(1893) La photographie médicale : application aux sciences médicales et physiologiques
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(1893) La photographie médicale : application aux sciences médicales et physiologiques

BIBLIOTHÈQUE PHOTOGRAPHIQUE.

LA

PHOTOGRAPHIE MÉDICALE.

APPLICATION

SCIENCES MÉDICALES ET PHYSIOLOGIQUES,

Albert LONDE,

Directeur du Service photographique à l'hospice de la Salpêtrière.

PARIS,

GAUTHIER-VILLARS ET FILS, IMPRIMEURS-LIRRAI RES,

ÉDITEURS DE LA BIBLIOTHÈQUE PHOTOGRAPHIQUE, Quai des Grands-Augustins, 55.

1893

(Tous droits réservés.)

AUX

PAR

^^^^^^^^

A

Monsieur le Professeur CHARCOT,

MEMBRE DE L'INSTITUT.

A Monsieur le Professeur Charcot, Membre de l'Institut.

Cher Maître,

Vous avez bien voulu me confier, il y a plus de dix ans déjà, la direction du Service photographique de la Salpêtrière. Cet Ouvrage, fruit des travaux et des recherches que j'ai pu faire grâce à votre bienveillant appui, montrera, je l'espère, les nombreux services que la Photographie peut rendre aux Sciences médicales, services que vous avez si bien pressentis en créant le premier laboratoire officiel de Photographie dans les Hôpitaux.

Veuillez recevoir, cher Maître, l'hommage de ce livre, trop heureux si j'ai pu contribuer, pour ma modeste part, à l'œuvre de l'Ecole de la Salpêtrière dont vous êtes le Chef si vénéré et si aimé.

Albert LONDE.

Novembre 1892.

Mon cher Monsieur Londe,

J'accepte avec grand plaisir la dédicace de votre intéressant Ouvrage sur la Photographie médicale, car ce m'est une occasion d'insister sur les réels et importants services que la Photographie est destinée à rendre aux Sciences médicales dans lesquelles, à mon avis,

le document figuré est appelé à tenir une place de plus en plus considérable. Le profit que nous avons nous-même tiré de votre concours si dévoué dans l'étude journalière des cas soumis à notre examen dans le Service de la Clinique nous porte à engager nos confrères à ne point négliger un auxiliaire si précieux, et je souhaite bien sincèrement à votre bel et bon livre tout le succès qu'il mérite d'obtenir.

CHARCOT.

PRÉFACE.

S'il est encore à notre époque des personnes qui ne regardent la Photographie que d'un œil indifférent, qui tiennent en une sorte de suspicion ceux qui s'en occupent, qu'elles daignent regarder le rôle qu'elle a pris dans les diverses sciences, qu'elles lisent les noms de ceux qui l'emploient journellement dans leurs travaux. Elles verront que la Photographie est venue apporter des procédés et des méthodes nouvelles à l'Astronomie, à la Physique, à l'Art militaire, à la Médecine et à la Physiologie, qu'elle est devenue entre les mains des Janssen, des Marey, des Lippmann, des frères Henry, des Charcot et de bien d'autres un merveilleux instrument de recherches et d'études, fécond déjà en découvertes de premier ordre, et certainement on peut dès à présent, sans être taxé d'exagération, affirmer qu'elle comptera parmi les plus belles découvertes du genre humain. Nous ne sommes, en effet, qu'à l'enfance de cette nouvelle science et d'après ce qui a déjà été fait on peut bien augurer de l'avenir.

Le but de notre travail est de montrer plus spécialement l'utilité de la Photographie dans le domaine de la Médecine et de la Physiologie.

Placé par notre éminent maître M. le professeur Charcot à la tête du Service photographique de la Salpêtrière, nous pensons avoir acquis l'expérience voulue pour traiter cette question nouvelle. En effet, les divers malades qui sont traités à la Salpêtrière appartiennent à la catégorie des nerveux : ce sont ceux qui pré

sentent incontestablement le pins de variétés et qui par cela même augmentent les difficultés de reproduction.

Nous avons dû dans bien des cas créer des appareils spéciaux pour résoudre ces difficultés; nous en donnerons la description détaillée afin de permettre au médecin qui voudrait organiser un service photographique analogue de le faire avec facilité et sans tâtonnements. Nous ne croyons pas, en effet, être loin du moment où le laboratoire photographique sera l'annexe obligatoire de tout service médical.

Nos explications seront accompagnées de figures et de planches. Nous avons dû cependant reculer devant la dépense considérable qu'aurait occasionnée l'édition de toutes les photographies que nous avons jugé utile de montrer au lecteur, et, dans l'intérêt de notre travail lui-même, nous avons emprunté nombre de planches à la Nouvelle Iconographie de la Salpêtrière et à l'ouvrage si remarquable de notre ami et collègue le Dr P. Richer, Etudes cliniques sur la grande hystérie. Ces planches, exécutées d'après les clichés photographiques du laboratoire de M. Charcot, sont pour la plupart l'œuvre de M. Richer. Nous lui adressons ici tous nos remerciements les plus vifs pour nous avoir autorisé à nous servir de ces dessins et croquis qui sont non seulement des documents de grande valeur, mais encore de véritables œuvres d'art.

A. L.

LA

PHOTOGRAPHIE MÉDICALE.

introduction.

La Photographie est une science relativement jeune : c'est en 1889 qu'on a célébré le cinquantenaire de sa découverte. Ses débuts, comme ceux de toutes les inventions nouvelles, ont été difficiles; ses méthodes étaient incomplètes, ses procédés très délicats, ses résultats d'une conservation problématique. Mais peu à peu elle s'est perfectionnée, elle est sortie des mains du photographe de profession pour passer concurremment dans celles des amateurs et des savants. La part prise dans les progrès récents par ces deux classes de travailleurs a été considérable et l'on peut dire sans hésitation que leur rôle dans le développement de la Photographie a été tout à fait prépondérant.

Les applications à la Médecine ne remontent donc pas bien loin. Il convient cependant de citer les travaux de Rousseau, d'Onimus et Martin, de Hardy et Montméja, ceux de Duchenne de Boulogne. Au point de vue historique, ces travaux ont pour nous une valeur indiscutable, car ils ont été les premiers pas dans une voie nouvelle et parce que leurs auteurs étaient loin d'avoir à leur disposition des procédés aussi pratiques et perfectionnés que ceux que nous employons aujourd'hui.

L'entrée officielle de la Photographie dans les services hospitaliers date de l'année 1878 ('). C'est grâce à l'initiative de M. le

(') Il est juste de faire savoir que MM. Bourneville et Regnard avaient déjà utilisé la Photographie à la Salpêtrière avant la création du Service photographique par l'administration de l'Assistance publique.

professeur Charcot que l'Assistance publique de Paris créa à cette époque le Service photographique de la Salpêtrière.

Les premiers travaux exécutés dans ce laboratoire ont été faits par MM. Bourneville et Regnard, puis par M. Loreau. Depuis 1882. il est sous notre direction et c'est grâce à notre initiative que le procédé au gélatinobromure d'argent, dont la sensibilité merveilleuse est si précieuse, y est devenu d'un usage quotidien et a remplacé complètement le procédé au collodion humide.

Depuis nous avons fait tous nos efforts pour être au courant de la science photographique et, bien que les crédits mis à notre disposition soient des plus modestes, le laboratoire de M. Charcot est cité partout en France et à l'étranger comme un modèle du genre. Les travaux exécutés dans ce laboratoire ont également obtenu les plus hautes récompenses dans les expositions françaises et étrangères.

La création due à M. Charcot répond donc à un besoin réel et il n'est pas douteux que les médecins prendront de plus en plus l'habitude de recourir à un auxiliaire aussi précieux que la Photographie.

L'exemple donné par notre maître a du reste été suivi de tous côtés. C'est ainsi que le regretté professeur Damaschino avait installé à l'hôpital Laënnec un laboratoire analogue. Il a laissé du reste de remarquables collections de clichés de malades et de reproductions micrographiques ayant trait à l'anatomie pathologique. Ces beaux documents ont été légués par lui au Musée de la Salpêtrière où ils se trouvent actuellement. A Bicêtre, M. le D' Bourneville a un service très bien installé dans lequel il s'occupe des études concernant les aliénés, les idiots et les dégénérés. M. le Dr Féré poursuit également avec succès les mêmes recherches.

A l'asile Sainte-Anne, à celui de Villejuif, à l'Hôtel-Dieu, à l'hôpital Saint-Louis, il existe des services du même genre.

En province, il faut citer à notre connaissance les laboratoires de M. Donnadieu à Lyon, du Dr Doyen à Reims et du D1' Bernard à Lille. Ce mouvement ne s'arrêtera pas et, d'ici peu d'années, il est certain que l'on verra dans les principaux hôpitaux des ateliers photographiques analogues à celui de la Salpêtrière.

Nous allons même plus loin et sommes persuadé que l'utilité de la Photographie pour certaines études et en particulier pour la Micrographie exigera la création d'un cours de Photographie à la Faculté de Médecine.

Nous espérons que le lecteur, après avoir pris connaissance de notre travail, sentira l'importance de l'application de la Photographie aux Sciences médicales et physiologiques.

Voyons maintenant quel peut être le rôle de la Photographie en Médecine, son utilité et ses applications.

Lorsqu'un malade entre à l'hôpital, il est dressé par les soins du personnel médical une sorte de rapport qu'on nomme l'observation. Sur ce document sont recueillis tous les renseignements concernant les antécédents du malade et son état actuel. Au fur et à mesure que des modifications se produisent, elles sont notées avec le plus grand soin et ainsi de suite jusqu'à la guérison si elle a lieu ou au décès s'il survient. Dans bien des cas l'observation sera suffisante pour le médecin, mais dans d'autres il y aurait avantage à la voir complétée par des documents iconographiques.

S'il s'agit d'une déformation quelconque, d'une plaie, d'une blessure, si parfaite que soit la description, une bonne épreuve en dira plus que bien des lignes d'explications.

Dans certaines maladies l'aspect général, l'attitude, le faciès sont tout à fait caractéristiques, et ici encore l'épreuve jointe à l'observation la complétera avec avantage. De même, pour garder la trace d'un état passager, rien ne sera plus commode que de prendre un cliché; en un mot, toutes les fois que le médecin le jugera nécessaire, il faudra faire la photographie du malade à son entrée à l'hôpital.

Chaque fois qu'une modification surviendra dans son état, une nouvelle épreuve sera nécessaire ; de cette manière on pourra suivre les progrès de la guérison ou de la maladie.

Dans les cas de paralysie, de contracture, d'atrophie, de scia-tique, etc., il sera très important de garder l'aspect du malade avant tout traitement. Dans l'étude de certaines affections nerveuses, telles que l'épilepsie, l'hystéro-épilepsie, la grande hystérie, où l'on rencontre des attitudes, des états essentiellement passagers, la photographie s'impose pour garder l'image exacte de ces plié

nomènes trop peu durables pour être analysés par l'observation directe. Il est même des hypothèses dans lesquelles l'œil lui-même ne saurait percevoir les mouvements par trop rapides; il en est ainsi dans les crises d'épilepsie, les attaques d'hystérie, la marche dans les cas pathologiques, etc. Grâce aux méthodes photochro-nographiques on suppléera facilement à l'impuissance de l'œil dans ce cas particulier et l'on obtiendra des documents de grande valeur.

Après avoir étudié les ensembles, on s'occupera des différents membres qui peuvent être atteints isolément, ou qui dans une affection générale demandent à être reproduits à plus grande échelle.

De même, après avoir analysé la face, on pourra être amené à reproduire spécialement les différents organes qu'elle renferme.

On ne se bornera pas toujours à noter l'aspect extérieur du malade, il faudra, dans certains cas, examiner l'intérieur de quelques organes accessibles. Aujourd'hui, au moyen d'instruments ti*ès ingénieux, on explore facilement les diverses cavités de l'individu; cet examen ne peut être évidemment que très rapide : il y aura donc avantage à faire dans ces cas particuliers une épreuve photographique, qui, outre sa sincérité, aura l'avantage de bien rappeler à l'observateur ce qu'il a aperçu, et de lui permettre de faire une étude à tête reposée sur un document indiscutable. Malheureusement, comme nous le verrons plus loin, les difficultés pratiques à résoudre sont nombreuses et il n'a été fait jusqu'à présent que peu d'applications dans cet ordre d'idées.

11 en est de même de la Chirurgie et des accouchements. Il peut être très intéressant pour le chirurgien de noter, lors de chaque pansement, les modifications produites à la suite de l'opération; pour l'accoucheur, il peut être très utile de faire saisir les diverses phases d'un accouchement laborieux pour pouvoir les étudier ensuite à l'aise.

En ce qui concerne les maladies mentales, le champ est également très vaste, les aliénés ayant souvent un faciès, des attitudes et des mouvements tout à fait caractéristiques. Il en est de même des idiots et des dégénérés.

Le médecin trouvera donc de grands avantages à se servir de la

Photographie d'une manière courante, mais s'il donne à ces travaux iconographiques la même publicité qu'à ses observations, les résultats obtenus seront d'une grande importance pour l'avancement des sciences médicales en général. En effet, le médecin, par sa profession même, doit être observateur, et plus il verra de malades, plus son expérience deviendra grande; mais si, dans les grands centres et dans les hôpitaux en particulier, il peut acquérir facilement cette éducation pratique, il n'en peut être de même dans les petites villes et dans les campagnes. Pour beaucoup donc la publication de ces documents, récoltés par des confrères mieux placés pour les recueillir, leur sera d'un grand secours et leur évitera souvent bien des recherches et bien des tâtonnements.

Il est incontestable que, sous l'influence de nombreuses maladies, l'organisme se modifie d'une manière identique chez les divers individus, mais ces modifications caractéristiques cependant peuvent échapper même à un observateur habile dans des observations isolées, tandis qu'il n'en sera plus de même s'il peut en réunir un certain nombre. Grâce à la Photographie, on peut atteindre ce résultat en collectionnant des épreuves similaires.

On arrivera même, en procédant ainsi, à reconnaître que des modifications constatées chez un sujet isolé, mais qui n'avaient rien de saillant par elles-mêmes, ont au contraire une valeur très grande au point de vue de la description de l'affection, si on les retrouve toujours les mêmes chez des malades de même nature. C'est ainsi, en particulier, que dans les maladies du système nerveux, on a pu établir des types rigoureusement définis qui correspondent à des affections déterminées. Ces types restent gravés dans la mémoire du médecin et nous en connaissons qui, à la seule inspection d'un individu entrevu dans la rue, ont pu faire un diagnostic qui a été pleinement confirmé par l'examen ultérieur.

Les études que doit faire le médecin ne se bornent pas seulement aux observations qu'il peut réunir sur le vivant, il faut aller plus loin et étudier sur le cadavre lui-même la lésion dont il n'a pu arrêter les suites mortelles. Il faut, en un mot, qu'il remonte jusqu'à la cause du mal; lorsqu'il le connaîtra, il lui sera possible désormais dè le combattre.

Le médecin sera donc amené au cours de l'autopsie à photogra

phier les diverses lésions qui l'intéressent: il conservera ainsi des documents authentiques et durables alors que les tissus qu'il examine sont destinés à disparaître promptement. S'il s'agit de lésions qui n'affectent pas un organe en son entier et qui, tout en étant également graves, sont moins perceptibles, il devra pénétrer dans le tissu lui-même, le dissocier et arriver jusqu'à la cellule, à l'élément primordial altéré. Le microscope sera son instrument de travail et le lecteur n'est pas sans ignorer que c'est grâce à l'emploi de cet appareil que les plus belles découvertes ont été faites. Nous n'insisterons pas sur l'avantage qu'il y a à faire intervenir la plaque photographique dans l'enregistrement de toutes ces études, quand nous saxirons que les préparations histologiques demandent de grands soins d'exécution pour pouvoir se conserver sans allé-rations.

Une fois tous ces documents amassés, le médecin sera conduit tout naturellement à les vulgariser, dans un but scientifique et pédagogique; ici la Photographie lui sera encore du plus grand secours.

S'il s'agit de montrer à un auditoire nombreux les résultats obtenus, les projections photographiques le permettront facilement. S'il s'agit de publications, la Photographie donne divers moyens de multiplier les épreuves originales, en leur conservant tous leurs caractères de sincérité et de vérité. Ces publications ont un grand succès, ainsi que nous avons pu nous en rendre compte par l'accueil fait à la nouvelle Iconographie de la Salpêtrière que nous avons eu l'honneur de fonder avec MM. P. Richer et Gilles de la Tourette.

Mais ce n'est pas tout : on sait maintenant l'importance prise en France et à l'étranger par les études physiologiques, on ne se contente plus de regarder les divers phénomènes qui se passent dans l'organisme, on les analyse, on les mesure, on les enregistre avec la plus grande précision et l'on est arrivé ainsi à la connaissance de nombreux faits qui échappaient précédemment à notre observation. La Photographie, employée dans des conditions que nous étudierons, est un merveilleux instrument d'enregistrement et, dans certaines expériences, où il est de première importance de n'introduire aucun organe susceptible de modifier en quoi

que ce soit le phénomène analysé, cette méthode est destinée à donner des résultats supérieurs.

Quand nous aurons dit quelques mots des avantages que peut présenter la Photographie au point de vue médico-légal, nous aurons terminé notre tâche et nous osons espérer que notre travail engagera ceux de nos lecteurs que la question intéresse à cultiver la Photographie, qui peut leur rendre, au point de vue médical, tant d'excellents et précieux services.

chapitre i.

INSTALLATION ET MATÉRIEL.

En commençant cette partie de notre travail qui a trait à l'organisation d'un service de Photographie médicale, nous devons prévenir le lecteur que notre intention est de décrire une installation en quelque sorte modèle, dans laquelle les appareils les plus pratiques et les plus perfectionnés seront employés, où tout sera combiné pour obtenir les meilleurs résultats en un temps aussi bref que possible et répondre le mieux aux diverses hypothèses qui pourront se présenter. En effet, comme nous» Je verrons par la suite, les applications de la Photographie à la Médecine sont aussi nombreuses que variées.

Nous décrirons l'organisation du laboratoire de la Salpêtrière et les divers appareils qui y sont employés par nous personnellement. Le médecin trouvera toutes les indications nécessaires pour créer un service analogue ou s'occuper particulièrement de telle ou telle application spéciale. Une sera d'ailleurs pas toujours nécessaire d'avoir un outillage aussi complet et l'on peut arriver au même résultat, mais avec un peu plus de peine et de temps.

Si peu à peu nous avons perfectionné notre installation et notre matériel, c'est que, notre temps étant limité, et c'est, croyons-nous, le cas de beaucoup de personnes, il était indispensable d'avoir sous la main tous les instruments voulus pour opérer rapidement suivant les cas qui se présentent.

§ I. — INSTALLATION.

Le service photographique doit comprendre au moins trois pièces dont l'usage est absolument différent : i° l'atelier vitré; 2° le laboratoire noir ; 3° le laboratoire clair. Nous allons décrire

l'organisation de ces diverses pièces; nous étudierons les appareils qui y seront placés, et enfin les différentes manipulations que l'on y exécutera.

Les manipulations photographiques courantes consistent en trois séries d'opérations absolument distinctes qui sont nécessaires pour obtenir la reproduction d'un objet quelconque. Ces opérations sont :

i° L'impressionnement de la couche sensible; 2° Le développement de l'image latente, ou obtention du négatif («);

3' L'obtention du positif.

Autrefois, il nous aurait fallu parler de la préparation de la surface sensible que l'on exécutait au moment même de s'en servir; aujourd'hui, grâce aux progrès réalisés, les plaques sont préparées industriellement et il n'y a qu'à se les procurer.

La plaque exposée à la lumière dans l'appareil photographique pendant un temps plus ou moins long est modifiée dans sa constitution ; mais cette impression n'est nullement visible et il est nécessaire de procéder à l'opération du développement de cette image latente; les parties frappées par la lumière noircissent et ceci d'autant plus que les valeurs de l'original au point de vue photogénique étaient plus grandes. Les blancs du modèle sont traduits par des noirs; les noirs, au contraire, par des blancs et les différentes nuances par des teintes plus ou moins foncées. A cause de ce résultat, l'image est dite négative, et le cliché obtenu est appelé le négatif.

Si maintenant on place derrière ce négatif une surface sensible et que l'on expose à la lumière, cette surface s'impressionnera sous les diverses parties du cliché proportionnellement à leur degré de transparence. Les noirs correspondront aux blancs du cliché, et les blancs de l'épreuve aux noirs qui n'ont pu être traversés par la lumière. Les demi-teintes seront inversement proportionnelles à celles du cliché. Cette image est dite positive, ou appelée encore le positif; elle est la reproduction fidèle de l'original avec toutes ses valeurs et ses nuances.

(') Dans la pratique on se sert aussi fréquemment du mot cliché.

Ces trois séries d'opérations doivent se faire dans des locaux spécialement appropriés, nous allons en décrire l'inslallation et l'agencement.

L'impressionnement ou l'exposition se fait dans l'atelier, le chargement des châssis et le développement dans le laboratoire noir et la série des autres opérations dans le laboratoire clair.

ATELIER VITRÉ.

L'atelier vitré est indispensable pour exécuter couramment des travaux ayant une véritable valeur; non pas que l'on ne puisse opérer en d'autres endroits, mais ce sera aux prix de difficultés spéciales et souvent au détriment de la qualité du résultat. Nous examinerons d'ailleurs plus tard celte hypothèse.

Dans la construction d'un atelier, il y a divers points à examiner, ce sont : l'emplacement, l'orientation, le mode de vitrage et l'agencement.

Emplacement. — En général, on place l'atelier dans les parties élevées des bâtiments, afin de profiter de la plus grande somme de lumière possible; c'est ainsi que dans les villes, les ateliers des photographes sont toujours dans les combles. Si l'on est abrité par des constructions plus élevées, il faudra adopter cette solution, mais, dans le cas contraire, il sera plus avantageux de le placer au niveau du sol. Il n'est pas, en effet, très pratique de faire monter plusieurs étages à des malades qui marchent difficilement. S'il faut les transporter sur un brancard, et le cas est fréquent, ce seront d'autres ennuis. Nous préférons donc cette deuxième solution, que l'on peut du reste facilement réaliser dans la plupart des hôpitaux. On élèvera l'atelier de 5 à 6 marches, afin d'éviter l'humidité5 s'il y a des arbres trop rapprochés ou trop feuillus, il faudra les abattre ou les élaguer. On n'ignore pas, en effet, que les feuillages retardent les opérations photographiques, non seulement par la suppression de lumière qu'ils entraînent, mais encore par la coloration anti-actinique qu'ils communiquent aux rayons qui les traversent.

Orientation. — L'orientation est très importante à déterminer. Comme on opère à la lumière diffuse, qui donne des épreuves plus modelées, on choisit généralement les orientations du nord et de l'est et non celles du midi ou de l'ouest. Avec ces dernières expositions, l'atelier se trouverait, pendant la majeure partie de la journée, exposé aux rayons directs du soleil. Outre la dureté de l'éclairage qui en résulterait, les fermes et les défauts du vitrage formeraient sur le modèle autant d'ombres du plus mauvais effet. En principe, ces deux expositions seront à éviter, mais si l'on emploie, comme nous le dirons tout à l'heure le verre strié, il pourra être utile, dans certains cas, de ne pas suivre les coutumes habituelles.

Bien que nous soyons convaincus de la nécessité d'obtenir d'excellentes épreuves en Photographie médicale, nous ne cherchons pas à faire de l'art; nous voulons des documents aussi complets que possible dans toutes les hypothèses de la pratique; or, comme nous reconnaîtrons par la suite qu'il peut être bon d'avoir la plus grande somme de lumière possible, on pourra être amené à préférer l'exposition du midi.

Malgré les progrès considérables réalisés depuis quelques années dans la fabrication des couches sensibles, il est encore bien des journées, dans la mauvaise saison, par exemple, pendant lesquelles le travail est très difficile, surtout quand il s'agit, comme dans l'espèce, de malades auxquels on ne peut imposer l'immobilité voulue. Nous devons donc chercher à obtenir l'atelier le plus éclairé qu'il sera possible. D'autre part, et le cas peut se présenter souvent, il faudra faire des épreuves instantanées, à cause de la mobilité du sujet. Comme celui-ci sera généralement nu, il ne saurait être question d'opérer en plein air, à moins d'avoir un endroit abrité des regards et organisé ad hoc. Dans ce cas, avec un atelier au midi éclairé par le plein soleil, la chose sera réalisable.

Vitrage. — Notre laboratoire de la Salpêtrière était garni de verres blancs ordinaires. Nous avons dû les faire dépolir jusqu'à hauteur d'homme pour éviter les vues du dehors. D'autre part, comme il est orienté à l'est, le soleil y pénètre pendant la plus grande partie de la matinée, ce qui nous oblige à nous servir des

rideaux afin d'éviter les ombres de la toiture; d'où perte notable de lumière ou obligation d'attendre que le soleil ait tourné. Aussi, pour éviter cet inconvénient, nous avons décidé d'employer, dans la partie utile du laboratoire, le verre strié que fabrique l'usine de Saint-Gobain. Ce verre a plusieurs avantages : tout d'abord, on le coule en grandes feuilles (celles que nous avons ont 3m, 3o d'une seule pièce) ; on peut donc vitrer le toit du laboratoire sans avoir de joints et par suite éviter complètement les infiltrations d'eau. De plus, grâce à ses cannelures, ce verre brise complètement les ravons lumineux et il donne un éclairage très doux et très harmonieux, analogue à celui que donnerait le verre dépoli, mais sans qu'il y ait une perte de lumière aussi grande qu'avec celui-ci. Nous n'avons garni ainsi que la toiture de l'atelier, mais il est également avantageux de l'employer pour les côtés.

Plusieurs industriels et amateurs, entre autres MM. Lévy, Gode-froy et Boisard qui, d'après nos conseils ont fait ainsi vitrer leurs ateliers, se déclarent absolument satisfaits des résultats obtenus.

Agencement. — On fait ordinairement le laboratoire sous forme de galerie adossée à une muraille quelconque. La face regardant l'orientation est vitrée, la toiture également. L'atelier de la Salpêtrière à iom de long sur3m,5o de large. Le toit est à4"\5o dans la partie la plus élevée et à 3m,5o dans l'autre, ce qui représente une pente d'environ 3o pour 100. On peut, dans la pratique, se contenter d'une longueur moindre, 7™ par exemple : mais il ne faut pas craindre d'avoir de l'espace, car, si l'on amène des malades sur des brancards, il faut néanmoins pouvoir circuler et effectuer les manœuvres nécessaires.

Le laboratoire de la Salpêtrière est vitré sur ses trois côtés, ce qui n'est pas nécessaire et rend le chauffage plus difficile en hiver. Le grand côté seul doit être vitré et encore peut-on ne le vitrer que sur 4m ou 5m. Dans un atelier de iom comme le nôtre, on pourrait laisser im de plein à l'une des extrémités, puis un vitrage de 5met le reste plein. De même, pour la toiture. La partie vitrée de 5m est la partie utile de l'atelier et celui-ci pourrait n'avoir que cette dimension, à condition que l'on ait une autre pièce dans le prolongement de l'atelier. En ouvrant la porte qui sépare les deux

pièces, on peut prendre du recul, ce qui est indispensable dans certains cas.

Plan du Service photographique de la Salpêtrière (').

A. Atelier vitré.

B. Laboratoire noir.

C. Laboratoire clair.

D. Entrée en chicane du laboratoire noir.

1. Chambre d'atelier. — 2. Chambre d'agrandissement. — 3. Estrade repliée. — 4. Appareil pour la photographie des mains. — 5. Appuie-tête. — 6. Lit. — 7. 7. 7. Fonds. — 8. Chevalet. — 9. Chevalets pour le tirage des positives. — 10. Classeur d'épreuves. — 11. 11. Tables. — 12. 12. Armoires. — 13. Armoire à clichés. — 14. Potence. — 15. Armoire à plaques sensibles. — 16. Planchettes et tiroirs pour papiers sensibles. — 17. — Lanterne. — 18. Évier. — 19. Robinets d'eau. — 20. Becs de gaz. — 21. Cuvette. — 22. Évier. — 23. Armoire à produits. — 24. Tables. — 25. Porte de l'atelier donnant sur la cour. — 26. Porte de l'atelier donnant sur les laboratoires de la clinique.

A l'extrémité de l'atelier se trouve à demeure un fond noir, puis par devant, un lit qui sert à faire les malades qui doivent rester

(l) Ce plan a été dressé par M. Louis Cousin, architecte. Nous lui adressons à ce sujet nos plus sincères remerciements.

Fig. i.

couchés ou qui sont dans l'état de crise. Ce lit est également recouvert de noir, car, comme nous opérons sur le nu, les chairs se détachent mieux que sur des draps blancs. On peut employer également avec succès, au lieu d'une étoffe noire, une étoffe gris foncé, qui serait même préférable à notre avis ; mais il faut proscrire absolument le blanc.

Devant le lit, nous pouvons placer d'autres fonds qui servent pour les opérations courantes. Ces fonds s'enroulent sur des tambours placés à la partie supérieure de l'atelier. On descend l'un ou l'autre, suivant les cas. Nous avons trois fonds, l'un noir, l'autre gris moyen et le dernier gris très clair. Ils servent suivant la nature du modèle. Ainsi le nu vient très bien sur le fond noir et sur le gris foncé, beaucoup moins bien sur le gris clair.

Un malade habillé viendra mal sur le fond noir, il viendra mieux soit sur le gris foncé, soit sur le gris clair. Ce dernier servira surtout lorsque l'on voudra voir les objets reproduits se détacher sur un fond très clair.

Si l'on ne veut avoir qu'un seul fond, c'est au gris foncé qu'il faudra donner la préférence ; sur ce fond, en effet, les ombres et les lumières se détachent également bien.

Le côté vitré de l'atelier et le toit doivent être garnis de rideaux bleus ou blancs, coulissant à volonté. Quoique, au point de vue documentaire, il ne puisse être question de réaliser les jeux savants de lumière que certains photographes obtiennent au moyen des rideaux, il faut pouvoir cependant guider la lumière sur le modèle, de façon à bien faire ressortir ce que l'on doit voir. On se trouvera, en effet, parfois en face de certains détails très délicats, que l'on ne parviendra à bien reproduire que par un habile jeu de lumière. Inversement, une lumière trop crue, trop uniforme, atténuera des détails qui disparaîtront plus ou moins sur l'épreuve définitive. L'étude du maniement de la lumière devra être faite avec le plus grand soin; peu à peu, on connaîtra son atelier et l'on obtiendra rapidement les effets cherchés.

Le soubassement du vitrage de l'atelier ne devra pas être trop élevé, afin que les modèles soient éclairés jusqu'aux pieds. Il est d'ailleurs très facile, de placer le malade sur une petite estrade qui le soulève du sol.

L'estrade que nous employons à la Salpêtrière peut se dédoubler et occuper alors toute la largeur de l'atelier : ce dispositif nous sert, par exemple, lorsque nous voulons prendre un malade en marche : celui-ci peut faire ainsi quelques pas, ce qui est suffisant dans la majorité des cas.

Tl sera nécessaire d'avoir un appui-tête solidement établi, bien que l'usage de cet instrument qui donne des poses trop raides et trop peu naturelles ne nous paraisse pas à recommander dans la pratique de la Photographie médicale.

•En effet, la rapidité des procédés actuels rend de moins en moins nécessaire l'usage de cet accessoire si employé dans la photographie courante. Néanmoins il faudra s'en servir lorsque le malade ne peut garder l'immobilité et que le manque de lumière ne permet pas de faire une épreuve instantanée. Il en sera de même lorsque l'on opérera de très près et que l'on voudra faire à grande échelle la tête ou quelques parties de celle-ci : les yeux, la bouche, le nez ou les oreilles. La grande dimension de l'image, dans ce cas particulier, nécessite des poses plus longues que d'habitude, et, d'autre part, l'immobilité complète du sujet est encore plus indispensable : cependant toutes les fois que la position, l'attitude du malade seront caractéristiques, il faudra proscrire d'une manière absolue l'emploi de l'appui-tête.

En dernier lieu, dans certains cas, nous nous servons d'une potence en fer qui est destinée à suspendre les malades qui ne peuvent ni marcher, ni se tenir debout. Cette potence mobile sur un axe se rabat en temps ordinaire le long du mur de l'atelier. Le malade est soutenu au moyen d'un appareil de suspension qui le maintient par les bras et la tête ; cet appareil est du même genre que celui qui sert pour la Méthode de la suspension.

En général, il faudra donner aux parties non vitrées de l'atelier une peinture favorable aux travaux que l'on doit y effectuer. On emploiera un ton soit bleu, soit gris clair. De cette manière, grâce aux réflexions qui se produisent, on obtiendra des éclairages plus harmonieux, sans trop grandes oppositions entre les lumières et les ombres. Si cela n'est pas suffisant, en emploiera des écrans réflecteurs, soit en toile blanche, soit en carton de même couleur. On peut également se servir d'une sorte d'entonnoir en fer-blanc,

dont la concavité brillante éclairera les parties du modèle placées à contre-jour. Nous avons vu employer ce réflecteur avec le plus grand succès par un habile opérateur, M. Bouillaud (de Mâcon).

LABORATOIRE OBSCUR.

Cette pièce est destinée aux opérations qui précèdent et suivent la pose et qui ont trait au maniement et au développement des préparations sensibles. Ces opérations devant être faites obligatoirement à l'abri de toute lumière blanche, la pièce sera donc hermétiquement close et éclairée seulement par une lumière non susceptible d'agir sur les préparations photographiques.

Il paraît avantageux de peindre cette pièce en couleur sombre, de façon à éviter toutes les réflexions de lumière qui pourraient se produire.

Pour pénétrer dans ce laboratoire, il est fort commode de se servir d'un dispositif permettante l'opérateur d'entrer et de sortir sans laisser passage à la lumière de l'extérieur. Deux systèmes sont également recommandables ; le premier consiste en un tambour muni de deux portes que l'on ouvre l'une après l'autre ; le deuxième est constitué par une sorte de couloir en chicane qui, tout en laissant un passage constamment ouvert, ne permet pas à la lumière de pénétrer dans le laboratoire obscur. Ce système que nous avons adopté à la Salpêtrière, nous paraît beaucoup plus pratique quand on a la place voulue pour l'installer.

La question qui va se poser tout de suite est celle de l'éclairage du laboratoire; on ne peut, en effet, employer qu'une lumière non susceptible d'agir sur les préparations sensibles. Quelle sera cette lumière? Avec les préparations actuelles au gélatinobromure, ce sera la lumière rouge. Celle-ci sera obtenue facilement en interposant, devant une source lumineuse quelconque, un verre rouge. Le choix de ce verre est fort important, car il doit arrêter tous les rayons du spectre, autres que le rouge. On fabrique maintenant assez bien cette sorte de verre, mais il conviendra toujours, dans une installation sérieuse, de n'adopter que des verres essayés au spectroscope et ne laissant passer aucun rayon vert ou jaune.

M. Werlein, à Paris, construit un petit spectroscope à vision

directe qui est d'un usage très pratique pour L'essai des verres rouges de laboratoire (').

(') On trouve des verres rouges essayés au spectroscope et, par conséquent garantis, chez M. Ch. Bazin, constructeur d'instruments de précision pour la Photographie, 4? rue du Rocher, Paris.

Fig. 2.

Laboratoire noir.

Il faudra ensuite adopter un mode d'éclairage déterminé. Se servira-t-on de la lumière naturelle ou de la lumière artificielle? Notre avis est que cette dernière est toujours préférable.

Il est indiscutable, en effet, que pour faire un travail régulier, obtenir des clichés d'intensité déterminée, il est nécessaire d'opérer avec un éclairage identique. Or, avec la lumière naturelle, nous ne pouvons prétendre réaliser ce desideratum, car elle varie non seulement suivant les saisons, les heures de la journée, mais encore l'état de l'atmosphère; par suite, son emploi donnera lieu constamment à des méprises. Puis, si l'on veut travailler le soir, il faudra une deuxième installation à la lumière artificielle. Nous croyons donc qu'à tous points de vue, il faut adopter cette dernière comme source normale d'éclairage dans le laboratoire.

On peut se servir indifféremment des lampes à essence ou à pétrole, du gaz, et même de l'électricité par incandescence. La source de lumière sera enfermée dans une lanterne de grandes dimensions afin d'éviter le bris des verres qui se produit souvent par suite d'échauffement, et de s'éclairer largement; il faut, en effet, être très difficile sur la qualité de la lumière, mais non sur sa quantité.

A la Salpêtrière, nous avons fait faire une grande lanterne à deux corps. Un des côtés, celui en face duquel nous développons, porte deux verres rouges superposés, l'autre, un seulement. En face de ces deux verres se trouvent deux becs de gaz ordinaires. On commande ceux-ci de l'extérieur et l'on règle ainsi la lumière à volonté ; on peut, en effet, baisser simultanément les deux becs, ou chacun d'eux isolément et obtenir ainsi toutes les combinaisons d'éclairage possibles. Pour commencer un développement, nous baissons au bleu le bec qui est en face du verre simple, et nous ne le relevons que lorsque le développement est bien en train. Nous ajoutons des deux côtés de notre lanterne un verre dépoli qui a pour but de diffuser la lumière ; on obtient ainsi un éclairage uniforme très propice pour l'examen du cliché par transparence.

Nous avons trouvé avantageux de faire sortir les produits de la combustion au moyen d'un tuyau, dans la pièce voisine. Il est bien entendu, que la lanterne doit être hermétiquement close et ne laisser échapper aucun rayon de lumière. Pour assurer l'arrivée

de l'air nécessaire à la combustion, on fait des ouvertures en chicane qui le laissent entrer librement mais ne sauraient laisser passer le moindre filet de lumière.

En dessous de la lanterne, nous plaçons une grande cuve en bois doublée de plomb; cette cuve constitue un vaste évier à pente douce dans lequel on jettera tous les liquides qui seront évacués au dehors par un conduit spécial.

Il est commode de disposer dans cette cuve des claies en bois qui permettent de recevoir les cuvettes, sans gêner cependant, en aucune façon, l'écoulement des liquides.

A l'endroit où l'on développe, c'est-à-dire en dessous de la partie de la lanterne qui est garnie d'un double verre, si l'on a une installation pareille à la nôtre, on place un balance-cuvette très ingénieux qui a été imaginé par M. Ch. Dessoudeix. Il se compose de deux tiges métalliques disposées en croix et recouvertes de caoutchouc. Ce système repose sur des couteaux analogues à ceux des balances et il est prolongé par une tige à angle droit descendant verticalement et portant un fort contrepoids. Si l'on met en mouvement celui-ci, on comprend facilement que tout l'appareil oscillera d'une manière régulière et ceci pendant un certain temps ; il suffira d'ailleurs d'une nouvelle impulsion, donnée de temps en temps, pour entretenir le mouvement.

L'utilité de l'agitation du bain durant le développement, quoique niée par certaines personnes, est cependant indiscutable. Tout d'abord, on évite les taches qui pourraient se produire, sur la plaque par suite d'un trempage inégal ou d'un bain non homogène; de plus, on élimine les bulles d'air qui peuvent rester adhérentes à la couche et occasionner autant de points non développés, car le mouvement imprimé constamment au bain les chasse. Enfin, le développement se poursuit dans de meilleures conditions, parce que la plaque n'est pas toujours en présence des mêmes couches du révélateur et qu'elle est mise fréquemment au contact de l'air. L'action de l'oxygène de l'air est en effet indéniable, et nous verrons plus loin, dans le développement des plaques pour projection, l'application courante de cette observation.

Le système de M. Dessoudeix permet, de plus, de ne pas se tacher les doigts, ce qui est encore une considération. La cuvette ne repo

sant que sur les parties très étroites en caoutchouc, les angles sont toujours secs : on peut donc la manier sans toucher le liquide révélateur.

Tout le long de la cuve et à quelques centimètres au-dessus court une canalisation d'eau sur laquelle sont placés un certain

Fig. 3.

Meuble à développer.

nombre de robinets tournants à pomme. On a ainsi toujours de l'eau à sa disposition. Notre cuve est assez longue pour pouvoir effectuer toutes les opérations qui suivent le développement; de la sorte, les plaques passent dans les cuvettes les unes après les autres; ce qui permet de faire un travail régulier et rapide.

En dessous de la cuve de plomb se trouvent des logements verticaux destinés à recevoir toutes les cuvettes. Chaque cuvette doit

avoir sa destination spéciale; on trouve du reste maintenant dans le commerce des cuvettes portant le nom du bain auquel elles sont destinées. On place le long des murs des planchettes pour recevoir les divers flacons contenant les produits nécessaires. Tous ceux-ci doivent être étiquetés avec soin.

11 sera bon d'avoir dans ce laboratoire des tiroirs ou des armoires bien étanches à la lumière pour y enfermer les boîtes de plaques et les papiers sensibles.

Un emplacement spécial sera réservé pour le chargement des châssis; on ne devra jamais effectuer à cet endroit de manipulation de produits photographiques ou autres.

A la Salpêtrière nous avons un casier à trois compartiments qui nous sert à mettre d'un côté les châssis chargés, de l'autre ceux à développer et en dernier lieu les vides. De cette manière aucune erreur n'est possible.

LABORATOIRE CLAIR.

Cette pièce servira pour toutes les manipulations qui peuvent s'effectuer à la lumière du jour. Il sera bon d'y organiser également un évier et une prise d'eau.

C'est dans cette pièce que l'on effectue le séchage, la retouche des clichés, le renforcement ou le baissage, le vernissage ou le collodionnage et toutes les opérations qui concernent l'obtention des épreuves positives, virages, fixages, lavages, coupage, collage, satinage, etc.

Cette pièce comportera une ou plusieurs tables et des planchettes pour placer les produits photographiques et les divers objets qui sont employés pour toutes les opérations que nous venons d'énumérer.

Nous avons terminé la description de l'installation que nous avons réalisée à la Salpêtrière, c'est un modèle d'installation fixe. En ce qui concerne les installations mobiles et transportables qui peuvent avoir leur utilité pour un étudiant ou pour un médecin sujet à se déplacer, nous avons combiné un meuble à développer qui, sous un volume restreint, renferme tous les dispositifs nécessaires pour le traitement des clichés, lanterne, balance-cuvette,

évier, tiroirs noirs, rayons pour cuvettes, etc. Ce meuble, dans certains cas, peut rendre bien des services (M (Jîg. 3).

§ II. — DU MATÉRIEL.

Le matériel nécessaire pour les opérations photographiques comprend la chambre noire, l'objectif, l'obturateur et le pied. Nous allons étudier successivement ces divers appareils.

CHAMBRE NOIRE.

Tout modèle de chambre noire {Jîg- 4) bien établi peut être utilement employé dans la Photographie médicale, mais il est divers dispositifs qui sont indispensables et qu'il nous faut examiner.

Fig. 4.

Chambre noire.

Le cadre d'avant doit être disposé de manière à permettre les substitutions rapides d'objectifs. On peut monter les divers objectifs sur une série de différentes planchettes identiques ou se servir d'adaptateurs spéciaux tels que ceux de MM. Molteni ou Clément et Gilmer. Ce dernier, connu sous le nom de Clégil, nous paraît très pratique : c'est un diaphragme iris robuste qui

(') Le meuble à développer a été construit sur nos indications par M. Dessoudeix.

peut facilement et rapidement recevoir des objectifs de tailles différentes.

L'objectif devra pouvoir se déplacer latéralement et en hauteur.

Fig. 5.

Adaptateur Molleni.

Tous les appareils bien conditionnés permettent ce double mouvement, mais, si l'on fait faire un appareil, on exigera toujours le

Fig. 6.

Adaptateur (Clégil).

plus grand déplacement possible de l'objectif, surtout dans le sens vertical.

On devra pouvoir placer dans la chambre une séparation mobile

qui sera très précieuse pour faire deux vues sur la même plaque ou exécuter des épreuves stéréoscopiques.

La longueur du soufflet devra être aussi grande que possible; dans les appareils ordinaires, elle est, en général, insuffisante. Elle devra toujours avoir au moins le double de la distance focale principale de l'objectif employé. Ainsi, si l'on emploie, par exemple, un objectif de om, 25 de foyer, le soufflet devra avoir plus de om, 5o. Ce long tirage est indispensable pour obtenir des images à grande échelle.

Le cadre d'arrière porte la glace dépolie sur laquelle on effectue la mise au point. Cette glace doit être divisée en centimètres carrés et porter à partir du centre deux échelles millimétriques dans chaque axe. Cette graduation du verre dépoli qui a été indiquée par notre ami le Dr Gustave Le Bon, et qui devrait se trouver sur tous les appareils, est très précieuse pour se rendre compte des dimensions de l'image obtenue et faire une reproduction de taille déterminée. Le cadre d'arrière est commandé par une crémaillère qui permet de l'avancer ou de le reculer jusqu'à ce que l'image offre le maximum de netteté. Dans certains appareils perfectionnés on trouve, à l'arrière de la chambre, un dispositif spécial nommé bascule qui permet de déplacer le plan du verre dépoli par rapport à l'axe de l'objectif. Ce dispositif peut présenter de grands avantages lorsque l'on a à reproduire des objets présentant des différences de plans considérables. On sait, en effet, que, dans cette hypothèse, les points de concours des rayons venant de ces divers points ne se font pas dans un même plan. On peut du reste adapter à tout appareil une bascule mobile très ingénieuse due à M. Mackenstein, ce qui évitera l'achat d'un appareil spécial, si l'on est déjà outillé.

Lorsque la mise au point est effectuée on enlève le verre dépoli et on lui substitue le châssis négatif, puis on arme l'obturateur et l'on démasque la plaque sensible. Il faut naturellement quelques instants pour effectuer ces diverses opérations : ce retard peut être cause de fréquents insuccès en Photographie médicale, car le malade a pu se déplacer. Il est préférable alors d'employer le dispositif que l'on trouve sur les chambres des photographes de profession. Le châssis à verre dépoli et le châssis négatif sont dans

une coulisse qui est à l'arrière de la chambre; dès que la mise au point est effectuée, il suffît de pousser le châssis négatif qui se substitue ainsi, beaucoup plus rapidement que précédemment, au verre dépoli (fig- 9).

En ce qui concerne les châssis destinés à renfermer les préparations sensibles, quel que soit le type adopté, on doit veiller à ce

Fig. 7.

Châssis négatif.

qu'ils ne laissent passer aucune lumière; car en attendant que le malade soit dans la position voulue, il peut être quelquefois nécessaire de les laisser ouverts avant la pose un temps plus ou moins

Les châssis porteront un numéro d'ordre et une plaque indicatrice en ivoire ou en peau sur laquelle on pourra mettre les indications convenables pour éviter toute erreur.

Nous nous sommes longtemps servi d'appareils ainsi conditionnés, mais il est bien des cas cependant où ils ne nous ont pas semblé suffisants.

Nous avons déjà signalé tout à l'heure la perte de temps qui se produit forcément entre la mise au point et la pose, temps que l'on peut réduire avec certains dispositifs, mais que l'on ne saurait supprimer complètement. Qu'arrive-t-il alors si le malade s'est déplacé pendant cet instant? Ou bien l'épreuve ne sera pas nette,

l'image mal en plaque, ou bien il faudra recommencer à nouveau la mise au point et toute la série des opérations.

Lorsqu'il s'agit d'un malade qui souffre, qui est inconscient ou irresponsable, on ne peut être trop exigeant et il faut chercher à obtenir le résultat voulu au moyen d'appareils plus perfectionnés qui suppriment les pertes de temps et par suite les insuccès.

Nous sommes arrivés à ce résultat en adoptant le principe suivant : nous avons une chambre à double corps portant deux objectifs rigoureusement semblables et nous donnant, par suite,

Fig. 8.

Chambre double.

deux images identiques de notre sujet (Jîg- 8). L'un des objectifs sert à photographier, l'autre à effectuer la mise au point; en effet, leur foyer étant le même et la crémaillère agissant sur eux deux simultanément, toute image nette sur le verre dépoli d'un des côtés le sera sur l'autre, c'est-à-dire sur la préparation sensible. L'objectif destiné à opérer est muni d'un obturateur, l'autre reste constamment ouvert et sert en quelque sorte de viseur. Le malade étant devant cet appareil, on arme l'obturateur, on démasque la plaque; à ce moment on effectue la mise au point sur le verre dépoli du viseur et au moment où l'on est satisfait de l'image, où le malade se présente dans l'attitude voulue, on appuie sur la poire de l'obturateur et l'épreuve est faite.

L'avantage de cette manière d'opérer est indiscutable par ce seul fait qu'elle supprime tout temps perdu entre la mise au point et la pose, c'est du reste le résultat que nous voulions obtenir. Le

malade peut même se déplacer, on le suit en le maintenant au point et on le saisit sans difficulté.

Nous croyons que si le médecin veut faire construire un appareil spécial pour la Photographie médicale c'est ce modèle qu'il devra préférer.

L'emploi de cet appareil exige certains soins; il faut, en effet, que le malade soit exactement dans la perpendiculaire qui passerait par le milieu de la chambre double. Dans ce cas, on constatera de suite que, pour amener les deux images au centre de chacun des verres dépolis, il est nécessaire de faire varier l'écartement des objectifs suivant la distance qui sépare l'appareil du modèle. Plus la distance sera faible, plus ils devront être rapprochés ; au contraire, on devra les éloigner d'autant plus que la distance sera plus grande.

Nous avons fait exécuter dans notre appareil un dispositif très simple qui permet de satisfaire à cette loi théorique et qui règle le rapprochement ou l'écartement facile des deux objectifs.

Dans le cas où l'on posséderait un appareil disposé pour la Photographie stéréoscopique, il serait facile de le transformer en un appareil du même genre, mais dans ce cas, bien entendu, la dimension de l'image resterait égale à celle d'une des images stéréosco-piques.

Il suffît de faire faire un cadre qui se place dans le logement du verre dépoli et que l'on met à la place du châssis négatif. Ce cadre est divisé en deux parties et porte d'un côté un châssis à verre dépoli et de l'autre un châssis négatif. Nous avons fait adapter déjà depuis longtemps ce dispositif à une chambre ~j et nous obtenons avec cet appareil des épreuves du format -i.

En faisant fonctionner un seul des obturateurs et en laissant le deuxième objectif démasqué, on obtient le même résultat qu'avec la chambre double que nous venons de décrire.

Chambre d'atelier. — On entend par chambre d'atelier une chambre de grand format et de tirage considérable. Cet appareil sera utile pour faire des clichés de grandes dimensions et pour les agrandissements ou les réductions. Il diffère des appareils ordinaires en ce qu'il comporte trois corps au lieu de deux, et deux soufflets au lieu d'un (fig. 9).

L'objectif se place sur le corps du milieu. Le corps d'avant porte une série d'intermédiaires destinés à recevoir des clichés de différents formats. Le verre dépoli est sur le corps d'arrière.

Fig. 9-

Chambre d'atelier.

En vertu de la loi des foyers conjugués, lorsque le tirage est le même entre le corps portant l'objectif et les deux autres portant l'un le cliché à reproduire et l'autre la plaque sensible, on obtiendra une reproduction à taille égale. Si l'on rapproche de l'objectif le corps d'avant, on obtiendra sur le verre dépoli un agrandissement qui sera d'autant plus considérable que le modèle sera plus rap

proche. Inversement, si on éloigne le corps d'avant de l'objectif, on obtiendra une réduction d'autant plus faible qu'on l'éloignera davantage.

C'est pour ces diverses raisons qu'il est nécessaire d'avoir un tirage considérable. Le calcul montre, en effet, que, pour un agrandissement de cinq fois, par exemple, le tirage du soufflet d'arrière doit avoir six fois la longueur focale de l'objectif employé.

Pour obtenir des clichés de grand format on transporte l'objectif sur le corps d'avant et l'on profite ainsi de tout le tirage de l'appareil. 11 est bien entendu qu'il faudra choisir un objectif couvrant convenablement la grandeur maxima de plaque que peut faire l'appareil. Cet objectif aura naturellement un foyer un peu long; c'est encore une des raisons qui nécessitent la grande longueur du soufflet. Cet appareil ainsi monté servira aussi pour faire la reproduction à grande échelle d'un objet déterminé tel qu'un cerveau, une pièce anatomique quelconque. Grâce à la longueur du tirage, on pourra faire un agrandissement direct.

Chambre stéréoscopique. — Les épreuves stéréoscopiques, quoique peu usitées jusqu'à présent pour les études qui nous occupent, peuvent cependant présenter un réel intérêt dans certains cas. On sait que, grâce à la vision binoculaire, nous voyons les objets avec un relief que les épreuves photographiques ordinaires sont impuissantes à donner; seul le stéréoscope conserve le sentiment de la réalité. Lors donc qu'il s'agira d'étudier des objets ayant des différences de plans qu'il est utile de mettre en lumière, c'est au stéréoscope qu'il faudra recourir. Nous sommes d'ailleurs convaincu que cet instrument, un peu trop délaissé à notre avis, reprendra la place qu'il devrait occuper.

Pour ne citer qu'un exemple, nous rappellerons que M. Lallier, un de nos dermatologistes les plus distingués, a obtenu avec cet instrument des épreuves très remarquables.

Pour la Photographie stéréoscopique on peut employer les appareils faits ad hoc ou, plus simplement, une chambre ordinaire dans laquelle on adapte la séparation mobile. Il est nécessaire, dans ce cas, d'avoir deux objectifs à court foyer, om, 15 environ, et de même

distance focale absolue. L'écartement entre les deux objectifs devra pouvoir varier de om,07 à om,io. En principe, il faudra augmenter d'autant plus l'écart que l'on est plus loin du modèle (fig- 10).

Il sera nécessaire d'avoir un obturateur spécial qui démasquera les objectifs rigoureusement au même moment. Si cette simulta-

Fig. 10.

Chambre stéréoscopique Londe et Dessoudeix à écartement variable,

néité de départ n'était pas obtenue dans les épreuves à courte pose, on obtiendrait une épreuve pseudoscopique, c'est-à-dire une épreuve dans laquelle les divers plans chevauchent les uns sur les autres, et, en somme, au lieu de relief, on obtiendrait l'illusion du creux. Ce défaut est totalement évité si les deux objectifs sont découverts exactement en même temps.

Peut-être, pourrait-on reprocher au stéréoscope de donner des images un peu petites, et, par suite, plus difficiles à étudier pour le

médecin ; le format du stéréoscope est en effet de 8,5 sur 17. Avec les marges, chaque épreuve n'a en réalité que 6,4 sur 7. Mais rien n'empêche de faire des épreuves de plus grand format. On emploiera alors la chambre double dont nous avons fait la description et l'on obtiendra deux épreuves ||-. Il faudra naturellement dans ce cas se servir d'un obturateur stéréoscopique, si l'on veut faire des épreuves rapides.

La seule difficulté consistera dans l'examen de ces épreuves qui théoriquement ne serait pas possible, puisque les deux centres des images devraient être à la distance des yeux, c'est-à-dire à om,07 environ. Néanmoins, M. Boyer, de Paris, a donné une solution élégante du problème, et, par suite, on pourra pratiquer la Photographie stéréoscopique de grand format si cela est nécessaire.

Pour les détails du tirage et du montage des épreuves stéréosco-piques, nous ne croyons mieux pouvoir faire que de renvoyer à l'excellent Ouvrage de M. Donnadieu sur la matière

Chambre verticale. — Pour les reproductions de pièces ana-lomiques, il est nécessaire d'avoir une chambre verticale à très long tirage, afin de pouvoir faire des agrandissements directs. Nous décrirons cet appareil dans le Titre IV, car c'est ce même appareil qui nous sert pour la Photographie microscopique.

OBJECTIF.

Le choix de l'objectif est une grosse question dans n'importe quelle branche de la Photographie; dans le sujet qui nous occupe, il en sera de même. Quelles qualités devons-nous demander à cet instrument duquel toute la valeur de nos résultats va dépendre?

Il faut qu'il nous donne la reproduction fidèle et exacte de notre modèle et ceci dans le temps le plus réduit possible. Nous adopterons, alors le type dit aplanétique, composé de deux combinaisons de lentilles symétriques. Cet objectif ne donne aucune

(') Donnadieu, Traité de Photographie stéréoscopique. Paris, Gauthier-Villars et fils, 1892.

déformation, et il peut travailler à grande ouverture. Tl répond donc bien à ce que nous demandions.

Pour le format ||, nous conseillons un objectif de om, 25 environ de foyer. Les objectifs dont nous nous servons sur notre chambre double sont des hémisphériques rapides de Darlot de om, 25 de foyer (1). Ils conviennent parfaitement pour l'usage auquel nous les destinons. Ils couvrent, en effet, le à pleine ouverture, ce qui nous permet d'opérer avec la plus grande rapidité. Il ne faut pas oublier que la rapidité d'un objectif est fonction de sa distance focale principale et de son ouverture. L'avantage sera indiscutablement à celui qui donnera la meilleure image avec la plus grande ouverture et la distance focale principale la plus faible.

Nous n'indiquerons pas dans ce travail la manière de mesurer la distance focale absolue d'un objectif; d'après les décisions du Congrès de Photographie de 1889, cette indication doit être portée sur la monture de l'objectif et il faut l'exiger de l'opticien.

D'après les décisions du même Congrès, les diaphragmes doivent être marqués de la façon suivante : Celui qui est égal au dixième de la distance focale absolue portera le n° 1. Si avec ce diaphragme, qui est le diaphragme normal, il faut poser \" par exemple, tous les autres diaphragmes porteront gravé un chiffre qui indiquera quelle doit être la pose que l'on doit donner avec chacun d'eux, toutes choses égales d'ailleurs. Il faut également exiger de l'opticien ce numérotage.

Le but des diaphragmes est d'augmenter l'étendue du champ couvert et de donner la netteté des divers plans.

Règle pour l'emploi des diaphragmes. — Plus le diaphragme sera petit, plus le champ de netteté augmentera, plus la profondeur de foyer deviendra considérable. C'est par l'usage des petits diaphragmes que l'on obtient, dans la Photographie courante, des images d'une netteté irréprochable. Il faudra donc diminuer les diaphragmes d'autant plus que l'objet à reproduire sera fait à grande échelle ou qu'il présentera de plans distincts les uns des autres. A ce propos, il faut non seulement examiner l'épaisseur,

(') L'objectif hémisphérique appartient à la classe des objectifs aplauétiques.

si nous pouvons nous exprimer ainsi, du modèle mais encore la distance à laquelle il se trouve de l'appareil. Et ici, nous devons nous arrêter un instant sur la loi qui régit les variations de la distance focale suivant la distance du modèle.

Si nous prenons un objectif de om,io de foyer, nous trouvons, d'après la loi des foyers conjugués, le Tableau suivant :

On voit, d'après la lecture de ce Tableau, que les allongements de la distance focale deviennent de plus en plus faibles, au fur et à mesure de l'éloignement du modèle. En pratique, on admet même qu'au delà de 100 fois la distance focale ils deviennent complètement négligeables. On constate également qu'il est d'autant plus difficile de mettre également au point deux plans situés à une distance déterminée que l'on en est plus près. Ainsi prenez deux plans distants de im. Si le plus rapproché est à im de l'appareil, les plans focaux dans lesquels se formeront les deux images nettes seront distants de ocni,58; ce grand écart ne permet pas de les avoir nets l'un et l'autre. Si le premier plan est au contraire à 4"\ la distance entre les deux plans focaux ne sera plus que de ocm, 06, quantité beaucoup plus faible.

On ne peut donc obtenir des images nettes d'objets ayant une certaine épaisseur et à grande échelle qu'en diaphragmant d'autant plus que l'on sera plus près. En un mot, la profondeur de

Distance

du modèle. focale.

0,20 0,20

o,3o i5

0,40 13 33

o,5o i25o

1 1111

2 io53

3 io35

4 1026

5 1020 10 1010 5o 1002

100 1001

1 000 10 001

10000 100001

foyer sera d'autant plus grande que le diaphragme sera plus petit. S'il est des cas où l'on ne peut arriver même par ce procédé à la netteté voulue, il suffira de s'éloigner.

Mais il n'est pas sans inconvénients de diaphragmer un objectif. Les temps de pose sont inversement proportionnels au carré des ouvertures. On peut donc, dans certains cas, arriver à des poses telles que tout travail pratique sur un modèle vivant sera impossible. Il faudra alors faire une application judicieuse de la loi que nous venons d'étudier et du jeu des diaphragmes, et préférer souvent une épreuve de petit format, mais rigoureusement nette, à une épreuve plus grande mais moins complète, celle-ci présentant d'ailleurs des difficultés considérables d'exécution.

Nous verrons du reste plus loin comment on peut agrandir une épreuve semblable et finalement obtenir l'épreuve à la taille voulue et aussi parfaite que possible.

Si, dans quelques cas exceptionnels, le rectilinéaire ne permet pas d'opérer avec une rapidité suffisante, il faudra avoir recours à un autre type, l'objectif double (forme Petzval). C'est l'objectif à portraits des photographes; il possède une grande ouverture et un foyer relativement très court : il est donc au point de vue de la rapidité bien supérieur mais il ne couvre qu'un champ beaucoup plus restreint, et, par suite, il ne faudra pas lui demander de couvrir de grandes surfaces à pleine ouverture. Il sera donc précieux dans certains cas où, par suite du manque de lumière, on devra poser très rapidement et se contenter d'un champ de netteté assez restreint.

OBTURATEUR.

L'obturateur est l'instrument destiné à démasquer et remasquer l'objectif au moment de la pose : on le dit à pose ou instantané, suivant qu'il permet d'obtenir les poses d'une durée quelconque, ou les poses plus ou moins rapides. Il peut même être disposé pour ces deux fins et permettre de faire l'une et l'autre à volonté. C'est alors un obturateur instantané et à pose.

Un excellent type d'obturateur à pose est celui de Guerry, universellement connu. Il se compose d'un petit volet de velours que l'on manœuvre au devant de l'objectif an moyen d'une poire pneu

matique. Cet appareil simple et peu coûteux est d'un usage très commode, mais il ne faut pas cependant, à notre avis, le placer sur l'objectif lui-même, comme on le fait généralement. En effet, si on l'ouvre brusquement, il y a un effet de réaction qui se produit, la chambre est ébranlée et la netteté de l'image compromise.

Obturateur Guerry, double volet.

Pour éviter cet inconvénient, nous plaçons cet obturateur sur un pied indépendant de celui de la chambre et nous le réunissons à l'objectif au moyen d'une manche en étoffe souple et imperméable à la lumière : de cette manière aucun ébranlement n'est à craindre.

L'obturateur Guerry, grâce au moyen d'un deuxième volet qui

Fig. 11.

est solidaire du premier et qui vient fermer l'objectif aussitôt que l'autre a fonctionné, permet, dans une certaine limite, de faire des épreuves rapides mais il ne saurait convenir à l'obtention de véritables instantanéités (fig- 11).

Nous employons dans ce cas l'obturateur que nous avons cité et qui est connu sous le nom obturateur Londe-Dessoudeix.

Fig. 12.

Obturateur Londe et Dessoudeix.

C'est un obturateur mixte qui permet de faire à volonté, ou des épreuves posées, ou des instantanés de divers degrés de rapidité (fig. 12).

Nous le plaçons entre les deux lentilles de notre objectif apla-nétique; le type que nous adoptons est celui de la série C, n° 2 ou 3 suivant le diamètre de l'objectif.

La manœuvre en est des plus simples. On voit extérieurement deux manettes, l'une plus petite qui est celle du disque et qui sert

à armer l'obturateur, la deuxième plus grande qui se meut sur une demi-couronne munie d'encoches numérotées. C'est par la position de cette manette que l'on peut obtenir à volonté la pose ou l'instantané d'un degré quelconque.

Manœuvre de l'obturateur :

i° Mise au point. — Pour effectuer cette opération, on met la manette inférieure dans l'encoche n° 3 où se trouve le mot Pose. On amène alors la manette du disque jusque dans la verticale et l'appareil reste ouvert.

2° Epreuves posées. — Il n'y a qu'à armer l'obturateur en poussant la manette du disque à fond, en face le mot Départ. Si l'on appuie alors sur la poire, l'appareil s'ouvre ; pour le refermer, on donne un nouveau coup de poire.

3° Epreuves instantanées. — On arme naturellement l'obturateur comme il a été dit plus haut, et l'on place la manette des vitesses dans l'une ou l'autre encoche (*); la vitesse est d'autant plus grande que le numéro de l'encoche est plus élevé.

L'appareil est réglé pour donner des poses depuis ~ jusqu'à de seconde. Les petites vitesses permettront de prendre des malades qui ne gardent qu'imparfaitement l'immobilité; les plus grandes, de saisir les mouvements les plus rapides, soit dans la marche, la course, les attaques d'hystérie ou d'épilepsie, etc.

Le grand avantage que possède cet obturateur, c'est de donner facilement des vitesses variables et de reproduire toujours d'une manière rigoureuse l'une ou l'autre. Il permet également de passer de la pose à un instantané quelconque ou vice versa, par Je simple déplacement de la manette, et ceci, au moment même d'opérer, ce qui, dans certains cas, est d'une utilité incontestable.

ACCESSOIRES.

Pied. — Le modèle que nous adopterons est le pied dit d'atelier qui est robuste et néanmoins facilement maniable. Il est muni

(') Excepté dans l'encoche n° 3 qui est réservée pour la pose.

d'une crémaillère qui permet de le lever ou de l'abaisser très aisément (fig. 13).

Il est nécessaire que la planchette supérieure qui porte la chambre puisse avoir un mouvement de bascule, aussi grand que possible, afin de pouvoir incliner plus ou moins l'appareil, suivant les cas.

Un dispositif que nous recommandons consiste à avoir sur cette planchette une deuxième planchette identique qui est montée

Fig. 13.

Pied d'atelier.

à charnières sur la première. Sur le côté, sont deux arcs de cercle métalliques qui passent dans deux coulants à vis de pression placés sur la planchette fixe. De cette manière, on peut avoir toute inclinaison voulue et même placer l'appareil verticalement, ce qui est utile assez souvent, comme nous le verrons plus loin.

S'il s'agit de transporter l'appareil, d'opérer dans les salles de malades, il sera bon également d'avoir un pied de touriste ordinaire, à trois branches; ce pied permet facilement de prendre toutes les inclinaisons nécessaires, car on peut raccourcir chacune des branches à volonté (Jîg- i4)-

Pour la grande chambre d'atelier, il faudra employer le grand pied qui est établi spécialement pour ce genre d'appareils.

Pied à trois branches

Loupe. — Pour parfaire la mise au point, on se sert d'une loupe spéciale que l'on construit pour les usages photographiques. Cette loupe appliquée sur le verre dépoli permet de voir l'image avec un fort grossissement et d'en régler la netteté d'une manière absolue.

Voile noir. — Le voile noir est destiné à abriter la tête de l'opérateur et à lui permettre d'examiner l'image de la chambre noire sans être gêné par la lumière extérieure. Il est fait en une étoffe quelconque, noire et imperméable à la lumière.

Fig. 14,

chapitre ii.

TECHNIQUE PHOTOGRAPHIQUE.

§ I. — DES PRÉPARATIONS SENSIBLES.

A l'heure actuelle, à la suite des progrès réalisés depuis quelques années, il ne peut plus être question d'employer d'autres plaques que celles dites au gélatinobromure d'argent. Elles sont formées d'une émulsion de bromure d'argent incorporé dans de la gélatine. Elles ont l'avantage de s'employer à l'état sec, de se conserver parfaitement bien et de posséder une rapidité qui n'a été égalée par aucun autre procédé. On les trouve de plus facilement dans le commerce et à des conditions de prix très abordables. Elles font l'objet d'une industrie très florissante et il ne peut y avoir qu'une difficulté, c'est de faire un choix parmi les nombreuses marques qui existent.

Au point de vue de la Photographie médicale, ce que l'on doit chercher avant tout, c'est la grande sensibilité, car il faut le dire, toutes les marques sont loin d'être aussi rapides les unes que les autres.

Pour éviter les recherches au lecteur, nous lui dirons que nous travaillons à la Salpêtrière avec plein succès sur des plaques de la maison Guilleminot. Les plaques Lumière (étiquette bleue) nous ont donné également d'excellents résultats. Bien que ces plaques nous suffisent pour le travail courant, il est cependant des cas où leur rapidité n'est pas encore assez grande.

Nous avons donc pris l'habitude d'essayer constamment les nouvelles marques qui sont présentées au public. Comme le lecteur peut se trouver dans la même situation que nous, il nous paraît nécessaire de lui indiquer comment nous procédons à nos essais comparatifs.

Ces essais peuvent se faire par la méthode proposée par le Congrès de 1889, mais l'application de cette méthode exige l'emploi d'appareils spéciaux qui sont dispendieux et n'existent pas ordinairement dans un laboratoire de Photographie.

Dans le cas présent et puisqu'il s'agit, non pas de déterminer la sensibilité absolue d'une nouvelle plaque, mais de savoir seulement si elle est plus ou moins rapide que celle employée habituellement par nous, nous faisons l'essai par l'un des deux procédés suivants :

Premier procédé. — Nous mettons dans un châssis négatif une bande de la plaque que nous employons d'habitude, puis'une bande de la plaque à essayer. Si notre format est ||, ces bandes auront chacune 18 de hauteur sur 6 \ de large. Ceci fait, nous plaçons notre châssis verticalement à la distance de im d'une source de lumière faible, telle que bougie, lampe à essence. L'opération doit se faire, bien entendu, dans le laboratoire noir. Nous ouvrons alors notre volet progressivement, de façon à démasquer des bandes successives des plaques en expérience. Chaque exposition doit durer le même temps que l'on fixera à une seconde. Si l'on fait dix expositions, par exemple, la partie inférieure aura posé dix secondes, et la supérieure une seulement. On referme alors brusquement le volet d'un seul coup. Il est bon de ne pas relever le volet jusqu'en haut de sa course de façon à avoir une partie des plaques qui n'aura pas été impressionnée et qui permettra de juger si elles sont voilées ou non.

On développe alors les plaques dans le même bain et pendant le même temps. La plaque qui pour un temps de pose donné présentera l'opacité la plus grande sera évidemment plus sensible, à condition de faire porter la comparaison dans les bandes les moins exposées. Pour les détails de cette méthode, nous renvoyons le lecteur à ce que nous avons publié à ce sujet dans un Ouvrage antérieur (1 ).

Second procédé. — Nous mettons dans un châssis double la plaque à essayer et celle que nous employons d'habitude. Il s'agit

(') A. Londe, La Photographie instantanée. Paris, Gauthier-Villars et fils.

maintenant d'impressionner ces deux plaques d'une manière identique et de voir après développement celle qui aura le mieux donné. A cet effet, il suffit d'avoir à notre disposition un bon obturateur qui fonctionne d'une manière régulière. Nous faisons alors à la chambre noire deux instantanés d'un même sujet, en ayant soin de poser les deux plaques l'une après l'autre, aussi rapidement que possible. Cette précaution est indispensable, car l'expérience ne peut avoir de valeur que si la lumière extérieure n'a pas varié d'une pose à l'autre. Aussi doit-on faire ces essais par un beau ciel bien pur ou encore par un temps gris, mais jamais lorsque les nuages viennent modifier constamment l'éclairage. On développe ensuite les plaques dans le même bain et pendant le même temps. S'il y a une différence de sensibilité elle saute aux yeux immédiatement et aucun doute à cet égard n'est possible.

Nous supposons maintenant le lecteur en possession d'une bonne marque rapide qui lui servira pour les travaux d'après nature : mais doit-il garder la même marque pour des travaux qui n'exigentpas une pareille sensibilité?Étant donné que l'on trouve des plaques un peu moins rapides que celles que nous avons indiquées, mais qui sont beaucoup meilleur marché, notre réponse n'est pas douteuse. Il faut une deuxième provision de ces plaques qui servira pour les reproductions, les photographies de pièces histologiques, la micrographie, en un mot dans tous les cas où la rapidité de la pose n'est pas la condition même du succès. Les plaques de cette catégorie dont nous nous servons portent la marque As de trèfle ('). Elles sont d'une excellente préparation mais un peu moins rapides que les précédentes.

Les plaques au gélatinobromure doivent être conservées à l'abri de la lumière et de l'humidité. On les emmagasine donc dans un endroit sec. Toute boîte entamée devra prendre place dans une ai-moire ou un tiroir ad hoc fermés à clef pour éviter les accidents dus à la curiosité ou l'indiscrétion d'un tiers.

(') Nous nous servons aussi avec succès des plaques de M. Perron de Màcon; ces plaques sont très bien préparées et d'une grande finesse.

§ II. — CHARGEMENT DES CHASSIS.

Pour employer les plaques sensibles on les place tout d'abord dans les châssis négatifs qui sont destinés à cet usage. Cette opération demande quelques précautions très simples mais indispensables. Etant donnée la grande sensibilité du bromure d'argent, il faut travailler à la plus faible lumière rouge possible; on baissera, à cet effet, la flamme de la lanterne ou l'on s'en éloignera suffisamment. Combien d'opérateurs accusent leurs plaques de présenter un léger voile, qui sont seuls fautifs pour avoir travaillé dans de mauvaises conditions.

Pour éviter tout accident, il est d'ailleurs un procédé très simple, c'est celui qui consiste à charger les châssis dans l'obscurité. Cette opération est loin d'être compliquée, elle ne demande qu'un peu d'habitude et de soins.

La plaque photographique a deux faces, celle qui porte la couche sensible et l'autre qui est à nu; il faut toujours mettre la couche du côté du volet du châssis. On distingue la couche qui est mate à ce qu'elle réfléchit moins la lumière de la lanterne que le dos du verre. De plus, elle se reconnaît très facilement, en passant le doigt sur un des angles ; c'est du reste le procédé qu'il faut employer dans l'obscurité, pour éviter les erreurs.

Il est indispensable d'épousseter, avec un blaireau fin, la plaque avant de la mettre dans le châssis ; de cette manière on enlève toutes les poussières qui pourraient se trouver sur la couche et qui feraient autant de taches. Bien souvent, les fabricants de plaques sont accusés de livrer des plaques constellées de petits trous, alors que le seul coupable est un opérateur peu soigneux. Il est également prudent de blaireauter le châssis avant d'y mettre les plaques.

Dans un laboratoire organisé, on doit toujours avoir une réserve de châssis chargés pour être prêt à opérer sans perte de temps. Nous avons, à la Salpêtrière, des casiers spéciaux qui contiennent les châssis chargés, d'autres, les châssis dont les plaques ont été exposées et d'autres enfin, les châssis vides; de cette manière aucune erreur n'est possible.

Si l'on ne peut avoir un nombre suffisant de châssis, on sort les

glaces posées des châssis pour les mettre dans une boîte à rainures à recouvrement; elles peuvent attendre ainsi le moment du développement et l'on peut recharger à nouveau les châssis.

§ IJI. — DE L'EXPOSITION.

11 s'agit maintenant, au moment d'opérer, de déterminer la durée du temps de pose qui sera nécessaire pour obtenir un négatif aussi parfait que possible.

Cette question est une des plus délicates de la Photographie et il nous est impossible de dire, a priori, ce qu'il faut poser dans tel ou tel cas, non pas que nous serions embarrassés d'opérer dans telle ou telle circonstance, mais notre manière de faire ne peut servir que d'exemple et non pas de règle absolue. En effet, les conditions dans lesquelles divers opérateurs travaillent, ne sont pas identiques : nous ne pourrons donc qu'exposer les conditions du problème et indiquer à chacun comment, avec un peu de pratique et d'expérience, il pourra arriver à le résoudre.

Parmi les raisons qui peuvent amener des variations dans les temps de pose, il en est de théoriques et de pratiques. Les premières seront les mêmes pour tous, les secondes variables suivant chacun.

INFLUENCES THÉORIQUES.

Parmi les raisons théoriques, il nous faut citer :

i° L'influence de la lumière;

2° L'influence de l'objectif;

3° L'influence du diaphragme ;

4° L'influence de la distance du modèle;

5° L'influence de la coloration du modèle;

6° L'influence des plaques;

7° L'influence du révélateur.

Parmi les raisons pratiques, nous aurons à étudier : i° L'influence de l'orientation de l'atelier; 2° L'influence du mode de vitrage de l'atelier; 3° L'influence de la latitude.

Examinons ces divers points dans l'ordre ci-dessus indiqué.

1. Influence de la lumière. — L'appréciation de la lumière au point de vue de la détermination du temps de pose est d'une importance capitale : en effet, plus elle sera intense et plus on pourra abréger la pose; inversement, plus elle sera faible plus il faudra l'allonger.

Les causes de variation de la lumière proviennent de l'heure, de la saison et de l'état du ciel. La latitude et l'altitude au-dessus du niveau de la mer ont aussi une influence, mais les variations qui en résultent sont purement locales et l'examen en sera fait plus loin.

Il nous faut donc examiner l'influence de l'heure, de la saison et de l'état du ciel sur l'intensité actinique de la lumière.

L'activité chimique de la lumière, très faible au lever du soleil, croît peu à peu lorsque cet astre monte au-dessus de l'horizon; elle atteint son maximum vers le milieu de la journée, puis elle décroît jusqu'au coucher.

Voici un Tableau qui indique les variations de l'intensité chimique de la lumière aux diverses heures de la journée. Ces chiffres sont donnés au solstice d'été et nous supposons qu'à midi le temps de pose satisfaisant est égal à l'unité.

nh ioh 9" 8" 711 6" 5" 4h

Midi

ih a" 3" 4h 5h 6h 7" 8h

1 1 1,1 i,3 1,6 2,3 5 14

On voit, d'après l'examen de ce Tableau, que de iih du matin à ih de l'après-midi la lumière est à son maximum, qu'à ioh et à 2h, elle est presque aussi intense, mais que lorsqu'on opère à d'autres heures, soit du matin, soit du soir, la pose va toujours en augmentant. 11 faudra donc opérer, de préférence, entre ioh et 2h, ou aux autres heures allonger la pose d'après les indications ci-dessus.

On a remarqué cependant, et contradictoirement à ce Tableau, qu'à égalité d'intensité lumineuse, il y a toujours intérêt à opérer le matin.

L'influence de la saison est également très importante; l'acti-nisme de la lumière, qui est à son maximum au solstice d'été, est réduit de près de la moitié au printemps et à l'automne ; au solstice d'hiver, il n'est plus que le quart de ce qu'il était au solstice d'été.

Si l'on prend pour unité la pose reconnue bonne au mois de juin, il faudra, toutes choses étant égales d'ailleurs, se conformer au Tableau suivant qui montre bien les différences de l'actinisme aux divers mois de l'année.

Juin Mai Avril Mars Février Janvier

Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre

i i 1,2 1,6 2,5 3,5

Les mois les plus favorables sont donc : mai, juin, juillet, août, et si une pose de i seconde, par exemple, est reconnue nécessaire dans celte période, il faudra presque la quadrupler en janvier et en décembre.

Enfin l'état du ciel qui varie constamment amène aussi des modifications importantes. Si l'on prend pour unité la pose nécessaire, pour obtenir au milieu du jour et en plein soleil la reproduction d'un objet déterminé, il faudra, toutes choses égales d'ailleurs, poser pour la lumière diffuse, de deux à quatre fois plus et par un temps gris et sombre de six à dix fois plus.

En résumant ce que nous venons de dire et en combinant ces diverses indications, on peut dresser, comme l'a fait M. Chapel d'Espinassoux à qui du reste nous l'empruntons, un Tableau qui donne mois par mois, heure par heure et par tous les temps, les durées d'exposition qui seront nécessaires pour reproduire un objet déterminé. Le temps de pose unitaire est pris le 21 juin au solstice d'été, à midi, et en plein soleil. Les chiffres donnés sont des coefficients par lesquels on multiplie le temps unitaire trouvé par l'expérience et déterminé une fois pour toutes.

Coefficients d'éclairage sous la latitude de Paris.

Coefficients de pose à l'extérieur selon le jour de l'année, l'heure du jour et l'état du ciel.

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A. Plein soleil sur le sujet-. — B. Ciel bleu sans soleil sur le sujet. — C Ciel couvert et gris. — D. Ciel couvert et très sombre. i.a pose nécessaire, le 21 juin, à midi, sous la latitude de Paris, au niveau de la mer, par plein soleil sur le sujet, est prise pour unité.

2. Influence de l'objectif employé. — La rapidité d'un objectit dépend principalement de son ouverture et de son fojer et accessoirement de la composition des lentilles, de leur nombre, de leurs épaisseurs et de leur coloration.

Laissant de côté intentionnellement ces causes modificatrices de la clarté de l'objectif qui n'ont qu'une importance secondaire, nous n'aurons à nous préoccuper que de l'ouverture de l'objectif ou mieux de son diaphragme et du foyer.

On sait que les temps de pose sont proportionnels aux carrés des longueurs focales: par suite, il y aura toujours intérêt au point de vue de la rapidité de la pose à employer des objectifs de foyer court et pouvant travailler à la plus grande ouverture possible.

L'avantage, au point de vue de la rapidité, sera incontestablement aux objectifs doubles (forme Petzval), qui ont une grande ouverture et un foyer relativement court, mais ils ne couvrent qu'un champ restreint. Ils ne peuvent donc pas être employés dans toutes les hypothèses.

Le type rectilinéaire, au point de vue de la surface couverte, est bien supérieur et, quoiqu'un peu moins rapide, c'est celui que l'on devra préférer en général. On parle beaucoup en ce moment des objectifs photographiques de Zeiss qui, bien qu'aplanétiques, peuvent travailler cependant à des ouvertures beaucoup plus grandes que celles des objectifs similaires employés jusqu'à ce jour. D'après les quelques essais que nous avons faits, ces objectifs peuvent remplacer avantageusement à grande ouverture le type Petzval, parce

f

qu'ils donnent une image plus correcte. Avec le diaphragme — ils

commencent à donner des images d'un champ suffisamment grand et, par suite, ils peuvent être employés avec grand succès, car i f

l'ouverture ^ permet des poses fort rapides.

3. Influence du diaphragme. — Le diaphragme, on le sait, est une lamelle métallique percée d'une ouverture circulaire qui se loge dans l'objectif. Il a pour but d'augmenter la profondeur du foyer et le champ de netteté de l'objectif. En Photographie médicale où l'on est appelé constamment à faire des malades dans leur attitude caractéristique, où il ne s'agit pas comme dans la Photo

graphie ordinaire, de ramener les diverses parties du corps dans un même plan, l'usage du diaphragme intelligemment compris sera d'une utilité incontestable. Mais, à côté de ses qualités, il a un inconvénient grave que l'on ne saurait passer sous silence, car, au fur et à mesure qu'il diminue, il supprime de la lumière ; par suite, il nécessite des poses croissantes. On ne peut donc le réduire par trop sous peine de compromettre la netteté du négatif, le modèle n'ayant pu garder l'immobilité voulue.

Il sera indispensable, dans la pratique, de ne réduire les diaphragmes que le moins possible, de façon à obtenir toujours la durée d'exposition la plus courte.

Les variations du temps de pose, résultant de la substitution d'un diaphragme à un autre, sont basées sur la loi suivante : les temps de pose sont inversement proportionnels au carré des ouvertures.

En pratique, et pour éviter tout tâtonnement, il faut exiger de l'opticien une série de diaphragmes numérotés d'après les décisions du Congrès de Photographie de Paris, ou les numéroter soi-même. Le diaphragme normal, qui correspond au dixième de la distance focale principale, porte le chiffre i. Les autres diaphragmes portent des chiffres qui indiquent le temps qu'il faut poser d'après leur ouverture, le temps de pose nécessité par le diaphragme normal étant supposé égal à l'unité.

4. Influence de la distance du modèle. — Nous avons vu précédemment que l'allongement de la distance focale entraînait des augmentations de la pose. Or, suivant la distance du modèle, la distance focale se trouve modifiée en application de la loi des foyers conjugués. En vertu de cette loi que nous étudierons plus loin à propos des agrandissements et des réductions, la distance focale augmente d'autant plus que le modèle se rapproche. Il faut donc augmenter la pose d'autant plus que l'on opère à faible distance, ou ce qui revient au même, que l'on opère à plus grande échelle.

Étant admis, par hypothèse, qu'il faudrait poser un temps égal à l'unité pour obtenir une bonne épreuve d'un malade en pied occupant une hauteur de om,o5 sur la plaque, il faudra augmenter la pose dans les proportions suivantes pour les divers cas que nous allons examiner.

Temps de pose relatif pour homme normal à réductions de tailles données.

DIMENSIONS DE L'IMAGE SUR LA GLACE SENSIBLE.

NATURE DU MODÈLE.

0", 18. 0'",10. 0m,05. Taille égale.

Pose.

Corps entier debout.......... t 0,94 0,89

Corps entier assis............ 1 ,of 0,99 0,91

Buste (à partir du nombril).. . i,3i i,i5 0,99 Tête (du sommet au menton). 2,46 1,97 1,3l Bras (à partir de l'aisselle) .. , 1,3i i,i5 0,99

Main (et poignet)............ 2,46 1,97 i,3i

Jambe (à partir de la hanche). i,i5 1,09 0,94

Pied........................ 2,20 r,65 1,22

Œil......................... 3,36

Langue...................... 3,36

Oreille...................... 3,36

5. Influence de la coloration du modèle. — On sait que les préparations employées en Photographie ne sont pas également sensibles aux diverses radiations du spectre et que certaines couleurs, le jaune et le rouge, sont bien moins actiniques que le vert, le bleu et l'indigo. Par suite, il faudra poser d'autant plus que les objets se rapprocheront du jaune et du rouge.

Dans la reproduction de certaines maladies de la peau, des lupus, des pièces anatomiques, etc., il faudra tenir compte des colorations spéciales et allonger la pose en conséquence.

6. Influence des plaques employées. — Cette influence n'est pas discutable, étant données les différences de sensibilité considérables qui existent entre les diverses marques de plaques du commerce et les inégalités que l'on constate même quelquefois entre les diverses émulsions d'un fabricant.

Il faudra donc se servir autant que possible de plaques de même marque, qui possèdent en général une sensibilité assez régulière.

Néanmoins, nous engageons toujours notre lecteur à s'approvisionner de plaques portant le même numéro et provenant de la même émulsion. Ce sera une garantie pour la régularité du travail. Nous avons du reste pris l'habitude, lorsque nous renouvelons notre provision de plaques, défaire un essai comparatif entre une plaque du nouveau numéro et une de l'ancien dont nous connaissons bien la valeur par l'usage. De cette manière, s'il y a une légère différence de sensibilité en plus ou en moins, rien n'est plus facile que d'en tenir compte dans les opérations subséquentes.

7. Influence du révélateur. — Les divers révélateurs, et nous en parlerons plus loin, ne produisent pas des résultats toujours identiques, en ce sens que, d'après leur nature, leur composition, ils peuvent donner des négatifs de nature différente. Certains révélateurs donnent dur, d'autres donnent doux. Par des modifications intentionnées dans le temps de pose on pourra combattre ces défauts. Ainsi, avec un révélateur qui donne doux et même gris, il faudra diminuer la pose; au contraire, s'il donne des clichés trop durs, ayant trop de contrastes, il faudra l'augmenter.

Dans un Ouvrage précédent, nous avons étudié longuement les rapports qui existent entre la nature de l'objet à reproduire, la durée du temps de pose et le développement; nous renvoyons le lecteur à ce travail (1 ).

INFLUENCES PRATIQUES.

Nous venons d'étudier les diverses règles qui doivent guider dans la détermination du temps de pose, règles qui sont les mêmes pour tous ; voyons maintenant les causes particulières ou locales qui peuvent amener des modifications propres à chaque installation.

1. Influence de l'orientation de l'atelier. — Elle est indiscutable, car suivant son exposition il recevra une somme de lumière plus ou moins grande. Nous avons examiné cette question dans le Chapitre I, en parlant de l'organisation de l'atelier : nous n'y

(') A. Londe, Traité pratique de développement. Paris, Gauthier-Villars et fils, 2" édition ; 1892.

reviendrons pas; d'ailleurs, après quelques essais, l'opérateur sera absolument fixé sur les qualités de son installation.

2. Influence du vitrage de l'atelier--Suivant le verre adopté,

sa coloration, son état de propreté, on trouvera des différences sensibles. C'est ainsi que le beau verre bien blanc laisse passer environ 90 pour 100 de lumière utile alors que le verre dépoli n'en transmet que ^5 pour 100. Si les verres ont une coloration jaune ouverte, la quantité de lumière actinique pourra être de beaucoup réduite, et ceci, sans qu'il nous soit possible d'indiquer quelle peut être cette nouvelle perte. L'opérateur devra donc choisir ses verres avec le plus grand soin et se rendre compte de la lumière utile par quelques expériences préliminaires. Il devra tenir toujours le vitrage en parfait état de propreté, car la poussière qui s'amasse inévitablement surtout dans les grandes villes forme un véritable écran qui enlève une grande somme de lumière.

3. Influence de la latitude. — Suivant la latitude, la hauteur du Soleil, à un jour et à une heure déterminés, n'est pas la même pour les divers points de la surface du globe; il faudra donc tenir compte de la hauteur du Soleil au jour et à l'heure où l'on doit opérer, pour se rendre compte des variations du pouvoir actinique de la lumière aux diverses latitudes. Nous empruntons les chiffres suivants à M. de Chapel d'Espinassoux et nous donnons un Tableau qui indique les coefficients de pose à l'extérieur selon la hauteur du Soleil au-dessus de l'horizon. La hauteur du Soleil à Paris, le ai juin à midi, qui est de 66", est prise comme unité. Le même Tableau s'appliquera rigoureusement au travail fait à l'intérieur de l'atelier.

Hauteur du Soleil au-dessus Coefficient

de l'horizon. de pose.

o

o 54

10 9.8

20 3.2

3o 1.8

40 1.4

5o 1.1

60 1.0

66 (Paris le 21 juin à midi) t.o

70 1.0

80 0.9

90 0.9

En dernier lieu, il ne faudra pas négliger les causes purement locales qui peuvent avoir également une importance qu'on ne saurait passer sous silence.

Ainsi le voisinage de grands arbres, de maisons élevées, de montagnes, l'atmosphère d'une grande ville industrielle pourront amener des allongements de pose 5 au contraire, le voisinage de la mer, de grands lacs, de glaciers pourront beaucoup favoriser les opérations photographiques. Quelques expériences auront vite fixé l'opérateur sur les variations que ces diverses causes peuvent amener dans l'évaluation du temps de pose.

§ IV. — DU DÉVELOPPEMENT.

L'exposition une fois faite, il s'agit de faire apparaître l'image formée par la lumière et qui existe à l'état latent, de la développer en un mot.

Cette opération est des plus délicates quoi qu'on en ait pu dire. En effet, si le développement peut paraître une opération simple et monotone pour celui qui opère toujours dans des conditions identiques, il n'en saurait être de même ici où nous allons nous trouver aux prises avec toutes les difficultés, et où nous ne serons pas toujours maître de notre temps de pose.

S'il était possible, comme le font certains photographes de profession, de réaliser toujours une exposition de même valeur, l'opération du développement serait bien simplifiée, et le plus maladroit pourrait opérer avec succès.

Dans ces derniers temps, on a préconisé beaucoup certains déve-loppateurs qui devaient donner d'excellents clichés quel qu'ait été le temps de pose; on a créé une méthode de développement dite automatique qui a fait beaucoup de bruit, mais pas beaucoup de bonne besogne.

Nous ne saurions trop mettre en garde le lecteur contre cette méthode et contre les bains tout préparés qu'il entendra vanter de tous côtés. Qu'il croie à notre expérience datant de plus de dix années.

C'est certainement dans notre laboratoire de la Salpêtrière que nous avons rencontré les travaux les plus divers, les plus com

pliqués, les difficultés les plus grandes. Si nous avions trouvé un développateur automatique susceptible de donner de bons résultats dans ces hypothèses variées, nous n'eussions pas hésité à l'adopter une seule minute. Mais il est loin d'en être ainsi et nous sommes réduits à nous servir d'un seul développement qui nous a toujours donné pleine satisfaction, c'est le développement à l'acide pyrogallique. C'est donc celui-là que nous conseillerons d'employer, et nous sommes convaincu que le lecteur ne regrettera pas d'avoir suivi notre exemple.

DÉVELOPPEMENT A L'ACIDE PYROGALLIQUE.

Les produits nécessaires sont : i° L'acide pyrogallique; 2° Le sulfite de soude; 3° Le bromure de potassium; 4° Le carbonate de soude.

Nous employons l'acide pyrogallique en poudre, tel qu'il est livré dans le commerce. Nous le prenons avec une cuiller en bois qui contient approximativement ogr,25 de ce produit.

Le sulfite de soude est employé à saturation. Nous recommandons d'employer toujours du sulfite pur et préparé récemment. Avec un sulfite de soude pur, on obtient des clichés limpides; avec un sulfite impur, ils sont plus ou moins colorés.

Nous employons une solution de bromure de potassium ainsi composée :

Eau................................... ioo®

Bromure.............................. iosr

Comme carbonate, nous prenons celui que l'on trouve chez tous les épiciers et nous l'employons à saturation comme le sulfite.

Nos produits étant ainsi préparés, procédons à l'opération du développement; nous avons besoin d'une cuvette de verre et d'un verre à expérience. L'emploi de la cuvette de verre nous a toujours paru très avantageux, car elle permet d'examiner le cliché par transparence sans le toucher avec les doigts.

Nous pouvons nous trouver en face de trois hypothèses : la

pose a élé normale ou bien elle a été insuffisante, ou, au contraire, elle a été dépassée, ce qui constitue la surexposition. La conduite du développement sera différente dans les trois cas ; aussi allons-nous les examiner successivement.

1° La pose a été normale. — Mettre dans le verre à expérience une cuillerée d'acide pyrogallique (pour une plaque ajouter la quantité d'eau nécessaire pour bien couvrir la plaque, environ 6occ à 8occ puis 5CC de sulfite et 4 à 5 gouttes de la solution de bromure de potassium.

Ce bain ainsi composé est versé à plusieurs reprises sur la plaque mise dans la cuvette de verre. De cette manière l'homogénéité du bain est assurée et l'on évite, en général, les bulles, d'air qui peuvent rester adhérentes à la couche, et former autant de taches transparentes. Si malgré cela les bulles persistaient, il faudrait les enlever en projetant sur la plaque un fort courant d'eau ou encore en les enlevant avec le doigt ou un pinceau doux.

Le bain tel qu'il est constitué actuellement ne saurait développer l'image latente, mais il permet, pendant que la plaque y séjourne, le ramollissement de la couche, son imbibition égale et l'enlèvement des bulles d'air.

Le développement ne pourra commencer que lorsqu'on aura ajouté l'alcali. A cet effet, on met dans le verre à expérience une dizaine de gouttes de carbonate de soude, on reverse le bain dans le verre et le tout ensuite sur la plaque. 11 faut éviter avec soin de verser le carbonate de soude directement sur la plaque, ce qui pourrait produire un développement inégal et occasionner des taches.

On remue constamment la cuvette de façon que le liquide baigne uniformément la plaque. Si la pose a été normale, et c'est ici l'hypothèse, l'image apparaîtra rapidement et elle montera progressivement.

Il est deux points sur lesquels il faut porter toute son attention pendant le développement : ce sont les détails du négatif et son intensité.

Une image négative ne peut être complète que si tous les détails viennent dans les parties les moins éclairées du modèle, c'est-à-dire

lorsque les blancs du négatif auront tous leurs détails. On sait, en effet, que le cliché est une image dans laquelle les valeurs sont transposées, d'où le nom de négatif. Il faudra donc arrêter le développement lorsque tous les détails seront apparus dans les blancs du négatif.

En général, dans un cliché à pose normale, l'intensité vient en même temps que les détails et, lorsqu'on a tous ceux-ci, l'opération est terminée.

On lave alors la plaque et on la met dans le bain de fixage. Nous parlerons de la suite des opérations un peu plus loin.

2° La pose a été insuffisante. — Ici il faut distinguer deux hypothèses : ou la pose a été simplement un peu courte, ou bien il s'agit d'épreuves instantanées.

a. Poses un peu courtes. — Nous composons le bain comme précédemment, mais sans y ajouter de bromure ou en mettant une seule goutte. Après la première addition de carbonate, si le cliché ne vient pas, ce qui est à présumer, on rajoute, au bout d'une trentaine de secondes, une deuxième dose de carbonate et l'on attend encore un moment. On continue l'addition des doses de carbonate de cette manière jusqu'à ce que l'image apparaisse. A ce moment, on la laisse monter et l'on ne rajoute du carbonate que si elle vient trop lentement.

Lorsque tous les détails sont venus, on examine l'intensité qui sera très probablement suffisante. S'il n'en était pas ainsi, on ajoute une cuillerée d'acide pyrogallique et, au besoin, plusieurs autres jusqu'à ce qu'on ait l'intensité voulue.

Le cliché est alors lavé comme précédemment et passé au bain de fixage.

b. Poses instantanées. — Pour ces expositions très courtes obtenues par l'emploi de l'obturateur, il est nécessaire d'avoir un bain très énergique dès le début. On augmente la quantité d'acide pyrogallique et l'on fait le bain comme il a été décrit plus haut, mais sans bromure. Au lieu d'ajouter le carbonate par petites quantités, on l'emploie par centimètres cubes et l'on fait les additions plus rapprochées de façon à mener rondement le dévelop

pement. Lorsque l'image apparaît, on continue les additions de carbonate alternées avec les additions d'acide pyrogallique. On obtient ainsi d'excellents résultats.

Le reste des opérations est le même. Dans l'hypothèse de très grands instantanés nous opérons d'une autre manière. Notre bain est composé de carbonate de soude et de sulfite de soude sans addition ni d'eau, ni de bromure. Après avoir laissé la plaque une minute environ dans ce bain, on ajoute une bonne dose d'acide pyrogallique (de deux à trois cuillerées) et on laisse agir sur la plaque. L'image vient très rapidement et avec une grande douceur. Le bain ainsi composé sera presque toujours suffisant : au cas où le cliché manquerait d'intensité, on fera des additions d'acide pyrogallique, puis d'acide pyrogallique et d'alcali alternées.

3° La pose a été dépassée (surexposition). — Un cliché peut être surexposé accidentellement ou intentionnellement. Comme l'appréciation du temps de pose dépend d'une quantité de facteurs, il est facile à chacun de commettre des erreurs en plus comme en moins; d'autre part, il est des hypothèses, et nous le verrons plus loin, dans lesquelles la surexposition est nécessaire pour obtenir de bons résultats, dans le cas de modèles à valeurs trop tranchées par exemple. Nous distinguerons donc d'une part les poses dépassant légèrement la normale et de l'autre les poses intentionnellement plus prolongées encore.

a. Poses un peu longues. — Nous composerons le bain comme d'habitude, mais en y ajoutant une quantité de bromure d'autant plus forte que la pose aura été plus longue. Les additions de carbonate se feront par petites quantités comme il a été dit précédemment.

b. Poses encore plus longues (surexposition). — C'est ici une hypothèse très délicate. Etant donné un modèle présentant des contrastes trop considérables, le problème consiste à obtenir une épreuve où les parties différentes, quoique opposées complètement en tant que valeur, soient également bien venues. En prenant un exemple simple, supposons une maison blanche dont une moitié se trouve dans l'ombre. Il s'agit d'avoir également

bien les deux parties inégalement éclairées. A cet effet, on met à profit une observation théorique de M. Janssen, qui montre que l'action de la lumière sur les surfaces photographiques telles que les plaques au gélatinobromure d'argent n'est pas indéfiniment proportionnelle à la durée de son action. Si des expositions de i,2,3 secondes donnent, par exemple, des réductions croissantes de la couche, il arrive un moment où cette progression cesse d'exister; il peut même se produire le phénomène inverse, les impressions allant en décroissant. Si, partant de ce principe, on donne une large surexposition, on atteindra rapidement la période à laquelle les parties les plus claires donnent des impressions décroissantes, mais pendant ce temps-là les parties sombres, pour lesquelles la même période est infiniment plus loin, auront continué à agir; on conçoit donc qu'avec cette manière de faire on puisse arriver à de bons résultats. C'est ce que l'expérience prouve journellement. Dans ce cas, le développement devra être conduit d'une manière tout à fait spéciale. Il faudra composer un bain très faible en constituants, arriver à obtenir à peu près simultanément les détails dans les parties claires et sombres et donner ensuite l'intensité nécessaire.

A cet effet, on diminue considérablement la quantité d'acide pyrogallique, on ajoute la dose habituelle de sulfite, puis une plus grande quantité d'eau de façon à avoir un bain plus étendu. Bien que la pose normale ait été dépassée de beaucoup, on n'emploie que quelques gouttes de bromure (c'est là du reste une exception à la loi que nous avons formulée tout à l'heure) : en effet, le bromure a la propriété de donner des clichés à oppositions et c'est précisément là ce que nous voulons éviter.

Nous ajoutons le carbonate par très petites quantités jusqu'à ce que nous ayons nos détails dans toutes les parties. A ce moment, nous poussons vigoureusement à l'acide pyrogallique pour donner l'intensité voulue.

En résumé, le développement tel que nous le comprenons est une opération intelligente et raisonnée dans laquelle, par des variations convenables des constituants du bain, on arrive à conduire son cliché et à l'obtenir tel qu'on le désire.

Nous avons vu qu'il était nécessaire, dans tous les cas, d'obtenir

tout d'abord les détails dans les blancs du négatif; c'est là une condition indispensable pour constituer un bon cliché. En ce qui concerne l'intensité, il n'en est pas tout à fait de même. Des clichés d'intensité variable peuvent être également bons suivant le point de vue auquel on se place? Sur quoi donc se baser pour apprécier l'intensité que l'on devra rechercher. Le rôle du négatif est de permettre d'obtenir par une nouvelle opération des épreuves dites positives qui reproduisent précisément toutes les valeurs de l'original. L'épreuve est le but, le cliché n'est que le moyen, l'intermédiaire. Or la pratique montre que, pour obtenir de bonnes épreuves par les nombreux procédés de reproduction qui sont employés couramment, il faut des clichés d'intensité variable suivant les procédés utilisés. L'opérateur aura donc à modifier son intensité suivant le mode de tirage qu'il compte employer. En nous basant sur le procédé le plus employé, le chlorure d'argent, c'est l'intensité obtenue pour user de ce procédé qui nous servira de point de départ.

Il nous est impossible dans un livre de faire comprendre ce que doit être cette intensité, mais, après l'obtention de quelques clichés, l'opérateur se rendra compte lui-même de celui qui donnera le mieux sur chlorure d'argent. Ce cliché lui servira de type d'intensité moyenne, il saura alors que pour le platine il faudra des clichés plus intenses et qu'au contraire pour la Photocollo-graphie, le charbon, le papier aristotype par exemple, les clichés devront être moins poussés.

Nous signalons ces faits pour montrer que dans le développement bien conduit, on peut opérer de manière à obtenir le meilleur négatif en vue du résultat final que l'on cherche.

Nous engageons d'ailleurs notre lecteur à se procurer le travail spécial que nous avons fait sur le développement le cadre de cet Ouvrage ne nous permettant pas d'insister davantage sur ce sujet.

(') Londe, Traité pratique du développement. Paris, Gauthier-Villars et fils.

ACHÈVEMENT DU NÉGATIF.

Le développement terminé, on lave rapidement et abondamment le cliché et on le place dans un bain d'hyposulfite de soude ainsi composé :

Eau................................... iooo

Hyposulfite de soude. ................. 'i5o

Le rôle de ce fixateur est de dissoudre le bromure d'argent non impressionné qui reste dans la couche. Le fixage est complet lorsque toute apparence laiteuse a disparu en examinant l'envers du cliché. A notre avis, il faut effectuer le fixage à l'abri de la lumière du jour. A cet effet, si l'on veut sortir du laboratoire, on recouvre la cuvette d'un carton ou d'une planchette ou mieux encore au moyen d'une cuvette renversée et un peu plus grande, bien entendu.

Laissez le cliché quelques minutes dans lhyposulfite, même lorsqu'il paraît fixé, afin d'être assuré que tout le bromure d'argent a été éliminé.

Après un lavage abondant, on plonge le cliché dans une cuvette contenant la solution suivante :

Eau................................... iooo

Alun ordinaire......................... 65

Le cliché peut séjourner un quart d'heure dans le bain d'alun. Il se nettoie et la gélatine se durcit, ce qui assure la conservation du négatif.

Reste alors le lavage définitif qui doit se faire autant que possible dans l'eau courante ; on trouve dans le commerce des cuves en zinc à rainures qui sont d'un excellent usage et permettent de laver en même temps toute une série de clichés. Un des meilleurs modèles est la laveuse de P. Henry, qui permet de laver des clichés de formats variés; elle nous paraît être le complément indispensable d'un laboratoire bien installé. Le lavage doit être prolongé au moins dix heures, afin d'assurer l'élimination complète de

l'hyposulfite de soude. La conservation des clichés n'est certaine qu'à ce prix.

Dans un service de Photographie médicale où les clichés ont tous de la valeur, il est indispensable d'en assurer la durée et d'éviter ce que nous avons constaté dans le laboratoire de la Salpêtrière. Presque tous les clichés qui ont été exécutés avant notre arrivée sont plus ou moins altérés. C'est là une perte irréparable qui aurait pu être évitée avec un peu de soins.

Le lavage terminé, il est bon de passer sur les plaques un blaireau fin et mouillé afin d'enlever les saletés qui auraient pu s'y déposer pendant le lavage 5 il faut aussi nettoyer avec un linge mouillé le dos de la glace qui est en général recouvert de bavures d'émulsion. A ce moment, elles s'enlèvent avec facilité et il n'en serait plus de même après le séchage.

Pour effectuer le séchage des clichés, il faut les mettre dans une pièce bien sèche et bien aérée, à l'abri de la poussière. On fait dans le commerce des séchoirs à rainures destinés à cet usage; nous en déconseillons l'emploi parce que les rainures étant trop rapprochées le séchage est inégal. Nous nous contentons d'appuyer tous nos clichés contre un mur et à une certaine hauteur du sol.

Dans le cas où l'on aurait besoin de sécher rapidement un cliché on le plongera, une fois le lavage terminé, dans une cuvette contenant de l'alcool. Après un séjour de cinq minutes on l'essorera rapidement et l'on pourra ensuite le mettre sécher à une douce chaleur. Cette opération peut être faite en moins d'un quart d'heure et permet dans un cas urgent de tirer des épreuves peu de temps après l'exécution du négatif.

RENFORÇAGE ET BAI S SAGE DES CLICHÉS.

Renforçage et baissage des clichés. — Si l'on a bien suivi notre méthode de développement, on doit, dans tous les cas, obtenir un cliché irréprochable; mais il faut, bien entendu, une certaine expérience que l'on ne peut acquérir d'emblée : par suite, on peut se trouver en face de clichés incomplets. Si ce défaut porte sur le manque de détails, cela peut tenir à une insuffisance de pose ou à un développement trop peu poussé. Il faudra alors,

ou poser davantage, ou pousser plus le développement, pour obtenir les détails. On profitera de cet avertissement pour l'obtention des clichés subséquents, mais ceux qui sont déjà développés seront forcément incomplets.

En ce qui concerne l'intensité du négatif qui est insuffisante ou exagérée, il n'en est pas de même : il est en effet possible d'augmenter ou de diminuer cette intensité, le cliché une fois terminé.

Nous allons indiquer les procédés qui permettent soit de monter soit de baisser l'intensité du cliché : ce sont le renforçage et le baissage, mais en faisant remarquer qu'on ne doit les employer que le moins possible, que l'on peut y recourir en cas de nécessité absolue et non pas compter sur eux constamment. Avec la méthode de développement que nous avons donnée, on doit arriver dans tous les cas à obtenir le cliché aussi parfait qu'il peut être sans recourir à des opérations qui sont, la dernière ressource des débutants.

Renforçage. — On prépare un bain ainsi composé :

Eau.................................. iooogr

Bichlorure de mercure........... .... 7ogr

Après avoir mis le cliché à tremper dans l'eau pendant dix minutes, on le plonge dans le bain de bichlorure en ayant soin de l'agiter constamment. Peu à peu la couche blanchit; il faut prolonger l'action du bain d'autant plus que le cliché a besoin d'être monté. On le lave alors abondamment, puis on le met dans le bain suivant :

Eau................................. ioooïr

Ammoniaque........................ ioo§r

On agite vigoureusement et l'on voit immédiatement le cliché se foncer et reprendre une teinte noire.

On constate alors que l'intensité a considérablement augmenté, mais, en ce qui concerne les détails, il n'y a aucun gain appréciable. Ce procédé ne doit donc être employé que pour augmenter l'intensité générale du négatif.

On termine par un lavage abondant et l'on met à sécher.

Baissage. — On prépare les deux solutions suivantes :

A. Eau................................ iooo

Ferricyanure de potassium........... 100

B. Eau................................ iooo

Hyposulfite de soude................ 100

On mélange A et B par parties égales au moment de s'en servir et l'on y plonge le cliché. Celui-ci descend graduellement et d'une manière générale. Lorsqu'il est suffisamment baissé, on lave abondamment et l'on met sécher. Ce bain étant assez énergique, il peut être bon, suivant que le cliché a besoin d'être plus ou moins baissé, d'ajouter une quantité d'eau plus ou moins grande.

Dès que ce bain, qui a une teinte jaune verdâtre au moment de sa préparation, devient bleu clair, il faut le jeter et le remplacer par un neuf.

chapitre iii.

PHOTOGRAPHIE PENDANT LA VIE.

PHOTOGRAPHIE POSÉE.

Nous venons de décrire l'installation d'un laboratoire de Photographie médicale, le matériel nécessaire et les diverses manipulations qu'il faudra exécuter pour obtenir le négatif; il s'agit maintenant d'étudier les différentes hypothèses qui vont se présenter dans la pratique, d'indiquer la conduite à tenir dans chaque cas particulier et de mettre en un mot le médecin à même de résoudre tous les problèmes qui se présenteront à lui.

Il s'agit, en effet, de garder la trace durable de toutes les manifestations pathologiques, quelles qu'elles soient, qui peuvent modifier la forme extérieure du malade et lui imprimer un caractère particulier, une attitude, un faciès spécial. Ces documents impartiaux et rapidement recueillis donnent aux observations médicales une valeur considérable en ce sens qu'ils mettent sous les yeux de tous l'image fidèle du sujet étudié.

L'étude du nu pathologique trouvera donc dans la Photographie un auxiliaire des plus précieux; mais pour en tirer tout le parti voulu il faudrait, comme l'a si bien fait remarquer M. le professeur Charcot, connaître également bien le nu normal. Or on doit bien l'avouer, si les médecins ne négligent en rien l'étude de l'Ana-tomie ils délaissent quelque peu celle du nu normal. 11 existe cependant entre l'anatomie morphologique et la pathologie des relations intimes que le médecin et le chirurgien doivent connaître sous peine de commettre de graves erreurs. La Photographie interviendra donc encore pour garder l'image de la forme soit dans le repos soit dans le mouvement. Dans le premier cas, bien qu'il

y ait repos, il est des attitudes que le modèle ne saurait garder un temps suffisant pour qu'un artiste ait le temps de les reproduire sur papier; les muscles se fatiguent et la forme vraie se modifie insensiblement. Dans le deuxième, les procédés instantanés permettent seuls de saisir des modifications rapides qui échappent à notre œil.

Ces études de grand intérêt non seulement pour le médecin mais encore pour l'artiste, ont été faites magistralement par M. P. Richer, dans son magnifique travail sur Y Anatomie artistique ({). Dans cet Ouvrage, l'auteur décrit, avec le talent qu'on lui connaît, les formes extérieures du corps humain au repos et dans les principaux mouvements, et ses explications, accompagnées de 110 planches, forment l'enseignement le plus complet qui ait été donné sur la matière. Dans toutes les hypothèses où la fatigue pouvait se produire chez le modèle et entraîner une modification quelconque de la forme vraie, la Photographie est intervenue pour fixer la forme exacte dans l'attitude ou le mouvement observé. Ce qui augmente encore la valeur de ces documents, c'est l'explication anatomique et physiologique qui en est donnée par l'auteur grâce à des dessins qui se superposent exactement sur l'épreuve morphologique et qui indiquent les causes qui ont amené les modifications de la forme extérieure de l'individu.

Des travaux analogues ont été depuis repris par M, le professeur Marey. Grâce à la méthode photochronographique, il a pu faire facilement l'étude de certains mouvements rapides ; c'est une belle application de cette méthode qui a été si perfectionnée par notre éminent collègue et permet l'analyse rigoureuse du mouvement.

Nous voyons donc que, soit qu'il s'agisse d'anatomie morphologique ou d'anatomie pathologique, la Photographie sera de la plus grande utilité. Pour ce qui concerne l'étude du nu normal, la question ayant été traitée complètement par M. Richer, nous renvoyons le lecteur à l'étude de ce bel Ouvrage; l'étude du nu pathologique va, au contraire, faire l'objet du présent Chapitre.

(l) Paul Richer, Anatomie artistique. Description des formes extérieures du corps humain au repos et dans les principaux mouvements. E. Pion et C", Paris, 1890.

Les modifications imprimées par la maladie peuvent affecter l'ensemble du corps ou, au contraire, être limitées à tel ou tel membre ou même localisées à une partie seulement de celui-ci. Les conditions dans lesquelles il faudra opérer dans chacune de ces hypothèses seront fort variables, aussi devons-nous procéder à une étude systématique.

Nous examinerons d'abord les hypothèses dans lesquelles le malade est au repos, qu'il s'agisse de l'ensemble du corps ou d'une partie seulement de celui-ci, puis celles dans lesquelles le mouvement du sujet nécessite des dispositifs spéciaux.

1. Reproduction du malade en entier. — C'est l'hypothèse qui se présentera le plus fréquemment, non seulement parce que la modification à reproduire peut affecter le corps tout entier, mais encore parce qu'il est intéressant, dans le cas même d'une modification partielle, de bien faire voir le contraste qui existe avec la partie restée normale.

On emploiera un fond gris foncé sur lequel le nu se détache fort bien. L'objectif tout indiqué dans l'espèce est le rectilinéaire ; nous savons en effet que c'est celui qui permet de travailler le plus rapidement possible, tout en donnant des images absolument exemptes de déformation. En principe, il ne faudra le diaphragmer que suffisamment pour avoir la netteté nécessaire, sous peine d'être dans l'obligation d'allonger la pose. Il ne faut pas oublier, en effet, que nous avons affaire à des malades et, bien que nous les supposions au repos, nous ne pouvons exiger d'eux la même immobilité que s'ils étaient bien portants. On pourrait, il est vrai, assurer leur position au moyen de l'appui-tête, comme on le fait fréquemment dans la pratique photographique, mais ce moyen nous paraît mauvais a priori. Il est indispensable de saisir le malade dans son attitude vraie et il ne faut pas l'immobiliser dans une position qui peut ne pas être naturelle.

D'autre part, le corps humain présentant une certaine épaisseur, il est évident que nous aurons d'autant plus de difficultés à obtenir la netteté des divers plans que nous opérerons de plus près.

Dans ce cas particulier, il faudra, comme nous l'avons dit dans notre première Partie, diaphragmer d'autant plus que l'on se rap

prochera du modèle. Les durées de pose croissant comme le carré des diaphragmes, il s'ensuit que plus on voudra opérer à grande échelle, plus il faudra diaphragmer et plus il faudra poser.

On ne pourra donc obtenir d'images un peu grandes du malade que s'il peut garder l'immobilité absolue pendant le temps nécessaire. La conduite à tenir sera donc indiquée par l'état du malade. S'il est tranquille, on pourra facilement faire de grandes épreuves; si, au contraire, sa stabilité est médiocre, il faudra s'éloigner en conséquence de façon à pouvoir supprimer tout diaphragme et opérer par suite avec la pose la plus courte possible.

Dans ce dernier cas, si le document obtenu est trop petit, on procédera ultérieurement à un agrandissement comme nous l'indiquerons plus loin.

L'éclairage du sujet devra être fait de façon à éviter les oppositions trop grandes entre les lumières et les ombres. Il ne faut pas cependant trop atténuer celles-ci, ce qui donnerait une reproduction plate et sans reliefs. Dans un atelier vitré organisé comme celui que nous avons décrit, on obtiendra de bons résultats; il suffira, si l'on constate trop d'oppositions, ou de diminuer la lumière du côté de l'éclairage en faisant coulisser un des rideau* de l'atelier ou bien en se servant d'un écran blanc destiné à envoyei un peu de lumière réfléchie du côté de l'ombre.

Nous préférons cependant le deuxième procédé, car il a l'avantage de ne rien supprimer de la lumière et de permettre, par suite, les poses les plus courtes, ce que l'on doit chercher avant tout en Photographie médicale.

Il est cependant des cas particuliers dans lesquels des contrastes un peu violents subsisteront par suite de la position du malade ; on se servira alors avec avantage, si l'on peut le faire, de la méthode de la surexposition. On sait, en effet, que l'action de la lumière sur la préparation sensible n'est proportionnelle aux durées d'exposition que jusqu'à une certaine limite et qu'au delà de cette limite les différences de valeur entre les parties les plus claires et les plus sombres s'effacent de plus en plus au fur et à mesure que la pose augmente. D'autre part, par le raisonnement inverse, on voit que les oppositions du modèle seront d'autant plus rendues que la pose aura été plus courte. La connaissance de ces faits et leur applica

tion judicieuse sera de la plus grande utilité dans certains cas Ainsi, si les contrastes du modèle sont trop accentués, on lesatté nuera en augmentant la pose. Au contraire, le sujet manque-t-i d'oppositions, on obtiendra d'excellents résultats avec des poses ur peu courtes.

Le développement dans ces diverses hypothèses sera conduil différemment. Nous renvoyons à ce sujet à ce que nous avon; dit dans le Chapitre II.

Il sera bon autant que possible de prendre tous les malades è la même échelle. On arrivera facilement à ce résultat en marquanl sur le plancher les emplacements respectifs du malade et de l'appareil.

Suivant les cas, on prendra des épreuves de face, de dos, d( trois quarts, de profil, debout ou assis. C'est au médecin qu'il appartiendra d'indiquer les positions dans lesquelles le sujet devra être reproduit.

On obtiendra ainsi limage fidèle d'un malade présentant une anomalie quelconque. Voici, par exemple, un sujet atteint de déviation de la colonne vertébrale dans un cas de syringomyélie. Il est indiscutable qu'un simple coup d'œil jeté sur cette épreuve en dit plus long que la description que l'on pourrait en faire {Pli}.

On pourra reproduire ainsi les paralysies, les atrophies, les contractures et en un mot toutes les déformations pathologiques ou modifications quelconques intéressant la forme extérieure.

Mais ce n'est pas encore tout. 11 peut exister des états pathologiques qui impriment au malade des attitudes spéciales, sans qu'il y ait cependant modification de la forme. La connaissance de ces attitudes absolument typiques est d'un haut intérêt pour le médecin et il est utile d'en garder la reproduction fidèle. Voici, par exemple, l'attitude d'un paralytique agitant dans la station debout; l'inclinaison de la tête et du tronc en avant est tout à fait caractéristique ; la déformation des mains, l'extension des membres inférieurs sont également à noter (fig. i5).

On retrouve ces mêmes caractères chez une autre malade du même genre qui est assise et dont la fig. 16 reproduit l'attitude habituelle. Cette malade, que M. Charcot a montrée bien des fois

Pl. I.

Déviation de la colonne vertébrale dans un cas de syringomyélie.

dans ses Conférences cliniques, passe la plus grande partie de ses

Fig. il.

journées dans son fauteuil, immobile, courbée en avant, les mains

ramenées sur les cuisses, les deux pieds relevés sur les barreaux d'une chaise, tournant vers ceux qui passent des regards obliques

pour suppléer au défaut de mobilité de sa tête véritablement soudée entre ses deux épaules.

Comme le dit fort bien M. P. Richer, ceux qui l'ont vue à ce moment n'oublieront pas ce tableau où les signes plastiques de la maladie se montrent si accentués.

2. Reproduction de la tête. — Dans les affections localisées à cette partie de l'individu, il sera nécessaire d'opérer à moindre

Fig. 16.

distance que pour le corps entier afin d'avoir une dimension d'épreuve suffisante.

La tête pouvant être considérée comme renfermant trois plans principaux, l'un passant devant le nez, l'autre par les yeux et le dernier par les oreilles, il est évident que les difficultés que l'on rencontre pour reproduire, avec la netteté suffisante, le corps humain à grande échelle, seront ici encore plus grandes.

Ce sera toujours le malade qui dictera la conduite à suivre.

Plus il sera tranquille, plus on pourra faire grand, mais on devra diaphragmer suffisamment pour obtenir la netteté nécessaire, puis poser le temps voulu. Au contraire, la stabilité est-elle douteuse, il faudra réduire le format et diaphragmer le moins possible pour obtenir l'épreuve assez rapidement.

D'ailleurs, quoi qu'il en soit, l'obtention d'une tête de grand format constituera toujours une réelle difficulté, car plus l'image est grande, plus l'immobilité doit être parfaite.

De plus, il n'y a pas d'intérêt à obtenir des têtes de format exagéré. Sur une tête de om,o5, on perçoit facilement tous les détails et l'on peut procéder à des agrandissements considérables, s'il est nécessaire. Il ne faut pas oublier, d'autre part, qu'au ^oint de vue de la rectitude de l'image on ne doit pas chercher à obtenir des épreuves directes trop grandes. Nous avons considéré la tête comme constituée par trois plans : celui du nez, celui des yeux et celui des oreilles. Or on sait que l'objectif photographique ne donne des images rigoureuses que d'objets situés sensiblement dans un même plan : plus nous nous éloignerons de notre modèle et plus nous nous rapprocherons de la reproduction en quelque sorte mathématique-: au contraire, plus nous nous rapprocherons, plus les échelles de réduction seront différentes. Si la mise au point est faite sur le plan passant par les yeux, les oreilles paraîtront plus petites et le nez plus fort. Si elle est effectuée sur le plan antérieur, les yeux et les oreilles seront reproduits à plus petite échelle; au contraire, les yeux et le nez paraîtront plus forts si l'on met au point sur le plan passant par les oreilles.

Notre conclusion est qu'il ne faudra jamais, à moins de cas particulier, chercher à obtenir des têtes à trop grande échelle : on

multiplie d'une part les difficultés d'exécution et, de l'autre, on court risque d'obtenir des images incorrectes.

On opérera avec une belle lumière de façon à supprimer complètement l'usage de l'appui-tête. Il est, en effet, très important de laisser à la tête son attitude vraie. On peut se convaincre aisément de cette nécessité en jetant un coup d'ceil sur la fig. 17. Elle représente la tête d'un hystérique mâle présentant un gonflement du cou permanent. Tout le haut du corps est porté en avant. Ce gonflement du cou, qui est un phénomène vulgaire de

la grande hystérie, est ordinairement passager, mais, chez le sujet en question, il a persisté pendant de longs mois. La fig. 18 montre le même malade vu de face. Ici, il a été placé sur un oreiller, de façon à bien mettre en évidence l'anomalie qu'il présentait. Dans la fig. 19 nous voyons un cas remarquable d'une maladie exceptionnelle qui ne semble pas jusqu'à présent avoir attiré l'attention dçs dermatologïstes. MM. Soucques et J.-B. Charcot, qui l'ont étudiée, lui ont donné la dénomination significative de géro-morphlsme. La malade, dont la peau est entièrement plissée et ridée, paraît au moins 70 ans : elle n'en a cependant que 21. L'affection avait débuté de bonne heure, ainsi que l'on peut s'en rendre compte sur une autre photographie du même sujet faite dix ans auparavant et qui est jointe à l'observation.

Fig. 17.

Fig. 18.

Ici nous devons ouvrir une parenthèse pour signaler l'utilité qu'il y a pour le médecin à recueillir, si possible, les photographies antérieures du malade qu'il examine : il récoltera ainsi des documents authentiques sur les modifications qui auront pu

Fig. 19.

se produire, documents qui lui serviront même quelquefois à assigner la date probable du début de l'affection. On pourra ainsi suivre avec facilité l'évolution pathologique. D'autre part, et par suite des mêmes raisons, il sera bon d'exécuter de nouvelles épreuves à des intervalles plus ou moins rapprochés, suivant qu'il sera nécessaire. La juxtaposition de ces épreuves constituera un enseignement de premier ordre.

En dehors des modifications particulières que l'on peut rencontrer dans ce genre d'études, on trouve chez certains malades des analogies, des ressemblances telles qu'elles constituent en quelque sorte le sceau de l'afïection et leur donnent une physionomie tout à fait caractéristique. Si ces ressemblances ne sauraient échapper à un médecin exercé, il n'en est pas moins évident qu'il sera quelquefois fort difficile de faire ces rapprochements si l'on n'a pas les divers sujets sous les yeux en même temps. Au contraire, les épreuves photographiques permettront de recueillir de toutes parts les documents voulus et d'en faire l'analyse méthodique.

Bien des modifications systématiques de la physionomie n'ont par elles-mêmes rien d'anormal et ce n'est que par leur répétition constante, chez des sujets atteints de la même affection, qu'elles prennent une importance particulière et qu'elles peuvent constituer ce qu'on appelle le faciès pathologique. "De même qu'on a l'habitude de recueillir le plus grand nombre possible d'observations sur une maladie quelconque, de même il serait utile de réunir le plus grand nombre de documents photographiques : telle modification de la physionomie qui, dans une observation isolée, pouvait passer inaperçue et n'avoir aucune valeur spéciale, prendra, au contraire, une importance particulière si on la retrouve constamment dans des cas identiques.

Un individu, absolument sain d'ailleurs, peut avoir naturellement un nez effilé et des lèvres rétrécies, mais si ce caractère se retrouve invariablement chez une série de malades, on pourra évidemment déterminer le faciès produit chez ces malades par l'affection étudiée. C'est ce qu'on a trouvé dans la sclérodermie, qui par un rétrécissement général de la peau produit nécessairement un amincissement du nez et des lèvres, celles-ci laissant les dents plus ou moins découvertes (Pl. II). Ce rétrécissement de la peau est général et affecte aussi les mains et les pieds, qui ont également un aspect tout à fait caractéristique.

Dans le goitre exophtalmique, nous constatons un développement considérable des globes oculaires qui donnent à la physionomie un aspect tout particulier. Un goitre plus ou moins développé est assez souvent concomitant, d'où le nom donné à cette affection typique (Pl. II).

Pl. II.

Faciès dans la sclérodermie.

Faciès dans le goitre exophtalmique.

Pl. III.

Faciès dans l'acromégalie

Signalons encore l'aspect de la physionomie dans la paralysie agitante qui est caractérisée par l'immobilité des traits et la fixité du regard, lent à se déplacer. De plus, au point de vue de l'expression, on constate que toute la partie du visage située en dessous de la ligne des yeux, se fait remarquer par une placidité et une impassibilité caractérisées par l'absence de rides. Comme le dit

Fig. 20.

Faciès dans la paralysie agitante.

si bien le Dr Richer, c'est un masque vide dont la vie semble absente, ni douleur ni plaisir, absence de toute expression. Au contraire au front les rides se creusent, les sourcils s'élèvent; chez ce malade les rides exclusivement transversales concourent à l'expression de l'étonnement et c'est ici le muscle frontal qui est en jeu uniquement, comme l'a démontré Duchenne (de Boulogne).

Le contraste sur une même physionomie, de ce front mouvementé et de ce bas de figure impassible, donne, avec l'aspect particulier des yeux fixes et immobiles, un masque étrange et saisissant qui est absolument typique.

Nous signalerons également une autre maladie qui a été particulièrement étudiée en France par le Dr P. Marie et à laquelle il a donné le nom à"1 acromégalie. Dans cette affection on trouve

une hypertrophie considérable de la face et des extrémités. En ce qui concerne la face, l'hypertrophie semble plus particulièrement localisée au nez et au maxillaire inférieur.

Le faciès de l'acromégalique est tellement typique que plusieurs des élèves de M. Charcot et nous-même avons pu reconnaître à première vue et en passant par hasard à côté d'eux des malades de cette catégorie. Du reste, ces types restent gravés dans la mémoire et pour le médecin exercé ils le mettront très souvent sur la bonne voie : non pas que nous ayons la prétention de faire du diagnostic photographique, mais il est certain, comme nous le disions au début de cet Ouvrage, que la meilleure des descriptions ne saurait, dans certains cas, remplacer une bonne épreuve photographique.

Nous parlions à l'instant d'un acromégalique reconnu par nous dans la rue et d'un simple coup d'œil; l'examen ultérieur a confirmé pleinement ce diagnostic au vol, et c'est alors que, signalant ce malade intéressant à deux médecins de valeur qui le connaissaient et l'avaient même soigné pour une opération chirurgicale, ceux-ci nous avouèrent que, malgré la connaissance qu'ils avaient des descriptions de l'acromégalie, ils n'avaient pas soupçonné un seul instant la nature de l'affection.

Ceci montre bien qu'une observation, si bien faite qu'elle soit, ne saurait remplacer le document photographique. Cet individu, qui présentait cependant des anomalies caractéristiques qui avaient d'ailleurs frappé les médecins qui l'avaient soigné, n'avait pas été reconnu comme acromégalique, alors qu'à simple vue le diagnostic pouvait être posé par une personne ayant déjà vu des malades de cette catégorie ou leurs photographies.

Nous donnons dans la Pl. 111 six épreuves d'acromégaliques ; le n° 6 est précisément le malade dont nous venons de parler. On constate chez tous, bien qu'à des degrés très variables, car ils n'étaient pas tous à la même période, les caractères spéciaux qui constituent le faciès acromégalique, savoir, l'augmentation considérable du nez et le développement très notable du maxillaire inférieur. Cette hypertrophie est encore plus marquée sur les épreuves des mêmes malades vus de profil.

L'étude des faciès pathologiques a été poussée très loin par

l'École de la Salpêtrière et a contribué certainement beaucoup à faciliter le diagnostic dans certaines maladies nerveuses. A côté des faciès dont nous venons déparier, il nous faudrait citer encore ceux du mjxœdème, de la myopathie, de la maladie de Fried-reich, etc.

Il sera toujours intéressant, dans ces divers travaux, de se procurer des photographies antérieures : on aura ainsi la preuve que les anomalies existantes sont bien la conséquence de la maladie et qu'elles n'existaient pas auparavant.

En réunissant un certain nombre de documents de ce genre, il serait très possible de réaliser une conception de Spencer, qui a été mise en pratique par Galton et Balut, et de créer par superposition des types composites dans lesquels, toutes les particularités individuelles s'effaçant, seuls les caractères communs persisteraient et détermineraient ainsi le faciès propre à telle ou telle affection.

La réalisation de cette conception présente en pratique certaines difficultés et, sans chercher à les résoudre, il nous paraît certain que la simple réunion d'épreuves juxtaposées constitue déjà un enseignement de la plus haute valeur.

3. Reproduction des détails de la face. — Si nous poussons l'analyse plus loin, il pourra être nécessaire de reproduire isolément telle ou telle partie de la physionomie seule affectée. Il faudra rapprocher encore davantage l'appareil du modèle afin d'obtenir des documents suffisamment grands pour être étudiés avec fruit.

Dans les hypothèses précédentes, soit pour les corps, soit pour les têtes, nous avons obtenu des images assez réduites par rapport à l'original; de telles réductions ne sauraient être employées pour le nez, la bouche, les yeux ou les oreilles. Pour obtenir des épreuves d'une taille suffisante il faudra, comme nous l'avons dit, nous rapprocher beaucoup du modèle. Dans certains même, pour les yeux par exemple, il pourra être nécessaire d'avoir une image de grandeur égale. Le tirage de la chambre se trouvera considérablement allongé, car on sait que, pour obtenir une reproduction à même taille, il faut un tirage égal à deux fois la longueur focale principale de l'objectif employé. Par ce seul fait, la pose se trouve qua

druplée; de plus, à cause de la faible distance à laquelle on opère, il faudra une immobilité rigoureuse du sujet pendant Je temps reconnu nécessaire, temps qui dépasse de beaucoup le temps de pose habituel. D'autre part, et pour ne pas occasionner de nouvelles pertes de lumière, il faudra diaphragmer le moins possible. Il est vrai de dire que, ne prenant qu'une partie de la figure isolément, on peut sans crainte sacrifier la netteté des autres parties de l'image.

Il n'a pas été fait jusqu'à présent, par la Photographie, d'études de nez et d'oreilles; il peut y avoir là, cependant, des recherches

originales à faire, surtout en ce qui concerne l'oreille. Les yeux seront reproduits avec succès lorsqu'il s'agira déchûtes delà paupière, de paralysie oculaire, de strabisme, etc. Avec les plaques actuelles et un malade suffisamment tranquille, on peut encore facilement obtenir des épreuves satisfaisantes en grandeur égale.

L'étude de la langue pourra être faite également avec succès dans certaines hypothèses; il faudra opérer avec belle lumière et le plus rapidement possible, en tenant compte de la couleur rouge antiphotogénique de cet organe.

Si, dans certains cas, on doit prendre la langue isolée, il faudra au contraire, dans d'autres, conserver la face tout entière, qui

Fig. 21.

Fig. 22.

peut revêtir un caractère particulier, comme on le voit, par exemple, dans le spasme glosso-labié hystérique (Jîg- 21 et 22). Le spasme est localisé à une moitié de la face. Il envahit l'œil qui se trouve clos en partie ou complètement, ainsi que le nez fortement dévié et dont la narine du même côté est tirée par le haut. Il comprend également la partie inférieure du visage, et la commissure labiale ainsi que le menton se trouvent violemment tirés sur le côté. Enfin la langue sortie de la bouche est déviée, la pointe dirigée du même côté que le spasme et avec une exagération qui constitue par elle-même un des traits les plus caractéristiques de l'affection.

Reproduction des mains. — Ces extrémités étant fréquemment atteintes dans les cas de paralysie, d'atrophie, de contractures, de déformations quelconques, on peut donc être amené souvent à prendre des épreuves isolées à grande échelle. Nous devons dire de suite qu'il est très rare de voir de bonnes épreuves de mains, car on ne sait comment les placer commodément à la fois pour le malade et pour la reproduction. Afin d'éviter ces difficultés, nous avons fait construire à la Salpêtrière un appareil qui nous est de la plus grande utilité. C'est un plateau que l'on peut incliner plus ou moins. Le malade se place derrière et il n'a qu'à poser ses mains sur le support, où il peut les maintenir facilement sans gêne ni fatigue. Les deux faces de la main peuvent être ainsi reproduites. Pour avoir une image non déformée, il sera nécessaire, dans ce cas particulier, de donner à la chambre noire une inclinaison égale à celle du plateau (voir fig. 23) (*).

Nous avons vu à la Préfecture de Police, dans le beau service de M. Bertillon, un appareil basé sur le même principe et qui est employé d'une manière courante pour l'étude des mains professionnelles. Nous en reparlerons plus loin.

Pour avoir des mains d'une certaine taille, il faudra rapprocher l'appareil, et c'est un des cas dans lesquels on aura besoin d'un long tirage de chambre.

(') Notre excellent ami M. le colonel Duhousset a bien voulu exécuter pour nos lecteurs un croquis du dispositif que nous avons imaginé. Nous lui adressons ici nos sincères remerciements.

A celte distance, la main ne pourra plus être considérée comme un plan unique et il sera nécessaire de diaphragmer d'autant plus fortement que l'on sera plus près, la profondeur de fojer diminuant, en effet, d'autant plus que l'on se rapproche du modèle. Il faudra donc poser en général plus que d'habitude. Dans la plupart des

Fig. 23.

cas, ce sera facile, car la main est maintenue; mais si celle-ci n'est pas stable, comme dans les tremblements, il n'y aura pas à hésiter: il faudra faire la reproduction à échelle beaucoup plus petite, en diaphragmant le moins possible et avec un bel éclairage. De cette manière, on pourra effectuer des poses très courtes et obtenir le résultat cherché.

En général, il y aura avantage, sauf impossibilité, à faire les

PI. IV.

Spécimen de mains à grande échelle.

épreuves de mains de même taille, de façon à faciliter les comparaisons. Si l'on possède un appareil vertical, il pourra être employé utilement pour la reproduction des mains.

Nous donnons (Pl. IV) un magnifique spécimen des résultats

Fig. 24.

que l'on peut obtenir dans la photographie des mains : à cette grandeur d'exécution on perçoit tous les plus petits détails. Il s'agit dans l'espèce d'une paralysie et d'une atrophie de tous les muscles innervés par le cubital. L'éminence hypothénar et les interosseux de la main gauche sont très atrophiés. Les deux derniers

doigts de la main sont rétractés en flexion et la rétraction est pins prononcée sur le petit doigt.

Il sera toujours bon, lorsqu'une main présentera des différences de volume, de photographier simultanément une main normale. La comparaison sera plus facile. C'est ce qu'on peut voirdans la fig. 24, qui montre des mains d'acromégalique à côté de mains normales.

Dans le domaine de l'hystérie, on aura fréquemment à reproduire des contractures de la main, soit qu'il s'agisse de contractures traumatiques ou de contractures artificielles, provoquées dans l'étude des phénomènes d'hyperexcitabilité neuro-musculaire.

Pieds. — On aura souvent à reproduire les pieds de malade,

Fig. 25.

soit qu'il s'agisse encore de contractures hystériques (fg. 25) ou de phénomènes quelconques intéressant ces organes : il faudra

Pl. V.

Dispositif pour la photographie des pieds.

Maladies de la peau. — On sait que les maladies de la peau sont très nombreuses; leur étude par la photographie peut donc présenter un intérêt spécial.

Les difficultés que l'on rencontrera fréquemment tiendront à l'échelle des épreuves cpii devra être souvent assez grande et aux colorations antiphotogéniques des tissus superficiels altérés.

les prendre le plus souvent de face ou de profil. On n'arrivera à de bons résultats qu'en élevant le malade sur une table, afin que les pieds soient à hauteur de l'appareil (Pl. V). On placera derrière eux un voile sombre, de façon à les bien faire détacher.

Pour la détermination de la durée de la pose, nous suivrons les mêmes règles que celles indiquées précédemment pour les mains, mais en faisant la remarque que, la plupart du temps, l'immobilité du malade sera plus grande, le pied supportant soit le poids de la jambe, soit celui du corps tout entier. Il pourra être quelquefois nécessaire de photographier la plante du pied. Dans ce cas, on mettra le malade assis ou couché sur une table à hauteur de l'appareil. Un voile noir placé derrière les pieds servira de fond. Nous donnons deux reproductions de pieds faites dans ces conditions (fig. 26).

Fig. 26.

Pieds d'acromégalique.

Durillon du pied gauche chez un épileptique.

Il faudra opérer, en général, d'assez près et diaphragmer quelque peu pour avoir une netteté parfaite. Le grand écueil viendra des colorations, soit rouges, soit jaunes, que l'on rencontre le plus fréquemment dans ce genre de maladies. Il sera nécessaire, pour avoir des détails suffisants, de poser plus longtemps que d'habitude; dans certains cas spéciaux, on devra même recourir aux plaques plus spécialement faites pour reproduire les jaunes et les rouges.

Rien ne dit même que cet inactinisme de certains éléments morbides ne pourrait servir, quelquefois, à mettre en lumière des éruptions non encore déclarées.

Vogel rapporte dans un de ses ouvrages Je cas d'une dame, qui venant se faire photographier, reçut un portrait constellé de points noirs. Trois jours après elle mourait de la petite vérole. L'authenticité de cette observation est peut-être discutable, mais le fait en lui-même n'est pas improbable.

Il est absolument certain que l'objectif photographique peut révéler des choses que l'œil le plus exercé ne saurait percevoir. Que l'on trace un mot sur une feuille de papier avec du sulfate de quinine et l'on obtiendra une image très satisfaisante, quand l'œil ne pouvait rien discerner. La reproduction des vieux palimpsestes a pu être faite par la photographie avec grande précision, parce que l'ancienne encre, quoique effacée, avait des propriétés photogéniques différentes de celle du papyrus.

A la Salpêtrière, nous avons observé un fait qui mérite d'être rapporté et qui montre bien les propriétés spéciales de la plaque photographique dans certains cas.

Notre maître M. Charcot voulant prouver que, chez les hystériques, le point qui provoque le réveil dans le sommeil hypnotique est bien l'ovaire, avait fait l'expérience suivante : Une hystérique en état de grossesse était plongée dans le sommeil hypnotique; on recherchait alors le point de l'abdomen sur lequel la pression provoquait le réveil et on le marquait avec une goutte de teinture d'iode. Si les prévisions de M. Charcot étaient justes, comme les ovaires remontent constamment pendant la grossesse, on devait constater sur les clichés faits tous les huit jours l'ascension des points en question. C'est ce que la série d'épreuves

obtenues montre d'une manière évidente. Sans insister davantage sur l'élégance de cette démonstration qui a tranché la discussion d'une façon pércmploire, signalons le fait que nous avons consigné. Un jour, sur la plaque photographique, nous avons trouvé deux points au lieu d'un seul.

Le second était l'image de la tache d'iode faite huit jours auparavant et qui, absolument invisible sur le sujet comme nous l'avons vérifié et fait constater par les personnes présentes, avait presque autant d'intensité que la plus récente. La conclusion est, que lorsque des parties seront colorées différemment du tissu normal, elles peuvent être révélées par la plaque avant même que l'œil puisse percevoir ces différences. H y a donc de ce côté des études nouvelles à faire dans les services consacrés aux maladies de la peau.

Nous rappellerons, en terminant, le beau travail de Hardy et Montméja que nous avons déjà cité au début de ce livre.

Dans cet Ouvrage, qui a précisément pour objet la représentation d'un certain nombre d'affections de la peau, les auteurs ont eu l'idée de colorer les parties atteintes, de façon à donner la représentation aussi fidèle que possible de la réalité. Les résultats sont des plus intéressants; il est à regretter seulement qu'il n'ait pas été fait usage de procédés inaltérables. Le tirage a été effectué aux sels d'argent et déjà l'altération des épreuves est manifeste. Si l'on devait entreprendre des recherches analogues, il serait important, à notre avis, de choisir des procédés plus stables que celui au chlorure d'argent. Pour des tirages peu nombreux, le procédé au platine sera le plus à recommander. S'il s'agit d'un tirage plus considérable, la photocollographie pourra être employée avec avantage. Il sera très facile, dans l'un ou l'autre procédé, de donner les colorations voulues. Ce travail, bien entendu, devra se faire sous la direction du médecin, qui devra n'accepter que les épreuves portant les nuances reconnues par lui comme rigoureusement exactes.

PHOTOGRAPHIE INSTANTANÉE.

Nous venons de parcourir toute la série des opérations que l'on devra faire pour obtenir de bonnes épreuves d'un malade, mais

nous avons supposé un malade tranquille, capable de poser convenablement au moins pendant quelques instants.

Mais il n'en sera pas toujours ainsi. En effet, par suite de son affection, le malade peut n'être pas susceptible de garder l'immobilité voulue, ou bien encore son état d'infériorité cérébrale ou physique empêche d'exiger de lui ce que l'on demanderait à un sujet moins gravement atteint.

Pour certains malades même, les idiots, les dégénérés, les fous par exemple, la photographie instantanée devra être la règle.

Pour réussir convenablement ces épreuves, il sera indispensable d'opérer avec une très belle lumière. Si le mouvement n'est pas rapide, qu'il s'agisse par exemple de saisir un malade sans le prévenir, on pourra opérer à l'atelier dans la belle saison, à condition de ne pas trop diaphragmer et de ne prendre qu'une vitesse d'obturateur de ~ ou -pg de seconde environ; s'il est nécessaire d'opérer plus rapidement, il faudra travailler en plein air et dans bien des cas au soleil.

Pour éviter la dureté donnée par la lumière solaire directe, on aura avantage à ne pas trop diaphragmer et à développer le cliché rapidement et avec excès de carbonate, le tout pour obtenir de la douceur.

C'est dans la série des maladies du système nerveux que nous trouvons les plus grandes variétés, les tremblements de diverses natures, la chorée, l'athélhose, les attaques d'hystérie et d'épi-lepsie, etc.

Examinons successivement ces divers cas. Les tremblements peuvent être généraux ou localisés à tel ou tel membre. Quel secours la Photographie peut-elle apporter dans l'espèce et comment une épreuve unique peut-elle donner une idée d'un étal mobile par excellence?

Le problème est intéressant. Il sera toujours possible, au moyen d'une épreuve instantanée, de saisir le malade et de l'immobiliser en quelque sorte. Mais cette épreuve prise au hasard ne représentera qu'une phase du mouvement, phase qui peut même ne pas être perçue par notre œil à cause de sa rapidité. Nous obtiendrons évidemment un document, mais nous ne pouvons admettre que cette épreuve unique puisse nous donner l'impression perçue par notre

œil. Celui-ci voit, en effet, une série non interrompue de mouvements très l'approchés, ce qui constitue en somme la sensation du mouvement et non pas tel ou tel de ces mouvements dissocié en quelque sorte ou pris au hasard.

Prenons dans un autre ordre d'idées un exemple qui sera saisi par tous.

Une voiture passe devant nous à grande allure : dans ces conditions notre œil n'aperçoit pas les rayons des roues, mais il a la sensation d'une vitesse considérable. Vient-on à photographier cette voiture; on obtiendra, si l'on emploie une vitesse d'obturateur suffisante, l'image des roues avec la plus grande netteté. On pourra même en compter les rayons. Dire que cette épreuve, si intéressante qu'elle soit, puisse représenter le mouvement en question, c'est là une erreur absolue, et cet exemple montre bien, à notre avis, la différence qu'il y a entre les séries d'images reçues successivement par l'œil et l'épreuve unique obtenue photographi-quement.

Lorsqu'il s'agira de malades, ce sera la même chose : l'épreuve unique ne pourra donner une idée suffisante de la réalité; mais seulement des documents sur des mouvements qui s'exécutent avec très grande rapidité et par cela même échappent à l'œil qui voit une succession d'images, mais n'est pas apte à en distraire isolément telle ou telle.

C'est évidemment quelque chose, mais ce n'est pas suffisant; on aura donc avantage, en ce qui concerne ces études spéciales, à se servir des méthodes graphiques d'enregistrement ou des méthodes spéciales dans lesquelles la Photographie donnera une succession d'images reproduisant toutes les phases d'un mouvement.

Pour obtenir la représentation d'un mouvement quelconque, c'est donc une erreur de vouloir chercher à l'obtenir au moyen d'une seule épreuve, à moins d'user de l'artifice suivant que nous croyons être le premier à avoir employé.

Étant donné qu'une épreuve instantanée rapide donnera une phase quelconque du mouvement observé, phase qui n'est peut-être pas d'ailleurs perçue par l'œil, qu'arrivera-t-il si nous employons une vitesse d'obturation plus lente, de façon à ne pas immobiliser notre malade dans une attitude quelconque?

Fig. 27.

qui peut être non perçue par notre œil (Jîg. 27,1), mais nous serons incapables de dire si tel ou tel membre était en mouvement. Aucontraire, posons un temps pluslong, de seconde par exemple. Le corps sera rigoureusement net, mais les membres affectés seront flous et ceci d'autant plus que le mouvement aura été plus rapide. C'est ce que montrent très bien les dessins 2 et 3 de la Jîg. 27 (' ). Cette manière d'opérer peut conduire évidemment à des résultats

(') M. Martin a bien voulu exécuter ces croquis d'après nos photographies originales. Nous lui adressons à ce sujet tous nos remerciements.

Voici, par exemple, une malade atteinte de chorée rythmée (Jîg- 27); elle exécute une série de mouvements combinés du corps et des membres, mouvements qui se reproduisent à intervalles réglés, mais n'affectent pas la même intensité au même moment et pour chacun des membres. Si nous prenons de cette malade une épreuve rapide, nous la figerons dans une attitude ou une autre

Fig. 28.

Tout ce que nous venons de dire s'appliquera intégralement à la reproduction des attaques d'épilepsie ou d'hystérie.

Dans toutes les hypothèses dans lesquelles il sera nécessaire de reproduire le malade en action, la Photographie interviendra naturellement. Il est évident que, au point de vue de l'analyse du mouvement observé, il sera toujours plus avantageux d'obtenir une série d'épreuves successives, qui en représenteront toutes les phases par la méthode photochronographique dont nous parlerons plus loin. Cependant des épreuves instantanées, prises isolément, donneront déjà des documents qui sont loin d'être négligeables. Voici, par exemple, un malade atteint de paralysie agitante

très instructifs, car sur l'épreuve on a la constatation d'un mouvement et l'indication même de son intensité.

Nous croyons donc qu'en ce qui concerne les tremblements, les phénomènes du même ordre, il y aura intérêt à obtenir sûrement et volontairement des épreuves comportant un flou relatif. La valeur de ce flou sera réglée d'après le plus ou moins de rapidité du mouvement observé.

(fig. 28) \ on remarque son altitude caractéristique dans la station debout, altitude que nous avons décrite précédemment; puis, le voici en pleine marche, le pied droit posé à terre, la jambe gauche arrivant près du sol ; son attitude, pendant la marche, est tout à fait typique et diffère notablement de la marche normale; tout le haut du corps et la tête sont fortement penchés en avant, les bras collés le long du corps, les jambes raides et tendues. Celte démarche, comme on le voit, est tout à fait particulière et le dessin que nous en donnons, d'après une de nos photographies, rend bien la chose.

Dans l'étude de la grande hystérie, on rencontre une série d'états particuliers, tels que la léthargie, la catalepsie, le somnambulisme, où l'on constate des phénomènes passagers qu'il est du plus haut intérêt de reproduire au moment même où ils ont lieu. La Photographie permettra d'en conserver une image durable et de les étudier ensuite à tête reposée.

On sait que chez les hystériques tout bruit violent et inattendu provoque la catalepsie; seulement, les divers malades prennent des attitudes totalement différentes, mais qui sont en général les mêmes pour chacun d'eux. On n'a pas encore trouvé la valeur clinique de cette attitude particulière chez chaque sujet, mais peut-être existe-t-elle, et à coup sûr, en réunissant un grand nombre d'épreuves de ce genre, on arrivera certainement à des résultais intéressants.

Voici la reproduction d'une photographie faite à la Salpêtrière (fig- 29)-

Les hystériques ont été amenées devant l'appareil sous le prétexte de faire faire leur portrait. A ce moment, un coup de gong a été donné et elles sont toutes tombées en catalepsie, ainsi que le montre le croquis fait d'après l'épreuve par le Dr Richer.

Dans ce cas particulier, on peut poser le temps voulu, car dans l'état de catalepsie le malade présente une immobilité presque complète. Cependant, bien que l'attitude soit conservée pendant un temps relativement long, il y a fatigue générale des muscles en action et des épreuves prises, à un certain intervalle, montreraient d'une manière manifeste le fait en question.

Dans cette même période de l'état cataleptique, on peut pro

Fig. 29.

l'on peut tour à tour, rien qu'en modifiant l'attitude des mains, voir se peindre sur la figure du malade l'extase, la prière, la colère, la tristesse, le défi, etc.

Le phénomène peut être unilatéral et, si l'un des bras est porté en avant le poing fermé et l'autre amenant la main près de la commissure labiale, un des côtés du visage présentera l'expression de la colère et l'autre celle du sourire.

D'autre part Charcot et Richer ont eu l'idée de procéder d'une manière inverse et, au lieu d'agir sur le geste pour modifier la physionomie, ils ont recherché l'influence de la physionomie sur le geste.

Se basant sur les travaux de Duchenne (de Boulogne) qui avait indiqué le premier l'influence de la faradisation localisée sur les

duire des phénomènes excessivement intéressants et qui ont été étudiés avec grand talent par le Dr Richer.

Si l'on vient à donner aux membres supérieurs de la malade une attitude expressive, ces gestes se trouvent complétés par l'expression de la physionomie. Ainsi, une attitude tragique imprime un air dur à la physionomie, le sourcil se contracte. Au contraire, rapproche-t-on les deux mains de la bouche comme dans l'acte d'envoyer un baiser, le sourire apparaît immédiatement sur les lèvres. La réaction du geste sur la physionomie est manifeste et

Fig. 30. Fig. 31.

Faradisation du muscle orbiculaire Faradisation du muscle frontal palpébral supérieur (courant fort). (courant fort).

Nous donnons une série de croquis exécutés d'après nos photographies et montrant l'attitude prise par le malade sous l'influence de la faradisation des principaux muscles de la face (fig. 3o, 3i, 32 et 33).

Il est à remarquer que, pour l'excitation d'un même muscle, l'expression varie suivant l'intensité du courant et, en augmentant celui-ci d'une manière régulière, on voit le phénomène se produire progressivement.

divers muscles de la face, ils ont répété ces expériences classiques sur des sujets cataleptiques. Les résultats différents ont été décisifs et du plus haut intérêt. En effet, dans les expériences de Duchenne, les muscles de la face entraient seuls en action, tandis que sur un sujet cataleptique, l'action du nerf faradisé se transmet au cerveau qui agit alors sur d'autres muscles de la face ou des membres, de telle façon que l'expression plus ou moins nettement indiquée par la faradisation du muscle est complétée.

Pl. VI.

Faradisation progressive du muscle iïontal chez une hystérique dans la catalepsie.

Fig. 32. Fig. 33.

Faradisation du muscle frontal Faradisation du muscle élévateur commun et du muscle peaucier. de l'aile du nez et de la lèvre supérieure.

tographie et l'on obtiendra ainsi la forme exacte des contractures obtenues par une simple excitation mécanique. Voici, par exemple, la griffe cubitale obtenue par friction du nerf cubital dans la région du coude (fig. 34), puis la griffe médiane par celle du nerf médian (fig- 35). Si nous agissons sur le sterno-mastoïdien, ce muscle entre en contraction et il imprime à la tête un mouvement de rotation qui est conforme absolument aux lois de la Physiologie (fig. 36).

Nous avons exécuté, avec le Dr Richer, une série d'expériences dont toutes les phases ont été rigoureusement notées par la Photographie (Pl. VI). Ici, comme précédemment, car nous sommes toujours dans l'état cataleptique, les expressions persistent avec une immobilité presque complète. L'obtention des épreuves ne présentera aucune difficulté.

L'étude de l'hyperexcitabilité neuro-musculaire dans la période de l'état léthargique pourra être également consignée par la Pho-

Fig. 34. Fig, 35.

encore que dans le cas précédent, la Photographie interviendra pour garder la trace de ces phénomènes trop peu durables. On sait les belles expériences de Duchenne (de Boulogne) sur l'action

spéciale des muscles de la face et la part qui revient à chacun d'eux dans l'expression des passions. Il sera facile de répéter dans l'état léthargique ces belles expériences, mais, au lieu d'employer le courant faradique, il suffira d'exciter mécaniquement les muscles au moyen d'une baguette quelconque à pointe mousse.

Les muscles de la face, dans le même état léthargique, se contractent également sons la pression, mais, à l'inverse de ce qui se passe dans les membres, la contracture ne persiste jamais. Ici plus

Fig. 36.

Fig. 37.

Pl. VII.

1. Verre jaune.

'L Verre vert foncé.

3. Verre bleu.

4. Verre bleu.

5. Cloche.

6. Chloroforme.

7. Camphre.

8. Froid.

Altitudes obtenues dans la catalepsie sous l'influence de diverses excitations.

Voici, d'après Duchenne, les points moteurs des principaux muscles de la face. D'après ses recherches, quatre de ces muscles ont le privilège de peindre complètement par leur action isolée une expression qui leur est propre. Ces muscles occupent la partie supérieure du visage et ils impriment tous au sourcil un mouvement particulier; ce sont le frontal, l'orbiculaire palpébral supérieur, le sourcillier et le pyramidal du nez. Le schéma suivant (fig. 37) indique les points d'élection sur lesquels Duchenne appliquait l'électrode, pour amener la contraction partielle de chacun de ces muscles.

Les croquis suivants montrent leur action individuelle sur les muscles de la face, et nous donnons, d'autre part, les dessins exécutés par M. Richer, d'après nos photographies représentant les mêmes attitudes, chez un sujet en état de léthargie (fig- 38).

Là ne se bornent pas les phénomènes intéressants que la Photographie peut reproduire utilement : il nous faut citer les recherches fort originales de M. Georges Guinon et de Melle Sophie Woltke (d'Odessa). Les auteurs ont étudié l'influence des excitations sen-sitives et sensorielles dans les phases cataleptique et somnambu-liques du grand hypnotisme. Il provoquaient, chez diverses malades, des suggestions variées qui se traduisaient par des gestes et des expressions de physionomie et ceci en interposant simplement devant les yeux des verres différemment colorés ou en leur faisant respirer certaines odeurs ou encore en agissant sur le sens de l'ouïe.

Nous avons reproduit les diverses attitudes obtenues dans ces circonstances et nous mettons sous les yeux du lecteur quelques-unes de ces épreuves. Sous l'influence du verre jaune (Pl. VII, fig. 1), la malade fronce les sourcils, elle cligne les paupières et met ses mains en abat-jour au-dessus de ses yeux, comme pour se protéger d'une lumière trop vive.

Le verre vert foncé, produit un effet tout différent. Elle sourit, puis porte la main à quelque distance de son nez, en flairant une fleur qu'elle croît tenir (Pl. VII, fig. 2).

Un verre bleu étant interposé, elle lève les yeux au ciel(P/. VII, fig. 3), joint les mains en l'air, dans l'attitude de la prière et finit par se mettre à genoux (Pl. VU, fig. 4)-

Si l'on fait entendre un bruit de cloches, la malade s'attriste et

Fig. 38.

Contraction de l'orbiculaire palpébral supérieur.

Contraction du frontal.

Contraction du grand zygomatique.

devient fixe, puis peu à peu le pied se contracture (Pl. VII, fig. 6).

Si l'on remplace le chloroforme par le sulfure de carbone, elle exprime un vif dégoût et se bouche le nez entre le pouce et l'index

met la main sur ses yeux, comme quelqu'un qui pleure ou qui prie (Pl. VU, fig. 5). Lui fait-on respirer du chloroforme, son regard

[Pl. VII, Jlg. 7). Une impression de froid la fait frissonner et elle serre les bras contre son corps (Pl. VII, fig. 8).

Nous arrivons maintenant à l'étude de la grande attaque d'hystérie, qui a été faite d'une façon si magistrale par notre maîlre le Dr Charcot et l'Ecole de la Salpêtrière; pour ceux de nos lecteurs qui désireraient étudier à fond cette question si intéressante, nous

Fig. 39.

Jes renvoyons au bel Ouvrage de P. Ricber, auquel du reste nous empruntons un grand nombre de ses belles planches (').

L'attaque d'hystérie peut se diviser en quatre périodes bien distinctes, celle des prodromes d'abord puis la période épileptoïde, celle du clownisme et celle des attitudes passionnelles.

Voyons comment la Photographie peut être utile au médecin pour saisir les phases multiples de ces diverses périodes.

(') Paul Riciier, Études cliniques sur la grande hystérie. V" Babé et G'% éditeurs. Paris, i885.

Fig. 40.

de vue de la reproduction photographique, il faut signaler d'abord les troubles physiques, les hallucinations. La malade court, marche, s'agite, crie, comme si elle voulait dépenser un excès de force (fig- 3g). Il ne saurait être question de vouloir amener la malade dans cet état devant l'objectif, il faut que ce soit l'opérateur qui la suive avec un appareil à main, pour la saisir au moment favorable.

Parfois, dans cette période, survient un accès épileptoïde ou une contracture (fig- 4°)'i dans ce derniercas,il sera plus facile d'opérer,

Lorsque la grande attaque va survenir, il se produit chez la malade divers phénomènes précurseurs qui l'avertissent en quelque sorte de l'imminence de la crise : c'est du reste un des caractères distinctifs de l'hystérie tandis que dans l'épilepsie la crise est toujours soudaine.

Parmi ces phénomènes, qui peuvent nous intéresser au point

Fig. 41.

{fig- 41)' Pll*s survient la deuxième phase avec immobilité tétanique ou tétanisme (fig. 42).

Dans cette phase, l'immobilité est complète et l'on n'éprouve aucune difficulté à reproduire l'attitude du malade.

Dans la phase clonique, les mouvements ont une certaine lenteur, car la tétanisation des muscles est partielle. Voici un dessin schématique de Richer qui donne une idée parfaite des grands mouvements cloniques (fig. 43). Dans l'espèce, il sera avantageux de faire plusieurs épreuves instantanées ou mieux encore de se servir d'un appareil photochronographique.

Après un court repos commence la période des grands mouvements que M. Charcot a appelé non sans raison la période du clownisme; en effet, la malade effectue une série de tours de force, de mouvements illogiques qui rendraient jaloux l'acrobate le plus

car la malade est forcément immobile. Il faudra néanmoins se hâter, car l'attaque proprement dite va débuter.

La première période dite épileptoïde se divise en trois phases : la phase tonique, la phase clonique et la phase de résolution.

Dans la première, qui est caractérisée par des secousses partielles du corps ou des membres, il faudra faire des instantanés rapides pour avoir la netteté complète ou au contraire se contenter d'une vitesse moindre si l'on veut montrer sur l'épreuve les parties affectées de mouvements plus ou moins rapides.

Dans la phase tonique, avant d'arriver à l'immobilité tétanique, la malade exécute avec les membres quelques grands mouvements

Fig. 42.

Fig. 43.

Fig. 44.

c'est celle de l'arc de cercle. La malade repose sur les pieds et la tête complètement renversée (fig. 46).

Fig. 46.

Vient alors une nouvelle phase, c'est celle des grands mouvements, qui diffèrent des précédents en ce qu'ils n'ont aucune relation avec la tétanisation et qu'ils ne sont pas compatibles avec un degré quelconque de contracture, mais qu'ils impliquent, au contraire, un relâchement musculaire complet.

habile. En voici deux spécimens choisis parmi l'infinité de poses que l'on peut rencontrer (fig. 44 et 45). H en est cependant une qui est particulièrement typique et que l'on trouve fréquemment,

Fig. 45.

C'est dans cette période qu'il faudra opérer le plus rapidement possible et surtout prendre des épreuves successives. En effet, certains de ces mouvements sont si rapides que l'œil ne peut en faire qu'une analyse absolument imparfaite. Nous donnons (fig- 47) une variété très remarquable des grands mouvements, la malade passant successivement par les trois positions indiquées sur le dessin.

Nous arrivons alors à la quatrième période que M. Charcot a admirablement définie, période des attitudes passionnelles ou des poses plastiques. La malade est en proie à des hallucinations qui la ravissent et la transportent dans un monde imaginaire. Elle assiste à des scènes gaies ou tristes (fig. 48 et 49)? parfois à des drames dont elle traduit toutes les phases et par les paroles qu'elle laisse échapper et par sa mimique expressive. La reproduction de ces scènes aussi variées qu'imprévues sera faite par la Photographie avec quelques difficultés, il faut le dire, car elles se succèdent rapidement. Il faudra toujours être prêt à opérer et saisir au moment voulu l'attitude intéressante. Dans cette hypothèse, comme du reste dans les précédentes, l'emploi de la chambre à double corps sera tout indiqué; car la malade se déplace constamment et il ne serait pas possible d'effectuer la mise au point par les procédés ordinaires.

Après la période des attitudes passionnelles, l'attaque est à proprement parler terminée, mais il peut encore se produire du délire et des contractures partielles ou générales : on opérera suivant les hypothèses comme nous l'avons indiqué précédemment.

Pour terminer cette revue rapide de la grande attaque d'hystérie et montrer la violence de ces crises, nous donnons (fig. 5o) deux des positions prises par un hystérique mâle dans le cours de son attaque. On peut, par l'examen de ces épreuves et de celles qui précèdent se rendre un compte exact des difficultés que l'on rencontrera dans l'application de la Photographie à ces études spéciales.

Par contre, nous avons cru intéressant de donner une planche représentant une de ces périodes qui sont caractérisées par l'immobilité absolue du malade. 11 s'agit, dans l'espèce, d'une attaque de sommeil hystérique, qui peut avoir une durée fort longue. Les difficultés photographiques dans cette hypothèse sont presque

Fig. 47-

nulles et l'on peut obtenir avec facilité des épreuves de grand

Fig. 48.

Fig. 49.

format absolument irréprochables [Pl. VIII).

Fig. 50.

permettront de faire l'analyse complète de la grande attaque, puis d'en effectuer ensuite la synthèse au moyen du phénakisticope.

PHOTOCHRONOGRAPHIE.

Nous venons de voir dans ce qui précède que, en ce qui concerne la reproduction du mouvement, les épreuves isolées sont loin d'être suffisantes; il faut prendre alors des épreuves successives et ceci à des intervalles réguliers; c'est ce que l'on nomme,

En un mot, la reproduction de la grande attaque d'hystérie par la Photographie offre un champ très vaste d'études presque nouvelles, car, s'il existe déjà un grand nombre d'épreuves isolées de ce genre dans les collections de la Salpêtrière, nous n'en avons pas encore de photochronographiques. Et cependant seules ces images

d'après les décisions du Congrès de Paris, la Photochrono-grapide.

Cette nouvelle branche de la Photographie est relativement récente et les travaux accomplis se comptent. Après l'Américain Muybridge, qui le premier a montré des épreuves multiples, il faut citer en France Janssen et Marey, et en Allemagne Otto-mar Anschùtz. Depuis, le général Sebert et nous-même avons étudié la même question.

Laissant de côté les appareils de Janssen et de Sebert qui sont destinés, l'un à la Photographie astronomique, et l'autre à la Photographie militaire, ceux de Mujbridge qui sont trop compliqués et ceux de Anschùtz sur lesquels nous n'avons que des détails trop incomplets, nous ne trouvons que les appareils de M. Marey pouvant rendre des services au point de vue physiologique ou médical, ainsi que ceux que nous avons fait construire spécialement pour le laboratoire de la Salpêtrière.

Examinons les conditions que doit remplir un appareil photo-chronographique destiné aux études médicales, conditions qui sont un peu spéciales. Il faut que les épreuves soient entières, isolées et d'un format lisible.

Si nous nous reportons aux belles épreuves de M. Marey obtenues sur fond noir, et qui ont trait à la marche normale, nous constaterons une confusion que l'auteur lui-même a su éviter par des dispositifs fort ingénieux. C'est ainsi que, après avoir photographié une partie du corps seule, il réduisait encore celui-ci à l'état de lignes en revêtant le modèle d'un costume sombre sur lequel des parties brillantes correspondaient aux grands axes des membres.

Ces épreuves seraient évidemment insuffisantes pour l'étude médicale, car il est nécessaire de ne supprimer aucune partie du corps par un artifice quelconque. M. Marey combine alors un appareil basé sur la rotation d'un miroir réfléchissant l'image du modèle dans la chambre noire. On arrive, en réglant la vitesse du miroir, à dissocier les images qui se projettent les unes à côté des autres; ce procédé est déjà bien supérieur, mais il n'est cependant pas très pratique, car il nécessite une installation comme celle de M. Marey à la Station physiologique du Parc des Princes : il faut,

en effet, un fond donnant le noir absolu dont l'emploi est indispensable dans ce genre d'appareil. Pour cette raison, il sera plus avantageux d'employer des instruments qui peuvent opérer sans fond ou sur fond autre que le noir; nous en parlerons tout à l'heure.

Le format des épreuves est également important et il nous paraît utile d'insister sur ce fait, car les épreuves obtenues avec les premiers appareils de M. Marey étaient un peu petites.

Il faut enfin, et c'est là la condition la plus délicate à réaliser dans l'espèce, que l'on puisse faire varier, non seulement les intervalles entre les épreuves successives, mais encore le temps de pose de chacune d'elles.

Nous croyons avoir été le premier à réaliser ce desideratum dans un appareil que nous avons appelé photo-électrique et qui a été présenté par nous à la Société de Photographie. Nous n'avons pas cru devoir adopter la méthode de M. Marey, qui consiste à obtenir le plus grand nombre possible d'images dans la seconde. Nous ne pensons pas qu'il soit nécessaire dans bien des cas d'avoir un nombre pareil d'épreuves. En effet, comme il arrive souvent, si le mouvement dure plusieurs secondes, on risque de ne pas le reproduire en entier ou d'avoir un nombre trop considérable d'épreuves qui ne diffèrent que peu les unes des autres.

Nous adoptons une autre manière de faire. Nous admettons hypothétiquement que douze épreuves successives sont suffisantes pour donner une idée convenable des diverses phases d'un mouvement quelconque. Or, la durée du mouvement à reproduire pouvant être excessivement variable, il s'ensuit donc que le problème que nous nous posons consiste à répartir nos douze épreuves sur la durée du mouvement à reproduire, quel qu'il soit.

Dans certains cas, il faudra que les douze épreuves soient faites en ~ de seconde; nous fonctionnerons dans ce cas comme avec l'appareil de M. Marey. Dans d'autres, ce sera |, i ou i seconde, ou un nombre donné de secondes.

Il faut de plus que le temps de pose lui-même soit variable, ceci tout d'abord pour la raison bien simple qu'il n'est jamais nécessaire et qu'il est même dangereux au point de vue de la perfection des résultats de réduire le temps de pose au delà du temps

nécessaire pour obtenir une bonne épreuve. Or, dans les appareils de M. Marey, la durée du temps de pose est entièrement liée à la vitesse de fonctionnement de l'appareil. C'est ainsi qu'il a pu obtenir des successions d'images avec des temps de pose ne dépassant pas, dans certains cas, le de seconde. Dans ces conditions, il est évident qu'il ne faut pas être trop difficile sur la qualité des résultats et il est nécessaire de n'opérer que sur des sujets très actiniques : c'est ainsi que les modèles sont revêtus de blanc, les oiseaux ou autres animaux choisis de la même couleur.

En Médecine, il ne saurait être question d'user de ces artifices, et il est nécessaire, dans certains cas, d'obtenir des images un peu grandes concernant la face ou l'un des membres du malade. Or nous avons vu précisément que, théoriquement, ces images exigeront une pose plus considérable et ceci d'autant plus qu'elles sont plus grandes; il s'ensuit que l'on aura bien des risques d'avoir des négatifs insuffisamment impressionnés. De plus, ces variabilités des temps de pose et des intervalles qui les séparent doivent pouvoir se faire avec facilité pour résoudre toutes difficultés qui se présenteront dans la pratique.

Dans le premier appareil que nous avons fait construire et que nous avons dénommé photo-électrique, 'nous employions une série d'objectifs montés en couronne sur une chambre noire. Chacun d'eux dessinait une image distincte et séparée des voisines. Derrière les objectifs se trouvait un disque percé d'une ouverture et actionné par un ressort d'horlogerie; ce disque faisait fonction d'obturateur et démasquait successivement les neuf objectifs. Au moyen d'un dispositif électrique qu'il serait trop long de décrire ici, le disque qui tend toujours à tourner sous l'action du ressort est immobilisé par une pièce spéciale, cpie l'on peut actionner à l'aide d'un électro-aimant. Aussitôt que l'on envoie le courant, cette pièce est attirée et le disque démasque un des objectifs. Celui-ci reste ouvert tant que dure le courant : aussitôt que celui-ci cesse, il est refermé; si l'on envoie un nouveau courant, on produit le même résultat, mais c'est l'objectif suivant qui pose et ainsi de suite.

On comprend donc facilement qu'avec un pareil mécanisme on puisse obtenir des poses d'une durée quelconque et à des inter

Fig. 51.

Si l'on veut opérer à des intervalles plus prolongés et donner une certaine durée à la pose, on pourra se servir avec avantage

valles également quelconques. La seule difficulté consistera dans le dispositif qu'il faudra employer pour lancer des courants de durée déterminée à des intervalles également déterminés et à empêcher l'appareil de fonctionner lorsque toutes les plaques auront été impressionnées. En ce qui concerne cette dernière partie nous y arrivons de la manière suivante : le grand axe du mouvement d'horlogerie qui correspond à celui du disque obturateur porte extérieurement une pièce circulaire en métal par laquelle arrive le courant au moyen d'un frottoir métallique relié à un des pôles de la pile, l'autre pôle étant relié directement à l'électro-aimant : cette pièce porte en un point de sa circonférence un évidement garni d'une matière isolante. Lorsque le contact latéral arrivera sur cette partie, le courant cessera de passer et l'appareil s'arrêtera automalicpiement.

Lorsque nous voulons obtenir des épreuves, à des intervalles connus et assez rapprochés, il est fort commode de se servir d'un métronome électrique qui envoie le courant dans l'appareil à des intervalles réglés d'avance. Le métronome étant en marche et le courant coupé au moyen d'un interrupteur, il n'y aura qu'à le rétablir pour voir fonctionner l'appareil (fig- 5i ).

(?) Notre appareil photo-électrique donne 9 images disposées en couronne sur une plaque fj.

du régulateur de Foucault sur lequel on installera les conlacts voulus.

Cet appareil, que nous avions construit d'un format modéré et avec nos ressources personnelles, ne nous a pas paru susceptible de donner des épreuves très rapprochées les unes des autres, car le disque obturateur est d'une certaine masse et il est difficile, à cause des arrêts qui doivent se produire à chaque épreuve, d'obtenir une vitesse suffisamment grande. Sous ce rapport, il ne saurait être rapproché des beaux appareils de Marey.

Mais, en ce qui concerne l'obtention des épreuves plus espacées et d'une durée de pose plus appréciable, il est au contraire très avantageux. Dans certains cas, il peut permettre d'enregistrer automatiquement des expériences de longue durée, et ceci dans le laboratoire même, sans être obligé d'opérer en plein soleil.

Il s'agit, par exemple, de faire l'analyse complète du phénomène du transfert chez une hystérique. On connaît le fait qui a été découvert par l'Ecole de la Salpêtrière et qui est d'une importance capitale en thérapeutique nerveuse. Une malade a une contracture du bras droit, d'origine hystérique. On la plonge dans le sommeil hypnotique et l'on place à côté du bras malade un aimant (Pl. Peu à peu, sous l'influence de celui-ci, la contracture disparaît du bras malade, mais en même temps elle apparaît sur le bras opposé, et ceci d'une manière rigoureusement symétrique. Voilà le transfert opéré, mais si le phénomène se bornait là, la malade ne s'en trouverait guère mieux; mais voici que le phénomène se poursuit, et la contracture revient comme elle était au début. A la suite d'une série d'oscillations de ce genre, la contracture disparaît des deux côtés à la fois. L'expérience est terminée. Le temps de transfert est très variable, il se chiffre le plus souvent par des minutes; on pourra donc trouver avantage à disposer l'appareil de façon à prendre automatiquement une épreuve toutes les minutes. Au bout de 9 épreuves (1 ), il suffira de remettre un autre châssis et de cette manière on obtiendra une série aussi longue qu'il sera nécessaire.

Pl. VIII.

Sommeil hystérique.

Pl. IX.

Transfert de contracture chez une hystérique.

Dans ce cas particulier, puisque l'appareil doit fonctionner d'une manière continue, nous supprimons la pièce de contact à interrupteur pour la remplacer par une pièce semblable, mais entièrement en métal. De cette manière, l'appareil fonctionne indéfiniment. Comme nous avons affaire à un sujet endormi et à des mouvements dont la durée totale est de plusieurs minutes, nous donnerons le temps de pose que nous reconnaîtrons nécessaire pour obtenir une bonne image : une ou deux ou trois secondes par exemple.

Nous donnons (PL IX) les deux phases extrêmes d'un transfert de contracture chez une hystérique. La lenteur du phénomène permet d'obtenir facilement des épreuves posées de grand format.

Nous avons obtenu également de bons résultats avec cet appareil dans un cas de reproduction de torticolis spasmodique. Notre malade parvenait à opérer la version de la tête par des procédés variables, soit la tête en avant, soit en arrière. La série des mouvements qu'il exécutait était curieuse à conserver et il mettait environ six secondes pour les réaliser.

L'appareil réglé pour fonctionner en six secondes nous a donné d'excellents résultats (Jîg. 52).

L'appareil photo-électrique que nous avons exécuté donnait des images trop petites à notre avis, mais nous avions dû reculer devant l'achat d'objectifs plus puissants. Grâce alors aux subventions qui nous ont été accordées par la Faculté de Médecine et l'Association pour l'avancement des Sciences, nous avons pu commencer la construction d'un appareil de plus grand format. Nous nous sommes arrêté au format |, qui correspond à celui des projections et permet de montrer facilement les résultats agrandis. Les objectifs, au lieu d'être disposés en couronne, sont placés en batterie sur trois lignes parallèles, ce qui permet d'obtenir 12 images sur une plaque f| et d'utiliser entièrement celle-ci, ce qui n'avait pas lieu avec l'appareil précédent dans lequel les images n'occupaient qu'une partie de la plaque (Jîg- 53).

Nous avons conservé dans cet appareil le même principe, à savoir : la variabilité des intervalles et celle des temps de pose, mais en limitant ceux-ci aux divers degrés de l'instantanéité. Nous avons eu plus en vue la reproduction des mouvements rapides et,

Fig. 52.

est fort difficile de réaliser un appareil qui donne à la fois, et ceci pratiquement, les poses de durée quelconque et les plus rapides.

Dans notre dernier appareil, chaque objectif comporte un obturateur susceptible de donner cinq vitesses différentes, ce qui est plus que suffisant dans la pratique. Une pièce spéciale armée de 12 dents peut déclencher les obturateurs les uns après les autres. Suivant la vitesse que l'on donnera à cette tige, on obtiendra entre chaque pose les intervalles voulus.

d'autre part, avec la grande sensibilité des procédés actuels, on peut opérer dans bien des cas avec une vitesse faible et ne pas être obligé de poser une ou plusieurs secondes. On sera conduit, tout simplement, à opérer en plein air. Nous croyons, en effet, qu'il

3° Temps de pose lents à intervalles rapprochés;

4° Temps de pose lents à intervalles plus ou moins éloignés.

Au point de vue pratique, ces diverses combinaisons présenteront un grand intérêt. Nous partons, en effet, du principe suivant, c'est qu'il y a toujours avantage à ne réduire la pose que de la quantité voulue pour obtenir la netteté suffisante; malgré leurs exquises qualités, la sensibilité des plaques n'est pas telle que l'on puisse poser impunément aux grandes vitesses et obtenir des clichés suffisants. D'autre part, si l'on veut faire des objets rappro-

8

Nous ne décrirons pas le mécanisme que nous employons, ce qui serait un peu trop technique. Quoi qu'il en soit, cet appareil permet les combinaisons suivantes :

i° Temps de pose très courts à intervalles très rapprochés;

2° Temps de pose très courts à intervalles plus ou moins éloignés ;

Fig. 53.

chés, rallongement de la distance focale interdit les trop grandes vitesses. Notre appareil permettra de se conformer à ces diverses nécessités.

Premier cas : Temps de pose courts, intervalles rapprochés. — On opérera ainsi pour les études ayant trait à la locomotion animale, aux attaques d'hystérie et d'épilepsie, aux tremblements, à la chorée, etc.

Druxième cas : Temps de pose courts, intervalles plus prolongés. — Marches pathologiques qui durent plus longtemps que la marche normale, mais où, dans certaines périodes, on trouve des mouvements très rapides.

Troisième cas : Petites vitesses, intervalles courts. — Reproduction de certains tics à courte distance : les mouvements du sujet peuvent n'être pas très rapides, mais être effectués dans un temps relativement court. Bâillement hystérique, torticolis spas-modique, etc.

Quatrième cas : Petites vitesses, intervalles plus ou moins prolongés. — Enregistrement des transferts de contractures ou d'attitudes passionnelles, des modifications d'attitudes obtenues pendant l'état cataleptique sous l'influence de l'augmentation progressive du courant faradique.

On voit, par ce crue nous venons de dire, qu'un appareil de ce genre peut être d'une grande utilité et donner lieu à des travaux originaux; mais il sera nécessaire, croyons-nous, dans cette hypothèse, d'organiser un laboratoire en plein air qui facilitera bien ces études. Cette installation devra être faite dans un endroit bien découvert, afin de bénéficier du maximum de lumière possible.

Nous avons fait établir à la Salpêtrière un laboratoire de ce genre. Il comprend un fond uni de 6m de longueur sur 3ni de hauteur.

Ce fond en toile unie est montée sur un tambour porté par de forts montants en bois. Ce tambour est recouvert d'un toit en zinc pour abriter le fond lorsqu'il est enroulé.

Devant le fond est installée une piste bien unie de im de large ; cette piste doit être prolongée de quelques mètres avant le fond,

de façon à permettre au sujet de prendre son allure normale. Elle est surélevée du sol de om,io et porte sur sa tranche une division métrique. Le fond est placé à im de la piste. Pour certaines éludes spéciales, on inslalle une deuxième piste qui part du fond et est à angle droit avec la première.

Dans la perpendiculaire au fond se trouvent deux rails qui supportent un chariot mobile sur lequel se trouve l'appareil photo-chronographique. De cette manière, on peut avancer ou reculer celui-ci en restant toujours perpendiculaire à la direction de la piste. Cette installation, comme on le voit, n'est pas bien compliquée et elle permet de tirer de notre appareil le meilleur parti possible.

chapitre iv.

APPLICATIONS DIVERSES.

ÉTUDE DE LA MARCHE PATHOLOGIQUE.

L'étude de la marche à la suite de traumatismes, de malformations ou de modifications produites par les différentes maladies du système nerveux, a une importance qu'on ne saurait méconnaître. On n'a qu'à se rapporter pour cela au beau travail qu'a publié notre ami le Dr Gilles de la Tourette (').

Il faudra opérer dans de belles conditions de lumière et faire marcher le sujet sur une piste parallèle ou perpendiculaire à l'objectif suivant les hypothèses. Dans les cas d'hémiplégie, de paraplégie, de paralysie, on obtiendra déjà des documents intéressants au moyen des épreuves isolées. Mais si l'on en multiplie Je nombre, ce sera une méthode d'analyse bien plus précieuse que nous emploierons. Nous en reparlerons dans un instant.

On peut employer dans l'espèce une autre méthode dont nous nous sommes servi avec le Dr Gilles de la Tourette : c'est la méthode des empreintes. On enduit les pieds du malade d'une couleur en poudre tel que le rouge d'Angleterre. Ceci fait, on le fait marcher sur un rouleau de papier portant une ligne médiane et l'on recueille ainsi son mode particulier de démarche. La longueur des pas, l'angle fait avec l'axe normal, la façon d'appuyer le pied constitueront autant de signes distinctifs (fig. 54).

La Photographie sera très précieuse pour reproduire ces traces légères qu'un rien pourrait effacer : elle permet, et c'est ce que

(.') Dr Gilles de la Tourette, La marche dans les maladies du système nerveux.

Fig. 54.

nous avons fait avec le Dr Gilles de la Tourette, de réduire d'un

Fig. 55.

Empreinte du pied dans la maladie de Friedreich.

seul coup ces longues bandes avec une précision mathématique et de pouvoir les publier facilement.

Cette méthode, peu employée jusqu'à présent, est susceptible

d'applications intéressantes, les empreintes de pieds (Jîg. 55), de mains pouvant révéler des particularités intéressantes. La Photographie interviendra toujours pour assurer la conservation ou la reproduction des documents ainsi obtenus.

APPLICATION DE LA PHOTOGRAPHIE A L'ÉTUDE DES ALIÉNÉS, DES DÉGÉNÉRÉS ET DES IDIOTS.

La reproduction de ces divers malades présentera plusieurs difficultés. Ils constituent tout d'abord la catégorie des sujets auxquels on ne saurait demander l'immobilité, à cause, d'une part, de leur état cérébral absolument modifié et, de l'autre, à cause des tics dont ils sont souvent atteints. C'est dans cette hypothèse qu'on trouvera grand avantage à employer la chambre à double corps que nous avons décrite, mais cet appareil, si perfectionné qu'il soit, ne sera pas toujours suffisant. En effet, certains malades sont craintifs, méfiants et la vue d'un appareil photographique de grand format monté sur un pied peut les effrayer et modifier leur attitude. On voit par là ce qu'il faut éviter à tout prix si l'on veut obtenir des documents typiques.

Nous nous servons alors d'un autre appareil que nous avons combiné avec M. Ch. Dessoudeix. C'est une petite chambre portative que l'on porte en bandoulière et qui est toujours prête à fonctionner. De cette manière, on s'approche du malade sans éveiller son attention et on le saisit instantanément.

Nous avons adopté potir cette chambre un format réduit afin d'avoir un instrument maniable et de faible volume. Le format f qui correspond à la grandeur des images pour projection est celui que nous employons.

Comme il s'agit d'obtenir des documents utilisables pour le médecin, notre appareil est disposé pour opérer au besoin d'assez près; c'est-à-dire que, dans certains cas, nous pouvons faire des têtes de om,o3. La difficulté que l'on rencontre dans un appareil de ce genre consiste en ce qu'il faut être assuré de la netteté de l'image aussi bien que dans un appareil ordinaire; il ne saurait être question d'employer les procédés de mise au point précédem-

viser et il renvoie au moyen d'un miroir son image sur le verre dépoli. Au moyen d'une bonnette à laquelle on place les deux yeux, on peut examiner cette image sans l'emploi du voile noir (fig. 56).

Les deux objectifs rigoureusement de même foyer sont commandés simultanément par la même crémaillère, de telle sorte que toute variation sur le verre dépoli du viseur corresponde à une variation précisément égale dans le plan focal. La conclusion est que toute image nette sur le verre dépoli le sera également sur la plaque sensible. Il sera donc de la plus grande facilité de mettre au point en même temps que l'on vise le sujet à reproduire. Aussitôt

ment décrits qui prennent un certain temps, car la condition de succès réside précisément dans la rapidité de l'opération. Voici à quel dispositif nous nous sommes arrêtés.

La petite chambre forme un bloc cubique de dimensions restreintes. Aucun organe ne dépasse. A l'avant se trouvent les deux objectifs, le diaphragme rotatif, la manette des vitesses de l'obturateur et le déclenchement de celui-ci. L'objectif inférieur est destiné à l'obtention de l'image et est muni à cet effet de l'obturateur dont nous reparlerons plus tard; l'objectif supérieur sert à

Fig. 56.

(') Nous devons ce dessin à l'obligeance de notre ami M. Martin, et nous lui adressons à ce sujet nos plus sincères remerciements.

la nettelé obtenue, on n'a qu'à appuyer sur le bouton qui déclenche l'obturateur.

On peut même dans certains cas et en plaçant l'appareil sur une table, un support quelconque, poser un temps déterminé lorsque la lumière est insuffisante. Dans ce cas, on opère avec une poire pneumatique qui commande l'obturateur et permet de le laisser ouvert tant que dure la pression de la main.

Les plaques sensibles, placées dans des petits cadres métalliques, se trouvent à l'arrière de la chambre dans un logement spécial qui permet de les substituer les unes aux autres au moyen d'une simple rotation delà chambre d'arrière en avant et un numérotage spécial permet de savoir exactement le nombre de plaques employées. On peut donc faire un certain nombre de vues très rapidement, car il suffit entre chaque pose d'armer l'obturateur et de changer la plaque qui vient d'être exposée.

Inutile de dire qu'un mécanisme spécial empêche la lumière de pénétrer dans l'appareil lorsque l'on arme l'obturateur : de cette manière on aura une sécurité absolue.

Comme spécimen d'épreuves obtenues avec cet appareil, nous donnons la reproduction d'une malade qui, dans un accès de délire, a brisé les liens de sa camisole de force et qui, malgré une fracture du pied qui la tenait au lit, s'est échappée dans les jardins de la Salpêtrière. Grâce à notre appareil qui est toujours prêt, nous avons pu la photographier facilement, ce qui n'eût pas été certainement possible avec le matériel ordinaire (') (fig- 07).

Nous venons d'examiner l'hypothèse, et elle se présentera fréquemment, dans laquelle la mobilité du sujet crée des difficultés spéciales; mais il n'en sera pas toujours ainsi et, par des procédés plus commodes à réaliser, on pourra noter les modifications permanentes que l'on rencontre dans cette classe de malades. Les déformations crâniennes, si fréquentes chez les idiots et les crétins, seront intéressantes à conserver et l'examen des photographies peut en dire plus que bien des descriptions. Un coup d'œil jeté dans la collection du D1' Bourneville, à Bicêtre, prouvera

Fig. 57.

La reproduction des anomalies que l'on constate fréquemment dans l'espèce pied-bot, bec-de-lièvre, strabisme, etc., présentera également pour le médecin un vaste champ d'études.

PHOTOGRAPHIES DE L'INTÉRIEUR DE CERTAINS ORGANES.

On sait que, grâce à l'emploi d'appareils spéciaux, le médecin peut maintenant examiner avec facilité l'intérieur des diverses cavités de l'individu et en constater l'état d'une manière très pré

bien la vérité de ce que nous avançons. La physionomie, le faciès, l'attitude ne seront pas moins utiles à recueillir.

cise. Le fond de l'œil lui-même est étudié au moyen de l'ophtal-moscope et les données ainsi obtenues ont une importance toute particulière sur laquelle il nous paraît inutile d'insister.

De tels travaux ne peuvent être exécutés que par des spécialistes d'une habileté consommée. Il faut en effet faire un examen qui est forcément rapide. La présence d'instruments spéciaux pouvant amener une grande gêne, pénible parfois pour le malade, le médecin devra donc d'un coup d'œil, pour ainsi dire, relever l'aspect de l'organe examiné et la représentation des lésions constatées, si l'on veut en garder trace, devra être faite uniquement de mémoire.

On conçoit facilement qu'une telle manière de faire puisse donner place à des interprétations inexactes. Aussi a priori peut-on affirmer que l'introduction des méthodes photographiques qui permettront de prendre en un instant des images absolument exactes et durables constituera un progrès sérieux.

La grosse question qui se posera dans l'espèce est celle de l'éclairage qui doit avoir une intensité considérable pour permettre de saisir, en un temps suffisamment court, des tissus en général de coloration inactinique et qui sont dans l'obscurité complète.

Depuis l'emploi de l'éclair magnésique en Photographie, la question a fait un grand pas en avant, car on peut obtenir désormais sans matériel spécial des sources de lumière d'une intensité considérable.

Nous considérons donc que désormais l'étude de l'intérieur des divers organes de l'individu peut être abordée avec plein succès : il y aura évidemment des difficultés pratiques à résoudre, des appareils spéciaux à créer, mais la plus grosse difficulté est dès à présent supprimée.

Parmi les organes qui ont été le plus étudiés jusqu'à présent il faut citer le larynx et l'œil. Nous allons donner un aperçu des travaux qui ont été exécutés et dont nous avons eu connaissance.

En ce qui concerne le larynx, les renseignements que nous allons donner nous ont été obligeamment remis par notre ami M. le Dr Gartaz, l'éminent spécialiste, et nous lui adressons à ce sujet nos sincères remerciements.

La reproduction photographique du larynx présente de grandes

(') Zeit. d. Ges. d. Aerzte zu Wien, 12 octobre 1860. (-) British med. Journal, 27 octobre 1884.

difficultés qui tiennent à la tolérance plus ou moins grande des sujets à examiner, à la difficulté d'éclairer fortement la cavité de cet organe, et enfin à la nécessité de faire concorder les facteurs divers, bonne position et bon éclairage du larynx, avec l'ouverture de la chambre photographique. ,

Ces difficultés ne sont pas insurmontables, et dès les premières périodes de l'application du laryngoscope à l'examen de l'appareil vocal, Czermak essaya de reproduire par la Photographie ce que lui faisait voir le miroir. A la même époque Mandl (') avait fait construire un appareil pour photographier les images du larynx.

Czermak fit quelques essais avec un photographe de Pesth, M. Simonyi. Plus tard, à Paris, il s'assura le concours du célèbre dessinateur anatomiste Lackerbauer et obtint des images relativement bonnes, si l'on se reporte à cette date où les appareils photographiques n'étaient pas ce qu'ils sont aujourd'hui, où les plaques demandaient une pose d'une certaine durée.

C'est avec Brandeis, peintre et photographe à Prague, que Czermak obtint les meilleures épreuves. Ces photographies furent présentées à l'Académie des Sciences de Paris en 1861.

Ces premiers essais de Mandl, Czermak furent longtemps sans être repris; les résultats n'étaient pas assez nets, assez frappants pour qu'on pût substituer ces photographies a un dessin schématique presque plus exact en raison de la netteté qu'on pouvait lui donner.

Stein, de Francfort, a donné la description du procédé à suivre, mais n'a pas publié de photographies.

Un laryngologiste américain, le Dr Thomas French, de Brooklyn, puis le grand spécialiste anglais Lennox Brown, s'efforcèrent d'obtenir des images plus nettes. Les premières épreuves de French n'étaient pas encore bien bonnes et Brown (2) pouvait avec juste raison dire que les résultats obtenus avant lui étaient peu satisfaisants. Mais French a depuis pris sa revanche.

Lennox Brown eut la bonne fortune d'avoir pour collaborateur

(') Voice, Song. and speeck. Londres.

(2) New-York med. Journ., 3i janvier 1891.

et sujet d'examen M. Behnke, professeur de chant, très versé dans les études de physiologie de l'appareil vocal. M. Behnke avait déjà tenté plusieurs années auparavant de photographier son larynx et il était confiant dans le succès et l'avenir de cette méthode. Il avait, en effet raison ; les épreuves que Lennox Brown a publiées pour illustrer son Ouvrage (') sont en effet déjà très nettes et très propices à la démonstration. Il se servait comme éclairage d'un appareil électrique de ioooo bougies; une chambre à eau, dans laquelle circulait un courant constant, était destinée à absorber la majeure partie des rayons calorifiques ; pour concentrer les rayons lumineux, deux séries de lentilles plan-convexes; enfin un miroir à surface plane pour réfléchir la lumière.

Pour obtenir une épreuve, le sujet placé devant l'appareil photographique tient, dans sa main droite, le miroir laryngé, éclairé par l'appareil électrique situé de côté. Le sujet se voit dans une petite glace attachée au volet de la chambre noire, de façon qu'il puisse mettre l'image laryngée bien sur la ligne et au foyer de la plaque photographique. A un signal du doigt, l'opérateur laisse tomber le volet.

Les épreuves obtenues par Brown demandaient une pose d'un quart de seconde.

Depuis M. French (2) a perfectionné ses procédés et il a pu montrer au Congrès de Berlin, par projection, des photographies du larynx de quelques artistes où les cordes vocales sont nettement fixées dans les diverses positions correspondantes aux modulations de la voix et du chant. On peut ainsi trancher les divergences d'opinions des physiologistes et des professeurs de chant sur l'action des divers muscles intrinsèques du larynx dans la voix chantée.

Les résultats obtenus par French, déjà fort nets, fort satisfaisants, permettent d'espérer qu'on pourra arriver à mieux encore, par le perfectionnement des appareils. Quant aux sujets dociles, faciles à examiner, ils se trouvent aisément.

La photographie du fond de l'œil a fait également l'objet de

nombreuses recherches dont quelques-unes sont même assez anciennes. Les difficultés sont encore plus considérables que poulie larynx et elles tiennent à trois causes principales, la mobilité de l'organe, le reflet de la cornée et la difficulté d'éclairage: nous devrions ajouter la couleur rouge antiphotogénique du fond de l'œil.

Grâce à l'intensité de l'éclair magnésique, ces deux dernières difficultés n'existent plus; mais on comprend facilement d'autre part les dangers qui peuvent résulter pour le sujet d'un tel éclairage : aussi ces expériences ne doivent être faites qu'avec la plus grande prudence.

Les premiers essais de photographie du fond de l'œil furent entrepris en i865 par Rosebrugh, qui fit construire à cet effet un ophtalmoscope spécial, mais les résultats obtenus étaient loin d'être satisfaisants.

En 1887, M. Gustave Paul dans une thèse, M. Lucien Hoove dans les Transactions of the american ophtalmolo g ical Society indiquent d'autres méthodes.

La même année Piffard prétend être arrivé à résoudre le problème, mais tous ces essais ne paraissent pas avoir été couronnés de succès.

D'autre part, Giraud-Teulon, qui, en 1886, venait de construire son ophtalmoscope binoculaire à éclairage direct, entreprenait avec M. Peuchot des recherches photographiques à l'aide de ce nouvel instrument. L'appareil, au moyen de prismes, permettait d'examiner le fond de l'œil et de le photographier en même temps. A ce point de vue particulier l'instrument était très ingénieux. Giraud-Teulon nous fît alors l'honneur de nous demander notre concours pour les recherches à entreprendre, mais la mort vint le surprendre.

Dans le procédé de Giraud-Teulon le grand écueil provenait du reflet cornéen qu'on ne pouvait éliminer.

C'est alors que M. Galezowski, qui lui aussi s'était occupé de la question, demanda à M. Peuchot de continuer ses recherches en portant les efforts sur la suppression du reflet cornéen. Tous les procédés de polarisation de la lumière (lames parallèles, prismes de Nicol) furent employés sans résultat, ainsi qu'il résulte de la

Communication de Galezowski au Congrès d'Heidelberg en 1887.

Galezowski place alors devant l'œil une cuve remplie d'eau ayant en avant et sur le côté temporal une lame de verre à faces parallèles, à l'intérieur un miroir percé à son centre et incliné à 45° la surface argentée du côté du patient. Dans ces conditions le reflet de la cornée est complètement supprimé. On place une lentille de force équivalente en avant de la cuve et on recueille l'image au moyen d'un appareil photographique ordinaire.

En dernier lieu, il faut citer un procédé qui vient d'être publié récemment et qui, se rapprochant du dernier par certains points, est néanmoins absolument différent.

Une cuve remplie de la solution physiologique de chlorure de sodium et garnie sur sa face antérieure d'une lame de verre à faces parallèles est fixée devant l'œil. Elle est maintenue par des caoutchoucs enserrant la tête. L'œil est au préalable alropinisé et cocaïne, le menton placé sur un support fixe. L'œil est dirigé de façon à regarder une bougie placée à une distance éloignée. La source d'éclairage artificiel est placée à gauche et séparée de l'œil par un écran que l'on enlève au moment de l'opération. Si l'on se sert de l'éclair magnésique l'écran est inutile. Le réflecteur consiste en un miroirlaryngoscopique convenablement placé; derrière l'ouverture de celui-ci on place l'objectif et l'appareil photographique. Avec ce dispositif, paraît-il, les reflets de la cornée sont évités et l'on obtient d'excellentes épreuves.

Nous avons eu entre les mains une épreuve obtenue par ce procédé, on distingue parfaitement la papille et les différents vaisseaux du fond de l'œil.

C'est là un véritable progrès sur ce qui a été fait jusqu'à présent et avec quelques perfectionnements qui s'imposent pour protéger la rétine contre l'action directe de la lumière, il est certain que la photographie du fond de l'œil entrera dans la pratique et permettra aux oculistes d'obtenir des documents authentiques cl durables.

Enregistrement. —En Physiologie, on fait usage constamment d'appareils spéciaux, qui sont destinés à enregistrer au moyen de courbes variées tous les phénomènes normaux ou anormaux de la

(«) Dans leurs expériences et pour ne pas compliquer les graphiques obtenus,

vie animale qu'on ne saurait analyser directement avec assez de précision : c'est ainsi qu'on étudie la respiration, les mouvements du cœur, les efforts musculaires, les tremblements, etc.

La plupart des instruments employés et qui ont été si perfectionnés par le professeur Marey rendent tous les jours les plus grands services, et il ne saurait être question d'appliquer à ces éludes les méthodes photographiques qui, elles aussi, pourraient être utilisées, mais seraient cependant infiniment moins pratiques.

Il est néanmoins quelques cas où elles peuvent être employées utilement à cause de certains avantages qu'elles présentent. Tout appareil enregistreur placé sur un organe qu'on veut étudier peut, à cause de son poids et de la gêne qu'il amène, introduire certaines perturbations susceptibles de fausser les résultais. Avec les méthodes photographiques dont nous allons parler, cet écueil sera évité en grande partie.

En effet, elles reposent sur l'emploi d'une source lumineuse qui vient tracer une courbe sur une plaque sensible. On peut opérer avec une source de lumière fixe et au moyen d'un miroir placé sur la partie à étudier, en recevoir tous les mouvements si faibles qu'ils soient. On peut encore placer sur la partie à étudier une petite lampe à incandescence et en enregistrer directement tous les déplacements.

Parmi les applications de ces procédés, il faut citer les intéressants travaux du Dr Quenu et de M. Demeny, le collaborateur de M. Marey.

Les auteurs ont fait une étude très approfondie de la locomotion humaine dans les cas pathologiques : pour avoir tous les documents nécessaires afin d'étudier une affection de la marche soit normale, soit pathologique, il est indispensable d'obtenir la trajectoire de divers points du corps et, par les procédés ordinaires d'enregistrement, il serait évidemment difficile d'arriver à ce résultat.

Voici comment les auteurs procèdent. On fixe sur les diverses articulations des membres à étudier, sur la hanche et l'épaule de petites lampes à incandescence (1 ). Les fils amenant le courant sont

MM. Quenu et Demeny ne prennent que les trajectoires des membres d'un seul côté.

suspendus à un chariot mobile coulissant dans la direction que doit suivre le sujet. Cette direction est perpendiculaire à l'axe de la chambre noire dans laquelle on va recueillir les images de ces lampes. On opère, bien entendu, dans l'obscurité.L'appareil étant prêt à fonctionner, que va-t-il se passer si l'on allume les lampes et si l'on fait progresser le malade ? Les lampes traceront sur la plaque sensible des trajectoires qui indiqueront à chaque instant la position de la partie correspondante du sujet étudié.

Mais ces trajectoires seraient incomplètes si l'on n'y adjoignait l'indication du temps. A cet effet, un disque fenêtre fonctionne devant l'objectif et ne laisse passer les rayons venant des lampes que tous les vingtièmes de seconde. Les trajectoires ne seront plus continues mais bien formées d'une série de points plus ou moins rapprochés, suivant la vitesse propre de chaque partie du corps, l'intervalle entre deux de ces points étant toujours de jô de seconde. En réunissant par des traits les points correspondants à chaque image, il sera facile de reconstituer la position du membre à chaque instant.

Cette méthode très intéressante, qui est dérivée de celle employée par M. Marey pour l'étude de la locomotion, est plus facile à organiser, car on opère dans une pièce sombre et il n'est pas besoin d'une installation spéciale et de la lumière du soleil.

L'appareil de MM. Quenu et Demeny se trouve à l'hôpital Beaujon.

Nous inspirant de cette méthode, nous l'avons appliqué avec M. Dutil à l'étude clinique des tremblements hystériques. La lampe à incandescence était placée sur le dos de la main du malade et son image reçue sur une feuille de papier sensible montée sur le cylindre d'un régulateur Foucault. Il était nécessaire d'opérer ainsi, car la main reste toujours sensiblement à la même place; c'est donc la surface sensible qui doit se déplacer continuellement. On pourra avec cette méthode, modifiée suivant les diverses hypothèses, obtenir l'enregistrement de phénomènes de longue durée : il suffira de faire déplacer lentement l'appareil

enregistreur, et l'on obtiendra une trace sinusoïdale de grande longueur qui affectera un caractère variable suivant la nature du tremblement (fig- 58).

Fig. 58.

Reproduction d'écritures. — Certains nerveux ou sujets atteints de crampes variées voient leur écriture se modifier. Un médecin expérimenté, d'après l'examen de quelques lignes écrites par le malade, pourra en tirer des indications sérieuses au point

Fig. 59.

de vue du diagnostic; car ces modifications de l'écriture sont, dans certains cas, absolument typiques.

La Photographie interviendra pour reproduire ces écritures, s'il est nécessaire de le faire et ceci sans en altérer en quoi que ce soit le caractère (fig- 59).

Peut-être même y aurait-il intérêt dans certains cas àphotogra

phier l'attitude prise par le malade lorsqu'il écrit, mais nous n'avons pas entendu dire qu'il ait été fait des recherches de ce genre.

Lorsqu'il s'agit de projeter l'écriture elle-même pour un cours, une conférence, on peut faire écrire avec une pointe sur une lame de verre enfumé, et cette lame de verre est mise directement dans l'appareil de projection. Malheureusement la conservation de ces types est très délicate; aussi avons-nous pensé qu'il serait utile de pouvoir en faire la reproduction simple et rapide sans même employer le matériel photographique nécessaire dans cette hypothèse. Voici comment nous opérons. Nous prenons une plaque sensible et dans le laboratoire noir, bien entendu, nous posons sur celle-ci le verre portant l'écriture, le côté enfumé par-dessus. L'image à reproduire et la couche sensible sont séparées par l'épaisseur de la lame de verre enfumé. Il semblerait donc a priori impossible d'obtenir une reproduction nette du trait existant; rien n'est cependant plus facile, à condition d'employer un faisceau de lumière parallèle. Dans ce cas l'image sera rigoureusement nette. En pratique, nous opérons en nous plaçant sous un bec de gaz papillon dont la flamme est horizontale; il peut être bon également de mettre les deux plaques au fond d'une caisse profonde ouverte aux deux, bouts et qui sera placée exactement en dessous de la source lumineuse.

PHOTOGRAPHIE A LA LUMIÈRE ARTIFICIELLE.

Jusqu'à présent, nous avons décrit les résultats que l'on peut obtenir, soit dans l'atelier, soit au dehors, c'est-à-dire dans de bonnes conditions de lumière. Or il n'en sera pas toujours ainsi et l'on pourra être conduit, par suite des circonstances, à opérer dans des salles d'hôpital ou dans des locaux insuffisamment éclairés. Les temps de pose se trouveront par suite considérablement allongés et l'on rencontrera de réelles difficultés à travailler dans ces hypothèses.

Il faudra alors avoir recours aux lumières artificielles. Jusqu'à ces dernières années on opérait avec l'éclairage obtenu par la combustion du magnésium en ruban. On obtient ainsi une lumière considérable qui permet de remplacer celle du jour. Néanmoins il

est encore nécessaire de poser quelques secondes, et ce sera quelquefois beaucoup trop, car nous savons qu'avec les malades il ne faut pas trop compter sur l'immobilité.

Mais, depuis quelque temps, on emploie le magnésium à l'état de poudre, soit seul, soit mélangé à d'autres substances. Dans le premier cas, on projette le métal finement divisé dans une flamme suffisamment chaude pour en opérer la combustion; dans le deuxième, on se contente de l'enflammer. Dans les deux cas, on obtient une lumière d'une intensité surprenante et d'une durée très courte, d'où le nom à'éclair magnésique qu'on emploie fréquemment.

Avec l'éclair magnésique on pourra donc résoudre toutes les difficultés qui pourront se présenter; il ne sera même pas nécessaire de prévenir le malade. La durée de combustion est si courte, que la Photographie est prise avant qu'il ait eu le temps de fermer les yeux, ce qui arrive fatalement lorsqu'une lumière intense vient agir sur la rétine.

Mais ce résultat n'est obtenu qu'avec les mélanges de magnésium et de produits riches en oxygène, car, avec le magnésium seul insufflé dans une flamme, la durée de combustion est bien plus lente; on risque d'avoir une épreuve floue par suite de la surprise qu'éprouve le sujet photographié.

Pour vérifier ce fait nous avons fait l'expérience suivante qui mérite d'être rapportée. On sait que, sous l'influence des vibrations lumineuses subites, les hystériques tombent en général en catalepsie. Si donc, une malade étant placée devant l'appareil et dans l'obscurité, on fait jaillir un éclair magnésique, elle tombera immédiatement en catalepsie. Si l'éclair est suffisamment rapide, elle sera reproduite dans son état naturel les yeux ouverts, sinon elle pourra être plus ou moins floue, car elle aura été photographiée pendant le passage de l'état de veille à celui de catalepsie. Or, avec le mélange de magnésium et de chlorate de potasse dont nous avons parlé, l'expérience nous a prouvé qu'elle était photographiée avant qu'elle ait eu le temps de remuer, tandis que, avec le magnésium ordinaire, elle est saisie précisément pendant la période de réaction, ce qui se traduit par un manque de netteté complet.

Il sera donc nécessaire d'adopter le dispositif qui permettra d'obtenir l'éclair le plus rapide possible. Pour notre part, nous avons rejeté tous les dispositifs qui consistent à insuffler du magnésium en poudre dans une flamme quelconque. Ces appareils sont peu réguliers, à cause des engorgements qui peuvent se produire dans les conduits de sortie du magnésium et surtout à cause des variations de la flamme. En effet, un mouvement trop brusque, un simple courant d'air amèneront dans la combustion du magnésium des différences très grandes et absolument imprévues.

Nous préférons employer un mélange composé de magnésium en poudre et de chlorate de potasse, mélange que l'on trouve tout fait chez MM. Delaperrière et Dida, les habiles successeurs de Ruggieri. Ce mélange est porté à une température suffisante et produit une lumière magnifique et très rapide. En effet, le chlorate de potasse se décomposant fournit immédiatement au magnésium tout l'oxygène nécessaire pour sa transformation en magnésie qui se produit pendant la réaction et donne ce nuage blanc très fin que l'on constate après l'inflammation.

Pour porter à une température convenable le mélange en question, nous nous servons soit de fulmicoton, soit d'un papier nitrifié appelé communément papier Bengale et que l'on trouve également chez MM. Delaperrière et Dida.

Nous prenons la quantité voulue de cette poudre éclair et nous la mettons dans un petit carré de papier bengale, nous replions ce papier de façon à enfermer le mélange dans son intérieur, puis nous enroulons les deux extrémités. Nous obtenons ainsi une véritable papillote, que nous pourrons placer à l'endroit le plus convenable pour obtenir un bon éclairage (fig. 60). Il faut en effet, dans la Photographie à la lumière artificielle, se rapprocher autant cpie possible des conditions dans lesquelles on opère à la lumière naturelle. On doit donc placer la charge de magnésium à une certaine hauteur et dans une direction telle que le modèle soit éclairé exactement comme dans l'atelier. Pour suspendre notre charge et l'enflammer en même temps, nous opérons ainsi. Nous prenons du fil de fulmi-coton et nous fermons notre papillote avec un morceau de ce fil qui serre les deux extrémités. Ce fildépasse la papillote

Fig. 60.

tinueront à brûler après l'inflammation et pourront occasionner des accidents. Au contraire, le fil de fulmicoton dont la^ combustion est si rapide brûle en un instant et tout est terminé.

Notre charge étant suspendue à la hauteur voulue, il n'y aura qu'à mettre le feu à la partie inférieure.

Ce dispositif nous a toujours donné d'excellents résultats : la combustion du mélange est infaillible et l'on peut être assuré absolument de l'effet qu'on obtiendra avec telle ou telle quantité de produit.

En général, pour faire un malade, il sera nécessaire de prendre

f f

2gr, 5, d'employer un objectif rectilinéaire diaphragmé ^ ou ^

environ. L'éclairage venant d'un seul côté, si l'on craint d'avoir les parties de l'ombre trop peu éclairées, on pourra se servir d'un écran blanc qui renverra sur elles une quantité de lumière appréciable.

La lumière artificielle est destinée à rendre les plus grands ser-

des deux côtés. Un de ces bouts servira à la suspendre, l'autre à l'allumer.

Il est évident que la partie supérieure du fil pourrait être un fil quelconque, puisqu'il n'a qu'un but, c'est de soutenir la charge. Mais si l'on prend du fil ordinaire ou de la ficelle, ces parties con-

Pl. X.

Spasme de la face hystérique, avant et après traitement.

vices pour la Photographie médicale. Elle permet d'obtenir d'excellents clichés dans une pièce quelconque et pourra éviter par suite la dépense de l'atelier. Elle sera aussi très précieuse pour opérer dans la mauvaise saison, alors que, même avec les préparations au gélatinobromure, on ne peut saisir les malades difficiles.

Cet hiver, nous avons opéré ainsi et les résultats ont été absolument satisfaisants. Grâce à l'emploi du dispositif que nous avons indiqué, on obtient des épreuves très douces, très modelées : cela tient au volume de la flamme qui est considérable.

Le mélange de magnésium et de chlorate de potasse ou d'autres matières oxydantes ne doit jamais être employé dans les lampes faites pour travailler avec le magnésium pur : on provoquerait l'explosion de l'appareil. Ce mélange doit toujours brûler à l'air libre. On peut cependant, dans un laboratoire et pour s'éviter la peine de faire les cartouches, employer un petit entonnoir métallique qui recevra la poudre. Un fort envoi d'air fait au moyen d'une poire en caoutchouc projettera le mélange dans une flamme quelconque. On obtiendra ainsi sans danger un éclair très rapide et très puissant.

Nous avons terminé l'étude des diverses applications de la Photographie médicale pendant la vie. Lorsque la guérison surviendra, une dernière épreuve terminera la série. Nous donnons (PL JC) un spécimen de ce genre. Il s'agit d'un spasme de la face et du cou d'origine hystérique; le n° 1 représente la malade à l'arrivée à l'hôpital : le spasme ne se produisait que lorsque le bandeau qu'elle portait habituellement était retiré, c'est ce que montre le n° 2; la troisième épreuve représente la malade guérie à sa sortie de l'hôpital.

chapitre v.

PHOTOGRAPHIE APRÈS DÉCÈS.

Lorsque la maladie a une terminaison fatale, le rôle du médecin n'est pas terminé : l'autopsie du sujet est quelquefois nécessaire; il devra en effet isoler les organes atteints et les conserver afin de les étudier ultérieurement. La Photographie ne lui sera pas moins utile que précédemment, pour noter l'aspect extérieur de pièces qui doivent subir des préparations ou des dilacérations avant d'être soumises à un examen plus délicat.

La reproduction des cadavres en entier, intéressante seulement dans quelques cas, ne présentera de difficultés sérieuses qu'en ce qui concerne l'installation de l'appareil. Les résultats les plus complets seront obtenus en disposant verticalement un appareil de format suffisant pour pouvoir prendre le corps tout entier. A vrai dire, nous n'avons pas entendu parler qu'il ait été fait d'installation de ce genre ; et pourtant dans l'amphithéâtre un appareil placé de façon à saisir la table d'autopsie permettrait de récolter sûrement des documents fort précieux.

A défaut de cette installation un peu spéciale, on placera le cadavre sur une civière fortement inclinée, et en penchant également l'appareil on atteindra le but cherché; mais si l'on peut le faire, l'emploi d'un appareil vertical sera toujours préférable. La question du temps de pose sera réglée d'après l'éclairage du local dans lequel on opérera, salle d'hôpital ou amphithéâtre. Si la lumière est par trop inégale, on pourra se servir d'une grande glace comme réflecteur afin d'éclairer les parties sombres ou bien encore de la lumière artificielle.

En ce qui concerne les pièces anatomiques fraîches, il y aura toujours avantage à les faire transporter dans l'atelier photogra-

(1 ) Cet appareil, exécuté sur nos indications et celles de notre collègue M. Thou-roude, figurait à l'Exposition universelle de j889.

phique. Les difficultés que l'on rencontre dans leur reproduction tiennent à la mollesse des tissus qui s'affaissent, à leur coloration et aux reflets qu'elles émettent.

Pour ce genre d'études, il faudra faire usage d'une chambre verticale. Parmi les plus perfectionnées nous citerons le physiographe universel de M. Donnadieu, qui est d'un fonctionnement irréprochable, mais malheureusement d'un pris de revient beaucoup trop élevé. Nous nous servons à la Salpêtrière d'une chambre qui a été construite par M. Mackenstein Cette chambre, du format 13 x 18, est à long tirage, et elle peut se placer soit verticalement, soit horizontalement. Le bâti d'arrière est beaucoup plus épais que dans les chambres ordinaires, et il permet, au moyen de portes latérales, de mettre directement au point l'image reçue sur une surface opaque. Ce dispositif, comme nous le verrons plus loin, nous servira également pour la Photographie microscopique. Dans l'espèce nous employons cette chambre disposée verticalement et effectuons la mise au point sur le verre dépoli comme d'habitude (fig. 61).

La pièce est placée soit sur une plaque de liège soit sur une planchette quelconque soit dans une cuvette de carton durci, si l'on veut un fond noir. On la cale et on la maintient dans sa position exacte au moyen de petits tampons d'ouate mouillée. Si elle est humide, et c'est ce qui arrive presque toujours, on l'essuie avec un papier buvard non pelucheux. Le choix de l'objectif devra être fait avec soin. Pour notre part, nous préférons dans ce cas les objectifs à très court foyer. Nous employons ordinairement un rapid rectilinear Dallmeyer de om, io de foyer. Cet objectif devra être fortement diaphragmé pour obtenir des divers plans avec une égale netteté. Les durées d'exposition seront en général assez longues, une ou plusieurs minutes au moins. Nous supposons en effet qu'on fait la reproduction de la pièce à l'échelle la plus grande possible.

Il y aura cependant des cas où ayant à reproduire des pièces de faibles dimensions, mais d'une épaisseur considérable, on éprou-

Fig. 61.

sorte la pièce avec du papier buvard non pelucheux (le papier employé en Chimie pour la filtralion des liquides est excellent). Si ce moyen est insuffisant on procédera différemment. On placera la pièce à reproduire dans un récipient rempli d'eau de façon qu'elle soit complètement recouverte. Cette manière d'opérer

vera de sérieuses difficultés. On devra alors faire un cliché à petite échelle aussi net que possible et l'agrandir postérieurement. Pour éviter les reflets, il faudra tout d'abord éponger en quelque

PI. XI.

Circonvolutions du cerveau.

est très précieuse également pour reproduire les tissus qui ont tendance à s'affaisser ou les pièces en cours d'autopsie. Ce procédé a donné entre les mains de M. Donnadieu de magnifiques résultats.

S'il s'agit de pièces dont il est important de bien définir les contours, on les mettra soit sur une lame de verre, soit dans une cuvette de verre, et l'on placera par-dessous, à 45°, un carton soit blanc soit de couleur appropriée pour donner un fond de la valeur désirée. Avec ce dispositif, toutes les ombres seront supprimées et l'on obtiendra une netteté de contours parfaite. Parmi les pièces que l'on aura souvent à reproduire, il faut citer le cerveau, dont il peut être important de conserver l'aspect à l'état frais, avant qu'il ait subi aucune opération pour obtenir son durcissement. On sait l'importance qu'a prise aujourd'hui la question des localisations cérébrales, et l'on n'ignore pas que des troubles nettement définis sont la conséquence de lésions affectant telle ou telle région des circonvolutions du cerveau.

Ces questions de topographie cérébrale peuvent être facilitées par l'obtention de clichés photographiques qui permettront ensuite de procéder à un examen plus complet de l'organe après en avoir gardé la physionomie exacte. Si l'on croit devoir faire des coupes longitudinales ou transversales du cerveau, on les photographiera successivement s'il est nécessaire. Nous donnons à titre de spécimen une reproduction d'une partie d'un cerveau vu latéralement; elle a été obtenue en plaçant le cerveau sous notre appareil vertical. Etant donnée la reproduction que nous avons faite à grande échelle et l'épaisseur de l'objet, il est nécessaire de diaphragmer fortement et de poser en conséquence. Le cerveau était calé au moyen de petits tampons d'ouate et la surface épongée avec du papier filtre de façon à enlever toute trace de liquide pouvant donner des reflets (Pl. XI).

Dans la Pl. XII, nous avons reproduit une coupe longitudinale d'un des hémisphères du cerveau. Ici, comme il n'y a qu'un plan à reproduire, on pourra opérer plus rapidement que tout à l'heure puisqu'il ne sera pas nécessaire de diaphragmer autant; l'épreuve montre parfaitement les détails de la substance blanche et les divers replis de la substance grise qui forment l'écorce du cerveau

et constituent les circonvolutions. Cette épreuve a été exécutée en photocollographie par notre préparateur, M. Sauvé fils, et le tirage fait à a5oo exemplaires dans notre atelier de la Salpêtrière.

Les arrêts de développement du cerveau, dans sa totalité ou l'une de ses parties, sont fréquents chez les idiots et les dégénérés. Il en est de même des hypertrophies de cet organe. La Photographie permettra de noter d'une manière très précise ces modifications et d'en donner une idée très exacte si l'on a soin de photographier toujours comparativement le même organe à l'état normal. Voici (Pl. XIII), la reproduction d'une atrophie cérébrale. L'un des hémisphères est absolument sain, l'autre est considérablement atrophié. La même différence se constate sur le bulbe, dont un des côtés est considérablement diminué par rapport à l'autre.

L'étude du bulbe et de la moelle allongée sera faite de la même manière lorsque les lésions seront localisées dans ces parties.

L'examen des divers organes, s'il est reconnu nécessaire par Je médecin, sera fait par les mêmes procédés, et, d'une manière générale, on peut dire que dans bien des cas il sera fort utile de conserver l'aspect d'une pièce anatomique quelconque avant de procéder à son étude plus approfondie, étude qui nécessite forcément sa dilacération plus ou moins complète.

L'examen du squelette et des diverses parties qui le composent pourra être également fort intéressant dans certaines hypothèses, qu'il s'agisse d'arrêt ou d'excès de développement ou même de fractures plus ou moins bien consolidées. La constitution des os peut même être modifiée profondément comme dans l'arlhropathie des ataxiques. Ils deviennent spongieux, friables et d'une solidité si médiocre que les malades en question se les brisent au moindre mouvement.

La reproduction de ces déformations sera faite avec facilité : il sera toujours bon, croyons-nous, de mettre à côté des épreuves des mêmes pièces normales. La comparaison sera ainsi plus facile et les moindres différences facilement perceptibles.

Ainsi dans la fig. 62, qui représente un crâne normal et un crâne d'acromégalique, on voit immédiatement leurs dissemblances. Le crâne d'acromégalique est beaucoup plus volumineux dans son

Pl. XIII.

Atrophie cérébrale.

Fig. 62.

Crâne d'acromégalique.

Crâne normal.

ensemble : de plus l'ossature du nez et celle des mâchoires et, en particulier, du maxillaire inférieur, qui ont des dimensions bien supérieures à celles de la normale, expliquent bien les raisons anatomiques de ce faciès typique de l'acromégalie dont nous avons parlé précédemment (1 ).

Mais ce ne sera pas encore tout : si l'étude de ces lésions macroscopiques qui constitue ce qu'on pourrait appeler la géographie pathologique a une grande importance, elle sera suivie avec un succès non moins grand par un examen plus profond, qui sera la topographie pathologique. Celle-ci sera faite avec le microscope et constitue une branche très importante de la Photographie médicale.

Microphotographie. — Si nous voulons pousser l'analyse plus loin et examiner la structure même des tissus, il faudra opérer différemment et recourir au microscope qui nous permet de discerner les éléments les plus ténus de l'organisme. C'est grâce à cet instrument que les plus belles découvertes concernant les infiniment petils ont été faites. L'étude des microbes, des divers tissus soit sains soit malades, constitue une science spéciale, Y Histologie. Son influence sur les progrès delà Médecine et de la Chirurgie est indiscutable. Avant de songer à guérir, il faut savoir quel est le mal et où il se trouve.

Sans diminuer en rien la valeur des matériaux amassés par l'his-tologiste, on peut néanmoins leur reprocher deux choses, leur altérabilité et leur unité. Nous voulons dire, et les faits sont malheureusement là pour le prouver, que les préparations histolo-giques n'ont qu'une durée assez problématique et que leur divulgation est chose presque impossible (2).

(1) Il pourra être aussi très utile de faire des épreuves stéréoscopiques qui montreront les reliefs avec un caractère de vérité indiscutable. C'est ainsi que MM. Debierre et Doumer ont procédé dans leur beau travail sur les centres nerveux.

(2) Nous ne prétendons pas dire qu'il soit impossible de conserver des préparations un grand nombre d'années, ce serait inexact; mais il peut arriver que l'on fasse une découverte importante sur une préparation qui n'a pas été faite spécialement en vue d'être conservée et il faudra bien dans ce cas en garder l'image fidèle; d'autre part, la préparation est fragile et un accident est toujours à craindre.

Il est assurément regrettable de savoir que des documents de grande valeur sont destinés à disparaître un jour ou l'autre et que l'on ne peut en faire profiter tous ceux qui auraient intérêt à les connaître et à les étudier.

La Photographie peut cependant combler avec facilité cette double lacune et c'est ce qui explique le développement qu'ont pris depuis quelques années les études microphotographiques.

MATÉRIEL NÉCESSAIRE POUR LES ÉTUDES MICROPHOTOGRAPHIQUES.

Ce matériel se compose du système optique servant à éclairer la préparation, du microscope destiné à agrandir celle-ci à la taille voulue et de la chambre noire destinée à recevoir l'image.

Nous compléterons cette étude en donnant quelques indications sur les qualités que doivent avoir les préparations ainsi que sur les procédés de coloration à employer.

Système optique. — Bien que dans la pratique ordinaire du microscope on fasse peu usage de lumière artificielle et qu'à la rigueur on puisse opérer de même dans la Photographie microscopique, nous croyons qu'il est indispensable de travailler avec une source de lumière très intense; son emploi nous permettra d'effectuer la mise au point avec grande facilité et de réduire le temps de pose à des limites raisonnables. La chose n'est pas indifférente, car, lorsque l'on emploie de forts grossissements ou que l'on fait usage de diaphragmes un peu petits, la lumière diffuse entraîne à des durées de pose par trop considérables.

Nous entendons par lumière naturelle la lumière diffuse du jour réfléchie par le miroir du microscope, et nos remarques ne s'appliquent nullement à la lumière solaire. Celle-ci est du reste la source de lumière la plus intense que nous connaissions et la plus économique indiscutablement. Malheureusement, si elle est à la portée de tous, sans bourse délier, elle a un grave défaut, c'est d'être inconstante ou irrégulière. Elle est un collaborateur des plus précieux, mais qui peut faire défaut précisément au moment où l'on a besoin de lui. Son usage n'est nullement compatible

Fig. 63.

qui est du reste le moins coûteux des appareils existants, est celui de M. Prazmowski ; il nous a toujours donné d'excellents résultats.

Malgré les avantages de la lumière solaire au point de vue de l'intensité, nous préférons de beaucoup, dans la pratique, les éclairages artificiels que l'on a toujours à sa disposition et qui permettent le travail à tout instant.

Il en est trois que l'on emploie avec égal succès, ce sont : la lampe à pétrole, l'éclairage électrique et la lumière oxhydrique.

i° Lampe à pétrole. — Il faut prendre des lampes de fort calibre à trois ou cinq mèches. Elles produisent une très belle lumière et n'ont que l'inconvénient de donner beaucoup de chaleur. Il faut les entretenir avec soin et couper la mèche avant chaque séance.

avec un travail régulier et de tous les instants. Aussi ne l'emploie-t-on que dans quelques cas exceptionnels, lorsque l'on a besoin d'un maximum de lumière et, dans ce cas, on ne travaille que lorsque le soleil se montre dans tout son éclat. Pour en diriger la marche et maintenir les rayons dans l'axe du microscope, on emploie un instrument spécial, Vhéliostat. Cet appareil (fig- 63) permet, malgré le déplacement continuel du soleil, de maintenir ses rayons dans une direction constante. Le modèle que nous employons, et

Fig. 64.

A, tube servant à monter le chalumeau; B, support du bâton de chaux; G, vis de serrage, permettant d'avancer ou de reculer le bâton de chaux; D, E, tubes séparés pour l'arrivée des deux gaz; F, tube de sortie du mélange des deux gaz; II, robinet de réglage de l'hydrogène; 0, robinet de réglage de l'oxygène.

Elle exige, il est vrai, un matériel spécial, mais elle se trouve habituellement dans la plupart des laboratoires, car c'est la même qui est employée pour les projections.

Le chalumeau à lumière oxhydrique (fig-64) se compose d'un pied métallique supportant le bâton de chaux ; deux tubes concentriques

a0 Eclairage électrique. — Cet éclairage est employé avec succès par un certain nombre de personnes. Il a l'avantage de dégager beaucoup moins de chaleur que la lampe à pétrole, de se prêter à des allumages et à des extinctions faciles et surtout de s'adapter commodément sous le microscope. On se sert, en effet, de petites lampes à incandescence de faibles dimensions que l'on place directement sous la platine. Le filament doit être rectiligne et ne pas dépasser 2mm à 3mm, de façon à donner un point bien lumineux. On trouvera avantage à faire argenter une moitié de la lampe qui servira ainsi de réflecteur. Ces lampes sont actionnées par une batterie au bichromate de potasse ou par des accumulateurs.

Maintenant que les installations électriques se développent dans les grands centres, ce mode d'éclairage deviendra de plus en plus pratique.

3° Lumière oxhydrique. — Cette lumière est obtenue par la projection, sur un bâton de chaux, d'un mélange d'oxygène et d'hydrogène ou, plus simplement, en place de celui-ci, de gaz d'éclairage. On obtient ainsi un foyer lumineux des plus intenses et, à notre avis, c'est cette combinaison qui est préférable.

amènent en face de celui-ci le mélange d'oxygène et de gaz d'éclairage. Ce mélange, qui est très détonant, ne se fait qu'à la sortie des tubes, ce qui évite tout danger. L'un des tubes est en relation avec le réservoir d'oxygène, l'autre avec la conduite de gaz d'éclairage : des robinets permettent de régler l'arrivée de ceux-ci.

Actuellement on trouve à Paris, à la Compagnie de l'oxygène, des tubes d'oxygène comprimé qui sont d'un emploi fort commode. Si l'on n'a pas cette facilité, il faudra préparer l'oxygène soi-même. Cette opération n'est pas bien compliquée, mais nécessite un matériel spécial. On trouvera tous les détails de la fabrication de l'oxygène dans le Traité pratique des agrandissements photographiques de M. E. Trutat.

Règles pratiques pour l'emploi de la lumière oxhydrique.

— Le réservoir d'oxygène et la conduite de gaz étant reliés aux deux tubes du chalumeau au moyen de tubes en caoutchouc, on veille à ce qu'aucune fuite ne se produise : c'est une question de bonnes ligatures. On ouvre le robinet du gaz que l'on enflamme; on tourne alors le bâton de chaux sur son axe de façon à l'échauffer progressivement et à éviter son éclatement. Lorsqu'il est suffisamment chaud, on envoie peu à peu l'oxygène et l'on règle les deux robinets de façon à avoir la lumière la plus intense possible sans cependant qu'il y ait sifflement.

Lorsque l'on travaille d'une manière continue, qu'il faut à chaque instant de la lumière, il nous paraît plus commode d'installer un dispositif très simple qui permet, avec un réglage fait une fois pour toutes, d'allumer, d'éteindre avec facilité, d'éviter par suite les dépenses inutiles et d'obtenir cependant toujours la même intensité lumineuse.

Ce dispositif, que nous avons imaginé et appliqué lorsque nous travaillions avec le D1 Paul Blocq à notre Atlas d''Anatomie pathologique de la moelle épinière, est ainsi composé :

Sur le tube amenant l'oxygène (fig. 65), nous mettons à portée de notre main un robinet qui permet l'arrivée ou la suppression du gaz. Le robinet du chalumeau sert à régler la quantité d'oxygène qui doit brûler.

Sur la conduite de gaz nous adaptons un système différent ; nous

Fig. 65.

RaO, robinet d'arrêt de l'oxygène; RrO, robinet de réglage de l'oxygène; Rail, robinet d'arrêt de l'hydrogène; RrH, robinet de réglage de l'hydrogène; RtH, robinet de réglage de l'hydrogène pour maintenir la flamme en veilleuse.

mages à chaque instant, l'autre commande l'arrivée ou la fermeture du gaz. La quantité de gaz qui doit brûler est réglée par le robinet du chalumeau.

Condensateur. — Quelle que soit la source de lumière adoptée, sauf peut-être pour les petites lampes à incandescence, il est nécessaire de concentrer le faisceau lumineux, soit sur le miroir si l'on opère par réflexion, soit sur la préparation elle-même si

plaçons vin ajutage à deux voies qui, toutes deux, vont aboutir après réunion au chalumeau. De ces deux voies l'une sert à entretenir constamment la flamme en veilleuse pour éviter les allu-

l'on opère directement. On emploie, à cet effet, des lentilles plan convexe ou des condensateurs spéciaux qui accompagnent ordinairement les microscopes. Le point de la préparation que l'on veut reproduire est alors très vivement éclairé; mais, lorsqu'il s'agira de photographier des coupes d'une certaine dimension, ce dispositif sera insuffisant et il faudra faire usage d'appareils spéciaux combinés pour donner un éclairage uniforme sur une surface plus grande.

L'appareil qui nous sert est le condensateur de J. Duboscq qui fait partie de son appareil pour projection de coupes. Il permet d'obtenir un champ uniforme d'éclairage de om, o3 de diamètre. Ce dispositif sera très précieux pour reproduire dans leur entier des coupes de tissus, des moelles, etc.

Microscope. — Tous les microscopes peuvent servir, mais ils se distingueront néanmoins les uns des autres par le plus ou moins de praticité.

La question primordiale et la plus importante est celle du choix des objectifs. Ils peuvent être excellents pour l'observation et plus que médiocres pour la Photographie. Ceci tient à ce que le système optique peut être achromatisé pour les rayons jaunes et ne pas l'être pour les rayons violets. Ce défaut est décelé facilement par l'expérience et l'on peut y porter remède de façon à utiliser les objectifs que l'on possède.

On s'aperçoit qu'un objectif n'est pas convenable pour la Photographie microscopique lorsque, après avoir mis exactement au point une préparation, le cliché n'est pas net; on dit alors que l'objectif a un foyer chimique. On arrive néanmoins à se servir d'un tel objectif en recherchant expérimentalement à quelle distance se forme l'image nette sur la plaque à partir du plan dans lequel se trouve le verre dépoli. Il suffit alors, une fois cette dislance connue, d'avancer ou de reculer la mise au point de cette même quantité.

A vrai dire, la plupart des objectifs de microscope que l'on fait actuellement n'ont plus ce défaut.

On emploiera, suivant le travail à exécuter, les objectifs grossissant convenablement. Bien que, par suite d'un préjugé que nous

Fig. 66

l'étroitesse du tube du microscope sera un obstacle insurmontable. Dans ce cas, on a proposé d'employer des microscopes spéciaux dont le tube a de grandes dimensions, tels que ceux de M. Yvon (fig. 70), de M. Dumaige (fig. 66). Nous préférons, pour notre part, employer le dispositif de Duboscq qui est éminemment pratique.

Dans les études microscopiques, on se sert conjointement de l'objectif possédant un grossissement déterminé et d'un oculaire qui augmente encore ce grossissement : c'est ainsi que l'on arrive à des grossissements considérables. L'oculaire a cependant un

ne comprenons pas, on s'adresse souvent aux fabricants étrangers, nous devons reconnaître qu'il existe en France un certain nombre d'opticiens qui peuvent lutter avec succès contre l'étranger.

Toutes les fois qu'il s'agira de photographier un point de la préparation, les microscopes ordinaires s'y prêteront admirablement; s'il s'agit de grandes surfaces, de moelles par exemple,

En général, dans les opérations de microphotographie, il sera nécessaire d'employer des diaphragmes quelquefois assez petits

(') Il est bien entendu que, dans les cas où il sera nécessaire d'avoir des grossissements très considérables, il faudra employer l'oculaire. On éprouvera plus de difficultés pour effectuer la mise au point parce que l'image est moins éclairée, et il faudra de plus augmenter considérablement les durées d'exposition.

inconvénient, c'est celui de supprimer une grande quantité de lumière. Aussi nous préférons toujours travailler avec l'objectif seul (' ). Nous avons, en effet, grâce au tirage de notre chambre, le moyen d'obtenir par son allongement des agrandissements considérables.

Fig. 67.

pour augmenter la netteté générale. Avec les objectifs faibles, ils doivent être placés dans l'intérieur de ceux-ci entre les lentilles. Pour les forts grossissements on emploie, en général, un diaphragme iris placé en avant de la préparation.

Pour les faibles grossissements, on pourra se contenter de déplacer la préparation à la main afin de trouver le point que l'on veut reproduire; pour les forts grossissements, il sera indispensable d'utiliser les platines à double mouvement. Grâce à elles, on peut explorer mathématiquement la préparation et arriver à la plus grande précision. Nous donnons (fig. 67) le dessin du modèle de platine de Karl Zeiss. On voit parfaitement les deux boutons qui permettent de déplacer la préparation dans un sens ou dans un autre. En dessous de la platine se trouve un troisième bouton que l'on aperçoit en pointillé et qui permet de faire tourner la préparation sur un axe idéal qui coïnciderait avec l'axe optique de l'objectif.

Modifications à apporter à l'éclairage. — Le lecteur n'est pas sans savoir que les procédés photographiques employés couramment sont loin de rendre toutes les valeurs de l'original, lorsque celui-ci présente des colorations variées. Certaines couleurs, très intenses pour notre œil, n'ont qu'une action très faible sur la couche sensible, alors que d'autres, au contraire, sont plus visibles, si nous osons nous exprimer ainsi, pour la plaque que pour notre œil. Il s'ensuit que les effets peuvent se trouver complètement renversés. C'est là un écueil qu'il s'agit d'éviter.

On peut obtenir ce résultat soit par l'emploi des plaques isochromatiques, soit par l'interposition de milieux colorés. Examinons successivement ces deux manières d'opérer.

i° Emploi des plaques isochromatiques. — Si l'on incorpore dans la couche sensible des substances chimiques capables d'absorber certains rayons du spectre, on constate que la plaque est devenue plus sensible précisément pour ces rayons. Telle est la base de l'isochromatisme. Les substances que l'on emploie le plus fréquemment sont l'éosine, la chorophylle, la cyanine, etc. La présence de ces substances modifie complètement la sensibilité des plaques pour tel ou tel rayon du spectre. Il s'ensuit que, dans

chaque cas déterminé, il faudra adopter tel ou tel produit susceptible de donner le meilleur résultat. C'est là une étude très délicate et nous engageons le lecteur qui voudrait approfondir la question à consulter les Ouvrages spéciaux.

La préparation des plaques isochromatiques se fait maintenant industriellement; on trouve des plaques sensibles au vert et au jaune, au jaune et au rouge (' ). L'addition de la matière est faite dans l'émulsion même. Mais ces plaques ne sauraient suffire dans tous les cas et l'on peut être conduit à faire des essais avec les diverses substances que nous venons de mentionner.

Le mode d'opérer est élémentaire. Il suffît de faire des solutions très diluées des substances en question, au par exemple, d'y plonger la plaque pendant deux minutes, de la laver abondamment et de la faire sécher.

Pour bien se rendre compte des résultats obtenus, il faut faire des essais préliminaires d'après un spectre bien pur, mais, en pratique, on pourra se contenter de photographier un des spectres que l'on trouve dans les bons Ouvrages de Physique ou de Spec-troscopie.

L'emploi des plaques isochromatiques est très délicat et il faut une certaine expérience pour en tirer le maximum d'effet. Ainsi, avec les plaques isochromatiques du commerce, on obtient assez souvent des résultats peu concluants. Si alors on interpose une légère pellicule jaune, immédiatement les résultats changent du tout au tout.

2° Emploi des milieux colorés. — Nous arrivons à parler d'une autre méthode qui consiste à interposer sur le trajet des rayons lumineux des verres ou des liquides colorés, tout en employant les plaques ordinaires non isochromatisées. Ce dispositif nous paraît préférable, car il permet plus facilement les essais et la pratique montre que les résultats peuvent être aussi parfaits qu'avec les plaques isochromatiques. Si l'on emploie des verres colorés, ils devront être taillés à faces parallèles de façon à ne pas apporter de perturbation dans la marche des rayons

(') Ces plaques spéciales sont préparées par la maison Lumière, de Lyon ; M. At-tout-Tailfer fabrique également d'excellentes plaques isochromatiques.

Fig. 68.

reil tel que celui que nous avons fait construire pour le laboratoire de la Salpêtrière. C'est une chambre à très long tirage (celui-ci peut être de 2m s'il est nécessaire) se plaçant verticalement ou horizontalement (fig- 68). Chaque opérateur peut préférer l'une ou l'autre

lumineux. Si l'on se sert de liquides, ceux-ci devront être mis dans des cuves à faces parallèles.

Le principe sur lequel on se base n'est plus le même que tout à l'heure.

Le verre coloré est destiné à retenir les rayons qui seraient trop actifs et à laisser passer uniquement ceux que l'on désire faire agir. Ainsi un verre rouge laissera passer les rayons rouges et arrêtera les rayons violets.

Le choix du verre convenable devra être fait dans chaque cas en se réglant sur ce que nous venons de dire.

Nous devons ajouter que cette méthode sera complétée avantageusement en combinant l'effet des milieux colorés avec l'emploi des plaques isochromatisées pour telle ou telle couleur : on obtiendra ainsi des effets plus complets et surtout une grande diminution de la durée du temps de la pose.

Chambre noire. — En principe, toute chambre peut servir pour la Photographie microscopique au moyen de quelques petites modifications ; mais, à notre avis, il vaut mieux employer un appa-

(') Il est bien entendu que l'on ne peut opérer ainsi que si l'appareil est placé dans une pièce obscure.

disposition, et, dans certains cas, elle est indiquée obligatoirement par le mode d'éclairage ou la nature de la préparation. Ainsi, si l'on opère avec un héliostat ou une lumière oxhydrique, il pourra être plus avantageux de placer l'appareil horizontalement, l'examen de l'image étant également plus commode; d'autre part, si l'on a affaire à des objets animés en suspension dans un liquide, il est évident qu'il faut opérer verticalement. Le cadre d'arrière est plus grand que dans les appareils ordinaires et il permet, au moyen de trois portes latérales, d'examiner directement l'image dans le plan focal. A cet effet, au lieu de mettre au point sur le verre dépoli, ce qui est quelquefois très délicat à cause du grain de celui-ci, on met au point sur une feuille de papier blanc collée sur une glace. Celle-ci se place donc dans le châssis négatif et on lui substitue, au moyen de l'opération, la plaque sensible De cette manière, on est assuré de la concordance rigoureuse des deux surfaces, ce qui n'arrive pas avec les châssis ordinaires dans lesquels la plaque ne se trouve pas toujours exactement en concordance avec l'emplacement du verre dépoli.

La réunion de la chambre noire au microscope se fait au moyen d'une enveloppe en étoffe souple et imperméable à la lumière. Ce détail est important, car le moindre mouvement de l'appareil pourrait se transmettre au microscope et déranger la mise au point et le centrage. De plus, si le poids de la chambre venait à porter sur le microscope, le fonctionnement de la vis micrométrique se trouverait compromis.

Dispositions générales. - En principe, nous préférons installer notre appareil micrographique dans une pièce sombre : la mise au point s'effectue avec beaucoup plus de facilité. Néanmoins, pour certains travaux courants, il peut être préférable d'installer l'appareil photographique dans le laboratoire clair ; on étudie la préparation au microscope et on la photographie lorsqu'il est nécessaire. Dans ce cas, on installe l'appareil verticalement sur un support peu élevé du sol, de manière que le verre

dépoli se trouve à une hauteur convenable; on dispose par devant le dispositif éclairant auquel on donne la préférence ; pour notre part, comme nous l'avons dit, nous employons toujours l'éclairage oxhydrique. Sur le pied de l'appareil se trouve une équerre en bois destinée à encastrer le microscope et à le mettre sans tâtonnements à la place voulue. Lorsque l'on a bien déterminé la partie que l'on veut photographier, on immobilise la préparation sur la platine à l'aide de volets et l'on porte le microscope sous la chambre noire. On le réunit au moyen d'un cône en caoutchouc ou d'un petit soufflet très léger qui vient s'engager sur le tube du microscope. On règle alors la lumière et on effectue la mise au point en avançant ou en reculant le verre dépoli et en agissant sur la crémaillère du microscope; on diaphragme s'il est nécessaire et on interpose également les solutions colorées. La mise au point s'effectue sur le verre dépoli, la tête de l'opérateur étant abritée sous un voile noir. Pour les mises au point délicates, on peut trouver avantage à faire remuer le verre dépoli dans son logement; de cette manière, son grain disparaît et l'opération est bien facilitée. On peut encore se servir pour achever la mise au point d'une glace bien pure sur la face inférieure de laquelle on a tracé des traits au diamant. Une loupe est alors posée sur cette glace de manière que l'on voie avec netteté les traits; lorsque l'image est également nette, on est assuré qu'elle se fait exactement dans le plan convenable.

Une fois la mise au point effectuée, on interpose un écran opaque quelconque sur le trajet des rayons lumineux, puis on substitue avec précaution le châssis contenant la plaque sensible au verre dépoli. On pose alors le temps voulu et l'on procède ensuite au développement par les procédés habituels.

Ce dispositif vertical doit être employé pour toutes les préparations à l'état frais ou pour les corps en suspension dans un liquide.

Appareils spéciaux. — Le lecteur remarquera que nous lui indiquons les procédés les plus simples et les moins dispendieux. Il est clair que dans un laboratoire spécialement destiné aux études microphotographiques on opérera différemment. On aura à poste

Fig. 69.

d'un prisme intérieur placé sur le trajet des rayons lumineux, d'examiner l'image, de la centrer et d'en parfaire l'éclairage. Le prisme est ensuite retiré et l'image va se peindre sur le verre dépoli; on effectue la mise au point photographique en agissant sur le bouton moleté qui, au moyen d'une tige de renvoi et de poulies, actionne la vis micrométrique du microscope. Cet appareil se prête aussi à l'obtention des épreuves instantanées, ce qui peut être très précieux pour l'étude des animaux en mouvement.

Nous citerons également l'appareil de M. Yvon, qui est construit par la maison Verick (fig. 70) ; il permet d'opérer soit avec l'objectif seul, soit avec l'objectif et l'oculaire, soit même de fixer les spectres d'absorption et d'émission. La disposition extérieure de cet instrument est la même que celle du microscope, mais le corps a un diamètre de om, 10 et une hauteur de om,3o, qui, au moyen d'une

fixe deux appareils, l'un vertical, l'autre horizontal, toujours prêts à fonctionner. Le microscope d'étude ne sera pas déplacé et l'on se contentera de porter les préparations, suivant les cas, sous l'un ou l'autre appareil.

On pourra employer, si l'on a les ressources suffisantes, des appareils très perfectionnés comme celui dont nous donnons le dessin ci-contre et qui est établi par l'habile constructeur M. Na-chet (Jîg- 69). Le microscope est placé horizontalement ainsi que la chambre noire. Un tube supérieur à angle droit permet, au moyen

Fig. 70.

Fig. 71

toutes la valeur de la correction que l'on doit effectuer lorsque l'objectif dont on se sert a un foyer chimique.

Sous la platine se trouve un obturateur mécanique qui sert à régler à volonté l'admission de la lumière. Le microscope est disposé de façon à employer la lumière électrique par incandescence, si l'on préfère ce mode d'éclairage. M. Yvon est partisan de l'em

glissière, peut être portée à om, 5o. Il est fermé par une boîte horizontale à coulisses qui peut recevoir soit le verre dépoli, soit le châssis contenant la surface sensible. La platine est munie d'une vis micrométrique spéciale qui permet de déterminer une fois pour

plôi exclusif de l'objectif. La netteté générale de l'image peut être très grande; mais, si l'on veut un grossissement considérable, on peut être amené à employer un tirage considérable, ce qui est une complication évidemment. Pour éviter une longueur exagérée de l'appareil et obtenir néanmoins des grossissements considérables avec l'objectif seul, M. Yvon met à la place de l'oculaire une lentille concave achromatique. Suivant la courbure de celle-ci on obtient des grossissements aussi considérables qu'on le désire. L'addition de cette lentille augmente la divergence des rayons qui la traversent et produit le même effet qu'une augmentation de tirage. Pour trouver la place à laquelle cette lentille doit être placée, le pas de vis de la pièce qui porte l'objectif se prolonge dans l'intérieur de l'appareil et l'on peut y placer facilement la lentille divergente dont nous venons de parler.

Nous croyons devoir décrire également le modèle que viennent de créer MM. Bezu et Hausser, les habiles successeurs de Praz-mowski.

Cet appareil a sa place tout indiquée dans un laboratoire médical, car il est disposé à la fois pour la Photographie microscopique et la Photographie macroscopique.

L'appareil est vertical et se compose de trois parties (fig. 71) :

i° Un solide tabouret de om, 55 de long sur om, 45 de large, supporté par des pieds de fonte. Ce tabouret porte à son centre un support en cuivre destiné à recevoir la base du microscope. Ce support peut monter et descendre au moyen d'une vis spéciale placée entre les quatre pieds; on peut donc monter et descendre à volonté le microscope tout entier.

Le microscope se fixe sur le support au moyen d'une vis de pression spéciale.

20 La table qui supporte la chambre noire. Cette table a les mêmes dimensions que le tabouret et elle est portée par quatre pieds en fonte d'une hauteur de om,45. Elle est percée à son centre d'une ouverture portant un tube de cuivre garni intérieurement de velours noir dans lequel on engage le tube du microscope.

3° La chambre noire composée d'une boîte cubique de om, i4

de côté surmontée d'un soufflet et du logement destiné à recevoir soit le verre dépoli, soit la surface sensible. Elle est guidée par deux colonnes métalliques, le long desquelles elle peut monter ou descendre sous l'action d'une double crémaillère. Ces règles ont im de hauteur au-dessus du niveau du tabouret. A cette distance l'image atteint le format

La boîte cubique qui est placée à la partie inférieure de la chambre noire est munie d'un volet latéral qui permet d'examiner l'image sur un petit verre dépoli vertical. L'image est renvoyée sur ce verre dépoli au moyen d'une glace à 45° que l'on amène au moyen d'un petit levier extérieur dans la position convenable.

Ce dispositif a pour but de chercher le point de la préparation que l'on veut reproduire et de bien centrer l'image. On peut même effectuer la mise au point, mais celle-ci sera toujours plus parfaite sur le verre dépoli supérieur.

Il faut signaler dans cet appareil un dispositif spécial qui permet à l'opérateur d'agir avec facilité sur la vis micrométrique du microscope. Un bouton spécial, moleté et garni de caoutchouc, peut être mis en contact avec la vis micrométrique. La tige de ce bouton traverse le plateau supérieur et se termine à son extrémité supérieure par une roue moletée de grand diamètre qui se trouve ainsi à portée de la main et permet d'imprimer à l'objectif des mouvements extrêmement petits, ce qui donne d'autant plus de perfection dans la mise au point.

Appareil de M. Duchesne. — Dans les divers dispositifs que nous avons indiqués, il faut, après avoir fait l'étude au microscope, transporter celui-ci sous l'appareil photographique, ou encore porter la préparation seule sur la platine d'un autre microscope spécialement réservé aux reproductions photographiques. Dans un cas comme dans L'autre, il faudra à nouveau retrouver l'éclairage le plus convenable pour mettre en lumière la partie que l'on veut reproduire. D'où perte de temps et, dans certains cas, difficultés sérieuses pour retrouver l'éclairage le plus convenable. On sait, en effet, que dans quelques études on ne peut discerner certains éléments qu'avec des éclairages d'une incidence particulière,

ce qui demande de longs tâtonnements avant d'atteindre le but cherché. Si l'on déplace soit le microscope, soit la préparation, il est évident que tout sera à recommencer, et, avec cette circonstance aggravante que la manœuvre du microscope adapté à la chambre photographique est infiniment moins aisée que dans l'observation directe.

La conclusion de ces observations est qu'il serait de beaucoup préférable de ne plus toucher le microscope et la préparation, une fois l'éclairage trouvé et, nous devons ajouter, une fois la mise en plaque faite. En effet, avec les forts grossissements, il est très long de retrouver le point exact de la préparation que l'on veut reproduire. Parmi les rares appareils basés sur ces remarques, il nous faut citer celui que M. Duchesne (d'Evreux) vient de faire construire (fig. 72) et qui a été montré au Conservatoire des Arts et Métiers, le 6 mars, par l'inventeur, au cours d'une Conférence très intéressante qu'il a faite sur la Microphotographie.

Cet appareil a pour but de laisser le microscope fixe et de permettre de lui superposer l'appareil photographique sans avoir rien à déranger.

L'appareil comprend une table de travail, dans le prolongement de laquelle se trouve un banc optique destiné à recevoir les appareils d'éclairage, les diaphragmes, les écrans colorés, en un mot tous les accessoires qui peuvent être utiles dans la circonstance.

Un plateau situé dans le prolongement du banc optique permet de placer une lampe oxhydrique ou électrique ou le miroir de l'héliostat. Pour effectuer le centrage de ces divers supports, on peut commander, au moyen de deux manivelles placées sous la main de l'opérateur, le déplacement du banc optique et celui du plateau. Une fois le centrage effectué, on enlève les manivelles et rien ne vient plus gêner l'opéra te ur.

La chambre photographique verticale est montée sur un bâti qui peut rouler sur des rails, et être amené ainsi au-dessus de la table d'expérience et par suite du microscope. La chambre photographique de grand format a un tirage considérable. On peut se servir de l'un ou de l'autre des cadres qui la constituent pour

Chambre microphotographique de M. Duchesne.

A, B, rails; C, table de travail; D, banc optique; E, plateau pour recevoir la source d'éclairage; d, d', manivelles de centrage du banc optique et du plateau ; H, J, I, cadres de la chambre ; M, N, volants permettant d'effectuer le déplacement des cadres de la chambre; V, soufflet de raccord du microscope.

Fig. 73.

obtenir tel ou tel grossissement. Les cadres de la chambre sont mus au moyen de vis sans fin et de volants toujours placés à portée de la main.

Cet appareil sera tout indiqué pour les études macrophotographiques. Tl suffit de monter sur l'appareil un objectif photographique approprié au travail que l'on veut exécuter.

Avec un appareil de ce genre, comme du reste avec la plupart des appareils microphotographiques, il est assez difficile d'agir sur la crémaillère du microscope, à cause de la distance à laquelle se forme quelquefois l'image.

Pour commander la vis micrométrique à distance, M. Duchesne a eu une idée très ingénieuse qui a été réalisée avec grand talent par M. Trouvé. Cet appareil se compose d'une turbine double à air qui actionne la vis micrométrique. Au moyen d'un double conduit en caoutchouc, en insufflant de l'air d'un côté ou de l'autre au moyen d'une poire pneumatique, on obtient le mouvement de la turbine dans un sens ou dans-l'autre et, par suite, on commande à distance avec grande précision le mouvement de la vis micrométrique.

L'appareil de M. Duchesne est un des plus complets qui aient été faits et sa place nous paraît tout indiquée dans les laboratoires de Microphotographie.

REPRODUCTION DES PRÉPARATIONS A LARGE SURFACE.

Le cas se présentera lorsque l'on voudra reproduire des moelles, par exemple, des fragments de cerveau, des coupes d'os, des portions de tissus quelconques, etc. Le dispositif que nous avons indiqué devra être modifié, car, d'une part, la platine du microscope est trop étroite, et, de l'autre, le miroir ne peut donner un éclairage suffisamment uniforme sur une aussi grande surface.

Dans ce cas il faudra employer un condensateur produisant un cercle d'éelairement beaucoup plus grand.

Voici le dispositif que nous avons employé pour exécuter les photographies de moelles qui figurent dans VA fias d'anatomie pathologique de la moelle épinière; il pourra servir d'exemple pour l'exécution de clichés analogues.

Nous nous sommes servis du microscope à projection deDubosq, mais en remplaçant les objectifs spéciaux pour la projection par les objectifs de notre microscope. Cet appareil était monté sur la lanterne oxhydrique : il donne un champ uniformément éclairé de om,o3 de diamètre, et permet facilement l'emploi de solutions diversement colorées que l'on met dans une cuve à faces parallèles. La chambre est placée horizontalement dans l'axe de ce système. On peut réunir l'objectif à la chambre au moyen d'une enveloppe souple et imperméable à la lumière ; mais, si l'on opère, comme nous le faisons toujours, dans le laboratoire noir, cette précaution est inutile : il suffit d'intercaler entre l'objectif et la chambre un grand diaphragme qui ne laisse passer que les rayons qui tombent sur la plaque.

La mise au point s'effectue en avançant ou en reculant le verre dépoli et en agissant sur la crémaillère qui actionne l'objectif. Au lieu de nous servir du verre dépoli, nous ouvrons une des portes latérales de notre appareil et mettons au point sur une feuille de papier blanc collée sur une plaque de verre qui prend exactement la place du verre dépoli. Pour les moelles, nous nous sommes servis du 00 de Verik, dans lequel il est nécessaire d'interposer un diaphragme.

Le même dispositif nous a servi pour les forts grossissements, mais en faisant certaines modifications importantes. Si le microscope de Duboscq comportait une platine à double mouvement et une vis micrométrique pour l'objectif, il suffirait de substituer un objectif de fort grossissement à celui que nous employions précédemment; mais il n'en est pas ainsi. Aussi ne faut-il garder de cet appareil que le condensateur; on supprime le porte-objectif et l'on place devant le condensateur le microscope disposé horizontalement. Nous emploierons un modèle à platine tournante et à double mouvement; de cette manière on disposera la préparation dans le champ, comme on le voudra, et il sera possible de l'explorer systématiquement pour trouver l'endroit à reproduire. Dans le cas de forts grossissements, nous employons le diaphragme iris qui est exactement sous la préparation.

Il ne sera pas nécessaire, dans le cas présent, d'avoir un microscope spécial à large tube. Pour notre part, nous n'avons jamais

employé l'oculaire, mais, dans certains cas, il pourra être utile de s'en servir, s'il s'agit de très forts grossissements, par exemple. Lorsque l'on travaille sans oculaire, il est nécessaire de faire noircir en mat l'intérieur du tube du microscope afin d'éviter les réflexions qui seraient nuisibles. Nous réunissons ici le tube du microscope à la chambre au moyen d'une étoffe souple et opaque. Le reste des opérations est identique.

Le temps de pose varie suivant l'épaisseur de la préparation et sa coloration, l'intensité de l'éclairage, le diaphragme employé. La nature du liquide interposé et l'emploi des plaques ordinaires ou isochromatiques amèneront également des variations dont il faudra tenir compte. Enfin la nature elle-même de la préparation donnera des indications importantes : si elle présente des contrastes très prononcés, il faudra faire usage de la méthode de la surexposition, qui permettra de les atténuer; si, au contraire, la préparation est trop uniforme, il faudra réduire la pose pour combattre cette monotonie qui amènerait un cliché sans valeur aucune. Il nous est impossible, par suite, d'indiquer a priori au lecteur les temps de pose qu'il devra employer, puisqu'il faudrait déterminer toutes les conditions de l'expérience. Quelques essais le fixeront d'ailleurs rapidement.

Nous pouvons cependant lui faire savoir comment nous avons opéré dans le travail que nous venons de faire récemment sur l'Anatomie pathologique de la moelle.

Nous nous servions de l'éclairage oxhydrique avec condensateur, comme objectif du 00 de Verik avec un diaphragme de 4mm. Dans ces conditions, pour un grossissement de 20 diamètres, avec éclairage jaune et plaques ordinaires, les poses ont varié de 1 à 3o secondes. Ces variations, toutes conditions étant les mêmes, tenaient à l'épaisseur des coupes, à leur mode de coloration et à la surexposition qui était nécessaire dans certains cas. Pour les forts grossissements, la reproduction des cellules, des tubes nerveux par exemple, nous avons employé le 2 et quelquefois le 7 de Verik et un diaphragme de 3mm à 4mm- Vu le grossissement considérable, les poses ont varié de 1 à 2 minutes jusqu'à 8 ou 10 dans certains cas.

Nous croyons avoir montré suffisamment les services que la

Photographie peut rendre dans les études micrographiques, tout en indiquant que l'on peut réussir parfaitement sans appareils spéciaux très compliqués et en utilisant simplement le matériel que l'on trouve ordinairement dans les services médicaux.

C'est du reste ainsi que nous avons obtenu les 90 planches qui composent Y Atlas d'Analomie pathologique de la moelle épi-nière. (Nous donnons, à titre d'exemple, deux Planches extraites de cet ouvrage, Pl. XIF et XV.)

Mais là ne se borneront pas les études que le médecin sera appelé à faire. On sait le rôle important que les divers microbes remplissent dans l'évolution des phénomènes qui tiennent à la vie : les uns ont une influence salutaire en favorisant certaines réactions; les autres, au contraire, entraînent les plus graves désordres.

La connaissance de ces infiniment petits que l'on rencontre dans l'air, dans l'eau, dans les divers tissus soit végétaux soit animaux, constitue, dès à présent, une science relativement jeune encore, mais qui a une importance qu'on ne saurait nier : c'est la Microbiologie.

L'étude de ces microbes sera faite uniquement au microscope, qui seul a permis d'en relever l'existence.

La Photographie interviendra pour conserver la reproduction durable et exacte de l'image perçue par l'observateur. Les dessins que l'on saurait faire peuvent être plus ou moins fidèles, et nous pourrions citer nombre de discussions entre savants sur tels ou tels sujets, qui ne provenaient que d'interprétations différentes. Le cliché photographique coupera court à toutes ces controverses et nous croyons savoir que c'est dans ce but que MM. Cornil, Doyen et Yvon ont entrepris le gigantesque travail de former un Atlas renfermant la reproduction photographique des divers microbes et organismes inférieurs actuellement connus.

Nous ne pouvons que nous réjouir de voir que c'est grâce à l'emploi raisonné de la Photographie que l'on pourra établir ainsi un véritable catalogue iconographique de ces infiniment petits dont le rôle est si important en Physiologie et en Pathologie.

Les dispositifs à employer seront les mêmes que ceux qui peu-

Pl. XIV.

Coupe de moelle pathologique. — Sclérose en plaques.

vent servir pour les études dont nous avons parlé précédemment. Il sera seulement.nécessaire fréquemment de faire usage de grossissements beaucoup plus considérables, qui atteindront parfois 1000, i5oo diamètres et même davantage.

La question de coloration des microbes, surtout par les procédés de double coloration, aura une importance particulière.

Nous examinerons ce point tout à l'heure.

En dehors de l'examen microscopique des organismes divers, il sera quelquefois intéressant de conserver l'aspect des cultures que l'on est conduit à faire et des modifications qui se succèdent avec le temps.

On fait le plus souvent les cultures de microbes sur des tranches végétales, comme celle de la pomme de terre, ou dans des milieux tels que la gélatine, celle-ci étant enfermée dans des petits tubes à essai.

La reproduction des cultures en plaques ne présentera pas de difficultés particulières; il suffira de placer la préparation sous la chambre verticale et d'opérer comme nous l'avons indiqué pour les pièces anatomiques.

La photographie des cultures en tubes est beaucoup plus délicate à cause de la courbure du verre qui donne des reflets qu'il est difficile d'éliminer. On peut y arriver cependant par deux méthodes; l'une consiste à mettre le tube de culture dans une cuve à faces parallèles remplie d'eau. Le tube devient invisible et les reflets sont complètement supprimés.

Ce dispositif permet d'opérer par transparence ou par réflexion : dans le premier cas on mettra la cuve bien en lumière, etonl'éclai-rera au besoin avec un condensateur; dans le second, il suffira de mettre derrière la cuve un morceau de carton ou d'étoffe foncée pour avoir un fond noir sur lequel la préparation se détachera parfaitement.

L'autre procédé pour éliminer les reflets nous a été indiqué par le Dr Doyen de Reims. Il est beaucoup plus radical; il consiste à couper avec un diamant toute la partie antérieure du tube.

Nous donnons dans la Pl. XVI une magnifique culture de Ba-cillus mesentericus faite sur la pomme de terre, et deux cultures

en tubes faites et photographiées par M. Doyen. Comme on peut s'en rendre compte, les reflets n'existent aucunement.

De l'obtention des préparations destinées à la reproduction photographique. — Les coupes que fait l'histologiste pour ses recherches peuvent ne pas se prêter à la reproduction photographique ou ne donner que de mauvais résultats, et ceci pour deux raisons bien déterminées, leur épaisseur ou leur mode de coloration.

Les pièces destinées à l'examen microscopique sont, après des préparations spéciales qui ont pour but d'obtenir un durcissement convenable, coupées en tranches aussi minces que possible au moyen de rasoirs ou d'instruments plus perfectionnés qu'on nomme des microtomes. L'obtention de ces coupes est très délicate, et il paraît fort difficile de n'obtenir qu'un seul plan de l'objet étudié. L'épaisseur de la coupe n'est du reste pas un inconvénient pour l'histologiste, car, armé d'un objectif à très fort grossissement, il parcourt les divers points de sa préparation, et, s'il est nécessaire, en faisant varier la vis micrométrique il peut examiner successivement les divers plans dans l'épaisseur de la coupe. On sait en effet que les objectifs microscopiques n'ont qu'une profondeur de foyer très faible; par suite, l'observateur ne sera pas gêné par la présence des plans voisins.

Lorsqu'il s'agit de photographier de telles préparations, les conditions de l'expérience peuvent changer. Il faut que la plaque photographique donne la reproduction fidèle de tout ce qui est dans le champ de l'objectif; par suite, on sera conduit naturellement à diaphragmer plus ou moins de façon à obtenir la netteté indispensable dans l'espèce. Par ce fait même, on augmentera la profondeur de foyer, et, si la préparation est tant soit peu épaisse, on pourra voir simultanément plusieurs plans, d'où une confusion inévitable des images des divers plans.

Le raisonnement le plus élémentaire exige donc de chercher à obtenir des coupes aussi minces que possible quand il s'agira de les photographier.

On mettra de côté toutes les coupes présentant un défaut quelconque, cassure ou coup de rasoir, car ces défauts prendraient une

CULTURES MICROBIENNES.

Pl. XVI.

Culture de Bacillus mesentericus sur la pomme de terre. Phototype négatif a. Londe. Photocollographie Chêne et Longuet.

Culture de Staphylococcus aureus.

Culture de Staphylococcus albus.

Phototypes négatifs de E. Doyen et F. Rothier.

importance considérable. Ce sera une affaire de soin et d'habileté de la part de l'opérateur.

La question de coloration des coupes peut entraîner beaucoup d'insuccès; aussi devons-nous à ce sujet faire une étude spéciale.

Nous avons vu dans le cours de cet Ouvrage que la plaque photographique n'est pas apte à traduire d'une manière exacte les diverses colorations d'un objet en tant que valeurs. En effet, en dehors de leur coloration, les divers rayons du spectre ont une intensité donnée que notre rétine apprécie parfaitement. Ainsi le jaune et le rouge sont des couleurs claires, le vert et le bleu sont des couleurs sombres. Voulons-nous traduire en grisaille l'effet ressenti par nous en regardant Funiforme du soldat français, pantalon rouge et capote bleue, nous rendrons le bleu par une teinte plus sombre que le rouge. De même, un toit rouge, se détachant sur la verdure sombre des arbres, se traduira par une note claire.

En Photographie, tous ces effets seront complètement renversés. Le rouge du pantalon, le toit en question, viendront noirs; le bleu de la capote, la verdure des arbres, seront rendus en notes plus claires.

C'est là, jusqu'à nouvel ordre, une impuissance de la Photographie qui peut fausser complètement le rendu de certains effets.

C'est pour cette raison que des préparations parfaites pour l'examen histologique peuvent donner sur la plaque photographique des résultats absolument contraires à ce que l'œil percevait. Donnons un exemple : On colore fréquemment les microbes en violet plus ou moins foncé et les tissus qui les renferment ou le fond sur lequel ils se détachent en rose ou en rouge plus ou moins intenses. L'œil perçoit l'impression d'un objet foncé se détachant sur un fond clair. Sur la plaque photographique, ce sera précisément l'inverse; le fond sera foncé, quelquefois même presque noir, et les microbes seront blancs ou plus ou moins gris. L'effet sera donc totalement changé.

Dans un autre ordre d'idées, une lésion dans une préparation est indiquée par une coloration soit jaune, soit rouge peu intense; tous les détails de la lésion sont perceptibles. Vient-on à photo

graphier cette coupe, les parties atteintes seront traduites par un noir plus ou moins intense dans lequel il sera difficile d'aller chercher les points intéressants.

On pourra atténuer ces défauts dans une certaine mesure en mettant en œuvre les procédés isochromatiques et obtenir, par suite, des résultats plus satisfaisants. On sait, en effet, que, par l'introduction de certaines substances telles que l'éosine, par exemple, dans la couche sensible, on augmente sa sensibilité pour certains rayons tandis qu'on la diminue pour d'autres. La plaque, qui est ordinairement si sensible aux rayons violets et si réfrac-taire aux rayons jaunes et verts, est modifiée complètement et les deux colorations extrêmes peuvent être obtenues et donner une bonne image par une exposition unique, tandis que dans le cas précédent, pour avoir également le bleu et le rouge, il eût fallu donner à celui-ci une pose beaucoup plus considérable.

L'usage des verres ou des solutions colorées destinées à intercepter certains rayons trop actiniques présentera également de nombreuses ressources à l'opérateur, qu'il les emploie isolément ou même combinées avec les plaques isochromatiques. Il devra faire une série d'essais préliminaires qui lui indiqueront le dispositif le meilleur à adopter dans chaque hypothèse. Il est assez difficile en effet de poser des règles fixes dans l'espèce, car l'effet produit dépendra d'une manière absolue de la nature du colorant employé : tel rouge donnera de bons résultats, tel autre ne donnera rien.

En ce qui concerne les procédés de coloration habituellement employés, il faut distinguer entre les méthodes de simple coloration et celles de double coloration. Dans les premières, les éléments à étudier se détachent colorés sur fond incolore, car, la préparation étant teintée uniformément, certaines parties se trouvent ou décolorées complètement ou colorées bien plus légèrement.

Dans les secondes, la coloration du fond est différente de celle de l'objet à étudier, où, certains éléments se colorant d'une façon, les autres se colorent d'une autre manière; d'où grande facilité pour distinguer les divers tissus différents.

Comme exemple de simple coloration, nous citerons les préparations de microbes qui, colorés soit en violet, en bleu, en rose

ou en rouge, se détachent sur fond blanc; les préparations de moelles colorées en picro-carmin, où les lésions seront perceptibles par leurs moindres colorations.

Dans les procédés de double coloration, au contraire, les microbes pourront se détacher en violet ou en bleu sur un fond plus ou moins rose, ou bien en rouge sur fond brun. Pour les moelles, on aura des colorations jaune et violet par exemple.

Inutile de dire que les préparations faites par double coloration seront beaucoup plus délicates à reproduire.

Nous allons passer en revue les principaux modes de coloration ainsi que les précautions à prendre pour obtenir les meilleurs résultats.

PROCÉDÉS DE SIMPLE COLORATION.

Méthode de Gram. — Les microbes traités avec du violet de gentiane ou du violet de méthyle B se colorent en violet. Le fond est décoloré. Il faudra employer des plaques ordinaires et des poses très courtes. Il pourra être bon d'opérer avec un verre jaune ou une cuve à acide picrique pour diminuer l'actinisme du violet et être plus maître du temps de pose.

Méthode d'Ehrlich. — On colore avec du violet de gentiane ou du violet de méthyle, pour les colorations violettes, avec de la fuchsine pour les colorations roses et rouges. On procédera de même que pour le procédé de Gram, sauf pour les préparations à la fuchsine. Pour celles-ci, il sera nécessaire d'employer des plaques isochromatiques et d'augmenter considérablement le temps de pose.

MÉTHODES DE DOUBLE COLORATION.

Méthode de Gram. — Les microbes sont colorés en violet foncé et se détachent sur un fond rose si l'on emploie l'éosine, ou en brun si l'on se sert de brun de Bismarck ou de vésuvine. La reproduction d'une telle préparation est très délicate à faire, et il s'agit dans l'espèce, pour obtenir une reproduction donnant l'effet de l'original, d'arrêter l'action intense des l'ayons violets pour

permettre aux rayons moins actiniques d'agir suffisamment. On prendra l'éclairage jaune et des plaques isochromatiques. Il sera très avantageux de faire dans cette hypothèse une application de la méthode de la surexposition que nous avons décrite dans le Chapitre TI.

Méthode d'Ehrlich. — On colore les microbes en violet, ceux-ci se détachant sur fond rose ou brun; on opérera comme nous venons de dire.

On peut encore, dans ces méthodes, obtenir les microbes en rouge sur fond bleu ou brun. Dans le premier cas, qui est assez défavorable pour la traduction photographique parce que le rouge viendra plus foncé que le bleu, il faudra employer l'éclairage jaune et des plaques isochromatiques. Dans le second cas, les plaques ordinaires pourront être employées tout simplement.

Procédés de coloration les plus usuels pour le tissu nerveux. — Dans le travail que nous avons fait avec le D1' Paul Blocq, nous avons étudié tout spécialement l'anatomie normale et pathologique de la moelle épinière et nous avons dû reproduire des préparations faites par diverses méthodes. Voici les observations que nous avons recueillies et dont notre lecteur pourra tirer profit.

Pour colorer les nerfs périphériques, on les immerge pendant vingt-quatre heures dans une solution d'acide osmique à La myéline seule est colorée en noir. La reproduction photographique se fait sans difficultés. En cas de lésions des nerfs, comme celles-ci portent toujours sur la myéline, la gaine noire caractéristique de l'état normal a disparu; aucune difficulté non plus de ce côté.

Pour les centres on emploie plusieurs méthodes de coloration que nous allons décrire.

A. Méthode au picro-carmin. — On laisse séjourner les coupes pendant vingt-quatre heures dans le liquide ainsi composé : une petite quantité d'eau distillée à laquelle on ajoute du picro-carminate d'ammoniaque (solution de Ranvier) jusqu'à ce que la liqueur offre une coloration fleur de pêcher.

B. Méthode de Weighert. — Les coupes séjournent tout d'abord pendant trois heures dans une solution concentrée d'acétate de cuivre, puis pendant vingt-quatre heures dans la solution suivante :

Hématoxyline......................... isr

Alcool absolu......................... iocc

Eau.................................. gocc

Solution saturée de carbonate de lithine. igr

Les coupes ainsi colorées sont rincées à l'eau, puis passées pendant une demi-heure dans la solution suivante dite solution décolorante :

Borax................................ 2gr

Ferricyanure de potassium............. 2,5

Eau.................................. 200

Après lavage, on déshydrate, on éclaircit, et on monte comme précédemment.

Les coupes sont ensuite lavées, déshydratées par l'alcool absolu, éclaircies par l'essence de girofle, et montées dans le baume de Canada. Dans cette méthode, la myéline est colorée en jaune, les cylindres-axes en rouge, les cellules nerveuses en rouge brun et leur noyau en rouge, le tissu conjonctif et la névroglie en rose, et leurs cellules en rouge.

Dans ce procédé l'ensemble des colorations obtenues est dans la note rouge ou jaune, couleurs qui, on le sait, sont antiphotogéniques. Néanmoins les préparations au picro-carmin donnent d'excellents résultats, précisément parce qu'elles n'offrent que des colorations de même genre. Il n'y aura qu'à allonger la pose suffisamment. Il pourra être avantageux d'employer dans ce cas particulier des plaques isochromatiques plus spécialement préparées pour la reproduction des objets colorés en jaune ou en rouge. L'interposition d'un verre jaune, ou d'une cuve à faces parallèles remplie d'une solution jaune, nous a donné d'excellents résultats en retardant la venue du fond et, par suite, sa solarisation qui aurait pu se produire avec les longues poses qui sont souvent nécessaires.

Eau.................................... ioo

Permanganate de potasse................ 8

puis

Eau.................................... 200

Sulfate de potasse....................... i

Acide oxalique.......................... i

Dans ce procédé, la myéline est seule colorée en noir et toutes les autres parties sont décolorées.

Aussi quelquefois recolore-t-on ces parties à J'aide du carmin et de la safranine et l'on obtient ainsi des doubles colorations.

Ce procédé, très employé, donne d'excellents résultats au point de vue histologique. La myéline des tubes nerveux est colorée en noir bleu, les cylindres-axes sont décolorés, les cellules nerveuses apparaissent en jaune ocre, et leur noyau en jaune plus foncé, le tissu conjonctif et la névroglie en jaune orangé et leurs cellules en jaune plus clair. Les lésions habituelles (scléroses) se distinguent par leur coloration jaune qui remplace la teinte noir bleu.

Ce procédé offre des difficultés particulières de reproduction au point de vue photographique puisqu'il comporte à la fois des colorations très photogéniques et d'autres qui le sont beaucoup moins. Pour arriver à de bons résultats, il faudra éteindre les rayons les plus actiniques et, à cet effet, employer des écrans colorés en jaune; les plaques isochromatiques préparées spécialement pour la reproduction des jaunes et qui sont moins sensibles au violet pourront être employées concurremment avec l'écran jaune. En dernier lieu on se trouvera bien d'essayer les poses très prolongées qui, par surexposition, permettront d'obtenir également bien les violets et les jaunes.

C. Méthode de Pall. — Cette méthode est une modification de la précédente. On colore encore avec l'hématoxyline, mais en solution aqueuse, et après que les coupes ont séjourné trois heures dans une solution à o,5o pour 100 d'acide chromique; on décolore en passant successivement les coupes dans les solutions suivantes :

(') M. Paul Blocq,dont la compétence en Histologie est si connue, a bien voulu nous fournir les renseignements nécessaires pour cette partie de notre travail. Nous lui adressons à ce sujet nos plus vifs remerciements.

Mais, au point de vue photographique, il vaut mieux se contenter de la simple coloration. Ce procédé se prête admirablement à la reproduction photographique (*).

chapitre vi.

CONSERVATION ET UTILISATION DU NÉGATIF.

| I. — DE LA CONSERVATION DES PHOTOTYPES NÉGATIFS.

Nous avons insisté précédemment sur la nécessité d'effectuer un lavage très soigné des négatifs après développement et fixage; il est, en effet, indispensable d'éliminer toute trace d'hyposulfîte de soude. Mais ce n'est pas encore tout : le négatif, une fois sec, doit être conservé à l'abri de l'humidité; ceci est indispensable, surtout avec les couches actuellement employées qui sont à base de gélatine, corps éminemment hygroscopique.

Avec ces précautions, la conservation des clichés au gélatinobromure d'argent paraît assurée, bien que les premières expériences faites sur ce support ne remontent guère à plus de vingt ans, mais ce laps de temps est déjà suffisant pour permettre de bien augurer de la durée des négatifs.

Il existe cependant une cause d'altération des négatifs bien plus fréquente et dont il nous faut parler. Lorsque l'on effectue l'impression du papier sensible derrière le négatif, opération que nous allons décrire dans un instant, il est indispensable que le négatif et le papier soient absolument secs ainsi que le matelas qui donne la pression. En effet, toute trace d'humidité provoquera la formation de taches produites par une combinaison du sel d'argent du papier avec la couche de gélatine.

Or ces taches sont irrémédiables et nous ne connaissons pas de moyens sûrs pour les enlever. Il faudra donc éviter toutes les causes qui peuvent amener de l'humidité et produire, par suite, l'accident en question. On abritera les châssis de la pluie, bien entendu. Il est bon de ne jamais laisser, autant que possible, un châssis chargé la nuit, surtout dans le laboratoire vitré : il se produit, en

Bon pour photographier M. Dubois.

Salle: Duchenne de Boulogne. N° 10.

Age .-27 ans.

Domicile : rue de l'Entrepôt, 72.

N" du cliché: 1510, 1511, 1512.

Stéréoscope

Projection

Épreuves : 2 de chaque cliché.

Diagnostic.

Contracture hystérique.

Renseignements.

La contracture dure depuis deux mois.

Est survenue à la suite d'une émotion violente.

Se procurer, si possible, une photographie antérieure du sujet.

Le 6 décembre i8yi.

Le Médecin,

Charcot.

effet, des condensations qui seront certainement préjudiciables. Inutile de dire que si ces accidents surviennent rarement dans la belle saison, lorsque la température est élevée et le tirage rapide, ils se produisent, au contraire, avec la plus grande facilité en hiver, lors de l'humidité et des jours courts, pendant lesquels l'impression est si lente.

Le remède radical, pour éviter ces inconvénients, consistera à protéger la couche au moyen d'un enduit spécial qui l'isolera du papier sensible. On peut tout d'abord vernir au moyen de vernis spéciaux et à chaud. Cette opération, sans être difficile, est assez délicate à réussir, et nous engageons le lecteur à collodionner tout simplement ses clichés au moyen d'un collodion contenant i ou i,5 de coton-poudre. Cette opération est si simple et si rapide qu'il ne faut jamais négliger de l'exécuter.

Dans un service médical, où les clichés peuvent s'accumuler en grand nombre, il est nécessaire de les classer avec le plus grand ordre.

Voici comment nous opérons à la Salpêtrière. Lorsque nous prenons un malade, nous consignons sur une fiche spéciale les divers renseignements suivants : nom, âge, domicile, salle de l'hôpital et numéro du lit, numéro du cliché. Voici le modèle des imprimés que nous avons fait exécuter.

SERVICE PHOTOGRAPHIQUE.

En dessous, nous inscrivons le diagnostic du médecin, puis les divers renseignements qui pourront être utiles à conserver.

Nous avons, d'autre part, un registre folioté et dont toutes les lignes sont numérotées. C'est sur ce registre que sont consignés, d'une manière définitive, les renseignements pris sur la fiche au moment d'opérer. Ordinairement nous inscrivons à l'encre, sur le cliché même, son numéro d'ordre et ceci lorsqu'il est sec. Mais, lorsque le même jour nous avons divers malades à faire, nous opérons différemment pour éviter toute confusion. Aussitôt la glace exposée, nous inscrivons sur le châssis lui-même, dans l'emplacement que l'on y trouve, le numéro d'ordre que devra porter la plaque. Avant le développement, nous reportons au crayon ce numéro sur la plaque elle-même. Le numéro, ainsi tracé, n'est pas effacé pendant les diverses manipulations et l'on évite ainsi toute erreur. Dans le cas où l'on n'aurait pas de châssis permettant l'inscription du numéro sur le volet, on consigne sur une feuille de papier le numéro du châssis et l'on met en regard le numéro d'ordre de la plaque.

On classe ordinairement les clichés dans des boîtes à rainures que l'on trouve dans le commerce. Nous avons renoncé à leur emploi à la Salpêtrière parce qu'elles sont d'un maniement difficile et incommode. Elles tiennent beaucoup de place et, pour chercher quelques clichés, il faut des dérangements fastidieux; de plus, une boîte peut tomber ou être renversée et l'on peut perdre ainsi des clichés fort précieux. Nous avons fait faire à la Salpêtrière une grande armoire portant des rainures et dans laquelle sont logés tous nos clichés. On les trouve ainsi facilement et l'on évite les inconvénients que nous indiquions. Les montants qui portent les rainures sont numérotés et permettent de mettre immédiatement la main sur un cliché quelconque.

S'il n'était pas possible de faire construire un meuble pareil ou d'acheter le nombre de boîtes à rainures suffisant, et ceci à cause de la dépense, on peut classer les clichés dans les boîtes en carton qui renferment les plaques sensibles et qui restent, après emploi, sans usage. On aura soin de séparer chaque cliché de son voisin au moyen d'une feuille de papier filtre blanc. On portera sur la boîte les deux numéros extrêmes de la série qui y est renfermée.

Ces boîtes seront rangées comme des livres sur des rayons. Cette solution est évidemment moins pratique que les précédentes ; mais, comme elle ne nécessite aucune dépense, elle peut avoir ses avantages.

§ II. — MULTIPLICATION DU NÉGATIF.

Le négatif n'est qu'un intermédiaire, le but final est d'obtenir l'image positive dans laquelle toutes les valeurs de l'original seront remises dans leur véritable sens. C'est cette épreuve qui constituera le document que consultera le médecin. Suivant les cas, on pourra se contenter de quelques épreuves; dans d'autres, il pourra être nécessaire d'avoir des tirages à grand nombre : les procédés à employer ne sauraient donc être les mêmes. D'autre part, il nous paraît indispensable de chercher à donner aux documents obtenus la plus grande stabilité, afin qu'ils ne soient pas exposés à disparaître dans un temps plus ou moins rapproché : ce qui ne nous empêchera pas d'indiquer les procédés courants, qui n'ont pas, il est vrai, toute la solidité que nous considérons comme indispensable en la matière, mais qui peuvent être précieux à cause de leur facilité d'exécution ou leur faible prix de revient.

1° Procédés à faibles tirages. — Nous entendons par ces procédés tous ceux dans lesquels l'action de la lumière est nécessaire pour l'obtention de chaque épreuve. Il est évident qu'il n'y a pas de limites a priori au nombre d'épreuves que l'on peut tirer d'un cliché, mais il faudra un tel temps d'exécution, une telle main-d'œuvre et par suite une telle dépense, que ces procédés ne peuvent donner pratiquement le résultat cherché.

Pour donner un exemple, si nous admettons qu'il ne faille qu'un quart d'heure pour tirer une épreuve d'un cliché donné, ce qui est la plupart du temps insuffisant, nous aurons en dix heures de travail 4o épreuves seulement. Pour en avoir iooo il faudra 25 jours de travail, en supposant encore que le temps soit toujours favorable. Avec une planche photocollographique, comme nous le verrons plus loin, on tire avec une machine à main facilement 4oo à 5oo épreuves par jour. Si l'on se sert d'une machine à vapeur, ce

chiffre peut dépasser i5oo. Si l'on fait usage des procédés typophotographiques, on atteint la vitesse que l'on réalise dans la typographie, vitesse qui est encore plus considérable.

Il faudra donc réserver les premiers procédés pour le travail journalier et lorsque le tirage n'est pas considérable. Parmi ceux qui sont les plus employés et les plus pratiques nous décrirons le procédé au chlorure d'argent sur papier albuminé et sur gélatine, et les procédés au platine et au charbon.

Les épreuves données par les deux premiers sont d'une conservation problématique, celles données par les deux derniers ont au contraire une stabilité aussi grande que l'on peut désirer.

1° Papier au chlorure d'argent. — Ce procédé est le plus ancien et encore, à l'heure actuelle, le plus employé malgré sa conservation douteuse. Cela tient à la facilité de son emploi et à son faible prix de revient. 11 sera encore beaucoup employé dans Je laboratoire à cause de ces qualités, mais nous croyons que, s'il peut servir dans bien des cas, il fajjjLit néanmoins, pour la collection qui doit renfermer tous les documents, user des procédés inaltérables.

On trouvera dans le commerce du papier sensible parfaitement préparé, aussi n'engageons-nous nullement le lecteur à faire cette préparation lui-même. Le papier est découpé au format voulu et conservé dans une boîte ou un tiroir à l'abri de la lumière et de l'humidité. Bien que ce papier se conserve assez bien, nous pensons néanmoins qu'il ne faut pas en avoir de trop grandes provisions et qu'il vaut mieux l'employer frais.

Si l'on adopte le format i3 x i8, la feuille de papier donne dix morceaux de cette taille.

Pour obtenir l'épreuve positive on place le cliché face en dessus dans des châssis spéciaux, les châssis positifs. On a soin au préalable d'en bien essuyer le dos et de passer un blaireau fin sur la couche pour enlever la poussière. On met alors le papier sensible, la face contre celle du cliché. On met par-dessus un petit matelas de papier ou de feutre, le volet du châssis, et l'on ferme celui-ci.

On procède alors à l'exposition au jour. Ici, quelques explications sont indispensables. La durée d'insolation nécessaire pour

donner une bonne épreuve sera fonction de la lumière ambiante, de l'intensité du cliché et de sa coloration s'il en a une. Il est donc impossible de dire a priori le temps qui sera nécessaire pour insoler une épreuve. A cet effet, les volets du châssis positif sont à charnières et permettent en soulevant la feuille de papier sensible de surveiller sa venue. Règle générale, il faut pousser l'exposition au delà du point où l'image est bonne, car dans les opérations subséquentes elle baissera d'une certaine quantité. L'expérience montre très vite à quel point il faut s'arrêter.

C'est en effectuant l'opération du tirage que l'on se rend parfaitement compte de l'intensité que doit avoir un bon négatif, pour donner une bonne épreuve. S'il est trop léger, l'image vient rapidement et est grise; s'il est trop poussé, l'image demande un temps d'exposition considérable.

D'un côté, mauvais résultat; de l'autre, perte de temps considérable.

On voit donc qu'il y a intérêt à mener ses clichés par le développement, de façon à avoir l'intensité voulue.

Néanmoins, par certains artifices, on peut encore tirer bon parti de clichés qui ne sont pas par trop éloignés du point voulu, soit en dessus, soit en dessous. S'agit-il d'un cliché trop faible, il faut le tirer à une très faible lumière ou recouvrir le châssis d'un ou plusieurs verres dépolis. S'agit-il d'un cliché trop intense, il faut le tirer à une lumière plus vive, c'est-à-dire en plein soleil. En suivant cette manière de faire, on pourra tirer bon parti de clichés qui à l'insolation ordinaire eussent donné des résultats insuffisants.

Au sortir du châssis, les épreuves sont mises dans une boîte spéciale, à l'abri de l'humidité et de la lumière. Lorsque l'on en a un certain nombre, on procède aux opérations qui ont pour but de fixer l'image. En général, il vaut mieux ne pas attendre trop longtemps pour terminer les épreuves, car elles sont sujettes à s'altérer, et l'opération du virage se fait moins bien.

Virage et fixage. — Les épreuves sortant du châssis ont un ton rougeâtre qui est loin d'être flatteur, de plus le sel d'argent non réduit par la lumière est encore sensible ; il faut donc effec

tuer deux opéralions, la première qui a pour but de donner à l'épreuve un ton plus agréable et la seconde de dissoudre les sels restés sensibles. On prépare tout d'abord le bain de virage de la manière suivante. On met dans une capsule de porcelaine :

Eau distillée................................ 5ooec

Chlorure d'or.............................. igr

Craie en poudre............................ ioSr

On chauffe ce bain jusqu'à l'ébullition. Pendant ce temps, on prépare une cuvette de porcelaine au-dessus de laquelle on place un entonnoir avec un filtre. On met dans la cuvette 5oocc d'eau distillée.

Dans une autre cuvette, on a mis à laver les épreuves; le lavage doit être fait jusqu'à ce que l'eau n'ait plus d'apparence laiteuse.

On filtre alors la solution chaude, elle se mélange avec l'eau distillée froide et donne un bain dont la température est convenable.

Les épreuves, mises dans ce bain, changent rapidement de ton; elles passent au marron, au brun et au violet. A ce moment, on les retire et on les met dans une cuvette contenant de l'eau propre. Jl est nécessaire de remuer constamment les épreuves dans le bain d'or afin que le virage se fasse également.

Une fois toutes les épreuves virées et passées à l'eau on les plonge une par une dans le bain de fixage :

Eau ordinaire............................ iooocc

Hyposulfîte de soude...................... ioogl'

Les épreuves doivent rester dans ce bain au moins dix minutes et il faut les remuer constamment pour assurer l'action égale de l'hyposulfite. Une fois le fixage terminé, les épreuves doivent être lavées avec le plus grand soin et au moins douze heures dans l'eau courante.

La conservation des épreuves est à ce prix, et c'est à cause d'un lavage insuffisant, que nous voyons à l'heure actuelle bien des épreuves, datant seulement de quelques années, déjà plus ou moins altérées.

Le bain d'or dont nous avons donné la formule et qui con

tient igr de chlorure d'or peut virer facilement cent épreuves. Mais on n'aura pas toujours de pareilles quantités d'épreuves à virer ensemble, et, à notre avis, il n'est pas pratique d'en virer et de fixer autant, car il faut un matériel trop important et on éprouve de grandes difficultés pour obtenir un bon lavage. Le nombre de cinquante ne devrait jamais être dépassé.

Dans ce cas, il faut faire un bain en conséquence, moins abondant et moins riche en or. Pour mesurer la quantité d'or voulue, nous dissolvons celui-ci dans ioocc d'eau distillée, et le renfermons dans une bouteille graduée en centimètres cubes. On prendra ainsi facilement la quantité que l'on reconnaîtra nécessaire sans être obligé de faire de pesées.

Lorsque nous avons une grande quantité d'épreuves, nous ne filtrons pas de suite la solution contenant l'or, mais nous la rajoutons peu à peu de façon à réchauffer continuellement le bain et lui apporter en même temps constamment un peu de bain neuf.

Une précaution qu'il ne faut jamais négliger, c'est d'avoir les doigts particulièrement propres ; il faudra également éviter d'une manière absolue de toucher l'hyposulfite de soude ou d'en introduire dans le bain de virage : on obtiendrait infailliblement des taches.

Séchage. — Après le lavage les épreuves sont suspendues dos à dos par des pinces américaines reposant sur des cordes tendues. Le séchage se fait rapidement. Si cependant on est pressé, on éponge les épreuves dans du papier filtré blanc et ceci à plusieurs reprises : le séchage est bien accéléré. Les épreuves sèches doivent être gardées à plat, dans un livre, ou bien si on les roule, il faut toujours les rouler la couche en dehors. Comme elles ont tendance naturellement à se rouler en dedans, cet effet se trouve contre-balancé, et lorsque l'on déplie l'épreuve, elle est plane.

On découpe ensuite l'épreuve au format voulu au moyen de calibres ou d'équerres en verre. Cette opération se fait sur une plaque de verre et avec un canif ou une pointe bien tranchante.

Si l'on veut éviter l'opération du séchage, il suffît de couper les épreuves avant le virage; de cette manière, en sortant du lavage,

on n'a qu'à les coller. Nous verrons, en effet, tout à l'heure qu'il faut remouiller les épreuves pour les coller.

Lorsque l'on coupe les épreuves, on ne doit pas oublier que Je mouillage que l'on doit effectuer pour le collage distendra le papier d'une certaine quantité : il faut donc par une expérience préalable mesurer la quantité dont se distend le papier, pour en tenir compte. Ceci n'a du reste d'importance que si l'on doit coller l'épreuve sur des cartons d'une taille déterminée ou portant des filets d'encadrement. Mais, à vrai dire, cette observation a moins d'importance en Photographie médicale que dans la Photographie artistique. Ce qui est plus grave au point de vue qui nous occupe, c'est que ces distensions du papier peuvent entraîner à commettre certaines erreurs, si l'on n'est pas prévenu. Lorsque l'on voudra prendre par exemple des mesures, il faudra les prendre sur une épreuve non collée et pour plus de précision sur le cliché lui-même.

Collage. — La colle dont on se sert le plus habituellement est la colle d'amidon. On peut la préparer de deux manières qui réussissent également bien.

Première manière. — On prend iogr d'amidon en poudre que l'on met avec ioogr d'eau dans une capsule de porcelaine. On opère le mélange le mieux possible, au mojen d'un agitateur de verre, puis on chauffe jusqu'à ce que le liquide prenne la consistance pâteuse. Il faut remuer constamment le liquide pendant cette opération, afin qu'il ne se forme pas de grumeaux et que la colle n'adhère pas au fond de la capsule. On laisse ensuite refroidir.

Seconde manière. — On prend iogr d'amidon comme précédemment, et on les dissout dans la plus petite quantité d'eau possible ; cette eau doit être tiède. On verse alors dessus et en agitant continuellement de l'eau bouillante. On s'arrête lorsque la masse devient pâteuse.

Quel que soit le procédé employé, on doit passer la colle au travers d'un linge fin ou d'une flanelle. Pour ceci on place la colle

dans le linge, et, le tordant entre les doigts, on oblige par pression la colle à s'échapper.

On met alors tremper dans l'eau les épreuves préalablement coupées à la taille voulue, on les applique sur une plaque de verre face en dessous et les unes sur les autres. On laisse égoutter le tout pendant un moment, puis au moyen d'un pinceau plat on enduit l'épreuve qui est au-dessus. On la porte alors sur le carton qui doit la recevoir, on la recouvre d'une feuille de papier filtre blanc et, avec la main, on chasse les bulles d'air et on donne une adhérence complète.

En séchant, les cartons ont une certaine tendance à bomber en dedans. On retrouve la planité en faisant passer le carton sous une machine spéciale qui s'appelle presse à satiner.

Lorsque l'on ne possède pas cet appareil, on évite le bombage du carton en mettant celui-ci entre deux réglettes qui maintiennent le centre plié, l'épreuve en dessus. Cette courbure maintenue pendant tout le séchage combat et annule celle qu'il aurait prise sous l'influence de l'épreuve.

Procédé au gélatinochlorure d'argent. — On trouve actuellement dans le commerce un papier dit aristotype, qui est à base de gélatine et de chlorure d'argent et qui donne des épreuves d'une grande finesse.

Il est également très précieux pour donner une bonne épreuve avec un cliché insuffisamment poussé. Les détails de l'impression sont les mêmes; il est seulement nécessaire de pousser l'épreuve vigoureusement, jusqu'à ce que les noirs soient métallisés, car elle descend en effet beaucoup dans les opérations subséquentes.

On emploie ordinairement avec ce papier un bain unique qui vire et fixe en même temps. Voici la formule d'un bain de ce genre :

Eau distillée........................... iooocc

Hyposulfite de soude................... a5o§r

Azotate de plomb pulvérisé............. 5gr

Chlorure d'or.......................... i«-

L'épreuve plongée dans ce bain jaunit rapidement en même temps qu'elle descend de ton, puis peu à peu elle remonte et prend une coloration de plus en plus chaude; on sort l'épreuve lorsque

l'on a le ton voulu. On passe alors dans un bain d'alun après lavage rapide et l'on procède au lavage définitif.

Celui-ci terminé, on fait sécher les épreuves sur une feuille d'ébonite où elles sont appliquées au moyen d'un rouleau de caoutchouc. Une fois sèches, elles se détachent seules et ont un brillant qui en fait ressortir les moindres détails.

Épreuves au platine. — Le procédé au platine a sur les précédents un avantage indiscutable, c'est la solidité de l'image qui paraît complètement assurée. Le papier sensible formé de chloro-platinite de potassium et d'oxalate sodico-ferrique se trouve tout préparé dans le commerce. Il faut le conserver dans des tubes métalliques garnis de chlorure de calcium, car il s'altère rapidement sous l'influence de l'humidité.

On fabrique deux sortes de papier au platine : le premier, qui donne des images par développement, et le deuxième, qui donne des images directes. C'est à celui-ci qu'il faut donner la préférence au point de vue pratique, car on suit bien mieux la venue de l'image et les opérations qu'il faut exécuter après l'exposition sont des plus élémentaires.

Comme le papier au platine est assez sensible, il est nécessaire d'effectuer le chargement des châssis à la lumière jaune ou à une très faible lumière blanche. Il est bon d'ailleurs de laisser le papier prendre pendant quelques instants, au sortir du tube, l'humidité ambiante. Complètement sec, il s'impressionne très lentement et donne des images dures. Au contraire, a-t-il repris un peu d'humidité, les résultats sont très différents. On peut même, au sortir du châssis, faire monter l'image par simple insufflation de l'haleine. Cette manière de faire permet de monter l'épreuve exactement à point. Il faut alors procéder de suite au fixage, car l'humidité de l'air continuerait à faire monter l'image. C'est même la méthode qu'il faudra employer lorsqu'une épreuve sera insuffisante; au bout de quelques heures, elle aura gagné d'une manière manifeste. Le bain de fixage est composé d'eau acidulée par de l'acide chlorhydrique.

Eau................................... iooocc

Acide chlorhydrique................... jocc

Les épreuves doivent rester dans ce bain jusqu'à ce que la teinte jaune du sel de platine ait complètement disparu. On procède ensuite à un lavage soigné pour éliminer toutes traces d'acide, ce dont on s'assure au moyen du papier de tournesol bleu qui ne doit pas virer au rouge. Il n'y a plus alors qu'à faire sécher l'épreuve. On remarquera que ce mode de tirage exige en général des négatifs corsés et vigoureux.

Procédé au charbon. — Parmi les procédés inaltérables, il nous faut citer le procédé au charbon, qui donne des résultats de toute beauté, mais qui ne jouit pas, il faut l'avouer, de toute la vogue qu'il mérite. Cela peut tenir, d'une part, à ce que l'opérateur préfère employer des papiers tout préparés et, de l'autre, à ce que le procédé au charbon exige des négatifs retournés ou une double opération qui complique certainement les manipulations. Cependant, devant les progrès accomplis dans les procédés pellicu-laires, il est certain que leur usage s'étendra de plus en plus; on verra alors le procédé au charbon faire une concurrence sérieuse aux autres procédés.

On achète dans le commerce du papier dit au charbon qui est formé d'une couche de gélatine additionnée d'une matière colorante fine. Ce papier est mis à flotter sur une solution de bichromate de potasse à 3 pour 100 pendant quelques minutes, de trois à cinq suivant la saison. Ce papier, une fois sec, est mis sous le négatif à reproduire. Son aspect est noir et il est absolument impossible de suivre la venue de l'image comme dans les autres procédés, d'autant plus que l'action de la lumière sur la gélatine bichromatée n'a que pour effet de l'insolubiliser plus ou moins profondément suivant les valeurs du négatif.

C'est alors que l'on est obligé de se servir de l'instrument qu'on nomme le photomètre. Celui-ci se compose d'une lame de verre portant des bandes d'un papier transparent disposées en escaliers, de façon à présenter des opacités régulièrement croissantes. Chacune de ces bandes porte un numéro, la plus claire porte le n° 1. On met ce photomètre, garni d'un morceau de papier au sel d'argent, à côté du châssis contenant le papier au charbon. Lorsque l'on croit l'exposition suffisante, on développe après avoir noté le

numéro correspondant du photomètre. Si le résultat est bon, il faudra inscrire le numéro du photomètre sur le cliché et l'on aura, en opérant de même pour chaque épreuve, un moyen sûr de l'amener au point voulu. L'emploi du photomètre implique naturellement un certain nombre d'essais et, lorsqu'on aura acquis cette expérience préliminaire, il sera très facile d'apprécier avec justesse la pose qu'il faut donner à un négatif en le comparant à un négatif qui aura déjà été tiré.

Nous faisons nos photomètres nous-même et, collant sur une lame de verre des feuilles de papier dioptrique de façon à former une échelle d'opacité croissante, nous inscrivons un numéro opaque sur chaque teinte, en commençant par la plus faible.

Voyons maintenant les modifications apportées par la lumière sur la gélatine bichromatée. Dans toutes les parties où la lumière a pénétré, la gélatine est devenue plus ou moins insoluble proportionnellement aux différentes valeurs du cliché ; elle est au contraire restée soluble dans les parties correspondant aux noirs du cliché.

Il suffit donc, en principe, dépasser l'épreuve dans l'eau tiède; les parties complètement solubles disparaîtront, dans les autres la gélatine plus ou moins insolubilisée se dissoudra partiellement en retenant une plus ou moins grande quantité de matière colorante ; on obtiendra ainsi les demi-teintes, les grands noirs seront formés parles parties complètement insolubles.

En pratique on commence par coller l'épreuve non développée sur un papier spécial qu'on nomme papier de transfert. Cette opération se fait en mettant dans l'eau froide les deux papiers pendant quelques minutes, puis on les applique l'un contre l'autre face contre face et on les met sous une légère pression afin que l'adhérence soit parfaite.

Une demi-heure après on peut procéder au développement en plongeant les deux feuilles collées dans l'eau tiède. Au bout de peu de temps le support primitif du papier au charbon se détache, l'image reste collée sur le papier transfert et, en l'agitant dans l'eau tiède, on la voit se dépouiller peu à peu. La température de l'eau permettra de corriger dans une certaine mesure les erreurs qui auraient pu se produire dans l'insolation.

Le but du transfert est de développer l'image par la face oppo

sée à celle qui a reçu la lumière et de permettre ainsi de garder les demi-teintes les plus délicates. On comprend en effet que, si l'on développait sans transfert, les parties qui ne sont insolubilisées qu'à la surface extérieure, pourraient être entraînées parles parties inférieures restées solubles. En opérant au contraire par l'autre face, les plus légers détails restent adhérents au support.

On termine par un passage à l'alun et un lavage à l'eau froide. L'opération du transfert amène naturellement le retournement de l'image, c'est-à-dire que la droite est à la gauche et inversement. Il y aura donc avantage, pour éviter cet inconvénient, à se servir de clichés pelliculaires que l'on tire retournés.

Au cas où, après s'être servi d'un négatif ordinaire, on voudrait avoir l'image dans son vrai sens, on transporte l'image terminée sur un dernier support où elle se trouve dans le vrai sens. C'est en particulier cette dernière opération qui éloigne bien des opérateurs de l'emploi du papier au charbon, car elle est assez délicate. Il sera donc plus avantageux et plus rapide de se servir de clichés pelliculaires et de ne faire qu'un seul transport.

Les épreuves au charbon sont très fines et complètement inaltérables. Les clichés doivent être doux et peu intenses. Ce procédé permettra donc d'utiliser des clichés un peu faibles.

Procédés à fort tirage. — Nous arrivons maintenant à l'étude des procédés permettant d'obtenir des épreuves inaltérables en grand nombre. Lorsque le médecin a une publication à faire, il est intéressant pour lui de savoir quelles sont les ressources que la Photographie lui offre pour la multiplication des documents.

Les procédés qu'il peut employer sont la Photocollographie, l'Héliogravure, la Pbotogfyptie et la Similigravure.

Examinons-les successivement.

Photocollographie. — La Photocollographie consiste à imprimer directement des épreuves sur une couche de gélatine bichromatée préalablement exposée à la lumière sous le cliché. Le principe de ce procédé a été découvert en 1855 par notre compatriote, Poitevin. Une couche de gélatine bichromatée étant exposée au jour (c'est ce qu'on appelle l'insolation), les parties insolées de

viennent imperméables à l'eau, et cela en raison directe de la lumière reçue, tandis que les parties protégées restent perméables. Si alors on mouille cette plaque, l'eau ne prendra que dans les parties n'ayant pas reçu la lumière et sera repoussée plus ou moins par les autres. Lorsque l'on passera un rouleau chargé d'encre d'imprimerie sur la couche de gélatine, l'encre ne prendra pas dans les parties humides, mais seulement sur les parties inso-lées et proportionnellement à leur degré d'insolubilisation.

Ce procédé donne des résultats absolument parfaits et n'exige que l'emploi de négatifs retournés et une certaine expérience que l'on peut du reste acquérir rapidement. 11 doit être employé régulièrement dans un service médical dans lequel il est besoin d'obtenir un nombre important d'épreuves d'un même malade.

Dès qu'il est nécessaire d'obtenir plus de vingt épreuves, il devient pratique ; en effet, pour quelques épreuves, il sera toujours plus simple de faire un des tirages que nous avons indiqués précédemment; mais, dès que leur nombre augmentera, les difficultés seront plus grandes, surtout dans la mauvaise saison où il n'est pas rare d'avoir besoin quelquefois d'un ou plusieurs jours pour avoir une seule épreuve.

La multiplication facile et économique de ces épreuves permettra de les distribuer largement aux personnes intéressées, d'illustrer des présentations, des observations ou des thèses.

Nous allons décrire le matériel qui est nécessaire dans l'espèce et que nous avons fait installer à nos frais dans notre laboratoire de la Salpêtrière. L'atelier de photocollographie est dirigé par notre préparateur M. Lucien Sauvé et à titre de spécimen nous donnons une des planches de notre Ouvrage (PL exécutée par lui et tirée à 25oo exemplaires. Il est vrai de dire que lorsqu'il s'agit de tirages aussi considérables il vaudra mieux s'adresser aux maisons spéciales qui tirent avec une machine mue par la vapeur et qui par suite donnent un tirage plus économique.

Il est nécessaire d'avoir deux pièces distinctes dans l'atelier photocollographique, l'une où l'on fera les préparations de plaques et les lavages, l'autre où se trouveront l'étuve et la presse. On devra pouvoir maintenir dans celte dernière pièce une température moyenne de i5° à i8° et y éviter toute humidité.

Fis- 73

fond de la boîte est formé d'un bain de sable enfermé dans une caisse de tôle de om, 10 d'épaisseur. Un système de chauffage quelconque placé en dessous du bain de sable permet de la chauffer el d'obtenir dans la partie supérieure la température convenable. Le système le plus avantageux est le gaz, qui permet de la régler à volonté.

Dans l'intérieur, des tasseaux portent des barres de fer mobiles garnies de vis calantes destinées à supporter les planches photocol-lographiques (fig- 74)* La boîte est fermée par un couvercle garni de toile rouge de façon à empêcher la lumière d'entrer en permettant

Nous employons le matériel de la maison Voirin qui s'occupe spécialement de la construction des appareils nécessaires pour la photocollographie et s'est fait une grande renommée dans celte industrie nouvelle.

L'étuve qui est destinée à faire sécher rapidement la couche de gélatine bichromatée coulée sur la plaque de verre se compose d'une boîte rectangulaire en bois montée sur quatre pieds (fig. 73). Le

Fig. 74.

mètre placé à l'intérieur. Il est en effet dangereux d'ouvrir l'étuve pendant le séchage des planches.

Pour se servir de l'étuve on allume la rampe de gaz et lorsque la température est au degré voulu on place les planches sur les vis calantes et l'on vérifie l'aplomb au moyen d'un niveau d'eau.

Presse. — Celle qui nous sert à la Salpêtrière sort des ateliers de M. Voirin (fig. 7$). Elle consiste essentiellement en un solide plateau métallique sur lequel on fixe la planche. Après encrage on superpose une feuille de papier convenable, on rabat dessus un cadre garni d'une toile de caoutchouc et au moyen de la manivelle on fait passer le plateau sous un rouleau d'acier qui par sa pression applique l'encre sur la feuille de papier.

Châssis à insolation. — On emploie des châssis spéciaux portant au fond une glace forte et des barrettes à vis de pression qui donnent un contact intime entre le négatif et la planche photocollo-graphique. On se sert encore avec avantage de châssis profonds dans lesquels on place des barres transversales. On obtient un serrage énergique au moyen de coins en bois que l'on glisse entre la planche et les barres. L'arrière du châssis est fermé par une porte à coulisse de façon que le jour ne puisse pas pénétrer sur le dos de la planche.

Encres. — On se sert d'encres et de vernis lithographiques. On trouve également dans le commerce des encres de couleur qui

néanmoins à l'air chaud de s'échapper. Sur le devant de l'étuve est un verre jaune permettant de lire la graduation d'un thermo-

Pour se servir de l'encre noire il faut la mélanger d'une certaine quantité de vernis; on fait cette opération sur un marbre avec le couteau à palette jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de grain.

La quantité de vernis variera d'après le travail à effectuer, en se

sont fabriquées spécialement sous le nom de teintes photographiques. Quelques-unes sont assez fluides pour pouvoir servir sans être rebroyées.

Fig. 76.

tous les jours l'enduire de vernis lithographique et le faire rouler pendant un certain temps. On nettoie ce rouleau en le grattant dans le sens du cuir avec un couteau à palette. Le rouleau de gélatine est prêt à servir de suite; il se nettoie avec de l'essence de térébenthine.

Glaces. — On emploie des glaces épaisses de nmm à i2mm au moins. Elle doivent être doucies d'un côté, afin de faciliter l'adhérence de la couche, et biseautées, afin de pouvoir être montées sur la machine.

Papiers. — On doit se servir de papiers fortement satinés ou de papiers couchés. On peut encore employer les papiers dits de luxe. Dans ce cas il faudra encrer davantage et augmenter la pression de la machine.

Gélatine. — Il existe deux sortes de gélatine : la tendre et la dure. La tendre donnera plus de demi-teintes, mais tirera peu; la dure au contraire sera plus résistante; mais elle conviendra mieux

basant sur les principes suivants : pour un cliché heurté, il faut une encre fluide contenant beaucoup de vernis; au contraire, pour un cliché manquant d'oppositions, il faut de l'encre dure, c'est-à-dire contenant peu de vernis.

Rouleaux. — Il faut deux, rouleaux, le premier en cuir : c'est celui des imprimeurs lithographes; le deuxième plus petit en gélatine {fig-r]r))- Le rouleau de cuir sert à encrer la planche ; celui de gélatine à répartir l'encre d'une manière convenable et à obtenir les demi-teintes.

Suivant la vitesse qu'on leur donnera, on déposera ou on enlèvera de l'encre. Le rouleau de cuir demande à être fait : on devra

Fig. 77

Préparation de la couche sensible. — Voici la formule que nous employons :

Gélatine................................... 21

Eau....................................... 3oo

Bichromate d'ammoniaqua................... i,5

Bichromate de potasse...................... 3

La gélatine est d'abord mise à gonfler dans de l'eau courante, de

aux travaux ayant peu de demi-teintes. C'est par un mélange convenable de ces deux sortes de gélatine que l'on arrivera au meilleur résultat suivant les hypothèses.

Préparation des planches photocollographiques. — Les

plaques sont nettoyées d'abord dans des solutions étendues d'acide sulfurique ou de potasse, puis lavées à l'eau. Il faut alors leur faire subir une préparation préliminaire, pour assurer l'adhérence de la couche de gélatine : on frotte d'abord les plaques avec un chiffon enduit de tripoli et humecté d'acide azotique étendu d'eau, puis avec de la ponce en poudre et de l'ammoniaque. Ces deux premiers nettoyages ont une grande importance. On procède ensuite au sili-catage; on prépare la solution suivante :

Bière..................................... 3oocc

Eau....................................... i5occ

Silicate de potasse du commerce............ 45cc

On mélange et l'on bat en neige. Lorsque la mousse a disparu, on filtre sur un morceau de flanelle. On essuie une dernière fois les plaques avec un chiffon de papier buvard imbibé d'ammoniaque, on enlève les poussières avec le blaireau, puis on verse la solution sur le côté dépoli des plaques; on l'étend avec une baguette de verre et on la laisse égoutter, puis on la met sécher à l'abri de la lumière. Il faut éviter de toucher la face silicatée avec les doigts et essuyer avec soin le dos de la plaque. On peut silicater un certain nombre de glaces à l'avance; on les conserve à l'abri de la poussière pendant une quinzaine au plus. Au moment de s'en servir, il faudra les laver à grande eau et les remettre à sécher.

tine. On ajoutera alors la quantité d'eau voulue pour arriver à la quantité indiquée dans la formule, puis on filtrera sur de la flanelle dans un entonnoir à filtration chaude (fig. 78).

Pendant ce temps l'étuve aura dû être chauffée à 4o° et les glaces mises de niveau. Lorsque la température du bain-marie sera descendue à 45°, on mettra sur chaque plaque la quantité reconnue nécessaire. L'épaisseur de la couche n'est pas indifférente; pour un cliché normal il faut | millimètre, 'pour un cliché de trait | de millimètre seulement. On étend la gélatine au moyen d'une baguette de verre recourbée, en ayant soin d'aller du centre aux

façon à la débarrasser des sels solubles. Celte opération se fait plusieurs heures à l'avance. On l'égoutte, puis on la fait fondre au bain-marie dans une petite quantité d'eau et on la maintient pendant une demi-heure à la température de 5o° à 6o°. Tl ne faut pas dépasser cette température sous peine de décomposer la gélatine; on pèsera alors les quantités voulues des bichromates, on les fera dissoudre séparément dans une petite quantité d'eau; puis, après les avoir mélangés, on les versera dans la solution de géla-

Fig. 78.

bords, de façon que même les biseaux soient recouverts. S'il y a des bulles d'air ou des poussières, on les enlèvera avec une extrémité de l'agitateur.

On fermera alors l'étuve et on maintiendra la température à 4o° pendant une heure et demie ou deux. On éteindra alors le feu, et, lorsque l'étuve sera redescendue à la température de la pièce, on pourra sortir les planches.

Insolation. — En général, on borde les clichés soit avec du papier noir, soit avec du papier d'étain mince, ceci dans le but de n'insoler que la partie à reproduire. On met alors le négatif dans le châssis, la planche photocollographique face contre celle du cliché; puis, après s'être assuré du contact intime des deux surfaces, on expose au jour. On reconnaît que l'exposition est suffisante lorsque, découvrant une partie de la planche, on voit nettement par réflexion le dessin dans tous ses détails. On pourra employer avec succès un photomètre analogue à celui que nous avons décrit pour le procédé au charbon.

Une fois la planche sortie du châssis, on la met face en dessous sur un drap noir et on l'expose pendant quelques minutes à la lumière diffuse. Cette opération a pour but d'insoler complètement la partie de la couche qui est en contact avec le verre et d'en augmenter i'adhérence.

Pour éliminerle bichromate dépotasse, on plonge laplanche dans une cuve où l'eau se renouvelle constamment; on ne doit plus voir sur la plaque la moindre coloration jaune. Cette opération est assez longue et demande de 8 à 10 heures. On met ensuite la planche sécher.

Tirage de la planche. — Avant de procéder au tirage, il faut opérer le mouillage de la planche qui a pour but de la mettre dans l'état voulu pour prendre ou repousser l'encre d'imprimerie. Le bain de mouillage est composé d'eau et de glycérine; cette dernière a pour but de maintenir la plaque humide et d'éviter son séchage trop rapide.

Pour les clichés normaux, on prendra parties égales d'eau et de glycérine; avec des gélatines dures ou fortement insolées, on

prendra f d'eau, ~ de glycérine et l'on ajoutera quelque gouttes d'ammoniaque; pour les sujets délicats où il y a des finesses, on prendra ~ d'eau et f de glycérine.

La planche est mise de nouveau sur un support à vis calantes et recouverte, suivant les cas, de l'un ou l'autre de ces bains. La durée du mouillage dépendra delà valeur du négatif, de l'insolation et de la nature de la gélatine.

Moins on mouille, plus on a de duretés ; plus on mouille, plus on diminue les oppositions. On reconnaît d'ailleurs que le mouillage est suffisant lorsque, passant le doigt à la surface, on sent que le relief a diminué.

On enlève alors le liquide sur la planche au moyen d'une éponge fine, puis on la place sur la machine en la faisant reposer sur un matelas de papier buvard coupé exactement de la grandeur de la planche.

Alors on tamponne celle-ci de façon qu'il ne reste plus de traces d'humidité et l'on procède à l'encrage.

Encrage. — On met une petite quantité d'encre bien broyée sur le marbre et avec le rouleau de cuir on l'étend jusqu'à ce que la couche soit bien égale. On passe alors le rouleau sur la planche et ceci jusqu'à ce que l'encrage soit suffisant; on garnit de même le rouleau de gélatine sur le marbre et on le passe rapidement sur la plaque pour obtenir les demi-teintes.

L'emploi du rouleau de gélatine est très important, car il permet, suivant qu'on le passe rapidement ou lentement, d'encrer ou de désencrer; on peut donc avec un peu d'habileté arriver au poin voulu.

On met alors la feuille de papier, on rabat le blanchet et l'on fait fonctionner la manivelle. Une fois la planche bien en train, le tirage s'effectue rapidement.

Nous avons cru devoir décrire tout au long le procédé de Photocollographie, car nous sommes convaincu que, parmi les procédés inaltérables et à grand tirage, c'est celui qui est le plus avantageux. M. Sauvé tire fréquemment à la Salpêtrière des planches pour la nouvelle Iconographie de la Salpêtrière et il atteint facilement sans aides un tirage de iooo exemplaires. S'il fallait

dépasser ce chiffre, nous croyons, comme nous l'avons dit, qu'il vaudrait mieux s'adresser à l'industrie, au point de vue de la rapidité du tirage et par suite du prix de revient. Avec une machine à main, un tirage de 5oo par jour est difficile à réaliser, tandis qu'une machine peut tirer facilement 2000.

En dernier lieu, nous ferons remarquer cpie la Photocollogra-phie rend toutes les nuances de l'épreuve photographique sans la production d'aucun grain susceptible de modifier l'aspect de l'original .

Photoglyptie. — Nous croyons devoir signaler ce procédé, parce qu'il peut lutter avec la Photocollographie au point de vue de l'exactitude du rendu des nuances de l'original; mais il ne saurait l'égaler au point de vue de la praticité, car il demande un matériel que l'on ne trouve que dans quelques rares ateliers.

En voici le principe. Une couche épaisse de gélatine bichro-matée est insolée sous le négatif. Sous l'influence de la lumière, elle est insolubilisée plus ou moins profondément et, si l'on traite une telle plaque par l'eau tiède, on obtiendra des creux et des reliefs exactement proportionnés aux différentes valeurs de l'original. On durcit alors la pellicule de gélatine dans l'alun et on la fait sécher. On la place alors sur une plaque d'acier bien dressée et l'on applique par-dessus un bloc de métal mou composé de plomb et d'antimoine. On place le tout sous la presse hydraulique et l'on exerce une pression qui n'est pas moindre cpie 1 oooks par centimètre carré. La pellicule de gélatine s'imprime dans le métal et y laisse l'empreinte exacte de ses creux et de ses reliefs. Si alors on coule dans ce moule de la gélatine colorée, que l'on applique pardessus une feuille de papier et que l'on donne une pression suffisante au moyen d'une presse spéciale, la presse photoglyptique, l'encre sera chassée dans les parties qui correspondent aux reliefs du moule ; elle restera au contraire en plus ou moins grande quantité dans les creux et ceci proportionnellement à leur profondeur. Dès que la gélatine a fait prise, on retire l'image, on la durcit dans un bain d'alun et elle est terminée.

Ce procédé est peu employé, à cause du matériel nécessaire pour la confection du moule; mais c'est regrettable, car, outre l'exacli-

Itide du rendu des nuances, c'est le procédé qui, à notre avis, pour de grands tirages, donnerait la régularité la plus grande, ce qui est loin d'exister dans la Photocollographie, où le degré de mouillage de la planche, la plus ou moins grande habileté de la personne qui fait l'encrage peuvent amener des différences considérables dans un tirage. Nous donnons une très belle planche qui a été exécutée par MM. Block de Paris (Pl. XV). La maison Block est une des rares maisons qui exploitent encore ce procédé si intéressant.

Héliogravure. — Nous ne donnerons pas de description détaillée de ce procédé qui est exploité par plusieurs maisons très en renom, mais gardant avec un soin jaloux leurs modes opératoires. En substance, on obtient sur cuivre une gravure en creux avec adjonction d'un grain artificiel destiné à éviter l'empâtement des demi-teintes. Ce procédé, dans les mains de MM.Lumière de Lyon, donne de magnifiques résultats, ainsi qu'on peut s'en convaincre en examinant les planches de l'Atlas d'Anatomie pathologique de la moelle épinière que nous avons publié avec le DrPaul Bloccj.

Il a l'avantage, sur les précédents, de permettre l'adjonction de lettres de renvois qu'un graveur fait aisément sur la planche.

Ce procédé est assez coûteux, car, outre le prix de la planche, il faut faire exécuter" les tirages sur papier spécial par un imprimeur en taille-douce.

Similigravure. — Les procédés que nous venons de décrire donnent d'excellents résultats, et, suivant les cas, on pourra utiliser l'un ou l'autre. Ils ont cependant un défaut commun, c'est de nécessiter le tirage hors texte.

A notre époque, où l'art de l'imprimerie a fait tant de progrès,

est certain que l'avantage sera aux procédés de gravure qui seront typographiques, c'est-à-dire qui pourront s'intercaler dans le texte et se tirer, comme celui-ci, rapidement et économiquement. Or ni la Photocollographie, ni la Photoglyptie, ni l'Héliogravure ne sont dans ce cas.

Il faut en effet des planches en relief pour les usages typographiques et il se pose alors un problème très complexe : c'est celui

qui consiste à transformer les teintes modelées d'un cliché en traits ou en lignes donnant précisément au tirage les mêmes valeurs.

Parmi les personnes qui se sont occupées de cette transformation du négatif photographique en planche typographique, il nous faut citer M. Ch. Petit, qui, avec une persévérance digne d'éloges, a surmonté peu à peu toutes les difficultés et est arrivé à un procédé très complet dont on trouvera dans cet Ouvrage de nombreux spécimens.

C'est là le procédé de l'avenir, nous en sommes convaincu, et c'est à ce titre que nous avons voulu lui faire dans notre travail une si large part. M. Ch. Petit s'est attaché à ne faire intervenir dans son procédé que des opérations purement chimiques, excluant d'une manière absolue la retouche locale faite par la main de l'homme, retouche qui peut toujours altérer la vérité.

La plaque de cuivre qui doit recevoir l'image porte un grain uniforme formant réserve. Ce grain est formé de points ronds disposés symétriquement en quinconces; il v a 72 de ces points par millimètre carré. M. Petit s'est arrêté à ce chiffre après de nombreux essais : c'est la limite à laquelle les rouleaux d'impression peuvent encrer une planche sans la boucher; d'autre part, la planche est nourrie et ne présente pas de solution de continuité apparente.

La planche est recouverte de gélatine bichromatée et insolée sous le négatif à reproduire. Après insolation suffisante la plaque est passée au perchlorure de fer.

Comme sous l'action de la lumière, le bichromate est devenu plus ou moins insoluble, et ceci proportionnellement aux valeurs du négatif, le perchlorure mordra d'autant plus le grain de la planche que la gélatine sera plus perméable. Dans les grands blancs du négatif, le grain sera le plus attaqué et il deviendra d'une finesse très grande; dans les parties correspondant aux demi-teintes, il sera moins attaqué, et enfin dans les grands noirs il ne le sera pas du tout.

On dissout alors le grain au moyen d'un dissolvant spécial, puis on monte la planche qui est prête au tirage. Ce procédé, comme nous l'avons déjà dit, est appelé à rendre les plus grands

services et il fait le plus grand honneur à M. Ch. Petit, qui est un travailleur infatigable, et depuis de longues années s'est consacré à l'étude de ce problème si important.

Mode de tirages rapides. — Dans certaines hypothèses, il pourra être nécessaire d'avoir rapidement une ou plusieurs épreuves d'un cliché donné. Dans ce cas on peut avec avantage se servir des papiers au gélatinobromure d'argent. Ces papiers sont d'une grande rapidité et ils permettent d'obtenir une épreuve en quelques secondes à la lumière d'une lampe ou d'un bec de gaz.

On les place dans le laboratoire rouge sur le cliché, puis on expose 20 à 3o secondes à im d'un bec de gaz ordinaire. Le développement s'effectue de la manière suivante :

Solution A. Oxalate neutre de potasse...... 3oo

Eau distillée................... 1000

B. Sulfate de protoxyde de fer..... 3oo

Eau distillée................... tooo

Acide tartrique................

G. Bromure....................... 10

Eau distillée................... 100

La solution B doit être d'un beau vert émeraude; on la conserve toujours à la lumière. Pour l'usage on prend :

Solution A............................ 3 parties

B............................ 1 partie

G............................ 10 gouttes

Il faut avoir soin de verser B dans A et non inversement.

Le papier plongé dans cette solution se développe rapidement; on le lave un instant, on le passe ensuite dans le bain suivant :

Eau distillée............................... 1000

Acide citrique............................. 20

Après quelques minutes de séjour et un nouveau lavage on fixe dans le bain ordinaire d'hjposulfîte de soude. Après un lavage abondant on passe le papier dans un bain d'alun où il doit séjourner au moins 5 minutes ; on termine par un lavage rapide. On peut développer successivement dans le même bain un certain nombre

d'épreuves ; lorsque son action commence à se ralentir, on reprend un bain neuf. En pratique, nous conseillons de n'ajouter la solution B que petit à petit.

L'épreuve lavée est épongée dans du papier buvard non plu-cheux et elle est sèche assez rapidement. Si l'on n'a pas le temps d'effectuer le séchage, on n'a qu'à appliquer l'épreuve sur un verre propre face en dessous. On l'appuie vigoureusement au moyen d'une raclette ou d'un rouleau en caoutchouc et on peut la livrer de suite avec le verre.

On peut même tirer, par cette méthode, une épreuve quelques instants après le développement. On lave rapidement le cliché pour enlever le plus possible l'hyposulfite de soude; d'autre part, on met tremper une feuille de papier au gélatinobromure dans une cuvette remplie d'eau distillée. Lorsqu'elle est distendue, on l'applique sur le cliché couche contre couche et avec la main à plat on enlève les bulles d'air interposées, afin que l'adhérence soit complète. Le reste des opérations est identique.

Avec ce procédé on peut avoir une épreuve un quart d'heure après avoir fait poser le modèle. Dans certains cas ce mode opératoire peut avoir des avantages incontestables.

Le tirage au gélatinobromure d'argent pourra être employé également lorsque la lumière naturelle sera insuffisante; mais il ne faudra pas oublier que la durée des épreuves ainsi obtenues est absolument problématique s'il n'a pas été fait un lavage convenable tout comme dans le procédé au chlorure d'argent sur papier albuminé.

§ III. — CONSERVATION ET CLASSEMENT DES ÉPREUVES.

Les épreuves terminées sont ordinairement réunies en albums. On reportera sur chaque feuille le numéro du cliché et les divers renseignements primitivement portés sur la fiche signalétique.

Ce procédé a néanmoins un inconvénient : c'est de ne pouvoir réunir les unes à côté des autres les épreuves concernant les mêmes affections. Or, au point de vue de la comparaison, il est évidemment fort incommode d'aller chercher des épreuves éparses à différentes pages de l'album.

Fig. 79.

Nous avons fait faire par M. Borgeaud un meuble fermé qui constitue un classeur d'épreuves du même genre que les classeurs de fiches qui se trouvent dans toutes les bibliothèques. Ce système, complètement fermé et portant une serrure, met les collections à l'abri de la poussière et des indiscrétions.

§ IV. — DES PROJECTIONS.

A côté de la collection d'épreuves sur papier, il pourra être nécessaire de créer une autre collection sur verre, celle-ci destinée à la projection. Ces épreuves s'appellent diapositives sur verre ou simplement projections.

Nous n'insisterons pas sur l'avantage qu'ilyapour le professeur à mettre constamment sous les yeux de ses auditeurs les malades dont il parle. Quand il ne pourra montrer le sujet lui-même, ce qui est a priori préférable, il pourra compléter cette lacune en

Aussi sommes-nous d'avis d'adopter les albums à feuillets mobiles, ce c[ui permet de faire tous les changements et toutes les transpositions voulues ( fig. 79).

Fig. 80.

appareils fonctionnent suivant les ressources dont on dispose, soit à la lumière électrique, soit à la lumière oxhydrique. Si l'on ne peut se procurer une installation aussi complète, on peut faire usage d'appareils plus simples qui fonctionnent avec de fortes lampes à pétrole. Ils seront suffisants dans bien des cas.

(') Consulter à ee sujet la Pratique des projections, par H. Fourtier. Paris, Gauthier-Villars et fils; 1892.

projetant les épreuves obtenues. La projection est le seul moyen de faire voir un objet déterminé à un auditoire nombreux.

Nous n'entrerons pas dans le détail des appareils à projections ('). Dans un service bien organisé on emploie des appareils construits spécialement dans ce but par Dtiboscq ou Molleni (fig- 80). Ces

Examinons maintenant les procédés employés pour obtenir des vues transparentes sur verre destinées à la projection.

D'après les décisions du Congrès international de Photographie de 1889, le format de ces plaques doit être 8,5 x 10. Pour donner de bons résultats, elles doivent être d'une transparence absolue dans les blancs ; à cet effet, on se sert de plaques préparées spéciale^ ment. Ce sont ordinairement des plaques au chlorure d'argent : elles ont l'avantage de donner des blancs très purs et des tons très agréables.

On se sert de ces plaques de deux manières : ou bien le cliché à reproduire tient dans le format de la projection : on opère alors par contact dans le châssis-presse; au contraire, veut-on projeter un plus grand cliché : dans ce cas il faudra en faire une réduction à la chambre noire. Examinons ces deux hypothèses.

1. Diapositives par contact. — On place la plaque au chlorure sur le cliché face contre face, exactement comme l'on fait avec le papier sensible. On expose ensuite suivant la sensibilité des plaques, soit à la lumière diffuse, soit à la lumière artificielle. Avec la marque Perron (deMâcon), 1 à 5 secondes sont nécessaires au jour; au gaz à im de distance, il faut de 1 à 5 minutes; avec ces plaques il vaut donc mieux opérer au jour. Avec la marque Ilford, dont nous nous servons actuellement (1 ), la sensibilité est telle qu'il est difficile d'opérer à la lumière diffuse ; à la lumière du gaz il faut de i5 à 60 secondes suivant les clichés. Comme les vues à projections doivent être très pures, il faut éviter toute réflexion de lumière, soit par le dos, soit par les bords de plaque. A cet effet, nous mettons toujours une surface noire derrière la plaque sensible ; de plus, nous enfermons le cliché dans une cache en carton garnie d'une légère bordure de papier noir. De cette manière, les bords delà projection ne sont pas impressionnés et ne présentent pas de halos.

Ce phénomène, il est vrai, ne se produit que lorsque le cliché à reproduire est plus petit que la plaque de projections. C'est ce qui

(') Nous nous servons également avec succès des nouvelles plaques au lactate d'argent que MM. Guilleminot viennent de mettre dans le commerce. Tout ce que nous avons dit de la marque Ilford s'applique exactement à ces plaques.

arrive avec le 8 x 8 et le 8 x g; si alors on opère sans cache, les bords sont impressionnés énergiquement et un halo considérable vient même envahir tout le pourtour de l'image; avec la cache cet inconvénient est complètement supprimé.

2. Diapositives par réduction. — Nous avons fait installer à la Salpêtrière un appareil spécialement destiné à ce genre de travail. Une ouverture faite dans la muraille et garnie d'un verre dépoli reçoit la lumière extérieure, soit directement s'il n'y a pas de constructions gênantes, soit au moyen d'un miroir incliné à 45° dans le cas contraire. Contre l'ouverture se trouve un bâti en bois pouvant recevoir des intermédiaires destinés à porter des clichés de différentes tailles. Sur une planche horizontale placée au ras de l'ouverture glisse un soufflet mobile qui peut s'adapter d'une part au bâti des intermédiaires et de l'autre à un bâti portant l'objectif. Plus loin et sur les mêmes coulisses se trouve un bâti portant également divers intermédiaires, et, entre autres, celui correspondant au format des plaques de projection.

Dans cet appareil, comme on le voit, le négatif à reproduire est fixe, mais l'objectif et la plaque sensible peuvent se mouvoir à volonté; par des déplacements convenables on arrivera à faire telles réductions que l'on voudra. C'est, du reste, ce même appareil que nous utiliserons plus tard pour les agrandissements.

Il est bien entendu que nous opérons ici dans le laboratoire noir. Si l'on voulait installer ce dispositif dans un local quelconque, il suffirait de réunir le bâti de l'objectif au bâti d'arrière et de remplacer celui-ci par un grand châssis portant les intermédiaires. L'appareil ne serait autre alors que la chambre classique à trois corps, qui permet du reste facilement le même travail. L'avantage que nous trouvons au dispositif que nous avons fait faire est de nous permettre une commode mise au point, parce que nous sommes dans l'obscurité, de faciliter la manœuvre des diaphragmes et de nous permettre, à la rigueur, de modérer la venue de certaines parties de l'image. La plaque étant à nu, il est facile avec un écran, ou même simplement avec la main, de masquer les rayons allant à tel ou tel point de l'image pendant un temps plus ou moins long.

Il faut pour ce genre de travail employer un objectif rectilinéaire

Solution À. Eau........................... 1000

Hydroquinonc.................... 8

Sulfite de soude.........,....... i5o

Bromure de potassium.......... i ,5

B. Eau........................... iooo

Soude caustique................ 8

On mélange par parties égales au moment de s'en servir. Les plaques viennent rapidement dans ce bain et on les enlève lorsqu'elles ont l'intensité désirable. Après lavage rapide, on les plonge

à court foyer. Celui dont nous nous servons est le stéréoscopique de Dallmeyer de i5cm de foyer. En ce qui concerne les réductions, il est inutile de diaphragmer beaucoup. C'est un avantage, car les temps de pose sont autrement plus longs par cette mélhode que par contact à la lumière directe. Avec des glaces Perron, il faut souvent des poses d'un quart d'heure et plus. Au contraire, avec les nouvelles plaques à ton noir de Ilford ou Guilleminot, i à i minutes sont suffisantes. A ce point de vue, ces plaques sont donc bien avantageuses.

Développement des plaques à projection. — Dans ce genre de travail, où l'on peut régler la pose d'après la valeur du cliché et arriver après quelques essais à savoir le temps d'exposition le plus juste, on pourra trouver grand avantage à employer des bains tout préparés dans lesquels il suffira de placer les plaques les unes après les autres et de leslaisser le temps voulu. Nous ne donnerons que la formule applicable aux plaques à ton noir d'Ilford ; ces plaques nous paraissent de beaucoup supérieures aux plaques au chlorure, non pas tant au point de vue de la transparence que de la régularité du travail. En effet, les plaques au chlorure (Perron) donnent des colorations différentes suivant l'intensité, la coloration du cliché et surtout suivant le temps de pose. On obtient des tons noirs avec des poses courtes et des tons plus ou moins chauds presque jusqu'au rouge brun par des poses plus longues. Le ton obtenu varie aussi suivant que le bain a plus ou moins servi ; enfin cette coloration se modifie au séchage. Toutes ces raisons réunies nous ont fait abandonner ces plaques, pour un travail où il faut avant tout de la régularité et de l'uniformité.

dans la solution d'hyposulfîte de soude et on termine par un lavage soigné. Nous avons remarqué que ces plaques, probablement à cause de leur grande sensibilité, ont toujours un léger voile sur toute leur surface. On s'en rend parfaitement compte en mettant la plaque sur une feuille de papier blanc. Or, pour qu'une projection soit parfaite, il faut qu'on voie le papier aussi blanc dans les blancs des plaques que dans les parties voisines.

Nous enlevons alors ce voile en nous servant d'un réducteur au prussiate rouge de potasse et à l'hyposulfite de soude. La plaque immergée pendant quelques instants dans ce réducteur en sort absolument limpide. Néanmoins, sous l'effet du réducteur, elle a pu baisser un peu; c'est pourquoi nous avons pris le parti de toujours pousser notre développement plus que nécessaire, et de descendre ensuite l'image au point voulu, comme nous venons de l'indiquer.

Les projections une fois sèches seront recouvertes d'un verre mince de même format de façon à protéger la couche. Ces deux verres seront réunis par des bandes étroites de papier noir gommé.

Les projections terminées seront numérotées et classées comme les clichés; un registre spécial en sera tenu. Ce registre portera la reproduction des divers renseignements qui existent sur la fiche signalétique.

D'après les décisions du Congrès de 1889, toutes les projections porteront une étiquette ronde placée dans l'angle inférieur droit, lorsque l'on regarde l'épreuve dans son vrai sens. De cette manière, la personne qui fait les projections n'aura aucune hésitation pour les placer dans la lanterne dans le sens convenable.

Obtention rapide des projections. — Il peut arriver qu'aussitôt un cliché fait il soit nécessaire de l'avoir en projection. S'il s'agit d'une réduction, rien ne sera plus facile. Le cliché sera épongé dans du papier filtre, le dos essuyé et il n'y a qu'à le mettre en cet état à l'appareil de réduction sans qu'il soit sec.

La question est plus délicate lorsqu'il s'agit d'opérer par contact. Nous avons cependant pu réaliser la chose et voici comment: Nous plaçons sur notre cliché épongé une cache en papier mince,

(') Société des Conférences d'Épernay, 8 mars 1890.

puis nous superposons la plaque sensible. Cette légère épaisseur empêche les plaques de se coller ensemble; mais cet intervalle pourra compromettre la netteté de l'épreuve : on sait, en effet, qu'il est nécessaire dans tous les modes de tirage d'avoir une adhérence parfaite entre les deux couches; or, ce n'est pas le cas ici. Nous obtenons néanmoins de bons résultats en nous servant non de lumière diffuse, mais de lumière parallèle. En pratique, un large bec papillon placé horizontalement au-dessus du châssis nous a donné d'excellents résultats.

Le reste des opérations est le même.

Mais vient alors la question du séchage. On ne saurait, en effet, mettre dans la lanterne à projection une couche qui n'est pas parfaitement sèche, car, à cause de la chaleur développée par cet appareil, elle fondrait rapidement. Pour obtenir un séchage rapide, nous passons sur notre plaque et à plusieurs reprises de l'alcool absolu : celui-ci s'empare de toute l'eau contenue dans la plaque. On essore celle-ci en l'agitant vivement et on la fait sécher à une chaleur douce.

Cette expérience, que nous avons été le premier à réaliser, nous a permis, dans une Conférence publique de photographier notre auditoire et de lui montrer, 35 minutes après, l'épreuve sur l'écran. Nous avons fait la même expérience à la Société d'Encouragement, lors d'une Conférence de notre savant collègue M. Davanne.

Projections colorées. — Les projections obtenues comme nous venons de l'indiquer sont monochromes et elles sont loin de présenter les belles colorations des préparations histologiques que l'on peut désirer reproduire. C'est évidemment là une lacune, mais qui vient d'être comblée heureusement par MM. Lumière de Ljon. Ces deux habiles praticiens se sont proposé d'obtenir des épreuves pour projections mierographiques avec les couleurs de l'original et ceci par des procédés uniquement photographiques et sans l'intervention d'un travail quelconque de la main. Voici le procédé qu'ils ont indiqué et que nous recommandons à cause de sa simplicité et de sa facilité d'exécution.

Eau....................................... 65o

Bichromate de potasse..................... 25

Alcool..................................... 35o

La solution ne doit pas dépasser la température de i5"; après 5 minutes d'immersion, le papier est mis à sécher à l'abri de la lumière et de la poussière. On expose ensuite sous le négatif, en se conformant aux règles spéciales au procédé au charbon.

L'épreuve est développée d'après les méthodes connues sur un verre mince douci, préalablement décapé et parfaitement propre; l'épreuve est appliquée du côté douci.

Le développement doit être bien complet. Aussitôt terminé, on lave à l'eau froide, on immerge dans l'alcool pendant 10 minutes et l'on met sécher. L'épreuve est faible et même peu visible; cela tient à la nature du papier qui renferme peu de matière colorante.

Pour colorer l'épreuve au charbon, on se sert de solutions aqueuses des couleurs employées en Histologie ou de solutions analogues.

Le degré de concentration varie entre et Avec les

matières colorantes peu solubles dans l'eau, on les dissout au préalable dans une petite quantité d'alcool, puis on ajoute la quantité d'eau voulue. Parmi les couleurs qui réussissent lé mieux, nous pouvons citer le violet et le bleu, de méthyle, le violet de gentiane, le bleu coton, le rouge de magenta, le nacarat, la safra-nine diméthylée, le vert malachite, etc.

Il ne faut pas oublier que certaines couleurs dérivées de l'aniline sont rapidement altérées à la lumière; par suite il faudra les éliminer.

On verse la solution choisie sur l'image: celle-ci se colore immédiatement ; on procède ensuite à un lavage à l'eau jusqu'à ce que l'on ait obtenu la décoloration complète du fond. Dans certains cas, il sera bon de faire la décoloration dans l'alcool.

On termine l'épreuve une fois sèche en la vernissant pour

On choisit un papier dit au charbon, très pauvre en matière colorante, et on le sensibilise dans le bain suivant :

MM. Lumière obtiennent même des doubles colorations qui donnent alors à ces épreuves l'aspect complet des préparations histologiques.

Prenons, par exemple, un positif au charbon de microbes. Une première coloration est faite avec le rouge magenta au Les microbes sont fortement colorés en rouge foncé, le fond en rouge clair. On passe à l'eau et à l'alcool jusqu'à ce que celui-ci soit décoloré. On applique alors une deuxième solution de bleu coton faible au j^. On obtient des microbes colorés en rouge sur fond bleu pâle.

Ces épreuves donnent en projection de très beaux résultats et le procédé de MM. Lumière est vraiment très élégant.

Il ne faut pas s'imaginer cependant qu'en ce qui concerne les doubles colorations les résultats s'obtiennent comme en Histologie. Ce n'est que grâce à un artifice du reste très ingénieux que MM. Lumière obtiennent les doubles colorations, tandis qu'en Histologie les doubles colorations résultent des différences chimiques des tissus qui se combinent ou non avec telle ou telle matière colorante.

Si dans la moelle par exemple on obtient des colorations variées en intensité et en nature par suite des divers tissus qui la composent, il n'en est plus de même dans le procédé de MM. Lumière où l'intensité de la coloration est fonction uniquement de l'épaisseur de l'image au charbon. '

enlever le grain du verre dépoli. Le vernis suivant est excellent :

Benzine................................... 3oo?r

Gomme dammar............. ............. 5gl"

chapitre vii.

DE LÀ PHOTOGRAPHIE MÉDICO-LÉGALE.

Rôle et utilité de la Photographie en Médecine légale. —

D'après la définition du regretté Legrand du Saule, la Médecine légale consiste « dans l'application des Sciences médicales à l'étude et à la solution de toutes les questions spéciales que peuvent soulever l'institution des lois et l'action de la justice ».

La Photographie, qui peut rendre, comme nous l'avons vu, tant de services aux Sciences médicales en général, ne présentera pas ici un champ moins vaste et le médecin commis par la justice comme expert dans une affaire criminelle trouvera souvent avantage à mettre en pratique les procédés divers que nous avons indiqués dans le cours de cet Ouvrage.

L'une des questions qui se présente tout d'abord est celle de la détermination de l'identité d'un individu quelconque. Bien que cette recherche soit faite actuellement, à Paris du moins, par la Préfecture de Police, il est indiscutable que cet examen est du domaine médical : en effet, outre les simples mensurations, il faut noter, dans le signalement, des blessures, des cicatrices, des anomalies ou des déformations dont la nature et la description ne pourront être faites avec la précision voulue que par un homme compétent, sous peine de voir fréquemment des erreurs commises. Il faut, en effet, dans l'espèce, une connaissance très exacte du nu morphologique, pour ne pas indiquer comme signes particuliers des phénomènes qui n'ont rien que de normal.

Les modifications que l'âge peut apporter dans les résultats trouvés sont du domaine exclusivement médical, car elles'dépen-dent des lois générales qui président au phénomène de la croissance,

et si une science comme l'Anthropométrie paraît sortir du domaine médical, n'est-ce pas parce que les médecins ne s'adonnent pas suffisamment à l'étude du nu morphologique pour se consacrer uniquement à l'anatomie interne et aux études physiologiques et pathologiques. Quoi qu'il en soit, le médecin devra pouvoir relever les divers signes susceptibles de constituer l'identité d'un individu quelconque.

La Photographie lui sera, dans bien des cas, fort utile, ainsi que l'a si bien prouvé M. Bertillon en organisant le magnifique service d'identification de la Préfecture de Police.

Outre la reproduction photographique de tous les inculpés qui passent par le Dépôt, M. Bertillon a fait une étude que nous ne saurions passer sous silence : il s'agit de l'examen des mains professionnelles (Pl. XVII). Tl est reconnu que dans le travail manuel certaines déformations des mains, certaines callosités ou rugosités, certaines déchirures sont produites chez l'ouvrier par la pratique de tel ou tel métier. C'est là un puissant moyen d'investigation et qui, dans la pratique, facilite beaucoup l'identification, car il permet de déterminer avec certitude la profession exercée parle sujet examiné.

L'étude de ces lésions, de ces modifications professionnelles est d'ordre exclusivement médical et intéresse l'homme de l'art au même titre que les mains pathologiques. Nous en dirons autant du faciès de certains individus chez lesquels les passions, les vices ont pu imprimer des stigmates particuliers. Autant d'études originales dans lesquelles la Photographie interviendra de la manière la plus utile pour recueillir tous les documents et en faciliter l'analyse comparative.

Grâce au service si complet de M. Bertillon, le médecin, du moins à Paris et dans quelques grandes villes, n'a pas à intervenir, toutes les questions signalétiques étant résolues d'une manière parfaite.

Mais un crime est-il commis, le rôle du médecin expert commence et prend une importance capitale pour éclairer la justice. Et ce que nous disons des crimes est également vrai des accidents, des suicides, des tentatives d'empoisonnement, en un mot de tous les cas dans lesquels la justice doit demander le concours de

Pl. XVII.

Coiffeur.

Buraliste.

Raboteur.

Tonnelier.

Mains professionnelles.

Pl. XVIII.

1.

Coups et contusions.

2.

Blessure par arme blanche.

Blessure par arme à feu (balle de revolver).

Pl. XIX.

l'homme de science pour connaître les désordres qui ont'été produits dans l'organisme humain.

Dans la plupart de ces circonstances, il sera souvent utile de noter exactement la position de la victime : on peut en tirer quelquefois des conclusions intéressantes pour savoir s'il s'agit, pai exemple, d'un crime ou d'un suicide. Le cliché photographique exécuté en quelques instants, on pourra ensuite procéder aux autres constatations avec l'avantage inappréciable qu'on aura conservé la trace ineffaçable de l'état des lieux. Le relevé de l'état des lieux est fait principalement dans les grands centres par l'autorité judiciaire, mais le médecin, dans certains cas et particulièrement en ce qui concerne l'attitude de la victime, pourra trouver intérêt à relever ce document lui-même.

L'aspect des plaies et des blessures devra être conservé également par le médecin, qu'il y ait guérison ou décès, car, dans le premier cas, la justice ne doit pas ignorer l'état dans lequel a été relevé la victime et, dans le second, l'autopsie, qui sera nécessaire pour reconnaître l'étendue des lésions qui ont amené la mort, fera disparaître forcément ces marques extérieures que l'on doit nécessairement mettre sous les yeux de ceux qui sont chargés de la grave mission de punir les crimes. Nous donnons, grâce à l'extrême obligeance de M. Bertillon, la reproduction de trois photographies représentant l'aspect de coups et blessures ayant occasionné la mort. ha.Pl.XVIII, fig'. i, montre la figure d'une vieille femme qui a été littéralement écrasée à coups de bâton; la fig. 2 de la même Planche représente une section du cou qui a été faite avec un fort couteau; la PL XIXTait voir l'effet de la balle d'un revolver qui, entrée parle cou, est ressortie au-dessus du menton.

Il est évident que de telles pièces mises sous les yeux des jurés et des magistrats doivent leur enlever toute pitié pour les auteurs de ces assassinats.

Au cours de l'autopsie, le médecin devra noter également l'aspect des organes atteints s'il.doit procéder à leur dilacération pour l'examen microscopique ou toxicologïque.

En un mot, au fur et à mesure de son travail, il aura intérêt à conserver par la Photographie tous les faits qu'il trouvera de

nature à éclairer la justice ; son procès-verbal d'autopsie en sera d'autant plus complet et celte manière de faire coupera court à toutes les discussions qui pourraient s'élever et qu'on ne saurait plus désormais trancher d'une manière définitive, les pièces à conviction faisant défaut.

En ce qui concerne l'examen microscopique qui est souvent nécessaire pour l'étude de certaines taches, la photographie de la préparation apportera un document indiscutable qui pourra être mis sous les jeux de tous.

Avec tous ces documents, il est certain que le rôle de la justice est bien facilité et qu'il sera très difficile à un avocat, si habile qu'il soit, de jeter un doute sur les résultats de l'enquête confiée au médecin. On a vu des procès retentissants dans lesquels la culpabilité d'un criminel n'a pu être établie que sur des preuves scientifiques provenant de l'examen d'une tache relevée sur le lieu du crime. On conçoit facilement quelles graves erreurs peuvent être commises dans l'espèce, et l'intérêt que le médecin soucieux de son art peut et doit avoir à apporter à la justice des preuves indiscutables et durables.

C'est là une nouvelle confirmation des services nombreux que la Photographie peut rendre aux Sciences médicales et de la nécessité de l'Ouvrage que nous avons entrepris et auquel nous espérons que le lecteur voudra bien réserver toute son indulgence.

FIN.

table des matières.

Pages

Introduction............................................................ 1

CHAPITRE I.

Installation et Matériel.

§ 1. — Installation...................................................... 8

Atelier vitré.................................................... io

Emplacement................................................. io

Orientation.................................................. 11

Vitrage...................................................... "

Agencement................................................. 12

Laboratoire obscur............................................ 16

Laboratoire clair............................................ 21

g 1. — DU matériel..................................................... 22

Chambre noire..........................• .................... 22

Chambre d'atelier.............................................. 27

Chambre stéréoscopique..................................... 29

Chambre verticale............................................. 3i

Objectif........................................................ 3i

Règles pour l'emploi des diaphragmes......................... 32

Obturateur.................. ................................... 34

Manœuvre de l'obturateur.................................... 37

Accessoires..............................-....................... 37

Pied........................................................ 37

Loupe........................................................ 39

Voile noir.................................................. 3g

CHAPITRE IL Technique photographique.

§ 1. — des préparations sensibles...................................... 4°

Essai des plaques.............................................. 41

§ 2. — Chargement des châssis.......................................... 43

§ 3. — De l'exposition.................................................. 44

Influences théoriques........................................... 44

Influence de la lumière........................................ 45

Influence de l'objectif employé................................. 4

Influence clu diaphragme......................•............... 48

Influence de la distance du modèle.......... .................. 49

Influence de la coloration du modèle........................... 5o

Influence des plaques employée?............................... 5°

Influence du révélateur...................................... 5i

Influences pratiques............................................ 5i

Influence de l'orientation de l'atelier......................... 5i

Influence du vitrage de l'atelier............................... 52

Influence de la latitude........................................ 52

§ 4. — DU développement.............................................. 53

Développement à l'acide pyrogallique..... .................. 54

Pose normale............................................... 55

Sous-exposition............................................. 57

Sur-exposition............................................... 56

Achèvement du négatif................................. ..... "°

Renforçage et baissage des clichés............................ 01

Renforçage................................................... "2

Baissage...................................................... 63

CHAPITRE III. Photographie pendant la vie.

Photographie posée............................................ 64

Beproduction du malade en entier.............................. 66

Reproduction de la tête........................................ 7°

Faciès pathologiques.......................................... 7^

Reproduction des détails de la face............................ 77

Reproduction des mains....................................... 79

Pieds......................................................... 82

Maladies de la peau........................................... 83

Photographie instantanée...................................... 85

Étude des tremblements....................................... 86

Reproduction des malades en action.......................... 89

Étude de l'hystérie........................................... 90

Étude de la grande attaque d'hystérie......................... 97

Photochronographie............................................ 106

CHAPITRE IV. Applications diverses.

Étude de la marche pathologique.............................. "6

Application de la Photographie à l'étude des aliénés, des dégénérés et des idiots............................................ 119

Photographie de l'intérieur de certains organes................ 122

Enregistrement................................................ 127

Photographie à la lumière artificielle.......................... i3r

CHAPITRE V.

Photographie après décès. p

Reproduction des pièces anatomiques.......................... i36

Microphotographie............................................. x42

Matériel nécessaire pour les études microphotographiques...... 143

Règles pratiques pour l'emploi de la lumière oxhydrique....... i/(6

Condensateur................................................. T47

Microscope.................................................... T48

Modifications à apporter à l'éclairage.......................... i5j

Chambre noire................................................ J53

Dispositions générales......................................... 1 ^4

Appareils spéciaux............................................ J55

Appareil de M. Duchesne...................................... 161

Reproduction des préparations à large surface................. i63

De l'obtention des préparations destinées à la reproduction photographique................................................. 168

Procédés de simple coloration. '............................... 171

Méthode de Gram............................................. 171

Méthode d'Ehrlich............................................. 171

Méthodes dédouble coloration................................... 172

Méthode de Gram........................................... 172

Méthode d'Ehrlich............................................ 172

Procédés de coloration les plus usuels pour le tissu nerveux.... 172

Méthode au picro-carmin...................................... 173

Méthode de Weighert.......................................... 173

Méthode de Pall............................................... 174

CHAPITRE VI. Conservation et utilisation du négatif.

§ 1. — DE la conservation des phototypes négatifs..................". . . 176

Fiches photographiques........................................ 177

§ 2. — Multiplication du négatif........................................ 179

Procédés à faibles tirages...................................... 179

Papier au chlorure d'argent..................................... 180

Virage et fixage................................................. 181

Séchage,....................................................... '83

Collage......................................................... 184

Procédé au gélatinochlorure d'argent............................. i85

Épreuves au platine............................................. 186

Procédé au charbon............................................ 187

Procédés à fort tirage.......................................... 189

Photocollographie............................................. 189

Châssis à insolation.......................................... 192

Préparation des planches photocollographiques................. ig5

18020 Paris. — Imprimerie GALTHIeu-VILLARS ET FILS, quai des (irands-Augustins, 55.

Préparation de la couche sensible............................ ig5

Insolation................................................... r97

Tirage de la planche........................................ 197

Photoglyptie.................................................. !99

Héliogravure.................................................. 200

Similigravure................................................. 200

Mode de tirages rapides......-................................ 200

§3. — Conservation et classement des épreuves........................ 2o3

§4. — Des projections................................................. 2°4

1. Diapositives par contact.................................... 2o6

2. Diapositives par réduction.................................. 207

Développement des plaques à projections....................... 2o8

Obtention rapide des projections.................... .......... 209

Projections colorées........................................... 2io

CHAPITRE VII. De la Photographie médico-légale.

11ôle et utilité de la photographie en médecine légale............... 2l3

PLANCHES.

I. — Déviation de la colonne vertébrale dans un cas de syringomyélie..... 68

II. — Faciès dans la sclérodermie et le goitre exophtalmique.............. 74

III. — Faciès dans l'acromégalie.......................................... 76

IV. —? Spécimen de mains à grande échelle............................... 81

V. — Dispositif pour la photographie des pieds........................... 83

VI. — Faradisation du muscle frontal chez une hystérique dans la catalepsie. g3

VII. — Attitudes obtenues dans la catalepsie sous l'influence de diverses excitations............................................................. £P

VIII. — Sommeil hystérique............................................. io4

IX. — Transfert de contracture chez une hystérique....................... m

X. — Spasme de la face hystérique....................................... i35

XI. — Circonvolutions du cerveau........................................ i39

XII. — Coupe longitudinale du cerveau................................... i3g

XIII. — Atrophie cérébrale............................................... i4°

XIV. — Coupe de moelle pathologique. Sclérose en plaques................ 166

XV. — Coupe de moelle.................................................. 166

XVI. — Microbes et tubes de culture...................................... 168

XVII. — Mains professionnelles........................................... 214

XVIII. — Coups et contusions. — Blessures par arme blanche.............. 2i5

XIX. — Blessures par arme à feu......................................... 2i5