(1913) Exposé des travaux scientifiques
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(1913) Exposé des travaux scientifiques

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TRAVAUX SCIENTIFIQUES

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DES

TRAVAUX SCIENTIFIQUES

DU

Dr J. BABINSKI

PARIS

MASSON & C,c, ÉDITEURS

LIBRAIRES DE LA ÇA DÉ MIE DE MÉDECINE E

120, ROUt.r.VAftD SAIKT-GHKtAÏX (6.)

1913

AVERTISSEMENT

L'exposé de mes travaux scientifiques est divisé en deux parties,

consacrées l'une à mes recherches d'histologie normale, de physiologie

et de pathologie expérimentale, l'autre el mes études de clinique et

d'anatomie pathologique.

Celle deuxième partie est subdivisée en sections se rapportant aux

affections des muscles, des nerfs, de la moelle, des méninges, de l'en-

céphale et de l'appareil vestibulaire, des glandes à sécrétion interne,

de l'appareil cardio-vasculaire, et à l'hystérie.

Chacune de ces sections comprend les chapitres de pathologie au

développement desquels j'ai plus ou moins participé.

Certains phénomènes que je décris pourraient être rattachés à plu-

sieurs de mes subdivisions ; je me suis ejjorcé de les situer à la place

qui leur convient le mieux et d'éviter les redites.

La longueur des divers chapitres n'est pas nécessairement propor-

tionnée à l'importance que j'attribue à chacun d'eux : telle notion essen-

tielle peut être clairement énoncée en quelques lignes ; telle autre, d'un

' intérêt accessoire, exige, pour être bien expliquée, une description

détaillée.

A l'index bibliographique (p. 21g) j'ai donné la liste de mes publica-

6 AVERTISSEMENT

lions par ordre chronologique : quelques-unes concernent des faits qui

n'ont pas trouvé place dans les chapitres que j'ai traités; il m'a paru,

pour le moment, suffisant de les mentionner . Toutes sont numérotées ,

ce qui me permet, au moyen de chiffres intercalés dans le texte, d'en

donner l'indication précise.

Mes recherches consistent , pour la plupart, en études cliniques. Or,

le contrôle des faits est plus difficile dans celle branche de la biologie

que dans les autres, car il porte sur des phénomènes souvent transitoires,

dont on ne peul reproduire il volonté la démonstration et qu'il est géné-

ralement impossible de soumettre et l'expérimentation. De là l'importance

des vérifications apportées par d'autres observateurs .

Pour cette raison, j'indique les confirmations principales obtenues par

certains de mes travaux. Quelques-unes d'entre elles sont incorporées

dans mon exposé, mais la plupart en sont détachées et sont imprimées

en petits caractères typographiques.

PREMIÈRE PARTIE

PREMIÈRE PARTIE

HISTOLOGIE NORMALE ET PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

FAISCEAUX NEURO-MUSCULAIRES

En 1886, j j'ai fait paraître dans les Bulletins de la Société de Biolo-

gie ( 1 7) une note où j'ai cherché à établir qu'à l'étal normal il existe dans

les muscles striés des faisceaux spéciaux constitués par des gaines

lamelleuses contenant de petites fibres musculaires et des tubes ner-

veux.

Trois ans plus tard, j'ai publié dans les Archives de Médecine expé-

rimentale (2 £ 1) un travail complémentaire sur ce sujet.

Voici la description que j'ai donnée de ces faisceaux neuro-muscu-

laires.

« Lorsqu'on examine, sur une coupe transversale assez étendue, des

muscles striés de l'homme, on observe par places. dans l'épaisseur du

tissu conjonctif qui sépare les faisceaux de fibres, de petits îlots plus

ou moins régulièrement arrondis, d'un diamètre variant de 100 à 200 (1-

environ, et constitués comme il suit : à la périphérie, une gaine de

tissu conjonctif fortement colorée en rouge par le picro-carmin. se

détachant nettement sur les parties avoisinantes, et présentant lastruc-

ture des gaines lamelleuses des nerfs ; elle est, en effet, tout à lait

10 HISTOLOGIE NORMALE ET PHYSIOLOGIE. PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

semblable aux. gaines des petits troncs nerveux : qui sont contenus dans

les mêmes travées de tissu conjonctif, avec cette seule différence qu'elle

est généralement d'une épaisseur un peu plus grande. Dans l'espace

délimité par chacune de ces gaines, on voit un groupe de 3 à fibres

musculaires striées, d'un diamètre plus ou moins considérable, mais

de beaucoup inférieur à celui des fibres qui se trouvent dans toutes

les autres parties du muscle, et présentant généralement un plus grand

FIG. i. Faisceau nouro musculaire.

a,a. Fibres musculaires qui a-voisinent le faisceau neuro-muscu-

l,iier; b Gaine lamelleuse de ce faisceau. Dans l'espace délimi-

tée par cette gaine on voit : c. Les petites fibres musculaires;

nombre de noyaux que

ces dernières. Ces peti-

tes fibres musculaires

sont séparées les unes

des au très par des fibril-

les de tissu conjonctif et

de petites cellules fusi-

formes. Dans certains

de ces îlots on trouve

aussi entre les fibres

musculaires quelques

tubes nerveux (voir

fig. i). Dans d'autres

îlots la structure est un

peu plus complexe : de

la face interne de la

gaine se détachent des

Imelles de tissu conjonctif qui viennent subdiviser la cavité de la

gaine en deux ou trois zones secondaires, dont la principale est occu-

pée par de petites fibres musculaires ; dans une des zones accessoires

se trouve un tronc nerveux.

« On observe dans certains endroits une disposition qui n'est qu'une

variante de la précédente : le tronc nerveux et le groupe des fibres

musculaires, au lieu d'être logés dans une gaine unique cloisonnée,

sont contenus dans des gaines indépendantes.

FAISCEAUX \IEURO-MUSCULAIHES il

« Ces figures correspondent à des faisceaux musculaires, bien dis-

tincts des faisceaux voisins par la dimension des fibres et la gaine

conjonctive dont ils sont entourés. Selon toute vraisemblance les fais-

ceaux et les troncs nerveux dont ces groupes de petites fibres sont

accompagnés leur sont destinés. »

Ayant constaté pour la première fois la présence de ces faisceaux

sur des muscles atrophiés dans un cas d'amyotrophie consécutive à

une lésion de la moelle, j'avais pensé qu'il s'agissait d'une disposi-

tion pathologique, mais je me suis assuré depuis qu'ils existent à

l'état normal dans la plupart des muscles striés.

N'ayant pas trouvé mention de ces faits, je croyais être le premier

à les avoir observés. Des recherches bibliographiques faites ultérieu-

rement montrèrent qu'ils avaient été déjà constatés par d'autres, en

particulier par Golgi. Cependant mon travail n'a pas été, ce me

semble, sans utilité. Il a été le point de départ de mémoires divers

dont les auteurs ignoraient d'ailleurs les travaux antérieurs au mien

(voir en particulier : a) Pilliet, Gaines concentriques autour de corps

neuro-musculaires. Bullet. de la Soc. anal, de Paris, l8go, pp. 275-

276. Note sur des corps neuro-musculaires à enveloppe semblable

à celle des corpuscules de Pacini. C. R. Société de Biologie, 1890.

pp. 3 13-3 1 Il. b) Blocq et Marinesco, Sur la morphologie des faisceaux

neuro-musculaires. C. R. Société de Biologie, > 8go, p. 3g8). Il a

contribué tout au moins à établir que les faisceaux neuro-musculaires

constituent une disposition normale, ce qui n'était guère connu des

anatomo-patholojistes, pas plus à l'étranger qu'en France. Ces

faisceaux avaient été considérés par eux comme le résultat d'un

processus morbide; encore en 1888. c'est-à-dire deux ans après

ma communication à la Société de Biologie, Eichhorst pu-

bliait, dans Virchow's Archiv. (Bd. 112, S. 237). un article ayant

pour titre : « Neuritis fascians » où il commettait la même erreur.

12 HISTOLOGIE NORMALE ET PHYSIOLOGIE. PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

DES MODIFICATIONS QUE PRÉSENTENT LES MUSCLES

APRÈS SECTION DES NERFS QUI S'Y RENDENT

D'un travail (8) que j'ai fait paraître sur ce sujet en ]88, j'extrais

les passages suivants :

« J'ai constaté, à la suite de la section du sciatique, chez le lapin,

une disposition particulière des fibres musculaires altérées, qui me

paraît propre à faire comprendre la nature des lésions qu'elles ont

subies.

« Des muscles de lapin adulte, six semaines après la section du nerf

qui leur correspond, m'ont paru un bon objet d'observation parce

qu'on peut y trouver, à tous leurs degrés, les altérations des fibres

musculaires. Pour voir la disposition que je vais indiquer, il suffit de

fixer les muscles, soit par le bichromate d'ammoniaque à 2 pour 100,

soit par l'acide chromique à 2 pour i ooo, de compléter le durcisse-

ment par la gomme et l'alcool et de pratiquer des coupes transver-

sales que l'on colore, soit par le picro-carmin, soit par l'hématoxyline.

Sur la plupart des fibres musculaires dépendant du nerf sciatique

sectionné, les champs de Cohnheim sont bien plus distincts qu'à l'état

normal ; ces champs ou polygones, qui correspondent à la coupe

transversale des cylindres primitifs, sont séparés les uns des autres par

un réseau émanant du protoplasma non différencié de la libre : ce

protoplasma en voie d'accroissement dissocie les cylindres primitifs.

A côté de celle disposition commune, on trouve des dispositions par-

ticulières à telle ou telle fibre, mais qui se rapportent toutes à la tu-

méfaction du protoplasma non différencié. Sur un ccrlain nombre de

fibres musculaires, il existe toute une couche protoplasmique par-

semée de noyaux qui sépare du sarcolemme la substance striée ; celle-

ci, dans certains faisceaux, est extrêmement réduite et le protoplasma

remplit presque à lui seul la gaine du sarcolemme. Sur d'autres fibres,

MODIFICATIONS DES MUSCLES APRÈS SECTION DE LEURS NERFS 13

c'est une disposition inverse qui s'observe : le protoplasma avec ses

noyaux en occupe le centre, et la substance striée, plus ou moins

réduite, accolée au sarcolemme, siège à la périphérie ; ces figures sont

tout à fait comparables à celles que présentent les fibres musculaires

en voie de développement. On voit donc que l'atrophie de la substance

contractile marche de pair avec la tuméfaction de la substance prolo-

plasmique en voie de développement

« Si l'on compare la fibre musculaire altérée à la fibre musculaire

normale, voici comment on peut comprendre le processus patholo-

gique : à l'état normal, la fibre musculaire est un élément très diffé-

rencié, dont la différenciation morphologique est en rapport avec la

différenciation fonctionnelle ; à la suite de la section du nerf, la fonc-

tion venant à être supprimée, la différenciation morphologique tend à

s'effacer, l'élément tend à revenir à l'état embryonnaire. »

Ce processus particulièrement net dans le muscle est en réalité,

on le sait aujourd'hui, un fait d'ordre général : tous les éléments dif-

férenciés repassent par l'état indifférent lorsque les circonstances les

obligent à s'adapter momentanément ou définitivement à de nouvelles

conditions d'existence.

Durante (Manuel d'histologie pathologiques de Corail et Ranvier, 1902, 1. Il,

p. 198), dans l'article consacré à l'anatomie pathologique du muscle, confirme les

résultats de mes,reclierches.

« Cette hyperplasie du sarcoplasme, dit-il, paraît bien être, en effet, le pro-

cessus primordial et essentiel de l'atrophie dite simple, mais ne saurait entrainer

qu'indirectement l'atrophie. »

A. Prenant et P. Bouin (Traité d'Ilistologie, 191 l, t. Il, p. 329) émettent la

même opinion. Voici ce qu'ils écrivent à ce sujet :

« Le caractère dominant de toute lésion musculaire a été exprimé par Durante.

Tandis qu'à l'état sain la portion trophique et non différenciée (sarcoplasme et

noyaux) est subordonnée à la partie fonctionnelle ou musculaire différenciée en

fibrilles, à l'état pathologique il y a inversion dans l'importance réciproque de ces

deux parties constituantes. La substance différenciée s'efface alors plus ou moins

complètement et, la cellule revenant à un état primitif, la portion trophique et

indifférente persiste seule.....

14 HISTOLOGIE NORMALE ET PHYSIOLOGIE. PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

« La fibre musculaire, : 1 la suite de ces troubles d'innervation ou de nutrition,

reprend, en sens inverse, le chcmin de l'évolution embryonnaire et revient au point

de départ. »

DE LA CONTRACTILITÉ ÉLECTRIQUE DES MUSCLES STRIÉS

APRÈS LA MORT

On enseigne, dans les traités de physiologie, que chez les animaux à

sang chaud la contractilité musculaire disparaît très vite après la mort,

que l'irritabilité des nerfs se perd toujours avant la contractilité directe

des muscles et que l'excitabilité disparait plus vite pour les courants

faradiques que pour les courants voltaïques. Chez la grenouille, la

diminution de l'excitabilité électrique des muscles, après la mort, serait

précédée d'une période d'augmentation. Enfin, d'après Jeanselme et

Lermoyez (Arch. de Physiologie, 1885), chez les cholériques, le mus-

cle, avant de mourir, passerait par une période que caractériserait

l'exagération de l'excitabilité idio-musculaire.

Voici les notions nouvelles qui résultent de mes recherches (52).

Chez l'homme, après la mort, les muscles ou tout au moins cer-

tains muscles, particulièrement ceux de la face, avant de perdre leur

contractilité électrique, passent par une phase dans laquelle, leur exci-

tabilité indirecte ayant disparu et leur excitabilité directe faradique

étant abolie ou affaiblie, ils se contractent lentement, paresseusement

sous l'action directe des courants voltaïques et présentent une inver-

sion de la formule normale de l'excitabilité voltaïque, PFC étant >

NFC et NOC > POC ; par conséquent, la contractilité électrique

de ces muscles subit après la mort des modifications qui, à une période

donnée, offrent une très grande analogie avec la réaction de dégéné-

rescence.

Chez le lapin, j'ai observé après la mort des modifications du même

ordre, mais bien moins nettes que chez l'homme.

DE LA PARALYSIE PVOCYAXIQUE 13

Quelle est la cause de ce phénomène ? Et d'abord, quelle est la cause

de la réaction de dégénérescence qui apparaît à la suite de certaines

lésions des nerfs ? On admet généralement que cette réaction, en par-

ticulier la modification qualitative de l'excitabilité galvanique (Erb,

Traité d'Électrothérapie, traduit par lueff, p. 181) est sous la dépen-

dance des modifications histo-chimiques se produisant dans les

muscles dont les nerfs sont dégénérés. Mais si l'on considère que les

caractères de la réaction de dégénérescence peuvent apparaître dans

certains muscles, ceux de la face, ainsi que je l'ai indiqué (Traité de

Médecine, t. X, p. 76), dès le troisième ou le quatrième jour après la

section du facial, c'est-à-dire à une période où, le bout périphérique

du nerf étant dégénéré, les fibres musculaires ne présentent que des

altérations morphologiques à peine appréciables, il y a lieu de penser

que cette réaction de dégénérescence tient, au moins pour une part, à

ce que le muscle est alors complètement soustrait à l'influence du

système nerveux et que l'excitation électrique ne porte que sur les

libres musculaires ; en d'autres termes, la réaction dite de dégé-

nérescence ne serait, en partie au moins, que la réaction propre des

fibres musculaires. On pourrait donc expliquer la réaction de dégé-

nérescence dans les muscles après la mort de la manière suivante :

les éléments histologiques succombant avec une rapidité d'autant plus

grande qu'ils sont d'un ordre plus élevé, cette réaction serait duc à la

persistance de l'excitabilité électrique propre des fibres musculaires

à une période où celle des filets nerveux inlra-musculaires est abolie.

DE LA PARALYSIE PYOCYANIQUE

(EN COIXAUO11AT10N 1\ EC CTIAlIIII\)

Voici les résultats de nos études sur ce sujet z) :

La paralysie est produite par l'inoculation des microbes ou l'injec-

tion de leurs produits solubles. 11 y a toujours une période d'incubation,

16 HISTOLOGIE NORMALE ET PHYSIOLOGIE. PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

dont la durée varie de quinze jours à deux mois, et qui est en rapport

avec les doses, la virulence et peut-être aussi avec les prédispositions

individuelles.

Il n'est peut-être pas sans intérêt de faire remarquer à ce sujet que

certaines paralysies infectieuses observées chez l'homme, la paralysie

diphtérique entre autres, se développent, très souvent aussi, long-

temps après le début de la maladie.

Les membres postérieurs sont atteints les premiers. Cette paralysie

est de nature spasmodique ; les réflexes tendineux sont exagérés ; la

percussion des tendons, comme aussi celle des masses musculaires,

provoque une véritable trépidation, qui se propage parfois à tous les

membres. Ce spasme, qui disparaît quand l'animal est endormi par le

chloroforme, peut entraîner à sa suite des rétractions fibro-tendineuses

analogues à celles que Charcot a décrites chez l'homme, rétractions qui

ne disparaissent plus sous l'influence delà chloroformisation et qui ren-

dent définitive l'attitude anormale. Il n'y a pas d'amyotrophie. L'excita-

bilité électrique des nerfs et des muscles mis à nu est conservée. La

sensibilité à la piqûre est émousséc dans certains cas, mais elle ne nous

a jamais semblé complètement abolie. De plus, les lapins éprou-

vent parfois des douleurs vives, qui se traduisent par des cris per-

çants, lorsqu'on exerce des (raclions sur les membres ou quand on

comprime la paroi abdominale. On observe aussi de la rétention

d'urine dans les cas où les lapins sont paraplégiques. Le mode de ter-

minaison n'est pas toujours le même. Lorsque la paralysie est géné-

ralisée, la mort est la terminaison habituelle. Parfois ces paralysies

finissent par disparaître. '

Nos recherches anatomiques ont porté sur les muscles, les nerfs et

le système nerveux central des lapins paralysés, et cela aux diverses

périodes de la paralysie qui, dans deux cas, remontait à deux mois.

\ous avpns employé, dans ces examens, des méthodes variées et

pourtant les résultats ont toujours été absolument négatifs.

Une s'agit pas là, comme on le voit, d'une paralysie banale, niais

PARALYSIE DIPHTÉRIQUE 17

bien d'une affection ayant sa physionomie propre, au même titre que

la paralysie saturnine ou alcoolique de l'homme.

Nous ferons remarquer, au sujet de l'absence de lésions dans la

paralysie pyocyanique, que les recherches ultérieures entreprises sur

d'autres paralysies infectieuses (par exemple sur la paralysie expéri-

mentale observée par Gilbert et Lion consécutivement à l'inoculation

d'un microbe recueilli dans un cas d'endocardite infectieuse) ont donné

des résultats conformes à ceux que nous avons obtenus.

ARTHROPATHIES EXPÉRIMENTALES

(en collaboration avec CHARMA')

Nous avons observé sur plusieurs lapins atteints de la maladie pyo-

cyanique des arthropathies qui paraissent se développer de préférence

dans les membres paralysés. Ce ne sont pas des arthropathies ner-

veuses. Les lésions articulaires reconnaissent pour cause un agent

infectieux dont nous n'avons pu déterminer la nature avec certitude ;

il s'agit soit du microbe de la pyocyanine, soit d'un organisme qui

provoque une infection secondaire (25).

PARALYSIE DIPHTÉRIQUE

J'ai fait des recherches anatomo-pathologiques sur la paralysie diph-

térique expérimentale obtenue par Roux et Yersin au moyen de l'in-

jection des substances solubles du bacille diphtérique ; dans les cas

que j'ai étudiés, les nerfs correspondant aux muscles paralysés, exami-

nés depuis leur origine jusqu'à leur terminaison dans les plaques

motrices, se sont montrés tout à fait normaux.

« De ces faits me semblent découler des conséquences importantes.

BaBINSKI. 2

18 HISTOLOGIE NORMALE ET PHYSIOLOGIE. PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

En effet, si d'une part on admet, ce qui est tout à fait légitime, que

la paralysie diphtérique est identique chez l'homme, quant à sa patho-

génie, à la paralysie diphtérique expérimentale, si d'autre part on se

rappelle que dans la paralysie diphtérique de l'homme on trouve des

altérations organiques des nerfs périphériques, on est amené à recon-

naître : i° que le poison diphtérique trouble profondément le fonction-

nement du nerf avant d'altérer sa disposition morphologique ; 2° que

les lésions de la névrite périaxile diphtérique ne peuvent être consi-

dérées comme la cause essentielle de la perturbation fonctionnelle, ce

qui, du reste, n'empêche pas de supposer que ces lésions, une fois

produites, n'exercent à leur tour une influence perturbatrice » (32).

VERTIGE VOLTAIQUE. LÉSIONS LABYRINTHIQUES

EXPÉRIMENTALES

Lorsqu'on applique les électrodes d'un appareil voltaïque aux tem-

pes ou aux apophyses mastoïdes, une de chaque côté, et que l'on fait

passer un courant électrique de quelques milliampères, on provoque,

l'état normal, entre autres phénomènes, une sensation de vertige,

des nausées, du nystagmus et une inclination latérale de la tête du

côté du pôle positif. C'est là le vertige voltaïque dont on doit la con-

naissance aux travaux de Breiier, de Ilitzig et de plusieurs autres

expérimentateurs.

Je vais indiquer les résultats de quelques-uns de mes travaux cor-

roborant des idées émises par d'autres que moi ou établissant des

notions nouvelles (67, 82, g2, cft, 167, 182, 200, 201).

1° A l'époque où j'ai publié mon premier travail sur le vertige vol-

taïque, en 19° 1, les physiologistes n'étaient pas d'accord sur le méca-

nisme de ce phénomène ; certains supposaient qu'il était dû à une

excitation du labyrinthe, d'autres pensaient qu'il dépendait d'une

irritation directe des centres nerveux.

VERTIGE YOLTAÏQUE. LÉSIONS LA13YR1NT111(UES EXPÉRIMENTALES 10

En montrant que les lésions auriculaires provoquent des perturba-

tions diverses du vertige voltaïque (voir p. 167) j'ai contribué à prou-

ver que le labyrinthe participe à ce phénomène qui peut, il est vrai,

se produire encore quand les deux labyrinthes sont détruits (Lewan-

dow-shy) .

2° Des expériences sur le pigeon m'ont permis de discerner l'action

de chacun des deux pôles. Je mets à nu chez un pigeon, à droite ou à

gauche, les canaux semi-circulaires et le vestibule, puis j'applique les

électrodes d'une pile, l'une immédiatement sur un point de l'appareil

labyrinthique dénudé, l'autre à un demi-centimètre environ en dehors

de cet appareil. En disposant l'expérience de cette manière, on soustrait

l'autre oreille à l'action du courant, ce qui est indispensable pour

atteindre le but visé. On constate alors de la manière la plus nette

que l'excitation d'une même partie du labyrinthe, à la fermeture du

courant, donne lieu tour à tour à deux mouvements en sens inverse

suivant que l'électrode en contact avec cette partie est positive ou

négative ; dans le premier cas, la tête s'incline du côté du labyrinthe

excité, et du côté opposé dans le second cas; c'est comme si la tête

était attirée par le pôle positif et repoussée par le pôle négatif. Il est à

noter que le mouvement produit par le pôle négatif est plus grand

et plus brusque. Ces recherches confirment celles qui ont été faites

par lIitzig.

3° Pendant le sommeil chloroformique, le vertige voltaïque est

aboli ; sa réapparition est une des manifestations du réveil.

Je dois ajouter que cette expérience a été pratiquée seulement sur

le pigeon, le lapin et le cobaye.

li" J'ai montré que, chez l'homme, le courant électrique, outre l'in-

clination connue depuis longtemps, provoque souvent une rotation de

la tête et parfois aussi du tronc.

Pour obtenir ce mouvement, voici les points où il convient de

placer les tampons. On les applique, l'un, 'celui qui est relié au pôle

négatif, derrière le maxillaire, l'autre, du côté opposé, au-dessus du

20 HISTOLOGIE NORMALE ET PHYSIOLOGIE. PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

tragus. La tête exécute du côté du pôle positif une rotation qui com-

mence au moment de la fermeture du courant et continue ensuite à

s'effectuer avec lenteur. Ce mouvement est un phénomène physio-

logique, mais non constant ; il et plus ou moins prononcé suivant les

sujets ; il est tantôt pur, tantôt associé à l'inclination.

5° J'ai établi que chez l'homme, à l'état normal, une irrigation

de l'oreille avec de l'eau à la température de 15 à 20° pratiquée

suivant la méthode de Barany, en même temps qu'elle provoque

du nystagmus, trouble le vertige voltaïque comme le font parfois

les affections auriculaires, mais seulement d'une manière transitoire.

L'inclination ne peut être obtenue que du côté irrigué, ou bien elle

est plus prononcée de ce côté que de l'autre.

6° J'ai constaté, avec Vincent et Barré, qu'après la destruction d'un

labyrinthe chez le cobaye, en faisant passer un courant galvanique de

courte durée, la « rotation voltaïque conjuguée de la tête et des yeux» »

fait pour ainsi dire défaut quand le pôle positif se trouve du côté

lésé ; que, le courant étant inversé, on obtient une rotation conjuguée

du côté sain, égale ou supérieure à la normale ; la rotation voltaïque

conjuguée de la tête et des yeux devient unilatérale.

Nous avons vu que les résultats obtenus diffèrent des précédents

lorsqu'on fait passer le courant pendant un certain temps (de quelques

secondes à une minute) : la rotation voltaïque conjuguée, au lieu d'être

unilatérale ou à peu près, devient seulement prédominante du côté

sain ; le mouvement de rotation du côté lésé peut même être très mar-

qué, mais il s'effectue d'habitude lentement et progressivement, après

un temps perdu notable; à l'ouverture, le mouvement de retour est

faible et fait parfois défaut, contrairement à ce qu'on observe quand

le pôle positif est placé du côté sain.

Dans les expériences ci-dessus, les pattes du cobaye sont fortement

fixées sur la table d'opération. Si l'on débarrasse l'animal de ses

entraves, on observe quelques autres phénomènes. Lorsque le pôle

positif est appliqué du côté opéré, le passage d'un courant prolongé

RÉFLEXES TENDINEUX ET RÉFLEXES CUTANÉS 21

augmente les troubles provoqués par la destruction du labyrinthe

(incurvation du tronc, instabilité, mouvements de manège) ; l'ani-

mal s'enroule davantage et la tête se porte vers le flanc du côté de la

lésion en même temps qu'elle tourne vers le même côté autour

de son axe occipito-nasal. Lorsque le pôle positif est du côté sain, à

mesure qu'on augmente le nombre des milliampères, l'attitude anor-

male du cobaye s'atténue ; il reprend la rectitude et, à condition de

ne pas exagérer l'intensité du courant, on peut le voir se mettre à

courir droit devant lui, comme le ferait un cobaye dont les labyrinthes

sont sains. Ces données expliquent peut-être les résultats en apparence

contradictoires, tantôt utiles tantôt nuisibles, que l'on obtient en

électrisant avec des courants voltaïques les malades atteints de vertige

auriculaire ; elles méritent en tout cas d'être prises en considération

au point de vue thérapeutique.

Notons encore qu'à la suite d'une destruction labyrinthique, le

cobaye, placé sur le côté ou sur le dos, peut rester quelque temps

immobilisé dans une attitude cataleptoïde.

L'exactitude des faits que j'ai rapportés et la légitimité des con-

clusions que j'en ai déduites ont été en partie confirmées (voir

p. 175).

RÉFLEXES TENDINEUX ET RÉFLEXES CUTANÉS

Mes études sur les réflexes tendineux et les réflexes cutanés m'ont

conduit à établir quelques notions nouvelles en ce qui concerne leur

état normal, mais comme ces données, d'une importance secondaire

au point de vue de la physiologie pure, sont surtout intéressantes

dans leurs applications à la pathologie, j'en ferai l'exposé au cha-

pitre consacré à la description des troubles de la réflectivité (voir

pp. 27 et 37).

22 IIISTOLOGIE NORMALE ET PHYSIOLOGIE. PATHOLOGIE EXPÉRIMENTALE

RÉFLEXES PUPILLAIRES

De l'influence de l'obscuration sur le réflexe à la lumière; étude

comparative du réflexe à la lumière chez les oiseaux de jour et

les oiseaux de nuit.

Des expériences suggérées par des observations cliniques dont il

sera question plus loin (p. 61) m'ont permis d'observer quelques faits

nouveaux appartenant à la physiologie normale.

J'ai montré que l'obscuration renforce le réflexe à la lumière et

permet de créer artificiellement, chez l'homme normal, une inégalité

pupillaire transitoire. Voici les conditions dans lesquelles il faut se

placer pour mettre ce fait en évidence.

« Le sujet en observation, après qu'on lui a clos un oeil hermé-

tiquement, doit séjourner pendant une demi-heure environ dans un

endroit bien éclairé à la lumière du jour; puis on le fait passer dans

une pièce obscure et, en éclairant latéralement avec une bougie l'oeil

qui est resté ouvert, on détermine d'abord le degré de dilatation de sa

pupille ainsi que 1 intensité de son réflexe à la lumière ; cela fait, on

ferme cet oeil, on enlève le bandeau qui recouvre l'autre oeil et on

examine immédiatement la pupille de ce côté, en employant la même

technique que précédemment. Ce rapprochement permet de conclure

que, abstraction faite de la dilatation développée par l'obscurité et

perçue un instant seulement au moment même où on découvre l'oeil,

la pupille de l'oeil qui était resté bandé est plus petite que l'autre, ce

qui tient évidemment à ce que la lumière impressionuc d'une manière

plus active le centre du réflexe; déplus, les mouvements pupillaires

réflexes obtenus à l'aide du procédé usuel sont ordinairement plus

vifs de ce côté; on crée ainsi artificiellement une inégalité pupillaire

plus ou moins prononcée, suivant les sujets, suivant le degré de

RÉFLEXES PUPILLAIRES 23

clarté du jour où l'expérience est faite, et qui subsiste plus ou moins

longtemps. Généralement, quand on ouvre les deux yeux, l'équilibre

tend à se rétablir rapidement.

« Il y a lieu de rappeler que l'obscuration, qui renforce le réflexe à

la lumière, amène aussi la régénération du pourpre visuel (voir à ce

sujet l'ouvrage de Parinaud, La Vision, Octave Doin, 1898, pp. £ 8 et

suiv.), et dès lors on peut se demander s'il n'y a pas entre ces deux

phénomènes une relation de cause à effet; c'est, peut-être, parce que

la rétine soumise à l'obscuration a acquis des propriétés fluorescentes

que le réflexe à la lumière devient plus énergique. S'il en était ainsi,

il faudrait admettre que l'érytliropsine joue dans la production de ce

réflexe un rôle important » (122).

A l'appui de cette idée on peut invoquer l'état des pupilles dans

l'héméralopie, affection produite par une altération du pourpre (Pari-

naud) et dans laquelle le réflexe à la lumière est faible ou même aboli.

J'ai encore cherché à vérifier cette hypothèse en faisant appel à

l'anatomie et à la physiologie comparées. Les résultats de ces investi-

gations, outre qu'ils m ont fourni un argument en faveur de cette

conception, m'ont amené à constater ce qui, à ma connaissance,

n'avait jamais été signalé que, chez les oiseaux, le réflexe à la

lumière diffère notablement suivant l'espèce, qu'il est très intense et

vif chez la chouette dont la rétine contient beaucoup de pourpre, très

faible au contraire chez la poule dont la rétine est dépourvue d'éry

thropsinc.

DEUXIÈME PARTIE

DEUXIÈME PARTIE

CLINIQUE ET ANATOMIE PATHOLOGIQUE

1. - SÉMIOLOGIE

RÉFLEXES TENDINEUX ET RÉFLEXES OSSEUX

Les réflexes tendineux el osseux font partie du groupe des phéno-

mènes objectifs que la volonté est incapable de modifier. Pour- celle

raison d'une part, d'autre part à cause de la fréquence des affections

capables d'y apporter des troubles et de la valeur des renseignements

que fournit leur recherche, ils méritent toute l'attention des clini-

ciens.

Dans une leçon sur les réflexes osso-tendineux (197), je me suis

exprimé en ces termes :

« La main, munie du marteau percuteur, interroge le système ner-

veux qui, par l'intermédiaire de ces réflexes, répond avec netteté aux

questions posées. Précieuses sont les révélations que l'on obtient ainsi

de lui : il fait part des dégâts que sa texture a subis, désigne les dépar-

tements où ils se sont produits, parfois même, comme un géomètre,

il en précise le siège et l'étendue, et il met en garde contre les dangers

graves qui le menacent. Un pareil entretien, d'où le mensonge et

l'erreur sont exclus, pour qui connaît ce langage, peut en quelques

28 8 SÉMIOLOGIE

instants dévoiler des secrets qu'il eût été impossible de surprendre

autrement.

« Apprendre à bien connaître les réflexes osso-tendineux, puis s'as-

treindre à les explorer systématiquement et avec méthode ne constitue

donc pas une minutie; telle particularité qui, à première vue, semble

un détail sans importance, acquiert parfois un intérêt majeur. »

Cela dit, je dois montrer dans quelle mesure j'ai contribué à établir

les notions que l'on possède aujourd'hui sur ce sujet.

J'ai perfectionné les méthodes d'exploration. Dans la leçon que

je viens de rappeler, la technique à employer pour l'investigation des

divers réflexes tendineux et les attitudes qui me semblent les plus favo-

rables à la recherche de chacun d'eux ont été indiquées d'une manière

très détaillée. En procédant conformément aux règles ainsi tracées,

et en examinant systématiquement un grand nombre de sujets

exempts de toute affection du système nerveux, j'ai pu redresser des

erreurs courantes, préciser certains points, contribuer à déterminer

parmi les caractères des réflexes tendineux ceux qui sont constants,

ceux qui sont variables, et fixer mieux qu'on ne l'avait fait avant, moi

les limites de l'état normal, ce qui est essentiel pour le neurologiste.

On admettait autrefois que le réflexe achilléen était inconstant à

l'état physiologique et pour ce motif sans doute les cliniciens y atta-

chaient peu d'importance. Eulenbourg, par exemple, déclarait que ce

réflexe faisait défaut 80 fois sur too. Pour Berger, qui entreprit des

recherches sur 14og individus normaux, le réflexe achilléen manque-

rait bien plus rarement que ne l'avait dit Eulenbourg ; il serait cepen-

dant absent dans 20 pour 100 des cas.

Ces conclusions résultaient d'examens pratiqués dans de mauvaises

conditions.

La position qui convient le mieux pour cette exploration est celle

que j'ai indiquée : le sujet se met à genoux sur une chaise; mais si,

pour quelque motif, il ne peut se' placer dans cette attitude, s'il est

incapable de quitter le lit, il faut l'examiner couché sur le côté, la

RÉFLEXES TENDINEUX ET RÉFLEXES OSSEUX 29

jambe légèrement fléchie sur la cuisse, l'extrémité du pied soutenue

par la main gauche de l'observateur.

En recherchant ainsi le réflexe achilléen, j'ai constaté qu'il ne

manque pour ainsi dire jamais chez les sujets dont le système nerveux

' est intact. On verra dans la suite les conséquences cliniques de cette

donnée et leur importance.

Mes conclusions ont été confirmées par nombre de neurologistes.

C'est ainsi qu'Oppenheim écrit (Lehrb. der Nervenkr. 5 A. Bd. I,

S. m, 12) :

« J'estime que la méthode de beaucoup la meilleure pour recher-

cher le réflexe achilléen est celle que Babinski a proposée... Depuis

que j'opère d'après cette technique, je n'ai trouvé ce réflexe absent

chez les sujets normaux que très exceptionnellement... Je considère

l'absence du réflexe achilléen comme signe d'un état pathologique. »

Telle est également l'opinion de Flatau (neural. Centralblalt, 190,

p. ro54. Ueber das Fehlen des Achillesplunomeu).

Je suis arrivé aussi à déterminer quelques positions favorables à

l'exploration des réflexes osso-tendineux des membres supérieurs.

Pour le réflexe du triceps brachial ou d'extension de l'avant-bras,

on fait porter le membre supérieur en dehors et en arrière ; on le

soutient de la main gauche au niveau du pli du coude, le bras du sujet

formant un angle obtus avec l'avant-bras. La position suivante me

semble encore préférable : l'attitude du membre supérieur est analogue

à la précédente, mais au lieu de soutenir le pli du coude, l'observa-

teur, assis, fait appliquer à plal sur sa cuisse la main du sujet. Il est

à noter que, dans ces conditions, l'avant-bras étant immobilisé ne peut

s'étendre et que la secousse musculaire seule est susceptible d'être

observée.

On obtient encore une extension de l'avant-bras en percutant celui-

ci le long du tiers inférieur du cubitus.

Pour le réflexe de flexion de l'avant-bras ou réflexe de l'extrémité

inférieure du radius, l'avant-bras, légèrement fléchi sur le bras, est

30 SÉMIOLOGIE

placé en demi-pronation et soutenu à sa partie inférieure par la main

gauche de l'observateur. On percute le radius à son extrémité infé-

rieure et on provoque ainsi la contraclion de tous les muscles qui

fléchissent l'avant-bras ; parfois cette excitation donne lieu également

à une flexion de la main et des doigts.

On obtient aussi la flexion de l'avant-bras par la percussion du

tendon du biceps, mais le mouvement de flexion est généralement

moins prononcé, peut-être parce que la contraction se limite, d'ha-

bitude, au seul muscle biceps. On provoque encore, pas toujours il est

vrai, la flexion de l'avant-bras en percutant l'extrémité inférieure de

l'humérus et di érentes parties de l'avant-bras, sauf le tiers inférieur

de la région cubitale dont il vient d'être question à propos du réflexe

d'extension.

Pour le réflexe de pronation, le membre supérieur est placé dans la

même position que pour la recherche du réflexe de flexion. Il faut per-

cuter, à l'extrémité inférieure de l'avant-bras, soit la partie antéro-

interne du radius, soit la partie postérieure du euhilus ; d'où le nom

de réflexe cubito-pronaleur proposé par Marie et Barré.

En employant ces procédés, j'ai pu établir que les réflexes de

flexion de l'avant-bras, d'extension du bras et de pronation sont

constants, points sur lesquels les auteurs étaient jusque-là restés dans

le vague.

J'ai insisté sur la symétrie parfaite des réflexes tendineux à l'état

physiologique, d'où cette conséquence que l'asymétrie dénote une

perturbation. Mais comment savoir si cette asymétrie est liée à de la

surréflectivité d'un côté ou à de la subréflectivité de l'autre ? Cela est

généralement assez simple : si les réflexes sont forts des deux côtés,

on a tout lieu d'admettre que du côté où ils sont les plus forts il y

a exagération, et inversement, quand les réflexes sont faibles des deux

côtés, que du côté où ils sont les plus faibles il y a affaiblissement.

Abstraction faite du degré d'intensité des réflexes. on peut aisé-

ment arriver à savoir si leur inégalité tient à de la subréflectivité ou

RÉFLEXES TENDINEUX ET RÉFLEXES OSSEUX 31

a de la surréllectivité lorsqu'il existe des troubles fonctionnels unilaté-

raux. Il va sans dire qu'en pareil cas les réflexes du côté malade

doivent être considérés comme affaiblis ou exagérés suivant qu'ils

sont moins forts ou plus forts que ceux du côté sain.

A côté de leurs caractères constants, les réflexes tendineux en ont

de variables. Leur intensité présente de très grandes différences indi-

viduelles. Mais quelles sont les frontières de l'état physiologique ?

Quel est le degré à partir duquel on est en droit de dire que les réflexes

sont au-dessous ou au-dessus de la normale, en admettant qu'il y ait

symétrie ? *

Cette question, en ce qui concerne la subréllectivité, ne se pose que

rarement, car en pareil cas la symétrie parfaite est exceptionnelle. Il

en est tout autrement pour l'exagération des réflexes tendineux qui,

souvent, dans maintes affections spinales, sont égaux et très forts des

deux côtés.

J'ai indiqué le moyen de résoudre le problème, au moins dans un

grand nombre de cas. Voici ce que j'ai écrit à ce sujet :

« Outre l'impression que l'on peut avoir au jugé, il est un carac-

tère général, un criterium de l'exagération des réflexes tendineux que

j'énoncerai de la manière suivante : il y a surréjlectivité lorsque, le

sujet ne contractant pas volontairement ses muscles, l'excitation d'un

tendon détermine dans le groupe musculaire correspondant une série de

contractions réflexes rythmées.

« Ce caractère, dont l'absence il est vrai ne permet pas d'exclure

l'idée de surréflectivité, est particulièrement apparent dans le phéno-

mène que les cliniciens appellent « épilepsie spinale » et qu'on observe

le plus souvent au pied. On le désigne alors sous la dénomination de

« clonus du pied », de « trépidation épileptoïde du pied ». On recherche

ce signe en procédant ainsi : tenant la jambe immobile dans la main

gauche et saisissant l'extrémité du pied avec la main droite, l'obser-

vateur fléchit brusquement le pied sur la jambe sans l'abandonner. Il

y a trépidation épileptoïde quand cette impulsion détermine une suc-

32 SÉMIOLOGIE

cession rapide de flexions et d'extensions, donnant à la main qui sou-

tient et accompagne le pied la sensation d'un rythme parfait.

« Ce phénomène peut être facilement distingué de la fausse trépi-

dation, simple tremblement, dont les oscillations ne sont pas aussi

régulières et sur laquelle je reviendrai en traitant de l'hystérie.

« Le clonus du pied- cela ressort de ce qui précède - ne constitue

un criterium de sunél1ectivité que lorsqu'il remplit la condition sui-

vante : le clonus doit être obtenu en l'absence de toute contraction

volontaire des muscles de la jambe ; alors seulement on a le droit de

considérer la trépidation comme parfaite et dénotant un état patholo-

gique. Sinon, on peut avoir affaire à une trépidation que j'appelle

fruste, phénomène banal qu'on observe chez des sujets dont il y a

tout lieu de considérer le système nerveux comme absolument sain.

« Pour s'en convaincre, il suffit de choisir quelques individus ne

présentant aucun signe d'affection nerveuse, ayant simplement des

réflexes tendineux forts, et chez lesquels le soulèvement du pied, sans

nul artifice préalable, n'a pas provoqué de trépidation ; qu'on imite

alors les sujets en expérience à étendre le pied sur la jambe et à résis-

ter un peu au mouvement de flexion que l'expérimentateur cherche

à lui imprimer pour faire apparaître l'épilepsie spinale ; en procédant

de cette façon on obtiendra, dans un assez grand nombre de cas, une

trépidation identique dans sa forme à celle qui dépend d'un état patho-

logique. Je ferai remarquer que le phénomène ne se manifeste pas tou-

jours dès que la contraction volontaire se produit, il faut que celle-ci

s'opère avec une certaine mesure ; si elle est trop forte ou trop faible,

le clonus fait défaut. 11 en résulte qu'un individu, chez qui l'expé-

rience est pratiquée pour la première fois, a besoin de tâtonner en

quelque sorte avant d'opposer le degré de résistance nécessaire ; il y

arrive plus facilement après plusieurs essais, et la trépidation qu'on

observe alors se rapproche davantage de l'épilepsie parfaite. Quoi qu'il

en soit, dans ces divers cas, il est extrêmement facile de reconnaître

qu'il s'agit d'épilepsie fruste; on a affaire, en effet, à des gens se prû-

RÉFLEXES TENDINEUX ET RÉFLEXES OSSEUX 33

tant à ces recherches, mettant quand on les y invite leurs muscles

dans le relâchement, état dans lequel la trépidation épileptoïde ne

peut plus être provoquée.

« Mais admettons qu'un de ces sujets, après s'être exercé et avoir

été pour ainsi dire dressé, se propose de simuler l'épilepsie spinale.

Y aura-t-il quelque moyen de reconnaître la nature fruste de sa trépi-

dation Assurément, car il est très difficile ou même impossible de

maintenir volontairement pendant plusieurs minutes consécutives

les muscles au degré nécessaire de contraction et, par conséquent, la

trépidation ne présentera pas le même degré de constance que dans

l'épilepsie spinale parfaite. J'ajoute que les contractions volontaires

gênent plutôt qu'elles ne facilitent la manifestation de la trépidation

parfaite, ce qui constitue encore un moyen de la discerner de la trépi-

dation fruste.

« Il n'en est pas moins vrai que, si l'on n'y prête pas une attention

suffisante, si, comme beaucoup de médecins le font, on se contente

d'une exploration rapide, on est très exposé à confondre les deux

variétés d'épilepsie spinale. Et pourtant, il est essentiel de les distin-

guer puisque, je le répète, la trépidation épileptoïde parfaite est un

phénomène pathologique et que la fruste peut exister à l'état physio-

logique.

« Il est à retenir que la trépidation épileptoïde fruste se rencontre

assez communément chez les tuberculeux ne présentant, du reste, au-

cun signe d'affection organique du système nerveux. »

Les données ci-dessus exposées sur le réflexe achilléen et les réflexes

tendineux du membre supérieur m'ont permis d'établir quelques no-

tions nouvelles en neuropathologie.

J'ai montré que l'absence du réflexe achilléen constitue un signe

de grande valeur pour le diagnostic de la névrite et du tabes, qu'il est

une manifestation plus précoce de cette dernière affection que le signe

de Westphal, ce qui aujourd'hui est unanimement admis. Dans les

BABINSKI. 3

31 SÉMIOLOGIE

chapitres « Sciatique » et « Tabes » (pp. 77 et go) je reviendrai sur

cette question pour donner à cet égard des détails complémentaires

qui, là, seront mieux à leur place.

J'ai dit plus haut qu'à l'état normal la percussion de l'extrémité

inférieure du radius, outre la flexion de l'avant-bras sur le bras,

phénomène constant, provoque parfois une flexion de la main et

des doigts ; mais ce dernier mouvement, chez l'individu sain, a une

intensité généralement inférieure et en tout cas jamais supérieure à

celle de la flexion de l'avant-bras sur le bras. Or, la diminution ou

l'abolition du réflexe de flexion de l'avant-bras, état pathologique,

peut avoir cette conséquence que la percussion de l'extrémité infé-

rieure du radius détermine une flexion de la main et des doigts l'em-

portant en intensité sur la flexion de l'avant-bras ou se produisant

alors que celle-ci fait défaut. C'est ce phénomène que j'ai décrit sous

la dénomination d'inversion du réflexe du radius ; il est lié dans la

grande majorité des cas à une lésion spinale atteignant le cinquième

segment cervical et respectant le huitième. Cette inversion se manifeste

dans toute sa netteté quand il existe au-dessus du huitième segment,

ce qui est très commun en pareil cas, une perturbation de la voie

pyramidale faisant apparaître ou exagérant le réflexe de flexion de

la main et des doigts.

Dans les faits de ce genre on peut encore, d'après l'état des réflexes

intermédiaires, réflexe de pronation et réflexe d'extension de l'avant-

bras, déterminer la longueur de la lésion. S'ils sont tous deux abolis,

la lésion occupe les cinquième, sixième et septième segments cervi-

caux. Si le réflexe de pronation est seul aboli, le septième segment est

respecté, tandis que le cinquième et le sixième sont atteints.

On peut imaginer aisément d'autres combinaisons.

Le sens du mouvement qu'un segment de membre exécute à la suite

d'une percussion osso-tendineuse peut être interverti quand il y a de

l'irréflectivité partielle. C'est ainsi que le choc sur le tendon du triceps

brachial, lorsque le réflexe d'extension de l'avant-bras est aboli ou

RÉFLEXES TENDINEUX ET RÉFLEXES OSSEUX 35

affaibli, peut être suivi d'une flexion de l'avant-bras sur le bras. C'est

là le réflexe paradoxal du coude dont je crois avoir pénétré le méca-

nisme. A l'état normal, la percussion de l'extrémité inférieure de

l'humérus détermine, comme je l'ai indiqué, une flexion de l'avant-

bras, sauf quand elle est pratiquée au niveau du tendon du triceps,

les effets de l'excitation de ce tendon l'emportant alors sur ceux qui

résultent de l'ébranlement de l'os sous-jacent. A l'état pathologique,

lorsque le réflexe d'extension est aboli ou affaibli, le mouvement réflexe

de flexion apparaît, même quand le choc porte sur le tendon tricipital.

J'ai montré que le réflexe paradoxal est un signe fréquent dans le

tabes, ce qui s'explique aisément avec les données ci-dessus,' quand

on sait que les lésions radiculaires tabétiques suivent d'habitude dans

leur évolution une marche ascendante.

Il résulte de ce qui précède que mes observations sur les réflexes

tendineux du membre supérieur, dont la recherche était d'habitude

négligée, ont apporté des éléments nouveaux pour la localisation des

affections de la moelle cervicale et de ses racines.

J'ai démontré enfin que l'hystérie est incapable de modifier l'état

des réflexes tendineux, contrairement à ce qui était admis autrefois.

C'est là une notion que je me contente d'indiquer pour l'instant,

devant y revenir ultérieurement et en montrer toute la portée (voir

p. 195).

Je citerai plus loin (p. gi) les travaux confirmatifs des miens sur les réflexes

tendineux dans le tabes.

En ce qui concerne l'hystérie, je me contenterai de noter ici que, dans une dis

cussion qui a eu lieu sur ce sujet à la Société de Neurologie de Paris (séance du

9 avril 1908), il ne s'est plus trouvé personne pour soutenir que cette névrose fût

capable de produire de la surréflectivité ou de l'irréflectivité tendineuse.

Les confirmations relatives à mes travaux sur l'inversion du réflexe du radius

sont nombreuses.

II. Claude et E. Veller rapportent (Revue neurologique, 1910, t. 20, p. 601)

une observation intitulée : « Syringomyélie cervicale. Inversion du réflexe du

radius ».

36 SÉMIOLOGIE

« Le malade que nous présentons, écrivent-ils, est atteint de syringomyélie

cervicale; on trouve chez lui, avec une grande netteté, le phénomène de l'inver-

sion du réflexe du radius, tout récemment signalé et décrit par M. Babinski »....

« Ce cas rentre dans la catégorie des faits sur lesquels M. Babinski s'est appuyé

pour indiquer la valeur sémiologique de l'inversion du réflexe du radius. » ..... « Il

ne paraît pas douteux que le 5° segment en particulier est atteint par ce foyer. »

Souques el Chauvet, sous ce titre : « Inversion du réflexe du radius. Fractures

spontanées et parfois signe de Babinski dans un cas de paralysie infantile avec

reprise tardive» (Revue neurologique, tgt t, t. XXII, p. t4r, publient un travail

duquel j'extrais le passage suivant : « Cette inversion du réflexe du radius con-

firme donc l'hypothèse de M. Babinski qui pense que cette inversion est condi-

tionnée par une lésion de Cn avec intégrité complète de CI. Si, dans notre cas,

cette inversion n'est qu'un argument de plus pour la localisation des lésions polio-

myélitiques antérieures, sa parfaite concordance avec les autres signes de locali-

sation montre sa valeur sémiologique topographique pour les cas où l'on trouve ce

signe plus ou moins isolé. »

Souques et Barré (Revue neurologique, ign, t. XXII, p. in5) relatent un nou-

veau fait du même ordre dans une communication intitulée : « Note sur l'in-

version du réflexe du radius et sur le réflexe cubito-fléchisseur des doigts. »

E. Moniz, de Lisbonne, publie une observation (Revue neurologique, 1012,

t. XXIII, p. t33 ayant pour titre : « Inversion du réflexe du radius dans un cas

de syringomyélie » et écrit : « Ce cas de syringomyélie, dont je donne le résumé,

est digne d'être enregistré pour venir continuer les investigations de M. Babinski

sur la valeur sémiologique de l'inversion du réflexe radial. »

Souques et Duhem (Revue neurologique, ! f)t2, 1. XXIII, p. Cr3S) rapportent un

cas d' « inversion du réflexe du radius et réaction de dégénérescence dans les

muscles biceps et long supinateur ». Leur travail se termine par cette phrase :

« Cette observation confirme en définitive la valeur topographique de l'inversion

du réflexe du radius. »

Goltard Soderbergh (Neurologisches Centralblall, 1912, p. Il 16) confirme aussi

les résultats de mes recherches dans un article intitulé : « Ueber Babinski's l'in-

version du réflexe du radius. » Il revient encore sur cette question dans un travail

fait en collaboration avec Akerblon ayant pour titre : « Rûckenmarlageschw. der

h6chsten Cervikalsegmenle (Jlill. a. d. Grenzgeb. d. Med. u. Chir., XXV, IIeft 1).

En ce qui concerne le réflexe paradoxal du coude auquel on a donné aussi le

nom d'inversion du réflexe tricipital, C. Lian signale ce symptôme chez un

tabétique (Revue neurologique, 1912, t. XXIII, p. lt3G) et écrit ceci : « Notre obser-

vation vient donc s'ajouter aux observations de M. Babinski et à celle de MM. Deje-

rine et Jumentié pour montrer que l'inversion du réflexe tricipital peut s'observer

chez les labéliques, en l'absence de toute hémiplégie ou de toute sclérose combinée. »

RÉFLEXES CUTANÉS 37

RÉFLEXES CUTANÉS

Phénomène des orteils.

J'ai montré qu'à t'étal normal, sauf dans la période qui s'étend

approximativement de la naissance jusqu'au moment où la marche

devient correcte, l'excitation de la plante du pied, quandclledétermine,

Fixe 2. Étal normal. Flexion des orteils provoquée

par excitation de la plante du pied.

ce qui est la règle, un mouvement réflexe des orteils, provoque tou-

jours une flexion (voir fig. 2).

11 est des individus normaux chez lesquels, à la suite de l'excitation

de la plante du pied, les orteils restent immobiles, au moins en appa-

rence, mais et c'est là un point essentiel - jamais ils n'exécutent

de mouvement d'extension.

Or, en cas de perturbation du système pyramidal, l'excitation de la

38 SÉMIOLOGIE

plante du pied provoque ordinairement l'extension des orteils, en

particulier du gros orteil.

C'est là le phénomène des orteils ou du gros orteil que j'ai fait con-

naître en 1896 à la Société de Biologie (43). J'en ai donné une des-

cription plus complète au Congrès de Neurologie de Bruxelles en

1897, et ensuite dans une leçon publiée en 1898 par la Semaine Médi-

Fig. 3. - Phénomène des orteils.

cale (48). On a pris l'habitude de l'appeler, tant en France qu'à l'étran-

ger, « signe de Babinski » (voir fig. 3).

Etant donnée l'importance que tous les neurologistes attachent à ce

phénomène, je dois entrer dans quelques développements. A cette

fin, je ferai d'abord quelques extraits du dernier travail que je viens

de rappeler.

« En général, ce n'est pas seulement par le sens du mouvement

que le réflexe normal diffère du réflexe pathologique ; le plus souvent

l'extension est exécutée avec plus de lenteur que la flexion ; de plus,

la flexion est d'habitude plus forte quand on excite la partie interne de

la plante du pied que lorsque l'excitation porte sur la partie externe,

et c'est l'inverse pour ce qui concerne l'extension ; enfin, tandis que

RÉFLEXES CUTANÉS 39

la flexion prédomine généralement dans les deux ou trois derniers

orteils, c'est dans le premier ou les deux premiers orteils que l'exten-

sion est ordinairement le plus prononcée.

« Le phénomène des orteils peut se présenter sous des formes

frustes, c'est-à-dire que le réflexe plantaire peut revêtir des caractères

en partie pathologiques, en partie physiologiques. En voici des

exemples : chez certains sujets, l'excitation de la plante du pied

provoque l'extension du gros orteil ou des deux premiers orteils

et donne lieu en même temps à une flexion des derniers orteils ;

chez d'autres, les orteils s'étendent quand on excite la partie externe

de la plante du pied et se fléchissent lorsque c'est la partie interne du

pied qui est excitée ; chez d'autres encore, le réflexe plantaire,

quelle que soit la partie de la plante du pied qui est excitée, se mani-

feste tantôt par de la flexion, tantôt par de l'extension des orteils ;

dans ce dernier cas, ce sont généralement les premières excitations qui

donnent lieu à de la flexion.

« Cela dit, je vais vous faire connaître la technique qu'il faut

employer pour bien observer le mouvement réflexe des orteils. Il

importe que les muscles du pied et de la jambe ne soient pas en état

de contraction, et pour obtenir ce résultat il est bon de ne pas pré-

venir le sujet de l'expérience qu'on se propose de pratiquer et de lui

faire fermer les yeux. La jambe doit être légèrement fléchie sur la

cuisse et le pied reposera sur le lit par son bord externe ou bien sera

privé de tout appui, la jambe étant relevée et soutenue par l'expéri-

mentateur. Le membre inférieur étant placé dans cette attitude, on

attendra pour procéder à l'excitation que les muscles paraissent bien

relâchés.

« Il n'est pas indifférent d'exciter légèrement ou énergiquement, de

chatouiller simplement ou de piquer la plante du pied. Ce dernier

mode d'excitation est nécessaire chez certains sujets pour faire appa-

raître un mouvement réflexe des orteils ; mais, par contre, il donne

lieu chez d'autres individus à des mouvements si vifs des divers

40 SÉMIOLOGIE

segments du membre inférieur qu'il est difficile de les analyser ; en

pareille conjoncture, le sens du mouvement des orteils peut être

impossible à déterminer et, lorsqu'onleperçoit, ilestencorepermis do

se demander s'il s'agit bien d'un mouvement réflexe ou d'un mouve-

mement volontaire, question importante à résoudre car il est à peine

besoin de faire remarquer que si, à l'état normal, le réflexe cutané

plantaire ne se manifeste jamais par une extension des orteils, ce mou-

vement pourrait être exécuté, consécutivement à la piqûre de la plante

du pied, par un acte de la volonté ; il faut, dans des cas de ce genre,

renouveler l'excitation en la pratiquant superficiellement.

« Il y a encore une cause d'erreur que je crois utile de vous

signaler. Les orteils suivent nécessairement le pied dans le mouvement

de flexion qu'il exécute sur la jambe à la suite de l'excitation de la

plante ; si donc le mouvement de flexion sur le métatarse fait défaut,

ainsi que cela a lieu parfois, les orteils, entraînés passiv ement vers la

partie antérieure de la jambe, peuvent donner à un observateur inat-

tentif l'illusion qu'ils exécutent un mouvement d'extension sur le méta-

tarse. Pour éviter cette confusion, il faut avoir soin d'examiner

la région de l'articulation métatarso-phalangienne du gros orteil, afin

de voir comment se comportent la phalange et le métatarse l'une par

rapport à l'autre.

« En m'appuyant sur ces quelques faits et sur d'autres beaucoup

plus nombreux que j'ai recueillis depuis que ce signe a attiré mon

attention, je vais passer en revue, d'une manière méthodique, les affec-

tions dans lesquelles on peut observer le phénomène des orteils.

« C'est d'abord l'hémiplégie due à une lésion organique de l'encé-

phale, quelle qu'en soit la cause, qu'il s'agisse d'hémorragie, de

ramollissement ou de néoplasme, que l'on ait affaire à une hémiplégie

de l'adulte ou à une hémiplégie infantile.

« Chez les sujets que je vous ai montrés il s'agissait d'hémiplégie de

date ancienne avec contracture et exagération des réflexes tendineux.

RÉFLEXES CUTANÉS S 41

Mais j'ai constaté aussi ce phénomène dans plusieurs cas d'hémiplégie

récente, flasque, où les réflexes tendineux étaient normaux, affaiblis

ou même abolis du côté paralysé. C'est ainsi que, chez la deuxième

malade que je vous ai présentée, je l'ai observé dès le premier examen

qui avait été pratiqué vingt-quatre heures après le début de l'hémi-

plégie ; les réflexes tendineux étaient alors à peu près de même intensité

des deux côtés. Chez une autre femme, atteinte d'hémiplégie orga-

nique, soumise à mon examen une heure après l'ictus apoplectique,

le phénomène des orteils était dès ce moment très manifeste et les

réflexes tendineux du côté de l'hémiplégie étaient très faibles. L'exten-

sion des orteils m'a même paru ordinairement plus marquée dans

l'hémiplégie récente que dans l'hémiplégie ancienne.

« J'ai constaté aussi l'existence de ce signe chez deux sujets présen-

tant une hémiplégie ancienne, flasque, avec abolition des réflexes rotu-

liens. L'un d'eux était atteint d'hémiplégie gauche remontant à trois

ans ; la paralysie était flasque au membre inférieur; le membre supé-

rieur gauche était légèrement contracture ; les réflexes rotuliens et les

réflexes du tendon d'Achille faisaient défaut des deux côtés ; le réflexe

du triceps brachial était normal à droite, exagéré à gauche ; le malade

avait eu quelques douleurs lancinantes et sa pupille droite était plus

petite que la gauche. Il est vraisemblable qu'il s'agissait d'une asso-

ciation de lésions radiculaires postérieures et d'une lésion organique

de l'hémisphère droit avec dégénération secondaire. Le second sujet

était une femme atteinte manifestement de tabes caractérisé par des

douleurs fulgurantes, des troubles vésicaux, le signe de Robertson,

l'absence bilatérale des réflexes rotuliens et achilléen et du réflexe du

triceps brachial ; elle avait été frappée brusquement d'une hémiplégie

gauche. Le phénomène des orteils existait dès le début de la paralysie

et, trois mois plus tard, la paralysie étant toujours flasque et les

réflexes tendineux faisant défaut à ce moment comme auparavant,

l'excitation de la plante du pied provoquait, ainsi qu'au premier jour,

l'extension des orteils.

42 SÉMIOLOGIE

« L'intensité du phénomène des orteils n'est pas proportionnée à

celle de la paralysie ; ce signe est très marqué dans certains cas où

l'hémiplégie est légère et où la motilité volontaire des orteils

n'est pas très affaiblie; par contre, il peut être fort peu accusé et même

faire défaut dans des cas où la paralysie est très prononcée.

« Généralement, du côté opposé à la paralysie, le réflexe cutané

plantaire est normal ; parfois pourtant j'ai constaté de ce côté le signe

des orteils, moins accentué toutefois qu'au pied paralysé.

« Chez une femme, atteinte d'hémiplégie spasmodique datant de

plusieurs années, j'ai noté le curieux fait suivant : l'excitation de la

plante du pied paralysé donnait lieu de ce côté à une extension des

orteils ; l'excitation de la plante du pied normal provoquait, outre une

flexion des orteils de ce pied, une flexion des orteils du pied paralysé.

« J'ai vu le phénomène des orteils dans quelques cas de méningo-

encéphalito diffuse ; il y avait en môme temps une grande faiblesse des

membres inférieurs et les réflexes tendineux étaient exagérés ; la

malade que je vous ai présentée en dernier lieu fait exception à cette

règle car, ainsi que vous l'avez vu, chez elle les membres inférieurs

ne sont que très peu affaiblis et les réflexes tendineux sont abolis ; il

s'agit là, il est vrai, d'une méningo-encéphalite diffuse associée au

tabes.

« Dans un cas d'épilepsie partielle, j'ai eu l'occasion de constater

ce phénomène : il s'agissait d'un homme, sujet à des crises d'épilepsie

jacksonienne, chez lequel les mouvements convulsifs occupaient le

côté gauche du corps. Ayant examiné le malade immédiatement après

une crise, j'ai vu que l'excitation de la plante du pied donnait lieu à

de l'extension des orteils à gauche; hors des crises, le réflexe cutané

plantaire était normal et le côté gauche ne présentait aucun trouble

de motilité. '

« J'ai également observé le signe des orteils chez un individu atteint

de méningite cérébro-spinale et chez une femme qui avait ingéré de la

strychnine à dose toxique ; tous deux présentaient aux membres infé-

RÉFLEXES CUTANÉS 43

rieurs de la contracture, de l'exagération des réflexes tendineux et

de la trépidation épileptoïde du pied. Le sujet empoisonné par la

strychnine guérit rapidement et, quarante-huit heures environ après

le début des troubles morbides, le réflexe cutané plantaire était rede-

venu normal.

« Dans les paralysies spinales spasmodiques, quelle qu'en soit la

cause, qu'il s'agisse de lésion traumatique, de compression de la

moelle par mal de Pott, de méningomyélite, de myélite transverse,

de sclérose en plaques, de syringomyélie, de sclérose latérale amyo-

trophique, on observe souvent le phénomène des orteils, et il est géné-

ralement plus prononcé dans les cas de ce genre que dans l'hémiplégie

d'origine cérébrale.

« Ce signe peut exister aussi dans certaines paraplégies flasques avec

affaiblissement ou abolition des réflexes tendineux. Je l'ai constaté,

du côté de la paralysie, dans un cas d'hémiplégie spinale avec anes-

thésic croisée due à une hémi-section traumatique de la moelle, à la

partie moyenne de la région dorsale, quinze heures après l'accident;

le côté paralysé était flasque et les réflexes tendineux y étaient abolis.

« Enfin, j'ai noté le phénomène des orteils dans plusieurs cas de

maladie de Friedreich.

« Si l'on jette un coup d'oeil d'ensemble sur les faits que je viens

de vous énumérer, en cherchant à déterminer la cause du phénomène

des orteils, on s'aperçoit immédiatement que cette inversion dans la

forme du réflexe cutané plantaire est liée à des affections diverses de

l'encéphale ou de la moelle. Or, ces affections, à tant d'égards si

différentes, ayant pour caractère commun de donner naissance toujours

ou parfois, suivant l'espèce dont il s'agit, à une perturbation dans le

fonctionnement du système pyramidal, c'est de cette perturbation que

l'on est amené à faire dépendre le phénomène qui nous occupe.

« Mes observations montrent que le phénomène des orteils peut être

44 SÉMIOLOGIE -

déterminé par une perturbation dans le système pyramidal, quelles

qu'en soient la durée, l'intensité et l'étendue. Je l'ai constaté, en effet,

dans des hémiplégies très anciennes ainsi que dans des hémiplégies

toutes récentes, dans des cas où les fibres nerveuses du faisceau pyra-

midal étaient détruites et dans d'autres (sclérose en plaques. par

exemple) où l'altération n'était que superficielle, où les cylindres-axes

de ce faisceau étaient conservés, sur des sujets chez lesquels les lésions

du faisceau pyramidal devaient être très étendues et sur d'autres chez

lesquels ces lésions étaient très limitées.

« Il faut donc bien remarquer que ce signe, s'il révèle l'existence

d'une perturbation dans le système pyramidal, n'en dénote pas la

gravité. Il peut exister dans des cas de paralysie très légère, de para-

lysie curable, et disparaître après la guérison ; il peut se manifester

d'une façon passagère dans l'épilepsie partielle, dans l'empoisonne-

ment par la strychnine. Il semble même qu'il puisse parfois constituer

le seul indice de cette perturbation. Par contre, il peut faire complè-

tement défaut chez des malades dont le système pyramidal est profon-

dément altéré. Il y a là un contraste qui conduit à se demander s'il

n'y a que certaines parties du système pyramidal dont l'altération

puisse produire le phénomène des orteils ; mais nous ne sommes pas

en mesure d'être précis à cet égard.

« Il résulte de tout ce qui précède que le phénomène des orteils a un

lien avec l'exagération des réflexes tendineux et l'épilepsie spinale qui

sont souvent sous la dépendance d'une lésion du système pyramidal,

mais que ce lien n'est pas, tant s'en faut, indissoluble. Aussi observe-

t-on fréquemment la réunion de ces signes chez un même sujet et

c'est ce que vous avez pu constater sur la plupart des malades que je

vous ai présentés. Néanmoins, ils peuvent exister l'un sans l'autre; en

ellet, le phénomène des orteils fait parfois défaut dans un membre

atteint de paralysie spasmodique avec exagération des réflexes ten-

dineux et trépidation épileptoïde du pied, tandis qu'inversement on

observe très nettement ce signe dans des cas où, malgré l'existence

RÉFLEXES CUTANÉS s 45

d'une lésion du système pyramidal, les réflexes tendineux sont nor-

maux, affaiblis ou abolis, soit parce que la lésion est de fraîche date,

soit parce qu'elle s'associe à des altérations des racines postérieures.

« L'importance du phénomène des orteils au point de vue du dia-

gnostic ressort de l'exposé des faits dont je vous ai entretenus, et je ne

saurais m'y arrêter davantage sans m'exposer à des répétitions.

« Je désire seulement vous faire remarquer que sa valeur sémiolo-

gique est surtout grande dans les cas où les réflexes tendineux ne

renseignent pas sur l'état du système pyramidal. C'est ainsi que,

dans l'hémiplégie organique récente, les réflexes tendineux sont géné-

ralement normaux ou affaiblis et l'on s'accorde à dire qu'il est souvent

impossible de la distinguer, lorsqu'elle est à sa première période,

de l'hémiplégie hystérique ; dans un cas de ce genre l'existence du

signe des orteils est particulièrement précieuse, car elle permet d'écarter

l'hypothèse d'hystérie. Il en est de même pour la paraplégie au début.

Les réflexes tendineux étant ordinairement abolis lorsqu'une lésion du

système pyramidal s'associe à une altération des racines postérieures,

la présence du phénomène des orteils dans un cas de tabes sera un

indice important puisqu'il révélera dans le système pyramidal l'exis-

tence d'un trouble qui, sans ce signe, aurait pu être méconnu.

« Au commencement de cette leçon je vous ai dit que je m'occupe-

rai seulement du réflexe cutané plantaire chez l'adulte. Toutefois, avant

de terminer, je veux vous dire un mot de ce réflexe chez le nouveau-né.

Le chatouillement de la plante du pied provoque normalement chez le

nouveau-né l'extension des orteils. Or, si l'on considère qu'à lanaissance

le système pyramidal n'est pas encore développé, on trouvera dans ce

fait une confirmation de l'idée que le phénomène des orteils est en

relation avec un trouble dans le fonctionnement du système pyra-

midal. »

Je n'ai rien à retrancher de ce que j'ai écrit il y a quinze ans et si

les travaux publiés de toutes parts, depuis cette époque, ont donné

46 SÉMIOLOGIE

du poids aux notions que j'ai établies, ils ne les ont guère éten-

dues.

Je mentionnerai toutefois quelques points relatifs au signe des orteils,

sur lesquels j'ai appelé l'attention ultérieurement.

J'ai observé ce signe (53) dans l'épilepsie dite idiopathique ou

essentielle, au moment de la crise et après la crise, pendant un laps

de temps plus ou moins long, chez des individus dont le réflexe

cutané plantaire était normal hors des crises. Le phénomène des

orteils est alors tantôt unilatéral, tantôt bilatéral; il est parfois accom-

pagné de surréflectivité tendineuse avec trépidation épileptoïde du

pied et de l'abolition du réflexe anal. Sa présence, pendant une crise.

chez un sujet dont le réflexe plantaire est normal hors des crises,

permet d'écarter l'hypothèse d'attaque hystérique.

Je l'ai constaté assez souvent dans la paralysie infantile spinale

(Revue neurologique, 1910, 11, p. Goi), et d'autres neurologistes

l'ont également observé en pareil cas. Sa présence confirme ce que

l'anatomie pathologique avait déjà montré, à savoir que les lésions de

la poliomyélite antérieure aiguë peuvent ne pas rester cantonnées dans

les cornes antérieures de la moelle et envahir les cordons latéraux ; sa

fréquence prouve que, dans cette affection, l'envahissement de la sub-

stance blanche est chose assez commune.

J'ai indiqué quelques moyens qui permettraient de distinguer le

phénomène des orteils légitime d'une extension volontaire des orteils,

dans les cas exceptionnels où l'on pourrait avoir quelque doute à cet

égard.

« A la vérité, ai-je fait remarquer (Revue neurologique, igo6,

p. 283), un simulateur ou un hystérique serait en mesure d'induire

en erreur un médecin inexpérimenté, car il est évidemment possible

d'étendre le gros orteil volontairement et d'exécuter ce mouvement à

la suite d'une excitation de la plante du pied. Mais, en y prêtant l'at-

tention nécessaire, un neurologiste sera à même de reconnaître la

fraude. En répétant l'expérience plusieurs fois, dans des conditions

RÉFLEXES CUTANÉS 47

variées, il sera ordinairement frappé par quelque irrégularité et, par l'

là, mis en garde : il constatera, par exemple, qu'un attouchement exces-

sivement léger aura été suivi d'une extension très forte, parfois môme

que le mouvement aura précédé l'attouchement ; par contre, quand

l'attention du sujet aura été détournée, une excitation forte ne sera

pas suivie d'extension, ou bien la durée du temps perdu sera mani-

festement trop longue. Voici un autre moyen de dépister la simula-

tion ou la suggestion : tandis que l'extension réflexe du gros orteil

s'accompagne de divers autres mouvements réflexes tels qu'une flexion

brusque de la cuisse sur le bassin, une contraction du tenseur du fascia

lata, l'extension volontaire du gros orteil s'opérera d'une manière indé-

pendante ou ne sera pas associée intimement à ces divers autres mou-

vements. »

Le phénomène des orteils ne dénote pas, comme certains l'ont

pensé, une abolition du réflexe cutané plantaire normal; celui-ci peut

être simplement masqué. En voici des preuves :

a. On a vu plus haut que dans certains cas de lésions de la voie

.pyramidale on peut obtenir alternativement de l'extension ou de la

flexion du gros orteil, suivant qu'on excite la région plantaire à sa

partie externe ou à sa partie interne, ce qui montre déjà que ces deux

réflexes ne sont pas incompatibles.

b. Dans un travail (106) paru en igo4, et relatif aux perturbations

des réflexes cutanés dans les affections du système pyramidal, j'ai fait

observer que chez quelques malades, tandis que l'excitation de la

plante du pied détermine de l'extension des orteils, ceux-ci se flé-

chissent très nettement quand on excite la peau de la partie supé-

rieure de la cuisse (ce qu'avait déjà vu Remak) ou de la partie

inférieure de l'abdomen.

c. Des expériences d'Ozorio de Almeida, confirmées par moi,

ont montré que, chez des sujets présentant le signe des orteils, une

compression du membre inférieur avec une bande élastique peut ame-

48 SÉMIOLOGIE

ner transitoirement la réapparition du mouvement réflexe de flexion

des orteils.

On a décrit sous des dénominations nouvelles des phénomènes

réflexes qui ne sont en grande partie que des variantes du signe des

orteils. Cette remarque s'applique, par exemple, au réflexe antagoniste

de Schaefer.

J'ai écrit à ce sujet (56) :

« Schaefer, dans le n" 22 de l'année 18c, du Neurologisches

Cenlralblatl, appelle l'attention sur un phénomène réflexe dont voici

la description : *.

« Lorsque l'on presse énergiquement le tendon d'Achille, dans son

tiers moyen ou son tiers supérieur, entre le pouce et l'index, on pro-

voque chez l'individu sain une sensation de douleur légère et en même

temps une très faible extension du pied et parfois aussi une flexion des

orteils. Or, dans certains cas pathologiques, chez des malades atteints

d'hémiplégie cérébrale organique, la même manoeuvre donne lieu à

une sensation douloureuse plus intense et en outre à une flexion du

pied ainsi qu'à une extension des orteils du côté paralysé. Ce réflexe

pathologique qui, au point de vue du diagnostic, a ceci d'important

qu'il peut permettre de déceler l'existence d'une affection grave de

l'encéphale, se distinguerait des autres réflexes tendineux parce que

la réaction, au lieu de s'opérer dans le muscle dont le tendon est

excité, se manifesterait dans les antagonistes; d'où la dénomination

de réflexe antagoniste que Schaefer propose de donner à ce phéno-

mène.

« Schaefer n'a sans doute pas eu connaissance de mon travail sur

le « phénomène des orteils », non plus que des diverses publications

qui ont paru sur ce sujet en France et à l'étranger; autrement il eût

été frappé de la similitude des résultats obtenus par son procédé et par

le chatouillement de la plante du pied, et alors il eût été vraisembla-

blement conduit à se demander si la flexion du pied et l'extension des

RÉFLEXES CUTANÉS 49

orteils qu'il obtient sont sous la dépendance de la pression du tendon

d'Achille, ou bien si elles ne sont pas simplement dues à l'excitation

de la peau.

« C'est le problème que je me suis posé, et voici comment j'ai pro-

cédé pour le résoudre.

« J'ai examiné plusieurs hémiplégiques présentant le phénomène

des orteils. En pratiquant la manoeuvre décrite par Schaefer, j'ai obtenu

comme lui la flexion du pied et l'extension des orteils. Puis, je me suis

contenté de pincer exclusivement la peau dans le voisinage du tendon

d'Achille ou encore en d'autres parties du membre inférieur, et j'ai

constaté les mêmes mouvements réflexes. Les membres de la Société

peuvent vérifier le fait sur les malades atteints d'hémiplégie organique

que j'ai fait venir à la séance.

« Rien n'autorise donc à soutenir que le réflexe de Schaefer soit un Il

réflexe tendineux antagoniste. Il y a tout lieu d'admettre qu'il s'agit

simplement d'un réflexe cutané. »

En somme l'extension des orteils provoquée par ce procédé n'est

pas autre chose que le phénomène des orteils. Quant à la flexion du

pied, si elle ne constitue pas, comme le croyait Schaefer, un réflexe

tendineux, elle doit être dissociée de l'extension réflexe des orteils ;

elle dérive sans doute de l'exagération des réflexes de défense.

Il est permis de faire une critique analogue du signe qu'Oppenheim

a décrit sous la dénomination d' « Unterschenkelsreflex ». Voici en

quoi il consiste : tandis que l'excitation des téguments de la partie

interne de la jambe, provoquée par le frottement avec le manche d'un

marteau à percussion, ne détermine, à l'état normal, aucun réflexe

ou seulement une flexion des quatre petits orteils, cette excitation,

dans les cas où il y a une lésion de la voie pyramidale, produit une

contraction des muscles extenseur propre du gros orteil, jambier anté-

rieur, extenseur commun des orteils et parfois des muscles péroniers.

En ce qui regarde la contraction du jambier antérieur, il s'agit, il

est vrai, d'un phénomène différent du signe des orteils, et la flexion du

BABINSKI. 4

sn SÉMIOLOGIE

pied ainsi obtenue peut être considérée, ici encore, comme résultant

de l'exagération des réflexes de défense. Mais pour ce qui concerne

l'extenseur propre du gros orteil et l'extenseur commun des orteils, il

est évident qu'on a affaire simplement au phénomène des orteils. C'est

d'ailleurs une remarque qui a été faite par plusieurs auteurs, et en par-

ticulier par K. Yoshimura, de Tokio (voir : Ueber das Babinski'sche

phaenomen, Aus der medicinischen Facultiit der Kaiserlich Japanischen

Univasitiit zu Tokio, Bd. VIII, IIeft 2, igo8, S. 220). Voici le pas-

sage relatif à ce sujet :

« J'ai souvent recherché ce réflexe et je me suis convaincu que ce

phénomène considéré par lui (par Oppenheim) comme un réflexe

particulier n'est autre chose qu'une modalité du phénomène de

Babinski qui peut aussi être provoqué par une excitation de la jambe,

et que ce n'est pas la surface interne de la jambe mais plutôt sa sur-

face externe ou encore mieux sa surface postérieure dont l'excitation

est propre à provoquer ce réflexe. »

Ci-dessous, je donne une liste des principaux travaux confirmant les miens.

J'arrête cet index à l'année igo3, car à partir de cette époque la valeur du phéno-

mène des orteils est unanimement admise ; il n'y a presque pas une observation

clinique relative à une affection du système nerveux dans laquelle sa présence ou

son absence ne soit expressément mentionnée.

io Phénomène des orteils, par Van Gehuchten (Journal de Neurologie, 1898,

nos des 5 avril, 20 juin et 5 juillet).

2° Phénomène des orteils ou réflexe de Babinski, par Glorieux (Journal de n'eu-

rologie, 1898, p. 482).

3° Beobachtung ùber Zehenrcllexe, par Schüler (Neurol. Cenlralblatl, n° r 3,

18g9)

4° An investigation upon the plantar reflex, with reference to flic signilicance

ofits variations under palhological conditions including an enduiry inlo flic cetio-

logy of acquired per cavus, by James Collier (Brain, part. LXXXV, r8yg).

5° Sul fenomeno di Babinski, p. Giovani Boeri (Rifornta medica, nos 146, 14,

1 ! ¡8, Anno XV, 1899, Palermo).

G° The Plantar Hellex and Babinski's sign. Their Diagnostic value in spinal

Disease, byF.-W. Langdon (The Cincinnali Lancel-Clinic, 1 ebruary 17, 1 (Joo).

7" Contribution to the Sludy of the Plantar Rellex, based upon seven hundred

RÉFLEXES CUTANÉS : ,1 1

Examinations made with special Reference to the Babinski Phenomcnon, by

G. L. Walton and W. E. Paul (Journal of nervous and mental Disease, June,

1900).

8° Ueber den normalen Grosszellenreflex bei Kindern, von Fritz Passini

(lViener klin. Wochenschrift, 1900, n° 4t).

9" Contribution à l'étude du phénomène des orteils, signe de Babinski, par

J. Charuel (Thèse, Nancy, 1900).

10° l'rzyczynek do kwestji objawu paluchowego Babinskiego oparty na zbadaniu

przeszlo tysiaca osobnikow chorych i zdrowych. Witold Chodzko (Rzecz odczylana

na IX zjezdzie Lekarzy i Przyrodnikow polslricla w Krakowié).

i io Valeur sémiologique du phénomène des orteils ou «signe de Babinski »,

par A. Charpentier (Revue internationale de médecine et de chirurgie, 22 septembre

1900).

120 Réflexes cutanés et réflexes tendineux, par Van Gehuchten (Congrès inter-

national de médecine de Paris, igloo, section de Neurologie, p. 170).

13° Ueber das Babinski'sche Zehenphanomen, par Guglielmo de Pastrowich

(Monatschrift sur Psychiatrie und Neurologie, t. VIII, p. 37°, novembre igoo).

1 l¡° Remarques sur le réflexe plantaire et en particulier sur le signe de Babin-

ski, par lsl : ridâe(Journal of Americ. Med. Assoc., ig et 26 janvier 19°1).

r5° Contribution à l'étude du réflexe plantaire normal basé sur t5G cas, par

Morton Prince (Boston Med. Journal, 24 janvier 1901).

16o The Babinski Reflex, by Van Epps (Journal of nerv. and mental Disease,

April 1901).

170 Osservazioni sui Riflessi Cutané ! e Tendinesi, p. Ettore Tedeschi (Gazella

degli Ospedali e délie Cliniche, n° 60, Anno 1901, Milano).

18° El reflejo plantar di Babinski y la Ilemiplegia organica. Lucas Ayarraga-

ray (Servicio del Asilo de iliendigos, Buenos-Ayres).

ig, Rillesso plantare, fenomeno di Babinski e reflesso antagonisto di Schaefer,

p. cl Dott. V. Capriati (Annali di Nevrologia, Anno XIX, trot, Napoli).

30° Ueber das Zehenphanomen Babinski's. Ein Bcitrag zur Lehre von den Fus-

sohlenrcllexen, von Ilermann Schneider (Berl. klin. jJ'ochenschr., 1901, n° 37).

2t. Sur la valeur diagnostique du réflexe plantaire de Babinski p. Schoenborn

(Son. de Ileidelberg, in ,1 ! linch. med. TT7ocheii., 31 décembre 1901).

22° Contribution à l'étude du réflexe de Babinski, par Crocq (Journal de Neu-

rologie, n° 1, 1901).

23° Erfahrungen ùber don Babinski'schen Reflex, von Dr. August Hamburger

(Neurologisclies Centralblait, igoi, p. 698 et 1902, p. 151).

24° Untcrsucltung u. diagn. Vcrwerthung der Hautrenexe, von Boettinger.

Vortrag bebalten im Allonaer tirztliche Verein am 27 nov. igoi (Miinch. med.

I l'ocls., 4 lob. igo2).

52 SÉMIOLOGIE

25° Contribution à l'étude du phénomène des orteils dans l'épilepsie, par Jean

Esmenard (Thèse, Paris, 1902).

26° Bemerkungen zur Klinischen Beobachtug der Haut u. Sehnenrellexe der

unteren Kdrperhâlfte, von Dr. Schônborn (Deutsche Zeilscitrifif. Nervenheilkunde,

XXI, 1902).

270 Ueber das Zehenphanomen Babinski's, von Imura( ! \'eurologin, Juni, 1902).

280 The differential Diagnosis of functional and organic Paralysis, by Thomas

Buzzard (The British Médical Journal, 18 novembre, 1902).

29° Algo acera del sintoma di Babinski. Dr. Gayarre (Academia Medico-Quirur-

gica espanola, 12 de Mayo de 1902).

3o° Le signe de Babinski immédiatement consécutif aux ictus cérébraux, par

Brissaud (Société de Neurologie de Paris, séance du 4 décembre igo2, in Revue

neurologique, 1902, p. r y5).

31° Beitrag zur klinischen Bedeutung und Patitogenese des Babinski'schen

Reflex, von Dr. Specht (Monatschrift f. Psychiatrie u. Neurologie, Bd. XII,

Ileft 2).

32° Il fenomeno di Babinski negli alienati, per il Dr. Edoardo Audenino (Gior-

nale délia Reale Accademia di llledicina di Torino, vol. IX, Anno LXVI, fasci-

coli 7-8).

33° Étude sur le phénomène des orteils (signe de Babinski), par G. Marinesco

(Revue neurologique, 3o mai 1903).

34° Le signe de Babinski comme signe précurseur des lésions du système pyra-

midal, par Peppo Acchiotte, de Constantinople (Congrès de Madrid, avril 1903).

35° Zur Lehre von den Hautreflexen an den Unterextremitâten (insbesondere

des Babinski'schen Réflexes), von Goldflam (Neurologisches Ceniralblait, 1903,

p. 1109).

De l'abduction des orteils (signe de l'éventail).

Ce signe, que j'ai fait connaître en igo3, est un complément du

signe du gros orteil. Voici ce que j'ai écrit à ce sujet dans mon pre-

mier travail (97).

« L'excitation de la plante du pied provoque parfois, entre autres

mouvements réflexes, une abduction plus ou moins marquée d'un ou

de plusieurs orteils, qui a déjà été incidemment signalée par certains

auteurs sans qu'ils y aient attaché une valeur sémiologique quel-

conque (voir fig. fi).

RÉFLEXES CUTANÉS 53

« Mon attention a été attirée aussi, depuis assez longtemps, sur ce

phénomène que j'ai observé à l'état normal ainsi qu'à l'état patholo-

gique. Mais il est rare chez les sujets sains, et quand il existe il est

peu prononcé, tandis que chez les malades atteints d'une perturba-

tion du système pyramidal il est bien plus commun, sans l'être toute-

fois autant que l'extension du gros orteil, et il est parfois très marqué.

11 m'a paru surtout très développé dans les paralysies spasmodiques

congénitales accompagnées d'athétose.

J'ajoute à cela que chez le nouveau-né,

dont, le système pyramidal n'est pas encore

constitué, le chatouillement de la plante

du pied donne lieu généralement à une

abduction des orteils en même temps qu'à

une extension du gros orteil.

« Ce fait seul qu'il peut exister à l'état

normal m'empêche d'attribuer à ce phé-

nomène l'importance fondamentale qui

appartient à l'extension du gros orteil,

caractéristique d'une perturbation du

système pyramidal ; néanmoins, quand

il est très accentué, il me paraît avoir une

FiG. 4. - Abduction réflexe

des orteils.

certaine signification. Récemment, dans

un cas de paraplégie crurale consécutive à un traumatisme, quiavaitété

l'objet d'une expertise médico-légale, l'absence de tout signe objectif

classique d'affection organique du système nerveux avait conduit les

médecins chargés de l'examen à émettre l'avis qu'il s'agissait d'hysté-

rie ou de simulation ; ayant observé chez ce malade une abduction très

nette des orteils, j'ai émis une opinion contraire et, environ trois

semaines après ma première consultation, un deuxième examen me

permettait de constater une extension des orteils qui jusque-là avait

fait défaut et venait confirmer ma manière de voir.

« J'estime donc que l'abduction des orteils, dans les conditions que

54 SÉMIOLOGIE

je viens de spécifier, constitue, à l'appui du diagnostic de perturbation

du système pyramidal, un signe de probabilité qui peut être précieux

dans certains cas douteux. ))

FIG. 5. - Abduction associée des orteils.

Dans une deuxième note parue quelques mois plus tard (102), je

disais :

« J'ai montré dans une précédente communication que l'abduction

réflexe provoquée par une excitation de la plante du pied constitue,

quand elle est bien marquée, une présomption de perturbation du sys-

tème pyramidal.

« Des faits plus récemment observés me conduisent à admettre que

RÉFLEXES CUTANÉS 55

cette perturbation peut occasionner aussi une abduction associée des

orteils. Pour constater ce phénomène, voici Comment il faut procé-

der : le sujet en observation doit se coucher sur le dos ; puis, après

avoir croisé les bras sur la poitrine, exécuter des mouvements alter-

natifs de flexion et d'extension du tronc sur le bassin, comme pour la

recherche du « mouvement combiné de flexion du tronc et de la

cuisse ». Pendant l'exécution de ces actes on voit les orteils s'écarter

les uns des autres (voir fig. 5).

« L'abduction associée des orteils me parait avoir une signification

clinique de même ordre que l'abduction réflexe ; mais il faut remar-

quer que, si ces deux espèces de mouvements coexistent parfois, ils

peuvent aussi exister l'un en l'absence de l'autre.

« L'abduction associée est un phénomène assez rare qui m'a semblé

plus commun dans l'hémiplégie de l'enfant que dans celle de l'adulte,

plus fréquent dans l'hémiparésie que dans l'hémiplégie.

« Notre collègue Dupré propose de donner à l'abduction des

orteils, qu'elle soit d'origine réflexe ou qu'elle se manifeste comme

un mouvement associé, la dénomination de signe de l'éventail. C'est

une expression imagée qui mérite d'être retenue ; mais, comme il peut

y avoir intérêt à spécifier les conditions dans lesquelles ce signe se

produit, il est peut-être préférable de se contenter des termes abduc-

tion des orteils auxquels on ajoutera, suivant les circonstances, les

mots réflexe, ou associée, ou réflexe et associée.

« J'ai observé l'abduction associée des orteils du côté droit chez une

malade atteinte d'un spasme fonctionnel du membre supérieur droit, qui

se manifestait en particulier par une crampe des écrivains ; cette femme

présentait en même temps à droite le phénomène de la flexion combinée

de la cuisse et du tronc. Ce fait me suggère une idée analogue à celle

que j'ai émise sur la pathogénie du torticolis dit mental, à savoir que le

spasme fonctionnel est peut-être, du moins dans certains cas, sous la

dépendance d'une perturbation du système pyramidal ; mais ce n'est

encore qu'une hypothèse qui a besoin de vérification » (voir p. 177).

."0 SÉMIOLOGIE

Postérieurement, dans une communication avec présentation de

malades sur les « formes latentes des affections du système pyramidal »

j'ai écrit ceci :

« Cette présentation me donnant une occasion de vous entretenir de

nouveau du signe de l'éventail sur la valeur clinique duquel on n'est

pas encore fixé, je crois bon de dire que ce phénomène, quand il est

bien caractérisé, me semble dénoter presque sûrement une perturba-

tion du système pyramidal ; si j'en juge par les observations que

j'ai faites depuis que je le recherche, il me paraît plus commun dans

l'hémiplégie infantile que dans l'hémiplégie de l'adulte, plus commun

aussi dans l'hémiparésie que dans l'hémiplégie et enfin plus commun

dans' les paralysies d'origine spinale que dans celles qui dépendent

d'une affection cérébrale. »

Il n'existe pas, du moins à ma connaissance. de travail confirmatif

consacré spécialement à l'étude de ce signe. Mais, dans maintes obser-

vations ayant trait à des affections organiques du système nerveux

central atteignant la voie pyramidale, sa présence est signalée, et je ne

sache pas que sa valeur ait été contestée.

Réflexes de défense.

Quoique les réflexes de défense, particulièrement lorsqu'ils sont

exagérés, puissent être provoqués non seulement par l'excitation de

la peau mais aussi par la compression des parties profondes ou par

des tractions, il me semble légitime de les étudier dans ce chapitre.

C'est là un sujet sur lequel j'ai fourni quelques données nouvelles

et qui est, depuis peu, à l'ordre du jour.

A. - J'ai montré en 1900, comme j'ai eu l'occasion de le rappe-

ler (voir p. 4g, que, dans l'hémiplégie organique, le pincement de la

peau, au voisinage du tendon d'Achille ou encore dans d'autres par-

RÉFLEXES CUTANÉS 57

ties du membre inférieur, peut provoquer une flexion réflexe du pied,

du côté paralysé.

J'ai signalé un autre moyen de reconnaître l'exagération des

réflexes de défense : le sujet étant assis et ses pieds reposant sur le

parquet, on excite les téguments de la cuisse ou de la jambe par la

faradisation. Quand les réflexes de défense sont exagérés, on constate

d'habitude que la cuisse se fléchit sur le bassin, que le pied se déta-

che du plancher et se maintient quelque temps dans cette attitude.

Lorsqu'on électrise des sujets normaux, en se plaçant dans les con-

ditions que je viens d'indiquer, le pied reste généralement fixé au

sol; exceptionnellement on observe aussi une flexion de la cuisse,

mais alors on a l'impression qu'il ne s'agit pas d'un phénomène

réflexe, car cette flexion fait partie d'un ensemble de mouvements

manifestement volontaires (106).

B. J'ai attiré l'attention sur ce point que l'exagération des

réflexes de défense peut exister, comme le phénomène des orteils,

dans des cas où les réflexes tendineux sont affaiblis ou abolis et que,

parfois même, elle est très prononcée (voir p. 67)' C'est ce que

l'on observe, par exemple, dans la maladie de Friedreich, comme je

l'ai montré avec Vincent et Jarkowski (188). Mais il est à remar-

quer que dans cette dernière affection les réflexes de défense se

comportent d'une manière particulière : ils sont très brusques et

peuvent en général être provoqués par l'excitation d'une partie

quelconque de la peau y compris le cuir chevelu, tandis que dans les

paraplégies dues à un foyer de sclérose ou à une compression de la

moelle ces réflexes se manifestent par des mouvements plus lents et

la zone réflexogène occupe seulement les territoires cutanés innervés

par des segments médullaires sous-jacents à la lésion.

C. Chez un sujet présentant un syndrome de Brown-Séquard

par coup de couteau, j'ai constaté avec Jarkowski et Jumentié

(180) que les réflexes de défense, exagérés des deux côtés, se

produisaient le plus facilement du côté opposé à la lésion ; le malade

58 SÉMIOLOGIE

avait du reste remarqué que les excitations du côté anesthésié provo-

quaient des mouvements involontaires. Nous avons noté le même

fait dans un cas de syndrome de Brown-Séquard dû à une lésion

syphilitique de la moelle. Chez un 'autre malade, atteint d'un syn-

drome de Brown-Séquard par coup de couteau, j'ai observé avec

Chauvet etJarhowslci (202), au début de l'affection, une disposition diffé-

rant en partie, au point de vue des réflexes de défense, de celle qui

vient d'être indiquée : le pincement des téguments du côté de la para-

lysie, en un point quelconque depuis le pied jusqu'à la partie infé-

rieure de la joue, déteiminait du même côté une sorte de tremblement

du quadriceps crural et du côté de l'anesthésie un retrait énergique de

tout le membre inférieur ; le pincement du côté de l'anesthésie ne pro-

voquait aucune réaction homo ou contra-latérale.

D. J ai étudié les réflexes de défense dans leurs relations avec la

contracture (voir p. 67) et comme moyen de localiser les compres-

sions de la moelle (voir p. io5).

RÉFLEXES PUPILLAIRES

De l'abolition des réflexes pupillaires dans ses relations

avec la syphilis.

EN collaboration avec A. Charpentier.

Dans un premier travail présenté au mois de juillet 1899 à la

Société de Dermatologie (5/)), j'ai cherché à établir, avec Charpen-

tier, que « l'abolition des réflexes pupillaires et plus particulière-

ment du réflexe à la lumière, lorsqu'elle est permanente, lorsqu'elle

est l'expression d'une lésion limitée à l'appareil des réflexes pupillai-

res, c'est-à-dire qu'elle n'est liée à aucune altération du globe oculaire

et du nerf optique et n'est pas associée à une paralysie de la troisième

RÉFLEXES PUPILLAIRES ;,9

paire, constitue un signe de syphilis acquise ou de syphilis héréditaire

presque, sinon tout à fait, pathognomonique ».

Nous sommes revenus sur cette question en mai igoi dans une

communication à la Société médicale des Hôpitaux (7{¡).

Entre temps, j'avais examiné avec Nageotte plusieurs sujets

présentant le signe d'Argyll et n'ayant, sauf ce trouble, aucun

symptôme d'affection organique du système nerveux. Nous avons eu

recours au cytodiagnostic qui venait d'être introduit dans la clinique

par Widal, Sicard et Ravaut, et chez tous les malades en question

nous avons constaté une lymphocytose des plus nettes dans le liquide

céphalo-rachidien, ce qui venait à l'appui de l'idée que nous avions

émise sur les relations entre les troubles pupillaires et la syphilis (75).

Nous arrivions à cetle conclusion que l'abolition du réflexe à la

lumière, dans les conditions ci-dessus précisées, dénote presque

sûrement une lésion du système nerveux central d'origine syphi-

litique, et que le sujet chez qui on la constate est un candidat à la

syphilis cérébro-spinale, au tabes et à la paralysie générale. Nous fai-

sions ressortir que ce trouble, n'apportant aucune gêne dans la vision,

n'est guère susceptible de frapper l'attention du malade et qu'il doit

être recherché systématiquement chez tout individu qui se présente à

l'examen du médecin.

La constatation de ce signe, disions-nous, a une importance pra-

tique très grande, car il décèle l'existence d'un état souvent précur-

seur de troubles fort graves et constitue une indication thérapeutique

impérieuse. En effet, si la cure spécifique peut exercer une influence

favorable sur les lésions du système nerveux d'origine syphilitique,

elle doit être surtout efficace quand ces lésions sont à leur début et

que les éléments nerveux ne sont pas encore profondément altérés.

Les résultats de nos recherches ont été confirmés par un grand nombre de neu-

rologistes el de syphiligraphes.

Aoefnn a l'un des premiers apporté des faits à l'appui de la thèse que nous avons

soutenue. Des obsenations d'abolition des réflexes pupillaires dans la syphilis

60 SÉMIOLOGIE

héréditaire ont été relatées par lui dans un mémoire intitulé : « On pupillary

anomalies in paralysed and non paralysed idiot children and their relation to

hereditary syphilis » (The Journal of Mental Science, July 1900).

Erb dit que ce signe lui paraît indiquer que le système nerveux central est tou-

ché par la syphilis (Zur Fruhdiagnoseder Tabès, J11 ünchener medizinische TV ochen-

schrift, 1900, p. 990).

Pour Ilarris le phénomène d'Argyll Robertson est un signe presque certain de

syphilis (SigniGcation de la pupille d'Argyll Robertson, Brit. med. Journal, 29

septembre 1900).

Parinaud et Antonelli ont déclaré qu'ils partageaient notre opinion. Il en est de

même de Gaucher (Bulletins et Mémoires de la Société des Hôpitaux de Paris, 1 go i,

pp. 5o2 et 5o4).

Cestan et Dupuy-Dutemps, dans une Revue générale intitulée : « Le signe pupil-

laire d'Argyll Robertson ; sa valeur sémiologique ; ses relations avec la syphilis »

(Gazelle des Hôpitaux, 1901, pp. 143ti et suiv.), écrivent : « ... grâce aux travaux

de Babinski, la valeur pratique du signe d'Argyll est définitivement mise en

lumière : sa présence chez un malade doit faire soupçonner la syphilis, doit faire

craindre l'évolution d'un tabes ou d'une paralysie générale progressive, doit faire

instituer sans retard un traitement iodo-mercuriel intensif... ».

Dufour, dans un mémoire sur « les relations entre les troubles pupillaires, la

syphilis et certaines maladies nerveuses (tabes, paralysie générale progressive) », in

Bulletins de la Société médicale, igo2, p. 563, écrit : « C'est à M. Babinski que

revient le très grand mérite de nous avoir indiqué les rapports qui unissent la

syphilis et le signe d'Argyll Robertson. Les observations de cet auteur ont été

confirmées un certain nombre de fois. Nous avons apporté ici une contribution

qui peut avoir son intérêt, étant donné le milieu indifférent où nous avons puisé

nos documents. »

Widal et Lemierre ont publié sur cette question dans les Bulletins de la Société

médicale (1902, pp. 825 et suiv.), un travail ayant pour titre : « Le signe d'Argyll

Robertson et la lymphocytose du liquide céphalo-rachidien » et dont voici la con-

clusion :

« En résumé, chez cinq malades sur six, le signe d'Argyll existait à l'état isolé.

Chez le sixième on constatait de plus l'abolition des réflexes rotuliens. Dans les

six cas nous avons trouvé une lymphocytose nette du liquide céphalo-rachidien.

Chez deux de ces malades, on notait des accidents certains de syphilis ; chez un

troisième, on retrouvait les stigmates d'un chancre mou ; chez les trois autres, on

ne notait aucun accident spécifique. Le signe d'Argyll, comme l'a montré

M. Babinski, est cependant tellement lié à la syphilis, que nous avons tenu à

considérer tous ces malades comme atteints de syphilis méconnue et que nous les

avons soumis sans distinction au traitement spécifique intensif.

RÉFLEXES PUPILLAIRES 61

« L'exploration méningée, en montrant la constance de la lymphocytose chez

ces six sujets, prouve bien, grâce à ce symptôme anatomique, que le signe d'Ar-

gyll, même isolé, décèle une altération organique des centres nerveux venant irri-

ter les méninges. »

Milian (voir : La syphilis du système nerveux, igio, Octave Doin, éditeur,

p. 2g) écrit : « L'importance du signe d'Argyll Robertson est considérable. Ce

signe est, comme l'a montré Babinski, un véritable stigmate de syphilis et non

pas seulement, comme on l'indiquait jadis, un simple signe de tabes ou de para-

lysie générale. Tous les auteurs qui se sont occupés de la question ont confirmé

l'opinion de cet auteur. »

Il me paraît inutile de faire d'autres citations. L'idée que j'ai émise avec

Charpentier n'est aujourd'hui contestée par personne. On a publié, il est vrai,

quelques faits exceptionnels où l'absence du réflexe à la lumière a été constatée

chez des sujets qu'il y avait de bonnes raisons de considérer comme non syphi-

litiques. Parmi ces faits il en est qui ne réalisent pas les conditions que nous

avons fixées, car l'abolition du réflexe s'accompagnait d'une paralysie plus ou

moins complète de la 3" paire. Mais en admettant qu'il y en ait de légitimes, ils

ne sont pas en opposition avec notre opinion; en effet, comme on l'a vu, nous

avions seulement la prétention d'énoncer une règle très générale.

De la pseudo-abolition du réflexe des pupilles à la lumière.

Pour donner une idée exacte du phénomène auquel j'ai donné cette

dénomination, je ne crois pouvoir mieux faire que de citer des extraits

du travail où je l'ai décrit (122).

« En raison del'imporlance fondamentale qui s'attache à l'étude des

troubles pupillaires, j'estime qu'on ne saurait trop chercher à préciser

les conditions capables de modifier l'état des pupilles ; aussi j'espère

que la Société trouvera de l'intérêt à la relation de quelques faits

nouveaux concernant ce sujet.

« Examinant une jeune femme sujette à des crises d'épilepsie et

recherchant chez elle, d'une manière systématique, comme j'ai l'habi-

tude de le faire chez tous mes malades, les divers signes objectifs qui

peuvent se manifester dans les affections organiques du système

62 SÉMIOLOGIE

nerveux, je fus frappé par ce fait que les pupilles, explorées immédia-

tement après l'entrée de cette femme dans une pièce sombre et suivant

la méthode dont j'ai coutume de faire usage', étaient dilatées et ne

réagissaient pas du tout à la lumière. Après avoir laissé la malade

pendant quelques minutes dans l'obscurité, pratiquant une nouvelle

exploration, je constatai celle fois que l'excitation lumineuse provo-

quait une contraction pupillaire faible, mais nette.

« Ces deux examens successifs donnaient donc des résultats en appa-

rence contradictoires, et je pensai qu'il serait intéressant de con-

naître la raison de leur dissemblance; pour atteindre ce but, je fis,

pendant une dizaine de jours consécutifs, des observations et des expé-

riences qui m'ont renseigné, au moins en partie. Je dois, en effet,

déclarer d'abord que la contractilité pupillaire chez celte malade est

soumise à des fluctuations quotidiennes dont je ne suis pas arrivé à

pénétrer toutes les causes, mais il en est une que je suis sûr d'avoir

déterminée. Je puis dire que la lumière tend à épuiser le réflexe de la

pupille et que l'obscuration, au contraire, le renforce. C'est pourquoi

lorsque l'examen est pratiqué dans une pièce obscure, le réflexe, faible

ou nul au moment où le sujet pénètre dans cette pièce, devient plus

fort après que la malade y a séjourné quelque temps. C'est aussi pour

cette raison que généralement, par les jours clairs, le réflexe est plus

faible que par les jours sombres. Je ferai remarquer que l'épuisement

complet du réflexe n'apparaît parfois qu'après deux ou trois excita-

tions suivies encore d'une réaction pupillaire.

« Un excellent moyen de mettre en évidence l'influence de l'obscu-

ration consiste, après avoir constaté la faiblesse ou l'absence du réflexe,

à fermer hermétiquement avec un bandeau les yeux de la malade et

i. Voici en quoi consiste cette méthode : l'examen est pratiqué dans un endroit sombre ;

on place une bougie, une allumette-bougie ou un rat-de-cave latéralement, à un décimètre

environ de l'oeil à examiner et un peu en avant du plan des yeux; on interpose la main, qui

joue le rôle d'écran, entre l'oeil et la lumière, puis, après avoir recommandé au sujet en

obsenation de fixer un objet éloigné, on retire brusquement la main ; or, dans ces condi-

tions, à l'état normal, la pupille se contracte très nettement à ce moment.

RÉFLEXES PUPILLAIRES fi3

à les laisser ainsi pendant vingt à trente minutes ; immédiatement

après qu'on a enlevé le bandeau, le réflexe à la lumière est à peu près

aussi fort que cliez les individus normaux. L'expérience est encore

plus Intéressante et plus convaincante si l'on pratique seulement l'occlu-

sion d'un oeil, l'autre oeil restant exposé à la lumière du jour ; on con-

state, après le délai indiqué, que la pupille de l'oeil qui a été fermé

réagit normalement, tandis que l'autre pupille réagit faiblement ou

ne réagit pas.

« Voilà donc une malade dont le réflexe à la lumière est très affaibli

ou fait même complètement défaut certains jours quand, pour le

rechercher, on se place dans les conditions qui ont été spécifiées.

Je viens de dire que l'obscuration le fait redevenir normal, mais je

dois ajouter immédiatement qu'il n'est pas nécessaire d'employer ce

moyen pour s'assurer qu'il ne s'agit pas là d'une véritable abolition

de ce réflexe. En effet, si au lieu de faire usage d'une bougie on se

sert d'une lumière beaucoup plus vive, ou si au lieu de laisser la

bougie latéralement on la porte devant l'oeil, de manière à faire

pénétrer dans les centres une quantité bien plus grande de lumière,

tout en faisant fixer à la malade un objet éloigné afin d'éditer

l'intervention de l'accommodation, on voit que les pupilles se

contractent ; le réflexe consensuel est aussi conservé, ce qui tient

sans doute à la grande quantité de lumière utilisée généralement

dans cette exploration. Quoi qu'il en soit, il s'agit là d'une disposi-

tion anormale, d'une perturbation que l'on pourrait dénommer, pour

fixer les idées, une pseudo-abolilion du réflexe à la lumière. Je dirai

encore, pour compléter la description de ce trouble, que les pupilles

de cette malade réagissent à la convergence et à l'accommodation.

« Si l'on n'est pas prévenu de la possibilité de confondre la pseudo-

abolition avec l'abolition vraie du réflexe à la lumière, on risque de

commettre cette erreur, grave au point de vue pratique. Je suis per-

64 SÉMIOLOGIE

suadé qu'on s'y est parfois laissé prendre et peut-être a-t-on là l'expli-

cation des prétendues disparitions et réapparitions successives du signe

d'Argyll Robertson, signalées par quelques observateurs et que pour

ma part j'ai toujours mises en doute, sans pourtant les nier. Mais si

l'attention est attirée sur cette cause d'erreur, il est très simple de

l'éviter : en effet, quand il s'agit d'une véritable abolition du réflexe

des pupilles à la lumière, le trouble subsiste quelle que soit l'inten-

sité de la source lumineuse, il subsiste aussi malgré l'emploi de l'ob-

scuration, quelque prolongée qu'elle soit, et le réflexe consensuel est

également aboli. »

Depuis, j'ai observé un certain nombre de faits analogues. Mais je

ne suis pas arrivé à déterminer la cause de celte perturbation ; on ne

peut faire à cet égard que des hypothèses. En ce qui concerne la

raison pour laquelle l'obscuration renforce le réflexe à la lumière, je

renvoie le lecteur à la page 22.

TROUBLES DE LA CONTRACTILITÉ ÉLECTRIQUE

Excitabilité faradique latente.

(EN collaboration avec Delherm et Jarkowski)

La contractilité faradique du muscle dégénéré peut être affaiblie

ou abolie et, dans ce dernier cas, en faisant agir les courants induits

à leur maximum d'intensité « en monopolaire ou en bipolaire», on

n'obtient pas de contraction musculaire.

Or parfois, l'excitabilité faradique n'est abolie qu'en apparence;

elle est latente, et il est possible de la faire apparaître par le pro-

cédé suivant :

On excite avec deux tampons reliés à un appareil faradique les

muscles dont on se propose d'explorer la contractilité et, pendant

CONTRACTURE I : 61«i

cetle exploration, on fait traverser la région examinée par un courant

galvanique constant d'une intensité de 10, 15, 3o milliampères.

Dans certains cas, on constate que les muscles, ne réagissant pas à

des courants faradiques aussi forts que l'appareil peut les fournir

quand la faradisation est employée seule, se contractent très nettement

avec des courants beaucoup moins intenses si l'on procède comme

nous venons de l'indiquer.

Le phénomène se produit avec son maximum de netteté lorsque

le pôle négatif du galvanique et celui du faradique sont tous deux

« distaux ». '

Cette réaction pourrait être considérée comme un échelon entre

la subexcitabilité et l'inexcitabilité faradique; elle semble constituer

le stade ultime de la contractilité faradique.

Sans doute, il y a bien longtemps qu'on a songé à utiliser, soit en

physiologie, soit en thérapeutique, l'action simultanée des deux cou-

rants, mais il ne semble pas que l'attention ait été attirée sur le point

que nous venons d'exposer et qui peut être important en électrodia-

gnostic.

Il y a tout lieu d'admettre, en effet, d'une façon générale, que l'exci-

tabilité faradique latente dénote une perturbation musculaire moins

profonde que l'abolition de l'excitabilité faradique. C'est donc un

caractère qui, selon toute vraisemblance, présente de la valeur au

point de vue du pronostic ; il y aura lieu de le rechercher systéma-

tiquement, en particulier dans les cas où la réaction de dégénérescence

obtenue par les procédés habituels semble complète (190).

CONTRACTURE,

En l'étudiant dans ses rapports avec les réflexes tendineux et les

réflexes de défense, je suis arrivé à distinguer par des caractères

intrinsèques diverses espèces ou variétés de contracture et a montrer

que chacune d'elles doit a\oir un mécanisme propre.

J3ABll\KI. )

66 SÉMIOLOGIE

A. Il était admis autrefois que la contracture hystérique, consi-

déiée en soi (voir pp. 116 et igti), pouvait avoir un aspect symplo-

maticluc identique à celui de la contracture dépendant d'une affection

organique de la voie pyramidale; on pensait d'ailleurs que les fais-

ceaux pyramidaux étaient irrités dans la contracture hystérique et

qu'ils étaient même susceptibles de subir à la longue des altérations

matérielles.

J'ai établi que c'était là une erreur, que la contracture hystérique

pure no s'accompagne d'aucune modification des réflexes (voir p. 196),

que par sa nature elle diffère essentiellement de la contracture orga-

nique et qu'elle peut être assimilée à une contraction musculaire voli-

tionnelle.

B. J'ai montré que, dans le groupe des contractures liées à une

perturbation de la voie pyramidale, il était nécessaire de faire une sub-

division, et de distinguer deux formes de rigidité musculaire, qui

souvent, il est vrai, s'associent l'une à l'autre (,94).

a) L'une de ces formes est constituée par la contracture vulgaire

en relation, comme on le sait depuis longtemps, avec l'exagération

des réflexes tendineux ; on peut l'appeler contracture lendino-réjlexe.

Cette relation me conduisit à penser que dans cette forme de

contiacture la rigidité musculaire pourrait être supprimée par une

opération sur les racines postérieures qui ferait disparaître la sur-

réflectivité tendineuse.

En igo6, à l'occasion d'une discussion à la Société de Neurologie

sur les injections intra-nerveuses d'alcool, je me suis exprimé en ces

termes :

« Je m'étais souvent demandé, en présence de malades atteints de

paraplégie avec contracture intense chez lesquels, la force musculaire

paraissant absolument conservée, l'impotence était liée à l'état spas-

modique, s'il ne serait pas légitime de chercher à supprimer le spasme

par une intervention chirurgicale portant sur les racines postérieures

de la moelle, mais la crainte d'accidents m'avait toujours empêché de

CONTRACTURE' 67

mettre celle idée à exécution » (Revue neurologique, 1906, p. (¡7(j).

Deux ans plus tard, en 19°8, Foerster eut le mérite de passer de l'idée

à la réalisation et de fixer la technique de l'opération qui porte actuel-

lement son nom. Elle consiste à sectionner quelques-unes des racines

postérieures de la région lombo-sacrée.

« En décembre 1912, Foerster écrivait que la résection des racines

postérieures a été pratiquée jusqu'à celte date dans 159 cas; sur ce

nombre, il y eut ifi morts, soit une mortalité de 8,8 pour 100. Sur

ces 169 cas opérés, 88 concernaient des enfants atteints de maladie de

Little, il y eut 6 morts. Dans la plupart des cas guéris, les résultats

furent très bons » (G. Guillain, in « Médication des troubles de la

motilité », p. 408, chez .1.-B. Baillière et fils).

b) La deuxième forme de contracture liée à une perturbation de la

voie pyramidale a été déterminée par moi. Elle se différencie princi-

palement de la précédente par les traits suivants : elle est indépen-

dante de l'état des réflexes tendineux qui sont tantôt forts, tantôt nor-

maux, tantôt affaiblis ou abolis ; mais elle a des liens avec les réflexes

cutanés de défense qui sont toujours exagérés. J'ai proposé de la

dénommer, par opposition à la contracture tendino-réflexe, contmc-

lure cutanéo- réflexe.

La contracture cutanéo-réflexe peut occuper les membres supé-

rieurs, mais c'est aux membres inférieurs qu'on l'a observée le plus

souvent ; je reviendrai sur cette question dans le chapitre : « Paraplégie

spasmodique en flexion » (voir p. 86).

C'est aussi à la suite de ce chapitre que je donnerai l'indication des

travaux confirmatifs des miens.

C. Enfin, j'ai attiré l'attention sur une variété de contracture,

observée dans la syringomyélie et qui, imputable à une affection orga-

nique de la moelle, doit cependant être distinguée aussi bien de la

contracture tendino-réflexe que de la contracture cutanéo-réflexe, car

elle se développe sans qu'il y ait de surréllectivité tendineuse ou cuta-

née.

08 SÉMIOLOGIE

Elle paraît due à une irritation des cellules des cornes antérieures

de la moelle produite par la néoformation liomateuse (1 DD)'

CRAMPES

J'ai lait quelques observations nouvelles sur le phénomène de la

crampe musculaire ( : 3 ?

J'ai montré que dans certains états morbides il est souvent possible,

par l'application d'un courant faradique à interruptions fréquentes,

d'une intensité plus ou moins grande, parfois très faible, de faire

apparaître une crampe qui subsiste pendant 20, 3o, 5o secondes

ou plus longtemps encore après que l'électrisation est suspendue.

Les crampes ainsi obtenues par la faradisation sont, du reste, sem-

blables à celles qui se développent spontanément; comme ces der-

nières, elles sont douloureuses; pendant leur durée le muscle est

contracté au maximum : ce sont principalement les jumeaux de la

jambe, et souvent ces muscles seuls, qui sont susceptibles d'en être

le siège; enfin, il est possible de hâter leur disparition en étendant

la jambe sur la cuisse et en fléchissant le pied sur la jambe.

Ordinairement, le muscle, après avoir été mis ainsi en état de con-

traction une ou plusieurs fois successivement, perd pendant quelque

temps cette propriété. -

Les crampes sont, comme on le sait, un des symptômes les plus

communs du choléra : d'habitude, dans les formes graves de cette

maladie et dans sa période d'état, elles se développent spontanément,

ou il suffit d'une cause excitatrice des plus minimes, d'une percus-

sion légère des muscles, d'un attouchement superficiel des téguments,

d'un simple mouvement volontaire du malade, pour les faire ilaiti c.

Mais il n'en est pas toujours ainsi; en particulier dans les formes

bénignes, de même que dans la période de décroissance de la maladie, les

crampes spontanées ou déterminées par les moyens précédemment

C1"l'oUlelli'OS1'1C DU LIQUIDE Cl : l'IlALO-tiACI11U11 : N cil

mentionnés peuvent faire défaut. Or, l'électrisation avec les courants

induits les a presque toujours provoquées chez les malades que j'ai

examinés, à ce point de vue, dans le service de cholériques de l'Hôtel-

Dieu dont j'étais chargé pendant l'épidémie de 1892.

Dès lors, il est permis de se demander si, dans un cas douteux, les

crampes provoquées par la faradisation ne constituent pas un signe

qu'il y aurait lieu de prendre en considération au point de vue du

diagnostic.

Il s'en faut, d'ailleurs, qu'il soit pathognomonique du choléra.

Il y aurait déjà tout lieu d'admettre, à priori, qu'il peut être observé

dans les divers états pathologiques qui comprennent les crampes

spontanées parmi leurs manifestations symptomatiques : dans les affec-

tions cholériformes, le choléra herniaire, par exemple, dans la période

algide de certaines maladies, dans quelques intoxications. En fait, je

l'ai constaté chez des saturnins, des alcooliques, des malades atteints

de névrite périphérique, des tabétiques.

J ajoute que j'ai eu l'occasion d'observer quelques individus, ne

présentant aucun signe d'intoxication, aucune manifestation objective

d'affection organique du système nerveux, qui depuis denombreuses

années étaient sujets à des crampes spontanées ; celles-ci survenaient

à la suite d'une marche de très courte durée, et constituaient une

infirmité fort gênante. On peut désigner un tel état sous la déno-

mination de maladie des crampes.

Cl'fODUIC\05'f1C DU LIQUIDE CÉPHALO-RACHIDIEN

A. .l'ai mis en pratique, avec Nageotte, le cytodiagnostic du

liquide céphalo-rachidien et fourni une statistique portant sur 120

cas pris parmi les affections nerveuses les plus variées (75). Nous avons

été les premiers à confirmer les résultats des recherches de Widal,.

70 SÉMIOLOGIE

Sicard. Rayant. Monod, et nous avons fait quelques observations nou-

velles. Voici des extraits de noire article.

« Si bien des problèmes relatifs au cytodiagnostic restent encore

sans solution, dès maintenant on peut dire que dans certains cas

la ponction lombaire apporte au diagnostic un élément très impor-

tant et que parfois elle permet de découvrir et d'étudier des formes

pathologiques que sans elle on n'aurait pas pu soupçonner. Nous

ne voulons pour preuve de cette assertion que le cas suivant : un

homme de l.o ans vient à la Pitié consulter pour des céphalalgies très

pénibles dont le début remonte au 15 décembre dernier, c'est-à-dire

à 5 mois ; cet homme n'a pas de fièvre, mais il est manifestement

affaibli; on sent qu'il est sérieusement malade; pourtant, il a con-

tinué jusqu'à ce jour à remplir ses fonctions d'inspecteur de police ;

il présente une paralysie de la sixième paire à droite et un peu de

congestion papillaire et d'exophtalmie; à part ces signes, l'examen

objectif est absolument négatif et, en particulier, il n'existe aucune

ébauche du signe de Kernig. Quel diagnostic porter ? La ponction

lombaire donne issue à un jet de liquide louche dans lequel, sans

aucune centrifugation, on constate la présence de polynucléaires en

très grande abondance, c'est du pus délayé dans du liquide

céphalo-rachidien et du coup s'impose le diagnostic de méningite

cérébro-spinale à forme ambulatoire. Sicard et Brécy ont attiré tout

récemment l'attention de la Société médicale des Hôpitaux sur ces

cas si curieux : notre observation, remarquable par la longue durée

des accidents, fera d'ailleurs l'objet d'un travail spécial; aujourd'hui

nous nous bornons à la signaler comme l'un des cas les plus intéres-

sants que nous ayons rencontré au cours de nos recherches.

« En résumé, sur 120 cas, nous avons trouvé une fois des polynu

cléaires, 56 fois des lymphocytes en grande abondance, 3 fois une

très légère lymphocytose, et 60 fois un liquide normal. Sur les 56

résultats nettement positifs, au point de vue de la lymphocytose, nous

CY'l'ODIt\(NOS1'1( : DU LIQUIDE C) ? PHALO-)iA( : HiD)EK 71

trouvons, dans 5o cas, des états morbides que nous considérons comme

le résultat de la syphilis diffuse : tabes. paralysie générale, signe de

Robertson, soit isolé (voir p. 58), soit associé à une hémiplégie, une

paraplégie, une atrophie musculaire progressive, une atrophie papil-

laire ayant l'aspect de l'atrophie tabétique. Et il faut remarquer que

dans aucun des 6 cas de lymphocytose nette qui restent, le diagnostic

clinique n'est suffisamment établi pour exclure la possibilité d'un

tabcs ou d'une paralysie générale ; dans 2 cas même, ces diagnostics

sont presque probables.

« Il semble donc que la lymphocytose permanente, lorsqu'elle n'est

pas en rapport avec la tuberculose méningée, décèle habituellement

la syphilis diffuse. »

B. J'ai -rapporté avec Gendron (i 8g) quelques faits établissant

qu'un ramollissement de l'écorce cérébrale peut s'accompagner d'une

leucocytose abondante du liquide céphalo-rachidien. Les observations

sur lesquelles notre travail est fondé étaient au nombre de trois ; dans

2 de ces cas, le diagnostic fut vérifié à l'autopsie.

« Les faits que nous avons constatés, écrivions-nous, doivent être

rapprochés de ceux qui ont été publiés par Widal et Lemierre ; Widal,

Lemierre et Boidin ; Chauffard : Caussade et "\-Villette; Mosny etPinard :

Claude et Verdun.

« Mais, tandis que dans les cas étudiés par ces auteurs la polynu-

cléose paraissait liée soit à des raptus congestifs survenant au cours

d'une syphilis des centres nerveux, à la suite d'un ictus dans la para-

lysie générale et le tabes (Widal), soit à un paroxysme d'hypertension

artérielle au cours de l'urémie convulsive (Chauffard), soit à une

hémorragie cérébrale (Mosny, Claude), dans nos observations I et III

la polynucléose semblait sous la dépendance d'un ramollissement t

cortical. On peut même l'affirmer pour l'observation I où le diagnostic

a été vérifié l'autopsie.

« De plus, l'élude comparative de nos observations et de celles de

Mosny et Pinard, de Claude et Verdun nous montre que, dans les

7-2 SEMIOLOGIE u

lésions cérébrales en foyer qui s'accompagnent de leucocytose, à la

polynucléoso du début peut succéder une lymphocytose qui disparaît

rapidement, le liquide céphalo-rachidien redevenant normal.

« La lymphocytose faisant suite à la polynucléose a été signalée, il

est vrai, dans les deux observations de Widal et Lemierre, mais elle

fut différente par son évolution de celle que nous avons observée. Elle

avait précédé la polynucléose, avait été masquée pendant quelques

jours par celle-ci, et s'était ensuite rétablie définitivement. Dans un

cas, elle était liée à la paralysie générale, dans l'autre, au tabes.

« Il est à remarquer enfin que, dans aucun de nos cas, la syphilis

ne semble être en cause ; d'ailleurs la lymphocytose constatée dans

l'observation III, par sa rapide disparition, se distingue de celle qu'on

observe dans la syphilis des centres nerveux. Notons encore que, dans

toutes nos observations, la quantité d'albumine contenue dans le

liquide céphalo-rachidien était très faible.

« Quoi qu'il en soit, dans des cas semblables aux nôtres, une ponc-

tion unique. pratiquée à la période où la leucocytose consiste en lym-

phocytose, pourrait conduire à faire dépendre de la syphilis une lésion

nerveuse qui n'a aucun lien avec cette infection. C'est là une cause

d'erreur qu'il est bon de connaître et de savoir éviter. »

II. AFFECTIONS DES MUSCLES

MYOPATHIE PRIMITIVE

A. Corrélation entre la prédisposition de certains muscles

à la myopathie et la rapidité de leur développement.

(EN collaboration avec O\1\OIP

Dans ce travail (21) nous rappelons d'abord qu'en ce qui concerne

la localisation de l'amyotrophie, les diverses formes de la myopathie

(la paralysie pscudo-hypertrophique avec ou sans hypertrophie, la

forme infantile de Duchenne, la forme juvénile d'Erb, etc.) ne diffè-

rent les unes des autres que par la prédominance et le début de

l'amyotrophie dans telle ou telle région. Mais quelle que soit la forme

que l'on considère, lorsqu'une région est envahie, ce sont toujours

ou presque toujours les mêmes muscles qui sont atteints et les mêmes

muscles qui sont respectés.

On peut, à ce point de vue, diviser les muscles en trois catégories :

la catégorie des muscles prédisposés à la myopathie, celle des muscles

réfractaires , celle enfin des muscles intermédiaires.

C'est ainsi, par exemple, qu'à l'avant-bras le long supinateur est un

muscle prédisposé, que les fléchisseurs des doigts sont des muscles

réfractaires. et que le rond pronateur et les radiaux sont intermédiai-

res. A la face, l'orbiculairc des yeux cl, l'orbiculairc des lèvres sont

7'1 AFFECTIONS DES MUSCLES

prédisposés, les muscles moteurs du pavillon de l'oreille et les masti-

cateurs sont réfractaires. Aux membres inférieurs, le triceps crural

est prédisposé, le triceps sural est réfractaire.

Nous montrons dans ce travail que l'anatomie de développement

permet de comprendre la prédominance de la myopathie dans certains

muscles. Voici les résultats de cette étude. Quelle que soit la région

que l'on examine, on constate, sur des foetus de cinq mois environ, des

différences histologiques très manifestes entre les divers muscles. Les

muscles prédisposés sont ceux dont le développement est le plus

avancé : dans les fibres qui les composent, la substance striée est très

abondante, les champs de Cohnheim peu apparents, les noyaux rélé-

gués à la périphérie sous le sarcolemme. Dans les muscles réfractai-

res, on observe une disposition inverse : la substance striée est moins

abondante, les champs de Cohnheim très apparents et il existe beau-

coup de noyaux à la partie centrale des fibres. Ainsi, le long supina-

leur, les muscles orbiculaires des lèvres et des yeux, le triceps crural

sont très avancés dans leur développement; au contraire, les flé-

chisseurs des doigts, les masticateurs, les muscles moteurs du pavillon

de l'oreille, le triceps sural sont relativement peu développés.

Ces recherches conduisent donc à établir une loi de corrélation

entre le degré de prédisposition des muscles à la myopathie et le degré

de rapidité de leur développement ; elles montrent qu'il existe pour

le système musculaire, comme pour le système nerveux central.

un lien entre l'anatomie pathologique et l'anatomie de développement.

As,%adouroff, dans une note présentée à la Société de Biologie (séance du

G octobre 18S8) et suggérée, dit l'auteur, par le mémoire de Babinski et Ona-

noff, a exposé les résultats de ses études sur la distribution relative des mus-

cles blancs et des muscles rouges du lapin. Cet auteur, en montrant que les

muscles blancs du lapin adulte correspondent aux muscles les plus avancés dans

leur développement chez l'embryon humain, a corroboré d'une façon indirecte les

conclusions de notre travail.

MYOPATHIE PRIMITIVE 7.'i

B. Excitabilité idio-musculaire et réflexes tendineux dans la

myopathie progressive primitive.

(EN COLLABORATION A\EC .1. J-RKON -1,I)

Nous avons établi que, dans la myopathie progressive primitive,

la diminution ou l'abolition de la contractilité idio-musculaire coïn-

cide avec la subréflectivité ou l'irréflectivité tendineuse, que ces phé-

nomènes sont connexes. qu'ils ont la même origine et que l'abolition

des réflexes tendineux dépend, dans l'espèce, d'une altération propre de

la fibre musculaire.

De plus. nous avons fait remarquer que l'abolition des réflexes ten-

dineux et de l'excitabilité idio-musculaire peut s'observer dans des

groupes musculaires qui ont conservé l'excitabilité volitionnelle et

l'excitabilité électrique. Il est donc permis de dire qu'il y a là une dis-

sociation des divers modes de l'excitabilité musculaire (181).

III. - AFFECTIONS DES NERFS

NÉVRITES

Dans le Traité île Médecine de Charcot-Bouchard j'ai publié un arti-

cle de 200 pages environ sur les Névrites.

C'est la première fois que ce sujet a été exposé d'une manière mé-

thodique ci détaillée dans un ouvrage de pathologie. J'ai dû compul-

ser de nombreux documents, les soumettre à la critique, les coor-

donner et constituer un ensemble avec ces matériaux épars.

Je ne fais que signaler ce travail qui n'est pas, à proprement parler,

une oeuvre originale. Toutefois, je citerai les conclusions du chapitre

« Introduction à l'étude des névrites d'origine interne ». Il contient,

sur les relations entre les lésions de la périphérie et des centres, des

idées qui étaient en partie nouvelles à l'époque où elles furent émises.

« Ce terme, névrite périphérique, ne doit pas impliquer l'idée que

les lésions des nerfs sont primitives, qu'elles sont l'origine de tous

les troubles symptomatiques observés et que le système nerveux

central ne présente aucune modification. Il signifie simplement que

les altérations anatomiques du système nerveux, perceptibles par nos

moyens d'investigation, sont exclusivement localisées dans les nerfs

ou y sont bien plus accusées que dans le système nerveux central. Il y

a tout lieu d'admettre, et ce n'est pas là du reste une simple hypo-

thèse, que bien des agonis qui déterminent des névrites provoquent à

- NÉVRITE SCIATIQUE 71

la lois une perturbation du système nerveux cenlral et du système

nerveux périphérique ; que parfois même ils exercent en même temps,

d'une façon directe, leur action pathogène sur d'autres systèmes ana-

toriques ; que les troubles fonctionnels qu'ils occasionnent sont cau-

sés non seulement par des lésions histologiquement perceptibles mais

aussi par des modifications de nature dynamique ; et qu'en définitive

les lésions des nerfs ne peuvent être considérées comme constituant

tout le substratum anatomique de l'affection, dont elles représentent

seulement les altérations les plus apparentes » (voir à ce sujet

p. 126).

\I ? RT'fl; SCIATIQUE

Scoliose sciatique.

J'ai fait paraître, il y a 25 ans, un travail inspiré par mon maître

Charcot sur la scoliose sciatique (20). J'en ai relaté cinq observations ;

le caractère essentiel de la déformation décrite consiste en une incli-

naison du tronc du côté opposé à la sciatique, sans soulèvement du

pied du côté malade; de là, une attitude toute spéciale qui distingue

cette scoliose des diverses déformations provoquées par d'autres affec-

tions, la coxalgie, par exemple, et qui peut servir, dans un cas dou-

teux, à établir le diagnostic de sciatique.

Celle donnée est devenue classique. Brissaud a appelé ce mode de déformation

« scoliose croisée » par opposition à un autre mode de déformation qu'il a observe

aussi dans la sciatique, « scoliose homologue », où le tronc est incliné du côté ma-

lade.

Abolition du réflexe achilléen dans la sciatique.

Ce signe, objet d'un travail (7)6) publié en 1896, avait été, il est

vrai. mentionné déjà par Slernberg dan- ! deux obsci valions, mais il

76 Affections des neRfS

n'avait pas retenu l'attention des cliniciens qui considéraient le réflexe

achilléen comme inconstant à l'état normal (voir p. 28) ; il n'était pas

signalé dans les traités classiques.

Je l'ai constaté non seulement dans des cas de sciatique intense, avec

amyotrophie notable, correspondant à la forme que l'on désigne sous la

dénomination de sciatique névrite, mais aussi chez des malades atteints

de la forme légère de cette affection, que l'on appelle sciatique névral-

gie, épithète qui n'implique pas, du reste, l'idée que, dans les cas de

ce genre, il n'y ait pas lésion du nerf.

« Ce signe, comme en général tous les signes objectifs, me paraît

avoir une grande valeur diagnostique ; sa présence indique l'existence

d'une altération organique du nerf, et elle suffit pour écarter l'hypo-

thèse de simulation ; elle peut aider à distinguer la sciatique vraie

de la sciatique hystérique qui n'est pas une véritable névralgie,

qui n'a pas le nerf pour siège, mais qui consiste en une douleur

de nature psychique, et dans laquelle, si j'en juge d'après les

faits que j'ai observés jusqu'à présent, le signe en question fait

défaut. »

Cette notion, confirmée d'abord par Janot (Contribution à l'étude de la sciatique

et en particulier des modifications du réflexe du tendon d'Achille. Thèse, Tou-

louse, 1897), puis par Forestier (Le réflexe du tendon d'Achille dans la sciatique.

Soc. médico-chirurgicale, séance du 27 février 18aa), est aujourd'hui admise par

tous les neurologiste".

Radiothérapie.

En igo8, j'ai rapporté l'histoire d'un malade, atteint de spon-

dylose et de douleurs très vives particulièrement sur le trajet des

deux sciatiques, et liant l'état s'est très notablement amélioré à la suite

de la radiothérapie (1/19)- Voici un résumé de cette observation. Depuis

deux ans le malade souffre aux chevilles, aux genoux, aux hanches,

à la région vertébrale et il éprouve des douleurs très vives sur le trajet de

NÉVRITE RADIALE' 19

deux sciatiques ; son tronc est fléchi et sa colonne vertébrale est rigide ;

il ne peut marcher qu'en s'aidant de deux cannes. Aucune médica-

tion ne l'a soulagé. On le soumet à la radiothérapie ; dès la deuxième

séance les douleurs s'atténuent; après la huitième le malade peut

marcher sans canne. L'amélioration s'accentue progressivement ; la

rigidité de la colonne vertébrale subsiste, il est vrai, mais la taille se

redresse, les douleurs sur le trajet des sciatiques disparaissent complète-

ment et, plusieurs mois après le début de la cure, le malade peut fran-

chir sans appui une distance d'un kilomètre.

« Y a-t-il, disais-je, entre la radiothérapie d'une part, la spondylose

et les douleurs névralgiques liées vraisemblablement à cette spondy-

lose, d'autre part, une relation de cause à effet ? Je ne suis pas en

droit de l'affirmer, mais je suis porté à le croire, et j'ai pensé que ce

fait méritait d'être rapporté. »

En avril igi i , j'ai fait paraitre avec Charpentier et Delherm (IJ9)

un travail basé sur quatre observations semblant bien établir que la

radiothérapie a une action curative sur la sciatique accompagnée ou

non de scoliose.

Ces résultats ont été confirmés par d'autres obsenateurs.

Zimmern et Cottenot, dans un article ayant pour titre : « Quelques cas de scia-

tique guéris par la radiothérapie » (Ballet, officiel de la Société française d'Électro-

thérapie el de Radiologie médicale, juin 1012), écrivent :

« Nous rapportons huit observations de sciatique traitée par la radiothérapie

appliquée sur les racines rachidiennes dans la région lombo-sacrée ; les résultats

que nous axons obtenus confirment pleinement les heureux effets de cette théra-

peutique déjà signalés par Babinski et par Freud. Systématiquement, nous ne

nous sommes adressés qu'à des cas gra\es, à des sciatiques névrites, a\cc dispari-

tion ou diminution nette du réflexe achilléen. »

NÉVRITE RADIALE

.l'ai décrit (98) une forme spéciale de névrite radiale caractérisée

par les symptômes suivants : douleurs, qui sans être exclusivement

SO AFFECTIONS DES NERFS

localisées à la partie postérieure du bras, prédominent dans cetle

région ; légère atrophie et diminution de la contractilité électrique du

triceps brachial ; abolition du réflexe du tendon de ce muscle.

Cette affection a été souvent méconnue, sans doute parce qu'ordi-

nairement on néglige de rechercher l'état du réflexe du triceps bi a-

chial, et qu'en présence d'un malade qui se plaint de douleurs au bras

on se contente du diagnostic vague de rhumatisme.

Cette variété de lésion du nerf radial peut être mise en opposition avec

la paralysie radiale par compression qui est très commune et bien

connue. Tandis que dans celle-ci la paralysie siège à l'avant-bras et

se manifeste par une impotence musculaire ne s'accompagnant pas de

douleurs, dans celle-là les troubles occupent le bras, se manifestent

par des douleurs et n'atteignent pas la motilité d'une manière bien

appréciable.

PARALYSIE FACIALE

On admet généralement que, dans les paralysies liées à des lésions

des nerfs moteurs, l'excitabilité électrique de ces nerfs ne peut être

exagérée que pendant les premiers jours qui suivent le début de l'al-

fection.

Exprimée d'une manière aussi absolue, cette opinion est inexacte,

ainsi que le prouvent des faits que j'ai observés (121).

Ces faits établissent qu'une lésion intéressant le nerf facial dans

son trajet ou à son origine peut déterminer, dans sa partie péri-

phérique, une surexcitahililé électrique durable et associée à la

paralysie.

Ils montrent qu'une paralysie faciale n'est pas nécessairement béni-

gne et ne doit pas infailliblement guérir dans un délai de quelques

semaines quand la réaction de dégénérescence fait défaut; ils four-

nissent ainsi une donnée nouvelle d'une certaine importance au point

de vue pratique. -

IIÉMISPASME FACIAL PÉRIPHÉRIQUE 81

HÉMISPASME FACIAL PÉRIPHÉRIQUE

BrissaudetMeigeont cherché à établir qu'il y a lieu de distinguer les

spasmes de la face d'avec les tics, que l'hémispasme facial présente

des caractères cliniques spéciaux que la volonté ne peut reproduire et

qui sont étrangers à la symptomatologie des tics, affection psychique.

J'ai vérifié l'exactitude de ces idées.

De plus, j'ai observé de nouveaux signes (117) appartenant en

propre à l'hémispasme facial et accentuant encore la distinction faite

par Meige et Brissaud ; je vais les indiquer.

Les contractions de l'hémispasme facial sont déformantes. Pour bien

faire comprendre ma pensée, il faut que je précise le sens que, dans

l'espèce, j'attribue à ce mot ; il est évident, en effet, que toute con-

traction musculaire modifie, dans une certaine mesure, la forme de la

région où elle se produit et, si l'on veut, la déforme; mais les défor-

mations produites par des contractions volontaires sont normales, ce

sont des changements de forme plutôt que des déformations ; il me

semble naturel de réserver ce mot à des modifications de forme anor-

males. Or, c'est ce que l'on constate dans l'hémispasme facial ; on

observe une déformation du nez dont la pointe se porte du côté malade

et dont le bord antérieur l'orme une courbure à concavité tournée du

même côté ; outre cette incurvation du nez, on note encore une autre

déformation se produisant pendant le spasme : c'est une fossette irré-

gulière qui apparaît au menton du côté malade (voir fig. 6 et 8).

Ces contractions s'associent les unes aux autres d'une manière con-

tradictoire. On voit, par exemple, le muscle peaucier se contracter en

même temps que la commissure labiale se porte en haut et en arrière,

ou encore on observe une association de ce dernier mouvement à un

mouvement du pavillon de l'oreille en haut et en arrière ; mais l'as-

sociation la plus singulière est la suivante : en même temps que le

1 BABINSKI. 6

82 AFFECTIONS DES NERFS

muscle orbiculaire de l'oeil fonctionne et que l'oeil se ferme, la partie

interne du muscle frontal se contracte et la peau de cette région se

porte de bas en haut ; c'est là une variété de synergie que l'on peut

qualifier de paradoxale (voir fig. 8), car elle est l'opposé des modes

de syncinésie propres aux mouvements normaux qu'elle ne saurait

qu'entraver.

J'ajoute que Y incurvation du ne ? la fossette mentonnière, la synergie

paradoxale peuvent être à l'état normal reproduites avec exactitude

par l'électrisation du nerf facial.

En ce qui concerne le mécanisme de l'hémispasme facial, mon opi-

nion diffère de celle de Brissaud.

Dans ses Leçons sur les maladies nerveuses (1895, p. 206), cet

auteur s'était exprimé ainsi :

« Le spasme facial chez le plus grand nombre des malades a un

point de départ oculaire. La contraction débute par 1 orbiculaire des

paupières, phénomène purement réflexe : la cornée, la sclérotique, la

muqueuse palpébrale reçoivent des fibres sensitives du trijumeau qui

transmettent au noyau de ce nerf les impressions reçues ; celui-ci les

communique à son tour au noyau de la VIle paire qui envoie la

décharge au muscle orbiculaire qu'il commande. Voilà donc l'arc

réflexe établi. On peut admettre, en principe, que toute irritation por-

tant sur un point quelconque de la voie centripète de cet arc pourra

produire un spasme oculaire. »

Voici ce que j'ai écrit :

« J'avoue n'être pas convaincu, tant s'en faut, de la réalité de ce

mécanisme. Il est bien entendu que j'ai ici en vue exclusivement

l'hémispasme facial caractérisé cliniquement par les divers signes que

j'ai cherché à mettre en relief, et qui est marqué par ce trait essentiel

de pouvoir être exactement reproduit par l'électrisation des branches

du nerf facial. Or, à priori, il me paraît déjà difficile d'admettre

qu'une excitation d'un nerf sensitif puisse produire un effet identique

FJG, 6.

Fig. 7

FIG. 8.

FIG. 9.

FIG. 6. Femme atteinte d'hémispasme facial droit. Phase tonique de la crise;

on voit l'incurvation du nez et la fossette mentonnière.

FiG. 7, 8, 9. - Homme atteint d'hémispasme facial gauche.

7. - Etat de repos entre deux crises.

8. Phase clonique de la crise; on constate l'incurvation du nez, la fossette men-

tonnière, le spasme du peaucicr avec déviation de la commissure labiale en haut et en arrière,

l'occlusion de l'oeil associée à une contraction du frontal qui se manifeste par des plis cutanés

à la partie supéro-interne du sourcil gauche.

g. Contraction volontaire du côté droit de la face. On ne trouve sur cette figure

aucun des caractères qui sont relevés sur la fig. 8.

84 AFFECTIONS DES NERFS

à celui qui résulte de l'électrisation d'un nerf moteur ; je ne sache pas

qu'expérimentalement, chez l'animal, on soit en mesure d'obtenir une

pareille réaction. De plus, il ne me semble pas prouvé qu'en pathologie

humaine il y ait des observations établissant ce fait : aussi bien, jusqu'à

présent les neurologistes ne se sont-ils guère attachés à analyser

avec précision les caractères du spasme facial, et il est possible que

les mouvements convulsifs ne soient pas identiques dans l'hémispasme

et dans le tic douloureux; il s'agit peut-être, au moins dans bien des

cas de cette dernière affection, de mouvements d'un tout autre ordre.

« Je ne crois pas non plus qu'une lésion du système nerveux sié-

geantau-dessusdu noyau du facial, telle qu'une lésion corticale, puisse

produire un hémispasme facial identique à celui dont je m'occupe.

« Si les idées que j'expose se confirment, cette notion nouvelle sera

établie que l'hémispasme facial, marqué par les caractères intrinsèques

que j'ai énumérés et analysés, ne peut être engendré que par une per-

turbation directe du nerf facial ou de son noyau d'origine. 11 serait

alors rationnel d'appliquer à cette modalité d'hémispasme facial l'épi-

thète « périphérique » dont on se sert pour désigner la variété d'hémi-

paralysie de la face liée à une lésion de ces mêmes organes. D'ailleurs,

je suis porté à croire qu'il y a une certaine parenté entre la paralysie

faciale périphérique et l'hémispasme facial périphérique, et qu'une

même cause peut, suivant son degré d'intensité, donner naissance à

l'une ou à l'autre de ces affections ; j'ajoute, à l'appui de cette opi-

nion, qu'on peut voir, dans la paralysie faciale périphérique, succéder

à la paralysie musculaire un état spasmodique ayant de grandes ana-

logies avec l'hémispasme primitif. »

Mes observations sur l'hémispasme facial on[ été confirmées par beaucoup de

neurologistes et quelques-uns d'entre eux ont accepté ma manière de oir en ce

qui concerne la pathogénie de cette affection.

Ernest Dupre et JuIcsLomaire, rapportant un fait d'hémispasme facial (Revue

neurologique, mo5, p. 1227), écrivent : « Le spasme offre les caractères cliniques

qui le dillërencienL du tic et des contractures et notamment ceux récemment mis

IIÉIISPAS1E FAC1AL PÉRIPHÉRIQUE 8,'i

en lumière par Meige et Babinski : trémulations fibrillaires, incurvation de la pointe

du nez, élévation du sourcil, synergie paradoxale du frontal el du sourcillier,

fossette mentonnière. »

Abadie et Dupuy-Dulemps (Revue neurologique, tgoG, p. 196) relatent une

observation d' « hémispasme facial guéri par une injection profonde d'alcool ». Les

crises de spasme, disent ces auteurs, présentaient, entre autres symptômes, « les

caractères indiqués par M. Babinski : la déformation (incubation du nez et forma-

tion d'une fossette mentionnière irrégulière du côté malade) et la synergie para-

doxale (contraction de l'orbiculaire et élévation de la partie interne du sourcil)».

Dcleni analyse (Revue neurologique, 1906, p. 10Z12) un travail de C. Negro sur

« l'IIémispasme facial comme équivalent de la paralysie faciale périphérique» »

(Gazella degli Ospedali délie Cliniche, 1906, an. XXYII, n° 108, p. i 139). A pro-

pos de la parenté que Negro cherche à établir entre la paralysie périphérique et

l'hémispasme facial périphélique, Deleni écrit : « Il y a, on le voit, pour MM. Negro

et Babinski, identité d'appréciation des faits. »

Raymond, F. Lévy et Baudouin font une communication ayant pour litre :

«Origine périphérique du spasme facial» (Revue neurologique, 1906, p. 779) et

admettent mon opinion sur l'origine de l'hémispasme. Dans la discussion qui suit

cette présentation, Meige, tout en maintenant quelcs irritations d'origine sensitive

peuvent provoquer cette affection,dit : « \I. Babinski croit que l'hémispasme facial

est toujours d'origine périphérique. C'est l'opinion que Ment de défendre M. Lévy.

Je suis convaincu également que telle est la pathogénie du plus grand nombre

des spasmes de la face... »

Houchaud, de Lille (Revue neurologique, 1908, p. go3), rapporte un cas d'hé-

mispasme facial dans lequel il a constaté tous les signes que j'ai décrits.

Meige, dans un travail intitulé : « Les convulsions de la face. Une forme cli-

nique de convulsion faciale bilatérale et médiane» (Revue neurologique, 1910,

t. XX, p. 438), écrit ceci : « D'autres caractères bien mis en valeur par

M. Babinski facilitent encore la distinction du spasme facial, notamment l'incur-

va/ion du ne : , l'existence d'une fossette mentonnière et parfois des mouvements du

pavillon de l'oreille du côté où siège le spasme ; enfin la contraction simultanée du

muscle frontal et de l'orbiculaire des paupières au moment de l'occlusion des yeux

(synergie paradoxale). »

Jaroszynski (Société de Neurologie et de Psychiatrie de Varsovie, séance du 20

mai 191 1) présente un malade atteint d'hémispasme facial, ayant des contractions

déformantes et de la synergie paradoxale.

André Thomas (Revue neurologique, 191 1, t. XXI, p. 5o8) écrit : « Il n'est pas

douteux que, suivant l'opinion exprimée par M. Babinski, l'hémispasme ne recon-

naisse pour origine une lésion périphérique du nerf facial, sur un point quelconque

de son trajet, depuis son noyau d'origine jusqu'à sa terminaison. »

IV. - AFFECTIONS DE LA MOELLE

PARAPLÉGIE SPASMODIQUE EN FLEXION

Les notions que l'on possédait sur ce sujet étaient rudimentaires

avant la publication de mes travaux. Il y a des ouvrages de neurologie

de date toute récente où il n'est même pas question de cette forme de

paraplégie. Charcot, à propos de la compression lente de la moelle

épinière. la mentionne incidemment. Voici ce qu'il en dit (OEuvres

complètes, Vol. II, p. 126).

« Je me bornerai à vous faire remarquer que l'intensité de la con-

tracture permanente des membres, et surtout de la contracture avec

flexion, est en général plus prononcée dans la myélite par compression

lente que dans la myélite spontanée. Il en est de même de l'exaltation

des propriétés réflexes de la moelle. Il ne faudrait pas néanmoins

chercher dans cette différence, dont la raison, d'ailleurs, nous échappe

entièrement, un caractère diagnostic absolu. »

En rapprochant la paraplégie spasmodique en flexion de la para-

plégie en extension avec contracture, décrite par Erb sous la dénomi-

mation de paraplégie spastique spinale et sous celle de tabes dorsal

spasmodique par Charcot, j'ai fait connaître quelques caractères dis-

tinctifs de ces deux types cliniques. Dans la paraplégie spastique spi-

nale, on constate, comme l'a indiqué Erb, outre la raideur musculaire

déterminant une attitude en extension, une simple parésie, c'est-à-dire

PARAPLÉGIE SPASMODIQUE EN FLEXION 87

un affaiblissement peu prononcé de la motilité volontaire et une exagé-

ration constante des réflexes tendineux avec trépidation épileptoïde du

pied. Ce syndrome constitué par la réunion de trois signes cardinaux

est un « Symptomentrias » disait autrefois Erb ; il l'appelle un « Quar-

tett » depuis que j'ai décrit le phénomène des orteils qui s'associe à

cette triade symptomatique. Ajoutons encore que ce syndrome peut

s'accompagner, d'une manière intermittente, de secousses involontaires

des muscles des membres inférieurs, se répétant avec rapidité, mais

n'ayant pas pour effet de fléchir les segments des membres les uns sur

les autres. De plus, je ferai remarquer que les réflexes de défense,

souvent plus forts, il est vrai, qu'à l'état normal, ne sont pas néces-

sairement exagérés.

Considérons maintenant la paraplégie spasmodique en flexion.

Dans ce type, contrairement à ce qui a lieu dans le précédent, la

motilité volontaire est profondément troublée et chez beaucoup de

malades elle est complètement ou presque complètement abolie.

La contracture en flexion est sujette à des variations fréquentes qui

résultent de contractions intermittentes involontaires, souvent dou-

loureuses, des membres inférieurs. Ces contractions provoquent des

mouvements alternatifs de flexion et d'extension, mais c'est l'action

des fléchisseurs qui prédomine ; il y a du reste des raisons de pen-

ser que c'est pour ce motif due l'attitude en flexion s'accentue progres-

sivement et tend à devenir permanente. Si j'ajoute que ces contractions

sont lentes, on reconnaîtra qu'elles diffèrent totalement des secousses

qui peuvent agiter les muscles dans le tabes dorsal spasmodique.

Dans la plupart des cas, on constate, au moins à une certaine

période, de la surréflectivité tendineuse, mais celle-ci n'est pas

constante ; elle peut faire défaut depuis le début jusqu'àla fin. Parfois

même les réflexes tendineux sont très affaiblis ou abolis. Les réflexes

cutanés de défense sont, au contraire, toujours exagérés et c'est peut-être

là le caractère le plus essentiel de cette forme de paraplégie. Le lien

qui unit ces deux phénomènes est comparable à celui qui rattache

88 AFFECTIONS DE LA MOELLE

l'exagération des réflexes tendineux à la paraplégie spastique spinale.

C'est un point que j'ai déjà cherché à mettre en évidence dans le chapitre

« Contracture » (p. 65) et sur lequel je n'ai plus besoin d'insister.

La paraplégie spasmodique en flexion, ordinairement précédée par

de la paraplégie en extension, dépend comme celle-ci de lésions

du système nerveux central intéressant le système pyramidal, ce que

démontre du reste pendant la vie la présence habituelle du phénomène

des orteils.

Déterminée le plus souvent soit par une sclérose spinale diffuse,

soit par une compression de la moelle ou du bulbe, elle semble liée,

particulièrement quand la contracture en flexion est très prononcée, à

une lésion non destructive de la voie pyramidale. Dès mon premier

travail sur cette question (51) j'ai montré que les dégénérations

secondaires peuvent manquer ou être très légères.

En résumé, la paraplégie spasmodique en flexion, dont j'ai tracé

les principaux caractères, sans représenter une espèce nosologiquc

puisqu'elle peut être liée à des processus anatomiques variés, constitue

un type clinique qu'il est permis d'opposer à la paraplégie spastique

spinale.

J'ai fait remarduer-c'est là un point de terminologie d'une impor-

tance secondaire, mais ayant toutefois un cerlain intérêt - que l'épi-

thète « spasmodique » ne convient guère à la paraplégie du « tabes

dorsal spasmodique » où la contracture a une stabilité relative, car

le mot spasme a été appliqué à des affections telles que le torticolis

dit mental où la raideur musculaire est instable. Le qualificatif « spas-

modique » s'adapte au contraire bien mieux à la paraplégie en flexion,

dans laquelle, comme on l'a vu, la raideur est sujette à des variations

fréquentes résultant de contractions intermittentes, involontaires.

Depuis ma deuxième publication sur ce sujet (177), plusieurs travaux confir-

matifs ont paru.

Souques, dans la séance du 12 janvier igi2 de la Société de Neurologie

(Revue neurologique, igii, p. 13G), a fait les rcmaïques suivantes :

TABES 89

« J'ai eu l'occasion de voir deux malades atteints de paraplégie spasmodique en

flexion, qui pourraient bien appartenir au type clinique que vient de signaler

M. Babinski.

« Je ne saurais dire s'ils présentaient la dissociation des réflexes caractérisée par

l'exaltation des cutanés et la diminution des tendineux. Je puis dire simplement

que les réflexes tendineux n'étaient pas exagérés et qu'ils paraissaient même affai-

blis. »

Dans la séance du 6 mars (Revue neurologique, tg t t, p. 376), Souques rapporte

un cas nouveau dans une communication ayant pour titre : « Paraplégie spasmo-

dique organique, avec contracture en flexion et exagération des réflexes cutanés de

défense. »

Claude (Sur la paraplégie avec contracture en flexion. Revue neurologique, 191 1 ,

p. a4g) rappelle un fait anatomo-clinique qu'il a observé, rentrant dans le type

que j'ai décrit. L'auteur attire l'attention sur ce point que les faisceaux pyramidaux

dans la région dorsale ne sont que légèrement atteints.

G. EtienneetE. Gelma (Nouvelle Iconographie de la Salpétrière, n° 5, septembre-

octobre 1911) rapportent sous le titre « Paraplégie spastique spinale en flexion »

une observation qui, disent-ils, « est un type de paraplégie avec contracture en

flexion tel qu'il a été décrit par Babinski».

C. Lian et J. Rolland relatent un fait du même ordre dans un travail inti-

tulé : « Paraplégie spasmodique avec contracture en flexion (type cutanéo-réflexe

de Babinski) dans un mal de Pott » (Revue neurologique, 1 1 t. I, p. 843).

Klippel etllonier-Vinard (Revue neurologique, 1912, t. II, p. 13g) publient une

observation analogue aux miennes, comme le titre seul l'indique : « Paraplégie

avec contracture en flexion et exaltation des réflexes de défense. »

Coyon et Barré présentent un nouveau cas (Société de Neurologie, 5 déc. 1912)

sous le titre « Paraplégie « type Babinski » au cours de la maladie de Reckling-

hausen». La paraplégie en flexion avec réflexes tendineux très faibles avait fait

suite à une paraplégie spasmodique classique. - L'autopsie montra qu'il y avait

compression très légère de la moelle par un névrome, et l'examen des coupes per-

mit de constater l'extrême légèreté des lésions médullaires.

TABES

Anatomie pathologique.

Je signale une étude anatomique faite en collaboration avec

Nageotte et intitulée : « Note sur un cas de tabes à systématisation

exceptionnelle » (120).

90 AFFECTIONS DE LA MOELLE

Dans le fait que nous avons rapporté, la topographie des lésions

était exactement l'inverse de celle qu'on observe habituellement : les

lésions radiculaires frappaient les voies longues de préférence aux

voies courtes, contrairement à ce qui se passe dans l'immense majo-

rité des cas. Quelle est la raison de cette anomalie ? Est-elle la consé-

quence d'une disposition individuelle en vertu de laquelle les fibres de

la zone radiculaire moyenne ont été moins sensibles que d'ordinaire à

l'action du poison syphilitique ; ou bien résulte-t-elle de ce que le virus a

présenté des qualités spéciales qui l'ont rendu plus nocif pour la zone

radiculaire postérieure, par suite de propriétés électives anormales P

C'est une question que nous n'avons pu résoudre. Il semble que celte

systématisation, exceptionnelle dans le tabes, soit plus fréquente

dans les lésions dues à la pellagre, si l'on s'en rapporte aux figures

de Tuczek.

Etudes cliniques.

, A. Réflexe achilléen. '

L'abolition du réflexe achilléen avait été notée autrefois déjà dans

quelques observations de tabes, mais on n'y avait pas attaché de

valeur parce que l'on considérait l'absence de ce réflexe comme assez

commune à l'état normal. Dans les traites classiques de pathologie, il

n'était question, en ce qui concerne l'irréllectivilc tendineuse, que de

l'abolition du réflexe rotulien. Or, m'étant assuré que le réflexe achil-

léen est pour ainsi dire constant chez l'individu sain, j'ai pu tirer

parti de son absence et montrer qu'il s'agit là d'un trouble très fré-

quent dans le tabes (50,78). J'ai même établi que dans la hiérarchie des

irréflectivitcs tendineuses, le signe de Weslphal n'occupe pas le premier

rang qui est tenu par l'abolition du réflexe achilléen. Ce symptôme

précède généralement l'abolition du réflexe rotulien et il a une valeur

prépondérante pour le diagnostic du tabès à son début ; cela se conçoit

TABES 91

d'ailleurs quand on sait que les lésions tabétiques suivent d'habitude

une marche ascendante et débutent par les racines les plus infé-

rieures.

On observe aussi, comme je l'ai indiqué, une abolition croisée

des deux réflexes rotulien et achilléen : il n'est pas rare de trouver

d'un côté le réflexe achilléen aboli et le réflexe rotulien conservé,

tandis qu'inversement de l'autre côté le réflexe achilléen existe et le

réflexe rotulien est aboli.

Les résultats de mes travaux ne tardèrent pas à être vérifiés et parmi les pre-

mières publications sur ce sujet, consécutives aux miennes, je mentionnerai celles

de Charles K. Mills (Some points of special interest in the study of the deep réflexes

of the lower extremities. foiirizal of nervous and mental diseases, 18gg, March), de

Van Gehuchten (Un cas de tabes incipiens avec exagération des réflexes rotuliens

et abolition du réflexe du tendon d'Achille des deux côtés. Journal de Neurologie,

1899, p. 85), de Max Biro (Ueber Stbrungen des Achillessehnenreflexes bei Tabes

und Ischias. Dellische Zeilschrift f. Neruenheilkunde, 1901, p. 168), de Schônborn

(Bemerkungen Zur klinischen Beobachtung der Haut-und Sehnenreflexe der unte-

ren Kôrperhâlfte. Deutsche Zeitschrift f Neruenheilkunde, 1902, xxt).

Au début cependant, quelques neurologistes n'admirent mon opinion qu'en

partie. C'est ainsi que Dejerine, dans son article sur la « Sémiologie du système

nerveux» (Traité de Pathologie générale, publié par Ch. Bouchard, 1901, p. 1002)

écrit : « L'abolition du réflexe du tendon d'Achille est également très précoce dans

le tabes (Babinski). Il n'est pas prouvé cependant qu'elle précède d'ordinaire

celle du réflexe patellaire. »

D'autres, au contraire, acceptèrent sans restriction ma manière de voir. Goldflam,

dans un article intitulé « Ueber das Erstsymptom und die Bedeutun, der Achi-

lessehnenreflexe bei Tabes (Neurologisches Cenlralblatt, 1902, p. 92), écrit : « On

peut conclure avec Babinski que dans le tabes le réflexe achilléen est troublé plus

souvent que le réflexe du genou et généralement avant que celui-ci ne le soit.

Les perturbations du réflexe achilléen constituent donc un signe de grande valeur

et pement contribuer à reconnaître le tabes dans sa phase initiale, encore avant

l'apparition du signe de Westphal. »

A. F. Hertz et W. Johnson, dans un mémoire ayant pour titre : « The Tendo-

Achillis-Jerks » (Gfty's lloshilal Reports, vol. LXV, pp. 48 et Cig) fournissent une

statistique concluante. Ils ont eu l'occasion d'observer dans le Neurological Oul-

Patient Département, du 20 avril 1910 au 19 juillet igi 36 cas de tabès. Ils ont

constaté l'abolition bilatérale du réflexe achilléen chez tous ces malades, sauf dans

92 AFFECTIONS DU LA MOELLE

un cas où le trouble n'était qu'unilatéral. Or, dans 8 de ces observations, le

réflexe rotulien existait des deux côtés.

Il serait inutile de multiplier les citations. Mes idées sont admises maintenant

sans réserves, tant en France qu'à l'étranger; elles constituent une notion clas-

sique.

B. Réflexes tendineux des membres supérieurs.

L'état de ces réflexes, dans le tabes, a été l'objet d'un travail de

Fraenkel (Revue neurologique, i go i, p. 245). D'après cet auteur, leur

abolition précéderait habituellement l'irrélleclibilité des membres

inférieurs et constituerait un signe précoce de tabès. J'ai mon-

tré que cette allégation est inexacte. L'erreur a probablement pour

cause des fautes de technique dans l'exploration des réflexes des

membres thoraciques. En les recherchant suivant les procédés que

j'ai indiqués (p. 29), on constate dans un grand nombre de cas

leur présence, alors que les réflexes des membres pelviens sont

déjà abolis : le fait inverse est excessivement rare. Il n'en est

pas moins vrai qu'à une certaine phase de la maladie les réflexes

des membres supérieurs s'affaiblissent et disparaissent à leur tour

chez beaucoup de sujets. Ordinairement, ainsi que,je l'ai fait ressortir,

les troubles suivent une marche ascendante, le réflexe d'extension

de l'avant-bras étant le plus souvent atteint avant le réflexe de flexion.

En pareil cas, la percussion du tendon du triceps brachial provoque

généralement ce que j'ai appelé « le réflexe paradoxal du coude »

(p. 34).

C. - Du champ visuel et de la vision centrale dans l'atrophie

tabétique des nerfs optiques.

J'ai fait avec J. Chaillous une étude sur ce sujet (i32). En voici

les conclusions :

TABES 93

« i° Il n'existe pas, dans l'atrophie tabétique du nerf optique, une

forme de rétrécissement du champ visuel particulière à cette affection.

« 2° Dans la grande majorité des cas, le champ visuel pour le blanc

est irrégulièrement rétréci et l'affaiblissement de la vision va de pair

avec la limitation du champ visuel.

« 3" On observe aussi des cas où le rétrécissement concentrique

s'accompagne d'une bonne acuité visuelle et parfois d'une conserva-

tion parfaite de la vision centrale.

« Il' Le scotome central est très rare dans l'atrophie tabétique. Quand

il existe, il est dù le plus souvent à une lésion surajoutée. Dans la

majorité des cas, il s'agit d'une névrite rétrobulbaire consécutive à

l'intoxication alcoolique et nicotinique. Par suite delà disparition pro-

gressive d'un secteur du champ visuel, la vision centrale peut être

abolie, tandis que persiste une grande partie du champ visuel péri-

phérique. Il s'agit là d'un pseudo-scotome central qu'il ne faut pas

confondre avec un scotome central vrai. »

D. Cytodiagnostic.

La cytologie du liquide céphalo-rachidien dans le tabes et la para-

lysie générale a été l'objet d'une étude faite en collaboration avec

Nageotte. Nous avons été les premiers à confirmer les résultats aux-

quels étaient arrivés Widal, Sicard et Ravaut, et nous y avons ajouté

quelques données nouvelles. J'ai déjà eu l'occasion de traiter ailleurs

cette question (p. 69) sur laquelle je ne crois pas devoir insister ici.

E. Ostéopathies, Arthropathies tabétiques.

Autrefois déjà on avait émis l'idée que les ostéopathies et les arthro-

pathies qu'on observe chez les tabétiques ne sont pas nécessairement

des troubles trophiques liés aux altérations nerveuses du tabès, mais

94 AFFECTIONS DE LA MOELLE

cette conception, énoncée d'ailleurs avec beaucoup de réserves, avait

été presque unanimement écartée. Il m'a semblé, au contraire, qu'elle

devait être prise en sérieuse considération. J'ai attiré l'attention sur ce

point à l'occasion de la présentation d'un malade atteint de tabes

fruste avec arthropathie (Société de Neurologie, séance du 6 mai i gog).

« Les signes objectifs du tabes, disais-je, sont ici réduits au

minimum, puisque, outre la lymphocytose, on ne constate qu'une

abolition des réflexes achilléens. J'avoue que j'ai quelque peine

à admettre que 1 arthropathie de ce malade, qui pourtant présente

tous les caractères appartenant aux lésions articulaires de l'ataxie,

soit un trouble trophique dépendant des altérations nerveuses

du tabes. N'est-elle pas le résultat d'une action directe du virus syphi-

litique sur les extrémités osseuses ? a »

Je citais aussi l'observation d'un sujet syphilitique chez qui s'était

produite une fracture de l'extrémité inférieure du fémur droit ayant

tous les caractères des fractures tabétiques : elle s'était faite pour ainsi

dire spontanément sans du'il y eut de traumatisme, avait été presque

indolore et s'était consolidée avec un cal énorme. Or, chez ce malade,

sujet il est vrai à quelques douleurs lancinantes, il n'existait aucun

signe objectif de tabes et le liquide céphalo-rachidien examiné très

soigneusement au point de vue cytologique s'était montré normal.

Sans contester les relations étroites unissant les ostéopathies et les

arthropathies dites « tabétiques » avec le tabes, je disais qu'il ne me

paraissait pas prouvé qu'elles fussent sous la dépendance de lésions

du système nerveux. Il y a peut-être là un rapport analogue à celui

qui existe entre l'aortite et le tabes. Cette idée n'a d'ailleurs été énon-

cée par moi qu'à titre d'hypothèse méritant d'être contrôlée.

Un de mes élèves, Barré, a fait un travail important sur ce sujet

(Les osléo-arthropalhies du tabes. Étude critique et conception nou-

velle. Thèse, Paris, 1912). Une des conclusions de son étude est

« qu'il existerait des cas assez nombreux d'arthropathies à type tabé-

tique en l'absence de tout signe de tabes, chez des syphilitiques».

TABES ! J1)

La question que j'ai posée n'est pas encore définitivement résolue ;

elle nécessite de nouvelles investigations.

F. Crises gastriques tabétiques.

Les crises gastriques du tabes ont-elles des caractères intrinsèques

permettant d'en établir le diagnostic, abstraction faite des signes con-

comitants qui décèlent l'existence de lésions radiculaires ? On peut

en douter, comme je l'ai fait remarquer. Dans une discussion sur

cette question à la Société de Neurologie (Séance du 3o décembre 1911),

j'ai dit ceci : « J'ai eu l'occasion d'observer une femme qui depuis

. longtemps était sujette à des accès de douleurs gastriques très

violentes accompagnées de vomissements ; pendant la crise qui durait

de 24 à 4s heures, toute ingestion d'aliments étaitimpossible en raison

de l'intolérance de l'estomac et, après la crise, les fonctions gastriques

redevenaient immédiatement normales. Je croyais bien, d'apiès la

description qui m'était tracée, avoir affaire à une crise gastrique tabé-

tique ; mais je ne trouvais chez cette femme aucun autre signe de

tabes ; elle m'affirmait n'avoir jamais eu la syphilis : enfin, la recherche

de la réaction de `Vassermann dans le sang et dans le liquide céphalo-

rachidien donna un résultat négatif, et il en fut de même du cyto-

diagnostic ; j'ajoute qu'à la suite d'un traitement par le sous-nitrate de

bismuth les troubles disparurent. Il est infiniment probable que, malgré

1 identité apparente de ces crises avec les crises tabétiques, le tabes

n'était pas en cause. »

Ultérieurement, j'ai relaté avec St. Chauvet et G. Durand un fait ana-

logue (202). Le malade, qui ne présentait d'ailleurs aucun signe de tabes,

était depuis six ans sujet à des crises gastriques identiques au point de

vue symptomatique à celles du tabes. Elles étaient séparées par des

intervalles de santé parfaite (pas de douleurs, pas de troubles dyspepti-

ques) et, à aucun moment, le malade n'avait eu d'hématémèse ou de

96 AFFECTIONS DE LA MOELLE

mélaena. Le malade étant mort de granulie, l'examen anatomique

décela l'existence d'un petit ulcus juxta-pylorique.

Duhot et Leroy (Société de médecine du département du Nord, 25 avril igi3,

in Semaine médicale, p. 5Go) ont relaté, en le rapprochant de la dernière observa-

tion que j'ai rapportée, un cas de « crises gastriques tabétiformes au cours d'un

ulco-cancer de la petite courbure ». J'extrais ce passage : « Les crises commencent

subitement et finissent de même ; le malade se sent subitement soulagé et reprend

sa respiration normale. Les accès se produisent aussi bien à jeun qu'à la fin des

repas. Il y a intolérance absolue au moment des crises et le malade fait des efforts

de vomissements à vide. Entre les accès, au contraire, le malade absorbe sans au-

cun malaise les mets les plus indigestes. »

G. Tabes conjugal et tabes hérédo-syphilitique.

Tabes et syphilis.

On considérait autrefois le tabes conjugal comme une rareté. Cela

tenait, d'une part, à l'absence de recherches systématiques sur ce point,

d'autre part, à ce que les formes frustes du tabes, dont mes études

sémiologiques ont contribué à faciliter le diagnostic, étaient souvent

méconnues jadis. Depuis longtemps j'ai pris l'habitude, quand je suis

consulté par un tabétique, de demander à examiner son conjoint,

celui-ci affirmerait-il n'éprouver aucun malaise. En procédant ainsi,

je me suis assuré que le tabes conjugal est chose fréquente (58). A la

même série de faits appartiennent, d'ailleurs, ceux où l'un des con-

joints étant tabétique, l'autre est atteint de paralysie générale. Afin

de réunir ces deux modes d'association morbide sous un même titre,

on peut se servir de l'expression plus compréhensive de « méningite

syphilitique conjugale ».

J'ai soutenu aussi que le tabès hérédo-syphilitique, qui paraissait

exceptionnel sans doute pour des raisons semblables à celles que je

viens de donner au sujet du tabes conjugal, est plus commun qu'on

ne le pensait généralement (83).

TABES 97

Du même ordre d'idées font partie mes recherches, en collaboration

avec Barré, sur la syphilis familiale (172). En voici le point de

départ : « Si l'on considère que la méningite chronique syphilitique

est rare par rapport à la fréquence de la syphilis, il y a tout lieu de penser

que les cas de méningite chronique spécifique conjugale sont excep-

tionnels relativement au nombre de cas de syphilis conjugale. Or

puisque, d'une façon absolue, la méningite chronique conjugale n'est

pas une rareté, il est permis de supposer que la syphilis conjugale est

chose assez commune. C'est au moins une hypothèse qu'il était légi-

time d'émettre et qu'on peut contrôler aujourd'hui bien plus aisément

qu'autrefois, grâce à la méthode de Wassermann. » Dans la plupart

des faits que nous avons rapportés, il s'agit de conjoints dont l'un est

atteint de tabes ou de paralysie générale et dont l'autre, ne présentant

aucun signe objectif d'affection organique, aucune manifestation de

syphilis, a, dans le sang, des anticorps dont une réaction de Wasser-

mann positive décèle l'existence. Nous avons relaté aussi des cas où

cette même réaction s'observe chez un enfant en apparence d'une

parfaite santé, mais issu d'un père ou d'une mère tabétique.

Demanche et Detré (Tribune médicale, 9 juillet 1910), poursui-

vant les mêmes recherches dans les services de Queyrat et de Dufour,

ont fait des constatations semblables aux nôtres. Dans il\ familles

où les parents étaient certainement syphilitiques, ils ont trouvé, chez

des enfants en apparence absolument sains, 8 fois la réaction de

Wassermann positive, et 6 fois cette réaction négative.

Mes observations surlaméningite syphilitique conjugale et la ménin-

gite syphilitique familiale, jointes à mes études sur l'abolition du

réflexe à la lumière (p. 58) et à des considérations diverses, relatives

à l'association non exceptionnelle de tabès et de lésions syphilitiques

(63), à l'impossibilité de trouver un fait avéré de chancre syphilitique

se développant chez un tabétique, etc., m'ont conduit depuis long-

temps à être de ceux leur nombre était autrefois très faible qui

soutenaient que la syphilis est vraisemblablement une condition sine

l3auwssi. 7

98 - AFFECTIONS DE LA MOELLE

quâ non du tabes. Aujourd'hui, c'est une notion banale. En effet, les

idées de Fournier sur les liens qui unissent le tabes et la paralysie

générale à la syphilis ne sont plus contestées par personne; les restric-

tions qu'il avait faites, très légitimes du reste au début, ne semblent

même plus justifiées, et l'on n'en doit attacher que plus d'importance

à l'oeuvre du grand syphiligraphe français.

H. Évolution. Pronostic. Traitement.

Depuis une dizaine d'années, les neurologistes ont été frappés par

l'atténuation apparente de la gravité du tabes. A l'occasion d'une

communication de Brissaud sur ce sujet, à la Société de Neurologie,

je fus amené à exposer les résultats de mes observations :

« Je considère aussi le labes, ai-je dit, comme une affection moins

grave qu'on ne le pensait autrefois. Il est juste pourtant de rappeler

que Charcot, il y a longtemps, a attiré l'attention sur la bénignité de

certaines formes de cette maladie, et moi-même, il y a déjà quinze ans,

j'ai communiqué une note sur ce sujet à la Société de Biologie (18).

Mais, ce qui semblait alors une exception me paraît aujourd'hui chose

assez commune. Je connais des malades présentant des signes carac-

téristiques de tabes, dont l'état est à peu près stationnaire depuis des

années ou s'est même amélioré, et qui n'ont jamais cessé de mener

une existence active ; ce sont, pour une part, des médecins, des

officiers, des hommes d'affaires astreints à une vie fatigante.

« Il y a lieu de se demander si le tabes est devenu réellement une

affection moins grave et, dans ce cas, de rechercher la cause qui en

a atténué la gravité, ou bien si cette bénignité n'est que relative et ne

lient pas seulement à ce que nous savons mieux reconnaître mainte-

nant les formes frustes du tabes.

« Selon moi, il y a une part de vérité dans chacune de ces deux

hypothèses.

TABES S M

« Notre attention est dirigée, plus que par le passé, sur les formes

atténuées ; en outre, la sémiologie a incontestablement fait des progrès

et nous dépistons la maladie, non seulement dans des cas où l'on en

attribuait les symptômes à toute autre cause qu'à une lésion nerveuse,

mais même chez des gens qui ne s'imaginaient pas être malades.

« Les formes frustes du tabes sont certainement bien plus communes

que les formes graves. Ainsi que je l'ai dit au dernier Congrès de Neu-

rologie (Congrès de Médecine de i goo, Section de Neurologie.

Comptes rendus, p. zo4, je vois chaque année dans mon service, à

l'Hôpital de la Pitié : de 200 à 3oo tabétiques et sur ce nombre il n'y a

pas plus d'une vingtaine de sujets franchement ataxiques. La maladie

de Duchenne, étant décelée mieux qu'autrefois dans ses formes atté-

nuées, doit sembler relativement moins grave.

« Mais, de plus, je crois que le traitement anti-syphilitique, que l'on

fait suivre généralement aux tabétiques depuis que l'idée d'une rela-

tion étroite entre le tabes et la syphilis s'est imposée à la plupart des

esprits, a réellement diminué le nombre des cas graves. Je sais fort

bien, et je l'ai moi-même fait remarquer, qu'il est très difficile, pour

plusieurs raisons, d'apprécier dans chaque cas pris en particulier la

valeur du traitement mis en oeuvre ; je n'ignore pas que le tabes peut

rester indéfiniment bénin en l'absence de tout traitement, comme aussi

devenir des plus graves malgré la médication anti-syphilitique la plus

active, si bien qu'en choisissant les cas, on pourrait presque soutenir,

comme on l'a fait du reste, que la cure mercurielle, loin d'atténuer le

mal, l'aggrave. Pour se former à cet égard une opinion fondée, il est

indispensable d'avoir observé un très grand nombre de faits et de com-

parer en bloc les tabétiques qui se sont abstenus de tout traitement

hydrargyrique à ceux qui en ont fait usage. Or, en procédant ainsi, je

suis arrivé à cette conviction que la cure antisyphilitique et plus par-

ticulièrement la cure mercurielle longtemps poursuivie est efficace,

que, pour le moins, elle enraye dans une certaine mesure l'évolution

du tabes. »

100 AFFECTIONS DE LA MOELLE

J'ai été, je le rappelle, un des premiers le premier en France, je

crois à préconiser contre le tabes le traitement hydrargyrique

aussi prolongé que possible.

Ma manière de voir, combattue autrefois par la plupart des méde-

cins, est actuellement admise par la majorité d'entre eux.

Maurice Faure, de Lamalou, dans un article intitulé : « Opinions sur le traite-

ment mercuriel du tabes » (Bulletins el Mémoires de la Société de médecine de

Paris, séances du 25 janvier et du 14 février igo8), exposant l'historique de la ques-

tion, après avoir rappelé l'opposilion faite au traitement hydargyrique dans le

tabes, écrit : « Un seul neurologiste français, Babinski, est d'un avis tout à fait

opposé. Avant que Leredde ait formulé l'opinion qui a eu tant de retentissement,

il pratiquait le traitement mercuriel des tabétiques et affirmait en avoir de bons

résultats.

« Malgré cette presque unanimité des principaux neurologistes contre l'opinion

admise par Babinski, Leredde, Lemoine, c'est cette opinion qui a prévalu, c'est

elle qui d'année en année a gagné du terrain au point que, actuellement, on ne

voit pour ainsi dire plus un tabétique qui ne fasse un traitement mercuriel mé-

thodique. »

DES PSEUDO-TABES

A. Sur une forme de pseudo-tabes (Névrite optique rétro-

bulbaire infectieuse et troubles dans les réflexes tendineux).

Ce travail est fondé sur l'observation d'une malade atteinte de trou-

bles oculaires se manifestant en partie par une décoloration des papil-

les semblable à celle qu'on voit dans le tabes, par une perturbation

des réflexes pupillaires, par une abolition unilatérale du réflexe acliil-

léen et une abolition bilatérale du réflexe rotulien. La distinction

d'avec le vrai tabes peut être établie au moyen des caractères suivants.

i° Tandis que dans les troubles pupillaires propres au tabes, quand

ils sont unilatéraux, le réflexe direct et le réflexe consensuel sont abo-

lis du même côté, cliez la malade dont il s'agit, d'un côté, le réflexe

SCLÉROSE EN PLAQUES 101

direct étant aboli le réflexe consensuel est conservé, de l'autre côté,

c'est la disposition inverse qu'on observe. 2° On constate, ce qui n'a

jamais été noté dans l'atrophie tabétique du nerf optique, une acuité

visuelle normale et une absence de dyschromatopsie contrastant avec

l'existence d'une sclérose papillaire. 3° Enfin, l'évolution de l'affection,

l'atténuation notable des troubles visuels sont en opposition avec le

diagnostic de tabes.

Ce fait se distingue du pseudo-tabes alcoolique où on ne voit guère

une décoloration papillaire coïncider avec une acuité normale, où il

a un scotome central avec une dyschromatopsie semblable à celle du

tabcs. et où les troubles oculaires sont bilatéraux et symétriques (62).

B. Pseudo-tabes spondylosique.

J'ai observé plusieurs faits paraissant montrer que la spondylose

peut provoquer dcs douleurs lancinantes, abolir les réflexes tendineux

et réaliser ainsi un tableau symptomatique ayant des ressemblances

avec celui du tabes. Il est vraisemblable que ces troubles sont sous

la dépendance d'une lésion des nerfs causée par l'inflammation verté-

brale au niveau des trous de conjugaison. Il m'a paru légitime d'appli-

quer aux faits de ce genre la dénomination de « pseudo-tabes spon-

dylosique » (96).

J'ai déjà eu l'occasion de dire (p. 78) que, dans un cas de spon-

dylose accompagnée de douleurs névralgiques, j'ai constaté une très

notable atténuation de tous les symptômes à la suite de pratiques

radiothérapiques .

SCLÉROSE EN PLAQUES

Les études anatomiques et cliniques sur la sclérose en plaques, qui

ont fait l'objet de ma Thèse de Doctoral, m'ont conduit à soumettre

102 AFFECTIONS DE LA MOELLE

à la critique certains points controversés et à observer quelques faits

FIG. IO.

\ et B. - Tubes à myéline nor-

maux de la moelle Lis sur une

coupe longitudinale. a. Cy-

lindre-axe. b. Gaine de myé-

line. a'. Cylindre-axe dénudé

par suite d'une cassure de la

gaine de myéline.

C. Sclérose en plaques. Tube à

myéline altéré vu sur une coupe

longitudinale.- a. Cylindre-a\e.

ce. Cellules qui entourent le

cylindre-axe. d. Noyau de ces

cellules. e. Protoplasma de

ces cellules. /. Boules de

myéline.

Grossissement de i 000 diamètres.

nouveaux (i3).

A. Dans mes investigations histolo-

giques, j'ai fait usage de la méthode de

Weigcrt. J'ai cherché à déterminer la

nature du processus qui aboutit à la dispa-

rition des gaines de myéline. Voici un

passage de ma thèse relatif à cette ques-

tion :

« Sur une coupe longitudinale passant

par une plaque de sclérose, on peut voir

dans les points de transition, entre les

parties saines et les parties malades, des

granulations noirâtres disposées sous

forme de boyaux longitudinaux faisant

suite aux tubes nerveux normaux et

paraissant des tubes en voie de destruc-

tion. Ce sont ces points de transition qu'il

faut examiner à de forts grossissements

pour constater la nature des lésions. On

voit alors, lorsque la coupe a été traitée

par le procédé de 'Yeigert et colorée par

l'liématoxyline de Ranvicr (voir fig. 10),

des tubes nerveux en voie d'altération

différant complètement des tubes nor-

maux ; les gaines de myéline ont disparu,

les c lindres-axes subsistent et tout autour

d'eux sont groupées de grosses cellules

accolées les unes aux autres ; ces cellules

présentent un gros noyau avec nucléole

et leur protoplasma est rempli de gouttelettes do volume variable,

d'une couleur noirâtre, qui ne sont autre chose, comme leur réaction

SCLÉROSE EN PLAOUES

103

l'indique. que des fragments de myéline. Au premier abord ces

gouttelettes ressemblent aux noyaux, mais, pour peu qu'on y prête

attention, on voit que la couleur n'est pas la même,

que le contour des noyaux est plus régulier, enfin

que ceux-ci présentent un nucléole dans leur intérieur

et que, par conséquent, la distinction entre ces deux

éléments est facile à faire. On trouve par places des

tubes qu'on peut suivre sur une assez grande lon-

gueur et qui, normaux d'un côté, sont de l'autre en

voie d'altération. On peut voir ainsi un même cylin-

dre-axe entouré dans une partie de son parcours d'une

gaine de myéline et en d'autres parties de cellules

chargées de gouttes de myéline (voir fig. Il).

« On voit nettement que la disparition des gaines

do myéline coïncide avec l'apparition des cellules

chargées de myéline, que ces deux phénomènes sont

connexes et que la destruction des gaines résulte de

l'absorption de la myéline par le protoplasma de ces

cellules. Ce sont ces cellules remplies de myéline

que Hibbert a décrites, mais cet auteur n'a pas mon-

tré le lien véritable qui existe entre leur présence et la

destruction des gaines.

« Quelle est la provenance de ces cellules ? Se déve-

loppent-elles au dépens du protoplasma myélinique ?

Sont-elles des cellules de la névroglie en voie de

multiplication ou bien des cellules migralrices ? On

peut admettre qu'elles ont à la fois ces trois origines.

« Mais l'activité du protoplasma myélinique qui

joue le rôle essentiel dans la destruction de la myéline

Inc. Il. - Sclé-

rose en plaques.

Tube à myéline

qui, normal

d'un cùté, est en

Noie d'altération

du cùté opposé.

- a, 6, c, d, e, f,

comme sur la li-

gure précédente.

ce . Cellules

sans myéline.

dans le bout périphérique d'un nerf sectionné, en admettant qu'elle

intervienne ici, ne paraît être qu'accessoire. Les cellules de la névro-

glie et les cellules migratrices jouent vraisemblablement ici un rôle

104 AFFECTIONS DE LA MOELLE

prépondérant. Il est à remarquer que la fragmentation de la gaine de

myéline ne se présente pas sous le même aspect que dans le bout péri-

phérique d'un nerf sectionné. Elle ressemble bien plus à celle qu'on

peut observer dans le bout central du nerf au voisinage de la section. »

Comme on le voit, le problème de l'origine des corps granuleux,

phagocytes de la moelle, qui d'ailleurs n'est pas encore résolu, a été

posé ici avec netteté.

B. J'ai été amené à discuter, à propos de la sclérose en plaques,

la question controversée de la régénération des tubes nerveux de la

moelle.

« La régénération des tubes nerveux de la moelle chez l'homme,

disais-je, est encore loin d'être démontrée. Il nous paraît, certes,

très vraisemblable que, lorsque les cylindres-axes sont interrompus

sur un point de leur parcours, la portion de ces filaments qui reste

fixée à leur centre trophique bourgeonne et tend à la régénération de

la même façon que dans les nerfs périphériques. Ce qui nous paraît

douteux, c'est que la régénération puisse aboutir au retour des fonc-

tions. Nous avons analysé l'observation qui semble la plus favorable

à cette hypothèse et elle ne nous a pas paru tout à fait démonstrative.

« Ainsi, en admettant même que cette régénération complète soit

possible, il n'en est pas moins très légitime de soutenir qu'elle doit

être tout à fait exceptionnelle et, en pratique, on peut n'en pas tenir

compte. »

C. Au point de vue clinique, les conclusions principales de ma

thèse sont les suivantes :

« L'hémiplégie dans la sclérose en plaques n'est pas toujours consé-

cutive à une attaque apoplectiforme; elle peut se développer pro-

gressivement. L'hémiplégie constitue parfois dans la sclérose en pla-

ques, pendant un temps plus ou moins long, le trait le plus saillant du

tableau symptomatique et l'on pourrait être tenté de le rapporter à

une lésion cérébrale en foyer.

« Des plaques de sclérose disséminées dans la moelle peuvent,

COMPRESSION DE LA MOELLE. TUMEURS ] : '\TRA-RACI/lDIEOEES 105

lorsque les cylindres-axes sont détruits, se manifester cliniquement

par les symptômes qu'on observe dans la myélite circonscrite destruc-

tive (paralysie et anesthésie des membres inférieurs, troubles dans

les fonctions de la vessie et du rectum, escarres). Il y a peut-être

lieu de désigner une pareille affection sous le nom de sclérose en pla-

ques à forme destructive.

« La sclérose en plaques, dont la marche est d'habitude éninem-

ment chronique, peut présenter une évolution aiguë ; on peut dire,

dans ces cas, qu'on a affaire à une forme aiguë de la sclérose en pla-

ques. »

COMPRESSION DE LA MOELLE. TUMEURS

INT Rr1-IAGHIDIrITNrS

Localisation.

Dans les compressions de la moelle, la topographie de l'anesthésie

permet généralement de déterminer le siège de la lésion, ce qui est

d'un grand intérêt quand il s'agit d'une tumeur susceptible d'être

extraite. -

Cependant, on est parfois conduit ainsi à localiser la néoplasie soit

trop bas, soit trop haut.

De plus, l'anesthésie donne seulement le moyen de connaître la

place occupée par l'extrémité supérieure du néoplasme et ne renseigne

pas sur la situation de son extrémité inférieure.

Aussi est-il bon de posséder d'autres éléments de localisation.

L'état des réflexes tendineux, par exemple l'inversion du réflexe du

radius que j'ai décrite (p. 34), donne parfois à cet égard des indica-

tions intéressantes. Mais dans les cas où la lésion siège à la région dor-

sale, on ne peut tirer aucun parti de l'examen des réflexes tendineux.

Il en est autrement des réflexes de défense qui fournissent des don-

nées précieuses, ainsi que j'ai cherché à l'établir avec Jarkowski (171).

106 AFFECTIONS DE LA MOELLE

La hauteur du territoire cutané dont l'excitation peut provoquer ces

réflexes n'est pas la même dans tous les cas. Or, le niveau auquel ce

territoire s'élève sur le tronc permet de reconnaître la limite inférieure

d'une compression de la moelle. Tel est le résultat auquel nous ont

conduit nos observations.

Je dois dire que, pour bien apprécier le signe que nous étudions,

il faut éviter plusieurs causes d'erreur.

Il est essentiel en particulier de savoir que les téguments des mem-

bres inférieurs sont généralement très excitables, que la peau de l'ab-

domen et du tronc l'est beaucoup moins ; nous avons observé des

sujets atteints d'une lésion spinale siégeant certainement à la partie

supérieure de la moelle dorsale et chez lesquels l'excitation de l'ab-

domen restait ordinairement sans effet, tandis que celle des membres

inférieurs était constamment suivie de mouvements réflexes. C'est

pourquoi nous estimons que dans le problème de la localisation il ne

faut tenir compte que des cas où la zone des mouvements réflexes de

défense dépasse les membres inférieurs et occupe une partie plus ou

moins étendue du tronc.

Mais dans les faits que nous retenons, il est encore nécessaire, étant

donné que l'excitabilité cutanée n'a pas toujours la même intensité, de

renouveler les examens plusieurs fois et en variant les conditions de

l'expérience. D'habitude, nous cherchons à délimiter le domaine des

réflexes de défense en pratiquant des excitations successives d'abord

de bas en haut, puis de haut en bas, et en guettant le moment où ces

réflexes disparaissent ou apparaissent. Il est bon que ces recherches

soient faites dans le calme le plus absolu et que le malade soit à l'abri

de toute cause capable de provoquer des mouvements automatiques.

Ajoutons que la détermination du niveau atteint par la surréflecil-

vité cutanée est facilitée quand l'impotence est complète, parce qu'il

n'y a plus alors de mouvements volilionnels pouvant, troubler l'ap-

précialion du phénomène.

Voici les conclusions auxquelles nons sommes arrivés :

COMPRESSION DE LA .MOELLE. TUMEURS 1NTRA-RACHIDIE\NES 107

i° Tandis que la topographie de l'anesthésie donne ordinairement

le moyen de reconnaître la limite supérieure d'une compression spi-

nale, la limite inférieure de cette compression peut être généralement

fixée parla hauteur à laquelle s'élève le territoire des réflexes de défense.

2° Ces deux données, quand elles sont bien nettes, permettent le

plus souvent de déterminer, par leur association, la longueur sur

laquelle la moelle est comprimée; elles constituent l'une pour l'autre

un mutuel contrôle et par leur réunion rendent la localisation plus

certaine et plus précise. -

3° Dans un syndrome de compression, lorsque l'écart entre la

frontière de l'anesthésie et celle des réflexes de défense est considé-

rable, l'hypothèse d'une compression par tumeur extra-dure-mérienne

(tumeurs qui peuvent acquérir une grande longueur) ou par pachy-

méningite est la plus vraisemblable; quand, au contraire, les deux

frontières se confondent ou sont très rapprochées, il est extrêmement

probable qu'il s'agit d'une tumeur intra-dure-mérienne (tumeurs

généralement courtes).

Traitement chirurgical. Laminectomie.

J'ai publié, le premier en France, avec P. Lecène et F. Bourlot, une

observation de néoplasie intra-rachidienne où l'opération fut suivie de

guérison (186). Il s'agissait d'une femme de 62 ans chez laquelle s'étaient t

installés progressivement des troubles de sensibilité consistant en

douleurs et anesthésie, des troubles vésicaux et une paraplégie crurale

presque totale. Nous pûmes reconnaître 1 existence d'une compression

de la moelle, probablement par tumeur, et en déterminer avec préci-

sion le siège, au niveau de D.XI et de D.XII, en nous fondant sur

les limites qu'atteignaient au tronc l'anesthésie et l'exagération des

réflexes de défense. Une laminectomie fut pratiquée et le néoplasme

qui s'était développé aux dépens des méninges molles fut aisément

108 AFFECTIONS DE LA MOELLE

extrait. L'examen histologique montra que c'était un fibro-sarcome.

Tous les troubles régressèrent petit à petit à la suite de l'intervention

et finirent par disparaître. Il y a maintenant deux ans que la malade

est complètement guérie.

J'ai rapporté ensuite une nouvelle observation de ce genre avec

Th. de Martel et J. Jumentié (192). Le malade était un homme de

60 ans atteint aussi de paraplégie crurale avec troubles de sensibi-

lité et troubles vésicaux. Comme dans le cas précédent, il fut pos-

sible de porter le diagnostic de compression spinale et de localiser

celle-ci au niveau de D.IV et de D.V. Une laminectomie pratiquée

dans la région ainsi délimitée permit d'extraire une tumeur, dévelop-

pée aux dépens des méninges molles, et qui consistait en un fibro-

myxo-sarcome. L'opération fut suivie d'une amélioration qui aboutit

graduellement à une guérison complète.

RADIOTHÉRAPIE DANS LES AFFECTIONS SPINALES

J'ai relaté, en i go6, l'observation d'un enfant de 15 ans atteint d'une

contracture généralisée due à une compression de la moelle cervicale,

contracture rapidement améliorée, puis guérie à la suite de l'emploi des

rayons X (128).

Voici un extrait de mon travail sur ce cas :

« En résumé, un sujet, après un grand traumatisme, est atteint de

troubles de motilité qui occupent d'abord exclusivement les mem-

bres supérieur et inférieur du côté gauche ainsi que le cou, en s'as-

sociant à un peu de thermo-anesthésie du côté opposé et à de la

thermo-asymétrie ; les troubles de motilité envahissent ensuite tout le

tronc, ainsi que le côté droit du corps, et s'accompagnent d'une per-

tmbation sphinctérienne. Les troubles de sensibilité disparaissent

spontanément, mais les troubles de motilité s'accentuent progressi-

vement... ? rendant le malade absolument impotent, incapable de

RADIOTHERAPIE DANS LES AFFECTIONS SPINALES 109

mouvoir ses jambes, de se mettre sur son séant, de tourner la tête, de

porter les aliments à sa bouche.

« L'état des réflexes tendineux et des réflexes cutanés, l'amyotro-

phie du membre gauche, la thermo-asymétrie et la thermo-anesthésie

permettent d'affirmer l'existence d'une affection organique de la moelle

cervicale..... Vraisemblablement, l'hémiplégie du début est liée à un

épanchement sanguin, et il est permis de supposer que les phénomènes

qui se sont développés à partir du troisième mois sont sous la dépen-

dance d'un nouvel épanchement ou d'une pachyméningite ; mais, à

cet égard, on ne peut pas porter de diagnostic précis. Il est impos-

sible aussi de dire si les faisceaux pyramidaux sont dégénérés ou sim-

plement comprimés, le signe des orteils décelant seulement une per-

turbation et non pas nécessairement une dégénération de ces faisceaux.

En ce qui concerne l'amyotrophie, elle a été probablement causée par

une altération des racines motrices.

« Les troubles de motilité, qui pendant six mois n'ont fait que

s'accentuer, s'atténuent sensiblement quelques jours après que l'on a

commencé à faire agir les rayons X sur la région cervicale (il s'agis-

sait en l'espèce d'une radiographie pratiquée en vue du diagnostic). Huit

jours environ après la première séance radiographique, le membre

supérieur droit peut se mouvoir suffisamment pour que le malade soit

en mesure de s'alimenter sans aide. Il est alors soumis systématique-

ment à des pratiques de radiothérapie.

« Son état continue à s'améliorer ; la contracture cède peu à peu

dans les diverses parties du corps et aujourd'hui, quarante-cinq jours

après que les rayons ont été employés pour la première fois, le malade

a recouvré intégralement l'usage du membre supérieur droit et en

partie celui du membre supérieur gauche, il remue la tête et le tronc

avec assez d'aisance, il est capable de marcher sans appui et de fran-

chir sans se reposer une distance d'une vingtaine de mètres ; la marche,

il est vrai, est encore lente, pénible, et l'état des réflexes dénote la

persistance d'une perturbation du système pyramidal.

110 AFFECTIONS DE LA MOELLE

« Y a-t-il coïncidence purement fortuite de l'usage des rayons X

et de l'amélioration, ou bien existe-t-il entre ces deux termes une

relation de cause à effet ? C'est là que réside tout l'intérêt de cette

observation, d'une grande importance pratique si la seconde hypothèse

se vérifiait. La question ne saurait être résolue pour le moment, mais,

en faveur de l'idée que les rayons X ont joué un rôle thérapeutique, on

peut faire valoir que l'état du malade, qui jusqu'alors n'avait fait

qu'empirer, a commencé à s'améliorer immédiatement après les deux

premières radiographies et que cette amélioration a été insolite par sa

rapidité. Je ne me rappelle pas avoir vu des troubles de motilité, liés à

une compression spinale et ayant atteint un semblable degré d'inten-

sité, se modifier spontanément d'une pareille façon. Je suis porté à

penser que les rayons X ont exercé sur l'épanchement hémorragique

ou sur la pachyméningite présumée une action résolutive. »

La guérison se compléta ultérieurement.

Quelque temps avant la publication de ce fait, Raymond et

Gramagna avaient rapporté chacun une observation de syringo-

myélie traitée avec succès par les rayons X.

Plusieurs mois après, j'ai relaté (133) un cas de paraplégie liée à

une tumeur intra-rachidienne (une laminectomie pratiquée plus tard

a décelé l'existence d'une tumeur comprimant la moelle, confor-

mément à l'hypothèse qui avait été émise), où les troubles de moti-

lité rétrocédèrent rapidement à la suite de l'emploi des rayons X ;

mais l'amélioration ne fut que transitoire.

Ces quelques observations ont été le point de départ des tentatives

de radiothérapie dans diverses affections de la moelle (tabes, sclé-

rose en plaques, etc.). A vrai dire, abstraction faite de la syringo-

myélie, dans les myélopathies à proprement parler l'efficacité de la

méthode n'est pas encore nettement établie.

V. - AFFECTIONS DES MÉNINGES

MÉNINGITES

A. Méningite cérébro-spinale subaiguë à polynucléaires.

Ponctions lombaires. Guérison.

Il s'agit d'une observation de méningite cérébro-spinale ayant pré-

senté, après un début aigu, une allure subaiguë ou chronique. Une

première rachicentèse, pratiquée environ trois mois après le début de

l'affection, donna issue à un liquide louche contenant un grand nom-

bre de polynucléaires. La ponction lombaire répétée plusieurs fois fut

chaque fois suivie d'une amélioration notable, et on obtint enfin une

guérison définitive.

« Les ponctions lombaires peuvent donc donner des résultats

remarquables, non seulement dans la forme aiguë de la ménin-

gite ainsi que cela ressort de nombreuses observations, en particulier

de celles de notre collègue Netter, mais aussi quand l'affection a une

évolution subaiguë ou chronique. »

Un autre fait intéressant. c'est que « malgré la durée et l'intensité

de cette méningite, les racines de la moelle, qui sont restées plusieurs

mois en contact avec un liquide purulent, n'ont subi aucune modifi-

cation apparente, car je n'ai jamais constaté chez la malade de signe

décelant une lésion radiculaire ; les réflexes tendineux, en particulier,

ont toujours été normaux» » (8fi).

112 AFFECTIONS DES MENINGES

B. Méningite hémorragique fibrineuse. Paraplégie spasmodique.

Ponctions lombaires. Traitement mercuriel. Guérison.

Quelques extraits de cette observation en feront connaître les parti-

cularités les plus intéressantes.

A la première ponction on recueille un « liquide jaune ver-

dâtre se prenant en masse très peu de temps après la rachicentèse pour

former un caillot fibrineux dense, consistant et très peu rétractile ;

la dissociation de ce caillot permet d'y constater la présence de lym-

phocytes » (c'est la deuxième observation de ce genre ; la première a

été publiée par Froin).

« Quel était le degré des lésions spinales ? L'évolution de la mala-

die, la guérison, aujourd'hui presque complète, semblent indiquer

que les altérations n'étaient pas très profondes, que les éléments

nerveux essentiels étaient plutôt irrités que détruits. Mais déjà, dès le

début, malgré l'intensité des troubles fonctionnels, et je dirais même

en raison de l'intensité de certains de ces troubles, on pouvait sup-

poser qu'il en était ainsi. C'était l'opinion que j'avais émise en me

fondant sur des observations faites autrefois et dont j'avais tiré cette

conclusion que la paraplégie crurale qui se caractérise par une con-

tracture très forte des membres inférieurs, accompagnée de douleurs

et de mouvements spasmodiques, est généralement liée à une irritation

non destructive des faisceaux pyramidaux, sans dégénération descen-

dante secondaire. C'est donc là un nouveau fait à l'appui de l'idée que

j'ai soutenue (p. 88).

« Pour terminer, je veux attirer particulièrement l'attention de la

Société sur l'efficacité do la thérapeutique dans ce cas. Je n'insisterai

pas sur l'utilité des lavages de la vessie qui ont été longtemps prati-

qués ; c'est là une notion courante. Le mercure a peut-être exercé une

MÉNINGITES 113

action favorable sur la maladie, mais ce n'est pas rigoureusement

démontré. Je puis au contraire affirmer que les ponctions lombaires

ont joué un rôle curatif des plus nets. Il faut d'abord remarquer la

différence notable qui distingue les liquides recueillis à 2fi heures

d'intervalle : celui de la première ponction renferme une grande

quantité de fibrine, celui de la deuxième n'en contient presque plus.

« D'autre part, les troubles fonctionnels ont diminué d'une manière

très appréciable immédiatement à la suite de chaque opération et,

par conséquent, l'efficacité de la rachicentèse est indiscutable.

« S'il s'agissait d'un cas de méningite aiguë vulgaire qui, comme

on le sait fort bien actuellement, est susceptible d'être heureusement

influencée par ce mode de traitement, ce fait serait banal, mais il n'en

est pas ainsi. On avait affaire, en effet, à une forme anatomique parti-

culière de méningite et l'aspect symptomatique de ce cas n'était pas

celui qui appartient à la méningite aiguë ordinaire ; on était en pré-

sence d'une paraplégie spasmodique que l'on aurait pu attribuer à

une lésion siégeant exclusivement dans la moelle, et, sans la ponction,

l'existence même de la méningite aurait bien pu être méconnue. Cette

particularité augmente singulièrement l'intérêt du résultat obtenu par

la rachicentèse, que je considère comme une arme thérapeutique

puissante et dont on n'a pas encore établi toute la portée » (99).

C. Méningite cervicale hypertrophique.

(EN collaboration avec J. Jumentié ET J..TARA011'SAI)

Voici les conclusions de ce travail (198).

10 Les lésions méningées observées rentrent dans ce que l'on a

décrit sous le nom de pachyméningite cervicale hypertrophique, mais

nous ferons remarquer que dans ce cas ce terme est impropre ; les

lésions de la pachyméninge passent en effet au second plan et celles

13ABINSKI. 8

: 111. AFFECTIONS DES MÉNINGES

de l'arachnoïde prédominent au point que l'on pourrait dire qu'il s'agit

surtout d'arachnitis ; il nous paraît préférable de désigner ces lésions

sous le nom de méningite cervicale hypertrophique.

2° La compression, qui semblait très forte, n'avait cependant pas

amené de lésions profondes de la moelle; il n'existait pas, en effet, de

dégénérescence de ses faisceaux longs, et l'examen clinique avait

montré que la sensibilité était conservée.

3° Les racines, quoique plus altérées que la moelle (état clair, dégé-

nérescence ascendante du faisceau de Burdach), ont fait preuve d'une

tolérance très grande, puisque la sensibilité objective était presque

normale, et que, dans les groupes musculaires atrophiés, il n'y avait

ni abolition complète des réflexes, ni réaction de dégénérescence.

110 Enfin, nous avons constaté au membre supérieur des mouve-

ments réflexes de défense que nous avons pu utiliser pour la locali-

sation de la lésion.

HÉMORRAGIE MÉNINGÉE

. J'ai publié avec Jumentié un travail sur ce sujet (195). Voici les

quelques points que nous avons cru intéressants de signaler.

io En nous fondant sur des examens cliniques et anatomiques,

nous avons été conduits à penser que la syphilis est une cause assez

commune des lésions vasculaires pie-mériennes qui provoquent l'hé-

morragie méningée. '

2° Nous avons observé un cas d'hémorragie méningée à rechute, ce

qui constitue une rareté.

3° Chez un malade qui, entre autres troubles, présentait des accès

d'épilepsie jacksonienne à droite, la nécropsie a décelé, sous la dure-

mère qui paraissait saine, la présence d'un vaste caillot sanguin de 3 à

si millimètres d'épaisseur, situé sur la face externe de l'hémisphère

gauche, à sa partie moyenne, au niveau de la région motrice qu'il com-

HÉMORRAGIE MÉNINGÉE 115

primait fortement; il s'agit là d'une variété d'hémorragie méningée que

l'on pourrait dénommer hémorragie méningée à forme jacksonienne.

N'y aurait-il pas lieu, disions-nous, de pratiquer une craniectomie

dans des cas de ce genre ? Dans l'espèce, l'évolution très rapide de

l'affection est la cause qui nous a empêchés d'avoir recours à ce mode

de traitement. Mais il est permis de penser qu'une pareille interven-

tion pourrait être efficace.

Peu de temps après notre communication, Maurice Chiray et Jacques Roland

publièrent (Soc. méd., juin 1912) une observation montrant que nos prévisions

étaient justes. Elle est intitulée « Hémorragie méningée sous-arachnoïdienne non

traumatique, à « forme jacksonienne». Craniectomie. Guérison».

J'extrais de ce travail les passages suivants :

« Dans la séance du 3 mai 1912, MM. Babinski et Jumentié présentaient deux

cas d'hémorragie méningée dont l'un, rapidement mortel, s'est manifesté, entre

autres symptômes, par des crises typiques d'épilepsie jacksonienne; etles auteurs

se demandaient si des faits de ce genre, encore peu connus, et pour lesquels ils

proposent la dénomination d'hémorragie méningée à forme jacksonienne, ne seraient

pas justiciables d'une intervention chirurgicale.

« Nous avons observé, le mois dernier, dans le service de notre maître le

P' Debove, un fait analogue. Dans ce cas, les symptômes de localisation étaient

si nets que nous nous sommes crus autorisés à tenter une intervention chirurgi-

cale. Nous avons eu la bonne fortune, grâce à cette intervention qui a été prati-

quée par M. Tuilier, d'assister à une disparition rapide des accidents, et nous vous

présentons, aujourd'hui, notre malade complètement guéri. »

VI ? AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE ET DE L'APPAREIL

VESTIBULAIRE

HÉMIPLÉGIE ORGANIQUE

Diagnostic.

On admettait autrefois que l'hémiplégie organique, à considérer

uniquement les troubles de motilité qui la constituent, ne présente

aucun trait qui lui appartienne d'une manière exclusive et que l'hysté-

rie est capable d'engendrer une paralysie ayant le même aspect symp-

tomatique. C'est surtout, pensait-on, en tenant compte des circons-

tances dans lesquelles l'affection s'est développée et de l'état général du

malade qu'il est possible d'arriver à discerner les deux espèces d'hé-

miplégie. La fréquence des erreurs de diagnostic commises à cette

époque faisait apparaître l'insuffisance de ces moyens.

Estimant que pour bien connaître la nature d'une paralysie il est

essentiel d'envisager les diverses formes de l'activité musculaire, les

diverses modalités du mouvement et de rechercher les perturbations

que chacune d'elles peut présenter, je me proposai de soumettre

l'hémiplégie organique à une analyse méthodique, avec l'espoir de

découvrir ainsi des caractères intrinsèques qui permettraient d'en dis-

tinguer plus sûrement la nature (5g). Je vais passer en revue les

résultats de mes investigations.

HÉMIPLÉGIE ORGANIQUE 117

Modifications des réflexes tendineux.

On savait depuis longtemps que les réflexes tendineux sont troublés

dans l'hémiplégie organique ; ce qui m'appartient, c'est d'avoir établi

que ce caractère fait défaut,dans l'hémiplégie hystérique. Je dévelop-

perai ce point ultérieurement (voir p. ig5).

Phénomène des orteils.

Je renvoie le lecteur à la « Sémiologie » où cette question a déjà

été traitée d'une manière complète (p. 37). Je me contenterai de

rappeler que ce signe apparaît d'habitude immédiatement après l'ictus

et que, généralement, les lésions radiculaires tabétiques, quand elles

viennent s'ajouter aux lésions pyramidales, paraissent ne pas le mo-

difier.

Hypotonicité musculaire.

L'hypotonicité musculaire était un phénomène connu. J'ai mon-

tré qu'elle fait défaut dans l'hémiplégie hystérique et j'ai indiqué

quelques moyens de la déceler dans l'hémiplégie organique.

a) A la face, l'hypotonicité musculaire qui provoque un abaissement

de la commissure labiale se reconnaît de la manière suivante : on con-

state le relâchement des muscles en saisissant, entre les doigts, les lèvres

et la joue et en leur imprimant des mouvements passifs. On distingue

ainsi l'asymétrie faciale due à l'affaiblissement de la tonicité de celle

qui dépend d'une contracture ou d'une contraction musculaire.

b) Voici un moyen de mettre en évidence l'hypotonicité dans les

muscles du membre supérieur :

118

AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

Lorsqu'on imprime à l'avant-bras placé en supination un mouve-

ment passif de flexion sur le bras et qu'on cherche à appliquer ainsi

ces deux segments du membre supérieur l'un sur l'autre, on constate,

FIG. 12. -Hémiplégie droite organique au' cinquième jour.

Flexion exagérée de l'avant-bras à droite.

en comparant les

deux côtés, que le

degré de flexion est

plus grand du côté

paralysé (voir fig. 12).

C'est là un signe que

j'ai désigné sous la

dénomination de fle-

xion exagérée de

l'avant-bras. Je dois

faire remarquer tou-

tefois que, même chez

des sujets sains, il

peut y avoir à cet

égard une légère dif1'é-

rence entre les deux

côtés; en pareil cas,

le degré de flexion

est généralement plus

prononcé du côté le

plus faible, du côté

gauche. Ce phéno-

mène n'a donc de

valeur que s'il est tiès net et sa signification est plus grande dans

l'hémiplégie droite que dans l'hémiplégie gauche. C'est principa-

lement dans les cas d'hémiplégie récente, flasque, sans exagération

ou avec affaiblissement des réflexes tendineux, qu'on l'observe ; mais

je l'ai constaté aussi, ce qui peut paraître surprenant, dans quelques

cas d'hémiplégie ancienne avec exagération des réflexes tendineux.

HÉMIPLÉGIE ORGANIQUE

119

Signe du peaucier.

Ce signe consiste en ce que,1 dans certains mouvements auxquels le

peaucier participe,

la contraction de ce

muscle est plus

énergique du côté

sain que du côté

paralysé ; il est par-

ticulièrement appa-

rent tantôt quand le

malade ouvre la

bouche toutegrande

(voir fig. 13), tantôt

quand il fléchit for-

tement la tête, lut-

tant contre une

résistance que l'ob-

servateur oppose à

ce mouvement. J'a-

joute que tous les

hémiplégiques ne

présentent pas ce

signe. J'ai désigné

d'abord ce phéno-

FIG. 13. Hémiplégie gauche organique un an après son

début. Contraction du peaucier du cou à droite.

mène sous la déno-

mination de spasme associé du peaucier, que j'ai abandonnée ensuite;

je crois, en effet, qu'il ne s'agit pas d'un spasme du côté normal,

mais plutôt d'une parésie du peaucier du côté malade, laquelle appa-

raît dans les mouvements synergiques où les peauciers entrent en

120 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

jeu et se manifeste par la prédominance d'action du muscle du côté

normal ; j'ai proposé d'appeler simplement ce trouble le signe du

peaucier. Il peut exister aussi dans la paralysie faciale périphérique,

le peaucier étant innervé par le facial.

J'ai observé quelques sujets atteints d'hémiplégie organique chez

lesquels les fibres du peaucier étaient, à l'ouverture de la bouche, plus

apparentes du côté paralysé que du côté sain; il s'agissait probable-

ment, dans ces cas, d'un véritable spasme ; du reste, chez ces ma-

lades, on constatait en même temps, du côté de l'hémiplégie, un

abaissement de la commissure, d'origine manifestement spasmodique;

ces faits me paraissent exceptionnels.

Mouvement combiné de flexion de la cuisse et du tronc.

Lorsque, étendu sur un plan résistant horizontal, sur un plancher

par exemple, dans le décubitus dorsal, les bras croisés sur la poitrine,

le malade fait un effort pour se mettre sur son séant, du côté paralysé

la cuisse exécute un mouvement de flexion sur le bassin et le talon se

détache du sol, tandis que du côté opposé le membre inférieur reste

immobile ou ne se soulève que plus tardivement el moins haut

(voir fig. 14) ; en même temps, l'épaule du côté normal se porte en

avant.

Le mouvement que je viens de décrire se reproduit et peut être plus

ou moins accentué que dans l'acte précédent quand le sujet, après

s'être mis sur son séant, les bras toujours croisés sur la poitrine,

porte le tronc en arrière pour reprendre la position primitive.

C'est surtout lorsque le malade se 1 enverse avec brusquerie que le

mouvement est prononcé.

On observe ce signe chez la plupart des sujets atteints d'hémiplégie

organique.

Quel en est le mécanisme ? P

HÉMIPLÉGIE ORGANIQUE 121

Pour comprendre l'interprétation que je propose, il faut d'abord

analyser l'acte qui consiste à se mettre sur son séant. Le mouvement

essentiel de cet acte est absolument conscient, c'est l'inclination en

avant du bassin et de la colonne vertébrale ; mais cette inclination ne

peut s'opérer d'une manière normale que si les fémurs ont été préala-

blement immobilisés. En effet, si on réfléchit au mode d'action du

psoas-iliaque qui, suivant qu'il prend son point d'appui à son inser-

FiG. 14. Hémiplégie gauche organique un an après son début. - Flexion

combinée de la cuisse et du tronc à gauche.

tion supérieure ou à son insertion inférieure, fléchit la cuisse sur le

bassin ou bien incline en avant le bassin et la colonne vertébrale, on

conçoit qu'un défaut d'immobilisation de la cuisse dans l'acte en ques-

tion doive entraver l'inclination du tronc en avant et entraîner une

flexion de la cuisse sur le bassin. Cette immobilisation de la cuisse est

obtenue par la mise en activité inconsciente ou sub-consciente des

muscles qui étendent la cuisse sur le bassin.

Je suppose que c'est la parésie de ces muscles qui cause le phéno-

mène dont nous nous occupons. Du reste, la réalité de cette parésie est

incontestable car, lorsque le malade, se trouvant couché sur le dos,

122 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

cherche à maintenir ses membres inférieurs appliqués aussi étroite-

ment que possible contre le sol, on arrive plus facilement du côté de

la paralysie que du côté sain à soulever la jambe par une traction de

bas en haut.

Ce phénomène, que j'ai appelé d'abord mouvement associé de flexion

de la caisse, dépendant, si mon interprétation est juste, d'un méca-

nisme bien différent de celui qui appartient aux diverses variétés de

mouvements associés déjà décrits dans l'hémiplégie ((v8), peut être

désigné de préférence sous la dénomination de flexion combinée de la

cuisse et du tronc qui exprime simplement et avec précision le mou-

vement en question.

Il est facile de comprendre pourquoi le mouvement de flexion de la

cuisse se reproduit lorsque le malade, après s'être mis sur son séant,

cherche à reprendre sa position primitive. Ce serait, en effet, une

erreur de croire que, dans cet acte, le sujet se borne à faire con-

tracter les muscles qui inclinent le tronc en arrière. S'il en était ainsi,

la partie supérieure du tronc, entraînée par la pesanteur, viendrait

heurter contre le sol. L'extension du tronc doit être modérée par la

contraction des fléchisseurs qui ne se relâchent que progressivement,

et cette contraction des fléchisseurs, pour être efficace, nécessite une

immobilisation préalable de la cuisse. De part et d'autre, les condi-

tions sont donc semblables.

Je dois faire remarquer qu'à l'état normal l'immobilisation de la

cuisse paraît être plus ou moins parfaite suivant les sujets, ce qui,

sans doute, est une des raisons pour lesquelles tous les individus ne se

mettent pas sur leur séant avec la même facilité; tandis que chez les

uns, pendant cet acte, les cuisses restent appliquées sur le sol, chez

les autres, elles exécutent un mouvement plus ou moins marqué de

flexion sur le bassin ; mais, chez des sujets normaux, quand ce dernier

mouvement se produit, il est à peu près égal à droite et à gauche.

Néanmoins, comme à l'état normal il peut y avoir entre les deux côtés

de légères différences, le mouvement de flexion combiné de la cuisse

HÉMIPLÉGIE ORGANIQUE 123

et du tronc ne peut être considéré comme pathologique que lorsque,

se produisant d'un seul côté, il est très net, ou que, bilatéral, il est

bien plus apparent d'un côté que de l'autre.

Le mouvement de flexion combinée de la cuisse et du tronc impli-

que naturellement que les muscles qui l'exécutent fonctionnent, au

moins dans une certaine mesure ; aussi, pourrait-on prévoir théori-

quement qu'il doit faire défaut quand la paralysie est complète ; c'est

ce que l'observation confirme. En effet, ce phénomène apparaît

d'ordinaire, quelque temps seulement après le début de l'hémi-

plégie, lorsque les troubles se sont atténués. Dans la première phase

de l'hémiplégie, l'impotence du côté paralysé étant complète, ou bien

le malade en état de prostration profonde est incapable de faire le

moindre effort, ou bien, comprenant l'ordre donné et cherchant à se

mettre sur son séant, il exécute un mouvement de rotation autour

d'un axe longitudinal passant par le côté paralysé ; ce mouvement

me paraît être le résultat de l'action, limitée à un côté du corps, des

muscles qui inclinent le tronc en avant.

Griffe de la main.

Anciennement déjà, la griffe de la main avait été décrite dans l'hémi-

plégie organique avec contracture. Voici les observations faites par moi

sur ce point : si l'on glisse sa main entre les doigts et la paume de la

main du malade, et si l'on cherche porter celle-ci dans l'extension, on

éprouve une résistance qui donne l'impression d'un obstacle doué

d'élasticité et parfois animé d'une légère trépidation ; de plus, pendant

que la main s'étend sur l'avant-bras, les phalanges se fléchissent les

unes sur les autres et sur les métacarpiens et viennent serrer la main

de l'observateur. Il résulte de ces diverses perceptions une sensation

d'ensemble que l'on a très nettement à l'examen de la plupart des

malades atteints d'hémiplégie organique avec contracture, à condition

que la paralysie du membre supérieur soit assez marquée : jamais

124 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

je n'ai perçu cette sensation dans l'hémiplégie hystérique avec con-

tracture et je la considère comme un signe tout à fait caractéristique.

Signe de la pronation.

Dans l'hémiplégie organique, avantmême que la contracture se soit

établie, il n'est pas rare que, du côté paralysé, la main se trouve en

pronation et qu'elle reprenne cette attitude lorsque, après l'avoir

portée en supination par un mouvement passif, on l'abandonne à

elle-même. C'est là un signe qui peut aider à distinguer l'hémi-

plégie organique de l'hémiplégie hystérique.

Voici un bon moyen de mettre en évidence ce phénomène : on

recommande au malade de laisser inertes les membres supérieurs,

puis on place les avant-bras en supination ; on les soutient par leur

face dorsale au niveau du poignet et on leur imprime plusieurs

secousses successives ; on voit alors la main du côté de l'hémiplégie

se porter en pronation (i3g).

Interversion des deux modes de balancement du bras.

Ce phénomène, commun dans l'hémiplégie, est surtout apparent

quand, les mouvements volontaires du bras étant abolis ou très affai-

blis, ceux du membre inférieur sont suffisamment conservés pour que

la marche reste possible. C'est pour ce motif que je l'ai décrit au cha-

pitre « Monoplégie brachiale » auquel je renvoie le lecteur (p. 128).

Parallélisme entre les divers troubles de la motilité volontaire.

Considérons, par exemple, les troubles de motilité à la face. Si les

mouvements unilatéraux sont très affaiblis, l'impotence apparaît aussi

avec netteté, du côté de l'hémiplégie, pendant l'exécution des divers

mouvements bilatéraux synergiques (il est évident que ce parallé-

lisme n'est pas parfait, chacun de ces divers troubles pouvant être

HÉMIPLÉGIE ORGANIQUE 123

un peu plus saillant que l'autre). Dans l'hémiplégie hystérique, au

contraire, il peut arriver que les deux côtés de la face fonctionnent à

peu près de la même façon dans l'acte de parler ou dans celui de siffler,

tandis que les mouvements unilatéraux sont abolis d'un côté : la

paralysie est « systématique » (34, 35, 38). Si l'on envisage les

troubles de motilité du bras dans l'hémiplégie ou la monoplégie

organique, on constate que les mouvements actifs accessoires sont

abolis en même temps que les mouvements actifs essentiels (voir

p. 13o). Dans la paralysie hystérique, l'abolition de ceux-ci pourrait

coïncider avec la conservation de ceux-là.

Fixité des troubles de motilité.

Il va sans dire que l'hémiplégie organique subit une évolution,

qu'elle peut rétrocéder et guérir et que, lorsqu'elle devient incu-

rable, elle passe préalablement par des phases diverses. Mais, d'une

façon générale, c'est graduellement que se produisent les modifica-

tions dans sa physionomie. Quand on considère, dans un laps de

temps relativement court, les troubles de motilité de cette espèce, on

est en droit de dire qu'ils ont de la fixité. A la vérité, c'est là un fait

banal qui s'applique à toutes les paralysies organiques et sur lequel il

n'y aurait pas lieu d'attirer l'attention s'il ne contrastait avec ce

qu'on observe dans les paralysies hystériques. Voici, par exemple,

deux sujets atteints, l'un d'hémiplégie organique, l'autre d'hémiplégie

hystérique et qui tous deux paraissent dans l'impossibilité de faire exé-

cuter un mouvement quelconque aux divers segments du membre

supérieur paralysé. Faites l'expérience suivante : saisissez le bras para-

lysé, soulevez-le et abandonnez-le ensuite à lui-même, répétez plu-

sieurs fois de suite cette opération et cherchez en même temps, par des

questions posées au malade, à détourner son attention de ce que vous

faites. Vous constaterez alors que chez le premier malade le bras para-

126 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

lysé retombera immédiatement comme un corps inerte aussitôt que

vous aurez cessé de le soutenir, et ce phénomène se reproduira chaque

fois que vous renouvellerez la tentative. Chez l'hystérique, vous obser-

verez généralement le même fait dans la plupart des expériences que

vous ferez, mais pour peu que vous apportiez de la patience dans votre

examen, il arrivera un moment où le membre soulevé conservera

plus ou moins longtemps, après avoir été privé de votre appui, l'atti-

tude que vous lui aurez imprimée ; la paralysie aura transitoirement

disparu. Cette variabilité, qui fait toujours défaut dans l'hémiplégie

organique, présente une grande importance diagnostique.

Tels sont les caractères intrinsèques de l'hémiplégie organique que

mes études m'ont conduit à déterminer. Tous n'ont pas une égale

valeur et si quelques-uns d'entre eux sont pathognomoniques, il en

est d'autres, tels que le signe du peaucier, le signe de la pronation,

le mouvement combiné de flexion de la cuisse qui pourraient être re-

produits jusqu'à un certain point par un acte de la volonté. Quoi

qu'il en soit, dans la grande majorité des cas d'hémiplégie organique,

grâce aux signes intrinsèques, le diagnostic peut aujourd'hui être

établi avec certitude.

La plupart de ces données sont admises sans conteste. Dans tous les traités de

médecine, on en trouve l'exposé (voir : a. Traité de médecine Brouardel, Gilbert,

t. VIII, pp. 4.87, 51o. Hémiplégie, par Pierre Marie; b. Traité de médecine Charcot,

Bouchard, Brissaud, t. IX, p. 51. Hémiplégie, par Brissaud et Souques).

Amyotrophie.

Dans l'hémiplégie d'origine cérébrale il se développe parfois une

atrophie des muscles paralysés qui, d'après les idées autrefois admises,

serait toujours précédée d'une altération organique des cellules ner-

veuses des cornes antérieures de la moelle.

J'ai montré (i4) qu'une lésion cérébrale accompagnée de dégéné-

HÉMIPLÉGIE ORGANIQUE 127

ration descendante peut provoquer une atrophie musculaire très pro-

noncée et ayant les caractères histologiques que l'on assigne à l'atro-

phie musculaire consécutive à la section des nerfs ou à la destruction

des cornes antérieures de la moelle, sans que les cellules des cornes

antérieures soient détruites ou atrophiées, sans que les nerfs moteurs,

au moins dans la plus grande partie de leur parcours, présentent la

moindre trace de dégénération.

Les mêmes faits ont été observés ultérieurement par Quincke,

Eiscnlohr, Borgherini, Roth et Mouratoti, Darkschewitsch qui ont

ainsi confirmé les résultats de mes recherches.

Plus tard, Dejerine a publié des observations d'amyotrophie dans

l'hémiplégie avec intégrité des cornes antérieures et altération des

nerfs moteurs à leur périphérie. Elles servent en quelque sorte d'inter-

médiaire entre les faits anciennement connus et ceux sur lesquels j'ai

appelé l'attention. De ce rapprochement, il est permis de tirer quel-

ques déductions d'ordre plus général.

« Ces trois groupes (26) font évidemment partie d'une même série

caractérisée par des lésions plus ou moins accentuées de l'appareil neuro-

musculaire et appréciables, soit dans la totalité de cet appareil, soit

à sa périphérie seulement, quoique sa partie centrale constitue tou-

jours le siège primitif du désordre. On conçoit ainsi la parenté qui peut

exister entre les troubles cellulaires organiques et dynamiques. Il est

impossible, ce me semble, de douter que l'amyotrophie, dans tous ces

cas, ne reconnaisse pour cause une perturbation centrale. Mes obser-

vations ont montré qu'une atrophie musculaire peut résulter d'une

modification dans l'état dynamique des cellules nerveuses. Les obser-

vations ultérieures de Dejerine ont établi, de la même manière, selon

moi du moins, car l'auteur n'en tire pas lui-même cette conséquence,

qu'une névrite périphérique en apparence peut dériver d'un trouble

dynamique des centres nerveux. »

Joffroy et Achard, dans un article intitulé : ce Contribution à l'étude de l'atro-

128 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

phie musculaire chez les hémiplégiques» (Arch. de Dléd. exp. 1er nov. 1891), ont

adopté complètement mon opinion.

MONOPLÉGIE BRACHIALE ORGANIQUE

Mouvements actifs et mouvements passifs. Balancement actif

et balancement passif du bras.

(Interversion des deux modes de balancement du bras.)

La monoplégie brachiale organique se manifeste, à moins que le

bras malade ne soit atteint d'une rigidité qui l'immobilise, par certains

caractères spéciaux que j'ai fait connaître (157) et dont voici la

description.

a) Dans la marche, le côté sain présente l'allure habituelle :

lorsque le membre inférieur se porte en avant, on voit le bras se por-

ter en arrière et vice versa ; du côté paralysé, il en est tout autrement :

le bras se meut très peu et parfois la cuisse et le bras se portent simul-

tanément en avant; le malade, vu du côté atteint, semble aller l'am-

ble ; en réalité, le mouvement en avant du bras n'est que la consé-

quence d'une propulsion exercée par la cuisse. ,

b) Lorsque, étant debout, le malade tourne sur lui-même avec

une certaine brusquerie, les membres supérieurs s'écartent du tronc ;

mais du côté atteint le mouvement est bien plus étendu ; de plus, le

bras paralysé se déplace et oscille encore alors que le bras sain est

déjà revenu au repos.

c) Le malade étant assis ou debout, si, après lui avoir recom-

mandé de laisser inerte le membre sain, je lui soulève les deux bras

et les abandonne ensuite à eux-mêmes, je constate ceci : du côté sain,

le membre supérieur vient heurter le tronc, rebondit une fois ou

deux, puis reste immobile ; du côté paralysé, le membre supérieur

exécute des oscillations plus nombreuses et ne revient que plus tardi-

vement au repos.

MONOPLÉGIE BRACHIALE ORGANIQUE 129

d) Le malade étant assis ou debout, si, après avoir attiré ses

bras en avant, je laisse reposer ses mains sur les miennes et cesse de

les tenir, le membre supérieur garde généralement du côté sain

l'attitude que je lui ai donnée, tandis que du côté malade la main

glisse sur la mienne et se porte en arrière.

C'est dans la monoplégie d'origine cérébrale que j'ai observé pour

la première fois ces phénomènes, mais on peut les constater aussi

dans la monoplégie liée à une lésion de la moelle ou à une névrite.

Pour interpréter ces faits, il faut d'abord remarquer que les mouve-

ments du corps et des segments qui le composent peuvent être divisés

en deux catégories, suivant qu'ils sont d'origine interne ou d'origine

externe, c'est-à-dire provoqués ou non par l'activité de l'appareil neuro-

musculaire.

Les mouvements de la première catégorie sont qualifiés d'actifs ;

on appelle passifs ceux de la deuxième.

Les mouvements actifs, si on les envisage dans les actes volition-

nels tant soit peu compliqués, peuvent eux-mêmes être subdivisés en

essentiels et accessoires. Dans la marche, par exemple, les mouve-

ments des membres inférieurs et du tronc constituent les mouvements

essentiels ; on doit considérer comme accessoires les mouvements

des membres supérieurs qui, sans être d'ailleurs indispensables à

l'accomplissement de l'acte, s'associent généralement aux précédents

et consistent en un balancement du bras en sens inverse du mouve-

ment de va-et-vient de la cuisse.

Je ferai observer ensuite que, si les mouvements spontanés manifes-

tent dans ce qu'elle a de plus caractéristique l'activité musculaire, celle-

ci entre encore en jeu dans les mouvements passifs qui sont plus ou

moins modifiés par son intervention. Par exemple, je soulève le bras,

puis je le laisse retomber comme inerte, lui faisant exécuter ainsi

un mouvement passif; si, comme cela arrive souvent, le membre

supérieur, après être retombé, reste immédiatement appliqué le long

du corps, sans avoir oscillé, je puis affirmer que l'activité musculaire

BA81\SKI. 9

130 AFFECTIONS DE L'ENCEPHALE

est intervenue, car, en vertu des lois de la mécanique, le membre

supérieur, s'il avait été complètement inerte, aurait dû, avant que son

mouvement se soit arrêté, avoir subi des oscillations à la manière d'un

pendule. A l'état normal l'activité musculaire trouble presque toujours

les mouvements passifs et les empêche d'apparaître dans leur pureté.

Cela posé, il est facile d'expliquer les faits sur lesquels j'ai appelé

l'attention.

Il est naturel que le balancement du bras, mouvement accessoire

faisant habituellement partie de l'acte de la marche, manque dans la

monoplégie brachiale organique qui doit frapper tous les mouvements

actifs, essentiels ou accessoires.

L'augmentation de l'étendue des mouvements passifs, l'augmenta-

tion du nombre des oscillations du bras paralysé dans les expé-

riences b et c, la rétro pulsion de la main paralysée dans l'expérience d,

sont dues à ce que la paralysie libère les mouvements passifs des

entraves qui leur sont mises à l'état normal par l'activité musculaire.

En résumé, dans laparalysic organique, l'abolition des mouvements

actifs, l'affranchissement et l'exagération des mouvements passifs

sont des phénomènes connexes.

Pour exprimer brièvement ce qu'il y a de plus manifeste, au point

de vue clinique, dans cette perturbation, on peut dire que, dans la

monoplégie brachiale organique, le balancement actif du bras est dimi-

nué ou aboli, et que le balancement passif est exagéré; ou encore qu'il

y a une interversion des deux modes de balancement du bras.

TUMEURS INTRA-CRANIENNES. OEDÈME CÉRÉBRAL

Diagnostic.

A. J'ai attiré l'attention sur ce fait que les signes considérés

comme les plus caractéristiques des néoplasmes intra-crâniens : la

TUMEURS INTRA-CRANIENNES. OEDÈME CÉRÉBRAL 13l

céphalée, les vomissements, la stase papillaire peuvent faire dé-

faut, même à une période avancée de l'affection. J'ai publié (127)

l'observation anatomo-clinique d'un sujet qui, atteint d'une tumeur

cérébrale dont le poids dépassait 3oo grammes, n'avait jamais eu,

pendant le cours de la maladie d'une durée de 2 ans et demi envi-

ron, ni douleurs de tête, ni nausées ; quant à la stase papillaire, elle

n'était apparue que près de 2 ans après le début. L'absence de ces

symptômes ne permet donc pas d'écarter l'idée de néoplasie intra-

crânienne.

C'est une donnée qui n'est pas courante puisque, tout récemment, au

Congrès international de Londres, IIorsley a insisté sur ce point, très

important à connaître, dit-il, car on est exposé, quand on l'ignore,

à commettre des erreurs de diagnostic dont les conséquences peuvent

être graves.

B. J'ai observé avec Clunet (i51) un fait d'hémiplégie homo-

latérale : la paralysie occupait le côté droit du corps et la nécropsie

a décelé la présence de trois tumeurs méningées refoulant l'hémisphère

cérébral droit ; à gauche, il n'y avait pas de tumeur. Cette obser-

vation est à joindre à quelques cas analogues antérieurement

publiés.

Ce qui en constitue surtout l'intérêt, c'est qu'elle nous a permis

d'émettre une opinion probable sur le mécanisme de l'hémiplégie

homolatérale. Nous avons constaté que l'hémisphère droit était d'un

tiers plus volumineux que l'hémisphère gauche, qu'il était distendu

par de l'oedème; nous avons vu, sur une coupe horizontale de l'encé-

phale passant par la capsule interne, la scissure inter-hémisphérique

fortement repoussée à gauche. L'hémisphère gauche était donc mani-

festement comprimé par l'hémisphère droit augmenté de volume, et

c'est à cette compression qu'il y a lieu d'attribuer les troubles de

motilité du côté droit.

C. J'ai montré que l'hémiplégie liée à une compression de

l'encéphale peut avoir des caractères permettant de la distinguer de

132 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

l'hémiplégie vulgaire accompagnée de dégénération secondaire,

et d'en reconnaître la nature (127). La paralysie, en pareil cas,

même après plusieurs mois de durée, ne s'accompagne pas néces-

sairement d'exagération des réflexes tendineux ; parfois, elle est

dépourvue de tous les signes objectifs qui appartiennent à l'hémi-

plégie organique commune, et elle est alors susceptible d'être confon-

due avec une hémiplégie hystérique. Pour mettre ce trait en évidence,

on pourrait lui donner la dénomination d' « hémiplégie pseudo-hysté-

rique ».

Cette forme d'hémiplégie, quand elle est associée à d'autres signes

rendant acceptable l'hypothèse de tumeur cérébrale, constitue un argu-

ment de grande valeur à l'appui de cette idée.

Pouvant conduire à un diagnostic précoce do néoplasme inlra-crû-

nien et dénotant l'existence d'une lésion qui comprime simplement

l'encéphale sans provoquer de dégénération secondaire, elle fournit

des données fort précieuses sur l'opportunité d'une intervention

chirurgicale.

Vincent (Revue neurologique. 1908, p. 4 lis) a rapporté un fait ana-

logue : il s'agissait d'un cas d'hémiplégie causée par une tumeur de la

dure-mère siégeant dans la région rolandique du côté opposé ; les

réflexes tendineux et cutanés du côté droit étaient égaux à ceux du

côté gauche.

D. - Les symptômes cérébelleux que j'ai décrits (voir pp. 136-157)

facilitent le diagnostic des tumeurs intéressant le cervelet. Quand ils

sont unilatéraux, ils permettent de déterminer le côlé où siège la

lésion ; dans un grand nombre de publications, il est expressément

noté que l'hémiadiadococinésie a fourni à cet égard des indications

précises (voir p. I ( I ).

Ces symptômes servent au diagnostic des tumeurs ponto-cérébel-

leuses qui se manifestent aussi parfois, à cause des altérations du

nerf acoustique fréquentes en pareil cas, par des troubles du vertige

voltaïque que j'ai fait connaître (voir p. 167).

TUMEURS INTRA-CRANIENNES. OEDÈME CÉRÉBRAL 133

Traitement.

Médication hydrargyrique.

Dans plusieurs observations (127), j'ai noté que le traitement

hydrargyrique peut exercer une action favorable sur des tumeurs

non syphilitiques ; mais cette influence n'est que passagère et les

troubles, après avoir rétrocédé, reparaissent. C'est là une donnée dont

le clinicien doit tenir compte; sinon, il court le risque de commettre

des erreurs de pronostic et de différer une opération urgente.

Rachicentèse.

J'ai rapporté avec Chaillous un certain nombre de faits (i36, 137)

contribuant à établir l'action curative de la rachicentèse sur la névrite

optique due à un épanchement intra-crânien post-traumatique ou

d'origine inflammatoire ; on peut constater alors, à la suite de l'inter-

vention, la régression rapide de la stase papillaire. Mais dans les cas

de névrite optique consécutive à une tumeur, la ponction lombaire

ne saurait guère être que palliative.

Craniectomie.

Je me crois autorisé à dire que j'ai contribué au développement de

la chirurgie cérébrale en France. La craniectomie, malgré les travaux

parus à l'étranger sur ce sujet. ceux de I-Iorsley en particulier, malgré

les tentatives déjà anciennes de Lucas-Championnière, n'avait guère

été en laveur ici auprès des neurologistes jusque dans ces derniers

temps ; ce n'est que depuis peu qu'un revirement s'est produit.

134 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

Dans plusieurs notes, dont la première date de plus de dix ans

(68, Gg, 16/i, 16g, 170, 173, 193), je me suis efforcé de faire ressortir

l'action remarquable que la craniectomie est à même d'exercer sur

l'oedème cérébral. J'ai-insisté sur l'utilité de la craniectomie décom-

pressive et sur la possibilité d'obtenir parfois la disparition de la cépha-

lée, de la stase papillaire et des autres troubles que l'oedème cérébral

avait provoqués, grâce à la simple résection d'une partie de la

voûte crânienne sans incision de la dure-mère.

Je terminais ainsi une communication sur ce sujet à l'Académie

de Médecine (170).

« En résumé, les services que peut rendre la craniectomie décom-

pressive l'emportent notablement sur les dangers qu'elle fait courir;

il est essentiel d'en connaître les indications et de se mettre en mesure

de la pratiquer en temps opportun pour en tirer tous les bénéfices

qu'elle est capable de donner. Ces notions, en raison de leur impor-

tance pratique, doivent devenir familières à tous les cliniciens. »

Georges Bouché, dans un rapport sur la craniectomie décompressive présenté

au VIle Congrès belge de Neurologie et de Psychiatrie (Journal de Neurologie,

igm, n° 19), cite les conclusions précédentes et déclare partager ma manière de

'011'.

Segond, à l'occasion d'une discussion à la Société de Chirurgie sur la trépana-

tion décompressive (Bulletins et mémoires de la Société de Chirurgie, 1911, p. 414),

s'est exprimé ainsi :

« Comme lIorsley, Babinski et de Martel, j'estime, en effet, que dans nombre

de cas de tumeur cérébrale, il faut être beaucoup plus réservé que Tuilier dans la

recherche du néoplasme, qu'il est dangereux d'inciser toujours la dure-mère

d'emblée, qu'il faut, en un mot, procéder presque toujours eu deux temps et

qu'enfin, la trépanation simplement décompressive est, en maintes circonstances,

une merveilleuse opération palliative. »

AFFECTIONS DU CERVELET

Les connexions anatomiques et fonctionnelles qui unissent le cer-

velet au labyrinthe non acoustique expliquent la parenté étroite que

SYNDROME CÉRÉBELLEUX . 13.'i

la symptomatologie des affections cérébelleuses présente avec celle des

affections labyrinthiques. Cette relation a été mise en évidence,

comme on le sait, par les mémorables expériences de Flourens.

Sauf le tremblement, la parole scandée, les troubles de l'écriture

qui, du reste, ont été surtout étudiés dans la sclérose en plaques, et

« l'ataxie cérébelleuse », phénomène mal défini, les caractères cli-

niques que l'on assigne, dans les traités classiques, aux affections du

cervelet, appartiennent aussi aux affections de l'appareil vestibulaire.

Il en est ainsi des attitudes forcées, des mouvements forcés, de la

latéropulsion, de l'écartement des jambes, de la titubation ébrieuse,

des vertiges, du nystagmus. Certains de ces troubles sont peut-être

même particuliers aux lésions vestibulaires et il est incontestable, pour

le moins, que très souvent, dans les maladies du cervelet, leur présence

ou leur intensité tient pour une part à ce que le nerf vestibulaire

ou les noyaux auxquels il se rend sont intéressés.

Sans doute, ces divers symptômes ne sont pas absolument iden-

tiques suivant que leur origine est labyrinthique ou cérébelleuse, mais

les différences ne sont pas assez tranchées pour qu'on puisse, en se

fondant sur elles, établir entre ces deux ordres de faits une ligne de

démarcation nette.

Mes investigations m'ont conduit à découvrir et à analyser plusieurs

phénomènes qu'on est en droit de considérer tout en faisant quel-

ques réserves sur certains points - comme appartenant en propre

à la symptomatologie des affections du cervelet. Ce sont : l'asynergie,

l'adiadococinésie, la catalepsie cérébelleuse. J'y ajoute les mouvements

démesurés, signe que j'ai contribué à établir.

Depuis 18gg, j'ai publié sur ces divers sujets plusieurs mémoires

(55, 7o, 72, 80, 81, 85, 126, 161, 178). Tout récemment, dans un

rapport, en collaboration avec Tournay, sur les Symptômes des mala-

dies du cervelet, présenté au Congrès international de Londres (207),

j'ai réuni les documents épars relatifs à ces questions.

Mes travaux ont apporté, j'espère le montrer, des notions

136 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

nouvelles sur la pathologie du cervelet et peuvent être considérés en

même temps comme une contribution à la physiologie de cet organe.

Je vais passer en revue les phénomènes que je viens de signaler, en

m'efforçant d'en donner une idée nette. Est-il besoin de prévenir le lec-

teur qu'ils ne sont pas constants Leur présence ou leur absence, leur

intensité et leur durée dépendent sans doute du siège et de l'intensité

des lésions cérébelleuses, et, quand celles-ci s'associent à des altéra-

tions occupant d'autres régions du névraxe, des modes divers de ces

associations.

Mouvements démesurés. Hypermétrie.

L'observation des mouvements démesurés peut être faite à l'occa-

sion d'actes accomplis spontanément. Mais c'est dans certains actes

commandés que le trouble apparaît généralement avec le plus de

netteté.

On ordonne, par exemple, au malade de porter l'extrémité de l'in-

dex (droit ou gauche) au bout de son nez : tandis qu'un sujet sain

arrive aisément, quelle que soit la vitesse du mouvement, à appliquer

sans choc l'extrémité du doigt juste sur le bout du nez et à le main-

tenir à cette place, le cérébelleux qui présente ce trouble n'y parvient

pas ; son doigt, après avoir suivi dans sa course la direction voulue

et avoir touché au but, ne s'y arrête pas, mais le dépasse : il heurte

violemment le nez, glisse ou ricoche, et de là, va en dehors et en

arrière, vers la joue et l'oreille.

Le malade étant assis, on lui dit de mettre sa main en pronation,

la paume appliquée sur le genou du même côté, puis on lui com-

mande de retourner sa main par un mouvement de supination, de

telle façon que par sa face dorsale elle vienne se poser exactement à la

même place sur le genou. Ce mouvement, simple et facile pour un

sujet normal, n'est pas accompli correctement : la main est en-

SYNDROME CÉRÉBELLEUX 137

traînée en dedans de la cuisse et, de plus, le mouvement de supination

est plus ample qu'il ne conviendrait, le bord cubital de la main attei-

gnant un niveau plus élevé que le bord radial.

Après avoir abaissé une ligne verticale à la droite d'une feuille de

papier, on invite le malade à tracer, de gauche à droite, des lignes

horizontales partant d'un point quelconque, mais devant s'arrêterexac-

tement à la verticale : la main franchit la limite fixée. On peut faire

répéter cet exercice de droite à gauche, mouvement moins

habituel.

Dans le premier temps de la marche, laquelle ne peut générale-

ment s'effectuer sans aide, la flexion de la cuisse sur le bassin est bien

plus prononcée qu'à l'état normal (voir fig. 15), ce qui a pour consé-

quence un soulèvement excessif du pied; dans le deuxième temps, le

bruit produit par la plante du pied venant s'appliquer violemment

sur le sol dénote l'extension démesurée de la cuisse.

La flexion démesurée de la cuisse sur le bassin peut encore être

constatée de la manière suivante : si le malade, étant couché sur

le dos, cherche à placer le talon d'un côté sur le genou de l'autre

côté, il le porte au delà du but, sur la cuisse ; ce n'est parfois qu'après

plusieurs mouvements alternatifs et excessifs de haut en bas et de bas

en haut que le point visé est atteint.

Il est facile d'imaginer d'autres exercices permettant de mettre en

évidence le trouble qui nous occupe.

Pour bien constater cette perturbation dans les mouvements, il faut

demander au cérébelleux de les exécuter avec rapidité, car elle peut

faire défaut ou être très peu apparente quand les mêmes exercices

sont effectués lentement. Et si, dans bien des cas, les mouvements

spontanés ne sont pas démesurés, c'est précisément parce que les

malades, qui se surveillent, les accomplissent avec lenteur. Parfois,

dans l'exécution des actes commandés, afin de ne pas dépasser le but,

ils usent de l'artifice suivant : ils visent sur la trajectoire du mou-

vement un point situé en deçà du but ; mais, dans les premiers

138 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

essais, ils commettent des erreurs d'évaluation et ce n'est qu'après

bien des tentatives qu'ils atteignent avec quelque précision la limite

fixée.

Leur sensibilité, dans tous ses modes, étant conservée, ils ont une

notion très nette des erreurs qu'ils commettent même quand leurs

yeux sont fermés. Du reste, l'occlusion des yeux et c'est là un

point capital n'accentue pas le phénomène en question. Un autre

caractère, non moins important, complète la description du mouve-

ment démesuré cérébelleux. Ce mouvement conserve, d'une manière

générale, son orientation, sa direction intentionnelle; le pied ou la

main ne dévie pas de la route qu'il doit suivre ; il va à peu près en

ligne droite vers le but, et ce n'est qu'après l'avoir dépassé qu'il décrit

quelques oscillations en sens divers, cherchant à se fixer sur le point

visé.

Dans le tabes, on peut observer aussi des mouvements brusques et

sans mesure, mais ils se distinguent de ceux qui dépendent d'une

affection cérébelleuse :

Avant d'arriver au but, le pied ou la main s'écarte plus ou moins du

chemin qu'il devrait parcourir ; l'occlusion des yeux accentue notable-

ment cette désorientation, dont le malade ne se rend compte que

d'une manière imparfaite ; enfin, le degré de vitesse n'a pas la même

influence que chez le cérébelleux sur la qualité du mouvement qui,

tout en étant exécuté avec lenteur, peut être nettement démesuré,

surtout quand les yeux sont fermés.

Voici l'interprétation que j'ai donnée des mouvements démesurés

cérébelleux :

« Et d'abord, à l'état normal, comment un sujet procèdc-t-il pour

exécuter un mouvement avec mesure et pour l'arrêter au moment

voulu ? P

« On peut admettre que pour les actes les plus ordinaires, ceux aux-

quels il est habitué, il est capable de régler, de doser la quantité

SYNDROME CÉRÉBELLEUX 139

d'énergie à fournir et d'imprimer à sa main, par exemple, l'impulsion

exactement nécessaire pour obtenir le résultat cherché, ce qui implique

l'intervention d'un mécanisme régulateur. Mais supposons que son

impulsion ait été excessive, ce qui peut avoir lieu surtout dans les

actes dont il n'est pas coutumier et dans les mouvements rapides : pour

en annihiler ou en restreindre les effets, il mettra en jeu les muscles

antagonistes de ceux dont la contraction a produit le mouvement

qu'il faut arrêter. Ce sera là une action frénatrice.

« Les mouvements démesurés me semblent résulter d'impulsions

excessives dont les effets ne peuvent être corrigés, faute d'une action

frénatrice suffisante et, comme ces mouvements s'observent dans les

affections cérébelleuses, je suis amené à dire que le cervelet est un

régulateur des mouvements et qu'il peut en particulier agir comme

frein. Cette dernière propriété serait liée à la faculté que posséderait

le cervelet d'exercer une action excito-motrice de renfort, ayant pour

conséquence une réduction de la durée du temps perdu entre l'incita-

tion volitionnelle et le début de la contraction musculaire. Je rappelle

à ce propos que les divers troubles de motilité d'origine cérébelleuse

peuvent se développer en l'absence de tout affaiblissement muscu-

laire et que c'est même alors qu'ils sont le plus manifestes. »

L'existence de mouvements démesurés cérébelleux a été notée il y

a plus de 3o ans par Huppert (Archiv. ftir Psychiatrie und Nervenkr.,

VII, 1878). On avait affaire à un malade dont les mouvements des

membres supérieurs et inférieurs manquaient de mesure (Masslosig-

keit), ce qui rendait difficile l'exécution de certains actes. Mais il s'agit

là d'un fait isolé et non d'une étude d'ensemble sur ce trouble. Du

reste, cette observation, qui n'est parvenue à ma connaissance qu'après

ma première publication sur ce sujet, paraît avoir échappé à l'atten-

tion des neurologistes car, sauf dans le travail de IIuppert, je n'ai

trouvé de description des mouvements démesurés dans aucun ouvrage

traitant des symptômes cérébelleux chez l'homme.

Les physiologistes les ont observés chez les animaux. Luciani, qui

140 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

les a bien étudiés, a donné à ce trouble la dénomination de « dysmé-

trie ». Dans les cas cliniques, dit-il, c'est un phénomène extrêmement

rare.

André Thomas, qui, après Luciani, a constaté la dysmétrie dans

ses expériences, ne la signale pas dans son exposé du syndrome céré-

belleux chez l'homme (Le cervelet, Etude anatomique, clinique et phy-

siologique, Thèse, Paris, 1897)' Il note bien l'existence de mouve-

ments brusques chez quelques-uns de ses malades. Mais brusquerie et

manque de mesure sont deux qualités différentes; un mouvement

peut, en effet, être à la fois brusque et, en quelque sorte, rigoureuse-

ment dosé, d'une précision parfaite.

En résumé, abstraction faite du cas isolé d'IIuppert, la description

précise et la mise en valeur des mouvements démesurés ou hypermé-

trie terme que je préfère à celui de dysmétrie dans les affections

cérébelleuses chez l'homme datent de mes travaux.

Ce symptôme a été constaté et étudié par plusieurs neurologistes qui ont con-

firmé les résultats de mes observations.

André Thomas (Revue neurologique, 15 novembre 1909), observant a\ec Jumen-

tié un malade qui rappelait cliniquement les cas antérieurs d'atrophie olivo-ponto-

cérébelleuse, a fait une analyse soignée des mouvements démesurés -et a décrit

leurs caractères au cours de certaines épreuves.

Süderberglr (Nord. med. Archiv. LU, 12, 1909), dans un cas de fibro-sarcome

de l'angle ponto-cérébelleux droit, signale, entre autres symptômes, des mou-

vements démesurés dans les membres du côté droit.

Souques (Société de Neurologie, 3 juin igog), chez un malade atteint d'une

tumeur de l'angle ponto-cérébelleux gauche, note que, lorsque le malade porte

son index gauche au bout de son nez, « le mouvement est incoordonné, brusque

et démesuré, l'index dépassant le but et frappant la joue ». \u membre inférieur,

il y a aussi de l'hypermélric.

Dejerine et T3audouin (Société de Neurologie, 5 juillet 19 r) publient un cas incon-

testable de syndrome cérébelleux où « les mouvements démesurés, la dysmétrie,

sont le symptôme le plus net ».

Enriquez, Gutmann et Chauvet (Société de Neurologie, 5 décembre igi2) notent

que les mouvements sont franchement démesuiés chez un malade atteint de lésion

bulbo-protubérantielle avec syndrome cérébelleux.

SYNDROME CÉRÉBELLEUX 141

Adiadococinésie.

L'adiadococinésie est l'abolition ou l'amoindrissement de la faculté

d'exécuter rapidement des mouvements volontaires successifs. C'est

la perte même de cette faculté qui nous en fait concevoir l'existence.

Un sujet sain est capable d'exécuter une succession rapide de mou-

vements élémentaires, par exemple, de porter avec vitesse la main

alternativement en pronation et en supination.

Or, chez le cérébelleux, voici ce que l'on peut constater. Sa force

musculaire est intacte; il exécute aussi promptement qu'un individu

normal chacun des mouvements élémentaires de pronation et de supi-

nation ; mais il accomplit deux ou trois fois moins vite qu'un sujet

sain l'acte complet constitué par la succession de ces deux mouve-

ments. Le phénomène devient surtout manifeste quand on fait répéter

ce même acte un grand nombre de fois.

Pour dénommer la fonction qui est ainsi troublée, j'ai proposé un

néologisme dérivé de deux mots grecs, dont l'un signifie « successif »

et l'autre « mouvement ». Le mot diadococinésie est synonyme de

mouvements successifs et par extension peut désigner la fonction qui

permet l'accomplissement de ces mouvements.

Quant au terme « adiadococinésie » proposé par Bruns et couram-

ment employé dans les observations, il exprime par l'addition de 1' « a »

privatif la perte ou l'altération de cette fonction.

Pour éviter tout malentendu, j'ai pris soin, dès l'origine, de faire

ressortir que ce trouble ne peut être considéré comme réalisé que

lorsqu'il se manifeste chez un sujet en mesure d'exécuter avec prompti-

tude les mouvements élémentaires, car il va sans dire qu'un indi-

vidu incapable de faire rapidement un mouvement isolé, soit de pro-

nation, soit de supination, ne peut à fortiori accomplir une succession

rapide de ces deux mouvements.

142 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

Jusqu'à présent l'adiadococinésie a été observée surtout aux

membres supérieurs. Elle est tantôt bilatérale, tantôt unilatérale ; dans

ce dernier cas. elle dépend d'une lésion occupant le même côté ;

c'est là une donnée importante au point de vue du diagnostic.

Comment expliquer l'adiadococinésie ? Voici l'interprétation que

j'en ai donnée dans mon premier travail sur ce sujet :

« Afin de comprendre l'adiadococinésie, il est nécessaire d'analyser

la diadococinésie. Pour que des mouvements alternatifs de pronation

et de supination se succèdent avec rapidité, il est indispensable que

chacun de ces mouvements successifs soit bien réglé, ne dépasse

pas la mesure, et que le temps perdu entre les deux mouvements suc-

cessifs soit réduit au minimum. Ces conditions se réalisent grâce à

une action régulatrice combinée à l'action excito-motrice dont il vient

d'être question (action excito-motrice de renfort ayant pour consé-

quence une réduction de la durée du temps perdu entre l'incitation

volitionnelle et le début de la contraction). L'adiadococinésie serait

la conséquence d'une perturbation dans ce mécanisme. »

Il serait permis de dire que les lésions cérébelleuses peuvent, sans

diminuer l'énergie musculaire, provoquer en quelque sorte de l'inertie

que traduiraient la difficulté dans la mise en train et l'impossibilité

d'arrêter le mouvement à temps.

L'adiadococinésie a été vérifiée par nombre de neurologistes. Il m'est impossible

de mentionner toutes les confirmations; je me contenterai d'en indiquer quel-

ques-unes.

Macfie Campbell et Crouzon (Revue neurologique, 1902, p. 1 186) ont recherché

ce symptôme, dans le service de Pierre Marie, chez sept malades atteints de sclérose

en plaques et chez un malade porteur d'une lésion cérébelleuse survenue à la suite

d'un traumatisme occipital. Voici les résultats obtenus par ces auteurs :

ce Quatre malades atteints de sclérose en plaques ne pouvaient faire les mouve-

ments isolés brusques de supination et de pronation, et à fortiori il leur était im-

possible de faire une succession rapide de ces mouvements. Nous ne pouvions donc

tirer aucune valeur de ce symptôme chez ces quatre malades. Trois autres malades,

au contraire, ont exécuté les mouvements isolés brusques d'une manière parfaite,

SYNDROME CÉRÉBELLEUX 143

mais n'ont pu accomplir la même succession rapide des mowementsde supination

et de pronation. Le symptôme existait donc chez eux dans toute sa pureté. »

Oppenheim signale l'adiadococinésie du côté droit dans l'observation XII de son

Traité des tumeurs cérébrales publié en 1907. La lésion occupait l'hémisphère céré-

belleux droit. 11 l'a constatée encore, entre autres symptômes, dans un cas de

tumeur occupant le vermis et l'hémisphère cérébelleux droit au voisinage du

vermis et intéressant aussi un peu l'hémisphère gauche. Elle était bilatérale,

mais plus prononcée à droite. Après extraction de la tumeur, tous les troubles, y

compris l'adiadococinésie, régressèrent et disparurent (Berlin. klin. 1Vochen-

schr., 1912, n° 5o).

Italo Ilossi (Nom. Icon. de la Salpétrière, 1907, p. 66) mentionne l'adiadoco-

sinésie dans un cas d'atrophie parenchymateuse du cervelet à localisation corticale.

Le fait est d'autant plus intéressant qu'il s'agit ici d'une affection cérébelleuse tout

à fait pure.

Siemerling (Berlin. klin. 11'ochensclea., 1908, nOS 13 et l4) constate ce symptôme

plusieurs fois et, entre autres, du côté gauche chez un sujet porteur d'un kyste de

l'hémisphère gauche du cervelet.

Ilomburger et Brodnitz (J/ ! «e : 7. ausdea Grevzgebielen der nodicinischen Chirur-

gie, Bd. XIX, S. igi, 1908) notent ce trouble chez un malade atteint de tumeur

cérébelleuse.

Gierliclr( ! \'eurol. Centralbfatt, 1908, p. 65 1) a observé, entre autres symptômes,

l'adiadococinésie à droite chez un sujet, à l'autopsie duquel il trouva un sarcome du

vermis inférieur comprimant les hémisphères cérébelleux, surtout du côté droit.

Raimiste (Neurol. Cenlralblatt, 1908, p. 762) a noté le phénomène à gauche

dans une observation de tumeur de l'hémisphère cérébelleux gauche.

Flatau (Neurol. Centralblatt, 1909, p. 3gg) rapporte un fait de néoplasme

comprimant le côté gauche du cervelet et ayant donné lieu à de l'adiadococinésie

dans le membre supérieur gauche.

Marburg (Nearol. Centralblati, l 9 10, p. 570) trouve de l'adiadococinésie à

gauche, dans un cas de tumeur de l'angle ponto-cérébelleux gauche.

Schwartz (Neurol. Ceittralblait, 19l1, p. 3g2), Davidenkow et Rose (Id., 1912,

p. 527), Jumentié (Thèse, Paris igii), E. Moniz (Nous. Icon. de la Salpétrière,

ttJt2, n° 6) la notent dans des faits de même ordre.

Dejerine et Beaudouin (Société de Neurologie, 6 juillet 1 \) II), dans un cas de

syndrome cérébelleux, trouvent de l'adiadococinésie très nette des deux côtés.

Dans diverses études d'ensemble, le symptôme est signalé.

Stewart et Holmes (Brain, XXVII, igo/i, p. 522) l'ont recherché soigneusement

dans beaucoup d'observations de tumeurs et l'ont constaté dans un certain

nombre d'entre elles. D'après eux, « il semble survenir également dans les tumeurs

intra-cérébelleuses et extra-cérébelleuses ».

l'il AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

1\leczko\\ski (Neurol. Centralblatt, igio, p. 557) la compte parmi les symptômes

cérébelleux « pro pes ».

Bing (Rev. suisse de Médecine, 2g décembre igi r) écrit ceci : « Sur huit cas de

lésion en foyer du cervelet, la recherche de cette « adiadococinésie » nous a donné

six fois un résultat positif. »

André Thomas (Revue neurologique, r5 novembre igog) a analysé l'adiadococi-

nésie chez un malade atteint -vraisemblablement d'atrophie cérébelleuse, où le

trouble était très net au membre supérieur gauche.

Max Rothmann, de lierlin, (The symploms of cerebellar disease and ilieli- signifi-

cance, p. 77. Congrès international de médecine de Londres, ig 13) s'exprime ainsi

à ce sujet : Il Il existe deux nouveaux signes qui correspondent à une perturbation

du centre cortical de l'extrémité supérieure et qui résultent d'un trouble dans

les réflexes des antagonistes. En première ligne, l'adiadococinésie établie par

Babinski, consistant dans l'impossibilité d'exécuter successivement avec rapidité

des mouvements antagonistes comme la pronation et la supination, la flexion et

l'extension ; c'est un symptôme très commun. Il n'est pas invraisemblable que,

par une observation précise des divers mouvements antagonistes parmi lesquels

les uns sont conservés, les autres profondément troublés, il devienne possible de

faire des localisations plus fines dans le domaine de la région cérébelleuse bra-

chiale. »

Asynergie.

Pour se former une idée précise de 1 asynergie, il est bon de l'étudier

dans sa forme la plus caractérisée chez un malade rendu, par la gravité

du mal, incapable de marcher sans soutien et qui d'ailleurs possède une

vigueur musculaire normale et n'a pas de troubles de sensibilité. Après

l'avoir fait mettre debout, que l'on place deux aides à ses côtés, l'un à

sa gauche, l'autre à sa droite, avec mission de soutenir seulement la par-

tie supérieure de son corps sans lui imprimer de mouvements, et

qu'on l'invite à se déplacer. On constate alors qu'il est arrêté dès le

premier pas : le pied se trouve porté en avant, tandis que le tronc,

étendu sur le bassin, ne suit pas le mouvement du membre inférieur

(voir fig. 15); il est en même temps un peu entraîné en arrière,

ce qui peut être la conséquence du mouvement démesuré de flexion

exécuté par la cuisse. On peut remédier en partie à ce trouble en pre-

SYNDROME CÉRÉBELLEUX

in

nant le malade parties mains, après s'être placé devant lui, et en l'atti-

rant légèrement au moment où il fléchit la cuisse. Il est aussi en état

de marcher, sans l'aide d'autrui, s'il a devant lui, de distance en dis-

tance, des points fixes qu'il puisse saisir avec les mains, comme par

exemple, les barres de lits d'une salle d'hôpital. Il faut remarquer

que le pied suit à peu près

sans dévier le chemin qu'il

prendrait à l'état normal, et

que les pas se succèdent avec

une certaine régularité. Ce qui

est surtout caractéristique dans

ce syndrome, c'est le fait que,

dans les tentatives de déam-

bulation, le tronc reste comme

inerte, tandis que les membres

inférieurs fonctionnent.

Je donne également l'épi-

tlièle d'asynergiques à d'autres

phénomènes qui, sans avoir,

il est vrai, des traits aussi

originaux que celui dont je

viens de m'occuper, sont di-

gnes d'être signalés.

FiG. n. - Attitude du malade pendant la

marche, soutenu par deux aides.

Considérons encore le ma-

lade dans la station debout, mais immobile et abandonné à lui-même, ce

qui est possible, car, lorsqu'il est debout, il parvient après des efforts

à trouver l'équilibre et sans être soutenu peut rester plus ou moins

longtemps dans cette attitude. S'il cherche alors à porter la tête en

arrière et à courber le tronc dans le même sens, en forme d'arc, les

membres inférieurs restent presque immobiles (voir fig. 16) et n exé-

cutent pas ou n'exécutent que d'une façon très imparfaite les mou-

vements de flexion de la jambe sur le pied et de la cuisse sur la

BABINSIiI. Io

116

AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

jambe, qu'un individu normal accomplit dans cet acte afin de main-

tenir son équilibre (voir fig. 17).

Lorsque le malade, après s'être couché à plat sur le dos et avoir

croisé les bras sur la poitrine, fait des efforts pour se mettre sur son

séant, il n'y réussit pas ; de plus, les cuisses se fléchissent fortement

FJG. 16. -ltlitmlc du malade

dans la station debout, cher

chant à porter la tète ci

arrière et i courl)er le tronc

dans le même sens en forme

d'arc.

1 sur le bassin et les talons s'élèvent nota-

blement au-dessus du sol (voir fig. 18),

contrairement à ce qu'on observe chez un

sujet normal et vigoureux.

Voici un autre symptôme que je classe

également dans l'asynergie. Le malade étant

assis, on l'invite à porter la pointe du pied

vers un point situé à 60 centimètres au-

dessus du sol : au début de l'acte, la cuisse

se fléchit sur le bassin et la jambe ne s'étend

que légèrement sur la cuisse ; puis l'exten-

sion de la jambe devient plus énergique et

la pointe du pied arrive au but, lancée avec

une certaine brusquerie. Quand le malade

cherche ensuite à reprendre la position ! primitive, on voit d'abord la jambe se iléchir

, sur la cuisse, tandis que celle-ci ne se meut

; que légèrement ; puis, lorsque la jambe est

en demi-flexion, la cuisse s'étend brusque-

ment sur le bassin et le pied vient poser à

plat sur le sol. Cette dernière variété d'asynergie peut être constatée

aussi dans un exercice que l'on l'ait faire au malade couché à plat sur

le dos, et qui consiste à porter le talon en arrière aussi près que

possible de la fesse et à le ramener ensuite à son point de départ.

Lorsque je décrivis, en 18gg, l'asynergie cérébelleuse chez le

malade qui m'a servi de type, j'en rapportai un deuxième cas.

Voici un extrait de l'observation : « La déambulation sans aide est im-

SYNDROME CÉRÉBELLEUX

147

possible. Quand la malade est soutenue des deux côtés et qu'elle

cherche à marcher, le membre inférieur exécute les mouvements

élémentaires d'une manière presque normale, mais la partie supé-

rieure du corps reste en arrière, et il faut que les aides la tirent en

avant. »

Conormément au diagnostic qui avait été porté, on put constater,

à la necropsie, qu une tumeur de la gros-

seur d'un oeuf de poule s'était creusée une

loge par refoulement, en majeure partie

aux dépens du cervelet.

Ultérieurement, j'ai montré que les

troubles asynergiques tels que je les avais

observés aux membres inférieurs peuvent

être localisés d'un côté (côté lésé). Dans

un travail intitulé « IIémiasynergie et hé-

mitrcmblement d'origine cérébello-pro-

tuhéraniielle (ï2), j'ai noté de l'asyner-

gie au membre inférieur droit chez un

sujet à l'autopsie duquel on découvrit

une tumeur remplissant l'espace compris,

à droite, entre le bulbe, la face inférieure

du cervelet et la protubérance, l'angle

ponto-cérébelleux, dirait-on aujourd'hui.

L'hémiasynergie se retrouve dans le

syndrome que j'ai décrit avec J. Nageotte

Fie. y. - Attitude d'un sujet

sain dans la station debout, cher-

chant à porter la tète en arrière

et à courber le tronc dans le

même sens en forme d'arc.

(voir p. 158) sous le titre : « Ilémiasy-

nergie, latéropulsion et myosis bulbaires avec hémianesthésie et liémi-

plégie croisées ». L'hémiasynergie siégeait du côté de la lésion.

Il va sans dire que l'asynergie, comme les autres signes dont on

dispose, peut manquer, que, lorsqu'elle existe, elle n'atteint pas tou-

jours le même degré de développement et qu'elle peut être très nette

ou fruste.

148 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

Quand elle est bien caractérisée, qu'elle soit bilatérale ou unilatérale,

elle diffère de tous les troubles de locomotion déjà connus. Elle se dis-

tingue en particulier de l'ataxie des tabétiques dans laquelle les mou-

vements concourant à un acte ne subissent pas une pareille décom-

position ; contrairement aussi à à ce qu'on observe dans l'asynergie

pure, les mouvements ataxiques dans le tabes sont, je le rappelle,

mal orientés et notablement influencés par l'occlusion des yeux.

A propos d'ataxie, j'ai fait remarquer qne l'expression d' « ataxie

cérébelleuse » couramment employée a été prise dans des acceptions

Fie. 18. Attitude du malade sur le dos faisant effort pour se mettre sur son séant.

diverses, qu'elle a sans doute été appliquée le plus ordinairement à

des cas où se mêlaient, en proportions variées, tremblement, hyper-

métrie, asynergie, et dont l'analyse n'avait pas été faite. Si une anec-

tion cérébelleuse peut réaliser le tableau symptomatique de l'ataxie

tabétique, cela doit être tout à fait exceptionnellement.

Les troubles dont je viens de donner la description, ayant un cachet

qui leur est propre, méritent une dénomination particulière. Le terme

asynergie que j'ai choisi avait été, il est vrai, employé par Duchenne

de Boulogne pour désigner la titubation de l'ataxie locomotrice et

l'opposer à la titubation vertigineuse ; mais ce mot pris dans cette

acception n'a pas été consacré par l'usage et il est même tombé en

désuétude.

SYNDROME CÉRÉBELLEUX il9

Je l'ai repris. Il sert à grouper les faits que j'ai décrits et il s'accorde

avec ma manière de concevoir leur mécanisme. J'en ai donné l'expli-

cation suivante :

« Envisageons, pour commencer, la démarche dite asynergique. Si

l'on appelle synergie la faculté d'accomplir simultanément les divers

mouvements qui constituent un acte, le phénomène que nous venons

de décrire peut être considéré comme l'effet d'une absence de synergie,

d'une asynergie : il faut l'attribuer à l'impossibilité où se trouve le

malade d'associer, dans l'acte de la marche, comme à l'état normal, la

translation du tronc à la flexion de la cuisse. L'immobilité de la partie

supérieure du corps, pendant quele membreinférieur seporte en avant,

ne saurait, en effet. être attribuée à une paralysie des muscles qui dans

la marche impriment au tronc une propulsion puisque, la force mus-

culaire étant conservée, les mouvements élémentaires peuvent s'accom-

plir. L'interprétation de ce trouble de déambulation me paraît donc

légitime. Elle semble encore mieux fondée quand on considère l'atti-

tude spéciale du malade cherchant à courber le tronc en arrière.

Cette épreuve est comme le complément de la précédente. Dans

l'une, c'est la partie supérieure du corps qui ne se déplace pas alors

que la partie inférieure se meut : dans l'autre, c'est la partie infé-

rieure qui reste immobile, tandis que la partie supérieure fonctionne.

N'est-il pas rationnel de soutenir que la perturbation de ces deux actes

dérive d'une même cause : l'impossibilité d'associer les deux ordres

principaux de mouvements qui les composent ? P

« Passons au mouvement combiné de flexion de la cuisse et du

bassin. C'est un phénomène que j'avais observé déjà dans l'hémiplégie

organique du côté de la paralysie, et je rappelle l'explication que j'en

avais donnée en citant un passage de mon travail sur ce sujet » (voir

p. 121).

Dans les cas que nous considérons ici, on ne peut donner la même

interprétation et, comme dans l'hémiplégie, attribuer le mouvement

combiné à la parésie des muscles extenseurs de la cuisse. « Nous

Ia0 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

avons bien spécifié, en effet, qu'il s'agit de malades dont les muscles

ont toute leur vigueur. Nous sommes donc obligés de faire intervenir

un autre facteur qui, croyons-nous, consiste précisément dans un

défaut d'association motrice ; l'acte qui nous occupe est exécuté

d'une manière imparfaite parce que le malade n'associe pas ou associe

mal le mouvement d'extension de la cuisse sur le bassin au mouve-

ment de flexion du tronc. C'est donc encore l'asynergie qui est en jeu.

« Porter la pointe du pied vers un endroit déterminé est un acte

qui, chez un individu sain, s'accomplit de telle façon que les divers

mouvements de flexion et d'extension de la cuisse sur le bassin, de la

jambe sur la cuisse et du pied sur la jambe sont exécutés simul-

tanément et en quelque sorte fondus les uns avec les autres. Ici, au

contraire, ils s'opèrent séparément ; au début, la cuisse se fléchit

énergiquement, tandis que le fonctionnement de la jambe est d'abord

nul ou très faible ; le mouvement de la jambe commence seulement

ou ne devient très apparent que lorsque celui de la cuisse est terminé :

en un mot, la flexion de la cuisse sur le bassin et l'extension de la jambe

sur la cuisse ne sont pas synchrones. N'y a-t-il pas lieu de penser que

ce défaut de synchronisme est dû à une perturbation de la synergie ? »

Quoi qu'il en soit, en admettant même que l'on critique ma façon

de comprendre ces faits, leur réalité me semble à l'abri de toute con-

testation.

L'asynergie unilatérale est relatée dans les observations d'un assez grand nom-

bre de neurologistes.

Vigouroux et Laignel-Lavastine (Société de Neurologie, 6 février 1\)02), chez un

sujet à l'autopsie duquel fut trouvée une lésion de l'hémisphère cérébelleux droit,

décrivent avec précision les troubles asynergiques qui occupaient la jambe droite.

Raymond et Cestan (Revue neurologique, t')02, p. 463) ont constaté de l'as)ner-

gie la jambe droite dans un cas d'endothéliome épithélioïde du noyau rouge, à

gauche.

Selon eux, c'est sans doute à cause de l'entrecroisement du pédoncule cérébel-

leux au-dessous de ce noyau que les troubles de la motilité siégeaient du côté

opposé à la lésion.

SYNDROME CËHÉXKLLEUX loi

Pelnar (Casopis Ces. Lek., igo4, p. i r), ayant constaté chez un malade de

l'hémiasynergie et de l'hémitremblement à droite, trouve à l'autopsie une tumeur

(tubercule) dans l'hémisphère cérébelleux droit.

Laigncl-Lavastine (No[1v. Icon. de la Salpêtrière, XIX, 1906, p. 53\)) public une

observation « d'hémiasynergie droite par hémorragie dans la substance blanche de

l'hémisphère du même côté, avec dégénérescence homolatérale partielle de l'olive

cérébelleuse, des pédoncules cérébelleux supérieur et inférieur et de l'olive bulbaire

du côté opposé, sans dégénérescence médullaire».

L'hémiasynergie de la jambe droite figure dans les faits précités de Soderbcrgh

et de Souques.

Souques (Société de Neurologie, 6 juillet 1\)11) obsena « un malade atteint

d'hémiplégie gauche et d'hémiasynergie droite. L'hémiasynergie était modérée et

n'entravait pas notablement l'usage des membres. A l'autopsie (outre un foyer de

ramollissement dans l'hémisphère cérébral droit qui avait causé l'hémiplégie gau-

che) on trouva dans l'hémisphère cérébelleux droit un second foyer qui avait déter-

miné l'hémiasynergie ».

Si les observations d'hémiasynergie sont assez communes, il faut reconnaître

que l'asynergie bilatérale, la « grande asynergie», celle qui se manifeste dans les

actes complexes nécessitant notamment la coopération de la partie supérieure et

de la partie inférieure du corps, se rencontre plus rarement. Quelques auteurs

cependant en ont relaté des exemples très nets.

Dans une observation clinique de Scherb (1\'o[1v. Icon. de la Salpêtrière, ego5,

n° 1), le malade présente la forme la plus développée de l'asynergie. Sa démarche

et l'attitude de ses membres sont calquées sur la description que j'en ai donnée.

Cassirer et Schmiedcn (Miinch. Med. IVoch., igio, n° 17) notent entre autres

signes une asynergie prononcée chez une femme de 23 ans qui avait subi un

traumatisme crânien. Soupçonnant une tumeur intéressant principalement le

vermis, ils firent une opération qui permit l'ablation d'un kyste du cervelet. La

guérison s'ensuivit.

Dejerine et Baudouin, dans le cas précisé, notent que « en même temps que le

sujet marche, le haut du corps tend à s'incliner en arrière, si bien que par mo-

ments le malade part en arrière et tomberait comme une masse si l'on n'était prêt

à le retenir. 11 y a donc une dissociation entre les mouvements du tronc et des

jambes qui rentre dans la grande asynergie décrite par M. Babinski... »

Voici une intéressante observation de Gôtt ayant trait à « l'asynergie cérébel-

leuse dans le changement du regard ».

Un enfant de 12 ans et demi, atteint de maladie de Friedreich, présentait un

phénomène particulier. Quand il voulait regarder les personnes ou les objets laté-

ralement situés, il tournait vers eux d'abord le visage, et seulement ensuite les

yeux, en position conjuguée normale. Le retard était mesurable et pour une tor-

152 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

sion du visage de 5o degrés, se montait à t,li ? 8 seconde. L'examen permit d'écar-

ter le diagnostic d'affection labyrinthique.

Gall mit alors ce trouble en parallèle avec un autre phénomène qui chez le

malade était très prononcé : l'enfant avait une démarche cérébelleuse très caracté-

ristique. « Si l'on essayait d'analyser celle-ci, l'on pouvait facilement démêler, comme

caractère essentiel, que la partie supérieure du corps se trouvait constamment

dans une autre phase de la marche que les jambes. Quand le tronc était déjà pen-

ché en avant, qu'il avait donc accompli déjà de son côté le mouvement en avant,

les jambes étaient encore en arrière et se trouvaient seulement au commencement

dupas; ainsi le malade était à chaque instant en danger de tomber. L'on voit à

quoi cela tient : il s'agit dans la marche, comme dans notre phénomène, du même

trouble dans la coopération de deux ou plusieurs groupes musculaires entrant en

action à l'occasion d'un mouvement compliqué, donc d'un trouble de coordina-

tion, ou comme Babinski l'a pertinemment nommé, de « l'asynergie cérébel-

leuse »... Je comprends donc ce phénomène de retard des mouvements des yeux

sur ceux de la tête, au sens de Babinski, comme un symptôme cérébelleux».

Gôtt, dans un deuxième cas, observa ce retard chez un enfant de 5 ans, atteint

vraisemblablement d'aplasie ou d'atrophie du cervelet.

Rothmann (loco citato) signale l'asynergie comme un symptôme aujourd'hui

classique.

F. X. Dercum, de Philadelphie, dans un travail intitulé : Diagnosis and Loca-

lisation of Brain Abscess (Rchrintecl front the Journal of the american Médical Asso-

ciation, septembre, 216, 1912, vol. LXI, pp. 10 et Il) écrit : «... Babinski a appelé

l'attention sur quelques symptômes qu'on peut observer dans les lésions cérébel-

leuses. Ces symptômes sont très importants et doivent être recherchés, selon moi,

quand on soupçonne un abcès cérébelleux. Parmi ceux-ci l'asynergie... Ce symp-

tôme, quand il est cantonné dans un côté du corps, est appelé hémiasynergie et

il est homolatéral, c'est-à-dire qu'il se trouve du même côté que la lésion... »

Catalepsie cérébelleuse.

Le phénomène auquel j'ai donné la dénomination de catalepsie

cérébelleuse et que l'on peut observer dans les affections de l'appareil

cérébelleux est caractérisé par la faculté que présentent les muscles

en état de contraction volontaire de se maintenir longtemps immobi-

les, comme s'ils étaient figés, sans être pourtant contracturés, dans

SYNDROME CÉRÉBELLEUX

153

certaines positions où se trouve réalisé l'équilibre volitionnel. (On

verra plus loin ce que j'entends par cette dernière expression.)

L'attitude dans laquelle la catalepsie apparaît de la manière la plus

frappante est la suivante : le sujet est couché sur le dos, les cuisses flé-

chies sur le bassin, les jambes légèrement fléchies sur les cuisses, les pieds

FIG, 19. Catalepsie cérébelleuse. Pose de

15 seconde ?

Cette photographie montre que, chez ce malade,

atteint d'asynergie dans sa forme la plus

caractérisée, la fonction de l'équilibre voli-

tionnel statique s'accomplit d'une manière

parfaite.

FiG. 20. Ataxie. Pose de 15 secondes.

Cette photographie met en évidence l'insta-

bilité des membres inférieurs.

écartés l'un de l'autre (voir fig. ig). Quand le malade, après s'être mis

sur le dos, cherche à prendre cette attitude, ses membres inférieurs et

son tronc exécutent pour commencer de grandes oscillations en divers

sens, particulièrement de gauche à droite et de droite à gauche, mais

au bout de quelques instants le corps et les membres deviennent

fixes. Cette fixité est remarquable par sa perfection, elle est supé-

rieure à celle qu'un homme normal est en mesure de réaliser ; c'est

presque une fixité de cire, de mannequin, qui n'est troublée par

aucune secousse musculaire, contrairement à ce qui se voit chez les

154 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

sujets les plus vigoureux que j'ai fait placer dans la même position ;

elle subsiste longtemps, plusieurs minutes, et le malade n'accuse

presque aucune sensation de fatigue, à l'inverse de ce qui a lieu chez

les sujets témoins.

La méthode graphique fournit sur cet état des données complé-

FiG. 21. Sujet normal. Ilomme vigoureux de 2tel ans.

Fic. axa. - Asynergie cérébelleuse.

Sur les hg. 21 et 22, le trace d'en haut correspond aux oscillations du pied, celui du

milieu est l'inscription des vibrations musculaires, celui d'en bas est le graphique du

temps.

mentaircs. J'ai vu avec Haillon. en comparant des sujets normaux à

un malade atteint de catalepsie cérébelleuse type, que chez celui-ci le

tracé est rectiligne, que chez ceux-là il présente au contraire de nom-

breux crochets (voir fig. 21 et 22).

Cette fixité peut être considérée comme la manifestation d'une

SYNDROME CÉRÉBELLEUX' 155

propriété nouvelle créée par la maladie, ou tout au moins comme

l'exaltation d'une propriété physiologique.

Il ressort de ce qui précède que le phénomène auquel j'ai donné le

nom de catalepsie cérébelleuse se présente, dans son état de pureté,

sous un aspect saisissant.

A en juger par mes propres observations, la catalepsie pure, par-

faite, est très rare ; il est probable qu'elle nécessite, pour se développer

ainsi, la réalisation d'un ensemble de conditions dont la réunion est

exceptionnelle. L'association d'un affaiblissement musculaire à la per-

turbation cérébelleuse, par exemple, est une entrave à la production

de la catalepsie parfaite.

S'il est rare de rencontrer la catalepsie cérébelleuse parfaite, il est

assez commun d'observer des cérébelleux atteints de titubation,

d'asynergie, dont la marche est, par suite, très difficile, et qui, placés

dans l'attitude requise, conservent une fixité équivalente à la normale.

A défaut de la véritable catalepsie, cette stabilité seule suffit à distin-

guer le cérébelleux d'avec un tabétique. Celui-ci placé dans la même

attitude se comporte tout différemment : ses membres oscillent dans

tous les sens et il lui est impossible de conserver l'immobilité (voir

fig. 20). Il n'est pas nécessaire pour cela que l'incoordination et les

troubles de sensibilité profonde soient très accusés. On constate cette

instabilité chez des tabétiques encore capables de marcher, et qui, les

yeux fermés, en ont déjà une notion très nette ; ils savent dans quelle

direction leurs membres se déplacent, mais ils sont incapables de les

immobiliser quelque effort qu'ils fassent, que leurs yeux soient ouverts

ou fermés.

J'ai cherché à faire ressortir dans le passage suivant, que j'extrais

d'un de mes articles, (161) les conséquences qui semblent découler

de ces faits.

« On admet que le cervelet joue un rôle essentiel dans l'équilibra-

tion et que les lésions cérébelleuses troublent cette fonction.

156 6 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

« Cela est incontestable, mais il résulte de mes observations que

cette notion a besoin d'être précisée davantage car, exprimée comme

elle l'a été jusqu'à présent, elle n'est pas à l'abri de la critique.

« Le mot équilibre a plusieurs acceptions. Dans le langage courant,

il signifie « qu'un corps se tient debout sans pencher d'aucun côté »

(Littré).

« En employant ce terme dans ce sens, on dit avec raison qu'un

cérébelleux titubant, asynergiquc, n'est pas capable de rester en équi-

libre.

« Mais ce vocable a aussi une autre signification : « étal d'un corps

maintenu au repos sous t'influence deplusieurs forces qui se contre-ba-

lancent exactement » (Littré). En le comprenant ainsi, on est autorisé

à dire qu'un malade atteint de catalepsie cérébelleuse présente une

exaltation de l'équilibration. Or, comme ce malade (dont l'observa-

tion détaillée a été relatée dans ce travail) est à la fois asynergique et

cataleptique, on est en droit de soutenir, suivant le point de vue

auquel on se place, que sa faculté d'équilibration est amoindrie ou

augmentée.

« Cela m'amène à faire remarquer que l'équilibre doit être envisagé

sous deux modes, suivant que le corps se trouve dans un état d'immo-

bilité active, ou bien qu'il est en mouvement, qu'il se déplace. Dans

le premier cas l'équilibre peut être qualifié de statique et dans le

second de cinétique. De plus, comme dans ces deux cas la réalisa-

tion de l'équilibre nécessite l'intervention d'un acte de la volonté,

j'appelle volitionnelles ces deux variétés d'équilibre ou d'équilibration.

Le choix de ces expressions pourrait être aisément critiqué, mais il ne

s'agit là que d'une affaire de convention et il suffit de s'entendre.

« A l'état normal, l'équilibre volitionncl cinétique est réalisé plus

facilement que l'équilibre volitionnel statique ; il est plus facile, en

effet, de marcher que de rester debout sans tituber, bien plus difficile

de se tenir immobile sur une jambe que de sauter à cloche-pied.

« Dans les affections cérébelleuses, l'équilibre volitionnel cinétique

SYNDROME CÉRÉBELLEUX 157

peut être profondément troublé alors que l'équilibre volitionnel sta-

tique est conservé ou même exalté.

« 11 ressort de ce qui précède que, d'une part, les observateurs

devront à l'avenir envisager séparément chacun de ces deux modes de

l'équilibre et que, d'autre part, les données classiques sur les troubles

de l'équilibration dans les affections du cervelet ne sont inattaquables

que pour ce qui concerne l'équilibre volitionnel cinétique. »

Dupré et Devaux (voir Latron, Thèse, Paris, igi i) ont constaté un état catalep-

toide léger des membres supérieurs associé à un défaut d'équilibration dans la

marche chez un malade atteint d'abcès du cervelet.

Léopold-Lévi (Société anatomique, 18g4, p. 166) a publié autrefois une observa-

tion analogue d'abcès du cervelet.

Stewart et IIolmes (Brain, XXVII, tgo4> p. 522) dans des cas de tumeurs

unilatérales intracérébelleuses ont noté ceci : du côté de la lésion, le bras étendu

horizontalement peut se maintenir longtemps dans cette position et rester remar-

quablement fixe ; le bras du côté sain, placé dans la même attitude, ne conserve

pas une pareille fixité.

Italo Rossi (1\rorru. Icon. de la Salpêtrière, 190, p. 66), dans le fait précité

d'atrophie parenchymateuse, a constaté la catalepsie cérébelleuse.

F. Sanz (Arc/¡. esp. de Neurol. Psiqu. y Fisiol., I, 33, igio) consacre une

étude à la catalepsie cérébelleuse et rapporte un cas où il existait une attitude

cataleptique singulière des quatre membres ; ceux-ci, quelle que fût la position

dans laquelle on les plaçât, demeuraient longtemps complètement fixes. Une opéra-

tion ayant été pratiquée, on découvrit un abcès dans l'hémisphère cérébelleux

droit. Malheureusement des phénomènes méningés compliquaient le tableau cli-

nique ; aussi cette observation ne peut-elle être considérée sans réserve comme

un exemple typique de catalepsie cérébelleuse.

Lewandowsl : y (Handbuch der Neurologie, Berlin, igog, Bd. I, S. 8 ! ¡2) écrit que,

d'après son expérience, « il n'y a aucun doute qu'une série de cérébelleux montrent

cet état cataleptoide ». Il y voit « un très frappant écart » entre l'ataxie cérébel-

leuse et l'ataxie radiculaire. -

Bing (Revue suisse de Médecine, 2g décembre I\) 1 [) signale ce symptôme dans

son rapporl. Il le considère comme «un phénomène cérébelleux d'ordre secon-

daire n'élant pas « un composant essentiel du syndrome cérébelleux ».

Dercum (loco citalo, p. 1 1) mentionne la catalepsie cérébelleuse.

Il en est de même de Rothmann (loco citato, p. 82). Il écrit : « Il faut ajouter

(aux autres symptômes cérébelleux) la catalepsie, c'est-à-dire la faculté des céré-

belleux de conserver longtemps des attitudes une fois prises... »

158 AFFECTIONS DE L'ENCEPHALE

AFFECTIONS DU BULBE

Hémiasynergie, latéropulsion et myosis bulbaires avec hémianesthésie

et hémiplégie croisées.

(EN COLLABORATION AVEC ! V 1Gfi01'TE)

Nous avons décrit un syndrome lié à une lésion bulbaire unilatérale

dont les traits cliniques essentiels sont : de l'asynergie, de la latéro-

pulsion et du myosis du côté de la lésion, de l'anesthésie et de la para-

lysie ou de la parésie du côté opposé. (A l'époque où nous avons

observé les malades qui font le sujet de ce travail, mon attention

n'avait pas été encore attirée par les mouvements démesurés et l'adia-

dococinésie ; aussi, ces phénomènes n'ont-ils pas été recherchés.)

Dans les traités classiques (voir le traité Charcot-Bouchard) ce

syndrome est désigné sous la dénomination de : « syndrome de

Babinski-Nageotte ».

Notre description était basée sur l'étude de trois cas, dont l'un est

d'un intérêt prépondérant, car il a été suivi d'un examen anatomique

minutieux. Avant d'indiquer les résultats des recherches histologi-

ques, je dois donner quelques renseignements complémentaires surles

symptômes constatés chez ce malade.

Il fut pris, en pleine santé, de vertiges, de troubles graves de la

motilité et d'une gêne dans la déglutition. L'examen pratiqué quelques

jours après le début de l'affection décèle les troubles suivants. On

constate de l'hémiparésie à droite avec signe des orteils et mouve-

ment combiné de flexion de la cuisse et du tronc; de l'hémiancsthésie

occupant tout le côté droit du corps jusqu'au cou, prédominant à la

jambe et à la partie inférieure de la cuisse et intéressant la sensibilité

au tact et à la température. Le sens musculaire est normal à droite et

SYNDROMES BULBAIRES 159

à gauche. A la face, la sensibilité est diminuée des deux côtés. Le

malade ne peut marcher sans être soutenu ; il est sans cesse entraîné à

gauche. Dans la déambulation, les membres inférieurs sont écartés

l'un de l'autre ; les mouvements élémentaires du membre inférieur

gauche sont brusques et le pied gauche vient s'appliquer sur le sol

d'une manière bruyante (il s'agissait probablement de mouvements

démesurés) ; les mouvements du membre inférieur droit présentent

aussi ces caractères, mais d'une manière bien moins prononcée. On

note de l'hémiasynergieau membre inférieur gauche, apparente quand

le malade, placé dans le décubitus dorsal, après avoir fléchi la cuisse

sur le bassin et la jambe sur la cuisse, remet le membre dans sa posi-

tion primitive. Les mouvements du membre inférieur droit sont exé-

cutés presque synergiquemenl. Ceux des membres supérieurs sont

correctement accomplis, mais avec un léger tremblement. Il y a un

peu de nystagmus, surtout dans le sens latéral. Les pupilles se

contractent à la lumière, mais elles sont inégales; la gauche, sans

être très petite, est sensiblement plus étroite que la droite. Le malade

meurt par syncope cinq jours après son entrée à l'hôpital.

Etude anatomique. A l'oeil nu, on constate que le tronc basi-

laire et les artérioles qui en partent sont obstrués par une thrombose

récente ; le tronc basilaire présente en outre des parois extrêmement

épaissies.

Le bulbe, le cervelet, la protubérance, les ganglions de la base

sont examinés en coupes sériées, par la méthode de Marchi. Des cou-

pes de la moelle sont pratiquées au niveau de chaque paire radicu-

laire (méthode de Marchi). De plus, la moelle et l'écorce cérébrale

sont examinées sur des coupes colorées à l'hématoxyline, et par la

méthode de Weigert pour la myéline.

L'examen microscopique a montré : i° des lésions diffuses, por-

tant sur l'élément mésodermique et occupant toute l'étendue de la

cavité sous-arachnoïdienne (moelle et cerveau) ; 2° des lésions locali-

sées, véritables foyers de nécrose et de ramollissement qui sont sousla

FIG. 23. rt. 24.

ric. a5.

Fig. 26.

SYNDROMES BULBAIRES 161

dépendance d'altérations vasculaires ; ces foyers sont au nombre de

FlG.2.

Explication des figures 20, 24, 2.'), 20, 27.

23, all, a5, 26. Coupes du Bulbe.

27. Coupe de la Protubérance.

CAn. Corne antérieure. - FCC. Faisceau central de la calotte. FCd. Faisceau cérébelleux : direct.

FD. Faisceau cérébelleux descendant (f. de Marchi). Flp Faisceau longitudinal postérieur.

F,I ? F3F,. Foyers de ramollissement. - In. Nerf intermédiaire de \Vri.lxrg. NC. Noyau

cunéiforme du bulbe ND. Noyau de Deiters. NG. Noyau grêle du bulbe. NV. Noyau de

la 5' paire NXH. Noyau de la 12e paire. OG Fibres olivo-cérébelleuses. puni. Pédon-

cule cérébelleux moyen. - PCS. Pédoncule cérébelleux supérieur. V. Nerf trijumeau. VII.

Nerf facial. VIII. Nerf acoustique. IX.. Nerf glosso-pharyngien. X Nerf pneumogas-

trique.

quatre et siègent dans le côté gauche du bulbe ; 3° des lésions parenchy-

mateuses systématisées, consécutives aux lésions localisées (voir fig.

23, 24, 25, 26, 27).

Babinski. il I

162 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

Ces trois sortes de lésions offrent chacune un intérêt particulier ;

nous allons les examiner successivement.

i° Les tissus mésodermiques du système nerveux tout entier sont

envahis par un vaste syphilome diffus, caractérisé essentiellement par

des altérations typiques des vaisseaux.

2° Les lésions en foyer qui sont cantonnées dans le côté gauche ont

intéressé en les altérant d'une manière plus ou moins profonde :

a) l'olive à gauche et la voie olivo-ciliaire des deux côtés ; la bilatéra-

lité de cette dernière lésion (toutes les autres sont unilatérales) tient

à ce qu'un des foyers interrompt à la fois les fibres olivaires gauches

avant leur entre-croisement et les fibres olivaires droites après leur

décussation; b) le faisceau cérébelleux descendant qui proviendrait

en partie du noyau de Deiters, en partie du cervelet ; s'il existe une

voie ascendante de la moelle au noyau de Deiters (Probst), cette voie est

également sectionnée ; c) les fibres du ruban de Reil, surtout dans la

partie postérieure de la couche interolivaire ; d) les voies ascendantes

latérales de la moelle (faisceau de Gowers), le faisceau cérébelleux

direct étant probablement intact ; e) le faisceau longitudinal posté-

rieur ; f) les nerfs mixtes sur une certaine étendue ; g) la pyramide

qui n'est que légèrement atteinte.

Nous avons cherché à déterminer, dans la mesure du possible, les

rapports unissant symptômes et lésions.

La gêne dans la déglutition et l'hémiparésie droite s'expliquent

par les altérations des nerfs mixtes et par celles de la pyramide

gauche.

La prédominance de l'anesthésie au membre inférieur peut être

attribuée à ce que les lésions du ruban de Reil sont plus prononcées

dans la partie postérieure de la couche interolivaire, région où siègent les

fibres nerveuses provenant du noyau grêle auquel aboutissent les fibres

longues des racines postérieures correspondant aux membres infé-

rieurs.

Le rétrécissement de la pupille gauche semble dû à l'altération du

SYNDROMES BULBAIRES 163

faisceau longitudinal postérieur par lequel passent vraisemblablement

les fibres descendantes établissant la communication entre le centre

irido-dilatateur supérieur et le centre cilio-spinal.

Nous avons émis l'hypothèse que le nystagmus et la latéropulsion

sont ici sous la dépendance de l'altération du faisceau cérébelleux

descendant (les lésions du faisceau longitudinal postérieur pourraient

aussi être incriminées dans la production du nystagmus).

Le tremblement bilatéral des membres supérieurs est peut-être

dû aux lésions des systèmes olivaires, qui étaient intéressés des deux

côtés.

Quant à l'asynergie, qui occupait presque uniquement le côté gau-

che, il serait légitime de la rattacher, principalement au moins, à la

lésion du faisceau cérébelleux descendant, mais il est permis aussi de

supposer que les altérations du faisceau de Gowers (et peut-être

aussi celles de la voie olivo-ciliaire) ont participé à son développe-

ment.

Les faits que nous venons de relater, quoique l'hypothèse inter-

vienne à tout instant dans les interprétations qu'on peut en donner,

constituent une contribution à l'étude des localisations des fonctions

bulbaires et cérébelleuses.

3° La recherche des lésions parenchymateuses systématisées, con-

sécutives aux lésions localisées, nous a permis de constater des faits

intéressants au point de vue anatomique.

Au-dessous des foyers, dans la région de la substance réticulée qui

avoisine le ruban de Reil et le faisceau longitudinal postérieur, il

existe des faisceaux longitudinaux de fibres dégénérées que l'on peut

suivre jusque dans les régions inférieures de la moelle ; elles forment

un faisceau qui coiffe la corne antérieure et qui, à un certain niveau,

est nettement distinct du faisceau pyramidal direct également dégé-

néré : c'est le faisceau cérébelleux descendant.

Au-dessus des foyers, on aperçoit des fibres dégénérées qui remon-

tent jusqu'au noyau de Deiters; ce sont probablement des fibres du

161 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

faisceau cérébelleux descendant qui ont subi la dégénérescence ré-

trograde.

Nous avons vu les lésions du ruban de Reil se terminer dans le

noyau externe et dans le noyau médian de la couche optique.

Enfin, et c'est là le point le plus important, nous avons pu suivre

les fibres olivaires dans toute leur étendue jusqu'à leur terminai-

son. Les fibres émanant des deux olives bulbaires, sectionnées en

grand nombre par un foyer unique, forment par leur dégénérescence

des boules beaucoup plus petites que les fibres des autres faisceaux.

Elles constituent d'abord les fibres pré-, inter- et rétro-trigéminales,

puis vont se grouper à la partie profonde des corps restiformes avec

lesquels elles pénètrent dans le cervelet. Bientôt elles traversent en

réseaux les corps restiformes et vont se grouper dans leur angle

postérieur. Elles montent ainsi jusqu'à la partie supérieure du corps

ciliaire et se recourbent pour descendre entre l'embolus et l'olive,

ainsi qu'à la face. interne de la moitié postérieure de l'olive où elles

prennent part au plexus intraciliaire. Un certain nombre d'entre elles

se dirigent directement dans la toison pendant leur trajet ascendant.

Ces fibres se terminent dans l'embolus et l'olive cérébelleuse, et ne se

rendent pas à l'écorce, comme on l'avait supposé. A la dénomination

de fibres olivo-cérébelleuses, il convient donc de substituer celle

d'olivo-ciliaires qui indique leur origine dans l'olive bulbaire et leur

terminaison dans le corps ciliaire.

Thermo-asymétrie et vaso-asymétrie d'origine bulbaire.

J'ai observé des faits montrant qu'une lésion bulbaire peut, sans

atteindre la motilité volontaire, produire des troubles vaso-moteurs

et thermiques à forme unilatérale (118, 13o). A la vérité, ces troubles

ne sont pas exceptionnels dans les allections du système nerveux

central et il n'est pas rare de les constater dans l'hémiplégie organique,

SYNDROMES BULBAIRES 165

à laquelle ils semblent alors liés ; mais, dans les cas que nous avons

en vue, il en est autrement puisqu'il n'y a pas de perturbation de la

motilité volitionnelle.

Dans mes observations, les phénomènes en question étaient asso-

ciés à de l'hémianesthésie à forme syringomyélique. Du côté de

l'anesthésie, les malades éprouvaient une sensation de froid et les

veines du membre supérieur, particulièrement celles du dos de la

main, étaient moins apparentes. J'ajoute que du côté opposé, c'est-

à-dire du côté de la lésion, existait le syndrome oculo-palpébral de

Claude Bernard-Hutchinson. Dans un de ces cas, où les troubles

avaient rapidement régressé, j'ai pu les faire reparaître en immer-

geant, pendant quelques minutes, les mains du malade dans de l'eau

froide : à leur sortie de l'eau, elles restaient environ quatre ou cinq

minutes aussi froides l'une que l'autre, et les veines sous-cutanées

étaient effacées des deux côtés, puis la main gauche (côté de la lésion)

s'échauffait, ses veines se dilataient, tandis qu'à droite le refroidisse-

ment de la main et l'aplatissement des veines duraient plusieurs

heures.

Je m'étais demandé si chez le sujet en question il s'agissait d'hyper-

thermie et de vaso-dilatation du côté de la lésion, ou d'hypothermie

et de vaso-constriction de l'autre côté, et voici ce que j'ai écrit sur

ce point :

« J'avoue que j'incline vers la seconde hypothèse pour les motifs

suivants : a) le malade s'est toujours plaint d'éprouver une sensation

anormale à droite ; dès le début il a eu de ce côté une impression

de froid ; le côté gauche ne lui a jamais semblé plus chaud qu'il ne

devait l'être ; b) lorsque, cinq jours après l'ictus, la symétrie ther-

mique s'est complètement rétablie, ce n'est pas le côté gauche dont

la température s'est abaissée, mais le côté droit qui s'est échauffé et

c'est de ce côté que les veines en se dilatant ont présenté une modi-

fication dans leur volume ; c) enfin, l'immersion des mains dans

l'eau froide a provoqué une réfrigération d'une durée de quelques

166 AFFECTIONS DE L'ENCÉPHALE

minutes seulement à gauche et de plusieurs heures à droite ; or, il me

parait difficile de ne pas considérer comme pathologique une vaso-

constriction réflexe aussi prolongée. Néanmoins, comme ces divers

arguments n'ont peut-être pas une valeur absolument décisive, je ne

me crois pas en droit d'émettre à ce sujet une opinion ferme et je me

contente, jusqu'à nouvel ordre, de constater qu'une lésion bulbaire

unilatérale est capable de provoquer une asymétrie vasomotrice et

thermique. »

Voici les notions nouvelles qui résultent de cette étude :

Une lésion bulbaire peut, sans engendrer de paralysie de la moti-

lité volontaire, provoquer des troubles vaso-moteurs et thermiques à

forme hémiplégique. Je leur donne les noms de vaso-asymétrie et de

thermo-asymétrie.

La vaso-asymétrie et la thermo-asymétrie d'origine bulbaire, parfois

très manifestes pour le malade et le médecin, peuvent aussi être légères

et avoir besoin d'être recherchées avec soin. Elles sont susceptibles

d'être mises en évidence par l'immersion des mains dans l'eau froide,

qui les accentue notablement.

Hémianesthésie bulbaire à forme syringomyélique.

J'ai constaté avec Nageotte (i 18) qu'une lésion bulbaire peut don-

ner naissance à une hémianesthésie avec dissociation des divers modes

de la sensibilité, identique à la dissociation syringomyélique.

De nouveaux faits publiés par moi (i3o) et par d'autres auteurs

(voir Rossolimo, G. J., Thermoanâsthesieund Analgésie aïs Symptôme

von IIerderhrankung des Ilirnstammes. Deealsclae Zeilscler. f. Nerven- ! teille Bd. 23, S. 2/)3) m'ont permis de reconnaître que non seule-

ment celle disposition est possible, mais qu'elle correspond à une

règle. En effet, si les lésions bulbaires ou protubéranlielles sont capa-

bles d'engendrer une anesthésie caractérisée par des troubles de la sensi-

AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE 167

bilité profonde avec conservation de la sensibilité thermique (voir Brault

et Cl. Vincent, Un cas de syndrome protubérantiel avec hémianes-

thésie dissociée de forme anormale. Rev. neur., 1912, t. XXIV,

p. 1), ce que j'avais mis en doute, il n'en est pas moins vrai qu'elles

provoquent rarement ce mode de dissociation, et qu'elles détermi-

nent dans la majorité des cas une hémianesthésie à forme syrin-

gomyélique.

AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE

Diagnostic.

Troubles du vertige voltaïque.

Depuis quelques années le diagnostic des affections de l'appareil

vestibulaire a acquis une sûreté et une précision qui lui manquaient

autrefois, alors qu'il reposait seulement sur l'appréciation de troubles

fonctionnels.

Aujourd'hui on le fonde principalement sur les modifications que

subissent à l'état pathologique les réactions objectives provoquées par

des excitants divers : épreuves giratoires (Mach, Egger), caloriques

(Barany) et voltaïques.

Les notions que l'on possède sur les perturbations du vertige

voltaïque chez l'homme, et dont l'exposé va suivre, sont dues à mes

travaux, sauf en ce qui concerne l'abolition du mouvement d'inclina-

tion observé par Ewald et Pollack chez les sourds-muets, dans une

proportion de 3o pour 100.

Parmi ces perturbations les unes, d'ordre subjectif, sont déjà inté-

ressantes : les autres, d'ordre objectif, ont beaucoup plus d'importance.

Voyons d'abord les premières ; elles portent sur les sensations de dé-

placement, de rotation, qui peuvent être exagérées, affaiblies ou abolies.

Tandis qu'à l'état normal, avec un courant peu intense, de i à 3

168 AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE

milliampères, ces phénomènes sont généralement très tolérables et

disparaissent dès que l'électrisation est terminée, un courant semblable,

de quelques secondes de durée, peut en cas de trouble labyrinthique

provoquer des sensations anormales fort désagréables, susceptibles de

se prolonger pendant des heures. A ce propos, je dois faire remarquer

que l'irrigation de l'oreille pratiquée pour la recherche du réflexe calo-

rique est capable de donner lieu à des effets non moins pénibles que

ceux de l'électrisation. Par contre, les affections destructives du laby-

rinthe ont pour conséquence une diminution ou une abolition de la

sensation de vertige, permettant parfois aux malades de supporter,

sans en être incommodés, des courants de 10, 15 milliampères et

même d'une intensité encore plus grande.

Passons aux phénomènes objectifs.

La résistance au courant voltaïque ou plus exactement à l'exci-

tation provoquée par ce courant-est ordinairement exagérée et, dans

les affections bilatérales, c'est là le caractère le plus saillant; le degré

de cette résistance est plus ou moins élevé; parfois, malgré un cou-

rant atteignant 15 ou 20 milliampères, l'inclination de la tête fait

totalement défaut, au lieu qu'à l'état normal elle est généralement

perceptible avec un courant de 1 à 2 milliampères.

Cette augmentation de résistance peut s'observer aussi dans des cas

de tumeur intra-crânienne accompagnée d'oedème cérébral et d'hyper-

tension du liquide céphalo-rachidien ; mais elle n'est pas constante,

tant s'en faut.

Très souvent, l'inclination et la rotation sont remplacées par un mou-

vement de la tête en arrière. Parfois, bien plus rarement, la tête se

porte en avant.

Dans certains cas, pendant le passage du courant, on voit la tête

exécuter des mouvements alternatifs d'inclination à gauche et à droite;

c'est là un phénomène auquel s'applique fort bien la dénomination de

« nystagmus céphalique ».

Dans les affections vestibulaires qui siègent exclusivement ou pré-

AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE 169

dominent d'un côté, on observe communément un trouble que j'ai

appelé « l'inclination unilatérale » et qui présente des modalités

variées. Tantôt, quel que soit le sens du courant, la tête s'incline du

côté de l'oreille malade ; en pareil cas, à l'ouverture du courant, la

tête reprend immédiatement sa position primitive ou bien exécute

d'abord un mouvement brusque qui augmente encore l'inclination

provoquée par le passage du courant. Tantôt la tête s'incline, comme

à l'état normal, du côté du pôle positif, mais le mouvement est plus

étendu d'un côté que de l'autre. Parfois la tête s'incline du côté malade

lorsque le pôle positif occupe ce côté et, quand on intervertit le sens

du courant, au lieu de s'incliner, elle se porte en arrière. D'autres fois

enfin, l'inclination paraît se faire exclusivement du côté sain, comme

dans les expériences de Weill, Vincent et Barré (destruction complète

du labyrinthe chez le cobaye).

La rotation de la tête subit fréquemment aussi des modifications.

Elle peut être exclusivement unilatérale, quel que soit le sens du cou-

rant, et s'opérer du même côté que l'inclination ou du côté opposé.

Enfin, le nystagmus provoqué à l'état physiologique par le courant

électrique peut manquer.

Telles sont les principales variétés du vertige voltaïque à l'état

pathologique.

Chacune d'elles doit dénoter soit le degré d'intensité des lésions,

soit leur situation dans telle ou telle partie de l'appareil vestibulaire.

Sur ce dernier point, je ne suis pas en mesure d'apporter beaucoup

de précision. Mais ce que je crois pouvoir affirmer, c'est que les divers

phénomènes dont j'ai fait l'exposé expriment tous un trouble de l'appa-

reil en question et que quelques-uns de ces signes permettent parfois

de reconnaître des perturbations encore très légères. En voici une

preuve : un vertige voltaïque anormal, caractérisé par de l'inclination

unilatérale ou de la rotation unilatérale, peut redevenir normal immé-

diatement après évacuation de quelques centimètres cubes de liquide

céphalo-rachidien.

170 AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE

Les modifications du vertige voltaïque s'associent très souvent à

celles du réflexe calorique mais, et c'est là un point essentiel,

elles ne sont pas nécessairement liées les unes aux autres. J'ai

observé bien des malades atteints de lésion auriculaire dont le réflexe

calorique était normal et chez lesquels l'exploration électrique avait

révélé l'existence d'une altération vestibulaire.

Par contre, on peut constater un reste de vertige voltaïque, une

conservation du nystagmus électrique chez des malades qui n'ont plus

trace de nystagmus calorique.

La sémiologie des affections de l'oreille a été enrichie par l'acquisi-

sition des divers signes que je viens de décrire puisque, comme on

l'a vu, ils permettent de déceler des altérations même superficielles du

labyrinthe postérieur. Ils fournissent d'importants éléments d'appré-

ciation lorsqu'il s'agit de différencier une affection auriculaire vraie

d'un trouble imaginaire ayant la suggestion pour cause ou encore

quand on soupçonne la simulation, ce qui a lieu très souvent dans

les expertises relatives aux accidents du travail. Ils peuvent contribuer

à établir le diagnostic d'une affection organique du système nerveux

central et comptent parmi les manifestations objectives précoces

des tumeurs ponto-cérébelleuses. Ils sont donc précieux pour les

auristes, les médecins experts et les neurologistes.

Si l'exactitude des conclusions auxquelles je suis arrivé a été contestée par quel-

ques-uns, elle a été en revanche confirmée par de nombreux observateurs : par

Cros (Thèse, Toulouse, i go i), par Gellé (Tribune médicale, 27 mars 1901), par

Napieralski (Le vertige voltaïque dans les otopathies. Bulletin de Laryngologie,

iyo2).

Dans son Traité d'Électrothérapie clinique, paru en y6 (Masson et Cie, édi-

teurs), Zimmern consacre un chapitre à la description du vertige voltaïque et le

termine ainsi :

« En résumé, la recherche du vertige voltaïque permet :

« 1° De découvrir une lésion auriculaire qui, en l'absence de signes fonction-

nels, passerait inaperçue, ou de dépister une lésion organique ne donnant lieu qu'à

des troubles subjectifs insignifiants ;

AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE 171

« 2° De différencier une lésion auriculaire d'un trouble psychique : dans le pre-

mier cas seul, la formule du vertige normal sera modifiée ;

« 3° Il peut être enfin un signe objectif décelant l'existence d'une augmenta-

tion de pression du liquide céphalo-rachidien, symptomatique d'un néoplasme

Intracrânien. »

Les perturbations du vertige voltaïque sont d'ailleurs décrites dans la plupart

des ouvrages modernes d'électro-diagnostic et d'otologie.

Ludwig Mann (Ueber Schwindel und Gleichgewichtsstôrungen nach Commotio

cerebri und ihren Nachweis durch eine galvanische Reaktion. Medicinische Iflinik,

26 mai 1907) a publié un travail très documenté sur 1' « Inclination unilatérale»,

dont les conclusions sont conformes aux miennes.

Après avoir fait remarquer que les troubles fonctionnels dus à une lésion de

l'appareil statique sont accessibles à la simulation et qu'il y a là pour les médecins

experts une source de difficultés, il s'exprime ainsi :

« Il est par conséquent, aux points de vue pratique et théorique, de la plus

haute importance de se mettre en quête d'un moyen qui permette de déterminer,

d'une façon tout à fait objective, un trouble dans les fonctions statiques de l'ap-

pareil labyrinthique.

« J'estime qu'il existe une réaction galvanique qui permet d'atteindre le but

visé; elle a été indiquée il y a peu d'années par Babinski et on l'appelle en

France : «Phénomène auriculaire de Babinski », mais chez nous, elle semble

encore peu connue. »

Je dois ajouter que Mann, qui ne semble connaître que ma première publica-

tion sur ce sujet, celle de 1901, me prête à tort l'idée qu'une lésion auriculaire

sans participation de l'appareil vestibulaire peut provoquer l'inclination unilatérale.

Voici, extraite de mon article sur le traitement du vertige auriculaire paru en

190/i, une phrase, entre autres, qui ne laisse aucun doute sur mon opinion :

« ... j'ai cru pouvoir déduire de mes observations que les modifications sus-indi-

quées constituent des signes précieux au point de vue du diagnostic différentiel

de la surdité hystérique et de la surdité labyrinthique qui, autrement, ne peuvent

être distinguées par aucun caractère objectif. »

J'attire l'attention sur deux observations rapportées l'une par Alfred Gallais

(Syndrome agoraphobique d'origine vestibulaire. Revue neurologique, 1912, t. XXIII,

p. 3o6), l'autre par Dejerine et Quercy (Un cas de syndrome d'Avellis avec trou-

bles de l'appareil vestibulaire et hémianesthésie alterne dissociée. Revue neurolo-

gique, igi2, t. XXIV, p. 635). Elles confirment en particulier ce fait important

sur lequel j'ai insisté à savoir que les troubles du vertige voltaïque peuvent déce-

ler l'existence d'une lésion de l'appareil vestibulaire, alors que les réactions obte-

nues par la méthode de Barany sont normales.

En ce qui concerne les réactions électriques, voici les points que je relève dans

172 AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE

la première observation, contrôlée par Courtade, Zimmern et Cottenot. Un cou-

rant galvanique de 5 ma., le pôle + étant à droite, fait dévier très nettement la

tête à droite et la déviation s'accompagne de rotation ; le sens du courant étant

renversé, le malade éprouve une sensation vertigineuse plus forte que précédem-

ment, mais il ne se produit ni mouvement d'inclination, ni latéropulsion. On

prélève par une rachicentèse 10 centimètres cubes de liquide céphalo-rachidien ;

trois jours après, le vertige voltaïque est normal, l'inclination et la rotation sont

bilatérales ; de plus, les vertiges sont moins pénibles. Quant au réflexe calorique,

il a toujours été normal.

Dans la deuxième observation, où le réflexe de Barany n'a subi non plus aucune

perturbation, Bourguignon, examinant le malade au point de vue électrique,

entre autres particularités, a noté ceci :

« Avec le courant continu, l'électrode positive étant à droite, le seuil du ver-

tige apparaît à 10 ma. La tête s'incline à droite et en arrière. Pendant que le

courant passe, la déviation de la tête persiste et on constate un nystagmus dont la

secousse rapide se fait vers la gauche, et la secousse lente vers la droite. Si l'on

refait la même expérience, le pôle positif étant à gauche, on n'obtient aucune incli-

naison ni déviation de la tête. Mais, pendant que le courant passe, on cons-

tate un nystagmus orienté de la même façon que lorsque le pôle positif était à

droite. »

Désorientation et déséquilibration spontanées et provoquées.

Mouvements réactionnels et contre-réactionnels.

(En collaboration avec G.-A. Weill)

Faire exécuter certains exercices pour rendre manifestes des pertur-

bations de l'appareil vestibulaire n'est pas chose nouvelle. Ce mode

d'examen a été appliqué par Stein à la recherche des troubles « spon-

tanés », à celle des troubles « provoqués » par Barany, Buys, Gèze.

Nous avons imaginé un procédé permettant de rendre ces troubles

encore plus apparents. Il consiste à faire exécuter au sujet en obser-

vation, alternativement, six pas en avant, six pas en arrière, cinq fois

dans chaque sens sans interruption. Les déviations partielles qui peu-

vent se produire, à chaque trajet, s'additionnent ainsi.

De plus, dans l'étude des troubles provoqués, nous avons employé,

AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE 173

entre autres moyens d'excitation, l'électrisation voltaïque avec un

dispositif permettant au sujet qu'on examine de marcher pendant le

passage du courant.

Après avoir déterminé les phénomènes que l'on observe à l'état

normal, nous avons recherché les modifications que peuvent leur faire

subir les affections de l'appareil vestibulaire.

Nous avons fait connaître les résultats que nous avons obtenus

(ZO4, 206) et nous nous croyons dès maintenant autorisés à dire que

ce mode d'investigation apporte au diagnostic des lésions de l'appa-

reil vestibulaire des données précieuses. Mais, comme il s'agit là de

travaux tout récents encore à l'étude, je me contente de les signaler.

Traitement.

Les troubles liés aux lésions labyrinthiques sont susceptibles de s'at-

ténuer et même de disparaître sous l'influence d'une ponction lom-

baire. Voici comment j'ai été conduit à concevoir ce mode de traite-

ment dont j'ai démontré l'efficacité. La recherche du vertige voltaïque

pratiquée sur des malades nullement atteints, d'ailleurs, d'affections

auriculaires, et que je soumettais à la rachicentèse dans un but thé-

rapeutique ou en vue du cytodiagnostic, m'avait montré que d'ordi-

naire la résistance à l'excitation électrique diminuait après l'opération.

Il y avait lieu d'en conclure que la ponction lombaire exerce une

action sur le labyrinthe. Du reste, cette action ne me paraissait pas

surprenante, la pression du liquide labyrinthique devant être subor-

donnée en partie à celle du liquide céphalo-rachidien. Dès lors, il

était tout naturel de se demander si la ponction lombaire ne serait

pas capable d'agir favorablement sur des troubles ayant des lésions

labyrinthiques pour cause. J'estimai qu'il y avait là une application

thérapeutique à tenter.

Je m'y suis cru d'autant plus autorisé que les moyens employés

174 AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE

d'ordinaire contre les troubles en question sont généralement ineffi-

caces et que, faite avec précaution, la rachicentèse n'est nullement dan-

gereuse.

J'ai traité ainsi un grand nombre de sujets atteints de vertiges,

d'affaiblissement de l'ouïe ou de bourdonnements d'oreille. Chez beau-

coup d'entre eux, une seule ponction a été pratiquée, mais plusieurs

en ont subi deux, trois et même davantage, à des intervalles plus ou

moins longs. La quantité de liquide extraite chaque fois a été de 5 à 20 o

centimètres cubes.

L'influence de cette intervention sur les troubles qui sont liés aux

perturbations de l'appareil vestibulaire est généralement manifeste. Il

n'est pas rare que les caractères objectifs du vertige voltaïque changent

immédiatement après l'opération : la résistance diminue souvent d'une

manière encore plus marquée que chez les sujets dont le labyrinthe

est sain ; l'intensité du courant nécessaire pour déterminer de l'in-

clination peut tomber par exemple de 10 milliampères à 5 ou à 4 ; ',

j'ajoute que chez d'autres malades, dont les altérations labyrinthiques

sont, sans doute, très intenses, la résistance ne se modifie en rien. De

plus, on peut voir le retour à l'état normal ou à un état voisin de la

normale d'un vertige voltaïque caractérisé par une inclination ou une

rotation unilatérale. Ce phénomène, qui s'observe sans qu'il soit fait

appel au témoignage du malade, ce qui exclut l'idée de suggestion, est

particulièrement instructif; outre qu'il montre jusqu'à l'évidence

l'action de la ponction sur les troubles labyrinthiques, il prouve que

l'inclination et la rotation unilatérales peuvent être liées à des lésions

labyrinthiques superficielles et, ce qui est un corollaire de la propo-

sition précédente, que, pour l'exploration du labyrinthe, l'électrisa-

tion est une méthode d'une grande finesse.

Quant aux troubles fonctionnels, ils peuvent également s'atténuer

aussitôt ; quelques sujets m'ont déclaré séance tenante qu'ils se sen-

taient plus à l'aise et que leur tête était plus libre. Bien qu'on soit,

à priori, tenté de voir là l'effet d'une suggestion, il est admissible

AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE 173

que les troubles subjectifs s'atténuent immédiatement à l'instar des

troubles objectifs. D'ordinaire, ces effets salutaires se font sentir

seulement après quelques jours, quelques semaines ou plus tardive-

ment encore. Ils ne sont pas constants, mais il est exceptionnel que

les sensations vertigineuses ne diminuent pas, au moins quelque peu,

ne serait-ce que d'une manière transitoire. Parfois, et ceci n'est pas

rare, l'amélioration, pouvant aller jusqu'à la disparition complète du

vertige, dure fort longtemps et même indéfiniment ; je connais nombre

de malades qui, après avoir été atteints, durant des mois, de vertiges

auriculaires, en ont été débarrassés à la suite d'une ou de plusieurs

ponctions lombaires, et dont la guérison date actuellement de plus de

cinq ans.

La rachicentèse a une action bien moindre sur les troubles dépen-

dant des lésions du labyrinthe antérieur : bourdonnements, diminu-

tion de l'ouïe, surdité ; les cas où une amélioration a été obtenue sont

exceptionnels (93, io5).

Lumineau (De la ponction lombaire dans le traitement des troubles auditifs.

Thèse, Paris, ego3), écrit dans ses conclusions :

« La ponction lombaire s'est montrée l'agent thérapeutique le plus efficace

contre les labyrinthites et tous les phénomènes de labyrinthisme.

« Dans les otites sèches, elle agit favorablement presque toujours sur les ver-

tiges, fait très souvent disparaître les bourdonnements et améliore parfois l'au-

dition. »

Mignon (Thèse, Bordeaux, igo3. Contribution à l'étude du traitement des

affections auriculaires par la ponction lombaire) rapporte quatre observations

personnelles dans lesquelles il y a eu, après la ponction, atténuation ou dispari-

tion des vertiges et des bourdonnements, sans que la fonction auditive ait été

notablement influencée. Il s'agissait delabyrinthite suppurée, de commotion laby-

rinthique, de syphilis cérébrale avec paralysie faciale et acoustique, de maladie de

Ménière.

Chauffard et Boidin (Gazette des Hôpitaux, 21 juin 1904, p. 728) écrivent :

« Nous avons été à même de vérifier l'action bienfaisante de la ponction lombaire

dans un cas de vertige labyrinthique, caractérisé par des bruits subjectifs avec

état vertigineux constant, se compliquant de grands ictus. La malade avait déjà eu

cinq de ces chutes précédées d'un aura auditif. La soustraction de 15 centimètres

176 AFFECTIONS DE L'APPAREIL VESTIBULAIRE

cubes de liquide céphalo-rachidien suffit à produire une amélioration très grande.

L'état vertigineux, les ictus disparurent, les bruits subjectifs diminuèrent beau-

coup. »

E. Lombard et H. Caboche (Congrès international d'Otologie de Bordeaux,

9 août igo4) rapportent sept cas d'otosclérose traitée par la ponction lombaire.

Les vertiges, disent ces auteurs, semblent bien être plus influencés que le bour-

donnement et la surdité et ils ajoutent : « Dans tous les cas d'amélioration des

vertiges et des bourdonnements, les malades accusent une sensation de légèreté

de la tète, comme si leur tête était dégagée. »

Trétrop, d'Anvers (Annales des maladies de l'oreille, déc. 19,)4, p. 55 Résul-

tats personnels du traitement des vertiges, des bourdonnements et de la surdité

par la méthode de Babinski), écrit : « Les vertiges ont été régulièrement influen-

cés et ont généralement complètement disparu ; les bourdonnements ont suivi

une marche analogue. Quant la surdité, dans trois cas, j'ai obtenu à n'en pas

douter un résultat inespéré » (sur quinze malades).....

« Les vertiges sont les symptômes qui sont le plus favorablement influencés,

puis viennent les bourdonnements, et en dernier lieu la surdité. »

Helsmoortel (Ponction lombaire dans les affections de l'oreille. Société médico-

chirurgicale d'Anvers, déc. igo5) communique trois observations, deux d'oto-

sclérose, une d'otite moyenne cicatricielle, dans lesquelles il a obtenu par la

ponction lombaire la disparition des vertiges, la diminution des bruits subjectifs

et l'amélioration de Fouie.

Godts (Quelques considérations générales sur la ponction lombaire, etc. Archi-

ves médicales belges, mars 1906, p. 169) relate deux cas d'otosclérose avec vertiges

tenaces que la rachicentèse a fait disparaître. ,

Weill, Barré et Gastinel (Société de Laryngologie,Otologie et Rhinologie de .Parts,

9 juillet 1909) présentent trois malades vertigineux qui ont été débarrassés de

leurs vertiges par la ponction lombaire. L'un de ces malades, atteint aussi

d'amblyopie, a obtenu une amélioration immédiate de la vision.

Guisez (La pratique olo-rlvino-larngolociclue, Baillère, tgog) dit à propos de la

rachicentèse : « Nous l'avons employée systématiquement chez douze malades.

Dans quatre cas, nous avons vu les vertiges disparaître ; dans cinq cas, il y a

eu amélioration notoire ; dans un cas, aggravation ; dans deux autres, résultat

nul. »

Barany (Handbuch der Neurologie, Bd. III. S. 8/), 848) écrit : « Depuis trois

ans que j'ai entrepris de contrôler les faits publiés par Babinski, je n'ai eu l'occa-

sion d'employer que dans dix cas la ponction lombaire contre le vertige. Avant et

après la ponction, j'ai toujours examiné aussi minutieusement que possible le

fonctionnement de l'appareil vestibulaire...

« Dans huit cas sur dix j'ai obtenu une guérison complète ou presque complète

TORTICOLIS SPASMODIQUE. - TORTICOLIS « MENTAL » 177

du vertige et des nausées. Six de mes dix malades avaient des lésions de l'oreille

interne (région cochléaire) ; dans deux cas, on devait penser à l'artério-sclérose ;

dans l'un de ces cas le vertige disparut, pendant un an, après la ponction et une

autre dut être faite ; le deuxième ne fut pas modifié d'une manière certaine. Deux

cas, de cause inconnue, furent favorablement influencés. Ces deux derniers étaient

vraisemblablement des cas de méningite séreuse de la fosse cérébelleuse. Dans

tous les cas que je considère comme guéris, j'ai constaté, après la ponction lom-

baire, une forte diminution des sensations de vertige. Tandis qu'avant la ponction

les malades souffraient de vertiges intenses et de nausées à l'occasion du

moindre nystagmus expérimental, il n'y avait plus, après l'opération, aucun

vertige ni aucune nausée, même avec le nystagmus le plus accentué. Dans

quelques cas, on pouvait encore déclencher le nystagmus par les mouvements

rapides de la tête, mais les malades n'en paraissaient plus vraiment gênés. »

J. J. Putnam (« The Babinski 's Treatment of aurai vertigo by lumbar punc-

ture ». The Journal of nervous and mental Disease, sept. igi i, p. 5/)o) présente un

travail sur le traitement du vertige auriculaire parla ponction lombaire; il s'appuie

pour confirmer l'efficacité de ce traitement sur les observations de 16 cas étudiés

depuis cinq ans par leur C. J. Blake et par lui-même.

TORTICOLIS SPASMODIQUE. TORTICOLIS « MENTAL »

Pathogénie.

La plupart des neurologistes ont admis la manière de voir de

Brissaud sur la pathogénie du torticolis spasmodique qui, d'après

cet auteur, serait d'origine mentale.

J'ai observé des faits qui semblent en opposition avec cette idée.

En février igoo, j'ai présenté à la Société de Neurologie (57) un

malade atteint d'un hémispasme occupant le côté gauche ; au membre

inférieur les troubles étaient légers ; ils étaient au contraire très mar-

qués au membre supérieur et à la région cervicale. Le spasme du cou

siégeait principalement dans le trapèze et le sterno-mastoïdien ; par

la forme des mouvements qu'il provoquait, par leur mode de succes-

sion, par les attitudes qu'il déterminait, il reproduisait exactement le

tableau symptomatique du torticolis dit mental. Or, tandis que le

BABINSKI. 12 a

178 TORTICOLIS SPASMODIQUE. - TORTICOLIS « MENTAL »

réflexe cutané plantaire était normal à droite, on constatait à gauche

le signe des orteils. A moins de supposer la coexistence fortuite de

deux affections bien différentes, on est conduit à admettre que le

torticolis dépendait dans l'espèce d'une perturbation organique des

centres nerveux, dont le signe des orteils était le témoignage. C'est

l'opinion qui m'avait paru la plus vraisemblable.

En igoi, j'ai rapporté une observation analogue à la précédente (76).

Il s'agissait d'un spasme du cou prédominant dans le sterno-mastoïdien

et associé à un spasme du membre supérieur gauche. La tête, à peu

près constamment en rotation à gauche, était à tout instant agitée par

des contractions spasmodiques des muscles cervicaux qui accentuaient

la rotation et donnaient lieu à un soulèvement du menton. Le malade

avait été amené, en quelque sorte automatiquement, à soutenir sa tête

avec la main, comme cela est la règle dans le torticolis dit mental.

Ce qui faisait sortir ce fait de la banalité, c'est qu'au membre supérieur

gauche le réflexe du triceps brachial était manifestement exagéré.

Cette surréflectivité tendineuse est contraire à l'hypothèse d'un trouble

mental et cadre avec celle d'une affection organique.

Depuis, j'ai eu l'occasion d'observer plusieurs autres sujets chez

lesquels à un torticolis « mental » était associée l'extension réflexe du

gros orteil ou le signe de l'éventail.

Ces nouvelles observations ont fortifié dans mon esprit l'opinion

que j'ai émise sur la pathogénie du torticolis spasmodique. Mais, je

tiens à le faire remarquer, si je suis très porté à croire que celle affec-

tion est liée à une perturbation organique des centres nerveux, je pense

que les lésions dont elle dépend doivent être, au moins dans la majo-

rité des cas, superficielles; autrement, il serait difficile de comprendre la

rapidité avec laquelle elle est susceptible de s'atténuer et de disparaître.

La perturbation organique présumée siège-t-elle dans le système

pyramidal, comme paraissent l'indiquer les modifications des réflexes

tendineux et du réflexe cutané plantaire ? Je l'avais pensé d'abord ; mais,

sur ce point, il y a lieu de faire des réserves. Il serait permis de sup-

TORTICOLIS SPASMODIQUE. - TORTICOLIS « MENTAL » 179

poser qu'elle occupe une région des centres nerveux avoisinant ces

faisceaux, par exemple le corps opto-strié. Le phénomène des orteils

ou l'exagération des réflexes tendineux apparaissant au cours du torti-

colis « mental » signifierait que la lésion n'est pas restée cantonnée

dans cette région et qu'elle a intéressé les fibres de la voie pyramidale.

Destarac (Revue neurologique, 1 go l, p. 5g 1 et Nouvelle Iconographie de la Salpê-

trière, igos, n° 5. Le syndrome du torticolis spasmodique), se fondant sur deux

faits qu'il a soigneusement étudiés, cherche à établir un lien entre le torticolis

mental et la maladie de Friedreich ; c'est là une conception nouvelle que je n'ai

pas à envisager ici. Mais ce que j'ai à faire ressortir c'est que dans sa première

observation, se rapportant une jeune fille atteinte d'« un torticolis clonique d'abord,

tonique ensuite, rappelant les récentes descriptions du torticolis mental et, comme

lui, corrigé par le signe du doigt», le signe des orteils était très net des deux côtés.

Cestan et Guillain (Revue de Médecine, octobre J goo, p. 8 t 5) ont constaté un tor-

ticolis spasmodique chez trois malades atteintes de paraplégie spasmodique familiale.

« Il nous a paru intéressant, disent ces auteurs, de signaler, chez nos spasmodiques,

ce torticolis spasmodique semblable au torticolis mental et de conclure, sinon à

leur identité complète au point de vue de la pathogénie, du moins à leur ressem-

blance parfaite au point de vue de la clinique. Nous voyons donc qu'en présence

d'un torticolis mental, l'attention doit être attirée vers la possibilité d'une altéra-

tion de la voie pyramidale. »

Beduschi et Bossi ont publié sur « la Pathogénie du Torticolis dit mental » un

travail analysé dans la Revue neurologique (igo-li, p. 178). Ils relatent l'observa-

tion d'une malade atteinte d'un torticolis spasmodique ayant les caractères clini-

ques du torticolis mental et dont les réflexes tendineux étaient exagérés surtout à

gauche. Ils concluent que le torticolis dit mental n'est pas l'expression d'un trouble

psychique, mais celle d'une irritation encore indéterminée dans sa nature et qui a

son siège dans la zone motrice de l'écorce.

Ces travaux, comme on le voit, viennent à l'appui de ma thèse.

Traitement.

La section de la branche externe du spinal, dans le torticolis spas-

modique, après avoir été souvent pratiquée, a été ensuite déconseillée

par la plupart des neurologistes qui l'ont considérée comme irration-

nelle et incapable d'être réellement efficace.

180 TORTICOLIS SPASMODIQUE. TORTICOLIS « MENTAL »

J'ai rapporté, en 1907, une observation établissant que cette opéra-

tion peut être utile (r 43) ; en voici un résumé :

Une femme atteinte d'un spasme du cou, se manifestant principa-

lement par des mouvements involontaires de rotation de la tête de

gauche à droite, est traitée sans succès par la gymnastique, la réédu-

cation motrice et divers autres moyens médicaux. Cinq mois après le

début de la maladie, tourmentée sans cesse par des mouvements spas-

modiques qui la mettent dans l'impossibilité de se livrer à un travail

quelconque, elle paraît absolument désespérée. La section du spinal

a pour résultat d'amener immédiatement une atténuation très notable

des mouvements involontaires de rotation, atténuation qui s'accen-

tue encore dans la suite.

Il est à remarquer que quatre ans après l'opération, époque où la

malade a été revue pour la dernière fois, l'amélioration, équivalant

presque à une guérison, s'était maintenue malgré la régénération du

sterno-mastoïdien et du trapèze.

J'ai observé ultérieurement un cas analogue.

A ce propos, j'attire l'attention sur ce fait qu'à l'atrophie du sterno-

mastoïdien et du trapèze, consécutive à la section du spinal, succède

assez rapidement une régénération; ces muscles, comparés à ceux

des membres inférieurs ou des membres supérieurs, paraissent sou-

mis à un régime privilégié leur conférant une aptitude plus grande à

régénérer (17/i).

CHORÉE DE SYDENIIAM

Pathogénie.

J'ai communiqué, en i go5, à la Société de Neurologie (n5) une

note intitulée : « De la flexion combinée de la cuisse et du tronc dans

la chorée de Sydenham ». Voici ce que j'ai écrit :

« J'ai observé, chez un assez grand nombre de sujets atteints de cho-

CHORÉE DE SYDENHAM 181

rée de Sydenham, la flexion combinée de la cuisse et du tronc. Je l'ai

constatée dans certains cas où la chorée était à peu près également

marquée des deux côtés; parfois alors le phénomène se manifeste d'un

côté quand le malade passe de la position horizontale à la position

assise, et du côté opposé lorsque le malade exécute le mouvement

inverse. Mais c'est surtout dans des cas de chorée prédominant nota-

blement d'un côté du corps, dans des cas d'hémichorée, que j'ai eu

l'occasion d'observer cette flexion avec le plus de netteté, et elle se pro-

duit du côté où prédominent les mouvements involontaires. Généra-

lement ce phénomène s'atténue et disparaît en même temps que les

mouvements choréiques ; il est par conséquent étroitement lié à la

maladie. Or, si l'on se rappelle que ce trouble constitue un des signes

objectifs les plus communs de l'hémiplégie organique, qu'il fait défaut

dans les paralysies psychiques, on peut admettre qu'il permet de

distinguer, dans certains cas, la chorée de Sydenham de la chorée

hystérique, et on possède là un signe qui, sans avoir une valeur déci-

sive, vient à l'appui de l'opinion que la chorée est une affection orga-

nique intéressant le système pyramidal. »

En 1906, A. Charpentier présentait à la Société de Neurologie (Revue neurologi-

que, 1906, p. 1 176) un enfant de 12 ans atteint de chorée de Sydenham chez qui on

constatait le signe des orteils. « Ce fait, disait-il, est rapprocher des observations

de chorée où M. Babinski a trouvé le mouvement combiné de flexion de la cuisse

et du bassin et prouve que dans la chorée de Sydenham il existe une perturbation

du système pyramidal. »

En igog, dans trois communications successives, l'une en collaboration avec

Tinel (Revue neurologique, 1909, pp. G38, 80o et 1060)etdontladernièreestintitulée :

« Chorée de Sydenham : maladie organique », Thomas développe la même idée.

Chez 10 enfants atteints de chorée de Sydenham, il a observé des signes de lésions

du système nerveux (troubles du tonus, flexion combinée de la cuisse et du tronc,

modifications des réflexes tendineux, signe des orteils, etc.) ; de plus, ayantprati-

qué la rachicentèse chez quatre malades, il a constaté deux fois une lymphocy-

tose discrète.

Thomas rappelle que la lymphocytose a été trouvée plusieurs fois par Sicard et

Babonneix chez des choréiques fébricitants, et par Claude dans un cas de chorée

persistante.

182 CHORÉE DE SYDENHAM

JumentiéetChenet(Reuueneuro ! ot</g, igog,p. g ! ¡5) relatent également un fait

de chorée de Sydenham avec troubles organiques (surréflectivité tendineuse, phéno-

mène des orteils, etc.).

D'autres observations analogues ont été publiées.

D'une revue générale de Brelet ayant pour titre : « Étiologie et Pathogénie

dela chorée de Sydenham » (Gazette des Hôpitaux, igi3, p. go3) j'extrais ce

passage :

« Les recherches de Babinski, d'André Thomas, ont profondément modifié nos

idées sur la nature de cette maladie, car il résulte de leurs travaux qu'on trouve

assez souvent chez les choréiques les signes cliniques propres aux affections orga-

niques du système nerveux. D'autres arguments peuvent encore être invoqués en

faveur de la théorie qui fait de la chorée une maladie organique du système ner-

veux ; cette théorie a été adoptée et soutenue par Hutinet et Babonneix (Les

maladies des enfants, t. V.), Iirajllé et Cassard (Gazette médicale de\'anles, 25 mars

et 1"" avrillgll), M"0 Gatow-Gatowski (Thèse, Paris, igio), Grenet et Loubet,

(Revue neurologique, t déc. igi2. Thèse de Loubet, Toulouse, mai 1912.

Article de Grenet in Monde médical, 25 avril 1913). »

Traitement.

J'ai appelé l'attention sur l'influence heureuse que la scopolamine

semble parfois exercer sur la chorée de Sydenham (i31).

VII. - AFFECTIONS DES GLANDES A SÉCRETION

INTERNE

SYNDROME HYPOPHYSA1HE ADIPOSE-GéNITAL

On appelle syndrome hypophysaire adiposo-génital ou dystrophie

adiposo-génitale, ou encore « syndrome de Frôhlich » l'association

d'une adiposité généralisée à un arrêt de développement des organes

génitaux externes et internes, association dépendant en l'espèce d'une

perturbation dans le fonctionnement du corps pituitaire. Ajoutons

que ce syndrome, quand il est pur, ne comporte ni acromégalie, ni

gigantisme. Il est déterminé le plus souvent par une tumeur de la

région hypophysaire et ce sont les symptômes caractéristiques d'une

néoplasie occupant ce siège, tels que les phénomènes oculaires spé-

ciaux, qui permettent, du vivant du malade, de rapporter à leur véri-

table cause l'adiposité et les troubles génitaux.

Le travail de Frôhlich date de 1 po 1. Outre ce mémoire, il en a

été publié un grand nombre dans lesquels le sujet qui nous occupe a

été traité d'une manière plus ou moins approfondie.

Tous, sauf celui de Pechlcrantz sur lequel je reviendrai, sont pos-

térieurs à une communication que j'ai faite à la Société de Neurolo-

gie le 7 juin i goo, et qui a pour titre : « Tumeur du corps pituitaire

sans acromégalie et avec arrêt de développement des organes génitaux »

(61). Le titre de mon travail joint aux deux photographies qui y sont

181

AFFECTIONS DES GLANDES A SÉCRÉTION INTERNE

annexées (voir fig. 28, 2g) et sur lesquelles la surcharge adipeuse et

l'aspect infantile du pubis sont manifestes, montrent déjà que tous

les symptômes cardinaux du syndrome adiposo-génital ont été expres-

sément notés par moi.

Î c. a8.

l'IG. 29,

Les lignes suivantes, extraites de ma communication, pourront à cet

égard fixer le lecteur d'une manière encore plus précise.

« Il s'agit d'une jeune fille de 17 ans que j'ai observée il y a dix

ans. Elle se plaignait de douleurs de tête qui, ayant apparu environ

trois ans auparavant, avaient petit à petit augmenté d'intensité et

atteint un haut degré de violence. Depuis plusieurs mois elle était

sujette à des crises épileptiformes, et sa vue s'était notablement affaiblie.

SYNDROME HYPOPHYSAIRE ADIPOSO-GÉNITAL 183

« Après avoir fait déshabiller la malade, on est frappé par la sur-

charge adipeuse du corps et par l'aspect infantile des organes génitaux

qui contraste avec la taille, d'une hauteur moyenne; du reste la malade

n'est pas réglée. L'intelligence paraît normale, mais la mémoire a

beaucoup diminué depuis quelque temps. Il n'y a pas de troubles

paralytiques. Les réflexes tendineux sont exagérés et ily a de la trépida-

tion épileptoïde du pied. A l'examen ophtalmoscopique, on constate de

FIG. 30. 3o. FJG. 31. 31

l'oedème papillaire bilatéral. Tels sontles caractères objectifs qui furent

notés.

« La malade succomba peu de temps après le premier examen. La

nécropsie décela l'existence d'une tumeur qui occupait la selle tur-

cique, adhérait au corps pituitaire et englobait le tuber cinereum (voir

fig. 3o, 31). Ce néoplasme a été examiné histologiquement par

Onanoff, qui a fait de cette étude l'objet de sa thèse (Thèse, Paris,

18g2). Il s'agit, d'après Onanoff, d'un épithelioma, du type mal-

pighien, développé aux dépens de l'épithelium de la glande pituitaire, en

186 AFFECTIONS DES GLANDES A SÉCRÉTION INTERNE

pleine évolution hyperplasique, avec dégénérescence myxomateuse

du stroma conjonctif.

« Les ovaires et l'utérus sont très petits ; d'après leurs dimensions,

ils sembleraient appartenir à une fillette de 8 à 10 ans.

« Cette observation est intéressante à deux points de vue : d'une

part, l'absence d'acromégalie, de gigantisme contraste avec l'existence

d'une grosse tumeur du corps pituitaire ; mais, pour que ce fait fût

très instructif, il serait nécessaire de savoir dans quelle mesure la

glande a été altérée. D'autre part, la coexistence de l'infantilisme,

caractérisé par l'arrêt de développement des organes génitaux, et de la

lésion pituitaire mérite aussi d'être remarquée. Il est vrai que, l'examen

du corps thyroïde n'ayant pu être pratiqué, on pourrait supposer que

cette glande était altérée et que l'infantilisme était sous la dépendance

de cette lésion présumée. Il me semble toutefois que l'idée d'une rela-

tion de cause à effet entre la tumeur du corps pituitaire et l'infanti-

lisme est très soutenable. On sait que les lésions de l'hypophyse, quand

elles apparaissent chez l'adulte, peuvent amener des troubles des

organes génitaux, la suppression des règles, l'atrophie de l'utérus ; il

est donc bien naturel qu'une semblable lésion, quand elle débute chez

l'enfant, produise un arrêt de développement des organes génitaux. »

Il est par conséquent impossible d'attribuer à Frôhlich la paternité

de ce syndrome que j'ai décrit avant lui, sans, à la vérité, donner à

l'ensemble des troubles qui le constituent le nom de syndrome,

détail sans importance.

Mon travail serait le premier sur ce sujet, n'était celui de

Pechkrantz. Cet auteur, en effet, a publié dans le Neurologisches Cen-

lralblatt (I8gg, pp. 2o3 et suiv.) un article intitulé : Zur Casuistik der

Hypophysis Tumoren (Sarcoma angiomatodes hypophyseos cerebri).

Il rapporte l'observation d'un jeune homme de 17 ans qui présentait

un aspect féminin ; parmi les symptômes constatés il mentionne le

développement du pannicule adipeux ainsi que l'état infantile de

l'appareil sexuel, et se dit enclin à établir une relation entre les troubles

MALADIE DE BASEDOW 187

de la nutrition, l'hypoplasie des organes génitaux et les anomalies de

structure de l'hypophyse. Les principaux caractères du syndrome

sont donc indiqués ; mais ils ne le sont que d'une manière incidente,

parmi d'autres faits bien différents, et rien ne signale l'existence de ce

type morbide dans le titre donné par Pechkrantz à son mémoire.

On reconnaîtra, je pense, que mon travail, s'il est le deuxième en

date, est le premier dans lequel ont été mis en évidence les traits

essentiels du syndrome hypophysaire adiposo-génital.

MALADIE DE BASEDOW

J'ai traité par le salicylate de soude plusieurs malades atteints de

goitre exophtalmique et cette méthode, employée déjà avec succès par

Chibret, de Clermont-Ferrand, m'a donné des résultats satisfaisants.

Entre autres faits, voici une observation résumée que j'extrais de

mon travail (71) publié en igoi :

« Il s'agit d'une jeune femme de 28 ans, chez laquelle l'affection,

ayant débuté vers le milieu de 1898, avait augmenté progressivement à

partir de cette époque et cela avec une très grande rapidité depuis le

milieu de janvier 18gg. Au commencement de février, je constatais

un goitre pulsatile très marqué, une exophtalmie bilatérale fort appa-

rente, du tremblement des membres supérieurs et une augmentation

du nombre des pulsations qui s'élevaient au chiffre de i 4o à la minute ;

la malade s'était notablement affaiblie et avait maigri.

« Le traitement salicylé fut institué (de 3 à 4 grammes par jour)

et continué pendant plusieurs mois, avec des interruptions.

« En octobre iSgg je revis cette femme ; son état s'était transformé,

elle se sentait bien plus forte, les pulsations n'étaient plus qu'au nombre

de 80 à la minute, le goitre et le tremblement avaient disparu,

l'exophtalmie avait diminué, et le poids s'était accru de plusieurs

livres.

188 AFFECTIONS DES GLANDES A SÉCRÉTION INTERNE

« A un nouvel examen pratiqué à la fin de igoo, la guérison du

goitre, du tremblement et de la tachycardie s'était maintenue ;

l'exophtalmie avait complètement disparu. »

Comme on le voit, la médication doit durer plusieurs mois, ce qui

est en général sans inconvénient, lorsque les reins fonctionnent

normalement. J'ajoute que l'efficacité de cette cure est loin d'être

constante et que parfois les troubles, après avoir rétrocédé, reparaissent.

Quoiqu'il en soit, la connaissance d'un moyen capable, dans certains

cas, d'atténuer et même de guérir la maladie de Basedow constitue

une acquisition précieuse pour la thérapeutique.

Ces faits ont été vérifiés par de nombreux médecins : par Terson père (Arch. m<M.,

Toulouse, 1902), par Joussement qui, dans son travail sur « le traitement du

goitre exophtalmique » (Thèse, Paris, igo4), rapporte des observations qui lui

sont personnelles, ou qu'il tient de Launois et de Guinon.

Sergent (Soc. méd., ego7, p. 1280), dans une communication intitulée : « t1

propos d'un cas de syndrome de Basedow consécutif à une crise de rhumatisme

articulaire aigu prolongé », écrit : ... « Il est permis de penser que si le salicylate

de soude, administré pendant longtemps, exerce une influence heureuse sur cet

état pathologique, c'est parce que celui-ci présente des affinités plus ou moins

étroites avec le rhumatisme aigu. »

H. Vincent (Soc. méd., 1907, p. 1286), dans une communication ayant pour

titre : « Rapports de la maladie de Basedow avec le rhumatisme aigu exprime la

même idée. « Il n'est pas jusqu'à la thérapeutique spéciale, dit-il, dont est

parfois justiciable le goitre exophtalmique, qui ne vienne apporter une nouvelle

confirmation de l'étroite relation existant entre cette maladie et le rhumatisme.

Chibret et Babinski ont recommandé le salicylate de soude dans le traitement de la

maladie de Basedow. Chez quelques malades de Babinski les effets ont été remar-

quables. Je puis confirmer les résultats favorables donnés par cette médication. »

VIII. AFFECTIONS DE L'APPAREIL CARDIO-VASCULAIRE

ANÉVRISME DE L'AORTE

Anévrisme de l'Aorte et Troubles pupillaires.

Les troubles pupillaires, en particulier l'inégalité des pupilles, qu'il

n'est pas rare d'observer dans l'anévrisme de l'aorte, étaient attribués

autrefois à une irritation ou à une paralysie du nerf sympathique

résultant d'une compression de ce nerf par la poche anévrismale. Sans

contester qu'il puisse en être ainsi dans certains cas, j'ai montré que

le mécanisme de ces perturbations est d'habitude bien différent (78).

Recherchant le réflexe à la lumière dans des cas d'ectasie aortique

avec inégalité pupillaire, j'avais constaté qu'il était très affaibli ou

aboli, ce qu'une lésion du sympathique, quelle qu'en soit la nature

et l'intensité, ne saurait expliquer. Dans les faits en question, les

troubles pupillaires étant permanents, n'étant liés à aucune lésion

des globes oculaires et n'étant pas associés à une paralysie de la

3e paire, réalisaient les conditions requises (voir p. 58) pour être

légitimement attribués à une lésion syphilitique des centres ner-

veux. J'ajoute que j'avais noté aussi, dans quelques-unes de mes

observations, une abolition des réflexes achilléens, ce qui venait à

l'appui de l'hypothèse d'affection organique du système nerveux.

J'émettais l'idée que dans les faits étudiés par moi les troubles de la

pupille n'étaient nullement sous la dépendance de l'anévrisme, que

190 AFFECTIONS DE L'APPAREIL CARDIO-vASCULA1RE

cependant il ne s'agissait pas là d'une coïncidence fortuite, que les

lésions aortiques et les perturbations pupillaires étaient liées par des

relations d'ordre étiologique et que c'était la syphilis qui les ratta-

chait les unes aux autres.

J'extrais de mon travail sur cette question le passage suivant :

« Je rappellerai que la coïncidence entre le tabes confirmé et l'in-

suffisance aortique a été fréquemment signalée ; mais, dans les faits

de ce genre, le diagnostic d'ataxie s'imposait, et il n'y avait aucune

raison pour songer à une compression du sympathique par une aorte

dilatée. Dans les observations que je viens de rapporter, il en est tout

autrement ; la lésion organique du système nerveux eût fort bien pu être

méconnue, ce qui me conduit à me demander s'il n'en a pas été ainsi

dans d'autres cas d'anévrisme aortique accompagné de troubles

pupillaires, et je voudrais savoir jusqu'à quel point est fondée la

notion classique qui fait dépendre ces troubles d'une compression

nerveuse. N'a-t-on pas été amené à cette idée par des considérations

théoriques, en rapprochant les phénomènes pupillaires des phéno-

mènes laryngés qui sont dus à la compression du récurrent ? P

« Pour résoudre cette question, il faut de nouvelles observations ;

j'invite donc mes collèguesà examiner, chez les aortiques qui se présen-

teront à eux, l'état du réflexe à la lumière, et à faire connaître à la

Société les résultats de leurs recherches » ( 8).

Trois semaines après ma communication, Vaquez publia dans les Bulletins de la

Société médicale des Hôpitaux, 1902. pp. 79 et 80, un travail qu'il voulut bien

intituler : « Syndrome de Babinski (Association des troubles de la pupille avec

les lésions de l'aorte). »

En voici quelques extraits :

« M. Babinski nous a rendu le très grand service de mettre de l'ordre et de l'unité

dans ces constatations disparates...

« Nos trois observations représentent un type différent des divers stades de la

maladie ; dans la troisième, les symptômes se réduisent exclusivement à la lésion

valvulaire aortique et à l'inégalité pupillaire avec perte des réflexes à l'accommoda-

tion et à la lumière. Chose curieuse, c'est dans ce dernier cas que la syphilis est le

plus indubitable.

ANEVRISME DE L'AORTE 191

« Si la lésion aortique ne se montrait qu'au cours du tabes confirmé, peut-être

aurions-nous hésité à donner à leur association avec les troubles de la pupille le

nom de syndrome de Babinski, mais comme il peut arriver qu'ils constituent à eux £

seuls toute la maladie, et cela pendant un temps très long, il nous a paru légi-

time de donner à cette association la dénomination sus-indiquée, en raison de l'in-

térêt pathogénique, diagnostique et thérapeutique qu'elle présente.

« En effet, en dehors des cas où la coincidence peut être fortuite, comme celui

d'une lésion valvulaire aortique d'origine rhumatismale évoluant au cours d'un

labes, la réunion des symptômes dont nous parlons devra faire suspecter la syphilis

comme cause étiologique commune, puisqu'il semble acquis que le signe d'Argyll

Robertson est fonction de syphilis.

« Enfin, et pour les raisons précédemment indiquées, il sera désormais néces-

saire ou tout au moins légitime de soumettre au traitement spécifique les sujets

atteints de lésions aortiques chez lesquels, en dehors de toute autre condition étio-

logique que l'on puisse invoquer, l'existence simultanée de troubles pupillaires

montrera la réalité de l'infection syphilitique. »

J. Chaillous a publié en juillet 1902 dans les Annales d'oculislique un mémoiie

intitulé : «Des troubles pupillaires chez les malades atteints de dilatation aortique. »

J'en extrais le passage suivant :

« Cette opinion (opinion de Babinski) est tout à fait opposée à l'opinion clas-

sique répandue dans tous les traités, dans toutes les thèses, et qui met sous la dé-

pendance directe de l'anévrisme de l'aorte les troubles pupillaires qui coïncident avec

lui......

« \TOUS croyons donc pouvoir conclure : le plus souvent les symptômes pupillaires

qui coincident avec les anévrismes de la crosse aortique se rattachent à la cause

même qui a produit cet anévrisme, c'est-à-dire à la syphilis. Ces conclusions n'ont

pas seulement un intérêt théorique. L'examen des pupilles fait d'une façon systé-

matique chez tout malade, et en particulier chez tout malade atteint de lésions

vasculaires, de dilatation aortique, démontrera la nécessité d'une thérapeutique

qui pourra, dans certains cas tout au moins, être plus efficace que celle suivie

jusqu'à présent. »

Renon, dans une leçon clinique (Archives générales de médecine, 4 avril igo5)

intitulée : et Rétrécissement mitral, aortite, coronarite et tabes chez une syphili-

tique », s'exprime ainsi :

« Il existe donc des anévrismes de l'aorte avec des troubles pupillaires tabéti-

ques. On peut en conclure que, dans ces conditions, les troubles pupillaires ne

sont pas liés à l'anévrisme, mais à la cause commune du tabes et de l'aortite, à

la syphilis. Voilà pourquoi ce syndrome justement dénommé syndrome de

Babinski a une si grande importance. »

192 AFFECTIONS DE L'APPAREIL CAliUlO-VASCULA1R

Paul Vautier, dans un travail (Thèse, Paris, igo5) inspiré par P. E. Launois et et

intitulé : « Le syndrome de Babinski », rapporte un grand nombre d'observations

confirmatives de mon opinion.

Edgard Hirtz et Paul Braun (Bulletins de la Société médicale, 19 II, t. XXXI,

p. 37), dans un article intitulé «Note sur dix cas d'aortite syphilitique écrivent :

« M. Vaquez a insisté avec raison sur l'association fréquente de l'insuffisance aor-

tique et du signe d'Argyll (syndrome de Babinski), le signe d'Argyll permettant

d'affirmer la syphilis. »

Grégoire Odobesco, de Bucarest, accepte aussi mes idées et les expose dans un

travail qui a pour titre : « Les troubles pupillaires dans les anévrismes de l'aorte

(Syndrome de Babinski) » (Revista Siiiiiielor Médicale Anul. VIII, n° 3, Martie,

1912).

CYANOSE

J'ai rapporté avec li"e Toufesco deux observations de cyanose des

rétines chez des sujets atteints de rétrécissement de l'artère pulmonaire

(1og, 112). Ces faits sont très rares : des recherches bibliographiques

nous ont montré qu'il a été publié seulement onze observations ana-

logues.

Dans l'un de nos cas, il s'agissait d'un enfant présentant, outre une

cyanose des rétines, de la cyanose généralisée, liée à une malformation

congénitale du coeur avec hyperglobulie. Dans l'autre, on constatait

une cyanose des rétines, légère mais nette, chez un malade atteint

de rétrécissement de l'artère pulmonaire, sans cyanose généralisée; ce

dernier caractère est, selon nous, particulièrement digne d'attention.

Il est probable que le nombre des cas signalés de cyanose des

rétines deviendrait plus grand si l'on soumettait systématiquement à

l'examen ophtalmoscopique tout malade atteint de cyanose généra-

lisée, et, d'une façon générale, tout malade porteur d'une affection

cardio-vasculaire. Notre deuxième observation prouve que la cyanose

des rétines peut exister sans cyanose généralisée, et l'importance de ce

trouble local est considérable, car il traduit une perturbation dans la

circulation du système nerveux central.

IX. - HYSTERIE. - PITHIATISME E

Pour préciser mon rôle dans l'évolution qu'a subie la notion d'hys-

térie, il me faut avant tout rappeler ce qu'étaient les opinions régnantes

sur ce sujet il y a une vingtaine d'années, à l'époque où parut mon

premier travail de revision.

L'hystérie était généralement conçue comme un état névropathique

défiant toute définition, sorte de Protée, apparaissant parfois sous des

aspects qui lui sont propres, mais susceptible aussi de prendre les traits

d'affections diverses, voire do maladies organiques.

On la disait capable de produire des troubles de motilité indiscer-

nables, à considérer seulement leurs caractères intrinsèques, de ceux

que déterminent des altérations cérébrales ou médullaires.

On la croyait en état de donner naissance à des lésions superficielles

ou profondes et à des troubles de toutes sortes : à des érythèmes, des

pillyctènes, des bulles, des hémorragies, des ulcérations et même à des

gangrènes de la peau, à de l'oedème sous-cutané à des paralysies

laryngées, du spasme glottique, de l'oedème de la glotte, des conges-

tions pulmonaires, des hémoptysies, à des ulcérations gastriques,

des hématémèses, du méloena, à de l'anurie, des hématuries, de

l'albuminurie, - à de l'angine de poitrine, de la tachycardie et de la

bradycardic, à une hyperthermie, parfois très élevée.

13.w;mssr. là z

194 ' HYSTÉRIE, - P1TI11AT1SII;

L'hystérie occuperait ainsi un domaine extrêmement vaste, dont les

limites ne sauraient être fixées.

Les causes auxquelles on rapportait les accidents hystériques

n'étaient pas moins variées et leur action, mal déterminée, était com-

prise diversement. Le rôle de la suggestion, incontesté d'ailleurs,

n'était pas apprécié par tous de la même manière. L'école de Nancy,

qui lui accordait plus d'importance que l'école de la Salpêtnère, allait

qui lui accordait plus d'importance que l'école de la Salpêtrière, allait

jusqu'à soutenir, ce que personne n'accepte plus maintenant, que sa

sphère d'action englobe des affections organiques. Elle admettait

cependant que les troubles hystériques peuvent se développer en l'ab-

sence de toute suggestion. L'émotion était unanimement considérée

comme un agent étiologique ayant la puissance de créer des désor-

dres hystériques sans que la conscience soit avertie de leur développe-

ment, sans que la volonté puisse intervenir pour y mettre obstacle.

On saisit aisément les conséquences, au point de vue médico-légal,

d'une pareille manière de voir.

Telle était l'hystérie traditionnelle, « la grande Névrose ». Cette

conception, autrefois déjà objet de critiques partielles et isolées,

n'avait cependant pas été profondément ébranlée.

La réflexion et l'observation attentives m'en éloignant peu à peu

m'ont conduit à lui en opposer une autre, sur certains points fonda-

mentaux, toute nouvelle.

L'étude comparative des paralysies hystériques et des paralysies

organiques avait d'abord fixé mon attention et, comme l'occasion s'est

déjà présentée pour moi de le dire, l'insuffisance des moyens dont on

disposait pour les distinguer m'avait frappé. On croyait, je le rap-

pelle, que ces deux espèces de paralysies étaient capables de se

manifester par les mêmes caractères intrinsèques ; on ne pouvait

donc chercher que dans les circonstances concomitantes le trait dis-

tinctif qu'elles ne possèdent pas en elles-mêmes. Par exemple, une

HYSTÉRIE. PiTfHATtSË 195

hémiplégie qui, survenant chez un sujet jeune, ni cardiaque, ni

syphilitique, s'accompagnait des « stigmates » de « la névrose »

(hémianesthésie, insensibilité du fond de la gorge, rétrécissement

du champ visuel, etc.), était généralement considérée comme hysté-

rique ; dans les conjonctures inverses on l'attribuait, au contraire,

à une lésion des centres nerveux.

Il y avait là un manque de précision et un défaut de logique. On

savait, en effet, depuis longtemps déjà que, d'une part, les manifesta-

tions variées de l'hystérie ne sont pas indissolublement liées auxdits

stigmates, que ceux-ci, d'autre part, peuvent s'associer à une paralysie

organique ; la présence ou l'absence d'une anesthésie sensitivo-sen-

sorielle ne saurait donc autoriser à affirmer ou à nier la nature hysté-

rique d'une paralysie ; de même, la présence ou l'absence de signes

soit d'une affection cardio-vasculaire, soit de la syphilis, ne donne

pas le droit d'admettre ou d'écarter l'idée d'une paralysie organique.

Dès lors la nécessité de soumettre les troubles paralytiques à une

analyse plus approfondie et de s'appliquer à trouver en eux-mêmes des

caractères différentiels m'apparaissait et s'imposait à mon esprit.

Des recherches méthodiques, dont les premiers résultats, déjà déci-

sifs, furent publiés en 1893, m'amenèrent à cette conclusion que dans

les paralysies et les contractures hystériques pures il n'existe aucune

perturbation des réflexes tendineux (4o). Cette donnée, qui parait

fort simple aujourd'hui où elle ne rencontre plus guère d'opposition,

a longtemps été contestée et, périodiquement, pendant des années,

elle a suscité des contradictions. Les objections reposaient invaria-

blement, d'ailleurs, sur des faits inexactement observés ou fausse-

ment interprétés, comme j'ai pu le démontrer toutes les fois que ai

été à même de les contrôler. En compulsant les Bulletins de la Société

de Neurologie de Paris, on trouve bien des cas de ce genre : ici, c'est

une hémiplégie prétendue hystérique accompagnée d'une exagération

unilatérale des réflexes tendineux ; là, une paraplégie, avec de la sur-

réflectivité aux membres inférieurs, de la trépidation épileptoïde du

196 HYSTÉRIE. P1TII1AT1SME

pied, que l'on rapporte également à l'hystérie. Mais, pour aucun de

ces faits, la vérification du diagnostic porté n'a été fournie ; générale-

ment, ceux qui avaient présenté de pareils malades venaient déclarer

ultérieurement que la marche de l'affection les contraignait d'aban-

donner leur première hypothèse et de reconnaître que, conformément

à mon opinion, il s'agissait de quelque affection organique. D'autres

fois, l'erreur avait une origine bien différente : chez tel malade, réel-

lement atteint d'une paralysie hystérique, on croyait à tort trouver

des réflexes tendineux très exagérés avec épilepsie spinale. La convic-

tion, si répandue jadis, que l'hystérie, comme les lésions du système

pyramidal, peut provoquer de la surréflectivité, tenait principale-

ment à ce que l'étude des réflexes tendineux à l'état normal avait été

négligée et que la gamme de leurs différences individuelles n'avait pas

été suffisamment fixée. En l'établissant avec précision, en distin-

guant (voir p. 31) la trépidation épileptoïde « parfaite », phénomène

pathologique, de la trépidation épileptoïde « fruste », phénomène

physiologique, observable, cela va sans dire, chez un individu atteint

de paralysie hystérique aussi bien que chez un sujet sain, j'ai fourni

le moyen d'éviter un écueil sur lequel autrefois on a si souvent donné.

L'hystérie n'a pas d'action appréciable sur les réflexes tendineux ;

elle n'est pas plus en mesure de les exagérer que de les affaiblir ou de

les abolir. Il en va de même des réflexes pupillaires et du réflexe

pharyngien. Ces données, qui résultent de nies investigations et qui

sont aujourdhui classiques, jointes à d'autres faits nouveaux, ont

sapé les fondements de l'ancien édifice de l'hystérie.

J'ai indiqué ailleurs (p. 1 6) toute une série do signes appartenant

aux paralysies organiques et faisant défaut dans les paralysies hysté-

riques. Il n'est pas nécessaire d'y revenir. De plus, dès 1892, j'avais

montré comment, en considérant uniquement les caractères des trou-

bles moteurs, on peut distinguer la paralysie faciale hystérique de la

paraly sie faciale organique (35, 38).

Ces travaux successifs, confirmés de toutes parts, ont entraîné a\ec

f15'S1'$131E. - l'11'llli\'l'1511 lUi

eux les premieis changements, du reste très importants, dans la doc-

trine traditionnelle de l'hystérie. 11 découle, en effet, de ce qui précède

que cet état n'est pas, tant s'en faut, capable « de tout faire » comme

on le disait jadis ; qu'il ne peut, en particulier, reproduire divers phé-

nomènes appartenant aux paralysies organiques dont ils constituent,

par conséquent, des attributs; que le diagnostic de ces deux espèces

do paralysies, au lieu de s'appuyer sur des caractères extrinsèques,

d'être ainsi arbitraire, livré au « flair » du médecin, est soumis à des

règles précises et, dans la grande majorité des cas, peut être porté

aec certitude, maintenant qu'il repose sur la recherche des caractères

intrinsèques.

Mais ce ne sont pas là les seules conséquences de ces données nou-

velles.

Logiquement, les résultats auxquels j'étais arrivé et que je viens

d'exposer devaient m'entraîner plus loin. Il devenait indispensable

de soumettre à une revision générale les troubles circulatoires, tro-

pliques et caloriques prétendus hystériques, car la notion de troubles

de cette nature semble avoir en partie pour origine des observations

faites sur des hémiplégies indûment rapportées à l'hystérie. Il n'est

pas rare, en effet, de voir, dans l'hémiplégie organique, des phéno-

mènes vaso-moteurs, de l'hypothermie du côté paralysé ; en pareil

cas, d'un diagnostic erroné d'hémiplégie hystérique on devait inévi-

tablement déduire que l'hystérie a la faculté de produire des troubles

circulatoires; de là à conclure qu'elle peut donner naissance à des

hémorragies el à des lésions cutanées diverses, il n'y a qu'un pas : et

alors, pourquoi n'y aurait-il pas aussi des hémorragies viscérales

'hystériques ? La fièvre hystérique semble aussi chose toute naturelle,

car si l'hystérie est apte à exercer une action perturbatrice sur les

centres des réflexes tendineux et les centres vaso-moteurs, il y a des

raisons de penser qu'elle peut aussi troubler dans leur fonctionne-

198 HYSTÉRIE. P1THIATISME

ment les centres régulateurs de la température. Toutes ces déduc-

tions, étant logiques et en apparence corroborées par des observa-

tions, ont été acceptées par les meilleurs esprits ; mais, ayant une

erreur à leur point de départ, elles étaient vaincs, entachées de nullité.

J'estimai donc qu'on devait faire table rase et se mettre, sans parti

pris, en quête de nouveaux faits relatifs à cette question.

Mes observations personnelles me firent de plus en plus douter de

l'authenticité des troubles que je viens d'énumérer : il ne me fut pas

donné d'en voir un seul exemple probant. Pendant des années, sans

cesse je réclamai de mes collègues la présentation de faits de ce genre

au cas où ils en constateraient. On crut d'abord en trouver, mais à

leur propos se renouvela ce qui s'était passé pour « la surréflectivité

tendineuse hystérique » : les événements prouvèrent bientôt qu'on

s'était mépris : ce fut tantôt un oedème qualifié au début d'hystérique

qui se révéla dans la suite en rapport avec une synovite tuberculeuse,

tantôt des phlyctènes attribuées également à l'hystérie, et que le malade

on le découvrait plus tard produisait volontairement par des

irritations artificielles. Aucune de ces observations ne put résister à un

examen rigoureux. Ceux qui s'obstinaient à rester fidèles à la vieille

doctrine conservaient l'espoir de rencontrer un jour ce que leurs

prédécesseurs affirmaient avoir vu, répétant que « les faits négatifs

ne sauraient prévaloir contre des faits positifs ». Quant à moi, je ne

cessais de soutenir que les documents anciens étaient suspects

et qu'il en fallait de nouveaux pour résoudre le problème posé.

Afin de donner à mon enquête toute l'ampleur désirable, je conseillai

à un de mes élèves, Icndicini Bono, de procéder à une information

sur ce sujet auprès d'un grand nombre de médecins chargés de

services hospitaliers à Paris. Aucun d'eux ne fut en mesure de

fournir un seul fait qui confirmât l'hypothèse de troubles circulatoires

ou trophiques d'origine hystérique. Il ne se trouva non plus per-

sonne pour s'en porter garant, lorsque leur réalité fut discutée en

if)0() à la Société de Neurologie de Paris.

HYSTÉRIE. - PITI111T15\IH : 199

Sans doute, on savait autrefois déjà que, parmi les cas publiés sous

ce titre, il en était de controuvés. G est ainsi qu'on avait reconnu la

nature fictive de certaines « fièvres hystériques ». Charcot lui-même

avait mis en garde contre les erreurs d'interprétation et les superche-

ries. Il n'en est pas moins vrai que l'éminent neurologiste admettait

l'existence des hémorragies, des lésions cutanées hystériques et qu'il

avait décrit sous la dénomination d'oedème bleu un trouble circulatoire

qu'il rattachait à la névrose.

Ce qui m'appartient, c'est d'avoir vu la nécessité de remettre sur le

chantier tout ce chapitre de pathologie et d'avoir établi, par une

inspection sévère des faits, qu'il n'en était pas un justifiant son main-

tien. De temps en temps surgit encore quelque contradicteur, mais

n'en est-il pas de même pour les vérités médicales le plus solidement

établies ? P

En résumé, autrefois, on attribuait à l'hystérie la faculté d'engen-

drer des phlyctènes, des ulcérations, des gangrènes superficielles,

des hémorragies cutanées et viscérales, de la fièvre; on lui prêtait

aussi le pouvoir de créer de l'albuminurie, de l'anurie. Tout cela était

enseigné dans les traités classiques et les communications sur ce

sujet abondaient. A partir de yogi, époque où a paru mon premier

travail d'ensemble sur la délimitation de l'hystérie, ces publications

sont devenues de plus en. plus rares ; on en chercherait vainement

une seule dans les Bulletins de la Société médicale des Hôpitaux de

Paris et de la Société de Neurologie de ces six dernières années.

Cette histoire n'est plus qu'une légende 1.

Les travaux que je viens de résumer ont eu pour effet de restituer à

des affections organiques, aujourd'hui bien connues, ce que l'hystérie

s'était indûment approprié ; de plus, ils ont contribué à la désencom-

I. Je fais abstraction pour le moment des troubles )aso-moteurs, superficiels, transitoires

(ér thèmes, dermographisme), qui seront plus loin l'objet d'une discussion (p. 201).

200 HYSTÉRIE. PITII IAT] S)IE

brer des produits de la supercherie. Ils ont une valeur pratique sur

laquelle nous reviendrons plus loin et constituent des acquisitions dont

l'importance n'est nullement subordonnée je tiens à le faire

remarquer - à l'opinion que l'on peut avoir sur les autres questions

dont nous allons maintenant aborder l'examen.

Le domaine de l'hystérie ainsi déblayé, il restait encore un grand

nombre de matériaux. Le reliquat était composé de troubles ayant

pour caractère commun l'absence de substratum anatomique, dans la

mesure du moins où les moyens d'investigation dont nous disposons

permettent de l'affirmer. Mais ce point de ressemblance ne suffit

pas pour les assimiler complètement. 1- a-t-il là un tout homogène aux

diverses parties duquel le terme « hystérique » puisse être appliqué ? Ne

s'agit-il pas au contraire d'un assemblage artificiel composé d'éléments

disparates ? Tel est le nouveau problème que je me posai.

De mes observations et expériences comparatives je retiens seule-

ment celles qui m'ont paru décisives et m'ont permis d'atteindre le

but visé.

Depuis longtemps, comme je l'ai rappelé plus haut, on connaissait

le rôle de la suggestion dans la genèse des troubles hystériques, et

celui de la psychothérapie dans leur traitement. Cependant, malgré

l'importance attribuée à ces agents, on s'accordait à dire que leur

influence ne s'étendait pas sur toutes les manifestations de l'hystérie.

Pouvait-on du reste avoir une autre opinion à l'époque où l'on faisait'

entrer des états organiques dans le cadre de cette névrose ? Il est 6%i-

dent qu'on courait à un échec inévitable lorsque, par exemple, on

s'acharnait à traiter par des procédés d'ordre psychique, la considé-

rant comme hystérique, une hémiplégie due à une hémorragie céré-

brale. Mais les progrès de la sémiologie ayant donné le moyen d'évi-

ter de pareilles erreurs et, l'intrusion d'accidents organiques dans

l'hystérie n'étant plus à redouter, je pensai qu'il y avait lieu de repren-

dre l'élude de la suggestion et de la contre-suggestion dans leurs rap-

ports avec les divers troubles que nous avons en we. Mes recherches

HYSTÉRIE. l'ITIIlATIS} ! E 2111

dirigées dans celle voie m'ont permis de diviser ces phénomènes en

deux groupes bien distincts : la suggestion produit les uns et n'a pas

d'action sur les autres. Toutefois, afin de prévenir un malentendu, il

me faut donner quelques éclaircissements complémentaires.

Au premier de ces groupes appartiennent : des crises convulsives,

des paralysies, des contractures variées, des tremblements, des mouve-

ments choréiques parfois irréguliers, mais généralement rythmés, des

troubles de la phonation, de la respiration. de la sensibilité (anes-

thésie, hyperesthésie). des troubles sensoriels, accidents ayant pour

caractère commun do pouvoir être reproduits par la suggestion expé-

rimentale qui, fait capital, est capable d'en déterminer la forme, l'in-

tensité et la durée. Ces accidents, soit dit en passant, peuvent être imi-

tés par un simulateur habile et éduqué, ce qui constitue une source

de difficultés dans les expertises médico-légales relatives à ce qu'on

appelle l' « hystéro-traumatisme ».

Ces troubles sont susceptibles aussi de disparaître, parfois instanta-

nément, sous la seule influence de la persuasion ou contre-suggestion.

On peut même dire que la psychothérapie les guérit presque imman-

quablement à moins qu'elle ne soit contre-balancée par une influence

opposée : soit une action contre-psychothérapique exercée involontaire-

ment par l'entourage du malade, soit. dans les cas d'associations

hystéro-organiques, par l'auto-suggestion qu'entretiennent les désor-

dres dus à la lésion. J'ajouterai incidemment que ces manifestations

peuvent encore être réfractaires au traitement chez un sujet atteint

d'une affection mentale telle que l'hébéphrénie.

Le deuxième groupe comprend d'une pari le dermographisme, qui

traduit une exagération des réflexes vaso-moteurs cutanés, et d'autre

part des réactions émotives anormalement intenses et prolongées :

tachycardie, érythèmes, hypersécrétion sudorale ou intestinale. La

suggestion n'est pas en mesure de les reproduire et la contre-

suggestion est sans action sur eux. On m'a objecté la possibilité

de provoquer chez certains sujets, presque au commandement,

202 HYSTÉRIE. PITH1ATISMF.

une accélération des battements cardiaques et des réactions vaso-

motrices qui seraient ainsi les effets d'une suggestion. Ce n'est pour-

tant qu'une apparence. En réalité, l'influence de la suggestion sur ces

désordres est très indirecte ; lorsqu'elle les fait naître, c'est par l'inter-

médiaire de l'émotion qu'elle peut occasionner. Elle n'en est pas mai-

tresse ; une fois qu'ils ont apparu. ils échappent à son influence ; elle

est incapable d'en déterminer la forme, l'intensité et la durée.

Ainsi donc, un caractère fondamental sépare ces deux groupes de

troubles. Voilà un nouveau point bien établi.

Cependant, malgré leurs différences, il serait possible qu'ils fussent

rattachés par quelque lien ; on aurait le droit de le soutenir s'il y

avait entre eux comme une attraction ; mais en fait il n'en est rien.

Ainsi que je l'ai montré par une étude comparative, le dermogra-

phisme et l'émotivité excessive s'observent aussi fréquemment chez

des individus d'ailleurs normaux que chez ceux qui présentent des

accidents du premier groupe : attaques de nerfs, contractures, etc. Il

n'y a donc aucune raison de réunir ces deux ordres de phénomènes

et de leur donner une dénomination commune. Ils doivent être com-

plètement dissociés et recevoir chacun un nom différent. Cette con-

clusion à laquelle je suis arrivé n'est nullement arbitraire, comme

certains l'ont prétendu ; elle est imposée par la logique.

Il serait évidemment irrationnel de continuer à appeler hystériques

les troubles que nous avons rangés dans le deuxième groupe ; du

reste, les termes : « dermographisme, troubles vaso-moteurs ou trou-

bles de la réflectivité vaso-motrice, troubles émotifs ou troubles de

l'émotivité » ne suffisent-ils pas à traduire les idées qui s'y atta-

chent ? .

Il y aurait même quelque avantage à abandonner l'usage du terme

hystérie qui, pris dans son sens étymologique, ne répond à aucun des

faits que nous envisageons. Si pourtant on veut le conserver, il est

légitime de le réserver au premier groupe qui comprend les troubles

impressionnants dont ce mot évoque presque automatiquement le sou-

HYSTÉRIE. P1TIIIATISME 203

venir (grandes attaques de nerfs, chorées épidémiques du moyen âge,

paralysies guéries « miraculeusement »).

J'ai proposé de le remplacer par le vocable « pithiatisme », de

TTStOu persuasion et ? irc guérissable, qui exprime l'un des caractères

fondamentaux de ces accidents : la possibilité de les guérir sous l'in-

fluence de la persuasion. C'est là un point de terminologie qui n'a

pas un intérêt capital et sur lequel je n'insiste pas.

Le démembrement de l'hystérie traditionnelle se trouve donc

accompli : les éléments hétérogènes, avec lesquels celle-ci avait été

constituée grâce à un assemblage artificiel, ont été séparés et chacun

d'eux a été mis à sa place naturelle.

L'hystérie, a dit Lasègue, n'a jamais été définie et ne le sera jamais.

En effet, comme il est impossible de donner une définition s'appliquant

à la ibis à divers objets de nature toute différente, il était impossible

autrefois de définir ce qu'on englobait sous ce titre. Aujourd'hui, il

n'en est plus de même. La délimitation du groupe des phénomènes

que l'on peut appeler indifféremment hystériques ou pithiatiques est

chose faite. Ils ont des caractères qui n'appartiennent qu'à eux, dont

tous les autres états morbides sont dépourvus, et qui par suite consti-

tuent les éléments de la définition de l'hystérie ; je l'ai énoncée de la

façon suivante :

« L'hystérie est un état pathologique se manifestant par des troubles

qu'il est possible de reproduire par suggestion, chez certains sujets,

avec une exactitude parfaite et qui sont susceptibles de disparaître sous

l'influence de la persuasion (contre-suggestion) seule'. » (19 1)

i. Je ferai remarquer que j'ai déjà exprime cette idée, en partie, il y a plus de vingt ans,

en 1890 (27). Voici du reste un extrait du travail dont je viens de donner l'indication, p. m i

et p. 12 :

« Lorsqu'on essaye, chez une hystérique (ce procédé réussit surtout si on est en présence

d'un sujet hypnotisé), à développer par la suggestion des symptômes dus par exemple à

°OU Ill'$TIsRII ? - l'l1'F11.11'1S\Ils'

Quelques auteurs ont critiqué celle définition, soutenant que la

persuasion ou contre-suggestion serait capable de guérir des troubles

névropathiques non hystériques, en particulier des symptômes neu-

rasthéniques. Il y a là une confusion évidente : on est d'accord pour

reconnaître que les phénomènes d'épuisement, caractères essentiels de

la neurasthénie, ne sont pas susceptibles de guérir sous l'influence de la

contre-suggestion seule; les symptômes qu'on fait disparaître au moyen

de ces pratiques ne sont que des accidents hystériques, pithiatiques,

greffés sur la neurasthénie. Du reste, il y a Niii-1 et un ans, en 1892,

j'ai insisté sur la fréquence des associations de ce genre (3G).

Je crois donc pouvoir dire que ma définition est adéquate : elle

convient à l'objet défini tout entier et ne convient qu'à lui seul.

Ce fait que la suggestion a le pouvoir de reproduire expérimenta-

lement d'une manière parfaite tous les troubles hystériques ne prouve

sans doute pas, à priori, que ceux-ci soient eux-même dus à la sugges-

tion. Cependant, je l'ai déjà dit précédemment, la possibilité de sa

participation à la production des accidents hystériques en appa-

rence spontanés n'a jamais été niée ; l'observation clinique l'établit

avec une telle évidence qu'une pareille vérité n'aurait pu passer

inaperçue. Mais dans quelle mesure la suggestion intervient-elle

alors ? P

quelque maladie organique du système nerveux, on obtient souvent une reproduction qui

peut paraître parfaite à un observateur peu attentif. Mais il n'y aura pas de méprise pour un

neuro-pathologiste exercé; l'hystérique, en effet, parviendra, dans ce cas, à présenter un

aspect symptomatique qui rappellera l'affection en question, soit grâce à la faculté d'imi-

tation que nous possédons tous à un degré plus ou moins accentué (mais la copie se distin-

guera aisément de l'original), soit en faisant éclore chez elle des manifestations hystériques

qui ne ressemblent que grossièrement aux phénomènes dont il s'agit. On cherche, par

exemple, à faire reproduire les signes cliniques de l'hémiplégie facialo périphérique en

montrant le malade au sujet hypnotisé ou en lui suggérant qu'une des commissures labiales

s'élève ou s'abaisse. On pourra obtenir ainsi, il est vrai, une déviation faciale due à une

contraction musculaire ou à une contracture, un spasme glosso-labié, mais ses caractères

seront faciles à distinguer do ceux qui appartiennent à la paralysie faciale. »

HYSTÉRIE. - PITHIATISME 20."

On ne le savait pas autrefois et l'on était loin de se rendre un compte

exact de ses divers modes d'action. Il en est un en particulier, la

suggestion médicale, longtemps méconnue, sur laquelle Bcrnheim a

attiré l'attention et dont j'ai montré toute l'importance. On peut bien

l'apprécier dans l'étude des prétendus stigmates hystériques qui se

développaient, disait-on, à l'insu des malades, à la manière d'un

trouble organique, sans représentation mentale préalable ; Bernheim

lui-même admettait la possibilité d'une hémianesthésie et d'une am-

hlyopic hystériques n'ayant pas la suggestion pour cause. Jadis, on

constatait chez la plupart des hystériques lesdits stigmates « perma-

nents » qui, suivant la croyance ancienne, donnaient aux accidents

transitoires un cachet d'authenticité. C'était une erreur ; elle tenait

à ce qu'on ignorait l'action inconsciente que, par ses questions et par

son attitude, le médecin peul avoir sur la genèse de ces désordres. Je

m'en suis assuré par l'étude systématique d'une série de malades

atteints d'accidents hystériques et qui jusque-là n'avaient été soumis

à aucun examen médical; j'ai exploré l'état de leur sensibilité et de

leur vision, avec la préoccupation constante d'éviter pendant mon

interrogatoire les réflexions, les gestes inopportuns qui auraient pu

troubler la spontanéité de leurs réponses; or, chez aucun de ces sujets,

dont le nombre s'élevait à plus de cent, je n'ai constaté ni hémianes-

thésie, ni rétrécissement du champ visuel, ni dyschromatopsie. Tout

commentaire serait superflu.

C'est la suggestion se manifestant par un besoin d'imitation qui

explique la contagiosité des phénomènes hystériques, en particulier

des attaques nerveuses ; elles se propageaient autrefois dans les salles

de malades sous forme d'épidémie, lorsqu'on n'en connaissait pas bien

le mécanisme.

La suggestion peut intervenir sous une forme différente dans les

associations hystéro-organiques : l'auto-suggcstion remplace l'hétéro-

suggestion ou s'y ajoute. On conçoit bien que des symptômes pro-

duits par une maladie tant suit peu tenace, sur lesquels se concentrent

206 IITSTLL31E. - PITII1AT1SME

l'attention et l'inquiétude de l'intéressé, fassent éclorc des troubles

qui sont du domaine de la suggestibilité.

Parfois, cette épine organique peut être minime ; c'est un trouble

passager, une légère douleur, un petit traumatisme, un froissement

musculaire qui, rencontrant un terrain favorable, sera le point de

départ d'un complexe travail d'auto-suggestion dans lequel l'analyse

psychologique aura bien de la peine à démêler le rôle joué par

les diverses causes qui ont pu y prendre part : les méditations du

sujet, toute son expérience antérieure et ses croyances, la sollicitude

maladroite de son entourage, enfin les examens médicaux avec leur

appareil impressionnant bien propre à éveiller l'attention du malade

et à diriger son imagination dans des voies souvent imprévues. Tous

ces éléments se mêlent, s'enchevêtrent, et de leur action combinée

résulte l'accident hystérique qui désormais subsiste seul tandis que

risque de passer inaperçu tout le travail d'auto- et d'hétéro-suggestion

qui l'a précédé et préparé.

Il est inutile d'insister davantage sur l'importance de la suggestion

dans la genèse des accidents hystériques. Mais je n'ai pas encore

prouvé qu'elle en soit la condition sine duâ non. D'autres agents,

l'émotion en particulier, ne peuvent-ils pas les engendrer, conformé-

ment à l'opinion unanimement admise autrefois ? p

Avant d'aborder cette question, il importe de la poser en termes

précis. Sans doute, il y a lieu de penser, à priori, que les ébranlements

physiques et surtout les secousses morales peuvent amoindrir la per-

sonnalité, affaiblir le sens critique, augmenter la suggestibilité et

jouer ainsi un rôle indirect dans le développement des troubles

pithiatiques; mais ces agents ne feraient alors que préparer le terrain

à la suggestion. Sont-ils capables, comme on l'a soutenu, de créer

par leurs propres forces, toute suggestion étant écartée, des phéno-

mènes hystériques ? En d'autres termes, une paraplégie, une mono-

plégie hystériques, par exemple, pourraient-elles apparaître sous lin-

HYSTÉRIE. PITII1AT1SME 207

lluence d'une émotion' sans aucune représentation mentale préalable,

automatiquement, à la manière d'une sécrétion sudorale, d'un flux

intestinal, d'un érythème Tel est le problème, capital pour qui veut

pénétrer la nature et le mécanisme de l'hystérie, qu'il fallait, selon

moi, soumettre de nouveau à l'étude, car la méthode dont on s'était

servi pour la résoudre est défectueuse. Voici en quoi elle consiste :

étant donné un malade atteint d'un accident hystérique, on tâche

d'établir par son interrogatoire et par celui de son entourage les cir-

constances dans lesquelles cet accident a pris naissance ; si parmi ces

circonstances on relève une émotion, on la considère comme une

cause de l'accident produit. Ce sont des observations de cet ordre

qui ont conduit à l'opinion classique sur le rôle de l'émotion dans

l'hystérie.

J'ai montré qu'en suivant une pareille voie, on ne saurait atteindre

la vérité ; en celte matière il faut tenir pour suspects les renseigne-

ments fournis par les malades, enclins, même quand ils sont

atteints d'une affection organique, à faire dépendre de quelque émo-

tion, ancienne ou récente, les troubles dont ils souffrent; de la meil-

leure foi ils peuvent induire en erreur. D'ailleurs, étant donné le

problème posé, il ne suffirait pas d'établir que l'éclosion d'un de ces

accidents aéré précédée d'un choc psychique ; il faudrait encore prouver

que la suggestion est restée étrangère à son développement. Or, celle-ci

1. Dans un travail fait en collaboration avec J. Dagnan-Bol1\eret. ayant pour titre

« Emotion et Hystérie » (I(J1), nous avons insisté sur la distinction qu'il y a lieu de faire

entre l'émotion choc et l'émotion lente..1 la première nous avons réservé le nom d'émo-

tion et nous avons appelé la seconde état affectif.

Nous avons défini l'émotion de la façon suivante : « Une modification brusque de l'affec-

tivité se produisant sous l'influence d'une représentation soudaine et qui rompt, pour un

temps généralement assez court, l'équilibre physiologique et l'équilibre psychique. »

Nous avons montré qu'il fallait opposer dans la vie affective les phénomènes diffus à ceux

qui sont systématisés. Le premier groupe comprend toutes les émotions proprement dites et

certains états affectifs comme la tristesse vague non motivée. Au second appartiennent les

états affectifs organisés dont les types principaux sont les sentiments d'espérance et de crainte,

ces états possédant le pouvoir d'entrer dans des complexus représentatifs et de leur donner

de la vie.

208 HYSTÉRIE Pl'11111T1S\Il.

implique l'idée d'une perturbation de la conscience, et tant qu'on la

subit on n'en a pas une notion nette.

La méthode dont on s'est servi, où les recherches se font au moyen

d'une rétrospection, ne peut conduire au but visé.

J'en ai adopté une autre qui procède d'une manière inverse : étant

donnée la présence ou l'absence de certaines conditions qui sont ou

semblent être propres au développement d'accidents nerveux, on se

met en quête de troubles hystériques : on peut dire que ces une

recherche par prospection. Il n'est pas fait appel au témoignage des

malades et à leurs interprétations. Cette méthode permet, si l'on varie

les observations, de discerner les causes supposées de l'hystérie, de

les dissocier et d'apprécier la valeur de chacune d'elles. Déjà je l'ai

appliquée à la critique des « stigmates », comparant, comme on

l'a vu, deux groupes d'hystériques, dont l'un avait été exposé et

l'autre soustrait à l'action de la suggestion médicale ; ce rapproche-

ment a montré que sans son intervention ces stigmates ne se déve-

loppaient pas ; la suggestion semble donc constituer pour leur genèse

une condition indispensable.

L'étude comparative de milieux hospitaliers, dans le passé et le

présent, ressortit aussi à cette méthode : autrefois, il n'était pas rare

d'observer dans une salle plusieurs malades à la fois en proie à des

contorsions, à des crises avec arc de cercle ; cela ne se voit plus jamais

maintenant. Et cependant le coeur humain n'est pas de nos jours plus

préservé des chocs moraux qu'il ne l'était jadis.

Pourquoi donc ce changement ? C'est qu'autrefois le médecin

« cultivait » inconsciemment l'hystérie ou du moins, n'en connaissant t

pas bien le mécanisme, ne prenail pas. comme il le fait actuellement,

les mesures propres à en faire disparaître les manifestations dès leur

apparition et à préserver les voisins de la contagion.

De ce qui précède ne semble-t-il pas se dégager que l'émotion, du

moins l'émotion seule. ne crée pas de crises hystériques ?

On pourrait faire des remarques analogues à propos des épidémies

H1'S1'RIE. - l'lTIll1'l'IS\lE 209

de chorée rythmée hystérique qui depuis longtemps ne se sont plus

reproduites.

La méthode par prospection trouve une application directe el four-

nit des données plus démonstratives sur le point qui nous occupe

dans les enquêtes faites auprès de personnes qui, fortuitement ou en

raison de leur profession, ont été en contact avec un grand nombre

d'individus placés dans des conjonctures où l'émotion semble

immanquable, et ont été à même de les observer au moment du

choc, avant la phase dite « de méditation » pendant laquelle la

suggestion entre en jeu si souvent. Voici, brièvement résumés, les

résultats de diverses recherches de ce genre dont les premières se

rapportent à des catastrophes frappant à la fois un grand nombre de

personnes.

Plusieurs médecins, ayant assisté à de grands accidents de chemin

de fer et soigné immédiatement les blessés, m'ont fait part de leurs

observations qui toutes étaient concordantes : aucun d'eux n'avait

constaté de troubles hystériques.

Les renseignements communiqués par Neri sur le tremblement

de terre de Messine sont également très instructifs. Quoique ses

investigations aient porté sur plus de deux mille sujets, il ne lui a

pas été donné, aussitôt après la catastrophe, d'en voir un seul atteint

de paralysie, de contracture ou de crises convulsives. Les études

qu'il fit ultérieurement, dans les quelques semaines qui suivirent le

désastre, à un moment où cependant la suggestion aurait déjà pu en-

trer en jeu et accentuer des phénomènes produits par la secousse

psychique, lui donnèrent les mêmes résultats. Il est à noter en parti-

culier que Neri examina soigneusement l'élat de la sensibilité et

mesura an périmètre le champ visuel de plus de 600 « rescapés » dont

quelques-uns souffraient de troubles nerveux divers constituant un

état morbide, une « névrose émotive»; il ne trouva pas un

seul cas d'lié 1111 an osiliésie ou de rétrécissement du champ visuel.

Pourtant on est bien en droit de penser que l'émotion, dans de pa-

13ABL\Sh.t. Ifl

210 Ill'S1'LNIE. - PITHIATISME

reilles circonstances, a dû atteindre son summum d'intensité et mani-

fester son action d'une manière éclatante.

J'ai eu l'idée de procéder à une information auprès des garçons

d'amphithéâtre des divers hôpitaux de Paris. Il est incontestable, en

effet, que la reconnaissance des morts par les parents est de nature à

déterminer chez ceux-ci une émotion profonde que le milieu où elle

s'effectue doit accentuer encore. Parmi ces enquêtes, qui toutes

d'ailleurs ont donné les mêmes résultats, je mentionnerai spéciale-

ment celle que j'ai faite, en compagnie de mon collègue Richardière,

à l'hôpital des Enfants Malades. Pendant une période de dix-huit

ans où près de 20000 décès y furent enregistrés, le garçon d'am-

phithéâtre a vu environ 10000 femmes venir reconnaître le corps

de leur enfant et assister à sa mise en bière ; on peut certes affirmer

qu'il a été le témoin d'émotions sincères. Or, cet homme, d'après

les renseignements très circonstanciés qu'il nous a fournis en ré-

ponse aux questions que nous lui avons posées, n'a pas \ 11 se déve-

lopper devant lui un seul trouble dont la nature hystérique fût avérée;

il se rappelle que cinq ou six fois seulement, dans sa longue carrière,

des femmes tombèrent comme en syncope et restèrent quelques

instants sans connaissance, mais jamais il n'a assisté à une crise con-

vulsive ; il affirme n'avoir pas constaté un seul cas de paralysie ou de

contracture.

Des enquêtes du même ordre ont été faites auprès de confrères, de

surveillantes, de garde-malades ayant eu maintes fois l'occasion

d'observer les effets des secousses morales les plus rives; elles ont

abouti au même résultat.

Ainsi, les recherches par prospection nous présentent sous un aspect

tout nouveau les relations de l'hystérie avec l'émotion; elles montrent

que l'émotion seule, quelle que soit son intensité, n'engendre pas de

troubles hystériques. On peut môme dire que si les émotions, en

affaiblissant le sens critique, peuvent préparer l'esprit à subir la sug-

gestion, elles l'excluent sur le moment et empêchent, lorsqu'elles

HYSTÉRIE. P1Î111ATISMË 21l

sont intenses, le développement des phénomènes pithiatiques ; c'est

pour ce motif que les émotions violentes les font même disparaître.

Quand une émotion sincère, profonde, secoue l'âme humaine, il n'y a

plus de place pour l'hystérie.

Ce qui précède permet de comprendre la variabilité des manifesta-

tions hystériques quant à leur forme et à leur fréquence suivant les

époques et les lieux, variabilité qu'on peut opposer à la fixité, à

1 invariabilité des autres maladies mentales. Cette mutabilité s'expli-

que quand on sait que les phénomènes hystériques sont un produit

de la suggestion. Si l'émotion, comme on le pensait autrefois, pouvait

les engendrer, elles devraient être de nos jours à peu près aussi

communes que par le passé, car les tristesses de la vie n'ont pas cessé

de provoquer des commotions morales.

Une nouvelle question se pose. Les états affectifs, que nous avons

distingués de l'émotion, peuvent-ils être assimilés à celle-ci, en ce qui

concerne leurs relations avec l'hystérie, ou en diffèrent-ils ?

Comme l'émotion, ils sont incapables à eux seuls de créer des

manifestations pithiatiques, mais, contrairement à l'émotion qui est

incompatible avec de pareils accidents, ils jouent dans la genèse de

certains d'entre eux un rôle accessoire, ainsi que nous allons cher-

cher à l'établir.

A ce propos, je dois dire qu mon interprétation des accidents

hystériques on a opposé l'argument suivant : des idées, de simples

idées ne peuvent avoir sur la conduite, sur la santé morale une

influence assez grande pour produire de pareils troubles.

Cette objection, d'ordre spéculatif, ne saurait prévaloir contre les

faits que j'ai rapportés, mais, même au point de vue théorique, elle ne

me parait pas fondée; j'ai cherché à la réfuter dans mon travail en

collaboration avec Dagnan-Bouvcrct.

Elle aurait quelque portée s'il s'agissait, par suggestion, d'entendre

l'inlluence d'une idée pure, abstraite, si tant est même que de pareilles

2)2 2 H1ST);R1E. - l'l'r1111'l'l\lE

idées répondent psychologiquement il une réalité quelconque. De

nombreux travaux, entre autres ceux de Hibot, ont montré que

toutes les idées, même les plus abstraites, possèdent un certain coef-

ficient affectif, si faible soit-il. De plus, dans les faits considérés ici, il

n'est pas question d'idées de ce genre; il s'agit d'idées qui enveloppent

un contenu affectif extrêmement riche dont la part n'est certes pas à

négliger. Souvent j'ai insisté sur ce point que le processus psychique de

suggestion participe de la simulation, dans une mesure d'ailleurs va-

riable avec les sujets, et suivant les circonstances au milieu desquelles

apparaissent les phénomènes hystériques. Ceux-ci, peut-on dire, sont

dus à une simulation inconsciente ou subconsciente, ou encore à une

sorte de demi-simulation. Tous ces termes, qui marquent bien le méca-

nisme sur lequel repose la pathogénie de l'accident pithiatique, per-

mettent de le rapprocher, au moins par l'un de ses aspects, de l'acte

volontaire. Cette comparaison me permettra de faire comprendre ma

pensée. Si l'on considère un acte volontaire, on voit qu'il est la réalisa-

tion d'une idée, d'un projet formé à l'avance et, en partie tout au moins,

le résultat d'une opération intellectuelle. Mais si l'on recherche les causes

qui ont l'ait adopter, pour la mettre à exécution, telle idée de préférence

à telle autre, on constate que ce choix a été déterminé par les senti-

ments qu'elle a suscités. Semblablement, l'hystérique saisit l'idée d'un

état pathologique et le réalise lorsque celte idée s'impose à lui par ses

éléments affectifs systématisés (voir la note de la p. 207), c'est-à-dire

lorsqu'elle éveille eliez le malade le désir de certains avantages, ou

des inquiétudes obsédantes, ou un besoin anormal d'étonner, d'attirer

l'attention, en un mot, les mobiles infiniment variés qui peuvent solli-

citer la volonté facile à influencer de ces sujets. Le rôle des éléments

all'ectifs systématisés apparaît dès lors clairement ; ils fixent l'idée et

lui donnent la puissance de réalisation plastique.

En résumé, l'émotion (émotion-choc) ne peut par elfe-même pro-

voquer l'apparition d'accidents hystériques, contrairement à ce qui

HYSTÉRIE. PITHIATISME 213

était autrefois admis sans conteste ; elle s'oppose même à leur déve-

loppement et n'est pas compatible avec eux. Ces accidents, pour appa-

raître, ont besoin de l'intervention d'une idée suggérée, soutenue, il

est vrai, par des états affectifs systématisés, idée dont ils ne sont que

l'expression.

Avant de terminer ce chapitre. je dois dire quelques mots de l'hyp-

notisme qui, selon moi, n'est qu'une dépendance de l'hystérie.

Quelques extraits d'un travail récent (175) exprimeront ma manière

de voir sur certains points essentiels de cette question et me donneront

l'occasion de compléter ce que j'ai dit sur les rapports entre l'hystérie

et la simulation.

« Les phénomènes hypnotiques, comme les phénomènes hystéri-

ques, résultent de la suggestion et disparaissent sous l'influence de la

contre-suggestion, de la persuasion.

« On comprend aisément que l'hypnotisme, étant un produit de

1 imagination, de la suggestion, se présente sous des aspects très divers.

« Le sommeil hypnotique ne crée pas la suggestibilité; il n'est

même pas démontré qu'il l'accroisse; il en constitue simplement une

manifestation'. »

« Les sujets hypnotisables et les hystériques sont susceptibles de

présenter des troubles (phénomènes hypnotiques, phénomènes hysté-

i. Je crois bon de rappeler quelques propositions traduisant des idées autrefois admises,

complètement ou partiellement, par la plupart des neurologistes et par moi-même, je le

confesse.

a. L'hypnotisation pourrait èlre opérée parfois contre le gré du sujet.

6. Le sujet hypnotisé ne se rappellerait plus, au réveil, ce qui aurait eu lieu pendant le

sommeil.

c. Dans l'état léthargique, il serait complètement inconscient.

d. Dans l'état somnambulique, sa propre volonté n'agirait plus et il accomplirait par

contrainte, pendant Hypnose, ou après son réveil, le» actes suggérés.

.l'ai soumis ces propositions à la critique et je crois avoir fourni des arguments établissant

qu'aucune d'elles ne peut tire maintenue aujourd'hui.

2H HYSTÉRIE. - P1TIIIAT1SME

f

riques) à la réalité desquels ils croient, mais seulement dans une cer

taine mesure ; leur sincérité connaît des limites

« Dans toutes sortes de circonstances, l'hystérique se comporte

comme s'il était en partie maître de sa maladie et si sa sincérité n'était

pas absolue : contrairement à l'épileptique, il n'a guère d'attaques que

dans des lieux déterminés ; il sort presque toujours, sans s'être con-

tusionné, des crises clowniques qui ont épouvanté l'entourage; en

proie à des hallucinations terrifiantes, il ne commet pas, à la manière

d'un alcoolique halluciné, des actes dangereux pour lui ; atteint

d'une anesthésie thermique en apparence très profonde, il ne sera pas,

comme un syringomyélique. exposé à se brûler ; un rétrécissement

du champ visuel, quelque prononcé fût-il, ne l'empêchera pas, ainsi

que cela a lieu dans les rétrécissements organiques, de circuler et

d'éviter tous les obstacles. Tout cela rapproche l'hystérie de la simu-

lation et j'ai l'habitude de dire que l'hystérique est en quelque sorte

un demi-simulateur.

« L'hypnotisme peut donner lieu à des réflexions analogues ; suggère-

t-on, par exemple, à un somnambule que la pièce où il se trouve et

l'escalier de sa maison sont la proie des flammes, il manifestera bien

de l'épouvante, mais il se gardera de sauter par la fenêtre, fùt-elle

à deux mètres au-dessus du sol. »

Comment donc faire la part du vrai et du faux ? C'est là un problème

difficile à résoudre puisque, comme on l'a vu (p. 201), tous les phé-

nomènes pithiatiques peuvent être simulés. Il faut avouer qu'il esl

impossible dans chaque cas particulier de déterminer avec certitude

le degré de sincérité du sujet en présence duquel on se trouve; les

circonstances seules permettent de se former sur ce point une opinion

probable. Je serais tenté de dire d'une manière générale que, sans

compter les faits relatifs à 1'llystéro-ti,auii-iatisme, les manifestations s

bruyantes, théâtrales, et l'hypnotisme fait partie de ce groupe, sont,

celles qu'il y a surtout lieu de suspecter, que les troubles discrets

HYSTERIE. - l'ITIIIATlS)IE ' 213

dont le sujet ne fait pas étalage sont au contraire ceux où sa bonne

foi parait le plus vraisemblable; il en est ainsi, en particulier, dans

l'hystérie associée où les phénomènes pithiatiques se greffent sourde-

ment sur les accidents organiques sans que le malade semble avoir

conscience de leur mécanisme. -

Mes travaux sur l'hystérie, outre l'intérêt spéculatif qu'ils peuvent

présenter, ont des conséquences thérapeutiques, médico-légales et

prophylactiques que je vais sommairement indiquer.

1° 11 est de toute évidence que posséder des moyens permettant de

discerner avec certitude les troubles hystériques des doubles organi-

ques est chose utile.

D'une part, en effet, un accident hystérique une fois reconnu et

combattu comme il convient ne tarde pas à disparaître, tandis qu'il

peut s'éterniser si sa nature est méconnue.

D'autre part, l'erreur qui consiste à prendre pour pithiatique une

affection organique expose à négliger le traitement qu'un tel état com-

porte.

De plus, dans les cas d'association, en déterminant exactement ce

qui revient à l'hystérie et à l'affection concomitante. on acquiert

le moyen de se conformer aux indications thérapeutiques posées par

chacune d'elles. '

2° La médecine légale a aussi tiré parti de mes recherches. Les don-

nées qui en résultent ont conduit experts et magistrats à mieux dépis-

ter la supercherie (oedèmes, ulcérations cutanées, etc., prétendus

hystériques), à apprécier plus exactement la valeur de l'hystérie

traumatique, enfin à reconnaître plus sùrement les troubles organi-

ques et 1 incapacité qu'ils entraînent.

Par suite, la loi su ries accidents du travail prèle moins aux divers abus

qu'elle avait d'abord suscités, en même temps que sont mieux saine-

31(i HYSTÉRIE. - PITII1AT1SME

gardés les intérêts légitimes de ceux qui ont droit à un dédommagement.

3° Depuis que l'on connaît toute la portée de la suggestion dans la

genèse des désordres hystériques, suggestion exercée soit par le milieu

familial, soit par le milieu hospitalier, soit par le médecin lui-même,

et que l'on en préserve ceux qui seraient susceptibles de subir ses effets,

les manifestations de l'hystérie sont devenues beaucoup moins fré-

quentes qu'elles ne l'étaient dans le passé.

(Voir il l'Index les n" 27, 3o,3/t, 35, 36, 38, tio, 5g, 77, 89, 100, 101, 10{"

t3 ! (, r35, 14 1 , 1/42, t4((, 1-/15, it,6, il(7, i/|8, ! 53, t5li, r55, 156, 158, 1G2,

175, 191, IgG.)

Neurologistes, cliniciens s'occupant de médecine générale et aliénistes ont pres-

que tous admis, au moins dans ce qu'elle a de fondamental, ma conception de

l'hystérie, du pithiatisme. Cela est pour ainsi dire de notoriété publique et il ne

me serait peut-être pas nécessaire de fournir de témoignage. Quelques citations

ne seront cependant pas inutiles : elles montreront la transformation qui sur

celle question s'est opérée dans les esprits.

Voici quelques extraits d'une communication de Brissaud au « Congrès interna-

tional de Rome des accidents du travail » et intitulée : « Les troubles nerveux post-

traumatiques » (Voir : Revue clinique médico-chirurgicale, ) ? juin tgog, n° 6).

« Ce n'est pas un effet de pure coïncidence si, depuis l'entrée en vigueur de la

loi de 1898, l'hystérie a fait l'objet de recherches si nombreuses. La revision de

l'oeuvre de Charcot est, en grande partie, une conséquence de cette loi. Or, c'est

un des plus actifs coJlaborateursde Charcot qui a démasqué« la grande simulatrice»

et fourni la preuve évidente qu'elle simulait mal. M. Babinski s'était, d'ailleurs,

bien rendu compte que la maladie avait changé avec le temps ; que l'hystérie d'au-

jourd'hui n'était plus celle d'autrefois, celle de la Salpêtrière, celle de Charcot;

qu'elle ne pouvait plus imiter les réactions spasmodiques authentiques et sincères,

comme la trépidation épileptoïde ; qu'elle ne savait plus faire que ce qu'on lui

enseignait : bref, que les seuls symptômes donl elle fût capable en dehors des

attaques de nerfs (ou des vapeurs, comme on disait jadis) se bornaient à cer-

tains phénomènes, en quelque sorte consentis d'avance, ceux qui peuvent être

provoqués par suggestion et supprimés par persuasion. Ces phénomènes, : \1. Babinski les appellc pitliiatidnes.

« Le pifltinlisme, tel serait le nom de l'hystérie nouvelle. Peu importe que ce nom

plaise ou déplaise. Il a une valeur incontestable : quiconque crée un mot est le

maître absolu de l'acceptai ion qu'il lui donne ; , et personne n'a songé 1 nier que

IlYSTlHOE. - PtTllt,\TJS\OE 211

ce mot - d'une formation étymologique irréprochable correspondit exactement

au sens visé par M. Babinski. Les phénomènes pithiatiques sonl donc bien définis.

Le seul point sur lequel l'opinion n'est pas absolument unanime est le suivant :

tous les symptômes de l'hystérie sont-ils pilhialiques ? A la Société de Neurologie

de Paris, deux ou trois voix se sont élevées contre celte formule catégoriquement

affirmative. Mais aucune discordance ne s'est manifestée sur la nature pithiatique

de la contracture, de la paralysie flasque, des anesthésies hystériques, qui sont

justement les stigmates fondamentaux de l'hystérie traumatique.

« Les contractures pithiatiqnes,toutcommeles paralysies proprement dites, sont

devenues faciles à reconnaître : jamais elles ne témoignent (par la trépidation épi-

leptoide vraie ou par le signe de l'orteil) de l'hyperexeitabilité des centres réflexes

de la moelle, telle que peut la produire la dégénérescence du faisceau pyramidal

«M. Babinski n'admet pas les troubles trophiques de l'hystérie, en dehors d'une

supercherie qui n'a rien de pithiatique. La Société de Neurologie, depuis que la

question est il l'ordre du jour, attend le fait probant qui permettra de conclut e

dans un sens contraire. Mais s'il n'existe pas encore un seul cas, scientifiquement

démontré, de trouble trophique imputable à l'hystérie, quelqu'un affirmera-t-il

que lous les autres troubles hystériques possèdent des caractères d'authenticité

excluant la simulation ? Bien loin de là. Le diagnostic différentiel de l'hystérie et

delà simulation est impossible. »

Dans sa leçon inaugurale, ayant pour sujet : « Stabilité et conditions de varia-

tion des espèces morbides » (La Presse Médicale, t janvier rgra). Chauffard

s'exprime sur l'hystérie en ces termes :

« Mais que d'autres variations, et de tout genre, l'on pourrait citer, et quoi de

plus curieux que ce que, de nos jours et sous nos yeux, nous avons 'u se passer en

matière d'hystérie.

« Ici encore, Sydenham va nous servir de témoin, quand, dans sa disserlation sur

l'affection hystérique, il nous déclare que celle-ci « est la plus fréquente de toutes

« les maladies chroniques » et que « les affections hystériques font la moitié du

« troisième tiers des maladies, c'est-à-dire la moitié des maladies chroniques».

Ainsi un sixième des cas de maladies lui paraissait imputable à l'hystérie ! Et pour

voir à quel point Sydenham connaissait bien il il sullit de lire cet admi-

rahle chapitre qui lui est consacré.

« Nous aussi, nous avons, sous l'influence d'un autre maître, de Charcot, connu

une grande époque de l'hystérie, et pendant des années nos services nous ont

montré chaque jour les plus beaux types de l'hystérie telle qu'on la décrivait à la

Satpptrierp.

2JR i)YSTËM ! ) ? P ! Tf)iAT)SME

« Prenons l'exemple de l'hystérie mâle. En la seule année de 188g, dans mon

service de Broussais, mon interne d'alors, mon collègue d'aujourd'hui, \I. Souques,

relevait « dans une salle de 3a malades, 26 cas d'une authenticité indiscutable »,

avec anesthésie sensitivo-sensorielle partielle ou généralisée, anesthésie pharyngée,

rétrécissement concentrique du champ visuel ; et h ces stigmates classiques s'ajou-

taient tous les accidents possibles de tremblement, d'hémiplégie, monoplégies,

hémispasme glosso-labié, attaques apoplectiformes, etc.

« Et Broussais n'était pas, croyez-le bien, un hôpital privilégié en matièred'hys-

térie masculine. A la même époque, dans le service de 11. Raymond, à Saint-

Antoine, huit cas étaient observés dans les deux seuls mois de février et mars

1890; à Bordeaux, dans le service du Professeur Pitres, en quatre années, dans

une salle de clinique générale de 38 lits, passaient 22 cas d'hystérie mâle indis-

cutable.

« Et maintenant ? Par un singulier changement à vue, il n'y a presque plus

d'hystérie dans nos services, pas plus chez les femmes que chez les hommes, et,

pour ma part, je crois bien qu'il a plus de dix ans que je n'en ai observé un cas

sérieux dans mes salles.

« C'est que, depuis Charcot, nos idées se sont profondément modifiées, en

grande partie, par le fait de la critique objective à laquelle M. Babinski a soumis

la doctrine de l'hystérie. Ces hystériques si nombreux, si démonstratifs, si typi-

ques, c'est nous, médecins, qui, par nos méthodes imprudentes d'examen, en

faisions la culture artificielle et intensive. Aujourd'hui que nous sommes avertis,

l'hystérie a à peu près disparu de notre clinique hospitalière, pour se réduire à

un substratum mental sur lequel l'avis des plus compétents que moi est encore

très partagé. »

Enfin, Ph. Chaslin, dans son livre : «Eléments de sémiologie et clinique men-

tales », paru en l()'2, termine ainsi l'article consacré à l'hystérie :

« Conclusion. Seulement... il y a un seulement à tout ce que je viens de dire,

et cela me ramène aux idées de Babinski et aux résultats pratiques importants qui

en sont découlés : on ne voit presque plus d'hystériques. Dans mon service à la

Salpélrière, je n'en reçois plus; il n'y en a plus, et les anciennes hystériques, qua-

lifiées telles, sont seulement des débiles, des arriérées, des instables, voire des

épileptiques vraies, qui avaient eu aussi des attaques, mais qui n'ont plus aucune

des manifestations qui florissaient si aisément du temps de Charcot, et même un

peu après lui. C'est à peine si j'ai rencontré cinq hystériques à la consultation

externe de la Salpèlrière depuis dix-huit mois. Et ce qu'on rencontre c'est de la

toute petite hystérie. »

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

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(Journal des connaissances médicales, 19 et 26 octobre 1882).

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départ un kyste dermoide de l'ovaire (Id.).

G. Epilepsie survenue chez un syphilitique et suivie de mort, reconnaissant pour

cause une hémorragie méningée (Revue de Médecine, 1883).

7. Sur un cas de pseudo-pellagre (Gazette médicale de Paris, 1884, p. 42).

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nerfs qui s'y rendent (Comptes rendus de l'Académie des Sciences, 7 janvier i 8SZt).

g. Sur un cas de myélite chronique diffuse avec prédominance des lésions dans

les cornes antérieures de la moelle (Revue de Médecine, 1884).

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bacilles dans les crachats (en collaboration avec Dejerine. Revue de Ifédeciiie, 188b).

Il. Sur les lésions des tubes nerveux de la moelle épinière dans la sclérose en

plaques (Académie des Sciences, 8 juin 1884).

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comparative des diverses variétés de sclérose de la moelle (Archives de Physiologie

normale et pathologique, 15 février 1885).

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chez Masson).

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Revue de Médecine, 188ô).

17. Sur la présence dans les muscles striés de l'homme d'un système spécial

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19. Ataxie locomotrice. Arthropathie tabétique. Rhumatisme chronique (Société

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disposition de certains muscles à la myopathie et la rapidité de leur développe-

ment (en collaboration avec Onanoff. Société de Biologie, Il 1 lévrier 1888).

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lion avec Charrin. Id., 10 mars 1888).

23. Grand et petit hypnotisme (Archives de Neurologie, 1889, nO' 4tJ et 5o).

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riurenlale el d'elnalomie pathologique, il, mars 1891).

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,Il. De l'abolition des réflexes pupillaires dans ses relations avec la syphilis (en

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INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 223

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et hémiplégie croisées (en collaboration avec Nageolte. Nouvelle iconographie de la

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5 mars igo3).

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;) ? Du traitement des affections auriculaires par la ponction lombaire (Société

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g5. Sur un cas de mélancolie guéri à la suite immédiate d'un accès provoqué

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`3 : 4 INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

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129. Sur les injections de sels mercuriels insolubles (Id.).

13o. Lésion bulbaire unilatérale : thermo-asymétrie et vaso-as)métrie; hémi-

anesthésie alterne à forme syringomyélique. Hypothèse nouvelle sur la conduction

des divers modes de la sensibilité (Société de Neurologie, 5 décembre 1 gong).

r3t. De l'action de la scopolamine sur la chorée de Sydenham (Id., janvier

'907).

132. Du champ visuel et de la vision centrale dans l'atrophie tabétique'des

nerfs optiques (en collaboration avec Chaillous. Comptes rendus de la Société

d'Ophtalmologie de Paris, 7 février 1 907).

133. De la radiothérapie dans les paralysies spasmodiques spinales (Société médi-

cale des Hôpitaux, ter mars igo7).

134. Suggestion et hystérie. A propos de l'article de M. Bernheim intitulé :

« Comment je comprends le mot Hystérie » (Bulletin médical, 3o mars tgo7).

135. Quelques remarques sur l'article de M. Sollier intitulé : « La définition et

la nature de l'Hystérie » (Archives générales de Médecine, mars tgo).

136. Sur la rachicentèse dans les tumeurs cérébrales (Société de Neurologie,

2 mai 1907).

137. Résultats thérapeutiques de la ponction lombaire dans les névrites opti-

ques d'origine inlra-crânienne (en collaboration avec Chaillous. Société d'Ophtal-

mologie, mai igo7).

138. De l'abduction des doigts dans l'hémiplégie organique (Société de Neuro-

logie, 4 juillet 1(07)'

13g. De la pronation de la main dans l'hémiplégie organique (Id.).

t4o. Sur le réllexe cutané plantaire. Différences dans les réactions correspondant t

il des différences dans le siège d'excitation (Id.).

r41. Emotion, suggestion et hystérie (Id.).

r4z. Sur la définition de l'hystérie (Congrès de Lausanne, aoùt 1907).

t 43. Section de la branche externe du spinal dans le torticolis dit mental (Société

de Neurologie, 7 novembre 1907).

13mvsm, nô

226 INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

144. A propos du pemphigus hystérique (Id., 5 décembre 1907).

t45. Sur les prétendus troubles trophiques de la peau dans l'hystérie (Société

médicale des Hôpitaux, 6 décembre 1907).

14G. Quelques remarques sur l'article de M. Cruchet intitulé : ^ Définition de

l'Hystérie en général et Hystérie infantile » (Presse médicale, 21 décembre 1(07)'

147. Sur le prétendu pemphigus hystérique (Société de Neurologie, g janvier igo8).

t48. Instabilité hystérique (pithiatique) des membres et du tronc (Id., 5 mai

1\)08).

149- Spondylose et douleurs névralgiques atténuées à la suite de pratiques

radiothérapiques (Id.).

15o. Traitement du vertige de 1\Iénière pour la ponction lombaire (Leçon faite

à la Pitié. Journal de médecine et de chirurgie pratiques, 10 juin 1908).

151. Tumeur méningée unilatérale. Hémiplégie siégeant du même côté que la

tumeur (en collaboration avec Clunet. Société de Neurologie, 2 juillet igo8).

152. Section du cubital et du médian à la partie inférieure de l'avant-bras.

Causes d'erreur dans l'exploration de la sensibilité (en collaboration avec Tournay.

Société de Neurologie, Id.).

io3. Quelques remarques sur le mémoire de M. Gordon intitulé : « Troubles

vaso-moteurs et trophiques de l'Hystérie » (Revue neurologique, 3o octobre igo8).

r 54. Quelques remarques sur le mémoire de M. Valobra intitulé : « Contribu-

tion à l'étude des gangrènes cutanées spontanées chez les sujets hystériques» (Nou-

velle Iconographie de la Salpêtrière, novembre et décembre igo8).

r 55. Démembrement de l'hystérie traditionnelle. Pithiatisme (Semaine médi-

cale, 6 janvier igog).

156. Quelques remarques sur le mémoire de M. Ettore Levi intitulé : « Nou-

velles recherches graphiques sur le phénomène de la trépidation du pied » (Encé-

phale, janvier 1909).

157. Monoplégie brachiale organique. Mouvements actifs et mouvements passifs

(Société de Neurologie, 5 février igog).

158. Sur la fièvre et les troubles trophiques attribués à l'hystérie (Id.).

15g. Deux cas de tumeur cérébrale (Id., 4 mars igog).

160. Deux cas de tumeur cérébrale du lobe frontal (Id., G mai igog).

161. Quelques documents relatifs à l'histoire des fonctions de l'appareil céré-

belleux et de leurs perturbations (Revue de médecine interne et de thérapeutique,

mai igog).

162. A propos d'un travail de M. Ettore Levi intitulé : « Quelques nouveaux

faits relatifs à un cas d'Hystérie avec exagération des réflexes tendineux. Réponse

aux critiques de M. Babinski » (Encéphale, 7 juillet 1909).

c 63. Quelques remarques sur la ponction rachidienne et la ponction céphalique

comparées entre elles (Société médicale des Hôpitaux, 3o juillet J (09)'

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 227

Il)4. Trépanation pour tumeur cérébrale. Ablation de la tumeur. Grande amé-

lioration (en collaboration avec de Martel. Société de Neurologie, 2 décembre

1909')'

165. Sur la localisation des lésions comprimant la moelle. De la possibilité d'en

déterminer le siège au moyen des réflexes de défense (en collaboration avec Jar-

kowski. Académie de Médecine. Bulletin médical, 17 janvier igio).

166. Hypotonicité musculaire et réaction de dégénérescence (Société de Neuro-

logie, 10 février igio).

167. Vertige voltaïque et lésions auriculaires (Bulletins el Mémoires de la Société

de Laryngologie, d'Olologie et de Rhinologie de Paris, 12 février igio).

168. Remarques sur la persistance de zones sensibles à topographie radiculaire

dans les paralysies médullaires avec anesthésie (en collaboration avec Barré et

Jarkowski. Société de Neurologie, 10 février et 4 avril igio).

16g. Craniectomie décompressive (Société de Neurologie, 14 avril igio).

170. De la craniectomie décompressive (Académie de Médecine. Bulletin médical,

20 avril igio).

171. Sur la possibilité de déterminer la hauteur de la lésion dans les paraplé-

gies d'origine spinale par certaines perturbations des réflexes (en collaboration

avec Jarkowski. Société de Neurologie, 12 mai igio).

172. Contribution à l'étude de la syphilis familiale. Recherches à l'aide de la

réaction de Wassermann (en collaboration avec Barré. Id.).

173. Utilité de la craniectomie décompressive dans les tumeurs cérébrales (Leçon

faite à la Pitié. Journal de Médecine et de Chirurgie pratiques, 10 juin igio).

174. De la dégénération et de la régénération du sterno-mastoïdien et du tra-

pèze à la suite de la section de la branche externe du spinal (Société de Neurologie,

7 juillet igio).

175. De l'hypnotisme en thérapeutique et en médecine légale (Semaine médi-

cale, 27 juillet igio).

176. Inversion du réflexe du radius (Société médicale des Hôpitaux, 14 octobre

igio).

177. Paraplégie spasmodique organique avec contracture en flexion et contrac-

tions musculaires involontaires (Société de Neurologie, 12 janvier 19 1 1).

178. Syndrome cérébelleux (en collaboration avec Jumentié. Id.).

17g. Radiothérapie de la sciatique (en collaboration avec Charpentier et Del-

herm. Ici, 6 avril 1 91 1). ,

180. Sydrome de Brown-Séquard (en collaboration avec Jarkowski et Jumentié.

Id., 4 mai 19 11).

181. Sur l'excitabilité idiomusculaire et sur les réflexes tendineux dans les myo-

pathies progressives primitives (en collaboration avec Jarkowski. Id., 1 ? juin

1911).

228 INDEX BIBLIOGRAPHIQUE

182. Du vertige voltaïque dans les affections de l'appareil vestibulaire (Société

de Neurologie, le." juin 101 1).

183. Syndrome de Brown-Séquard par coup de couteau (en collaboration avec

Jarkowski et Jumentié. Revue neurologique, 15 septembre 1911).

184. Réapparition provoquée et transitoire de la motilité volitionnelle dans la

paraplégie (en collaboration avec Jarkowski. Société de Neurologie, g novembre

I(I1).

185. Modification des réflexes cutanés de défense sous l'influence de la com-

pression par la bande d'Esmarch (Société de Neurologie, Id.).

186. Tumeur méningée. Paraplégie crurale par compression de la moelle.

Extraction de la tumeur. Guérison (en collaboration avec Lecène et 1l0urioL..société

de Neurologie, Id.).

187. Pachyméningite cervicale h) pertrophique (en collaboration avec Jarkow ski

et Jumentié. Id., 25 janvier igia).

188. Des réflexes cutanés de défense dans la maladie de Fricdreich (en collabo-

ration avec Vincent et Jarkowski. Id., 7 mars 1912).

18g. Leucocytose du liquide céphalo-rachidien au cours du ramollissement de

l'écorce cérébrale (en collaboration avec Gendron. Société médicale des Hôpitaux,

22 mars 1(12).

190. Contribution à l'étude de la réaction de dégénérescence. Excitabilité fara-

dique latente. Possibilité de la faire apparaître au moyen de la voltaïsation (en

collaboration avec Delherm et Jarkowski. Société française d'Électrothérapie, mars

19 1,2).

19 ! . Emotion et hystérie (en collaboration avec Jean Dagnan-Bouveret. Journal

de Psychologie normale et pathologique, mars-avril igi2).

192. Tumeur méningée de la région dorsale supérieure, Paraplégie crurale par

compression de la moelle. Extraction de la tumeur. Guérison (en collaboration

avec de Martel et Jumentié. Société de Neurologie, 25 avril 1912). -

193. Stase papillaire bilatérale. Cécité presque complète. Craniectomie décom-

pressive avec incision do la dure-mère. Guérison (en collaboration avec Chaillous

et de Martel. Id.).

zig4. Contracture tendino-réflexe et contracture cutanéo-réllexe (Id., 9 mai

1912).

195. Contribution à l'étude de l'hémorragie méningée (en collaboration avec

Jumentié. Société médicale des Hôpitaux, 31 mai igi2).

r96. Élude comparative des limites de l'anesthésie organique et de l'aneslhésie

psychique (en collaboration avec Jarkowski. Société de Neurologie, I 1 juillet

I CJ I 2).

197, Réflexes tendineux : et réflexes osseux (Leçons faites à la Pitié. Bulletin

médical, numéros des 19 et 26 octobre, 6 et 23 novembre IcJI2).

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 229

Ig8. Méningite cervicale hypertrophique (en collaboration avec Jarkowski et

Jumentié. Nouvelle Iconographie de la Salpêtrière, janvier-février igi3).

igg. Contracture liée à une irritation des cornes antérieures de la moelle dans

un cas de syringomyélie (Société de Neurologie, 6 février igi3).

200. Vertige voltaïque. Perturbation dans les mouvements des globes oculaires

à la suite de lésions labyrinthiques expérimentales (en collaboration avec Vincent

et Barré. Id.).

2oi. Vertige voltaïque. Nouvelles recherches expérimentales sur le labyrinthe

des cobayes (En collaboration avec Vincent et Barré. Id., 6 mars igi3).

202. Un cas de crises gastriques tabétiformes liées à l'existence d'un petit ulcus

juxta-pylorique (en collaboration avec St. Chauvet et G. Durand. Id.).

203. Désorientation et déséquilibration spontanées et provoquées. La déviation

angulaire (en collaboration avec G.-A. Weill. Société de Biologie, 26 avril igi3).

204. Sur un syndrome de Brown-Séquard par coup de couteau (en collabora-

tion avec Chauvet et Jarkowski. Id., 8 mai igi3).

205. Pseudo-coxalgie et appendicite (en collaboration avec Enriquez et Gaston

Durand. Société médicale des Hôpitaux, 16 juillet IgI3).

206. Mouvements réactionnels d'origine vestibulaire et mouvements contre-

réactionnels (en collaboration avec G.-A. Weill. Société de Biologie, ig juillet

IgI3).

207. Les symptômes des maladies du cervelet et leur signification (en collabo-

ration avec Tournay. Congrès de Londres, août igi3).

TABLE DES MATIÈRES

Pages.

Avertissement 5

PREMIÈRE PARTIE

Histologie normale et Physiologie. Pathologie expérimentale.

Faisceaux neuro-musculaires................... (j

Des modifications que présentent les muscles après section des nerf» qui s'v v

rendent........................ la 2

De la contractilité électrique des muscles striés après la mort 14

De la paralysie pyocyanique 15

Arthropathies expérimentales Il

Paralysie diphtérique . 17

Vertige voltaïque. Lésions labyrinthiques expérimentales 18

Réflexes tendineux et réflexes cutanés 2 1

Réflexes pupillaires. - De l'influence de l'obscuration sur le réflexe à la lumière ;

étude comparative du réflexe à la lumière chez les oiseaux de jour et les oiseaux

de nuit 22

DEUXIÈME PARTIE

Clinique et Anatomie pathologique.

I. - Sémiologie 27

Réflexes tendineux et réflexes osseux 27

Réflexes cutanés 37

Phénomène des orteils 37

De l'abduction des orteils (signe de l'éventail) 52

Réflexes de défense 5G

Réflexes pupillaires 58

De l'abolition des réflexes pupillaires dans ses relations avec la syphilis.... 58

Do la pseudo-abolition du réflexe des pupilles à la lumière ti1 i

Troubles de la contractilité électrique 64

Excitabilité faradique latente 64

Contracture 65

Crampes 68

Cytodiagnostic du liquide céphalo-rachidien 69

2.12 TAULE DES MATIÈRES S

II. - FI'EC'rI0\5 DES MUSCLES 73

Myopathie primitive 7

Corrélation entre la prédisposition de certains muscles à la myopathie et la rapidité

de leur développement 73

Excitabilité idio-musculaire et réflexes tendineux dans la myopathie progressive

primitive 75

III. - AFFECTIONS DES NERFS 76

Névrites 76

Névrite sciatique 77

Scoliose sciatique .... 77

Abolition du réflexe achilléen dans la sciatique 77

Radiothérapie 78

Névrite radiale....................... 7g

Paralysie faciale 80

Ilémispasme facial périphérique 81

IV. - Affections de la moelle 8r.

Paraplégie spasmodique en flexion 86

Tabès 8g

Anatomie pathologique 89

Etudes cliniques go

Réflexe achilléen go

Réflexes tendineux des membres supérieurs 1)2

Du champ visuel et de la vision centrale dans l'atrophie tabétique des nerfs

optiques 92

Cytodiagnostic g3

Ostéopathies, Arthropathies tabétiques g3

Crises gastriques tabétiques 95

Tabes conjugal et tabes hérédo-syphilitique. Tabes et syphilis...... 96

Evolution, Pronostic, Traitement 98

Des pseudo-tabes...................... 100

Sur une forme de pseudo-tabes (Névrite optique rétrobulbaire infectieuse et troubles

dans les réflexes tendineux) 100

Pseudo-tabes spondylosique.................. 101

Sclérose en plaques loi 1

Compression de la moelle. Tumeurs intra-rachidiennes.......... 105

Localisation io5

Traitement chirurgical. Laminectomie 107

Radiothérapie dans les affections spinales 108

V. - Affections des méninges 1 l 1

Méningites lit 1

Méningite cérébro-spinale subaiguo à polynucléaires. Ponctions lombaires. Guéri-

son * III 1

Méningite hémorragique fibrineuse. Paraplégie spasmodique. Ponctions lombaires.

Traitement mercuriel. Guérison 112

Méningite cervicale hypertrophique 113

Hémorragie méningée 11 4

TABLE DES MATIÈRES 233

VL AFFECTIONS DE l'encéphale et DE l'appareil ESTIBULAIRE .... 116

Hémiplégie organique Il G

Diagnostic 1 G

Modifications des réflexes tendineux mi

Phénomène des orteils 117

Hypotonicité musculaire 117

Signe du peaucier II\) kj

Mouvement combiné de flexion de la cuisse et du tronc 120

Griffe de la main 123

Signe de la pronation I z4

Interversion des deux modes de balancement du bras......... Iz4

Parallélisme entre les divers troubles de la motilité volontaire..... 124

Fixité des troubles de motilité 125

Amyotrophie 126

Monoplégie brachiale organique................. 128

Mouvements actifs et mouvements passifs. Balancement actif et balancement passif

du bras (Interversion des deux modes de balancement du bras) 128

Tumeurs intra-cràniennes. OEdème cérébral 130

- Diagnostic 130

Traitement I 33

Médication hydrargyrique. 133

Rachicentèse. 133

' Craniectomie.................... 133

Affections du cervelet 134

Mouvements démesurés. Hypermétrie 136

Adiadococinésie...................... 141

Asynergie 144

Catalepsie cérébelleuse 152

Affections du bulbe 158

Hémiasynergie, latéropulsion et myosis bulbaires avec hémianesthésie et hémiplé-

gie croisées I,iB

Thermo-asymétrie et vaso-asymétrie d'origine bulbaires l6fj

Hémianesthésie bulbaire à forme syringomyélique.. 166

Affections de l'appareil vestibulaire.. 167

Diagnostic 167

Troubles du vertige voltaïque 167

Désorientation et déséquilibration spontanées et provoquées. Mouvements

réactionnels et contre-réactionnels 172

Traitement 1 73

Torticolis spasmodique. Torticolis « mental » 177

Pathogénie 177 î

Traitement 17g

Chorée de Sydenham..................... 180

Pathogénie . 180

Traitement .. 182

VIl. - AFFECTIONS des glandes A SI-CIi13TI0\ ¡¡.¡ II : R1'(I : . 183

Syndrome hypophysaire adiposo-génital. 183

\Ialadie de BasedoH-..................... 187

234 TABLE DES MATIÈRES

Vlll, - ArrECTIO\S DE L'APPAItEIL CABDIO ? ASCULAIBE.. , ..... 18

Ané\risme de l'aorte 189

Anévrisme de l'aorte et troubles pupillaires 180

Cyanose I g a

IX. - Hystérie. - Pithiatisme 193

Index bibliographique 219 g

CIIARTRrS. IMPRIMERIE DURAND, RUE FULBERT.