(1904) Archives de neurologie [2ème série, tome 17, n° 97-102] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales
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(1904) Archives de neurologie [2ème série, tome 17, n° 97-102] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales

ARCHIVES

DE E

NEUROLOGIE

ARCHIVES

DE ,

NEUROLOGIE

REVUE MENSUELLE 1

DES MALADIES NERVEUSES ET MENTALES

f

Fondée PAR,J.-M. CMARCOT '

FUItLIf : E SOUS I.A DIIIKC11ON DE

A. JOFFROY

Professeur de clinique

des

maladies mentales

à la Faculté de médecine

de Paris.

V. MAGNAN

Membre de l'Académie

de médecine

Médecin de l'Asile clinique

(Ste-Anne).

MM. :

F. RAYMOND

Professeur de clinique

des maladies

du système nerveux

à la Faculté de médecine

de Paris.

MM. ABAD ! E(J.), ARNAUD, BABINSKI, BALLET, BLANCHAHD(II.), BLIN, BOlSSlE11 (l'.),

BONCOUn (P.), BOYEIi (J.), B111AKU (âl.), IIHISSAUI) (E.), BIIOllAHDEL (l'.),

CARRIER (G.), CAUUIION, CESTAN, CHARON, CHARPENTIER, CHRISTIAN,

CULLEIIHE, DANJEAN, UEBOVE (M.), DENY, DUVAL (Mmllu), FÉIiÉ (Cu.), '

FENAYIi0ll, FERIIIKII, FRANCOTTE, GARNIR (S.), GOMHAULT, GRASSET, GUIARD,

KIÎRAVAL, KOUINIJJ Y, LA DAME, LANUOUZY, LEGIU1N, LEHOY, LWOFF,

HABILLE, MAUANDON DE MONTYEL, MARIE (4.), MASSELON, )IAU(jERET (R ),

MEIIKLEN, bliEltZEJEWSKI, MXtALLOE. 510011ATOFP (W. A.),

1(JSGIIA VIL-I I,A1', PAPADAKI, PARIS (A.), PATUIiEI" DE PEHIIY, PICQl'É,

P1ERI1ET, PITRES, RAMAI1T, XAYNEAU. RÉGIS, HIWNAIW (l'.), IItsGNlEtt (P.),

Itil : llElt(1'.), HOTU (W.), ROY, SÉGLAS, SÉRIEUX, SOLDER, SOUICIIANOFF,

SOI QUES, THULIÉ (H.). 1 ! 111110LA, VACHIDE, VALLON, VIGOUREUX, V1LLARD,

VOISIN (J.), VURPAS, YVON (P.).

Rédacteur en chef : BOURNEVILLE

Secrétaires de la rédaction : J.-B. CHARCOT KT J. noir

Deuxième série,, tome XVII. 1904.

Avec 15 figures dans le texte.

PARIS

BUREAUX DU PROGRÈS MÉDICAL L

14, rue des Carmes.

>kf

1904

Vol. XVII. Janvier 1904. N° 97.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE NERVEUSE.

Tumeur cérébrale avec abolition des réflexes

tendineux.

(Leçon de M. le Professeur RAYMOND, 12 décembre 1902)' t

Messieurs,

Il existe dans les questions les mieux connues, les plus

fouillées, des points particuliers, parfois même très impor-

tants, qui n'ont pas été jusqu'alors suffisamment mis en

lumière et sur lesquels il peut être nécessaire d'attirer l'at-

tention. Le cas de la malade que je veux vous présenter au-

jourd'hui en est une preuve. Elle est atteinte d'une affection

dont je vous ai présenté bien des exemples; le tableau symp-

tomatique qu'elle offre est accusé, très en relief et composé

de signes saillants qui s'imposent à première vue ; il s'agit,

je vous le dis, par avance, d'un cas de tumeur cérébrale.

Mais, de plus, on trouve, chez cette malade, quelques phé-

nomènes que ne suffit pas à expliquer la tumeur cérébrale;

c'est sur ces phénomènes, sur leur signification clinique,

pathogénique et anatomopathologique que j'insisterai sur-

tout, après avoir très rapidement légitimé mon diagnostic ;

je passerai brièvement sur la très intéressante localisation et

sur la nature probable de la tumeur présentée par la malade

à cause des développements trop longs dans lesquels je

serais obligé d'entrer ; cette étude fera l'objet d'une leçon

ultérieure.

Laissez-moi d'abord vous mettre rapidement au courant du

passé pathologique et de la situation actuelle de cette ma-

lade.

' Recueillie et publiée par MM. les D6 Philippe et Lejonne.

Archives, 21 série, t. XVII. 1

2 CLINIQUE NERVEUSE.

Il s'agit d'une jeune femme de vingt-quatre ans, plumas-

sière. Dans ses antécédents héréditaires, je relève ce fait

important que sa mère est morte de bacillose pulmonaire.

Elle-même a eu une coxalgie de la hanche gauche qui a dé-

buté à l'âge de huit ans et s'est accompagnée d'une arthrite

du genou gauche; il y a eu là au genou un foyer de suppura-

tion dont on retrouve encore aujourd'hui les cicatrices, très

visibles. Le membre inférieur gauche, ankylosé au niveau

de l'articulation coxofémorale a pris une altitude vicieuse

spéciale qu'il conserve encore aujourd'hui; mais malgré cette

infirmité, la malade a pu vaquer à ses occupations, même

faire de longues courses, piquer à la machine.

Mariée à vingt ans, notre malade a vu son mari mourir de

tuberculose au bout de quelques mois; après quatre ans de

veuvage, elle s'est remariée au milieu de cette année ; jamais

elle n'a eu de grossesse.

Ainsi, chez cette malade, triple soupçon de tuberculose :

héréditaire, sa mère est morte de bacillose pulmonaire ; per-

sonnelle, elle a eu une coxalgie dans son enfance; conjugale,

elle s'est exposée à la contagion en soignant son premier

mari. Nous ne trouvons dans son passé pas d'autres traces

d'infection ou d'intoxication possibles.

La maladie actuelle a débuté le 10 septembre 1902, par

des vertiges et une certaine apathie physique et intellec-

tuelle ; la malade se sentait lasse, elle était obligée de se

forcer pour travailler. Trois jours après, le 13 septembre,

apparaît une céphalée intense siégeant au niveau des régions

occipitale et temporale droite, en même temps se montrent, à

plusieurs reprises, des vomisments faciles qui surviennent

sans être précédés de nausées et sans rapport avec l'alimen-

tation.

Le lendemain, on note un troisième grand symptôme, la

diplopie; cette diplopie empêche la malade de coudre et

provoque des verliges si elle essaye de marcher; aussi, dès

cette époque, la malade est-elle obligée de garder la cham-

bre. Peu de temps après, sa vue se trouble; l'oeil droit est

atteint d'abord par l'amblyopie; puis bientôt l'oeil gauche

se prend à son tour. Céphalée, vomissements, troubles

oculaires, voilà une triade symptomatique qui doit attirer

votre attention et déjà orienter votre esprit vers le dia-

gnostic.

- TUMEUR CÉRÉBRALE ET RÉFLEXES TENDINEUX. 3

Cet état persiste pendant plus d'un mois. Puis les vomis-

sements cessent; la céphalée se calme, seule l'amblyopie

s'accentue de plus en plus et aboutit rapidement à l'amau-

rose : si bien que dès le 15 novembre, deux mois seulement

après le début des accidents la malade était devenue com-

plètement aveugle.

A peu près à cette époque survient une asthénie géné-

ralisée, peut-être un peu plus prononcée du côté droit du

corps que du côté gauche. Tous ces symptômes évoluèrent

chez la malade sans fièvre, et avec conservation relativement

bonne de l'état 'général; mais néanmoins, presque dès le

début, la malade fut obligée de garder lit.

Elle fut admise dans mon service le 24 novembre 1902. Je

vais maintenant examiner devant vous son état actuel

(12 décembre 1902).

Voici la malade devant vous. Dès l'abord vous êtes

frappé par l'aspect des yeux; ceux-ci sont largement ouverts

mais fixes avec des pupilles dilatées ; l'amaurose est com-

plète. L'examen oculaire pratiqué par mon collaborateur,

M. Dupuy-Dutemps, a montré, du côté du fond de l'oeil,

une stase papillaire intense avec hémonhagies rétiniennes,

péii et eYtrapapillaires des deux côtés. Il existe, de plus, une

ophtalmologie externe et interne presque totale : la recher-

che des mouvement oculaires est rendue, il est vrai, difficile

par l'amaurose et aussi par l'état d'hébétude actuel de la

malade; mais par un examen délicat et répété, on arrive à

se rendre compte que les pupilles ne réagissent, ni à la lu-

mière, ni à l'accommodation; du côté de la musculature ex-

terne, il y a bien une intégrité à peu près complète des rele-

veurs de la paupière, mais tous les autres muscles sont pa-

ralysés, cependant quelques légers mouvements sont encore

possibles dans les muscles droits internes.

J'examine immédiatement les autres organes des sens : il

n'y a pas de troubles de l'ouïe ; la malade entend parfaite-

ment tout ce que je dis ; vous avez pu vous en apercevoir.

Le goût est bien conservé. Au contraire, l'odorat est presque

totalement aboli ; la malade sent toutefois un peu de la

narine gauche ; je l'interroge et elle me répond d'une

manière affirmative qu'il y a quelques mois elle sentait très

bien les diverses odeurs. Cette recherche de l'état de l'odo-

rat, on la néglige un peu en général ; vous voyez qu'elle

4 CLINIQUE NERVEUSE.

nous révèle cependant un nouveau symptôme très intéres-

sant.

Voyons maintenant l'état des différents muscles : j'ob-

serve au niveau du visage une paralysie droite des plus

nettes; je puis la mettre en évidence facilement dans les di-

vers mouvements provoqués (succion, action de siffler, gon-

flement des joues, etc.). Il n'y a pas trace de paralysie faciale

supérieure : le frontal et l'orbiculaire fonctionnent normale-

ment des deux côtés.

On ne trouve pas non plus chez la malade de paralysie du

voile du palais ; la voix n'est pas nasonnée; les boissons ne

sont jamais rejetées par les fosses nasales. J'ajoute que la

langue est normale; vous voyez que la malade la tire correc-

tement ; elle ne présente ni déviation ni atrophie.

Je remarque du côté de la musculature du cou une atti-

tude spéciale de la malade, une ébauche de déviation conju-

guée de la tête et des yeux vers la gauche ; il y a comme une

légère parésie du sternomastoïdien et du trapèze du côté

droit.

Les membres supérieurs ne présentent pas une paralysie

vraie, au sens propre du mot, mais plutôt une parésie assez

accentuée : cette parésie va en s'accusant de la racine du

membre à sa périphérie; elle est notablement plus marquée

du côté droit que du côté gauche ; de plus, tandis qu'à gauche

elle s'étend à peu près également à tous les groupes mus-

culaires, à droite, elle est surtout intense au niveau des

extenseurs des doigts; les doigts de la malade conservent

une attitude de flexion, et elle ne peut les relever sponta-

nément, les supinateurs sont aussi plus atteints que les mus-

cles de la pronation.

Au niveau des membres inférieurs, on observe une fatigue

musculaire rapide, qui paraît augmenter plus vite dans les

segments supérieurs que dans les segments inférieurs. Il

m'est impossible de faire marcher la malade, mêmé en la

faisant soutenir par deux aides, sa tête tombe en avant, ses

bras et ses jambes pendent inertes.

L'examen électrique des muscles pratiqué par M. Huet,

n'a montré aucun trouble appréciable des réactions électri-

ques.

Somme toute, vous le voyez, au niveau des membres cette

malade ne présente que des phénomènes de parésie et d'as-'

TUMEUR CÉRÉBRALE ET RÉFLEXES TENDINEUX. 5

thénie musculaire généralisèe ; il y a bien une légère prédo-

minance des troubles du côté du bras droit, mais je n'ai pas

là un point de repère suffisant pour me conduire à une

localisation précise; jamais d'ailleurs cette malade n'a pré-

senté de crises d'épilepsie jacksonnienne.

J'examine maintenant les réflexes tendineux et je vois

qu'ils sont complètement abolis, aussi bien au niveau des

membres inférieurs (réflexes rotuliens et achilléens) que des

membres supérieurs (réflexes du poignet, du coude et de

l'épaule). Ce n'est pas la règle, vous le savez, dans les

tumeurs cérébrales ; il est commun au contraire de trouver

chez les malades un certain degré de spasmodicité : j'attire

votre attention sur cette intéressante particularité, j'y revien-

drai plus longuement tout à l'heure.

Les réflexes cutanés abdominaux sont également abolis.

Le gros orteil se met en flexion lorsqueje chatouille laplante

des pieds. Il faut noter aussi l'existence d'un certain degré

d'hypotonie musculaire.

Cette malade présente aussi des troubles sensitifs impor-

tants. Au point de vue subjectif, elle ne se plaint que de

quelques douleurs dans le bras droit, douleurs d'ailleurspeu

marquées; mais si je la touche, même légèrement, au niveau

du bras ou de la jambe droite, vous la voyez aussitôt sur-

sauter, comme si je lui faisais mal ; elle a, en effet, de

l'hyperesthésie de tout le côté droit du corps, et cette hype-

resthésie est bien marquée pour tous les modes de la sensi-

bilité, surtout peut-être pour le froid.

La malade ne présenté ni incoordination, ni tremblement;

elle n'a pas de perte des attitudes segmentaires, ni de la

perception stéréognostique. Les sphincters ont longtemps

bien fonctionné ; elle n'avait, lorsqu'elle est entrée dans le

service, qu'une légère incontinence d'urine; maintenant,

elle gâte sans s'en apercevoir.

Elle a beaucoup maigri depuis quelque temps, mais c'est

un amaigrissement massif de tous les muscles, sans atrophies

musculaires localisées.

L'état intellectuel de la malade, qui était resté longtemps

relativement bon, a beaucoup baissé actuellement; vous

voyez qu'elle est maintenant dans une sorte de torpeur; en

lui posant des questions répétées, j'arrive cependant à l'en

faire sortir, et même si je lui adresse une question très S

6 CLINIQUE NERVEUSE.

.simple, j'obtiens une bonne réponse; mais il ne me serait

plus possible d'avoir d'elle un renseignement un peu précis

ou délicat, bien que sa mémoire soit en grande partie

conservée.

Quant aux symptômes fonctionnels si importants qui

étaient apparus, au début de l'histoire pathologique de la

malade, céphalée, vertiges, vomissements, ils ont totale-

ment disparu.

La ponction lombaire a donné issue à un liquide clair,

eau de roche, ne renfermant pas d'éléments; et surtout elle

nous a montré que la pression du liquide céphalo-rachidien

était augmenté d'une manière très sensible. La ponction n'a

. amené aucune modification des phénomènes que je viens de

vous faire connaître.

L'examen des différents viscères est resté absolument

négatif; je note seulement la fréquence du pouls qui oscille

entre 110 et 120, et cela sans que la malade soit émotionnée.

Les urines ne renferment ni sucre, ni albumine.

. Je résume maintenant rapidement l'histoire de cette

malade : son affection a débuté il y a. trois mois environ par

des vertiges ; en peu de temps sont apparus successivement

trois grands signes, la céphalée, des vomissements à type

cérébral, de la diplopie. Dans le cours des deux derniers mois

les troubles oculaires se sont rapidement aggravés et ont

abouti à l'amaurose. en même temps que s'établissait une

ophtalmoplégie bilatérale totale ; à la même époque, s'ins-

tallaient, du côté des organes des sens, une anosmie à peu

près complète, du côté de la face une paralysie faciale infé-

rieure droite, du côté des membres une parésie généralisée,

plus nette au niveau du membre supérieur droit, enfin une

hyperesthésie de la moitié droite du corps.

, Tel est le tableau présenté aujourd'hui par la malade ; on

voit qu'il justifie pleinement le diagnostic de tumeur céré-

brale que j'avais porté dès le début de cette leçpn. En effet,

cette céphalée persistante, aussi bien diurne que nocturne,

ces vomissements faciles, ces vertiges, montrent à la fois

l'irritation directe et la désorganisation d'un territoire ner-

veux et surtout la diminution de l'espace dans une cavité

inextensible, la boîte crânienne : ce sont des signes de

compression cérébrale; et je trouve comme la signature de

cette compression, caractérisée par l'augmentation de lai

TUMEUR CÉRÉBRALE ET RÉFLEXES TENDINEUX. 7

pression du liquide céphalo-rachidien, dans les résultats de

l'examen ophtalmoscopique qui montre l'existence d'une

stase papillaire. L'anosmie elle-même, s'il était bien

démontré qu'elle fût récente, pourrait être considérée comme

un phénomène de compression. Ainsi, j'ai là plus de signes

qu'il n'en faut pour affirmer l'existence d'une tumeur céré-

brale et je ne m'attarderai pas à discuter le diagnostic.

Il est au contraire beaucoup plus difficile de déterminer

le siège et la nature de cette tumeur ; je ne puis insister

aujourd'hui sur ce sujet, la discussion me mènerait trop

loin. Je ferai seulement remarquer que les signes locali-

sateurs, l'ophtatmoplégie externe et interne, la paralysie

faciale inférieure droite, les troubles parétiques et l'hyperes-

thésie du côté droit du corps, montrent qu'il doit s'agir

d'une lésion pédonculaire. La lésion a-t-elle atteint direc-

tement les noyaux, ou bien les pédoncules cérébraux, par-

ticulièrement le pédoncule cérébral droit, ont-ils été sim-

plement comprimés par la tumeur ? ce sont autant de

points sur lesquels je reviendrai. En tous cas, je pense vous

montrer qu'une tumeur unique peut suffire à expliquer les

phénomènes observés. -

Quant à la nature de cette tumeur, étant donnés les anté-

cédents tuberculeux héréditaires et personnels présentés

par la malade, je ne serais pas éloigné de croire qu'il s'agit

d'un gros tubercule solitaire, mais toutefois la plus grande

réserve est ici de rigueur 1.

Je vous répète que je compte d'ailleurs revenir sur ces

diverses questions dans une de mes prochaines leçons.

Je tiens aujourd'hui, et dès maintenant, à vous souligner

un symptôme clinique très intéressant présenté par notre

malade, la perle des réflexes tendineux au niveau des

membres inférieurs et supérieurs. Quelle est la signification

de ce phénomène ? il ne peut s'agir là de tabes. Eh bien ! je

pense pouvoir vous démontrer que cette abolition des

réflexes est encore sous l'influence de la tumeur cérébrale et

qu'elle est due à la compression médullaire qui accompagne

la compression cérébrale.

1 La malade vient de mourir; l'examen macroscopique montre bien

bien qu'il s'agit d'un sarcome de la région optique inférieure droite avec

compression du pédoncule cérébral correspondant et des tubercules

quadrijumeaux voisins. ' l .

8 CLINIQUE NERVEUSE.

. Une digression est ici nécessaire : des travaux assez

récents ont montré l'existence, dans les tumeurs cérébrales,

de lésions médullaires : en Allemagne et en Autriche ce sont

principalement les travaux de Mayer (1894), puis de Pick,

de Hoche et plus récemment d'IIoffmann ; en Angleterre

l'importante monographie de Batten et Collier. En France,

quelques auteurs, particulièrement M. Nageotte, se sont

occupés de la question, mais seulement, d'une façon inci-

dente.

Voici à quels résultats ont abouti les recherches de ces

divers auteurs : au point de vue anatomique, on observe une

dégénérescence des fibres radiculaires postérieures (zone

cornu-radiculaire; zone des bandelettes externes); cette

dégénérescence peut se prolonger dans toute la hauteur de

la moelle ; ordinairement, il s'agit d'une dégénération en

pleine évolution, visible surtout par la méthode de Marchi ;

exceptionnellement le processus plus marqué ou de plus

longue durée aboutit à une véritable sclérose pseudo-tabé-

tique.

Au point de vue clinique, les lésions de la moelle se mani-

festent presque toujours par l'abolition précoce des réflexes

particulièrement des réflexes rotuliens. Ce symptôme s'ac-

compagne de phénomènes surtout sensitifs, hyperesthésies

identiques aux hyperesthésies radiculaires, douleurs rappe-

lant les douleurs fulgurantes des tabétiques.

Parfois aussi il y a des zones d'hypoesthésie ou même

d'anesthésie à type radiculaire. Enfin, mais rarement, on

pourrait observer (Hoffmann) des symptômes tabétiformes

plus précis : incoordination, signe de Romberg, etc.

Mais si les auteurs dont je viens de- vous rappeler les

travaux sont suffisamment d'accord dans leurs descriptions

anatomo-pathologiques et cliniques, il n'en est plus de même

quand il s'agit de déterminer le mécanisme pathogénique

qui préside à l'établissement des lésions des racines et

cordons postérieurs de la moelle au cours des tumeurs céré-

brales. Je ne veux pas énumérer ici les nombreuses théories

qui ont été successivement soutenues depuis les premières

constatations histologiques et cliniques; qu'il me suffise de

vous déclarer que pas une d'entre elles n'a été capable d'en-

traîner la conviction gènérale. Aussi ai-je engagé mes élèves,

MM. Cl. Philippe et P. Lejonne, à entreprendre quelques re-

TUMEUR CÉRÉBRALE ET RÉFLEXES TENDINEUX. 9

cherches, surtout dans le but de préciser la pathogénie

exacte de ces lésions médullaires, sans négliger de relever

soigneusement, dans chaque cas, leurs principales expires-

sions symptômatiques et leur évolution générale. Je tiens à

vous donner dès aujourd'hui les intéressants résultats de

ces recherches, dont vous pourrez lire tous les détails dans

un mémoire très documenté, qui sera prochainement publié

par les Archives de neurologie.

MM. Cl. Philippe et P. Lejonne ont été conduits à admettre

que les lésions médullaires des tumeurs cérébrales sont

nettement individualisées non seulement par leur topo-

graphie et leurs principaux caractères histologiques, mais

encore et surtout par leur pathogénie, très spéciale,

comme vous pourrez en juger vous-mêmes dans un instant.

Topographiquement, ces lésions sont nettement prédomi-

nantes sur le système radiculaire postérieur, ainsi que les

'premiers observateurs l'avaient bien expressément noté.

Mais, dans les cordons postérieurs, elles sont d'emblée

diffuses, n'obéissant à aucune systématisation, étendues à

toutes les zones radiculaires, partout avec une intensité

sensiblement égale (zone cornu-radiculaire ; bandelettes .

externes ; champs postérieurs); de plus, quelle que soit leur

durée, elles n'envahissent jamais la région des faisceaux

endogènes, en particulier celle des faisceaux endogènes des-

cendants (triangle de Gombault et Philippe; centre ovale de

FIechsig ; bandelette périphérique dorso-lombaire de

Hoche, etc). La topographie n'est pas moins intéressante à

étudier au niveau de la racine postérieure; ainsi, l'intensité

des lésions augmente manifestement au sur et à mesure

qu'on examine les segments de la racine plus rapprochés du

ganglion, si bien qu'elle atteint son maximum dans la

région immédiatement préganglionnaire, comme MM. Cl.

Philippe et P. Lejonne ont pu nettement l'observer sur les

coupes sériées, pratiquées à tous les niveaux de la racine

postérieure. C'était là remarquons-le en passant une

constatation fort intéressante, puisqu'elle devait servir à

orienter vers un endroit bien déterminé du système radicu- -

laire postérieur toutes les recherches concernant le méca-

nisme pathogénique des lésions ; je vais vous montrer son

importance majeure relativement à cette question.

Auparavant, je tiens encore à vous dire que d'autres régions

10 CLINIQUE NERVEUSE. 1

de la moelle peuvent être atteintes : par exemple, les zones

radiculaires antérieures., les racines antérieures jusque

dans leurs filets d'émergence en pleine substance grise,

même quelques fibres de la région du faisceau pyramidal

croisé. Mais toutes ces lésions sont contingentes, toujours

faiblement développées, par conséquent bien inférieures en

intensité à celles qui se montrent souvent dès les premières

manifestations symptômatiques des tumeurs cérébrales, au

niveau des cordons et racines postérieurs. Quoi qu'il en soit,

le processus histologique est sensiblement le même partout,

dans les régions sensitives et postérieures comme, dans les

régions motrices et antérieures de la moelle. Dans chaque

tube nerveux, la gaine de myéline est atleinte la première,

subissant la désintégration poussiéreuse, avec fines granu-

lations, assez lentement, puisque les corps granuleux sont

exceptionnels. Le cylindraxe est pris plus tardivement; il ap-

paraît tantôt gonflé, gros et pâle, parfois vésiculeux, remplis-

sant complètement la gaine, tantôt petit, replié sur lui-

même, comme plaqué à la périphérie du tube. Que devient-il

ultérieurement ? Certainement, il persiste longtemps après

la démyélinisation complète du tube nerveux ; mais, d'après

quelques auteurs, il pourrait être détruit, lorsque le pro-

cessus est arrivé à la phase scléreuse. Les autopsies exami-

nées dans le service n'ont rien montré de semblable. En

résumé, il s'agit d'un processus surtout parenchymateux,

peu destructif, à évolution lente et subaiguë, frappant

d'abord la gaine de myéline, plus tardivement le cylindraxe,

dont la persistance est certainement très longue, sinon

indéfinie. -

Au total, ces lésions sont à rapprocher incontestablement

de celles bien étudiées par M. Dupuy-Dutemps, dans sa

thèse inaugurale, à toutes les phases de la papille étranglée,

plus spécialement au niveau du nerf optique rétro-bul-

baire.

Mais revenons à la pathogénie. Deux cas particulièrement

heureux ont permis à MM. Cl. Philippe et P. Lejonne d'appor-

ter une nouvelle théorie qui sera, tout permet de le penser,

confirmée à l'avenir par des faits plus nombreux, au sur et à

mesure que les examens histologiques se multiplieront. Dans

ces deux cas, sitôt que les ganglions rachidiens eurent été

extraits de leur canal osseux, on fut surpris de constater

TUMEUR CÉRÉBRALE ET RÉFLEXES TENDINEUX. J ! 1

leur volume relativement énorme; ces ganglions avaient,

pour la plupart, triplé de dimension, si bien qu'ils ressem-

blaient, comme vous pouvez aisément le voir sur ces dessins

reproduits au tableau, à de grosses amandes allongées dans

le sens antéro-poslérieur. Des coupes transversales permi-

rent de constater une véritable dislocation de toute la masse

préganglionnaire, masse creusée de lacunes communiquant

largement entre elles et remplies d'un liquide clair absolu-

ment semblable au liquide céphalo-rachidien normal ;

d'ailleurs, un stylet fin pouvait aisément être conduit de la

grande cavité sous-arachnoïdienne jusque dans la région

pré et périganglionnaire. L'examen histologique ne fit que

confirmer, en précisant certains détails, les intéressantes

constatations déjà relevées à l'oeil nu. C'est ainsi que le

microscope montra plus nettement la dislocation des fasci-

cules nerveux de la racine postérieure principalement; les

lésions, surtout démyélinisatrices, des fibres nerveuses, l'in-

tégrité suffisante des cellules ganglionnaires; enfin, l'ab-

sence de toute inflammation interstitielle proprement dite,

si l'on met a part quelques leucocytes diapédésés, disposés

isolément çà et là, dans les espaces conjonctifs, ou autour

des vaisseaux assez dilatés et souvent gorgés de sang. Bref,

sans vouloir entrer ici dans une discussion histologique trop

détaillée, je me contenterai de vous dire que MM. Cl. Phi-

lippe et P. Lejonne, en s'appuyant sur ces constatations

anatorno-pathologiques, se croient autorisés à admettre

l'envahissement de toute la région préganglionnaire par un

liquide céphalo-rachidien à haute pression, d'autant que la

tension de ce liquide est fréquemment augmentée, souvent

à un degré considérable, au cours dès tumeurs cérébrales,

ainsi que ces auteurs ont pu s'en convaincre en utilisant un

manomètre à eau heureusement modifié par M. IIallion.

Vous savez bien qu'à l'état normal, l'espace sous-arachnoï-

dien se continue jusqu'au ganglion, en envoyant des diver-

ticules à travers les fascicules des racines rachidiennes, de

la racine postérieure en particulier. Ces diverticules sont à

peu près virtuels dans les conditions ordinaires ; mais vienne

un excès de tension du liquide céphalo-rachidien, comme

dans les tumeurs cérébrales, et nécessairement il y aura

d'abord élargissement, puis dislocation de tous ces espaces !

à parois minces et peu résistantes, si bien qu'en dernière

12 CLINIQUE NERVEUSE.

analyse les tubes nerveux eux-mêmes seront séparés les uns

des autres, plus ou moins dissociés et tiraillés au point de

subir ces lésions de la myéline et du cylindraxe, sur les-

quelles j'ai suffisamment appelé votre attention. Pour tout

résumer d'un mot, il y a une véritable hydropisie de toute

la région pré et périganglionnaire, consécutivement à l'excès

.de tension du liquide céphalo-rachidien de la grande cavité

~sous-arachnoïdienne. Il s'agit donc là, au fond, d'accidents

de compression, qu'on peut, au point de vue de la patho-

logie générale, placer à côté des accidents de compression

cérébrale, si communs au cours des tumeurs de l'encé-

phale.

Et maintenant, je voudrais, en terminant, vous dire ma

pensée sur la valeur séméiologique de ces lésions médul-

laires, d'après l'ensemble des cas qui ont été plus spéciale-

ment observés dans le service depuis quelques années. Si

cette valeur séméiologique est certaine, assurément elle est

moins considérable que ne l'avaient pensé quelques auteurs

au début de leurs recherches. Le gros symptôme révélateur,

celui qui doit éveiller l'attention du clinicien, c'est la dimi-

nution d'abord, puis l'abolition des réflexes rotuliens et

achilléens; de même, les réflexes des membres supérieurs

sont assez souvent diminués. Par contre, l'état des réflexes

cutanés ne parait pas avoir de valeur symptomatique bien

grande. Mais j'ajouterai expressément qu'en dehors de ce

phénomène important, les autres signes sont d'une recherche

et d'une appréciation bien plus délicates. Sans doute, on

peut observer parfois quelques troubles moteurs, un peu

d'incertitude dans la démarche, un légervacillement lorsque

le malade se retourne avec brusquerie ; de même, la main

hésite parfois un peu, avant de saisir un objet; mais, tous

ces symptômes sont bien contingents, et ils peuvent, pour

une grosse part, être dus aux modifications de tension

cérébrale, cela se conçoit sans peine. Par contre, les troubles

sensitifs sont plus accentués, plus directement imputables,

semble-t-il, aux lésions des racines et des cordons posté-

rieurs. Ainsi, les patients peuvent accuser des douleurs surve-

nant parvéritables paroxysmes, dans les membresinférieurs,

également et surtout au niveau de la nuque, avec irradiation

le long des bras, sans topographie bien constante : mais, les

malades ne souffrent pas autant que les tabétiques, cela est

TUMEUR CÉRÉBRALE ET RÉFLEXES TENDINEUX. 13

certain d'après les observations recueillies dans le service.

Fréquemment, on observe des zones d'hypoesthésie pour

tous les modes de la sensibilité, prédominantes au niveau

des membres supérieurs, le long du bord interne des avant-

bras et des bras. Ainsi, c'est à ces quelques phénomènes que

se réduit la compression médullaire, consécutive aux

tumeurs cérébrales, dans tous les cas observés à la Salpê-

trière depuis trois ans; jamais, nous n'avons constaté, malgré

des recherches fréquentes et minutieusement pratiquées,

l'existence du syndrome pseudo-tabétique (douleurs fulgu-

rantes ; ataxie, etc.), tel qu'il a été décrit dans quelques

observations, d'ailleurs assez rares. '

Tel est, Messieurs, le point particulier sur lequel je tenais

à attirer plus spécialement votre attention. Donc, lorsque

vous rencontrerez, au cours des tumeurs cérébrales (ce.

mot étant pris dans son sens général) l'abolition des

réflexes tendineux du côté des membres paralysés, voire

même de ceux qui ne le sont pas, ne vous laissez pas impres-

sionner par cette anomalie apparente, l'exagération de

ces mêmes réflexes, au moins du côté paralysé étant la

règle -; cela voudra dire que les cordons postérieurs sont

altérés vraisemblablement par le mécanisme que je vous ai

fait connaître. Cette constatation est très importante pour

le pronostic, car elle implique une exagération énorme de

la pression du liquide céphalo-rachidien et indique la gra-

vité des désordres causés par la tumeur. Elle est,impor-

tante aussi au point de vue de la pathogénie des lésions des

cordons postérieurs, mais c'est là une question qui ne peu^

encore, être tranchée pour le moment; il faut savoir

attendre.

Asiles d'aliénés. - Mouvement de novembre 1903. -- M. le De

Marchand, médecin adjoint à Blois, nommé à la 11,1 classe du cadre.

M. le or DERicQ, directeur médecin à l'asile de Bonneval, promu

à la classe exceptionnelle du cadre. M. le De Sizuiet, médecin

en chef à l'asile de Rennes, promu à la 1 ? classe du cadre.

M. le Dr DUBOlJRDlNj médecin adjoint à l'asile de Pau nommé di-

recteur médecin à l'asile de Leovellec (Morbihan), en remplacement

de 114. le Ur Schils, démissionnaire. M. le Dr TIRADE, médecin

adjoint à l'asile de la Charité (Nièvre), promu à la classe excep-

tionnelle du cadre. M. le D1' CASTIN, médeciu adjoint il l'asile de

Montdevergues (Vaucluse), est promu à la il" classe du cadre.

CLINIQUE MENTALE.

Contribution à l'étude de la démence catatonique;

Par W.-A. lOUfi1'IOLF,

Agrégé de la faculté 1 Moscou.

11 est connu que la question concernant la catatonie,

comme forme morbide, jusqu'à présent, n'est pas encore

résolue. -

Certains auteurs, avec Kahlbaum en tête, envisagent la

catatonie comme une entité morbide, d'autres regardent le

tableau décrit par cet investigateur comme un symptomo-

complexe clinique à part, qui entre dans les troubles psy-

chiques les plus variés et ne présente aucune liaison réci-

proque. Le thème de mon ouvrage ne consiste pas dans

l'examen de l'histoire de cette question, mais vu que divers

auteurs, sous le nom de catatonie, comprennent des formes

cliniques tout à fait différentes, je dois m'arrêter sur cer-

taines opinions de ces auteurs afin d'élucider les côtés prin-

cipaux de notre problème.

En z Kahlbaum (L) se basant sur 26 investigations cli-

niques et 7 autopsies, institua une nouvelle forme morbide

à laquelle il donna le nom de catatonie.

Les données anatomiques de Kahlbaum sont très indéfi-

nies et n'ont aucune liaison avec la pathogénie des symp-

tômes cliniques ; c'est pourquoi nous nous arrêterons

exclusivement sur le côté clinique de son ouvrage.

L'auteur en question regarde comme symptôme détermi-

natif des formes catatoniques les troubles moteurs typiques,

qui se joignent à la maladie mentale où entrent aussi les

symptômes d'excitation motrice et les symptômes de l'enlè-

vement de la fonction. Ces derniers n'atteignent jamais au

degré de paralysie, se limitant seulement par un affaiblisse-

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. '(5

ment et par une diminution de l'impulsion volontaire. Vou-

lant prouver l'unité nosologique de sa forme, Kahlbaum lui

impute un cours cyclique. « La catatonie, dit-il, est une

maladie de cerveau à cours cyclique, où les symptômes psy-

chiques présentent consécutivement un tableau de mélanco-

lie, de manie, de stupeur, de confusion mentale et de

démence; pourtant quelquefois l'un ou l'autre stade de

trouble psychique peut manquer. De pair avec les symptô-

mes psychiques existent aussi des phénomènes, des troubles

moteurs avec caractère de convulsions. »

Au nombre des phénomènes caractéristiques de la catato-

nie, Kahlbaum inclut encore les troubles suivants : z10 les

poses sléréotypiques habituelles ; 2° « flexibilité de cire »,

c'est-il-dire la conservation prolongée d'une altitude du

corps ou d'une extrémité donnée artificiellement au ma-

lade (flexibilitas ce1'ea, catalepsie); 3° négativisme (phéno-

mène qu'on peut indiquer comme résistance aux excitations

extérieures); 4° verbigération (prononciation de mots isolés,

sans liaison entre eux et sans sens, ou la répétition d'un seul

mot quelconque avec une expression telle, comme si c'était

un discours raisonnable) ; 50 altonité (immobilité durant un

temps plus ou moins long).

Donc, d'après Kahlbaum, le cas typique de la catatonie

présente un tableau de lésion mentale à cours périodique

(dont les périodes viennent d'être citées) et avec troubles

moteurs. Dans les formes atypiques certaines phases de

psychose isolées, ainsi que certains troubles moteurs peu-

vent manquer.

Le symptomo-complexe décrit par Kahlbaum a excité

parmi les cliniciens des débats très vifs, qui ne sont pas

achevés jusqu'à présent encore. Les opinions des auteurs

concernant ce sujet peuvent être divisées en trois groupes :

quelques-uns des auteurs n'envisagent pas le syndrome de

Kahlbaum comme indépendant. Ils trouvent qu'on peut le

rencontrer dans diverses maladies psychiques comme com-

plication de l'une ou autre forme typique de maladie men-

tale [Westphal (2), Figges (3), Mendel (4), Sander (5), Kraft-

Ebing (6), Popoff (7), Serbski (8), Bepr (9)]. D'autres auteurs

reconnaissent l'indépendance complète de la catatonie

d'après le type de Kahlbaum [Brosius (10), Frommer (20),

Neisser (11 et 23), Jensen (12), Sommer (13), Fschige ('111,),

16 CLINIQUE MENTALE.

Aschaffenburg (24), Ilsberg (26)], et les troisièmes, enfin,

tout en admettant l'indépendance de la forme en question,

donnent une autre explication aux symptômes et tracent

autrement les phénomènes cardinaux [Iiorsaliolr(1b), Schüle

(18), Kraepelin (16 et 17)]. Kraepelin, qui avant doutait de

l'indépendance de la catatonie, dans les deux dernières édi-

tions de son manuel, se met sur le point de vue de Kahl-

baum et définit la catatonie comme « états particuliers

d'excitation, passant dans la stupeur, la démence consécu-

tive avec idées délirantes confuses, illusions sensorielles,

phénomènes de stéréotypie et de suggestion dans les actes

et la conduite externe des malades ». D'après le type, le

cours et l'issue, Kraepelin rapporte cette forme au groupe

des dégénérescences psychiques et la regarde comme proche

des formes de la démence précoce (dernentia præcox). L'opi-

nion de Schüle, consiste à peu près dans cela : il prend les

formes graves et légères de la catatonie et dit que les pre-

mières finissent toujours par passer dans la démence. Dans

la description clinique, Schüle s'associe à l'opinion de Kahl-

baum. Les formes plus légères de la catatonie passent quel-

quefois dans la guérison, avec un certain défaut mental

pourtant, et quelquefois elles ont une tendance aux réci-

dives. Outre les cas de catatonie pure, Schüle admet encore

des symptômes catatoniques dans le cours d'autres psycho-

ses aiguës et chroniques. Il définit la catatonie pure par les

mots suivants : « La catatonie pure (dans une forme grave)

présente essentiellement une démence primaire (souvent

hébéphrénique) ou une psychose dégénérative, périodique-

circulaire, modifiée par des phénomènes catatoniques. »

Concernant l'étiologie de la catatonie, Schüle insiste par-

ticulièrement sur l'hérédité morbide des catatoniques.

Après cette petite revue littéraire je peux passer à mes

observations personnelles :

On-rrsVATioON I. -vu. M. F..., de vingt-six ans. Père alcoolique.

Mère de cinquante-six ans, bien portante. Lorsque le malade était

dans sa première année, il eut, après la chute d'une chaise, des

accès convulsifs. Le malade a fait ses études dans une petite ville,

à l'Pcoie de la paroisse, où il était premier élève; après avoir fini

son cours, à quatorze ans, il entra dans un atelier de serrurier à

Moscou, oÙ il resta comme apprenti quatre ans, puis pendant un

an il tr.ivailia dans différents ateliers; ensuite, à dix-neuf ans, il

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE 17

prit une place de serrurier au chemin de fer où il resta jusqu'à :

l'année 1895. Il s'appliquait à son service avec beaucoup de zèle,

était très exact : quelquefois seulement il témoignait du méconten-'

tement de ce qu'on ne lui donnait point d'avancement, malgré qu'il.

tâche de servir et ne prend pas de boissons fortes. 11 vivait tou- !

jours avec sa mère, avait un caractère doux, menait une vie très

modeste, n'aimait pas à se promener, rendait à sa mère lotis,

ses gages, laissant pour lui 1 ou 2 roubles qu'il dépensait pour-

acheter quelques petits cadeaux pour son frère et sa soeur. Deux'

ans de cela, pendant un ou deux jours, il eut un état passager 'du-

trouble p.ychique suivant : il avait peur de quelque chose, disait

que quelqu'un grimpait sur le mur, par le derrière de la fenêtre; dans

un mois il se rétablit. Il y a un an, le malade commença à se.

plaindre de céphalalgie, disant que quelque chose remuait dans sa

tête; surlout le mal de tête le dérangeait en été lorsqu'il faisait,

chaud. Depuis le mois d'octobre de l'année 1895 il devint triste, se

plaignait d'avoir mal au coeur, cessa d'aller à son service, ne

dormait pas la nuit, marchait par la chambre, disant qu'on allait

l'assassiner; quelquefois s'en allait de la maison et zô.lrrit on ne'

savait où; sa, mère, avec laquelle il se comportait très amicalement'

avant, disait que le dernier temn.s il la soupçonnait de 'lwlque chose. '

Lorsque le malade fut amené dans le bureau d'admission delà'

police, on nota ce flui suit : le malade avait un air opprimé, la tête '

baissée sur la poitrine, la ligure avait, une expression d angoisse,

les mains pendaient inertement le long du corps ; ses mouvements''

étaient extrêmement lents, la démarche aussi; il parlait d'une voix !

qu'on entendait à peine. Concernant l'état psychique on constata line,

confusion mentale, un affaiblissement de combinaison et de mémoire, '

une humeur opprimée et triste; le malade se plaignait de ressentir''

de l'angoisse et comme si quelque chose l'oppressait (il montre la''

région épi¡ ! astri4ue), il disait qu'il devient fou, qu'il est pirdu et 1

tout cela à la suite de la masturbation à laquelle il s'est adonné pen- i

dant deux ans. A ce qu'il pardit, it'a des hallucinations visuelles. '

car il raconte qu'il voit des gens sur le mur et qu'à cause de ces z

gens il va périr. : '

Elut présent, 30-4 1896. - Le malade est d'une taille plus que-

moyenne; la peau et les enveloppes muqueuses visibles sont rais 1

blement colorées. Le poids 58,2 kilogramme'. Comme stiuniates de z

dégénéralion, on peut noter l'asymétrie de la face, la forme irré- z

gulière des oreilles. Dans les organes internes, rien d-t patlli)lo-

gique n'a éte constaté. Les pupilles sont égales, la réaction à la-'

lumière et à l'accommodation conservées ; la sensibilité de même. ' 1

Les mains tenduesdu malade tremblent. Les réflexes rotiilieiissont'-

vifs. Le malade ne peut pas bien s'orienter dans son entourage;

n'a point de représentation régulière, du temps et de l'endroit où

Archives, 2° série, t. XVIT. 2

18 CLINIQUE MENTALE.

il il se trouve. Lorsqu'on le questionne sur le sujet, il répond « pour-

quoi est-ce que je le sais ». Il manifeste un négativisme très mar-

. que ; lorsqu'on lui parle il se détourne, cache sa figure dans un coin,

se mettant le nez contre le mur. Souvent, quand on cause avec lui,

il fait des grimaces et rit sans raison. D'après les paroles du

malade, il a des visions et entend des voix. Il ne peut pas raconter

d'une manière plus détaillée ses hallucinations. Des jours entiers,

le. malade passe à se tenir sur une seule place, la face contre le

mur et à marmotter quelque chose. Il fait peu attention à ce qui

se passe autour de lui.

Octobre 1-15, 1896. Ordinairement on voit le malade se tenir

la face tournée contre le mur, sans chaussures ; tout son habit est

en désordre. A l'entrée du médecin, il tâche encore plus de se

cacher. Aux questions qu'on lui adresse, il répond : « pourquoi

est-ce que je sais cela » ou bien : « le diable le sait » et sourit sans

raison. '

Février 1-14, 1897. La pose favorite du malade est d'être assis

accroupi, la face tournée vers un coin, en se recouvrant de sa robe

de chambre. Il ne manifeste aucun intérêt. Le sommeil est pas-

sable, l'appétit aussi. Le malade fut transféré à la section d'Alek-

céevsky (Histoire de la maladie écrite par le Dr P. A. Scherbats-

chow).

Janvier 1-15, 1898. L'examen du malade présente quelques

difficultés, car il s'y soumet de mauvaise grâce. On doit le retirer

par force du coin où il est ordinairement assis. Amené pour l'exa-

men dans une chambre à part, il lâche de se dégager des mains

de l'infirmier et d'aller se mettre dans un coin. Assis sur une

chaise, il ferme les yeux et se détourne de plus en plus du méde-

cin qui l'interroge. Il ne résiste pas pourtant lorsqu'on l'ausculte et

qu'on lui mesure le crâne, il répète seulement : « Assez, assez ! ne

faites pas de sottises. » Le mesurage de la tête donna les faits sui-

vants : la circonférence du crâne 38, vertical 31, le diamètre

longitudinal - 19,1, transversal - 15,2. L'expression de la figure

du malade est taciturne, il a beaucoup de plis verticaux au front,

les yeux sont presque fermés, les lèvres un peu tendues en avant.

Le pli naso-labial du côté droit est plus abaissé que du côté

gauche. Les poumons et le coeur sont normaux. Le pouls - 84.

Les réflexes tendineux, plantaires, abdominaux et ceux du crémas-

ter sont conservés. Aux piqûres, le malade tressaille et retire son

pied ou sa main, à l'application du courant induit, lorsque la

désunion des bobines n'est pas grande, on remarque que cela lui

est désagréable. La contractilité électrique est sans modification.

Angiographie.

Tant qu'on n'a pas besoin de l'aide du malade lui-même dans

l'examen, tout va bien, mais dès qu'il devient nécessaire qu'il fasse

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. 19

quelque chose lui-même, il proteste et ne veut rien faire, en don-

nant même quelquefois l'explication pourquoi il ne le veut pas.

Par exemple, à la prière d'ouvrir les yeux pour faire voir ses

pupilles, il les ferme encore plus fortement, lorsqu'on essaie de les

lui ouvrir, il fait des mouvements de rotation avec ses bulbes ocu-

laires et tâche de résister. « Pourquoi n'ouvrez-vous pas vos yeux ? »

« Parce que les gens m'ont ennuyé. » « Montrez votre lan-

gue. » Il ne la montre pas, on répète la demande et on reçoit la

réponse : « Est-ce que je suis un éléphant pour montrer la lan-

gue. » La prière d'écrire quelque chose ou de lire adressée au

malade, reste sans résultat. On a eu seulement la possibilité de le

convaincre de se tenir sur un pied avec les yeux fermés, et on nota

alors que le malade chancelait très fort. Dès qu'on le laissait s'en

aller de la chambre, il se rendait tout de suite dans son coin en

marchant seulement sur la pointe du pied, tâchant de ne pas

s'appuyer sur les talons, son corps était recourbé du côté droit, sa

tête penchée sur l'épaule droite et un peu tournée du côté droit ;

les yeux à demi-ouverts ; en arrivant dans son coin, il prenait, à

l'instant même, l'une de ses poses favorites, à savoir, il restait

couché sur le dos, les jambes rapprochées de l'estomac et pliées

aux genoux. En observant le malade, on remarqua qu'il préférait

deux places où il s'arrangeait dans la journée : 1° sous l'escalier

et 2° derrière la porte. Il marche par le corridor et reste assis dans

des coins, sans pantoufles, qu'il refuse de mettre; souvent il est

assis accroupi et tâche de tirer sur lui sa robe de chambre, de

manière qu'elle lui recouvre la tête ; lorsqu'on essaie de lui faire

changer d'attitude et de place, le malade s'oppose, marmotte

quelque chose d'inintelligible, parfois prononce assez haut : « Ne

faites pas de sottises » ; quand on s'adresse à lui d'une manière

plus instante, alors, au lieu de se mettre en colère, le malade

commence à rire aux éclats en se détournant du médecin et con-

tinue à résister. Souvent on parvient à lui étendre les pieds sans

difficulté et sans constater de tension musculaire. Le malade prend

lui-même lune ou l'autre attitude incommode; tantôt on le voit

marcher en se recourbant du côté droit, tantôt il se redresse et

mâche tout à fait droit, tantôt il se recourbe du côté gauche.

Pourtant, pour satisfaire ses besoins naturels, le malade sort de

son coin sans qu'on le lui rappelle, et sait toujours trouver le che-

min des cabinets d'aisance ; le malade n'est jamais malpropre.

Quand on sert le dîner ou le thé, il faut appeler le malade, mais

quelquefois il y va lui-même; c'est assez de le retirer de son coin

pour qu'il aille s'asseoir à table ; il mange avec appétit. Un jour,

à l'approche du médecin qui lui demanda quelque chose pendant

qu'il dinait, il cessa de manger et la cuiller à la main attendit qu'on

le laissât en repos, lorsque le médecin s'éloigna, il se remit à man-

ger avec le même appétit. La nuit, le malade dort dans son lit,

20 CLINIQUE MENTALE.

, r

mais durant la journée il ne se couche pas au lit, mais passe tout

le temps dans son coin. Pour le faire coucher, il faut toujours le

conduire. On ne parvient pas à le faire promener, car dès qu'il

vient au jardin, il ôte ses chaussures et reste nu pieds. Le malade

ne sait où il se trouve, ni ce qui l'entoure et n'a aucune idée du

temps. Il ne répond pas si ou lui demande son nom ou son nom

~de famille. A la question, qui donc il est ? Il répond : « Peut-être

je suis un saint quelconque », mais quel saint, il ne peut pas l'ex-

pliquer. Lorsqu'on lui demande si quelqu'un vient le voir, il dit :

« Il y a beaucoup de personnes qui'viennent et qui s'en vont. »

Lorsque des parents le visitent, il vient à eux, les salue aux pieds,

demande pardon de quelque chose et tout de suite après retourne

à sa place. On voit que la quantité des représentations chez le

malade est très diminuée et l'association difficile. Il n'a point de

combinaison, sa sphère psychique est si affaiblie qu'il n'est pas en

état d'entretenir aucune conversation. Il existe chez lui des frag-

ments de son délire d'avant qui s'exprime dans les saluts à terre

qu'il l'ait à ses parents, dans sa prière de lui pardonner quelque

chose et encore dans cela qu'il se croit être un saint, etc. Si il a des

hallucinations, il ne le dit pas, mais il sourit quand on le lui

demande. Lorsqu'on a voulu savoir, n'est-ce pas, sous l'influence

de quelles visions ou de quelles voix il va se mettre dans un cein,

il répondit : « Chacun est à sa place. » (Histoire de maladie écrite

par le Dr S. S. Protopopoff).

Noire observation personnelle du malade commença au mois de

juin de l'année 1900. En comparant la description de l'état du

malade faite par le Dr Protopopoff et son élat actuel, on voit que

peu de changements se font opérés en lui. Il a toujours la même

inertie motrice, comme avant, occupe toujours la même place sous

l'escalier, où il reste accroupi : du côté de la sphère motrice pas-

sive on peut constater un nouveau symptôme en aspect d'une cata-

lepsie. Si l'on tire le malade de son altitude habituelle et si on le

met nu lit, on peut alors donner artificiellement l'attitude la plus

incommode à ses membres, et il la garde assez longtemps. Chaque

tentation aux mouvements passifs est suivie d'opposition.

Il existe des poses qu'il prend habituellement : étant assis, il

s'accroupit, étant couché il recourbe les jambes, en marchant il

prend une pose artificielle très compliquée, à savoir : son bras

droit est relevé (faisant un coin droit), à demi courbé et rapproché

du corps ; il a l'air de vouloir se couvrir de la main, les yeux ; son

corps est ordinairement penché d'un côté ou d'un autre, la lête

renversée en arrière. Sa démarche porte un caractère spastique

très net; il s'appuie sur la pointe des pieds, ses extrémités infé-

rieures ne se plient pas suffisamment dans les genoux et le tendon

du muscle gastro-cnémien reste tendu. Tel est l'état de sa mobilité

locomotrice. On remarque un négativisme très accentué dans sa

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. -2't

région psychomotrice. Le malade ne fait jamais aucun mouvement

correspondant à la demande qu'on lui adresse. De sou gré il ne

peut faire aucuns mouvements. Par exemple, il mange lui-même,

mais toujours en se détournant et en se couvrant de la main. Par-

fois il parle à quelque chose. L'articulation des mots est 2lldrl61ta-

blement disar trique. Il bégaie sur les syllabes et parle comme si sa

bouche était remplie de quelque chose. Les muscles mimiques de

la face sont en état de tension tonique. Souvent le malade rit et

même anx éclats sans aucune raison. Oulre la modification de la

parole, le malade présente des phénomènes de vcrbigéralion. Nous

avons eu plusieurs fois l'occasion de l'entendre prononcer des sons

quelconques avec une expression, comme s'il disait un discours

sensé ; la verbigération passe chez lui souvent en éclats de rire.

La sensibilité, pour autant qu'un peut le juger d'après les réflexes,

semble être conservée, l'ouïe et la vue aussi. Nous ne pûmes p'l'5

examiner objectivement la sensibilité musculaire. En jugeant

d'après les poses incommodes que prend le malade, il faut penser

qu'il a perdu la conscience musculaire. Les réflexes tendineux sont

très exagérés; le clonus plantaire existe des deux côtés. Lorsque

le malade est assis sur le lit, les extrémités pendantes, on voit un

tremblement rythmique dans les pieds. L'excitabilité mécanique

esl très vive. Cyanose très marquée des mains et de splantes des

pieds.

Du côté de la sphère psychique du malade, on peut noter une

disparition presque totale de son individualité psychique. L'acti-

vité volontaire est limitée presque exclusivement par des actes

végétaux; il est vrai que le malade a quelques actes d'habitude,

par exemple, il connaît l'heure du diner, peut se servir de la cuit-

ler, va lui-même aux cabinets d'aisance; mais ou peut dire que

sous ce rapport il n'est pas bien supérieur à un animal dressé.

Existe-t-il encore chez lui quelques restes de délire, nous ne pûmes

le constater. En 1898, le ur Protopopoff nota chez lui des frag-

ments d'idées délirantes, par exemple : il disait qu'il était un saint,

actuellement le malade ne le dit plus; avant non plus, ce n'était

pas une idée stable chez lui, mais seulement une idée délirante

passagère.

Le degré de la conscience du malade, nous aurions défini comme

un trouble très profond, mais non comme enchaînement, parce

que les réflexes psychiques existaient encore chez lui à un certain

degré, quoique très retenus et modifiés morbidement.

L'activité cérébrale d'association, si même elle existe chez lui,

se trouve en état d'inhibition. Toute la conduite du malade prouve

une démence très profonde. L'attention active est très affaiblie, on

en remarque seulement quelques étincelles. L'attention passive, à

en juger par le manque de réflexes concernant l'entourage, est très

faible aussi. 1

22 CLINIQUE MENTALE.

Nous avons eu l'occasion d'observer le malade dans le stade de

maladie déjà terminal, mais grâce à l'histoire de la maladie très

détaillée, écrite à l'hôpital Préobragensky, nous avons pu nous

faire une idée de tout le cours de sa maladie.

La maladie a débuté par une période mélancolique avec des

idées d'autoaccusation très marquées et une peur exagérée, des

suites de la masturbation. En même temps, depuis le début de la

-maladie, on remarqua une confusion mentale, un délire, des illu-

sions sensorielles et des symptômes d'inhibition et d'excitation

motrice. On observe chez le malade un négativisme très marqué et

dans ses mouvements une grande indécision ; des journées entières

il peut conserver une seule pose quelconque ; quand on lui parle,

il se met à rire sans cause et fait des grimaces imbéciles. La

démence déjà très marquée à son entrée, s'accroit à vue d'oeil et

conformément à cela les symptômes catatoniques aussi.

Au mois de janvier de l'année 1898, nous voyons déjà un tableau

d'une démence catatonique très profonde : des poses incommodes

stéréotypes, qui lui sont habituelles, une manifestation très limi-

tée des actes volontaires, un négativisme très marqué et en même

temps un rire sans raison, des grimaces et parfois une tendance à

prononcer un discours imbécile (ver bigération).

En 1900, outre le négativisme, la verbigération et les poses cata-

toniques, on observa encore la catalepsie. La démence atteignit à

un degré encore plus grand. Apparut une exagération très accen-

tuée des réflexes jusqu'au clonus plantaire et un trouble de la

parole avec le type de disartrie.

Ainsi donc, dans le cas sus-décrit, il est difficile de disputer au

sujet du diagnostic du symptôme-complexe de Kahlbaum.

Nous devons donc maintenant poser la question suivante :

Est-ce une catatonie indépendante ou seulement des symp-

tômes catatoniques qui complètent ici une forme psychique

quelconque ?

Avant tout, il faut faire attention à la démence secondaire;

si nous admettons ce diagnostic, alors il faut indiquer après

quelle psychose aiguë a apparu la forme secondaire ?

Par conséquent, l'analyse clinique de la période initiale

de la maladie doit occuper ici le premier lieu. Ne peut-on

pas rapporter notre cas aux psychoses primaires émotives

et, vu la dépression psychique du malade, ne peut-on pas

admettre ici une mélancolie ? Cette question est d'autant

plus légitime, que dans la mélancolie on observe aussi une

attonité et parfois un enchaînement de conscience (stupeur).

Effectivement, au début de la maladie (octobre 1895), le

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. 23

malade manifestait des symptômes de mélancolie, un délire

d'auto-accusation, mais dans ce temps même il y avait déjà

un commencement de délire de persécution et des soupçons

envers les personnes qui l'entouraient. Quoique ces idées

portent une coloration d'angoisse, pourtant elles ne déri-

vent point tout droit de la sensibilité dépressive. Le mélan-

colique cherche ordinairement dans lui-même la cause de

son état dépressif. Quant à notre malade, outre l'autu-accu-

sation, il soupçonne et accuse les autres aussi. C'est un

smptôme délirant et non purement mélancolique. Déjà au

mois d'avril, six mois après le début de la maladie, la con-

fusion mentale chez notre malade et une certaine limitation

intellectuelle étaient déjà très accentuées. Malgré le type

mélancolique général de la maladie, on pouvait remarquer

certains phénomènes « hébéphréniques », une inclination à

faire des grimaces, et de rire sans cause ; en même temps

l'inhibition motrice s'accentuait ; au commencement de la

maladie on a noté encore des illusions sensorielles. '

Par conséquent, contre la mélancolie parlent les faits sui-

vants : 1° le délire pas tout à fait caractéristique ; 2° les

symptômes d'atonie ensemble avec des symptômes d'excita-

tion motrice (rire, grimaces); 3° le cours atypique, puisque

déjà six mois après le début de la maladie est survenue la

démence déjà très nettement visible. Se basant sur ces par-

ticularités, le diagnostic d'une mélancolie pure au commen-

cement de la maladie doit être exclu.

Restent encore deux autres formes, à savoir : l'anzeiîtia

de Meynert et la démence précoce.

Contre la première forme, de même comme contre la mé-

lancolie, parle le cours atypique de la psychose et sa transition'

très prématurée dans la démence. Ordinairement, l'amentia

de Meynert et les formes qui ont une connexion avec cette

lésion, à savoir, la psychose hallucinatoire aiguë et la dé-

mence primitive, donnent une amélioration assez marquée

dans trois-quatre mois, ou après un stade d'affaiblissement

comparatif de la maladie, passent dans une démence chro-

nique, avec des hallucinations isolées seulement et avec une

faiblesse intellectuelle générale.

Notre malade, premièrement, n'a pas eu du tout de pé-

riode hallucinatoire aiguë, propre à l'amentia de Meynert,

secondement, nous avons déjà noté que d'une mélancolie

24 ik CLINIQUE MENTALE.

initiale, légère, avec idées délirantes isolées et une confu-

sion mentale, commença à se développer chez lui, en trois-

quatre mois, une démence complète.

Donc, la psychose initiale de notre malade, s'exprimant

par un état de mélancolie avec délire épisodique, parfois

avec hallucinations et troubles moteurs caractéristiques, ne

ressemble à aucune forme de psychose primaire indépen-

dante.

. En nous basant sur tout ce que nous venons de citer et

sur l'état actuel du malade, nous nous comptons en droit,

au sujet du diagnostic, d'écarter ici la démence consécutive

secondaire, car la démence a déjà été notée au commence-

de la maladie. Il est vrai que nous ne pouvons pas nier chez

notre malade la forme morbide qu'on définit comme démence

précoce; pourtant ce n'est pas chaque cas de démence pré-

coce qui peut se compliquer par de tels troubles moteurs,

comme ici.

C'est justement la prédominance des troubles moteurs

aigus avec symptômes d'inhibition dans la région psycho-

motrice, qui nous donne le droit de reconnaître ici la forme

à laquelle Kahlbaum donne le nom de catatonie . '

Ce qui parle encore en faveur de la catatonie, c'est la

période mélancolique initiale, ensuite l'excitation halluci-

natoire dans la floraison de la maladie. et la démence pré-

coce à la période terminale. Le cours de cette maladie pré-

sente un cas typique de « spannungsirrescin », comme

Kahlbaum définit la catatonie.

Oas. II. Le malade S. U..., gentilhomme de trente-trois ans,

fut admis dans l'hôpital psychiatrique de Préobragensky, le

il janvier en 4892.-De l'histoire de sa maladie (écrite par le Dr

Maltschine), nous empruntons les laits suivants : la mère du ma-

lade était une hystérique ; lui-même, depuis son enfance déjà,

était un déséquilibré. Au commencement de son service militaire

(en 1882) alcoolisme très marqué; depuis l'enfance et jusqu'au

temps actuel masturbation. En 1882, il fut atteint d'une psy-

chose aiguë avec hallucinations et délire de la persécution ;

quand commença le traitement, il se trouvait dans un hôpital

militaire, qu'il quitta au bout d'un an avec un certain défaut men-

tal. En 1887, nouvelle exacerbation de la maladie. En été de 1888,

refus d'aliments pendant plusieurs mois. A la fin de l'année 1888,

le' malade devint de nouveau agité. Depuis le 19 du mois de jan-

vier. 1889 jusqu'au 7 aoùt 1891, il resta à l'hôpital Empereur'

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. 25

Alexander, où il présentait les mêmes symptômes qu'à son entrée

à l'hôpital de Préol)i,af,enslçy.

Etat présent. Le malade est d'une taille plus que moyenne,

d'une complexion d'un aspect assez épuisé; du côté des organes

internes rien d'anormal n'a été constaté.

Aucuns troubles de la motilité et de la sensibilité. Aucuns

dérangements trophiques ni physiques. Le malade reste demi

couché, s'appuie au coussin, les pieds tendus, les mains aussi

tendues le long du corps. Le malade garde cette attitude sans

le moindre changement pendant plusieurs jours. Les paup ères

sont à demi baissées, le regard nu s'arrête sur rien et n'exprime

rien. Un émoussement visible des impressions extérieures; il se

rapporte d'une manière tout à l'ait indifférente à tout ce qui l'en-

toure et ne s'intéresse à rien. Le nombre des représentations est

très limité et leur cours très lent. A toutes les questions, répond

de mauvaise grâce, d'une manière monosyllabique et souvent

mal à propos. Dans sa sphère psychique, on constate aussi une

lenteur et une immobilité générale, mais de pair avec cela, il ma-

nifeste quelquefois- des mouvements impulsifs : par exemple, tout

à coup il se jette à la fenêtre voulant casser la vitre ; le malade a

une inclination à des mouvements automatiques ; en se tenant

debout à quelque distance d'un mur, il se balance de la même

manière en recourbant et en rejetant ses pieds en avant. Dans la

sphère volontaire - manque complet de désirs; le malade ne

demande jamais à manger, mais mange avec avidiié ce qu'on lui

donne. Sa conscience est profondément troublée ; il ne sait pas ni

où il se trouve, ni ce qui l'entoure, ni le temps. Le discours est

régulier, mnis lent, uniforme et sans contenu. Point d'hallucina-

tion*, m d'illusions.

Le malade reste constamment demi-couché au lit, sans changer

d'attitude une fois prise, durant plusieurs journées, sans qu'on ne

l'y force. Aux questions, répond lentement par des monoyllabes.

Le malade est calme, mange beaucoup Il est malpropre.

Deux jours de suite, le malade avait une tendance à casser les

vitres de la fenêtre, de sorte qu'on était obligé de l'avoir sous l'oeil

afin de l'empêcher d'approcher les fenêtres. A la question pourquoi

il veut faire cela, il ne répondait rien, en souriant seulement d'un

air hébété. Quelquefois les mouvements impulsifs se manifestent

en poses stéréotypes, par exemple il reste assis tranquillement sur

son lit, les bras pendants, puis tout à coup se lève et se met en

front, comme un militaire, se lient un peu, puis se rassied, ou se

lève, fait quelques pas de côté, reste debout quelque temps et

retourne à sa place. Tout cela est fait avec une tenue militaire. Le

malade est malpropre, dort et mange bien. La périphérie de la-

main gauche est ulcéreuse, à la suite d'une lésion gommeuse de

l'os, à ce qu'il paraît. Un balancement automatique en avant et en

26 CLINIQUE MENTALE.

arrière, en se tenant près d'un mur. On remarque une catalepsie

assez accentuée.

Le malade ne fait aucune attention à son entourage, tient les

yeux fixés des heures entières sur un seul point, n'entendant et ne

voyant rien de ce qui se passe autour de lui. Affaiblissement de

mémoire et de combinaison. Mange et dort bien. Graduellement le

malade passe dans un état de démence de plus en plus profonde.

Actuellement (1900), le malade se trouve dans l'état que nous

allons décrire à l'instant et qui, d'après les paroles du Dr Proto-

popolf qui l'a observé, continue sans aucun changement pendant

plusieurs années déjà.

Le malade reste des journées entières sur une seule place et

dans une seule pose. Sur sa face, on voit une certaine tension des

.muscles mimiques. Ses mains font assez souvent des mouvements

impulsifs particuliers. L'épaule se tourne dans son articulation et

par la contraction du grand muscle dorsal, s'approche un peu de

la poitrine. Il courbe un peu le bras dans l'articulation du coude et

remue légèrement les doigts. Ces mouvements, par leur type, rap-

pellent le plus les mouvements choréiformes; ils sont égaux dans

les deux mains, mais dans les pieds et dans la face on n'en observe

point. Il s'oppose très fort à la tentative de lui faire changer sou

attitude habituelle.

De son gré, le malade ne parle jamais de rien ; très rarement il

s'adresse à l'inspecteur en le priant de lui donner une cigarette,

chez d'autres personnes il refuse d'en prendre. Si on parle au

malade, il répond d'une manière monosyllabique et de mauvaise

grâce. A la question pourquoi il se tient toujours à la même place,

il répond : « Je me tiens ainsi » ou : « Il faut ainsi ». Il manifeste

une grande résistance lorqu'on veut lui faire changer de pose. Une

fois an jardin, pendant qu'on faisait sa photographie, nous le

priâmes d'ôter son chapeau, il refusa : « pourquoi ôter, on ne peut

pas ôler » ; quand après la séance photographique, on essaya de

lui remettre son chapeau, il s'opposa de nouveau. Il résiste aussi

lorsqu'on lui propose de s'asseoir ou de se coucher pour l'exa-

men.

* Le malade mange lui-même, sans qu'on lui aide, il connaît

l'heure du diner. L'attention active manque; les perceptions non

habituelles sont presque tout à fait abolies, le malade peut faire

seulement des actes auxquels il est déjà accoutumé. L'attention

passive est aussi très affaiblie.

Toute la conduite du malade ne démontre pas de délire ou d'il-

lusions. La sensibilité est conservée. Le malade sent les piqûres,

voit et entend bien. Dans les mains et les plantes des pieds se

développe très facilement une hypérémie vasculaire. Les réflexes

tendineux sont exagérés, les réflexes pupillaires sont sans modifi-

cation.

; - ETUDE DE LA DEMENCE CATATONIQUE. 27

4

. Notre deuxième observation présente un cas pur de la forme qui

nous occupe. A son analyse, surgissent certains points diagnosti-

quels à propos desquels on peut discuter et que nous allons tâcher

.;de résoudre. Pour cela, nous retournerons à l'histoire de la mala- ! die, que nous venons de décrire. Il est indubitable qu'au commence-

ment de l'année 1892, le malade présentait un tableau typique du

; syndrome de Kahlbaum, à savoir : des poses stéréotypes incom- '

molles, des phénomènes de négativisme et de mutisme, parfois une

k catalepsie et des mouvements impulsifs. '

es Comme on le voit, d'après les renseignements reçus de l'hôpital

. de l'Empereur Alexander et de l'asile de réception, cet état a été

déjà constaté encore avant, à savoir, au mois de janvier 1885.

Ici, nous nous rencontrons de nouveau avec la question

; qui concerne tous les catatoniques; avons-nous à faire à

une forme de psychose primaire ou à une démence secon-

|* daire ? A notre regret, nos renseignements concernant l'ori-

i gine de la maladie sont incomplets. Nous savons qu'en 1882

a, (c'est-à-dire dix ans avant l'entrée du malade à l'hôpital) la

\ maladie a débuté par une période mélancolique; mais nous

', n'avons pas de description précise de son séjour à l'hôpital

militaire. Il est certain seulement que dejà un an après le

début de la maladie, il présentait des phénomènes d'une

démence très marquée, et que le premier temps à l'hôpital

41 militaire il avait une excitation maniaque. Ainsi donc, si

l, nous prenons en considération les données, peu nombreu-

{ ses, il est vrai, que nous connaissons concernant la période

[, initiale de la maladie, nous devons noterque la maladie s'est

développée à un âge jeune (vingt-trois ans), qu'il y avait

1 d'abord une période de dépression, puis une excitation con-

t sécutive et une démence qui se développa dans la durée

,* d'une année. Sans doute que cela n'est pas une mélancolie

pure ici ; nous ne parlons pas déjà de cela, que dans le tout

'j commencement de la maladie, lorsque la psychose primaire

' était encore présumée, entrent déjà des idées délirantes et

non avec caractère d'auto-accusation, mais avec caractère

j de persécution. La seconde possibilité c'est l'existence

chez ce malade d'une psychose périodique mais elle doit

être exclue, vu le développement de la démence très vite

. après la première explosion de la maladie. Il est vrai que

1 dans le cours suivant de la maladie on pouvait observer

chez le malade deux états, état de dépression et état d'exci-

28 CLINIQUE MENTALE.

tation, mais toujours avec la prédominance d'un fond basi-

laire de démence.

Ces symptômes, tantôt d'un état maniaque, tantôt d'un

état mélancolique, pouvaient donner lieu à présumer ici une

forme périodique ou circulaire; pourtant, pendant tout le

temps depuis le développement de la maladie, nous n'avons

pas observé d'intervalles lucides, mais seulement un affai-

blissement du procès morbide, comme cela a eu lieu en

1891, avant le développement de la catatonie complète,

nous voyons alors tantôt un enchaînement moteur total,

tantôt une excitation motrice subite.

Par conséquent, nous pouvons exclure ici la supposition

concernant l'existence d'une psychose périodique dans le

cours de laquelle pouvaient aussi apparaître des symptômes

catatoniques.

Vu le commencement atypique de la maladie et le déve-

loppement prématuré de la démence, nous aurions dû rap-

porter ce cas aux formes hébéphréniques de dégénérescence,

connues sous le nom de démence précoce. Nous ne savons

pas si le malade avait des phénomènes catatoniques durant

son séjour à l'hôpital militaire (en 1882), mais nous savons

qu'en 1887 on pouvait constater chez lui consécutivement

des phénomènes de négativisme et d'excitation. En 1889, il

avait déjà une catatonie typique. Si cette dernière était à

douter au commencement de la maladie, maintenant corres-

pond au type clinique de Kahlbaum.

Des formes pures de la démence hébéphrénique notre

second cas diffère par la prédominance des phénomènes ca-

tatoniques, qui durent pendant onze ans, tandis que dans

les formes précoces de la démence, ils apparaissent seule-

ment de temps en temps et épisodiquement.

Nous devons nous arrêter encore sur une particularité

intéressante de ce cas, sur les périodes d'affaiblissement du

procès morbide.

Après le commencement de la maladie en 1882, il y a eu

une rémission en 1883, puis une nouvelle exacerbation en

1887; en 1889-1892, un tableau typique de catatonie et

une démence terminale très profonde qui dure jusqu'à pré-

sent.

Sur l'existence des rémissions dans la catatonie insistent

entre autres, Schüle (18) et Kraepelin (17). Ce dernier dans

! ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. 29

son article « Ueber Remissionen in der Katatonie » (1896)

, vient aux conclusions suivantes :

' 1° Les rémissions apparaissent assez souvent dans la cata-

.' tonie, surtout chez les hommes, et durent même plusieurs

1 années ;

¡ 2° Dans les rémissions les malades ordinairement ne sont ! pas tout à fait bien portants et présentent certaines particu-

; larités (état dépressif, irritabilité, des positions forcées) ;

3° Dans la période terminale toujours une démence.

¡ En comparant le cours de la maladie de nos deux cas,

malgré l'identité des symptômes, nous y voyons une grande

différence ; tous les deux ont présenté des phénomènes cata-

toniques, mais dans le premier cas la maladie se dévelop-

pait sans intermission; dans le second, il y avait des péi iodes

de rémission et d'exacerbation, pourtant sans intervalles

lucides de santé complète.

Le premier cas présente un type de catatonie progressive,

le second, de catatonie à cours rémittent. Comme nous

l'avons déjà dit au commencement de cet ouvrage, les trou-

bles catatoniques se rencontrent non seulement dans les cas

de catatonie pure, mais ils peuvent compliquer aussi d'au-

tres maladies mentales. Dans le but d'un diagnostic dilféren-

tiel, les symptômes catatoniques qui compliquent l'amentia

de Meynert et la démence précoce sont surtout graves.

Je m'arrêterai à présent sur un cas de ce genre, un cas de

démence compliquée.

Observation III. La malade, A. M., de vingt et un ans, entra à

l'hôpital de 1-Iréobra-enky au mois de mars en 1900. Anamnèse.

très incomplèle et très abrégée, car le mari de la malade jusqu'à

la noce ne la connaissait pas, et ne pouvait nous donner des ren-

seignements plus détaillés sur son passé, jusqu'au mois de mars

elle se portait bien. En mars tout à coup devint tri-te et com-

mença à manifester un délire d'autoaccusalion à savoir : une iufi-

délité à son mari. De certain motif pour ce délire a servi, peut-

être, une tentative de viol de la malade de la part d'un ouvrier de

fabrique où la malade avait servi.

A l'admission de la malade à l'hôpital en mars, le Dr Doubensky

nota une confusion mentale, parfois un délire d'auto-accusation

et une grande allonité, qui souvent -était suivie d'une excitation

motrice si forte qu'on était obligé d'isoler la malade. Dans la

chambre d'isolement elle était aussi très agitée, traînait de place

en place son matelas, déchirait ses habits, barbouillait les murs.

30 . CLINIQUE MENTALE.

Dès le premier temps, on observa déja des symptômes de négati-

visme : la malade refusait de prendre des médicaments, présentait

des phénomènes de mutisme et s'obstinait à l'examen actif. Notre

observation de la malade date de juin 1900. Le premier fait qui

attira notre attention sur elle, c'était une inclination aux poses

stéréotypes, que nous avions remarquée accidentellement en

faisant notre visite. Par exemple, la malade s'assied à table pour

dîner, puis se lève tout à coup et reste debout quelque temps le

corps incliné d'une manière très incommode et le bras courbé au

coude ; cette pose est accompagnée d'un sourire imbécile . Une fois

je lui ai levé le bras jusqu'à un angle droit, et elle garda cette pose

tant que je ne le lui ai baissé et quand je l'ai fait asseoir à table,

elle recommença à manger. ·

Je veux citer en abrégé les résultats de mon observation de la

maladie au mois de juin et juillet, sans m'arrêter sur les détails de

son histoire de maladie. Je commencerai par la description de la

sphère psychique de la malade : la conscience est troublée, elle ne

peut s'orienter dans son entourage, ne sait pas qu'elle se trouve

dans un hôpital; la chambre du médecin elle prend pour un con-

fessionnal, nomme le médecin « père Jean ». Dans la sphère

volontaire où nous rapportons tous les phénomènes psycho-mo-

teurs nous remarquons et même actuellement deux états : état

d'altonité et état d'excitation motrice uniforme. Pour la plupart de

temps la malade se trouve en état proche de la stupeur, reste

assise conservant une seule et même pose : un peu courbée, la tête

appuyée sur la main. Pourtant il est très facile de s'assurer que

cela n'est pas une pose d'un mélancolique stupeureux ; si on la

retire de cet état, elle commence à parler et à rire. Avec un sou-

rire très gai et quelquefois en riant même elle dit qu'elle a fait

« un péché », qu'elle est jeune et son mari vieux. Fixée de son

état d'attonité elle manifeste des phénomènes d'une excitation

motrice, qui aussi est très stéréotype. Si elle se met à marcher,

alors ordinairement elle fait toujours par son chemin la même

courbe, ou elle tâche de marcher de manière à mettre- ses. pieds

dans les carrés du parquet. Elle parle en trainant les mots, par-

fois on observe chez elle une verbigération, par exemple : elle com-

mence à lire un alphabet slave avec une intonation très expres-

sive et en chantonnant.

Les associations cérébrales, premièrement sont très ralenties,

secondement très superficielles. Si, par exemple, vous allez lui

montrer deux livres : l'un plus grand, l'autre plus petit, elle vous

dira du premier te c'est un évangile » et du second « c'est une

grammaire ». En voyant les balances pour peser les malades elle

dit : « Voilà des balances pour peser la provision Il. Une fois

qu'elle s'est souvenue de la provision, elle se met à dire, que la

salle de réception est une cuisine. Evidemment des illusions exis-

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. 31

tent chez elle eu dépendance de l'affaiblissement de la critique ;

mais on ne peut rien dire de sûr, quant aux hallucinations.

Elle n'a point de délire stable. Elle a seulement quelques réminis-

cences délirantes, qu'elle exprime quelquefois en parlant d'un

péché.

Sa mémoire, pour autant qu'on pouvait le constater, est affai-

blie, vu l'affaiblissement de l'attention.

Les mouvements actifs ont conservé leur force. La sensibilité

et le sens musculaire aussi ; si on met sur la main de la malade

un poids de 100 grammes et de 50 grammes du premier elle dit

que c'est un demi-kilo, et du second que c'est un quart de kilo,

par conséquent elle comprend la différence et détermine le poids,

quoique pas au juste, il est vrai, en se servant de ses associations

d'avant. Les réflexes sont très vifs. L'excitabilité faradique est

normale et l'investigation de l'excitabilité, la malade suit attentive-

ment la contractilité des muscles et s'y oppose un peu. Il parait

qu'elle comprend l'impulsion de la contractilité provoquée car elle

dit. souvent en regardant les muscles contractés : « Pourquoi

faites-vous de moi une morte ? » Une hyperhémie par slase appa-

rait très facilement dans les mains. Salivation ,très marquée.

Symptômes dégénératifs très graves. -

Au mois d'août en 1900, nous avons observé chez elle pendant

plusieurs jours une stupeur complète avec catalepsie, après quoi

survint l'excitation habituelle avec mouvements stéréotypes.

En septembre l'état de la malade était sans modifications visi-

bles. Les phénomènes d'enchainement moteur prédominaient. Le

plus souvent la malade était assise la tête appuyée sur les mains

ou les mains croisées. Ede résiste très fort, lorsqu'on veut lui faire

changer de pose. Parfois elle fait des grimaces ou sourit. Les

mouvements de la malade sont toujours tout aussi stéréotypes,

comme avant. Elle parle encore moins. L'appétit est bon et elle

ne diminue pas en piods.

Quoique les symptômes catatoniques existent indubitable-

ment dans le cas donné, mais ils n'apparaissent ici qu'épiso-

diquement. De symptôme primaire-cardinal sert la confu-

sion mentale avec abaissement très marqué de la faculté

intellectuelle avec grand trouble d'attention.

Vu la courte durée de notre observation personnelle de

ce cas, nous ne pouvons pas instituer ici un diagnostic

absolu. Le plutôt qu'on peut rapporter ce cas'au groupe

d'une démence précoce généralive. En faveur de cela parle

l'abaissement de l'intelligence très-prématuré, l'alypie de la

période initiale, la stéréotypie du cours de la maladie et

32 CLINIQUE MENTALE.

l'affaiblissement très marqué de la capacité productive du

cerveau. Ayant un grand trouble de conscience et d'atten-

tion, la malade ne fait aucune tentative pour s'expliquer son

entourage, tandis que dans l'amentia de Meynert, même

sans hallucinations, l'incompréhension de l'entourage sert

de stimulus au développement d'un délire quoique non

stable parfois. Les hallucinations sont habituelles, les illu-

sions, comparativement, très éclatantes. Ensuite il faut dire

que pour l'amentia de Meynert, le début de la maladie par

une période mélancolique ne convient pas, et le délire dans

l'amentia de Meynert est presque toujours accompagné et

soutenu par des hallucinations.

Ici c'est la sphère de l'attention qui est altérée le plus, la

sphère de l'attention active, ainsi que celle de l'attention

passive; sans doute que ce ne sont pas les hallucinations

qui en sont cause, puisqu'elles manquent, mais c'est à la

suite du trouble de l'activité cérébrale des associations que

cela provient.

Ainsi donc, je suis porté à reconnaître ici une démence

précoce compliquée par des phénomènes catatoniques. On

ne peut pas pour le moment dire au juste si notre cas se

rapporte à une catatonie lypique. Nous pouvons dire seule-

ment que celte supposilion a assez de vraisemblance. En

effet, nous avons ici presque tout le symptomocomplexe

catatonique, à savoir : début de la maladie par un délire

mélancolique, inhibition motrice, négativisme, stéréotypie,

verbigération, etc. Quoique notre malade a des illusions et

un manque de critique, mais tout de même il est difficile

d'admettre que l'inhibition motrice, la stéréotypie et les

autres phénomènes catatoïdes puissent être expliqués ici par

des illusions seulement.

Pendant tout le temps de l'observation on n'a jamais

constaté chez la malade d'explosion hallucinatoire typique.

Quoique, vu la courte durée de l'observation, on ne pouvait

pas établir de diagnostic précis, mais en rapport pronostique

on peut envisager ce cas comme non favorable. La maladie

doit se terminer par une démence, ou elle va se répéter.

Sur cela nous allons conclure la partie didactique de notre

ouvrage et nous voulons passer à la résolution du thème,

basilall'e de la signification de la catatonie comme entité

morbide.

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. ' 33

Cette question admet une résolution différente, en dépen-

dance du point de vue que nous mettrons dans la base de la

division des maladies; le critérium de la « forme indépen-

dante » présente par lui-même une grandeur assez relative

en dépendance du degré de l'étude scientifique de l'une ou

de l'autre spécialité.

En général, comme nous avons déjà eu l'occasion de l'in-

diquer dans nos Leçons cliniques relativement aux formes

infectieuses, il se compose :

1° D'un tableau clinique défini et d'un cours typique et

constant de la maladie ;

2° D'un substratum anatomo-pathologique défini ;

3° D'une étiologie distincte.

Concernant l'étiologie de la catatonie, il faut remarquer

qu'elle n'est pas encore. instituée définitivement.

Il n'y a pas longtemps que le professeur Fehige a fait un

essai d'instituer une étiologie constante de la catatonie, la

cause de laquelle il voit dans l'auto-intoxication de l'orga-

nisme par des produits sexuels à des conditions de l'absti-

nence chez les hommes, également que chez les femmes.

En faveur de cette opinion on ne peut indiquer aucune

preuve positive, mais contre elle parlent les faits suivants : "

1° Chez les filles, ayant la menstruation régulière, il

n'existe point d'inhibition physiologique des produits

sexuels principaux; 2° la plupart des hommes catatoniques

sont des onanistes obstinés, et, par conséquent, n'ont pas

non plus d'inhibition de produits sexuels ; 3° la catatonie

est bien loin d'apparaître chez toutes les personnes qui sont

privées des fonctions sexuelles, tandis que la constance du

développement de la maladie dans les conditions de l'inhibi-

tion du toxique dans l'organisme est typique par toutes les

formes toxiques.

Quoique l'auteur de cette forme, Kahlbaum n'envisage pas

la dégénérescence et l'laé'édité au nombre des causes de la

maladie donnée; pourtant d'autres investigateurs (Kraepe-

lin, Schüle) insistent absolument sur le terrain dégénératif

ici.

Quant à nous personnellement, nous partageons aussi

cette opinion. Dans nos deux premières observations le ter-

rain dégénératif était indubitable. Mais par contre, nous

venons encore 'à cette conclusion en nous basant sur des

Archives, 2- série, t. XVII. 3

34 CLINIQUE MENTALE.

combinaisons du caractère général. En faveur dp cela parle

premièrement la connexion de la catatonie avec les formes

de la démence hébéphrénique ; deuxièmement, la possibilité

du cours rémittent et même, par le fait, périodique de la

maladie. Ces particularités indiquent que certaines condi-

tions cardinales provoquent la maladie donnée.

Nous n'avons pas à notre disposition des données anato--

miques tant soit peu définies concernant la question de la

catatonie.

Les observations de Kahlbaum sont trop indétellll i liées et

trop incomplètes.

Une autopsie d'un catatonique, faite dans la clinique du

professeur Fehige, à Jourieff (Derpt), démontra une atrophie

de tout le cerveau. Il est à regretter que l'examen microsco-

pique n'ait pas été fait. Alzheimer, dans les formes termi-

nales de la catatonie, note le développement de la névroglie

dans l'écorce cérébrale, qui influent sur le caractère orga-

nique de la psychose. 1

Du côté clinique, les ennemis de l'indépendance de la

catatonie font deux objections, à savoir : pr mlènemrnt,

l'existence des symptômes catatoniques dans d'aul1't's mala-

dies mentales; deuxièmement, le manque de connexion

organique entre les phénomènes catatoniques isoles ' ,

La première objection n'a pas beaucoup d'importance, car

les uns et les autres symptômes dépendent de la 1", alisalion

des troubles fonctionnels et du trouble de l'admis réci-

proque des uns et des autres centres. Sans limite, les

phénomènes propres à une seule maladie quelconque peu-

vent être observés aussi dans d'autres maladies ; niais cela

n'enfreint pas l'unité du symplômo-complexe. 1,tii;ii(iiiiie

pathologique ne nous donne pas encore de solnle point

d'appui, et, pour prouver l'autorité morbide de celle forme,

nous devons nous diriger seulement d'après des .humées

cliniques.

La seconde objection est plus grave. Mais est ? donc en

effet que le symptômo-complexe catatonique il.- présente

qu'une coïncidence occasionnelle ? Nous pensom -1111, non.

Dans les deux premières observations citées 1 ? ! uni, un

certain groupe de troubles de l'activité de l'innervation vo-

lontaire, s'exprimant sans l'altération de tous les 11O'II-'S psy-

chomoteurs, sert de symptôme déterminatif.

Ér'UDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. 35

Encore Kahlbaum disait que les centres moteurs s'alté-

raient en premier lieu dans la maladie décrite par lui ;

quant aux investigateurs qui ont écrit après lui, ils sont

pour l'origine secondaire des phénomènes catatoniques,

provoqués dans la sphère sensorielle par des hallucinations

quelconques.

Sur ce fait insiste surtout le Dr Serbsky, citant à ce sujet

des observations analoges de Kandinsky. Nous ne sommes

pas contre cela, que peut-être, une certaines partie des

poses et des mouvements, peut être expliquée par des hallu-

cinations, mais, premièrement, on ne peut pas ne point

remarquer, que les illusions sensorielles sont comparative-

ment rares dans la catatonie pure ; secondement, si même

nous admettons que l'excitation primitive part des régions

sensorielles, tout de même alors on reçoit des réflexes céré-

braux sur la sphère motrice, tellement particuliers, qu'ils

font supposer l'une ou l'autre modification de sa fonction.

Kahlbaum, en expliquant. la pathogénie de son symptomo-

complexe, le divise en phénomènes. différents ; il rapporte

les uns aux symptômes d'excitation, contractions cloniques

et toniques, verbigération ; les autres aux symptômes d'inhi-

bition, atonité ; les poses habituelles des catatoniques, il

les rapporte plutôt à la contracture. '

En 1874, lorsque l'ouvrage de Kahlbaum venait de paraî-

tre, la science n'était pas encore si avancée dans l'étude des

fonctions de l'écorce cérébrale, comme actuellement ; c'est

pour cela que Kahlbaum devait se contenter seulement par

l'indication des symptômes, sans s'arrêter d'une maniée

plus précise sur leur base anatomo-pathologique.

Dans le temps moderne, Freusberg (25) et Zehmann (22)

font un essai d'approcher de plus près la- pathogénie des

symptômes catatoniques, en envisageant l'excitalion des

ganglions sous-corticaux comme cause de l'affaiblissement

de l'activité corticale. Par son essentiel celte hypothèse pré-

sente l'application de l'opinion de Meynert concernant la

dépendance des mouvements automatiques des ganglions

corticaux.- ,

En profitant des connaissances physiologiques contempo-

raines, nous pouvons nous permettre de faire une analyse

plus détaillée dans cette direction justement.

Nous posons la question ainsi : Pour combien et de quelle

36 ' CLINIQUE MENTALE.

manière la sphère motrice est-elle intéressée dans la patho-

génie des différents phénomènes catatoniques ? Prenons le-

premier symptôme catatonique, l'enchaînement moteur, la

discénésie et les poses stéréotypes habituelles, et voyons

quel rôle joue l'écorce cérébrale dans l'origine de ce symp-

"tôme. Dans une autre forme morbide et dans une autre

expression clinique ces phénomènes sont connus de nous

dans les maladies locales du cerveau. La contracture, la dis-.

cénésie, en général l'exagération du tonus musculaire, c'est

une verbigération. Evidemment que ce sont des actes d'ex-

citation corticale et non de l'enlèvement des fonctions. Nous

nous décidons à affirmer tout le contraire, à savoir : ce sont,

des symptômes d'innervation corticale incomplète, c'est-à-

dire que les mouvements impulsifs des catatoniques, par

leur essentiel présentent un acte locomoteur et non un acte.

psychomoteur. Le catatonique commet des mouvements

rapides, uniformes, des sauts, frappe, déchire les habits,

casse des objets, etc. Ces mouvements se font sans la parti-

cipation de la conscience. Quoi qu'on ne puisse pas nier,

totalement l'innervation corticale ici, mais, en tout cas, vu

la rapidité et l'impétuosité des mouvements et vu leur uni-,

formité, nous avons affaire ici, pour ainsi dire, à une trans-

mission unilatérale : dans certains centres et par' certains

conducteurs sa transmission est surtout facilitée, tandis

que dans d'autres elle est sujette à une inhibition nor-

male. '

D'ici provient l'impulsion, et en même temps l'uniformité

des mouvements. En cela, entre autre consiste la différence,

essentielle entre les mouvements impétueux des catatoni-

ques et les mouvements maniaques. Les derniers sont très

forts, énergiques, en même temps que très variables et

changent constamment de caractère. Ce sont véritablement

des actes psycho-moteurs, de la rapidité desquels dépend,

des changements très rapides des représentations, c'est-à-; ,'

dire de l'excitation de différents centres corticaux. Dans les 1

mouvements catatoniques, nous voyons au contraire une,

excitation uniforme de certains centres, tandis que d'autres, 1

se trouvent en état d'inhibition.

On peut donner la même signification à la verbigération-

des catatoniques. Il est indubitable qu'il existe ici une exCÍ'-¡

talion, du centre de phonation, comme nous avons pu. le

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. a'iÎ

- conclure, vu l'intonation variable avec laquelle les malades

prononcent toute une série de mots sans liaison ou quel-

.quefois toujours un seul et même mot, ou une seule syllabe

quelconque. Mais ici on ne peut pas du tout parler de l'exci-

tation du centre moteur du discours. Les images de dis-

cours ne se forment pas alors ou bien leur formation est,

en tout cas, retenue. Ici de nouveau on peut constater la

.fonction incomplète de la sphère motrice corticale. En outre,

c'est surtout le symptôme de « verbigération » qui contredit

beaucoup à l'hypothèse concernant cela, que les mouve-

ments impétueux proviennent des illusions par la voie

réflexe. Si même, concernant les mouvements complexes, on

peut admettre encore une origine hallucinatoire, mais il

est difficile d'expliquer par des hallucinations, par exemple,

le son « khme, khme » que le malade répète uniformément,

ou bien la lecture expressive d'un alphabet slave, comme

cela a eu lieu dans l'une de nos observations, ou la pronon-

ciation des lettres a, b, c, d, sur un motif « Mit meiner

Mandoline » (Fremmer).

Pour achever avec l'analyse des troubles moteurs catato-

niques, nous voulons nous arrêter encore sur l'un d'eux, à

savoir, sur la flexibilité de cire (catalepsie). Vu l'état con-

temporain des renseignements concernant ce sujet, nous ne

pouvons pas donner de pathogénie générale de ce trouble.

Il est connu que la catalepsie peut se manifester dans

diverses maladies mentales et nerveuses, elle peut même

être provoquée artificiellement dans un état hypnotique, et,

nous croyons que sa pathogénie n'est pas toujours la

même.

Effectivement, dans certains cas de catalepsie hystérique,

elle peut être provoquée par des hallucinations, mais pour

que ce symptôme soit stable, un certain degré d'inhibition

de l'activité psychomotrice du cerveau est indispensable.

L'affaiblissement du sens musculaire peut avoir aussi à un

certain degré une signification ici ; d'un côté, peut-être, il

existe ici un affaiblissement de la transmission des centres

corticaux aux conducteurs moteurs.

Quoiqu'on observe quelquefois la catalepsie dans l'amen-

tia de Meynert, ce n'est pourtant pas un symptôme céré-'

bral commun, mais un symptôme local. Chez les malades se

trouvant en état de stupeur ou en état comateux malgré

38 CLINIQUE MENTALE.

le phénomène ordinaire de disjonction de l'écorce cérébrale

avec ses conducteurs, c'est un symptôme de prédominence

des centres sous-corticaux et spinaux sur la région corti-

cale.

C'est justement l'écorce cérébrale qui, en influant d'une

manière d'inhibition sur- les ganglions sous-corticaux,

communique aux mouvements la régularité et l'égalité.

Ensuite, les expériences de Zichen, Pitres et Frank, dé-

montrèrent que l'élément atonique de la concentration est

propre aux centres sous-corticaux, tandis que l'écorce céré-

brale réagit par une contraction tonique seulement à des

excitations très fréquentes. Ainsi donc, nous basant sur les

données physiologiques, nous envisageons l'atonité et les

poses stéréotypes, comme symptôme d'affaiblissement de la

fonction corticale. Pour expliquer mon idée, je dois remar--

quer que les poses stéréotypes et l'enchaînement moteur

l'atonité présentent seulement des différents degrés de

développement d'un seul et même phénomène. Effective-

ment, la stéréotypie d'une seule et même position du corps

indique déjà par elle-même sur une fonction amoindrie de

l'écorce, puisque les mouvements corticaux sont toujours

motivés et variables en dépendance de l'un ou l'autre centre

cortical. Du côté clinique on ne peut pas tracer de limite

très accentuée entre ces deux troubles. Ainsi, par exemple,

notre premier malade, qui était toujours assis « accroupi »,

présentait un enchaînement moteur, et quand il marchait

recourbant son corps et en se couvrant de la main, nous

parlons alors d'une pose stéréotype.

Ensuite il est indubitable que le rire non motivé doit

aussi être regardé comme symptôme de l'affaiblissement de

l'activité corticale. Souvenons-nous que ce même symptôme

se rencontre aussi, mais dans une forme moins marquée,

dans les apoplexies cérébrales, à des conditions de la distri-

bution des conducteurs entre l'écorce et les ganglions sous-

corticaux (Brissaud, Bechtereff). Je pense qu'il n'y a point

de nécessité à prouver que le négativisme présente aussi un

symptôme d'inhibition corticale. L'une ou l'autre excitation,

pour ainsi dire, une demande adressée à la volonté (sphère

psycho-motrice), ordinairement provoque un réflexe ou un

autre, qui s'exprime par un acte volontaire. Chez un indi-

vidu bien portant, ce réflexe a un caractère qui lui convient ;

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. 39

chez un malade mental, il peut être sujet à une inhibition,

par exemple à la suite d'une hallucination, ou peut être

exagéré par suite d'un délire quelconque ou d'une excita-

tion, ou enfin, il peut manquer totalement, lorsqu'il existe

un manque total d'impressions. J'ai pu m'assurer personnel-

lement que c'est justement les reflexes psychiques qui exi-

gent des actes psycho-moteurs qui sont en état d'inhibition

chez les catatoniques. Ainsi, par exemple, notre premier

malade réagissait aux piqûres de sa peau par des mouve-

ments, il se retournait quand on claquait avec bruit auprès

de 'son oreille, mais il ne donnait jamais sa main au geste

correspondant. Pourtant il comprenait, à un certain degré,

les gestes et les paroles, malgré le trouble de l'attention; si

après deux ou trois piqûres avec l'épingle on approchait la

main de la poitrine du malade, il s'écartait, comme quand

on le piquait. Ainsi donc, ici, il y a justement l'enlèvement

des associations cérébrales, qui exigent la transmission de

l'excitation dans la 1'égion psycho-motrice de l'écorce. Dans

notre cas où le négativisme était complet ainsi que l'enchaî-

nement général de la conscience et l'inhibition de réflexes

psychiques pouvant être expliqué encore par le trouble gé-

néral de l'activité psycho-motrice. Mais nous savons d'après

les observations des autres auteurs, que le négativisme peut

exister aussi sans stupeur, même dans les excitations mo-

trices. Une telle explication aussi nous donnons aux cas de

négativisme partiel, à savoir : au mutisme.

Nous passerons à présent au symptôme suivant qui est le

plus difficile à expliquer de notre point de vue, à savoir :

aux actions impulsives des catatoniques et à la disparition

de la conscience, on ne parvient pas à provoquer la catalep-

sie.

Cela seul indique déjà que pour l'apparition de la catalep-

sie il faut des conditions à part en forme d'un symptôme

local, avec une localisation- dans la région psycho-motrice.

Si ce n'est pas un symptôme de l'enlèvement de la fonction,

alors tout de même ce symptôme indique sur une modifica-

tion fonctionnelle, portant plutôt un caractère d'inhibition

que d'exhibition.

De sorte que d'après le caractère clinique général, la cata-

lepsie ne contredit pas non plus les autres phénomènes

catatoniques.

40 " CLINIQUE MENTALE.

L'argument le plus persuasif, qui peut être cité en faveur

de la participation primordiale de la sphère motrice dans la

catatonie, ce sont les troubles d'innervation très stables qui

se développent à la fin de la démence catatonique. Chez

notre malade (lre observation) nous avons noté une exagéra-

tion stable de réflexes rotuliens ; un clonus plantaire avec

une démarche spastique très marquée. Il est connu que c'est

un symptôme ordinaire d'affaiblissement de l'innervation

corticale. Encore on observait chez ce même malade une

dysartrie; le peu de mots qu'il disait quelquefois, il les pro-

nonçait presque comme un paralytique général.

Lorsqu'il y a un manque total de troubles bulbaires, nous

considérons la dysartrie dans la catatonie ainsi que la dysar-

trie paralytique (voyez nos Leçons cliniques, vol. II, p. 153-

154) comme un symptôme du trouble de la synergie des

centres corticaux. Tout aussi bien que le symptôme stable

de l'enlèvement de la fonction peut être considéré comme

trouble du sens musculaire. Relativement à ce dernier il faut

avoir vu, qu'on peut l'admettre seulement dans les cas

graves de la catatonie, lorsque le malade a gardé très long-

temps une seule et même pose avec une position incommode,

des muscles, comme, par exemple, dans notre première ob-

servation.

Les phénomènes épisodiques catatoïdes, qui compliquent

d'autres psychoses ou qu'on rencontre dans les cas légers

de catatonie, ne sont pas accompagnés de trouble stable du

sens musculaire (voir notre 3e observation).

Ainsi donc tout le syndrome catatoïde peut être parfaite-

ment expliqué par des symptômes d'inhibition ou par l'in-

suffisance de l'innervation des centres corticaux dans la

région psychomotrice, et à présent, grâce aux conditions.de

l'analyse anatomophysiologique contemporaine plus détail-

lée, nous pouvons confirmer et nous rapporter plus sévère-

ment à la considération fondamentale de Kahlbaum citée

par lui encore en 1874, concernant l'unité génétique du

tableau clinique décrit par lui.

Pourtant nous devons dire d'avance que nous sommes

loin d'admettre dans la catatonie quelque trouble grossier

dans la sphère motrice de l'écorce cérébrale ; assurément

dans la période primordiale de la maladie, toute l'affaire se

bornait à des modificatious nutritives qui, à la fin des fins,

ÉTUDE DE LA DÉMENCE CATATONIQUE. 41

comme en général dans les formes de démence terminale, se

sont achevées par une atrophie. Ainsi donc, la « catatonie »

satisfait parfaitement à la première condition de la forme

clinique, à {'unité du symptomocomplexe.

Pour ce qui concerne le second phénomène clinique : la

constance du cours de la maladie, on peut l'admettre

seulement dans certaines limites. Le cours de la maladie

décrit par Kahlbaum est trop schématique et trop indéter-

miné.

D'un côté, les stades de maladie cités par cet auteur n'ap-

paraissent pas toujours dans le même ordre, d'un autre côté

Kahlbaum décrit lui-même l'intégrité du tableau clinique,

en admettant la possibilité de l'enlèvement des périodes iso-

lées. Dans l'état contemporain des choses nous aurions pu

donner la description de cette forme :

Comme bien d'autres psychoses dégénératives, la catato-

nie commence par des bouffées épisodiques délirantes, qui,

souvent, comme l'auteur de la forme en question l'indique,

portent un caractère mélancolique.

Pour différencier cette forme de la mélancolie pure, dans

la période primordiale on peut noter déjà un cours atypique

et un développement assez marqué de l'élément délirant,

qui contient non seulemeut des idées d'auto-accusation,

mais aussi des idées de persécution.

Le cours consécutif de la maladie admet deux types : un

cours progressif et un cours rémittent. Assez souvent la

première bouffée de délire épisodique passe sans suites,

comme dans deux de nos observations, et dans l'une des

observations du professeur Fehige. Puis survient une réci-

dive de maladie avec confusion mentale, qui se développe

très rapidement, avec prédominance des phénomènes cata-

toniques.

Dans le cours progressif cet état passe immédiatement

dans la démence catatonique; dans le cours rémittent sur-

vient un affaiblissement temporaire de maladie, accompa-

gné d'un défaut mental plus ou moins marqué ; ensuite

apportait de nouveau une exacerbation de maladie avec

délire épisodique, confusion mentale et catatonie, qui finit

tôt ou tard par une démence terminale. Comme phénomènes

caractéristiques des bouffées catatoniques d'amentia de

Meynert, nous aurions envisagé le défaut mental très pré-

42 CLINIQUE MENTALE.

coce et très stable qui ressort nettement dans le tableau de

confusion de conscience.

En évaluant les résultats généraux des travaux de diffé-

rents auteurs et nos observations personnelles, nous som-

mes portés à croire qu'il existe dans le cours de la catatonie

-une certaine variation définie de symptômes, avec constance

d'un seul symptôme cardinal et avec une issue terminale

constante. -

C'est une autre question, si on peut regarder la catatonie

comme un groupe nosologique indépendant, ou comme une

forme clinique, qui entre dans un autre groupe de maladies

plus vaste. Pour le moment nous ne pouvons pas encore

donner de réponse définie à cette question. Il faut dire

qu'on doit se rapporter avec beaucoup de prudence à la fon-

dation dans la psychiatrie de nouveaux groupes nosolo-

giques indépendants, vu la versatilité des commentaires

concernant les données cliniques, et vu l'indétermination de

la nosologie et de l'étiologie des maladies psychiques. Outre

un nombre assez médiocre de formes toxiques, para-infec-

tieuses et dégénératives, dans d'autres cas nous disposons

seulement de complexes cliniques déterminés et d'un cours

déterminé. De ce point de vue la catatonie est une entité

morbide.

Pour ainsi dire, le commencement de la détermination

nosologique de la catatonie a déjà été donné par Kahlbaum

lui-même, qui l'a rapproché de l' « hébephrénie », c'est-à-

dire des psychoses dégénératives des adolescents, passant

dans la démence. Plus tard, Kraepelin et Schüle rapportè-

rent, d'une manière plus décidée déjà, la catatonie au

groupe des dégénérescences psychiques. En effet, il est très

probable que cette lésion, à son tour, se basant sur son type

clinique, peut entrer dans le vaste groupe de dégénéres-

cences psychiques et présenter parmi elles une forme mor-

bide dont les limites cliniques, qui ont été marquées pour

la première fois encore par Kahlbaum, doivent être sou-

mises à une étude et un développement plus détaillés.

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psychische Krankheilem. 1 Heft. Die Katatonie. Berna, 1874.

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REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIQUES.

I. Un cas d'épilepsie avec gliôme consécutif à une lésion trauma-

tique du cerveau; par A.-R. URQUHAUT et W. Ford HOBIIT50N.

(TM Journal of Mental Science, octobre 1902).

L'intérêt de ces cas réside dans la localisation des lésions et dans

la dégénérescence du tissu cérébral au moment de l'opération.

Le mal était trop étendu pour que l'on pût éviter une terminaison

fatale; mais comme il était. prévoir la diminution de la compres-

sion intérieure a probablement modifié les symptômes les plus

importants. Dans un cas publié en jauvier dans le Journal of

Mental Science par l'auteur, l'épilepsie avait été consécutive à une

44 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

lésion traumatique du lobe frontal : il en a été de même danp le

cas présent. Tout le monde sait que des lésions cérébrales peuvent

rester silencieuses pendant des années, et bien que les preuves

rapportées à l'appui des faits publiés ne soient pas toujours ri-

goureuses, les arguments en faveur de cette manière de voir s'ac-

cumulent tous les jours. En tout cas dans l'observation actuelle

comme dans la précédente, le traumatisme n'est pas douteux, et

les lésions de dégénérescence sont vérifiées à l'autopsie.

` R. DE MUSGRAVE-CLAY.

II. Influence des recherches récentes concernant les ganglions des

racines postérieures sur l'étiologie du tabes dorsalis ; par R. G.

Rows. (1'lae Journal of Mental Science. Avril 1902.)

Ce travail a été lu au moment où le Dr Orr venait de montrer à

l'aide de projections lumineuses, les ganglions des racines posté-

rieures et les altérations qu'elles subissent dans la paralysie géné-

rale des aliénés. ,

Jusqu'à une date récente, on admettait que la lésion initiale qui

aboutissait à la dégénérescence des fibres des colonnes postérieu-

res de la moelle avait pour siège les cellules des ganglions des ra-

cines postérieures, et l'on décrivait la destruction du corps de

Nissl, le déplacement du noyau, etc. Dans son traité des maladies

du système nerveux, Sir William Gowers disait que les ganglions

sont généralement normaux et que les lésions de dégénérescence

du système nerveux sont probablement sous la dépendance d'un

agent chimique d'origine syphilitique.

En 1898, Juliusberger et Meyer publient un travail dans lequel

ils déclarent n'avoir pas trouvé de lésions des cellules ganglionnai-

res des racines postérieures chez les tabétiques.

En août dernier, dans la Presse Médicale, parait un article sur les

altérations de ces cellules : on décrit d'abord les types de cellules

que l'on rencontre dans les ganglions normaux, puis on indique les

modifications subies par ces cellules chez les tabétiques telles que

la destruction du corps de Nissl, les altérations du noyau (diminu-

tion de volume etimprégnation diffuse par les agents colorants) et

modifications de volume du corps même de la cellule. Cette der-

nière modification parait toutefois être due à une fixation im-

parfaite plutôt qu'à un état pathologique. Les lésions décrites par

Marinesco ressemblent beaucoup à celles que l'on observe dans les

mêmes cellules chez les paralytiques généraux. Mais il est intéres-

sant au point de vue de leur importance en tant que cause primi-

tive des lésions nerveuses de la moelle, de remarquer que Marinesco

dit que les lésions signalées sont très communes dans les états

morbides des ganglions spinaux, et qu'il n'a rien trouvé qui fut

particulier au tabes. '

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 45

Il discute ensuite la question des rapports entre les altérations

de ces cellules et la dégénérescence des fibres des colonnes posté-

rieures de la moelle, et conclut que lorsqu'on considère l'incons-

tance des lésions, et les différences qui existent entre l'intensité de

la dégénérescence des fibres de la moelle et le peu d'importance

relative des lésions des cellules des ganglions des racines posté-

rieures, on est conduit à affirmer nettement que la dégénérescence

des libres des colonnes postérieures de la moelle n'est pas sous la

dépendance d'ude lésion primitive de ces cellules. D'autre part les

lésions de ces cellules, ne sont pas consécutives à une altération de

leur prolongement central puisque Lugaro et d'autres physiologistes

ont démontré que l'on peut sectionner le prolongement central de :

ces cellules, c'est-à-dire les fibres des racines postérieures, sans y dé-

terminer d'altération de dégénérescence.

Ces deux altérations de dégénérescence doivent donc être rap-

portées à une cause commune, la présence dans le sang d'agents

toxiques, et l'hypothèse ancienne doit être éliminée. Sciuti, de

Naples, en a proposé une autre. Il rend compte des dégénérescen-

ces de fibres rencontrées dans la moelle chez les tabétiques et'

montre que l'on a souvent rencontré des lésions portant surd'autres

tractus de fibres que ceux des colonnes postérieures.

Celte analyse montre qu'il y a des cas de tabès simple dans les-,

quels les colonnes postérieures seules sont atteintes, et des cas de

« tabes combiné » où d'autres lésions de dégénérescence se ren-

contrent, par exemple dans les colonnes latérales, dans les colonnes

antéro-latérales. Il cite même un cas où la colonne de Rurdach

était saine à la région lombaire, alors que la continuation des

mêmes fibres à la région cervicale où elles forment la colonne de

Goll, présentait des iésionsétendues, ce qui démontre qu'un même

faisceau de fibres peut être sain dans une région de la moelle et

malade dans une autre. Bien plus, dans les faisceaux malades il

n'est pas rare de rencontrer beaucoup de fibres saines disséminées

bien que, naturellement dans les cas chroniques de longue durée

la sclérose puisse être complète. Les fibres des racines antérieures

et postérieures ont montré la même disposition capriciense.

Te]ssont quelques-uns des faits sur lesquels ]'auteuritalien édifie;

son hypothèse, à savoir : « Que la dégénérescence du tabes con-

« sisie en une altération des fibres qui sont défectueuses à leur

«point de départ.et qui dégénèrent sous l'influence de certains'

« agents stimulants », par exemple la syphilis, l'alcool, la pella--

gre, etc. '

D'autre part il existe une théorie suivant laquelle la dégénères-'

cence des libres nerveuses serait consécutive à des altérations des,

parois vasculaires, qui constitueraient la lésion primitve ,(Chalmersl

Watson). Le Dr Buzzard a publié des cas dans lesquels la lésion'

vasculaire a été primitive, mais il ne prétend pas qu'il en soit tou-

46 revue d'anatomie KT de PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

jours ainsi. Sciuli a, lui aussi, décrit ces altérations vasculaires,

mais san leur attacher assez d'importance pour trouver en elle la

cause de la dégénérescence. Etant donné le fait que la dégénéres-

cence des fibres nerveuses et les altérations vasculaires sont dues

au même agent toxique, il devient évidemment très difficile de pré-

ciser si c'est par la libre nerveus ou par les vaisseaux que débutent

les lésions, ou si ces deux éléments sont envahis simultanément :

Ce qui est absolument certain c'est que, si les lésions vasculaires

ne créent pas la maladie, elles jouent tout au moins un rôle impor-

tant dans sa marche progressive. Dans la paralysie générale on'

trouve les mêmes altérations nerveuses et les mêmes lésions vas-

culaires, et dans cette maladie, M. Ford Robertson pense que les

lésions va"culair es sont primitives et que la dégénérescence des

parois capi laires est la cause première des altérations subies par

le tissu cortical. Il y a évidemment d'autres états, les folies aiguës

par exemple, où il est à peu près certain que la lésion nerveuse est

primitive : mais qtiel-(Iue soit le siège primitif des altérations pa-

thologiques, il laudra, chaque fois qu'on tentera d'interpréter les

dégénérescences, tenir compte à la fois de ce que. Sciuti appelle

« la défectuosité des fibres nerveuses » et de ce que Fort Hobert-

son a désigné sus le nom de « réactivité des lisons ».

- fi. de VIUSGRAVE-CL1Y.

III.. Différenciation de courants, démontrée par un cas de névrite

consécutive aune dégénérescence parenchymateuse de la moelle

par A. D. ROCHVELL. (The New York Médical Journal, 4 ucto-

bre 19U2). i

Etude intéressante et que nous nous bornons à indiquer à cause

des détails de technique électro-thérapique qu'elle comporte.

' H. M.-C.

IV. Un cas d'hydrencéphalocèle; par David E. WrIeELER. (The

Kew-York médical Journal. fer février 1902.

Enfant du sexe féminin, âgée d'un jour, vigoureuse, sans ano-

malie autre qu'une tumeur volumineuse faisant saillie hors-de la

fontanelle postérieure ; cette tumeur a douze pouces de circonfé-

rence, elle est couverte de peau, et porte des cheveux au voisinage

de son point d'attache ; elle est translucide et fluctuante, mais la

fluctuation ne se transmet pas à la fontanelle antérieure : l'enfant,

qui pèse huit livres à cemoment, ne tarde pas à perdre de son poids;

en même temps la tumeur augmente sensiblement de volume et

de tension. Pas de convulsions même quand on comprime la

tumeur. Au bout de vingt-six jours, signes de collapsus brusque et

mort en état de dyspnée et de cyanose.

A l'autopsie : fontanelle antérieure ouverte ; os du crâne mous,

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 47

présentant de petits îlots membraneux de formation osseuse, entre-

mêlés de zones non calcifiées ; cette disposition s'observe surtout

sur les pariétaux, où de petites concavités correspondent aux

points non calcifiés. Les sinus et le tissu cérébral paraissent nor-

maux. De la fontanelle postérieure part une volumineuse tumeur

kystique, fluctuante, transparente et mesurant dix-sept pouces de

circonférence : elle est remplie par de la sérosité claire. En la

comprimant on fait pénétrer le contenu du kyste dans la corne

postérieure du ventricule latéral gauche. L'intérieur du kyste pré-

sente une membrane vasculaire sur laquelle on remarque, dissé-

minées par ilots, des plaques de tissu gélatineux blanc, de nature

cérébrale. R. de Musgrave-Clay.

V. Contribution à la question de la théorie histologique du som-

meil, par W.-M. NAR13OUTrLe (Obozrénié psichiatrii, VI, 1901).

Expériences fort bien conduites très claires et judicieusement

divisées, accompagnées de figures, dont l'auteur tire les conclu-

sions suivantes : '

1. Les préparations de cerveau emprunté aux animaux à l'état

de veille montrent les prolongements proloplasmiques des cellules

garnis d'appendices piriformes. 2. Sous l'influence de la narcose,

chloroformique et morphinique, ces appendices piriformes dimi-

nuent notablement de quantité ; en quelques préparations, ils ont

totalement disparu. Les prolongements protoplasmiques prennent

franchement l'aspect moniliforme. Cellules et dendrites sont

quelque peu défigurées : ont voit sur ces dernières der boursouf-

Hures creuses. 3. Les préparations de cerveau emprunté aux ani-

maux morts révèlent, même peu de temps après la moi t, l'aug-

mentation tranchée du nombre des épaississements moiiililorines

on ne rencontre presque plus d'appendices piriformes. Les cel-

lules et rameaux protoplasmiques sont un peu variqueux. 4. Ces

modifications corticales marchent de la périphérie au centre ; on

les observe d'aboi d sur les rameaux protoplasmiques de la

couche des petites cellules pyramidales, où elles affectent la

marche centripète, pour atteindre finalement les dendrites des

grandes cellules pyramidales. P. KERAVAL.

VLLe rôle physiologique des tubercules quadrijumeaux antérieurs,

. par PAWLOW (Obozrénié psiclziutrü, VI. 1901).

Revue très complète, très détaillée, sorte. de code de nos con-

naissances relatives aux tubercules quadrijumeaux antérieurs,

établi à l'aide des sources bibliographiques et des recherches per-

sonnelles de l'auteur (Figures).

En ce qui concerne la structure, M. Pawlow pense qu'il n'y a

pas de limites tranchées entre la substance blanche et la substance

48 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

grise de cet organe. Il y a distingué néanmoins : 1. Une couche

névroglique, constituée par une énorme quantité de cellules des

formes les plus différentes, y compris les globes mats de Popow,

mais sans noyau (surtout chez l'homme). 2. Une couche de petites

cellules nerveuses multipolaires de toutes formes. 3. Une couche de

grandes cellules nerveuses, surtout dans la partie latérale, externe,

de l'organe, qui correspondent en forme et en grandeur aux cel-

lules des cornes antérieures de la moelle. 4. Une couche de petites

cellules ganglionnaires, au delà desquelles commence la substance

grise centrale du canal encéphalomédullaire. Cette répartition,

relativement claire chez l'homme, est impossible chez l'animal.

La texture des fibres nerveuses comporte, chez le chien, le chat,

le lapin, l'homme, la disposition suivante, en allant de la péri-

phérie à la profondeur de l'organe : 1. Une couche de névroglie,

ayant l'aspect d'un épais réseau dont les mailles étroites embras-

sent les éléments cellulaires sus-indiqués. 2. Une couche de fibres

nerveuses minces qui correspond à la jre couche de petites cel-

lules nerveuses : elle est plus mince dans les parties inférieures

du tubercule et s'épaissit à mesure que l'on va vers le cerveau.

3. La carra cinerea de Tartuferi. Correspond également à la couche

des petites cellules, et n'est en réalité pas une couche distincte.

Elle est de part en part en abondance coupée de fibres excessive-

ment minces dans toutes les directions. 4. Strato bianco cineFPO,

correspond à la couche des grandes cellules nerveuses. 5. Cin-

quième couche. Strato bianco et cinereo profundo. Elle correspond

à la troisième couche de petites cellules nerveuses. Elle forme la

limite tranchée entre le tubercule quadrijumeau et la substance

grise cavitaire.

Toutes ces couches sont traversées par une énorme quantité

de fibres radiaires allant de la substance grise centrale à la troi-

sième couche de Tartuferi inclusivement : c'est à ces fibres que

Meynert et Obersteiner attribuent la transmission de l'excitation

lumineuse du nerf optique au noyau de l'oculomoteur commun.

La question des relations de l'ensemble de ces éléments avec

les autres parties du système nerveux, est ainsi mise au point.

Les ramifications terminales des fibres de la rétine entrent en

contact avec les éléments cellulaires du tubercule quadrijumeau

antérieur, où elles se terminent. '

Le tubercule quadrijumeau antérieur ou supérieur est la pre-

mière station dans la marche des excitations lumineuses. La

transmission s'y effectue de là par les systèmes de fibres qui pren-

nent naissance dans le corps de l'organe. 1

Le faisceau tecto-bulbaire prédorsal transmet par ses collaté-

rales les excitations lumineuses à tous les noyaux des nerfs

moteurs de l'oeil, des troisième, quatrième et sixième paires : -.

ainsi s'expliquent tous les mouvements réflexes des muscles des

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. z

yeux qui dépendent des excitations lumineuses. Une série de colla-,

térales de ce faisceau, qui vontau noyaul'oufJe, transmettent parcon-

tact l'agent lumineux aux éléments cellulaires de ce dernier. Le.

faisceau rubrospinal le porte à la moelle où, par voie de contact, il

est transmis aux cellules nerveuses de la corne antérieure, et de

là, au moyen des racines antérieures, aux appareils nerveux ter-

minaux des muscles. On peut de cette manière comprendre les

innombrables contractions réflexes des muscles de tout le corps

qui, d'ordinaire, accompagnent les vives excitations lumineuses

inopinées.

D'autre part, le noyau rouge est, en partie, l'aboutissant des

pédoncules cérébelleux supérieurs : il est donc en communication

avec le cervelet, et par là, avec le cordon latéral de la moelle. Le

cervelet recevant presque toutes les fibres sensibles de la moelle,

(voie cérébelleuse directe, faisceau de Gowers, etc.) qui lui rendent

comple des relations de notre corps avec l'espace, les pédoncules

cérébelleux supérieurs transmettent cette impression en partie a

la conscience mais surtout, à l'insu de la conscience, au noyau

rouge : cette impression est de là, à l'insu de la volonté, trans-

mise aux muscles par le faisceau rubrospinal. Ainsi est maintenu,

sans la participation de la volonté, {'équilibre constant du corps.

Le faisceau tectobulbaire prédorsal se termine graduellement

dans la formation réticulaire de la protubérance et du bulbe, jus-

qu'au territoire intermédiaire entre les noyaux de l'auditif et de

l'hypoglosse. '.

Le faisceau tecto-protubérantiel sert à la transmission des excita-

tions lumineuses aux cellules nerveuses des masses grises de la

protubérance, près du faisceau pyramidal. Ces cellules sont

munies d'une énorme quantité de collatérales des voies motrices

qui vont de haut en bas ? fibres cortico-protubéranlielles. Ces

mêmes cellules forment par leurs cylindraxes presque tout le

pédoncule cérébelleux moyen : fibres ponlo-cérébelleuses. Le tuber-

cule quadrijumeau antérieur peut donc transmettre des impul-

sions au pédoncule cérébelleux moyen et de là au cervelet. La vue

exerce ainsi son influence sur l'équilibre : il y a coordination des

mouvements réflexes qui dépendent des impressions lumineuses.

Le tubercule quadrijumeau antérieur envoie encore de courtes

,6res à diverses parties de la formation réticulaire. ,

Il y a lieu en outre de supposer avec quelque assurance qu'il

exisle une énorme quantité de courts systèmes de fibres à direction

descendante, qui joignent diverses parties de la formation réticu-

laire. On est alors en droit de se demander si la formation réti-

culaire n'est pas une réserve de faisceaux de remplacement de

second ordre destinés à transmettre les excitations des régions

axiales aux régions éloignées du centre, dans le cas, par exemple,

où les laisceaux principaux ont souffert dans leur intégrité. Une

ArscmvHs, 2' série, t. XVII. 4

50 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES..

de ces voies unit la formation réticulaire au pédoncule cérébelleux

supérieur. Ainsi ce pédoncule se bifurque en deux branches

l'une monte dans le noyau rouge ; l'autre descend. La bifurcation

a lieu après l'entrecroisement des pédoncules cérébraux. La

branche descendante va dans la formation réticulaire du bulbe.

Par le ruban de Reil latéral, le tubercule quadrijumeau antérieur

est lui-même en relation avec les faisceaux de l'ouïe.

Le tubercule quadrijumeau antérieur sert en somme de centre

réflexe à la transmission des excitations lumineuses aux parties

éloignées de l'axe. Cette transmission est descendante.

Reçoit-il des fibres descendantes d'organes situées au-dessus de

lui ? De la c'ouche optique, par exemple ? De recherches en train,

par la méthode de Marchi, M. Pawlow se croit en droit de supposer,

jusqu'à nouvel ordre, qu'il n'existe pas de systèmes de fibres pre-

nant naissance dans la couche optique et se terminant dans le

tubercule quadrijumeau antérieur. P. KERAVAL.

VII. L'anatomie du cerveau, la psychologie et la théorie philoso-

phique de la cognition; par W. WEY6ANDT. (Centralblatt f. Ner-

venheilk. XXIV. N. F. XII, 1901.)

Les phénomènes intérieurs constituent la première manifesta-

tion du monde : ce sont eux dont se doit développer, par abstrac-

tion, la notion du sujet et celle de l'objet. La matière n'est qu'une

abstraction de second ordre ; elle n'a pas d'existence primordiale.

Sur la notion tout à fait hypothétique de la substance et sur celle

de son mouvement s'édifie le monde des sciences naturelles, de

l'expérience médiate.

Sur le rapport qui existe entre les phénomènes physiques et

les phénomènes psychiques, on ne peut rien affirmer de plus. que

ce que formule la psychophysique. Evidemment elle ne défend pas

à l'anatomiste et au physiologiste d'expliquer l'activité cérébrale,

comme s'il s'agissait d'une machine, mais ce n'est qu'un raison-

nement par analogie, et jamais, nulle part il ne sera possible de

jeter un pont entre le domaine du physique et celui du moral,

comme le rêvent les naturalistes exagérément satisfaits des résul-

tats qu'ils ont obtenus.

Le parallélisme psychophysique n'est pas pour cela une hypo-

thèse stérile : c'est réellement un principe fécond. Puissent seule-

ment les formules modestes quoique pleines d'espoir déjà codi-

fiées exercer sur le mode de travail des naturalistes une influence

bienfaisante et les détourner de viser à des hauteurs inaccessibles.

En arrière des coulisses de l'idée de l'objet nos regards ne porte-

ront jamais. Toutes les belles phrases sur l'essence des choses, leur

fonds, leur explication, les lois découvertes, sonnent creux quand

elles sont traduites en la langue de la pratique scientifique. Voilà

ce que dit M. Weygandt, de Wurzbourg P. KERAVAL.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 51

VIII. De l'emploi du microscope à lumière polarisée dans l'examen

des fibres nerveuses à myéline dégénérées; par K. Ii110D3SANN.

(Centi,albl. f. Nervenheilk. XXIV. N. F. XII, 4904.) .)

Les manchons de myéline des fibres nerveuses présentent d'une

manière très accusée le phénomène de la double réfraction. Cette

double réfraction est négative par rapport à l'axe longitudinal de

la fibre, ce qui la distingue de celle des autres tissus anisomé-

tropes, tels que muscles, tendons, fibres végétales, qui est

positive. Elle devient positive quand la myéline est incomplète-

ment développée ou altérée (inversion).

Si l'on intercale entre les deux prismes de Nicol croisés du

microscope à polarisation une lame de cristal biréfringent, l'inter-

férence des rayons lumineux polarisés produit des phénomènes

colorés analogues à ceux des bulles de savon et des anneaux de

Newton. La couleur du cristal dépend de l'intensité de la double

réfraction. de l'épaisseur de la lame, de la position des axes d'élas-

ticité dans la lame. La couleur sera des plus intenses si les axes

d'élasticité de la lame forment une diagonale par rapport aux

Nicols, c'est-à-dire s'ils forment avec leurs plans de polarisation

un angle de 45°. La lame de gypse, dite du rouge-iio. 1 donne,

quand ses axes forment avec les plans de polarisation des Nicols

croisés un angle de 45°, une couleur rouge homogène. Le champ

du microscope présente alors une belle teinte rouge diffus de la

nuance rouge n° 1 des tableaux de Newton.

Si maintenant nous superposons à la lame de gypse un nerf

frais, ses manchons de myéline apparaissent, sur le fond rouge,

jaune clair, lorsque les fibres ont leur direction parallèle au grand

axe de la lame ; leur fait-on décrire un angle de 90° de façon que

leur longueur devienne parallèle au petit axe et perpendiculaire

au grand axe du gypse, la myéline est d'un bleu éclatant. Le

cylindraxe n'étant pas biréfringent reste invariablement rouge

pourpre. Le caractère positif de la double réfraction des fibres

musculaires et du tissu conjonctif leur assure, quand ils sont

associés aux fibres nerveuses, une coloration contraire, ils seront

bleus quand la myéline sera jaune, et vice versa. La gaine de

Schwann aura pour la même raison (c'est du tissu conjonctif),

des colorations inverses de celles de la myéline.

Les coupes transverses de nerfs formeront des images complexes

à cause de l'orientation spéciale des ellipses d'élasticité dans la

coupe optique. La coupe tranverse de la fibre myélinique apparaît

dans les conditions d'examen décrites formée de quatre quarts

de cercle. Ceux par lesquels passe le grand axe de la lame de

gypse sont bleus ; les deux autres sont jaunes. .

Tel est le procédé d'analyse applicable aux fibres nerveuses,

fraîches, dissociées, ou sectionnées dans le microtome à congéla-

52 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

tion et imbibées de la solution physiologique de Na CI. Ambronn

et Held en ont indiqué la valeur pour l'étude du développement

(Kenntniss des Nervenmarks. Archiv f. Anat. u. phypolog. Anat.

ALtheil, 1896).

Peut-on par la polarisation examiner le système nerveux patho-

logique ? Reconnaître les déchéances de la myéline ? L'auteur

n'hésite pas à l'affirmer. Il décrit vingt expériences de dégénéres-

cences nerveuses chez le lapin, et passe en revue des lésions du

système nerveux chez l'homme dans lesquelles les troubles des

images colorées sus-indiquées étaient manifestes, dans les limites

et au prorata des altérations. Citons : 3 paralysies générales,

2 polynévrites alcooliques, 1 suppuration chronique des reins

avec cachexie amyloïde dans la folie sénile, 1 ramollissement

du cerveau disséminé par thrombose avec marasme, 2 démences

séniles avec marasme, 1 névrite par compression du pneumogas-

trique dans l'anévrysme de l'aorte, 1 névrite propagée dans l'ar-

thorite nécrosique.

En somme les fibres nerveuses à myéline présentent normale-

ment une double réfraction négative accusée. Lorsqu'elles dégé-

nèrent, outre qu'elles changent de forme, la propriété biréfrin-

gente de leurs manchons de myéline s'affaiblit, proportionnelle-

ment au degré de la dégénérescence : celle-ci est-elle avancée, le

caractère de la double réfraction s'invertit. Le microscope à pola-

risation donne une allure vivante, à raison des phénomènes colorés

correspondants, à l'état normal ainsi qu'aux états pathologiques.

P. KERAVAL.

IX. De la localisation des centres olfactifs dans l'écorce cérébrale,

par 1.-1'. GOIISCIIKOW (Obozrénié psichialrü, VI, 11101).

I. Une large destruction bilatérale de toute la région du lobe

piriforme, ou lobe de l'hippocampe, produit chez le chien, la perte

de toutes les modalités de l'odorat : l'animal ne perçoit ni les ali-

ments, ni aucune substance odorante, même qiiaiiii on les lui fait

toucher du nez.-lI. Si cette opération n'est pratiquée que sur un

hémisphère, la perte de l'odorat a lieu du côté correspondant;

l'odorat est en outre- manifestement affaibli du côté opposé. Il

semble donc qu'il y ait entrecroisement partiel des fibres olfac-

tives, la plupart d'entre elles innervant la moitié correspondante,

le reste allant du côté opposé (Ferrier, Luciani et Senpdh). -II La

destruction de toutes les autres régions de l'écorce (frontales,

pariétales, temporales, occipitales) n'entraîne pas d'ordn aire de

troubles de l'odorat; seulement, dans les premiers jours qui sui-

vent l'opération, l'odorat est un peu affaibli des deux côtés identi-

quement. Ce trouble disparaît dès le deuxième ou troisième jour.

IV. La région olfactive de la face inférieure du cerveau (renflement

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 53

olfactif, bandelette olfactive, lobule de l'hippocampe), subit un

contre-coup des diverses opérations pratiquées sur le cerveau, no-

tamment quand on agit sur les parties de l'écorce avoisinantes ; il

se produit presque toujours alors un affaiblissement olfactif du

côté correspondant, qui dure peu de temps. Il se peut qu'il s'agisse

de l'extension de l'inflammation à la répion olfactive ou d'une

compression exercée par du sang épanché de quelque vaisseau

sangum accidentellement lésé. L'olfaction se montre également

fort sensible dans divers étals morbides de l'organisme; souvent

elle disparait dans les inflammations cérébrales, alors que le goût

persiste. V. Le degré de l'hypo osmie et la durée de l'anosmie sem-

blent, en l'absence de complications générales, jusqu'à un certain

point proportionnel, à la quantité de la surface détruite dans la

sphère olfactive : moins on détruit d'écorce, plus faible est la perte

de l'odorat, plus vite il se rétablit, grâce à la suppléance des par-

ties de la région olfactive non lésées. VI. Les centres propres de

l'olfaction semblent être l'écorce de la portion inféro-interne du

lobe de l'hippocampe, c'est-à-dire de la circonvolution de l'hippo-

campe et de la partie postérieure du pli unciforme; l'odorat ne

demeure très longtemps affaibli que lorsqu'on a détruit ces régions.

Détruit-on les parties ântéru-externes ou postéro-externes de ce

lobe, l'odorat, qui s'affaiblit dans les premiers temps, s'améliore

très rapidement. La corne d'Ammon parait peu participera l'olfac-

lion.-VII. Impossible de localiser séparément les modalités des im-

pressions olfactives, les classât-on simplement en impressions désa-

gréables et en impressions agréables. VIII. L'excitation l'aradique

de la région olfactive, plus exactement delà circonvolution en cro-

chet, au point de Ferrier, détermine un réflexe olfactif cortical,

qui se traduit par une contraction de la narine correspondante.

IX. La région olfactive n'a pas de relation directe avec la région du

goût; la destruction de la région de l'odorat ne modifie point du

tout le goût; mais la première n'étant séparée de la seconde que

par les scissures sylvienne, présylvienne, rhinale, olfactive, on con-

çoit, en vertu de ce qui a été dit au n° 4, que l'odorat soit un peu

affaibli quand on a détruit la région du goût. " P. KEIIA. VAL.

X. Des modifications subies par l'écorce du cerveau pendant z

le sommeil, par W.-\l. 1V.1RBOUTTE (Obozrénié psichiatrii, VI,

1901). ).

On enlève à de tout jeunes chiens 1 centimètre et demi à 2 cen-

timètres carrés de la calotte crânienne au niveau du sillon crucial;

puis, après,les avoir laissés reposer, pendantleur sommeil on leur

extirpe brusquement, par cette ouverture, au moyen d'un rasoir

acéré, une parcelle du cerveau, que l'on fixe par la méthode rapide

de Golgi. Voici ce que l'on voit : - ' .

54 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

1. Pendant le repos (du sommeil) se manifeste l'aspect monili-

forme des dendrites; plus le sommeil est profond, plus net est cet

aspect. Il est dû à ce que, sous l'influence des processus chimiques

(accumulation de l'acide carbonique), les rameaux protoplasmi-

ques se contractent pour vivre des restes de l'oxygène, en prenant

le moindre volume (globulaire). 2. Quand augmente l'alflux d'oxy-

gène, les dendrites semblent étendre leurs appendices; le contact

se produit; le réveilarrive et l'activité. 3. Les dendrites lisses cons-

tituent le stade intermédiaire entre le premier état et le second.

4. Les gros épaississements variqueux des dendrites correspondent

à leur état pathologique d'atrophie dégénérative.

P. KERAVAL.

XI. Du réflexe hypogastrique, par W.-M. Beciiterew (Obozrénié psi-

chiatrii, VI, 1901. - New'olog. Centmlblatt, XX, 1901).

Même article en russe et en allemand.

Le réflexe abdominal, constitué par la contraction des muscles

abdominaux, provoqué par l'excitation mécanique de la peau au-

dessous des côtes, est en rapport avec les huitième et douzième

paires dorsales. Le réflexe épigastrique, qui se traduit par la for-

mation du creux épigastrique du même côté, à raison de la con-

traction des fibres les plus supérieures du grand droit de l'abdo-

men, émane de l'excitation de la paroi latérale du thorax dans la

sphère des sixième et cinquième paires, ou du quatrième espace

intercostal; il est en rapport avec les quatrième, sixième ou septième

paires dorsales. On doit, dans l'es cas pathologiques, rechercher

ces deux réflexes, parce que souvent le second se produit très aisé-

ment, alors que le premier fait défaut, notamment dans l'hémi-

plégie.

Mais il existe encore un réflexe de l'abdomen, inconnu jusqu'ici.

C'est le réflexe hypogastrique. En rayant rapidement la peau de la

face interne de la cuisse, près de l'aine, au-dessous du pli inguinal,

on voit la région sus-inguinale s'affaisser par suite de la contrac-

tion des muscles de la région abdominale inférieure, du segment

inférieur du grand oblique de l'abdomen très probablement. Il doit

être en rapport avec le segment inférieur de la moelle dorsale. Il

peut ainsi marquer le niveau d'une affection de la moelle, s'il est

conservé, tandis que le réflexe abdominal est épuisé, ou inverse-

ment. Il semble normalement un peu plus constant que le réflexe

épigastrique. Dans les affections cérébrales, il a les mêmes allures

que le réflexe abdominal; tous deux sont généralement diminués

du côté hémiplégique. P. KERAVAL.

XII. Des altérations du cerveau et de la moelle dans la psychose

polynévrilique de Korsakow, par N.-A. WYROUBOW (Obozrénié

psichiatrü, VII, 1902).

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 55

Observation complète avec autopsie et examen histologique chez

une femme de 50 ans. Etude extrêmement bien faite.

Conclusions principales. - 1. Les altérations anatomiques ren-

contrées prouvent que le système neuro-musculaire entier participe

àl'affection, ainsi que tous les départements des centres nerveux.

2. Les fibres des nerfs et des muscles présentent une atrophie sim-

ple et une dégénérescence primitive. Celle-ci, dans la fibre ner-

veuse, revêt la forme de névrite périaxillairede Gombault. 3. Dans

les ganglions intervertébraux, les cellules sont atteintes de chro-

matolyse primitive et de dégénérescence stéato-pigmentaire, plus

rarement du processus secondaire de Marinesco. Le bout central et

le bout périphérique des fibres nerveuses subissent la déchéance

myélinique. Ces dégénérescences peuvent être suivies dans les ra-

cines postérieures et jusque dans la moelle. 4. Dans les cordons

postérieurs, la dégénérescence des longs systèmes exogènes possède

le caractère ascendant; elle se suit jusqu'aux noyaux de ces cor-

dons, après quoi elle diminue rapidement; de sorte que, au niveau

de la protubérance, dans le ruban de Reil, on ne peut rencontrer

qu'un petit nombre de fibres disséminées. Quant aux systèmes

endogènes, on remarque, dans le segment sacré, une certaine irri-

tation des fibres du faisceau postéro-interne d'Obersteiner. La ré-

gion radiculaire antéro-externe est intacte. 5. Les cellules des

cornes antérieures, manifestement moins nombreuses, ont subi la

chromatolyse primitive et la dégénérescence stéato-pigmentaire;

il est plus rare d'y voir la dégénérescence secondaire. Dégénéres-

cence evidente des racines antérieures et aussi de celles des nerfs

craniens. 6. La dégénérescence du faisceau pyramidal commence

au segment sacré inférieur; on la suit à travers l'entrecroisement,

jusque dans les pyramides de la protubérance, jusque dans le seg-

ment moyen du pédoncule cérébral, point où se fait la jonction

d'un faisceau supplémentaire du ruban de Reil, qui apporte les

fibres des noyaux moteurs du bulbe; on la suit, enfin, à travers

la capsule interne, jusqu'à l'écorce des circonvolutions motrices.

7. Les systèmes cérébelleux dégénérés sont les suivants : a) Le fais-

ceau cérébelleux direct; b) les fibres radiaires de l'écorce du cer-

velet ; c) les grandes cellules de la couche à gros grains et les cel-

lules de Purkinje; d) les fibres qui se ramifient aux alentours de

ces dernières ; e) tous les segments du pédoncule cérébelleux anté-

rieur ; f) le noyau rouge; c)le faisceau qui pénètre dans la couche

optique, et notamment dans son article externe dont les cellules

ont subi la chromatolyse et la dégénérescence stéato-pigmentaire.

Les dégénérescences du pédoncule cérébelleux moyen sont peu

marquées. 8. La dégénérescence du faisceau fondamental du cor-

don antéro-latéral et du faisceau de Gowers-Bechterew se poursuit

jusqu'au niveau de l'entrecroisement des pyramides. Le faisceau

interne du cordon latéral est partout intact. 9. Des régions corti-

56 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

4.

cales examinées (frontales, motrices, pariétales et occipitales), c'est

l'écorce de la région pariétale qui présente les altérations les plus

marquées et les plus nettes; c'est là que s'affirme la destruction

la plus intense des fibres d'association de toutes catégories, que

Les cellules nerveuses ont le plus diminué, qu'elles ont le plus subi

sa dégénérescence stéato-piamentaire. 10. La confusion mentale,

la désorientation, etc., rapprochées de la prédominance des lésions

pariétales, viennent à l'appui de la thèse de rlerUsig, d'après la-

quelle toute lésion de la zone d'association postérieure entraîne de

la confusion dans les idées, et l'impossibilité de s'orienter dans

l'espace et dans le temps, elc. P. Keraval.

XIII. Observation de calvitie congénitale partielle dans ses rap-

ports avec la sensibilité pilaire; par P. Ossipow. (Neurolog.

Centrulbl., XX, 1901)..

- Article déjà publié dans ï Obozrénié russe de 1899. Analysé.

- - P. KERAVAL.

XIV. Le réflexe sus-orbitaire, nouveau réflexe dans le territoire de

- la 5e et de la 7e paire; par D.-J. Mac C.\IiTHY. Contribution à

- la question du réflexe sus-orbitaire; par C. HuDovERNiG. (Neu-

. n'ol. Ccntmlbl., XX, 1901).

Quand, dit M. Carlhy, on frappe le nerf sus-orbitaire, il se pro-

duit un tremblement fibrillaire de l'orbiculaire des paupières,

sans fermeture des yeux : tout au plus les paupières se rappro-

chent-elles. Y a-t-il exagération de l'excitabilité réflexe, il suffit

de frapper en un point quelconque du trajet du nerf, jusqu'au

vertex et, parfois, les deux orbiculaires réagissent, bien qu'un ne

frappe que d'un côté. Chez les personnes normales. on peut frap-

per jusqu'à la limite du cuir chevelu. Dans le cas d'affaiblisse-

ment des réflexes, il faut frapper au point de sortie du nerf. Arc

réflexe : branche sus-orbitaire de la 5° paire, 5° paire elle-même,

facial, branche de l'orbiculaire du facial. On a trouvé ce réflexe

diminué (à gauche) dans un cas de syphilis cérébrale avec paraly-

sie complète de la 5° paire à gauche et intégrité de la 7°; adroite il

y avait paralysie complète de l'oculomoteur commun et cependant

le réflexe sus-orbitaire était normal. Il avait disparu du côté d'un

tic douloureux rhumatismal guéri. Cette disparition est constante

dans la paralysie faciale. Sur 25 tabétiques, il était chez 23, dimi-

nué, disparu chez 2. Il n'existait plus chez un malade ayant subi

la section du nerf sus-orbitaire pour cause de névralgie de ce nerf.

Donc corrélation dans les fonctions des branches orbitaires des

5° et 7° paires.

Ce n'est pas un réflexe, dit M. Hudovernig, car on obtient le

tremblement fibrillaire de l'orbiculaire palpébral en frappant le

REVUE d'aNATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 57

frontal dans toute son étendue, il ne fait défaut que dans la para-

lysie faciale, et il subsiste après l'extirpation du ganglion de Gas-

ser. Faits à l'appui. Le tremblement fibrillaire de l'orbiculaire des

paupières n'est donc que le résultat de la propagation de l'excita-

tion mécanique d'un muscle à un muscle voisin innervé par le

même nerf. ' P. KERAvaL.

XV.'DU réflexe acromial; par W.-M. BECHTEr3Ew. (Obozrénié psi-

- chiatrii. VII, 1902). ,

Quand on frappe snr la région acromiale du bras et sur l'apo-

physe coracoïde, on obtient, à l'état normal, un léger mouvement

de flexion de l'avant-bras, parfois une légère rotation de la main

en dedans, et, quand l'hyperexcitabilité réflexe est très marquée,

delà flexion de l'extrémité supérieure des doigts. Evidemment ce

reflexe tient à la contraction du coraco-brachial, et du biceps

dont la courte portion, réunie au caraco-brachial, s'insère sur l'apo-

physe coracoïde, tandis que sa longue portion se fixe à la partie

supérieure de la cavité glénoïde de l'omoplate. Lorsque l'hyper-

excitabilité réflexe est extrême, ce réflexe s'étend à d'autres

groupes musculaires, par exemple aux fléchisseurs des doigts.

C'est un réflexe périostique qui se voit surtout dans les cas

d'hyperexcitabilité réflexe, et en particulier dans les hémiparésies

et les hémiplégies organiques ; on l'observe aussi dans les para-

lysies atrophiques avec hyperexcitabilité réflexe, telle la sclé-

rose latérale atrophique. Ce réflexe n'est pas d'ordinaire exagéré

dans les hémiplégies fonctionnelles. La percussion répétée de la

région acromiale du bras délermine parfois de la douleur : on

l'évitera en employant le plessimètre. P. KERAVAL..

XVI. Sur les affections de la queue de cheval et du segment infé-

rieur de la moelle ; leçon clinique de M. le Dr RAYMOND (Nouv.

. lconogr. de la Salpétrière, n° 6, 1902).

Lésions syphilitiques des centres nerveux. Foyers de ramollisse-

ment dans le bulbe : hémiasynergie, latéropulsion et myosis bul-

baires avechémianesthésie et hémiplégie croisées, par Babinski et

Nageotte (Nouv. lconogr. de la Salpétrière, n° 6. 1902).

Homme de cinquante ans, syphilitique depuis l'âge de trente

ans; pris subitement en pleine santé d'accidents nerveux caracté-

risés par hémiasynergie du membre inférieur gauche, latéropul-

sion vers la gauche, tremblement léger des membres supérieurs,

hémiplégie légère et hémianesthésie droites, difficulté de la déglu-

tition, léger rétrécissement de lapupille gauche. Douze jours après le

début des accidents, mort en syncope. A l'autopsie, lésions syphi-

litiques artérielles et méningées diffuses, avec ramollissements

multiples localisés dans la moitié gauche du bulbe. 11 n'est pas

58 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

question de troubles psychiques. Les symptômes cliniques obser-

vés sont expliqués par la lésion bilatérale des faisceaux olivo-

ciliaires, par la lésion unilatérale du faisceau qui met en rapport

le noyau de Deiters avec la moelle par l'interruption de la voie

centripète constituée par le faisceau de Gowers. L'auteur insiste

sur l'importance de la latéropulsion pour le diagnostic des lésions.

' R. Charron.

XVII. Les lésions histologiques de l'écorce dans les atrophies du

cervelet; par LANNOIS et Paviot (Nouv. Iconogr. de la Salpé-

trière, n° 6, 1902).

Trois observations : 1. Syndrome cérébelleux, atrophie du cerve-

let apparemment limitée à la base ; 2. Epilepsie à crises très fré-

quentes avec aura sensitive du côté gauche, atrophie du lobe gauche

du cervelet ; 3. hémiplégie spasmodique infantile droite avec épi-

lepsie. Atrophie croisée du cervelet. Conclusions : 1° il n'y a pas de

différence histologique entre la corticalité d'un cervelet paraissant

atrophié primitivement et celle d'un cervelet atrophié secondaire-

ment ; 2" dans ce processus d'atrophie, il s'isole constamment une

couche qui répond probablement à la persistance et à la conden-

sation des cellules de relation des couches granuleuses et molécu-

laires, la couche moléculaire s'atrophiant en même temps que

disparaissent les cellules de Purkinje et les grains. La disparition

des cellules de Purkinje est totale et absolue et précède toutes les

autres modifications dans ce processus d'atrophie ; 3° la nature

fréquemment secondaire de l'atrophie démontre qu'on ne doit pas

considérer le syndrome clinique cérébelleux comme étant tou-

jours le représentant d'une lésion primitive du cervelet. R. C.

XVIII. Sur l'aspect des prolongements protoplasmiques des cellules

nerveuses des cornes antérieures et postérieures de la moelle

épinière chez des enfants nouveau-nés (méthode chromo-argen-

. tique); par S. SOUKHANOFF et F. CzARNIECK (Nouv. /eo ? ! 0)'. de la

. Salpétrière, n° 6, 1902).

Les auteurs, dans une série de recherches histologiques com-

portant quelques moyens nouveaux de technique (séparation des

faisceaux, coupes longitudinales), ont pu déterminer avec une

grande précision les détails morphologiques des cellules médul-

- laires. Us ont constaté entre autres choses intéressantes, que l'as-

pect des prolongements protoplasmiques des cellules nerveuses de

la corne antérieure était très différent de celui de la corne posté-

rieure. Dans la corne antérieure : dendrites à contours plus régu-

liers, rectilignes, longs et pauvres en appendices collatéraux. Dans

la corne postérieure : dendrites courtes, plus ramiliées, à contours

moins réguliers et plus riches en appendices collatéraux de forme

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. b9

variable. Ces différences sont si apparentes que l'examen d'une

seule dendrite permet de dire si l'on se trouve en présence d'une

corne antérieure ou d'une corne postérieure. La comparaison de

ces dernières recherches avec d'autres recherches antérieures por-

tant sur l'homme adulte, indique que dans la moelle adulte les

prolongements des cellules motrices sont encore plus gros, plus

longs et plus pauvres en appendices collatéraux que chez le nou-

veau-né. R. C.

XIX. Gigantisme et infantilisme, par Larrrros et Roy (Nouv. Ico-

nogr. de la Salpétrière, n° 6, 1902).

La revue critique des observations publiées sur les géants et les

infantiles, et l'analyse d'un cas personnel mettant en lumière cer-

tains détails non observés^ permettent aux auteurs les conclusions

suivantes : 1° il existe réellement un type de gigantisme infantile

dans lequel la taille élevée coexiste avec l'atrophie génitale ou,

tout au moins, avec l'impuissance et la stérilité si souvent notées

chez les géants ; 2° toutefois ce type de gigantisme infantile, très

particulier par la continuité de la croissance (persistance des car-

tilages de conjugaison), par la modalité de cet accroissement

(allongement des membres et surtout des memhres inférieurs) et

ses anomalies (genu valgum) n'est peut-être pas irréductible, dans

le temps, au type de gigantisme acromégalique (grand tronc,

hypertrophie des extrémités, déformation du maxillaire infé-

rieur, etc.), après que se sera effectuée l'ossification très retardée

des cartilages épiphysaires, l'hypertrophie hypophysaire causale

étant commune à tous les deux ; 3° il reste à déterminer la part

de l'hypertrophie pituitaire dans la production de cette croissance

anormale. A cet égard, l'examen de l'hypophyse chez les eunuqués

et les animaux castrés précocement pourra peut-être fournir

d'utiles renseignements. R. Charron.

XX. Trois cas de néoplasies cérébrales ; par Gilbert Ballet et

A. DELILLE (Nouv. Iconoqr. de la Salpétrière, n° 3. 1902).

Ces observations accompagnées de la présentation des cerveaux

et de l'examen histologique des lésions présentent comme intérêt

dominant, l'absence de parallélisme entre le syndrome clinique

et le tableau anatomo-pathologique. La première est un cas de

gliome du volume d'une noix siégeant à la partie postérieure

de la 3" C-F de l'hémisphère gauche ; l'évolution a été rapide,

la lésion profonde : pas d'aphasie. La deuxième est un cas de

sarcome du volume d'une orange comprimant le lobe frontal

gauche, les premiers accidents convulsifs permettent d'établir que

l'évolution de cette tumeur a duré plus de quatre ans, tout en

laissant persister pendant longtemps un bon fonctionnement de

60 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

tous les organes et de l'intelligence. Dans le troisième cas, il s'agit

d'une infiltration gliomateuse diffuse, intéressant les deux tiers

antérieurs de la circonvolution du corps calleux à droite, ayant

débuté à la suite d'un traumatisme du crâne suivi de paralysie

oculaire et d'épilepsie jacksonienne. Ii. C.

-XXI. Description d'un cas de monstruosité rare de la face et de

l'encéphale, par Hauspulter et 13RIQUEL (Nouv. Iconogr. de la Sal-

pétnièue, n° 3. 1902.

Tumeur de la grosseur du poing, implantée à la région frontale

droite, surplombant une face à peine formée avec cloaque naso-

bncco-pharyngien. Survie 41 jours. L'autopsie montre une confor-

mation générale normale, sauf pour la face, le crâne, le cerveau

et les membres : hydrocéphalie hémilatérale avec encéphalocèle

frontale consécutive, altérations des extrémités, résultant d'adhé-

rence et de brides amniotiques. Rareté du siège de l'encéphalocèle

qui se produit le plus souvent à la région occipitale. R. C.

XXII. La vie biologique d'un xypophage; par VASCIIIDE et Vurpas

(Nouv. lconogr. de la Salpétrière, n° 3, 49C2).

Examen de l'un des numéros de la collection Barnum dit les

« Frères Chinois », détaillant les différences de mesures, de

rythmes, de températures, de réactions motrices et sensibles qui

caractérisent les deux sujets. li. C.

XXIII. Un cas d'hémimélie du membre abdominal droit étudié par

la radiographie, par INPRUIT et HEITZ (Nouv. Iconogr. de la Sulpê-

trière, n° 3. 1902.

Malformation par absence de péroné chez une femme dont l'as-

cendance et la descendance ne présentent aucun cas de malforma-

tion et dont le membre avorté ne porte aucune trace de brides ou

d'adhérences amniotiques ; ce qui inciterait à reconnaître pour

cause de la malformation une compression purement accidentelle

du capuchon amniotique pendant les premiers mois de la gros-

sesse. il. C.

XXIV. Un cas d'eunuchisme familial, par SAINTON (Nouv. Icono ! J1'.

de la Salpêtrière, n° 3. 1902).

Eunuchoïde par atrophie testiculaire dont les ascendants pré-

sentent deux cas et les collatéraux trois cas de la même anomalie.

XXV. Etude sur les lésions radiculaires et ganglionnaires du tabes ;

par Thomas et HAUSIOE (Nouv. lconogr. de la Salpétrière, n° 4,

- 1902). -

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 61

L'examen histologique du système nerveux portant principale-

ment sur les lésions des racines postérieures de la moelle et des

ganglions rachitiques dans onze cas de tabes confirmé, venant à la

suite des différentes théories pathologiques de cette affection, con-

duit les auteurs de ce travail à considérer le tabes comme une

affection beaucoup plus complexe qu'on ne, l'admet généralement

et à proposer à côté des formules antérieures, une théorie plus

éclectique résumée comme suit :

« La lésion essentielle du tabes est, en somme, une dystrophie

qui porte sur l'ensemble du neurone sensitif périphérique tout en

prédominant sur le prolongement central de la cellule et qui

atteint généralement- aussi certaines portions du protoneurone

moteur et du système sympathique. Les altérations histologiques

se caractérisent par des modifications des fibres nerveuses compa-

rables sous certains rapports à celles qui ont été relevées au cours

des névrites toxiques expérimentales ou pathologiques. Elles sont

très distinctes de la dégénération wallérienne.

« Si le corps cellulaire du protoneurone sensitif paraît en géné-

ral conserver sa structure et son aspect normaux, il est cependant

parfois le siège de lésions atrophiques et d'ailleurs, à défaut de

lésions anatomiques, il est légitime de supposer que sa fonction

trophique est, dans uns certaine mesure, compromise ».

XXVI. Exostoses multiples à tendance suppurative; par 1,ANNOIS et

Boy (Nouv. lcono,qr. delà Salpêtrière, nO' 4. 1902).

Observation d'un malade de 31 ans, porteur d'exostoses mul-

tiples dont plusieurs avec suppuration, présentant une main de

Morvan et des troubles de la sensibilité caractérisés par uue hémia-

neslhésie sensilivo-sensorielle totale y compris la thermo-anesthésie

du côté gauche. S'agit-il d'exostoses dites osteogéniques ? Faut-il

incriminer la syringomyélie,'la lèpre, la tuberculose. L'étude des

détails de ce cas et celle des observations antérieures conduisent

les auteurs aux conclusions suivantes : la pathogénie de la maladie

exostosique n'est pas encore nettement connue; peut-être est-elle

sous la dépendance d'une affection non encore locali-ée du système

nerveux (substance grise de la moelle); pour la variété à évolution

suppurative, la tendance actuelle est d'incriminer la tuberculose.

R. C.

XXVII. Les déviations de la colonne vertébrale dans la maladie de

Parkinson; par SicARD et ALQUIER (Nouv. lconogr. de la Salpé-

trière, 110 5, 1902).

La genèse des déviations du rachis a été étudiée pour un assez

grand nombre d'affeclions organiques ou dynamiques du système

nerveux (hémiplégie, syringomyélie, tabes, myopathies, sciatique,

62 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

hystérie), mais aucun auteur jusqu'à ce jour, n'avait fait mention

des déformations rachitiques au cours de la paralysie agitante. Les

auteurs ont rassemblé 17 observations de cette affection compre-

nant 11 cas de déformations variées dépendant du processus par-

kinsonnien (cyphoses, scolioses, cypho-scolioses, lordo-scolioses et

cypho-lordo-scolioses); ils en concluent que « dans la maladie de

Parkinson, on observe le plus souvent des déviations de la colonne

vertébrale, de types divers, apparaissant en même temps que la

raideur musculaire et probablement sous sa dépendance » .

R. C.

XXVIII. Recherches expérimentales sur les localisations motrices

spinales; par 13RISSAUD et B.1UER. (Journal de Neurologie, 1903,

n° 14.)

On ne discute plus aujourd'hui l'existence des lésions médul-

laires aprèsles amputations, mais leur topographie est encore contro-

versée. Différents auteurs pensent qu'elles sont diffuses et ne peu-

vent être localisées ; MM. Brissaud et Bauer au contraire ont cons-

taté des lésions cellulaires très nettes des cornes ventrales du

renflement lombaire chez de jeunes têtards auxquels ils avaient

pratiqué l'amputation de divers segments des membres posté-

rieurs. Ces altérations sont de degré très variable; chromatolyse

légère ou accentuée, atrophie plus ou moins complète du proto-

plasma avec persistance ou non du noyau, etc. De leurs expé-

riences MM. Brissaud et Bauer tirent la conclusion que chez le

fêtard à chaque segment de membre répond au niveau du renfle-

ment lombaire un groupe plus ou moins limité de cellules radicu-

laires, mais non différencié normalement.

Les groupements semblent s'imbriquer en se superposant : le

groupe inférieur représentant les muscles placés autour des arti-

culations du pied, est constitué principalement par les cellules

radiculaires de l'extrémité caudale du renflement et plus haut par

celles qui sont placées surtout à la partie postérieure de la portion

caudale de la région postérieure. Le groupement qui représente

les muscles placés autour de l'articulation tibio-tarsienne et occu-

pant 18 jambe, est formé de cellules situées en avant et en dedans

des précédentes ; lorsque ce groupe inférieur est épuisé, elles vien-

nentse placer au dessus de lui occupant ainsi peu à peu la région

postérieure et externe du groupe latéral. Tandis que ces cellules se

placent à la partie postérieure et externe de la corne les cellules

qui correspondent aux muscles de la cuisse groupés autour de

l'articulation du genou, occupent la partie antero-interne du

groupe latéral ; elles se comportent ensuite à l'égard du groupe-

ment précédent comme celui-ci se comportait à l'égard du grou-

pement inférieur. ,

REVUE D'ANATOMIE ET-DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 63

Sur des coupes transversales on a donc schématiquement la

répartition suivante : -

Au dessous de la dizième racine sur une petite hauteur, le

groupe cellulaire ne contient que des éléments correspondant aux

muscles du pied. Au niveau de la dizième racine et juste au dessus,

la partie postérieure et externe du groupe latéral correspond au

pied, la partie antero-interne à la jambe. G. D.

XXIX. Sur un cas de tumeur du canal rachidien (segment dorsal);

par le professeur RAYMOND. (Journ. de neurologie, 1903, n° 9.)

Il s'agit'd'un jeune homme de dix-huit ans qui était atteint

d'une paraplégie motrice avec contracture et trépidation dans les

membres inférieurs, exagération des réflexes rotuliens, abolition

des réflexes cutanés dans les parties paralysées, et enfin d'une

anesthésie totale dans la moitié inférieure du corps. Plus tard,

survinrent des troubles vésico-rectaux.

En présence de cette symptomatologie, on diagnostiqua une

compression du segment dorsal du névraxe par un néoplasme

intra-rachidien situé dans la dure-mère. Le malade ayant été

soumis pendant plusieurs mois, sans résultat, à un traitement

iodo-mercuriel intensif, réclama une opération. Celle-ci permit de

constater, au niveau de la partie moyenne de la moelle dorsale la

présence d'un sarcome très vasculaire avec bourgeons sarcoma-

teux intra-médullaires.

Le malade succomba rapidement à une hémorragie provenant

de la tumeur. G. D.

XXX. Asymétrie dolorifique; par IoTEYKoetSTEFANOwsKA. (Journ. de

neurologie, 1903, n° 8.)

Les auteurs ont fait des expériences avec l'algésimètre de

Cheron pour savoir si l'asymétrie des fonctions sensorielles

s'étend aussi au sens de la douleur. Sur les 50 sujets ayant

servi à ces expériences, 3 se sont montrés plus sensibles à droite

et 47 plus sensibles à gauche qu'à droite, aussi bien les droitiers

que les gauchers. Nous serions donc tous gauchers pour la dou-

. leur, contrairement à ce qui a lieu pour les autres sensibilités :

musculaire, tactile, visuelle, etc. Il résulte de ces recherches que

les centres de la douleur ne sont pas les mêmes que les centres

c percepteurs des sensations tactiles, sans que cependant il soit

encore permis d'affirmer l'existence d'un centre spécial pour la

douleur. G. D.

XXXI. Sur un autre cas de tumeur du canal rachidien (segment

dorso-lombaire), par le professeur Raymond. (Journ. de iietiro-

logie, 1903, n° 11.)

64 revue D'ANATOMtE ET de physiologie pathologiques.

Une femme de trente et un ans, bien portante jusqu'alors, est

prise, sans cause appréciable, de douleurs constrictives en cein-

ture limitées au côté gauche. Ces douleurs siègent au niveau des

fausses côtes et se manifestent par accès d'une grande violence.

Trois mois après, apparait une parésie du membre inférieur

gauche, puis du membre inférieur droit, qui oblige la malade à

garder le lit; en même~temps, on constate de la dysurie, de la

constipation, une hyperesthésie de la surface externe des mem-

bres inférieurs, une hypoesthésie totale des mêmes régions, une

exagération des réflexes rotuliens et achilleens, etc.

La succession et l'ensemble de ces accidents permettent d'affir-

mer l'existence d'une compiession de la moelle, à la limite des

segments dorsal et lombaire, compression qui, en présence de

l'intégrité de la colonne vertébrale, ne peut être que le fait d'une

tumeur intra-vertébrale n'ayant pas encore provoqué de lésions

médullaires irréparables. G. DENY.

XXXII. Un cas d'écriture en miroir, par le Dr Duroutt. (Rev. méd.

de la Suisse romande, 1903, n° 9.)

Il s'agit d'un enfant de quatorze ans, arriéré et gaucher de nais-

sance, qui a appris à écrire des deux mains, mais qui écrit tou-

jours plus facilement de la main gauche, et de celle-ci toujours en

miroir.

Ce fait prouve à nouveau que l'écriture en miroir et de la main

gauche est l'écriture normale chez les gauchers dont l'éducation

n'a pas faussé la tendance naturelle. L'état d'arriération de cet

enfant est, en effet, la cause que, malgré les efforts de ses maî-

tres, il n'ait pu se déshabituer d'écrire en miroir de la main

gauche. ' G. D.

XXXIII. Examen histologique d'une tumeur cérébrale présentée

par le Dr Cuylitz ; par le Ur voN IsENDitycK (Bull. de la Soc. de

méd. mentale de Belgique, juin, août 1903).

Cet examen a démontré qu'il s'agissait d'un'ostéosarcome peri-

endothélial fongueux de l'arachnoïde.

XXXIV. Psycho-physiologie des religieuses; les religieuses de Port-

Royal ; parle De Binet-Sanglé (Journ. de Neurologie, 1903, n°45).

Ce travail contient cinq observations qui font suite à celles que

l'auteur a déjà publiées dans différents recueils notamment dans

les n08 d'avril 1903 et suivants des Archives.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

I. Contribution à l'étude de l'aphasie ; par G.-G. Boino-Rod-

zewitsch. (Obozrénié p.,ichiat1'ii. VII, 1902). ,

La première observation concerne un homme de 49 ans. Trou-

bles du langage, de la lecture et de l'écriture. Lésions des conduc-

teurs qui joignent le. centre intellectuel au centre moteur et le

centre visuel des caractères au centre sensoriel. Elles doivent

siéger sous l'écorce de la troisième frontale gauche et près de.la

temporale du même côté. Le début et la marche de l'affection pre-

mière permettent de supposer une altération des vaisseaux du cer-

veau suivie d'hémorrhagie. En effet, troissemames après le début des

accidents, presque tout à coup, le patient cessait de comprendre

également le langage oral, sans, qu'il se produisit de désordres

somatiques : il s'était fait une nouvelle lésion du centre sen-

sorie) tui-méme, de la première temporale près de laquelle siégeait

déjà le foyer.

L'observation 2 a trait à un homme de 45 ans. Il présente .

d'abord un trouble absolu, complet, du langage et de l'intelligence

du langage, puis graduellement, se rétablissent la parole sponta-

née, la lecture, l'écriture, l'intelligence de l'écriture : finalement il .

récupère la faculté de comprendre le langage oral.

Le désordre observé d'abord peut ? expliquer par une lésion des

centres moteur et sensoriel. Ce qu'il y a de particulier en l'espèce

c'est l'amélioration préalable du centre moteur, avant celle du

centre sensoriel. Bien qu'il eût graduellement recouvré la parole ,

spontanée, le patient était incapable de répéter les mots : cette

. faculté ne revint qu'avec le retour de la fonction du centre senso-

riel. C'est donc que, pour répéter les mots, l'on a besoin de l'inté-

grité du centre sensoriel tout autant que de celle du centre mo-

teur. L'aphasie motrice transcorticale ne peut s'expliquer par une

lésion du centre moteur.

On peut sans difficulté s'expliquer, pour le rétablissement du

centre moteur, l'amélioration graduelle de l'écriture spontanée.

Cependant le malade comprend le sens de ce qu'il lit bien avant

de comprendre ce qu'on lui dit, bien que le centre sensoriel inter-

vienne dans les deux fonctions. Cela dépend du degré d'activité de

ce centre. Sou inertie totale se traduit par l'anéantissement de'

l'intelligence du langage oral et du langage écrit : telle était la

situation au début de l'affection. Bientôt il se ranime un peu et

Archives, 2' série, t. XVII. 5

66 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

voici que le patient discerne en quelle langue on lui parle. Après

cela, le sujet arrive graduellement à lire sans comprendre-le sens

de ce qu'il lit : le centre en question est déjà plus actif, mais il ne

l'est pas encore assez pour communiquer avec le centre intellec-

tuel. Lorsqu'il fait librement passer son courant par les conduc-

teurs, le malade comprend ce qu'il lit et, tout à la fin, ce qu'on

-lui dit. Cette théorie a en sa faveur la fatigue observée à chaque

espèce de séances.

Il est à penser qu'il s'agissait d'une altération syphilitique des

vaisseaux : certains d'entre eux se thrombosaient, d'où des

troubles nutritifs des parties correspondantes du cerveau.

, P. KERAVAL.

Il. Tentative de recherche de la sensibilité pilaire chez les ,

malades atteints de tabes dorsal; par W.-P. Ossipow et

1OISCHEWS6Y. (Obozrénié psichiatrii, VI, 1901.)

Dix-neuf observations : (figures). L'atteinte de la sensibilité

cutanée chez le tabetiqûe commence fort souvent par la sensibilité

pilaire. De plus, le trouble de cette dernière occupe une bien plus

grande surface que celui des autres modes de la sensibilité cutanée,

et le degré du trouble de la sensibilité pilaire est plus profond que

celui des autres, modes de la sensibilité cutanée. Le trouble de la

sensibilité pilaire marche plus vite que celui des autres modes de

la sensibilité cutanée.

La triclioanesthésie est donc précoce et marche rapidement.

Mais il est impossible de préciser les rapports de son expansion

avec le trajet de tels ou tels conducteurs nerveux. A-t-elle une

valeur diagnostique quant à l'ataxie locomotrice ? Si souvent elle

s'observe à une époque où il n'existe pas encore de trouble des

autres modes de la sensibilité cutanée,- à cette époque on a déjà à

sa disposition d'autres signes permettant d'établir le diagnostic.

Il'faut se défier pour la recherche de la sensibilité tactile de l'em-

ploi de pinceaux de blaireau qui excitent simultanément, les poils

et la peau et qui, par suite, peuvent induire en erreur. KEIIA VAL.

P. Keraval.

III. Atrophie musculaire du membre inférieur gauche ; par le Dot

Glorieux (Journal de Neurologie, 1903, n° 11).

Celte observation concerne un garçon de douze ans et demi qui

est atteint depuis trois ans au moins d'une atrophie musculaire du

membre inférieur gauche sans troubles de la sensibilité, sans mo-

difications des réflexes, ni phénomènes de parésie. La lente évolu-

tion de cette atrophie musculaire et son état pour ainsi dire sta-'

tionnaire font croire à l'auteur qu'il s'agit d'une syringomyélie au

début. ' , . G. D '

REVUE DE pathologie NERVEUSE. 67

IV. Un cas de tabes spasmodique; par le Dr SANO (Journ. de Neu-

rologie, 1903, n° 15).

Il s'agit d'un ouvrier peintre, âgé de quarante-sept ans, quia été

pris de contractures des membres inférieurs d'abord, puis des

membres supérieurs avec secousses spasmodiques, tremblements

des mains, conservation des réflexes cutanés, exagération des

réflexes tendineux, etc. En présence de ces accidents révélateurs

d'une lésion du faisceau pyramidal, l'auteur estime qu'il s'agit

d'un cas de tabes spasmodique d'origine saturnine on plutôt para-

saturnine, l'affection ne s'étant produite qu'un certain temps après

que le malade avait déjà cessé tout travail. G. D.

V. Réflexions sur un syndrome d'astasie-abasie ; par le Dr de Bock

(Bull. de la Soc. de méd. mentale de Belgique, 1900, juin-août).

Il s'agit d'une jeune fille de vingt-huit ans qui était atteinte de

sclérose en plaques au début lorsqu'elle fut prise subitement d'as-

tasie-abasie. L'auteur attribue ce phénomène névrosique à une

auto-suggestion. La lésion organique préexistante aurait joué dans

ce cas le rôle de cause occasionnelle au même titre que les émo-

tions, les chocs moraux, etc. De fait, la persuasion ayant réussi à

rendre la station et la marche à la patiente tout en lui laissant les

autres troubles d'incoordination reposant sur une base organique

la nature hystérique de cette astasie-abasie ne semble pas douteuse.

G. D.

VI. Un cas d'atrophie du membre inférieur gauche et d'hypertro-

phie du membre inférieur droit ; par le Dr Glorieux (Journal de

Neurologie, 1903, n° 11).

Il s'agit d'un jeune homme de vingt-deux ans exerçant le métier

de polisseur qui, quatre années après une chute sur le genou

gauche, présenta une atrophie du membre inférieur correspondant

accompagnée d'une faiblesse plus ou moins douloureuse du genou

et une hypertophie.du membre droit. Il existait en outre chez ce

sujet une exagération des réflexes rotuliens et achilléens.

Malgré ces derniers symptômes et le début en apparence articu-

laire de l'affection, l'auteur croit qu'il faut la ranger dans laclasse

des myopathies pseudo-hypertrophiques de l'adulte sans rejeter

cependant d'une façon absolue l'hypothèse d'une syringomyélie

unilatérale avec hypertrophie du membre opposé. G. DENY.

VII. Un cas d'hystéro-syphilis; par le Dr THOORIS. (Journ. de Neu-

' ' rologie, 1903, n° 2.)

Cette obseruation concerne un homme qui contracta la syphilis

à vingt-deux ans et chez lequel survint pendant la période secon-

68 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

daire de cette affection une hémiparésie du côté gauche. Cette

hémiparésie persista pendant quatre ans malgré le traitement spé-

cifique ; on constata en outre au bout de quelque temps une hémi-

anesthésie complète du côté droit avec rétrécissement du champ

visuel, amnésie, etc. Tous ces accidents, sauf l'amnésie, ont disparu

brusquement dans ces derniers temps. L'analyse du liquide cé-

phalo-raclndien a donné un résultat négatif,

De l'ensemble de ces faits, l'auteur conclut que son malade a

été atteint d'hystéro-syphilis. G. D.

VIII. Mal vertébral sous-occipital avec luxation du crâne en ar-

rière. Paralysie atrophique bilatérale de la langue par com-

pression probable des deux hypoglosses ; par le Dr DECROLY

(jours. de Neurologie, 1903, n° 3.) 1

Le malade est un homme de trente-trois ans, qui fut pris un

jour en chantant d'une vive douleur localisée d'abord au sommet

du crâne et ensuite à la nuque. Quelque temps après survint une

paralysie progressive du côté gauche qui envahit bientôt les mem--

bres droits. Un traitement par la suspension et le plan incliné fait

disparaître ces troubles moteurs, mais à ce moment la langue qui

jusque-là, était restée intacte, devient de moins en moins mobile et

diminue de volume en même temps que la nuque se creuse, que le

menton se rapproche de la poitrine, et que le cou s'immobilise.

Deux mois après, la paralysie des membres réapparaît et condamne

le malade à l'immobilité. L'examen de la cavité buccale permet de

constater le refoulement en avant du voile du palais et de la paroi

postérieure du pharynx d'où une gêne considérable de la respira-

tion et de la déglutition.

Cet ensemble de phénomènes est attribué par l'auteur à un mal

vertébral sous-occipital avec luxation du crâne en arrière et com-

pression des deux nerfs hypoglosses à leur sortie des trous condy-

liens antérieurs. G. D. ,

IX. Sclérose en plaques. Mouvements au repos; par le or BOUCHAUD,

de Lille. (Journ. de Neurologie, 1903, no 3.)

Il s'agit d'un enfant de seize ans qui a présenté d'abord des

maux de tête, des éblouissements, avec chute de la paupière supé-

rieure et déviation de l'oeil droit en dehors et plus tard des mou-

vements involontaires incessants de flexion et d'extension des mem-

bres inférieurs d'abord, ensuite des membres supérieurs; la parole

devint alors difficile et finit par être inintelligible, tandis que les

membres inférieurs, pris de raideur, rendaient la marche impos-

sible. Notons encore comme autres symptômes une exagération

des réflexes rotuliens, de la trépidation épileptoï ie, des mouve-

ments nystagmiformes, etc. Ces accidents qui s'étaient développés

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 69

en l'espace d'un an et qui sont restés stationnaires pendant de

longs mois, ont été suivis d'une amélioration des plus remar-

quables qui équivaut presque à une gué, ison. C'est en se basant

sur cette évolution que l'auteur s'appuie pour affirmer l'existence

chez son malade d'une sclérose en plaques malgré les mouvements

involontaires des membres qu'il présentait au repos. A l'appui de

son opinion, M. Bouchaud cite plusieurs autres faits recueillis dans

la littérature, qui prouvent que le tremblement de la sclérose en

plaques n'est pas toujours intentionnel; comme l'admettent les

auteurs classiques, et qu'il peut subsister au repos. G. D.

X. Tabes incipiens; parle Dr de Buatt. (Journal de Neurologie,

' 1903, na 5.)

Il s'agit d'un homme de 35 ans, ni alcoolique, ni syphilitique,

mais ayant fait des excès génésiques, qui a été atteint d'abord de

dérobement des jambes, de fatigue dans les mollets et de fourmil-

lements dans les membres inférieurs. Il existait en même temps

une hyperesthésie du sens génésique, une démarche ataxique,

les yeux fermés, une exagération des réflexes rotuliens et une abo-

lition complète des réflexes achilléens. C'est sur ce dernier signe

que l'auteur s'appuie en même temps que sur une analgésie du

bord externe du pied pour admettre un début de tabes.

G. Deny.

XI. Le syndrome psychasténique de l'akathisie ; par Raymond et

JANET (Nouv. Iconogr. de la Salpêtrière, rit 3, 1902).

Récemment Haskowec (de Prague) décrivait sous le non) d'aka-

thisie, un syndrome nouveau caractérisé par l'impossibilité de

s'asseoir, et comprenant tout le cortège de l'angoisse (contorsions,

paroxysmes respiratoires, cardiaque, détente consécutive). Ce

syndrome était rapproché de celui de l'aslasie hystérique. Le cas

nouveau observé par les auteurs concerne un homme, fils d'alcoo-

liques, frère d'épileptiques, qui a toujours été instable et qu'il y a

lieu de considérer comme un dégénéré atteint d'aboulie profes-

sionnelle avec angoisse. - R. C.

XII. Cécité verbale pure; par BRISSAUD (Nouv. Iconogr. de la Sal-

pétrière, n°4, 1902).

Lésions anatomiques constatées à l'autopsie : ramollissement

de la région calcarine gauche résultant de l'oblitération de l'artère

calcarine s'étendant à la presque totalité du cuneus et à la partie

la plus reculée du lobule lingual, dégénérescence du splenium, du

tapetum et du faisceau optique à gauche et du tapetum à droite.

Confirmation des observations antérieures de Pelnar et Skalicka.

. R. C.

.70 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

XIII. Le syndrome du torticolis spasmodique; parDÈSTARAc(7Vb«u.

Iconogn. delà Salpêtrière, n° 5, 1902).

Discussion clinique au sujet de deux malades présentant une

symptomatologie identique et voisine de celle de la paraplégie

; spasmodique et aussi de celles de la maladie de Friedreich et de

l'hérédo-ataxie cérébelleuse : intégrité de la force musculaire avec

impotence fonctionnelle, systématisée, sous forme de spasmes

fonctionnels, à certains mouvements complexes et coordonnés tels

que la marche'et l'écriture : attitudes vicieuses et mouvements

involontaire des membres, du tronc et de la tête. L'affection parait

différenciée par un phénomène capital, le torticolis spasmodique,

qui autorise l'auteur à la désigner sous le nom de Syndrome du

torticolis spasmodique. S'appuyant sur ce lien de parenté sympto-

matique et sur ce fait qu'il n'existe qu'une différence de nuance

entre l'incoordination fonctionnelle et le spasme fonctionnel, l'au-

teur se demande, sans pouvoir conclure, à défaut de constatations

anatomo-pathologiques, s'il n'y aurait pas lieu de rechercher la

parenté pathologique entre le syndrome du torticolis spasmodique,

la maladie de Friedreich et l'hérédo-ataxie. R. Charron.

XIV. La question de l'aphasie motrice sous-carticale, par le

Dr Ladame.

L'auteur a pu suivre, depuis dix ans, un cas qui présentait, dans

toute leur pureté, les symptômes que Déjerine, Lichtheim,

F. Bernheirruet d'autres auteurs ont prétendu caractériser la forme

sous-corticale de l'aphasie motrice. La lésion corticale, trouvée à

l'autopsie, permet à M. Ladame d'émettre les conclusions sui-

vantes :

1° Les symptômes que l'on a considérés par erreur comme carac-

téristiques de l'aphasie motrice, dite sous-corticale, s'observent

'dans la lésion corticale de l'opercule frontal; -

2° L'agraphie n'est point la suite nécessaire d'une lésion du pied

de la deuxième circonvolution frontale ;

3° Il faut abandonner désormais le classement des aphasies mo-

trices en corticales et sous-corticales, comme ne répondant ni à la

réalité clinique, ni à la réalité anatomo-pathologique.

M. Ladame se réserve de donner ultérieurement une description

détaillée des coupes du cerveau, permettant de localiser exactement

les dégénérations secondaires consécutives aux lésions de l'écorce

trouvées à l'autopsie (Revue neurologique, janvier 1902). E. BLIN.

- XV. Sur deux cas de syringomyélie à topographie radiculaire des

' troubles sensitifs et des troubles moteurs; par les Dra CESTAN

et HUET.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 71

- La question se pose actuellement de savoir si la topographie

habituelle des troubles de la sensibilité dans la syringomyélie ré-

pond davantage à la distribution radiculaire, qu'à la disposition de

la métamérie spinale. Dans les cas avancés de syringomyélie, non

seulement la topographie précise des troubles sensitifs peut être

difficile à déterminer, mais encore leur interprétation peut donner

sujet à discussion. Aussi doit-on colliger avec soin les observations

;de syringomyélie peu avancée, avec troubles localisés à une partie

des membres; elles permettent de mieux préciser la topographie

des troubles sensitifs, et souvent aussi des troubles moteurs.

Les deux observations rapportées par les auteurs, des plus inté-

ressantes, et prises avec la précision la plus rigoureuse, viennent

s'ajouter aux faits déjà nombreux de syringomyélie, relevés par

M. Huet, et aux faits rapportés dans la thèse de Hauser, qui

montrent que les troubles sensitifs se produisant au cours de cette

maladie, sous l'influence des lésions médullaires, peuvent, comme

les troubles moteurs, affecter une disposition radiculaire (Revue

neurologique, janvier 1902). E. B.

XVI. Quelques considérations sur l'épilepsie tardive et l'épilepsie

sénile; par le Dr P. 11lASOIN.

D'après les recherches et observations de l'auteur, l'hérédité

névropathique joue un rôle important dans l'épilepsie tardive,

l'artériosclérose venant secondairement, au' même titre que toute

autre cause de débilité ou de déchéance, déterminer la maladie.

Dès lors ce groupe d'épilepsies tardives, comprenaut aussi cer-

tains cas d'épilepsie sénile se confondrait presque avec les épilepsies

dites idiopathiques ; il n'y aurait de différence que dans le

moment d'appairtion de la maladie : jeunesse et adolescence

d'une part, âge adulte et sénilité de l'autre.

Pour les cas cependant où la prédisposition névropathique héré-

ditaire n'existe pas, et où l'artério-sclérose constitue le substra-

tum anatomique de la maladie, il n'y a pas de motif pour se

refuser à en faire une variété distincte, voire même une maladie,

spéciale, ainsi que l'a soutenu Crocq fils (Annales médico-psycho-

logiques, avril 1902). E. B.

XVII. L'examen des malades atteints de paraphasie; par le

' Dr SAINT-PAUL.

Comme Pitres l'a établi, la paraphasie se distingue de l'aphasie

en ce qu'il n'y a pas, comme dans l'aphasie, perte de l'usage de

l'un des centres de la mémoire verbale ou du langage intérieur,

mais bien usage défectueux, viciation du fonctionnement de l'un de

ces centres.

Dans une savante et intéressante étude, l'auteur examine quels

7 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

sont, dans les diverses formes d'aphasie, les symptômes ou parti

cularités qu'il faudra rechercher. i

Ji A. Purctphémie.-Les symptômes principaux sont la dysphémie

la dyslexie, la dyséchophémie motrice. '

B. Pamg1'aphie. Les symptômes principaux sont : la dysgra-

phie ou écriture spontanée inadéquate à la pensée à écrire, la

,.dyscopie ou copie défectueuse des textes lus, et la dyséchographie

ou exécution vicieuse des dictées. Comme dans la paraphémie, il

sera bon d'étudier le rôle de l'attention, de savoir si, par exemple,

la lecture machinale, en cas de paraphémie, n'est pas la seule

possible et si l'appel de l'attention, en forçant le malade à com-

. prendre ce qu'il lit. ne gêne pas ou même ne supprime pas la

lecture machinale. '

C. Paraphémie et paragraphie associées, réunissant les .symp-

tômes des deux affections. '

D. Paracécité verbale dont les symptômes sont la dysopsie, la

dyslexie, la dyscopie sensorielles. '

E. Parasurdité verbale dont les symptômes sont la dysacousie, la

dyséchographie, la dyséchophémie sensorielles. Il est à noter que

dans l'examen d'un cas de paraphasie, l'étude de l'endophasie est

d'une importance capitale, si bien qu'on doit successivement étu-

dier non pas les quatre mais les cinq centres suivants : 1° trois

centres de mémoire verbale, auditif, moteur, visuel; 2° un centre

endophasique de même nom que l'un des précédents, mais non

identique à lui ; 3° le centre de mémoire verbale graphique, avec

lequel ne coexiste pas le centre endophasique de même nom.

F. Leitungsaphasie ou viciation des communications. La ques-

tion des leitungsaphasies resterait relativement assez simple si

les recherches faites jusqu'à présent ne nous enseignaient qu'elle

se relie étroitement à l'étude des aphasies et paraphasies endopha-

siques.

G. Examen de la zone sensorielle ou motrice de même nom

que le centre lésé et du fonctionnement des centres spéciaux, du

centre de mémoire musicale, par exemple, dans les cas de surdité

verbale.

En résumé, dans l'examen des malades atteints de paraphasie,

il est utile d'élucider : 1° l'état des centres intellectuels supérieurs ;

2° le fonctionnement annihilé ou diminué du centre lésé (aphasie)

ou fonctionnement inadéquat du centre par rapport à l'expression

(centres moteurs), on a la sensation (centres sensitifs) ; 3° les alté-

rations du langage intérieur ; 4° les amnésies ; 5° les paraphasies

endophasiques : viciation des communications entre le centre du

langage intérieur et les centres intellectuels; usage ou reception

inadéquats par le cerveau des signes verbaux (Annales médical"

psychologiques, avril 1902). E. B. , i

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 73

XVIII. Cas d'acromégalie aiguë; (British médical Journal, avril 1903).

Ces deux observations sont accompagnées de figures, la pre-

mière a été suivie d'autopsie; il s'agissait d'une tumeur cérébrale

intéressant la pituitaire naturellement. La nature des deux tumeurs

comme dans le cas le plus ordinaire d'acromégalie aiguë était celle

du sarcome. D' A. Marie.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

I. Les principes de l'action thérapeutique du courant continu,

par S.-11. ScHaTzKY (Obozrénié psiclaiatrü, VI, 1901).

L'auteur pense que les expériences physiques qu'il a citées, et

les considérations qu'il a édifiées sur les travaux des savants, em-

pruntés à d'autres domaines de la science, l'engagent à aboutir

aux conclusions suivantes : .

1. Les phénomènes de l'électrolyse, dus au passage du courant

continu à travers un électrolyte,'s'accomplissent aussi bien entre

les pôles qu'aux pôles mêmes. 2. Sur tout le parcours du courant,

il voyage des ions, qui, pour ainsi dire, chargés par l'électricité

statique, se précipitent vers ses pôles comme aux points finaux de 'e

la plus grande attraction. 3. La cataphorèse est le résultat du

voyage des ions : elle provient exclusivement de l'acte de l'électro-

lyse ; c'est une phorèse électrolytique. 4. L'action thérapeutique du

courant continu sur les affections chroniques locales d'origine in-

flammatoire, arthriticorhumatismale, goutteuse, névropathique,

dépend de ses propriétés électrolytiques : n) la disparition des

symptômes objectifs d'une affection locale s'effectue par l'électro-

lyse interpolaire; b) celle des sensations douloureuses s'accomplit

par un courant artificiellement provoqué, renforcé par un afflux

d'oxygène vers les éléments nerveux locaux sensible ? ainsi que

par la suppression des causes mécaniques de leur irritation du fait

de la phorèse. 5. Le pôle qui apaise la douleur doit être l'anode;

celui qui l'éveille doit être la cathode. 6. Le degré d'effet thérapeu-

tique est directement proportionnel à la force et à la durée du Cou-

rant. P. Keraval.

Il. L'influence de l'alcool sur l'efficacité des effets thyroïdiens; par

le Dr Ladame 13asbovcc. ,

L'alcool n'altère pas, in vitro, le liquide thyroïdien, et lui laissé

la possibilité d'exercer son action sur le coeur et sur la pression du ,

sang. Mais le liquide thyroïdien conservé, mélangé avec de l'alcool,

'74 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

agit d'une manière différente que le liquide frais, parce que l'ac-

tion de l'alcool du mélange paralyse l'action du liquide thyroïdien.

Le liquide thyroïdien, conservé au moyen de l'acide carbonique,

offre la même action que le liquide frais (Revue neurologique, jan-

vier 1902). E. BLIN.

. ici. De l'emploi du phosphate de codéine en pathologie mentale;

- - par le Dr DHEUIt.

. En présence de la vogue dont jouit aujourd'hui le traitement de

la mélancolie par le laudanum, l'auteur s'est proposé de recher-

cher un médicament qui possède les mêmes effets que le laudanum,

sans en avoir les inconvénients, et s'est adressé au phosphate de

codéine. Après son emploi, les malades présentent une physiono-

mie gaie et animée, qui contraste étrangement avec le masque

habituel du mélancolique. Les cauchemars disparaissent très vite;

les rêves perdent leur caractère pénible, souvent même des rêves

gais apparaissent et prolongent leur action bienfaisante jusque

dans la période de veille.

La codéine n'est pas un hypnotique, à proprement parler, mais

elle ramène toujours le sommeil chez les mélancoliques et chez les

anxieux, en s'attaquant directement aux causes de l'insomnie, en

agissant sur la sensibilité générale, en diminuant l'angoisse et la

' douleur morale, en supprimant le cauchemar. Le phosphate de

codéine n'a aucune action défavorable sur le tube digestif, et sem-

ble même favoriser les selles.

Quoique la plupart des malades supportent très bien la codéine,

il n'en convient pas moins de n'employer ce médicament qu'à doses

progressives, et il faut surveiller le malade dès qu'on arrive à

0 gramme 06 centigrammes en injections sous-cutanées, et à

0 gramme 08 centigrammes en pilules. En général, l'auteur n'a pas

dépassé 0 gramme 10 centigramme en injections sous-cutanées

(Annales médico-psychologiques, juin 1902). E. B.

IV. Influence du menthol sur les nerfs cutanés ; parM110 IOTEYRO.

(Journal deNeurologie, 1903, n° 10.)

D'après les expériences relatées dans ce travail, le menthol est

un excitant énergique pour les nerfs du froid et les nerfs du chaud,

un déprimant pour les nerfs de la sensibilité tactile etdolorifique.

Cette différence est due, d'après l'auteur, à une inégalité dans le

seuil d'excitabilité de ces divers nerfs par le menthol et aussi à la

situation occupée par ces différents nerfs. Les nerfs de la sensibi-

lité à la douleur sont considérés comme étant les plus superficiels

par von Frey et Thunberg ; la deuxième couche de nerfs serait

constituée par tes nerfs du froid, et la troisième couche par les

» nerfs du chaud. Cette localisation trouverait donc un appui dans

les expériences précitées. G. DENY.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.. - 75

V. Contribution à l'étude de l'action physiologique de quelques

bromures; par Ch. FERÉ (Nouv. lconogr. de la Salpétrière, n° 5,

1902). -

Poursuivant ses études antérieures sur les rapports existant

entre la capacité du travail volontaire normal et ce même travail

soumis à l'influence d'excitants divers ou de médicaments, l'auteur,

dans une série d'expériences portant sur les bromures de potas-

sium, de sodium, d'ammonium et de camphre et suivant la méthode

déjà exposée (ergographe de Mosso, travail du médius), expose le

résultat de ses recherches desquelles il ressort que : dans la plu-

part des cas les bromures produisent une excitation initiale, quel-

quefois, à dose élevée, une dépression immédiate; constamment

sous l'influence de diverses doses, la fatigue se trouve accélérée ;

quelle que soit la valeur du travail total, il se produit à la fin de

l'expérience une diminution considérable de la capacité du travail

qui peut être inférieure à un dixième du travail normal ; l'action

des bromures est rapide, elle se manifeste presque instantanément

avec de hautes doses. R. Charron.

VI. Pronostic et traitement des affections spécifiques du système

nerveux; par W. GOWERS (Britislz médical Journal, 4 avril 1903).

C'est un plaidoyer en faveur du traitement spécifique dans les

myélo et encéphalopathies syphilitiques ordinaires mais à l'exclu-

sion des affections telles que tabes et paralysie générale. L'auteur

admet les lésions parasyphilitiques non justiciables des antisyphi-

litiques. A l'heure où la question est discutée chez nous, il est inté-

ressant-de suivre l'argumentation de l'auteur anglais.

Dr A. Marie.

VII. Sur le traitement chirurgical de la folie avec délusions, basé

sur son étude physiologique ; par T. CLAY SIAN. (The Journal

of Mental Science, Juillet 1902).

Après quelques considérations sur le fonctionnement du cerveau

à l'état normal et dans les délusions, l'auteur fait remarquer que

la chirurgie s'est déjà emparée d'une portion du territoire médical

et que le moment parait venu pour elle de prendre en main quel-

ques-uns des problèmes de la folie. Si, en dernier recours,

on en vient à une intervention opératoire, on peut se demander

jusqu'où elle doit aller, et dans quelle direction il convient de pro-

céder.

L'auteur pense qu'une trépanation primordiale, en vue d'explorer

la région malade, ne peut, en tant qu'opération être nuisible. Elle

comporte actuellement peu de risques et s'exécute rapidement. On

peut trouver un épaississement des membranes, ou'des adhéren-

76 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

ces avec les circonvolutions sous jacentes et on peut remédier chi-

rurgicalement 1 ces lésons dont la présence détermine quelquefois

des phénomènes d'irritation ou de compression. '

On peut trouver de grands avantages dans la diminution de con-

gestion qui résulte de l'intervention, sans qu'il y ait, suivant l'au-

teur, aucune conséquence. lâcheuse à redouter. Si, après l'enlève-

' ment de la dure-mère, les membranes paraissent opaques, on

peut les ponctionner et les drainer. Quant aux interventions sur la

cellule nerveuse elle-même, il faut se laisser guider par ce que l'on

constatera. En tout cas on obtiendra ainsi des éléments de pro-

nostic que ne fournirait aucun autre traitement. Tout cela mé-

rite réflexions. Il. de liIUSGRA'E-CLAY.

VII. Notes sur quelques cas de morphinomanie; par Robert Jones.

· (The Journal of Mental Science. Juillet 1902).

Très bon résumé de la question, suivi de huit observations.

R. M.-C.

VIII. Un cas d'empoisonnementpar lesulfonal; par H. de M. ALEXAN-

, der (The Journal of Mental Science. Octobre 1902).

Femme de trente-deux ans, anémique, sans constipation, at-

teinte de manie depuis deux ans, devenue agitée : comme au mo-

ment des crises précédentes d'agitation, on donne du sulfonal à

la dose de 30 grains (1 g. 80 centig.), qui a toujours eu un effet sé-

datif sans provoquer de symptômes fâcheux. Environ vingt-huit

heures après la dernière dose, elle refuse toute nourriture et est

prise de vomissements : la peau est froide et visqueuse, les pupil-

les normales, le pouls à 86, avec tension faible, et un peu irrégulier :

respiration normale; température au-dessous de la normale : l'ar-

ticulation de la parole un peu lente mais nette ; état mental meil-

leur que depuis bien des mois. La malade se plaint surtout d'avoir

froid : on la met au lit et on la traite pour un empoisonnement par

le sulfonal. Les leucocytes sont au nombre de 5 642 par millimètre

carré et restent jusqu'à la fin au dessous de 6 000. L'urine est cou-

leur de vin de Porto foncé, contient un peu d'albumine et de l'hé-

matoporphyrine. L'état s'aggrave. Une paralysie flasque atteint

d'abord les jambes, puis monte et finit par rendre à peine possi-

bles les mouvements de la tête. On constate un degré variable

d'anesthésie au toucher, à la chaleur et au froid, surtout aux mem-

bres inférieurs, qni sont le siège de douleurs fulgurantes. La

sensibilité des muscles à la compression est accusée et douloureuse.

Une éruption bulleuse apparaît aux talons, aux mollets. au coude

et à l'avant-bras gauche. Les excrétions deviennent involontaires.

La déglutition est progressivement compromise, la respiration à

peine perceptible. Il y a bien un certain degré de léthargie men-

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 77

tale, mais la malade se rend compte de ce qui se passe autour

d'elle et ses facultés intellectuelles conservent une netteté remar-

quable jusqu'à la mort, qui survient le cinquième jour après l'ap-

parition des phénomènes toxiques. L'autopsie a été refusée.

Bien que ce cas puisse être considéré comme un cas d'empoison-

nement chronique par le sulfonal, des phénomènes graves peuvent

se manifester même après une première dose de sulfonal ou de

trional. Les symptômes ordinaires sont les vomissemenis, l'incoor-

dination des mouvements, et la torpeur mentale, avec prostration

considérable et pouls un peu rapide et à faible tension. Sur

dix cas dans lesquels l'auteur a noté ces symptômes, il y en avait

huit où le sulfonal avait été donné à la dose de 30 grains (1 g. 80)

et deux ou l'on avait administré le trional à la dose de 20 grains

(1 gr. 20).

Dans ces dix cas il s'agissait de femmes et toutes ont été guéries

plus ou moins rapidement. Dans neuf de ces cas, les règles étaient

imminentes ou présentes; il semblerait donc que ces médicaments

demandent à être employés avec réserve au moment de l'époque

menstruelle. , R. DE Musgrave-Clay.

IX. Le traitement opératoire des lésions traumatiques intra cra-

niennes, par Charles PHELPS. (1'he New York llecaicul Journal,

il Janvier 1902). z

Les conclusions de ce travail peuvent se résumer de la manière

suivante le nombre des cas dans lesquels l'intervention opératoire

est légitime demeure très restreint. D'une façon générale on peut

dire que cette intervention devra être générale dans les fractures

du crâne avec dépression osseuse, fréquente dans les cas à peu près

dépourvus de complications, d'bémorrhagies siégeant au-dessus

de la dure-mère, exceptionnelle dans les cas de lésion située au-

dessous de la dure-mère, que ces lésions intéressent le cerveau ou

la membrane pio-arachnoïdienne. Le recours à l'intervention chi-

rurgicale, qui, pourvu que l'état général soit favorable, est essentiel

dans les abcès du cerveau et dans les plaies pénétrantes par arme

à feu sera étudié dans un autre travail. Mais si l'intervention doit

être rare dans la plupart des lésions intra-craniennes, en revanche,

la question d'intervention est souvent posée, et la solution implique

des responsabilités graves. Une action ou une inaction inopportu-

nes peuvent être également nuisibles : mais les opérations préma-

turées ou conlre-indiquées pratiquées par des chirurgiens inexpéri-

mentés sont certainement en plus grand nombre que les cas où

une tendance exagérée à la non-intervention aconduit à une abs-

tention funeste. ' R. de D1USGItAVE-CLY.

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE

Séance du 3 décembre 1903. Présidence DE M. P. RICHER

Adénome du corps pituitaire sans acromégalic.

MM. CESTAN et H.m,sssrnnx communiquent un cas d'adénome

kystique du corps pituitaire sans hypertrophie du squelette (gigan-

tisme ou acromégalie). La maladie a évolué chez un homme de

cinquante-huit ans ; cette observation présente un double intérêt

au point de vue clinique et au point de vue anatomique. D'une

part, en effet, l'affection a revêtu la forme d'un délire alcoolique

sans troubles objectifs. D'autre part la tumeur est un adénome

vrai de l'hypophyse ; or le sujet n'a eu ni gigantisme ni acromé-

galie. Pour les auteurs la question d'âge du malade est peut-être

fort importante pour expliquer cette anomalie : la tumeur hypo-

physaire étant survenue chez un homme âgé et à périoste inactif,

elle n'a pu déterminer l'hypertrophie du squelette.

- Tabès juvénile. -

MM. Camus et CHIRAY présentent à la société une jeune fille de

vingt-deux ans qui souffre depuis l'âge de seize ans de crises gas-

triques avec vomissements. Les crises extrêmement violentes ame-

nèrent la malade en quelques heures à un état de déshydratation

tel que l'issue fatale parait proche. En dehors des accès on n'ob-

serve aucun trouble gastrique et l'état général est excellent. Pen-

dant leur cours on a pu constater la présence du signe d'Argyll

Robertson qui disparait ensuite. Mais il existe d'autres signes per-

manents du tabès chez cette jeune fille, ce sont en particulier

l'abolition totale de tous les réflexes tendineux, et l'hypoesthésie

radiculaire limitée au territoire de la huitième cervicale et de la

première dorsale surtout du côté gauche. Il ne s'agit donc ici ni

d'hystérie dont la malade n'a aucun stigmate, ni d'une maladie

organique de j'estomac : Ce sont des crises gastriques. Ces crises

ayant débuté à l'âge de seize ans il ne paraît pas possible d'incri-

miner une syphilis acquise, la malade n'en présente d'ailleurs

sociétés savantes. 79

aucune trace. Par contre, son père était certainement syphilitique.

Il est mort paralytique général, sa mère a perdu trois enfants sur

sept et le dernier des enfants vivants est nettement hérédosyphi-

litique. Le diagnostic probable est donc tabès juvénile par hérédité

syphilitique et crises gastriques consécutives avec signe d'Argyll

Roberstson intermittent.

Atrophie musculaire type Charcot-Marie.

MM. DÊJEMNE et Armand DEr.LLE présentent les pièces d'un cas

d'amyotrophie progressive du type Charcot-Marie; le sujet, une

femme de cinquante ans, après trente ans de maladie est morte

d'une crise d'asystolie due à une sthénose aortique. Les coupes en

série de la moelle ont montré une dégénération systématique du

cordon de Goll dans ses deux tiers antérieurs et du cordon de

Burdach. Ces lésions étaient surtout intenses dans la région cer-

vicale, elles vont en diminuant à mesure qu'on descend, jusqu'à

disparaître complètement au bas de la région lombaire ; les racines

postérieures sont partout indemnes. Les cordons antérieurs pré-

sentent simplement quelques altérations de sénilité, les racines

antérieures sont intactes aussi. Les lésions des nerfs périphériques

sont plutôt des lésions d'atrophie simple que de dégénération; il

n'y a pas de névrite interstitielle. Il n'y a donc aucune analogie

avec l'amyotrophie du type Déjerine-Sottas.

Sensibilité osseuse. ,

MM. RIFDEL et P. Marie présentent un nouveau diapason pour

recherche de la sensibilité osseuse, l'appareil porte un indice

optique gradué permettant d'évaluer le temps de durée de la sen-

sibilité au diapason. Cette sensibilité se trouve notablement dimi-

nuée dans sa durée, dans tous les états morbides des cordons pos-

térieurs : tabès, maladie de Friedreisch et amyotrophie de Charcot-

Marie.

M. DÉJEIIINE ajoute que ce moyen d'investigation lui a permis

de reconnaître l'intégrité des cordons postérieurs dans un cas de

mal de Pott où toutes les sensibilités étaient abolies sauf la sen-

sibilité osseuse au diapason.

OEdèmes chez des catatoniques.

M. DINDE envoie des photographies d'oedèmes chez des déments

catatoniques. Il rapproche ces phénomènes des trophoedèmes des

hypothyroïdiques.

MM. Mfige et Marie font observer que ces oedèmes sont à dis-

position segmentaire ce qui n'est jamais le cas pour les oedèmes

thyroïdiens.

80 SOCIÉTÉS SAVANTES.

De l'abduction des orteils (signe de l'éventail).

M. G. Babinski. J'ai montré dans une précédente communi-

cation, que l'abduction des orteils provoquée par une excitation

de la plante du pied, constitue, quand elle est bien marquée une

présomption de perturbation du système pyramidal.

Des faits plus récemment observés me conduisent à admettre

que cette perturbation peut occasionner aussi une abduction asso-

ciée des orteils. Pour constater ce phénomène voici dans quelles

conditions il faut se placer : le sujet en observation doit se cou-

cher sur le dos, puis, après avoir croisé les bras sur la poitrine,

exécuter des mouvements alternatifs de flexion et d'extension du

tronc sur le bassin, comme pour la recherche du « mouvement

combiné de flexion du tronc et de la cuisse. Pendant l'exécution de

ces actes ont voit les orteils s'écarter les uns des autres.

L'abduction associée des orteils me paraît avoir une significa-

tion clinique de même ordre que l'abduction réflexe, mais il faut

remarquer que si ces deux espèces de mouvement coexistent par-

fois ils peuvent aussi exister l'un en l'absence de l'autre.

L'abduction associée est un phénomène assez rare qui m'a

semblé plus commun dans l'hémiplégie infantile que dans celle de

l'adulte, plus fréquente dans l'hémiparésie que dans l'hémiplégie.

Je l'ai observé du côté droit chez une malade atteinte d'un

spasme fonctionnel du membre supérieur droit qui se manifestait

en particulier par une crampe des écrivains ; cette femme présen-

tait en même temps à droite le phénomène de la flexion combinée

de la cuisse et du tronc. Ce fait me suggère cette idée que le

spasme fonctionnel est peut-être, au moins dans certains cas, sous

la dépendance d'une perturbation du système pyramidal.

Alexie chez un achondroplase. ,

MM. FURSTER et Marie présentent le malade Claudius de Bicêtre,

achondroplase bien connu et montrent qu'il copie avec une rigou-

reuse exactitude, transformant l'imprimé en cursive, mais qu'il

lui est absolument impossible de lire quoi que ce soit.

Une observation anatomo-clinique de syringomyélie.

MM. A. Thomas, GEORGES HAUVER et TAYLER communiquent une

observation de syringomyélie qui a surtout un intérêt histolo-

gique. Il ne s'agit en effet pas de gliome, ni de cavité d'origine

névroglique, mais seulement de fentes comblées par des vaisseaux

et du tissu conjonctif et qui avaient en certains points suscité une

réaction névroglique secondaire. Le rôle du système conjonctivo-

vasculaire est capital ici et les auteurs se réservent d'y revenir

dans un travail ultérieur.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 81

Sensibilité tactile et thermique dans le tabès.

MM. Rousseau et V ASCHIDE se servent d'un esthésiomètre com-

posé d'aiguilles montées de façon à n'appuyer sur la peau que

par leur poids et échelonnées au milligramme, de un milligramme

à un gramme et portées, pour éviter les causes d'erreur, à la tem-

pérature du sujet. Pour la sensibilité thermique ils se servent' de

gouttes d'eau distillée de deux centigrammes chauffée au bain

marie. Pour la sensibilité dynamique ils emploient des boules. Ils

ont trouvé ainsi chez les tabétiques une hypoesthésie généralisée,

la normale étant à 3 milligrammes, il a fallu des aiguilles de

5 milligrammes à 1 gramme pour produire une sensation chez les

tabétiques, sauf sur certaines régions déterminées.

Le liquide céphalo-rachidien des paralytiques généraux. - '

M. ARDIN-ULLTEIL a étudié le liquide céphalo-rachidien chez

34 paralytiques généraux. ,

Ce liquide ne s'est jamais montré toxique; il contient générale-

ment de l'albumine (globuline), souvent à l'état de traces, quelque- :

fois en quantité notable (12 cas); il contient toujours un corps

réducteur (glycose) quelquefois plus abondant (2 cas). '.

La formule cytologique (nulle dans 2 cas) peut être : a) très dis-

crète ; 8 cas : (petits lymphocytes, trace d'albumine; pgp en

rémission ou à marche excessivement lente) ; b) discrète ; 13 cas :

(petits lymphocytes, grands lymphocytes, albumine ; pgp. période,

d'état stationnaire) ; c) accentuée; 7 cas : (grands lymphocytes,

albumine : pgp en activité) ; d) très marquée 4 cas (petits et grands

lymphocytes polynucléaires, de 3 à 50 p. 100 ; albumine ; pgp

très active ; congestions, agitation soutenue, attaques en se-;

rie, etc.). Ces variantes de la formule cytologique peuvent avoir

une valeur pronostique réelle.. , , 1

Méningo-myélite tuberculeuse à lésions discrètes. Paraplégie aiguë :

MM. DUPRÉ, Haosen et SÉBILEAU rapportent l'histoire anatomique

et clinique d'un cas de méningo-encéphalomyélite subaiguë, inté-

ressant à plusieurs titres. Anatomiquement, lésions méninge-'

médullaires diffuses, mais discrètes, n'ayant entrainé ni destruc-

tion fransverse, ni dégénérations fasciculaires, prédominant dans

la région dorsale inférieure, en regard d'un vieux nodule libro-

tuberculeux, centro-épendymaire, première localisation probable

de l'infection médullaire. Pas de mal de Pott : méningite'cérë=

brale secondaire aux lésions spinales. Tuberculose pleuro-pulmo-

naire et ganglionnaire médiastine. '

Cliniquement, première étape, six ans auparavant, derachialgie

lombaire ; puis, évolution, en deux mois, d'une paraplégie sensi-.

tivo-motrice et trophique aiguë, flasque, avec exagération des.

Archives, 2° série, t. XVII. 6

82 SOCIETES SAVANTES.

réflexes tendineux, troubles sphinctériens, thermoanesthésie abso-

lue jusqu'à l'ombilic, diminution des sensibilités profondes, etc.

Mort dans le coma, après un syndrome psychapothique de con-

fusion mentale, délire onirique, optimisme, stupeur, qui traduisit

la propagation au cortex du processus méningomédullaire.

L'intensité du syndrome paraplégique, qui semblait indiquer

des altérations profondes de la moelle, contraste avec l'exiguité

des lésions constatées, et autorise à supposer une sorte d'inhibi-

tion des fonctions médullaires, d'ordre toxique, qui pourrait expli-

quer la curabilité de certaines paraplégies graves.

Paralysie alterne double incomplète chez un enfant de huit mois par

tubercules pédol1 cu 10- }JI'otubémntiels.

M. DUFOUR présente au nom de MM. LENOBIE et ANDINEAU (de

Brest) l'observation d'une enfant de huit mois ayant présenté pen-

dant la vie les signes d'un syndrome de Weber incomplet et double,-

caractérisée par une paralysie du nerf facial inférieur droit, du

ptosis double, de l'ophtalmoplégie externe gauche (paralysie du

droit interne, du droit inférieur gauche, peut-être du droit supé-

rieur) avec strabisme divergent, sans autres signes oculaires; de

la parésie ou plutôt de la faiblesse des membres du côté gauche.

' A l'autopsie, on trouva un volumineux tubercule caséifié et

couenneux de la moitié supérieure gauche de la protubérance,

empiétant légèrement sur la région des pédoncules cérébraux, et

en outre un tubercule crû occupant la moitié droite de la partie

inférieure de la protubérance. Il n'y avait pas de dégénérescence

des faisceaux blancs.

Les auteurs pensent que la symptomatologie doit être tout

entière regardée comme dépendant du tubercule supérieur. Le

tubercule inférieur n'a eu qu'un rôle secondaire dans le tableau

clinique ayant probablement entrainé la faiblesse du côté gauche

du corps. Il n'a fait qu'écarter sans les détruire les portions du

système nerveux dans lesquelles il s'est développé.

' M. DÉJER1NE est nommé président et M. BftISSAUD vice-président

pour l'année 1904. ' F. BoissiER.

. SOCIÉTÉ D'HYPNOLOGIE ET DE PSYCHOLOGIE

Présidence DE M. Jules Voisin. Séance du mardi 20 octobre 1903.

La suggestion pendant le sommeil naturel.

'M. Wiazemsky (deSaratow). La suggestion pendant le sommeil

naturel, d'après la méthode Paul Fartez, m'a permis de traiter une

hystéro-epiteptiquc rél'ractaire aux procédés classiques de l'hypno-

, .SOCIÉTÉS SAVANTES. 83

tisation et de la guérir de divers troubles, tels que crises nerveuses

avec perte de connaissance, paroxysmes d'angoisse, terreurs non

motivées, etc. Cette suggestion pendant le sommeil naturel trouve

son application dans le traitement des névroses traumatiques dont

j'ai observé un grand nombre de cas, en ma qualité de médecin

attaché au service d'un chemin de fer russe. En outre, les méde-

cins débutant dans la pratique delà psychothérapie, devraient, au

lieu de prétendre obtenir d'emblée le sommeil hypnotique, s'essa-

yer à transformer le sommeil naturel en sommeil hypnotique.

Eoel'é1'iences de psychologie médicale.

M. S\VOBODA (de Vienne) expose la loi de périodicité suivant

laquelle il a enregistré la réapparition spontanée, et non pas asso-

ciative, des souvenirs musicaux; cette loi est confirmée par les

expériences faites sur les hypnotisés; elle n'intéresse pas seule-

lement les souvenirs musicaux, mais encore certaines douleurs, la

soif de l'alcool, la passion du jeu, etc. ; elle permet de concevoir

l'hypothèse d'une certaine périodicité organique.

Hyperesthésie hystérique guérie par la suggestion hypnotique.

Une institutrice souffrait, depuis dix ans, de crises hyperalgé-

siques qui revenaient toutes les trois semaines, puis tous les quinze

jours, en dernier lieu tous les dix jours et duraient très régulière-

ment trois jours consécutifs. Après avoir essayé en vain toutes

sortes de traitements, cette malade a été complètement guérie

par la suggestion hypnotique. Cette guérison se maintient depuis

cinq mois.

Le réreil et la mort de la dormeuse de Thénelles.

M. Paul Farez, après avoir exposé les principales conclusions de

l'étude psycho- physiologique à laquelle il s'est livré sur place, il y

a un an, insiste .ur les particularités pathologiques qu'a présen-

tées la dormeuse de Thénelles pendant les derniers mois de son

existence et les phénomènes psychologiques qu'elle a manifestés

lors de son réveil, quelques jours avant de mourir, après un som-

meil ininterrompu de vingt ans.

M. Bérillon rappelle la visite qu'il a faite à Tliénelles, en 1887,

et les grandes lignes de l'étude très documentée qu'il publia à cette

époque. Il insi-te sur la forme de séquestration arbitraire à

laquelle cette dormeuse a été soumise pendant vingt ans. De ce

réveil, précédant immédiatement la mort, il rapproche ce fait que

des aliénés, plongés dans une dépression profonde, reprennent tout

ou partie de leur facultés intellectuelles, quelquesjours ou quelques

heures avant de mourir. LEGRA : vD du Saule a signalé des cas de

cette nature.

84 SOCIÉTÉS SAVANTES. '

M. Jules Voisin. Eudoxie que j'ai eue autrefois dans mon service

à la Salpétrière et qui est restée endormie, plusieurs mois de suite,

s'est aussi réveillée quelques instants avant de mourir. J'ai vu jadis

moi aussi, la dormeuse de Thénelles. Elle n'était pas indifférente

à ce qui se passait autour d'elle. Quelques-unes de mes paroles

provoquèrent chez elle des troubles vasomoteurs, en particulier de

la rougeur de la face. --

M. PAU DE Saint-Martin rapproche de la dormeuse de Thénelles,

la malade dont il a rapporté l'observation dans sa thèse de 1869 et

à propos de laquelle il a signalé quelques-uns des phénomènes

confirmés plus tard par CHARCOT,

v Le Dieu des myxoedémateux.

M. Félix REGNAULT présente une petite statuette trouvée dans des

fouilles faites à Snyre et qui représente le dieu BES myxoedéma-

teux, goitreux, aux membres courts, au ventre gros, au facies

lunaire, à la langue pendante. Le culte du dieu BES s'est répandu

dans toute l'Asie, il a provoqué l'apparition de nombreuses amu-

lettes. D'ailleurs, dans quelques coins des Alpes, les goitreux sont

l'objet d'une vénération spéciale.

Miroir hypnogénigue.

M. PAU D SAINTA1-ARTIN présente un miroir hypnogénique que

M. Gaiffe a construit sur ses indications. Ce miroir est cubique; il

tourne autour d'une de ses diagonales prise comme axe; sa sur-

face, nickelée, polie, présente des cannelures disposées de telle

sorte que, d'une face à l'autre, elles sont non pas parallèles, mais

perpendiculaires. Ce miroir rotatif est silencieux; il captive l'at-

tention du malade, l'éloigne de toute cause de distration, et, par

son éclat brillant, facilite l'hypnotisation.

M. PaulMAGNiN. Certains malades sont plus facilement hyp-

notisés par un miroir silencieux, d'autres par un miroir auquel on

associe, par exemple, les battements d'un métronome. Les ma-

noeuvres hypnogéniques doivent être appropriées à la psychologie

du malade; elles diffèrent, suivant qu'il s'agit d'un visuel, d'un

auditif ou d'un moteur.

L'aboulie essentielle et son traitement psychothérapique .

M. BCRILLON. Sous le terme d'aboulie, on englobe un grand

nombre d'états de conscience dans lesquels on constale, à un degré

quelconque, une altération ou une diminution de l'activité volon-

taire. Au point de vue du mécanisme fonctionnel, la volonté a été

décomposée en trois phases : la délibération, la décision et l'exé-

cution. Dans chacune de ces phases, l'activité volontaire peut être

influencée par un facteur d'ordre extérieur qui est la suggestion.

BIBLIOGRAPHIE. 85

Une excitation psychique peut accélérer ou ralentir la délibération,

la décision ou l'exécution. En réalité, les effets de la suggestion

sont assez faibles chez les sujets dans l'état normal, car son action

est neutralisée par les facultés mentales de contrôle, par contre,

dans certains états pathologiques, l'action de la suggestion est

exagérée au plus haut degré, les malades étant hypersuggestibles.

Dans d'autres états, toute suggestibilité est abolie.

M. Jules Voisin. Le plus souvent, l'aboulie se complique de

folie du doute. ou même à la fois de folie du doute et de délire du

toucher. Toutefois certains malades, classés à tort parmi les mé-

lancoliques, ne sont que de simples abouliques.

M. Paul MAGNAN rapporte plusieurs observations d'aboulie essen-

tielle sans folie du doute et sans délire du toucher.

BIBLIOGRAPHIE.

I. Mécanisme et éducation des mouvements ; par G. DEMENY, vol.

in-8° de 524 pages, avec 565 figures de la Bibliothèque scienti-

fique internationale, Paris, F. Alcan, 1904.

Cet ouvrage à allure scientifique et documenté d'expériences

soigneusement raisonnées est plutôt un intéressant chapitre de

physiologie qu'un traité de gymnastique. Après avoir décrit et ex-

pliqué le mécanisme des mouvements, l'auteur expose les règles

générales il suivre pour les analyser, et passe en revue tous les

modes d'activité musculaire. Il énumère les appareils de gym-

nastique universellement employés et il en fait une judicieuse cri-

tique. Aucun mouvement, aucune attitude n'est laissé de côté, le

patinage, la vélocipédie. la danse, donnent lieu à d'intéressants

développements. Les conditions économiques de l'utilisation de la

force musculaire, ses applications les plus pratiques servent de

conclusion logique.

Nous ne pensons pas que, jusqu'ici, rien n'ait été écrit de plus

complet sur une question d'un aussi haut intérêt, puisqu'elle n'a

pas seulement pour objet l'amélioration de l'individu, mais encore

l'avenir de la race que tant de causes sociales mettent de plus en

plus en danger.

Ce livre mérite d'être lu par tous les médecins, car il donne des

indications précises qui leur permettront de choisir les modes de

gymnastique suivant les conditions pathologiques des malades

auxquels ils prescrivent un traitement physique.

' J. BOYER.

86 BIBLIOGRAPHIE.

IL Le Névraxe; recueil de neurologie normale et pathologique,

publié par A. VAN GEHUCHTEN, professeur d'anatomie à l'Univer-

sité de Louvain, avec la collaboration de ses élèves et des

savants étrangers. Louvain, A. Uystpruyste, éditeur, 1903.

Voici la liste des travaux renfermés dans le cinquième

volume (1903).

A VAN GEHUCHTEN : La dégénérescence dite rétrograde ou dégéné-

rescence wallérienne indirecte; Fritz de BEULr : A propos du mé-

canisme des mouvements respiratoires de la glotte chez le chien;

Professeur A. Plca : Zur Deutung abnormer 1;'asei-bündel im cen-

tralen Grau der Medulla oblongata; E. Bossi : La c eaaione aiirett

e l'intima struttura delle cellule nervose del rnidollo spinale umano ;

E. Rossr : La reazione aurea e l'intima St1'UltUi délie cellule

nervose dei yangli spinali umarzi; - A. VAN GEUUCHTEN : Le traite-

ment chirurgical de la névralgie ? (tc : '6[<e; Dr8 DE BUCK et L. DE

MooR : Morphologie de la régression musculaire; A. VAN

GEHUCHTEN : Recherches sur l'origine réelle et le trajet intercéribral

des nerfs moteurs par la méthode de la dégénérescence wallérienne

indirecte. , ,

III. Contribution à l'étude de l'idée de grossesse trouble psychopu-

thique; par M. Fernand BICHEBOIS (Thèse de Nancy, 1903; lmp.

Louis Kreis).

Après examen de l'idée de grossesse non accompagnée de trou-

bles psychiques, de l'idée de grossesse prenant la forme d'une

obsession, de l'idée délirante de grossesse, l'auteur s'attache à

l'étude du délire de grossesse et arrive, ayant analysé un certain

nombre de faits cliniques très intéressants, à conclure : que le dé-

lire de grossesse, toujours secondaire, est en quelque sorte symp-

tomatique d'affaiblissement intellectuel, qu'il indique en général

la chronicité et l'incurabilité, qu'il n'est qu'un syndrome que l'on

peut observer dans le cours de différents états d'aliénation men-

tale.

11 ressort également du travail de M. Bichebois, mais il aurait

pu le montrer avec plus de précision. toutes mes observations per-

sonnelles seraient aussi à l'appui de cette conclusion, que l'idée

délirante de grossesse ne se rencontrerait que chez des sujets pré-

sentant une diminution sensible, définitive ou temporaire, de leur

acuité psychique habituelle (alcoolisme, hystérie, neurasthénie,

sénilité psychique, folies chroniques, etc.).

La description du délire de grossesse n'a pas, à mon avis, la

valeur clinique que l'on voudrait lui donner ; ce délire ne mérite

de retenir l'attention que comme élément complémentaire de pré-

cision de pronostic. Paris.

bibliographie. 87>

IV. L'amnésie et les troubles de la conscience dans l'épilepsie; par

J. Maxwell, avocat général près de la Cour d'appel de^Bordeaux,

docteur en médecine. Thèse de Bordeaux, 1903.

L'avocat général qui, le 16 octobre 1902, prononçait à l'audience

solennelle de rentrée de la cour d'Appel de Bordeaux la très origi-

nale et documentée harangue sur l'amnésie au point de vue de la

médecine judiciaire n'avait pas que des compétences juridiques;et

voici qu'il nous donne, comme couronnement de ses études médi-

cales, un travail à la fois très complet et très inédit sur les trou-

bles de' la mémoire et de la conscience dans l'épilepsie, prélude.

probable d'une étude d'ensemble sur les amnésies lacunaires.

« J'ai remarqué à maintes reprisesdit l'auteur, combien les

médecins peu familiarisés avec les théories du droit et les préci-

sions techniques du langage juridique, confondaient facilement la >

responsabilité civile et la responsabilité pénale, choses cependant.

bien différentes entre elles. » Rien n'est plus exact et beaucoup de

médecins pensent à tort que leur seul rôle possible auprès de la

justice consiste dans l'appréciation de la culpabilité. Si, pratique-

ment, cette opinion se trouve à peu près justifiée, cela n'empêche

que, théoriquement au moins, l'étude des troubles de la personna-f

lité entraînant la responsabilité civile soit d'un très grand intérêt ' i

pour le psychologue, pour le médecin, pour le juge. '

Cette distinction juridique capitale entre le civil et le criminel, '

M. Maxwell s'efforce de la retrouver en pathologie mentale; et s'il z

fallait indiquer en une équation mathématique des conclusions

qu'à bon droit l'auteur n'a pas voulu aussi rigoureuses, on pour-

rait dire qu'en général les troubles de la mémoire entraînent1'i1'l'es-

ponsabilité pénale, tandis que ce sont surtout les troubles de la cons-

cience qui créent ['irresponsabilité civile.

Pour justifier cette conclusion en ce qui concerne l'épilepsie,

M. Maxwell a d'abord tenu à présenter une vue d'ensemble de nos

connaissances actuelles d'une part sur l'épilepsie et d'autre part,

sur l'amnésie. Puis, à l'aide d'un grand nombre d'exemples, per-

sonnels ou empruntés à la très abondante littérature ayant trait'au z

sujet (on trouvera à la fin du volume un riche index bibliographique

de 60 pages), il étudie les différentes formes de l'amnésie épileptique :

simple, antérograde, rétrograde ou mixte; passagère, permanente,

périodique, complète ou incomplète (ou même absente). '

L'auteur étudie alors la question des relations entre l'amnésie et

l'état de la conscience : sans doute, dans certains cas, tels les états'

crépusculaires et les fugues épileptiques, l'amnésie s'accompagne

le plus généralement de troublés marqués de la conscience (per-

sonnalités secondes épileptiques); mais dans beaucoup d'autres'

circonstances les troubles de la mémoire et de la conscience peu-

vent être dissociés et, du moins, peut-on dire que la forme de l,a ? n-

88' CORRESPONDANCE.

nésie n'indique nullement quel a été l'état de la conscience, tandis

qu'au contraire elle est en rapport assez étroit avec la notion de la

participation personnelle du sujet à l'acte oublié.

Les conséquences médico-légales de cette étude de psychologie

pathologique, nous les avons indiquées dès le début : l'irresponsabi-

lité de l'épileptique se présume en matière criminelle; au contraire la

responsabilité se présume en matière civile. Ainsi l'amnésie lacunaire

simple et l'amnésie rétrograde peuvent, dans certains cas, contri-

buer à établir l'irresponsabilité pénale d'un épileptique pour des

actes déterminés, mais ne sauraient justifier, à elles seules, son

interdiction.

D'autres considérations médico-légales appuyées, sur d'intéres-

sants rapports d'experts, ont trait à l'amnésie retardée (c'est-à-dire

l'amnésie qui survient après des aveux on d'autres circonstances

établissant que le coupable a conservé le souvenir de l'acte com-

mis par lui), forme qui est facilement prise pour de la simulation;

au témoignage des épileptiques amnésiques; à la prescrip-

tion criminelle (l'épileptique ne peut être jugé tant que son amné-

sie dure); etc., etc.

On voit, par cette brève analyse, que cet ouvrage, riche de docu-

ments et d'interprétations ingénieuses, suffirait à lui seul à légiti-

mer le voeu formulé par l'auteur d'une fusion possible, à un

moment donné, des études médicales et des études de droit sur le

domaine indivis de la médecine légale, où leurs enseignements se

complètent l'un par l'autre. Pierre Roy.

CORRESPONDANCE.

A propos de l'asile de Meerenberg (Hollande), dont il a été ques-,

tion dans notre numéro- d'octobre (p. 377), notre excellent confrère

le Dr J. Morel, nous adresse la lettre suivante :

Mons, le 30 octobre 1903.

Mon cher Collègue, -

Mon excellent ami, le Dr van Deventer, médecin-directeur de

l'asile de Meerenberg (Hollande), qui compte 1300 malades et 7 mé-

decins, me fait part de son étonnement à la lecture des Archives-

de Neurologie (p. 378) qui mentionnent : « Il y a des cellules qui,

servent parfois et des malades qu'il faut attacher comme partout;1 1

mais la critique vraie doit surtout montrer ce qu'il y a de bondans-

les choses; le mal se voit toujours assez. »

- Je partage absolument cet-étonnement, d'autant plus que je con-

VARIA. 89

nais l'asile de Meerenberg depuis environ trente ans et que je l'ai

visité plusieurs fois. D'abord l'auteur de l'article doit avoir con-

fondu le mot chambre d'isolement avec celui de cellule. En 1875, il

y avait énormément de chambres d'isolement parce que les moyens

de contrainte n'existant plus dans cet asile depuis plus de cinquante

ans, et la valeur du traitement au lit et des bains prolongés étant

inconnue en ce temps, il fallait bien isoler, encelluler, le no-res-

traint y étant absolu, .

Aujourd'hui le traitement moderne a permis au savant médecin-

directeur de l'asile de Meerenberg de supprimer la plupart de ces

chambres d'isolement et les vraies cellules y sont bien rares.

Quant aux moyens de contrainte, j'ose espérer que l'auteur de

l'article n'en a pas rencontrés comme on n'en rencontre nulle part

en Hollande, sauf chez les aliénés auxquels il faut faire respecter

les pansements. En 1902, sur 1 353 aliénés, et malgré un grand

encombrement, il n'y a eu que 79 isolements et sur ce nombre 47

ne furent isolés que pendant vingt-quatre heures et 32 pendant

une nuit.

Je crois, mon cher. collègue, qu'une petite note rectificative ferait

bon effet, non seulement pour défendre l'asile de Meerenberg et

surtout son savant et zélé directeur, mais encore tous les asiles de

la Hollande. D'ailleurs, le no-restraint se trouve généralisé dans le

Hoyaume-Uni, aux Etats-Unis, en Allemagne, dans les pays Scan-

dinaves, en Suisse et probablement en Russie, en Autriche, etc.

Vous êtes un trop vaillant lutteur pour la cause sainte de l'aliéné

pour que je ne puisse espérer l'obtention de la rectification si juste-

ment méritée de l'asile de Meerenberg.

Croyez, mon cher Collègue, en mes sentiments les plus dévoués.

J. MOREL.

VARIA.

Asiles d'aliénés DE la Seine. Ainsi que nous l'avons annoncé

dans notre numéro de novembre le concours de l'internat en

médecine a commencé le 3 décembre. Nous en rendrons compte

dans notre prochain numéro. Nous reproduisons ici les conditions

du concours que faute de place nous avons dû ajourner.

Conditions DE l'admission au concours ET FORMALITES A remplir.

- Pourront prendre part au concours les docteurs en médecine

munis du diplôme délivré par les facultés de l'État et les étudiants

ou étudiantes en médecine, sans dictinclion de nationalité, possé-

dant seize inscriptions de doctorat. Les candidats devront, pour

être inscrits au concours, produire les pièces suivantes à la préfec-

90 . varia.

ture de la Seine (service des aliénés) : 1° Expédition d'acle de nais-

sance ; 2,1 Extrait du casier judiciaire; 3° Certificat de revaccina-

tion ; 4° Diplôme de docteur en médecine ou certificat de seize ins-

criptions prises dans une des facultés ou écoles de médecine de

l'État. Ce dernier certificat devra indiquer que l'intéressé n'a pas

- subi de peines disciplinaires graves; 5° Certificat de bonnes vie et ? moeurs délivré par le maire'de la commune ou le commissaire de

police du quartier; 6° Certificat de l'Assistance publique indiquant

les services hospitaliers du candidat et témoignant qu'il n'a pas

subi de peines disciplinaires graves.

Les candidats devront en outre n'avoir pas atteint l'âge de trente,

ans révolus au 1er décembre de l'année où aura lieu le concours.

Les années de présence sous les drapeaux accomplies par les can-

didats français, ne seront pas comptées dans ce délai. La liste des

candidats sera close quinze jours avant la date de l'ouverture du

concours.

Les épreuves du concours sont les suivantes : 1° Une composi-

tion écrite de trois heures, sur un sujet de pathologie interne et

de pathologie externe (médecine et chirurgie). Il sera accordé

trente points pour cette épreuve. Elle pourra être éliminatoire si

le nombre des candidats dépasse le triple des places vacantes; z

2° Une épreuve orale de quinze minutes sur un sujet d'anatomie et

de physiologie du système nerveux, après quinze minutes de pré-

paration. Il sera accordé vingt poinls pour cette épreuve; - 3° Une

- épreuve orale de dix minutes sur une question de garde. Il sera

laissé aux candidats deux minutes de réflexion qui seront com-.

prises dans les dix minutes de l'épreuve. Il sera accordé quinze-

points pour rette épreuve. Par question de garde on doit entendre

une épreuve orale relative à la conduite immédiate à tenir par le

médecin en présence d'un cas clinique urgent de médecine, de chi-

rurgie ou d'obstétrique.

Seront seuls admis dans la salle où aura lieu la composition

écrite, les candidats porteurs d'un bulletin spécial délivré par l'ad-1

ministration et constatant leur admission au concours. Le sujet

de la composition écrite est le même pour tous les candidats. Il est

tiré au sort entre trois questions qui sont rédigées et arrêtées par

le jury immédiatement avant l'ouverture de la séance. Pour les

épreuves orales, la question sortie est la même pour ceux des can-

didats qui sont appelés dans la même séance. Elle est tirée au sort,

comme il est dit ci-dessus. L'épreuve orale peut être faite en plu-

sieurs jours. si le nombre des candidats ne permet pas de la faire

subir à tous dans la même séance; dans ce cas, les questions sont

rédigées par le jury chaque jour d'épreuves, au nombre de trois,'

immédiatement avant d'entrer en séance. Les candidats qui doivent'

subir les épreuves orales sont tirés au sort à l'ouverture de chaque'

séance. Les épreuves orales sont publiques. Le jugement définitif

VARIA. 91 '

porte sur l'ensemble des épreuves. Il pourra être nommé des

internes provisoires en nombre égal au nombre des internes titu-

laires. L'interne provisoire reçoit le traitement et les avantages en

nature d'un interne titulaire de ir° année, chaque fois qu'il est

appelé à faire un remplacement.

Les internes nommés dans l'ordre de classement établi par le

jury d'examen entreront en fonctions le leur février de l'année sui-

vante.

La durée des fonctions des internes titulaires est de trois ans ;

celle des fonctions d'interne provisoire, d'une année. Les fonctions

d'interne dans les asiles sont incompatibles avec les fonctions d'in-

terne ou d'externe dans les hôpitaux, hospices ou autres établis-

sements. Les internes provisoires peuvent se représenter au con-

cours pour les places d'internes titulaires, sous réserve des condi-

tions ci-dessus.

La répartition des internes dans les divers services d'aliénés se

fait le 1er février de chaque année. Les internes de première année

choisissent leurs places d'après l'ordre de classement. Pour les

années suivantes, le choix se fait suivant l'ordre d'ancienneté.

Tous ces choix ne seront définitifs qu'après ratification de l'Admi-

nistration. -

A l'expiration de leur fonctions, les internes qui auront soutenu

leurs thèses pourront être autorisés à faire une quatrième année

d'internat et ceux qui auront passé avec succès le concours de

l'adjuvat pourront être maintenus en fonctions une cinquième

année. Ce-, prorogations seront autorisées par décisions préfecto-

rales sur demandes motivées du chef de service. Un interne ne

pourra rester plus de deux ans dans le même service; toutefois,

cette règle ne sera pas appliquée aux internes prorogés.

Les traitements alloués aux internes sont fixés de la manière

suivante : ire année, 800 francs; 2° année, 1.000 francs;

3e année, 1.200 francs.

Les .internes qui, exceptionnellement, ne seraient ni logés, ni

nourris dans l'établiseethent, recevront les indemnités représenta-

tives de logement et de nourriture suivantes :

Indemnité représentative Indemnité représentative

do logement. de- nourriture.

1" année 600 francs 900 francs

2. - ...... 600 900

3........ 600 900

Les internes reçoivent, en outre, une indemnité de déplacement

de 380 francs pour Villejuil' et de 400 francs pour les asiles de Vau-

cluse, Ville-Evrard et Maison-Blanche. Les internes appelés à rester

en fonctions après leurs trois années d'internat, reçoivent un trai-

tement de 1.400 francs pendant la quatrième année et de 1.600

92 VARIA.,

pendant la cinquième. Ils continuent, comme pendant les trois

premières années, à jouir des avantages en nature ou des indem-

nités représentatives ci-dessus suivant la situation de l'établisse-

ment auquel ils sont attachés. Ceux de l'infirmerie spéciale des

aliénés à la préfecture de police, recevront le traitement ainsi que

les avantages en nature, ou les indemnités représentatives, dans

les proportions fixées par la Préfecture de police. *

LES aliénés EN liberté

Le fou chauffeur. Un auto, conduit par des Anglais, roulait sur

la route de Balleroy à Saint-I.o, lorsqu'un individu sortit en che-

mise de sa maison et, par ses gestes désespérés, força les Anglais,

à s'arrêter. L'individu sauta aussitôt dans la voiture et tomba à

coups de poing sur ses conducteurs qui sortirent pour lui échap-

per. Maître du véhicule, le fou car c'en était un le fit partir à

toute vitesse; mais bientôt, pris de peur, il sauta dans un fossé pen-

dant que l'auto allait, plus loin, se briser en mille morceaux contre

un arbre. (Le Bonhomme Normand, 22 octobre.)

Suicide. Samedi dernier, vers midi et demi, Joseph Milon,

journalier, arrivant comme d'ordinaire chez sa mère pour y

prendre son repas, trouva celle-ci étendue à terre dans sa cuisine,

et ne donnant plus signe de vie. Autour du cou, la pauvre femme

avait un lien qui la serrait fortement et au-dessus d'elle se trouvait

une ficelle attachée à la suspension de la lampe fixée au plafond.

Le poids du corps avait rompu la corde. Un médecin fut appelé en

toute hâte, mais il ne put que constater le décès. Pauline Hellouin,

veuve Milon, qui était âgée de cinquante-deux ans, était atteinte

depuis longtemps de la monomanie du suicide, car elle avait tenté

.plusieurs fois de s'asphyxier et de se pendre (Progrès de l'Eure,

12 septembre 1903).

Morte de faim. Une femme Com, âgée de trente-trois ans,

dont le mari est bûcheron aux Barils (Eure), avait quitté le domi-

cile conjugal depuis le 7 septembre, et la gendarmerie l'avait

recherchée en vain, lorsqu'on a découvert son cadavre dans un

petit bois situé près de Boissy-le-Sec. Le Dr Filleul de la Ferté-

Vidame n'a relevé sur le corps aucune trace de coups, mais

l'examen de l'estomrc a établi que la pauvre femme était morte de

faim. Depuis qu'elle était tombée dans une mare, elle ne jouissait

pas de toutes ses facultés (Progrès de l'Eure, 3 oct.)

Kleptomane originale. Une femme d'une trentaine d'années,

assez élégamment vêtue, parcourait, hier matin, en tous sens le

marché de la Chapelle, s'arrêtant devant tous les étalages sans ja-

mais rien acheter. Soudain, devant l'éventaire d'une fruitière, elle

bondit sur une corbeille en s'écriant : Oh ! le bel oeuf !

FAITS DIVERS. 93

Et, s'emparant de l'objet en question, elle s'enfuit à toutes jam-

bes. Arrêtée quelques pas plus loin, elle fut conduite au commissa-

riat de la Chapelle, où elle refusa de faire connaitre les raisons

qui l'avaient poussée voler un oeuf. Elle déclara se nommer

Aglaé S..., trente-neuf ans, sans profession, rue de l'Evangile.

Une perquisition opérée à son domicile a amené la découverte

d'une quantité considérable d'oeufs de toute espèce, chacun présen-

tant une anomalie particulière. M. Pontaillier, après avoir exigé le

paiement de l'oeuf volé, a remis en liberte cette kleptomane peu

ordinaire.

Chantant à tue-tête le Veni Creator, un individu, d'une qua-

rantaine d'années, se promenait hier après-midi, sur la place de la

République. Des gardiens de la paix l'ayant prié de se taire, l'in-

dividu s'écria : A moi ! puissances éternelles ! Voilà « Satan ».

Et il continua le chant liturgique, un instant interrompu. Con-

duit au commissariat du quartier de la Folie-Méricourt, l'ennemi

de Satan fut reconnu pour être un nommé Joseph Mets, ouvrier

cordonnier, demeurant rue Fontaine-au-Roi. C'est un alcoolique

impénitent. Il a été envoyé à l'infirmerie spéciale du Dépôt. (Jour-

nal, 17 septembre). -,

Traitement DE l'épilepsie.

Voici un moyen de guérir l'épilepsie : faire un anneau de pur

argent, y enchâsser un morceau de la corne du pied d'un élan :

puis un lundi de printemps au moment où la lune est en conjonc-

tion avec Jupiter et Vénus, graver en dedans de cet anneau les

mots Dabi, Habi, Haber, Habi et le mettre au doigt du milieu de

la main.

Pour se bien porter, tous les matins à jeun, il fallait avaler qua-

tre branches de rue, neuf grains de genièvre, une noix, une figue

sèche et un peu de sel que l'on pilait ensemble.

La fameuse poudre de Perlimpinpin à laquelle on attribuait tant

de merveilleux effets était faite avec un chat écorché, un crapaud,

un lézard et un aspic (vipère), le tout était calciné sous de' la

braise, le résidu formait cette poudre. (Bulletin médical des Vosges,

de juillet octobre 1902).

FAITS DIVERS.

Asile DE VILLEJUIF. Service de M. TOULOUSE. Maladies men-

tales et épilepsie. Le mercredi matin à 10 heures visite du service

et présentation des malades intéressantes.

94 FAITS DIVERS

Asile DE Prémontré (Aisne). Une place d'interne est vacante à

cet asile. Avantages en nature complets. Traitement de 900 francs.

12 inscriptions nécessaires. S'adresser au directeur-médecin.

Nouveau Journal. Nous venons de recevoir le numéro 1 du

Journal de Psychologie normale et pathologique par MM. Pierre

JANET et Georges DOUMAS. Voici le sommaire de ce numéro : Profes-

seur Ribot (Paris) : De lavaleur des questionnaires en psychologie; ? Professeur Th. Flournoy (Genève) : Note sur une communication

typtologique ; Professeur J. Grasset (Montpellier) : La sensation

du « déjà vu » ; Professeurs F. Raymond et P. Janet (Paris) :

Dépersonnalisation et possession chez un psychasténique. Bi-

bliographie. Un an, 14 fr. Le numéro 2 fr. 60. Félix Alcau, édi-

teur, boulevard Saint-Germain, n° 108. Nous souhaitons la bien-

venue à notre nouveau confrère et faisons des voeux pour sa pros-

périté.

Suicide familial. A Coudeville (Manche), une jeune fille de

vingt-ans, Alphonsine Lejamtel, a été trouvée par son père pendue

'dans un champ. La pauvre enfant était minée par le chagrin de

voir sa soeur malade depuis un an. Chose singulière : son frère et

son oncle s'étaient suicidés de la même façon. (Bonhomme Normand,

22 octobre.)

Suicide d'enfants. Les époux Martin, demeurant rue Roche-

chouart, avaient fait des reproches sur sa conduite à leur fils Paul,

14 ans. Il s'est empoisonné (Bonhomme Norm., 2 oct.)

Un petit. garçon de treize ans, nommé Oddoz, dont les parents

habitent la Mure (Isère) est allé se jeter dans le Drac, parce qu'il

avait été accusé injustement de vol. Son cadavre a été retrouvé

sur le territoire de la commune de Saiut-Jean-d'IIeraus. (Petit

Parisien, 22 septembre),

Un oublié. Mort d'Auberlin. L'attentat contre Jules Ferry. -

Aubertin vient de mourir dans un modeste logement de la rue de

Valois. C'était lui qui, en 1884, dans les couloirs de la Chambre,

tira un coup de revolver sur M. Jules Ferry, alors président du

Conseil, à qui il reprochait de s'entremettre avec la droite pour

faire rapporter, après les avoir fait voter, les dispositions du fameux

article 7.

Aubertin avait eu une carrière très mouvementée ; il fut tour à

tour ingénieur, industriel, inventeur, chargé de mission, etc... Il

eut, notamment avec Henri Rochefort, de violentes polémiques.

Après avoir occupé une situation en vue, il connut, dans les der-

nières années de sa vie, les ennuis de la gêne.

Enfermé comme fou, à la suite de son attentat à l'asile clinique

puis à BicêLi e,,il parvint à s'évader et à passer à Londres. Il y resta

quelques années et revint à Paris, où il s'occupa d'inventions. On

FAITS DIVERS. 95

ne l'inquiéta plus, bien qu'il écrivit journellement aux ministres et

aux personnalités en vue des lettres injurieuses et menaçantes.

Il a succombé aux suites d'une affection pulmonaire. Il avait

soixante-dix ans. Il était inscrit au bureau de bienfaisance du lot

arrondissement et vivait seul des reliefs d'un restauraut du Palais-

Royal. (Petit Phare, 24 septembre).

Un jeune Monstre. Les tribunaux de Middlesburg ont eu à

s'occuper, d'une affaire qui ne peut laisser indifférent voire même

le coeur le plus blasé, car il s'agit en l'occurence d'une accusée

âgée seulement de neuf ans.

Laurence Davis, lel est le nom de ce jeune monstre. Deux fois

en une semaine, elle commit une tentative d'assassinat sur de jeu-

nes enfants. La première fois, c'est un enfant de six ans, nommé

Louis Savila, qu'elle choisit pour victime. Elle l'emmena au bord

d'un ruisseau assez profond et, soudain, le jeta dedans, s'amusant

à voir l'infortuné lutter désespérément contre la mort. Néanmoins

par un revirement de sentiment inexplicable chez la coupable, Lau-

rence sauva sa victime.

Après avoir reçu de ses parents une correction méritée et être

restée enfermée dans un cachot pendant quelques jours, la petite

brute ne trouva rien de mieux, à sa première sortie, que de vou-

loir noyer un bébé de trois ans ! Sans le secours d'un homme que

les cris de l'enfant avaient attiré sur la berge, le bébé allait dispa-

raître à tout jamais ! « Cette petite misérable sera enfermée dans

une maison de correction jusqu'à l'âge de seize ans», a décidé le

tribunal. D'après l'opinion des médecins, il appert que la précocité

criminelle de cette fillette est due à l'atavisme et à une dégénéres-

cence cérébrale. (Petit Parisien 26 septembre).

Alcoolisme des enfants. Les parents de deux jeunes garçons,

les hères Gancel, de Lison, près Isigny, ne s'occupent guère d'eux.

Ils les laissent seuls la journée entière, si bien, que l'autre

jour, au repas du midi, ils buvaient de l'eau-de-vie en guise de

cidre. Le jeune n'a jamais pu arriver jusqu'à l'école et on l'a rap-

porté chez lui où il s'est tordu de douleurs sur son lit, pendant des

heures. L'ainé est tombé ivre-mort au milieu de la classe et le

père, prévenu, a dit qu'il irait le chercher le soir. C'est le garde

champêtre, aidé d'un voisin, qui a dû enlever le petit malade de

l'école (Bonhomme Normand, Il décembre).

Les dangers du spiritisme. Emile Roubeau, trente-six ans,

représentant de commerce, rue de Cléry, a assommé à coups de

tisonnier Georges Ragot, vingt-deux ans, son ami, dont l'état est

désespéré. Roubeau est spirite et les esprits lui avaient dit que

Ragot était l'amant de sa femme. (Bonhomme Normand, 11 décem-

bre).

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

- GARNI EU. Rapport médical de l'asile départemental d'aliénés de

digon. In-8» de 92 -pages. Dijon.

IIIETZ (Jean). Les nerfs du cceur citez les tabétiques. 1r.-8° de

220 pages (Thèse). - Librairaie Steinhel, 2, rue Casimir-Delavigne.

PAl LilAS (B.). Enfermerie diocésaine ou primitif asile d'aliénés

d'Albi. In-8° de 16 pages. Extrait du Bulletin de la Société Française

d'histoire de la médecine.

ROBINOVITCII. The Genesif of Epilepsy. In-8° de 38 pages.

Régis. Les délirants des hôpitaux. Leur assistance. Leur

utilité au point de vue de l'enseignement. In-8° de 32 pages.

VAN Gehuchten (A.). Le Nevoaxe. Recueil de neurologie normale

et pathologique. 5. vol. in-8°. Imp. des Trois-Rois. Louvain.

AVIS A NOS ABONNÉS. L'échéance du le''JANVIER

étant l'une des plus importantes de l'année, nous prions

instamment nos souscripteurs dont l'abonnement cesse à

cette date, de nous envoyer le plus tôt possible le montant

de leur renouvellement. Ils pourront nous adresser ce

montant par l'intermédiaire du bureau de poste de leur

localité, qui leur remettra un reçu de la somme versée.

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quittance de réabonnement leur sera présentée, aug-

mentée des frais de recouvrement, à partir du

15 Janvier. Nous les engageons donc à nous envoyer DE

SUITE leur renouvellement par un mandat-poste.

Afin d'éviter toute erreur, nous prions également nos

abonnés de;'oind1'e à leur lettre de réabonnement et à toutes

leurs réclamations la BANDE de leur journal.

- Nous rappelons à nos lecteurs que l'abonnement collec-

tif des Archives de Neurologie et du Progrès Médical

est réduit à 28 francs pour la France et 30 francs pour

l'Étranger.

Le rédacteur-gérant : BOURNEVILLE.

Evretii, Ch, HÉBl88BV, imp. - 12-1903.

Vol. XVII. Février 1904. N, 98.

ARCHIVES DE NEUROLO"1^

CLINIQUE NERVEUSE.

Epilepsie : Pathogénie et indications théra]

(Contribution à l'élude de la physiologie du corps

thyroïde.) -

P \R

le D' ALEX.-\ : -IDRE PARIS

Médecin de (le Maréville,

Chargé de Cours il la Faculté de Médecine de Nancy.

Avant-propos. Depuis Rhazès et Avicenne qui, les pre-

miers, ont attribué une nature toxique à l'épilepsie, les re-

cherches et les contradictions relatives à cette maladie ont

été bien nombreuses ; tous les médecins qui se sont intéres-

sés à cette affection ont lu tellement de redites à ce sujet

qu'il serait abusif aujourd'hui de commencer un mémoire

comme celui-ci par un nouvel historique. Je me bornerai

adonner dans le cours de mon travail l'opinion des derniers

auteurs qui me semblent approcher le plus de la vérité rela- 1

tivement à l'étiologie et au traitement. Je montrerai tout

d'abord comment je suis arrivé à une conception nouvelle

de la nature de l'épilepsie, sur quelles bases repose mon in-

terprétation qui est, je crois, appelée à éclairer beaucoup de

points encore obscurs de l'étiologie pure de l'épilepsie géné-

rale, de l'épilepsie indépendante de causes acquises, et qui

permettra d'expliquer facilement aussi la pathogénie des

épilepsies dites secondaires, que l'on est tenté de rattacher à

des causes acquises, épilepsies dites gastro-intestinales,

par exemple, attribuées surtout à des toxines d'origine

alimentaire ou à la présence de parasites dans le tube di-

gestif, etc.

La pathogénie qui me semble être celle de l'épilepsie vraie, de

Archives, 2' série, t. XVII. 7

98 ' CLINIQUE NERVEUSE.

l'épilepsie stéréotypée en quélquesorte quant à ses manifesta-

tions principales doit donner en outre la pathogénie d'altéra-

tions indélébiles du système nerveux, de celles qui, par exem-

ple, déterminent, par arrêt de développement cérébral, certai-

nes idioties, certaines imbécillités ; elle doit, en somme, nous

montrer si, comme on le prétendait généralement autrefois,

comme on l'écrit encore aujourd'hui, l'épilepsie peut résul-

ter de l'imbécilité ou de l'idiotie ou si elle est, au con-

traire, une de leurs grandes causes. Peut-être pourrons-nous

demander encore à cette pathogénie' quelques notions plus

précises au point de vue du traitement, au point de vue du

pronostic, de la distinction des épilepsies curables et des

épilepsies incurables ou qui ne peuvent plus être qu'atté-

nuées, soit par un traitement médical, soit par une inter-

vention médico-chirurgicale.

I. - SO)lMAII\E. - Influence flwo1'rtlde, bien que passagère, de Ce ?

taÍ11Cs maladies infectieuses sur l'épilepsie. Rareté du goitre

chez lés épileptiques adolescents ou jeûnes adultes. Son in-

fluence modératrice sur l'épilepsie. Distribution géographique

du goitre, du crétinisme et de l'épilepsie. Les régions les plus

fertiles en épileptiques sont stériles, ou à peu près, en goitreux ou

crétins et réciproquement . Trouve-t-on associés le crétinisme

pur et l'épilepsie franche ? Statistiques el observations franche-

ment négatives de la plupart îles auteurs. ,

Depuis longtemps frappé de l'influence suspensive que cer-

taines maladies, infectieuses ont sur l'épilepsie, la fièvre

typhoïde notamment, j'étais persuadé que ce résultat, la

suppression des attaques convulsives et des troubles psy-

chiques pendant les périodes d'ascension et d'état de la ma-

ladie infectieuse, ne pouvait être attribué qu'à une ncutrali-

- sation ou à une destruction de toxines par d'autres toxines

d'origine différente ou qu'il devait se rattacher à la modifi-

-cation d'un produit de sécrétion.

Une observation surtout m'avait frappé, celle d'unejeune

épileptique sujette à de fréquents accès convulsifs, toujours

inerte, indifférente à toutes les sollicitations, hébétée, qui

.n'avait cependant l'aspect général ni d'une idiote, ni d'une

imbécile, qui n'avait jamais articulé un mot depuis son en-

- trée dans le service (plusieurs années), et que nous consi-

dérions même comme muette. Elle fut atteinte de fièvre

'typhoïde ; après quelques jours d'alitement, à notre grande

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES/ 99

surprise, elle se mit à parler très correctement, provoquant

elle-même quelques petites conversations avec les personnes

qui l'entouraient, donnant quelques renseignements exacts sur

sa famille (donc mémoire), et elle n'eut plus de crises convul-

sives, aucun trouble épileptique jusqu'à la convalescence

de la fièvre typhoïde. Mais la convalescence arrivée, l'état

antérieur, accès d'épilepsie, hébétude, etc., reparut, et, de-

puis plusieurs années, comme avant la fièvre typhoïde,

Larti... ne parle plus.

Cherchant toujours la raison de ce phénomène et me de-

mandant quelle sécrétion pouvait être incriminée surtout

dans l'épilepsie,' je finis par être frappé de la rareté du

goitre chez les épileptiques adolescents ou jeunes adultes

dans cette région où le goitre est encore assez commun et

l'idée me vînt de chercher à me rendre compte de ce qui se

passe chez les épileptiques qui deviennent goitreuses ; j'ar-

rivai bientôt à cette conviction que, d'une façon générale,

plus le goitre se développe plus les crises d'épilepsie doi-

vent s'espacer, lorsqu'elles sont indépendantes évidemment

de grosses lésions organiques (altérations méningo-corti-

cales profondes de certains idiots, tumeurs cérébrales, esquil-

les, etc.). Je remarquai que les épileptiques goitreuses

ont beaucoup moins d'accès que les autres 1, qu'elles ne

sont pas sujettes aux accès subintrants (état de mal) comme

les autres, que l'épileptique présente d'autant moins bruyants

ou apparents les symptômes du haut-mal qu'il tend plus à

se rapprocher du myxoedémateux, éf j'en vins à comparer

les causes du crétinisme et leurs effets aux causes de l'épi-

lepsie et à ses manifestations.

J'ai demandé un premier enseignement à la géographie

du crétinisme, du goitre et de l'épilepsie et voici ce que j'ai

trouvé :

Epilepsie. « Les régions arctiques sont un des foyers de pré-

dilection de l'épilepsie comme de l'hystérie ; on la signale comme

extraordinairement fréquente en Sibérie parmi les Yakoutes, les

Lapons et autres peuplades de la Russie : il en est de même en

Suède, au Groënland et en Irlande. La Lithuanie, les provinces

baltiques de la Russie, la Pologne (Frank) sont fertiles en épilep-

Les exceptions sont faciles a expliquer, comme on le verra par la

suite.

100 CLINIQUE NERVEUSE.

tiques ; en Suède el en Norvège, la fréquence de l'épilepsie la fait

regarder comme une endémie de ce pays..... En France, d'après

les statistiques basées sur les visites médicales de la conscription

militaire, elle serait en moyenne de 104 épileptiques sur 100.000

habitants, plus fréquente toutefois dans le Midi que dans le Nord

de la contrée 1. » - -

Crétinisme. « Le domaine européen du goitre et du créti-

nisme est essentiellement formé par le massif des Alpes, par leurs

contreforts, leurs hautes et moyennes vallées, ainsi que par les

rivières qui découlent de ces citadelles de notre continent...

« Après le Piémont vient la Suisse pour la fréquence du goitre et

du crétinisme... « Le Nord-Ouest de l'Europe est relativement

fort épargné par les deux endémies (goitre et crétinisme). Incon-

nus dans les Pays-Bas, elles n'existent guère en Belgique, que dans

la province de Liège, du Ilainaut, dans la Flandre occidentale et

dans les régions monteuses du Luxembourg. Le Danemark et la

Norvège sont exempts du goitre : en Suède on n'en constate que dans

une ou deux localités. , '

En France « l'endémie du crétinisme sévit avec intensité dans

les départements des Hautes-Alpes et de Savoie 2. »

Ainsi où nous voyons l'épilepsie très fréquente, presque

endémique, comme en Suède et en Norvège, nous ne trou-

vons le goitre et le crétinisme qu'à titre d'exceptions : la Nor-

vège est exempte de goitre, la Suède n'en offre que dans une

ou deux localités. ,

En France, ainsi que nous le verrons encore plus loin, les

régions qui comptent le plus d'épileptiques n'ont ni crétins `

ni goitreux.

Epilepsie. « En Amérique, l'épilepsie est fréquente sur les

hauts plateaux du Mexique, au Pérou et surtout à Lima et au Bré-

sil où elle constitue l'une des maladies les plus communes (Rendu).

Il est probable que l'épilepsie règne dans le Nord du Continent

américain avec la même fréquence qu'en Europeàlatitude égale...

« Seuls les Néo-Zélandais en seraient presque indemnes (Thomp-

son). » .

Crétinisme. En Amérique, « le goitre n'est pas rare dans le

bas Canada « Au Mexique, le goitre et le crétinisme ont été

signalés dans l'Etat de Tabesco; très rare sur l'Aualmac, ils

1 Mahe. Art. Géographie, du Dict. Dechamhre, page 303.

Y Maué. Loc. cil., pages 339 et suivantes.

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 101

occupent les niveaux intermédiaires entre les plateaux élevés et les

terres basses 1. »

En Amérique, comme en Europe, le goitre et le crétinisme

sembleraient donc n'abonder que dans les régions où l'épi-

lepsie est le plus rare et réciproquement. Voyons mainte-

nant ce qu'il en est plus particulièrement pour notre pays :

« L'Epilepsie est incontestablement répartie d'une façon inégale

dans les dix-huit corps d'armée dont l'ensemble compose la

France. La région la moins favorisée est celle du 16e corps (Béziers,

Montpellier, Mende, Narbonne, Perpignan, Albi) 2. » Et, plus loin,

11. Burlureau, faisant allusion à la statistique plus probante qu'il

a établie non pas par corps d'armée (région trop étendue) mais

par chefs-lieux de subdivisions de régions, constate que ce sont,

en somme, les départements du centre de la France qui four-

nissent le plus d'épileptiques et les régions les plus voisines de la

Méditerranée.

Le goitre et le crétinisme, en France n'existent qu'à titre d'excep-

tions (si on les rencontre) sur les bords de la mer, le littoral mari-

time et dans le centre ; nous les rencontrons principalement dans

les vallées voisines des plus hautes montagnes de nos frontières

Est et Sud-Ouest.

Il semblerait ressortir de là que l'on ne devrait jamais

voir associés le crétinisme et l'épilepsie ? Cherchons donc ce

qu'il pourrait y avoir de commun à l'épilepsie et au cré-

tinisme, au crétinisme type, comme à l'épilepsie pure, s'en-

tend.

Esquirol classait ainsi, au point de vue de la mentalité,

les 339 épileptiques de son service : « Douze sont monoma-

niaques, écrivait-il. Trente sont maniaques, parmi elles

quelques-unes ont du penchant au suicide, et ont fait plu-

sieurs tentatives pour se détruire. Trente-quatre sont furieu-

ses ; chez trois la fureur n'éclate qu'après l'accès. Cent-qua-

rante-cinq sont en démence ; seize sont constamment dans

cet état; les autres ne le sont qu'après l'accès, deux ont des

paroxysmes de fureur. Huit sont idiotes ; l'une d'elles n'est

épileptique que depuis sept à huit mois, et n'a eu que cinq

accès. Cinquante sont habituellement raisonnables, mais

elles ont des absences de mémoire plus ou moins fréquentes,

1 Mahé. l.oc. cil.

, Hurlurenu. Art. Epilepsie du Dict. Dechamble, page 109.

102 CLINIQUE NERVEUSE.

ou bien des idées exaltées ; quelques-unes ont un délire

fugace ; toutes ont de la tendance vers la démence. Soixante

n'ont aucune aberration de l'intelligence, mais elles sont

d'une très grande susceptibilité, irascibles, entêtées, diffi-

ciles à vivre, capricieuses, bizarres ; toutes ont quelque

chose de singulier dans le caractère. » 1 (Caractère épilep-

tique bien dépeint en ces quelques mots.)

, Remarquons déjà la proportion relativement faible de

l'idiotie avec épilepsie, le petit nombre des accès d'épilepsie

d'une idiote, petit nombre qui semble avoir frappé Esquirol,

mais notons surtout qu'un observateur sagace comme Es-

quirol, qui distinguait déjà les crétins des idiots ordinaires,

ne mentionne pas d'association du crétinisme et de l'épilep-

sie dans ses 339 cas d'épilepsie. Du reste, dans les autres

parties de son ouvrage, ni lorsqu'il traite de l'épilepsie, ni

lorsqu'il étudie le crétinisme, nulle part il ne fait la moindre

allusion à l'observation d'une association du crétinisme et

de l'épilepsie. Il parle bien (page 315, loc. cil.) d'une épi-

lepsie sympathique ce qui a son siège dans le système des

vaisseaux blancs », épilepsie à laquelle seraient prédisposés

« les sujets pâles, chlorotiques, rachitiques, scrofuleux »,

mais il ne donne aucune expression qui permette de sup-

poser un instant qu'il a voulu viser des crétins ; du reste il

les avait trop bien caractérisés antérieurement pour ne pas

les désigner clairement s'il avait entendu, les comprendre

dans le groupe des individus susceptibles d'être atteints de

cette épilepsie.

Baillarger et Krishaber2 parlent bien de l'épilepsie chez le

crétin, mais ils ne mentionnent l'épilepsie que parmi les

causes de décès du crétin et en termes entourés tellement

de restrictions que l'on se demande, comme eux-mêmes, s'il

s'agit bien d'épilepsie vraie : « Les maladies auxquelles les

crétins succombent sont celles de l'enfance, parmi lesquelles

il faut nommer, disent-ils, le rachitisme, la scrofule, la

dysenterie, la méningite, l'hydrocéphalie, les affections con-

vulsives et notamment l'épilepsie. On a signalé chez le cré-

tin des accès de maladies aiguës avec fureurs qui se rat-

tachent probablement à l'épilepsie».

1 Esquirol. Des maladies mentales, t. I, pages ` ? sur et suivantes, 1838.

' Art. Crétinisme, du Dict. Dechambre.

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 103

Il s'agit plus probablement de convulsions liées à quel-

ques-unes de ces altérations si minutieusement relevées par

M. Bourneville sur les cerveaux des enfants décédés dans son

service de Bicêtre et qui lui ont permis de montrer dans ces

dernières années que l'on classait dans un même groupe des

enfants dont l'arrêt de développement intellectuel avait des

causes absolument différentes de l'un à l'autre au point de

vue anatomo-pathologique (paralysie générale infantile,

porencéphalie, etc...).

Du reste Baillarger et Krishaber qui, lorsqu'ils décrivaient

la symptomatologie, distinguaient des crétins types, des

semi-crétins et des crétineux, ne font plus allusion à ces

divisions lorsqu'ils parlent des causes de décès; ils ne dis-

tinguent pas les causes de décès les plus fréquentes dans

le crétinisme pur et les causes de décès du demi-crétin ou du

crétineux. '

J'ai parcouru un grand nombre d'ouvrages traitant de

l'épilepsie, depuis le livre de Portai jusqu'aux travaux les

plus complets et les plus récents de MM. Féré et Maurice de

Fleury, à la recherche de faits précis d'association du créti-

nisme pur et de l'épilepsie; je n'ai rien trouvé, et, comme

nous le verrons par la suite, cela n'a rien d'étonnant tant il

y a loin de la pathogénie du crétinisme ou du myxoedème

pur à celle de l'épilepsie franche.

Morel, dont les remarquables travaux sur les dégénéres-

cences font encore autorité, fit lui-même, en 1850, une

enquête médicale à Rosières-aux-Salines où les goitreux et

les crétins étaient fort nombreux. Il parle, dans la rela-

tion qu'il en fait', de toutes les dégénérescences qu'il a ren-

contrées à Rosières-aux-Salines, des accidents quiles accom-

pagnaient ; il a trouvé des imbéciles , des idiots , des

rachitiques, dit-il, tous les degrés du crétinisme, des cré-

tins, enfants et adultes, ivrognes et cependant il ne cite

aucun cas de crétinisme avec épilepsie. Il publie dans son

mémoire un rapport écrit de l'Instituteur de Rosières-aux-

Salines qui lui fournissait, en 1850, des renseignements assez

nets sur chacun de ses élèves, signalant, par exemple, que

tel enfant est bègue, tel autre sourd, que tel autre a des ten-

, Considérations sur les causes du goitre et du crétinisme endémiques

il Rosières-aux-Salines (meurtre). Nancy, 1831.

104 CLINIQUE NERVEUSE. '

dances à l'ivrognerie, tel autre descend d'un ivrogne, mais

il ne signalait cependant pas un enfant crétin et épileptique.

Morel ajoute pourtant : l'ivrognerie est un vice commun à

Rosières (Loc. cit., p. 27). Il parle aussi de renseignements

envoyés par le secrétaire de la mairie de Rosières qui ne fait

non plus mention d'aucun cas d'épilepsie associée au créti-

"nisme. .

A propos de l'étiologie de l'épilepsie, les auteurs de tous

les temps parlent bien de l'idiotie, de l'imbécillité, du rachi-

tisme, de la tuberculose, etc., mais aucun ne fait la moin-

dre allusion au crétinisme.

Dans son livre si intéressant sur les Epilepsies et les épi-

leptiques, M. Ch. Féré1 nous montre en des tableaux très

précis qu'il s'est attaché d'une façon assez méticuleuse à des

recherches sur la parenté de 305 hommes et 286 femmes épi-

leptiques (591 épileptiques) et il ne signale chez les ascen-

dants, les collatéraux ou les descendants,- aucun cas de

myxoedème, aucun cas de crétinisme, même non typiques.

C'est en vain que j'ai cherché dans la littérature médicale

des crétins dans la descendance des épileptiques (question

sur laquelle je reviendrai plus loin) ou des épileptiques dans

la descendance si limitée des crétins, et cependant les ren-

seignements sur les conditions familiales abondent dans

la plupart des ouvrages qui traitent du crétinisme ou de

l'épilepsie.

II. Sommaibe. Caractères paraissant établir à priori une oppo-

sition complète entre la pathogénie de l'épilepsie et celle du créti-

nisme. Ascendance différente chez le crétin ou l'épileptique.

Puberté et arrêt de développement du crétin; au contraire impul-

sion donnée au développement de L'épileptique. Mentalités oppo-

sées du crétin el de l'épileptique. Longévité de l'un et de l'autre.

Frigidité naturelle chez l'un, exaltation génésique relative chez

l'autre,, etc.

Nous constatons déjà par ce qui précède que le crétin et

l'épileptique semblent avoir des origines absolument oppo-

sées ; voyons si nous trouverons de nouveaux éléments de

conviction dans une analyse comparative des grands carac-

1 tes épilepsies ci les épileptiques. Paris. llcan,-éUit., 1890. pages 24 !

et 242.

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. l05

Lères des crétins types, des myxoedémateux ou des épilep-

tiques types : ,

Le crétinisme, dont une des principales causes organiques

est aujourd'hui connue, s'affirme toujours bien avant la

puberté, vers la deuxième année d'après Ackermann, la troi-

sième selon Niepce, et le crétin descend toujours de goi-

treux ou de crétins; l'épilepsie, au contraire, apparaît le plus

habituellement à la puberté et l'épileptique ne descendrait

jamais de crétins; l'épilepsie serait même relativement très

rare dans les pays où le goitre est endémique.

L'époque de la puberté marque le terme du développement

corporel ou intellectuel du crétin; à la puberté, au contraire,

époque où ses glandes à sécrétion interne et ses organes

génitaux acquièrent une activité fonctionnelle relativement

intense , l'épileptique voit son développement corporel

prendre un nouvel essor; il reçoit une impulsion analogue à

celle qui se produit chez les sujets sains; il en est de même

dans la majorité des cas, au point de vue du développement

de l'intelligence et des sensibilités (sous réserve, bien entendu,

des variations dont nous parlerons plus loin et qui consti-

tuent le caractère épileptique).

A cette époque, la puberté, le système nerveux manifeste

chez l'épileptique comme chez l'adolescent sain, souvent

même plus que chez ce dernier, une stimulation spéciale en

rapport avec le développement des fonctions de glandes, et

ce que nous savons du développement chez le crétin de cer-

taines de ces glandes (corps thyroïde, ovaires ou testicules)

et des rapports qui existent chez lui entre le développement

intellectuel, les stimulations génésiques et l'insuffisance de

ces glandes nous permet d'attribuer cette stimulation spé-

ciale qui apparaît à la puberté, à un accroissement d'activité

fonctionnelle du corps thyroïde, des ovaires ou des testicules.

C'est là une déduction absolument logique et de la plus

grande importance, car elle nous aidera à mieux fixer le rôle

du corps thyroïde et des glandes génitales dans la pathogé-

nie et dans l'évolution de l'épilepsie. 1

Le crétin adulte, comme le crétin enfant est un être géné-

ralement sans ca1'actère, sans volÓnté, sans affection altruiste,

sans affection égotique même, sans initiative; tel on le voit

aujourd'hui au point de vue des manifestations intellec-

tuelles, tel on le retrouvera pour ainsi dire chaque jour;

106 Il CLINIQUE NERVEUSE.

l'épileptique, au contraire, est essentiellement variable dans

ses affections, sa volonté et les manifestations de sa sensibi-

lité ; son activité et son acuité intellectuelles parfois

intenses sont aussi sujettes de fréquentes variations.

A l'époque où les glandes dont nous avons vu l'essor vital

marquer une impulsion imprimée au développement phy-

sique et intellectuel, vont se tarir, à l'âge critique, l'épilep-

tique verra souvent ses attaques diminuer de fréquence et

d'intensité pour disparaître quelquefois, et il s'acheminera

souvent vers une vieillesse de durée normale. Les crétins qui

passent la moyenne de l'âge mur sont, au contraire, extrê-

mement rares; on pourrait citer à titre d'exceptions ceux

qui vont au delà de l'âge critique de l'individu normal..

Quant à l'individu myxoedémateux, qui ne devient myxoe-

démateux qu'à l'âge adulte, il présente, à côté de lalangueur

intellectuelle et morale, de l'aboulie et de l'apathie du cré-

tin, tous les troubles trophiques généraux que l'on ren-

contre chez le crétin, le développement du squelette et des

principaux viscères ne pouvant évidemment pas rétro-

grader.

Si le crétin ou le myxoedémateux sont si peu dangereux

pour la société, puisque apathiques, inertes, on sait qu'il en

est tout autrement de l'épileptique, qui est un des malades

les plus redoutables, fréquemmenthomicide, incendiaire, etc.,

tandis que l'on attend encore un exemple de meurtre com-

mis par un myxoedémateux. Il semblerait donc que le créti-

nisme et l'épilepsie doivent avoir des causes diamétralement

opposées. '

Les grands caractères différentiels que je viens de passer

rapidement en revue me. dispensent d'entrer dans plus de

détails, d'opposer, par exemple, la forme et le développe-

ment différents des mains chez le crétin ou chez l'épilep-

tique, les longueurs différentes de tels ou tels de leurs

membres, etc... Mais j'aurai garde d'omettre d'appeler dès

maintenant, tout spécialement, l'attention sur les quelques

points suivants : .

1° L'insuffisance ou l'altération du corps thyroïde, cause

du crétinisme ou du myxoedème; 2° cette insuffisance ou

cette altération, cause de l'arrêt de développement physique et

intellectuel du crétin, cause de la déchéance intellectuelle et

physique du myxoedémateux tardif (myxoedème de l'âge

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 107 Î

adulte); 3° l'exiguité des ovaires ou des testicules chez les

crétins-types et leur frigidité bien connue, aucune incitation

n'émanant habituellement des organes génitaux; 4° au

contraire : le développement physique et intellectuel relati-

vement considérable de l'épileptique et une excitation

génésique souvent très accusée à partir de la puberté, déve-

loppement physique et intellectuel et excitation génésique

qui résultent évidemment d'un accroissement progressif très

sensible de l'activité fonctionnelle du corps thyroïde et des

ovaires ou des testicules, et, par conséquent, d'un développe-

ment progressif de ces glandes.

111. Soualnr. Analyse de quelques faits ou observations.

Epilepsie moins grave de sujets goitreux. Aggravation de

l'épilepsie par ingestion de corps thyroïde frais ou de thyroidine.

Rapports de l'épilepsie el des principales phases de. la vie géni-

tale che : . la femme, puberté, menstruation, ménopause. / ? ! /i'ue ? ! ee

secondaire des glandes génitales dans la pathogénie de l'épilepsie.

Ces caractères si opposés du crétinisme et de l'épilepsie

types m'ont amené à chercher ce qu'il advenait de l'épilep-

sie sous l'influence de modifications ou d'altérations des

principales glandes qui semblent avoir pour objet d'assurer

le développement physique et intellectuel et la continuité de

l'espèce, leur activité fonctionnelle paraissant donner, avec

certains éléments primordiaux nécessaires, les forces stimu-

lantes indispensables. C'est ainsi que je suis arrivé il deman-

der à l'observation les liens de l'épilepsie et du goitre, par

exemple, à analyser les modifications que l'épilepsie subit

lorsque varient sensiblement les sécrétions thyroïdiennes,

ovariques ou testiculaires. Si, comme le fait supposer ce que

nous venons de dire, il y a un réel antagonisme entre le

crétinisme complet et l'épilepsie, nous devons trouver un

certain antagonisme également, moins accusé évidemment,

entre le goitre, première étape du crétinisme, selon l'ex-

pression bien fondée de More], et l'épilepsie.

Dès 1890, dans un mémoire adressé à l'Académie de méde-

cine de Belgique, je montrais, d'après mes observations de

Maréville, dont la population épileptique était de 63 femmes

et 52 hommes, que ce sont les sujets qui présentent le plus

de signes apparents de dégénérescence physique, parmi

lesquels, par conséquent, on peut compter les goitreux, qui

108 CLINIQUE NERVEUSE.

ont le moins d'attaques convulsives et que ce sont les épi-

leptiques en apparence le mieux constitués qui offrent les

troubles les plus graves. J'ai cherché, dans ce travail, les

particularités en rapport avec le sens de la chute (grande

attaque), et j'ai remarqué, par exemple, que c'est parmi les

épileptiques qui tombent toujours en arrière que l'on trouve

le plus de dégénérés inférieurs et que, à ce point de vue,

viendraient ensuite les épileptiques qui tombent toujours

ou sur le côté droit ou sur le côté gauche. Calculant d'après

un même temps, les quatre derniers mois de z90, les

moyennes des attaques d'épilepsie par groupes de malades

classés d'après le sens de la chute, je suis arrivé aux propor-

tions suivantes (Service de 63 malades depuis longtemps

épileptiques)1 :

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 109

davantage leurs attaques, à de rares exceptions près, et ils

auront, j'en suis convaincu, bien de la peine à se rappeler

quelque exemple d'état de mal, d'accès subintrants chez un

épileptique goitreux. Je vois annuellement, depuis vingt-

trois ans, un très grand nombre d'épileptiques et je ne me

rappelle pas avoir vu en état de mal une épileptique affectée

d'une altération manifeste du corps thyroïde. Tout ce que

nous avions dit dans les premières parties de ce mémoire

devait, du reste, faire présumer qu'il doit en être ainsi. Ce

ne sont pas là de simples vues de l'esprit, je vais le démon-

trer. ' " '

J'ai été amené, il y a plusieurs années déjà, par l'aspect

général de certaines épileptiques anciennes, à leur faire

ingérer du corps thyroïde (corps thyroïde frais ou thyroïo-

dine), mais je n'ai pas tardé à observer des accidents dont je

tirerai aujourd'hui argument en faveur de la démonstration

du rôle que j'attribue au corps thyroïde dans la pathogénie

de l'épilepsie. Chaque fois que j'ai fait prendre du corps

thyroïde (mouton) à une épileptique, il a été procédé comme

suit : un demi-corps thyroïde, très frais, au repas de onze

heures du matin, température axillaire, prise à une heure,

trois heures et cinq heures après-midi, trois jours de traite-

ment seulement dans une semaine, soit un corps thyroïde et

demi par malade dans une semaine.

Chez K..., une des quatre malades du premier groupe

auquel fut donné du corps thyroïde, la température s'éleva

très promptement dès le premier jour, mais pour retomber

aussi rapidement. Température à une heure, 38°; à 3 heures,

37°,5; à 5 heures, 37°,2. La défervescence ne se produisitpas

de même le second jour, ainsi : Température à une heure,

38°,3;, à 3 heures, 38°,2; 'il à 5 heures, 38°, et de l'excitation

avec confusion mentale extrême se développa, tellement per-

sistante et intense qu'il devint impossible de prendre la

température le troisième jour.

Chez les trois autres malades de ce premier groupe, com-

prenant les femmes du service à manifestations épileptiques

les plus graves et très anciennes, la température moyenne

s'éleva d'un jour à l'autre, recevant une impulsion assez

marquée surtout immédiatement après l'ingestion de corps

thyroïde, et le troisième jour elles avaient aussi de la confu-

sion mentale beaucoup plus accusée qu'elles ne l'avaient

110 CLINIQUE NERVEUSE.

jamais présentée; elles étaient très mobiles dans la soirée

(du troisième jour), ne restaient pas deux minutes à la même

place, avaient des mouvements désordonnés des membres

supérieurs, verbiageaient en bredouillant. Pendant la sus-

jpension du traitement (quatre jours), les troubles s'atténuè-

rent, mais la semaine suivante lorsque nos malades reprirent

du corps thyroïde, ils revinrent promptement à leur inten-

sité du troisième jour et la dépassèrent bientôt sensible-

ment.

' Toutes les épileptiques qui ingérèrent ainsi du corps

thyroïde, éprouvèrent, dès le troisième jour de la première

semaine et surtout de la seconde semaine, une confusion

mentale extrême avec désordre des actes, mobilité incons-

'cliente incessante. Quant aux attaques d'épilepsie, leur

nombre mensuel atteignit pour chaque malade un chiffre

auquel il n'était jamais arrivé auparavant et qui ne se repro-

duisit plus après la suppression définitive de l'administra-

tion du corps thyroïde. L'action de la thyroïdine est la

même; on pourra, du reste, en juger par une des observa-

tions que nous relatons à la fin de ce mémoire.

L'élévation de température si sensible que nous avons

"notée chez nos malades et l'ensemble des phénomènes géné-

raux que nous avons observés témoigneraient suffisamment

d'une aggravation de l'épilepsie. Si je cherche à me rendre

compte directement, d'après mon service, des rapports qui

peuvent exister entre l'altération du goitre et les manifesta-

tions symptomatiques de l'épilepsie, voici ce que je trouve ' :

' Sur 60 épileptiques, j'en rencontre 7 goitreuses, dont'2 seu-

lement porteuses d'un goitre bien- évident, les 5 autres

'n'ayant que des goitres peu accusés, commençant ou évo-

luant très lentement, qu'il faut même chercher assez atten-

tivement chez deux au moins d'entre elles. Celle qui présente

le goitre le plus volumineux avait, en ils889, 1890, ils91, au

moins une attaque d'épilepsie par jour, quelquefois deux;

-en 1895 (elle ne prenait pas de bromure et n'en a pas pris

^ depuis 1889 au moins) les attaques commencent à s'espacer

un peu plus, et, en 1900, elles sont de 2/3 moins nombreuses

- qu'autrefois (1895) sans traitement médicamenteux; la

'malade est âgée de quarante-sept ans (ménopause). Chez la

- malade qui vient ensuite, au point de vue du volume du

goitre, et dont le goitre remonte à deux ans environ, les

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 111 L

accès d'épilepsie ont diminué de 1897 à 1901 dans la pro-

portion de 4 à 1 ; le traitement médicamenteux ayant été

abandonné avant 1897 et cette femme n'ayant que trente-

quatre ans, ce cas permet de mieux juger de l'influence pos-

sible de l'altération du corps thyroide sur l'épilepsie (nous

reviendrons sur ce cas dans les observations données à la fin

de ce travail). Celle qui viendrait en troisième lieu comme

volume de goitre n'a pas un accès par mois, bien que encore

assez éloignée de l'âge critique. Deux des quatre autres

(goitres kystiques, peu visibles), arrivées à l'âge critique,

n'ont plus, par an, l'une qu'un accès, l'autre 7 à 8, mais en ,

deux ou trois jours seulement de l'année (modifications arri-

vées sans influence de traitement médicamenteux).

A côté de cette constatation que les attaques d'épilepsie

sont, d'une façon générale, moins fréquentes chez les épilep-

- tiques goitreuses que chez les autres, que je n'ai jamais,

en. vingt-trois ans de pratique spéciale, vu d'épileptiques

goitreuses en état de mal, que les attaques convulsives

diminuent beaucoup de fréquence chez quelques malades à

mesure que les altérations du corps thyroïde s'accentuent;

je dois appeler déjà l'attention sur le petit nombre de

goitres que l'on trouve dans la population épileptique. Après

avoir rappelé que j'habite une région où les goitres étaient

autrefois très nombreux, et qui comptait beaucoup de cré-

tins et de crétineux, je citerai le résultat d'une statistique

que je fis ici pour mon chef de service, il y a vingt-deux

ans; je trouvais alors au moins 130 goitres-non douteux

pour une population de sept cents et quelques aliénées,

parmi lesquelles environ 60 épileptiques; les épileptiques

goitreuses n'étaient pas plus nombreuses qu'aujourd'hui.

Mais, aujourd'hui, dans la même région, je fais cette

remarque, absolument manifeste et probante, que, la con-

naissance des circonstances de développement du crétinisme

ayant amené la diminution du nombre des goitreuses et des

crétines, le nombre des épileptiques, non aliénées au moins,

.a a continué à s'accroître. Je n'entends pas dire que l'aug-

mentation d'un chiffre est en rapport avec la diminution de

l'autre mais bien que ces variations ont des causes absolu-

ment différentes dont je parlerai plus tard et je veux ainsi

ajouter simplement cette remarque à d'autres pour établir

que le crétinisme et l'épilepsie ont des pathogénies essen-

1H - CLINIQUE NERVEUSE.

tiellement différentes, et partir de cette donnée pour

remonter à la pathogénie complète de l'épilepsie.

L'étude comparative des grands caractéres de l'épilepsie

et du crétinisme ou du myxoedème et ce que nous savons

.des modifications opposées que l'on observe alors que le

corps thyroïde s'altère, que sa fonction diminue, ou alors

que l'on fait ingérer du corps thyroïde et que l'on augmente

en quelque sorte la fonction de la glande thyroïde, tout con-

tribue à mettre en opposition le crétinisme ou le myxoedème

et l'épilepsie et à indiquer que le corps thyroïde doit jouer

un grand rôle à la fois dans la pathogénie du myxoedème ou

du crétinisme et de l'épilepsie, mais rôle absolument diffé-

rent selon qu'il conduit au crétinisme, au myxoedème ou à

l'épilepsie. Nous sommes amenés déjà à entrevoir dans la

pathogénie de l'épilepsie deux facteurs principaux : 1° un

territoire nerveux préparé, une tare originelle, et 2° l'in-

Jluence d'une glande à sécrétion interne (corps thyroïde).

Mais l'observation clinique, qui accuse assez nettement

cette influence de la glande thyroïde, nous porte aussi à

attribuer à d'autres glandes un certain rôle que nons devons

aussi chercher à déterminer. Il est d'observation courante

que les troubles symptomatiques de l'épilepsie, troubles

psychiques ou attaques, sont plus accentués, plus graves,

chez la femme par exemple, aux époques menstruelles;

nous avons dit aussi, et il n'est pas un spécialiste qui ne

l'ait constaté, que l'épilepsie éclate le plus souvent à la

puberté, à l'époque de la puberté. Si donc l'épilepsie, qui

éclate ordinairement vers l'âge de la puberté, qui s'accuse

surtout aux époques menstruelles, tend à diminuer à partir

de l'âge critique, si l'épilepsie qui semble naître avec l'arri-

vée à mâturité des organes génitaux, s'affirme davantage à

chaque époque de suractivité fonctionnelle d : organes de la

génération pour s'atténuer quand ces organes se flétriront

et disparaître quelquefois quand leurs fonctions, 'cessent,

c'est que, certainement, ces organes doivent jouer, directe-

ment ou non, un .rôle dans sa pathogénie. Ce rôle tout l'ac-

cuse, comme nous allons voir, mais il est en quelque sorte

secondaire, puisque le développement des organes de la

génération est lui-même sous la dépendance du développe-

ment du corps thyroïde, ainsi que l'atteste, par exemple,

l'exiguïté, l'arrêt de développement des testicules du crétin,

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 113

la persistance de l'épilepsie, bien que parfois atténuée,

après la castration, etc...

Que l'épilepsie éclate le plus souvent à la puberté, que les

accidents symptomatiques en soient plus intenses chez la

femme à chaque époque menstruelle, cela est absolument

certain pour tous les auteurs, pour tous les spécialistes ; cela*

avait été constaté déjà par Esquivol, Georget, etc. ; Georget,

cité par M. Féré 1, avait remarqué déjà « que beaucoup de

femmes étaient dans la période menstruelle lorsqu'elles

avaient éprouvé la frayeur qui les rendit épileptiques.

Peut-être, disait-il, faut-il tenir compte de la susceptibilité

particulière du cerveau à cette époque de la suppression

menstruelle et de la frayeur». Je discuterai plus loin l'im-

portance qui peut être attribuée à la frayeur. Tout le monde

partage unanimement cette conviction basée sur l'observation

journalière, c'est que l'épilepsie se manifeste plus bruyam-

ment chez la femme à chaque époque menstruelle.

Tout porte à croire alors que la ménopause devra généra-

lement occasionner quelque modification de l'épilepsie. La -

plupart des auteurs ont négligé ce côté de la question, et

cependant nous sommes persuadé qu'il n'est pas un ancien

spécialiste qui n'ait observé comme nous des cas d'amélio-

ration en apparence spontanée de l'épilepsie à l'âge critique.

Voici résumés quelques-uns des derniers cas que j'ai ren-

contrés dans mon service :

- 5... Célestine, entrée dans le service en 1876, alors âgée de

trente-neuf ans, atteinte d'épilepsie (grandes attaques et vertiges)

avec affaiblissement intellectuel, fréquentes préoccupations hypo-

chondriaques ; deux ou trois grandes attaques, au minimum, par

mois et nombreux vertiges. Diminution progressive des petites et

grandes attaques à partir de la ménopause sans le secours d'un

traitement médicamenteux ; 7 accès seulement en 1897, ver-

tiges très rares ; aucun accès en 1900; aucun accès en 1901 (de

janvier à ce jour, c'est-à-dire mai inclus).

M... Anne veuve C..., arrivée dans le service en 1897 ; âgée

de cinquante-trois ans ; instruction nulle ; envoyée comme épilep-

tique pyromane (a allumé un incendie), atteinte d'épilepsie depuis

l'âge de quinze-ans; grandes attaques autrefois fréquentes; une

trentaine seulement en 1895, mais, en 1896, à la suite de cha-

' Les épilepsies et les épileptiques. Paris, Alcan, 1890.

Archives, 20 série, t. XVII. S

114 ' CLINIQUE NERVEUSE.

grins, perte de son mari, troubles intellectuels, idées de persé-

cution, craintes de viol, idées de vengeance, incendie d'une maison

et recrudescence du nombre des crises, environ tous les deux

jours un accès d'épilepsie (recrudescence absolument passagère

comme on va le voir). Entrée en février 1897 dans le service; les

accès sont immédiatement moinsnombreux sans le secours d'un

traitement médicamenteux (régime seulement plus régulier) 3 à

7 accès par mois en 1897, puis diminution progressive, rapide et

seul accès dans toute l'année 1900. Du côté de l'état mental : reste

de l'affaiblissement intellectuel et de l'instabilité. Aucun accès

en 1901.

B... Q..., âgée de quarante-cinq ans. Avait autrefois, irré-

gulièrement, 15 à 20 accès par mois ; ne tombe plus que deux ou

trois fois par mois, à l'époque menstruelle (ne suit plus de traite-

ment depuis longtemps).

B... Louise, cinquante-sept ans ; dans le service depuis 1866,

ne suit plus de traitement spécial depuis fort longtemps, bien

avant diminution sensible du nombre des accès. Autrefois accès

fréquents; depuis une dizaine d'années 1 à 2 accès seulement par

an, sauf en 1900 (3 accès en mars, 1 en septembre et 1 en dé-

cembre).

Il est incontestable que, en général, -l'épilepsie tend à

s'amender à l'approche de l'âge critique et les observations

analogues à celles que nous résumons ci-dessus ne sont pas

rares; nous avons vu plusieurs épileptiques chez lesquelles

- la ménopause, seule, sans l'aide d'un traitement médica-

menteux, a été suivie de la disparition complète des attaques

convulsives et même des vertiges. A rapprocher aussi de ces

remarques cette observation faite par tous les spécialistes,

que l'épilepsie se développe de moins en moins de la

moyenne de l'âge mûr à l'âge critique.

Il semble donc bien certain qu'un rôle doit être attribué à

l'évolution des glandes des organes génitaux dans la patho-

génie de l'épilepsie.

Que mes lecteurs spécialistes fassent appel à leurs souve-

nirs, à leurs observations, ils arriveront à remarquer que

c'est à l'époque de la plus grande activité des fonctions des

organes génitaux que l'épileptique adulte a le plus grand

nombre d'accidents, qu'il est le plus exposé aux accès subin-

trants, à l'état de mal. (Nous dirons encore plus loin com-

ment une partie de l'influence des glandes génitales doit

être rapportée à la glande thyroïde.) z

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. t 11) J

On m'opposera, je le prévois, quelques cas d'épilepsie qui

s'aggravent à l'âge habituellement considéré comme âge

critique; j'en ai vus moi-même, mais, outre que ces cas, sont

relativement rares, qu'ils ne peuvent, par conséquent, pas

infirmer les déductions que nous tirons de la très grande

majorité des observations, ils peuvent s'expliquer par ce

fait que la ménopause n'arrive parfois que fort tardivement

chez certains individus, que l'altération des glandes thyroïde

et génitales, qui marque le commencement du déclin de la

vie. qui le cause à mon avis, que celle altération est excep-

tionnellement tardive dans ces cas ; à l'âge habituel de la

ménopause, il se produit, au contraire, chez certains indi-

vidus, une sorte d'exaltation passagère de l'activité fonction-

nelle des glandes thyroïdes et génitales; ne voit-on pas, en

effet, certains individus, jusque-là calmes et normaux, cher-

cher vers la cinquantaine les aventures galantes, montrer

un érotisme qu'on ne leur avait pas connu antérieurement,

et n'a-t-on pas vu des femmes enceintes âgées de plus de

cinquante ans, approchant même de la soixantaine, quel-

ques-unes la dépassant même (je connais au moins 2 cas de

grossesse après soixante ans). C'est une suractivité fonction-

nelle analogue que l'on pourra rencontrer dans les cas

d'épilepsie qui semblent s'aggraver à la ménopause, et,

dans ces cas, on ne constatera évidemment aucune altération

profonde du corps thyroïde. Le plus souvent, du reste, l'ag-

gravation ne sera que très passagère comme l'exaltation

fonctionnelle qui précède.le déclin de la vie.

Il me reste enfin à répondre par l'observation clinique à

une dernière objection qui pourrait être tirée de la persis-

tance des accès après la ménaupose ? Mais il est bien

évident que la ménaupose n'est pas due à une suppression

totale, brusque, de l'activité fonctionnelle des glandes thy-

roïde et génitales, bien que les écoulements menstruels ne

se produisent plus ; la preuve ne nous en est-elle pas fournie

chaque jour par la clinique même ? J'observe tout parti-

culièrement, depuis cinq ou six ans, des aliénées mélanco-

liques qui ont depuis longtemps, déjà, plusieurs années,

dépassé l'âge critique; elles sont encore sujettes, la plupart,

à une exaltation mélancolique de quelques jours par mois,

comme elles présentaient, aux époques menstruelles, évi-

demment beaucoup plus accusés alors, des troubles psycho-

116 RECUEIL DE FAITS.

sensoriels paroxystiques. Je connais une dipsomane, arrivée

depuis plusieurs années à la ménopause, et qui, chaque

mois, à jours qui correspondent aux temps anciens de ses

époques cataméniales, a un paroxysme d'impulsions à

.boire. On ne peut certainement expliquer la persistance de

la périodicité de certains troubles intellectuels chez la femme

qui a passé l'âge critique, périodicité autrefois manifeste-

ment liée à la menstruation, que par la persistance au

moins d'une certaine fluxion périodique des glandes géni-

tales et thyroïde', dont nous chercherons dans un instant le

mode d'action sur le système nerveux. n (A suivre.)

RECUEIL DE FAITS.

Un nouveau cas de paralysie générale conjugale;

Par le Dr A. CULLERRE

Le 22 mars 1903 était admise la nommée D..., veuve R..., âgée

de cinquante ans, atteinte de paralysie générale à la seconde

période. Ses antécédents héréditaires sont assez vagues : mère

morte d'anémie à la suite de métrorrhagie; un oncle alcoolique;

on ne peut fournir aucun renseignement sur la lignée paternelle.

Comme antécédents personnels, elle n'aurait eu qu'une fièvre

typhoïde légère dans sa jeunesse. Elle a épousé à trente et un ans

un employé âgé lui-même de trente ans, ayant fait cinq ans de

service dans la marine de l'Etat. Elle a fait trois grossesses, toutes

les trois terminées par des fausses couches ou la naissance d'en-

fants morts. De nombreuses métrorrhagies à la même époque

l'avaient beaucoup épuisée et nécessité l'intervention continuelle

des médecins.

Son mari est mort il y a deux ans et demi à la suite d'accidents

cérébraux. Elle raconte qu'il a été cinq ans malade ; qu'il a, au

début, beaucoup engraissé ; qu'il a eu des attaques et qu'elle l'a

soigné pendant trois ans comme un enfant. Nous verrons tout à

l'heure que cette affection répond au diagnostic de paralysie géné-

rale.

A l'entrée on constate les phénomènes suivants : agitation ma-

niaque intense, loquacité bruyante, érotisme, satisfaction ; elle-

NOUVEAU CAS DE PARALYSIE GÉNÉRALE CONJUGALE. 117 7

veut se marier, aller à Paris, faire la fête. Elle est double vierge ;

elle aura des pensions, des trésors inépuisables. Embarras extrême

de la parole, tremblements musculaires généralisés, ataxie lin-

guale, myosis, plus accentué à gauche. ,

L'excitation a toujours été en progressant. Au bout de deux mois

elle est en proie à une agitation violente, crie nuit et jour sur un

ton irrité et satisfait des choses incompréhensibles mais où

dominent des expressions trahissant un délire ambitieux. Amai-

grissement considérable, refus partiel d'aliments, teinte subicté-

rique des téguments, constipation, signes somatiques très accen-

tués. '.

En septembre, c'est-à-dire six mois après son entrée, elle suc-

combe dans un marasme profond avec diarrhée et gâtisme. L'au-

topsie n'a pu être faite, par opposition de la famille.

Voici maintenant. les renseignements qu'a bien voulu me fournir

le médecin de la famille sur la maladie du mari :

« Je suis heureux de pouvoir vous fournir quelques rensei-

gnements au sujet de la mort du sieur R..., dont vous avez actuel-

lement la femme en traitement.

« Le dit R... est mort d'accidents cérébraux qui se sont succédé

dans l'ordre habituel de la paralysie générale progressive. Il était

gardien de phare, d'une vie très régulière; pas d'alcoolisme. Je

n'ai jamais constaté d'accidents syphilitiques. Son affection a

débuté par des troubles oculaires : myosis, inégalité pupillaire, et

l'abolition du réflexe pupillaire .

«Eu même temps la parole devenait embarrassée, hésitante;

la prononciation difficile. Son caractère était tantôt apathique,

tantôt irritable, mais sans délire spécial.

« Au milieu de ces divers symptômes les troubles de motilité

étaient apparus, caractérisés par un affaiblissement de tous les

mouvements, en particulier de son appareil locomoteur. Peu à

peu ces troubles s'accentuèrent ; la déchéance intellectuelle et

physique devint complète et lit place à un état paralytique et

cachectique qui emporta le malade. »

Ce double cas, comme on le voit, constitue un nouveau

fait de paralysie générale conjugale, car les renseignements

fournis pur le médecin traitant sont suffisants pour per-

mettre de conclure que le mari a bien lui aussi succombé à la

méningo-encéphalite.

Ce confrère ne croit pas à la syphilis des conjoints, n'ayant

jamais eu à soigner chez eux d'accidents propres à cette

maladie. Mais on sait assez que cette raison n'est pas suffi-

sante pour écarter toute présomption d'infection ancienne.

J'ajoute qu'au contraire, l'étude attentive des deux observa-

118 CLINIQUE NERVEUSE.

tions, bien que très sommaires, conduit presque irrésisti-

blement à admettre la syphilis parmi les antécédents des

deux malades. La femme n'a pu mener à bien aucune gros-

sesse, fait d'une haute signification en pareille matière.

Parmi les symptômes relevés par le médecin traitant chez le

.mari, nous trouvons le signe d'Argyll Robertson dont l'ori-

'gine, si nous en croyons l'opinion récemment soutenue par

des neurologistes autorisés, serait nécessairement liée à la

syphilis (Joffroy, Babinski.)'.

Je considère donc ce nouvél exemple comme militant en

faveur de l'origine syphilitique de la paralysie générale.

Quant aux causes de ce singulier phénomène d'une même

maladie organique des centres nerveux se développant tan-

tôt simultanément , tantôt successivement chez deux con-

joints, je ne hasarderai pas même-une explication. S'agit-il

d'une vulnérabilité du système nerveux fortuitement iden-

tique de part et d'autre, ou d'une propriété élective du

virus ? En d'autres termes, doit-on incriminer le terrain ou la

graine ? Peut-être ces deux hypothèses contiennent-elles cha-

cune une part de vérité. -

Notons en passant le long délai écoulé (vingt ans selon

toute probabilité) entre l'infection initiale et le développe-

ment de la maladie cérébrale. L'infection du mari a dû pré-

céder le mariage de quelques années; chez la femme elle a

dû être contemporaine des premiers rapports sexuels (fausses

couches successives).

En 1890, au Congrès de Rouen, j'ai publié les premiers cas

de paralysie générale conjugale observés dans notre pays2.

Depuis, de nombreux travaux ont ajouté à ce premier con-

tingent des faits analogues dont le total doit être d'une qua-

rantaine environ.

' Société de neurologie, 13 mars l(J02.

°- .1. CULLERRE. Note sur la paî-laysie générale conjugale {Congres des

aliénisles de langue française, Rouen, 1890.

REVUE CRITIQUE

Dernières conceptions de l'hypnotisme

. et de l'hystérie 1.

Par le D' ALBERI' CHARPENTIER

Lauréat de la Faculté de médecine de Paris.

Dans notre premier article nous avons essayé de montrer, en

analysant un travail de Bernheim sur l'hystérie, que la Défini-

tion de l'hystérie présentée par notre maître Babinski à la Société

de Neurologie en 1901 n'avait été ni infirmée ni complétée et

qu'elle demeurait toujours pour nous la base la plus solide d'une

classification en neurologie.

Avant d'aborder l'étude critique du livre de Grasset ayant

pour titre : l'Hypnotisme et la Suggestion 2, nous croyons utile de

rappeler que l'hystérie est un état psychique rendant le sujet qui

s'y trouve capable de s'aulo-suggestionner, d'être suggestionné et

d'être guéri sous l'influence exclusive de la persuasion 3. Et comme

une des principales formes de la persuasion, l'hypnotisme, joue

un rôle important dans la thérapeutique des manifestations hys-

tériques, il n'était pas inutile de le définir avec précision : L'hyp-

nose est un état psychique rendant le sujet qui s'y trouve susceptible

de subir la suggestion d'autrui; il se manifeste par des phénomènes

que la suggestion fait naître, que la persuasion fait disparaître et

qui sont identiques aux accidents hystériques.

Lorsqu'on lit attentivement le travail de Babinski, on se rend

compte que ces deux définitions résument la conception de l'au-

teur sur la nature des troubles hystériques et des phénomènes

hypnotiques. Le caractère psychique, mental et uniquement men-

tal, y est affirmé par la dépendance étroite des symptômes à un

mécanisme psychique : la suggestion et la persuasion, dans leur

sens étymologique. Et nous insistons sur ce dernier mot, la per-

1 Voir Arcliives de Neurologie, 1903, no 90.

* Octave Doin, Paris, 1903.

1 Définition du Babinski. Voir notre premier article p. 4 (Extrait des

Arch. de \'eur.).

120 REVUE CRITIQUE.

suasion, car pour la suggestion, il peut y avoir malentendu, comme

nous allons voir. On a soutenu que la suggestion agissait sur des

éléments nerveux étrangers au moi volontaire. Une pareille thèse

ne peut s'appliquer, sans non-sens, aux phénomènes de persua-

sion. Qui dit persuasion présuppose une intelligence capable de

raisonner et d'accepter l'évidence. " '

Dans son dernier livre ? Grasset cherche à établir comme

fondement de ses idées sur la suggestion, l'hypnotisme et l'hys-

térie, ce qu'il appelle : l'automatisme supérieur ou psychisme iiifé-

rieur. Et voici comment il le définit : « C'est une. fonction automa-

tique qui n'est pas l'arc réflexe ordinaire, puisque elle aboutit à

des actes coordonnés, intelligents, spontanés dans une certaine

limite. C'est une fonction psychique dont les centres sont dans

l'écorce grise cérébrale et qui doit être cependant soigneusement

distinguée de la fonction psychique supérieure, siège de l'intellec-

tualité supérieure, de^la personnalité pleine et vraie, de la cons-

cience entière et morale, de la liberté et de la responsabilité ? »

Grasset ajoute : « Les actes automatiques supérieurs ont

donc des centres distincts, d'une part des centres psychiques supé-

rieurs, de l'autre des centres réflexes. Ces centres ne sont ni dans

l'axe bulbo-médullaire (réflexes) ni même dans les centres basi-

laires et mésocéphaliques (réflexes supérieurs, automatisme infé-

rieur). Ils sont dans l'écorce cérébrale mais se distinguent des

centres du psychisme supérieur également situés dans celte écorce

cérébrale 3. » Pour faire'saisir avec plus de clarté sa conception

des divers psychismes, l'auteur se sert du schéma (fig. 1).

« En 0 est le centre psychique supérieur formé bien entendu,

d'un grand nombre de neurones distincts : c'est le centre du moi

personnel, conscient, libre et reponsable.

Au-dessous est le polygone (AVTEMK) des centres automatiques

supérieurs : d'un côté les centres sensoriels de réception, comme

A (centre auditif), V (centre visuel), K (centre kinétique), T (centre

de sensibilité générale), comme M (centre de la parole articulée),

E (centre de l'écriture).

Ces centres, tous situés dans la substance grise des circonvolu-

tions cérébrales sont reliés entre eux de toutes manières par des

fibres transcorticales, intrapolygonales, reliés à la périphérie par

des voies sous-polygonales, centripètes (tA, vV, tT) et des voies

centrifuges (Ee, Mm, Tt) et reliés au centre supérieur 0 par des

libres suspolygonales : les unes centripètes (idéo-sensorielles), les

autres centrifuges (idéo-motrices).

' L'Hypnotisme et la suggestion.

' Page 6.

3 Page 7.

CONCEPTIONS DE L'HYPNOTISME ET DE L'HYSTÉRIE. 121

On peut avoir ou non conscience des actes automatiques suivant

que l'activité automatique est communiquée ou non au centre 0,

qui est le centre de la conscience personnelle.

La conscience ou l'inconscience ne doit donc pas figurer dans

les caractères essentiels des actes polygonaux ou automatiques

supérieurs : ils ne deviennent conscients que par l'addition de

l'activité de 0 à l'activité propre du polygone. Mais les actes poly-

gonaux sont des actes psychiques, parce qu'il y a de la-mémoire

et de l'intellectualité dans leur fonctionnement » (p. 9).

« Un exemple emprunté à la physiologie du langage rendra très

claires ces notions, un peu arides dans leur forme synthétique :

Un sujet lit à haute voix. S'il fait attention à ce qu'il lit, y pense,

continue volontairement sa lecture, l'interrompt par des réflexions

personnelles, c'est que son centre 0 est compris dans le cercle

vVOMm. Si au contraire il dicte ce qu'il lit, ou s'il lit à une

Fig. 1.

0, centre psychique supérieur de la personnalité consciente, de la volonté libre el du

moi responsable : écorce cérébrale au lobe préfrontal ( ? ) ;

AVTEMK, polygone des centres psychiques inférieurs ou de l'automatisme psycholo-

gique ; '

A, centre auditif, écorce des circonvolutions temporales,

V, centre visuel, écorce de la région calcannienne ;

T, centre tactile {sensibilité générale), écorce de la région périrolandique : : ^ .

K. centre kinéique (mouvements généraux), écorce de la région pértrolandultue;

I, centre de la parole, écorce du pied de la 3c frontale gauche ;

E.cenlre de l'écriture, écorce du pied de la 2- frontale gauche ;

aA, v\'. tT, voies ccnlripèdcs de l'audition, de la tision, de la sensibilité générale';

Ee, Mw, Kk, voies centrifuges de l'écriture, de la parole, des mouvements ;

EA, EV, ET; ME, MK, MV, MA. MT; KV, KA, KT, ,oies intrapol;gonales.

122 . REVUE CRITIQUE.

autre personne sans penser ce qu'il lit, s'il lit automatiquement,

le cercle ne comprend plus 0, il ne comprend que uVMMt; c'est

un acte purement polygonal ; et avec 0, il peut penser à autre

chose » (p. 10).

Grasset, répondant plus loin à des objections anatomiques

dit qu'il n'attache pas à son schéma une valeur de réalité. Ce

n'est pas l'interprétation d'une coupe avec localisations cérébrales,

mais une hypothèse que la suite de l'ouvrage a mission de démon-

trer.

On sent le point faible et, à notre avis, le danger d'une telle

méthode. Dans une science abstraite on peut faire crédit au savant

d'une hypothèse qui suppose le problème résolu. C'est une excel-

lente méthode en géométrie et en algèbre parce que toutes les

déductions tirées de l'hypothèse primordiale s'enchaînent dans le

domaine du raisonnement pur en vertu de calculs et de proposi-

tions déjà démontrées. Le résultat ne peut être qu'exact ou

absurde. Et ce caractère de la solution confirme ou condamne

l'hypothèse momentanément acceptée. Il n'en va pas de même dans'

les sciences biologiques. Les phénomènes ne sont pas reliés entre

eux uniquement par des rapports numériques et les effets que

nous éludions, pour comparables qu'ils paraissent, ne sont pas

de même nature. On peut déduire de la définition du triangle que

la somme de ses angles égale deux angles droits. On ne peut pas

dire en voyant une poule immobile devant une raie blanche

qu'elle est hypnotisée pour ce fait que les sujets humains hypno-

tisés restent souvent immobiles. Le caractère d'immobilité n'est

pas une propriété unique ni suffisante d'un être vivant pour déce-

ler l'hypnose. Les phénomènes biologiques offrent des comparai-

sons, mais la vie qui les caractérise est riche en complexités pro-

fondes ne permettant pas des déductions d'identité. Aussi les

mêmes faits en médecine et en physiologie ont-ils été expliqués

par des écoles philosophiques contradictoires. Les grandes hypo-

thèses, les théories ne sont que des jalons par lesquels l'esprit

humain essaye de fixer l'ignorance d'une époque.

Par ce premier chapitre, Grasset se rattache au temps où la

médecine, n'étant pas encore entrée dans le domaine véritable-

ment scientifique, qui est aussi le domaine des acquisitions lentes,

espérait faire tenir toute la physiologie dans une formule et en

déduire toute la thérapeutique. D'ailleurs, ces idées sur l'auto-

matisme, le polygone, le centre 0, développées brillamment par

Grasset, ne viennent-elles pas d'un homme certainement très

distingué, mais dont le nom même et les oeuvres appartiennent

plus à la philosophie qu'à l'anatomie et à la physiologie.

Grasset, ne pouvant fournir une preuve anatomique de l'exis-

tence des divers centres qu'il situe dans l'écorce cérébrale (psy-

chisme supérieur et automatisme psychique) essaye une démons-

CONCEPTIONS DE L'HYPNOTISME ET DE L'HYSTÉRIE. 123

tration par des faits de physiologie normale et par des faits de

pathologie. Il pense que dans la distraction, le centre 0 (psychisme

supérieur) est fatigué, faible, mobile et « qu'il abdique la direc-

tion qu'il doit exercer normalement sur les centres polygonaux. »

Le centre 0 est dissocié du polygone. « Quand Archimède sort

dans la rue en costume de bain, il marche avec son polygone et

crie Eurêka avec son 0 1. » De même, dans le sommeil, c'est le

centre ? qui se repose : le psychisme polygonal persiste et cette

persistance est démontrée par l'existence des rêves (p. 13).

Nous ne suivrons pas plus loin l'auteur dans les exemples qu'il

cite pour étayer son schéma et sa théorie sur des faits de physio-

logie normale. Nous avouons ne pas connaître de plus brillant

exemple d'abstractions réalisées, de dissociation verbale, que cette

dissertation sur des centres hiérarchiquement différenciés bien que

situés par hypothèse dans la même région : écorce cérébrale du

lobe préfrontal. -

Sur ce terrain des hypothèses nous préférons croire que le centre

psychique est un, et que les divers aspects sous lesquels il se mani-

feste proviennent de sa plus ou moins grande activité. Certains

actes qui pour Grasset sont accomplis par le polygone (sorte

de carrefour de l'automatisme et de l'intelligence), peuvent, selon

nous, ressortir à des centres bulbo-médullaires sur lesquels agi-

rait un pouvoir régulateur psychique. D'autres actes que l'auteur

attribue également au polygone hypothétique peuvent être mis

sous la dépendance du centre psychique supérieur (le centre 0 de

M. Grasset), en admettant que ce centre se trouve alors dans

un état de faible activité. A une grande activité physiologique

correspondrait la conscience nette, et à une certaine torpeur du

centre intellectuel, le sommeil de la conscience.

Mais, encore une fois, nous pensons que les hypothèses ne

valent que par les vérités de faits qu'elles amènent à découvrir.

Nous faisons donc crédit a priori à la théorie philosophique de

Grasset si les phénomènes d'hypnose et de suggestion, phéno-

mènes qui appartiennent à l'observation expérimentale, ne vien-

nent pas l'infirmer.

II. Dans le deuxième chapitre de son livre, l'auteur traite de

l'hypnose. 11 commence par montrer, en analysant les signes pré-

sentés par les sujets hypnotisés, que la caractéristique de l'hypnose

ainsi que l'ont établi Liébault et Bernheim, c'est l'état de suggesti-

bilité (l'état de celui à qui on peut faire des suggestions).

Cette première définition amène l'auteur à étudier la suggestion.

Grasset, tout en admettant cette définition de l'hypnose, n'ac-

cepte pas celle que Bernheim donne déjà suggestion, et trouve, avec

l'a;e 1 1 .

kJd* ? REVUE CRITIQUE.

quelque raison, que le sens du mot suggestion est élargi par Bern-

heim au point de ne plus rien exprimer de précis. Ce qui revient

à dire que la définition de l'hypnose est elle-mème très vague par

le fait de sa trop grande extension 4.

Nous pensons, avec notre maître Babinski, quitte à y revenir

plus loin, que l'état d'hypnose présuppose la suggestion. Il est

exact de dire que l'hypnose-est un état de suggestibilité, pourvu

qu'il soit entendu que le fait seul d'être hypnotisé, nécessite l'état

de suggestibilité. La première suggestion pratiquée dans'le som-

meil hypnotique n'est que la continuation de cette primordiale

suggestion : Alors que je suis éveillé, vous. vous, allez dormir 2.

Grasset, analysant l'influence de l'hypnotiseur sur l'hypno-

tisé, admet que celui-ci obéit sans critiquer, sans réfléchir. Il agit

comme on le lui suggère, tandis que dans tous les cas, autres que

la suggestion,'où l'influence d'un être se fait sentir sur un être, ce

dernier accepte l'injonction; il consent à obéir. Ici, il y aurait spon-

tanéité, libre-arbitre et dans la suggestion, obéissance passive,

déterminisme fatal. zinc

Aussi l'auteur, appliquant à cette interprétation des faits sa

théorie de l'automatisme supérieur, dit qu'il y a dissociation sus-

polygonale. « Le polygone du sujet n'obéit plus iL son centre 0,

parce que les communications centrifuges sont interrompues

entre 0 et le polygone. Ce dernier obéit au centre 0 de l'hypnoti-

seur. »' D'où cette définition schématique de l'état de suggestibi-

lité : « C'est un' polygone émancipé de son centre 0 qui obéit au

centre 0 de l'hypnotiseur \ »

Si la psychologie de l'hypnose était en réalité telle que nous

venons de la décrire avec M. Grasset, nous convenons que le sché-

ma et la théorie de l'auteur acquerraient une large part de pro-

babilité. Mais l'observation des sujets hypnotisés, leur psycholo-

gie, amène, selon nous, l'esprit libre de toute hypothèse à des

constatations bien différentes et comme la théorie, de Grasset

est contenue dans ces quelques lignes de dissociation des centres

psychiques, nous nous permettrons d'étudier l'hypnose avec quel-

ques détails.

Lorsque l'on dit à un sujet parfaitement éveillé, assis en face de ,

soi, qu'en le regardant dans les yeux,,on va l'endormir, quelle

espèce d'acte fait-on ? On essaye de convaincre un être dese placer

dans un état différent de celui où il se trouve, état qui consiste d'abord

1 Voir notre premier article.

- Nous employons les mots habituels : dormir, sommeil hypnotique...,

bien que ces termes soient impropres et ne représentent pour nous qu'un

vocabulaire de comparaison grossière employé à une époque où les

idées émises sur ces phénomènes étaient totalement erronées.

3 Page 68..

CONCEPTIONS DE L'HYPNOTISME ET DE L'HYSTÉRIE. 128

à fermer les paupières et à rester plus ou moins immobile : chose

absurde en réalité, véritable suggestion au sens éthymologique et

précis que Babinski a développé dans son travail 1. Si le sujet

tombe dans cet état d'inertie apparente, peut-on dire que son moi,

que son intelligence n'ait pas accepté l'idée suggérée. En aucune

façon, et au contraire Grasset l'avoue plus loin lui-même

il faut que le sujet veuille se laisser hypnotiser. On n'hyp-

notise pas tout le monde, parce qu'on ne suggestionne pas

tout le monde, c'est-à-dire : on ne fait pas réaliser par tous des

actes notoirement absurdes ou contraires à la réalité.

Le fait de rester soudain immobile, les yeux fermés, de répondre

aux questions de l'hypnotiseur, d'accomplir des actes commandés

par lui, nécessite un état mental (ou psychique) un état du « moi »

spécial, le même d'ailleurs qui caractérise les sujets hystériques.

Mais cet état particulier, pathologique du moi, n'exclut nullement

la participation du raisonnement, de l'intelligence, du centre 0 de-

Grasset. Et la preuve en est que l'on peut faire accomplir par

un sujet hypnotisé des actes éminemment délicats, subtils, où

l'intelligence la- plus aiguë entre en jeu d'une manière évidente.

Toutes les expériences de cumberlandisme appelées à tort de

double vue pratiquées avec des sujets hypnotisés prouvent que

l'intelligence (le centre 0) est aussi éveillée qu'à l'état normal.

Ceux-là manieront avec fruits la thérapeutique suggestive qui

sauront habilement comprendre l'intelligence, le psychisme supé-

rieur du malade hypnotisé. C'est en s'adressant quelquefois à un

sentiment de vanité, d'orgueil, d'affection jusque-là effacé, et en

éclairant ce coin de la psychologie intime, que tel hypnotiseur a

pu guérir un malade hypnotisé sans succès auparavant.

L'état mental du sujet hypnotisable, loin d'être inconscient

(polygonal) est, comme on voit, parfaitement conscient. C'est au

centre 0 de Grasset que vous vous adressez et c'est lui que

vous devez suggestionner ou persuader. Mais, dira-t-on, comment

se fait-il qu'un être intelligent accepte avec son moi (son centre 0)

une chose absurde comme l'état d'hypnose. Nous répondrons que

même si on ne pouvait expliquer le fait, il faudrait bien l'enregis-

trer, s'il est exact. Mais l'explication, selon nous, ne paraît pas

impossible. Les sujets que l'on hypnotise sont généralement des

malades qui ont confiance dans le médecin ; cette confiance leur

fait accepter d'avance la formule thérapeutique qu'il va prescrire.

Une première partie de cette formule consiste dans l'obtention

de l'hypnose : « Je vais vous endormir et je vous guérirai. » Si

l'état mental d'une femme atteinte de monoplégie brachiale hys-

térique consent à ce mode d'intervention, il n'y a pas de raison

' Définition de l'hystérie. Société de Neurologie .

'12G REVUE CRITIQUE.

pour que vous ne lui fassiez pas accepter d'abord l'idée d'être

totalement inerte, c'est-à-dire pour que vous ne transformiez pas

cette monoplégie en paralysie apparente des quatre membres et

du corps. Cette transformation, résultat de l'acceptation par son

état mental pathologique de votre suggestion, la convainc de

votre puissance en vertu du même principe de causalité erronée

qui fait attribuer par les hommes à des objets inanimés ou ima-

ginaires un pouvoir sur leur destinée. Cet état psychologique de

croyance à votre puissance permet à cette malade d'accepter tous

les termes intermédiaires par lesquels vous ferez ensuite passer

son esprit afin d'obtenir la guérison. Pour informulés que soient

ces raisonnements intermédiaires, ils n'en existent pas moins et

voici, développée, la série nécessaire : ,

1° Vous vous en remettez à moi, du soin de vous guérir ? ` ?

(Réflexion du moi, du centre 0 : Oui, puisque j'ai confiance en

vous). "

2° Vous êtes atteinte d'une paralysie partielle et pour vous en

débarrasser, je suis obligé de vous endormir.

(Réflexion du'moi, du centre 0 : Il a guéri d'autres personnes

atteintes de la même affection, il les a endormies, il peut m'en-

dormir).

3° Vous voici endormie, vous ne pouvez plus ouvrir les yeux, ni

vous lever, ni remuer les bras.

(Réflexion du moi, du centre 0 : Je suis paralysée complètement.

Tout à l'heure je n'avais qu'un bras de paralysé. Ce médecin a eu

le pouvoir de me paralyser tout entière). -

4° Quand je vous aurai réveillée en soufflant sur vos yeux, vous

ne serez paralysée d'aucun membre. Pour vous prouver que je puis

défaire une paralysie, il me suffit de frotter votre jambe gauche...

vous pouvez la remuer.

(Réflexion du moi du centre 0 : Ce médecin m'a paralysée entiè-

rement, et il m'enlève une partie de cette paralysie. (A ce moment,

le centre 0, le « mot commande aux mouvements de la jambe

gauche).

5° Je n'ai qu'à souffler sur votre jambe pour la paralyser de

nouveau. Voyez ! (Le moi ne commande plus aux mouvements de

la jambe). Je vais vous réveiller complètement et vous pourrez

remuer tous vos membres, vous serez guérie.

(Réflexion du moi, du centre 0 : Ce médecin m'a paralysé des

organes qui ne l'étaient pas auparavant, il vient de défaire une

paralysie qu'il avait provoquée, il peut guérir les paralysies.

Réveil et guérison. ou grande amélioration de la monoplégie bra-

chiale).

IL est entendu que cette série de raisonnements, de reflexions,

de réponses du moi aux injonctions persuasives de l'hypnotiseur

ne se font pas avec cette netteté toute' schématique. Mais le fond

CONCEPTIONS DE L'HYPNOTISME ET DE L'HYSTÉRIE. 127 -1

delà psychologie de l'hypnotisé réside néanmoins dans la croyance

au pouvoir de' l'hypnotiseur. Aussi, avant la période scientifique,

des personnes instruites ont pu croire qu'un fluide passait de

l'hypnotiseur à l'hypnotisé et que les magnétiseurs possédaient

plus ou moins de ce fluide.

Les faits sont réels, l'interprétation seule était erronée. Le fluide

c'est le pouvoir, la confiance qu'inspire l'hypnotiseur et ce pou-

voir est extrêmement variable. Tel hypnotiseur aura une grande

influence de persuasion sur tel sujet et n'en aura qu'une très faible

sur tel autre. L'esprit des divers sujets n'est pas influençable par

des procédés identiques. C'est un des plus forts arguments pour

démontrer que le moi de l'hypnotisé participe activement aux

phénomènes hypnotiques et que c'est par lui que l'on obtient la

guérison en sachant trouver le meilleur moyen psychologique de

le persuader.

Mais alors, répondra Grasset, pourquoi certains sujets, atteints

de manifestations particulières, ne sont-ils pas guéris sans hypno-

tisme, par la seule suggestion ou persuasion à l'état de veille.

Nous répondrons qu'avant les pratiques hypnotiques des mani-

festations identiques ont guéri par d'autres moyens de persuasion,

ce qui prouve que l'hypnose, avec la prétendue dissociation sus-

polggonale, n'est pas indispensable. La crainte, la douceur, l'in-

carcération, la foi dans le surnaturel et les piscines ont guéri des

accidents similaires.

Puis l'hypnose, ajouterons-nous, par la puissance dont elle pare

l'hypnotiseur dans la pensée du~sujet, est un moyen persuasif de

premier ordre, et enfin il ne faut pas oublier que les sujets hypno-

tisables ont un état mental spécial, caractéristique de l'hystérie ',

du pitltiatisrne comme dit Babinski, état pathologique du moi.

De même que certains chevaux ne sautent pas un obstacle avec tel

cavalier et le sautent aisément avec tel autre, de même l'état de

suggestibilité présente des variétés qui sont pour le moi patholo-

gique ce que représentent pour le moi normal les particularités du

caractère.

Ainsi, tandis que l'étude psychologique des sujets hypnotisés

amène M. Grasset à penser que le moi, l'intelligence volontaire est

paralysée et remplacée chez eux par le moi de l'hypnotiseur

s'adressant à des centres automatiques (au polygone), cette même

étude nous convainc au contraire, avec Babinski, que l'hypnose

est un état mental particulier, dans lequel la personnalité du sujet

se confie volontairement aux conseils persuasifs de l'hypnotiseur

1 Grasset n'admet pas l'identification entre l'état de suggestibilité.

caractéristique de l'hypnose et l'hystérie. Nous aurons l'occasion de dis-

cuter ce point à propos des rapports de l'hypnotisme avec l'hystérie. ! De ? 0u persuader et : xTOç (guérissable).

128 REVUE CRITIQUE.

et peut accomplir des actes d'une finesse, d'un jugement, d'une

pénétration qui démontre la participation active des centres psy-

chiques supérieurs.

Mais nous prévoyons une nouvelle objection de M. Grasset. Com-

ment expliquer, si on admet l'activité des centres supérieurs intel-

lectuels dans l'hypnose, l'absurdité de certains actes, les halluci-

nations sensorielles, les contradictions psychologiques avec la

réalité objective.

Vous dites, par exemple, au sujet hypnotisé de saisir l'oiseau

qui est perché sur votre doigt et le sujet étend la main pour pren-

dre une bête imaginaire.

Nous répéterons, encore une fois, que l'hypnose présuppose

nécessairement un état psychique spécial, pathologique, et que

s'il n'en était pas ainsi, l'hypnotisé ne différerait en rien d'un

simulateur. Mais de ce fait que le moi est perturbé d'une certaine

manière. il n'en résulte pas que l'intelligence soit paralysée. Un

malade atteint de la maladie du doute, sait parfaitement que ses

angoisses, ses scrupules sont absurdes. Ce malade, souvent fort

intelligent, a conscience de l'inanité de ses craintes : celles-ci n'en

existent pas moins. Grasset soutiendra-t-il que dans les phobies

les délires conscients, l'intelligence est absente. Nous ne le pen-

sons pas : ce serait aller contre toute évidence. Des faits multiples

prouvent que les phénomènes intellectuels sont très complexes et

que le moi peut n'être pas normal dans quelques-unes de ses

nombreuses manifestations sans pour cela que l'intelligence, le

raisonnement soient anéantis ni même affaiblis. Ne voit-on pas

des hommes éminents, doués d'une intelligence supérieure,

admetre sans critique la realité de phénomènes en désaccord avec

l'observation scientifique.

Maintenant, si Grasset nous demande de préciser la nature

intime de la perturbation mentale caractéristique de l'hypnose et

de l'hystérie, de démonter les ressorts cellulaires de ce méca-

nisme mystérieux, nous lui répondrons que nous n'avons pas la

prétention d'expliquer ni le pourquoi des phénomènes, ni leur

cause première. Nous nous gardons de faire couvre de métaphy-

sicien, tâchant simplement d'observer des effets et d'en comparer

les caractères pour une définition et une classification.

III. L'auteur étudie ensuite les procédés d'hypnotisation et

les divers degrés de l'hypnose. Nous ne le suivrons pas dans sa

revue de tous les travaux publiés depuis plus de vingt ans sur ces

points de détail. Peut-être si Grasset avait accepté la concep-

tion de Babinski, n'aurait-il pas consacré tant de pages à des tra-

vaux historiquement intéressants, mais sans grande valeur cli-

nique.

Au sujet des procédés employés pour produire l'hypnose, nous

CONCEPTIONS DE L'HYPNOTISME ET DE L'HYSTÉRIE. 129 9

retrouvons la divergence des deux conceptions dans cette phrase :

M Quand on endort par la fixation d'un objet brillant où est la

suggestion ? x (p. Il 1), et plus loin : « Comment le coup de gong

de la Salpêtrière donne-t-il l'idée du sommeil à un sujet qui l'en-

tend pour la première fois, il devrait plutôt donner l'idée du réveil

(p. 114). Nous répondrons, au nom de Babinski, ancien chef de cli-

nique de Charcot, que si les hystériques s'endormaient au premier

coup de gong, c'est parce qu'elles étaient placéesàcôté des grandes

hypnotiques malléables au commandement. Aucun fait ne prouve

que la suggestion ait été étrangère à ces expériences. Et puisque l'oc-

casion se présente de revenir sur le grand hypnotisme, observé à

la Salpêtrière, disons nettement que le milieu hospitalier, que le

cadre de ces phénomènes psychiques représente l'élément princi-

pal de suggestion. C'est par le rassemblement des hystériques, par

la contagion mentale, et par l'intérêt que l'on porte à l'étude de

leurs manifestations hypnotiques que sont créés les plus remar-

quables spécimens.

Notre maître reconnaît d'ailleurs que ses idées, à cet égard, se

sont modifiées, et que les restrictions qu'il énonça dans un travail

ancien le grand et le petit hypnotisme ne doivent pas être mainte-

nues. Pour exprimer toute notre pensée, nous ajouterons que

nous avons eu personnellement l'occasion d'étudier quelques-'

de ces grandes hypnotiques de la Salpêtrière, de celles qui

dormaient au coup de gong. Il nous a suffi de leur donner la

gestion inverse, pour les réveiller avec ce procédé. Tout ré

dans la suggestion, pourvu que l'on ne pense pas cor

Bernheim que la suggestion peut réaliser ou guérir tous

phénomènes morbides. La suggestion (et la persuasion) a

domaine que l'expérience seule, armée de l'observation criti

peut délimiter.

Nous ne nous étendrons pas sur les degrés et les nombre

classifications des états hypnotiques. Ici, comme dans tout. --

pathologie on observe tous les intermédiaires, depuis la plus faible

malléabilité du moi, jusqu'à la réalisation, toujours par sugges-

tion, de l'état hypnotique le plus complet. Tel sujet fait preuve

seulement d'une docilité mentale suffisante pour la guérison per-

suasive, tel autre présente dès la première séance un caractère de

souplesse extrême en réalisant toutes les suggestions, y compris

l'hémi-hypnotisme.

IV. Dans le chapitre suivant Grasset se livre à une étude

analytique des suggestions qu'il classe en intra-hypnotiques et

post-hypnotiques. Les suggestions intra-hypnotiques sont elles-

mêmes subdivisées en motrices, sensitives, psychiques et d'actes

(p. 179). L'auteur reconnaît lui-même que cette division est arti-

ficielle et schématique. Aussi ne nous étendrons-nous pas longue-

Ascmves, 2° série, t. XVII. 'J

130 ' REVUE CRITIQUE.

ment sur ce chapitre. Nous sommes forcé cependant de relever

quelques points de doctrine. , -

Se fondant sur des expériences qui gagneraient, ou qui plutôt

perdraient, à être répétées avec un contrôle rigoureux, Grasset

pense que chez les sujets en hypnose paralysés d'un seul membre,

- le dynamomètre révèle une augmentation de force dans le mem-

bre correspondant de l'autre côté. Il rapproche ces faits de ceux

observés par Brown-Séquard après la vivisection d'un nerf ou

d'une moitié de la moelle et du bulbe : inhibition d'un côté, dyna-

mogénie de l'autre.

Ces observations inexactes proviennent de cette même concep-

tion erronée : localisation possible dans un territoire anatomique

déterminé, cérébral, bulbaire ou médullaire de l'agent « Sugges-

tion » ou de l'agent « Hystérie ». A priori, en effet, on pouvait

concevoir qu'il en fut ainsi. Mais l'observation scrupuleuse des

faits vient infirmer cette hypothèse et montrer que la suggestion

(ou l'hystérie, nous y reviendrons) ne peut se localiser dans des

systèmes anatomiques, ne peut produire les mêmes effets qu'une

lésion organique cérébrale, bulbaire ou médullaire.

La suggestion porte sur la personnalité, sur la volonté et l'ima-

gination, sur ce que Grasset appelle le centre O.En fait, on n'observe

jamais dans les paralysies suggérées ni exagération des réflexes

tendineux, ni épilepsie spinale légitime, ni aucun des signes décelant

une irritation de la voie pyramidale. Cette assertion fondée sur

l'observation et l'expérience, Babinski l'émettait pour la première

fois il y a plus de dix ans. On n'a pas encore présenté à la Société

de Neurologie un seul cas de paralysie nettement hystérique ou

suggérée, vierge de toute association organique, qui soit accom-

pagné de l'exagération des réflexes ou de l'extension des orteils.

Est-il utile de répéter les mêmes idées au sujet des dissections

anatomiques que la suggestion peut soi-disant produire.

La suggestion ne peut disséquer physiologiquement que ce que

la volonté peut normalement dissocier. Une aphasie et une agra-

phie de cause suggestive sont loin d'être identiques à une aphasie

et à une agraphie par lésion cérébrale. Tandis que les organiques

se présentent à l'observateur avec une constance dans les détails,

une sobriété dans l'expression, une dissociation physiologique de

l'écriture et de la parole qui sont la preuve de l'incapacité fonc-

tionnelle d'un groupe de neurones détruits ou lésés, les agraphies

et les aphasies de l'hypnose de même que le mutisme sont

variables d'un jour à l'autre, au gré de l'hypnotiseur. paraissant

se localiser aujourd'hui sur tel vocable et demain sur tel autre;

elles prouvent par leur variabilité, leur caractère souvent théâtral,

qu'elles proviennent d'un trouble de la volonté, trouble du centre 0

de Grasset, et que nées tout entières de la suggestion, elles

disparaissent totalement par la persuasion.

CONCEPTIONS DE L'HYPNOTISME ET DE L'HYSTÉRIE. 131

A propos des hallucinations optiques, Grasset constate avec

tous les auteurs ayant étudié cette question, que l'oeil du sujet

hypnotisé se comporte en tous points comme l'oeil d'un sujet nor-

mal : il obéit aux lois de l'optique. Et tandis que l'auteur cite

des expériences où l'intelligence du sujet hypnotisé entre en jeu

avec une finesse très grande (expériences des miroirs et des

prismes), il n'en conclut pas moins, croyant étayer sa théorie et

son schéma que « seul, le polygone utilise des impressions reçues,

mais non perçues par le centre 0. » A ce même ordre d'idées se

rattache la théorie polygonale des anesthésies. On détermine par

suggestion l'insensibilité à la douleur, et à la température. Ces

anesthésiques se comportant dans toutes les expériences minu-

tieuses, comme s'ils sentaient réellement (ce qui est la vérité).

Grasset en conclut, fidèle à sa théorie, que les excitations péri-

phériques sont reçues par le polygone jouant le rôle de centre auto-

matique conscient mais ne sont pas perçues par le centre 0, véri-

table centre de la personnalité entière, morale et libre. Lorsqu'on

étudie attentivement ces anesthésies, on se rend compte qu'elles

sont psychiques au premier chef. On peut les comparer à celles

des Aissaouas, des martyrs, ou simplement de tout homme distrait.

Disons d'ailleurs que le stoïcisme ne va jamais très loin et qu'un

courant faradique intense, .une brûlure quelque peu sérieuse, suffit

ordinairement à faire apparaître sur la face du sujet des signes

évidents de douleur. En persuadant à l'hypnotisé que l'anesthésie

va disparaître et faire place à une hyperesthésie, il n'est pas rare

d'obtenir instantanément cette métamorphose. Nous ferons obser-

ver que la recherche de la sensibilité se pratique généralement à

l'aide d'une aiguille et il n'est pas un seul individu qui ne soit

capable, en faisant appel à un peu de courage ou en distrayant

son esprit pendant quelques secondes, de paraître ainsi anesthé-

sique. Ce qui prouve le caractère psychique de ces anesthésies

c'est que jamais les hypnotisables (les hystériques) ne se brûlent

et ne se font pratiquer une grande opération sans chloroforme.

Pour ce qui se rapporte aux suggestions psychiques et d'actes

nous ne ferions que nous répéter en mettant encore en évidence la

différence fondamentale entre la conception de M. Grasset et celle

de Babinski. -

Disons seulement, parce que le fait n'a peut-être pas été exprimé,

que l'absence de mémoire au réveil vis-à-vis des suggestions intra-

hypnotiques est plus apparent que réel. Il suffit d'exciter l'atten-

tion du sujet sur les diverses phases par lesquelles son esprit a

dû passer, pour voir ressusciter tous les phénomènes de l'hypnose

avec leur véritable caractère de perception mentale.

Si on compare encore à ce point de vue l'amnésie des épilep-

tiques avec celle des hypnotiques, on se rend aisément compte de

la différence de nature qui existe entre ces deux états : l'épilep-

132 REVUE CRITIQUE.

tique, au sortir de sa crise est amoindri intellectuellement, ne se

souvient en rien de ce qui s'est passé, quel que soit le moyen

persuasif employé pour raviver sa mémoire. Il y a eu véritable

paralysie momentanée des centres psychiques. Chez l'hypnotique,

au contraire, l'amnésie est superficielle, le sujet a tout entendu

. avec son esprit et peut se rappeler les moindres détails pourvu que

l'on ait la curiosité de stimuler ses fonctions mentales et de lui

montrer que l'on désire qu'il en soit ainsi.

Grasset, étudiant les modifications de la personnalité, cite

les cas et expériences célèbres de Richet, de Ribot, de Bourru et

Burot, expériences auxquelles il applique sa théorie de la désa-

grégation sus-polygonale. Pour l'auteur, la personnalité normale

est formée de deux individualités collaborant : l'individualité

polygonale et l'individualité supérieure 0 (p. 260). Dans les cas de

personnalités successives, suggérées par 1 hypnotiseur ou chez les

médiums, l'association du centre 0 et du polygone se rompt et les

personnalités secondes ne prennent consistance que dans le poly-

gone désagrégé.

Nous pourrions montrer en citant l'auteur qu'il semble se con-

tredire à vingt-cinq lignes de distance. Il a d'abord admis comme

personnalité vraie, normale l'ensemble [0 + polygone], puis plus

loin, alors que le polygone est désagrégé, il dénomme 0 tout seul

« le moi identique et intangible » (p. 207).

Mais nous préférons réfuter par des faits cette argumentation

un peu obscure, de l'aveu même de l'auteur. Pourquoi ne pas

admettre qu'un sujet hypnotisé puisse jouer des personnages

divers, comme un acteur, comme un mime ?

Est-ce que Fregoli, dans ses exercices, change réellement de

personnalité ? Il simule, avec plus ou moins de ressemblance, des

personnages que son moi connait plus ou moins. Demandez à un

sujet hypnotisé d'imiter un personnage qu'il ne connaît pas :

l'imitation sera fantaisiste.

Toutes les personnalités suggérées ou évoquées ont des rapports

intimes avec le moi de l'hypnotisé ou du médium. Elles en ont

l'orthographe et la syntaxe. Ajoutons qu'un certain nombre de

faits étiquetés jusqu'à ce jour troubles hystériques de la person-

nalité, ressortissent en réalité à la pathologie mentale (perturba-

tion du centre 0 dirait Grasset). C'est affaire de définition et

ensuite de classification. '

A propos des suggestions dans les appareils habituellement sous-

traits à la volonté l'auteur rapporte un grand nombre d'expé-

riences et de découvertes physiologiques empruntées à l'ouvrage

de Jules Soury. Ces expériences si elles étaient confirmées -

prouveraient que l'écorce cérébrale contient un grand nombre de

centres en rapport avec la volonté et cependant intermédiaires

entre les centres réflexes et les centres moteurs volontaires déjà

CONCEPTIONS DE L'HYPNOTISME ET DE L'HYSTÉRIE. 133

connus. Grasset cite les hystériques 'de Sollier qui, subcons-

cients et anesthésiques, peuvent faire contracter volontairement

leurs muscles lisses non soumis normalement à l'action de leur

volonté (p. 272). On rapporte encore ces numéros de Barnums qui

peuvent arrêter leur coeur à volonté.

Nous ne saurions trop nous élever contre ces assertions. Le

réflexe pupillaire à la lumière par exemple, met en jeu le muscle

irien à fibres lisses. Jamais la suggestion, ni la volonté, n'ont pu

inhiber le centre du mouvement réflexe lumineux. Nous avons

tenté l'expérience sur un grand nombre d'hypnotiques et d'hysté-

riques, même en pleine crise, et jamais nous n'avons obtenu un

résultat différent de la contraction' chez le sujet normal1.

De même, lorsque Grasset écrit « aucun organe n'échappe à

l'influence cérébrale, cela explique qu'aucun organe n'échappe à

la suggestion (p. 183), il tire une déduction hâtive, dans un syllo-

gisme dont les termes ne sont pas prouvés. Influence cérébrale et

influence de la suggestion ou de la volonté ne sont pas des termes

synonimes ni interchangeables. Le deczcbilus ac2clus dans une

hémiplégie organique est bien sous l'influence cérébrale, cause de

l'hémiplégie, et cependant la suggestion n'a aucune influence sur

cette complication.

Enfin, toutes les expériences ayant pour objet l'apparition de

troubles trophiques par suggestion et que rappelle l'auteur à

l'appui de sa these, sont loin d'avoir été faites avec toute la rigueur

nécessaire. Il paraît de plus en plus probable que les seuls phéno-

mènes provoqués par suggestion dans cet ordre de recherches

qui ne brille ni par le nombre, ni par la critique expérimentale

sont les troubles émotifs. La suggestion provoque une émotion

qui, elle, agit sur les centres vaso-moteurs. Le mécanisme est du

20 degré. C'est ce que Babinski pourrait appeler « les troubles

secondaires de l'hypnose » comme l'atrophie musculaire est quel-

quefois nn trouble secondaire de l'hystérie.

Pour terminer cette revue déjà longue des principaux chapitres

du livre de Grasset et pour ne nous occuper que du côté théo-

rique et clinique de leur conception, nous avons à envisager les

signes somatiques de l'hypnose et les rapports de l'hypnotisme

avec l'hystérie.

« Peut- on dans l'hypnose observer et étudier des sypmptômes

indépendants de toute suggestion » (p. 331). Telle est la question

que se pose l'auteur et à laquelle il répond affirmativement en

citant les faits de la Salpêtrière et quelques autres postérieurs. Si

le but de cette étude est atteint, si la conception de Babinski sur

1 Nous avons déjà développé cette idée dans un travail intitulé : Rela-

tions qui existent entre la syphilis et les troubles des réflexes piipil-,

I 'aires, Stheinheil, 1899.

134 REVUE CRITIQUE.

l'hypnose et l'hystérie a été clairement développée dans le précé-

dent article et dans celui-ci, il nous sera inutile d'insister. Nous

avons dit au début 'que la possibilité pour un sujet d'être hypno-

tisé prouve précisément chez lui l'état de suggestibilité. Etre

hypnotisé c'est subir une suggestion. Notre maître nous prie d'af-

firmer - et cette pensée ressort de tous ses travaux depuis dix

' ans - que si autrefois, conformément à l'enseignement de la

Salpêtrière il a cru que les phénomènes somatiques pouvaient ne

pas être exclusivement dus à la suggestion, il est aujoùrd'hui

convaincu que la suggestion ou l'auto-suggestion est leur unique

cause.

Dans sa définition de l'hystérie, Babinski a établi que si hysté-

rique et hypnotisable ne sont pas deux termes synonymes, ils

représentent deux états mentaux séparés par une nuance seule.

Les troubles hystériques ne se différencient en rien des troubles

provoqués dans l'hypnose par suggestion et tout ce que nous avons

dit dans ce travail des phénomènes hypnotiques peut être main-

tenu intégralement des phénomènes hystériques. Les premiers "

sont provoqués, les seconds sont spontanés, en apparence au

moins.

La préoccupation constante de Babinski depuis dix ans a été de

prouver que les manifestations nerveuses organiques pouvaient se

différencier par l'étude de leurs caractères intrinsèques, des mani-

festations hystériques qui paraissaient à beaucoup identiques. Et

tandis qu'il découvrait le phénomène des orteils, la flexion com-

binée de la cuisse, le signe du peaucier, l'hypotonicité musculaire

comme caractères décelant une irritation organique de la voie

pyramidale, tandis qu'il soutenait que l'exagération des réflexes

tendineux, l'épilepsie spinale légitime, les troubles du vertige vol-

taïque n'appartiennent pas non plus à l'hystérie, il se rendait

compte par l'expérimentation que les phénomènes suggérés dans

l'hypnose sont identiques aux phénomènes hystériques. Provoquez

par suggestion chez une hypnotique une hémiplégie et envoyez

ensuite la malade consulter un neurologiste en lui recommandant

de ne pas dire qu'elle a été hypnotisée, quel sera le diagnostic :

hémiplégie hystérique. Comme dans l'hémiplégie hystérique, il

n'y aura, en effet, ni exagération des réflexes tendineux, ni phé-

nomène des orteils, ni aucun des signes caractérisant une lésion

organique; comme dans l'hémiplégie hystérique la persuasion

pourra 'obtenir la guérison instantanée. Ainsi deux groupes de

symptômes pathologiques apparaissent : d'un coté les organiques

avec leurs caractères anatomo-cliuiques bien délimités, de l'autre ,

les hystériques et hypnotiques dont le seul caractère essentiel

est d'apparaitre par suggestion et de pouvoir disparaître totale-

ment par persuasion.

En résumé, nous croyons avoir montré que la conception de

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 135

M. Grasset, théorie et schéma du centre 0 et du polygone, n'est

pas confirmée par les faits cliniques. Et nous voudrions insister en

terminant sur les points les plus importants : 1° Dans l'hypnose

comme dans l'hystérie, c'est l'état mental du'sujet qui n'est pas

normal ; c'est sur le moi que l'on agit par suggestion ou persua-

sion. 2° Dans l'hypnose comme dans l'hystérie, le sujet réalise

seulement des phénomènes que la volonté et l'imagination pour-

raient réaliser à l'état normal. Aussi les paralysies, les contrac-

tures, les troubles de sensibilité hystériques ou h3 pnotiques dif-

fèrent-ils par certains caractères très nets des paralysies, des con-

tractures, des troubles sensitifs observés dans les maladies orga-

niques et que le moi normal est incapable de reproduire. L'hys-

térie (ou l'hypnose) est une grossière simulatrice.

3° Un certain nombre de phénomènes morbides qui ont pu, par

coïncidence, être observés chez des sujets hystériques ont été, à

tort, dénommés hystériques. Le cadre de l'hystérie a été bientôt

trop agrandi. Une étude scrupuleuse, édifiée sur une définition,

revisera la classification de symptômes qui n'appartiennent pas à

l'hystérie et établira que la suggestion hypnotique ne peut réaliser

et guérir complètement que les phénomènes hystériques. A notre

maître Babinski revient, selon nous, l'honneur d'avoir sollicité

cette revision clinique par l'exposé d'une définition précise qui

contient, en peu de lignes, une large partie de la neurologie. -

REVUE DE -PATHOLOGIE MENTALE.

1. Crétinisme ; par WALTER SANIJS MIL (The New-York Médical

Journal, 22 février 1902).

Après un court historique du sujet, l'auteur aborde la question

du traitement du crétinisme et du myxoedème par les préparations

thyroïdiennes, dont il indique comme on l'a fait avant lui, les in-

dications, les contre-indications et le mode d'emploi ; il rapporte

en terminant une observation propre à démontrer que le myxoe-

dème après s'être amélioré, rétrograde facilement quand on sus-

pend pendant un certain temps les préparations thyroïdiennes, et

aussi que ces préparations donnent des résultats favorables non

seulement dans l'enfance, mais aussi dans l'âge adulte (le malade

qui fait le sujet de l'observation avait vingt-sept ans).

1 H . DE ilUSGRAVE-CL9Y.

136 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

II. Les rapports des symptômes mentaux avec les maladies soma-

* tiques; par Nathan Rac. (The Journal of Mental Science, Octo-

bre 1902).

Le point principal sur lequel l'auteur s'est proposé d'insister est

le suivant :

^ Chaque année, beaucoup de personnes sont envoyées sans né-

cessité dans les asiles d'aliénés, ce qui oblige l'asile à disposer

d'un grand nombre de lits pour les cas aigus : or il est déjà encom-

bré par les cas chroniques et n'a pas la place suffisante pour les

cas aigus. ' '

Le remède proposé est celui-ci : dans chaque ville, il faut créer

un hôpital de réception pour les maladies mentales; il pourra être

ou non rattaché à l'hôpital général ; lés malades y seront placés

dans les meilleures conditions possibles et soignés par des méde-

cins versés dans l'étude de la psychiatrie. Dans un grand nombre

de cas, le malade guérira, et sera rendu à sa famille ; ceux qui ne

seront pas guéris dans un délai de six semaines seront certifiés

aliénés et dirigés sur un asile. En outre, la direction du « Work-

house » devrait prendre les dispositions nécessaires pour garder

les aliénés pendant vingt jours dans la salle de son infirmerie, avant

qu'ils soient transférés à l'asile, dans les cas bien entendus ou l'in-

ternement serait reconnu nécessaire.

Les avantages de ce système sont manifestes : d'abord un grand

nombre de malades ne seraient l'objet ni d'un certificat d'aliéna-

tion, ni d'un internement, qui jettent sur eux un discrédit pour

toute leur vie ; ensuite il y aurait là, pour les étudiants, une faci-

lité, qu'ils n'ont pas actuellement à se familiariser avec l'étude des

cas aigus de maladies mentales. R. DE Musgrave-Clay.

III. Note sur la pathogénie de la folie diabétique; par W.-R DAw-

son. (The Journal of Mental Science. Octobre 1902).

Il résulte des considérations cliniques, pathologiques et chimi-

ques exposées dans ce travail, que l'on est autorisé à conclure que

la diminution de l'apport d'oxygène aux cellules corticales, est,

selon toute probabilités, la principale cause de la folie particulière

"au diabète; cette cause est d'ailleurs puissamment secondée par

un mauvais état général de la nutrition (lequel est du à l'action de

la même cause sur d'autres tissus, action démontrée par les atro-

phies multiples qui caractérisent la maladie) et par d'autres in-

fluences encore. On serait tenté de supposer que la dégénérescence

et l'atrophie finale du tissu nerveux est simplement due à une

cessation, ou plutôt à une diminution de fonctionnement; mais il

est vraisemblable que le processus est ici plus complexe.

R. DE Musgrave-Clay.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 'l31

IV. L'évolution du délire dans quelques cas de mélancolie; par

Lionel Ÿl°EATIiERLY. (The Journal of Mental Science. Juillet 1902).

Dans ce court mémoire, qui ne contient, dit l'auteur lui-même,

ni théorie, ni idées nouvelles, mais seulement quelques observa-

tions, avec les déductions qu'elles paraissent comporter, il s'agit

d'attirer l'attention sur certains cas de mélancolie, dans lesquels

les idées délirantes peuvent légitimement être rapportées à des

faits réels, appartenant à la vie récente du sujet, faits qui naturel-

lement sont exagérés, déformés et aboutissent à une délusion pré-

cise. Les réalités sont souvent insignifiantes et vagues; c'est pour-

quoi elles passent fréquemment inaperçues si on ne les recherche

pas avec soin.

L'auleur relate deux observations tendantà prouverqueles délu-

sions des mélancoliques ne sont pas purement imaginatives, mais

qu'elles ont pour point de départ un fait réel qui prend en quelque

sorte possession, de la pensée tout entière, surmonte la volonté,

pervertit la raison et aboutit à un délire défini. Dans le traitement

des cas de cet ordre, les demi-mesures ne servent à rien, la meil-

leure marche thérapeutique à suivre est la suivante : Séparer le

malade de toutes ses associations ordinaires et le placer dans un

milieu absolument nouveau. Remonter sa santé physique : rien

n'égale pour cela le traitement en plein air, tel qu'il est actuelle-

ment adopté pour la tuberculose. Occuper son esprit par des pro-

menades et des distractions variées, sans jamais le fatiguer, mais

sans lui laisser le temps* de réfléchir à ses misères. Gagner sa con-

fiance, ne jamais le tromper, ne jamais permettre qu'il soit trompé

par le personnel de l'asile. Il ne faut en effet jamais tolérer que

les serviteurs de l'asile obtiennent l'obéissance des malades par

des promesses qui ne seraient pas tenues, non plus que par un

assentiment donné à leurs idées délirantes.

Il. DE Musgrave-Clay.

V. Les symptômes pupillaires chez les aliénés et leur valeur; par

T. P. CowEN. (The Journal of Mental Science. Juillet 1902).

Il est commun de rencontrer chez les aliénés des troubles des

fonctions motrices de l'iris; toutefois la paralysie générale fournit

autant de cas que toutes les autres formes de folies réunies. Les

troubles moteurs de l'iris se constatent par des observations por-

tant sur les points suivants : 1° dimensions des pupilles ; 2° inéga-

lité ; 3e contour marginal ; 4° mobilité; 5° adaptation réflexe : a)

accommodation à la lumière directe; 6) à la stimulation consen-

suelle ; c) à l'excitation cutanée ou sympathique; 6° états irido-

moteurs liés à l'accomodation ou à la convergence. L'auteur rap-

pelle quelques notions physiologiques relatives au fonctionnement

138 , REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

de la pupille, et constate que chez les aliénés, on rencontre deux

groupes d'anomalies pupillaires ; le premier groupe est caractéri-

sé par l'inconstance des variations pupillaires, le second groupe

est formé par les cas où les mouvements pupillaires sont altérés

d'une manière persistante et progressive. Le premier groupe con-

cerne les maladies autres que la paralysie générale et la démence

sénile, tandis que dans ces deux dernières maladies les deux grou-

'peso de symptômes peuvent se rencontrer. On s'occupera spéciale-

ment ici de la paralysie générale, L'auteur rappelle les différents

symptômes pupillaires observés dans cette maladie, et il conclut

que la valeur diagnostique et pronostique des altérations fonction-

nelles de la pupille est très douteuse. Dans les cas de démence sé-

nile, le caractère accusé des anomalies pupillaires est d'un fâcheux

augure. Sans s'arrêter à des hypothéses douteuses, il est vraisem-

blable que l'agent toxique, dans ces maladies choisit d'une ma-

nière en apparence capricieuse, mais en réalité réglée par une di-

minution de résistance, certaines fibres et cellules. Ce sont naturel-

lement les plus délicates et les plus spécialisées qui sont atteintes

les premières, et le degré suivant lequel sont intéressés les mus-

cles internes de l'oeil paraît être un index très sensible du degré de

l'état toxémique. R de iUSGRA VE-CLA Y.

VI. Remarques sur les hallucinations ; par CONOLLY 1TORhfAN (The

'Journal of Mental Science. Janvier 1902).

Lorsqu'on se trouve en présence d'un état hallucinatoire, l'un

des premiers points à examiner est de savoir si les hallucinations

s'étendent d'une manière inusitée à tout le champ sensoriel ou

bien si d'une façon inusitée aussi, elles sont limitées à l'une des

divisions de la sensibilité. Il n'est pas rare de rencontrer des cas

dans lesquels tous les sens, et, si l'on peut ainsi parler, plusieurs

subdivisions des sens, sont atteints : il en est d'autres où un ou

deux sens sont seuls intéressés, ou du moins le sont d'une manière

tellement prédominante que les troubles des autres sens sont dou-

teux ou masqués. L'auteur se propose ici d'envisager les données

fournies à cet égard par un cas soumis actuellement à son obser-

vation, cas qui n'est pas très complet en ce qui touche l'extension

aux divers sens, puisque pour deux d'entre eux, il n'est pas dé-

montré qu'ils soient atteints : l'un de ces deux sens est celui de la

vue, l'autre celui de l'activité mentale.

Personne ne conteste l'importance du sens de la vue au point de

vue de nos relations avec le monde extérieur. Le sens de l'activité

mentale a échappé à l'attention des physiologistes parce que, en

réalité, il est à peu près sans importance à l'état normal. Ordinai-

rement, nous faisons usage de nos facultés sans avoir la sensation

nette de notre activité mentale, et si nous devenons conscients de

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 139

cette activité,nous sommes ordinairement sur la limite d'un état anor-

mal. Dans la paranoïa où nous observons beaucoup de ces dissections

psychologiques opérées par la maladie et qui jettent sur le fonc-

tionnement normal une lumière inattendue, le sentiment de l'acti-

vité mentale a souvent une grande importance, car ses manifesta-

tions morbides ont pour effet de renforcer la croyance à des

influences occultes et pernicieuses : rien, en effet, n'est plus com-

mun que d'entendre ces malades se plaindre qu'on agit sur leurs

pensées, qu'ils sont forcés de penser d'une certaine manière ; il est

souvent manifeste, chez les malades, que l'on n'est pas en présence

de simples suppositions ou inductions, mais que la sensation de

l'activité mentale (s'exerçant d'une façon anormale) est aussi nette

que l'hallucination de tout autre sens.

La malade de M. Conolly Norman est une femme de soixante

ans, ancienne domestique, de santé apparemment bonne. La pu-

pille gauche est un peu plus grande que la droite : toutes denx

réagissent normalement à la lumière et à l'accommodation. La

vision est bonne dans les deux yeux. La malade paraît intelligente,

gaie et tranquille : elle cause intelligemment, mais quand on l'in-

terroge sur son état, ses réponses révèlent de nombreuses hallu-

cinations, en même temps que des délusions se rattachant au

type de la paranoïa commune organisée. Voici les principales :

Sensibilité générale : douleurs aiguës et vives sur toute la surface

du corps (piqûres, élancements, étincelles); douleurs plus cons-

tantes et plus sourdes desjointures et des muscles. Sens de la tempé-

rature : outre les sensations de brûlure ou de chaleur douloureuse,

elle a des bouffées de chaleur et des boulfées de froid glacial. Sens

musculaire : sensation d'extrême fatigue, de lassitude douloureuse

sans cause : les membres paraissent en plomb. Sensibilité tactile :

elle se plaint d'une sensation particulière que l'auteur n'a

jamais observée auparavant; elle sent, à certains moments, que

ses mains sont sèches et vernies : ce n'est pas une sécheresse rude,

mais une sécheresse lisse, elle décrit leur surfàce en la comparant

à du verre ou à de la soie, elle constate cette sensation en frottant

ses doigts les uns contre les autres. Ce fait est intéressant d'abord

parce qu'il est rare, ensuite parce qu'il se rapproche de ce que res-

sentent les malades qui prennent de la belladone : la sensation est

peut-être purement nerveuse, mais il se peut qu'elle soit déter-

minée par la suppression de la transpiration sous l'influence de la

belladone. Inutile de dire que la malade n'en prend pas : d'ail-

leurs la sécheresse de la peau ne correspond nullement à la sen-

sation éprouvée. Sensation du goût : elle perçoit avec intensité des

saveurs acides et astringentes, et pas seulement avec le dos de la

langue, comme il arrive ordinairement dans les hallucinations

gustatives. Les physiologistes n'admettent que quatre saveurs :

aigre, douce, salée, amère ; l'auteur pense qu'il en faudrait

140 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

admettre au moins deux autres, la saveur astringente et la saveur

piquante, surtout la saveur astringente, qui n'a rien de commun

avec l'odorat. Sensations olfactives : elle est tourmentée par des

odeurs de matières fécales et autres substances dégoûtantes, ou

bien elle sent des parfums de fruits, de citrons surtout. Sensations

respiratoires : il y a toute une série de sensations qui se rattachent

à la respiration, et qui devraient, suivant l'auteur, être considérées

comme, constituant un sens particulier. Nous ne les percevons,pas

à l'état normal, mais nous en prenons conscience lorsque la respi-

ration est entravée : elles sont souvent liées aux hallucinations

olfactives, mais peuvent exister isolément. La malade se plaint de

ce qu'on lui fait des fumigations, on accroche sarespiration. Sensi-

bilité viscérale : , sensation de mouvement et de torsion dans l'ab-

domen ; on lui entre un bâton dans le corps et ou le tourne : ces

phénomènes sont communs chez les paranoïques et les hypocon-

driaques, ils sont probablement la représentation dans la con-

science de quelques troubles de la région. Sensibilité génitale : on

lui introduit un fil électrique dans le vagin, ce qui la gêne beau-

coup, en provoquant non seulement de la douleur, mais d'autres

sensations spéciales. Sensations visuelles : les hallucinations de la

vue paraissent faire défaut ; la malade dit bien que, il y a quatre

ans, à l'église, elle a vu un ange armé d'une épée nue ; mais l'au-

teur n'est pas certain qu'il s'agisse d'une hallucination vraie. Elle

ne dit pas qu'elle a vu un ange, elle dit qu'elle a eu la vision d'un

ange. Elle paraît attribuer moins de réalité à ce qu'elle croit avoir

vu qu'à ses hallucinations de l'ouïe. Sensation d'activité mentale : il

ne paratt pas y avoir d'hallucinations de cet ordre. Hallucinations

de l'ouïe : la malade entend des bruits variés qu'elle attribue avec

certitude à des machines électriques et magnétiques ; elle entend

aussi des voix qui parlent de ses actions et de ses affaires, qui

l'insultènt, la menacent, et prononcent souvent des paroles

obscènes et blasphématoires ; elles annoncent aussi les divers

moyens qui vont être employés pour la torturer ; quelquefois il y

a des voix qui plaident en sa faveur. L'auteur rappelle ici que

Seglas a divisé les hallucinations de l'ouïe en trois groupes :

1° hallucinations élémentaires (bruits vagues); 2° hallucinations

communes (bruits associés des objets définis); 3° hallucinations

verbales (une voix est entendue). Ces trois ordres d'hallucinations

se rattachent à des fonctions physiologiquement séparées, l'audi-

tion d'un bruit, la reconnaissance d'un son, la compréhension du

langage; ils sont corrélatifs aux divers états que l'on observe dans

une autre série pathologique, à savoir, la surdité corticale, la sur-

dité psychique et la surdité verbale. L'existence des « voies favo-

rables » parmi les hallucinations de l'ouïe est considérée comme

ayant une valeur pronostique fâcheuse, et l'expérience de l'auteur

confirme cette manière de voir. Un point intéressant, c'est que la

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 'J 41

malade entend les bruits et les voix avec l'oreille droite exclusive-

ment, alors qu'elle est absolument sourde de cette oreille. Or, elle

admettait un certain degré de surdité de l'oreille gauche, mais il.

fallut l'examen direct de l'audition pour lui apprendre qu'elle était

sourde de l'oreille droite ; or, elle l'était au point de ne pas en-

tendre la montre, même touchant l'oreille ou apqliquée sur le

crâne. Il parait démontré que c'est sur l'audition des voix qu'elle

se basait pour croire à l'intégrité de l'ouïe à droite. La conclusion

d'un spécialiste appelé à examiner son oreille fut qu'elle était

atteinte de surdité auditive ou labyrinthique à droite; avec état

assez satisfaisant de l'audition à gauche. L'association de lasurdité

avec les hallucinations de l'ouie a été signalée depuis longtemps,

par Colmeil, confirmée par Brierre de Boismont, et plus récem-

ment par Bail qui va jusqu'à considérer la surdité comme une

cause d'hallucination. Les hallucinations unilatérales isolées ou se

manifestant en même temps' que d'autres hallucinations, ont été

décrites, l'auteur les croit rares, bien que Dagonet ait peut-être

raison de penser qu'elles passent souvent inaperçues. Dans la plu-

part des cas publiés, elles peuvent être rapportés à des influences

périphériques. Il est à remarquer que dans le cas qui sert de base

à cette étude, les hallucinations de l'ouïe étaient seules unilaté-

rales. Si l'on écarte ici les hallucinations visuelles, qui sont dou-

teuses, et si l'on admet que les hallucinations de l'ouïe ont ouvert

la scène, on se trouve en présence d'un dilemne : si les lésions ou

les imitations périphériques constituent un facteur important

dans la genèse des hallucinations unilatérales de l'ouïe, pourquoi

voit-on apparaître chez le même sujet des hallucinations bilatérales

de plusieurs autres sens ? Et d'autre part, avec une tendance

marquée aux hallucinations de tous les sens, pourquoi les halluci-

nations de l'ouïe, si communes chez ceux qui entendent et chez les

sourds, ne se manifestent-elles dans le cas actuel que du côté

sourd ? R. DE IUSGR.1VE CLAY.

VII. Deux cas de confusion mentale polynévritique; par le Dr

J. CRocQ. (Bull, de la Soc. de Méd, Mentale de Belgique, 1903,.

n° 108).

Ces deux cas concernent deux femmes âgées l'une de cinquante-

neuf ans, l'autre de soixante-sept ans, ayant toutes deux des habi-

tudes alcooliques et qui ont été atteintes de parésie des membres

avec atrophie musculaire accompagnée de troubles intellectuels

consistant surtout dans une incohérence du langage, de la déso-

rientation et de l'amnésie.

Il s'agit donc de deux cas de psychose polynévritique d'origine

alcoolique, affection qui d'après l'auteur devrait être placée désor-

mais dans le cadre de la confusion mentale. G. DENY.

142 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

VIII. La paralysie progressive d'après les documents de l'hôpital

territorial du gouvernement de Kharkow pendant douze ans

de 1890 à 1901, par B.-S. Greidenberg. (Obozrénié psiclaiutrü),

VII, 1902). -

-, Il est entré pendant ces- douze ans 4 759 aliénés hommes dont

- 684 paralytiques et 2 331 aliénées femmes, dont 116 paralytiques.

De 1890-1895 il est entré en tout, hommes et femmes, 2 84G aliénés

quelconques; de 4896-1901, ont en a reçu 424t, c'est-à-dire pas

tout à fait une fois et demie autant que pendant les six premières

années. De 1890 à 1895, il est entré 305 paralytiques hommes et

femmes; de 1896-1901, il en est entré 495, c'est-à-dire plus d'une

fois et demie autant que pendant le premier sexennat Le

nombre des aliénés hommes pendant ces douze années s'est élevé

à un peu plus du double du chiffre des femmes; le nombre des para-

lytiques hommes pendant le même temps a presque été six fois

plus grand que celui des paralytiques du sexe féminin. La

proportion des entrants paralytiques du sexe masculin parrapport

aux entrants quelconques est de 14,3 p. 100 pour la première

période, et de 14,4 pour la seconde : celte proportion en ce qui

concerne les femmes est de 3,3 pour le premier sexennat, et de

6 p. 100 pour le second. Il y a un paralytique pour 7 admissions

masculines, et une paralytique pour 20 admissions féminines.

Les causes principales de la paralysie générale sont : la syphilis,

l'alcoolisme et l'hérédité. - Il serait désirable qu'on fit des recher-

ches sur un programme uniforme en chaque hôpital territorial

d'aliénés de la Russie. - P. KERAVAL.

IX. La mélancolie intermittente ; par M. Gilbert Ballet (Presse

Médicale, 14 mai 1902).

Une femme de cinquante-six ans se présente à la consultation ,

de l'Hôtel-Dieu avec l'aspect d'une mélancolique : expression de

tristesse empreinte sur le visage, lenteur de la démarche et des

mouvements, parole lente et monotone, accablement physique et

moral absolu, crises d'angoisses avec idées de suicide, conviction

de ne pas guérir, etc. L'histoire de cette malade est la suivante :

père atteint de mélancolie sénile, migraineux depuis l'âge de seize

ans, se marie à vingt-cinq ans.

4r° grossesse survenue en 1872 sans incident ; 2° grossesse en

1873, à l'âge de vingt-huit ans, suivie quinze jours après la nais-

sance de l'enfant d'une crise de dépression analogue à la crise

actuelle, ayant duré six mois et se terminant brusquement; en

1876, nouvelle grossesse sans incident; en 1877, 2° accès de mélan-

colie après la naissance du 4° enfant; un troisième se produit en

1880 à la suite de la ° grossesse, puis 3 années se passèrent. En

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 143

1883, après la naissance du 8e enfant, survint un accès nouveau

qui dura dix-sept mois. Puis la santé se rétablit parfaite; une

Se grossesse en 1889 ne provoqua aucun accident et pendant les

dix années qui ont suivi, la malade put se croire guérie. Le début

de la crise qui l'amène à l'hôpital date de trois mois. Nous som-

mes ici en présence de la mélancolie périodique ou intermittente.

Pour mettre en évidence la différence existant entre cette psy-

chose et la mélancolie simple, M. Ballet présente à ses élèves une

autre malade de soixante-sept ans, également atteinte de mélan-

colie. Cette dernière, qui n'avait jamais présenté aucun trouble

mental, est devenue, à la suite de la mort d'un parent, sombre,

déprimée, pour arriver peu à peu, en une année, à l'état de mélan-

colie profonde où elle se trouve aujourd'hui. Premier caractère

différenciel, caractère d'évolution : ici, unique accès survenu à un

âge avancé, là, accès débutant dans la jeunesse et se répétant

pendant toute la vie.

Le médecin de l'Hôtel-Dieu a vu des crises de mélancolie inter-

mittente se reproduisant tous les ans et toujours à la même épo-

que. D'autres caractères permettent de faire le diagnostic :

Mélancolie simple : apparait à la suite d'une émotion, d'un cha-

grin, se développe d'une façon lente, progressive, dure des années,

disparait peu à peu. 'Mélancolie périodique : survient en dehors de

toute cause provocatrice, début soudain, accès généralement

courts, terminaison brusque, guérison du jour au lendemain,

n'existe guère que chez la femme.

On peut retrouver dans ces deux affections la même dépression

physique et mentale profonde, les mêmes idées de ruine, de culpa-

bilité, de damnation. Cependant la mélancolic périodique s'ac-

compagne le plus souvent de dépression mélancolique simple.

Les malades offrent une anesthésie morale, une indifférence fort

pénible pour l'entourage. Elles sont instables, impatientes, ont

l'esprit de contradiction présentent des mouvements impulsifs,

frappent les femmes. Les tentatives de suicide sont aussi rares

dans la mélancolie, intermittente que communs dans la mélancolie

simple. Enfin, symptôme très important, les accès successifs sont

identiques les uns aux autres chez la mêmé malade ; c'est le même-

mode de débuts, la même physionomie, les mêmes douleurs, les

mêmes obsessions. ,

Indépendamment du diagnostic avec la mélancolie simple, le

médecin ne doit pas confondre la mélancolie périodique avec les

accès de dépression des dégénérés. Mais, alors que dans l'inter-

valle des accès, les mélancoliques intermittents ne présentent aucun

stigmate mental, les déséquilibrés se font remarquer par les singu-

larités et les anomalies de leur constitution psychique.

La mélancolie intermittente n'est qu'une forme clinique de la

psychose périodique, pouvant être alterne, à double forme oucircu-

144 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

laire. Elle est souvent héréditaire. Cette affection mentale ne sévit

pas toujours sous les traits accusés et les caractères décisifs que

décrivent les aliénistes. Le monde est plein de circulaires, qu'on

tient pour de simples lunatiques parce qu'on les trouve tantôt plus

indifférents aux choses du monde et plus tristes qu'il ne convient,

tantôt plus exubérants et plus entreprenants que de raison. Nous

sommes peut-être tous des circulaires, la psychose n'étant que

l'exagération d'un état physiologique normal. R. LEROY.

X. Contribution à l'étude des manifestations initiales de la

paranoia, par A. Pick (Neurolog. Centralblatl , XXI, 1902).

L'auteur fait quelques critiques au travail de Head : Certain

mental changes thaï accompany viscéral diseases. Brain XCV.

Head décrit un état de soupçon vague, inhérent à des malades

atteints d'affections viscérales : « leurs amis voudraient se défaire

d'eux, parlent d'eux ; les infirmiers leur en veulent ; les personnes

de leur entourage les méprisent ; on ne les regarde pas comme

malades. » C'est, dit le savant anglais, de l'autophilie, mais elle

diffère de l'autophilie des aliénés en ce qu'il n'existe pas d'idées

délirantes proprement dites ; c'est vague, mobile ; cela se dissipe

par la simple contradiction des gens à qui s'adressent ces re-

proches. '

M. Pick fait remarquer que les mêmes caractères se retrouvent

chez les aliénés, et qu'inversement les conceptions hypochon-

driaques, toutes pathologiques soient-elles, ne suffisent pas à faire

considérer celui qui les exprime comme un aliéné. La phase de for-

mation du délire,, dont parle M. Head, est postérieure au stade

dans lequel le paranoique présente cette autophilie et son auto-

philie, qui n'est pas encore du délire, est exactement semblable à

celle de M. Head. Le paranoique au premier stade de son délire

n'est pas constamment bien convaincu de la réalité de ses hypo-

thèses. A ce premier stade, aussi, existe de l'appréhension, un sen-

timent de vague inquiétude. P. Keraval.

XI. -Contribution à l'étude des troubles.mentaux périodiques, par

ENNEN. (Neurolog. Centralbl. XXI, 1902).

Trois observations intéressantes.

Dans la première, il s'agit d'un homme de soixante-neuf ans

atteint depuis 1869 de folie circulaire. Le 22 août 1898 il est en

état d'agitation maniaque consécutive à une période de dépression

qui a. duré dix-huit mois. Il est encore très excité le 16 novembre

quand il est frappé d'un ictus apoplectique avec aphasie motrice,

paralysie flasque du bras droit, légère parésie faciale, à forme

graduelle : d'excité, il devient déprimé et il reste déprimé et

hypochondriaque malgré l'amélioration graduelle aussi des acci-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 145

dents paralytiques. Nouvelles attaques ultérieures suivies d'excita-

tion maniaque légère ne durant que peu de jours. Affaiblissement

intellectuel pendant les dernières années. Artériosclérose. -

Les deux autres cas concernent l'alternance quotidienne de

l'agitation et de la dépression soit chez un circulaire, soit chez un

sénile de soixante-dix ans. Chez ces deux malades existe aussi

de l'artériosclérose. Il est penser que la marche des phénomènes

tient à des troubles vasomoteurs et nutritifs sans qu'on puisse

s'expliquer le mécanisme réel de l'agitation et de la dépression.

P. KERAVAL.

XII. Esquisse historique de l'étude de la possession; parM.-I. LAKH-

TmE. (Obozi-énié psichiat1'ii, VI, 1901).

Travail très intéressant à lire en entier. P. KERAVAL..

XIII. L'élément histrionique dans les maladies mentales; par

THÉODORE A. KELLOGG. (The New-York Médical Journal, 16 juillet

1902). -

Les faits cliniques et les conclusions de ce travail ont été résumés

par l'auteur de la manière suivante : ,

L'élément histrionique dans les maladies mentales est dans cer-

tains cas le résultat direct d'impulsions irrésistibles et de poussées

émotives. Dans d'autres cas, il a pour cause des délusions ou des

hallucinations terrifiantes qui contraignent le sujet qui les éprouve

à commettre des actes tragiques. 11 procède dans certains cas

d'une croyance erronnée, centrale et organisée, qui conduit le

malade à jouer un rôle monomaniaque sensationnel. Les phases

théâtrales se développent consécutivement à l'amour morbide, à

la jalousie, à toute autre passion dominatrice, ou bien aux véri-

tables changements de personnalité qui sont propres à la folie.

Lorsque l'élément histrionique revêt la forme de la caricature, il

représente une manifestation aberrante de la loi d'imitation, loi

qui est fondamentale dans les processus de formation mentale.

Au point de vue clinique, les actes histrioniques sont spontanés et

involontaires chez certaines malades, accompagnés d'un certain

degré de réflexion et de liberté chez d'autres, et, dans un petit

nombre de cas, gouvernés par les intentions volontaires les plus

perverses et toute la ruse de l'aliéné.

Le diagnostic de l'élément histrionique en tant que partie

intégrante d'une maladie mentale, jette une certaine lumière sur

quelques phases obscures de la pathologie mentale, éclaircit le

caractère embarrassant des cas où la simulation parait se mêler

à la réalité, et est enfin de nature à exercer une influence pratique

appréciable sur le pronostic et le traitement des maladies men-

tales. - R. de MUSGRAVE-CLAY.

Archives, 20 série, t. XVII. 10

146 ' REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XIV. Un cas d'idiotie avec amaurose; par A. HymANsaN. (The New-

Y01'k Médical Journal, 12 juillet 1902).

Il s'agit d'un garçon de quinze mois, né de parents sains, sans héré-

dité fâcheuse, sauf du côté d'un grand oncle qui a eu onze enfants,

les quatre premiers bien portants, les cinq suivants malades et les

deux derniers bien portants : ceux qui étaient malades avaient la

tête grosse, le visage épais, le rire idiot; ils étaient paralysés, n'y

voyaient pas et ne pouvaient rien retenir dans la main. A quatre

mois l'enfant est agité, un écoulement par l'oreille est constaté, et

guérit par une médication appropriée. Jusqu'à sept mois l'enfant

parait normal, mais vers le huitième mois il cesse de s'intéresser

à ce qui l'entoure, il laisse tomber sa tête et exécute avec ses mem-

bres des mouvements sans but : l'auteur l'examine et pense à

l'hydrocéphalie ; la tête était très grosse (19 pouces de circonfé-

rences) ; les fontanelles étaient saillantes, fluctuantes, largement

ouvertes. Au dixième mois les fontanelles se fermèrent graduelle-

ment et la tête cessa de grossir. Mais le développement psychique

et physique parait arrêté. L'enfant est anémique, les muscles sont

mous et flasques, les mouvements spontanés cessent progressive-

ment : l'aspect se rapproche de celui des idiots. Réflexes nor-

maux ; réaction faradique normale. Voici ce que l'on constate à

l'examen des yeux : pupilles légèrement contractées également

des deux côtés. Pas de réaction à la lumière. Ni strabisme, ni

nystagmus. A l'ophthalmoscope, en un point qui correspond à

la tache jaune de chaque oeil, une large plaque blanc bleuâ-

tre, à bords ramollis et recouvrant une étendue à peu près

double de celle du disque optique : au centre, un point

rouge brun, à peu près circulaire, tranchant nettement sur la

plaque blanche qui l'entoure. Cet état est comparable à celui que

l'on observe sur la tache jaune dans les cas d'embolie de l'artère

centrale de la rétine. Les nerfs optiques sont atrophiés, de couleur

grisâtre, et les vaisseaux tant artériels que veineux sont notable-

ment diminués de calibre.

L'enfant a vécu jusqu'à l'âge de dix-neuf mois. - L'autopsie n'a

pas été autorisée. H. de Musgrave-Clay.

Il s'agit d'une forme particulière d'idiotie, l'idiotie amau-

J'otique. Nous en avons dit, naguère, quelques mots dans le

Traité de médecine de Brouardel et Gilbert, d'après les

auteurs car nous n'en n'avons pas observé un seul cas. Il y

aurait là matière à une thèse ou à une monographie intéres-

sante. Aux travaux cités nous ajouterons : Idiotie amauro-

tique, par Sachs (Journ. of nient. sc.1897, p.178; d'après N.Y.

Med JOU1'n. 30 may 1896 ; Deux cas d'idiotie familiale

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 147

amaurotique, par Latrick et par Ch. H. Beard (The journ.

of ne1'v. and ment, diseases, may 1900, analyse dans A1'ch.

de neur., t. XI,.1901, p. 62 à 63) ; On arnau1'otic fantily

idiocy, par Sachs (Pediat1'ics, 1903, n°l, p. 8). B.

XV. Note sur un cas de fétichisme; par le Dr DE 111ooa. (Bzill. de ltt

Soc. de n.éd. mentale, de Belgique, 1903. juin-août).

11 -s'agit d'un vagabond qui avait encouru déjà une vingtaine

de condamnations, lorsqu'il fut soumis à une expertise médicale.

Or, sur ces 20 condamnations, 7 avaient été encourues pour vols

de vêtements de femmes, vêtements le plus souvent sans valeur

et qu'à diverses reprises le prévenu avait jetés après les avoir

lacérés. Pressé de questions, celui-ci finit par avouer que les

vêtements de femmes, surtout lorsqu'il les lacérait, provoquaient

chez lui des sensations voluptueuses pouvant aller jusqu'à l'érec-

tion et l'éjaculation. Les vols auxquels cette perversion sexuelle

l'avaient entraîné avaient un caractère impulsif nettement mar-

qué et étaient précédés d'une phase d'angoisse qui disparaissait

lorsque l'objet convoité était en sa possession. Cette perversion

sexuelle était donc la manifestation d'un état de dégénérescence

que venaient encore affirmer un certain nombre de stigmates

physiques. G. DENY.

XVI. Etude sur la folie circulaire et sur les formes circulaires

des psychoses ; par SouKLAiioFF et GANNOUCK1"E. (JOU1'1l. de

neurologie, 1903, n° 7). , '

Des recherches faites à la clinique psychiatrique de Moscou les

auteurs concluent que la folie circulaire se rencontrerait dans

1,94 p. 100 des cas de maladies mentales et s'observerait deux fois

plus souvent que la manie et trois fois plus rarement que la mé-

lancolie. Les femmes y seraient plus exposées que les hommes :

sur 86 malades atteints de psychose circulaire on compte 83 fem-

mes et 34 hommes. Sur 77 cas où les renseignements ont pu être

recueillis, 10 ne présentaient aucune tare héréditaire, 60 accu-

saient de l'alcoolisme ou des maladies mentales chez le père ou

la mère et 7 des tares analogues chez des collatéraux. Autrement

dit la prédisposition héréditaire existait dans 87,01 p. 100 des cas

et faisait défaut dans 12,99 p. 100.

Ces chiffres prouvent que l'hérédité dans la folie circulaire se

rencontre aussi souvent que dans la manie pure (87 p. 100) et la

mélancolie (82 p. 100).

Au point de vue de l'âge où débute la folie circulaire les auteurs

ont noté que dans presque les deux tiers des cas cette affection se

manifeste entre quinze et vingt-cinq ans.

148 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. '

Sur 80 sujets qui en étaient atteints il n'y en avait pas un seul

chez qui la maladie ait débuté après 42 ans. Les accès de folie cir-

culaire sont bien plus rapprochés que ceux de la mélancolie réci-

divante dans laquelle le plus souvent on n'observe que deux

accès;- Sur 76 cas on a pu avoir des indications nettes sur le

point de savoir si l'affection avait débuté par une phase de mélan-

colie ou par une phase de manie ; on a noté 50 fois un accès'de

dépression comme première manifestation et 26 fois seulement

avec accès d'excitation. La folie circulaire débuterait donc dans la

grande majorité des cas par un stade mélancolique. Enfin dans

l'immense majorité des cas également les stades de dépression et

d'excitation ne seraient séparés par aucun intervalle lucide. Mais

il est arrivé assez souvent qu'on a pris pour un retour complet à

la santé un léger état de dépression qui dans certains cas peut

être assez prolongé pour durer plusieurs années.

Les auteurs font suivre ces renseignements statistiques de quel-

ques considérations sur la nécessité de différencier la psychose

circulaire du cours circulaire qu'on peut observer dans d'autres

psychoses quelques-unes aiguës et à terminaison favorable qui

ont été publiées à tort comme des exemples de folie circulaire

terminée par la guérison, ou encore à la suite de lésions organi-

ques circonscrises ou diffuses du cerveau.

Deux observations servent à illustrer ces considérations : l'une

de psychose récidivante qui à la suite du développement de

lésions arterio-séléreuses a pris un cours circulaire, l'autre de

psychose aiguë de forme également circulaire qui s'est terminée

favorablement. G. D.

XVII. De la possession diabolique au Japon; par G. REITz (Oboz-

rénié psichiatrü, VI, 1901).

Etude fort documentée, qui montre que la possession diabolique

au Japon,-malgré ses particularités, provoquée par des supersti-

tions locales, ressemble fort à la démonomanie d'Europe. L'hys-

térie sous-jacente serait évidente, alors même que Baelg ne nous

eût pas signalé l'hystérie dans l'étiologie du ritsumé tsuffi (posses-

sion par des renards). P. KERAVAL.

XVIII. Contribution à la pathologie de la perversion sexuelle;

par L.-W. BLOUMENAOU (Obozrénié psichiatl'ii, VII, 1902).

Il s'agit d'un jeune héréditaire dégénéré qui ne ressent aucun

attrait pour les jeunes filles et les femmes jeunes, qui est au con-

traire invinciblement attiré vers les femmes âgées qui ont des che-

veux gris. Il prétend n'avoir pas encore cédé à cette passion. Il

éprouve pour une vieille tante une sorte d'amour platonique. Mais

a personne qui maintenant éveille en lui les idées les plus cour

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 149

pables, c'est une dame de soixante ans, à cheveux blancs, dont les

traits sont réguliers et beaux. Ni masochisme, ni fétichisme. Une

jeune femme en perruque grise on à cheveux poudrés ne lui dit

rien : « c'est de la falsification. » Maux de tête, pollutions noc-

turnes avec rêves voluptueux et apparition de femmes âgées con-

nues ou inconnues. Ce jeune homme est aussi obsédé : il éprouve

la phobie de dire quelque parole inconvenante, en présence notam-

ment d'une vieille personne aimée, de l'éreuthophobie, un peu

d'agoraphobie. Il raisonne bien, a le don de la parole, lit énormé-

ment. ' -

L'auteur a également observé une jeune fille assez jolie, dont

l'indifférence désespérait les jeunes prétendants. Elle ressentait une

attraction exclusive pour les vieillards. Migraines épouvantables.

Jadis danse de Saint-Guy.

Tout cela, c'est de la p1'esbyphilie erotique hétérosexuelle. On la

trouve enferme chez le fétichiste de trente-sept ans de Charcot et

Magnan (Archives de Neurologie, 1882, n° 12), et dans les observa-

tions de Krafft-Ebing et W.-M. Tarnowski où il existe de la pédé-

rastie presbyphilique homosexuelle (Psiichopathia sextialis, 2e édit.,

1901, p. 377. Wiestnik psichiati-ii, II, 1884, u 2). -

Il ne faut pas confondre cet état avec la passion provoquée par

une personne plus âgée que l'amoureux ou l'amoureuse, surtout

quand il s'agit d'une passion unique. Les qualités spéciales phy-

siques ou morales de l'objet- en question ou les conditions de

l'existence expliquent alors cet attachement. L'hystérie ou l'hysté-

ricisme provoque par contre certains « coups de foudre », sans

cependant les faire ranger dans la perversion sexuelle. Pour qu'il

y ait presbyphilie, il faut que le sujet ressente un appétit exclusif

ou du moins prédominant pour les personnes âgées et qu'il

demeure insensible aux jeunesses, ou que ses relations avec celles-

ci ne lui donnent pas une satisfaction complète.

L'héroïne de Poltava de Pouschkine, Marie, qui aime le vieux

Mazépa, qui a été ensorcelée par ses yeux merveilleux, est une

hystérique suggestionnée, car elle a une syncope hystérique au

moment où ses parents refusent sa main au vieillard.

Marie frissonna. Son visage

Se couvrit d'une pâleur sépulcrale.

Et froide, comme inanimée,

. La vierge tomba sur le perron.. P.' KERAVAL.

XIX. L'auto-intoxication comme cause de maladies nerveuses et

..mentales; par A.-I. linarmshr. (06orénié psichiatrü, VII, 1902).

Revue très sagace des documents actuels dans laquelle il importe

de signaler tout spécialement le tableau deMartius et la termino-

logie de Lewin et Jaksch. Quand on parcourt la liste des subs-

tances toxiques qui se forment dans l'organisme, on est contraint

150 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

de reconnaitre que l'immense majorité d'entre elles constituent

des poisons du système nerveux. Dépouillement des mémoires sur

ce sujet. « Si les faits,mis en relief semblaient peu convaincants,

décousus et mal étayés, il faudrait se rappeler que la question de

l'auto-intoxication n'en est qu'à ses débuts, et que la nature même

de ces travaux, leur extraordinaire difficulté, excusent la pauvreté

des faits... Il existe énormément d'éléments en faveur de l'excel-

lence dela voie dans laquelle on est engagé. » P. KERAVAL.

XX. De l'allochirie; par A.-W. Trapieznikow. (Obozrênié psichiatrii.

VI, 1901). - -

- ...

Ce trouble de la sensibilité consiste, comme on sait, en ce que

l'excitation nerveuse effectuée sur un point du corps semble au

malade provenir du point correspondant du côté opposé. L'auteur

en donne trois observations des plus intéressantes. La première,

par exemple, concerne un sous-officier d'infanterie noble, âgé de

vingt-deux ans, obéré d'une forte hérédité nerveuse paternelle et

maternelle, né avant terme, ayant subi une foule de maladies

infectieuses, et des traumatismes réitérés à la tête, sur la colonne

vertébrale, par tout le corps, qui a fait des excès sexuels de toute

nature jusqu'à épuisement. Il se serait empoisonné par erreur à

l'âge de dix-neuf ans, et depuis présente des phénomènes multiples

parmi lesquels des hallucinations en masse qui parfois occupent

simultanément la vue, l'ouïe, le toucher, la sensibilité générale.

Influence bienfaisante en l'espèce de la suggestion, par l'hypnose

et à l'état de veille. L'hypnose se produisait chez lui par tous les

modes, et en outre par le picotement de la peau à l'aide d'une

épingle. La peau de la plus grande partie du corps étant incom-

plètement analgésiée, les piqûres lui faisaient l'effet de légères

excitations rythmiques uniformes comparables à celles des passes

magnétiques, du miroir, etc., etc.

De l'étude de ces observations et des travaux des auteurs,

M. Trapieznikow tire que la théorie anatomique de l'allochirie ne

repose pas sur des éléments certains, et qu'il n'y a aucune raison

pour dire qu'il existe des allochiries spinales et des allochiries non-

spinales. On peut aisément expliquer tous les cas d'allochirie si on

considère celle-ci comme un phénomène mental, un phénomène de

réception erronée des sensations (Leyden, Fischer), le produit d'un

désordre de l'activité mentale. Et on le peut en s'appuyant sur le

phénomène du transfert, à i'aide de l'aimant et des métaux, de

l'allochirie provoquée par la suggestion pendant le sommeil hyp-

notique (Bosc). Ne regarde-t-on pas actuellement l'hystérie comme

une affection psychiqne ayant pour symptômes principaux l'affai-

blissement de l'aptitude à la synthèse et le rétrécissement du

champ dela conscience. P. KERAVAL.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 1S1

XXI. Une affection spéciale du système nerveux, survenant pen-

dant l'enfance et se traduisant par des troubles moteurs et de

la débilité mentale; par W.-Ai. BECHTEREW. (Obozrênié psichiatrü,

VI, 1901. Cei2li,alblait f. Veru6K/ ! M</{,N. F., XII, 1901).

Observation d'une fillette de dix-neuf ans se rapprochaut de

celles de 0. Giese (Neue Form des hereditaeren Nervenleidens;

Schwachsinn mit Zittern und Sprachstoerung. Deutsche Zeitsch1'. f.

Nervenheilk. XVII 1900). On constate de l'ataxie cérébelleuse, avec

des troubles de la parole, sans troubles de la sensibilité, qui a

évolué lentement dès l'enfance. On croirait à l'ataxie héréditaire

de Friedreich, mais il n'existe ni ataxie musculaire, ni phéno-

mènes choréiques, ni nystagmus, les réflexes patellaires sont con-

servés. Il existe des tremblements des membres, une certaine

rigidité, de la débilité mentale.

Cette observation diffère des cas de 0. Giese en ce que les

réflexes tendineux ne sont pas exagérés, non plus que l'excitabilité

musculaire, en ce qu'il n'y a pas de paralysies locales, tandis que

les parties périphériques des extrémités ont manifestement subi un

retard dans leur développement et qu'on y voit des accidents de

stase plus ou moins prononcés. A noter encore une tare hérédi-

taire excessivement chargée, l'accouchement avant terme, Bien

que l'affection ne se soit nettement manifestée qu'à l'âge de

neuf ans par l'apparition de symptômes cérébraux graves, les

signes de dégénérescence et l'arrêt de développement des

membres témoignent de son germe héréditaire, d'autant que la

marche de la malade a présenté dès le début des troubles cer-

tains. Depuis les accidents cérébraux, l'état morbide a progressé

lentement mais sans arrêt.

Les phénomènes de débilité mentale, les tremblements des

membres, les troubles particuliers de la marche empreints des

caractères de l'ataxie cérébelleuse, tout cela fait penser à une

affection corticale du cerveau, probablement associée à la dégéné-

rescence des faisceaux pyramidaux et des tractus cérébelleux des-

cendants. P. Keraval.

XXII. Contribution à la question des relations entre les rêves et

les conceptions délirantes; par A.-D. KazowsKY. (Neurolog.

Centralbl., XX, 1901).

Article déjà publié dans l'Oboz2-éîtié russe de 1900. Déjà analysé.

P. Keraval .

XXIII. Des troubles psychiques de la déglutition, ou dysphagie

psychique; par W.-M. BscnrEaEw. (06ozrénlé psichiatrii, VI,

1901. Ncurolog., Celit1'Ctlbl., XX, 1901).

152 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

Ce sont des états anxieux caractérisés par la crainte de déglutir

ou plutôt de s'étrangler, tantôt sans idée nette (phobie simple).

tantôt en vertu de l'obsession initiale que le morceau à avaler va

vous étouffer : dans ce cas, l'appréhension donne le' sentiment de

l'incertitude de l'acte et s'accompagne d'oppression, de battements

de coeur;-le patient fait des efforts pour déglutir aliments solides

ou aliments liquides, de préférence ou simultanément. Observations

de deux espèces à l'appui. '

Il s'agit toujours d'héréditaires qui souvent aussi sont atteints

d'accidents nerveux, principalement hystériformes ou neurasthé-

niques. Parfois la dysphagie est presque le seul complexus symp-

tômatique de l'état morbide. La dysphagie psychique se développe

souvent à l'occasion d'un incident, d'un morceau avalé de travers

ou demeuré accidentellement dans le gosier comme cela peut arri-

ver quand on mange précipitamment. Cet incident devient le choc

psychique qui donne le coup de fouet à l'état mental. Dès lors le

sujet s'observe en mangeant, appréhende d'avaler, éprouve de

l'angoisse à tout mouvement de déglutition : cette anxiété trouble

l'acte malgré l'absence de lésions organiques au pharynx, à l'oeso-

phage, de paralysies musculaires de la région. La dysphagie psy-

chique en rapport avec un état nerveux rétrocède, s'aggrave, réci-

dive, etc. suivant les allures de cet état nerveux. La dysphagie

psychique autonome est plus opiniâtre, plus persistante : c'est alors

que les voies alimentaires sont parfois imperméables il la sonde

elle-même; celle-ci butte contre l'extrémité la plus élevée de l'oeso-

phage, c'est-à-dire en un point où l'examen direct est aisé. Quand

la dysphagie cesse ou s'atténue, la sonde passe. Utilité de l'hyp-

notisme, de la faradisation locale, du traitement mixte au K. Br.,

associé de médicaments cardiaques, de codéine. P. Keraval.

XXIV. Confusion mentale et syndrome cérébelleux au cours de

l'urémie. Excellent effet de la lombo-ponction; par G. ScnEne.

La question de la lombo-ponction dans l'urémie cérébrale est

d'actualité, et la série des cas défavorables ne peut lui faire perdre

un terrain que les cas si heureux de MM. Marie et Guillain lui

avaient acquis. -

Chez le malade dont l'intéressante observation est rapportée par

M. Scherb, l'effet de la ponction lombaire fut caractéristique. Il

s'agit d'un homme de quarante-neuf ans, entré à l'hôpital avec des

symptômes insolites d'urémie cérébrale, empruntant le double

masque du syndrome confusion mentale et du syndrome cérébel-

leux. Une ponction lombaire de 20 centimètres cubes eut un effet

si nettement favorable, que le malade, amélioré presque sur-le-

champ, put sortir de l'hôpital quelques jours après. Une rechute,

survenue au bout d'un mois et demi, engagea l'auteur à faire une

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 153

nouvelle ponction de 30 centimètres cubes, dont l'effet, bien que

favorable, ne fut que transitoire (Revue neurologique, janvier 1902).

. E. B.

XXV. Du langage chez les idiots ; par le De MAUrnT>;.

D'un mémoire très documenté présenté pour le prix Belhomme

et récompensé par la Société médico-psychologiqzce, l'auteur tire les

conclusions suivantes :

1° Le langage manque souvent chez l'idiot, généralement faute

d'idées; 2° Son apparition, quand il existe, est tardive (souvent

après quatre ou six ans); 3° parfois cet arrêt de développement

n'est pas absolument congénital ; l'enfant a commencé à parler

comme un autre, quand, sous l'influence d'une maladie causant

l'idiotie, il devient muet irrémédiablement; 4° une fois apparu, le

langage, chez l'idiot, passe par les mêmes phases que chez l'enfant

sain, mais l'idiot met des années à franchir les étapes que l'enfant

parcourt en quelques mois; il s'arrête même à l'une de ces étapes;

5° Cette analogie avec le développement normal du langage

chez l'enfant n'est vraie que 'pour chaque branche du langage prise

séparément (chaque variété ayant son évolution spéciale, plus ou

moins rapide que les autres);

6° Les troubles d'articulation de la parole, en particulier, co-

existent fréquemment avec un langage relativement développé ;

7° ce n'est pas le langage expressif (parole, écriture, geste) qui est

en rapport avec le niveau intellectuel, mais la façon de com-

prendre le langage des autres; 8° ces troubles du langage tiennent

à des lésions qui peuvent atteindre divers points de l'encéphale,

du système nerveux périphérique, ou les organes d'articulation

suivant les cas, les centres du langage restant le plus souvent

intacts. 0

9° Les troubles du langage ne sont donc pas toujours incurables,

et on doit en entreprendre le traitement dans un triple but : per-

mettre à l'idiot de communiquer avec les autres hommes, déve-

lopper son intelligence et le rendre utile j'usqu'à un certain point,

à la société à laquelle il est à charge ; 10° le traitement devra

débuter le plus tôt possible, se faire sous la direction d'un méde-

cin, qui, connaissant bien tous les troubles auxquel il a affaire,

appliquera à chacun le traitement approprié (Annales médico-

psychologiqucs, juin 1902)." E. B.

XXVI. Un cas de glycosurie avec mélancolie et impulsions éroti-

ques ; par M. E. Cornu .

Tous les auteurs ont insisté sur la frigidité sexuelle des diabé-

tiques, et cette défaillance de leur génitalité est même un des

symptômes capitaux de la glycosurie. La présente observation fait

154 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

exception à cette idée généralement admise et montre une filiation

étroite entre la maladie sucrée et la perversion sexuelle ; l'impul-

sion aux actes érotiques diminua en même temps que s'abaissait

le taux du glucose, et disparut en même temps que l'excrétion

glycosurique. L'habitude elle-même que la malade pouvait avoir

contractée n'a pas persisté (Annales médico-psychologiques, juin

1902). E. B.

XXVII. Un cas de polynévrite et de psychose polynévritique

(maladie de Korsakoff) à la suite d'anthrax dans le cours d'une

psychose mélancolique aiguë ; par les D'g Serge, Soo6H ? vorF et

TCHELTXOFF.

Intéressante observation d'une malade de quarante-neuf ans qui

entre à la clinique psychiatrique de Moscou en état de dépression,

d'angoisse, de peur, avec idées hypochondriaques; l'état mélan-

colique chez elle était accompagné d'agitation motrice, de refus

d'aliments et de résistance à tout ce qu'on lui proposait. Puis,

assez vite, le tableau clinique changea ; la malade commença à'

manger ; l'émotion d'angoisse et les idées hypochondriaques

disparurent progressivement. Mais, en même temps que se déve-

loppait un anthrax auprès de la clavicude gauche, apparurent de

la faiblesse des extrémités, avec douleurs surtout localisées aux

pieds, anesthésie profonde et phénomènes paralytiques. Les

troubles de la mémoire vinrent compléter les symptômes carac-

téristiques d'une psychose polynévritique de Korsakoff paraissant

nettement en rapport avec l'infection du sang causée par la toxine

'pyohémique.

L'examen microscopique démontra des modifications du côté

de la moelle épinière, des nerfs périphériques et des muscles. La

coexistence de tous ces faits indique nettement que le cours de la

psychose mélancolique aiguë a été compliqué par une lésion orga-

nique de tout l'appareil nerveux et musculaire, qui porte le nom

de polynévrite, d'après l'un de ses symptômes les plus visibles

(Annales médico-psychologique5, juin 1902). E. BLIN.

XXVIII. Sur les psychoses chez les Juifs ; par le D1' PiLcz.

L'auteur s'est proposé de rechercher, à la clinique psychiatrique

du professeur von Wagner, à Vienne, si les Juifs ont une disposi-

tion plus grande à l'aliénation mentale, relativement à la popula-

tion aryenne, et, si oui, à quelles formes nosologiques spéciales des

psychoses ? ?

La réponse à la première question ne peut qu'être insuffisante,

car on ne trouve que peu de Juifs parmi les innombrables malades

du prolétariat de la capitale, clients de l'asile public : et cependant

alors que le rapport des Juifs à la population totale est de 8,86

p. 100, le Dr Pilez a trouvé 11 p. 100 d'aliénés juifs admis à la cli-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 155

nique. Les chiffres deviennent plus intéressants, quand on envi-

sage les malades divisés selon les types nosologiques divers : de

l'examen de 1437 cas, il résulte que la disposition des Juifs pour

les types nosologiques de l'aliénation mentale diffère de celle de

l'autre population en plusieurs points.

1° Il est très rare d'observer chez les Juifs une des psychoses

dont le facteur étiologique est l'abus de l'alcool ; 2° On n'observe

pas de différence entre les Juifs et les Aryens en ce qui concerne la

fréquence des psychoses dans l'étiologie desquelles, outre une dis-

position individuelle encore obscure, des causes accessoires (intoxi-

cations d'origine exo ou endogène, altérations des vaisseaux,

foyers cérébraux, etc...) occupent une place remarquable ; -

3° Les cas de démence précoce et de démence consécutive à une

psychose aiguë sont plus fréquents chez les Juifs ; 4° Les Juifs

fournissent un grand contingent au pourcentage de cette maladie

mentale sur laquelle, après la syphilis, le facteur du surmenage

intellectuel, l'épuisant strceggle for life, a une grande influence

étiologique, c'est-à-dire à la paralysie générale; -5° Les Juifs sont

fort disposés aux psychoses dans lesquelles la dégénérescence - ·

héréditaire est le facteur efficace presque unique.

Et les chiffres atteindraient une élévation considérable si l'on

pouvait y ajouter ces nombreux cas qui, sans tomber jamais aux

soins d'un asile, ne sont pas quand même à considérer comme

normaux, à savoir des formes plus légères de la folie circulaire et

surtout des espèces innombrables de la folie neurasthénique, des

phobies, perversions sexuelles, etc. : ces types hérédo-dégénératifs,

l'aliéniste ne les connait que par sa clientèle privée et l'on est

étonné de la grande quantité de Juifs qui en sont atteints (Annales

médico-psychologiques, février 1902). E. Blin.

XXIX. La folie au point de vue juridique en Allemagne ; par le

Dr H. KORNFELD, de Gleiwitz (Silésie). Médecin légiste (.llédico-

légal Journal, V. xxi, i'l° 1, juin 1903).

L'auteur fait une distinction entre les folies à substratum orga-

nique et celles qui en sont dépourvues (à notre connaissance), ad-

mettant des maladies organiques du corps (cerveau, etc.) par

opposition aux maladies mentales ou de l'esprit ( ! ). Mais son tra-

vail prend de l'intérêt en ce qu'il passe en revue tous les textes

juridiques allemands qui concernent la folie. 1

Ce sont, pour le Code civil depuis le 1°1 janvier 1900, en matière

de capacité civile, le paragraphe 104, section 2, incapacité pour

celui qui a des troubles mentaux caractérisés. § 3. Incapacité

pour l'aliéné séquestré. § 105. Incapacité pour l'interdit.

§ 114 et 1906. Assimilation permanente ou transitoire de l'in-

terdit ou interné pour folie; au mineur de sept ans. § 106. La

responsabilité de l'aliéné, comme des mineurs de 7 ans auquel il

156 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

est assimilé, ne s'étend qu'aux dommages causés. A 14 ans

(p. 1728, 2), son consentement est nécessaire pour rendre valable

sa légitimation. A 16 ans (p. 1302), la femme peut contracter

mariage.

Le paragraphe 2.229 admet le testament; le § 393 permet le

serment; quand il n'acquiert pas d'avantage légal en matière de

testament, il a besoin du consentement de ses tuteurs légaux

(p. 107-132. § 2). Il en a aussi besoin pour élire ou changer de

domicile (p. 8). Le paragraphe 56 du code de procédure criminelle

allemand admet l'interrogatoire de l'aliéné ou débile mental, comme

du mineur au-dessous de 16 ans, mais en dehors du serment.

Enfin, la loi criminelle, sect. 51, reproduit l'esprit de notre

article 64 du code pénal. Dr A. Marie.

XXX. A propos du diagnostic de l'épilepsie et de la paralysie géné-

rale ; par 11111. d. SÉGLAS et Henri Français. (Presse niédicale,

24 septembre 1902).

Il est quelquefois difficile de distinguer la paralysie générale de

l'épilepsie, surtout s'il s'agit d'épileptiques en voie de démence

présentant certains signes physiques rappelant ceux de la ménin-

go-encéphalite. L'observation suivante est intéressante à ce propos.

Un homme de vingt-huit ans, L..., entre à Bicêtre au mois de

mai 1900, dans un état de violente agitation survenue à la suite

d'un accès convulsif épileptiforme. Il présente de l'hébétude, un

embarras très accentué de la parole, de l'inégalité pupillaire, du

tremblement de la langue et de l'exagération des réflexes. Des

renseignements fournis par la mère apprennent que le malade a

depuis quinze ans des crises convulsives classiques qui ont débuté

deux jours après un violent traumatisme crânien. Depuis cinq ans

on a remarqué de la diminution de la mémoire de l'affaiblisse-

ment de l'intelligence et quelques rares idées de grandeur. L'em-

barras de la parole date de l'année précédente.

L... est donc un dément épileptique, mais n'est-il que cela ? On

a signalé du reste la coexistence de la paralysie générale et de

l'épilepsie. L'observation prolongée du malade a seule permis

d'arriver à un diagnostic précis. En deux années, l'état mental, loin

de s'aggraver, est devenu meilleur ou tout au moins resté sta-

tionnaire. Dans l'intervalle des crises, qui surviennent assez fré- -

quemment, L... manifeste plutôt des symptômes de démence épi-

leptique (apathie, confusion des idées, perte de la notion du temps

et du milieu) que ceux de la démence paralytique. L'embarras de

la parole, tout en étant permanent, est surtout prononcé à la

suite des accès. Enfin le cyto-diagnostic du liquide céphalo-rachi-

dien a été négatif. Dans ces conditions, il semble bien que la seule

étiquette à donner au' cas actuel est celle de démence épileptique.

' R. LEROY.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. un

XXXI. Séméiologie générale de l'idée de grossesse; par M. Thomas,

(L'Echo de Lyon, 15 mai 1902, n° 5.

M. Thomas range les différentes formes que peut prendre l'idée

de grossesse en deux grandes catégories : 1° Comme idée fixe :

idée fixe permanente ou obsession paroxystique. Dans ce cas l'idée

de grossesse domine la scène, c'est l'idée directrice. 2° Comme

phénomène secondaire mêlé à d'autres idées délirantes : a). Idée

de grossesse liée à d'autres conceptions délirantes ; b). Délire

de grossesse envisagé comme syndrome comparable au délire de e

négation.

L'auteur se base pour édifier sa classification sur dix cas qu'il

publie. D'après l'opinion de différents auteurs, Magnan, Arnaud,

Rousset et Viallon, Toulouse et Marchand, on trouve la simple

idée de grossesse dans toutes les vésanies. Le délire de grossesse

n'est pas chose commune, quant à l'idée fixe permanente et à

l'obsession paroxystique, l'auteur ne l'a pas encore vu signaler. La

genèse de l'idée de grossesse peut avoir un point de départ mental

ou organique. G. Carrier.

XXXII. Les rémissions spontanées de la paralysie générale tabé-

tique ; par M. PIERRET (Lyon médical, n° 51, 21 décembre 1902).

M. Pierret s'élève contre cette affirmation qui prétend que si le

tabes et la paralysie générale, spécifiques toujours, ne guérissent

pas plus souvent, c'est parce que les traitement dont on use sont

insuffisants.

A commencer par le tabes, l'auteur croit que l'on ne doit pas

invoquer uniquement l'étiologie syphilitiqne.

Il pense que la syphilis ne peut développer un tabes légitime que

chez des individus prédisposés par une faiblesse de leur sys-

tème sensitif, et de plus qu'elle n'est pas la seule maladie capable

de faire naître les premiers foyers d'inflammation (ergotisme,

alcoolisme, auto-intoxications, grippe, tuberculose). En outre si la

syphilis influe très souvent sur le développement des premières

névrites tabétiques, il est certain aussi que ces mêmes névrites

peuvent être réveillées et entretenues par toutes les causes, et elles

sont nombreuses, qui peuvent produire l'inflammation de= nerfs.

comme les auto-intoxications et les infections.. Ces notions jettent

une certaine clarté sur la cause réelle de l'insuccès des médica-

tions systématiques du tabes.

11 peut en être de même pour la paralysie générale.

M. Pierret reproche en somme aux auteurs, qui se sont occupés

récemment de la thérapeutique du tabes et de la paralysie générale,

de ne pas définir nettement à quel tabès, à quelle forme de para-

lysie générale ils ont eu à faire, et de ne tenir aucun compte des

158 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

successions et des superpositions de causes variées qui viennent

entretenir les foyers de névrite ou d'encéphalite qui primitivement

pouvaient bien être spécifiques.

Il y a en outre un fait, concernant spécialement le tabes, qui

vient diminuer sensiblement la valeur de certains résultats théra-

peutiques ; l'auteur veut parler des rémissions spontanées que

l'on rencontre fréquemment dans l'évolution de cette maladie.

La forme de paralysie générale qui précède, accompagne ou suit

le tabes se distingue, d'après M. Pierret, de la paralysie générale

proprement dite, par des différences cliniques ainsi que par sa

marche et sa terminaison.

Au point de vue clinique, le tabétique mégalomaniaque ou per-

sécuté, ou l'un ou l'autre, reste un sensitif même quand il arrive

a la démence. Ce fait donne au délire une fixité et une vraisem-

blance qui permettent de le reconnaître. Bien plus, on voit se

greffer sur l'état lypémaniaque de véritables bouffées de mégalo-

manie avec troubles moteurs; enfin la démence une fois établie, ne

perd jamais le caractère sensoriel qui tient aux localisations carac-

téristiques de la maladie primordiale (tabes). « Les tabétiques

déments sont toujours infiniment moins niais que les paralytiques

généraux vulgaires. »

Les différences que l'on trouve dans la marche, sont les ten-

dances régressives de la paralysie tabétique. Son évolution est

coupée d'arrêts brusques, de rémissions telles que les malades

sortent guéris des asiles. Ils peuvent même guérir une fois, deux

fois,pour retomber ensuite sous l'influence de causes qui ne sontpas

toujours spécifiques. Ils peuvent même guérir définitivement, non

de leurs tabes, mais des troubles intellectuels que l'auteur appelle

démences paralytiques transitoires.

Pour M. Pierret ces rémissions sont propres à la maladie

et caractérisent la paralysie générale tabétique qu'il rapproche

des paralysies générales toxiques, en particulier de l'alcoolique.

G. C.

XXXIII. Epilepsie d'origine nasale; par le D1' M. 1.9NMOIS (Société

Méd. des Hôpitaux de Lyon, 30 mai 1902).

M. Lannois rapporte l'observation d'un malade qui présente des

accidents épileptiformes par l'excitation du nez, plus particulière-

ment du cornet inférieur, dans sa partie supéro-convexe, à l'occa-

sion de l'ablation d'un polype nasal.

Cet ordre de faits, signalés par Rack, a sa place dans l'étude des

névroses réflexes d'origine nasale décrites par Voltolinie puis par

B. Fraenkel qui démontra qu'il s'agissait bien d'un réflexe, opi-

nion qui est bien établie aujourd'hui au'point de vue clinique et

par l'expérimentation. L'épilepsie réflexe a une base expérimen-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. , 1J9

tale solide, elle s'appuie sur l'expérience de Brown-Séquard quia

montré qu'on pouvait déterminer l'apparition des zones épilepto-

gènes chez le cobaye en coupant le sciatique, ou en prolongeant

une hémisection de la moelle, et que cette épilepsie pouvait même

se transmettre par hérédité.

L'opinion très fondée de l'intervention du mécanisme de l'auto-

intoxication dans les affections de l'estomac, de l'intestin, de l'uté-

rus, etc., ne doit pas faire perdre totalement de vue la possibilité

de l'acte réflexe comme moment déterminant de la crise.

G. C.

XXXIV. Etiologie de la paralysie générale; par Arthur W. HURD

(The American journal of Insanily, avril 1902, p. 565, 574).

La syphilis est la cause la plus habituelle de la paralysie géné-

rale. Elle peut agir soit directement, soit indirectement en débili-

tant l'organisme, le rendant vulnérable à d'autres influences, et,

par suite, jouant simplement le rôle de cause prédisposante. Elle

n'intervient généralement pas seule, mais est associée, au con-

traire, aux effets du surmenage, de l'alcoolisme, de l'hérédité, etc.

Dans un très petit nombre de cas, on ne trouverait, comme seule

cause discernable, que le surmenage. Et, dans quelques-uns aussi,

le traumatisme; ce dernier, cependant, ne contribuant à rendre

paralytique que des sujets antérieurement syphilitiques.

SIMON.

XXXV. Diagnostic précoce de la paralysie générale; par F. X. DER-

cum (The Ame·icaz journal of InsaniLy, avril 1902, p. 575, 585).

L'auteur insiste surtout sur la nécessité d'examiner avec le plus

grand soin tout état neurasthénique. Le diagnostic peut être fait

avant les signes physiques, si l'on a clairement à l'esprit le con-

traste qui existe entre les signes qui relèvent seulement d'un état

de fatigue chronique, et les signes au contraire d'affaiblissement et

de déchéance intellectuels qui caractérisent la paralysie générale.

Ce contraste est mis en relief dans l'article d'une façon tout à fait

remarquable, et les quelques pages qui y sont consacrées sont à

lire en entier. SIMON.

XXXVI. Fréquence comparée de la paralysie générale; par Charles-

J. WAGNER (TAs Amcrican journal of Insanily, avril 1902, p. 587,

595).

D'après les statistiques analysées dans ce travail : 1° la paralysie

générale représente à peu près 8.75 p. 100 des cas de folie; 2° elle

arrive surtout entre trente et cinquante ans ; 3° elle augmente gra-

déliement de fréquence à l'époque actuelle; 4° les hommes sont

. sept fois plus atteints que les femmes; 5° sa terminaison est fatale

160 ' REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

et, le plus souvent, en moins de deux ans et demi; 6° elle est deux

fois plus fréquente dans les grandes cités que dans les campagnes;

7° hérédité, syphilis, alcool, sont trois facteurs importants de sa

production; 8° aucune profession n'y prédispose spécialement, pas

même les professions libérales;. 9° le surmenage intellectuel, avec

un certain degré d'hérédité, est ce qu'on observe le plus souvent;

10° excès sexuels, habitudes irrégulières de sommeil et d'alimen-

tation, insolation, traumatismes cérébraux, etc., interviennent éga-

lement. SIMON.

XXXVII. Traitement de la paralysie générale; par Edward COWLES

(The American journal of Insanity, avril 1902, p. 597. 605).

L'article ne comporte pas de conclusions précises. Aussi bien

s'agit-il du traitement d'une maladie actuellement incurable. Mais

l'auteur passe en revue les théories pathogéniques de la paralysie

générale et de ses accidents, et montre ce qu'elles conseillent et

permettent d'espérer. Sinon.

XXXVIII. L'hérédité pathologique telle qu'elle ressort de l'étude

des statistiques des hôpitaux nationaux de New-York; par Wil-

liam-C. Krauss (The American journal of Insanily, avril 1902,

p. 607, 623). '

XXXIX. Sénilité et démence sénile ; par William-L. RUSSRLL (The

American Journal of Insanity), avril 1902, p. 625, 633).

Contribution à l'étude des limites entre les signes physiologiques

de la vieillesse et les caractères morbides qu'elle peut au contraire

présenter. Smon.

XL. Folie maniaque dépressive avec autopsies ; par Stewart

PATOU ( ? 7teAtK6)'t'c(Mt Journal of Insanity, avril 1902, p. 679,704.

Il est difficile de donner un résumé de cet article. Mais il y a

chemin faisant, des remarques intéressantes comme celle-ci : qu'il

y a peut-être moins d'opposition qu'il ne semble entre les états

maniaques et mélancoliques ; que les premiers ne traduisent peut-

être pas toujours, comme on a l'habitude de le dire, une suracti-

vité mentale. SIMON.

1,X1. Les signes auxquels se reconnaît la folie et les problèmes de

la psychiatrie; par E. STANLEY ABBOT (The American Journal of

Insanily, juillet 1902, p. 1 à 16). -

Revue des principales définitions de la folie. La folie est essen-

tiellement une maladie mentale. L'examen des facultés menta ! es.

permet,.seul de conclure à son existence. Aucun signe physique n'y

suffit. SIMON.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 161

XLII. Sur les, psychoses liées à la fièvre typhoïde ; par Cla-

rence-B. FAHRAR (The American Joumal,[nsanity, juillet 1902,

p. 17, l; .

L'auteur résume lui-même son article à peu près comme suit :

La fièvre typhoïde atteignant un individu sain, peut le laisser sans

symptômes psychiques, ou provoquer, au contraire, tous les de-

grés possibles de troubles mentaux. La gravité des troubles men-

taux n'est pas nécessairement en rapport avec le degré de la fièvre

ou la profondeur de l'infection. La prédisposition héréditaire in-

tervient spécialement pour les accidents délirants du début.

Une fièvre épuisante prolongée prédispose à une psychose asthé-

nique. Une deuxième ou troisième attaque de fièvre typhoïde

s'accompagnent plus souvent de'troubles mentaux que la pre-

mière. -

Quant aux types morbides ainsi réalisés : in le délire du début

est la forme la plus rare, mais la plus rapide et la plus grave, fa-

tale dans plus de 50 p. 100 des cas; il est la marque d'une intoxi-

cation profonde; les altérations qu'indique le Nissl en témoignent.

Il est l'occasion fréquente d'erreurs de diagnostic. Tout trouble

mental, accompagné de fièvre, doit faire soupçonner la fièvre

typhoïde; .

2° Les psychoses de la période fébrile, proprement dites, sont

les plus fréquentes et celles qui comportent la meilleure issue ;

25 p. 100, cependant, persistent longtemps, pendant ou même

après la convalescence. Elles sont surtout attribuables l'élévation

de la température et à ses conséquences;

3° Les psychoses asthéniques présentent une évolution particu-

lièrement lente et une issue douteuse, vec évidence d'altérations

cérébrales graves. Elles se développent sur une base d'épuise-

ment :

4° En outre, une prédisposition post-typhoïque (faiblesse irrita-

ble)-persiste, sur laquelle peuvent éclore des psychoses ultérieures

de pronostic douteux.

Les psychoses de la fièvre typhoïde n'ont de caractéristiques

cliniques ni anatomiques : infection, intoxication, hyperthermie,

épuisement, quelle que soit leur origine, peuvent produire des dé-

sordres semblables. Et la susceptibilité du sujet aux troubles men-

taux est surtout fonction de son degré de réaction mentale.

- / Smox.

XLIII. De quelques éléments de diagnostic de la démence pré-

coce ; par William Rush Dunton (The American Journal of lazsa-

nity, juillet 1902, p. 53, 61).

Phénomènes moteurs : irritabilité mécanique du facial ; exagé-

ration des réflexes; impulsions et leurs caractères. Confusion.

Archives, 2' série, t. XVII. 11

162 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Négativisme et stéréotypie. Relativement à ces deux derniers symp-

tômes, l'auteur parait avoir quelque hésitation sur la manière cor-

recte de les interpréter. Indications bibliographiques au cours de

l'article. SIMON.

XLIV : De quelques maladies terminales de la mélancolie : par

Adolf MEYER (The Amel'ican Journal of Insanity, juillet 1902,

p. 83-89).

Les mélancoliques ne meurent pas tant de leur affection men-

tale, que souvent de complications résultant d'ailleurs de leur état.

Parmi les maladies qui les emportent, il y a à signaler surtout :

1° les broncho-pneumonies, en particulier du fait des alimentations

artificielles (trop souvent faites par des mains inexpérimentées) ;

va le complexus symptomatique suivant : rigidité, attitudes ,téta-

noïdes des extrémités, grimaces spasmodiques du visage, secousses

musculaires irrégulières, cris avec exacerbations (p. 87 et suiv.), etc.

Accessoirement, l'auteur relève la diminution des cas de pacha-'

méningite hémorrhagique depuis l'alitement, vraisemblablement

parce qu'ils reconnaissaient en réalité une origine traumatique.

Simon.

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

- Séance du 30 novembre 1903. - Présidence de-M. G. Ballet.

Folie à double forme avec syndrome paralytique chez un aliéné atteint

. de pachyméningite cérébrale et de gomme du cervelet.

11. DOIJTREBENTE rapporte l'observation d'un ancien alcoolique

atteint de débilité mentale à hérédité mentale très chargée qui

eut au cours de sa vie plusieurs accès de folie à double forme pour

finir dans la démence, avec des signes de paralysie générale. Ce

malade était, en outre, syphilitique ; on doit se demander si la

syphilis n'a pas eu quelque influence sur le syndrome paralyti-

que qui dominait la scène dans la dernière période de la maladie.

A l'autopsie on trouva une gomme du cervelet avec pachyménin-

gite sans aucune des lésions classiques de la paralysie générale.

M. Vallon croit que le diagnostic de folie à double forme doit

être réservé et il lui préférerait celui de débilité mentale avec alter-

native d'excitation et de dépression, se terminant par la dé-

mence. Pour lui, les débiles ne peuvent faire de la folie à double

forme.

M. TOULOUSE a relevé des observations où la paralysie générale

- SOCIÉTÉS SAVANTES. 163

débutait par des accès de folie intermittente. Loin d'exclure la

paralysie générale, l'intermittence est peut-être considérée comme

un signe du début. ' .

M. Ballet. La paralysie générale débute parfois par des

symptômes pouvant faire penser à la folie intermittente qu'ils

simulent. D'autres fois la paralysie générale vient compliquer une

folie intermittente vraie.

Un cas de psychose-polynévritique avec insuffisance hépatique.

MM. Juquelier et PERPÈRE communiquent une observation

ayant trait à une malade qui présenta simultanément un état de

confusion mentale profonde, des phénomènes névritiques du côté

des membres inférieurs et qui succomba à la suite d'infection

d'origine vésicale. L'autopsie permit de constater une cirrhose

graisseuse du foie et un certain degré de néphrite scléreuse.

L'examen du système nerveux montra, du côté de l'encéphale,

des lésions exclusivement cellulaires. Les grandes cellules pyrami-

dales sont rondes, globuleuses avec un noyau excentrique, de la

chromatolyse et une excessive pigmentation. Mêmes lésions cellu-

laires dans les cornes antérieures de la moelle, avec un maximum

au niveau de la région lombaire. Les nerfs des membres inférieurs

sont atteints de névrite parenchymaleuse.

Ces lésions cellulaires sont nettement primitives, à l'encéphale;

dans la substance grise médullaire, leur nature primitive ou

secondaire est discutable en raison des phénomènes de névrite

concomitants. Au point de vue pathologique, il y a lieu d'incrimi-

nerl'alcool et l'auto-intoxication hépatique. Celle-ci ne parait pas,

dans la majorité des cas, responsable des lésions nerveuses

constatées à l'autopsie. Dans le fait actuel, l'insuffisance hépa-

tique semble avoir eu pour effet de favoriser l'éclosion des trou-

bles mentaux, chez une malade, dont le système nerveux était

préalablement lésé par le poison exogène. La sclérose rénale favo-

risait cette double action toxique.

M. Duruir. De l'aveu même de Nissl, les lésions cellulaires

qu'il a décrites et qui sont invoquées dans l'interprétation du cas

qui nous est soumis, n'ont aucun caractère de spécificité. On les

retrouve dans la fièvre typhoïde, les cachexies, etc.

M. Ballet reconnaît qu'en effet, ces lésions s'observent, quelle

que soit la forme de toxicité pourvu qu'elle ait touché le système

nerveux; elles n'en restent pas moins intéressantes, car elles

sont la signature anatomo-pathologique des toxi-infections.

Paralysies générales à longue durée.

M. Brunet rapporte quelques observations de paralytiques géné-

raux dont la maladie mit plusieurs années à évoluer, tout en pré-

164 -il SOCIÉTÉS SAVANTES.

sentant les signes caractéristiques de la méningo-encéphalite dif-

fuse.

M. Vallon. J'ai dans mon service un certain nombre de ma-

lades que je considère comme paralytiques généraux, vu que leur

maladie remonte à plus de dix ans pour qnelques-uns et exacte-

ment à vingt-trois ans pour l'un d'eux.

M. TOULOUSE croit qu'il faut distinguer les cas où le diagnostic

de paralysie générale a pu être posé dès le début, de ceux où la

paralysie générale est venue compliquer une ancienne vésanie

comme l'admettait Esquirol. -

M. Brunet n'a jamais observé de vésanies se terminant par la

paralysie générale.

M. Dupré. Si la paralysie générale pouvait être considérée

comme une complication possible des vésanies, on observerait plus

fréquemment cette terminaison.

M. Ballet. La paralysie générale qui s'observe dans le cours

d'une vésanie, loin d'en constituer une complication ne doit être

invoquée que comme une association. M. B.

Séance du 30 décembre 1903. Présidence de M. G. Ballet.

Syphilis cérébrale et démence.

M. \TCCOUnoUx communique l'observation d'un homme mort de

syphilis cérébrale et dont l'état démentiel rappelait celui de la

paralysie générale.

M IZ,LIPPL fait remarquer que toutes les encéphalites ne donnent

pas lieu au syndrome paralytique. Il pense que, malgré la multi-

plicité des lésions observées chez le malade de M. Vigouroux, on

doit plutôt porter le diagnostic de démence, avec lésions circons-

crites, chez un syphilitique.

Un cas de neurasthénie traumatique ayant évolué à longue échéance

vers le délire systématique.

M. Tissot rapporte l'histoire d'une malade du service de

M. Briand, laquelle, après un accès de neurasthénie d'origine trau-

matique, voit se transformer sa psycho-névrose en une psychose

vraie à évolution chronique.

A propos de ce cas, l'auteur fait ressortir le rôle de la prédispo-

sition, dans l'éclosion de ces troubles nerveux et mentaux, la pré-

disposition est caractérisée ici par une constitution psychique spé-

ciale, qui se révèle, dans différentes circonstances de la vie de la

malade, par des tendances à la neurasthénie hypochondriaque ; à

la faveur de cette psycho-névrose franchement établie, le délire

SOCIÉTÉS SAVANTES. 'l6t)"

survient un jour et se fixe dans la forme systématique. Mais la

constitution qui prédispose le traumatisme (ou la cause occasion-

nelle quelconque) qui crée la psycho-névrose semble être insuf-

fisants encore pour provoquer l'éclosion d'un trouble psychopa-

thique organisé, sans l'intervention de causes secondes, passagè-

res ou durables, évidentes ou non, qui constitueraient une aptitude

imminente à délirer.

Au point de vue médico-légal, ce délire doit être considéré

comme une application éloignée du traumatisme, mais en raison

de la prédisposition de la malade, la responsabilité de l'auteur de

l'accident doit être très atténuée.

M. BRIAND insiste sur le côté médico-légal de cette observation,

qui est des plus instructives. La femme qui en fait l'objet aurait

pu, en effet, demander à l'auteur de l'accident une indemnité pour

le préjudice causé par neurasthénie traumatique, et ses parents,

formuler une nouvelle demande pour la dédommager de la psy-

chose vraie qui s'est développée par la suite chez cette aliénée. Il

est fort probable que les tribunaux auraient condamné l'auteur

de l'accident et cependant, s'il est vrai que la blessée était une

prédisposée à la folie, il est aussi fort probable que tout autre

goutte d'eau que celle qui a fait déborder son vase trop plein

pouvait déterminer le même résultat. Peut-être même aurait-

elle déliré sans cause occasionnelle apparente. En matière d'hysté-

ro-traumatisrne, il y a donc à tenir plus grand compte de la

prédisposition héréditaire que ne le font non seulement les tribu-

naux mais encore certains médecins.

M. Vallon. Dans un cas pareil, si la question de la prédispo-

sition héréditaire n'est pas posée, le médecin expert doit toujours

en faire ressortir le rôle étiologique. Si les tribunaux ne jugent

pas toujours dans le sens indiqué par M. Briand, c'est parce qu'ils

sont des juges et non des médecins.

M. Ballet. La question soulevée par la malade de M. Briand

doit être envisagée à un double point de vue. Au point de vue ju-

ridique, qui ne regarde que les juges et ne relève que de leur

conscience et au point de vue purement médical. C'est le côté pu-

rement clinique que j'entends discuter. Autrefois le choc trauma-

tique n'était considéré que comme un accessoire dans le dévelop-

pement de l'hystéro-traumatisme. C'était la doctrine de Charcot

qui n'admettait aucune objection sur ce principe, dont il s'était

fait l'apôtre, à savoir que la prédisposition expliquait, à elle seule,

tous les troubles consécutifs au traumatisme. Plus tard une réac-

tion s'est produite, sous l'impulsion de MM. Brouardel et Vibert

qui pensent que, le plus souvent, la prédisposition n'est qu'hypo-

thétique. C'est cette dernière doctrine qui semble aujourd'hui

guider la jurisprudence. '

111. Jorrnol. Si la recherche de la prédisposition dans l'hys-

166 SOCIÉTÉS SAVANTES.

téro-traumatisme se heurte souvent à des difficultés insurmonta-

bles, on peut dire également que cette question envisagée au point

de vue purement médical est rendue des plus délicates par le peu

de précision, ou si l'on aime mieux par la grande extensibilité de

terme prédisposition. - -

' Dans certains cas la prédisposition est très accusée, elle s'est

déjà manifestée bruyamment en maintes circonstances, alors la

question est des plus simples et tout ,le monde sera d'accord sur

la réponse à faire.

Dans d'autres cas la prédisposition s'est moins nettement affir-

mée, les preuves paraissent moins décisives et la question est déjà

moins facile à trancher.

Enfin il est des cas où la prédisposition est encore moindre et

surtout n'aura pas encore eu l'occasion de se manifester ; le pro-

blème sera alors des plus difficiles. On pourra bien dire, en effet

dans ces cas, qu'aucun fait n'a jusqu'ici mis la prédisposition en

évidence, mais on ne devra pas, on ne pourra pas dire pour cela

que la prédisposition n'existe pas. La prédisposition peut en effet

être latente.

Si dans un compartiment d'un wagon huit personnes subissent

le même choc et si une seule parmi elles fait de l'hystéro-trauma-

tisme, il faut bien qu'il y ait chez elle quelque chose de particulier.

et ce quelque chose c'est la prédisposition qui a pu rester latente

jusqu'à ce jour.

M. Vallon. Il est souvent difficile de déterminer mathémati-

quement le rôle joué par la prédisposition, cependant on peut.

avec assez de vraisemblance, déterminer le rôle joué par la pré-

disposition. quand on la trouve, dans l'évolution d'une névrose

traumatique ou d'une psychose telle que celle dont l'histoire vient

de nous être rapportée.

M. Briand. On ne peut résoudre une question par une péti-

tion de principe et cependant c'est souvent la seule réponse vraie

à faire dans certains cas; je ne parle pas de celui présenté par

M. Tissot puisque le rôle de la prédisposition a pu être précisé.

mais je reprends l'exemple du wagon bousculé dans un léger acci-

dent de chemin de fer. Il est occupé par plusieurs personnes, su-

bissant le même choc avec un traumatisme insignifiant. Les uns

rient de l'accident, les autres y restent indifférents, une ou deux

personnes seulement s'affolent, se tâtent, crient au secours et une

fois arrivées chez elles, font appeler le médecin, sans arriver à se

faire tranquilliser ; puis vient l'obsession d'un mal imaginaire et.

après quelques jours, la neurasthénie compte une ou deux \ic-

timesdeplus,à moins qu'elle ne se soit développée brusquement, au

moment du choc. Même quand la prédisposition ne pourrait être

décelée, je crois qu'elle découle des circonstances même dans les-

quelles s'est produite la névrose. Si vous ne faisiez intervenir la pré-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 167 Î

disposition, vous ne pourriez expliquer comment et pourquoi

parmi tous les voyageurs, ayant subi la même commotion, un seul

tombera dans la neurasthénie alors que nous savons que la neu-

rasténie frappe presque exclusivement, je n'ose pas dire exclusive-

ment, les prédisposés.

M. JOFFROY. Sur le terrain médico-légal, je crois que les

experts doivent tout simplement signaler au tribunal l'existence

ou l'absence des faits témoignant d'une prédisposition plus ou

moins grande.' Mais je répète que si on se place au point de vue

puremeut scientifique on ne peut pas affirmer, avec M. Briand,

qu'il n'y a pas de prédisposition, parce qu'on n'a pas découvert de

manifestations de cette prédisposition. Car, de même q'un danger

peut exister, sans que la catastrophe se produise, de même la pré-

disposition peut exister sans avoir, jusqu'à ce jour, trouvé une

occasion suffisante pour se manifester. Quant à moi, je regarde

l'hystéro-traumatisme comme une preuve de la déchéance anté-

rieure du système nerveux. Aussi je suis d'avis que, quand nous

sommes interrogés, en tant qu'experts, nous ne devons pas dire,

en pareil cas, qu'il n'y a pas de prédisposition, mais tout simple-

ment que nous n'avons pas découvert de faits témoignant de l'exis-

tence de la prédisposition. J'en reviens toujours à la même argu-

mentation ; comment pourrait-on comprendre, si la prédisposition

n'existait pas, qu'une seule personne sur huit fasse de l'hystéro-

traumatisme, alors que les huit personnes se trouvaient toutes

dans des conditions en apparence identiques.

M. ARNAUD. - Peut-on affirmer que les huit personnes renfer-

mées dans un compartiment de chemin de fer ont subi un trauma-

tisme rigoureusement récemment identique ? ` ?

M. Ballet. Quand les tribunaux demandent à un expeit si la

victime d'un accident, laquelle a vu se développer chez elle, une

neurasthénie traumatique, est malade parce qu'elle était prédispo-

sée, nous devons rechercher si, dans le passé du traumatisé, il

existe des faits permettant d'admettre la prédisposition. Si l'on ne

trouve rien, l'expert doit déclarer qu'il n'a rien trouvé, mais il ne

doit pas conclure à la non existence de cette prédisposition car, si

elle est souvent facile à découvrir, elle peut aussi exister tout en

demeurant voilée malgré les plus minutieuses investigations.

11. JOFFROY. - Quand je parlais tout à l'heure de conditions

identiques, je ne parlais que des conditions matérielles car il est

bien évident qu'au point de vue psychique les conditions sont

fort différentes, il est bien évident que l'état émotionnel n'est pas

le même chez tous ces sujets et que c'est là qu'il faut chercher la

cause déterminante de l'hystéro-traumatisme.

En voici un exemple : il s'agit d'un jeune homme que j'ai

examiné avec M. Ballet et qui dans une catastrophe de che-

min de fer eut son patron tué à ses côtés et fut évidemment plus

168 SOCIÉTÉS SAVANTES. /

douloureusement frappé, par ce malheur, que les autres voya-

geurs qui ne connaissaient pas la victime. Il fut le seul à faire de

l'hystéro-traumatisme.

- Je citerai encore l'exemple d'un jeune homme de quinze ans qui fit

aussi de l'h3-stéro-traumatisme, grave après avoir eu, dans des cir-

constances analogues, sa tante transpercée par un morceau de

bois et mourir en quelques instants.

Mais il n'en va pas toujours ainsi et à ce propos, je citerai le cas

d'un postier ambulant que j'ai examiné avec M. B.riand. Dans le

wagon où il se trouvait, tous les employés furent bousculés par

une forte secousse et seul il fit de l'hystéro-traumatisme.' On ne

peut trouver ici de motifs actuels à une émotion plus intense chez

lui que chez les autres, mais cela ne prouve nullement que son

émotion ne fut pas plus' vive que chez les autres, et cela, sous

l'influence d'une prédisposition, prédisposition d'ailleurs latente

car aucun accident antérieur ne l'avait révélée.

Pour terminer et insister encore davantage sur les obscurités de

la question, j'ajouterai que la prédisposition peut exister et ne pas

se manifester. J'ai pu, en effet, interroger une hystérique avérée,

ayant eu de grandes attaques et qui, au cours d'un voyage, fut

l'une des victimes d'une rencontre de trains.

Elle fut d'ailleurs quitte pour quelques contusions et. si elle eut

la plus grande frayeur qui se traduisit par des cris aigus et la plus

vive agitation, elle n'eut pas de perte de connaissance et ne fit pas

d'hystéro-traumatisme.

Je dirai plus : on peut voir le même sujet, à peu près à la même

date, réagir différemment sous l'influence d'un même accident.

Comme exemple je citerai le cas d'un malade, que j'ai soigné pour

des accidents d'hystéro-traumatisme. En février, il fut victime d'un

déraillement de chemin de fer et s'en tira avec quelques contusions

sans gravité; il ne lit aucun accident consécutif. Un mois plus tard,

il fut encore victime d'un déraillement de chemin de fer, et cette

fois encore il n'eut que de légères contusions et se félicitait de s'en

être tiré à si bon compte, lorsque le lendemain ou le surlende-

main apparurent les premiers symptômes de l'hystéro-trauma-

tisme. ' -

Il était nettement prédisposé, il avait eu des frayeurs nocturnes,

était scrupuleux; son père était grand buveur et. sa mère très

émotive. Mais comment expliquer qu'il n'ait pas fait d'hystéro-

traumatisme dans le premier déraillement, qui fut aussi grave que

second, et dans lequel il y eut, comme dans le second, un certain

nombre de grands blessés ?

En somme, je dirai : il, que l'hystéro-traumatisme m'apparait

comme un stigmate de la défectuosité' du système nerveux, alors

même qu'il survient comme la première manifestation de cette dée

fectuosité.

SOCIÉTÉS SAVANTES. - 169

2° Que c'est l'état émotionnel du blessé au moment et à la suite

de l'accident qui constitue le principal facteur pathologique.

. MARCEL Briand.

SOCIETE DE NEUROLOGIE

Séance du 7 janvier 901. Présidence de M. Déjerine.

AcropuestJtésie.

M. Maux EGGER, s'appuyant sur quatre cas très fouillés d'acropa-

resthésie, montre que les troubles paresthésiques revêtent Une

localisation exactement radiculaire. Il considère ce syndrome

comme l'expression d'une affection irritative des racines posté-

rieures. , 1

M. BAUP présente une malade atteinte de la même affection :

acroparesthésie des extrémités avec troubles radiculaires et disso-

ciation delà sensibilité.

M. Brissaud fait observer que les malades cités ou présentés

ci-dessus ont bien des troubles à disposition radiculaire, mais les

aires paresthésiques ne sont pas limitées aux membres; elles

intéressent assez le tronc : le mot ocro-paresthésie est donc mau-

vais.

Pied tabétique.

M. IDGLSIION (de Riga) présente le squelette d'un pied tabétique

offrant tous les caractères typiques de cette lésion et provenant

d'un individu de soixante-treize ans, qui pendant la vie ne pré-

sentait guère aucune manipulation typique du tabès; néanmoins,

l'arthropathie classique permit de diagnostiquer la maladie et à

l'autopsie une dégénération typique des cordons postérieurs

vérifia la chose. L'examen microscopique provisoirement a donné

des troubles importants des nerfs périphériques, de l'épiderme et

une artériosclérose bien accusée. Au point de vue d'étiologie il est

intéressant que le malade ne présentait aucun trouble de la sensi-

bilité, aucune ataxie, aucun traumatisme; on ne peut donc croire

à une origine essentiellement due aux lésions des nerfs périphé-

riques.

D'autre part, il faut attirer l'attention sur une certaine analogie

entre le pied tabétique et celui dans la claudication intermittente.

Cette analogie consisterait de la présence du pied plat et de'

l'artériosclérose. Ces deux moments furent considérés comme

jouant un certain rôle dans l'évolution des troubles trophiques

4. ïO - SOCIÉTÉS SAVANTES.

dans la claudication intermittente. La question se pose si dans le

pied tabétique ces deux moments ne concourent pas aussi dans la

production des troubles trophiques.

- '- Réflexe adducteur du pied.

MM. H.RSCIIBERG et Rose. Ce réflexe, signalé par l'un des auteurs

dans une notice parue dans la Revue neurologique, consiste en une

adduction du pied avec rotation interne à la suite de l'excitation

du bord interne du pied, en particulier du niveau de la racine du

gros orteil, mais qui, dans certains cas, peut aussi être provoqué

par l'excitation de la plante.

Sur 52 malades atteints d'affections intéressant la voie pyrami-

dale, les auteurs ont trouvé ce réflexe 34 fois, alors que le signe

de Babinski existait 38 fois. Mais, dans 8 des cas (4 scléroses en

plaques, 1 hémiplégie acquise, 1 hémiplégie infantile, 1 affection

du cône terminal et 1 syphilis cérébro-spinale), le réflexe adduc-

teur existait nettement, alors que le signe de Babinski manquait

ou etait peu net.

C'est dans ces cas surtout que ce réflexe acquiert une valeur

diagnostique véritable, analogue à celle du phénomène des

orteils, car les auteurs ne l'ont jamais trouvé dans des affections

purement fonctionnelles.

- Paraplégie spasmodique chez une enfant.

MM. DÉJERINE et Ciiiray présentent une enfant de huit ans-

atteinte de paraplégie spasmodique.

Cette paraplégie a débuté à l'âge de sept ans et demi, sans

troubles antérieurs connus. Elle ne s'accompagne d'aucun trouble

de la sensibilité subjective ou objective, mais d'exagération des

réflexes achilléens et rotuliens sans trépidation épileptoïde ni

signe des orteils.

11 n'existe aucune paralysie des sphincters et les membres supé-

riaurs sont intacts.

L'examen des yeux montre une immobilité papillaire totale à la

lumière et à la convergence pour la pupille droite, de la paresse

seulement à gauche.

Enfin, l'enfant présente des stigmates de dégénérescence men-

tale depuis le début de sa maladie.

, La ponction lombaire a manifesté une lymphocytose assez

abondante.

On ne peut songer ici à un mal de Pott, car la colonne verté-

brale est-absolumeut intacte, ni à un syndrome de Little, puisque

la maladie a debuté à sept ans. On peut se rattacher à l'hypo-

thèse d'une hérédo-syphilis médullaire, bien que les parents

nient l'infection et que la fillette ne présente pas de stigmates.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 171

mais la mère a perdu deux enfants en bas âge, et le dernier.

mort il y a trois mois, était nettement hérédo-syphilitique.

R ? YMOND a vu un cas analogue chez une jeune fille de quinze

ans, fille d'un père mort de syphilis cérébrale. C'était une para-

lysie générale juvénile à début inférieur. -

L'élat des nerfs oculo-moteurs dans l'hémiplégie de l'adulte.

M. S.-A.-K. WILSON (d'Edimbourg). D'après MM. Mirallié et Des-

claux (de Nantes), qui ont présenté une communication à la

séance de la Société du 4 juin 1903, il y a une paralysie latente

des moteurs oculaires dans l'hémiplégie organique. Chez les indi-

vidus sains, les muscles homologues des deux yeux ont exacte-

ment la même puissance. Dans l'hémiplégie organique de l'adulte

la puissance musculaire absolue de chacun des muscles oculaires

est diminuée des deux côtés, mais surtout du côté hémiplégie.

Nous avons recherché la puissance oculaire chez plusieurs

hémiplégiques dans le service de M. Marie à Bicêtre, en observant

particulièrement si le facial supérieur était touché ou non. Nous

avons employé le petit appareil tout à fait semblable il celui que

décrivent MM. Mivallié et Desclaux. Nous avons aussi examiné

lentement et plusieurs fois six docteurs, dans la séance de

.NI. Marie, et six internes de médecine à Bicêtre. /

Nous sommes arrivés aux résultats suivants :

1° Chez les individus sains, les muscles homologues des deux

yeux n'ont pas toujours exactement la même puissance évaluée

en degrés de prisme;

2° Dans l'hémiplégie organique, il y a quelquefois une diffé-

rence nettement marquée entre la puissance oculaire des deux

côtés, mais le plus souvent on trouve des deux côtés une dimi-

nution très évidente de cette puissance;

3" Dans l'hémiplégie hystérique, la différence entre les muscles

homologues du côté sain et du côté paralysé est très prononcée.

Tabès fruste avec conservation des réflexes cutanés et tendineux.

MM.E. Duphé et P. Camus. Homme de soixante-cinq ans. syphilis

il vingt-cinq ans, traitée, au moment des accidents secondaires.

pendant trois mois; aucun accident depuis, fièvre typhoïde pro-

longée il cinquante ans.

Tabès affirmé par les signes suivants : analgésie presque abso-

lue, à topographie radiculaire, dans les domaines suivants :

8° cervicale et 2" premières dorsales; 2°, 3'' 4° et 5° intercostaux;

petits sciatiques; trijumeau, avec paresthésies superposées.

Myosis permanent, signe d'A. Robertson, analgésie du globe a la

pression, rétrécissement des artères du fond de l'oeil. Douleurs en

ceinture il la base du thorax. Lymphocytose céphalorachidienne.

'li2 SOCIÉTÉS SAVANTES.

On constate, par contre, la conservation de tous les réflexes,

cutanés et tendineux : ceux-ci sont peut-être un peu plus faibles à

gauche.

Ni Romberg, ni hypotomie. Aucune altération dans l'équilibre :

les sens musculaires, de position stéréognostique; les sensibilités à

la pression de la trachée, du testicule des nerfs radial et cubital.

Aucun déficit psychique.

L'absence de certains signes cardinaux de la série tabétique,

dans ce tabes indiscutable, s'explique par le siège supérieur et le

caractère discret des lésions méningo-radiculaires. Les cas en

sont tellement rares qu'ils méritent d'être signalés..

Emploi du véronal.

M. CoNSTENsoux a employé le véronal comme hypnotique chez

les nerveux. Cette substance procure aux insomniques les plus

rebelles un très bon sommeil, mais elle cause des accidents tels

que vertiges, titubation et éruptions cutanées.

Méningite sarcomateuse avec envahissement des racines nerveuses et

de la moelle. Cytologie positive et spéciale du liquide céphalo-

rachidien.

M. H. DU1OUR. Un malade âgé de soixante-quatre ans, entré à

l'hôpital avec une paraplégie flasque accompagnée de rétention

d'urine et de constipation. .

La langue est atrophiée d'un côté; il y a de l'agitation et du

subdélire. --

La recherche du signe de Kernig détermine de violentes dou-

leurs dans les cuisses. Au bout de huit jours, la température

s'élève au-dessus de 38° et oscille pendant les huit jours suivants

jusqu'à la mort du malade, entre 38°,5 et 39°,5. Pendant les dix

derniers jours, l'oeil droit est atteint de kératite avec opacité et

vascularisation de la conjonctive indiquant un trouble trophique

par altération du trijumeau. Le liquide céphalo-rachidien prélevé

deux fois pendant la vie, à cinq jours d'intervalle, fut chaque fois

de coloration jaune, fibrineux, très riche en lymphocytes, avec

quelques hématies. Ce liquide contient, de plus, de' très nom-

breuses cellules volumineuses, trois fois grosses comme un lym-

phocyte. Ces cellules se colorent uniformément en violet clair par

l'hématéine, et c'est à peine si l'on peut différeucier le noyau du

protoplasma. L'autopsie fit constater l'existence d'une méningite

sarcomateuse diffuse ayant envahi toute la hauteur de la moelle.

Cette méningite a déterminé par places quelques petites suffu-

sions hémorragiques. Elle a son point de départ au niveau des

nerfs de la queue de cheval qui sont englobés ainsi que le cône

terminal, par une grosse tumeur conique, de texture sarco-

SOCIÉTÉS SAVANTES. - 173

mateuse à petites cellules. Cette méningite est diffuse, nodulaire

par places, comme à la région cervicale et à l'origine du trijumeau

droit. Elle atteint surtout les radicules nerveuses par lesquelles

elle pousse les prolongements sarcomateux dans l'intérieur de la

moelle. Le sarcome envahit la moelle également par l'intermé-

diaire du canal de l'épendyme qui semble avoir servi de vecteur

aux éléments globo-cellulaires. L'intérêt de cette observation

réside dans son extrême rareté. M. Lereboullet a publié, en 1901,

dans le Bulletin de la Société de wcliat·ie, un cas analogue, et

MM. Philippe Cestan et Oberthur ont relevé quelques faits sem-

blables dans leur mémoire du Congrès de Grenoble de 1902, mais

c'est la première fois, à ma connaissance, qu'est notée, dans le

liquide céphalo-rachidien du cours de la sarcomatose méningée,

une lymphocytose aussi abondante que dans une méningite

d'autre nature. L'absence de lymphocytes ne constitue donc plus

aujourd'hui,. ainsi qu'on l'a dit, un signe différentiel qui per-

mette d'en faire le diagnostic. De plus, le liquide céphalo-rachi-

dien contenait des éléments éellulaires volumineux en nombre

considérable. Pour moi, ces éléments doivent être assimilés aux

cellules qui pullulent dans les cordons postérieurs et y sont

appelées par la dégénérescence brutale et rapide de ces cordons.

Or la méthode de marche montre que ces cellules des cordons ne

sont autres que des corps granuleux : un certain nombre des

grandes cellules du liquide céphalo-rachidien représentent donc,

à mon avis, sans que je puisse l'affirmer, les macrophages assi-

milables aux corps granuleux.

Cécité verbale.

M. BRIS5.1UD, à propos du jeune homme achondroplasique

montré par M. Marie à la séance précédente, refait l'analyse sché-

matique de ce cas, le rapproche des cas de P. Morgan et de Ver-

nike (de Buenos-Ayres), et considère l'expression de cécité ver-

bale comme mauvaise, appliquée à des faits dont la lésion toute

virtuelle ne rend pas les sujets tout à fait inéducables. Cette lésion,

serait un défaut d'association des centres graphique, moteur,

auditif et du langage en un point théorique où les fibres d'asso-

ciations, allant de deux- de ces centres aux deux autres, se rap-

procheraient ou se croiseraient.

Psemlo-oedème catatonique.

JI. DIDE revient sur cette question, rapprochant ce phénomène

de l'asphyxie symétrique de Maurice Raynaud. Le pseudo-oedème

catatonique tiendrait le milieu entre cette affection et le syn-

drome de Weir-Mitchell.

M. P. Marie montre des cerveaux présentant des lésions peu

'1 Î4 SOCIÉTÉS SAVANTES.

communes et d'autres sous-lésions macroscopiqnes, dont les hul-

bes et les .moelles offraient de grosses lésions de dégénérescence

secondaire. ? Névrite optique.

MM. 13J\tSSAUD et BRESEY rapportent l'histoire d'un malade

atteint de névrite optique à marche rapide avec myélite aiguë

ayant déterminé .la mort en peu de temps. Ces cas méritent un

nom spécial, tel que neuropo myélite aiguë.

Sur la transformation du régime des réflexes cutanés dans les

affections du système pyramidal.

J. BAacrrshc. On a cherché à établir un antagonisme dans les

affections du système pyramidal et en particulier dans la para-

plégie spasmodique entre les réflexexes tendineux, qui sont exa-

gérés comme on le sait, et les réfles cutanés, qui seraient affaiblis

ou abolis. Cet antagonisme est en partie réel; ordinairement,

dans la paraplégie spasmodique, les réflexes abdominaux et le

réflexe crémastérien sont affaiblis ou abolis, mais il faut se

garder de généraliser. En effet, certaines excitations cutanées

produisent généralement dans ce cas des mouvements réflexes

des divers segments des membres inférieurs et en particulier un

mouvement de flexion de la cuisse sur le bassin plus prononcé

qu'à l'état normal.

Cette flexion peut être mise en évidence d'une manière écla-

tante, lorsque la peau est excitée par le passage d'un courant

faradique.

Ainsi donc, suivant le réflexe cutané que l'on considère, il y a

tantôt affaiblissement ou abolition, tantôt exagération. En consé-

quence, si l'on envisage les réflexes cutanés en général, il faut

dire que les lésions du système pyramidal leur font subir une

transformation. Cette modification dans la forme est particulière-

ment remarquable dans les mouvements réflexes des orteils, dans

l'extension (phénomène des orteils), qui se substitue à la flexion.

Bien plus, on voit parfois, ainsi que je le montre sur l'un des ma-

lades que je présente, l'extension des orteils, produite par l'exci-

tation des téguments du pied et de la jambe, contractés avec la

flexion des orteils à laquelle on donne naissance en. excitant la

peau de la partie supérieure et antérieure de la cuisse ou la peau

de l'abdomen. Voici enfin une autre malade atteinte de para-

plégie spasmodique caractérisée par de l'exagération des réflexes

tendineux de l'épilepsie spinale; l'excitation de la plante du pied

provoque une flexion des orteils, comme à l'état normal; les

orteils ne s'écartent pas les uns des autres sous l'influence de

cette excitation, pas plus que sous celle de l'excitation de la peau

SOCIÉTÉS SAVANTES. 175

du dos du pied ou de la jambe, mais un simple pincement des

téguments de la cuisse donne lieu à une abduction des orteils des

plus nettes.

Il ressort de tous ces faits que, si l'on veut définir d'une manière

générale les modifications que subissent les réflexes cutanés dans

les affections du système pyramidal, on ne peut dire ni qu'ils

sont exagérés, ni qu'ils sont affaiblis ou abolis, mais il faut dire

qu'ils présentent une transformation dans leur régime.

M. HUET confirme l'opinion de M. Babinski.

M. BRISS.1UD, après quelques réserves sur l'état plus ou moins

i chatouilleux » des sujets se range au même avis et ajoute qu'on

devrait établir une classification des réflexes, en désignant à la

fois le point d'excitation et le point de réaction, dans l'espèce ne

pourrait-on pas dire : réflexe « abdomino-plantaire ». ,

MM. Babinski et RA Y : .10ND montrent que ce ne serait pas pra-

tique, les dénominations seraient innombrables. Ils réfutent les

réserves au sujet du chatouillement, établissant que le réflexe est

d'autant plus fort qne le sujet est plus hypoesthésique.

F. BOISSIER.

SOCIÉTÉ D'HYPNOLOGIE ET DE PSYCHOLOGIE

Séance du mardi 20 novembre 1903. -PRÉSIDENCE de ni. Paul Magnin

Hyperexcîtabilité nell1'o-/IHlsculail'e chez une hystérique.

M. BERNARD (de Cannes) rapporte l'observation d'une hystérique

qui avait jusqu'à douze crises dans la même nuit. Une seule

séance de suggestion hypnotique les a fait disparaître. Cette'ma-

lade, dans l'état de léthargie, présentait à un degré tout à fait

remarquable le phénomène de l'hyperexcitabilité neuro-musculaire.

M. Paul M.&G ? 1,Ç. On a eu tort de dire que l'hyperexcitabilité

neuro-musculaire était un phénomène suggéré, cultivé et déve-

loppé par Cnancor. Nous l'avons constatée, il y a quinze ans,

BËRHLON et moi, dans le service de DULONTPALLIn chez les malades

tout à fait vierges d'un entraînement quelconque. Je l'ai obtenue,

depuis, chez des paysannes qui n'avaient jamais entendu parler

ni d'hypnotisme ni de suggestion. Le cas de M. BERNARD confirme

l'existence de ce phénomène qui mérite de rester classique.

Traitement de l'alcoolisme à l'ambulance psychothérapique de la

clinique de l3eclatereiu.

M. PEWNiTZRt (de St-Pétersbourg). Trois mois après son ou-

verture, cette ambulance comptait déjà -nombre d'alcooliques.

176 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Ceux-ci sont perpétuellement et volontairement soumis à la sur-

veillance active d'un membre de leur famille ; ils sont soumis à un

traitement général, ainsi qu'à un traitement spécial. Les buveurs

d'habitude se laissent facilement hypnotiser; une simple somno-

lence suffit souvent à rendre chez eux la suggestion efficace. Les

dipsomanes, au contraire, sont assez difficiles à hypnotiser et la

suggestion ne réussit que si le sommeil est très profond. Le trai-

tement se prolonge pendant toute une année, quelquefois plus.

Rapport entre la puissance de l'image visuelle et la puissance du

souvenir ; applications pratiques.

M. E. Crûs expose les considérations psychologiques qui l'ont

amené à la réalisation des « bagages-images » et du « train-image »

lequel fonctionne depuis plusieurs semaines sur la ligne de l'Ouest

de Paris à Cherbourg. Ces innovations diminuentconsidérablement

l'état de nervosité que présentent de nombreux voyageurs pendant

les voyages en chemin de fer. '

Psychologie de l'entraînement dans la course en flexion.

' M. Félix REGNAULT expose les conséquences psychologiques el

thérapeutiques de la course en flexion, tout à fait différents de

la course en extension. Il précise, pour les diverses maladies ner-

veuses et pour les principales- maladies de la nutrition, les appli-

cations et les résultats de cette forme spéciale de dromothérapie.

Il présente ensuite deux « jarretières de Carmélite rapportées d'Es-

pagne et employées par une mystique pour faire pénitence.

Tics convulsifs.

M. GGItILLON présente une jeune malade atteinte de la maladie

des tics, avec coprolalie, troubles du caractère, perversion des sen-

timents affectifs, colères violentes, inaptitude au travail, etc. Sou-

mise à une éducation longtemps continuée, grâce à la suggestion

hypnotique, cette jeune fille a été considérablement améliorée;

elle a acquis de l'empire sur elle-même ; elle a appris a

inhiber ses tics; ses sentiments affectifs sont redevenus normaux

et, à l'école, elle est maintenant une élève très appliquée.

Un cas de mutisme prolongé.

M. LEItILLON présente un homme de quarante ans qui, depuis la

mort de sa femme, survenue il y a dix-huit mois, présente un

mutisme absolu, compatible toutefois avec la vie sociale et l'exer-

cice de sa profession; il distingue,ce cas du mutisme hystérique et

du mutisme vésanique et développe les considérations médico-16-

gales que comporte un cas de cette nature.

BIBLIOGRAPHIE.

V. Etude sur les troubles trophiques dans la paralysie générale;

par M. Paul HÉRISSEY, thèse de Paris, 1903.

Si certains chapitres de la paralysie générale peuvent paraître

épuisés à force d'être discutés, on ne saurait en dire autant des

troubles trophiques de cette affection. A part quelques observa-

tious publiées çà et là, nous ne connaissons guère comme étude

d'ensemble sur ce sujet que les articles de M. Cololian parus en

1898 dans les Archives de neurologie. Il faut- donc savoir gré à notre

jeune confrère d'avoir comblé cette lacune, en nous donnant dans

sa thèse un exposé très documenté des troubles trophiques dans la

paralysie générale.

La classification est la suivante : Troubles trophiques muscu-

laires (atrophie musculaire); -Troubles trophiques osseux (frac-

tures) ; Troubles trophiques articulaires (arthropathie); Trou-

bles trophiques de la peau et de ses annexes (oedème, pseudo-

phlegmon, othématome, érythème vésico-pustuleux, pemphigus,

zona, purpura, prurit, icthyose, alopécie, chute des ongles, expul-

sion et abrasion des dents, mal perforant plantaire, eschare) ;

Troubles trophiques viscéraux (vaso-dilatation du poumon, du

foie et du rein) ; Troubles trophiques des organes du sens

(atrophie blanche de la pupille) ; Troubles trophiques généraux

(fonte paralytique). -

Cette rapide énumération indique combien la question a été

traitée à fond : de nombreuses observations viennent compléter

chaque description. Une thèse sur les troubles trophiques relève

forcément de la physiologie. L'auteur, après avoir rappelé les

expériences classiques de Claude Bernard, Brown-Séquard, Snellen

rajeunit la question en faisant entrer en ligne de compte la notion

d'infection. « Tout dans la production des troubles trophiques se

résume en trois faits : d'abord une lésion nerveuse amenant sou-

vent un trouble circulatoire, ensuite une infection se produisant

facilement chez le paralytique par suite de l'inertie de l'organisme

contre les influences extérieures.» Cette collaboration's'affirme

parfois si intimé que la suppression d'un des trois facteurs suffit à

provoquer la disparition presque immédiate du résultat commun.

C'est ainsi que dans l'eschare, quelles que soient la faiblesse du

malade et l'étendue de ses lésions cérébro-spinales, une antisepsie

rigoureuse peut provoquer une guérison surprenante. Une récente

Archives, .-3a série, t. XVII. 1

178 b bibliographie.

expérience mérite d'être rappelée à ce propos. MM. Roger et Josué

ayant injecté des cultures streptocciques dans l'oreille de deux

lapins obtinrent un érysipèle bien plus considérable chez l'un

d'eux à qui l'on avait coupé le sympathique cervical. C'est là une

..constatation expérimentale dont le rapprochement s'impose natu-

- rellement avec les faits d'observation clinique que la réunion de

deux agents, l'un infectieux, l'autre nerveux, produit des troubles

trophiques nettement indépendants de chacun d'eux en particu-

lier. '

Les paralytiques généraux sont d'autant plus prédisposés aux

troubles trophiques que, chez eux, la maladie atteint la totalité de

l'axe cérébro-spinal. Neurones corticaux, neurones médullaires,

neurones sympathiques, peuvent être plus ou moins profondé-

ment lésés sans qu'il soit possible de déterminer les conditions de

leur participation au processus pathologique. Dans ces conditions,

il n'est pas étonnant que ces malades présentent des troubles tro-

phiques aussi nombreux que variés. Si leur constatation n'est pas

plus fréquente dans nos services c'est que l'indolence des lésions

les font souvent passer inaperçus. R. LEROY.

VI. La tuberculose dans l'étiologie et la pathogénie des maladies ner-

veuses et mentales. Etude critique et expérimentale; A. MopsELLi,

Gênes, 1903.

Cet important mémoire est divisé en trois parties :

I. LES névroses ET LES psychoses par hérédité TUBERCULEUSE. -

La tuberculose des parents ne se transmet pas à leurs descendants,

.mais ceux-ci héritent d'une prédisposition diathésique qui pourra

se manifester, à un âge variable, par l'apparition des névroses,

surtout chez l'enfant, et des psychoses, surtout chez l'adulte. La

tuberculose des parents a été notée dans la méningite, l'épilepsie,

l'idiotie, la chorée de S ! /deH/t6tN ! ,la sui-di-i ? izilité,l'athélose, la paralysie

spastique infantile, l'hystérie, la psychose polynév1'ilique,l'é1'wlopho-

bie etc., etc. Chez les aliénés, les antécédents tuberculeux (parents

proches et éloignés) s'observeraient, d'après Hrdlicha, dans une

proportion de 40 à 50 p. 100, pour les hommes, et de 50 à 60 p. 100,

pour les femmes. Morselli a voulu vérifier ces chiffres qui parais-

sent un peu bien exagérés : sur 328 hommes et 280 femmes il n'a

trouvé la tuberculose des père et mère que dans 39 cas (6,

7 p. 100 pour les hommes, 6 p. 100 pour les femmes),qui se répar-

tissent de la manière suivante :

BIBLIOGRAPHIE. 179

180 " BIBLIOGRAPHIE.

troubles apparents pour le médecin et même le malade, révélée

seulement par la dégénérescence parenchymateuse constatée à

l'examen histologique; névrite amyolrophique, limitée à un ou

plusieurs troncs nerveux, et s'accompagnant de troubles subjectifs

ou objectifs, parmi lesquels on peut ranger la zone symptomati-

que ; névrite sensitive, caractérisée par l'absence habituelle de dé-

sordres moteurs. '

f. Tétanie par action toxique, générale et à distance du bacille

de Ioch.-Une observation personnelle de Tuberculose avec tétanie

chez un enfant de quatre ans.

B. Troubles de l'axe cérébro-spinal. a. Méninges et centres

nerveux : Outre la méningite, si fréquente, on a signalé la para-

lysie bulbaire asthénique, le ramollissement du pédoncule, l'encé-

phalite tuberculeuse hémorragique, la paralysie de Landry, les

myélites, etc.

b. Névroses : éclampsie infantile, épilepsie jacksonienne, mala-

die de Basedow, maladie de Menière, chorée de Sydenham, chorée

molle, épilepsie, etc. Trois observations personnelles : tuberculose

avec épilepsie. avec neurasthénie, avec neurasthénie gastrique.

C. Psychose polynévritique tuberculeuse. -Cas rares (deux obser-

vations de Colella), sans symptomatologie constante comme dans

la maladie de Korsakoff d'origine alcoolique ; caractérisés par

l'association des divers troubles névritiques ci-dessus mentionnés

avec des désordres psychiques variables : excitation, irritabilité,

hallucinations nocturnes, amnésie, etc.

D. Déso1'dres psychiques. a. LE PSYCIlISOE des tuberculeux.

D'une manière générale, l'affectivité est augmentée ; le tuberculeux

est un émotif, bizarre, volubile, capricieux, souvent égoïste, par-

fois d'un altruisme excessif. Le sens des besoins organiques est sou-

vent altéré : dégoût pour les aliments ou voracité excessive, exa-

gérant les conseils thérapeutiques; érotisme, normal ou perverti.

d'observation fréquente dans les sanatoria, mais toujours éphé-

mère. La volonté est toujours diminuée et se traduit souvent par

des décisions à l'improviste et injustifiées. L'intelligence est, au

contraire, dans un état d'hyperexcitabilité (mémoire excel-

lente, sens critique très avisé, etc.) qui pourrait, d'après Lombroso,

aller jusqu'au génie, du moins à la période de début. Trois ob-

servations personnelles du tuberculose avec mor phinomanie.

b. Les psychoses des tuberculeux. En dehors de « l'illusion

délirante chronique », dont parle Letulle, et qui fait que certains

malades voient leur espoir de guérison augmenter à mesure que

leurs forces déclinent, le délire terminal consiste surtout en une

obnubilation plus ou moins accentuée de la conscience, sans

agitation le plus souvent, avec carphologie et parfois des halluci-

BIBLIOGRAPHIE. 181

nations de la vue. Le suicide est assez fréquent (27 des 214 suici-

dés pour maladies incurables de Brierre de Boismont étaient des

phtisiques). La criminalité est en rapport assez étroit avec l'infec-

tion bacillaire : l'auteur résume une observation personnelle d'un

jeune tuberculeux de vingt et un ans, de caractère doux et tran-

quille et qui, à la suite d'un séjour prolongé à l'hôpital pour péri-

tonite tuberculeuse et voyant son état empirer, devint rebelle et

batailleur, fut condamné à plusieurs reprises pour de légers délits

et finalement se livra à une tentative d'homicide sur un garde

municipal.-Quelques exemples de criminels tuberculeux emprun-

tés à l'histoire, notamment chez les Valois (hallucination de la vue

du roi Charles VI dans la forêt du Mans) et chez les Médicis. Sur

300 prostituées, 32, d'après Callari, avaient des antécédents tuber-

culeux. Ce qu'on appelle la folie tuberculeuse est représenté par des

troubles mentaux sans rapports avec ceux qui accompagnent les

désordres dans le système nerveux périphérique et qui n'ont pas

de phénoménologie spéciale : souvent ils se manifestent sous

forme de mélancolie, mais ils peuvent aussi se traduire par des

accès maniaques ou hystériformes. Ainsi Morselli peut-il rapporter

six observations personnelles très diverses de tuberculose avec ma-

nie, lypémanie, ameolica confies ion ? zelle, paranoïa' originaire, para-

noïn persécutrice, démence primitive.

111. Les altérations anatomiques DU système nerveux produites

tzar la tuberculose. Chez l'homme, les altérations du système

nerveux périphérique peuvent manquer ou révéler le processus

inflammatoire d'une névrite intertitielle ou parenchymateuse. Sur

le système nerveux central des lésions variables ont été signalées

de l'écorce, des méninges, des centres ganglionnaires, du grand

sympathique,, etc. En ce qui concerne les altérations cellulaires, et

si l'on compare les cerveaux de malades ayant succombé à des

psychoses d'origine tuberculeuse avec ceux des lapins auxquels

expérimentalement on a injecté la toxine du bacille de Koch (extrait

aqueux fourni par l'Institut sérothératique de Maragliano), il faut

convenir que ces lésions n'ont rien de caractéristique ni de certain.

l : llesconsisteutnon seulementen un processus de désintégration de-

la partie chromatique, de coagulation et de vacuolisation, mais

aussi en une dégénération pigmentaire. Mais ces diverses altéra-

tions ne sont nullement spécifiques de l'infection bacillaire et ne

peuvent suffir à expliquer les différents troubles mentaux du ma-

lade.

Telle est l'analyse très succincte de l'important mémoire de Mor-

selli représentant un excellent travail d'ensemble, sur un sujet

fréquemment étudié, mais qui a le mérite d'être abordé ici sui-

vant un plan très clair et avec un grand nombre de documents

étrangers ou originaux. Pierre Roy.

182 BIBLIOGRAPHIE. /

VII. Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie

et l'diotie. Compte rendn du service des enfants idiots, épi-

leptiques, arriérés et aliénés de Bicêtre, pendant l'anné 1902,

par BOUR\EVILLE,aVec la collaboration de AI\Z. AMB.1RD, DERTIIOU,

BLUMENFELD, J. BOYER, CROCZOX, Lemaire, MOREL, OBERTHUR. PAUL-

BONCOUR, Philippe et Poulain. Librairie du Progrès médical, 14,

rue des Carmes. '

Le Dr Bourneville publie le XXIII0 compte rendu annuel de son

service de Bicêtre. La première partie de l'ouvrage est consacrée à

l'étude du traitement médico-pédagogique des idiots et arriérés et

à l'histoire du service pendant l'année 1902. C'est merveille de

voir l'ingéniosité déployée pour éveiller l'intelligence de ces mal-

heureux arriérés; leur apprendre la propreté ; leur apprendre à

marcher, se laver, s'habiller, manger seuls, voir, lire, écrire,

compter : on est étonné des résultats obtenus et qui font le plus

grand honneur au directeur de ce remarquable service et à ses

dévoués collaborateurs. ' ·

La deuxième partie, consacrée à la clinique, thérapeutique et

anatomie pathologique, fait connaître les observations des faits et

recherches les plus importants, observés dans le service pendant

l'année 1902.

Plusieurs travaux sont consacrés à faire connaître l'idiotie mon-

Fig. 2. - Dipl{ogle.

BIBLIOGRAPHIE. 183

Fig. 3. - Sclérose atrophique.

184 BIBLIOGRAPHIE.

golienne, que les travaux du Dr Bourneville ont puissamment con-

tribué à faire connaître. Tout d'abord une observation typique,

très détaillée, avec examen anatomique des centres nerveux et sui-

vie de la bibliographie la plus récente ; puis l'étude histologique

-de deux cerveaux d'idiots mongoliens, due à MM. Philippe et Ober-

thur : une observation d'imbécillité mongolienne, avec nanisme

relatif.

De nouveaux matériaux viennent enrichir les faits d'idiotie,

contenus dans les comptes rendus antérieurs : idiotie complète

avec diplégie;' l'autopsie montre une sclérose atrophique surtout

marquée à l'hémisphère droit (Fig. 2 et 3) ; la description très

détaillée d'une main-bote chez un idiot (Fig. 4 et 5) = l'observa-

Fig. 4. - Main botte.

BIBLIOGRAPHIE. 1 185

tiou très complète et très détaillée d'un idiot profond avec nanisme

et infantitisme, suivi dans le service pendant douze ans , on suit

pas à pas le développement progressif de cet arriéré, dû au traite-

ment médico-pédagogique appliqué systématiquement pendant

plusieurs années : un cas d'idiotie prononcée avec impulsions vio-

lentes, dacnomanie, krouomanie, mutilations, autophagie (Fig. 6),

altribuables à une méningo-encéphalite. Le D1' Bourneville com-

plète ses précédentes recherches sur l'étiologie de l'épilepsie et de

l'idiotie et montre le rôle important de l'alcoolisme, et par contre

le peu d'importance de la consanguinité, quand les procréateurs

sont bien portants.

L'histoire de Jules Deb..., idiot myxoedémateux que tous les in-

ternes de Bicêtre ont connu et qui a été surveillé dans cet hospice

pendant douze ans constitue une des observations les plus com-.

Fia. 5. - \lain butte

186 BIBLIOGRAPHIE.

plètes et les plus importantes qui aient été publiées. Observation

clinique minutieusement prise ; examen histologiqne, recherche

de la mucine, étude du squelette, rien n'y manque, et en font un

des observations capitales publiées sur le sujet'.

- Contrairement à M. Chipault, Bourneville montre que depuis,

- longtemps il connaissait la scoliose myxoedémateuse; les observa-

tions de ses compte rendus en font foi ; chez presque tous ses ma-

lades, le savant observateur de Bicêtre l'avait observée, et dans

une étude publiée par nous sur les déviations du rachis en neuro-

pathologie, nous avions signalé la scoliose chez les myxoedéma-

teux en nous basant uniquement sur les observations de notre

Maître, à qui revient tout le mérite de cette découverte clinique.

Plusieurs pages, fort intéressantes, sont consacrès à l'épilepsie :

Epilepsie idiopathique, déchéance intellectuelle, suicide ; Epilep-

sie idiopathique, guérison par un traitement institué dès le début

de la maladie. -Plusieurs observations d'hémorrhagies de la

peau et des muqueuses (hémorrhagies sous-conjonctivales, pen-

dant et après les accès d'épilepsie) ; il. Bourneville insiste sur

leur analogie avec les stigmates des extatiques. A côté des bro-

mures. M. Bourneville attache une grande importance à l'hydrothé-

rapie.

En quelques pages très claires, Crouzon expose la technique pour

rechercher les réflexes tendineux, cutanés et pupillaires, les plus

importants pour la clinique.

La maladie des tics est le plus souvent incurable : aussi est-elle

d'autant plus intéressante l'observation de maladie des tics suivie

de guérison. Celle-ci fut obtenue par les exercices de gymnastique,

les exercices respiratoires et la suggestion à l'état de veille.

Quelle est l'influence des professions insalubres sur la produc-

tion des maladies chroniques du système nerveux ? De la statisti-

que, M. Bourneville déduit : sur 115 familles, ayant fourni 555 en-

fants, 278 de ceux-ci sont décédés (soit 50 p. 100), 115 idiots, épi-

leptiques, etc., soit 78 p. 100 mortellement ou gravement impres-

sionnés par les différentes professions insalubres exercées par les

parents. Parmi celles-ci, il s'agit dans 59 cas de saturnisme une

fois le phosphore peut être incriminé; 17 fois le mercure, 16 fois

le cuivre, 19 fois des poussières diverses (tabacs,plumassières, ma-

telassières).

Les troubles psychiques sont fréquents chez les enfants ; déjà les

compte rendus de Bicêtre en contiennent de nombreuses observa-

tions; l'auteur en ajoute une nouvelle terminée par la guérison.

L'histoire des affections familiales, déjà si complexe, s'enrichit

d'une très importante observation de diplégie spasmodique infan-

1 Cette observation avec de nombreuses figures et planches a été

publiée dans le numéro d'août des Archives de Neurologie, 1903, p. 91.

BIBLIOGRAPHIE. 187

tile et idiotie chez deux frères; l'autopsie de l'aine fit constater

une atrophie manifeste du cervelet et du pont de Varole. Le second

frère a succombé et l'autopsie a fait,aussi découvrir une atrophie

cérébelleuse.

Relevons uue observation très intéressante de canitie partielle

(mèche blonde au milieu du front) que l'on retrouve chez Il per-

sonnes de la même famille ; 3 d'entre elles présentent des teintes

blanches sur la partie extérieure du tronc, au-dessous des seins.

Enfin, dans une statistique d'ensemble, M. Bourneville reprend

l''ig. 0. Mutilation et autophagie. Destruction de l'oeil gauche.

188 . VARIA.

tous lestas d'inégalité de poids des hémisphères cérébraux et cé-

rébelleux qu'il lui a été donné d'observer.

On voit par cette analyse quelle somme de matériaux et de

quelle importance contient ce volume digne en tous points de ses

devanciers : il y a là un exemple à suivre pour tous les grands ser-

vices hospitaliers, pour la meilleure utilisation des matériaux que

la cliniqua met à notre disposition. D1' 1111RALLI>;.

VARIA.

Li. : s ALIÉNÉS EN liberté

Suicide. - M. Alphonse Perdrix, âgé de cinquante-quatre ans,

rentier à Barneville-sur-Seine, a été trouvé, dimanche matin, pendu

dans son grenier au moyen d'une lanière de cuir qu'il avait atta-

ché à une solive. D'après M. le De Texier, qui a constaté le décès,

la mort remontait à vingt-quatre heures environ. Depuis quelque

temps déjà, M. Alphonse Perdrix, que sa raison abandonnait par

instants, manifestait des idées de suicide. (Le Progrès de l'E1l1'c,

20 janvier z) .

Un suicide. Un nommé Dupont, 39 ans, habitant Charbon-

nières et qui depuis plusieurs jours était recherché par son père,

vient d'être trouvé noyé dans une mare à Clessé. Le malheureux

ne jouissait pas de la plénitude de ses facultés mentales. (Progrès

de Lyon, décembre).

Suicide. Depuis deux jours Marie-Eglantine Picard, âgée de

soixante ans, ouvrière de filature, demeurant à Pitres, n'avait pas

paru à son domicile, jeudi dernier. M. Védrine, maire de cette

commune, envoya le garde champêtre s'informer de son sort.

Celui-ci, après avoir escaladé le mur de l'habitation, par une fenê-

tre restée ouverte put entrer dans une chambre où il trouva pendu

le corps de la malheureuse femme. Le cadavre était encore rigide;

une chaise renversée indiquait que Marie Picard s'en était servie

pour fixer le noeud coulant et l'avait ensuite repoussée pour se

lancer dans le vide. Cette femme paraissait ne pas posséder toutes

ses facultés mentales. (Progrès de l'l;ue, 6 janvier 1904).

- La mère d'Urbain Gohier s'est suicidée ce matin 20 janvier,

en se jetant par une fenêtre de son appartement, situé au cin-

quième étage, rue Claude-Bernard, où elle habitait avec son fils et

sa fille. Mme Gohier, âgée de soixante-cinq ans, était depuis quel-

que temps en proie à des idées noires. Ce matin profitant d'une

courte absence de sa fille, elle ouvrit la fenêtre et se précipita dans

VARIA. 189

la rue; elle s'est brisée le crâne et cassé jambes et bras. La mort a

été instantanée, Mlle Gohier qui revenait à ce moment fut prise en

apercevant le cadavre de sa mère d'une terrible crise de nerfs.

Urbain Gohier était absent pendant cet affreux drame ; il a été rap-

pelé par dépêche.

D'où la nécessité d'hospitaliser les aliénés.

L'assistance DES épileptiques

Un épileptique. Sur la place Victor-Hugo, à l'angle de la rue

Nationale, un rassemblement s'était formé a 40 h. 15 du soir, pro-

voqué par un mendiant qui venait d'être pris d'une violente crise

d'épilepsie. Le malheureux écumait et se débattait. Dès la crise

passée, c'est-à-dire au bout d'un quart d'heure, cet homme, un

mendiant du nom de Guillaume G..., âgé de quarante-six ans,

a été emmené chez lui, rue de l'Armedieu, par sa femme. (Le

Petit Var, 23 août 1903.)

- Pour cent sous, je le tue ! Pour bien moins, pour rien et pas

même pour le plaisir ! Car ce misérable épileptique-alcoolique, ce

garçon de vingt-cinq ans, Lair, qui, dans la nuit du Il au 12 juil-

let dernier, à Montreuil-sous-Bois, frappa de deux coups de cou-

teau catalan le pauvre Villard, ne l'a pas dévalisé ; et les deux

hommes ne se connaissaient pas, et rien dans les antécédents du

meurtrier ne permettait de prévoir qu'il dût, un jour, se plaire

aux sanglantes violences.

C'est pourtant bien probablement lui, en dépit de ses dénéga-

tions sur ce point, qui a proféré ces mots. rapportés par plusieurs

témoins : « Pour cent sous, je le tue ! » Mais il les a dits sans

doute inconsciemment, puisque, l'action abominable accomplie, il

n'a pas même songé à fouiller l'homme qui râlait à ses pieds. Il a

continué son chemin et, à quelques pas de là, il s'est attaqué à un

autre passant; c'est même cette seconde tentative criminelle, heu-

reusement restée sans effet, qui finit par éveiller l'attention de la

police. Devant ses juges, Lair est inerte, comme hébété. lia avoué ;

mais quand on lui demande pourquoi il a tué, il ne sait pas, il

balbutie des explications incohérentes et vagues, et ma parole, son

ignorance de ses propres mobiles, son horreur de son propre

forfait paraissent sincères ! Je ne sais pas comment ça s'est

passé, dit-il ; je n'ai pas pu frapper comme ça, c'est pas possible !

Et en assénant sur le banc un coup de poing retentissant, il fait

cette déclaration que l'assistance accueille par une rumeur de

protestation : « Je ne suis pas un sauvage ! »

Les médecins commis à son examen ont conclu que Lair est

responsable de ses actes, mais qu'il mérite, en raison de son état

maladif, quelque indulgence.

Après une intéressante plaidoirie de 115 Brieu, les jurés ont

prononcé un verdict de culpabilité. La cour a condamné à six ans

190 VARIA.

de travaux forcés le meurtrier inconscient (Le Matin, 20 janvier

190). ' ,

Les deux faits qui précèdent montrent la nécessité de

l'hospitalisation des épileptiques. N'aurait-il pas mieux valu

"essayer de traiter le second dans un asile, que de payer son

entretien pendant six ans dans les prisons. Cette condamna-

tion d'un inconscient a de quoi surprendre.

La LOI SUR l'ivresse

Juste contravention. La dame B..., débitante de boissons, rue

Augustin-Daumas, 6, ayant servi à boire à des gens ivres a été

l'objet d'une contravention. Un pareil motif est trop rare pour que

nous ne l'enregistrions pas avec des éloges à l'adresse de l'agent

qui a constaté le fait. Si on procédait plus souvent de la sorte, il y

aurait bien moins d'ivrognes dans nos rues. (Le Petit Yar,

(19 sept. 1903).

Oui, si comme le dit le Petit Va ? ' et comme nous l'avons dit

nous- même et écrit tant de fois, « on procédait plus sou-

vent de la sorte, il y aurait moins d'ivrognes dans les rues »,

moins d'enfants dégénérés, moins de meurtriers dans les

prisons ou au bagne, moins d'aliénés dans les asiles. Il s'en-

suivrait aussi la disparition d'un grand nombre de mar-

chands de vins au grand bénéfice de la Société.

'-

Alcoolisme DE l'enfance.

La boisson est aussi la cause que la jeune Augustine Levillain.

douze ans ; la femme Aubert et son garçon de onze ans, demeu-

rant à Saint-Germain-de-Livet, ont passé devant le tribunal cor-

rectionnel de Lisieux. Le sieur Le Tuai avait chargé Augustine

Levillain de livrer de la boisson aux époux Aubert. Mais, au lieu de

tirer du « petit », elle prenait du pur jus dont elle buvait sa part,

sans compter le café et les gâteaux qu'on lui payait en échange de

sa complaisance. Augustine Levillain et le jeune Aubert ont été

acquittés, mais la femme Aubert a été condamnée à un mois de

prison avec la loi Béranger. Son mari a été déclaré civilement res-

ponsable, c'est-à-dire qu'il aura à payer les frais du procès et a

rembourser au sieur Le Tuai les 500 litres manquant à son ton-

neau de gros cidre. (Lé Bonhomme Normand^ 16 au 23 octobre

1902).

Jadis ET naguère : l'épilepsie ET LE mariage

D'un procès-verbal de 1533, conservé aux archives de Luçon et

publié en 1878, relatif à un fiancé et une fiancée, atteints de mal

caduc, il résulte que, dès cette époque, on considérait l'épilepsie

FAITS DIVERS. 191

comme une cause suffisante de séparation, Or, maintenant, il pa-

rait que cette terrible maladie n'est pas un cas de divorce. Et l'on

dit que nous progressons. (Gazette médicale de Paris).

Discours présidentiel prononcé A la 62° réunion annuelle de

l'Association Médico-Psychologique, tenue à Londres le 16 juil-

let 1903, par Ernest W. VHITC (The Journal of Mental, Science,

octobre 1903). Comme ceux de ses prédécesseurs, le discours

de M. \\'xTC touche à trop de sujets pour se prêter à l'analyse.

R. M. C.

FAITS DIVERS.* ·

Concours d'internat en médecine des Asiles' (3 décembre 1903).

- Liste des candidats 'par ordre d'inscription. - MM. Saillant

(Georges), Collet (Claude), Dupouy (Roger), Ploton (Emile), Mlle

Pelletier (Anne), MM. Michon (Arnaud), Papillon (Pierre), de Ne-

vrèze (Bertrand), Mlle Pascal (Constance), MM. David (Charles),

Baldenweck (Louis), Masmonteil (Philippe), Bourilhet (Jean), Albès

(Abel-Ernest), Ambrosi (Paul), Monod (Gustave), Tahier (Charles),

Florence (Antonin), Ducosté (Urbain). Les 19 candidats ont

remis une copie. Les deux questions restées dans l'urne étaient

les suivantes : 1° a) symptômes et diagnostic du cancer de l'esto-

mac. b) phlegmon diffus. 2° a complication de la scarlatine.

b) diagnostic et traitement de la hernie crurale étranglée.

Questions orales : Nerf glosso-pharingien, Nerfs du coew',

Cordons antérieurs de la moelle. Questions de garde : De la con-

duite à tenir en présence d'un accès de suffocation. - De la conduite

à tenir en cas de rétention complète d'urine.

Résultats du concours. Internes titulaires : MM. Dupouy, 57

points ; Albès, ! j3 ; Monod, 54 ; David, 53; Ducosté, 53; Mlle Pelle-

tier, 52; M. Collet, 50; Mlle Pascal, 4.9 ; MM. de Neurgé, 46 ; Sail-

lant, 46 ; Papillon, 45. - Internes provisoires : 1111. \üchon, 44;

Bourilhet. 43. Parmi les internes titulaires figurent deux femmes,

Miles Pelletier et Pascal, celle-ci roumaine. Nos lecteurs se rappel-

lent que c'est à la suite de nos réclamations persistantes appuyées

par notre ami le professeur Joffroy, émises aussi par le jury du

concours de 1902, que la commission de surveillance, conseillée par

l'administration, a admis les femmes et les étrangers à concourir.

Nous adressons nos vives félicitations au premier interne, fils de

notre excellent confrère le Dl' Dupouy. ,

Asile d'aliénés DE BRON (Rhône). - La Loire m éd. du 15 janvier

nous annonce que le concours pour l'Internat de l'asile de Bron

vient de se terminer par la nomination de MM. Loup, Cauvers,

192 BULLETIN bibliographique. 1

Jaub'ert, titulaires et Charasse suppléant. Le concours comprend

une question écrite d'anatomie, une question écrite de pathologie

interne et de pathologie externe, enfin une question de garde.

Distinctions honorifiques. Nous apprenons avec plaisir que

M. le D CORTYL, médecin-directeur de l'asile de Bailleul vient

d'être nommé chevalier de l'ordre du mérite agricole.

Suicide d'un enfant. Le jeune Amiot, quatorze ans, domes-

tique chez le sieur Legrand, débitante à Deauville, s'est pendu

dans un grenier. Qn ignore les causes de ce suicide. (l3ozlc. Norm.;

2 juillet 1903).

Maisons de Santé. Responsabilité des Directeurs. Une dou-

loureuse histoire est celle de Mlle G..., qui, à la suite de chagrins

d'amours, atteinte de neurasthénie, avait été placée dans une mai-

son de santé du Dr Duhamel, à Fontenay-sous-Bois. Elle trompa

un jour la surveillance dont elle était l'objet et parvint à se pen-

dre dans'les water-closets. Le père avait, à raison- de ce fait,

intenté au Dr Duhamel une action en dommages-intérêts, - impu

tant à la négligence des préposés de celle-ci le malheureux événe-

ment qui le mettait en deuil. Il obtint 10 000 francs de la première

Chambre du tribunal. Mais le Dr Duhamel fit appel.Et l'affaire a été

de nouveau plaidée devant la troisième Chambre de la Cour. La

Cour, jugeant que M. G... ne faisait la preuve d'aucune faute ou

imprudence à la charge du directeur de la maison de santé, a

infirmé le jugement du tribunal, et déchargé le D' Duhamel de

toute condamnation. (Gazette médicale de Paris, 9 janvier 1904).

Revue Scientifique. Nous apprenons que notre confrère, le

D1' TOULOUSÉ, médecin en chef de l'asile de Villejuif, directeur à

l'Ecole des Hautes-Etudes, a pris la direction de la rédaction de la

Revue scientifique (revue rose).

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

BtcnEMis (Fernand). Contribution à l'élude de l'idée de yrosseise.

1 vol in-8- de 102 pages, imp. Kreiss, Nancy. '

HÈmssEY (Paul). Etude clinique sur les troubles trophiques dans la

paralysie générale. Librairie C. : laud, 3, rue Racine." In-8- de 136 pages,

The Johits //op/ft ! M Ilospilal Reports, t. XI, 1 vol, in-8° de 556 pages.

John tlopkins. Press., Baltimore 1903." ' '

1 Le rédacteur-gérant : Boluneville. 1

Eireux, Ch. lItRls5BV, imp. - I-100f.

Vol. XVII. Mars 1904. N° 99.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE MENTALE.

L'état du fond de l'oeil chez les paralytiques

généraux;-

PAHLFS DOCTEURS -

P. KERAVAL F.r A. DANJEAN

Médecin en chef. Interne.

A l'Asile de Ville-Evra,,d. \

Le présent travail est le complément de deux mémoires

déjà publiés, consacrés à la révision des aspects ophthalmos-

copiques de la papille observés chez les paralytiques

généraux, dans lesquels il a été démontré que certains de

ces aspects tiennent à des lésions de la papille, de la

rétine, du nerf optique Il nous a semblé utile de procéder

à l'examen du fond de l'oeil chez la femme paralytique et

dans un autre milieu que celui d'Armentières. Quarante et

une paralytiques étaient, à l'époque où nous nous sommes

livrés à cet examen, accessibles à ce genre de recherches.

1. Quatre d'entre elles ne présentaient certainement

aucune anomalie du fond de l'oeil et de la papille, ni à

droite ni à gauche. Nous en donnons les observations résu-

mées et quant à l'état mental et quant à l'état ophthalmos-

copique.

Observation I. - Vauder..., femme S..., trente-sept ans, entrée

le 8 juillet 1903. Présente le 7 septembre de la. même année un état

loi/- Keraval et Itaviart. L'état du fond de l'oeil chez les paralytiques

Qeneraux el ses lésions anatomiques initiales et terminales. Nou-

relle contribution il l'état du fond de 1 oeil chez les paralytiques géné-

raux = (.4rclzivestle Neurologie, 2* série. 11°' 85 et 9.°3, janvier et août

1903.) Yoy. au,si Congrès de Bnuxelles, 1903, in Revue Neurologique,

Il' 16, 3L août 1903, page 826. '

Archives, 2' série, t. XVII. 13

194 -il CLINIQUE mentale.

de dépression mélancolique avec quelques idées de persécution.

Hallucinations de l'ouie : on lui dit toute espèce d'injures, on ne

cesse de causer d'elle. Elle ade temps à autre quelques impulsions

violentes; pleurnicheries. Signes physiques : pupilles dilatées et

' inégales; les réactions en sont conservées mais lentes. Accrocs

nombreux de la parole Tremblements (ibrillaires de la langue et

de la face. Cette malade n'est pas gâteuse. Les papilles sont ab-

solument normales.

Observation II. - Hil'..., femme B..., 31 ans, entrée le 29 juil-

let 1903. Examen du 7 septembre 1903, affaiblissement intellectuel

considérable, grande confusion mentale; désorientalion excessive.

Hallucinations nombreuses de l'ouïe de caractère pénible. -Pas

d'idées délirantes. Inconscience. Signes physiques : faiblesse

musculaire accentuée ; tremblements des mains, des lèvres, de la

langue. Dilatation pupillaire avec inégalité considérable. Parole

difficile. Gâtisme très prononcé. Les papilles sont tout à fait nor-

males.

Observation III. - Mail..., femme Trou..., trente-cinq ans,

entrée le 3 juillet 1899. A présenté dès son entrée tous les signes de

paralysie générale à forme maniaque. Le 10 septembre 1903, épo-

que de cet examen, elle est en rémission complète ; aucun trouble

intellectuel; conscience très nette de son état. Atténuation très

grande des signes physiques. Les pupilles égales et moyennement

dilatées présentent une réaction faible à la lumière. A l'ophtalmos-

cope les papilles ne présentent pas d'anomalie.

Observation IV. K..., femme Laz..., trente-un ans; entrée

le 5 juin 1903. Examen du 14 septembre 1903. Excitation intellec-

avec agitation par intervalles. Quelquefois réactions violentes.-

Signes physiques : léger tremblement fibrillaire de la langue et des

lèvres. Troubles de la parole. Pupilles légèrement inégales, immo-

biles à la lumière. Papilles absolument uormales.

II. Chez les neuf autres malades}les papilles n'étaient

qu'à peu près normales, en ce sens que les particularités

susceptibles d'inspirer des doutes ne se présentaient pas

avec les caractères très tranchés de lésions indéniables.

Voici d'ailleurs les traits principaux de leur état mental

au moment de l'examen et le relevé correspondant de l'ap-

parence du fond de l'oeil.

Observation V. - L..., veuve Mir..., 55 ans ; entrée le

21 avril 1903. A présenté à l'entrée les signes de paralysie générale

à forme maniaque. Actuellement, le 10 septembre 1903, elle est

intellectuellement affaiblie et désorientée. Idées de satisfaction et

LE FOND DE L'ÛEIL CHEZ LES PARALYTIQUES GÉNÉRAUX. 195'

de grandeurs. Signes physiques : parole empâtée et bredouil-

lante ; secousses nbrillaires de la langue. Pupilles égales mais

complètement immobiles. Gâtisme.

Les papilles semblent normales, mais la coloration rosée ne

parait pas d'une nuance de bon aloi.

Observation VI. Il..., femme B..., trente-six ans, entrée le

29 mai 1903. Examen du 14 septembre 1903. En état de démence

complète, cette malade est, de temps à autre, en proie à de l'agita-

tion maniaque. - Signes physiques très marqués, tremblement de

la langue : parole très hésitante, un peu explosive. Pupilles dila-

tées, inégales, immobiles. Nombreuses attaques épileptiformes.

Gâtisme. A l'ophtbalmoscope les papilles sont bien dessinées, les

bords en sont très nets; mais le segment interne de chacune

d'elles est blanc, tandis que le segment externe en est rosé (imagé

renversée).

Observation VII. - in.... femme Gro..., 45 ans, entrée le

10 avril 1903. Dès son entrée, symptômes de paralysie générale à

forme maniaque, avec signes physiques prononcés. Examen du

14 septembre 1903. Dépression mélancolique avec anxiété ; la

maladene s'alimente passpontanément. Absence d'idées délirantes.

Signes physiques très atténués; pas de troubles de la parole : pu-

pilles légèrement inégales. Papilles bien nettes à l'ophthalmoscope

mais le segment interne de chacune d'elles tire sur le blanc (image

renversée).

Observation VIII. Lo..., femme Gàt..., trente-huit ans, en-

trée le 15 avril 1903. Très excitée, manifeste des idées de richesses.

Actes inconscients; elle a mis le feu chez elle. Inégalité pupil-

laire, troubles de la parole ; hémiparésie gauche qui a rétrocédé

rapidement.

Actuellement, le 7 septembre 1903, affaiblissement intellectuel

sans aucune idée délirante. Elle se rappelle très bien avoir commis

quelques actes extravagants. Tremblement de la langue, troubles'

très légers de la parole ; aucun trouble de la lecture, mouvements

fibrillaires des lèvres. Ecriture tremblée. Pupilles égales, complète-

I ment immobiles. A la suite de ses règles, cette malade présente

parfois de l'hémiparésie droite avec troubles vasomoteurs du même

; côté. A l'ophthaimoscope les papilles sont normales, sauf peut-

être le bord externe (image renversée) de la papille droite un peu

imprécis. ZD

r Observation IX. Ri..., femme 13ou. , ., quarante ans; entrée

le 8 août 1902. Avant son entrée cette malade a présenté deux fois

', des vertiges avec chute et perte de connaissance. Ces accidents ont

; été suivis de parésie linguale et de bégaiement pendant quelques

196 CLINIQUE MENTALE.

jours. 'Au moment de l'entrée, accès d'agitation qui a duré plusieurs

jours. Examen du 8 septembre 1903.- Aucun trouble de la parole;

tremblements fibrillaires de la langue. Pupilles moyennement dila-

tées, légèrement inégales, celle de ganche est plus large; elles réa-

glissent bien à la lumière toutes deux; réaction à l'accommodation

lente. La malade dit voir mal, il lui semble avoir un voile devant

les yeux. Aucun rétrécissement du champ visuel.

On constate encore de l'hypertrophie des extrémités ; les mains

sont très volumineuses, les index en particulier sont larges et spa-

tulés. Les pieds sont également hypertrophiés, le gros orteil sur-

tout. Langue volumineuse. '

.A l'ophthalmoscope, les papilles apparaissent normales, saut

peut-être un peu nacrées en dedans (image renversée).

'Observation X. - Du... Marie, quarante-six ans, entrée le

12 juillet 1902. On note alors un affaiblissement intellectuel dû à

l'alcoolisme chronique dont on relève les stigmates, et des signes

physiques de paralysie générale. Aujourd'hui, 8 septembre 1903,

les manifestations mentales sont en rémission, la malade s'occupe

régulièrement. Mais la parole est embarrassée, les pupilles sont

étroites et inégales; il existe une sénilité prématurée.

A roplilhalinoscope les papilles ont un aspect normal, mais elles

sont un peu pâles.

Observation XI. - Fo..., femme Can..., quarante-deux ans;

entrée le 15 avril 1901 : excitation avec euphorie et quelques idées

délirantes de richesses ; embarras très net de la parole ; signes phy-

siques très marqués; elle s'est fait arracher onze dents sous pré-

texte qu'elles étaient cariées.

Examen du 8 septembre 1903. Signes physiques très marqués,

trouble léger de la parole : tremblement menu et rapide de la

langue; inégalité pupillaire ; pupilles étroites à réaction lente tant

à la lumière qu'à l'accommodation. '

L'examen ophthalmoscopique révèle des papilles normales quoi-

qu'un peu pâles. '

Observation XII. - Duv..., veuve Hé..., quarante-trois ans,

entrée le 4 mai 1903. Le 8 septembre 1903, il existe de l'affai-

blissement intellectuel, avec idées de satisfaction, euphorie, incons-

cience de son état. Les Signes physiques qui étaient très prononcés

au début semblent en rémission; la parole n'est plus hésitante;

l'inégalité pupillaire est à peine appréciable. - A l'ophthalmos-

cope les papilles sont mormales; on est simplement frappé de

quelque réflexion nacrée du segment interne, près la dépression

centrale de chaque côté (image renversée).

Observation XIII. -Chantel..., femme Arn..., quarante et un

ans; entrée le 9 mai 1903. Examen du 15 septembre 1903. Idées

LE FOND DE L'OEIL CHEZ LES PARALYTIQUES GÉNÉRAUX. 197

de satisfaction, elle se dit forte, vigoureuse, capable de bien cou-

rir. Elle n'est pas trop désorientée et s'occupe activement dans le

quartier. Signes physiques : tremblement de la langue et de la

mâchoire inférieure, pupilles inégales, celle de droite étant plus

large : leur réaction à la lumière est abolie des deux côtés; la réac-

tion à l'accommodation est diminuée.- A l'ophthalmoscope,les pa-

pilles sont normales; peut-être seulement le segment interne de la

papille droite (image renversée) est-il un peu brillant.

III. Voici maintenant vingt et une paralytiques qui cer-

tainement étaient affectées des lésions que nous avons anté-

rieurement décrites avec MM. Raviart et Caudron. Ces ma-

lades se peuvent diviser en trois groupes.

Premier groupe. Paralytiques générales dont les bords

papillaires étaient imprécis, soit d'un côté, soit des deux

côtés. Trois observations.

Observation XIV. Schw..., femme Schw..., quarante-trois

ans, entrée le 6 avril 1903. Présente alors de l'excitation intellec-

tuelle, avec quelques idées de persécution, elle est nn peu dé-

sorientée, se dit âgée de trente-cinq ans. On constate une exoph-

thalmie très prononcée accompagnée d'inégalité pupillaire, et d'un

léger ptosis à droile.

Examen du 7 septembre 1903. Inégalité pupillaire très manifeste ;

la pupille droite est moins large. Les pupilles réagissent assez bien

à la lumière; la pupille droite réagit lentement à l'accommodation

la pupille gauche pas du tout. Tremblement de la langue. Pas de

troubles bien nets de la parole. La malade conserve quelques idées

de persécution.

A l'ophthalmoscope, la papille droite est normale. La papille

gauche présente un bord inférieur imprécis.

\ ,

Observation XV. Fri... Octavie, trente-cinq ans; entrée le

3 avril 1903; à la suite d'une arrestation pour vol d'orange. On

relève alors de l'affaiblissement des facultés, bien que la mémoire

soit assez bien conservée. Il n'existe pas d'idées délirantes, mais la

malade n'a aucune conscience de sa situation. Signes physiques

très peu marqués, pas de troubles de la parole; pas de tremble-

ment dés mains, ni de la langue, mais mouvements fibrillairesrapi-

des des lèvres; pupilles dilatées et immobiles à la lumière.

Examen du 7 septembre 1903. Troubles de la parole très ac-

centués : mouvements de trombone de la langue en même temps un

peu déviée à gauche. Pupilles égales mais à leur maximum de

dilatation; elles ne réagissent plus ni à la lumière, ni à l'accommo-

dation. 0

198 CLINIQUE MENTALE.

L'examen du fond de l'oeil permet de constater à droite : une'

papille pâle; à gauche un papille pâle à bords imprécis, surtout

le segment inféro-interne (image renversée).

Observation 1VI.- Lél...., femme Pi..., trente-neuf ans, en-

trée le 17 septembre 1902. Cette malade aurait eu, avant son en-

trée, des hallucinations de l'ouie, quelques idées de persécution,

et aurait fait une tentative de suicide.

Examen du 8 septembre 1903. Affaiblissement intellectuel

avec quelques idées mystiques et érotiques. Cette malade s'occupe

régulièrement. Un examen attentif décèle de l'hésitation de la pa-

role, une écriture tremblée. Aucun tremblement de la langue; ce

sont les muscles des lèvres et des joues qui tremblent. Pupilles

inégales, la pupille gauche resserrée, ne réagit pas à la lumière;

rien de semblable du côté de la pupille droite normale.

-Examen ophthalmoscopique : papille droite à bord externe

(image renversée) imprécis; à gauche, c'est le bord supérieur de la

papille qui est dépourvu de netteté.

` Deuxième groupe. Paralytiques générales à papilles

floues, unilatérales cu bilatérales. Sept observations.

Observation XVII. L'Az ? veuve P..., femme P..., quarante

ans; entrée le 30 mars 1903.

On constate à l'entrée un trouble considérable de la parole,

celle-ci étant presque inintelligible; la malade cherche ses mots et

certains de ceux-ci ne peuvent être articulés. Affaiblissement intel-

lectuel accompagné d'idées de satisfaction. Tremblement intense

des membres droits.

Examen du 7 septembre 1903. La parole n'est plus aussi diffi-

cile, il existe un achoppement syllabique intermittent et léger.

Tremblement de la langue. Pupille droite moyennement dilatée,

déformée dans son segment supérieur, réagit bien à la lumière et

à l'accommodation. Pupille gauche resserrée présente des réac-

tions à peu près normales à la lumière, à l'accommodation, à la

convergence.

Pas de tremblement des membres.

Il existe des idées de satisfaction, mais la malade a la mémoire

nette des troubles qu'elle a présentés et a conscience d'avoir été

malade. Elle s'occupe régulièrement. A l'ophthalmoscope : papille

gauche floue; papille droite normale.

Observation XVIII. -Schl..., Eugénie, trente-huit ans; entrée

le 29 mai 1903. Elle ne présente aucun signe de paralysie générale.

Elle est excitée et croit qu'on a déposé pour elle dans une banque

600 000 francs; elle se dit, par suite, au comble de ses voeux, et se

félicite de la santé excellente dont elle jouit.

LE FOND DE L'OEIL CHEZ LES PARALYTIQUES GÉNÉRAUX. 199

Examen du 8 septembre 1903. Persistance du même délire;

c'est maintenant une somme d'un million qui est à sa disposition ;

avec cette somme elle va fonder une maison de soierie. Signes

physiques très accentués, mais par intervalles seulement, notam-

ment le tremblement de la langue, très passager. Inégalité pupil-

laire très marquée; à droite, la pupille est déformée et immobile

il la la lumière; la pupille gauche réagit mal à la lumière. Réac-

tion à l'accommodation lente des deux côtés. Pas de troubles de la

parole.

A l'ophthalmoscope, papille droite normale mais un peu pâle en

dedans (image renversée) ; papille gauche généralement floue et

mal dessinée en même temps que pâlotte.

Observation XIX.-Tav..., femme Pei..., soixante-trois ans,entrée

le 24 avril 1903. Eléments symptomatiques d'un délire systématisé,

hallucinations de l'ouïe ; la malade croit qu'on lit sa pensée. Hal-

lucinations de la sensibilité générale ; certaines personnes, dit-elle,

son mari surtout, font agir sur elle des rayons X. Son mari l'aurait t

dépouillée de tous ses biens de concert avec sa maîtresse.

Examen du 8 septembre 1903. Persistance du même état men-

tal ; hallucinations de l'ouïe et de la sensibilité générale très fré-

quentes. On vient toujours l'injurier sans cesse, la menacer, lui

tenir des propos orduners. - -

Signes physiques très nets. Inégalité pupillaire, pupille droite

plus dilatée que la gauche. Les pupilles réagissent mal à la

lumière, très mal à l'accommodation. Tremblements fibrillaires de

la langue. Achoppements syllabiques. A l'ophthalmoscope, papille

gauche normale, papille droite floue et, en sus, bord externe

(image renversée) imprécis.

Observation XX. Pi..., femme Guy.... cinquante et un ans ;

entrée le 14 août 1903.

Examen du 14 septembre 1903. Déchéance complète des facul-

tés ; indifférence totale; excitation par intervalles; mutisme.

Troubles physiques intenses; tremblement des lèvres, de la langue,

des mains. Pupilles très dilatées, immobiles. Gâtisme. A l'ophthal-

moscope, papille droite floue dans l'ensemble; la papille gauche

qui présente des bords nets précis, mais irréguliers, est plus pâle

qu'à droite.

Observation XXI. Pet..., femme Leg..., cinquante-six anr,; i

entrée le 6 avril 1903. Délire mélancolique avec préoccupations

hypochondriaques. Quelques signes de tabès ; signe d'Argyll

Hobertson; signe de Romberg. Inégalité pupillaire.

Examen du 9 septembre 1903. Délire d'énormité ; cette malade

dit que la syphilis qu'elle aurait contractée il y a environ dix ans,

l'a complètement nécrosée ; elle n'existe plus; bien plus, sa mala-

200 - CLINIQUE MENTALE.

die s'est propagée à tout l'univers, aux végétaux et aux animaux

de la création ; tout le monde en est malade. L'anxiété dans

laquelle elle se trouve l'a poussée à deux tentatives de suicide.

Signes physiques caractéristiques : paralysie faciale gauche ; les

- pupilles sont dilatées, la'droite plus qne la gauche, et leurs réac-

tions à la lumière sont faibles, tandis qu'elles ne réagissent plus à

l'accommodation. Tremblement léger de la langue, tremblement

des muscles de la face. Diminution de la sensibilité au contact et à

la douleur. Gâtisme. A l'ophthalmoscope les deux papilles sont

uniformément floues et pâlottes. ,

Observation XXII. Thép..., femme Can..., quarante-trois ans :

entrée le 22 mai 1903. z

Examen du 10 septembre 1903. Affaiblissement intellectuel avec

idées hypochondriaques. IIallucinations multiples ; des hommes

la poursuivent et lui disent de vilaines choses. Signes physiques

assez nets : tremblement de la langue ; pupilles contractées et iné-

gales, ne réagissant plus normalement à la lumière. Gâtisme par

intervalles. A l'ophthalmoscope, les papilles sont floues et font une

légère saillie globuleuse en avant sur laquelle les vaisseaux s'éten-

dent, en l'embrassant, comme des pattes sans cependant perdre de

leur visibilité aux diverses mises au point.

Observation XXIII. - Dev..., femme Pr..., quarante-huit : ! ns;

entrée le 1 avril 1903.

Examen du 10 septembre 1903. Affaiblissement intellectuel, avec

quelques idées délirantes de richesses et quelques divagations

hypochondriaques. Elle a, dit-elle, une bête à la place du foie. Pas

de tremblements de la langue. Accrocs de la parole rares; la malade

avoue cependant ne pouvoir trouver ses mots. Pupilles inégales,

ne réagissant plus à la lumière. A l'ophthalmoscope, les deux pa-

pilles sont floues.

Troisième groupe. - Paralytiques générales présentant

les signes de l'atrophie papillaire en voie d'évolution des

deux côtés ou d'un seul côté. Onze observations.

Observation 1XIV. - Dal..., femme Meil..., trente-deux ans,

entrée le 21 août 1903, présente alors de l'excitation maniaqne.

Examen du 7 septembre 1903. Dépression avec angoisse.

Signes physiques. Pas de tremblement de la langue ni des lèvres.

Quelques achoppements syllabique Pupilles un peu inégales, la

pupille gauche étant plus large; elles réagissent cependant nor-

malement. At'ophthatmoscope, double japillite; les papilles sont

surtout excessivement nuageuses dans les trois quarts de leurs

segments externes (image renversée). C'est un type de neuroré-

Unité paralytique.

LE FOND DE L'OEIL CHEZ LES PARALYTIQUES GÉNÉRAUX. 201

Observation XXV. Ros..., femme B ? trente-cinq ans, entrée

le 13 mars 1903. A ce moment quelques préoccupations hypochon-

diaques, qnelques idées de satisfaction; hésitation de la parole ;

inégalité pupillaire.

Examen du 8 septembre 1903. Légère dépression mélancoli-

que avec un certain degré de désorientation ; la malade ignore le

jour de la semaine, ne sait depuis combien de temps elle est à

l'asile. ' ,

Tremblement ribrillaire de la langue ; inégalité pupillaire très

nette; à gauche, la pupille, en outre déformée, reste immobile à

lalumière et à l'accommodation ; les réactions de la pupille gauche

sont faibles. Parole lente et embarrassée. Gâtisme par intervalles.

À 1'ophtUalmoscope,la papille droite est pâle et floue, la papille

gauche tend à ressembler à un pain à cacheter blanc.

Observation \\VI. Cl..., femme Bu..., cinquante et un ans,

entrée le 3 août 1903.

Examen du 9 seplembre 1903. -' Affaiblissement intellectuel;

désorientation complète; la malade qui se dit âgée de vingt-deux

ans, ne sait où elle se trouve. Signes physiques très marqués;

parole extrêmement embarrassée ; tremblements très forts de la

langue et des lèvres; les pupilles égales réagissent très faiblement

à la lumière, surtout la pupille droite, et pas davantage à l'accom-

modation. La malade dit ne pas voir distinctement les caractères

d'imprimerie. '

A l'ophthalmoscope, papille droite à bords flous partout, mais

surtout en bas, en dehors et en haut (image renversée). La pa-

pille gauche plus précise tend à devenir blanchâtre en dedans; le

bord externe (image renversée) est dépourvu de netteté. ,

Observation XXV ! I.Werk..., femme Ga..., quarante-deux ans,

entrée le 8 avril 1903.

Examen du 9 septembre. Démence totale; idées de satisfac-

tion ; rires et pleurnicheries enfantins. Signes physiques : em-

barras de la parole; langue trémulante; pupilles égales ne réagis-

sent plus à la lumière. Gâtisme. -A l'ophtholmoscope, la papille

droite est floue, la papille gauche présente les signes certains de

l'atrophie blanche en voie d'évolution. te

Observation XXVIII. Pi..., femme Ge..., trente-cinq ans,

entrée le 27 novembre 1897. Elle est considérée dès l'entrée comme

en complète démence accompagnée d'agitation et de gâtisme. Elle

aurait présenté des crises gastriques. ,

Examen du 10 septembre 1903. Idées de satisfaction; eupho-

rie ; affaiblissement intellectuel très prononcé.

Signes physiques très marqués : tremblêment-de l'a langue et des

lèvres; parole fort embarrassée. Pas d'inégalité pupillaire; les pu-.

202 . CLINIQUE MENTALE.

pilles moyennement dilatées ne réagissent plus à la lumière tandis

qu'elles réagissent suffisamment à l'accommodation. La malade

a des attaques épileptiformes très fréquentes et un affaiblissement

musculaire accentué. Gâtisme. A l'ophthalmoscope, la papille

=droite blanche présente des bords flous et voilés d'un exsudat; il

en est de même de la papille gauche dont les bords sont moinsvoi-

lés mais flous.

Observation XXIX. - Let... Camille, quarante-cinq ans, entrée

le 1er mai 1903. -

Examen du 10 septembre 1903. Affaiblissement intellectuel

très marqué.

Signes physiques très nets : tremblement accentué de la langue; ·

parole lente : pupilles fort inégales; pupille gauche déformée.

Gâtisme. A l'oplithalmoscope : papille droite floue et blanche;

la papille gauche et encore plus blanche.

Observation XXX. Tsch ? Anne, quarante-cinq ans, entrée le

5 juin 1903. .

Examen du 10 septembre 1903. Affaiblissement intellectuel;

idées de satisfaction ; inconscience absolue.

Signes physiques peu marqués; pas de tremblement de la langue;

la malade ne paraît pas avoir d'hésitation de la parole; légère iné- -

galité des pupilles qui réagissent bien à la lumière. Gâtisme con-

tinu. -Examen ophthalmoscopique : Papille droite floue; papille

gauche blanchâtre à bords imprécis, déchiquetés, polygonaux.

Observation XXXI. Lar..., femme Ma..., quarante-cinq ans,

entrée le 24 juillet 1903. ·

Examen du 14 septembre 1903. - Affaiblissement intellectuel.

A eu avant son entrée quelques idées de grandeur; elle allait

nommer le pape et se croyait riche au point d'entourer le Luxem-

bourg de chaînes d'or. -

Signes somatiques très nets ; troubles de la parole très prononcés.

Pas de tremblement de la langue. Dilatation pupillaire bilatérale

plus marquée à gauche. Les deux pupilles immobiles à la lumière

et à l'accommodation. Gâtisme intermittent; signalé avantl'entrée,

il ne s'est pas reproduit. A l'ophthalmoscope, on constate la

physionomie de l'atrophie blanche surtout à gauche, la papille droite

étant d'un flou qui tire sur le blanc.

Observation XXXII. - From..., femme Dels..., trente-huit ans,

entrée le 24 juillet 1903. '

A l'entrée, affaiblissement intellectuel avec lacunes considé-

rables de la mémoire; désorientation complète; elle ne sait où elle

se trouve, ne peut indiquer le quantième ni le jour de la semaine,

se trompe sur son âge, n'a qu'une conscience très incomplète de sa

LE FOND DE L'OEIL CHEZ LES PARALYTIQUES GÉNÉRAUX. 203

situation. Pupilles dilatées et inégales. Faiblesse musculaire du

côté gauche.

Examen du 15 septembre 1903. Etat à peu près identique.

Affaiblissement intellectuel considérable. Pupilles très dilatées, la

pupille gauche étant plus grande que celle de droite; elles sont com-

plètement immobiles à la lumière et à l'accommodation. La malade

n'a que des troubles légers de la parole. L'écriture est tremblée. La

force musculaire est égale des deux côtés. Il existe 'de la cirrhose

hépatique avec de l'ascile. Gâtisme. A l'ophthalmoscope, les

papilles sont floues et pâles; la pâleur paraît plus accentuée à

gauche.

Observation 11YIII. - Rohr ? femme Gai..., trente ans, entrée

le 15 novembre 1901. Signes de paralysie générale avec halluci-

nations génitales très intenses et idées de suicide; inégalité pupil

laire; troubles de la parole.

Examen du 9 septembre 1903. Rémission intellectuelle.

Persistance des signes physiques ; dilatation pupillaire bilatérale

avec absence de réaction à la lumière. Tremblement de la langue.

Pas de troubles de la parole. A l'ophthalmoscope, la papille

gauche tend à l'atrophie blanche et le bord inférieur en est im-

précis. ,

OBSERVATION 11XIV. - Cloq..., femme Ed..., trente-huit ans,

entrée 21 août 1903. En janvier dernier, à lasuite d'un chagrin,

elfe est brusquement atteinte d'une paraplégie flasque desdeuxmem-

bres inférieurs, accompagnée d'une complète paralysie des membres

supérieurs, d'une paralysie faciale droite, d'une hémiplégie lin-

guale du même côté. Il existait aussi une anesthésie au tact et à

la piqûre affectant la forme de bas et de gants jusqu'à mi-cuisse

et jusqu'au coude. Anesthésie de la face et de la langue du côté

paralysé. Ces troubles étaient accompagnés d'une amaurose com-

plète. Puis l'ensemble de ces accidents disparurent subitement.

Cinq jours après récidive identique. Chaque fois la malade a gâté.

Il s'agit d'une personne qui aurait été très nerveuse et chez

laquelle se serait souvent manifesté le phénomène de la boule

hystérique.

Examen du 9 septembre 1903. Légère dépression mélanco-

lique, La patiente se rend bien compte de son état ; elle éclate en

sanglots quand on lui rappelle ses tentatives de suicide.

Signes physiques très marqués. Pupilles dilatées et inégales ; la

pupille gauche est plus large ; toutes deux réagissent lentement à

la lumière, mais bien à l'accommodation. Pas de tremblement de

la langue. Troubles de la parole très intenses; bredouillement

extrêmement marqué ; certains mots ne peuvent être articulés.

Aucun trouble sensoriel. Le gâtisme a disparu.

204 .. CLINIQUE MENTALE. ,

A l'ophthalmoscope, la papille droite blanche est en voie d'a<ro-

phie manifeste ; le bord externe (image renversée) en est presque

invisible. Le bord externe de la papille gauche également en voie

d'atrophie blanche est un peu imprécis. -

IV. Enfin, sept paralytiques portaient des lésions du fond

de l'oeil paraissant indépendantes de la maladie cérébrale

dont elles étaient affectées.

Observation XXXV. -Tru... Victorine, quarante-cinq ans, entrée

le 16 février 1903. -

Examen du 7 septembre 1903. - Affaiblissement intellectuel;

idées de satisfaction; pleurnicheries; inconscience de sa situation.

Inégalité pupillaire ; la pupille droite, plus petite, réagit mal à

la lumière ; les deux pupilles présentent leur réaction normale à

l'accommodation. Tremblements fibrillaires de la langue. Parois très

lente et très embarrassée ; achoppements syllabiques nombreux.

Lecture bredouillée. Tremblement des mains par intervalles.

Gâtisme intermittent. La malade a eu une attaque congestive

suivie d'aphasie motrice qui n'a persisté qu'un mois.

A l'ophthalmoscope on constate des lésions de kératite ancienne

au travers desquelles les papilles semblent floues, mais cette appré-

ciation n'a pas de valeur en l'espèce.

Observation XXXVI. - Gib..., femme Di..., quarante-six ans,

entrée le 14 avril 1903. A ce moment dépression mélancolique avec

quelques, préoccupations hypochondriaques; « le sang, disait-elle,

ne se renouvelait plus dans son cerveau ». Gâtisme passager. Aucun

trouble de la parole, aucun trouble pupillaire.

Examen du 7 septembre 1903. Pas de troubles de la parole ni

de la lecture ; aucun tremblement de la langue. Tremblement très

marqué des doigts de la main, surtout à gauche. Pas d'inégalité

pupillaire; les pupilles réagissent bien à la lumière, mais lente-

ment à l'accommodation et à la convergence. La malade est

toujours un peu déprimée; les préoccupations hypochondriaques

ont disparu. Plus de gâtisme. La malade travaille.

A l'ophthalmoscope, on constate des anomalies congénitales des

deux papilles; coloboma choroïdien énorme surtout à gauche.

Observation XXXVII. Fag..., femmme P..., trente-trois ans,

entrée le 14 novembre 1902 avec le diagnostic; démence, gâtisme,

inconscience absolue ; signes physiques très nets.

Examen du 9 septembre 1903. Rémission des troubles intel-

lectuels. La malade est très consciente de son état.

. Signes physiques très marqués : mouvements de trombone de la

langue; parole très embarrassée; pupilles égales, celle de. droite

LE FOND DE L'OElI, CHEZ LES PARALYTIQUES GÉNÉRAUX. 205

seule ne réagit plus à la lumière. - A l'ophthalmoscope, lésions

de rétinochoroïclite ancienne, papilles floues et nuageuses.

Observation XXXVIII. Br..., femme Ga..., trente-six ans,

entrée le 24 avril 1903, confuse, stupide, avec des troubles pupil-

laires très marqués..

Examen du 9 septembre 1903. Confusion mentale, demi-

stupeur, attaques épileptiformes fréquentes. Il est difficile d'obtenir

une réponse.

Signes physiques au complet : inégalité pupillaire très pronon-

cée ; pupille droite très dilatée, tout à fait immobile; la pupille

gauche semble réagir encore mais faiblement. Mouvements de

trombone de la langue. Tremblement des membres affectant la

forme d'une véritable incoordination. Gâtisme. Cette malade pré-

sente une gibbosité accusée consécutive à un mal de Pott guéri.

A l'ophthalmoscope, on relève des lésions de myopie extrême;

un staphylome postérieur étendu, surtout à gauche.

OBSERVATION X1111. - Pav..., femme Lois..., trente-sept ans,

entrée le 21 août 1903. -

Examen du 10 septembre 1903. -Malade obnubilée, anxieuse :

hallucinations de l'ouïe. °

Signes physiques peu marqués. Léger tremblement de la

langue; pas d'accrocs de la parole.

L'ophthalmoscope décèle des altérations de vieille kératite empê-

chant l'examen du fond de l'oeil, à droite; à gauche, on perçoit

difficilement la papille qui naturellement paraît vague.

Observation XL. Marg... Augustine, soixante-déux ans;

entrée le 26 mai 1903.

Examen du 9 septembre 903. - Affaiblissemen intellectuel avec

quelques idées de persécution. Paralysie faciale gauche survenue

à la suite d'un ictus. Pupilles punctiformes et inégales ; leurs réac-

tions à la lumière sont abolies, la réaction à l'accommodation est

conservée. Troubles de la parole assez nets. Surdité incomplète.

A l'ophthalmoscope, les papilles ont une teinte grisâtre ou plutôt

gris rosé, mais les bords en sont assez nets et l'état des vaisseaux

est normal. Nous croyons à une disposition normale. -

Observation XLI. Thi..., femme Guil..., soixante-deux ans,

entrée le 24 juillet 1903.

Examen du 14 septembre 1903. Dépression mélancolique avec

oblusion intellectuelle; actes inconscients; agitation intermittente;

hallucinations de caractère pénible.

Signes physigucs peu nets. Parole embarrassée et empâtée. Pas

de tremblements de la langue. Pupilles égales mais réagissant

mal. Marche difficile. Gâtisme. - A l'ophthalmoscope, vieilles

206 CLINIQUE NERVEUSE.

lésions de myopie avec astigmatisme accusé ; quelques points noirs

dans le cristallin.

Conclusions. - 1. On a donc constaté sur 41 paralytiques

-du sexe féminin, l'existence de papilles normales ou proba-

blement normales chez treize d'entre elles.

2. Il existait chez vingt et une paralytiques des lésions

papillaires certaines de l'ordre de celles que nous avons

antérieurement publiées.

3. En éliminant, comme de juste, les sept observations

de lésions du fond de l'oeil ou d'aspects du fond de l'oeil indé-

pendants de la paralysie générale, ou, si l'on préfère, de

lésions qui ne permettent pas d'apprécier de visu s'il existe

des lésions complicatrices d'origine paralytique, on obtient,

en chiffres ronds, une proportion de 38 p. 100 d'états du

fond de l'oeil normaux, et de 61 p. 100 de lésions du fond

de l'oeil d'origine paralytique.

CLINIQUE NERVEUSE.

Epilepsie : Pathogénie et indications thérapeutiques

(Contribution à l'élude de la physiologie du corps

thyroïde.)

PAR R

le Dr Alexandre PARIS .

Médecin de l'tls.le de Marévillp,

Chargé de Cours à la Faculté de Médecine de Nancy.

- (SUITE 1)

IV. Sommaire. Enseignements confirmatifs fournis par la lit-

térature médicale, la physiologie et la chirurgie rdativemtnt au

rôle du corps thyroïde et des glandes génitales dans l'épilepsie. -

Rapports du corps thyroïde et des glandes génitales. - La fonc-

tion du corps thyroïde et l'intelligence. - Rôle du corps thyroïde

dans la ménopause. - Chirurgie du corps thyroïde ; ses enseigne-

ments. - Influence delà suractivité fonctionnelle des glandes géni-

tales sur le système nerveux; modifications du côté de l'intelligence

' Voir numéro 98, février 190 p. 97.

ÉPILEPSIE PATUOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 207 î

et des sensibilités à la puberté. Rôle pathogénique des émotions,

de la frayeur ? - Les rêves des épileptiques. Chirurgie des

glandes génitales ; ses enseignements. Preuves que le rôle pft</t0-

génique de ces glandes n'est que secondaire. Grand rôle du

corps thyroïde ressortant toujours. -

Si nous demandons à la littérature médicale, à la physio-

logie, à la chirurgie même quelques enseignements sur les

rapports du corps thyroïde, des glandes de l'appareil génital

et de l'épilepsie, nous voyons confirmé tout ce que nous

venons de dire, comme nous le verrons absolument con-

firmé par les résultats que donnent déjà certains traitements

de l'épilepsie.

Nous relevons tout d'abord dans tous les ouvrages qui

traitent du crétinisme cette remarque que les crétins-types,

chez lesquels le corps thyroïde fait défaut ou est extrême-

ment rudimentaire, sont généralement stériles, que les tes-

ticules n'ont acquis aucun développement, de même les

ovaires, qu'ils n'existent qu'à l'état de rudiments ; la con-

clusion qui vient immédiatement à l'esprit du lecteur, c'est

que.le développement des glandes de l'appareil génital est

en quelque sorte sous l'influence du développement du corps

thyroïde. Eh bien, malgré cela, tous les auteurs, frappés

cependant par. des apparences physiques bien manifestes,

diront que la menstruation, le coït lui-même retentissent

sur l'activité fonctionnelle du corps thyroïde, que le goitre

suit la ménopause, et, sans remarquer une contradiction,

que le myxoedème, c'est-à-dire l'altération du corps thyroïde,

a pour résultat une diminution considérable de l'activité

fonctionnelle des glandes génitales. A notre avis, l'altération

du corps thyroïde commande plutôt l'altération des glandes

génitales qu'elle n'est la conséquence de cette dernière et

l'on a pris très probablement la cause pour l'effet. Cette dis-

tinction, sur laquelle nous devrons revenir, aura une

certaine importance lorsque nous déterminerons le rôle

pathogénique des divers organes.

La turgescence spéciale du corps thyroïde, qui se produit

chez la femme et à la puberte et à l'occasion de chaque

époque cataméniale, et qui s'accompagne d'une augmen-

tation de l'impressionnabilité, d'un certain état d'éréthisme

émotif, d'une modification passagère de la mentalité, ne

semble.t-elle pas accuser nettement que l'accroissement de

208 CLINIQUE NERVEUSE. -

l'activité fonctionnelle du corps thyroïde a pour conséquence

certain changement dans l'activité encéphalique ? Si l'on

m'objectait que ces changements sont dus aux modifications

que subissent alors les glandes génitales quant à leur

-activité fonctionnelle, il me suffirait pour faire ressortir que

l'importance du rôle de ces glandes n'est, en ce cas, que

secondaire de faire remarquer que, dans le myxoedème, c'est

la suppression ou l'altération du corps thyroïde qui produit

l'effet inverse, c'est-à-dire la suppression ou la diminution

de l'impressionnabilité et de l'activité encéphaliques et que

cela est si vrai qu'en prescrivant du corps thyroïde on rend

avec l'activité encéphalique l'activité des glandes génitales.

Il semble donc bien que ces glandes génitalesfonctionnenten

quelque sorte sous la tutelle du corps thyroïde. - Notons

encore, en regard de cette hyperactivité fonctionnelle de la

glande thyroïde aux époques menstruelles, la plus grande

intensité des manifestations de l'épilepsie au même moment.

Cette intervention de l'activité fonctionnelle du corps thy-

roïde dans l'épilepsie se trouve à chaque pas accusée dans

la littérature médicale, mais elle passe inaperçue : « Les

épileptiques sains d'esprit sont certainement le plus grand

nombre, quelques-uns sont même très bien doués », dit

M. Berlureaux' ; le contraire, ajouterons-nous, est observé

chez les individus dont le corps thyroïde s'altère.

A l'approche de la ménopause et surtout à la ménopause,

le volume des goitres augmente considérablement chez la

femme, disent tous les auteurs; mais nous avons vu aussi

qu'à l'approche de la ménopause et après l'âge critique les

accès d'épilepsie diminuent généralement de fréquence, dis-

paraissent même.

L'âge critique, chez la femme par exemple, n'accuse-t-il

pas toujours une altération du corps thyroïde, que l'on sait

aujourd'hui exercer une influence presque capitale sur la

nutrition générale ? L'âge critique, en effet, n'est-il pas

marqué par une altération de la nutrition, un embonpoint

spécial, un empâtement physique et de profondes modifi-

cations des sensibilités et notamment de la sensibilité

morale et de l'affectivité ? ` ?

« Que nous révèle, du reste, la chirurgie du corps thyroïde ?

' Art. Epilepsie, du Dict. Dechambre, page 187.

ÉP1LEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 209

«..Des phénomènes nerveux complexes succèdent à la

thyroïdectomie. Peu après l'opération peuvent apparaître

des convulsions toniques, constituant le syndrôme de la

tétanie 1. Est-ce là de- l'épilepsie, ainsi que cela a été dit

simplement à cause des contractures ? - Ces accidents peu-

.vent, comme l'indique M. Thiebierge, être liés à un empoi-

sonnement par les antiseptiques usités au cours de l'opéra-

tion, septicémie opératoire, - ou s'expliquer, comme le

dit M. Féré (loc. cit.), par ce « fait mis en lumière par

Nôthnagel et bien connu des physiologistes, que, chez les

animaux en expérience, les pertes de sang favorisent la pro-

duction des mouvements réflexes et des convulsions ». A-t-on,

du reste, cité un seul cas d'épilepsie vraie, c'est-à-dire net-

tement caractérisée et surtout durable à la suite de la thyroï-

dectomie complète, car après la thyroïdectomie incomplète,

et surtout si l'on admet l'existence de glandes parathyroï-

diennes, cela n'aurait plus rien' de surprenant, MM. Gley et

Mousson, cités par M. Thiébierge, ayant « montré que les

glandes thyroïdes accessoires ou glandes parathyroïdiennes

de Sandstrom jouaient latéralement ou parallèlement à la

glande un rôle important. »

Mais la chirurgie atteste d'un autre côté l'influence que

nous attribuons au corps thyroïde dans la pathogénie de

l'épilepsie ; ne peut-on pas, en effet, interpréter en faveur

de nos vues les quelques améliorations de l'épilepsie obte-

nues par résection du sympathique cervical qui, envoyant

quelques branches à la glande thyroïde, a évidemment une

certaine action sur sa fonction.

Quant aux glandes génitales par rapport à l'épilepsie, que

peuvent nous enseigner la littérature médicale et la chi-

rurgie ? - Bien que l'épilepsie éclate parfois chez l'enfant

bien avant la puberté, montrant ainsi que si le développe-

ment des organes génitaux et leur activité fonctionnelle peu-

vent avoir une influence sur elle, leur rôle n'est que secon-

daire et que l'épilepsie peut apparaître sans leur intervention,

ce qui justifierait ce que nous disions tout à l'heure de la

suprématie de la glande thyroïde, - il n'en est pas moins

vrai que c'est l'époque où ces organes arrivent à la vie géni-

tale, la puberté, qui verrait éclore le plus grand nombre de

' Thiébierge. Loc. cit., page 17, - .

Archives, 21 série, t. XVII. 14

210 CLINIQUE NERVEUSE.

cas d'épilepsie ; on ne peut donc pas négliger de rechercher

comment ils interviennent dans la pathogénie de l'épi-

lepsie. -

Il est évident que les glandes principales des organes

génitaux exercent ou paraissent exercer une influence exci-

tatrice sur les centres nerveux, que la suractivité fonction-

nelle de ces glandes s'accompagne d'une excitation cérébrale

spéciale, d'une exaltation particulière des sensibilités qui

se manifeste de façon bien frappante à la puberté, aux

époques menstruelles et chez les continents. L'étude des

rêves des épileptiques accuserait assez bien la réalité de cette

action excitatrice émanant des organes génitaux : MM. Vas-

chide et Pieron (in Revue scientifique du 6 avril 1901)

signalent la traduction, dans les rêves, des troubles de la

menstruation et, en général, des fonctions sexuelles et des

organes génitaux ; ils montrent quelques enseignements

précieux donnés par les rêves pour le diagnostic de l'épi-

lepsie et citent à l'appui les 4 observations' publiées par

M. Ducosté dans un travail sur « Les songes d'attaque des

épileptiques 1». Comme MM. Vaschide et Piéron nous pen-

sons que ces songes, dits songes d'attaques parce qu'ils se

produiraient seulement pendant les attaques, ne constituent

que des auras. Nous ne pouvons pas admettre, en effet,

qu'un épileptique se rappelle, au point de le narrer, un rêvé

qu'il aurait fait pendant une attaque, au paroxysme de l'at-

taque. Trois observations sur quatre sont particulièrement

intéressantes pour nous :

- Marie, trente-cinq ans. C'est le soir; le soleil se couche, illu-

minant en rouge la campagne et le ciel. Elle est debout dans un

champ de trèfle. Un taureau monstrueux qui galope dans le

champ vient la frapper à la poitrine, sans que, le laissant venir,

elle pense à se défendre, elle saisit l'animal par les parties sexuelles,

qu'elle lui arrache. Un flot de sang s'écoule alors; le taureau se

retourne furieux et lui enlève la tête au bout de ses cornes.

Hippolyte, cinquante-trois ans..... Une colonne de sangchaud,

brûlant même, le traverse complètement et sort en jet puissant

par le pénis. Il porte une main au sommet de sa tête pour empê-

cher le sang d'entrer par un trou qu'il a sur le vertex, et de l'autre

serre le gland. Mais le sang traverse la main posée sur la tête et

1 Journal' de médecine de Bordeaux, 1889.

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 211

passe quand même; et, le gland étant trop serré pour qu'il puisse

sortir, il lèsent se gonfler de plus en plus il meurt.

- papal, quarante-deux ans..... Un monstre se présente; il porte

à la place des organes sexuels un tire-bouchon qu'il enfonce dans la

poitrine du malheureux et le fait ainsi tomber il meurt.

Il est probable, comme l'indiquent MM. Vaschide et

Pieron, que ces rêves ne sont que des auras et que la fin du

songe, la mort, est le commencement de l'attaque convul-

sive, marque le début de la suspension des manifestations

psychiques de l'activité cérébrale.

Nous croyons trouver là une preuve d'une espèce de sti-

mulation partie des organes génitaux, et il nous suffira,

pour confirmer la fréquence d'une telle stimulation dans

l'épilepsie, de rappeler la fréquence relative de l'exhibition-

nisme dans l'épilepsie, la fréquence de propos érotiques

dans le verbiage des épileptiques agités, alors qu'elles ont

parfois une confusion mentale qui ne permet guère de

donner à ces manifestations érotiques que le caractère d'un

phénomène réflexe.

N'est-ce pas un peu à l'influence d'une activité spéciale de

ces organes, à ce qu'ils apportent de' renforcement d'irrita-

tion, de stimulation complémentaire des centres nerveux

supérieurs, qu'est due cette concordance habituellement

signalée à l'occasion de la première attaque d'épilepsie :

une frayeur, à l'époque de la puberté, et, pour la femme et

la jeune fille, le plus souvent alors que les règles coulaient,

c'est-à-dire à une époque où toute son impressionnabilité et

toutes ses sensibilités s'exaltent plus facilement à l'occa-

sion d'une hyperactivité fonctionnelle de glandes de la

génération, à l'occasion du rut, en somme. Mais cette

frayeur, à laquelle on fait jouer un si grand rôle, perd toute

son importance si l'on veut bien porter un instant son

attention sur les conditions dans lesquelles elle se produit;

on remarque bien vite, en effet, que la cause est le plus sou-

vent insignifiante, que la réaction est absolument dispro-

portionnée. Si l'on se rappelle que l'épileptique, en vertu

même de son organisation congénitale, est souvent poltron

dans l'enfance, qu'il reste souvent peureux à l'âge adulte et

même dans la vieillesse, on comprendra facilement qu'une

faible cause puisse ainsi avoir de grands effets; un ensemble

212 - CLINIQUE NERVEUSE.

de circonstances, impressionnabilité spéciale de la puberté,

des époques menstruelles et émotivité habituelle spéciale, se

trouvent, en effet, réunies pour préparer la réaction, et le

rôle de la frayeur n'apparaît plus qu'accessoire. Comme

M. Féré, « nous ne pensons pas que les émotions puissent

« être considérées comme de véritables causes, mais seule-

ce ment comme des excitences particulièrement efficaces de

« la prédisposition (loc. cit.) ».

On peut s'expliquer facilement que la turgescence des

glandes génitales, leur réplétion amène par action réflexe

une excitation complémentaire du côté de l'encéphale, qui,

ajoutée à celle résultant déjà d'autres causes, fait que les

attaques d'épilepsie éclatent plus facilement et sont plus

nombreuses. Ce qui se passe aux époques cataméniales

semble l'indiquer. Cette stimulation encéphalique, éma-

nant en quelque sorte des organes génitaux en état de

réplétion, n'est-elle pas attestée par les rêves érotiques qui

précèdent l'éjaculation chez les continents.

A la suite de la castration, de l'ovariotomie, ces causes

d'aggravation de l'épilepsie, excitation partant des glandes

génitales, accroissement de l'émotivité, de l'impressionna-

bilité sous leur influence, par action réflexe, disparaissent

et c'est ainsi que l'on peut s'expliquer l'atténuation de

l'épilepsie que l'on a quelquefois observée. Mais loin de

faire ressortir, comme on l'a cru un instant autrefois, que

les glandes génitales jouent un rôle capital dans la patho-

génie de l'épilepsie, la castration, ovarique ou testiculaire,

a montré par ses suites que le rôle de ces glandes n'est que

secondaire. Si elle n'a donné que des résultats très varia-

bles, souvent même insignifiants, c'est évidemment parce

que ces glandes et leurs réactions ne jouent qu'un rôle

adjuvant dans l'excitence nécessaire pour déterminer les

troubles épileptiques bruyants; leur suppression n'a pu

avoir un résultat un peu favorable, au point de vue dé l'épi-

lepsie, que lorsque la tare épileptogène, dont nous parle-

rons plus loin, était modérée, lorsque le terrain nerveux

n'était que peu préparé et que les excitences habituelle-

ment suffisantes pour déterminer l'épilepsie avaient besoin

d'être en quelque sorte renforcées. Mais plus la tare est

mauvaise, moins l'ablation des ovaires ou des testicules, et,

par conséquent, la suppression de toutes les excitations

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 2'13

qu'ils occasionnent, ont d'influence modératrice sur l'épi-

lepsie. C'est évidemment ainsi que l'on peut s'expliquer les

améliorations et les rares guérisons qui semblent dues à la

castration. Mais, encore une fois, l'influence des organes

génitaux doit être considérée comme secondaire dans la

pathogénie de l'épilepsie, sans pour cela être négligée dans

l'institution d'un traitement, puisque, bien que secondaire,

elle peut être une cause d'aggravation de l'épilepsie.

Ce serait donc à la glande thyroïde que resterait un des

principaux rôles. Le corps thyroïde, dont le crétinisme

accuse le grand rôle au point de vue du développement

organique général et du développement des principales

fonctions et de l'intelligence, dont une certaine turges-

cence accuse un accroissement de fonctions à l'époque de

la puberté, aux époques menstruelles, - qui s'altère, sou-

vent de façon très manifeste, à l'approche de la ménopause,

- ne semble-t-il pas jouer un rôle extrêmement impor-

tant et n'est-ce pas à lui qu'il faut encore remonter pour

trouver les véritables causes des modifications, soit en plus,

soit en moins, que subit généralement l'épilepsie aux

grandes étapes de l'évolution des organes de la génération.

Il semble bien, en effet, que c'est, au moins en grande

partie, de sa constitution, de sa fonction que relèvent le

développement et l'activité fonctionnelle des organes prin-

cipaux de la génération et que les modifications qu'éprou-

vent ces organes, à la puberté et à la ménopause notam-

ment, soient assez intimement liées à des modifications du

corps thyroïde.

V. Sommaire. Pathogénie de l'épilepsie. Terrain encépha-

lique épileptogène. Excitences, d'origine thyroïdienne.- Lésions

anatomiques de l'épilepsie, secondaires et non primitives. - Asso-

. dation des excitences d'origine thyroïdienne et génitale. - Consé-

quences de l'insuffisance fonctionnelle des glandes excrétoires. -

Concordance de la suractivité des glandes thyroïde et génitales et

de l'hypoactivité fonctionnelle des glandes sudoripares, des reins,

etc., amenant une aggravation très manifeste de l'épilepsie; accès

en séries, accès subintrants, état de mal. - Epilepsie grave plus

fréquente chez la femme que chez l'homme ; causes de cette gravité

et de cette fréquence établissant la pathogénie de l'épilepsie. -

Intoxication épileptogène. - Epilepsies dites secondaires. Les

lésions de l'idiotie ou de l'imbécillité avec épilepsie sont consécu-

214 CLINIQUE NERVEUSE. '

tives à l'épilepsie et non causes de celle-ci; importance de cette

constatation. - Convulsions du bas âge et épilepsie. - Intoxi-

cations secondaires épileptogènes. - Pathogénie de certaines épi.

lepsies partielles. - Notre interprétation pathogénique simplifiant

- l'étude des épilepsies dites secondaires, de psychopalhies diverses

et apportant de précieuses indications thérapeutiques dont nous

montrerons la valeur par des faits cliniques insérés à la fin de ce

mémoire.

Pathogénie. - Nous venons de voir d'un côté l'altération

ou l'insuffisance, ou la suppression du corps thyroïde et des

glandes génitales avec atténuation ou même disparition de

l'épilepsie, d'un autre côté un accroissement de l'acti-

vité fonctionnelle des glandes thyroide et génitales suivi

d'une aggravation de l'épilepsie, d'une exaltation de ses

manifestations principales, la glande thyroïde semblant

rester toujours le p1'il1wm movens.

11 paraît certain, par tout ce que nous avons vu que

presque toutes les excitations qui viennent agir sur les cen-

tres encéphaliques qui déterminent l'attaque d'épilepsie,

ont pour premier point de départ la glande thyroïde et

qu'elles ne sont que renforcées par des excitences partant

des glandes génitales dont nous avons aussi montré les

liens étroits avec le corps thyroïde.

Comme l'indiquent les manifestations' spéciales habi-

tuelles (irritabilité ou dépression, sensiblerie, instabilité

morale, etc...) de l'activité encéphalique, même indépen-

dantes des attaques, le terrain épileptogène serait constitué

par les régions méningo-corlicales de l'encéphale, ainsi

qu'on l'admet aujourd'hui d'après les données de la physio-

logie expérimentale. Là encore, dans les simples variations

de la mentalité ou des sensibilités de l'épileptique, le corps

thyroïde doit jouer un rôle, et c'est à une excitence parti-

culière émanant de lui, aux variations mêmes de cette exci-

tence que sont dues les manifestations habituelles qui stig-

matisent pour ainsi dire l'épileptique, qui lui donnent ce

caractère qui fait soupçonner l'épilepsie chez des individus

que l'on n'a pas encore vu tomber ou qui n'ont que de rares

attaques. Ce rôle nous paraît accusé par maintes remarques

sur lesquelles nous avons précédemment appelé l'attention

et dont nous trouvons l'explication générale dans ce fait

que la suppression du corps thyroïde, quelle qu'en soit la

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 215

cause, produit une mentalité contrastant absolument avec

celle de l'épileptique.

On pourrait même, et c'est là une hypothèse dont nous

n'avons même pas besoin, mais hypothèse vraisemblable

cependant, on pourrait invoquer une disposition congéni-

tale du corps thyroïde et son influence spéciale sur le déve-

loppement du système nerveux, sur l'organisation de la pré-

disposition nerveuse, car il est acquis que des altérations du

corps thyroïde peuvent se transmettre de générateur à des-

cendant, même iudépendamment de conditions de milieu;

« c'est ainsi que des individus goitreux ont engendré des

« goitreux et des crétins dans des contrées indemnes de ces

« infirmités * ».

Mais contentons-nous- de l'opinion courante, vraisem-

blable et suffisante, qu'il y a chez l'épileptique un système

nerveux préparé par hérédité, ce qui semble assez logique,

étant donnée la facilité avec laquelle l'alcoolique donne

l'épileptique, système nerveux doué, en vertu d'une compo-

sition intime que nous ne connaissons pas encore, d'une

sensibilité spéciale et appelé à donner des réactions vives

ou violentes sous l'influence d'excitences normales pour des

individus sains ou même inférieures à ce qu'elles sont en

tout temps chez les sujets sains, originellement bien cons-

titués. Ainsi est formée en quelque sorte la constitution

épileptogène, mais sans lésions anatomiques des centres

nerveux, un état chimique encore inconnu de la cellule ner-

veuse suffisant pour nous expliquer son impressionnabilité

anormale. -

« Ce qui semble faire croire qu'on aurait tort de chercher

une lésion organique là où il n'y a que perversion dyna-

mique, dit 11. le professeur Charles Richet z, parlant de l'hys-

térie, c'est que les hémianesthésies, après avoir duré très

longtemps, quatre ou cinq ans, par exemple, tout d'un

coup, brusquement, sans cause appréciable, sans motif

plausible, disparaissent et ne laissent pas de traces. »

Ne pourrait-on pas faire une remarque analogue en ce qui

concerne le système nerveux de l'épileptique adulte et ne

' Baillarger et Krishaber. Art. Crétinisme, du Dict. Dechambre,

page 182.

' L'homme et l'intelligence. Alcan, édit. ' .

216 CLINIQUE NERVEUSE. '

serait-elle pas absolument justifiée par des faits semblables à

'celui que nous relations au début de ces recherches et que je

résumerai sommairement ici : une jeune fille épileptique,

,depuis plusieurs années inerte, hébétée, ne parlant pas, est

~ atteinte de fièvre typhoïde, son cerveau retrouve une activité

normale, tous les accidents liés à l'épilepsie disparaissent jus-

qu'à la convalescence de la fièvre typhoïde. Comment pour-

rait-on admettre que l'intelligence soit redevenue, même

momentanément, normale, si l'épilepsie dépendait d'une

'altération anatomique du cerveau et surtout des couches

corticales ? - Chaque spécialiste pourrait citer quelques cas

analogues à celui-ci. - L'épilepsie n'apparaît donc que.

comme la manifestation, bruyante par action réflexe du

bulbe, d'une irritation méningo-encéphalique ; les altérations

méningo-encéphaliques trouvées à l'autopsie d'épileptiques

seraient donc altérations secondaires, consécutives, et non

lésions causales, ce qu'il est important de retenir pour bien

s'expliquer la pathogénie des lésions méningo-encéphali-

ques que l'on considérait jusqu'à ce jour comme causes des

convulsions infantiles, de l'épilepsie infantile. '

La glande thyroïde étant évidemment un des principaux

facteurs du maintien de l'activité nerveuse à un certain

niveau, on conçoit facilement que les, variations des exci-

tences qu'elle envoie aux centres nerveux auront pour con-

séquences des réactions d'autant plus accusées qu'elles agi-

ront sur un système nerveux plus impressionnable en

raison de sa constitution originelle spécialeouqu'ellesseront

elles-mêmes plus intenses et plus continues. Il pourra se

faire que l'activité fonctionnelle normale du corps thyroïde

et des glandes génitales produise des excitences trop fortes

pour un système nerveux d'une impressionnabilité supé-

rieure à la normale, d'où la réaction presque continue qui

constitue le caractère épileptique, la mentalité. habituelle

spéciale de l'épileptique ou même du simple prédisposé à

l'épilepsie. Que l'activité fonctionnelle de ces glandes

soit accrue, comme cela arrive chez la femme aux époques

menstruelles, les réactions du terrain nerveux épileptogène

sont plus vives et les manifestations épileptiques par consé-

quent plus accusées et comme inténsité et comme durée. ,

Que l'activité fonctionnelle de ces glandes diminue, au

contraire, l'épilepsie s'amende, comme nous l'avons vue s'at-

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 217'-

ténuer et même disparaître, soit sous l'influence d'une alté-'

ration du corps thyroïde (goître), soit sous l'influence de la

suppression des glandes génitales (castration), soit sous

l'influence d'une altération des glandes .thyroïde et géni-

tales (ménopause) 1.

11 est évident, d'autre part, qu'une modification de l'acti-

vité fonctionnelle de ces glandes n'est pas indispensable

pour donner l'épilepsie que l'accumulation de certains de

leurs produits de sécrétion, par destruction ou élimination

insuffisantes, aurait, arrivée à un certain point, le même

résultat qu'une hyperactivité fonctionnelle. Et c'est par cette

accumulation possible que l'on s'explique l'éloignement des

attaques chez certains individus, comme on interprète la

recrudescence périodique des manifestations épileptiques

chez la femme par l'hyperactivité fonctionnelle périodique

des glandes génitales et même thyroïde.

L'afflux sanguin, la suractivité fonctionnelle qui se pro-

duit aux époques menstruelles du côté des glandes thyroïde

et génitales, semble avoir pour conséquence une diminu-

tion de l'activité fonctionnelle des glandes d'évacuation,

d'excrétion (peau et reins notamment) et, par suite, une

accumulation dans le sang de produits de sécrétion de

glandes à sécrétion interne ou de toxines, accumulation qui

ne peut avoir que des effets fâcheux. N'est-ce pas en grande

partie à cette cause même, accumulation en excès dans le

sang de principes nuisibles ou excitants, que seraient dus

les troubles gastro-intestinaux que l'on observe chez beau-

coup de femmes aux époques menstruelles ? Voici ce qui me

porte à croire au bien fondé de cette interprétation : en

même temps que l'on observe de l'embarras gastrique

avant les paroxysmes chez les aliénés vésaniques et pendant

toute la durée de l'exaltation momentanée des troubles

psychiques ou sensoriels, on constate une diminution très

sensible de la quantité des urines, de l'anurie même, de la

sécheresse de la peau, souvent de la constipation, et la fin

de la crise semble annoncée en quelque sorte par des urines

abondantes et de la moiteur de la peau, des sueurs profuses

même. L'état de mal des épileptiques permet les mêmes

' Cette influence de l'activité fonctionnelle du corps thyroïde nous

explique facilement la rareté de l'éclosion de.l'épilepsie à un âge avancée `

218 CLINIQUE NERVEUSE.

remarques relativement aux excrétions : diminution de la

quantité des urines pouvant aller jusqu'à l'anurie au

paroxysme de l'état de mal, sécheresse relative de la peau,

fréquemment constipation, et, à la fin du paroxysme épilep-

- -tique, mictions abondantes, sueurs profuses. Ainsi s'explique

tout naturellement la double influence agissant aux époques

menstruelles sur le système nerveux supérieur :

1° Stimulation par sécrétions des glandes génitales et

thyroïde, sécrétions plus abondantes qu'en temps ordi-

naire ; 2° accumulation forcée de ces sécrétions et de

toxines dans le sang par diminution de l'activité des glandes

excrétoires;

Donc deux grandes causes de l'aggravation de l'épilepsie

aux époques menstruelles. Et c'est ainsi que l'on peut

arriver facilement à déterminer la pathogénie des accès en

séries et de l'état de mal. D'où des indications thérapeuti-

ques que nous aurons garde de négliger et dont nous ver-

rons l'application confirmer encore complètement notre

manière de voir.

On interprète facilement maintes observations à l'aide de

ces connaissances : l'amélioration de cas d'épilepsie par le

mariage, la suspension fréquente de l'épilepsie pendant la

grossesse, signalée par M. le professeur Pinard, remarquée

par nous-même (évacuation régulière de sécrétions dont

l'accumulation peut être cause d'une augmentation de sti-

mulation sur les centres nerveux épileptogènes, dérivation

de sécrétions habituellement trop abondantes, étant donnée

l'impressionnabilité spéciale du système nerveux, par le

foetus, puisque ces sécrétions sont, nous l'avons vu, indis-

pensables pour assurer le développement physique régu-

lier, etc.).

C'est par l'alcoolisme des ascendants, l'activité fonction-

nelle plus grande, et bien manifeste, de la glande thyroïde

et la plus grande impressionnabilité du système nerveux de

la femme que l'on peut s'expliquer la plus grande fré-

quence de l'épilepsie la plus grave chez la femme (état de

mal plus rare chez l'homme), alors que l'épilepsie relative-

ment fruste, l'épilepsie larvée, par exemple, est, au con-

traire, plus fréquente chez l'homme. N'est-ce pas cette plus

grande activité fonctionnelle du corps thyroïde de la

femme qui est cause des réactions plus vives du système

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 219

nerveux de la femme, quifait que, en tout temps (maladie ou

santé), la femme est plus impressionnable que l'homme ? Je

suis porté à le croire.

En résumé, prenant toujours comme exemple la femme,

chez laquelle les modifications du corps thyroïde sont plus

intenses et plus apparentes, nous voyons, à la puberté,

avec la turgescence du corps thyroïde et des glandes géni-

tales, avec une impulsion donnée à la nutrition générale et

au développement physique, nous voyons éclater fréquem-

ment l'épilepsie; - nous constatons, à chaque retour pério-

dique de la turgescence cataméniale des glandes génitales,

une turgescence de la glande thyroïde, une diminution des

excrétions et, en même temps, une recrudescence de mani-

festations épileptiques; - que l'âge critique arrive, nous

observons généralement le contraire de ce qui s'est produit

à la puberté : en même temps que les glandes génitales se

flétrissent, le corps thyroïde s'altère, la nutrition générale

se modifie, les tissus s'empâtent ? et l'épilepsie s'atténue

progressivement aussi. N'est-ce pas la preuve bien évidente,

comme tant d'autres apportées dans les premières parties de

ce travail, que le corps thyroïde, dont l'influence sur le déve-

loppement des glandes génitales, sur l'activité de la nutrition

etdu développement organique nous est bien attestée par ce

qui se passe chez le crétin ou le myxoedémateux, que le corps

thyroïde joue un rôle de premier ordre dans la pathogénie

de l'épilepsie. -

Quel que soit le mode d'accumulation en excès de pro-

duits de sécrétion dans le sang, cet excès rend le sang toxi-

que pour le système nerveux, voilà ce qu'il importe de

retenir, et l'empoisonnement du système nerveux se traduit

suivant son intensité et la rapidité avec laquelle il impres-

sionne les centres nerveux par tels ou tels signes bruyants

ou bien manifestes, confusion mentale, irritabilité, vertige

ou convulsions, ou par l'association de tous ces troubles. On

comprend aisément que si l'on envoie, en outre, dans le

sang un autre poison, alcool ou poison d'origine alimen-

' L'embonpoint de l'âge critique est évidemment dû à une altération

du corps thyroïde; il sulfit de donner du corps thyroïde pour le prévenir

et nous avons vu aussi que l'ingestion du corps thyroïde aggrave l'épi-

lepsie.

220 CLINIQUE NERVEUSE. '

taire, ce poison jouera un rôle adjuvant épileptogène, d'au-

tant plus intense et plus rapide que les réactions bruyantes

se produisaient antérieurement plus facilement.

Quelle est l'action intime du sang chargé de la matière

toxique sur les cellules nerveuses ? « Est-ce une combi-

naison chimique du poison avec les cellules ? Est-ce un trou-

ble mécanique dans la circulation cérébrale ? Voilà ce que

nous ignorons encore, et ce que des expériences ultérieures

pourront peut-être un jour nous apprendre. Tout au plus

pouvons-nous regarder comme vraisemblable qu'il s'agit

d'une combinaison chimique passagère du poison avec les

cellules de la substance grise du cerveau » (Ch. Richet : Les

poisons de l'intelligence).

Quoi qu'il en soit du pourquoi, l'important est que nous

connaissions le comment, et maintenant nous savons com-

ment se produit la modification du sang qui amène les exci-

tences épileptogènes du cerveau chez des individus qui ne

sont pas alcooliques et dont le régime habituel (alimentaire

ou autre) ne peut pas être incriminé; nous savons qu'ils ont

toujours en eux une sécrétion dont l'abondance ou l'accumu-

lation peut facilement, étant donnée la constitution origi-

nelle de leur système nerveux, amener les troubles sympto-

matiques de l'épilepsie. C'est une acquisition évidemment

importante au point de vue de la prophylaxie et du traite-

ment curatif. - .

. Cette intelligence de la pathogénie de l'épilepsie nous per-

mettra-t-elle de nous rendre compte de ce qui se passe dans

les épilepsies dites secondaires, dans les épilepsies dites

partielles ? .

Epilepsies DITES secondaires. - M. le professeur Dieulafoy,

dans son manuel de pathologie interne, divise les épilepsies

secondaires en trois groupes principaux ; dans une première

classe, il range « les épilepsies secondaires avec lésions plus

ou moins grossières de l'encéphale »; - une seconde classe

comprendrait les épilepsies secondaires d'origine toxique,

à une troisième classe appartiendrait l'épilepsie secondaire

d'origine réflexe (corps étrangers de l'intestin, lombrics,

taenia). :

'- 1re classe. Les épilepsies dites secondaires avec lésions

plus ou moins grossières de l'encéphale seraient ces épilep-

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 221

sies que l'on observe habituellement chez des individus qui

présentent, outre les convulsions, une altération plus ou

moins profonde des facultés intellectuelles et divers troubles

liés à quelque lésion méningo-encéphalique. A cette classe

appartiendraient notamment beaucoup d'épileptiques que

nous considérions jusqu'à ce jour comme dégénérés, géné-

ralement inférieurs, imbéciles, idiots, arriérés. D'après nous,

cette appellation « épilepsie secondaire » ne serait plus jus-

tifiée pour désigner ces cas.

Voyons ce que l'on sait, ce que l'on pense généralement

au sujet de l'association de l'idiotie ou de l'imbécillité et de

l'épilepsie; c'est surtout la pathogénie de cette association

qui nous fixera sur l'utilité de distinguer cette première

classe d'épilepsie secondaire de l'épilepsie proprement dite :

« Si dans bon nombre de cas l'idiotie et l'épilepsie peuvent

être la conséquence des mêmes lésions encéphaliques, on

doit reconnaître que dans quelques autres, dit M. Féré,

l'idiotie est entretenue par l'épilepsie; il n'est pas douteux,

en effet, qu'on ne réussisse quelquefois à modifier favora-

blement l'évolution de l'intelligence chez des idiots épilep-

tiques, lorsqu'on arrive à supprimer ou à éloigner leurs

attaques. Les décharges nerveuses ont d'autant plus d'action

sur l'intelligence que celle-ci a subi un retard plus prononcé

dans son développement, ou que le cerveau est plus détérioré

par des lésions organiques. D'autre part, l'intelligence des

idiots qui sont sujets à des attaques d'épilepsie, subit des

modifications spontanées assez caractéristiques, chez quel-

ques-uns d'entre eux du moins ; on les trouve un jour la

physionomie ouverte, capables de comprendre ce qui se

passe autour d'eux et même de parler : c'est qu'ils n'ont pas

eu d'attaques depuis un certain temps. Survienne une crise,

et surtout une série de crises, le tableau change ; ils tombent

dans la prostration et la stupidité les idiots épilepti-

ques sont ceux dont l'éducation présente le plus de chances

de succès..... Si les accès cessent, l'évolution de l'intelli-

gence reprend son cours, mais les traces de la suspension

persistent 1. » »

Ces observations de M. Féré confirment bien celles dont

' CI]. Féré. Les épilepsies et les épileptiques. Paris, Alcan, 1890

page 231.

222 CLINIQUE NERVEUSE.

M. Bourneville a tiré les plus précieux enseignements au

sujet de l'idiotie; elles montrent, comme s'efforce de l'éta-

blir M. Bourneville, avec un succès complet d'ailleurs, que

l'on a englobé sous cette dénomination « idiotie » maints

- états d'origines différentes et en apparence seulement iden-

tiquement caractérisés : démence symptomatique de périen-

céphalite généralisée diffuse de l'enfance, - arrêt de

développement intellectuel par suite de lésions méningo-encé-

phaliques indélébiles, etc. etc. Il s'agit, en effet, dans les

nombreux cas visés par M. Féré, d'une idiotie spéciale,

relativement supérieure puisqu'une certaine culture intel-

lectuelle est plus réalisable que dans les autres, idiotie

spéciale que l'on peut considérer comme un arrêt de dévelop-

pement par suite d'épilepsie et de lésions méningo-encépha-

lique secondaires, lésions qui se sont produites d'autant

plus facilement que les accidents encéphaliques pathogé-

niques de l'épilepsie éclataient chez un enfant en plus bas

âge, c'est-à-dire dont le système nerveux central était plus

délicat, plus sensible aux excitations anormales et plus fra-

gile 1. On conçoit facilement que ces lésions puissent être

enrayées dans leur développement mais que, les conditions

épileptogènes originelles et autres persistant, on observe

habituellement l'état mental lié aux lésions devenues indé-

lébiles et, de temps en temps, une diminution relativement

considérable de cette mentalité plus ou moins rudimentaire

1 L'existence et le siège de ces lésions secondaires nous expliquent la

prédominance des troubles convulsifs de tels ou tels membres; et la

meilleure preuve que cette prédominance accuse des lésions secon-

daires, c'est que le sens de la chute est d'abord variable chez l'individu

qui devient épileptique à la puberté ou à l'âge adulte, tandis qu'il n'en

est plus de même chez les épileptiques anciens, ainsi que le montrent

les statistiques ci-dessous résumées quP j'ai publiées en 1891 (et qui ont

une certaine importance au point de vue médico-légal, au point de vue

de la simulation de l'épilepsie notammem).

1° Statistique relative à 63 femmes épileptiques : de ces 63 épilepti-

ques, 26 tombent toujours en arrière, 15 tombent toujours en avant,

3 tombent tantôt en arrière, tantôt en avant, 1 tombe toujours sur le

vertex, 10 tombent toujours sur le côté droit, 6 tombent toujours sur le

côté gauche, 1 tombe tantôt à droite, tantôt à gauche, 1 tombe tantôt à

gauclip, tantôt en arrière;

2° Statistique relative à 52 hommes épileptiques : de ces S2 épilep-

tiques, 39 tombent toujours en arrière ou toujours sur un côté (le même),

12 tombent toujours en avant, 1 tombe tantôt en avant, tantôt en

arrière.

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 223

sous l'influence des troubles qui précèdent ou accompagnent

les grandes et les. petites attaques d'épilepsie. Il n'y a donc

rien là qui puisse être contraire à la thèse que nous soute-

nons et qui explique d'ailleurs mieux que les autres la

pathogénie de cette idiotie spéciale. Nous trouvons là aussi

la raison des modifications, dites à tort spontanées, que

subirait d'une façon plus ou moins rémittente, comme l'in-

dique M. Féré, l'intelligence de ces idiots épileptiques, et

cela nous explique facilement aussi que l'intelligence puisse

s'améliorer assez sensiblement lorsque l'on est parvenu à

atténuer l'épilepsie.

De ses statistiques' et de celle d'Echeverria, M. Féré (loc.

cit., page 243) tire cette conclusion que plus de moitié des

enfants issus d'épileptiques sont des convulsifs, dont beau-

coup, près des deux tiers d'après Echeverria, meurent en

bas âge de convulsions, l'autre tiers restant comme épilep-

tiques. Mais pourquoi ces convulsions qui emportent dès

l'âge le plus tendre les deux tiers de ces descendants d'épi-

leptiques ne sont-elles pas considérées comme de l'épilepsie,

comme celles du tiers survivant épileptique ? 2

Ces statistiques affirment évidemment aussi la logique de

l'interprétation que je donne de la pathogénie de l'idiotie

avec épilepsie. Les convulsions de l'enfance sont générale-

ment convulsions épileptiques ; c'est l'épilepsie qui tue les

enfants qui succombent en bas âge par suite de convul-

sions, ce sont les convulsions (l'épilepsie) ou plutôt les

excitences qui les provoquent qui sont suivies des altéra-

tions anatomiques meningo-cérébrales qui causent souvent

un arrêt de développement intellectuel plus ou moins

marqué, et la meilleure preuve que c'est bien une tare

épileptique qui doit être incriminée, ainsi que l'attestaient

déjà les statistiques dont nous venons de parler, c'est que

chez beaucoup des enfants idiots, imbéciles ou arriérés qui

ont eu des convulsions peu après la naissance et qui sont

restés ensuite sans avoir d'accidents convulsifs, chez beau-

coup de ces enfants éclatent, à la puberté, des accidents

franchement épileptiques qui les font alors classer non plus

comme idiots ou imbéciles simples, màis comme idiots

épileptiques, imbéciles épileptiques, etc... ? accidents con-

vulsifs nouveaux qui, apparaissant après l'idiotie ou l'imbé-

cillité, ont fait croire jusqu'à ce jour que c'était l'idiotie ou

224 CLINIQUE NERVEUSE.

l'imbécillité ou leurs causes organiques qui avaient occa-

sionné l'épilepsie. L'erreur vient évidemment de ce que l'on

omet de rapprocher ces convulsions tardives de celles de

. la première enfance qui"ont précédé, elles, l'arrêt de déve-

loppement intellectuel et qui étaient évidemment la mani-

festation précoce de l'épilepsie, comme en témoignent suf-

flsarmnent les antécédents héréditaires des enfants atteints.

C'est une erreur qu'il est extrêmement important de com-

battre, car elte a des conséquences -désastreuses pour l'en-

fant qui naît avec une tare épileptique, ainsi que nous le

ferons ressortir en parlant de la prophylaxie à instituer

contre l'éclosion de l'épilepsie infantile, des convulsions de

la première enfance.

Cette première classe d'épilepsies secondaires trouverait

donc désormais sa place dans le chapitre même de l'épi-

lepsie proprement dite, ainsi que nous l'avions, du reste,

démontré déjà, dans la première partie de ce travail.

2° classe. - Les épilepsies secondaires d'origine toxique

mériteraient à notre avis cette dénomination « épilepsies

secondaires », surtout pour indiquèr l'origine de l'appoint

apporté aux excitences habituelles chez un individu ayant

déjà originellement un terrain nerveux épileptogène.

. Quelle que soit, en effet, l'interprétation pathogénique

que l'on adopte relativement au mode d'action du toxique,

il faut voir, dans la majorité des cas, avant cette action

toxique, un terrain préparé, une prédisposition; comment

.expliquer sans cela que parmi les alcooliques les plus into-

xiqués, par exemple, quelques-uns seulement et non tous

soient affectés de troubles épileptiques ? Il y a évidemment

une note individuelle, constitutionnelle dans chaque cas et

dont il faut admettre l'origine congénitale, que l'on attribue

l'excitence des centres nerveux aux toxiques eux-mêmes ou

que l'on veuille la rattacher soit à une modification, sous

l'influence du toxique, de l'activité fonctionnelle des glandes

dont nous avons vu le rôle important dans la pathogénie de

l'épilepsie, soit à une influence du toxique favorisant l'accu-

mulation de sécrétions de ces glandes dans le torrent san-

guin, soit à une influence du toxique diminuant l'élimina-

.tion régulière ou la dépense régulière de ces secrétions.

Ne semble-t-il pas assez naturel de voir, au moins dans un

certain nombre de cas d'épilepsie dite d'origine toxique,

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 225

surtout une influence du toxique sur l'activité fonctionnelle

des glandes que nous avons vu intervenir habituellement

dans la pathogénie de l'épilepsie proprement dite ; n'est-ce

pas ainsi, par exemple, qu'agiraient les toxines alimentaires

dans l'épilepsie dite gastrique, dans l'épilepsie qui semble

se rattacher, au point de vue de la détermination, ou à une

suralimentation et aux troubles gastro-intestinaux consé-

cutifs ou à une alimentation habituelle trop condimentée,

trop stimulante, qui a souvent un retentissement manifeste

sur les glandes que nous avons vu stimuler spécialement

l'encéphale dans la pathogénie de l'épilepsie, glandes géni-

tales par exemple, sous l'influence de l'absorption de cer-

tains mets, gibiers, poissons ou crustacés. Lorsque ces

glandes sont ainsi stimulées, le corps thyroïde est évidem-

ment influencé aussi, en raison des liens étroits qui existent

toujours entre ces glandes. C'est un point sur lequel nous

reviendrons en discutant les indications thérapeutiques. -

Il semble certain que, dans ces épilepsies secondaires par

intoxication, il doit y avoir en quelque sorte association de

causes déterminantes, excitences d'origine glandulaire, exci-

tences par action directe du poison accidentellement ou

volontairement absorbé, excitences résultant d'accumula-

tions de sécrétions, de toxines diverses par suite d'insuffi-

sance d'excrétions, par suite de troubles gastro-intestinaux

eux-mêmes d'origine toxique (buveurs), etc.

3e classe. - Quant à la troisième classe d'épilepsies dites

secondaires (corps étrangers de l'intestin, lombrics, toenia),

sa pathogénie ne diffère pas sensiblement de celle que nous

venons d'indiquer, l'excitence méningo-encéphalique com-

plémentai1'e pouvant aussi être attribuée dans la majorité

des cas à l'influence des toxines, ainsi que l'attestent les

troubles gastro-intestinaux qui trahissent, en même temps

que les convulsions, la présence de corps étrangers, de

lombrics, etc... ? troubles gastro-intestinaux qui précèdent

les convulsions.

1 1 EPILEPSIES DITES partielles. - Il nous reste, pour étre com-

plet, à dire quelques mots de la pathogénie de certaines

épilepsies partielles, bien que, à la rigueur, toutes ces épi-

lepsies ne se rattachent que d'assez loin à l'épilepsie propre-

ment dite, dont elles ne revêtent, le plus souvent, que

I Archives, 2' série, t. XVII. 15

226 CLINIQUE NERVEUSE.

quelques caractères plus ou moins incomplets, qui parfois

même les rapprocheraient tout autant, sinon davantage,

d'autres aflections, tétanos, par exemple. Il est évident que

l'irritation causée par -une esquille osseuse peut être assez

vive pour déterminer, sans le secours d'une -prédisposition

congénitale ou d'excitences émanant de glandes particu-

lières, une impressionnabilité méningo-cérébrale qui aura

pour conséquence une réaction motrice, mais réaction qui

sera limitée à une petite région seulement, puisque, l'exci-

tation méningo-cérébrale étant très limitée, le bulbe ne

reçoit lui-même qu'un contre-coup insignifiant, insuffisant

pour le mettre en jeu comme dans la pathogénie de la

grande attaque d'épilepsie ? '

De ce qui se produit dans certaines épilepsies partielles,

convulsions localisées à la suite d'une irritation très limitée

d'une petite région méningo-corticale du cerveau, par

exemple, et de l'observation facile de troubles psychiques

avant la grande attaque de l'épilepsie complète, on peut

conclure que l'intervention du bulbe dans la genèse de l'at-

taque d'épilepsie-type, franche, n'est pas primitive. Des

troubles intellectuels ou psycho-sensoriels très manifestes

précèdent souvent, en effet, et parfois même de beaucoup,

les troubles moteurs de la grande attaque,,confusion men-

tale, ou simple, ou hallucinatoire, divagations hypochon-

driaques, rêves spéciaux, troubles que l'on observe assez

fréquemment et avant et après l'attaque d'épilepsie complète

et qui, dans le premier cas, constituant une sorte d'aura,

parfois d'assez longue durée, par rapport aux convulsions,

donnent évidemment le premier rôle à l'impressionnabilité

méningo-cérélirale dans l'évolution des phénomènes d'ordre

nerveux qui se succèdent pour constituer la grande attaque.

Ainsi, de la pathogénie que nous avons attribuée, à l'épi-

lepsie vraie découle facilement aussi l'intelligence de la

pathogénie des épilepsies dites secondaires dont les unes,

cemme nous l'avons vu à propos de certains cas d'idiotie et

d'épilepsie, ne seraient que des épilepsies vraies accompa-

gnées de symptômes de lésions organiques elles-mêmes

consécutives à l'épilepsie infantile, d'autres, comme les

épilepsies d'origine toxique (alcool, absinthe), ou d'origine

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 227

dite réflexe (corps étrangers de l'intestin, vers intesti-

naux, etc.), éclatantchezdesindividus prédisposés, auxquelles

seraient également applicables en grande partie les consi-

dérations que nous avons développées à propos de la patho-

génie de l'épilepsie vraie.

Cette évolution pathogénique de l'épilepsie vraie dont

nous connaissons enfin l'arbre étiologique jusqu'à ses plus

profondes racines, confirme absolument aussi l'opinion des

aliénistes qui voient des liens de parenté assez étroits entre

l'épileptique qui tombe, qui a des vertiges, et l'individu qui

n'a que le caractère, que la mentalité habituelle de cet

épileptique, qui présente des exaltations ou des dépressions

psychiques et des variations de sensibilité analogue à celles

que l'on remarque communément chez l'épileptique con-

vulsif ou vertigineux, opinion d'aliénistes qui groupent,

comme on le sait, dans la même famille, épilepsie convul-

sive, épilepsie larvée, certains cas de folie transitoire, de

folie impulsive, etc..... On n'ignore pas, du reste, que les

attaques convulsives sont souvent remplacées chez les épi-

leptiques convulsifs par des 'troubles intellectuels paroxys-

tiques ; nous avons nous-même appelé l'attention sur ce

point, en 1884, dans l'Encéphale.

Cette pathogénie de l'épilepsie vraie permet de concevoir

assez facilement les raisons des caractères spéciaux à chaque

branche de la famille. Tous les individus atteints de l'une

ou l'autre des manifestations pathologiques auxquelles nous

faisons allusion sont, en somme, victimes d'une organisa-

tion analogue, à une différence d'activité fonctionnelle et de

sensibilité organiques près ; ils différent seulement par

l'acuité de l'impressionnabifité des centres nerveux et par

l'intensité ou l'irrégularité de l'activité fonctionnelle des

glandes qui mettent habituellement en jeu cette impression-

nabilité ou des organes qui doivent dépenser ou de ceux qui

doivent éliminer tout ou partie des produits de sécrétion de

ces glandes. S'il faut, par exemple, une stimulation forte et

prolongée sur tel système nerveux central prédisposé pour

déterminer à la fois des troubles psychiques et des troubles

convulsifs, on comprend très bien qu'une stimulation faible

et de courte durée sur un tel système nerveux ou qu'une

excitence faible sur un système nerveux originellement

228 ^CLINIQUE NERVEUSE.

moins taré ne donneront pas des effets identiquès, d'où

l'explication facile des variations d'un sujet à un autre de

l'intervalle et de l'intensité des attaques d'épilepsie en tenant

.recompte de toutes les circonstances d'aggravation des exci-

tences. Ainsi s'explique tout naturellement ,que chez tel

individu l'épilepsie se manifeste habituellement par tous

les accidents de l'épilepsie complète, que chez tel autre, on

ne rencontre que troubles psychiques ou de sensibilité et

confusion mentale, vertiges, etc

Je reviendrai, dans la dernière partie de ce travail, sur

quelques points de pathogénie, à l'occasion des indications

thérapeutiques qu'ils fournissent.

L'épilepsie est donc l'expression d'une disproportion entre

la constitution originelle, au point de vue de la sensibilité,

de l'impressionnabilité des centres nerveux encéphaliques

et leurs stimulants habituels émanant des organes glandu-

laires qui doivent assurer la continuité, la fixité de l'espèce,

c'est-à-dire la reproduction et le développement individuel

régulier : ovaires ou testicules qui non seulement assurent

la reproduction par l'association de leurs sécrétions mais

qui, par une certaine action excitante sur les centres ner-

veux, en quelque sorte complémentaire de la fonction du

* corps thyroïde, sollicitent à la reproduction, Corps

thyroïde surtout, dont le rôle est évidemment d'entretenir

cette stimulation des centres nerveux qui préside à notre

développement régulier, au maintien et à la coordination

de l'activité fonctionnelle de nos organes. -

Qu'il y ait activité fonctionnelle trop grande de ces

glandes ou élimination insuffisante, c'est-à-dire accumula-

tion anormale, de leurs produits excitateurs des centres

nerveux, le résultat sera une manifestation épileptique, si

ces centres ont l'impressionnabilité spéciale dont nous avons

parlé et que l'on pourrait appeler une constitution épilep-

togène.

La pathogénie de l'épilepsie nous apparaît désormais très

simple, de nature à fournir le comment de tous les acci-

dents qui peuvent se rattacher de près ou de loin à l'épi-

.- lepsie et elle nous apporte ainsi de précieuses indications

thérapeutiques. Le but à atteindre pour guérir l'épilepsie

ne semble plus très éloigné puisque nous connaissons les

conditions à réaliser : .

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 229

1° Diminuer la sensibilité, l'excitabilité méningo-encépha-

lique ; 2° modérer l'activité fonctionnelle de la glande thy-

roïde surtout et des glandes génitales; 3° assurer l'élimina-

tion régulière de leurs secrétions, en prévenir l'accumulation

dans l'organisme; 4° prévenir toutes les causes complémen-

taires d'excitence méningo-encéphalique, développement ou

accumulations accidentels de toxines, etc..... -

Nos observations cliniques montreront que. nous avons

utilisé assez/ heureusement déjà ces indications thérapeu-

tiques. '

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIQUES.

XXXV. Sur la production d'un sérum cytolytique spécifique pour la

thyroïde et les parathyroïdes, avec quelques observations sur la

physiologie et la pathologie des glandes parathyroïdes, spécia-

lement dans leurs rapports avec le goitre exophtalmique ; par

MAC CALLUM (The àled. Netvs, 31 oct. 1903).

Les recherches expérimentales que relate cette intéressante

notice eurent pour point de départ une expérience de Gontscha-

rukov, expérience dans laquelle, après l'injection dans le tissu cel-

lulaire sous-cutané d'un mouton, d'une émulsion de thyroïde de

chien, il put ensuite, en injectant le sérum de ce mouton à d'autres

chiens provoquer chez cenx-ci certains symptômes tétaniques qui,

suivant lui, semblaient indiquer l'existence d'une toxine spécifique

antithyroïdienne. Pour contrôler ces résultats, l'auteur essaya

d'obtenir un sérum cytotoxique spécifique thyroïdien et aussi'un

sérum cytotoxique spécifique parathyroïdien.On sait bien, en effet,

que thyroïde et parathyroïde ont des propriétés physiologiques dif-

férentes, puisque la thyroïdectomie produit les troubles lents du

métabolisme menant graduellement à l'état cachectique appelé

myxoedème, tandis que la parathyroïdectomie produit des phéno-

mènes nerveux aigus rapidement mortels, tétanie et polypnée sur-

tout, qui ont été longtemps désignés sous le nom de symptômes

précoces de la thyroïdectomie. (La confusion était due à ce fait que

ne connaissant pas les parathyroïdes, petites et souvent comme

incrustées àla surface même de la thyroïde, on les enlevait presque

toujours avec elle, et aussi à ce que les symptômes dus à leur

230 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

extirpation emportent souvent l'animal avant que les symptômes

de la thyroïdectomie n'aient eu le temps d'apparaître.) L'auteur

injecta donc, dans le péritoine doies, des émulsions séparées de

thyroïde et de para thyroïde, de chien; puis le sérum de ces oies

- fut injecté à des chiens dans le péritoine d'ordinaire. En ce qui con-

cerne la thyroïde,' plusieurs des chiens ayant été sacrifiés à des

intervalles variables, chez presque tous la thyroïde fut trouvée

normale; dans un cas seulement, on nota l'augmentation de vo-

lume des cellules qui s'observe dans l'hypertrophie consécu-

tive à l'extirpation partielle et aussi, assez souvent chez des chiens

normaux. Chez les autres, conservés jusqu'à leur mort, et qui

présentèrent une émaciation marquée et des symptômes de

cachexie, mais chez lesquels la mort sembla toujours due à une

affection intercurrente, on ne trouva non plus aucune lésion définie

ni constante du tissu thyroïdien. En ce qui concerne la parathy-

roïde, pas non plus de résultat constant ni défini : sur trois chiens,

l'un ne présenta aucune modification, deux moururent très éma-

ciés, l'un d'eux après' avoir présenté des secousses convulsives;

aucune lésion histologique des parathyroïdes ne fut non plus cons-

tatée.11 n'y a donc pas dans le sérum de l'animal traité par l'injec-

tion soit thyroïdienne soit parathyroïdienne, de cytotoxine capable

de produire aucune lésion des cellules glandulaires in situ. Cepen-

dant, il ne semble pas que l'émaciation des animaux en expérience

puisse s'expliquer par la simple action hémolytique du sérum de

l'oie, car, autant que l'on peut étendre à l'organisme les résultats

de l'expérimentation in vitro, une très minime quantité de sang

aurait été détruite de ce fait. Il est donc probable qu'émaciation et

cachexie sont dues à une action spécifique du sérum injecté, ce

sérum contenant peut-être une substance, non pas cytotoxique,

mais capable de se combiner à la sécrétion normale, soit de la

thyroïde, soit de la parathyroïde, pour la neutraliser.

L'auteur fut ainsi amené à rechercher le rôle des glandes para-

thyroïdes, découvertes seulement par Sandstromeii 1880, puis à nou-

veau par Gley en 1892, mais encore très mal connues. On savait bien,

depuis longtemps, que la thyroïdectomie avait des résultats varia-

bles : que tantôt elle tuait les animaux avec des symptômes très

aigus; que tantôt au contraire, elle les laissait vivre, les adultes

sans aucun trouble sérieux, les jeunes avec apparition lente du

myxoedème. On savait aussi que les symptômes aigus survenaient

chez les carnivores ou les omnivores, mais'non chez les herbivores,

et l'on attribuait à l'excès d'azote dans la nourriture ces symp-

tômes d'empoisonnement aigu, qui, dans le fait, s'amendaient ou

disparaissaient par la diète hydrocarbonée. Gley, plus tard, mon-,

tra que ces symptômes aigus peuvent être produits chez le lapin

en extirpant chez lui, avec la thyroïde, les parathyroïdes, qui en

sont assez éloignées pour qu'on les eût toujours laissées en place

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 23-1

sans le savoir. Mais d'autre part les voyant s'hypertrophier,dans le

cas de thyroïdectomie-seule, il les considéra comme des portions

de la thyroïde restées à l'état embryonnaire et se développant

alors pour compenser la thyroïde extirpée. La découverte chez le

lapin de deux autres parathyroïdes, incluses dans la thyroïde même

et que l'on laissait ou extirpait toujours avec elle, montra bientôt

que l'hypertrophie parathyroidienne consécutive à la thyroïdecto-

mie était compensatrice, non de celle-ci, mais de l'extirpation con-

comitante de deux des parathyroïdes. Et ainsi se trouva établie

définitivement la distinction nette des deux organes, aujourd'hui

généralement admise, la thyroïdectomie produisant lemyxoedème,

la parathyroïdectomie, les symptômes tétaniques aigus. Pour cer-

tains auteurs cependant, notamment pour Moussu, il y a entre les

deux organes une parenté fonctionnelle, car tous deux contiennent

de l'iode, et car surtout la tétanie consécutive à la parathyroïdec-

tomie est amendée par la thyroïdectomie.

Pour ces recherches sur le rôle des parathyroïdes à l'état nor-

mal, l'auteur pratiqua l'extirpation, de cet organe chez le chien.

Les chiens parathyroïdectomisés présentent, au bout de peu de

jours, des symptômes d'agitation et d'anxiété, avec ça et là de

légères contractions des muscles et des tremblements fibrillaires

de la langue. Puis bientôt se produisent des spasmes tétaniques de

tous les muscles. La marche devient spasmodique, avec raideur

surtout 'des membres postérieurs qui souvent se dérobent sous l'ani-

avec une secousse le jetant à terre. Quelquefois, pendant la marche,

le chien tombe soudainement à terre dans une convulsion épilep-

tiforme, les jambe rigides, la tête dans l'extension, la respiration

suspendue pendant quelques instants; puis celle-ci se rétablit gra-

duellement, les membres se relâchent et l'animal reprend sa

marche. Mais d'ordinaire, l'état tétanique s'établit graduellement,

depuis la marche spasmodique jusqu'à l'incapacité absolue de se

tenir avec tous les muscles en contraction violente. Il y a alors

trismus violent, avec craquement des mâchoires et morsures fré-

quentes de la langue, écoulement de salive, contraction de tous

les muscles de la face, projection des yeux en avant par la forte

rétraction de la paupière supérieure, respiration haletante, attei-

gnant 200 à 250 par minute, parfois irrégulière et du type Cheyne-

Stokes. (Cette tachypnée ne pouvant s'expliquer par le défaut

d'oxygénation, car il n'y a aucun signe de cyanose et le sang est

facilement artérialisé par agitation à l'air.) Puis l'épuisement sur-

vient, les convulsions deviennent moins violentes et la respiration

moins rapide, de sorte que la mort est précédée d'une période de

calme relatif, si elle ne s'est pas produite à l'apogée de l'attaque.

Pendant tout ce temps, les battements du coeur ne sont pas aug-

mentés de fréquence, le choc est seulement un peu violent et la

ligne - d'ascension élevée. La température s'élève beaucoup, pour

232 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

retomber avec la disparition de la tétanie. Les sensations parais-

sent très émoussées, sinon tout à fait disparues. ,

En présence de ces phénomènes, plusieurs questions se posent.

S'agit-il là du manque de quelque sécrétion nécessaire de la

- parathytoïde ? Ces phénomènes sont-ils dus à un poison circulant

dans le sang, poison neutralisé chez l'animal normal par les cel-

lules parathyroïdiennes ou leur sécrétion ? Y a-til rapport spécifique

entre les parathyroïdes et quelque autre organe, ce poison étant le

produit de rebut du métabolisme de cellules particulières, fibres

musculaires ou cellules nerveuses, par exemple, - ou bien est-il

directement absorbé par l'intestin ? A la première de ces questions

(manque d'une sécrétion nécessaire), on peut répondre par la

négative : en effet, si à un chien en violente contraction tétanique

à la suite de thyro-parathyroïdectomie, on transfuse du sang d'un

chien normal, les symptômes disparaissent rapidement ; et évi-

demment cette dilution du sang ne pourrait expliquer l'améliora-

tion s'il s'agissait du manque d'une sécrétion nécessaire; cette

amélioration n'est d'ailleurs pas due à l'introduction, avec le sang

normal, de la sécrétion parathyroïdienne en circulation dans ce

sang car le même résultat s'obtient par la transfusion, après sai-

gnée, de la solution saline physiologique. La parathyroïde semble

donc agir, non en sécrétant une substance nécessaire, mais en

neutralisant quelque toxine en circulation dans le sang. Il n'est

d'ailleurs pas nécessaire que la glande, pour agir, soit intacte et

dans ses rapports normaux avec les vaisseaux sanguins, son extrait

suffit à assurer la fonction; car l'état tétanique peut être prévenu

ou arrêté par l'injection intra-péritonéaile d'émulsion de la para-

thyroïde, ce qui correspond évidemment à une transplantation de la

glande. Il semble donc probable que l'action de la parathyroïde con-

siste à sécréter une substance,~laquelle neutralise des poisons cir-

culant dans le sang. Quels sont ces poisons ? Sachant que la téta-

nie est moins violente et plus tardive chez les chiens'soumis au

régime lacté que chez ceux soumis au régime carné, on a supposé

qu'il s'agit peut-être d'un poison produit dans le métabolisme pro-

téique ; et à l'appui de cette idée venait l'observation que la téta-

nie consécutive à la parathyroïdectomie seule est bien plus intense

que celle qui succède à la thyro-parathyroïdectomie, ce qu'on ex-

plique par ce fait que la thryroïdectomie, en diminuant le méta-

- boulisme protéïque, diminue par là la somme de poison jetée dans

la circulation. Mais à cette explication, Lusena objecte que l'amé-

lioration survient aussitôt après la thyroïdectomie et ne se mani-

feste pas dans le cas de thyroïdectomie partielle : selon lui, les

symptômes de la parathyroïdectomie sont dus surtout ;à ce qu'on

enlève à la thyroïde l'influence de la parathyroïde, la parenté fonc-

tionnelle des deux organes pour lui, comme pour Moussu, étant

très étroite. Quoi qu'il en soit, il reste donc que le parathyroïde

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES : 233

semble produire une substance, neutralisant des poisons en cricu-

lation dans le sang, poisons qui sont évidemment des substances

stimulantes des cellules nerveuses. En vue de démontrer l'existence

de ces poisons, l'auteur, chez un chien partiellement thyroïdecto-

misé, aboucha dans la jugulaire l'aorte d'un autre chien parathy-

roïdectomisé et en violente tétanie ; mais aucun symptôme téta-

nique ne se montra. Ce résultat négatif pouvant s'expliquer peut-

être par nne quantité suffisante de parathyroïde laissée en place,

la même expérience fut répétée avec un chien complètement para-

thyroïdectomisé ; le résultat fut encore négatif, mais peut-être

peut-il encore s'expliquer par une quantité suffisante de la sécré-

tion paraihyroïdienne encore présente dans le sang et les sucs des

tissus de l'animal parathyroïdectomisé. En tont cas, l'expérience

n'est pas concluante. L'auteur chercha alors à déterminer le point

d'attaque de ce poison hypothétique, muscles ou système nerveux.

Chez des chiens parathyroïdectomisés et chez lesquels avait été

pratiquée la section du sciatique, du crural et de l'obturateur, d'où

paralysie complète de la'jambe, les muscles de cette jambe, lors-

qu'apparut l'état tétanique ne présentèrent aucune contraction.

Donc l'action du poison ne porte pas sur les muscles mais sur le

système nerveux central. Pour préciser sur quelle partie du sys-

tème nerveux central, chez un autre chien parathyroïdectomisé,

la section de la moëlle fut pratiquée au niveau de la sixième ver-

tèbre dorsale, d'où paralysie flasque du train postérieur : lors-

qu'apparut la tétanie, elle se limita à la moitié antérieure du corps,

les membres postérieurs ne présentèrent aucune rigidité. Les cel-

lules des cornes antérieures de la moelle ne semblent donc pas

affectées seules, car si elles l'étaient, leurs connexions avec les

membres étant restées intactes, les contractions de ces membres

se seraient produites comme à l'ordinaire. Il semble donc que les

neurones moteurs supérieurs soient aussi, et peut-être surtout

atteints. A l'examen histologique, d'ailleurs, aucune dégénéres-

cence des fibres de la moëlle; mais, révélés par la méthode de

Nissl, le gonflement et la chromatolyse du noyau dans les cel1nlacr

des cornes antérieures et du cortex, analogues aux dégéi

cences aiguës de nombreux états toxiques.

Dans un autre ordre d'idées, l'auteur tenta de se rendre ce

des changements survenus dans le métabolisme, en tant que

lables par l'expulsion d'azote dans les urines. Le résultat bn

le suivant : après la parathyroïdectomie aucun changemen

table dans le contenu azoté de l'urine, mais après la thyroidec

la thyroparathyroïdectomie diminution du total de l'azote a

modification des rapports normaux entre les composés (n

ment, augmentation marquée de l'ammoniaque et diminution

marquée de l'urée). Et ceci vient s'ajouter à bien d'autres faits

pour démontrer, qu'alors que la thyroïde influe nettement sur le

234 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

métabolisme, la parathyroïde au contraire n'a sur lui aucune

influence.

Au cours de ces expériences, l'idée se présentait tout naturelle-

ment à l'esprit qu'il pouvait exister quelque maladie ayant des

symptômes analogues à ceux de la parathyroïdeetomie ; et ce fut

au syndrome complexe et difficilement explicable du goitre

exophtalmique que l'auteur pensa comme étant au moins quelque

peu semblable. Gley déjà avait fait ce rapprochement, et Moussu

avait même traité par la parathyroïde de boeuf une malade qui

avait présenté une amélioration marquée, mais avait succombé

à une tuberculose pulmonaire intercurrente. Et de ce fait, il existe

bien, entre les symptômes de la maladie et les symptômes expéri-

mentaux, certaines analogies, mais moins frappantes en somme

qu'elles ne paraissent au premier coup d'oeil. C'est ainsi que la

tachycardie, constante dans la maladie, manque dans l'état expé-

rimental : le tremblement de la première est représenté par les-

convulsions du second; l'exophtalmie de l'une n'est approchée que

de loin, quelquefois, dans l'autre ; et d'autre part, la thyroïdec-

tomie partielle ne produit de symptômes que sous l'influence de

fatigues spéciales, telles que la lactation, et ce sont alors ceux de

la parathyroïdectomie complète. Il ne faut pas perdre de vue,

d'ailleurs, que même si le goitre exopthalmique était vraiment dû

à une insuffisance parathyroïdienne, il ne saurait, avec ses allures

de maladie progressant graduellement, être entièrement analogue

à la parathyroïdectomie, opération brusque et totale. Donc, ressem-

blance générale des deux états, mais aussi dissemblances, celles-ci

peut-être explicables parla différence de durée et le degré de l'insuf-

fisance parathyroïdienne. L'étude anatomique du goitre exophtal-

mique a été faite par l'auteur dans un certain nombre de cas. Dans

huit d'entre eux, où les symptômes étaient modérés et où un lobe

entier de la thyroïde fut enlevé par le traitement chirurgical, les

parathyroïdes furent trouvées quatre fois et l'auraient été proba-

blement toujours, si l'examen avait pu porter sur la thyroïde

entière. Dans un cas seulement. où la mort survint du fait même

de la maladie avec des symptômes d'une très grande intensité, on

ne put trouver trace de la glande à l'autopsie. Dans' tous les autres

cas, elle était nettement plus petite qu'à l'état normal. Au point de

vue histologique, dans deux des cas, pas de modification ; dans un

autre, dégénérescence des cellules du parenchyme avec hyperplasie

du tissu conjonctif. Il semble donc que l'on puisse conclure à la

diminution du volume de la glande et à la dégénérescence et à la

disparition de ses cellules. Cela veut-il dire que les symptômes

sont ceux d'une insuffisance parathyroïdienne ? Ceci est autre

chose. On observe souvent, en effet, soit la guérison, soit une

grande amélioration après l'extirpation d'un lobe de la thyroïde,

extirpation qui s'accompagne probablement toujours de celle d'une

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 235

partie des parathyroïdes ; or on ne comprendrait guère qu'une amé-

lioration pût résulter de la suppression d'une moitié des parathy-

roïdes, si c'était déjà à leur insuffisance que la maladie était due.

Cependant, en raison des modifications anatomiques constatées,

en raison aussi de l'amélioration obtenue dans le cas .de Moussu

(et bien que tous les traitements aient donné dans cette maladie

des résultats favorables), l'auteur, en ce moment même, en traite

un cas par l'ingestion parathyroïdienne : la malade, dont les symp-

tômes sont modérés, reçoit depuis un mois chaque jour douze pa-

rathyroïdes crues de vache, ce qui représente à peu près le tissu

parathyroïden de trois vaches; aucune amélioration n'a encore été

constatée. Mais l'auteur estime que de nouvelles épreuves doivent

être tentées, et il fait préparer dans ce but un extrait parathyroï-

dien. D'autre part, en raison des accès épileptiformes observés

chez quelques-uns de ses chiens, l'auteur ne serait pas éloigné de

penser que certaines formes d'épilepsie, et peut-être encore d'autres

maladies convulsives, pussent être en rapport aussi avec des alté-

rations de la parathyroïde. Mais on n'a aucune donnée à ce sujet,

aucune étude de la glande n'ayant encore été faite dans l'épilepsie,

non plus qu'aucun essai de traitement par son ingestion.

R. MAUGERET.

XXXVI. Graphologie. médicale; par 1111, Dolphine POPPÉE. (Joum.

de Neurologie, 1903, n° 7.)

Dans ce travail, l'auteur s'attache à démontrer l'importance de

la graphologie au point de vue médical. La nervosité, la neuras-

thénie, est démontrée par la dissemblance et l'instabilité de posi-

tion et de dimension que présentent les caractères, dont la direction

tantôt s'abaisse et tantôt se redresse.

Les lignes montantes dénotent l'humeur enjouée, l'activité, l'ar-

deur, l'ambition, parce que dans tous ces cas, nous développons

des mouvements centrifuges et ascendants; tandis que dans le

chagrin, la maladie, le découragement, la grande timidité, nos

mouvements sont centripètes et déprimés.

Comme dans la vie, l'homme froid qui sait se maîtriser affecte

une attitude verticale et indifférente, tandis que le sentimental se

penche volontiers en avant et tend la main à celui qu'il rencontre,

de même l'écriture de l'homme froid est plus droite, celle du senti-

mental plus conrbée. L'écriture droite, raide, positivement carac-

téristique de notre siècle égoïste, dénote enfin une nature calcula-

trice, rebelle au sentiment ; l'écriture inclinée suivant un degré de

force, indique un coeur chaud, passionné.

Ces considérations sont appuyées par la reproduction de quel-

ques types d'écritures empruntés à des hystériques, des neurasthé-

niques, des dégénérés et des aliénés. G. DENY.

236 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

XXXVII. A propos du réflexe de Babinski; par le Dr HELDENBERGH.

(JOU1'n. de Neurologie, 1903, n°2.) ·

D'après l'auteur de cette'note, les réflexes tendineux normaux ou

anormaux, s'effectuent toujours par la voie extra-pyramidale; au

contraire, les réflexes cutanés empruntent la voie pyramidale ou

extra-pyramidale suivant qu'ils sont normaux ou anormaux.

Aiusi, le réflexede Babinski qui est le type des réflexes cutanés

anormaux est un réflexe cutané extra-pyramidal, c'est-à-dire dont

les fibres motrices suivent la voie thalamo-spinale ainsi que le

prouvent plusieurs faits anatomo-pathologiques de Homburger,

Dejérine, etc., dans lesquels la disparition du signe des orteils a

coïncidé avec une destruction des corps opto-striés. G. D.

XXXVIII. Hémiatrophie facio-scapulo-humérale ; par le D DEBRAY.

(Jouwa. de Neurologie, 1903, n° 2.)

Il s'agit d'un homme de vingt-cinq ans, ayant eu dans son

enfance une fracture du poignet qui est atteint d'une atrophie des

muscles de l'épaule et du bras gauche ainsi que de la moitié

gauche de la face, avec exagération de la contractilité faradique

et des réflexes tendineux. Se basant sur ce dernier caractère, l'au-

teur estime que malgré l'aspect protapathique de cette atrophie'

facio-scapulo-humérale. Cette affection est^en réalité dentéropalhi-

' que et qu'il doit exister dans les cornes antérieures de la moelle

une altération anatomique ou une excitation fonctionnelle qui est

la cause des accidents. Le traitement qui a été prescrit et qui a

consisté en séances bi-quotidiennes d'électricité faradique des

muscles paralysés, en frictions stimulantes, en même temps que

dans la prescription d'un regime alimentaire riche en albumi-

noïdes et en sels calcaires a été suivi d'une amélioration notable.

G. D.

XXXIX. La recherche duréflexe rotulien chez les névrosés; par le

Dr ScHnYDER. (Joum. de Neurologie, 1903, ne8.)

Chez dix malades atteints de neurasthénie, d'hystérie ou de

diverses vésanies, l'auteur a constaté que la recherche du réflexe

rotulien était rendue impossible ou contrariée par des contractions

involontaires antagonistes. Entre ces troubles et ceux qui consti-

tuent le négativisme des catatoniques , il y aurait d'après lui

d'étroites relations, etc. Dans les deux cas, il y aurait pour le

malade une incapacité d'origine psychique d'exécuter un mou-

vement voulu par lui-même on commandé par une autre personne.

... e G. D.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 237

XL. Un cas de tremblement intentionnel. Considératious sur la

pathogénie du tremblement intentionnel et du tremblement au

repos; par le Dr DE Bucu. (Joum. de Neurologie, 1903, n° 10.)

Il s'agit d'un homme de trente-six ans qui a commencé par pré-

senter des vertiges suivis d'un tremblement intentionnel des

membres inférieurs prédominant à droite, puis d'une certaine

asynergie des membres inférieurs, d'un léger nystagmus et de

ralentissement de la parole. L'auteur admet dans ce cas l'intégrité

des voies motrices cortico-spinale et mésencéphalo-spinale et de la

voie sensible principale et croit que la lésion siège sur la voie sen-

sible ou plutôt centripète secondaire, passant par le cervelet.

Etudiant à propos de ce fait la pathogénie du tremblement

intentionnel et du tremblement au repos, l'auteur émet l'opinion

que le premier de ces troubles est d'origine centripète, se rapproche

de l'asynergie, de l'ataxie et dépend d'une lésion des voies mé-

dullo-cérébello-corticales, tandis que le second est d'ordre moteur,

centrifuge, exprime une variation de l'état du tonus musculaire

(rupture de l'équilibre de tonus entre antagonistes), dépend de

lésions du faisceau extra-pyramidal et doit être rangé à côté des

mouvements hyperkinétiques (chorée. myoclonie). G. D. ,

XLI. L'acool aliment et l'hypothèse du mécanisme humain ; par le

Dry. FOREL. (Rev. méd. de la Suisse Romande, 1903, na 3).

Après avoir rappelé que le mécanisme chimique de la vie nous

est encore inconnu puisque nous ignorons complètement les trans-

formations chimiques qui ont lieu dans les tissus vivants, l'auteur

soutient que l'alcool, loin d'être un aliment, active la décomposi-

tion de l'albumine en détruisant la substance protoplasmique. A

l'appui de cette opinion il cite les expérience de Kroepelin,

Schmitt, Durer, Chauveau, etc. Il réfute celles d'Atwater et de

Frey et montre que celles plus récentes de Schnyder (de Berne),

bien que susceptibles de diverses interprétations, plaident plutôt

en faveur de l'action paralysante de l'alcool sur le muscle, fatigué

ou non.

En somme, dit en terminant'le Dr Forel, les expériences rela-

tives à l'action de l'alcool ne font que confirmer celles sur ses pré-

tendues qualités alimentaires : c'est un poison protoplasmique.

Son action délétère, même à faible dose, sur les facultés intellec-

tuelles, action si nettement prouvée par les expériences de Krae-

pelin et de son école ne laissent place à aucun doute. G. DENY.

XL11. Des réflexes dans les régions de la face et de la tête; par

W.-M. BECHTEREW. (Obozrénié psichiatl'ii), VI, 1901. (Neurol.

Centralbl., XX, 1901).

238 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

M. Bechterew résume les caractères des réflexes qu'il a décou-

verts. Le réflexe oculaire, constitué par la contraction de l'orbicu-

laire palpébral, par un rapprochement généralement faible des

paupières, lorsqu'on frappe toute la région frontotemporale et l'ar-

cade zygomatique, se produit fréquemment des deux côtés simul-

tanément, mais est plus accusé du côté percuté. Arc réflexe : tri-

jumeau et noyau sensitif de la 5° paire, noyau de la branche

supérieure du facial des deux côtés; le trajet central de cet arc est

la calotte. C'est le réflexe sus-orbitaire de Mac Carthy, mais avec

véritable contraction; en réalité il n'émane pas du nerf sus-orbi-

taire, c'est un réflexe périostique ordinaire.

Le réflexe malaire s'obtient en frappant l'os de la pommette; il

se traduit par un mouvement en arrière et en haut de la commis-

sure des lèvres. Il est bien moins constant que le premier. Arc

réflexe : branche maxillaire supérieure du trijumeau et son noyau

sensitif, noyau moteur de la branche inférieure du facial.

Réflexe de la mâchoire. La bouche étant à demi ouverte, on frappe

de haut en bas le menton ou la partie latérale du maxillaire infé-

rieur en avant de l'insertion du masséter de façon à produire un

brusque mouvement de descente de cette mâchoire; on peut aussi

frapper l'os malaire. On voit alors le maxillaire inférieur remon-

ter. Arc réflexe : branche inférieure du trijumeau, noyau sensitif

de celui-ci, noyau moteur du trijumeau. Il est exagéré dans la

paralysie pseudobulbaire, et parfois dans la paralysie générale.

Ne pas le confondre avec les tremblements cloniques de la mâchoire

inférieure produits par la percussion des dents du maxillaire infé-

rieur (phénomène du maxillaire inférieur) .

Réflexe nasal, ou ratatinement du nez et contraction de la joue

du même côté, quand on irrite mécaniquement la muqueuse et les

parties profondes de la cavité nasale. Arc réflexe : branche

moyenne du trijumeau, son noyau sensitif, noyau du facial.

Réflexe surtout unilatéral, disparaissant quand le trijumeau ou le

facial sont affectés, ou lorsqu'il y a lésion du lieu de passage de

ce réflexe dans le bulbe ou la protubérance. P. KEHAVAL.

XLIIL Echinocoque du cerveau ; par M. Fedorow. (Obozrénié

psichiulü, VI, 1901).

Observation d'hémiplégie droite à développement lent, avec

aphasie motrice incomplète. Puis, graduellement, faiblesse, maux

de tête, vomissements, vertiges, dysarthrie, convulsions, paralysie

de l'oculomoteur commun, neurorétinite avec hémorrhagies réti-

niennes. De la discussion bien faite du diagnostic, il découle qu'il

s'agit d'un ramollissement du cerveau en rapport avec des tuber-

cules de la région motrice de l'écorce de l'hémisphère gauche; il

se peut qu'ultérieurement se soit développée une tumeur isolée du

pédoncule cérébral.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 239

A l'autopsie, le tissu du cerveau est très tendu et les circonvolu-

tions sont lisses surtout à gauche. Cet hémisphère est notablement

plus gros que celui de droite : il renferme une capsule presque

aussi volumineuse que le poing à contenu liquide, qui occupe à

peu près tout l'hémisphère et siège au-dessus du ventricule latéral

dans toute sa longueur. La paroi en est solide et blanche. La cavité

dans laquelle elle est placée possède elle-même`des parois tout à

fait lisses. C'est bien l'aspect du kyste de l'échinocoque. La couche

optique et le corps strié sont comprimés; le 3e vcutricule est com-

plètement obturé. On ne trouve rien autre chose au cerveau ni

ailleurs, sauf de la tuberculose pulmonaire très avancée dans les

sommets. P. KEHAVAL.

XLIV. Des fonctions sexuelles chez les enfants bien doués, mais

entachés d'hérédité nerveuse; par L. BEDRJITZFTY. (Obozi,é7zié psi-

chiatrii, VI, 1901). '

1. Ces enfants présentent périodiquement de l'entraînement

abusif aux plaisirs sexuels. Pour un jour d'excès, ils ont 2,8 jours

de repos. Cet abus n'est pas lié à l'action d'une imagination dépra-

vée, ce qui les distingue des onanistes éphémères : - 2. Dans les

intervalles qui séparent les périodes d'abus, le sentiment de bien-

être général, l'activité intellectuelle et les idées élevées entrent en

scène pour plus de la moitié du temps; puis intervient une rapide

réaction. C'est l'inverse, à une écrasante majorité, pour les ona-

nistes éphémères ; 3. L'abolition des fonctions sexuelles agit

d'une pernicieuse façon sur toute l'organisation. Il n'en est pas

ainsi pour les onanistes éphémères; - 4. Dans 11 cas sur 18 on a

constaté une résistance énergique à l'hypnotisme. L'organisme de

ces sujets lutte opiniâtrement contre les affections dues aux

refroidissements; ils supportent bien les maladies infectieuses.

P. Keraval.

XLV. Physiologie pathologique de l'attaque d'apoplexie;

par le Dr BIET-SA1VGL.

La physiologie pathologique de ce syndrome n'est pas fixée, et

cela tient à ce qu'on n'a pu encore expliquer comment une atteinte

portée à une région limitée du système nerveux, pouvait inter-

rompre le fonctionnement de ce système presque tout entier. En

effet, le cerveau (coma), le bulbe (ralentissement des mouvemenls

respiratoires et circulatoires), et la moelle (abolition du tonus et

des réflexes) sont également frappés.

D'après l'auteur, on ne peut expliquer l'attaque d'apoplexie, ni

par la compression, ni par l'anémie des conducteurs nerveux.

Reste la théorie de la commotion, l'apoplexie étant le résultat

d'une action d'arrêt exercée par la lésion sur les fonctions de l'en-

céphale et de la 'moelle épinière. Sans doute, il peut y avoir apo-

240 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

plexie sans choc traumatique; mais, dans tous les cas, l'ictus est

déterminé par la rétraction des prolongemements des neurones.

C'est là la lésion fonctionnelle, toujours identique, quelle que soit,

du reste, la cause organique qui la détermine.

Lorsque, tout à coup, un'flot de sang pur fera irruption sous une

pression de 150 à 200 millimètres de mercure, au milieu des neu-

vrones cérébraux, il y aura un dégagement soudain et considérable

d'ondulations. Ces ondulations, lancées sur tous les conducteurs

partant des neurones intéressés, iront traumatiser d'autres neuro-

nes, et ainsi de suite. L'ébranlement se propagera avec une vitesse

moyenne de 16 mètres à la seconde, et, si le choc primitif a été

assez fort, il n'y aura pas un individu de la colonie neuronienne

qui ne soit frappé.

Instantanément, ces neurones se rétractent, et le courant ne

passe plus. Dès lors, la colonie neuronienne est dissociée : ce n'est

plus qu'un agrégat de neurones indépendants. Et alors, suivant la

violence du choc : 1° ou bien la rétraction des neurunes est incom-

plète, et l'apoplectique se trouve dans la situation d'un homme à

moitié endormi ; 2° ou bien la rétraction est complète, mais porte

presque exclusivement sur les neurones de l'écorce cérébrale. Il y

a perte du sentiment de l'unité du moi, perte de connaissance;

mais les circuits à sommet sous-cortical persistent, et les réflexes

sont conservés; 3° ou bien la commotion s'est propagée à la co-

lonne médullaire dont presque tous les neurones sont en rétraction

complète. La paralysie est totale. Les réflexes rotulien, plantaire

et de la déglutition sont abolis; la tonicité de la vessie, des

sphincters, et la tonicité vasculaire n'existent plus. Cependant,

le malade respire et son sang circule. L'ébranlement s'est pro-

pagé jusqu'au bas de la moelle et a épargné certaines régions

bulbaires. Cette invulnérabilité des circuits à sommet bulbaire

est remarquable : elle tient à leur indépendance même ; 4° enfin,

à un quatrième degré, tous les neurones sont en rétraction

complète et définitive. Le malade ne survit pas au choc. Cepen-

dant. les neurones qui président à la circulation et à la respi-

ration, peuvent n'être pas désorganisés, détruits; qu'on rétablisse

leurs communications interrompues, qu'on fasse étendre à nouveau

leurs prolongements, qu'on lés excite par les tractions rythmées

de la langue, par la respiration artificielle, par l'électrisation du

phrénique, et, si l'on s'y prend à temps, si l'on a de la patience

on verra revenir à la vie de prétendus morts (Revue neurologique,

mars 1901). E. B.

XL VI. Fibres nerveuses à myéline dans la pie-mère de la moelle

. épinière, par les Drs DERCum et SPILLEIt,

Les fibres nerveuses à myéline dans la pie-mère de la moelle

sont chose assez rare. Parmi les préparations microscopiques d'un

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 241

cas d'adisposis dolorosa, les auteurs en ont trouvé un bon nombre

contenant de fines fibres à myéline dans cette partie de la pie-

mère qui couvre les cordons postérieurs de la moelle épinière. Ces

fibres étaient si entrelacées, qu'il était impossible de déterminer

leur continuation dans les sections successives. Cependant, surune

des coupes, dont la reproduction est jointe au mémoire, on voit

nettement quelques fibres sortir de la pie-mère pour entrer dans

les cordons postérieurs. 11 est très probable que les fibres nerveu-

ses, dans la pie-mère viennent des racines postérieures et remon-

tent haut dans cette membrane vasculaire, avant qu'elles entrent

dans les cordons postérieurs (Revue neurologique, mars 1901).

. E. B.

XLVII. Cavités médullaires et mal de Pott; par les

Drs Thomas et HausER.

Observation clinique et anatomique d'altérations médullaires

dans un cas de mal de Pott. Malgré l'interruption presque com-

plète de la moelle au niveau de la première racine lombaire (il ne

subsistait, en effet, en cette région que de rares fibres dans les cor-

dons postérieurs), la paralysie motrice avait conservé jusqu'à la fin

les caractères de la paraplégie spasmodique. D'autre part, la sen-

sibilité n'était abolie dans les membres inférieurs que jusqu'aux

genoux.

Anatomiquement, malgré l'absence de compression osseuse, la

moelle était considérablement réduite de volume, cette réduction

semblant avoir été la conséquence de la pachyméningite avec

exsudat.

Au niveau des onzième et douzième racines dorsales, des pre-

mière et deuxième racines lombaires, les rares éléments nerveux

qui subsistent, sont disséminés parmi des nappes hyalines résul-

tant de la dégénérescence simultanée des fibres nerveuses, de la

névroglie et des vaisseaux.

Un des points les plus remarquables est la présence, au milieu

de ces lésions, de cavités qui, par leur aspect, rappellent singuliè-

rement les cavités syringomyéliques, et qui se sont faites en dehors

de toute participation du canal de l'épendyme dont elles restent

toujours indépendantes. Il résulte de l'examen, que ces cavités se

sont sans cesse agrandies aux dépens de leur paroi névroglique,

qui, elle-même, tend à se propager excentriquement.

Cette observation tend donc à montrer qu'un processus tuber-

culeux, tel que le mal de Pott, peut, en certains cas, en dehors de

toute compréssion osseuse, donner lieu à une dégénérescence hya-

line des éléments nerveux, et au développement, au sein de la

moelle, de formations cavitaires d'apparence identique à celles de

i la syringomyélie (Revue neurologique, février 1901). E. B.

Archives, 21 série, t. XVII. 16

242 .REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

.....1,. ? \ f. , ...

- XLVIII. Les lésions de la moelle épinière chez les amputés,

" ' . par M. SIVIT : ILSIÜ.

' L'auteur a pu examiner cinq moelles d'amputés. Dans quatre

cas, il s'agissait d'une amputation de la cuisse; dans un cas, d'une

amputation de la jambe au tiers supérieur. Dans les cinq cas, il

existe une atrophie de la moelle, du côté correspondant à l'ampu-

tation ! ' A : cette atrophie, participent aussi bien la substance blan-

che que la substance grise. C'est surtout le cordon latéral et le

c'Ordon postérieur qui sont atteints.

La' substance' grise est, in loto', le siège d'une- atrophie; cepen;

dant,' les cornes postérieures semblent plus atrophiées que les

cornes antérieures. Dans quatre des cas, c'étaient les colonnes de

Clarke qui étaient lé plus attaquées de toute la substance grise,

toujours du côté correspondant à l'amputation. Il n'y a pas seule-

ment.atrophie simple, mais sclérose, et, tandis que l'atrophie ala

tendance'à' diminuer' de bas en haut, la sclérosé, au contraire,

devient plus marquée et plus distincte "eh allant de bas eu haut;

Pour qu'une sclérose 'puisse se produire dans la moelle d'un am-

puté, il faut que,la survie, après l'amputation, soit longue, même

très longue, et les lésions seront d'autant plus marquées, que l'in-

dividû'a'survécu plus longtemps, qu'il était plus jeune au moment

de 'l'amputation, et qu'une plus grande partie du -membre a été

sacrifiée. Enfin, l'existence d'une sclérose dans les cordons posté-

rieurs des deux 'côtés, parait démontrer qu'il existe un certain

nombre de fibres qui proviennent du côté opposé (Revue neurolo-

riqice; janvier'4901j.= ' '' 1.. B.

IL' Diagnostic de l'ostéomalacie à la phase « ostéomalacia fra-

'gilis.'))*; par M. PA VIOT (Société naé<l : des Hôpitaux de Lyon, 3 oc-

tobre 1902).' .

- ? ? y t" ? , . , ,

L'auteur rappelle qu'on est d'accord aujourd'hui pour ne pas

admettre deux formes d'ostéomalacie, osteromalacia fraclurosa ou

fmgilis et ostéomalacia coherens ou ceroea.

. On reconnaît maintenant que la maladie passe par deux phases;

- dans la-première', l'os est plus friable, les espaces médullaires sont

agrandie et la table externe est amincie; dans la seconde, il e.-t

flexible comme un morceau de caoutchouc, les lamelles osseuses

étant remplacées par un tissu fibroïde souple. - .'

- 'A' Iii seconde phase, le diagnostic ne peut être hésitant pourper-

sonne ? A la première, dont l'évolution est parfois très longue, les

grandes douleurs et le tassement du sujet font seuls soupçonner

la maladie-; à cette période le diagnostic est souvent méconnu.

L'auteur'- rapporte "deux cas; où l'adjonction de certains sympa 1

tomes' ! d'ordre .nerveux-, comme .l'exagération de -la réflectivité

s t . : 1 . r t ( , ! 1 , A

REVUE D'ANATOMIE ET; DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 243

médullaire et des atrophies musculaires, fit dévier le diagnostic.

Dans le premier cas, on porta tout d'abord le diagnostic de

sclérose latérale amyotrophique à cause des symptômes diffus

d'atrophie musculaire observés qui prédominaient aux éminences

1ênar et hypoténar ; ainsi que d'une exagération des réflexes avec

trépidation épileptoïde. En second lieu, on porta le diagnostic de

mal de Pott cervico-dorsal à cause d'une immobilité presque abso-

lue de la.tête rentrée dans les épaules, accompagnée d'une longue

période douloureuse qui semblait correspondre à la phase d'irri-

jabililé spinale, ainsi que de phénomènes de Basdowisme.

La malade avait eu une pleurésie et présentait une induration

fibreuse manifeste du sommet droit.

.L'autopsie permit de constater une ostéomalacie, diagnostic qui

avait été porté un moment mais auquel on ne s'était pas arrêté.

Le second cas, qui a guéri progressivement, prêta encore davan-

tage à l'erreur. Dans celui-ci, on porta le diagnostic de méningo-

myélite et de myélite transverse. ' - -' - .

Dans ces deux cas, les phénomènes d'ordre nerveux prédomi-

nants ont été : l'exagération des réflexes,' la trépidation épilep-

toïde, voire même des contracteurs chez le second malade. L'au-

teur insiste sur ces faits et sur cette forme nerveuse de l'ostéoma-

lacie qui n'est pas signalée et n'est pas envisagée au point de vue

du diagnostic. Il fait remarquer en outre que les douleurs rachi-

tiennes semblent précéder tous les symptômes. Elles précèdent le

tassement et le rapetissement du sujet qui semble surtout se pro-

duire chez les malades qui ne souffrent pas assez pour cesser de

marcher. On doit ajouter à cela la notion de phénomènes nerveux

faisant croire à une affectation médullaire. G. C.

L. Du signe de l'orbiculaire dans le diagnoctic de- la paralysie

faciale; par L. Bard. (Lyon médical, 10 lévrier 1901, n° 6 p. 218).

Parmi les moyens propres à mettre en évidence la paralysie du

facial supérieur, le plus efficace est le signe de l'orbiculaire signalé

par le professeur l3evilliod. Il consiste dans l'expérience suivante :

si l'on demande à une hémiplégique de fermer les deux yeux, à la

fois, il les ferme-; ilpeat également fermer 7'oéil dit côté sain en

laissant l'oeil ouvert du côté paralysé, mais il lui est impossible de

faire l'inverse, c'est-à-dire,'de fèrmersèul l'oeil du côté paralysé,

l'antre restant ouvert.

PôurRevilliod, ce signe serait constant dans l'hémiplégie alésions

centrales, tandis qu'il pourrait faire défaut dans quelques cas

d'hémiplégie corticale quand elle serait due à,un, foyer très

limité et dans lequel l'origine du facial supérieur ne serait pas

comptise. , 1 . * -

- ..M, Bard a eu plusieurs fois l'occasion de vérifier l'existence du

244 REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.

signe de l'orbiculaire dans la paralysie faciale hémiplégique, mais

il a constaté qu'il faisait complètement défaut dans la paralysie

faciale périphérique. Non seulement, la fermeture isolée de l'oeil

du côté paralysé n'est pas abolie, mais même l'occlusion en est

. plus parfaite que dans la fermeture simultanée des deux yeux. Le

malade peut la tenter isolément de chaque côté ; de plus, du côté

malade, cette occlusion est moins incomplète dans le mouvement

isolé que dans le mouvement synergique par le fait de l'intensité

plus grande de l'effort en pareil cas. '

Pour M. Bard, le signe de l'orbiculaire a une importance clinique

de premier ordre ; il est appelé à accentuer la séparation sympto-

matique des paralysies faciales centrales et périphériques et à

devenir un des éléments de leur diagnostic differentiel. G. C.

LI. Paralysie motrice et sensitive consécutive à l'injection de

bichlorhydrate de quinine dans le liquide céphalo-rachidien;

par M. JABOULAY (Société nationale de médecine de Lyon, 3 mars

1902).

Il s'agit d'une malade de soixante-cinq ans atteinte de cystite

très douloureuse. M. Jaboulay lui injecte pour faire disparaître les

phénomènes douloureux, 0,04 centigrammes de bichlorhydrate de

quinine dans le liquide céphalo-rachidien. Il en est résulté une

paralysie vraie motrice et sensitive du périné et des organes con-

tenus dans l'excavation pelvienne : rectum, utérus, vagin, vessie.

La malade ne souffre plus de sa cystite, mais elle a de l'inconti-

nence d'urine et de la paralysie du rectum. Une injection de qui-

nine dans le voisinage d'un nerf paralyse définitivement ce nerf.

Chez cette malade la paralysie du cône terminal est aussi défini-

tive. Le résultat a été obtenu en injectant deux divisions et demie

d'une seringue de Pravaz, pleine d'une solution à 30 p. 100 de

bichlorhydrate de quinine dans le liquide céphalo-rachidien en

passant entre la 4e et la 5e lombaire. Cela représente exactement

0,037 milligrammes de bichlorhydrate. G. C.

REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.

I. Le cas d'un dégénéré non reconnu tel et puni par la loi ; par

EDWIN GOODALL. (The Journal of Mental Science, Avril 1903)-

Il s'agit d'un homme de trente-cinq ans, envoyé à l'asile de la

prison où il subissait une condamnation à un an de prison pour

tentative de viol sur une fille de moins de treize ans. Emprisonné

le 24 mars 1902, il fut jugé le 30 mai; le 24 juin il donne des

REVUE DE MÉDECINE LEGALE. - 245

signes d'aliénation mentale et fut transféré à l'asile le 1er juillet.

La fille qu'il avait essayé de violer était faible d'esprit, et au cours

du procès,'il ne vint à l'idée de personne que l'accusé pourrait

bien l'être aussi. A son entrée à l'asile, il fut reconnu atteint d'in-

suffisance mentale congénitale, avec nouveaux troubles surajoutés,

lesquels étaient caractérisés par de la dépression, des hallucina-

tions de la vue et de l'ouïe, des dilusions terrifiantes et de l'agita-

tion. L'hérédité était mauvaise. Le malade fut soumis à un exa-

men anthropologique selon le système de l'auteur, et l'on constata

un écart considérable avec les mensurations et descriptions nor-

males. Les symptômes mentaux aigus et nouveaux ont disparu,

laissant subsister l'insuffisance mentale ; c'est un minus habens.

L'auteur ajoute avec raison que c'est un système suranné, inefficace

et anli-cienlifique que celui qui permet de condamner un individu

de cette sorte, qui avait besoin, non d'être inutilement mis en pri-

son, mais soumis à un traitement éducationnel à la fin physique

et mental. ' R. de nlUSG9A1'E-CLAY.

II. Les mesures à prendre à l'égard des idiots et des imbéciles;

par J.-H. SPROAT. (The Journal of Mental Science. Octobre

1902). 1

L'auteur n'entend pas s'occuper ici des grands centres, où le

nombre des sujets congénitalement défectueux est assez considé-

rable pour permettre de fournir à leurs besoins dans des institu-

tions spéciales : pour être moins nombreux dans d'autres endroits

ils ne méritent pas moins que l'on se préoccupe de leur sort.

Les différentes classes d'individus dont il y a lieu de s'occuper

sont : 10 Les faibles d'esprit (principalement les enfants arriérés ou

dont le développement mental est lent) ; 2° les imbéciles ; 3° les

idiots. Pratiquement il n'existe entre les trois catégories qu'une

différence de degré, et, au point de vue des dispositions à prendre

il y a lieu de diviser chaque catégorie en deux groupes, celui des

enfants et celui des adultes. -

Les faibles d'esprit constituent la classe plus difficile à pourvoir.

Les enfants de cette classe retireraient de grands avantages d'une

éducation spéciale et beaucoup d'entre eux pourraient être relevés

jusqu'à un niveau intellectuel presque normal. La loi de 1899 sur

l'Education élémentaire donne à l'autorité scolaire le droit d'orga-

niser des classes pour les enfants arriérés et épileptiques que la

législation actuelle ne permet pas de détenir dans une institution

spéciale, et qui, sans être capables de suivre les classes ordinaires,

peuvent cependant bénéficier d'un certain degré d'enseignement;

mais comme cette mesure n'est pas obligatoire, elle reste presque

toujours dans la pratique à l'état de lettre morte; et ces enfants,

simplement faibles d'esprit, deviennent trop souvent des hommes

nuisibles. Quant aux adultes de cette catégorie, on ne peut évidem-

246 REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.

ment les atteindre que s'ils tombent un' jour-ou l'autre sous le

coup de la loi sur les aliénés ou de la loi criminelle : ils oscillent

entre la prison et l'asi ! e, et comme ils rencontrent plus de confort

dans ce dernier établissement, ils se gardent bien de protester con-

- trele certificat qui les déclare aliénés et les fait enfermer.

- Les deux autres catégories doivent être envisagées à des points

de vue différents suivant qu'ils'agit : 1° de sujets jeunes, capables

d'une certaine éducation et d'un certain apprentissage; 2° de su-

jets jeunes nécessitant une simple surveillance ; 3° d'adultes capa-

bles d'être utilement employés ; 4° d'adultes nécessitant une sur-

veillance permanente.

Le premier groupe mérite qu'on s'occupe spécialement de lui,

car c'est parmi ces jeunes sujets que l'on obtiendra des résultats

assez satisfaisants pour compenser la peine prise et la dépense en-

courue. Aussi le législateur s'est-il occupé d'eux dans la loi de 1886,

improprement appelée Loi sur les idiots, puisqu'elle vise des sujets

qui ne sont pas idiots, mais atteints d'un degré plus ou moins

avancé d'imbécillité.

Quant à ceux du second groupe, qui ne sont que peu ou point

accessibles à l'éducation et au perfectionnement, et ne réclament

qu'une simple surveillance, il n'existe pour eux d'autre ressource

que le « Workhouse » ou l'asile, où leur présence au milieu d'a-

dultes présente de réels inconvénients, parfois des dangers. Le

groupe des adultes capables d'être utilement employés est le plus

difficile de tous à pourvoir : les plus calmes, les plus inoffensifs

sont volontiers reçus au « Workhouse où ils .rendent des services

sans donner d'ennui, ce qui suffit à montrer le parti que l'on pour-

rait tirer d'eux dans un autre milieu. Quant à ceux qui, tout en

étant capables d'un travail utile, sont agités ou violent*, l'asile est

évidemment leur place naturelle. Ceux qui sont incapables de tout

travail utile mais demendentune surveillance permanente aboutis-

sent à l'asile, en passant par le « Workhouse » qui, ne disposant

pas d'un personnel suffisant pour une surveillance active, s'em-

presse de se débarrasser d'eux, sans s'occuper si l'asile est bien le

lieu d'internement qui leur convient.

Le reste des travail est consacré à l'examen des dispositions ad-

minstratives, spéciales à l'Angleterre, prises ou subies, à l'égard

des malades de cet ordre, à leur discussion et à leur critique, et à

des propositions de modifications à ces mesures. R. de M.-C.

III. Jugement, exécution, autopsie et état mental de Léon Czolgosz

alias Fréderic Nieman, meurtrier du Président Mac-Kinley, par

Carlos h'. MacDoxALD, avec compte-rendu de l'autopsie par Ed-

' C'est la thèse que nous avons toujours soutenue, avec de nombreux

faits à l'appui.. (B).

REVUE DE MÉDECINE LÉGALE., 247

ward Anthony SpiTZKA.. (The New-York Médical Journal 4 jan-

vier 190). ` . ,. , . .

La conclusion à laquelle les deux auteurs ont été conduits par

des voies différentes, l'un par l'étude de l'état mental, l'autre par

l'examen nécrospique du cerveau est identique; tous deux esti-

ment que le meurtrier étaitsain d'esprit et responsable de ses actes.

. . ' lt. M.-C.

iv. Rapport sur l'examen de l'état mental de Machetto Charles;

' par les Dr Weber et KOHLER. (Reu. métl' de la Suisse Romande,

Mai 1902). '1

Agé de 36 ans, Machetto était accusé d'avoir commis un attentat

à la sécurité par explosifs, à la cathédrale de Saint-Pierre à Go,

nève. Se basant sur l'existence d'hallucinations et d'idées déliran-

tes chroniques de grandeurs et de persécutions, dépourvues de

tout caractère de systématisation et greffées sur un état démen-

tiel mauifeste, les auteurs ont conclu à l'irresponsabilité du

prévenu.

D'après le D'' Neber la démence de Machetto, qui avait débuté à

l'Age de 18 ans par un accès d'excitation maniaque, était un type.

de démence paranoïde qui est, comme on le sait, une variété de

démence précoce. '

Le Dr Weber fait suivre la publication de son rapport des ré-

flexions suivantes :

- 10 Il a été donné à Machetto communication d'un assez long

arrêté du Tribunal fédéral ; dans cet arrêté on lui fait savoir qu'il

est atteint d'idées délirantes, d'hallucinations et de démence. Il

me semble peu logique d'appliquer à un aliéné les mêmes pro-

cédés qu'à un homme sain d'esprit. Il me paraîtrait suffisant en

pareil cas de communiquer au malade qu'il a été reconnu irres-

ponsable, et que le tribunal ayant adopté cette manière de voir,

un non-lieu a été rendu en sa faveur'. '. ,

» 2° A la suite du non-lieu, Machetto a été transféré de la prison

de Saint-Antoine à l'asile de Bel-Air; j'éprouve quelque honte à

. avouer qu'il n'a guère gagné au change...; les asiles-modernes

1 étant installés avec raison pour un traitement aussi libre que pos-

l sible, il en résulte que les aliénés criminels ne peuvent être placés

' que chez les agités, ce bâtiment offrant seul une certaine garantie

contre les évasions. Il me parait peu humain de placer un-malade

tranquille comme Machetto au milieu d'agités; il serait temps

de reprendre l'idée d'un asile spécial pour les malades chez les-

quels l'aberration mentale est compliquée de criminalité grave.

, ' G. D.

. r

1 ' Pareille communication, regrettable à tous égards, de rapports r

i 'd'experts a été faite en France à des aliénés internés.. ' .. ' i ,

248 REVUE DE MÉDECINE LEGALE.

V. Les résultats d'un examen médical infructueux; par S. Lass

(Obosrénié psie7vialrü, VI, 1901).

Histoire invraisemblable, mais vraie, d'un bourgeois de Saratow

- de vingt-deux ans, qui passe en cour d'assises pour avoir assassiné

sa maîtresse. Six médecins experts, dont deux aliénistes, concluent,

à l'unanimité, que c'est un héréditaire prédisposé aux affections

nerveuses et mentales, qui a accompli son crime en état de mala-

die. Acquitté par le jury, dans un procès qui a occupé tout Sara-

tow, il est, cependant, le lendemain, traduit devant le conseil de

guerre, où deux médecins, un médecin militaire et un médecin

civil, le déclarent propre au service. Alors ce malheureux, pendant

un an et demi, passe par toutes sortes d'épreuves occasionnéespar

des épisodes délirants multiples; il est trimballé dans les chancel-

leries, les casernes, les hôpitaux, les corps de garde les plus divers,

est soumis sans trêve à tous les désagréments et même à tous les

affronts possibles, et il est obligé de supporter tout cela à cause de

l'incapacité spéciale des médecins en question. P. K1OEAVAL.

VI. Une paille dans la législation anglaise sur la folie ; par Ernest

Wiiite. (The Journal of Mental Science. Avril 1902.)

Une dame est admise à l'asile le 26 octobre sur l'ordre d'un

juge de paix qui ne l'a pas vue, et sur le certificat de son médecin

ordinaire, et un second certificat d'un médecin du voisinage. Con-

formément à la loi, elle demande à être examinée par un magistrat.

Lé 2 novembre, l'auteur signe un certificat qui la déclare aliénée,

atteinte de mélancolie avec délusions. Le 5 du même mois, elle est

examinée par un juge de paix qui, malgré les trois certificats, et

la note inscrite par le Dr Patterson au registre des entrées, déclare

qu'il ne la considère pas comme lolle. En conséquence de cette

déclaration, elle est emmenée par son frère le 26 novembre, sans

que légalement, personne puisse s'opposer à cette mesure, qu'il a

même été légalement obligatoire de provoquer.il faut ajouter qu'à

l'asile elle était considérée comme ayant fort probablement des

idées de suicide, et que l'auteur écrivit au médecin traitant pour

lui conseiller de surveiller la malade et même de la faire admettre

dans un autre asile avec de nouveaux certificats ; mais la malade

refusa de revoir le médecin. Le 9 décembre, quatorze jours après

sa sortie de l'asile, elle se suicida sur une ligne de chemin de fer.

Ainsi, dans ce cas, le rapport d'un juge de paix, jeune et inexpéri-

menté, a annulé le rapport de deux experts, du médecin traitant,

qui suivait la malade depuis plusieurs mois, et d'un quatrième

médecin qui avait signé le certificat d'admission. II n'est pas dou-

teux qu'un vice de la législation sur les aliénés a été la cause de

cette mort. - li. de MUSGPAVE-CLAY.

REVUE DE MÉDECINE LÉGALE. 24&

VII. La folie chez les imbéciles ; par E.-F. 'l'fiEDGOLD. (The Journal

of mental Science. Janvier 1903.)

La folie ne s'observe que rarement dans les états les plus accu-

sés d'amence ; mais elle est loin d'être rare dans les formes peu

avancées d'imbécillité ; toutefois chez les malades comme les sujets

normaux il semble qu'une prédisposition soit nécessaire. On trouve

souvent chez eux un état qu'on peut définir par le mot instabilité

mentale et on peut par conséquent diviser les imbéciles les plus

élevés en deux groupes, celui des mentalement stables et celui des

mentalement instables. L'instabilité mentale paraît être chez eux

le facteur le plus important de l'aliénation mentale ; et dans la pro-

duction de ce facteur, l'hérédité joue un rôle prépondérant. De par

les recherches cliniques,, histologiques et étiologiques, on peut ad-

mettre que chez les imbéciles élevés l'arrêt de développement a

porté surtout ou exclusivement sur les portions les plus élevés du

cerveau, en respectant à peu près les facultés inférieures; mais

celles-ci ont besoin du contrôle des centres supérieurs, et si ce con-

trôle vient à manquer, l'instabilité mentale s'établit. 11 y a une caté-

gorie de ces imbéciles chez laquelle on peut facilement constater

l'absence du contrôle de l'idéation ; il y en a une autre qui estcarac-

térisée par l'absence du contrôle de l'activité émotionnelle. Tous les

cas de folie que l'auteur a constaté chez les imbéciles se conformaient

d'abord àl'un ou l'autre de ces deux types. Il pense d'autre part que

t'age auquel la folie apparaît d'ordinaire chez les imbéciles conduit

souvent au diagnostic de folie de l'adolescence. Si l'on considère

maintenant les caractères cliniques de la folie chez ces malades, on

constate qu'ils sont très semblables à ceux que l'on trouve chez

les malades ordinaires. C'est la manie qui est la forme la plus

fréquente; ensuite vient la mélancolie : la proportion de la para-

lysie générale n'est que de 2 à 3 p. 100. Les cas de l'idéation sont

de beaucoup les plus nombreux (80 à 85 p. 100). Qu'il s'agisse de

manie ou de mélancolie, le trouble mental n'est pas ordinairement

de longue durée ; dans 60 à 70 p. 100 des cas, il a disparu au bout

de deux ou trois mois. Mais les rechutes sont fréquentes ; presque

toujours (85 p. 100) elles présentent le même type que l'attaque

initiale. Dans un tiers des cas environ, la première attaque ne gué-

rit pas et le malade aboutit à la folie chronique. La folie émotion-

nelle est loin d'être aussi fréquente que la folie de l'idéation ; elle

ne représente guère que 10 à 15 p. 100 du nombre total des cas;

ici encore la manie est la forme la plus commune; elle est souvent

violente, et rappelle souvent beaucoup l'attaque d'épilepsie. La

démence primitive est extrêmement rare chez les imbéciles ; mais

la démence secondaire est la terminaison ordinaire d'un grand

nombre de cas de ce genre. La paralysie générale, comme on l'a

250 ? asiles^ d'aliénés.

vu plus haut, est rare, et présente chez les imbéciles, où elle est

précoce le tableau exact, de la paralysie générale de l'adoles-

cence. Ce travail est accompagné de huit observations.

R. DE 111USGRVE-CLY.

ASILES D'ALIÉNÉS.

I. La propagation de la tubercnlose par les bacilles contenus

dans les salles. Prédominance de ce mode de, propagation dans

les asiles d'aliénés ; par le De Anglade.

La diarrhée chronique des aliénés est presque toujours, sinon

toujours, le symptôme d'une entérite tuberculeuse. L'étude bacté-

riologique de cette entérite enseigne qu'elle résulte d'un processus

bacillaire très actif dont les agents microbiens se répandent dans

le contenu intestinal. ·

, Les selles des tuberculeux sont, partout, un puissant agent de

propagation de l'infection tuberculeuse. Dans les asiles d'aliénés,

où l'entérite tuberculeuse sévit avec intensité, où les malades, qui

ne savent pas cracher, répandent partout leurs matières fécales,

la propagation par les selles est la plus redoutable.

Isoler les tuberculeux, recueillir leurs crachats et surtout leurs

matières fécales, désinfecter tout ce qui a pu être contaminé par

les expectorations et surtout par les selles, telles sont les mesures

prophylactiques capables d'atténuer les ravages de la tuberculose

dans tous les milieux, plus particulièrement dans les asiles d'alié-

nés (Annales medico-psychologiqucs, février 1902). E. DUN.

II. Des moyens d'améliorer l'organisation médicale des asiles en

Belgique, par J. Crocq. (Journ. de neurologie, 1903, n° 1.) '

Ce travail, qui a été communiqué au Congrès de l'assistance des

aliénés, tenu à Anvers en 1902, contient des détails très intéres-

sants sur l'organisation des asiles d'aliénés de la plupart des pays

d'Europe, ainsi que de l'Amérique, et se termine par un certain

nombre de conclusions concernant les modifications qu'il convien-

drait d'introduire dans l'organisation des établissements consa-

crés aux aliénés en Belgique. G. D.

III. Rapport annuel de la section des aliénés de l'hopital arménien

' du St-Sauveur à Constantinople ; par le D1' Luigi Mongeri (Bull.

.de laSoc. de méd. mentale de Berme, juin-août 1903).

asiles D aliénés. 251

IV. De la nature du symptôme : trichotillomanie chez les aliénés ;

par J.-F. InrLarr. (Obozrénié 11sichiall'ii : VII, 1902). -

Résumé de la question suivi de 4 observations personnelles avec

deux figures. - Conclusions : On ne saurait attribuer à la tricho-

tillomanie d'origine physique que dans les cas où on ne lui trouve

aucune 'explication physique. 2. Elle n'existe que dans les cas

de démence avérée, quelle qu'en soit la cause, notamment dans

l'idiotie. 3. Il s'en faut donc de beaucoup que ce soit un phéno-

mène rare chez les aliénés. 4. Elle peut exister en temps que

phénomène plus ou moins constant, voire provisoire, concomitant

d'une période d'excitation. - 5. Il faut la ranger dans la catégorie

des mouvements stéréotypés, automatiques, car elle présente

avec quelques-uns d'entre eux d'étroites analogies. 6. Elle est

connue depuis un temps comparativement long. - 7. Il n'y a pas

de raison d'en faire une unité nosologique distincte. - 8. Le terme

de trichotillomanie n'a pas droit à l'existence. r P. KERA VAL.

V. Quelques remarques sur le suicide dans les asiles publics ; par

Harry A. BEXHAM. (The Journal of Mental Science, juillet 1903.)

Les recherches de l'auteur ont porté sur une période qui va de

1890 à 1902, durant laquelle furent constatés 201 suicides

(126 hommes et 75 femmes), ce qui sur un chiffre approximatif de

788000 aliénés en traitement, donne au pourcentage de 0,0025 ou

2 5/8 p. 10000. Dans trente cas (17 hommes et 13 femmes) l'acte

a été commis avant l'admission. 16 fois (10 hommes et 6 femmes)

il a été commis après évasion, et vingt fois (11 hommes et

9 femmes) après une sortie d'essai. En déduisant ces chiffres, il

reste 88 hommes et 47 femmes qui se sont suicidés à l'asile, soit

135 malades. Sur ce chiffre 40 hommes et 32 femmes étaient

signalés comme ayant des idées de suicide, et il y avait eu négli-

gence dans 51 cas (27 hommes et 24- femmes). Dans 18 cas, z

(10 hommes et 8 femmes) ces tendances étaient douteuses. La

négligence a été constatée dans 30,6 p. 100 des suicides masculins

et dans 51,1 p. 100 des suicides féminins; 112 suicides ont eu lieu

le jour et 29 la nuit. Parmi les moyens de suicide la pendaison

occupe le premier rang (un peu plus de 50 p. 100). En présence

du rôle joué par la négligence dans la production des suicides à

l'asile, l'auteur termine son travail par quelques considérations

sur les moyens et les précautions propres à empêcher l'exécution,

tout en reconnaissant que l'on n'arrivera jamais à éteindre com-

plètement le suicide dans les asiles. R. DE Musgrave-Clay.

VI. De l'éducation des infirmières dans les établissements destinés

aux aliénés; par Bedford PIERCE. (TheJournàl of Mental Science.

Janvier 1903.)

252 asiles d'aliénés.

On ne peut qu'indiquer ce travail qui entre dans beaucoup de

détails sur la manière dont fonctionne cet enseignement dans la

maison que dirige l'auteur. Nous en retiendrons seulement ce

point qu'il estime que ce n'est pas trop de quatre ans pour former

une bonne infirmière d'asile, et qu'il n'est pas d'avis de prendre

des infirmières ayant commencé leur éducation dans un hôpital

général et ne se spécialisant que tardivement.

- R. DE MUSGRAVE-CL.1Y.

VII. Le traitement de la pthisie dans les asiles par l'urée et ses

sels ; par J. Longheed Baskin. (The Journal of Mental Science,

Janvier 1903.)

L'auteur a employé chez sept malades le traitement qu'il préco-

nise : un malade est mort, deux sont guéris, et quatre sont en

voie d'amélioration. Les propriétés qu'il attribue à l'urée et à ses

sels sont les suivantes : 1° activer le rôle des corpuscules san-

guins, c'est-à-dire augmenter la phagocytose; 2° dissoudre les

bacilles de la tuberculose et par là exercer une action locale; 3° agir

à titre d'attirant ; et 4° jouer à l'égard de la toxine du germe

tuberculeux le rôle d'une antitoxine spécifique.

' n. DE Musgrave-Clay.

VIII. La possibilité d'assurer des moyens appropriés de traitement

aux cas de début et aux cas passagers de maladies mentales

dans les hôpitaux généraux : ouverture de la discussion; par

M..T.-S. CLOUSTON. (The Journal of Mental Science, octobre 1902).

N'ayant d'autre rôle que d'ouvrir la discussion, M. Clouston

présente sa communication sous forme de questions : 1° Possède-

t-on actuellement les ressources nécessaires pour traiter convena-

blement dans les hôpitaux généraux les cas de folie au début, et

les cas de folie légère ou transitoire ? La réponse est évidemment

négative. 2° Est-il désirable de remédier à cet état de choses ?

Evidemment oui, car les cas de début sont ceux où le traitement

est le plus utile, et en soignant ces malades en temps opportun on

rend service à eux d'abord, à la société ensuite. 3° L'agrandisse-

ment des asiles n'atteindrait-il pas le but ? Non, précisément

parce que sont des asiles et que beaucoup de malades soignés en

temps utile n'auraient pas besoin d'un séjour à l'asile qui pèse

lourdement dans la suite sur leur vie sociale. 4° Quels avantages

l'hôpital général présente-t-il sur l'asile ou tout autre mode de

traitement ? D'abord celui qui vient d'être signalé; on ne compro-

met pas son avenir en allant demander des soins à l'hôpital; en-

suite, et ceci est très important, on montrerait par là aux classes

inférieures que la folie n'est une maladie ni honteuse ni répu-

gnante, et qu'elle marche de pair avec les autres maladies. Il est

asiles d'aliénés. 253

excellent que le public soit renseigné sur la véritable nature de la

folie. 5° Cette organisation nouvelle ne serait-elle pas une simple

extension des spécialisations diverses dont on a favorisé récem-

ment le développement dans les grands hôpitaux ? Précisément, et

elle serait utile aux autres de branches de la médecine et de la chi-

rurgie. 6° Les dépenses qu'elle nécessiterait ne seraient-elles pas

trop élevées ? Le prix d'un lit dans la salle de psychiatrie, les cal-

culs d'aliénistes compétents l'ont prouvé, ne dépasserait pas sen-

siblement le prix d'un lit de médecine, et n'atteindrait pas le prix

d'un lit de chirurgie. 7° Cette innovation n'entraînerait-elle pas

des changements importants dans la construction des salles d'hô-

pital ! De l'avis des personnes compétentes ces changements seraient

peu importants. 8° Le traitement de ces cas d'aliénation ne risque-

rait-il pas de troubler le 'repos des autres malades ? Cet inconvé-

nient n'existera pas, si l'on choisit bien les cas, auquel le traite-

ment hospitalier est approprié. 9° L'administration de ce service

ne sera-t-elle pas tellement différente de l'administration ordi-

naire d'un hôpital qu'il en pourra résulter un trouble et un boule-

versement de mécanisme administratif en vigueur ? On peut har-

diment répondre négativement. 10° A ces salles spéciales ne fau-

dra-t-il pas un personnel spécial ? Certainement, et l'innovation ne

donnera tous ses effets qu'autant qu'un médecin spécialisé dans

l'élude des nzentules, aura la direction de ce service : cela ne chan-

gera rien d'ailleurs aux habitudes hospitalières; est-ce que l'on con-

fie le service de gynécologie à un chef faisant de la chirurgie gé-

nérale 2 Nciturellemcnl, le personnel soignant et surveillant sera spé-

cial aussi. 11° En supposant qu'il y ait une limite - six semaines

ou deux mois par exemple - à la durée de ce séjour temporaire,

cette période suffira-t-elle pour que le traitement ait des effets

utiles ? On peut répondre affirmativement pour un grand nombre

de cas; les autres resteront justiciables de l'asile. 12° Y a-t-il assez

de malades de la catégorie morbide dont il s'agit pour rendre l'in-

novation utile ? et ces malades viendront-ils se faire soigner à

l'hôpital ? A ces deux questions tous les médecins qui font de la

consultation de maladies mentales répondront oui, avec quelques

réserves sans doute, mais oui dans l'ensemble. 13° Quelle serait

l'influence de ce système sur le savoir et l'expérience des prati-

ciens en matière de pathologie mentale ? On peut répond- e que

l'avantage serait énorme pour le médecin, et non pas moins grand

pour le public. Les étudiants verraient à l'hôpital précisément ce

qu'ils ne voient pas à l'asile, le début des maladies mentales, et

ils apprendraient à les soigner de bonne heure, c'est-à-dire au

moment où elles sont plus précisément le plus accessibles à une

thérapeutique rationnelle. 14° Sans trop escompter l'avenir on peut

admettre que le système nouveau contribuerait à diminuer le

nombre des cas de folie. 15° Pourquoi les salles d'aliénés dans les

'284 SOCIÉTÉS SAVANTES.

hôpitaux n'ont-elles pas' rendu de services là où on les avait inslnl-

lées ? Tout simplement parce que au lieu d'y recevoir des cas de dé-

.but, on y recevait les malades les plus difficiles et les plus avancés,

sans disposer d'ailleurs des moyens particuliers nécessaires pour les

soigner. 16° Quel serait l'idéal des mesures à prendre pour le

traitement des maladies mentales dans les classes pauvres ?

- Pour M. Clouston, ces mesures sont au nombre de quatre : a,

à l'hôpital général une salle de maladies mentales, telle qu'elle

vient d'être décrite'; b, un hôpital de réception destiné aux

malades que l'on interne sur certificat médical et dont la maladie

z a un caractère aigu ; cet hôpital serait situé près d'une grande

.ville, il aurait un personnel nombreux et des médecins en assez

- grand nombre pour s'occuper activement des malades ; c, un asile

.ordinaire pour les cas chroniques ; - d, un système de pension au

-dehors pour les malades vraiment tranquilles et faciles à manier,

que l'on pourrait ainsi rendre, dans une certaine mesure, à la vie

'de famille.

- Discussion. - Sir John Silbalcl, M. Rayner, M. Newington,

ohm. Davidson, M. Marc Dowall, M. Savage (avec des réserves qui

-équivalent presque à une opposition), M. Mould, 111. Urquhart.

M. Hyslop, M. Bruce, M. George Robertson, sont d'accord-, au

moins sur l'ensemble de l'innovation proposée, avec l'orateur.

111Ji. Yellowlecs et Nathan Raw lui sont opposés.

- R. de Musgrave-Clay.

- SOCIÉTÉS SAVANTES.

.SOCIÉTÉ l\1ÉDICO-PSYCHOLQGIQUE

'Séance du 215 janvier 1904. Présidence de G. Ballet ET

' , ... ' ' Brunet. ) ,

M. BALLET, avant d'abandonner la présidence, fait ce. qu'il

.appelle son examen de conscience et se demande s'il a toujours

.,tenu la main à ce que les auteurs de communications remissent

bien, au secrétaire général, le jour même, leur texte complet

ainsi qu'un certain nombre de résumés pour la presse scientifique.

^Si les comptés rendus de séances n'ont pas toujours paru aussi

rapidement que beaucoup de. membres, le désiraient ce retard

.^tenait à des circonstances indépendantes de sa volonté. Il exprime

ensuite l'espoir que son successeur comblera ces petits desiderata

et termine son allocution en remerciant.ses.collègues dont la bien-

veillance, a facilité sa lâche de président.... ? ' la bieil-

-SOCIÉTÉS SAVANTES. 5â : 113. BRUNET,en prenant place au fauteuil dé la présidence, remer-

cie ses collègues de l'honneur qu'ils lui ont fait en l'appelant à di-

riger leurs discussions. Il s'inspirera des idées émises par son pré-

décesseur afin de conserver le bon renom de la Société qui entre

dans sa cinquante-deuxième année d'existence. ' .. ' "

Deux cas de délire de médillmnilé. ,

MM. Sollier et BOISSIER. Il s'agit de deux faits pouvant utile-

ment contribuer à établir les rapports du spiritisme avec l'aliéna-

tion mentale. La première malade distraite et rêveuse, n'ayant

jamais pratiqué le spiritisme antérieurement, eut à la suite' de

déboires sentimentaux une voix qu'elle-même et son mari attiibuè-

rent à l'esprit de sa belle-mère' Elle évoqua par la table cet esprit

devenu son guide téléologique et quelques autres. Elle ne tarda

pas à acquérir toutes les spécialités médianimiques, se distinguant

comme médium parlant, entendant et typteur, elle eut aussi une.

vision importante dans sa vie, elle eut de la psychographie méca-

nique et semi-mécanique, fit des dessins automatiques ainsi que

toutes de révélations. Son mari partageait toutes ses croyances

erronées. Mais ces pratiques déterminèrent chez la malade deux

bouffées délirantes vésaniques de mysticisme théomaniaque avec

érotisme et mission apostolique. Elle s'entretenait avec Dieu con-

curremment à ses communications avec les espTits ordinaires.

Toutes ses hallucinations revêtirent la forme des évocations ri-

tuelles du spiritisme. Elle était irrésistiblement attirée vers une

table à faire tourner. Son langage automatique prenait souvent la

forme versifiée. Guérie, elle est restée une mystique sentimentale

regrettant ses anciens rapports avec l' « au-delà » et faisant beau-

coup de vers.. - > * ' 1

Le second malade, ancien phobique, légèrement éthyliquè,

tombe. après une dyphtérie grave; dans un délire spirite plus

fruste. Il voit et entend les esprits de deux amis et de son père et

les évoque à Volonté. Il finit par entendre Dieu et' Jésus-Christ et

'évolue vers un 'délire -mystique avec -hallucinations ' impératives

brutales et érotisme. Il commet pour obéir aux ordres de ses voix

'-des actes extravagants d'expiation, tels que tentatives d'ingestion

d'urine et d'excréments et tentatives de suicide. - :

Ce spiritisme délirant' peut être toute la maladie en tant que

- forme de délire mystique d'une couleur particulière comme dans

le premier cas. Il peut être une étape, une épisode dans un état

mental grave comme dans le second cas. Il permet d'attirer l'at-

tention sur les dangers du spiritisme en général.

De tels malades sont dès mystiques théomanes d'une nuance

particulière à mettre à côté des démonomanes dans le cadre des dé-

lires religieux. La première malade se rapproche en tous points de

256 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Svedenborg à qui il n'a manqué que la forme du spiritisme classi-

que encore inconnue de non temps.

M. Marie. - M. Boissier classe les médianimiques à côté des

démonomanes, je crois plutôt qu'il faut identifier ceux-là à

ceux-ci. En etfet, de même que les démonopathes sont ou des mé-

lancoliques, ou des persécutés, ou des obsédés, ou des délirants

mystiques, de même on retrouve ces diverses catégories de possé-

dés, dans le groupe des médianimiques, qui sont des possédés mo-

dernisés, possédés par des êtres d'outre-tombe, comme ces

malades étaient possédés jadis par les Euménides, plus tard par

le Diable ; l'objet de la possession seul a changé.

M. BoISSiER. - Les médianimiques sont en effet des possédés,

mais ce sont plutôt des théomanes : on doit voir par là une pre-

mière différence dans la couleur du délire. Comme presque tous

les mystiques encore, les théomanes ont une mission à remplir, ce

que ne présentent pas les démonomanes.

M. MARIE. - Il y a d'autres délirants spirites qui restent mélan-

coliques sans jamais évoluer vers la théomanie.

Le Secrétaire général donne connaissance des mémoires en-

voyés pour les prix à décerner en 1904.

Prix M&eme ? Question : Valeur diagnostique des symptômes

oculaires aux différentes périodes de la paralysie générale, appuyée

sur des observations personnelles.

(Aucun mémoire n'a été déposé).

Prix Esquirol. - Quatre mémoires ont été envoyés :

1° Contribution à l'étude de l'évolution clinique et pathologique

des traumatismes du crâne guéris chirurgicalement. Epigraphe :

« Fac et spern ».

2° Des rapports du paludisme et de l'aliénation mentale. Epi-

graphe : « Jeunes gens, vivez dans la paix des laboratoires et des

bibliothèques (Louis Pasteur).

3° Contribution à l'étude des névroses et des délires paroxysti-

ques. Sans épigraphe.

4° Les incendiaires, par le Dr Gimbal, Pierre, médecin-adjoint à

l'asile de Prémontré (Aisne).

Commission chargée de décerner le prix Esquirol :

La commission chargée de décerner le prix Esquirol est compo-

sée de MM. Briand, Klippel, Pactet et Sémelaigne.

Marcel Bmnnn.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 287

SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE

Séance âu février 190 1. - Présidence de NI. DÉJERINE.

.Paralysie faciale dans l'érysipèle.

MM. Gnnmra et P. Thaon relatent un cas de paralysie faciale

périphérique droite survenue dans-la convalescence d'un érysipèle

de la face de moyenne intensité, prédominant du côté droit. La pa-

ralysie s'est accompagnée de réaction de dégénérescence et a guéri

complètement en deux mois. A ce propos les auteurs font remar-

quer que certains troubles nerveux apparaissent à la suite de

l'érysipèle tels que paralysie faciale, névralgies, troubles oculaires

paraissent relever d'une imprégnation directe des filets nerveux de

la région par les toxines de l'érysipèle.

M. IIusr cite un cas analogue avec oedème du côté paralysé.

Un cas de névrite du plexus brachial suivi d'autopsie.

M. TAYLOR rapporte le cas d'une vieille femme ayant présenté

une névrite spontanée du plexus brachial, avec atrophie et rétrac-

tion musculaires du membre, hypéresthésie, réflexes normaux. La

lésion était une névrite atrophique surtout parenchymateuse avec

retentissement sur les groupes cellulaires de la moelle.

Un phénomène palpébral constant dans la paralysie faciale

périphérique.

M. Cestak montre les photographies d'un cas du phénomène

palpébral de la paralysie faciale qui consiste en ce que le malade

peut baisser complètement la paupière quand on lui commande de

regarder en bas, mais ne peut pas la baisser'quand on lui com-

mande de fermer l'oeil ; cela en raison de l'expansion aponévri-

tique allant du muscle droit supérieur à la paupière, muscle dont

la tonicité est conservée dans la paralysie faciale. -

Lèpre et névrite hypertrophique .

MM. JEANSELME et 13UGT présentent un malade atteint de lèpre

avec névrites motrices et sensitives et hypertrophie considécable

des nerfs correspondants : radial, cubital, médian et partie du

muscle cutané à gauche, branche auriculaire et branche mastoï-

dienne du plexus cervical superficiel à droite, nerf auriculo-tem-

poral et nerf facial droit, nerfs sus et sous orbitaires des deux

côtés.

Archives, 2° série, t. XVII. 17

'288 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Le volume de ces nerfs atteint presque le volume du petit doigt

pour le tronc du radial et du cubital,celui d'une plume d'oie pour

les rameaux superficiels du musculo-cutané et du radial et pour

les branches auriculaire et mastoïdienne, celui d'une allumette

pour les nerfs frontaux.

Il est à remarquer que non seulement l'anesthésie mais encore

l'éruption lépreuse affectent la distribution des branches nerveuses

hypertrophiées. -

La névrite motrice s'accompagne d'atrophie et de DR très pro-

noncés pour la partie antibrachiale du nerf radial et pour le nerf

cubital et le nerf médian à la main ; elle est moins accentuée et

en partie séparée pour le nerf facial.

Il a existé dans le territoire des nerfs hypertrophiés de violentes

névralgies, qui ont actuellement disparu. Un traitement par l'huile

de Chaulmoogra à dose élevée et par des applications locales

d'ichthyol a amené une grande amélioration et sur quelques-uns

des nerfs atteints l'hyperthrophie a beaucoup rétrocédé.

' Polynévrite sulfocarbonée. ,

MM. GUILLAIN et COURTELLE3(O\T présentent un malade atteint de

polynévrite sulfocarbonée. -

Il s'agit d'un jeune homme travaillant dans une fabrique de bal-

lons de caoutchouc, qui, trois mois après avoir commencé cette

profession, fut atteint successivement d'une paralysie des mem-

bres inférieurs, puis des membres supérieurs en même temps que

de troubles digestifs avec odeur permanente de sulfure de carbone

dans la bouche, céphalée, sensation d'ivresse, troubles de la mé-

moire. Après avoir rapporté les symptômes nerveux, les auteurs

insistent sur certaines particularités de cette observation. La para-

lysie, contrairement à ce que l'on constate ordinairement, s'est

montrée d'une façon très précoce, trois mois après le début de

l'intoxication. Généralement, les membres inférieurs sont seuls

atteints dans les névrites sulfocarbonées; dans ce cas, lee mem-

bres supérieurs ont également été touchés. Contrairement à la rè-

gle, les troubles de la sensibilité et les troubles d'ordre génital ont

fait défaut. Les auteurs discutent l'origine centrale ou périphéri-

que de ces paralysies, et insistent en terminant sur les infractions

à l'hygiène professionnelle que commettent les trempeurs de bal-

lons de caoutchouc. Cet état de choses nécessiterait une réforme

qui pourrait être utile au point de vue social.

Amaurose tabétique.

' MM. Pierre Marie et André LÉRI attirent l'attention sur une par-

ticularité de l'évolution du tabes avec cécité. On dit couramment

que l'amaurose tabétique évolue lentement, entre un et dix ans.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 259

En réalité l'évolution se divise en deux périodes : une première

période aiguë, durant six ou huit mois, au maximum deux ou trois

ans, pendant laquelle le malade perd toute vision distincte, toute

notion de la couleur et de la forme des objets, une seconde période

essentiellement chronique, durant au minimum, trois, quatre, cinq

ans et généralement beaucoup plus (vingt-deux ans, trente-quatre

ans dans certains cas ! ), pendant laquelle le malade perd la notion

de la lumière, la notion du jour et de la nuit, la perception des

becs de gaz. L'anatomie montre que des fibres optiques peuvent

subsister dans le nerf optique jusqu'à trente-quatre ans après le

début de l'amaurose !

Cette constatation a de l'importance au point de vue de l'appré-

ciation des résultats du traitement antisyphilitique : certains attri-

buent à ce traitement une influence néfaste sur l'amaurose tabéti-

que d'autres une influence favorable; il faut se garder de mettre

sur le compte du traitement l'évolution rapide du début.

Gigantisme infantile.

MM. Bmssaufl et Meige présentent un homme de trente ans

tout à fait infantile mais extrêmement grand et avec une atrophie

génitale très apparente. Il a cessé de grandir à dix-huit ans, les

cartilages s'étant soudés à ce moment là. Le sujet est un déséqui-

libré. Il n'est pas acromégale bien que son maxillaire soit large

ainsi que ses mains et ses pieds.

Sensibilité osseuse.

MM. EGGER et IIIEDEL discutent la valeur respective de leurs dia-

pasons pour la recherche de la sensibilité osseuse. M. Egger repro-

che à celui de M. Riedel d'être trop léger et de se terminer par

une plate-l'orme. M. Riedel répond que son diapason dans la prati-

que lui a pourtant rendu les mêmes services que celui de son argu-

mentateur.

Jeunet et Bmssaun montrent un malade atteint vraisembla-

blement de tumeur cérébelleuse sans qu'on ait trouvé ni syphilis ni

tuberculose. Le traitement mercuriel semble pourtant avoir amené

une amélioration.

. MM. GOLSTEIN et Marinesco communiquent un cas d'hémiplégie

gauche produite par une tumeur de la région pariétale faisantcorps

avec l'os.

, Dysantigraphie.

M. Raymond communique sous ce vocable le cas d'un médecin

qui peut écrire spontanément et sous la dictée sans aucun trouble,

mais qui en copiant est parfois obligé de s'arrêter sans pouvoir

260 SOCIÉTÉS SAVANTES.

aller plus loin quelque effort qu'il fasse. Cet état serait comparable

à la claudication intermittente.

Soixante-cinq cas de pseudo-oedème catatonique observés à l'asile ? '* - ' 'EurcMa;,

M. Trepsat. Chez 65 malades, on retrouve les caractères assi-

gnés par Dide (de Rennes) au syndrome qu'il a décrit, ainsi qu'on

pourra en juger en comparant ses résultats à ceux de ce travail :

la fréquence chez les catatoniques (G3 fois sur 67 examinés), la

localisation au dos du pied, l'élasticité, l'absence de godet, sauf

dans les cas très intenses (et alors il est peu persistant et la vaso-

dilatation consécutive,lente à se produire), la cyanose (dans la

moitié des cas et qui seulement 22 fois, s'accompagne de refroidis-

sement) le refroidissement sans cyanose. L'empâtement du bas de

la jambe s'observe dans plus de la moitié des observations, et il

est douloureux (Bessière) chez 26 malades. La femme est plus

souvent alteinte de pseudo-oedème catatonique que l'homme.

Ecriture et débilité mentale.

M. R. FOERSTER (de Bonn) qui avait présenté dans la séance du

3 décembre 1903 un débile achondroplasique (Claudius) qui est

incapable de lire et d'écrire sous la dictée, mais qui sait bien par-

ler et calligraphier en copiant un texte manuscrit ou imprimé,

communique une autre observation d'un imbécile (du service de

M. Pierre Marie) atteint aussi de ce trouble.

Le malade copie moins bien et moins adroitement que Clau-

dius, mais il épèle un peu mieux et est plus avancé dans la lec-

ture des chiffres.

Comme chez le premier cas on ne peut conclure à une lésion en

foyer; il faut chercher plutôt la cause dans un développement

- défectueux et inégal des centres psychiques. Des symptômes

pareils ne sont pas trop rares chez les enfants arriérés; ces indivi-

dus peuvent être encore éduqués dans la limite de leur âge et de

leur intelligence.

- l11 ? Déjerune. Il en est de ces sujets comme des enfants retar-

dataires auxquels le maître donne tout le temps quelque chose à

copier et qui le font sansrien interpréter et sans réflexion. Le mot.

cécité verbale que d'ailleurs M. Faester n'a pas prononcé est mau-

vais appliqué à des arriérés qui ne sont pas rationnellement édu-

qués. F. Boissier.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 261.

SOCIÉTÉ DE NEUROPATHOLOGIE ET DE PSYCHIATRIE

DE L'UNIVERSITÉ DE MOSCOU - "

Séance du 20 septembre 1902

B. W. Mouravieff. Sur la symptomatologie du lues cérébral

(avec présentation de la malade). Malade, demoiselle de dix-sept

ans depuis longtemps déjà souffre de céphalgie. Les dernières

années quelque fois apparaissent des phénomènes nerveux passa-

gers, à savoir : diplopie, parésie du nerf facial périphérique, paré-

sie du nerf hypoglosse, etc. ; ces phénomènes disparaissaient très

vite après le traitement par le natrium jodatum. Une demie année

avant l'entrée de la maiade à l'hôpital, elle avait des maux de tête

avec vomissement et du trouble des mouvements associés des yeux

il gauche et à droite, tandis que les mouvemens des yeux en haut

et en bas étaient normaux, de même que les mouvements associés

des yeux en dehors. En mai 1901, on constata chez la malade les

phénomènes suivants : une voix nasillarde, de la céphalgie avec

vomissements opiniâtres, de la diplopie et de la faiblesse générale.

Le 6 juillet, la malade entra à l'hôpital, où au commencement on

remarqua de bons résultats après les injections du jodipinum (2,0)

et, ensuite, après les frictions .du unguenlum cinereum ; bientôt les

phénomènes morbidess'aggravèrent d'une manière très marquée :

la céphalalgie et les vomissements devinrent plus forts, apparut

une hémiparosie sinistre, cécité de l'oeil gauche, puis de l'oeil

droit, trouble de déglutition, somnolence, la parole devint inin-

telligible, on prescrivit du natrium jodatum (4,0 pro die) l'état

de la malade commença lentement à s'améliorer ; on ajouta

encore du kalium jodatum (2,0. par jour) et'on revint de nouveau

aux frictions de l'unguentum cinereum (40 frictions; 2 grammes

par jour); lorsque la conscience s'éclaircit et l'assoupissement di-

minua, se manifesta un trouble très accentué de la mémoire, un

manque presque total de mémoire pour les faits récents, mais une

bonne mémoire pour les faits anciens, et une inclination aux fausses

réminiscences (comme dans la maladie deKorsakoff). La restitution

de la mémoire se faisait lentement. Actuellement la malade mar-

che librement; les céphalalgies sont rares; la vue est normale, la

parole régulière. On marque une certaine distraction, un enfantil-

lage dans la conduite et une faiblesse de mémoire. Point de dé-

mence marquée, et l'état psychique continue à s'améliorer. Le rap-

porteur compte assez caractéristique pour le lues cérébral les

symptômes suivants : la somnolence, le trouble de mémoire du

type de la psychose de Korsakoff. L'apparition innattendue et la

262 SOCIÉTÉS SAVANTES.

disparition subite des symptômes isolés sont possibles à ce qu'il

paraît, non seulement dans la sclérose disséminée, mais aussi

dans la syphilis cérébrale. L'aggravation temporaire des symptô-

mes morbides, sous l'influence du traitement mercuriel n'exclut pas

encore le caractère spécifique de l'affection du système nerveux.

Vs. A. Mouratoff pense que l'association de l'amnésie du type

Korsakoff avec la dépression psychique n'est pas caractéristique

pour le lues cérébral et que ces symptômes peuvent aussi se ren-

contrer dans de bien différentes lésions graves générales du cer-

veau. '

N. P. PosTOVSKY trouve le diagnostic du lues cérébral trop géné-

ralisé et aurait voulu que de tels cas soyent plus limités du côté

clinique, ainsi que du côté anatomique.

\V. I. ROTII souligne la nécessité d'un traitement spécifique plus

prolongé pour les cas qui paraissent parfois ne pas se soumettre

au traitemcnt et éveillent le doute concernant la justesse du diag-

nostic.

W. P. SERBSKY doute de l'existence du lues cérébral dans le cas

donné, vu l'absence complète des indications sur le lues dans

l'anamnèse de la malade.

F. A. GElER. Sur les prolongements protoplasmaliques des cellules

nerveuses de la moélle épinière chez les vertébrés supérieurs. (Présen-

tation des préparations). Ayant examiné par la méthode Golgi les

cellules nerveuses de la moelle épinière chez le chien, le chat, le lapin

etc., de différents âges, le rapporteur, en confirmation des expérien-

ces de S. Soukhanoff et F. Cramiecki, a trouvé que les dendrites des

cellules nerveuses des cornes antérieures et postérieures se diffè-

rent les unes des autres; tandis que les dendrites des cellules ner-

veuses de la corne antérieure ont des contours rectilignes, donnent

des ramifications au moyen de la division et sont pauvres en ap-

pendices collatéraux, les dendrites de la corne postérieure ont des

contours raboteux, sont souvent en état variqueux, se ramifient

beaucoup et sont pourvues d'une grande quantité d'appendices

collatéraux de caractère très varié.

G. J. ROSSOLIUO. Combinaisons de la I)olioîiyélite chronique

avec la syringomyélic gliomateuse (Avec présentation des prépara-

tions). Un malade de trente-cinq ans, sans intoxication syphiliti-

que, ni alcoolique, ni quelque autre intoxication ou infection; un

an auparavant le malade eut- très froid, en restant dans l'eau

jusqu'aux genoux, en péchant. La maladie dura à peu près deux

ans, s'exprimant, vers la période terminale, par des profondes

atrophies musculaires de toutes les extrémités et du tronc; il y

avait un abaissement très marqué de l'excitabilité électrique, par

places une réaction de dégénérescence ; les organes pelviens étaient

CORRESPONDANCE 265

réfractaires à l'liypnotisation ; 3 présentaient une simple som-

nolence ; 63 furent plongés dans une hypotaxie plus ou moins

profonde, avec ou sans automatisme et amnésie ; 16 furent mis en

somnambulisme avec hallucinations, amnésie et suggestions post-

hypnotiques.

Infirmeries pour le traitement hypnotique de l'alcoolisme en Russie.

M. ÛRLITZKY (de Moscou) expose les grands et rapides succès

obtenus par les infirmeries fondées, dans le but de traiter l'alcoo-

lisme par l'hypnotisme, à Moscou, à Saint-Pétersbourg, à Ekate-

rinoslaw.

Note sur le traitement cla buveurs français par la suggestion

hypnotique.

1111. BEIiILLO\ et Marnay. En Russie, les ouvriers s'enivrent régu-

lièrement à la fin de chaque semaine, après la paye mais, pendant

toute la semaine, ils sont d'une frugalité et d'une tempérance

exemplaires. Ce ne sont donc pas des alcooliques chroniques que

nos confrères russes ont il traiter et cela explique leurs très grands

succès thérapeutiques. En France, au contraire, nos alcooliques

sont des chroniques qui, en outre, boivent non pas simplement

de l'alcool, mais des liqueurs à essences. Nos résultats thérapeu-

tiques sont donc moins luillants; ils sont cependant très encou-

rageants et c'est pour cela que je viens de fonder un dispensaire

antialcoolique où les alcooliques seront traités par la suggestion

hypnotique. M. Demonciiy. A l'étranger, on peut parler avec

succès de traiter l'alcoolisme, car l'alcoolisme y passe pour un

vice; en France, au contraire, on ne peut déraciner ce préjugé

que l'alcool est nécessaire à l'existence. M. Jules Voisin. L'al-

coolique aigu est bien obligé de demander aide et secours ; l'alcoo-

lique chronique, au contraire, refuse d'ordinaire de se soigner.

Or c'est précisément cette chronicité qui rend la guérison si dif-

ficile, c'est elle aussi qui accentue de plus en plus la dégénéres-

cence de la race et fait naître tant d'idiots.

CORRESPONDANCE.

Les aliénés en Roumanie. -

Très honoré Rédacteur,

Dans le récent Traité de pathologie mentale, publié sous la direc-

tion de M. Gilbert Ballet, livre X, concernant la pathologie mentale

au point de vue administratif et judiciaire, au « § 5. Aperçu sur

266 CORRESPONDANCE.

les législations étrangères concernant les aliénés », M. Vallon en se

basant sur les comptes rendus du Congrès international de médecine

mentale de Paris en 1889, où M. Soutzo parle de l'assistance publi-

que des aliénés en Roumanie, écrit (page 4.4) que « dans ce

pays il n'existe pas de loi spéciale sur les aliénés; leur assistance

' est réglementée : 1° par des articles du Code pénal et civil ; 2° par

des articles de la loi communale qui impose à chaque commune

l'obligation de soigner ses infirmes et ses aliénés ; 3° par un règle-

ment concernant les placements et les sorties dans les hospices

civils, »

En effet les choses se sont passées de cette manière jusqu'à la

date dont il s'agit dans les comptes rendus qui ont servi comme

document relativement au placement des aliénés en Roumanie.

Avant 1867, il n'y avait même pas en Roumanie des formalités pour

/ le placement des aliénés; et c'est de cette date que commence ce

mode de placement dont on parle dans le traité de M. Ballet. Mais

depuis près d'une dizaine d'années, l'état de choses est changé et

je me fais un devoir de montrer comment se fait actuellement le

placement des aliénés en Roumanie.

L'état de choses dont il s'agit dans le Traité de M. Ballet a duré

jusqu'en 1894 quand on a sanctionné la loi sur les aliénés qui aété

faite d'après la loi française en vigueur de 1838 sur les aliénés avec

très peu de modifications.

Ainsi par exemple, le certificat médical ne pourra être admis

s'il a été délivré plus de trente jours avant sa remise au directeur

de l'Asile. En 1896, on a fait aussi un règlement de la loi sur les

aliénés qui n'est que la reproduction de la loi augmentée de dis-

positions sur les inspections des asiles d'aliénés et des établisse-

ments privés consacrés aux aliénés.

D'après ce que je dis, on comprend très bien qu'on ne reçoit et

qu'on ne garde plus les aliénés dans les couvents comme aupara-

vant. Même l'article ler de la loi dit : « Les établissements destinés

au traitemeni des aliénés sont de deux sortes : les hospices d'alié-

nés et les établissements privés. Les couvents- d'hommes et de

femmes ne peuvent plus recevoir d'aliénés. »

C'est vrai que le peuple, comme malheureusement partout d'ail-

leurs, considère la folie comme un mal diabolique, ne pouvant

être guéri que par des prières et autres pratiques religieuses et il

arrive souvent que les paysans conduisent leurs malades au cou-

vent, mais ce n'est qu'en passant; la prière finie, le malade doit

s'en aller. Et encore les paysans tâchent de faire cela par acquit

de conscience parce que les formalités de placement coûtent beau-

coup de dépense : ils doivent s'en aller avec les malades à la ville

résidence et là attendre beaucoup et bien que les formalités soient

faites, et puis encore l'assistance des aliénés en Roumanie est très

réduite.

bibliographie. 267

Dans le Traité de M. Ballet on dit : « En Roumanie, pour une

population de cinq millions d'habitants il n'y a d'ailleurs que trois

asiles contenant chacun 500 lits au maximum. » Cela n'a été jamais.

Nous n'avons que quatre asiles : Marcoutza à Boucarest, avec

500 lits hommes et femmes ; Golia à Jassy, avec 100 lits, femmes;

Monastère Neantzu, avec 100 lits hommes ; Madona-Dudu à

Craïova avec 60 lits hommes et femmes. Comme établissement

privé il n'y a que celui de M. le Dr Souzo à Boucarest. Ainsi

noire pays pour une population de presque six millions d'habitants,

d'après le dernier recensement, n'assiste plus que 800 aliénés au

maximum. En vous envoyant cette note, je vous prie de montrer

la vérité sur l'assistance des aliénés en Roumanie. Salutations

distinguées.

Le 3 janvier 1904. Dr Zosirr,

Médecin en chef de l'hospice

du Monastère Neamtzu.

(Roumanie).

BIBLIOGRAPHIE.

VIII. Contribution à l'élude diagnostique des idées hypochondriaques

dénégations, parle De Sigismond Trébosc. (Thèse de Montpellier,

1903).

Par leur physionomie un peu différente dans les diverses

affections mentales où elles se présentent, les idées de négation

peuvent contribuer à en établir le diagnostic différentiel. Tel est

le point que l'auteur se propose de mettre en liiiiière ; et pour

cela il s'adresse aux idées de négation hypochondriaques, c'est-à-

dire relatives à l'existence des organes ou de leurs fonctions, parce

que ce sont celles qui révèlent le plus constamment une significa-

tion diagnostique particulière suivant les cas.

L'existence même des idées hypochondriaques de négation est

déjà par elle-même une première indication diagnostique, car

les idées indiquent toujours un fond très marqué d'affaiblisse-

ment ou d'obnubilation des facultés intellectuelles. Leur signifi-

cation s'accroit, ensuite, par l'étude des caractères différentiels

qu'elles présentent au cours des diverses affections qui composent

ces deux catégories cliniques.

C'est ce que l'auteur s'attache à démontrer en les étudiant suc-

cessivement dans la paralysie générale où elles permettent sou-

vent, dès le début, de préciser la nature de cette redoutable affec-

tion; dans les états mélancoliques, où elles marquent l'affaiblisse-

sement intellectuel et peuvent servir à différencier une modalité

clinique, spéciale; dans les délires de persécution où elles confir-

268 - VARIA.

ment l'apparition de la démence lorsqu'elles se relient aux idées

de persécution, ou la coexistence d'un état mélancolique si elles

sont purement concomitantes. -

Dans les états d'obnubilation intellectuels, elles se retrouvent

^plus particulièrement dans la confusion primitive ou secondaire et

' dans l'alcoolisme aigu, où, par leur physionomie diverse, elles

peuvent servir à différencier ces états, souvent transitoires et

curables, des états d'affaiblissement intellectuel définitif.

A l'appui de ces considérations l'auteur rapporte quatorze obser-

vations qui font de cette thèse une contribution importante à la

séméiologie clinique des idées hypochondriaques de la négation.

. J. Sr';cr.AS.

IX. Nains d'aujourd'laui et nains d'autrefois. Nanisme ancestrul,

achondroplasie ethnique, par M. le professeur l'O;'\CET et M. Lai-

CHE. (Lyorz médical, 3j octobre 1903, n° 43 et tirage il part.)

M. le professeur Poncet pense que dans la classe des nains achon-

droplases, on a englobé une catégorie importante de nains, qui

mérite d'en être distraite. Ils n'appartiennent, en rien, à la patho-

logie, ils ne sont que des hommes très petits, reliquats d'une race

ancienne, qui s'est continuée dans certaines contrées, pour dispa-

raître complètement dans d'autres où elle a autrefois existé. Il

s'agirait d'un nanisme essentiel, offrant cette particularité capitale

d'être un attribut ethnique, par cela même héréditaire.

A cette classe, M. Poncet donne le nom de nanisme nnveslrul,

d'achondroplasie ethnique. Il existerait donc, à côté de l'achondro-

plasie décrite jusqu'à ce jour, dont la pathogénie est encore mal

connue, une achondroplasie physiologique. '

Cette dernière est constituée par le rappel atavique d'un type

de Pygmées, type qui aurait disparu dans nos régions depuis le

milieu environ de l'ère chrétienne.

- Les auteurs rapportent deux observations qui sont la base deleur

étude. Elles ont trait à deux êtres d'une même famille, à un frère,

et une soeur, nés dans un petit village que baigne la rivière d'Ain.

L'un à 1 m. 20, l'autre 1 m. 17. Leur grand-père et leur père,

mesuraient l'un et l'autra 1 m.3a. Leur mère, femme intelligente,

a une taille de 1 m. tua. G. C.

VARIA.

Les ALIÉNES en liberté.

Par la fenêtre. Samedi soir, une veuve Marie, née Lefèvre,

quarante-quatre ans, giletière, rue de Strasbourg, 14, à Caen, qui,

depuis quelque temps, avait l'esprit dérangé, s'est jetée par sa feue-

VARIA. 269

tre dans la cour, de la hauteur d'un troisième étage. La malheu-

reuse dans un accès de fièvre chaude, était sortie de sa chambre

en chemise, avant qu'une jeune fille qui travaillait dans le même

appartement ait eu le temps de la retenir. Dans sa chute, la veuve

Marie s'est brisé les deux jambes et ouvert le crâne. Transportée

à fHbtel-Dieu, elle y est morte quatre heures après. (Le Bonhomme

Normand, 12-18 février 1904.)

Suicide. Lundi dernier, dans la matinée, Eugène Mallet, ou-

vrier lampiste à Canly, a été trouvé pendu dans son grenier. On

suppose que la mort remontait à quarante-huit heures car, depuis

samedi, lliallet n'avait pas été vu et n'avait plus quitté sa maison.

Le Dr Bouvier, de Grandfresnoy, a constaté le décès et la gendar-

merie d'Arsy a procédé aux constatations d'usage. Depuis quelque

temps déjà, Eugène llallet offrait des signes de dérangement céré-

mais depuis la mort de sa femme, survenue le 18 décembre

dernier, son état semblait s'être aggravé. Eugène lllallet, qui laisse

deux orphelins, était âgé d'environ quarante-trois ans. (Le Semeur

de l'Oise, 22 janvier 1904.)

LE DISPENSAIRE ANTIALCOOLIQUE DE PARIS. i

Le dispensaire antialcoolique de Paris, créé par le DI. Bérillon,

médecin-inspecteur des asiles d'aliénés, a été inauguré dimanche

dernier. L'inauguration a eu lieu au siège du dispensaire antialcoo-

lique, 49, rue Saint-André-des-Arts, sous la présidence de M. Jules

Voisin, médecin de la Salpêtrière, assisté de les Drs Legrain.

médecin de l'asile de Ville-Evrard et Félix Regnault, professeur à

l'Ecole de psychologie.

M. le Dr Jules Voisin a démontré dans une allocution applaudie,

que l'alcool doit être considéré comme l'agent le plus important

de la dégénérescence humaine. Il a aussi insisté sur l'accroisse-

ment des cas d'aliénation mentale causés par l'abus des boissons

alcooliques.

M. le D Legrain a fait un exposé LI ès intéressant des oeuvres

antialcooliques et indiqué le rôle moralisateur des restaurants de

tempérance, dont la création récente a obtenu un grand succès

dans les milieux ouvriers. s

Enfin le Dl' l3érillon a expliqué le but du dispensaire antialcoo-

lique, qui est de fournir à ceux qui s'adonnent avec intempérance

a l'abus des boissons alcooliques la direction morale et les traite-

ments appropriés pour résister à leur dangereuse habitude. Il a

démontré l'importance du traitement psychologique, reposant sur

la suggestion hypnotique, qui permet d'obtenir la guérison des

buveurs par une rééducation de leur volonté.

La création du dispensaire antialcoolique, la première oeuvre de

ce genre créée à Paris, comble une lacune et vient à son heure.

270 VARIA.

Elle évitera certainement à un certain nombre de buveurs immo-

dérés l'ennui d'aboutir à l'internement dans un asile d'aliénés.

Elle présente aussi un grand intérêt sociologique puisqu'elle per-

mettra de lutter contre^une habitude que l'on considère ajuste

titre comme le plus grand dissolvant du milieu familial. Les con-

sultations du dispensaire antialcoolique ont lieu sous la direction

du Dr Bérillon, jeudis, samedis, de 10 heures à midi, 49, rue

Saint-André-des-Arts.

Prix DE la Société fEDICO-PSYCIIOLOGIQUE

Année 1904. Prix Aubanel. - 1.000 francs. Question : Va-

leur diagnostique des symptômes oculaires aux différentes pério-

des de la paralysie générale, appuyée surtout sur des observations

personnelles. Prix Esquirol. Ce prix, d'une valeur de

200 francs, plus les oeuvres de Baillarger, sera décerné au meil-

leur manuscrit sur un point de pathologie mentale. ,

Année 1905. - Prix Belhomme. - 900 francs. - Question : De

l'association des idées chez l'idiot et l'imbécile. Prix Es-

quirol. Ce prix, d'une valeur de 200 francs plus les oeuvres de

Baillarger, sera décerné au meilleur travail manuscrit, sur un point

de pathologie mentale. Prix Moreau(de Tours). - 200 francs.-

Ce prix sera décerné au meilleur manuscrit ou imprimé ou bien

à la meilleure des thèses inaugurales soutenues en 1903 et en

1904, devant les facultés de médecine de France, sur un sujet de

pathologie mentale ou nerveuse. - 7 ? KSeme/'< ? ) ! e. - 500 francs.

- Question : Des sorties à titre d'essai, au point de vue clinique,

administratif et législatif.

NOTA. - Les mémoires manuscrits ou imprimés devront être

déposés le 31 décembre 1903 pour les prix à décerner en 1904, et

le 31 décembre 1904 pour ceux à décerner en 1905, chez M. leD'

Ant. Ritti, médecin de la Maison nationale de Charenton, secré-

taire général de la Société médico-psychologique. Les mémoires

manuscrits devront être inédits et pourront être signés; ceux qui

ne seront pas signés devront être accompagnés d'un pli cacheté

avec devise contenant les noms et adresse des auteurs.

LE R. P. Guillaume Hahn, S. J.

Le Revue des questions scientifiques dans son numéro de janvier,

annonce la mort, à l'âge de soixante-deux ans, de l'un de ses plus

anciens et dévoués collaborateurs, le 1. P. Guillaume IIeHV, jé-

suite. Parmi ses publications nous relevons son mémoire intitulé :

Les phénomènes hystériques et les révélations de sainte Thérèse, qui

fut mis à l'Index. Voici ce qu'écrit à ce propos la Revue : .' ,

« En tête, le P. Hahn a placé cette note : « Mémoire couronné

au concours de Salamanque, le 23 octobre 1882. » On' sait que

pour rehausser l'éclat du troisième centenaire de sainte Thérèse,

VARIA. 271

Msr l'évêque de Salamanque avait ouvert un concours auquel

étaient admis les écrivains étrangers à l'Espagne. Parmi les ques-

tions proposées, il s'en trouvait qui avaient pour objet de défen-

dre le caractère et les révélations de sainte Thérèse contre les

attaques de l'incrédulité. Tel a été également le but poursuivi dans

ce travail.

« Le jury chargé de décerner les récompenses, comprenait deux

membres de l'Académie d'Espagne, deux chanoines de Salaman-

que, le vice-recteur et les professeurs de droit de l'Université de

cette ville, le recteur du collège de San Carlos, le provincial des

dominicains, le prieur du couvent des franciscains, le recteur du

collège des Nobles Irlandais. »

« La décision du jury de Salamanque n'empêcha pas que cette

publication ne rencontrât, dans une partie du monde religieux, une

opposition bruyante, qui dégénéra bientôt en polémique acerbe.

L'autorité ecclésiastique y mit fin en inscrivant le mémoire du

P. Hahn à l'Index.

« Jugea-t-elle fausse quelqu'une des conclusions de l'auteur ?

Nous l'ignorons. La congrégation de l'Index n'a pas l'habitude de

s'expliquer sur les raisons qui dictent ses arrêts. Il est permis de

croire que la publication de cette étude, à la fois scientifique et

théologique, fut seulement jugée inopportune, puisque cela suffit,

en pareille matière, pour provoquer et justifier semblable me-

sure. Nous nous abstiendrons de tout commentaire.

UN FOU condamné.

Le conseil de guerre du 2° corps jugeait l'autre jour, le soldat

Louis Bédu, du 67° de ligne qui, étant ivre, avait insulté plusieurs

gradés. Le capitaine rapporteur, M. Marix, avait cru devoir le sou-

mettre à un examen médical, et le docteur Ravenez, médecin-chef

de l'hôpital d'Amiens, avait conclu à l'irresponsabilité complète de

l'inculpé.

Bédu, disait en substance, dans son rapport, M. le docteur Rave-

nez, est atteint de tous les troubles qui caractérisent l'alcoolisme

chronique chez un impulsif. Bédu sait que l'alcool lui fait mal, et

cependant il s'intoxique d'une manière irrésistible. Médicalement

parlanl, il a commis ses méfaits étant frappé d'alcoolisme chro-

nique ; à ce moment, une longue intoxication l'a rendu irrespon-

sable. '

Devant d'aussi nettes et d'aussi radicales conclusions, M. le capi-

taine rapporteur Marix conclut un non-lieu en faveur de Bédu.

Ce fou irresponsable n'en a pas moins été condamné à six mois

d'emprisonnement. Est-ce la prison qui le guérira ? (L'Aurore du

9 février).

FAITS DIVERS.

Bourreau D'ENFANTS. On se souvient de la fameuse affaire Dip-

pold et de l'indignation que les débats soulevèrent dans toute

l'Allemagne. Un procès analogue vient de commencer à Eberfeld ;

un maître d'école, nommé Detitius, comparaît devant le tribunal

sous l'inculpation d'avoir causé la mort d'un enfant de treize ans,

nommé Busche. 1

Detitius,parait-il, pour punir ses élèves, les faisait placer debout

contre le mur, et leur cognait violemment la tête contre la pierre.

Busche était un enfant fort et bien portant, mais quelque peu en

retard. Le 8 janvier 1903, comme il avait mal écrit quelques chif-

fres sur le tableau noir, Detitius,son professeur, lui heurta violem-

ment, par deux fois, la tête contre la muraille. Le lendemain, l'en-

fant était malade, il souffrait de la tête, et deux jours après un

docteur dut être appelé pour lui donner des soins.

L'enfant devint plus faible; une lésion cérébrale se déclara, sui-

vie de la perte de la vue, et finalement, au début du mois de juin

dernier, Busche mourait après de grandes souffrances. Peu de

temps avant de mourir, il avait raconté à son père l'odieux traite-

ment dont lui et ses camarades étaient victimes. (L'Aurore, 14

janvier 1904.)

Ce genre de corrections coups sur la tête, cognement de la

tête sur un mur ou sur le sol est très dangereux. Chaque fois

que nous le relevons dans l'histoire de nus malades, nous en mon-

trons les graves conséquences à tout le personnel de notre service.

Suicide d'adolescente. Dans la nuit de dimanche à lundi on a

découver t, dans un wagon de deuxième classe du train partant de

Pontoise à 10 h. 22 et arrivant à Creil à 11 h. 38 du soir, le cada-

vre d'une jeune fille. La malheureuse, dont le linge est marqué aux

initiales R. D. s'était pendue à la barre de fer du filet à bagages.

L'enquête ouverte par la justice vient de nous faire connaître son

identité C'est \lire Ilenée Dumont, âgée de seize ans, habitant Nogent-

les-Vierges avec ses parents. Depuis trois mois environ, la malheu-

refuse souffrait de troubles cérébraux. Elle avait quitté le domicile

paternel depuis le matin. (Le Semeur de l'Oise, 22 janvier 190r.)

Le rédacteur-gérant : Bourneville.

Vol. XVII. Avril 1904. N° 100. CI'

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE NERVEUSE.

Hospice DE la Salpêtrière. M. le professeur F. RAYMOND.

Les localisations du cancer sur le Syst4

nerveux, périphérique.

Messieurs.

Je désire, dans ma leçon d'aujourd'hui, étudier o,o 'VU"

le cas d'une pauvre femme de cinquante ans, atteinte d'une

affection qui, jusqu'à présent, fait le désespoir du médecin,

dont le triste rôle se borne à assister presque impuissant, à

une longue agonie précédée d'atroces souffrances.

Il s'agit en un mot d'un cas de cancer; c'est vous dire le

terrible pronostic qui découle de cette constatation. Pourquoi

donc ces phénomènes si douloureux ? Pourquoi donc le néo-

plasme cancéreux indolent parlui-même -et tous les obser-

vateurs se rangent à cet avis - s'accompagne-t-il presque

constamment au cours de son évolution de ces pénibles

symptômes ? z

Quelles sont dans le cas particulier, comme dans ceux ana-

logues, les raisons de l'apparition de souffrances intolérables,

à peine calmées par la morphine, souffrances qui font du

pauvre patient un véritable martyr, au sens le plus absolu

de ce mot ? Voilà déjà messieurs, un premier point des plus

importants à éclaircir, et vous l'avez deviné, la raison pour

laquelle la tumeur cancéreuse indolente par elle-même

devient parfois, sinon toujours le point de départ d'horribles

douleurs; c'est parce que, pendant son développement, pen-

dant son évolution, quoiqu'étrangère embryologiquement

Archives. z série, t. XVII. 18

274 clinique NERVEUSE.

au système nerveux, elle peut atteindre celui-ci. Ce faisant,

elle donne naissance, comme chez notre pauvre malade à des

syndromes cliniques, en apparence si nets et si précis, qu'en

les considérant, on pourrait croire - et bien des erreurs de

-ce genre ont été commises ! - n'avoir affaire qu'à une mala-

die nerveuse en apparence curable, alors qu'en réalité, ils

sont l'expression tangible de complications absolument

graves, redoutables, surtout par leur valeur pronostique.

Il y a un autre point de vue que je veux vous indiquer

tout de suite : les douleurs dont je viens de parler peuvent

être, sachez le bien, la première manifestation d'une carci-

nose jusque là latente ou méconnue. Or, prévoir la maladie,

la deviner alors qu'elle n'est qu'à ses débuts, c'est peut-être

se donner la possibilité de l'enrayer ; c'est dans tous les cas,

établir un diagnostic précis, et d'emblée être fixé sur la

nature de la maladie, partant en état de fixer sur sa gravité

les membres de la famille du malade. Trop souvent, hélas !

dans de telles circonstances notre rôle de médecin ne se réduit

qu'à cela. ,

J'aurai donc, en ce qui concerne cette malade, à rechercher

brièvement devant vous les divers syndrômes nerveux réa-

lisés chez elle, quelle est leur valeur clinique au double

point de vue du diagnostic et du pronostic.

Je vous montrerai les points du système nerveux touchés

par l'envahissement carcinomateux. Et lorsque j'aurai

établi les particularités du cas soumis à votre examen, j'en

prendrai prétexte pour attirer votre attention sur les princi-

pales localisations cancéreuses sur le système nerveux péri-

phérique ; m'attachant surtout à vous faire connaître certains

types anatomo-cliniques nouveaux ou moins connus, et dont

la connaissance peut vous être utile dans votre pratique.

Voici d'abord la pauvre malade dont je vous ai parlé.

Vous voyez avec quelles précautions on l'apporte dans cet

amphithéâtre. Tous les mouvements communiqués, les moin-

dres trépidations sont vivement ressenties par elle. Voyez

quelle souffrance vive est empreinte sur ses traits. On a dû

pour l'amener jusqu'ici lui faire une piqûre de deux

centigrammes de morphine. Quand elle n'est pas sous l'em-

pire de ce calmant, elle ne peut retenir des plaintes conti-

nuelles.

Elle est âgée de cinquante ans et exerçait la profession de

localisations DU cancer SUR LE système nerveux. 275

couturière. Ses antécédents héréditaires ne sont pas connus.

Son père et sa mère sont morts jeunes; elle ignore dans

quelles conditions, elle ne sait même pas si elle avait des

frères ou des soeurs.

Sa première enfance se passa sans maladie notable; elle

fut réglée à dix-sept ans. Vers l'âge de dix-huit ans, elle au-

rait eu une pleurésie, sans doute de nature tuberculeuse, car

elle eut à ce moment des hémoptysies et fut traitée long-

temps à l'huile de foie de morue. -

Mariée la première fois à vingt-deux ans, car elle fut mariée

deux fois, elle eut quatre enfants de ces deux mariages. Cir-

constance assez particulière : son premier mari aurait été

atteint d'une tumeur, diagnostiquée comme un « enchon-

drome ». Ce néoplasme évolua pendant dix-huit mois, fut

jugé inopérable et se termina par la mort; ceci se passait

en 1881.

Ce n'est qu'au mois d'août 1899 que remonte le début des

accidents actuels. La malade s'aperçut alors d'une petite

induration au niveau du sein gauche. Un médecin consulté,

conseilla une opération à laquelle la malade refusa de se sou-

mettre. Un mois après elle ressentit pour la première fois

des sensations d'engourdissement dans le bras gauche, elle

n'avait plus de force, dit-elle, dans ce bras. A la fin de l'année

ellese décide enfin à une intervention et entre à l'hôpital pour

se faire opérer. L'ablation du sein fut pratiquée en jan-

vier 1900, et la malade quittait l'hôpital trois semaines après.

Malgré les suites opératoires, en apparence favorables, la

gêne persistait dans le bras gauche; de plus des douleurs

lancinantes survenaient par intermittences dans ce bras.

En septembre 1902 elle revient à la Salpêtrière. Le bras

gauche était enflé, sans doute à cause d'une compression

veineuse axillaire par une récidive du néoplasme dans les

ganglions. On tenta une nouvelle opération avec curettage

de l'aisselle, mais sans beaucoup de succès. Les douleurs et

l'oedème du bras persistèrent,

A partir de ce moment l'évolution devint plus rapide et une

série de symptômes nouveaux firent leur apparition. En

mai 1903, la malade se plaint de douleurs dans les jambes,

rendant la marche de plus en plus difficile; mais sans para-

lysie vraie et sans troubles sphinctériens. En juillet, une

toux pénible s'installe; la respiration est gênée, avec sensa-

276 C CLINIQUE NERVEUSE. ,

tion de constriction thoracique ; en même temps les dou-

leurs des jambes deviennent intolérables, surtout à droite, et

rendent la marche impossible.

C'est à ce moment que cette pauvre femme entra dans

notre service, et, depuis son état a été loin de s'améliorer.

Vous voyez l'état de cachexie profonde dans lequel elle se

trouve. Tous les mouvements actifs, même ceux de la tête

sont presqu'impossibles à cause de la douleur qu'ils provo-

quent. Remarquez aussi qu'elle ne présente pas la teinte

cireuse habituelle à la période terminale d'un cancer, mais

plutôt une mélanodernie accentuée, surtout sur la région ab-

dominale et au cou. Par contre les muqueuses sont d'une

coloration normale.

Dans la région de la cicatrice opératoire, on perçoit une

induration de la peau à la partie supérieure de cette cicatrice.

Les ganglions axillaires correspondants sont immobilisés,

hypertrophiés et durs. Par ailleurs, vous rencontrerez des

adénopathies multiples, mobiles le plus souvent, aux aînés,

à la région axillaire opposée, à la région cervicale. '

Prenons maintenant les membres en détail : le membre

supérieur gauche doit fixer d'abord notre attention. Voyez

comme la main est amaigrie, les éminences thénar et hypo-

thénar sont flasques et atrophiées. Les mouvements actifs de

flexion et d'extension des doigts sont supprimés; il en est de

même de l'adduction et de l'abduction du pouce.

Aucun mouvement n'est possible au niveau de l'articula-

tion radio-carpienne. N'était un léger mouvement d'exten-

sion de l'avant-bras sur le bras, on pourrait dire qu'il existe

une monoplégie totale de ce membre, puisquelesmouvements

de l'épaule eux-mêmes sont nuls. D'ailleurs cet examen ne

peut-être poursuivi avec toute la méthode désirable, eu égard

à la vive douleur provoquée par le moindre déplacement du

membre.

L'examen électrique de ces nerfs a été fait par le docteur

Huet et a montré que dans le domaine de tous les nerfs

émanés du plexus brachial, la réaction de dégénérescence

existait à des degrés divers; peu accentuée dans le domaine

du circonflexe et du musculo-cutané, cette réaction existait

nettement dans tous les muscles innervés par le médian et le

cubital, et atteignait son maximum d'intensité dans le terri-

toire du radial.

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTEME NERVEUX. 277

Un oedème diffus s'étend depuis le pli du coude jusqu'au

poignet. Je vous signale aussi les troubles trophiques qui

existent aux doigts : perte de la tonicité de la peau et désqua-

mation exagérée.

La recherche de l'état de la sensibilité est délicate dans

l'espèce et ne peut être qu'imparfaite. Il est superflu d'insis-

ter sur les troubles de la sensibilité subjective : paresthésies,

fourmillements, douleurs lancinantes qui torturent la

malade. Au point de vue objectif, on remarque une zone d'a-

nesthésie douloureuse sur le bord interne du bas de l'avant-

bras et de la main, le reste des téguments du membre est le

siège d'une hyperesthésie très nette, et les diverses sensibili-

tés sont mieux perçues dans la moitié externe que dans la

moitié interne.

Le membre supérieur droit est bien moins atteint que le

gauche, il y a de la faiblesse, de l'impotence fonctionnelle;

les mouvements de l'épaule sont.douloureux et difficiles, les

doigts n'ont aucune force.

Si nous passons aux membres inférieurs, nous constatons

que le droit est bien plus pris que le gauche.

A droite la circonférence de la cuisse est de deux centimè-

tres plus faible que la gauche. La flexion de la cuisse sur le

bassin est impossible à cause de la douleur ressentie dans

l'aine. Par ailleurs la paralysie motrice n'est pas complète,

elle est sous la dépendance étroite de l'élément douloureux,

c'est ainsi qu'avec un peu d'effort et au prix de souffrances

vives, la malade arrive à faire exécuter à ses orteils quelques

mouvements, à fléchir ou à étendre son pied.

Le trajet du sciatique et de ses branches est très doulou-

reux.

Pareillement, la région trochantérienne est extrêmement

, sensible (noyau néoplasique secondaire) et manifestement

hypertrophiée. -

s Les téguments des membres inférieurs, comme d'ailleurs,

j toute la surface du corps sont hypéresthésiés.

f J'insisterai encore sur une sensation très nette de cons-

r triction thoracique avec douleurs en ceinture à caractère lan-

» cinant. C'est vous dire que les nerfs intercostaux ou tout au

; moins leurs racines sont touchés eux aussi par le processus : morbide. -

I Les réflexes tendineux sont généralement exagérés, parti-'

278 CLINIQUE NERVEUSE.

culièrement les réflexes rotuliens et surtout à droite;

la percussion du tendon rotulien de ce côté semble amener

une ébauche de trépidation spinale. Le réflexe cutané plan-

étaire est en flexion. - -

- - Du côté des yeux, les réactions sont normales, il n'y a pas

d'inégalité pupillaire, pas de myosis, pas de syndrome ocu-

laire sympathique.

Jusqu'ici les sphincters fonctionnent normalement.

. Enfin, Messieurs, j'attirerai votre attention sur les phéno-

mènes dyspnéiques et la toux chez cette malade. Doit=on

attribuer ces symptômes pulmonaires, malgré la pleurésie

antérieure, à une métastase du cancer ? Je suis tout disposé

à l'admettre pour ma part. Je vous signale à la base gauche.

une zone de matité remontant jusqu'à l'angle inférieur de

l'omoplate; il y a de l'egophonie, delà pectoriloquie aphone,

un souffle intense, dont la tonalité se rapproche du souffle

tubaire, sans gargouillements, tous signes qui militent en

faveur d'une induration du parenchyme. L'expectoration est

abondante, jaunâtre, il n'y a pas de sang dans les crachats.

Somme toute vous devez retenir de cette énumération les

faits suivants :

Chez une femme sans autécédauts héréditaires et person-

nels, autres qu'un enchrondome chez le premier mari, et une

affection tuberculeuse à l'âge de dix-huit ans, il s'est déve-

loppé vers l'âge de quarante-sept ans une grosseur au sein

droit, nettemennt cancéreuse par son évolution et sa cons-

titution anatomique; tumeur qui d'emblée est l'occasion de

troubles sensitifs, puis moteurs dans le membre supérieur

correspondant. Malgré une première opération ces troubles

nerveux continuent. Un curettage de l'aisselle est pratiqué

trois ans après l'apparition des premières douleurs, les phé-

nomènes douloureux et l'oedème du bras persistent; puis les

symptômes de généralisation s'accentuent, le bras droit, les

jambes se prennent à leur tour, l'impotence fonctionnelle

'devient complète, sans que pour cela on note à aucun mo-

ment de troubles sphinctériens, les douleurs s'étendent à tous

les nerfs du thorax et du tronc. La dyspnée et la toux s'ins-

tallent, l'impotence et la douleur augmentent chaque jouren

même temps que l'état général évolue parallèlement vers la

cachexie profonde avec cette teinte particulière des tégu-

ments sur laquelle je reviendrai tout à l'heure.

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. i 9

Il n'y a pas lieu, Messieurs, de discuter la nature intime

de l'affection. Aucun doute ne saurait exister dans votre

esprit. Aussi ne m'attarderai-je pas à vous démontrer que

dans l'espèce, ni l'hystérie, ni la syphilis, ni la tuberculose,

ni une intoxication exogène 'comme le plomb et l'alcool ne

sont en jeu. Ici la cause est nette et vous avez vu débuter les

symptômes nerveux en même temps que la tumeur; leur

évolution ultérieure a suivi la même marche que celle de la

récidive du néoplasme, il y a donc entre les deux processus,

nerveux et carcinomateux, une relation indubitable, étroite.

Sur quelle portion du système nerveux central ou périphé-

rique siègent donc les altérations responsables du com-

plexus symptômatique que vous aviez sous les yeux ? Ici, les

centres nerveux encéphaliques ou médullaires ne sont pas

en cause; je n'en veux pour preuve que la distribution des

troubles moteurs qui n'ont rien à voir avec la paraplégie ou

l'hémiplégie de cause médullaire ou cérébrale. Ici l'impuis-

sance motrice n'est point complète, il y a plutôt une véri-

table inhibition causée par la douleur, car l'abolition de^la

motricité volontaire est en rapport absolument direct avec

la douleur. D'autre part, vous ne constatez ni paralysie

flasque, ni contracture. L'exagération de la reflectivité

montre seulement qu'il existe une irritation spinale légère,

liée sans doute à un commencement d'envahissement du

squelette rachidien ou de la méninge -par le néoplasme;

peut-être aussi les phénomènes d'ordre toxique ne sont-ils

pas étrangers à cet état de choses ? -

Enfin, s'il y avait encore quelques doutes; l'absence de

troubles sphinctériens, la disposition des troubles sensitifs,

sans dissociation des diverses sensibilités, sans anesthésies

totales, qui sont bien plutôt d'ordre objectif, consistant en

paresthésies, en fourmillements, en douleurs lancinantes,

spontanées ou provoquées par les mouvements et les con-

tacts ; tout ceci, dis-je, montre surabondamment que c'est le

système nerveux périphérique qui est atteint au maximum,

et dans celui-ci non pas les terminaisons fines intra-muscu-

laires, mais bien les gros troncs. En un mot, ce sont avant

tout des névrites tronculaires par compression.

Si nous reprenons l'analyse des divers symptômes, nous

arriverons à localiser exactement ces lésions. ,

Tout d'abord, et en ceci nous suivons la chronologie des

280 CLINIQUE NERVEUSE.

faits, c'est l'impotence douloureuse du membre antérieur

gauche qui domine le tableau morbide.

Vous voyez qu'il s'agit ici d'une paralysie de plexus, para-

lysie totale, mais incomplète, comme c'est de règle en pareil

cas ; vous le verrez tout à l'heure lorsque nous aborderons

l'étude de ces envahissements des plexus.

Contrairement à ce que nous observons dans les cas de

paralysies radiculaires classiques, par arrachement, vous

voyez que les différents groupes musculaires placés sous la

dépendance des nerfs du bras sont irrégulièrement frappés.

Ainsi pour deux branches nerveuses émanées d'un même

tronc, le tronc postérieur, vous trouvez des altérations d'un

degré très différent. Le territoire du nerf circonflexe est rela-

tivement peu touché, alors que dans le domaine du radial,

l'examen électrique nous a montré une forte réaction de

dégénérescence. De même pour le tronc antéro-externe, vous

ne trouvez pas de réaction de dégénérescence et une parésie

très peu prononcée dans les régions innervées par le mus-

culo-cutané alors que le médian montre de la réaction de

dégénérescence et de la parésie. Enfin pour le tronc antéro-

interne formé par les racines inférieures du plexus, vous

voyez le domaine du cubital ainsi que celui du brachial

cutané interne également lésés. Ce sont donc, retenez bien

ceci, les branches les plus étroitement en rapport avec les

vaisseaux axillaires qni ont été le plus atteint par le néo-

plasme. Vous vous souvenez, d'ailleurs, que par la palpation

nous avions rencontré des masses ganglionnaires hypertro-

phiées et difficilement mobilisables, dans le creux de l'ais-

selle ; vous pouvez, par là même, juger du degré de compres-

sion et de gêne dans lequel se trouvent les troncs nerveux à

ce niveau.

Ce que nous venons de dire pour le membre supérieur

gauche, nous le retrouvons, mais à un degré moindre, à

droite; c'est encore à des phénomènes de compression du

même genre que nous avons affaire.

Les membres supérieurs ont été atteints eux aussi, plus

tardivement il est vrai, avec prédominance à droite. Ici la

pathogénie n'est peut-être pas en tous points identique. Le

grand trochanter droit est hypertrophié, l'os coxal est envahi

et point n'est besoin de chercher ailleurs que dans cette

infiltration osseuse avec augmentation de volume, la cause

localisations du cancer sur LE système nerveux. 281

de la compression du sciatique dans sa gouttière. Les nerfs

de la queue de cheval comprimés dans le sac durai ou à leur

sortie des trous de conjugaison pourraient, il est vrai,

donner une symptômatologie analogue; il est possible, à

tout prendre qu'ils entrent pour une part quelconque dans

le processus morbide, à gauche surtout, où l'atteinte de l'os

coxal n'est pas évidente.

En tous les cas, cette lésion est peu accusée et ne va pas

jusqu'à la compression médullaire, car le syndrome classique

de la queue de cheval, pas plus que celui du cône terminal,

ni de l'épicône dont Minor nous a si justement fait connaître

la valeur séméiologique, ne se rencontrent ici à aucun titre.

C'est bien encore là à une névrite par compression que nous

avons affaire, et, dans le cas particulier, elle est localisée au

domaine du sciatique. D'ailleurs, la colonne vertébrale n'est

nullement déformée et si elle commence à être atteinte en

quelques points, ce sont des faits relativement récents, en

tous cas bien postérieurs en date à la compression du plexus.

Il y a tout lieu d'admettre maintenant que d'autres organes

internes sont acuellement atteints par la généralisation du

néoplasme. Je ne doute pas que les lésions pulmonaires ne

soient de cet ordre et que ce que nous constatons pour les

ganglions accessibles à nos moyens d'investigation, soit éga-

lement vrai pour les ganglions profonds du thorax et de

l'abdomen. Ainsi expliquerons-nous les vives douleurs inter-

costales ; et, peut-être, l'asthénie si prononcée, la méladoner-

mie toute spéciale de notre malade ne reconnaissent d'autre

cause que la compression ou l'envahissement des capsules

surrénales et du sympathique abdominal par le processus

cancéreux.

Quoi qu'il en soit le pronostic d'un tel état ne saurait être

que fort sombre et c'est la mort au milieu de souffrances

intolérables qui viendra fatalement délivrer la malheureuse

que vous aviez à l'instant sous les yeux/etcecià brève échéance.

Nous sommes ici, comme je vous le disais en commen-

çant, absolument désarmés, 'et c'est un des rares cas où le mé-

decin consciencieux est véritablement autorisé à faire usage

des injections de morphine à dose croissante, sans se préoc-

cuper de l'accoutumance et des inconvénients de ce palliatif.

Son seul but doit être d'atténuer les souffrances et, pour ce

faire, il n'a pas le choix des moyens.

282 CLINIQUE NERVEUSE.

.

Messieurs, vous avez vu que, dans le cas qui vient de pas-

ser devant vos yeux, j'ai conclu à des lésions siégeant sur le

système nerveux périphérique, principalement dans les points

où les gros troncs nerveux sont réunis pour former les

plexus. Est-ce bien là le cas le plus commun ? Assurément

non, et les cas de compression médullaire, de paraplégie

douloureuse dus à l'écrasement des vertèbres envahies par

le carcinome sont ceux qui vous sont le plus familiers et

dont vous entretiennent tous les traités classiques ; pour

celte raison, je ne vous en parlerai pas aujourd'hui et je

vous renverrai, si vous désirez approfondir cette question,

aux travaux de Charcot sur la paraplégie douloureuse, à la

thèse fondamentale de Tripier, aux observations de Lépine...

J'ai moi-même consacré à ce sujet plusieurs observations

que vous trouverez dans mes cliniques.

Je vous demanderai donc la permission de passer en

revue avec vous les principales formes cliniques de l'atteinte

du système nerveux périphérique par le cancer ; ces divers

points ont été l'objet de recherches intéressantes de la part

de deux de mes élèves, Oberthur et Monsseaux. C'est en par-

tie des résultats de leurs travaux dont j'ai à vous entretenir

maintenant.

Les complications que provoquent,sur le système nerveux

périphérique, les affections cancéreuses, sont de deux

ordres.

Comme l'a fait très judicieusement remarquer mon col-

lègue Klippel : « Le cancer est à la fois une tumeur et une

ce cachexie ; il peut léser les organes nerveux comme

« tumeur, c'est-à-dire directement ; il peut, d'autre part,

« agir sur eux indirectement, comme entraînant un état de

« dyscrasie et d'intoxication complète. »

Ces deux modes d'action se combinent le plus souvent

chez le même sujet, mais pas au point qu'on en puisse faire

la part dans tous les cas et nous devons distinguer nette-

ment les accidents dus à la compression et à 1' 'envahissement

des troncs nerveux, véritables accidents mécaniques, des

processus d'ordre toxique relevant de l'auto-intoxication

cancéreuse.

Ces névrites toxiques mises en lumirèe par Francotte, par

Oppenheim et Siemerling, étudiées plus complètement par

Klippel, par Auché, par Miura, superposables par leur

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 283

pathogénie aux lésions médullaires signalées dans la même

dyscrasie par Lubarsch, ont une origine complexe que tous

les auteurs qui se sont occupés de la question leur accordent.

A côté des toxines produites'par la désagrégation du néo-

plasme, il faut incriminer d'une part, l'auto-intoxication

résultant du trouble dans les échanges nutritifs, dans la

fonction glycogénique ; d'autre part, les troubles circula-

toires, les oedèmes cachectiques.

Ces lésions ne semblent d'ailleurs nullement pathogno-

moniques du cancer, l'expérimentation entre les mains de

Dopter a montré qu'elles sont variables dans leur expression

anatomique, suivant les sujets, et qu'elles ne diffèrent en

rien de celles que l'on peut produire par la même technique

en expérimentant avec d'autres sérums toxiques (toxines

bactériennes, sérums ou exsudats d'urémique, de diabétique,

d'Addisonnien, etc.) ,

Je reviens, Messieurs, aux accidents mécaniques, les seuls

dont j'aie à m'occuper aujourd'hui avec vous.

1%i. 7. - Lésions d'ordre toxique des cylindraxes.

\, coupe Vc¡'l1cale du médian. Vacuolisalioll et ltiniétactioii du c;tmdmxe; B, munies

tcaïons 6nr utic coupe longi6uuale (ii-,uve due j, l'obligeance de la llevue ncurolo-

gique).

284 CLINIQUE NERVEUSE.

L'envahissement des nerfs est un phénomène beaucoup

plus rare que la compression, cet envahissement peut se

faire soit par la tumeur primitive, soit par ses metastases,

mais comme l'a justement fait remarquer Mousseaux, il y a

-toujours un rapport de contiguité immédiate avec une

tumeur quelconque : « Nous ne connaissons aucun cas où

« une métastase se soit faite directement ou à l'état isolé

« dans un nerf sans localisation préalable dans un organe

« de voisinage immédiat. » '

Quant au cancer primitif des nerfs, je n'ai pas besoin d'in-

sister pour vous dire qu'il n'existe pas. Toutes les données de

l'histologie et de l'embryologie s'opposent à telles concep-

tions. Les descriptions déjà anciennes de Fôrster et de Wir

chow se rapportent indubitablement à des lésions d'un

tout autre genre, à la sarcomatose ou à la neuro-fibro-sarco-

matose des nerfs.

L'envahissement ou l'intégrité des nerfs dans la carcinose,

n'est pas un fait de pur hasard ; c'est une question réglée

avant tout d'une part par la variété histologique du cancer,

d'autre part, par sa localisation primitive. Sans nul doute,

les cancers dont la tendance généralisatrice est faible,

comme le cancroïde de la peau, comme les tumeurs squir-

reuses (à condition toutefois que ces dernières ne soient pas

opérées), n'atteignent que les extrémités nerveuses en con-

tact immédiat avec eux. Par contre, les cancers végétants du

sein, à cause de leurs rapports intimes avec les ganglions de

l'aisselle, les cancers de l'utérus, ceux de l'estomac, du rein,

par la richesse de ces organes en vaisseaux lymphatiques

prédisposent entre tous aux métastases nerveuses.

Enfin il est un organe dont l'atteinte primitive ou secon-

daire favorise au plus haut point l'infection générale de tout

l'organisme et par suite du système nerveux, comme l'a fait

remarquer Marfan. Le cancer du poumon permet, en effet,

aux embolies cancéreuses d'arriver dans le système artériel

dès son origine, et d'être ensuite disséminées dans toute l'éco-

nomie. ' .

Les localisations cancéreuses, affectant le système ner-

veux périphérique, pourront à priori s'effectuer sur un nerf

isolé, surfin groupe limité de nerfs ou sur une infinité de

divisions nerveuses, réalisant ainsi les syndromes les plus

variés. C'est aussi de cette façon que les choses se passent

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NKRVEUX. 285

dans la pratique, et je vais vous décrire les divers syndromes

nerveux ainsi constitués et dont la plupart sont encore peu

connus. -

Un premier type que je désire individualiser devant vous

est un syndrome de polynévrite généralisée au cours de la

carcinosemiliaire aiguë; l'expression anatomique de cette

forme assurément peu commune dans toute sa pureté, con-

siste dans des lésions multiples des terminaisons nerveuses

les plus fines.

L'observation anatomique et clinique, la première en date

et la seule jusqu'à ce jour, aété publiée par mon élève Ober-

thûr, aussi vous proposerais-je de désigner ce syndrome par

le nom de l'auteur que l'a le premier décrit : Polynévrite

cancéreuse généralisée, type Obertbür. Voici d'ailleurs les faits

cliniques et les constatations histologiques qui en résultent.

Dans le courant de l'année 1900, au mois de mai, entrait

à la clinique Charcot, une malheureuse femme dans un état

des plus précaires.

Rien d'intéressant dans ses antécédents héréditaires ou

collatéraux au point de vue nerveux ou néoplasique. La

malade avait eu des maladies bénignes habituelles de l'en-

fance ; sa menstruation avait été normale et régulière ;

somme toute la santé ne laissait rien à désirer jusqu'à l'âge

de vingt-cinq ans. A cette époque, la malade ressentit des

douleurs dans l'abdomen; un chirurgien consulté conseilla

l'ablation des deux ovaires, l'opération fut pratiquée avec

succès et l'on trouva avoir affaire simplement à une dégé-

nérescence scléro-kystique. Les suites opératoires furent

excellentes et la malade reprend ses occupations antérieures.

Peut-être y avait-il une certaine faiblesse générale, assez

compréhensible d'ailleurs, mais somme toute la santé se

maintenait satisfaisante.

Vers le milieu de l'année 1899, la malade avait alors

trente et un ans, elle se plaint d'une sensation de fatigue au

moindre effort, de douleurs vagues le long de la colonne

vertébrale, dans les épaules et dans la poitrine, l'appétit se

perd et la malade maigrit ; en même temps elle a de l'anhé-

lation presque continuelle, sans effort ; la toux s'installe vers

le 15 décembre; les quintes sont fréquentes, pénibles ; à

plusieurs reprises, suivies de crachements de sang; malheu-

reusement les renseignements sur l'aspect de l'expectoration

286 " CLINIQUE NERVEUSE. 1

sont vagues. Le soir on constate presque chaque jour de

l'oedème malléolaire.

Les médecins consultés, diagnostiquent une tuberculose

^ pulmonaire au début et conseillent l'huile de foie de morue,

la créosote, etc. La malade ne s'en tient pas à ce traitement

et, en outre « pour se remonter » elle ingère chaque jour

une certaine quantité de préparations alcooliques de kola

et de quinquina.

Malgré cette thérapeutique, l'état ne s'améliore pas ; les

crachements de sang sont plus fréquents, sans être abon-

dants, l'oppression augmente et l'oedème s'installe ; de plus

à ce moment un cortège de symptômes nouveaux entre en

scène : ce sont d'abord des crampes douloureuses aux mem-

bres supérieurs et inférieurs, le long de la colonne verté-

brale, qui, d'abord nocturnes, finissent par ne plus laisser

aucun repos la malade.

Les muscles commençent à s'atrophier. Non seulement la

marche, mais encore presque tous les mouvements sont

impossibles. C'est dans ces conditions qu'elle se fait trans-

porter à l'hôpital.

A son entrée dans le service, nous constatons l'amaigris-

sement et la faiblesse extrême, les jambes et les pieds sont

le siège d'un oedème blanc ; les muscles des membres supé-

rieurs et inférieurs sont atrophiés dans leur totalité ; les

pieds et les mains sont tombants, les extenseurs ont perdu

toute action. Les mouvements volontaires sont d'ailleurs à

peu près supprimés. Toute la surface du corps est doulou-

. reuse, et, le moindre attouchement, le moindre contact

arrachent des plaintes à cette pauvre femme. La pression des

masses musculaires et des points d'émergence des nerfs

provoque d'atroces douleurs. '

Le signe de Lasègue est des plus nets. Les réflexes rotu-

liens sont faiblement conservés lors du premier examen;

on ne les retrouva plus aux examens ultérieurs.

Dans de telles conditions de faiblesse et de souffrance

l'examen électrique ne put être fait;, l'examen de la sensi-

bilité objective pour les mêmes raisons fut très incomplet;

il ne permit d'affirmer qu'une hyperesthésie généralisée des

- téguments, avec erreurs de localisation, et aussi confusion

entre les diverses sensibilités, tactiles, thermiques et dou-

loureuses.

LOCALISATIONS. DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 287 I

Les sensations subjectives sont variées autant que péni-

bles, ce sont des crampes, des douleurs à caractères fulgu-

rant ou térébrant, des fourmillements, des paresthésies...

Le coeur est devié en bas et à droite, la tachycardie est

nette, 120 à 140 pulsations par minute.

La toux est fréquente, parfois coqueluchoïde avec rejet

de crachats blanchâtres, muqueux parfois striés de sang.

La dyspnée est continue. Par la percussion on perçoit à

gauche une matité complète, à droite la matité est surtout

évidente au tiers inférieur du poumon. ,

L'auscultation révèle à gauche une absence de murmure

respiratoire, on entend seulement à la région du hile un

souffle profond à timbre amphorique. A droite, frottement,

à la base, souffle étendu assez rude, quelques râles fins

disséminés. Le tube digestif n'attire l'attention que par une

diarrhée assez intense. L'inappétence est complète, lalangue

est sèche.

Très peu de temps après le premier examen, les symp-

tômes s'accentuent. Il survient de l'incontinence de l'urine

et des matières, l'état mental, déjà très précaire, caractérisé

par de la torpeur intellectuelle, des troubles de la mémoire,

s'affaiblit de jour en jour. Surviennent des hallucinations,

du subdélire ; d'ailleurs notre malade ne tarde pas à entrer

dans un état comateux, la température s'élève, et, le décès

survient peu de jours après son entrée.

Nul ne songea, il faut l'avouer, à la possibilité d'un can-

cer latent. Guidés d'un côté par les commémoratifs : l'affai-

blissement, l'amaigrissement, la toux, les quelques abus

d'alcool; d'un autre côté, nous basant sur les constatations

objectives, l'impotence fonctionnelle des membres, l'atrophie

musculaire, les vives douleurs à la pression des nerfs et des

muscles, les signes stéthoscopiques, nous avions porté le

diagnostic de polynévrite éthylique chez une tuberculeuse ;

et, ceci sans aucune arrière-pensée. '

Une surprise nous était réservée à l'autopsie. Dès la pre-

mière incision, qui avait pour but de détacher les masses

sacro lombaires pour arriver sur les lames vertébrales, des

productions bizarres attiraient l'attention. En pleine masse

musculaire, de tous côtés, l'oeil découvrait une quantité de

petites granulations fusiformes, de coloration grisâtre ou

rosée ; la surface de section des muscles en était littérale-

288 CLINIQUE NERVEUSE.

ment criblée. La plupart de ces granulations étaient de la

dimension d'un grain de blé, quelques-unes atteignaient le

volume d'un pois ou même d'une petite amande, d'autres

étaient à peine visibles, à peine des têtes d'épingles. Il

1 s'agissait donc d'une production néoplasique. Une dissection

attentive de tous les muscles du tronc, du thorax, des mem-

bres découvre des quantités de ces granulations. Les mus-

cles d'ailleurs, surtout aux membres inférieurs, sont atro-

phiés en masse, décolorés, infiltrés de sérosité. Les troncs

nerveux, les plexus examinés soigneusement ne montrent

en aucun point d'invasion de la sorte, au moins macroscopi-

quement, et pourtant en bien des points ils sont accolés aux

nodules néoplasiques.

Rien de visible à l'oeil nu, dans le squelette, le cerveau

et la moelle. Tous les organes abdominaux sont farcis de

ces nodules ; certains ganglions sont hypertrophiés et

dans quelques points se dessinent des réseaux de lym-

phangite cancéreuse. Mais nulle part il n'y a confluence des

lésions. -

Par contre les poumons sont envahis en masse. Un épan-

chement de 3 litres d'un liquide citrin séro-fibrineux occupe

la cavité pleurale gauche; à droite il y avait à peine un

demi-litre.

Pleurésie cancéreuse classique avec ses élégants réseaux

de lymphangite. Le poumon gauche est rétracté au maxi-

mum, atelectasique et fibreux à son sommet. Toute la base

et la région du hile sont envahis par un cancer massif,

ramolli au centre, dur à la périphérie.

A droite les lésions sont moindres, plusieurs gros noyaux

enserrent les grosses bronches, et, la base de la trachée est

engainée par les ganglions du médiastin hypertrophiés.

Nous avions donc l'explication de tous les phénomènes.

Je ne veux pas m'étendre ici sur tous les résultats de

l'examen histologique qui porta sur tous les organes. Il

s'agissait d'un cancer bronchique primitif avec métastases

innombrables constituant le type le plus parfait de la car-

cinose miliaire aiguë. Mais ici les métastases intra-muscu-

laires dominaient entre toutes.

Les seules lésions que je vous prie de retenir pour l'ins-

tant sont celles du système nerveux. Ni macroscopiquement,

ni microscopiquement on ne put constater aucune trace

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 289

d'invasion cancéreuse dans les troncs nerveux accessibles à

la dissection, ni au sein des plexus.

Dans les nerfs, au voisinage des tumeurs, il y a une proli-

fération de la gaine lamelleuse et du perinèvre, partout une

multiplication des noyaux interstitiels. A peine trouve-l-on

de-ci, de-là, dans la lumière des vasa 2e·uo·ua quelques

cellules rpillléliaies isolées. Les altérations du parenchyme

nerveux se rapprochent beaucoup de celles décrites par

Klippel, et sont avant tout constituées par un élut l'ranen-

taire de la myéline, un état poussiéreux de celle-ci mi, sur-

tout eu évidence par la méthode à l'acide osniique sur les

nerfs traités par la dissociation. Les cylimlruxes sont gra-

nuleux, oedémateux ou vacuolaires, et présentent vis-à-vis

des colorants ordinaires des réactions variées.

Archive», 2- série, t. XVII. 19

4 1 Fig. 8. Fascicule nerveux au voisinage d'un nodule cancéreux intra-

musculaire, dénudation des cylinll¡'axps, fragmentation de la mvéline,

1 tl'au.tol'1l1dtion des gaines sarculemuaauques en acini glandulaires.

290 ' CLINIQUE NERVEUSE.

Tout autre est la condition des terminaisons nerveuses

plus fines, des ramifications intramusculaires au voisinage

des mélastases cancéreuses; c'est là que les lésions nerveuses

- sont profondes, graves; et le très grand nombre de ces alté-

rations donne aisément l'explication de la symptomatologie

observée. Les fibres sont sectionnées nettement au niveau des

masses épithéliales, au sein desquelles, aucun réactif n'a pu

montrer trace de fibres nerveuses.

A quelque distance de la section, quand on peut suivre le

fascicule nerveux, on le voit enserré le plus souvent dans un

tissu scléreux, entouré de noyaux conjonctifs, les cylindraxes

sont tuméfiés et vacuolaires, ils se dépouillent de leur myé-

line sur une certaine étendue ou par places, celle- ci se résout

en granulations ou de vacuolise. Il est parfois possible d'ob-

server sur une certaine longueur la dégénérescence rétro-

grade souvent à type périaxile.

Concurremment avec ces lésions névritiques, les lésions

musculaires les plus variées et les plus intéressantes se pré-

sentent à l'observation.

Le système nerveux central et ses enveloppes sont indem-

nes de toute métastase, sauf au niveau de la moelle lom-

baire où l'on trouve sur un certain nombre de coupes une

artériole dont la lumière est remplie par une collerette de

cellules épithéliales. Je ne vous étonnerai pas non plus en

vous disant que les phénomènes de réaction à distance dues

à des lésions périphériques sont évidents dans un certain

nombre de noyaux cellulaires des cornes antérieures de la

moelle, en rapport avec les régions plus particulièrement

éprouvées par la carcinose.

Ces phénomènes consistent comme vous le savez en une z

chromatolyse centrale avec état vésiculeux du protoplasma

cellulaire et excentricité du noyau, que la méthode de colo-

ration de Nissl met particulièrement en évidence.

Ainsi donc, Messieurs, un cancer bronchique primitif a,

au cours de son évolution, distribué dans tout l'organisme

et notamment au sein de tout les muscles de l'économie, des

embolies cancéreuses, qui, en végétant, ont atteint mécani-

quement, en les comprimant, en les sectionnant, une infi-

nité de terminaisons nerveuses et de la sorte a été créé un

syndrome polynévritique absolument complet qu'il y aura

lieu de rechercher à l'avenir.

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 29U i.

Anatomiquement il s'agissait d'une véritable neul'o-myo-

site cancéreuse multiple, et l'erreur de diagnostic était dans

l'espèce presque fatale.

Parmi les types cliniques des localisations du cancer sur

le système nerveux périphérique, il en est de plus habi-

tuelles que celle que je vous ai exposé dans ma dernière

leçon, et l'envahissement ou la compression de troncs ner-

veux isolés, ou réunis en plexus, par une tumeur volumi-

neuse est un phénomène bien plus fréquent.

Le premier cas dont je vous ai entretenu, rentrait dans

cette dernière catégorie.

A vrai dire,' les névrites isolées sont rares. La compression

du phrénique par des masses cancéreuses inlramédiastinales

est la plus habituelle. Tels sont : le cas de Lancereaux où

cette lésion avait été réalisée par un cancer du poumon, le

cas de Lenoble où le nerf phrénique était engainé dans des

adénopathies trachéobronchiques consécutives à un cancer

du sein. Parmi les autres nerfs de l'économie, Monsseaux a

relevé dans sa thèse, un petit nombre de cas, ceux de Doyen,

de Reboul, d'Oiryoùles nerfs médian, radial et cubital étaient

atteints isolément, et ce, par envahissement à distance, au

cours d'épithéliomas cutanés.

Pareille constatation pour les nerfs intercostaux, qui sont

souvent atteints dans les cancers de la plèvre, dans les métas-

tases aux côtes. Les douleurs intenses en ceinture de la

nature de celles que présentait la malade que vous avez vue

au début de la leçon, relèvent sans doute de cette patho-

génie. Des éruptions zostériformes ont été signalées dans

de semblables circonstances par Ollivier.

Pourquoi donc les points où les nerfs sont réunis en groupe

au niveau des plexus sont-ils plus souvent atteints ? Assuré-

ment ce n'est pas à cause du groupement lui-même, mais

bien plutôt parce que ce groupement en plexus se fait dans

des régions particulièrement exposées aux localisations can

céreuses. Et parmi ces plexus il en est un qui est bien plus

fréquemment atteint. Le plexus brachial, en effet, que ce

soit dans l'aisselle ou dans le creux sus-claviculaire, est en

rapport avec de nombreuses masses ganglionnaires.

292 - : - CLINIQUE NERVEUSE.

- Une grande partie de celles-ci reçoivent les lymphatiques

de la mamelle, et, comme vous venez de le voir, souvent dès

le début d'un cancer du sein la lésion néoplasique retentitsur

rie domaine du plexus voisin. Les cancers du poumon, comme

dans un cas de Béhier, pourront également dès le début

de leur évolution, envahir les ganglions de cette région.

La veine axillaire est presque toujours prise en même

temps que le plexus, et cette altération vasculo-nerveuse

imprime un cachet tout spécial à cette sorte de paralysies

radiculaires. Aux douleurs vives, lancinantes; à l'impotence

fonctionnelle, s'ajoutent des oedèmes d'origine va ? ulaiie,

qui peuvent arriver à un véritable pseudo-éléphanliasis du

bras. Comme vous vous en êtes d'ailleurs rendu compte de

visu, ces phénomènes vasculaires dans lesquelles il est dif-

facile de faire la part de la compression vasculaire et des

tioubles vaso-muleurs, manquent bien rarement.

Rarement, avons-nous dit, ces paralysies sont complètes.

La paralysie est plus sensitive que motrice et les types clas-

siques sont l'exception. Les lésions sont incomplètes, difTu- ,

ses, ce qui s'explique facilement par la résistance des gros

troncs nerveux à l'envahissement cancéreux, par la persis-

tance d'un grand nombre de tubes nerveux sains au milieu

même de la masse néoplasique, par l'absence presque totale

de lésions dégénéralives des nerfs au-dessous du point de

compression. A cet égard je peux pour vous édifier vous

présenter les figures suivantes se rapportant à un cas du

service, présenté par Oberthûr à la Société de Neurologie de

Paris, en 1901. Il s'agissait dans l'espèce d'une paralysie

radiculaire surtout inférieure avec syndrome de Klulllpke.

Ce dernier syndrôme, consiste, vous ne l'ignorez pas, dans la

coexistence avec une paralysie radiculaire inférieure, d'un

myosis du côlé de la lésion avec rétraction du globe oculaire

et diminution de l'ouvertme de la fente palpébrale. On attri-

bue cette symptomatologie à la lésion, section ou compres-

sion des l'ami communicantes du sympathique avec le pre-

mier ganglion dorsal.

Ce signe ne saurait donc exister que lorsque la lésion

atteint la portion du plexus la plus rapprochée de la moelle;

il se rencontre aussi lorsqu'il existe des lésions radiculaires

intrarachidienues.

Une partie du plexus cervical et tout le plexus brachial,

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 293

depuis la sortie des nerfs mixtes hors des ganglions rachi-

diens, étaient englobés dans une masse carcinomateuse dure,

fibreuse, comme vous pouvez vous en rendre compte sur les

planches ci-joinles. Sur les coupes transversales, vous pou-

vez encore très facilement reconnaître et suivre tous les gros

troncs nerveux. Examinés à un grossissement plus fort,

ceux-ci pour la plupart ont gardé une constitution quasi

normale; le tissu interstitiel à vrai dire est proliféré, le

périnèvre est épaissi, quelques hémorrhagies se sont pro-

duites de-ci de-là. Les tubes nerveux ont subi quelques alté-

rations tant du côté de leur gaine de myéline que de 1 leurs

cylindraxes. (Fig. 9 et 10.) . . `, . -.

Fig. 9. Aspect du plexus brachial engainé par la tumeur.

294 " - CLINIQUE NERVEUSE.' - " -

Dans certains points, les lésions vont plus loin, et l'on

peut constater la sclérose totale de quelques faisceaux ner-

veux. Mais, eu égard à la compression intense, les lésions

ne sont pas telles qu'on-aurait pu le supposer d'après les

symptômes présentés.

Au-dessous de la compression la dégénérescence des nerfs

est loin d'être totale.

Vous voyez donc, Messieurs, que ces gros troncs nerveux

offrent'une résistance assez longue à l'envahissement et

malgré la compression dont ils souffrent, ils conservent

encore longtemps leur structure anatomique, alors même

qu'ils semblent avoir perdu leur puissance fonctionnelle.

A la longue, cependant, la sclérose des nerfs ainsi enserrés

peut devenir complète. Un cas de Jacobsohn où presque

'tous les nerfs du plexus étaient réduits à des tronçons fibreux

nous montre une semblable évolution ; nous devons toute-

fois considérer celle-ci comme exceptionnelle.

Ces paralysies radiculaires de plexus, vous les distinguerez

facilement des paralysies radiculaires de siège intrarachi-

dien. Vous aurez ici pour vous guider l'unilatéralité ou au

moins la prédominance unilatérale, l'absence de symptômes

Fi ! ]. 10. Coupe verticale de la figure précédente.

A, 5calèue anlé1Ïc.ul' : B, tronc 1'cH.liocil'conflc\c : r.. médian eL 111lIsculo-culané'

E. l1l'clHièrc )'acinc uOl'bc.de j F. plè\ l'C j G, poumon; 11, arléreavillaire.

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 295

médullaires, mais surtout votre diagnostic sera conduit par

la présence d'une tumeur axillaire ou sus-claviculaire, l'oe-

dème et les troubles vaso-moteurs.

Toutefois les deux ordres de lésions, intrarachidiennes et

autour du plexus peuvent coexister et compliquer le tableau

morbide; seule une analyse attentive vous permettra de ne

pas vous laisser induire en erreur. (Fig. 11).

Que vous dire maintenant de l'atteinte des autres plexus ?

hile est bien moins fréquente. Quelques branches du plexus

cervical peuvent être prises en même temps que le plexus

brachial. Nous ne voyons qu'exceptionnellement le plexus

cervical pris à l'état isolé.

Les plexus lombaire et sacré sont surtout atteints par les

tumeurs primitives du bassin et de l'abdomen, bien plus

que par des métastases ganglionnaires.

Et ici ce sont les périnéphrites cancéreuses, les cancers

Fig. Il . - Portion de la figure 10 à un fort grossissement.

A, fascicule nencu\ isolé au sein d'une masse épilhéliale. Sclérose légère et hémor-

rhagie interstitielle; 13c, conservation des tubes neveux au sein des travées carcinoma-

lenses, coloration Pal-carmin.

296 . - CLINIQUE NERVEUSE.

de l'utérus, les mélastases du côté du sacrum, de l'os iliaque,

que l'on rencontre le plus souvent comme facteur pathogé-

nique.

.. Ici le diagnostic avec les lésions intrarachidiennes est

difficile dans bien des cas, d'autant mieux que la prise du

squelette vertébral est presque constante dans les cas jus-

qu'ici publiés.

Les irradiations douloureuses qui accompagnent ces der-

nières métastases. sont aussi fonction, il faut bien le dire,

de 1 atteinte d'un autre ordre de branches nerveuses.

Je veux parler du sympathique abdominal dont les termi-

naisons sont toujours lésées au cours de l'évolution des

néoplasmes pelviens et abdominaux. Head a même voulu

faire des douleurs eu ceinture et de l'hyperesthésie cutanée

si fréquentes dans les cancers viscéraux, l'expression de la

souffrance du sympathique dont la moelle extérioriserait

ainsi les sensations. C'est une hypothèse que je livre à votre

critique. -

Quoi qu'il en soit, ces lésions du sympathique sont peu

connues. Je crois volontiers qu'elles sont fréquentes et

importantes. Le seul auteur, Cotomiatti, qui les ait étudiées

avec soin, les trouve presque constamment dans les cancers

de l'utérus et a décrit un processus très intéressant de l'en-

vahissement des cellules épithéliales à l'intérieur même du

périnèvre.

C'est à dessein, Messieurs, que vous parlant des névrites

cancéreuses isolées et de leur peu de fréquence, je n'ai pas

fait allusion aux nerfs craniens. Leur histoire vis à vis du

cancer comporte cet taines pai ticularités étrangères aux nerfs

rachidiens.

En effet, comme le faitremarquer Mousseaux : « L'atteinte

« intra-vertébrate des nerfs rachidiens ne donne pas des

« tableaux cliniques identiques à celle des nerfs définitive-

« ment constitués la séméiologie radiculaire n'est

pas la même que la séméiologie périphérique. » Pour

les nerfs crâniens il n'en est pas ainsi et le tronc nerveux

individualisé, à part quelques branches anaslolnotiqlles-

dès son origine, confond en clinique ses symptomalogiesra-

diculaire et périphérique.

Vis-à-vis du cancer, toutefois, c'est-à-dire à un point de

vue d'anatomie pathologique spécial, il faut nettement sépa-

LOCALISATIONS DU CANCER, SUR, LE SYSTÉMR NERVEUX. 297

rer l'alteinle des nerfs crâniens dans la hnite crânienne ou

datio, sps parois, de Crlle qui e fait en dehors du crâne.

11(iul-t'elle-ci comme pour les ti-oli.-S 111'('\'pux r,"ri/,hériqurs

elle est rare et 1'.lIère surttlut de la COll1p"e"sitln, ahoulis-

salll h la dégénérescence et à la sclérose du nerf ainsi englobé.

C'est ainsi que l'on a rapporté des cas d'atteintes de la bran-

che sous-orllitaire du trijumeau, dans des epithétiomas de la

face et de l'orbite, du lingual, de l'hypoglosse dans le cancer

de la langue, etc., etc.

Un seul nerf émané du crâne est fréquemment al teint dans

son trajet extérieur. Vous comprendrez aisément()lI'en raison

deson long trajet dans la région du cou et dans le médiastin,

c'est du pneumogastrique qu'il 1 s'agi 1. Les cancers secondaires

du médiastin, ceux du poumon, de l'oesophage, du corps

"'y ! 'oï ! e, du thymus atteignent fatalement ce nerf ou ses

branches, et vous pressentez la gravité exceptionnelle de

celle complication enlraînantla tachycardie, la louxquiuteuse

les troubles laryngés. -

La lésion des nerfs crâniens est infiniment plus fréquente

au cours de leur trajet intra-cranien. Il semble y avoir une

Fig. 12. Coupe du racial au niveau du ganglion génicnlé.

1, B, envahissement de la gaine de Heule et du contre du faisceau nerveux ; c, cel-

lules ganglionnaires entourées d'éléments épithéhaux.

\ ,

298 CLINIQUE NERVEUSE. z

étroite analogie entre la pathogénie de ces accidents et la

lésion de même nature des racines rachidiennes. Rien d'éton-

nant à cela, car au point de vue de leur signification fonc-

tonnelle comme de leur constitution histologique il existe

une parenté des plus étroites.

Comme nous le verrons tout à l'heure en étudiant les for-

mules lésionnelles des racines rachidennes, nous pouvons de

même constater qu'il peut y avoir sur les nerfs crâniens des

lésions nerveuses consécutives à l'envahissement osseux, phé-

nomènes de compression, des lésions succédant à l'envahis-

sement de la méninge, véritable pachyméningite cancéreuse

interne dans lesquels le nerf peut être non seulement com-

pressé, mais encore envahi par les éléments épithéliaux dans

l'intérieur de sa gaine. (Fig. '1" ? ). -

Quoiqu'il en soit la lésion cancéreuse des nerfs crâniens

est le plus souvent le fait d'une métastase à distance, d'une

embolie par l'intermédiaire de la circulation artérielle ou

lymphatique. Cette métastase peut se faire un peu partout,

vers la fente sphénoïdale, dans la région de l'orbite, au

pourtour du trou occipital; mais il est pour les raisons

que nous venons d'énoncer, une localisation de choix.

C'est dans le voisinage du rocher. Les nerfs y sont;IlOnl-

breux et cheminent dans des trajets osseux étroits, circons-

tance qui facilite leur envahissement.

Le facial, l'auditif, le moteur oculaire externe, le pneumo-

gastrique, le spinal, le grand hypoglosse sont ainsi fréquem-

ment lésés.

Presque toujours l'atteinte de plusieurs de' ces nerfs sera

simultanée ou rapidement successive, le plus souvent unila-

tépale. Le début sera souvent apoplectiforme, ce qui n'aura

pas lieu de vous étonner ; étant donné l'étroitesse des canaux

osseux, une lésion minime pourra retentir sur les troncs ner-

veux d'une manière rapide et précoce.

C'est ainsi qu'un malade vint il y a quelques années se

présenter à notre examen à cette clinique pour une paralysie

faciale droite totale à type périphérique. Cette paralysie

était devenue brusquement dans la nuit.

Son teint était pâle, cachectique; il nous raconta souffrir

depuis longtemps de dyspepsie et nous affirma qu'il avait eu

des hématémèses et du méloena. La palpation révéla que

nous avions affaire à une tumeur gastrique. '

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 299

L'autopsie ne tarda pas d'ailleurs à nous donner raison.

Le malade mourut subitement. On trouva un cancer de l'es-

tomac avec des métastases ganglionnaires, hépatiques, pul-

monaires. Il existait en même temps une infiltration carcino-

mateuse du rocher avec compression du nerf facial dans

l'aqueduc de Fallope. -

Vous comprenez que dans des cas semblables, le diagnos-

tic peut devenir des plus embarrassants, surtout s'il s'agit

d'une métastase précoce d'un cancer jusque-là latent. La

symptomatologie peut faire penser à une sarcomatose des

nerfs de la base du crâne, à la tuberculose méningée ou à la

syphilis; semblables erreurs ont été maintes fois commises.

Il me reste, Messieurs, à vous entretenir d'une dernière

question : c'est l'atteinte par le cancer des racines rachidien-

nes. Vous connaissez tous les beaux travaux deCharcot sur la

paraplégie douloureuse des cancéreux, et la thèse fondamen-

tale de Tripier sur le cancer de la colonne vertébrale.

Une notion classique en découle : c'est que les troubles

nerveux divers qui caractérisent la paraplégie sont sous la

dépendance directe d'une métastase primitivement dévelop-

pée dans les corps vertébraux. Ceux-ci s'effondrent, ou bien

la propagation se fait vers les parties latérales et postérieures

des vertèbres qui se déforment et compriment les racines ra-

chidiennes dans les trous de conjugaison. L'affaissement

peut atteindre un grand nombre de vertèbres qui se tassent

et apportent des modifications dans les rapports des trous

de conjugaison et des racines qui les traversent ; celles-ci

peuvent être ainsi tiraillées, coudées sur le rebord osseux.

La propagation se fait aussi vers la face externe de la dure-

mère qui s'épaissit, et, par. ces divers facteurs, se trouvent

constitués les symplômes médullaires ou radiculaires que

nous connaissons. Telle est la doctrine classique, et, certes elle

répond à bon nombre de cas dans la pratique. Cependant le

corps vertébral, et même le tissu osseux du rachis, ne sont

pas toujours envahis aussi rapidement. Les phénomènes

myélitiques peuvent faire totalement défaut.

Il existe une autre voie d'invasion qui comporte une symp-

tomatologie et des lésions très différentes.

Que se passe-t-il donc dans bien des cas de carcinome et

.comment les phénomènes nerveux font-ils leur apparition ?

Au cours d'un cancer du sein, par exemple, souvent à la

300 CLINIQUE NERVEUSE.

suite d'une intervention chirurgicale, la malade éprouve

une gêne constri. tive à la base du thorax, des duulpl1rs

névralgiques intercostales quelquefois même du zona. Une

autre fois, c'est au cours d'un cancer abdominal ou pelvien,

une explosion de douleurs vives dans le domaine du plexus

lombaire et sacré avec douleurs également intenses à la

pression des troncs nerveux. C'est à ce moment une véri-

table névrite, sans signes médullaires...La symptoinalo-

logie de la moelle n'entre en scène que beaucoup plus tard.

Retenons donc celle apparition précoce des symptômes

douloureux radiculaires.

Par quelles raisons anatomiques les expliquerons-nous ?

Nous ne pouvons invoquer à ce moment l'affaissement des

corps vertébraux et la compression consécutive des

racines.

Nous savons que le tassement osseux se produit tardive-

ment, bien plus rarement que dans le mal de Pott tubercu-

leux, où cependant de telles douleurs sont exceptionnelles.

Pas plus nous ne pouvons penser à des masses émanées

du corps vertébral et venant faire saillie de l'intérieur vers

i'extérieuren passant par les trous de conjugaison. La pachy-

méningite externe et interne ne nous satisfait pas davan-

tnge, la moelle serait comprimée en même temps que les ra-

cines et il y aurait concomitance dans l'apparition des

phénomènes médullaires et radiculaires.

Rappelons-nous aussique ces symptômes douloureux sont

souvent prédominants d'un côté et étendus sur une grande

hauteur. Pourquoi donc alors ne pas penser à une pénétra-

tion de la tumeur cancéreuse simultanément ou du moins à

intervalles très rapprochés dans de nombreux trous de con-

iugaison, il,

Et pourquoi aussi ne pas penser à la dissémination en

hauteur dans la cavité des méninges à la faveur du liquide

céphalo-rachidien ? ° ?

Ainsi dune il se pourrait que dans bien des cas, l'invasion

méningée radiculaire précédât l'invasion osseuse, et plusieurs

faits récents semblent vouloir prêter leur appui à celle ma-

nière de voir; et, peut-être est-ce dans cette région latérale

du rachis, par un mécanisme toujours à peu près le même

que débutent les lésions ?

Toujours est-il que, presque constamment, nous voyons les

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 301

lésions qui nous occupent - à condition toutefois que le

décès soit survenu à une période de l'invasion rachidienne

pas assez avancée pour que l'on ne puisse encore saisir le

mode d'évolution du proce^-sus ces lésions, dis-je, semblent

être eu rapport étroit de voisinage, soit avec le cancer pri-

mitif qui leur a donné naissance, soit avec des vaisseaux ou

des ganglions lymphatiques nettement envahis.

Ce sont d'ailleurs souvent des cancers viscéraux, surtout

pelviens, quelquefois des cancers du sein avec généralisation

pleura-pulmonaire et médiastinale, et, dans tous les cas, la

chaîne ganglionnaire et lymphatique prévertébrale est forte-

ment atteinte.

Bien que les obscurités qui planent encore sur les origines

de la circulation lymphatique méningée et médullaire, soient

encore loin d'être dissipées, on est autorisé à se demander,

en se basant sur des travaux récents, si les lymphatiques ne

suivent pas le trajet des racines et si les espaces lymphati-

ques des méninges et des ganglions spinaux ne sont pas en

rapport de communication étroite avec les ganglions abdo-

minaux. -

D'ailleursla phlébite cancéreuse des veines méningées pas-

sant par les troncs de conjugaison, f.tit suite à la phlébite très

habituelle des plexus veineux préveltébraux.

L'invasion cancéreuse pourrait donc se faire primitivement

du côté des racines et îles méninges, par les ganglions et les

lymphatiques prévertébraux; l'atteinte du système osseux

d'abord au niveau des pédicules ne serait dans de tels cas

que secondaire et contingente. La généralisation à l'arc pos-

térieur ou aux corps vertébraux ue s'effectuant qu'à une

période plus lointaine de l'évolution.

Les racines seront ici comprimées, mais étant donné la

structure de la dure-mère àce niveau, le cancer peut facile-

ment pénétrer la gaine du ganglion spinal et les cellules

epilLéliales envahissent ainsi sou stroma en respectant plus

011 niuiiis les cellules ganglionnaires, et de là fuseut le long

des racines et même a l'intérieur de celles-ci.

Dans un cas du service, qui fut d'ailleurs le point de

départ de la théorie pathogénique que je vous expose,

Oberthûr a trouvé les produits épithéliaux pénétrant non

seulement à l'intérieur du tissu conjonctif intrafasciculaire,

mais encore au sein même de la gaine de Schwann par un

302 CLINIQUE NERVEUSE.

mécanisme analogue à celui des gaines sarcolemnatiques des

muscles. Vous pourrez d'ailleurs vous rendre compte de ces

lésions et de leur pathogénie dans les figures histologiques

et par le schéma que je. mets sous vos yeux. (Fig. 13).

. De même vous pouvez ainsi vous expliquer l'extension du

processus à la face interne de la dure-mère ou du moins à

l'intérieur de l'espace subdural et dans la cavité arachnoï-

dienne. La dissémination par le liquide céphalo-rachidien

permet seule d'expliquer la présence des nodules isolés sur

certaines racines en des points très éloignés les uns des

autres.

De semblables cas de pénétration du cancer par les trous

de conjugaison ont- été, il est vrai, signalés depuis long-

temps par Darolles, par Brault, par Sottas, par Labbé,

mais on n'avait pas cherché à trouver la loi pathogénique

de ces lésions.

Plus récemment, deux observations très curieuses ont pré-

cisé ce mode d'envahissement. L'une d'elles appartient à

Bruns, l'autre à Lilienfeld et Benda.

Il s'agissait dans ces deux cas d'une pachyméningite

Pli, 13. - Schéma montrant l'envahissement des racines et des méninges

au niveau des trous de conjugaison. Le tissu cancéreux est en noir

plein.

A, ganglion lympalhique; B. ganglion spinal; C, dure-mère : n. corps rrléLral;

E,apophyse épineuse.

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 303

interne cancéreuse intéressant les racines rachidiennes et

provoquant des symptômes douloureux et moteurs à origine

radiculaire. La pachyméningite externe n'existait pas, non

plus que les lésions osseuses.

La description exacte de ce processus et son mécanisme

pathogénique ont été pour la première fois exposés par Ober-

thûr à la Société de Neurologie en juillet 1902 et je vous

demande la permission de vous rappeler en quelques mots

son observation-type. A celle-ci, d'ailleurs, se rapportent les

figures que vous aviez tout à l'heure sous les yeux.

Il s'agissait d'une femme de quarante-neuf ans, atteinte

d'un squirrhe atrophique de la mamelle. Cette tumeur fut

opérée, ce qui n'empêcha pas la récidive. A son entrée à la

Salpêtrière, la malade présentait une induration au niveau

de la cicatrice opératoire, un état cachectique avancé, de

l'oedème des membres inférieurs et de la dyspnée.

Comme phénomènes nerveux^ on notait des fourmille-

ments douloureux dans les membres inférieurs, des douleurs

lancinantes en ceinture.

La station debout était presque impossible, les réflexes et

la sensibilité objectives ne présentaient pas de modifica-

tions importantes.

L'état ne tarda pas à s'aggraver par les progrès de la

cachexie et la mort survint rapidement. Pendant les derniers

jours, il y eut de l'incontinence des* urines et des matières.

Lors de l'autopsie, outre la récidive sur place, on rencon-

tra une généralisation à tous les viscères. Les ganglions

médiastinaux, mésentriques, prévertébraux, pelviens, étaient

également tuméfiés et envahis par le néoplasme; le canal

thoracique êtait dur et moniliforme; de nombreux lympha-

tiques dessinaient leurs réseaux, comme s'ils avaient été

artificiellement injectés.

Les muscles avaient une teinte jaunâtre, mais les troncs

nerveux avaient l'apparence saine.

A l'ouverture du rachis, on constatait un épaississement de

la dure-mère en certains points; néanmoins, elle n'était pas

adhérente au tissu osseux. Au niveau de quelques trous de

conjugaison, seulement il y a une légère adhérence fibreuse.

Les corps vertébraux, ainsi que les lames, sont sains sur

toute l'étendue du rachis. Le tissu osseux n'est ni friable, ni

spongieux.

304 CLINIQUE NERVEUSE.

La dure-mère est épaisse, surtout au niveau des racines

dorsales inférieures, les ganglions spinaux sont hypertro-

phiés. (Fig. 1').

A l'incision des méninges, on est frappé par la présence,

à la face interne de la dure-mère, de petits nodules saillants,

fusiformes, enserrant les racines dorsales inférieures.

Un autre nodule est accolé aux racines postérieures de

la queue de cheval, libre de toute adhérence avec la dure-

mère. - Mêmes lésions plus légères, à la région cervicale.

L'examen histologique montrait nettement l'origine du

processus.

Le tissu néoplasique, émané des vaisseaux lymphaliques

prévertébraux, rencontrait la r21ne mixte et le ganglion

rilchi,liRI1. Celui-ci, entouré d'une gangue si 1 Il'O-lIéop ! ilSi'l"e,

élait peu à peu envahi parles cellules épithéliales qui s'in-

filtrent dans les mailles de sa charpente conjonctive respec-

tant jusqu'à un certain point les éléments nerveux : fibres à

myéline et cellules ganglionnaires. ,

Fig. 14, Envahissement dus racines et pachyméningite interne

cancérpu-.p.

A, racine envahie ; B, dure-mère.

LOCALISATIONS DU .CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 305

A ce niveau, le périoste avoisinant commence à s'infiltrer.

Les cellules épithéliales cheminent le long des racines

postérieures, infiltrant le périnèvre et l'endonèvre, effon-

drant la dure-mère au point de pénétration des racines, et de

là s'étendent en bourgeonnant sur les deux faces de la dure-

mère, mais principalement sur la face interne. (1%ig. 15).

D'autre part, les racines elles-mêmes sont envahies, d'as-

pect moniliforme et le microscope permet de se rendre

compte de l'envahissement des gaines de Schwan, par les élé-

ments du cancer.

J'ai pu d'ailleurs corroborer maintes fois l'exactitude de la

théorie. pathogénique découlant de semblables observations.

Archives, 2' série, t. XVII. 20

l'ig. 15. Racine postérieure envahie par l'épithélioma.

A, gaine de Schwann bourrée d'éléments 6p ! )he[iau\; B. li3 peutropliie du c3 Iiiidi,a\e

C, envahissement du cylindrwe; D, dégénérescence hyaline du cylindraxe.

306 CLINIQUE NERVEUSE.

Ici même, dans cet amphithéâtre, j'ai eu l'occasion de vous

présenter un cas dans lequel il était aisé de suivre la succes-

sion des deux phases radiculaire et médullaire et pour lequel

j'avais entièrement adopté cette doctrine.

" Il faut bien que vous le .sachiez, rarement vous aurez l'oc-

casion d'étudier post-mortem des lésions aussi limitées que

celles qui existaient dans le cas que je vous ai rapporté tout

à l'heure.

L'envahissement du squelette est la règle au bout d'un

certain temps.

Quoi qu'il en soit, j'estime qu'il est juste de faire dans

l'histoire de la paraplégie douloureuse des cancéreux, une

bonne place à cette nouvelle formule radiculo-méningée à

côté de l'ancienne formule osseuse de Charcot et Tripier.

Que vous dirai-je de la symptomatologie de ces radiculites

cancéreuses ? Leur pathogénie, que je viens de vous exposer,

sera votre guide le plus sûr. Les divers. aspects cliniques

seront fonction de la distribution topographique des lésions

et celle-ci peut être très variable.

C'est surtout par l'élément sensitif que vous serez influen-

cés. Chaque fois que vous rencontrerez ces douleurs atroces,

constrictivcs, lancinantes, s'irradiant dans les membres;

chaque fois que les symptômes médullaires ne seront pas là

pour vous diriger ; lorsque vous aurez éliminé le tabes, vous

penserez à la carcinose radiculaire. Vous serez aussi le plus

souvent mis sur la voie par l'état général, par la connais-

sance des antécédents héréditaires et personnels. Votre

tâche sera facilitée si vous constatez une tumeur aisément

accessible ou une cicatrice opératoire ; mais, souvent aussi,

ce ne sera qu'après un examen approfondi de tous les

organes, reins, foie, poumons, capsules surrénales, utérus,

prostate, etc., que vous serez amenés au diagnostic, et la

découverte d'un cancer latent sera pour vous une précieuse

révélation.

A dire vrai, si le diagnostic est parfois très aisé, s'impo-

sant presque, plus souvent il est difficile. L'hystérie, le lum-

bago, les névralgies, les sciatiques, les kystes hydatiques,

les anévrismes de l'aorte et surtout les pachyméningites, la

syphilis, la tuberculose du rachis, les tumeurs des nerfs

peuvent donner lieu à un complexus douloureux et moteur,

capable d'induire en erreur à un examen superficiel.

LOCALISATIONS DU CANCER SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 307

Je voudrais, Messieurs, discnter avec vous plus longue-

ment le diagnostic différentiel de ces diverses affections,

mais ce serait abuser trop longtemps de votre attention.

Que vous dirais-je enfin du pronostic de toutes ces variétés

d'atteinte cancéreuse du système nerveux périphérique ? Il

est, vous n'en doutez pas, des plus sombres. De toutes les

complications du cancer, ce sont les plus redoutables qui

puissent arriver, et malheureusement elles manquent rare-

ment à un degré quelconque. C'est cette atteinte, en effet,

qui, à la cachexie et aux troubles organiques profonds,

ajoute les souffrances horribles et l'impotence fonctionnelle,

dont vous avez contemplé un si triste exemple.

Parler du traitement, c'est avouer notre impuissance

curative. La morphine seule et ses succédanés, comme je

vous le disais au début de cette leçon, réussissent à appor-

ter quelques soulagements momentanés. La libération des

troncs nerveux comprimés, leur résection, la section ou

l'élongation des racines postérieures, proposées par les chi-

rurgiens en pareille occurrence, ne donnent que des résultats

peu encourageants. Peut-être, dans des cas déterminés, des

injections epidurales ou sous-arachnoïdiennes de cocaïne

pourraient-elles être de quelque valeur. -

Laissez-moi, Messieurs, en terminant, vous rappeler les

quelques notions d'anatomie pathologique et les faits cli-

niques qui découlent de cet entretien.

Le système nerveux périphérique, peut être, avons-nous

dit, atteint par le cancer de deux sortes d'accidents : les

accidents d'ordre toxique, ceux d'ordre mécanique; les der-

niers agissent par deux moyens' : la compression et l'enva-

hissement. Les lésions mécaniques, les seules que nous

ayons développées ici, peuvent atteindre les nerfs sur tous

les points de leur parcours, créant ainsi des syndromes

variés.

Vous retiendrez surtout l'existence possible de lésions

multiples des terminaisons nerveuses intra-musculaires au

cours de la carcinose miliaire aigüe, véritable 1leW'o-rnyo. !

site généralisée dont les allures cliniques sont celles d'une

polynévrite sensitivo-motrice diffuse.

Vous penserez aux névrites isolées des nerfs rachidiens;

vous n'oublierez pas non plus la symptomatologie des para-

lysies radiculaires classiques par arrachement, avec leurs

308 - CLINIQUE NERVEUSE.

oedèmes, leurs troubles vasculaires, trophiques ; la prédomi-

nance des troubles sensitifs sur les troubles moteurs et la

subordination étroite de ceux-ci à ceux-là.

Vous vous souviendrez que de tous les nerfs crâniens, le

pneumogastrique est le plus souvent atteint dans son trajet

extra-cranien.

Pour les autres nerfs crâniens, ils sont atteints fréquem-

ment dans le crâne au niveau de l'étage inférieur et au voi-

sinage du rocher ; ceci à cause de la distribution facile du

cancer à distance du foyer primitif par les vaisseaux et les

lymphatiques. Vous connaissez les rapports morphologiques

et fonctionnels étroits entre les nerfs crâniens et les racines

rachidiennes, leurs réactions devant le cancer sont iden-

tiques. Rappelez-vous encore la brusquerie, quasi apoplec-

tiforme de certaines névrites cancéreuses intra-craniennes,

vous en connaissez la cause.

Enfin, vous penserez à la fréquence des névrites cancé-

reuses précoces des racines rachidiennes, à leur importance

comme phénomène de début dans le cancer du rachis. Vous

saurez qu'à la formule osseuse primitive classique, il con-

vient d'ajouter une nouvelle formule d'envahissement : la

formule 1'adiculo-méJ.lingée avec sa pathogénie lymphatique

et la notion de dissémination du cancer dans l'intérieur des

méninges par l'entremise du liquide céphalo-rachidien.

Asiles d'aliénés. Nominations et promotions. Janvier 19 ?

Distinctions honorifiques. Légion d'honneur : M. LApoixn.

directeur-médpcin honoraire des asiles d'aliénés, nommé Chevalier

de la Légion d'honneur.- Officiers d'académie : D1' CASTIN, médecin-

adjoint de l'asile de Montdevergues (Vaucluse); BnETIN, pharmacien

de l'asile de Bron (Rhône). Mérite agricole : -. val. le Dr Germain

CORTI'L, docteur-médecin de l'asile de Saint-Venant, (Pas,de-

Calais), nommé chevalier.

Février 1904. M. le Dr BOURDIN, directeur-médecin à Moulins,

nommé médecin en chef à l'asile du Mans; M. PETIT (Gilbert)

médeciu-directeur à Moulins, est promu à la 110. classe du cadre à

dater du jour de son installation à Moulins.

RECUEIL DE FAITS.

Paralysie saturnine à type partiel Aran-Duchenne.

PAR '

Pnosrre 111ERIiLEN hT- IIENRI GUIARD

Ancien interne des Hôpitaux' Ancien interne des Asiles

Assistant suppléant de consultation de la Seine. -

à l'hôpital Bichat. ' r

Nous n'avons d'autre prétention que de rapporter ici une

observation, qui, pour n'être pas unique en son genre, n'en

présente pas moins un certain intérêt. Il s'agit d'une para-

lysie saturnine à localisation très limitée, de diagnostic

différentiel et étiologique délicat, ainsi que de curabilité à

peu près complète. .

En effet les cas de paralysie saturnine ne frappant qu'un

petit nombre de muscles ne sont pas d'une -extrême fré-

quence, et on conçoit que le clinicien, en présence d'une

forme aussi rare, puisse éprouver quelque hésitation. Dans

notre observation, seuls l'éminence thénar et les interos-

seux ontété touchés, et cela d'une manière si prédominante que

nous sommes en droit de la considérer comme une moda-

lité du type classique Aran-Duchenne. Déjà l'on sait que le

type complet Aran-Duchenne est un des moins communs, .

puisque Remake dans une statistique de 98 cas n'en a

noté que 20 qui rentrent dans cette catégorie. Plus rares

encore sont les faits où ce type n'est que partiel.

En 1834, dans la thèse classique de Tanquerel des Plan-

ches on trouve une observation (obs. VIII) intitulée « Para-

lysie incomplète des doigts et du poignet »' il s'agit une

paralysie très accentuée du court abducteur de pouce, sans

' RC\1\K, Ai'ch. sur psijch. and Xervenkr. 1876-1877.

'T\NQUEREL DES Planches. Essai sur la paralysie du plomb 'ou

saturnine. Thèse 4S3r.

310 ' RECUEIL DE FAITS.

que les autres muscles de la main soient tous atteints; il

existait en plus une paralysie de l'extenseur propre du

gros orteil droit. "

Pour ne parler que des auteurs qui ont particulièrement

étudié la question, citons Romak qui rapporte un cas d'amyo-

trophie exclusivement limitée aux muscles du pouce et plus

tard trois autres cas où l'éminence Sthénar et les interos-

seux étaient pris sans que les extenseurs du poignet parti-

cipent à la paralysie.111°l Déjerine-Iïlumplte en z1889 dit que

« la paralysie des petits muscles de la main est souvent

partielle dans le type Aran-Duchenne et intéresse plus par-

ticulièrement le court abducteur du pouce et le premier

interosseux. » Elle rapporte des observations de paralysies

partielles du 'type Aran-Duchenne, mais accompagnées de

paralysies d'autres régions. Villaret2 cite de même Gowers

qui a décrit la paralysie des petits muscles de la main con-

nexe le plus souvent à la paralysie des extenseurs, mais qui

peut évoluer pour son propre compte; il cite enfin Ber-

nhardt qui a publié deux observations où, .sans paralysie

des extenseurs l'éminence thénar une fois, les interosseux

une autre fois ont été atteints.

Comment expliquer ces localisations ? On ne sait pas

encore quelles règles y président : tantôt c'est un membre ou

un segment de membre qui est intéressé, tantôt ce sont les

troncs nerveux périphériques qui commandent la localisa-

tion, tantôt enfin il' s'agit de groupes musculaires sans

rapport avec une innervation périphérique déterminée. Aussi

conçoit-on la variabilité du tableau clinique : on a même

publié des cas de paralysie limitée au seul deltoïde, au long

supinateur. Il en est d'ailleurs de même d'autres paralysies

toxiques, diphtériques par exemple. Ballet3 distingue dans

cet ordre d'idées les polynévrites des mononévrites, insistant

sur ce fait que ces dernières peuvent relever d'une cause

générale (paludisme, rhumatisme, saturnisme). Raymond' ¡

' JI"'a DI : .ICItI\E-IVLU31PICE. Polynévrites en général; paralysie el atro-

phie saturnine en particulier. Th. Paris, 1889.

3 Maurich YfLLvnE'r. Paralysies saturnines ; Revue générale : Gazette

des hôpitaux. 7 février 1903.

1 Ballet. Leçons de clinique médicale, 1897.

* Raymond. Cliniques du système nerveux : 1895-90; Leçons sur les

polynévrites.

PARALYSIE SATURTINE A TYPE PARTIEL ARAN-DUCHENNE. 31 t

étudie d'autre part les névrites diabétiques circonscrites (cas

de Ziemssen localisé dans le domaine du nerf cubital, cas

de Bernard et Féré limité à la sphère du péronier, cas d'Al-

thaus localisé au nerf circonflexe). Le même auteur signale

le peu de tendance à se diffuser des paralysies post-typhiques

et il cite des observations de différents cliniciens à l'appui

de cette opinion.

Observation. - Le nommé T..., âgé de trente-cinq ans, manu-

tentionnaire, ne présente dans ses antécédents rien de particulier.

Son père est mort accidentellement ; sa mère sujette aux rhuma-

tismes a succombé à l'âge de cinquante-sept ans. Lui même n'a

jamais eu de maladies infectieuses et notamment pas de syphilis.

H a toujours pu travailler sans être arrêté par aucune affection,

de quelque ordre soit-elle.

Le 20 juin 1902 il se plaint de douleurs névralgiques dans la région

ilio-lombaire droite, douleurs sans grand caractère qui disparais-

sent au bout de quelque temps ; peu après il accuse une sensation

d'engourdissement dans les deux derniers doigts de la main droite

et au niveau de la région correspondante au cinquième métacar-

pien. Cet engourdissement s'accompagne d'une sensation de froid

plus ou moins accusée suivant les moments.

L'examen de cette région montre la perte de la sensibilité au

contact et à la douleur, et on remarque de plus qu'il existe une

atrophie évidente de l'éminence thénar. Le premier espace inter-

osseux présente également un méplat très net. Quant aux autres

espaces, ils sont plus légèrement atteints et l'atrophie est moins

perceptible.

Nous attirons l'attention du malade sur l'atrophie ainsi consta-

tée. Il répond l'avoir lui-même déjà remarquée depuis quelques

jours, mais il n'y attachait qu'une importance relative, préoccupé

qu'il était par les troubles subjectifs signalés plus haut. Et cepen-

dant il éprouvait une certaine difficulté à soulever les rouleaux de

drap qu'auparavant il maniait sans la moindre peine. A ce mo-

ment nous perdons le malade de vue pendant quelque temps,mais

les phénomènes d'atrophie et de paralysie ne faisant qu'augmenter

nous le revoyons quinze jours plus tard.

Les troubles subjectifs de la sensibilité ont alors à peu près dis-

paru, et c'est l'atrophie musculaire qui inquiète le patient qui res-

sent de plus en plus de gêne dans l'exécution de son métier. La

force musculaire évaluée au dynamomètre du côté droit par rap-

port au côté opposé est à peu près de 1 à 10. Les mouvements des

quatre derniers doigts sont presque normaux ; quant au pouce,

1 abduction est diminuée, tandis que les mouvements d'extension

et de flexion des phalanges ne s'éloignent guère de la normale ;

312 - RECUEIL DE FAITS.

par contre il est impossible au malade de mettre complètement le

pouce en opposition avec les autres doigts : tout au plus arrive-t-il

à toucher l'index. .

Les mouvements de flexion du poignet sont normaux de même

"que ceux d'extension ; toutefois lorsque la main est en extension,

la plus légère pression à la face dorsale suffit à l'amener en flexion,

ce qui prouve bien qu'il existe un certain degré de parésie des

muscles extenseurs des doigts comme on le constate mieux encore

par comparaison avec le côté sain. 11 n'existe pas d'autre signe

appréciable de paralysie des extenseurs. -

Notons enfin que la sensibilité au contact et à la douleur le long

du trajet du nerf ' cubital est diminuée, surtout au niveau de la

main ; la sensibilité au froid et au chaud est au contraire bien con-

servée. Dans la même région le malade éprouve, comme nous

l'avons déjà indiqué, des sensations d'engourdissement et de four-

millement. Sur le trajet du médian à la-partie inférieure de

l'avant-bras et au creux 'de la main, la sensibilité au contact est

légèrement atténuée. Sur le trajet du radial, rien à noter. -

' L'examen électrique donne les résultats suivants :

PARALYSIE SATURNINE A TYPE PARTIEL ARAN-DUCHENNE. 313

massage, iodure, etc.) et cinq semaines plus tard, un examen

picctrifjue donnait les résultats suivants :

314 , . RECUEIL DE FAITS. -

Comme on peut le voir par ce qui précède, l'enquête nous

a permis de porter dans cette observation le diagnostic

ferme de paralysie saturnine. Si ce dernier est en général

aisé à formuler, il est-néanmoins des cas où un examen

sérieux peut seul le déceler. C'est ainsi que dans le type

Aran-Duchenne complet, l'aspect de la main est celui du

syndrome de l'atrophie musculaire progressive qu'on ren-

contre dans un certain nombre d'affections nerveuses. Qu'il

s'agisse du type total ou partiel, la différentiation avec les

affections d'origine centrale repose toujours sur la coexis-

tence, dans le saturnisme, de paralysie et d'atrophie pour

peu que la durée excède une semaine; tandis que dans

l'atrophie musculaire progressive, l'atrophie est le phéno-

mène primitif et primordial. En outre, il y a lieu de tenir

compte de tous les autres signes caractéristiques des névrites

d'une part, des myélopathies d'autre part (secousses fibril-

laires, signes électriques, etc).

Nous n'envisageons d'ailleurs pas ici le diagnostic dogma-

tique de la paralysie saturnine dans son ensemble, et nous

ne nous arrêterons pas davantage sur la confusion possible

avec les autres paralysies d'origine centro-médullaire, voire

myopathique. Mais nous devons mentionner les paralysies

d'ordre périphérique, traumatiques et surtout infectieuses

de toute nature frappant la sphère du médian et du cubital.

Ce sont là des faits rares; en tout état de cause; le dia-

gnostic serait toujours basé sur la coexistence des autres

signes de saturnisme et sur l'histoire du malade. Notre sujet

en effet mettait en rouleaux des tissus teints avec des cou-

leurs à base de sels de plomb : la profession fait donc ici le

diagnostic, confirmé encore par la constatation d'un liséré

de Burton. '

Cette même notion de profession soulève un point de

pathogénie intéressant, puisque ce sont précisément les

muscles du territoire correspondant au contact du poison

qui seuls présentent des phénomènes morbides. Pareille

remarque a déjà été maintes fois signalée par les différents

auteurs et il semble bien que les localisations anormales

relèvent le plus souvent d'influences professionnelles. Le

type Aran-Duchenne notamment a été vu chez des ciseleurs

qui tiennent leur instrument entre le pouce et l'index de la

main gauche.

PARALYSIE SATURNINE A TYPE PARTIEL ARAN-DUCHENNE. 315

Duchenne 1 avait cru devoir invoquer, dans des cas sem-

blables, l'action de la compression par l'instrument de travail

(pinceau, brosse, etc.); mais plus tard il se rattacha à l'idée

d'intoxication saturnine, remarquant que la paralysie des

muscles de la main s'observe surtout dans les intoxications

lentes.

Il semble que l'absorption directe par la peau doive jouer

le principal rôle. Manouvrier n'a-t-il pas vu que les extré-

mité, en contact avec le poison sont le siège des accidents

saturnins, et pour lui la peau saine peut servir de porte

d'entrée au plomb. A l'appui de cette théorie biencon nue,

rappelons que Canuet a intoxiqué des chiens en les plon-

geant dans un bain d'acétate de plomb. Rappelons aussi

l'intoxication saturnine notée après des pansements à base

de plomb appliqués sur des plaies; mais alors il y a absorp-

tion par des surfaces dénudées. La première explication de

Duchenne a trouvé en Moebius un nouveau défenseur; cet

auteur réserve la plus grande part à la compression habi-

tuelle des muscles et à leur surcroît d'effort professionnel.

Il est d'autant plus logique de faire entrer' cette conception

en ligne de compte que les paralysies saturnines type Aran-

Duchenne se rencontrent seulement dans certains métiers :

il n'en reste d'ailleurs pas moins acquis que la cause fonda-

mentale réside dans l'imprégnation plombique.

Dans notre cas enfin, comme il est classique de le cons-

tater, le court abducteur du pouce a été très touché, ainsi

que le premier interosseux dorsal : ce sont là des points

que l'on relève dans plusieurs observations. Remarquons

aussi que la guérison de notre sujet a été suffisante pour

lui permettre de reprendre assez vite son travail, fait à noter,

car dans le type Aran-Duchenne les mouvements sont sou-

vent longs à revenir et l'atrophie persiste plus longtemps

encore.

' Duchenne (de Boulogne). Traité de l'Eleclrisaiion localisée, page G75.

Edition de 1872. 0

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

XIX. Un cas de chorée de Huntington, suivie d'autopsie; par

GLAW '1LDE RUZK (The American Jbu ! 'nr.J.1 of Insanity, juillet 1902.

p. 63-82).

L'auteur combat la théorie inflammatoire avec origine vascu-

laire, etc., et défend la théorie considérant la chorée d'Hunting-,

ton comme maladie essentielle des éléments nerveux. Examens

histologiques détaillés. 1 planche. SmoN.

XX. Des fractures spontanées chez les syringomyéliques ; par

MM. Louis Rknon et Jean Heitz. (Presse médicale, 26 juillet 1902).

MM. Rénon et Heitz ont eu l'eccasion d'observer un cas de frac-

ture spontanée chez une vieille syringomyélique dans le service

de M. le professeur Déjérine à la Salpêtrière.

Femme de soixante-six ans, hospitalisée depuis treize ans, sans

antécédents héréditaires ni personnels. En 1884, à l'àge de qua-

rante-neuf ans surviennent progressivement de la faiblesse des

mains et de la difficulté pour la marche. La malade entre en 1888a à

la Salpêtrière ne pouvant plus marcher, les membres supérieurs

atrophiés.

Au mois de juin 1901, époque de la fracture, l'état physique est

le suivant : membres supérieurs : impotence totale, atrophie mus-

culaire prédominant à droite masquée par l'adipose, pas de con-

tractures, rétractures tendineuses maintenant les deux mains fer-

mées, abolition des réflexes; membres inférieurs : impotence moins

marquée prédominant aux fléchisseurs, réflexes faibles, atrophie

peu considérable.

Cpho-scoliose extrêmement accusée. Du côté des yeux, léger

nystagmus, névrite optique ancienne à droite. Troubles de la sen-

sibitité : anesthésie douloureuse sur tout le côté gauche, au-des-

sous de la quatrième paire cervicale; à droite l'anesthésie à la

douleur est légère et se trouve seulement dans la zone radiculaire

externe. L'anesthésie thermique occupe exactement le même terri-

toire.

Le 6 juin 1901, pendant que deux infirmières asseoient la malade

dans son lit pour le déjeuner, celle-ci perçoit un craquement, mais

ne ressentant aucune douleur, croit que sa camisole se déchirait,

on ne s'aperçut de la fracture de l'humérus gauche que le lende-

main par la constatation d'une énorme ecchymose et d'un oedème

dur dépassant le coude. L'indolence est absolue.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 3t7 Î

La radiographie indique un trait de fracture oblique en bas et

en dedans à l'union du tiers inférieur avec le tiers moyen. Le

iragment supérieur se termine par un V ouvert en bas. Le frag-

ment inférieur, taillé en pointe, présente à la fois du chevauche-

ment et du déplacement autour de son axe. Il est remonté de plu-

sieurs centimètres en arrière et en dehors.

Sur la radiographie, les muscles sont absents, sauf le triceps.

On immobilise le bras dans une écharpe de Mayor. La consoli-

dation se produit deux mois après, avec un chevauchement très

marqué.. '

Les observations de fractures spontanées dans la syringomyélie

sont fort rares (treize dans toute la littérature médicale). Généra-

lement, elles surviennent comme symptôme initial, quelques mois

ou quelques années avant que le diagnostic ait pu être fait.' Elles

se produisent presque toujours aux membres inférieurs contraire-

ment à celles du tabes.

D'une façon régulière la fracture siège dans une région où la

peau présentait antérieurement des troubles marqués de thermo-

analgésie et on sait que ceux-ci sont surtout marqués aux mem-

bres supérieurs.

L'origine de cette fracture doit être attribuée aux troubles tro-

phiques osseux.

La radiographie a montré à MM. Rénon et Heitz un état très spé-

cial du squelette du bras fracturé : humérus et os de l'avant-bras

très amincis, ayant l'aspect atrophiés de ceux de la paralysie infan-

tile, se laissant très facilement traverser par les rayons X.

Au point de vue clinique, les fractures des syringomyéliques

ressemblent beaucoup à celles des tabétiques. On retrouve à peu

près les mêmes causes occasionnelles, la fracture étant rarement

tout à fait spontanée. On relève presque toujours une légère vio-

lence, une contraction musculaire de moyenne intensité. L'indo-

lence complète est la règle. L'impotence fonctionnelle est faible

lorsque les muscles ne sont pas trop atrophiés. Le gonflement est

énorme ; la crépitation souvent voilée par l'oedème.

, Les auteurs n'ont pas encore observé de fracture syringomyéli-

que dont le foyer ait.suppuré, mais la chose reste possible. Dans la

majorité des cas, la consolidation se produit par un cal toujours

exubérant et souvent long à se calcifier entièrement. On a vu

aussi subsister une pseudarthrose plus ou moins complète.

R. LEROY.

XXI. Lèpre et syringomyélie; par M. H. DE Brun. (Presse médicale,

9 avril 1902).

L'auteur a reçu dans son service d'hôpital à Beyrouth une jeune

femme de vingt-quatre ans, présentant une atrophie musculaire

318 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

des deux mains (aspect de main de singe) un peu plus accusée à

droite qu'à gauche. '

L'intégrité des masses musculaires des avant-bras et des bras et

l'existence de nombreux-troubles de la sensibilité font rejeter

- l'hypothèse d'atrophie musculaire progressive type Aran-Du-

chenne.

La sensibilité à la douleur a totalement disparu au niveau des

mains et des deux tiers inférieurs des avant-bras, de même aux

pieds et aux jambes.

L'analgésie est moins absolue aux bras et aux cuisses. Dans les

endroits où l'analgésie est totale, il existe une thenno-anesthésie com-

plète ; la malade s'est brûlée atrocement avec de l'eau bouillante

sans avoir ressenti la plus légère sensation. Toutefois, il existe

une intégrité de la sensibilité au contact et du sens musculaire,

même au niveau des parties analgésiées. Cette dissociation des

sensibilités permet donc de porter le diagnostic de syringomyélie.

Cette affection nerveuse esl très fréquente en Syrie, d'après

M. de Brun qui en donne l'explication suivante. La malade pré-

sente d'autres symptômes dont l'existence éveille l'idée d'un pro-

cessus infectieux spécial : diminution notable des règles depuis

l'époque où apparurent les premiers troubles syringomyéliques,

sensation de brûlure « de feu ardent », éruption de taches rouges

bleurissant légèrement par le froid, arrondies, irréfiulières, ayant

des dimensions variant entre celles d'une pièce de deux francs et

celles de la main,ne s'accompagnant ni de démangeaisons,ni d'au-

cun phénomène subjectif. Ces symptômes montrent que cette

femme syringomyélique est en même temps une lépreuse.

L'auteur croit que l'infection lépreuse a pu amener la syringo-

myélie en portant son action sur la moelle. Chauffard, Babinski

ont observé des lépreux présentant la forme parfaite de l'anesthé-

sie syringomyélique. Danielson et Boeck, Stendner, SouzaMartins,

Kalindero ont signalé dans la lèpre des altérations médullaires.

N'a-t-on pas le droit d'admettre l'existence de cas de lèpre à loca-

lisation médullaire et à manifestations syringomyéliques ? Ceci

expliquerait pourquoi la syringomyélie est si fréquente en Syrie.

Il y aurait deux lormes nerveuses de la lèpre : la lèpre névritique,

la plus commune, la lèpre myélitique, beaucoup plus rare.

R. LEROY.

XXII. Pathogénie du tabes dorsal ; par M. J. NAGEOTTE. (Presse

médicale, 10 décembre 1902).

Le tabes est caractérisé anatomiquement par une lésion inflam-

matoire qui attaque un nombre quelconque de racines sensitives

ou motrices, à leur sortie de l'espace sous arachnoïdien et qui se

relie à une syphilose généralisée des méninges.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 319

La moelle des tabé tiques présente deux ordres de lésions :

1<> lésions des éléments nobles ; 2° lésions de l'appareil conjonctif.

La dégénérescence tabétique consiste essentiellement dans la

destruction progressive des racines postérieures, depuis les cellules

des ganglions rachidiens où elles naissent jusqu'aux centres gris de

la moelle et du bulbe où elles se terminent, le processus marchant

de la moelle aux ganglions. La lésion consiste en une atrophie

lente qui frappe de préférence certaines espèces de fibres dans cha-

que racine et qui est habituellement assez irrégulièrement répar-

tie sur les différentes racines de la moelle et mên : e sur les diffé-

rents fascicules de chaque racine. La disparition des fibres radi-

culaires est la première en date; lorsqu'elle est suffisamment

avancée on voit survenir la disparition des systèmes endogènes des

cordons postérieurs. Mais ces libres endogènes ne sont pas seules

atteintes, les racines antérieures n'échappent pas aux lésions dans le

tabès.

Les lésions diffuses qui siègent dans l'appareil conjonctif du

système nerveux central portent en elles-mêmes comme un cachet

d'origine ; la méningite du tabès 'est une méningite syphilitique.

M. Nageotte démontre par une série de coupes que l'épaississement

et surtout l'infiltration d'éléments cellulaires de la pie-mère, l'alté-

ration des veines et des artères se prolongeant sur les capillaires

en plein tissu nerveux permettent de dire ceci : Il existe constam-

ment dans le tabes une véritable 171éiiingo-171yélite vasculaire qui

représente dans la moelle à un degré atténué ce qu'est dans le cer-

veau la méniztgo-encépltalite diffuse. Les lésions inflammatoires de

l'élément conjonctif existent dans toute- la hauteur de la moelle,

dans le bullu, dans la protubérance.

Cette méningite que décèle le microscope est encore prouvée par

l'examen du liquide céphalo-rachidien, qui indique une lympho-

cytose constante. Celle-ci existe dès les premières manifestations

du tabès. Bien loin d'être la conséquence des lésions parenchymateuses,

ln méningite précède leur évolution et préside en quelque sorte à

leur formation. Mais la méningo-myélite syphilitique diffuse, ainsi

que la lymphocytose, est commune à toutes les formes cliniques de

la syphilis nerveuse. Elle ne peut donc pas expliquer à elle seule

les lésions des racines postérieures propres au tabes.

Pour trouver la lésion syphilitique indissolublement liée au

tabes, il faut chercher dans la portion des racines qui prend le

nom de atenj radiculaire et qui est comprise entre le point où les

racines abordent la dure-mère et celui où la racine postérieure

aboutit au ganglion. Le tabes est la conséquence d'un envahisse-

ment des nerfs radiculaires par le processus d'inflammation

méningée syphilitique, lésion que l'auteur a décrit en 1894 sous le

nom de névrite radiculaire interstitielle transverse, pour indiquer

son siège dans le nerf radiculaire, sa nature interstitielle ou con-

320 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

jonctive et enfin son analogie avec la myélite transverse syphiliti-

que. Il faut noter que la névrite radiculaire n'est pas constante au

cours de la méningite syphilitique ; c'est une conséquence fré-

quente mais non obligatoire de la, lésion méningée, ce qui expli-

que pourquoi le tabes lui-même n'est pas constant au cours de

cette méningite. Par contre la névrite radiculaire est constante dans

le tabès. -

. Pour M. Nageotte, le tabes n'est qu'un cas particulier de la

pathologie des nerfs radiculaires, ce qui crée son individualité,

c'est la nature syphilitique du processus inflammatoire lui don-

nant naissance. R. LEROY.

XXIII. Insuffisance des organes thyro-parathyroïdiens et éclam-

psie ; par 111J1. FRUIiINSHOLZ et JEA : -IDELIZE, (Presse médicale,

25 octobre 1902). 1

Il est reconnu aujourd'hui que les convulsions éclamptiques sont

l'expression d'une imprégnation spéciale du système nerveux par

des poisons encore indéterminés : infection exogène et auto-into-

xication (insuffisance hépatique,insuffisance rénale). L'insuffisance

thyroïdienne peut aussi jouer son rôle.

Lange a remarqué que le corps thyroïde s'hypertrophie chez

80 p. 100 des femmes enceintes pour reprendre son volume avec

la puerpuéralité. Or les femmes qui ne présentent pas cette hyper-

trophie sont presque toutes albuminuriques et un tiers d'entre

elles ont à un moment donné des crises d'éclampsie. Heile a étudié

récemment le cas d'une femme enceinte, ayant subi l'extirpation

partielle de la glande thyroïde, chez laquelle des convulsions écla-

tèrent sept jours après l'opération, au point que l'on dut prati-

quer l'accouchement prématuré.

Comme suite à ses faits, MM. Fruhinsholz et Jeandelize rappor-

tent l'intéressante observation d'une femme de dix-huit ans,

myxoedémateuse qui, devenue enceinte accoucha avant terme et

fut prise d'éclampsie, alors qu'elle n'avait dans l'urine que des

traces non dosables d'albumine. '

Il semble donc que certaines éclampsies peuvent être dues à une

insuffisance fonctionnelle de la glande thyroïde, insuffisance

tantôt ancienne, mais aggravée par l'état de grossesse, tantôt

récente, produite par l'état de grossesse même et le surmenage

momentané qui en résulte (méïopragie) pour les organes de

défense.

Quelques faits expérimentaux sont de nature à établir la vrai-

semblance de cette hypothèse. MM. Verstroeten et Vanderlinden

ayant fait à une jeune chatte l'ablation des deux glandes thyroïdes

ont vu l'animal rester trois ans bien portante puis présenter des

phénomènes convulsifs à l'occasion de la parturition. Lange a

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 32]

constaté chez des chattes thyroïdectomisées en état de gestation

des lésions rénales et hépatiques.

Le corps thyroïde n'est pas seul enjeu. Les glandules pa1'athy-

roides ont peut-être ici une importance plus grande. Des travaux

de Moussu, de Vossale, de Gley, il semblé résulter qu'à l'insuffi-

sance thyroïdienne appartiennent des troubles chroniques (trou-

bles de nutrition, myxoedème), qu'à l'insuffisance para-thyroï-

dienne appartiennent surtout des troubles aigus (troubles convul-

sirs), que les accidents aigus (convulsions) sont dus à l'ablation

des parathyroïdes, mais que, bien qu'étant des organes différents,

thyroïdes et parathyroïdes sont fonctionnellement associées.

Cette opinion permet de penser qu'en cas de crises d'éclampsie,

chez une femme enceinte ou en travail, surtout si le corps thy-

roïde n'a pas subi son hypertrophie physiologique, on est peut être

autorisé à essayer la médication thyroïdienne. 11. LEROY.

XXIV. Observation d'ataxie cérébelleuse aiguë d'origine orga-

nique, compliquée d'hystérie; par S. Popow. (Obozrémé psichia-

vis. 1902). -

L'ataxie s'est installée sous l'action d'une hémorrhagie ménin-

gée et a progressé immédiatement après l'avulsion d'une dent.

Puis elle a disparu sous l'influence de la suggestion, ce qui a

compliqué le diagnostic et le pronostic. A ce moment le malade a

succombé brusquement en présentant les signes d'une occlusion

intestinale.

L'autopsie révèle une leptoméningite chronique de la convexité

du cerveau, et de la sclérose de ses vaisseaux. 11 existe un kyste

apoplectique de la pie-mère du lobe gauche du cervelet, du volume

d'une grosse noix, qui comprime l'extrémité antérieure de l'hé-

misphère gauche de cet organe : liquide séreux, paroi interne

orangée. La moitié gauche de la protubérance est comp

il en est de même, quoique plus faiblement de la moitié gai

bulbe. -

Les progrès de l'ataxie ne se peuvent expliquer que par

ciation à l'ataxie organique de l'ataxie hystérique qui a ce

pour son compte sous l'influence de l'avulsion dentaire inoi

en soi : cette opération a donné un coup de fouet à la compl

parce que le système nerveux du patient était préalab

affaibli par des excès alcooliques. Etant donné le peu d'alterauon

du cervelet, il est probable que, sans cette complication, cet

homme de 54 ans se fût rapidement rétabli. P. Keraval.

XXV. Syndrome cérébro-spinal, vraisemblablement urémique avec

signe de Kernig; par THÉVENGT et Péhu. (Lyon médical, 1901.

n°39. p. 430). -

ACI1lVES, 2' séi ie, t. XVII. ' 21

322 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

Il s'agit d'une malade de cinquante-deux ans, dans l'observation

de laquelle on relève les principaux symptômes suivants : céphalée

intense, crises convulsives épileptiformes, inégalité pupillaire,

dyspnée, poussées respiratoires, anomalies de quantité des urines

avec albumine en très petite quantité,. hypotension et bruit de

galop constaté à plusieurs reprises, oedème des jambes avec four-

millement dans les extrémités et crampes dans les mollets; apy-

rexie constante. Elle avait eu anciennement une albuminurie ayant

persisté six mois à la suite d'une néphrite probablement typhiquc.

A ces symptômes s'ajoutaient des signes d'irritation des méninges,

caractérisés par des douleurs céphalo-rachidiennes intenses et le

signe de Kernig. La malade passa trois mois à l'hôpital et l'évolu-

tion fut favorable.

Ayant éliminé la méningite cérébro-spinale, la méningite tuber-

culeuse, la syphilis, le tubercule cérébral, l'intoxication chronique

par les liqueurs à essences, enfin l'hystérie, I\HI. Thévenet et Péhu

rapportent à l'urémie les phénomènes observés.

Ils attribuent l'irritation des méninges dénoncée par les douleurs

céphalo-rachidiennes et le signe de Kernig à l'hypertension par

hypersécrétion pure et simple du liquide céphalo-rachidien, reje-

tant l'hypothèse de la possibilité d'une véritable méningite urémi-

que due à l'action des produits toxiques excrémentitiels sur les

méninges.

Il semble bien, disent les auteurs, que l'hypertension puisse,pour

ainsi dire, organiser à elle seule le méningisme y compris le signe

de Kernig ainsi que tendent à le démontrer deux observations de

Klippel et W. Thyne. Quant à la méningite brigthique, elle a contre

elle l'opinion classique courante. G. Carrier.

XXVI. Ramollissement bulbaire aigu et syndrome cérébelleux;

par M. Lecleuc (Lyon médical, 1901, n° 42, p. 533).

M. Leclerc publie l'observation d'un malade ayant présenté les

principaux symptômes suivants : le syndrome cérébelleux dans ses

grandes lignes, vertiges, titubation ébrieuse avec latéropulsion à

gauche ; paralysie de la déglutition avec hoquet et vomissements

et hémiplégie laryngée gauche; troubles de la sensibilité générale,

caractérisés par de l'analgésie et surtout de la thermo-anesthésie

des membres et du tronc du côté droit du corps.

Çes symptômes pouvaient faire considérer le malade comme un

cérébelleux typique et, pourtant, il ne s'agissait que d'un bulbaire.

A l'autopsie, en effet, on trouva un ramollissement bulbaire aigu.

Le foyer occupait une des moitiés du bulbe, envahissait toute la

région comprise entre l'olive qui est entamée par places et les

noyaux du plancher du 4C ventricule.

Au point de vue topographique, la lésion était située en pleine

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 323

substance réticulée grise ou champ moteur de Meynert ; elle s'éten-

dait, dans le sens transversal, depuis la périphérie du bulbe (mé-

ninges comprises) jusqu'en deçà et à une certaine distance du

rapbé médian, aux confins de la substance réticulée blanche et de la

substance réticulée grise; dans le sens antéro-postérieur, depuis le

tiers ou le quart postéro-externe de l'olive jusqu'aux noyaux gris

du plancher exclusivement. Dans le ramollissement étaient donc

compris les fibres arciformes cérébello-olivaires, une partie de

l'olive, le faisceau central de la calotte, le noyau ambigu et les

libres des racines des IXc et Xe paires dans leur trajet intra-bul-

baire, le faisceau latéral du bulbe et la racine descendante de la

Vu paire. ,

Cette topographie de la lésion rend compte des principaux

symptômes observés. '

Ce syndrome cérébelleux a donc été la conséquence d'une mala-

die du bulbe. Les cas analogues sont très rares et dans les recher-

ches auxquelles s'est livré l'auteur, il n'a pu trouver que trois cas

semblables; deux cas rapportés par Nothnagel (un de Leyden et

un de Proust), et un cas de Senator cité par Grasset.

Dans cette étude, M. Leclerc déduit les conclusions suivantes :

dans les maladies du névraxe, le syndrome cérébelleux qui est la

conséquence habituelle d'une affection du cervelet peut être quel-

quefois le résultat d'une lésion siégeant dans d'autres parties qui,

a l'instar du cervelet, sont des centres d'équilibration ou bien ont

un rapport immédiat avec les fibres qui vont au cervelet ou qui

en viennent. Telle est la région bulbaire supérieure dans laquelle

l'olive, les fibres cérébello-olivaires et peut-être encore d'autres

portions, prennent une part importante à ce qu'on a appelé le sens

statique. -

A côté du syndrome cérébelleux par lésion du cervelet, il existe

donc des syndromes pseudo-cérébelleux, quant à leurs causes, et

en particulier un syndrome pseudo-cérébelleux d'origine bulbaire.

G. Carrier.,

XXVII. Tumeur cérébrale avec symptômes d'immobilité ; par

11. L. 1)oR (Société nationale de médecine de Lyon, 10 mars 1902).

M. L. Dor présente un malade qui est atteint d'une tumeur céré-

brale et qui a des symptômes de la maladie connue chez le cheval

sous le nom d'ill ! 11wbillté.

Le malade a une double stase papillaire ; mais en dehors de ce

symptôme rien n'indiquerait l'existence d'une tumeur cérébrale,

s'il ne présentait une « immobilité » comparable à celle du cheval,

provoquée chez ce dernier par l'existence de cholestéatomes dans

les plexus choroïdes. La physionomie du malade est sans expres-

s'on, elle a l'air d'un masque immobile, et depuis six mois le.

324 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

malade n'a qu'une ambition, c'est celle de rester assis sur une

chaise continuellement. Il ne se plaint que de voir baisser sa vue;

il dit qu'il a la tête lourde sans de véritables douleurs. Les réflexes

ont une légère exagération. Il a de l'anosmie. L'auteur se demande

si le cholestéatome serait chez l'homme, comme chez le cheval,

caractérisé par un syndrome particulier. G. C. '

XXVIII. Névrite périphérique des membres inférieurs. Réflexe

rotulien latéralisé; par M. Josserand [Société des sciences anédi-

cales de Lyon, 14 mai 1902).

M. Josserand présente une malade atteinte depuis deux mois

d'une névrite périphérique des membres inférieurs. Actuellement

elle présente une parésie manifeste des membres inférieurs et une

atrophie marquée des muscles des cuisses et des jambes. Elle offre

une modalité toute spéciale des réflexes rotuliens. Lorsqu'on per-

cute le tendon rotulien, la jambe, au lieu de se projeter en avant,

se déjette en dehors; d'où l'expression de réflexe rotulien latéralisé

proposée par l'auteur. Ce phénomène est probablement dû, d'une

part à l'atrophie du quadriceps fémoral incapable de répondre

suffisamment à l'excitation ; d'autre part à l'intégrité du tenseur

du fascia lata, ou plutôt, peut-être, à son hyperexcitabilité. La voie

du réflexe peut s'expliquer par une connexion, sensitive entre le

tendon du tenseur et le tendon du quadriceps. Ce phénomène peut

avoir une certaine importance dans le diagnostic entre le pseudo-

tabès polynévritique et le tabès vrai. Dans le premier les muscles

ne sont pas tous atteints en même temps et quelques-uns peuvent

se trouver normaux ou en état d'hyperexcitabilité à côté d'autres

qui sont en pleine atrophie. G. C.

XXIX. Syndrome basedowien avec enophtalmie; par M. Dupuxr

(Société des sciences médicales de Lyon, 16 avril 1902).

L'intérêt du cas présenté par M. Duplant réside dans la coïnci-

dence du recul oculaire et du syndrome basedowien. L'auteur

essaye d'interpréter ce cas ; deux hypothèses sont en présence. Ou

l'oenophtalmie dépend d'un trouble de l'innervation du sympa-

thiqne de l'oeil, comme le syndrome basedowien. Ou bien il y a

coïncidence de ce syndrome et de l'enophtalmie sans aucune rela- 1

tion entre eux.

-Dans le premier cas il faudrait admettre que l'excitation du

sympathique produit la tachycardie et les phénomènes vasculaires

observés, alors queconcuremment elle déterminerait au niveau de

l'oeil, par prédominance des fibres vaso-constrictives, la rétraction

du globe oculaire. '

Quelles que soient les théories admises (Morel et Doyon ; Aba-

die ; Jaboulay) sur les résultats de l'excitation du sympathique

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 325 .

cervical, il faut admettre que l'excitation de ce nerf s'accompagne

d'exophtalmie, alors que la paralysie de ce système détermine

l'enophtalmie. Peut-on observer des phénomènes traduisant l'ex-

citation des filets cardiaques et thyroïdiens, et la paralysie des

nerfs oculaires ? Telles sont les questions que pose M. Duplant,

tout en faisant cette restriction que dans son cas la paralysie ne

porterait que sur les fibres atteignant le muscle de Millier et

qu'une telle dissociation semble bien difficile. Provisoirement il

admet la coïncidence de l'enophtalmie dont la cause est difficile à

déterminer et du syndrome basedowien, sans qu'il existe de rela-

tions entre ces phénomènes. G. Carrier.

XXX. Cécité corticale. Absence de réaction pupillaire ; par M. Jos-

senaNn (Société des sciences médicales de Lyon, mars 1902).

Il s'agit d'une malade ayant présenté une amaurose absolue

s'étant établie progressivement en deux semaines. Le début avait

été brusque, la malade était à son travail quand elle s'aperçut

tout à coup qu'elle n'y voyait plus rien. A son entrée à l'hôpital,

la cécité était absolue y compris le point de fixation. Elle ne dis-

tinguait même pas le jour de la nuit. La réaction pupillaire fut

recherchée cinq ou six fois. Toujours on la trouva absente. La

malade se cachectisa rapidement et mourut.

A l'autopsie, on trouva un athérome très prononcé du tronc

basilaire et des cérébrales postérieures et un double ramollisse-

ment des lobes occipitaux : à droite ramollissement en bouillie

du lobe occipital occupant toute la zone visuelle ; à gauche ramol-

lissement moins prononcé, mais contemporain de l'autre, attei-

gnant la pointe occipitale et la partie inférieure du cuneus, mais

respectant les lobes lingual et fusiforme. Les bandelettes optiques

les corps genouillés et les tubercules quadrijumeaux ne présen-

taient pas de lésions macroscopiques, l'examen microscopique n'a

pas été pratiqué. '

M. Josserand attire l'attention sur deux points : tout d'abord la

simultanéité et la bilatéralité des lésions, choses très rares. Ensuite

l'absence certaine et plusieurs fois constatée du réflexe ,pupil-

laire. La lésion étant corticale, le réflexe aurait dû persister d'a-

près la loi formulée par Wernicke. Il croit donc que lorsqu'on a

des raisons cliniques suffisantes pour croire à de la cécité corticale,

il ne faut pas réformer son diagnostic sur le seul fait de l'abolition

du réflexe à la lumière. M. Josserand reste sur le terrain cli-

nique et réserve le côté physiologique de la question ?

G. Carrier.

XXXI. Troubles du mouvement chez un hystérique simulant la

maladie de Thomsen; par MM. LECLERc et AGNIEL (Société médi-

. cale des hôpitaux de Lyon, 28 février 1902). -

326 6 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

Il s'agit d'un jeune homme de dix-sept ans, cultivateur. Comme

antécédents héréditaires et personnels rien d'intéressant à noter.

Le début de l'affection semble avoir été lent et progressif. Quel-

ques mois avant son entrée à l'hôpital les parents avaient remar-

qué quelque chose d'anormal dans les mouvements de leur enfant

qui continuait néanmoins' ses occupations. Huit jours avant son

entrée il avait été très ému de la mort subite de sa grand'mere.

Examiné à cette époque le médecin fit le diagnostic de maladie de

Thomsen et le fit entrer à l'hôpital.

Ce qui caractérise le malade c'est essentiellement le retard qu'il

met à réagir quand on lui commande un mouvement volontaire et la

brusquerie et le ressaut qui caractérisent le début de l'acte. Il réagit

devant l'excitation, à l'instar d'un sujet qui est à demi éveillé ou très

distrait. Le malade n'est pas cependant amyosthénique, la pres-

sion volontaire au dynamomètre donnant une moyenne de 29 à

droite et 15 à gauche. On ne note pas de raideur musculaire pen-

dant le temps de réaction, pouvant entraver le mouvement. Les

mouvements automatiques et les mouvements de défense s'opèrent

avec le temps de réaction normal.

Les muscles réagissent normalement à l'exploration mécanique

et électrique ; pas de réaction myotonique. Les mouvements passifs

s'effectuent normalement et sans raideur. - Pas de troubles de la

coordination, ni de l'équilibre les yeux fermés;- pas de troubles

des sphincters. Les réflexes rotuliéus sont plutôt vifs et exagé-

rés ; les réflexes olécraniens et masséterins sont normaux.

Au point de vue sensitif le malade présente des zones hyperes-

thésiques et spasmogènes ; la sensibilité au tact, à la piqûre et à

la chaleur est normale. Réflexes conjonctival et laryngé très diini.

nués. La sensibilité profonde ne parait pas altérée. Le sens des

attitudes et le sens stéréognostique sont intacts; les organes des

sens sont sains. Le champ visuel n'est pas rétréci ; pas de dys-

chromatopsie.

Au point de vue psychique le malade est un solitaire ; il est peu

sociable. Il a fait ses études à l'école communale et a toujours été

des premiers de sa classe ; sa mémoire est excellente et il com-

prend bien. Habitudes d'onanisme. - Viscères sains.-Le

traitement hydrothérapique, douche écossaise, avec rééducation

des mouvements volontaires l'ont amélioré.

En comparant ces différents symptômes avec ceux de la maladie

de Thomsen, et devant la constatation de l'intégrité complète des

réflexes et des mouvements automatiques, MM. Leclerc et Angiel

concluent que chez leur sujet le neurone moteur périphériquefonc-

tionne normalement. Tous les mouvements qui peuvent s'effectuer

sans le concours du neurone moteur supérieur ou plus exactement

de l'écorce cérébrale sont normaux. Seuls, ceux qui sont volontaires

et qui exigent une influence psychique coordinatrice sont altérés.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. ' 327

- Le symptôme important est la différence du temps de réaction

entre les actes volontaires et les automatiques ; ce retard du temps

de réaction dans un acte volontaire est dû, d'après P. Janet, à

une modification des centres nerveux supérieurs qui consiste dans

la diminution de l'attention consciente. Les auteurs font de leur

malade un cérébral, un cortical et en précisant un hystérique.

C'est pour eux un cas d'aboulie hystérique simulant la maladie de

Thomsen. G. Carrier. '

XXXII. Incontinence urinaire et myélite ; par M. le professeur

Weill (Société médicale des hôpitaux de Lyon, 28 février 1002). '

31. Weill résume l'observation d'une fille de quatorze ans qui a

présenté une myélite dorso-lombaire, accompagnée de paraplégie

flasque, avec abolition de toutes les sensibilités au contact, à la

douleur, à la température, à l'électricité. Les réflexes cutanés et

tendineux étaient abolis. La malade avait perdu le sens de posi-

tion de ses membres. Enfin, la région sacrée était le siège d'une

énorme escarre très profonde et entourée d'un oedème s'étendant

au loin sur les régions voisines. Il y avait suivant la règle, une

incontinence urinaire, dite paralytique ; l'urine s'écoulait cons-

tamment, goutte à goutte, et était la principale cause de l'escarre

sacrée. Il y avait .aussi de l'incontinence fécale. Le début de la

paraplégie remontait à la fin de septembre 1901. L'enfant s'était

alité le 10 octobre ayant déjà de l'incontinence urinaire. Elle est

morte le 14 février 1902 à la clinique infantile.

M. Weiil insiste sur un point limité à l'incontinence urinaire de

sa malade. Cette incontinence qui avait tous les caractères de

l'incontinence paralytique, avec suppression du tonus du sphinc-

ter uréthral et évacuation constante de la vessie, n'était en réa-

lité qu'une incontinence par regorgement. En effet, en sondant la

malade régulièrement toutes les six ou sept heures, l'incontinence

urinaire disparaissait complètement. Le cathétérisme systéma-

tique de la vessie permit de réaliser^une véritable guérison de

cette incontinence. A mesure que la maladie progressait, il fallait

augmenter le nombre des sondages. La quantité d'urine retirée

par le cathétérisme qui était au début de l'entrée de 350 à 400

centimètres cubes toutes les sept heures, diminua jusqu'à 200 cen-

timètres cubes et à la fin à moins de 100 centimètres cubes en

sondant la malade toutes les deux heures.

L'autopsie permit de comprendre la raison de toutes ces parti-

cularités. La vessie était réduite au volume d'une petite orange,

les parois étaient rétractées, épaisses de 0 millimètres et en

poussant une injection par l'orifice vésical on ne pouvait dépasser

40 à SO centimètres cubes sans voir le liquide sourdre à travers

les orifices uretéraux. Il y avait donc rétraction progressive de

328 8 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

la vessie, diminution de sa capacité et incontinence par regorge-

ment.

M. Weill croit très probable la fréquence de ce mécanisme de

l'incontinence. Ce fait a pour lui une double importance pratique

et théorique. D'abord l'incontinence urinaire est une des causes

les plus fréquentes de la mort dans les myélites, par la provoca-

tion et l'entretien de l'escarre sacrée. Or si ce mécanisme de l'in-

continence est vrai, on pourra espérer voir évoluer plus longue-

ment les formes aiguës de la myélite.

Au point de vue théorique le cas de l'auteur ne confirme pas les

données physiologiques sur l'innervation de la vessie et du sphinc-

ter urethral. Chez sa malade il y avait conservation de la tonicité

du sphincter, mais en plus rétraction progressive de la vessie,

comme si, dépourvue de tout lien avec la moelle la vessie avait

obéi à une excitation spasmodique venue des ganglions sympa-

thiques ou des cellules nerveuses contenues dans les plexus ner-

veux vésicaux.

M. Weill cite à l'appui de son opinion des faits expérimentaux

de MM. Arloing et Chantre et de Goltz et Ewald en rapport avec

son observation, qui ont montré l'indépendance relative des

sphincters vis-à-vis de la moelle, sans cependant établir l'existence

d'une véritable contracture du corps vésical telle qu'elle existait

chez sa malade, . G. Carrier.

XXXIII. Urémie délirante ; par M. Roque (Société médicale des hôpi-

, taux de Lyon, 28 février 1902).

L'urémie cérébrale comprend trois formes différentes : une

forme convulsive, une comateuse, une délirante. M. Roque, se

basant sur six observations personnèlles, étudie à un point de vue

purement clinique la variété délirante. '

L'auteur pense que la folie brightique, pas plus que l'urémie déli-

rante ne constituent des entités cliniques. Dans l'un et l'autre cas,

il s'agit, croit-il, de délire survenant seulement chez des prédis-

posés cérébraux, à la faveur d'un trouble circulatoire fréquent à

toutes les périodes du mal de Bright, à la faveur de l'ocdéme céré-

bral. Il pense en outre, pouvoir établir que ce trouble psychique

ne peut jamais être considéré comme le signe d'une insuffisance

renale, d'une intoxication générale et qu'il n'a pas de valeur pro-

nostique.

Des six observations rapportées par l'auteur les deux premières

ont trait à deux alcooliques dont le délire a suivi l'évolution de la

néphrite. Plus aigu chez le premier malade, il a simulé l'urémie

délirante ; plus chronique chez le deuxième dont l'état général

était resté bon, on aurait pu le rapprocher de la folie brightique.

Dans les deux cas, ces délires ont eu la physionomie du délire

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 329 9

alcoolique, et les malades n'ont présenté ni intoxication, ni uré-

mie. La troisième observation est celle d'un vieillard artério-sclé-

reux qui a succombé à une attaque d'urémie avec délire. Reste à

savoir si ce délire de la période terminale a eu une origine toxique.

La quatrième et la cinquième observation visent deux jeunes

femmes, prédisposées par une hérédité cérébrale qui au cours

d'une néphrite, font des phénomènes délirants, évoluant parallèle-

ment aux lésions rénales. Les coefficients urotoxiques n'ont

'jamais indiqué d'insuffiance rénale. L'une d'elles fit de la confu-

sion mentale, l'autre, un délire à physionomie ancestrale bien

typique. Enfin dans la sixième observation il s'agit d'une brigh-

tique ancienne, ayant eu au début une hémorragie cérébrale

gauche et qui quatre mois plus tard. sans ictus, sans paralysie

reprit de l'aphasie par un de ces phénomènes de rappel, étudiés

par Pierret, fit du délire d'inanition et mourut d'urémie.

L'auteur, se basant sur ces différents cas qui sont tous impu-

tables, croit-il, à un oedème cérébral chez un prédisposé, émet les

considérations suivantes :

1° Qu'il n'a jamais été isolé dans les urines une substance

capable de provoquer le délire. 2° Que si cette substance existait

elle provoquerait un délire toujours le même, de physionomie

constante. Or les délires observés ont au contraire l'allure la plus

variable et la plus dissemblable. 3° Ces délires n'éclatent que chez

des gens ayant une tare cérébrale héréditaire ou acquise, et leur

caractère dépend de la nature de cet état du cerveau : délire

alcoolique chez les alcooliques ; délire à physionomie ancestrale

chez les héréditaires, etc. 4° Ces délires éclatent à une période

quelconque du mal de Bright, tantôt au début, tantôt à la fin; ils

peuvent coïncider avec l'urémie, mais ils ne relèvent pas d'une

intoxication générale, puisque le coefficient urotoxique est sensi-

blement le même pendant la période délirante et en dehors d'elle.

5° Dans les autopsies on ne retrouve pas l'oedème cérébral qui

disparait après la mort, mais on note de la distension et de l'hy-

dropisie des ventricules qui démontrent son existence.

L'auteur ne croit pas que le délire soit jamais le signe d'une

intoxication générale, il peut coïncider avec l'urémie mais il n'est

pas d'origine toxique. Il n'a par lui-même aucune valeur pronos-

tique. G. Carrier.

XXXIV. Liquide céphalo-rachidien et méningite chronique dans

un cas de maladie de Friedreich ; par MM. BARJON et Cadk. (Pro-

vince médicale, mars 1901, p. 136.)

MM. Barjon et Cade, à propos de l'autopsie d'un homme atteint

de maladie de Friedreich, dttirent l'attention sur deux points :

'" La formule cytologique du liquide céphalo-rachidien. Ce liquide

330 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

présentait des éléments cellulaires assez rares d'ailleurs constitués

à peu près exclusivement par des lymphocites et des globules rou-

ges.- 2° L'existence d'une pachyméningite cérébrale très accentuée,

lésion qui a été trouvée^ rarement dans les autopsies de maladie

de Friedreich.. G. C.

XXXV. Maladie de Parkinson ; contribution à l'étude des formes

unilatérales; par M. P. Grange. (Lyon mèd., n° 21, 1901, p.7G3).

M. Grange rapporte deux observations de malades atteints de

maladie de Parkinson à forme hémiplégique.

Observation I. Maladie de Parkinson. Hémitremblement

gauche. Athérome artériel et des valvules aortiques. Crises an-

goissantes nocturnes dans la région précordiale. Grippe. Mort par

pneumonie.

Ons. Il. Maladie de Parkinson. Hémitremblement droit (bras

surtout) spasmes laryngés.

Outre l'intérêt d'un tremblement parkinsonien nettement hémi-

plégique, ces deux observations présentent d'autres faits intéres-

sants. Au point de vue étiologique, absence de rhumatisme dans

les deux cas, et présence d'un nervosisme antérieur très marqué.

Absence de parésie presque totale pendant longtemps dans la pre-

mière observation et durant toute la durée de la maladie pour

l'observation II, ce qui a rendu le diagnostic facile avec le tremble-

ment d'origine organique cérébrale. Le tremblement était si carac-

téristique que les autres tremblements d'origine périphérique ou

toxique ont été facilement éliminés.

Les troubles vaso-moteurs, si fréquents en général, manquent

dans les deux cas. G. C.

XXXVI. Un cas de tétanie d'origine gastrique ; par MM. Barjon et

Cade. (Lyon médical, juillet 1901, na 29, p. 66).

MM. Barjon et Cade publient l'observation d'un malade atteint

d'accidents de tétanie manifestement liés à une gastropathie

ancienne. Cette complication des affections gastriques est fort rare,

les auteurs font en effet remarquer que, depuis le travail initial

de Kussmaul, les observations publiées n'ont pas dépassé cin-

quante. Rappelant les différentes théories pathogéniques mises

en avant par les auteurs : la déshydratation du sang, la théorie

réflexe, enfin la théorie toxique développée par Bouchard et sou-

tenue par MM. Bouveret et Devic, ils montrent combien les opi-

nions sont divergentes au sujet du mode de production de la téta-

nie d'origine gastrique.

Le malade, qu'ils ont observé, présentait le tableau symptoma-

. tique qui caractérise la deuxième forme de tétanie gastrique

individualisée pnr MM, Bouveret et Devic. Les contractures avaient

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 331 L

débuté par les extrémités, avaient gagné les autres segments des

membres et avaieut envahi les muscles de la colonne et de la

nuque. On sait que c'est une forme sévère, entraînant rapidement

la mort.

L'examen nécropsique et histologique donne les résultats sui-

vants : vaste dilatation stomacale avec sténose pylorique serrée et

présence de plusieurs ulcères en activité.

Présence au niveau et au-dessous de l'ulcération principale pylo-

rique d'une tuméfaction à limites nettes et à consistance dure.

L'examen histologique de cette tuméfaction sous-séreuse montra

qu'elle était le simple résultat d'un processus inflammatoire et

qu'il n'existait à son niveau aucune trace de dégénérescence épi-

théliomateuse. Les lésions histologiques observées sur les reins

étaient trop minimes pour qu'on puisse affirmer leur influence dans

la production des accidents toxiques tétaniques. G. Carrier.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XLV. Symptômes hystériques de la folie simple ; par F. Nissl..

- Critiques de ce mémoire; par E. SToncu. Réponse de

XissL. (Centralblalt f. Nervenhrilkunde. XXV, N. F. XIII, 1903).-

Quelques mots sur la question de l'hystérie, réplique au mé-

moire de Nissl; par Raecke. (Neurolog. Centralbl. XXI, 1902).

Grave affaire selon M. Nissl que de distinguer la véritable hys-

térie ayant ou non vraiment engendré la psychose que l'on a sous

les yeux, des accidents hystériformes imputables à cette psychose

même.

Voici par exemple une malade atteinte de folie circulaire ; dès

son premier accès, elle présente toute une série de phénomènes

hystériformes qui en imposent pour de l'hystérie. Ce sont des dou-

leurs névralgiques polyarticulaires, des douleurs abdominales

localisées, des syndromes d'astasie-abasie, des accidents convul-

sifs en rapport avec la compression d'un point du ventre, de la

contracture de la jambe en extension. Ces phénomènes propres à la

phase dépressive, disparaissent pour la plupart pendant la période

maniaque et l'intervalle lucide. Néanmoins pendant la période dé-

pressive du quatrième accès, on se demande s'il ne conviendrait

pas de pratiquer une laparotomie exploratrice, afin de la débar-

rasser des douleurs hystériques. On oubliait que ni pendant l'en-

fance, ni à l'époque de la puberté, elle n'avait eu de' syndromes ou

de stigmates de l'hystérie. Finalement le tableau carastéristique

332 , REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

de la phase maniaque ; l'identité quasi-absolue des accès; la réap-

parition inéluctable des mêmes accidents associés à la phase dé-

pressive ; leur disparition presque complète au cours de la phase

maniaque et complète au. cours des intervalles lucides; l'absence

de caractère. moral de l'hystérique, et de tout stigmate pendant

ces intervalles; tout cela imposa le diagnostic, d'autant qu'il y a

plus de dix ans que les choses durent.

Voyons, par comparaison, l'hystérie sous-jacente psychopatho-

gène. Il s'agit d'un circulaire à la phase maniaque d'un troisième

accès. Il apprend inopinément la nouvelle de la mort de son père

le voilà en proie à des convulsions épileptiformes généralisées,

qui rapidement se transforment en grands mouvements du corps

entier, mouvements de fronde, arcs-de-cercle, sans que la connais-

' sance soit considérablement troublée. Les renseignements font

connaître qu'avant son premier accès, ce malade présenta des

altérations du caractère spéciales aux hystériques, et qu'à plu-

sieurs reprises il a été pris d'analgésies et d'hyperesthésies passa-

gères ; ces perturbations se sont révélées pendant les intervalles

lucides. Une fois même, à la suite d'une vive terreur, il a perdu

la parole durant une semaine. Dans ces conditions, les con-

vulsions épileptiformes observées sont symptomatiques de l'hys-

térie.

Reste à savoir si la folie circulaire est une complication ou une

émanation de l'hystérie. Pour en décider il faut étudier le méca-

nisme des accès de folie, l'influence sur eux de l'état mental, des

accidents psychopathiques et somatiques. il faut examiner l'alter-

nance rapide et immédiate des phases morbides. Si ces aecès ont

entre eux une ressemblance mathématique, s'ils reviennent à des

intervalles de temps précis, sans cause appréciable qui les déchaîne,

c'est une hystérie compliquée de folie circulaire et non une psy-

chose hystérique.

L'hystérie en tout cas, d'après MM. Nissl et Kraepelin, c'est une

affection congétinale qui produit, par l'intermédiaire d'un pro-

cessus anatomique, un état spécial permanent du système nerveux

dont l'expression clinique est : le caractère moral hystérique, les

troubles somatiques passagers et les formes diverses d'une folie

spécifique. Ces derniers épisodes sont en rapport avec des concep-

tions d'un sentimentalisme exagéré ; ils se peuvent produire en

tout temps,et traduisent, de même que le caractère, l'actionperma-

nente de la tare nerveuse.

. Voilà pourquoi l'hystérie qui, chez les malades de la clinique

d'Heidelberg affectées de folie simple, intervenait, pour la période

- antérieure à 1890, dans le diagnostic, dans la proportion notable

de 13, 8 p. 100, se traduit depuis 1890 par celle de 1,5. Les acci-

dents hystériformes qui avant 1890 étaient de 14,4 p. 100, sont

depuis de 11,2 p. 100.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 333

Ayant reproduit le fond de la doctrine et les deux principaux

exemples de son application, nous laissons à penser les critiques

intéressantes de Storch; elles sont à lire en entier. Il faut lire

aussi la critique de l'obnubilatiou crépusculaire hystérique de

Ganser et Raecke, de la stupeur cataleptoïde de Raecke, à laquelle

se livre M. Nissl.

A A cette critique M. Raecke répond, qu'à côté de la conception

ancienne de l'hystérie, il y a lieu d'admettre un groupe spécial de

faits, celui mis en vedette par Sommer sous le nom de psychogénie

(Diagnostik der Geisleslcr·ankheiten. 1901. p. 281). Quant à nous

appuyer sur les lésions anatomiques supposées par Kraepelin, il

faut attendre qu'elles soient tirées du néant. Nous en sommes

toujours réduits à l'étude des symptômes : l'habileté consiste à

distinguer entre les symptômes essentiels et les symptômes acces-

soires, entre les stigmates propres et les manifestations acciden-

telles. L'évolution exige souvent des années. Les commémoratifs

présentent fréquemment des lacunes, trop de-lacunes. «Bref, le

praticien demeure toujours, pour établir son diagnostic, réduit -

aux symptômes du moment.»

L'obnubilation crépusculaire ne peut être tenue pour hystérique

que lorsqu'elle est greffée sur un terrain où l'on trouve les stigma-

tes de l'hystérie : c'est ce qu'a fait M. Kraepelin (EinfÜh1'lI/lg,

p. 277). Quantàlacatatonie, àl'obnubilation crépusculaire et leurs

modalités dans les diverses affections mentales, M. Raecke les

détaille et discute successivement. Il se rallie à l'opinion de Gaupp :

«Aucune investigation anatomique, si avancée soit-elle, ne nous

dispensera jamais de l'analyse psychologique et du traitement de

l'hystérie. » P. Keraval.

XLVI. La phobie du regard d'autrui ? par W. DE 13ECHTERE\V. (Cen-

tmlúlatl f. Ne1'venheilk. XXV. N. F. XIII. 1902).

Voir l'article russe de l'Obozrélzié psichiatrii, analysé dans les

Archives 2° série, XIII, p. 502, 1902. P. Keraval."

XL\'II. Histoire de la câtatonie ; par E. Arndt. (Cent1'albl. f. Yer-.

venheilk. XXV. N. F. XHL 1902). ,

L'auteur passe en revue les origines et le développement des

idées scientifiques contenues dans le vocable : catatonie, depuis

1809 jusqn'en 1901. P. Keraval.

XLV111. Psychose hallucinatoire aiguë dans un cas d'empoisonne-

ment par l'atropine ; par M1110 W.-S. Iakowenko. (Obozaérzié psi-

ettiatiii. VII, 1902).

L'observation est intéressante à raison de l'origine atropinique

et de l'évolution dont on n'a pas troublé la marche. Il s'agit d'une

334 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

paysanne de ;il ans buveuse mais bien portante qui vient à la

ville se faire soigner d'une kératite double. On est obligé de lui

instiller 16 gouttes d'une solution d'atropine qui correspondent il

0,006 millig. Immédiatement elle sent la tête lui tourner, perd

toute notion, a des visions et surtout des voix terrifiantes, délire,

s'agite, est agressive pour se défendre, comme dans le délire

alcoolique aigu. Cela dure 6 jours et disparaît en laissant de

l'amnésie. Il ne faut pas perdre de vue que le père de cette ma-

lade était un ivrogne et qu'elle-même abuse des spiritueux.

, P. KERAVAL.

LUX. De l'examen de psychologie clinique des aliénés; parG.-C.

FERRARI. (Centralblatt f. Nervenheilk, XXIV. N. F. XII, 1901).

Modèle d'examen propre à l'auteur. Mémoire écrit en français.

. P. 11HRAVAL.

L. Hallucinations de l'ouïe, alternant avec des accès de surdité

verbale et d'aphasie sensorielle chez un paralytique général ;

par Sérieux et 1[GoT (Noua. Iconog1'. de la Salpêtrière, n° 4.

1902).

Paralysie générale vérifiée à l'autopsie, ayant présenté à l'ob-

servation clinique, en plus d'un délire de persécution et de gran-

deur, des phénomènes d'excitation (hallucinations de l'ouïe) alter-

nant avec des phénomènes de déficit (surdité corticale, puis surdité

verbale). Les lésions de méningo-encéphalite diffuse présentaient

des foyers nettement circonscrits dans les régions pariétales, avec

maxima d'intensité dans les circonvolutions marginales (surtout

à gauche). Il n'y aurait donc pas lieu en présence d'hallucinations

et de symptômes de lésions en foyer surajontés au tableau clinique

commun de la P. G. d'écarter, comme on l'a fait, le diagnostic de

méningo-encéphalite diffuse. Mais plutôt de reconnaître une forme

sensorielle de cette affection en rapport avec la localisation des

degrés les plus élevés de la lésion. IL C.

LI. Démence précoce et catatonie ; par SLGLAS (Nouv. 1601lOgi'- de

la Salpêtrière, n° 4, 1902).

Entre l'opinion de Kalbaum qui fait de la catatonie une entité

morbide spéciale et celle des auteurs qui la considèrent comme un

syndrome banal pouvant se présenter au cours des affections men-

tales les plus différentes, se place l'opinion de Kroepelin, tendant a

établir que la catatonie est une variété de la démence précoce comme

l'hébéphrénie en est une autre. La discussion développée par 1 au-

teur, à propos de trois observations cliniques de démence précoce

avec catatonie, confirme l'idée de Kroepelin. 11 y aurait lieu de

considérer un syndrome catatonique composé d'un ensemble de

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 33d 5

symptômes psycho-moteurs dont le terme capital serait le négati-

visme. Sous ses formes atténuées ou incomplètes, ce syndrome se

rencontrerait dans les états vésaniques les plus divers, imbécillité,

hystérie, épilepsie, paralysie générale, démence sénile, mélancolie,

confusion mentale, délires auto et exataxiques : avec ses carac-

tères les plus complets, il serait l'apanage de la démence précoce,

dont il constituerait une variété particulière. il. C.

LU. Observations cliniques et expérimentales sur la katatonie;

par Lewis C. BRUCE. (The Journal of Mental Science, octobre 1903.)

Les conclusions tirées par l'auteur de ses recherches cliniques

et expérimentales sont les suivantes : 1° la katatonie est une ma-

ladie aiguë, toxique, avec un début et une marche bien nets, dans

laquelle les symptômes varient suivant la force de résistance du

sujet, mais sans que l'on voie jamais manquer un certain nombre

de symptômes caractéristiques qui sont les suivants : période pro-

dromique à début graduel aboutissant à la période d'invasion

aiguë avec hallucinations de l'ouïe, confusion mentale, paroxys-

mes d'excitation, actes impulsifs, spasme katatonique des mus-

cles et hyperleucocytose, qui, à la fin de la période aiguë indique^

une toxémie virulente. A la dernière période, état de stupeur avec

résistance des muscles aux mouvements passifs. 2° Même au

début de la maladie, il y a, dans 70 p. 100 des cas envirou, dans

le sérum sanguin, un ag ! ! lutinement qui parait être spécial à un

streptocoque court, qui a été isolé du sang dans un cas de kata-

tonie. 3° En infectant des lapins, soit par les voies digestives,

soit par la voie sanguine, avec le streptocoque, on provoque chez

eux un état de malaise, avec irrégularité de la température, aug-

mentation des réflexes cutanés et hébétude mentale. Chez les

lapins bien portants, la maladie tend il se terminer dans un

espace d'environ six semaines, et un état d'immunité est ainsi

créé dans leur organisme. 3° Le traitement par un antisérum

provenant de la chèvre n'a donné aucun résultat favorable.

3" L'immunisation active chez des malades ayant atteint la période

de stupeur n'adonné aucuu résultat curatif. G° L'immunisation

active à la période du début aigu de la maladie, essayée jusqu'ici

une seule fois, a donné un résultat indiscutablement avantageux,

mais sans qu'aucune des théories actuelles de l'immunité puisse

expliquer le mécanisme de ce résultat.

· Il. DE 11USi : R.I'L-CLAY.

Lllt.Note sur trois cas de folie d'origine toxique; par Emc M. Thom-

son. (The Journal of Mental Science, juillet 1903.)

Le premier de ces cas montre une connexité remarquable entre

les hallucinations sensorielles et les troubles cutanés. Le second

33G REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

présente une variété assez commune d'auto-intoxication d'origine

intestinale. Dans le troisième, l'intoxication avait pour origine la

suppuration causée par un calcul rénal. R. DE Musgrave-Clay.

LIV. La folie du haschich; par John \VAnNOCE. (The Journal of

Mental Science, janvier 1903.)

L'auteur, qui dirige un asile au Caire, est bien placé pour étu-

dier les effets du haschich : il décrit les diverses formes de folie

auxquelles le haschich peut conduire, puis il les compare avec

celles qui relèvent de l'alcool, et constate que les idées de suicide,

si communes dans la folie alcoolique, sont rares dans celles du

haschich; il ajoute que le haschich parait être en Egygte un fac-

teur d'aliénation mentale plus important que l'alcool en Angle-

terre, et que, comme facteur de criminalité, il est aussi impor-

tant en Egypte que l'alcool en Angleterre; enfin, il fait remarquer

que, contrairement à ce que l'on observe pour l'alcool, l'usage du

haschich ne produit aucune lésion anatomique caractéristique,

non plus qu'aucun trouble physique, exception faite pour le carac-

tère chancelant de la démarche. Les malades, chez lesquels le

haschich a déterminé la folie, ont une tendance particulière à

commettre des crimes. En terminant, l'auteur constate que l'usage

du Cannabis Indics parait avoir, en Egypte, des résultats men-

taux et sociaux plus graves que dans l'Inde anglaise, et qu'il

donne lieu à plus de cas d'aliénation mentale et à plus de crimes.

II. DE IOSGIi.IVE-CL : 1Y.

LV. Nouvelles observations cliniques sur la manie aiguë et parti-

culièrement la manie de l'adolescence; par Lewis C. BRUCE.

(The Journal of Mental Science, juillet 1903.)

Dans un précédent travail, l'auteur a démontré que, dans tous

les cas de manie aiguë, il existe une leucocytose qui persiste indé-

finiment après la guérison, et il a soutenu que cette leucocytose

était protectrice. Or, parmi les malades dont il s'agissait, trois

ont eu une rechute, et chez eux la leucocytose était tombée à

13.000 par millimètre cube, tandis que dans les cas de guérisou

définitive, elle se maintient aux environs de 20.000 par millimètre

cube. L'auteur décrit ensuite ce qu'il entend par manie d'adoles-

cence et constate que les symptômes ont une similitude frappante

avec ceux de la manie des adultes. IL DE Musgrave-Clay.

LVI. Douze cas de « Maladie de Korsakow » chez des femmes; par

John TURNER, (titre Journal of Mental Science, octobre 1903.)

Il y a une quinzaine d'années, Korsakow a décrit un ensemble

de symptômes qui se rencontrent très fréquemment chez les

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 337

alcooliques chroniques, et'il a donné à cet ensemble la valeur

d'un type morbide auquel il a donné le nom de psychose polyné-

vritique, et plus tard de cérébropathie psychique aiguë. Les

symptômes principaux de cette maladie sont- outre la polyné-

vrite l'amnésie et les pseudo-réminiscences. Que l'on regarde

la maladie de Korsakow comme une entité morbide légitime, ou

simplement comme un syndrome, il n'en est pas moins vrai que

les symptômes associés qui la constituent se rencontrent dans un

nombre assez considérable de cas de folie alcoolique chronique.

L'auteur, après un résumé de la littérature du sujet, publie douze

observations de cette maladie, qu'il fait suivre de quelques

remarques. Dans dix de ces cas, sinon dans les douze, la polyné-

vrite existait; dans dix cas aussi, l'alcoolisme était certain, et dans

les deux autres il était probable. L'examen des pupilles n'a rien

donné de caractéristique, non plus que l'observation du langage.

Plusieurs auteurs trouvent une connexité étroite entre la maladie

de Korsakow et le delirium tremens quatre des malades de l'au-

teur en avaient nettement présenté. Sur ces douze malades, sept

ont suffisamment guéri pour sortir de l'asile; trois sont encore à

l'asile; deux sont morts. L'auteur termine par quelques considé-

rations sur l'anatomie pathologique de la maladie de Korsakow

(d'après les travaux étrangers) et sur la pathogénie des symp-

tômes. Il. de Musgrave-Clay.

Lïll. Un cas de cysticerque du cerveau ayant causé la folie; par

Lui. Sm : LAIR-(3LACK. (The Journal of Mental Science, janvier 1903.)

La présence de cysticerques ayant déterminé l'aliénation men-

tale est excessivement rare. Il s'agit d'un malade qui fut admis à

l'asile comme étant atteint de manie aiguë, et dont l'état ne fit

que s'aggraver progsessivement. Il était incohérent, sa démarche

était chancelante, il était malpropre, destructeur bruyant, et avait

fréquemment des convulsions épileptiformes, unilatérales, mais

; non toujours du même côté. A l'autopsie, on trouva un excès de

liquide cérébro-spinal, une congestion généralisée des vaisseaux x

¡ cérébraux, de la congestion des poumons, du l'oie et des reins et

un épaississement de la valvule mitrale. A la région frontale, on

trouvait, disséminés, des cysticerques adhérant à la pie-mère et

enchâssés dans la substance grise. Au niveau de l'aire motrice et

particulièrement au voisinage de la scissure de Rolando, ils

. étaient très nombreux, couvrant toute cette surface de petites

vésicules semi-transparentes, à peu près de la grosseur d'un pois.

Ils étaient rares au niveau de l'aire sensorielle, ainsi qu'à la base;

mais ils étaient enfouis très profondément dans les parois des

[ ventricules latéraux; la surface ventriculaire de la couche optique

} et le corps strié en étaient couverts. ! j Archives, 2' série, t. XVII. 22

338 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

Dans le quatrième ventricule, cinq kystes étaient suspendus par

des pédicules minces à la fine membrane qui tapisse la surface

libre du ventricule et flottaient dans le liquide cérébro-spinal ;

rien au cervelet. Tous'les kystes paraissaient avoir leur origine

dans la pie-mère; il y en avait certainement plusieurs centaines

dans le cerveau, et ils étaient tous à peu près de la même gros-

seur, mais d'âge différent. A la section des muscles, on trouvait

des cysticerques entre les faisceaux; ils étaient surtout abondants

dans les muscles intercostaux et le diaphragme, rares dans le

muscle cardiaque et dans le tissu consécutif sous-péricardique.

On n'en a pas trouvé dans le tissu connectif cutané, ni dans les

poumons, le foie et la rate, mais il y en avait dans le tissu con-

nectif qui entoure les reins. L'auteur termine son travail par

l'observation d'un cas analogue qui lui a été communiqué parle le

Dl' Conry, de la colonie du Cap. It. DE jIUSGIiAVE-CL.1T.

LVIII. Un cas d'anévrysme; par Robert Pucn. (The Journal of

- Mental Science, juillet 1903.)

Observation curieuse d'un homme de trente-sept ans, atteint de

paralysie générale qui succomba à la rupture dans la trachée d'un

anévrysme de l'aorte. Ce cas est remarquable par l'absence de

tout signe physique et de tout phénomène de compression pou-

vant faire penser à un anévrysme. Le malade était au lit depuis

plusieurs jours et l'on ne pensa à l'anévrysme que vingt-quatre

heures avant la mort, en présence d'une toux métallique et d'une

crise de dyspnée. R. de 31USGRAVF-CL.Y.

L1X. OEdème malin chez un mélancolique : rapide terminaison

fatale; par li.-D. Hotchkis. (The Journal of Mental Science,

juillet 1903.)

Il s'agit d'un 'homme de cinquante-neuf ans atteint démets

colie qui, ayant glissé sur le parquet fit une chute qui détermina

' une légère conpure au-dessus du sourcil droit. Cinquante-cinq

heures après il succombait à un érysipèle oedémateux ou oedème

malin. Il n'y eut pas d'élévation de température ; celle-ci resta

même au-dessous de la normale, c'est le contraire de ce que l'on

observe ordinairement. Le tissu cérébral était oedematié ainsi que

les poumons. Malgré l'oedème cérébral aucun signe de comptes-

sion ne fut constaté. Le cas' a paru digne d'être rapporté, parce

qu'il montre jusqu'où le taux de la vitalité peut être abaissé chez

les mélancoliques, et avec quelle facilité ces malades peuvent

devenir la proie de n'importe quel processus infectieux.

R. DE DIUSCR.1VG-CLAI'.

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 29 février 1904. Présidence de M. Brunet.

Paralysie générale et syphilis cérébrale.

M,l", TISSOT, interne à Villejuif, communique l'observation d'une

femme de trente-trois ans, syphilisée à vingt ans et entrée à Ville-

Evrard avec des signes de paralysie générale ; elle y exprime un

délire absurde d'énormité, de grossesse et d'accouchement, est

sujette à des hallucinations de l'ouïe et de la vue. Elle meurt au

bout d'un mois, en pleine déchéance, et l'autopsie montre au

niveau de la zone motrice gauche une ulcération corticale avec

ostéité hypertrophique du pariétal. A côté de ces lésions spéci-

fiques, on constate les lésions ordinaires de la paralysie générale,

tant macroscopiques qu'histologiques. Or, durant la vie, cette

malade n'a jamais eu de troubles paralytiques ou convulsifs, ni

d'ophtalmoplégie, rien qui pût faire soupçonner les grosses lésions

qu'elle portait dans son cerveau ; elle eut seulement quelques acci-

dents apoplectiques dont les suites furent toujours très vite dissi-

pées. Cette association de lésions diffuses de paralysie générale et

de lésions locales de syphilis est assez intéressante, car elle peut

expliquer la marche rapidement fatale de la maladie.

M. TOULOUSE fait ressortir que les idées de grossesse se sont sur-

tout montrées pendant la phase d'expansion, ce qui est la caracté-

ristique d'un état démentiel.

M. Vallon rappelant que les hallucinations de la vue sont rares

dans la paralysie générale, demande si la localisation des lésions

pauvait les expliquer.

M. TISSOT. Les lésions étaient surtout accusées au lobe fron-

tal. , ,

M. Vallon. La rareté de l'association des lésions diffuses de

la paralysie générale, avec les lésions circonscrites de la syphilis,

explique pourquoi beaucoup d'observateurs nient l'étiologie syphi-

litique de la paralysie générale. CD

111, BRUXET l'ait remarquer qu'il est rare de trouver des adhé-

rences aussi étendues que celles dont il est question dans l'obser-

vation de M. Tissot.

340 SOCIÉTÉS SAVANTES.

M. PACTET, L'association des lésions syphilitiques avec celles

qu'on rencontre habituellement dans la paralysie générale, se ren-

contre beaucoup plus fréquemment que 'ne le pense M. Vallon,

M. Klippel a décrit cette concomitance, dans ce qu'il appelle les

paralysies générales associées.

Délire consécutif à des pratiques spirites.

M. DUHEM rapporte l'observation d'un cas de délire consécutif

à des pratiques spirites. Il s'agit d'un homme de cinquante-deux

ans, sondeur. Rien à signaler dans ses antécédents héréditaires et

personnels. Pas d'éthylisme. Il se rend à une société de spirites, et

au bout de quatre ou cinq séances, devient médium intuitif, puis

semi-mécanique, puis purement mécanique. En même temps se

développent chez lui des phénomènes hallucinatoires aussi nom-

breux que variés. Ce sont d'abord des voix qui l'insultent et cher-

chent à le détourner de son travail, pour le malade ce sont'les

mauvais esprits qui le persécutent, puis les bons prennent le des-

sus, lui prédisent un grand avenir et lui enseignent la haute phi-

losophie spirite. Il a ensuite plusieurs visions analogues aux hal-

lucinations du délire onirique et se rapportant plus ou moins à

ses interprétations de l'au-delà auxquelles se rapportent déjà ses

hallucinations auditives. En même temps se produisent chez lui

des troubles de la sensibilité générale et des troubles génitaux qui

développent chez lui des idées de perséculion. Néanmoins, le

malade s'observe, et comme les prédictions que lui font ses voix

ne se réalisent pas, il arrive à se rendre compte qu'il n'est que le

jouet d'hallucinations diverses et vient se faire soigner.

La rapidité avec laquelle se sont développés ces différents trou-

bles chez lui s'expliquent peut-être par certains phénomènes ana-

logues à ceux qu'on rencontre chez certains hystériques : inégalité

variable de la pupille, sensibilité troublés (anesthésie et h3·peres-

thésie se superposant), réflexes exagérés un jour, diminués le len-

demain. Le délire systématisé mystique n'aboutit pas chez lui.

Seules, quelques idées de persécution subsistent en rapport avec

ses troubles de la sensibilité générale et de ses fonctions géné-

siques. Il est remarquer que l'écriture habituelle du malade se

modifie quand il écrit sous l'influence des esprits.

M. Vallon demande si les hallucinations de la vue n'étaient pas

en rapport avec des excès alcooliques.

M. DUHESIIE. Le malade était très sobre.

- M. Christian ne constate pas une grande différence entre les

deux écritures qu'il a sous les yeux.

M. Philippe. Une écriture automatique *est toujours plus

grosse que l'écriture normale. De même, quand on veut changer

son écriture, on amplifie généralement les caractères.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 341

Délire spirile.

11. Marie. - Les conceptions spiiites peuvent se refléter dans

les conceptions délirantes diverses. Comme toutes les hypothèses

mystiques, le spiritisme peut être utilisé par les malades pour s'ex-

pliquer leurs troubles mentaux. Croyant innover, ces malades

reviennent à la phase des conceptions mystico-fétichistes, selon la

loi d'A. Comte.

Il n'y a pas de folie spirite distincte, mais le spiritisme est sus-

ceptible de colorer d'un mysticisme particulier toutes les psychoses,

car toutes peuvent donner lieu à des troubles psycho-moteurs. On

peut ainsi distinguer des délires épisodiques de médiumnité ~ou des

délires systématisés progressifs. - '. ,

Les premiers forment la transition entre les folies proprement

dites et les automatismes symptomatiques névrosiques. Les dégé-

nérés atteints de bouffées délirantes à teinte spirite, commencent

souvent par présenter des automatismes graphiques ou autres en

rapport seulement avec l'hystérie. 1

Les pratiques exagérées du spiritisme attirent ces sujets. Elles

peuvent contribuer à les précipiter dans la voie des psychosténies

dégénératives jusqu'alors latentes. La médiumnité n'est pas facile-

ment délirante ; il y a le médium à éclipse momentanée et volon-

taire, et le médium aliéné, c'est-à-dire non maitre de se ressaisir

après la séance de médiumnité. Entre les deux, il y a la même

différence qu'entre le mystique convaincu qui s'hallucine par cer-

taines pratiques pieuses appropriées, mais revient à lui, et le déli-

rant mystique, jouet d'illusions et d'interprétations délirantes con-

tinues.

Les pratiques spéciales mystiques ou spirites conduisant à

l'hallucination voulue des centres moteurs ou sensitivo-sensoriels

sont comparables à l'intoxication de l'ivrogne qui obtient l'ivresse

sans arriver fatalement au délire alcoolique. La répétition de l'un

peut cependant conduire à l'autre.

Dans les délires persistants et systématisés à teinte spirite, il en

est, et c'est le plus grand nombre, où s'observe la médiumnité et

l'automatisme graphique en rapport avec les trois phases de l'évo-

lution délirante : phase de persécution; phase de mégalomanie ?

phase mixte intermédiaire (ou d'emblée en certains cas). '

D'autres réalisent des délires mélancoliques chroniques, à teinte

spirite, correspondant aux démonopalhies internes et aux délires

dénégation de Cotard. Enfin, les dissociations psychiques aboutis-

sant à l'automatisme graphique plus ou moins semblable à celui

des médiums et, comme telles, attribuées au spiritisme par les

malades, peuvent s'observer à litre d'épisode chez toutes les autres

.catégories d'aliénés, toutes peuvent, en effet, offrir l'automatisme

342 SOCIÉTÉS SAVANTES.

psychique comme phénomène accessoire au même titre que l'halo

lucination ordinaire plus ou moins caractérisée.

La folie quelle qu'elle s'oit, n'est-elle pas toujours caractérisée

par l'altération de la synthèse mentale, terrain propice à tous les

automatismes psycho-moteurs et autres ? Marcel Briand.

SOCIETE DE NEUROLOGIE

f

' Séance du 3 mars 1904. Présidence de M. DÉJERIi'OE.

Compression du nerf médian par ossification probable du brachial

antérieur, ](é1'atodel'mie palmaire limitée à la zone du médian.

M. F. Dainville. Quinze jours après une contusion grave du

coude gauche, apparition d'une tumeur dure, mobile et progres-

sivement croissante, sous le tendon du biceps et au niveau du bra.

chial antérieur. Surfaces articulaires et osseuses intactes (radio-

graphie). Paralysie des muscles de l'avant-bras et de la main

innervés par le médian. A la main troubles sensitifs (anesthésie

totale) et troubles trophiques correspondants, caractérisés par une

kératodermie tranchant nettement sur les régions saines voisines.

- Anesthésie acoustique.

M. EGGER, Quand on fait vibrer un diapason sur la moitié hé-

mianesthésique du crâne d'un hystérique, il ne détermine aucune

perception sonore, même si l'instrument vibre tout près de la ligne

médiane. Cependant les vibrations physiques se propagent dans

tous les sens et atteignent les deux appareils acoustiques. Il en est

de même dans l'hémianesthésie organique comme l'a montré un

cas d'hémianesthésie absolue, due à la compression qu'exerçait

une tumeur sur la.V° et VIIIO paire et le corps restiforme du côté

gauche. Dans'1'hémianesthésie organique de l'hémiplégie où l'in-

tensité de l'anesthésie n'est jamais aussi complète que dans l'hys-

térie, la perception sonore est considérablement affaiblie. Chezles

ataxiques ayant perdu la sensibilité osseuse, le son que produit le

diapason, vibrant sur les parties anesthésiées, n'est plus perçu.

Une ataxique, avec anesthésie osseuse des quatre membres, n'a

plus aucune perception sonore quand un puissant diapason vibre

sur un point quelconque du squelette anesthésie. Il y a quatre ans,

le sternum et les clavicules transmettaient encore puissamment le

son, aujourd'hui ces os, étant atteints eux aussi par l'anesthésie

osseuse, la perception sonore est de même abolie. Chez le sourd,

SOCIÉTÉS SAVANTES. 343

on constate le phénomène de l'hyperparacousie, c'est-à-dire là

faculté de percevoir des tonalités quand le diapason vibre sur le

squelette. Cette faculté, existant déjà chez l'homme normal,.ac-

quiert un grand développement et affinement chez le sourd. Le

sourd, n'entendant plus le diapason, vibrant dans le voisinage

immédiat de la VIGIE paire, perçoit une sensation sonore beaucoup

plus puissante que l'individu normal, quand le diapason vibre sur

une des parties les plus éloignées des oreilles. Il se fait donc chez

le sourd un aflinement de la sensibilité générale comme chez

l'aveugle. Ces observations rendent probable l'idée que les nerfs

de la sensibilité générale jouent un rôle actif dans la transmission

du son, par excitation rolidienne. Cette idée ne contredit aucune-

des théories actuelles concernant le mécanisme de l'audition. L'au-

dition par les nerfs de la sensibilité générale doit être considérée

comme la plus ancienne au point de'vue phylogénitique, reléguée

au second plan depuis l'apparition d'un appareil acoustique spé-

cialisé.

IL BO : OEIER. - L'acoustique dérive de la sensation tactile et tient

à une variation de pression moléculaire, ce qui vient à l'appui des

faits de M. Egger.

Le faisceau pyramidal direct dans le cordon antérieur

de la moelle.

11 ? DÉJERINE, au moyen de très nombreux cas de lésions corti-

cales avec pièces, préparations et figures, discute l'opinion de

MM. Marie et Guillain sur l'origine des fibres pyramidales directes

et leur situation dans le pied du pédoncule et reprenant le schéma

de Meinert, elle démontre que le pied du pédoncule cérébral et la

pyramide bulbaire ne contiennent que des fibres d'origine corti-

cale. De cette communication il ressort très clairement que le fais-

ceau pyramidal direct dégénère à la suite de toute lésion encépha-

lique dans l'aire pyramidale et que la valeur de cette dégénéres-

cence varie, non pas avec le siège de la lésion, mais selon que

l'individu possède plus ou moins de fibres pyramidales directes, à

dégénérescence pyramidale égale.

Défense de la théorie du neurone.

M. AzouLaY présente de belles préparations de cellules et de

fibrilles nerveusès par le nouveau procédé au nitrate d'argent et

à l'acide pyrogallique de Cajal. Ce nouveau mode de coloration

permet de montrer l'inanité des récentes et nombreuses attaques

contre la doctrine du neurone.

M. Déjerine insiste, montrant qu'en neuropathologie il est de

plus en plus démontré qu'il y a contact et non continuité entre les

extrémités opposées de deux -neurones. Les histologistes purs

344 SOCIÉTÉS SAVANTES.

s'égarent dans des discussions de procédé, se reprochant les uns

aux autres de colorer plus ou moins et perdant la réalité des faits.

M. GRENET présente un cas de cyphose avec ankylose partielle

du rachis, accompagné d'atrophie des muscles spinaux.

L'émission des rayons N'dans quelques cas pathologiques.

MM. Gilbert Ballet et DLÜEIt31. Après avoir essayé plusieurs

modèles d'écrans, les auteurs ont adopté le dispositif qui consiste

à placer un écran de 5 millimètres sur 3 à l'une des extrémités

d'un tube creux de plomb de 5 centimètres de long, dont l'autre

bout est appliqué sur la partie qu'on se propose d'explorer.

Leur examen a porté sur un myopatbique atteint d'atrophie

complète du deltoïde, incomplète des muscles de l'avant-bras avec

intégrité des muscles du visage. La phosphorescence de l'écran

était normale à la face, moins marquée à l'avant-bras, très affai-

blie au deltoïde. L'émission des rayons N paraît donc, dans ce cas,

directement proportionnelle au degré d'atrophie, musculaire. Dans

trois cas de névrite (polynévrite toxique, névrite saturnine unila-

térale des extenseurs, paralysie périphérique du facial), ils ont

constaté, en comparant les muscles symétriques du côté sain et du

côté malade, un affaiblissement marqué de l'éclat de l'écran sur

les muscles malades. Plusieurs paralysies Infantiles ont été exa-

minées et toujours sur les muscles paralysés, les auteurs ont pu

constater une phosphorescence bien moindre que sur les muscles

similaires du côté sain.

La conclusion qui en découle est, qu'il y a diminution de l'émis-

sion des rayons N au niveau des muscles paralysés ou atrophiés

dans la myopathie, les névrites, les polynévrites, c'est-à-dire dans

les lésions du neurone moteur périphérique.

Les auteurs ont constaté le contraire dans des cas d'altération

du protoneurone moteur. Dans les hémiplégies anciennes avec

contracture par lésion cérébrale et chez une femme atteinte de

paraplégie spasmodique, les muscles paralysés augmentaient de

beaucoup la luminosité de l'écran. Enfin, chose-inattendue, dans

deux paralysies hystériques flasques (une hémiplégie, une mono-

plégie), il y avait également une exagération de la phosphores-

cence du côté paralysé.

Ganglions rachidiens dans le tabès : '

M. Thomas a examiné systématiquement et comparativement

avec des ganglions de sujets indemnes de myélopathie des gan-

glions rachidiens de nombreux tabétiques. Il a toujours trouvé les

cellules nerveuses de ces ganglions altérées et, cela d'autant plus,

qu'on se rapproche des régions lombaire et sacrée. 11 y a surtout

disparition de nombreuses cellules. F. BOISSIER.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 345

SOCIÉTÉ D'IIYPNOLOGI>; ET DE PSYCHOLOGIE

Séance du mardi 1 décembre 1903, Présidence de M. Jules Voisin.

Paralysie vésicale, d'ovine hystérique, guérie par un procédé

psychothérapique.

M. DEI10 : \CHY. Un homme de vingt-cinq ans présente, à la

suite d'une grosse émotion, une paralysie vésicale telle que pen-

dant trois semaines consécutives on est obligé de le sonder ; chose

curieuse, il présente de l'anesthésie rectale, anale et uréthrale. Je

lui ai administré des pilules de bleu de méthylène et il se remit

à uriner abondamment, tout seul, le jour où je lui en fis la sugges-

tion.

La valeur thérapeutique de la suggestion hypnotique.

M. DAMoGLOU (du Caire). L L'hypnotisme est devenu une bran-

che légitime de la neurologie ; tout praticien doit être avant tout un

thérapeute et, lorsque l'occasion s'en présente, ne pas hésiter à

recourir à la psychothérapie qui,bien appliquée, soulage toujours,

guérit souvent et ne nuit jamais. Témoins les cas suivants guéris

par la suggestion hypnotique et dont l'auteur rapporte l'observa-

tion complète : crises d'li3,stéro-neurastliénie, constipation opiniâ-

tre, néoralgies, paroxysme d'angoisse, spermatorrhée, etc.

Deux ans de psychothérapie à Sao-Paulo (Brésil).

M. JAGUARIBE. Depuis deux ans que j'ai fondé à Sao-Paulo

(Brésil) un Institut psycho-physiologique,j'ai donné 8 247 consulta-

tions. Parmi les résultats thérapeutiques les plus marquants, je

citerai les guérisons suivantes : 269 alcooliques, 27 choréiques,

29 dysménorrhées, 30 neurasthéniques, 95 cas de crises hystéri-

ques, 22 d'incontinence d'urine, 469 de névralgie ou migraine,

52 de paralysies diverses, et, en outre, des cas d'oedème hystérique,

de diarrhée chronique, de mutisme, surdité ou cécité hystérique, de

verrues, etc., etc.

L'auteur rapporte quelques observations marquantes de mutisme,

de paralysie et de chorée; dans tous ces cas, la suggestion hypno-

tique amène la guérison complète.

Le traitement hypnotique dans les maladies organiques.

M. PENNITZ6Y (de Saint-Pétersbourg) rapporte l'observation de

sept malades de la clinique de Bechterew et corrobore l'opinion de

346 SOCIÉTÉS SAVANTES.

ce dernier, à savoir que, dans les maladies organiques du système

nerveux, on peut parfois, grâce au traitement hypnotique, complè-

tement restituer une fonction perdue. Même chef des tabé-

tiques, la suggestion hypnotique peut améliorer la marche, les

crises gastriques, les troubles vésicaux et surtout créer un état mo-

ral excellent qui fait que le traitement spécifique, par exemple,

est suivi avec une grande docilité. ,

- Un cas de mutisme prolongé.

M. Berillon. - Je vous présente un homme de quarante-quatre

ans qui, depuis la mort de sa femme, survenue il y a dix-huit

mois, présente un mutisme complet. Il est resté un excellent ou-

vrier ; mais rien, ni personne ne peut lui arracher une parole. Je

me demande si nous sommes en présence d'un vésanique ou d'un

homme qui a simplement fait avec lui-même le pacte de ne plus

parler. En tout cas ce fait soulève une question importante de mé-

decine légale. Supposons qu'à la suite d'une bagarre, d'une fausse

dénonciation, ou d'une méprise il soit arrêté. S'il ne répond pas à

l'interrogatoire du Juge d'instruction, son mutisme ne sera-t-il pas

interprété en faveur de sa culpabilité ? Des cas analogues se sont

rencontrés dans les Annales judiciaires. Parmi les nombreuses

sectes religieuses de la Russie. 11 en est une qui considère le si-

lence perpétuel comme la condition principale du Salut. Poursui-

vis en justice, ces fanatiques ne veulent point répondre aux ques-

tions qu'on leu adresse sur leur âge, leurs occupations, leur état

social; et tout le temps que dure le procès, ils ne prononcent pas

une parole. Ils écoutent avec la plus grande indifférence l'arrêt qui

les condamne à l'exil et quittent la salle sans dire un mot. Il sem-

ble que le mutisme de cet homme soit complètement voulu comme

cela arrive dans la secte dont je viens de parler.

M. VOISIN. - Ce malade a dû présenter de la confusion mentale

après la mort de sa femme; il est maintenant beaucoup moins con-

fus et semble s'acheminer vers la guérison ; il s'est vraisemblable-

ment fait à lui-même le serment de ne plus parler ; il a dû, pour

des raisons que nous ignorons s'imposer ce mutisme 'comme une

punition. Je suis tout à fait d'avis que le traitement hynotique

auquel M. l3ÉaiLLOa a commencé à le soumettre facilitera la guéri-

son.

L'analgésie obstétricale et la suggestion éthyl-mélhylique.

M. Paul Farez. Une primipare, arrivée au terme de sa gros-

sesse, est en travail depuis trois heures du matin. A six heures du

soir, la dilatation est comme deux francs et reste stationnaire

pendant trois heures. La parturiente, énervée par la douleur, de-

vient intraitable ; dans l'espoir de moins souffrir elle se couche sur

bibliographie. 347

le côté, en chien de fusil : elle refuse de se tenir sur le dos et de

pousser. Je la soumets à la narcose éthyl-méthylique, pendant

deux ou trois minutes : la douleur est complètement jugulée. Pen-

dant Ja période d'hyponarcose qui précède le retour à l'état de

veille, je fais des suggestions, grâce auxquelles l'analgésie persiste

après la cessation de la narcose : la paturiente est tout à fait

calme, ses contractions deviennent régulières, elle pousse de toutes

ses forces très utilement, d'une manière soutenue et prolongée.

sans se plaindre du tout. Au bout d'une demi-heure, la douleur

reparait : nouvelle narcose, avec suggestion pendant l'hyponarcose,

maintien de l'analgésie pendant une autre demi-heure, contrac-

tions régulières, suivies, soutenues et indolores. L'accouche-

ment ne tarde pas à se terminer dans d'excellentes conditions.

M. BERILLO1V. J'ai 11101-llléllle, à ma clinique, essayé toutes sor-

tes d'anesthésiques ou d'hypnotiques, pour renforcer l'hypotaxie

et préparer un terrain favorable à la suggestion' curative : chloro-

forme, éther, protoxyde d'azote, morphine, trional, etc. Les uns et

les aures m'ont paru présenter des inconvénients et des dangers

divers qui m'ont fait presque complètement renoncer à leur emploi.

Les récentes publications de M. Paul Fanez doivent arrêter notre

attention, puisque la narcose méthyt-éthytique permet,par exemple,

de traiter par la suggestion des obsédés non hypnotisables. Toute-

fois, il y a lieu de s'assurer si cette narcose élhyl-méthylique est

réellement exempte de tout danger. Dans ce but, je propose que

- la Société nomme une commission, composée de médecins et de

vétérinaires, laquelle étudiera sur des animaux, les effets physio-

logiques des anesthésiques en général, des dérivés de l'éthane et

du méthane, en particulier. (Cette proposition est adoptée. Sont

nommés membres de la Commission des anesthésiques : MM. VOI-

SI, iil.lG\II\, 13RILLON, FAI\EZ, DE Bourgade, DElIOXCHY, médecins et

MM. Lépinay, GHOLLET, LAYRAULT, vétérinaires.

Lettre autographique de James Braid.

M. BMULLON communique à la Société une lettre autographe de

James Braid, écrite à son fils, étudiant à Edimbourg et datée du

12 mai 1814. Dans cette lettre, Braid interprète avec un remarqua-

ble esprit critique quelques faits de prétendue clairvoyance som-

nambulique.

BIBLIOGRAPHIE.

X, Archives de médecine expérimentale et d'anatomie pathologique,

publiées par Grancher, Joflroy, Lépine, secrétaires de la rédac-

348 bibliographie.

tion, MM. Achard et Wurtz. Masson et Cie, éditeurs. Cette belle

publication, qui parait tous les deux mois, renferme les articles

suivants, relatifs au système nerveux :

- - 10 En 1902 : Ch. Achard et Léopold Lévi. Recherches cliniques

sur l'élimination de l'éther par les poumons. P.-Armand Delille.

Réactions des méninges à certains poisons du bacille tuberculeux

humain. F. Cathelin. Détermination des divers équivalents de

la cocaïne injectée directement sur la bulbe du chien. V. Cornil

et P. Coudray. Etude expérimentale sur la réimplantation de la

rondelle crânienne après la trépanation chez le chien et le lapin.

- ni. Deguy et Benjamin Weill. Sur la thrombose cardiaque avec

embolies dans la diphtérie. G. Durante. Du processus histolo-

gique de l'atrophie musculaire. E. Maurel. Contribution à

l'étude expérimentale du bromhydrate neutre de quinine.

D. Mezincesco. Les modifications du sang après 'l'extirpation du

corps thyroïde. N. Vaschide et Ci. Vurpas. Considérations

pathologiques sur certaines monstruosités à propos d'un cas de

monstre anencéphale.

2° En 1903 : Ch. Dopter. Etude pathogénique des paralysies cen-

trales de nature auto-toxique. - Laignel-l.avastine. Cytologie ner-

veuse d'un cas de tétanos.- A. Zinno. Les lésions de centres ner-

veux produites par la toxine tétanique.

XI. L'Année psychologique, publiée par A. BliNET, vol. in-8° de

gaz pages. Paris, Schleicher frères et C ? éditeurs, 1903.

Comme pour les années précédentes, l'Année psychologique de

1902 (IXe année) consacre sa première partie aux mémoires origi-

naux. Nous y trouvons le résultat d'une enquête faite sur le senti-

ment de la colère chez les enfants, par M. Malapert, un article de

M. Bourdon sur la distinction des sensations des deux yeux, et

enfin une série de mémoires dus à M. A. Binet sur la sensibilité. La

deuxième partie comprend des analyses bibliographiques d'ou-

vrages français et étrangers sur la psychologie physiologique, l'an-

thropologie, la psychologie pathologique, et la psychologie com-

parée.

Une table bibliographique termine le volume et fournit aux inté-

ressés la liste de tous les articles ou mémoires parus durant

l'année précédente, tant en France qu'à l'étranger, sur toutes les

questions se rattachant de près ou de loin à la psychologie, depuis

l'anatomie et la physiologie du système nerveux, jusqu'à la patho-

logie nerveuse, la psychologie génétique, individuelle et sociale.

Cette table bibliographique a été composée par le professeur War-

ren avec la collaboration de savants de divers pays. J. B.

VARIA.

XIVe CONGRES S

DES 11ÉDECINS ALIÉNISTES ET NEUROLOGISTES DE FRANCE

ET DES PAYS DE LANGUE FRANÇAISE.

(Pau leur-7 7 Août 1904.)

Le XIVe Congrès des médecins aliénistes et neurologistes de

France et des pays de langue française se tiendra cette année à

Pau, du 2e au 7 Août, sous la présidence de M. le professeur Rnis-

sauD. Les questions suivantes sont l'objet de rapports : 1° Psy-

chiatrie. Des Démences véceniq2ves. - Rapporteur : M. le Ur

DERNY, de Paris. 2° Neurologie. Des localisations motrices

dans la moelle. Rapporteur : NI. le Di. SANO, d'Anvers. - 3° Assis-

tance. Des mesures ci prendre contre les aliénés criminels. Rap-

porteur : M. le D' KERAYAL, de Paris. 4° Communications

diverses. - N.-B. Les discussions et communications ne peuvent

être faites qu'en langue française. ,

Excursions. La proximité de l'Espagne, de l'Océan et des

Pyrénées a permis d'organiser une série d'excursions faciles, variées

et intéressantes. Des réductions de tarif seront très vraisemblable-

ment consenties, comme précédemment, par les différentes Com-

pagnies de Chemins de fer, ainsi que par les principaux Hôtels de

Pau. Un programme détaillé des travaux et des excursions sera

publié, à bref délai, et adressé à tous les membres du Congrès.

Le Congrès comprend : 1° Des Membres adhérents (docteurs en

médecine) ; 2° Des Membres associés (dames, membres de la famille,

ou étudiants en médecine, présentés par un membre adhérent.

Les asiles qui s'inscrivent pour le Congrès figurent parmi les

membres adhérents. Le prix de la cotisation est de 20 fr. pour les

Membres adhérents et de 10 fr. pour les Membres associés. Les

membres adhérents recevront, avant l'ouverture du Congrès, les

trois rapports. Ils recevront, après le Congrès, le volume des

Comptes rendus. Adresser les adhésions et communications à

M. le Dr GIRU ? secrétaire général du Congrès, médecin-directeur

de l'Asile public des Aliénés de Pau. ZD

Assistance DES. épileptiques

Malade dans la rue. Al heure 30 du matin, deux marins

passant dans la rue de l'Armedieu, ont trouvé un homme correc-

tement vêtu étendu sur le pavé et en proie à une violente crise

330 . varia.

épileptique. Un agent ayant voulu le relever pendant qu'un de ses

collègues allait chercher un fiacre, a été mordu par le malade et à

eu sa pèlerine déchirée. On-a fait transporter l'épileptique, dont

- on n'a pas pu connaitre le nom à ce moment, à l'hôpital civil.

(Petit Var, 15 février.) D'où la nécessité de laisser les épilepti-

ques revenir à eux tranquillement et de se borner à les surveiller.

Meurtre non motive, commis par une épileptique : Hue<t're'e.Une

femme de cinquante ans avait, à la suite d'une maladie subie à

l'âge de trente ans, souffert d'épilepsie avec accès de petit mal.

Elle était parfois irritable et violente avant et après ses accès, sans

cependant s'être montrée réellement dangereuse. Un jour, sans

motif plausible, elle assomma un vieillard à coups de tisonnier.

Elle se trouvait alors en état de stupeur à la suite d'un accès. A

l'arrivée du médecin, peu après le meurtre, ses idées étaient encore

confuses et l'état de stupeur continuait. Il en fut de même à l'asile

pendant les premiers temps ; plus tard, il y eut plutôt alternance

de périodes de stupeur et d'irritabilité; la mort survint alors

qu'elle était en état soporeux.

A l'autopsie, on trouva une exostose ossifiée à la fosse temporale

gauche. (Journal de Neurologie de Bruxelles, du 5 mars 1904).

LES ALIÉNÉS EN LIBERTÉ

Mme Braun, âgée de soixante-six ans, a été trouvée, mercredi

soir, carbonisée dans la chambre qu'elle occupait chez sa fille ; elle

ne jouissait pas de toutes ses facultés mentales et l'on pense qu'elle

aura mis involontairement le feu à ses vêtements. (Le Semeur de

l'Oise, 6 mars.)

Suicide d'une pauvre fille. Le 8 mars, vers midi, Mule Alphon-

sine Clément, 02 ans, née le 11 mars 1841 à Plessier-sur-Bulles

(Oise), journalière, demeurant à Beauvais, a été trouvée pendue

dans son grenier, à l'aide d'une corde à lessive à un chevron de la

toiture. Cette vieille fille était atteinte du délire de la persécution

et on attribue sa mort à des troubles cérébraux. Vendredi dernier,

elle avait déjà voulu se pendre sans pouvoir y parvenir. C'est une

ouvrière de la couturière, M"° Céleste Godin, qui en allant cher-

cher' de la braise au grenier a aperçu le cadavre de la pauvre fille.

Cette fille a appelé les voisines et les maçons qui travaillaient non

loin de là; ceux-ci sont accourus et ont coupé la corde avec

laquelle la suicidée s'était donné la mort. (Semeur de l'Oise.

11 mars).

L'enseignement DE la psychologie dans LES Universités des Etats-

Unis; par Charles-S. Mayens. (The Journal of Mental Science. Octo-

bre 1903.) ' -

- Dans ses visites aux Universités des Etats-Unis, l'auteur a pu

faits divers. 351

constater la place importante que prend dans leur enseignement

l'étude de la psychologie; cette science aux Etats-Unis n'est pas le

lot exclusif d'une élite de travailleurs ; mais ses éléments au moins

figurent dans presque tous les programmes. Il y a là un exemple

dont l'Europe pourrait et devrait profiter. Il. DE Musgrave-Clay.

Lesinfiumiers dans LES salles d'hommes des asiles, par A.-13. TUMBULL

(The Journal 0/'Mental Science, octobre 1903). ,

L'auteur raconte d'abord sa visite à deux institutions de Hol-

lande, l'asile de Meerenberg, et l'hôpital Wilkelmina, puis il rend

compte de sa propre expérience à l'asile de Fifre. Il conclut en

disant que, dans les salles d'hommes d'un asile, il y a du travail

pour des infirmiers et des infirmières, et qu'il y a avantage à mul-

tiplier l'emploi de ces dernières. It. DE ;11USGRavI : -GLaY.

REY ! 9 ! ON DES statistiques présentées par H commission DE la

tuberculose (The Journal of Mental Science, octobre 1903).

Travail accompagné de plusieurs tableaux, et que l'auteur après

quelques rectifications des- chiffres, termine par les déductions

suivantes tirées des statistiques. 1° L'infection est l'une des causes

les plus puissantes de la prédominance de la tuberculose dans les

asiles. 2° La situation (terrain sec et bien drainé) de l'asile a une

grande importance. 3. Les causes de la tuberculose dans les asiles

sont inhérentes aux asiles eux-mêmes et non à la nature des

malades qu'on y envoie. Cela doit être vrai, puisque des exceptions

très accusées, et il doit y en avoir, ne laissnet dans les statistiques

qu'une trace insignifiante. 4° Il parait probable d'après les docu-

ments que le temps passé au grand air, le cube d'air à l'intérieur

et la ventilation restent au-dessous de ce qui serait désirable.

IL DE MUSGRAYE CLAY.

FAITS DIVERS.

Suicide d'une fillette. Le Semeur de l'Oise du 28 février, rap-

porte que la jeune Faustine Noël, de Candor (Oise), âgée de 13

ans, s'est pendue. La jeune fille a dû agir sous l'influence d'un

dérangement cérébral, car elle avait déjà manifesté des symptômes

d'abaissement des facultés mentales. Ii y a quelque temps, à la

suite de remontrances que lui avaient été adressées, elle avait

quitlé le domicile paternel, était restée absente pendant deux jours.

Cependant connaissant son état d'esprit, ses patents évitaient de la

contrarier.

3b2 bulletin bibliographique.

Maison nationale DE CHARENTON. Par arrêté en date du 22 fé-

vrier, 1904, M. le Dr AKTHE\uME (André-Alphone-Louis), ancien

chef de clinique des maladies mentales à la Faculté de médecine

^de Paris, inspecteur adjoint des asiles d'aliénés de la Seine, a été

nommé médecin suppléant de la maison nationale de Charenton, à

la suite du concours sur titres institué par l'arrêté en date du

4 janvier 1904. Nous adressons nos félicitations à notre collabora-

teurli. Antheaume.

Asile d'aliénés de CLERMONT. Nous sommes heureux, dit le

Semeur de l'Oise du 9 mars, de signaler l'acte de .probité accompli

dimanche par M. Stéphane Mouette, garde particulier à l'Asile

d'aliénés. Se trouvant rue Broussier, à Creil, M. Mouette a trouvé

un petit sac dans lequel se trouvaient plusieurs obligations et un

porte-monnaie contenant une certaine somme d'argent. M. Mouette

s'est empressé d'aller faire sa déclaration au bureau de police où

quelques instants après, le propriétaire a pu rentrer en possession

. de son bien. Nos meilleurs compliments à l'auteur de cet acte

de probité.

Asile d'aliénés de L Charité (Nièvre). Une place d'interne en

médecine est vacante à l'asile public d'aliénés de la Charilé-sur-

Loire. Traitement : 800 francs par an. Avantages en nature :

nourriture, logement, chauffage, éclairage et blanchissage.- Salle

d'autopsie, laboratoire, bibliothèque dans l'asile. Deux internes

attachés au service médical. - Conditions : être Français et pos-

séder au moins douze inscriptions de doctorat. Adresser les

demandes au médecin en chef, directeur de l'asile.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Gonxier (Pierre). Le sens des attitudes. 1 \01. in-8° de 116 pages

avec figures, librairie C. Naud, 3, rue Itacine. Prix : 3 fr. 50.

Pnov. Influence de l'estomac sur l'elat mental et les fonctions

psychiques. 1 vol. in-18" de 190 pages, librairie J. Houssent, 1, rue Cai-

mir Delavigne. Prix : 3 francs.

Froussvrd. L'ezzléro-c6lile muco-memb1'aneuse. 1 vol. in-8° (le

lût pages, librairie A. malouine, 25-27, rue de l'Ecole-de-Médecine.

Prix : 2 francs.

' SCliUTTLFWORTII. Les enfants anormaux au point de vue mental, -

Leur traitement et leur éducation. 1 vol. in-12 de 172 pages, LebèDue,

Bruxelles, 190.

Le rédacteur-gérant : BOUnNEVILLE.

Evreux, Ch. Hh'89RY, imp. - 3-1904,

Vol. XVII. Mai 1904. N° 101.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE MENTALE.

Des signes oculaires dans la pàralysie générale;

Par A. JOFFROY

(Leçon faite à l'Asile Clinique, le 17 novembre 1902 et recueillie par le

Dr Schrameck). -

Messieurs,

Je désire aujourd'hui attirer votre attention sur les signes

oculaires de la paralysie générale, et vous montrer le rôle

souvent décisif qu'ils jouent dans le diagnostic de cette

maladie.

Aussi fréquente dans la clientèle hospitalière que dans

la clientèle privée, la paralysie .générale du moins à ses

débuts, est d'un diagnostic délicat et souvent même difficile.

Pour faire ce diagnostic nous pouvons nous appuyer sur

des symptômes psychiques et sur des symptômes soma-

tiques.

Les symptômes psychiques consistent en troubles démen-

tiels et en troubles délirants ou hallucinatoires. Mais, ni les

troubles de la mémoire, ni les troubles de l'attention, ni

l'affaiblissement des facultés de raisonner, d'observer, de

comparer, de critiquer, de concevoir, d'associer logique-

ment les idées, ne constituent le plus souvent, au début de

la paralysie générale des signes assez caractérisés pour

permettre d'affirmer d'une manière absolue le diagnostic

de cette maladie. Et si l'affaiblissement intellectuel ne suffit

pas en pareille occurence, les troubles délirants sont encore

bien plus insuffisants; d'abord parce qu'assez souvent ils

manquent, surtout au début de l'affection, et que, s'ils

existent, ils n'offrent rien de caractéristique.

Archives, 2'série, t. XVII. 23

354 CLINIQUE MENTALE.

Il convient cependant de reconnaître que dans certains

cas, ces troubles psychiques forment un ensemble tel que

-l'on doit immédiatement'penser à la paralysie générale et

qu'on est presque en mesure d'affirmer le diagnostic.

Les troubles somatiques eux aussi, sont d'importance

tout à fait inégale :

Nous ne dirons que peu de chose des troubles de la pro-

nonciation et du tremblement fibrillaire de la langue et des

lèvres qui peuvent manquer jusqu'à une' période avancée

de la maladie, et que d'autre part on peut rencontrer dans

d'autres circonstances, par exemple dans certains cas d'in-

toxication alcoolique subaiguë.

J'accorde une bien plus grande importance à la lympho-

cytose du liquide céphalo rachidien et bien souvent dans

mes leçons de l'année dernière j'ai insisté sur la valeur de

cette constatation qui, dans des cas très difficiles, dissipait

les doutes et nous permettait d'affirmer sans réserve un

diagnostic jusqu'alors indécis. Seulement la constatation de

ce signe présente quelques difficultés; il faut pratiquer

d'abord une véritable petite opération chirurgicale, faire

ensuite une centrifugation et, en suivant une technique

précise, faire enfin un examen microscopique'. Il s'agit

donc là d'une constatation assez difficile, et en outre je

tiens à rappeler que j'ai toujours eu soin, dans mes leçons

et dans mes publications,'de dire que la lymphocytose ne

pouvait pas dans tous les cas avoir raison des incertitudes

et permettre d'affirmer ou de rejeter le diagnostic de para-

lysie générale.

C'est pour tous ces motifs que l'étude des signes oculaires

doit continuer à tenir une très grande place dans les préoc-

cupations du médecin aliéniste.

Les symptômes oculaires sont d'une recherche relative-

ment facile, aussi bien au lit du malade que dans le cabinet

du médecin.

Leur importance dans le diagnostic de la paralysie géné-

rale est considérable, leur fréquence très grande, et c'est

1 La recherche de l'albumine dans le liquide céphalo-rachidien peut,

comme l'ont démontré M. Pierre Marie chez les tabétiques, et JIM. Guillain

et Parant chez les paralytiques généraux, remplacer cliniquement l'exa-

men microscopique après centrifugation.

DES SIGNES OCULAIRES DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 355

ainsi que se trouve justifié le choix que j'ai fait de leur

description, comme sujet de cette conférence.

Je m'appuierai, pour cette étude, sur les examens ocu-

laires de 227 paralytiques généraux faits dans le service par

oe. Sauvineau et Schrameck. La plupart de ces examens

ont été pratiqués au moment de l'entrée des malades et par

conséquent, dans la majorité des cas, dans la première

période de la paralysie générale.

Sur ces 227 malades, 212 ont présenté des troubles ocu-

laires.

Vous voyez tout de suite, combien ces troubles sont fré-

quents, Et encore pourrais-je dire que ce nombre de 212,

exact d'une manière absolue, constitue une erreur ; car un

grand nombre de nos malades n'ont été examinés qu'une

seule fois lors de leur entrée, et, il est certain que parmi les

15 malades chez lesquels on n'a pas signalé de troubles

oculaires, un examen ultérieur à une période plus avancée

de la maladie en eut fait observer. La proportion de 212

sur 227, ne veut donc pas dire que nous avons observé sur

ce dernier nombre 13 paralytiques généraux qui n'ont pas

présenté de symptômes oculaires, elle indique tout simple-

ment que nous avons observé 15 malades chez lesquels les

symptômes oculaires n'existaient pas encore.

Quoiqu'il en soit, acceptant ce chiffre trop faible de 212

sur 227, nous pouvons dire que la recherche des troubles

oculaires chez les paralytiques généraux s'impose comme

étant de la plus grande utilité clinique.

Mais quels sont, parmi ces troubles oculaires, les plus

importants et les plus fréquents ? Ce sont bien certainement

ceux qui se manifestent du côté de l'iris.

L'iris, en effet, peut présenter des modifications dans ses

dimensions, dans sa forme, dans sa motilité (réflexe lumi-

neux et accommodateur).

On peut bien encore trouver parfois chez les paralytiques

généraux des troubles de l'accommodation elle-même, on

peut bien aussi constater, et même assez fréquemment

des phénomènes paralytiques de la musculature externe, ou

des lésions du fond de l'oeil, mais ce sont les troubles iriens

qui sont de beaucoup les plus fréquents.

356 CLINIQUE MENTALE.

Le premier signe, noté depuis longtemps par Baillarger.

est l'inégalité pupillaire.

Nous l'avons trouvée 144 fois sur nos 227 malades.

A ces '144 cas d'inégalité pupillaire nous devons ajouter les

altérations des dimensions de l'iris comme la mydriase com-

plète double 26 fois, et le myosis extrême double 29 fois.

En somme, nous avons noté 199 fois des modifications des

dimensions de l'iris sur 227 cas, soit plus de 87 p. 100. Ce

chiffre de 87 p. 100 se rapproche de ceux donnés déjà par

Mendel, Moreau de Tours, Doutrebente, Renaud, etc.

Outre son diamètre, nous devons encore, dans l'iris, consi-

gner la régularité ou l'irrégularité de son contour.

La pupille normale, dont l'aspect n'a pas été modifié par

une affection irienne antérieure, présente généralement une

forme régulièrement circulaire.

Or nous voyons très fréquemment chez les paralytiques

généraux, l'orifice pupillaire ne pas conserver sa forme

normale, se modifier en un ou plusieurs points, le plus sou-

vent par segments qui deviennent rectilignes comme si

l'arc de ce segment avait fait place à sa corde. Il en résulte

que la pupille prend alors une forme irrégulière. Cette

déformation pupillaire a été signalée depuis longtemps, et,

dans la leçon que M. Gilbert Ballet a consacré autrefois aux

troubles oculaires de la paralysie générale il en est fait

mention 'comme s'observant parfois.

Ce signe, à notre avis, mérite davantage d'attirer l'atten-

tion et, cette année même, dans une communication à la

Société de Neurologie, nous avons cherché à démontrer sa

signification. Cette déformation pupillaire est excessive-

ment fréquente chez les paralytiques généraux. Dès les

premiers examens oculaires faits dans le service, M. Sauvi-

neau l'avait déjà relevée quelquefois.

Ces derniers temps nous en sommes arrivés avec M. Schra-

meck à la rechercher systématiquement et, dans nos

125 dernières observations de paralytiques généraux, nous

avons;trouvé 93 fois les deux pupilles déformées ; 8 fois une

déformation monoculaire.

Deux fois nous avons constaté cette irrégularité du con-

DES SIGNES OCULAIRES DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 357 î

tour irien sans que ce symptôme soit accompagnée de

paralysie ou de parésie du réflexe lumineux et dans ces deux

cas nous avons vu par la suite la parésie d'abord, puis la

paralysie du réflexe lumineux s'établir.

Pas plus que le signe d'Argyll cette déformation n'est

particulière aux paralytiques généraux, on la retrouve

comme lui chez des tabétiques et chez des syphilitiques,

mais ce que nous avons pu voir, c'est qu'elle est antérieure

à l'établissement du signe d'Argyll dont, dans laplupart

des cas, elle est en quelque sorte le signe précurseur et

l'équivalent.

Mais si les dimensions et l'aspect de la pupille sont habi-

tuellement modifiés chez nos malades, le fonctionnement

de l'iris est lui aussi très fréquemment atteint.

L'iris à l'état normal est constamment mobile et ses mou-

vements ne sont pas sous la dépendance de la volonté. Mais

il nous est cependant possible, indirectement il est vrai,

d'arriver à faire contracter ou relâcher notre iris.

Lorsqu'une vive lumière vient impressionner notre rétine,

l'orifice pupillaire se rétrécit; inversement quand l'oeil

est placé dans l'obscurité, la pupille se dilate. C'est là le

réflexe pupillaire à la lumière. Nous pouvons donc, à

notre gré, en fixant un objet plus ou moins lumineux faire

varier le diamètre de nos pupilles.

Nous le pouvons aussi par l'accommodation.

Vous savez tous que l'accommodation est la faculté que

nous avons de voir nettement et instantanément un objet à

tous les points de l'espace situés entre le punctum proxi-

zz2cnz et le punctum l'emolwn, points variables pour chaque

individu. L'ouverture pupillaire est d'autant plus réduite

que l'oeil accommode pour un point plus rapproché du punc-

tum proximum. Cette variation des dimensions de l'iris

sous l'influence de la distance de l'objet observé se fait

sous l'influence du réflexe accommodateur.

Ces deux réflexes, lumineux et accommodateur, peuvent

être lésés dans la paralysie générale, mais, je m'empresse

de le dire, ils le sont d'une façon tout à fait inégale.

L'un, le réflexe lumineux, est très fréquemment atteint,

358 CLINIQUE MENTALE.

on peut dire presque constamment; l'autre, le réflexe accom-

modateur, ne l'est que très rarement. La perte du réflexe

lumineux avec persistance'du réflexe accommodateur cons-

titue le signe d'Argyll-Robertson.

Signalé en 1869 par Argyll-Robertson chez des ataxiques,

ce signe est considéré comme très important et très fré-

quent dans le tabes, vous allez voir qu'il ne l'est pas

moins dans la paralysie générale, bien qu'on puisse le ren-

contrer aussi en' dehors de ces deux affections, et plus, par-

ticulièrement dans la syphilis (Babinski-Dufour). Aussi y

a-t-il grand intérêt à rechercher soigneusement'ce signe.

Mais cette recherche, celle surtout du réflexe lumineux,

n'est pas aussi facile qu'il semble au premier abord.

Il faut d'abord s'assurer par l'éclairage oblique, de l'ab-

sence de synéchies postérieures, traces d'ancienne iritis ; puis

surtout se mettre à l'abri, pour cette recherche du réflexe

lumineux, de toute intervention du réflexe accommodateur.

Le procédé le plus généralement employé dans les ser-

vices consiste dans l'occlusion puis l'ouverture brusque

des paupières; mais il importe dans ce cas de ne pas se

placer devant le malade qui, aussitôt que ses yeux sont

ouverts, accommoderait à la distance où se trouve l'obser-

vateur qu'il est porté à regarder. On aurait alors un mouve-

ment de l'iris, dû au réflexe accommodateur, que l'on attri-

buerait faussement au réflexe lumineux.

Il en est de même lorsqu'après l'ouverture brusque des

paupières on place en avant de l'oeil une source lumineuse;

le malade regarde la source lumineuse et accommode pour

la distance à laquelle elle est placée.

Nous nous servons dans notre service du procédé suivant :

Le malade est assis dans une chambre qu'éclaire légère-

ment une source lumineuse placée sur le même plan que

les yeux du malade et un peu en arrière de lui. On le fait

regarder à 5 mètres en avant et fixer un point blanchâtre

au mur, ou s'il le peut, on le fait lire à haute voix les

grosses lettres d'une échelle optométrique placée à cette

même distance. L'accommodation se trouve ainsi en état

de relâchement. L'observateur se tenant en avant du malade

et un peu de côté, réfléchit avec un miroir concave le fais-

ceau lumineux provenant de la source de lumière sur l'oeil

du malade qui continue à épeler à haute voix les lettres de

DES SIGNES OCULAIRES DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 359

l'échelle optométrique, et de cette façon la réaction lumi-

neuse est isolée de la réaction accommodative.

D'autres procédés peuvent encore être utilisés; celui par

exemple qui consiste à placer le malade le dos à la fenêtre,

en le faisant fixer un objet distant de 4 ou 5 mètres, et à

observer les dimensions des pupilles; puis, à retourner le

malade face à la fenêtre en lui faisant regarder au loin; le

diamètre des pupilles doit alors diminuer si la réaction de

la pupille à la lumière existe.

En résumé, ce qu'il importe dans la recherche du réflexe

lumineux c'est d'éliminer toute réaction pupillaire à l'accom-

modation.

Nous avons dit que le réflexe lumineux, est très souvent

lésé dans la paralysie générale, et chez nos 227 malades

171 fois il a été trouvé aboli ou diminué. C'est ainsi que

nous l'avons trouvé aboli des deux côtés 103 fois, aboli d'un

côté et affaibli de l'autre 14 fois, affaiblis des deux côtés

33 fois, aboli d'un côté, normal de l'autre 9 fois, affaibli

d'un côté, normal de l'autre 10 fois, soit 75 p. 100.

Et ici nous signalerons un point fort intéressant. Il nous

a été possible en effet, chez quelques-uns des malades qui

figurent dans notre statistique, d'observer très nettement la

marche régressive et finalement la disparition des réflexes

pupillaires, du réflexe lumineux principalement, que nous

avons vu s'affaiblir d'abord, puis au bout d'un certain

temps disparaître complètement.

En voici quelques observations :

1° G..., 37 ans, paralytique général (Examen du D'' Sau-

vineau), 21 décembre 1893 : pupilles réagissant bien à la

lumière et à l'accommodation; 13janvier 1895 : pupilles réa-

gissant très faiblement à la lumière, bien à l'accommodation ;

3 mars 189G : absence complète de réaction des pupilles

à la lumière avec réaction normale à l'accommodation.

2°X..., paralysie générale (examen du Dr Schrameck),

30 octobre 1901, réactions pupillaires normales; 28 juil-

let 1902, réflexes lumineux tout à fait réduits.

3°X..., Paralysie générale (examen du Der Schrameck)

18 juin 1902, réflexes pupillaires normaux; 12 juillet '1902,

réflexe lumineux diminué à gauche, normal à droite ;

-3 juillet 1902, réflexes lumineux diminués des deux côtés.

Ce dernier malade est sorti du service peu après, mais' il

360 CLINIQUE MENTALE.

est probable que dans un temps plus ou moins rapproché

on aurait trouvé chez lui les réflexes lumineux abolis.

Le signe d'Argyll s'établit donc d'une façon progressive et

~ quand on assiste à l'affaiblissement des réflexes lumineux (les

réflexes à l'accommodation restant intacts) on peut attribuer

à cet affaiblissement la même valeur qu'au signe d'Argyll.

Cet affaiblissement progressif du réflexe lumineux est

bien la règle et, le plus généralement, une fois installé, le

signe d'Argyll reste immuable. Il peut cependant en être

autrement et deux fois il nous a été donné d'assister à la

disparition du signe d'Argyll chez des malades qui venaient

d'entrer dans une période de rémission de leur affection.

En voici l'observation résumée : l'un est un malade du

service, l'autre un malade de la ville.

1° X..., paralysie générale, 10r examen : inégalité pupil-

laire avec affaiblissement des réflexes lumineux ; 1° examen

(trois semaines plus tard) : abolition complète des réflexes

lumineux, 3e examen (six semaines plus tard) : les réflexes

lumineux ne sont plus abolis, ils sont seulement affaiblis, le

malade est en période de rémission et sort du service.

Quelques temps après, nous avons appris qu'il a eu une

rechute en province. Comme traitement, le malade avait tout

simplement été soumis au repos. '

2°X..., paralytique général, 1er examen : inégalité pupil-

laire peu marquée ; pupilles irrégulières ; réflexes lumineux

normaux ; 2° examen (huit jours après) : inégalité pupillaire

très manifeste; réflexes lumineux très affaiblis. 3° examen

(deux mois plus tard) : le malade étant en complète rémis-

sion, les pupilles ne présentent plus que de la déformation

et un peu d'inégalité pupillaire; les réflexes lumineux ne

sont plus affaiblis, mais tout à fait normaux.

Ces cas de rémission des symptômes oculaires sont peu

fréquents, et n'ont été que très rarement relatés.

Ce que vous devez surtout retenir c'est l'extrême fréquence

du signe d'Argyll-Robertson chez les paralytiques généraux

et son installation le plus souvent progressive quand on

examine le malade en temps opportun.

Le réflexe accommodateur est lui, beaucoup moins sou-

DES SIGNES OCULAIRES DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 361

vent lésé, dans l'affection qui nous occupe, et lorsqu'il l'est,

c'esten général bien plus tardivement que le réflexclumineux.

Sur nos 227 malades, nous n'avons trouvé que 56 fois des

troubles du réflexe à l'accommodation. Il était aboli des

deux côtés 17 fois, affaibli des deux côtés z13 fois, aboli d'un

côté et affaibli de l'autre 5 fois, aboli d'un côté et normal

de l'autre 8 fois, affaibli d'un côté et normal de l'autre

13 fois. 2 fois seulement nous l'avons trouvé atteint sans que

le réflexe lumineux soit lésé.

Nous pouvons donc dire que l'altération du réflexe accom-

modateur seul est extrêmement rare, et que souvent, même

à une période avancée de la paralysie générale, le réflexe

accommodateur reste normal.

Si le réflexe à l'accommodation n'est que rarement

atteint; l'accommodation elle-même l'est encore beaucoup

moins souvent.

L'accommodation est la faculté que nous avons devoir nette-

ment et instantanément à des distances variables entre deux

pointsdonnés le punctum proximum et le punctum remotum.

Le muscle de Bruche, muscle accommodateur, agit par la

zonule de Zinn sur le cristallin et en modifie la courbure

pour permettre la vision distincte des objets aux différentes

distances; c'est l'accommodation.

En même temps et d'une façon réflexe la pupille se

rétrécit, c'est le réflexe à l'accommodation.

L'accommodation elle-même venons-nous de dire, est

bien moins souvent encore atteinte que le réflexe accommo-

dateur lui-même, et sur le giand nombre de malades que

nous avons examinés, à part deux cas restés douteux à cause

des difficultés d'examen, jamais nous n'avons trouvé l'ac-

commodation atteinte.

Une réserve toutefois est à faire, c'est qu'à une période

avancée de leur affection, il est impossible chez beaucoup de

paralytiques généraux de se rendre un compte exact de l'état

dupouvoiraccommodateur; l'intelligence des malades a pres-

que complètement sombré et l'examen est alors impossible.

Quoi qu'il en soit, on peut, si l'on veut, dire avec Mickle

(1886) que chez les paralytiques généraux :

362 ? CLINIQUE MENTALE.

1° On trouve très fréquemment l'immobilité des pupilles à

la lumière.

- 2° Que l'altération dû réflexe accommodateur se rencontre

parfois, mais beaucoup moins souvent.

3° Que plus tard encore, l'accommodation, elle-même peut

parfois être atteinte. On aurait alors l'oplitalmoplégie interne.

Soit; mais nous ajouterons que si cela est vrai, la consta-

tation de l'ophtalmoplégie interne est tout à fait exception-

nelle et nous résumerons de la manière suivante les altéra-

tions de la mobilité de l'iris et de l'accommodation que

nous venons de décrire :

Il est de règle, chez les paralytiques généraux, que le

réflexe lumineux s'affaiblisse progressivement et finisse de

la sorte à disparaître complètement pendant que persiste le

réflexe accommodateur ; c'est là le signe d'Argyll-Roberston.

Dans des cas peu nombreux on peut, après la perte du

réflexe lumineux, assister à la diminution progressive et

même à la perte du réflexe accommodateur.

Quant à la perte de l'accommodation elle serait tout à fait

exceptionnelle et ne se produirait qu'à une période avancée

de la maladie où il est impossible de la constater à cause

de l'état démentiel des malades.

Ainsi donc nous faisons certaines restrictions à la formule

de M. Ballet di sant que dans la paralysie générale, il s'agit en

somme d'une « ophtalmoplégie interne, graduelle et pro-

gressive » parce que cliniquement dans la très grande ma-

jorité des cas, le réflexe lumineux est seul atteint. Bien peu

nombreux sont les malades dont le réflexe à l'accommoda-

tion est lésé, et tout à fait exceptionnels, s'il en existe, ceux

dont l'accommodation est perdue du fait même de la para-

lysie générale. De sorte que la paralysie de l'accommodatiou

ne nous semble guère être un des symptômes oculaires de

la paralysie générale. ,

Et, si nous voulions retenir la formule de M. Ballet, nous

devrions dire que si l'ophtalmoplégie interne est le terme

ultime vers lequel on tend, c'est là un terme idéal qui n'est

presque jamais atteint.

Indépendamment des troubles de l'iris, on peut encore

DES SIGNES OCULAIRES DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 363

trouver, chez les paralytiques généraux, des troubles de la

musculature externe de l'oeil et des altérations du nerf

optique et du fond de l'oeil.

Chez nos 227 malades, 38 fois nous avons noté des lésions

de la musculature externe. Nous n'avons pas fait entrer,

bien entendu, en ligne de compte les altérations des muscles

pouvant être rapportées à d'autres causes que l'affection qui

nous occupe, les cas de strabisme fonctionnel- par exemple.

Nous avons noté 12 fois un ptosis simple, sans aucun

autre trouble des muscles innervés par la Ille paire, 14 fois

des paralysies ou parésies des muscles sous la dépendance

de cette 1111 paire, 5 fois des paralysies de la IV,, paire,

5 fois du nystagmus, 2 fois des contractions spasmodiques

de l'orbiculaire.

Il peut bien arriver parfois que ces lésions musculaires se

manifestent après des attaques apoplectiformes ou épilepti-

formes, mais le plus souvent elles ne sont pas la consé-

quence d'ictus.

Assez fréquemment chez nos malades qui présentaient

des parésies ou paralysies musculaires nous avons trouvé

également des symptômes tabétiques (douleurs fulgurantes,

incoordination motrice, abolition des réflexes, lésions atro-

phiques de la papille, etc.), l'affection prenant ainsi l'aspect

de la paralysie générale tabétiforme.

Le fond de l'oeil; a toujours été examiné chez nos paraly-

tiques. Depuis longtemps déjà on a décrit des hyperémies,

des lésions artérielles du fond de l'oeil, de l'oedème et sur-

tout de l'atrophie papillaire. .

C'est bien en effet cette dernière lésion que nous avons

trouvée le plus fréquemment. Foville, Voisin, Magnan, Chris-

tian, IIammond, Wiglesworth, etc., ont étudié les altéra-

tions du fond de l'oeil chez les'paralytiques généraux, et, dans

ces derniers temps, au Congrès de Grenoble, MM. Keraval

et Raviart en ont fait l'objet d'une communicution.

sur 51 paralytiques généraux examinés par ces derniers

auteurs 42 ont présenté des lésions du fond de l'oeil. :

» atrophies blanches de la pupille, 1 atrophie grise, 1 scléro-

ellOrOÏdiLe postérieure sans myopie, 13 papilles pàles (atro-

phies commençantes), 22 aspects flous de la papille avec

364 CLINIQUE MENTALE.

bords indécis. En somme 42 fois des lésions du fond de l'oeil

sur 51 malades examinés. ' '

L'examen de nos malades donne, vous allez le voir, un

chiffre tout à fait différent.

Gowers, ne décrit pas chez ses malades de lésions du fond

de l'oeil, sauf des cas très exceptionnels. M. Ballet, sur

37 malades ne signale non plus aucune lésion du fond de

l'oeil.

Chez nos 227 malades, 27 fois seulement nous avons noté

des altérations du fond de l'oeil, soit 12 p. 100, ce qui est

loin des 82 p. 100 de MM. Keraval et Raviart.

Les examens de nos malades ont été faits par MM. Sauvi-

neau et Schrameck, et d'après leurs observations, vous

voyez que les altérations du fond de l'oeil chez les paralyti-

ques généraux seraient beaucoup moins fréquentes que ne

l'ont dit au Congrès de Grenoble MM. Keraval et Raviart.

Nous n'avons en effet que 27 cas de lésions du fond de l'oeil

chez nos 227 malades, à savoir : 22 lésions papillaires (atro-

phies complètes ou en évolution), 2 chorio-rétinites (spécifi-

ques), 1 ancienne irido-choroïdite et 2 fois des traces

d'ancienne névrite optique.

Sur les 22 lésions papillaires 16 étaient concomitantes de

lésions de la musculature externe, 6 cas seulement en

étaient indemnes. Quand à leur aspect, ces lésions papil-

laires présentaient absolument les mêmes caractères que,

celle des tabétiques.

Pour terminer, je rappellerai que Reznikow a décrit en

1900, chez les paralytiques généraux, des modifications du

champ visuel et en vante beaucoup la valeur. Nous dirons

pour notre part, que, abstraction faite des cas où les trou-

bles mentaux rendent cet examen impossible, et ceux où des

lésions papillaires peuvent entraîner une modification, nous

avons toujours trouvé le champ visuel normal.

Telles sont, brièvement résumées, les notions que je vou-

lais vous présenter relativement à l'examen de l'organe de

la vision chez les paralytiques généraux. La fréquence des

signes oculaires et leur ordre d'apparition leur donnent la

plus grande importance clinique ; mais si à propos de la

ponction lombaire dont la valeur diagnostique est plus

DU COEFFICIENT SEXUEL DE L'IMPULSION MUSICALE. 365

grande encore, j'ai pu dire au Congrès de Grenoble que « la

présence des éléments blancs dans le liquide céphalo-rachi-

dien n'a pas une valeur absolue pour le diagnostic de la

paralysie générale » j'en dirai tout autant, et avec plus de

raison encore, pour les troubles oculaires constatés au début

de la paralysie générale. Les signes oculaires concourent

grandement au diagnostic de cette affection, mais.ils sont

insuffisants à eux seuls pour l'établir.

PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

Du coefficient sexuel de l'impulsion musicale,

PAU

N. VASCIIIDEetCL. VURPAS

Le rapport entre l'impulsion motrice et l'acte génital est

un point de psycho-physiologie, qui est resté jusqu'ici dans

l'ombre à notre connaissance. Divers ordres de recherches

entreprises soit sur des sujets sains, soit sur des aliénés

nous ont montré un rapport étroit entre l'impulsion motrice

et le rapprochement sexuel, et nous ont permis ainsi de

pénétrer la genèse et le mécanisme psycho-fonctionnel

encore obscur de ce phénomène biologique, qui, à notre avis,

est la plus haute expression du déclanchement moteur et

traduit la forme la plus achevée de l'avalanche motrice.

I

Nos travaux ont porté sur différents ordres de recherches

et de constatations, qui tous s'harmonisent et concourent à

montrer les rapports étroits, qui unissent l'impulsion

motrice et l'acte sexuel.

Les sujets, chez lesquels il nous a été donné de pour-

suivre nos recherches sont nombreux. Et si nous voulions

donner toutes les observations que nous avons prises, nous

aurions de longues descriptions cliniques à écrire, qui dépas-

seraient par trop le cadre limité de notre étude.

366 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

Au lieu de donner toutes les observations in extenso,

nous nous contenterons, afin de fixer les idées et de citer

quelques exemples, illustrant par le fait concret et particu-

lier le type schématique, que nous étudions, nous nous

contenterons, disons-nous, d'esquisser rapidement dans

leurs grandes lignes deux ou trois cas pris au hasard parmi

les nombreux sujets que nous avons observés depuis que

nous nous occupons de cette question.

Les nombreuses malades impulsives, que nous avons pu

examiner, avaient une tendance marquée à l'érotisme.

Tel était le cas, par exemple, d'une dégénérée impulsive

P... entrée à l'asile de Villejuif dans le service de M. Tou-

louse, avec le certificat suivant : « Déséquilibre mental.

Accidents hystériques. Impulsions génitales. » Cette malade,

qui présentait des impulsions motrices, passait de longues

heures à pousser les cris de : « des hommes, des hommes».

Dès qu'elle apercevait un homme, immédiatement elle

s'élançait sur lui, et essayait de le saisir par les testicules.

La malade N... est une dégénérée impulsive. Elle entre

fréquemment dans de violentes colères, brise tous les

objets qui sont à sa portée; pousse de grands cris, frappe

ceux qui l'entourent. Ces accès de colère, se répétant fré-

quemment, ont obligé sa famille à la faire interner. Celte

malade a des sentiments érotiques très marqués. Elle pro-

pose par écrit des rendez-vous à tout venant et recherche

toutes les occasions de s'adonner à l'amour..

Un autre sujet G..., vingt-huit ans, dont l'histoire a été

reportée ailleurs, agitée, maniaque, avait, elle aussi, des

désirs érotiques très intenses. Lorsqu'un homme entrait

dans la salle, l'oeil devenait brillant, le visage rouge, et soit

dans ses attitudes et sa mimique, soit dans son langage,elle

' lui proposait ses faveurs.

Nous ne voulons pas aller plus loin dans cette énuméra-

tion, et ces rapides exquisses que nous donnons, avons-nous

dit, à titre de simple exemple. Ce qu'il est intéressant d'étu-

dier ici, c'est le parallélisme dans l'évolution des images

motrices, d'une part dans les impulsions et de l'autre dans

l'amour ou plutôt dans l'acte sexuel.

Son développement à fait, de notre part, l'objet d'une

étude spéciale. L'analyse d'un cas instructif pour la connais-

sance de la jeunesse de l'impulsion nous a conduits à

DU COEFFICIENT SEXUEL DE L'IMPULSION MUSICALE. 367 -1

émettre les quelques considérations suivantes, comme induc-

tion dictée par les faits : « Une fois mis en jeu l'automa-

tisme (moteur) paraît suivre certaines lois, par lesquelles

se répète toujours l'ensemble des mouvements provoqués

par l'acte exécuté. Un groupe de muscles entrent en con-

traction d'abord et provoquent dans l'accomplissement de

l'acte la mise en jeu du groupe symétrique ; peu à peu les

mouvements gagnent tout le corps, se généralisent, s'ac-

compagnent même de grimaces de la figure, et se déroulent t

en se dissociant dans une impulsion générale, que l'auto-

matisme achève mais dont le coefficient intellectuel est très

appauvri Une sensation de mouvement, d'une part,

provoque par association presque spontanée un mouvement

exécuté et déjà fini, et, de l'autre, produit la répétition

involontaire de ce même mouvement, le tout commandé par

l'évolution d'une image mentale motrice. Cette image s'ac-

compagne d'une vague conscience, mais se dissocie psycho-

logiquement et consciemment dans l'exécution de l'acte...» »

Par le seul fait d'avoir l'esprit concentré sur une image

motrice non définie, pour ainsi dire, le sujet exécutait toute

une série de mouvements stéréotypés sur le même cliché

initial, mouvement croissant de force et de vitesse jusqu'à

en arriver à une contracture qui correspondait, d'après la

malade et selon nos constatations, à l'instant où la vitesse

maxima de la pensée répétait assez rapidement les multi-

ples images, pour qu'elles se confondent et n'en forment

qu'une seule continue. On pourrait comparer en d'autres

termes ce déclanchement automatique à l'avalanche motrice,

qui évoluait physiologiquement et psychologiquement. Il y

avait cependant cette différence, que l'exécution physique

du mouvement était la résultante inconsciente et immédiate

de l'avalanche mentale de l'image motrice. Et lorsque le

mouvement augmentait, les excitations qui en parvenaient

à la malade la grisaient pour ainsi dire, et l'attention

qu'elle donnait malgré elle, au but de l'action, lui causait

un plaisir qui la rendait de plus en plus excitable et qui

était parfois la genèse de ses penchants pervers.

Des associations disparates envahissaient alors sans

ordre sa pensée, et lorsque grisée par le déclanchement

automatique greffé sur le cliché moteur de l'acte en exécu-

tion, le sujet s'arrêtait au moment où le maximum de mou-

368 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

vements était atteint, moment soit dit de contracture, il

s'apercevait alors du caprice de ses associations d'idées et

de leur haut degré d'impulsion.

Ce qui vient d'être exposé comme étant la genèse et le

mécanisme d'une impulsion est également applicable à

l'acte sexuel. Ce qui caractérise l'acte sexuel au point de

vue mental c'est avant tout une impulsion motrice qui se

répète et réapparaît au champ de la conscience à des inter-

valles de plus en plus rapprochés jusqu'à ce qu'enfin toutes

les images successives arrivent à se fusionner en une seule

se continuant sans interruption et discontinuité, moment

correspondant à un état de contracture ou phase tonique à

laquelle fait suite une phase clonique et enfin le relâche-

ment moteur. L'acte sexuel ne serait à nos yeux, que le plus

haut développement, que l'épanouissement et l'achèvement

du déclanchement moteur provoquant une avalanche

motrice. Le plaisir génital doit vraisemblablement être rap-

porté à cette griserie motrice, qui, arrivée à son summum

se traduit par un état vague et flou de la conscience, véri-

table distraction mentale, se détachant pour ainsi dire de

son objet qui est l'image motrice dans sa rapide évolution.

L'état moteur particulièrement instable et changeant tra-

duit une activité motrice puissante et s'harmonise de la

sorle avec cette conception plus générale, qui place l'ori-

gine du plaisir dans une activité qui se dépense.

Toutes ces considérations montrent le rôle de l'image

motrice dans l'acte sexuel ; et cliniquement, certains auteurs

ont voulu voir de l'épilepsie, affection motrice, une maladie

génitale, un trouble sexuel, soit dans la conformation ana-

tomique des organes génitaux soit dans leur fonctionnement

physiologique.

II

Jusqu'ici nous n'avons abordé qu'un seul genre de recher-

ches et de considérations pour étayer et déterminer le rôle

et la valeur de l'image motrice dans l'acte sexuel. L'influence

de la musique sur le rapprochement génital, phénomène

fréquemment observé et relevé, parle'aussi dans le même

sens.

L'influence de la musique, sur l'image motrice et l'état

moteur est manifeste. L'entraînement provoqué dans l'armée

DU COEFFICIENT SEXUEL DE L'IMPULSION MUSICALE. 369

avec la musique est bien connu. Des expériences plus pré-

cises de laboratoire ont vérifié les données grossières mais

vraies de l'expérience banale, et ont montré que la musique

est un tonique efficace de l'état moteur. D'un autre côté, la

musique a une action très nette sur la vie génitale. Dans

nos recherches sur ce point de psychobiologie il nous a été

donné très souvent de faire cette constatation. Dans certains

cas de fatigue et de satiété la musique facilite le rapproche-

ment sexuel. Dans certains cas pathologiques les rapports

génitaux ne peuvent s'accomplir que soutenus, aidés,

secondés, si l'on peut ainsi dire, par la musique. Il y a

même plus. Non seulement la musique excite à l'amour,

non seulement elle invite au rapprochement sexuel, mais on

peut dire que la vie mentale provoquée par l'audition d'airs

musicaux se rapproche de la vie génitale, et se poursuit et

marche dans une évolution parallèle des images psychiques

et particulièrement des images motrices.

Pendant l'audition d'un morceau de musique, X... change

de physionomie, l'oeil devient brillant, les traits sont

remontés, un sourire s'ébauche, la physionomie prend une

expression de plaisir, le torse devient plus droit, une hyper-

tonicité musculaire générale se produit. X... nous dit que

pendant l'audition du morceau elle a éprouvé des sensations

très semblables à celles du rapprochement sexuel. La diffé-

rence portait surtout sur l'état local de l'appareil génital.

Car ici, il n'y avait pas d'écoulement vaginal. La similitude

résidait surtout dans la vie psychique et l'état mental dû

très probablement à l'évolution parallèle et similaire dans

ces deux états de l'image motrice. L'état oculaire est sou-

vent d'un précieux secours pour la connaissance de l'état

mental d'un sujet. ,

Dans un précédent travail nous avons cru pouvoir déter-

miner. « 1° Qu'il y a un rapport' étroit entre la position des

yeux et celle des paupières, ainsi qu'entre les mouvements

de l'oeil et ceux des paupières ; 1° Que 1'liypotonicité des

muscles des yeux est en rapport avec un défaut de conver-

gence et un état d'indépendance des deux yeux dans leurs

1 VASCUI ? E et VURPAS. Essai sur la psycho-physiologie du sommeil :

Le sommeil dans la paralysie faciale, in Revue Neurologique, no 18,

30 septembre 1902. '

Archives, 2' série, t. XVII. 24

370 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

rapports réciproques ; 3° Qu'il y a un rapport entre l'at-

tention psychologique et l'attention oculaire. »

Il est ainsi une constatation qui nous aide à pénétrer la

psychologie de. l'amour ou plutôt de l'acte sexuel; c'est la

position des yeux. Au début la tonicité des muscles de l'oeil

semble s'accroître, le releveur de la paupière provoque l'élé-

vation de la paupière supérieure et l'oeil semble plus grand;

sa mobilité et son éclat augmentent, puis cette tonicité mus-

culaire croît et bientôt on arrive à la période que nous

pourrions dénommer de contracture, les muscles les plus

puissants l'emportent, et comme dans la dynamique ocu.

laire les muscles qui dirigent l'axe de l'oeil « en dedans »

sont les plus forts, il en résulte un strabisme : cet état tra-

duit ainsi la contracture musculaire des muscles de l'oeil qui

elle-même n'est que la traduction de l'état mental du sujet

« et par suite est l'expression de l'activité » et de l'intensité

de l'image motrice, qui dans la rapidité du déclanchement

et de la succession rapide de son évolution arrive à un éclat

et une sorte d'immobilité, comparables grossièrement à la

succession rapide des paysages dans un kaleidoscope arri-

vant par leur rapidité même à présenter une netteté et un

éclat qui leur donnent l'apparence de l'immobilité.

L'état de lassitude et de faiblesse qui suit l'acte sexuel

est la traduction de l'épuisement moteur qui suit l'excitation

génitale. Nous donnerons simplement à titre d'exemple un

tableau exprimant numériquement la diminution pendant

l'excitation sexuelle de la force musculaire et surtout de sa

régularité et de son adaptation constante et synergique.

La force musculaire était prise au dynamomètre Régnier,

à l'état normal et pendant l'excitation génitale. Voici les

chiffres obtenus :

DU COEFFICIENT SEXUEL DE L'IMPULSION MUSICALE. 371 1

La moyenne totale de ces dix pressions dynamométriques

est la suivante pour chaque main dans ces deux états

psychobiologiques différents : Pendant l'état normal, pour

la main droite de 31,1, pour la main gauche de 30,0; pen-

dant l'excitation génitale, pour la main droite de.28,2, pour

la main gauche de 28,0.

L'écart moyen des diverses pressions par rapport à leur

moyenne brute respective était, pendant l'état normal, de

0, pour la main droite et de 1,4 pour la main gauche; pen-

dant l'excitation génitale, de 1,8 pour la main droite et de

2,4 pour la main gauche. Le graphique de la variation de

pression par rapport à leur pression moyenne est intéres-

sant et éloquent.

Il démontre, d'une façon très manifeste, la variabilité et le

défaut d'adaptation musculaire dans l'excitation génitale,

qui est à relever à côté de la diminution de la force muscu-

laire saisissable par une diminution dans l'intensité des

pressions dynamométriques. L'observation courante directe

et grossière de l'état musculaire dans l'excitation génitale

parle d'ailleurs dans le même sens et plaide, croyons-nous,

en faveur de la thèse que nous soutenons, à'savoir l'impor-

tance de l'image motrice dans' la vie sexuelle; constituée

qu'elle est par l'avalanche motrice, il est tout naturel de

trouver dans l'excitation génitale une véritable dérivation

de l'énergie motrice, accaparée dans une sphère limitée et

ne pouvant par conséquent pas se manifester avec son inten-

sité normale dans l'état moteur général, ainsi qu'en témoi-

gnent des expériences précises qui montrent l'affaiblisse-

ment et l'affolement moteur pendant l'excitation sexuelle.

Une autre question nous semble mériter également

quelques recherches et quelques explications, c'est l'origine

et les causes de la faiblesse musculaire, qui succède à l'acte

génital, ainsi que son mode de production. En d'autres ter-

mes : pourquoi voit-on succéder à l'acte sexuel des phéno-

mènes de fatigue et d'abattement ? La raison nous semble

précisément dans l'épuisement moteur dû à l'excès de l'in-

tensité de l'image motrice.

Lorsque nous parlons de l'épuisement moteur nous dési-

gnons, s'entend, l'image motrice; l'état psychique, et non

la fatigue organique, l'épuisement du muscle, comme il

arrive par exemple dans le travail musculaire. Dans ce der-

3Î7 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

nier cas, comme après une longue marche ou dans un exer-

cice musculaire quelconque, c'est le muscle lui-même qui

' travaille, qui se fatigue. Il en résulte son épuisement, dû

probablement à .une intoxication, résultat de l'intensité des

échanges organiques au niveau des muscles en travail.

Dans l'acte sexuel, les phénomènes se passent tout diffé-

remment ; il ne s'agit assurément pas d'un épuisement mus-

culaire, mais bien d'une fatigue motrice. Et, lorsque nous

disons fatigue motrice, c'est l'image mentale du mouvement

que nous voulons désigner. C'est l'image motrice qui

acquiert une intensité et un éclat particulièrement intense

qui lui donne, pour ainsi dire, ses caractères spécifiques et

la rapidité de leur succession; 'l'avalanche motrice, si l'on

peut ainsi dire, provoque une sorte d'inhibition sur les

autres processus psychiques. Lorsque le sujet est revenu à

l'état soi-disant normal, il en résulte un état d'épuisement

de l'état mental et principalement des impressions et repré-

sentations motrices, comme on l'observe à la suite d'un tra-

vail musculaire prolongé, dans lequel, non seulement l'élé-

ment musculaire a été épuisé, mais aussi l'image motrice

qui devenait plus intense a mesure que la fatigue muscu-

laire rendait chaque mouvement plus difficile dans son

exécution et dans son adaptation régulière et précise.

III

L'augmentation de pression sanguine, qui accompagne

l'excitation sexuelle, parle également dans le même sens.

Si, en effet, l'activité sexuelle se rapproche de l'activité

motrice, les mêmes modifications biologiques, ou plutôt des

modifications de même ordre et de même sens, devront se

produire. Or, voici comment s'exprime le professeur Potain

au sujet des rapports de l'activité motrice et de l'augmen-

tation de la pression sanguine : « Cet effet 1 (élévation im-

médiate de la pression artérielle) se produit au moment

même du passage du repos à l'activité. » Nous donnons

l'observation suivante, véritable recherche expérimentale,

' C. POT11V. La pression artérielle de 'l'homme lc l'élal normale ! el

pathologique. Paris, Masson et Ci-, 1902, 1901, p. : J7, - -

DU COEFFICIENT SEXUEL DE L'IMPULSION MUSICALE. 373

comme exemple de l'élévation de la pression sous l'in-

fluence de l'excitation sexuelle.

X..., lemme âgée de vingt-cinq ans, servait de sujet d'expé-

riences pour la mesure de la pression sanguine avec le sphygmo-

manomètre de Ilono,

L'examen avait porté sur des faits d'ordre technique concernant

particulièrement la signification psychophysiologique de certaines

données psychologiques sur la musique. -

Entre le sujet et l'expérimentateur, il y avait une sympathie

mêlée d'une tendresse toute amicale.

Le sujet, bl°1° X..., à la suite de circonstances dues sans doute

en grande partie au milieu dans lequel elle vivait, aimait à parler

souvent de N... dont l'amitié lui tenait au coeur.

Pendant l'observation, nous essayâmes de réaliser un ensemble

de conditions expérimentales, capables d'éclairer et même de

trancher, si possible, la question suivante : l'état de l'anémie cir-

culatoire pendant une excitation émotive intense. L'expérimenta-

teur parla de l'amour, de la sympathie, et finit, le sujet ayant tou-

jours les mains dans le sphygmomanomètre de Hono, presque par

une déclaration d'amour.

Le sujet était très impressionné, et, à son dire, son émotion était

hanche, puissante et vivement ressentie. On observa à ce moment

une augmentation notable de la pression sanguine, à tel point que

la contrepression, qui habituellement était de 65 millimètres de

mercure chez X... nécessita une colonne mercurielle atteignant

150 et même 160 millimètres. Ces derniers chiffres indiquent une

pression sanguine très élevée, et qu'il est rare de rencontrer dans

les recherches sur l'évolution de la pression du sang. Le- sujet

avait le facies d'une personne très émue,il tremblait et se complai-

sait dans le plein épanouissement de son activité mentale. '

C'est là une expérience rare, peut-être même unique, qui

démontre la réalité de ce phénomène biologique, l'augmen-

talion de la pression sanguine, sous l'influence d'une excita-

tion provoquant une émotion puissante, dans laquelle la

sexualité avait joué le plus grand rôle. Il resterait encore à

formuler une conclusion, ressortant nettement de celte

observation, à savoir que les grandes émotions sexuelles

paraissent s'accompagner de modifications' importantes

dans l'élément psycho-moteur, modifications dans la mani-

festation desquelles la pression sanguine joue un des pre-

miers rôles.

374 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

IV

- Des diverses considérations précédentes, nous nous croyons

autorisés à émettre les quelques remarques suivantes :

1° Nous avons toujours constaté un rapport étroit entre

la tendance à l'impulsion et le désir génital. La plupart des

impulsions qu'il. nous a été donné d'observer manifestaient

constamment dans leurs paroles, leurs propos, leurs gestes,

leur mimique, leur attitude générale, un penchant marqué

à l'érotisme.

2° Il est encore un autre ordre d'études qui nous montre

le rôle de l'image motrice dans l'acte sexuel; c'est l'influence

de la musique sur le rapprochement génital. Dans certains

cas pathologiques, les rapports ne peuvent avoir lieu que

sous l'excitation de la musique.

3° Un autre argument peut être tiré de' la position des

yeux dans l'acte sexuel. La direction convergente des axes

oculaires provoquant un véritable strabisme traduit l'état

de tonicité et d'hyperactivité du système musculaire. Il y a

une véritable tension de tout le système moteur se tradui-

sant grosso modo, d'une façon générale, par un stabe

d'abord tonique, puis clonique.

4° Une autre preuve consiste dans l'abattement et l'état

de lassitude musculaire qui suit l'acte génital. Il semble

que l'équilibre moteur ait atteint une stabilité manifestée

par de l'immobilité et du vague de la pensée. Cet état

semblé la conséquence de l'épuisement temporaire de l'acti-

vité motrice dans sa condition psychologique d'image

motrice, 1

5° Enfin, l'élévation brusque de la pression sanguine

sous l'influence d'une excitation sexuelle plaide encore en

faveur du rapprochement que nous tentons de faire entre

l'excitation sexuelle et l'activité motrice, ou plutôt tend à

montrer le rôle de l'image motrice et de l'élément moteur

dans la genèse, le développement et l'évolution de l'excita-

tion génitale.

V

Si, de ces différents ordres de recherches, il nous est per-

mis d'entrevoir quelques données sur le mécanisme fonc-

DU COEFFICIENT SEXUEL DE L'IMPULSION MUSICALE. 375

tionnel psychodynamique de l'acte sexuel, voici ce que

nous pensons pouvoir dire :

a) L'acte génital consiste dans une tension de plus en

plus accentuée de l'état moteur qui, arrivé à son maximum,

présente une phase tonique assez courte, à laquelle fait

suite une phase clonique, et qui se termine par une période

d'adynamie et de repos.

b) Dans la production de cet état et de ces différentes

phases, l'image motrice joue le rôle primordial. L'acte

génital consiste dans son évolution particulière, qui se pro-

duit dans les différents stades sus-indiqués.

c) Dans l'acte sexuel, le système moteur tout entier est

intéressé et intervient. L'équilibre moteur total arrive à un

état d'excitation et de potentiel tel qu'il ne peut se main-

tenir à un taux aussi élevé et qu'à la suite on relève des

phénomènes de fatigue et d'épuisement moteur.

d) L'excitation motrice se traduit également par des phé-

nomènes circulatoires, vasomoteurs, respiratoires, qui parais-

sent consécutifs aux phénomènes nerveux moteurs, en sont

la conséquence et les traduisent en dehors.

e) Les érotiques sont des moteurs et, d'une façon géné-

rale, presque tous les moteurs sont des érotiques.

f) Dans toute sa marche et toutes ses allures capricieuses,

la vie sexuelle est due à l'évolution et à la tendance au déclan-

chement de l'image motrice et de l'état moteur.

Tous les préparatifs, tous les accessoires qui concourent

à exciter les désirs génésiques, sont surtout des excitations

de l'image motrice. Tous les sens peuvent, selon chaque

individualité, présenter une action excitatrice de l'état

moteur, plus ou moins développée et accentuée selon les

différents cas.

Les sens provocateurs des excitations génésiques et mo-

trices sont variables et diffèrent avec chaque sujet. Il s'agit là

de la nécessite d'un véritable emmagasinement de potentiel

pour traduire au dehors l'excitation motrice suffisante. Il sem-

ble que, pour que le potentiel de la pile vitale soit suffisant,

il le faille charger par des excitations extérieures adoptées.'

Ces états témoignent d'un état d'affaiblissement moteur

dont le type est donné par la neurasthénie et autres affec-

tions débilitantes (diabète, paralysie générale, etc.), et cette

376 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.

insuffisance motrice exige un renfort et un excédent dans la

charge de la machine vitale. ,

Avant de terminer,- il nous faut spécifier explicitement

encore une distinction afin de bien préciser le sens et la

portée de nos observations. Entre l'image motrice propre-

ment dite et l'image motrice devenue sexuelle, il y a unedif-

férence aussi bien dans la modalité que dans l'ensemble des

phénomènes psychologiques, ou plutôt des éléments men-

taux qui forment l'image motrice dans sa nature intime.

L'image motrice proprement dite possède en elle-même

tous les éléments de l'image motrice sexuelle, sauf l'émo-

tion ; l'image motrice ordinaire se résoud et s'achève dans

ses éléments constitutifs, tandis que l'image motrice

sexuelle se développe et se constitue au contraire, à mesure

que croissent d'intensité tous les éléments qui la compo-

sent. De nombreuses associations d'images et toute une

mentalité cristallisée et schématisée dans une image men-

tale, s'épanouissent, se développent, s'esquissent comme

dans une vue cinématographique, et s'acheminent à leur

achèvement parallèlement à l'image qui augmente toujours

d'intensité dans la rapidité de son évolution, jusqu'à ce

qu'elle atteigne son maximum, qui se résoud en une sorte

d'immobilité vertigineuse, correspondant au summum

d'excitation mentale. De nouveaux groupes d'images, véri-

tables satellites mobiles, s'associent secondairement et con-

tinuent à se développer et à évoluer. Cette multitude de

fragments d'images, d'éléments d'idées, alimentés et

nourris par une émotion toujours plus intense, donne à

l'image mentale sexuelle une physionomie bien définie et

bien. particulière, qui porte à la faire considérer comme

l'image motrice la plus intense et la plus émotive, c'est-à-

dire la plus capable d'évoquer une émotion généralisée et

réellement extériorisée. Il semble que l'image motrice

sexuelle met en action de nombreux centres nerveux dont

chacun apporterait ses éléments à cette image particulière-

ment riche et ayant atteint le plus haut degré de cristallisa-

tion. Entendons-nous; l'image motrice ordinaire est une

image complexe, riche d'éléments constitutifs. L'image mo-

trice sexuelle a, en outre, ce caractère particulier de pou-

voir se décomposer en ses nombreux éléments, ainsi qu'un

tableau panoramique aux tons multiples, complexes, aux

\ ....

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 377

clartés variables, vision aperçue dans les brumes ' sans

foime précise, mais donnant l'intuition de son contenu,

sans qu'il soit possible de le décrire exactement et de le

détailler, assez cependant pour fournir une connaissance

sommaire de sa composition.

Nous ne voulons pas ici faire la description et la psycho-

logie de l'image sexuelle, mais en décrivant ses rapports

avec l'image motrice ordinaire, rapports intimes et peu mis

en lumière, nous avons cru intéressant de rappeler ces

quelques considérations, afin d'éviter toute confusion entre

l'image motrice ordinaire et l'image motrice sexuelle. Ces

quelques données, nouvelles à notre connaissance sur le

rôle de l'image motrice dans l'acte sexuel, nous laissent

espérer que nous avons apporté quelques contributions à

l'important problème de l'impulsion sexuelle.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIQUES.

L11. Sur quelques lésions viscérales dans la folie; par R. WILSO ?

et D. Chalmers `VATS01. (The Journal of Mental Science, juil-

let 4003 )

Deux observations très intéressantes, suivies d'autopsie : ce tra-

vail est accompagné de planches. ' R. Ai.-C.

LUI. L'habitude de la morphine; son traitement par le bromhy-

drate d'hyoscine ; par J. L)lt-40,ND-GOLDAN (The New-l'o·l : Mental

Journal, 3 janvier 1903.)

bans ce travail, accompagné de deux observations, l'auteur

s'attache à démontrer que le bromhydrate d'hyoscine, convena-

blement administre, constitue un moyen certain, dépourvu de

tout danger et non douloureux, de guérir la morphinomanie.

R. M.-C.

L1 ? Elimination de l'indican, de l'acétone et de l'acide diacétique

dans diverses psychoses; par Isador-H. Couiat (The Amer'iwan

or Ilisaizily, avril 1902, p. G35, 677).

Historique (Bibliographie). Technique. S6 observations person-

nelles. Le travail parait avoir été l'ait avec le plus grand soin, et

ion ne saurait trop louer la réserve des conclusions : il y a excès

378 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

d'indican dans tous les états de dépression, de quelque psychose

qu'ils relèvent ; même résultat, à quelque chose près, pour l'acé-

tone ; l'inverse s'observe-dans les états d'excitation; il est actuelle-

ment impossible d'affirmer davantage. Smo11,

LV. Excitabilité idiomusculaire chez les tabétiques; par

M. Duplant (Lyon médical, 1901, n° 12, p. 434).

M. Duplant, se basant sur sept observations, étudie l'excitabilité

idiomusculaire chez les tabétiques, recherche dont les différents

auteurs ne font pas mention. Des faits observés, il arrive aux con-

clusions suivantes : 1° L'excitabilité idiomusculaire chez les tabé-

tiques est le plus souvent normale, elle semble parfois exagérée.

- 2° Le myooedème s'obtient plus facilement chez les ataxiques

que chez les sujets sains. Cette réaction n'est qu'une variété de

contracture idiomusculaire; elle est partielle au lieu d'être géné-

ralisée. 3° L'exagération apparente de la réaction idiomuscu-

laire dans le tabes démontre, d'après M. Duplant l'intégrité des

muscles dans le plus grand nombre des cas. La réaction n'est pas

due à l'excitation des filets nerveux cutanés ou musculaires.

4° La réaction idiomusculaire dans le tabès n'est pas plus forte que

normalement mais elle est rendue plus apparente par l'hypotonie

des muscles qui est constante dans l'ataxie locomotrice. G. C.

LVI. Sur la signification de la chromatolyse centrale avec dépla

cement du noyau dans les cellules du système nerveux central

de l'homme ; par John TUnNER. (The Journal of Mental Science,

juillet 1903).

Très intéressant mémoire, mais qu'il faudrait non analyser,

mais suivre pas à pas : nous devons nous borner à retenir quel-

ques conclusions : l'auteur divisé ses cas en deux classes, la pre-

mière qui comprend le type de cellules des imbéciles, la seconde,

qu'il appelle le type vrai de réaction axonale, où les altérations

sont beaucoup plus prononcées que dans la première, le noyau

étant plus ou moins atteint.

La conclusion de ses recherches, c'est qu'il convient de ne pas

rapprocher comme semblables tous les cas de chromatolyse cen-

trale avec déplacement du noyau.

Il peut y avoir là deux causes, et peut-être même plus de deux

causes ; et tandis que dans l'une des classes l'altération cellulaire

parait avoir un rapport défini avec les symptômes mentaux de la

maladie où on l'observe, dans l'autre classe ce rapport parait

n'exister aucunement. - R. de Musgrave-Chï.

LVII. Observations bactériologiques et cliniques sur le sang dans

les cas de manie aiguë continue; par Lewis C. BRUCE ( 7'Ae Jour-

nal of Mental Science, avril 1903.)

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 379

Les conclusions de ce travail sont les suivantes :

i° Si les observations hématologiques consignées dans ce travail

sont exactes, elles démontrent pratiquement que la manie est un

état infectieux aigu, et que lorsque la guérison s'effectue un état

d'immunité s'établit.

2° Elles prouvent que lorsque le malade guérit en apparence,

la maladie demeure latente : d'où persistance de la leucocytose : -.

ce serait une donnée très importante dans les examens médicaux

en vue d'assurances sur la vie.

3° L'examen du sang constitue un secours précieux pour le pro-

nostic. R. DE IUSGRAVE-CL.4Y.

LVIII. Sur la présence fréquente de granulations de l'épendyme

dans la paralysie générale; par J.-V. 13LACHFORD (The Journal

of Mental Science, juillet 1903.)

De ses propres recherches et de plusieurs séries d'observations

recueillies par d'autres auteurs, M. Blachford conclut que l'on

peut admettre comme probable que l'état granuleux de l'épen-

dyme a pour cause primitive la syphilis; et, ce premier point

admis, la fréquence des granulations de l'épendyme dans la para-

lysie générale serait instructive au point de vue de son étiologie.

R. DE IUSGR.1\'E-CLAY.

LIX. Localisations rares de la maladie de Raynaud; par MM. DE-

CLOUX, Ribadeau-Dumas et S : 1DAR.IIrU. (Presse médicale, 16 avril

1902). '

Les localisations à la face de la maladie de Raynaud sont parti-

culièrement rares. Les auteurs de l'article ont eu l'occasion d'en

observer deux cas à l'hôpital Lariboisière. Le premier concerne

un peintre de quarante et un ans, non éthylique, ayant eu des

attaques de coliques de plomb antérieures.

Dapuis dix ans, au moment où commencent les chaleurs, il est

atteint régulièrement de « gelures d'oreilles. » Elles surviennent

spontanément, durent trois et quatre mois et disparaissent ensuite

avec ou sans éliminations de croûtes. En mars 1902, époque de

l'observation, les plaques érythémateuses sont apparues aux deux

oreilles et au nez, après une journée de cuissons assez vives. Elles

se sont transformées en plaques de gangrène qui se sont momifiées

et se sont détachées, laissant un état de la peau qui rappelle la

sclérodermie.

Le second cas se rapporte à une femme de soixante-cinq ans,

alcoolique et tuberculeuse. Celle-ci a présenté des plaques de

coloration violacée, puis des eschares aux deux joues, à l'extré-

mité du nez, aux deux mains et aux.deux pieds.

Quel peut être le facteur étiologique de l'affection ? On ne sau-

380 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

rait invoquer ici l'ergotisme. Les deux malades sont tous deux des

intoxiqués ; le saturnisme et l'alcoolisme jouent probablement le

rôle de cause prédisposante à la réalisation du syndrome de

Maurice Raynaud, la cause occasionnelle restant inconnue. Tout

au plus peut-on signaler à titre de coïncidence le froid rigoureux

que l'on subissait à l'époque du début des accidents. R. LEROY.

LX. Suites de la section du facial chez le chien; par M. Anr.oix

(Société nationale de médecine de Lyon, 12 mai 1903).

Dans ses expériences sur la section du facial chez le chien et le

lapin en avant de la parotide, Cl. Bernard avait remarqué que la

face était entraînée du côté de la section, l'explication n'en avait

pas été donnée.

M. Arloing reprenant ces expériences a constaté le même fait,

mais de plus, que quelques jours après la section, les réflexes mus-

culaires sont très marqués de ce côté. Il pense que les filets

moteurs accessoires passent par la voie du sous-orbitaire. Un effet

si on sectionne le sous-orbitaire chez un chien dont le facial est

déjà sectionné en avant de la parotide,' on voit immédiatement

après la face entraînée du côté sain. Il doit donc y avoir, en un

point quelconque, des filets moteurs qui se détachent du facial

pour gagner le sous-orbitaire. Ce qui est difficile à expliquer, c'est

pourquoi quelques filets' ainsi déviés suffisent à entraîner la face

du côté de la section du nerf principal.

L'auteur met en évidence d'autres faits : d'abord l'amendement

progressif des phénomènes paralytiques les plus saillants bien

qu'on ait constaté la dégénérescence complète du bout périphé-

rique. L'amélioration ne peut s'expliquer que par la restitution du

trajet nerveux. Cette amélioration ne va pas jusqu'au retour de la

contractilité, mais aboutit à une sorte de restauration de l'élasli-

cité musculaire. Enfin si on sectionne le facial à sa sortie du trou

osseux, en arrière de la parotide, l'atrophie qui n'existait pas dans

la section en avant de la parotide apparaît. Il semble donc que le

nerf facial ait une action trophique localisée uniquement dans sa

portion intra-parotidienne. G. C.

LXI. Lésions nerveuses dans le tétanos expérimental du cheval;

par MM. J. CoonrsoT, M. Doyon et J. Pavot. (Province médicale,

Lyon, septembre 1901, n° 38, p. 4 : >0).

Dans des publications précédentes, les auteurs ont soutenu qu'il

n'existait pas dans la moelle des tétaniques de lésions cellulaires

pouvant être considérées comme l'origine des contractures. Ils

constatèrent bien, par le Nissl, des hémorrhagies et une chromato-

lyse cellulaire,lésions décrites parMarinesco comme spécifiques du

tétanos et comme cause de la contracture; mais ils arrivèrent; ! a

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 381

des conclusions diamétralement opposées â celles de cet auteur

et n'admettèrent pas ces lésions comme spécifiques du tétanos.

Pour les auteurs qui ont étudié ultérieurement la question, comme

pour eux,les lésions cellulaires,observées dans la moelle d'hommes

ou d'animaux tétaniques, sont banales et n'ont aucun rapport ni

avec la pathogénie des contractures, ni avec leur localisation.

Continuant leurs recherches, MM. Courmont, Doyon et Paviot

s'adressèrent à un animal très sensible au tétanos, le cheval. Dans

l'observation qu'ils publient, ils trouvèrent, le système nerveux cen-

tral envahi par des cellules migratrices, lésion déjà citée par

M. Jonkowski dans ses recherches sur l'histologie des lésions ner-

veuses du tétanos. Mais cette accumulation de cellules migratrices

n'est pas plus spécifique, pas plus caractéristique du tétanos que

la chromatolyse.

Les résultats histologiques dans leurs traits principaux ont été

les suivants : lésions prédominantes dans le cerveau et au niveau

des couches de cellules du manteau gris, lésions analogues, mais

moins marquées, dans l'axe gris de la moelle, se traduisant ici et

là par une infiltration de petites cellules inflammatoires. Dans le

cerveau, amas de cellules rondes péricellulaires et travées autour

des capillaires ; dans l'axe gris medullaire, dissémination diffuse

de ces cellules. Il ne semble pas que ces cellules migratrices aient

pénétré dans le protoplasma de la cellule nerveuse; mais le cas

est suraigu. la mort est survenue cinq jours après l'injection et

trente-six heures après le début des symptômes. G. Carrier.

Le système nerveux et ses réserves à longue échéance.

Contribution récemment offerte par l'anatomie comparée; par

M. Bonne. (Province médical, Lyon, mai 1901, p. 205).

M. Bonne met en relief une découverte faite il y a plusieurs années

parM.Morat dans les ganglions spinaux de la grenouille. Il s'agis-

sait de gouttelettes de graisse de dimensions variables et qui parais-

saient incluses dans le protoplasma de la cellule unipolaire, les

gouttelettes étaient apparentes surtout au cours delasaison d'hiver

et disparaissaient ensuite petit à petit. -

L'auteur a recherché la localisation exacte de ces gouttelettes de

graisse d'existence temporaire. Leur forme et leur dimension sont

très variables. Leur aspect et leur volume le plus communs à

l'apogée de leur évolution (au milieu de la saison hivernale) sont

ceux d'une cellule ganglionnaire. Ces gouttelettes ont perdu leur

forme ronde primitive, pour s'accommoder plus ou moins à la forme

des éléments entre lesquels elles se sont développées. Les gouttes

les plus petites sont situées dans l'épaisseur de la capsule conjonc-

tive, entourant la cellule ganglionnaire dans laquelle elles forment

une saillie plus on moins accusée. Les gouttes les plus volumineuses

382 REVUE D'ANATOMIÉ ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

refoulent la cellule nerveuse qui souvent ne remplit même plus la

moitié de sa capsule, et les deux sphères se trouvent alors plus ou

moins déformées par pression réciproque, tandis que la capsule ne

subit, le plus souvent, pas de déformation sensible.

Ces gouttelettes disparaissent par résorption graduelle. Dans

aucune période de Tannés, on ne peut déceler de semblable forma-

tion dans le névraxe du même animal. Il s'agit évidemment,

dit l'auteur, d'une particularité propice aux éléments conjonctifs.

Les corpuscules de Morat représentent donc une des nombreuses

réserves dont se charge pendant l'hiver, l'organisation de la gre-

nouille. Leur situation au voisinage immédiat d'une cellule ner-

veuse, permet d'envisager le rôle probable de ces éléments. L'au-

teur pense que ce sont des matériaux de réserve, destinés à être

lentement consommés un certain temps au moins après leur accu-

mulation. Leur existence transitoire prouve le rôle actif qu'ils

jouent dans la nutrition des éléments voisins : capsule conjonctive

et cellule unipolaire. 1 G. Carrier.

LXIII. Les anomalies du palais considérées comme stigmates de

dégénérescence; par E.-H. Haurisson. (The Journal of Mental

Science. Janvier 1903.)

Les conclusions de l'auteur sont les suivantes : 1° les anomalies

du palais sont communes chez les aliénés ; 2° ces anomalies peu-

vent se diviser grosso modo en deux grands groupes dont le pre-

mier comprend le palais des psychopathes héréditaires, et le

second le palais des dégénérés en général; 3° dans le premier

groupe, le palais est variable dans son type général; mais en

somme il est peu profond, ou du moins ne dépasse pas la profon-

deur ordinaire, en avant; 4° dans le second groupe, le palais varie

aussi dans son type général, mais il estsurtout caractérisé par une,

augmentation de profondeur au niveau des premières petites mo-

laires. Il, DE MUSGRA'E-CHY.

LXIV. Un cas d'anévrisme thoracique ayant simulé une tumeur

du médiastin; par Robert PuGH. (The Journal of Mental Science.

Avril 1903).

Il s'agit d'un homme de quarante-cinq ans, entré à l'asile pour

une démence secondaire bénigne. Le malade a succombé brusque-

ment à une hémorrhagie par la trachée, due à un faux anévrisme

lequel était consécutif à un anévrisme vrai de la moitié supérieure

de la branche ascendante de la crosse de l'aorte ; l'ouverture s'est

faite dans la bronche droite près de sa jonction avec la trachée.

Autres constatations pathologiques : syphilis généralisée, folie

avec démence très accusée. Un des points les plus curieux de ce

cas était une extrême distension des veines superficielles du tho-

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 383

rax. Cette distension était si considérable que, en l'absence de tout

signe précis révélant un anévrysme, il était impossible de déter-

miner exactement si le malade souffrait de cette dernière lésion

ou bien d'une affection syphilitique du médiastin et de ses gan-

glions. R. DE l\1uSGHAVE-CLAY.

LXV. Un cas de cyticerque du cerveau; par W.-C. SULLIVAN. (The

Journal of Mental Science. Janvier 1903).

Homme de 27 ans, aurait eu à l'âge de deux ans-une crise avec

spasme de la main et du bras droit, suivie de perte de connais-

sance, d'aphasie et de parésie droite, le tout ayant disparu en

deux jours. Aucun trouble nerveux depuis. On ne s'est jamais

aperçu qu'il eut le ver solitaire. Le premier symptôme a été une

céphalalgie sans fièvre, qui s'aggrava trois jours après,en s'accom-

pagnant de frissons et d'obscurcissement de la vue. Signe de Ker-

nig des deux côtés. Ecoulement abondant par l'oreille droite d'un

liquide séro-purulent, dont le dépôt, examiné au microscope, mon-

tre des crochets de taenia. Puis délire, cécité complète, rétention

d'urine, coma et mort. A l'autopsie : organes thoraciques et abdo-

minaux sains. Pas de taenia dans l'intestin. A l'ablation de la

calotte crânienne, on distingue très nettement des dépressions

arrondies sur la face interne des deux pariétaux dont l'épaisseur,

aux points les plus amincis, ne dépassait pas celle d'une feuille

de parchemin ; ces dépressions correspondaient à la saillie des

kystes dans l'espace sub-dural. La dure-mère était normale et

n'adhérait nulle part aux parois kystiques. Plusieurs kystes fai-

saient saillie à la surface du cerveau, surtout au niveau ries gran-

des scissures. A la base, on trouvait une grande quantité de

liquide purulent, clair, baignant la protubérance et la moelle et fi-

lant le long des gaines des nerfs crâniens. En ouvrant l'oreille

moyenne, on trouve une cavité remplie d'un liquide purulent clair

semblable à celui de la base du crâne. La membrane muqueuse et

les osselets paraissent normaux. Le mode de communication entre

la cavité tympanique et l'espace subdural n'a pu être précisé. Les

cysticerques étaient ceux du ténia soli2em. R. DE M-C.

LXVI. Les altérations du système nerveux dans un cas de poren-

céphalie ; par J.-O. WAKELIN BARRATT. (The Journal of Mental

Science, juillet 1903.) ,

L'observation du malade est suivie d'une autopsie très bien

faite, et dont le compte rendu très détaillé est accompagné de

ligures et de planches : nous reproduisons le résumé de l'auteur.

lous les faits constatés dans ce cas indiquent comme cause de

la porencéphalie une embolie de la cérébrale moyenne gauche

survenue vers la fin de la première année de la vie : les princi-

384 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

pales altérations du système nerveux central étaient les suivantes :

1° Il y avait une défectuosité du manteau cérébral à gauche,

intéressant l'opercule, l'insula de Iteil et la circonvolution tempo-

rale supérieure. Le plancher de cette surface était formé par les

restes de la substance blanche sous-jacente, laquelle était très

paume en fibres médullaires. L'hémisphère gauche- était petit : le

lobe temporal gauche vu par en dessous était aussi de volume

insuffisant. Le faisceau longitudinal inférieur gauche était altéré;

2" Les noyaux caudé et lenticulaire étaient sains; 3- La couche

optique gauche était atrophiée, et l'atrophie intéressait les noyaux

latéral médian et ventral (surtout ce dernier), tandis que le noyau

antérieur était indemne. Le corps génicuié interne gauche était

très petit,' le droit d'un volume inusité. Les tubercules mamil-

laires étaient intacts. La radiation optique gauche était atrophiée,

L'atrophie de la couche optique était entièrement sous la

dépendance de la lésion corticale; 4° Les tractus cortico-spinal et

thalamo spinal émanant de l'hémisphèl gauche étaient nettement

atrophiés dans la mésencéphale, la protuberance et la moelle;

5° Le cervelet avait son développement normal; 6° La moelle pré-

sentait une défectuosité de la colonne antero-tnterue gauche, et la

colonne antéro-latérale droite était d'une largeur insuffisante en

face de la base de la corne antérieure. Il y avait aussi une dimi-

nution de volume de la corne antérieure droite. Il y a encore deux

points sur lesquels il faut insister : 1° La pie-mère et l'arachnoïde

étaient opaques et épaissies sur les deux hémisphères dont le

droit présentait aussi un certain degré d'atrophie générale. Ceci

semble être indépendant de la lésion corticale, et être de la même

nature que l'opacité et l'épaississement des membranes, et l'atro-

phie cérébrale que l'on rencontre dans les autopsies d'asile chez

des épileptiques n'ayant présenté aucun signe de porencéphalie;

2° Le second point à noter est l'absence de développement de la

névroglie dans la moelle au point où devraient se trouver les

fibres pyramidales entrecroisées droites, en sorte qu'on ne peut

constater en ce point aucune sclérose, bien que cette lésion existe

à un certain degré dans la moelle allongée et dans la pyramide

antérieure gauche. Ceci parait pouvoir s'expliquer par ce fait que

la dégénérescence des fibres provenant de l'écorce cérébrale et de

la couche optique est survenue avant que la myélination fût com-

plète, et s'est par conséquent accompagnée de moins de sclérose

que si ces fibres avaient atteint leur myélination parfaite.

n. DE MUSGRAVE-CLAY,

Remarques sur la cellule de la névroglie et ses prolonge-

ments ; par R. LEEPEI\ (The Journal of Mental Science. Oct.i902).

Les altérations des cellules de la névroglie se rencontrent com-

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 385

munément dans le cerveau des aliénés ; leur fonction normale est

encore mal déterminée; l'auteur pense que chaque vibration due

à la systole ventriculaire trouve sa plus lointaine et sa plus délicate

expression dans le réseau fibrillaire de la névroglie ; qne ces cel-

lules, par l'élasticité qui leur est propre, ne servent pas seulement

de support mécanique, mais représentent le mécanisme vaso-

moteur des centres cérébraux les plus élevés, servant à les proté-

ger contre des actions toxiques brusques et à les isoler; il est

possible aussi d'accorder aux cellules de la névroglie et à leurs

prolongements l'énergie et la complexité de fonctions que Cajal

leur attribue. On s'étonne parfois de la fréquence avec laquelle se

rencontrent les granulations pigmentaires dans toutes les grandes

cellules nerveuses chez l'homme et chez les animaux; il est plus

que probable que cette substance pigmentaire est indispensable

aux fonctions nerveuses normales. Quelle est donc l'interprétation

de la presence de ces granulations pigmentaires dans l'intérieur

et autour des cellules de la névroglie ? Il est à remarquer que le

pigment devient d'autant plus abondant que la cellule vieillit et

réclame, pour entrer en activité, une stimulation plus vive. Cette

substance pigmentaire est-elle un phénomène accessoire de la

fonction nerveuse cérébrale normale, ou bien un stigmate intra-

crânien de dégénérescence, n'apparaissant que dans les cellules

dont les fonctions ne sont déjà plus capables d'une activité supé-

iieure, mais cependant nécessaire à leur vitalité faiblissante. Les

prolongements des cellules de la névroglie ressemblent beaucoup

aux flagella de certaines bactéries douées de mouvement ; elles se

colorent par les mêmes méthodes histologiques. et il ne faut pas

oublier que' Spina et Vejnar ont vu des cellules de la névroglie en

mouvement, ainsi que les mouvements en apparence ciliaires, de

leur réseau fibrillaire chez la grenouille vivante.

La sclérose cérébrale diffère de la sclérose des autres tissus par

le peu de rétraction de la région malade, ce qui ne peut être dû

qu'à l'élasticité et à la faculté d'adaptation du tissu de suppléance,

lequel, on le sait, est fourni principalement par l'hyperplasie et la

prolifération des cellules de la névroglie. La cellule de la névroglie

possède donc une organisation supérieure à celle du tissu conjonc-

tif du reste de l'organisme. La partie de la cellule de la névroglie

qui mérite le plus d'attention et d'étude est celle que Bevan Lewis

désigne sous le nom de prolongements vasculaires. On voit sou-

vent ces prolongements en contact apparent avec une cellule endo-

tlléliale dans la paroi d'un capillaire, ou bien adhérente au con-

duit vasculaire qui sépare les cellules endothéliales. Si un réseau

fibrillaire très fin est constamment interposé entre la terminaison

de ce prolongement et la paroi capillaire, il est aisé de comprendre

quelle puissante influence la contractilité de ce prolongement peut

exercer sur la circulation cérébrale, et d'admettre que l'hypertro-

AnC ! l1VE. 2° série, t. XVII. 23

386 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

phie de ce prolongement dans un cerveau malade doit comporter

une signification pathologique bien nette.

- Il se peut aussi que ce prolongement soit un conduit d'excrétion

pour les produits de décomposition cellulaire, et que des particules

de cellules nerveuses chromatolysées trouvent dans ces prolonge-

ments en quelque sorte tentaculaires des cellules de la névroglie

une issue nécessaire hors de l'écorce cérébrale; il se peut encore

que le processns soit inverse, et que la lymphe des espaces péri-

cellulaires et péri-vasculaires soit absorbée par ces terminaisons

cellullaires, pour prendre une direction centripète, alimenter la

névroglie et ses dépendances et finalement, atteindre le neurone.

s'il est vrai que la névroglie exerce sur la cellule nerveuse une

action trophique.

En terminant, l'auteur insiste sur la nécessité d'examiner ces

cellules aussitôt que possible après la mort, car, de même que les

autres éléments cellulaires de l'écorce, elles présentent très rapi-

dement des altérations cadavériques de nature à empêcher ou à

égarer les recherches. R. DE 1\IUSGR1VE-CLAY.

LXVIII. Un cerveau anormal de poids anormal ; par John SUTc-

, LIFFE. (The Journal of Mental Science. Avril 1902.)

La conclusion de l'auteur est la suivante : Il s'agit de la lésion

que l'on désigne sous le nom d'hypertrophie du cerveau et qui est

en réalité constituée par une augmentation diffuse de la névroglie

NeU1'ogliose) avec masses gliomateuses localisées, et présentant les

caractères d'un gliome myxomateux. La distribution générale de

la lésion donne à penser qu'elle pouvait être le résultat d'une

défectuosité congénitale. R. de Musgrave-Clat.

LXIX. Sur les rapports de la pression intra-crânienne et sur les

phénomènes de la compression bulbaire ; par le D1' Zeri. (Iliv.

Sp. di fren. 1903, fasc. 1, t. Il),

Conclusions générales de ces recherches expérimentales : l'ou-

verture du ligament occipito-atloïdien et l'issue même abondante

de liquide céphalo-rachidien, ne donnent pas lieu à des phénomè-

nes remarquables du côté de la circulation et de la respiration.

Les effets de la compression de la moelle allongée se manifestent

sur la circulation le plus souvent sous la forme de ralentissement

des pulsations cardiaques, avec abaissement de la pression et

d'accélération des battements suivis d'augmentation de la pression.

Ce n'est que rarement que la fréquence du coeur et la hauteur de

la pression se manifestent de façon indépendante. Du côté de la

respiration, la compression de la moelle allongée fut accompagnée

d'un arrêt respiratoire, précédé d'une accélération des mouve-

ments respiratoires et d'une diminution de leur amplitude. Assez

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 387

souvent on nota des formes arythmiques et allorythmiques des

mouvements respiratoires. Le centre respiratoire est beaucoup

plus sensible que le modérateur du coeur aux effets de la com-

presssion.. J. S.

LXX. Lésions nerveuses et pathogénie des amyotrophies d'origine

articulaire; parle Dr Pighini, (Riv. Sp. difren. 1903, fasc,1,LlI).

Les amyotrophies qui succèdent de façon précoce aux affections

articulaires sont d'origine réflexe vaso-motrice.

Le réflexe s'accomplit par les voies sensitives de l'articulation,

ganglions spinaux, centres trophiques vaso-moteurs de la moelle,

ganglions sympathiques et nerfs vaso-moteurs. Les altérations

qui se rencontrent dans ce trajet sont dues à la dégénération

rétrograde. L'atrophie musculaire dans les cas aigus dépend vrai-

semblablement de l'ischémie produite par un spasme vasculaire

prolongé; dans les cas chroniques, de troubles trophiques com-

plexes occasionnés par des altérations matérielles des vaisseaux.

J. SEGLAS.

LXXI. Rotation autour de l'axe longitudinal chez les animaux

avec lésions unilatérales du cervelet; par le D SEncI (Riv. Sp. di

frein. 1903, fasc. 1, t. II).

La direction de la rotation autour de l'axe longitudinal chez les

animaux avec lésions unilatérales du cervelet se fait tantôt du côté

opéré au côté sain, tantôt du côté sain au côté opéré. Dans les

lésions incomplètes des pédoncules cérebelleux, qui intéressent

leur partie postérieure et interne ou dans les lésions qui intéres-

sent surtout le cervelet, le mouvement se fait du côté sain vers le

côté opéré, dans les lésions complètes des pédoncules cérébelleux

en sens inverse. La rotation est un phénomène toujours irritatif;

mais tantôt elle est due à l'hémihyperkinésie d'un côté, tantôt à

l'hemibypokinésie du même côté accompagnée d'un trouble sen-

soriel, le vertige; ce qui, modifiant les rapports dynamiques entre

les deux moitiés du corps de façon opposée, favorise ce mouve-

ment tantôt dans une direction, tantôt dans la direction opposée.

J. SELLAS.

L\III. Sur l'encéphalite hémorrhagique en particulier de nature

tuberculeuse ; par le D'' l3oIQICCI. (Riv. Sp, di (l'en. 1903, fasc. 1,

t. 11). -

LXXIII. Antocytotoxines et anti-autocytotoxines spécifiques des

épileptiques ; par le D1' C. Ceci. (Riu. Sp. di (¡'en, 1903. fasc. 1,

t. II).

L'auteur conclut de ses recherches que dans le sang des épilep-

tiques, en même temps qu'une autocytotoxine spécifique, circule

388 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

aussi une anti-autocytotoxine ; que ce principe antitoxique n'est

pas soluble dans le plasma vivant, mais se trouve dans le sang à

l'état latent, incorporé dans les éléments cellulaires du sang lui-

même, et dont il ne se libère qu'à la suite d'un processus phagoly-

tique. - J. S.

LXXIV. Effets de la thyroïdectomie sur le pouvoir de procréation

et sur les descendants; par le D' C. CENI. (Riv. Sp. difren. fasc. 4,

1903).

L'état morbide qui se produit chez les procréateurs, à la suite de

lésions ou d'ablations des thyroïdes, exerce une action nocive sur

leurs éléments sexuels (ovule et spermatozoide) ; cette action,

après la conception, est ressentie de façon directe plus par la

partie de l'ovule destinée à donner les annexes, que par celle des-

tinée à donner le germe embryonnaire.

La thyroïdectomie peut exercer une action nocive avant toutsur

les organes sexuels féminins en diminuant et en arrêtant la puis-

sance procréatrice ; et en second lieu, elle exerce dans le même

temps une action évidemment néfaste sur les descendants, due à

l'influence qu'elle exerce directement sur l'ovule et sur le sperma-

tozoïde avant la conception. J. Seglas.

LXXV. A propos du problème des rapports entre les voies de con-

duction intercellulaires et la périphérie de la cellule nerveuse ;

par le Dr Donaggio. (Riv. Sp. di frein. fasc. 4, lu03.)

D'après l'auteur, l'appareil complexe périphérique de la cellule

nerveuse n'est pas doué de capacité de conduction. Les neuro-fibril-

les, au lieu de s'anastomoser avec l'appareil périphérique, le

perforent sans assumer avec lui aucun rapport ; comme l'auteur a

pu le constater dans des éléments du noyau du corps trapézoide,

où les ramifications fibrillaires rejoignaient l'intérieur de la

cellule, repliés dans une duplicature du réticulum périphérique

dont ils restaienttoujours nettement différenciés. J. S.

LXXVI. Influence du travail intellectuel prolongé et de la fatigue

mentale sur la respiration ; par le Dr Omci. (Riv. Sp. di /'ren.

fasc. 4, 1903).-

Voici les conclusions de cet important mémoire : 1° Les irrégu-

larités de la respiration sont généralement liées à des irrégularités

du travail mental, soit dans sa rapidité du calcul, soit dans l'in-

tensité variable avec laquelle certains éléments psychiques (atten-

tion, aperception, mémoire...) prennent part à des actes mentaux

déterminés. 2° Quand les actes mentaux sont de durée égale et

coûtent au sujet un effort mental égal, la respiration prend aussi

un cours uniforme ; au contraire elle devient périodique quand il

REVUE d'aNATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 3S

y a des alternatives périodiques de travail et de repos. 3° Une des

principales causes des modifications respiratoires chez celui qui

calcule, est due au fait que le langage intérieur accompagne et

aide le travail mental. 4° Les irrégularités de la respiration se

manifestent dans la forme, la profondeur, et la fréquence des

excursions thoraciques, et deviennent d'autant plus accentuées que

plus intense est la fatigue mentale du sujet. 5° La rapidité de

l'inspiration est d'autant plus grande que le travail mental est

plus intense et plus rapide, peut-être parce que la période inspi-

ratoire n'est pas la plusfavorable à l'extériorisation de la pensée et

que le sujet tend inconsciemment à l'abréger. - 6° L'inspiration

correspond très souvent soit au petit intervalle entre deux actes

mentaux successifs, soit à celui qui sépare le calcul mental accom-

pli de l'acte musculaire d'écrire les chiffres obtenus. Quand durant

un acte mental (A. M.) le sujet fait quelques respirations, les ins-

pirations sont généralement moins profondes, mais plus brusques

et rapides qu'à l'ordinaire. -7° Le travail mental du calcul est

plus intense durant l'expiration, si l'on fait exception des périodes

de travail accomplies pendant quelques pauses. 8° L'expiration

contemporaine du travail mental est à l'ordinaire allongée, non

uniforme dans la rapidité de la ligne de descente, saccadée. z

9° L'allongement de l'expiration semble être l'indice d'un travail

mental contemporain, tandis que d'autre part la longueur nor-

male ou même le raccourcissement de l'expiration n'excluent pas

la possibilité d'un calcul concomitant, 10° On ne peut pas, à

priori, établir aucun rapport entre la durée de l'expiration et la

quantité des A. M. 11° La modification de l'expiration, contem-

poraine au travail mental, peut aussi manquer; mais elle est un

bon indice, quand elle existe, pour juger si, même durant une

expiration brève, le sujet a travaillé. 12° La pause post-expira-

toire est d'abord abrégée ou manque durant les A. M. rapides.

13° D'ailleurs, les pauses dans la respiration des calculateurs ne

sont pas rares et de diverses espèces, soit pour le moment de leur

production, soit pour leur valeur psychologique. 14° La pause

la plus fréquente est la pause post-expiratoire. La valeur psycho-

logique la plus habituelle des diverses pauses est d'indiquer une

période de repos mental relatif ou absolu. 15° Très souvent les

diverses pauses sont contemporaines de l'acte d'écrire un chiffre.

16° On ne doit pas oublier cependant qu'une pause quelconque

peut être associée à une période de travail mental, et être alors

l'expression, soit d'un phénomène d'aperception, soit d'un effort

intense de mémoire pour évoquer des souvenirs oubliés. i ï° Les

pauses de toute espèce deviennent d'habitude très fréquentes

durant la fatigue mentale, et alors sont peut-être l'expression de

la. fatigue des muscles et des centres respiratoires inférieurs. -

18° Le rapport entre la profondeur de la respiration et l'intensité

390 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

du travail mental n'est pas toujours constant. 19° Spécialement

chez les sujets non fatigués encore, une augmentation de la pro-

fondeur de la respiration correspond aux périodes de repos men-

- tal absolu ou relatif. - 20° Au contraire aux périodes d'activité

mental correspondent des respirations peu profondes ; si bien que

l'on peut dire d'une manière très générale que plus le travail men-

tal est intense et absorbant, plus la respiration est superficielle,

jusqu'à s'épuiser dans une pause plus ou moins longue, spéciale-

ment quand le sujet concentre dans le calcul toute son attention

et fait des efforts intenses de mémoire. 21° La réaction de la

fréquence respiratoire aux variations d'intensité et de rapidité du

travail mental est très sensible et très vive. 22° D'ordinaire, à

un travail mental représenté par des phénomènes d'aperception

et de's efforts de la mémoire-d'évocation s'associe une diminution

de la fréquence respiratoire; aux périodes d'activité calculatrice

presqu'automatique, s'associe plus souvent une augmentation du

nombre des excursions thoraciques. J. SEGLAS.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE

XXXVII. Le diagnostic des blessures de tête; parAmTOn B. HER-

rick. (The 11'ew-I'orl : médical Journal and Philadelphia medical

Journal, 31 octobre 1903.)

L'auteur examine successivement les contusions du cuir chevelu,

les plaies du cuir chevelu, les fractures de la base du crâne, les

fractures du vertex avec dépression, la commotion cérébrale, la

déchirure du cerveau et l'hémorrhagie. Il signale comme devant

faire porter un pronostic grave ou fatal les caractères suivants :

persistance de la stupeur ; accroissement du caractère stertoreux

de la respiration et respiration du type Cheyne-Stokes ; enfin

l'élévation considérable et sans rémission de la température.

, R. DE Musgrave-Clay.

XXXVIII. Pseudo-tabes syphilitique : une observation; diagnostic

différentiel du tabès; par Joseph COLLINS. (The New-York

Médical Journal, 28 mars et 4 avril 1903.)

Intéressante observation, avec autopsie instructive, mais qu'il

faut se borner à signaler, car elle ne peut se résumer sans perdre

son intérêt. ' R. ni.-C.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 391

XXXIX. Un cas d'état de mal compliqué de scarlatine; par George

WATTERS Green. (The Journal úr Mental Science. Avril 1903).

Il s'agit d'un garçon de dix-sept ans entré à l'asile comme épi-

leptique : après deux séries de crises d'épilepsie (l'une de 36 et l'au-

tre 73) en trois jours il fut pris de scarlatine, au cours de laquelle

il eut parfois 100 à 200 attaques par jour (en tout 1.742 en dix-

sept jours). Démence très faible, il fut soigné par la digitale et

l'alcool. Il était à peu près guéri lorsqu'il fut atteint d'une névrite

périphérique des deux jambes. Quelle est l'origine de cette né-

vrite ? Elle peut être post-scarlatineuse ou post-épileptique, car on

ne peut guère admettre qu'elle soit post-alcoolique, le traitement

par l'alcool n'ayant eu qu'une durée courte. D'autre part la durée

de la névrite a été plus longue que dans les cas post-épileptiques.

Il semble donc bien que ce soit à la scarlatine qu'il faut rapporter

l'origine de cette névrite. L'auteur rappelle en terminant que

Korsakow (Moscou) a le premier fait remarquer qu'une forme spé-

ciale de trouble mental que l'on avait auparavant décrite comme

étant caractéristique de l'alcoolisme, et qui s'associe communé-

ment à la névrite multiple, peut également s'observer dans des

cas où l'alcoolisme n'est pas en jeu, mais où l'on observe des

polynévrites d'autre origine. On peut donc se demander, sans que

la question soit encore tranchée, s'il n'existe pas une « psychose

polynévritique ». R. DE Musgrave-Clay.

XXXX. Hystérie para et post-pneumonique; par L. Gallavardin

(Province médicale, Lyon, novembre 1901, n° 44, p. 517).

Parmi les causes provocatrices de l'hystérie, le traumatisme et

les intoxications se placent au premier rang, les infections ont été

bien moins souvent incriminées.

M. Gallavardin publie, à ce titre, l'observation d'un malade de

vingt-deux ans qui entre à l'hôpital pour une pneumonie lobaire

assez limitée de la base droite. Dans le cours de la pneumonie, et à

la suite, apparition de manifestations hystériques multiples. Di-

plopie monoculaire ; contracture en flexion de la jambe gauche sur

la cuisse avec anesthésie en genouillère superposée. Parésie des

deux membres supérieurs avec ataxie, mouvements choréiformes,

soubresauts des tendons, et anesthésie passagère en manchette.

Grandes crises hystériques d'une' durée d'une demi-heure surve-

nant tous les deux jours, pendant quarante jours. Phénomènes

post-paroxystiques : bâillements, alalie et trismus cédant à l'élec-

trisation. Amélioration progressive.

Gilles de la Tourette pense que les infections agissent en déter-

minant un épuisement général de l'organisme qui retentit profon-

dement sur un système nerveux prédisposé. Dans le cas de l'au-

392 REVUE DE PA'lHOLOGIE NERVEUSE.

teur, le malade présentait des antécédents personnels névropathi-

ques : chorée, crises dans l'enfance, tempérament nerveux.

M. Gallavardin insiste.sur ce fait; qu'il peut se produire au cours

des maladies infectieuses, à côté des complications nerveuses de

cause organique, des manifestations hystériques franches, dont le

pronostic est en général bénin et qu'il importe de reconnaître dès

le moment de leur apparition. G. C.

XXXXI. Diagnostic des méningites infantiles par la réaction du

liquide céphalo-rachidien sur le sang du porteur (procédé de

M. Bard) ; par MM. Weill et Péiiu (Province médicale, Lyon,

mars 1901, p. 136.)

MM. Weill et Péhu ont appliqué au diagnostic des méningites

infantiles, le procédé de M. Bard : hématolyse par la réaction du

liquide céphalo-rachidien sur le sang du porteur. Cette méthode

repose sur le principe des variations de la pression osmotique

du liquide céphalo-rachidien par rapport au sang du malade.

Le procédé de M. Bard est basé sur les changements qui se pro-

duisent lorsqu'on met en présence le sang du malade et le liquide

céphalo-rachidien pathologique. Si la tension osmotique de ce der-

nier est modifiée. apparaît alors le phénomène dit du laquage

(coloration en rouge ou rose du liquide en dehors du caillot) expli-

cable par la mise en liberté de l'hémoglobine des globules rouges

dans le sérum additionné de liquide céphalo-rachidien ; cette mise

en liberté constitue le phénomène de la plasmolyse.

Après une ponction de Quincke, il suffit de recueillir trois à cinq

centimètres cubes de liquide céphalo-rachidien ; d'après le pro-

cédé de M. Bard on voit, après centrifugation d'une demi-minute

seulement à l'appareil de Krauss, ou après repos de dix à douze

heures, se produire le phénomène du laquage, si par suite d'une

méningite, la tension osmotique du liquide rachidien est mo-

difiée.

Dans 88 p. 100 des cas observés par les auteurs, le procédé a

donné des résultats décisifs pour le diagnostic. G. Carrier.

XXXXII. Névrite professionnelle du cubital palmaire chez un

verrier diabétique; par M. LAN1'iOIS. (Lyon médical, p. ï8,

7 décembre 1902).

M. Lannois communique l'Observation d'un homme de qua-

rante-trois ans qui depuis trois ou quatre semaines ne pou\ait

plus faire son métier de verrier. 11 avait de l'engourdissement de

l'auriculaire; les mouvements de ce doigt étaient difficiles et les

sensations d'engourdissement augmentaient par le travail. A part

un peu de dyspepsie et de polyphagie avec un peu de sucre dans

l'urine, deux ans auparavant, rien à noter de spécial.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 393

On a décrit une griffe cubitale chez les verriers; M. Laurençon

a publié des cas de cette nature avec bourse séreuse au niveau -du

coude.

Le malade en question faisait des bagues de goulots de bou-

teilles; pour ce faire, il se servait d'un outil l'obligeant à appuyer

la main au niveau du pisiforme, où il avait un durillon. A ce ni-

veau, le cubital était comprimé. La compression ne semble pas

suffire pour créer de la névrite, car l'auteur a vu, dans une verre-

rie, beaucoup d'ouvriers présentent ce durillon sans avoir de la

névrite. Chez le malade en question, le diabète semble avoir agi

comme seconde cause nécessaire. D'autres fois il peut y avoir de

l'éthylisme ou du saturnisme. Ziemsen a décrit, chez les diabéti-

ques, la griffe cubitale. 1

Ce malade a été guéri sous l'influence du repos et de l'électricité.

. G. C.

1

XXXXIII. Méningite tuberculeuse et granulie au cours d'une

bronchopneumonie aiguë (cytologie, cryoscopie, séro-agglutina-

tion, présence du bacille de Koch); par 11111.1\ICOr ? s et F. AI\LOING,

(Société médicale des Hôpitaux de Lyon, 11 avril 1902).

Il Cytologie. Dans les trois ponctions faites par les auteurs,

les mononucléaires (les lymphocytes en particulier) étaient très

abondants dans le liquide céphalo-rachidien. Ils donnent les

chiffres 67 et 97 contre 31 et 3 polynucléaires. Cette formule dénote

une lymphocytose caractéristique et ces chiffres sont en parfait t

accord avec ceux obfenus par MM. Widal, Sicard et Ravaut.

La comparaison des chiffres obtenus à la première et à la der-

nière ponction met eu relief ce fait qui ressort des observations

cytologiques des pleurésies en particulier, que le chiffre des mono-

nucléaires augmente se rapprochant de 100 p. 100 au détriment

des polynucléaires, dont la proportion diminue inversement à

mesure qu'on s'éloigne du début des processus tuberculeux.

2° Cryoscopie. - Dans les méningites tuberculeuses, le liquide

rachidien devient presque toujours hypotonique avec = 055 à

0018,

Dans le cas des auteurs A - - 0 ? 1.

3° Sèro-agglulination très positive à 1/5° avec le sérum sanguin.

4° Recherche du bacille de Koch. Les auteurs, conformément

à la règle n'ont pu trouver le bacille de Koch dans les premières

phases du processus. Il a été décelable, après la mort, en quantité

extraordinaire dans le liquide céphalo-rachidien.

Cette observation est très intéressante : 1° Par la concordance

de la cytologie, de la cryoscopie et du séro-diagnostic positif du

sang qui établit la nature tuberculeuse d'une méningite qu'on pou-

vait cliniquement supposer d'autre nature. - 2° Par l'absence du

pouvoir agglutinant du liquide céphalo-rachidien vis-à-vis du

394 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

bacille tuberculeux. 3° Par la présence seulement décelable sur

le cadavre au bacille de Koch en grande abondance dans le

liquide céphalorachidien. - 4° Par le peu d'action de la ponction

de Quincke sur les contractures dont elle n'a amené aucune séda-

tion passagère sans améliorer les autres symptômes. G. C.

XXXXIV. Corps étranger du cerveau; par M. Vallas (Société

nationale de médecine de Lyon, 2 février 1902).

M. Vallas publie une observation intéressante au point de vue

médico-légal.

Il s'agit d'un maçon employé aux travaux du tunnel du Credo,

qui le 2 janvier 1902 avait reçu sur la tête une pierre de 1 à

2 kilos tombée d'une hauteur de 3 à 4 mètres. Il avait travaillé

deux jours ne se plaignant de rien. Le 4janvier il ressentit un mal

de tête qui alla en s'accentuant. Le 6 janvier, il eut une crise

d'épilepsie jacksonienne et on vit apparaître une hémiplégie avec

aphasie. La région pariétale gauche présentait une plaie contuse.

A l'exploration on sentait comme une arête osseuse au-dessous

des téguments, cequi fit penser à une fracture du crâne par enfon-

cement.

La trépanation fut faite et l'on trouva une lame de couteau

longue de 2 centimètres prise entre les deux bords d'une plaie du

pariétal. Elle faisait saillie à la partie interne et s'enfonçait dans

l'épaisseur du lobe paracentral. Tout autour il y avait du pus en

assez grande quantité. La méningite qui existait déjà suivit son

cours et le malade succomba le troisième jour.

A l'autopsie, l'auteur trouva une méningite diffuse, marquée

surtout au niveau de l'hémisphère gauche ayant envahi la base

et commençant à remonter du côté de l'hémisphère droit. Il y

avait plaie de la dure-mère, de la pie-mère et cavité purulente en

plein lobe paracentral gauche. D'après les renseignements

recueillis auprès de la femme du malade, son mari avait reçu un

coup de couteau, il y a deux ans, au cours d'une rixe, mais

il n'en était résulté aucun accident.

Le siège de la plaie contuse correspondant à la chute de la pierre,

ne correspondait pas au siège du corps étranger, mais se trouvait

un peu à côté. On trouvait une cicatrice linéaire blanche, ancienne,

correspondant assez exactement au siège du corps étranger. La

plaie ossseuse présentait des lésions manifestes d'ostéite ancienne.

Les renseignements donnés par la femme du malade étaient donc

vrais. M. Vallas interprète les faits de la façon suivante : la

plaie contuse, produite par la chute de la pierre, se serait infectée

secondairement; de là, l'infection aurait gagné la plaie ancienne*

toute voisine produite par la lame du couteau et pénétré par la

dans le crâne, d'où abcès localisé autour de la lame dans le lobe

paracentral et méningite.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 395

Cette observation est intéressante : 1° par la longue tolérance

Ju cerveau à l'égard d'un corps étranger; 2° par le traumatisme

insignifiant qui a été l'origine de l'infection ; 3° par l'intérêt médi-

co-légal de la filiation des accidents. " G. C.

Deux cas de nanisme achondroplasique chez le frère

et la soeur; par le Dr M. LtNNOis (Lyon médical, n° 24, p. 893,

16 juin 1902).

)1. Lannois publie l'observation de deux nains achondroplasi-

ques, âgés l'un de vingt-cinq ans et l'autre de vingt-six ans. Ces

observations auraient été déjà présentées, croit l'auteur, à la

Société de médecine de Bordeaux par M. Tissié en 1806. Il les

reprend, car il pense que grâce au travail de P. Marie elles peuvent

mieux être classifiées et aussi à cause des radiographies intéres-

santes qu'il possède de ces deux nains.

Les caractères qui ont été donnés à l'achondroplasie s'y rencon-

trent très nettement : du côté des mains, disposition des doigts

en trident, les phalanges sont tassées et d'apparence cubique; les

métacarpiens sont très courts et ramassés. Les os du carpe sont

remarquables par leur petitesse. Légère courbure de l'extrémité

inférieure du cubitus et profondeur de la rainure cubitale; aspect

carré et massif de l'extrémité inférieure du radius. Cette même

apparence est encore plus marquée sur les articulations fémoro-

tibiales; le péroné n'entrait pas dans la composition de l'articula-

tion. La trace de l'épiphyse semble être une petite ligne saillante

au-dessous du plateau tibial.

Sur l'humérus, on trouve une énorme saillie ostéogénique qui

existe symétriquement.

Le pied d'un des sujets présente un aspect particulier ; les os du

gros orteil, qui semblent extérieurement avoir échappé au nanisme,

sont plus volumineux, plus épais qu'aux autres orteils, mais

cependant, ils sont plus tassés, plus cubiques. Les autres méta-

tarsiens sont très courts.

Au point de vue du diagnostic, dit l'auteur, les cas de nanisme

peuvent se ranger dans trois catégories nettement distinctes :

Le premier groupe est constitué par l'arrêt de développement

myxcedémateux.

Le second groupe comprend les nains rachifiques chez qui les

lésions se développent après la naissance soit dans le premier âge,

soit plus tardivement. 0

Le troisième groupe est constitué par les achondroplases. Ici le

thorax n'est pas touché et le nanisme est dû à une micromélie

surtout rhizoalélique qui porte exclusivement sur les épiphyses à

exclusion des diaphyses.

1. Lanuois range ces sujets dans cette catégorie. Chez eux le

tronc et la tète sont sans déformation, les bras trop courts n'attei-

396 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

gnent que la partie supérieure de la cuisse et les mains ont la

déformation caractéristique en trident.

A l'encontre de l'opinion courante. il semble que les os courts

participent au raccourcissement comme les os du poignet et ceux

du pied ; le tronc est court, la tête est brachycéphale.

A propos de la nature et de la pathogénie de cette affection, les

auteurs sont loin d'être d'accord.

Les unsnient que l'acllondroplasieait un caractère héréditaireet et

repoussent l'assimilation qu'on a voulu faire avec les races à petite

taille (Lapons-Akkas, etc.). D'autres, se basant sur l'hérédité pos-

sible et sur l'existence d'organes génitaux aptes à la reproduction

envisagent l'achondroplasie comme une variété bien caractérisée

et héréditaire des types humains (Apert). Ce sont des troubles

dystrophiques pour les uns, des intoxications pour les autres.

M. Lannois fait remarquer que les parents de ses deux sujets

sont de taille normale ; ils ont eu sept enfants et ont donné nais-

sance successivement à deux onfants nains succédant à un fils de

taille élevée anormale (1 m, 92), Il lui semble très vraisemblable

qu'il y a eu chez la mère des troubles dyscrasiques temporaires

mais inconnus qui ont suffi à provoquer des modifications dans

l'évolution du squelette des enfants. G. Carrier.

XXXXVI. Un cas de tumeur cérébrale à forme psycho-paralytique

et à évolution fébrile; par MM. LAKxots et l'onor (Lyon médical,

n° 43, 26 octobre 1902)..

Le cas rapporté par MM. Lannois et Porot semble venir à l'appui

de l'opinion de certains auteurs qui admettent la nature toxi-m-

fectieuse de quelques-unes des manifestations des tumeurs.

Le début de l'affection se fit par une période d'affaiblissement

général, lentement progressive qui dura un an. Un mois avant la

mort apparurent des troubles psychiques, modification du carac-

tère, apathie, état de stupeur progressivement croissant; puis

cépalée, vomissements et tremblement. Parésie générale au début,

prédominante au membre supérieur droit, se transformant en

monoplégie brachiale, puis en véritable hémiplégie. Exagération

des réflexes ; anesthésie droite. Deux grandes crises épileptiformes,

température constante autour de 38°. Pouls lent, cachexie rapide-

Inégalité pupillaire. ,

Trépanation au niveau d'un point de la calotte très douloureux

à la pression, correspondant au pied de la frontale ascendante-

Pas de tumeur visible à la convexité, absence de battements,

petite plaque méningée. Mort en pleine hémiplégie droite avec

contracture et hyperthermie finale brusque, onze jours après l'in-

tervention.

Autopsie. Grosse tumeur développée au niveau de la partie

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 397

antérieure des noyaux, saillante dans le ventricule latéral gauche,

comprimant les portions antérieures de l'hémisphère gauche,

dilatation ventriculaire bilatérale. Quelques plaques de méningite

delà convexité. Petite hémorragie méningée récente. Diagnostic

macroscopique de la tumeur : Gliome.

Les auteurs mettent en évidence la forme psycho-paralytique de

l'évolution clinique, bien décrite par Brault et Loeper, mais font

remarquer que les troubles psychiques ont bien peu de valeur

, diagnostique; qu'ils peuvent même être trompeurs et faire penser

à la paralysie générale en particulier. Il n'en est pas de même des

troubles paialyliques qui sont un élément de diagnostic important

et qui se caractérisent par leur marche lente. Ils appellent en outre

l'attention sur deux symptômes en particulier : la douleur locali-

sée a la pression d'une part, et la fièvre d'autre part. Le foyer dou-

loureux est en général en rapport avec le siège de la tumeur; cette

douleur très localisée existait au plus haut point chez leur malade

et correspondait bien à la tumeur. Mais le fait que celle-ci n'était

pas corticale doit imposer des réserves sur la valeur rigoureuse de

ce signe.

Quant à la fièvre, deux hypothèses peuvent l'expliquer : ou bien

elle était sous la dépendance des lésions méningées légères trou-

vées à l'autopsie ou bien elle traduisait une toxi-infectiondes cen-

tres nerveux, hypothèse soutenue par Klippel qui a substitué l'au-

to-intoxication et l'auto-infection aiguës à la théorie de l'action

1 purement irritative de la tumeur. C'est cette dernière théorie que

' les auteurs appliquent à leur cas. G. Carrier.

XXXXVII. Formes sévères de l'aérophagie nerveuse ; par M. Bou-

' veret. (Lyon médical, 1901, na 10, p. 349).

Sous le nom d'aérophagie hystérique, M. Bouveret a décrit en

1891 une névrose du pharynx caractérisée par des mouvements de

' déglutition incessants, convulsifs, entraînant de l'air dans l'oeso-

pliage et l'estomac. De temps en temps le gaz dégluti est expulsé

par une bruyante éructation. L'auteur, dans cette note, veut signa- ! 1er simplement certaines formes moins connues, marquées par des

troubles graves au moins en apparence, que la déglutition, immo-

dérée de l'air peut entraîner dans le fonctionnement de l'estomac,

1 du ceeur et du poumon.

, L'auteur cite deux observations dans lesquelles l'aérophagie

provoque un vomissement alimentaire fréquent, abondant, de

nature à troubler sérieusement la nutrition. Le vomissement

domine la scène et il y a souvent quelques difficultés à reconnaître

son exacte pathogénie. Il rapporte aussi une autre forme sévère de

, 'aérophagie nerveuse, où il s'agit de troubles de la respiration

. « de la circulation caractérisés par des phénomènes d'oppression

398 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

et des accès de palpitations allant jusqu'à la crise d'angor vaso-

motrice.

M. Bouveret fait remarquer l'utilité de rechercher dans les cas

de vomissements nerveux ou d'accès d'angor vaso-motrice si l'aéro-

phagie n'est pas en cause. Dans ces cas, comme l'accès d'aéropha-

gie survient le plus souvent ou est plus prononcé après les repas,

il faut que le malade surveille son pharynx avec une attention très

soutenue pendant toute la durée du repas. Il doit s'efforcer de

discipliner ses mouvements de déglutition et de les soumettreà

l'empire de sa volonté. Si l'effort volontaire est insuffisant, il place

un corps étranger entre ses dents, l'écartement des mâchoires arrê-

tant les mouvements pathologiques de déglutition. On doit

joindre le plus souvent au traitement spécial de l'aérophagie, le

traitement général de l'hystérie ou de là neurasthénie.

G. Carrier.

XXXXVIII. Un cas d'hémiplégie passagère causée par un courant

industriel. Contribution à l'étude des accidents nerveux causés

par les courants industriels ; par MM. UoNDET et Piéry. (Province

médical, Lyon, avril 1901, p. 157-f 77).

MM. Bondet et Piéry publient un cas d'hémiplégie passagère

causée par un courant industriel continu, d'une force électro-

motrice de 500 volts. ,

Les symptômes présentés par le malade, revenu à lui au bout

de cinq minutes environ, ont été ceux d'une hémiplégie gauche

incomplète avec hémi-spasme glosso-labié et hélJ11-aneslhésle

sensitivo-sensorielle superposée ; les symptômes ont diminué pio-

gressivement et un mois après ils avaient disparu.

Au point de vue du diagnostic, les auteurs rejettent et une lésion

organique et 1'liysLéro-trauinaisme. Il s'agit, dans ce cas : i, d'ac-

cident nerveux spéciaux sans substratum anatomique en l'espèce;

2° d'une hémiplégie avec hémi-anesthésie passagère due il l'action,

en quelque sorte spécifique, du courant industriel. Cette affection

spéciale, créée par la commotion électrique, doit occuper poureux

une place à part dans le cadre nosologique. MM. Bondet et Piéry

font à ce propos une revue d'ensemble sur les effets pathologiques

des courants industriels.

Les causes étiologiques sont variées. Elles ont Irait : 1° à la

nature des courants qui peuvent être des courants continus ou des

courants alternatifs ; 2° aux diverses conditions dans lesquelles

se trouve placée la victime. Les effets des courants industriels

varient en effet suivant la durée du contact et de son étendue, sui-

vant l'état des parties en contact et suivant la situation du corps

par rapport au courant. Les accidents causés parles courants sont

de deux ordres : les uns locaux, des brûlures ; les autres sont des

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 399

accidents nerveux qui consistent en perte de connaissance immé-

diate, paralysies, convulsions et tremblements, troubles de la sen-

sibilité et troubles psychiques.

Le diagnostic doit être fait avec l'hystérie et des lésions organi-

ques du système nerveux. Au point de vue anatomo-pathologique,

on ne peut encore être fixé à l'heure actuelle. Il est probable que

suivant l'intensité de la commotion électrique, les lésions nerveu-

ses peuvent ou non apparaître.

Au point de vue nosologique, les auteurs émettent l'hypothèse,

que les accidents nerveux, causés par les courants industriels, doi-

vent être distingués de l'hystéro-traumatisme et former un groupe

à part; comme les paralysies produites par la fulguration, que

Charcot a séparées de l'hystérie proprement dite et a appelées les

kéraino-paralysies. G. Carrier.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

LX. Quelques considérations à propos du rapport sur l'aliénation

mentale; présenté par M. LENTZ, au Congrès International d'hy-

giène et de démographie de 1903, par M. SANO. (Blill. de la Soc.

deméd. ment, de Belgique, 1903, n° 112).

LXI. Sur un cas de tabès compliqué de mouvements choréiques

et de paranoïa; par le De de Buck. (Bull, de la Soc. de méd., men-

tale de Belgique, 1903, n° 112.)

Les mouvements choréiques n'étant survenus chez le malade,

dont l'observation fait l'objet de cette note, qu'à la suite d'un ictus

apoplectique suivi de perte de la conscience et de dysenterie,

l'auteur pense (en l'absence d'examen microscopique) que ces

mouvements se sont développés sous l'influence de l'irritation des

voies motrices extra-pyramidales.

Quant à la paranoïa hallucinatoire à forme démoniaque et mys-

tique, greffée sur cette chorée tabétique, elle était liée comme elle

a la méningo-encéphalite qui était venue compliquer le tabes. Il

s'est donc agi, en somme, d'un cas de tabo-paralysie générale.

G. D.

LXII. Note sur un cas de maladie de Graves avec manie ; par

J.-P. Grikves. (The Journal of Mental Science. Octobre 1903).

Intéressante observation d'une femme atteinte de maladie de

Graves chronique, chez laquelle cette maladie prit brusquement

une forme aiguë, avec accompagnement de manie. La mort sur-

400 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

vint en quatorze jours, sans complications pulmonaires ou autres

avec état pyrétique durant la dernière semaine. '

- - . R. de 1\IUSGIU YE-CL\ y,

LXIII. Un cas de double conscience; par Albert WiLsox. (The

Journal of Mental Science . Octobre 1903.)

Nous regrettons de ne pouvoir utilement analyser la très inté-

ressante histoire de cette jeune fille; mais on comprendra que

c'est une véritable traduction qu'il faudrait, si l'on songe que chez

elle la condition seconde (état anormal) se subdivisait en au moins

12 sous-conditions. Chacune de ces sous-conditions apparaissait et

disparaissait à des intervalles absolument irréguliers. Chaque

sous-condition avait son caractère spécial qui lui était propre, et

chaque sous-condition se combinait avec elle-même, c'est à-dire

qu'elle commençait exactement au point où la même sous-condi-

tion antérieure avait fini. R. de nIGSGR,1VE-CLAI'.

LX1V. Deux cas de chirurgie abdominale chez des aliénés pour

des tentatives de suicide; par Robert JoNEs. (The Journal of

Mental Science. Avtil 1903.)

Relation intéressante de deux observations de grande chirurgie

abdominale chez des aliénés. 0 R. M.-C.

LXV. Notes sur deux cas propres à démontrer la différence qui

existe entre la katatonie et la mélancolie avec stupeur; par

W.-Il. Dawson. (Tite Journal of Mental Science. Octobre 1903.)

Deux observations intéressantes, suivies de remarques à l'appui

de la thèse soutenue. R. M -C.

LXVI. Un cas de chorée et de grossesse avec aliénation mentale;

par Robert Joues. (Tlc Journal of Mental Science, juillet 1903.)

Observation intéressante suivie de remarques judicieuses.

Il. m.-c.

LXVII. De l'action possible sur les aliénés des conversations

raisonnables; par Jas.-M. BUCKLEY (The American Journal of

Insanily, juillet 1902, p. 117-127).

Exemples d'efficacité du traitement moral et appel en faveur de

celui-ci. Snw : 1,

LXVIII. Notes cliniques et pathologiques; par M.-J. MOLAN, (fin

- Journal of Mental Science. Avril 1903).

Ce travail se compose de quatre observations intéressantes : la

première concerne un homme qui avait avalé en état de démence

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 401

des corps étrangers : passage facile de gros clous par l'anus, per-

foration de l'estomac par un fragment de balai qui s'était enfoncé

dans la paroi abdominale antérieure, où il donna lieu à un abcès

nécessitant une intervention chirurgicale, guérison. La seconde a

trait à un homme qui présenta de la pyohémie septique ou cryp-

togénique : angio-cholite suppurée avec infection des poumons,

delà vessie, de la prostate et de l'épididyme, mort. Dans la troi-

sième observation,*il s'agit d'une femme atteinte de mélancolie

avec eczéma généralisé (guérison). Enfin le quatrième cas est un

cas de mélancolie sénile, chez une femme, avec infiltration grais-

seuse du coeur et anévrysme de l'aorte : rupture dans la cavité du u

péricarde ; mort. H. DE IUSGn.avE-CL1'.

1.'\1'\. Nomenclature des maladies mentales; par A.-R. Urguiurt.

(Tlte Journal of Mental Science. Avril 1903).

C'est à propos d'une nouvelle édition de la Nomenclature ils

maladies que va publier le Collège Royal des Médecins de Londres

que l'auteur a pensé qu'il y avait lieu de reviser la nomenclatnre

des maladies mentales. Il pense qu'il faut se rallier, dans les gran-

des ligues du moins, à la classification de Griesinger, et se baser

pour l'établir sur les symptômes, mais en faisant aussi la part de

l'étiologie (sans tenir compte de l'hérédité qui représentant une

étiologie générale, doit être notée dans chaque cas particulier).,

Meynert a tenté une classification pathologique, mais.il est fort

diflicile d'y faire rentrer les cas particuliers. L'auteur pense que

l'on arrivera à un résultat beaucoup plus pratique, si chacun veut

bien ne dire que ce qu'il sait et ne se servir que de chiffres

exacts; il proteste surtout contre l'emploi du mot idiopathique qui

ne veut rien dire du tout et qui ne sert qu'à voiler notre igno-

rance, qu'il vaudrait mieux avouer simplement. Il indique ensuite

la classification qu'il propose, et la fait suivre de quelques explica-

tions. Il. de Musgrave-Clay.

L'il. Un cas d'hébéphrénie ; par W.-R. Dawson. (The Journal of

Mental Science, avril 1903.)

On sait que le mot d' « hébéphrénie » a été employé par Stecker

et Kahlbaum pour désigner une série de phénomènes mentaux

pathologiques commençant à la puberté ou à l'adolescence et suf-

t'samment constants et définis pour qu'on puisse en faire une

forme particulière de maladie mentale, ce que plusieurs auteurs

toutefois n'admettent pas. La maladie dont il s'agit peut. d'après

I(raepelin,être décrite de la façon suivante : elle apparaît toujours

chez des sujets à prédisposition héréditaire et vers la puberté : il

peut y avoir une période de dépression avec idées de suicide, ou

bien, dans une forme plus insidieuse de début, le sujpt devient

Archives, 2' série, t. XVII. 26

402 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

morose, absorbé, il recherche la solitude, ou bien encore il est

irritable et obstiné. Il devient craintif, soupçonneux, il a des hal-

lucinations plus souvent de l'ouïe, quelquefois de la vue, de

l'odorat et de la sensibilité générale; il a des idées délirantes

d'indignité personnelle, de soupçon (on le travaille, ses idées ne

sont pas à lui, etc.), et plus tard il devient expansif. Tout d'abord

il a conscience d'un certain détraquement mental. La masturba-

tion est fréquente. La conduite devient de plus en plus puérile :

il y a des éclats de rire sans le moindre motif, et des actions sans

but. Au début l'appétit est faible, le sommeil troublé et il y a

quelquefois des troubles trophiques ; mais ils disparaissent. La

marche de la maladie est progressive, mais elle comporte quelques

rémissions, surtout dans les commencements. Puis l'affaiblisse-

ment mental s'accuse, mais les idées délirantes et les hallucina-

tions disparaissent. Il peut y avoir cependant quelques périodes

d'excitation. Une démence très accusée apparaît dans un délai

qui va de six mois à plusieurs années, et le plus souvent elle va

s'aggravant. Quelquefois cependant la guérison se produit dans

une certaine mesure : chez quelques sujets la maladie reste sta-

tionnaire. L'auteur rapporte ici, très longuement et avec beaucoup

de détails, l'observation de son malade, qui parait incontestable-

ment être atteint d'hébéphrénie, bien que le cas ne soit pas assez

ancien pour que l'on ait pu constater la démence des dernières

périodes. Il est intéressant de rechercher quels sont les rapports

de l'hébéphrénie avec les autres formes de maladies mentales. Il

est évident qu'elle constitue essentiellement une psychose de dégé-

nérescence, et .presque tous ceux qui en. sont atteints avaient

depuis leur naissance, comme l'a fait remarquer Fink, un certain

degré d'idiotie et d'imbécillité. Mais elle diffère de l'idiotie en ce

que la démence y est progressive et peut remplacer tous les

autres symptômes, soit que, comme on l'admet généralement,

elle soit primitive et inhérente à la maladie, soit qu'on la consi-

dère comme une conséquence des premiers symptômes plus aigus.

L'analogie de l'hébéphrénie avec la paranoïa est évidemment

considérable, mais elle n'est vraie que pour les premières périodes

de la première de ces deux maladies, et les différences (surtout le

caractère très accusé de la démence et le caractère passager des

idées délirantes dans l'hébéphrénie) sont si nettes qu'on conçoit

difficilement que les deux maladies aient pu être rapprochées

dans une même classe. En effet, tandis que l'hébéphrénie est

l'hypertrophie des caractères d'une époque, la paranoïa est

l'hypertrophie de quelques-uns des caractères d'un individu. L'au-

teur inclinerait volontiers à considérer l'hébéphrénie en partie

comme une insuffisance de développement, en partie comme une

dégénérescence ; mais comme la dégénérescence dépend d'une

faiblesse constitutionnelle, la distribution ne porte peut-être que

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 403

sur les mots. Enfin on peut se demander quel est, dans ces cas, le

rôle delà masturbation. Bien qu'il soit évident que l'excès de cette

pratique soit de nature à hâter le déchéance mentale, il ne parait

pas y avoir de raisons suffisantes, dans le cas qui nous occupe,

pour lui attribuer une autre valeur que celle d'un symptôme de

troubles mentaux généralisés. R. de lIIUSGU.vVE-CL.1Y.

LXXL Quelques réflexions à propos de la catatonie ; par le or de

BUCK. Bull. delà soc.de méd. ment, de Belgique, 1903, n° 113.)

L'auteur rejette sans discussion la théorie de l'origine sous-

consciente, ou automatique du syndrome catatonique, il se refuse

également à admettre la théorie qui attribue ce syndrome à un

ralentissement des associations et des processus psycho-moteurs

parce que ce ralentissement ne donne pas une explication suffi-

sante des différences qui séparent la stupeur catatonique de la

stupeur mélancolique. M. de B'uck se déclare donc partisan de la

doctrine de Kroepelin qui rattache les phénomènes catatoniques à

un trouble de l'activité volontaire, mais il estime que cet auteur

est allé trop loin en considérant ces phénomènes comme propres

à la démence précoce, et à côté du syndrome catatonique de la

démence précoce il croit qu'il y a place pour des syndromes cata-

toniques de nature névrosique, toxique, etc..., qui ne se terminent

pas par la démence.

En un mot le syndrome catatonique, comme tous les syndromes

psychiques, pourrait être fonctionnel ou organique, et c'est seule-

ment dans ce dernier cas qu'il appartiendrait à la démence.

G. DENY :

LXXII. Remarques sur les hallucinations ; par CONOLLY Mormon

(T'he Journal of Mental Science, avril et juillet 1903).

La première partie de ce mémoire contient 13 observations fort

intéressantes, et pour la plupart rapportées avec détail. Dans la

seconde partie, l'auteur aborde l'étude des théories des hallucina-

tions. Ces théories sont nombreuses, l'une des premières est la

théorie psychique, d.ite théorie d'Esquirol. Une autre théorie, dite

sensorielle, a éié proposée par Foville,. Luys et Ritti. La théorie

mixte ou spycho-sensorielle porte le nom de Baillarger. Il n'y a

pas lieu d'insister sur ces théories qui sont connues et remplacées.

Les deux théories dont il faut maintenant s'occuper sont celles de

Tamburini et celle de Tanzi : cette dernière d'ailleurs n'est que le

développement et le complément de la première. Tamburini con-

sidère l'hallucination comme dépendant d'une irritation des cen-

tres perceptifs ou psycho-moteurs de l'écorce cérébrale. La théorie,

d'abord acceptée avec beaucoup de réserve, a fini par rallier à

peu près toutes les opinions, et les théories nouvelles ne peuvent

404 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

guère que l'étendre ou la compléter. C'est ce que Tanzi a essayé

de faire. 11 accepte entièrement les vues générales de Flechsig sur

l'existence des centres d'association et croit que c'est en eux qu'il

faut chercher l'origine des hallucinations. « L'origine de toutes

les hallucinations vraies, dit-il, est transcorticale... Le mécanisme

de. l'hallucination consiste en la rétrogression d'une image plus

ou moins complexe, plus ou moins consciente, qui descend de la

zone psychique dans les centres sensoriels, d'où elle était venue

et qui prend ainsi de nouveau la forme d'une sensation, de

manière à être prise pour la réalité. Tanzi pense que ce méca-

nisme ne se produit que dans des conditions pathologiques ou

anormales, pour des trajets anatomiques appropriés à la con-

nexion centrifuge entre la zone psychique supra-sensorielle et les

centres corticaux de pure sensation, alors même que ces trajets

sont destinés à d'autres fonctions plus ou moins bien déterminées. *

Ces trajets paraissent incontestablement exister puisqu'il y a dans

les centres sensoriels des fibres qui descendent des centres supé-

rieurs et paraissent avoir une fonction centrifuge : Flechsig les

considère comme modérateurs de la sensation ; Ramon et Cajal

leur attribue une action tonique se rattachant au processus de

l'attention. En tous cas Tanzi estime que même sans le secours de

ces fibres centrifuges, il est possible, quoique peu probable que

les centres supérieurs puissent agir sur les centres sensoriels par

les voies qui sont ordinairement centripètes. Peut-être faut-il aller

un peu plus loin que l'anzi et admettre qu'une irritation débutant

dans les centres psychiques peut, par une action rétrogressive,

descendre non seulement jusqu'aux centres de la sensation, mais

bien plus bas encore, jusqu'à la périphérie, jetant ainsi tous les

trajets nerveux dans un état d'activité anormale.

L'auteur entre ensuite dans quelques considérations intéres-

santes sur les hallucinations génitales, parce qu'il lui semble que

la variété de leurs formes peut jeter quelque lumière sur la ques-

tion des pseudo-hallucinations des autres sens. Peut-être peut-on

trouver l'explication de cette variabilité dans ce fait que, ici, ce

n'est pas un sens, c'est une fonction tout entière qui est en jeu. et

que toutes les sortes de sensibilité qui se rattachent à cette fonc-

tion peuvent être intéressés. En d'autres termes, ne trouvons-nous

pas là l'indication d'une synthèse s'accomplissant dans un centre

autre que celui par l'activité spéciale duquel nous sommes cons-

cients de telle ou telle sensation ? Nous savons que dans les cen-

tres moteurs les plus élevés, ce sont moins les muscles individuel-

lement, que les groupes musculaires destinés à des fonctions spé-

ciales qui sont surtout représentés. L'étnde des hallucinations

semblerait démontrer que les centres sensoriels corticaux sont

associés entre eux d'une manière analogue. Et comme la sensa-

tion est beaucoup plus complexe que le mouvement,, il n'est pas

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 405

surprenant que les associations sensorielles soient beaucoup plus

complexes que les associations motrices. Bien que l'auteur pense,

avec Tamburini, que la sensation dont nous sommes conscients

dénote une modification dans un centre sensoriel cortical, il n'en

est pas moins vrai que sauf les sensations élémentaires (douleur,

lumière, bruit), nous ne paraissons pas avoir de sensations pures,

et il semble que ceci nous force à admettre ou qu'un certain degré

de synthèse des sensations se produit dans le centre spécial du

centre qui prédomine, ou bien que cette synthèse s'accomplit dans

un centre plus élevé auquel aboulissent les représentations ou

symboles de plusieurs centres. Ce centre est alors un centre

d'association de Flechsig, ou un centre psychique, et l'auteur

pense, avec Tanzi, que l'étude des hallucinations paraît confirmer

d'une façon générale les doctrines de Flechsig.

R. du nIUSGRAVE-CL : 1Y.

LXXIII. Les hallucinations et les phénomènes mentaux qui leur

sont connexes; par Sir LAUDER BItuwTOV. (The Journal of Mental

Science, avril 1902.) , .

Pour analyser ce long travail il faudrait presque le traduire : il

est rempli de faits curieux, intéressants, judicieusement observés

et racontés d'une manière captivante ; les faits ont rapport plus

souvent aux phénomènes mentaux qui sont connexes aux halluci-

nations qu'aux hallucinations elles-mêmes, mais tous présentent

un réel intérêt psychique, et c'est avec un véritable regret que

nous nous voyons réduits, par la nature même de ce mémoire, à

cette brève et insuffisante mention. R. DE i\IUSGRAVE-CLr.

LXXIV. Observation d'un cas de tétanos consécutif à la vaccina-

tion ; par WILLIS S. COOliE. (The New-York Médical Journal,

10 janvier 1903.) -

Il s'agit d'une fillette de quatre ans qui présenta les symptômes

du tétanos vingt-huit jours après une vaccination pratiquée selon

toutes les règles de l'antisepsie et que d'ailleurs sa soeur ainée,

demeurée indemne, avait subi le même jour. L'antitoxine a été

employée, et la petite malade a guéri. L'antitoxine paraît avoir eu

dans ce cas une action spécifique très nette. La vaccination n'a

évidemment joué aucun rôle dans l'apparition de la maladie, si

ce n'est par la plaie qu'elle a créée à la jambe, et qui a été facile-

ment infectée. R. M. C.

L\YV. Contribution statistique à la pathologie de la folie; par

T. DUNCAN GREENLEES. (rA6youn ! a< of Mental Science. Octobre

1902) . '. '

Ce travail est très intéressant, et les recherches sont conduites

avec beaucoup de soin ; mais il ne saurait être analysé ; étant

406 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

composé presque exclusivement de chiffres et de tableaux, il cons.

titue une source précieuse de documents. nE lIlUSGRAVE-CLAY.

- - R. DE Musgrave-Clay.

L11VI. Les états mentaux qui aboutissent à l'homicide; par

G.-T. REVINGTON. (Tlee Journal of Mental Science. Avril 1902.)

Les conclusions de ce travail se résument ainsi : les malades

homicides, que l'auteur a observés ne souffrent pas d'une forme

spéciale de maladie mentale. La plupart d'entre eux ne sont des

criminels en aucun sens du mot. Le crime est un accident qui

survient au cours de la maladie mentale; il n'en est le résultat ni

essentiel ni caractéristique. Tous les aliénistes ont eu sous leur

direction des centaines de malades qui étaient des meurtriers en

puissance. C'est par un heureux hasard qu'ils n'ont tué personne.

Aucun des cas observés par l'auteur ne le conduit à admettre

une manie homicide, une soif particulière de sang, un besoin

brutal d'ôter la vie pour le simple plaisir de l'ôter. Il pense que

les motifs ordinaires, la jalousie, la misère, la terreur, agissant

sur des états pathologiquement émotifs, sont la cause des crimes

commis par les aliénés, et non pas une idée nette d'homicide.

R. DE AIUSGRA'E-CL.1Y.

L1V1L-Rapport de la Commission de la Tuberculose nommée

par l'Association médico-psychologique de la Grande-Bretagne

et de l'Irlande. (7'he Journal of Mental Science. Juillet 190z.)

Ce travail, très documenté, ne peut pas être analysé : il com-

porte des tubleaux, des statistiques qu'il faudrait reproduire inté-

gralement. La première partie est consacrée à l'étude clinique et

hygiénique de la phthisie dans les asiles ; la seconde au chauffage

et à la ventilation, la troisième à la compilation des statistiques

fournies par les divers asiles. Nous donnons ici simplement le

résumé de la partie clinique de ce rapport :

« La phtisie règne dans les asiles à un degré qui appelle des

mesures urgentes. Un très grand nombre de phthisiques ont acquis

leur maladie postérieurement à leur entrée à l'asile.

Les causes spéciales de cette fréquence de la phthisie dans les

asiles sont les suivantes : 1° l'encombrement, ayant pour consé-

quence l'insuffisance du cube d'air attribué à chaque malade pen-

' d;int le jour, et surtout pendant la nuit; 2° l'insuffisance des heures

passées en plein air ; 3° la défectuosité du chauffage et de la venti-

lation ; 4° les habitudes de malpropreté ; 5° les vices du régime

alimentaire. »

Les moyens préventifs conseillés sont :

« 1° La précocité du diagnostic de la tuberculose; 2° l'isolement

de tous les malades atteints de phthisie; 3D la construction à

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 407

l'avenir d'asiles moins grands ; 4° les mesures propres à empêcher

l'encombrement; 5° l'augmentation du cube d'air de jour et de

nuit ; 6° la diminution du nombre des lits dans les dortoirs ;

7° l'organisatiou d'une ventilation plus complète et plus efficace ;

8° l'adoption de mesures très fermes pour empêcher la propaga-

tion de la maladie par les produits d'expectoration ; 9° une sur-

veillance rigoureuse du régime alimentaire ; 10° la construction

d'hôpitaux spéciaux et de sanatoria, entourés de terrains suffi-

samment étendus, et propres à l'isolement des malades à leur

traitement selon les règles de la thérapeutique moderne ; 11° à

défaut de ces hôpitaux ou de ces sanatoria, toutes autres mesures

pratiques et efficaces d'isolement. » R. de Musgrave-Clay.

Les statistiques médico-psychologiques : - avantages que

présenteraient, en vue d'études collectives, des définitions

précises et une méthode corrélative; par C. HUBER Bond (The

Journal of Mental Science, octobre 1902).

Travail intéressant mais qui nécessiterait pour être convenable-

ment analysé la reproduction de questionnaires, de chiffres et de

tableaux. R. M. C.

LXXIX. La toxémie dans l'étiologie des maladies mentales.

Ouverture de la discussion; par M. T.-S. CLOUSTON. Opinions de

111\i. W. Ford Hohertson, G.-B. Wilson, Yellowlees, Bruce et

Marr (The Journal of Mental Science, juillet 1902).

M. Clouston en ouvrant la discussion sur ce sujet, déclare qu'il

serait important de définir la toxémie, mais qu'il est disposé à

accepter la définition que M. Ford Robertson a donné des toxines :

« des substances qui absorbées par la cellule nerveuse corticale en

troublent le métabolisme. » Il cite ensuite comme représentant

l'opinion de ce médecin et une grande partie des recherches con-

duites sur ce sujet sur le continent les paroles suivantes tirées d'un

discours de M. Robertson : « Les différents états toxiques qui

tendent à altérer les cellules nerveuses proviennent : 1° d'agents

toxiques venus du dehors ; 2° d'infections ; 3° d'auto-intoxications

et d'auto-infections... En terminant, je renouvelle l'expression de

ma conviction que l'action toxique est le facteur de beaucoup

le plus important dans la pathogénie de la folie. J'irai plus loin

et je dirai que la plus grande partie des cas de folie ne sont pas

du tout, primitivement, des affections du cerveau, mais dépen-

dent de l'action de toxines venues d'ailleurs, qui altèrent l'activité

fonctionnelle des cellules nerveuses corticales en troublant leur

métabolisme, et souvent en endommageant d'une manière perma-

nente, ou même en détruisant plusieurs d'entre elles. L'opinion

générale que la « maladie mentale » est un état primitif et que

408 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

.la « maladie somatique » qui l'accompagne est consécutive, est en

général basée sur une conception erronée des phénomènes. »

. M. Clouston considère que l'opi, : ion de Mott sur l'auto-intoxi-

cation des couches corticales par la choline et d'autres produits

de dégénérescence nerveuse représente, dans la littérature scien-

tifique, un autre courant toxémique. Les opinions de M. Lewis

Bruce résument les plus récentes conclusions de la jeune école

clinico-pathologique. Toutes ces opinions sont-elles prouvées ?

1° En considérant la pathologie générale et l'étiologie d'un cas

de maladie mentale, il ne faut pas perdre de vue certaines consi-

dérations psychologiques et physiologiques relatives au fonction-

nement du cerveau, et dont les principales sont les suivantes :

L'action cinétique de la cellule est de nature explosive, et, de plu-

sieurs façons, rhythmique et périodique, et sa faculté .d'explosion

normale se transforme, avec une grande facilité et sans ligne

de démarcation, en une faculté d'explosion pathologique. Cette

activité est tellement différente, à plusieurs égards, du processus

du nutrition, de' sécrétion, d'excrétion que l'on risque fort de

s'égarer en admettant une analogie d'effet de l'action bactérienne

ou toxique sur ces deux sortes de fonction. L'esprit est si unique,

si grand, si dominant qu'on ne peut guère rester dans la vérité en le

considérant comme un « effet » et non comme une « cause». 11 n'est

pas seulement contraire à la philosophie, mais aussi à la clinique

de lui refuser la valeur d'un facteur étiologique des maladies men-

tales. 2° La conscience- et les états mentaux peuvent se modifier

considérablement dans divers états physiologiques (sommeil, rêve,

état hypnotique, etc.). Pourquoi l'exagération de ces étals phy-

siologiques ne produirait-elle pas les phénomènes observés dans

les maladies mentales ? 3° Beaucoup de maladies mentales ont une

apparition et une disparition dont la soudaineté s'accorde mal

avec les formes connues des actions toxiques, mais très bien avec

l'exagération ou la perversion de certains états physiologiques.

i° L'énergie de réaction de la cellule corticale à l'égard des agents

de stimulation, d'irritation ou de dépression, intrinsèques ou

extrinsèques, est un de ses attributs physiologiques les plus im-

portants au point de vue de la folie : sa fonction mentale est assu-

rément celle qui réagit le plus vivement à l'égard des stimulations

purement mentales, mais elle réagit aussi d'une façon bien accusée

à l'égard des stimulationss ensorielles, des stimulations endogènes

venues des divers organes et des influences chimiques des sécré-

tions du corps et des toxines. Quand cette activité réactionnelle

est pathologiquement exagérée, ou anormalement paresseuse, les

manifestations pathologiques les plus variées peuvent en résulter.

5° La faculté de réaction d'un cerveau dépend de ses qualités ata-

viques héréditaires plus que toute autre cause. L'influence fré-

quente et considérable de l'hérédité est la démonstration clinique

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 409

de cette proposition. 6° Les processus du développement cérébral

et mental jusqu'à vingt-cinq ans, ceux de l'involulion et- de la

déchéance après soixante ans, et les phénomènes mentaux qui les

accompagnent sont rigoureusement physiologiques. Mais l'héré-

dité peut les rendre irréguliers et leur associer des troubles men-

taux. Une cellule corticale se développe, se charge d'énergie, se

détériore et meurt conformément il la loi de vitalité qui lui est

inhérente. Les toxines peuvent troubler le fonctionnement de la

cellule nerveuse, mais non pas donner aux symptômes mentaux le

caractère d'un" âge ou d'un autre. 7° Dans beaucoup de cas, la

maladie mentale n'est que l'évolution graduelle de la nature par-

ticulière, originelle, du cerveau (extrême sensibilité aboutissant à

la mélancolie, volition faible aboutissant à l'obsession). La théorie

toxémique ne parait pas indispensable à l'explication de pareilles

évolutions. 8° L'épuisemsnt nerveux, la fatigue, l'anémie, dont

l'importance étiologique a jusqu'ici passé pour considérable,

paraissent bien suffire à déterminer beaucoup de cas de folie, sans

l'intervention des toxines, qui ne seraient ici en tout cas qu'un

phénomène secondaire et une résultante. 9° Il n'y a dans l'histoire

clinique et pathologique des maladies mentales aucun phénomène

qui soit le moins du monde analogue à l'immunité, laquelle est

un des caractères propres des maladies toxiques ou bactériennes.

10° De simples élévations de température peuvent être produites

par la stimulation et la suractivité des centres thermiques, en

dehors de toute action toxique. 11° N'est-ce pas une manière de

voir plus scientifique, dans beaucoup de cas de folie, d'admettre

que le fait primordial est une faiblesse morbide héréditaire des

cellules nerveuses corticales, le second fait une stimulation inusitée

capable d'exagérer et de troubler leur activité cinétique, et le

troisième fait un trouble de nutrition de divers organes avec

développement considérable de bactéries et toxémie consécutive,

celle-ci sans aucun doute capable d'accentuer et de prolonger les

troubles mentaux que d'attribuer à la toxémie une importance

fondamentale ? : ' 42° En ce qui touche la théorie moderne suivant

laquelle la maladie est un défaut de résistance, une faiblesse des

agents de défense contre les forces hostiles à la vie, est-ce que

l'épuisement nerveux, l'hérédité pathologique, la dépression men-

tale et les processus de développement et d'involution n'expli-

quent pas aussi bien qu'une action toxique les conditions ciné-

tiques pathologiques de l'écorce cérébrale ? 13° Les tendances de

la pathologie moderne sont manifestement bactériennes et toxé-

miques. Peut-être cependant quand il s'agit de l'esprit et des

éléments nerveux, serait-il nécessaire pour arriver à la vérité

d'admettre d'autres facteurs étiologiques. 14° Le psychologue mé-

decin ne doit pas perdre de vue que l'écorce cérébrale est le véri-

table centre régulateur de tout l'organisme, des sécrétions, des

If] 0 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

excrétions, de la nutrition, que par conséquent son activité ou son

inactivité déterminent ou combattent précisément ces états de non

résistance par lesquels les bactéries nuisibles et les toxines sont

'développées ou détruites, et que cette théorie permet d'attribuer

à la toxémie, dans la genèse des états mentaux, un rôle non pas

primordial mais secondaire. 1;¡0 Tout le monde naturellement doit

admettre l'origine toxémique de certaines folies (folie puerpérale,

alcoolique, syphilitique, etc.). Mais il en est d'autres pour lesquelles

il faut chercher une autre étiologie. 16° Il est très important de

reconnaître le rôle de la toxémie dans la genèse et la prolonga-

tion des maladies mentales, mais elles sont trop complexes, trop

manifestement des résultantes pour qu'on puisse admettre l'unité

du facteur étiologique. L'importance du sujet, l'autorité de l'au-

teur nous ont fait résumer longuement, souvent presque traduire,

ce travail qui est on le voit, le procès complet de la toxémie. Nous

résumerons un peu plus brièvement la discussion à laquelle il a

donné naissance.

M. FonD 11013ERTSO,4, croit que les différences d'opinion qui exis-

tent entre M. Clouston et lui viennent surtout de ce qu'ils envi-

sagent la folie à deux points de vue très différents, M. Clouston

,au point de vue de la clinique et de la psychologie, l'orateur au

point de vue de la pathologie générale. Pratiquement la divergence

se réduit à ceci : M. Clouston n'admet pas qu'il y ait autant de cas

de folie associés à la toxémie que le pensent plusieurs de ses con-

frères. Le point sur lequel M. Clouston parait s'écarter le plus des

théories modernes, c'est le rôle attribué à l'hérédité. Mais ce que l'on

désigne sous le nom de prédisposition héréditaire à'la folie comprend

au moins trois états très différents : 1° les anomalies cérébrales;

2° les troubles cérébraux par traumatisme ou toxémie intra ou

extra-utérine ; 3° enfin les caractères individuels de la réaction

du cerveau à l'égard du milieu ambiant. Ces états ne sont pas

nécessairement caractérisés par une dégénérescence : biologique-

ment, ils représentent simplement des directions diverses de la

variation individuelle ; de plus ils ne sont nullement spéciaux au

cerveau et peuvent s'observer dans les autres organes ou tissus.

Plus loin l'orateur ajoute que les impulsions sensorielles peuvent

être la cause déterminante de phénomènes mentaux, mais que la

nature de ces phénomènes est subordonnée à l'organisme qui en

est la base physiologique et à la nutrition des éléments cellulaires,

d'où le rôle joué par la toxémie. En pathologie générale, on ne

peut pas admettre que ce qui est évidemment la manifestation de

l'activité fonctionnelle, d'un organe soit considéré comme la cause

de la maladie de cet organe. C'est un effet dont les causes sont à

chercher. L'orateur ne peut pas attribuer à l'écorce cérébrale

l'influence que lui reconnaît M. Clouston sur le développement des

bactéries : on sait parfaitement aujourd'hui que la résistance

RE\UE DE PATHOLOGIE MENTALE. 411 l

naturelle aux bactéries et l'immunité spécifique sont dues à des

conditions chimiques et vitales sur lesquelles le système nerveux

n'a tout au plus, qu'une influence très secondaire. Considérer

la folie comme une simple maladie du cerveau, c'est considérer le

mal de Briglit comme une maladie des reins et l'anémie perni-

cieuse comme une maladie du sang. Une pathologie de cette sorte

a pu être utile, mais elle a fait son temps. La pathologie' actuelle

exige qu'on remonte à l'origine des processus morbides.

M. H. G. WILSON pense que cette question ne peut être envisagée

que comme une question controversée : il serait plutôt toxémiste,

mais il n'est cependant pas disposé à reconnaître toujours à la

toxémie un rôle étiologique dans la folie, et à écarter tous les

autres facteurs.

M. YELLOWLEES est convaincu que l'esprit réagit sur le corps et

que la folie peut avoir et a souvent une origine purement men-

tale.

M. Bruce pense que personne ne peut'nier l'importance de la

prédisposition héréditaire dans la genèse de la folie. Mais en

somme le noeud de la question se trouve dans la proposition

suivante : « Au début d'une maladie mentale aiguë les symptômes

« mentaux précèdent-ils les symptômes physiques, ou bien les

« choses se passent-elles inversement ? » Il est d'avis que la plu-

part des folies sont d'origine toxique et il entre à ce sujet dans

quelques développements intéressants. Il termine en disant que

l'une des raisons qui lui font adopter la théorie toxémique c'est

qu'elle permet d'espérer des progrès thérapeutiques : si la cellule

cérébrale devient spontanément malade, il est clair que tout trai-

tement est inutile. '

M. M.mR pense que les opinions de M. Clouston et de M. Robert-

son ne sont pas aussi différentes qu'elles ont paru l'être dans la

discussion. Celle-ci est terminée par quelques paroles courtoises du

Président. Il. DE MUSGW 1'E-CLT.

LXXX. Etude clinique sur les troubles de la conscience dans l'état

post-épileptique ; par le Prof. A. PicK (de Prague).

L'auteur rapporte l'observation d'un malade étudié par lui. Il y

fait remarquer l'obscurcissement de la conscience, provenant d'une

diminution dans la cohésion des idées et les enchaînements for-

tuits, sans aucun rapport intrinsèque qui s'établissent entre les

diverses séries de représentations. {Annales Me</t'eo-p(;/<o/oc ? ? : 'M.,

février 1903.) E. 15.

LXXXI. Contribution à l'étude médico-légale du délire de dépos-

session ou dé revendication ; par le j)1' II. MAILLE.

Dans cet article sont rapportées quatre observations de sujets

i 12 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

atteints du délire de dépossession et de revendication. L'auteur

montre, fait qui n'avait pas encore été signalé, que le délire

de dépossession tend, à un moment donné, à se compliquer d'au-

- tres idées délirantes surajoutées : idées de persécution, tendances

orgueilleuses, etc. {Annales médico-psychologiques, février 1903).

E. B.

LXXXII. Fébricitants délirants pris pour des aliénés ; par le

D'' C. Rouge.

De ce travail se dégagent les réflexions suivantes :

1° On devrait soigner il domicile ou à l'hôpital les délirants

fébricitants.

2° Il y a lieu d'organiser dans chaque asile un quartier d'obser-

vation pour les entrants, avant leur admission définitive, ou mieux

d'après l'auteur, exiger que dans tout certificat médical joint à la '

demande d'internement, il soit fait mention que le malade ne pré-

sente pas de température fébrile. {Annales médico-psychologique,

juin 1903 1.) E. l3Lm.

LXXXIII. Des hallucinations antagonistes unilatérales et alter-

nantes ; par le Dol' J. SÉGLAS.

L'auteur montre le côté fantaisiste de l'hypothèse de la dualité

cérébrale pour l'explication des hallucinations unilatérales. Il

pense que les hallucinations dites bilatérales et de caractère diffé-

rent suivant le côté affecté, ne sont qu'une variété d'hallucina-

tions antagonistes ; comme telles, elles se rattachent à des phéno-

mènes fondamentaux de contraste psychique, d'antagonisme

d'idées délirantes. En somme, il ne s'agirait là que d'hallucina-

tions antagonistes unilatérales et alternantes. {Annales médico-psy.

chologiques, aoüt L903). , B. B.

.. LXXXIV. Suicide et folie; par le D1' Vallon.

Longue et intéressante étude du suicide et des états patholo-

giques dans lesquels on l'observe, grossie d'observations nombreu-

ses. Le pronostic et le traitement de la tendance au suicide sont

également étudiés. Chez un aliéné, l'idée de suicide décèle ordi-

1 Nous avons insisté souvent, sans apporter la conviction, sur la néces-

sité de prendre la température des malades aliénés avant leur dépait de

l'hôpital pour le bureau d'admission ou à l'Asile clinique et de la prendre

aussi il l'asile Clinique au moment du transfert de cet asile clans les

autres. On éviterait ainsi de faire voyager des malades fébriles et

d'aggraver leur état. Comme nous prenons la température de nos malades

à l'entrée et durant les cinq jours qui suivent, il nous est arrivé de cons-

tater que. parfois, les enfants étaient sous le coup d'une affection aiguë.

BOUR1,EVILLE.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 413

nairemeut une tare héréditaire souvent très chargée et malheu-

reusement cette idée a une fâcheuse tendance à reparaître : '). chaque

accès d'aliénation mentale.' {Annales médico-psychologiques, août t

f 903). ' E. B.

LXXXV. Sur deux cas de folie du doute avec délire du toucher ;

par Cn. Azémar, interne de la maison de santé de Picpus.

Deux intéressantes observations : chez l'un des malades prédo-

mine le délire du toucher, chez l'autre la folie du doute. Ces deux

cas contribuent à confirmer l'opinion actuelle qui fait rentrer les

malades de ces deux catégories dans la classe des dégénérés et

des héréditaires. M. Azémar signale l'évolution du délire du doute

vers les idées de négation. 11 insiste sur l'importance du fonction-

nement régulier de l'intestin, afin d'éviter la coprostase habituelle

chez ces malades et les auto-intoxications qui peuvent en résulter.

A côté de la désinfection des voies digestives et de l'hydrothérapie,

le traitement moral entrera pour une bonne part dans le traite-

ment de l'affection. {Annales médico-psychologiques, août 1903.

E. B.

LXXXVI. Etude sur la mélancolie ; par les D'9 Serge SOUKHANOFret

Pierre Jannouckiiinf.

Les conclusions de ce travail sont les suivantes :

Il La mélancolie, comme toute psychose aiguë, peut donner

des récidives, qui peuvent apparaître tantôt après des intervalles

de temps comparativement courts, tantôt après de longs inter-

valles de temps.

2° Il n'y a pas, actuellement, de base suffisante pour élever cer-

tains cas de maladie récidivante en une entité morbide, la psy-

chose périodique, les cas de mélancolie périodique coïncidant par-

faitement avec les cas de mélancolie récidivante à accès fré-

quents.

3° Dans certains cas de mélancolie récidivante peut survenir,

après l'un des accès, un affaiblissement de facultés intellectuelles

et même une démence profonde. Cela ne doit pourtant pas exclure

le diagnostic de mélancolie récidivante en nous montrant la pos-

sibilité de cas transitoires entre le groupe de la démence précoce

et celui des psychoses récidivantes.

4° Dans quelques cas, la mélancolie se développe sur un terrain

déjà altéré par la déséquilibration psychique, l'hystérie ou l'alcoo-

lisme qui lui communiquent alors une teinte particulière.

5° La phase mélancolique de la folie circulaire a peut-être une

loute autre origine que les psychoses aiguës récidivantes en général

et que la mélancolie récidivante en particulier. {Annales médico-.

Psychologiques, octobre 1903. ' ) : . 1;.

ici 4 ' REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

LXXXVH. Contribution à l'étude de la névrose d'angoisse; par le

' D1' Capghas.

. Cet article renferme deux observations de névrose d'angoisse.

"Avec Ballet, l'auteur pense, contrairement à la théorie de Frend,

que la privation sexuelle ne joue qu'un rôle très secondaire dans

la production de cette névrose. C'est surtout aux chagrins, aux

peines morales qui succèdent aux ruptures affectives, que doit être

attribué le principal rôle étiologique : il s'agit, en somme, de trau-

matisme moral. De plus, l'association d'accès d'angoisse et d'idées

de suicide, doit être considérée comme l'étape initiale d'une mélan-

colie. {Annales niétlico-psycltologiqzies, décembre 1903). E. B.

LXXXVIII. Le fou rire prodromique; par M. Ch. Féré.

M. Féré a observé le fou rire comme premier symptôme dans

des cas de chorée dont il rapporte l'observation. Il l'a observé éga-

lement au début de lésions organiques du cerveau et en particulier

du ramollissement cérébral. Féré attribue ce rire prodromique,

non pas à une lésion localisée, mais à une dépression de l'activité

des éléments corticaux qui entraine un défaut de contrôle et une

augmentation de l'irritabilité réflexe, c'est-à-dire une condition

analogue à celle de la fatigue. {Revue ncurolog., avril 1903). E. B.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

IX. Stase papillaire par tumeur cérébrale. Intervention; par

L. Dort {Société des sciences médicales de Lyon, 19 mars 1902).

M. L. Dor présente une femme atteinte d'une tumeur cérébrale.

Elle présentait il y a neuf ans une stase papillaire avec troubles

prononcés de la vision. Une ponction de Quincke fit disparaître

totalement la stase papillaire et la vision redevint normale. Il y a

trois mois l'auteur revit cette malade, dont les symptômes s'étaient

aggravés ; elle présentait une atrophie du nerf optique à droite; à

gauche une légère diminution de l'acuité visuelle. 111. Jaboulayla

trépana. A la suite de cette opération l'acuité visuelle de luit

gauche redevint normale et les douleurs disparurent. L'essentiel

dans ces cas est d'inciser la dure-mère ; les simples ponctions sont

insuffisantes, l'orifice se cicatrisant trop vite. Parla trépanation on

établit une cicatrice à filtration qui persiste. Peut être, d'après

M. Jaboulay, se fait-il une anastomose des vaisseaux profonds avec

les vaisseaux superficiels. Le cas de l'auteur est très favorable.

G. C.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 415

X. De l'appoint que peuvent apporter au traitement de la folie les

pratiques hydriatiques; par Emmet-C. Dent (7lie Americntz Jour-

nal of Insanily, juillet 1902, p. 91-101).

XI. L'état actuel de la cocaïnisation spinale sous arachnoïdienne;

par Ernest G. Mark. (77te New- 1'01'1. Médical Journal anal Philo- z

dclphiu médical Journal, 31 octobre 1003.)

De tous les arguments qui ont été mis en avant pour ou contre

celte méthode, l'auteur estime que l'on peut conclure : 1° Qu'elle

offre autant, sinon davantage, de sécurité que l'anesthésie géné-

rale ; 2° Que l'on peut en toute sûreté employer jusqu'à 48 p. 100

de grain1 de cocaïne sans craindre d'effet toxique ; 3° Que le choc, "

lorsqu'il existe, est certainement moindre que dans l'anesthésie

générale; 4° Qu'avec ce procédé, le risque de conséquences ou de

symptômes fâcheux est moindre; G0 Qu'1 cause de la variabilité

de durée de l'action analgésique l'emploi de cette méthode est

contre-indiqué dans les opérations de longue durée. Il. DE M-C.

XII. De l'action du persulfàte de soude sur les contractures

dans le tétanos ; A. GÉLIIJERT (Lyon médical, la décembre 1901,

p. 829.) .

A propos de deux cas de tétanos terminés par la guérison,

M. Gélibert signale l'action du persulfate de soude, oxydant éner-

gique, sur les contractures et les accès spasmodiques survenant

dans le tétanos.

L'auteur s'est basé sur les expériences faites par MM. Lumière et

Chevrotier, sur des lots de cobayes et de chiens auxquels ils avaient

inoculé des doses variables de toxines tétaniques très actives.

Leurs expériences leur montrèrent que le persulfate de soude a

v une action favorable constante sur les contractures tétaniques.

Des recherches semblables ont été faites en Allemagne parSieber.

Dans les deux cas qu'il publie, l'auteur s'est servi d'une solution

fraîche de persulfate de soude sans dépasser le titre de 5 p. 100;

les injections hypodermiques étaient de dix centimètre cubes.

Dans les deux observations, ce n'est qu'après les premières injec-

tions de persulfate que les malades ont pu reposer tranquillement;

alors qu'en prenant du chloral et du bromure, ils pouvaient à

peine sommeiller quelques minutes. Après les premières injec-

i bons, les accès spasmodiques douloureux ont disparu. Les contrac-

tures enfin ont commencé à diminuer à la fin du second jour

1 de traitement dans un cas, à la fin du troisième jour dans l'autre.

i Leur disparition complète a été obtenue au bout de sept jours chez ! le second malade, au bout de dix chez le premier.

\ Le grain anglais ou'américain vaut six centigrammes.

i 1 Ô REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

Le trismus seul a persisté encore quelque temps.

L'auteur a constaté en outre que les injections de persulfate de

soude semblaient relever l'état général. Les injections sont peu

douloureuses à la condition de ne pas dépasser le titre de 5 p. 100.

' -" .. - - G. C.

XIII. La prophylaxie et le traitement de la dysenterie d'asile; par

N. H. i\I : 1C\IILL : 1N (Tite JOllmal of Mental Science. Juillet 1902).

L'auteur indique avec détails les mesures prophylactiques prises

pendant une épidémie de dysenterie, et rappelle les moyens de

traitement qui ont été employés. R. M.-C.

XIV. Le traitement des troubles mentaux à leur début; son ensei-

gnement clinique dans les salles des hôpitaux généraux; par

Sir John SIB13ALD (Tite Journal of Mental Science. Avril 1902).

Le but de ce travail est de signaler l'insuffisance actuelle des

moyens d'enseignement clinique des maladies mentales, et les

moyens d'y remédier : cet enseignement en effet n'est obtenu que

dans les asiles, généralement trop éloignés des centres d'instruc-

tion hospitaliers pour que les étudiants ne mettent pas quelque

négligence à les fréquenter, si toutefois ils ne s'en abstiennent pas

complètement : l'enseignement théorique est.parfaitement donné

dans les écoles de médecine ; mais l'enseignement clinique est in-

suffisant, ainsi que l'a signalé le premier Griesinger, il y a près

d'un demi-siècle. Le meilleur moyen de remédier à cettte regretta-

ble insuffisance consiste à créer dans les hôpitaux généraux des

salles spéciales consacrés au traitement des maladies mentales à

leur début. Les malades n'y resteraient qu'un temps assez court-

que l'on peut fixer à peu près à six semaines, et si à ce moment

ils n'étaient pas guéris, ils seraient transférés dans un asile.

L'avantage de cette méthode serait considérable et double. D'abord

les étudiants se familiariseraient avec les maladies mentales, avec

leur diagnostic au moment même où il est le plus difficile à la fois

et le plus nécessaire, et avec le traitement, qui peut être àce même

moment beaucoup plus efficace que plus tard ; d'autre part les

malades y gagneraient, car ils seraient soignés à un moment où le

plus généralement ils ne le sont pas.

Rien n'est plus rare en effet que l'internement d'un aliéné dès le

début de sa folie : d'une part la loi entoure de formalités, protec-

trices à la vérité, mais pleines d'entraves, l'internement d'une per-

sonne réputéée aliénée ; d'autre part la défaveur sociale qui

s'attache à l'entrée dans un asile d'un de leurs membres, pousse

les familles à tergiverser le plus longtemps possible avant d'en

venir à cette extrémité. La même défaveur ne s'attacherait certai-

nement pas aux salles, même spécialisées, d'un hôpital ordinaire.

R. DE 1\IU : GRAVE-CL\Y.

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIETE DE NEUROLOGIE

Séance du 14 «vav 9904.- Présidence DE M. DÉJËRIKE.

l "

Sur la prétendue influence de la cécité sur les troubles spinaux

sensitifs et moteurs du tabès.

MM. P. Marie et A.4LÉIiI. -Une opinion généralement acceptée

veut que la cécité apparaissant dans le tabes empêche l'apparition

ultérieure des symptômes spinaux ordinaires, des douleurs et des

troubles de la coordination en particulier, ou en arrête l'évolution

quand ils existaient déjà antérieurement. Notre statistique portant

sur 45 cas ne confirme nullement ces propositions.

Pour ce qui concerne les douleurs, 16 fois sur 32 elles ont paru

alors que le malade était déjà aveugle; la cécité n'empêche donc

pas l'apparition des douleurs tabétiques. L'intervalle entre les

deux phénomènes a été rarement de quelques mois seulement,

généralement de plusieurs années, les douleurs ont paru dans cer-

tains cas, 9, 10, 12 ans avant la cécité, 11, 14, 26 ans après elle ;

il ne semble donc y avoir aucune espèce de relation entre la date

d'apparition des troubles sensitifs et visuels.

Quand les douleurs ont été précoces, la cécité n'a eu sur elles

aucune influence favorable; elles n'ont disparu que chez trois ma-

lades sur seize devenus aveugles tardivement, mais plus ou moins

longtemps après la cécité et après avoir persisté un temps au moins

aussi long que chez les tabétiques vulgaires ; il est rare en effet

que chez des tabétiques les douleurs persistent pendant toute

l'évolution de l'affection, elles disparaissent le plus souvent ou

s'atténuent une fois la période d'évolution aiguë franchie. Or chez

six de nos tabétiques ama1ll'0tiqueo elles ont garde au moins leur

violence primitive après huit, onze, douze, dix-sept et vingt

ans.

Comme les douleurs, les troubles de la coordination apparaissent

plus souvent après les troubles visuels qu'avant eux ou en même

temps qu'eux; l'iniervalle est généralement de plusieurs aminées

(jusqu'à 31 ans dans un cas ! ). La cécité tardive n'a sur les troubles

ataxiques déjà développés aucune influence atténuante ; ceux-ci

n'ont été que deux fois passagers; or des poussées d'incoordina-

ARCII1\'ES, 2' série, t. XVII, 27 ï

418 SOCIÉTÉS SAVANTES.

tion peuvent s'observer chez les tabétiques vulgaires, non amau-

rotiques ; et même dans nos deux cas il s'agissait peut-être

simplement de paraparésies transitoires.

Nous concluons donc que la cécité n'exerce sur les phénomènes

douloureux et ataxiques du tabes aucune influence ni immunisante

ni atténuante ; il s'agit de phénomènes indépendants, évoluant

chacun pour son compte; les troubles spinaux et les troubles

visuels du tabes semblent être des symptômes de deux localisations

distantes d'un même processus sur les centres nerveux; leur fré-

quente coexistence empêche de les considérer comme dépendant

de deux processus différents.

OEdème de la main chez une hémiplégique. '

MM. RAYMOND et Courteliemont présentent une malade atteinte

d'hémiplégie droite, compliquée d'oedème de la main. Le gonfle-

ment se montra une heure après l'apparition des premiers symp-

tômes paralytiques : c'est un oedème blanc, chaud, assez ferme.

Des poussées congestives douloureuses s'y produisent chaque

après-midi, et, en modifiant momentanément sa couleur et sa

consistance, en font une forme intermédiaire, en quelque sorte,

aux deux variétés d'oedème observées chez les hémiplégiques :

oedème blanc typique et état succulent de la main.

Conformément à la règle, cette complication est survenue chez

une-femme, et est associée à des troubles de la sensibilité objective

et subjective. Par contre, la précocité du début, l'hyperthermie

locale et la conservation d'un bon état général sont des particula-

rités qu'il n'est pas habituel d'observer dans les cas de ce genre.

Les auteurs insistent surtout sur la précocité du début et le

maintien de l'état général : ces deux caractères permettent d'éli-

miner, dans la genèse de cette complication, le rôle mécanique

de l'insuffisance cardiaque ou rénale, de l'immobilité et de la

déclivité, ainsi que l'influence de la cachexie. Le développement

de l'oedème dans les premiers instants qui ont suivi l'attaque

montre que paralysie et gonflement relèvent de la même lésion;

il plaide en faveur de l'opinion de Parhon et Goldstein, qui admet-

tent l'existence de centres vaso-moteurs dans les noyaux gris cen-

traux et de fibres vaso-motrices dans la capsule interne. Chez

cette malade, un foyer de ramollissement a lésé ces zones vaso-

motrices en même temps qu'il a atteint le faisceau pyramidal et la

voie sensitive.

Préparations de muscles provenant d'un cas de maladie

de Pa1'lânon.

M. JDELSOHN (de Riga) a pu vérifier les lésions décrites par

Schiefferdecker et Schuetze (Bonn) en 1903 dans un travail con-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 419 9

sacré à l'étude des muscles dans diverses maladies, entre autres

dans la maladie de Parkinson. Il trouva des lésions musculaires

très accentuées dans tous les muscles examinés aussi bien dans les

muscles du bras et de la main que dans le quadriceps, le couturier

et le carré pronateur. Outre une atrophie très marquée il rencon-

tra des altérations musculaires des faisceaux neuro-musculaires;

il décrit une lésion 1° vocabulaire, 2° grannuleuse et 3° une lésion

très particulière, qui consiste en une division transversale de la

fibre musculaire. De pareilles fibres musculaires se retrouvaient

aussi quelquefois indépendamment des faisceaux neuro-muscu-

laires ; cette division fibrillaire était tellement prononcée, qu'il y a

lieu de se demander s'il s'agit bien d'une lésion et non pas d'un

changement artificiel. , 1

La choline dans les maladies nerveuses.

M. S. A. K. WILS01/ (d'Edimbourg) communique les résultats de

ses recherches sur la choline, faites dans le service de M. Pierre

Marie. On a pu constater la présence de la choline, comme évi-

dence d'une dégénération nerveuse plus ou moins active dans le

liquide céphalo-rachidien. Par exemple, on l'a trouvé dans des

cas d'hémorragie cérébrale, tabes (dix fois sur douze) paraplégie,

tumeur cérébrale, épilepsie tardive et jacksonienne. Ellea manqué

dans l'hystérie, dans la syphilis secondaire, ainsi que dans

quelques cas où il n'y avait aucun signe de dégénération nerveuse.

M. WIlson a démontré l'utilité de cet examen essentiellement cli-

nique dont la technique n'est pas trop compliquée. Il n'a pas pu

constater un rapport définitif entre la présence de la choline et le

résultat de l'examen cytologique du liquide de céphalorachidien.

M. P. Marie insiste sur l'intérêt de ces recherches qui devraient

être poursuivies de divers côtés; mais il remarque que, malheu-

reusement les cas de Bicêtre qui en ont été les sujets sont de vieux

tabes sortis depuis longtemps de la période inflammatoire. La

choline n'accompagne donc pas seulement la période de désassi-

milation, ce qui réduit la valeur diagnostique de sa présence.

. F. BOISSIER.

SOCIÉTÉ D'H1'P\OLOGfI·; ET DE PSYCHOLOGIE

Séance du mardi 23 février 1904. PRÉSIDENCE DE M. Voisin.

Troubles névropathiques causés par le spiritisme.

M. de JONG (de la Haye). Déjà, à deux reprises, j'ai observé

des manifestations délirantes consécutivement à des séances de

420 SOCIÉTÉS SAVANTES.

spiritisme. Les malades s'étant soumis au traitement par la

suggestion hypnotique, il m'a été impossible de les guérir promp-

tement de leur disposition à l'automatisme. Chez l'une de ces ma-

Jades, l'automatisme se traduisait par un besoin irrésistible de

danser; elle avait fait dans l'art de la danse des progrès vrai-

ment remarquables, sans pouvoir, d'ailleurs, se soustraire d'elle-

même au besoin qui la poussait irrésistiblement à danser.

' Un cas d'écriture automatique.

M. BERILLON. Le sujet de cette observation n'avait jamais pré-

senté de troubles névropaihiques.jusqu'au jour où elle prit part à

une séance de spiritisme. Au bout de quelques instants, elle se

sentit portée à écrire automatiquement. Depuis, elle a écrit un

nombre considérable de pages, traitant des questions les plus

diverses. Ce sont de véritables livres qu'elle écrit, divisés

méthodiquement en chapitres. Il ressort de la lecture de ces

ouvrages qne le sujet tire ce qu'elle écrit de son propre fonds;

on y retrouve les manifestations d'un véritable délire des gran-

deurs. Ce qu'il y a de caractéristique, c'est l'impossibilité où se

trouve la malade de mettre un terme à ses élucubrations ; elle se

trouve ainsi condamnée à une sorte de travail forcé. Les ouvrages

se succèdent, de plus en plus volumineux, sans qu'on puisse

prévoir quand s'arrêtera ce besoin automatique de composition

écrite.

Catalepsie guérie par l'hypnotisme.

M. Viviani (d'Arezzo) rapporte l'observation d'une jeune fille de

seize ans avec laquelle il a pu renouveler et varier les. expériences

classiques relatives au grand hypnotisme avecralisâtion intra ou

post-hypnotique. Finalement elle a été, par la suggestion, guérie

de son état cataleptique. ,

Le merveilleux et la sorcellerie au XVIIIe siècle.

M. Ch. de COYNARD expose d'après des documents pour la plupart

inédits, l'importance à la fois médicale et psychologique qu'eurent,

pendant le cours du xVIII° siècle, les sorciers, sourciers, magiciens,

ventriloques, noueurs d'aiguillettes, vampires, possédés, démonia-

ques, convulsionnaires, condormants, etc.

Contribution à la psychologie du rêve.

M. Il. BEAUNIS expose un certain nombre d'observations et de

considérations desquelles il tire les conclusions suivantes : les

phénomènes du rêve peuvent se décomposer en trois phases :

phase d'excitation initiale, phase de souvenir, phase d'irradiation.

BIBLIOGRAPHIE. ' 421

La seconde phase semble pouvoir se produire en dehors de toute

action initiale sensilive, sous nne simple variation de pression ou

de composition du sang (action chimique) qui agit directement

sur un centre cérébral pour déterminer l'apparition d'un souvenir,

point de départ du rêve. Les souvenirs qui apparaissent dans les

rêves peuvent provenir d'événements du jour même ou des jours

précédents ou d'époques plus ou moins éloignées. Les deux ordres

de souvenirs peuvent s'amalgamer dans le même rêve. L'évolution

biologique du rêve correspond assez exactement à l'évolution orga-

nique et psychologique de l'individu.

Un sommeil de dix-sept ans.

M. Paul FAMz rapporte l'observation d'une femme âgée de qua-

rante-quatre, laquelle, il y a quelques semaines, au moment où le

tocsin annonçait un incendie, est brusquement sortie d'un som-

meil hystérique qui durait sans interruption depuis dix-sept ans.

Au réveil, elle ne se rappelait rien de ce qui s'était passé pendant

les dix-sept dernières années, mais elle avait conservé le souvenir

très net des événements antérieurs à cette période. Pendant le

cours de ce sommeil, elle ne fut point anesthésique totale, comme

par exemple la dormeuse de Thenelles, mais présenta des phéno-

mènes de dissociation sensorielle. La sensibilité tactile et muscu-

laire, la vue, l'ouïe surtout, étaient sinon totalement suspen-

dues, au moins considérablement diminuées ; le goût était conservé

et l'odorat considérablement exalté. Le réveil coïncida avec la pré-

sence d'albumine dans l'urine.

BIBLIOGRAPHIE.

XII. La cellule nerveuse normale et pathologique. Altérations histo-

logiques des centres nerveux dans les délires taxi-infectieux des

alcooliques, la delirium tremens et le délire aigu; par M. Henri

Carrier, Un vol. 427 pages, Baillière, Paris, 1904.

Le travail de M. Henri Carrier fait éloge à son auteur ; il s'est

proposé en effet d'élucider et de mettre à jour d'une façon aussi

concise et aussi nette que possible, les lésions du système nerveux

dans un syndrome mental de nature auto-toxique, le delirium tre-

mens, dont les caractères cliniques ont été souvent bien mis en

évidence par de nombreux auteurs, mais dont l'anatomie patho-

logique était encore confondue avec d'autres syndromes mentaux

toxi-infectieux..

422 - BIBLIOGRAPHIE.

Pour arriver à une notion exacte des lésions du delirium tre-

mens, l'auteur a adopté un plan général d'étude qui lui a permis

d'éloigner le plus possible- les causes d'erreur ou de mauvaise

- interprétation des phénomènes histolo; ! iques qu'il voulait observer.

Après avoir décrit sa technique et sa méthode d'examen, l'au-

teur a' divisé son travail en trois parties.

La première partie est une étude critique de l'histologie nor-

male et pathologique de la cellule nerveuse. Il y discute l'existence

réelle des corps de Nissl, la fonction qu'on peut leur attribuer, la

valeur et la signification des diverses formes de chromatolyse, la

physionomie et le moment d'apparition dans les centres nerveux

des véritables altérations cadavériques, enfin les artifices de pré-

paration.

Il différencie des lésions pathologiques, les modifications appor-

tées à la structure intime des cellules nerveuses par les maladies

antérieures, l'inanition, enfin et surtout par l'âge plus ou moins

avancé du sujet. C'est ainsi qu'il expose le résultat de ses recher-

ches et sa' manière de voir sur les aspects cellulaires réalisés par

l'involution dite sénile, sur le rôle et la fonction des petites cel-

lules rondes qui infiltrent la substance cérébrale dans les proces-

sus pathologiques.

Il discute la nature et la signification du pseuclo-pigment jaune,

du protoplasma nerveux dont l'abondance exceptionnelle et cons-

tante dans les cas de delirium tremens constitue une lésion bien

spéciale de dégénérescence jaune globulaire et de dégénérescence

graisseuse des éléments nerveux.

Pour interpréter sainement les lésions du delirium tremens qui,

au pointdevue clinique, est un épisode aigu et accidentel, ne pou-

vant survenir que chez des alcooliques chroniques; l'auteur,

allant du simple au composé, a recherché d'abord l'état des cel-

lules nerveuses dans l'alcoolisme chronique avant l'éclosion de la

crise hypertoxique terminale. Il a pu démontrer ainsi, au point de

vue anatomique quel était le terrain nécessaire pour réaliser le

delirium tremens.

Cette étude fait l'objet de la deuxième partie du travail. C'est

l'étude des altérations histologiques des centres nerveux corticaux

dans l'intoxication alcoolique chronique et dans les délires surve-

nant chez les alcooliques au cours des toxi-irfections; altérations

qu'il a cherché à diagnostiquer des lésions trouvées, soit dans les

délires urémiques, soit dans les méningites, soit dans les proces-

sus infectieux fébriles, soit enfin de celles produites par l'activité

fonctionnelle et la fatigue expérimentale. ,

Muni des résultats obtenus, il aborde dans la troisième partie-

l'étude histologique du delirium tremens dont il différencie les

lésions dé celles de la paralysie générale. Dans le dernier chapitre,

l'auteur compare l'ensemble des lésions du delirium tremens etdu

BIBLIOGRAPHIE. 43

délire aigu et montre comment les altérations histologiques peu-

vent expliquer les symptômes observés.

De l'ensemble des nombreuses recherches auxquelles M. Henri

Carrier s'est livré, et qui font de son travail, non seulement une

étude critique très documentée sur divers points de l'histologie

normale et pathologique de la cellule nerveuse, mais encore une

exposition nette et précise de l'histologie pathologique des délires

alcooliques et du delirium tremens, il résulte les conclusions sui-

vantes : .

I. Les corps de Nissl existent réellement dans la cellule ner-

veuse sur l'animal vivant comme sur le cadavre. Ils semblent être

des éléments en rapport avec l'activité fonctionnelle de la cellule.

La raréfaction des corps de Nissl constitue une lésion cellulaire

chronique; leur fonte poussiéreuse ou leur dissolution indique une

lésion cellulaire récente.

Les objections faites il, la valeur de la méthode de Nissl sont trop

absolues. Les altérations de chromatolyse observées après le délai

légal imposé entre la mort et l'autopsie ne sont ni des altérations

cadavériques, ni des artifices de préparation.

II. L'involution dite sénile des cellules nerveuses n'est pas un

phénomène rigoureusement physiologique. Elle n'est pas proportion-

nelle à l'âge de l'individu, mais aux intoxications ou auto-intoxi-

cations chroniques. Elle se caractérise par l'atrophie simple ou

pseudo-pigmentaire des cellules atteintes, ce qui explique l'affai-

blissement des facultés intellectuelles des vieillards.

III. Les petits éléments ronds observés au niveau des cellules

nerveuses en désagrégation ne pénètrent jamais à l'intérieur du .

proloplasma. L'auteur leur refuse toute fonction de phagocytose, de

neurophugie ou de lgocylose sur les cellules nerveuses.

IV. Le pigment jaune des cellules nerveuses n'est pas un vrai

pigment, ce n'est pas un pigment physiologique de sénescence,

mais un produit d'involution cellulaire.

Ce n'est pas un pigment normal, mais un produit de dégéné-

rescence du protoplasma nerveux. C'est un produit de déchet, qui,

arrivé au terme ultime de son évolution peut subir la transforma-

tion graisseuse (dégénérescence granuleuse ou jaune globulaire

(délires aigus), dégénérescence graisseuse (alcoolisme chronique).

V. Tout délire, survenant au cours des maladies générales,

résulte d'une action toxique ou auto-toxique sur les cellules du cer-

veau.

VI. La fréquence des troubles cérébraux chez les alcooliques

chroniques, résulte : d'une part, des altérations lentes des émonc-

toires de l'organisme par l'intoxication alcoolique, qui favorisent

la production de la cause toxique déterminante ; d'autre part, des

lésions chroniques réalisées dans les cellules nerveuses.

424 il BIBLIOGRAPHIE.

L'alcoolisme rend ainsi le cerveau plus sensible aux influences

toxi-infel tieuses ou nuto-toxiques ; il exaspère par cela même la pré-

disposition cérébrale héréditaire. ? VII. Dans tout délire alcoolique, on peut distinguer dans le

cortex deux sortes de lésions :

1° Des altérations cellulaires chroniques, caractérisées par l'atro-

phie, la raréfaction chromatique, la dégénérescence pseudo-pig-

mentaire et graisseuse, la vacuoli-ati'on d'un certain nombre d'élé-

ments des différentes espèces cellulaires. Elles prédominent souvent

au centre de la cellule, sans indiquer pour cela une atteinte pri-

mitive des prolongements nerveux. Elles s'accompagnent d'altéra-

tions fibro-hyalines et graisseuses des parois vasculaires, d'une

légère prolifération névroglique, de l'altération de quelques fibres

corticales. ·

Ces lésions ne sont pas spécifiques de l'alcoolisme, elles s'obser-

vent dans diverses intoxications ou auto-intoxications chroniques

(urémie). Elles correspondent cliniquement ci des symptômes d'affai-

blissement intellectuel. ,

2° Des altérations cellulaires récentes d'ordre chromatolytique et

de formes diverses. Elles s'accompagnent d'une légère infiltration

des couches profondes de l'écorce par de petits éléments ronds.

Ces lésions cellulaires récentes, à vrai dire fonctionnelles, sont

analogues à celles des processus infectieux fébriles. Elles ne dépen-

dent ni de la congestion, ni des lésions de méningo-vasculurite, ni de

la rièvi-e.

Dans les délires alcooliques, elles sont proportionnelles à l'inten-

sité des phénomènes délirants. Elles semblent correspondre à la surac-

tivité fonctionnelle désordonnée des éléments nerveux produite par la

cause toxique. Plus marquées, ordinairement dans le lobe occipi-

tal, elles peuvent être mises en regard de la fréquence des hallu-

cinations visuelles.

Les délires alcooliques sont histologiquement des encéphalites

parenchymateuses diffuses développées sur un fond pathologique

ancien, parenchymateux et interstitiel.

VIII. Le delirium tremens fébrile est un syndrome de nature

auto-toxique qui ne peut survenir que chez des alcooliques chro-

niques et dans lequel la prédisposition cérébrale héréditaire est

secondaire, les lésions d'alcoolisme chronique étant le facteur

essentiel. Il se caractérise cliniquement par un état de confusion

mentale hallucinatoire suraiguë accompagnée de fièvre et de trem-

blement.

Ilislologiqztentettt, c'est une neuro-myélo-encéphalite pal'el/chy-

maleuse toxique aiguë. Indépendamment des lésions anciennes,

dues à l'alcoolisme, ce sont les altérations cellulaires qui credo'

minent parmi les lésions récentes.

131BLIOGRAI'lilE. 458 5

L'aspect terne et vitreux, la dé génération trouble, la teinte bleue

pdle uniforme (au Nissl) avec dégénérescence jaune globulaire

constituent le type cellulaire dominant. Ce type semble corres-

pondre à l'épuisement fonctionnel des cellules.

IX. Le délire aigu est un syndrome de nature toxi-in/'ectieuse

et auto-toxique, survenant chez dés individus héréditairement pré-

disposés. Cliniquement, c'est un état de confusion hallucinatoire

suraiguë avec fièvre.

Histologiquement, c'est aussi une neuro-myélo- encéphalite pare ?

chymateuse toxique aiguë, mais qui ne survient pas comme le deli-

rium tremens sur un fond pathologique ancien d'encéphalite

parenchymateuse et interstitielle.

X. Le delirium tremens et le délire aigu sont des maladies

générales du système nerveux, dans lesquelles la suractivité fonc-

tionnelle violente et désordonnée des éléments nerveux produite

par la cause toxique, aboutit rapidement à leur épuisement com-

plet. Le coma et la mort surviennent dans ces cas par véritable

insuffisance nerveuse.

XIII. L'association des idées dans la manie aiguë et dans la, débilité

mentale; par le Du Madeleine Pelletier, 1 vol. in-8° de 150 p.,

Paris, 1903; Jules Rousset, éditeur.

En dehors des phénomènes purement somatiques, qui peuvent

prendre une part très grande dans le déterminisme de nos états de

conscience, leslois d'association constituent les lois presque uniques

delà psychologie. Dans la perception, le souvenir, le jugement et

le raisonnement, le rôle de l'association des idées, depuis l'asso-

ciation par ressemblance, contraste, contiguité et répétition, jus-

qu'à l'association et l'inhibition systématiques, ne peut être nié.

Les lois qui président à ce processus psychique présentent chez le

maniaque et le débile mental, les mêmes caractères que chez l'in-

dividu normal.

Le maniaque se trahit par une exagération de l'activité tant

somatique que cérébrale qui le rend gai, exubérant, loquace, et

accélère le processus moteur, ce qui le rend dangereux. L'attention

s'affaiblit chez lui, et sa disparition rend impossible toute adapta-

tion au monde extérieur ; ses idées semblent fuir, et il lui arrive

d'avoir conscience de son état. '

L'incohérence de ses idées ne doit pas être attribuée à la volu-

bilité de son élocution, pas plus qu'à la rapidité avec laquelle se

succèdent chez lui les étals de conscience. Cette incohérence est

réelle, et présente un caractère particulier à chaque cas. En obser-

vant de près la conversation de ces malades on arrive facilement

a retrouver non seulement des rapports de contiguïté, d'assonnance

et de contraste, mais encore des manifestations d'association sys-

42 G VARIA.

tématique; les causes de cette incohérence doivent être cherchées

dans la faiblesse provoquée chez eux par l'effondrement soudain

de leur intelligence, dans leurs états de conscience, qui se succè-

dent avec la même «incomplétude » et dont aucun ne peut acqué-

rir une énergie consciente suffisante pour assurer le rôle d'idée

directrice. La psychologie et la physiologie n'ont pu encore nous

apprendre quel changement dans l'influx nerveux a pu produire

cet affaiblissement des états de conscience. L'histologie patho-

logie s'est occupée de la question, mais elle ne fait que débuter

dans cette voie. -

Le travail psychique du débile mental est supérieur à celui du

maniaque. Il y a chez lui une ébauche de coordination d'idées,

mais le niveau mental subit à chaque instant des dépressions qui

font naître l'incohérence. Le débile est un être qui vit son rêve

ou plutôt qui rêve sa vie. Nous retrouvons dans ses processus psy-

chiques de nombreux rapports avec ceux qui se succèdent chez

l'être normal en état de rêverie. Les associations systématiques

sont conscientes bien qu'à un faible dégré, aussi persistent-elles

plus longtemps dans le souvenir.

En résumé, quel que soit le mode d'activité psychique, on trouve

toujours à sa base l'association des idées. Les lois d'association

sont les mêmes dans l'aliénation mentale et la débilité que dans

l'état normal. L'affaiblissement des processus psychiques porte

chez le maniaque et le débile sur les états de conscience ; mais

tandis que chez le maniaque, l'atlaiblissement de la tension psy-

chique est profonde, chez le débile il n'est pas suffisamment

accentué pour l'empêcher d'atteindre le degré le plus bas de la

pensée normale, la rêverie.

L'auteur ne s'est pas borné à des affirmations : elle donne des

observations consciemment rédigées qui viennent à l'appui de sa

thèse, et confirment en tous points ses conclusions. Nous nous

permettons cependant de faire remarquer que la réflexion a été

confondue avec l'attention, et que la volonté aurait pu être, à

notre avis, citée comme un facteur important dans l'association et

l'inhibition systématique. Ces critiques n'enlèvent rien à la valeur

de l'ouvrage, qui intéressera les neurologistes et les psychologues.

Joseph BoYER.

VARIA.

Règlement du Concours DES Médecins ADJOINTS des Asiles.

Le président du Conseil, ministre de l'Intérieur etdes Cultes, sur

la proposition du conseiller d'Etat, directeur de l'assistance et de

VARIA. 427 7

l'hvaiène publique, vu la loi du 30 juin 1838, l'ordonnance du 18

décembre 1839, les décrets des 6 juin 1863 et 19 octobre 1894 ; vu

les arrêtés ministériels des 18 juillet et 24 octobre 1888 et des 12

juin 1899, 7 mars 1900 et 9 mai 1902; vu l'avis des inspecteurs

généraux du 22 mars 1904, arrête : '

Article premier. Un concours pour l'admission anx emplois

de médecins adjoints des asiles publics d'aliénés s'ouvrira à Paris

le mardi 14 juin 1904.

Art. 2 Les candidats devront être Français et docteurs en

médecine d'une des facultés de l'Etat, avoir satisfait à la loi sur le

recrutement de l'armée et ne pas être âgés de plus de trente-deux

ans au jour de l'ouverture du concours; ils devront justifier d'un

stage d'une année au moins, soit comme interne dans un asile

public ou privé consacré au traitement de l'aliénation mentale,

soit comme chefs de clinique ou internes des hôpitaux nommés

au concours. Leur demande devra être adressée au ministre de

l'Intérieur qui leur fera connaître si elle, est agréée et s'ils sont

admis à prendre part au concours. Elle devra parvenir le 15 mai

,1901 au plus tard, au ministère de l'Intérieur (1 ? bureau de la

direction de l'assistance et de l'hygiène publiques, 7, rue Camba-

cérès), qui est exclusivement chargé de l'organisation du concours.

Celte demande sera accompagnée de l'acte de naissance du pos-

tulant, de ses états de services, d'un exposé de ses titres, d'un

résumé restreint de ses travaux, du dépôt de ses publications,

'ainsi que des pièces faisant la preuve de son stage et de l'accom-

plissement de ses obligations militaires.

Art. 3. - Le jury chargé de juger le résultat du concours sera

composé comme suit : 1° Un inspecteur général des services admi-

nistratifs au ministère de l'Intérieur, désigné par le ministre, pré-

sident ; Trois professeurs titulaires de facultés de médecine

ou, à défaut, des agrégés ou chargés de cours des maladies men-

tales, en exercice dans des facultés ou écoles' de médecine de

l'Etal; 3° Trois directeurs médecins ou médecins en chef d'asiles

publics d'aliénés ou de la maison nationale de Charenton; 4°

Enfin, un juré suppléant pris parmi les directeurs médecins ou

médecins en chef des mêmes établissements.

Tous les juges seront désignés par le ministre de l'Intérieur sur

la proposition du comité des inspecteurs généraux. Les profes-

seurs, les agrégés ou les chargés de cours seront choisis dans des

facultés ou écoles différentes. Les directeurs médecins et les méde-

cins en chef devront eux-mêmes être pris dans des établissements

différents et, en outre, appartenir à des asiles situés hors du res-

sort des académies qui auront fourni les professeurs, les agrégés ou

les chargés de cours. En cas d'absence, le président est remplacé

par un autre inspecteur général des services administratifs, désigné

par le ministre de l'Intérieur.

428 , varia.

S'il se produisait plusieurs absences parmi les autres membres

du jury, il serait fait appel au juré suppléant pour remplacer le

premier juré absent et lesépreuves continueraient de plein droit

- avec les membres restants. -

Art. 4. Les épreuves seront toutes subies à Paris, sous le

contrôle de l'inspecteur général président.

Elles sont au nombre de six, savoir : Il, Une question écrite

portant sur l'anatomie et la physiologie du système nerveux, pour

laquelle il sera accordé trois heures aux candidats; le maximum

des points sera de 30 ; 2° Une question écrite portant sur l'or-

ganisation des asiles publicsd'aliénés, pour laquelle sera accordé

deux heures ; le maximum des points sera de 10. Les copies devront

être écrites lisiblement et porter une devise; cette devise sera

reproduite avec le nom du candidat et mise par celui-ci sous enve-

loppe cachetée ; -3° Une épreuve sur titres; le maximum des

points sera de 10 pour cette épreuve et les points devront être

donnés lors de la correction des épreuves écrites. Il sera tenu

compte de ces points en vue de l'admissibilité des candidats aux

épreuves orales et cliniques.

Ces épreuves sont éliminatoires. 4° Une question orale portant

sur la médecine et la chirurgie en général, pour laquelle il sera

accordé vingt minutes de réflexion etquinze minutes d'exposition :

le maximum des points sera de 20 ; 5° Une épreuve cli-

nique orale. Cette épreuve portera sur un seul malade. Il sera

accordé au candidat quinze minutes pour l'examen de l'aliéné, y

compris le temps de réflexion et vingt minutes d'exposition ;le

maximun des points sera de 20 ; - Go Une épreuve clinique écrite.

Cette épreuve portera sur un seul malade. Il sera accordé au can-

didat quinze minutes pour l'examen du malade et trois quarts

d'heure pour la rédaction d'une consultation écrite; le maximum

des points sera de 20. Les épreuves cliniques auront lieu à l'asile

clinique Sainte-Anne.

A partir du le,,juin 1904, Usera interditaux candidats, sous peine

d'exclusion, de pénétrer dans les services de l'admission et de la

cliniqne Sainte-Anne, ainsi que dans les services de l'infirmerie

spéciale du dépôt à lapréfecture de police.

Art. 5. Le nombre des places mises au concours est fixé à

dix. Il ne pourra, dans aucun ca, être dépassé. Aucun délai n'est

garanti pour la nomination des candidats reçus au concours. Au

sur et à mesure des vacances d'emploi qui se produiront dans les

asiles publics d'aliénés, les candidats déclarés admis seront nommes

suivant l'ordre de classement par mérite établi par le jury. C'est

à partir du jour de l'installation effective du médecin adjoint que

commenceront à courir ses services. Les avancements de classe

peuvent être accordés par le ministre, savoir : aux directeurs-

médecins et médecins en chef, après trois ans de stage, au mini-

varia. 429

num, dans la classe inférieure; aux médecins-adjoints, après deux

ans, au miuinum, dans la classe précédente.

Art. 6.- Sont et demeurent abrogées les dispositions anté-

rieures au présent arrêté, notamment celles de l'article 8 du 7

mars 1900, qui dispensait du concours le chef de clinique- de

pathologie mentale et des maladies de l'encéphale, à la Faculté de

médecine de l'université de Paris. Ce dernier se trouvera désor-

mais soumis aux mêmes conditions que les autres candidats.

Art. 7. Le conseiller d'Etat, directeur de l'assistance et de

l'hygiène. publiques, est chargé de l'exécution du présent arrêté.

Paris, le 0 avril 4901.

MAMYROLOGUE DU personnel secondaire DES asiles d'aliénés.

Le samedi 28 mars ont eu lieu, à Villejuif, les obsèque de

11. H.-J.-B. Cuiusac, infirmier à l'asile d'aliénés de Villejuif, tué en

service par un malade. La levée du corps a eu lieu au Hall de l'asile

où ont été prononcés les discours officiels des représentants de

l'administration. M. Patenne, président de la 3° commission, et

M. le 1) Brousse, rapporteur général des asiles, délégués du con-

seil général, M. Louis Lucipia, ancien président du conseil muni-

pal, directeur de l'asile, M. Defrance, directeur des affaires dépar-

tementales, représentant M. de Selves, et M. Honorat pour M. le

Préfet de Police, ont successivement adressé à l'infirmier mort à

son poste, le dernier adieu.

Impersonnel médical et administratif des quatre autres asiles

publics de la Seine et du quartier d'hospice de Bicêtre avait envoyé

des délégations.

Le médecin chef du service de la ll'° section où l'infirmier a

trouvé la mort, M. Pactet, a rendu un suprême hommage à son

modeste collaborateur dans les termes suivants :

« Mesdames, Messieurs, ' '

' Vous devinez l'émotion qui m'étreint au'moment de prendre

la parole, mais je croirais manquer au plus impérieux des devoirs,

si ne venais rendre un suprême hommage au collaborateur qui

ni été enlevé si prématurément et dans des circonstances aussi

Magiques.

« Je n'ai garde d'oublier la part qui revient dans l'accomplisse-

ment de l'oeuvre commune, au conco : lrs actif, zélé, intelligent de

tous ceux qui y participent.

«Notre lâche est ingrate, elle est toujours difficile, souvent

périlleuse, et le sentiment de cette communauté dans l'action,

dans le but, dans la responsabilité et dans le danger, établit entre

nous, infirmiers et médecins, un lien de sympathie et de solidarité

qui nous groupe dans une même grande famille, la famille médi-

cale.

430 VARIA.

« Et lorsqu'un coup imprévu vient frapper l'un de ses membres,

il est vivement ressenti par tous les autres. Aussi, ne saurais-je

vous dire la peine que m'a causé dimanche soir la nouvelle de cet

événement, et le chagrin que, tous, nous avons éprouvé en voyant

que nos elforts pour rappeler la victime à la vie demeuraient inu-

tiles. Cette mort slupide, d'un homme de 38 ans, tué par unirres-

ponsable, n'est-elle pas horrible ! Et n'aurait-elle pas été cent fois

plus épouvantable encore, si la victime avait été mariée et chargée

de famille ?

« Cette émotion, mes collègues, j'en suis sûr, ne me démenli-

tiront pas, seul, le médecin peut le sentir pleinement, lui, le colla-

borateur de tous les jours de ses infirmiers, leur guide, il est vrai,

mais leur guide dans des fonctions dangereuses, qui exigent impé-

rieusement un aide et un soutien réciproques.

« On parle souvent des malades brutalisés ou tués .par les infir-

miers, on ne parle jamais des infirmiers assaillis et tués par les

malades. Et voilà qu'en quelques jours deux morts sont survenues

à la suite des mêmes causes : l'une à l'asile de Pau, l'autre à l'asile

de Villejuif. La liste serait longue à dresser des victimes,depuisles

médecins jusqu'aux infirmiers et jusqu'aux malades eux-mêmes,

frappés par les aliénés. Il ne se passe guère de jour où l'on n'ait à

enregistrer des actes de violence et souvent c'est miracle que la

mort ait pu être évitée. ,

« Je ne veux pas insister, mais cela vous montre combien nous

avons raison, nous médecins, de recommander, d'ordonner qu'un

infirmier ne reste jamais seul an milieu des malades. L'isolement

implique la lutte, le corps à corps, lutte dont on ne peut d'avance

prévoir l'issue. Cette fois, le secours a été immédiat, et cependant

le mal était déjà irréparable.

« Nous avons bien le droit de dire qu'ici nous nous trouvons

en face d'une victime du devoir, au même titre que s'il s'agis-

sait d'un de ceux qui remplissent leurs fonctions quotidiennes

en courant à l'incendie ou en assurant la sécurité de la rue.

« Et quel meilleur exemple que pour remplir son devoir il n'est

pas besoin de prononcer des voeux. Il n'est pas nécessaire de

prendre l'habit du moine ou le voile de la religieuse; l'uniforme

de nos infirmières et de nos infirmiers laïques cache un dévoumenl

qui, pour être encore trop souvent méconnu, n'est que plusrespec-

table.

a Cahusac est mort simplement, en faisant son devoir.

« Ses camarades le savent, ils en sont convaincus etj'aiétép1f'

ticulièremetit touché de l'empressement qu'ils mettent en ce mo-

ment à me seconder dans des circonstances très difficiles, alors

que notre service est chargé, qu'une épidémie de grippe sévit sur

le personnel, et que notre effectif d'infirmiers n'est pas au complet.

C'est le plus bel hommage qu'ils pouvaient rendre à leurcollegue,

VARIA. zip31

c'èst aussi la meilleure preuve d'affection qu'ils pouvaient me

donner. Qu'il me soit permis de les remercier en mon nom per-

sonnel et au, nom des parents des malheureux confiés à nos

soins. ·

« J'ai fini. Je n'essaierai pas d'atténuer par des consolations

banales la trop légitime douleur d'un père. Puisse-t-il trouver un

adoucissement à sa paine, en pensant que son fils laisse chez tous

ceux qui l'ont connu, le souvenir d'un-homme doux et bienveil-

lant, souvenir inséparable des regrets et de la profonde pitié que

nous a causé sa mort. »

Après les obsèques le corps a été transporté à Neuilly où a eu

lieu l'inhumation.

L'assistance des idiotes.

Viol d'une idiote. Hier soir, 20 mars, dit le Journal, a la tom-

bée de la nuit, 1111° A ! bertine Doré, vingt et un ans, une idiote, fut

entraînée au pied d'une meule de paille, par un individu âgé d'en-

viron vingt-cinq ans, qui lui a fait subir les derniers outrages et

s'enfuit ayant entendu des pas sur la route. Une enquête ouverte

fait supposer que c'est un ouvrier de M. Pihan, cultivateur, con-

gédié par ce dernier. Il n'a pas reparu depuis. La gendarmerie le

recherche. D'où la nécessité d'hospitaliser et de traiter

les idiotes.

Les aliénés en liberté.

Délire de la persécution. Un suicide a eu lieu dans celte loca-

lité le 7 avril courant, M. Lécureur (Ernest), quarante-huit ans, jar-

dinier, domicilié à Clermont, rue de Beauvais, atteint depuis quelques

mois du délire de la persécution et interné à ce sujet ces temps derniers

à l'asile de Clermont, en était sorti il y a huit jours, et depuis le

5 courant il se trouvait chez Mue Dubreuil, née Lécureux (Léonie),

habitant la commune de Weiles-Pérennes.

Plusieurs fois, et notamment le avril, cet infortuné avait mani-

festé l'intention de se suicider. Jeudi de grand matin il put trom-

per la surveillance de ses parents, qui le trouvèrent étendu dans,

la grange, au milieu d'une mare de sang, la gorge coupée à l'aide

't'un couteau de jardinier, qui se trouvait près du malheureux.

(Le Semeur de l'Oise, 10 avril). Ce fait montre combien est diffi-

cile l'assistance des aliénés dans les familles, à moins qu'elles ne

puissent avoir un infirmier qui surveille constamment le malade.

Il y a un choix souvent difficile à faire.

Un fils qui lue sa mère. Ce matin, 13 avril à Lorient, vers sept

heures, le fils Lemestric a tué sa mère, en tirant sur elle avec un

" canardier » à bout portant. La mort a été instantanée. On dit que

le meurtrier ne jouit pas entièrement de sa raison.. Il aurait été déjà

432 bulletin bibliographique.

interné. Hier avait été célébré le mariage de la fille Lemestric. Le

père Lemestric, entrepreneur de transports très connu, est mort

subitement il y a deux mois environ. (Le Petit Ya1', n° du 14

avril). -

FAITS DIVERS.

Asiles d'aliénés. M. le Dr Sluoa, médecin-adjoint des asiles

publics d'aliénés, a été nommé médecin assistant au service de

l'admission de l'Asile clinique. Nous adressons nos félicitations à

notre distingué collaborateur.

Nécrologie. Nous avons le regret d'apprendre la mort de

M. le Dr Vallée, médecin de l'Asile d'aliénés de Québec.

Hospice DE Btc> : 'TRE. M. BOURVHVILLE. Visite et présentation de

malades, le samedi à 9 heures et demie très précises.

XIVe CONGRÈS DES MÉDECINS ALtÉNISTE3 ET NEUROLOi : ISTES DE FR1\CB

ET DES pays DE La\GUI's ER : 1NÇAISR (Pau leur-7 août 1901). Le XII"

Congrès des médecins aliénistes et neurologistes de France et des

pays de langue française se tiendra cette année à Pau du 1er au 7

août sous la présidence de M. le professeur Brissaud.

Adresser les adhésions et communications à M. le D' Girma,

secrétaire général du Congrès, médecin-directeur de l'Asile public

des aliénés de Pau.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Chardin (Cli.) . Précis d'électricité médicale. 1 vol. in-16 de 840 pages.

Librairie 111aloine, 25-27, rue de l'Ecolè.de-létlecine, t'rix : dû francs.

PRIVIT de Fortuné. - Etude sur les délires post-parlum envisagés

spécialement au point de vue de la palhogéiiie. 1 vol. in-8» de 172 page;.

Librairie Masson, 120, boulevard Saint-Germain.

LE'ET. - Conférences fuites au personnel de l'asile de Bassens, 8111

les soins à donner aux aliénés. In-16 de 64 pages.

Le rédacteur-gérant : Bouhnevius.

EvrpttT,Ch.HtBtttt.imp.4[04

Vol. XVII. Juin 1904. ' N° 102.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE MENTALE.

Un cas de forme fruste de démence précoce 1.

Par René ni,vssELOV,

Médecin-adjoint à l'asile de Pau.

Le malade dont je publie ici l'observation intéresse à la

fois le médecin et le- psychologue; le médecin, parce qu'il

s'agit d'un sujet normal et même d'une intelligence bril-

lante jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans, atteint à cette

époque d'un accès délirant, suivi d'un alluiblisseim-nl intel-

lectuel spécial dont je me propose de déterminer les carac-

tères ; le psychologue, parce que la nature et les caractères

decet affaiblissement peuvent apporter une contribution à

l'étude des états d'indifférence et d'aboulie.

Il s'agit d'un homme de quarante ans M N..., israélite, entré à

la maison spéciale de santé de Ville-Evrard, dans le service de

M. le Dr Sérieux, le 10 octobre 1902.

Appartenant à une famille de robe,' le malade, d'après les ren-

seignements recueillis soit auprès de lui-même, soit auprès de sa

soeur, n'aurait pas d'antécédents lier, dILaire. bon père et sa mère

sont morts, jeunes encore, de maladies de coeur. Sun grand-père

maternel, àné de quatre-vingt-cinq ans, est encore eu lionne

santé. Sa sconr âgée de vingt-cinq ans est également bieu por-

tante.

Après de brillantes études (il eut des nominations au concours

général), M. N.. fait du droit et fiasse sa licence. C'est alors qu'il

perd son pere en 18b6, Ims sa. mère quelque temps après. Cette

double perte détermine chez le malade une violente éliiolioli : il se

sent à la suite désemparé, Isole dans la vie : il n'épiouve qu'une

' Travail fait dans le service de M. le Dr Sérieux.

Archives, 2' série, t. XVII. ' ? 8 .

131· li CLINIQUE MENTALE.

faible affection pour le reste de sa famille; aussi, malgré ses con-

seils, et aussi pour contenter un ancien goût de voyages et d'aven-

tures, accepte ? il un poste de substitut près d'un parquet colonial , > ? 11 reste environ un an aux colonies, y gagne les lièvres pain ?

déennes et revient en France pour se soigner. Après un séjourdc

trois mois, il est nommé juge de paix en Algérie, où il reste deux

ans; à la suite d'une altercation avec un agent d'affaires, il est

déplacé et envoyé dans le Sud-Algérien; ce déplacement mécon-

tente M. N... qui vient à Paris pour en chercher la cause.

Notons que, pendant son séjour en Algérie, le malade buvait

un peu, prenait régulièrement une absinthe matin et soir : il

travaillait beaucoup, parfois de six heures du matin à onze

heures du soir, enfui il fut repris de fièvres palustres et traité à

l'hôpital d'Oran.

Jusqu'à cette époque, M. N... avait une activité intellectuelle

assez vive : s'intéressant à beaucoup de choses, il s'occupait au

cours de ses études de droit, de littérature et de musique, suivait

les concerts dont il lit même des comptes rendus. Sans doute la

mort de ses parents semble avoir jeté momentanément du moins

un certain trouble dans l'harmonie de ses facultés mentales, néan-

moins il s'acquitta fort bien des fonctions qui lui étaient con-

fiées aux colonies.

A son retour d'Algérie, il était en règlement de comptes avec l'un

de ses oncles et n'était pas d'accord avec lui sur tous les points.

Arrivé à Paris (c'était en 1890), il croit s'apercevoir qu'il est filé

par des agents; il s'imagine alors que son oncle veut se débarras-

ser de lui. Il entre dans un café, prend un sandwich et du 1-tit, e<t

saisi d'angoisses, a des sueurs froides, ne doute plus alors qu'il

est empoisonné; il envoie une. carle à un procureur de la répu-

blique de ses amis dans laquelle il dit : « Je meurs assassiné. ),Il II

demande à être conduit chez un commissaire, et dans le bureau

veut se jeter parla fenêtre, car il croit sa dernière heure venue. On

le mène alors à l'infirmerie du dépôt.

Le malade ne se souvient que d'une façon extrêmement confuse

des divers incidents de son délire. A l'infirmerie du dépôt, il éuit

dans un état de marasme au cours duquel il refusa toute nourri-

ture ; lorsqu'il quitta le dépôt pour aller à Sainte-Anne, il lui snm-

blait qu'une foule était là qui le regardait monter en voiture, lin il

gardé qu'un souvenir extrêmement confus de son séjour à Saint-

Anne, il se souvient seulement qu'il lui semblait entendre les voix

de personnes connues qui partaient de tous les coins de la chambie.

Transféré à Villejuif, il croit, pendant le voyage, qu'on le con-

duit en un lieu où on va l'égorger. Il y reste sept ou huit mois,

son délire dit-il, n'y dura que huit ou dix jours, il se souvient qu'il

voulut plusieurs fois sejeter tête, baissée contre une colonne pour se

tuer. 11 est probable que le délire ou du moins la période de trou-

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 435

bles mentaux aigus a duré plus de temps que le malade ne le croit,

car, après avoir passé sept -ou huit mois à Villejuif, transféré à

Ville-Evrard, où il reste encore plusieurs mois, il n'a gardé qu'un

souvenir très vague de son séjour dans ce dernier asile.

Il nous est assez difficile de reconstituer d'une façon précise

l'accès délirant dont fut atteint M. N... en 1890 ; il est néanmoins

permis de supposer, étant donnée la confusion des souvenirs lais-

sés parles délires, qu'il fut marqué par des conceptions extrême-

ment peu précises, qu'il y eut à la base un état de frayeur et d'an-

xiété commandant des idées de persécution confuses et détermi-

nant des réactions assez violentes; ces idées délirantes semblaient

étayées elles-mêmes sur des interprétations fausses, désillusions,

peut-être même des hallucinations. A ce délire semble avoir suc-

cédé une phasede confusion mentale qui a dû persister plusieurs

mois jusqu'à la sortie du malade. '

A sa sortie de Ville-Evrard, sa famille lui fait une pension.

M. N... va alors habiter Versailles où il reste deux ou trois ans,

on lui a prescrit de ne pas faire immédiatement de métier suivi,

il s'occupait un peu d'assurances. Il se sentait d'ailleurs lui-même

incapable de reprendre une occupation. Il revient ensuite à Paris,

où il vit seul, fuyant la société, conservant toujours quelque mé-

liance à l'égard de son oncle, qui, dit-il, l'écartait de son- grand-

père.

Je tâcherai d'élucider plus loin quel était l'état mental de

)1. N... à cette époque, état mental qui a déterminé son mode de

vie depuis 1890. Le malade ne fait rien, se promène, fréquente les

théâtres, les concerts, les musiques militaires, suit des conférences;

il mène une vie oisive et désemparée qui n'est marquée par aucun

événement saillant jusqu'en 1899. A cette époque il ressent quel-

ques palpitations et s'imagine immédiatement qu'elles sont dues

à l'ingestion de poison contenu dans un de ses aliments. Il a alors

des idées noires, croit qu'il va mourir : en proie à ses idées, il entre

à l'hôpital Dubois où il reste huit ou dix jour-); pendant son sé-

jour à il il refuse toute nourriture, prétendant qu'il n'a pas

besoin de manger puisqu'il va mourir, il se rétablit un peu, sort de

l'hôpital et reprend sa vie antérieure.

En 1900, étant allé à l'Opéra-Comique, son pantalon se trouve

déchiré par un clou qui sortait du fauteuil sur lequel il était assis.

M. N... assigne alors en justice de paix le directeur du théâtre qui

rel'use de l'indemniser de la perte de son pantalon; quelques

jouis après,- il lit cette histoire dans le Malin; intrigué, il va au

journal et demande qui a signalé cet incident au directeur'; on lui

montre une lettre dans laquelle il croit reconnaître récriture de

son oncle; il se demande aujourd'hui encore quel intérêt a poussé

son oncle à informer un journal des faits de sa vie privée.

Nous arrivons aux faits qui ont motivé sa dernière entrée. De-

436 CLINIQUE MENTALE.

puis le mois de février 1902, nI. 1\... était sombre, il ne soi [¡tuque

rarement pour prendre ses repas, encore bien souvent ne descen-

dait-il pas déjeuner. Cet état va croissant ; le malade ne sort plus,

- mange chez lui, se sent totalement sans volonté, ne fait rien, sem-

ble en partie conscient de son état : il pense alors qne si on venait

l'attaquer il serait incapable de se défendre. Son aboulie est telle

qu'il met parfois trois heures à s'habiller, une heure à lacer ses

chaussures, parfois reste des journées entières étendu sur .-on lit,

parfois aussi se promène dans sa chambre en répétant toujours

les mêmes mots. « Il semblait, me dit-il, que je n'étais plus libre,

que j'étais comme un pantin entre les mains de quelqu'un. » Il

voulait aller en un endroit et il allait en un autre; il voulait dire

quelque chose et n'y parvenait pas. M. N... pensa alors qu'il était

influencé, qu'il était dominé par une puissance extérieure à lui.

Mais ces pensées elles-mêmes furent vagues, peu précises et ne

s'imposèrent pas à son esprit. Ces troubles augmentant, le malade

veut, le 8 octobre, se faire conduire a la maison Dubois, mais dans

le trajet, il change d'idée, se fait ramenerchez lui et prie son con-

cierge de s'occuper de lui. Le soir, à dix heures, il était allongé

sur son lit; le concierge est entré, s'est approché du lit; le malade

crut le voir qui avançait les mains vers lui, s'imagina qu'il voulait

l'étrangler, saisit son revolver qui était dans sa table de nuit, tira

plusieurs coups sur le concierge qu'il n'atteignit pas, s'enfuit en

chemise dans la rue et se réfugia chez le commissaire de police, le

suppliant de l'arrêter pour l'empêcher de commettre un deuxième

attentat. On le conduisit alors à l'infirmerie du dépôt, puis il

Sainte-Anne où il resta un jour, eufin à la maison de santé de

Ville-Evrard.

A l'entrée,le malade est sombre, répond difficilement et lentement,

il semble avoir beaucoup de peine à rassembler ses idées. Il se

croit électrisé, sous l'influence magnétique de gens qui ont voulu

le iaire enfermer, il ne sait lesquels, il ne l'affirme pas d'ailleurs;

c'est là une simple impression. Il ne peut faire ce qu'il veut; cette

nuit, il a gâté au lit, il a voulu se lever, mais n'a pas pu. Parfois

il ne répond pas, ne parle plus, enfonce sa tête dans ses épaules,

s'efforce d'arrêter sa respiration ; il reste quelque temps ainsi.

puis nous dit ensuite que le courant vient de l'arrêter. Il ressent

alors une angoisse dans la région précordiale et il lui semble

qu'il vient d'être étranglé derrière le cou. En d'autres moments,

il remue les jambes et dit que c'est le courant électrique qui l'in-

fluente :

J'ai déjà dit que le malade ne rassemblait que fort difficilement

ses idées ; parfois il ne parait pas comprendre les paroles du'ou

lui adresse. Ou lui fait lire un fait divers, on le prie de le résumer

et il répond qu'il en est incapable,'qu'il n'a pas compris ce qu'il a

]11, et qu'il n'en a retenu que le titre ; on le prie d'écrire et il écrit :

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 437 Î

C'est aujourd'hui, me dit-on, le 13 octobre, la température est excel-

lente et tiède.

Il n'a qu'un souvenir extrêmement confus de tous les faits qui

ont précédé son internement. Il a cru que son concierge voulait

l'étrangler; il était d'ailleurs depuis quelque temps comme un su-

jet hypnotisé : « j'étais, dit-il, le jouet de quelqu'un. » Il ne peut

fournir que des détails très vagues sur son genre de vie, sur son

premier internement. Il reconnaît Ville-Evrard, sait l'année, le ..

mois, ignore la date. Le malade a du dégoût de la vie : « il serait

bien heureux qu'on l'en débarrassât, mais n'a pas le courage de le

faire lui-même. » Il n'a jamais fait de tentatives de suicide.

Réflexes patellaires normaux. Pupilles rondes et égales.

Réflexes lumineux et accommodateurs affaiblis. - Pas d'embarras

de la parole.

Pendant les quinze premiers jours qui suivent son entrée, M. N...

reste dans le même état. Spontanément, il n'adresse la parole à

personne, il ne répond que lentement ou même ne répond pas,

reste parfois immobile des heures entières, ne paraissant penser à

rien. Incapable de tout effort mental, il ne cherche aucune occu-

pation. Il dit lui-même dans les périodes où il se trouve un peu

mieux, le 17 octobre par exemple, qu'il se sent le cerveau vide,

qu'il n'est pas capable de suivre une conversation, que le moindre

effort lui fait mal; dans ces moments il s'inquiète un peu de sa

situation ici, de ce que sont devenus ses meubles et ses affaires.

Ces moments sont rares,le plus souvent il se croit encore hypno-

tisé, mais ces idées sont cpnfuses ; il sent toujours des courants

électriques lui passer dans les jambes; il croit avoir entendu des

voix le 12 octobre, mais ne peut dire ce qu'elles lui ont dit, ni d'où

elles venaient. Le 17 octobre il me raconte que, la veille. il se pro-

menait sous la galerie en sifflant des airs qu'il ne connaissait pas

du tout; il explique encore ce phénomène par l'hypnotisme. Par- .

lois il refuse de manger, sans en vouloir donner le motif. Il n'a

qu'une notion extrêmement confuse du temps écoulé; le surlende-"

main de son entrée, il ne peut dire exactement quel jour il est

entré à la maison de santé.

11 n'a pas de désorientation et sait parfaitement'où il est.

Enfin les idées de persécution extrêmement confuses qu'il pré-

seule, ne déterminent chez lui aucune réaction.

On voit qu'il s'agit en somme d'un état de confusion mentale,

d'imprécision extrême des idées, qui se traduit dans toutes les pen-

sées du malade et dans ses conceptions délirantes, extrêmement

vagues. Sur ce fonds de torpeur cérébrale se développent quelques

illusions, quelques interprétations fausses, de légers troubles de la

Personnalité (le malade rapportant à une cause objective, des phé-

nomènes subjectifs, crampes dans les mollets, réminiscences mu-

sicales, paroles prononcées pour ainsi dire automatiquement, etc.,

438 CLINIQUE MENTALE.

etc.) Remarquons enfin que les perceptions sont peu précises et

que c'est à la faveur de cette imprécision des perceptions et des

images mentales que se développent les illusions de fausse recon-

naissance, extrêmement vagues, d'ailleurs elles aussi.

L'état de confusion disparaît progressivement et avec lui les

idées délirantes; celles-ci ont à peu près disparu à la fin d'octobre.

M. N... reconnaît qu'il a été malade, néanmoins il conserve un

certain doute sur les intentions qu'avait son conciergeà son égard;

nous verrons ultérieurement qu'il ne se rend pas toujours un

compte très exact de la nature des troubles ressentis dans ses ac-

cès délirants antérieurs.

Le 31 octobre le malade cause plus facilement : il commence à

lire et ne ressent plus de fatigue lorsqu'il veut faire un certain

effort mental. La phase aiguë n'a laissé en lui que des souvenirs

peu précis; il pense cependant qu'il pourrait retrouver ses souve-

nirs si on le forçait à fixer son attention sur certains points déter-

minés, mais spontanément il ne peut les évoquer. Il n'a pas

alors une conscience très exacte du temps écoulé depuis son entrée

à l'asile.

L'amélioration continue : en février, les phénomènes aigus ont

totalement disparu et M. N... peut être considéré comnv guéri.

Il nous reste à voir en quoi consiste cette prétendue guérison, et

quels sont les caractères de l'amoindrissement intellectuel qui a

débuté avec le premier accès. Ces caractères vont nous expliquer

le genre de vie qu'il a mené de 1890 à 1903. Evidemment nous

serons obligés pour cette période, d'accepter le témoignage du

malade et les renseignements fournis par la famille ; mais M, N...

compare son état d'alors à son état présent, et nous pouvons con-

clure de son état présent à son état d'alors, les actions et réactions

de M. N... en liberté paraissant à peu près identiques à celles qu'il

présente à l'asile.

Depuis le mois de février jusqu'à l'époque actuelle (c'est-à-dire

'en août 1903) le sujet a vécu à la maison de santé de Ville-Evrard,

rapidement adapté à la vie de l'asile. Il joue au billard', aux car-

tes avec les autres pensionnaires, lit le journal, quelques romans.

va à la promenade. Jamais il n'a demandé spontanément sa sor-

tie. Bien souvent je lui ai demandé s'il désirait reprendre sa

liberté. Au début, c'est-à-dire au mois de février, cetie question

l'embarrassa, il n'y répondit pas immédiatement, parut chercher

à concentrer son attention sur ce que je lui demandais. évides-

ment il n'y avait pas encore pensé spontanément ; il me répondit

enfin affirmativement, mais d'un air embarrassé. Le lendemain il

me dit que ma question l'avait surpris, et il m'interrogea pour

savoir s'il pouvait reprendre la vie commune : pour lui, il avait

certaines craintes ; d'abord il ignorait totalement ce qu'étaient

devenues ses affaires, il craignait en rentrant à Paris, de ne pou-

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 439

voir se diriger, de retomber malade, en un mot M. N... ne tenait

pas à sa sortie. Je`lui en reparlai plusieurs fois depuis.je lui deman-

dai si cette vie réglée, monotone, sans aucune distraction ne lui

était pas pénible. 11 me dit que non, qu'il ne souffrait pas de son

séjour ici; il n'a aucun désir de liberté, parfois seulement il se dit

que, s'il était dehors, il pourrait aller à l'Opéra, mais cette distrac-

tion même ne parait pas lui faire défaut : il considère son séjour

ici comme un séjour dans un sanatorium, il sait qu'il aura une fin

un jour, d'ailleurs, il est un peu effrayé par l'idée de vivre au

dehors, il lui faudra chercher un logement,s'occuper de ses repas,

d'une foule de petites choses quotidiennes qui le fatiguent et l'en-

nuient : ici il n'a à s'occuper de rien, il mange, il se couche à

une heure fixe sans qu'intervienne aucune décision de sa part.

« Prendre une décision, même au sujet de la chose la plus futile,

dit-il, m'ennuie et me fatigue. Généralement, je reste où je suis. Je

suis totalement apathique. » Tous ses besoins sont contentés ici :

ses désirs ne dépassent pas le cercle de ce qu'il peut se procurer à

l'asile, car, en fait, s'il avait des habitudes, il n'avait guère de dé-

sirs. Depuis son premier accès sa vie était en effet bien peu active.

Autrefois M. N... était un homme actif, aimant beaucoup les dis-

tractions, la musique, le théâtre ; aux colonies, surtout en Algérie,

il avait exercé un métier assez absorbant. Or depuis 1890 il ne

fait plus rien ou presque plus rien; sans doute il allait encore au

théâtre et au concert, mais il semble que ce fut là plutôt une ha-

bitude ancienne qu'un désir toujours nouveau. Sa vie n'était pas

en somme très différente de celle qu'il mène à l'asile. Il vivait

seul, retiré, ne voyant presque personne. 11 n'élève aucune critique

contre le régime de la maison de santé, sauf parfois contre la

nourriture; il mange d'ailleurs beaucoup et avec gourmandise.

Les désirs sexuels me paraissent diminués : voici un an qu'il est

interné et la privation de femme ne l'a jamais tourmenté ; le ma-

lade trouve d'ailleurs cela tout naturel ; il a quarante ans, et n'a

jamais été que peu adonné aux pratiques amoureuses. Il est assez

difficile de savoir ce qu'étaient les désirs sexuels avant 1890; le

malade ne nous donne que peu de renseignements à cet égard, il

est toujours un peu porté à se déprécier, et il se déprécie à ce point

de vue comme à tous les autres, mais il semble bien que depuis

son premier accès les désirs aient diminué et les explications du

malade ne font que masquer un véritable déficit à cet égard.

Nous trouvons donc ici une réduction considérable des besoins

et des désirs et un état accentué d'aboulie; cette aboulie n'est d'ail-

leurs pas seulement déterminée par la diminution des désirs, mais

est liée aux troubles de tout l'exercice mental; ce n'est qu'après

avoir passé en revue toutes les fonctions psychiques que nous

pourrons comprendre dans leur ensemble les troubles de la volonté

11. N... ne semble guère ressentir les émotions bien profondé-

440 ' CLINIQUE MENTALE.

ment. Il est assez difficile d'étudier d'une façon vraiment objective

les émotions d'un malade, sauf dans les cas extrêmes. Je n'ai pas eu

l'occasion d'observer chez M. N... d'émotion-choc. Il est tropcons-

- citent pour qu'on puisse lui annoncer un malheur imaginaire, ce

que l'on peut faire sans danger dans les formes avancées de dé-

mence précoce; les circonstances ordinaires de la vie, la simple

observation ne m'ont pas permis d'étudier chez lui d'émotion-choc

bien typique, je n'en conclus pas qu'il n'est pas capable d'en res-

sentir, je serais plutôt disposé à croire le contraire, et en fait si

l'on se rapporte à ce que dit le malade il n'a pas eu l'occasion

de ressentir des émotions-choc bien intenses depuis fâ90; il se

souvient cependant d'avoir été très impressionné par la vue des

cadavres du Bazar de la Charité, exposés au palais de l'Industrie;

dans les foules il était pris parfois de peurs intenses. On pourrait

en conclure que la faculté d'être ému est diminuée en lui, car on

ne manque pas, en l'espace de treize ans, d'occasions de ressentir

un plus grand nombre d'émotions que n'en indique notre malade.

Mais l'absence d'émotions peut tenir ici à des causes plus généra-

les. Depuis 1890 le malade a vécu isolé, et a eu peu d'occasions

d'être froissé dans ses affections, puisqu'il n'en avait presque pas.

En outre, on est d'autant plus exposé aux chocs moraux que l'on

a une vie plus active, que l'on se représente avec plus d'intensité

dans le présent les émotions de plaisir que la réalisation des dé-

sirs ou des projets donnera dans l'aveuir. Tout cela est étranger à

M. N..., et ainsi peut s'expliquer le petit nombre des émotions

qu'il a ressenties. ,

Il est plus facile d'observer l'étal général de ses dispositions

affectives. M. N... n'a jamais été sombre depuis le mois de février;

il est généralement souriant et plaisante volontiers, sans être néan-

moins vraiment euphorique. Je l'interrogeai un jour sur ce sujet,

en prenant bien soin de ne pas le suggestionner en un sens ou

dans l'autre : « Etes-vous habituellement gai ou triste, lui deman-

dai-je ? » « Mais, me répondit-il, je ne suis ni gai, ni triste; je

suis toujours indifférent. »Si cet étal d'indifférence frappe le malade

c'est qu'il n'existe que depuis 1890. Il a été très affecté de la mort

de ses parents avant cette date. Depuis, il ne s'intéresse plus à

rien de ce qui touche sa famille, il ne s'intéresse même plus à

ses propres affaires. Autrefois les distractions artistiques lui cau-

saient un vif plaisir, aujourd'hui le plaisir qu'il y trouve est beau-

coup moindre. La privation des habitudes qu'il avait au dehors

n'a été nullement ressentie par lui d'une façon pénible. Il s'étonne

lui-même de ne pas souffrir de son internement, il lui semble

qu'il devrait s'en préoccuper, s'en attrister davantage.

Le malade semble néanmoins avoir eu des périodes d'inquiélude

et de préoccupations déterminées par le sentiment de son incapa-

cité et de son aboulie. Nous avons vu les craintes d'empoisonne-

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 4L t

ment qu'il éprouva en 1900. Il se disait parfois qu'il serait facile-

ment proie de quelqu'un qui pourrait le faire disparaître sans

que personne n'en sache rien. Il craignait qu'on ne l'engageât à

des actions qu'il n'aurait pas dû accomplir. Ayant un jour donné

sa signature pour attester un fait banal (l'identité d'une personne

qu'il connaissait), il·se dit longtemps qu'on avait peut-être fait une

substitution de pièces, que cette signature' pouvait avoir des con-

séquences graves. L'idée que sa femme de ménage pouvait le

quitter, que son concierge pouvait l'abuser, le préoccupait vive-

ment. Il avait conservé de fortes méfiances à l'égard de son oncle

qui croit-il, l'écartait de son grand-père, et il n'est pas encore bien

sûr de ne pas avoir été réellement l'objet des tentatives d'empoi-

sonnenle'1t dont il se plaignait au cours de ses différents accès.

Toutes ces préoccupations, ces inquiétudes ont disparu depuis

qu'il est interné, et c'est un peu la crainte de les retrouver à la

sortie qui contribue, dit-il, à lui faire accepter le séjour à la mai-

son de santé. ,

Les troubles intellectuels n'apparaissent pas à un examen super-

ficiel : M. N... n'a plus de conceptions délirantes, il n'a rlus de

confusion mentale ou d'imprécision des idées. Il ne parait pas

avoir de troubles de la mémoire; il n'est pas désorienté, sait par-

faitement où il est, se rend un compte exact du milieu, sait tout

ce qui s'y passe, n'a aucun trouble de la notion du temps. Très

cohérent, ses idées bien systématisées, il analyse très bien son état,

il est capable de remarques justes et fines sur lui-même et les

choses qui l'entourent. De temps en temps cependant il ne com-

prend pas immédiatement, et semble faire un certain effort men-

tal pour répondre. Néanmoins M. N... pourrait être considéré

comme guéri, si on ne poussait pas plus loin l'analyse psycholo-

gique de ses troubles, si l'on ne savait pas ce qu'il était avant son

premier accès, et si l'on ne comparait pas au mode de vie qu'il

menait alors celui qu'il mène depuis 1890.. -

En fait l'activité intellectuelle est ralentie, le malade l'a lui-

même constaté : il compare fréquemment ce qu'il était autrefois à

ce qu'il est aujourd'hui. Brillant élève au lycée, il avait continué,

étudiant, à s'intéresser à beaucoup de choses, il avait exercé un

métier jusqu'à son premier accès. Après, il ne peut plus avoir d'oc-

cupation suivie, il ne fait rien et ne souffre pas de son inaction, il

va au concert, au théâtre, fréquente un peu la bibliothèque na-

tionale, mais ne fait rien de suivi. Il sent lui-même qu'il est désor-

mais incapable de reprendre une occupation, d'exercer un métier :

Il terne sens bête, dit-il » et il ajoute : « Ce qui m'étonne c'est

que Je ne souffre pas de me sentir ainsi; cela m'est totalement indiffé-

rent. »

Habituellement il ne pense à rien, il n'a pas d'états de rêverie, sa

Pensée ne se fixe spontanément sur rien, il n'a pas de souvenirs

442 "-) CLINIQUE MENTALE.

spontanés, il ne songe'pas à sa vie passée, il ne pense pas à l'ave-

nir, à ce qu'il fera à sa sortie : « Il semble, dit-il, qu'il y a en moi

quelque chose â'anli,l/loé.3.. Il a une sensation de vide dans la tête,

depuis son dernier accès il se disait fréquemment qu'il avait le

cerveau vide, qu'il n'avait plus d'idées.

Pour penser à quelque chose, il faut qu'il le- veuille, qu'il conren-

tre fortement son attention sur un point déterminé, c'est ainsi

seulement qu'il peut évoquer des souvenirs passés, rassembler ses

idées pour penser à l'avenir. Il fait cela un peu volontairement,

pour penser à quelque chose, pour ne pas persister dans l'état de

vide cérébral qui lui est habituel.

Expérimenter sur un tel sujet pour savoir ce qu'il pense habi-

.tuellement, pour constater objectivement ce qu'il nous décrit lui-

même est très difficile, car la caractéristique de ce malade est de

ne penser à rien spontanément, mais de pouvoir le faire d'une

façon volontaire. Néanmoins. j'ai recherché ce qui surgissait dans

l'esprit du malade lorsqu'on le pliait de laisser sa pensée au ha-

sard bien que lui imposant de penser à quelque chose. J'ai em-

ployé un test préconisé par M. Binet dans son Etude expérimentale

de l'intelligence. Je l'ai prié d'écrire vingt mots à la suite : je lui

ai demandé quelles représentations il avait eues pendant qu'il

écrivait; puis je l'ai prié d'en écrire vingt autres, et j'ai agi comme

la première fois. Ce test m'a donné des résultats en désaccoid

apparent avec ce que le malade m'avait dit de lui-même, ce désac-

cord peut toutefois, me semble-t-il, s'expliquer. Je donne ici la

première série de mots et les représentations qui l'ont accompa-

gnée. Voici à peu près comment l'expérience ,'est passée :

« Ecrivez, dis-je au malade, vingt mots à la suite. » - Quel genre

de mots ? » Tous ceux que vous voudrez. » « Pas de noms pro-

près D - « Tous les mots qui vous viendront à l'esprit, » Le malade

hésite environ six'ou sept secondes, puis écrit les mots suivants

assez rapidement : i Roman - Feuilleton Livre Bouquin -

Anatole - France - F1'al ! çois - Arao - Alphonse - baudet

Tar tarin Tarascon Port-1'arccscort Gustave Aymanl -

EdmoH(< About Francisque Sancey -1'entps. » La durée

est de deux minutes.

Le malade, comme on le voit, a été guidé par la question qu'il

m'avait posée touchant les noms propres. Il semble en .outre que

dans le choix des mots, il aille vers le minimum d'efforts possible;

il assemble le prénom et le nom d'un homme ce qui simplifie la

besogne. Dans un autre exercice il nous cite encore des nums pro-

pres, bien qu'à un moment donné il fasse des efforts pour sortir

de la série dans laquelle il est engagé; la durée est alors plus lon-

gue, elle est de quatre minutes. '

Je recherche ensuite quelles représentations a eues le malade au

moment où il écrivait chacun de ces mots. Je les lui lis les uns

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 44l

après les autres en le priant de me dire à quoi il a pensé en

écrivant chacun d'eux.

ftomn. - « J'ai pensé au crime de Sylvestre Bonnard que je lis en ce

moment : je me suis dit que le litre ne correspondait pas au sujet

traité. » - Vous avez bien pensé cette chose au moment même où

vous écriviez le mot, mais non avant, ni maintenant ! » « Oui, au

moment même. »

feuilleton. - « Simple rapprochement d'idées avec le mot précédent.

Aucune représentation. »

Livre. - Même chose :

Bouquin. - Même chose.

Anatole. - « Prénom d'A. France, il y a pensé parce qu'il avait

pensé précédemment au crime de Sylvestre l3ozrzarcl ; mais au mo-

ment oit il l'écrivait il a pensé ci Anatole Delaforge, il s'est repré-

senté la figure de ce dernier, tel qu'il l'avait vu, prononçant un dis-

COlt1S à uu comice agi icole dans la Ilaute-Sudne. »

France. - A. France, s'est représenté sa figure telle qu'il l'avait vue

dans l'Illustration.

François. - A pensé à Fr. Coppée, aucune représentation visuelle.

Arugo. - S'est représenté le boulevard Amao, un point déterminé

de ce boulevard, la station d'omnibus au coin de l'avenue des Gobe-

lins.

Alphonse. - Aucune représentation, a pensé à A. Daudet.

Daudet. - Aucune représentation.

T,/1'((scon, - S'est représenté la gare telle qu'il l'avait vue dans un-

arrêt du train. '

Port-Tarczscon. - Il a pensé que Daudet avait voulu décrire Tarascon,

port de mer (il n'a pas lu le livre).

Gustave. - A pensé ci Gustave 1ymard.

dynaarcl. - A pensé que son gardien s'appelle aussi AynHl1'd, mais ne

se l'est pas représenté.

Francisque. - A pensé ci Sarcey.

Sarcey. - A vu Sarcey faisant une conférence, la dernière qu'il ait

faite à l'Odéon; voyant ma montre sur la table il a pensé que Sar-

cey posait aussi la sienne de la même façon.

Temps. - Sm'cey l'a fait penser au Temps, il a vu le format de ce

journal, mais non un numéro déterminé.

L'imagerie n'est sans doute pas très riche (un autre test dans

lequel je prononce un mot devant le malade et le prie de me dire

quelle image ce mot évoque en lui me donne à peu près les mêmes

résultats); les phénomènes ne sont cependant pas assez accentués

pour que, par comparaison avec des sujets normaux, nous puis-

sions en conclure un trouble de la pensée spontanée; en outre si

le malade n'a pas beaucoup d'images, un mot lui suggère un cer-

tain nombre d'idées à côté, liées au mot d'une façon fort cohérente.

'el quel, est en désaccord avec ce que nous apprend le malade sur

444 CLINIQUE MENTALE.

sa pensée spontanée. Mais je crois que ce désaccord tient à ce qu'en

somme nous provoquons ici des pcu.-ées volontaires. Or le malade

ne se plaint pas tant de ne pas pouvoir penser volontairelneutque

de l'effort mental qu'il lui faut faire pour penser, il se plaint d'avoir

habituellement le cerveau vide. Ici nous l'avons forcé à remplir

son esprit, il est incité par notre présence ; les mots étant donnés,

il a quelques représentations en i apport avec ces mots. La suite de

l'examen va d'ailleurs nous montrer d'une façon plus complète

l'inaptitude du malade à l'idéation spontanée.

Les souvenirs ne se présentent pas spontanément à Sun esprit, il

faut qu'il les évoque volontairement ou qu'on le force à les évo-

quer. Dans ce dernier cas il ne semble pas avoir de troubles du

souvenir ; je lui fais raconter de nombreux détails de sa vie, il se

les représente très bien, il revoit les endroits qui lui sont familiers

sans dilficulté. Les souvenirs touchant ses phases de délire sont

beaucoup moins précis, il est incapable de raconter spontanément

ce qu'il a éprouvé. Mais si l'on atlire son attention sur un point

déterminé, il se le rappelle ; on peut ensuite évoquer en lui les dif-

férents souvenirs des faits qui se sont passés au cours de ses accès

délirants en dirigeant son attention ; sans doute il règne une cer-

. taine imprécision sur ces souvenirs, mais il ue faut pas oublier

que son délire a été singulièrement confus et que le malade ne

peut avoir conservé, un souvenir net de conceptions qui ont été

elles-mêmes imprécises. Je lui demande alors de m'écrire le récit

de ses accès délirants et de sa vie, il me dit que cela lui sera diffi-

cile, que néanmoins il essaiera; le lendemain, il me déclare que

cela lui est impossible, qu'il se souvient bien des choses lorsque

je l'aide, lorsque je l'interroge, mais que seul, il en est inca-

pable.

Pour se souvenir, M. N... doit donc faire un effort : cet effort, il

peut le faire lorsqu'on l'aide, qu'on le soutient; seul, il est rapide-

ment fatigué, son attention dilfliie ; le malade e-t paresseux, et il

est paresseux parce que ses pensées ne s'ordonnent pas spontané-

ment et que l'effort qu'il doit faire pour les rassembler ne peut

être soutenu longtemps sans fatigue. Notons ici que l'on peut pas-

ser à côté de pareils troubles de la mémoire sans les remarquer;

le malade répond correctement aux questions qu'on lui pose lou-

chant ses souvenirs, parce qu'il est encouragé et soutenu par la

présence du médecin, parce que l'interrogatoire dirige son atten-

tion ; la conservation des souvenirs n'est pas troublée, mais ce qui

l'est, c'est l'évocation; les images mentales n'ont plus une vivante

assez grande pour apparaître spontanément à la conscience, elles

ont besoin d'un secours artificiel, secours que le malade peut don-

ner dans certaines occasions, mais qui est plus dilficile lursqu'il

est livré à lui-même, l'efiort qu'il doit laire alors le fatigue très

rapidement. Il s'agit, en résumé, d'un trouble de l'activité spon-

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 445

tanée de l'esprit, trouble qui peut être compensé par un effort vo-

lontaire, lui-même de courte durée.

Tâchons de pénétrer plus profondément dans l'analyse de sa

pensée, pu essayant de lui faire coordonner certains groupes

d'images, en le priant de nous écrire par exemple un certain nom-

bre de phrases composées par lui. Ce qui s'impose immédiate-

ment à son e-prit, refont des réminiscences. M. N ? ne. fdjt aucuu

elTort pour construire des phrases or iginales; il se contente de

rassembler quelques souvenirs, ce qui nécessite un effort

mental moindre; il écrit un certain nombre de proverbes qu'il a

lus Jans l'almanaclr Hachette. Je lui propose alors d'achever un

certain nombre de phrases, espérant ainsi le forcer à un certain

effort de construction mentale; ici encore, ce sont des rmiuis-

cences qui s'imposent à ^on esprit. En voici quelques exemples (je

souligne l début proposé) :

Sil1't1'< est dil'file quand on a l'âme en peine.

Le Soleil luit pour tout le monde.

J'(/illt le son du cor le soir nu fond... du parc.

Le 6rntt, c'est l'homme ajouté a la nature.

Réjolliss')1 nous... hullevill.

Ainsi donc, si l'évocation des souvenirs est plus pénible qu'à

l'étlltllolmal, elle est cependant plus facile que révocation de

pensées ou d'images cohérentes, pour l'evpres-ion desquelles il

faut effectuer un degré plus considérable d'effort intnl ecluel.

t Je n'insislerai pas, pour ne pas tomber dens des redites, sur la

richesse intellectuelle du sujet ; nous avons vu que le vi le intellec-

tuel était son état habituel. Le malade ne croit pas qu'il serait ca-

pable de conduire une enquête, de développer un sujet donné

comme il le raisait autrefois.

M N... peut fixer son attention pendant quelque temps, mais

non d'une façon suivie.

Les tests auxquels on le soumet l'ennuient visiblement, il s'y

applique peu, il parle d'autre chose, se laisse facilement di-lrail'e.

Ces distractions sont surtnul. visibles si l'on poursuit quelque temps

l'étude des temps de réaction; cet exercice est rapi iemeut pénible

pour le malade qui peu : e à autre chose, bien que les temps de

réaction fournis au début soient normaux. 11 est d'ailleurs souvent

distrait, un jour il rend"il visite à une de ses amies; bien qu'il y

ait d'autres personnes, il prend un livre sur la labié du salon, se

met à lire, ne s'apercevant pas que tout le monde est parti et

'fort l'a laissé seul. Un autre jour, il lui arriva, une fous sorti, de

« demander s il avait le -tué sa porte et d'y retourner voir. -

\1 faut distinguer dans l'étude de l'attention deux cas,'suivant

que les procédés d'étude n'exigent l'intervention que de facultés

11lpn'a ! ps peu complexes ou suivant le cas contraire. Sans doute

'attention ne s'exerce jamais à vide et on ne peut l'étudier qu'à

446 6 CLINIQUE MENTALE.

travers une autre fonction. M. Binet fait remarquer que tous les

tests avec lesquels on étudie l'intelligence permettent en même e

temps d'étudier l'attention ; mais on l'observe d'autant mieux à

l'état pur que l'intelligence intervient moins pour l'accomplisse-

ment du test. -

Eh bien ! si l'on s'adresse à des tests, dans lesquels l'intelligence,

la faculté d'analyse mentale n'interviennent que peu, M. N... four-

nit des résultats satisfaisants, à la condition que le test n'ait pas

une trop longue durée.

Je lui ai fait copier des textes composés de phrases ayant un

sens, de syllabes dénuées de sens, de chiffres, en le priant d'y

jeter les yeux le moins possible, je lui ai fait barrer certaines let-

tres d'un passage déterminé,je lui ai lu vingt séries de six chiffres

en le priant de les répéter immédiatement, j'ai pris ses temps de

discernement, je l'ai prié de regarder attentivement une gravure

pendant deux minutes puis de la décrire ; tous ces exercices sont

relativement bien accomplis par M. N... lia quelques distractions,

ses temps de discernement sont assez longs, oscillent entre trente

et 50 centièmes de seconde, mais aucun de ces troubles n'est assez

accentué pour être considéré comme vraiment anormal. Les trou-

bles sont beaucoup plus accentués si l'on fait intervenir des fonc.

tions intellectuelles plus complexes, si accentués même parfois

qu'ils étonnent.

J'ai déjà fait remarquer que le sujet ne comprenait pas toujours

bien les questions qu'on lui pose; lorsqu'on lui explique ce qu'il

doit faire pour accomplir un test déterminé, il me répond parfois :

« Je n'ai pas même compris ce que vous me disiez ». Là est un fac-

teur de l'isolement de M. N...,la société ne le tente pas parce qu'il

suit difficilement une conversation. Au théâtre, bien souvent il ne

comprenait pas l'intrigue de la pièce, au concert il ne pouvait sui-

vre ce que l'on jouait ; il lit, mais il serait bien embarrassé pour

résumer ou analyser ce qu'il a lu.

Les troubles de la compréhension apparaissent très nets quand

on prie le malade de reproduire ou résumer par écrit une anec-

dote qu'on lui a lue à haute voix. J'ai répété très souvent cet

exercice devant mon sujet. Le plus souvent M. N... n'a retenu que

quelques mots de l'anecdote, la dernière phrase, le sens général

n'a pas été saisi, la plupart des détails ont disparu. Parfois aussi il

comprend le sens général mais aucun détail n'est retenu (par exem-

ple, il écrit : « Il s'agit du départ d'un bateau », je lui avais lu les

cinq ou six premières lignes de Education sentimentale de G. Flau-

bert, il n'a prêté attention à aucun des détails).

Très souvent il est distrait pendant la lecture, il pense à autre

chose. Il a simplement entendu un bruit de voix : « Je serais, dit-

il, bien embarrassé de savoir ce que vous avez lu. » Il se refuse a

faire l'effort nécessaire pour résumer par écrit, et sans douter'

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 447

tervient ici encore sa paresse d'esprit ; M. N... pourrait peut être

évoquer plus de détails qu'il ne le fait, mais grâce à un effort

mental assez considérable qui le fatigue et l'ennuie. Voici le meil-

leur résultat'que j'aie obtenu à la suite d'une lecture. Je lui avais lu

le fait divers suivant :

« Urzr> vinlle 7JaY(tl1ne, âgée de soixante quatre ans, la veuve

Mouillet, qui /LIlbii'Lit une petite maison sur lu route des R,co'lets,

avait conduit son troupeau d ms les champs. Pendant qu'elle fallait

de l'herbe pour ses animaux une vipère cachée derrière les fagots

s'élança sur elle et la mordit à plusieurs reprises au poignet'. La pau-

ire femme en est morte. »

Voici ce qu'il éclit après quelques recherches :

« Lapuuvre femme en est morte.

1't ¡liqnée au poignet par une vipère.

mouillez.

Route ans Récollets. » .

Le maiade a reproduit les détails au hasard, ne se souciant pas

de mettre un lien entre eux, de les coordonner en une anecdote

semblable à celle qu'il a entendue.

Peut-être d'ailleurs le défaut de compréhension reconnaît-il les

mêmes causes : M. N... ne fait pas l'effort suffisant pour lier dans

son esprit les diverses parties de l'anecdote, des détails, de» mots

seuls se lixent dans son esprit et subsistent.

Celte difficulté de l'effort mental se manifeste encore quand on

prie le malade de reproduire un dessin lormé de lignes simples;

j'ai employé un dessin emprunté à l'étude de Me Binet sur l'atten-

tion et l'adaptation (Année psychologique, 19n0). Je l'expose aux

re¡ral',ls du malade pendant quinze secondes, il ne parvient pas à

le reproduire ; après trois nouvelles expositions de quinze secon-

des suivies de trois nouvelles tentatives, il s'en déclare totalement

incapable : « Fixez-vous bien votre attention .-«; le dessin pendant

l'exposilitlit ? » « Oui, mais je ne sais pur quel côté le prendre, je

ne puni ns pas à voir ccrnament il est 1(iii. Je ni' sais 111ême pliS si je

parviendrais à le repro luire si jl ! l'avais sous les 2c,c. » Je le lui

donne et il le copie tort bien. L'esprit, daus les quinze secondes qui

lui sont accordées ne peut s'adapter au dessin, il ne peut analyser

ses divers éléments cependant foi t simples, il ne peut en compren-

dre la structure ; le malade n'a cependant pas seulement essayé

d'en avoir une image globale, il a tenté une analyse qu'il n'a pas

été capable de realiser.

La suite des calculs de tête de Sommer nous révèlent encore les

mêmes troubles. En général lorsqu'il s'agit de multiplications,

d'additions, de soustractions ou de division- simples, M. N... ré-

pont immédiatement et le résultat est exact ; il répond immédia-

tement encore si le problème est un peu plus compliqué, mais

souvent alors la réponse est inexacte et il ne cherche pas à la cor-'

448 8 CLINIQUE MENTALE.

riper ; à la fin de l'exercice, il ne prête plus attention aux pro-

blèmes qu'on lui po=e, il répond par des à peu près, il ne peut

plus faire l'effort nécessaire pour résoudre ce problème, il se plaint

que cet exercice le fatigue beaucoup.

Ce test met bien en lumière la difficulté qu'éprouve l'intelli-

gence dès qu'elle se trouve en présence d'un travail qui exige un

certain effort intellectuel. M. N... se soumet mal d'ailleurs à ce

genre d'exercice, alors qu'il se prête volontiers à ceux qui n'exi-

gent qu'uu léger effort de mémoire. Tout effort, toute application

tout exercice un peu prolongé de l'esprit est pour lui une fatigue

et un ennui. Ce sout dans le domaine intellectuel les mêmes trou-

bles que nous avons constaté dans le domaine volontaire.

Esumen physique. - Réflexes patellaires faibles. - Réflexes pu-

pillaires (lumineux et accommodateurs) faibles. - Pupille ? rondes

et égales, non dilatées. -Pas de rétrécissement du champ visuel.

Réflexes conjonctivaux et pharyngiens normaux. - Perceptions

sonores, visuelles, oll'aclives, gustatives bien conservées. Pas

de troubles de la sensibilité tactile ou à la douleur. Pas de crises

convulsives. - Le malade a augmenté de 12 kilos depuis son en-

trée à Ville-Evrard.

Il est évident que les troubles psychiques portent sur

toute l'étendue des facultés intellectuelles, émotionnelles et

vulantaires. Je ne chercherai pas à résoudre lequel parmi-

ces troubles est le p1'imurn movens, celui qui conditionne

tous les autres. D'ailleurs, les divers éléments de l'esprit

sont indissolublement liés entre eux, et certains ailleurs ont

peut-être trop de tendance à ramènera une fonction unique

toutes les fonctions de l'esprit. J'ai déjà indiqué ailleurs que

la conservation des sentiments dépend de l'intégrité de

toutes les facultés intellectuelles; je n'y reviendrai pas ici :

je me contenterai de résumer aussi brièvement que possible

les différents troubles qui concourent à l'amoindrissement

intellectuel du sujet.

Ce qui domine la symptomatologie de ce malade, c'est

l'état d'aboulie et d'indifférence : c'est là ce qui frappe l'ob-

servateur au premier examen. Depuis 1890, 1\1. N... n'est

plus capable d'exercer une profession : il est devenu une

inutilité sociale; oisif, il n'a plus pu tirer de l'exercice de

son intelligence les joies qu'il en tirait autrefois.

L'examen du malade nous a montré que ses désirs étaient

-diminués, .que ses sentiments de tristesse ou de joie étaient

estompés,- qu'il n'était généralement ni triste, ni gai, qui'

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DEMENCE PRÉCOCE. 449

était le plus souvent indifférent '. L'activité cérébrale est, de

ce fait même, lésée assez profondément, d'autant plus pro-

fondément qu'à cet amoindrissement des désirs et des émo-

tions s'ajoute une vivacité moins grande des images men-

tales ; si M. N..., en effet, ne pense plus spontanément,

c'est que les diverses représentations qui composent son

complexus intellectuel ont peu de tendance à revivre, à s'or-

ganiser d'elles-mêmes, soit d'une façon cohérente, dans un

but déterminé, soit même d'une façon incohérente, au gré

de rêveries qui trahissent l'affinité qu'ont les diverses repré-

sentations mentales les unes pour les autres. M. N..., pour

reproduire des souvenirs anciens, pour assembler des

images nouvelles, est obligé de faire un effort; il est obligé

de substituer à son activité spontanée son activité volon-

taire. Mais cette suppléance est fort limitée; elle ne peut se

faire que dans certaines circonstances et pendant peu de

temps, si l'intelligence ne s'applique qu'à des objets sim-

ples, si la combinaison des éléments mentaux est peu com-

pliquée ; elle est impossible ou presque impossible dans les

cas contraires. Aussi, M. N... est-il paresseux, s'accom-

mode-t-il très bien de la vie à l'asile, où tout est réglé, où

il n'a aucun effort à faire, aucune décision à prendre. La

vie au dellol exige une certaine dose d'adaptation spon-

tanée, une certaine rapidité dans les processus mentaux qui

permettent aux touts complexes, que forme la combinaison

des diverses représentations, de se décomposer pour se

recomposer sur des bases nouvelles, dont M. N... est inca-

pable.

Pour conclure, disons que M. N... présente de l'aboulie,

de l'indifférence émotionnelle et une diminution de l'acti-

vité intellectuelle consistant en une diminution de la viva-

cité des représentations mentales.

Voilà donc une forme morbide dans' laquelle, à la suite

' J'ai au cours de l'observation émis un doute au sujet de la dispari-

tion des émotions-chocs : cette opinion peut sembler contradictoire avec

ce que j'avance ici : il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'un cas où sont

frappées surtout les manifestations les plus élevées de l'activité psy-

chique : j'ai recherché, les lésions élémentaires qui constituaient ce

trouble : j'ai observé un état de déficit lorsqu'il s'agit d'émotions-senti-

ments : mais il semble que M. N... soit encore capable de ressentir

des émotions plus violentes, la peur, la surprise, etc.; bien que celles-ci

soient rares chez lui. i.

Archives, 2' série, t. XVII. 2'.)

.

450 CLINIQUE MENTALE.

d'un épisode hallucinatoire confus survenu à l'âge de vingt-

quatre ans, s'est installé un état d'affaiblissement intellec-

tuel que nous venons d'analyser. Notons immédiatement ici

que, depuis cette époque, l'affaiblissement intellectuel a nota-

blement augmenté; ce fait résulte des renseignements fournis

par la famille du malade qui a remarqué que sa tendance à

l'isolement n'a fait que croître depuis lors, que sa capacité de

travail, l'intérêt qu'il prenait à tout ce qui l'entourait dimi-

nuaient parallèlement; d'ailleurs, de 1890 à 1SJ6, lll. N...

semble avoir une certaine activité, il cherche à repren-

dre un métier, il s'occupe d'assurances; puis, peu à peu,

il s'en désintéresse, s'habitue peu à peu à une vie totale-

ment oisive. L'amoindrissement intellectuel, se traduisant

par une incapacité plus grande à se diriger dans la vie, se

manifeste, surtout depuis 1896, où le malade commence à

s'isoler totalement, à présenter quelques idées hypochon-

driaques, à concevoir de la méfiance à l'égard des personnes

qui l'entourent. Ai. N..., aujourd'hui encore, a toujours de

ces méfiances, des craintes puériles de se trouver en butte à

certaines tracasseries auxquelles, pense-t-il, sont exposées

les personnes qui vivent isolées.

Dans quel groupe morbide allons-nous faire rentrer

M. N... ? Je ne pose que pour l'éliminer immédiatement le

diagnostic de mélancolie; autrefois, on rangeait dans la

dépression mélancolique tous les états dans lesquels le ma-

lade présentait de l'obnubilation intellectuelle, de la confu-

sion ; on a distrait de la mélancolie, à juste titre, toutes

ces formes morbides; sans doute, on observe chez le mélan-

colique un arrêt psychique, un ralentissement des processus

psychiques, comme chez M. N... ; mais il y a en plus de la

douleur morale. La mélancolie est avant tout le résultat

d'un trouble affectif, c'est un état de conscience doulou-

l'eux; la mélancolie est caractérisée essentiellement par un

étal de dépression ressenti douloureusement par le malade :

ce n'est pas le cas de NI N...

En présence de l'auto-analyse de M. N..., on pourrait

m'objecter qu'il s'agit d'une forme grave de neurasthénie;

une pareille opinion tombe devant l'analyse un peu

détaillée des faits; M. N... ne s'analyse que lorsqu'on l'y y

contraint, spontanément il ne se plaint pas; il assiste en

spectateur à sa propre déchéance, mais en spectateur indif-

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 451

férent, ce qui est loin d'être le cas du neurasthénique qui

s'analyse sans cesse, recherchant et trouvant des sujets de

craintes dans les moindres modifications de son état

physique et mental.

A cause du retour de plusieurs accès à peu près identi-

ques portera-t-on le diagnostic de folie intermittente ? Non,

sans doute, puisque le premier accès a laissé après lui un

état d'affaiblissement intellectuel, que cet état d'affaiblisse-

ment n'a fait que progresser dans l'intervalle des accès, que

les derniers accès sont évidemment conditionnés par cet état

de déficit.

Ces diagnostics étant éliminés, nous nous demanderons si

M. N... est un dégénéré. -

Or, si l'on interroge ses antécédents héréditaires, on ne e

trouve aucune trace d'aliénation mentale, de dégénérescence

dans sa famille. Jusqu'à son premier accès, 1\1. N... n'a ma-

nifesté aucune tare mentale ou névropathique bien appré-

ciable. Noterons-nous cependant qu'il avait un grand goût

pour les voyages et les aventures, qu'il prit part à des

excursions alpines sans prendre l'avis de sa famille, parfois

sans calculer s'il avait assez d'argent pour aller jusqu'au

bout, que son départ pour les colonies fut un peu le

résultat d'un coup de tête, il n'en prévit pas les consé-

quences possibles pour son avenir, il ne vit là qu'un moyen

de voyager et. d'aller vers un inconnu qui le séduisait ? Ce

seront peut-être là des faits suffisants pour que certains

concluent à la tare mentale congénitale. Mais en élargissant

à ce point le concept de la dégénérescence, on ne manquera

pas, je le crains, d'en trouver quelques traces chez chacun,

d'autant qu'en cette matière, tout critérium scientifique

manquant, chaque aliéniste sera disposé à considérer comme

dégénéré tout homme qui ne lui ressemble pas. Pour nous,

nous n'acceptons la notion de dégénérescence qu'en pré-

sence de grosses tares morbides qui différencient nettement

1 homme de ses semblables, en font un anormal dans toute

l'acception du mot. M. N... ne nous paraît pas rentrer dans

celte catégorie; aussi, ne pouvons-nous voir en lui un héri-

ditaire dégénéré.

Nous pouvons admettre tout au plus que l'abus d'alcool,

le paludisme, le surmenage ont créé un terrain favorable à

l'éclosion de la psychose observée; mais il ne s'agit pas là

452 ) CLINIQUE MENTALE.

de prédisposition héréditaire, il s'agit de prédisposition

acquise, de ce que l'on a si singulièrement dénommé (à tort,

suivant nous, car c'est-créer de la confusion par l'exten-

sion illégitime d'un mot) de la dégénérescence acquise.

L'étude clinique de la psychose permet d'ailleurs d'éli-

miner le diagnostic de dégénérescence. On ne peut grouper

parmi les délires des dégénérés que ceux qui sont l'expres-

sion de l'état de deséquilibre fonctionnel congénital des

facultés mentales. Or, ce n'est pas le cas ici; il n'y a rien de

commun entre un délire à base de confusion hallucinatoire

et l'état mental des dégénérés. La maladie de M. N... scinde

sa vie en deux périodes bien tranchées; son mode de vie,

son état mental, son activité intellectuelle sont changés,

modifiés, bouleversés; tout porte ici le cachet d'une

psychose accidentelle survenant chez un individu prédis-

posé, je le veux bien (mais c'est là un fait courant de patho-

logie générale qui n'a rien à voir avec une classification des

délires), mais chez lequel la prédisposition n'intervient que

comme facteur secondaire dans la genèse du délire.

Aussi, sans vouloir élargir outre mesure le cadre de la

démence précoce, je n'hésite pas à voir dans ce cas une

forme fruste de cette affection. Sans doute, je n'ai pas

assisté au début de la maladie, je ne sais pas exactement ce

qu'a été cette phase aiguë que le malade a présenté en z1890;

il semble bien cependant qu'on se trouve là en présence

d'un épisode de confusion hallucinatoire, comme on en

observe dans l'hébéphrénie.

Mais le diagnostic me paraît jugé par l'évolution et sur-

tout par les caractères de l'affaiblissement intellectuel. Ce

qui caractérise essentiellement la démence précoce, ce sont

le diminution ou la suppression totale de l'activité intellec-

tuelle, l'aboulie et l'apathie. Le malade conserve longtemps

toutes ses acquisitions antérieures, mais il les évoque diffi-

cilement ; en outre, il n'acquiert plus ou presque plus. La

déficience intellectuelle consiste en ce que le malade ne

peut plus faire usage de son intelligence; il perd l'habitude

de s'intéresser, d'assimiler, de puiser dans le capital intel-

lectuel accumulé par le passé ; aussi, perd-il de plus en plus

contact avec ce qui l'entoure, et la réserve intellectuelle, a

son tour, se rétrécit de jour en jour davantage. Il en est

ainsi parce que le malade a perdu toute activité, toute plas-

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 453

ticité cérébrale, parce qu'il a perdu les ressorts mêmes de

cette activité, les désirs, les tendances, les émotions et les

sentiments que leur satisfaction ou son contraire entraînent.

Ce sont bien là les caractères de l'état mental de 111. N...

Nous avons vu que, chez lui, c'était surtout l'activité spon-

tanée qui était le plus troublée; son observation éclaire

même, à ce point de vue, la psychologie de ces malades, car,

le déficit intellectuel de Ai. N... étant encore peu marqué, elle

nous permet de différencier les troubles primitifs des trou-

bles plus accentués que présentent les malades parvenus à

un état plus avancé de démence; il s'agit d'une diminution

des désirs, d'un état d'indifférence à tout ce qui l'entoure et

à son propre état, et d'une diminution de la spontanéité

intellectuelle; ces troubles de la spontanéité intellectuelle,

nous les avons retrouvés dans toutes les formes mentales de

notre malade, depuis la diminution de l'attention spon-

tanée, jusqu'aux troubles de l'évocation spontanée des

images qui caractérisent l'état de sa mémoire; elles se résu-

ment en cette formule : spontanément, le malade ne pense

à rien ou presque à rien, mais on peut lui faire récupérer

momentanément l'usage de ses facultés en dirigeant son

intelligence, en soutenant artificiellement son attention.

Mais, me dira-t-on, beaucoup de signes manquent ici : on

n'observe ni négativisme, ni stéréotypie, phénomènes si

caractéristiques dans la démence précoce. Je réponds à cela

que ces phénomènes ne sont que les manifestations de l'af-

faiblissement intellectuel précoce; le négativisme, les sté-

réotypies, les attitudes catatoniques ne sont que les formes

extrêmes d'un état intellectuel dans laquelle la vie mentale

se réduit à un nombre de plus en plus restreint de représen-

tations ; les troubles présentés par 111. N... ne sont pas assez

marqués pour qu'il offre le tableau complet d'un affaiblis-

sement intellectuel accentué; il ne s'agit ici que d'une forme

fruste dans laquelle les lésions ne portent que sur les élé-

ments les plus délicats de l'activité mentale.

Que pour une cause quelconque (cause que nous igno-

rons d'ailleurs), l'état de torpeur augmente, l'aboulie croît

dans des proportions identiques; sur cet état s'installent des

combinaisons d'idées assez fixes qui forment les éléments

d'un délire. Si le premier accès délirant semble avoir été

assez riche en conceptions, fugaces d'ailleurs et peu précises,

484 CLINIQUE MENTALE.

le second en a été extrêmement pauvre, le délire s'est figé

en quelques idées qui n'étaient après tout que l'interprétation

des troubles morbides ? dans cet accès aigu, la pauvreté

-intellectuelle du sujet et son inaction cérébrale se sont ma-

nifestées par la pauvreté du délire et la très faible intensité

des réactions à ce délire. Notons enfin le caractère impulsif

de l'acte qui a déterminé son internement et aussi que

M. N... semble avoir présenté, peu de temps avant, quelques

phénomènes stéréotypés.

Aschaffenburg 1 a déjà relaté des cas de ces formes frutes

de démence précoce. Il a montré que, dans certains cas où

le malade avait été considéré comme guéri, l'affection avait

cependant laissé des traces de son passage; on remarquait

de l'indifférence affective, un manque d'intérêt pour tout ce

qui se passait autour du malade, un grand défaut d'initia-

tive, certaines singularités, parfois certaines façons de

parler ou de se tenir, du mutisme non motivé, quelques

plaintes hypocondriaques. Les sujets d'Aschaffenburg

étaient des paysannes que ces troubles légers n'empê-

chaient pas de vaquer à leurs occupations ordinaires. Il est

naturel qu'ils soient d'autant plus apparents que le sujet

témoignait auparavant d'une intelligence plus développée,

et c'est le cas de M. N... Ces observations prouvent d'ail-

leurs qu'il serait bon de suivre longtemps les malades avant

d'affirmer la guérison complète de certains cas dé démence

précoce; peut-être un examen attentif permettrait-il de

dépister, dans ces cas, des signes de déficience intellec-

tuelle analogues à ceux que nous avons observés ici.

Le pronostic était-il possible dès le début de l'affection' ?

Peut-être, dès cette époque, 111. N... a-t-il présenté des

signes qui auraient pu faire penser à la gravité de l'affec-

tion, mais le diagnostic pouvait certainement être posé dès

la fin de la période aiguë.

Il est nécessaire, en effet, de pratiquer une analyse

psychologique rigoureuse avant d'affirmer la guérison d'un

malade. Or, 111. N... peut faire illusion à un observateur

non prévenu. On a pu le considérer comme guéri en 1890,

et cependant les événements ont montré que M. N... était

' AscHAFFEXHURG. Die Kalalonief ravage. 411,q. Zeilschr. f. psych,

no 54.

UN CAS DE FORME FRUSTE DE DÉMENCE PRÉCOCE. 455

un amoindri intellectuel. On constate la disparition du

délire, on croit observer que le malade n'est pas affaibli

parce qu'il répond correctement aux questions d'un examen

très superficiel; mais il importe dans ces cas d'étudier avec

soin les désirs, les émotions, les diverses réactions aux

excitations que fournit la vie à l'asile, enfin l'activité de

l'intelligence sans laquelle toute vie mentale un peu élevée

est impossible. La conception deKraepelin, en précisant les

signes précoces d'affaiblissement intellectuel, a permis de

prévoir l'avenir réservé à ces malades. Bien que NI. N...

soit en apparence normal, l'examen de ses diverses facultés

mentales nous a permis de déceler chez lui lés traits essen-

tiels de la démence précoce; dès la sortie de l'asile, l'amoin-

drissement intellectuel s'est manifesté dans ses actions; les

troubles dont il était atteint l'ont empêché de reprendre la

place qu'il occupait dans la société.

Cet état durant depuis treize ans; il n'est pas hasardé de

conclure qu'il est installé aujourd'hui d'une façon définitive.

M. N... ne pourra vivre au dehors que surveillé et dirigé; il

pourrait accepter un emploi simple, n'exigeant qu'un exer-

cice intellectuel restreint, mais toute profession demandant

des facultés mentales étendues, de la présence d'esprit, de la

plasticité intellectuelle, lui est désormais interdite. C'est là,

nous semble-t-il, un groupe de malades pour lesquels les

colonies familiales, les asiles-colonies peuvent rendre de

grands services. Les cas ne sont pas rares de ces démences

précoces qui laissent un degré d'intelligence encore assez

considérable pour être utilisé; ce sont d'ailleurs les déments

précoces qui forment la grosse majorité des travailleurs des

asiles. Tous les degrés se rencontrent en effet, depuis les

formes frustes, comme celle de NI. N..., jusqu'aux états de

démence profonde; les moins affaiblis peuvent rendre des

services, et les conditions dans lesquelles ils se trouvent

placés dans les colonies familiales et les asiles-colonies

nous semblent les meilleures à cet égard.

Je crois, d'ailleurs, que le travail peut être considéré

chez eux comme un endiguement du processus démentiel ;

car, en dehors de la lésion irréparable causée par la ma-

ladie, il se pourrait, comme je l'ai laissé prassentir, que la

démence progressive ultérieure fut le résultat de la non-uti-

lisation du capital intellectuel existant encore. C'est là une

4S6 6 ' CLINIQUE MENTALE.

simple hypothèse, mais elle mérite d'être approfondie, car

elle laisserait entrevoir la possibilité d'une thérapeutique

psychologique qui garantirait ces aliénés de la démence

profonde à laquelle aboutissent un grand nombre d'entre eux.

Des paralytiques généraux persécutés et dangereux;

Par le Dr PASTUREL,

Médecin-adjoint de l'asile de Leyme (Lot).

, « Les idées délirantes de persécution dans la paralysie

générale ne sont en général ni systématisées, ni stables. Chez

quelques paralytiques prédisposés par leurs antécédents

vésaniques à la période de début ou durant les rémissions,

les idées de persécution se manifestent avec une certaine

tenacité et peuvent même dans certains cas simuler un délire

de persécution systématisé. » Telles sont les idées exprimées

à ce sujet par Magnan et Sérieux *.

Dupré, in traité Pathologie mentale de Ballet, z1903),

écrit à peu près dans le même sens : « Les idées de persécu-

tion dans la paralysie générale sont rares, elles apparaissent

en général chez les héréditaires. Elles peuvent surtout au

début de l'affection montrer un peu plus de stabilité et de

durée que les autres conceptions délirantes du paralytique

général. Elles ne sont que passagèrement systématisées et

s'accompagnent le plus souvent d'hallucinations auditives el

visuelles. »

Ces deux citations qui d'ailleurs résument les données des

auteurs là-dessus, suffisent pour montrer que jusqu'ici les

idées de persécution ont été considérées dans la paralysie

générale comme un épiphénomène qui n'imprime aucun carac-

tère particulier à cette maladie.

On les signale mais on ne s'y arrête pas; et il ' faut bien

avouer que la plupart du temps elles tiennent peu de place

1 Paralysie générale, in Collect. Séauté, 189L

' PARALYTIQUES GÉNÉRAUX DANGEREUX. 457

dans le délire absurde et contradictoire du paralytique géné-

ral.On est habitué avoir dansce dernier unmalade ordinai-

rement débonnaire, coulent, heureux, distribuant de l'ar-

gent et des honneurs à tout le monde, n'étant désagréable

et de conduite difficile que par intermittences.

Nous avons eu l'occasion d'étudier pendant quelque temps

trois malades qui nous ont frappé justement par la forme

anormale de leur paralysie générale, c'esL-à-dire par l'exis-

tence simultanée des troubles habituels de cette maladie et

d'idées délirantes de persécution, d'une tenacité et d'une

intensité extraordinaires. Ces idées de persécution sont en

outre accompagnées de réactions violentes qui rendent ces

malades dangereux. Etant donné la rareté du fait, nous

avons crn intéressant de publier leurs observations.

Observation I. C. Pierre, menuisier, marié, âgé de quarante-

deux ans, entré l'asilele 21 février 1903. Antécédents héréditaires :

Père mort à l'âge de cinquante-cinq ans (d'un refroidissement). Mère

morte emphysémateuse à l'àge de soixante ans. Une soeur a eu un

accès de folie de la durée d'un mois pendant lequel elle a jeté

son petit enfant par la fenêtre. : 1.-I'. D'après les renseignements recueillis et d'après les dires

du malade, il n'aurait pas été atteint ni dans son enfan;e ni dans

sa jeunesse de maladies sérieuses. Il a fait cinq ans de service mili-

taire : il s'est marié à vingt-sept ans. Excès alcooliques; quant à la

syphilis il a été impossible de savoir s'il l'avait contractée, mais sa

femme a eu une fausse couche de deux mois, et deux de ses petites

filles se plaignent de maux de tête fréquents.

Il était de nature taciturne et irritable, les sentiments affectifs

n'étaient pas très développés. Il y a cinq ans il fut blessé aux

bourses eu remuant un fardeau ; depuis lors, d'après sa femme, il

changea d'une façon notable de caractère. Il fut en proie à des

idées de persécution, plaida avec son patron au sujet de ce trau-

matisme et perdit son procès. Il devint méchant, agressif, perdit

le sommeil, finalement on fut obligé de le mettre en traitement à

l'hôpital de Périgueux. Là il fut soigné par une religieuse dont

l'image est restée fixée de telle façon dans son esprit, que même

après sa sortie de l'hôpital, il la voyait et l'entendait fréquemment.

(Hallucinations visuelles et auditives).

A partir de cette époque C... a eu des périodes intermittentes

'le calme et de trouble.

Mais quinze jours environ avant son internement à l'Asile, son

délire est devenu si actif, qu'il se croyait à tout instant poursuivi

par des êtres imaginaires qui en voulaient à ses jours, et qu'il a

458 CLINIQUE MENTALE. -

cherché une nuit à se jeter par une fenêtre du 2° étage. Une autre

fois il a essayé d'étouffer un de ses enfants en le prenant par le

cou.

Le certificat d'admission le signale comme atteint du délire de

persécution et comme dangereux.

A son entrée à l'asile de Leyme, C... présente les signes physiques

et psychiques de la paralysie générale.

A l'examen somatique on constate les signes suivants : Myosis,

inégalité pupillaire ; les pupilles réagissent cependant normale-

ment. Tremblement du muscle orbiculaire des paupières, léger

ptosis, tremblement de la langue, des muscles de la face, du

muscle orbiculaire des lèvres. -

Léger embarras de la parole, accrocs surtout évidents lorsqu'on

fait parler le malade -pendant un certain temps et qu'on lui com-

mande de prononcer des mots difficiles. ,

Tremblement considérable des mains. L'écriture n'est pas trop

altérée. Réflexe rotulien aboli.

L'examen psychique montre que l'affaiblissement intellectuel est

encore peu accentué ; la mémoire semble intacte sauf quelques

lacunes ; on note une certaine puérilité dans ses propos, une

certaine satisfaction et l'inconscience de son état.

Il a été malade, il est vrai, mais maintenant il va bien, tout à

fait bien, il est tout à fait dispos. Il est d'ailleurs très intelligent

il connaît son métier à la perfection, etc.... En même temps il

- formule quelques idées de persécution; on l'a rendu malade'en le

contrariant, en lui créant des ennuis; son patron en particulier

en lui causant du dommage, en lui faisant perdre de l'argent, il

est cause qu'il a attrapé un hernicocèle (sic).

D'un autre côté, il accuse des hallucinations terrifiantes de la

vue très nettes : Vision pendant son sommeil de précipices dans

lesquels il allait tomber, de cadavres, de cercueils, etc.

Durant les premiers temps de son internement il se montre

docile, calme, de façon qu'on essaie de l'employer à l'atelier de

menuiserie.

Il y reste quelque jours, mais l'abandonne sous prétexte qu'on

ne lui donne pas les outils nécessaires et assez perfectionnés pour

travailler. Taciturne, sombre, il médite toute la journée. Il écrit

cependant à sa femme, et est même sensible aux réponses de cette

dernière et à l'envoi de photographies de ses enfants. Il demande

sa liberté à plusieurs reprises. ZD

1903. Juillet. - Devient agressif, menaçant surtout à l'égard du

médecin. Demande d'un ton impératif les clefs de la maison dont

il est le maître et le gouverneur. Il veut mettre l'ordre partout. Il

est le fils de Talma, il est Pierre leur, roi de Serbie, et en disant ces

mots il déplie des journaux qu'il a dans sa poche et montre son

PARALYTIQUES GÉNÉRAUX DANGEREUX. 459

nom imprimé. Il est le roi des rois, l'Homme-Dieu, elc... Il a en

même temps des illusions de personnes ; il voit dans un infirmier

son frère et dans la supérieure des religieuses, sa mère, etc.

Comme on n'obéissait pas aux ordres qu'il donnait en qualité

des titres dont il croit être le détenteur, il était devenu violent, se

serait jeté sur le personnel; aussi a-t-il fallu le mettre au quartier

des dangereux. Il présente des hallucinations de l'ouïe : le Dieu

suprême » lui parle dans les oreilles, il lui dit qu'il est le roi de

Serbie, qu'il est intéressé dans la maison, etc. Il entend également

une religieuse qu'il a connue autrefois pendant son service mili-

taire ; et à la suite de l'entretien qu'il a avec elle, il ressent une

grande commotion dans le corps.

Toutes ces idées délirantes persistent sur le thème que nous

venons de décrire, pendant tout le reste de l'année 1903 avec des

périodes de légère rémission pendant lesquelles C... n'est ni aussi

violent ni aussi agressif.

1903. Décembre. - Le diagnostic de paralysie générale porté- au

début se confirme par des troubles de l'écriture qui n'étaient pas

apparents à l'entrée. C... écrit des lettres où il revendique ses droits;

on lui a dit, son frère, (hallucinations de l'ouie) qu'il n'était venu

dans l'établissement qu'à titre d'intéressé, que l'Asile fait partie

delà Serbie dont il est le souverain. Il demande en outre, d'être

nourri au pensionnat, il a connu la religieuse qui y est attachée,

et il prétend même avoir eu des relations avec elle. A la visite il

est toujours dangereux pour le médecin dans lequel il voit son

ennemi, et il est prêt à tout moment à se précipiter sur lui, sous

prétexte qu'il ne fait pas droit à ses revendications.

190t Janvier. Même état, il insulte, il traite le médecin de

canaille, de maquereau, de crapule, etc; il l'attend pour lui régler

son compte ainsi qu'à ceux qui l'empêchent de sortir et d'aller au

pensionnat. On lui fait toutes les misères possibles à lui qui était

venu comme intéressé dans la maison, mais il les fera payer. Il est

jaloux de la religieuse attachée au Pensionnat, et il l'accuse de

le tromper, dès qu'il la voit il la traite de sal... de put..., etc.

Avril. D'apparence calme, et constamment plongé dans des

méditations, mais dès qu'on l'interroge on s'aperçoit qu'il n'aban-

donne aucune de ses idées délirantes. A part les troubles mo-

leurs signalés plus haut, la santé physique est bonne. Sa figure

est ordinairement congestionnée.

Observation Il. -I ? Jean, boulanger, marié, âgé de trente-

deux ans, entré à l'asile le 19 mars 1903. 0

Antécédents héréditaires. Père âgé de soixante-quinze ans,

mère de soixante trois-ans, tous les deux jouissent d'une assez

460 ' · CLINIQUE MENTALE.

bonne santé. D'après eux, pas de maladies nerveuses ou mentales

dans les ascendants.

Antécédents personnels. - Pas de maladies sérieuses de l'en-

fance ; à dix-huit ans, pleurésie droite. Il était d'un caractère gai et

affectueux, intelligent. Il a fait trois ans de service militaire;

avant d'être soldat il s'est marié à l'âge de vingt ans. A trois

enfants bien portants

Dans son métier de boulanger, il était actif, faisant bien ses

affaires. En un moment donné il fit une mauvaise spéculation sur

les farines et se ruina. Excès alcooliques de toutes sortes. La ma-

ladie mentale actuelle date de trois ans. Elle a débuté par des ver-

tiges ; le médecin de l'endroit le. soignait pour une maladie de la

moelle épinière (sic).

Il semble avoir eu à cette époque deux crises épileptiformes à la

suite desquelles il est resté huit jours sans parler et sans reprendre

conscience de son état. Il s'est remis ensuite à ses occupations

pendant trois ou quatre mois.

Hallucinations de la vue, perte de sommeil et d'appétit.

Dans les derniers temps qu'il a passés chez lui, il avait des idées

de grandeur et de richesse très nettes, il était riche à millions, il

possédait un grand nombre de châteaux et il allait les voir en

voiture dans la journée.

Idées de persécution et de jalousie envers sa femme. A menacé

de mort cette dernière à plusieurs reprises, ainsi que les autres

membres de sa famille. Aurait frappé, si on ne l'avait empêché,

toutes les personnes qui se trouvaient autour de lui. Tous ces faits

ont décidé son internement.

Le certificat médical d'admission signale F... comme atteint

d'alcoolisme chronique avec accès de délire et de furie.

A son entrée à l'Asile, l'examen nous montre que F... est bien

constitué sans stigmates physiques de dégénérescence, il a le teint

,coloré et il est d'apparence robuste. Il présente tous les caractères

d'un paralytique général. Comme troubles moteurs on note de

l'ophtalmoplégie interne, du tremblement de la langue, des mus-

cles de la face, un léger embarras de la parole, des troubles psy-

chographiques et calligraphiques, du tremblement des mains et

de l'exagération du réllexe rotulien. , ,

Du côté psychique, la mémoire parait profondément altérée;

F... ne se souvient en effet ni de l'année, ni du mois, ni du jour

courants. Mégalomanie et idées absurdes de richesses très accusées :

« Il est le Bon Dieu, il rend tout le monde immortel; son frère fait

le Ciel, le soleil avec des louis de vingt francs. Il est lui-même gêne-

ral de division, il commande 200.000 hommes, il a une fortune de

quatre-vingt millions de francs. Il s'appelle de Monl'errand, il est

honnête, lui, etc...» »

PARALYTIQUES GÉNÉRAUX DANGEREUX. 461

Il avoue de nombreux excès alcooliques, avoir eu des halluci-

nations terrifiantes de la vue, des idées de jalousie à l'égard de sa

femme, quelques hallucinations de l'ouïe mais mal définies, etc...

F... est assez tranquille et assez docile durant le premier mois

de son internement.

Avril. Il devient méfiant, méchant et grossier dans ses propos.

Un jour qu'on lui dit d'écrire à sa femme, il répond par des

insultes et prétend que le médecin entretient des relations avec

elle, que c'est une p... et qu'il l'en fera repentir, etc.

Mai, - Il se laisse approcher et reçoit même avec un certain

plaisir une lettre et des photographies que lui envoie sa femme.

Mais il ne lui a jamais répondu, ni jamais écrit à personne. A par-

tir de cette époque il n'a plus été possible de l'examiner et de le

toucher à n'importe quelle partie du corps. ,

Il en veut surtout au médecin; lorsque ce dernier l'appelle pour

lui causer il s'avance d'un air menaçant en lui disant : « Qu'est-ce

que vous voulez, canaille, assassin, propre à rien, faux, espion.

C'est un propre métier que vous faites; je m'en vais vous faire

guillotiner moi. » Et en même temps il s'avance pour frapper, le

regard mauvais et la figure congestionnée. Il s'appelle de Monfer-

rand, de Mussidan, il est roi, Dieu, souverain de France, d'Italie,

du monde entier, maître du gouvernement, et il ajoute : « Qu'est-ce

que vous avez à répondre à cela, répondez si vous l'osez. Vous

èles à moi, vous vous donnez à moi tous les jours, etc., etc. » Il

est d'ailleurs taciturne, parle peu à ses camarades, mais beaucoup

tout seul et à voix haute. Cet état reste absolument identique

durant toute l'année 1903.

1904. Janvier. Il ne s'est pas modifié sensiblement, mais F...

est devenu encore plus violent. Il est souvent sur le point d'en venir

aux mains avec les autres malades ; il s'est même battu un jour

avec l'un d'entre eux. On est obligé de l'isoler et de le surveiller

spécialement. l.

A peine jette-t'on les yeux sur lui qu'il se lève et parle de suite

de vous casser la gueule. « Je donne des ordres et n'en reçois pas. »

Cependant, il a bon appétit, il dort bien, il a bonne mine. L'em-

barras de la parole est peu accentué, mais les tremblements, sur-

tout ceux des muscles de la face, ont augmenté et acquièrent de

l'intensité lorsque le malade s'excite. - Avril. ? l\Iême état.

Observation III. C... Marie, cultivatrice, mariée, âgée de trente

un ans, entrée à l'asile le 24 janvier 1904.

Antécédents héréditaires. - Rien de précis à ce sujet. Père mort

d'accident, mère en bonne santé.

462 CLINIQUE MENTALE.

Antécédents personnels. A eu la rougeole. D'un tempérament

nerveux et émotif. A été réglée à seize ans. Mariée à dix-sept

ans et demi. A eu 5 enfants ; deux mort-nés, l'un à sept mois et

l'autre à huit mois. Depuis cinq ou six ans éprouvait des céphalées

fréquentes. La maladie mentale qui a nécessité son internement

remonte à deux ans environ.

Elle a débuté par changement dans caractère, de l'irritabilité,

l'apparition d'idées de grandeur qui la rendaient même violente.

En effet, sous prétexte que tout le monde devait lui obéir et lui

céder le pas, elle maltraitait ceux qui ne voulaient pas lui céder.

Ce sont d'ailleurs les actes de violence auxquels elle s'est livrée

au dehors qui ont nécessité son internement. Le certificat médical

d'admission ne donne aucun diagnostic précis.

A son entrée à l'asile, lors de l'examen médical, notre attention

est attirée par l'air béat et atone de la malade. Comme signes

somatiques on trouve de l'inégalité pupillaire, un léger tremble-

ment des muscles de la face et de l'orbiculaire des lèvres, un léger

achoppement des syllabes, du tremblement de la langue et des

mains.

Du côté psychique ce qui frappe tout d'abord c'est une grande

émotivité ; C... pleure facilement et rit de même d'une façon alter-

native. Elle n'est pas consciente de son état ; la mémoire est assez

bien conservée si l'on tient compte du manque complet d'instruc-

tion du sujet.

Si l'on pousse plus loin l'examen on découvre des idées absurdes

de grandeur et de richesse combinées avec des hallucinations de

l'ouïe : « On a dit en chaire qu'on allait faire d'elle une reine, une

impératrice, une présidente, elle en a le titre mais non l'éducation.»

Elle est en proie à des idées de persécution, on l'a dérangée, dit-

elle, de ses affaires, on l'a troublée, on l'a rendue malade.

Elle entend la nuit un nommé Magne, elle le sent à côté d'elle;

c'est par leur esprit qu'ils communiquent tous les deux. Cet indi-

vidu est jaloux de son mari ; c'est lui qui a indisposé ce dernier

contre elle, qui l'a poussé contre elle, etc.. On l'a paralysée; on

lui envoyait des souffles énormes par tout le corps, on la torturait

dans les membres. On a parlé beaucoup d'elle et en mal, etc. On

note encore chez elle des hallucinations' visuelles de nature mys-

tique. (Apparitions divines.)

1903. Avril. - Tantôt loquace, tantôt déprimée, elle demande

souvent sa sortie et pourquoi on la retient dans l'asile. Lorsqu'on

veut l'examiner elle s'y oppose et tourne le dos en disant qu'elle

n'est pas malade et que ses organes sont en nieilleurétatque ceux

du médecin. '

mais Dépression générale, reste la majeure partie delà jour-

née à la même place.

PARALYTIQUES GÉNÉRAUX DANGEREUX. 465

Les idées de persécution ne l'ont pas abandonnée.

Elle se plaint qu'on s'amuse d'elle, qu'on lui fait des misères tout

le temps; on la fait insulter par les infirmières, on la laisse dans

l'ordure, on ne lui donne que des habits en lambeaux, on lui pâlit

la figure, etc. En même temps qu'elle vocifère de la sorte, elle

pleure de colère.

Toutefois, nonobstant toutes ces idées délirantes, elle s'occupe

quelque peu à l'épluchage. Elle jouit d'une période de deux mois

environ de calme et, pendant ce temps, elle est de conduite assez

facile. Un jour, s'étant livrée à des actes de violence sur une infir-

mière, on dut la surveiller spécialement.

1904. Janvier. Elle est toujours très désagréable, elle s'oppose

à tout examen et frapperait si on voulait insister. Elle s'excite

lorsqu'on lui parle, et demande sa sortie en traitant le médecin

et le personnel infirmier de malhonnête, de canaille, de crapule.

On ne lui donne même pas à vivre, dit-elle, on lui regrette la nour-

riture, on la fait bredouiller comme une folle. « Sortez-moi cette

p..., de devant moi, en désignant une infirmière, elle mériterait

la guillotine, 'vous m'em... tous.» » -

Les accrocs dans la parole sont devenus beaucoup plus mani-

festes ; la mémoire lui fait défaut pour préciser certains faits;

tout cela confirme l'évolution de la paralysie générale.

Avril. - Même état ; est taciturne et s'isole des autres malades.

En résumé les observations ci-dessus montrent l'existence

de paralytiques généraux qui sortent du cadre ordinaire par

des caractères particuliers, nous voulons parler des idées de

persécution tenaces et de longue durée, accompagnées de

réactions violentes. Il n'est pas commun, en effet, de trouver

des malades aussi dangereux et pendant une aussi longue

période que F..., de l'Ous. II.

Ces idées morbides semblent être sous ladépendance,comme

l'ont d'ailleurs constaté plusieurs auteurs, notamment Ma-

gnan, Sérieux, Truelle, etc., d'hallucinations auditives ou

bien d'hallucinations de la sensibilité générale ; c'est ce que

nous voyons dans les OBs. I et III.

Dans l'Ons. II, il nous a été impossible de savoir d'une

façon précise si ces hallucinations existaient. Il importerait

aussi de savoir si ces idées de persécution chez les paralyti-

ques généraux, sont le fait, de même que les hallucinations,

d'un facteur étiologique, autre que le syndrome paralysie

générale.

464 CLINIQUE MENTALE.

Baillarger soutenait que quand il y a un délire, c'est une

maladie nouvelle qui se surajoute à la démence paralytique.

D'après Bail, les hallucinations de l'ouïe et par suite les idées

de persécution sont liées à la maladie elle-même et non à des

complications étrangères.

Magnan et ses élèves, de leur côté prétendent, que la para-

lysie générale seule, ne suffit pas pour produire des idées

délirantes de persécution ainsi que des hallucinations. Il

faudrait en plus une prédisposition vésanique (hérédité vésa-

nique ou névropathique) ou alcoolique, ou bien des antécé-

dents nets d'alcoolisme. Et à ce sujet, Truelle (Société me-

dico-psych. 31 juillet 1899), donne à l'appui de cette thèse

une statistique de 59 cas de paralysie générale, avec idées

de persécution, chez qui il a relevé 21 fois l'alcoolisme.

Sérieux, Mignot, Jamet, ne se contentent pas pour expli-

quer la genèse des hallucinations des paralytiques généraux

de la prédisposition vésanique, héréditaire, ils réclament un

autre facteur qui serait la lésion produite par la méningo-

encéphalite localisée à tel ou tel centre sensoriel. Et à ce

sujet on trouve dans les Annales ntédico psc7 ? n° Sept.-

Oct. 1902, une observation des deux premiers auteurs qui est

très intéressante.

L'observation est suivie de l'autopsie qui en révélant des

lésions irritatives manifestes surtout au niveau de la circon-

volution supra marginale et du tiers postérieur de la pre-

mière temporale semble donner raison à leur théorie. Il

s'agissait d'hallucinations surtout auditives avec idées de

persécution et de jalousie.

Dans nos observations, les hallucinations ne sont pas

aussi typiques que celles citées par Sérieux. Elles ont sur-

tout existé au début, mais ce qui domine ce sont les idées de

persécution et surtout les réactions violentes qui sont pous-

sées à un haut degré.

Ces dernières sont subordonnées chez C... et F... (Ons. I et et

II) aux idées de grandeur. Il s'est fait chez ces deux malades

l'association d'idées suivante : Ils sont rois, Dieu, souverains,

maîtres du gouvernement, et on vient les empêcher de sortir,

de faire des choses auxquelles ils ont tous les droits. De là,

suivent les injures, les menaces et les voies de fait dont nous

avons fait mention.

Nous ne croyons pas que l'alcoolisme soit capable à lui

UN CAS DE DELIRIUM TREMENS. 465

seul d'expliquer ces phénomènes morbides, car depuis un an

environ que F... et C... sont soustraits à l'action nocive de

l'alcool, ce dernier aurait eu le temps de s'éliminer.

L'OB5. I semble tout d'abord confirmer la théorie de Ma-

gnan. Le malade en question, en effet, d'après ses antécé-

dents héréditaires et personnels (idées délirantes de persé-

cution remontant à cinq ans), serait un prédisposé.

La paralysie générale survenant alors comme une maladie

surajoutée, aurait laissé persister le délire et l'aurait renforcé

même. Mais on peut dire aussi que ce délire de persécution

et de jalousie joint d'ailleurs au dégoût de travail consti-

tuait peut-être les symptômes avant-coureurs d'une paraly-

sie générale au début.

Sans vouloir imposer aucune hypothèse ni aucune théorie,

nous pensons avec Sérieux que la paralysie générale est

capable seule d'engendrer par 'des processus irritatifs en

même temps que des hallucinations multiples des idées de

persécution et de réactions violentes durables. L'hérédité

intervient sans doute ici, comme dans toutes les maladies

mentales, mais elle ne joue pas un rôle prépondérant.

Notre véritable but a été surtout d'enregistrer avec le plus

d'exactitude possible des faits observés ; nous laissons à

d'autres le soin d'en expliquer la véritable origine.

RECUEIL DE FAITS.

Un cas de delirium tremens au cours d'une

hallucinose auditive éthylique; ,

Par le D, A. PAPADAKI,

Ancien assistant à la clinique psychiatrique de Genève.

Dans une récente statistique clinique des alcooliques

traités pendant 'les années 190M902, à l'asile de Bel-Air,

près Genève, nous avons adopté la classification suivante

des psychoses éthyliques proprement dites, classification

basée sur l'observation clinique :

In Revue médicale de la Suisse romande, no 12, décembre 1903.

Archives, 2- série, t. XVII. 30

4G6 RECUEIL DE FAITS.

I. - Psychoses alcooliques aiguës : 1° delirium tremens;

2° hallucinose auditive (délire hallucinatoire aigu alcoolique

ou paranoïa alcoolique); 3° délires atypiques, et 4° délires

atypiques par suite de maladies graves concomitantes

(pachyméningite).

II. Etats démentiels : 1° psychose polynévritique de

Korsakow; 2° démence alcoolique avec ou sans épilepsie.

De cet eusemble des psychoses aiguës nous pouvons rele-

ver les deux premières comme types nettement déterminés.

Le premier, délire alcoolique du type visuel (delirium tre-

mens), est caractérisé par la prédominance des hallucina-

tions visuelles très mouvementées, de la désorientation par

rapport au lieu et au temps, mais avec conservation du

sentiment de la personnalité, de l'amnésie pour la période

du délire et une grande suggestibilité. Au point de vue

émotif, angoisse peu prononcée, plus souvent gaieté du

buveur. Symptômes physiques principaux, tremblement des

mains et de la langue pouvant se généraliser, troubles de

la sensibilité (hypoesthésie, anesthésie), et quelques trou-

bles cardiaques (tachycardie), etc. Le second, délire alcoo-

lique du type auditif (hallucinose auditive), est caractérisé

par une grande prédominance des hallucinations auditives, .

des idées délirantes très souvent (mais pas nécessairement)

systématisées, la conservation du sentiment de la personna-

lité et de l'orientation par rapport au temps, au lieu et à

l'entourage, la conservation de la mémoire pour la période

du délire. Du côté émotif, par une angoisse très violente et

une forte tendance au suicide. Relevons, en passant, que les

hallucinations auditives de cette forme sont aussi mouve-

mentées et multiples que les visuelles du delirium tremens.

Le malade, contrairement au délirant tremens, est capable

d'interpréter ses troubles sensoriels, de les systématiser

dans la grande majorité des cas, et, par ses idées de persé-

cution, arrive finalement aux idées de suicide. Cette faculté

de systématisation implique une part de jugement qui fait

défaut chez les délirants tremens.

Au point de vue physique, le tremblement est de beau-

coup moins accusé, les troubles de la sensibilité générale

font habituellement défaut.

En considérant les nombreux symptômes psychiques et

physiques de ces deux, psychoses alcooliques, on est con-

UN CAS DE DELIRIUM TREMENS. 467

duit à admettre que la désorganisation mentale est moins

profonde au cours du délire auditif que dans le délire

visuel (delirium tremens) où la confusion et l'incohérence

prédominent. Nous comprendrions ainsi que la mémoire,

pour la période de délire, doit faire défaut dans le délire

tremens, tandis qu'elle peut être intacte dans le délire

auditif.

Mais si les deux psychoses sus-mentionnées sont connues

comme entités morbides bien caractérisées, il n'en est pas

de même en ce qui concerne leur pathogénie. La question,

pourquoi chez tel alcoolique chronique apparaît le delirium

tremens, tandis que chez tel autre éclate une hallucinose

auditive, est des plus difficiles et à notre connaissance elle

n'a guère reçu de solution. L'hypothèse de Wernicke et

Bonhoffer', que le sujet plus prédisposé aux troubles sen-

soriels optiques sera atteint de delirium tremens, tandis

que l'excitabilité, par exemple des centres auditifs, facilite-

rait l'éclosion de l'hallucinose auditive, ne paraît pas tou-

jours être confirmée par la clinique. En effet, sur 12 cas

d'hallucinose auditive, nous en avons eu- plusieurs qui,

quelques mois auparavant (2-3), avaient été internés pour

delirium tremens.

Une autre hypothèse admet que le delirium tremens serait

le délire des « peu cultivés », l'hallucinose, la forme des

« lettrés ». En tous cas, le passage d'une forme à l'autre

serait rare, puisque Bonhoffer dit en avoir vu un cas. Il est

de règle que le même individu récidive dans la même

forme.

Qu'il nous soit permis d'exprimer ici notre gratitude à

notre maître, M. le professeur. Weber, d'avoir attiré notre

attention sur un cas aussi rare et de nous avoir autorisé sa

publication. La malade dont nous rapportons ci-dessous

l'observation in extenso, huit mois après un délire tremens,

fut atteinte d'une hallucinose auditive, interrompue elle-

même par un second délire tremens des plus typiques.

Voici les faits :

Berthe C..., trente-sept ans, lingère, entre à l'asile le 23 mai

1903. °

Hérédité névropathique et psychopathique niée. Depuis plusieurs

' Die akliien Geisteskraakheilen der Gewohnlieitslriaker. Iéna. 1901.

468 RECUEIL DE FAITS.

années adonnée à l'alcoolisme, consomme d'une façon excessive

toutes sortes de boissons. Prise d'un délire aigu dans la nuit du

20 mai, entre le 23 à l'asile très agitée, désorientée, en proie à des

hallucinations de la vue, avec tremblement généralisé et hypoesthé-

sie cutanée ; en un mot présentant l'ensemble des symptômes du

delirium tremens. Le 26, après un long sommeil tout rendre en

ordre et le 16 juin la malade fut transférée à l'asile pour femmes

alcooliques d'où elle s'évada plus tard. Il paraîtrait cependant que

depuis, ses excès alcooliques seraient bien moins intenses qu'au-

paravant.

Second séjour :

Le 21 janvier 1904, elle est reconduite à Bel-Air par son frère.

Elle est un peu excitée, mais bien orientée. Présente un tremble-

ment prononcé de la langue et des mains, brusquerie dans ses

mouvements, le langage un peu indistinct, la sensibilité générale

normale. Elle reconnaît les médecins ; répond aux questions posées

et fait un récit très précis en ce qui concerne la chronologie des

faits qu'elle dit s'être produits depuis le matin. Elle a passé assez

mal la nuit du 20 au 21, prise par une frayeur inexplicable. Vers

3 heures, heure habituelle du réveil de ses voisins, elle aurait

entendu à travers la paroi (très mince d'ailleurs) des propos mal-

veillants à son adresse. Son voisin qui aurait déjà tué deux

femmes, disait vouloir l'assassiner. En même temps elle aurait

entendu une violente dispute entre un homme et une femme, mais

ne les voyant pas elle admit que la dispute avait lieu dans un

petit café situé trois maisons plus loin, du même côté de la rue.

Elle s'est mise à la fenêtre, d'où elle aurait vu un attroupement et

en même temps la femme en question, toute couverte de sang,

qui cherchait à se réfugier dans une pharmacie. Elle aurait

entendu des protestations des spectateurs outrés de la lâcheté de

cet individu qui frappait une femme et en même temps une voix

« moutons chez l'autre, là-haut a ! Pendant que la foule arrivait

presque .devant sa porte, un vacarme épouvantable se faisait enten-

dre aux étages inférieurs, provenant de vitres et de vaiselles brisées,

de ferrailles, etc., avec lesquelles on battait des femmes. On l'insul-

tait, l'appelait « pute », et lui reprochait sa liaison avec X... Prise

d'une terreur formidable, elle s'est barricadée chez elle en poussant

contre la porte un gros bahut, puis elle versa du pétrole dans sa

chambre et menaça de mettre le feu à la maison si on ne partait

pas. Là-dessus les assaillants seraient redescendus avec l'intention

de revenir encore. A ce moment, saisie de l'importance de la faute

commise, persuadée qu'elle sera arrêtée et condamnée pour tenta-

tive d'incendie, elle se décida à en finir avec la vie. Au moyen

d'un rasoir, elle se fit alors plusieurs entailles profondes aux deux

avant-bras, complètement insensible à la douleur, « tellement,

dit-elle, elle était effrayée ».

UN CAS DE DELIRIUM TREMENS. 469

Vers 10 heures du matin, on pénètre chez elle et on la trouve

dans une mare de sang. On la conduit à la policlinique où on pro-

cède à la suture des tendons fléchisseurs des deux mains et à la

ligature de la radiale droite. Elle supporta l'opération pendant

quatre heures sans anesthésie, faisant preuve d'une insensibilité

absolue. De là on la dirigea sur Bel-Air. Nous avons décrit son

status d'entrée.

22 janvier. A parlé pendant toute la nuit. Ce matin, elle con-

firme entièrement ses déclarations d'hier concernant les scènes qui

ont précédé sa tentative de suicide. Le tremblement des mains et

de la langue est toujours accusé.

23 janvier. Désorientée ; se croit à la rue de C... (où elle habite),

ne reconnaît pas les médecins. Même tremblement et embarras de

la parole. Comme elle cherche à enlever ses pansements, on est

obligé de lui mettre des gants. Elle comprend encore le but de

cette opération. Entend des voix qui l'insultent. On lui présente

une pièce d'un franc, mais elle hésite longtemps avant de répon-

dre, puis elle finit par dire que c'est un franc et quart; un instant

plus tard elle reconnaît une pièce de deux francs. Apercevant un

stethoscope dans la poche d'un médecin, elle le regarde attentive-

ment et le prend pour une bête à deux ou trois pattes, qui rampe

sur l'habit du médecin. Tout d'un coup elle se détourne vivement

et cligne des yeux comme si de menus objets lui tombaient sur la

figure et elle s'exclame : « Eh ! que c'est joli cette pluie fine qui

tombe partout, cette eau qui coule ! ... mais c'est splendide, c'est

magnifique ces grésillons ! ... »

Le soir, très agitée, cherche par tous les moyens à arracher ses

gants et ses pansements, se trouve constamment hors de son lit.

Isolée la nuit du 23 au 24, s'est plutôt calmée, mais n'a point

dormi. Elle est complètement désorientée sur le temps et le lieu ;

ne reconnaît pas les médecins, leur donne des noms de ses

anciennes connaissances. Voit des bêtes voler dans sa chambre ;

ne parle plus de voix ; prend sa couverture pour un chàle dont lui

aurait fait présent le Conseil d'Etat. Le voisinage d'une plaie sup-

pure un peu. Apyrexie. La malade réussissant à enlever continuel-

lement ses gants, on se voit obligé de lui mettre la camisole de

force pour quelques heures.

25 janvier. Absolument calme pendant la nuit. A la visite du

matin, elle est mieux orientée, sait qu'elle se trouve à Bel-Air,

mais elle ne se souvient pas encore des noms des médecins. Ignore

qui l'a conduit à l'asile et prie qu'on fasse savoir à son frère où

elle est. Dans l'après-midi du même jour, la malade est parfaite-

ment claire, très bien orientée, se rappelle comment et avec qui

elle est venue à l'asile, quel médecin l'a reçue. Le tremblement a

considérablement diminué; elle ne touche plus ses pansements et

se distrait en lisant.

470 RECUEIL DE FAITS.

26 janvier. Idem. Claire, orientée, mais elle est absolument con-

vaincue de la réalité des événements hallucinés par l'ouïe, dont

elle nous a fait le récit.

27 janvier. Persiste dans ses convictions. Conserve la mémoire

des faits qui ont précédé le début du delirium tremens, mais

ignore à peu près tout ce qui s'est passé pendant celui-ci, soit du

23 à l'après-midi du 25.

Notre observation, dans sa première partie, est celle

d'une hallucinose auditive pure, puisque la malade, sous

l'influence de ses hallucinations de l'ouïe, a pu systéma-

tiser, étant assez lucide et orientée. Sa tentative même de

suicide n'était qu'une décision raisonnée, prise par crainte

de se voir condamner comme une incendiaire.

La durée de son hallucinose auditive (nous entendons la

durée des idées délirantes, les hallucinations ayant disparu

au bout de vingt-quatre heures) a été de trois jours (de la

nuit du 20-21 au 23). Au cours de cette période, et principa-

lement à son paroxysme, elle manifesta une anesthésie pro-

fonde, symptôme faisant plutôt partie du tableau du délire

tremens.

Pendant son séjour à l'asile, soit le 23, après une nuit

plus ou moins agitée, commence le délire tremens. La déso-

rientation, l'extrême agitation, les multiples hallucinations

visuelles, l'exagération du tremblement, tout cet ensemble

des symptômes cliniques du delirium tremens succède au

délire systématisé. Son agitation est telle que, pour sauve-

garder les plaies opératoires compromises par l'arrachement

continuel des pansements, malgré les gants de cuir, on est

obligé d'employer la camisole. Elle fut dans ce cas directe-

ment salutaire. C'est à dessein que nous relevons ce fait; on

pratique à Bel-Air un no-restreint aussi large que possible;

mais on n'y hésite pas à employer tel moyen de contention

indiqué par un but thérapeutique.

Après trois jours de délire aigu, elle se réveille calme et

orientée, avec amnésie des faits de la période de delirium

tremens, mais conservant par contre le souvenir intact de

toute la période hallucinatoire auditive et considérant

comme réel le contenu de son délire systématisé. Le

4 février, soit douze jours après son hallucinose auditive.

elle persiste encore dans ses convictions; mais, le z12 lé-

vrier, tout cet échafaudage s'est effondré, et Mme C...

UN CAS DE DELIRIUM TREMENS. q ï'1

taxe elle-même de « délire » l'état grave par lequel elle a

passé.

Comment expliquer cette apparition du delirium tremens

sur le terrain même d'un délire auditif ? ·

Si nous admettons que le type visuel est l'expression d'une

perturbation intellectuelle plus profonde que le type auditif r

(hallucinose), il paraît tout facile de comprendre que le

traumatisme d'une part et la grande perte de sang de l'autre

aient provoqué le délire tremens par épuisement.

Mais il semble singulier et apparemment contradictoire

qu'un malade atteint d'une affection psychique plus intense

(nous supposons que c'est le cas pour le delirium tremens),

puisse dans un très bref délai corriger toutes ses idées déli-

rantes, tandis qu'un autre, celui-ci atteint d'hallucinose

auditive, affection avec désorganisation mentale vraisembla-

blement moins profonde ne réussisse qu'à la longue (quinze

à vingt jours) à s'en débarrasser.

Cette particularité inhérente au délire auditif nous

amène par analogie à le comparer avec la paranoïa (délire

systématisé chronique), où par contre le délire se développe

tout à fait insidieusement. Aussi bien dans la paranoïa

chronique que dans le délire alcoolique du type auditif, les

idées délirantes s'implantent en dépit d'une logique plus ou

moins bien conservée. On comprend dès lors que cette

même logique ne réussisse plus à corriger ces idées déli-

rantes. En effet, chez notre malade, ce sont avant tout les

témoignages de personnes venues de dehors qui ont fait

table rase des conceptions délirantes. Dans le delirium tre-

mens, grâce au désarroi psychique, rien ne peut se fixer

quelque peu profondément, et le cerveau revenu à son équi-

libre reconnaît immédiatement les côtés pathologiques du

délire. Il est bien aidé dans ce travail par le défaut de la

mémoire.

Il serait intéressant d'étudier dans quel ordre cesse le

fonctionnement des divers sens, par exemple dans la nar-

cose ; peut-être la vue résiste-t-elle plus longtemps que

l'ouïe. Il en résulterait alors qu'une affection mentale com-

portant déjà des troubles graves des centres auditifs du

cortex laisserait encore plus ou moins intacts ceux de la

vision, tandis que le contraire n'aurait pas lieu. -

En résumé, nous avons l'impression que la différence

472 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

entre les deux types fondamentaux du délire alcoolique est

plutôt quantitative que qualitative. Le type auditif repré-

senterait la forme plus légère, le type visuel la forme plus

grave.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIQUES.

LXXVII. Importance du stimulus dans la restauration et la dé-

chéance du système nerveux; par F.-W. IIOTT. (The Journal of

Mental Science, octobre 1902.)

Tout le monde sait que le stimulus est indispensable à la géné-

ration et à la régénération du tissu et de la fonction du système

nerveux ; et aussi que l'excès de stimulation résultant de la civili-

sation et de la vie urbaine joue un rôle important dans l'étiologie

des maladies nerveuses et de la folie ; mais on le sait surtout d'une

manière générale et sans données précises. Le stimulus nerveux

est une vibration moléculaire se propageant au taux de 30 à

33 mètres par seconde. La quantité d'énergie libérée par le stimu-

lus n'est pas nécessairement proportionnelle à ce stimulus; en

fait elle est le plus ordinairement en disproportion avec lui. Le

passage du stimulus le long d'un nerf, n'entraîne pas de fatigue;

si les neurones cessent de fonctionner par suite d'un excès de sti-

mulation, ce fait est dû aux effets que la fatigue produit sur leurs

arborisations terminales à la périphérie ou dans la substance grise

centrale. Le système nerveux tout entier peut être considéré

comme composé d'unités nerveuses en état de corrélation physio-

logique, et dont chacune possède son indépendance de nutrition,

sa vie propre. Les parties vulnérables du neurone sont les expan-

sions terminales de la substance essentielle fibrillaire et conduc-

tible qui se continue à travers le corps de la cellule d'un côté avec

l'axone et ses arborisations terminales, de l'autre avec les prolon-

gements ramifiés des dendrites dans la substance grise centrale.

Tout retard apporté au passage du stimulus, se produit au seuil

du neurone.

Les courants qui représentent l'énergie nerveuse circulent conti-

nuellement dans toutes les directions, dans le système nerveux,

mais plus volontiers dans les systèmes des neurones que 1 habi-

tude a mis en corrélation ordinaire ; le courant s'établit alors avec

moins de potentiel et moins de fatigue. Sir William Gowers défi-

nit le stimulus « un processus qui détermine d'autres processus de

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 473

déaré plus grand », mais comme il le fait remarquer, il faut l'at-

tention consciente pour que l'on obtienne la série successive des

violentes décharges musculaires. Mais qu'est-ce que c'est que cette

attention ? Une concentration de la conscience sur le stimulus

venu du dehors; le siège de la conscience est dans l'écorce céré-

brale, plate-forme d'arrivee et de départ de tous les stimulus affé-

rents et efférents. La décharge musculaire est un réflexe, en par-

tie spinal, mais aussi cortical. Mais nous admettons que des impul-

sions d'inhibition partent continuellement de l'écorce cérébrale

vers les centres spinaux et exercent un antagonisme contre les

décharges réflexes tant corticales que spinales. Les expériences

de Sherrington et Hering paraissent démontrer que ces impulsions

sont transmises par les systèmes pyramidaux. Nous pourrions

alors expliquer les séries successives de violentes décharges mus-

culaires que provoque le chatouillement par exemple, par un arrêt

de la fonction inhibitive de contrôle de l'écorce. Et si nous suppo-

sons qu'il y a, normalement, un antagonisme localisé et spécia-

lisé entre les impulsions d'accroissement et d'inhibition émanant

de l'écorce cérébrale, il est clair que, l'équilibre une fois rompu, le

contrôle effectif une fois supprimé, le courant sortant d'énergie

nerveuse suivra les voies de moindre résistance, deviendra semi-

automatique et échappera au contrôle de l'attention, malgré la

persistance de la conscience. Faut-il admettre qu'attention signifie

concentration du potentiel et libération d'énergie nerveuse ? Ou

bien devons-nous penser que, dans les mouvements semi-automa-

tiques et sub-conscients, le stimulus peut entrer et sortir en n'em-

ployant que relativement très peu de potentiel ? En fait, il se peut

qu'il se fasse une accumulation d'énergie, au moyen de transfor-

mations hio-chimiques, surtout dans les tissus les plus récemment

développés et qui forment la grande masse du système nerveux

central, c'est-à-dire les neurones d'association. La résistance au

passage des impulsions se produit au point du maximum de retard,

c'est-à-dire aux points de jonction des dendrites d'un neurone

avec les arborisations terminales de l'axone d'un autre neurone.

Mais comme l'a fait remarquer Von Monakow, les neurones sen-

soriels ne sont pas en relation directe avec les neurones moteurs,

et, par conséquent, le retard se produit là où se rencontrent des

neurones d'association intercalaires. La grande masse du cerveau

est composée de neurones d'association, dont le nombre dans

lécorce cérébrale est infini. Nous devons toutefois supposer que

toute sensation consciente, si simple soit-elle, affecte l'écorce céré-

brale tout entière, laissant des traces de son passage sous lorme

oe changements moléculaires qui facilitent de plus en plus jusqu'à

un certain point le passage de la même excitation à mesure que ce

passage devient plus habituel.

L'énergie nerveuse dérive-t-elle directement de la transforma-

474 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

tion de l'énergie chimique propre à la vie des neurones ? Ou faut-

il admettre les vues, nettement opposées, de Gotch, qui soutient

que toute énergies-nerveuse vient du dehors, qu'il n'y a ni accumu-

lation ni emmagasinement d'énergie, mais seulement redistribu-

tion ? L'auteur est d'accord avec Gotch pour admettre que, sans

stimulus, il n'y a pas, ni directement ni indirectement de décharge

spontanée partant des neurones moteurs spinaux. Il accepte avec

lui la possibilité que la somme d'énergie entrante soit supérieure

à la somme d'énergie sortante ; mais il se sépare complètement

de lui sur la question de l'accumulation d'énergie.

Chaque pensée, chaque sentiment, chaque émotion, a son cor-

rélatif musculaire, mais peut n'avoir pas d'intensité suffisante

pour s'élever jusqu'à un phénomène de conscience, à l'existence

duquel l'attention contribue beaucoup. Mais il n'y a aucun rap-

port de proportion entre l'effort mental qui implique l'attention et

la masse musculaire mise en mouvement et par conséquent les

impressions cinethétiques entrantes consécutives ; de même qu'il

n'y a non plus aucun rapport proportionnel entre la surface cor-

ticale qui correspond aux mouvements spécifiques et la masse des

muscles mis en action. Nous pouvons supposer que l'attention

représente une libération d'énergie nerveuse dans l'écorce céré-

brale due à une production bio-chimique directe dans les neurones

ou à la transformation d'énergie accumulée. L'auteur entre ici

dans quelques considérations sur le mécanisme nerveux des

actes habituels, qu'il explique au moyen d'une figure. Exami-

nant ce qui se passe chez les aliénés, il fait remarquer, après

quelques indications de détail que, si nous supposons que' la

totalité du potentiel nerveux (énergie nerveuse accumulée) est il la

disposition du système nerveux tout entier, nous devons admettre

que chez les fous, ce potentiel est constamment employé tout de

travers. Il existe certainement une indépendance trophique des

neurones; mais leur indépendance anatomique est douteuse, et

leur indépendance physiologique n'existe certainement pas. Quand

nous voyons que le signe de la vie et la propriété fondamentale

de la matière vivante est la capacité de transformer de l'énergie,

nons pouvons concevoir non seulement que l'énergie entrante soit

emmagasinée, mais qu'elle soit redistribuée.

L'effet du stimulus dépend, non pas seulement de l'intensité de

l'excitation, mais aussi de l'excitabilité des neurones stimulés; et

le facteur personnel lui-même peut varier suivant l'état de santé

ou de maladie du sujet, et suivant la qualité et la quantité du

sang qui alimente le système nerveux et l'écorce cérébrale.

L'auteur recherche ensuite comment les centres supérieurs con-

trôlent la conscience dans l'attention; car l'attention, au point de

vue du stimulus, est un processus à la fois positif et négatif. On

ne peut pas concentrer la conscience sur un stimulus émané d'un

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 475

objet extérieur sans fermer la porte de la conscience à tous les

autres stimulus. Faut-il voir là une sorte d'aiguillage dans une

direction ou dans une autre du potentiel actif, ou bien l'effet néga-

tif est-il le résultat d'une opposition de courants nerveux (comme

dans l'antagonisme corrélatif des muscles) aboutissant à la pro-

duction d'équivalents thermiques et chimiques .(chaleur et CO')

enlevés par le sang ? Cette dernière hypothèse expliquerait la

fatigue qui résulte de la concentration de l'attention, surtout sur

des sujets variés. Chaque stimulus fait revivre du passé et derrière

l'onde d'association qui surgit dans la conscience immédiate, il y

a un océan non visible, qui, dans les conditions normales, est

écarté de la conscience. Dans l'insomnie, dans le délire de la fièvre,

dans certaines intoxications, celle du haschisch par exemple, les

centres supérieurs de contrôle étant fatigués ou paralysés, le pro-

cessus négatif s'efface- et le processus positif prédomine dans les

centres de la perception et de l'idéation. Souvent, ces centres infé-

rieurs étant eux-mêmes partiellement atteints, l'idéation est gro-

tesque, confuse et anormale. Ces états mentaux relèvent surtout

des stimulations visuelles, parce que la vision et ses associations

jouent dans notre vie psychique le rôle de beaucoup le plus

important.

L'auteur se place ensuite sur le terrain des faits physiologiques

et anatomiques.

L'expérimentation démontre que les nerfs sont incapables de

fatigue, ou, tout au moins, que pendant fort longtemps, ils conti-

nuent à conduire les impulsions sans aucune perte apparente d ex-

citabilité à la stimulation électrique, Les expériences de Hallibur-

ton et de Brodie sur les nerfs de la rate, prouvent qu'un nerf non

médullé est aussi dilficile à fatiguer qu'un nerf médullé, et ces

auteurs concluent que tandis que la fatigue est démontrable dans

la cellule nerveuse, on n'a jamais pu la constater dans les fibres

nerveuses de l'une ou l'autre variété. Mais ceci n'implique pas que

la fibre nerveuse ne subisse, pendant la transmission d'une impul-

sion nerveuse, aucun changement métabolique. Cela signifie pro-

bablement que ce changement est très faible, et que le pouvoir de

réparation dans le nerf sain est très grand, et que la fatigue, au

sens ordinaire du mot, n'est pas démontrable. L'auteur entre ici

dans quelques détails sur les recherches de Waller qui démontrent

que le passage d'un courant le long d'un nerf s'accompagne d'une

certaine transformation d'énergie mise en évidence par des varia-

sions électriques et des processus chimiques, et bien que la théo-

rie de Waller ne concorde pas avec les résultats expérimentaux de

Eve, Brodie et Halliburton, il estime qu'il y a beaucoup d'argu-

ments en sa faveur. S'il est vrai que nous pouvons considérer une

impulsion nerveuse comme une onde moléculaire d'irritabilité

croissante propagée le long des fibres nerveuses, les variations

476 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

électriques et chimiques déjà indiquées, sont les preuves d'une

décharge d'énergie sous une autre forme ; et l'énergie addition-

nelle de l'impul-ion et l'énergie électrique doivent se transformer

toutes les deux en énergie chimique latente de la fibre. L'énergie

additionnelle peut provenir des modifications chimiques de la myé-

line. Si elle est évidemment peu considérable dans le nerf muni de

son névrilemme, elle peut être considérable dans la fine gaine de

myéline qui recouvre le pinceau terminal de fibrilles qui pénètre

dans la substance grise, car c'est la que l'apport d'oxygène est le

plus considérable, et les relations de l'oxygène avec la vibration

moléculaire le long de la fibrille sont des intimes puisqu'ils ne

sont séparés que par une très délicate gaine de myéline, tandis

que ces relations n'existent pas quand il s'agit des fibres nerveuses

péripheriques.

Plusieurs raisons conduisent à penser que très probablement le

rôle de la myéline n'est pas seulement un rôle d'isolement :

1° Les impulsions transmises par les fibres non médullées des

tissus viscéraux et vasculaires sont, comparativement aux autres,

de faible intensité. Il ne servirait à rien à ces impulsions d'être

plus intenses et d'arriver jusqu'à la conscience; aussi ne pren-

nent-elles ce caractère que lorsque, par suite d'un état patholo-

gique, les nerfs sont anormalement irritables; au contraire, il est

essentiel que nous soyons informés du moindre contact sur la

peau, et il est concevable que nous soyons avertis de ces très

légères impressions par une énergie additionnelle provenant des

changements métaboliques de la myéline au moment où le stimu-

lus traverse le neurone.

2° L'activité métabolique des tissus nerveux peut être démon-

tré par l'examen du liquide cérébro-spinal et des extraits salins du

tissu nerveux (recherches de Gumprecht et Gulewitz, recherches

de Halliburton et de l'auteur). On peut supposer que des processus

anaboliques et kataboliques travaillent continuellement à larecom-

position et à la décomposition de la base chimique de la myéline.

3° Le développement de la gaine de myéline est en relation avec

le passage du stimulus le long du cylindraxe, car nous voyons que

les tractus entrants du système nerveux central sont myélines

avant les tractus sortants. L'étude du cerveau du nouveau-né vient

à l'appui de cette manière de voir pour des raisons que l'auteur

développe.

4° On sait que, chez un enfant né à terme, la gaine de myéline

du nerf optique n'est pas aussi bien développée que chez un enfant

né à huit mois et ayant vécu un mois les yeux exposés il la

lumière. Les expériences d'Ambron et de Held et Berger, sur les

animaux nés aveugles, ont montré que si l'on coud la paupière

d'un côté, de façon que le stimulus lumineux n'agisse pas sur la

rétine au même degré que l'autre côté, la myélination est plus

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 477 Î

avancée dans le nerf optique de l'oeil qui a été exposé à la lumière.

Cette expérience constitue une preuve directe. '

50 La réciproque est vraie : l'absence d'influx du stimulus amène.

une lente atrophie régressive, d'abord du protagone dans la gaine

de myéline, ensuite du cylindraxe. Ceci peut être constaté très net-

tement dans les nerfs, dans les racines postérieures et leurs pro-

longements intramédullaires après l'amputation d'un membre.

6° Quand le stimulus diminue ou manque, la formation de myé-

liue est insuffisante pour régénérer les nerfs. L'auteur entre ici

dans des considérations assez étendues et propres à démontrer

cette proposition. Quels sont maintenant les effets d'une stimula-

tion excessive ? Le passage des courants à travers les neurones

s'accompagne de changements kataboliques, et si les neurones ont . ·

à ce moment un équilibre de nutrition au-dessous de la normale,

les processus de désintégration l'emportent sur ceux d'intégration.

L'état de nutrition des neurones dépend de diverses circonstances.

La partie vulnérable du neurone est celle qui est la plus éloignée

du corps de la cellule et de son noyau, c'est-à-dire les arborisa-

tions terminales; c'est là que la décharge d'énergie, et, probable-

ment les processus kataboliques atteignent leur maximum. Ainsi,

dans les dégénérescences primitives, de nombreux facteurs se réu-

nissent pour produire les altérations de dégénérescence, qui débu-

tent dans les lins rameaux collatéraux et terminaux pour retour-

ner en arrière vers la cellule d'origine. Si l'épuisement ou l'excès

de stimulation peut être un facteur important dans la production ,

de la dégénérescence quand les neurones sont soumis à des

influences toxiques, cela tient probablement à ce que l'équilibre

de nutrition ne peut plus se maintenir, les processus de désinté-

gration qui accompagnent la décharge d'énergie l'emportant alors

sur ceux d'intégration.

L'action des poisons existant dans le sang peut être élective et

se porter sur certains systèmes ou groupes de neurones. Si ces

poisons sont absorbés comme stimulants pour activer des neu- z

roues dont l'état de nutrition est défectueux, ils émoussent les.

sauvegardes naturelles représentées par la douleur et la fatigue,

qui servent de signal pour le repos et la récupération d'énergie;

car la douleur est bien, comme l'a dit Sberrington, l'adjuvant

psychique d'un réflexe protecteur. Ce sont les névropathes, les psy- ,

chopathes et les neurasthéniques qui souffrent le plus des effets

de l'alcool, lorsqu'ils s'y adonnent pour recouvrer leur force ner-

veuse. Edinger a soutenu et appuyé d'expériences l'importance

d'un excès d'effort dans la production de la dégénérescence. Il a

montré que l'injection de poisons, tels que la pyridine, détermi-

nait chez les animaux qui l'avaient subie, un degré considérable

d'anémie, mais sans dégénérescence ; tandis que des animaux.

(rats) ayant subi les mêmes injections, mais placés dans une cage

478 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

à roue et soumis à un excès de travail, présentaient une dégéné-

rescence des colonnes postérieures analogue à celle que l'on ren-

contre dans le tabes, en même temps que des altérations chromo-

lytiques des cellules des cornes antérieures. Edinger soutient que

cette dégénérescence expérimentale a d'étroits rapports tant au

point de vue de sa cause qu'au point de vue de son siège avec la

dégénérescence tabétique des colonnes postérieures chez l'homme.

Les observations de l'auteur qui portent sur un grand nombre de

cas, viennent à l'appui de cette manière de voir, la syphilis don-

nant lieu à ce que Sir William Gowers appelle une « Abiotrophie ».

L'auteur termine en disant que l'expérience et l'expérimention sont

d'accord pour nous montrer que dans les maladies nerveuses, l'ex-

cès d'effort, l'excès de stimulation a une grande influence sur la

détermination du siège de la dégénéressence dans un organisme

soumis à une action toxique ou à une insuffisance de résistance

héréditaire ou acquise. Enfin il est incontestalbe que le surmenage

mental est un facteur déterminant de la production de la folie.

R. de MUSGHAVE-CLAY.

LXXVIII. Quelques caractères nouveaux de la structure intime de

l'écorce cérébrale chez l'homme ; par John TURNEP (The Journal

of Mental Science. Janvier 1903.)

Nous ne pouvons, en raison de son étendue, que reproduire ici

les conclusions principales de cet important travail, après avoir

toutefois indiqué d'après l'auteur lui-même quels sont ces carac-

tères, ce sont : 1° un réseau en chapelet qui enveloppe les cellules

pyramidales de l'écorce cérébrale et qui n'avait jusqu'ici jamais été

observé dans le cerveau de l'homme, mais seulement autour des

cellules nerveuses de quelques animaux inférieurs (cobaye et lapin)

lorsque ces animaux ont été soumis pendant la vie à l'injection de

bleu de méthylène dans les tissus. 2° un plexus intercellulaire de

fibrilles extrêmement fines, plexus qui, à la connaissance de l'au-

teur, n'a jamais été démontré jusqu'ici ni dans le cerveau de

l'homme ni dans celui des animaux. L'auteur décrit ensuite la

méthode de coloration employée, et traite les points suivants :

1° le réseau péricellulaire ; 2° la différenciation des cellules en cel-

lules pâles et cellules foncées; 3° l'origine du réseau, qui part des

dendrites des cellules foncées ; 4° la fonction des éléments collaté-

raux avec le réseau; 5° le plexus intercellulaire. Nous résumons

maintenant les conclusions dans lesquelles l'auteur montre l'in-

fluence de ces recherches sur les notions courantes que l'on pos-

sède sur le tissu nerveux.

Quelle que soit l'interprétation que l'on donne à ces faits, ils

montrent d'abord qu'il existe un système distinct de cellules cor-

ticales qui, par le moyen des dernières ramifications de leurs

dendrites sont entre elles dans un état de continuité organique par

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 479

l'intermédiaire d'un réseau péricellulaire enveloppant les cellules

pyramidales; ils nous apprennent ensuite que les élément collaté-

raux s'unissent aussi à ce réseau, en sorte que, s'ils tirent leur ori-

aine du cylindraxe des cellules pyramidales, ce qui est fort pro-

bable, et si cette union n'est pas une circonstance exceptionnelle,

ce fait implique que, d'une manière générale, l'ensemble du sys-

tème pyramidal de cellules ne fait qu'une, et que, par suite, pra-

tiquement, toutes les cellules corticales sont en continuité les unes

avec les autres.Après avoir rappelé brièvement les travaux de Hill

et de Held, l'auteur ajoute que ses observations tendent toutes à

démonlrer que la conception rigide qui faisait de chaque* cellule

nerveuse et de ses prolongements une entité individuelle (théorie

des neurones) doit être abandonnée ou tout au moins considérable-

ment modifiée (il entend parler de la théorie des neurones telle que

l'a formulée Waldeyer, laquelle insiste sur l'indépendance anato-

mique des unités cellulaires). Quanta l'interprétation de celles de

ces observation qui sont discutables, M. Turner est d'avis que les

différences de formes, de pouvoir colorant, etc., indiquent une

différence de fonction, et, puisqu'il y a de bonnes raisons d'asso-

cier les fonctions motrices au système pâle ou pyramidal, il est

aussi fort probable que les fonctions sensorielles relèvent des cel-

lules foncées, qui seraient en d'autres termes chargées de trans-

mettre les stimulotions afférentes. Si cela est admis, il en

résulte que par cette méthode, nous pouvons très nettement pré-

ciser le point ultime de terminaison du stimulus afférent, le point

où finit le courant d'entrée et où commence le courant de sortie,

et ce point sera naturellement au niveau du réseau et de la cellule

qu'il contient. Dans un autre travail l'auteur a fait remarquer que,

tandis que dans l'écorce cérébrale les cellules pâles sont beaucoup

plus nombreuses que les cellules foncées, c'est l'inverse que l'on

observe dans l'écorce cérébelleuse, ce qui concorde avec les vues

de Herbert Spencer qui considère le cerveau comme le grand or-

gane de coordination des mouvements en série, et le cervelet

comme l'organe de coordination des mouvements simultanés. Mais

si l'on admet que les cellules foncées sont conductrices des stimu-

lations afférentes, il en résulte que les courants nerveux ne se

dirigent pas toujours dans un sens unique (des dendrites vers

le corps de la cellule, puis de la cellule le long du cylindraxe),

comme on l'admet généralement. Le courant doit se diriger vers

les cellules foncées par la voie de de leurs cylindraxes, et de là

vers le réseau par l'intermédiaire des dendrites, tandis que dans

le système pyramidal, il suivra une direction naturellement in-

verse.

On pourra trouver ces conclusions peu satisfaisantes : mais il

faut se souvenir que les partisans du courant à direction unique se

trouvent eux aussi en présence de faits gênants, par exemple en

480 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

ce qui touche les cellules des ganglions spinaux postérieurs. Ces

cellules, on le sait, sont unipolaires, et. leur unique prolongement

se divise non loin de la cellule par une disposition en T. Or, ce

prolongement a tous les caractères d'un cylindraxe, surtout il

est myélisé. Et cependant, pour satisfaire aux exigences des parti-

sans de cette théorie, on nous demande d'admettre qu'une des

moitiés du prolongement en forme de,T n'est pas du tout un cylin-

draxe, mais bien une dendrite qui dans ce cas unique, présente

toutes les particularités anatomiques d'un cylindraxe. Les propo-

sition de l'auteur n'ont toutefois que la valeur de simples tenta-

tives, il le reconnait, puisque sa méthode ne parvient pas à nous

montrer les tissus compliqués qui nous avons toutes raisons

de le penser- concourent à la formation des cellules pyramidales;

et en présence des résultats importants obtenus par Apathy, chez

les sangsues, qui montrent un système compliqué de fibrilles par-

courant tout le système nerveux et paraissant traverser sans

interruption les cellules cérébrales, il faut se dire qu'il y a encore

bien des recherches à faire sur les connexions intimes des cellules

entre elles.

Mais en matière de psychologie nerveuse, si les recherches

faites sur les animaux inférieurs peuvent être des guides

utiles, on ne saurait en appliquer les résultats au cerveau de

l'homme que lorsqu'elles auront été confirmées sur le cerveau

même. L'auteur répond à quelques objections du professeur

Schûfer, et en terminant, il déclare que si sa méthode est d'une

application beaucoup moins étendue que celle de Golgi, elle a tou-

tefois le mérite, là où elle réussit de révéler beaucoup plus de dé-

tails et de mieux montrer certaines délicatesses de structure.

R. DE MUSGW1VE-CLaY.

LXXIX. Un cas de tumeur cérébrale compliqué de folie confusion-

nelle d'origine alcoolique : par H.-E. HiDWOLD, avec remarques

par Robert JONES, (The Journal of Mental Science. Juillet 1903).

Il s'agit d'une malade de 38 ans, ayant une hérédité psycho-

pathique, elle-même nettement alcoolique et qui succomba aune

« tumeur paraissant avoir son origine dans la dure-mère, se déta-

chant par un pédicule du côté gauche de la selle turcique et enva-

hissant le lobe temporo-sphénoïdal. Cette tumeur était probable-

ment de nature sarcomateuse. Le cas de cette malade montre bien

les difficultés qui accompagnent le diagnostic d'une tumeur céré-

brale. D'abord, il n'y avait ni céphalalgie, ni convulsions, et la

névrite optique, dont l'autopsie a démontré la réalité, était dou-

teuse mentalement, la malade présentait les symptômes caracté-

ristiques de la démence alcoolique (paramnéie). On s'est souvent

demandé s'il existait des symptômes psychiques constants qui

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 481

fussent communs à toutes les tumeurs cérébrales. La réponse est

forcément négative,pusique les symptômes dépendent du siège de

la tumeur, de son volume, de sa nature et de la rapidité de son

développement. Les recherches statistiques démontrent que dans

les cas de tumeur cérébrale, les troubles mentaux ou intellectuels.

se rencontrent dans la moitié de cas, le délire une fois sur douze,

et la folie très rarement. On dit aussi que les tumeurs qui empié-

taient sur les lobes frontaux s'accompagnaient de symptômes psy-

chiques très marqués, et qu'une forme spéciale de « folie raison-

nante » était associée aux néoplasmes de cette région; mais

d'autres auteurs pensent qu'au point de vue symptomatique les

lobes frontaux sont « tolérants et silencieux ».

Brault et Loeper insistent sur la valeur séméiologique de la

démence et décrivent une forme psycho-paralytique de tumeur

cérébrale, dans laquelle les troubles psychiques prédominent et

apparaissent les premiers. Cette démence consiste en une lenteur

des idées, une indolence, un état nuageux de l'intellect avec dimi-

nution du pouvoir d'attention, perte de la puissance d'effort ou de

concentration de l'esprit, lenteur des réponses. Brissaud a très

bien décrit cette forme de stupeur, au milieu de laquelle la con-

duite reste normale et régulière. Rail a donné l'instabilité comme

un symptôme de tumeur cérébrale, permettant le diagnostic diffé-

rentiel entre la tumeur et le ramollissement. Dupré et Devaux

donnent une grande importance à un psycho-puérilisme, avec

intonations infantiles, et indifférence impatiente ou obstinée.

Brissaud dit que l'intelligence et la mémoire disparaissent, mais

que le caractère n'est pas changé, et qu'il y a un simple retour à

l'enfance, sans la vivacité et la curiosité de l'enfance. On a donné

aussi comme signe des tumeurs cérébrales les impulsions, puis un

«automatisme ambulatoire ». Quand la circonvolution de Broca

est intéressée, il peut y avoir des troubles de la parole. Les tu-

meurs cérébrales doivent être différenciées de la démence sénile,

du ramollissement, de l'épilepsie, de la neurasthénie, de l'intoxi.

cation saturnine et de l'urémie, les symptômes mentaux et physi-

ques pouvant dans ces divers états pathologiques ressembler à

ceux des tumeurs du cerveau. En résumé, en ce qui touche les

troubles intellectuels et les modifications des émotions et de la

volition, il n'existe aucun symptôme qui soit caractéristique de la

présence d'une tumeur cérébrale, ni indication du siège de cette

tumeur. R. de nIUSGR.1'E-CL4S'.

LXXX. L'alcalinité du sang dans les maladies mentales; par

' Robert Pucu. (Tlee Journal of Nental Science. Janvier 1903).

Voici les conclusions de cet important mémoire :

1° L'alcalinité du sang est physiologique dans la manie chroni-

que, la mélancolie et la démence.

Archives, 2' série, t. XVII. 31

482 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

2° Elle est abaissée dans la manie pendant la période d'excita-

tion.

3° Elle subit des variations très accusées dans l'épilepsie : a) elle

est au-dessous de la normale dans les périodes inter-paroxysti-

ques, b) elle subit une diminution brusque et prononcée immédia-

tement avant le début de l'attaque, c) elle subit une nouvelle dimi-

nution quand l'attaque est terminée; cette nouvelle diminution

dépend du plus ou moins de durée des spasmes musculaires, et

du degré de l'alcalinité dans la période inter-paroxystique, d) le

sang reprend progressivement son alcalinité normale dans un dé-

lai de cinq à six heures, e) il existe une relation entre le degré de

l'alcalinité et le début des attaques; plus l'alcalinité est élevée,

moins le malade est exposé à une attaque, f) il est impossible

d'élever ou de maintenir l'alcalinité du sang dans des limites

physiologiques et pour un temps appréciable au moyen de médi-

caments. ,

4° L'alcalinité diminue dans la démence paralytique; cette dimi-

nution est constante et très accusée; elle est probablement due à

l'introduction dans la circulation de produits de dégénérescence

neuronique. Les variations observées dans cet abaissement de l'al-.

calinité dépendent du type, de la marche et de la durée de la ma-

ladie. R. de Musgrave-Clay.

LXXXI. Sur l'action de l'écorce Rolandique dans ses rapports avec

l'épilepsie jacksonnienne et la volition ; par A.-B. KINGSFORD.

(T)ce Journal of Mental Science. Juillet 1903).

Le caractère de l'épilepsie jacksonnienne sur lequel l'auteur se

propose d'attirer l'attention est la périodicité des décharges. Que

l'on regarde la lésion comme une lésion irritative ou une lésion

de décharge, elle est en tout cas chronique ; et, que nous consi-

dérions les décharges comme allant directement de l'écorce aux

différentes cellules nerveuses efférentes ou tout simplement comme

déterminant des convulsions par l'intermédiaire des systèmes

sous-corticaux, il est certain que ces décharges sont périodiques.

Comment donc des lésions chroniques causent-elles des décharges

périodiques. La réponse que l'auteur se propose de faire à cette

question lui a été suggérée par deux passages de la Psychologie

de Mercier : dans le premier passage on lit : * Les organismes ani-

maux ont une autre propriété que ne possèdent pas la plupart des

corps inorganiques : ils ajoutent continuellement à leur provision

de mouvement, et de ces additions continuelles il résulte à la fin

une surcharge. La tension du mouvement contenu atteint un

degré tel que la résistance contellante cesse d'être suffisante pour .

la maîtriser, et elle éclate, peut-être sous la provocation d'une

addition de mouvement, certainement sous une provocation

minime. »

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 483

Dans le second passage 1\1. Mercier ajoute : « On emploie dans

les arts beaucoup de machines, qui, pour leur mise en mouve-

ment, dépendent du remplissement graduel d'un vase par de

l'eau. Le vase est de telle forme et il est soutenu de telle manière

que, à mesure qu'il se remplit, le centre de gravité se déplace, de

façon que, à un certain degré d'emplissage, la verticale du centre

de gravité passe en dehors de la base du vase; celui-ci alors bas-

cule, vide son contenu, récupère la distribution antérieure

du poids, reprend sa place et recommence à se remplir. » Et

l'auteur, poussant l'analogie un peu plus loin, ajoute : « Suppo-

sons que le renversement du vase soit en partie réglé par un cor-

don élastique qui lui permette de se remplir un peu plu-- qu'il ne

pourrait autrement le faire sans basculer : nous pouvons alors

imaginer une disposition et une force élastique du cordon telles

que le vase puisse se vider un peu quand sa limite de stabilité

est dépassée et reprendre son équilibre avant que beaucoup

de son contenu ait été évacué. Supposons en outre que l'extré-

mité supérieure du cordon soit fixée à un bras de levier capable

de se rapprocher ou de s'éloigner du vase sous l'influence,

de circonstances extérieures, le vent par exemple. Une disposition

de ce genre peut être considérée comme nous représentant le

mécanisme Rolandique et son action de contrôle sur les centres

sous-corticaux de l'état normal. Supposons maintenant que

1 élasticité du cordon s'affaiblisse, il pourra très bien se faire

alors que le vase ne puisse plus se remplir au>si complètement

qu'auparavant sans qu'une partie de son contenu déborde, et

qu'un débordement excessif succède à toute inclinaison brusque

du levier vers le vase. L'action d'un mécanisme de contrôle défec-

tueux comme celui qui vient d'être décrit serait analogue à celle

de l'écorce Rolandique malade.

Cette manière de voir implique la double supposition : 1° que

les décharges qui causent les convulsions ont leur point de départ

dans les centres corticaux et représentent en fait un débordement

spontané de leur énergie continuellement accumulée; ` ? ° Que la

fonction de l'écorce Rolandiqne consiste à contrôler des décharges

de cet ordre, et, quand elle les autorise, à en déterminer la direc-

tion.

L'auteur expose brièvement les théories courantes sur l'action

défaire Rolandique et les faits qui leur servent de base; ce point

fort controversé est le champ de bataille de la neurologie. La

question de l'existence des centres moteurs ou même des centres

sensorio-moteurs repose sur les preuves fournies par les autopsies

dans l'épilepsie jacksonnienne et sur les résultats de la stimula-

tion expérimentale de ce que l'on désigne sous le nom de centres

chez les animaux supérieurs et chez l'homme. M. Kingsford rap-

pelle ensuite et discute les travaux de Sir Williams Gowers, de

'484 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

Sir Michael Foster, de Hitzig, de James Shaw, de Shewington, de

Mercier, de Charles Beevor. et conclut que l'hypothèse de l'inhi-

bition exercée par l'aire Rolandique a sur les doctrines courantes

l'avantage tout au moins de la simplicité. Il examine ensuite dans

quelle mesure cette théorie peut rendre compte des phénomènes

d'activité volontaires, ou involontaires et automatiques, et de la

paralysie qui succède à l'ablation de l'aire Rolandique, et c'est la

seconde de ces deux questions qu'il se propose d'étudier d'abord,

sa solution devant aider à résoudre la première. L'attitude des

animaux inférieurs après l'ablation, la destruction et l'isolement

physiologique des aires Rolandiques démontre d'une manière évi-

dente que la paralysie qui en résulte est purement volitionnelle.

Les faits observés sur ces animaux semblent indiquer que le

grand ressort qui met en jeu tous les mouvements est purement

automatique, mais avec un contrôle volitionnel qui va se déve-

loppant depuis le poisson jusqu'à l'homme ; que les éléments de

contrôle ou volitionnels prennent une place prépondérante chez

les animaux de l'organisation la plus élevée et chez l'homme, et

qu'ils sont proportionnels à la complexité du milieu ambiant; et

que, dans sa forme, l'élément volitionnel est entièrement inhibi-

teur, ce que l'on appelle un acte de volonté étant tout simplement

un relâchement spécial, une diminution (ou un échec) de l'inhi-

bition. Les faits tant physiologiques que pathologiques,

nous indiquent l'écorce Rolandique et les tractus pyramidaux

comme les organes par lesquels s'exercent ce contrôle ou cette

volition.

Foster et Schafer sont d'accord pour affirmer qu'il y a contesta-

bkment deux voies pour les impulsions volitionnelles, ici l'auteur

résume l'opinion de Donaldson, citée par Foster, mais pour s'en

écarter.

Il est démontré que l'écorce Rolandique exerce une fonction

d'inhibition, et que lorsqu'une lésion détermine la dégénéres-

cence des tractus pyramidaux, des contractures apparaissent par

suite d'une exagération d'activité des centres inférieurs, exagéra-

tion due à l'absence de contrôle ; on sait aussi que les animaux

privés de leurs hémisphères perdent non seulement la mémoire et

la perception, qui sont les bases principales du contrôle volition-

nel, mais aussi les mouvements acquis ; or, la destruction soit de

l'écorce Rolandique, soit des pyramides, prive l'animal de toutes

les actions résultant de l'éducation. Et ceci amène naturellement

à la question du rôle joué par la volition dans l'exécution du

mouvement que l'auteur étudie longuement.

On pourrait supposer que la destruction d'une partie du sys-

tème Rolandique et la perte du contrôle volitionnel qui en résulte

laisseraient aux centres inférieurs une plus grande liberté d'action,

aboutissant à des mouvements, ou même à des convulsions; mais

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 485

on ne modifie pas un fragment d'une organisation en laissant le

reste intact. t.

D'abord il y a l'effet du choc, qui est proportionné au volume et

à l'importance de la partie enlevée, et dont les effets portent sur-

tout sur les plus compliqués des mécanismes associés à la partie

mutilée, tandis que les mécanismes plus simples se rétablissent

plus vite et plus complètement. Ainsi l'opération peut modifier

d'une façon permanente, et dans un sens défavorable, les rapports

qui existent entre les centres sous-corticaux et les centres spinaux.

D'autre part, la suppression d'une force constante de contrôle

n'aboutirait pas à une action spasmodique, mais à un déborde-

ment chronique d'énergie ayant sou origine dans les mécanismes

les plus inférieurs et les moins atteints.

Enfin dans notre hypothèse c'est surtout l'accumulation d'éner-

gie dans les centres sous-corticaux qui serait entravée. Si l'on

pouvait, par d'autres moyens que les moyens chirurgicaux., sus-

pendre ou diminuer l'action de contrôle de l'écorce, avec un mini-

mum de perturbation des centres sous-corticaux, c'est alors que

l'on pourrait s'attendre à voir apparaître des actes automatiques;

et c'est d'ailleurs ce qui se produit, dans les automatismes, sou-

vent si compliqués, qui suivent les attaques de petit mal, et qui

accompagnent le somnambulisme et l'hypnotisme. L'auteur se

propose d'examiner ensuite comment son hypothèse concorde

avec les traits principaux de l'épilepsie. Après cette étude assez

longue, il recherche jusqu'à quel point la théorie de l'inhibition

peut servir à expliquer quelques-uns des principaux phénomènes

des états post-épileptiques.

L'écorce Rolandique est l'organe préposé à l'exécution de la vo-

lition et son influence sur le mouvement est semblable à celle des

mains du cocher sur la marche de la voiture : elle fait tout, en ce

qui touche la direction du mouvement, rien en ce qui touche

l'énergie à lui communiquer.

Passant à l'étude de l'effort volitionnel, l'auteur le considère

comme l'accompagnement mental d'un frottement nerveux (s'il

est permis d'employer cette expression) déterminé par un élan de

courants nerveux -provenant de plusieurs territoires associés -

vers un centre, suivant des voies qui ne sont encore que peu prati-

cables. L'essence de la volition avec effort paraît être une suspension

d'action par l'intermédiaire du système pyramidal. L'auteur en

terminant examine quelle influence sa théorie peut avoir sur le

traitement. 1 R. DG ! \lUSGIIAVE-CL.1Y.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

XV. Traitement de la névralgie de la face par les courants gava

niques; par M. VERNAY {Lyon médical, nOS 44-46.47, p. 616-684-722.

novembre 1901).

M. Vernay publie une étude sur le traitement des névralgies de

la face par l'action de l'énergie électrique avec plusieurs observa-

tions concluantes à l'appui. Les conclusions auxquelles il arrive

peuvent se résumer ainsi :

1° Le traitement électrique de la névralgie du trijumeau est un

traitement curatif sur lequel on peut compter, aussi bien dans les

cas récents ou bénins que dans, les cas graves ou invétérés, si on

le pratique avec une intensité et une durée suffisante.

2° Le courant choisi sera le courant galvanique, dit courant

continu. L'intensité sera de 40 m A au moins et pourra s'éle-

ver suivant les cas jusqu'à 50, 60, 70 m A et même plus, pendant

une durée de trente à soixante minutes.

3° L'intensité nécessaire doit être employée dès le premier jour

du traitement qui doit être de dix, vingt, trente jours de suite

suivant les cas, alors même qu'une amélioration notable se serait

produite dès le début du traitement.

4° L'électrode faciale de 150 centimètres carrés, au moins, doit

être appliquée sur tout le territoire du trijumeau depuis le sommet

du front jusqu'au maxillaire inférieur, alors même que la névral-

gie ne porterait que sur une seule branche. L'électrode indifférente

sera au moins de 200 centimètres carrés pour une intensité de

40 m A, de 300 ou 400 centimètres carrés pour des intensités plus

élevées.

5° Le traitement est d'une innocuité absolue, si. on a soin de gra-

duer progressivement le courant'au commencement et à la fin de

la séance, d'où la nécessité d'un bon rhéostat. Une variation

brusque du courant peut occasionner des vertiges ou une syncope.

6° Les intensités élevées seront très bien supportées, si au com-

mencement de la séance, on dépasse 5 à 6 m A l'intensité voulue

pour le reste de la durée de l'application.

7° Le pôle actif sera de préférence le pôle positif; en cas d'in-

succès on devra employer le pôle négatif surtout s'il existe des

troubles trophiques.

8° L'action du courant est due probablement à des effets élec-

trolytiques atteignant aussi bien les terminaisons périphériques

que le tronc et les racines du nerf affecté. ' C-

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 487

XVL Sur l'emploi pratique de la suggestion hypnotique; parWil-

liam-Lee IIov=1RD. (The l7ei ? Yoi-li Médical Journal, 48 avril 1903.)

Après quelques considérations sur l'hypnotisme et la sugges-

tion, l'auteur arrive aux applications pratiques, qui sont limitées,

mais précieuses. La suggestion hypnotique est surtout utile pour

faire le diagnostic différentiel des troubles purement fonctionnels

du cerveau et des lésions anatomiques de cet organe; et il ne faut

pas oublier que même dans les lésions organiques, si elle échoue

contre la lésion elle-même, elle peut souvent atténuer des symp-

tômes pénibles. Elle est sans effet, au moins sans effet durable,

contre les douleurs ataxiques, rhumatismales, névralgiques. Mais

le terrain de choix est manifestement l'hystérie; il est peu de

symptômes de cette maladie que la suggestion hypnotique ne

puisse amender dans une grande mesure. R. de Musgrave-Clay.

XVII. Le traitement des aliénés dans la clientèle privée; par F.

Savary-Pearce. (The New-York Médical Journal, 25 octobre 1902.)

L'auteur résume son travail dans les conclusions suivantes :

« Pour nous tous, il est indispensable de modifier ce que nous

savons sur les folies aiguës : c'est un enseignement à iefaire. Il

faut, dans la clientèle privée, instituer le plus tôt possible un

traitement qui dirige le malade vers la guérison, et cela bien

longtemps avant de penser au traitement par l'internement dans

un asile, sans méconnaître la valeur de ce traitement dans les

folies chroniques et dans les cas de manie ou de mélancolie à

forme homicide.

« Les folies aiguës de caractère hybride, c'est-à-dire celles qui

se rattachent à deux ou plusieurs types, sont celles dont le pro-

nostic est le plus favorable; il faut, par conséquent, différer le

plus longtemps possible l'entrée des malades de ce genre dans un

asile; et, cela surtout, si l'hystérie est un des éléments constitutifs

delà folie.

« Le devoir du médecin est de vaincre la terreur que les aliénés

inspirent aux personnes étrangères à la médecine et d'entretenir

l'espérance que le traitement à domicile sera efficace comme dans

les autres maladies médicales. R. de Musgrave-Clay.

XVIII. Trépanation dans un cas d'épilepsie, gliome kystique ; par

M. LANNOIS (Société médicale des Hôpitaux de Lyon, 18 avril

1902.

Le malade présenté par M. Lannois est un épileptique chez

lequel on a pratiqué une trépanation cranienne en raison d'une

hémiplégie survenue après des crises. L'observation peut se résu-

mer ainsi :

488 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

Epilepsie généralisée, paraissant avoir présenté tous les carac-

tères de l'épilepsie dite essentielle, ayant débuté à l'âge de trente

et un ans chez un homme ne présentant aucune tare nerveuse anté-

rieure ; hémiplégie gauche post-critique survenue dix ans plus

tard. Trépanation, gliome kystique de la région motrice droite,

amélioration. M. L... fait remarquer que malgré la présence d'une

grosse lésion de la zone motrice droite, les crises ont toujours gardé

l'allure de grandes attaques généralisées sans jamais présenter le

caractère jacksonien, sauf dans les crises provoquées par l'inter-

vention chirurgicale. Delà discussion provoquée par la communi-

cation de M. Dieulafoy à l'Académie de médecine, il ressort ce fait

que les tumeurs ne peuvent servir au diagnostic des localisations

cérébrales', et cette autre conclusion qu'étant donné un cas d'épi-

lepsie jacksonienne, on est autorisé .à aller voir s'il existe une

lésion dans la zone correspondante, mais qu'il ne faudra pas trop

s'étonner si on ne trouve rien.

Dans les cas, où aux convulsions jacksoniennes simples, on voit

se joindre une paralysie plus ou moins permanente, les probabi-

lités en faveur d'une localisation précise sont beaucoup plus

grandes et l'intervention a plus de chance de réussir. C'est le cas

de l'observation présentée par M. Lannois.

L'opération semble devoir être favorable au malade puisqu'elle

a permis d'enlever la lésion causale. Le résultat immédiat est très

bon puisque les crises ne se sont pas renouvelées depuis deux mois

alors qu'elles revenaient tous les huit ou dix jours auparavant.

M. Lannois fait remarquer en outre la tolérance du cerveau

pour les tumeurs ou mieux la lenteur avec laquelle celles- ci progres-

sent. Pendant dix ans le gliome du malade en question, malgré sa

situation en pleine zone motrice, a donné seulement des crises et

ce n'est qu'au bout de ce temps que s'est montrée l'hémiplégie.

L'examen histologique pratiqué par M. Paviot montre que la

cavité représente, par son contenu fluide, la transformation d'un

gliome dont la totalité n'a certainement pas été enlevée. Pour

M. Paviot, beaucoup de kystes du cerveau sont sans doute des

gliomes kystiques à une seule cavité, dont on ne peut connaître la

vraie nature que par l'examen microscopique. G. G.

XIX. Guérison de la méningite tuberculeuse à sa période prodro-

mique par l'emploi répété des vésicatoires sur le cuir chevelu;

par le prof. R. Tripier (Province médicale, n° 29, 19 juillet 1903).

M. le professeur R. Tripier rapporte six observations de ménin-

gite tuberculeuse à le période prodromique, guérie* par l'applica-

tion répétée de vésicatoires sur le cuir chevelu.

Ces différents cas présentaient les symptômes suivants, relevant

' Opinion ancienne, soutenue naguère par Charcot.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 489

selon toute probabilité, d'après l'auteur, d'un début de méningite

tuberculeuse :

Troubles généraux communs à diverses maladies (perte de

l'appétit, état saburral de la langue et constipation, nausées et

quelquefois vomissements, un peu de fièvre avec des températures

irrégulières ; amaigrissement avec pâleure de la face et dépérisse-

ment ; troubles du côté de l'encéphale ; changement de caractèr

de la manière d'être habituelle; céphalée, crainte de la lumièi

allant jusqu'à la photophobie).

Ces cas n'ont jamais présenté les moindres contractures ou p £

résies indiquant la méningite confirmée.

Interprétant ces faits, M. le professeur R. Tripier admet qu'c

peut supposer l'existence d'une infection autre que la tubercule :

et que le diagnostic de méningite tuberculeuse repose dans ces c.

sur des probabilités ; mais il pense que, si le traitement qu'il pr

conise dans la période prodromique réussit dans tous les cas où '.

méningite tuberculeuse semble exister, on est en droit d'admettre

qu'il se produit sous l'influence du traitement, la guérison d'une

affection considérée aujourd'hui comme à peu près incurable, à la

condition d'agir à une période bien déterminée avant qu'il n'y ait

la moindre trace de contracture ou de parésie.

L'action révulsive des vésicatoires suffirait pour faire avorter des

lésions assez légères pour pouvoir rétrocéder. Ce n'est que l'obser-

vation de nombreux cas qui décidera dans quelle mesure on peut

compter snr le traitement préconisé par M. le prof. Tripier.

En somme, si on se trouve en présence d'un malade dont les

symptômes semblent se rapporter à la période prodromique de la

méningite, on devra appliquer chaque jour sans tarder une ban-

delette vésicante sur le cuir chevelu préalablement rasé. La pré-

sence de l'albumine dans l'urine ne doit pas être une contre-indi-

cation'. 1. G. C.

XX. Quelques remarques sur le traitement chirurgical de la folie ;

par DAMER llanmsov. (7'/t6./o : <r; ! tt<o/'Me) : <a< ? CHCc, oct. 1902).

Intéressant travail accompagné de plusieurs observations détail-

lées. R. AI. C.

XXI. Soins et traitement des personnes dont l'esprit est troublé

dans les maisons particulières et dans les « Nursing Homes »;

par Ernest W. WU1T1 ? (Tice Journal of Mental Science. Avril 1903.)

Dans ce travail l'auteur étudie avec sagacité les moyens les plus

' Très Souvent et avec succès ilans nombre de cas, nous faisons des

applications répétées de vésicatoires sur le crâne où nous donnons des

douches ou pluie, quotienuemeut sur le crâne, dans les cas de ménin-

gite ou de méningo-encéphalite chroniques. (B.)

490 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

pratiques et les plus utiles de venir en aide aux malades dont l'es-

prit est troublé. R. 1L-C.

XXII. Remarques sur le traitement des cas aigus ; par R.-R. LI E-

PER. (titre Journal of Mental Science. Octobre 1903 )

L'auteur rapporte plusieurs cas propres à démontrer, comme il

en a le désir, des difficultés qui entourent le traitement des cas

aigus ; souvent on attribue injustement la guérison à un médica-

ment qui n'en est pas l'auteur, ce qui contribue à lui faire attri-

buer une valeur purement fictive. La hâte que l'on met à conclure

en faveur de tel ou tel médicament, de tel ou tel traitement n'est

pas l'un des moindres obstacles à la solution des problèmes déjà

si difficiles de la psychiatrie. Il. de 11u=cwvr-Cnar.

XXIII. Le sommeil dans ses rapports avec les narcotiques dans le

traitement des maladies mentales; par Henry n.\Y<ER, (The

Journal of Mental Science, juillet 1902).

L'auteur se demande si le sommeil provoqué par les narcotiques

est aussi réparateur que le sommeil naturel, et si le soulagement

du symptôme insomnie n'est pas trop chèrement acheté par un

procédé nuisible à d'autres égards. Il entre dans quelques consi-

dérations, sans vouloir toutefois aborder la question des théories

du sommeil, sur la nature du sommeil et ses rapports avec d'autres

états d'inconscience. Un point sur lequel tous les observateurs

sont d'accord c'est l'anémie artérielle du cerveau dans l'état de

sommeil ; elle est consécutive à la dilatation générale des vais-

seaux périphériques (spécialement de ceux de la peau) qui pré-

cède le sommeil. Le résultat de la comparaison laite par l'auteur

entre le sommeil et d'autres états d'inconscience se résume ainsi :

dans le sommeil il y a inconscience sans insensibilité; dans le

coma narcotique, il y a inconscience et insensibilité; dans l'état

mesmérique (l'auteur préfère ce mot qui ne précise rien à ceux

d'hypnose ou de sommeil hypnotique) il y a trouble à la fois de la

conscience et de la sensibilité. Il y a donc là trois états psychiques

qu'il faut se garder de confondre. Dans le sommeil naturel, toutes

les fonctions, la conscience exceptée, conservent leur activité. Dans

le sommeil dû aux narcotiques, la nutrition est très sensiblement

troublée. On connaît l'action de l'opium et de ses alcaloïdes sur

les sécrétions, et les résultats de leur emploi prolongé sur l'orga-

nisme : on sait aussi que le réveil du sommeil provoqué par

l'opium est loin de s'accompagner d'une sensation de repos. Le

chloral, le sulfonal, le trional, ralentissent et affaiblissent la res-

piration, abaissent la pression sanguine, affaiblissent le contrôle

vaso-moteur et abaissent la température du corps. Le réveil est

d'abord agréable, parce que le malade est encore sous l'influence

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 491

du médicament, mais s'accompagne au bout de quelclue temps

d'une grande sensation de dépression. Le contraste entre les effets

du sommeil et de la narcose sur la cellule nerveuse est particu-

lièrement frappant, et ici l'auteur rappelle les travaux de

Hodges et de Hamilton Wright. L'ensemble de ces considéra-

tions démontre que l'action des narcotiques sur le corps humain,

et spécialement sur le cerveau, est loin de favoriser l'assimilation,

qu'elle s'oppose directement à l'élimination des matériaux de

déchet, et à la réparation nutritive, et cela surtout dans les tissus

nerveux les plus importants du cerveau. Si donc les narcotiques

donnent des résultats favorables, dans certains cas et d'une cer-

taine manière, ce n'est pas en agissant directement dans le sens

du remontement de la nutrition, mais par une voie indirecte, en

soulageant un organe ou un tissu au détriment d'un autre, comme

on ampute un membre pour sauver une existence. Il faut savoir

en le donnant que l'on accepte un met, en vue d'un bien qui en

résultera. Or ce principe est juste en tant que l'organe sacrifié est

de valeur moindre, et l'organe protégé de valeur supéi ieure ; mais,

en matière d'aliénation, c'est précisément l'organe que l'on com-

promet dont la valeur est infiniment supérieure. Le principe du

mal pour le bien ne doit donc être appliqué que le plus rarement

possible et avec une extrême réserve. Quels sont donc les cas où

cette application est légitime, et qu'elle en sera la forme ? Sur

l'appréciation des cas, les opinions varient à l'infini ; sur le mode

d'emploi l'auteur est arrivé depuis longtemps à écarter complète-

ment de la pratique l'emploi des doses narcotiques, à n'employer

que rarement les agents pharmaceutiques, exclusivement à la dose

simplement hypnotique, et seulement sous la forme de bromures

ou d'une petite quantité d'alcool. Quand on substitue l'exercice

aux hypnotiques, on- doit diminuer dans une mesure surprenante

le nombre des malades agités et bruyants pendant la nuit.

La conclusion générale de l'auteur, c'est que l'emploi des narco-

tiques doit être à peu près complètement supprimé de la théra-

peutique des asiles : c'est ce qu'il a fait personnellement depuis

longtemps, sauf des exceptions rares, si rares qu'il pourrait compter

sur ses doigts les doses prescrites. Il ne faut avoir recours à eux

qu'avec autant de réserve et de répugnance que l'on en a pour les

moyens mécaniques de contention'. R. de MusGRAVE-CLAY.

XXIV. De l'action thérapeutique de la bromipine; par le D'' DE

Ioo[\. (Bull. de la Soc. de méd. ment, de Belgique, 1903, n° 113).

On sait que la bromipine est une combinaison de brome avec

'Voir dans les Archives de Neurologie, 1903, t. XVI, p. 313, la discus-

sion au Congrès de Bruxelles sur le Traitement de l'insomnie dans les

mal. ment.

492 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

l'huile de sésame. Elle existe sous deux formes de concentration

différente, à 10 et à 33 1/3 p. 100 ; la première solution est la plus

employée : et se prend en général dans du lait ou de la bière.

L'auteur considère la bromipine comme un succédané précieux

du bromure de potassium dans le traitement de l'épilepsie. Elle a

été parfaitement tolérée dans tous les cas où il l'a administrée ; elle

aurait en outre l'avantage de ne pas provoquer d'éruptions acnéi-

ques et de relever la nutrition si souvent compromise des épilep-

tiques. La bromipine donnerait également de très bons résultats chez

les neurasthéniques et les névropathes de tous ordres, atteints de

troubles nerveux divers relevant de la médication bromurée.

Les doses qu'il convient d'employer dans le traitement de l'épi-

lepsie de l'adulte sont de 2 à 5 cuillerées à soupe de la solution à

10 p. 100. Dans le traitement des états névropathiques simples on

peut en général se contenter de prescrire une à deux cuillerées à

soupe par jour du médicament. G. Deny.

XXV. Note sur la privation de sel dans le traitement de l'épilepsie

par les bromures ; par L. PIERCE CLARK. (The New-York Medical

Journal. 10 Janvier 1903).

L'expérimentation a démontré que dans les tissus, les bromures

peuvent remplacer les chlorures. Déjà en 1868, Hughiinps Jackson

avait préconisé ce qu'il appelait la nutrition substitutive; mais ce

sont les travaux de Toulouse et Richet qui ont remis la méthode

en honneur il y a trois ans.

En privant les épileptiques de chlorure de sodium on peut ré-

duire d'un tiers au moins la dose des bromures, dont en diminue

du même coup les effets fàcheux sur l'organisme; résultat d'autant

plus appréciable que la médication bromurée a souvent besoin

d'être continuée pendant des années. On peut dire d'une manière

générale que les avantages que l'on retire du régime hypochlo-

ruré associé aux hommes dans le traitement de l'épilepsie sontles

suivants : absence de bromisme, d'irritation gastrique, de consti-

pation, et de cette hébétude mentale si commune dans les cas

anciens de sédation par les bromures. Il. de MUSGRAVE-CLAY,

XXVI. Des rémissions thérapeutiques de la Paralysie générale; par

M. DEVAY (Lyon médical, 15 et 22 février 1903.)

M. Devay dans ce travail apporte de nouveaux faits en faveur de

l'influence du traitement spécifique sur' la marche de la paralysie

générale. Ce sont de nouvelles preuves, dit l'auteur, qui viennent

à l'appui de l'opinion qui tend à admettre la nature syphilitique de

la paralysie générale. Sur 42 malades traités à l'Asile, il retient

23 cas qui ont été modifiés, améliorés ou transformés. Ces

23 observations sont divisées en quatre groupes : 111 groupe : Atte-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 493

nuation ou disparition des signes somatiques, amendement très

incomplet des troubles intellectuels : trois observations. 2e groupe :

Intelligence reste affaiblie mais atténuation ou disparition com-

plète des signes somatiques : 5 observations. 3e groupe : Intelli-

gence redevient complète (conscience, attention, mémoire.) Mais

persistance de quelques troubles physiques : 5 observations.

4" groupe : Disparition absolue des symptômes physiques et men-

taux, rechutes cédant sous l'influence de la reprise du traitement :

10 observations. Le traitement consistait en injections de calomel

avec l'iodure de potassium à haute dose.

Dans ces 23 observations de paralytiques généraux modifiés,

améliorés ou guéris du moins temporairement, la syphilis doit

être incriminée dans une proportion de 90 p. 100. L'auteur croit que

les rémissions spontanées sont l'exception, mais qu'elles sont la

règle grâce au traitement.

En somme, M. Devay conclut que la paralysie générale n'est ni

alcoolique, ni arthritique, ni toxique en général, elle est syphili-

tique et non parasyphilitique. L'alcoolisme, l'arthritisme, l'héré-

dité nerveuse ou vésanique, les excès divers, le surmenage, le

traumatisme, les maladies infectieuses ne sont que des causes

occasionnelles. Le traitement spécifique intensif doit être appliqué

hâtivement. 11 ne doit pas être rejeté, même en présence de para-

lysie ancienne datant même d'un an. Le traitement sera d'autant

plus prolongé que l'affection sera plus ancienne. Si, après six

mois, le traitement a été sans résultat, en général, il ne donnera

rien. Il doit être continué après la guérison. G. Carrier.

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE

Séance du 5 mai. Présidence de M. DÉJERINE.

Méningite aiguë syphilitique cérébrospinale. Cytologie du liquide

céphalorachidien. Autopsie.

MM. SiCARD et Roussy. - Nous rapportons un cas de méningite

cérébro-spinale syphilitique, à évolution aiguë, qui se prête à

quelques considérations intéressantes d'ordre clinique, cytologique,

histologique et thérapeutique.

Cliniquement, il s'agissait d'un syndrome méningé aigu, débu-

tant sept mois après le chancre, et qui entraîna à sa suite une

hémiplégie terminale.

494 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Histologiquement, on notait avant tout une infiltration embryon-

naire généralisée à toute l'étendue des méninges molles vas-

culo-conjouclives aussi bien cérébrales que spinales, et secondaire-

ment existait une thrombose partielle d'une des sylviennes.

Cytologiquement, la formule dès le début lymplrocito.polynu-

cléaire, et polynucléaire presque exclusive dans lasuite, avec liquide

céphalo-rachidien dépourvu de germes, témoignent de l'intensité

de l'attaque du virus syphilitique sur les méninges.

Enfin, l'échec thérapeutique avec des doses moyennes de mer-

cure, nous montre que dans ces cas de secondarisme précoce du

système nerveux, plus encore qu'au cours du tertiarisme, il faut

s'adresser à une cure intensive et longtemps prolongée.

Névrite professionnelle chez un cocher.

MM. RAYMOND et Courtellehont présentent un malade atteint de

polynévrite des deux mains et de synovites des poignets. Parmi

les signes observés, la réaction de dégénérescence, l'hypoesthésie

à disposition périphérique, l'existence d'un point douloureux à la

pression sur le trajet des nerfs ne laissent aucun doute sur la légi-

timité du diagnostic. Cet homme est obligé, par sa profession de

cocher, de maintenir sans cesse, à l'aide de ses deux mains, les

rênes fortement tendues. C'est au surmenage qui résulte de cet

effort journalier qu'est due la paralysie. Le traumatisme, ici, s'est

produit par un double mécanisme : d'une part, action exercée sur

les nerfs de la main par la contraction énergique et prolongée des

muscles de la main et de l'avant-bras, et d'autre part compression

des mêmes branches nerveuses par les synovites professionnelles.

R. et C. insistent, en terminant, sur les signes qui, dans un cas

comme celui-là, permettent de distinguer l'acroparestésie vraie des

pseudo-acroparesthésies symptomatiques de névrites périphériques.

Sur la teneur en sucre du liquide céphalo-rachidien.

l\I111. LANNOIS et BOULUD (de Lyon). - Le corps réducteur qui

existe dans le liquide séphalo-rachidien est bien du glycose car il

donne avec la phénylhydragine une osazone caractéristique.

Les auteurs ont fait le dosage de ce sucre un certain nombre de

fois (17 cas) et ont trouvé un chiffre très constant. La teneur en

sucre du liquide céphalo-rachidien varie entre 0 gr. 40 et 0 gr. 50

p. 1000; elle est la moitié du taux du glycose dans le sang et le

tiers du glycose du sérum sanguin. Elle confirme que le liquide

céphalo-rachidien est un liquide de sécrétion et non de transsu-

dation.

Le sucre du liquide céphalo-rachidien joue probablement un

rôle dans la nutrition des éléments nerveux avec lesquels il est en

contact.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 49&

Le chiffre peut subir des modifications dans certains états patho-

logiques. Comme on pouvait s'y attendre il est augmenté dans le

diabète où on a trouvé 1 gr. 22 et 1 gr. 6 p. 1000, soit 3 et 4 fois

plus que dans le liquide céphalo-rachidien normal.

Tremblement à forme de sclérose en plaques occasionné par une

ostéo 'a1'thl'opath ie du coude. ! \nI. Brissaud et IL GRENFT présentent une malade atteinte d'un

tremblement localisé au membre supérieur gauche et ayant tous

les caractères de celui delà sclérose en plaques. Mais il n'y a aucun

autre signe de sclérose en plaques ; il n'y a non plus aucun

stigmate d'hystérie. Au moment où le tremblement est ap-

paru, le malade ressentait au niveau du coude gauche de vives

douleurs liées à une ostéo-arthropathie. probablement syphilitique

et dont les symptômes sont nets actuellement.

Névralgie du trijumeau traitée par les injections de cocaïne

loco dolenti.

Un malade atteint de névralgie faciale ; ce malade a subi, il y

a quatre ans la résection du nerf maxillaire inférieur; il a eu, à la

suite de cette intervention une amélioration de dix-huit mois ; les

douleurs reparaissant, on pratiqua une série d'injections de 1 centig.

decocaïue an point douloureux; on obtint. une cessation com-

plète des douleurs pendant un an; de nouvelles crises se sont

reproduites, qui cèdent actuellement à une nouvelle série d'injec-

tions. Il est intéressant de signaler cette heureuse action des injec-

tions de cocaïne. Il faut aussi signaler ce fait que la sensibilité,

abolie dans le domaine du nerf maxillaire inférieur après l'opéra-

tion, reparait en ce moment, bien que l'on ait fait une résection,

et non une simple section du nerf.

Perte radiculaire de la perception sléréognostique.

MM. DÉJERINE et CIIIRAY. Il s'agit d'une femme de quarante

ans présentant depuis un an environ des fourmillements, de l'en-

gourdissement et une diminution de la force musculaire dans la

partie interne du bras droit. L'examen objectif montre une anes-

thésie cutanée et osseuse avec perte du sens des attitudes dans le

domaine des VIII b et I D à la main et à l'avant-bras droit. Toute

la partie interne de la main est privée du sens stéréognostique

tandis que la moitié externe l'a conservée. Cette perte radiculaire

de la notion de relief est due à la diminution des sensibilités super-

ficielle et profonde sur le même domaine. Ce sont, en effet, celles-ci

qui fournissent les éléments de la perception stéréognostique. La

perception stéréognostique n'est pas un sens spécial, mais une

synthèse de sensations simples.

496 SOCIÉTÉS SAVANTES.

M. Brissaud objecte qu'il s'agit d'une anesthésie toute simple et

n'admet pas que le sens stéréognostique soit particulièrement

altéré dans ce cas. ,

Sur un syndrome talamique.

MM. Thomas et CHIRAY présentent une malade qu'ils crurent

atteinte de lésion isolée de la couche oplique. Ils pensent qu'à

l'heure actuelle on peutparlerd'un syndrome thalamique.Leurcas

se calque exactement sur deux autres antérieurement présentés par

MM. Dyermi et Egger ; cas vérifiés anatomiquement.

Les caractéristiques de ce syndrome sont : l° Hémiplégie regres

sant très vite et contrastant avec une hémianesthésie intense et

persistant; 2° Apparition de choréo-ataxie et d'athétose dans le

territoire hémiplegié ; 3° Hémianesthésie très .intense superficielle

et profonde extrêmement intense. La perte des sensibilités- pro-

fondes surtout est absolu. Il y a anesthésie osseuse, perte de la

perception stéréognostique, perte du sens des attitudes; 4° L'ab-

sence du signe de Babinsky est remarquable car elle contraste

avec l'exagération des réflexes et on la retrouve dans tous les cas

de lésions thalamiques.

La cécité et le pronostic du tabès.

. Euci.aeTEnaiErr rapporte un casde tabescompliquédecécité.Chez

ce malade, comme chez ceux de MM. Marie et Léri, l'apparition de

cette complication n'a eu aucune influence heureuse sur l'évolution

du tabès.

Les troubles de la vision sont apparus il y a environ quinze ans

alors que les signes du tabes étaient encore peu accentués.

Depuis, la cécité s'est complétée ; l'examen de l'oeil pratiqué par

Félix Terrien a montré une névrite optique complète. En même

temps le tabes a toujours progressé; les douleurs et les troubles de

la coordination sont devenus aussi accentués que possible.

Si bien que l'apparition de la cécité, loin d'avoir la signification

favorable qu'on lui a souvent attribuée n'a été que le prélude des

manifestations les plus graves.

Atrophie cérébelleuse cérébrale.

lliV. Boasrrenrr,LE et CRouzoN rappellent qu'ils ont présenté au

Congrès de 1900 l'observation de deux frères atteints d'idiotie et de

diplégie cérébrale infantile. L'un des deux frères était mort son

autopsieavait révélé une atrophie cérébelleuse. Les auteurs avaient

émis en 1900 l'hypothèse que l'autopsie du second malade révéle-

rait la même lésion. Ils présentent aujourd'hui à la Société, l'encé-

phale de ce deuxième enfant, atteint lui aussi, d'atrophie cérébel-

leuse. Il s'agit donc là d'une maladie familiale caractérisée

SOCIÉTÉS SAVANTES. ' 497

cliniquement par l'idiotie et la diplégie cérébrale infantile et ana-

tomiquement par l'atrophie cérébelleuse. '

Scléroses combinées médullaires chez deux paralytiques généraux.

MM. Vigouroux et LuGNEL-LAVASTINE. Dans les deux cas, l'as-

pect de la moelle lombaire est identique, sclérose des aires pyrami-

dales des cordons latéraux et sclérose à topographie tabétique des

cordons postérieurs. '

L'examen du névraxe en coupes sériées démontre la nature des

lésions observées.

Dans les deux cas, on voit des lésions du tabes incipiens. De

plus, dans l'un la sclérose diffuse des cordons latéraux constatée

dans la moelle lombaire se réduit dans la moelle cervicale et le

bulbe à une sclérose du faisceau cérébelleux direct et est, sous la

dépendance de foyers en évolution de méningo-myélite de la région

dorsale.

Dans l'autre cas, les lésions des cordons antéro-latéraux sont

plus complexes, dépendant non seulement d'un foyer de méningo-

myélite de la région dorsale, mais encore d'une sclérose, descen-

dante d'un système pyramidal suite d'un ramollissement sous-

cortical d'un hémisphère cérébral. ,

Ainsi, ces scléroses combinées médullaires observées chez deux

paralytiques généraux ont des pathogénies différentes que le sim-

ple examen anatomique fait en coupes sériées suffit à éclaircir.

Tabès, dégénérescence descendante du système pyramidal par lésion

cérébrale, foyers de méningo-myélite de même nature que la méningo-

encéphalite ont réalisé le syndrome des scléroses combinées qui n'a

de valeur qu'autant qu'on en reconnait les causes.

ml. EGGER et CUIR.\ présentent un malade atteint des symp-

tômes suivants : Paralysieetatrophie progressives et systématiques

des fléchisseurs des pieds, des extenseurs des gros orteils et des

péroniers avec conservation des extenseurs des pieds. Musculature

de la cuisse intacte. Atrophie et paralysie des fessiers. Tremble-

ments fibrillaires.Intégrilédessphincters et des fonctions génitales.

.Affaiblissement des réflexes rotuliens et exagération des achilléens.

Abolition du réflexe crémastérien.Maux perforants et hypertrophie

osseuse énorme des phalanges et métatarsien des deux gros orteils.

Les auteurs ne concluent pas. '

Névrite radiculaire sensitivo-molrice à marche chronique. ,

MM. Déjeune et EGGER. Comme premier symptôme, l'appari-

tion de douleurs fulgurantes dans la jambe droite il y a dix ans.

Paralysies et atrophies successives dans l'espace de trois ans et

intéressant les muscles du pied droit'et de la jambe droite,

gagnant ensuite le pied et la jambe gauches. Première apparition

Archives, 21 série, t. XVII. ' 32

498 SOCIÉTÉS savantes.

de troubles sensitifs trois ans après le commencement des para-

lysies motrices. Propagation des douleurs fulgurantes aux extré-

mités supérieures.

Paralysie du groupe des muscles extenseurs et du deltoïde.

Troubles de la sensibilité objective à topographie radiculaire

comme dans le tabes, mais avec cetle différence que la notion des

attitudes et du mouvement passif n'est pas affectée. A deuxépoques

différentes, inconscience urinaire et fécale complète. Pas d'hypo-

tonie, pas d'incoordination. Homberg et abolition des réflexes

rotuliens et achilléens. Mais ces deux derniers symptômes sont

tributaires de la paralysie musculaire. Pas d'Argyll. Tous les troncs

nerveux très douloureux à la pression, de même que les masses

musculaires. '

Poliomyélite de l'adulte et paralysie infantile.

MM. A. TZAR et S.-A.-K. `VILSON présentent les coupes d'un cas

de poliomyélite antérieure aiguë de l'adulte avec lésions en foyer

absolument analogues à celles de la paralysie infantile.

Le malade était mort à trente ans, la paralysie datait de l'âge

de vingt-trois ans. Le début avait été rapide, fébrile, accompagné

de troubles importants de l'état général et d'albuminurie, comme

un début de paralysie infantile; les deux membres inférieurs

s'étaient paralysés, le gauche plus que le droit, puis deux jours

après les membres supérieurs s'étaient pris à leur tour, de sorte

que le tableau clinique avait été celui d'une paralysie ascendante

aiguë. 11 n'y avait pas eu de trouble notable de la sensibilité. A la

période aiguë du début avait succédé une phase d'état très pro-

longée, le malade était resté infirme, mais l'affection n'avait plus

progressé, et l'on avait porté le diagnostic de paralysie ascendante

aiguë d'origine probablement polynévritique.

A l'autopsie on a trouvé une destruction complète, à peu près

symétrique, quoique un peu inégale des deux côtés, de la plus

grande partie des deux cornes antérieures, d'une part dans le ren-

flement cervical entre les 6° et 80 segments, d'autre part dans la

région lombaire moyenne et inférieure.

Ces foyers avaient absolument l'aspect des foyers de paralysie

infantile ancienne ; au centre de la plupart d'entre eux se trouvait

encore un vaisseau altéré, témoin de l'origine vasculaire de la

lésion. La méninge paraissait indemne et les vaisseaux n'étaient

pas entourés de gaines lymphocytiques. ,

Les nerfs ont été examinés. Ils présentaient des lésions mani-

festes de névrite interstitielle; mais ces altérations paraissaient

bien secondaires et en tout cas n'avaient certainement joué qu'un

rôle accessoire dans la symptomatologie. Les muscles présentaient

une dégénérescence très accusée, semblable àcelle qui succède aux

sections nerveuses et aux lésions médullaires.

sociétés savantes. 499

Ce cas démontre nettement la possibilité, jusqu'ici contestée, de

l'existence de lésions en foyer dans les Cornes antérieures de

l'adulte absolument semblables à celles que l'on trouve dans la

paralysie infantile. Van Gehuchten avait rapporté un cas du même

"enre au récent Congrès de Bruxelles. F. B01SSLER.

SOCIÉTÉ D'HYPNOLOGIE ET DE PSYCHOLOGIE

Séance du 26 avril 1904. - Présidence de M. le D1' Voisin.

Changement de caractère au cours d'une évolution dentaire.

M. DEHOSCHY rapporte l'observation d'un enfant qui présente de

l'agitation, des crises nerveuses, des accès de colère et de violence,

ainsi qu'un besoin irrésistible de répondre à toute interrogation

par des mots orduriers et des injures. On a déjà porté le diagnos-

tic de méningite, avec pronostic fatal. En réalité, l'état mental est

sous la dépendance d'un trismus, avec infection buccale, survenu

chez un enfant, à l'occasion de l'évolution de la molaire de six ans.

Le traitement de l'infection buccale permet de triompher rapide-

ment du trismus, et l'état mental disparait.

L'hypnotisme en Russie.

M. ORLITZ61 (de Moscou) donne de nouveaux renseignements sur

les nombreuses infirmeries fondées en Russie pour le traitement

des alcooliques par la suggestion hypnotique. Les Russes sont très

suggestionnables; même dans les campagnes, on rencontre beau-

coup d'hystériques, sur lesquels les sorciers exercent une influence

tyrannique. Ainsi, dans certains villages, où le sorcier n'a pas été

invité à un mariage ou si on ne lui a fait aucun cadeau, il « noue

les aiguillettes » au marié.

La dormeuse de Thenelles.

M. Paul Fanez présente au nom de M. le D'' Charlier (d'Origny-

Sainte-Benoîte) une longue étude rédigée par ce dernier et consa-

crée à la dormeuse de Thenelles qu'il a suivie et soignée pendant

ses vingt années de sommeil. Il s'est agi d'un sommeil hystérique,

survenu à la suite d'une impression morale très violente, chez une

prédisposée héréditaire. Au début, des injections hypodermiques

d'atropine ont ramené la sensibilité par tranches horizontales et

symétriques, suivant la disposition métamérique; puis l'anesthésie

s'est établie définitivement. Dans les premiers mois, il survenait,

de temps à autre, de grandes crises convulsives qui disparurent

rapidement pour reparaître seulement à l'approche du réveil.'

500 - SOCIÉTÉS SAVANTES.

Comme incidents pathologiques il convient de signaler des oedèmes

de la face et, par intervalles, une teinte ictérique des téguments

surtout au visage. Au début de 1903, apparait au bras gauche un

abcès tuberculeux qui est ouvert; un stylet pénètre jusqu'à l'os et

provoque de la douleur; c'est le premier signe de sensibilité qui se

manifeste depuis près de vingt ans. Puis, la malade se met à tous-

ser ; un nouvel abcès survient, cette fois à la face dorsale'du pied

droit, et, à la suite de quelques grandes crises convulsives, la ma-

lade se réveille le 22 mai 1903, pour succomber à l'infection

bacillaire, le 28 mai, après une agonie douloureuse. Au réveil, les

constatations suivantes ont été faites : intelligence nettedu présent;

abolition du souvenir des faits ayant précédé de plusieurs années

le sommeil, et principalement deceux approchant la crise initiale ; -

perte absolue du souvenir de ce qui s'est passé pendant le som-

meil ; affaiblissement de la notion du temps et de l'ordre de suc-

cession des jours; subsconscience d'une lacune dans sonexistence.

M. RAP1EG13.U. J'ai eu jadis dans ma maison de santé une

jeune fille de quatorze ans qui est restée cinq mois en léthargie;

toutes les tentatives pour provoquer le réveil restèrent vaines, sauf

la cautérisation des amygdales. A-t-on essayé chez la dormeuse

de Thenelles la cautérisation des amygdales ?

M. Paul Parez. Il ne fallait pas y songer, car la malade pré-

sentait un trismus permanent; aucune force ne pouvait lui ouvrir

la bouche; aussi était-on réduit à la nourrir parla voie tectale.

Pour réveiller cette malade, il était indispensable de combinera la

suggestion diverses pratiques oesthésiogéniques ; le docteur Cmn-

lier et moi avions convenu de nous y appliquer en commun pen-

dant les vacances de 1903 ; la mort de la malade, en mai. à réduit

à néant notre projet. `

M. Voisin. - Quoique anesthésique totale, au moins en appa-

rence, cette malade entendait au moins subconsciemment, ce qui

se disait auprès d'elle. C'est ainsi que, par de simples paroles,

j'ai pu provoquer chez elle des modifications vaso-motrices, en

particulier de la rougeur de la face.

M. Paul ! 'AnEZ. Elle était même douée d'une certaine sponta-

néité. En effet, quand je voulais lui écarter les lèvres, lui relever

la paupière supérieure, fléchir un membre en extension, étendre

un membre en flexion, elle résistait énergiquement, comme une

personne qui s'entête à vouloir le contraire de ce que l'on exige

d'elle ; dans cette résistance, elle déployait une force étonnante.

Pour ce qui concerne ses zones hystérogènes, ses contractures, ses

tremblements, ses trépidations localisées, tout cela résultait en

grande partie de l'éducation, de l'entraînement, ou des sugges-

tions que lui faisaient inconsciemment, sous diverses formes, 1 en-

tourage elles visiteurs. Au réveil, elle ne s'est rien rappelée de

tout ce qui s'est passé pendant son sommeil; il n'en résulte pas

SOCIÉTÉS SAVANTES. 501

que, pendant ce dernier état, elle fut totalement inconsciente. Son

état second, seul, était impressiouné. Au réveil, c'est l'état prime

qui reparaît; et l'on comprend qu'il ignore le contenu psycholo-

gique de l'état second.

M. Voisin. Il est curieux de constater que l'infection bacillaire

ait provoqué le réveil de la dormeuse de Thenelles. De même,

Eudoxie' que j'ai eue jadis, dans mon service à la Salpètrière, s'est

réveillée à l'occasion d'une pneumonie qui devait l'emporter.

M. Paul Farez. - Ce rôle des agents toxiques a aussi été très net

chex M. Gésine, dont je rapportais récemment l'observation. Elle

est sortie d'un sommeil hystérique qui durait depuis dix-sept ans et

son réveil aroincidé avec l'apparition de l'albumine dans ses urines.

M. BERiLLON. En 1887, dans la Bévue de l'hypnotisme, j'ai

publié une longue étude, la première en date, sur la dormeuse de

Thenelles. Déjà je pressentais que le milieu dans lequel vivait cette

malade lui était physiquement et mentalement funeste. Je disais

expressément ceci : L'état d'incapacité, d'inertie mentale de cette

malade, les mauvaises conditions hygiéniques dans lesquelles elle

se trouve, nécessitent son transport immédiat dans un asile où

elle sera soignée et observée. 11 appartient aux pouvoirs publics,

aussi bien dans un but d'humanité que dans un but de moralité

générale, de mettre un terme aux propos qui circulent dans le

pays, en prenant l'initiative de ce transfert dans une asile.» On en

a rien fait ; la malade est restée endormie vingt longues années

et elle a succombé à la tuberculose qui la guettait fatalement.

D'une manière générale, le milieu familial est souvent funeste aux

nerveux et aux mentaux ; aussi leur prescrit-on l'isolement. Tou-

tefois, comme certains médecins voient dans l'isolement une sorte

de panacée pour tous les troubles névropathiques, je désire faire

sur ce point une restriction formelle. L'isolemement n'est, par

lui-même, ni le seul, ni le meilleur procédé de traitement. Ainsi,

j'ai observé le cas suivant. Une jeune fille est isolée et elle guérit

très vite. De retour dans sa famille, elle retombe malade. Dès

qu'elle retourne à la maison de santé, elle redevient bien portante;

dès qu'elle rentre chez ses' parents, la rechute survient. Est-elle

donc condamnée à passer sa vie dans une maison de santé ? Le

praticien devra, quand il le pourra, s'appliquer à soigner aussi la

famille et à corriger le milieu.

M. Paull\1AGNIN. -A ce propos, il est très regrettable qu'un cer-

tain groupe de psychothérapeutes s'ingénie à repéter ou que l'hyp--

notisme n'existe pas, ou qu'il est dangereux ou qu'il est inefficace.

Leur mot d'ordre est que l'auto-suggestion ou l'hétéro-suggestion

àl'état de veille doivent suffire et, en fait, se montrent fort effi-

'Nous avons publié l'obs. détaillée de cette malade dans l'Iconographie

phot. de la Salpêtrière, t. 111, p. 118, 1879-1880. (..). ;

502 SOCIÉTÉS SAVANTES.

caces. Or, d'une part, comment nos malades pourraient-ils prati-

quer sur eux-mêmes l'auto-suggestion volontaire et raisonnée,

puisque ce sont, la plupart du temps, des abouliques. D'autre part,

si l'hétéro-suggestion l'état de veille donne de si merveilleux

résultats, pourquoi ne lui demande-t-on pas de modifier aussi

l'entourage ; cela rendrait l'isolement superflu.

'"

Le bégaiement graphique.

M. BERILLON. Dans le langage ordinaire, le terme bégaiement

s'applique à la difficulté d'émettre la parole. Ce terme peut et doit

être étendu à des troubles analogues de l'écriture. De nombreuses

personnes sont incapables de tracer une lettre, dès qu'on les re-

garde ; et leur timidité n'existe que pour le fait d'écrire en public.

Ainsi, tel de nos confrères, alors qu'il était étudiant, n'a jamais pu

signer lui-même sur le registre de consignation et a dû, chaque

fois, charger de ce soin un de ses amis. Récemment, en consulta-

tion avec un de ses maitres, il a, à force d'astuce, décidé ce dernier

à écrire l'ordonnance, car il était incapable de tenir la plume. La

timidité des bègues de l'écriture est le résultat de deux facteurs

principaux : l'aboulie et l'émotivité ; elle est tout à fait justiciable

de la suggestion hypnotique, laquelle nous a, dans un certain

nombre de cas analogues, donné d'excellents résultats.

M. LEGRAIN. - L'émotivité est, en effet, à la base de divers trou-

bles névropathiques de l'écriture; ainsi lacrampe des écrivains est

une forme de bégaiement graphique, avec cette différence qu'elle

est continue tandis que les bègues graphiques dont parle M. 13eRIL-

La ? ne le sont que par intermittence, dans certaines conditions.

Dès lors, il semble que la suggestion hypnotique soit aussi pleine-

ment indiquée dans le traitemment de la crampe des écrivains.

M. BERILLON. - Sans doute, mais la crampe des écrivains est

fort tenace et il faut qu'on superpose à la suggestion hypnotique

une très longue rééducation.

Les suggestions criminelles.

M. Liégeois (de Nancy) a pu réaliser récemment sur Gabrielle

Bompart les expériences qu'il avait vainement proposées à la Cour

d'Assises, lors de l'affaire Gouffre. Ces expériences, dont le compte

rendu a été sténographié, confirment la thèse qu'il a soutenue

alors et démontrent l'hypersuggestibilité pathologique que présente

cette personne, même à l'état de veille.

Hommage A LILBEAULT.- La Société prend l'initiative d'une sous-

cription à l'effet d'ériger un monument à la mémoire de Liébeault.

Déjà la municipalité de Nancy a décidé que la rue de Bellevue,

habitée par l'illustre savant, s'appellerait dorénavant : rue du doc-

teur Liébeault.

sociétés' savantes. 503

SOCIÉTÉ DE NEUROPATHOLOGIE ET DE PSYCHIATRIE

DE MOSCOU

Séance DU 11 octobre 1902

Sur les modifications du canal central dans les traumatismes

de la moelle épinière (avec projection des préparations).

L.-S. Minor. Au sujet des préparations démontrées furent

proposées quelques questions par P.-A. PREOBRGENSEY et par W.

A, MOURATOFF.

Sur l'histopallaologie des poliiiévi-iles diphléi-iliques.

B.-W. MOURAVIEFF. - En indiquant sur les descriptions incom-

plètes que nous avons dans la littérature concernant les modifica-

tions histologiques dans les névrites infectieuses et l'insuffisance

de la limitation de ces modifications de celles que nous observons

dans la dégénérescence de `VALLER, le rapporteur donne, en se'

basant sur ses recherches personnelles, un schéma parallèle des

modifications dans le nerf après la résection et après l'effet produit

sur le nerf par la toxine diphtéritique, à savoir : .

Après la section. - 1° La fragmentation et l'absorption de la

myéline sont les phénomènes primaires ; la dégénérescence de la

myéline s'associe plus tard et joue plutôt un rôle auxiliaire;

2° La désagrégation du cylindre commence très tôt ;

3° De très bonne heure commence la multiplication du névrilème

et une croissance abondante de la substance fondamentale;

4° La dégénérescence de toute la fibre va assez également.

Dans les névrites diphtèritiques. 1° La dégénérescence des

parties isolées de la myéline est le phénomène primaire ; ordi-

nairement, il n'y a point de fragmentation des fibres ; l'absorption

de la myéline a lieu à la suite de la dégénérescence ;

2° Le cylindre-axe se conserve très longtemps ; sa désagrégation

laisse après elle le tableau de la dégénérescence de Waller;

3° La multiplication des noyaux survient plus tard; elle est peu

sigificative; de la manière très modérée, presque nulle, se fait aussi

la croissance de la substance fondamentale.

4° La dégénérescence peut atteindre les segments isolés de l'en-

veloppe myéliniclue ou même des parties des segments.

W.,A.' Mouratoff insiste sur l'irrégularité du tableau compa-

ratif de la « fragmentation » et de la dégénérescence du nerf; la

fragmentation ne présente que l'un des phénomènes et l'une des

périodes de la dégénérescence du nerf.

W.-K. ROTH compte possible que la fragmentation de la myé-

line, avec l'intégrité du cylindre-axe, apparaît seulement comme

504 SOCIÉTÉS savantes.

l'expression d'un degré moins grand du trouble de l'influence tro-

phique ; une telle fragmentation existe donc aussi dans la coupe

centrale de la fibre coupée.

Présentation des préparations du sang des épileptiques.

A.-N. BEUXSTEIN. Récemment vient de paraître la description

des investigations de BnA qui a trouvé une espèce particuliere du

diplococcus dans le sang des épileptiques. Par la proposition du

rapporteur, le Dr B.-A. GUILIAROVSKY s'est occupé du contrôle de

ces investigations sur les malades du Bureau Central d'Admission

pour les aliénés de Moscou, et chez les trois malades exa-

minés jusqu'à ce temps on a trouvé des diplococcus dans le sang,

qui a été pris pendant l'accès épileptique.

Contribution à l'étude de la mélancolie.

P.-B. Gannouchkine et S.-A. SOUKHANOFF. - Les rapporteurs ont

examiné tous les cas de mélancolie simple et récidivante qui ont

été observés dans la Clinique Psychiatrique de Moscou (chez les

malades stationnaires et les malades de la consultation externe).

Les rapporteurs n'ont pas délimité les cas avec un seul accès ou

avec plusieurs accès, trouvant que toutes les psychoses aiguës sont

portées aux récidives et la différence entre les formes périodiques

et les formes récidivantes ne peut pas encore être bien instituée. Il

y avait 278 cas de mélancolie en tout (102 hommes et 176 femmes)

et, en rapport à tout le nombre des malades psychiques de la Cli-

nique, cela fait 6, 23 p. 100; ce rapport, pris pour les hommes et

les femmes à part, revient pour les premiers, 3, 65 p. 100 et pour

les secondes, 10,75 p. 100; c'est-à-dire que la mélancolie chez les

hommes se rencontre trois fois plus rarement que chez les femmes.

La prédisposition héréditaire, à un degré plus ou moins grand,

a été signalée dans 82 pour 100 de tous les cas. Le premier accès

de mélancolie revient chez les hommes pour l'âge de 21-30 ans et

chez les femmes pour l'âge de 21-25 ans; le second accès chez les

hommes le plus souvent survenait 1-5 ans et chez les femmes 10-

20 ans après le premier.

Comme espèces de mélancolie, les rapporteurs distinguent la

mélancolie alcoolique et organique, la mélancolie avec idées ob-

sessives, la mélancolie raisonnante, hystérique, dégénérative. En

notant dans leur matériel les cas de mélancolie récidivante, où

après deux ou plusieurs accès se sont manifestés divers degrés de

démence, les rapporteurs inclinent à croire qu'entre la démence

précoce et la psychose maniaco-dépressive il n'y a pas de limites

très marquées et que entre ces deux groupes de maladie sont pos-

sibles des formes transitoires.

' Bra, voir Arch. cle \'eur., 1902, t. XIV, p, 51.

sociétés savantes. ' 505

N.-P. PoTOvsKY ne peut pas reconnaître comme motivée la

manière de voir des rapporteurs sur le manque de différence entre

les psychoses périodiques et les psychoses récidivantes. Les psy-

choses récidivantes apparaissent comme troubles exogènes et les

psychoses périodiques, comme troubles endogènes. L'association

de la mélancolie alcoolique au groupe des mélancolies et non au

groupe des psychoses alcooliques n'est pas tout à fait juste.

V.-W. VOROIIIEFF dit qu'en incluant dans la statistique des mélan-

colies, la mélancolie périodique, les rapporteurs auraient dû, pour

la même raison, y inclure aussi les états mélancoliquesdes para-

lytiques généraux, etc. -

W.-P. SERBSKY trouve que l'identification des psychoses pério-

diques avec les psychoses récidivantes est très importante, mais elle

lui parait peu motivée ; les psychoses périodiques existent et il est

indispensable de les citer; il serait à désirer que les rapporteurs

confirment par des histoires de maladie l'impossibilité de faire

une limite bien accentuée entre la démence précoce et les psy-

choses périodiques.

A.-N. BFRNSTPIN ne peut pas être d'accord concernant l'existence

des formes transitoires entre la démence précoce et la folie ma-

niaco-dépressive. A. 13ERNGTG11V, M. MOLTCHANOFF, S. SOUKHANOFF.

Séance DU 15 novembre 1902

N -A. ALFÉEVSKY a présenté un cas d'épilepsie de 110aERN11;OP1·

(épilepsia parlialis continua). '

[Un malade de 36 ans remarqua il y a un an et demi que

lorsqu'il souriait sa bouche se déviait à gauche, ce qui dura à peu

près trois semaines. Un an plus tard apparurent des tiraillements

menus dans la joue droite qui durèrent quatre semaines et furent

succédés par des contractions menues, cloniques, dans le ponce et

l'index de la main droite et un mois plus tard ces contractions

envahirent tous les doigts. Encore un mois plus tard furent atteints

l'épaule et l'avant-bras; laparole devint inintelligible lasuite des

tiraillements de la langue.'Bientôt après cela subitement, sans

aura, survint un accès de convulsions générales avec perte de

conscience; l'accès débuta 'par une douleur, des picotements et

contractions dans les doigts de la main droite; après l'accès les

tiraillements de la main et le tremblement de la voix s'affaiblirent

ponr quelques heures. Le malade avait encore deux accès sembla-

bles avec intervalles de deux semaines.

Hors les accès, continuaient les contractions menues très varia=

oies dans la joue droite, la langue et la main droite ; ces contrac-

tions se renforçaient par les mouvements volontaires, et par les émo-

tions. Les muscles de la main droite sont atrophiés légèrement;

506 sociétés savantes.

l'excitabilité foradique un peu diminuée; la sensibilité est sans

modification. ' -

Sur l'influence thérapeutique du patronage pour les aliénés.

N.-A.Zander. En ce dernier temps on ne regarde plus le patro-

nage familial comme un moyen bon marché d'évacuation des

malades des hôpitaux surchargés, mais comme un moyen théra-

peutique très grave. Le contingent des pensionnaires du patronage

consiste en malades chroniques, auxquels l'hôpital a déjà donné

tout ce qu'il pouvait donner et pour lesquels le séjour ultérieur à

l'hôpital serait inutile et même nuisible, car il aurait augmenté

leur indigence psychique. Quelques-uns de ces malades renaissent,

en séjournant au patronage où une individualisation sévère, une

liberté relative et tout le milieu bien portant qui les entoure, aident

à l'amélioration de tout leur organisme psychique. Se basant sur

l'essai du patronage familial, fait par l'hôpital Alexéebsky de

Moscou, le rapporteur indique, en illustrant son rapport- par la

description de quelques observations, que dans la démence pré-

coce a été constatée une amélioration plus ou moins marquée à

savoir dans les cas où il n'y avait point de tare héréditaire lourde

et de phénomènes accentués de dégénérescence; dans la démence

consécutive bien des malades recouvrent, en partie, leur individua-

lité d'auparavant et apprennent à se servir du reste de leur intel-

ligence ; certains malades avec hystérie grave, qui étaient très dif-

ficiles dans la vie de l'hôpital, au patronage allaient mieux, car à

la campagne ils apprenaient à se soumettre au régime et à la dis-

cipline, infailliblement liés avec la vie de travail. Dans beaucoup de

cas de paranoïa chronique, les hallucinations pâlissaient, le délire

s'affaiblissait et l'hébétude psychique diminuait. Sur les malades,

atteints de paranoïa o1'iginal'ia ou alcoolique, le patronage n'avait

point d'influence bienfaisante, et même souvent l'état de ces mala-

des empirait. L'amélioration chez les alcooliques s'exprimait en

cela qu'ils devenaient plus réservés, moins alfectifs. Les paraly-

tiques généraux présentent, en général, un élément tranquille et

commode pour la vie du patronage, excepté les cas avec délire

hypochondriaque et avec la peur morbide ; pour les malades de ce

genre, le séjour au patronage n'était pas favorable. Regardant

comme prématuré encore tout raisonnement sur l'influence du

patronage sur les formes morbides isolées, le rapporteur pense,

pourtant, que le patronage est une mesure bienfaisante et très

grave dans la thérapie des maladies mentales.

N.-N. l3acaor.r présume que la définition exacte du moment,

quand il est possible de permettre le contact du malade avec le

milieu hors de l'hôpital, est parfois tout aussi grave que la défini-

tion du moment, où l'implication opérative devient nécessaire

SOCIÉTÉS SAVANTES. 507

chez un malade chirurgical. L'individualisation de chaque malade

a, sous ce rapport, une grande signification pratique.

B.-V. VOROBIEFF demande si le patronage donne aux malades

quelque chose de pareil qui ne peut pas leur être donné ni par

l'hôpital, ni par la colonie.

V.-R. BOUTZKE insiste sur la grande différence entre la colonie

et le patronage : dans la première l'entourage est, pour ainsi dire,

artificiel, dans le second il est naturel. C'est en vain que le rap-

porteur n'a pas mentionné les données statistiques qu'il avait à

sa disposition, dont on aurait pu voir que dans certains cas, pas

nombreux il est vrai, l'admission des malades dans le patronage

n'a pas apporté de succès.

N.-P. PosTOvSKY note que le contenu de lacommunication ne se

rapporte pas au patronage proprement dit, mais seulement à l'in-

fluence du patronage sur les ci-devant malades de l'hôpital, à

savoir, leschroniques ; bien des phénomènes pathologiques, disparus

chez les malades pendant leur séjour au patronage, ne présentaient t

pas autant les symptômes de leur maladie fondamentale que des

pseudo-symptômes, acquis par eux artificiellement grâce aux

côtés négatifs de la vie de l'hôpital.

A.-N. Bernstein pense qu'en mentionnant les bons côtés du

patronage familial, il ne faut pas tout de même diminuer la signi-

fication de l'hôpital.

Sur la question du développement des dendrites des cellules nerveuses

spinales chez les vertébrés supérieurs (avec démonstration des pré-

pa)'< ! < ! '0 ! M.)

F.-A. Geier. Le rapporteur a examiné par la méthode de

Golgi la moelle épinière des embryons de poulets et il a réussi à

suivre le cours du développement des prolongements protoplas-

matiques des cellules nerveuses des cornes antérieures.

A. BEnNSTEIN, M. nlOLTCnAN01·P, S. SOUKIIANOFF.

Séance DU 29 novembre 1902

,

Paralysie générale et grossesse.

S.-A.SouKUANOFF.La grossesse dansla paralysie générale n'est

pas si souvent observée qu'on aurait pu l'attendre, vu la grande

propagation de cette maladie ; ce fait tient, à ce qu'il paraît,

à ce que les femmes atteintes de paralysie générale, sont pour

la plupart stériles. Les cas, envisagés par certains auteurs, comme

paralysie générale, s'étant développée en liaison avec la période

puerpérale, doivent être rapportés aussi à la grossesse dans la

paralysie générale. L'existenee de la paralysie générale se reflète

508 SOCIÉTÉS savantes.

peu sur le cours de la grossesse ; au contraire la grossesse et les

couches ne sont pas sans influence sur le cours de la paralysie

générale, et cette influence n'est pas égale dans différents cas.

Dans le cas du rapporteur, la grossesse dans la, paralysie générale

a été observée chez une femme de 22 ans, avec syphilis héréditaire

probable et avec phénomènes très accentués de démence paraly-

tique. La grossesse avait un cours normal, et les couches étaient

faciles- et rapides ; l'enfant né un peu avant terme, vécut pen-

dant un an. La facilité des couches indique probablement l'exis-

tence des anesthésies profondes. Bientôt après les couches com-

mencèrent chez la malade des accès épileptoïdes et plus tard

se développa assez rapidement de la paraplégie inférieure avec

contractures.

L.-S. 1llNOa insiste sur ce fait que dans la paralysie générale de

paire avec la lésion fondamentale peuvent exister aussi des pro-

cessus purement syphilitiques. Le lues et le p'J1'alues ne s'excluent

pas l'un l'autre et dans le cours d'une certaine période intermé-

diaire peuvent exister parallèlement.

V.-W. Vouobieff insiste sur la possibilité d'envisager, comme

urémiques, les accès observés chez la malade en question.

G.-J. PII.IBYTKOFF se souvient d'un cas de couches, observées

dans la Clinique des maladies nerveuses de Moscou en 1892 chez

une femme de 29 ans, avec paraplégie inférieure, troubles uri-

naires et constipation opiniâtre. Un peu avant les couches se déve-

loppa chez elle le décubitus sacré profond. Les couches survinrent

avant terme, et vu l'insuffisance des contractions utérines on fut

obligé d'appliquer l'mtewention instrumentale. Deux semaines

après les couches la malade mourut, et à l'autopsie on constata

une myélite luétique dans la région dorsale inférieure et une grosse

gomme dans la partie supérieure de la cauda equina. Ainsi, dans

ce cas, non seulement a été détruite la liaison entre la partie infé-

rieure de la moelle épinière et le cerveau, mais les centres de la

région sacrée ont été éloignés de la communication avec les

organes pelviens, ce qui n'empêcha pas, pourtant, l développe-

ment des contractions utérines ; évidemment, ces dernières se sont

développées exclusivement d'une manière automatique.

W.-K. BaTH admet la possibilité de l'origine centrale de la para-

plégie dans le cas du rapporteur, ce qui est analogue, par exem-

ple, à ce qui s'observe dans la maladie de Little.

A. l3cnnsTrr, M. MOLTCHANOFF, S. Soomlnrtorr.

Séance DU 20 décembre 1902

S.-S. MOLODENKOFF a montré un malade de la Clinique des

maladies nerveuses atteint d'achondroplasie symétrique des os des

deux avant-bras.

.sociétés savantes. 509

Trouble particulier dans la représentation du temps dans un cas

de paralysie générale (avec présentation du malade).

V.-W. VoROBtEFF. Le malade de 38 ans, fut placé à la maison

de santé du Dr FÉRIANE, le 28 septembre de 1902, avec des phéno-

mènes très marqués de paralysie générale, les premiers symptômes

de laquelle se manifestèrent deux ans de cela. Depuis le matin du

28 septembre le malade commença à faire un compte particulier

du temps, en prenant chaque journée pour une demi-heure. Ainsi,

le 27 septembre il disait que c'était onze heures et demie du 28

septembre ; le jour suivant il assurait que c'était midi du 28 sep-

tembre, etc. Etant arrivé dans son calcul (à la moitié d'octobre)

jusqu'aux heures de la nuit, il retourna de nouveau à 3 heures de

la journée qu'il croyait être toujours le 28 septembre et de rechef

il commença à ajouter chaque jour par une demi-heure. Le der-

nier temps, avec le nouvel approche du compte vers les heures du

soir, les intervalles du compte commencèrent à diminuer et s'ar-

rêtèrent tout à fait. La mémoire du malade est assez bien conser-

vée ; il peut bien s'orienter .dans l'entourage. Il existe chez lui

une bonne humeur, une élévation dans la sphère émotive, une

inclination aux, idées de grandeur, un affaiblissement marqué de

la critique. Le rapporteur ne trouve pas possible de considérer le

trouble dans le compte du temps, observé chez le malade, comme

une idée démente délirante et voit dans ce trouble un affaiblis-

sement spécial ou perversion des réminiscences de cet élément t

sensoriel, qui accompagne toute notre activité psychique et à

l'aide duquel nous apprécions le temps. Vu cela le rapporteur est

porté à croire que de pair avec le processus anatomique diffus

général, il y a dans le cerveau du malade une lésion spéciale des

régions qui ont un rapport à la représentation du temps.

W.-A. Mouratoff pense que l'appréciation du temps se fait à

l'aide des combinaisons mentales et non à l'aide de la seule per-

ception et, par conséquent, se rapporte aux actes d'association. Le

symptôme, noté chez le malade, présente une idée délirante

absurde, une expression partielle d'une démence profonde.

N.-P. POSTOVSIIY insiste sur la prématurité de l'essai de la loca-

lisation des représentations du temps dans le cerveau, parce

qu'il n'existe pas jusqu'à ce temps de théorie scientifique fonda-

mentale sur la formation de cette catégorie des représentations.

A.-N. Bernstein rappelle que le trouble de mémoire dans la

paralysie générale ne se propage pas, en somme, toujours égale-

ment sur toutes les formes de mémoires, et la capacité de la loca-

lisation régulière des événements dans le temps souffre préféren-

ciellement, en comparaison de la capacité de la reproduction du

contenu des événements.

S'10 sociétés savantes.

Sur la question de la parasitologie du sang dans l'épilepsie.

B.-A. GUlLIrIROVSIiT. Au commencement de l'année 1902,Dm

décrivit un micrococcus particulier qu'il a observé sur les prépa-

rations du sang des épileptiques; il était toujours présent dans le

sang pendant l'accès épileptique, et souvent dans les intervalles

entre ces derniers. Sur la préparation fraîche du sang ou dans la

culture pure le parasite se présente en aspect d'un diplococcus

très mobile et parfois en aspect de coccus mobile. En injectant

une dose assez considérable de la culture du bouillon de ce micro-

coccus dans les veines des lapins, BnA provoquait chez eux des

convulsions cloniques et toniques et parfois différentes parésies.

Se basant sur ces faits, BRA considère le micrococcus, décrit par

lui, comme provocateur de l'épilepsie et l'épilepsie elle-même,

comme maladie parasitaire. En contrôlant les investigations de

BnA sur les malades du Bureau central d'Admission de police pour

les aliénés, le rapporteur prenait pour l'examen à plusieurs reprises

le- sang de 5 épileptiques pendant les accès et aussi hors des

accès ; il l'examinait sous le microscope en aspect fraiset en aspect

fixé (coloré) et aussi en le semant dans le bouillon et dans l'agar-

agar. Dans tous les cas il parvenait, par différentes méthodes, à

constater la présence du micrococcus, correspondant tout à fait

pareil à la description de Bina ; les investigations de contrôle, faites

sur des personnes bien portantes, donnèrent des résultats négatifs.

Pourtant, l'injection sous-cutanée de la culture du bouillon, faite

aux lapins et aux souris blanches, ne provoqua aucun phénomène

morbide, et les micrococcus se multiplièrent dans le sang de ces

animaux, sans produire d'influence marquée sur leur santé. L'exa-

men plus détaillé du micrococcus trouvé, manifesta son identité

complète avec le micrococcus agilis, non pathogène, déjà connu

avant; la culture pure, identique à celle qui a été trouvée dans le

sang a pu être cultivée immédiatement de l'air. Encore le même

micrococcus a été manifesté dans le sang d'un choréïque chronique

et chez plusieurs malades présentant une excitation motrice très

marquée. Ainsi, donc, la présence du micrococcus de Bnn dans le

sang desépiteptiques renseigne non pas sur lasignification générale

de l'épilepsie, mais sur ce que l'activité musculaire très exagérée

rend le sang plus accessible aux cultures de ce micrococcus et,

probablement, à d'autres.

W. A. nlOURATOPD dit que tout le côté clinique de l'épilepsie parle

d'une manière très expressive conlre son origine parasitaire, mais

pour son origine dégénérative. L'hypothèse de BnA laisse sans

attention des faits, déjà institués, comme l'hérédité de l'épilepsie.

qu'elle n'est pas infectieuse, sa liaison avec la liaison organique du

cerveau ; cette hypothèse fait considérer l'épilepsie comme accès

convulsifs seulement, oubliant tout à fait les troubles stables, ob-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 811

serves dans les intervalles des accès ; enfin, elle insère dans l'étude

sur l'épilepsie une observation, expliquée injustement.

L.-S. MINOR trouve que le travail du rapporteur a plutôt con-

firmé que refuté les investigations de l3nn, puisque ici aussi dans

tous les cas on a trouvé le micrococcus, et que la trouvaille de ce

dernier dans d'autres hyperkinésies ne parle pas encore contre

son rôle producteur dans l'épilepsie. Du côté théorique, il pense

qu'il n'y a point de raison de réfuter apriori la possibilité de l'ori-

gine infectieuse des convulsions épileptiques. N'étant pas bactério-

logue, M. MINOT ne peut pas d'une manière tout à fait déterminée

dire son opinion concernant cela, si la découverte d'un agent infec-

tieux d'une maladie apparaît comme identique avec l'institution

de sa pathogénie ; M. Minor pense que ces opinions ne se corres-

pondent pas et que. outre le micro-organisme spécifique, sont

encore indispensables bien des conditions pour le développement

de la maladie.

A.-N. BERNSTriN dit que lorsque lui et le rapporteur se sont occu-

pés de l'examen du sang des épileptiques, ils ont pensé le moins à

réfuter les observations de BnA ; le cours de leur travail lui- t

même les -a dirigés et les a poussés vers les faits et les considé-

rations qui ont été communiqués aujourd'hui. L'investigation

n'est pas encore achevée, et il est difficile de dire à quoi elle

mènera encore sur la nouvelle voie, s'étant éloigné du but pri-

mordial. La communication actuelle du rapporteur avait en vue,

d'un côté, de prévenir les autres de la répétition des erreurs de

liiu et, d'un autre côté, d'indiquer dans quelle direction peut être

continué le travail productif ultérieur.

Sur l'aphasie amnestique.

S.-J. PopOFF.-Le malade du rapporteur avaittout à fait perdu

la capacité de la parole indépendante, mais il pouvait lire libre-

ment de même que répéter les paroles des autres. Il pouvait écrire

lui-même et sous la dictée. Il mourut d'une cause accidentelle. A

l'autopsie a été constaté un ramollissement dans les deux circon-

volutions frontales et dans l'hémisphère gauche; en outre, a été

encore détruit l'îlot et la partie antérieure du lobe temporal. Le

rapporteur présume que chaque écriture indépendante doit être

précédée par la prononciation et la formation intérieure des

paroles; vu cela il est indispensable d'admettre que outre la base

de la troisième circonvolution frontale, détruite chez le malade,

existe encore un territoire accessoire du centre moteur de la

parole qui aide à celte articulation interne et duquel se servait le

malade pour l'écriture.'A ce qu'il parait, ce centre accessoire peut

fonctionner seulement à l'aide de l'influence sur lui du côté du cen-

tre visuel et auditif; le rapporteur localise ce centre accessoire

dans la base de la deuxième circonvolution frontale.

gt2 BIBLIOGRAPHIE.

V.-W. Vouobieff pense que le centre de BROCA apparaît comme

un centre purement moteur; l'association des images idéatives,

visuelles, auditives et d'autres, avec l'image motrice de la parole

se fait, évidemment, dans un autre centre, qui est resté intacte

chez le malade en question.

A. 13FasrrIN, M. MOLTCIIAKOFF, S. Soukiianoff.

BIBLIOGRAPHIE.

XIV. La démence précoce ; par René ;\1ASS¡';LO : -l, avec une préf., 1904.

Joanin et Cie, éditeurs.

C'est en 1893 que Kroepelin dans la IVe édition de son livre, après

avoir rapproché l'hébéph1'énie de la catatonie ajoutait à celles-ci

la démence paranoïde pour ne voir dans ces trois affections que les

, formes d'une maladie unique, la démence précoce. Cette conception

hardie renouvelait complètement la psychiatrie. Elle n'avait d'ana-

logue dans notre science que l'immortelle découverte de Ba)le

quand, en 1822, il fondait la Paralysie générale, en établissant

l'unité de cette maladie là où Esquirol et Calmeil n'avaient vu

que des symptômes.

Les idées de Kroepelin ont soulevé de multiples controverses.

Elles ne sont 'guères connues en France que depuis quelques

années et n'ont pas encore eu le temps de s'y acclimater. Toutefois,

il se fait en ce moment, sous l'influence de M. Deny et de M. Sérieux,

d'incontestables progrès sous ce rapport. La démence précoce a

conquis une place importante dans la nosologie et tous les jours

nous reconnaissons la maladie de Kroepelin. chez des malades qui

auraient été catalogués autrefois débiles ou déments secondaires

ou dégénérés à délire polymorphe. '

Un ancien interne de Sérieux, notre collègue Masselon, vient Je

publier dans la Collection de Médecine pratique, dirigée par

M. Hutinel, une excellente monographie de la démence précoce.

C'est une étude très complète de cette maladie mentale, étude sur

laquelle on nous permettra d'attirer un instant l'attention.

La réalité de la démence précoce repose sur trois grands ordres

de faits : 1° l'apparition des troubles mentaux à l'adolescence;

2° l'évolution clinique qui évolue à travers des épisodes variés

vers un état de démence plus ou moins profond; l'affaiblissement

intellectuel est précoce, tous les phénomènes aigus observés en »

portent la marque ; 3° les caractères psychologiques; la démence

précoce est primitivement une maladie de l'affectivité : l'indifférence

BIBLIOGRAPHIE. 513

est le symptôme primordial de l'affection, les malades per-

dent successivement la faculté d'être émus, les désirs et la volonté,

enfin la curiosité et l'activité intellectuelle; au contraire les sou-

venirs simples persistent assez longtemps, une activité automa-

tique involontaire et inconsciente se substitue peu à peu à l'acti-

vité émotionnelle et volontaire qui caractérise l'homme normal.

Résumons maintenant dans ses grands traits la description de

la maladie.

La démence précoce débute par une phase prodromique dont

les symptômes peuvent simuler ceux de la neurasthénie. Cepen-

dant la diminution de l'émotivité et surtout des sentiments effec-

tifs, l'étui de paresse, de nonchalance et d'indifférence qui carac-

térise l'affaiblissement de l'activité intellectuelle, les modifications

du caractère, des actes parmi lesquels se manifeste déjà certains

phénomènes d'aulomatisme, tels que le négativisme, l'opposition

aveugle et irraisonnée à tout ce qu'on demande d'exécuter au

malade, la perte de certaines habitudes de politesse, de propreté

permettent dès celte époque de poser le diagnostic et de prévoir

l'avenir qui est réservé à ces prétendus neurasthéniques.

La maladie peut s'acheminer plus ou moins rapidement, vers la

démence sans autre incident : l'a({t11blissement intellectuel s'exa-

gère ; le négativisme, les tirs, les fugues, les impulsions, les vio-

lences subites et sans cause, l'inattention perpétuelle, la puérilité

décidées el dus propos vont en s'accentuant; c'est la forme simple

dans laquelle les malades ne présentent jamais de phénomènes

aigus.

Dans la majorité des cas, après une phase prodromique de quel-

ques mois deux ans, apparaissent des phénomènes aigus qui

ont fait diviser la démence précoce en trois formes selon la prédo-

minance de telles ou telles manifestations morbides ; on distingue

donc : une l'orme catatonique, une forme hébéphrénique ou déli;

riante, une 1'111'nle parauoïde.

La forme catatonique est essentiellement caractérisée par des

états de stupeur ou d'agitation où dominent les manifestations de

négativisme, de sléréotypie et de suggestibilité.

On entend par négativisme une tendance permanente et instinc-

tive à se raidir contre toute sollicitation venue de l'extérieur. La

sugwStiGrlrLe est au contraire une tendance permanente et instinc-

tiveà adopier toute sollicitation venue de l'extérieur (catalepsie

échomimie, écholalie). La sléi-éolypie est caractérisée par la durée

anormale de'~ impulsions motrices, qu'il s'agisse de la contracture

permanente d'un certain nombre de muscles (attitudes stéréoty-

pées) ou de la répétition d'un même mouvement (mouvements

stéréotypés).

Les états de stupeur catatonique sont caractérisés par un engorr-

AHCmvrs, 2' série, t. XVII. 33

514 BIBLIOGRAPHIE.

dissement cérébral tel que le sujet ne manifeste plus aucune

activilé; immobile il adopte certaines attitudes qu'il reproduit

sans cesse et conserve toufes celles qu'on lui fait prendre, ou bien

oppose une résistance aveugle à tous les actes qu'on veut lui faire

exécuter et même à ses besions organiques (refus d'aliment,

/ya/t'Mf par regorgement.) ,

A/agitation catatonique consiste en une agitation stéréotypée

(reproduction incessante des mêmes mouvements, des mêmes

paroles, verbiuération) coupée de brusques mouvements automa-

tiques, violence*, impulsion*, fugues, tentatives de suicide.

La forme hébéphrénique est un ensemble d'états de dépression et

d'agitation caractéri-és par des troubles délirants, dont le poly-

morphisme est la note prédominante : idées de grandeur le plus

souvent absurdes, parfois délite d'énormilé, idées mystiques,

idées de persécution, idées de culpabilité et d'auto-accusation.

idées de ruine physique ou morale, idées de négation, troubles de

la personnalité. Toutes ces conceptions délirantes se méienl, se

choquent dans l'esprit du malade créant un chaos mental indes-

criptible.

Le langage et les écrits de ces malades sont hès-ir7col;ér'enls.

Tout dans leur attitude, leur physionomie, leur pose et leurs

gestes revêt un aspect maniéré, artificiel et convenu. En dehors des

réactions provenant de leurs idées délirantes, ils présentent de

brusques impulsions, des fugues, des actes de violence, des tenta-

tives irraisonnées d'évasion, des éclats de rire, des tics. On

retrouve ici, mais à un degré moins accenfué, les divers phéno-

mènes caractéristiques de la catatonie : négativisme, suggeslibilité.

La forme ¡i(l1'illIo'ide est formée de conceptions délirantes un peu

mieux systématisées que dans les formes délirantes, mais le plus

souvent absurdes, qui n'évoluent pas et prennent rapidement une

expression figée et stéréotypée. La forme parauoïde de la démence

précoce est la partie la plus attaquée de l'oeuvre de Kroepeliti.

Celui-ci y fait entrer tous les délires systématisés accompagné : , d'af-

/'czibliss ment intellectuel et évoluant vers la démence, et comme tel

le délire chronique de Magnan. La majorité des aliénistes contem-

porains n'admet pas cette manière de voir.

Aucune de ces formes n'offre de caractères absolument tranchés :

tous les intermédiaires se rencontrent entre elles et cerlains cas

cliniques peuvent même évoluer en passant par des formes diffé-

rentes. '

Ce qui fait l'homogénéité de ces diverses variétés et les groupeen

une entité mal bide spéciale, la démence précoce, ce sont les carac-

tères propres de l'af1'iIlulisemellt intellectuel. Cet affaiblissement

consiste en une indiffé¡ ence émotionnelle précoce avec perle des sen-

timents u f/'e tifs. Cette indifférence émotionnelle s'accompagne de

la perte des désirs, de la diminution de la volonté. de l'affaiblisse-

BIBLIOGRAPHIE. 515 J

1

ment progressif delà curiosité et de l'activité intellectuelle. Apathie,

aboulie, perle de l'activité intellectuelle, telle est la triade sympto-

malique qui caractérise au premier chef la maladie.

Les troubles psychiques s'accompagnent de troubles physiques.

surtout accentués dans les périodes aiguës. Ce sont, d'après

Kroepelin : exagération parfois très accentuée des réflexes tendi-

neux, augmentation de l'excitabilité mécanique des nerfs et des

muscles, dilatation pupillaire, troubles vaso-moteurs, cyanose,

cedéme, dermographisme, hyperhidrose, sialorrhée, modification

du rythme du coeur, diminution de la température, troubles de la

menstruation, augmentation du volume du corps thyroïde.

exopthalmie, augmentation du poids du corps, vertiges, accidents

convulsifs.

La démence précoce évolue vers un état d'affaiblisssement intel-

lectuel plus ou moins accentué ; léger dans les formes frustres, on

peut observer tous les intermédiaires entre cet état et la démence

profonde : ce dernier mode de terminaison est toutefois le plus

fréquent.

Les guérisons peuvent s'observer quelquefois : 8 p. 100 dans les

formes hébéphréniques, 13 p. 100 dans les formes catatoniques

d après Iiraepelin. Mais il faut être très réservé sur l'avenir de ces

prétendues guérisons, bien souvent il ne s'agit que de rémissions

d'une durée plus ou moins longue.

La démence précoce est une psychose accidentelle : elle est

probablement le résultat d'une auto-intoxication que les circons-

tances étiologiques autorisent à considérer comme une auto-intoxi-

cation d'origine sexuelle. Elle se développe le plus souvent chez

des individus héréditairement prédisposés mais qui n'avaient

généralement manifesté jusque-là aucune tare névropathique

intense. Il est possible d'ailleurs que d'autres auto-intoxications

d'origine thyroïdienne, gastro-intestinale, etc., puissent réaliser

le syndrome clinique de la démence précoce. Il suffirait alors

d'un processus toxique prolongé se produisant à une époque déter-

minée de la vie pour créer toutes les manifestations symptoma-

tiquesde l'affection.

Telles sont les conclusions du livre de M. Masselon résumant

très complètement les idées de Kræpelin sur ce sujet. Inutile d'in-

sister sur l'importance fondamentale d'une conception qui permet

de nous guider à travers le chaos des délires polymorphes en nous

montrant l'enchaînement de faits jusqu'alors inaperçus. Sans

doute de nouvelles recherches sont nécessaires, mais l'idée

entrevue jusqu'ici est assez belle pour qu'il soit permis de prédire

les plus hautes destinées à la démence précoce. R. LEROY.

VARIA.

Discours présidentiel prononcé A la soixante ET unième RÉUNION

annuelle de l'Association 1'IÉDICO-PSYCHOLOGIQUE, TENUE 1 LIVEIt-

pool, le 24 JUILLET 1902; par G. Wiglesworth. (The Journal of

Mental Science, octobre 1902).

Le discours présidentiel de M. Wiglesworth se distingue des

harangues officielles du même ordre en ce qu'il est consacré à un

seul sujet, l'hérédité. Après avoir rappelé en indiquant leur sens

les travaux récents sur cette question et fait une large part à ceux

de Weismann, l'auteur constate que, malgré une somme considé-

rable de travail, les lois qui gouvernent les processus de l'hérédité

sont encore fort obscures. C'est qu'aussi les problèmes qui sur-

gissent sont fort nombreux. Quelle est la proportion des aliénés

qui doivent leur folie à une tare héréditaire bien nette ? L'un des

sexes est-il plus exposé que l'autre à la folie héréditaire ? L'un

des parents est-il plus propre que l'autre à transmettre la folie à

ses descendants ? Les différentes formes de folie diffèrent-elles les

- unes des autres dans leur tendance héréditaire ? Un caractère ou

une maladie acquis peuvent-ils se transmettre aux descendants

et apparaître chez eux comme l'une des nombreuses manifestations

de la diathèse vésanique ! (l'auteur emploie ce mot de diathèse

vésanique dans le cours de son travail simplement pour la com-

modité et la brièveté du langage). Bien d'autres questions se

posent en foule, sans qu'il soit possible actuellement de leur

donner une réponse satisfaisante.

Les statistiques de l'auteur portent sur 3445 cas, entrés dans

son asile pendant une période de douze ans, et se décomposant

en 1693 hommes et 1752 femmes. Parmi ces malades, on en

'a trouvé 965 chez les parents desquels on constatait la folie, l'épi-

lepsie en un degré très marqué d'excentricité (hérédité directe ou

collatérale); ce chiffre donne un pourcentage de : 8.01, légèrement

inférieur à celui qu'ont Irouvé d'autres observateur*, Faryuharson

par exemple qui donne .30,7. Les statistiques fournies par les

établissements privés donnent toujours des chiffres plus élevés;

c'est ainsi que Grainger Stewart, au Crichton Institution, a trouve

une proportion de 49,6 p. 100. Il faut observer d'ailleurs qu'il n'y

a peut-être pas deux auteurs qui soient absolument d'accord sur

ce qu'il convient d'entendre par « tare héréditaire ». Si l'on exa-

mine maintenant chez ces 965 malades la question de sexe, on

trouve 419 hommes et 546 femmes (soit un pourcentage de 34/74

. varia. : .17 7

pour les hommes et de 31,16 pour les femmes). La différence est

lrappante et d'autant plus intéressante que, sur ce point, presque

toutes les observations concordent, sinon dans les chiffres, au

moins dans les faits.

Quel est celui des parents qui est le plus propre à trans-

mettre la diathèse vésanique ?

Ici les chiffres des divers auteurs sont loin de concorder et vont

même jusqu'à se contredire. Sur les 620 cas où l'auteur a pu éta-

blir avec exactitude par lequel des deux parents la folie avait été

transmise, il en a trouvé 306 pour l'hérédité paternelle, et 314

pour l'hérédité maternelle, soit un pourcentage de 8,88 et de 9,11.

Ces chitires se rapprochent beaucoup de ceux qu'a donnés Far-

quharson (8,1 et 8,2). En ne faisant figurer que l'hérédité directe-

(en excluant l'hérédité collatérale et réversive) on trouve sur

350 malades 185 cas de folie du père, et 165 de folie de la mère.

Le père ou la mère ont-ils une plus grande tendance à trans-

mettre la folie à ceux de leurs enfants qui appartiennent à leur

propre sexe ? Ici encore on se trouve en présence de sérieux désac-

cords. La statistique de l'auteur concorde surtout avec celle de

Turner : sur 306 cas dans lesquels l'influence paternelle était pré-

dominante, il'a trouvé 130 hommes et 176 femmes; tandis que

dans 314 cas où l'influence maternelle prédominait, il n'y avait

que 124 hommes contre 190 femmes. On voit par les chiffres que

l'auteur a réunis dans un tableau que nous ne pouvons pas repro-

duire, que si les auteurs sont un peu divisés sur la question de

savoir si l'influence paternelle agit plus puissamment sur les gar-

çons que sur les filles, ils sont unanimes au contraire à admettre

l'influence plus grande de la mere dans la transmission de la

folie aux filles.

Si l'on recherche si les diverses formes de folie diffèrent entre

elles au point de vue du degré de leur tendance à l'acquisition

héréditaire, on pose une question qui : sous cette forme, est très

difficile à résoudre. On sait toutefois que, bien que l'enfant puisse

présenter la même forme de folie que son ascendant, il n'y a là

aucune loi de relation directe, et que la diathèse vésanique peut

se manifester sous des formes très diverses dans différentes géné-

rations. Quant il la fréquence relative de tel ou tel trouble mental

chez les sujets à prédisposition héréditaire, c'est une question

controversée, et qui restera probablement telle, tant que l'on ne

possédera que la classification délicieusement simple qui a reçu

depuis longtemps la sanction officielle : car avant de constater la

fréquence d'une maladie, il faut s'entendre sur ce qu'elle est et ce

qu'elle n'est pas, sur ce qu'elle contient et sur ce qu'elle exclut.

Le chiffre de 3445 malades qui sert de base à la statistique de

l'auteur ne comporte que 68 cas congénitaux, avec ou sans épi-

lepsie, se divisant en 35 hommes et 33 femmes. Ce chiffre est

518 . VARIA. '

faible, mais il est peut-être dû à ce que l'asile étant depuis long-

temps encombré, on évitait autant que possible d'admettre des

cas de ce genre. Dans 30 de ces cas, la tare héréditaire était nette

(soit 44,11 p. 100). Sur ces 30 cas, il y avait 13 hommes et

17 femmes. >

La folie associée à l'épilepsie fournit un groupe de cas bien

définis qui se prêtent aux recherches de la statistique. En excluant

tous les cas accompagnés d'idiotie ou d'imbécillité (dont il vient

d'être question), le nombre des cas de folie épileptique relevés

par l'auteur est de 120, dont 77 hommes et 43 femmes. Ceux de

ces malades qui avaient une tare héréditaire représentent un

pourcentage de 31,66; mais ici la différence entre les deux sexes

est considérable ; il y avait 15 épileptiques héréditaires du sexe

masculin (soit 19,48 p. 100) taudis qu'il y en avait 23 du sexe

féminin (soit 53,48 p. 100). La différence est même si grande que

l'on peut considérer cet écart comme accidentel.

Le degré d'hérédité de la paralysie générale est très discuté :

quelques auteurs voudraient la rayer entièrement du groupe des

folies héréditaires; d'autres l'assimilent à cet égard aux autres

maladies mentales. La statistique de l'auteur porte sur 433 cas -

363 hommes et 70 femmes. - Dans 82 de ces cas, - 60 hommes

et 22 femmes les antécédents héréditaires d'aliénation étaient

nets, ce qui donne un pourcentage de 18,93, et, en séparant

les sexes, de 31.42 pour les femmes, et de 16,52 seulement pour

les hommes. Il résulterait de ces chiffres que la paralysie géné-

rale est moins héréditaire que plusieurs autres formes de folie,

mais que l'hérédité constitue néanmoins l'un de ses facteurs

importants. La différence d'hérédité entre les deux sexes parait

indiquer que la maladie est plus souvent acquise chez l'homme

que chez la femme, ce qui n'est pas sans importance si l'on songe

au rôle considérable que l'on attribue actuellement à la syphilis

dans l'étiologie de la paralysie générale. , .

Il reste à considérer le bloc des folies ordinaires, comprenant

toutes les formes autres que celles sur lesquelles ont porté les

recherches précédentes. Ce bloc comprend 2824 cas (1 218 hommes

et 1 606 femmes). L'hérédité a été constatée chez 815 (soit un

pourcentage de 28,85), et en séparant les sexes on trouve

331 hommes (soit 27,17 p. 100) et 484 femmes (soit 30,13

p. 100.) 1

L'auteur aborde ensuite une question de la plus haute impor-

tance, celle de savoir si une modification de la structure du corps,

ou un état constitutionnel quelconque acquis par un individu au

cours de sa vie peut se transmettre à ses descendants et se mani-

fester chez eux sous une forme similaire ou connexe. Voici près

de vingt ans que Weismann a exposé ses idées sur ce sujet et

l'énorme controverse qui s'est élevée sur ce sujet n'a pas détruit

1 - varia. o19

ses assertions fondamentales. Sur la non-transmission des muti-

lations, presque tout le monde est d'accord ; et quant aux carac-

tères acquis, il faut reconnaitre que beaucoup de faits autrefois

considérés comme des preuves paraissent se prêter à d'antres

interprétations. Examinons la question de l'alcoolisme, qui est

bien un type d'acquisition personnelle. Sur les 3445 cas étudiés,

des excès alcooliques bien nets, non associés à la folie, chez l'un

ou l'autie des ascendants directs ont été rencontrés dans 578 cas

(16,77 p. tOO). En séparant les sexes, on trouve pour les hommes

327 cas (19,31 p. 100) et pour les femmes 251 cas (14,32 p. 100).

En dehors de l'hérédité vésanique, il n'y a aucun antécédent

héréditaire qui figure pour un pareil chiffre dans l'étiologie. Or,»

il n'en devrait pas être ainsi si les caractères acquis n'étaient pas

héréditaires, et la doctrine de Weismann paraît compromise :

elle ne l'est pas en réalité, car il semble bien qu'on soit fondé à

faire une distinction entre un caractère acquis et un empoisonne-

ment du germe plasmatique par l'introduction de l'alcool dans la

circulation générale, et à admettre qu'un empoisonnement n'est

pas un caractère. Des considérations de même ordre peuvent être

invoquées quand il s'agit de la syphilis dite héréditaire. Ici encore

il s'agit d'un état constitutionnel acquis, qui influera sur la pro-

géniture par l'action directe d'un poison sur les molécules du

germe plasmatique'. On a sans doute à faire ici, dans la plupart

des cas, à une infection spécifique du germe ou de l'embryon en

voie de développement, bien que dan- la plupart des cas l'em-'

bryon, incapable de se développer, périsse prématurément. Mais

l'auteur ne pense pas que la doctrine de l'infection spécifique

explique tous les cas. En se limitant au système nerveux, il croi-

rait plutôt qu'une influence .morbide, de caractère non spécifique,

quoique dépendant d'une syphilis antérieure, s'est exercée sur la

cellule germinative; ou spermatique et a si bien modifié la nutri-

tion des groupes de molecules qu'elle contient, et qui président

au développement des centres nerveux préposés aux fonctions de

l'esprit, que ceux-ci sont arrêtés dans leur développement (idiotie),

ou bien que leur capacité de résistance est considérablement affai-

blie, ce qui les conduit à une déchéance prématurée. On se trouve

en effet en présence d'une lésion directe subie par 1 germe plas-

matique, et le processus est probablement semblable à celui qui

prépare le développement de la paralysie générale chez l'adulte.

La syphilis détermine donc, comme le pense mort, une diminution

de 1 éoislance, d'origine toxique, des neurones cérébraux, qui

favorise leur déchéance physiologique. Cette doctrine permet de

se représenter le mode d'action du poison dans la paralysie géné-

rale juvénile que nous avons de très fortes raisons d'attribuer tout

au moins dans la plupart des cas, à la syphitis des prirent ? L'au-

teur adopte cette étiologie, qui est généialement, quoique non

520 VARIA.

universellement reconnue, mais il ne croit pas que le rapport qui

existe entre la syphilis parentale et la paralysie générale juvénile

soit un rapport d'infection directe; il invoque de préférence une

altération de nutrition de nature parasyplrilitique, pesant sur les

neurones. Et si cette manière de voir est exacte, il est clair que

les cas de, ce genre ne peuvent pas être considérés comme des

cas de transmission de caractères acquis, au sens où l'entend

Weismann : ce ne sont pas en effet les modifications somatiques

qui sont alors héritées, mais un vice de nutrition s'exerçant direc.

tement sur le germe plasmatique.

La question a été examinée jusqu'ici au point de vue de l'héré-

dité, directe ou collatérale, de la folie et des états connexes. C'est

une loi connue que le semblable engendre le semblable, et ce dont

il faut s'étonner, ce n'est pas de voir cette loi en activité continue,

mais bien de constater que son fonctionnement est si souvent

contrarié ou dissimulé par l'action d'autres lois qui nous sont

moins claires. Les phénomènes de l'atavisme appartiennent sim-

plement une hérédité reculée, et n'affectent pas le principe de

la descendance directe. On est souvent surpris dans les asiles de

voir que dans une famille manifestement imprégnée de folie, il y

a plusieurs individus qui demeurent indemnes, et en revanche de

voir la folie apparaître dans des familles sans aucune tare psyclio-

pathique. Il semblerait que lorsque le père et la mère sont aliénés

peu, ou même aucun des enfants ne devrait échapper à la folie,

il n'en est pas ainsi cependant, et bien que, assurément on trouve

un plus grand nombre de ces héréditaires, si les deux ascendants

sont fous que s'il n'y en a qu'un seul, la proportion des descen-

dants indemnes demeure pourtant considérable. Galton a juste-

ment fait remarquer que « la loi de régression pèse lourdement

sur la plénitude de la transmission héréditaire d'un don » orga-

nique ou intellectuel. Cette loi veut que les caractères de la race

soient plus persistants que les caractères individuels, et c'est à

elle sans doute que beaucoup d'enfants doivent d'échapper à la

folie de leurs ascendants. Il est manifeste d'ailleurs que les enfants

de mêmes parents sont très dissemblables entre eux, ce dont

Weismann a donné une explication aussi ingénieuse que vraisem-

blable. Mais il se peut fort bien qu'il y ait d'autres facteurs que

ceux qu'invoque Weismann. Mais, bien que l'hérédité directe et la

réversion représentent des facteurs prédominants dans l'histoire

des phénomènes de l'hérédité, elles ne s'appliquent pas à des

groupes importants de cas dans lesquels on voit apparaître chez

les descendants des caractères absolument nouveaux, qui ne se

rencontraient ni chez les ascendants directs, ni chez les ancêtres

les plus éloignés. De nouvelles combinaisons des éléments du

germe plasmatique, ou des variations de ces éléments sont surve-

nues, et ont abouti au développement d'un être différent de celui

. VARIA. 521

qui l'a précédé. Ces variations sont naturellement de la plus haute

importance dans le développement phylétique, puisqu'ils four-

nissent les matériaux dont s'empare la sélection naturelle pour

former des variétés nouvelles et meilleures : elles sont donc à la

hase de tout progrès. Mais il y a des variations défavorables, et

ce sont celles-là qui intéressent l'aliéniste. Et c'est ainsi que l'on

voit apparaître des cas de folie dans des familles rigoureusement

pures de toute tare. De pareils faits sembleraient indiquer qu'il

se peut que les germes provenant de chacun des parents, étant

respectivement sains, leur combinaison puisse néanmoins donner

un produit instable : mais il s'agit là d'une simple supposition, et

dans l'état actuel de la science ces cas ne sout pas explicables. On

peut dire que l'élément mâle et l'élément femelle sont alors en

état d'incompatibilité physiologique, mais c'est plutôt la consta-

tation d'un fait qu'une explication. Nous savons que si ces élé-

ments sont trop uniformes, le résultat est fâcheux, et que s'ils

sont trop dissemblables, le résultat est encore fâcheux ; et c'est à

peu près tout ce que nous savons. Quant aux causes générales

des variations, nous sommes là aussi bien ignorants : cependant

l'observation et l'expérimentation mettent lentement au jour r

quelques faits nouveaux (recherches de Cossar Ewart), et il serait

très important d'étendre nos connaissances sur ce sujet. Ou con-

sulte souvent les aliénistes sur des mariages entre personnes dont

l'une a des aliénés dans sa famille. Si par des combinaisons

sélectives on pouvait opposer une diathèse à une autre, la

réponse serait plus facile et plus utile. Prédire le résultat de

l'union de deux individus sains ou malades serait pour le médecin

un avantage de premier ordre. De là recherche des moyens de

combattre une tendance héréditaire à la folie, l'esprit passe tout

naturellement à une question plus large, celle de l'amélioration

possible de la race par l'union d'individus spécialement choisis.

On ne peut que l'effleurer ici, mais il semble bien que si les lois

intimes de l'hérédité étaient mieux connues, on pourrait espérer

un fonctionnement considérable de la race, perfectionnement qui

à l'heure actuelle n'est peut-être pas aussi progressif qu'on se le

ligure généralement. On peut très bien se demander si le dévelop-

pement intellectuel de l'époque présente est notablement plus

élevé que celui qui était l'apanage de plusieurs civilisations

anciennes, dont les monuments écrits nous donnent à réfléchir,

Lorsque nous voulons leur comparer notre civilisation actuelle,

il faut en effet distinguer avec soin le simple accroissement des

connaissances, - qui est considérable à notre époque, - du pou-

voir intellectuel, qui l'est peut-être moins que l'augmentation du

savoir ne nous le fait croire. Mais si des millions d'années n'ont

pas amélioré la qualité du cerveau humain, on réalisera peut-

entre cette amélioration par l'application des principes biologiques,

S "22 varia.

et si le xixe siècle a-vu la biologie devenir une science précise par

la découverte des lois générales qui président au développement

du monde organique, il n'est pas interdit de penser que le siècle

actuel assistera non seulement à l'extension de ces lois, mais

encore à leur application pratique au perfectionnement progressif

de la race humaine. Il ne suffira pas toutefois de découviir des

lois ; il faudra les appliquer et cela sera fort difficile, car il y

faudra la complicité des individus et de l'opinion publique, en un

mot, il ne faut pas craindre de le dire, une véritable révolution,

ou tout au moins évolution, dans les moeurs matrimoniales.

Galton, qui a étudié lumineusement l'hérédité, voudrait que l'on

accordât des diplômes aux jeunes gens des deux sexes qui révè-

lent des talents exceptionnels, et que l'on encourageât entre eux

des mariages précoces, en les assistant pécuniairement ou autre-

ment en cas de besoin, au moyen d'agences créées à cet effet. On

voit tout de suite que le procédé n'est guère pratique. Quant à la

législation elle est et sera toujours impuissante sur ce terrain. Il

faudrait simplement que les familles et les contractant eux-mêmes

fussent persuadés de l'importance des unions sélectives. Cela

arrivera-t-il jamais ? L'auteur en désespère d'autant moins que la

diminution en Angleterre du taux de la natalité, diminution per-

sistante, considérable, régulièrement progressive depuis un quart

- de siècle, prépare silencieusement une révolution du système

social. Cette diminution est masquée, actuellement, par un abais-

sement du taux de la mortalité, mais elle fait son oeuvre. Sans

doute le nombre des unités constitue pour une nation un facteur

d'importance capitale de la lutte internationale pour l'existence;

mais il y a d'autres facteurs, ceux-là d'ordre biologique, dont

l'importance n'est pas moindre. Une nation dont la population

resterait virtuellement stationnaire, peut continuer à exister sans

que le nombre de ses unités augmente, pourvu que la race soit

bonne ; mais si la race vient à se détériorer, la nation est perdue.

Or, pour l'auteur, c'est une vérité biologique qu'une population

ne peut pas rester stationnaire sans que la race dégénère : car il

y a alors absence ou diminution de concurrence, et par consé-

quent chaque unité ne donne pas tout ce qu'elle peut : c'est un

fait d'observation que l'organisme humain ne met en jeu toute sa

puissance que sous l'influence d'une stimulation extérieure : il en

est de même de l'unité organique sociale, qui n'étant pas déve-

loppée en vigueur par la concurrence, deviendra languissante et

dégénérera.

Après quelques considérations finales, l'auteur conclut qu'il est

nécessaire de poursuivre par tous les moyens, chez l'homme,

chez les animaux, chez les plantes, par l'observation et par l'expé-

rimentation, la recherche des lois intimes de l'hérédité. Les résul-

tats des travaux de ce dernier quart de siècle surtout sont prao-

VARIA. M3

1

(juempnt insuffisants, mais ils sont encourageants. Il faut songer

que si complexes, si enchevêtrés que soient les phénomènes de

l'hérédité, ils obéissent à des luis, tout comme la pomme qui

tombe obéit à la gravitation. Il faut chercher ces lois dont la

découverte contribuera puissamment au perfectionnement de la

lace humaine. Il. DE IUSGRAVE-CLAY.

70'' Coucnès DE la BRIl'ISH Médical Association, tenu à Manchester.

.luillet-aoùt 1902.

Ces travaux parus en 1903 ont fait l'objet d'analyses publiées au

firilish Médical Journal, à la fin de 1902 (octobre-novembre). Il y

a lieu d'y signaler les discussions générales de la section médico-

physiologique relatives aux tendances modernes de l'assistance des

aliénés.

Le président de la section George-N. Mould, après avoir rappelé

que le précédent congrès, tenu à Manchester, comptait parmi ses

membres présents Charcot et Virchuw fait un bref éloge de ces

illustres disparus. Il rappelle ensuite qu'à l'asile de Manchester,

dès 1862 fut appliqué le cottage System.

Le or sir John Sibbald expose ensuite son rapport général sur

les soins et le traitement au début des maladies mentales. Il pré-

conise un système que M. le professeur Clouston a depuis égale-

ment défendu et développé (Journal loi Mental Science, octobre

1902). Il demande la création entre l'asile fermé et les soins pri-

mitifs à domicile où le diagnostic se dessine d'un échelon inter-

médiaire qui .est l'hôpital simple pour maladies mentales sans

internement.

De la sorte, promptitude des soins, possibilité de l'enseigne-

ment psychiatrique courante) disparition du stigmate inhérent au

passage a l'asile fermé. L'auteur combat l'idée de fonder pour les

maladies mentales des hôpitaux à part, établissements distincts des

hôpitaux généraux et des asiles d'aliénés. '

De quelque nom qu'on le désigne, ces hôpitaux ne seraient jamais

pour le public que des asiles'et les malades qui pourraient y trou-

ver avantage tenteraient toujours à y entrer spontanément. Cette

nécessité d'éviter tout ce qui peut suggérer l'idée d'asile à l'esprit

du public est pour lui tellement importante que les services spé-

ciaux des hôpitaux généraux eux-mêmes, tout en répondant aux

besoins des maladies mentales au début, devraient comme dispo-

sition et administration n'être en lien distincts des autres services

médicaux.

Déjà, il y a vingt ans, le conseil de comité de Londres avait

fait une enquête en ce sens et adopté les mêmes vues en prin-

cipe. C'est te même mouvement d'idées qui en France c'est mani-

festé dans les discussions de la Société médicale des hôpitaux de

524 VARIA.

Paris en 1901 et dans la création à Bordeaux sur l'initiative de

Régis d'un service à l'hôpital Saint-André pour l'observation et

le traitement de certaines psychoses dites d'hôpital. -

A l'importante discussion prirent part MM. Yellowlees, Wigles-

worth, Woods Bower, R. Jones, J. Stewart, Schofield, Andriezen,

S. Tuke, Douglas, J. Beath, Bruce, Reynolds et Shair. Il est à

noter que le principe ne fut pas mis en questions, mais seulement

la question de savoir s'il convenait d'établir l'hôpital psychiatri-

que sans internement comme autonome ou annexé soit à l'asile,

soit à l'hôpital ordinaire. Le contre-coup de ce débat s'est fait sentir

depuis dans ceux des sociétés médicales d'Ecosse et d'Angleterre.

A signaler aussi à ce congrès la description du dernier établis-

sement construit à Bexley, où l'influence combinée du cottage sys-

tem et d'Altcherbitz prévalent avec la spécialisation des services de

chroniques et de convalescents.

Les rapports de la neurasthénie puis de la syphilis, avec la folie

ont fait l'objet des exposés spéciaux à MM. Cl. Albutt, pour la pre-

mière et J.-W. Mott, pour la deuxième. '

La catatonie et la stupeur ont fait l'objet du rapport par Robert

Jones de Claybury. Les mêmes questions sont en même temps, on

le voit à l'ordre du jour, des deux côtés de la Manche. A. M.

Infirmiers des asiles.

Poursuites contre un gardien pour coups et blessures sur un

aliéné. - Sur mandat d'amener de M. Durand, juge d'instruction,

on vient de mettre à la disposition de ce magistrat un gardien de

l'Asile départemental d'aliénés du Hhône, nommé Philibert Dufour.

Cette opération a été décidée à la suite d'un drame qui s'est

déroulé dans une cellule de l'asile de Bron. Un des gardiens rasait

un malade, nommé Benel. Tout à coup, celui-ci fut pris d'une

crise de démence et menaça son coiffeur, qui appela à l'aide un

de ses collègues. Ce dernier, voyant le danger, accourut. Taillé en

hercule, Dufour s'empara du furieux et le jeta au loin, au hasard.

L'aliéné tomba contre un escabeau et resta sur le parquet, immo-

bile. Il avait deux côtes enfoncées et des contusions diverses.

L'affaire s'ébruita. Le gardien Dufour fut d'abord révoqué; main-

tenant, il aura à répondre devant la justice du délit de coups et

blessures. (D'après une dépêche de Lyon du 9 mai.)

FAITS DIVERS.

Asiles D'ALIÉNÉS.- ? omizctiozs.-1'Iouvement de mars 1901 et

d'avril 1904. M. le Dr Maunier, médecin en chef à Aix (Bouches-du-

faits DIVERS. IJ

Rhône) nommé à Marseille. - M. le Dr Caperas. médecin-adjoint

à Lafond (Charente-Inférieure), nommé médecin-adjoint à Dury

(Somme), en remplacement du Dr Simon, mis en disponibilité sur

sa demande. M. le De lt,vLl;ols, dixième du concours de 1902,

nommé médecin-adjoint à l'asile d'aliénés de Lafond (Charente-

Inférieure). M. Josseranu, Directeur de l'asile d'aliénés de

Cadillac (Gironde), nommé directeur de l'asile d'aliénés de Cha-

teau-Picon à Bordeaux en remplacement de M. 111engardaqua,

décédé. M. Meillet (Léo), Directeur de l'asile d'Aix (Bouches-du-

Rhône), nommé Directeur de l'asile d'aliénés de Cadillac (Gironde).

- 11. Guichet, Conseiller général des Bouches-du-Rhône, nommé

Directeur de l'asile d'aliénés d'Aix (Bouches-du-Rhône). M. le

or BEY, médecin en chef à Aix (Bouches-du-Rhône, nommé à

Marseille.

Hospice DE Bicètre. M. BOURNEvILLE. Visite et présentation de

malades, le samedi à 9 heures et demie très précises.

XIV0 COI\'GHÈS DES Médecins ALIÉNISTES et NEUROLO.ISTES DE France

et DES pays DE langue française (Pau lei'-7 août 1904-). Le XIVG

Congrès des médecins aliénistes et neurologistes de France et des.

pays de langue française se tiendra cette année à Pau du 1er au 7

août sous la présidence de M. le professeur Brissaud.

Adresser les adhésions et communications à M. le Dr Girma,

secrétaire général du Congrès, médecin-directeur de l'Asile public

des aliénés de Pau. '

Nous prions, dès maintenant, les auteurs à ce Congrès, de

bien vouloir nous envoyer pour le 25 juillet, un résumé de

leurs communications.

Enfant assassin. A Moknine (Tunisie), au cours d'une lutte

entre deux enfants de dix ans, Ali et Abdallah, le premier, au paro-

xysme de la colère, tira deux coups de fusil à bout portant sur

l'aure Abdallah fut tué sur lecoup; le meurtrier a été arrêté. (lit-

transigeant du 4 mai 1904.)

Médecin et INST.TUTRICE.- Une IDYLLE chez les aliénés. Suicide

DESDtux amants. Un double suicide s'est produit à l'asile d'alié-

nés de Maréville, près de Nancy. Le Dr Bichedois, attaché à l'éta-

blissement, s'est suicidé avec sa maîtresse, nommé Box, en s'as-

phyxiant dans sa chambre, à l'aide d'un réchaud de charbon. Le

docteur, bien connu à Nancy, où il a fait ses études, était âgé de

vingt-huit ans. Il était attaché à l'hospice de llfareville depuis

plusieurs années.

H avait fait, depuis deux ans, la connaissance de MUe Box, une

ancienne institutrice, très jolie, qui avait abandonné sa profession

pour se fixer à Nancy. Il y a deux ans, elle fut arrêtée pour, vol

526 faits DIVERS.

d'une bicyclette et condamnée par le tribunal. A l'audience, elle

fut prise d'une crise hystérique qui détermina le parquet à la met-

tre en observation à l'asile de llarémlle. Là, elle tit la connaissance

de 131chebois et, après avoir purxé sa peine en prison, elle devint sa

maîtresse. Bichebois voulait l'épouser, mais sa famille s'y opposa.

On croit que cette résistance fut la cause de ce double suicide, qui

a causé une vive émotion à Nancy.

Mokt d'une fumeuse d'opium. M ? Million, née Félicie Grand

couturière, 28, rue Monsieur-le-Prince, avait pris en Indo-Chine,

alors qu'elle vivait près de son mari, fonctionnaire colonial, l'habi-

tude de fumer l'opium. Elle l'avait conservée en France. Mais cette

passion, naturellement, faisait du tort à son travail et peu à peu

ses pratiques l'abandonnèrent. Elle résolutde se suicider et alluma

un réchaud, prit sa pipe d'opium et, au milieu des hallucinations

du narcotique, attendit la mort. Quand au bout dequelques heures

on est venu ouvrir la porte, on l'a trouvée étendue souriante. Sur

un meuble elle avait laissé une feuille de papier sur laquelle on

pouvait lire ces quelques mots : « Adieu je pars pour le pays des

rêves ! » (L'Epoque du 13 avril).

Deux suicides A l'asile d'aliénés D'UccLE. Le parquet de

Bruxelles vient de se livrer à une enquête au sujet de deux drames

qui se sont deroulés, en moins d'un mois, dans la maison d'aliénés

de la chaussée d'Alsemberg, à Uccle.

La première affaire s'est déroulée le 6 avril dernier; un pension-

naire, Alfred E..., âgé de quarante-neuf ans, trompant la surveil-

lance de ses gardiens, s'est jeté dans un puits et en a été retiré

mort. Dimanche dernier, un autre drame s'est produil dans ce même

établissement; M ? M..., née à Monseul832, domiciliéeàCurebhem-

Anderlecht, avait perdu ses facultés mentales à la suite de la

mort de son fils. Enfermée à l'asile d'aliénés, elle était l'objet d'une

surveillance toute spéciale, car elle était devenue dangereuse en

ces derniers temps. Mmo M... a cependant réussi à sortir de sa

chambre, pendant que sa gardienne était allée chercher son dé-

jeuuer. Grimpant sur le toit de l'immeuble, la malheureuse 's'ac,

crocha à la gouttière et se laissa tomber dans la rue. Uu passant

prévint le personnel de la maison de santé ; Mme \I... fut trans-

portée dans sa chambre, mais tous les soins dont on l'entoura

furent inutiles; elle succomba peu après. ion de

M. Nagels, procureur du roi, dirige lui-même l'instruction de

ces deux drames, qui ont produit à Uccle la plus douloureuse

impression. (La Chronique de Bruxelles, 4 mai.)

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

I : Ë'HE ! ! t. Conception du mot hystérie. In-8° de 48 pages. Librairie

0 Uoiu, S, place de l'Odéon. Prix : 1 fr. 50.

Cuius (Jean) et Pagniez (Pltilippe). Isolement et Psychothérapie,

1 vol. in-8" de 408 pages. Librairie Félix Alcan, 108, boulevard Sdint-Ger-

uuun. Piix : 9 fr.

CHI11S (F,), L'eau (l'Evian, Ce qu'on en dit. Ce qu'elle fait. Ce

qu'elle est. ln-S° de 88 pages. Librairie J.-B. Baillière, 19, rue Haute-

leuille.

DuBots. Les psychonévroses et leur traitement moral. 1 vol. in-8o-

de5â8 pages. Llbl all'le Masson, 120, boulevard Saint-Germain. Prix : 8 fr.

NUE ! , (J -P.). La vision. 1 vol. in-18 de 380 pages. Librairie Octave

Dom, 8, place de l'Odéon. Prix : 4 fr. .

PEETERS (J.-Al.). Situation actuelle de la colonie de Gheel. In-8° de

16 pages. Mool. 1904. '

Schuster (P.). Die inte1'suclw/1,r¡ nesvenhranher und allgmeine

neurologische diagnostik. In-8" de 100 pages.. Ul'uan et Schwarzeuberg.

Herliu, 1904.

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étant l'une des plus importantes de l'année, nous prions

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mentée des frais de recouvrement, à partir du

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SUITE leur renouvellement par un mandat-poste.

Afin d'éviter toute erreur, nous prions également nos

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- Nous rappelons à nos lecteurs que l'abonnement collec-

tif des Archives de Neurologie et du Progrès Médical

est réduit à 28 francs pour la France et 30 francs pour

l'Etranger.

. Le rédacteur-gérant : BOUIINEVILLE.

TABLE DES MATIERES

Aboulie. L'- essentielle et son trai-

tement psychothérapique, par

Iléi-illon, 81.

A Clhl1\DROl'LASE. Voir Alexie.

Acromégalil. Cas d'- aiguë, 73.

ACIi0P.IRESTnÉSIE, Par Egger, 169.

Adénome du corps pituitaire sans

acromégalie, par Cestan et Hal-

bers tad t, 78.

Aérophagie nerveuse. Formes sévè-

res-de l ? par Bouveret, 397.

AKATHISIE.SyndroMepSyCliaSté@i]qUC

de l ? par Raymond, 69.

Alcool. L'influence de l'- sur l'efii

cacité des effets thyroïdiens, par

Ladame et IfaslcovPC, 73. L'-

aliment et l'hypothèse du méca-

nisme humain, par Forel, 237.

ALCOOLISEE des enfants, 95. Traite-

ment de l'- à l'ambulance psy-

chothérapique de la clinique de

Bechterew, par Pewnitzki, 175.

de l'enfance, 190. Infirmeries

pour le traitement hypnotique de

l'- en Bussie, par Orlitzky, 265.

Alexie chez un achondroplase, par

Fiirsler et Marie, 80.

Aliénation mentale. Quelques con-

sidérations à propos du rapport

de l ? par Lentz, 399,

Aliénés. Les - en liberté, 92, 268,

350, 'ri, 525. Les symptômes pu-

pillaires chez Ins-et leur valeur,

par Cowcn, 137. Les en liberté :

suicides, 185. -voir 1'1'icholillo-

manie. Les - en Roumanie, par

Zosin, 267. De l'examen de psy-

chologie clinique des -, par Fer-

rari, 334. De l'action possible sur

les - des conversations raison-

nables, par Buckley. 400. - Voir

Fébricilarlls. Le lraltement des-

dans la clientèle privée, par Sa-

vary-Pearce, 487. Sur l'influence

thérapeutique du patronage des

- , par Zander, 506. Poursuites

contre un gardien, pour coups et

blessures sur un -, 526,

ALLOCIIIRIE. De l ? par Trapiezni-

kow, 150. ,

Amaurose. Voir ldiolie, tactique

par Pierre 1\lal'lI' et Léii, 258. '

Amnésie. Voir épilepsie.

Amyothopiiils. . 1,C bioris iiprvptiqes et

pathogénie des - d'origine al'Ii,

ciilane. par l'lgllllli, 387.

An wct`ste. L'- obstétricale et la

F;i lez, 316. éthy 1-met hylique, par

Finez, 346.

Anatojiie. L'- du cerveau, la psy-

chologie ei la 1 héOl'iP pliilo-opln-

qne de lacogniliun, pal' We\gand,

50.

Année. L'- psychologique. 348.

A;>;FIIÉS1E acoustique, par Egger,

3 12. Do

Anevhisjie. Un cas du. par l'ugh.

338. Un cas d'-avant mmnlé une

tumeur du médiastin, par l'ugh,

382. n

Aphasie. Contiibution 1 (le

l ? par l3miuu-Nmlzwvn·cli, 65.

La aursiion de l'- muW ce sous-

corticale, par Ladame, 70 SUI' 1'-

amnesticpe. par f>op"fr, 5J 1.

Apoplexie. Physiologie pathologique

dft'aHaqued ? par Ijinel-Saiiglé.

239.

AP.1\-DI;CBE\NE. Voir Paralysie sa-

lu mine.

Archives de médecine expéninenlale

et d'anntomo-palliolonic, 347.

Asiies D'AL[Ë.M' : s. Mmt'

personnel, 13. - de la Seine.

(Concours de l'internat . 89. -

de Villejuif, service de ,11. 'l'ou-

]OIIS £ : , 93. - de Préiiiontré, 91. -

Voir Concours. - de Hion (con-

cours), 191. La lnupa ? tiun ,ie la

tuberculose par les h,j(;ille, < : 011-

tenus (Idiis les halles. Nredomi-

na ncp de ce mode de ppopagation

dans les -, par AIIgla'If', 250,

Des movens (l'innélioier l'OIg-anl'

aliolllTjl'dil'al.' oIl ? I'1l B,'IltJul',

par Cro"q, 250. Quelques 1'"11131"

ques sur le SIII"I"" dans les-.

par lienham, 251. - Voir 1nfti : '

misères. Vuir Phtisie. - \omi-

nations et promotions, 308. - de

TABLE DES MATIÈRES. S29 9

Clermont, 352. - de La Charité

(,Iqièvre), 352. -Nominations, 526.

Assassin. Enfant -, 527.

Assistance. Voir Epileptiques. -

des épileptiques, 349. L'- des

idiotes, 431.

Astasie-abasie. Réflexions sur un

syndrome d ? par de Buck, 67.

ASYMETRIE Dolorifique, par Ioteyko

et Stefauowslca, 63.

Ataxie. Observation d'-cérébelleuse

aiguë d'origine organique compli-

quée d'hystérie, par Popow, 321.

Atrophie. Voir Cervelet. - muscu-

laire du membre inférieur gauche.

par Glorieux, 66. Un cas d'-

du membre inférieur gauche et

d'hypertrophie du membre infé-

rieur droit, par Glorieux, 67. -

musculaire type Charcot-Marie,

par Déjerine et A. Delille, 79. -

cérébelleuse cérébrale, par Bour-

neville et Crouzon. 496. -

Atropine. Voir Psychose hallucina-

toire.

ANTOLtTOTOXINES. Voir Epileptiques.

Auto-intoxication. L' comme cause

des maladies nerveuses et men-

tales, par Karpinsky, 149.

Babinski. A propos du réflexe de -

236. '

Bégaiement. Le - graphique, par

Berillon, 502.

Blessures. Le diagnostic des - de 1

la tête, par Derrick, 390.

Bourreau d'enfants, 272.

BRAID, James. Lettre autographique

de -, par Bétillon, 347.

BR03fIP1NE. De l'action thérapeutique

de la -, par de Moor, 491.

Bromures. Contribution à l'étude de

l'action physiologiquede quelques

, par Féré (fin.), 75.

Brûlures. Voir Mutisme.

Calvitie. Observation de - congé-

nitale partielle dans ses rapports

avec la sensibilité pilaire, par Os-

sipow, 56.

Canal rachidien. Voir Tumeur.

Cancer. Les localisations du - sur

le svstème nerveux périphérique,

par Raymond, 273.

Caractère. Changement de au

cours d'une, évolution dent'tire.

par Demonchy, 499.

Catalepsie. guérie par l'hypno-

t'ule, par Viviani, 420.

Archives, 2« série, t. XVII.

Catatonie. Histoire de la -, par

Arndt, 333. Voir Démence pré-

coce. Observations cliniques et

expérimentales sur la -, par

Bruce, 335. Notes sur deux cas

propres à démontrer la différence

qui existe entre la et la mélan-

colie avec stupeur, par Dawson,

400. Quelques réflexions à pro-

pos de la , par de Buck, 403.

CÉCITÉ verbale pure, par Brissaud,

69. - verbale, par Brissaud, 173.

corticale. Absence de réaction

pupillaire, par Josserand, 325.

Voir Tabès. La - et le pronostic

du tabès, par Terrien, 496.

Cellules nerveuses. Voir Moelle.

Sur la signification de la chroma-

z tolyse centrale avec déplacement

du noyau dans les de l'homme,

par Turner, 378. A propos du pro-

blème entre les voies de conduc-

tion intercellulaires et la périphé-

rie de la - par Donaggio. 388.

La normale et pathologique.

Altération histologique des cen-

tres nerveux dans les délires toxi-

infectieux des alcooliques, le déli-

rium tremens et le délire aigu,

par Carrier. 421. Sur la question

du développement des dendrites

des - spinales chez les vertébrés

supérieurs, par Geir, 507.

Centres olfactifs. De la localisation

, des - dans l'écorce cérébrale. par

Gorschkow, 52.

Cerveau. Voir Anatomie. Des alté-

rations du et de la moelle dans

la psychose polynévritique de

Korsakow, par Wyroubow. 54.

Voir Echinocoque. Voir cysti

cerque. Un anormal de poids

anormal, par Sutcliffe, 386. -

Voir Corps étranger.

CERVELET. Les lésions histo'ogiques

de l'écorce dans les atrophies du

, par Lannois et Paxiot, 58.

Rotation autour de l'axe longitu-

dinal chez les animaux avec lé-

sions unilatérales, du -, parSergi,

;;87.

Chien. Suites de la section du facial

chez le -, par Arloina, 380.

Chirurgie abdominale. Deux cas de

- chez des aliénés pour des ten-

tatives de suicide, par Jones, 400.

Choline. La dans les maladies

nerveuse^, par Wilson, 419.

CHORÉE. Un cas de de Ilunting-

34

530 TABLE DES MATIÈRES

ion. suivie d'autopsie, par Glan-

vilde Itusll, 316. Un caq de - et

de grossesse avec aliénation men-

tale, par Ioiies, 400.

C Il RO,%I,%1'0 LYSE. Voir Cellules ner-

veuses.

COGNI11ON. Voir Anatomie,

Colonne vertébrale. Voir l'arlcirt-

son. '

Commission DE la Tuberculose. Rap-

pot t de la - nommée par l'Asso-

ciation médico-psychologique de

la Graiide-Bretagneet de 1'lilitii(le,

406.

C1111PHRSSION du nerf médian par

ossification probable du hra-

chial antérieur. Kéiatodermie pal-

maire luuilée àla zone du médian,

par Daillville. 312. - bulbaire,

voir Pression intracranienne.

Concours d'internat en médecine

des asiles (3 décembre 1903), 191.

lIèg- ! pment du - des médecins

adjoints des asiles. 426.

Confusion mentale. Deux cas de

polynévritique, par Crocq, 11J.

Congrès. XIV* (les médecins alié-

nistes et neurologie tes de Fiance

et des pays de langue française,

349, 527. 70' - de la Br lIslt-lé-

dical Association, tenu à Manches-

ter. Juillet-août 1902, 523.

Conscience. Un cas de double

par Wilson, -100.

Corps étranger du cerveau, par

Vallas, 391.

Corps pituitaire. Voir Adénome.

Courant continu. Les plinclpes de

l'action thérapeutique du -, par

Schatzky, 73. - Voir névrite.

Course en flexion. - Psychologie

de l'entraînement dans la -, par

Régnau (1<'.), 176.

l;nt : TtvrsvE, par Mill, 135.

CYSTICERQUE, Un cas de du cer-

veau ayant causé la folie, par

Sinclatr-I3lack, 337. Un cas de

du cerveau, par Sullivan, 383.

Dégénéré. Le cas d'un non re-

connu tel et puni par la loi, par

Goodall, 24 ?

Déglutition. Voir Troubles psychi-

'lues,

Délire. L'évolution du - dans

quelques cas de mélancolie, par

Weatherly. 137. Deux cas de -

de mediumuité, par Sollier et

Boissier, 255. - consécutif à des

pratiques spirites, par DuhPm,

3ÍO. - spinl'J, par Marie 'Mi

Contribution à l'étude mélltro-

légale du - de dépossession ou

de revendication, par Mabille

411. '

DELIIIIUM TRI : 11EVS. Un cas de au

cuurs d'une hallucinose ilurhllve

éthylique, par Pripariaki, 465.

Démence catatonique Contribution

à l'étude rie la -, par Mounlloft',

14. -- sfnile. Voir Sénilité De

quel4ues éiEments de di,ynoslic

de la précoce, par Dunlllll, 161.

Voir Syphilis. - précoce nt cafa-

lonie. par Séglas, 334. Un cas d.-

forme truste Iln - précoce, par

lasselon, 's;S3. La - précuce, par

Masselon, 512.

DISCOLRS présidentiel prononcé à la

soixante et unième réunion an-

nunlle (1j l'Association mélico-

pswlloluique, tenue à Lmerhool.

le 24 juillet 1902, Par\\'ileswurth.

516.

Dispensaire. Le antialcoolique de

Paris, 269.

Distinctions honorifiques, 192.

I)v·En'rtcRnrtIIE, pr ttaymoml, ? 9.

Dysenterie. La prophylaxie et le.

traitement de la d'asile, par

Jlaciiullan, 416.

Dysimiagië psychique. Voir Troubles

psychiques.

EnnxocnnuE du cerveau, par Fedo-

row, 238.

Econcn cérébrale. Voir Centres ol-

faclifs. Des modifications subies

pol' 1'- du cn-vrau neiidant le

sommeil, par NalbounP, 53.

Vmr Cez'aelel. Queiques cnra'tè-

rpsnouvfaux de la structuie e

intime de l'- clnez l'lomme, pm

TurneÍ', 478.

Ecriture. Un cas d' en mil 011',

parUufou',64.('tdbnHetnen-

tale, par Foerslel', 260. UII ca< d'-

automaiique, par liéiillon, 421.

Lxmsow : vEniT. Voir Psychose hnl-

lucinatoire. Voir sulfonal.

Encéphale. Voir Monstruosité.

bKCF.pHAUTE.Surl'hnurr) ?

queen parliciilier de nature tu-

berculeuse, par 13nmhicci, 387.

[^ophtalmie. Voir Syndrome

l's('ENUY\tE. Voir Paralysie générale.

I'.pii.epsii : . Un cas il' avec g»ome

consécutil à une lésion trauma-

TABLE DES MATIÈRES. 53 1

tique du cerveau, par Urqnhart et

Fr-rri Itoherisoti, 43. Qnplqnps

Cnn·oiNlanons sur l'- tardive et

1'- sénile, p 11, 71. L'anl-

npsip PI les 1 l'On hies rie la cons-

cipncp dans l'- par Maxwell, 87.

Traitement de l ? 93 ? Pallio-

géuie et indications lltéravlm·u-

tiques, par Paris. 97, 206. A propos

du diacrllOS' ie de l'- et de la para-

lysie irénéralp, par Séglas et Fran-

cats 136. - d'origine na',]." par

Lilllnllls, 158. Recherches cliniques

et

rip et l'i-liolie, par ! 3ùnrnpvdle,

182. 1 ? et le mal iag-e, 190. Sur

l'action dp l'écorce rula ? Iiq "" ria ns

ses rapports avec l'- l;a ksn-

nnnnc et la solilion. par IW ys-

lord, 182. Un ras il'- de Kojerni-

kuff ;.¡arAlf¡le>l¡y, 50 ? ;. Trail"lII"nt

de 1'- par la diète, par Sdlnilzer,

524. .

Epileptiques. L'assistance des -

189. Allloc\ tOloinps et anlHlulO'

cy otoxines spécifiques des -,

par 1 : II1, 387. -

Enslsls. Voir. Paralysie.

Etat de mal. Un cas d' compliqué

de SI il 1'1", ¡lie, tar Green, 391.

Jugement, exécution, autopsie et

- de 1.oii Gzolgo,z, alias E,{'-

Nieiiiati. meurtrier du pré-

sidellt )111t-Kitili-y. par Mac Do-

mil'l SI)iizka, 247. Rapport

sur l'examen de l'- de Macheito

Charl-<, pilr 'Velu' et Kohler,

17 I ? yui ab Il,il à l'homicide,

par Revinglon, 06.

Ewucu sme. Un cas d'- familial,

1);, 1- S,i i i 11 o ri, 60.

Ex mien. Les résultats rJ'l1l1- méili-

c,U 1),,ii, La"s, 21S.

EXC'TADIIITR idioniiisculaire chez

le^ ? 1)1;11'1111'<, pal' Implant

I\XOSTOEsmlllliple8 à l"udalicesl1p-

purative, par Lannois et Ruy, 61.

Face. Voir Monstruosité.

IIAISCFAU pyramidal. Le - direct

dans le l'01l1"11 antérieur de la

momlr·, por Déjerine.

hB"1 IFA,\T.1; délirants pris pour des

aliénés, par licitj,,6, 412.

Fétichisme. Note sur un cas de ,

pal' dl' \lnOI' 147

Fiévrk typhoiiie. Voir Psychose.

I'otF. Sur le IraitPlIIpl1l cllIlIll'g-ical

de la avec délusions, basé sur

son élude physiologique, par

Clay Shaw, 71>, t'illl.. sur la pa-

thogénie de la diabétique, par

Dwv·ou, 13G. N mnie sur la - ctr-

culaire et sur les tonnes ci,c1l-

lai ces des psychoses, par Souk-

lahotf et Gannon lwne, 1 17 La -

au point de vue .l'I,jdiqlle en

Allemagne, par Kornfeld, 155.

maniaque dépressive avec autop-

sies, par l'atoll, 160, Les signes

auxquels se rfconnut la - et

les problèmes de la psychiatrie,

par Abbut, 1110, à double

forme avec syndrome paralytique

chez un aliéné atteint de pachy-

méniyitr Cénebr.rlr Nt dn t;unme

du ceivelel, par Doiitrebente, 162.

Une paille dans la législation an-

rilaise sm' la -, pnr `VIWr, 243.

La - chez les unhectes.par

'i'redolrl, 9. ympl0mes hys-

tériques de la simule, par

i'iis1. Critiques de ce mémoire,

pr Siorch, 3 : 31. Htlpllll'p de Nissl.

Quelques mots sur la question

de l'hysléiie, réplique au mé-

moire de Nss). par Kaecke, 331.

Kote sur tiois « as de d'origine

toxique, par Thomson. 335. La

- du lia-cliich, par Warnock.

336. Sur quelques lésions viscé-

ra)es dans la -, par Wdson et

Walslln, 377. COlllrihlltlon statis-

tique à la pailiologie de la -

1ar GrPmtlre, 0 : .·. -, voir Sui-

cide. lIr dpux cas de - dll

doute avec dtllire du toucher,

par zPII1¡¡r. 113, De l'appoint

que peuvent apporter au traite-

ment de U les pratiques hy-

driattques.par lient. 415. Quel-

q"ps remarques sur le traitement

cliirinc-ical de la -, par Harri-

son, 489.

Fonctions SEXUEL) ES De - chez

les enf.'uts bien doues, mais enta-

ches d'hérédité nerveuse, par Be-

dr.plcy, 234.

1'011. Un condamné, 271.

Fractures. Des spontanées chez

les yrin=·umvélyms, par iténou

rt 11·tlz (.h·anl, 31B ,

Fnlr·.nnEmn. Voir Liquide céphalo-

rachidien.

Ganglions. Voir Tabes dorsalis.

r.i .hidieiis dans ietducs. par

Thomas, 344.

532 TABLE DES MATIÈRES.

Gigantisme et infantilisme, parLan-

nois et ltoy, 59. - infantile, par

Brissaud et Meige, 259.

Gliome. Voir Épilepsie,

Glycosurie. Un cas rie avec mé-

lancolie et impulsions érotiques.

par Cornu, 153.

Goitre exophtalmique. Voir Sérum.

Graphologie médicale, par Poppée,

235.

Gn WES. Note sur un cas de maladie

- de avec manie, par Grieves,

399.

Grossesse. Contribution à l'étude

de l'idée de trouble psychopa-

thique, par Bichebois, 86. Sémélo-

10 ? générale de l'idée de -,

par '1 homa', 157.

IIAIIN. Le R. P, Guillaume - S. J..

270.

Hallucinations. Remarques sur les

- , par Conoly Norman, 138. -

de l'ouïe, alternant avec des

accès de surdité verbale et d'apha-

sie sensollelle chez un paralytique

général, par Sérieux et Jlignot,

334. Remarques sur les - par

1>lorma/l, 403. Les et les pilé-

nomènes mentaux qui leur sont

connexes, par Brution, 405. Des

- antagonistes unilatérales et

alternantes, par Srglas, 412.

lir : BF : rHRI°.nlE. Un cas d' . par Daw-

son, 401. Un cas (1 ? par Daw-

11 ÉM1ATROI'111E racio, scapulo - humé-

rale, par Debray, 236.

IIÉ %Il[ÉLIE. Un cas d'- du membre

abdominal droit étudié par la

radiographie, par Infroit et Heilz.

60.

Hémiplégie. Un cas Il'- passagère

causée par un courant industriel.

Contribution à l'étude des acci-

dents nerveux causes par les cou-

rants industriels, par Boiidet et

Piéry, 398.

Hérédité. L' pathologique telle

qu'elle ressort de l'étude des sta-

tistiques des hôpitaux nationaux

deNew-1'ollc. par Kraoss. 160.

nerveuses, voir Fonctions sexuel-

les.

HUNTISGTON. Voir Chorée.

HvnISEVCkrHnl.oci : l.r.. Un cas d ?

par Wheeler, 46.

HYPERESTlI1 ! : SIl; : hystérique guérie par

la suggestion hypnotique, 83.

IIYPEREXCIT.IBILlT Ilt;ün0-mIISCnlall'e

chez un hystérique, par Bernard

175. ,

Hypnotisme. Dernières conceptions

de l'- et de l'hysttlrie, par Char-

pentier (A), 118. Lien Russie,

par Orlitzky, 499. '

Hystérie. Voir Hypnotisme. Voir

Epilepsie. - Voir Alaxie. - \'ou

Folie. - Para et post-pl1cllmolli,

que, par Callavardln, 391

IIYIÉItO-SYPIIILIS. Un cas Il ? par

Thooris, 67.

Idées nvrocttnNDSUIrES. Contribu-

tlon à l'étude diagnostique des

- de négations, par Ti ebose, 261.

IDIOTS. Du langage chez les , par

111aupate, 153. Les mesures à

prendre à l'égard des et des

imbéciles, par Sproat, 245.

Idiotie. Un cas d'- avec amaurose.

par Hvinanson, 146. Voir Epi-

lepsie.

Image visuelle. Rapport entre la

puissance de l'- et la puissance

du souvenir, applications prati-

ques, par Cros, 176.

Imbéciles. - Voir Idiots.

Impulsion musicale. Du coefficient

sexuel de l ? par Vasdude et

Vurpas, 365.

Incontinence urinaire et myélite,

nar \Veill, 327.

Infantilisme. Voir Gigantisme.

Infirmiers. Les dans les salles

d'hommes des asiles; par Tum,

b1l11, 351.

lnrIR111ÉItES. De l'éducation des

dans les établissements destinés

aux aliénés, par Pierre. 251-

InsIrrrlsnncE. Voir Organes.

Ivresse. La loi sur l ? 190.

Ivératodermie. Voir Compression.

Kermg. Voir Syndrome Cél'éVl'O'

spinal.

Kohsakow. Voir Cerveau. Douze

cas de maladie de - chez des rem,

mes, par Turner, 330.

Lésions histologiques, Voir Cerer-

lel. Le traitement opératoire de»

traumatiques tutraoaniennes,

lar Phelps, 77. - nerveuses-.

Voir 2111lyoli,ol)llie ? ?

LiatiE. Voir Névrite. Voir Syrin-

gomyélie.

Liquide céphalo-rachidien. Le

ries paralytiques généraux, par

TABLE DES MATIÈRES. 533

Ardin-Delteil, Si. - et méningite

chronique dans un cas de mala-

die de Friedriech. par Barjon et

Cade, 329. Voir Méningite. Sur

la teneur en sucre du -, par

Lannois et l3o\llud, 494.

Localisations motrices spinales.

Recherches expérimentales sur

les-, par Brissaud et Bauer, 62.

Logl3o-*POI\CTION. Voir Urémie.

Lues cérébral. Sur la symptomato-

logie du , par Mouravieff, 261.

Maisons DE santé. Responsabilité

des directeurs, 191

MUSON nationale DE Charenton.

Nomination d'un médecin ad-

joint. 352.

) ! AL VERTEBRAL. Sous-occipital avec

luxation du crâne en arrière.

Paralysie atrophique bilatéiale

de la langue par compression

probable ries deux hypoglosses,

par Decroly, 08.

)1 \LADIES somatiques. Les rapports

des symptômes mentaux avec les

, par Haw, 136. L'élément, his-

trionique dans les - mentales,

par Kellogg, 145. - mentales.

Voir Auto-intoxication. - ner-

veuses et mentales. Voir Tuber-

culose. l,a possibilité d'assurer

des moyens appropriés de traite-

ment aux cas de début et aux cas

passagers de - mentales dans

les hôpitaux généraux : ouver-

ture de la discussion, par Clous-

ton, 252. organiques Voir

Traitement hypnotique. Nomen-

clature ries mentales, par Ur-

quhart, 401.

Manie. Nouvelles observations cli-

niques sur la - aiguë et parttcu-

lièrement la de l'adolescence,

par Bruce, 3sî. - aiguë. Voir

Sang.

Médecin. et institutrice, 527.

Médiummte. Voir Délire.

Mélancolie. Voir Délire. La

intermittente, par ' Gilbert-Ballet.

2. De quelques maladies ter-

minâtes de l.i -, par llcyer. 162.

Voir OEdème malin. Etude sur

la -, par auukbanod et Jamouc-

1(hine, H3, a0 ! r.

Memngite sarcomateuse avec en-

vahissement des racines nerveu-

ses et de la moelle. Cytologie po-

sitive et spéciale du liquide ce'

phalo-rachidien, par Dufour, 172-

Diagnostic des - infantiles par

la réaction du liquide céphalo-

rachidien sur le sang du porteur,

par Weill et Péhu, 392. tuber-

culeuse et granulie au cours

d'une broncho-pneumomf aiguë,

par \icolas et Arloing, 393. Gué-

rison de la tuberculeuse à sa

période prodromique par l'em-

ploi répété des vwcatores sur le

cuir chevelu, par Tripier, 488.

aiguë syphilitique cérébro-spi-

nale. Cytologie du liquide cé-

phalo-racludicn. Autopsie, par

Sicard et Roussy, 493.

Méningo-myélite tuberculeuse à lé-

sions discrètes. Paraplégie aiguë,

parDupré, Hauser et Sébileau, 81.

Menthol. Influence du - sur les

nerfs cutanés, par Ioteyko, 74.

Microscope. De l'emploi du - à la

lumière polarisée dans l'examen

des fibres nerveuses à myéline

dégénérées, par Brodmann, 51.

Miroir hypnog-énique, par Pau (le

Saint-Germain, SE.

Moelle. Voir Névrite. - Voir Ce)'-

veau. Voir Queue de cheval.

Sur l'aspect des prolongements

protoplasmiques des cellules ner-

veuses des cornes antérieures et

postérieures de. la - épimère

chez des enfants nouveau-nés,

par Souklianoff et Czarnieck, 58.

Fibres nerveuses à myéline dans

la pie-mère de la - épinière.

par Dereum et Spiller, 240. Les

lésions de la - épinière chez les

amputés, par Sivitalski. 242. Sur

les prolongements protoplasme-

ques des cellules nerveuses de la

épinière chez les vertébrés su-

périeurs, par Geier. 262. - Voir

Faisceau pyramidal. Sur les mo-

difications du canal central dans

les traumatismes de la -, par

lllinor, 503.

Monstre. Un jeune - 95.

Monstruosité. Description d'un cas

de - rare de la face et de l'encé-

phale, par Haushalter et Bri-

quel, 60.

Morphine. L'habitude (le la -; son

1 traitement par le hromhydrate,

ri'hyoseino, par Ormond-Goldan,

377.

634 TABLE DES MATIÈRES.

.MOIlI'IIJ1\O,\1 II\IF., otes sur quelques

cas rie ; par .)on,76.

Mouvements. Mécanisme et éduca-

tion Iles -, l;lr Urmeny, 85,

Mutisme. Un cas de prolongé,

par Rulillon, 176. BI ûlnre sug--

gérée chez une femme ayant pré-

senté c1u - Ilywtériyue, : ! 6\.. Un

cas dep ! otungé.pd.rBéri) ! on,

346.

Myélite. Voir Incontinence 1l1'Í-

naire.

Myxoedémateux. Le Dieu ries -.

par Rét;nault (r.), 8f.

Nains. d'aujourd'hui et d'au-

trefois. amsmancestral,nchou-

dropiusie ethnique, par Poncet,

168, '

Nanisme. Deux cas rie achondro-

plasique chez le frère et la soeur,

pal L,mnui, 39 ?

NÉOI'LAOES Cf ? UHALFS, Trois cas de

parCdbertUatiet.etDettHH.

9.

Nerfs entamés. Voir Menthol. L'état

des -uculo nlot"urs dalls l'I1pmi-

plégie rie l'adulte, par Wil.-on.

ni. médian, voir Comp1'es-

sion,

Neurasthénie- Un cas de trau-

matique avant évolué à longue

échéance vers le délire systema-

tique, par Tissol, 164.

Neurone. Iiélense de la théorie du

- , par Aznujay, 343.

Névraxe. Le-, par Van Gehuchten,

86.

Névralgies. Traitement de la de

face par les courants galvaniqnp8,

pal' VpI'llay, 41\G.- du trijulIIPau

traitée par les injections de cocaïne

loco dolenii, 495.

ÉvRlrE. 111 ! TI;reuciatÍon de Courants,

démontrée par un cas de con-

sécutive une dégénérescence pa-

renclivmateiise de la moelle, par

Rocktvrll, 46, optique, par

Brissaud el Riesey, 174. Un cas

de du plexus brachial suivi

d'autopsie, par Taylor, 257. Lè-

pre et livpertrophique, par

JeanslmP et Ilm·t, : i7. - péri-

pllpl'lque dps IlIelilbres illré1'Ïl'ul ?

Réflexe 1'0111111'11 latéralisé, par

Jost.frand,324.pr')ssinnp ! [f

(1\1 cuhilal palmaire c ! II'Z un ypr-

. rier diabétique, par Lannois, 392.

professionnelle chez un cocher,

par Raymond et Courtallemont,

491. - radiculaire seu.,ilicu-mo-

tricea marche chrouiliue par

' Ur·.jNrme et L : gner, lt. 497.

NFVROGL1R. Item : ,rqnes sm la cel-

lule de la et ses piolongeiiients,

pal' [,peper, 384,

\t;vnose. Cuntribution à l'eruie do

la d'angoisse, par Captas,

414. 0 ,

Névrosés. Voir Réflexe.

Notes. Cliniques pathulogiques, pal'

Molan, 400.

Nursings Homes. Soins et traite-

ment des personnes dont l'esprit

est troublé dans les- par Wlute,

489..

OEdèmes chez des catatoniques, par

I ide, î9. -tnalm cllez un mélan-

culique ; rapide terminaison fa-

tale, Irar Hotcfl : is, 33R. - ne la

main chez un hémiplégique, 418.

OEil. L'état du fond de 1'- citez les

paralytiques généraux, par Kéra-

val el lianjean, 193. /

Opium. Mort d'une fumeuse ci ?

525.

Organes. Insuffisance ries lliyro-

narutllyrui lieus et écllrrnpsre, paf

In uiliu·Imlz et.leamlelizr, 320.

Orteils. De l'abduction des , par

Itnbmshi, 80.

OS'l'I : 0114LACIE. Diagnostic de 1'- à

la phase « osleomalacia fragilisa,

par Paviut. 242.

Ouïe. Voir Hallucinations.

Palais. Les anomalies rlu- consi-

dérées comme stigmates de dégé-

nPrescence, par Ilnrri·rnn, 3n.

Paralysie. Voir Mal vertébral. -

alterne double incomplète chez un

euranl cie IIUillllOIS par 1 Il ! JPIcules

pédonculo-piotubéraiiliels, 82. Un

nouveau cas de générale con-

jugale, par Cullerre, 116. La ?

piogressive d'après les, documents

de l'hôpital terrrlol'ldl clil gouver-

nement de Iilrarlcow pendant

dOllze ails, cie 18 ! JO à '19U1, pnl'

Greirlenher" 142. générale,

voir Lhilepsie. - Les rémission-,

spontanées de la générale ta-

bétique, par Pierret, 157. KU"10"

gie de la générale, par llurii,

159. Diagnostic précoce de la -

générale, par Lle.lcum, 159. Fli;-

quence comparée de la - géné,

TABLE DES MATIÈRES. 535

raie, par Waauer, 159. Traitement

de la -générale, par Cowles, 1G0.

- générale à longue durée, par

Brunet, 163. - générale, voir

Troubles trophiques. Du signe de

1'oil)i(;tlldire dans le diagnostic de

la faciale, par Barri. 243. -

motrice etsensitive consécutive à

l'injection de biuhlurhydrate de

quinine dans le liquide céphalo-

rachidien, par Jàbuulay, 215. --

faciale dans liai, Gar-

nier et Thaon, ? 7, Un pl1"uo,

mène palpéblal constant dans la

faciale périphérique, par Ces-

tan, 257. saturnine à type par-

tiel Aan-Duchenne, par Meiklen

et Guiard, 309. - générale, et

syphilis célébrai ? , par'l'isaot, 339.

- vésicale d'origine hystérique,

guérie par un procédé phyehuthé-

1 apique, par Uemonch ? 3a5. -

générale, voir Sig7tes oculaÍ1'es.

Sur la présence fréquente de gra-

nulations de l'épendyme dans la

- générale, par f3laultford, 379.

Des rémissions thérapeutiques de

la paralysie générale, par Devay.

19 ? - généiale et grossesse, par

Suulcanuff, 507. Trouble particu-

lier dans la représentation du

temps dans un cas de - générale,

par Vorobieff, 509.

P : 112ALYTIQiIFS généraux. Voir OEil.

- Voir Hallucinations Des -

persécutés et dangereux, par Pas-

turpl,450,

Paranoïa. Contribution à l'étude

des manifestations initiales de la

- , par Pick, lu.

Pirapiiasie. L'examen des malades

atteints de-, par Saint-t'au), 71 :

Paraplégie spasillodique chez un

enfant, par IJéjerlI1e et Chirav,

170. .

P \l1 ! "NSOl'i. Les déviations de la

colonne vertébrale dans la mala-

die de -, par Sicard et Alquier.

61. Maladie de -, contribution à

1 étude des formes unilatérales,

par Grande, 330. Ptéparations de

muscles provenant d'un cas de

maladie de , par Idelsohn, 418.

l'ER50NEL SECO : -¡D \IRF.. Martyrologue

du (les asiles d'aliénés, 529.

Ursulfate de soude. Voir Tétanos.

imtb RAI)ICULAIIE. - de la percep-

tion stéléognostique, par Déjerine

pI Cl111 il Y. 45.

Perversion sexuelle. Contribution à

la pathologie de la par Blou-

mpnaou, li8.

PHOBIE, La - du regard d'autrui,

pu' de Bechterew, 333.

Phosphate de codéine. De l'emploi

du - en pathologie mentale, par

Diseur, 71.

Phtisie. Le traitement de la- dans

les asiles par l'urée et ses sels,

par Baslnn, 25.

Pied lahétique. par Idelshon, 169.

Poliomyélite. de l'adulte et para-

ly,ie infantile, par Léry et Wil-

son, 498. ,

Polynévrite. Un cas de et de psy-

chose polynévritique à la suite

d'anthrax dans le cours d'une

psychose mélancolique ai¡ : rue, par

Serge, Soukhano(F et TclmltzoIT,

154. Sulfocarbotiée, par Guil-

lain et Courtellemunt, S ! "8, Sur

l'hlslotlathologie des diphtèri-

tiques, par 111ouraviefF, 50 : 1.

POKEXCÉPH \LIE. Les altérations du

système nerveux dans un cas de

- par Barratt, 3S3.

Possession. Esquisse historique

do l'élude de la -, par LakhLine,

145 De la - diabolique au Japon,

par lieitz, 148.

l'oST-ÉPILFP11QU ? Etude clinique sur

les troubles de la conscience dans

l'état -, par l'IC[¡, 411.

PoTT. Cavités médullaires et mal de

, par Tnomas et llauser. 21l.

Pression 1\TR.1-CR.1\II : \E. Sur les

rapports de la - et sur les phé-

nomènes de la compression bul-

balre, par Zéri. 386.

Prix. de la Société médico-psy-

chologique, 270.

PSEUDO-OEDÈMEcatatonique,par Dirle.

173. Soixante-cinq cas de-cita-

tonique observés à l'asile d'Evreux,

par Trepsat, 260.

Pseudo-tares syphilitique : une ob-

servation. diagnostic différentiel

du tabès, par Collins, 390.

Psychologie médicale. Expériences

de -, par Swobôda, 83. L'ensei-

gnement de la-dans les univer-

sités des Etats, Lnls, par il vers,

350.

Psychothérapie. Deux cas de - i,

Sao-I'aulo (Brésil), par Jaguanhe.

3'r5. '

Psychose polynévritique. Voir Cer-

veau. Voir Folie. Voir Pou ? ! ,

17eÔ table DES matières.

névrite. Sur les - chez les Juifs,

par Pilez, 154. Sur les - liées à

la fièvre tltyplrorde, par Farrar.

161. Un cas de - polynévritique

avec insuffisance hépatique, par

Juquelier et Perpère, 163. - liai-

lucinatoire aiguë dans un cas

d'empoisonnement par l'atropine,

par laltnwenlco, 333. Elimination

de l'indican, de l'acétone et de

l'acide dmcétiqne dans diverses

- par Curiat, 377.

Queue de cheval. Sur les affections

de la - et du segment inférieur

de la moelle, par Raymond, 57.

Ramollissement. - bulbaire aigu

et syndrome cérébelleux, par Le-

clerc, 32 ?

R.w.ton. Localisations rares de la

maladie de-, par Decloux, Ri-

badeau, Dumas et Sabaréanu,

379.

Rayons N. L'émission des - dans

quelques cas pathologiques, par

Gilbert, Ballet et Delherm, 344.

Réflexes. Voir Tumeur cérébmcle.

Du - hypogastrique, par Beelite-

rew, 54 Le - sus-orbitaire, nou-

veau réflexe dans le territoire (le

la 5° et de la 7° paires, par Mac

Carthy, 56. ContribW ion il la ques-

tion du - sus-orbitaire, par llu-

dovering, 58. Du - acromial,

par Hechterew, 57. - adducteur

du pied, par et Rose,

170. Sur la transformation du ré-

gime des - cutanés dans les af-

fections du système pyramidal,

par Babiiislçi, 174. - Voir Ba-

binski. La recherche du - chez

les névrosés, par Sclnytler, 236.

Des dans les régions de la face

et de la tête, parRechterew, 237.

- Voir Névrite.

Religieuse. Psycho-physiologie des

; les de Port-Royal, par Bi-

net-Sanglé, 61

Respiration. Influence du travail

intellectuel prolongé et de la fa-

tigue mentale sur la - par Ob,ict,

388.

Rêves. Contribution à la question

des relations entre les rêves et

les conceptions délirantes, par Ka-

zowsky, 151. Contribution à la

psychologie du -, par Beaunis,

420.

Revues scientifiques, 192. ! {nu;.Lefouprudromique.nar

Feront. le,

Sang. Observations bactériologiques

et cliniques sur le - dans les

cas de marne aigue continue, par

Bruce, 378. - Voir Méningite.

L'alcalinité du - dans les mala-

dies mentales. par Pugb. 481. Pré-

sentation des préparations du -

des épileptiques, par Bemstein,

504. Sur la question de laparasi-

tologie du dans l'épilepsie, par

Gl11liarov.kv, 510.

Sclérose en plaques. Mouvements

au repos, par Bouchaud. H8.

combinés médullaires chez deux

paralyliques généraux, par Vigou,

roux et Laynel-Lavastine, 497.

Sel. Note, sur la privation de -

dans le tiaitement de l'épilepsie

par les bromures, par Cla¡J" 492,

SÉÉLlTÉ et démence sénile,par Rus-

sel, 160.

Sensibilité pilaire. Voir Calvitie

Tentative de recherche de la

chez les animaux attemts de tabes

dorsal, par OSoipowetNoiscbews-

ky. 66. - osseuse, par Riedel et

Marie ((J,), 79. - tactile et tber,

miqne dan. le tabès, par Rous-

seau et Vasdlide, 81. - osseuse,

par Eggar et Riedel, 259.

Sérum. Sur la production d'un -

cvtolylique spécifique pour la

thyroïde et lespaiathyroïries. avec

quelques observations siii@ là 1)11y-

siologie et la pathologie des glan-

des parathyroïdes, spécialement

dans leurs rapports avec le goitre

exophtalmique, par Callum. 229.

Signes oculaires. Des - dans la

paralysie générale, par Joffroy,

353.

Société médico-psychologi'1ue,sran,

ce du 25 janvier" 4J0, 255. - de

neurologie, séance du 4 février

1901. - de neuropathologie et de

psychiatrie de l'Université de

Moscou, séance du 20 septembte

1902, par 111ouravielT, 261.

Sommeil. Contribution à la ques-

tatou de la théorie histologique

du -, par NarbouttP, 17. - Voir

Ecorce du cerveau. Un de

dix-sept ans, par Farez, 421. Le

- dans ses rapports aver les

narcotiques dans le traitement

TABLE DES MATIÈRES. o37 i

des maladies mentales, par Ray-

ner. 490.

SoMELLEmn. Le merveilleux et la

au xvme siècle, par de Coy-

nard, 120. - -

Spiritisme. Les dangers du -, \)5

Troubles névropathiques causés

par le -, par Jonj (de), 419.

Statistiques. Revision des - pré-

sentées par la commission de la

tubeiculose, 351. Les - médico-

psychologiques : avantages que

présenteraient en vue d'études

collectives, des définitions pré-

et une méthode corrélative,

par Bond, 407.

Stase papillaire. - par tumeur

cérébrale. Intervention, -414.

Stimulus. Voir Système nerveux.

.suggestion. La pendant le som-

mC11 naturel, par \Vrazeysl : y, 82.

- Voir 11 ? 11)e)-esiliésie.. hyp-

notioue, Voir Vertige. Inlluence

de là hypnotique sur les fonc-

tions gastro-mtestinales. par De-

lius, -264. Notes sur le traitement

des buveurs français par la

hypnotique, par liérillon et Mar-

nuy, ` ? 115. La valeur thérapeuti-

que de la hypnotique, par Da-

maglou, 345. - Voir Analgésie.

Sur l'emploi pratique de la

hypnotique, par Howard, 487. Les

- criminelles, par Liégeois, 502.

Suicide. 92, 269, 272, 525. - fami-

lial, 94. d'enfants, 94, 192.

Voir Asiles d'aliénés - d'une

pauvre fille, 350. d'une fillette,

351. et folie, par Viallon, il2.

Deux - à l'asile d'aliénés d'Uc-

cle, 525.

Silfonal. Un cas d'empoisonne-

ment par le , par Alexander,

76.

Symptômes mentaux. Voir Maladies

somatirliies. pupillaires. Voir

Aliénés.

Syndrome. cérébro-spinal vrai-

semblablement urémique, avec

signe de Iiernit;, par Thévenet et

Péhn, 321. - bulbaire. Voir Ra-

mollissement. basedowen avec

panophtalmie. par Implant, 324.

Sur un - thalamique, pal' Tho-

mas et Chiray, 496.

Syphilis cérébrale et démence, par

Vigoureux. 101. Voir Para-

lysie générale.

SYRfNGOMYÉI.IE, Sur deux cas de

à topographie radlculaite ries

troubles semilif, et des trou-

bles moteurs, par Cestan et Huet.

70. Une observation anatomo-cli-

nique de - par Thomas, Ilau-

ver et Tayler, 80. - Voir Frac-

turnes, Lèpre et -, par de Brun,

317.

Système nerveux. Pronostic et trai-

tement des affections spécifiques

du système nerveux. par Gowers,

75. Une affection spéciale, du -,

survenant pendant l'enfance et

se traduisant par des troubles et

de la débilité mentale, par Bech-

terew, 151. - Voir Cancer. Le

- et ses réserves à longue

échéance. Contribution récem-

ment oflet,te par l'anatomie com-

parée, par Bonne, 381. Voir

l'ol'encéphalie. Importance du (i

stimulus dans la restauration et

la déchéance du , par Mott, 473.

Tares dorsalis. Influence des re-

cherches récentes concernant les

ganglions des racines postérieures

sur l'étiologie du dorsalis, par

Rows, 44. Etude sur les lésions

.radiculaires et ganglionnaires du

, par Thomas et Hauser, 60. -

Voir Sensibilité pilaire. Un cas

de- spasmodique, par Sano, 67.

- incipiens, par de Buclr, 69. -

juvénile, par Camus et Chiray, 78.

Voir Sensibilité. Fruste avec

conservation des réflexes cutanés

et tendineux, par Dllpré et Camus.

171. Pathogénie du - dorsalis.

Sur un cas de - compliqué de

mouvements choréiques et de

paranoïa, par de Buck, 399.- Sur

la prétendue influence de la cé-

cité sur les troubles spinaux sen-

sitifs et moteurs du -, par Marie

(P.) et Lui-i, 417.

Tabétiques. Voir Excitabilité.

Tétanie. Un cas (le d'origine

gastrique, par Barjon et Cade,

330.

Tétanos. Lésions nerveuses dans le

- expérimental du cheval. par

Cuurmont. Uoyon et l'amot, 380.

Observation d'un cas de - con-

séetitit à la vaccination, par Cooke,

405. De l'action du persulfate de

soude sur les contracteurs dans

le -, par Céhbert, p 415.

Thenelles. Le réveil et la mort de

538 TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS.

la dormeuse de -, par Farez,

83, 499.

THOIS¡ : N, Voir Troubles.

Thyroïde. Voir Sérum.

TuYaorDl : C'ronlE. Effets rie la - sur

le. pouvoir (le procréation et sur

les descendants, par Cent, 388.

Tics conviilsifs, par Bélillun, 176.

Torticolis. Le syndrome du -

spasmodique, par Destarac, 70.

Toxémie. La- dans l'eiiologie des

maladies mentales. Ouverture de

la discussion, par Cloustun, Ro-

lJerl80n, \\'ISOn, Yellowlees, Bruce

et MarI', 407.

Traitement hypnotique. Le - dans

les maladies organiques, par l'ew-

nitzky, 345. n

Trfmelement. Un cas de - intrn-

tionnel. Considérations sur la pa-

thogéniedu intentionnel el du

- au repos, par de Buclc, 237. -

à forme de sclérose en plaques

occasionné par unosteo-a ! ') ! jro-

paihie du coude, par Brissaud et

G l'pnet, 195.

Trépanation. dans un cas d'épi-

lep,ie, gliome kystique, par Lait-

nois, 487.

'I'RICHUTILLU)1.\NIE chez les aliénés,

par Iiaplan, ` ? 5J.

Troubles mentaux. Contribution à

l'étude ries - périodiques, par

Ennen, 144. Des - p-ychiqiies

de la déglutition, ou dysph"g-ip

psychique, par Bechterew, 151.

Etude sur les - trophiques dans

la paralysie générale, par IIAJÏs-

sey. 177. - du mouvement chez

ull Imnfridue simulantl,lll1aladle

de Thomsen, par Leclerc et

Agniel, 325. Le traitement des

mentaux à leur début, son ensei-

gnelllent clinique dans les salles

des hôpitaux généraux, par l'il¡,

balri. 410.

'l'uBFRcut.es quadiijnmpaux a11l1'

rieurs. Le rôle physiologique des

, par Pawlovv, 17.

Tuberculose. La - dans l'étiologie

et la pathogénie des maladies

nerveusPS et tnentalPS, tar uo,

selli. 178. Voir Asiles d'aliénés.

Tumeur céiébrale avec abolition des

réflexes te nrii neux, par Raymond. 1

Suruncasdeducanat.ractn-

dien, par Hftymond, 63, SIII 1111

autre cas de du canal niclu-

dien, par Raymond, 63. Ëvuncn

histologique d'une céiébiale

présentée par le Dr Guilitz, p,u-

],;endr\'l'k. 64. - c¡lrM1t'<lle 11\'I'C

symptômes (l'immobilité, par Dur

323. Un cas de - cérébrale a

forme pavclto-paralyttqne et à

évolmton fébrile, par Lamois Il

Porot, 396. -. cérébrale, 1 ?

Stase papillaire. Un cas com-

pltqué de folie contusionne) d'on-

¡{trie alcoolique, par Uidwolil.

480.

Urée. Voir Phtisie.

Urémie. Confusion mentale et syn-

drome cérébelleux au cours de

] ? Exoelleut effet de la lombo-

ponction, par Scberb, 1;'2, - dé,

llrante, par Hoq lie; 328,

Véronal. Emploi du par Cons-

tensoux, '172,

Vertige. Observation de de la

locomotion traitée, avec succès

par la suggestion hypnotique, par

Le Menant des Chesnais. 264.

Xt'ttopACE. La vie biologique d'un

- , par Vasclnde'et Vurpas, 60.

TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS

Agniel, 325.

Alexandre, 176.

Alfl'esi- v. 505.

Alyuier, 61.

Anglarie, 250.

Arluiy. 380, 393.

Ardin-Delteil, 81,

Arndt, 333.

Azémar, 413.

Azoulay, 343.

Bahinsl¡j.80, 17L

Ballet, 59, 142, 251-, 34 1.

Bard, 243.

Barjon, 329, 330.

Rarrat, 383.

Baskin. 252.

liauer, 62.

Beallnis. 420.

Rechterrw, 54, 57, 451,

237, 333.

TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS. 539

Iieilrjitzky, 239.

Beuilalll, 151.

iiérillon. 84, 176, 265,

34ti, 34 î. 'v0, 50 ? .

Bernai d, 17j.

Bernstein, 504.

Bichebois, 86.

Billl'i-Sang'lp, 64, 239,

Blacliford, 379.

BlolllIIl'llaOll, H8

Baill"t Hodzp.wil"cli. 65

Boissier, 255.

Bomhicci, 387.

Bond, 407.

Boudet, 398.

Bonne, 38).

Boiicliauri, 68.

Ilouhi'l, 494.

Boiirneville, 182, 196.

Bouveret, 397.

BI PSPV, 17 P.

Brique), 60.

Brissaud, 62. 69, 173,

471, 259. 495.

Biodmallll, 51

Bruce, 335, 33G, 3t8,

407.

Brun (de), 317.

Bruiiet, 163.

Brunloll, 405,

Buck (le), 67, 69, 237,

399. 401.

Buckle5, 400.

Cade, 329, 330.

Callum, 229.

Camus, 78, -171. I .

Capgras, 414.

Call'i.'r, 421.

Carty, 5G, 78.

CPni, 387, 388.

Cestan, 7U, 257.

Charpentier (A ), 119

Chtray, 18, 970, r95, 496

CIaICk, 19.

Clouston, 25, 407.

Collms, 390.

Couke, 30 ?

Coridt,377.

CoiMensoux, 172.

Comu, 153.

Coin-mont, 380.

Coin tellemout, 258, 418,

49t. '"

Cwv n, 937.

Cuwlp, 160,

Coynald IdNI, 4 ? 0.

Crolq. 111, 50.

Cros, 176.

Crouzon, 496.

Cu lierre, 116.

CZdrn Ilk, 58.

Dainville, 342.

Damoglou, 345.

llaneân, 193.

DalVoll, 136, 400, 401.

Dl bray, 236.

Dpaoly, 68.

Ué,jPrmr, 79, 170, 343,

495, 497.

Dellmrm 344.

Delille, 59, 79.

Delitis, 26L -

Demeny, 85.

l1emolldl\', 345, 499.

Uem, 415.

IIPI'Cllm, 159, 210.

DesLirrie, 70.

Uevav, 492.

Dlieur. 74.

Dite, 79, 173.

Donaggio, 388.

Donald, 24(;.

Ilor, 323, 41 r.

Druutebenm, 162.

Doyon, 380.

I)ufuur, 6r R2, -172.

Diihem, 340.

Duntun, 161.

Duplant, 324, 378.

Dupié, 81, 171.

Egger, 169, 259, 342,

497.

Ennen, 144.

Farez, 83, 316, 421, f99.

Fairar, 161.

t7f-dorow, 238.

Feré, 75, 414.

Fer rad, 334.

Foerster, 260.

Foi el, 237.

Francais, 1 ! j6,

1'\'11 Il 1 nholz, 320.

Fuster, 80.

Gallavardin, 391.

G,irnier, 237

Geier, 262. 507.

Géhbert, 415.

Glorieux. 66, 67.

(7t)oilall, 244.

Gursclil : wv, 52.

(,owers, 7.).

Grange. 330.

Given. 391.

( : roenl·es, 405.

Greilenber5r, 142.

Grenet, 495.

Crieves, 399.

Guiard. 309.

Guillait, 258.

GuUalovsl,y, 510.

Haskovpc, 13.

Ilalberstarit. 78.

Harrisson, 382.

Hanser, 60, Si. 241.

l1all"hailel', 60.

Hdiiver. 80. ,

Heiiz, 60, 316.

Ilelilenberg, 236.

Hérisse) ? ? ? . -

Heirick, 390.

H Irschbel g, 170.

Hatcia : ls, 338.

Howard. 487.

Huet, 70, 257.

Il à6.

Muni, 159.'

Hymanson, 146.

Iakowenko, 333.

ldelslioti. 1t9, fIS.

Introït, 60.

luteylco, 63, 7+.

Isendrv(-k, 64.

Jaboulay, 244.

lagtiat-ihe, 345.

Jaunet, 69.

Januouckhine,413, 50f.

.Irant',ellze, 320.

Jeanselme, 257.

Juffroy. 353.

.loues, 76, 400, 480,

.long, 419.

.Insaeranrl, 324, 325.

Jucluelier, 163.

Kaplan, 251.

Karpinsky, 149.

Kazow,.kv, 151.

Kellogg. 145.

Kéraval, 193.

Ivingsforri, 482.

Kohler, 247.

Kornfeld, 155.

Krauss, 160.

Ladame, 70, 73.

Laiclre. 2G8.

Laigml-Lavastine, 197.

Lannois, 58, 59, fil, 158,

392.395,396,447,494.

Lakhtine, 145.

Lass, 248.

Leclerc, 822, 335.

Leeper, 384, 490. -

540 TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS

Le Menant des Chesnais.

. 264.

Leri, 258, 417.

Liége\'es, 498.

Habille, 411. ,-

lllacmillan, 416.

Marie (A.), 73, 3+1.

Marie (t'.), î9, 80, 258,

417.

Mark, 415.

Ma1'llay, 265. '

ilarr,'40 î.

\lasoin, 71.

Masselon, 433.

Maupaté, 1 : 3.

Maxwell, 87.

Meige,259.

lllerlclen, 309.

Mever, 162.

Miinot, 334.

Mill, 135.

mosan,400.

Molodenkoff, 508.

Mongeri, 250.

Moor (dp), 147, 491.

More),89.

Morman, 403. z

Morselli, 178.

Mott, 472.

1110uratoff. 14.

Elouravietf, 261. 503.

Nageotte, 318.

Narhoute, 47, 53.

Nicolas, 393.

Nissl, 331.

Noischewskv, 66.

Norman, 138.

Obici, 3.

Orlitzky. 265, 499.

Ormond-Goldan, 377. 1.

Ossipow, 56, 66.

Papadaki, 465.

Paris, 97, 206.

Pasturel, 456.

Patou, 160.

Pau de Saint-3larUu.

84.

Pavot. 58, Tl, 380.

Pawloff, 47.

Péhu, 321, 392.

Pelletier, 425. '

Perpère, 163.

Pewnitzki, 175, 345.

Phelps, 77..

Pick, 144, 411.

Pierce, 251.

Plerrer, 157.

Piéry, 398.

Pighini, 387.

Pilez, 154.

Podipolskv, 264.

Poucet. 268.

Popow, 321, 511.'

Poppée, 235.

Porut, 396.

Pugh, 338, 382, 481.

Raecke, 331.

Ray, 136.

Ravrnond, 1. 57, 63, 69

259, 27 : i, %18, 494.

Itayer, 490.

Régnault, 84, 176.

Retiz, 14H.

Hélion, 316,

liéviyton, 406.

Ririwol.l. 480.

Riedel. î9, 239.

Robertson, 43, 407.

Rol.Wll, 4G.

Roque, 328.

Rose, 170..

lIossoli 1110, 262.

RougP, 41'2.

ItOUSSP,nU, 8 : .

Roussy. 493.

Rows, 44.

1 Ho\V<, 44. G1.

Xov.59.61.

Rusk, 316.

1 l\usÓel, 160.

Saharéanu, 379.

Saint-Paul, 71.

Sainton, 10.

Sano, 67.

Savary, l'parce, 487.

Séglas, 334.

Sérieux, 334.

Sclratzky, ï3.

Scl·ierl, 1118,

Sclmnzer, 524.

Schnyrier, 236.

Sébile,au, 81.

Shglrts, 9,6, 412.

Serge, 154.

Sergi, 387.

Shah, 75.

Sibbald. 446.

Sicard, 61. 493

Sinclair-Blach,33î.

1 Sivitalski, 212

Sollier, 255.

Soukiianoff. 58, 147, 134

504,507. "

Spiller. 240.

proat, 2.5.

Sldliley-Ahbot, 160.

Stéfdnowska, 63.

Storcli, 331.

Sullivan, 383.

Sutelilfe, 386.

Swoboda, 83.

Tayler, 80, 257.

Tch..llzofT, 15,

Terrien. 196.

Th lon, 257.

'1 hAvenet, 321.

Thomas. 60. 80, loi,

341, 34, 496.

Thom,un, 335,

Tlssut, 164, 339,

Trapipznikow, 150,

Trébnsc, 267.

Tred¡wld, 249.

Trepsat, 260.

Turner, 336, 378, 478.

Urquhart. 43, 401.

Vallas, 39+.

Va.cliide, 60, 81, 365.

Vernay, 486.

Vialloiï, 412.

Vigoureux, 164, 497.

Viviani, 4.0.

Vurote(1, 09.

Vurpas, 60,365,

Wagner, 159.

`Varnach, 336.

Wat,on, 377,

Weatherlv, 137.

Weber, 217.

Weill, 327,392. '

We y garnit. 50.

Whec]er.46.

White, 489.

Wiazemskv, 82.

Wiglesworth, 516.

\Vilsnn, 17t, 400, f07,

418, 498.

Wyuubow, .1

Yellawlees, 407.

Zanrier, 506.

Zéri, 386.

Evreux, Ch. Héhissey, imp. ü-ln04,