ARCHIVES
DE E
NEUROLOGIE
A.RCH1 VS
DE
NEUROLOGIE
REVUE MENSUELLE
ma MALADIES NERVEUSES ET MENTALES
F 0 N D 1 : ; PAR H J. -]\1. CIIARCOT
l'Ulll.ll'F. SOUS LA DIRECTION DR MM.
A. JOFFROY
Professeur de clinique
des
maladies mentales
à la Faculté de médecine
(le
V. MAGNAN
Membre de l'Académie !
de médecine
Médecin de l'Asile clinique
(Sle-Aunc).
F. RAYMOND
Professeur de clinique
des maladies
du système nerveux
à la Facilité (le médecine
de Paris.
COI.LABORITRUIl5 PIIINCIPÀUX
)1.%I. ABADIE, ATIIANASSIO, l3AItIYSICI, BALLET. 131 : L1.1\, BI\ET-SANGI.Ii. BENOIT.
BLAN('.11AI11)(I1.) ISLIN, 1301SS1Elt ( ! '.), BONCOUIÎ (l'.), BOYEll (J.), IIK1ANI) (11.),
IsItISSAlIU (E.), lItOtIA111)EL (l'.), BM NET (D.). CADE, CA'l'SAI.1S, r.F.STAN,
( : IIA1113EIiT, ClIAItO.N, CIIHIST1AN, C0LOL1AN, COUII,lONT. C(11,LEIlitE, (Ni.),
DELTEIL, UENY, DEVAY, UUCANP, Ullt'A1. (1111TIIIAB), FALCIIEII, FEUE (Cu.),
l'ENAYIIOU, Jo'EIIIIIEII, l'IIAI'>COTTE, GILLES 1)1 ! I.A TOIJIIETTE. GAHNII : 11 (S.1,
GOi111SAUf.'f, GIIASSET, KlcIlAVAL. fv0ltSAICO\V, KOIJINDJY. LA DAME, LA\U0(%Y,
LEGItAIN, LWOFF, MA BILLE, M ABAN DOX UE MO : 'lI YEL, IIE]tZ[UFtVSICY,
.)ll[IALLile, IUS(;]AVE-(.1,AY, NOIII, l'II ? Itltt : 'f, PI'l'ItES, IlEc.1s, ItEGNAItU (l'.)
IIÊGNIEII (P.), IIICIlEll (l'.), ItELLAY'(i'.), 110TU (N.). SEGI.AS. SEIIIEl'X,
SOIIKUIANOFF, SOI1QlIg ? SOI'ItV (J.). TAGLET, TI>INTI'ItIEIt (E.),
TIIILO (OT.), TIIUUE (11.), UltitiOLA, VALLON, V1LLAItIJ, YOISIN(J.),\1'AHL, Y YO : I(P.).
· Rédacteur en chef : BOURNEVILLE
Secrétaires de la rédaction : J.-B. CHARCOT et J. NOIR
Dessinateur : LEUBA
Deuxième série, tome X. - 190 0.
Avec tonsures dans le lexte.
PA n 15
HUItIAUX DU PROCHES MÉDICAL
14, rite des Carmes.
1900
Vol. X. Juillet 1900. Nu 55.
ARCHIVES DE NEUROLOGIE
CLINIQUE NERVEUSE.
Sur un cas d'hémorrhagie méningée sous-
arachnoïdienne ;
Par MM. Paul COURMONT et CADE.
{Travail de la clinique de tll. le professeur 73o·zclet.)
L'histoire et particulièrement l'histoire clinique des diverses
variétés d'hémorrhagies méningées est encore entourée de
nombreuses obscurités. Très variable est le tableau sympto-
matique qu'elles peuvent réaliser ; et, dans la pratique, le
diagnostic des diverses formes entre elles et même avec les
lésions en foyer intra-hémisphériques corticales ou profondes,
présente de telles .difficultés que le plus souvent il n'est porté
qu'avec hésitation, et étayé seulement sur des présomptions.
Et si ces difficultés diagnostiques se rencontrent lorsqu'il
s'agit de l'hémorrhagie intra-arachno'idienne consécutive à
la pachyméningite ou surtout primitive, elles se rencontrent
aussi et à. plus forte raison lorsque l'épanchement siège au-
dessous de l'arachnoïde, constituant l'hémorrhagie sous-
arachnoïdienne ou intra-pie-mérienne ou encore sous-mc-
ningée.
L'étude anatomo-pathologique et la pathogénie de cette
dernière se sont éclaircies en partie depuis l'époque où Prus l
le premier attirait l'attention sur elle, et cherchait à la diffé-
' Prus. Bulletin Acad. méd. Paris, l815, Mémoire sur les deux mala-
dies connues sous le nom d'apoplexie méningée.
Archives, 2' série, t. X. 1
"2 CLINIQUE NERVEUSE.
rencier des autres hémorrhagies péri-encéphaliques, mais
son histoire clinique est restée encore bien obscure malgré
le nombre relativement considérable d'observations qui en
ont été publiées, puisque aussi bien c'est là la forme la plus
fréquente d'hémorrhagie méningée primitive chez l'adulte.
Ce n'est que par l'adjonction de faits nouveaux, en nombre
suffisant, et bien observés qu'il sera donné de combler les
lacunes, d'éclaircir les obscurités, de superposer exactement
les symptômes aux lésions. Peut-être arrivera-t-on ainsi à
expliquer la variabilité du tableau clinique, variabilité très
frappante lorsqu'on parcourt un certain nombre des obser-
vations qui s'en trouvent éparses dans la littérature mé-
dicale.
C'est à ce titre que nous croyons intéressant de rapporter
le cas suivant que nous avons pu étudier avec soin clans le
service de notre maître M. le professeur Bondet, alors sup-
pléé par M. le professeur agrégé Pic.
I. OBS1 RV.\TJOl'l CLINIQUE ET .11.1TOMO-PATIIOLOG1QUE.
A) Observation. Le 13 novembre 1899 on amenait il l'IIrilel-
Dieu, salle Saint-Augustin, un homme sans connaissance, parais-
sant âgé d'une soixantaine d'années, et qu'on venait de trouver
étendu sur la voie publique. C'étaient là les seuls renseignements
qu'on pouvait recueillir sur son compte.
.Examiné dès le soir môme de son entrée, il présente les particu-
larités suivautes : il est plongé dans le coma, étendu immobile
dans son lit, les paupières fermées, la respiration calme. La réso-
lution n'est d'ailleurs pas complète : des excitations cutanées un
peu fortes déterminent encore des mouvements dans le membre
supérieur droit, et même ce membre présente des mouvements
sponlané., le malade l'étend et cherche à saisir ce qui se trouve il
sa portée et par exemple les vêlements de ceux qui l'entourent. Ce
membre présente un cei tain degré de raideur, tandis que le membre
supérieur gauche est flasque, retombant lourdement. Les membres
inférieurs plus ou moins repliés sont aussi contractures. Il existe
une paralysie du facial inférieur droit, le malade fume la pipe et
soulève à chaque expiration la commissure droite. Les pupilles
sont égales avec conservation du iéflexe lumineux. La tempéra-
ture est abaissée (36°4). Les urines sont de coloration normale et
contiennent un peu d'albumine.
Le lendemain matin (14 novembre), nous constatons la persis-
tance et l'aggravation de l'état comateux : le malade est étendu
dans son lit, sans déviation de la tête, les yeux à demi fermés,
11EM0RRHAGIE MENINGEE SOUS-ARACHNOÏDIENNE. J
nettement déviés à.droite, le regard légèrement plafonnant. Les
pupilles sont inégales, la pupille gauche étant plus petite; elles
sont de dimensions restreintes et se contractent encore sous l'in-
fluence de la lumière. On ne peut apprécier l'état de la langue. La
commissure buccale est abaissée et effilée à gauche, le facial infé-
rieur gauche est parésié. Le malade respire la bouche ouverte. Les
membres du côté gauche sont absolument flasques et tombent
lourdement. Les membres inférieur et supérieur droits présentent
au contraire de la raideur.
Les réflexes tendineux sont conservés et normaux des deux côtés.
Les réflexes plantaires sont aussi conservés mais présentent la
modification signalée par Babinski : l'excitation plantaire déter-
mine des deux côtés un mouvement d'extension des orteils.
La respiration est irrégulière mais sans affecter de type spécial.
Pas de Cheync-Slokes. A l'auscultation des poumons on ne perçoit
que quelques ronchus disséminés. Au coeur on constate un certain
degré d'hypertrophie, marquée par un abaissement de la pointe,
un élargissement de son choc, une augmentation de la zone de
matité précordiale, un assourdissement et une prolongation du
premier bruit.
Les artères sont nettement athéromaleuses. Les urines recueil-
lies par cathétérisme (car le malade a de l'incontinence de ses
sphincters) sont de coloration normale et contiennent un peu d'al-
bumine. La température qui, la veille, était de 3S°4, est remontée
et marque 39°.
Pendant que nous nous livrions à cet examen nous étions sur-
pris par l'apparition de crises convulsives. qui se déroulèrent à
plusieurs reprises devant nos yeux. Ces crises étaient apparues
pour la première fois la veille, assez tard dans la soirée et s'étaient
répétés plusieurs fois dans le cours de la nuit.
Elles présentaient toutes le môme type nettement jacksonien,
débutant, par des grimaces et des tiraillements dans la moitié
gauche de la face et plus spécialement dans la moitié gauche de
la lèvre intérieure, puis s'étendant au membre supérieur qui
est agité de mouvements cloniques étendus, assez souvent descen-
dant aussi dans le membre inférieur du même côté, enfin parfois
se généralisant et rappelant alors assez bien le tableau de la crise
d'épilepsie vraie. Mais il n'y a ni émission involontaire d'urine,
ni cri, ni morsurc de la langue, ni écume il la bouche. Les globes
oculaires sont convulsés et fortement déviés vers la gauche. Cet
état dure deux ou trois minutes seulement. 'Ces crises sont provo-
quées facilement par des excitations diverses et spécialement par
des mouvements imprimés au membre supérieur gauche. Elles
peuvent être aussi spontanées.
1;; novembre. On note la persistance du coma absolu. L'hémi-
plégie flasque gauche (facial inférieur et membres) persiste aussi.
4 CLINIQUE NERVEUSE.
Il y a toujours un état de contracture de la face et des membres
du côté droit.
Les crises d'épilepsie jacksonienne se répètent fréquemment.
La température est montée hier soir à 39 ? et ce matin est in 39"7.
Le malade meurt ce même jour à une heure après-midi.
Autopsie. L'autopsie n'a pu être pratiquée que quarante-trois
heures après la mort.
On constate extérieurement à gauche sur la région frontale une
éraflure cutanée sans importance. Il n'y a pas de lésions de la
boite crânienne.
Après ouverture de la dure-mère on constate à la surface interne
de celle-ci au niveau des circonvolutions frontales et pariétales
droites un dépôt hémorragique peu important. La pachyméninge
ne présente pas d'ailleurs d'altérations, elle n'est pas épaissie et le
sang qui la recouvre ne lui adhère pas. Extérieurement tout l'hé-
misphère droit est recouvert d'un épanchement hémorrhagique,
qui, à première vue, parait infiltré dans la méninge molle et dont
le maximum se trouve au niveau des circonvolutions rolandiques.
A la partie moyenne de la frontale ascendante l'épanchement est
plus noir et plus épais, et l'on peut croire d'abord à du sang venu
par effraction de la profondeur. Les méninges cérébelleuses pré-
sentent un léger degré d'infiltration. Le liquide céphalo-rachidien
est rosé, de quantité il peu près normale.
Rien à la surface de l'hémisphère gauche ni dans son épaisseur.
A la coupe de l'hémisphère droit on constate que le sang pénètre
profondément dans les scissures et les sillons du cortex, qui sont
remplis par des caillots noirs comme par une masse à injection
poussée sous pression. Ceci s'observe particulièrement au niveau
de la scissure de Sylvius et de celle de Rolando, et la surface de
l'insula est recouverte de gros caillots. Sur un point au niveau de
la région motrice il y a effraction de la méninge molle.
L'ablation de la pie-mère est difficile, les caillots étant comme
lixés dans les scissures et les sillons où le sang a dû s'épancher
sous pression. On note à la surface interne de ce feuillet méningé
des saillies hématiques correspondant aux dépressions corticales,
si bien que cette surface prend l'aspect de la carte géographique
en relief d'une région montagneuse. L'épanchement s'est donc fait
dans l'épaisseur et au-dessous de la pie-mére. Ce n'est que secon-
dairement que s'est produite en un point limité son effraction à
travers cette membrane. Les circonvolutions débarrassées de la
méninge sont un peu imbibées de sang, mais lisses et sans lésions.
Pas d'épanchement sanguin ni de lésions dans l'épaisseur de
l'hémisphère. '
La sylvienne droite est enlevée. On constate sur une de ses
branches principales un caillot adhérent présentant une surface
HEMORRHAGIE MENINGEE SOUS-ARACHNOIDIENNE. r)
lisse après détersion et paraissant contenu sous l'adventice. Ce
point paraissant suspect d'être l'origine du raptus hémorrhagiqut
doit être réservé pour un examen plus approfondi. L'artère basi-
laire est dilatée, indurée, grosse comme une grosse plume d'oie et
présente quelques plaques jaunes. On ne constate rien d'anormal
du côté du mésocéphale.
Le coeur est gros (450 gr.), gras, sans lésions orificielles. Les
poumons sont congestionnés. Les reins présentent un certain degré
de sclérose, la capsule est adhérente et la substance corticale
diminuée d'épaisseur.
13) Examen histologique. Nous avons recueilli la sylvienne
droite avec soin et nous avons examiné la branche de cette artère
présentant à sa surface un caillot noirâtre qui paraissait inclus
sous l'adventice. A l'examen macroscopique de la partie moyenne
de cette artère ainsi munie d'un caillot périphérique en croissant,
on constate à l'intérieur de celui-ci la coupe transversale du vais-
seau. Cette coupe est irrégulière, du moins sur une de ses moitiés
qui est dilatée et forme un petit sac contenant du sang. L'exis-
tence de ce petit sac anévrysmatique est indéniable et apparaît
nettement après le grattage des caillots qui recouvraient la
surface externe du vaisseau. Son volume est très restreint, attei-
gnant à peine celui d'un petit pois. L'examen microscopique
confirme d'ailleurs son existence. Voici les résultats qu'il nous a
fournis :
Nous avons pratiqué des coupes transversales d'un fragment
pris au niveau de la dilatation anévrysmale, après fixation par
l'alcool et inclusion dans la paraffine. Nous les avons colorées soit
avec l'IIématéine et l'Eosine, soit avec l'Orcéine.
A un faible grossissement on constate tout d'abord la présence,
au milieu d'un caillot volumineux, de la grosse branche artérielle
émanée de la sylvienne et coupée plus ou moins transversalement.
Sa lumière est très irrégulière; dans une de ses'portions elle est
arrondie, revenue sur elle-même et ne contient pas de globules de
sang. Cette portion arrondie se continue par une lumière étroite
avec un segment renflé, dilaté, présentant de nombreux globules
sanguins. La paroi de cette artère offre elle aussi une épaisseur et
une structure différentes dans les deux régions. Cette différence
apparaît nettement déjà même avec un grossissement faible et
s'accuse avec un grossissement plus fort.
Au niveau du segment arrondi ou segment artériel principal, on
distingue la succession des diverses tuniques qui sont atteintes
d'ailleurs de lésions manifestes : l'endartère est épaisse, présentant
de la prolifération conjonctive et contenant par places des îlots de
dégénérescence sous forme de flaques homogènes à coloration plus
ou moins foncée allant du rouge franc au rose pâle et parsemées
6 CLINIQUE NERVEUSE.
de quelques rares noyaux. Ces flaques s'observent surtout dans la
portion la plus interne de l'endarlère.
La limitable élastique ressort avec netteté surtout sur les prépa-
rations colorées il En certains points elle devient plus
pâle ; elle peut s'amincir ou se fragmenter ou se diviser en plu-
sieurs lamelles et comme s'effeuiller.
- La tunique musculaire présente un certain degré de sclérose.
Elle et envahie par des éléments cellulaires jeunes, arrondis, à
noyaux fortement colorés. Cette invasion embryonnaire est surtout
très marquée dans l'adventice.
Dans le segment qui constitue la paroi de la dilatation ampul-
laire nous ne retrouvons plus la structure de la paroi artérielle
que nous venons de décrire. Au niveau des points où se fait l'union
de l'anévrysme et du vaisseau, la limitante élastique devient moins
colorable, s'effile, se fragmente, puis disparait. On voit aussi la
tunique musculaire devenir plus scléreuse, puis disparaître il son
tour complètement. L'endartérie ou mieux sa portion interne
forme, adossée à l'adventice, la paroi de la dilatation. Cette paroi
n'est plus alors constituée que par du tissu fibreux dans les mailles
duquel on retrouve une infiltration très abondante de globules
sanguins. A sa surface interne existe aussi un caillot adhérent,
assez volumineux, sans traces d'organisation, s'eflilant en s'enga-
geant dans la lumière rétrécie qui réunit le sac et le segment artériel.
Nous n'avons pu déceler sur nos préparations le siège exact de
la fissuration à travers laquelle a dû se faire le raptus hémorrha-
gique, mais l'infiltration sanguine abondante dans les interstices
du tissu fibreux pariétal et tout autour de cette paroi sous forme
d'un caillot volumineux indique selon toute probabilité que ce
point de rupture était tout proche. En tout cas l'existence de'ce
petit auévrysme sacciforme jointe à celle d'un gros caillot périphé-
rique et à la notion de son siège dans la région où l'infiltration
hémol 1 hagiquc ¡ntra-pic-mél ienne"alleint son maximum nous au-
torise à penser qu'il a été le point de départ de l'hémorragie que
nous avons observée, d'autant mieux que nous n'avons trouvé sur
aucune autre branche artérielle de dilatation semblable.
Les autres artérioles pie-mériennes intéressées par notre coupe,
étaient elles aussi nettement malades et présentaient dans leur
portion périphérique surtout une infiltration embryonnaire très
abondante.
En somme et pour résumer celte observation :
Cliniquement : au début : Coma, paralysie faciale droite,
paralysie du bras gauche, contracture des membres inférieurs,
contracture moins forte du membre supérieur droit, pupilles
égales, hypothermie.
HÉMORRHAGIE MENINGEE SOUS-ARACHNOIDIENNE. 7
Plus tard : Coma complet, hémiplégie gauche flasque (facial
inférieur et membres supérieur et inférieur gauches), con-
tractures de la face et des membres à droite, déviation* des
yeux à droite, myosis et inégalité pupillaire, crises d'épilepsie
jacksonienne à point de. départ dans la moitié gauche de la
face, hyperthermie.
Anatomiquement : .' hémorrhagie sous-arachnoïdienne à la
surface de l'hémisphère droit, foyer plus épais au niveau de
la scissure de Sylvius, hémorrhagie secondaire et très limitée
intra-arachuoidienne, petit anev1'ysme d'une des brandies de
la sylvienne (point de départ de l'infiltration sanguine),
lésions des artères cérébrales, léger degré de sclérose rénale.
Voilà donc le fait tel que nous avons pu l'observer et l'étu-
dier. Il donne lieu à un certain nombre de considérations que
nous allons exposer, considérations d'ordre anatomo-patho-
logique, clinique et thérapeutique.
If. - Considérations- générales.
Les lésions révélées par l'examen nécropsique du sujet
de notre observation rentrent dans le cadre ordinaire des des-
criptions anatomo-pathologiques d'hémorrhagies sous-arach-
noïdiennes, du moins des hémorrhagies liées aux ruptures
des artères méningées. L'existence d'un épanchement très
limité intra-arachnoïdicn, consécutif à un point d'effraction
secondaire ne peut suffire à la faire rentrer, du moins elini-
quement, dans le groupe des hémorrhagies méningées mixtes.
Nuus voulons au point de vue anatomique retenir seulement
deux faits :
D'abord l'existence de lésions de sclérose rénale et en
général de lésions artérielles ; en second lieu la présence : d\1ll
petit anévrysme sur une branche de la s1'lvienlle et le rôle
important qu'il a joué.
On sait combien sont fréquentes les hémorrhagies céré-
brales au cours des néphrites artérielles. Il semble en être de
même pour les hémorrhagies méningées, du moins pour
celles qui sont liées à la rupture d'une artère ou d'un petit
anévrysme. Goodhart a bien insisté sur leurs relations avec
les lésions rénales : vingt fois sur quarante-neuf cas il. y
avait une néphrite interstitielle concomitante.
Le parallélisme entre l'hémorrhagie sous-méningée d'ori-
gine artérielle et rhémorrhagie eérébrale se poursuit encore
8 CLINIQUE NERVEUSE.
lorsqu'on examine de plus près le mode de cette effraction
sanguine. C'est évidemment sur une artère malade que dans
les deux cas se produit la rupture, mais c'est ordinairement
par l'intermédiaire d'une dilatation anévrysmale, petit ané-
vrysme d'une artériole inlra-cérébrale d'un côté ainsi que
l'ont bien montré les premiers Charcot et Bouchard, et d'autre
part dilatation anévrysmale portant sur une branche d'une
artère ou d'une artériole pie-mérienne. M. le professeur
Lépine a attiré l'attention, dans un mémoire important ', sur
le rôle joué par ces anévrysmes, dans la détermination d'un
certain nombre d'hémorrhagies sous-arachnoïdiennes.
Dans une de ses observations il s'agissait même de dilata-
tions miliaires absolument semblables à celles décrites par
Charcot et Bouchard sur les artérioles intra-hémisphériques.
D'ailleurs le volume de)'anévrysme qui peut être très variable
est un fait contingent et dépend évidemment surtout du
volume du vaisseau sur lequel il a pris naissance. Qu'il
s'agisse d'un sac relativement volumineux siégeant sur un
des gros troncs artériels de la base, qu'il s'agisse d'une ec lasie
beaucoup plus restreinte du volume d'un petit pois par
exemple comme dans notre cas où la lésion portait sur une
artère de moyen calibre, ou bien qu'il s'agisse d'un anévrysme
miliaire siégeant sur une artériole pie-mérienne, au fond les
lésions sont à peu près les mêmes et leur mécanisme patho-
génique est identique. A ce point de vue le rapprochement
des hémorrhagies méningées d'origine artérielle et de l'hé-
morrhagie intra-cérébrale est donc naturel et légitime.
Donc deux faits anatomo-pathologiques nous paraissent
devoir être surtout retenus : l'influence des artériopathies et
la coexistence de l'artériopathie rénale en particulier, le rôle
pathogénique des dilatations anévrysmales.
L'étude clinique de notre observation et la lecture des faits
plus ou moins analogues que l'on trouve relatés dans la lit-
térature médicale frappent avant tout par la richesse et la
variabilité de la symptomatologie, et aussi par le caractère
diffus le plus souvent, complexe toujours et éminemment
variable des symptômes relevés chez un même sujet aux
diverses phases évolutives de l'accident méningé qui le frappe.
Ce sont là les deux points que nous désirons d'abord mettre
1 Mémoires de la Société de biologie, 1867.
HÉMORRHAGIE MÉNINGÉE SOUS-ARACHNOÏDIENNE. 9
en vedette, nous rechercherons ensuite le pourquoi de ces
variations et nous verrons enfin quelle importance diagnos-
tique elles peuvent revêtir.
Notre malade avait certainement présenté une symptoma-
tologie assez riche et relativement bruyante, or si o,m ânalys
un à un chacun des éléments de ce tableau clinique on
marque non sans étonnement qu'un certain nombre 1 il ^
eux constituaient une manifestation rare de l'hémor 1 '
sous-méningée, du moins si l'on s'en tient aux descrip ?
des classiques. Le coma excepté, bien entendu, car c'est là de- - -.
l'aveu de tous les neuropathologistes le phénomène le plus
constant et parfois le. seul phénomène observé au cours des
épanchements sanglants sous-arachnoïdiens. Prus , par
exemple, dit bien l'avoir observé dans ses six cas. Mais encore
le coma se présente-l-il avec des variantes soit dans ? on mode
d'apparition soit dans son évolution, tantôt s'établissant d'em-
blée et atteignant aussitôt sou maximum pour persister ainsi
jusqu'à la terminaison fatale, tantôt au contraire s'installant
progressivement, constituant d'abord plutôt un simple état
subcomateux, se transformant plus tard seulement en coma
absolu, parfois sujet à des régressions et à des améliorations
transitoires. l3oud'et' aurait même vu un individu atteint d'une
hémorrhagie sous-arachnoïdienne, qui, frappé d'une attaque
d'apoplexie, revenait à lui au bout de dix minutes et ne
retombait dans un coma final qu'après une longue période
d'un violent délire d'action.
Notre malade présentait nettement une hémiplégie gauche.
Or on sait que les paralysies localisées, l'hémiplégie par
exemple, constituent une manifestation très rare de l'hémor-
rhagie sous-méningée. Prus n'avait constaté l'hémiplégie que
dans trois cas sur douze et Serres en avait même nié la pos-
sibilité en s'appuyant sur ses recherches personnelles. Gri-
solle l'admettait mais comme symptôme moins fréquent et
plus tardif que dans l'hémorrhagie cérébrale. M. le profes-
seur Lépine l'observait dans les deux cas de son mémoire
déjà cité.
Chez notre sujet l'hémiplégie était llasque, mais dans les
débuts pourtant il existait de la raideur des deux membres
inférieurs, puis plus tard cette raideur se localisait à la
' E. Boudet. Mémoire sur l'hémorrhagie des méninges. (J. des connais-
sances )2 éclico- chii,ii ? q ic(t 1(,s, 1839, p. 55.)
10 CLINIQUE NERVEUSE. ,
moitié droite du corps. Ces contractures du côté de la lésion
ne constituent point une anomalie-dans l'histoire clinique des
lésions méningées, et il y a de nombreuses années déjà que
Bochefontaine {Académie des Sciences, 1876) et Duret (Soc.
biologie, 1877) ont démontré expérimentalement leur réalité,
du moins pour la pach-mi·ninge. }lais l'accord est encore
loin d'être fait en ce qui concerne les relations qui unissent
les contractures et l'hémorrhagie sous-arachnoïdienne.
Jaccoud1 el Labadie-Lagrave en particulier', malgré que
Boudet les ait observées quatorze' fois sur vingt-sept cas et
que Legendre les range au nombre des symptômes essentiels
de la- maladie, considéraient que les contractures doivent être
rapportées d'unc façon presque exclusive à la variété inlra-
arachnoïdienne ou encore à la pachyméningite hétnorrha-
gique. Lorsqu'on les observe dans une- hémorrllagie sous-
méningée, il s'agirait ou d'une hémorrlwgie mixte (sus et
sous-arachnoïdienne) ou bien d'une hémorrhagie. ventricu-
laire concomitante.
En fait dans notre observation, il existait bien un léger
épanchement sanglant secondaire inlra-arachnoidien, celui-ci
existait de même dans une des observations de M. le profes-
seur Lépine où l'on notait de la contracture du membre
supérieur du côté de la lésion. Il est donc possible que les
contractures directes soient le fait d'une hémorrhagie intra-
arachnoïdienne concomitante, mais en tout cas cette coïnci-
dence qui est loin d'être constante ne peut expliquer tous
les phénomènes spastiques que l'ont peut observer au cours
de l'hémorrhagie sous-méningée.
Parmi ces symptômes d'excitation il en est un, la déviation
conjuguée de la tête et des yeux que nous n'avons relevé
qu'incomplet dans notre observation (il n'existait en effet,
qu'uncsimple déviation des yeux), et qui n'aété d'ailleurs que
très rarement noté.
Nous n'avons point recherché chez notre malade le signe
de Kernig, et il est probable que cette recherche eût été
négative, étant donnée la topographie de l'épanchement
hématique. Si Widal et Merkfen en effet ont pu l'observer °,
c'est qu'il s'agissait dans leur cas d'une liémorrhagie sous-
. Dictionnaire de médecine el de chirurgie pratique . Article Méninges.
8 Wiùal et ferl : len. Soc. méd. des lù ? 1899.
HÉMORRUAGIE MENINGEE SOUS-ARACHNOÏDIENNE. 'I1 1
arachnoïdienne irritant les méninges du mésocéphale et celles
do la moelle.
Quant aux crises convulsives, elles sont ! regardées par bien
des auteurs connue rares, et cependant nous avons pu cons-
tater chez notre malade une série do crises absolument
typiques d'épilepsie jacksonienne, que nous ne saurions con-
sidérer malgré Jaccoud et Labadie-Lagrave comme le résul-
tat du léger épauchement intra-arachnoïdien secondaire et
concomitant que l'autopsie nous a révélé. Dugast dans une
thèse de Paris déjà ancienne affirmait au contraire que des
convulsions épileptiformes survenant sans cause connue et se
montrant sous la forme intermittente suffisaient à établir le
diagnostic d'hémorrhagie sous-méningée.
Dans plusieurs observations nous'avons trouvé noté un
degré marqué de myosis et parfois ['inégalité pupillaire.
Nous avons nous-mêmes constaté celle-ci dans le fait que nous
rapportons aujourd'hui.
Nous ne voulions pas-terminer cette analyse s-mploma-
lique sans rappeler d'abord que notre malade a présenté une
courbe de température analogue à celle que les travaux de
Charcot ont montré appartenir à l'hémorrhagie cérébrabe,
mais qui s'observe aussi dans lesllémorrhaâiessous-araclmo'i-
diennes, ainsi que M. Lépine le faisait remarquer dans son
mémoire de la société de biologie : l'hypothermie initiale
faisant place rapidement à une réélévation de la température
qui bientôt monte au-dessus de la normale pour se mainte-
nir à un taux fébrile élevé, jusqu'à la mort.
Nous voulons aussi rappeler que nous avons noie très net-
tement et des deux côtés l'apparition de cette modification du
réflexe plantaire signalée par Babiuski dans les lésions orga-
niques-du système neuro-moteur central et consistant dans
un mouvement d'extension des orteils sous l'influence d'une
excitation cutanée de la plante du pied.
Ce qui ressort le plus nettement de cet exposé critique des
symptômes qui marquent la scène clinique des hémorrhagies
sous-arachnoïdiennes, c'est la grande variabilité de celte
1)Lomitolo--ic. Ainsi dans telle observation c'est l'hémi-
plégie que l'on note, dans tello autre aucune trace de para-
lysie, ici ce sont des contractures, des crises jacksoniennes,
la on ne décèle que des phénomènes de déficit. La scène
change donc avec l'acteur. Mais ce n'est pas tout.
12 CLINIQUE NERVEUSE.
Chez un même sujet on la voit subir du soir au matin ou
d'un jour à l'autre des modifications très importantes. Et ici
nous voudrions insister sur cette variabilité d'un moment à
l'autre du tableau clinique chez le même sujet, variabilité
qui, jointe à la diffusion et à la complexité des symptômes
acquiert, croyons-nous, une importante valeur diagnostique,
Si nous considérons par exemple le malade dont nous
venons de rapporter l'histoire, nous sommes frappés des
divergences qui existent entre les résultats des examens suc-
cessifs auxquels il fut soumis : Ainsi le soir de son entrée, il
présentait de la paralysie du facial inférieur droit et du bras
gauche, et de la contracture des membres inférieurs et du
membre supérieur droit.
Le lendemain nous notions une hémiplegie gauche flasque
et de la contracture des membres du côté droit. Mêmes varia-
tions du côté de l'état des pupilles : le premier jour elles sont
égales, le lendemain l'inégalité était apparue. Chez certains
malades on peut même voir l'inégalité se produire tantôt aux
dépens d'une pupille tantôt aux dépens de l'autre.
Ainsi donc le tableau clinique change d'aspect avec une
grande facilité, et en outre il est surchargé de symptômes
et parfois de symptômes d'ordre différent. Les phénomènes
de déficit et ceux d'excitation s'y rencontrent et s'y entre-
mêlent ; les paralysies flasques, les contractures, les crises
d'épilepsie jacksonienne s'y trouvent réunies. En présence de
tels malades on a bien l'impression que la lésion est en varia-
tion ou mieux qu'elle évolue et progresse.
Et en effet ce polymorphisme et cette instabilité sympto-
maliques trouvent leur raison d'être dans le mode d'insLalla-
tion et la progressivité de la lésion. L'épanchement sanglant
détermine sur les centres sous-jacents des phénomènes d'ex-
citation puis d'inhibition, puis il étend son effet sur une plus
grande surface, puis il peut rompre l'arachnoïde et venir
irriter la pachyméninge, etc.
Ce sont ces mêmes notions du mode hémorrhagique, de
l'abondance de l'épanchement et surtout de son siège qui
expliquent évidemment aussi le fait du polymorphisme de la
symptomatologie notée dans les diverses observations.
Il est bien certain que la simple transsudation sanglante,
à la surface de l'encéphale, qui peut s'observer au cours de
divers états dyscrasiques ne donnera, si du moins elle peut
HÉMORRHAGIE MÉNINGÉE SOUS-ARACHNOÏDIENNE. 13
arriver à s'extérioriser cliniquement) que des symptômes
bien vagues et bien légers.
Il ne saurait évidemment en être de même des ruptures
veineuses et surtout des ruptures artérielles. Celles-ci, lors-
qu'elles siègent au niveau d'un sac anévrysmal volumineux,
sont même parfois précédées de phénomènes prodromiques.
L'intensité de l'hémorrhagie et sa brusquerie d'invasion
dépendront. du volume du vaisseau lésé et de la largeur de la
rupture ; elles régiront le mode parfois variable d'installa-
tion des phénomènes cliniques. Le siège de l'hémorrhagie
est assurément le facteur pathogénique le plus important.
Ainsi il semble que l'on doive expliquer la rareté relative des
troubles de motricité du côté des membres ou de la face, au
cours des hémorrhagies sous-arachnoïdiennes par ce fait que
les anévrysmes et les ruptures artérielles siègent plus fré-
quemment à la base du cerveau.
Dans notre cas ce qui dominait la scène c'étaient les phé-
nomènes moteurs, et l'autopsie nous a bien montré que le
point de départ de l'hémorrhagie était au niveau d'une des bran-
ches de la sylvienne et que c'était au niveau de la région
motrice que l'épanchement atteignait son maximum de ten-
sion et d'épaisseur. Les constatations nécropsiques nous mon-
traient en outre l'intégrité de ces circonvolutions rolandiques
simplement comprimées et mécaniquement irritées; or on se
rappelle que les phénomènes spasmodiques occupaient le
premier plan du tableau clinique. Enfin nous avons trouvé
un point d'effraction de l'arachnoïde et un épanchement se-
condaire, d'ailleurs peu important, au-dessous de la pachy-
méninge. Ces lésions secondaires peuvent évidemment jouer
un rôle modificateur. Nous avons en particulier signalé plus
haut que Jaccoud et Labadie-Lagrave, attribuaient, peut-être
avec exagération, les phénomènes de contracture à l'épanche-
ment secondaire intra-arachnoïdien. Il est possible en tout
cas que celui-ci tiennent sous sa dépendance les raideurs ob-
servées du côté de la lésion par irritation de lapachyméninge
conformément aux expériences de Bochefontaine et Duret.
Un fait important domine donc l'histoire des hémorrhagies
sous-arachnoïdiennes,c'est le caractère complexe,polymorphe
et instable de la symptomatologie. Ce caractère est, croyons-
nous, assez tranché pour aider souvent au diagnostic. Or on
sait combien il est difficile de porter ce diagnostic et de l'af-
14 -fit CLINIQUE NERVEUSE.
firmer. Tous les auteurs sont unanimes sur ce point. L'hémor-
rhagie cérébrale est cependant plus systématisée dans ses
symptômes et son apoplexie est souvent plus brusquement
complète. Avec l'effraction ventriculaire apparaissent les
contractures précoces.
Le ramollissement cérébral a ordinairement pour lui son
mode de début et son étiologie.
La congestion cérébrale a une durée moindre et une symp-
tomatologie moins brutale.
Et quant t la commotion cérébrale, à laquelle on peut tou-
jours penser, surtout en l'absence d'anamnestiques précis, elle
est surtout marquée en même temps que par un état comateux
assez profond par des phénomènes du côté du pouls et de la res-
piration (irrégularité, ralentissement). Les troubles morbides
durent ordinairement assez peu et s'effacent graduellement.
Mais s'il est difficile de séparer cliniquement une lésion
intra-cérébrale d'une lésion péri-cércbrale, il est peut-être
encore plus difficile de distinguer entre les diverses variétés
d'hémorrhagies méningées, sauf quand il s'agit d'un sujetquc
l'on a pu suivre et observer antérieurement et chez lequel
on a reloué les symptômes d'une pachyméningitc, avant-
coureurs d'une hémorrhagic intra-arachnoïdiennc. Quant à
l'épanchement sanglant entre les os du crâne et la dure-
mère, le plus souvent d'origine traumatique, son diagnostic
deviendra malaisé en l'absence de celte notion étiologique.
Et cependant cette question de diagnostic anatomique et
topographique des hémorrhagies intra-craniennes. n'a pas
qu'un intérêt purement théorique, elle se double d'une ques-
tion vitale de thérapeutique.
On ne discute plus sur les avantages et la nécessilé d'une
intervention dans -l'épanchement épidural. De même dans les
pachyméningites où la trépanation a déjà été pratiquée
maintes fois (Armstroug, Iironlein, Gulding-Bird, Grainger-
Stewart, etc.), il ne paraît pas douteux que les résultats
qu'elle a fournis soient de beaucoup supérieurs ceux que
procure la simple expectation, ? eismann rapportait en
1882-85 dans la Deulsch. Zeil. f. Chir. une statistique basée
sur 257 cas et d'après laquelle la trépanation aurait donné
G7 p. 100 de succès, tandis que .l'expectalion aurait été
suivie d'une mortalité de 90 p. 100. Ces chiffres sont très
éloquents. Mais il est en pratique malheureusement très dif-
HÉMORRHAGIE MÉNINGÉE SOUS-ARACHNOÏDIENNE. lia
ficile souvent de porter un diagnostic ferme, du moins un
diagnostic de siège et de localisation.
Il est bien certain que dans notre cas, où la question d'une
intervention avait été agitée, celle-ci, même guidée par l'exis-
tence de convulsions à type jaclaonicn et à point de départ
facial n'eût donné que des résultats bien insignifiants. L'im-
possibilité d'évacuer une pareille hémorl'hagie en nappe est
ressortie clairement pour nous de l'examen nécropsique des
hémisphères cérébraux. Néanmoins la trépanation et l'inci-
sion de la dure-mère auraienl-elles pu, en diminuant la ten-
sion inlra-cranienne, améliorer l'état du malade ? C'est là
chose possible, et c'est ce que démontreront peut-être dans un
avenir plus ou moins prochain les progrès de la chirurgie
intra-cranienne.
On voit en tout cas par notre observation que l'existence
de phénomènes spasmodiqucs d'épilepsie jaksonienne au
cours d'un coma, même lorsqu'ils indiquent une localisation
cérébrale précise, ne constituent pas une indication opéra-
toire impérative puisqu'ils peuvent être produits par une
hémorrhagie sous-méningée en nappe.
COCLUSIO1VS.-L'llémorrhabie sous-arachnoïdienne se pro-
duit ordinairement chez les artério-scléreux atteints, 11. des
degrés plus ou moins marqués, d'artérite cérébrale Elle est
habituellement déterminée par la rupture d'un anévrysme de
volume variable. .
Cliniquement, l'hémiplégie et l'épilepsie jacksonienne,
c'est-à-dire les phénomènes de localisation semblent plus
fréquents que ne l'indiquent beaucoup d'auteurs. Dans notre
cas notamment ces phénomènes devaient faire diagnostiquer
une localisation assez étroite et pousser à une intervention.
La variabilité des symptômes d'origine corticale obser-
vés dans un court délai chez un même malade, variabilité qui
a été très nette dans notre cas, nous paraît devoir consti-
tuer un bon signe diagnostique de l'hémorrhagie méningée
d'avec l'hémorrhagie intra-cérébrale.
Les phénomènes de localisation ne sont pas toujours une
indication opératoire suffisante, puisque dans la plupart
des cas d'hémorrhagie sous-arachnoïdienne par exemple, la
diffusion de l'épanchement rend une intervention inutile.
CLINIQUE MENTALE.
Du sens génital étudié chez les mêmes malades aux
trois périodes de la paralysie générale;
Par le D' E. MARANDON DE 110\TYEL,
Médecin en chef des asiles publics d'aliénés de la Seine.
Dans deux précédents mémoires j'ai étudié le sens tactile ' 1
et le sens analgésique - à l'aide d'une longue et patiente
méthode qui a consisté à suivre les mêmes paralytiques géné-
raux au nombre de 108 depuis le début de la maladie jus-
qu'à sa terminaison par la mort, en ayant soin de recher-
cher sur eux à des intervalles rapprochés et au même
moment toute la symptomatologie physique et mentale de
la paralysie générale. Ce travail, le troisième, est consacré
au sens génital. Le sujet est délicat car pour le traitera fond,
il est nécessaire de dévoiler les secrets de l'alcôve et de noter
d'intimes détails. Certes, la mère ne conseillera pas la lecture
de ce mémoire à sa fille et je ne la lui conseillerai pas davan-
tage à elle-même, mais sans rappeler que nos aïeux affir-
maient avec raison que la science comme le feu purifie tout
ce qu'elle touche, je dirai que j'écris dans un journal scienti-
fique pour des hommes de science, et que dans ces condi-
tions : honni soit qui mal y pense.
Pour se renseigner sur le sens génital des paralytiques
généraux il y a trois sources d'informations. D'abord le
malade lui-même. J'ai été, en effet, très surpris de constater
combien dans beaucoup de cas, le paralytique général, même
à une période déjà avancée, restait conscient de l'état de sa
virilité et fournissait, sur celle-ci des renseignements que les
deux autres moyens de contrôle démontraient être exacts. De
même que le malade qui se prétend empereur ou million-
1 Archives de Neurologie, 1898-1899.
. Bulletin de la Société de Médecine mentale de Belgique, 1898.
DU SENS GÉNITAL DE LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 17
naire, vous répondra sincèrement qu'il est journalier à
3 francs par jour si vous lui demandez sa profession, de
même tandis qu'il se prétend de force à déflorer deux cents
vierges en une nuit, il vous avouera le plus souvent sans
réticence que depuis six mois il n'a plus d'érection, si vous
l'invitez à fixer l'époque de ses derniers rapports sexuels. Il
en est même qui cherchent à expliquer le désaccord existant
entre la réalité et leurs paroles : ainsi, un prétendait que son
impuissance tenait à l'absence de toute femme dans le ser-
vice ; un autre à la poudre aux moines que nous mettions
dans les aliments pour calmer les ardeurs des malades, et
tous deux juraient que dehors, ils se faisaient fort de satis-
faire coup sur coup une douzaine deMessalines pour le moins.
N'empêche que les renseignements qu'ils donnaient sur l'état
véritable de leur virilité étaient exacts. De même il est rare-
ment arrivé que ceux fournis sur l'état inverse, l'état d'exci-
tation, n'aient pas été reconnus fondés. Le paralytique géné-
ral, du reste, n'a presque toujours aucune retenue, il ne se
cache pas. Quand le sens génital parle chez lui, il se masturbe
et il se masturbe un peu partout; même si sa verge en érection
le gêne dans son pantalon, lui ne se gêne guère pour la
mettre à l'air. Il en résulte qu'il est d'ordinaire assez facile
de s'assurer si l'excitation indiquée par le malade est exacte.
On a encore dans les taches des chemises et des draps, un
bon moyen de vérifier la fréquence et l'abondance des éja-
culations.
Mais les renseignements les plus sûrs sont fournis par les
femmes des paralytiques généraux qui, quand elles sont
interrogées avec réserve et délicatesse, s'empressent de tout
raconter au médecin. Par elles, on arrive à connaître non
seulement toujours l'état avant l'entrée, mais encore souvent
l'état à l'asile, et cela môme si les malades ne sortent pas en
permission de promenade ou en congé de quelques jours, car
lors des visites, elles reçoivent de leur homme, plus d'une
confidence sur ce sujet. Il importe donc de choisir de préfé-
rence comme sujets d'observations, des paralytiques dans la
force de l'âge et en puissance de femme.
A l'aide de ces trois moyens et en suivant nos 108 paraly-
sies générales du début à la terminaison de la maladie, tra-
vail que nous avons poursuivi durant six ans, nous avons
constaté des choses intéressantes sur lesquelles l'attention n'a
Aiiciuves, 2e série, t. X. 2
18 CLINIQUE MENTALE.
pas été, croyons-nous, suffisamment attirée. Mais pour bien
apprécier les-résultats de nos recherches, il convient de résu-
mer brièvement l'état actuel de la question, en rapportant
les appréciations contenues dans les travaux les plus récents
sur la paralysie générale et relatives aux modifications du
sens génital dans cette affection.
Les fonctions génitales, écrivent MM. Magnan et Sérieux,
sont souvent troublées; on observe au début même de la
maladie, une impuissance plus ou moins complète; dans le
cours des accès maniaques et même en dehors d'eux, on peut
constater une excitation génitale qui pousse le sujet à des
excès vénériens, à l'onanisme. D'après M. Iluet, à la période
initiale, les fonctions génésiques sont assez souvent modi-
fiées ; chez les hommes, on observe de la frigidité et de l'im-
puissance contrastant avec l'excitation génitale d'ordre psy-
chique, assez fréquente au contraire. Cet auteur ne dit rien
des périodes d'état et de terminaison. Pour M. Voisin, au
contraire, l'activité génésique acquiert souvent des propor-
tions extraordinaires pendant la période prodromique. Les
individus deviennent insatiables, au grand étonnement de
leurs épouses qui finissent bientôt par s'inquiéter de ces
manifestations insolites ; elles font alors des confidences
incroyables. Cet auteur considère comme bien plus rare la
frigidité prématurée qui ne se constate que dans certains
cas. M. Voisin ajoute que cette excitation s'accentue à la
première période et l'attribue à l'hypércsthëaie, l'excitation
génitale, qui à la seconde période se manifeste par des pra-
tiques d'onanisme. Il ne dit rien de la pliase terminale.
M. Gilbert Ballet ne parle des troubles du sens génital qu'à
la période prodromique. On observe bien souvent, dit-il, une
surexcitation sexuelle qui se produit par des excès génitaux
pouvant même entraîner les malades à des actes immoraux,
d'autres fois', au contraire, il existe de l'agénésie.
De tous les états d'excitation, nous apprend M. Sollier, la
première période de la paralysie générale est celui où l'éro-
tisme est le plus marqué. Il se traduit non seulement par des
idées et des paroles, mais encore par des actes. L'auteur
constate que cette excitation génésique donne souvent lieu à
des conceptions délirantes; les paralytiques se croient capa-
bles de repeupler le monde, de posséder mille femmes dans
une nuit et autres prouesses du même genre. MM. Christian
DU SENS GÉNITAL DE LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 19
et Ritti sont d'avis que l'excitation génésique se produit
presque invariablement pour durer plus ou moins longtemps
à la période prodromique et est la source la plus fréquente
des actes délictueux ou immoraux commis à cette phase. Elle
va en diminuant il mesure que l'affection progresse ; cepen-
dant, ajoutent-ils. on voit quelquefois des paralytiques, arri-
vés à une période très avancée, qui se livrent avec fureur à
l'onanisme; on en peut citer d'autres qui, quoique malades
depuis longtemps, sont encore capables de se livrer au coït
et même de devenir pères. M. Régis signale seulement à la
période prodromique des altérations en divers sens de la puis-
sance génésique. Nous n'avions rien trouvé de spécial dans
M. Dagonet ni dans M. Culerre, mais M. Grasset spécifie
qu'à la période prodromique, certains paralytiques commet-
tent des actes de libertinage éhonté, sans raisons apparentes,
montrant un érotisme qui contraste souvent avec l'impuis-
sance réelle, car Baillarger a noté,'en effet, la perte des facul-
tés génitales, dans beaucoup de cas, un an et plus avant le
début de la paralysie générale confirmée. Cet auteur, lui
aussi, ne signale les troubles du sens génital ni à la deuxième,
ni à la troisième période; seulement à l'occasion des formes
spinales, il parle d'un satyriasis habituel, bien différent de
l'impuissance des tabétiques.
Si nous interrogeons les aliénistes étrangers nous ne trou-
verons pas davantages d'appréciations basées sur des recher-
ches systématiques poursuivies du début à la terminaison de
la paralysie générale chez les mêmes malades. Les fonctions
sexuelles, nous apprend M. Schule, sont en général exagérées
au début de la maladie, à la période d'excitation; la manière
inconvenante dont leur satisfaction est accomplie est souvent
le point de départ d'actes délictueux, même d'actes crimi-
nels. Plus tard, avec les progrès de la paralysie, l'excitation
anormale et la fonction sexuelle s'affaiblissent (pollutions
involontaires avec flaccidité de la verge, pertes séminales
pendant la miction et la défécation). 111. de Kraff-Ebing formule
ainsi son opinion : « L'instinct génital est, dans les premiers
stades de la maladie ainsi que dans les états d'excitation épi-
sodique, habituellement accentué, parfois aussi perverti;
dans les stades terminaux, le libido et la puissance sexuelle
tombent ordinairement à zéro. » Enfin nous lisons dans l'ou-
vrage de M. l\lickle que la perte des facultés génitales a été
20 CLINIQUE MENTALE.
notée dans quelques cas comme symptôme prodromique; que
d'un autre côte des excès sexuels coïncident quelquefois avec
le développement des premiers germes de la maladie et quand
ils semblent être une cause, souvent ils ne sont en réalité
qu'un symptôme prodromique.
Est-on autorisé après cela il se dire bien éclairé sur les
troubles de la fonction génitale chez les paralytiques ? j'en
doute fort. Tout d'abord il est un point important complète-
ment omis par tous les auteurs : le coït; or nous avons trouvé
de ce côté des particularités intéressantes. Le rapport existant
entre le libido, le désir de posséder la femme, et la possibilité
de réaliser cette possession ne paraît non plus avoir suffisam-
ment préoccupé les observateurs. Ensuite à entendre les uns,
aux périodes initiales, l'impuissance serait le fait le plus fré-
quent et à entendre les autres, ces derniers les plus nom-
breux, l'excitation génitale l'emporterait de beaucoup; mais
ni ceux-ci, ni ceux-là ne semblent avoir recherché si les deux
états ne se remplaceraient pas chez le même sujet et à des
intervalles assez courts. D'un autre côté, nous sommes loin
d'être complètement renseigné par tout ce que nous avons
rapporté sur les modifications du sens génital aux diverses
périodes de la maladie, la nature des altérations, leurs
nuances, leur fréquence absolue et relative selon les diverses
formes mentales, l'intensité des troubles moteurs aux phases
initiales, l'étiologie ou des malades, l'inlluence de ces
troubles sur le délire, leurs rapports avec les sensations sub-
jectives ressenties par les paralytiques, leur valeur au point
de vue du pronostic et du diagnostic; tous points sur lesquels
nos recherches patiemment poursuivies du début à la termi-
naison de la paralysie générale sur.108 sujets nous apporte-
ront des données précises et comparables.
Ces 108 sujets que nous suivîmes ainsi pas à pas, recher-
chant à intervalles rapprochés, chez chacun au même moment,
toute la symptomatologie physique et mentale, étaient des
paralytiques généraux exempts de toute complication par
névrose ou affection de la moelle, afin d'avoir des résultats
appartenant exclusivement à la périencéphatique chronique
interstitielle. De ces '108 paralytiques, il n'en est que 42 qui
aient parcouru toutes les trois périodes de la maladie pour
aboutir au marasme paralytique; 32 ont succombé à la pre-
mière période; 30 à la seconde; enfin il en est quatre qui
. DU SENS GÉNITAL DE LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 21
depuis plusieurs années sont restés à la phase initiale bien
qu'ils présentent les signes physiques caractéristiques de la
paralysie générale.
Les constatations opérées sur ces 108 malades se sont éle-
vées à 150 ? , mais toutes n'ont pas réussi et 91 fois, nous ne
sommes pas parvenu à constater avec certitude l'état du
sens génital, soit une proportion d'insuccès de 5 p. 100 seu-
lement. Nos échecs ont été d'autant moins nombreux que la
maladie était plus avancée; ce résultat est facile à com-
prendre, le paralytique cachant d'autant moins les troubles
de ce côté que son inconscience est plus marquée; autant il
est facile de s'assurer qu'un malade à la troisième période a
le sens génital aboli, autant cette constatation est difficile à
la première, si le malade, honteux de son impuissance, la
dissimule.
Nos échecs ont donc été de 55 à la première période, soit
3 p. 100; de 29, à la seconde, soit 1,6 p. 100; et seulement de
7 à la troisième, soit 0,3 p. 100.
Les 1.711 constatations qui réussirent se divisent comme
il suit au point de vue de l'anormalité et de la normalité.
22 CLINIQUE MENTALE.
est parfois perverti; mais sans indiquer comment. Chez nos
108 sujets nous n'avons trouvé que des anomalies simples et
des troubles dans le mécanisme de la copulation. Tout d'abord
une excitation à tous les degrés arrivant même jusqu'au
priapisme ou au contraire un affaiblissement poussé jusqu'à
- l'impuissance. D'ordinaire le paralytique excité accomplissait
normalement le coït qu'il répétait un nombre souvent prodi-
gieux de fois et le paralytique affaibli perdait en même temps
que sa virilité le désir de la femme. Mais il n'en fut pas tou-
jours ainsi et chacun de ces deux grands groupes nous a
offert deux variétés. A côté des paralytiques qui accomplis-
saient plus souvent que d'habitude mais normalement le
coït, nous en avons eu d'autres qui éjaculaient par le faitseul
de l'introduction de la verge dans le vagin; chez certains le
réflexe éjaculateur était encore plus prompt à se produire :
la pénétration du pénis dans la cavité vaginale n'était même
pas nécessaire, l'acte s'accomplissait avant celle-ci, à la
vulve. A l'inverse de ceux-ci, il en fut d'autres qui mettaient
au contraire à éjaculer un temps démesurément long et il
s'en est même trouvé qui, conservant indéfiniment leur
érection, n'aboutissaient jamais à l'éjaculation. Le plus sou-
vent ces deux troubles de la copulation étaient associés à une
excitation génitale assez marquée, au besoin plus répété de
coïter, mais il nous est arrivé de les constater en dehors de
celle-ci. Le libido se manifestait aux époques habituelles,
seulement l'éjaculation était ou très précipitée ou très retar-
dée.
D'ordinaire, avons-nous dit, l'impuissance chez nos paraly-
tiques était complète et accompagnée de frigidité; mais d'au-
tres fois les sujets conservaient un vif désir de la femme qu'ils
étaient incapables de satisfaire et alors de deux choses l'une,
ou les attouchements opérés par celle-ci déterminaient après
un temps variable l'éjaculation sans rigidité du membre, ou
le réflexe ne se produisait jamais malgré le supplice imposé
d'une masturbation parfois fort longue. Si, à cela nous ajou-
tons les pertes séminales involontaires, nous aurons la nomen-
clature complète des troubles génitaux que nous avons rele-
vés. Ces pertes furent de deux espèces : sthéniques ou asthé-
nique ; nous les avons rencontrées tantôt chez des sujets
impuissants, incapables de la moindre érection, tantôt chez'
des sujets qui cependant sacrifiaient souvent à Vénus; s'en-
DU SENS GÉNITAL DE LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 23
dormaient-ils après des coïts même répétés, qu'ils éjaculaient
au milieu d'un rêve voluptueux. -
Dans tout cela il n'y a aucune perversion et à cet égard le
paralytique impuissant mais libidineux diffère du sénile et du
névropathe qui ont perdu leur virilité tout en conservant le
libido. Ces deux derniers pour obtenir l'érection demandent
à la femme des complaisances ou se livrent sur elle à des
manoeuvres auxquelles le premier ne paraît pas avoir recours,
à en juger par mes constatations. Certes le paralytique
impuissant et qui n'a pas perdu le libido ne devient pas plus
chaste qu'il n'était jadis ; s'il était coutumier du vaginolingus,
du cunilingus, de la masturbation buccale ou de la pédérastie
féminine, il garde ses goûts, mais de nos paralytiques, il n'en
est pas un seul qui. il. ma connaissance, ait apporté dans la
recherche de l'érection des raffinements auxquels il n'avait
pas recours auparavant, raffinements qu'on retrouve chez
tous les séniles et chez tous les névropathes frappés dans leur
virilité.
Je crois que si les auteurs insistent tant sur l'excitation
génitale à la période prodromique de la paralysie générale,
c'est qu'elle constitue un fait positif se manifestant par des
actes parfois délictueux et même criminels qui attirent l'at-
tention tandis que l'impuissance est un fait négatif. En effet
j'ai pu avoir sur 95 de mes 108 paralytiques des renseigne-
ments précis par leurs femmes ou leurs maîtresses et tous les
95 ont eu des troubles de la fonction génitale, 60 fois, ces
troubles furent en moins et 35 fois seulement en plus; l'affai-
blissement du sens génésique serait donc beaucoup plus fré-
quent. Cette fréquence plus grande est confirmée par ce fait
que chez 5 sujets seulement l'excitation fut continue, chez
les 30 autres elle a été intermittente, éclatant par périodes
que séparaient des intervalles d'accalmie, voire même d'im-
puissance. Il est vrai de dire qu'également chez 35 seulement
des 60 abolis, l'impuissance fut persistante, par moments
pour les autres la fonction reparaissait. Néanmoins il ne reste
pas moins acquis que nous avons noté bien plus souvent l'al-
tération en moins que l'altération en plus. Le retard dans
l'éjaculation est ensuite le trouble qui s'est surtout présenté :
9 fois contre 4 fois le trouble inverse. Parmi les 60 impuis-
sants il n'en est que 5 qui avaient conservé le libido avec
possibilité d'éjaculation par la masturbation. Il ne nous a pas
,)Il CLINIQUE MENTALE.
été possible de nous renseigner exactement sur les pertes
séminales à cette période, la plupart des femmes ignorant ce
phénomène pathologique.
Nous avons été à même de vérifierions ces troubles durant
le séjour des paralytiques à l'asile en nous servant des trois
moyens d'information exposés au début de ce travail et nous
avons pour nos 1599 constatations d'auormalité.
DU SENS GÉNITAL DE LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 25
tions, elles existent et dès lors méritent d'être signalées et
décrites. Il semblerait d'après nos constatations qu'elles
appartiennent plus particulièrement à la période prodromique,
mais leur rareté à l'asile peut n'être qu'apparente et tenir
aux difficultés d'observation tandis que au dehors, avant
l'entrée, les femmes des malades sont en mesure de les cons-
tater jour par jour. Dans tous les cas, un fait est indéniable :
leur existence dans la paralysie générale.
On comprendra qu'il ne nous a pas été possible, ainsi que
nous l'avons réalisé pour le sens tactile et le sens algésique,
de noter les nuances des altérations du sens génital. Nous
avions déjà trop de peines à nous assurer de ces altérations
pour reconnaître exactement si elles étaient légères, modé-
rées ou fortes. Sans insister davantage, nous allons mainte-
nant rechercher dans quelles proportions les troubles que
nous avons notés se répartissent aux trois périodes de la
paralysie générale.
26 CLINIQUE MENTALE.
alités, incapables de se tenir sur leurs jambes. Certes il n'est
guère probable qu'ils soient en état d'accomplir le coït nor-
mal, mais ils ont des érections, se touchent et éjaculent. On
voit donc que si l'exaltation génitale esl infiniment plus rare,
même dans le début de la maladie, que l'affaiblissement et
l'impuissance, elle jette parfois une dernière lueur aux portes
même du tombeau. Nos constatations confirment en consé-
quence et au delà l'assertion émise par MM. Christian et Rilti
et rapportées plus haut. Quant au détail des altérations en
plus ou en moins aux trois périodes, il est fourni par le
tableau suivant :
DU SENS GÉNITAL DE LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 27 7
n'existent qu'à ce moment. Il est deux états que nous avons
constatés seulement à la seconde période, mais comme nous
savons qu'ils existent à la phase prodromique, il est certain
que si nous ne les avons pas relevés à la première période,
cela tient à une observation incomplète qu'expliquent les
difficultés du sujet; ces deux états sont l'impuissance avec
libido et possibilité d'éjaculation et l'impuissance avec lihido
sans celle-ci. On comprend qu'ils ne se montrent pas à la
phase ultime où par suite des altérations de la couche cen-
trale psychique le désir ne saurait se manifester sans partici-
pation active du centre génital. Par contre l'éjaculation
retardée avec excitation vénérienne a été vérifiée par nous à
la période prodromique et aux deux dernières périodes; elle
est donc de toutes les phases de la maladie. Nous aurions
donc en conséquence, si nos constatations étaient exactes :
1° du début à la terminaison : l'exagération simple, l'exagé-
ration avec éjaculation retardée, et l'impuissance totale;
2° aux seules périodes prodromique, première et deuxième :
l'affaiblissement, l'impuissance avec libido et possibilité
d'éjaeulation ; 3° aux seules périodes prodromique et pre-
mière : les pertes séminales, l'éjaculation précipitée et quel-
quefois l'état normal. '
Existe-t-il un rapport entre les altérations en plus et en
moins du sens génital et les diverses formes mentales que
peut présenter la paralysie générale, formes expansives,
dépressives et mixtes, formes démentielles et de rémission,
formes calmes ou agitées ? Le tableau suivant répond à cette
question :
28 CLINIQUE MENTALE.
Un premier fait intéressant fourni par ce tableau est la fré-
quence excessive de l'altération en plus et surtout de l'altéra-
tion en moins du sens génital lors des rémissions ; c'est seu-
lement, en effet, dans H,8 p. 100 de nosconstatations que nous
avons trouvé ce sens normal,il s'estdonc montré altéré surtout
en moins dans l'énorme proportion de SS ? p. 100, preuve bien
-probante que la rémission n'est pas la guérison. En second
lieu nous voyons que nous n'avons nullement vérifié l'exac-
titude de l'opinion ayant cours et d'après laquelle l'altération
en plus serait particulièrement propre aux formes expan-
sives, opinion due sans doute à l'étalage que font ces malades
de leurs excitations génitales; ce sont en réalité les formes
démentielles, dans lesquelles il faut au contraire rechercher
ce trouble, si on veut le constater qui nous ont fourni le
maximum d'exaltation génésique, et détail curieux, les formes
démentielles calmes avec la forte proportion d'un quart
d'exagération tandis que le fait n'a jamais été relevé avec les
formes démentielles agitées. D'après notre tableau, en effet,
il ne serait pas vrai non plus, que l'altération en plus de
l'instinct génésique apparaisse surtout dans les phases d'agi-
tation ; nous venons de constater le contraire dans les formes
démentielles, nous constatons de même pour les formes mixtes
que la proportion de l'altération en plus, dans les périodes
de calme, est plus élevée de 7,5 p. 100. C'est seulement dans
l'expansive agitée que le sens génital a été plus souvent excité
que dans l'expansive calme ; l'opinion ayant cours, due sans
doute ici encore à la raison donnée plus haut, ne serait donc
fondée que pour cette seule forme mentale. En troisième
lieu, à noter l'absence d'excitation génitale dans tous les cas
à forme dépressive, que la dépression fût calme ou agitée ;
c'est ce fait constant joint à la fréquence plus grande de
l'altération en plus avec les expansives agitées qui, certaine-
ment, a beaucoup contribué à donner naissance à l'opinion
que nous venons de reconnaître en grande partie erronée,
de la prédominance de l'excitation du sens génital avec le
délire expansif et l'agitation. Il est curieux aussi de relever
que si nous avons trouvé dans nos constatations le maximum
de l'altération en plus avec les démences calmes (25,1 p. 100),
immédiatement après par ordre de fréquence arrivent les
rémissions (23,6 p. 100) ; ainsi nos paralytiques généraux qui
étaient considérablement améliorés et dans un état simulant
SCLÉROSE TUBÉREUSE. 29
presque une guérison, avaient un appétit sexuel plus souvent
violent que dans l'état de délire expansif avec agitation, qui
n'occupe même que le quatrième rang par ordre de fréquence,
le troisième étant pris par les formes mixtes calmes, et le
cinquième et le dernier ex-oequo, à 1 p. 100 près, par les
formes expansives calmes et mixtes agitées ; nous avons déjà
dit plus haut que dans la démence agitée et toutes les dépres-
sives, le sens génital n'avait jamais été exagéré.
Il est maintenant à remarquer que ces trois formes men-
tales, démence agitée, dépressive calme et dépressive agitée
dans lesquelles l'excitation génitale ne fut jamais observée sont
également les trois seules, avec les mixtes agitées, dans les-
quelles l'instinct de la reproduction n'a jamais été trouvé
normal. Celle qui nous a présenté le maximum de normalité
de l'instinct génital fut l'expansive calme (13,2 p. 100) l'em-
portant même à cet égard sur les rémissions (11,8 p. 100). On
voit combien nos constatations confirment peu les idées
ayant cours. - (.1 suivre.)
HECU El L DE FAITS.
Idiotie et épilepsie syinptomatiques de sclérose
tubéreuse ou hypertrophique ;
l'.ir IIOL'RN'EVII.LE.
Dans le Compte rendu de Bicètre de 1898 (p. 198) nous
avons fait suivre la relation d'un cas de Sclérose tubéreuse
du tableau récapitulatif de tous ceux que nous avions observés
à la Salpêtrière et à Bicclrc. Ils sont au nombre de dix. Celui
que nous allons donner ligure sur ce tableau.
SOmIA1H¡ ? Père, eczémateux, alcoolique, affaiblissement physique
et intellectuel, tremblement mi-alcoolique, mi-saturnin. Grand-
père paternel, excès de boilsOJ¿. - Grand' mère paletvu llo, eczéma-
teuse. Grand-oncle paternel mort d'un ramollissement du cerveau.
Tante et cousin morts de tuberculose. Oncle eczémateux, al-
30 RECUEIL DE FAITS.
eoo ? M6, cancéreux. Cousin mort de convulsions. Autre cou-
sin idiot. '
Mère, enfant naturelle, céphalalgies. Demi-ltt ? zteii2cite,iielle parais-
sant aliénée. Cousin mort de la poitrine. Trois autres cousins
et deux frères morts de méningite.
Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de six ans.
- Emotions durant la grossesse, Accouchement et naissance, rien
de particulier. Signes d'idiotie à l'âge de trois mois. Séries
de convulsions il trois mois : regard plus obscur; inertie des mem-
bres. A vingt-deux mois, attention, pat oie, préhension, mastica-
tion nulles ; paralysie des membres ; grincement des dents ; accès
de cris. Epilepsie.
Etat du malade en 1898 : idiotie complète; diplégie et contracture.
Cachexie tuberculeuse progressive; mort. - Température pendant la
maladie et après le déeès.
Autopsie. Tuberculose pulmonaire. Ilots de sclérose tubéreuse
des deux hémisphères cérébraux; petites- tumeurs sclél'C1/sr-s du
sillon upto-sll"é. Petites tumeurs des reins.
Grosm... (Henri), né le 9 janvier 1855, est entrée dans le service
le 8 août 1898, avec un certificat ainsi conçu : « Idiotie avec con-
vulsions épileptiformes très fréquentes; nulle manifestation d'in-
telligence ; privation de langage articulé; nombreuses malforma-
tions ; paraplégie avec contracture des pieds; gâtisme. » (dur
Garnier).
Antécédents héréditaires (Renseignements fournis par sa mère).
Père, quarante-deux ans, peintre en voitures, n'a pas eu de coliques
de plomb mais il y a huit ans, durant trois mois, un tremblement
de tout le corps et de la langue; ni convulsions, ni migraines, ni
indices de syphilis; poussées d'eczéma; otite double. Fume beau-
coup. Nombreux excès de boisson. « Il a malheureusement trop bu
pour sa santé. » Il est violent surtout quand il a pris de l'absinthe.
[Son père, qui exerçait la même profession, est indemne de ma-
nifestations saturnines. Il faisait aussi des excès de boisson. Il est
mort à quatre-vingts ans. Sa mère, soixante-dix-neuf ans, sobre
sans accidents nerveux, est eczémateuse. Grands-parents 1)(/te1'-
neh et maternels, morts âgés après avoir joui d'une bonne santé.
Un oncle maternel serait mort relativement jeune d'un ramollisse-
ment cérébral. Il avait deux enfants dont l'un a succombé à la
tuberculose. Une SOEur est morte à trente-cinq ans de la même
maladie. Une autre SOEUI', bien portante, a eu un enfant enlevé
par des convulsions. Un frère, eczémateux, décédé à quarante
ans d'un cancer de la bouche, commettait de nombreux excès (tel-
cooliques. L'un de ses enfants est mort à dix-neuf mois : « Il n'avait
aucun signe d'intelligence ; il était comme mon enfant. » Rien
à mentionner dans le reste de la famille. 1
SCLÉROSE TUBÉREUSE. 31
Mère, trente-cinq ans, blanchisseuse, enfant naturelle, sobre, pas
de convulsions, céphalalgies frontales n'ayant pas le caractère des
migraines; nul indice de syphilis; mariée à vingt et un ans.
(l'ère, aucun détail, ni sur sa famille. Mère, soixante-quinze ans
se porte bien; aucune maladie nerveuse. Grand-père maternel
mort vieux, on ne sait de quoi. Gl'l1llLfmèl'e matemette morte de
dysenterie. Deux frères et deux soeurs n'ont rien de particulier.
Un neveu est mort de la poitrine. « Ma mère a eu avant moi
et d'un autre amant une fille, ma demi-soeur, qui est sujette-à des
idées noires et raconte des choses imaginaires ; elle a eu trois
enfants morts de méningite. » Dans le reste de la famille, ni aliénés
ni épileptiques, etc.)
Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de six ans (père plus
âgé). P , ... ,
Trois enfants : Deux sont morts a cinq et seize mois, de coiiviil-
sions, le tloisième est le sujet de l'observation.
Antécédents personnels. La conception ne se serait pas opérée
pendant l'ivresse alcoolique bien que son mari eût d'habitude- des
rapports avec elle quand il avait bu. Grossesse : émotion vive
occasionnée par la mort de l'un de ses enfants, survenue alors
qu'où le croyait mieux. Huit jours plus tard, douleurs dans le bas-
ventre, disparues par le repos au lit. Deux semaines après, elle a
été effrayée par les cris d'une femme qui avait une attaque : « Je
n'ai pas perdn connaissance, mais je me suis senti mal dans le
ventre et dans les reins. J'ai tremblé tout le reste de la journée et
dans la nuit, je m'imaginais toujours entendre les cris de cette
femme. » Le lendemain, indigestion. Le reste de la grossesse s'est
très bien passé.
Accouchement or terme, naturel, en deux heures ; présentation du
sommet; liquide amniotique en petite quantité, mais beaucoup
de sang, « ce qui effrayait la sage-femme ».
- la naissance, pas d'asphyxie, l'enfant n'était « pas bien gros
mais paraissait vivace ». Elevé au sein de sa mère jusqu'à trois
mois : « Il venait tant bien que mal, parce que je fatiguais beau-
coup et étais mal nourrie. Il ne dill'érait pas des autres enfants
physiquement, mais déjà, il ne me semblait pas naturel : son
regard ne se fixait pas, on aurait même dit qu'il n'entendait pas :
cependant quand un objet tombait auprès de lui, il tressautait et
c'est par la qu'on s'apercevait qu'il entendait. Sa tête tombait de
côté. Il ne souriait point. »
A trois mois l'enfant si. été pris de convulsions. Les membres
étaient affectés également des deux côtés. « La face était blanche
ne se défaisait pas beaucoup; les yeux remuaient et se portaient
en haut. » Pas de ronflement. Durée, environ cinq minutes. Le
même jour il a eu trois crises dans la matinée et cinq dans la soi-
rée. Pendant quelques jours, il a eu quotidiennement plusieurs
32 RECUEIL DE FAITS.
convulsions semblables. Il a eu ensuite une rémission d'une ou
deux semaines. On a alors remarqué que les yeux étaient brouillés
comme s'il ne voyait pas clair. Les membres, qui, auparavant,
remuaient naturellement et également étaient devenus inertes.
Pendant deux autres mois il aurait eu également des convulsions :
les membres étaient raides, le corps tressautait.
Il a été envoyé à la campagne il sept mois et nourri au biberon
avec du lait de vache. Quand il a été repris par ses parents, à vingt-
deux mois, « il était gros et constipé comme il l'avait toujours été
les jambes se croisaient et se fléchissaient quand on voulait le
mettre debout. Sa nourrice, qui en avait eu bien soin, avait essayé
de le faire marcher sans y réussir ». Il n'a jamais pu tenir les ob-
jets dans ses mains, il essayait de les porter à sa bouche sans pou-
voir y parvenir. Jamais on n'a pu fixer son regard. Peu de
temps avant l'entrée les jambes commençaient à se fléchir sur les
cuisses et les genoux à devenir raides : « La nuit, dit sa mère,
j'étais obligée de me lever pour lui allonger les jambes. Les pieds
ont commencé à se dévier il sept ans. »
Les accès venaient par séries durant plusieurs jours, puis il y
avait des arrêts de deux mois : le corps devenait raide, le cou était
tendu, les yeux se portaient en haut ; venaient ensuite des secousses
cloniques, égales, enfin un peu d'écume et un léger ronflement
Ils duraient deux à quatre minutes, et parfois ils étaient suivis de
sommeil. Dans les derniers temps de son séjour à la maison, les
accès étaient moins forts. Point de vertiges ni de secousses.
Jamais Gro... n'a donné de signes d'intelligence ni parlé. Il res-
tait toujours couché, car, assis il tombait. Onanisme constaté
peu après son retour de nourrice avec ses mains; il a continué jus-
qu'à l'admission. Sa mère lui attachait les bras.
Préhension et mastication nulles : la langue se mouvait mal,
grincements fréquents des dents, la nuit aussi bien que le jour.
Pas de vomissements, constipation habituelle, gâtisme. Oxyures
vers douze ans.
Aucune maladie infectieuse, ni accidents scrofuleux, sauf un peu
d'impétigo du cuir chevelu, ni traumatisme.
Le sommeil était court et léger. Parfois l'enfant avait la nuit, et
aussi le jour, « des actes de cris énervants, qui semblait le faire
souffrir, comme si quelque chose le rongeait ( ? ) ». Ces accès du-
raient d'une il deux heures.
Etat actuel (avril 1898). - La physionomie n'exprime aucune in-
telligence, mais dénote un état maladif.
Tète un peu carrée, assez développée, symétrique; les bosses sont
peu proéminentes. Visa-le aplati, front bas, à peine bombé.
Arcades sourcilières peu saillantes. Aucune lésion des yeux. Iris
bruns. réagissant bien à la lumière. - Ne ? droit. Odorat très ob-
tus, Pommettes assez saillantes, régulières. Couche petite, lèvre
SCLÉROSE TUBÉREUSE. 33
inférieure pendante, menton peu volumineux. Oreilles assez grandes
ourlet très accentué, lohule adhérent. L'enfant entend le bruit qui
se fait autour de lui mais' ne s'en occupe pas. Il tressaille légère-
ment lorsqu'on l'appelle ou qu'on hausse la voix.
Le maxillaire supérieur offre une légère atrésie, l'inférieur est
normal. L'évolution de la dentition est très retardée, l'enfant
n'ayant encore que quatre incisives permanentes à la mâchoire
inférieure et trois à la mâchoire supérieure, l'incisive centrale
droite manquant. Les molaires, encore temporaires, sont dans un
état complet de destruction. Gr... grince souvent des dents.
Cou gros et court. Thorax un peu aplati. Rien à l'auscultation
des poumons et du coeur. Abdomen normal. Corps et pénil
glabres. Gland recouvert par le prépuce, non découvrable (phi-
mosis). Testicules petits, égaux. Longueur de la verge, 5 centi-
mètres ; circonférence 4 cent. 1/2.
Les bras sont paralysés, longs et très maigres. Les avant-bras
sont fléchis sur les bras. Paralysie et contracture prédominant à
gauche. La préhension est nulle.
Les membres inférieurs sont incapables de tout mouvement. Les
cuisses sont fléchies sur le bassin, les jambes sur les cuisses, les
pieds sur les jambes. Le gauche est, de plus, en adduction forcée.
L'enfant, ne pouvant se tenir assis, reste au lit.
L'appétit est médiocre; la mastication ne se fait pas, aussi l'en-
fant ne prend-il que des panades ou des aliments liquides qu'on
est obligé de lui donner par petites cuillerées. Pas de vomissements,
ni de rumination. Constipation très prononcée, il ne va à la selle
que par des lavements et des purgatifs. Gâtisme. Souvent la face
est très congestionnée, d'autres fois très pâle et alors les yeux sont
cernés, enfoncés, et l'enfant semble souffrir. La sensibilité générale
est très obtuse. Gr... est peu sensible au froid. Aucune attention,
il ne connait personne, ne pleure et ne sourit jamais.
Le sommeil est très agité, court, l'enfant ne dort qu'une petite
partie de la nuit. Quand il se réveille, il s'amuse avec ses doigts
qu'il agite, en poussant un léger grognement, tout près des yeux ;
remue sa tête de droite et de gauche. Onanisme très fréquent :
l'enfant porte la main gauche à la verge qu'il saisit entre le pouce
et l'index. Pour s'y opposer, on place ses bras sur sa couverture
et on enveloppe le tronc dans une alèze. Les mouvements sont
limités à ce que nous venons de dire.
Ie1' avril. État général mauvais. Amaigrissement. Escarres
aux fesses et le long de la colonne vertébrale.
8. Symptômes de bronchite. T. R. 38°.
14. Bronchite légère qui n'explique pas l'élévation de la tem-
pérature (39°), due plutôt, probablement, à une infection ayant les
escarres pour origine.
Archivas, 2e série, t. X. 3
34 RECUEIL DE FAITS.
20-26. Aggravation des symptômes généraux. Signes de
tuberculose pulmonaire. - Mort le 5 mai.
Du au 11 avril (matin), la température a oscillé de 37° à 38°;
du 11 avril (soir) au 21, de 38°,2 à 39°,2; elle est descendue à
1°,8 et 38° les 21, 22 avril, puis elle a oscillé autour de 39° du
23 avril au 2 mai. Alors elle est descendue progressivement le 3 et
le 4 mai à 35°,8. Après le décès (5 mai) elle était de 38 ? i et a eu
enfin la marche suivante :
SCLÉROSE TUBÉREUSE. 35
Sur la face externe de l'hémisphère gauche, plaques laiteuses le
long de la scissure de Sylvius, vascularisation assez prononcée sur
les deux tiers antérieurs.
Les artères de la base sont symétriques, sauf les communi-
quantes postérieures, la droite étant environ trois fois plus volumi-
neuse que la gauche qui est filiforme. Les nerfs, les tubercules
mamillaires, les pédoncules cérébraux, etc., sont égaux. - La glande
pinéale a son aspect et son volume normaux. La protubérance,
le bulbe et le cervelet n'ont rien de particulier.
Cerveau. Hémisphère droit. Face convexe (PL. 1). Les
deuxième et troisième circonvolutions frontales sont remplacées par
quatre volumineux îlots de sclérose tubéreuse. La partie moyenne
de F1 est également remplacée par deux grosses masses tubéreuses
qui se prolongent, aussi volumineuses, sur sa face interne. Ce qui
reste de fi, F2 et F3 en arrière de ces îlots est très grêle. La FA
est médiocrement développée. La PA est remplacée dans ses deux
cinquièmes supérieurs par un îlot scléreux. On trouve encore
un îlot sur la partie inférieure de P1, un sur PC, deux sur LO et
un vers la circonvolution postérieure de Tl, caché dans le sillon
marginal inférieur, enfin un autre à la partie postérieure de T3.
Face interne (PL. II). Notons un îlot sur F1 à deux centimètres
de son origine, puis les deux autres gros îlots précédemment
signalés sur cette face ; ils sont séparés par un petit pli de passage
de la circonvolution du corps calleux qui est très grêle ; - un
autre îlot sur la partie postérieure de LQ, un sur le coin, un autre
au fond de la scissure frontale interne. - Le lobule paracentral et la
circonvolution de l'hippocampe sont assez réguliers, sans îlots
scléreux. - ,Les autres circonvolutions sont arrêtées dans leur
développement.
Le ventricule latéral n'est pas dilaté. Le long du sillon opto-strié,
il existe plusieurs nodosités scléreuses. La couche optique, le corps
strié, la corne d'A 1111/10n et le ventricule lui-même n'offrent aucune
lésion. Le lobule de l'instcfcc avec ses trois digitations parait sain.
Hémisphère gauche. Face convexe (PL. III). 11 existe sur le
lobe frontal huit îlots tubéreux qui forment une sorte de chaîne
allant de l'extrémité antérieure de Ir jusqu'à l'extrémité inférieure
de FA ; leur configuration est très variable : masses triangulaires
ou semi-ovoïdes. Tous ont une dépression à peu près centrale. On
trouve encore un autre ilot sur la partie postérieure de F2. Ce qui
reste des circonvolutions frontales, à peine le quart, est grêle. Les
circonvolutions frontale (FA) et pariétale ascendantes (PA) sont
petites, surtout la dernière qui est très effilée dans son quart
supérieur. La photographie n'en donne pas une idée exacte.
Pl, P2, PC et LO sont composés de circonvolutions irrégulières et
offrant des sillons superficiels. Un îlot sur LO et trois autres
36 RECUEIL DE FAITS.
sur P2. La Planche III permet de se rendre compte d'une façon
très nette de la répartition des îlots de sclérose, de la forme des
circonvolutions et un peu des sillons superficiels qu'elles présentent.
I" envoie un pli de passage au fond du lobule de l'insula qui,
lui, a'trois digitations dont les deux premières sont bifurquée's.
Face interne. Aucun îlot scléreux, mais on retrouve la traînée
habituelle de petites tumeurs blanches et dures, sur le sillon qui
sépare la couche optique du corps strié ; elle envahit la partie
antérieure du corps strié. Sur cette face. comme sur la face
convexe, les circonvolutions sont découpées en forme de pavés
. irréguliers, surtout FI et LO. (PL. IV).
Face inférieure. Un îlot sur l'extrémité du gyrus rectus et
deux sur Te Des deux côtés le ventiicule, la couche optique, le
corps strié, la corne d'Ammon, le corps calleux n'offrent rien de
particulier.
Sur cet hémisphère il n'y a pas de lésions de ménil1go-encé¡;halite,
tandis qu'il en existe, à droite, disséminées çà et là et principa-
lement sur ce qui reste de l ? F2, F3 et sur la moitié postérieure de
1'1 et P.
Cou. Aucune trace du thymus. Corps thyroïde, larynx, rien.
Thorax. Pas d'adhérences des plèvres. Poumon droit volu-
mineux ; le lobe supérieur est farci de tubercules ; le lobe moyen
présente une vaste caverne, l'inférieur est fortement congestionné.
Le poumon gauche n'offre aucune lésion tuberculeuse. Cceuu.
Le péricarde est sain. L'oreillette droite est remplie de caillots
cruoriques. Le trou de Dotal est oblitéré. Pas de lésions des
orifices.
Abdomen. - Estomac, intestins, pancréas, rien. - Foie volumi-
neux, ayant un certain degré de dégénérescence graisseuse.
Vésicule biliaire, rien. Rate grosse et duite. - Le rein gauche se
décortique facilement ; on trouve à sa surface et sur des coupes de
nombreuses petites tumeurs blanches, ressemblant à des îlots de
sclérose ( ? ). Le rein gauche est le siège des mêmes lésions. De
plus, il y a vers son extrémité supérieure une tuméfaction de la
dimension d'une noisette, dont le centre est occupé par un kyste
à contenu citrin. La vessie est normale. Les testicules, de la
dimension d'une petite amande, sont situés sur le trajet du canal
inguinal. Phimosis ; méat régulier.
Les muscles, examinés dans plusieurs régions sont pâles et
comme lavés.
Poids des organes.
SCLÉROSE TUBÉREUSE. 37
38 RECUEIL DE FAITS.
symptômes cliniques qui permettent de distinguer l'idiotie
symptomatique de la sclérose tubéreuse.
Certains symptômes : grincements de dents, accès de cris,
congestion et pâleur alternatives de la face, constipation, etc.,
étaient sans doute dus à l'existence des lésions méningiliques
chroniques qui étaient du reste bien moins prononcées chez
Gr... que nous ne l'avons vu dans d'autres cas.
IV. Les accès épilepti formes ont été très rares durant le
séjour de l'enfant à Bicêtre et, malheureusement, nous n'avons
pu en avoir la description.
V. L'enfant a succombé à la tuberculose ce qu'explique
surabondamment ses antécédents familiaux.
VI. Au point de vue de l'anatomie pathologique, de la
distribution des îlots de sclérose, de leurs caractères, les
renseignements donnés à l'autopsie, les Planches qui accom-
pagnent l'observation, nous dispensent d'insister davantage.
Notons pour mémoire, les traînées de nodosités scléreuses des
ventricules latéraux et les petits néoplasmes des reins, lésions
qui sont constantes.
EXPLICATION DES PLANCHES
Planche I.
Face externe ou convexe de l'hémisphère droit.
S. R., sillon de Holando.
CI, F2, F3., ! CI', 2°, 3e circonvolutions frontales.
F. A., circonvolution frontale ascendante.
P. A., circonvolution pariétale ascendante.
Pl., pli pariétal supérieur.
P2., pli pariétal inférieur.
P. C., pli courbe.
Se. f. s. Scissure frontale supérieure.
Sc. f. i., Scissure frontale inférieure.
Sc. p. f., Scissure parallèle frontale.
Sc. ip., Scissure interpariétale.
L. 0., Lobule orbitaire.
L. 0. C., Lobule occipital.
EXPLICATION DES PLANCHES. 39
Se. S., Scissure de Sylvius.
Op. F., Opercule frontal.
Op. R., Opercule Holandique.
Op. P., Opercule pariétal.
S. P. E., Scissure perpendiculaire externe.
L. L, Lobule de l'insula.
Sc. p. Scissure parallèle.
T1, '1'=, 'l'3, l ? 2e, 3° circonvolutions temporales.
Les chiffres 1, 2, 3, 4, 3, etc., indiquent les l'loIs de sclérose
tubéreuse.
Planche IL
Face interne de l'hémisphère droit.
S. R., sillon de Ilolando.
Sc. cm., scissure calloso-marginale.
F. ca., tissure calcariue.
Se. tol., l ? scissure temporo-occipitale.
Se. to2., 2e scissure tempora-occipitale.
FI., 110 circonvolution frontale interne.
C. C. C., circonvolution du corps calleux..
C. C., Corps calleux.
L. P., lobule paracentral.
L. Q., lobule quadrilatère ou avant-coin.
V., ventricule.
C., Cuin.
To', '1'0" le- et 2° circonvolutions temporo-occipitales.
1'3., e circonvolution temporale.
p.p. a., pli pariéto-lunbique antérieur.
p.f. 1., lli 1't,oiiLo-Iiiiil)ique.
p.p.p., pli pariéto-limbique postérieur.
C. H., circonvolution de l'hippocampe.
G. Il., gyrus rectus.
Les chiffres 1, 2, etc., indiquent les ilots de sclérose tubéreuse.
Planche III.
Face externe ou convexe de l'hémisphère gauche.
Les chiffres et les lettres ont la même signification que ceux de
la Planche 1.
Planche IV.
Face interne de l'hémisphère gauche.
Les chiffres et les lettres ont la même signification que ceux de la
Planche II. ZD
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
I. Paralysie générale chez l'enfant; par J. THOJ ! S01\ et 1'e : r.srr.
(Biitish médical Journal, avril 1899.)
C'est une observation de fillette de onze ans atteinte de paraly-
sie générale précoce et morte six années après, avec autopsie
complète conlirmalive. Les antécédents héréditaires démontrent
l'hérédosyphilis. Calcul volumineux trouvé dans la vessie qui
fait le sujet d'une figure. A. M.
IL Un cas de torticolis mental; par E. Noguès et J. SIROL.
(Nous. Iconogr. de la Salpêtrière, n° G, 1899.)
Le torticolis mental est-il un syndrome de dégénérescence tou-
jours accompagné d'un cortège plus ou moins long de stigmates,
- comme le soutient l3ompaire, - ou bien cette affection exis-
terait-elle en dehors de la tare dégénérative, comme parait l'ad-
mettre Féré ? Le cas des auteurs, accompagné de bégaiement hé-
réditaire, vient confirmer la première opinion il savoir « que le
torticolis mental est un tic spasmodique et, comme tous les tics,
a une origine mentale et se développe souvent, sinon toujours,
chez les dégénérés. » R. C.
III. Remarques sur le terme « faiblesse d'esprit », avec quelques
observations sur la nécessité d'une nomenclature précise
applicable aux cas de défectuosité mentale congénitale qui ne
peuvent être désignés dans un certificat ni comme imbéciles
ni comme aliénés. (The Journal of Mental Science, juillet 1898.)
L'auteur constate que la qualification de « faible d'esprit » est
ambiguë et, de plus, déroutante par la largeur même de sa signi-
fication. Tous les fous sont des faibles d'esprit, les idiots et les
imbéciles aussi, sans compter pas mal de gens qui circulent de par
le monde et qui, sans être fous ni idiots, ont parfaitement droit à
cette qualification.
On en rencontre dans les prisons, de ces simples d'esprit que
les conséquences légales d'actes d'ailleurs délictueux, assimilent à
des sujets réellement pervers. Et parmi les avantages des dénomi-
nations plus exactes que réclame l'auteur, sans en proposer, ce ne
serait pas le moindre de mettre les magistrats, mieux édifiés sur
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 41 L
les choses par des mots meilleurs, en état d'accepter plus aisément
et aussi plus équitablement certaines limitations de responsabilité.
R. nIUSGR.1VE Clay.
IV.TYTanie aiguë chez un jeune garçon; par M. B. Ray. (The Jour-
nal of lIeiii(il Science, avril 1898.)
Ce cas, qui s'est terminé par la guérison, est surtout intéres-
sant par l'âge du malade (lez ans) ; on n'est guère habitué à obser-
ver la folie aiguë à cet âge. Il est difficile d'autre part de voir là
un cas de folie de la puberté, car le malade ne présentait aucun
des signes de cet état de transition; il faut donc admettre qu'on
se trouve bien en présence d'un cas de folie aiguë chez un très
jeune sujet '. IL 111. C.
V. Chorée maniaque chez un adolescent; par Thomas-Philip p
Cowev. (titre Journal of Mental Science, avril 1897.)
L'auteur relève lui-même les points les plus intéressants de cette
observation, qui sont les suivants : 1e La maladie est survenue
chez un adolescent du sexe masculin ; 2° un intervalle de temps
considérable s'est écoulé entre l'apparition du désordre mental et
celle de la chorée ; 3° la chorée a été aiguë, mais en restant tou-
jours apyrétique ; 4° l'excitation mentale se calmait à mesure que
les mouvements choréiques augmentaient d'intensité ; 3° après la
cessation de l'orage moteur il est resté une apathie un peu hébé-
tée due à l'épuisement des centres nerveux ; G° La rapidité de la
guérison est remarquable, car elle s'est effectuée en un mois à
partir de la cessation des mouvements choréiques. H. M. C.
VI. Note sur l'influence de l'alcoolisme maternel sur la progéni-
ture ; par \\' .-C. Sullivan. (The Journal of Mental Science,
juillet 1899.)
Ce mémoire, basé sur 12 observations, a pour objet de traiter
quelques points du rôle de l'alcoolisme maternel considéré comme
agent de dégénérescence de la race. Il se termine par les conclu-
sions suivantes :
1° L'alcoolisme maternel est une condition particulièrement
défavorable à la vitalité et au développement normal de la progé-
niture. Sa gravité à cet égard est considérablement supérieure à
celle de l'alcoolisme paternel ; 2° son influence, telle que nous
pouvons la mesurer par le taux de la mortalité des enfants nés dans
' Les cas de folie chez les enfants ne sont pas rares ainsi qu'on peut
le voir en parcourant les Comptes rendus publiés chaque année sur notre
service ne iiicetru. * (tt.) .)
42 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
ces conditions, parait s'exercer par une voie qui, dans une large e
mesure, est indirecte, celle de la détérioration du milieu ; mais
une grande part de cette influence est due aussi il l'action primitive
et directe du poison. La réalité de ce dernier mode d'action est
démontrée par la tendance aux accouchements de morts-nés, -par
la grande fréquence de l'épilepsie chez les enfants qui survivent,
par les causes les plus communes de la mort, enfin par les effets
qui résultent des modifications de l'intoxication; 3° cette influence
primitive de l'alcool est due pour une part aux effets permanents du
poison sur l'organisme maternel, effets qui provoquent un état
transmissible de dégénérescence, et pour une autre part à l'action
directe sur l'embryon, ou le nourrisson par suite des excès con-
tinués de la mère pendant la grossesse et l'allaitement; f¡.0 le pre-
mier de ces modes d'action directe est, de sa nature, permanent
avec tendance à s'accroitre. Le second, bien que son influence tende
aussi à être constante et constamment croissante, est néanmoins
capable d'augmentation ou de diminution temporaires; 5° pour
l'action combinée de ces diverses modalités d'influence, la famille
à maternité alcoolique tend normalement vers un type absolument
inverse de celui de la famille syphilitique, c'est-à-dire que, dans la
première, ce sont les premiers enfants qui sont normaux, puis il
en vient d'autres qui sont plus ou moins défectueux mais qui vivent
au delà de la première enfance, puis d'autres qui meurent dans la
première enfance, puis des mort-nés, et enfin il n'y a plus que des
avortements; 6° les faits qui s'écartent de ce type sont probable-
ment dus, dans beaucoup de cas, à des oscillations dans l'intensité
du second mode d'influence; c'est ce que l'on observe par exemple
lorsque la mort des premiers-nés dans leur toute première enfance
estle résultat d'une conception qui s'est accomplie pendant l'ivresse
et lorsque les enfants nés plus tard survivent la mère ayant été en
prison pendant une partie de sa grossesse '. R. M. C.
VU. Un cas de paralysie générale juvénile; par A. Hrmx 1301'LE.
(The Journal of Mental Science, janvier 1899.)
Il s'agit d'une jeune fille de dix-neuf ans chez laquelle on diag-
nostique à son entrée à l'asile, malgré son âge, une paralysie
générale, diagnostic que l'autopsie confirma.
Les points les plus remarquables de cette observation sont
d'abord l'âge de la malade, chez laquelle l'affection mentale parait
avoir débuté vers 14 ans. Ensuite on note l'obscurité de l'étiologie :
la phtisie, notée dans les antécédents, a peut-être joué un rôle,
1 Voir sur cette question les 20 volumes de nos Comptes rendus de
nicutre et dont la plupart ont été analysés dans le Journ. of ment.
Science. (iL).
REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 43
ou plutôt la syphilis congénitale, qui toutefois reste douteuse. Un
autre point intéressant est la relation qui existait entre l'inconti-
nence de l'urine et des matières fécales et les attaques, les habi-
tudes de la malade devenant plus propres pendant les mois où
elle avait des attaques. Enfin le quatrième point à signaler, c'est
la connexion étroite qui paraît avoir existé entre la paralysie géné-
rale et la puberté. Les phénomènes de la paralysie générale en effet
ont fait leur apparition à l'époque ordinaire où auraient dû se mon-
trer les règles. Celles-ci ont été précédées d'une attaque convulsive
intense. Il. de Muscrivë CLAY.
VIII. La pseudo-paralysie générale arthritique ; par M. Klippel.
(Revue de Psychiatrie, t. III, n° 12.)
A l'occasion d'une nouvelle observation typique, M. Klippel
complète ici son étude antérieure (Revue clemécl.) de la pseudo-
paralysie générale arthritique par dégénérescences athéromateuses
diffuses des capillaires et des cellules de l'écorce cérébrale. Cette
affection se distingue essentiellement comme maladie de la para-
lysie générale inflammatoire (vraie) ; mais plus qu'aucune autre,
elle lui est analogue comme symptômes. Il est vrai que l'athéro-
masie peut dans certains cas coïncider avec la paralysie générale
vraie qui dans ces faits s'est greffée sur l'athéromasie à titre
d'infection secondaire. Mais ! 'athéromasie des artérioles intracor-
ticales et les dégénérescences diffuses des éléments nobles qui
l'accompagnent peuvent, ci elles seules, créer le Y1l(llome pumly-
tique. Cette athéromasie n'est d'ailleurs pas localisée à l'écorce
cérébrale; elle se montre ailleurs sur l'ensemble du système arté-
riel (aorte, reins). Il faut même chercher en dehors du cerveau
les éléments d'un diagnostic différentiel. Si parfois le tableau
clinique est identique à celui de la paralysie générale, il peut aussi
se présenter quelques différences symptomatiques (parésies plus
accusées après les ictus, délire moins fréquent, moins prononcé,
démence plus accusée ; délire auto-toxique, au lieu que dans la
paralysie générale il est plutôt auto-infectieux). La coexistence
fréquente d'autres manifestations arthritiques (diabète, urémie,
lithiase) est encore à noter avec la fréquence moindre des mani-
festations fébriles, des eschares et des troubles trophiques. Enfin
les attaques apoplectiformes de la fin relèvent d'une cause diffé-
rente (hémorrhagies).
Enfin les lésions corticales macroscopiques et histologiques, en
dehors de leur diffusion n'ont pas le moindre rapport avec celles
de la paralysie générale et impliquent un processus morbide
essentiellement différent.
Le malade est un homme de trente-neuf ans ayant eu une
syphilis peu intense en 1891 ; vers 18ut, ictus légers nocturnes
44 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.
suivis d'affaiblissement musculaire généralisé et progressif;
troubles de la parole caractéristiques de la paralysie générale,
tremblement de la langue, inégalité pupillaire. Affaiblissement
progressif des facultés intellectuelles, accès délirants, démence.
Mort à quarante-trois ans par ictus apoplectiforme, (liémorrhagie
méningée). A l'autopsie : athéromasie aortique, athérome des
artères périphériques, des rénales (le malade avait de l'albumi-
nurie) ; athérome des artères cérébrales et piemériennes. Pas la
moindre lésion d'encéphalite inflammatoire, ni adhérences ni opacités
des méninges. Dégénérescence des artérioles et des éléments ner-
veux sans traces de diapédèse. Examen et ensemencements bacté-
riologiques négatifs. F. 1301SSIER.
IX. La folie chez les enfants; par (LETCfIER 13E.ACU. (The Journal
of Mental Science, juillet 1898.)
Ce n'est guère qu'au commencement de ce siècle que les auteurs
ont accordé quelque attention à la folie des enfants. Les causes
qui la déterminent sont nombreuses : la première et la plus im-
portante est l'hérédité ; l'imitation joue aussi un rôle parfois très
fâcheux ; on peut signaler aussi les émotions et la frayeur, l'excès
de travail intellectuel, la puberté dont l'influence est très connue,
la masturbation, l'intoxication alcoolique dont Magnan a cité des
exemples, enfin certaines affections aiguës (méningite, scarlatine,
fièvre typhoïde). Quant à l'âge, Berkham a fait une statistique
portant sur 41 malades qui montre le maximum de fréquence
entre dix et douze ans ; sur ce même nombre il y avait 29 garçons
et 14 filles (pour les autres le sexe n'était pas indiqué) et sur
13 cas observés par l'auteur on comptait 8 garcons et 5 filles.
Toutes les formes de psychoses peuvent se rencontrer chez les
enfants, la démence (quelquefois liée à l'hérédité syphilique) la
monomanie, l'érotomanie, la nymphomanie et le satyriasis, la
manie homicide, la mélancolie, la manie, la choréomanie, la folie
morale, l'hystérie. Kelp a même rapporté un cas de folie circulaire
chez un garçon de treize ans. Le suicide n'est pas exceptionnel, et
devient même de plus en plus fréquent (en France si2 suicides
d'enfants en seize ans ; en Russie, 57 en dix ans; l'auteur ne con-
naît pas la statistique anglaise à cet égard.) M. Wigtesworth a
décrit il y a peu de temps deux cas de maladies cérébrales à forme
de dégénérescence observés chez des enfants et ressemblant beau-
coup à la paralysie générale. Ce mémoire se termine par quelques
considérations sur le diagnostic, le pronostic, le traitement et la
prophylaxie. (On trouvera dans les 20 volumes des Comptes rendus
du service des enfants de Bicêtre de nombreux exemples des
différentes formes de la folie chez les enfants et les adolescents.
Il y a là une véritable mine à exploiter.) IL M. C.
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 45 5
X. Troubles psychiques de la ménopause virile ; par le Dr Miguel
Bombarda. (Revue de psychologie clinique et thérapeutique,
novembre 1899.)
Chez l'homme, comme chez la femme, se produisent souvent
entre quarante et cinquante ans, des changements psychiques,
les uns légers, les autres plus graves; ce défaut d'équilibre mental,
commun aux deux sexes, à cet âge, justifie la dénomination de
ménopause virile, employée par l'auteur. Ces perturbations psy-
chiques se traduisent d'abord par un changement de caractère
amenant avec lui des idées qui, par leur fixité, changent, du tout
au tout, la vie psychique des sujets. Subitement, se manifeste une
inconduite, surtout apparente et choquante lorsqu'on l'observe
chez des personnes, jusque là d'une vie exemplaire; ou encore
surviennent des poussées neurasthéniques, caractérisées surtout
par une préoccupation absorbante et obsédante touchant l'état de
l'organisme, sorte d'ébauche d'une folie hypochondriaque. Enfin,
on voit aussi se développer tardivement une jalousie sauvage, ou
prendre naissance un amour des plus tenaces et, parfois aussi, des
plus bizarres, capable d'entrainer le sujet à toutes sortes de folies,
de ridicules et de préjudices.
L'élément fondamental de ces accidents réside en une sorte de
modification de l'affectivité et en une sorte d'obsession portant les
malades à orienter toute leur vie psychique vers un seul but, vers
une seule idée. La pathogénie n'en est pas exactement établie; mais
il est permis d'affirmer que ces désordres psychiques ne sont pas
symptomatiques d'un commencement cl'atl.ihlissement mental. Ils
ne sont également pas la conséquence d'une impuissance génitale
à son début; en effet, au lieu d'impuissance, on constate plutôt
une exagération de la puissance génésique. Mais il est manifeste
qu'ils sont liés à un changement, soit en quantité, soit en qualité,
des fonctions sexuelles, sur la nature exacte duquel on n'est nulle-
ment fixé. A. Fenayrou.
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
1. Sur l'élimination du bleu de méthylène dans l'épilepsie, l'hystérie
et quelques formes mentales; par H. Bonfigli. (Riv. sp. di frein.,
fasc. 2, 1899.)
La durée de l'élimination du bleu de méthylène chez les para-
noiaques chroniques comme chez les individus normaux est plus
46 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
courte que chez les épileptiques, les hystériques, les confus. La
courbe d'élimination chez les mêmes paranoïaques comme chez
les normaux est toujours polycyclique continue ; tandis que dans
les états de confusion, les états délirants des hystériques, l'état de
mal épileptique, ou lorsque l'injection a été faite immédiatement
après l'attaque, elle présente toujours quelque interruption.
J. Ségalas.
II. Du traitement de l'hystérie; par 0.\I\W1 : '1 STOCKLEY. (Médical
News, 31 décembre 18J8.)
L'auteur place les traitements hypnotique, électrique et phar-
maceutique au second rang comme simplement symptomatiques.
L'hydrothérapie et le traitement moral sont les vrais spécifiques,
ce dernier surtout qui doit tendre à réveiller l'initiative indivi-
duelle du malade, l'action et l'énergie individuelle étant incompa-
tibles avec l'épanouissement de la névrose. A. M.
III. Du rôle des mouvements dans la thérapeutique des névroses ;
par le Dr SOLDER (Journ. de Neurologie, 1899, n 25.)
L'auteur de ce travail propose d'employer la gymnastique pour
réveiller la sensibilité des parties atteintes par un trouble hysté-
rique quelconque, et comme d'après lui, tous les accidents hysté-
riques sont dus à des modifications de la sensibilité, il en résulte
que ce mode de traitement serait applicable à toutes les manifes-
tations de la névrose, aussi bien du cûté des membres que du côté
des viscères.
Comme d'autre part on rencontre des troubles plus ou moins
marqués de la sensibilité dans toutes les névroses, il s'ensuit que la
gymnastique peut constituer une méthode de traitement de toutes
les névroses eu général.
Sans entrer dans le détail de la gymnastique qu'il emploie,
M. Sollier se borne à dire qu'une de ses caractéristique est l'emploi
systématique des mouvements forcés d'une part et la mise en jeu
de l'attention du sujet d'autre part. Elle comporte eu outre des
procédés spéciaux pour certains organes, en particulier pour l'ap-
pareil digestif, et pour provoquer à un moment donné le dévelop-
pement de phénomènes psychiques. G. D.
IV. Traitement de certains troubles mentaux par l'extrait thyroï-
dien ; par le De Richard Il. LEEPER de Dublin. (British médical
Journal, janvier 1900.)
L'auteur a employé l'extrait thyroïdien avec succès dans trois
cas, chez un myxoedémateux atteint de manie, chez un héréditaire
porteur d'un corps thyroïde hypertrophié et présentant de la stu-
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 47
peur consécutive à un accès de manie et enfin chez un jeune
homme de vingt ans présentant de la stupeur simulant la démence.
Il estime que l'emploi du traitement thyroïdien s'impose toutes
les fois que l'insuffisance de la fonction thyroïdienne est soup-
çonnée ; grâce il son actionsur la circulation générale, elle est tout
indiquée chez les aliénés lorsque l'exaltation et la dépression
peuvent être attribuées à un trouble dans la circulation générale.
- A. Vicoosoos.
V. Organothérapie et goitre exophtalmique ; par II. WrnTE.
(British médical Journal, avril 1899.)
VI. Observation très résumée à l'appui des bons effets de la mé-
dication glandulaire, par le thymus sous forme d'extraits en
tablettes.
A signaler dans le numéro du 7 janvier de la même année
quatre autres observations de Parker avec photographies. A. M.
VII. L'imbécile améliorable ; son éducation et son avenir ; par
A.-Il. Douglas. (77ze Journal of Mental Science, janvier 1899.)
'fout en rendant justice aux efforts que l'on fait pour l'éduca-
tion, surtout industrielle, des imbéciles, et tout en reconnaissant
le succès [qui couronne souvent ces efforts, car beaucoup d'imbé-
ciles deviennent d'habiles et bons ouvriers, l'auteur estime qu'il
ne faut pas se leurrer et compter qu'ils peuvent entrer de plein
pied dans la vie sociale, où ils peuvent devenir une plaie pour leur
famille et un danger pour la société. Sans qu'il soit nécessaire de
recourir à un véritable internement, il est indispensable qu'ils
soient surveillés et surtout guidés dans l'existence par des êtres
mieux équilibrés qu'eux. IL de Musgrave CLAY.
VIII. Craniectomie pour idiotie, avec une observation; par T.TEL-
FORD-S)111'11. (Tite Journal or' Mental Science, juillet 89;.)
Enfant de sept ans, pas d'hérédité fâcheuse. Né à terme, mais
en état d'asphyxie ; n'a marché que vers deux an, n'a jamais
parlé, et maintenant encore, n'émet que des sons inarticulés; la
vue et l'ouïe paraissent normales; les autres sens sont intacts. Pas
de paralysie ; l'enfant marche et court sans assistance. Il est sou-
vent malpropre; il est curieux, mais ne peut fixer son attention.
Le visage est normal, la voûte palatine très élevée ; on n'a pas
mesuré le crâne avant l'opération, mais à l'heure actuelle on ne
peut considérer l'enfant comme un microcéphale ; il faut voir là
plutôt un cas d'idiotie traumatique, le traumatisme étant repré-
48 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
sente par la longueur du travail de l'accouchement, qui a fait
naître l'enfant en état d'asphyxie.
L'opération a consisté en une craniectomie linéaire en trois sec-
tions (le 13 et le 27 août, et le 12 septembre 18)5). L'enfant a vite
et bien guéri à la suite de chacune des opérations. ,
Vingt mois se sont écoulés depnis l'opération et les parents ne
remarquent chezlui aucune amélioration mentale ; il ne parle
toujours pas et parait manquer presque complètement d'idées. Il
crie moins et ne cogne plus sa tête à droite et à gauche comme il
avait coutume de faire. Voilà l'amélioration la plus notable.
Un autre point à noter, c'est qu'il est actuellement sensible à la
douleur, alors qu'il ne paraissait pas 1 être avant d'être opéré.
En somme, ce fait vient confirmer tout ce qu'a dit M. Bourneville
sur la craniectomie dans le traitement de l'idiotie. R. M. G.
IX. Le traitement et l'éducation des enfants faibles d'esprit et
imbéciles au point de vue de la loi sur les aliénés indigents ;
, par John Carswell. (The Journal of Mental Science, juillet t8cJ8.)
La question est traitée presque exclusivement au point de vue
administratif, et les points qu'elle discute sont étroitement liés à
la connaissance des lois et règlements qui régissent la matière en
Angleterre et en Ecosse. R. M. C.
X. L'éducation industrielle des imbéciles; par G. E. Sulttleworth.
(The Jomnal nf lllentcal Science, juillet 1898.)
L'éducation donnée aux imbéciles doit toujours avoir pour ob-
jectif une utilité industrielle : on ne peut guère espérer l'école de
progrès intellectuels, et il faut diriger tout l'effort éducateur vers
un seul but : procurer au malade une certaine habileté profes-
sionnelle, qui lui permette de gagner sa vie ou à peu près. Dans
tous les cas, les travaux qui s'accomplissent au dehors doivent
être préférés aux travaux intérieurs, d'autant plus que beaucoup
de petits travaux de ferme, de jardinage, de laiterie, sont à la
portée des imbéciles, avec un peu d'habitude. Il n'y a pas de rai-
son pour que les travaux du dehors soient uniquement réservés
anx garçons et les jeunes imbéciles du sexe féminin auraient tout
avantage à s'y livrer.
En somme dans l'éducation industrielle des imbéciles, il y a
deux choses dont il faut surtout se I)iéoccuper ; étudier les apti-
tudes physiques du sujet pour le diriger dans une voie technique
où il puisse réussir ; et en second lieu se préoccuper des condi-
tions dans lesquelles l'imbécile pourra, suivant les contrées et
leurs habitudes ou leurs particularités industrielles ou agricoles,
utiliser l'éducation reçue.
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 49
L'auteur ajoute en terminant que le système des menues récom-
penses pécuniaires lui parait fort utile dans l'éducation indus-
trielle des imbéciles. R. de MUoGllAYE CLAY.
XI. Etudes cliniques de psychothérapie; par le U'' SEIr. (Zeitschrift
sur HY¡J1lotismus, novembre 1899 et mars 1900.)
Neuf malades atteints de troubles nerveux et psychiques ont été
traités par l'hypnotisme et la suggestion avec plus ou moins de
succès. LWOFF.
XII. Un cas d'épilepsie Jacksonienne guéri par la cràniectomie;
par M. Barragan. (Académie médico-chirurgicale Espagnole.)
Un convalescent de variole se plaint de douleurs frontales et est
pris d'attaques épileptiques avec une perle- complète de connais-
sance, non suivies de troubles de la motilité, ni de la sensibilité.
On constate du gonflement de la région douloureuse. L'interven-
tion chirurgicale amène la découverte et l'ablation d'un séquestre
frontal comprimant le cerveau à travers les méninges restées
saines ainsi que la substance corticale. La guérison est complète.
(Revista de méd. Cio. pract. n° tu90.) F. BOISSIEI1,
XIII. De quelques traitements de l'alcoolisme et de celui employé
à l'asile de Cery ; par le Or de Martinets (Rev. méd. de la Suisse
Romande, 1900, n° 3.) ,
Depuis quelque temps on s'efforce partout, et en particulier en
Suisse, de diminuer les ravages causés par l'alcoolisme. On espère
y arriver en fondant des sociétés d'abstinence et de tempérance,
des cafés et restaurants où l'alcool est remplacé par le café, le
thé, le chocolat, l'eau de seltz, etc.
En Suède, la Société des débits d'alcool de Gothenbourg exerce
une surveillance attentive sur toutes les auberges, qui sont fer-
mées de bonne heure dans la soirée et dans lesquelles les diman-
ches et jours de fête on ne peut débiter qu'un petit verre d'eau-de-
vie à titre d'apéritif avant le repas ! .
En dehors de ces mesures qui ne visent que la prophylaxie de
l'alcoolisme, on a installé dans quelques pays des asiles de bu-
veurs où les ivrognes sont l'objet d'une surveillance spéciale. La
Suisse possède déjà plusieurs de ces asiles et les résultats qui
ont été obtenus sont assez favorables.
A son entrée à l'asile de Cery, l'ivrogne est placé dans une cel-
lulle ; s'il est agité et violent on le laisse sans vêtements, couché
sur une litière de varech, sans avoir recours à aucun moyen de
coercition; lorsqu'il est plus calme, on lui donne un lit sur les
Archives, 2' série, t. X. 4
50 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
côtés duquel s'élèvent des treillis en ficelle qui lui permettent de
se débattre sans se blesser. Pour le faire dormir, on lui fait
prendre en une fois 1 gr. 50 à 2 gr. de chloral et on renouvelle
cette dose au besoin. Pendant la première semaine, l'ivrogne
reçoit deux verres de vin par jour; au bout de ce temps, il est
complètement privé de boissons alcooliques et nourri abondam-
ment. Une fois le calme et la raison revenus, on occupe l'alcoolisé
d'abord dans la division, plus tard au grand air à la campagne.
Chaque jour on lui adresse quelques paroles au sujet de son ave-
nir, on attire son attention sur le danger qu'il y a pour lui à con-
tinuer à boire de l'alcool, etc.
Avant de mettre l'ancien buveur en liberté, on lui propose de
signer un engagement d'abstinence ; s'il s'y refuse, on ne lui im-
pose pas de prendre cet engagement.
XIV. La cure des buveurs. A propos de sérum antialcoolique;
par M. Legrain. (Presse médicale, 27 janvier 1900.)
Le raisonnement et, jusqu'ici du moins, la clinique tendent à
démontrer que le remède contre l'alcoolisme ne peut consister en
une préparation médicamenteuse agissant par sa vertu propre.
L'alcoolisme est un effet dont la cause est l'alcool, et tous les
remèdes, quels qu'ils soient, qui ne s'attaquent pas à la cause, en
tendant à la supprimer, ou au mécanisme qui la rend efficiente, en
modifiant la mentalité, la moralité et l'ambiance du buveur, tuus
ces remèdes ne peuvent que faire fausse route, quand bien même
ils seraient des palliatil's d'un instant. AL Legrain exprime la
crainte que l'efficacité du sérum antialcoolique découvert récem-
ment par MM. Sappelier, Thébault et Broca, pharmacien, ne soit
pas aussi grande que l'espèrent ses inventeurs. Sans doute, il faut
attendre, pour juger de la valeur exacte de ce mode de traitement,
que l'action en ait été bien étudiée pratiquement, mais il est permis
auparavant d'en discuter le principe, qui n'est pas à l'abri de toute
critique. 1
1° L'alcoolomanie, période latente de l'alcoolisme, contre laquelle
est dirigé spécialement le traitement, ainsi dénommée par compa-
raison avec l'intoxication morphinique, et caractérisée par l'accou-
tumance et le besoin, est bien loin d'être la règle comme l'affir-
ment MM. Sappelier, Thébault et Broca. Les seuls vrais alcoolo-
manes sont les dipsomanes et ces malades ne sont pas des
alcooliques chroniques. Au reste, le rapprochement que les inven-
teurs du sérum ont voulu faire entre l'intoxication alcoolique et
l'intoxication morphinique n'est pas absolument justifié : chez le
morphinisé, l'accoutumance est réelle et inséparable de l'augmen-
tation des doses absorbées et le besoin est un symptômeal'inanition;
chez l'alcoolique, au contraire, l'inanition n'existe pas ; le désir
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 51
répété de l'alcool, s'il existe, n'a rien d'organique, sauf dans les
cas de dipsomanie; il n'est que l'indice d'une souffrance psychique
que l'on rencontre communément chaque fois que l'on met obs-
tacle à la satisfaction d'une habitude, quel qu'en soit l'objet. 2° On
a le droit de se demander si les substances antitoxiques dont le
sérum doit, dans la pensée de ses inventeurs, provoquer la pro-
duction, pourraient avoir une réelle efficacité, alors que celles qui,
conformément aux lois générales, actuellement bien établies, doi-
vent s'être développées dans les organismes soumis, depuis un
temps plus ou moins long, l'action directe du toxique, de l'al-
cool dans le cas particulier, sont impuissantes à guérir les buveurs
des accidents de l'alcoolisme et même à les rendre réfractaires il
ces accidents. 3° Il parait, a priori, difficile de concevoir que le
sérum anti-alcoolique puisse par lui-même faire naître le dégoût de
l'alcool. Le dégoût est un processus purement psychique, qui n'a
rien à voir avec la nature de son objet ou des effets qu'il provoque.
Au reste, ainsi qu'on a pu l'observer chez quelques dipsomanes,
le dégoût n'est pas toujours un remède à une impulsion, quand
celle-ci est bien caractérisée. De plus, le dégoût, supposant le goût
préalable et, par suite, -un état conscient d'alcoolisation et. en
même temps que le désir de guérir, celui de se soumettre il la
méthode, ne seraient injectables que ceux qui voudraient être
dégoûtés de l'alcool ; or, cette condition ne serait que rarement
réalisée. Enfin, la durée de ce dégoût ne devant sans doute pas
être illimitée, au lieu de chercher à dégoûter les buveurs de l'al-
cool, mieux vaudrait leur donner la force de volonté nécessaire
pour résister au désir du poison dont ils ne pourront jamais fuir
absolument le contact. 4° 11 est étrange que le même sérum, qui
détruit le goût des boissons fortes, à base d'alcool (ce qui est déjà
extraordinaire, ces boissons ne plaisant pas seulement par l'alcool
qu'elles renferment, mais aussi et surtout par les essences, les
éthers, les aldéhydes qui y sont incorporés) développe le goût du
vin. Et si cela était, la méthode serait plus nuisible qu'utile ; l'ex-
périence a démontré, en effet, que la condition essentielle d'une
guérison durable de l'alcoolisme est la privation absolue du poison
sous toutes ses formes.
A la fin de son travail, M. Legrain exprime cette opinion, que,
si la découverte de \111. Sappelier, Thébault et Broca peut parfois
avoir une action heureuse contre l'alcoolisme individuel (ce qui
n'est pas encore bien établi), elle ne constituera certainement pas
le remède souverain de l'alcoolisme social. Ce remède ne saurait
résider que dans le dégoût de l'alcool. mais dans un dégoût forte-
ment voulu et raisonné par une population éclairée et moralisée
et non dans un dégoût d'origine équine.
Eu somme, dit l'auteur, « le sérum héroïque est celui qu'em-
ploient les millions d'abstinents du monde entier. C'est celui-là
52 ) REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
que je préconise, dont nos malades se trouvent bien et qui les fait
guérir. Il consiste dans une infusion d'un peu de bonne volonté
dans beaucoup d'eau ; c'est à la portée de toutes les bourses. Le
tout est de savoir s'en servir ». A. Fenayrou.
XV. Traitement du-delirium tremens par les injections sous-cuta-
nées de sérum artificiel; par M. J. MASI31\ENIER. (Presse médicale,
2 janvier 1900.) .
L'auteur passe en revue les divers. traitements qui ont été et
sont encore actuellement employés contre le delirium tremens.
L'opium à haute dose (Dupuytren, Rayer, Stockes), le cannabis
indica (Corrigan, West et Polli, \pillard [de Guér.etl), le chloral
(Trousseau et Pidoux, Lancereaux), le trioual (Magnan et Sérieux),
le bromure de potassium et divers anesthésiques, en inhalations,
ont été préconisés. Mais l'emploi de ces différents agents ne cons-
titue qu'une thérapeutique symptomatique : le malade étant
agité et délirant, on cherche à l'endormir coûte que coûte, et,
parfois, l'on arrive à des doses de narcotiques réellement invrai-
semblables. En même temps que l'on donne des calmants et des
hypnotiques, on administre de l'alcool, sans doute en vertu de
cette idée que l'apparition des accidents a sa principale cause dans
la suppression de l'excitant habituel. En somme, en présence d'un
malade intoxiqué depuis longtemps par l'alcool, non seulement on
donne encore de l'alcool, mais on y ajoute des toxiques variés.
A cette thérapeutique semble vouloir succéder une médication
plus rationnelle, consistant à traiter le malade atteint de delirium
tremens comme un individu intoxiqué par un poison quelconque
et à s'occuper avant tout de favoriser l'élimination du toxique et
d'augmenter la résistance du sujet. Les diurétiques et les toniques
constituent la base de cette thérapeutique ; c'est ainsi que la digi-
tale à haute dose (Trousseau), la caféine, l'éther, la strychnine, les
bains tièdes (Magnan et Sérieux), les lotions vinaigrées, les grands
lavements froids, les bains froids à 18° (Letulle) ont été tour à tour
recommandés. Depuis plusieurs années, M. Quénu emploie les
injections de sérum artificiel qui sont un tonique puissant et un
diurétique d'une efficacité et d'une rapidité d'action incontes-
tables ; cette méthode lui adonné de bons résultats dans un assez
grand nombre de cas. L'auteur rapporte sommairement les obser-
vations de trois malades, chez qui ce mode de traitement, com-
biné avec la suppression absolue de l'alcool, a amené une prompte
atténuation du délire et de l'agitation. Une de ces observations
concerne un mégissier, atteint de delirium tremens à l'occasion
d'un anthrax. L'opium et le chloral lui avaient été prescrits sans
résultat. Deux injections sous-cutanées de sérum artificiel, l'une
de 1500 grammes, l'autre de 700 grammes lui ont été faites à
asiles d'aliénés. S3
vingt-quatre heures d'intervalle ; la première a été suivie presque
aussitôt d'un calme relatif; cette amélioration s'est accentuée
encore après la seconde et le malade est devenu tout à fait tran-
quille. Fait il noter, la quantité des urines, inférieure à la normale
avant les injections, a augmenté rapidement, et, à cette oligurie,
a succédé une véritable polyurie (3 litres). Les deux autres obser-
vations sont absolument identiques à celle-ci. A. Fenayrou.
XVI. Le traitement des psychoses aiguës par le repos au lit; par
les 1)"8 Scmvus et Farnarier. (73u11. de la Soc. de méd. ment, de
Belgique, mars 1900.) (Voir Comptes rendus de la Soc. médico-
psychologique.)
ASILES D'ALIÉNÉS.
1. L'Asile de Pontareuse pour la guérison des buveurs ;
par le D' Châtelain.
Comme le morphinomane, l'alcoolisé est un esclave ; sa force
de caractère baisse à mesure que monte le besoin de la boisson.
Dans cet état d'obnubilation du sens moral et d'affaiblissement
de la volonté, l'alcoolisé perd peu à peu la conscience de sa dé-
gradation, devient indifférent aux angoisses des siens, à ses
affaires en souflrance.
Le seul remède est l'abstinence totale : du reste, pour l'alcoo-
lisé, il est plus facile de s'abstenir entièrement que de se mo-
dérer. Mais s'abstenir n'est pas facile pour des raisons multiples et
il est nécessaire, dans un grand nombre de cas, de sortir le buveur
de son milieu habituel physique et moral, de l'entourer d'absti-
nents parmi lesquels il ne sera plus un être à part, seul de son
espèce.
Il faut, jusqu'au moment où son organisme aura perdu le besoin
de l'alcool, où sa volonté raffermie sera redeveuue normale, il
faut qu'il ne voie plus d'alcool, qu'il soit mis dans l'impossibilité
absolue de boire. Tel est le but des asiles pour la guérison des
buveurs.
L'asile de Pontareuse, dans le canton de Neuchâtel (Suisse), a
été créé sous les auspices de la Ligue patriotique contre l'alcoo-
lisme, et ouvert en 1897.
C'est un petit asile dont le personnel se compose du directeur,
5 asiles d'aliénés.
de sa femme et de sa fille ces deux dernières vaquant aux
soins du ménage et d'un valet de ferme.
Toute personne majeure désirant être admise à l'asile doit s'en-
gager par écrit à rester à l'asile tout le temps fixé pour son traite-
ment par le comité du Conseil d'administration : le temps de
traitement n'est pas, dans la règle, inférieur à six mois.
Pontareuse, comme du reste les asiles similaires en Suisse, n'a
donc rien qui rappelle, même de loin, l'hospice ou la maison de
correction ; c'est une grande famille. Son principe fondamental
est celui d'un relèvement par la liberté, en ce sens que le buveur
qui veut se corriger se soumet librement au séjour de l'asile et
à la discipline indispensable. (Annales médico-psychologiques,
août 1899.) E. B.
II. L'hospitalisation des alcoolisés; par le Dr Lgntz. (Bulletin de
la Soc. de Méd. mentale de Belgique, juin 1899.)
Il y a lieu tout d'abord, quand on envisage cette question de
distinguer parmi ceux qui abusent des boissons alcooliques deux
catégories d'individus : les alcoolisés elles simples ivrognes.
A ces deux variétés bien distinctes de malades doivent répondre
deux espèces tout aussi distinctes d'institutions hospitalières.
Aux alcoolisés, aux intoxiqués, à quelque variété du reste qu'ils
appartiennent età quelque degré d'intoxication qu'ils soient arrivé5,
l'asile d'aliénés actuel suffit. Quant aux simples buveurs d'habi-
tude qui ne présentent pas encore de signes d'intoxication spéci-
fique, ils ne peuvent être traités que dans des asiles spéciaux mais
l'auteur a soin de faire remarquer que ce traitement pour être
efficace, doit rester libre et volontaire et comme conséquence
que les sanaloria pour alcooliques doivent être des institutions
privées où l'autorité n'a aucun droit d'intervenir.
Celte règle souffre cependant une exception quand le buveur
commet des actes nuisibles à autrui : l'intervention de l'autorité
devient alors nécessaire, mais pour qu'elle puisse s'exercer avec
efficacité deux choses sont absolument indispensables :
1° D'abord et avant tout une loi qui détermine les conditions
de l'internement; 2° ensuite un asile spécial, prison et maison
de traitement, dans lequel seront colloqués tous les délinquants
buveurs ou alcoolisés jusqu'à guérison complète ou supposée
complète. G. DERNY.
111. La question des asiles pour alcoolisés incurables ; par le
Dr Formel. (Reo. méd. de la Suisse romande, 1899, n° 8.)
Les asiles d'aliénés, les prisons, les maisons de correction sont
encombrés d'êtres anormaux, malfaisants et dangereux, véritables
ASILES d'aliénés. 55
idiots moraux, chez lesquels l'alcool, que du reste ils ne supportent
pas, est le pire agent excitateur et renforçant de leurs mauvaises
actions.
Bien que ces individus, pervers de par leur cerveau anormal,
soient réputés incurables, le Dr Forel croit qu'en les soumettant à
une discipline à la fois sévère et humaine, qu'en les astreignant
à un travail continu et en les privant complètement de l'usage de
toute boisson alcoolique, on peut arriver peu à peu aies améliorer
et même à guérir quelques-uns d'entre eux.
C'est pour cette catégorie d'alcoolisés psychopathes réputés incu-
rables, qui ne sont à leur place ni dans les prisons, ni dans les
maisons d'aliénés, que le D' Forel réclame la création d'asiles spé-
ciaux distincts des asiles pour alcoolisés curables.
Ces alcoolisés psychopathes, étant presque tous assez forts et
intelligents pour travailler utilement, les asiles qui leur sont des-
tinés doivent être pourvus d'une installation agricole et indus-
trielle susceptible d'un assez grand développement pour que ces
établissements puissent se suffire sans rien coûter à l'Etat.
En outre la reproduction de personnes tarées et leurs excès
sexuels constituant un danger social perpétuel, il y a lieu de sépa-
rer entièrement les sexes dans des asiles différents mais assez rap-
prochés pour que le travail agricole et autre des hommes profite à
l'exploitation de l'asile des femmes et que le travail des femmes
(lavage, cuisine, racommodage), profile à l'asile des hommes.
Il faut enfin enlever à la détention dans ces asiles tout caractère
infamant rappelant une condamnation judiciaire. Il faut donner à
l'internement un caractère purement administratif, de salut public
et individuel.
La haute surveillance de ces asiles devra être confiée à une com-
mission où devraient siéger en même temps que des aliénistes,
des juristes criminalistes et des directeurs de pénitenciers, ainsi
que des experts sur la question de l'abstinence de l'alcool.
G. D.
IV. L'alcool dans les asiles d'aliénés; par H. 13orr.
(Neurolog. Centralbl.,XVl\, 1898.)
Les asiles reçoivent de plus en plus de buveurs, de plus en plus
d'aliénés par suite d'excès alcooliques, de plus en -plus de malades
chez lesquels l'alcool a joué un rôle certain (statistiques). Il est à
côté de cela des aliénés auxquels l'alcool est nuisible ; épileptiques,
paralytiques généraux, déments organiques ou séniles, idiots et
imbéciles, maniaques excités ou malades excitables et confus,
fous périodiques. On obtient ainsi une proportion minima de
56 p. 100, c'est-à-dire plus de la moitié des malades hommes, qui
ne doivent ingérer aucune boisson alcoolique, et chez la femme
56 ASILES d'aliénés.
une moyenne de 25 p. 100. Enlever d'un asile d'aliénés les buveurs
serait assainir l'établissement et supprimer bien des causes de
désordre. Pour les autres malades, il conviendrait encore de rayer
tout à fait les boissons alcooliques de la liste des aliments, y com-
pris la bière. On les remplacerait par des boissons rafraîchis-
santes constituées par de la bonne eau additionnée de sucs de
fruits. C'est ce qu'on a fail à Burghoelzli près Zurich (Forel), à
la clinique d'aliénés d'Heidelberg, à Wuhlgarten, près Berlin (asile
d'épileptiques) et dans les quatre asiles de Londres.
P. KERAVAL.
V. Esquisse historique sur les asiles d'aliénés au Canada ;
, par le D' Burgess.
Après avoir donné à leurs aliénés des soins de simple garde avec
un restraint plus ou moins mécanique, les diverses provinces du
Canada, à part celles de Québec et de la Nouvelle-Ecosse, sont
entrées dans la voie du progrès et ont accepté la maxime de Horace
Mann à savoir que les aliénés sont les pupilles de l'État et qu'à ce
titre ils doivent être soignés dans des institutions gouvernemen-
tales spéciales.
A l'époque actuelle, dans la construction des asiles, l'idée de dé-
tention est subordonnée à celle de traitement ; l'hôpital pour les
aliénés ne doit plus être une prison, mais une maison.
Après ces considérations générales, l'auteur, dans une étude des
plus documentées, examine province par province, l'historique et
les conditions actuelles des asiles d'aliénés au Canada. (The Ame-
rican Journal of insanity, avril 1899.) E. B.
VI. De l'emploi des femmes-médecins dans le service de nos
établissements publics d'aliénés; par 1,UDWIG. (Centralbl f. Ne ?
vcnheilk., XXII, N. I . \, 1899.)
Il faut être* femme pour bien comprendre, voir et ouïr telle ou
telle manifestation de la femme aliénée-; la femme instruite peut
seule nettement percevoir, sentir et deviner certaines émanations
de l'activité intellectuelle, certaines fluctuations de l'humeur, les
formes et les nuances de l'extériorisation psychique de la femme.
L'analyse des éléments demeurés sains du caractère et de l'esprit
sur laquelle reposent le diagnostic et le traitement moral, sera plus
profondément faite par une femme ; elle saura mieux distinguer
qu'un homme ce qui en reste. Elle se pénétrera mieux de ce qu'il
y a à faire comme traitement physique et moral, car elle gagnera
plus aisément la confiance de ses malades.
Ceci aura encore un autre avantage relatif aux infirmières. Elles
seront mieux surveillées, dirigées, instruites par les femmes méde-
asiles d'aliénés. 57
cins. Celles-ci ne constituent-elles pas au besoin les infirmières les
plus éduquées ; par contact et par attraction elles arriveraient en
tout cas à former un personnel d'élite. P. IiHn.avnr..
VII. Rapport au Zemstwo de Saratow ; par le Dr Bagénofe,
directeur de l'établissement de Voroneje.
Dr Bajénoff constate que les aliénés en Russie sont mal assistés,
malgré les très grands sacrifices du gouvernement et les efforts
de la société. Cette question pèche en principes et en détails.
Parmi les défauts est l'absence de lois définissant et réglant les
devoirs de l'administration centrale et ceux de l'administration
locale vis-à-vis des aliénés. Mauvaise répartition des malades dans
ces asiles, par rapport au lieu de leur origine, absence de lois qui
règlent l'admission des malades et enfin encombrement par des
malades incurables.
L'auteur propose pour remède d'établir un rapport plus étroit
entre l'hôpital psychiatrique et les médecins de la localité ; de
seconder les asiles par la création de colonies familiales.
En répondant aux objections que posent les adversaires des
colonies, l'auteur considère cette forme d'assistance comme la
meilleure pour le désencombrement et trouve que l'entourage
bien portant n'en souffrirait pas, que les abus possibles ne sont
pas plus considérables que ceux qui peuvent arriver dans les
asiles. Il termine par l'exposé de la liste des colonies familiales à
l'étranger et en France, décrivant spécialement la colonie de
Dun-sur-Auron qu'il a visitée et indiquant les excellents résultats
qu'il y a constatés. Cette méthode d'assistance pour les chroniques
ne fait pas double emploi avec la colonisation agricole qui répond
il des catégories de malades tout autres, moins nombreuses d'ail-
leurs ; « tous les systèmes sont nécessaires, l'asile fermé comme les
autres modes, c'est une question de diagnostic et d'espèces. »
D. M.
VI(LLa statistique des aliénés à Anvers; par le D'' SaNO. (Bulletin
de la Soc. de illéd. mentale de l3elyique, juin 1899.)
Il résulte de ce travail que la proportion du nombre des aliénés
indigents par rapport à celui de la population s'est réduite de
moitié à Anvers pendant la seconde moitié de ce siècle. Ce résultat
parait dû en grande partie à ce que les alcoolisés ne sont pas col-
loqués à Anvers, mais simplement gardés, soit à l'hôpital, soit à
la prison, et l'auteur ajoute que si le nombre des aliénés semble
en diminution dans celte ville c'est qu'on y a de plus en plus
perdu les moyens d'un traitement scientifique. G. Decvo.
58 asiles d'aliénés.
IX. De la réforme de l'assistance des aliénés; par le D1' PEETERS.
(Bulletin de la Soc. de Jléd. mentale de Belgique, décembre 1898.)
Dans cette conférence faite au Cercle artistique, littéraire et
scientifique d'Anvers, l'auteur se déclare partisan, pour l'assis-
tance de la grande majorité des aliénés, de la substitution aux
asiles fermés des colonies familiales instituées depuis quelque
années dans presque tous les pays sur le modèle de Gheel.
X. Une visite au plus récent hôpital d'Athènes; par le Du Fre-
derick l'ETEUsoN de New-York. (Médical zezvs,,janvier 1900.)
L'auteur décrit sous ce titre l'Asile de Giessen près de Frank-
fort-sur-Main. Cet hôpital très bien situé est destiné à l'étude des
maladies mentales et à l'enseignement clinique. Il contient
100 malades environ, des deux sexes, répartis en huit pavillons : -.
agités, turbulents et suicideurs, tranquilles et pensionnaires.; les
autres aliénés chroniques sont transférés dans un asile provincial.
Ces pavillons ont été construits avec tout le confort moderne, et en
vue de l'examen complet et du traitement rationnel des malades :
appareils d'électrothérapie, d'hydrothérapie, chambres de surveil-
lance pour le traitement par le lit, elc. Des laboratoires de toute
nature : de physiologie pathologie, d'histologie pathologique, de
photographie, etc., une bibliothèque scientifique, un musée
d'anatomie pathologique sont annexés à l'Asile. Un grand amphi-
théâtre permet l'enseignement et la présentation des malades, les
projections photographiques, etc. Enfin, une consultation externe
permet aux malades de se faire examiner dès le debut de leur
maladie et d'entrer à l'hôpital dès qu'il est nécessaire. A. V. '
Il Quelques visites aux asiles danois pour les faibles d'esprit et
à d'autres institutions ; par William-W. Ireland. (The Journal
Mental Science, janvier 1898.)
Garnie Bakkelws. - C'est la plus ancienne école, pour les imbé-
ciles, du Danemark ; elle est située dans un faubourg de Copen-
hague ; elle comprend environ 200 enfants dont quelques-uns ne
sont susceptibles d'aucune éducation et 4 professeurs du sexe mas-
culin et 10 du sexe féminin. Les préaux de récréation sont un peu
restreints, ce qui tient au prix élevé du terrain dans le voisinage
d'une capitale; les salles d'école spacieuses, peut-être même trop
spacieuses, les pièce ? trop grandes tendant à égarer l'attention
déjà si difficile à fixer chez les imbéciles. Les filles apprennent à
coudre, à tricoter, à broder; les garçons font des brosses, des
paillassons et quelques simples objets en bois. 11 n'y a pas de
cas de crétinisme sporadique dans rétablissement ; mais on y
asiles d'aliénés. 59
remarque plusieurs microcéphales et une forte proportion d'idiots
du type Mongolien. Le ? dortoirs sont simples, mais propres et
confortables les enfants paraissent bien nourris.
Asile cllsloriilll t< ! 'B&t'roe[[(ft ? - Situé à deux milles de la
station de Birkeroed, sur la ligne de Copenhague à El-eneur; il est
destiné aux adultes; on y utilise ceux qui peuvent travailler et on
y soigne et surveille ceux qui sont incapables de tout travail, Cet
asile a été ouvert eu juin 1892 avec 131 malades (80 hommes et
51 femmes). 11 est très bien organisé, ses créateurs ayant profité
des enseignements fournis par les institutions analogues déjà exis-
tantes. Il est spacieux aussi bien dans ses bâtiments que dans les
terrains qui les entourent et les séparent. L'enseignement que les
malades y reçoivent est exclusivement industriel. On y trouve
toutes les formes d'idiotie et quelques cas curieux de difformités
et de troubles nerveux. Les malades sont bien nourris, convena-
blement vêtus et visiblement bien soignés. Le personnel se com-
pose de 17 employés (10 hommes et 7 femmes), le directeur non
compris, et de 70 serviteurs (18 hommes et 52 femmes). Les ate-
liers sont consacrés à la fabrication des brosses à ongles, de pin-
ceaux de peintre, de paillassons et de chaises, de tabourets et de
tables d'un modèle simple. Les ressources de l'établissement se
composent de contributions volontaires, de sommes payées par
les différentes communes ou par les individus, et enfin d'une
subvention de l'Etat qui représente la moitié de l'entretien pour
chaque malade. Le chiffre moyen des malades est de 400.
L'auteur donne ensuite quelques détails, plus sommaires, sur
les établissements privés fondés par le D1' Johan Keller et conti-
nués par son fils, et sur la maison de refuge des épileptiques à la
villa Poppina, et enfin sur l'asile des idiots adultes incurables.
Gamme : llosclc2cs. C'est l'asile pour les femmes imbéciles dont
l'éducation est terminée; il est situé à environ -c.nq milles de
Copenhague, au milieu des champs. Il peut réunir environ 40 ma-
lades qui sont presque toutes jeunes et paraissent en bonne santé;
elles se livrent à des travaux de couture, de blanchissage et de
tricot.
Lille Mosegaard. C'est l'asile des hommes, situé à peu de
distance du précédent. Les malades sont employés à la fabrication
des corbeilles et des paillassons, à la menuiserie ordinaire et à la
cordonnerie; les moins aptes au travail-sont affectés à l'exploita-
tion des carrières de pierre.
h, Le total des personnes soignées dans les diverses institutions
Keller est d'environ G00 (230 dans les écoles, 150 dans les ateliers,
220 dans les différents asiles).
A Brème il y a une école pour les enfants faibles d'esprit. Elle
reçoit 82 élèves et l'on récolte actuellement des fonds pour créer
une institution où seront soignés et éduqués les idiots du terri-
60 asiles d'aliénés.
toire de la vieille république hanséatique. L'auteur a visité aussi
l'institution des sourds-muets, sur laquelle il donne des détails.
R. c lluscn.wc-Cnr.
XII. Gheel et Lierneux, les colonies-asiles pour les aliénés en
Belgique ; par John SicuALD. (Tite Journal of Mental Science,
juillet 1897.)
L'organisation de ces deux colonies est soumise à une régle-
mentation spéciale établie par un décret royal : l'admission des
aliénés dans l'une et l'autre de ces deux colonies nécessite les
mêmes formalités que l'admission dans un asile ordinaire d'aliénés
conformément à la loi belge.
Colonie de Gheel. L'auteur l'a visitée pour la première fois en
1860, et il a publié le compte rendu de sa visite dans le Journal of
Mental Science, en 1861. Il y est retourné en 1862, puis en 1893,
époque à laquelle il a recueilli les éléments du présent travail.
Gheel est situé dans la province d'Anvers à environ 25 milles de la
ville du même nom, et se compose d'un village de 3 à 4000 habi-
tants et de 23 hameaux éparpillés sur une surface dont la circonfé-
rence aurait environ 20 milles. La population totale de la com-
mune s'élève à un peu plus de 11 000 habitants, qui se livrent à
la culture d'un sol assez peu fertile, et par places très rebelle à
toute culture. La plupart des habitants sont propriétaires du sol
qu'ils cultivent.
L'administration de la colonie est entre les' mains d'une com-
mission locale ; le personnel se compose d'un médecin-directeur
(actuellement le IF Peeters), de deux médecins adjoints, de deux
médecins assistants, d'un receveur, d'un secrétaire et d'un maga-
sinier. Outre le personnel de l'infirmerie, il y a quatre infirmiers
gardes de section, qui visitent continuellement les aliénés à domi-
cile. Les malades appartiennent à deux catégories, les indigents,
et les pensionnaires. Au commencement de 1897, il y avait dans
la commune 1983 malades (au lieu d'environ 800 en 1861) dont
1809 indigents et 174 pensionnaires.
Chaque indigent, à son entrée, est placé il l'infirmerie qui est
sous la surveillance immédiate du médecin-directeur ; sauf le cas
de nécessité d'une observation plus prolongée, il n'y reste que
cinq jours, après lesquels'il est remis entre les mains d'un gardien
choisi par le médecin directeur, suivant la nature du cas. Pour
les pensionnaires, les conditions pécuniaires sont ordinairement
réglées à l'avance, ce qui permet de supprimer le passage à l'in-
firmerie.
L'infirmerie, en dehors de son rôle de salle d'observation, est
aussi une infirmerie véritable, qui reçoit les malades delà colonie.
Les aliénés répartis dans les habitations sont également sous la
asiles d'aliénés. 61
surveillance du médecin directeur, mais il n'est obligé par le rè-
glement à les visiter que deux fois par an ; dans la pratique il les
voit beaucoup plus souvent. L'inspection est confiée aux médecins
adjoints et aux médecins assistants qui visitent les malades incu-
rables au moins une fois par mois, et au moins une fois par se-
maine ceux qui sont curables ou à qui cette visite est utile pour
une raison quelconque ; souvent les visites sont quotidiennes.
Chaque malade reçoit aussi une fois par mois la visite d'un garde
de section. Médecins et gardes rendent compte chaque jour au mé-
decin directeur de leurs visites de la veille et de leurs résultats, et
reçoivent ses instructions. Les membres du comité local visitent
également les malades de loin en loin. Pour les pensionnaires
les conditions pécuniaires sont l'objet de conventions entre la
famille et l'habitant logeur. Les indigents admis aux frais des
communes payent une pension qui varie de GO à 90 centimes par
jour suivant que l'aliéné est utile, propre ou malpropre : en plus
de cette somme il est perçu un droit fixe de 2j centimes par jour
pour frais généraux : la literie et le mobilier des chambres de
malade sont fournis par l'administration. Outre les bains de
l'infirmerie il y a dans le village deux établissements de bains et il
y en aura bientôt quatre.
Les malades sont répartis à peu près également sur la surface
de la colonie ; quelques-uns logent dans le bourg, la plupart dans
les hameaux voisins : on ne donne pas de malades à loger aux
habitants trop pauvres. Chaque malade a sa chambre particulière,
dont les dimensions minimum sont réglées (j30 pieds cubes) ; il
y a ordinairement deux malades dans chaque maison ; le mobilier
est convenable et suffisant ; toutes les tentatives de décoration de
l'appartement sont encouragées, et des plantes à fleurs sont fournies
gratuitement aux logeurs par les jardins de l'administration. Il
n'y a jamais plus de deux malades chez le même habitant, de
façon à ce que la vie soit absolument commune entre le logeur et
le logé. La liberté dont jouissent les malades est subordonnée à
leur état.
La nourriture des logés est la même que celle des logeurs, c'est-
à-dire assez simple et comportant fort peu de viande de boucherie.
Les vêtements sont grossiers mais convenablement appropriés à
chaque saison ; leur prix de revient est de 40 fr. par malade.
Les aliénés paraissent être généralement traités à l'égal des
membres de la famille : ils partagent la table, le travail et les
amusements de leurs hôtes ; ils paraissent satisfaits et ne se plai-
gnent pas. La plupart des malades que l'auteur a vus pouvaient
parfaitement être ainsi logés chez des particuliers, mais il en a vu
aussi quelques-uns qui, à son avis, auraient été mieux à leur place
dans des asiles ordinaires, surtout parmi les déments et les idiots ;
ceux-là ne retirent évidemment aucun avantage de l'entourage
,6,2 asiles d'aliénés.
familial ; il en dit autant de certains aliénés dont la conduite
désordonnnée nécesssite les gants de cuir, dont l'emploi subsiste
encore (on a aboli la chaise de force, la camisole, la ceinture,
etc.). Les aliénées à tendance érotique seraient aussi mieux
ailleurs.
Si l'on recherche actuellement quels sont, pour les malades,
les résultats de ce traitement, il faudra, avant toute comparaison
avec les résultats que donnent les asiles ordinaires, se souvenir
que, à Gheel, on n'admet pas toutes les formes d'aliénation men-
tale : les malades violents, agressifs, intraitables, dangereux, ne
sont pas reçus. Gheel n'est donc pas un asile, et le traitement que
l'on y suit demeure inapplicable à un grand nombre de cas de
folie. D'autre part tous les cas admis n appartiennent pas, il s'en
faut de beaucoup à la catégorie des chroniques ou des incurables.
Beaucoup au contraire sont guérissables, et la statistique de
1889-93 donne 21 p. 100 de guérisons. en se basant sur le
chiffre des admissions, réadmissions comprises. Il faut considérer
ce chiffre comme une donnée absolue, mais non comme un élé-
ment de comparaison, pour les raisons qui viennent d'être dites;
ces raisons sont également applicables au taux de la mortalité qui
de 1884 à 1893 a été de 7,3 p. 100. Le taux général de la
mortalité des aliénés n'est pas relevé en Belgique.,
L'impression générale de l'auteur est que, pour la très grande
majorité des malades soignés il Gheel le traitement est préférable
à celui des asiles fermés ordinaires ; il persiste à penser toutefois,
comme il l'a dit plus haut, qu'un certain nombre de ces malades
serait mieux à sa place dans un asile, mais il estime que ce nombre
doit être peu considérable.
Il est rare qu'il arrive aux malades des accidents sérieux. De
1888 à 1893 il n'y a eu qu'un cas de grossesse chez une aliénée,
mais en 1893 il y en a eu deux. On ne connait pas de cas où un
aliéné ait eu des rapports sexuels avec une aliénée. Le nombre
des évasions est très faible surtout si l'on considère la somme de
liberté dont jouissent les malades. Durant les cinq dernières an-
nées la moyenne annuelle de ces évasions a été de cinq.
Quant aux résultats du système au point de vue de la société,
il faut constater d'abord que le prix d'entretien d'un malade à
Gheel est très notablement inférieur il celui des asiles ordinaires,
même en tenant compte de la non admission il Gheel de certains
malades particulièrement onéreux pour les asiles. Au point de vue
spécial du village de Gheel, les résultats se traduisent par une aug-
mentation manifeste de la fortune et du bien-être publics. Mais la
présence d'un si grand nombre d'aliénés n'est-elle pas nuisible aux
habitants, ou, pour préciser : 1" les aliénés sont-ils un danger
public ? et 2° la santé mentale des habitants souffre-t-elle de leur
voisinage ? Sur le premier point, l'opinion des habitants eux-
asiles d'aliénés. i 63
mêmes est que leurs hôtes ne sont pas dangereux, et, en fait,
depuis cinquante ans il n'y a pas eu un habitant sérieusement
blessé par un malade. Sur le second point, on ne pourrait répon-
dre que s'il était possible de déterminer si la folie est plus fré-
quente chez les indigènes de Gheel que chez ceux des localités non
occupées par des aliénés, et, sur ce point, il n'y a pas de statis-
tique ; mais l'opinion des habitants et celle du Dr Peeters est que
la folie n'est pas plus commune à Gheel qu'ailleurs.
Colonie de Lierneux. Un grand nombre des remarques qui
viennent d'être faites au sujet de Gheel sont applicables à Lier-
neux. L'organisation de cette colonie est le résultat, plus heu-
reux qu'on ne l'avait pensé, d'une tentative faite par l'Administra-
tion pour introduire des aliénés dans un pays qui n'y était pas
préparé. La colonie est située sur la frontière sud de la province
de Liège. La commune de Lierneux (2.G00 habitants environ)
couvre une surface d'environ 24 milles carrés, et le village est à
environ 7 milles à l'ouest de la station de Vielsalm sur la ligne de
Liège et des Trois- Vierges. Outre le village, ily'a environ 18 hameaux
éparpillés dans la commune; la région est surtout pastorale et
agricole; la population est'pauvre, le sol est peu fertile.
La colonie fut projetée en 1883 et créée en 1884, à l'instigation
de M. Oudart, inspecteur général des asiles de Belgique. Il faut se
souvenir que la Belgique se compose de deux portions à peu près
égales : l'une septentrionale, où l'on parle flamand, et une méri-
dionale, où l'on parle le patois wallon. Les habitudes, les cou-
tumes, l'alimentation de ces deux portions de la Belgique différent
autant que la langue ; il y avait donc, en dehors môme d'autres
considérations, un réel avantage à ne pas trop dépayser les alié-
nés du sud en les envoyant à Gheel. Le gouverneur de la province
de Liège entra dans les vues de M. Oudart; mais, sur place, la
chose ne marcha pas toute seule : le bourgmestre de Lierneux,
avec plus de zèle que de lumières, déclara que « rien n'était plus
contagieux que la folie » et que tant qu'il serait en place, pas un
aliéné n'entrerait il Lierneux; les habitants, toutefois, ne furent
pas tous de cet avis; mais on procéda avec ménagements, et Lier-
neux fut tout d'abord organisé commeune annexe de Gheel où, en
avril 1884, il entra 4 malades venus de Gheel avec un gardé de
section. Peu il peu les habitants se familiarisèrent avec l'idée de
loger des aliénés, et un peu plus tard (avril 1883) la colonie fut
détachée de Gheel et rendue indépendante par décret royal. Elle
contenait alors 27 malades, et en juillet 1896 elle en contenait 420.
La colonie est administrée par une commission composée* de
7 membres, dont 3 sont pris parmi les principaux fonctionnaires
de la province (membres de droit), dont un autre membre est le
bourgmestre ou l'un des échevins, dont (l'un' doit être un méde-
cins) 2 sont désignés par le conseil provincial et dont le dernier
64 asiles d'aliénés.
est nommé par le ministre de la Justice. Les règles d'admission
sont les mêmes que dans les asiles ordinaires de Belgique.
Le médecin-directeur, chef du pouvoir exécutif de la colonie, est
nommé par le roi. Il y a aussi un trésorier et un secrétaire ; ce
dernier a la direction de toute la partie non médicale de l'admi-
nistration. Le médecin-directeur voit les malades curables une
fois par semaine au moins et plus souvent, s'il y a lieu, et les in-
curables, une fois par mois. Les gardes de section visitent tous les
malades deux fois par semaine. L'infirmerie de Lierneux est en
tout semblable à celle de Gheel.
Le règlement établi par le conseil provincial confie à la police
locale la protection des aliénés, à qui les débitants ne peuvent
fournir aucune boisson alcoolique. Le bourgmestre peut requérir
l'admission à l'infirmerie de tout malade qu'il considère comme
dangereux ou comme pouvant offenser la morale publique. Les
contraventions sont punies par des amendes qui ne peuvent dé-
passer 25 francs, ou par de la prison, la durée ne pouvant excéder
8 jours.
Les habitants qui reçoivent les malades se divisent en deux
catégories : les hôtes, qui reçoivent des pensionnaires payants, et
les nourriciers, qui hébergent les indigents. Les pensionnaires
payants sont peu nombreux (en 1892, 6 pensionnaires contre
343 indigents). Hôtes et nourriciers sont enregistrés, et leur ins-
cription sur le registre, après enquête sur leur moralité, signifie
leur acceptation à ce titre par le conseil communal; en cas de
contravention, ils sont passibles de la radiation. Ils ne peuvent
loger des malades de sexe différent. Pour les indigents, le prix de
la journée est fixé à 1 fr. 40 c. ; sur cette somme, le nourricier
reçoit 85 centimes pour un malade qui travaille, 93 centimes pour
un malade qui ne travaille pas et 1 fr. 10 c. pour un malade mal-
propre ou épileptique. Le reste est versé à l'Administration pour
les frais généraux.
Il est stipulé que les moyens de contention et l'isolement des
malades ne doivent être employés que dans des cas tout à fait
exceptionnels et d'une manière tell1polail'e; en aucun cas les gar-
diens ne peuvent prendre sur eux d'appliquer ces mesures qui ne
doivent être employées que sur ordre médical.
Les statistiques dressées par le médecin-directeur, le Dr Depé-
ron, montrent qu'il y a à Lierneux des malades auxquels le sys-
tème de la colonie n'est pas utilement applicable et qui seraient
mieux dans des asiles ordinaires.
Le confort des habitants et des malades, à Lierneux, paraît un
peu supérieur à celui de Gheel; les maisons sont propres, bien
aérées, bien tenues, souvent même un peu ornées. La nourriture
est saine et suffisante ; le règlement prescrit que chaque malade
aura au moins 1 kilogramme de viande par semaine ; mais le
SOCIÉTÉS SAVANTES. 65
Dr Dupéron ieconnaît lui-môme qu'il n'est pas appliqué, par la
raison qu'il est inapplicable dans les conditions où sont reçus les
aliénés. Le médecin-directeur, dans son rapport de 1894, ajoute
que bien que le règlement précise les cas qui ne doivent pas être
admis dans la colonie, il y a certainement lieu de le modifier et
d'étendre les exclusions et il indique les catégories qui, suivant
lui, ne peuvent pas être admises utilement ni sans inconvénient
dans la colonie ; ce sont les suivantes : 1° malades réduits à la vie
purement végétative; 2° malades atteints de démence oiganique,
chez lesquels le tissu cérébral est en état de dégénérescence pro-
gressive ; 3° idiots de l'espèce la plus inférieure; 4° malades à la
dernière période de la paralysie générale ; 5° la plupart des épilep-
tiques ; 6° malades dans un tel état de débilité physique qu'on ne
peut pas les transporter sans aggraver leur état; 7° malades mal-
propres ou sur le point de le devenir. R. de lIIUSGRAVE-CL : 1Y.
XIII. Statistique de l'asile Sainte-Agathe, à Liège, de 1892 à 1899;
par le D1' L11OEST. (Bull. de la Soc. de méd. mentale de Belgique,
mars 1900.)
Les tableaux statistiques contenus dans ce travail montrent
la progression constante de la population de l'asile Sainte-
Agathe pendant les huit dernières années. Au 10r janvier 1892, les
pensionnaires de cet asile étaient au nombre de 178, actuelle-
ment ils sont plus de 200. De 1892 à 1899, le mouvement de la
population se décompose ainsi : entrées 503, décès 195, sorties
par guérison effective 106. Pendant le même laps de temps il y a
eu 3 évasions, mais pas un seul suicide.
SOCIÉTÉS SAVANTES.
SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE.
Séance du 7 juin 1900.
Chorée de Sydenham et rhumatisme. -1f. Gilles DE la TOURETTE
réfute l'opinion qui rattache la chorée de Sydenham au rhuma-
tisme. Sur dix-sept cas observés par lui il n'a trouvé le rhuma-
Archives, 2° série, t. X. 5
(il) SOCIÉTÉS savantes.
tisme qu'une seule fois. Sur ce même nombre de faits l'affection n'a
jamais débuté après la puberté. Il faudrait donc ranger les chorées
survenant après cette période et notamment celles de la grossesse
à l'hystérie et à la maladie des tics. On doit renoncer à l'avor-
tement provoqué chez les femmes enceintes atteintes de chorée.
M. Jorrnoo persiste à admettre qu'un certain rapport existe
entre le rhumatisme et la chorée bien que cette dernière ne soit pas
toujours d'origine rhumatismale ; le rhumatisme dans l'espèce
agit simplement comme une maladie infectieuse quelconque telle
que rougeole ou grippe en tant que cause occasionnelle; enfin il
a vu des cas de chorée dans la grossesse qu'il est vraiment impos-
sible de rattacher à l'hystérie ou aux tics.
Paralysie du mouvement associé de l'abaissement des yeux.
M. 13.\BINSKI. Un malade jusque-là bien portant a été subitement
frappé d'un ictus suivi de plusieurs heures de coma. Depuis lors
le malade présente constamment l'attitude suivante : flexion de la
tête associée à une élévation des deux globes oculaires; il peut
regarder en haut et de côté sans remuer la tête, mais il lui est
impossible d'abaisser les yeux au-dessous de l'horizontale, et de les
faire converger. Intégrité complète des réflexes pupillaires, de
l'acuité visuelle et du fond de l'oeil. La parole est ralentie, un peu
embarrassée surtout pour la prononciation des r et des s, l'intelli-
gence est paresseuse.
La société connait déjà ce malade que MM. Marie et Crouzon
avaient déjà présenté, le considérant comme atteint d'un tic mental
qu'ils avaient rapproché du torticolis mental (voir arcs. Neural.,
1900, p. 170). Pour M. Babinski il ne s'agit pas d'un spasme d'ori-
gine psychique des élévateurs mais bien d'une paralysie des droits
inférieurs d'origine organique centrale, ce que vient corroborer la
présence d'autres signes de lésion des centres nerveux tels que
affaiblissement intellectuel et embarras de la parole survenant
après un ictus.
M. Parinaud qui a étudié précisément ces paralysies associées
assure que ce cas rentre parfaitement dans l'un des trois types
cliniques qu'il a décrits, la lésion centrale ici n'est point nucléaire
à son avis mais bien sus-nucléaire.
M. Ballet observe cependant que le malade peut encore abaisser
les yeux dans les mouvements automatiques quoique ne le pou-
vant pas volontairement et consciemment.
M'. Babinski montre encorel'impossibilité du mouvement d'abais-
sement associé chez son malade, malgré la persistance du recou-
vrement d'une partie de la cornée par la paupière inférieure,
mouvement qui dépend de l'orbiculaire seul et auquel dans ce cas
l'abaissement de l'oeil ne prend aucune part.
SOCIÉTÉS SAVANTES. C7
Forme anormale de la maladie de Recklinghausen. MM. Renon et
UCFOUR. Il s'agit d'un hommedevingt-septansatteintàplusieurs
reprises de rhumatisme musculaire. Actuellement il présente des
nodules sous-cutanés développés dans le sens de la longueur des
membres et qui sont à peu près indolores, la masse de ces nodules
est constituée par des dépôts calcaires. Le front et la nuque sont
couverts de tâches pigmentaires. La confirmation du diagnostic
dépendra de l'examen histologique.
Tumeur du corps pituitaire sans acromégalie et avec arrêt de déve-
loppement des organes génitaux. AI. Babinski rapporte le cas
d'une jeune fille de dix-sept ans, morte avec tous les signes d'une
tumeur cérébrale. A l'autopsie : épithélioma du corps pituitaire.
Il n'y avait pas trace d'acromégalie ; mais les organes génitaux
externes aussi bien que les ovaires et que l'utérus présentaient les
dimensions de ceux d'une fillette de huit ans.
M. Meige lit pour M. Vihes, de Montpellier une intéressante étude
sur le signe des orteils de Ilalil1ski.
M. Touche présente le cerveau d'une femme chez qui une tumeur
frontale de l'hémisphère droit avait entraîné une hémiplégie
gauche. F. 1301SSIER.
SOCIÉTÉ D'IIYPNOLOGIE ET DE PSYCHOLOGIE.
Séance du mardi 13 mai 1900. Présidence DE M. Jules Voisin.
Orthopédie morale et hypnotisme.
M. Voisin. Une jeune fille, professeur de musique, économe,
travailleuse, rangée, est séduite par un jeune homme. Depuis lors,
elle ne pense plus qu'à lui; pour le faire vivre, elle vole sa mère à
qui elle rend la vie insupportable; elle délaisse ses leçons de
musique et mène ouvertement une vie irrégulière. Je la traite par
le suggestion hypnotique. Je ne tarde pas à apprendre qu'elle
s'est remise assidûment à son travail, qu'elle ne pense plus à son
individu, qu'elle redevient gentille pour sa mère et qu'elle se
trouve très contente de sa nouvelle vie. J'ai soigné aussi avec
succès, il y a quelques années, une autre jeune fille qui, adoptée
par un ménage sans enfants, se montrait fort vicieuse ; elle
mentait, volait et avait la manie de couper les robes de soie.
Réformée au point de vue mental et moral, gràce à l'hypnotisme,
68 SOCIÉTÉS SAVANTES.
elle s'est mariée depuis; elle est maintenant une épouse et une
mère de famille excellente.
M. BÉRILLON. Ces cures d'orthopédie morale sont parmi celles
qui font le plus honneur à l'hypnotisme. Auguste Voisin, en iSSu,
avait dans son service-une femme malpropre, menteuse, voleuse,
colère, vicieuse, ordurière. Il la traita par l'hypnotisme et la
ramena à de bons sentiments,- au point qu'elle devint dans un
hôpital le modèle des surveillantes. C'est cette cure qui fut
l'origine du culte qu'Auguste Voisin professait pour l'hypnotisme.
Depuis lors, je me suis appliqué systématiquement à faire de
l'orthopédie mentale et morale, surtout chez les enfants. Grâce à
la pédagogie suggestive, j'ai obtenu de très nombreux résultats
chez les vicieux et les pa.resseux.
Orthopédie mentale et morale par suggestion
pendant le sommeil naturel.
M. Peu de SAOET-IAHTIN. J'eus à soigner un enfant à la fois
vicieux , paresseux et arriéré. Les parents, obéissant à des
craintes injustifiées, repoussaient absolument l'hypnotisme. J'eus
alors recours à la suggestion pendant le sommeil naturel, dont
M. Farez nous a recommandé l'emploi et exposé la technique. Le
traitement fut assez long, mais je parvins à guérir cet enfant de
ses vices. Par surcroit, comme ce fait a déjà été constaté, d'ail-
leurs, son intelligence s'est développée ; il a pris goût au travail et
peut suivre utilement ses classes.
M. PAUL Farez. On voit que la suggestion pendant le sommeil
naturel peut être considéré comme le succédané de la suggestion
hypnotique dans tous les cas où celle-ci ne peut être employée.
Ce mode de suggestion est très efficace et on ne l'utilise pas assez.
Il est donc intéressant d'enregistrer le succès obtenu par M. Pau
de Saint-Martin ; je rappelle qu'à l'une de nos dernières séances,
j'ai rapporté le cas d'un enfant atteint d'incontinence d'urine et
guéri, lui aussi, par suggestion pendant le sommeil naturel.
L'hypnotisme et les paralysies psychiques motrices.
M. BÉRiLLON. Le phénomène hypnotique le plus élémentaire
et le plus frappant consiste dans le fait qu'un membre ou un
segment de membre peut être paralysé par suggestion. Que ces
paralysies psychiques soient obtenues chez un sujet hypnotisé,
cela n'a rien de surprenant. Ce qui paraît plus singulier, c'est
qu'elles puissent être provoquées dans l'état de veille apparente,
chez des sujets qui ont déjà été endormis auparavant ou qui même
n'ont jamais été hypnotisés. Or, il est inadmissible de considérer
comme étant en état de veille complète un être qui, tout à coup,
BIBLIOGRAPHIE. 69
parce qu'on lui en a fait la suggestion, ne peut plus, par exemple,
marcher ou se servir d'un membre. A notre avis, un tel phéno-
mène ne peut s'expliquer que par l'inhibition de certains centres
supérieurs et cette inhibition constitue essentiellement l'état
d'hypnotisme. Il est curieux de constater que ces paralysies
psychiques suggérées n'étonnent nullement le sujet chez lequel je
viens de les créer.
M. Paul Magnin. Cette personne a pleine confiance en vous et
elle pense bien que vous saurez la débarrasser de cette paralysie
que vous venez de lui donner. Mais, faites-lui une suggestion à
échéance plus éloignée : si, par exemple, demain elle se réveille
avec une paralysie que vous lui aurez suggérée aujourd'hui, elle
ne manquera pas de venir vous trouver très effrayée.
Hypnotisme chez les neurasthéniques.
M. BI;AILLON.- On prétend, bien à tort, que les neurasthéniques
ne sont pas hypnotisables ; la vérité est qu'ils le deviennent après
un certain entraînement. Cette malade que j'hypnotise devant
vous, n'a pu être endormie que ce matin pour la première fois.
C'était notre cinquième séance. Il ne faut donc pas se contenter
d'un seul essai et se laisser rebuter par un premier échec. Le
succès dépend de la persévérance du malade et de celle du
médecin.
BIBLIOGRAPHIE.
1. Le problème de la mémoire, essai de psycho-mécanique; par le
or Paul SOLLIER. 1 vol. in-8°. Bibl. de philosophie contemporaine.
Félix Alcan, édit., Paris, 1900.
Ce volume reproduit un certain nombre de leçons faites par
l'auteur pendant le semestre d'hiver 1898-99 à l'institut des Hautes-
Etudes de l'Université nouvelle de Bruxelles. '
Le plan général comporte trois parties principales. La première
est une revision des idées actuelles sur le mécanisme de la mé-
moire, nous montrant que les psychologues sont aujourd'hui
d'accord pour admettre deux parties dans la mémoire : l'une
essentiellement organique, physiologique, l'autre psychologique ;
et pour y distinguer en outre deux formes, suivant que l'attention
70 BIBLIOGRAPHIE.
intervient ou n'intervient pas, organisée ou brute quand il s'agit
d'apprendre, active ou passive, quand il s'agit de se rappeler.
Puis, l'auteur s'applique à une analyse détaillée et très précise
de l'acte mnésique à ses différents stades. La mémoire comprend
trois opérations essentielles, la conservation de certains états dans
le cerveau, leur reproduction et leur reconnaissance. Mais ces trois
opérations peuvent et doivent se subdiviser elles-mêmes. Dans la
conservation, il y a en effet deux stades : la pénétration, la fixation
de l'impression dans la substance nerveuse, et sa conservation.
Dans la reproduction il y a lieu également de considérer deux
stades : l'évocation de l'image conservée et la reproduction de
cette image. Dans la reconnaissance enfin il faut également consi-
dérer deux choses : la reconnaissance proprement dite ou report
dans le passé et la localisation dans le passé entre deux autres
souvenirs contigus.
De quelque espèce qu'ils soient, les actes mnémoniques s'accom-
plissent dans des zones corticales spéciales, autres que les centres
sensoriels. Les centres perceptifs ne sont en réalité que des centres
de réception des excitations périphériques, nécessaires à la trans-
formation qui les rend capables d'être perçues et évoquées ensuite ;
la conservation des impressions et le point de départ de leur
reproduction est autre part. Les centres d'association de Flechsig
ne président simplement qu'à la représentation d'ensemble des
images d'un mot ou d'un objet ; la véritable évocation se produit
au point même où siège la mémoire, c'est-à-dire dans le lobe
frontal.
M. Sollier termine cet exposé, qui constitue à notre avis la partie
la plus attachante, capitale de son livre, en tentant une théorie
mécanique des différents phénomènes de mémoire par comparaison
avec les phénomènes électriques. Il est évident que la conception
du cerveau comme agrégat de neurones isolés, pouvant s'influencer
réciproquement, prête à de pareilles hypothèses. Mais si ingé-
nieuses qu'elles puissent être, elles n'en restent pas moins des
hypothèses que l'auteur lui-même déclare « être loin de vouloir
pour le moment transformer en théorie et en doctrine ». J. S.
IL L'éducation rationnelle de la volonté; parle UI ? 1 : . Lévy. in-8°
de 278 pages. Paris, F. Alcan, éditeur, boulevard Saint-Ger-
main, 1899, 2° édition.
De la connaissance des lois qui régissent notre esprit, le DI' Lévy
espère tirer une méthode de traitement, la psychopathie, qui nous
permettra de réagir contre les atteintes du mal tant moral que
physique.
La pensée est un acte iL l'état naissant, elle fait en se dévelop-
pant action dynamogénique ou inhibitive. La confiance, la foi en
BIBLIOGRAPHIE. 1 1
la vertu curative d'une pratique quelconque amène souvent la
guérison. C'est cette donnée que va mettre en oeuvre' la psycho-
thérapie.
La pensée a, d'une façon constante, sa représentation et sa ré-
percussion dans notre organisme. Se donner une idée est faire de
l'autosuggestion, la recevoir d'un tiers est subir de l'hétérosugges-
tion. Dans le monde des états de conscience, comme partout, t,
c'est aux plus forts que revient la suprématie; par l'attention nous
pouvons accorder cette suprématie à un état de conscience de
notre choix. Ces constatations expliquent à elles seules le méca-
nisme de la suggestion. Nous y sommes tous soumis, nous pou-
vons donc en user pour soulager et amender notre être physique
et moral.
Par le recueillement nous augmentons notre puissance de sug-
gestibilité. Pour en faciliter la mise en action, nous ferons appel,
en cas de dépression, à une émotion stimulante, ou à une émotion
calmante, s'il y a au contraire excitation. C'est le moyen de régenter
son émotivité, et de transformer même en passion noble, un état
émotif dont l'évolution pourrait devenir dangereuse.
L'autosuggestion idéative', dont nous venons de parler, n'est pas
la seule arme dont dispose la thérapeutique psychique. Il faut y
ajouter l'autosuggestion en acte ou gymnastique psychique. Fai-
sons suivre l'idée que nous nous donnons, d'un essai de réalisa-
tion, et, par suite d'un véritable choc en retour, nous en augmen-
terons la puissance dynamogénique ou inhibitive. Qu'il s'agisse de
provoquer un acte, de secouer notre torpeur, la concentration de
l'esprit sur cette idée, facilitera la gymnastique psychique, s'il
s'agit d'une inhibition, l'oubli d'une douleur, par exemple, la dis-
traction est tout indiquée.
Notre être moral se manifeste par notre attitude, nos paroles et
nos actes. A nous de nous imposer une expression de physio-
nomie, un ton de conversation, un modus muendt conlorme à l'état
de conscience que nous voulons créer en nous. L'effort sera
pénible au début, mais peu à peu, comme les hâbleurs, nous nous
prendrons à nos propres mensonges, et ce qui a commencé par
n'être que fiction, deviendra réalité.
Les idées que nous nous suggérons nous viennent de l'ex-
térieur, pourra-t-on objecter, mais ne les faisons-nous pas nôtres
en les adaptant à notre tempérament ? Qu'on ne veuille voir dans
ces pratiques qu'une hétérosuggestion déguisée, qu'importe, il nous
suffit de constater l'existence et l'efficacité de la thérapeutique
suggestive. Une autre objection plus grave est celle qui consiste il
prétendre que la suggestion annihile la volonté. Il ne faut pas con-
fondre l'hypnotisme plus ou moins extravagant avec la sugges-
tion. L'expérience montre au contraire que cette dernière aug-
mente le pouvoir idéoréflexe.
72 BIBLIOGRAPHIE.
L'entourage au milieu duquel nous évoluons devra pouvoir
exercer sur nous une heureuse hétérosuggestion, aussi bien que
nos livres de chevet : à nous donc de faire des choix judicieux.
Si l'autosuggestion et l'hétérosuggestion ont une telle impor-
tance, c'est qu'elles correspondent aux tendances les plus natu-
relles et les plus intimes de notre être. La première témoigne de
l'étroite solidarité qui unit les différentes parties de notre être, la
seconde est une preuve manifeste de la solidarité qui unit les
hommes entre eux.
Tout fait physique ou psychique, si léger qu'il soit, laisse en
nous une empreinte, une tendance à revivre sous une excitation
moindre, à créer un commencement d'habitude. De là, la nécessité
de ne fixer dans notre organisme que de saines habitudes ; cette
déduction nous fait comprendre ce que nous devons entendre par
hygiène morale. Pour s'y conformer, il faut d'abord se connaître,
et lorsque nous aurons conscience de ce que nous sommes, nous
saurons ce que nous pouvons et ce que nous devons être. Par l'au-
tosuggestion nous aurons la volonté de réaliser le moi idéal que
nous concevons. Certes nous ne nous approcherons du type que
nous rêvons que par étapes successives et après forces luttes, mais
ces combats incessants ne feront qu'affermir notre volonté de réussir.
La faiblesse du vouloir est la maladie de l'époque. La thérapeu-
tique suggestive, se basant sur cette donnée primordiale que toute
idée contient en germe le phénomène qu'elle exprime, et qu'elle
est un commencement d'action, se propose d'apprendre à vouloir
et par conséquent à manier la suggestion. Elle fait sentir à la
volonté qu'elle ne peut rien d'elle-même, qu'elle peut tout avec
l'appui des idées qui lui auront été suggérées.
Une conclusion médicale se dégage de cette théorie : c'est qu'il
existe une médecine psychique, et que la volonté, sous l'influence
de la suggestion, pourra lutter avec succès non seulement contre
les habitudes acquises, mais contre les habitudes ataviques, contre
les tares héréditaires.
Une autre conclusion, de morale pratique, celle-là, découle
aussi de l'étude que nous venons de faire. C'est que, en apprenant
à manier notre volonté, nous apprenons à gouverner notre ma-
nière de réagir, etpar conséquent à tenir éloignéesdelaconscience
les émotions et les sensations pénibles, à tirer au contraire des
impressions agréables tout ce qu'elles peuvent nous donner de
bonheur et de joie. Et qu'on ne croie pas qu'on arrive ainsi à
l'égoïsme absolu ; au contraire, le fait d'aspirer à repousser une
douleur, nous entraîne à rejeter tout ce qui est mal et chez nous
et chez les autres et c'est le cas de répéter la parole de Sénèque :
je suis devenu un ami de moi-même, et un tel homme, sois-en sûr, est
l'ami de tous les hommes. Cet effort continuel contre le mal, nous
fait aimer le Bien et aspirer au Mieux.
BIBLIOGRAPHIE. 73 e
L'auteur nous cite un grand nombre d'observations où nous
voyons sinon disparaître toujours, au moins s'atténuer souvent par
la suggestion intime ou extérieure, des malaises, des douleurs,
même des parésies et des paralysies ayant eu comme générateur
l'élément psychique, ou tout au moins singulièrement exagérées
par la neurasthénie du sujet. Des troubles oculaires, circulatoires,
respiratoires, digestifs, sexuels, ont cédé à la psychothérapie, alors
qu'ils s'étaient montrés rebelles à toute médication.
En résumé, si la psychothérapie ne peut faire disparaitre la
lésion organique, lorsqu'elle existe, elle peut restaurer la fonction
et par cette restauration fonctionnelle, annihiler la puissance
funeste de la lésion. Elle n'a pas la prétention de remplacer toutes
les médications, mais elle peut devenir pour elles une alliée
sérieuse et' il n'est pas de cas où elle ne puisse trouver l'occasion
de s'employer utilement.
Dans son ouvrage, le Dr Lévy n'a pas, à notre avis, exagéré la
puissance de la suggestion telle qu'il l'entend ; mais il lui a peut-
être donné un sens trop étendu. A ce compte, l'éducateur fait de
la suggestion, Socrate en usait auprès de ses disciples, le médecin
l'a toujours employée quand il a essayé de remonter le moral de
son malade et chacun de nous en fait dans la discussion, et dans
le moindre conseil donné à un ami.
Le traitement moral des aliénés n'est pas autre chose que de la
suggestion, et Leuret a même prononcé le mot.
Le livre du D' Lévy n'en est pas moins intéressant à lire, et utile
à méditer, surtout à une époque comme la nôtre, où les caractères
ont une tendance à faiblir, où l'indifférence, le doute de soi-
même et le découragement paralysent si souvent nos efforts, où
un état névrosique en un mot préside à toutes les manifestations
de notre activité.
J. Bort : ,s,
Professeur : 1 l'insllluL llIédico-pédagogitlllC.
III. Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie
et l'idiotie; par Bourneville, t. XIX, Paris, in-8, xcu-236 pages,
avec 13 fig. et 13 planches, 1899. Progrès médical et F. Alcan, édi-
teurs.
Ce sont les travaux du chef de la 4° section du quartier des alié-
nés de Bicètre pendant l'année 1898, avec la collaboration de
MM. Cestan, Chapotin, Katz, Noir, Philippe, Sébilleau et Boyer.
Nous y trouvons d'abord l'histoire du service proprement dit, qui
comprend : a) L'école et les exercices des enfants; b) L'ensei-
gnement professionnel ; c) Le mouvement de la population
illustré du tableau des lésions trouvées chez les décédés, en face
des diagnostics ; un second tableau indique les sorties et leurs
ï Il BIBLIOGRAPHIE.
causes. Le 1er janvier 1898, il y avait 459 enfants : le 31 décembre
1898, il y en avait 462. Puis, c'est l'histoire de la fondation Vallée
sur le même plan. M. Bourneville consacre un chapitre spécial à
l'assistance des idiots : création de classes annexées ou non aux
écoles primaires pour les enfants arriérés : documents suisses,
anglais, belges. Il formule les indications relatives à l'ussistancc et
au traitement médico-pédagogique des enfants anormaux : intervenir
le plus tôt possible. Dans une note sur la criminalité des enfants
et des adolescents, il propose, comme prophylaxie, de maintenir à
l'école le plus longtemps possible ceux que les parents ne peuvent
surveiller, en les intéressant par les leçons de choses. Telle est la
première partie.
La seconde partie, toute à la clinique, à la thérapeutique, à
l'anatomie pathologique, se compose de mémoires sur la chorée,
guérie par le bromure de camphre, l'idiotie hydrocéphalique,
l'athétose double, avec mouvements convulsifs cloniques de la
face simulant les tics convulsifs, l'idiotie légère symptomatique de
méningite chronique, l'inégalité de poids des hémisphères céré-
braux, l'état du faisceau pyramidal dans 4 cas de contracture
spasmodique infantile, un cas de guérisonde manie avec nympho-
manie, chez une adolescente, l'instabilité mentale alcoolique et
héréditaire, celle-ci guérie par le traitement médico-pédagogique.
l'idiotie complète symptomatique d'hydrocéphalie ventriculaire
et l'idiotie par sclérose tubéreuse.
Mentionnons à part une complète étude sur une épidémie de
fièvre typhoïde : 21 cas, dont 10 enfants idiots. Et n'oublions pas
l'action de l'alcoolisme sur la production de l'idiotie et de l'épi-
lepsie. Sur 1773 idiots, épileptiques imbéciles ou hystériques, en-
trés du 1 cr janvier 1879 au ICI' janvier 1898, on a trouvé que les
pères de 667 enfants faisaient des excès de boissons : 154 avaient
été conçus pendant l'ivresse.
Une liste des travaux scientifiques faits dans le service termine
le volume, orné de 13 figures et de XIII planches.
P. KERAYAL.
IV. Studies from the Yale Psychological La6orcatoy, edited by
Edward W. Scripture, director of the Psychological Laboratory,
vol. VI, 1898.
Ce volume d'une centaine de pages renferme les mémoires sui-
vants : A color illusion, par G. Trumbull Ladd : Ifeseccrches in
cross-education (éducation croisée, écriture en miroir, etc.), par
Walter W. Davis; Researches in praelice and habit, par Smylhe
Johnson ; enfin Notes sur l'enseignement du laboratoire. Une planche
coloriée et 14 figures dans le texte.
VARIA. ï5
V. Du mariage des épileptiques; par A. fièvre, in-8. ('Ih. Pari*. 1899,
Jouve et Boyer.)
Si ce travail documenté montre le vague et la diversité de toutes
les opinions émises à ce sujet, il montre aussi que de ce concert
émane surtout une idée défavorable au mariage des épileptiques.
L'auteur dissocie d'abord la question pour arriver à une synthèse
finale. Dans l'influence du mariage sur le malade lui-même, il
arrive à voir que les rapports sexuels lui sont plutôt nuisibles
quel que soit son sexe ; plus nuisible toujours que la continence
absolue ; nuisible aussi la grossesse dans la majorité de cas ; nui-
sible encore l'accouchement. Les faits où le contraire a pu être
observé sont une rarissime exception et sont douteux.
Dans la famille le conjoint épileptique est généralement un objet
de gêne et souvent une source de misère ; il peut quelquefois rem-
plir ses droits civils, mais nul ne peut affirmer avant son mariage
qu'il en sera capable, et sa capacité peut fléchir d'un jour à l'autre.
La descendance de l'épileptique est dans l'immense majorité des
cas lourdement et souvent similairement tarée. Légalement rien
ne s'oppose à ce mariage au moins de nos jours et chez nous, où
l'épilepsie n'est même pas une cause de divorce.
Le médecin consulté doit l'empêcher, en tout cas ne jamais le
conseiller et lutter de toutes ses forces contre le préjugé répandu u
surtout pour les femmes que le mariage est utile au malade.
Quand par exception on ne peut pas le déconseiller, il faut pré-
venir le malade de toutes les conséquense funestes qui peuvent en
résulter pour lui, pour sa nouvelle famille et pour sa descendance.
Ce travail s'appuie principalement sur des observations commu-
niquées par M. Bourneville à l'auteur et dont il a bien su tirer
parti. F. BOISS1L : R.
VARIA.
Concours pour les places DE médecins-adjoints
des asiles d'aliénés.
Le concours pour l'admission à l'emploi de médecin-adjoint des
asiles publics d'aliénés de la Région de Paris, s'est terminé le
samedi 9 juin. Dans la séance publique où ont été proclamés les
résultats, M. le 1.)" Albert Hegnard, inspecteur général des Établis-
sements de bienfaisance, président du jury, a déclaré que :
76 G VARIA.
« Vu la supériorité éclatante absolument exceptionnelle du
présent concours ; prenant en considération le voeu unanime et
pressant des membres du jury; vu la nécessité de maintenir à ce
concours régional le privilège de la plus rigoureuse équité ;
considérant que tous les candidats ont fait preuve de qualités
remarquables, au double point de vue théorique et pratique, il
croyait devoir présenter à M. le Président du Conseil, Ministre de
l'Intérieur, pour être nommés à l'emploi de médecin-adjoint des
Asiles de la Région de Paris, au sur et à mesure des vacances qui
se produiront, les candidats suivants, tous reconnus admissibles
par le jury, savoir :
En première ligne, ex-sequo : MM. Manheimer et Truelle (84 points) ;
en deuxième ligne, M. Dide (81) ; en troisième ligne, M. Pochon (78);
en quatrième ligne, ex-xqlco : MM. Castin, Marchand, \\-ah (76) ;
en cinquième ligne, M. Ameline (72) ; la question écrite était : Le
lobe frontal.
Rappelons que le jury se composait, outre le Président délégué
par le Ministre, de M. le Pr Joffroy, MM. les Drs Magnan, Vallon et
Blin ; Homery, suppléant.
Le concours de la région de Lille, brillant aussi, s'est terminé
par la nomination de : en première ligne, M. Raviart ; en deuxième
ligne, M. Brunet; en troisième ligne, cx-xruo : MM. Rodiet et
Ricoux ; la question écrite était : Portion cervicale du grand sympa-
thique.
Région de l'Est (Lyon, MM. Jacquin et Bonne) ; Région du
Midi (Montpellier, MM. Ricue et Pélissier). M. de Fursac, chef de
clinique des maladies mentales de la Faculté de médecine de Paris,
est inscrit sur la liste des admissibles, sans concours, en vertu de
l'art. 8 de l'arrêté du 7 mars 1900.
Considérations neurologiques sur l'éducation
dans LES ÉCOLES publiques.
Grâce aux recherches anthropométriques, il est unanimement
reconnu aujourd'hui que l'état mental des enfants est en relation
directe avec leur poids, leur taille, leurs mensurations physiques
. et qu'il existe une base physique pour la précocité comme pour
l'arriération intellectuelle. En conséquence, il serait nécessaire
d'établir des mesures définies, des étalons du poids, de la taille,
des mensurations pour chaque âge ; et l'enfant, suivant qu'il serait
au-dessus ou au-dessous de cette mesure moyenne devrait être
traité en conséquence. (Jour, ofnervous and ment. disCltse, fév. 1899.)
Idiots : traitement T }I É D 1 C 0 - P É DA GOG 1 QUE,
Il y a quelques jours nous avons vu un enfant idiot de sept à
huit ans, dont l'état est très perfectible. Et comme nous expri-
faits DIVERS. 77
niions à sa mère le regret qu'on ne se soit pas occupé plus tôt de
son traitement et de son éducation elle nous répondit : Je vou-
lais venir il y a deux ans, mais notre médecin m'a dit : Attendez,
cela peut encore s'améliorer. » Notre confrère à commis une
erreur. On doit traiter ces enfants dès que l'idiotie est reconnue et
au plus tard à partir de deux ans. C'est la limite d'âge fixée depuis
bien des années à Bicêtre, et que nous avons adoptée à l'Institut
médico-pédagogique. On ne dresse plus un vieux cheval, on ne
dirige pas un arbre ou un arbuste déjà vieux. Après avoir
déclaré que Dupl... a été « repris d'un accès de folie », le jour-
naliste ajoute peine inutile que Dupl... « parait irrespon-
sable ».
Supplice DE Morin.
(l'r l2CtrS 1663.)
Simon Morin était un visionnaire qui prétendait que le Christ
s'était incorporé en lui. Cette fantaisie bien innocente avait le tort
de revêtir un caractère religieux. Il n'en fallait pas plus à cette
époque pour être convaincu d'hérésie, et Morin, qui n'était qu'un
malheureux atteint de folie, fut condamné à être brûlé vif.
« Le 14 du mois de mars, raconte Colletet, Simon Morin, par
arrêt de la cour du Parlement, après avoir fait amende honorable,
nud en chemise, la corde au col et la torche au poing, devant la
.principale porte de l'église Notre-Dame, où il fut conduit dans un
tombereau, fut ensuite mené en place de Grève et là attaché à un
poteau pour y être brûlé vif avec son livre intitulé : Pensées de
Morin, ensemble tous ses écrits et son procès, puis les cendres
jetées au vent pour punition d'avoir pris la qualité de fils de Dieu
et ses complices condamnés d'assister à son exécution, puis d'être
attachés à la chaîne pour y servir le roi à perpétuité. » (Le Radi-
cal, 15 mars 1900.)
FAITS DIVERS.
Asiles d'aliénés. Nominations et promotions : M. le Dr 13RICUC,
médecin-adjoint à Fains (Meuse) nommé en la même qualité à
Saint-Venant (Pas-de-Calais); M. le Dr Croustel, médecin-adjoint
à Rennes, nommé en la même qualité à Quimper ; M. le D'' ÏER-
rade, médecin-adjoint à Lafand (Charente-Inférieure) nommé en
la même qualité à Prémontré (Aisne); M. le Dr Papillon, mé-
78 ii FAITS DIVERS.
decin-adjoint à Mont-de-Sergues, promu à la Il classe du cadre ; : \1. le W BELLETI\UIJ, directeur-médecin, à l'ierrefeu, promu à la
reclasse du cadre; M. le D1' Lent, médecin-adjoint de Basrens,
promu à la classe exceptionnelle ; M. le D'' 'l'AGUET, médecin
en chef à l'asile de Vaucluse, est nommé en la même qualité an
Je asile(Maison-Blanche); - \I. le D' VIGOUI\OUX, médecin en chef à
Dun-sur-Auron (Cher), est nommé en la même qualité il l'asile de
Vaucluse.
LE drame DE SAlNT-J¡¡ : .IN-DE-DlEu. Un nouveau drame vient de
se dérouler ¡[l'asile d'aliénés de Saint-Jean-de-Dieu de Lyon.
Un nommé Chouzy, manoeuvre, pour se venger d'avoir été main-
tenu quelques jours après sa guérison dans l'asile de Saint-Jean-
de-Dieu où il avait été enfermé, il y a une quinzaine d'années, a
frappé de deux coups de couteau à la tête et à l'épaule le portier
de l'asile. L'inculpé immédiatement appréhendé par la police a
déclaré qu'il n'avait aucune inimitié particulière pour le frère
portier, mais qu'ayant souffert des agissements des frères en géné-
ral, il avait frappé le premier qu'il avait trouvé sous sa main.
(Le Journal du 29 mars 1900.)
Suicide d'enfant. Un désespéré de douze ans. Le mécanicien
du train 207, qui se dirigeait sur Soissons, a aperçu près de la
Courneuve un corps étendu sur la voie. On fit des recherches et
on trouva le cadavre d'un enfant d'une douzaine d'années dont la
tête était détachée du tronc.
L'enquête a établi que le malheureux était un nommé Alfred
Biziaux, dont les parents sont domiciliés 70, rue du Moutier, il
Aubervilliers. Le jeune Alfred était employé dans une tréfilerie de
la Courneuve; il apprit samedi qu'il était renvoyé. Ne voulant pas
avouer qu'il n'avait plus de travail, il alla s'étendre sur la voie
du chemin de fer, plaçant son cou sur l'un des rails, mais rabais-
sant sa casquette sur ses yeux afin de ne pas voir venir le train.
L'express le décapita. (L'Aurore, 20 avril 1900).
Tentative de suicide d'une adolescente. La jeune Juliette lia-
baut, quartorze ans, ouvrière de fabrique à Orbec, tout en travaillant,
tient le ménage de son père qui est veuf et à la mauvaise humeur
duquel elle est souvent en butte. Après une scène, un soir, Juliette
prise de découragement, essaya de s'étrangler avec un ruban serré
autour de son cou. Son frère l'entendant râler, accourut à son se-
cours. Il n'était que temps, car le visage de la pauvre enfant était
déjà congestionné. (Le Bonhomme Normand, 3 mai.)
Contre L'ALCOOLISME. - « Dans les réunions publiques où je me
rends depuis deux ans, j'éprouve une horreur insurmontable, au-
tant de défiance que de dégoût pour les braillards qui débitent
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. 79
des boniments violents, avec un souffle empesté de vitriol. Ils ont
tout de snite un air d'agents provocateurs. Leurs camarades
doivent les tenir pour dangereux, les écarter de l'oeuvre commune.
J'ai constaté avec joie que des ouvriers entreprennent eux-mêmes
la croisade contre l'alcool. On ne fait pas la Révolution avec des
ivrognes. On fait la Révolution avec des hommes de sang-froid,
maîtres de leur raison et de leur volonté. Pour s'affranchir de ses
oppresseurs, il faut que le peuple s'affranchisse de l'alcool. (L'Au-
2-oi-e du 6 mai.)
On ne saurait trop applaudir à cette énergique protestation
contre les ivrognes et ces excellents conseils.
Mort par l'alcool. Un individu de Saint-Cyr-du-Bailleul
(Manche), ayant fait boire de l'eau-de-vie au jeune Chaponais,
âgé de huit ans et demi, le pauvre petit en est mort. (Le Bon-
homme normand, 10 mai.)
On ne saurait trop faire connaitre les actes stupides de ce genre.
Les individus qui font boire des enfants sont malheureusement
très nombreux. Aussi dans les conférences populaires est-il indis-
pensable de signaler les dangers d'une pratique aussi dangereuse.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
Archives of zzeurology from the pathological laboratory of the London
County Asylums. Claybury, Essex. Edited by F. Wall : er Mott. Publication
annuelle. Volume in-8°. Prix : 20 francs. London, 1900.
Librairie King and Son.
Asylnm for idiots and Imbéciles (Eastern Coiiiities) residing in the
countics ot Essex, Suffulk, Norfolk and Cambridge. Lorty-Grst annual
report for the ear ending december 31 st. 1899, Volume in-8° de
73 pages, avec 3 planches hors texte. Colchester, 1900. April,
.1. Turner, secretary.
il (D.). - Qualclte considerazione sulla misura délia correrzli
indolle e su varii apparecchi d'induzione acloperali in medicina.
Brochure in-8° de 8 pages. Nocera Inferiare, 1900. Tipografia del
llamcomio.
h'orty-sevenlh anxtuccl report of lhe Penusylvania Training School foi-
/'uGle-mincled chilclren. Brochure in-8° de 31 pages, avec 5 planches
hors texte. Pbiladelphia, 1899. Burk and Mac Fetridge O.
GUÉRIN (J.).-Les différentes manifestations de la pensée. Volume
in-8» de 231 pages. Prix : 5 francs. Paris, 1899. Librairie Alcan.
Massalongo (R.). Epatismo e xaevropalia. Brochure in-8- de
12 pages. Hôpital de Verone, 1900. Chez l'auteur.
80 AVIS A NOS ABONNÉS.
Ptr,r.z (A.). Eu : weilerer Beilrag zur Lelrz·e von der Jlicrocepltalre
nebsl zus ammenfassendem Bel'ichte iiber die El'(olge der C1'Clniotomie
bei der Mikl'oceptzalie. Brochure in-S° de 56 pages, avec 8 ligures et
une planche hors texte. Wien, 1899. F. Deuticke.
POLL1CK IB.). Préparation el coloration du système nerveux. Traduit
de l'allemantl, parNicolaïdi, par Launois. - Ilrix : 5 francs. - l'arts, 1900.
z : .7 Librairie Carré et Naud. -
Raymond. Clinique des maladies du système nerveux (hospice de la
Salpêtrière, 1897-1898). Volume in-8° de O10 pages, avec bG figures
dans le texte et 2 planches en chromolülroraplties hors texte.- Prix :
15 francs. - Paris, 1900. Librairie O. Doni.
RIEGER (C.). Die castration in rechtlicher, socialer und vilaler
Ilinsicht. Volume in-S° de xxxv-116 pages. Prix : 3 fr. 75. Iéna,
1900. Verlan G. Fischer.
Roubinovitcii. La palhologie mentale et la fin du XIX' siècle. Confé-
rence faite à la Salpêtrière le 21 janvier 1900. - Brochure in-8" de 38 pages.
Paris, 1900. Imprimerie J. Gainche.
' AVIS A NOS ABONNÉS.- L'échéance du le'' JUILLET
étant l'une des plus importantes de l'année, nous prions
instamment nos souscripteurs dont l'abonnement cesse à
cette date, de nous envoyer le plus tôt possible le montant
de leur renouvellement. Ils pourront nous adresser ce
montant par l'intermédiaire du bureau de poste de leur
localité, qui leur remettra un reçu de la somme versée.
Nous prenons à notre charge les frais de 3 p. 100 prélevés
par la poste, et nos abonnés n'ont rien à payer en sus du
prix de leur renouvellement.
Nous leur rappelons que, à moins d'avis contraire, la
quittance de réabonnement leur sera présentée, aug-
mentée des frais de recouvrement, à partir du
15 Juillet. Nous les engageons donc à nous envoyer DE
SUITE leur renouvellement par un mandat-poste.
. Afin d'éviter toute erreur, nous prions également nos
abonnés de joindre à leur lettre de réabonnement et à toutes
leurs réclamations la BANDE de leur journal.
- Nous rappelons à nos lecteurs que l'ab *oiii2e»îeiît collec-
tif des Archives de Neurologie et du Progrès Médical
est réduit à 30 francs pour la France et l'Étranger.
Le rédacteur-gérant : BOURNEVILLE.
Évreux, Cli. IIekissby, imp. 7-1900.
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7-
Vol. X. Août 1900. N° 56.
ARCHIVES DE NEUROLOGIE
THÉRAPEUTIQUE.
Le traitement de l'épilepsie par la méthode
1 de Flechsig;
PAR
J. SÉGLAS, 6T l HERTZ,
Médecin de l'hospice de 131cètre. Interne de» hôpitaux.
Parmi les méthodes nombreuses de traitement de l'épilep-
sie, il en est Irnis surlout qui,dans les dernières années, ont
suscité l'attention. Ce sont l'intervention chirurgicale par la
sympathicectomie, et les cures médicales de Pechterew et de
Flechsig. Nous ne nous occuperons ici que du traitement par
la méthode de Flechsig.
Le premier travail de rlechsiâ date de 18911. La méthode
de traitement qu'il y préconise consiste à faire précéder l'ad-
minbtration du bromure de potassium par celle de l'opium,
à des doses progressives et rapidement élevées.
L'opium, sous forme d'extrait, est ainsi administré au
début, à la dose de C6,C` à à 0-l',05, prise en deux ou trois
fois. Cette dose est augmentée ensuite progressivement, de
manière à arriver au huut de dix à douze jours il la dose de
1 gramme ou lsr,2o par jour. Cette dernière dose est conti-
nuée pendant six semaines.
A ce moment, l'opium est brusquement interrompu et
remplacé par le bromure de potassium, à la dose de 7 gr.
1 Flechsig. Neurolog, cenlralbl., 1893, p. 229
Archives, 2' série, t. X. 6
82 THÉRAPEUTIQUE.
par jour. Cette dose de bromure est continuée pendant deux
mois, puis réduite progressivement à 2 grammes par jour.
quantité moyenne et variable suivant les cas.
Par l'administration préalable de l'opium, Flechsig prétend
diminuer l'excitabilité du cerveau en abaissant sa tempéra-
ture, en ralentissant les échanges, en rendant moins active la
circulation cérébrale, de façon à permettre l'apport d'une
quantité plus considérable de bromure. De plus, l'opium, en
modifiant les conditions de l'absorption intestinale, pourrait
favoriser plus tard l'absorption du bromure.
L'administration de l'opium à doses aussi élevées n'était
pas sans amener des accidents quelquefois sérieux : vomis-
sements, constipation opiniâtre, crises diarrhéiques, hyper-
thermie, hallucinations, délire. Ces accidents seraient sur-
tout à craindre au moment de la suppression brusque de
l'opium. Aussi Flechsig recommande-t-il, pendant la cure,
une surveillance incessante, le repos au lit, la diète, les lave-
ments fréquemment répétés, et en cas d'intolérance, la sup-
pression de l'opium par doses progressivement décrois-
santes.
En usant de ces précautions, il aurait obtenu de bons résul-
tats, surtout chez les jeunes gens, beaucoup moins dans le
petit mal que dans le grand. Ce traitement ne pourrait être
appliqué qu'avec la plus extrême prudence aux malades
affaiblis physiquement, atteints d'affections cérébrales en
foyer ou présentant de la tendance à l'état de mal.
Flechsig et ses élèves' sont revenus sur ce sujet dans dif-
férentes publications, en insistant particulièrement sur les
bons résultats du traitement à l'égard des paroxysmes con-
vulsifs et des accidents délirants de leurs malades.
En même temps, de plusieurs côtés, surtout en Allemagne
et en Italie, on expérimentait la méthode de Flecksig. Comme
on pouvait s'y attendre, les opinions exprimées par les
auteurs sont très variables. Au nombre des partisans de la
méthode de Flechsig on peut citer Marro 2, Stein 3 qui se
montrent très favorables. Ce dernier rapporte 6 cas où il
1 Flechsig. Neur. centr., 1897. Salzburg (thèse de Leipsig, 1893). Flech-
sig et Salzburg. Ueber die Behandlung der Epilepsie mit opium Groyn.
LeipSiâ, 1894.
* Marro. Gio1'n. della R. Acad. di Torino. 1895, fasc. 2.
' Stein. Neurol. central. 1893.
TRAITEMENT DE l'ÉPILEPSIE. 83
y eut suppression totale des accès; mais il est à remarquer
que ces cas ne furent suivis que pendant deux mois, temps
bien insuffisant pour juger du résultat définitif.
Bennecke et Warda2 apportent les résultats . observés
dans la clinique de Binswanger. Le premier, sur 15 cas, a
eu 15 améliorations portant à la fois sur les crises et les
troubles psychiques ; et sur ce nombre, il y eut deux fois
suppression totale des crises pendant sept mois.
Le second, sur 45 cas, dont 11 sont la continuation des
précédents, a eu 55 p. 100 d'améliorations et 2,5 p. 100
d'aggravations ; les troubles psychiques n'ont pas été influen-
cés. Il conseille de prolonger l'emploi du bromure le plus
longtemps possible et pense que les résultats sont d'autant
meilleurs que la dose d'opium tolérée dans la première partie
du traitement a été plus élevée.
- Crisafulli3 a obtenu par ce procédé des résultats supérieurs
à ceux de la cure bromurée simple. Sans action sur le petit
mal, la méthode de Flechsig lui paraît surtout indiquée
dans le cas d'accès très violents. Il signale aussi l'améliora-
tion des accidents psychiques, surtout il forme mélancolique.
. Aurelio Lui,, sur 3 cas, a obtenu une fois la suppression
totale des accès pendant quatre mois; dans les 2 autres cas,
une diminution notable de leur nombre et de leur intensité ;
aucun effet sur les troubles psychiques.
Ces différents auteurs signalent bien quelques accidents au
cours du traitement, mais jamais sérieux. Ils ne constituent
pas, pour eux, des contre-indications. En pareil cas, Aure-
lio Lui conseille simplement de suspendre le traitement pen-
dant une semaine pour le reprendre ensuite. Avec cette pra-
tique, il a pu continuer le traitement sans nouveaux acci-
dents.
En regard des partisans de la méthode de Flechsig, il y a
ses adversaires. Sommer l'a expérimentée sans résultats ;
Froenkel n'a obtenu que 1 succès sur 10 cas ; Boehm n'a rien
obtenu le plus souvent '; Pollitz repousse absolument cette
1 Bennecke. Epilepsie Behaiidliiiig. Iéna, 1894.
- , Warda. Monatschrift sur Psych. und New., 1897.
3 Clisafuili. Manicomio 7zodet-uo, 1897, fasc. J.
4 Aurelio Lui. Riv. sp. di {l'en., IS9a.
s Boehm. Allg. Z. f. Psych., 1896.
8 Pollitz. Allg. Z. f. Psych., 1896.
84 THÉRAPEUTIQUE.
méthode en raison de la recrudescence des accès, des acci-
dents d'intoxication quelquefois mortels. L;ratz ' n'a obtenu
que des améliorations passagères suivies, au bout de quelques
mois, de séries d'attaques et d'un retour à l'état antérieur. Il a
noté fréquemment des accidents graves d'intoxication au
cours de l'administration de l'opium et de la recrudescence
des accès. Il conseille en pareil casd'interrompre l'opium et de
donner immédiatement le bromure. Au moment de la cessa-
sion de l'opium, il a eu les accidents les plus graves, quel-
quefois même des décès. Sur ° ? 00 cas parveuus à sa connais-
sance, il a relevé 8 décès au cours du traitement.
Ce : are Rossi', dans une série d'expériences sur l'excitabi-
lité corticale du chien après trépanation, arrive à ces
conclusions que la méthode de Flechsig diminue énormé-
ment l'excitabilité corticale; que le bromure seul produit
absolument les mêmes effets, que les expériences faites pen-
dant la période d'administration de l'opium montrent que
celte substance diminue très peu l'excitabilité corticale.
Malgré ces données contradictoires, enlace des résultats
favorables obtenus par quelques auteurs, nous avons soumis
à la cure de Flechsig un certain nombre (22) des épilep-
tiques de notre service de Dicètre.
Une première série (juin 1898) comprenait 12 malades, tous
adultes, de bonne sauté physique, présentant à la fois des
vertiges et de grands accès sans état de mal. Ces malades
ont pris le premier jour 0 ? r.03 d'extrait d'opium ; le len-
demain, Ox, l0 ; puis chaque jour C ? 10 en plus, de manière
à arriver le douzième jour à la dose de 1 gramme. Cette
dose n'a jamais été dépassée. L'opium était donné en trois
fois dans la journée.
Sur ces 12 malades, 1 a refusé de continuer au bout de trois
jours, à 0,20, sans avoir eu, d'ailleurs le moindre accident.
5 autres ont dû cesser le traitement : 1 à 0,SO d'extrait
d'opium, 1 0,60, 1 à 0,70, 1 à 0,80, en raison d'accidents
d'intoxication.
Ces accidents consistèrent en vomissements, diarrhées
abondantes, albuminurie, oligurie, ralentissement considé-
rable de la respiration, perte de poids rapide, myosis, trou-
1 Bratz. Allg. Z. f. Psych., 1897.
'C. Rosi. Rii;. sp. di {,'en., 1838.
TRAITEMENT DE L'ÉPILEPSIE.
85
bles psychiques graves, somnolence constante, hébétude,
délire.
En même temps, 3 de ces malades avaient des accès et
vertiges nombreux, et, après la cessation progressive de
l'opium, 2 ont eu un état de mal.
Les 6 autres ont subi tout le traitement en ne présentant
que des accidents très légers et seulement pendant la période
progressive de la cure d'opium. Ils n'ont eu aucun accident
au moment de la cessation brusque de l'opium et de son
remplacement parle bromure à la dose de 7 grammes, qui
fut diminuée par la suite, à intervalles variables, suivant les
indications de Flechsig. Ces 6 malades ont été suivis pendant
un an, à dater du début du traitement. 3 d'entre eux n'ont
pas été modifiés. Pour les 3 autres, les tableaux montreront
la marche des accès avant et après le traitement.
86 THÉRAPEUTIQUE.
lades P... et G... Il est à remarquer que, notamment chez le
malade P... elle porte surtout sur les premiers mois du trai-
tement.
Il est à noter aussi chez ces deux malades que si le chiffre
total annuel des vertiges n'a pas été sensiblement abaissé,
ces accidents vertigineux semblent cependant avoir été heu-
reusement influencés par le traitement dans les premiers
mois. Le fait est surtout évident pour le malade G...
Quant aux troubles psychiques nous devons dire que ces
malades, plus ou moins idiots ou imbéciles, ne présentaient
pas d'accidents psychiques de nature vraiment comitiale,
susceptibles d'èlre modifiés par un traitement quelconque.
En 1899, l'un de nous a soumis à la cure de Flechsig une
nouvelle série de 10 malades. L'un d'eux, arrivé à 0,40 d'ex-
trait d'opium, a refusé de continuer le traitement, bien que
n'ayant eu aucun accident d'intoxication. Un autre, arrivé à
Os ? 60 d'opium, est mort, dans une nuit, à la suite d'une
série d'attaques, sans avoir présenté auparavant aucun phé-
nomène d'intoxication. Il avait, d'ailleurs, fréquemment, au-
paravant des attaques en série. Un troisième malade, arrivé
à 0,70 d'extrait d'opium, commença à présenter des accidents
légers qui, le lendemain, avec la dose de 0,80, s'aggravèrent
d'nne façon véritablement effrayante et mirent un instant
sa vie en danger (somnolence, confusion mentale avec para-
phasie, myosis, constipation, anurie, ralentissement considé-
rable de la respiration). Ces accidents perdirent tout caractère
sérieux en quarante-huit heures avec la suppression de
l'opium aidée de l'administration de lactose, de lavements
purgatifs, de café, et se dissipèrent ensuite en quelques jours.
Les 7 autres malades qui étaient arrivés à ce moment à la
dose de 0,80 commencèrent à présenter en même temps
des phénomènes d'intoxication assez sérieux : myosis, olygu-
rie avec albuminurie légère, diarrhée abondante, respiration
ralentie, hébétude, somnolence. Craignant que ces phéno-
mènes ne vinssent encore à s'aggraver comme chez le précé-
dent malade, nous n'avons pas osé augmenter la dose
d'opium, ni même maintenir la dose actuelle et nous avons
jugé plus prudent d'interrompre le traitement.
Ainsi, chez tous les malades de cette seconde série, l'admi-
nistration de l'opium provoqua des symptômes d'intoxica-
tion plus ou moins graves, cependant toujours sérieux. Nous
CURE DE MALADIES DE NERFS. 87
noterons cette particularité que chez l'un d'entre eux qui se
trouvait en période d'accès répétés avec excitation délirante
lorsqu'il fut soumis au traitement, on vit ces différentes ma-
nifestations comitiales disparaître très rapidement sous l'in-
fluence de l'opium.
En résumé, de l'ensemble de nos recherches personnelles
nous croyons pouvoir conclure que le traitement de Flechsig
n'est supporté que par un nombre très restreint de malades.
Son administration nécessite des soins et une surveillance
tels qu'il est indispensable de placer d'abord l'épileptique
dans un milieu spécial; encore reste-t-elle toujours difficile.
souvent même dangereuse. Ces contre-indications sont loin
d'être compensées par les bénéfices, somme toute assez mi-
nimes, qu'on peut en retirer et qui ne nous paraissent pas
supérieurs à ceux de la cure bromurée simple.
Méthode d'exercices et de mouvements proposée
comme cure de maladies de nerfs ;
Par le D' O. TIIILO, de Riga (Russie).
Nous ne pouvons atteindre à aucune agilité sans exercices ;
c'est même avec peine, en nous y exerçant petit à petit, que
vous avons acquis la plupart de nos mouvements journaliers,
par exemple la démarche droite, les différentes espèces de
course, de saut, la natalion. La perfection à laquelle nous
pouvons parvenir dans ces mouvements dépend toujours de
la méthode et des exercices auxquels nous nous sommes sou-
mis ; c'est ce que nous observons le plus clairement en com-
parant la marche élastique d'un soldat hien discipliné à la
lourde démarche d'un paysan ou même aux pas inégaux et
hésitants d'un homme voûté par une vie trop sédentaire. On
peut donc affirmer sans exagération que nous devons faire
la conquête de ces facultés héritées avant de les posséder
véritablement; nous ajouterons même que nous ne conser-
vons l'usage de ces facultés que par un exercice constant ; de
même ne pourrons-nous les recouvrer en cas de perte qu'en
88 THÉRAPEUTIQUE.
nous astreignant de nouveau à de fréquents exercices. Ceci
sera à plus forte raison le cas quand celte perte ne provien-
dra pas seulement d'un manque d'usage, mais sera la consé-
quence d'une maladie affaiblissante; l'essai, par exemple, de
guérir par le repos, les bains ou les médicaments et le mas-
sage, sans avoir recours à des exercices, ces contractions de
la main que nous appelons chez nous crampe de plume on
crampe de piano est absolument inutile. C'est pourquoi il
nous parait surprenant que la médecine se soit bornée à trai-
ter ces maladies elles-mêmes et n'ait pas essayé, par un plan
d'exercices méthodiques, de ramener les capacités de mouve-
ment à leur ancien degré de perfection. Il y a peu de méde-
cins, par exemple, qui essaient par un système d'exercices du
mouvements, de remettre sur pieds un malade quiaurail perdu
la possibilité démarcher, par suite d'une maladie nerveuse,
rhumatismale ou autre ; clans ces derniers temps, cependant,
quelques spécialistes de névrologie se sont acquis le grand
mérite de réveiller chez leur malade le désir de marcher et
cela par leur influence morale et l'effet de leurs continuelles
persuasions. Néanmoins, l'emploi méthodique d'un système
de mouvements pour exercer notamment les groupes de
muscles dont la faiblesse rend la marche impossible, est une
chose que nous rencontrons rarement.
Que d'hystériques, que de malades après des inflammations
articulaires, ne deviennent, en restant constamment ali-
tés à charge à eux-mêmes et aux autres, que par lasimple
raison qu'ils ne savent pas apprendre de nouveau à marcher
et qu'ils ont perdu le dernier vestige de leur énergie dès le
premier effort, infructueux et désespéré de se remettre
sur pied. Que d'enfants perclus ne sont si difficiles à faire
bouger que parce qu'on ne les a pas suffisamment soutenus
dans leurs essais de marcher ! Or, c'est surlout chez les en-
fants qu'on peut arriver à de brillants résultats avec de la
méthode et des exercices ; c'est ce que démontrent si victo-
pieusement les mains dcs enfants aveugles. Ici, nombre de
collègues nous objecteront sans doute que de semblables
exercices exigent infiniment de patience et prennent beau-
coup de temps et que le médecin a déjà, sans cela, souvent à
travailler au-dessus de ses forces ; et nous trouvons cette
objection absolument valable; un médecin ne peut entre-
prendre d'employer comme remède, dans une large mesure,
CURE DE MALADIES DE NERFS. 8 : 9
des exercices dans le genre de ceux dont je parle, que s'il
est à même de traiter simultanément un grand nombre de
malades, c'est-à-dire s'il peut faire faire des exercices en
masse et si l'achat des appareils à exercices ne devient pas
une source de trop grandes dépenses. Ici, je me permets de
recommander mes appareils, lesquels sont décrits en détail
dans mon travail intitulé « Exercices ». (Recueil de leçons
de clinique, de R. Volkmann, 1897.) Ce sont des jeux de
poulies à poids dont l'achat n'entraîne qu'une dépense fort
minime.
J'expose ci-dessous, à l'appui de ce qui précède, quelques
cas choisis dans ma longue pratique ; ils doivent également
servira expliquer la méthode d'emploi de mes appareils' et
à en prouver l'efficacité.
La tension de laj : rmbe gauche de Jenny Liebermann, âgée
de douze ans, était devenue
extrêmement difficile par suite
d'une paralysie d'enfant sur-
venue dès son plus bas âge ; en
conséquence, la petite fille ne
pouvait faire que quelques pas
sans béquilles pour la soutenir.
L'asoeyait-on sur une chaise à
siège saillant (voyez fig. 1 ci-
contre), elle ne pouvait pas
tendre la jambe; par contre,
si l'on attachait l'extrémité
d'une poulie à son pied (voyez-
figure ci-jointe) et si l'on fixait
à l'autre bout de la poulie un
poids de 50 grammes elle pouvait balancer la jambe en
avant et en arrière et la tendre jusqu'à former presque un
angle de 180°. Ce mouvement ne lui était pourtant possible
qu'avec un poids de 50 grammes et en attachant la poulie
très exactement à la même hauteur que le siège sur lequel
elle était assise ; si on assujettissait la poulie à 10 centimètres
ou 20 centimètres plus haut que le siège, les mouvements
devenaient impossibles. Ajoutons qu'il faut, pour faire cet
exercice d'une manière effective, une poulie se déroulant
' Ces appareils se vendent à Berlin, chez Carl Sonnenburg, 8, Goltz-
strasse.
Fig. I.
90 THÉRAPEUTIQUE.
aisément et soigneusement huilée et un cordon de laine très
souple ; un frottement de résistance ou un cordon trop dur
amènent des irrégularités dans le jeu de la poulie, et ces
irrégularités rendent les mouvements de l'exercice difficiles
et même impossibles. -
Il résulte clairement de ce qui précède à quel point on est
à même, avec des poulies, de créer des résistances appro-
priées ; il s'en suit aussi qu'on est également maître d'aug-
menter la résistance à vaincre, en changeant la quantité des
poids; ajoutons que c'est, pour le malade, un grand relève-
ment moral de pouvoir, à l'aide des augmentations de poids,
juger par lui-même que sa force lui revient.
Je fis s'exercer la petite fille deux fois par jour avec ce
poids de 50 grammes au pied, et cela dans l'ordre suivant :
cinq minutes d'exercices, puis massage pendant un quart
d'heure ; puis de nouveau cinq minutes d'exercices. Les
mouvements réussirent beaucoup mieux quand on eut placé
une planche devant la malade, à la hauteur du siège sur
lequel elle était assise et qu'on l'eût excitée à toucher la
planche de la pointe de son pied chaque fois qu'elle tendait
la jambe ; et ceci m'a prouvé combien les efforts sont plus
vite couronnés de succès quand la personne, qui les fait, a
devant les yeux un but déterminé. Après une période de
huit jours, les exercices avec poids de 50 grammes purent
être prolongés pendant dix minutes ; quelques semaines
après nous exercions une heure le matin et une heure
l'après-midi, avec poids de 50 grammes. Après huit mois de
traitement, la malade pouvait surmonter vingt fois de suite
une résistance de poids de 2,000 (deux mille) grammes et
pouvait marcher dans la rue environ 1 kilomètre sans ses
éclisses. Le tableau suivant donnera une idée plus claire de
la progression graduelle des forces :
CURE DE MALADIES DE NERFS. 91
atteignit de juin à fin août 1896 une augmentation de force de
50 grammes à 1500 grammes.
A. M..., de Saint-Pétersbourg (alcoolisme, empoisonnement de
nicotine, hystérie ? ), ne pouvait marcher que foi péniblement, à la
dale du 28 juin 1896; après deux semaines de traitement avec
massage, bains et exercices avec l'appareil à poulie (cela deux fois
par jour), il put marcher pendant un kilomètre au bord de la mer
et il se baignait même lorsque les vagues étaient fortes. La
progression de force du muscle quadric. crural avait haussé de
1 kilogramme à 4 kilogrammes depuis le 28 juin jusqu'au 4 août
1896 ; les autres muscles avaient retrouvé leur force dans les
mêmes proportions.
Le cocher L... avait été mordu au bras par un cheval de telle
façon que la paralysie totale des doigts et des tendons du poignet
s'en suivit. Mon collègue H... de Riga m'adressa le malade après
être parvenu, par le galvanisme, à fortifier suffisamment les muscles
de l'index et du majeur pour qu'ils pussent supporter la tension
avec un poids de 8 grammes (fig. 2). J'atteignis d'octobre 1894
jusqu'à mai 1895 une progression de force de 8 grammes à 700
grammes. A partir du mois de mai 1896, le malade ne se fit plus
traiter et travailla dans une fabrique ; il avait à remplir des sacs
et à les attacher avec des cordes. On put constater en janvier
1896 que, malgré ce travail manuel, la force tensionnaire des
muscles n'avait pas augmenté : ce n'était toujours, pour l'index et
le majeur que 700 grammes, tandis que les mêmes doigts de la
main gauche surmontaient un poids de 900 grammes. De janvier à
Fig. 2. - Tension des doigts.
92
THERAPEUTIQUE.
mai 1897, L... fut de nouveau soumis au même traitement de
massage et d'exercices, et eu mai 1897, l'index et le majeur de la
main droite soulevaieut, tendus, 900 grammes, c'est-à-dire, exacte-
ment autant que les doigts de la main bien portante.
Le mesurage des forces de la main endommagée nous offre le
tableau suivant : - 0
CURE DE MALADIES DE NERFS. 93
malade ne pouvait pas, en écrivant, garder l'index allongé. L'affai-
blissement de ce seul doigt avait abîmé complètement son écriture :
il est évident que je n'aurais pas pu, sans l'aide de mon appareil,
établir ce diagnostic.
Dans son Manuel de massage et de gymnastique (Vienne,
1890), Antoine Bum a publié à Vienne des cas de malades où
mes appareils et ma gymnastique des doigts ont été employés
avec un succès évident. Voyez aussi Krukemberg (Guide de
la méthode pour le traitement mécanique, 1896, p. 50)
et encore Revue périodique pour les praticiens, du Dr W.
Lierrnann, Francfort-sur-le-Main, 1897 (n° 3).
Il arrive souvent que, soit leurs douleurs, soit leur faiblesse
empëchentle3maladesde faire eux-mêmes des mouvements
avec résistance de contre-poids ; par exemple les mouvements
actifs sont parfois absolument impossibles dans les maladies
des articulations, dans les rhumatismes musculaires et dans
l'hystérie ; dans des cas semblables, je fais faire au membre
malade des exercices passifs par le membre bien portant, à
l'aide d'un appareil, qui a, alors, deux poulies; l'une est
attachée au membre souffrant, l'autre est mise en activité
par le membre bien portant. Ces mouvements passifs con-
viennent très spécialement au traitement des hystériques.
La malade vous aflirrne-t-elle, par exemple, ne pouvoir sou-
lever la main droite ? Faites tenir les poulies, l'une par la
Fis. ,S. Écarquillement des doigts.
94 THÉRAPEUTIQUE.
main droite, l'autre par la main gauche, et invitez la ma-
lade à mettre sa main infirme en mouvement en tirant la
poulie de la main gauche; cela réussit presque toujours,
car la main droite ignore à peu près ce que fait la main
gauche, et l'on peut graduellement, ainsi, sans qu'elle s'en
rende compte, glisser des mouvements passifs aux mouve-
ments actifs.
Je ferai observer qu'il faut, petit à petit, tenir le cordon de
la main malade plus court que celui de la main bien por-
tante ; dans les cas de récentes fractures articulaires et aussi
pour d'anciennes raideurs de jointures, j'ai également ob-
tenu, et cela dans des cas presque désespérés, une motilité
très suffisante, à l'aide de mes mouvements passifs.
Je n'ai pas encore publié en entier cette méthode de mou-
vements passifs, j'espère néanmoins être à même de le faire
cette année ; pourtant quelques cas que j'ai traités avec la
gymnastique passive sont décrits dans la Revue centrale de
médecine générale, 1897, sous la rubrique : « Mouvements
employés comme cure des inflammations articulaires, par le
Dr Otto Thilo, Riga», et dans la même Revue centrale, '1897,
n° 54 : « Pour le traitement des fractures de la rotule »
(Patella). Je ferai observer finalement que mes appareils
peuvent servir à mesurer les forces dans des buts diagnos-
tiques et qu'ils sont très appropriés aux exercices en masse
dans les hôpitaux.
Etant donné que l'influence morale à exercer sur le ma-
lade est d'une très grande importance dans tout ce traite-
ment de mouvements gymnastiques, il me semble que nos
collègues en névrologie sont tout particulièrement appelés à
se servir avec succès de mes appareils à exercices.
ÉPILEPSIE ET TRÉPANATION. 95
Épilepsie et Trépanation ;
Par le Dr F. 1J00SSlEl\,
Ancien interne des asiles d'aliénés de la Seine.
Parler de craniotomie en matière d'épilepsie dite idiopa-
thique, c'est énumérer des insuccès. Ce discrédit de la chi-
rurgie crânienne pure a conduit aux excisions de matière
cérébrale, prélevée dans les régions corticales correspondant
aux points de départ des phénomènes convulsifs; dans cet
ordre de faits les statistiques ne sont pas plus heureuses.
Après la plupart des échecs on a émis l'espoir qu'en se pla-
çant dans des conditions meilleures, le résultat pourrait être
positif; mais en fait il ne l'a été que dans des cas spéciaux
où l'on tombait sur des épilepsies jacksonniennes méconnues.
Quant au processus jacksonnien lui-même, quelque manifeste
qu'il soit, quelque précis qu'en aient été les diagnostics et
les localisations, il faut noter des cas innombrables où l'abla-
tion même de la lésion causale n'a pu amener qu'une période
relativement courte d'amélioration comme pour le morbus
sacer ordinaire. Et l'on voit en y regardant de près, que
dans tous les cas de guérison confirmée il y avait tumeur
énucléable, kyste, esquille ou exostose, et presque toujours
d'origine récente. Les cicatrices corticales, les foyers de
méningo-encéphalite, les vieilles hémorrhagies ont laissé gé-
néralement les opérations inefficaces. Telford Smith entre
autres a très bien montré : que dans cet ordre de faits l'habi-
tude convulsive, dès qu'elle remonte un peu loin, est si puis-
sante, et que les altérations visibles ou non de l'écorce sont
si stables, que l'intervention est régulièrement inutile. Dans
les cas de traumatisme avéré eux-mêmes, 4 p. 100 seulement
des opérés guérissent et encore à la condition que les acci-
dents soient de date récente.
Naughl rapporte un cas intéressant à cet égard; les circons-
tances paraissaient aussi favorables que possible; il s'agissait
d'une esquille et d'un kyste. Ce dernier s'était formé juste
au-dessous de cette esquille laquelle se dirigeait perpendi-
culairement contre la surface corticale, l'opération sembla
d'abord radicalement curative. Mais l' « habitude convulsive »,
96 THÉRAPEUTIQUE.
restait et sept mois après, les convulsions reparaissaient à
la moindre excitation toxique ou autre. Sans m'engager en
rien dans la bibliographie déjà connue de celle question,
rappelons en route les vingt-cinq insuccès signalés par
Lavista et les deux faits de Luntz dont un échec et un résul-
tat douteux; je voudrais seulement faire aussi allusion aux
deux cas de Collins (lirain, 1896, p. 366) qui présentent,
surtout le premier, une grande analogie avec celui qui fait
l'objet de cetle note. Un jeune homme ayant subi un trauma-
tisme céphalique est pris dans la suite de crises épilepti-
formes à localisation corticale très nettement déterminables.
Il est opéré deux mois seulement après la première attaque.
Quatorze mois après l'opération le patient n'a pas eu de nou-
velle crise ; mais on ne s'est pas borné à trépaner, on a en-
levé une aire d'écorce grise qui s'est trouvée atteinte de
méningo-encéphalile chronique en foyer. Une jeune femme
dans des circonstances analogues mais sans traumatisme
opérée de la même façon (prolrlération névralgique, atrophie
des cellules pyramidales, hémorrhagies punctiformes) reste
sans attaques depuis plusieurs mois. Mais l'auteur prudent a
continué le bromure à haute dose et avertit ses lecteurs qu'il
ne juge pas le temps écoulé suffisant pour considérer ses
malades comme guéris. Dans l'histoire qui va suivre, le cer-
veau ne fut pas entamé et l'opération fut plus tardive; en
tout cas j'ai cru intéressant de la puLlier ici, ne serait-ce que
pour répondre à l'enquête ouverte par M. Bourneville. Le
- caractère jacksonnien avait paru si évident que l'intervention z
s'imposait, les suites n'en furent pas moins défavorables. Il
s'agit d'une fillette qne j'ai longtemps suivie à l'asile de
Villejuif dans le service de mon maître M. Marcel Briand et
dont il a bien voulu me permettre de rapporter l'obser-
vation :
Sommaire. - Père alcoolique; mulacle bien l1a1'lante jusqu'à huit ans.
1'rwtlnali,'me, attaques épilcl,li/,oJrnes à rrqneue; croissante
. depuis cette époy2lr. Débilité mentale ; trépanation pendant un
état de mal grave; suspension de tous les tymylomes ; récidive après
trois mois; mort uu cours d'un état de mul.
Léonie L... était, à son arrivée à Villejuif en 1889, une fille de
treize ans tiès brune, d'aspect enfantin et paraissant à peine onze
ans bien que robuste et plutôt grasse. Les joues sont fermes et
· ÉPILEPSIE ET TRÉPANATION. 97 f
rondes, le visage un peu hébété, les lobules des oreilles sont
adhérents, la voûte palatine étroite, le front bas, la chevelure très
épaisse ; la malade est réglée depuis quelques mois. Le père a fait
son service militaire en Afrique où il a eu les fièvres intermittentes
et où il a fait de notables excès alcooliques. La mère bien équili-
brée nie tout passé pathologique et parait jouir d'une belle santé.
L'unique frère de la malade a neuf ans, il est intelligent et bien
portant, Léonie est venue au monde bien constituée à la suite d'un
accouchement normal, elle n'a pas eu de convulsions dans la pre-
mière enfance, l'évolution dentaire s'est passée sans incidents, elle
n'a subi aucun trouble intellectuel, infectieux ni traumatique jus-
qu'à l'âge de huit ans. A cette époque elle serait rentrée un jour
portant au côté droit de la tête, au-dessus de l'oreille, une plaie
assez profonde, saignant abondamment et produite par la pointe
en fer d'une toupie de bois qu'on lui aurait lancée par maladresse.
Peu d'instants après se serait déclarée une série de crises convul-
sives ayant duré cinq heures, avec émission involontaire d'urine
et de matières fécales. Au dire de la mère, l'enfant passa ensuite
huit jours au lit en proie à des troubles que le médecin de la fa-
mille aurait qualifiés de méningite. La convalescence arriva, mais
les crises se renouvelèrent .de loin en loin'et finirent par revenir
assez régulièrement toutes les quatre ou cinq semaines. Les choses
durèrent ainsi pendant deux ans, les attaques cependant avaient
augmenté de fréquence et une fois ou deux par an, en mars et en
juillet ordinairement, survenaient des séries d'attaques constituant
un véritable état de mal. En 1898 cet'état de mal fut suivi d'émi-
plégie gauche plus accentuée au bras et qui dura deux mois en
s'atténuant graduellement. Même phénomène en 1899. Sur les
conseils de voisins ou amis Léonie fut alors placée à la Charité
dans le servlice de Luys pour y être traitée par la suggestion
hypnotique et les aimants. Le résultat fut nul, Les crises augmen-
tèrent encore de fréquence et d'intensité, quelques-unes furent
suivies de troubles mentaux et de la Charité l'enfant fut trans-
férée d'office à l'Admission de l'Asile Clinique d'où elle passa
immédiatement à Villejuif dans le service de M. Briand.
Les crises convulsives avaient donc fait leur apparition après un
traumatisme du côté droit de la tête. elles frappaient d'abord et
surtout le côté gauche du corps et de la face, depuis leur invasion
l'intelligence de l'enfant avait cessé de se développer et demeurait
lente et obtuse. Ces attaques révélaient exactement la forme sui-
vante : Léonie éprouvait une aura sensitive bizarre, c'était d'abord
des fourmillements dans la main gauche, puis l'impression d'avoir
deux bras du côté gauche, et celle que ces deux bras gauches
étaient serrés progressivement depuis le poignet jusqu'à l'aisselle,
à ce moment elle tombait et les mouvements convulsifs se produi-
ARCIlI\"ES, 1° ;éiie, t. X i
98 THÉRAPEUTIQUE.
saient débutant par la main gauche, gagnant bientôt tout le
membre supérieur, les muscles de la face et l'orbiculaire des pau-
pières du même côté, ensuite le membre inférieur. La crise finis-
sait par se généraliser, le corps se raidissait, les poings fermés, la
tête et les yeux déviés à gauche, après une série de mouvements
cloniques arrivait une période de stertor avec rougeur de la face
et écume aux lèvres. Après les fortes crises il restait un peu d'hé-
bétude. Il n'y avait pas de cri initial, pas de morsure de la langue
et pas d'émission involontaire d'urine, du moins dans les crises
isolées. La perte de connaissance était rarement complète, souvent
nulle, le souvenir de l'attaque était conservé, parfois même on
pouvait au cours de celle-ci provoquer des réponses raisonnables
que l'enfant se rappelait ensuite. Le côté gauche présentait tou-
jours des mouvements convulsifs plus intenses que le droit, dans
les petites crises il était même seul intéressé.
Au moment de son arrivée dans le service la fréquence de ces
accidents était moyenne; de une à trois fois par mois, de temps
en temps en série de trois ou quatre, les séries les plus fortes lais-
sant presque toujours après elles une paralysie ou parésie du
bras gauche qui se dissipait peu à peu. L'intelligence était déjà
très atteinte, la malade ne faisait aucun progrès à l'école de l'asile,
elle n'écoutait pas, répondait évasivement par des monosyllabes à
toutes les questions, se négligeait, abîmait ses vêtements, restait
inerte et indifférente à tout, et se plaignait seulement de mal à la
tête. Elle fut soumise au traitement médical rationnel très atten-
tivement appliqué mais sans aucune amélioration. Les crises aug-
mentèrent même de fréquence en 1890. Au commencement de 1891
encore léger accroissement, enfin au mois de mars de la même
année un état de mal très grave survient. Le 20 mars 68 attaques
le jour et 80 la nuit, le 23 75 attaques le jour et 102 la nuit ; la
température s'élève, la tête est très chaude, la bouche reste déviée
entre les crises qui durent chacune une minute sans perte de con-
naissance ; les mouvements volontaires sont impossibles dans les
membres du côté gauche, et bien que le bras de ce même côté
soit anesthésique à la piqûre d'épingle il est le siège d'une sensa-
tion spontanée de brûlure très douloureuse ; les lèvres deviennent
fuligineuses, le pouls est petit, la malade s'amaigrit et souffre de
plus en plus, l'état général est très précaire; les crises tendent à
devenir subintrantes. La présomption très justifiée d'épilepsie
jacksonnienne avait déjà fait songer à l'intervention chirurgicale,
seule l'ancienneté des troubles avait fait hésiter, mais devant
l'imminence d'une issue fatale cette intervention est décidée. L'o-
pération fut faite le 24 mars en plein état de mal par MM. Pozzi et
Picqué.
Les centres corticaux correspondant aux mouvements convulsifs
ÉPILEPSIE ET TRÉPANATION. 99
initiaux (main et bras gauches) furent aisément déterminés. Une
première couronne de trépan est appliquée à un demi-centi-
mètre à droite de la sature interpariétale et à deux centimètres et
demi en arrière de la soture coronale, une seconde en dehors et
une troisième en arrière de la première. Les trois rondelles enle-
vées, on élargit l'ouverture et on en régularise les bords à la
gouge, de façon à former un orifice osseux unique découvrant un
champ triangulaire de cinq centimètres de côté. Le crâne est épais
(6 millimètres) la dure-mère ne présente rien d'anormal, la pie-
mère est congestionnée, mais il n'existe pas de lésion visible, ni
esquille, ni exostose, ni trace d'hémorragie ancienne. Des ense-
mencements faits sur agar et gélatine avec les liquides recueillis
dans la plaie subdurale sont restés stériles. La plaie est refermée,
la réunion se fait par première intension. Dès le premier jour le
nombre des accès était tombé à 18 le jour et 8 la nuit, le second
jour 3 accès seulement, le troisième jour la température est rede-
venue normale ; la motilité volontaire du côté paralysé revint gra-
duellement, les examens dynamométriques montrant un progrès
journalier. Le 3 avril quoique la démarche soit encore lente elle est
possible, et chose que la malade n'a pas fait depuis très longtemps
elle lit et s'intéresse à tout ce qu'on lui dit et lui montre ; elle
n'a plus d'attaques depuis le 27 mars ; en mai elle fait des progrès
à l'école et prend une part active aux jeux des autres enfants, la
transformation est absolue, le développement physique et intel-
lectuel semble avoir repris son essor. En juin voyant le terrain
gagné et ne demandant qu'à croire Léonie guérie j'envoyai son
observation avec tous les détails journaliers de l'opération et de
ses suites à M. Pozzi qui me l'avait demandée, mais qui heureu-
sement jugea plus prudent ne la point publier encore. En effet le
25 juin un léger vertige se produisit, la malade ayant reçu une
mauvaise nouvelle nous crûmes à une lypothymie. Mais le loir juillet
la malade souffrit de la tête et ent plusieurs vertiges le soir. Le
il septembre, nouveau vertige peu intense suivi d'un peu d'hébé-
tude.
A partir de ce jour l'intelligence redevient paresseuse. Le 23 oc-
tobre autre vertige suivi de deux heures d'hébétude ; enfin en
décembre crises convulsives complètes et en série. Le 7 janvier 1892
survint sans crises un accès d'excitation maniaque qui dura
quelques jours. Dans la suite l'état de la malade redevint exacte-
ment ce qu'il avait été pendant toute l'année qui avait précédé
l'opération. Les attaques sont aussi fréquentes qu'en 1890-91,
elles ont exactement la même marche et le même caractère (bras,
face, jambe gauches, conservation de la conscience), enfin le
8 février survient un état de mal au cours duquel pendant une
crise Léonie fait signe avec son bras droit encore libre que le
100 THÉRAPEUTIQUE.
gauche convulsé lui fait très mal, et cela pour répondre à une
question qu'elle a pu répéter après. A ce moment en palpant la
cicatrice \ crânienne on sent encore les bords restés nets de la
plaie osseuse toujours béante... En 1892, 1893, 1894, la situation
reste identiquement la même ; crises revenant par petites séries
de loin en loin, nombreuses attaques isolées ou vertiges dans l'in-
tervalle, état de mal en mai 1893 (jusqu'à 160 accès en un jour).
En 1894 état de mal vers la même époque. Au cours de ces trois
années, Léonie a sensiblement grandi, mais son intelligence est
restée fort arriérée, la tête est restée petite, les bords de la plaie
osseuse sont devenus mousses, t'orifice craniotomique s'est rétréci
et tend à s'oblitérer, bien que la cicatrice cutanée reste déprimée
en cratère. Enfin en avril 1895 Léonie meurt au cours d'un état
de mal très grave.
N'ayant malheureusement pas pu assister à ralltopsie, je n'ai pu
que recueillir les souvenirs d'un de mes collègues qui s'y trouvait
présent. La dure-mère ne présentait rien d'anormal, la pie-mère
était hyperhémiée et l'écorce grise avait revêtu la teinte hortensia
comme cela se produit généralement dans les cas de mort par suite
d'état de mal. Sur quelques points disséminés la congestion était
plus intense et correspondait à des foyers d'encéphalite superfi-
cielle dont quelques-uns anciens pouvaient remonter aux états de
mal antérieurs. Le cerveau était petit, je n'ai malheureusement
pas pu obtenir d'indications plus précises à cet égard. Q uant au
crâne, que j'ai pu recueillir grâce à l'obligeance de M. M. Briand,
il est franchement microcéphale et correspondrait à celui d'une
enfant ayant cinq ou six ans au moins au-dessous de l'âge de
Léonie. Mais ici comme dans tous les cas semblables et comme
M. Bourneville l'a si bien montré, il ne s'agit nullement d'un crâne
précocement ossifié et aux sutures soudées comprimant un encé-
phale qu'il empêche de s'accroître, c'est simplement un crâne bien
conformé et s'adaptant librement aux dimensions naturellement
réduites d'un cerveau originellement petit. Toutes les sutures sont
parfaitement libres et très marquées, les sinuosités longues bien
dessinées en conservent toute la laxité désirable comme dans les
têtes les plus normales d'enfants du même âge. Le diamètre fron-
to-occipital mesuré directement sur l'os est de 17 centimètres, le
diamètre entre les deux bosses pariétales est de 134 millimètres.
La calotte est extrêmement lourde et épaisse, chose fréquente
d'ailleurs en pareil cas, les pariétaux et le frontal présentent
dans leur portion temporale une épaisseur de 7 millimètres ;
dans sa partie moyenne le frontal atteint 14 millimères, l'occipital
près de sa pointe supérieure où siège un gros os wormien n'a pas
moins de il millimètres d'épaisseur. (Fig. 4 et 5.)
L'orifice de trépanation s'est en grande partie comblé, et serait-
EPILEPSIE ET TRÉPANATION. 101
arrivé à une occlusion totale si la malade avait survécu. C'est à
peine si l'on retrouve la trace des bords de l'ancien orifice, que
j'di indiqués sur la pièce par un pointillé noir. L'os s'est régénéré
peu à peu de la périphérie vers le centre selon un processus' lent
Fig. 4. Face convexe du crâne : cranieclomie en voie de réparation.
102
THERAPEUTIQUE.
et régulier et le terrain ainsi regagné sur tout le pourtour du trou
est d'un demi-centimètre au moins. Mais à la partie antérieure la
prolifération osseuse a été plus rapide et plus intense, elle s'est
étendue en nappe de substance éburnée blanche et dure formant
Fig. 5. - Face interne du crâne : cranieclomie en voie de réparation.
ÉPILEPSIE ET TRÉPANATION. 103
de larges promontoires dont deux se sont rejoints et constituent
déjà un pont complet. Cette lame éburnée occupe un plan très
inférieur à la surface externe du crâne, elle semble en continuité
avec la table interne du pariétal, mais au lieu de reproduire la
convexité externe de cet os, elle tend plutôt à [se déprimer for-
mant convexité interne et par suite tendant à diminuer d'autant
la capacité de la boite cranienne ; ce qui est enore entièrement
d'accord avec les observations deM. Bourneville. Ce pont et les pro-
montoires tendant à oblitérer l'orifice opératoire divisent celui-ci en
deux, un petit antérieur mesurant un peu moins de 1 centimètre
carré ; un autre allongé mesurant 3 centimètres et demi de long,
sur 17 millimètres de large, alors que l'ouverture primitive mesu-
rait 5 centimètres de côté. (Fig. 4 et 5.)
L'histoire préépileptique de cette malade aussi bien que
la forme et le caractère de ses attaques devaient nécessaire-
ment faire penser à des accès jacksonniens; et certainement
à ce point de vue l'intervention chirurgicale se justifiait
pleinement. Seuls quelques signes de dégénérescence (oreilles,
voûte palatine) et l'alcoolisme du père pouvaient faire songer
à un autre genre d'épilepsie et faire hésiter, la malade devait
en tout cas profiter de la présomption prépondérante, ce qui
fut fait. Mais si la marche fut ce qu'elle est toujours en
pareil cas même dans le cas de trépanation spontanée rap-
portée par Jacquin, si l'opération n'amena qu'un bien-être
et un renouveau de trois mois on peut dire qu'ici elle amena
aussi une survie de trois ans et qu'ayant eu lieu au cours d'un
état de mal et presque à l'agonie de la malade, la gravité de
la situation céda aussitôt. A part ce dernier détail les circons-
tances de la maladie et les lésions trouvées à l'autopsie
rapprochent ce fait du premier cas de Cullins cité plus
haut.
Est-ce à dire cependant que si l'on eût excisé une zone
d'écorce on eût été plus heureux. Je ne le crois pas, car les
foyers d'encéphalite s'étendaient à des régions autres que
celle où avait siégé la trépanation, et l'on sait combien dans
de tels cas ce procédé s'est trouvé inefficace. Enfin chez le
malade de Collins l'affection était récente, et l'auteur lui-
même croit devoir attendre encore avant de croire à la gué-
rison ; et on peut avec Winkler dire que la question thérapeu-
tique des épilepsies n'est pas toute dans la détermination
104 PATHOLOGIE NERVEUSE.
du point de départ des décharges convulsives ; que « le sti-
mulant provocateur toxique, mécanique ou autre » peut
siéger ailleurs et que c'est lui qu'il faudrait connaître et pou-
voir atteindre. « L'indication d'une intervention chirurgicale
ne sera donc jamais fournie par l'existence d'une épilepsie
dite jacksonnienne ou idiopathique; il faut chercher la lésion
qui produit les décharges... Il n'y a pas de chirurgie des
épilepsies, il. y a celle du cerveau et du crâne. » (Winkler.)
Je ne dis pas qu'il faille être aussi absolu, en tout cas si l'ou-
verture du crâne me paraît définitivement jugée dans le
morbus sacer idiopathique, il faut encore choisir parmi les
cas jacksonniens d'apparence ceux que l'on croit devoir
opérer et ne le faire qu'avec une confiance réservée dans
l'efficacité finale de l'intervention.
PATHOLOGIE NERVEUSE.
Méningo-myélite syphilitique avec signe
d'Argyll-Robertson ;
Par CESTAN.
Chef dç clinique à la Salpèfricrc.
Nous avons pu observer dans le service de notre maître
le professeur Raymond, quatre malades atteints de méningo-
myélite syphilitique avec signe d'Argyll-Robertson.
Observation Il Lej ? cinquante-sept ans,cordonnier. Absence
d'antécédents héréditaires. Le malade né à terme, n'a pas eu de
convulsions; a été atteint de fièvre typhoïde à l'âge de quinze ans;
a contracté la syphilis au régiment; 18 mois après, iritis de l'oeil
gauche et dans la suite deux fausses couches de sa femme. Le
malade nie tout excès alcoolique.'
La maladie actuelle a débuté à l'âge de cinquante-quatre ans,
trente ans par suite après le chancre, par des douleurs fulgurantes
revenant par crises, parcourant la face postérieure des membres
MÉNINGO-MYÉLITE SYPHILITIQUE. 105
inférieurs et déterminant par leur intensité du dérobement subit
des jambes; ces troubles sensitifs sont bientôt suivis de parésie
vésicale, de constipation, puis d'une lourdeur et d'un engourdis-
sement des membres inférieurs. L'état s'est ainsi peu à peu
aggravé et la démarche a pris le caractère nettement spasmodique.
Le malade est grand, bien constitué, ne présentant ni troubles
cardiaques, ni troubles pulmonaires. Son intelligence est normale,
il répond parfaitement et d'une voix normale à toutes les ques-
tions. La démarche est spasmodique, entraînant une usure de la
pointe des souliers ; tous les réflexes tendineux (massélerin, 6nis.
rotidicns, tendon cl'Acliille) sont exagérés, avec trépidation spinale
bilatérale ; le réflexe cutané plantaire se fait en extension des deux
côtés. Le malade est obligé de pousser en urinant et se plaint de
constipation opiniâtre. Il présente une hypoesthésie des membres
inférieurs et se plaint d'une lourdeur lombaire. Le réflexe crémas-
térien est conservé et le signe de Romberg fait défaut. 11 n'existe
ni atrophie musculaire, ni troubles trophiques. Les mouvements
volontaires des mains s'exécutent sans tremblement, la parole est
normale. L'examen des yeux dénote l'absence de nystagmus et de
diplopie. Mais les pupilles sont en myosis et la paupière supérieure
tombante, comme on l'observe dans le tabes ; d'ailleurs nous
trouvons très nettement à droite le signe d'Argyll Robertson ; il est
impossible, de par les traces de l'ancienne iritis survenue pendant
le service militaire, d'apprécier nettement le réflexe pupillaire de
l'oeil gauche ; le fond d'oeil est normal.
OI3SGIlVATION II. J..., quarante-neuf ans, femme de ménage.
Absence d'antécédents héréditaires. Syphilis conceptionnelle ; le
mari est mort en effet de paralysie générale ; la malade aurait eu
9 grossesses, et nous y avons relevé 2 fausses couches; 4 enfants
morts dans les premiers mois avec des éruptions pemphigoïdes et
un coryza dès la naissance. La maladie a débuté en 1898, par
une diplopie transitoire, puis par des douleurs lombaires accom-
pagnées de constipation, de fourmillements dans la plante des
pieds, de parésie des membres inférieurs. Cet état a peu à peu
progressé. Actuellement, l'état général est excellent. La démarche
est nettemeut spasmodique avec usure de la pointe des souliers,
sans caractère cérébelleux ; les réflexes sont très exagérés (massé-
térin, bras, rotulien, tendon d'Achille) avec trépidation spinale.
Le réflexe cutané plantaire se fait en extension des deux côtés.
Constipation opiniâtre. Absence de troubles de la sensibilité objec-
tive ou subjective ; sens articulaire conservé ; absence d'incoordi-
nation motrice et de signe de Romberg. Absence d'atrophie mus-
culaire et de troubles trophiques. Les mouvements volontaires des
mains s'exécutent sans tremblement et sans incoordination ; la
malade accuse des fourmillements dans la sphère du cubital.
106 PATHOLOGIE NERVEUSE.
L'examen des yeux montre l'absence de nystagmus et de diplopie,
mais, met en évidence, le signe cl'Argyll-Itoùerlsozz ; le fond de
l'oeil est normal. L'intelligence et la mémoire ne sont pas dimi-
nuées ; la parole est tout à fait normale.
Observation Ill. Or..., soixante-un ans, boulanger. Absence
d'antécédents héréditaires et personnels. Syphilis en 1883 avec
cortège classique d'accidents secondaires. La maladie actuelle a
débuté en 1887 par des douleurs lancinantes, dans le trajet du
sciatique droit et qui ont cédé à un traitement iodo-mercuriel
intensif. Trois années, ces douleurs reviennent avec les mêmes
caractères, amenant parfois par leur intensité un dérobement des
jambes. Depuis, en 1893, surviennent une légère constipation et
une légère rétention d'urine, et en 1898, une parésie des jambes
qui rend la marche très difficile. A l'heure actuelle, la démarche
est pareto-spasmodique,sans incoordination motrice, accompagnée
de crampes dans les deux mollets. Les réflexes rotuliens et du tendon
d'Achille sont exagérés mais il n'existe pas de trépidation spinale.
Les réflexes osseux et tendineux des bras sont forts, le réflexe massé-
tcrilz est exagère. La sensibilité extrême de la plante du pied
empêche la re cherche du réflexe cutané plantaire, le moindre
frôlement est en eflet suivi d'un retrait convulsif du pied. Le
malade se plaint de douleurs fulgurantes sur le trajet des deux
sciatiques mais la sensibilité objective est normale ; il est atteint
d'une légère rétention d'urine. Enfin les deux yeux sont en myosis
et présentent nettement le signe d'Argyll l1obcrtson.
Observation IV. - Can..., trente-trois ans, couturière. Père
mort d'hémorragie cérébrale. Famille nerveuse. Pas d'antécé-
dents personnels, Deux fausses couches dont la première suivie
d'une céphalée intense ayant duré deux mois. Salpingite en 1892.
Début de la maladie en 1897 par des sensations de froid et de
chaud sur les jambes, une pesanteur lombaire, des douleurs lan-
cinantes dans les jambes, une paraplégie progressive, des troubles
des sphincters. A l'heure actuelle, la démarche est paréto-spasmo-
dique sans incoordination motrice, accompagnée de crampes
dans les deux mollets. Les réflexes tendineux des membres inférieurs
sont très exagérés, avec trépidation spinale bilatérale; le réflexe cutané
plantaire se fait en extension des deux côtés. On constate quelques
troubles sphnictériens, mais on ne relève ni atrophie musculaire
des jambes ni troubles objectifs de la sensibilité; la force muscu-
laire segmentaire est assez bien conservée. Les réflexes des bras
sont exagérés; il n'existe ni tremblement intentionnel, ni troubles
de la parole, ni nystagmus, ni incoordination cérébelleuse. La
malade aurait présenté de la diplopie en 1892. Actuellement elle
JIENINGO-111YELI7`E SYPHILITIQUE. 107
fait défaut, mais les deux pupilles sont ovaluires, en myosis et pré-
sentent le signe d'Argyll-Robertson.
En résumé, nos 4 malades sont des syphilitiques qui se
présentent à nous sous deux aspects, avant tout l'aspect
spasmodique bien connu de la paraplégie syphilitique du
type Erb avec l'évolution progressive, l'exagération des
réflexes tendineux, la trépidation spinale, le signe des
orteils de Babinski, les troubles urinaires, les douleurs lom-
baires ; d'autre part, l'aspect tabétiforme par la présence du
signe d'Argyll-Robertson. Comment pouvons-nous interpré-
ter cette association morbide ?
Dès 1893, en France, M. Gilles de la Tourette attirait l'at-
tention sur une variété particulière de myélite syphilitique
qu'il dénommait myélite syphilitique pseudo-tabétique, et
que son élève, M. Schwanhard, étudiait dans sa thèse inau-
gurale, en 1897. La ressemblance de cette myélite avec le
tabes est créée -non par l'absence des réflexes rotuliens,
point qui est au contraire la caractéristique de la forme
décrite par M. Sottas sous le nom de myélite pseudo-tabéti-
que, mais par l'existence de troubles sphinctériens, du signe
de Romberg et de douleurs fulgurantes associés à l'exagéra-
t-on des réflexes tendineux et à la trépidation spinale. « C'est
chez ces malades qu'on trouve des troubles oculo-pupil-
laires fréquents consistant en myosis unilatéral ; il existera
en même temps un certain degré de rétrécissement de la
fente palpébrale, » Ces troubles oculaires seraient causés par
une lésion de la VHP racine cervicale d'où partent les filets
du grand sympathique se rendant à la pupille. En somme,
tous ces accidents, troubles pupillairès, douleurs fulgurantes,
exagération des reflexes, troubles des sphincters sont sous la
dépendance de l'infiltration soit de la moelle, soit des
racines créée par la méningo-myélite syphilitique.
Il semble bien, au premier abord, que nos malades sont
des exemples de cette variété de méningo-myélite syphiliti-
que isolée par M. Gilles de la Tourette. Mais, point très im-
portant, et que nous voulons surlout mettre en lumière, nos
malades diffèrent de ce type par un signe nouveau, le signe
d'Argyll-Robertson.
Certes, nous ignorons encore le mécanisme pathologique
qui produit ce signe. Ne faudrait-il pas, d'ailleurs, en pre-
108 PATHOLOGIE NERVEUSE.
mier lieu, connaître la physiologie exacte, les centres et les
voies de conductibilité du reflexe pupillaire à la lumière.
Or, sur ce point, aussi nombreuses sont les questions que
l'on doit se poser, aussi significatif est le silence des physio-
logistes. Existe-t-il un seul centre cervical dilatateur de la
pupille, le centre de Budge d'où partiraient les fibres ner-
veuses qui gagnent ensuite la voie du sympathique cervical ?
Existe-t-il, au contraire, deux centres isolés ou associés entre
eux, l'un cervical réagissant surtout aux excitations sensi-
tives de la peau, l'autre bulbaire, réagissant à l'excitation
lumineuse, sensorielle ? Quelle est l'action exacte des fibres
issues de ce centre dilatateur, action d'inhibition sur le centre
bulbaire constricteur ou action dilatatrice directe sur la
pupille" ? Quelle est la voie du réflexe lumineux parti de la
rétine pour aboutir à la pupille ? Où siégera la lésion qui le
supprimera tout en conservant l'action de l'accommodation à
la distance : fibres spéciales à grosse gaine de myéline du
nerf optique, ganglion de l'habenula, centre bulbaire dilata-
teur, centre cervical, conducteur réunissant ces deux centres ?
Voilà autant de questions posées et non résolues encore par
les physiologistes et les anatomo-pathologistes.
Aussi ne devons-nous pas nous éloigner du terrain de la
clinique. Dans cet ordre d'idées, nos malades diffèrent essen-
tiellement des malades de M. Gilles de la Tourette. Dans sa
forme pseudo-tabétique, on constate un myosis et une dimi-
nution de la fente palpébrale causés, selon toute vraisem-
blance, par une lésion radiculaire atteignant l'origine du
sympathique cervical. Or, la physiologie et les interventions
chirurgicales surle grand sympathique nous démontrent que
la sympathectomie ne détermine jamais le signe d'Argyll-
Robertson, mais uniquement du myosis avec rétrécisse-
ment de la fente palpébrale et rétraction du globe oculaire.
A ce point de vue, très intéressante devient l'observation de
MM. Déjerine et Mirallié (Archives de physiologie, 1595),
puisque leur malade, syringomyélique, présentait du côté
gauche les signes de la lésion du grand sympathique (myo-
sis, diminution de la fente palpébrale, sans signe d'Argyll);
du côté droit, au contraire, le signe d'Argyll-Robertson.
Ainsi nous ne pouvons supposer chez nos malades qu'une
lésion de méningo-myélite irritant la 1 paire dorsale ait pu
créer la perte du réflexe lumineux.
MÉNINGO-MYÉLITE SYPHILITIQUE. 109
Faut-il, dès lors, admettre que nos malades présentent
une association morbide ? Un premier problème serait aussi-
tôt à résoudre, le nombre des maladies au cours desquelles.
on peut observer le signe d'Argyll. Or, M. Parinaud dit l'avoir
observé dans quelques cas d'hémiopie corticale, sans préci-
ser d'aifleurs la cause de cette hémiopie. M. Déjerine l'a vu
unilatéral dans un cas de syringomyélie ; MM. Sauvineau et
Lévy, bilatéral dans un autre cas de syringomyélie-tabéti-
forme. Ce sont là des faits exceptionnels et nos malades ne
rentrent pas dans ces deux groupes. Au contraire, tous les
neurologistes reconnaissent que le signe d'Argyll est un des
meilleurs signes du tabes et de la paralysie générale. Or, il
ne faut pas oublier le rôle si important de la syphilis dans
l'éclosion de ces deux maladies; d'autre part, M. Babinski et
son élève, M. Charpentier, dans la syphilis héréditaire ou
acquise, ont pu observer le signe d'Argyll en dehors de tout
autre trouble du système nerveux. Faut-il, dès lors, faire de
la syphilis la cause fréquente, sinon exclusive du signe d'Ar-
gyll, problème très important que des recherches statisti-
ques nombreuses pourront seules établir. Quoi qu'il en soit,
voilà une hypothèse qui peut expliquer la perte du réflexe
lumineux chez nos malades, la syphilis créant la myélite
spasmodique et le signe d'Argyll, ce dernier, par une lésion
encore inconnue. Cependant nous ferons remarquer que ce
signe n'a été que très rarement observé au cours des myé-
lites syphilitiques dont la fréquence est pourtant assez
grande.
Nous sommes ainsi amenés à examiner une deuxième hy-
pothèse, celle de l'association d'un processus tabétique à un
processus de myélite syphilitique. Nos malades ne sont pas
en effet exclusivement des tabétiques. On peut bien observer
chez des ataxiques l'existence du signe d'Argyll Robertson
avec la persistance ou l'inégalité des réflexes rotuliens, mais
dans le cours d'un tabes normal non'compliqué nous n'avons
jamais constaté ni l'exagération des reflexes rotuliens ni le
signe des orteils de Babinski ; nous avons examiné une tren-
taine de tabétiques; chez eux, le reflexe cutané plantaire ou
n'existait plus, ou se manifestait par la flexion du gros orteil,
de telle sorte que le signe de Babinski, comme nous l'avons
montré dans des travaux antérieurs, vient nous révéler avec
certitude la lésion du faisceau pyramidal. D'autre part, nos
110 0 PATHOLOGIE NERVEUSE.
malades ne sauraient être considérés comme des paralytiques
généraux de par l'évolution de la maladie et de par l'inté-
grité absolue de leur intelligence. Dès lors, comment peut-on
concilier ces deux termes, qui semblent disparates : spas-
modicité et tabès ? Dans un travail antérieur, nous avons
essayé de démontrer que chez les tabétiques qui ont perdu
complètemeut-les reflexes tendineux, une sclérose du fais-
ceau pyramidal n'entraîne pas une contracture spasmodique
conformément à la loi de Westphal,,des scléroses médul-
laires combinées, et se manifeste uniquement par le signe des
orteils de Babinski. Mais il en est tout autrement si les re-
flexes tendineux persistent, modalité clinique que l'on peut
observer dans le tabes. Dans ce dernier cas, la sclérose pyra-
midale provoquera l'exagération des reflexes tendineux.
Nous pouvons, par suite, supposer que nos malades sont des
tabétiques avec signe d'Argyll et persistance des reflexes ten-
dineux ; leur faisceau pyramidal va se scléroser, ils seront
des lors des spasmodiques avec signe d'Argyll. Très rarement
la lésion du faisceau pyramidal siégera dans le cerveau,
créant ainsi une hémiplégie ou une diplégie cérébrale syphi-
litique avec signe d'Argyll, comme nous avons pu en obser-
ver un bel exemple dans le service de notre maître, le pro-
fesseur Raymond : homme atteint dans l'enfance d'une hémi-
plégie cérébrale droite spasmodique ; prend la syphilis, pré-
sente des douleurs fulgurantes, des troubles sphinctériens,
le signe de Romberg, le signe d'Argyll ; fait ensuite une hé=
miplégie cérébrale gauche, de telle sorte qu'il se présente
avec une paralysie spasmodique créée par une double lésion
cérébrale, la droite relevant de l'enfance, la gauche provo-
quée par la syphilis cérébrale, paralysie qui évolue avec des
douleurs fulgurantes et le signe d'Argyll.
Mais nos 4 malades sont des spasmodiques médullaires par
l'absence d'ictus, de troubles bulbaires et cérébraux, par
l'évolution lente et caractéristique de leur maladie, aussi
peut-on admettre que chez eux la syphilis a créé une lésion
médullaire combinée, d'une part une myélite chronique pro-
gressive du type Erb, d'autre part des lésions tabétiformes.
Cette association a été en effet décrite par plusieurs auteurs :
Kuh, Dinckler et Marinesco, et le cas de Dinkler est particu-
lièrement intéressant : homme syphilitique présentant des
troubles pupillaires, des douleurs fulgurantes et l'exagéra-
VÉNI\GO-\fYL.I,I'l'r SYPHILITIQUE. 111
tion des reflexes tendineux ; bientôt les réflexes se suppri-
ment, créant ainsi le tableau d'un tabes légitime. A l'autop-
sie on constate des lésions tabétiformes des cordons posté-
rieurs et une méningite médullaire prononcée (Deutsche
Zeit, für Nervenh. 1893)'. Ces associations morbides nous
étonnent moins à l'heure actuelle, avec les idées régnantes
sur l'influence de la syphilis dans la création du tabes.
Cependant nous n'avons pas vu signalées des observations
de paraplégie spasmodique forme Erb, avec signe d'Argyll.
Le plus souvent on décrit soit des myélites créant la sympto-
matologie du tabes (Oppenheim, Ewald) par l'abolition immé-
diate des réflexes rotuliens, soit une association de tabes et
de myélite avec exagération des reflexes, qui disparaissent
bientôt, les symptômes de la myélite s'effaçant tout à fait
devant ceux du tabes (cas de Dinkler).
Telles sont les deux hypothèses qui nous permettent
d'expliquer la présence du signe d'Argyll chez nos deux ma-
lades, d'une part que ce signe soit créé par la syphilis en
dehors de toute lésion tabétiforme des cordons postérieurs,
par un mécanisme encore inconnu, d'autre part qu'il soit
l'indice d'une 'association de lésions tabeliformes avec des
lésions de myélite transverse, le signe d'Argyll dénonçant
l'altération des cordons postérieurs, la trépidation spinale et
le signe des orteils, de Babinski, celle du faisceau pyramidal.
L'anatomie pathologique est seule capable d'élucider cette
question, et c'est dans ce but que nous avons cru utile
d'attirer l'attention sur cette association morbide, para-
plégie spasmodique progressive syphilitique avec signe
d'Argyll-Robertson.
RECUEIL DE FAITS.
Folie de l'adolescence ;
Par BOURNEVILLE et BELLIN.
La folie de l'enfance et de l'adolescence, malgré quelques
mémoires intéressants et entre autres celui de M. Paul Moreau
(de Tours) mériterait d'être l'objet d'une étude complète.
Nous avons essayé de la faire accomplir par un de nos élèves
qui, malheureusement, pressé par les circonstances ' n'a pu
écrire qu'une ébauche imparfaite. Peut-être reprendrons-
nous cette tâche un jour, en nous appuyant principalement
sur des faits inédits et sur les faits nombreux que nous
avons consignés dans les vingt volumes de nos Comptes
rendus (1880-1899). Ces derniers, observés avec soin, n'ont
cependant pas eu le mérite d'attirer l'attention des auteurs
de publications récentes. Ceci dit, arrivons à notre nouvelle
observation.
Sommaire. - Père alcoolique, emporté. - Grand'père paternel et
Grand'mère paternelle, alcooliques. Tante paternelle prostituée.
- Mère, convulsions fréquentes dans l'enfance, hystérique, internée
deux fois à l'asile de Villejuif. Grand'père maternel, saturnin.
- Grand' mère maternelle morte délirante à quarante-huit ans. -
Grand'oncle paternel cardiaque, mort subitement. - Grand'tante
paternelle, folle. - Un oncle maternel choréique dans l'adolescence.
- Un second arriéré. Un troisième interné si l'Asile clinique.
- Un frère mort de méningite.
Pas de consanguinité. - Inégalité d'tige de trois ans en faveur du
père.
Grossesse : fréquentes querelles de ménage, coups. Vomissements
abondants pendant les trois premiers mois. - Première dent à dix
mois; ci cette époque, convulsions. De dix à douze ans incon-
tinence nocturne d'urine. - Rougeole à quatre ans. - Scarlatine à
quatre ans et demi. - Fièvre muqueuse à neuf ans : délire, léger
' Filibiliu. Contribution iz l'étude de la folie de l'enfance.
FOLIE DE L'ADOLESCENCE. 113
affaiblissement de la mémoire. - Premiers troubles intellectuels,
hallucinations visuelles, folie mystique qui font renvoyer l'enfant
de l'orphelinat religieux où elle était placée. - Description de la
malade à son entrée. En mars 1899, délire religieux, durée dix
jours. Hallucinations. - Fin mars : nouvel accès de délire, ré-
mission au bout de quelques jouis.
En avril 1899, nouvel accès de folie sans délire religieux, durée
quelques jours. - Gité-iso72 qui se maintient jusqu'à ce jour (fin
mai 1900). - Développement de la puberté.
Gassel... (Alberline), née à Paris le 29 octobre 1884, entre dans
le service le 4 mars 1899 (quatorze ans et demi).
Antécédents héréditaires. (Renseignements fournis par sa mère.)
Père, âgé de quarante ans, exerce la profession de cordonnier. Il
vit avec une autre femme, depuis son divorce, prononcé il y a six
ans. Mme Gas... s'est mariée à vingt et un ans, elle connaissait son
mari depuis trois mois. A cette époque, il était sobre, mais quel-
ques années plus tard, il se mit à boire avec excès surtout de
l'absinthe. Dès lors, sa femme fut malheureuse avec lui, il l'inju-
riait, la battait souvent, si bien que, sur les conseils de ses parents,
elle demanda le divorce. Elle ne fournit que peu de renseignements
sur les antécédents pathologiques du pere de l'enfant. Il avait
habituellement une bonne santé, se plaignait seulement de douleurs
de léte de temps en temps. Il était d'un caractère naturellement
emporté.'
Son père, concierge, d'un caractère violent, fait de fréquents
excès alcooliques (vin blanc et absinthe). Sa mère est morte d'une
maladie dans le ventre ( ? ) : elle buvait plus que son mari. - On
n'a connu qu'un oncle paternel, il était très bien, sobre. Trois
frères, l'un souffre d'une maladie de coeur, les autres sont très
bien portants. Une soeur, mariée, a quitté son mari « pour faire
la fête ». - Dans le reste de la famille, on n'a pas connu d'aliénés,
mais les alcooliques abondent.
Mère, trente-huit ans, fleuriste et plumassière, aurait eu dans
son enfance beaucoup de convulsions à la suite desquelles elle se-
rait restée sourde jusqu'à l'âge de quinze ans, époque de l'établis-
sement de ses règles. Cette surdité est intéressante à noter, nous
la verrons réapparaitre plus tard à la suite de crises hystériques.
Elle accuse parfois de la céphalalgie, mais n'a pas de vraies mi-
graines. Elle serait hystérique depuis l'âge de vingt-trois ans à la
suite d'une « peur terrible », causée par son mari ivre qui la
poursuivait « armé d'un tranchet », menaçant de la tuer. Au dé-
but, les crises hystériques étaient très fréquentes,. trois par jour.
Après un traitement par les douches, elles sont devenues plus
rares. A l'aige dé vingt-sept ans, des troubles mentaux sont venus
s'ajouter à ces crises et ont nécessité son internement à l'asile de
Archives, 2' série, t. X. 8
114 RECUEIL DR FAITS.
Villejuif. Voici, à ce sujet, les renseignements qui nous ont été
fournis par M. le Dr Marée ! Briand. Le certificat délivré à la Pré-
fecture de police par le Dr Legras, le 21 mai 1888, était ainsi
conçu : « Affaiblissement intellectuel. Dépression mélancolique
avec excitation par intervalles. Hallucinations de l'ouïe, refus d'a-
liments, idées de suicide. Troubles de la parole. Incohérence et
enfantillage. » -
Le lendemain de l'arrivée à l'Asile Clinique, M. Magnan, signait
le certificat suivant : « Affaiblissement des facultés avec dépres-
sion mélancolique. Excitation passagère. Rieurs, propos incohé-
rents. Inégalité pupillaire. Contusion sur le front, » - Son certi-
ncal de quinzaine porte : « Debilité mentale avec idées mélanco-
liques et idées de persécution. Hallucinations de l'ouïe, surdité. »
En juillet, M. Briand, dans le service duquel elle avait été trans-
férée, formulait ainsi son opinion : a Même état; à la suite d'une
attaque hystérique, surdité. » En octobre, elle était suffisam-
ment améliorée pour être rendue à sa famille. Le certificat de
sortie, délivré le 8 octobre 1898, était ainsi libellé : « Débilité
mentale avec accidents hystériques et idées mélancoliques aujour-
d'hui dissipées, peut être rendue à son père qui la réclame et
s'engage à la surveiller. »
Jusqu'à l'âge de trente-six ans et demi, rien de bien particulier
à signaler, elle avait des crises de temps en temps et parliculiè-
rement au moment de ses règles. A cette époque, elle a été inter-
née de nouveau à Villejuif, sans savoir pourquoi, dit-elle : « Quand
j'ai eu mes idées à moi, j'ai été tout étonnée de me trouver là. »
En réalité, on avait dû la faire interner pour troubles mentaux.
Le 20 mai, on la trouva chez elle, les yeux hagards, demandant
ses enfants, refusant de manger, voulant tout garder pour eux.
Dans la nuit du 21 mai, elle s'est levée, a voulu sortir, on a été
dans l'obligation de la placer (mai 1897).
Depuis cette époque, elle n'a pas quitté l'asile de Villejuif. Le
G juillet 1899, elle est venue nous donner des renseignements sur
sa famille et celle de son mari, elle a très bien répondu à toutes
nos questions, mais elle était dans une bonne période, car depuis
un mois elle a été reprise de troubles intellectuels et d'incohérence
dans les idées.
Son père, sobre, atteint de cataracte, presque aveugle, distribue
des prospectus; avant, il exerçait le métier de peintre en bâti-
ments. Il aurait eu beaucoup de coliques de plomb, des paralysies
«alumines, mais pas d'attaques d'éclampsie. Sa mère est morte
de la poitrine à l'âge de quarante-huit ans, elle était un peu
« idiote », état qui serait survenu à la suite d'une crise de nerfs ( ? ),
- Pas de renseignements sur les grands parents paternels ni sur
le grand-père maternel. La grand'mère maternelle serait morte
« asthmatique ». Un oncle paternel, cardiaque, sobre, est mort
FOLIE DE L'ADOLESCENCE. 1'15
subitement. Un autre oncle paternel est asthmatique, il est ma-
rié, a quatre enfants bien portants ; il a perdu une fille poitrinaire
à vingt ans. Une tante paternelle, sans enfants, est devenue folle
à la suite de pertes d'argent, elle aurait été enfermée il Ville-
Évrard. -- Ni oncle ni tante maternels. Trois fières célibataires,
deux intelligents, dont l'un aurait eu la chorée étant enfant. L'autre,
aliéné, est actuellement interné à l'Asile Clinique. Voici, à son
sujet, les renseignements qui nous ont été fournis par le Dr Paul
Dubuisson :
« Bar-... a été placé trois fois à l'Asile Clinique : La première
fois du 19 juin 1892 au 23 avril 1893 ; la seconde du 27 juin 1893
au 13 mars 1899 ; la troisième du 16 avril 1899 jusqu'aujourd'hui.
Il est toujours entré ici dans les mêmes conditions : Débilité
mentale, idées mélancoliques, stupeur, tendances au suicide.
Quand il est sorti pour la seconde fois le 13 mars 1899, il était
certainement très amélioré, il travaillait depuis longtemps au jar-
din de l'asile et semblait en état de s'occuper et de gagner sa vie
au dehors. 11 est à peine resté un mois en liberté. Depuis le
16 avril 1899 il n'est plus sorti. Pendant quelques années, il a pré-
senté des périodes de lucidité durant lesquelles on a pu le faire
travailler. Mais peu à peu ces rémissions sont devenues de plus en
plus rares et de moins en moins longues et, maintenant, c'est un
type de délirant et d'halluciné chronique. »
Le troisième frère aurait été longtemns affaibli intellectuelle-
ment ; il va mieux et travaille comme tailleur. Une soeur, mariée,
n'a jamais présenté d'accidents nerveux ; elle a deux-filles, l'ainée,
âgée de six ans, aurait eu des convulsions. Dans le reste de la
famille, on n'a pas connu d'autres aliénés, et l'on ne trouve rien
méritant d'être noté.
Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de trois ans en faveur du
mari.
Quatre enfants : 1° L'ainée, fille, seize ans et demi, n'a jamais eu
de convulsions, mais, elle a eu le carreau et est rachitique. Actuel-
lement elle est domestique» et se porte assez bien ; - 2° Notre
malade 3° Garçon, mort à deux ans, rachitique, beaucoup de
convulsions, serait mort de méningite; - 4° Garçon mort-né à sept
mois et demi. La mère en dehors de son internement vit avec un
ami depuis dix ans, elle n'a pas eu d'enfants avec lui. '
Antécédents personnels. A la conception, il n'y avait plus d'en-
tente entre les parents. Le père était très porté aux rapports, sur-
tout quand il avait bu. La mère ne peut préciser si l'enfant a été
conçue pendant l'ivresse. Au cours de la grossesse, elle a reçu, de
son mari, de fréquents coups de pied dans le ventre. Pour se sous-
traire aux mauvais traitements, elle était obligée de se sauver
dans la rue ou de se réfugier chez ses parents. Elle a perdu con-
naissance une fois autour de sa grossesse, elle ignore la durée de
- 16 RECUEIL DE FAITS.
cet évanouissement. Vomissements fréquents pendant les trois
premiers mois ; elle n'a pas eu d'attaques d'hystérie durant sa gros-
sesse. L'accouchement s'est fait à terme, présentation du sommet,
beaucoup d'eau. - A la naissance, l'enfant ne présentait rien de
particulier. - La mère l'a élevée au sein pendant quatorze mois.
Première dent à dix mois, on ignore à quelle époque la denti-
tion a été complète. Début de la marche à neuf mois, de la
parole à onze mois Propre à trois ans seulement, et de dix à douze
ans, elle a présenté de l'incontinence nocturne d'urine. Elle aurait
eu des convulsions après sa première dent, trois dans la même
journée. localisées à la face, n'en aurait jamais eu depuis. Mise
à l'école, elle apprenait bien, plus tard sa mère l'a envoyée en
apprentissage comme giletière, elle travaillait convenablement,
était docile. Après l'internement de sa mère, elle a été placée
dans un patronage rue de Vaugirard, d'où elle a été envoyée dans
un couvent aux Andelys avec sa soeur. Là, d'après celle-ci, « elle
se serait beaucoup ennuyée de sa mère » et elle présenta quelques
troubles cérébraux, sur lesquels nous reviendrons, ce qui fit qu'on
la renvoya au patronage qui la plaça d'office à la Fondation Vallée.
Chez elle, l'enfant n'était pas dévote. Elle était douce, docile,
mais, de temps en temps, depuis l'âge de douze ans, elle riait et
pleurait sans motif. Au cours de sa treizième année, elle aurait eu
plusieurs lipothymies.
Comme maladies infectieuses, nous avons à relever : rougeole à
quatre ans, .scarlatine à quatre ans et demi, fièvre typhoïde à
neuf ans, durée trois mois; aurait eu, au cours de cette fièvre, du
délire durant trois ou quatre jours; consécutivement, légère dimi-
nution de la mémoire. Beaucoup de gourme de dix à onze ans,
otorrhée gauche vers la même époque. Adénite cervicale.
Oxyures, rendus par le rectum et par la bouche.
Les premiers troubles intellectuels se sont montrés pendant le
séjour de l'enfant aux Andelys ; ils ont débuté fin février 1899 et
ont duré six jours. Elle croyait être Jeanne d'Arc ; une de ses com-
pagnes du couvent l'appelait « Albertine d'Arc », elle avait des
visions sacrées : l'une de ses compagnes lui semblait avoir le
visage éclairé et ressembler à un ange, elle voyait le coeur sacré de
Jésus.
On la renvoya à Paris, le 2 mars 1899. Le Dl' Legras donna le
certificat suivant : « Atteinte de troubles intellectuels qui parais-
sent liés à l'hystérie, loquacité, agitation, propos déraisonnables.
Hallucinations visuelles, fréquence du pouls. - Génuflexions
fréquentes pour implorer son pardon du bon Dieu... etc. » Durant
son passage à l'Asile Clinique, elle aurait offert les mêmes symp-
tômes.
Etat actuel à son entrée à la Fondation (4 mars 1899). L'en-
fant présente un visage rosé, elle n'est ni grasse ni maigre, parait
FOLIE DE L'ADOLESCENCE 117 -1
en bonne santé physique. La physionomie semble assez intelli-
gente, elle est mobile, éclairée par deux yeux vifs et brillants.
La peau est blanche, pas de cicatrices, pas de ganglions. Les che-
veux sont bruns, bien implantés.
Le crâne est de volume normal, symétrique. Le visage est
ovale, régulier, le front est moyen, les arcades sourcilières peu
accusées sont recouvertes de sourcils bruns abondants. Les fentes
palpébrales sont normales, symétriques, ombrées de cils longs et
bruns. Les yeux ne présentent pas de lésions ni de troubles de
la réfraction. Iris marron, pupilles non dilatées, réagissant bien à
la lumière et à l'accommodation. Le fond de l'oeil ne décèle rien
de particulier. L'acuité visuelle semble normale, pas de rétrécisse-
ment du champ visuel.
Le nez est long, droit, un peu élargi à son extrémité et très
légèrement dévié à gauche. La rhinoscopie antérieure montre la
narine gauche obstruée par un cornet inférieur très volumineux,
la narine droite n'a rien de pathologique. Les pommettes sont
saillantes, rosées, symétriques. La bouche, de dimension moyenne,
présente au niveau de chaque commissure une petite cicatrice,
dont la mère n'a pu nous dire la cause. Ces cicatrices rappellent
celles qui succèdent aux pustules vaccinales, on n'en peut con-
naître l'origine. Le palais est très ogival, le voile du palais égale-
ment. Les amygdales sont.volumineuses, cryptiques; quelques
végétations adénoïdes latérales; l'amygdale de Luchka recouvre le
tiers supérieur du vomer. La langue est épaisse, mobile : pas de
tremblement de la pointe. Le menton est arrondi; pas de progna-
thisme du maxillaire inférieur. L'enfant n'a pas de troubles du
goût. Les oreilles n'ont rien de particulier dans leur forme :
otite moyenne chronique double, forme fongueuse; il n'y a plus
de tympan, fond de caisse granuleux; audition 25 centimètres à
droite et à gauche. -
Le thorax, bien développé, présente dans la région postéro-infé-
rieure gauche, au niveau de l'extrémité vertébrale des 100, 4 ie et-
12e côtes, une cicatrice de brûlure, de la largeur de la main, pro-
duite accidentellement par de l'eau bouillante. L'enfant était'âgée
de trois ans au moment de l'accident. Au-dessus de la grande Cica-
trice, il en existe quelques autres, petites, arrondies, régulières;
au-dessous, trois autres cicatrices, ovalaires, nettement marquées
situées respectivement au niveau de la 12° côte et des apophyses
costoïdes des 1 ? et 2" lombaires.
La respiration appartient au type, dit thoracique. L'auscultation-
et la percussion des poumons ne dénotent rien de particulier. Il en'
est de même de l'examen du coeur. Rien du côté de la paroi
abdominale, ni du côté des organes intra-abdominaux. ·
. Les bras sont arrondis, normalement musclés, leur attitude est',
régulière. Au niveau de la région deltoïdienne droite, on note une \
118 RECUEIL DE FAITS.
cicatrice de vaccin. - Pas de troubles de la sensibilité. Les
ongles sont normaux, sauf l'ongle du pouce droit qui a été altéré
par un panaris.
Les membres inférieurs sont bien développés, normaux de forme,
de volume et d'attitude. On constate une cicatrice arrondie, sans
caractères, à la portion moyenne de la région antéro-externe de la
jambe droite; une autre cicatrice, allongée, est située au niveau
du tiers supérieur 'de la crête tibiale gauche : cicatrice de plaie
consécutive à une chute. Les pieds sont plats. Les réflexes et les
mouvements volontaires sont normaux. L'enfant résiste bien aux
mouvements provoqués.
Puberté : aisselles, poils noirs assez cours et rares (5 centimètres
sur 2 centimètres). A la face postérieure du thorax, on constate un
fin duvet entre les omoplates. Les seins sont plats, ont un diamètre
transversal de «centimètres et un diamètre vertical de 9 centi-
mètres à droite et à gauche. L'aréole est rosée, 15 millimètres de
rayon, mamelon, 5 millimètres Les fesses sont glabres. - Poils
noirs, fins, très abondants sur tout le pénil dans une hauteur de
7 centimètres sur 8 centimètres. Poils très abondants dans toute la
hauteur des grandes lèvres, moyennement saillantes, laissant voir
le clitoris peu développé et les nymphes; la droite est moitié plus
longue que la gauche. L'hymen, circulaire, parait intact. Poils
assez nombreux au pourtour de l'anus.
La sensibilité générale'. semble normale dans tous ses modes.
L'enfant parait assez intelligente, la parole est libre. Les fonc-
tions digestives et respiratoires s'accomplissent régulièrement.
Dès son entrée à la Fondation Vallée, Gas... est mise en obser-
vation à l'infirmerie. Elle parait effarée, irritable, elle crie dès
qu'on l'approche, menace de frapper; elle fuit la compagnie des
autres enfants, recherche la solitude, refuse de manger, son alti-
tude est spéciale, elle va, se promenant lentement, à pas comptés,
la tête légèrement fléchie sur la poitrine, elle semble concentrée
en une prière qui l'absorbe toute. Elle marmotte avec componction
des oraisons, elle semble prononcer avec un plaisir exquis les
mots : Dieu, Sainte Vierge, Jésus; elle les répète, les savoure.
Tantôt, elle s'arrête, lève vers le ciel des yeux si brillants qu'ils
semblent presque lumineux; le regard reste fixe, extasié, comme
si elle voyait dans le lointain de divines visions. Tantôt, elle prend
leton de l'exhortation, parle des choses saintes aux autres enfants,
leur recommandant d'être bien sages et de ne pas pécher, les assu-
rant ainsi dé la satisfaction divine. Elle chante des cantiques,
baise dévotement une image sacrée qu'elle garde enlre ses mains.
Vient-on à lui demander son nom, elle répond : « Je suis Jeanne
d'Arc, j'ai mission de sauver la France de ses péchés. » Ses com-
pagnes essayent-elles de l'en dissuader, elle se fâche, devient mé-
chante, rageuse.
FOLIE DE L'ADOLESCENCE. 119
Le soir, l'enfant est d'une pruderie exagérée, elle refuse de se
déshabiller en présence de l'infirmière, disant que « Dieu, seul, la
doit voir puisqu'il est partout ». Elle ne veut pas laisser prendre
sa température. Elle regrette son couvent des Andelys, manifeste
le désir d'y retourner, disant : « Il y a des chrétiens là-bas, tandis
qu'ici et au dépôt il n'y en a pas. » Cet état persiste jusqu'au
7 mars.
Le 7, au matin, G... laisse prendre sa température sans diffi-
culté z,6). Dans la journée, elle demande à s'occuper des petits
enfants qui sont à l'infirmerie, elle est douce, maternelle avec eux.
Traitement : bains, hydrothérapie Ses idées religieuses l'occupent
moins, elle semble mieux.
8 mars. Gas... est raisonnable, elle demande à descendre
travailler à l'ouvroir. : .
22.- Depuis le 9 mars, l'enfant a quitté l'infirmerie. Elle partage
les jeux et les travaux des autres enfants, elle est raisonnable et
n'a rien présenté d'anormal depuis qu'elle est avec eux. '
23. Dans la nuit d'hier, Gas... a été très agitée, elle, s'est
mise à parler haut, crier, chanter : elle s'est levée de son lit et a
couru dans le dortoir; c'est avec beaucoup de peine qu'on a pu la
maintenir au lit. Elle a de la diarrhée et gâte dans son lit sans
s'en rendre compte.
Elle est remise à l'infirmerie, elle ne prie plus ni ne parle plus
des choses saintes, elle est surexcitée, prononce des paroles in-
cohérentes. La diarrhée persiste, l'enfant gâte au lit, elle ne peut
s'habiller ni se déshabiller <eule, on est obligé de lui faire sa toi-
lette. Température normale. Traitement : chloral, bromure,
douches.
24. - Même agitation, Gas . se lève pour tirer les cheveux des
autres enfants, leur pincer le nez. On est obligé de la maintenir au
lit. Le gâtisme persiste.
25. L'enfant a passé la nuit à chanter, à rire. Ce matin, on la
trouve assise sur son lit, les yeux brillants, le reeard égaré, d'une
extrême mobilité. Lui dit-on bonjour, elle répond : bonjour, avec
l'intonation qu'ont les mamans lorsqu'elles disent ce mot en
jouant avec leurs petits bébés, puis elle se met à rire aux éclats en
disant : « Tiens ! qu'est-ce que cela veut dire, vous causez drôle-
ment aujourd'hui, je ne vous comprends pas ». L'appétit est bon,
la soif vive, la diarrhée a presque complètement disparu. Pas de
température.. 2
27. Même état d'exaltation. Hier, une dame et ? a soeur sont
venues la voir, elle les a accueillies avec joie, mais ne- leur a=pas
tenu la moindre conversation..Ces dames lui ayant apporté du
chocolat, elle s'en est barbouillé le visage, l'a broyé -entre .'ses
mains et l'a semé de droite et de gauche. Elle a. voulu s'emparer.
t'20, RECUEIL DE FAITS.
de vive force d'une petite médaille que sa soeur portait au cou, on
ne l'a retenue au lit qu'avec difficulté.
- L'enfant ne fait plus sa prière, ne parle plus de Dieu ni des
saints, sa pudeur elle-même s'est évanouie, elle enlève sa chemise,
et se promène nue dès qu'on la quitte un instant. Elle chante, rit,
fait mille grimaces, se lève, fait son lit, se recouche, pour se rele-
ver bientôt, bavarde, crie, gesticule. Toujours même gâtisme. Pas
de température. Même traitement, doses plus élevées.
28. Même état, l'msomnie persiste malgré le chloral. Bains,
hydrothérapie.
29. - L'excitation continue. Ce matin, profitant d'un instant où
elle était seule dans le dortoir, elle s'est mise à défaire tous les
lits, à se rouler sur les matelas, monter sur la table, en chantant
à tue tête : « Oh ! ce qu'on est bête quand on est amoureux ! »
Enfin, fatiguée, elle a demandé à manger, puis s'est couchée et
s'est endormie d'un profond sommeil.
30. -- L'enfant est calme, demande à descendre jouer avec les
autres enfants, les reconnait, parle et joue gentiment avec elles.
Elle est redevenue raisonnable, propre, et fait sa toilette elle-
même.
1er avril. Le mieux s'accentue de plus en plus, l'enfant est un
peu triste, elle pâlit et rougit sans motif. Elle raisonne bien et
semble partager avec plaisir les occupations et les jeux de ses
compagnes.
10. - L'enfant continue à bien aller. Hier, elle a eu la visite
de sa mère et l'a accueillie avec la plus vive joie. Elle est calme,
ne parle plus des choses religieuses, raisonne correctement, s'ap-
plique à tout ce qu'elle fait, parfois elle est triste lorsqu'elle songe
à sa mère et à sa soeur qui sont loin d'elle. ·
Hier au soir, l'enfant était triste, songeuse, son-regard
était brillant, égaré, elle avait l'air de ne pas comprendre ce qu'on
lui disait. La nuit a été agitée, a parlé haut, prononçant des
phrases sans suite. '. - '.
23. Ce matin elle est incapable de faire seule sa toilette. On
dirait qu'elle n'a pas la notion de ce qui se passe autour d'elle.
Elle parle peu, est calme, triste. : 24. Même état, le regard est cependant moins effaré, la phy-
sionomie plus calme.. :
28. - La nuit a été bonne. L'enfant est triste, pleure, dit s'en-
nuyer de sa mère, mais elle est redevenue raisonnable et fait seule
sa toilette. -
- 28. -- .Le mieux persiste et s'accentue.
1er mai. G... semble guérie, elle n'est plus triste, elle joue
et travaille auec les autres enfants.
z20. L'enfant est très appliquée, très obéissante ; elle travaille
bien tant en classe qu'au repassage ou à l'ouvroir.. -.
FOLIE DE L'ADOLESCENCE. 121 1
juillet. - G... semble guérie, elle continue à bien travailler
et à être tranquille.
1er septembre.. - Depuis trois mois, rien à signaler, l'enfant
raisonne et travaille bien.
.Décembre. Gass... s'améliore sous tous les rapports ; elle est
très obéissante, s'occupe avec dévouement des petites filles gâ-
teuses et en prend soin comme une véritable infirmière. Elle s'est
développée physiquement et a une mme superbe. Toute excitation
religieuse a disparu, elle accueille facilement toutes les observa-
tions qu'on peut lui faire et se prête de bonne grâce à ce qui lui
est commandé. Elle est très propre, fait bien sa toilette, est très
décente. Elle recherche avec plaisir l'occasio.n d'être utile. Elle
travaille bien en classe, mais ses progrès sont lents car elle a une.
certaine difficulté pour tout ce qui concerne l'instruction primaire.
Elle a fait beaucoup de progrès en gymnastique.
1900. Avril. - Gass . fait des progrès sous tous les rapports.
On n'a observé aucun trouble intellectuel depuis la fin du mois.
Elle est d'humeur toujours égale, très polie, propre, laborieuse et
obéissante. En un mot, sa conduite est exemplaire. Sa physiono-
mie est éveillée : ses joues sont fraîches et pleines; elle a pris de
l'embonpoint. Sa seule préoccupation c'est d'affermir sa guérison
afin de pouvoir aider sa mère quand elle sera sortie de l'asile. On
a toujours continué les douches, les bains, l'école et la gymnas-
tique.
Puberté. - Poils noirs, frisés, abondants, surtout au sommet et
sur la face interne des creux axillairis. Les seins mesurent 13 cen-
timètres horizontalement et 11 centimètres verticalement. Les
aréoles sont rosées, bien dessinées. Les tubercules de Morgagni
sont apparents. Poils noirs très abondants, longs de 3 à 4 centi-
mètres, dans une hauteur de 8 centimètres environ sur le pénil.
Poils très abondants sur les grandes lèvres qui sont volumineuses;
les petites lèvres sont très développées et proéminentes à la vulve.;
elles sont triangulaires et forment un capuchon clitoridien assez'
accusé; la droite est un quart plus large que la gauche. Le clito.
ris est petit. L'hymen, circulaire, n'est pas déchiré, mais son ori-
fice admet la pulpe du petit doigt. Quelques poils longs sur le.
périnée. Poils assez nombreux autour de l'anus. -
Si l'on compare cette description à la précédente, on voit que-
la puberté qui rie faisait que s'annoncer à l'entrée s'est depuis
rapidement développée. Les règles ont paru, sans aucun accident
physique ou mental pour la première fois du 4 au 9 mars et se
sont reproduites du le, 6 avril, du 2 au 6 mai, du 23 au 28 mai.
30. La guérison parait définitive et Gass... est rendue à sa
mère. Elle a continué ses douches, la gymnastique, les exercices
scolaires, de couture, de repassage et de ménage jusqu'à ce jour.
13 juin. - G... vient avec sa mère. Sa santé ne laisse rien à-
122 RECUEIL DE FAITS. ·
désirer à tous les égards. Elle travaille à la couture et gagne
50 centimes par jour. La mère qui vit depuis dix ans avec un
homme âgé aujourd'hui de-soixante-cinq ans, sobre et laborieux,
n'apas eu de crises depuis sa sortie de Villejuif mais elle est tou-
jours nerveuse. Sa mémoire s'affaiblit. Albertine dit que de temps
en temps sa mère divague.
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES; 123
extravagants, gâtisme, insomnie. Aucune idée mystique.
L'obscénité a remplacé la pudeur. Ce délire maniaque a duré
une semaine. Alors se produit une nouvelle rémission du
30 mars au '21 avril, suivie d'une nouvelle période de dépres-
sion mélancolique mais très atténuée par rapport à la pre-
mière, sans aucune manifestation mystique et sans hallucina-
tions. Elle disparaît complètement au bout de huit jours
(28 avril). -
A partir de là, Gas... n'a plus eu aucun trouble intellec-
tuel. Sa santé s'est affermie sous tous les rapports. La crois-
sance et la puberté se sont développés régulièremeet. Les
règles ont paru sans accident. Le poids et la taille ont aug-'
menté. Jamais nous n'avons observé aucun signe d'hystérie,
contrairement à la mention du certificat de la préfecture de
police.
IV. La température rectale, du 7 au 15 mars n'a point
dépassé 37°,4 et a été le plus souvent au-dessous de 37° ;
du 16 mars au 14 avril, elle a oscillé entre 37° et 37°,6 avec
un abaissement à 3G.,9 et un autre à 36°,8, ensuite elle est
devenue normale. '
V. Le traitement a consisté surtout en bains et en douches
avec l'administration de chloral et de bromure pour com-
battre l'insomnie et l'excitation. La gymnastique, les exer-
cices scolaires, les travaux manuels, employés durant les
rémissions, puis après la dernière période mélancolique, jus-
qu'à sa sortie (juin), ont certainement contribué à affermir la
guérison.
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE
1 PATHOLOGIQUES.
I. Les connexions des tubercules quadrijumeaux supérieurs chez
le lapin ; par W. PAVLOw. (Jozema. de Neurologie, 1899, nU 21.)
En étudiant les dégénérescences consécutives aux lésions des
tubercules quadrijumeaux supérieurs chez le lapin, M. Pavlow a
124 REVUE d'anatomie ET DE PHYSIOLOGIE pathologiques :
constaté que de ces tubercules, portaient un nombre considérable
de fibres nerveuses descendantes reliant cette masse grise aux
masses grises du pont de Varole et de la moelle allongée. Dans
aucune de ses expériences. l'auteur n'a trouvé une dégénérescence
des libres ascendantes se rendant vers le diencéphale ou le télen-
céphale. - G. U.
II. De l'influence de l'alcool sur le travail du muscle fatigué ; par
les U1'5 de l3oecR et GUVZDURG. (Bull. de la Soc. de méd. ment, de
- Belgique, 1899, n° 94 )
Pour étudier les effets de l'alcool sur le rendement du muscle
fatigué les auteurs ont expérimenté sur d'anciens alcooliques aux-
quels ils administraient une ou plusieurs doses de 30 grammes de
rhum. L'instrument qu'ils ont employé pour ces expériences était
le dynamomètre ordinaire : tantôt les sujets se livraient à un tra-
vail ininterrompu, tantôt à un travail interrompu.
Les résultats obtenus ont varié avec les différents sujets : chez
les uns, l'alcool détermine une excitation immédiate ou tardive :
chez-les autres l'action de l'alcool est peu prononcée ou nulle ; il
en est enfin chez lesquels l'alcool détermine dès son ingestion Un
abaissement manifeste du rendement.
Pour' expliquer ces différences, les auteurs admettent qu'il
existe un rapport entre la manière de réagir à l'alcool et l'état
psychique : plus l'intoxication, la dégradation alcooliques sont
intenses, plus les effets de l'alcool diffèrent de ce qu'on ohserve
chez les sujets normaux : au lieu d'augmenter, le rendement du
muscle reste stationnaire ou diminue. G. D.
III. Exagération des réflexes tendineux avec hypertonie, hypoto-
nie et atonie musculaires ; par Van GEIIUCIITE;O¡. (Jouon. de
Neural., 1899, iN" 24.)
On sait que M. Van Gehuchten soutient que, contrairement à
l'opinion généralement admise, il n'y a pas toujours parallélisme
entre le tonus des muscles et l'état des réflexes tendineux, et que,
dans un certain nombre de cas, les réflexes tendineux sont exa-
gérés alors que le tonus normal des muscles est affaibli.
A l'appui de cette opinion, M. Van Gehuchten rapporte dans ce
travail l'observation d'un malade atteint d'hémiplégie avec contrac-
ture, chez lequel on constate une exagération des réflexes tendineux
aussi bien dans les muscles atteints d'hypertonie, que dans ceux
atteints d'hypotonie ou d'atonie complète.
Cette dissociation de l'exagération des réflexes tendineux vis-à-
vis du tonus des muscles, prouve que celui-ci doit se produire sui-
vant un autre mécanisme ou à l'aide d'autres connexions que
celles qui président à la production des réflexes tendineux,
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 125
11 résulte de là encore que l'exagération des réflexes tendineux
ne peut pas être considérée comme un état d'imminence ou d'op-
portunité de contracture. G. DENY.
IV. Les parakinésies; par le Dr de BUCK. (Joumz. de Neurologie,
1899, u° 19.)
Les conclusions de ce travail peuvent être résumées de la façon
suivante : Les mouvements associés tels qu'on les a décrits jus-
qu'ici dans la période post hémiplégique, dans les diplégies, la
paralysie générale et l'idiotie, les parahsies médullaires surtout
unilatérales, les névrites périphériques et même le tabes doivent
être subdivisés en synkinésies et pÉii,(iliyi2ésies.
Dans la première catégorie il faut ranger tous les mouvements
associés et substitutifs, tant homolatéraux qu'hétérolatéraux et
bilatéraux, quine reposent que sur la diffusion de l'influx nerveux
à des centres plus ou moins éloignés de ceux appelés naturellement
a entrer en action, parce que l'effort nécessaire à cette dernière
est plus énergique qu'à l'état normal par suite des lésions qui
augmentent la difficulté de la conduction ou l'irradiation réflexe.
La seconde catégorie renferme les mouvements associés par
trouble de l'association idéo-motrice; dans cette classe rentrent la
paraphasie, la paragraphie et la paracnimie. G. D.
V. La doctrine des neurones et les théories nouvelles sur les
connexions des éléments nerveux ; par VAN Gehuchten. (Journal
de Neurologie, 1S99,n°201.) -
Dans ces derniers temps, le fait de l'indépendance des éléments
nerveux, mis en lumière par Hamon y Cajal et adopté par la
plupart des neurologistes, a été de nouveau constesté par plusieurs
savants, notamment par Apathy, Held, Bsthe et Nissl. Après avoir
exposé aussi complètement que possible la théorie de ces derniers
auteurs, M. van Gehuchten termine en disant que la doctrine des
neurones reste debout malgré l'assaut qu'elle a eu à subir de divers
côtés. Ce qui à ses yeux constitue la meilleure preuve de la vérité
de cette doctrine, c'est ce qui se passe à la suite de la section du
cylindre axe d'un neurone : la dégénérescence vallérienne de
son bout périphérique et la réaction cellulaire avec atrophie du
bout central de l'axone arrêtent précisément les limites du neurone.
S'il y avait, en réalité, des anastomoses d'une part entre les rami-
fications cylindraxiles terminales de différents neurones, d'autre
part entre les ramifications protoplasmiques de divers corps cellu-
laires, la dégénérescence d'un côté et l'atrophie de l'autre devraient
envahir les éléments nerveux voisins. G. D.- --
126 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.
VI. Le système nerveux chez les aliénés ; par J. F. Belstvs.
(British médical Journal, VII, 1898.)
L'auteur passe en revue quelques cas d'osLroporoes, d'hyperos-
tose, et de ramollissement des os. Il décrit les modifications dans
la structure de ces os, et note quelques particularités dans le
régime des malades avant la maladie. C. ScuÉPILOFF.
VII. Remarques sur les lésions observées dans un cas de paralysie
spinale chronique d'origine syphilitique ; par R. F. William-
son. (British médical Journal, Il, 1898.)
Le malade observé présente assez bien le cortège de symptômes
de la paralysie syphilitique spinale d'Erb avec quelques diffé-
rences quant à la marche : incoordination légère des mouvements
des jambes.
Après une étude microscopique assez complète de la moelle l'au-
teur conclut ainsi : Endartérite et dégénérescence hyaline des
artères de la moelle et des méninges, méningite légère, infiltra-
tion gommeuse des cordons antcro-tatéraux dans la région dor-ale
supérieure. Sclérose de la périphérie de la moelle dans les cordons
latéraux dans toute la région dorsale. Sclérose des cordons posté-
rieurs médians dans la région dorsale. Zones sclérotiques irrégu-
lières avec une zone d'infiltration cellulaire (gommeuse) dans la
région dorsale inférieure. Sclérose descendante dans les tractus
pyramidaux croisés lombaires. Sclérose ascendante dans les cor-
dons cervicaux postérieurs médians. C. SCHÉPILOFF.
VIII. La géographie de la moelle épinière ; par BENOIT. (Union mé-
dicale du Canada, n° 11, 1899.) .
Leçon d'ouverture d'un cours sur les maladies du système ner-
veux et en particulier de la moelle épinière. Exposé très clair des
connaissances actuelles sur l'anatomie topographique et la physio-
logie de cette partie des centres nerveux. It. C.
IX. Nouveau myographe; par le Dr BUFALINI. (Lo Sperimeutale,
fasc. 1, 1899.) .
Description d'un appareil de laboratoire aussi simple qu'ingé-
nieux et particulièrement recommandable pour la recherche de
l'action physiologique des médicaments sur la contraction mus-
culaire. Il permet d'obtenir simultanément les tracés graphiques
de plusieurs muscles, de plusieurs animaux en expérience, d'où
la dénomination de « polymiographe » que lui a donné son inven-
teur... . " R. C.
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 127
X. Sur les altérations du système nerveux central dans l'em-
poisonnement lent par le chlorhydrate de cocaïne ; par L. DADDI.
(Lo Sperintentnle, fasc. 1, 1899.)
Des recherches expérimentales et anatomo-pathologiques faites
par l'auteur sur des chiens, il résulte que les altérations du système
nerveux produites par l'empoisonnement lent de la cocaïne sont
analogues à celles qui sont produites par beaucoup d'intoxications
(morphine, arsenic, plomb) ou d'infections généralisées et qu'au-
cune cl'elles ne peut être considérée comme caractéristique de
l'intoxication cocaïuique. L'auteur estime que ces altérations dé-
pendent en partie de l'action directe du poison sur le système ner-
veux, en partie des modifications produites dans les échanges
organiques. R. C.
XI. L'accessoire de Willis est un nerf mixte ; par le
Dr G. PIER \CClNI, (Lo Sperimentale, IV, 1899.)
Considérations critiques et comparaisons analytiques et synthé-
tiques touchant les études récentes de Lubosch et les recherches
antérieures faites par l'auteur, en collaboration avec Staderini.
Ces dernières ont porté sur l'homme, les autres sur différents
mammifères. Toutes concordent pour permettre de considérer
comme certain que le nerf accessoire de Willis ou spinal est réel-
lement un nerf mixte. li. C.
XII. Sur la cause du crétinisme. {Etudes et recherches, par le
Dr V. ALLARA. {Il Morgagni, n° 12, 1899.)
L'auteur, dont les études sur le crétinisme remontent à plusieurs
années, est arrivé à reconnaître, par une observation prolongée,
que : l'idiotie à tous ses degrés, l'arrêt de développement, l'asthé-
nie, la surdimutité, le goitre, la scrofule et le lymphatisme, le
rachitisme et l'ostéomalacie, la folie et le crime sont toutes formes
morbides qui peuvent avoir pour cause le crétinisme, comme elles
peuvent dériver d'autres causes. C'est, d'ailleurs, aujourd'hui, une
opinion conforme à celle d'auteurs les plus distingués, conforme
également aux faits. Il élimine, comme ne pouvant résister à
l'analyse scientifique et par suite inacceptables :
1° La théorie des causes multiples; 2° la théorie de l'insuffisance
d'iode et de brome dans les eaux potables ; 3° la théorie mécanique
de Chabrand; 4° l'hypothèse des miasmes crétinisants; 5° l'opinion
milanaise que les causes du crétinisme et de la scrofule sout les
mêmes; que le crétinisme et le myxoedème sont une même maladie;
6° l'opinion de Virchow que le crétinisme est la conséquence de
ti8 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.
la synostose du crâne intra-utérine; 7° l'opinion de Tanzi que
l'idiotie crétineuse n'est qu'une cérébroplégie.
L'auteur arrive enfin à ne reconnaître comme acceptables et
inexpugnables que deux causes : 1° l'influence héréditaire; 2° l'in-
fluence des eaux potables en connexion avec celle du terrain, par
le moyen des matières inorganiques cédées à celles-là par celui-ci.
C'est là toute la théorie hydro-tellurique. « Lorsque les matières
inorganiques sont absorbées en trop grande quantité pour être
éliminées, elles se déposent dans les organes, produisant un
trouble de nutrition, une détérioration spéciale qui nous apparaît
sous la forme scrofuleuse dont le goitre est un des premiers symp-
tômes et la dégradation intellectuelle un des derniers. « Notre
ancien maitre, Baillarger avait dit longtemps avant : » Toutes les
formes de dégradation organique se rattachent à l'endémie goitro-
crétineuse. » -
Les substances minérales les plus justement incriminées seraient
les silicates àbase alcalino-terreuse (chaux, baryte, magnésie, etc.)
et parmi celles-ci le silicate d'alumine ou craie, très répandu dans
toutes les régions où règne l'endémie crétineuse.
Dans la nature, les roches sont détruites par l'action de l'anhy-
dride carbonique contenu dans l'air et l'eau. Cette observation a
servi de guide dans la voie du traitement prophylactique et cura-
tif des affections crétinoïdes. Eviter l'usage des eaux contenant
des matières inorganiques. Absorber d'une façon continue des sub-
stances capables de décomposer les silicates en produits élimina-
bles : chlorure de sodium, eaux minérales carboniques, gazeuses,
chlorurées, iodiques, etc.
L'auteur développe enfin les résultats de ses expériences et de
son traitement (élimination de la silice parles urines, amélioration
des crétins). I. C.
XIII. Un nouveau cas d'épilepsie avec persistance du thymus, hy-
perplasie lymphatique et hypoplasie vasculaire; par A. P. OIIL-
uacusa. (The Sew York Mcdical J01ll'al, 24 septembre 1898.)
L'auteur rapporte avec quelque détail cette observation parce
qu'elle complète et confirme les résultats constatés dans six autop-
sies d'épileptiques qu'il a'pratiquées récemment. Sur ces six cas,
il a observé quatre fois un état particulier qui était surtout carac-
térisé par la persistance de l'hyperplasie du thymus, une hyper-
plasie très marquée des follicules lymphatiques de l'intestin et de
la rate, une hyperplasie de divers autres tissus 1) inpliadénoïdes. et
un rétrécissement des artères : cet ensemble de lésions représente
bien au point de vue anatomo-pathologique ce que les anciens
auteurs appelaient « le constitution lymphatique » et, sans's'exa-
gérer le' rôle que peut jouer cette constitution au point de vue de-
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 129
la genèse de l'épilepsie, il est permis de regretter que dans les
autopsies d'épileptiques on s'en tienne presque toujours à l'examen'
du cerveau ; en pratiquant des examens nécroscopiques plus com-,
plets, on trouverait peut-être, même dans quelques épilepsies,
secondaires un état somatique particulier au-dessous des manifes-
tations cérébrales de la maladie '. H. de 111USGnAVE-CLaY.
XIV. Un cas de porencéphalie imparfaite, relaté par T. ALDOUS CLINCH.
(The Journal of Mental Science. Avril 1899.) ,-
Les planches qui accompagnent ce mémoire sont indispensables'
à l'intelligence du texte de cette observation histologique très soi-
gneusement et très complètement recueillie ; mais nous pouvons
résumer les considérations générales exposées par l'auteur à l'oc-
casion de ce cas et s'y rapportant. En ce qui touche l'état patho-
logique primitif, les causes les plus fréquentes sont l'hémorrhagie
et l'obstruction artérielle ; en faveur de la première, on a ici les
conditions de la naissance, le siège de la lésion, qui bien qu'au
niveau de la zone de distribution de l'artère sylvienne n'accom-.
pagne ni toute l'artère, ni l'une quelconque de ses branches, l'abc
sence de toute cause de thrombose ou d'embolie, enfin la fréquence
relativement plus grande ; en faveur de la dernière, on a le début
des convulsions sans attaque épileptiforme et le retard dans l'ap-
parition des accès. Si l'on admet l'étiologie hémorrhagique, il est
probable que la lésion remonte au moment de la naissance, et
l'apparition des convulsions neuf mois plus tard n'est pas incom-
patible avec cette idée. Kundrat a montré que les cas intra-utérins
présentent une disposition radiée des circonvolutions autour de
la lésion, et Gierlich a montré que dans la paralysie infantile céré-
brale on ne rencontre pas de dégénérescence secondaire. Dans un
cas publié par Wiglesworth et Campbell et attribué à un trauma-
tisme obstétrical, il y avait une sclérose intense des faisceaux
pyramidaux de la moelle, et aucune trace de cette sclérose'au-
dessus -de la décussation ; et dans un autre cas publié vers la
même époque il n'y avait ni hémiatrophie, ni hémisclérose des
pédoncules et de la moelle, mais le cervelet était asymétrique.
Ainsi des résultats très divers peuvent être amenés par des états
très analogues.
1 Consulter sur la persistance au thymus chez les épileptiques les
statistiques publiées chaque année par 51. Bourneville dans son compte
rendu de Bicêtre et le Progrès médical du 23 juin 1900.
- Sur 80. autopsies d'épileptiques ou d'idiots épileptiques nous avons
noté la persistance du thymus dans il cas, soit 13,7 p. 100 et dans
168 autopsies d'idiots et imbéciles non épileptiques nous avons noté la
persistance du thymus dans 13 cas, soit 7,6 p. 100. Si l'auteur veut bien
parcourir nos observations il verra que nous faisons nos autopsies aussi
complètement que possible. (f3.)
Archives, 2° série, t. X. 9
130 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.
Passant aux faisceaux calleux croisés, l'auteur conclut de l'étude
des faits comme celui dont il s'agit que, outre les faisceaux qui
montent des ganglions de la base vers l'écorce du côté opposé au
travers du corps calleux, faisceaux dont l'existence à été démon-
trée par Ferrier et Turner, il y a d'autres fibres motrices descen-
dantes qui suivent le même trajet. L'examen histologique n'a pas
nettement prouvé l'existence de grosses masses de ces fibres, mais
on peut distinguer beaucoup de libres dont l'examen donne l'im-
pression qu'elles suivent ce trajet, bien que la direction de
leurs impulsions soit naturellement inconnue. Dans le cas dont il
s'agit le corps calleux était plus atrophié dans son troisième quart
que partout ailleurs, ce qui permettrait peut-être de rapporter
principalement à ce point le siège de la lésion.
Enfin l'auteur étudie en terminant le spasme du côté malade :
il rappelle que Charcot a enseigné que, dans l'hémiplégie ordi-
naire, survenant chez l'adulte, la cause de la roideur tardive est
l'irritation des faisceaux moteurs parla cicatrisation qui s'effectue
au siège de la lésion et se propage le long de ces faisceaux. D'autres
auteurs ont montré que la section complète de la moelle détermine
la perte des réflexes au-dessous de la section, et qu'il faut un cer-
tain temps pour qu'ils reparaissent, ce qu'ils font alors sous une
forme exagérée. Dans le cas dont il s'agit (et cela est ordinaire
dans les cas de ce genre) on s'est trouvé en présence d'un spasme
des vaso-moteurs aussi bien que des muscles volontaires, avec en
même temps un abaissement de la nutrition, bien que la sclérose
ait été très légère : on a d'ailleurs rencontré ces mêmes conditions
en dehors de toute sclérose. Si, comme cela est plus que probable,
les rares fibres corticales qui pénètrent dans la moelle viennent de
portions de l'hémisphère non directement envahies, il n'y a guère
de raisons pour admettre qu'une irritation de quelque importance
passe du cerveau à la moelle, et il faut se rattacher à la théorie
suivant laquelle l'état spasmodique est le résultat d'une hyperac-
tivité non restreinte par l'inhibition corticale.
R. DE MUSGRAVE-CLAY.
XV. Un cas de tumeur cérébrale avec autopsie; par G. L. WALLON.
(Brain, vol. XX, p. 109.)
Homme cinquante-trois ans ; troubles présentant d'abord les
signes de la paralysie générale et enfin ceux d'une tumeur, hémi-
plégie droite avec aphasie et hémianopsie. La mort survint au
moment où on songeait à opérer. A l'autopsie : gliome à l'angle
des scissures de Sylvius et de Rolando, non encapsulé, s'enfonçant
jusque dans le centre ovale et remontant jusque sous la deuxième
frontale. L'intervention eût été praticable et peut-être favorable.
F. B.
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 131
XVI. Anatomie pathologique d'un cas d'ataxie héréditaire; par
A. MHYHR et Saucer BROWN. (Brain, vol. 20, p. 276 )
Dans le Drain de 1892, M. Meyer a publié le tableau d'une
famille de 53 personnes dont 24 avaient subi l'ataxie héréditaire
transmise par une aieule. Le cas présenté est le n° VI du tableau.
Femme de soixante-sept ans atteinte à quarante-cinq ans, morte
de diarrhée tuberculeuse ; incoordination des mouvements des
membres inférieurs, plus maltraités que les membres supérieurs,
élocution ralentie mais distincte, vision affaiblie, relâchement au
repos des muscles de la face, exagération du réflexe patellaire,
sensibilité intacte, état mental sain. Autopsie : l'examen microsco-
pique des centres nerveux à l'état frais fait défaut, le cerveau et le
cervelet sont abimés ; ce dernier pourtant parait légèrement
ramolli en son centre, mais sans lésion circonscrite ni corticale et
sans altération de nombre des cellules de purkinje. Tous les fais-
ceaux cérébelleux de la moelle, surtout les directs, sont fortement
atteints ; la neuroglie de la moelle est notablement accrue et dans
toute la moelle, le nombre des corps amyloïdes de Redlich est
énorme. Les cordons de Goll sont dégénérés uniquement dans la
région cervicale. L'auteur tend à rapprocher le type de Marie du
type de Friedreich sous le nom général d'ataxie héréditaire, les
différences cliniques tiennent à l'étendue et à la prédominance en
divers points des lésions et à l'âge où le mal apparaît.
F. f3olsslea.
XVII. Sur les fibres endogènes dans la région lombo-sacrée ; par
A. BRUCE. (Drain, vol. 20, p. 262.)
Sur un cas d'ataxie où tous les faisceaux ascendants des cor-
dons postérieurs étaient complètement dégénérés, même dans les
régions inférieures de la moelle, l'auteur a suivi de bas en haut
avec une netteté rare le faisceau cornu commissural et le faisceau
septo-marginal ou faisceaux descendants restés sains. Au niveau
du cinquième segment sacré, le cornu commissural peu marqué,
n'atteint pas tout à fait la corne postérieure, borde assez épais la
cloison et se continue avec le septo-marginal qui borde la cloison
très volumineuse et atteint la périphérie sans s'y étendre ; cette
disposition continue jusqu'au premier segment sacré ; mais le
cornu commissural atteint la commissure, il prend de plus en plus
d'importance et tend à se séparer du septo-marginal qui ne
fusionne plus avec lui que par une mince couche appliquée contre
la cloison ; dès le cinquième segment lombaire, les deux faisceaux
sont distincts, mais le cornu commissural plus étendu perd en
netteté, taudis que le septo-marginal s'applique encore contre la
cloison dans le tiers postérieur de celle-ci et atteint toujours la
)33 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.
périphérie sans s'y étaler. Au quatrième segment lombaire le
septo-marginal tend à quitter la cloison pour s'étendre à la péri-
phérie, jusqu'à s'éloigner complètement de la cloison et former
une couche appliquée à la face postérieure du cordon. Le cornu
commissural à ce niveau est toujours visible, mais ses rapports
avec la cloison sont aussi de moins en moins étendus, tandis que
ses rapports avec la corne prennent plus d'importance. Enfin
r.u-dessus du dernier segment dorsal, les tleux faisceaux tendent
à se diffuser en fibres isolées semées dans tout le cordon postérieur.
à Bruce croit que le « champ ovale » de Flechsig est constitué
par le faisceau cornu commissural au niveau où il s'applique contre
la cloison formant avec son congénère du côté opposé un faisceau
ovale coupé en deux par le septum, ce qui expliquerait les diver-
gences des auteurs qui ont décrit « ce champ ovale », relativement
au niveau où on le trouve. L'auteur n'ose pas se prononcer sur les
cellules d'où émanent ce faisceau qu'il considère comme probable-
ment destiné aux réflexes des organes inférieurs. F. BOISSIER.
XVHL Sur une disposition anormale des fibres de la pyramide
bulbaire; par van Gehuchten. (Journal de Neurologie, 1900,
n° 7.)
En examinant le bulbe d'un sujet mort d'une hémorragie céré-
brale qui avait détruit le noyau lenticulaire et une grande partie
du bras postérieur de la capsule interne M. van Gehuchten constata
que la pyramide du côté droit était moins volumineuse que celle
du côté gauche. L'examen microscopique montra qu'il ne s'agissait
pas là d'une atrophie et que les fibres qui manquaient à la pyra-
mide plus étroite étaient étalées sur la face ventrale de l'olive
recouvrant cette dernière jusqu'au niveau du sillon qui la sépare
du pédoncule cérébelleux inférieur.
Ce fait prouve que l'examen macroscopique n'est pas toujours
suffisant pour pouvoir conclure à l'existence d'une atrophie
quelconque.
XIX. Un cas de tumeur cérébrale avec autopsie; par van GEIIUCIITFN
et Le Mort. (Journal de Neurologie, 1900, n° 7.)
L'intérêt de cette observation réside dans ce fait que malgré la
paralysie des quatre membres présentée par le malade la voie
pyramidale ou voie motrice cortico-médullaire était anatomique-
ment intacte. Les troubles moteurs ne peuvent donc étre attribués
qu'à une interruption physiologique de ces fibres motrices et
comme cette interruption a dû retentir avec une intensité presque
égale sur les voies motrices des deux côtés du névraxe, les troubles
moteurs ne peuvent pas avoir été la conséquence directe de la
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. L53
lésion, puisque celle-ci n'intéressait que l'hémisphère gauche. La
cause de ces troubles doit être attribuée, d'après l'auteur. à la cotir
pression des voies motrices dans leur passage à travers les deux
pedoncules cérébraux. '
Ce fait prouve donc une fois de plus que les libres de la voie
pyramidale peuvent être comprimées avec une intensité suffisante,
pour suspendre leur fonctionnement, sans que cette interruption
physiologique entraîne ni la dégénérescence vallérienne du bout
périphérique ni la chromolyse des cellules d'origine. , .
Un autre fait qui tend à prouver que c'est bien a la compression,
des pédoncules cérébraux que doivent être rattachés les troubles,
moteurs, c'est l'abolition des réflexes rotuliens qui a persisté
jusqu'à la mort. Une compression des fibres dans Ja capsule
interne aurait entraîné une exagération des réflexes. ( ? 1). : `
XX. Rapports entre les prolongements des cellules nerveuses des
invertébrés et des vertébrés; pdr le D1' Hvvet. (Bulletin de la
Société de médecine mentale de Belgique, décembre 1900.)
L'étude comparée delà cellule nerveuse des animaux des divers,
embranchements conduit à cette conclusion que la cellule nerveuse
est construite d'après un même plan. Le type, cellulaire des
invertébrés n'est pas toujours semblable dans tous .ses détails au
type cellulaire des vertébrés ; mais on peut dire cependant que
chez les divers animaux, les prolongements des cellules nerveuses
se terminent librement et se mettent en rapport avec leurs
voisins de la même manière, c'est-à-dire par simple contact.
G. Deny.
XX Des modifications morphologiques des cellules des cornes
antérieures de la moelle en action; par J. LUXEM13LTIiG. (Neuro-
log. Centralblutl. XVIII, 1899.) -
Quand on soumet à l'action d'un courant induit un nerf sensitil,
les cellules nerveuses motrices changent de formes. Les auteurs
ont néanmoins là-dessus des opinions toutes différentes, faute
d'une méthode uniforme. L'auteur anesthésie de jeunes lapins et
de jeunes chiens dans la proportion de 0,03 (le chlorhydrate de
morphine par kilogramme.de poids.de l'animal (injections
sous-cutanées). Il ouvre par derrière le canal vertébral dans la.
région dorso-lombaire, sépare la moitié droite de la moitié gauche
de l'organe, et supprime, par une coupe transverse, l'influence
des centres situés au-dessus du segment de moelle qui commande
à la fonction motrice des pattes postérieures. Découvrant ensuite
le nerf -crural sur une des extrémités postérieures, il l'incite
au moyen d'un courant faradique capable -de faire nettement
134 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.
contracter la patte excitée. Chaque séance dure une heure, avec
des alternatives d'excitation et de repos de 5 minutes chacune;
pendant les pauses, le nerf est imbibé de la solution physiologique
de chlorure de sodium et recouvert de la- peau. Les électrodes
(fils de platine) sont entourées de tubes de verre. Ceci fait, on tue
l'animal en sectionnant. la moelle cervicale ; le segment inférieur r
de la moelle est enlevé et placé dans le liquide de fixation, c'est-
à-dire une heure dans l'alcool à 96° et 24 heures dans l'alcool
absolu. Coloration à l'aniline (12 heures), au xylol (12 heures) :
immersion pendant 12 heures dans une solution de xylol et paral-
fine saturée (au bain-marie à 37°), enfin dans la paraffine avec
addition d'nn grain de cire. On pratique alors une série de
coupes de 5 t d'épaisseur soudées sur lamelle de mica.
La coloration de Nissl s'obtient en enlevant la paraffine de la
coupe que l'on plonge dans l'alcool absolu, puis directement dans
la solution au bleu de méthyle de Nissl pendant une demie à
une minute sans chauffer : on décolore pendant 2 à 3 minutes dans
la solution d'aniline à 10 p. 100 ; on sèche au papier buvard ; on
éclaircit à l'essence de cajeput, lave au xylol, monte dans le
baume de Canada.
La coloration à la thionine s'effectue à l'aide d'une solution
aqueuse à 1 p. 100; différenciation à l'alcool.
Conclusions : 1° La provision d'énergie potentielle des cellules
motrices de la moelle est contenue dans la substance chroma-
tique ; 2° l'activité de ces cellules s'accompagne d'altérations
morphologiques exprimées par la déchéance de leur substance
chromatique ; 3° le volume du corps de la cellule et celui de son
noyau ne changent généralement pas pendant qu'agit la cellule;
le nucléole augmente de volume ; 4° la situation du noyau par
rapport au corps de la cellule reste la même; 5° les prolongements
protoplasmiques de la cellule participent à son activité; l'épuisement
de la cellule s'accompagne d'altérations de la substance chroma-
tique et non chromatique étendues.
Fr. Pick en excitant les centres corticaux d'un hémisphère vient
de constater que la cellule de la moelle prend un aspect finement
grenu, et que, par conséquent, la déchéance de la substance
chromatique est l'expression fondamentale de l'état d'excitation
de la cellule. (illoiphologiscite Differelzzen zwischen nthenden und
erregten Galzglienzellez. Deutsch. medic. Vochenschr., 1898,
n" 22.) P. IiEaavaL.
XXII. Contribution à la théorie de la méthode de Golgi ; par
H. SMIDT. (Neurologisch. CentrnlGl., XVIII, 1899.)
C'est chez les invertébrés que triomphe la méthode de Golgi.
Apàthy y a vu, dans les grandes cellules, des réseaux formés de
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 135
fibrilles primitives extrêmement fines. Dans un premier type, les
fibrilles continuant le prolongement nerveux s'en vont, comme un
méridien, au pôle de la sphère de la cellule, et s'en reviennent au
prolongement nerveux. Dans un second type, les neurolibrilles
forment deux réseaux reliés entre eux par des fibres radiaires. A
la grille extérieure ou périsomale, formée de fibres délicates,
viennent les fibrilles périphériques du prolongement nerveux ; de
la grille périnucléaire, à grosses fibres, part une fibrille primitive,
épaisse, axile, qui s'en va dans le prolongement nerveux.
Le limaçon traité par la méthode rapide de Golgi, modifiée par
Smirnow se traduit par les détails suivants. Il y a imprégnation
des fibres nerveuses périphériques et de celles du neuropile, mais
il est très rare d'arriver à l'imprégnation totale des grosses
cellules. Le sel d'argent se dépose à l'intérieur de la cellule et
montre les types d'Apâthy f figures).
On voit dans le prolongement nerveux de tout petits grains
nombreux, ordonnés en séries distinctes que l'on peut souvent
suivre loin jusque dans le neuropde; en entrant dans la cellule,
ils s'accumulent en petits amas d'où partent des tractus plus ou
moins épais vers le dôme de la cellule. Ils laissent généralement
le noyau de la cellule libre, et préfèrent la couche externe de
celle-ci; il y en a aussi un grand nombre dans la zone périnu
cléaire. L'épaisseur des petits grains est en raison inverse de la
grandeur de la coupe de la cellule ; ils sont donc très épais au
niveau du col de la cellule et du prolongement nerveux. Plus
minces sont les granulations, plus difficile est-il de les répartir en
groupes, mais très souvent elles apparaissent distinctement en
séries et, dans ce cas, on ne peut se refuser à admettre les groupes
principaux du schéma d'Apàlhy. Leur manière d'être dans le
prolongement nerveux les rattache aux fibrilles primitives.
Ces groupes de granulations sont très probablement les neuro-
somes de Held. Ils correspondent aux réseaux péricellulaires qui
paraissent ne point exister chez les invertébrés ; d'autre part les
fibrilles primitives intracellulaires des vertébrés sont bien plus
épaisses que chez les invertébrés.
D'ailleurs les méthodes de Ileld et Golgi, si différentes l'une
de l'autre, fournissent des résultats analogues. La continuité de
la fibrille primitive colorée chez le vivant ou colorée à l'état
mourant est un fait acquis. Qu'on galvanise l'animal soumis au
bleu de méthylène ou à l'azotate d'argent, voici ce que l'on voit.
Les sels métalliques déposent leur métal à la cathode. Le bleu de
méthylène B. X. ou chimiquement pur, étant une couleur d'aniline
basique, offre aussi pour la cathode une affinité plus grande que
la thionine, le bleu de toluidine, le rouge magenta, la safranine.
Aussi, peu à près l'action du courant voit-on déjà d'épaisses
couches de cette matière colorante à la cathode. Le neurosome
136 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.
subit ainsi une réaction galvanique. Aussi dans la méthode double
de Cajal les neurosomes imprégnés sont-ils très marqués.
Pourquoi n'est-ce pas toute la fibrille, pourquoi n'est-ce que
le neurosome qui réagit au pôle négatif ? Si les fibres nerveuses
composées d'un cordon de fibrilles primitives, se comportent, de
même que les cellules nerveuses des vertébrés, autrement que les
fibrilles nues, cela provient de la structure des premières et de la
çoparticipation d'éléments névrogliques qui sont également im-
prégnables, bien que pas au même degré que les fibres nerveuses.
Les nerfs périphériques enclavés dans les tissus hétérogènes sont
dans de tout autres conditions galvaniques. -
Des centaines de préparations de mollusques n'ont jamais
révélé le réseau de fibrilles primitives intracellulaires autrement
que sous la forme de séries de granulations plus ou moins.denses.
Or, la méthode de A. Golgi agissant d'une manière tout à fait
analogue sur les autres territoires nerveux périphériques ou cen-
traux des vertébrés ou des invertébrés, il est à penser que les
dernières fibrilles élémentaires qui doivent, à nos yeux, repré-
senter les prolongements terminaux des dendrites et des den-
draxones, sont partout dans le système nerveux central révélées
par le sel d'argent sous la forme de neurosomes isolés. L'impéné-
trable embrouillement de ces fibres dans le système nerveux
central des vertébrés nous empêche et nous empêchera toujours
de distinguer la connexion de ces granulations avec chacune des
fibrilles séparément. Ce dernier problème restera forcément obscur
dans l'image fournie par la méthode de Golgi.
P. Keraval.
XXIII. Du poids du cerveau le plus lourd décrit jusqu'ici ; par
G ? C. VAN WALSEN. (Neurolog. Cenlralblalt., XVIII, 1899.)
Il s'agit d'un idiot épileptique de 21 ans n'ayant marché qu'à
l'âge de 4 ans, très peu développé, d'humeur très mobile mais
assez souvent expansif. Il n'avait à son usage que peu de mots et
ne connaissait, en dehors de sa' famille, que quelques personnes
de son entourage journalier. Il se maintenait assez propre quand
oh s'occupait bien de lui, et généralement s'amusait avec un jouet'
très simple. Aucune anomalie physique, sauf la démarche spasmo-
dique, l'exagération des reflexes tendineux aux 4 membres. Il
parlait. Il était sujet à des attaques d'épilepsie qui finirent par le
tuer. Taille'l m. 40. --
On constate à l'autopsie un cerveau géant, dépourvu d'altéra-
tions macroscopiques, à circonvolutions aplaties, dont le poids
total, avec les membranes, est de 2.850 grammes. - : --
, Après durcissement dans la liqueur de Muller : -- ? ,
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 137
138 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
tivité contractile (section du nerf), moins intenses là où le tonus
et la contraction réflexe persistent encore (section de la moelle),
mais le processus est le même. La genèse de ces atrophies ne peut
s'expliquer, ni par un trouble de l'activité trophique de la cellule
nerveuse médullaire, ni par des perturbations vaso-motrice s
engendrées par la section de la moelle ou par l'interruption du
faisceau pyramidal dans son trajet intra-cérébral. L'équilibre
nutritif d'un muscle est fonction de l'activité de 'ce muscle. Il est
plus que probable que l'intégrité anatomique d'une cellule com-
plexe comme la fibre musculaire est intimement liée à son inté-
grité fonctionnelle ; une atteinte portée à cette dernière ne reste
pas sans retentir sur la vitalité de la substance striée. Dans ces
conditions, le rapport étroit constaté par l'auteur, entre l'intensité
'du processus atrophique et le degré de non-fonctionnement, s'ex-
plique facilement. A. FENAynou.
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
XVII. Du maintien au lit des aliénés; par A. V. TnAi');zN;KOw.
Portée thérapeutique du maintien au lit des aliénés; par V.-P.
Ossipow. (Oborénié psiclliatrii, nos 3, 4, 5, 6, 1898.)
Ces deux mémoires pleins d'intérêt au double point de vue de
l'histoire de la question et de son analyse scientifique, constituent
le développement des communications faites par ces auteurs à la
société des neuropathologistes et aliénistes de la clinique de Saint-
Pétersbourg. (V. Progrès médical, 18 juin 1898.)
M. Trapeznikow raconte comment il s'y est pris pour appliquer
l'alitement dans le service deshommes de M. Bechterew et combien
le système a changé l'aspect général de l'établissement à son
avantage; il convient cependant de multiplier les chambres d'iso-
lement et de conserver les cellules en y installant l'alitement à
portes ouvertes. En somme il a été alité vingt-neuf malades ainsi
au'il suit : -
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 139
L'auteur a eu soin de faire de nombreuses contre-épreuves,
(interruption de l'alitement et réalitement) et de procéder à unie
étude scientifique minutieuse. '
Conclusions : 1° L'alitement, méthode de traitement depuis
longtemps connue, ne doit pas être appliqué indistinctement à
tous les entrants, par la force; 2° 11 ne faut pas croire que l'on
puisse arriver à réduire les violents et les agités en les noyant dans
la masse des malades tranquilles, en les couchant à côté des
tranquilles alités; le résultat est tout à fait inverse ; 3° L'alitement
semble ne pas devoir s'appliquer aux délirants chroniques qui
paraissent, par ce régime, tendre à l'aggravation; 4° Pendant
l'alitement le poids des malades diminue sans que l'on constate
parallèlement une amélioration mentale; 5° L'alitement favorise
l'onanisme ; 6° Le nombre des heures de sommeil augmente dans
les vingt-quatre heures, mais parfois, au detriment du sommeil de
la nuit ; 7° L'alitement modifie peu la quantité des narcotiques
nécessaires aux malades; 8° L'alité parait aller moins souvent à la
selle que le non alité; 9° L'alitement diminue le nombre des
collisions des malades entre eux et avec les infirmiers, et calme
les sections des violents ; 10° Le meilleur moyen d'habituer les
violents et les agités à l'alitement, c'est la chambre séparée ouverte
et la suppression de toute contrainte ; il faut les inviter à se coucher
par l'exemple, les laisser aller et venir en costume de nuit; 11° La
spécificité des malades à l'alitement doit être rigoureusement
individualisée.
M. Ossipow a procédé dans les mêmes conditions à peu de chose
près que M. Trapeznikow et pour son mémoire et pour l'installa-
tion de l'alitement dans le service des, femmes de M. Bechterew.
Il l'a appliqué à 13 malades.
140 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
est contre-indiqué ; 2° L'alitement diminue assez souvent le poids
de la malade ; c'est l'effet probablement du séjour continu au lit ;
3° Il n'améliore pas le sommeil et .n'exclut pas les soporifiques;
4° Il nuit à l'évacuation intestinale; 5° Les malades s'habituent
tellement au lit que celles que l'on remet au régime ordinaire
recherchent les occasions de se coucher le jour, tandis que quelques-
unes, dans les premiers temps, redemandent carrément à se
coucher ; 6° Il ne convient pas d'aliter trop longtemps les malades ;
il convient au contraire, dès que cela est possible, de les remettre
au traitement ordinaire; 7° Il est plus facile, par l'alitement, de
soigner les gâteuses, de surveiller les aliénées ; 8° Il est plus difficile
de s'opposer à l'onanisme ; 9° Toutes les malades se sont, sans
qu'il fût nécessaire d'employer la force, soumises à l'alitement,
quelques-unes même très volontiers ; 10° Des 13 aliénées de formes
mentales différentes soumises à l'alitement cinq ont guéri, soit
38,5 p. 100 ; si on en élimine la démence secondaire (3 cas) on
arrive à une proportion de guérison de 50 p. 100; 11° Aliter tous
les malades sous prétexte que c'est dans l'intérêt de la tranquillité
.et du bon ordre de l'asile ne saurait constituer un argument
acceptable parce qu'il faudrait alors avoir recours à la force
brutale ; 42 On ne saurait à l'aide d'un si petit nombre d'obser-
vations dégager les véritables indications en faveur de l'alitement
en tel ou tel cas, au point de vue mental ; il ne faut pas perdre de
vue que, dans les cas où l'alitement a agi favorablement sur les
malades, celles-ci s'y étaient volontiers soumises. P. KERAVAL..
XVIII. Le traitement par le lit à l'asile des aliénés de Perm;
par J. B. Fischmann. (Obozrénié psichiatrü, n° 4, 1899.)
M. Fischmann l'aurait installé sans grandes difficultés dans le
service des hommes. L'alitement n'exige par son procédé ni mise
en scène spéciale, ni une énorme quantité de serviteurs. Il l'a
d'abord organisé dans le quartier des agités où sont reçus d'ordi-
naire les nouveaux entrants ; il joue donc le rôle d'une section
d'observation. La grosse difficulté fut de faire coucher ceux qui
avaient d'anciennes habitudes ; il fallut employer, pour quelques-
uns seulement, le maintien au lit par la force à l'aide des serviteurs,
mais ce fut peu important car cette section n'exige pas actuellement
plus de 1 infirmier par six malades. On tâtonna pour le groupe-
ment convenable des malades de chambre en chambre ; beaucoup
se couchèrent volontairement. On prescrivit, au besoin, à ceux qui
se laissaient persuader difficilement, une médecine de circonstance,
et tout fut dit. Quant aux nouveaux entrants ils suivirent le
mouvement, d'aucuns même faisant entrer l'alitement dans le
cercle de leurs idées délirantes.
. L'alitement fut ensuite installé au quartier des violents et des
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 141
aliénés dangereux. Plus de bruit dès lors, plus de disputes, plus
d'accidents, plus de drames ; diminution des mesures restrictives,
observation des aliénés plus aisée.
Puis vint le tour du quartier des faibles et de celui des chroniques
irritables non travailleurs. L'alitement diminuant l'excitabilité,
l'isolement disparut. On n'employa plus les cellules que rarement
et en maintenant les portes ouvertes. Tranquillité, bon ordre, tel
devint le résultat. Voici par quartiers le nombre des malades et
les formes morbides en traitement en septembre 1897.
142 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
premiers temps; une fois que le régime est commencé, il n'est pas
enfreint parce que tel ou tel malade se lève pour quelques instants.
La plupart des malades, au reste, se couchent et demeurent
couchés si volontiers qu'on a parfois de la peine il les mettre sur
leurs jambes : d'aucuns pour ainsi dire y répugnent. On joint à
l'alitement la mise en oeuvre de tous les agents physiques, chimi-
ques et psychiques indiqués.
L'alitement permet de diminuer les dimensions, des salles de
jour, de restreindre le nombre des cellules à 1 pour 15 agiles, de
transformer les cellules en chambres d'isolement (on ne conser-
vera qu'une à deux cellules du type ancien), de diminuer le
nombre des serviteurs parce que la surveillance est plus facile et
les voies de fait sont plus rares et moins graves. A ce dernier
égard cependant 1 infirmier pour 6 malades ne suffit pas. En
effet le dispositif le plus efficace, c'est un dortoir moyen bien
éclairé et bien ventilé pour 8 à 10 malades, autour duquel sont
installés 1 dortoir ou 2 dortoirs de 4 à 5 lits; or,' ontre les infir-
miers de service dans le dortoir, il en faut en dehors et dans les
autres salles. P. KERAVAL.
XIX. Quatorze mois d'application du maintien au lit dans les états
d'excitation psychique ; par Lion : '( Obozrénié psichialrü ,
no8 4, 5, 6, 1899.)
Le service des hommes de l'hôpital des aliénés du Zemslwo de
Samarsky comprend 210 à 220 malades. Depuis le 1er janvier 1898,
on a dans la section des agités et violents, installé le traitement
au lit pour tous ceux qui présentent de l'excitation. On y a
organisé un groupe de pièces destinées à la surveillance continue
par fractionnement des malades ; l'alitement dans les cellules des
insociables généralement tranquilles; quatre chambres isolées
pour les agités en permanence qui ne se soumettent pas au
traitement au lit; 2 cellules pour les aliénés relativement calmes,
mais agressifs. On soigne de cette façon 146 patients, à l'aide de
20 serviteurs; garde continue des assistants. L'auteur se loue de
ce système.
Aucun de ces malades n'a été couché par la force ; l'alitement a
été obtenu par suegestion, silence, action morale, agrément du
lit, les bains chauds, quelquefois un médicament calmant, un
court isolement dans les cas extrêmes, l'évacuation opportune des
intestins trop pleins. On laisse du reste, les premiers jours, les
malades récalcitrants s'asseoir sur leur lit, aller et venir, s'impré-
gner graduellement de la mise en scène. Quelquefois, on les voit
aller humblement se coucher dans une pièce séparée. En cas de
refus persistant, on place le lit dans une cellule dont on ne ferme
la porte que si le malade est agressif.
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 14
Alitement au surplus ne veut pas dire être étendu comme une
momie jour et nuit, le calme s'obtient simplement 'avec une
qninzaine d'heures de décubitus ; le reste du temps le malade se
peut asseoir dans son lit, passer quelque temps dans la salle de
jour, se promener, aller même à l'air. On peut dire que ce
système a évité la cellule, l'isolement en cellule, à la pluralité des
146 agités en question, et a permis de remplacer les cellules par
des chambres d'isolement, sans l'isolement.
Ce sont les épileptiques qui nécessitent le maintien de 4 cellules
vraies, dont deux seulement, en moyenne, sont fermées. Ce sont
eux qui se soumettent difficilement à l'alitement, qui sont le plus
agressifs, à raison de l'état de leur connaissance, de l'impétuosité
de leurs impulsions. On est obligé de les coucher dans une
chambre séparée, et, dans les moments critiques, de fermer la
cellule. Inversement, l'épileptique, peu suggestible , obnubilé
c'est-à-dire séparé du monde extérieur, échappe aux dangers per-
nicieux de l'isolement.
L'alitement calme l'excitation psychique surtout celle qui est
d'origine psychomotrice. Les 146 agités se sont tous calmés, soit
rapidement, soit graduellement. C'est ce qui a eu lieu, dans les
formes mentales suivantes :
144 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.'
des paralytiques, des confus et des alcooliques, c'est que ces trois
espèces de malades prédominent ; c'est aussi chez eux que l'alite-
ment a agi le plus favorablement'.
L'alitement est continué jusqu'à ce que l'excitation ait disparu.
Il n'a pas fallu pour cela plus de 10 jours pour 74 malades; il a
fallu, de 3 à 4 semaines pour 38 d'entre eux ; il a fallu plus de
4 semaines pour 34, plus de 3 mois pour 11. Autant dire que,
quelle que soit la forme mentale, deux ou trois semaines au plus
d'alitement suffisent. Ceci indique en même temps que l'alitement
n'a pas besoin d'être prolongé.
Etude comparative de la mortalité dans le service des hommes
(alités) et dans le service des femmes (non alitées).
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 141)
Conclusions : 1° Avec l'alitement disparait la guerre à l'asile ;
2° les instincts de destruction s'atrophient (démonstration mathé-
matique) ; 3° la propreté des malades augmente et avec elle la
pureté de l'air noso-comial et l'hygiène de l'aliéné ; 4° les
malades, plus tranquilles, dorment mieux et sans narcotiques
(tableau de la consommation des soporifiques) ; 5° l'isolement est
réduit au minimum : 4 cellules suffisent, et au delà, pour
220 hommes; et encore n'en occnpe-t-on que deux, de plus non
constamment; 6° l'asile ressemble presqu'à un hôpital ordinaire.
P. KEHAVAL.
XX. Hystérie et suggestion. (Académie royale de Médecine de
Madrid.)
j /
Sur une communication de M. G. Alvarez, une longue discussion
qui a duré plusieurs séances s'est ouverte à l'Académie de Madrid
L'auteur, en désaccord avec les théories de la Salpêtrière, va plus
loin que l'École de Nancy et s'il reconnaît le danger de l'hypno-
tisme livré il des mains non scientifiques, il en exalte très haut la
valeur curative et attribue ses effets à un « fluide radiant qui
siège dans le cerveau de l'opérateur. MM. Morejon, Iglesias, San
Martin, Otz et Mariant se sont montré d'un avis tout à fait diffé-
rent. L'hystérie relève avant tout du traitement par les agents
physiques, l'influence du milieu, les reconstituants aidés par un
emploi rationnel des calmants appropriés, l'hypnose n'est qu'un
utile adjuvant et ne doit intervenir qu'en toute nécessité, et comme
thérapeutique symptomatique. L'hystérie est toujours difficile à
guérir et c'est à la prophylaxie par l'hygiène de l'enfance qu'il faut
demander une défense contre elle. Il n'y a d'ailleurs pas un trai-
tement exclusif de l'hystérie, celui-ci doit varier selon l'âge et
même selon le sujet et selon toutes soi tes de conditions; la. sug-
gestion est vieille comme le monde, on l'applique sans s'en douter,
elle a toujours secondé la thérapeutique sans avoir besoin pour en
expliquer les ell'ets d' « un fluide radiant ». Celui-ci nous ramène
inutilement aux « esprits vitaux », au « fluide magnétique animal»,
au spiritisme et autres fables des époque» dogmatiques. La valeur
de la suggestion à l'état de veille suffit à montrer l'exagération de
la supériorité exceptionnelle attribuée à l'hypnotisme, qui doit être
retenu comme thérapeutique de réserve seulement, (llevisla de
Med. y Cir. Net., liol 695 à 603.) F. B.
XXI. Traitement par la suggestion des perversions sexuelles et de
l'onanisme; par W. M. BECil1 ERE\V. (O&ozl'é11lé psichialrii, n° 8.
1898.)
Voy. Cnilralblatt f. Neruerzheilk., 1899 : déjà analysé. P. K.
Archives, 2' série, t. X. 10
1 W REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.
XXII. Contribution au traitement par la suggestion de l'inversion
du sens génital et de la masturbation ; par de Schrenck. -
iVOTZING. - Contribution au traitement des anomalies dégéné-
ratives de l'instinct sexuel ; par \V. de Bechterew. (Centralblatt
f. Nel'venheilk., XXII, N F. X, 1899 )
M. de Schrenck reproche au professeur russe de s'être donné
comme l'inventeur de cette méthode de traitement, dans l'ona-
nisme et l'homosexualité. Il lui cite la bibliographie antérieure à
ses articles russes et allemands. M. de Bechterew se défend de
cette prétention ; il a simplement voulu publier deux observations
intéressantes de nature dégénérative. P. Keraval.
XXIII. Sur le traitement de l'onanisme par la suggestion hypno-
tique ; par W. M. Bechterew. (Obozrénié 1)sich;tti'it, n° 3, 1899.)
Lorsque la volonté est à ce point affaiblie que l'homme ne puisse
se défaire de ses mauvaises habitudes, l'hypnotisme est le moyen
le plus fécond. Voici chez une fillette de sept ans un résultat sur-
prenant. Observation prise par la maman. « Que ne connaissais-je
ce moyen, alors que j'étais professeur à Kasan, j'eusse sauvé
une petite fille de cinq à six ans qui s'adonnait à l'onanisme
partout : Je l'eusse sauvée ! » P. EEHAVAL.
XXIV. Importance de l'emploi concurrent de l'hypnotisme et
d'autres moyens dans le traitement de 1 ivrognerie habituelle ;
par \vil. Bechterew. (Ubozl'enie psichiatrii, n° 1, 1899.)
Même article en allemand in Centmlbl. Nervenheilk., 1899. Déjà
analysé. P. KERAVAL..
XXV. L'importance de l'addition de l'adonis vernalis ou de la
digitale aux bromures et à la codéine dans le traitement de
l'épilepsie ; par W.-M. Bechterew. (06osrénié psichiutrü, 111,
n° 9, 1898.)
Voyez Neurogloisches Centralblatt. XVII, 1898. Analysé.
P. lE[tAVL.
XXVI. Le traitement de l'épilepsie par l'emploi simultané des
bromures et de l'adonis vernalis ; par 1 .-S. Tekoutiew. (Obo-
zrènié psichiatrii, 111. n° 3, 1898.)
Observation d'un petit garçon de dix ans. Le mélange de bro-
mure, d'adonis vernalis et de codéine fait cesser les attaques, et,
en outre, rétablit les facultés intellectuelles très amoindries ainsi
que le développement physique régulier. P. IEnA1'AL.
REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. '14'7 i
XXVII. Le traitement des enfants idiots et arriérés en Belgique ;
par le Dl LEY. (Bulletin de la Société de médecine mentale de
Belgique, décembre 1899.)
\
La Belgique, dit l'auteur de ce travail, est très en retard sur les
autres pays en matière d'éducation des enfants idiots et arriérés.
Il propose, conformément aux voeux récemment formulés par la
Société de médecine mentale, de créer :
1° Pour les idiots et les imbéciles des colonies pourvues d'asiles-
écoles : dans ces asiles-écoles, seront traités les idiots valides ; ils
y seront classés suivant leur degré d'é&ucabtlité. Les idiots convul-
sivants y seront complètement séparés des autres. Le régime du
demi-temps (laolf-lime system) sera appliqué avec avantage dans
ces asiles-écoles. Les colons seront autant que possible employés
aux travaux champêtres et hospitalisés dès que le diagnostic aura
pu être posé; ? Pour les arriérés proprement dits, des écoles d'enseignement
spécial séparées des écoles ordinaires ;
3° Pour les épileptiques et les convulsivants de toute nature, des
écoles complètement séparées des autres. G. D.
XXVIII. Résultats du traitement chirurgical des tubercules céré-
braux ; par le D' Treyer. (Rev. méd. de la Suisse romande, 1900,
nos 5 et 6.)
Sur les 1G observations, dont 2 inédites, rapportées dans ce
travail, 12 concernaient des tubercules du cerveau et 4 des tuber-
cules du cervelet.
Sur les 4 malades opérés pour des tubercules du cervelet, 2 sont
morts quelques heures après l'opération, et 2 quelques mois après,
de récidive.
Sur les 12 malades opérés pour des tubercules du cerveau,
1 est mort de shock, 1 six semaines après l'intervention, 3 au bout
de quelques mois et 7 ont eu une survie de 5 mois à 7 ans. Onze
fois la tumeur recherchée et trouvée avait son siège dans la région
rolandique ; une fois elle était située dans le lobe frontal, sa
localisation put être déterminée avant l'opération grâce à un abcès
froid du crâne siégeant au niveau de la tempe.
Dans la majorité des cas le diagnostic de tuberculome avait été
considéré comme très probable, soit à cause des anamnestiques,
soit en raison de la coexistence de lésions tuberculeuses dans
d'autres organes. '
Malgré les résultats opératoires peu encourageants énoncés
ci-dessus, l'auteur estime que l'extirpation des tubercules du cer-
veau est justifiée, chaque fois qu'il ne s'agit pas d'un cas de tuber-
culose avancée ou généralisée. G. DENY.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
I. Le diagnostic différentiel de l'apoplexie hystérique et de
l'apoplexie organique ; par .1. CROCQ. (Jourw. de Neurologie, 1899,
ni 1.) 9
L'auteur rapporte deux faits qui prouvent que l'on aurait tort de
considérer le diagnostic de l'apoplexie hystérique comme -facile.
En tenant compte des antécédents et de l'âge du malade, de la
cause et des caractères de l'ictus, de l'évolution des paralysies et
des anesthésies, on pourra dans un grand nombre de cas, arriver
à une conclusion exacte, mais il en est d'autres dans lesquelles le
diagnostic pourra présenter des difficultés insurmontables. G. D.
IL Un cas d'ophtalmoplégie orbitaire ; par J. Crocq. (Journ. de
Neurologie, 1899, n° 23.)
La malade qui fait l'objet de cette observation était atteinte d'une
paralysie de tous les nerfs du globe oculaire associée à une névral-
gie du maxillaire supérieur et de l'ophtalmique de Villis.
Cette ophtalmoplégie, d'après M. Crocq, ne peut être nucléaire,
car dans ce cas les altérations seraient limitées au domaine des
nerfs ayant des connexions cellulaires centrales ; elle n'est pas non
plus extra-orbitaire, car la paralysie des deux .branches orbitaires
du trijumeau ne pourrait dans ce cas. exister. La lésion doit fata-
lement siéger dans la cavité orbitaire et ne peut être qu'une com-
pression ou une altération névritique rhumatismale. G. D.
III. Un cas d'amyotrophie progressive d'origine traumatique ; par
F. Savo. (J01l7'll, de Neurologie, 1899, n° 23.)
Il s'agit d'un cas d'amyotrophie de la jambe droile avec dimi-
nution de la sensibilité survenue progressivement deux mois et
demi après un traumatisme grave ayant porté sur la poitrine et
la colonne vertébrale.
D'après l'auteur ces accidents ne sauraient être attribués à une
lésion médullaire : le diagnostic différentiel doit se limiter entre
une affection névritique et une amyotrophie progressive avec des
phénomènes surajoutés d'anesthésie hystéro-neurasthémque d'ori-
gine traumatique. G. D.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 149
IV. Un cas de poliomyélite aiguë en voie de guérison; par J. Crocq.
(Voum. de Neurologie, 1899, n° 23.) .
Le sujet de cette observafion est une malade qui trois mois
après avoir fait un violent effort, est atteinte d'une paraplégie
flasque incomplète. avec abolition des réflexes et douleurs lom-
baires. Quinze jours après apparaissent l'incontinence d'urine et
des matières fécales, de la fièvre puis des eschares. La fièvre tombe
au bout de huit jours, bien que les eschares continuent à augmen-
ter ; la malade présente un jour un état comateux inquiétant, puis,
progressivement, tous les phénomènes s'améliorent, l'incontinence
disparait, la mobilité revient, les eschares guérissent et il n'y a
plus actuellement qu'une parésie des membres inférieurs avec abo-
lition des réflexes.
L'auteur rejetant l'hypothèse d'une polynévrite et d'une héma-
tomyélie croit pouvoir attribuer ces accidents à une myélite, ayant
évolué lentement au début, étant subitement devenue aiguë pen-
dant huit jours, et ayant ensuite marché progressivement vers la
guérison.
En ce qui concerne la localisation du foyer on doit admettre
qu'il siégeait au niveau du renflement lombaire et qu'il a atteint
les cornes antérieures, car tous les phénomènes se sont bornés à
des troubles moteurs et sphinctériens. 11 s'agirait donc d'un cas de
poliomyélite en voie de guérison. G. D.
V. Phénomène singulier de l'ataxie locomotrice; par le Dr Free-
man-F. 1'ann. (Journal of nervous and mental discale, février
1899.)
Malade atteint d'alrophie double de la papille. Il présente le
signe de Bomberg d'une manière très accentuée, et tombe aussitôt
qu'il ferme les yeux. Il est âgé de cinquante-trois ans, et sa mala-
die a commencé il y a quatorze ans avec diminution graduelle de
la vue. Le Dr H ? I. Thomas, de Baltimore a rencontré ce signe de
Romberg deux fois chez des aveugles. Le D1' Leszynsky rapporte
le cas d'une femme tabétique aveugle, qui présentait une ataxie
considérable quand elle réunissait ses pieds, mais, dans son cas.
au moment où elle fermait les yeux l'ataxie disparaissait. P.
VI. Hémiplégie et aphonie hystériques avec symptômes men-
taux, par S. Il. B. Montgomery. (The Journal or Mental Science,
juillet 1847.)
Homme de quarante-deux ans, marié, boxeur renommé, grand bu-
veur ; bonne santé. En novembre 95 perte de connaissance, avee
mouvements spasmodiques desbras etdesjambes. En revenante lui,
1DO REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
il ne peut pas parler, mais se fait comprendre par signes. Le bras
et la jambe droits sonttrès affaiblis. Pendant plusieurs jours, séries
d'attaques convulsives qui finissent par disparaître, mais laissent
la jambe et le bras droit paralysés. Alité jusqu'en 1896, il reprend
graduellement l'usage de ses membres, mais la voix reste entiè-
rement perdue. En octobre 1896, à l'hôpital, faradisation intra-
laryngée ; résultat, récupération immédiate et complète de la voix,
suivie d'un accès de manie aiguë dans lequel il veut se jeter
par la fenêtre et se débat violemment contre ceux qui veulent l'en
empêcher. Il entre à l'asile en élat d'excitation maniaque ; dès
le lendemain il est calme et raisonnable. Vision de l'oeil droit légè-
rement abaissée; surdité à droite. Le bras droit est atrophié et un
peu rigide : contracture des 3° et 4' doigts de la main droite. Atro-
phie et roideur de la jambe droite où les tentatives de flexion sont
très douloureuses. Héflexe rotulien égal des deux côtés, mais
exagéré. Amélioration rapide.
Ce cas est surtout intéressant par le développement d'accidents
hystériques chez un homme de 45 ans, menant une vie très active
et qui selon toute apparence aurait du être aussi éloigné que pos-
sible de toute prédisposition^ l'hystérie. R. DE Musgrave CLAY.
VII. Contribution à l'étude de l'hystérie de l'enfance telle qu'on
l'observe aux Etats-Unis d'Amérique; par HERMAN, B. SIIEFFIELD.
(The New York Médical Journal, 17 septembre et z septembre
1898.)
Les conclusions de ce travail sont les suivantes :
f° L'hystérie est une neuro-psychose qui se manifeste par un
ensemble de troubles fonctionnels de l'un des centres ou de tous
les centres les plus élevés (intelligence, sensibilité et volonté) avec
altérations secondaires dans les centres inférieurs, le tout ayant
pour substratum un état morbide de la substance nerveuse. La
question de savoir si cet état morbide a pour siège le neurone, la
cellule nerveuse, la fibre nerveuse, ou bien tous ces divers élé-
ments, demeure encore sans solution précise.
2° L'étiologie de l'hystérie chez l'enfant comme chez l'adulte est
très obscure. Tout ce qui abaisse le taux de la vitalité du sujet
agit comme cause prédisposante. Le rôle joué par l'hérédité dans
l'étiologie de l'hystérie a été surfait. Il faut attacher beaucoup plus
d'importance aux causes, acquises dans le grand nombre des-
quelles il faut mentionner spécialement l'imitation, les méthodes
vicieuses d'éducation et de discipline, l'alcoolisme des enfants et
le traumatisme.
3° L'hystérie frappe les garçons aussi bien que les tilles dans la
proportion de un contre deux : elle est comparativement rare chez
les enfants au-dessous de huit ans.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. loi
4° La symptomatologie de l'hystérie devient caractéristique à
force de variabilité et de multiplicité. Aux Etats-Unis on observe
en général les symptômes dans l'ordre suivant de fréquence : a)
affections spasmodiques (convulsions, spasme des muscles du la-
rynx, croup, contractures, catalepsie) ; b) symptômes sensoriels
(sensations douloureuses, anesthésie, cécité, rétrécissement du
champ visuel, hémianopsie, surdité) : c) troubles moteurs (para-
lysies des extrémités, paralysie des muscles laryngés, aphonie) ;
d) troubles viscéraux et vaso-moteurs (affections du tube digestif,
dyspnée, tachypnée, hyperpyrexie).
5° Le traitement général consiste dans la suppression des causes,
l'observation attentive des règles de 1 hygiène générale, l'isolement
et le repos, la suggestion et l'hypnotisme. La durée de la maladie
dépend beaucoup de l'habileté mise en oeuvre dans le traitement.
Le pronostic est toujours favorable. R. DE 111csceAVE CLAY.
VIII. Sur un cas d'infantilisme myxoedémateux; par J. GoYANES.
(Siylo ;U6t<M;o, n° 2394 )
Il s'agit d'un jeune homme de dix-neuf ans présentant tous les
attributs physiques et intellectuels d'un enfant de douze ans. Sauf
un léger gonflement des joues, rien n'attire l'attention sur l'origine
de ce nanisme, les proportions des parties du corps étant assez
élégantes. Cependant, le corps thyroïde est complètement atrophié
et on retrouve à la mensuration les caractères osseux de l' « infan-
tilisme thyroïpnve ». Les antécédents s'accordent avec ces signes
pour diagnostiquer ce genre d'infantilisme, qui, dans de tel. cas,
peuvent être confondus avec les infantilismes de nature et d'étio-
logie différentes. F. Baissier.
IX. Survival Movements of human Infancy; par A. MuMt'oRu.
(Brain, vol. XX, p. 290.)
L'auteur donne ce nom aux mouvements inconscients du premier
âge, auxquels il attribue une origine ancestrale lointaine. L'étude
de ces mouvements le conduit à y voir les vestiges des mouvements
propres à la vie aquatique et arboricole (mouvements de simple
progression aquatique, terrestre ou aérienne ; mouvements de
préhension arboricole; mouvements de manipulation pour la
recherche ou le dépouillement de la nourriture). M. Mumford a
étudié quelques nouveau-nés il ce sujet, il demande que ces
recherches soient complétées et approfondies. F. BOISSIER."
X. Hémianopsie et plus spécialement ses variétés transitoires ;
par W. HARRIS. (Brain, vol. XX, p. 308.)
D'un examen complet de l'hémianopsie sous toutes ses formes
152 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
' (homonyme, bitemporale, binasale, centrale incomplète, double,
avec hallucinations, à la couleur, en quart de cercle, etc., etc.),
l'auteur infère, avec beaucoup d'observations à l'appui, que ce
phénomène est rarement binasal, plus souvent latéral et très sou-
vent localisé à gauche. L'hémianopsie s'accompagne généralement
de rétrécissement du demi-champ resté sain ; elle se montre parfois
comme accident transitoire dans l'hystérie. L'hémianopsie due a
des lésions vasculaires du cunéus débute souvent par un obscur-
cissement de tout le champ visuel, allant même ju-qu'à l'amaurose
complète par inhibition du demi-centre sain. Les territoires corti-
caux visuels ne sont pas divisés en centres respectifs pour la couleur,
pour la l'orme, pour la lumière; mais l'hemiachromatopsie est
plutôt due à une lésion sur un point quelconque des voies optiques,
situé entre le chiasma et les centres corticaux. L'hémianopsie en
quart de cercle peut être due à une lésion de la capsule interne.
Les fibres de la région maculaire n'ont pas une marche spéciale
dans les voies optiques où elles suivent la même distnbut on que
celles des autres parties de la rétine ; mais le centre cortical de la
macula est moins exposé à la destruction complète que les autres
et reprend plus vite ses fonctions. Le scotome scintillant est causé
par une décharge dans le demi-centre obnubilé du cunéus; les
hallucinations de la moitié aveugle sont dues à des irritations à
distance réflexes de centres visuels plus élevés. L'hémianopsie de
la migraine est due à une décharge épileptique dans le demi-
centre visuel d'un côté, et dans bien des cas une décharge épilep-
tique peut prendre naissance dans le demi-centre visuel d'un côté
et ne pas le dépasser, y produisant alors l'hémianopsie, ou le
dépasser jusqu'à produire des convulsions unilatérales sans perte
de connaissance ou même l'épilepsie complète. Cette hémianopsie
transitoire est rare dans l'épilepsie jacksonienne et n'arrive que si
le demi-centre visuel est légèrement altéré, ou au moins hyperes-
thésié et prompt à la décharge spontanée comme dans la migraine.
Elle peut enfin souvent accompagner les convulsions unilatérales
dans la paralysie générale et se montre parfois au cours de l'uré-
mie. Les centres auditifs peuvent présenter les mêmes accidents
par propagation de la décharge épileptique. F. BoissiEn.
XI. Tremblement hystérique; par VaLr y ALDAIHLDE. (Académie
, medico-eliiruryicule espagnole.)
.Un homme de vingt ans, ayant subi un traumatisme, s'endort
sous un hangar un jour d'été, il se réveille avec un tremblement
du bras gauche qui dure actuellement depuis trois ans. Tout le
membre, depuis l'épaule jusqu'aux doigts inclusivement, est agité
par une trémulation rythmique qui s'exagère pendant les mouve-
ments volontaires. Quelques stigmates sensitifs d'hystérie ont per-
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 153
mis d'établir le diagnostic. Tous les traitements possibles ont
échoué, sauf l'hypnotisme, qu'on n'a pas encore essayé et auquel
le malade va être soumis. (Revista de lled. y Cir. practicas, n° 592.)
F. B.
XII. Un cas aigu de maladie de Graves et son anatomie patholo-
gique ; par A. FOXIVELL. (Brain, vol. 20, p. 277.)
Femme quarante-cinq ans, bons antécédents, gonflement thyroï-
dien, tachicardie, exophtalmie légère, persistance du thymus, dila-
tation de la pupille gauche, amaigrissement et épuisement extrê-
mement rapides, insomnie, agitation, vomissements incoercibles
souvent sans nausées ni efforts; durée de la maladie, six mois.
Mort dans le marasme cachectique. - Le plancher du 4° ventricule
parait épaissi, les nuances en sont effacées, les sillons exagérés,
l'orifice du calamus élargi ; sur les coupes : épaississement et sclé-
rose de la pie-mère et du tissu nerveux sous-jacent de toute la
région du 4° ventricule, vaisseaux dilatés et gorgés, sclérose sur
certains territoires englobant les noyaux de la 10° paire ; hémor-
rhagies capillaires sous le plancher du 4° ventricule et nombreux
corps amyloides. Ramollissement de la surface des deux couches
optiques, vascularisation excessive de la surface du cerveau, du
cervelet et de la moelle. F. B.
XIII. Neurasthénie et hystérie traumatiques; par PH. COOMBS
IiN.re. (l3rvizz, vol. 20, p. 385.)
De l'étude de 120 cas et de toutes les théories proposées, ce
mémoire tire d'excellents éclaircissements pour la difficile question
médico-légale des névroses traumatiques. Discutant vivement l'opi-
nion de Strumpell, toujours avec des faits précis, l'auteur réhabilite
les malades qui demandent aux compagnies des indemnités ; qui
lorsqu'elles sont obtenues sont le plus souvent très au-dessous du
dommage causé. La comparaison des cas ayant donné lieu à des
procès avec ceux qui ne sont jamais entrés en litige, est démons-
trative. L'influence suggestive de la procédure sur le malade n'est
pas celle que Strumpell lui attribue. Le pronostic et la marche
sont les mêmes qu'il y ait ou non intervention litigieuse. Une seule
chose est à remarquer dans cet ordre d'idée, c'est que la longueur
des procès, pour ceux qui durent des années, assombrit générale-
ment le pronostic. Tous les symptômes sont passés en revue au
point de vue de leur valeur et des moyens de s'assurer de leur
réalité. La discussion serrée et concise du mémoire en rend la lec-
ture nécessaire, tous les détails en étant également importants..
- F. B ...
154 -11 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
XIV. De l'inflammation ankylotique de la colonne vertébrale et
des grandes articulations; par W. M. BECHTEREW,. (Obozrénie
psiuhilltrii, n° 3, 1899.)
Deux observations qui d'après l'auteur réunissent tous les
caractères des observations de MM. P. Marie et A. Struempell, mais
tout à fait distinctes de la maladie qu'il a, lui, Bechterew, désignée
sous le nom de raideur de la colonne vertébrale avec incurvation.
L'affection commence parles membres et affecte non pas seulement
les articulations du tronc, mais celles du genou et du pied. C'est
une affection ossifiante, rhumatismale, qui monte et gagne la
colonne vertébrale, qui porte aussi sur les parties mollis et les
muscles périarticulaires ; la cyphose est inconstante ; inconstants
sont les symptômes radiculaires.
Le nom de spondylose rhizomélique de Marie est donc mauvais.
Mauvaise aussi la dénomination de A. Struempell qui semblerait
vouloir limiter la maladie aux articulations coxofémorales.
L'auteur propose le terme d'inflammation chronique ankylosante
des grandes articulations et de la colonne vertébrale. P. KERA VAL.
XV. De l'ankylose de la colonne vertébrale; par S. Popoff.
(Neurologis. Ceztcu,lLl., XVIII, 1899.)
Nouvelle observation d'ankylose avec incurvation de la colonne
vertébrale constituant une forme mixte, tenant à la fois des laits
de Struempell, P. Marie, Boeumler, Koehler, Beer et Schatalow
(spondylose rhysomélique), par la concomitance de l'ankylose
vertébrale et de l'ankylose des articulations périphériques - et
des faits de Bechterew, par l'incurvation de la région thoracique
de la colonne vertébrale à grande amplitude et l'existence des
douleurs névralgiques.
L'auteur fait remarquer que la première série des faits a à son
actif : au début, des douleurs, soit dans les genoux, soit dans la
hanche, soit dans la région lombaire, sans tuméfaction ni rougeur
des articulations ; puis l'immobilité avec ankylose des parties
inférieures de la colonne vertébrale dont la partie supérieure après
être restée pendant un certain temps mobile devient bientôt raide
et incurvée. L'incurvation prend tout, partie de la région cervicale
ou de la moitié inférieure de cette région ; plus bas, la colonne
vertébrale est verticale par suite de la disparition de la lordose
normale de la région lombaire. Toujours, dit P. Marie, il y a
ankylose des articulations centrales de la hanche et de l'épaule ;
pas d'hérédité, causes inconnues. Quelquefois refroidissement,
contusion du dos par chute dans une cave; un cas d'atrophie
musculaire sans réaction dégénératrice (Marie); quelque diminu-
tion de l'excitabilité électrique du dos (Beer). L'ensemble du
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 1 SS
complexus symptomatique serait, d'après Boeumler, d'origine
articulaire.
Dans la seconde série de faits, on signale l'hérédité, un trauma-
tisme du dos. Il y a ankylose incomplète ; les mouvements des
vertèbres sont encore possibles. La région thoracique est incurvée.
Chez quelques malades existe de l'anesthésie, de l'hyperesthésie,
de l'atrophie musculaire, de la diminution de l'excitabilité
électrique.
L'observation présente de Popoff montre un développement
extrêmement rapide de l'ankylose et de l'incurvation de la colonne
vertébrale. Il y a eu refroidissement et deux mois après ankylose.
L'étude des antécédents rapprochée de l'évolution des accidents
actuels révèle une arthrite rhumatismale de diverses articulations,
avec rougeur, gonflement, puis ankylose ; finalement une arthrite
vertébrale, en un mot une affection goutteuse. C'est bien ici la
douleur qui force le corps à s'infléchir en avant pour dégager, de
la pression supérieure du corps, les autres vertèbies malades; et
la colonne s'immobilise dans cette situation. La tension musculaire
ne joue peut-être pas un rôle exclusif dans la genèse de l'incur-
vation ; il est possible que, simultanément, l'élément spasmodique
se double d'une altération organique des articulations vertébrales.
P. KERAVAL.
XVI. Une observation de tabes dorsal avec paralysie bulbaire;
par M. 13c,oco. (lCUI-010g. Cezzt,rabl., XVIII, 1899.)
Dégénérescence tabétique des cordons postérieurs ; rétrécisse-
ment et insuffisance des valvules aortiques; dilatation anévrysmale
de l'aorte ascendante. Le malade (qui vit encore) présente en outre
une paralysie bulbaire par lésion de la région des noyaux
c'est-à-dire une paralysie glossolabiopharyngée. comme dans les
deux seuls cas connus d'IIorward (American Journal of médical
Science, mars 1889) et de Charcot (Progrès médical, 17 juin 1893).
Paralysies des muscles des yeux; troubles dans le domaine du
trijumeau ; atrophie du nerf optique ; phénomènes de la paralysie
bulbaire progressive ; symptômes classiques du tabes ; immobi-
lité fixe réflexe des pupilles, signe de Westphal (unilatéral). Les
symptômes relatifs aux membres inférieurs paraissent cependant
avoir rétrocédé ; l'ataxie est peu prononcée.
Il y a paralysie laryngée mais l'image laryngoscopique est celle
que l'on obtient en pareil cas dans le tabes. Or, dans la paralysie
larynsée bulbaire la paralysie atteint les adducteurs des cordes
vocales, presque jamais les abducteurs; ce syndrome serait donc
ici plutôt tabétique. P. KERHAL,
156 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
XVII. De la microgyrie et de la microphthalmie;par S. Kalischer.
(Neurolugisches Cenlrabl., XVIII, 1899.)
Il s'agit d'une fillette de cinq ans atteinte d'une micropbthalmie
du côté gauche due à un kyste gliomateux situé derrière le globe de
l'oeil; le gliome a envahi -le nerf optique jusqu'au chiasma ;
celui-ci pas plus que le reste du système optique situé au-dessus
ne décèle ni asymétrie ni anomalie. L'écorce du cerveau présente,
surtout au niveau des lobes frontaux, pariétaux et occipitaux, des
altérations de la méningoencéphalite avec ratatinement, atrophie
et plissement des circonvolutions, et de la sclérose diffuse par
méningite ausculaire (ratatinement, déplacement de la névralgie,
stratification anormale des cellules et fibres nerveuses).
L'auteur croit à la simultanéité des lésions pareilles mais indé-
pendantes du cerveau et de l'oeil; elles se sont produites dans les
premières semaines du développement foetal à l'époque du stade
de la vésicule oculaire primitive (Virchow et Beruheimer).
Les accidents convulsifs et l'idiolie constatée en ce cas particu-
lier étaient en rapport avec les altérations cérébrales des régions
frontales, occipitales. P. KERAVAL.
XVIII. Petite contribution à la question du tabes syphilitique;
par E. A. IlouEn. (Neurolog. Cenlralbl., XVIII, 1899.)
Observation d'un jeune Finlandais de vingt-deux ans, atteint
de tabès vrai avec prédisposition due à la syphilis paternelle ;
père également alcoolique; ce n'est pas une allection syphilitique
héréditaire directe, une syphilis cérébrospinale.
Douleurs lancinantes, absence de phénomène du genou- :
inégalité des pupilles avec réaction paresseuse, atrophie des nerfs
optiques ; alaxie faible mais nette, troubles vésicaux ; analgésie
des pieds et des jambes. Diminution de la sensibilité tactile cor-
respondant à la disposition segmentaire de la moelle, ou au
territoire innervé par les racines dorsales supérieures et moyennes,
en un mot zone hypo-esthésiqne du tronc de Hitzig et Loehr.
Analgésie du cubital des deux côtés. Légères attaques apoplecti-
l'ormes, ayant pu être produites par une affection en foyer
syphilitique car elles ont cessé à l'hôpital sous l'influence d'un
traitement anlisyphilitique énergique tandis que les autres symp-
tômes ont été peu modifiés. Le malade vit encore. P. KERAVAL.
XIX. Thrombose de l'artère cérébrale antérieure; par G. L31KELES.
(Neurolog. Centralbl., XVIII, 1899).
Observation d'une femme de quarante-six ans. Nécropsie.
Figures.
- REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 157
droite, ramollissement cortical des deux premières frontales.
s'étendant dans la couche blanche à une profondeur de 3,2 cent.
il 3. cent. Au-dessous existe un second foyer occupant la partie
lenticule-striée de la capsule interne sur une étendue de
8 milhm,-f 3 millim. Plusieurs foyers isolés dans les circonvolutions
frontales. Rien du tout dans les ascendants, rien dans les parties
lenticulo-optiques de la capsule interne. Les corps transverses et
perpendiculaires de la couche optique décèlent tout 11 fait en avant,
au-dessus des ganglions de la base, dans le centre ovale, une
dégénérescence des manchons de myéline ; la capsule interne est
intacte dans le segment lenticulo-optique. Dégénérescence, au
contraire, très franche des faisceaux de l'anse du noyau lenticu-
laire qui traversent transversalement la capsule interne, c'est-à-
dire de ceux qui, après avoir traversé la capsule interne, vont à la
région snbthalamiqne. Intégrité de l'anse du pédoncule cérébral,
c'est-à-dire des fibres du noyau lenticulaire qui passent au-dessous
du pédoncule. Au-dessous et en dehors du putamen, un petit
foyer de ramollissement; dans le putamen même, très nombreux
détritus. Rien d'anormal dans le globus palhdus. P. Keraval.
XX. De l'ataxie cérébrale aiguë ; par M. \)Ii'OELEIL (Nelll'ologisch.
Cerrl·nlbluli., XVIII, 1899.)
Un maçon de vingt-huit ans jusque-là bien portant a froid; quelques
heures plus tard, il éprouve un frisson avec tremblement violent,
et perd connaissance. Délire grave. Deux jours plus tard, la fièvre
cesse, le malade revient à lui; il ne se rappelle plus qu'une chose,
c'est que pendant plusieurs heures il a souffert de douleurs insup-
portables dans l'épaule gauche. On constate alors une ataxie
extrêmement intense de la parole, des mouvements du tronc et
des membres contrastant avec l'intégrité de la sensibilité (réflexes
tendineux normaux). Au bout de six mois, rétention d'urine qui
cède à un seul cathlétérisme. Enfin, dans les cinq années ulté-
rieures, amélioration graduelle de l'ataxie, le malade réapprend
successivement à s'asseoir, à parler, à marcher.
L'analyse des symptômes indique l'ataxie des mouvements du
tronc, des membres, de la parole, de la physionomie. Leur persis-
tance et leur rétrocession rapprochées de l'intégrité de la déglu-
tition, de la mastication, de la vision, indiquent aussi leur nature.
L'acuité du début, l'abattement général, la rapide évolution du
processus indiquent qu il y a eu infection dont la localisation a
produit l'ensemble morbide. Evidemment il ne s'agit pas d'une
sclérose en plaques. Une affection bulbaire ne cadrerait pas avec
la généralisation et la gravité des perturbations du tronc, des
extrémités, en l'absence de phénomènes de déficit sensitifs et
moteurs.
158 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
L'inconscience avec délire de plusieurs jours rapprochée de
l'absence de phénomènes paralytiques indique le cerveau. L'atteinte
de la parole et le genre de l'ataxie, qui n'est pas du tout cérébel-
leuse, éliminent le cervelet. L'écorce est indemne puisqu'il n'y a
pas de symptômes corticaux. Reste le territoire qui s'étend de la
couronne rayonnante et des gros ganglions de la base aux
pédoncules cérébraux. (V. Observations de Leyden, 'irchow's
- Archiu; 1868 et 1891). P. KERAVAL. ,
XXI. Deux observations de luxation spontanée tabétique de l'arti-
culation coxofémorale; par HucazEREYER. (Cel1l1'ulIJlati f. Ner-
venheilk, XXII, NF. X, 1899.)
On constate, dans les premiers et-, au niveau de la hanche
gauche, un oedème pâteux indolent qui descend jusqu'au milieu
de la cuisse ; le malade raconte que, quelques jours auparavant, il
a ressenti un craquement dans les muscles de ce membre; à
chaque pas il traîne le pied gauche en marchant et la hanche
s'abaisse très bas comme dans la coxalgie ancienne; la jambe a
subi un raccourcissement de 6 centimètres. La tête du fémur,
sortie de la cavité articulaire repose, en arrière et en haut de cette
cavité, sur l'os iliaque. Impossible de traiter cet accident parce
que l'immobilité dans un appareil d'extension continue menace
sa santé générale. Le raccourcissement de la jambe produit alors
une scoliose des dernières vertèbres lombaires avec obliquité du
bassin ; on lui fait porter un corset spécial et une chaussure à
talon élevé. La seconde observation concerne également un homme.
Un beau jour, en tirant sa botte gauche au moyen d'un tire-bottes,
il ressent une piqûre dans le ventre, et éprouve une sensation de
déplacement d'organe en cet endroit. Quelques jours plus tard, on
constate la complète luxation de la tête du fémur gauche qui
occupe la partie postérieure et supérieure de la gouttière sus-
cotyloïdienne ; raccourcissement considérable de la jambe. Pas
d'oedème. On ne s'occupe donc pas de réduire la luxation, d'autant
qu'il s'agit d'un capitaine en retraite pour fracture de la jambe
droite; et que la scoliose modelée des dernières vertèbres lom-
baires ainsi produite se trouve compensée de cette façon.
P. KERAVAL.
XXII. Contribution à l'étude de la chorée héréditaire (d'Hun-
tington) ; par L. LOEWKKFELD. (Centralblatt f. Ne1'venheilk" XXII,
N F. X., 1899.)
Malade suivi depuis dix années. Ses parents etses grands-parents
ont été atteints non pas seulement de chorée semblable mais de
maladies nerveuses éaractérisées. L'hérédité chronique remonte à
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 159
ses arrière-grands-parents maternels : un frère et un cousin de
sa mère ont été atteints de la même affection, et les aïeux du
malade devaient porter cette prédisposition en eux à l'état latent.
C'est pour cela que la chorée n'est pas chez lui progressive comme
d'ordinaire, qu'elle est demeurée depuis dix ans à un degré modéré
de développement, bien queles premiers éléments en soient apparus
de très bonne heure relativement.
Choréique depuis près de quarante ans, il a conservé la plénitude
de son intelligence. Il en est de même pour un oncle de ce malade,
vieillard avancé, choréique depuis sa jeunesse. Néanmoins, de
temps à autre il est déprimé et est sujet à des obsessions avec
idées de suicide indépendantes de la dépression et passagères. Il
a aussi des tics coordonnés dans le bras droit; d'un mouvement
lent il porte l'avant-bras à l'oreille et se frotte légèrement le visage
avec la main comme pour enlever quelque chose qui le gêne. Ces
tics ont dû se produire au début volontairement pour arrêter les
mouvements choréiques de la tête; ils sont ensuite devenus auto-
matiques comme il arrive à bien des mouvements d'habitude.
En somme, chorée héréditaire légère sans caractère progressif,
sans démence ni altération de l'intelligence, à mouvements relati-
vement faibles qui, tout en rendant difficiles les opérations de la
vie de chaque jour, ne les empêchent point. Mais chorée tout aussi
incurable que la chorée progressive. P. hEnnvat.
XXIII. L'étiologie en neuropathologie ; par GROTHHN. (Cenlmlblalt
f. Neruenheillr., 1111;1V. l·'. X, 1899.)
Critique de la division des maladies nerveuses de P. J. Moebius.
L'étiologie sert surtout à diviser les savants. Savoir que la tuber-
culose est produite par un bacille, l'alcoolisme par un liquide, la
syphilis par un agent syphilogin, ne nous donne pas la clef du
mécanisme vital. Cela nous amène à étudier les influences physi-
ques auxquelles est exposé l'individu, la constitution générale du
corps permettant de résister ou de s'exposer à l'agent morbide,
les importants facteurs sociaux en rapport avec les relations des
individus les uns avec les autres. Mais cela ne nous donne pas la
clef de la détermination quantitative, du contingent, de la part
prise par les divers facteurs étiologiques à la genèse de l'état
pathologiqne, ni des conditions dans lesquelles l'individu est exposé
à l'ingestion immodérée des spiritueux. Il est presque absurde de
prétendre que, lorsque deux tableaux morbides se ressemblent
par leurs symptômes, leur mode de production, leur marche, c'est
qu'ils ont la même cause. Sans doute, dire que la même cause
pourrait produire des effets différents est idiot, mais les influences
étiologiques sont bien compliquées ; ainsi il est extrêmement rare
que l'effet soit le résultat d'une seule cause. L'effet est générale-
160 SOCIÉTÉS SAVANTES.
ment engendré par des causes multiples qui ont collaboré quanti-
tativement de diverses manières, mais ont eu concurremment un
même résultat. La même forme clinique de l'alcoolisme se produira
dans tel cas où", la prédisposition individuelle étant très petite, les
entraînements à l'excès seront très grands ; il se produira dans tel
autre cas où, la prédisposition individuelle étant très grande,
l'action du milieu sera très petite.
Sans doute toutes les conditions pathogéniques sont, en ce qui
concerne l'individu, externes ou internes. Mais c'est un tort de
diviser les maladies connues en deux classes d'après cette condition
sine q2cu non. Moebius ajoute : « Dans les maladies exogènes les
causes sont qualitativement différentes (alcool, plomb, toxine) ;
dans les maladies endogènes il n'y a généralement qu'une cause,
la prédisposition qui varie suivant la quantité, l'intensité de la
faiblesse de l'individu. » I;h bien, la question est justement de
savoir si l'alcoolisme est alors exclusivement exogène ou simple-
ment endogène ; même réflexion pour la tuberculose. Ceci sullit
donc pour faii e voir que la division des états pathologiques à l'aide
des causes, en internes et externes, est impuissante.
Ce qui est mieux, c'est l'importance attribuée par Vleebius à la
constitution psychopathique congénitale. P. Keraval.
SOCIÉTÉS SAVANTES.
SOCIÉTÉ mtD 1 CO-P5 YCH OLOG 1 QUE,
Séance du 26 mars 1900. - Présidence de M. Magnan.
Présentation de* malade. - M. Marchand présente un jeune
paralytique gène ! al cbezjequel la maladie aui ait débutée vers l'age
de dix-sept ans et dont il relate l'observation.
La mici océphalie et 1, suites de la craniectomie dans la mirocé.
phalie. - M. Lecrain donne une analyse du travail de M. A. Pilez
de Vienne sur la microcéphalie. Il partage les conclusions de
l'auteur qui considère la cranieclomie comme une opération
reposant sur une fausse connaissance de l'anatomie pathologique
de la microcéphale. Elle doit être abandonnée dans tous les cas
d'idiotie et ne peut être pratiquée, avec quelque apparence de
SOCIÉTÉS SAVANTES. 161
raison, que dans certains cas où, à côté de la faiblesse mentale,
on constate l'existence de troubles mentaux pouvant faire soup
çonner la coexistence d'une lésion cérébrale localisée '.
L'hérédité dans la paralysie générale. - M. HAMELINE donne
communication d'un travail accompagné d'observations cliniques
sur l'hérédité dans la paralysie générale et en particulier dans
l'hérédité similaire. Les recherches auxquelles il s'est livré dans le
service de M. Magnan l'amènent aux conclusions suivantes :
A. En ce qui concerne l'hérédité des paralytiques en général :
1° La paralysie générale n'apparaît que dans près de la moitié
des cas sans attache héréditaire et semble être alors une maladie
acquise; 2° l'alcoolisme, les vésanies, etc., se partagent à peu
près également les antécédents héréditaires ; 3° l'hérédité pater-
nelle est de beaucoup le plus fréquent ; 4° les antécédents héré-
ditaires sont un peu plus fréquents chez les femmes paralytiques
que chez les hommes atleints de la même maladie.
B. En ce qui concerne l'hérédité similaire :
1° Cette hérédité est exceptionnelle (7 fois seulement sur
237 malades).
Délire hypochondriaquc à forme évolutive- - M. CASTIN commu-
nique l'observation d'un cas de délire hypochondriaque à forme
évolutive ayant duré toute la vie. Il s'agit d'une femme. Le délire
a évolué, depuis l'adolescence jusqu'à la mort, en passant par trois
périodes : une période d'hypochondrie simple, une période
d'hypochondrie délirante, une période d'hypochondrie avec idées
de négation. On ne trouve dans toute sa vie la trace d'aucune autre
manifestation délirante. M. B.
Séance du 30 avril 1900. Présidence de M. Magnan.
Prix Aubanel. M. P.aCTET fait connaître le rapport de la
Commission du Prix Aubanel. Ce prix est décerné à M. Coulon,
médecin adjoint de l'asile de Clermont (Oisé).
Les candidats auront à traiter dans le prochain concours : « De
la valeur séméiologique des idées hypochondriaques dans les
maladies mentales, appuyées sur des observations personnelles. »
Eloge de Billod. - Le secrétaire général prononce l'éloge de
Billod, ancien médecin directeur de l'asile de Vaucluse. M. B.
Séance du 28 mai 1900. Présidence DE M. Magnan.
LE Président annonce la vacance d'une place de membre titulaire,
en remplacement de celle occupée par M. Bouchereau.
1 Voir les cas publiés dans les Archives de Neurologie et les nombreux
travaux de M. Ilourneville sur cette question, démontrant, par des faits,
l'inutilité de la craniectomie.
Archives. 2 série, t. X. 11
162 SOCIÉTÉS SAVANTES.
Maladies mentales familiales {discussion). - M. ARNAUD distingue
les maladies familiales des maladies héréditaires proprement dites,
qui se transmettent directement, avec tous leurs caractères, d'une
génération à l'autre. Par maladie familiale il entend désigner une
maladie frappant à la fois ou successivement plusieurs membres
d'une même génération (frères, soeurs, cousins et cousines).
La forme mentale doit aussi être la même chez tous les sujets
atteints.
11 n'a observé que 11 familles chez lesquelles on ait pu constater
23 cas d'aliénation mentale susceptibles d'être qualifiés de maladie
mentale familiale.
Peut-on avec un si petit nombre de faits conclure avec M. Trénel
à l'existence des maladies mentales familiales ?
M. DouTREBENTE ne croit pas à l'existence de types similaires dans
une même famille. Il croit que les types disparates sont au contraire
la règle.
M. TAGUET rappelle qu'il a publié l'histoire d'une famille composée
de trois garçons et de deux filles entrés le même jour à l'asile
avec un délire religieux identique.
' AI. Christian ne croit pas qu'on rencontre beaucoup de cas réels
de maladie mentale familiale. Il fait exception pour la folie suicide
et pour le délire religieux. Celui-ci étant souvent un délire commu-
niqué, il ne saurait être envisagé comme une maladie familiale.
M. GIItAUD trouve trop absolue l'opinion qui consiste à nier
l'existence du type décrit par M. Trenel.
M. Briand ne voit pas pourquoi, alors que deux aliénés étrangers
l'un à l'autre peuvent présenter un délire identique, il n'en serait
pas de même pour deux frères ou soeurs; il considère ces faits
comme beaucoup plus fréquents qu'on ne le pense et en cite
plusieurs exemples qui lui reviennent successivement à la mémoire.
M. Magnan a constaté maintes fois chez des héréditaires dégé-
nérés de la même génération, les mêmes syndromes épisodiques.
Si l'on ne peut dire que deux frères ou soeurs doivent être frappés
fatalement de la même affection, ajoute-t-il, on ne saurait davan-
tage nier la fréquence des cas sur lesquels M. Trénel a attiré
l'attention. Ces cas sont très nombreux. Il suffit de faire appel à
ses souvenirs pour en retrouver beaucoup.
M. DOUTREBENTE ne nie pas l'existence des maladies mentales
familiales, mais il n'en a jamais observé. Il croit plutôt avec Morel
que le type disparate est la règle.
M. ARNAUD se demande si on doit conclure de l'existence d'une
même affection chez deux ou plusieurs congénérés, à la création
d'un type spécial et particulier permettant, en voyant un frère
SOCIÉTÉS SAVANTES. 163
atteint après son frère, de pronostiquer la marche de la folie chez
lui par l'observation de ce qu'on a constaté chez l'autre. :
M. LECnnN voudrait qu'on adoptât un vocable autre que celui
de maladie familiale, parce que la famille ne comprend pas seule-
ment une génération.
M. Magnan persiste à croire que plus on y réfléchit, plus on
demeure convaincu de la fréquence des types similaires dans une
même génération. M. B.
Séance du 25 juin 1900. - Présidence de M. Magnan.
Déformation de l'oreille chez les lutteurs japonais. - M. CHRISTIAN
analyse un travail de M. Sakaki, sur les déformations de l'oreille
observées chez les lutteurs de Tokio. M. Christian considère
l'existence de l'hématome de l'oreille chez les lutteurs comme un
argument de plus en faveur de l'origine traumatique de l'hématome
analogue qu'on observe chez les paralytiques généraux.
M. Magnan a toujours défendu cette opinion que l'hématome
est toujours 'la conséquence d'un froissement de l'oreille. Il a
observé dans le service d'Artaud (de Lyon) une véritable épidémie
d'hématomes. Elle a cessé après le départ de deux infirmiers qui
avaient l'habitude d'entourer de leurs bras la tête des aliénés
agités pour la maintenir dans certaines circonstances. Il ne croit
pas à l'existence de l'hématome spontané.
M. CI3RISTIAN. -Les traumatismes de l'oreille sont très fréquents
chez les gens normaux et cependant l'hématome ne s'observe que
dans les asiles d'aliénés.
M. ARNAUD croit que le traumatisme est la cause habituelle de
l'hématome; cependant le traumatisme ne suffit pas toujours ; il
faut encore une disposition particulière des tissus. On n'observe
d'ailleurs d'athématomes quechez les paralytiques généraux ou les
déments ordinaires. Les maniaques et les épileptiques n'y sont
pas sujets. Ils reçoivent cependant beaucoup de contusions.
M. Briand envisage comme un argument très important en
faveur de son origine traumatique, ce fait que l'athématome est
très rare dans les services de femmes. Cette rareté tient à ce que
les infirmières n'emploient pas les mêmes procédés que les hom-
mes pour maintenir les aliénés agités. Il ne saurait dire si une
prédisposition des tissus est nécessaire pour expliquer la produc-
tion de la lésion.
Maladies mentales familiales. M. BOISSIeR. - M. Trénel n'a
pas voulu dire dans sa communication que lorsque dans une
famille un membre était frappé de folie, si un congénère venait à
164 SOCIÉTÉS SAVANTES.
l'être aussi, il serait fatalement voué à la même forme ; j'ai fait
des recherches dans la même direction que M. Trénel et j'ai, tantôt
trouvé des cas similaires, tantôt des cas disparates.
M. ARNAUD. Ce qui serait intéressant de prouver ce serait
l'existence d'un type particulier permettant de faire de la maladie
mentale familiale un type à part.
M. Brunet croit qu'il faut d'abord définir ce qu'on entend par
maladie familiale, parce que tous les auteurs n'attachent pas au
mot familial la même signification. Lande, Pauly, Bonne et Lor-
rain attribuent aux maladies familiales trois caractères princi-
paux : 1° Elles atteignent sans changer de forme plusieurs enfants
d'une même génération ; 2° elles débutent à peu près au même
âge chez les enfants d'une même génération ; 3° elles sont indé-
pendantes de toute influence extérieure. M. Brunet, après avoir
rapporté un certain nombre d'observations personnelles recueillies
à l'asile d'Evreux, conclut à la nécessité de faire appel à la
statistique pour trancher une question qui ne saurait être résolue
par de simples souvenirs personnels parce qu'ils ne peuvent être
assez nombreux ni assez précis.
Rapport médico-légal au sujet d'un persécuté persécuteur. -
M. RAyNAUD communique l'observation prise au point de vue
médico-légal d'un persécuté persécuteur avec idées ambitieuses
ayant commis un grand nombre d'escroqueries. Il allait de ville en
ville recueillir des souscriptions pour un annuaire départemental
qui ne paraissait jamais. Ce malade était certainement irrespon-
sable. Il fut enfermé comme tel à la section d'aliénés de l'hospice
d'Orléans, mais il adressa au Préfet de telles réclamai ions que
celui-ci finit par le rendre à la liberté, son état mental ne s'étant
nullement modifié. Martel Briand.
SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE
Séance du jiiillet.
Arthropathie tabétique. -11. DUPRÉ présente les photographies et
les radiographies d'une arthropathie double du genou avec hydar-
throse et déformation énorme des articulations malades, l'un des
genoux présente une luxation en arrière du fémur sur le genou;
il rappelle que M. Gibert de Montpellier a publié un fait ana-
logue.
sociétés savantes. 165
Sitiomanie. M. G. Ballet présente une malade atteinte d'impul-
sion irrésistible et angoissante à manger. Le premier accès s'est
produit à l'âge de vingt-cinq ans, après une frayeur ; second accès
à vingt-huit ans ; troisième accès trois ans après, ayant duré sept
mois ; enfin quatrième accès à 34 ans, ayant duré six mois. La
malade a actuellement quarante ans, elle est en plein état d'obses-
sion depuis le mois d'avril. La malade appelle elle-même son état
« la maladie de la faim », elle en est profondément affectée, elle
pleure quand elle en parle et se livre parfois à un véritable déses-
poir. « Ça la dégoute », dit-elle, et elle emploie des subterfuges
pour amender le plus possible et satisfaire le plus aisément qu'elle
peut son irrésistible envie de manger. Elle n'a pas envie de boire
et boit peu parce que « cela fait couler ses aliments et la force à
manger davantage », elle mange surtout du pain qui tient plus
longtemps que les autres aliments sur son estomac. Cet état est
tout à fait analogue à la dipsomanie, et peut, comme celle-ci,
présenter deux formes, selon son origine et sa nature. Ce peut être
un état obsédant dégénératif, survenant d'une manière tout à fait
irrégulière et sans marche ni évolution précise, ce qui n'est pas ici
le cas ; ou cela peut revêtir le caractère d'accès régulièrement
répétés comme ceux de la mélancolie intermittente comme dans
le fait actuel. La malade engraisse beaucoup pendant ses accès.
M. DÉJERINE. = Ce caractère différencie le cas des neurasthénies
avec accès de boulimie pendant lesquels au contraire, les malades
maigrissent, pour engraisser de nouveau quand ils cessent de man-
ger avec excès. .
M. Ballet. Telle est en effet l'histoire de cet employé de ména-
gerie qui, comme boulimique, dévorait des quantités d'aliments
énormes et alla jusqu'à manger la viande d'un lion mort, tout en
restant d'une maigreur extrême. Mais la malade présentée
engraisse et son était pourrait prendre le nom de sitiomanie.
Nouveaux symptômes pupillaires dans le tabès. - M. PIL1'Z. A côté
des réactions pupillaires bien connues à la lumière et à l'accommo-
dation, il existe encore un autre phénomène pupillaire, qui est
souvent si nettement accusé que l'on s'étonne de ne pas le voir
mentionné jusqu'à ces temps derniers. Je veux parler des mouve-
ments associés de l'iris, qui se produisent à l'occasion d'une occlu-
sion énergique des paupières. Si l'on invite le sujet à fermer éner-
giquement les yeux et à les ouvrir brusquement, on voit alors les
pupilles fortement contractées. Ce symptôme se rencontre surtout
chez les sujets dont les pupilles sont rigides, tels que les paraly-
tiques généraux.
On observe un phénomène analogue mais non tout à fait ana-
logue, si le sujet s'efforçant' de fermer les yeux, on s'oppose à
cette occlusion lui tenant les paupières écartées. Le globe oculaire
166 SOCIÉTÉS SAVANTES. -
se dirige alors en haut et en dehors et la pupille se contracte net-
tement. Ce deuxième phénomène a déjà été vu parWUnDT, Galas-
si, GFFOan et décrit en détails récemment et presque à la même
époque par WETSPHAL et par moi.
Je n'ai trouvé au contraire dans la littérature aucune mention
du premier symptôme.
J'ai recherché ces deux phénomènes chez des paralytiques géné-
raux des catatoniques et des gens bien portants.
Le premier phénomène se rencontre chez 59 p. 100 des paraly-
tiques généraux, chez 32 p. 100 des catatoniques et chez 6 p. 100
seulement des individus normaux.
Le deuxième phénomène : la contraction pupillaire, qui se pro-
duit, quand le malade se forçant de fermer les yeux on s'y oppose
en maintenant les paupières écartées, comme je le fais actuelle-
ment avec ce malade, se rencontre chez 75 p. 100 des paralytiques
généraux, chez 48 p. 100 des catatoniques, mais aussi chez
48 p. 100 des individus normaux.
Sur le conseil de M. le Dr Dèjerine. qui a bien voulu mettre à
ma disposition les tabétiques de son service et de sa consultation,
j'ai recherché ces phénomènes chez un certain nombre decesma-
lades.
Voici le résultat que j'ai obtenu sur 70 tabétiques : le premier
phénomène s'est montré dans 41 p. 100 des cas, le deuxième phé-
nomene dans 42 p. 100 des cas.
Le malade sur lequel je viens d'avoir l'honneur de vous montrer
ces phénomènes est précisément un tabétique, soigné à la consulta-
tion de M. le Dr Déjeune. La seconde malade chez laquelle on
voit ce signe aussi très nettement est une tabétique du service de
M. le D1' Déjerine.
Je veux prier un de ces malades de circuler parmi vous, de
façon à ce que vous puissiez vous rendre compte directement de ces
deux phénomènes.
Permettez-moi encore quelques mots sur l'explication de ce
signe. -
Le rétrécissement pupillaire qui accompagne l'occlusion active
des paupières est un mouvement synergétique de l'iris, qui accom-
pagne la contraction du muscle orbiculaire et la rotation en haut
et en dehors du globe oculaire. Ce mouvement synergétique est une
manifestation physiologique. A l'occasion de l'occlusion énergique
des paupières, il se produit dans l'iris deux tendances opposées.
D'abord une tendance à la dilatation qui résulte de ce fait, que les
rayons lumineux sont interceptés et ensuite une tendance à la
contraction, qui constitue le phénomène que j'étudie devant vous.
Ces deux tendances de l'iris se combattent mutuellement. Chez
l'individu normal la tendance à la dilatation prédomine, aussi
n'observons-nous pas en général la contraction pupillaire. Chez les
SOCIÉTÉS SAVANTES. 167
paralytiques généraux ou tabétiques au contraire, où le réflexe
lumineux et par conséquent la tendance à la dilatation sont abo-
lis, la tendance à la contraction existe seule et par conséquent peut
se manifester en toute liberté.
Le deuxième phénomène, au contraire, c'est-à-dire la contrac-
tion pupillaire qui se produit à l'occlusion des yeux si l'on s'op-
pose en tenant les paupières écartées, se rencontre souvent chez
les malades, dont les pupilles sont rigides, mais il se rencontre
aussi avec une fréquence de 48 p. 100 chez les individus normaux.
Ce fait semble montrer que seul le premier phénomène, associé
bien entendu à d'autres symptômes, présente une certaine valeur
clinique.
Sclérose pupillaire double. - M. B.uussm présente une femme qui
avec ce phénomène est aussi atteinte d'abolition des réflexes rotu-
liens et du tendon d'Achille. Pas de syphilis, la vision est très limi-
tée d'un côté avec légère dyschromatopsie, elle est mieux conser-
vée de l'autre côté, le champ visuel est fort rétréci, mais l'acuité
visuelle est normale. 11 s'agit d'un pseudo-tabes. Du côté sain le
réflexe à la lumière est conservé, tandis que dans le tabes, le
réflexe lumineux est aboli du côté sain comme du côté malade ;
M. Babinski s'appuie sur ce fait pour montrer que dans le tabes la
lésion porte sur les voies centripètes, ce qui explique l'immobilité
du côté sain, ou bien dans le pseudo-tabes, la lésion intéresse les
voies centrifruges.
Association du tabès et de lésions syphilitiques. M. Babinski présente
deux malades présentant d'une part des signes de tabes, abolition
des réflexes, troubles de la marche, troubles capillaires, douleurs
fulgurantes et d'autre part des signes de néoplasme syphilitique
intracranien. Ces derniers accidents ont aisément guéri sous l'in-
fluence du traitement spécifique, qui n'a modifié en rien les phéno-
mènes tabétiques.
Traitement antisyphilitique et lobes. - M. Bamcvss a pu traiter
deux malades atteints de lobes au début, chez lesquels sous l'in-
fluence d'injections de calomel l'atrophie optique a cessé d'évoluer.
Comme Winkler qui a publié des cas semblables il croit que ce
traitement peut arrêter l'évolution, de certaines manifestations
tabétiques mais sans les faire rétrograder.
M. LÉvy présente un cerveau atteint de ladrerie.
Contribution à l'étude des voies centrales des nerfs moteurs de l'oeil.
- M. J. PILTZ (de Varsovie). Étude faite à Zurich. - Chez le lapin
nous avons étudié spécialement le centre moteur oculaire situé
dans le lobe pariétal. Dans la zone indiquée par nous avons
1 G. Alann. Journal of Anal, and PI>ulnl. vul. XXX.
168 SOCIÉTÉS SAVANTES.
pu déterminer des points isolés dont l'excitation produisait sépa-
rément les différents mouvements de l'oeil en haut, en bas, en
dedans, en dehors, ainsi que les mouvements de rotation du globe
oculaire. Les résultats de ces recherches tant physiologiques qu'a-
natomiques pratiquées sur le lapin ne nous occuperont pas plus
longtemps pour le moment.
Il existe chez le chien trois centres moteurs oculaires :
1° Le centre frontal, qui est situé dans la partie postérieure du
lobe frontal, en avant du Sulcus cruciatus et en arrière du Sulcus
poaecruciulus. Ce centre est limité en dedans par « la région de la
nuque H » et en dehors par « la région de la tête E » de Muni.
Le gyrus sigmoïde (zone motrice du membre antérieur) le limite
en arrière ;
2° Fritsch et Hitzig ont trouvé une zone du lobe pariétal, dont
l'excitation électrique donne -lieu à des mouvements associés des
yeux. Cette partie occupe la portion antérieure et latérale de
l'extrémité antérieure de la deuxième circonvolution primitive.
Elle fait partie intégrante de « la région oculaire F » de Muni, par
conséquent du lobe pariétal.
3° L'on sait enfin que des mouvements des yeux peuvent être
provoqués par l'excitation électrique des lobes occipitaux (sphère
visuelle).
Mes expériences ne portent que sur les deux premiers centres.
Leurs résultats peuvent être résumés en quelques mots :
Les dégénérescences secondaires à l'extirpation du centre frontal
ont pu être suivies (sous forme de fibres dégénérées ! ) dans les
circonvolutions voisines, dans le corps calleux, dans la capsule
interne, dans la lame médullaire interne du noyau lenticulaire et
enfin dans le stratum intermedium du pied du pédoncule cérébral
et dans la partie dorso-médiane de la moitié interne du pied du
pédoncule cérébral. Sur les coupes passant par le tubercule qua-
drijumeau antérieur, au niveau du noyau du moteur oculaire
commun, on voit des fibres dégénérées se dirigeant du pied du
pédoncule vers ce dernier noyau. Après avoir traversé la substance
de Soemmering, elles prennent une direction dorso-médiane en
passant de chaque côté du noyau rouge. Cette dégénérescence ne
se laissait pas poursuivre plus loin sous forme de fibres, mais on
apercevait seulement de loin en loin des corps granuleux noirs
disséminés dans la partie dorso-médiane du faisceau longitudinal
postérieur des deux côtés. En dehors de ces fibres, qui se rendent
au noyau du moteur oculaire du même côté, j'en ai trouvé d'au-
tres, qui paraissaient se diriger vers le raphé, probablement pour
gagner le noyau du moteur oculaire commun du côté opposé.
Après l'extirpation du centre pariétal des fibres dégénérées (qu'on
peut poursuivre directement jusqu'à la place d'extirpation) se
rencontrent dans les circonvolutions voisines du même côté, dans
SOCIÉTÉS SAVANTES. 169
le cingulum, dans la couche des fibres tangentielles de la substance
grise sous-épendymaire, qui forme le toit du ventricule latéral,
dans le corps calleux, dans les circonvolutions -symétriques du
côté opposé, dans la capsule interne et dans la couche optique du
même côté, dans la lame médullaire externe du thalamus de
Forel, dans le corps de Luys, dans le champ H de Foret et enfin
dans la partie latérale du pied du pédoncule cérébral. On voit
presque sur toutes les coupes, faites dans la région correspondante
des fibres dégénérées monter du pied du pédoncule cérébral vers le
tubercule quadrijumeau antérieur. Ces fibres arrivent à la couche
grise superficielle, la plupart cependant se rendent dans la couche
blanche profonde du tubercule quadrijumeau antérieur. L'on peut
en suivre quelques-unes jusqu'au tubercule quadrijumeau anté-
rieur du côté opposé. Un certain nombre donnent des collatérales,
qui se perdent dans la substance grise centrale.
Une dégénérescence nettement visible sur les coupes passant
derrière le tubercule quadrijumeau antérieur au niveau de la
IVe p. représente des fibres aberrantes superficielles postéro-
externes du pied du pédoncule ou le pes lemniscus profond de
Déjerine, fascicules aberrants superficiels externes de Long.
Outre ces faisceaux de fibres dégénérées issues du pédoncule
cérébral on voit encore, après l'extirpation du centre pariétal, un
faisceau dégénéré, qui se rend directement aux tubercules quadri-
jumeaux antérieurs à travers la capsule interne. Voici en quelques
mots le trajet de ce faisceau : sur les coupes pratiquées en avant
du ganglion de l'habénula on voit ce faisceau dégénéré sortir de la
capsule interne, se diriger en dedans, traverser la zone reticulée,
la zone ou le champ de lVemzicke et gagner la portion ventrale
du corps genouillé externe en passant par la partie antérieure'de
sa capsule blanche. Plus bas dans la région où les portions ven-
trale et dorsale du corps genouillé externe se fusionnent, le
faisceau dégénéré s'est déjà notablement éloigné du corps genouillé
externe en se portant vers la ligne médiane et sur les coupes pas-
sant par la partie antérieure de la commissure postérieure il
atteint les limites latérales de la calotte. Sa situation plus bas peut
être précisée de la façon suivante : il est situé entre la calotte et le
corps genouillé interne. D'autre part il est situé entre le corps
genouillé externe et le corps genouillé interne, bien qu'il soit encore
dans le territoire de ce dernier. En avant il est limité par le ruban
de Reil médian. Sur les coupes plus bas nous le voyons derrière le
bras du tubercule quadrijumeau postérieur. Enfin il franchit la
limite entre le corps genouillé interne et la calotte d'autre part
pour se perdre dans la couche grise superficielle et dans la couche
blanche superficielle (oberflaechliches Mark de Forel) du tubercule
quadrijumeau antérieur.
Silex a observé après l'extirpation du centre de Hitaiy des dégé-
170 SOCIÉTÉS SAVANTES.
nérescences du côté opposé et dans la couche optique, la capsule
interne, le corps genouillé, le pied du pédoncule et les tubercules
quadrijumeaux.
GUe1'Vel' a vu après l'extirpation du centre frontal une dégéné-
rescence dans le corps calleux, le segment antérieur de la capsule
interne du côté opposé, dans la couche optique (autour des noyaux
antérieur et externe), dans une partie de la couche optique, située
au-dessus du faisceau de Vicq d'Azyr, dans les noyaux de la
IIIe paire (la dégénérescence du noyau correspondant était plus
marquée que celle-là du noyau opposé), dans le faisceau longitu-
dinal postérieur des deux côtés, dans l'entre-croisement ventral de
la calotte de Forel, dans le stratum intermedium et dans la substance
noire de Soemmering, une légère dégénérescence dans le corps
genouillé externe et dans la couche des fibres superficielles du
tubercule quadrijumeau des deux côtés, une dégénérescence dans
la région des noyaux dans la IV paire des deux côtés, dans la
pyramide et dans le ruban de Reil médian et même dans le ruban
de Reil latéral du côté correspondant et enfin une dégénérescence
dans les racines de la IVe paire. Guerver décrit encore une dégéné-
rescence du faisceau pyramidal et du ruban de Reil du côté opposé,
et une légère dégénérescence dans la racine ascendante de la
Ve paire, enfin une dégénérescence des noyaux de la VIe paire (la
dégénérescence du côté opposé était plus accentuée que celle-ci du
même côté) et de la substance réticulée. F. BOIS,IR ! \,
SOCIÉTÉ D'HYP10LOGIG ET DE PSYCHOLOGIE.
Séance du 19 juin 1900. - Présidence DE 11..IULISS Voisin.
De la suggestion envisagée comme cause d'erreur dans les recher-
ches thérapeutiques. M. Bérillon. Les succès que revendique
le fameux sérum antiéthylique sont imputables à la suggestion.
De l'aveu même de ses auteurs, ce sérum échoue chez les sujets
qui présentent des tares, qui sont névropathes « détraqués »,
dipsomanes ; mais il réussit chez les « alcoolomanes ». Au lieu de
traiter tous les alcooliques indistinctement, ils veulent faire une
sélection et ils ne retiennent précisément que les individus sugges-
tibles. Qui sait si ceux-ci n'auraient pas été aussi bien guéris avec
des injections d'eau pure décorées du nom de sérum '1
M. Magnan. - L'opinion de M. Bérillon me parait trop exclusive.
SOCIETES SAVANTES. 171
Les auteurs dont il s'agit ont d'abord fait des expériences très
concluantes sur les animaux ; tous les chiens auxquels ils ont
injecté du sérum antiéthylique, ont manifesté un dégoût profond
pour l'alcool.
M. LÉPINAY. - Le dégoût pour l'alcool est instinctif chez les
animaux. Quand on veut faire prendre aux chiens malades une
médication alcoolique, on est obligé de recourir à la force.
M. Fanez. - Le Dr Crivelli (de Melbourne) a essayé ce sérum
antiéthylique et les effets en ont été nettement négatifs, sauf au
début, où quelques améliorations se sont manifestées, mais, dit-il,
sous l'influence de la suggestion. C'est, en effet, par suggestion
que réussissent et la fameuse cure d'or et les injections d'apomor-
phine, et tous les médicaments variés, réputés infaillibles, mais
qui doivent tous leurs succès à la suggestion plus ou moins habile
dont on les accompagne par la réclame, le prospectus ou la mise
en scène. On ne doit pas espérer qu'un médicament quelconque
puisse, par lui seul, conférer à l'alcoolique, à son insu, en dehors
de lui, sans sa complicité, la force de résister à l'alcool. Au
contraire il faut d'abord créer cette force de résistance par les
moyens moraux; l'abstinence alcoolique résultera de cet état
mental préalablement créé. Le traitement qui convient à l'alcooli-
que, c'est celui qui permet de lui imposer une discipline psychique,
de réformer sa mentalité, d'accroître sa volonté, d'augmenter son
énergie, de refréner ses impulsions jusqu'alors irrésistibles.
L'hypnotisme dans ces cas est précieux, puisqu'il développe le
pouvoir d'arrêt ou d'inhibition.
Les images cérébrales et l'activité mentale. - M. PAU de Saint-
MARTIN compare le neurone à la lame métallique du télégraphone
qui restitue en se déroulant le potentiel magnétique dont elle a
été chargée ; s'appuyant sur cette analogie, il explique la produc-
tion et la conservation des images, la réviviscence des souvenirs
et les divers modes de l'activité mentale.
M. Bérillon. On a de même comparé la conductibilité des
neurones à celle du tube à limaille de Branly, lequel sert de base
à la télégraphie sans fil.
M. REGNA ULT. Le télégraphone est encore peu connu ; il serait
bon d'inviter son inventeur à venir nous en faire la démonstration.
BIBLIOGRAPHIE.
VI. Clinique des maladies du système nerveux (quatrième série) ;
par le professeur RAYMOND. In-8° de 606 pages avec 59 figures
et 2 planches en couleurs. (Libr. 0. Doin, 1900.)
La quatrième série des Leçons cliniques du professeur Raymond
contient des leçons faites à l'hospice de la Salpêtrière, pendant
l'année scolaire 1897-98. Les trente et une leçons que renferme
ce volume touchent à tous les sujets de la neuropathologie; re-
produisant chacune une mise au point parfaite de la question
traitée, complétées et éclairées par des vues personnelles et origi-
nales, ces études de neurologie sont dignes de leurs devancières et
font le plus grand honneur à la science française.
La première leçon est consacrée à l'étude de deux cas de tu-
meurs de la zone rolandique. Les convulsions jacksonniennes in-
diquaient le siège de la lésion. Ces deux malades ont été opérées.
Les résultats ont été satisfaisants.
A la suite d'une frayeur, une fillette de douze ans est prise d'une
attaque de contracture, crises convulsives à caractère jacksonnien,
asthénie musculaire généralisée, nystagmus, exagération des ré-
flexes tendineux. Le professeur Raymond discute le diagnostic
entre une méningite tuberculeuse et la sclérose en plaques. La
leçon suivante permet au professeur d'établir l'état actuel de la
question de la sclérose en plaques chez l'enfant, où son existence
est encore controuvée.
L'étude des paralysies alternes fournit chaque jour des types
cliniques nouveaux. M. Raymond présente à ses élèves une para-
lysie de la sixième, septième paires gauches, coincidant avec
une hémiplégie droite. Le professeur en profite pour esquisser
les différentes variétés de paralysies alternes, motrices et sensitives.
Les polioencéphalites supérieures sont des affections rares. Lé-
sions du neurone moteur périphérique, elles peuvent ou non s'as-
socier à des poliomyélites, altérations du même système. Le
professeur Raymond peut en montrer deux cas : l'un où l'examen
microscopique fut négatif; l'autre, combinaison d'ophtalmoplégie
interne et d'atrophie musculaire progressive Aran Duchenne. Ces
leçons permettent au professeur d'établir les diverses modalités
de l'ophtalmoplégie chronique.
L'ophtalmoplégie peut se montrer dans le tabes. Sauf. dans le
BIBLIOGRAPHIE. 173
cas de Déjerine, elle relève toujours des lésions nucléaires : c'est
donc une complication, une association morbide, et non l'exten-
sion du processus tabétique ou mésocéphale. Les véritables para-
lysies oculaires sont des paralysies dissociées, passagères, de
courte durée et faciles à récidiver : celles-ci sont d'origine péri-
phérique.
La leçon suivante (IX) est consacrée à l'étude de la paralysie
bulbaire asthénique : le syndrome de Erb-Goldflam commence à
être bien connu dans ses manifestations cliniques ; mais sa place
nosographique est encore à déterminer.
L'hémiplégie avec hémiatrophie des membres et de la langue
est un syndrome rare. Après une revue des principaux cas ana-
logues, le professeur Raymond étudie les diverses solutions ; mais,
en présence de l'hémiatrophie linguale si difficile à interpréter,
se tient dans une prudente réserve sur le siège possible de la
lésion.
Faut-il, avec Marie et Gowers, rayer l'atrophie musculaire, type
Aran. Duchenne, du cadre nosographique; faut-il, avec Déjerine
et J.-B. Charcot, la maintenir dans la nosographie ? Le professeur
Raymond se range à cette dernière opinion et profite de cette cir-
constance pour étudier les rapports nosologiques des diverses va-
riétés d'atrophie musculaire progressive.
Deux faits d'atrophie chez les tabétiques viennent ensuite.
L'atrophie musculaire est tantôt symptôme, tantôt complication
du tabes. La première névrite, de beaucoup la plus fréquente,
relève d'une névrite périphérique ; la seconde variété, complica-
tion, est une association du tabes et de l'atrophie spinale Aran.
Duchenne. L'atrophie musculaire Aran. Duchenne n'est pas la
seule association d'affection spinale que présente le tabes. La
syringomyélie peut se présenter associée au tabes. La présentation
d'un malade qui réalise cette association, permet au professeur de
passer en revue les associations morbides principales du tabes :
paralysie générale, syphilis des centres nerveux, ophtalmie pro-
gressive, hémiatrophie de la langue, atrophie musculaire progres-
sive, syringomyélie, maladie de Friedreich, sclérose en plaques,
hystérie. .
Les associations morbides présentent souvent des difficultés
très grandes de diagnostic. Témoin le fait de syringomyélie chez
un malade, atteint de paralysie saturnine.
Bien que connue depuis peu d'années, la symptomatologie des
affections du cône terminal est suffisamment nette et précise, pour
que le diagnostic soit facile à faire. Le professeur Raymond put
en présenter deux exemples à ses auditeurs. Complétant ses tra-
vaux précédents, le professeur profite de cette occasion pour
reprendre et exposer les travaux nouveaux parus sur le sujet.
L'auteur revient ensuite sur un sujet qu'il avait déjà longue-
174 bibliographie.
ment traité l'an dernier : le rapport des polynévrites et des polio-
myélites. A côté des poliomyélites pures et des polynévrites
proprement dites, il existe des formes où la lésion frappe à la fois
la cellule et le cylindraxe : c'est la cellulo-névrite. Le point délicat
est de reconnaître la cause de la polynévrite : le diagnostic de-
vient encore plus délicat chez un syphilitique soumis au traite-
ment mercuriel, si bien'que l'on peut incriminer la syphilis ou le
mercure.
Après une étude de l'hystéro-traumatisme à forme paraplé-
gique, vient une leçon fort intéressante et magistralement exposée
sur les hallucinations du moignon ; puis une mise au point par-
faite de la question de la myoclonie. La paralysie générale juvénile,
si difficile le plus souvent à reconnaître, fait l'objet des deux
leçons suivantes, et dans le cas présent, elle semble avoir été con-
sécutive à une méningite gommeuse syphilitique. Les dernières
leçons sont consacrées à l'étude du myxoedème sous ses différentes
formes, infantile et spontanée, et à son traitement.
Telles sont les études contenues dans ce volume, rempli de faits
et d'aperçus originaux, digne de ses devanciers et digne du pro-
fesseur. Miraillié.
VII. Etude de lantyélèlzisaliondeslzémisplaèrescéréb·nux; par Mme CE-
CILE VOGT. (In-8°, 72 p. Th. Paris, Steinheil, 1900.)
Ce travail est un premier aperçu d'un ouvrage plus considérable
en préparation ; quoique dérivé de la méthode Flechsig, il ne
s'accorde pas avec les résultats de celui-ci. Mme Vogt a pratiqué
des coupes sériées chez des carnassiers et des rongeurs jeunes,
d'âges gradués, et chez des enfants du premier âge. Elle a noté
l'état systématique de la myélinisation pour chaque âge,' en con-
trôlant chaque donnée par la méthode des dégénérescences secon-
daires, cherchant à montrer que chez les carnivores et le lapin,
la myélinisation se fait à des époques différentes pour les diffé-
rentes régions de l'écorce ; qu'elle a lieu d'après des principes
identiques pour ces deux classes de mammifères et homologues à
ceux que l'on connaît pour le cerveau de l'enfant; et enfin que
tant qu'il y a dans l'écorce cel ébrale de ces animaux des régions
non myélinisées, il y en a de même dans les fibres de projections
et que chez l'homme aussi, les centres corticaux tard myélinisés,
sont en relation avec les faisceaux de projection tard myélinisés.
En somme, il y a dans les grandes lignes identité complète dans le
processus de la myélinisation chez les animaux et chez l'homme.
Les régions tard myélinisées dans les fibres de projection ont, en
comparaison avec l'ensemble des fibres de projection, une si
grande étendue qu'on peut conclure que les centres corticaux
auxquels elles appartiennent possèdent des fibres de projection en
varia. 17b
grand nombre. Ceci s'accorde absolument avec les résultats de
l'étude des dégénérescences secondaires qui montrent que toutes
les régions corticales contenant des fibres de projection, pas une
ne peut constituer un pur centre d'association, même chez
l'homme, malgré l'opinion de Flechsig. Les figures nombreuses et
très nettes sont très démonstratives. F. 1301SS1ER.
VARIA.
Société de PATRONAGE DES aliénés.
Nous empruntons les renseignements suivants au neuvième
Rapport de la Société de patronage pour les aliénés de l'arrondisse-
ment de Diisseldorf (1893).
La Société a pour but de venir en aide aux aliénés guéris ou
améliorés, de faciliter leur retour au sein de la société, et de
prévenir, dans la mesure du possible, les rechutes ; en outre de
perfectionner l'assistance des aliénés, de 'faire disparaître les
préjugés contre les aliénés et les asiles d'aliénés, d'étudier les causes
de la folie et les combattre, de hâter le traitement des malades
par l'internement. En 1892 le nombre des membres de la Société
était de 660.
176 VARIA.
sont pas séquestrés, de proposer les mesures nécessaires, à leur
protection au comité, et de distribuer les secours alloués par le
comité ; 3° d'informer le comité sur toutes les lacunes de l'assis-
tance des aliénés dont ils viendraient à avoir connaissance.
Le comité fixe le montant du secours à accorder, et le remet au
malade lui-même ou au membre qui est son représentant. Le
président peut à la sortie du malade lui allouer un secours qui ne
doit pas dépasser 25 francs. Assemblée générale tous les 2 ans à
l'asile. P. Sérieux.
XIIIe Congrès international de médecine.
(Paris, 2-9 août 1900.)
I. Section de Neurologie.
Président, M. le professeur F. Raymond; vice-présidents, MM. Bris-
saud, Déjerine, Grasset (de Montpellier), Pitres (de Bordeaux) ;
secrétaire, P.Marie.
Rapports : 1° Sur les centres de projection et d'association dans
le cerveau humain. Rapporteurs, Flechsig (de Leipzig), Hitzig (de
Halle), von Monakow (de Zurich) ; 2° Sur la nature et la localisa-
tion des réflexes tendineux. Rapporteurs : Jendrassik (de Buda-
pest), C.-S. Sherrington (de Liverpool) ; 3° Nature et traitement de
la myélite aiguë. Rapporteurs : von Leyden (de Berlin), Crocq (de
Bruxelles), Marinesco (de Bucharest) ; 4° Diagnostic de l'hémiplé-
gie organique avec l'hémiplégie hystérique. Rapporteurs : Roth
(de Moscou), Ferrier (de Londres) ; 5° Des lésions non tabétiques
des cordons postérieurs de la moelle. Rapporteurs : Bruce (d'E-
dimbourg), Hômen (Helsingfors) ; 6° Sur différents points de
l'étude des aphasies. Rapporteurs : Pick (de Prague), Tamburini
(de Reggio). »
Jeudi 2 août. Dans la matinée : Séance d'ouverture, à 8 h. 1 /2
du matin, à la Sorbonne, dans l'amphithéâtre Richelieu. Discours
de M. le professeur Raymond, président du Comité d'organisation.
Nomination des présidents d'honneur et des membres du bureau.
Fixation du programme des travaux de la section. Exposé et dis-
cussion d'une des questions mises à l'ordre du jour et ayant fait
l'objet d'un rapport. Communications diverses.
Rapports. - Les questions suivantes, mises à l'ordre du jour,
ont été l'objet de rapports : L'aphasie motrice pure (sans agra-
phie). Aphémie pure. Rapporteur : M. P. Ladame (de Genève). -
Aphasies et amnésies. Rapporteur : M. Tamburini (de Reggio). -
De l'importance du centre auditif du langage comme organe d'ar-
rêt du mécanisme du langage. Rapporteur : M. A. Pick (de
Prague). - Sur les centres de projection et d'association du cer-
varia. 177 Î
veau humain. Rapporteurs : MM. P. Flechsig (de Leipzig), Hitzig
(de Halle), von Monakow (de Zurich). Le diagnostic de l'hémi-
plégie organique et de l'hémiplégie hystérique. Rapporteurs :
MM. D. Ferrier (de Londres), et W. Roth (de Moscou). Les
lésions non tabétiques des cordons postérieurs de la moelle. Rap-
porteurs : MM. Ch. Dana (de New-York), Bruce (d'Edimbourg) et
Homen (d'Helsingfors). - Nature et traitement de la myélite
aiguë. Rapporteurs, MM. Von Leyden (Berlin), Marinesco (de
Bucharest), Crocq (Bruxelles), Fischer (New-York). La nature
des réflexes tendineux. Rapporteurs : MM. Jendrassik (de Buda-
pest), et Sherrington (de Liverpool).
MM. les rapporteurs, en raison de la longueur du programme
des travaux, sont priés de ne pas dépasser un quart d'heure pour
l'exposé de leurs rapports. Ceux-ci ne sauraient en aucun cas être
lus en séance. Ces rapports, seront imprimés in extenso dans le
compte rendu du Congrès. Dans la discussion des rapports, chaque
orateur ne pourra disposer que de dix minutes.
Communications diverses ? Dans chaque séance, après l'exposé
et la discussion des rapports, auront lieu les communications sur
les sujets divers. Ces communications ne pourront avoir été
publiées ou présentées à des sociétés savantes avant l'ouverture du
Congrès. En raison du grand-nombre des communications annon-
cées (une centaine environ), il a été décidé par le Comité d'organi-
sation que la durée maxima de chaque communication ne devra
pas excéder dix minutes. Dans les discussions, les orateurs ne
pourront garder la parole plus de cinq minutes consécutives. Au
bout de ce temps, le président ne pourra les autoriser à continuer
qu'après avoir consulté l'Assemblée.
..
- II. Section de Psychiatrie. ?
Jeudi 2 août, à 2 heures : Séance solennelle d'ouverture du
Congrès, à la salle des fêtes de l'Exposition universelle. .
.Vendredi 3 août. - Séance du matin, à 10 heures : 1° Nomina-
tion du bureau ; 2° Discours du président ; 3° Première question,
Pathologie mentale. Psychoses de la puberté. Rapporteurs,
MM. Ziehen (d'Allemagne), Marro (d'Italie), J. Voisin (de Paris).
Discussion : Pronostic éloigné des psychoses de la puberté, par le
Dr Cullerre (de la Roche-sur-Yon'(Vendée). Statistique des. psy-
choses de la puberté à l'asile des aliénés de Bordeaux, par le
Dr Pons, médecin en chef.
- Séance de l'après-midi, à 2 heures. Continuation de la discus-
sion. Communications diverses sur la pathologie mentale. Contri-
bution à l'étude des idées obsédantes, par- le Dr Ladislas Hosko-
vec, privat-docent de neuropathologie, à Prague (Bohême). On the
Archives, 2' série, t. X. 12
178 varia.
evolution of folie du doute [De l'évolution de la folie du doute), par
le or Hugues (de Saint-Louis (Etats-Unis). Ueber der psychischen.
Ursprung hysterichen phenomoene (De l'origine psychique de cer-
tains phénomènes hystériques), par le Dr Vogt (de Berlin). Ueber
paranoïa periodica (De la paronoïa périodique), par le professeur
Meschede (de Koenigsberg (Allemagne). Sur la folie systématique.
par le Dr Séglas, médecin de Bicêtre. La vraie cause de la paralysie
générale, par le professeur Wladimir Tschisch (de Dorpat (Bussie).
La famille des paralytiques généraux, par les Drs Ch. Vallon et
Wahl (de Paris). Sur la période terminale de la paralysie générale
et sur la mort des paralytiques généraux, par le Dr Arnaud (de
Vanves). Les formes pathologiques de la rougeur émotive, par le
Dr Hartenberg (de Paris). Paralysie générale progressive chez un
sujet ayant présenté, dix-huit ans auparavant, du délire de persé-
cution. Analgésies cutanées et viscérales profondes. Autopsie. Inté-
grité de la moelle, par les Drs Joffroy et Gombault (de Paris). Le
soir, fête sur invitation, offerte par M. le président du Congrès.
Samedi 4 août. Séance du matin, à 9 heures. - Deuxième
question. Anatomie pathologique. Anatomie pathologique de
l'idiotie. Rapporteurs, MM. les De, Shuttleworth et Fletcher-Beach
(d'Angleterre) ; Mierzejewsky (de Russie) ; Bourneville (de Paris).
Discussion, M. Toulouse (de Villejuif).
Séance de l'après-midi, 2 heures. Continuation de la discussion.
Communications diverses sur les questions d'anatomie et de phy-
siologie pathologiques. A mounted brain hémisphère transver-
sely divided into thirty seven sections for purposes of instruction
and clinical description in brain disease autopsy (Hémisphère
cérébral divisé transversalement en trente-sept coupes, monté
pour la démonstration et la description clinique dans l'autopsie
des'maladies du cerveau), par le or Hughes de Saint-Louis (États-
Unis). - Contribution clinique et anatomo-pathologique à l'étude
de la confusion mentale, par les Drs Roubinovitch et Vlavianof (de
Paris. An improved pocket aesthesiometer made of platinum
with Weber's distance points, etc., in decimal and english scale
engraved thereon (Aesthésiomêtre perfectionné en platine avec les
pointes de distance de Weber, etc., gravées en décimales à l'échelle
anglaise), par le De Hughes, de Saint-Louis (Etats-Unis).
Dimanche 5 août. Visite des asiles de Ville-Evrard et de la
Maison-Blanche. Banquet. Le soir, fête offerte aux membres
du Congrès par le Bureau et les Comités d'organisation du Congrès
au palais et dans les jardins du Luxembourg.
Lundi 6 août. Séance du matin, 9 heures. Troisième ques-
tion. Thérapeutique. De l'alitement (repos au lit) dans le traite-
ment des formes aiguës de la folie et des modifications qu'il pour-
rait entraîner dans l'organisation des établissements consacrés aux
VARIA. 17K
aliénés. Rapporteurs, MM. Clemens Neisser (d'Allemagne); Korsa-
koff (de Russie) ; More ! (de Belgique). Discussion : M. Toulouse
(de Villejuif). - Ueber die l3etlbeUandluuh der Geisteskranken
ausserhalb der Anstalten (De l'alitement des aliénés en dehors des
asiles) ; par le Dr Otto Snell (de HIdesheim). Du repos au lit
dans le traitement de psychoses aiguës parle Dr Braesco (de Jassy,
Roumanie).
Communications diverses sur la thérapeutique. Le placement des
aliénés dans les familles. Le système d'Ecosse (avec cartes) par le
D1' Sutherland, lier Majesty's D. Commissionner in Lunacy for
Scolland. Passage entre la vie ordinaire et la maison d'aliénés,
par le Dr Gustave d'Olah (de Budapest). - Sur le rôle du chirur-
gien dans les asiles d'aliénés, par le De Picqué, chirurgien en chef
des asiles de la Seine. Examen et surveillance des aliénés (avec
projections), par le De Toulouse (de Villejuif). De la suggestion
hypnotique et de la psychothérapie dans le traitement de la mor-
phinomanie et de la dipsomanie, par le Dr Bérillon (de Paris). -
Une méthode de traitement de certaines phobies, par le Dr Har-
tenberg (de Paris).
Séance du soir, 2 heures. - Assemblée générale du Congrès au
grand amphithéâtre de la Sorbonne.
Mardi 7 août. Le matin, à 10 heures visite de l'Asile cli-
nique. Inauguration du nouveau pavillon de chirurgie. Banquet.
- Le soir, fête à l'Hôtel de Ville, offerte par Je Conseil municipal
de Paris.
Mercredi 8 août. Séance du matin, 9 heures. Quatrième ques-
tion. Médecine légale. Les perversions sexuelles obsédantes et im-
pulsives au point de vue médico-légal. Rapporteurs, MM. de Krafft-
Ebing (d'Autriche), Morselli (d'Italie), Paul Garnier (de France).
Discussion.
Séance du soir, 2 heures. Continuation de la discussion.
Communications diverses sur la médecine légale des aliénés. - thé
prostate gland in relation to sexual perversion. (La glande prosta-
tique dans ses rapports avec les perversions sexuelles), par le D'
Sulherland (d'Ecosse). Psychopathia sexualis and divorce (Psy-
chopathie sexuelle et divorce), par le D1' R.-W. Ihnfeldt (de New-
York). - Rapport entre la criminalité des enfants et l'alcoolisme
des parents. Etude clinique, par l\1ne Louise Robinovitch, docteur
en médecine à New-York. Sur les rapports des maladies men-
tales avec la perversion morale, par le Dr Brunet (de Paris). -
Des responsabilités pénales et civiles dans les cas de placements
familiaux d'aliénés, par les Drs Marie et Toulouse, de Villejuif.
Jeudi 9 août. Séance du matin, 9 heures. Communications
diverses. Relations sur la psychiatrie en Hongrie, par le Dr Gus-
tave d'Olah (de Budapest). Statistique des aliénés. Projet d'une
180 VARIA.
entente internationale (avec projections), par le Dr Toulouse (de
Villejuif).- L'isolement des tuberculeux dans les asiles d'aliénés,
par les D''s Marie et Toulouse (de Villejuif). - Clôture des travaux
de la section.
Séance du soir, 2 heures. Séance solennelle de clôture du
Congrès dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne. Le soir, fête
offerte par M. le Président de la République, au palais de l'Ely-
sée'. v
Vendredi 10 août. - Visite de la colonie familiale de Dun-sur-
Auron (Cher).
Les aliénés en liberté.
Nous devons à l'un de nos internes le récit suivant redire
d'après les renseignements les plus exacts.
Le nommé Dethès, cultivateur à Séderon, âgé de vingt-deux ans,
a depuis l'âge de douze ans des accès nettement épileptiques avec
convulsions et perte de connaissance. 11 est réformé l'année dernière
au conseil de revision, pour épilepsie. Il est grand et robuste. Son
caractère est depuis longtemps sournois, irritable, violent. Sa
famille, dévote, espérant améliorer son caractère, lui inculque des
idées religieuses et le pousse aux pratiques pieuses.
Vers le commencement de 1900, D... semble atteint de manie
religieuse. Ses visites à l'Église deviennent très fréquentes, exces-
sives, il parle continuellement de Jésus Christ et dit qu'il « veut
devenir semblable au bon Dieu ».
Au mois d'avril dernier, un dimanche matin, au moment des
offices, D... accourt à la messe tout nu, fait irruption au milieu des
fidèles, gesticulant et criant : « je suis devenu semblable au Christ »
- Grand émoi énorme scandale dans le petit village. Il faut
l'intervention de la gendarmerie pour obliger D... à quitter
l'église.
Le procureur de la République informé de cette exhibition scan-
daleuse se renseigne et ne voulant pas poursuivre D... qu'il juge
irresponsable, demande un examen et un certificat médical. Le
médecin désigné^ répond, après examen, que D... est épileptique,
1 Pour toutes les fêtes du Congrès, les femmes, filles et soeurs de
JIN. les membres du Congrès seront invitées. Un Comité de dames est
organisé pour la réception des femmes, filles et soeurs de les mem-
lues du Congrès. Ce Comité, composé des femmes des membres du Comité
exécutif du Congrès et des présidents de section, s'est constitué sous la
présidence de \Im" Lannelongue et l3ronardel. Ce Comité disposera, à la
Faculté de médecine, d'une très belle salle où les dames congressistes
pourront retirer leurs insignes, se réunir et trouver, aupiès des dames,
membres du Comité, tous les renseignements qui leur seront utiles.
VARIA. 1 S 1
maniaque, qu'il constitue « un danger pour la morale et là sécurité
publique », et que son état mental nécessite son internement dans
un asile spécial.
Dès lors le maire de la commune de Sederon, conseiller général
de la Drôme, M. Raynaud-Lacroze, est prié de faire remplir les
formalités complémentaires pour faire enfermer D...
Aussitôt, les parents du malade viennent supplier M. Raynaud-
Lacroze de ne pas faire interner leur fils ce qui « serait une tache
pour leur famille ». D'ailleurs, ils s'engagent à exercer sur ce ma-
lade une surveillance de tous les instants et promettent que des
faits aussi regrettables ne se produiront plus. Le maire cède à ces
réclamations et il le fait d'autant plus volontiers qu'il sait que l'in
ternement de D... coûtera un demi-millier de francs par an à sa
commune qui est très pauvre -une dépense de demi-mille francs
chaque année, constitue pour son petit village, une dépense
colossale, aussi croit-il agir en sage administrateur des deniers
communaux en faisant son possible pour empêcher le transfert de
D... dans un des asiles voisins. Bref, D... n'est pas interné. On le
laisse au domicile paternel où il continue à vaquer à ses occupa-
tions champêtres.
On va voir les terribles conséquences de cet acte. D... devient de
plus en plus sournois, il a de fréquents accès de colère. II est per-
suadé que le maire, M. Raynaud-Lacroze, a voulu le faire interner.
Il lui en garde rancune, on arrive enfin au drame final. C'est au
mois de mai dernier, D... en allant travailler aux champs, parque
sa chèvre dans une prairie appartenant au maire du village. Pen-
dant la journée, un domestique de ce dernier, craignant que la
chèvre ne cause des dégâts dans la propriété de son maitre, détache
l'animal et va le parquer plus loin. D... bêchait la terre tout près
de là. Au retour du travail, il vient détacher sa chèvre et constate
qu'elle n'est plus à la place où il l'avait attachée quelques heures
auparavant. Il en éprouve un vif ressentiment. C'est certainement 't
le maire de la commune qui lui a encore joué ce mauvais tour ! ...
Or, à ce moment précis, cruelle fatalité, Mme Raynaud-Lacroze,
femme du maire, vient àpasser à proximité. D... l'aperçoit. Bran-
dissant sa bêche il bondit sur elle qui menacée s'enfuit de toute la
vitesse de ses jambes. Elle arrive jusqu'à son jardin... D... la pour-
suit toujours, menaçant, elle se réfugie dans un réduit qu'elle
referme sur elle. D... enfonce la porte du réduit et assène sur la
tête de Mme Raynaud-Lacroze un formidable coup de bêche qui
l'étend morte. Un habitant du village (père de cinq enfants) a
aperçu Mme Raynaud-Lacroze fuyant devant D..., il accourt, et à
peine est-il en face de cet aliéné qu'il reçoit sur le crâne un vio-
lent coup de bêche qui le tue net. Deuxième victime. Cette scène
a été très rapide mais ne s'est pas passée sans bruit. M. Raynaud-
Lacroze, qui, il y.a quelques jours à peine, tâchait d'éviter l'inter-
182 VARIA.
nement de D... est attiré par le vacarme. Il aperçoit les deux
cadavres sur lesquels s'acharne cet individu, il vient les lui arra-
cher. Mais D... se précipite sur lui, M. Raynaud-Lacroze s'enfuit,
mais dans sa fuite il est atteint à la nuque par la bêche de D... qui
produit une fracture compliquée de la base du crâne dont il meurt
le lendemain sans avoir repris connaissance.
Son crime accompli, D..., tranquillement, regagne son domi-
cile, sa bêche sur l'épaule. Il a les yeux hagards et aux personnes
qu'il rencontre et qui le regardent il dit avec flegme : « N'ayez
aucune crainte, je viens d'en tuer trois, c'est assez pour aujour-
d'hui. » A peine est-il rentré chez lui, la gendarmerie informée
accourt et ce n'est qu'après une lutte acharnée, après un corps à
corps des plus émouvants qu'on arrive à s'emparer de cet homme.
On le transfère provisoirement à la maison d'arrêt du chef-lieu
d'arrondissement. D... est très excité, il a de violentes impulsions
qu'on maîtrise à grand'peine. On le place dans une cellule. On ne
laisse à sa disposition qu'une paillasse qu'ilne tarde pas à détruire
à coups de dents. Actuellement D... est interné à l'asile de Privas
(Ardèche); il a de fréquentes et très violentes impulsions.
Ce fait horrible dû à un épileptique malade depuis des
années montre combien nous avons raison de poursuivre
énergiquement et sans cesse notre campagne en faveur de
l'internement des malades aliénés aussitôt que se produisent
les premiers troubles intellectuels. Dans ce cas encore les
malheurs sont dûs à ce que l'on n'a pas suivi ce conseil donné
d'ailleurs par tous les médecins un peu au courant de l'his-
toire de la folie. Ici le médecin n'a pas hésité â faire son
devoir. Il n'en a pas été de même de l'administration. Le Pro-
cureur, le Préfet et le Maire n'ont pas fait leur devoir, ce
dernier hélas l'a payé de sa vie sans compter celle de sa
femme et l'un de ses concitoyens. C'est à l'administration
supérieure de donner des ordres formels à ses préfets pour
qu'ils n'hésitent jamais à autoriser d'urgence le placement
des individus reconnus aliénés. La guérison du malade, la
sécurité publique doivent l'emporter sur les questions d'ar-
gent. Les faits ci-après sont également démonstratifs à divers
égards.
Le crime d'un fou. Un homme d'une vingtaine d'années, très
surexcité, se présentait mercredi matin chez M. Michaud com-
missaire de police du quartier Saint-Victor, et lui faisait la décla-
ration suivante :
« Je me nomme Pierre Legrand, j'ai vingt-cinq ans, je suis jour-
VARIA. 183
nalier, je viens me constiluerprisonnier, car j'ai tué ma maitresse,
11'e Jeanne Marin, âgée de trente-cinq ans, femme de place aux
Halles, qui demeure rue des Fossés-Saint-Victor. Elle m'a pris
mon coeur ; elle ne veut pas me donner le sien, tant pis pour elle.»
Le magistrat remarqua en même temps que le prétendu meur-
trier était chargé de victuailles : pain, oeufs, fromage, viande,
fruits. « Pourquoi apportez-vous tout cela ? » lui demanda-t-il.
- « Dame, comme on ne donne pas à manger là-bas, j'ai pris mes
précautions. »
M. Michaud comprit qu'il avait affaire à un fou. Il se rendit
pourtant au domicile de Mme Marin qu'il trouva en bonne santé.
Il se décida à envoyer le pauvre aliéné à l'infirmerie du Dépôt.
Examiné au Dépôt par un médecin aliéniste, Pierre Legrand fut
remis en liberté jeudi. Hier matin, vers six heures, 1\lule Jeanne
Marin se trouvait avec sa patronne, au pavillon des Halles, n° 11.
et vaquait à ses occupations ordinaires lorsque, sans provocation
aucune, un individu lui porta un coup de couteau en pleine
figure. Le coup fut si violent que la lame traversa la joue et sortit
par la bouche. Le meurtrier fut arrêté aussitôt. Il n'opposa, du
reste, aucune résistance et se laissa conduire au commissariat de
la rue des Prouvaires. C'était Pierre Legrand. Au magistrat il
déclara n'avoir aucun regret de son acte et être prêt à recommen
cer. Il avait voulu se venger de Mm0 Marin parce que celle-ci-qui
lui avait pris son coeur, répéta-t-il n'avait pas voulu abandon-
ner son mari pour le suivre lui. Ajoutons que Mme Marin se défend
d'avoir eu la moindre relation avec Pierre Legrand. Le fou meur-
trier été renvoyé au Dépôt. Cependant la victime avait été trans-
portée à l'Hôtel-Dieu où son état fut jugé très grave. (Le Radical,
18 mars 1900.) .
Evadé. Un aliéné nommé Fernand Copin vient de s'évader de
l'asile de Ville-Evrard, où il était interné depuis quelque temps.
L'histoire de Copin, qui n'est pas banale, mérite d'être contée.
Dans le courant de l'année dernière, trois malfaiteurs masqués
tentèrent une nuit d'assassiner une vieille renlière de Montreuil,
Mme veuve Pope, après avoir dévalisé son appartement. La commo-
tion éprouvée par la vieille dame la fit mourir quelques jours
après. Deux des malfaiteurs, Frascoli et Lemançois, furent arrê-
tés, mais le troisième parvint à se soustraire aux recherches.
Quelques semaines après l'attentat, un individu se présenta chez
M. Rousselot, commissaire de police de Montreuil et lui dit :
« Je me sens devenir fou et j'ai envie de couper la gorge à quel-
qu'un. Arrêtez-moi avant que j'aie le temps de commettre ce
crime. » Cet homme fut envoyé l'infirmerie du Dépôt et de là à
l'asile de Ville-Evrard. C'était Fernand Copin. Quelque temps
après, une femme, que Copin avait juré de tuer, vint raconter il
t84 VARIA.
M. Rousselot que la folie de cet homme était simulée et qu'il était
le complice de Frascoli et de Lemançois. Chaque fois qu'il était
sur le point d'être arrêté il simulait la folie. A la suite de ces
révélations, on mit le prétendu fou en observation. Convaincu que
son « truc » était découvert, il a pris la fuite. On ne sait ni com-
ment il a fait pour s'évader, ni où il est. (Le Temps, 6 mars 1900.)
Dans un accès de folie, une femme Villain, âgée de cinquante-
quatre ans, demeurant à Chinon (Indre-et-Loire) alluma du fen
dans le milieu de sa chambre et vint y enflammer ses vêtements.
Quand le mari arriva, attiré par les cris, le feu consumait déjà le
corps de la malheureuse folle, qui ne tarda pas à succomber au
milieu d'atroces souffrances. (Le Bonhomme Normand, 23 au
29 mars 1900.)
La folie de l'assassinat. - Un gardien du Palais de justice aper-
çut hier soir, à neuf heures, une jeune fille accroupie auprès de
la guérite du factionnaire. Il la questionna, et comme elle ne
répondait pas, semblant presque inanimée, il la releva et la porta
au corps de garde. En cet endroit, elle se remit promptement et
s'écria : « Arrêtez-moi, je suis une assassin. J'ai tué ma mère ! » »
Cette déclaration causa, on le pense bien, une profonde sensation.
Les gardes s'assurèrent de la jeune personne et la conduisirent au
commissariat de police.
Là, devant les inspecteurs, elle renouvela sa déclaration et
donna des détails. Sa mère l'ayant frappée, elle avait juré de se
venger. Elle était allée emprunter un revolver à une amie qu'elle
ne voulut. pas nommer afin, dit-elle, de ne pas la compromettre
et, rentrée chez elle, avait brûlé la cervelle à sa mère : « Allez,
ajouta-t-elle, 23, passage Ménilmontant, au domicile de ma mère,
Mme Connans, et vous trouverez le corps étendu dans l'entrée. »
La jeune fille parlait sans exaltation, d'un ton ému, ainsi qu'il
convient à l'auteur repentant d'un pareil crime. Les inspecteurs
de police ne doutèrent pas un instant de la véracité de son récit.
Ils se rendirent à l'adresse indiquée, frappèrent à la porte de
l'appartement de 11h'° Connans et... cette dame en personne vint
leur ouvrir. Mise au courant du récit fait par sa fille, elle déclara
que celle-ci était folle et qu'elle s'était enfuie depuis la veille.
Mlle Connans a été envoyée à l'infirmerie du Dépôt. (Le Temps du
5 avril 1900.)
En paix... - M. Antoine Duplais, propriétaire à Treuil-Bussac,
commune de Fouras (Charente-Inférieure), avait été, il y a quelque
temps, interné dans l'asile d'aliénés de Lafond. Sur les instances
de ses amis, on le remit en liberté. Il vivait sans sortir de chez lui,
soigné par une vieille femme, Pauline Burgeau, âgée de soixante-
trois ans. Au moment où la pauvre femme venait lui annoncer
- VARIA. 188
hier que le dîner était servi, M. Duplais, repris d'un accès de folie
furieuse, s'arma d'un fusil de chasse et fit feu à bout portant.
Pauline Burgeau tomba foudroyée. Le meurtrier a été conduit
dans la soirée à la maison d'arrêt de Rochefort. Il parait absolu-
ment irresponsable. (Le Temps du 4 mars 1900.)
Un jeune homme de dix-huit ans, d'Ambarès (Gironde), s'est jeté
sous un train, à Bordeaux, et a été décapité. On dit que c'est la
folie qui l'a conduit à se donner la mort. (L'Indicateur de Cognac,
29 avril.)
Le sieur Pierre Lavieille, trente-sept ans, journalier à Isigny,
s'est pendu dans une chambre de son habitation. Le malheureux
qui avait depuis quelque temps le cerveau dérangé, avait, à plu-
sieurs reprises, manifesté l'intention de se donner la mort. (Le
Bonhomme Normand du 17 mai.)
Une héritière de Jules Grévy. Une journalière, Rose Carpon,
âgée de vingt-huit ans, demeurant à Courbevoie, boulevard
Bineau, prétendait que M. Jules Grévy lui avait légué plusieurs
millions. A l'en croire, elle avait été élevée par MM. Carnot et Félix
Faure, et les légataires des trois présidents l'avaient frustrée de ses
droits. La malheureuse joignait à la folie des grandeurs celle de
la persécution qui, en fin de compte, a tourné à la folie furieuse.
- Cette maison est à moi, déclara-t-elle, hier, à son proprié-
taire, et vous l'occupez indûment : je vous donne vingt-quatre
heures pour vider les lieux. -
On rit indulgemment des sommations de l'insensée et, comme
on pense, il n'en fut tenu aucun compte. Mais elle, alors, eut
recours aux grands moyens pour expulser de force son locataire
récalcitrant. Elle mit tout simplement le feu au mobilier. Pour le
coup, on pouvait dire qu'elle opérait littéralement une saisie-
brandon. Cet acte de folie n'a pas eu, . heureusement, d'autre
conséquence que de faire transporter Rose Carpon à l'infirmerie
spéciale. (Le Matin, 5 juin 1900.)
- La femme Jannot, soixante-huit ans, cultivatrice à Boissey,
près Saint-Pierre-sur-Dives, s'est noyée dans la mare située dans
sa cour. La pauvre femme avait la. manie de la persécution.
(Bonhomme Normand du 7 juin.)
' Un pendÛ. Le sieur Joseph Dallet, domestique à Cambremer,
s'est suicidé dans un moment de folie. (Le Bonhomme Normand,
8 au 14 juin 1900.) - · -
Un terrassier, Guillaume Vaissier, âgé de cinquante-quatre ans,
qui habitait depuis dix-sept ans l'hôtel Délabre, 137, rue de Cha-
186 VARIA.
renton, donnait depuis quelque temps des signes d'aliénation
mentale. Ce malheureux était pris hier après-midi d'un accès de
folie furieuse et se frappait sur la tête à coups de marteau et dans
le ventre à coups d'alène, en criant : « au secours ! à l'assassin ! »
On accourut et on désarma le malheureux qui a été transporté
mourant à l'hôpital Saint-Antoine. (Le Soleil, 12 juin 1900.)
M. Bertrand H..., âgé de quarante-neut ans, journalier, de-
meurant rue Diderot, à Issy-les-Moulineaux, a été conduit, hier, à
l'infirmerie spéciale du Dépôt. Il brisait tout chez lui et menaçait
ses voisins. On dut le ligoter pour l'emmener. Cet accès de folie
furieuse est attribuée à l'alcoolisme.
Le même jour à l'ile Saint-Germain, un autre fou, vêtu en
ouvrier, était retiré de la Seine par des garçons bouchers qui fai-
saient une partie de canot. On n'a pu obtenir de lui aucun rensei-
gnement. Il a dit être âgé de trente et un ans, alors qu'il en pa-
raissait soixante-dix au moins. Il a été, lui aussi envoyé à l'infir-
merie spéciale. (Le Soleil 10 juin 1900.)
Le nommé Léopold Foucher, cinquante-trois ans, ouvrier
carrier à May-sur-Orne, a, dans un accès de folie, frappé à coups
de pelle, sur la tète, le sieur Louis Royer, quarante-cinq ans, ou-
vrier couvreur à Fontenay-le-Marmion. Royer, qui réparait la cou-
verture d'une maison, à May-sur-Orne, descendait pour chercher
du mortier ; c'est alors que toucher se mit à le frapper, sans dis-
cussion prealable. Immédiatement arrêté, Foucher n'a cessé de
chanter pendant le trajet de May-sur-Orne à Caen. L'état du blessé
est très grave. Des démarches avaient déjà été faites pour faire
interner Foucher au Bon-Sauveur de Caen. (Le Bonhomme Nor-
mand, 15 au 21 juin 1900.)
Pendu dans un urinoir. Une tentative de suicide a eu lieu hier
soir, vers 11 heures. Les gendarmes Sinibaldi et Azan ont trouvé
pendu, dans l'urinoir de la place de la Liberté, un individu qui
s'était servi de sa ceinture pour mettre son triste projet à exécu-
tion. Les deux gendarmes ont immédiatement coupé le lien et ont
transféré cet homme au poste de la Permanence. Ils étaient arrivés
juste à temps. Cet individu, nommé François Audiguier, âgé de
cinquante-sept ans, né dans le département de l'Indre-et-Loire, V.
été ensuite dirigé sur l'hôpital civil, où des soins lui sont prodi-
gués. Audiguier ne jouit pas de la plénitude de ses facultés men-
tales. Il aurait été déjà interné à l'asile d'aliénés de Sainte-Anne
(Seine). (Petit Var, 15 juin 1900.)
A coups de hache. La gendarmerie de Lison a arrêté la nommée
Eugénie Marie, ménagère à Sainte-Mai guerite-d'Elle, pour avoir
VARIA. 187
porté plusieurs coups de hache à un habitant de la même com-
mune avec lequel elle vivait. Les blessures, quoique graves, ne
mettent pas sa vie en danger. Cette femme semble avoir agi sous
l'empire de la folie. Elle a déjà été internée au Bon-Sauveur.
Folle incendiaire. Un incendie, du reste tôt éteint par les
voisins, éclatait hier vers 2 heures au domicile de Mima veuve
Anne Dion, 5, rue de Chabrol ; c'était la pauvre femme qui atteinte
du délire de la persécution depuis la mort de son mari survenue
il y moins d'un an, qui avait elle-même mis le feu aux tapisseries
de son appartement pour, dit-elle, « asphyxier les esprits qui la
persécutaient a. Envoyée à l'intirmerie du dépôt par M. Leygonie,
commissaire de police, la pauvre femme mit en lambeaux la
redingote du cocher et arracha la barbe de l'un des agents char-
gés de la conduire. (Le Radical, 20 juillet 1900.)
Les drames de L'ALCOOLISllE.
Un forcené. Le nommé Jules Viel, vingt-un ans, couvreur à
Villers-Canivet, marié depuis trois mois, maltraite sa femme quand
il a bu. Lundi, celle-ci, après une nouvelle scène, se réfugia chez
son oncle, le sieur Leclerc. Viel alla la chercher. On refusa de lui
ouvrir. Il retourna chez lui, prit un revolver et un fusil à deux
coups et retourna chez le sieur Leclerc. Sur un nouveau refus, il
tira trois coups de revolver et un coup de fusil sans atteindre per-
sonne. Il s'en alla puis revint une troisième fois et tira quatre
coups de feu dans la porte et la fenêtre. Le lendemain, la paix
était faite entre les époux qui déjeunèrent ensemble, mais le par-
quet de Falaise avait été prévenu et Viel aété arrêté. (Le Bonhomme
Normand du 8 mars 1900.)
- Le nommé Arthur Lemue, dix-neuf, de Nouvion (Aisne), ren-
trant ivre, a frappé de plusieurs coups de couteau son père qui lui
faisait des reproches. Il a été arrêté. L'état de Lemue père est
grave. (Le Bonhomme Normand, 23 au 29 mars 1900.)
Au Havre, un jeune employé de commerce fit le pari, après
s'être déjà enivré avec de l'absinthe le matin, de prendre dans
l'après-midi quinze verres d'absinthe. Il absorba la boisson funeste
et se coucha. Il mourut dans la nuit après avoir bu trente-cinq
verres d'absinthe en moins de douze heures. (Le Bonhomme Nor-
mand, 6 au 12 avril 1900.)
A Clichy, le nommé Auguste Leverrier, trente ans, journalier,
étant ivre, tirait des coups de revolver sur les passants. Apercevant
à à une fenêtre Emile Mirabelle, 18 ans, il le blessa d'une balle dans
la tête. Il fut aussitôt terrassé et désarmé. La foule l'avait il moitié
188 VARIA.
assommé quand les agents vinrent l'arrêter. L'état du blessé est
grave. (Le Bonhomme Normand, 6 au 12 avril 1900.)
Un ivrogne incendiaire. - Hier soir, vers huit heures, un jour-
nalier, nommé Adolphe Tichaut, âgé de quarante-cinq ans, demeu-
rant 1, impasse Letort, qui était rentré à son domicile complète-
ment ivre, a répandu du pétrole sur le parquet de la chambre qu'il
occupe au troisième étage et y a mis le feu. L'incendie s'est immé-
diatement propagé aux meubles et à la literie. Grâce à l'interven-
tion des voisins, le feu a pu heureusement être éteint après une
demi-heure de travail. Quant à Adolphe Tichaut, il a été consigné
au poste de police, où son état n'a pas permis de l'interroger.
L'Aurore, 20 avril 1900).
- Le sieur Armand Becquemond, cinquante-quatre ans, jour-
nalier au Mesnil-Germain, près Livarot, était continuellement ivre
depuis quelques jours. Voyant sans doute tout en noir au lieu de
voir tout en rose, il a mis à profit l'absence de sa femme pour se
pendre dans l'appartement attenant à sa cuisine. (Le Bonhomme
Normand, 9 mars.)
Une ivrognesse. - Un commerçant de Beaumesnil (Eure), a
porté plainte contre sa jeune femme qui a pour l'alcool, dit-il,
une passion irrésistible et se livre contre lui à toute sorte de vio-
lences quand elle est en état d'ivresse. C'est ainsi qu'un soir, le
.commerçant l'ayant trouvée couchée, complètement ivre, dans son
lit, et lui ayant fait des observations à ce sujet, elle prit un
revolver sur la cheminée de la chambre et le mit en joue. Il put
heureusement la désarmer avant qu'elle eût fait feu. La nuit sui-
vante, comme elle était encore dans le même état, elle porta à son
mari, pendant qu'il dormait, plusieurs coups de poing sur la figure,
. et ce dernier, pour avoir la paix, dut aller coucher dans une autre
chambre. Craignant que la mégère ne lui fasse un mauvais
parti, ainsi qu'au bébé de neuf mois qu'elle allaite, le pauvre mari
s'est décidé à prévenir les gendarmes. (Le Bonhomme Nos-
mand du 17 au 23 novembre 1899.)
Pari mortel. - Les nommés Ilouget et Degort, domestiques à
Beaulieu, avaient parié de boire à eux deux un litre d'eau-de-vie
.que paierait celui qui le premier serait ivre. Rouget gagna le pari;
' mais, en rentrant chez son maître, il fut en chemin pris de ma-
laise et retrouvé inanimé le lendemain. Le malheureux avait suc-
combé à une congestion causée par l'alcool. (Le Bonhomme Nor-
mand du 17 au 23 novembre 1899).
' - Un spectacle rare que nous a donné, hier, la cour d'assises de
la Meuse, siégeant à Bar-le-Duc, devant laquelle comparaissait un
VARIA. 189
professeur de seconde classique de Verdun, M. Bivrum, sous
l'accusation de tentative d'assassinat sur la personne du principal
même du collège. Quoique licencié ès lettres, M. Bivrum s'enivrait
comme un portefaix. Il achetait l'absinthe par fûts de 25 litres,
qui passaient comme lettres à la poste de sa cave dans son gosier.
Mais il avait l'absinthe mauvaise... et même criminelle. Et c'est
ainsi qu'un jour il tira deux coups de revolver sur le principal
qui avait eu le tort à ses yeux de demander son changement.
Tout couvert de sang, le malheureux proviseur parvint à désarmer
le professeur que le jury meusien a déclaré coupable sans prémé-
ditation. 11 a été, en conséquence, condamné à huit ans de réclu-
sion. Détail navrant : Ce 'malheureux est marié et père de deux
enfants. (Le Soleil du 31 janvier 1900).
Suicide. - Vendredi dernier, pendant l'absence de son mari,
Mm° Brout, née L;gasse Augustine-Félicie, cultivatrice à Merveille,
a mis fin à ses jours en se précipitant dans son puits. C'est
encore une victime de l'alcoolisme, car il est tout probable que
c'est sous l'empire de la boisson sa passion - que lui estvenue
l'idée du suicide. (Le Progrès de l'Eure, 27 avril.)
Ivresse et brutalité. - La femme Marthe Marie, vingt-sept ans, vit,
à Fontaine-Etoupefour, forcément séparée de son mari, écroué en
prison pour vol. Elle vient à Caen vendre du pissenlit afin de se faire
quelques sous pour boire. On dit même qu'elle attire chez elle des
jeunes gens pour boire et pour leur enseigner autre chose que la mo-
rale en action. Quand elle est ivre, lafemme Marie a la boisson brutale
et martyrise sa petite fille de sept ans, au point que plainte a été
portée au parquet. Poursuivie pour ce dernier fait, la femme Marie
a été condamnée à huit mois de prison. (Le Bonhomme Normand,
3 mai.) Et l'enfant !
Les suites de l'ivresse. Le sieur Morin, cinquante-six ans,
cantonnier à Marolles, près Lisieux, voulant, pour rentrer chez lui,
aller au raccourci, traversa des prairies ; mais, comme il avait bu
plus que de raison, il glissa en passant sur un vannage et tomba
dans l'eau la tête la première. Le malheureux s'est tué net.
(Bonhomme Normand, 7 juin.)
A coups de tranchet. Un drame s'est déroulé hier matin à
trois heures et demie, 7, rue de l'Industrie. A cette adresse vivait
maritalement avec une dame Albertine Gil, âgée de trente-cinq
ans, un ouvrier cordonnier nommé Albert Barray, âgé de quarante
ans, qui était fréquemment en proie à des accès de délire alcoolique.
Ce malheureux, qui était rentré chez lui vers deux heures et demie,
très surexcité, s'est levé brusquement et, se précipitant sur sa
compagne, l'a frappée de sept coups de tranchet. Albertine Gil,
190 . FAITS DIVERS.
bien que grièvement blessée au bras et au coté gauches, a réussi
à s'échapper de l'étreinte du forcené, mais celui-ci, la saisissant à
bras-le-corps, l'a portée jusque sur l'avenue d'Italie où des passants
l'ont relevée inanimée au milieu d'une mare de sang. La pauvre
ferume, dont l'état est désespéré, a été transportée à l'hôpital
Cochin. Quant au meurtrier, il a été arrêté à son domicile au
moment où, pris d'un nouvel accès de délirium tremens, il rédui-
sait son mobilier en miettes. On l'a transporté également à l'hôpital
Cochin, d'où il sera dirigé plus tard sur l'Asile Clinique. (Le Matin,
5 juin 1900.)
Un Vacher poitevin .
Entre Saint-Benoit et Smarves (Vienne), la femme Gervais.
occupée dans son champ, a été saisie tout à coup par derrière,
renversée, à moitié assommée, violenlée, et allait être assassinée
lorsque l'arrivée du tramway fit enfuir le bandit. Un petit berger
de Monaillé a été assailli par le sinistre assassin, qui lui laboura
le ventre à coups de couteau et le laissa pour mort. Une fillette a
été séparée de ses camarades puis enlevée par le Vacher poitevin,
qui la transporta derrière un buisson, la viola et allait l'étrangler,
lorsqu'on accourut assez à temps encore pour empêcher le monstre
de consommer ce dernier crime. On cite encore un voiturier qui a
été attaqué et une femme menacée qui n'ont dû leur salut qu'à la
fuite. (Le Bonhomme Normand, 15 au 22 juin 1900.)
FAITS DIVERS.
Asiles n·.1LIH : 11 : S. Nominations et promotions : M. le D1' MAIGUEr.
(concours de 1896), nommé médecin-adjoint à Montdevergues
(Vaucluse), en remplacement du Dr Lent; M. le Dr IAVIAI1T,
premier du concours de Lille, nommé médecin-adjoint à l'asile
de Dury (Somme), en remplacement du Dr BUBEG, décédé;
M. le Dr BicuE, premier du concours de Montpellier, nommé
médecin-adjoint à l'asile de Lafond (Charente-Inférieure), en rem-
placement du Dr 7·FNADF, nommé à Prémontré (Aisne); M. le
Dr Brunet, second du concours de Lille, nommé médecin-adjoint
à Fains (Meuse), en remplacement du Dr Bruche, nommé à Saint-
Venant ; il. le Dr Lorry, médecin-adjoint à Evreux, nommé à
la 1 re classe exceptionnelle.
FAITS DIVERS. 191
Religion ET folie. L'extrait suivant est bon il rappeler. Il s'agit
d'une réponse de Leuret à Heinroth qui considérait la folie, non
pas comme une maladie du corps, « mais comme une maladie de
l'esprit, un péché ».
«... Dire que l'homme ne deviendra jamais aliéné, s'il a toute
sa vie, dans son coeur, l'image de Dieu. c'est méconnaître les
innombrables cas de folies engendrées par la vie ascétique et par
la superstition; imputer les tourments des ensorcelés et des
possédés du démon, aux remords de leur conscience, c'est calomnier
des malheureux qui n'ont souvent d'autres torts que d'exagérer
leurs fautes, ou même de s'en attribuer qu'ils n'ont jamais com-
mises ; avancer que l'homme a une puissance morale qui ne peut
être vaincue par aucune puissance physique, c'est ignorer l'influence
qu'exercent, sur la production de la folie, les blessures à la tête,
l'ingestion de certaines substances vénéneuses, l'inflammation des
méninges, etc., etc. Se refuser à admettre que la folie soit trans-
missible, par voie de génération, c'est se refuser à l'évidence, et
nier ce que l'on voit tous les jours. » (LEURET, Traitement moral de
la folie, p. 147.)
Suicides d'adolescents. - Bouquetot. -.Nous signalions l'autre
jour à Evreux le suicide d'une jeune fille de quinze ans. Aujour-
d'hui, à Bouquetot, c'est un jeune homme de seize ans qui se pend
dans son grenier. On se demande en vérité si ces malheureux
jouissent bien de toutes leurs facultés et si une contrariété ou une
souffrance passagère ne leur enlèvent point tout sentiment d'attache
à la vie. Le jeune Adeline, de Bouquetot, jouait au bouchon
quelques minutes avant d'aller se pendre. (Rappel de l'Eure,
9 juin 1900.)
On a trouvé dans la Seine, quai de la Râpée, les cadavres,
liés ensemble, d'Aimé Fischer, quatorze ans, et d'Eugénie Marchai,
seize ans. Cause de ce double suicide : un précoce désespoir
d'amour. (Le Bonhomme Normand, 8 au 14 juin 9900.)
Le jeune Célestin de Baize, treize ans, dont le père est ciseleur,
rue Saint-Anastase, s'est pendu. On ignore les causes qui l'ont
poussé au suicide. (Le Bonhomme Normand du 12 juillet.)
Hospice DE Bicètre. - Maladies nerveuses des enfants : Ji. BOUR-
NEVILLE, le samedi à 9 Il. 1/2.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
BouRXEVtLLE. Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie,
l'hystérie et l'idiotie, Compte rendu du service des idiots, épileptiques et
arriérés de Bicêtre pour l'année 1899. Publié avec la collaboration de
MM. Bellin, Boyer, Chapotin, Darde), Katz, Noir (J.), Paul-Boncour et
Foulard. Tome XX de la collection. In-8° de cwxw·- ? 92 pages, avec
76 figures dans le texte et 13 planches hors texte. Prix : 8 francs.
Pour nos abonnés : 6 francs.
SAUXARt (S.). - Le lesioni traumatiche dei cenlni nervosi. Volume
in-8° de iv-320 pages. Roma, 1900. - Presso Il Giornale medico.
Sandret (J.). - Construction des asiles d'aliénés.' {Programme, empla-
cement, dimensions des pavillons et des salles de malades, description
des divers quartiers,. services généraux, description des principaux
asiles français, asiles de la Seine, asiles d'aliénés en Angleterre et en
Ecosse.) - Volume in-8, de 160 pages. - Paris, 1900. Librairie Béranger.
THULIIL Le dressage des jeunes dégénérés ou orlhophrénopédie. -
Tome VI de la Bibliothèque d'éducation spéciale de fiourneviiie.
Volume in-8° de iv-678 pages, avec 53 figurez Prix : 8 francs ? Pour
nos abonnés : 6 francs. - Auxbureaux du Progrès médical, 11," rue des
Carmes. '
- TONOLI (G.). - Dimissioni precoci di aliénait. Brochure in-8° de
24 pages. Meggio-Ëmitia, 1899. - Tipografia S. Calderini e Figlio.
TOULOUPE (Ed.). Traitement de l'épilepsie par les bromures et l'hy-
perchloruralion. Brochure in-8° de 14 pages. - Paris, 1900. - Extrait
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Genpemd Gesticht. - Volume in-8° de 165 pages. Ilaarlem, 1900. -
J. Euschedi in Zonen. '
VAN NESS Dearbors (G.). The Emotion of Joy. Volume in-8° de
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' VAN WALSEM (G.-C.). Versuclz.einer systematischen Methodik der
znikroskopisch-anatomischezz und antropologischen. Uzzlersuchung des
Cezztralnervensystem. Volume 111.40 de 184 pages, avec 8 planches. -
Amsterdam, 1899. -J. buller.
VILLERS (l : .). -- Le délire de la jalousie. Volume in-8° de 96 pages.
Bruxelles, 1899. Librairie H. Lamertln.
.. - Le rédacteur-gérant : Bournevii.le.
W reur, Ci). lIihu ! JsEv, imp. 7-1900.
Vol. X. Septembre 1900. N° 57.
ARCHIVES DE NEUROLOGIE
ENSEIGNEMENT
Les Cliniques psychiatriques des Universités
allemandes ; .
' Par le Dr PAUL SÉRIEUX, .
.Médecin des asiles publics d'aliénés de la Seine, '
chargé de missions.
Il est manifeste que nous sommes actuellement, en France,
dans une période de transition pour tout ce qui a trait à l'assistance
des aliénés aigus et chroniques, à la constitution des asiles et des
colonies, à l'organisation du service médical, en un mot pour
toutes les questions d'hospitalisation et de traitement des sujets
atteints de maladies mentales. Comme il arrive toujours en pareille
occurrence, deux camps sont en présence : l'un, comprenant les
hommes fidèlement attachés aux traditions anciennes, mais en
général insuffisamment documentés sur les progrès réalisés à
l'étranger; l'autre composé de ceux qui pensent que l'assis-
tance des aliénés est soumise, elle aussi, à cette loi d'évolution
qui régit le domaine des faits biologiques et sociaux.
Il ne nous appartient pas de prendre position dans ce débat;
mais il nous est permis, sans entrer dans la mêlée des combat-
tants, de faire porter nos investigations au delà de nos frontières.
Peut-être y trouverons-nous, ce qui vaut mieux que les discus-
sions et les joutes oratoires des sociétés savantes, je veux dire
des faits. N'est-il pas évident, en effet, que si nous voyons réalisées
à l'étranger, et cela chez les peuples les plus différents par la race
et la culture, les réformes qu'on réclame actuellement chez- nous,
n'est-il pas évident qu'on ne saurait plus présenter ces réformes
comme des vues de l'esprit, comme des entreprises hasardeuses ?
Archives, 2° série, t. X. 13
194 ENSEIGNEMENT.
Telles sont le non-restreint (Angleterre), l'open-dom' (Ecosse et.
Allemagne), la colonisation des aliénés (Allemagne), le traitement
par le lit (Belgique, Russie, Allemagne), l'assistance familiale
(Belgique, Ecosse), les hôpitaux urbains pour les aliénés aigus
(Allemagne), etc. Il s'agit là, non plus de polémiques plus ou
moins brillantes - mais d'applications pratiques, de conceptions
soumises au contrôle de la méthode expérimentale et contre
lesquelles ne sauraient prévaloir une théorie a priori ou l'obsti-
nation de quelques retardataires.
On a pu dire avec raison que la conception de l'asile d'aliénés
moderne s'était renouvelée complètement à l'étranger. Tandis que
nos asiles actuels ne diffèrent en rien des établissements construits
il y a une quarantaine d'années, les asiles étrangers se sont
transformés radicalement à mesure que se répandaient les idées
des aliénistes français, écossais, anglais, allemands, belges, et que
se formulaient plus nettement les exigences, trop lentement mé-
connues, du traitement des maladies mentales. Des réformes
décisives ont été réalisées en vue de donner satisfaction aux
desiderata de la psychiatrie contemporaine, et de permettre d'ap-
pliquer aux sujets atteints de maladies du cerveau le traitement
individuel que celles-ci réclament au même titre que les affec-
tions des autres appareils. Citons brièvement les plus importantes
de ces réformes :
Subordination étroite du plan général et de la constitution maté-
rielle des établissements d'aliénés aux indications d'ordre médical;
Segmentation de ces établissements en un grand nombre de
pavillons, complètement indépendants, sans souci exagéré de la
symétrie ;
Nombre très restreint des malades dans chaque pavillon;
Organisation matérielle et morale de chacun de ces pavillons
adaptée spécialement ci sa destination ;
Création de petits hôpitaux de traitement ;
Aménagement de quartiers de surveillance continue;
Grand développement donné ri la colonisation des aliénés chroniques
et convalescents ;
Extension de jour en jour plus généralisée de l'ol)eii-(Iooi, et du
non-restreint ;
Généralisation du traitement des psychoses aiguës par le séjour
au lit ; 1 -
Réaction contre l'isolement cellulaire ;
Création d'établissements spéciaux, de colonies, pour les épileptiques.
les idiots, les buveurs, les déments séniles, les aliénés criminels :
Augmentation du nombre des médecins, des internes, des 11lfi ?
miers ; .
Réformes dans l'organisation du service médical : .'
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 195
Organisation de l'assistance familiale, des Sociétés de patronage,
des écoles d'infirmières ;
Grand développement donné à renseignement clinique des mala-
,lies mentales.
Dans les pages qui vont suivre nous nous proposons d'exami-
ner les deux questions, étroitement liées, des petits hôpitaux de
traitement urbains et des cliniques psychiatriques universitaires.
Ayant eu l'occasion, au cours de deux missions en Allemagne
dont nous avons été chargés par la Préfecture de la Seine, en
1894 et 189fui, d'étudier de près l'organisation et le fonctionne-
ment de ces établissements, nous avons pensé que ceux qui s'in-
téressent aux choses de la médecine mentale, de l'assistance des
aliénés et de l'enseignement supérieur seraient peut-être curieux
de posséder quelques renseignements sur les cliniques psychia-
triques des Universités allemandes dont certaines méritent, à
divers points de vue, de retenir l'attention.
L'étude de la constitution matérielle et de l'organisation de ces
cliniques nous paraît d'ailleurs une question d'actualité. D'une
part, en effet, la réorganisation de nos universités provinciales
permet d'espérer que la science des maladies mentales - science
éminemment française sera officiellement enseignée dans
chacune de ces universités, ce qui nécessitera la construction de
cliniques psychiatriques universitaires. D'autre part, certaines
questions sur lesquelles on discute encore actuellement chez nous,
celles de l'isolement en cellule, du traitement par le lit, des
quartiers spéciaux d'agités, ces questions ont été tranchées dans
la plupart des cliniques allemandes, et cela conformément aux
desiderata exprimés en France par des maîtres qui s'appelaient
Esquirol, Parchappe, Foville, Renaudin, J.-P. Falret. Dans ce
but, une installation spéciale a été nécessaire, qu'il importe,
croyons-nous, de faire connaître. L'étude de ces diverses ques-
tions nous parait en effet devoir être féconde en enseignements.
Notre travail est divisé en deux parties. Dans la première, nous
examinons successivement chacune des cliniques psychiatriques
d'Allemagne en donnant à notre description une étendue en rap-
port avec l'importance de l'établissement. La seconde partie est
consacrée à des considérations générales : nous avons cherché à
rassembler, dans un tableau d'ensemble, les traits les plus intéres-
sants de l'organisation de ces cliniques.
Le nombre des universités allemandes est de vingt : elles
siègent il Berlin, Bonn, Breslau, Erlangen, Fribourg, Giessen.
GüLtingen, Greisswald, Halle, Heidelberg, Iéna, Kiel, Konigsberg,
Leipzig. Marbourg, Munich, Rostock, Strasbourg, Tubingen,
Wurzbourg. Chaque université, sauf celle de Kiel, possède une
clinique psychiatrique.
196 ENSEIGNEMENT.
- Université de Würzbourg (Bavière).
(Faculté 'de médecine : 8' professeurs ordinaires; 8 professeurs
z extraordinaires; 40 privat-docenten ; 998 étudiants 1.)
. Une -des premières en Allemagne, l'Université bavaroise de
Wùrzbourg organisa, dès 1818, une clinique de psychiatrie. Long-
temps installée dans les salles- antiques de l'hôpital Julius,où
existait depuis trois -siècles un quartier d'aliénés 2, la clinique
abandonna-, en 1888, le vieil hôpital pour devenir un Institut
universitaire autonome. Mais c'est seulement le leur juin 1893
que furent inaugurés les bâtiments de la nouvelle clinique (Psy-
chiatrisçhe' Klinik der Universitàt Viii,zbtt9), spécialement cons-
truite-en vue de sa destination : l'enseignement des maladies
mentales 3., · - : Nous emprunterons les éléments de notre description aux
publications du professeur Rieger . Conçue sur un plan tout à
fait nouveau, la clinique de Wûrzbourg est 1'(i-uvre, non pas d'un
.architecte, - `ce dernier n'ayant été que l'agent d'exécution, -
mais d'un aliéniste qui a poursuivi, non, sans hardiesse, la réali-
sation des conceptions que formule impérieusement la psychiatrie
contemporaine. C'est en effet le professeur de la clinique psychia-
trique lui-même, le Dr Rieger, qui a élaboré le plan général de
l'établissement, ainsi que tous les détails d'organisation. L'architecte
de l'Université, M. R. v. Horstig, n'a fait que se conformer scrupu-
leusement aux indications du médecin compétent.
Avant d'examiner dans le détail l'organisation de cet établisse-
' A moins d'indication contraire, les chiffres donnés au cours de ce
travail se rapportent à l'année 1891.
- °- V. Paul Sérieux. Notice historique sur le développement de l'assis-
tance des aliénés en Allemagne,. Arch. de Neurologie, 1895; n° t05.
- C'est la seconde clinique psychiatrique de l'Empire allemand dont
la création ait eu uniquement pour but de satisfaire les exigences de
l'enseignement et de la science. L'autre clinique est celle de l'Université
de' Halle (Prusse).
* Die Ausfiill1'ltn,q des Gl'iesinger'sclten Programma. Centralbl. f. Ner-
venheilk. und Psychiatrie, déc. 1893.
t7eber eizzige F1'a.'len der Organisation und de;' Battes psychiatrischer
Klinikell. Ibicl., 1894.
Die neue psychiatrische Klinik de ? ' Universitiit il'uzeboztrg. Klinisches
Jahrbuch. V liand, 1894 (avec un plan).
LES CLINIQUES -PSYCHIATRIQUES. J97
ment modèle, donnons-en brièvement les caractères principaux :
Clinique de soixante lits pour malades aigus ; -'deux pavillons- de
trente lits chacun, la plupart des lits étant placés au rez-de-
chaussée ; pas de quartier cellulaire; - aménagement spécial
en vue du traitement par le lit; un bâtiment principal avec salle
de cours de cent places, chambres d'examen, laboratoires pour le
personnel médical (le professeur de clinique et cinq médecins) et
un certain nombre d'étudiants ; logements pour une partie du
personnel médical. · '.
Prix de revient des bâtiments : 340 000 francs. (La ville de
Wurzbourg a fait don à l'Université du terrain, d'une superficie de
deux hectares.)
Le nombre des lits de la clinique (60) paraîtra peut-être insuffisant,
comparé à celui des autres cliniques psychiatriques universitaires
d'Allemagne (100-150 lits). Mais à Wirzbourg, on dispose pour
l'enseignement, en outre des malades de la clinique, de 88
sujets incurables (40 aliénés et 48 épileptiques), hospitalisés à
l'hôpital Julius. Le matériel clinique disponible est donc en réalité
de 150 sujets environ. Ajoutons que le « mouvcment » des entrées
et des sorties est très actif : le nombre des admissions est quatre
ou cinq fois plus considérable que celui des lits, d'où le renou-
vellement fréquent des patients. Chaque malade séjourne en
moyenne soixante-treize jours. Le chiffre moyen des entrées par
an, pour la période 1889-1896, est de 207. Le chiffre moyen de la
population présente le 1er janvier a été, pour la même période,
de 40. Enfin, l'admission des cas aigus est très facilitée : les
malades sont admis sans plus de formalités que dans les services
de médecine interne ou de chirurgie. La clinique sert de bureau
d'admission pour l'asile de district de Verneck. On transfère dans
ce dernier établissement les chroniques et les cas sans intérêt pour
l'enseignement.
La clinique se compose essentiellement de trois pavillons
détachés mis en communication par des corridors. Le pavillon
central, est destiné exclusivement à l'enseignement et aux recher-
ches scientifiques ou cliniques. Les deux autres pavillons, symé-
triquement disposés à droite et à gauche du premier, comprennent
chacun trente malades de chaque sexe. (Voir la fit.6.) -.
. Les locaux les plus importants de la clinique étant situés au
rez-de-chaussée, nous dirons quelques mots, pour n'avoir plus à-y y
revenir, de l'affectation des locaux du sous-sol et du premier étage.
Le sous-sol des trois pavillons composant la clinique est assez
élevé. En partie aménagé pour servir de locaux d'habitation', il
est affecté en réalité à la salle des morts, à la salle- d'autopsie, à la
buanderie, à la cuisine, aux magasins, etc.. ; ? -
. Pas de premier étage, sinon au-dessus de la partie antérieure de
chaque pavillon, c'est-à-dire que la salle des cours (pavillon central)
198
ENSEIGNEMENT.
et les salles de surveillance (2° et 3° pavillons) sont des bâtiments
à rez-de-chaussée.
Au premier étage du pavillon central se trouvent de vastes
laboratoires de chimie, de physiologie. Les pavillons latéraux ont, au
premier étage, les logements des médecins et quelques chambres
destinées à des malades n'ayant besoin d'aucun aménagement
spécial.
Le plan du rez-de-chaussée doit nous arrêter plus longuement.
Dans le pavillon central se trouvent : 1° la salle des cours pour
cent auditeurs assis ; 2° deux salles pour l'examen clinique des ma-
lades avec installation électrothérapique ; 3° le laboratoire d'ana-
tomie avec un laboratoire de photographie ; 4° le cabinet du pro/'es-
t1. lJtt : r'tr des hommes, 3o CcGr.
13 JJ¿VZ.J'ÍlHl/ de.J;.fimm £ J; 3o Zri.r :
C Corridors.
iSfilZc. dm cours
D TMccrOEt ? coej-. 1 £ .n,
\0kamôrcs d'examen;
Fi ? ri.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 199
seur; 3" les bureaux; G. une salle de réception. Le prix de revient
du pavillon central s'est élevé à 137.500 francs.
Pavillons latéraux. De nombreux problèmes se sont posés à
propos de l'organisation des pavillons de malades. 11 fallait, en
effet, tenir compte des conditions spéciales dans lesquelles devait
fonctionner la clinique psychiatrique de Wùrsbourg. Les locaux
devaient se prêter à l'application du traitement par le lit de tous
les malades non tranquilles et de ceux dont l'état physique laisse
à désirer. Il fallait concilier l'emploi systématique de cette méthode
avec les exigences de l'enseignement clinique, de façon à ce que le
traitement ne fut pas interrompu chaque fois que le patient serait
conduit à la salle de cours ou à la chambre d'examen. Pour donner
satisfaction à cette dernière indication, sans cependant renoncer
au système des pavillons détachés, on a mis les deux pavillons de
malades en communication avec le bâtiment principal à l'aide de
corridors. Grâce à ces corridors, on peut très aisément conduire
les patients, maintenus au lit, de la salle de surveillance à la salle
des cours ou aux chambres d'examen : tous ces locaux sont, en
effet, situés au rez-de-chaussée. Les sujets traités par le repos au lit
sont ainsi présentés aux élèves, ou examinés, dans leur lit. Celte
manière de faire présente en outre l'avantage de permettre, sans
perte de temps, un examen physique complet. Les considérations
qui précèdent expliquent l'utilisation presque exclusive du rez-de-
chaussée des bâtiments pour les locaux d'habitation, les salles
d'examen et de cours, ainsi que l'emploi de corridors pour relier
entre eux les divers pavillons.
D'autres difficultés devaient être tranchées dont la solution
semblait de prime abord bien embarrassante. M. ltieger ne voulait
en effet ni quartier cellulaire spécial, ni isolement prolongé en
cellule, ni emploi habituel des « calmants ». Et cependant, la
clinique devait recevoir un nombre considérable de cas aigus :
d'où une proportion anormale de sujets agités ou de malades ayant
besoin d'une surveillance permanente (50 p. 100 environ du chiffre
total). La constitution matérielle des pavillons devait être adaptée
à ces exigences spéciales. Chacun de ces quartiers comprenant
30 lits, c'étaient donc 16 malades agités ou à surveiller, pour
lesquels-il fallait prévoir un aménagement particulier.
Le problème était ainsi posé : grande proportion de cas aigus :
agités ou malades à surveiller suppression des quartiers cellu-
laires - pas d'isolement en cellule ou du moins isolement dans
des limites très restreintes - pas de restreint chimique 1. Avant
de dire comment. M. Rieger a cherché à résoudre des difficultés
que certains pensaient insolubles, exposons brièvement les idées
' Il va sans dire que le non-reslreiut est appliqué d'une façon rigou-
reuse. On a cessé de discuter cette question à l'étranger.
200 ' ENSEIGNEMENT.
du professeur de -Würzbourg sur cette question des quartiers
d'agités et de l'isolement en cellule, qu'il considère à juste titre
comme une des plus importantes de la psychiatrie.
M. Rieger part de ce principe que les malades agités et malpro-
pres ont besoin d'une surveillance ininterrompue. Cette surveillance
est d'autant plus indispensable que ce sont précisément les sujets
agités qui présentent, en général, le plus de chances de curabilité.
De plus, l'agitation n'est pas habituellement permanente chez un
même malade ; l'agité de tout à l'heure est calme maintenant.
Conclusion : l'isolement de ces sujets dans un quartier spécial
doit être proscrit ; ceux-ci ne doivent pas être abandonnés à eux-
mêmes, entre quatre murs, dans un quartier cellulaire, relégué à
l'extrémité de l'établissement. Et, de fait, M. Rieger affirme, fort
d'une expérience de dix années, qu'on peut traiter les malades
agités sans cellules, et cela dans de meilleures conditions qu'en
employant l'isolement cellulaire. Avec le concours du D1' Sommer,
aujourd'hui titulaire de la chaire de clinique psychiatrique à
l'université de Giessen, M. Rieger, dont la clinique, nous le répétons,
sert de bureau d'admission pour tous les cas aigus et graves d'une
grande ville et de ses environs, a pu réduire le nombre des cas
dans lesquels il s'est vu obligé de recourir à l'isolement en cellule,
à une quantité négligeable, et cela malgré un emploi très restreint
des calmants.
Mais, dira-t-on, voici un maniaque furieux ou très bruyant : ne
faut-il pas, tantôt mettre les malades à l'abri de ses cris, de ses
violences, tantôt protéger l'agité contre lui-même ? - C'est préci-
sément, répond M. Rieger, ces malades-là que, loin d'enfermer
entre quatre murs, il importe de placer dans des conditions telles
qu'ils ne soient pas un instant perdus de vue, et, cette surveillance
permanente, ce n'est pas à travers un judas qu'elle peut s'exercer
d'une façon efficace. - Sans doute, peut-on objecter ! Mais combien
d'agités non dangereux qui ne sauraient rester dans une salle de
surveillance, à moins d'être maintenus au lit par des infirmiers,
tandis qu'on peut sans inconvénient les laisser en cellule 1 A cela
M. Rieger de répondre que ces malades, dont l'agitation ne parait
pas dangereuse pour leur propre sécurité, risquent alors d'être
plus ou moins abandonnés dans leur chambre d'isolement. S'ils ne
troublent plus le repos des autres, en revanche les symptômes
psychiques s'aggravent par le fait' même de leur séquestration en
cellule ; ils contractent les pires habitudes et, si l'isolement se
prolonge, leur état mental en est profondément modifié ; on a
alors devant les yeux des manifestations psychiques artificielles. La
cellule, l'isolement ont produit leur oeuvre : il devient alors exact
de dire que de pareils malades ne peuvent vivre qu'en cellule '.
' Il convient à ce propos de rappeler l'opinion formulée, il y a long-
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 20J
M. Rieger examine ensuite l'argument tiré des malades bruyants.
Il rappelle l'opinion du professeur Hitzig, qui exprime le regret de
se voir obligé, pour respecter le repos des autres malades, de
reléguer loin de la surveillance du médecin des sujets qui, par leur
agitation, sont susceptibles de provoquer des actes de brutalité de
la part des infirmiers. La chose est d'autant plus regrettable que
les malades en question ne sont pas à même, en raison de leur
état mental, de dénoncer les violences dont ils peuvent être l'objet.
Il parait impossible de réaliser cet isolement acoustique sans
soustraire, dans une certaine mesure, les malades en question à la
surveillance qu'ils réclament. Nous verrons, après l'examen du
plan des pavillons, comment M. Rieger remplace, pour les cliniques
universitaires, cet isolement acoustique par ce qu'il appelle
l'isolement optique, et dans quelles limites étroites il a recours
aux chambres d'isolement.
Chaque pavillon se compose de deux parties étroitement en
rapport : l'une, formant sur le plan la partie horizontale du
bâtiment ; l'autre constituée par la partie verticale.
La première partie est réservée aux malades trauquillee ? G
seconde aux agités et aux sujets à surveiller. La toit
comprend : un vestibule où viennent aboutir le corridor (lui col 4. i
au bâtiment central (salle des cours) et le monte-charge'qtt, du
sous-sol, apporte les aliments. Sur ce vestibule donnent : unè's.alt
de réunion carrée, de 6 mètres de côté, un dortoir rectatigur
laire (10 mètres x 6 mètres), une salle-lavabo (7 mètres x 2 mè-
tres), communiquant avec une salle de bains, enfin un autre
vestibule. Cette première section destinée aux malades paisibles
comprend encore un office, des water-closets et une chambre à
coucher (3 mètres x 6 mètres).
La deuxième section (malades agités ou à surveiller) comprend
un second vestibule qui peut servir de salle de réunion (13 mè-
tres X 5 mètres). Sur ce vestibule s'ouvrent : la salle de surveil--
temps, par d'éminents aliénistes français. Renaudin considère la cellule
« comme une cause permanente d'excitation, comme exagérant les con-
séquences de l'état hallucinatoire et comme favorisant le développement
des conceptions délirantes les plus tenaces ». Elle n'est pas moins nui-
sible, ajoute Renaudin, sous le rapport hygiénique.
« La cellule, comme habitation de jour, dit Parchappe, ne' peut être
admise que très exceptionnellement et toujours d'une manière tempo-
raire et pour une courte durée. Le séjour permanent dans une cellule,
loin d'être efficace pour amener l'apaisement de l'agitation chez les alié-
nés, a au contraire pour effet d'augmenter et d'entretenir l'agitation. »
Foville déclare que «· l'isolement dans la cellule a des inconvénients
graves : l'halluciné, l'agité n'y trouvent que des conceptions délirantes
nouvelles ; les fonctions organiques s'exerçant mal, leur constitution s'y
étiole ».
202 ' ENSEIGNEMENT.
lance continue, -la salle de bains indiquée ci-dessus, une cham-
bre d'isolement. La salle de surveillance continue (13 mètres
de longueur) a 6 m 50 de largeur sur une partie de son étendue
et 10 mètres sur le reste. Au fond de la salle de surveillance, par
conséquent en rapport étroit de contiguïté avec cette pièce, s'ou-
vrent deux chambres d'isolement séparées par une cellule capitonnée.
Ces trois chambres' constituent le seul aménagement spécial
organisé en vue des agités. Point important à noter : des closets
et une baignoire sont placés dans la salle de surveillance même.
Pas de barreaux aux fenêtres. Jalousies en bois fermant à clef.
Le prix de revient de chacun de ces pavillons (30 malades) a été
de 100 000 francs.
La constitution matérielle n'est qu'uu des éléments il considérer.
M. Rieger a complété cette installation par une organisation spéciale
du service de surveillance. Tout est combiné pour que, pas un
instant, les malades ne cessent d'être étroitement surveillés par un
personnel bien dressé. Les infirmiers n'ont pas ci s'occuper du
transport des aliments, ceux-ci étant amenés automatiquement, du
sous-sol dans le vestibule même de la salle de surveillance, par un
monte-charge. De cette façon, ni perte de temps, ni relâchement
de la vigilance du personnel. Ce n'est pas tout. Un service de garde
est organisé entre les six médecins (dont quelques-uns sont logés
dans les pavillons des malades) et des étudiants stagiaires ; il y a
ainsi un médecin de service d'une façon presque permanente. En
particulier, dans la salle de surveillance des hommes, les mesures
nécessaires sont prises pour que, en dehors des médecins assistants
qui sont dans la proportion de un pour dix malades, dont quatre
aigus, il y ait presque en permanence et même la nuit en cas
de besoin - un étudiant de garde. On arrive ainsi à obtenir une
surveillance médicale presque continue.
Dans ces conditions, chaque accès d'agitation, au lieu de
déterminer purement et simplement la relégation du malade dans
un quartier d'agités plus ou moins éloigné, où l'insuffisance du
personnel et l'isolement en cellule tendent une surveillance
.constante bien difficile, chaque accès d'agitation peut être traité
par le médecin. Celui-ci, logé à proximité de la salle de surveillance,
peut intervenir chaque fois qu'éclate un accès de ce genre, de
même que, dans une clinique obstétricale, le médecin est appelé
pour surveiller les accouchements. Ajoutons que les locaux sont
disposés de façon à ce que la salle de surveillance soit traversée
aussi souvent que possible par le médecin : elle lui sert de passage.
. Le personnel est ainsi constamment tenu en haleine par l'appa-
rition fréquente et inopinée des médecins : voilà qui vaut mieux,
à coup sûr, que toutes les visites et contre-visites à heure- fixe en
usage dans la plupart des asiles.
A-t-on affaire à un agité furieux, absolument égaré, dans un
- LES CLINIQUES l'bYCHI.a'l'RIQUt;S. 03
' état de conl'ubion profonde, cas d'ailleurs rare, un grand nombre
des fous furieux d'autrefois étant le produit artificiel de la camisole
et de la cellule, on a recours à un lit capitonné placé dans la
salle de surveillance, ou (en cas de nécessité absolue) au transport
du patient dans une cellule dont parois et parquet sont soigneuse-
ment capitonnés. Le malade est conduit aux closets à heure fixe.
S'agit-il d'un sujet bruyant ? La présence du médecin, les soins
que celui-ci peut donner dès le début de l'accès d'agitation,
permettent souvent de ne pas en venir à l'isolement du patient.
Parfois il suffit d'un changement de milieu, du transport du lit du
malade dans la salle d'examen pour calmer l'excitation. Les bains
prolongés durant plusieurs heures, les bains permanents sont très
utiles. On les donne dans la baignoire placée dans la salle de
surveillance.
Au cas où -ces moyens se montrent insuffisants, on ne peut
évidemment, en l'absence d'un quartier cellulaire spécial, réaliser
l'isolement acoustique. Mais au moins, dit M. Rieger, est-il possible
d'obtenir, dans une certaine mesure, l'isolement optique : dans ce
but on se sert, dans la salle de surveillance, de paravents, ou bien
on transporte le malade dans une des deux chambres qui donnent
sur cette salle, chambres dont la porte doit, en principe, rester
ouverte. Rarement d'ailleurs on est obligé d'avoir recours à cette
mesure.
Si l'isolement s'impose, complet, s'il devient nécessaire de fermer
la porte des chambres en question, on le fait pour un laps de temps
qui ne dépasse pas quelques quarts d'heure. De cette manière, on
ne laisse pas au malade le temps de souiller le local. L'agitation,
qui procède habituellement par crises passagères, Unit en général
par s'atténuer. En pratique, M. Rieger insiste sur ce point, - les
chambres en question sont pour ainsi dire inemployées ; elles
n'entrent pas en ligne de compte dans le nombre des lits disponibles.
Lorsqu'on y a recours, c'est plutôt comme à un grand lit dans
lequel médecin et infirmiers ont le patient sous les yeux, pendant
que les autres malades, à la vue desquels l'agité est soustrait,
sont isolés de lui optiquement et, si la chose devient nécessaire, au
point de vue acoustique 1.
Ajoutons que M. Rieger attache une grande importance au mode
de répartition des lits dans la salle de surveillance, répartition qui
est fréquemment modifiée selon les indications (dislocation). En
vue d'obtenir la présence continue du personnel, les closets et la
, A l'asile de Brème, il n'existe pas, en dehors de la salle de surveil-
lance, d'installation spéciale pour l'isolement des agités. Le docteur
Scholz est, plus encore que le professeur Rieger, systématiquement
opposé à la création d'un quartier cellulaire pour les agités. Il n'a voulu,
dans son asile, ni chambre d'isolement, ni cellule' capitonnée. .
204 ENSEIGNEMENT.
baignoire sont, nous l'avons dit, placés dans la salle de surveillance
même, et le transport des aliments se fait d'une façon automatique.
Une organisation de ce genre, excellente pour une clinique
universitaire de soixante lits, présenterait des inconvénients dans
un établissement dont la population atteindrait 200 malades. Le
repos nécessaire au traitement des psychoses aiguës et des mélan-
coliques ne doit pas être sans cesse troublé par le bruit résultant
du séjour des agités dans des chambres annexées à la salle de
surveillance. Est-ce à dire cependant que la création d'un quartier
cellulaire, d'une section d'isolement pour les agités, devienne alors
nécessaire ? Nullement. Ce qu'il faut, dit M. Rieger, c'est une
deuxième salle de surveillance, analogue à la première, bien isolée
de celle-ci au point de vue acoustique et affectée aux sujets
bruyants ou agités'.
Population de la clinique (1"' janvier 1898) : 51 malades (19 hom-
mes, 32 femmes). - Nombre des admissions en 1897 : 220 malades
(98 hommes, 122 femmes). -Pei-sonnel médical : le professeur, deux
assistants, dont l'un est privat-docent, et deux co-assistants.
Université de Giessen (Grand-Duché de Hesse).
(Faculté de médecine : 17 professeurs et privat-docenten ;
140 étudiants.)
Nous empruntons à M. le D1' de Boeck, il M. le D' Ladame et à
M. le D1' Loehr, les éléments de la description de la clinique de
psychiatrie de Giessen, une des plus récentes (1890) des cliniques
de ce genre en Allemagne 2.
La clinique psychiatrique (l'schiutnische Klinik zze Giessen) est
située au centre de la ville, à proximité des instituts de gynécologie,
de médecine interne, d'anatomie pathologique, d'hygiène, d'oph-
talmologie, de chirurgie. Les étudiants peuvent ainsi, sans perte de
temps, suivre les différentes cliniques, qui n'ont pas lieu comme en
France; à la même heure.
Le personnel médical comprend le professeur, M. le De Sommer,
qui est aussi directeur de la clinique, trois assistants et deux
médecins volontaires, logés à la clinique. Le nombre des lits est
de 80. La proportion des serviteurs est de un pour trois malades.
- ? Voir sur cette question : P. Sérieux. La clinique de psychiatrie de
l'université de 1--VÜ/'zboU/'U et la suppression des quartiers cellulaires .
Revue de psychiatrie, avril 1898.
- * De Boeck. La clinique de psychiatrie de l'université de Giessen (Bul-
letin de la Société de médecine mentale de Belgique, décembre 1896,
p. 393-399).
Ladame. Une visite à la clinique psychiatrique de Giessecz. Annal,
méd. psycholog., nov. 1898. - -- ,
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 205
L'établissement se compose de pavillons détachés, de villas,
séparées par de vastes jardins et disposées symétriquement autour
du bâtiment central et des cuisines qui sont au milieu de la
colonie. Pas de murs, mais une simple haie peu élevée.
Le bâtiment principal comprend : au rez-de-chaussée, le cabinet du
professeur, les bureaux administratifs, la policlinique (consultation
externe), la bibliothèque ; au premier étage : les laboratoires de
chimie, d'histologie, de photographie, de psychologie, le musée, la
salle d'autopsie, la salle des cours. Les logements du premier et
du deuxième assistants, chargés l'un de la division des hommes,
l'autre de celle des femmes, sont situés au rez-de-chaussée et au
premier étage et disposés de façon à permettre aux assistants de
surveiller leur division respective.
La policlinique sert non seulement à recevoir les malades de la
consultation, mais à hospitaliser un certain nombre de sujets
atteints de, maladies nerveuses. "
Chaque division d'hommes et de femmes comprend quatre
villas destinées chacune aux malades suivants : 1° tranquilles et
pensionnaires ; 2° sujets tranquilles, mais ayant besoin d'une
surveillance continue; 3° agités ; 4° sujets à isoler, aliénés criminels.
La première villa renferme trois salles de réunion et une série
de chambres particulières. ,
La deuxième villa, qui sert de pavillon de traitement, comprend
l'appartement du troisième assistant (chez les femmes), de l'assis-
tant volontaire (chez les hommes), une grande-salle de surveillance
continue pour le traitement par le lit, une salle de réunion, une
salle de bains.
Dans le pavillon des agités se trouvent, en outre des locaux
réservés aux malades, un laboratoire avec appareils photogra-
phiques, phonographe, cinématographe, stéréoscope, instruments de
psychologie physiologique, et le logement du surveillant en chef.
Il faut signaler que ce pavillon possède un premier étage avec salle
de réunion, deux dortoirs, deux chambres d'isolement, une salle
de bains et un cabinet de toilette. Les sujets les moins agités y
sont logés.
Le pavillon d'isolement, en communication avec la villa précé-
dente par une galerie assez large, a quatre cellules, dont une très
solide et une salle de bains.
Chaque villa est reliée aux autres et aux appartements des méde-
cins par le téléphone.
Eclairage électrique. Chauffage central (vapeur à basse pression)
avec appareils installés dans le sous-sol d'un des pavillons de la
division des hommes.
Eau chaude et eau froide à volonté dans chaque pavillon ; on
peut ainsi appliquer aux agités et aux sujets atteints d'eschares le
traitement par les bains tièdes. Parquet recouvert de linoléum.
20G ENSEIGNEMENT.
Emploi presque exclusif des bains dans les accès d'agitation. Les
salles de bains possèdent des baignoires mobiles se transportant
sur des rails jusque dans les cellules. Dans les salles de surveil-
lance continue se trouvent des baignoires entourées de rideaux qui
permettent de baigner les malades agités près de leur lit.
Comme dans les autres cliniques, le non-restreint est rigoureu-
sement appliqué.
Lesavantages de la clinique de Giessensontles suivants : 10 Abon-
dance des locaux pour les recherches scientifiques et pour l'en-
seignement psychiatrique ; 2° Multiplicité des salles spéciale-
ment aménagées pour la surveillance continue; - 3° Proportion
considérable du personnel médical : Il y a, à Giessen un infirmier
pour 2,5 à 3 malades. Outre le professeur de clinique, qui remplit les
fonctions de directeur-médecin en chef, il y a médecins assistants
et 2 médecins volontaires pour un service de 80 lits. Le nombre moyen
des malades présents pendant les derniers mois a oscillé entre 50
et 62; 4° Annexion à la salle de surveillance de locaux de réunion,
de salles de bains et de water-closets; - 50 Organisation d'un cabinet
spécial pour l'examen scientifique des malades, à côté de la salle
de surveillance ; 6° Connexion étroite de cette salle avec les
cellules d'isolement;-7° Situation des appartements des médecins
à proximité des salles de surveillance continue, la surveillance et
l'assistance médicales devant être aussi rapprochées que possible
des malades qui en ont le plus besoin.
La construction des bâtiments a nécessité une dépense de
1 million. L'ameublement, les appareils ont coûté 150 000 francs.
L'Etat fournit à la clinique une subvention annuelle de 77 000
francs. Le prix de journée varie de 3 fr. 75 à 8 fr. 75 pour les
pensionnaires ; il est de 1 fr. 23 pour les indigents.
Pour les admissions, le directeur s'inspire avant tout des
besoins de l'enseignement clinique; il peut recevoir gratuitement
10 malades, dont les frais de séjour sont supportés par le budget
de l'asile. Du le, mars ils90, date de l'ouverture, au 1 ? mars 1897,
on a compté 184 entrées. -
Population (Ie1' janvier 1898) : 56 malades (26 homme,
30 femmes). Nombre des admissions en 1897 : 154 (76 hommes,
78 femmes).
Il importe de faire remarquer en passant quels sacrifices con-
sidérables font les universités allemandes en faveur de leurs cli-
niques. L'université de Giessen est une des moins fréquentées
d'Allemagne ; elle est située dans un petit Etat, le Grand-Duché
de Hesse, dont la population atteint à peine 1 million d'habitants,
et dans une ville elle-même peu importante; cependant on n'a pas
reculé devant l'énorme dépense de plus d'un million pour créer
nne clinique psychiatrique modèle. Espérons que nos universités
provinciales suivront cet exemple.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 207
Le professeur Sommer est l'auteur de travaux intéressants sur :
le Siège de l'âme, d'après cEmme ? '; ? ; l'Histoire de la psychologie
et de l'esthétique en Allemagne ; la Question des infirmiers;
l'Eglise et l'Etat, leur intervention dans l'assistance des aliénés;
les Méthodes d'investigation psychophysique applicables aux aliénés,
méthodes ayant pour but de mesurer avec précision le niveau
mental et l'instruction des sujets, la durée et l'intensité des réac-
tions psychiques, des phénomènes d'association et d'automatisme,
la faculté d'orientation, etc.
Université d'Iéna (Grand-Duché de Saxe-Weimar).
(Faculté de médecine : 12 professeurs ordinaires ; 8 professeurs
extraordinaires ; 5 privat-docenten ; 20} étudiants.)
La clinique psychiatrique de l'université d'Iéna, fondée en 1848,
n'est pas un établissement purement universitaire. Elle sert aussi
d'asile de traitement (Lnndes-h°·ez-Heil-Alzstult und psychiatrisehe
Kliiîik) pour le Grand-Duché et pour une petite principauté voisine
(soit pour une population totale de 400 000 habitants environ). Elle
a été inaugurée en 1879.
L'asile d'Iéna est composé de trois corps de bâtiments réunis
entre eux par le sous-sol et par le rez-de-chaussée (longueur
130 mètres). Le bâtiment central sert à la fois de bâtiment d'admi-
nistration et de quartier de malades; les deux étages en sont
réservés aux pensionnaires, aux aliénés paisibles et aux « ner-
veux J'. Les deux bâtiments' latéraux servent au logement des
malades de deuxième et de troisième classes.
En arrière du bâtiment central se trouve un pavillon avec deux
suites de réunion et une salle des fêtes. Plus en arrière encore, le
bâtiment des services économiques avec des locaux d'habitation pour
8 aliénés paisibles. Non loin, le pavillon du directeur.
La population de l'établissement était, au FI' janvier 1890. de
tC8 malades (91 hommes, 77 femmes). Nombre des admissions
en 1889 : 203 (148 hommes, Il : ) femmes).- Le nombre des lits
disponibles est environ de 180.
L'asile d'Iéna possède un terrain de culture, de vastes jardin*,
une annexe (fondée en 1890) pour une quinzaine de malades
convalescents ou de « nerveux ». Il sert de bureau d'admission
pour l'autre établissement du Grand-Duché, l'asile-colonie de
Rlankenhain (260 malades). Les admissions se font très facile-
ment, même pour les aliénés « étrangers » n'ayant pas leur domicile
de secours dans le Grand-Duché. Les prix de journée varient de
1,20 à 0 marks 50. Le nombre des admissions de malades
« nerveux » va sans cesse en augmentant.
Le professeur de psychiatrie, le 1)" O. Rinsmaner, est secondé
208 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.
par trois médecins. Le professeur est partisan de l'enseignement
obligatoire de la psychiatrie pour tous les étudiants, et réclame la
création d'un examen spécial portant sur les maladies mentales.
- Population, le l01' janvier 1898 : 198 malades (100 hommes,
98 femmes). - Nombre des entrées en 1897 : 520 (305 hommes,
215 femmes). -
. - . ' - (A suivre.)
PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.
Théorie des neuro-diélectriques;
Par le Dr Charles BINET-SANGLÉ.
La théorie, qu'on peut appeler théorie de l'excitation
simple et par laquelle on a jusqu'ici prétendu expliquer le
tremblement, les myoclonies, les attaques d'épilepsie et les
attaques d'hystérie est loin de satisfaire l'esprit.
- Par exemple, elle ne fait pas comprendre :
1° La diminution ou la cessation temporaire du tremble-
ment alcoolique par suite d'une absorption d'alcool ;
2° L'apparition de l'hémitremblement ou de l'hémichorée
post-hémiplégique, au moment où l'hémiplégie s'améliore ;
3° La coïncidence fréquente, dans un même territoire mus-
culaire, de secousses pathologiques et d'une parésie ;
4° L'intermittence des contractions athétosiques, des se-
cousses choréiques et des tics;
50 La soudaineté des attaques d'épilepsie et des attaques
d'hystérie.
Je. propose de lui substituer une théorie dont l'exposé va
suivre, et qui procède des idées de Schrbder van der Kolk et
d'Hughlings Jackson.
Je me sépare de ces auteurs en ce que :
1° Je n'assimile pas la cellule nerveuse à un condensa-
teur comme la bouteille de Leyde, mais à un accumulateur,
comme l'accumulateur Planté, ne faisant intervenir la con-
densation proprement dite que lorsqu'il existe certaines
THÉORIE DES NEURO-DIÉRECTRIQUES. 209
lésions nerveuses que j'appelle les ae2cro-diélecf·iqtces paflao-
logiques ;
2° Par cette conception du neuro-diélectrique, j'essaie d'al-
ler un peu plus au fond des choses ;
3° Au lieu de limiter aux cellules du bulbe et de l'écorce
l'assimilation de la cellule nerveuse à un élément électrique,
je l'étends à toutes les cellules nerveuses ;
4° Au lieu de limiter la conception de la décharge nerveuse
à l'épilepsie, je l'étends à toutes les secousses pathologiques.
L'ensemble des travaux ded'Arsonval, les expériences de
Beaunis sur la vitesse de l'électricité dans les conducteurs
organiques, les recherches de Bernstein sur la variation
négative des nerfs, et celles, récentes, d'Auguste Charpentier
sur la vitesse de propagation et la longueur d'onde des oscil-
lations nerveuses, nous permettent de croire, après du Bois-
Raymond, que ces oscillations sont de nature électrique.
D'ailleurs, le nerf actionné fait dévier le galvanomètre. Il
ne répond qu'à une action brusque, comme si cette action
n'agissait que par l'intermédiaire de courants induits. Sa
coupe ressemble d'une façon frappante à celle d'un câble
électrique, et l'on sait que, l'industrie plagie souvent la
nature. Certains phénomènes psychologiques ont leurs analo-
gues dans les phénomènes d'aimantation. Enfin l'étude des
poissons électriques conduit à penser que leur fonction spé-
ciale n'est qu'un cas particulier de la grande fonction ner-
veuse.
Bien plus, il résulte, d'une part des expériences de Becque-
rel et de d'Arsonval et d'autre part des recherches de Ranke
sur les réactions cellulaires, que toute cellule est une pile
hydro-électrique, un couple éleclro-capillaire. Les neurones
sont, à ce qu'il semble, des piles réversibles, des accumula-
teurs disposés en série. Selon Marinesco, leur trophoplasma
est une substance à haute tension chimique. Pfluger, repre-
nant les expériences de Budje, admettait déjà que le nerf
était non seulement un organe de transmission, mais un
organe de dégagement nerveux. Autant dire que l'axone, et,
d'une façon plus générale, que le neurone contient des élec-
trolytes. N'est-ce pas, comme le dit excellemment Hermann,
dans les faits de polarisation, c'est-à-dire dans les phéno-
mènes électrolytiques, que l'électrotonus trouve sa meilleure
interprétation ? Les neurones se comportent comme des
Archives, 2 série, t. X. il t
: 210 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.
accumulateurs. Leur activité diminue ou cesse lorsqu'ils
s'encrassent, pour reparaître lorsqu'ils ont été lavés par les
liquides circulants. Ils subissent encore, comme les accumu-
lateurs, les conséquences d'un excès de travail ou d'un trop
long repos.
Le système nerveux est une machine qui, comme toute
machine, et par le seul fait de son architecture, de l'agence-
ment de ses rouages, et ici, de la disposition de ses molé-
cules, transforme les mouvements qui la traversent.
D'une part. elle est impressionnée par des mouvements
qu'on peut rapporter à la mécanique (froissements, chocs,
pincements, piqûres, etc.), à la physique (ondes thermiques,
électriques, sonores, lumineuses), ou à la chimie (transfor-
mations isomériques, combinaisons, décombinaisons). Ces
derniers, très nombreux, très variés, et ayant lieu dans l'in-
timité de tous nos tissus, sont, par les impressions qu'ils
produisent sur les conducteurs profonds, la source princi-
pale de notre force. On peut dire que la machine nerveuse
reçoit ces mouvements.
Mais d'autre part, les lois de la conservation de l'énergie
et de l'équivalence des forces étant applicables aux êtres
vivants, la machine nerveuse rend des contractions muscu-
laires, et des mouvements physiques et chimiques d'un autre
ordre (chaleur animale, électricité organique, trophisme).
En un mot, le système nerveux n'est qu'un lieu de passage
et l'origine de notre énergie, de nos mouvements, est dans
les impressions sensorielles conscientes ou inconscientes. Rien
dans les muscles qui n'ait été dans les sens.
Il n'y a pas un instant de la vie ou le système nerveux
ne reçoive du mouvement, et il n'y a pas un instant où il
n'en rende. Le réservoir central débite sans cesse. Mais ce
débit n'est pas constant. Tantôt il est faible, comme dans le
sommeil. Tantôt il est énorme, comme dans les grands
efforts. C'est la une preuve certaine qu'il existe des barrages
dans le système nerveux. Ces barrages, je les appelle les
1WW'I) ,diélecl J'iques,
Soit deux lames métalliques communiquant l'une avec
une source électrique, l'autre avec la terre, et séparées par
une lame isolante. Cet appareil est un condensateur, et la
lame isolante est un diélectrique. Soit deux fils reliés chacun
THÉORIE DES NEURO-DIELECTRIQUES. 211
au pôle d'une pile. Rapprochons leurs bouts libres, sans
cependant les mettre en contact. La masse d'air qui les sé-
pare, et qui oppose une résistance encore infranchissable au
courant, est un diélectrique. Soit un fil de cuivre réunissant
les deux pôles d'une pile. Je remplace un centimètre de ce
fil par un centimètre de fil de plomb. Ce plomb constitue un
'diélectrique. Un diélectrique est donc un corps mauvais con-
ducteur placé entre deux corps bons conducteurs.
Or il se forme normalement des diélectriques, dans les
conducteurs nerveux. Le défaut fréquent d'équivalence entre
la provocation et la réponse immédiate, ainsi que les phéno-
mènes d'addition latente ne peuvent s'expliquer autrement.
Comment se forment ces 1wu1'o-diélectriques normaux ?
Peut-être par suite de la rétraction des neurones, dont la
plasticité est démontrée. Où se forment-ils ? Peut-être entre les
prolongements, momentanément séparés, de deux neurones
contigus; peut-être dans l'intérieur du neurone par suite de
modifications locales dans sa densité lors de la rétraction
(dispositif perlé de Jean Renaut).
Or c'est il la formation dans les conducteurs nerveux de
lIellro-diélectriqlles pathologiques que sont dues, selon moi,
les contractions athétosiques, les secousses du tremblement,
des chorées et des tics, les décharges épileptiques et hysté-
riques, ainsi que les paralysies.
Si je rassemble des phénomènes aussi divers en apparence,
c'est que toute théorie qui prétend expliquer l'un quelconque
d'entre eux, doit aussi pouvoir expliquer les autres; car j'ai
été conduit par une étude d'ensemble' sur les contractions
pathologiques et les paralysies, à poser les lois suivantes :
Première loi. Chaque variété de secousses et de para-
lysies peut résulter de causes différentes ;
Deuxième LOI. - Une même cause peut produire plusieurs
variétés de secousses et de paralysies;
Troisième tol. Les diverses variétés de secousses et de
paralysies peuvent se transformer les unes dans les autres
chez un même sujet;
Quatrième LOI. Les diverses variétés de secousses et de
1 Cil. Binet-Sany-lé. Lois des secousses et des paralysies. Théorie des
/«t'o-<7Mep ? )/c. ? (en préparation).
212 PHYSIOLOGIE pathologique.
paralysies peuvent se transformer les unes dans les autres
par hérédité.
La formation du neuro-diélectrique est due :
1° Soit à l'action sur le conducteur nerveux d'un poison
non microbien ou microbien (tremblement alcoolique, chorée
rhumatismale, etc.) ;
2° Soit à un déplacement moléculaire par ébranlement
(tremblement de Zielgen, hystérie traumatique, etc.) ;
3° Soit à un déplacement moléculaire par compression ou
étirement (hémichorée par hémorrhagie cérébrale, épilepsie
par tumeur cérébrale, etc.) ;
4° Soit à une déchirure ou à une rupture (paralysies trau-
matiques diverses).
Dès qu'un conducteur nerveux est altéré physiquement,
chimiquement ou histologiquement en un point quelconque
de son parcours, un neuro-diélectrique est constitué en ce
point. Nous ne connaissons encore que les neuro-diélectriques
grossiers. Ce sont ces lésions nerveuses qui ont été constatées
en correspondance avec les secousses pathologiques et les
paralysies :
z10 Aspect brillant du corps du neurone; 2° atrophie simple;
3° ectopie du nucléole; 4° ectopie du noyau; 5° déformations
-diverses, varicosités.; 6° tuméfactions; 7° vacuolisations ;
8° pigmentations anormales, surcharges amyloïde, graisseuse
ou calcaire; 9° chromatolyse;10° désintégration et disparition
de la trame achromatique; 11° rupture des dendrites ou de
l'axone ; 12° fragmentation et disparition des dendrites, de
l'axone ou du corps du neurone.
La résistance des neuro-diélectriques dépend : 1° de leur
constitution physique, chimique et histologique; 2° de leur
épaisseur.
La nature des accidents auxquels ils donnent lieu dépend :
z11, de leur résistance ; 2° de leur répartition.
On comprend comment ces accidents surviennent. Dès
qu'un neuro-diélectrique est constitué dans un conducteur,
le potentiel, ou, si l'on veut, la pression nerveuse augmente
peu à peu en amont, par suite de l'arrivée incessante des
ondes consécutives aux impressions sur les conducteurs ou
au dégagement des accumulateurs neuroniens. Si le neuro-
diélectrique n'est pas absolument imperméable, il arrivera
un-moment où sa tension ne sera plus équilibrée par sa téna-
THÉORIE DES NEURO-DIÉLECTRIQUES. 213
cité. Il se produira alors une décharge, comme dans le con-
densateur électrique, et par suite une contraction muscu-
laire. Puis la pression, tombée à zéro, augmentera de nou-
veau : une nouvelle décharge se produira, et ainsi de suite.
De là l'intermittence des contractions du tremblement, de
l'athétose, des chorées et des tics, ainsi que des attaques
d'épilepsie et des attaques d'hystérie. -
Que se passe-t-il entre les décharges ?
1° Ou bien les ondes nerveuses continuent de traverser le
neuro-diélectrique sous forme d'effluves, comme il arrive
dans le condensateur électrique; et on ne constate alors
qu'une parésie, qui peut même rester ignorée par suite des
suppléances musculaires ;
2° Ou bien les ondes nerveuses-ne passent plus, et il existe
une paralysie qui peut aussi être en partie masquée par les
suppléances.
Ainsi s'explique la coïncidence fréquente, dans un même
territoire musculaire de contractions pathologiques et d'une
parésie plus ou moins apparente.
Si le neuro-diélectrique est absolument imperméable, il
n'y a pas de décharges, et la paralysie est complète.
Cette théorie fait comprendre pourquoi l'hémiplégie est
souvent précédée d'hémitremblement, d'hémiathétose ou
d'hémichorée. C'est qu'alors la résistance des neuro-diélec-
triques d'abord relativement faible, a augmenté peu à peu.
Et pourquoi l'on voit parfois l'hémitremblement ou l'hémi-
chorée réapparaître, quand l'hémiplégie s'améliore. C'est
qu'alors les neuro-diélectriques ont diminué peu à peu de
résistance.
Pour une quantité d'électricité donnée, la force des dé-
charges électriques est en raison inverse de leur fréquence.
De même : -
Cinquième LOI. Pour une quantité d'influx nerveux
donnée, la force des décharges nerveuses est en raison in-
verse de leur fréquence.
C'est ainsi que les décharges du tremblement, qui sont les
plus fréquentes, sont aussi les plus faibles, et que les décharges
épileptiques, qui sont les plus fortes, sont aussi les plus rares.
Si en amont d'un diélectrique, la pression électrique aug-
mente, les décharges électriques augmentent de fréquence.
: .Il '1. PHYSIOLOGIE pathologique.
De même :
Sixième LOI. Si en amonl d'un 1wllI'o-diélecll'irjlW la
pression nerveuse augmente, les décharges nerveuses aug-
mentent de fréquence.
La pression nerveuse augmente en amont d'un neuro-
diélectrique :
'1° Soit par suite d'une augmentation dans le nombre ou
l'intensité des impressions sur les conducteurs (secousses
clioréiques exagérées par les excitations cutanées; attaques
d'épilepsie ou d'hystérie occasionnées par l'excitation de cer-
taines zones, etc.) ; -
2° Soit par suite d'une augmentation de dégagement dans
les accumulateurs ncuroniens (tremblcment, athétose, cho-
rées exagérés par le dégagement explosif qui correspond à
l'émotion).
L'augmentation de la pression nerveuse eu amont du
neuro-diélectrique peut même rendre les décharges si fré-
quentes qu'elles se fusionnent momentanément. C'est de
celte manière qu'une absorption d'alcool peut faire cesser
momentanément le tremblement alcoolique, phénomène
tout à fait comparable à celui-ci :
Si nous approchons de l'un des cylindres d'une machine de
ttamsdeu modérément actionnée, une tige métallique com-
muniquant avec le sol, des étincelles distinctes jailliront du
cylindre il la tige. Mais si la vitesse du plateau augmente suf-
fisamment, les étincelles se succéderont avec une telle rapi-
dité qu'on aura l'illusion d'une traînée lumineuse constante.
Inversement, si en amont d'un diélectrique, la pression
électrique diminue, les décharges électriques diminuent de
fréquence.
De même :
SLPTlÈ.lOE loi. Si en amont d'un ueecro-diélectoictaee, la
pression nerveuse diminue, les décharges nerveuses dimi-
nuent de fréquence.
La pression nerveuse diminue en amont d'un neuro-diélec-
trique :
1° Soit par suite d'une diminution dans le nombre uu dans
l'intensité des impressions sur les conducteurs ;
2° Soit par suite d'une diminution de dégagement dans les
accumulateurs neuroniens.
idiotie 8PILEPTlQUE. 210 i)
C'est ainsi que les tremblements, les contractions atliétu-
siques et les secousses choréiques cessent pendant le som-
meil. J'attribue aux rêves et aux hallucinations hypnagogiques
des épileptiques l'exception qu'offrent à ce point de vue les
attaques d'épilepsie. La théorie des neuro-diélectriques lais-
sant moins de faits inexpliqués, doit être préférée à la théorie
de l'excitation simple.
RECUEIL DE FAITS.
Idiotie épileptique. Inégalité de poids des hémisphe-
res cérébraux. Malformation des lobes occipitaux
dans lesquels les sinus latéraux se sont creusés
des sillons profonds ;
le D' Dvmil L Bl UNE 1'.
Le nommé zozo" enfant assisté d'lngoulème, né en 181-i, entre
à l'asile de l3rent,y le 19 novembre 1868, pour cause d'idiotie
epileptique.
Son intelligence est nulle. 11 ne répond aux questions qu'on lui
adresse que par des sons inarticulés. Dans certains moments, il
prononce quelques mots sans suite. Il a des accès d'épilepsie
violents et très fréquents, en moyenne 8 à 10 par semaine.
1870. Les accès épileptiques deviennent de plus en plus fréquents.
Sons inarticulés.
1871. Les accès sont au nombre de 10 à 15 par semaine.
Gâtisme.
16 janvier 1870. 11 succombe aujourd'hui à une série de crises
épileptiques qui se sont succédés, pendant vingt-quatre heures, à
de très courts intervalles. A 6 heures du soir, je lui ai fait prendre
7 grammes de bromure de potassium, au moyen d'une sonde
oesophagienne introduite par le nez. Sous l'influence de cette
médication, il est resté calme jusqu'à 3 heures du matin. Les accès
sont alors revenus, et il a succombé à 7 heures du matin.
Autopsie. Poumon droit congestionné à la partie postéro-
iuférieure ; foie également congestionné.
216 RECUEIL DE faits.
Les lobes occipitaux du cerveau présentent en arrière une
anomalie très rare, probablement congénitale. Ils sont creusés
d'un sillon profond pour loger les sinus latéraux. Le sinus longi-
tudinal, qui leur donne naissance, au lieu de se bifurquer, comme
il le fait ordinairement, au niveau de la tente du cervelet, se
bifurque à deux centimètres en avant de l'extrémité postérieure
des lobes occipitaux pour former ces sinus.
L'hémisphère cérébral gauche est beaucoup moins volumineux
que le droit.
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
XXIV. Polynévrite avec incontinence d'urine et des matières
fécales, tachycardie, hoquet, etc. ; par J. Crocs. (Journal de
Neurologie, 1900, n° 7.)
Un jeune homme en pleine santé est subitement pris de fièvre
intense, d'un affaiblissement musculaire et de douleurs très
violentes, localisés d'abord dans les membres inférieurs, puis dans
les membres supérieurs, et d'autant plus marqués que l'on se
rapproche des extrémités. Les réflexes sont abolis dans les parties
atteintes, sauf le réflexe plantaire qui persiste ; les différentes
sensibilités sont intactes. Puis survient pendant quatre jours une
incontinence d'urine et des matières fécales. Au bout de trois
semaines, la fièvre tombe, les troubles moteurs et sensitifs s'amé-
liorent progressivement, mais il survient de la tachycardie, de
l'oppression, des palpitations et du hoquet, phénomènes qui,
d'après l'auteur, dénotent l'existence d'une névrite du pneumo-
gastrique et du nerf phrénique. Ces symptômes ont fini à leur
tour par s'amender et la guérison semble devoir être complète.
* G. DENY.
XXV. Deux cas de névralgie du sciatique et de ses branches
d'origine grippale ; par le D1' DuBois. (Journal de Neurologie,
1900, n°7.)
L'auteur s'appuie pour affirmer l'origine grippale des deux cas
de sciatique qu'il relate dans ce travail sur ce fait que les deux
sujets qui en ont été atteints, en même temps que d'autres mani-
festations grippales, ont été rapidement guéris par le sulfate de
quinine. G. D.
XXVI. Pachyméningite cervicale d'origine syphilitique ; par le
D1' SACHE. (The Journal of nervous and mental Disease, mai 1900.)
Individu de trente-huit ans, ayant eu, trois ans auparavant, une
attaque d'hémiplégie, dont il guérit rapidement. Il y a sept mois,
survint une rigidité complète de la région cervico-dorsale de la
colonne vertébrale. De plus, il avait éprouvé une grandé douleur
irradiant de la région cervico-inférieure dans le bras, et il était
18 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
survenu une atrophie très marquée des muscles de la ceinture
scapulaire du côté gauche.
On posa le diagnostic de pachyméningite spécifique de la
région cervicale. Le cas était intéressant en ce qu'il présentait un
exemple très net de syphilis extra-spinale. Les douleurs et l'atro-
phie avaient été regardées comme des symptômes d'origine radi-
culaire. Il y avait une histoire très nette d'injection syphilitique
datant de cinq ans. Le malade fut traité par l'iodure de potassium
à doses croissantes et prit jusqu'à 00 gouttes de solution saturée
trois fois par jour. La douleur disparut complètement, et les
mouvements de la tête purent se faire très librement.
A. POULAUD.
XXVM. Un cas de poliomyélite antérieure aigue chez un jeune
homme de dix-sept ans; par \V ARTUN StNKmn. (The Journal u/'
iiel-volis and mental Discase, avril 1900.)
Cette observation offre trois points particulièrement intéres-
sants : 1° âge anormal auquel survint la maladie; 2° taudis que
la réaction de dégénérescence existait dans les muscles tibiaux
antérieurs de la jambe gauche, on constatait encore l'excitabilité
par le courant faradique, et, alors même que les muscles de la
jambe droite avaient recouvré presque toute leur force normale,
la réaction de dégénérescence existait encore dans le groupe tibial
antérieur; 3° il y a actuellement exagération du réflexe rotulien
de la jambe droite, tandis que deux mois antérieurement ce
réflexe était complètement aboli. A. Poulard.
XXVIII. Cécité réelle passagère dans l'hystérie; par George
C. HAHLAN (de Philadelphie).
11 s'agit d'une malade de vingt-trois ans, hystérique, qui,
pendant une dizaine de jours, présenta une cécité réelle de l'oeil
droit. Au bout de ce temps, l'oeil recouvra son entière acuité
visuelle.
A ce propos, M. Harlan fait les remarques suivantes :
Au point de vue clinique, il est facile de diviser les cas de cécité
hystérique en trois classes :
1° Un certain nombre de sujets accusent la cécité dans le but de
tromper. Leur action s'explique par le désir de se rendre intéres-
sants, de se donner de l'importance ou par un caprice déréglé. La
cécité peut alors être considéré comme une manifestation d'une
certaine forme de folie. Les malades sont, dans ce cas, comme ces
jeunes filles qui s'astreignent à un jeûne des plus sévères dans le
but de faire croire qu'elles vivent sans manger.
2° D'autres semblent sincères et se trompent eux-mêmes comme
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 2 I l)
ils trompent les autres. Il est possible que, s'ils voient assez bien,
inconsciemment ils ne sont pas capables de vision consciente.
L'expérience journalière, quand nous faisons du microscope ou de
l'ophtalmoscope les deux yeux ouverts, nous montre que, dans
certaines conditions, le cerveau peut ne prendre aucune connais-
sance de ce que l'oeil voit, n'avoir aucune conscience des images
qui se forment sur une rétine saine, ayant toutes ses connexions
nerveuses normales. La perception est en suspens. Quelque chose
d'analogue peut survenir dans le cas de cécité hystérique. Pour-
quoi et comment, personne ne le sait. On peut, si l'on veut,
appeler cela cécité « psychique ». : 3° Enfin, dans une troisième classe, il faut placer la cécité
absolue, réelle, mais transitoire survenant sans cause évidente. '
A. FOULARD.
XXIX. Paralysie de Landry; remarques sur la classification; par
E. W. Tayloh et J.-L;. CLAHK. (Jour, of IICI-V. and ment. Diseuse,
avril 1900.)
La paralysie de Landry n'existe pas comme entité morbide. t11
la clinique, ni l'anatomie pathologique, ni l'étiologie ne sauraient
établir son individualité.
Au point de vue clinique, aucun des symptômes décrits par
Landry n'est fondamental.
1° La paralysie flaccide commençant par les extrémités infé-
i ieures, sans atteinte aux sphincters, doit, dans une grande
mesure, être regardée comme une circonstance fortuite.
On a décrit des cas dans lesquels les membres supérieurs ont
été pris les premiers. Leyden a cru devoir distinguer deux formes,
bulbaire et névritique, afin d'expliquer la façon souvent variée
dont progresse cette affection. Il n'y a donc qu'un certain nombre
de cas dans lesquels la paralysie ascendante de Landry soit
réellement ascendante. ? 0 La flaccidité des muscles et l'intégrité des sphincters n'ont
certainement aucune importance pour établir l'identité d'un nou-
veau processus morbide, puisque ces constatations sont faites fré-
quemment dans les altérations de l'appareil moteur périphérique.
3° Quant aux troubles de la sensibilité, Landry les recherchait.
et dans un des cas qu'il rapporte, il y avait des troubles très nets
de la sensibilité. C'est nous qui avons, dans une bonne mesure,
assumé l'opmiull contraire d'après laquelle les troubles de la sen-
sibilité n'existeraient pas en règle générale, et cela parce que dans
beaucoup de cas, ils ne constituent pas un symptôme marquant.
4° L'intégrité des muscles, c'est-à-dire l'absence d'atrophie et
le défaut de modifications électriques ne sauraient présenter une
importance. Ce sont des faits qui tiennent à la marche si souvent
220 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
rapide de la maladie. Dans des cas plus lents dans leur évolution,
les troubles trophiques et les modifications électriques se sont
rencontrées assez souvent pour qu'il soit permis de douter de leur
non existence absolue, de nier la possibilité de leur apparition
future, même dans ces cas qui se terminent rapidement par la
mort.
5° Enfin, dire qu'une maladie est d'ordinaire fatale, ne sert
absolument à rien pour éclairer la question. Elle n'est pas toujours
fatale, nous le savons, et, le fut-elle, ce seul fait ne saurait lui
donner un caractère spécial.
Il est donc évident qu'aucun des symptômes classiques de la
paralysie de Landry ne saurait, à la lumière de nos connaissances
actuelles, offrir quelque chose de caractéristique. Groupés, ils
sont aussi vages, et ne présentent aucune unité fondamentale
comme processus individuel.
Les recherches anatomo-pathologiques n'ont pas réussi davantage
à donner à la maladie de Landry une place à part dans la noso-
'graphie.
Tantôt il n'y a pas de lésions, tantôt ce sont des lésions variées
(myélite, polynévrite, altération de tout le neurone moteur périphé-
rique) (Mills et Spiller).
Leur siège est également variable; c'est en général au niveau de
la moelle, mais ce peut être également dans le corte et les racines
nerveuses (Bailey et Ewing). Pour Meyer, la paralysie de Landry
est un syndrôme auquel correspondent des lésions anatomiques
qui ne sont pas toujours les mêmes. Il serait très facile de multi-
plier les exemples de différences existant dans les lésions post-
mortem, chez les personnes mortes de ce que nous avons l'habi-
tude d'appeler paralysie de Landry.
Il n'y a, ici non plus, aucune unité, et par suite, aucune relation
causale entre ces lésions anatomiques et la symptomatologie
admise ne saurait être reconnue.
L'étude de l'étiologie ne donne pas plus de lumière. A part la
simple affirmation que la maladie de Landry est probablement
due à quelque toxémie élective, notre savoir surl'étiologie n'a pas
avancé. L'individualité de la maladie est plutôt atténuée qu'établie
par une telle affirmation. La paralysie de Landry rentre alors
tout simplement dans la catégorie d'un grand nombre de processus
morbides qui attendent des investigations plus complètes avant
d'obtenir la dignité d'entités morbides, de maladies définies,
dans le même sens que la diphtérie, par exemple, est une mala-
die définie.
Conclusion. Etant donnés l'inconstance des symptômes cli-
niques et des lésions pathologiques, le vague de l'étiologie, il est
probable que la paralysie de Landry ne représente pas un processus
auquel on puisse appliquer le nom de « maladie », et, dans ce cas,
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 11221
il vaut mieux abandonner un nom qui est à la fois inutile et
trompeur. A. POULAIID.
XXX. Lésion cérébrale par contre-coup ; par les D ? DE BucK et
VAN DER 1,INDEN. (Joum, de Neurologie, 1900, n° 8.)
Le sujetde cette observation est un homme de trente-six ans, qui se
fit une plaie contuse, sans enfoncement des os, au niveau de l'occi-
puten tombant dans une cave. Cet accident fut suivi de perte decon-
naissance, de vomissements et de délires aigus. La mort survint
au bout de douze jours, avec des symptômes de paralysie bulbaire.
Les lésions constatées à l'autopsie consistaient dans une félure de
l'os occipital sans déplacement osseux et dans un épanchement
sanguin abondant à la base des lobes frontaux qui étaient le siège
d'une plaie contuse. G. D.
XXXI. Un cas de sclérose en plaques avec fou rire ; par J. CRocQ.
(./ou)' ? : . de Neurologie, 19CO, n° 8.)
XXXII. Un cas de sclérose latérale amyotrophique avec phéno-
mènes bulbaires; par J. Crocq. (Jol/m, de Neurologie, 1900, n° 8.)
Il s'agit d'une femme de quarante-deux ans, intoxiquée par le
mercure qui a ressenti d'abord un affaiblissement de la motilité
des membres supérieurs. Puis surviennent trois ictus apoplectiques
suivis, le premier d'une hémiplégie passagère et le dernier de
troubles glosso-labio-laryngés. 11 existe une atrophie des muscles
des mains et des avant-bras. Les réflexes sont exagérés, la sensi-
bilité est normale. En raison de ces derniers phénomènes et des
accidents bulbaires, l'auteur croit pouvoir affirmer qu'il ne s'agit
dans ce cas ni d'une atrophie musculaire progressive, ni d'une
syringomyélie, mais d'une sclérose latérale amyotrophique.
G. D.
XXXIII. Un cas d'épilepsie jacksonienne guérie par intervention
opératoire, par van Gehuchten. (JUZl1')t. de Neurologie, 1900, n° 9.)
11 s'agit d'un homme de vingt-huit ans qui a été atteint pendant
près de cinq ans de crises d'épilepsie jacksonienne débutant par la
main droite et s'étendant ensuite au bras, à l'épaule et à la moitié
droite du visage. A ce moment il perdait connaissance, écumait,
se mordait la langue et présentait des secousses de tout le corps.
A côté de ces grandes crises, il en existait d'autres localisées à la
main droite : les unes et les autres se montraient presque tou-
jours la nuit.
Lé traitement bromure n'ayant donné aucun résultat, quatre
222 U2 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
couronnes de trépan furent appliquées au niveau du sillon de Ho-
lando et, la dure-mère incisée, on se trouva en présence d'une vaste
cavité remplie de liquide. La substance cérébrale était retombée à
environ six centimètres de la paroi osseuse.
Le malade présente encore des crises convulsives pendant une
dizaine de jours après cette opération, ce qui fut dû il ce que le
liquide s'était de nouveau accumulé dans la cavité kystique à la
faveur du pansement.
Il n'en a plus eu de nouvelles depuis qu'il a été opéré mais
il n'est pas sans intérêt de faire remarquer que cinq semaines seu-
lement s'étaient écoulées entre ce moment et celui de la publica-
tion de son observation '. G. 0,
XXXIV. Étude histologique du cerveau dans le sommeil provoqué
par la fatigue; par )1110 STtèl' I<\O\\'SK 1. (.Innrn. de Neurologie . 1 flOO,
na 10.)
Chez une souris endormie par suite d'une longue marche,
l'écorce du cerveau ne présente pas, d'après : \[110 Stefanowska de
modifications appréciables à l'aide de la méthode de Golgi. Seuls
les noyaux gris de la base et la moelle allongée sont profondé-
ment altérés mais uniquement du fait de la décapitation.
Ces résultats sont plutôt en désaccord avec la théorie histolo-
gique du sommeil formulée par Mathias-Duval puisque l'état
moniliforme n'a pas été observé dans les neurones corticaux d'un
animal sacrifié pendant le sommeil naturel. S'il était vrai que le
sommeil est dû il la rétraction des neurones, à la rupture des con-
tacts, soit par suite de l'apparition des perles sur les dendrites.
soit par la disparition des appendices piriformes, on devrait ob-
server ces modifications chez la souris qui était repliement plon-
gée dans le sommeil natnrel. Or il n'en était rien, il n'existait ni
rétraction des prolongements cellulaires, ni état perlé, ni dispari-
tion des appendices piriformes dans l'écorce. C.. D.
XXXV. Tabes et traumatisme ; parle D1' l.rwn;. (.10/11'/1.
de Neurologie, 1 (¡OO, 110 II.)
Le traumatisme peut-il être considéré comme une cause suffi-
sante du développement du tabes ? Bien qu'il rapporte un cas de
tabes survenu après une chute de voiture chez un homme de
trente-trois ans, qui n'était ni syphilitique, ni alcoolique, l'auteur
rejette cette opinion. Il admet cependant que le traumatisme peut
faire éclore le tabès chez un sujet prédisposé. Ce point d'étiologip
' Espérons que \f. van Geliuclitrn nnus fera connaître ultérieurement
si la guérison s'est maintenue. lC.)
REVUE DE PATHOLOGIE- NERVEUSE. 223
a une grande importance médico-légale puisque le sujet a le droit
de faire valoir que sans le traumatisme il eut été capable de tra-
vailler pendant de longues années encore et que c'est l'accident
qui en venant agir comme cause occasionnelle a déterminé ou tout
an moins hâté l'éclosion de la maladie. C. D.
XXXVI. Des contractions de l'estomac, des intestins et de la vessie
dans les attaques d'épilepsie ; par V.-P. Ossipnw. (O/¡o1'Pl11e
psichiatrii.)
Voyez le même article en allemand in Neurologische Centralblatt,
1898. Déjà analysé. P. Kerwal.
Accès épileptiques et épileptoïdes se manifestant sous la
forme d'angoisses ; par W.-M. Bechterew. (nbO : 1'p¡¡ie psirhiatrii,
III, 12. 1R98.)
Voir le même article en allemand, in Nnirohg. Centrcaltrlntl.
1898. Déjà analysé. P. Keraval, ,
111'IIT. Des modifications de la circulation cérébrale dans
l'intoxication alcoolique aiguë; par Beivar. (06o·rnir psi-
rhintrii, n° 9, 1899.)
Voir l'article de Bechterew sur le même sujet qui, précisément t
a pour base les expériences de Beinar. (h7 Cc ? ? 6/(t<f r. Nervrn-
heilk. 1898.) Déjà analysé. P. Kn,wvr..
XXXI X. Syndrome poliomyélitique succédant à une chute sur le
dos : par AI. le Dr Decroly. (Journal de Neurologie, t900, i G.)
Il s'agit d'un curant qui à la suite d'une chute dans un escalier
fut atteint d'une paralysie fiasque des quatre membres. Cette
paralysie qui fut suivie d'une atrophie rapide rétrocéda au bout
d'un certain temps dans certains muscles mais resta définitive au
niveau des autres. Réaction de dégénérescence, abolition des
réflexes tendineux, conservation des réflexes cutanés. Pas de
troubles sensitifs, pas de paralysie des sphincters, aucune modi-
lication de l'intelligence.
Rien ne permettant d'affirmer qu'un traumatisme puisse déter-
miner d'emblée une lésion du groupe externe des cellules, de la
corne antérieure, l'auteur croit plutôt que c'est le développement
brusque sinon de cette lésion (qui pouvait exister à l'état latent
depuis quelque temps) du moins de se* manifestations fonction-
nelles qui a été la cause de la chute. . D.
224 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
XL. Parésie des quatre membres, contractures, exagération des
réflexes et phénomène de Babinski à la suite d'une chute sur
le dos. (Journal de Neurologie, 1900, n° 6.)
XLI. Paralysie générale et Syphilis; par MM. Sérieux et F.\RNA-
RIER. (Bulletin de la.Société mentale de Belgique, décembre 1900.)
Ce travail se termine par les conclusions suivantes : la syphilis
est de beaucoup la cause la plus fréquente de la paralysie
générale ; on la trouve certaine ou probable dans près de
80 p. 100 des cas ; elle peut être affirmée avec certitude dans
50 p. 100 des cas. Elle existe comme seul facteur 31 fois p. 100.
C'est dire qu'elle est 2 fois plus fréquente que les autres infections
(variole et fièvre typhoïde) et l'alcoolisme réunis ; 2 fois et
demie plus fréquente que l'hérédité arthritique, 8 fois plus
fréquente que le traumatisme cranien, causes qui sont cependant
plus faciles à dépister.
L'hérédité névropathique ou. vésanique se rencontre environ
, dans le tiers des cas, mais ce chiffre est sûrement trop faible.
L'hérédité paraît être le terrain nécessaire au développement de la
paralysie générale. La période qui s'écoule entre l'infection
syphilitique et la paralysie générale confirmée est en moyenne de
quatorze à quinze ans avec six et trente-deux ans comme chiffres
extrêmes.
Quelle que soit la valeur de la syphilis comme cause de para-
lysie générale, ce facteur étiologique n'est pas unique. La syphilis
n'a qu'une action banale, nullement spécifique et il paraît bien
démontré que les toxiques les plus divers poisons chimiques
(plomb ou alcool), poisons végétaux (maïs altéré), poisons micro-
biens (syphilis, variole), peut-être aussi les auto-intoxications,
peuvent donner naissance chez des prédisposés à la méningo-encé-
phalite. La paralysie générale ne mérite donc plus les dénomina-
tions trop exclusives d'affection parasyphilitique ou même para-
infectieuse, mais celle plus générale d'affection paratoxique (en
considérant les infections comme des intoxications).
XLII. Un cas d'ophtalmoplégie nucléaire progressive;
par AUSSET et RAVLRT. (Presse médicale, 28 février 1900.)
Les auteurs rapportent, dans ce travail, les constations anatomo-
pathologiques et histologiques faites par eux à l'autopsie d'une
enfant de sept ans, qui avait présenté, de son vivant, les signes
d'une ophtalmoplégie nucléaire progressive : paralysie du moteur
oculaire commun gauche et parésie du même nerf du côté droit ;
névrite optique surtout à droite ; paralysie du facial inférieur droit;
dysarthrie par parésie linguale; démarche ébrieuse et hémiplégie
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 3M
droite. L'examen attentif de tous les organes n'a révélé aucune
trace de tuberculose. Les méninges elles-mêmes ne présentaient
pas de granulations tuberculeuses. Mais il existait dans la calotte
des pédoncules cérébraux une tumeur, du volume d'une noix,
s'étendant de l'extrémité supérieure de la protubérance annulaire
jusqu'à la région sous-optique, empiétant même un peu sur cette
région du côté droit. L'étude histologique de cette tumeur a
révélé sa nature tuberculeuse. Elle était constituée, en effet, par
des amas embryonnaires, entre les cellules desquels on distinguait
par places, de nombreuses fibrilles, probablement conjonctives; au
milieu de ces amas se trouvaient disséminées des cellules géantes
entourées de cellules épithélioïdes et dans lesquelles les auteurs
purent colorer quelques bacilles tuberculeux. De petits vaisseaux
gorgés de globules sanguins existaient en grand nombre dans
toute l'étendue de la tumeur. Les éléments du tissu nerveux
n'étaient pas refoulés par la tumeur, mais on les retrouvait, au
milieu des masses tuberculeuses, plus ou moins altérés (renflement
exagéré des fibres à myéline avec cylindre-axe gonflé en certains
points, très aminci en d'autres ; cellules globuleuses, gonflées,
d'apparence homogène, ou à noyau aplati, refoulé à la périphérie).
Les désordres ainsi produits dans la région envahie expliquaient
les symptômes qu'avait présentés la malade; c'est ainsi que l'alté-
ration des noyaux et la dégénérescence des nerfs de la troisième
paire, la dégénérescence des nerfs optiques, la destruction des
noyaux rouges et celle des pédoncules cérébelleux supérieurs,
dans leur trajet pédonculaire, la lésion enfin du pied du pédon-
cule cérébral gauche et la destruction des fibres de la calotte, ren-
dent compte des troubles oculaires, de la perte de l'équilibre de
l'hémiplégie droite, facial inférieur droit compris et enfin de la
paralysie de la langue. A. FENAYROU.
XLIII. La congestion cérébrale devant l'Académie de médecine
en 1861 ; par M. P. Marie. (Presse médicale, 3 février 1900.)
L'auteur estime qu'on attribue à la congestion cérébrale, en
nosographie, une importance qu'elle est loin d'avoir réellement.
Selon lui, la congestion cérébrale, considérée en tant qu'affection
autonome, est un de ces faits que personne n'a directement cons-
tatés et qu'on accepte d'une façon générale. Déjà, en 1861, dans
une communication à l'Académie de médecine, Trousseau avait
émis une opinion analogue : il avait soutenu qu'un bon nombre
d'états morbides ou de symptômes ordinairement attribués à la
congestion cérébrale apoplectiforme relèvent, en réalité, d'affec-,
tions toutes différentes. « Est-ce à dire, concluait-il, que je nie
d'une manière absolue la congestion cérébrale ? Non, certes.
J'admets la congestion, l'hyperhémie du cerveau ; il faudrait être
Archives, 2° séiie, t. X, 15
2G C) REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.
insensé pour en contester l'existence ; mais je dis que ce qu'on a
appelé la congestion cérébrale apoplectiforme est, dans le plus
grand nombre des cas, un accident épileptique ou éclamptique,
quelquefois une syncope ; je dis que, bien souvent, les simples
vertiges épileptiques, que les vertiges liés à un mauvais état de
l'estomac ou à des maladies de l'oreille, sont considérés à tort
comme des congestions de l'encéphale. » Ces idées furent l'objet
de vives discussions auxquelles prirent part, en particulier, Bouil-
laud, Piorry et Beau. M. Marie reproduit textuellement et com-
mente les principaux passages de la communication de Trousseau
ainsi que quelques-uns des arguments soutenus par ses contra-
dicteurs. Il termine en faisant remarquer « la sûreté de coup d'oeil
avec laquelle Trousseau montre la banalité de la congestion céré-
brale et l'impossibilité d'admettre qu'un phénomène aussi banal
puisse être la cause efficiente de tous les méfaits qu'on lui impute '. »
A. FENAVROU.
XI.1V. Une observation de maladie de Basedow mortelle avec
coexistence de myxoedème ; par M. M. FAURE. (Presse médicale,
23 septembre 1809.)
Si l'on admet que le goitre exophtalmique est la conséquence
de l'hyperfonction du corps thyroïde et que le myxoedème est, au
contraire, en rapport constant avec le défaut de sécrétion thyroï-
dienne, on est amené à considérer comme impossible la coexis-
tence de ces deux maladies. Cependant, un certain nombre d'ob-
servations ont été publiées, dans lesquelles est signalée cette
coxistence. L'exactitude de ces observations a été contestée,
et on a pu soutenir qu'il n'y avait, dans ces cas, entre le goitre
exophtalmique et le myxoedème qu'un rapport de succession.
M. Faure rapporte l'histoire d'une malade atteinte depuis huit ans
de goitre exophtalmique, chez qui se sont manifestés des accidents
(bouffissure et induration des tissus de la face et du cou; somnolence,
hébétude et diminution de l'activité intellectuelle), qu'il rattache
au myxoedème. Ces symptômes ont apparu à une période où les
signes de goitre exophtalmique s'étaient sensiblement amendés ; -,
ils ont persisté pendant trois ans, et pendant la plus grande partie
de ce laps de temps, la maladie de Basedow a continué de s'affir-
mer d'une façon plus ou moins accentuee, mais incontestable. La
mort est survenue par insuffisance cardiaque, onze ans après le
début des accidents.
L'auteur fait remarquer que, dans ce cas, la naissance du
myxoedème et la terminaison de la maladie de Basedow ont che-
' Nous avons publié en 1861, dans la Médecine contemporaine, une
revue analytique et critique sur cette discussion. (B.) .)
REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 227 I
vauché l'une sur l'autre de manière à coexister pendant deux ans
environ. Cette observation ne peut se concilier avec la théorie thy-
roïdienne du goitre exophtalmique et du myxoedème que si l'on
admet l'hypothèse que ces deux affections sont la conséquence,
non de l'exagération (maladie de Basedow) ou de l'abolition
(myxoedème) de la fonction thyroïdienne, mais de deux viciations
de cette fonction, différentes et, partant, susceptibles de coexister
chez un même sujet ; cette hypothèse n'est, d'ailleurs, en contra-
diction avec aucun fait. M. Faure n'a trouvé dans le cas de cette
malade aucune particularité capable d'appuyer la théorie bulbaire
du goitre exophtalmique. Il a constaté à l'autopsie que le corps thy-
roïde exerçait une compression sur le sympathique cervical, com-
pression que rien ne faisait soupçonner pendant la vie ; ce fait
semble confirmer la théorie sympathique de la maladie de Base-
dow, mais, d'après l'auteur, cette théorie est incapable d'expliquer
tous les faits observés.
Au reste, il n'est pas actuellement de théorie anatomique et
pathogénique qui puisse convenir à tous les cas de maladie de
Basedow. Le goitre exophtalmique n'est vraisemblablement pas
une maladie, mais un syndrome clinique que des causes, peut-être
multiples, peuvent faire apparaître ; ces causes ne sont pas encore
bien connues ; on ignore aussi son anatomie pathologique, et
l'aveu de cette ignorance est implicitement contenu dans la déno-
mination de névrose, c'est-à-dire de maladies sans lésions et sans
cause, que l'on donne à la maladie de Basedow.
· A. FENAYROU.
XLV. Un cas de tumeur du lobe occipital; par le Dr Weber. (Rev.
méd. de la Suisse Romande, 1900, n° 3.) -
La malade dont l'observation fait l'objet de ce travail était con-
sidérée comme une épileptique ordinaire : ses attaques ne se dis-
tinguaient en rien de celles des autres épileptiques. A plusieurs
reprises elle passa par des états de surexcitation maniaque allant
jusqu'à une désorientation complète et mourut en état de mal.
A l'autopsie on trouva dans l'hémisphère cérébral droit une
tumeur qui s'étendait du pôle occipital jusque vers le milieu de
l'hippocampe, occupant le domaine des lobules lingual et fusi-
forme. L'artère cérébrale postérieure était obstruée par un throm-
bus. L'examen histologique de cette tumeur a démontré qu'il
s'agissait d'une sarcome à petites cellules.
D'après l'auteur, cette tumeur a été la cause unique des crises
épileptiques, l'examen d'un grand nombre de circonvolutions
cérébt ales lui ayant permis de constater leur parfaite intégrité.
H. DENY.
REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.
1. Aliénés méconnus et condamnés; par les D1'5 VLLENEUVE et
CHAI,NON. (Union médicale du Canada, n" 0, 1899.)
D'une enquête faite par les auteurs dans les asiles et la prison
de Québec, il résulte que, pendant une période de dix-sept années,
de 1881 à 1897, 1.197 aliénés ont été reçus dans les prisons com-
munes de la province. De ce nombre, 498 seulement n'y ont été
reçus que' temporairement, en attendant que les procédures insti-
tuées pour les placer dans les asiles fussent complétées ; ce qui
laisse une balance de 699 aliénés, condamnés, soit une moyenne
annuelle de 41 aliénés méconnus et condamnés.
Après avoir rapporté brièvement les travaux publiés en France
et à l'étranger sur celte question, toute d'actualité, et résumé les
observations les plus intéressantes qu'il leur a été donné de ras-
sembler, les auteurs formulent les conclusions suivantes :
1" Il ressort de cette étude que l'appréciation de la folie échappe
manifestement à la compétence des magistrats, qui restent forcé-
ment étrangers aux connaissances spéciales de la médecine;
2° Les magistrats devraient donc considérer comme un devoir
de leur charge, d'ordonner l'expertise médicale des prévenus chez
qui les circonstances du crime, l'attitude ou les antécédents peuvent
faire soupçonner un état mental défectueux ;
3° Chaque fois que la défense allègue l'irresponsabilité du pré-
venu, les magistrats devraient ordonner une expertise médicale
rigoureuse portant sur tous les éléments de la cause : ,
4° Les magistrats devraient confier cette mission à des médecins
dont les connaissances spéciales et l'expérience donneraient toute
garantie de compétence ;
5° Les médecins des prisons devraient examiner tous les préve-
nus et faire rapport aux magistrats sur ceux dont l'état mental
laisse des doutes. R. C.
Il. Les aliénés devant la loi. Etude médico-légale; par le Dr G.
VILLENEUvE. (Union médicale du Canada, n° 7, 1899.)
La troisième partie de cet ouvrage destiné surtout à éclairer les
magistrats et à les mettre en méfiance contre l'interprétation trop
absolue du Code en usage au Canada, est un commentaire critique
REVUE DE MÉDECINE LÉGALE. 229
du Code civil, dans ses rapports avec l'aliénation mentale, particu-
lièrement pour ce qui concerne l'interdiction, les testaments et les
contrats. Ce travail doit être lu en entier et ne se prête 'pas à l'ana-
lyse, mais il comporte quelques réflexions qui peuvent en être
considérées comme.les véritables conclusions.
Après avoir cité les différents articles du Code civil dans lesquels
on trouve, comme en France, les termes imprécis : imbécillité,
démence, fureur, l'auteur déclare que le législateur devrait défini-
tivement renoncera faire des classifications, forcément incomplètes,
parce qu'elles ne sont pas de sa compétence, et employer le terme
générique de folie ou aliénation mentale.
Après avoir passé en revue les expressions dominantes de la
folie, pour faire connaître les principales influences qui agissent
sur les déterminations de l'individu et dirigent ses tendances et
ses actes, l'auteur s'attache à démontrer combien il est important
de connaître l'évolution particulière de chacune des formes patho-
logiques pour en tirer, au point de vue légal, pour le passé et
pour l'avenir, des indications spéciales, susceptibles de justifier
les mesures à prendre vis-à-vis de chaque cas particulier. A ce
sujet, l'auteur déclare justement ne pas comprendre que la pro-
cédure d'une demande d'interdiction puisse se passer de l'inter-
vention d'une expertise médicale. R. CUARON,
III. L'affaire Sauter. Tentative d'assassinat et intention suggérée
de mettre à mort neuf personnes ; par SC ! IRENCK-NoTZ1NG, (Zeits-
chrifl fiir Hypnotismus, mars 1899.)
NI ? S..., femme d'un boucher, a été traduite au mois de juil-
let 1899 devant la cour d'assises de Munich : 1° pour tentative
d'assassinat n'ayant pas abouti par suite de circonstances indé-
pendantes de sa volonté. Elle a mis notamment une poudre dans
les chaussettes de son mari avec l'intention de l'empoisonner ;
2° Pour avoir engagé de vive voix et par écrit la femme Gauz-
bouer en lui promettant des récompenses en argent et en objets
précieux de mettre à mort son mari, trois de ses enfants et cinq
de ses amis.
La femme Sauter a toujours vécu en mauvaise intelligence avec
son mari, elle l'a trompé plusieurs fois. Au mois de juillet 1898
elle a rencontré un acteur S..., et est devenue sa maîtresse.
Au commencement de l'année 1899 elle est allée trouver la
femme Gauzbouer, tireuse de cartes et somnambule, pour la con-
sulter sur l'avenir. La somnambule lui a déclaré qu'elle pré-
voyait de nombreuses morts dans sa famille et dans son entourage;
elle lui parla en outre dans des termes vagues des choses de sa vie
intime et amena de cette façon 11m° S... à lui faire des confidences
et à avouer son amour sans bornes pour l'acteur S..., et son
30 REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.
désir'de se débarrasser de son mari, La somnambule lui donna
alors un paquet de poudre de gentiane et lui fit croire que cette
poudre mise dans les chaussettes du mari suffisait pour l'em-
poisonner.
Mme S... ayant fait ce que la somnambule lui conseillait, et
voyant que son mari ne tombait pas malade revint la voir à plusieurs
reprises pour lui demander de faire disparaître non seulement son
mari, mais tous les obstacles qui l'empêchaient de se donner
entièrement à son amant.
Mme S... lui aurait exprimé alors le désir de voir mourir son
mari, trois de ses enfants, et cinq amis et elle promettait à la som-
nambule, en récompense, de l'argent, des bijoux, des robes, etc.
La somnambule la décida même de dresser une liste sur laquelle
les noms de ceux qui devaient être tués étaient accompagnés d'un
certain nombre de croix et de formules magiques. La somnam-
bule, qui, soit dit en passant, avait à son actif vingt et une condam-
nations, pour vol, escroquerie, etc., fit venir deux agents de
police qui assistaient à la scène de la confection de l'arrêt de mort
cachés derrière une cloison. Ils arrêtèrent Mm0 S... aussitôt après.
A l'instruction, l'attention du juge a été attirée par les bizarre-
ries de cette tentative criminelle.
On ne pouvait s'expliquer notamment pourquoi Mme S... avait
choisi trois de ses cinq enfants, et encore moins pourquoi elle
avait condamné à mort cinq des amis avec lesquels elle a toujours
conservé, comme l'a montré l'enquête, de très bonnes relations et
qu'elle a même souvent obligé. On eut des doutes sur l'intégrité
de ses facultés mentales et trois médecins : le D1' Vocke, le profes-
seur Messerer et le Dr Schrenk-Notzing furent commis pour l'exa-
miner.
Mme S... est âgée de quarante-cinq ans, elle n'est plus réglée de-
puis plus d'un an : elle a toujours été maladive,' avait des métror-
rhagies abondantes qui mettaient souvent sa vie en danger. Tares
héréditaires physiques et psychiques. Migraines fréquentes avec
vertige, vomissements, sensibilité bien grande, hyperémie cu-
tanée, sensations anormales de chaleur, troubles du sommeil avec
hallucinations hypnologiques, aurait eu des hallucinations de la
vue à l'état de veille.
Pendant les derniers temps, état de dépression.
Rétrécissement concentrique du champ visuel des deux côtés.
Diminution de l'acuité auditive et tactile, sensation de boule.
En somme, malgré l'absence de crises on a droit de conclure
qu'on a affaire à un tempérament hystérique, à une déséquilibrée,
chez laquelle les réactions ne sont pas normales et la force de
résistance psychique très diminuée.
La malade n'ayant pas présenté de troubles délirants propre-
ment dits, on ne pouvait conclure a l'irresponsabilité dans le
REVUE DE MÉDECINE LÉGALE. 231
sens de la loi. Mais les troubles nerveux que présentait M-9 S...,
son faible niveau intellectuel, l'absence de sens critique, les circons-
tances qui ont accompagné les tentatives criminelles, les conci-
liabules et les visites fréquentes chez la somnambule, enfin la
personnalité de cette dernière, les manières d'être et d'agir, tout
permettait de dire que AIm0 S... agissait sous l'influence d'une vo-
lonté étrangère. Elle était dans un état de rêve, fascinée par la
somnambule, parlant et agissant sur ses indications, et ne se ren-
dant plus exactement compte de la portée de ses actes. Les témoins
étaient en effet surpris par le calme avec lequel elle signait l'arrêt
de mort de ses enfants et de ses amis. C'est donc un crime par sug-
gestion à l'état de veille. Jusqu'ici on s'est surtout préoccupé des
crimes suggérés dans l'état de sommeil hypnotique et cependant
il s'agit là surtout de crimes de laboratoire.
Les actes délictueux suggérés à l'état de veille sont bien plus fré-
quents dans la pratique et méritent d'attirer l'attention des méde-
cins et des juges. Sous ce rapport l'affaire Sauter a une signification
toute particulière.
C'est pour la première fois que le jury acquitte un prévenu ayant
commis un acte criminel par suggestion à l'état de veille. Ce ré-
sultat, ajouterons-nous, est dû, en grande partie, au rapport des
experts et surtout à celui du De Schrenck-Notzing qui a fait si
clairement ressortir le rôle de la suggestion chez un être diminué
au point de vue psychique. LwOrF.
IV. Contribution à l'étude de la valeur clinique et médico-légale
de certains délires systématisés ; par K. Bonhoefeer. (Central-
Llatf f'. Nervenheilk. XXII, N. F. X, 1899.)
Les conceptions délirantes systématisées sont-elles, en toutes
circonstances. un motif d'excuse, au point de vue pénal' ? Voici un
malade ayant été considéré par tel spécialiste comme atteint de
folie systématisée chronique et déclaré irresponsable, et, ultérieu-
rement, par un autre, comme non aliéné. C'est un dégénéré (tare
héréditaire, et peut-être aussi rachitisme dans la jeunesse), voleur
précoce. En pri-on, il a été atteint de folie systématisée subaiguë
(idées de persécutions et de grandeurs) qui a laissé des idées
délirantes résiduaires. Il est certain, d'après la pathogénie de ces
conceptions délirantes, qu'il s'agit d'idées délirantes, vraiment para-
noïques, mais l'état mental n'est pas tout à fait le même que
celui du délirant systématique chronique progressif. Les idées
délirantes actuelles n'ont pas la force associative decedernier état.
L'individu a une demi-conscience de sa maladie. Leur persistance
est due à certaines manières de voir normales propres à certaines
couches sociales. C'est ainsi que chez certains alcooliques chroni-
ques on trouve assez souvent des idées de jalousie, certainement
232 REVUE DE MÉDECINE LÉGALE. ,
pathologiques, qui cependant ne donnent point naissance à un délire
actif de jalousie, sans qu'il y ait non plus affaiblissement mental.
Néanmoins l'accusé est excusable. P. KERAVAL.
V. Servitude pénale et folie, par A.-R. Douglas. (The Journal of
Mental science, avril 1998.)
L'auteur défend par de nombreux arguments les prisons anglaises
d'être comme on l'a prétendu des agents provocateurs de la folie.
R. M. C.
VI. Notes sur un cas propre à ouvrir une discussion sur la rédac-
tion des testaments par les aliénés certifiés tels, et sur les
devoirs des médecins en pareil cas, par W.-B. MORTON, (The
Journal of Mental science, janvier 1898.) ,
Il s'agit d'un homme entré en juin 1895 à l'asile où il est mort
en juillet 1896 ; il était âgé de cinquante ans, avec des antécédents
de folie dans sa famille et pouvait être considéré comme un cas
type de stupeur mentale. 11 eut plusieurs intervalles lucides, nette-
ment constatés par le médecin, pendant l'un desquels il demanda
à faire, et fit en effet son testament; mais tandis que le notaire le
lui relisait il retomba dans son état de stupeur, et ne put pas le
signer. Quatre jours plus tard, au cours d'un nouvel intervalle
lucide, il fit redemander le notaire et cette fois put apposer sa
signature sur le document. Depuis ce moment jnsqu'à sa mort,
survenue dix jours plus tard, il eut encore plusieurs intervalles
lucides, durant l'un desquels il fit un codicille.
Le testament fut contesté, mais un arrangement étant inter-
venu entre les parties, il n'y eut pas lieu pou le tribunal de rendre
un arrêt qui eût été intéressant.
Dans le cas actuel, en présence d'un état de lucidité absolue
constaté par quatre médecins, le rôle du médecin était facile, mais
il s'en faut qu'il en soit toujours ainsi. R. M. C.
VII. La nouvelle loi sur l'ivresse, par A. WooD-BENTON, (The jour-
nal of Mental science, avril 1899.)
Cette loi a été mise en vigueur le le, janvier 1899. Elle com-
prend : 1° des amendements aux deux lois sur l'ivresse de 1879 et
de 1888; et 2° de nouvelles mesures concernant l'ivresse criminelle.
M. Wood-Renton, qui est avocat, en expose avec détail le méca-
nisme légal. R. M. C.
' REVUE DE MÉDECINE LÉGALE. 233
VIII. La responsabilité des aliénés ; doit-on les punir ? Réponse au
D1' Mercier, par REGiNALD Il. NOOTT. (The journal of Mental
science, janvier 1899.)
Jusqu'en 1894 la différence qui existait au sujet de la responsa-
bilité des aliénés entre les magistrats et les médecins consistait en
ce que les premiers admettaient que certaines formes et certains
degrés de folie entraînaient seuls l'irresponsabilité, tandis que les
seconds repoussaient presque tous la folie partielle telle que la
concevaient les légistes, et soutenaient, avec raison suivant l'au-
teur, que toutes les formes et tous les degrés de folie impliquaient
l'irresponsabilité. A cette époque et un peu plus tard, une com-
mission spéciale examina cette question, et le D1' Mercier, après
avoir conclu que la loi demandait des modifications, et traitant
ensuite de la responsabilité criminelle émit l'opinion « que dans
beaucoup de cas il est juste et équitable de punir un aliéné pour
la mauvaise action qu'il a commise ». C'est la théorie de la res-
ponsabilité partielle.
Pourquoi le D1' Mercier admet-il cette théorie C'est à cause du
système, adopté dans les asiles, de donner, dans l'intérêt du bon
ordre de la maison, et dans l'intérêt des malades eux-mêmes,
quelques douceurs (tabac, argent de poche, etc.) aux aliénés qui se^
conduisent bien, ou bien de priver de ces même douceurs qu ? w-
ils seconduisent mal. Or, l'auteur soutient énergiquement que cli ? -)re
sont là, à proprement parler, ni des récompenses ni des puni io
Ce sont des moyens à l'aide desquels on essaye d'assurer Jes
malades à exercer sur eux-mêmes autant de pouvoir que la ni31=
die leur en laisse, dans le but d'exercer et de développer ce pou-
voir dans les cas curables et de contribuer ainsi à rétablir un équi-
libre mental qui permette à ces aliénés de guérir et de reprendre
leur place dans la société ; et s'il s'agit de cas chroniques et incu-
rables, c'est un moyen de maintenir l'ordre dans la maison, dans
la mesure du possible. Mais il y a un grand nombre de malades
qui sont absolument inaccessibles à ce moyen d'action, et vis-à-vis
desquels il faut prendre des mesures d'un autre genre ; mais
jamais ces mesures n'ont le caractère d'une punition véritable,
comme celles qu'inflige la sentence du juge, et cela même con-
damne l'argumentation du docteur Mercier. Ce serait d'ailleurs
une notion bien dangereuse à introduire dans l'esprit des servi-
teurs et des gardiens d'asile que celle du droit de punir les aliénés
et elle ne manquerait pas d'avoir de fâcheuses conséquences.
Nous avons dû abréger considérablement les développements
que l'auteur a donnés à la thèse qu'il soutient, et à l'aide desquels
il espère avoir démontré le danger qu'il y a à admettre la respon-
sabilité partielle des aliénés ; il termine en citant un fait très
démonstratif, et emprunté à un magistrat anglais, l'un de ceux
234 REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.
qui ont le plus étudié cette question : on va voir quelle contradic-
tion il implique : Une femme, raconte ce magistrat, est prise
d'une impulsion violente qui l'emporte il tuer avec un couteau
l'enfant qu'elle allaite : elle jette le couteau, se précipite hors de
lachambre et appelle quelqu'un parce que, dit-elle, elle a de mau-
vaises pensées : au milieu de la nuit elle se réveille avec la même
impulsion ; sous l'influence d'un traitement approprié elle se
calme ; néanmoins le fait se reproduit encore une fois ; elle résiste
encore, et finalement n'est plus tourmentée jamais par cette
impulsion. Et le magistrat ajoute : « Que l'impulsion ait été déli-
rante, on ne peut guère le mettre en doute ; mais délirante ou non,
il est évidentqu'elle n'était pas irrésistible puisque cette femme, en
fait, a résisté victorieusement, et sûrement c'était son devoir légal
de résister. Ceci nous amène à conclure que si elle avait été inca-
pable de résister et si elle avait tué son enfant, Sir James Stephen
l'aurait considérée comme responsable et l'aurait punie pour ce
meurtre, et pourtant il dit lui-même : « que l'impulsion ait été
délirante, on ne peut guère le mettre en doute. » DE MUSERA VE-CLA Y.
R. de Musgrave-Clay.
Aliénés EN liberté.
Tentative de suicide. Le sieur Glace, soixante-dix-sept ans,
à Villy, près Falaise, dont le cerveau était dérangé depuis quelques
mois, s'est tiré trois coups de revolver. Deux projectiles seule-
ment ont pu être extraits. Cependant l'étet du blessé est assez
satisfaisant. (Bonhomme Normand, 23 août.)
- Le nommé François Jauréguibert, âgé de quarante-sept ans,
propriétaire à Alos, près de Tardets, dans les Basses Pyrénées,
atteint depuis quelque temps d'aliénation mentale, a été trouvé
pendu hier dans son domicile. (Petit Parisien du 23 août.)
Suicide. - Dans la nuit du 21 au 22 de ce mois, le nommé Jean-
Baptiste, journalier, âgé de soixante ans, s'est volontairement
donné la mort en se jetant dans une mare, au village de Nogues,
commune de Boisredon, canton de Mirambeau.
Depuis un mois environ, Jean-Baptiste travaillait au service de
M. André Chaintrier, propriétaire au lieu des Noguez, et donnait
des signes d'aliénation mentale. M. le docteur Cadenaule, de Saint-
Ciers-Lalande, appelé aux fins de constatations légales, a déclaré
que le suicide de Jean-Baptiste était dû, en effet, à l'alcoolisme et
à la folie. (La Petite Gironde, 25 août.)
Pour une illuminée. - A Algaida d'après une dépêche de Murcie
en date du 28 août, la foule se pressait autour d'une femme illu-
minée, sortie naguère d'une maison de santé, pour entendre
ses prédictions. La police tenta d'empêcher ces réunions, mais
une collision se produisit au cours de laquelle le frère de cette
femme fut tué et son père blessé. D'autre part, quatre agents
ont reçu des blessures graves. (Le Petit Var, 29 août 1900.)
XIIIe CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
(2-9 août 1900.)
Section de psychiatrie.
En 1889, le Congrès international de médecine mentale était auto-
nome. Cette année il a été constitué en une section spéciale du
Congrès international de médecine. Il a été aussi organisé une
section pour la neurologie. Par un défaut d'organisation regrettable,
la section de psychiatrie tenait ses séances à l'Ecole de pharmacie,
tandis que la section de neurologie tenait les siennes à la Sor-
bonne. Rien n'était plus facile que de faire siéger les deux sections
dans le même endroit, ce qui aurait facilité les relations entre les
membres des deux sections et leur aurait rendu plus commode
l'audition des communications qui les intéressent.
Séance du 3 août 1900. - Présidence DE M. : \1AGN,L,(,
La séance est ouverte à 9 h. 1/2. Le bureau est ainsi composé :
Président, M. V. MAGNAN; Vice-Présidents, MM. Joffroy, Ballet;
Pierret, Cullerre; Secrétaire NI. Ritti.
Le bureau étant constitué, M. MAGNAN prononce le discours
suivant : .
Messieurs,
A l'ouverture de nos travaux, j'ai un pieux et douloureux devoir
à remplir, celui d'exprimer nos profonds regrets à la mémoire
d'un de nos rapporteurs les plus éminents, le professeur Korsakoff
(de Moscou), qui a été ravi à l'affection des siens, de ses amis, de
ses élèves, de ses malades, au moment même où il mettait la der-
nière main au rapport sur la clinothérapie, dont il avait, malgré
sa santé chancelante, bien voulu se charger. Il est mort sur la
brèche, dans tout l'éclat et la vigueur de sa vaste intelligence, en
laissant le souvenir non seulement d'un savant incontesté, mais
d'un philanthrope modeste et discret dont l'influence bienfaisante
peut se mesurer aujourd'hui 'par le vide immense que sa mort
vient de révéler.
Ce deuil n'est malheureusement pas le seul, nous avons encore
à regretter la mort d'un de nos collaborateurs les plus aimés et
les plus distingué ? , le Dr Bouchereau, membre du Comité d'orga-
nisation, à la mémoire duquel des témoignages émus d'estime et-
d'affection ont déjà été rendus. -
236 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MEDECINE.
Le Congrès de 1900 semble devoir marquer une date importante
dans l'histoire de la psychiatrie. Les aliénistes de tous les pays,
non seulement suivent avec attention et se mêlent pour la plupart
au grand mouvement qui a déjà fait tant progresser la médecine
générale et les sciences biologiques, mais encore, de tous les côtés,
un vigoureux effort se dessine pour assurer le traitement de la
folie et la réalisation pratique des divers modes d'assistance des
aliénés. Nous sommes loin des spéculations métaphysiques des
psychologues confinés dans la pure observation intérieure, de bonne
heure la plupart des aliénistes se sont attachés à l'observation
directe des faits et, si au début, frappés par certains phénomènes
prédominants, ils ont accordé à un symptôme la valeur d'une
entité morbide, en créant les monomanies, bientôt la détermina-
tion de la paralysie générale et l'appréciation plus exacte des dif-
férentes manifestations morbides ont marqué un notable progrès.
Cette méthode clinique donne à chaque phénomène le rang qui
lui revient, non seulement d'après sa forme, sa couleur, son con-
tenu, mais surtout d'après son évolution. Elle ne décrit plus comme
espèces distinctes les diverses phases d'une maladie, mais elle
essaye d'embrasser tout son ensemble, de reconstituer son passé
et de prévoir son avenir, elle rétablit la filiation successive des
phénomènes depuis la cause jusqu'à la terminaison, si bien que le
diagnostic implique nécessairement le pronostic.
D'autre part, l'anatomie pathologique, l'examen plus approfondi
des organes, les progrès de l'histologie par les nouvelles techniques,
l'expérimentation physiologique confirmant et éclairant la clinique,
ont fait faire un grand pas à l'étude des localisations cérébrales et
cette étude fertile en résultats intéressants et pratiques, a permis
de rattacher les modifications mentales à l'activité de certains
centres déterminés.
De plus, l'application de moyens plus rigoureux d'expérimen-
tation, tels que la méthode psycho-physique, a fait pénétrer plus
profondément dans la connaissance de certains phénomènes pri-
mordiaux, les sensations par exemple, qu'il s'agisse du sens mus-
culaire, de la vue, du goût, de l'odorat, du toucher. Les résidus de
ces sensations sont devenus des images qui ne flottent plus dans le
vague mais se localisent, formant des types assez nettement définis
pour être désignés du nom de visuels, auditifs, moteurs. Tous ces
matériaux accumulés sont mis à profit par les psycho-physiolo-
gistes, qui abandonnant l'introspection des psychologues ont
adopté la méthode objective et agrandi le champ d'observation.
C'est par l'étude des faits normaux et pathologiques, par l'étude
de l'enfant et des aliénés qu'ils sont parvenus à suivre le dévelop-
pement, la marche évolutive des facultés intellectuelles, et puis,
leur marche régressive, les conditions dans lesquelles ces facultés
s'abolissent et se dissolvent. Les belles recherches de M. Th. Ribot
SECTION DE PSYCHIATRIE. : 2 : )j
sur la mémoire, la volonté, la personnalité, l'attention prouvent
combien sont fécondes ces sources d'investigation, et quelle vive
lumière elles ont jeté sur des côtés cliniques restés jusqu'ici
obscurs.
Ce n'est pas tout, le grand mouvement scientifique provoque
par les admirables découvertes de Pasteur, les travaux de M. Bou-
chard sur la nutrition, ceux de M. Gautier sur les actes biologiques
et les échanges chimiques, dont est le siège la cellule vivante, les
recherches sur la constitution des liquides de l'économie à l'état
de santé et de maladie, ces travaux ont déjà donné des résultats
appréciables, ouvert des horizons plus vastes. Ces doctrines nou-
velles de l'infection, de l'auto-intoxication ont fait naître les psy-
choses infectieuses avec les microbes et les toxines, les psychoses
viscérales avec les auto-intoxications dues aux lésions des organes,
et enfin les psychoses diathésiques dans lesquelles les infections et
11. le Pr Magnan,
Président de la section de Psychiatrie.
2R8 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
les auto-intoxications peuvent simultanément intervenir, et, dans
un magnifique élan vers un idéal pathogénique, on voudrait arri-
ver à la détermination de la formule chimique propre aux diffé-
rents états morbides !
Il ne nous déplaît pas de constater ces grandes envolées, quel
que soit l'essort de notre imagination, la clinique immuable,
rebelle aux hypothèses, fournit chaque jour l'enseignement qui
empêche de s'égarer et ramène vers la réalité des faits. Les agents
infectieux, microbes et toxines, les poisons de l'économie dépen-
dant d'une élaboration nutritive incomplète peuvent, sans doute,
provoquer certains troubles psychiques, de la confusion, de l'obtu-
sion mentale, des amnésies de nature diverse suivant le siège et
l'étendue des régions intéressées, mais ces produits sont incapables
par eux-mêmes d'engendrer une psychose pure, un délire systé-
matisé, une manie, une mélancolie, une impulsion, une obsession,
ces stigmates si caractéristiques de la dégénérescence. Il en est de
la folie comme des autres affections. Est-ce qu'un psoriasis, un
eczéma pourraient être provoqués par une irritation cutanée quelle
qu'en fût l'intensité, si le sujet ne portait pas déjà en lui l'aptitude
, à produire ces dermatoses ? Il faut pour le développement d'une
psychose, d'un délire systématisé, tout d'abord un terrain préparé,
une prédisposition, et alors, seulement, la cause morbifique, agis-
sant sur un cerveau en état de moindre résistance, peut faire éclore
la folie ; sans cela, on ne s'expliquerait pas pourquoi parmi tant
d'urémiques, tant de tuberculeux, de cancéreux, de syphiliti-
ques, etc., un si petit nombre est touché par la folie.
Du reste, en lisant les observations de psychoses attribuées aux
diathèses, aux maladies viscérales, aux infections, on est surpris
du polymorphisme symptomatique dont elles s'accompagnent, et
l'on comprend l'hésitation à attribuer à une même cause toxique
des troubles si variés ; c'est qu'à côté du poison, il y a le sujet avec
ses qualités personnelles, ses différents degrés de prédisposition.
On se rend bien compte de ce qui se passe en se reportant à une
intoxication que l'on a malheureusement trop souvent l'occasion
d'observer, l'alcoolisme.
Dans les cas simples que voyons-nous ? Un délire, toujours le
même, fait tout entier d'hallucinations pénibles, multiples, mobiles,
professionnelles ou rappelant les événements d'un jour. Ce délire a
une évolution constante ; il se manifeste d'abord la nuit, puis la nuit
et le jour; les hallucinations disparaissent promptement le jour, se
maintiennent encore quelques nuits et cessent complètement en
moins d'une semaine s'il ne survient pas une cause nouvelle d'exci-
tation. Le délire passe comme un rêve qui ne résiste pas aux réa-
lités du réveil. Mais si tel est l'accès alcoolique chez un sujet
indemne de toute tare héréditaire, que de variétés présentent les
alcoolisés prédisposés ou dégénérés ! Le plus souvent, le délire
SECTION DE PSYCHIATRIE. 239
pendant deux ou trois jours ne diffère pas de l'accès hallucinatoire
simple, mais une fois la bouffée délirante passée, les alcoolisés
prédisposés redeviennent eux-mêmes, c'est-à-dire des sujets avec
des degrés variables de prédisposition et par suite, les troubles
psychiques qui survivent à l'accès peuvent affecter toutes les formes
cliniques depuis la manie et la mélancolie, depuis les délires poly-
morphes les plus touffus jusqu'aux délires les plus étroitement
systématisés, ambitieux, mystiques, de persécution, etc. L'alcool
n'a pas enfanté ces derniers délires mais il a agi comme cause
excitante.
Toutes ces recherches ont l'avantage d'attirer l'attention sur les
troubles somatiques dont s'accompagne la folie, troubles autrefois,
sans doute, un peu trop négligés et cette nouvelle tendance, plei-
nement justifiée d'ailleurs, a provoqué des applications thérapeu-
tiques nombreuses. Non seulement on a puisé plus largement dans
la matière médicale, mais on a donné plus d'extension à certains
modes de traitement, à l'opothérapie, à l'électrothérapie, à la
méthode hypodermiqne et même à l'intervention chirurgicale ! Il
va sans dire que nous sommes encore là à une période de tâton-
nements qui n'est pas sans soulever de nombreuses réserves.
Mais le terrain sur lequel les psychiatres sont d'accord et tendent
aujourd'hui à se rencontrer, c'est la nécessité par la large appli-
cation de divers modes d'assistance, d'assurer une meilleure
hygiène et une protection plus efficace aux aliénés, tout en leur
laissant une plus grande liberté.
Pendant longtemps l'asile, considéré comme le seul instrument
de traitement de la folie, recueillait pêle-mêle tous les aliénés ; peu
à peu et après bien des essais, pour répondre aux-diverses indica-
tions on en était arrivé à une division de l'établissement par quar-
tiers : les cellules, les demi-agités, les tranquilles, les faibles ou
gâteux et l'infirmerie. Des ateliers, des services généraux et quel-
quefois des terrains de culture complétaient cette installation, mais
le soir, toute la population de l'asile devait regagner ses quartiers
enclos de murs, de sauts de loup, de portes avec serrures spéciales.
Tel est, sauf de très rares exceptions, le mode d'assistance géné-
ralement adopté. Une appréciation plus nette de l'état et des be-
soins des aliénés, l'encombrement des asiles, les exigences budgé-
taires ont provoqué depuis quelques années un mouvement d'opi-
nion qui ne tend pas sans doute à la destruction de ce vieil orga-
nisme mais à son rajeunissement et à sa transformation, en même
temps qu'il lui enlève, pour la placer dans des conditions mieux
appropriées, une grande partie de sa population actuelle.
De l'avis presque unanime un premier groupe de malades, les
déments séniles, les déments organiques, les chroniques inoffen-
sifs, principale cause de l'encombrement doivent être distraits de
l'asile et placés dans un milieu mieux approprié à leur état.
HI . CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Pour eux différents modes d'assistance sont préconisés : l'assis-
tance au domicile même du malade, l'hospice-asile, la colonisation
familiale. L'assistance au domicile du malade, serait évidemment
la plus simple mais elle réclame des conditions spéciales réalisa-
bles dans un petit nombre de cas seulement.
L'hospice asile, largement ouvert, plus économique, conviendrait
au groupe de déments dont la santé physique, le gâtisme récla-
ment des soins particuliers plus efficacement donnés par un per-
sonnel expérimenté.
La colonisation familiale répond au plus grand nombre, elle est,
vous le savez, comprise de deux façons : les aliénés sont dispersés
sur une étendue plus ou moins vaste du territoire, dans des loca-
lités éloignées ou au contraire réunies dans la même aggloméra-
tion. Le premier système pratiqué avec succès un Écosse, cons-
titue la primate dwelling sstenz si bien installé par l'ancien et dis-
tingué Commissionc1' in lunacy sir John Sibbald. Le second, orga-
nisé en Belgique à Gheel et à Lierneux et depuis quelques années
en France à Dun-sur-Auron (Cher) et bientôt à Ainay-le-Château
(Allier), groupe les aliénés dans la même localité et les place ainsi
sous la direction immédiate du médecin.
Un hôpital-asile permet à Gheel de recevoir toutes les catégories
de malade et facilite de bonne heure pour le convalescent son
passage à la vie libre, chez le nourricier. Dun-sur-Auron, muni
d'une infirmerie et à proximité de l'asile de Beauregard, reçoit en
dehors des déments quelques chroniques hallucinés et quelques
délirants systématisés que l'on place momentanément à l'infir-
merie ou à l'asile quand viennent à se produire des maladies inci-
dentes ou quelque phase d'excitation.
Un second et un troisième groupe de malades que l'on tend à
détacher de l'asile ou à placer dans des quartiers spéciaux sont
fournis par les épileptiques et les alcoolisés. Pour les premiers, en
raison de leurs attaques, on songe plus volontiers aux colonisa-
tions agricoles avec villas ou bâtiments séparés et à une infirmerie
pour les périodes de crises et les affections incidentes.
Pour les seconds, les alcoolisés, l'absence d'une législation spé-
ciale dans beaucoup de pays, laisse le champ ouvert à la discus-
sion et retarde l'accomplissement des réformes nécessaires. Cette
question d'ailleurs comporte des solutions diverses suivant qu'on
envisage les buveurs d'habitude, les alcoolisés délirants et les
aliénés ou nerveux avec appoint alcoolique. Quelques promoteurs
impatients veulent d'emblée tout régler, législation et assistance,
les autres peut-être plus pratiques demandent à mettre à profit
les bonnes dispositions des administration pour une hospitalisa-
tion plus conforme aux besoins des alcoolisés dont le délire force
la porte des asiles.
Quoi qu'il en soit, l'initiative privée a créé, non sans succès, en
SECTION DE PSYCHIATRIE. 24) 1
Suisse, aux Etats-Unis, en Allemagne, en Angleterre, des maisons
de retraite et de travail pour les buveurs d'habitude et l'on tend,
partout ailleurs, à l'installation de quartiers spéciaux en atten-
dant une organisation plus complète et plus efficace qui pourra
mettre à profit le concours de toutes les bonnes volontés.
Les idiots et les imbéciles ne doivent pas non plus être mainte-
nus à l'asile, il est préférable pour eux d'être réunis dans un
même centre pour y recevoir les soins hygiéniques et le traite-
ment médico-pédagogique dont ils ont besoin. Là encore, l'infir-
merie devra se trouver à côté de l'école et de l'atelier. Ce mode
d'assistance est déjà réalisé dans beaucoup de pays, et Bicêtre
sous l'active initiative de M. Bourneville, nous en présente un très
beau spécimen.
Enfin, un dernier groupe que l'on tend de plus en plus à éloi-
gner de l'asile comprend certains aliénés dits criminels, non point
le paralytique général ou le sujet nettement aliéné qui a commis
un crime ou un délit, mais le dégénéré fou moral pour lequel on
hésite parfois aujourd'hui entre la prison et l'asile; sa présence
parmi les aliénés ordinaires est presque toujours une cause de
trouble, et il ne semble guère possible de différer plus longtemps
l'installation d'un établissement spécial dans le genre de Broad-
moor, avec une réglementation et même une législation particu-
lières.
Après l'élimination de ces différents groupes de pensionnaires,
l'asile resterait avec sa véritable population d'aliénés, les uns
aigus, qui dans beaucoup d'établissements sont aujourd'hui déjà
soumis au traitement par le repos au lit, grave et importante ques-
tion d'alitement indissolublement liée au nO-J'estJ'i11nt dont il n'est,-
en quelque sorte, que la conséquence et la suite, mais que je me
garderai de déflorer puisqu'elle figure à notre ordre du jour, et
pour la solution de laquelle le Comité d'organisation a voulu faire
appel aux lumières du Congrès.
Quoi qu'il en soit, ces malades aigus, alités, hospitalisés, au
bout d'un temps plus ou moins long, donnent des convalescents
en voie de guérison ou des malades plus tranquilles mais encore
délirants. Les premiers, en bonne voie de guérison, dans quelques
établissements, Altz-ScherbiLz, par exemple, quittent le quartier
d'alitement, l'hôpital, pour se rendre à une partie annexe, sorte
de colonie, où ils s'essaient à la liberté en travaillant toutes portes
ouvertes. Les seconds, plus tranquilles, mais non guéris, quittent
aussi l'hôpital mais doivent rester l'objet d'une certaine surveil-
lance et ne peuvent pour la plupart, que très tardivement et après
une longue observation, bénéficier du régime de colonisation. Ces
malades sont en général des délirants systématisés qui désignent
leurs ennemis imaginaires, des persécutés-persécuteurs, des dégé-
nérés obsédés et impulsifs.
Archives, 2' série, t. X. 16
2 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MEDECINE.
Il semblerait donc aujourd'hui que l'asile réduit à ses éléments
essentiels devrait comprendre l'hôpital pour les cas aigus, les
quartiers de surveillance pour les aliénés tranquilles mais dange-
reux, la colonie v portes ouvertes pour les convalescents.
Vous voyez, Messieurs, quels vastes sujets d'étude s'offrent
devant nous, aussi bien au point de vue scientifique qu'au point
de vue de la pratique et des divers modes d'assistance des aliénés;
jamais à aucune époque peut-être, des problèmes aussi importants
et aussi nombreux ne s'étaient posés à l'esprit du psychiatre;
notre Congrès jettera, j'en suis convaincu, de vives lumières sur
quelques-uns, il ne les résoudra pas tous, mais il est permis
d'avoir confiance en l'avenir ; ne sommes-nous pas tous unis dans
une même pensée, ardente et généreuse, faire tous nos efforts
pour l'amélioration du sort des malheureux en proie à la plus
cruelle des infortunes, la perte de la raison ? 2
Quatre questions étaient à l'ordre du jour : 1° Les psychoses de
la puberté. Rapporteurs : i\I1. larro, J. Voisin, Ziehen et Cullerre ;
2° L'alitement dans la folie. Rapporteurs : MM. Neisser, Korsakoff
et More) ; 3° L'anatomie pathologique de l'idiotie. - Rapporteurs :
MM. Shuttleworth, F. Beach, Mierxejewski et Bourneville ; 4° Les
Perversions sexuelles obsédantes et impulsives au point de vue mé-
dico-légal. Rapporteurs : K. Ebing, Morselli, P. Garnier.
Les psychoses de la puberté.
M. le Pr Ziehen (d'Iéna, Allemague). En se basant sur à peu
près quatre cents cas de maladies mentales, dont les premiers
symptômes remontent à la puberté c'est-à-dire l'âge de treize ans
jusqu'à environ vingt et un ans, l'auteur arrive aux conclusions
suivantes :
1° La morbidité mentale offre un de ses maximums à l'âge de
la puberté. La tare héréditaire détermine pour la puberté une
morbidité un peu plus grande. A part la tare héréditaire, ce sont
surtout l'anémie, le surmenage corporel et intellectuel, les mala-
dies infectieuses aiguës et les excès sexuels, qui jouent un rôle
important dans l'étiologie des psychoses de la puberté;
po Presque toutes les psychoses connues se rencontrent aussi
dans la puberté. Une influence spéciale de la puberté se montre
seulement en ce que certaines psychoses prévalent beaucoup et en
ce que souvent - point du tout toujours les psychoses subis-
sent certaines modifications spéciales des symptômes et de la
marche de la maladie. C'est donc par erreur que quelques auteurs
ont parlé d'une psychose de puberté spéciale, qui devrait com-
prendre la majorité des cas de maladie mentale dans la puberté.
La seule psychose de la puberté, qui appartient presque exclusi-
SECTION DE PSYCHIATRIE. 243
vement à la puberté, la démence hébéphrénique ou hébéphrénie
de Kahlbaum, ne fournit qu'un relativement petit nombre de cas
au gros des psychoses de la puberté ;
3° Les psychoses, qui prévalent dans la puberté, sont à part
l'hébéphrénie les suivantes : la folie circulaire, la manie, la
mélancolie, la paranoïa hallucinatoire aiguë (amentia de quelques
auteurs) et les folies hystérique et épileptique ;
4° Les modifications les plus importantes, que la puberté pro-
duit, sont les suivantes : une débilité exagérée des troubles affec-
tifs (« dissociation affective »,, une « discrépance » entre ces
troubles et les réactions mimiques (« paramimie hébéphrénique»),
une certaine incohérence non seulement des idées délirantes mais
aussi des pensées normales, d'autre part une tendance à des sté-
réotypies mimiques, verbales, etc., le caractère illogique, trivial et
fantastique des idées délirantes et enfin la tendance ou à une
marche circulaire ou à une démence progressive. Toutes ces modi-
fications se rencontrent dans quelques psychoses de la puberté
plus souvent que d'autres ;
5° Le pronostic des psychoses de la puberté est, en général, à
cause des modifications mdiquées plus haut, pire que le pronostic
des spychoses post-pubiques ;
6° Le traitement des psychoses de la puberté ne différe en géné-
ral point du traitement des psychoses post-pubiques. Seulement,
un alitement n'est admissible que pour les cas où il y a une exa-
cerbation prononcée.
Conclusions de M. MAMO, second rapporteur :
1° La puberté exerce une influence notable sur la vie psychique,
qui se manifeste soit en donnant aux troubles mentaux préexis-
tants des caractères qu'ils n'avaient pas auparavant, ou qu'ils
avaient à un moindre degré, soit en ouvrant la voie à l'invasion
des psychoses;
2° Parmi les psychoses qui viennent atteindre les garçons et les
filles à l'époque pubère, il y en a une particulière, l'hébéphrénie,
de Hecker, qu'on peut regarder comme spécifique, et dont la spé-
cificité vient d'être déterminée de la réunion de plusieurs carac-
tères qu'elle partage avec d'autres psychoses, mais qui en elle
seule se trouvent réunis ;
3° Les manifestations morbides de cette forme particulière de
psychose, et les altérations constatées dans les examens nécros-
copiques, démontrent que l'écorce cérébrale et les méninges sont
le siège d'un processus morbide anatomique. Les symptômes d'in-
vasion tendent à prouver qu'on peut avec une certaine probabi-
lité en faire dériver la source d'un processus d'auto-intoxication
par des troubles des voies gastriques;
4° De l'époque pubère et de l'exercice précoce et anormal de
'ÏW CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
l'activité génératrice prennent sources d'autres manifestations
morbides, dont l'influence imprime un cachet particnlier au carac-
tère de l'individu, de nature permanente, quoique l'âge et la vie
dans des conditions favorables puissent en effacer l'évidence;
5° La prophylaxie des troubles mentaux exige que l'on prête la
plus grande attention à éviter toutes les causes d'affaiblissement
qui peuvent troubler le développement de l'organisme physique
.et mental dans cette époque si importante de la vie, telles que,
excès de fatigue soit physique, soit intellectuelle, et avant tout le
précoce et anormal exercice de l'activité sexuelle.
Voici maintenant les conclusions du rapport de M. J. Voisin :
1° On doit entendre par psychoses de la puberté les affections
mentales qui se développent dans la période de la puberté, c'est-à-
dire entre 14 et 2 ans. Cette période est caractérisée par la matte-
rité sexuelle et le développement physique et intellectuel de l'in-
dividu ;
2° Toutes les variétés de psychoses peuvent se montrer à cette
époque : l'hébéphrénie comme entité morbide n'existe pas. On
doit réserver le nom d'hébéphrénie aux cas de démence. Les psy-
choses qui se développent au début de l'évolution pubérale sont
moins graves que celles qui se développent dans le cours ou à la
Jin de la puberté. Les premières peuvent être appelées psychoses
de la puberté, tandis que les autres seraient les psychoses de l'ado-
lescence ;
3° La prédisposition héréditaire est la cause prédominante de
ces affections ; c'est l'association du développement intellectuel
incomplet de l'individu avec l'hérédité qui donne à la maladie son
cachet dit hébéphrénique; ,
4° Les psychoses pures, ou plutôt celles qui se rapprochent le
plus des formes pures, présentent des tableaux atypiques, des
formes mixtes qui guérissent dans plus de la moitié des cas;
5° La mélancolie apparaît le plus souvent sous la forme grave
de la stupeur, s'accompagnant d'actes impulsifs, d'obsessions et
d'hallucinations impératives dirigées contre la vie du malade et
de son entourage. On signale en même temps très souvent le
mysticisme et l'onanisme ;
0° La manie se présente rarement sous la forme bénigne , elle
revêt le plus souvent le caractère de la moria et présente aussi
beaucoup d'éléments impulsifs;
7° La démence précoce (hébéphrénie) décrite par Kahlbaum et
Hecker, se présente sous deux formes : une grave et une légère.
La forme grave peut offrir les symptômes de la stupeur, de la dé-
mence, de la catatonie, de la confusion mentale... C'est ce qui
en rend le diagnostic difficile. La forme légère ou démence pré-
coce simple (stigmate de dégénérescence mentale, More]) doit être
, SECTION DE PSYCHIATRIE. 21b
distinguée de la paralysie générale progressive et de la démence
épileptique spasmodique ;
8° La confusion mentale présente un délire de rêve ou délire
onirique, qui a beaucoup d'analogie avec le délire alcoolique. Ce
délire onirique est la caractéristique des psychoses d'auto-intoxi-
cation, et il est presque sûr que les troubles de la nutrition de
l'adolescence sont les causes de ce délire ; ,
La guérison arrive dans la moitié des cas; elle est annoncée
généralement par des crises, sueurs, diarrhées, salivation, mens-
trues, abcès, furoncles, etc., et l'on constate presque toujours de
l'amnésie rétro-antérograde, comme dans les cas de psychoses
polynévritiques;
9° La paralysie générale progressive juvénile se distance de'la
paralysie générale progressive de l'adulte par l'absence d'idées de
grandeurs et de délire ambitieux et par sa marche plus lente.' Un
grand nombre d'auteurs lui assignent comme étiologie la syphilis
héréditaire;
10° Les psychoses dégénératrices et les neuro-psychoses sont les
plus fréquentes; elles reparaissent généralement à l'âge adulte;
11° La médecine légale des psychoses de la puberté est soumise
aux règles ordinaires de la médecine légale des'aliénés ; mais les
cas relatifs à la capacité civile sont écartés, puisque la loi française
ne reconnait pas la capacité civile avant vingt et un ans. 11 n'y
a qu'à considérer les cas concernant la responsabilité criminelle,
qui est fixée à seize ans.
M. Régis (Bordeaux) insiste sur le rôle prépondérant de l'auto-
intoxication dans la genèse d'un grand nombre de cas de folie de
la puberté.
M. MA131LLI, (Le Rochelle) a observé chez des pubères des psy-
choses diverses, sans qu'on puisse affirmer qu'il existe une folie de
la puberté à physionomie clinique spéciale.
M. Tokarski (Moscou) pense que les rapporteurs du Congrès
n'ont pas suffisamment insisté sur certains signes psychiques de
l'hébéphrénie : les attitudes théâtrales, les déclamations pathéti-
ques, etc...
M. TRRNFL (Rouen) insiste sur la difficulté du diagnostic de la
démence précoce à laquelle aboutit généralement l'hébéphrénie. (Il
y a des réserves à faire sur ce point.)
M. 13EDEDl ! {T (Vienne) signale l'importance des abus génésiques
(platoniques ou matériels) dans la production des troubles psy-
chiques de la puberté.
M. Gilbert Ballet (Paris) distingue les psychoses se produisant
pendant la puberté des psychoses de la puberté. Les premières sont
banales. Les autres semblent avoir une physionomie clinique se
246 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
rapprochant de celle qui a été décrite par Kalbaum. Quant à la
pathogénie, il faut la chercher dans les antécédents héréditaires et
persounels du sujet. Au terme de : folie pubérale, l'orateur préfère
celui de « folie de l'adolescence ». (C'est sous ce titre que nous
avons publié récemment une observation intéressante dans les
Archives de Neurologie. Nous avons revu la jeune fille il y a quel-
ques jours, la guérison se maintient.)
Pronostic éloigné des psychoses de la puberté .
M. le Dr A. CULLERRE (La Roche-sur-Yon) a réuni 120 observations
de psychoses de la puberté chez des sujets de quinze à dix-huit ans
(53 garçons, 57 filles), qui peuvent se classer au point de vue de
l'évolution, en six groupes : .'
1° Morts dans le cours du premier accès, 3 cas ; 2° Démences pré-
coces, 33 cas. La démence précoce s'est produite chez 18, dès le
premier accès ; chez 9, dès le second ; chez 2 à la suite du troi-
sième. Dans 4 cas, l'accès a dégénéré en folie systématisée secon-
daire avec affaiblissement mental ; 3° Folies périodiques, 20 cas.
Toutes les formes y sont représentées; 4° Récidives à échéances
variables, 25 cas. Ces récidives sont le plus souvent bénignes et
espacées. C'est le groupe le plus favorable au point de vue du pro-
nostic éloigné; 5° Folies avec conscience (obsessions et impulsions)
9 cas. La folie avec conscience dure en général la vie entière;
6° Malades perdus de vue après le premier accès, 30 cas. L'aspect
clinique du premier cas observé permet de les confondre, au point
de vue du pronostic éloigné avec les sujets des groupes précé-
dents.
En résumé, les faits précédents tendent à établir que : si le pro-
nostic de l'accès dans la folie de la puberté, est favorable dans
l'énorme proportion de 79 p. 100, le pronostic éloigné de la mala-
die est des plus sombres. L'individu qui guérit de cette sorte de
psychose est voué pour l'avenir aux récidives, à la démence pré-
coce, aux folies périodiques, aux retours agressifs de la folie des
obsessions. Le sort le moins triste qui puisse lui échoir est de voir
ses inévitables rechutes réduites à un petit nombre et largement
espacées au cours de son existence, avec de longues périodes in-
tercalaires de santé psychique plus on moins normale.
M. Pons (Bordeaux) fait une communication sur la statistique
des psychoses de la puberté à l'asile des aliénés de Bordeaux dont
il est le médecin en chef.
Séance du vendredi suir.
Cette séance a été consacrée à des communications diverses.
Notons d'abord celles de M. Ladislas Haskovec, privat docent de
SECTION DE PSYCHIATRIE. 247
neuropathologie à Prague intitulée : Contribution à l'étude des
idées obsédantes; - et de M. HuGuEs (de Saint-Louis, Etats-Unis).
Sur l'évolution de la folie du doute.
Sur la nature de l'hystérie.
M. OsKAR VOGT (Berlin). - L'hystérie n'est qu'un syndrome et
les divers troubles hystériques se rencontrent soit seuls soit asso-
ciés à des stigmates non hystériques de dégénérescence ou de ner-
vosisme acquis.
Dans tous les cas d'hystérie étudiés par moi, j'ai trouvé que des
phénomènes psychiques prenaient part à la genèse des troubles
observés. Ces phénomènes psychiques sont surtout les émotions.
Les formes pathologiques de la rougeur émotive; par P. HARTENBERG,
de Paris.
La rougeur émotive, réaction émotionnelle, caractérisée par une
vaso-dilalation cutanée marquée surtout au visage et ne survenant
qu'en présence de la personne humaine, se rapproche normalement
de la pudeur et de la honte.
Elle peut donner lieu à des troubles morbides de trois degrés.
Au premier degré, c'est une simple exagération du phénomène
vaso-moteur, dont l'intensité est disproportionnée avec les circons-
tances où il se produit. Elle représente une sorte de dermatose
émotive intermittente, à laquelle on pourrait donner le nom de
maladie de la rougeur ou éreulhopalhie.
Au deuxième degré, la rougeur se complique de peur anxieuse. Le
malade s'affecte de son infirmité en redoute le retour, fuit la société
où elle se produit. Une phobie se constitue, l'éneztthophobie, qui se
traduit par des crises aiguës paroxystiques.
Au troisième degré la peur est devenue chronique. Le malade
pense sans cesse à sa rougeur : elle devient une idée fixe autour
de laquelle s'oriente toute sa vie mentale et affective. C'est l'obses-
sion de la rougeur.
L'analyse psychologique montre que la phobie et l'obsession de la
rougeur sont constituées par deux phénomènes émotionnels combinés :
l'émocioaz de la rougeur, l'émotion de la peur. La première a provoqué
la seconde dans le premier stade de l'affection, puis dans le
deuxième stade, la peur provoque la rougeur par un mécanisme
semblable à celui d'une impulsion irrésistible. Toutefois l'élément
important de la phobie est l'émotion anxieuse de la peur, liée à l'émo-
tivité constitutionnelle du sujet, qui se fixe sur la rougeur pour en
faire l'objet d'une phobie dont elle fournit la matière. Cette émoti-
vité relève le plus souvent de la dégénérescence héréditaire ou acquise.
C'est ce que montrent les cas rapportés comme exemples, où l'on
voit la rougeur ne s'accompagner d'aucune complication phobique
248 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
et rester à l'état de maladie simple de la rougeur chez un sujet
normal, tandis qu'elle donne lieu tantôt à la phobie, tantôt à
l'obsession de la rougeur suivant que les tares dégénératives des
malades sont plus ou moins accentuées.
La vraie cause de la paralysie progressive.
M. le professeur WLADLI1lR Tscmscll (Faculté de Dorpat). 1° La
vraie et seule cause de la paralysie générale progressive, c'est la
syphilis non traitée ou négligée. Des observations soigneusement
recueillies prouvent que tous les paralytiques ne se faisaient pas
traiter pour la syphilis ou bien qu'ils ne se faisaient pas assez
traiter; 2° Les syphilitiques qui se faisaient traiter longtemps et
soigneusement n'ont pas été atteints de la paralysie générale;
3° L'hérédité pathologique et la dégénérescence ne jouent aucun
rôle dans l'étiologie de la paralysie générale; 4° Les personnes qui
ont de visibles stigmates de dégénérescence, physiques et psychi-
ques, ne sont atteintes que très rarement de la paralysie progres-
sive ou de la syphilis cérébrale. ,
M. WAHL. - La prédisposition héréditaire joue un grand rôle
dans l'étiologie de la paralysie générale.
M. GREIDENllEIIG. - La syphilis ne peut être considérée comme
la seule cause de la paralysie générale.
- M. LALANNE. - A la maison de santé à laquelle je suis attaché,
il n'y a eu que quatre femmes paralytiques générales et qui toutes
les quatre étaient syphilitiques.
Sur l'origine onirique de certains délires dans la paralysie
générale.
MM. Régis et LALANNE. - Le délire onirique dans la paralysie
générale, tel qu'il résulte au moins de nos quelques observations,
n'a pas tout à fait les mêmes caractères que dans les intoxications
aiguës. Il est moins hallucinatoire, moins intimement lié à la per-
sonnalité du sujet.
Fractures spontanées dans la paralysie générale.
M. LALANNE. De même que dans le tabes, la lracture sponta-
née a pu se montrer comme premier symptôme à la période pré-
tabétique, de même elle peut exister à la période préparalytique
comme première et unique manifestation de la paralysie générale.
L'auteur rapporte quatre cas à l'appui de cette thèse.
Une méthode de traitement de certaines phobies ; par P. HARTENBERG,
de Paris.
M. Hartenberg expose la méthode de traitement qui lui a donné
SECTION DE PSYCHIATRIE 2 M
les meilleurs résultats contre les phobies inhibitoires, c'est-à-dire
contre ces peurs qui ont pour objet un acte volontaire et dont
l'effet est de contrarier ou d'empêcher l'exécution de cet acte.
Le traitement se divise en deux périodes. La première période,
d'une durée de une semaine à un mois et plus, est consacrée à
une thérapeutique générale du système nerveux. Traitement de
l'affection générale (artério-sclérose, bradytrophie, etc.) ou locale
(estomac, foie, organes génitaux, etc.); s'il y en a, régime alimen-
taire sévère, hydrothérapie sous forme de lotions et de bains,
électricité statique ou faradique, comme unique médicament.
l'opium, et enfin vie de repos, et au besoin séjour au lit, telles sont t
les principales pratiques de cette période, au bout de laquelle on
assure au malade, que son état nerveux général, qui constitue
l'élément important, étant guéri, la phobie, qui n'est que secon-
daire, aura disparu d'elle-même. De cette phobie, on n'en parle
jamais au malade, on évite qu'il en soit parlé devant lui, on écarte
de lui tout ce qui pourrait la lui rappeler.
Durant la seconde période, le rôle du médecin consiste à faire
accomplir au malade, sous sa direction, des exercices d'accoutu-
mancie à la phobie. Il l'accompagne dans le lieu et dans les condi-
tions où la peur se déchaîne ; et par des stimulations persévérantes
l'oblige à faire, malgré l'émotion, l'acte redouté. Les premières
épreuves, reprises chaque jour, sont en général difficiles et péni-
bles ; mais au bout de quelques séances, l'appréhension et l'inhibi-
tion diminuent en même temps que reviennent la confiance et
l'espoir. Au bout d'une dizaine de jours, le patient est souvent
capable d'affronter la peur tout seul et il n'est pas rare qu'au
bout de deux semaines il soit guéri au point d'accomplir l'acte
redouté sans trace d'émotion. Pendant toute cette seconde période
de même que pendant la première, il n'est jamais parlé de la
phobie dans l'intervalle des exercices.
Cette méthode présente deux grands avantages. Le premier,
c'est que le traitement s'attaque, non à l'idée de la phobie, mais à
l'émotion de la phobie, qui en constitue l'élément prépondérant. La
tactique ne consiste pas à empêcher d'avauce par des paroles ras-
surantes, la production de la peur, mais à combattre les effets-
morbides de cette peur, l'inhibition et la retraite du malade, au
moment même où elle se déchaîne. Il faut que la maladie agisse
malgré sa crainte. Et c'est chose étonnante comme l'émotion cède
vite à l'accoutumance ; chaque essai qui réussit contribue à rendre
au malade confiance et espoir. C'est donc en réalité dans la
seconde période que commence véritablement le traitement de la
phobie. Mais ce traitement a lieu à l'insu du malade.
Et tel est le second avantage de la méthode : c'est qu'on combat la
peur sans en parler. Loin d'attirer l'attention sur son objet, on l'en
détourne au contraire et on s'oppose ainsi àla tendance à l'obsession.
250 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
En revanche, la méthode présente l'inconvénient d'obliger le
médecin à des déplacements souvent incommodes pour suivre le
malade sur le terrain de sa phobie (voiture, chemin de fer, bateau
chant, etc.). Néanmoins, quand les autres moyens auront échoué.
il sera indiqué de recourir à cette méthode, qui semble être le
procédé de choix dans-le traitement des phobies inhibitoires.
Sur la période terminale de la paralysie générale et sur la mort
des paralytiques généraux.
M. L. ARNAUD (Vanves). D'après mes observations, beaucoup
de paralytiques parcourent toutes les phases de leur maladie sans
devenir impotents, sans avoir d'eschares, et meurent debout, c'est-
à-dire sans avoir jamais été confinés au lit, ayant gardé jusqu'à la
fin la possibilité d'aller et de venir sans appui. M. Arnaud apporte,
à l'appui, 47 observations personnelles de paralytiques suivis jus-
qu'à la mort. Sur ce nombre, neuf ayant été emportés prématuré-
ment par une affection intercurrente, ne peuvent entrer en ligne
de compte, on ne sait pas s'ils seraient ou non devenus impotents.
Les 38 restants donnent 19 malades ayant traversé la période d'im-
potence, et 19 également qui sont morts debout. D'où cette pre-
mière conclusion que la description classique répond tout au plus
à la moitié des cas. ,
Les malades qui deviennent impotents présentent tous des symp-
tômes spasmodiques, des contractures, qui sont la vraie cause de
la gêne des mouvements. Ceux qui meurent debout ne présentent
pas ces phénomènes spasmodiques. La période terminale de la
paralysie générale présente donc deux variétés cliniques : l'une
avec contractures et impotence, d'aulres sans contractures et sans
impotence.
En ce qui concerne la cause de la mort, les faits rapportés se
divisent en trois groupes : Le premier, celui des sujets morts dans
le marasme, comprend seulement deux cas. Le second, avec neuf
cas, est celui des malades qui ont succombé à une affection étran-
gère à la paralysie générale. Le troisième renferme les malades
emportés par un ictus cérébral, et il compte 36 cas.
La conclusion qui découle de ces faits est que, contrairement à
la doctrine classique, l'ictus cérébral n'est pas une complication
de la paralysie générale, mais bien un symptôme intrinsèque; il en
est de plus la terminaison normale et la plus fréquente.
Sur la névrose d'angoisse; par P. Hartenberg, de Paris.
Eu 1895, Freud, de Vienne, proposait de considérer comme une
affection autonome et distincte de la neurasthénie sous le nom de
névrose d'angoisse (angstneurose) un syndrome caractérisé par :
a, l'irritabilité générale ; b, un étal chronique d'attente anxieuse;
SECTION DE PSYCHIATRIE. 251
c, des crises d'angoisse paroxystique ou des équivalents de crises ;
d, des phobies et des obsessions.
Cette affection, tout en pouvant reconnaître d'autres causes,
telles que la dégénérescence, le surmenage, etc. ; aurait surtout
une origine sexuelle et se produirait chaque fois qu'il y a chez
l'homme ou chez la femme surexcitation sexuelle inapaisée.
Pour séparer la névrose d'angoisse de la neurasthénie, Freud
s'appuie sur deux ordres de motifs : les conditions étiologiques,
les symptômes cliniques.
En ce. qui concerne les conditions étiologiques, il semble qu'on
doive réserver son jugement, car Freud attribue une origine
sexuelle à toutes les névroses, hystérie, neurasthénie, et ce serait
suivant lui la qualité de l'irrégularité sexuelle qui donnerait sa
forme à la névrose. Cette théorie générale n'étant pas encore ad-
mise, on n'en saurait tirer un argument pour ou contre la névrose
d'angoisse.
En revanche les symptômes cliniques se rencontrent, en pratique,
tels que les a décrits Freud, avec une exactitude frappante, chez
des malades qui ne présentent, d'autre part, aucun des stigmates
de la neurasthénie, type Beard-Charcot. Toutefois on les rencontre
aussi associés à la neurasthénie, et ils ont été décrits plus ou
moins fidèlement sous le nom d'états anxieux neurasthéniques :
et quand ces états d'anxiété dominent chez un malade, on pro-
nonce volontiers le terme de neurasthénie anxieuse.
Or, pour séparer la névrose d'angoisse de la neurasthénie, on
doit se demander : 1° Si cette distinction est légitime ; 2° si elle est
utile.
1° Elle paraît légitime, car quiconque a observé et suivi un cas
de névrose d'angoisse, ne saurait douter que le tableau et la
marche cliniques diffèrent absolument de la neurasthénie à stig-
mates classiques. Une forme pure de névrose d'angoisse n'a rien
de commun avec une forme pure de neurasthénie dépressive ;
2° Elle paraît utile, car le terme de neurasthénie, de l'avis de
tous les auteurs, par l'extrême extension qu'on lui a donnée, a
perdu beaucoup de son exactitude et de sa précision. Il serait bon
de posséder un nom pour qualifier cette forme de névropathie, où
la dépression est absente, mais où l'angoisse domine, chronique
et paroxystique, et qui constitue le terrain d'éclosion le plus favo-
rable des phobies et des obsessions.
L'analyse des symptômes montre que la névrose d'angoisse est
faite presque exclusivement de désordres vasculaires et organiques
dépendant de l'innervation sympathique : en conséquence, on
pourrait en faire une névrose par faiblesse irritable du sympathique,
en opposition avec la neurasthénie classique, représentant la fai-
blesse irritable du système cérébro-spinal. Il en est ainsi pour les
formes pures. Mais dans la pratique, comme les causes morbides
252 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE. '
atteignent souvent à la fois le système cérébro-spinal et le sympa-
thique, les symptômes des deux névroses se trouvent réimis-clinique-
ment, comme se rencontrent d'ailleurs associées la neurasthénie
et l'hystérie.
Paralysie générale progressive chez un sujet ayant présenté dix-huit
ans auparavant du délire de persécution. Analgésies cutanées et
viscérales profondes. Intégrité de la moelle.
MM. JOFFROY et Gombault (Paris) rapportent l'histoire d'un ancien
délirant persécuté devenu paralytique général avec troubles pupil-
laires caractéristiques, embarras de la parole, etc. Il succomba à
un érysipèle de la face.
A l'autopsie, on constate que la pie-mère est épaissie sur toute
la surface externe du cerveau. La décortication des circonvolutions
frontales ne peut se faire, quelque soin qu'on y mette, sans entrai-
ner de véritables lambeaux de substance grise adhérant à la face
interne de la pie-mère. 11 en est ainsi sur tout le lobe frontal, sur
le lobe temporal, ainsi qu'au niveau des lobes orbitaires, et â
la partie antérieure de la face interne de l'hémisphère cérébral.
L'examen histologique démontra que les lésions des méninges
et de l'écorce cérébrale sont généralisées, mais beaucoup plus pro-
noncées au niveau du lobe frontal et dans les circonvolutions qui
avoisinent le sillon de Holando. La pie-mère cérébrale est formée
par un lacis serré de fascicules fibrillaires. Toutes les variétés de
cellules sont présentes et les pyramidales géantes forment dans les
circonvolutions motrices des amas assez nombreux et bien fournis.
On doit noter cependant le gros volume de l'amas pigmentaire
dans la plupart des cellules, et la diminution des grains chroma-
tiques dans les pyramidales grandes et géantes. La moelle est
indemne aussi bien dans sa substance blanche que dans sa subs-
tance grise, et en particulier les faisceaux postérieurs sont aussi
richement pourvus de fibres à myéline que dans une moelle nor-
male. Les racines antérieures et postérieures sont saines.
M. LALANNE a eu l'occasion d'observer un paralytique général,
ancien dégénéré avec deux accès vésaniques antérieurs. Entre les
deux accès de folie, son malade contracta la syphilis.
(.1 suivre.)
Section de Neurologie.
Le jeudi 2 août, à neuf heures du matin, par conséquent avant
rAssemblée générale d'inauguration, la Section de Neurologie a
inauguré ses travaux. M. le professeur F. RAYMOND, président du
Comité d'organisation, assisté de MM. les professeurs ,Brissaud,
SECTION DE NEUROLOGIE. 2a3 il,
Grasset, A. Joffroy, Pitres et de MM. les Drs Déjerine et P. Marie, a
ouvert la séance et prononcé le discours suivant :
Messieurs,
Comme Président du Comité d'organisation de la section de
Neuropathologie du Congrès international de médecine de Paris,
j'ai l'honneur et le plaisir, au nom de mes Collègues et au mien,
de vous souhaiter la bienvenue. Nous sommes très heureux de
vous recevoir, et nous vous exprimons notre commune reconnais-
sance d'avoir répondu, en si grand nombre, à notre appel.
Messieurs,
La grande solennité qui réunit, dans la Capitale de la France,
(Cliché Piroa.
M. le Pr RAYMOND,
Président de la section de Neurologie.
2 S il . CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE !
les plus illustres représentants de la science contemporaine, mar-
quera une date dans l'histoire de l'humanité. Elle clôt le siècle qui
est à la veille de finir et qui a été si fécond en découvertes scienti-
fiques de tout, ordre; la médecine en a recueilli sa très large part.
Pour ce qui concerne notamment la branche des sciences médica-
les, qui constitue notre spécialité, elle a pris un essort vraiment
prodigieux dans le cours des cent dernières années. Avant de pro-
céder à l'élection du bureau définitif et de donner la parole à
Monsieur le Secrétaire général du Congrès, je voudrais vous
remettre en mémoire, dans une rapide revue rétrospective, les
principaux jalons qui répèrent l'évolution et les progrès de la neu-
rologie au xixe siècle. Je serai aussi bref que possible, afin de ne
point abuser de votre bienveillante attention. '
Messieurs, depuis une vingtaine d'années, l'activité intellectuelle
d'une élite de biologistes s'est concentrée sur ce vaste domaine qui
embrasse l'anatomie, la physiologie et la pathologie du système
nerveux. A ne considérer que l'étude des maladies nerveuses, nous
la voyons occuper, au milieu des autres branches de la patho-
logie, une place incontestablement prépondérante, et elle est par-
venue à un état d'avancement tout à fait remarquable. Il y a un
siècle, elle se mouvait dans un vrai chaos, n'ayant pour guide que
des conceptions doctrinales sans base objective, reflets des théories
médicales du jour.
En pouvait-il être autrement à une époque où la structure et
l'agencement intime des centres nerveux étaient à l'état de lettres
mortes pour 1(.s anatomistes, et où les idées qu'on se faisait de
leur rôle se réduisaient à des notions vagues, pour la plupart
erronées.
De l'encéphale, on ne connaissait que l'anatomie grossière.
La moelle était considérée comme un prolongement du cerveau,
quelque chose comme un gros nerf, plus volumineux que les
autres.
Les origines de tous les nerfs étaient placées dans le ce ! veau.
La présence de fibres, dans cet organe, était méconnue ou niée. On
ignorait l'existence des cellules nerveuses.
Les représentants officiels de l'enseignement de l'anatomie en
étaient encore à décrire les nerfs comme des vaisseaux sanguins
de la membrane pie-mérienne, transformés successivement en
substance corticale et en substance médullaire.
Il n'y a donc pas lieu de s'étonner que la pathologie de l'encé-
phale fût bornée à l'étude de lesions grossières ou à de simples
apparences auxquelles on attribuait une importance démesurée :
hydrocéphalie, hémorragie, atrophie, hypertrophie, induration,
ramollissement, encéphalite, tels sont les termes autour desquels
ont pivoté les discussions et les classifications relatives à la patho-
SECTION DE NEUROLOGIE, 255 Il
logie de l'encéphale, pendant la plus grande partie de la première
moitié de ce siècle.
Quant à la pathologie spinale, jusque vers les trente dernières
années, une grande partie de ses cadres était encombrée par les
névroses ou par des affections prétendues telles : épilepsie. chorée,
tétanos, rage, etc.; le reste embrassait l'étude des lésions trauma-
tiques, des vices de conformation, des congestions, de l'inflamma-
tion, des productions morbides de la moelle et de ses enveloppes,
de l'atrophie et de l'induration du névraxe.
Cependant, dès les premières années de ce siècle, à une époque
où, je vous le répète, la plupart des anatomistes niaient la pré-
sence de fibres dans les centres nerveux, Gall et Spurzheim affir-
maient catégoriquement leur existence. Ils affirmaient que tous les
nerfs prennent leur origine dans la substance grise. Ils soutenaient
que la moelle n'est pas un simple prolongement du cerveau, com-
parable à un gros nerf, mais quelque chose comme un amas de
centres, équivalents ou complémentaires de la masse encéphalique.
En outre, ils cherchaient à faire prévaloir une thèse qui contenait
comme un germe de la doctrine des localisations; ils la formu-
laient ainsi : « L'ensemble des nerfs se contpose de plusieurs sus-
tèmes particuliers ; ces systèmes diffèrent entre eux aussi bien dans
leur structure intime que dans leurs fonctions respectives; les fonc-
tions ou facultés sont en raison directe du développement des organes
auxquels elles sont affectées; il y a, entre les divers appareils, plus ou
moins de connexion, et par conséquent d'influence réciproque ; le cer-
veau se compose d'autant de systèmes particuliers qu'il exerce de fonc-
tions distinctes, etc.. »
A vrai dire, c'étaient là de simples vues de l'esprit. Près d'un
quart de siècle se passa, avant qu'elles ne trouvassent un commen-
cement de confirmation, à la suite des expériences de Bell, de
Magendie. En nous révélant les différences de fonctions des racines
antérieures, des racines postérieures et des faisceaux blancs dont
se compose la moelle, les travaux de ces deux illustres physiolo-
gistes fondaient, sur des bases objectives, les premières assises de
la systématisatiou de l'axe spinal. A l'époque dont je parle, on
entrevoyait déjà, dans la moelle, un centre immédiat de mouve-
ments, mais on s'occupait surtout de son rôle de conducteur.
Désormais, on allait distinguer les parties qui, dans le nevraxe,
servent à la transmission de la sensibilité et les parties qui servent
à la transmission des impulsions motrices.
Cette manière d'envisager l'organisation et le fonctionnement de
la moelle se reflète dans les traités de pathologie nerveuse de
l'époque. L'anatomie pathologique n'avait guère progressé jusque-
250 C) CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
là et pour cause. Aussi, s'attachait-on principalement à l'étude des
troubles fonctionnels qui figurent dans la symptomatologie des
maladies du système nerveux. Indépendamment des maladies ner-
veuses proprement dites - et comme telles, on décrivait surtout
des névroses on se mit à étudier, dans autant de chapitres spé-
ciaux, les troubles delà sensibilité : anesthésies, hype ? 'esthésies;
- les troubles delamotilité : paralysies, contractures et spasmes
en les considérant suivant leur siège réel ou présumé. La systé-
matisation n'allait pas plus loin, dans le domaine de la pathologie
nerveuse; n'empêche qu'elle s'affirmait, d'une façon très catégo-
rique, dans les classifications adoptées pour l'étude des maladies
de la moelle.
Vers 1830, la conception,. par trop vague, qu'avaient Gall et
Spürzheim, de l'origine des nerfs et de leurs fibres, s'éclaira d'une
lueur nouvelle, grâce à la découverte des cellules nerveuses, dont
l'honneur revient à Ehrenberg, à Valentin, à Pürkiiije. Elle sortit
de son état informe et prit corps dix ans plus tard. A cette date,
Hannover proclama, catégoriquement, que toutes les fibres du cer-
veau naissent des cellules nerveuses. Entre temps, Virchow nous
avait révélé l'existence d'une trame interstitielle dans les centres
nerveux, l'existence de la névroglie, déjà entrevue par Cruveilhier.
Désormais, les histologistes allaient avoir devant eux, un terrain
admirablement préparé pour le succès de leurs investigations
futures. Un programme bien défini s'imposait à leurs recherches.
Il s'agissait de déchiffrer l'agencement intime des cellules ner-
veuses, des fibres nerveuses et de la névroglie; de démêler l'enche-
vêtrement, en apparence inextricable, des appareils qui composent
les centres nerveux et qui président, pour ainsi dire, à toutes les
manifestations de la vie.
Les travaux de Stilling et de Wallach marquent une première
étape, très fructueuse, franchie dans cette voie de recherches. Dès
le commencement de la seconde moitié de ce siècle, la structure
intime du cerveau et de la moelle nous était connue dans ses traits
essentiels. De cette même époque (1854) date la loi qui a régi, jus-
qu'à ces derniers temps, notre conception de l'organisation intime
des centres nerveux ; elle subsiste encore en grande partie. Wa-
gner l'avait formulée en ces termes : le cerveau et la moelle se
réduisent à des agglomérations considérables de cellules multipo-
laires et de fibres primitives, celles-ci ne communiquant entre elles
que par l'intermédiaire des cellules. Tous les phénomènes d'inner-
vation reposent sur l'union des cellules isolées ou des agrégats de
cellules avec d'autres cellules et avec les fibres centrales et péri-
phériques.
Un peu plus tard, les travaux de Deiters nous valurent les pre-
mières données précises, relatives à la 'structure des éléments cel-
SECTION DE NEUROLOGIE. 257 Î
lulaires des centres nerveux. Gerlach objectivisait'cettè couceptiou
des rapports anatomiques des cellules et des fibres nerveuses. Il
édifiait sa doctrine de l'agencement réticulé des fibrilles qui
étaient censées unir entre elles les cellules nerveuses. La doctrine
du réseau de Gerlach a régné, sans opposition, jusqu'à l'avène-
ment de la doctrine du neurone, et elle compte encore des adeptes
qui poursuivent sa restauration.
Enfin, au cours de cette même période, Waller nous révélait
l'existence des centres trophiques, des centres qui tiennent sous leur
dépendauce la nutrition des nerfs moteurs et des nerfs sensitifs et
il nous initiait aux lois des dégénérescences secondaires.
Messieurs, la répercussion de ces découvertes, sur l'évolution de
la pathologie spinale, fut énorme ; elle aboutit à une rénovation
de cette branche de la pathologie nerveuse. Une fois en possession
de cette donnée fondamentale que les centres nerveux se composent
d'éléments parenchymateux, cellules et fibres, soutenus par une
trame interstitielle, on appliqua, à la pathologie nerveuse, les
mêmes principes qui ont cours dans les autres branches de la
pathologie. On se mit à distinguer des lésions parenchymateuses
et des lésions interstitielles. L'induration grise devint la sclérose,
l'hyperplasie du tissu interstitielle.
Dès 1853, à une époque où il avait déjà inauguré l'étude des
dégénérescences secondaires, rattachées ensuite aux scléroses,
Tùrck décrivait une sclérose primitive des cordons latéraux; on a
prétendu en faire le substratum du tabes spasmodique.
Un peu plus tard, Tùrck nous révélait l'existence d'une sclérose
des cordons postérieurs dans les cas de tabes dorsalis ; la sympto-
matologie de cette affection nous était déjà connue, en partie,
grâce aux travaux de Horn, de Vunderlich, de Romberg.
En 1863, Friedreich découvrait l'existence d'une sclérose des coi,-
dons postérieurs, d'origine héréditaire ; d'abord, on en fit la forme
héréditaire du tabes dorsalis, de l'ataxie locomotrice de Duchenne.
Aujourd'hui, la maladie de Friedreich est classée dans les scléroses
systématiques combinées.
Vers la même époque, les travaux de Rindfleisch, de Leyden,
de Zencker, nous révélaient l'existence d'une sclérose qui envahit
les centres nerveux sous la forme d'îlots disséminés; les recherches
cliniques de Charcot et Vulpian nous apprenaient à distinguer cette
sclérose en plaques de la paralysie agitante, de la maladie de Par-
kinson, jusque-là confondue avec elle. ,
A côté des scléroses, un autre groupe d'affections médullaires
était en train de faire son avènement : je veux parler des amyotro-
phies spinales, des amyotrophies symptomatiques d'une lésion des
centres trophiques du névraxe.
ARCHIVES, 2. série, t. X. 17 î
211;8 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MEDECINE.
Dès 183, Cruveilhier avait constaté l'existence d'une atrophie
des racines antérieures de la moelle, dans un cas d'atrophie mus-
culaire progressive. Guidé par cette remarquable intuition, qui lui
a fait entrevoir tant de découvertes futures, il avait conclu que le
point de départ de l'atrophie des racines antérieures devait être
cherché dans la moelle. En 1860, Luys fut plus affirmatif. Il
avança que la dégénération des cellules des cornes antérieures de-
la moelle constituait la lésion anatomique principale de l'atrophie
musculaire progressive. A peu d'années de distance, les recherches
de Clarke, de Charcot, de Joffroy et de Hayem nous ont fourni les
preuves matérielles de l'existence d'une forme d'atrophie muscu-
laire progressive, en rapport avec une lésion des cellules tropho-
motrices des cornes antérieures de la moelle.
Au cours de cette même période, une origine analogue fut recon-
nue à la paralysie infantile. Déjà précédemment, Heine et Duchenne
avaient été conduits, par voie de simple raisonnement, à placer le
siège de cette maladie dans la moelle. De par les observations de
Cornil, de Prévost et Vulpian, de Clarke, de Charcot et Joffroy, il
fut démontré que la paralysie spinale infantile avait pour substra-
tum une atrophie aiguë des cellules tropho-motrices des cornes
antérieures.
Dans l'intervalle, l'étude des dégénérescences secondaires, qu'on
voit survenir dans la moelle, avait été amenée à un point d'avan-
cement qui n'a guère été dépassé, grâce surtout aux remarquables
travaux de Bouchard. Entre autres notions de pathogénie, il s'en
était dégagé celle qui suppose un rapport de causalité entre le
symptôme contracture et la sclérose d'une partie des cordons laté-
raux, de celle qui est devenue le faisceau pyramidal croisé.
Charcot nous fit ensuite connaître la sclérose latérale amyolro-
phique, qui établissait comme un trait d'union entre les scléroses
systématiques et les amyotrophies spinales. En effet, sa sympto-
matologie se résume dans ces deux éléments : contracture, atro-
phie musculaire, et elle a pour substratum fondamental une sclé-
rose des cordons latéraux, associée à une atrophie des cellules
tropho-motrices des cornes antérieures.
Cette succession de découvertes embrasse une période de vingt
années à peine. Au sortir de cette période, les cadres de la patho-
logie médullaire se trouvaient constitués dans leurs grandes lignes,
tels que nous les voyons encore aujourd'hui.
La moelle nous apparaissait définitivement comme un assem-
blage de centres gris et de conducteurs blancs, juxtaposés ou im-
briqués les uns dans les autres, formant autant de systèmes ana-
tomo-physiologiques distincts, la lésion isolée de chacun d'eux se
traduisant par des manifestations différentes et pour ainsi dire
spécifiques. Aux affections diffuses, tellesque )a myélite, la méninpo-
SECTION DE NEUROLOGIE. 259
myélite, on se mit à opposer les affections dont le substratum se
localise dans un ou plusieurs de ces systèmes. Ainsi prit corps la
doctrine des affections systématiques de la moelle.
Une semblable conception de l'organisation architecturale et
fonctionnelle du névraxe spinal formait un singulier contraste avec
celle qu'on avait encore de l'organisation fonctionnelle des hémis-
phères cérébraux. A l'époque dont je vous parle, le dogme erroné
de l'homogénéité fonctionnelle du cerveau,' consacré par les recher-
ches expérimentales de Flourens, était accepté presque sans con-
teste. Il barrait la route à l'initiative de ceux, psychologistes, phy-
siologistes ou cliniciens, qui soupçonnaient au cerveau une organi-
sation analogue à celle que l'on connaissait déjà à la moelle. La
doctrine des localisations cérébrales était encore dans les limbes.
Toutefois, ceux qui devaient l'en tirer et assurer son triomphe
comptaient déjà des précurseurs, qui avaient préparé les voies à
son avènement. Les recherches de Bouillaud, de Dax, de Broca
avaient abouti à la découverte du centre du langage articulé.
Tûrck, tout en commettant une erreur de topographie, avait en-
trevu l'existence, dans le cerveau, de deux territoires dont la lésion
engendre, pour l'un, une hémianesthésie, pour l'autre, une hémi-
plégie motrice du côté opposé.
Hughlings-Jackson avait reconnu les rapports de l'épilepsie uni-
latérale avec des lésions de l'écorce grise, cantonnées dans une
région circonscrite de l'hémisphère du côté opposé ; il avait conclu
il la nécessité de localiser dans cette région les centres moteurs des
différents groupes de muscles. Mais tout cela n'avait pas-ébréché
d'une façon bien ostensible le dogme de Flourens. On n'en consi-
dérait pas moins les hémisphères cérébraux comme une masse de
substance nerveuse, homogène au point de vue fonctionnel. On se
représentait toujours l'affaiblissement de leurs fonctions comme
adéquat à la quantité de substance cérébrale, détruite ou anni-
hilée.
En 487U, une découverte sensationnelle vint préluder à l'effon-
drement de la doctrine de Flourens. L'excitabilité d'une partie de
l'écorce grise des hémisphères par le courant électrique, mécon-
nue jusqu'alors, nous fut dévoilée par les expériences de Fritsch
et de Hitzig. Cette mémorable révélation, corroborée et complétée
par les expériences de Ferrier et d'autres physiologistes, donna le
branle aux recherches convergentes des physiologistes, des anato-
mistes et des cliniciens ; leur but commun était de démontrer que
les hémisphères cérébraux se décomposent en territoires aux fonc-
tions très différentes et que la lésion isolée de chacun de ces terri-
toires se révèle par des troubles particuliers et caractéristiques.
La méthode anatomo-chimique, créée par Charcot, a pris une
part prépondérante aux découvertes qui se sont succédées dans cette
260 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
voie de recherches. Peu d'années se passèrent et la doctrine des lo-
calisations cérébralesétaitfondée sur des bases inébranlables. Notre
connaissance des différents territoires qui composent la zone mo-
trice corticaie était, à peu de choses près, à l'état d'avancement où
nous la trouvons encore aujourd'hui. Presque parallèlement et
grâce à cette méthode- notre connaissance des aphasies et de la
fonction du langage subit un remaniment complet. Il se fit voir
qu'il n'y avait pas un centre unique du langage, mais autant de
centres d'expression et de perception des idées qu'il y a de ma-
nières d'exprimer et percevoir celles-ci ; il se fit voir qu'il existait
autant de modalités correspondantes d'aphasie. Vous m'en vou-
driez de ne point rappeler, en passant, la part prépondérante qui
revient à Wernicke dans ce travail de rénovation.
Je ne ferai qu'évoquer les tâtonnements qui ont préludé à une
connaissance exacte de la topographie des centres corticaux de la
perception sensitive. A cet égard, les recherches combinées des
anatomo-pathologistes, des cliniciens et des expérimentateurs ne
nous avaient fourni, jusqu'à ces derniers temps, que des données
toujours incertaines, souvent contradictoires. Il a fallu les admi-
et patientes recherches de Flechsig, sur la chronologie de
la myélinisation des fibres nerveuses dans le cerveau du foetus et
du nouveau-né, pour nous faire entrevoir l'exacte topographie des
territoires corticaux auxquels viennent aboutir les conducteurs
chargés de transmettre à la conscience les impressions dévelop-
pées à la surface de nos téguments ou dans la profondeur de nos
organes. Il en découle que les centres corticaux de la perception
sensitive se superposent, en grande partie, aux centres moteurs ;
autrement dit, les mêmes territoires corticaux qui projettent des
impulsions motrices sur nos muscles sont aussi des lieux d'abou-
tissement des conducteurs sensitifs par l'intermédiaire desquels
notre conscience est renseignée sur ce qui se passe autour de nous
et en nous.
Je serais entrainé beaucoup trop loin, si je voulais passer en
revue, même dans une énumération sommaire, les innombrables
travaux qui ont concouru à l'édification de notre connaissance
actuelle de l'anatomie, de la physiologie et de la pathologie des
centres nerveux et des nerfs pérphiériques. Aussi me bornerai-je à
une simple constatation d'ensemble. Cet imposant concours
d'efforts synergiques nous a valu une conception à la fois simple
et précise de l'organisation des appareils qui mettent le monde
extérieur et nos propres organes en communication avec les ter-
ritoires du cerveau qui constituent en quelques sortes le substra-
tum de notre moi, de notre conscience et de notre volonté. Deux
grandes voies, l'une sensitive, l'autre motrice, desservent ces com-
munications. Nous sommes aujourd'hui exactement renseignés
SECTION DE NEUROLOGIE. 261 1
sur les lieux de départ de la voie motrice, autrement dit, sur la
topographie des centres moteurs corticaux. Nous le sommes un
peu moins bien sur les territoires de l'écorce cérébrale auxquels
aboutit la voie sensitive (sensibilité générale et sens spéciaux);
nous le sommes d'une façon encore plus incomplète sur les com-
munications qui relient les centres corticaux sensitifs et sensoriels
aux centres corticaux moteurs et sur l'organisation des appareils
par l'intermédiaire desquels s'effectue leur synergie, leur associa-
TION.
Messieurs, la question des centres d'association figure au nombre
de celles qui feront l'objet d'un rapport d'ensemble; nous espé-
rions avoir la bonne fortune de l'entendre exposée'par son auteur;
malheureusement un accident, d'ailleurs sans gravité, arrivé ces
jours derniers au professeur Flechsig, l'empêche de venir au Con-
grès ; nous n'aurons donc que son rapport écrit, et celui-ci va être
discuté par les anatomistes les plus compétents. Il est à prévoir
que la question soulèvera un conflit d'opinions. Je manquerais
donc au plus élémentaire de mes devoirs si je risquais, à son sujet,
un jugement hâtif. Laissez-moi seulement vous faire remarquer
que si les révélations de Flechsig, ou d'autres analogues, se véri-
fient dans leur partie fondamentale, et nonobstant les correctifs
que des recherches parallèles pourront leur faire subir, les fonc-
tions psychiques deviendront localisables au même titre que les
fonctions dévolues aux centres de la perception consciente et aux
centres de la motilité volontaire. Dès maintenant, nous serions en
possession des premiers matériaux à l'aide desquels nous espérons
reconstruire la psychologie sur des bases objectives. Et ce qui
offre pour les neurologistes comme pour les aliénistes, un intérêt
plus immédiat, dès maintenant, nous serions assurés de la possi-
bilité de fonder l'anatomie pathologique des syndromes psychi-
ques sur les mêmes bases que celle des syndromes somatiques des
maladies de l'encéphale. Aux affections, en rapport avec des lésions
diffuses du cerveau et de ses enveloppes, nous en viendrions à
opposer les troubles mentaux qui se prêtent à un diagnostic topo-
graphique rigoureux parce qu'ils sont en rapport avec la lésion
d'un territoire aux fonctions psychiques bien définies.
Déjà des données éparses existent, glanées dans le domaine de
l'observation clinique, qui nous garantissent l'espoir que les voies
inaugurées par l'école anatomique contemporaine n'aboutiront pas
à un désert où les rêves et le mirage tiennent lieu de réalités. Mais
j'ai hâte de conclure, m'excusant à nouveau de retenir aussi lon-
guement votre attention. ,
En l'espace d'un siècle, les recherches combinées des anato-
mistes, des expérimentateurs, des cliniciens ont révolutionné, de
262 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
fond en comble, notre connaissance du système nerveux. Elles ont
abouti à nous doter d'une conception, simple et rationnelle, de
l'ensemble de ce système et de ses fonctions, fondée sur des don-
nées objectives qu'on peut, sans témérité aucune, qualifier d'iné-
branlables :
Le système nerveux. nous apparaît maintenant comme un
ensemble d'appareils, aux fonctions distinctes, mais synergiques.
Nous distinguons, dans cet ensemble, et nous localisons les con-
ducteurs chargés de transmettre à notre conscience les ébranle-
ments qui résultent des moindres modifications survenues dans
le monde ambiant, à la surface ou dans la profondeur de nos
organes.
Nous distinguons et nous localisons, de même, les territoires
qui servent de substratum à la conscience, les territoires chargés
de percevoir ces ébranlements que nous appelons des impressions,
chargés de les métamorphoser en sensations. De vagues, confuses
et fugaces qu'elles sont, au début de la vie, celles-ci gagnent en
netteté et en persistance, au sur et à mesure de leur répétition. En
outre, elles appellent des réactions multiples.
Les unes s'extériorisent sous la forme de mouvements qui
d'abord ont pour unique but la conservation de l'organisme ou
qui ne réfléchissent que les impressions de bien-être, de déplaisir
ou de souffrance.
Nous localisons les centres d'où partent ces impulsions mo-
trices.
Les autres, intérieures, donnent naissance à des idées de sou-
venirs. D'après certains auteurs, nous serions à même de localiser
les territoires dans lesquels s'emmagasinent ces idées de souve-
nirs, les centres des différentes variétés de mémoires.
Au sur et à mesure des progrès de l'éducation que nous acqué-
rons par nous-mêmes ou que nous tenons de nos semblables, ces
deux catégories de réactions se perfectionnent.
Les réactions extériorisées ne sont plus réduites à de simples
mouvements réflexes qui visent la satisfaction de nos besoins im-
médiats, la conservation et le développement de notre machine
corporelle; elles s'élèvent peu à peu à la hauteur d'actes plus ou
moins prémédités. De mieux en mieux, nous apprenons à adapter
les mouvements et les actes aux buts à atteindre. Mouvements et
actes éveillent des réactions internes ; à leur tour, celles-ci vont
constituer un stock à part d'idées, de souvenirs. La comparaison
s'exerce sur les diverses traces'qu'ont laissées en nous les impres-
sions venues du dehors, sur les idées de souvenirs de toute caté-
gorie. Le jugement se forme sur les résultats de notre propre
expérience et par voie de suggestion exercée du dehors.
La personnalité - le moi se dessine d'une façon de plus en
plus nette, fondée qu'elle est sur les souvenirs des sensations pas-
SECTION DE NEUROLOGIE. 263
sées, sur les souvenirs des réactions intérieures et extérieures qui
s'en sont suivies, sur la notion des rapports qui unissent ces sensa-
tions et ces réactions, sur les aptitudes acquises pour satisfaire nos
besoins matériels et nos aspirations diverses, sur la conscience que
nous avons de toute cette vie intérieure et de nos relations pré-
sentes et passées avec le monde ambiant.
Or, d'après Flechsig, nous serions déjà à même de localiser ap-
prox·imativenaent les territoires corticaux qui sont en quelque sorte
les dépositaires de nos diverses aptitudes. Nous serions à même
de localiser les centres par l'intermédiaire desquels nous apprécions
plus ou moins exactement les rapports des sensations aux réac-
tions extérieures et intérieures qu'elles déterminent, et ceux par
l'inter médiaire desquels nous réfrénons et nous réglementons ces
réactions. Nous serions également à même de localiser les terri-
toires corticaux où siège la conscience que nous avons de notre
personnalité.
Souhaitons que toutes ces données nouvelles se vérifient et
s'étendent. Leur portée va bien au delà du domaine de la méde-
cine proprement dite, car leur répercussion se fera sentir sur la
psychologie, sur l'anthropologie normale et morbide, sur la socio-
logie.
Pour ne m'en tenir qu'au domaine propre de notre spécialité,
déjà, je vous le répète, nous entrevoyons, avec une quasi certitude,
la possibilité de faire, pour la pathologie mentale, ce qui a été
fait, dans ces trente dernières années, pourra pathologie nerveuse,
de fonder, sur des bases objectives, le diagnostic topographique
des maladies mentales. Déjà, nous entrevoyons le moment où,
neurologistes et psychiatres, nous ne nous contenterons plus de
suivre des voies parallèles, et où nous fondrons nos efforts les uns
dans les autres, parce que notre activité s'exercera sur un terrain
commun, à l'aide des mêmes méthodes et suivant les mêmes prin-
cipes pour ce qui concerne l'étude des rapports qui unissent les
manifestations morbides aux altérations, dynamiques ou organi-
ques, d'un territoire déterminé de l'encéphale. Depuis assez long-
temps, du reste, une communauté de vues nous unit sur le terrain
de l'étiologie. En pathologie mentale, comme en pathologie ner-
veuse, nous attribuons à l'hérédité et à la dégénérescence, congé-
nitale ou acquise, un rôle étiologique de premier ordre. Dans le
développement des maladies mentales et dans le développement
des maladies nerveuses, nous incriminons les mêmes causes pro-
vocatrices ; elles se résument dans les intoxications autochtones et
exogènes, dans les infections, dans le traumatisme physique et
psychique. '
Nous possédons ainsi les éléments d'une prophylaxie rationnelle
des maladies mentales et des maladies nerveuses. Une connaissance
64 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MEDECINE.
plus exacte de l'organisation structurale et fonctionnelle du sys-
tème nerveux concourra à faire édifier, sur des données positives,
la plus noble de toutes les branches de l'hygiène, celle qui envisage
l'homme en tant qu'être pensant et agissant.
Notre commun programme s'est donc singulièrement élargi au
sur et à mesure des découvertes du siècle passé. Nos efforts ne
sauraient plus avoir pour but exclusif de connaître, avec une ri-
gueur croissante, le siège et le mécanisme des maladies nerveuses
ou mentales, de distinguer celles qui résultent d'une perturbation
fonctionnelle, d'un état d'épuisement, d'une intoxication, de celles
qui sont liées à une lésion organique; de discerner celles qui sonl cura-
blesd'aveccelles qui ne le sont pas ; de multiplieret de perfectionner
nos moyens de curation. Ils doivent tendre aussi à préserver nos
semblables de tout ce qui peut compromettre le bon fonctionne-
ment et l'intégrité de leur système nerveux. Et c'est la ce qu'il y a
de plus salutaire et de plus sublime dans notre rôle : aussi bien,
lutter contre les progrès de la dégénérescence et de l'hérédité mor-
bide ; contre la dissémination des infections et plus spécialement
contre les ravages de la syphilis, la plus fréquente et la plus funeste
de toutes; dévoiler et supprimer les intoxications qui menacent
le plus directement nos appareils nerveux, en commençant par la
plus néfaste et la plus répandue, par l'alcoolisme ; pénétrer nos
semblables de cette vérité, que la principale source de bonheur
réside dans un parfait équilibre mental, dans une parfaite har-
monie entre les appareils qui président aux rapports de notre or-
ganisme avec le monde extérieur, dans une exacte compréhension
de nos vrais besoins, dans une volonté immuable d'éviter ce qui
doit l'être et de tendre vers ce qui est digne de solliciter nos dé-
sirs, n'est-ce pas là, Messieurs, contribuer pour la plus large part
au bien de l'humanité ?
Saluons donc le siècle qui s'en va, car c'est aux travaux et aux
découvertes des cent dernières années que nous sommes devenus à
même de poursuivre cet idéal, sans plus nous égarer dans le
domaine des rêves et des chimères, et en nous guidant seulement
sur une connaissance exacte de la structure et des fonctions de la
plus noble partie de notre être, du système nerveux.
M. le D1' Pierre Marie, secrétaire général du Comité d'organisa-
tion de la Section de Neurologie, expose le programme des travaux
de la Section.
La Section de Neurologie, qui représente un des groupements
du XIII° Congrès international de Médecine, se trouve être en
même temps le IIe Congrès international de Neurologie. Le le ? on
se le rappelle, fut inauguré il y a trois ans, à Bruxelles, sous les
auspices de la Société belge de Neurologie. Le choix de Paris
comme siège; et de l'année 1900 comme date, de la seconde réu-
SECTION DE NEUROLOGIE. 265 5
nion internationale des neurologistes a nécessité la fusion du Con-
grès spécial de Neurologie avec le XIIL° Congrès international de
Médecine.
L'abondance des travaux qui incombent aux neurologistes et
aux psychiatres a nécessité la formation de deux sections, l'une
pour la neurologie, l'autre pour la psychiatrie. Cette séparation
s'adresse, non pas aux personnes, mais aux sujets d'études, et
M. Pierre Marie propose d'envoyer aux membres de la Section de
Psychiatrie l'adresse suivante approuvée par l'unanimité des
membres présents :
« Les membres de la Section de Neurologie du XIII0 Congrès
international de Médecine, assemblés à la Sorbonne, dans l'amphi-
théâtre Richelieu, envoient aux membres de la Section de Psy-
chiatrie un cordial salut. Ils les prient d'agréer l'assurance de
leurs sentiments de haute estime et expriment le souhait qu'en
travaillant ainsi parallèlement dans un même esprit de dévoue-
ment à la science les deux Sections contribuent efficacement à
l'avancement de nos connaissances pour tout ce qui concerne le
système nerveux normal et pathologique. »
M. le Dl' Magnan, Président du Comité d'organisation de la Sec-
tion de Psychiatrie, présent à la séance, adresse ses remerciements
aux membres de la Section de Neurologie.
A l'adresse qu'on vient de lire, la Section de Psychiatrie a
répondu le lendemain par l'adresse suivante :
« Les membres de la Section de Psychiatrie du XIII" Congrès
international de Médecine, assemblés à l'Ecole de Pharmacie,
envoient aux membres de la Section de Neurologie leurs sincères
remerciements, les félicitent du succès de leurs réunions, leur
renouvellent l'assurance de leurs sentiments de haute et confrater-
nelle estime et seront toujours heureux de se retrouver avec eux
dans les futurs Congrès pour travailler ensemble au développement
de nos connaissances sur les maladies du système nerveux. »
Sont nommés Présidents d'honneur de la Section de Neurologie :
266 VARIA.
VARIA. 67
Neuve, M. Philippe Lerentier, marié et père de trois enfants, sui-
vait depuis quelques jours avec passion les terribles événements
qui se déroulent en Chine. D'un tempérament faible, ayant un
léger penchant pour les liqueurs capiteuses, l'infortuné en était
arrivé à un extrême état de nervosité qui ne laissait pas que d'in-
quiéter sa femme, une brave ménagère.
Hier après midi, Lerentier fut pris d'une violente crise de folie
au cours de laquelle il traita sa femme de mangeuse d'enfants.
« Oui, disait-il, tu es l'impératrice de Chine et tu veux dévorer mes
pauvres petits; il n'en sera pas fait ainsi. » Après avoir roué de
coups la malheureuse, l'aliéné prit ses enfants par les jambes et
les lança violemment sous les lits, sous prétexte de les dérober
aux dents aiguës de l'ogresse. Et pendant que sa femme, terrifiée,
s'enfuyait chez des voisins, Lerentier brisait tous ses meubles, bien
convaincu qu'il détruisait le palais de l'impératrice de Chine.
M. Deslondes, commissaire de police du quartier de Charonne,
survenant alors avec deux inspecteurs, le fou, les yeux hagards,
les poings levés, se plaça devant eux en criant : « Venez donc me
chercher, vous, les Boxers, je vous attends ! » Il n'a pas fallu
moins de huit hommes pour s'emparer du pauvre fou et le con-
duire à l'infirmerie spéciale du Dépôt. (Le Journal, 9 juillet 1900.)
Tentative de suicide. M. Guérin-Meneville, rédacteur à la pré-
fecture de la Seine, a tenté, la nuit dernière de se suicider à l'aide
d'un revolver, en son domicile, 86, boulevard de Clichy. La déto-
nation fit accourir sa domestique qui trouva son maître étendu
sans mouvement sur sa descente de lit, au milieu d'une mare de
sang. M. Meneville ne jouissait pas de la plénitude de toutes ses
facultés, car il aurait été dernièrement interné pendant un mois à
l'asile d'aliénés de Ville-Evrard. Il était atteint de la manie de la
persécution. Le malheureux, dont l'état est désespéré, a été trans-
porté à l'hôpital Lariboisière. (L'Epoque du 7 juillet 1900.)
Par la fenêtre. Le nommé Gustave Marie, cinquante ans, jour-
nalier à Lisieux, se croyant poursuivi par des individus qui vou-
laient le guillotiner, s'est jeté par la fenêtre du 2e étage. Il a été
relevé dans un triste état. [Bonhomme Normand, 10 août 1900.)
LES drames DE l'alcoolisme.
Le nommé Etienne Portes, quarante-six, d'Estadens (Haute-
Garonne), un alcoolique, a tué à coups de hache, sa mère âgée de
soixante-quinze ans, et son fils âgé de seize ans. (Le Bonhomme
Normand, 15 au 21 juin 1900.)
Le nommé Rouveyrol, écroué à la prison de Toulon pour
ivresse, a été tellement battu par les gardiens qu'il a succombé à
268 VARIA.
ses nombreuses blessures. (Le Bonhomme Normand, 15 au 21 juin
1900.)
Victimes de l'alcool. Le sieur Amand Evroult, soixante ans,
ouvrier cordonnier à Pont-1'Evêque, s'est pendu dans son loge-
ment. Le désespéré, qui était un alcoolique invétéré, avait fré-
quemment manifesté son intention de mettre fin à ses jours.
- Aprèb avoir abominablement bu, Jean Le Scaut, trente-un
ans, domestique à Saint-Pierre-sur-Dives, monta se coucher ; il
n'eut même pas la force de grimper dans son lit et tomba comme
une masse sur le parquet, où on le trouva mort, victime d'une
congestion due à son état d'ivresse.
- Charles David, vingt-un ans, soldat au 22° d'artillerie, en
convalescence chez ses parents à Meulles, près Orbec, avait un pen-
chant pour la boisson. A la suite d'une remontrance que lui fit son
père ces jours derniers, David, s'asseyant sur une chaise, se plaça
sous la gorge le canon de son fusil et pressa la-détente. Le mal-
heureux tomba foudroyé. (Bonhomme Normand, 15 au 21 juin
1900.)
- La veuve Desabeye, quatre-vingt-cinq ans, rentière, vivait au
Saussay (Seine-Inférieure) avec sa bru. Celle-ci se livrait à la
boisson ; sa raison en était altérée. Dans un moment d'ivresse,
elle a tué la pauvre vieille, puis elle est allée se noyer. (Le
Bonhomme Normand du 26 juillet.)
Les effets de l'alcool. - Abel Juhellé, trente-neuf ans, est né à
Vire où il s'est marié. Depuis deux ans, il était divorcé. 11 habitait
Bréhal (Manche), où il exerçait la profession de tricoteur, encore en
usage dans la Manche. Tout ce que Juhellé gagnait était dépensé
en boisson. A force de boire, sa raison s'en alla et, en ces derniers
temps, il se croyait poursuivi par des fantômes et par une fille-
mère du pays qu'il connaissait. Enfin, il s'est tué en se tirant deux
coups de revolver dans la poitrine, en présence de sa propriétaire,
sous prétexte qu'elle voulait le mettre dehors de son logement.
(Le Bonhomme Normand du 26 juillet.)
- Le sieur Charles Grieux, soixante-douze ans, avait pour mai-
tresse une femme mariée nommée Porphiled, trente-trois ans,
qu'il avait logée dans une petite maison voisine de celle de son
fils, avec lequel il habitait à Vesly (Eure). Cette femme s'enivrait
chaque jour et avait des relations avec Paul Delaistre, braconnier
renommé. La femme Porfiled lui ayant fermé sa porte, Delaistre
qui était ivre, mit le feu dessous. Effrayée par la fumée, la femme
sortit. Delaistre lui tira un coup de fusil dans le dos et déchargea
le second coup de son arme sur le vieux Grieux qui venait au
VARIA. 269
secours de sa maitressc. Celle-ci est blessée grièvement. Grieux fut
tué net. Delaistre ne se souvient de rien. (Bonhomme Normand,
10 août 1900.)
LES dangers de l'hypnotisme.
1-e Pauline Chevillon, âgée de trente-six ans, femme d'un em-
ployé de chemin de fer, demeurant 98, rue Claude-Decaen, se
trouvait seule avec son fils, l'avant-dernière nuit, son mari étant
à son travail ; elle se leva vers quatre heures du matin, se rendit
dans la chambre de son fils Roger, âgé de onze ans, lui ordonna
de s'habiller et de passer dans la salle à manger. Comme le
gamin arrivait dans cette pièce, il entendit sa mère ouvrir la
fenêtre; puis un cri s'éleva, et ce fut le bruit d'une chute sur le
pavé de la rue. L'enfant se précipita dans la chambre et par la
baie aperçut le corps de sa mère gisant sur le sol. Prévenu aussitôt,
le concierge, M. Dreyer, releva Mmo Chevillon ; la malheureuse
s'était tuée sur le coup.
M. Chevillon, interrogé sur les causes de ce drame, raconta qu'il
y a six mois environ, étant avec sa femme et la soeur de cette der-
nière chez des amis à Villeneuve-Saint-Georges, celles-ci s'étaient
prêtées à des expériences d'hypnotisme et de magnétisme, et que,
depuis cette époque, toutes deux avaient donné des signes de trou-
bles cérébraux; que 'sa belle-soeur était depuis deux mois environ
internée à l'asile de Saint-Anne, et que la terrible fin de sa femme
devrit être attribuée à la folie. M. Brunet, commissaire de police, a
ouvert une enquête. (Le Radical, 17 juin 1900.)
Hypnotisme ( ? )
Une affaire extraordinaire . Nous avons déjà, à plusieurs
reprises, parlé d'une singulière affaire dans laquelle une bonne, la
demoiselle B..., était accusée par sa jeune maîtresse, 11l° G..., de
l'avoir poussée sous l'influence de l'hypnotisme, à la prostitution
et d'avoir vécu du produit de son inconduite. Plusieurs médecins,
MM. Vallon, Séglas et Legras, furent chargés d'examiner la demoi-
selle G..., afin de savoir si elle avait obéi à une influence extra-
naturelle. Ils conclurent négativement. Un incident très grave vient
maintenant se greffer sur cette curieuse affaire; la demoiselle B...,
la domestique, accuse A111° G... de s'être fait avorter avec le con-
cours d'un médecin célèbre, qui est à la fois homme politique et
membre de l'Académie de médecine. La bonne affirme tenir ce fait
de 11111° G... elle-même ; l'avortement aurait eu lieu au cours d'un
séjour que fit 111r1° G... à Dieppe. - Jeudi, M. Basly, juge d'ins-
truction, confrontera dans son cabinet le médecin incriminé et un
de ses confrères avec Mne. G... et B... (Le Radical du 3 janvier 1900).
370 faits divers.
SUICIDES d'enfant.
Le jeune Auguste Folliot, treize ans, domestique, à Formigny,
près Trévières, s'est pendu à un pommier dans le jardin de ses
maitres, les époux Julien. Le noeud coulant se trouvait à environ
80 centimètres du sol et les genoux du malheureux enfant Lou-
chaient presque la terre. On ignore les motifs qui ont poussé le
jeune Folliot à cet acte de désespoir. Mais l'idée de se donner la
mort devait être chez lui bien arrêtée, car, il y a cinq semaines
environ, il avait tenté de s'étrangler ; depuis, il avait déclaré qu'il
se porterait un coup de couteau. (Le Bonhomme Normand, 15 au
21 juin 1900.)
Enfant suicidé par nostalgie. - Les époux Alphonse, ne trouvant
plus de travail à Calais, avaient quitté cette ville pour la région
des mines, où le mari trouva à s'embaucher. L'un des enfants, la
petite Elise, âgée de treize ans, ne put se faire à sa nouvelle
résidence. Elle éprouva un tel ennui qu'elle manifesta fréquem-
ment à sa mère le désir de revenir à Calais ou qu'elle chercherait
à en finir avec l'existence. L'on ne prit pas garde à cette menace
d'enfant. L'on vient de trouver la petite Elise pendue dans le gre-
nier au domicile de ses parents, à Bruay. (Le Temps, du 12 août
1900.)
Hôpital des maladies mentales de Pierrefeu. 39° concert offert
aux pensionnaires le 10 juin 1900, à 5 heures du soir, avec le
concours de la musique de l'établissement : Marche des Petits
Troupiers, Désormes. Faust, fantaisie, Gounod. L'Eblouis-
sante, mazurka pour clarinette. Bousquier. Retraite croate,
E. Marie. Les Cloches de Corneville, mosaïque, Planque.tte. -
Aux Trois Suisses, polka, Bonnechope. (Le Petit Var, 11 juin 1900.)
FAITS DIVERS.
Asiles D aliénés. Nominations et promotions : M. le 1)1' LIGIER,
sous-directeur à la maison nationale de Charenton, est nommé di-
recteur de l'asile public d'aliénés à Montdevergues (Vaucluse); -
M. le Dr JOSSEftAND, directeur de l'asile de Montdevergues, est
nommé directeur de l'asile de Cadillac (Gironde) en remplacement
de M. GAUCKLER décédé; M. le Dr TRUELLE, concours de Paris,
est nommé médecin-adjoint à Dun-sur-Auron; - M. le Dr LwoF,
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. 2-il 1
médecin-adjoint à Dun-sur-Auron, est nommé médecin en chef à
Ainay-le-Chàteau.
M. le Dr DIDE reçu au concours de l'adjuvat de 1900 (région de
Paris) est nommé médecin-adjoint à l'asile public d'aliénés de
Saint-Méen, Rennes ((lle-et-Vilaine), en remplacement' de M. le
or Croustel appelé aux mêmes fonctions à l'asile public d'aliénés
de Quimper; M. le Dr Pochon reçu au concours de l'adjuvat
de 1900 (région de Paris) est nommé médecin-adjoint à l'asile
public d'aliénés de Lesvellec (Morbihan) en remplacement de
M. le or Singer.
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
Annuaire de l'internat en médecine des Asiles publics d'aliénés du
déparlement de la Seine publié par l'Association amicale des internes et
anciens internes pour 1900. Brochure in-12 de 79 pages. Paris,
chez le Dr Antheaume, 6, rue Sclieffer..
Archives of ne1l1'olog ! } from the palhologicallabo1'alol'Y of the London
cozzzzty asylums Claybury. Essex. Edited by F.-W. motte Volume in-8°
rie xn-552 pages, avec nombreuses figures et 10 planches hors texte. -
Prix : 18 fr. 75. - London, 1900. Asy)ums Committee office.
Asile public d'aliénés de Saint-l'on. Rapport médical pour l'année
1899. Brochure in-4" de 24 pages. Rouen, 1900. Imprimerie
L. Cy.
Asile public d'aliénés de Quatre-Mares. Rapport médical pour
l'année 1899. - Brochure in-4° de 19 pages. Rouen, 1900. Impri-
merie Blondel. c
Babinski (J.). Diagnostic différentiel de l'hémiplégie organique et
de l'hémiplégie hystérique. Brochure in-8° de 40 pages, avec 12 figures.
Paris, 1900. - Extrait de la Gazette des hôpitaux. n
BABINSKI (J.). - De l'asynergie cérébelleuse. Brochure in-8° de
10 pages, avec 8 figures. Paris, 1900. Extrait de la Revue neurolo-
gique.
BABINSISI (J.). Sur un cas d'hémispasme (Contribution à l'étude de la
pathogénie du torticolis spasmodique). Brochure in-8° de 5 pages.
Paris, 1900. Extrait de la Revue neurologique.
Babinski (J.). Sur le prétendu réflexe antagoniste de Schaefer. -
Brochure in-8o de 2 pages. Paris, 1900. Extrait de la Revue neuro-
logique.
Bontnten (P.). L'orientation (n° 9 de la Bibliothèque Sciezztia). -
Volume tn-8°, cartonné de 90 pages. Prix : 2 francs. Souscription à
6 fascicules : 10 francs. Paris, 1900. Librairie Carré et Naud.
BOURNEvILLE. Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie,
l'hystérie et l'idiotie, Compte rendu du service des enfants idiots, épilep-
tiques et arriérés de Bicêtre pour l'année 1899. Public avec la collabo-
272 . BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
ration de MM. Bellin, Boyer, Chapotin, Dardel, Katz, Noir (J.), Paul-
Boncour et Poulard. Tome XX de la collection. In-8» de CLXXXIV-292
pages, avec 76 figures dans le texte et XIII planches hors texte.
Prix : 8 francs. Pour nos abonnés : 6 francs.
DAGNI\I (G.). Sopra una forma non comune di anestesia dolorosa
di origine'islerica. Brochure in-8° de 39 pages. - Firenze 1900. -
Rivista crilica di Clinica medica. -
Fifth anzzual report of the board of managers of the Ronte State Cuslo-
dial asylum at Home N. Y. (or the year ending septembre 30, 1899. -
Brochure in-8° de 65 pages. Albany, 1900. ' /
JONKOVSKY. Rachitisme en Roussie, - Brochure in-8- de 47 pages,
avec 111 figures, - Saint-Pétersbourg, 1900. Imprimerie de la Société
Narodnaïa Poka. 0
JoRGE (R.). - La peste bubonique de Porto, 1899. Sa découverte, pre-
miers travaux. - Volume in-8" de 78 pages, avec 6 planches et un plan
de la ville hors texte.
KRAFFT-EBING (R. von).- Médecine légale des aliénés. (Édition française
traduite sur l'édition allemande et annotée par le Dr A. Rémond.) 1" fas-
cicule : Partie criminelle. - Volume in-8° de xiv-544 pages. Prix de
l'ouvrage complet en deux parties : 20 lrancs. - Paris, 1900.- Librairie
0. Doin.
l\1ARIWV.\ (K.). Contribution à l'étude de la perception stériognos-
tique. Brochure in-8° de 82 pages. - Genève, 1900. Librairie Eggi-
mann et C ? -
Paon (F.). Résultats éloignés de la trépanation dans l'épilepsie.
Volume in-4° de 48 pages. Paris, 1900. - Jouve et Boyer.
POHL. Remel'lwngl¡bel' die Ilaare der Negrilos auf den Philippinen.
Brochure in-8° de 2 pages. Iena, 1900. - G. Fischer.
Pom.. - Die mikroslcopischen. Vel'tindeJ'll11,gen am meuschliclten kopf-
hazl1'untel' denz Einfluss tzervôser .Et'eMe ? Brochure in-S° de
5 pages. \'eimar, 1900. - Librairie G. Steinert.
Rechenschaftsbericht liber die Zûrcherische Kanlonale Irrenheilanstalt
Bll1'ghüZ ? i, - Brochure in-8° de 43 pages. Zurich, 1900. Buchdruckerei
Berichthaus. '
Régnier (P.). - Les instituts Zende¡' et la mécanotlzé1'Clpie, Bro-
chure in-8° de 32 pages. Paris, 1900. Libraires associés.
Sajous (Ch.-M.). - Annual and azzalylical cyclopaedia of practical
medicine. Tome V, volume en deux parties reliées formant ensemble
v-662 pages, avec planches et figures. Philadelphia, 1900. Davis Cy.
Il s'agit là d'une très belle publication sur laquelle nous ne saurions trop
appeler l'attention de nos lecteurs.
Ssrsoccn (F.). lI ! rl1 ! llale di pedagogia spéciale per l'educazione dei
bambini od anol'11lali ad uso degli apprendisli délie R. scuole normali
del Regno.- Volume in-18 de 143 pages. - Alessandrin,1900. Istituto
pei Sordomuti.
Le rédacteur-gérant : Bourneville.
ÉI'rCLI\, Ch. HÉRISS8\", imp. - 9-1900.
1
Vol. X. Octobre 1900. N° 58.
ARCHIVES DE NEUROLOGIE
THÉRAPEUTIQUE.
De l'alitement (repos au lit) dans le traitement<iies
formes aiguës des maladies mentales et les modi<
fications qu'il pourrait entraîner dans l'organisa-
tion des établissements consacrés aux aliénés ;
Par S. S. hO12S.1110\',
Professeur à l'Université de )[05C0\1.
Communication faite à la section de psychiatrie
du XI 1 1° Congrès international de Paris. ,
(Présenté par M. SERBSKI.)
La question de traitement des aliénés par l'alitement pro-
longé a fait dans les derniers temps d'immenses progrès, ce
que nous devons surtout aux indications des aliénistes alle-
mands. Beaucoup d'auteurs ont consacré leurs travaux à à -
cette question, mais je ne veux pas entrer dans les détails de
tout ce qui a été fait sous ce rapport, puisque on peut trou-
ver les indications bibliographiques nécessaires dans les tra-
vaux des auteurs français, 111L11. lieraval', Pochon, Sérieux et
Farnarier, etc. Cependant, comme rapporteur de la Russie,
je crois de mon devoir de décrire en quelques mots l'évolu-
tion de la question parmi les aliénistes russes.
Comme partout, le repos au lit était depuis longtemps
appliqué comme moyen thérapeutique dans les asiles d'alié-
Ili-0g)-ès médical, no 1898.
Archives, ` ? ° série, t. X.
IS
274 THÉRAPEUTIQUE.
nés russes, mais seulement dans des cas isolés. Ce n'est qu'en
z1593 que la nécessité d'une application systématique du
régime au lit a été pour la première fois proclamé dans la
littérature russe par le docteur A. V. Timoféiew, qui avait
appris à connaître cette méthode à Leubus, chez M. Clemens
Neisser. Le docteur Timoféiew introduisit ce régime à l'asile
Alexandre III, près Saint-Pétersbourg et en z1896 il nous a
fait part dans un petit mémoire des bons résultats qu'il en a
eus. Mais un intérêt particulièrement vif a été excité en Russie
pour le régime en question par les communications du doc-
teur A.-A. Govséiew, faites à la fin de 1895 et 1896 : l'une
à la Société des Neuropalholoâistes et des Aliénistes de Mos-
cou, l'autre au Congrès des médecins russes à Kiew. Le
docteur Govséiew a été frappé des résultats de ce régime
qu'il a réussi à appliquer dans l'asile des aliénés, pauvre
et encombré, d'Ekaterinoslaw : il s'est établi dans l'établis-
sement un ordre sans précédent; il y a eu possibilité de se
passer complètement d'isolement des malades dans les cel-
lules, les pavillons isolés antérieurement pouvaient être con-
vertis en des chambres pour des malades tranquilles.
Bien que le régime au lit était appliqué en 1895 également
à la clinique psychiatrique que je dirige et où, comme le
montre l'article de M. Bernstein, paru en 1896, on pouvait de
même, grâce à lui, tout à fait renoncer à la mise des malades
dans des quartiers de cellules qui depuis ce temps restent
complètement inoccupées, l'expérience de la clinique, comme
d'un hôpital en petit et particulièrement bien organisé ne
pourrait cependant pas être aussi concluante que celle du
docteur Govséiew dont les rapports ont ainsi inspiré toute
une série de communications sur la question. Il s'en suivit
un grand nombre d'articles des docteurs Levtchatkine, Your-
man, Lion, Kostezki et Yochtchenko, qui communiquaient
les résultats du repos au lit appliqué dans des grands hôpi-
taux, et du Professeur Bechterew et de ses élèves, MM. Ossi-
pow etTrapeznikow, qui avaient fait des recherches relatives
à ce régime, sur les malades de la clinique psychiatrique de
Saint-Pétersbourg, où il avait été introduit depuis le mois de
septembre 1896. L'intérêt des aliénistes russes pour ce régime
grandissait toujours et cette question fut mise à l'ordre du
joùr à la section des maladies nerveuses et mentales au Con-
grès des Médecins russes, en mai 1899. Les rapporteurs
DE l'alitement.. 275
en étaient le professeur Tschisch et le docteur Ossipow 1.
Les articles des auteurs énumérés aussi bien que les débats
qui avaient eu lieu plus tard au congrès, ont fait ressortir le
fait que les aliénistes russes considèrent ce régime comme
une mesure très importante qui contribue énormément au
bon ordre de l'asile d'aliénés surtout si on l'applique aux
malades agités. Cependant il y a eu une assez grande diver-
gence, d'opinions dans l'appréciation de différents côtés du
régime d'alitement. Les uns pensaient que l'introduction du
régime en question créait une nouvelle ère dans la psychia-
trie et était le dernier mot dans la lutte séculaire pour la
liberté des aliénés'; que l'on pouvait, par ce régime, trans-
former tout asile d'aliénés encombré et négligé en un hôpital
bien rangé et bannir complètement l'isolement dans les cel-
Iules, -voire même, décentraliser, grâce à cette méthode, la
psychiatrie et traiter presque tous les aliénés dans les salles
des hôpitaux ordinaires et à domicile. D'autres étaient d'un
avis différent : ils avançaient qu'en appliquant avec insis-
tance ce régime on était conduit aux abus les malades
seraient parfois maintenus de force par qualre ou cinq gar-
diens pendant quelques jours, leur corps se couvrirait d'ec-
chymoses, et c'est pourquoi le régime au lit largement et
fermement appliqué était un retour au système « restreint »;
on ajoutait que l'attention portée un moment sur ce régime,
était un des nombreux entraînements et qui commençait déjà
à passer. Entre ces deux opinions extrêmes il y a eu celle de
ceux qui, tout en attribuant au régime du lit une grande
valeur dans le traitemcnt des maladies agitées, insistaient
sur ce qu'il y aurait de préjudiciable à généraliser son appli-
cation et que pour cela il y aurait nécessité à faire des indi-
cations et contre-indications à son sujet. Enfin, qu'en se
servant de ce régime, il n'y avait pas lieu de dédaigner les
autres méthodes qui avaient été déjà d'une utilité incontes-
table dans l'assistance des aliénés, par exemple, le régime
de travail.
Outre ces points principaux, irlême divergence d'opinions
sur ce qui concerne la mode même de l'application du régime
' Les indications bibliographiques et historiques nécessaires ayant trait
à l'étude du régime d'alitement fait par les aliénistes russes, ont été
données par moi dans un autre article. (XIII' Congrès international de
médecine. Paris. Masson et Ci., éditeurs, 1900.)
276 thérapeutique.
au lit. Ainsi, les uns pensaient qu'il devait avoir pour con-
dition absolue l'organisation d'un quartier d'observation, où
seraient mis tous les excités qui demandent à être particu-
lièrement surveillés et tous les malades nouvellement arrivés;
d'autres disaient que c'était faux de mettre ainsi les malades
de différentes catégories ensemble; les uns insistaient sur la
nécessité d'éviter absolument l'isolement pendant ce régime,
tandis que les autres l'admettaient à la rigueur; les uns
disaient qu'il y avait lieu de se servir alors des salles com-
munes, les autres, que le meilleur moyen du régime d'ali-
tement était, au contraire, dans des chambres séparées aux
portes qui ne ferment pas; les uns admettaient l'usage de
telles mesures, comme le maintien au lit par des infirmiers,
l'emploi des enveloppements humides et secs, de quelques
médicaments sédatifs puissants tels que la duboisine, l'hyos-
cine, les autres considéraient tout cela barbare ; enfin les uns
voyaient dans le régime au lit un puissant moyen thérapeu-
tique qui bien que ne guérissant pas la maladie même, en
adoucissait énormément les manifestations, tandis que les
autres lui refusaient toute valeur thérapeutique.
- On voit d'après tout cela que les aliénistes russes étaient
en train d'émettre à peu près les mêmes opinions que ceux
des autres pays et que les avis concernant le régime au lit et
son application étaient aussi différents que partout ailleurs.
En analysant les opinions émises, je trouve que la diffé-
rence d'avis tient d'une part à l'exclusivisme de l'expérience
personnelle, d'autre part à ce qu'on n'entendait pas toujours
la même chose par le régime au lit; tandis que les uns en
parlaient comme d'un « système » dans l'organisation géné-
rale de l'asile, d'autres ne le considéraient que comme un
procédé thérapeutique dans les cas isolés. Cependant ces deux
côtés de la question doivent être bien distincts.
Par un « système » dans le traitement des aliénés nous
voulons dire tout un ensemble de mesures qui ont pour but
de régler, pour ainsi dire, la manière de vivre des pension-
naires des asiles d'aliénés. Tels sont le système d'influence
morale », le « système du No-Restraint », le « système des
porles ouvertes», le « système du régime ouvrier ». Par ana-
logie et particulièrement grâce aux indications de M. CI.
Neisser il s'est formé le « système du repos au lit ».
Les éléments faisant partie de ce système ne sont pas
DE l'alitement. 277
encore, d'ailleurs, assez exactement définis, ce qui contribue
en partie à ce que les avis sont différents. Pour ma part, je
crois que ce système comprend principalement ceci : 1° l'u-
sage du lit est considéré comme un élément essentiel du trai-
tement, et la durée du séjour au lit est établie pour chaque
jour suivant les indications et contre-indications el qui chan-
gent d'un individu à l'autre; 2° le séjour au lit des malades
s'obtient non pas par violence, mais par influence moralé
(persuasions, douceurs, rappels) et par l'effet suggestif du
milieu hospitalier; 3° une partie intégrante obligatoire du
système d'alitement doit être une organisation spéciale de la
surveillance des malades.
J'y ajouterai volontiers de mon côté : 4° que l'usage des
cellules doit en être exclu. Cependant, vu que plusieurs de nos
confrères, tout en appliquant systématiquement le repos au
lit, se servent également de cellules, je pense que le refus de
se servir par principe des cellules n'est pas une condition
fondamentale du système en question.
11 va sans dire qu'ici, comme dans tout autre système
appliqué à la psychiatrie, il y a, à côté des éléments princi-
paux, une foule de détails, tels que, par exemple, l'améliora-
tion de l'observation clinique et, comme conséquence, une
meilleure application des différents moyens thérapeutiques.
Arrêtons-nous sur chacun des points que j'ai avancés.
I. Je crois que le système d'alitement à l'asile est réglé
d'après l'examen de chacun des malades eu traitement et
qu'on s'était bien posé la question, dans quelle mesure le
régime au lit convenait à tel ou tel malade. Dans certains cas,
il faut un repos au lit prolongé, presque constant pendant
quelques semaines et même des mois, dans d'autres, ce repos
se réduit au minimum, par exemple, le malade ne reste au
lit que la nuit et le matin jusqu'à la visite du médecin. Ce
dernier établit, comme toute autre mesure thérapeutique, la
durée du séjour au lit et combien il doit être continu. Je crois
que les indications précises sur la durée et le mode d'appli-
cation du repos au lit écarteraient bien des objections
essentielles qui se font à ce système. Chez nous, on divise,
d'après la durée, le régime au lit, de la façon suivante : '
1° Le régime au lit absolu, lorsqu'on veut que le malade
soit constamment au lit. Il arrive certainement que le malade
se lève brusquement, se met marcher, alors on lui rappelle
278 S thérapeutique. 1
qu'il ne doit pas le faire ; dans la plupart des cas, les
malades, même astreints au régime absolu, sont autorisés à
aller aux cabinets (après avoir préalablement mis leur robe
de chambré) ou à se servir d'une chaise percée. Il n'y a que
les malades très faibles sous lesquels on passe le vase. Il va
sans dire qu'il n'y a point d'infraction au régime, si le
malade est assis dans son lit. La position horizontale continue
n'est exigée que dans des cas peu nombreux. Le régime au
lit absolu, appliqué dans les psychoses aiguës, ne doit pas
durer longtemps : il ne faut pas oublier qu'il a alors souvent de
mauvaises suites. C'est pourquoi dans la plupart des cas,
même chez les malades très agités, mais apyrétiques, on ne
s'en sert pas plus de quelques jours, mais on est obligé de
prolonger davantage ce régime chez les malades fébriles ou
souffrant de maladies somaliques;
2° Le repos au lit avec l'autorisation de s'asseoir pendant
le dîner, sur la chaise qui se trouve près du lit ou de la
table ; les malades, pendant ce temps, passent également un
léger vêtement de dessus ;
3° Le repos au lit avec l'autorisation de faire une promenade
une ou deux fois par jour. Les malades, avant de sortir,
mettent leurs vêtements; puis, une fois rentrés, ils se désha-
billent et se couchent de nouveau ; -,
4° Le régime au lit avec l'autorisation des promenades et
d'un séjour dans les salles communes pendant le dîner et le
souper ou bien pendant quelques heures entre ces deux
repas; la durée du séjour hors du lit est fixée très exacte-
ment ;
Si Le repos au lit jusqu'à la visite du matin du médecin.
Ensuite, si ce dernier l'autorise, il est permis au malade de
rester toute la journée hors du lit. La plupart du temps de
tels malades, surtout dans les premiers temps, se recouchent
pendant la journée, selon leur propre désir. Beaucoup d'eux
se reposent également après le bain.
G° Enfin, il y a des cas plus ou moins nombreux dans les-
quels les malades sont autorisés, par le médecin, à se lever
avant sa visite. Ce sont quelques convalescents et des malades
chroniques tout à fait calmes qui s'occupent de travaux. Ces
malades sont ordinairement placés dans des salles à part
pour ne pas provoquer, à cause de leur régime, de protesta-
tion chez d'autres malades. S'ils sont plusieurs, ils sont mis
DE l'alitement. 279
dans des pavillons particuliers et constituent la colonie ou-
vrière.
Il va sans dire qn'une telle classification des malades d'après
la durée de leur séjour au lit; doit se faire sans pédantisme
paralysant, ni sévérité extrême : il faut toujours avoir pré-
sent à l'esprit que c'est le régime qui existe pour le malade,
et non pas le malade pour le régime.
Il s'ensuit de ce qui vient d'être dit que le « système » du
régime au lit peut être appliqué même alors qu'il y a, à un
moment donné, très peu de malades astreints constamment
à ce régime, que cela tientà l'assortiment même des malades
ou bien à d'autres conditions. Le principe du système du
traitement par le repos au lit sera tout de même observé si
le médecin établit bien chaque fois la durée du séjour an lit
pour chaque individu et que la nécessité de considérer l'élat
du malade sous ce rapport pénètre tout le personnel du ser-
vice ainsi que les malades eux-mêmes.
II. Quant au second point fondamental du régime au lit,
je crois que le milieu doit contribuer à ce que le malade se
couche volontairement. Pour cela, il faut d'abord une orga-
nisation bien ordonnée, ensuite que les gens du service et la
plupart des malades aient tous la conscience de la nécessité
de cette mesure. Celte conscience collective est élaborée par le
but tracé d'avance, les procédés définis et les rapports mé-
thodiques, et, de son côté, favorise le perfectionnement de
tous les moyens qui contribuent it ce que les malades, même
les plus agités, prennent l'habitude du lit. Parmi les facteurs
qui agissent dans ce sens, est celui-ci, à savoir que l'on
engage chaque malade nouvellement arrivé à se mettre au
lit, et le temps qu'il y séjournera dépend uniquement de son
état de santé apprécié par le médecin; les malades ne gar-
dent que leur linge de corps et sont couchés de préférence
dans les salles communes. C'est l'expérience et l'intelligence
du personnel surveillant qui dictent l'ordre de la répartition
des malades. Dans la plupart des cas, l'effet suggestif du
milieu sur la sphère psychique du malade est tel qu'il reste
couché sans protestation. Chez les malades agités il n'est pas
rare de voir que les premiers jours ils s'y obstinent un peu,
mais cela dure ordinairement très peu, un jour ou deux,
après quoi ils se couchent de leur propre chef. Il en est ainsi
280 THERAPEUT1QUE'.
dans la plupart des cas, lorsque le malade se trouve dans la
salle commune.
Cependant il y a, incontestablement, des cas où le malade
proteste beaucoup contre ce régime. On se comporte alors
différemment avec lui : tantôt il est isolé, mais ayant la
liberté des mouvements dans sa chambre, tantôt il est main-
tenu au lit.
Plusieurs des aliénistes s'élèvent avec raison contre le
maintien au lit par des infirmiers : il irrite souvent les
malades ne pouvant souffrir aucun contact, augmente
l'excitation, s'accompagne de lésions, comme meurtrissures,
ecchymoses, et constitue par lui-même une violence grossière.
- C'est pourquoi beaucoup le repoussent absolument. Quant
à moi, il faut que je dise que je ne crois pas que l'on ne
doive jamais user de ce moyen : il est nécessaire lorsque le
malade tend à se faire des lésions importantes, il est quel-
quefois également nécessaire pour que le malade reste au lit.
Il y a des malades pour lesquels le repos au lit est une indi-
cation vitale (des malades fortement excités, avec une tem-
pérature élevée, disposés à un épuisement rapide). Dans des
cas pareils il est préférable de recourir au maintien que de
laisser le malade dépérir dans la chambre isolée. Mais si
j'admets dans quelques cas isolés le maintien des malades au
lit par les infirmiers, je ne saurais trop insister sur ce qu'il
est provoqué uniquement par des indications exceptionnelles
et n'entre nullement comme élément dans le système d'alite-
ment, comme n'entre pas non plus dans le système de No-
Restraint la camisole en cas de lésions chirurgicales, bien
qu'elle soit admise dans les établissements où ce système se
pratique. Et de même que dans le système du ce No-Res-
train » on arrive à la fin des fins à ne pas être forcé de re-
courir à la camisole pour les malades chirurgicaux, de même,
en imposant progressivement le régime au lit régulier, on
finit par être de moins en moins obligé de faire maintenir les
malades dans leur lit.
Il ! . L'organisation d'une surveillance régulière constitue le
troisième élément fondamental du système d'alitement. Quel-
ques-uns croient précisément que ce qui caractérisait le nou-
veau système, c'est qu'il se pratiquait dans le soi-disant ce quar-
tier d'observation », où l'on mettait tous les malades qui
DE l'alitement. 281
exigeaient une surveillance particulière, les dangereux ainsi
que les faibles, avec des maladies aiguës et tous ceux qui
venaient d'entrer à l'asile. Je considère également l'orga-
nisation spéciale de la surveillance comme un élément né-
cessaire du système en question, mais l'essentiel pour moi,
c'est que tous les gens du service et les malades se pénètrent
de la notion qu'il faut une surveillance qui ne porte pas tant
le caractère d'une surveillance de garde, mais qui se traduit t
plutôt par des soins ou une façon d'observer, de guetter les
différentes manifestations de la maladie, les psychiques entre
autres, bien entendu. Je considère comme faux de concentrer
les soins de ce genre seulement dans les quartiers d'observa-
tion. Ils doivent être répartis dans tout l'asile, et non pas
dans un ou deux pavillons d'observation. Je suis complète-
ment d'accord avec ceux qui croient que l'entassement dans
la même salle des malades de nature très différente puisse
être pénible pour bien des malades, et alors la division du
local par des paravents mobiles ou des cloisons n'allant pas
jusqu'au plafond ne fait pas grand'chose. Il est beaucoup
plus pratique d'avoir pour les malades qui agissent mal l'un
sur l'autre, des locaux différents dans lesquels la surveillance
et les soins sont également constants et ponctuels. Avec
un régime d'alitement bien organisé, cela ne demande pas
d'aâmeutalion du nombre des infirmiers; il faut seulement
que les locaux soient disposés de façon à ce que les infirmiers
en réserve puissent rapidement arriver à l'endroit où l'on en
aurait le plus besoin.
Les quelques malades qui sont excités par la présence
d'autres malades ou qui sont agressifs, doivent être traités
dans des chambres il part qui n'ont cependant rien de com-
mun avec les cellules habituelles. Nous avons des confrères,
le professeur Betcherew et ses élèves, par exemple, qui con-
sidèrent que le régime au lit dans des chambres séparées,
aux portes ouvertes, est préférable à celui dans des salles
communes. Mais je suis d'un autre avis : le système de
régime au lit réussit particulièrement bien et produit son
puissant effet précisément là où on l'applique dans des
salles communes. Dans les maisons de santé privées où les
malades ont des dlambl es à part, l'effet n'est plus le moine.
Il va sans dire qu'on doit avoir dans chaque asile des pièces
pour une personne, mais ce n'est pas la base du système du
282 THÉRAPEUTIQUE.
régime au lit. En outre, la surveillance dans les chambres
séparées a souvent un caractère importun, agaçant, tandis
que, dans les salles communes, répartie qu'elle est sur plu-
sieurs malades, elle a plutôt l'air de soins prodigués.
IV. Je disais plus haut que j'aurais volontiers ajouté au
nombre des éléments fondamentaux du système d'alitement,
la condition absolue de mettre hors d'usage les chambres
isolées d'ancien type. Je crois qu'il n'y a rien qui favorise si
fortement le développement du régime au lit que la décision
prise de ne point se servir de telles chambres. Ainsi que la
résolution formée de ne plus employer la camisole de force
a créé toute une série de moyens, qui appartiennent au côté
dit positif du système No-ResLraint, il en est de même du
rejet de l'usage de chambres isolées (j'ai en vue les cellules
de l'ancien type) qui doit faire naître une série de mesures
positives et le perfectionnement du système en question.
C'était précisément l'idée qui nous guidait, nous, le docteur
Govséiew à Ekaterinoslaw, par exemple, et moi à la clinique
de Moscou, et nous avons réussi l'un et l'autre à faire tom-
ber l'isolement cellulaire en désuétude complète. Cependant
beaucoup d'honorables aliénistes ne croient pas possible de
le bannir complètement et s'en servent il côté du régime au
lit. C'est pourquoi je renonce à considérer le non-usage des
cellules comme un élément indispensable du système d'alite-
ment.
Le système du repos au lit bien organisé a des avantages
incontestables. Comme ils sont connus de tout le monde, je
n'en énumérerai que les principaux : l'augmentation de
l'ordre extérieur et de la bonne organisation des asiles, sur-
tout de ceux qui sont pauvrement montés et très encombrés;
la diminution de conséquences défavorables de l'isolement,
les soins étant devenus plus faciles, une plus grande garantie
de la sécurité, l'amélioration de l'observation clinique et du
traitement des malades; d'aulres y ajoutent : l'augmentation
du nombre des guérisons, la réduction du coût d'assistance
et la simplification du traitement par la ce décentralisation
de la psychiatrie », car le régime au lit donnerait la possibi-
lité de soigner ces malades dans des salles qui leur serait
assignées aux hôpitaux, mais ce dernier point est encore con-
testable.
A côté des partisans entraînés du régime au lit qui y voient
DE l'alitement. 283 3
un très puissant moyen dans le traitement des aliénés,
capable de convertir tout asile d'aliénés défectueux en un
hôpital bien organisé, il existe assez de sceptiques qui regar-
dent le nouveau régime comme un entraînement et même
un pas en arrière en psychiatrie. Bien que je doive recon-
naître que beaucoup des objections que l'ont les adversaires
du régime sont judicieuses, il n'en est pas moins vrai que
tous les reproches ont trait non pas au système même, mais
aux abus qu'il entraîne.
En effet, il peut y avoir des abus avec le régime au lit. -Le
premier que je voudrais signaler c'est que ce système prédis-
pose beaucoup à l'inactivité, au quiétisme, non seulement les
malades, mais aussi les médecins. C'est qu'effectivement,
très souvent, avec ce régime on prête très peu d'attention à
tout ce qui pourrait éveiller l'énergie psychique du malade,
on pense peu à ce qui pourrait utilement l'occuper, aux dis-
tractions. On dit même par une sorte d'opposition : le régime
au lit serait propre aux maladies aiguës, le régime ouvrier
aux maladies chroniques. C'est tout à fait inexact. Presque
tous les malades, après une certaine période, parfois courte,
de leur maladie aiguë, ont besoin d'une stimulation intel-
ligente de leur énergie psychique, et non pas d'une dépres-
sion de celte énergie. On dit couramment : les maladies
mentales sont des maladies comme celles du corps, et si le
repos est nécessaire aux dernières, il en est de même aux
maladies mentales, mais on ne tient pas compte du fait que
même dans le traitement des maladies somatiques on
s'adresse souvent aux exercices et aux mouvements appro-
priés. Ceux de nos collègues, qui prennent plaisir à noter
que sous le régime d'alitement les asiles d'aliénés ressem-
blent beaucoup aux hôpitaux somatiques, ont l'air d'oublier
que ce n'est pas toujours un éloge qu'ils leur font : ainsi,
dans un asile d'aliénés bien organisé, il doit se faire pour les
malades beaucoup plus que dans les hôpitaux somatiques
qui manquent même parfois de jardins pour les prome-
nades, et sous ce rapport ce n'est pas aux établissements
consacrés aux aliénés que d'imiter les hôpitaux somatiques,
mais bien le contraire.
Ce qui concerne la prédisposition à l'inactivité (le quié-
tisme), elle n'est pas une conséquence nécessaire du système
du régime d'alilement. C'est un abus ou un malentendu. Ça
284 THÉRAPEUTIQUE.
ne doit pas arriver si le régime est bien réglé, comme je l'ai
indiqué plus haut. On n'a recours au repos au lit absolu,
qu'après avoir bien pesé toutes les indications et les contre-
indications et on le remplace aussitôt que possible par le
repos modéré ; aiusi on arrive parfaitement à combiner ce
'système avec le régime ouvrier ainsi qu'avec l'influence
morale qui réveille l'énergie.
La seconde objection que l'on fait au système en question
c'est que, en cas, qu'il est suivi par de la contention forcée par
les in11l'Il11el's ou bien par des enveloppements, etc., il est
un retour au système restreint. Mais, comme je le disais
plus haut, le régime au lit bien organisé n'a presque rien
de commun avec la contention, comme élément du système.
Le maintien par les infirmiers n'est effectué que s'il y a une
indication individuelle, ce qui peut arriver avec n'importe
quel système, ou bien il n'est qu'une irrégularité ou un abus.
Mais on ne peut certainement pas nier que cette mesure
provoque parfois des protestations de la part des malades et
ne soit pas par conséquent un objet de vexation : mais pour
le moment nous ne pouvons pas encore, dans le traitement
de tous les aliénés, leur éviter toute vexation, du moins dans
la plupart des hôpitaux : le placement lui-même à l'hôpital
en est souvent une.
La troisième objection à faire, c'est que ce n'est pas encore
suffisamment clair à quel point le repos au lit prolongé
puisse en général être utile ou nuisible, et cependant plu-
sieurs de nous considèrent comme élément principal de ce
régime le séjour au lit prolongé pendant des mois et qu'il
soit presque absolu. Mais j'ai eu déjà l'occasion de dire, que
l'examen rigoureux de chaque cas particulier est indispen-
sable et doit nous guider dans les indications du régime,
comme d'un moyen thérapeutique.
Il est vrai que les indications et contre-indications du repos
absolu comme moyen thérapeutique chez les aliénés n'ont
pas encore de base scientifique rigoureuse. Si étrange que
cela paraisse, il en est pourtant ainsi : depuis les temps im-
mémoriaux on se sert de la position horizontale et du repos
au lit comme d'une mesure thérapeutique générale, et cepen-
dant il y a très peu de recherches bien scientifiques relatives
à l'effet du régime au lit, et encore moins relativement à son
effet sur les fonctions de l'organisme qui sont aussi impor-
DE l'alitement. 285 5
tantes dans la thérapeutique des maladies mentales. Nous
avons bien depuis quelque temps toute une série d'observa-
tions prises sur des aliénés traités par le repos au lit, comme,
par exemple, celles des docteurs Trapeznikow, Ossipow,
Lacombe, Toulouse et Marchand, Glaussalles et d'autres.
Ces recherches ont démontré que l'effet calmant du repos et
de la position horizontale sur le travail du coeur et la res-
piration était incontestable et que, par conséquent, l'action
favorable de l'alitement sur beaucoup d'états affectifs était
hors de doute, mais cela n'est pas suffisant cependant : il
serait de la plus haute importance pour nous de savoir à
quel point le repos au lit est susceptible, surtout chez les
aliénés, de paralyser l'énergie de l'activité psychique et la
force directrice de l'esprit (l'aperception active de Wundl),
laquelle faiblit si souvent dans les psychoses. 11 n'y a pas eu
de recherches du tout à ce point de vue, autant que je sache,
et cependant on se pose involontairement la question, si le
séjour au lit par trop prolongé ne pourrait pas, en affaiblis-
sant l'énergie mentale, contribuer au passage des formes
curables de ce l'amentia » en formes incurables, et si, la
forme diagnostiquée « dementia præcox » ne sérail parfois
qu'autre chose que la terminaison défavorable d'un proces-
sus curable et qui s'expliquerait par le non- emploi opportun
des moyens stimulant l'énergie de l'activité psychique; on se
demande aussi s'il n'y a pas quelque rapport de cause à effet
entre la fréquence plus grande du diagnostic de ce dementia
prrccox » et l'application du repos au lit prolongé chez des
sujets jeunes dans quelques hôpitaux.
Ensuite, bien que le traitement au lit soit employé avec
succès pour le traitement des clVorotique, nous savons très
peu de chose sur l'effet du repos au lit prolongé sur l'héma-
tose, sur la composition du sang et sur l'expulsion de l'orga-
nisme des produits de désassimilation et des toxines. Et
cependant c'est très important pour les psychoses qui dépen-
dent souvent d'auto-intoxication. L'expérience nous appre-
nant que le repos prolongé a une action indubitable sur les
échanges, on peut admettre théoriquement que l'absence des
mouvements ne reste pas sans influence sur les os et la
moelle osseuse, par conséquent sur la composition du sang.
Sous ce rapport il nous faut des recherches exactes et jus-
que-là nous ne pouvons marcher qu'à tâtons et n'établir les
286 THÉRAPEUTIQUE.
indications et les contre-indications que d'une façon empi-
rique.
Nous savons cependant par expérience que l'effet théra-
peutique du 'régime au lit sur les maladies mentales est
incontestable. Certaines formes graves avec le complexus
symptomatique de «-delirium acutum » ou « delirium tre-
mens fébrile » sont devenues sous ce régime presque toutes
non mortelles, d'autres formes avec l'excitation maniaque
suivent leur cours d'une manière beaucoup plus tranquille ;
les cas de suicide sont devenus plus rares chez les mélanco-
liques, les malades faibles conservent plus de forces avec le
régime au lit. D'où l'indication formelle du régime au lit
plus ou moins constant et d'une durée plus ou moins longue
chez la plupart des malades agités, surtout les maniaques
purs, les malades faibles et fébriles, les mélancoliques, enfin,
chez presque tous les malades atteints de formes aiguës des
psychoses à leur période initiale. Lorsque la maladie passe
de la période initiale à la phase stationnaire, il faut user du
régime au lit avec prudence et de n'en pas abuser en durée.
Il faut toujours penser au fait que nous ne savons pas encore
comment le repos au lit agit sur l'énergie de la force direc-
trice de l'esprit dans les formes si fréquentes d' « amentia »
(confusion mentale, amentia Meynert, dysnoia). Dans l'igno-
rance où nous sommes il ne faut jamais oublier le premier
précepte de la médecine « non nocere » et ne pas dédaigner,
à cause de la commodité et de la facilité du maintien au lit
des amentiques les moyens dont on use avec succès dans les
hôpitaux bien organisés, où le système du travail est régu-
lièrement établi et où l'on pratique d'une manière suivie
l'influence morale intelligente. En disant cela, je ne veux
point contester l'utilité du régime qui nous occupe ; bien au
contraire, ce que je dis là ne fait que ressortir ce qui est,
selon moi, nécessaire comme élément fondamental d'un
système bien organisé, à savoir, l'individualisation rigoureuse z
du régime au lit comme moyen thérapeutique.
Il m'est impossible de m'arrêter plus longtemps sur mes
idées relatives aux indications et aux contre-indications.
J'en parle davantage dans un article plus long consacré à
cette question.
De même je ne puis aborder ici qu'en passant la question
de savoir quelles seraient les modifications que le régime au
DE l'alitement. 287 Î
lit amènerait dans la construction des asiles d'aliénés. Les
changements essentiels ne seraient pas bien grands. Il faut
la même organisation des ouvrages, des occupations et des
distractions; il faut également des salles communes, les
dortoirs ainsi que des résidences de jour. Il n'y a que les
dortoirs qui doivent être disposés d'une façon plus hygié-
nique (du côté ensoleillé) et offrant plus de facilité pour les
soins et la surveillance ; il est préférable de disposer les
dortoirs surtout pour les malades agités à l'étage inférieur
(rez-de-chaussée) pour que l'on puisse rouler leurs lits dans
le jardin. Ensuite on n'a pas besoin du tout des bâtiments
composés uniquement des pavillons isolés (cellules). Les
pièces à un lit doivent se trouver près des salles ou des dor-
toirs communs, où les malades sont alités.
CONCLUSIONS
1. Dans la question du traitement des maladies mentales
par le repos au lit il faut distinguer le « système d'alitement»
comme mode d'organisation intérieure des asiles et l'usage
d'alitement comme moyen thérapeutique.
2. Les bases du système de l'alitement sont les suivantes :
a) l'usage du lit est considéré comme un élément essentiel
du traitement ; b) le séjour au lit est obtenu non pas par
violence, mais au moyen de l'influence morale et de l'effet
suggestif du milieu ; c) il doit avoir une organisation parti-
culière de la surveillance qui ne serait qu'une manière de
soigner les malades et de suivre et de bien observer les symp-
tômes physiques et psychiques de la maladie.
Le refus de se servir par principe des cellules n'est pas
une condition fondamentale du système en question, mais il
contribue puissamment au développement du régime au lit;
d'un autre côté la diminution d'usage des cellules est un des
premiers bienfaits de ce régime.
3. La régularisation exacte du temps de séjour des ma-
lades au lit, des promenades et des occupations en dehors
du lit constitue la partie essentielle de ce système ; le séjour
au lit doit être réglé dans tous ses détails depuis le séjour au
lit absolu jusqu'au plus limité.
4. L'usage des salles communes est un puissant moyen
dans l'organisation régulière du système d'alitement. Bien
que l'on soit obligé d'appliquer le régime au lit également
288 8 THÉRAPEUTIQUE.
dans les chambres séparées, cela a dans le système en
question une importance secondaire. Le maintien forcé au lit
n'est pas un élément du régime d'alitement comme système.
5. Les principaux avantages du régime au lit sont : un
plus grand ordre dans l'asile, surtout s'il est encombré, une
sécurité plus grande'pour les malades, une plus grande faci-
lité pour leur donner des soins et pour l'observation clinique;
usage restreint des chambres isolées ; le système du repos au
lit est susceptible d'abolir complètement l'emprisonnement
dans les cellules. Les maladies caractérisées par un état
d'agitation ont une marche plus modérée; dans les asiles, où
le système d'alitement est appliqué, la mortalité de quelques
psychoses graves aiguës est notablement diminuée.
6. Avec le système du régime au lit il ne faut pas non plus
négliger les autres systèmes qui agissent favorablement,
comme celui de l'influence morale, celui de No-Restraint,
du régime ouvrier ou des portes ouvertes. Une combinaison
heureuse de ces systèmes est très possible. Le quiélisme, qui
se développe parfois, sous l'influence du régime d'alitement,
chez le personnel médical de l'asile, n'est qu'un abus.
7. Les indications pour le repos absolu ne sont établies
que d'une manière très insuffisante. Pour avoir des. indica-
tions à base scientifique, il est nécessaire non seulement de
multiplier les recherches, mais aussi d'élargir leur sphère.
Ce qui mérite d'être étudié, c'est l'effet du repos au lit et du
manque d'exercice sur la composition du sang, l'expulsion
de l'organisme des toxines, sur les fonctions psychiques,
surtout sur l'énergie de la force directrice de l'esprit (l'aper-
ception active).
8. L'indication principale pour le repos au lit est l'état
d'excitation des malades. Le régime au lit très prolongé et
appliqué d'une manière rigoureuse est contre-indiqué chez
les malades à l'intelligence paresseuse, prédisposés à l'apathie,
à l'anémie et à la masturbation. Il serait très important
d'étudier l'effet que ce régime produit sur les maladies psy-
chiques chez les sujets jeunes pour que celles-ci deviennent
chez eux incurables.
9. Le repos au lit doit être appliqué d'une manière diffé-
rente suivant les indications individuelles presque à toutes les
psychoses à forme aiguë, surtout à la période initiale de la
maladie. 11 agit surtout favorablement sur la plupart des ma-
SYNDROME DE BASEDOW POST-TYPHOÏDIQUE. 289
lades maniaques, sur ceux qui souffrent du délire alcoolique,
dans beaucoup des formes de confusion mentale et de mé-
lancolie. Il peut y avoir des indications vitales à l'appliquer
chez des malades dont le trouble mental se rattache à une
infection, une haute température et chez les personnes très
épuisées.
CLINIQUE NERVEUSE.
Syndrome de Basedow post-typhoïdique ;
Par F. BENOIT,
Médecin major de 3'' classe.
Répétiteur l'Ecole du Service de Santé militaire.
B. , vingt-deux ans, originaire de la Loire, soldat aux batte-
ries à cheval du G° régiment d'artillerie, enlre à l'hôpital militaire
d'instruction Desgenettes, le 18 septembre 1897, pour dothiénen-
thérie classique, avec prostration, céphalalgie, bourdonnements
d'oreilles, épistaxis, éruption de taches rosées, séro-diagnostic
positif (21 octobre), Mère rhumatisante, sujette à des bouffées de
chaleur : il dit avoir un oncle mort de mort subite étouffé en cou-
rant après des boeufs échappés : cet oncle se plaignait de son coeur
depuis plusieurs années; il ne pouvait se livrer qu'à de petits tra-
vaux. Grand'mère et tante, affectées de goitre. Lui-même, à l'âge
de seize ans, eut une première attaque de rhumatisme articulaire
aigu, puis quelques accès de tachycardie avant sa maladie actuelle
toutes les fois qu'il montait il cheval. En 1891, il avait eu l'in-
fluenza ; vers la même époque, il fit une chute de trois mètres de
hauteur, qui n'eu), pas de suite. Le 3 février 1897, il avait fait une
première entrée à l'hôpital Desgenettes, où il avait été soigné
jusqu'au 2 mars de la même année pour une attaque de rhuma-
tisme compliquée d'endocardite, dont il ne resta aucune trace
qu'un peu d'oedème transitoire des jambes. Il eut alors un congé
de convalescence.
Cette fièvre typhoïde suivit un cours très régulier, sauf que,
pendant la convalescence, il s'établit une tachycardie tenace, allant
au début jusqu'à 150 battements à la minute, puis oscillant entre
110 et 120.
Ai-.r.nnE : , e sél ie, t. X. 19
290 CLINIQUE NERVEUSE.
Cette complication attira l'attention vers le 23 ou 21 octobre ;
elle fut traitée par 4 grammes de bromure de potassium et de
bains tièdes d'une demi-heure de durée tous les jours : il n'y avait
ni albuminurie, ni hypertrophie du coeur. Le 10 novembre, le pouls
se maintenant autour de 112, il fut commencé un traitement par
le sulfate d'atropine à la dose de un demi-milligramme par jour et
le surlendemain 12 novembre, on s'aperçut pour la première fois,
d'un léger tremblement de mains, les réflexes étant normaux.
La situation était en l'état, avec quelques palpitations par inter-
mittences, et l'administration d'un peu de salicylate de soude en
raison de l'ancienne détermination rhumatismale sur le coeur,
lorsque, le 29 novembre, en pleine convalescence de sa fièvre
typhoïde, le malade attire l'attention sur son cou qui avait déme-
surément grossi : il ne pouvait plus boutonner le col de sa che-
mise. On constata en effet, l'existence d'un goitre de volume
modéré, souple, sans kystes, ne présentant aucun souffle à l'aus-
cultation avec le stétoscope : c'était une tuméfaction assez appré-
ciable, suivant la trachée dans les mouvements de déglutition. 11
ne fut pas possible de savoir si B... avait quelque commencement
de goitre avant la tuméfaction actuelle de sa thyroïde, et il a été
d'autant moins fait de tentative d'exploration bactériologique par
la ponction, au point de vue de l'existence du bacille d'Eberth,
dans cette glande hypertrophiée que ces tentatives sont particu-
lièrement infructueuses lorsqu'il n'existe pas d'abcès collecté
(Jeanselme). Pas de douleur spontanée ou provoquée par la palpa-
tion ni par les mouvements dn cou. Pas de réseau veineux super-
ficiel; aucun indice de fluctuation ni de ramollissement sur aucun
point. Il persistait un tremblement oscillatoire très fin des mains,
et on pouvait constater en même temps, un éclat du regard très
notable sans grande exophtalmie. Les autres signes de la maladie
de Basedow, signes de Graefe et de Moebius, faisaient défaut; mais
le malade avait des bouffées de chaleur le surprenant subitement
dans la soirée, et accompagnées quelquefois d'hyperthermie ob-
jectivement constatable avec poussées sudorales. La mensuration
du cou, faite dans la position d'extension, donnait 43 centimètres
de circonférence, à 8 centimètres au-dessus de la fourchette ster-
nale.
Cet état demeura sans grande modification jusqu'au 9 février 1898
où le malade sortit de l'hôpital militaire Desgenettes pour aller
en congé de convalescence de trois mois. Pendant ce temps, il fut
possible de constater à diverses reprises l'émotivité anormale de
B..., qui par exemple s'affectait jusqu'au point d'en avoir les lar-
mes aux yeux, du départ d'un voisin de lit. De plus, il désespérait
facilement de sa situation, disant qu'il avait toujours souffert de
palpitations; mais que celles-ci s'étaient exaspérées depuis sa
fièvre typhoïde, qu'il ne guérirait jamais, etc.. Le sort tragique
SYNDROME DE BASEDOW POST-TYPHOÏDIQUE. 291
de son oncle paraissait en particulier toujours présent à son esprit
et à ses préoccupations.
Le volume du goitre, malgré de nombreuses tentatives thérapeu-
tiques, resta à peu près stationnaire, autour de 43, 42 ou 41 centi-
mètres de tour de cou. Le pouls persista également aux environs
de 92, 96, 100, 110 battements à la minute : à aucun moment, le
coeur ne présenta de signes d'affaiblissement, ni de dilatation.
Toutefois, surtout dans la période terminale de ce second séjour
à l'hôpital, il s'établit des intermittences perçues par le malade et
quelquefois par le médecin, qui n'étaient jamais bien tenaces ni
bien intenses et survenaient surtout le matin. De temps en temps;
de violentes crises de palpitations, venaient au dire du malade,
compliquer ce tableau; mais elles n'ont jamais été constatées
objectivement.
Parfois un peu d'oedème prétibial provoqué surtout par les
efforts du malade pour marcher. Le tremblement oscillatoire menu
des mains persista jusqu'à la fin du séjour de B... à l'hôpital, in-
terrompu par les mouvements intentionnels. Les réflexes étaient
conservés, sensibilité et motilité intactes; aucun stigmate d'hys-
térie. L'éclat du regard persista également jusqu'à la lin du séjour
du malade à l'hôpital. L'urine ne présenta jamais ni sucre ni
albumine ; l'épreuve de la glycosurie alimentaire, essayée le
28 décembre 1897 avec 150 grammes de sirop de sucre, eut un
résultat négatif.
Le traitement varia à diverses reprises, à cause de l'échec de
toutes les thérapeutiques employées. Successivement, B... fut soumis
au régime des bains tièdes prolongés, avec 2 grammes de bro-
mure de potassium par jour, puis 3 grammes d'iodure de potas-
sium, à des badigeonnages de teinture d'iode et de pommade iodu-
rée au niveau du goitre ; il fut également fait des applications
locales de glace sur ce goitre, et des lotions froides générales sur
le tégument. Enfin, le 2 janvier 1898, il fut institué un traitement
par la glande thyroïde de mouton, dont le malade absorba tous
les jours deux lobes, sauf pendant une angine pultacée intercur-
rente, qui dura du 6 au 10 janvier. Ce traitement qui fut continué
jusqu'à la fin du séjour à l'hôpital, n'eut d'autre effet que de causer
a B... un amaigrissement de 9 kilogr. (71 kilogr. au lieu de 80).
C'est dans cet état que, le 9 février 1898, B... quitta l'hôpital mili-
taire Desgenettes pour aller en congé de convalescence de trois
mois.
Pendant ce congé, il continua à se plaindre, dans les lettres qu'il
nous adressa, de la perte des forces, et de ses palpitations qui
reprenaient avec intensité au moindre effort auquel il se livrait. Il
demanda et obtint une prolongation d'un mois.
Cependant, étant rentré à son corps, le 8 juin, il dut revenir à
l'hôpital le 13 du même mois pour une recrudescence de ses pal-
292 1-) CLINIQUE NERVEUSE.
pitations, amenée par quelques tentatives pour reprendre son
service. A ce moment, les symptômes basedowiens, n'étaient
guère atténués; les yeux étaient moins saillants, mais toujours
très brillants : ses parents, dit-il, lui en avaient fait l'observation,
et lui avaient fait remarquer à son arrivée chez lui l'éclat de son
regard : le tremblement vibratoire léger persistait : la circonfé-
rence du cou mesurée dans les mêmes conditions que précédem-
ment, était de 41,5 centimètres. Le coeur, légèrement amélioré, était
à 80; le pouls, ample, sans intermittences, ni arythmie d'aucune
sorte. Pas de dilatation du coeur, ni de souffle, pas d'oedème des
pieds; bouffées de chaleur, sommeil conservé, appétit médiocre.
Le 18 juin on s'aperçut que B... était porteur d'une blennorrhagie
pour laquelle il fut évacué sur le service du deuxième, blessés. Il
en sortit le 24 août 1898. 1
A l'occasion d'un quatrième séjour de B... à l'hôpital Desgenettes
causé par une attaque de rhumatisme articulaire subaigu (entré
le 2 janvier 1899) et qui se termina par son évacuation pour pelade
sur un service de blessés, du 20 janvier au 22 mars, nous pûmes
examiner de nouveau B... qui déclara qu'il allait mieux. Les in-
termittences avaient disparu depuis le mois de mai 1899, et les
sensations de chaleur avaient diminué. Le périmètre du cou, toujours
mesuré à 8 centimètres au-dessus de la fourchette sternale, était
de 41 centimètres : mais le coeur était toujours très rapide, 92 à
la minute, et présentait toujours un éréthisme notable. Pas de
souffle dans les veines. B... avait été installé dans les fonctions
d'employé au réfectoire, et ne montait plus il' cheval. Il fut libéré
avec sa classe, au commencement d'octobre 1899.
En somme, il s'agit, chez un jeune sujet, de souche incon-
testablement neuro-arthritique, de symptômes basedowiens
développés insidieusement au déclin d'une fièvre typhoïde de
moyenne intensité et s'accompagnant de tuméfaction du corps
thyroïde. Les thyroïdites consécutives à la fièvre typhoïde,
ne sont pas de constatation récente : elles ont fait l'objet de
plusieurs travaux' qui ne laissent pas de doute sur leur fré-
quence relative. Il semble résulter de la lecture des obser-
vations qu'elles ont une tendance manifeste à aboutir à la
Foi,giie. Contribution à l'étude de la. ihyroïdile typhique. (Archives
de médecine et de pharmacie militaires, 189G.)
Charvot. Etude clinique sur les goitres sporadiques infectieux. (Revue
de chirurgie, 1890.)
Pinclaud. Des thyroïdites dans la convalescence de la fièvre typhoïde.
Thèse de Paris, 1888.
Testevin. Thyroïdites infectieuses suppurées. {Archives de médecine et
de pharmacie militaires, 1899.)
SYNDROME DE BASEDOW POST-TYPHOÏDIQUE. 293
suppuration : aussi n'est-il pas surprenant que les chirurgiens
surlout s'en soient préoccupés. Il semble même que, de
toutes les infections qui peuvent se localiser sur cette glande,
l'infection typhoïdique soit celle qui ait le rôle étiologique
le plus important : c'est du moins la conclusion que tire
M. Jeanselme de l'étude très complète qu'il a faite des diverses
infections de la glande thyroïde '. Cette conclusion est encore
renforcée par la constatation positive qui a été faite dans
plusieurs cas du bacille d'Eberth à l'état de pureté dans le
pus des cas de thyroïdites abcédées (Jeanselme) et par la réali-
sation expérimentale de l'infection thyroïdienne typhoïdique
qu'ont réussie MM. Roger et Garnier en injectant des cultures
de bacilles d'Eberth, par la carotide des lapins liée à sa par-
tie supérieure 2. Cette infection peut d'ailleurs aboutir à trois
états anatomiques très différents, et de conséquences physio-
logiques très variables : la suppuration, qui semble être,
comme nous l'avons vu, l'issue la plus fréquente du travail
phlegmasique, la simple prolifération formative de l'épithé-
lium sécréteur, du tissu conjonctif interstitiel et de la sub-
stance colloïde, à laquelle nous rattacherons les troubles
observés dans le cas présent, ou enfin, la sclérose terminale
de l'organe qui peut aboutir, comme dans le cas récemment
décrit par notre camarade Remlinger 3, précisément à la
suite d'un processus très probablement typhoïdique, à un
myxoedème d'apparence spontanée, en réalité causé par l'atro-
phie de la glande thyroïde. Cette sclérose du corps thyroïde
a été également observée par MM. Roger et Garnier chez les
tuberculeux '.
Notons enfin que ces troubles sont survenus chez un
homme qui ne semble pas avoir eu de goitre antécédent. On
sait que cette particularité a été considérée comme très im-
portante dans la pathogénie des thyroïdites post-infectieuses,
le goitre antécédent constituant, a-t-on dit, un locus rnino1'is
1'esistantiæ qui devait appeler les infections. Or, si, à ce point
' Jeanselme. Thyroïdites et strumites infectieuses. (Gazette des ltûpi-
taux, 2 février 1891.)
2 Roger et Garnier. (Société de biologie, leur octobre 1898.)
3 Remlinger. Un cas de myxoedème spontané de l'adulte : guérison par
le traitement thyroïdien. (Archives de médecine et de pharmacie mils-
taires, 1899.)
* Roger et Garnier. Société de biologie, 30 juillet 185S.
294 CLINIQUE NERVEUSE.
de vue, nous ne relevons aucune propathie personnelle chez
B..., sauf, au point de vue de la maladie de Basedow, un
certain degré de nervosisme et la tendance possible du rhu-
matisme à se localiser sur le coeur, il nous est impossible de
ne pas remarquer que sa grand'mère et sa tante étaient affec-
tées de goitre, et que, originaire du département de la Loire,
nous pourrions répéter à son sujet, ce que disait M. le profes-
seur Charvot, dans un cas de même origine' :
« Le sujet est, comme dans nos autres observations de
thyroïdites aiguës sporadiques, originaire d'un département
noté à l'encre noire sur la carte du goitre. Et, bien qu'il ne
présente aucun antécédent héréditaire ni personnel, on peut
supposer que notre Auvergnat gardait toujours une prédis-
position goitreuse. »
Mais, si les thyroïdites post-typhoïdiques sont maintenant
bien connues, il n'en est pas de même des cas, où elles s'ac-
compagnent de troubles basedowiens. Nous n'en avons trouvé
dans la littérature qu'une seule observation de MM. Gilbert et
Castaigne=, où il s'agit d'une jeune fille de seize ans, sans
tare névropathidue, qui lit, à l'âge de quinze ans, une lièvre
typhoïde de trois semaines de durée et de formes régulières,
à la période d'apyrexie de laquelle apparurent quelques
douleurs vagues dans le corps thyroïde, avec augmentation de
la circonférence du cou; un mois après, les yeux devinrent
brillants, et, au moment où le fait fut publié, le sujet pré-
sentait tous les signes de la maladie de Basedow.
D'autres infections, également localisées sur la glande thy-
roïde, sont signalées comme ayant réalisé dans certains cas,
le syndrome basedowien. Dans la communication ci-dessus
citée de MM. Gilbert et Castaigne, il est question de deux
autres cas ayant donné lieu à des symptômes basedowiens,
et relevant, l'un, d'une infection indéterminée avec tuméfac-
tion des ganglions lymphatiques, l'autre, de la tuberculose.
Roux de Lausanne aurait observé un intéressant cas de stru-
mite après l'influenza dans la maladie de Basedow. G. Singer
de Vienne ? a observé dans cinq cas, au début de la thyroï-
' Charvot. Loco cilalo.
5 Gilbert et Castaigne. Infection thyroïdienne et goitre exophtalmique.
[Société de biologie, 3 juin 1899.) .
3 Roux de Lausanne. Cité par Jeanselme.
4 Cité par Jeanselme. Idem.
SYNDROME DE BASEDOW POST-TYPIIOÏDIQUE. 295
dite, de la paresthésie des mains. Il considère ce signe comme
l'indice d'un trouble fonctionnel de la glande thyroïde, car
il existe aussi dans la maladie de Basedow.
Si maintenant nous nous demandons comment les infec-
tions en général, et la fièvre typhoïde en particulier arrivent à
réaliser le syndrome basedowien, il semble que l'expérimenta-
tion et l'anatomie pathologique, nous donnent actuellement
une réponse satisfaisante. Dans les recherches anatomo-patho-
logiques consignées dans sa thèse 1, M. Garnier s'est, en effet,
constamment trouvé en face de lésions qui attestaient l'excès
de fonctionnement des éléments glandulaires spécifiques.
Dans l'infection éberthienne, à côté de lésions de phlébite
avec thrombose, « le parenchyme était en état d'hypersécré-
tion manifeste... les vésicules étaient revenues sur elles-
mêmes, remplacées par des amas cellulaires, tandis que le
tissu conjonctif voisin renfermait quelques traînées de ma-
tière colloïde ». Et ailleurs « la modification la plus fréquente
de la thyroïde infectieuse, consiste, chez l'adulte, dans l'hy-
peractivité glandulaire, avec sécrétion exagérée de matière
colloïde ». Il est même intéressant de constater, au point de
vue de l'action spéciale de la fièvre typhoïde sur la glande thy-
roïde que, presque seules, les injections de bacilles coli et de
bacilles d'Eberth, ont réussi à provoquer dans les glandes thy-
roïdes des animaux mis en expérience, les lésions d'excitation
sécrétoire, et l'issue de la matière colloïde hors des vésicules.
Or, sans prendre parti au milieu des théories qui, actuel-
lement se partagent la pathogénie de la maladie de Basedow,
il est permis de constater la faveur toujours croissante dont
jouit la théorie humorale, celle qui rattache les phénomènes
morbides observés à un excès de fonctionnement de la glande
thyroïde, à un hyperthyroïdation de l'organisme. Cette sub-
stance colloïde, de nature mystérieuse, que les recherches de
M. Garnier nous montrent expulsée des vésicules thyroïdien-
nes enflammées, et probablement aussi, des vaisseaux san-
guins et lymphatiques qui doivent assurer son emploi et sa
répartition convenables, constitue le produit de sécrétion
spécifique de la glande thyroïde, et rien d'étonnant à ce que
les infections, notamment la fièvre typhoïde, qui surexcitent
la formation de cette substance amènent à la fois l'augmen-
' Garnier. La gla»cle l/¡i/I'oïde dans les maladies infectieuses, Thèse
de Paris, 5 février 1809.
296 CLINIQUE NERVEUSE.
tation de volume de la glande thyroïde, et l'hyperthyroïdisa-
tion de l'organisme, qui se traduisent par le syndrome de Base-
dow. C'est, du reste, ce que disent MM. Gilbert et Castaigne :
« Depuis que MM. Roger et Garnier ont montré la fréquence
des lésions thyroïdiennes, au cours des maladies générales,
il ne semble pas inadmissible de supposer que les infections
peuvent jouer, non seulement un rôle prédisposant dans le
développement du goitre exophtalmique, comme on le croyait
autrefois, mais un rôle de tout premier ordre. L'infection se
localise pendant la période aiguë sur la glande, puis, après
guérison complète du malade, les lésions thyroïdiennes peu-
vent persister, entraînant tantôt une grande diminution de
sécrétion qui se traduit par le myxoedème, tantôt un trouble
spécial dans les fonctions thyroïdiennes, qui, cliniquement
est révélé par les signes de la maladie de Basedow. Pour
le myxoedème de l'adulte, M. Thibierge, se basant sur les
travaux de Roger et Garnier, a montré la réalité de la théorie
infectieuse : nous appuyant sur trois observations que nous
résumons, nous croyons pouvoir admettre, au moins pour un
certain nombre de cas, l'origine infectieuse du goitre exophtal-
mique. »
Peut-être, bien qu'il lui manque la vérification anato-
mique, pourra-t-on admettre notre observation comme un
appoint à cette théorie de l'origine infectieuse de certaines
maladies de Basedow. En tout cas, nous tenons à faire re-
marquer que, par ses caractères d'indolence et de souplesse,
d'absence de sclérose et de suppuration, la tumeur thyroï-
dienne semble bien, dans notre cas, avoir été constituée par
un tissu de nouvelle formation ayant conservé ses propriétés
de vitalité et par conséquent de sécrétions normales et même
exagérées. Remarquons en outre, que cet accident de la
convalescence de la fièvre typhoïde n'a pas été sans présenter
des conséquences assez sérieuses pour l'homme qui était vic-
time, et sans entraîner, notamment, jusqu'à la fin de son
service, une inaptitude presque complète au métier de soldat
d'artillerie qu'il faisait correctement auparavant, notam-
ment à cause de la tachycardie et des crises de palpitations
qu'il ressentait au moindre exercice un peu violent.
Tous les traitements ont échoué contre ce syndrome de
Basedow, et il est à craindre que l'existence ultérieure de cet
homme n'en demeure fort gênée.
PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.
L'énergie nerveuse et l'énergie électrique, à propos
de la théorie des neuro-diélectriques ;
Par le D' PAUL SOLFIER.
M. le docteur Binet-Sanglé a publié dans le dernier numéro
des Archives de Neurologie (septembre) une note sur
une théorie nouvelle dite des neuro-diélectriques, qui
n'est que le prélude d'un travail plus étendu devant
paraître ultérieurement. Cette théorie comprend deux points
de vue : l'un général, qui est le fondement même de la
théorie et qui ne tend à rien moins qu'à l'assimilation de
l'énergie nerveuse à l'énergie électrique ; l'autre particulier,
qui n'est que l'application de cette manière de voir à l'inter-
prétation des tremblements, des convulsions, des paralysies.
De ce dernier point de vue, je ne dirai rien; je me bornerai
à faire certaines remarques à propos du premier.
J'ai en ell'et soutenu moi-même une théorie semblable dans
des conférences faites cet hiver à l'Université nouvelle de
Bruxelles sur l'énergie psychique. Ces conférences sont d'ail-
leurs inédites, car je ne juge pas la question assez mûre,
les conclusions assez solides pour leur donner une forme
plus .définitive. Je n'en parlerais donc pas si je n'avais d'autre
partémisdans un récent ouvrage, le Problème de la mémoire,
, paru en janvier dernier dans la Bibliothèque de Philosophie
Contemporaine, une théorie du mécanisme de la mémoire
basée sur les analogies entre les phénomènes psychiques et
les phénomènes électriques, où se rencontrent la plupart des
opinions que soutient M. Binet-Sanglé. Cet auteur parai.ssant
ignorer ce travail, je crois devoir en rappeler ici certains
points, et je serai heureux si, dans l'étude qu'il nous annonce,
il peut nous apporter des arguments démonstratifs à l'appui
de mes idées qui sont aussi les siennes.
A ce propos, je crois devoir relever que les critiques qui
ont été faites de ma théorie de la mémoire ont paru mécon-
naître sa portée. Analysant les diverses phases d'un acte
mnésique, je me suis attaché à montrer que chaque événe-
ment de cet acte pouvait être reproduit par des appareils
298 PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.
électriques, communs, réalisés et relativement simples et
grossiers. Mon but, en mettant ce fait en évidence, n'était
pas de prétendre que la force produite par le fonctionnement
du système nerveux était de nature électrique. Je voulais
simplement démontrer que cette force ne se distinguait en
rien d'une force physique, et était absolument comparable à
l'électricité. Chaleur, lumière, son, électricité ne sont - on
le sait aujourd'hui,- que des formes différentes de l'énergie
dont on peut établir l'équivalence. Ce que je soutiens, c'est
que la force nerveuse n'est également qu'une forme de
l'énergie : se confond-elle avec une des formes connues, et
avec l'électricité en particulier, c'est possible ; je le crois
même volontiers et j'en verrai avec plaisir la preuve que
paraît nous en promettre M. Binet-Sanglé. Maiscela m'importe
peu : l'essentiel pour moi était de montrer que l'on n'a pas
besoin de chercher dans un principe spécial, inconnu, mysté-
rieux, ne ressemblant à rien dans la nature, la cause des phé-
nomènes psychiques, mais qu'on se trouvait au contraire en
présence de phénomènes d'ordre physique, régis par les lois
connues de la physique générale, produits, il est vrai, par un
appareil d'une structure particulière, d'où les différences
qu'on pouvait observer, différences de forme, mais non de
nature. La similitude est telle entre les phénomènes nerveux
et psychiques et les phénomènes électriques que je ne pouvais
trouver de meilleurs termes de comparaison pour établir le
mécanisme des premiers que de m'adresser aux derniers, d'au-
tant plus qu'il n'est aucun de ces phénomènes nerveux et psy-
chiques qu'on ne puisse reproduire au moyen d'appareils
électriques. 1
Le télégraphonepar exemple, encoreinconnu, au moins pour
moi, au moment de la publication démon livre, est venu don-
ner un argument nouveau à ma manière de voir sur la fixation,
la conservation et la reproduction d'une impression reçue.
Je n'ai pas voulu conclure à l'identité des phénomènes
nerveux et électriques, et on s'est servi de cette réserve pour
en inférer que c'était un simple procédé de démonstration
que j'avais employé, alors que mon but était de démontrer
l'identité des phénomènes nerveux et psychiques, non pas
avec les phénomènes électriques plus qu'avec d'autres, mais
d'une manière générale avec des phénomènes d'ordre phy-
sique, et de faire rentrer ainsi ces phénomènes dans l'ordre
l'énergie NERVEUSE ET l'énergie électrique. 299
physique, dont on ne peut les faire sortir qu'en admettant
hypothétiquement l'existence d'un principe, d'une essence
particulière et presque surnaturelle *.
Mais je reviens aux différents points de la note de M. Binet-
Sanglé, que j'ai déjà soutenus dans le Problème de /6TMtë-
moire. Je crois avoir le premier montré les analogies entre
la mémoire et l'aimantation (p. 1). Le télégraphone, dont je
parlais tout à l'heure, rend mieux compte encore du méca-
nisme de la mémoire au moins dans ses premières phases.
De même pour l'analogie entre l'élément nerveux et l'accu-
mulateur (p. 1 G, 196, 202). Tout le long de mon travail, je
me suis efforcé à mettre en évidence cette analogie et à mon-
trer que le cerveau se comportait comme un accumulateur
électrique. Mais je dois ajouter que je suis arrivé à penser que
certaines parties du cerveau seules doivent être considérées
comme un accumulateur. Ce sont les centres percepteurs,
chargés de conserver les impressions, c'est-à-dire les lobes
frontaux.
Dans les autres parties de l'axe cérébro-spinal, les groupes
cellulaires semblent agir plutôt comme des condensateurs
(p. 215), comme M. Binet-Sanglé paraît d'ailleurs l'admettre
pour expliquer les parésies. J'ai montré en outre que cer-
tains phénomènes de mémoire ne pouvaient s'expliquer que
par les lois de résonance électrique.
Mais je crois que le principal rôle du système nerveux est
dans la transformation de l'excitation reçue. Les centres
récepteurs (sensitivo-sensoriels) du cerveau agissent en parti-
culier comme de véritables transformateurs et producteurs
d'énergie nerveuse.
Une excitation périphérique atteint l'extrémité du nerf. La
vibration ainsi produite se propage le long du nerf : c'est le
courant nerveux, mesurable et comparable à toutes les vibra-
tions d'ordre physique. Ce courant nerveux aboutit, en sui-
vant les fibres nerveuses, à des agglomérations de cellules
de l'écorce cérébrale, après avoir traversé un plus ou moins
grand nombre de postes intermédiaires. Il détermine, dans
les groupes cellulaires de l'écorce, une modification molécu-
' il. M. Ameline, dans sa thèse [Energie, entropie, pensée, Pans, 1898),
avait cherché déjà à montrer que le neurone est un système électro,-
capillaire qui transforme de l'énergie, et que les phénomènes mentaux
obéissent aux lois de la physique générale. '
300 PHYSIOLOGIE pathologique.
laire et par conséquent un état dynamique spécial, dont le
potentiel est dans un rapport constant avec le courant ner-
veux qui l'a produit, de même que celui-ci est exactement
correspondant à l'excitation qui l'a déterminé, quoique la
nature de cette excitation soit tout à fait différente de celle du
courant nerveux. -
De sorte qu'en fin de compte l'état moléculaire et dyna-
mique des centres récepteurs de l'écorce est dans un rapport
constant avec l'excitation provocatrice. En se propageant à
travers le système nerveux, la force qui a agi sur lui se trans-
forme donc, que ce soit une vibration lumineuse, thermique,
sonore, chimique ou électrique, ou une excitation purement
mécanique. Au niveau des neurones, ces différentes formes
d'énergie prennent une nouvelle forme : énergie nerveuse et
psychique.
M. Binet-Sanglé, se basant sur les irrégularités qu'on
observe dans le rendement si je puis dire du système
nerveux, pense qu'elles sont dues à des barrages, et ce sont
ces barrages qu'il appelle les neuro-diélectriques, sans d'ail-
leurs ce en quoi il a raison se prononcer sur la
façon dont se forment ces barrages. J'ai insisté tout particu-
lièrement aussi sur les résistances qui s'opposent au passage
du courant nerveux et à l'accumulation de l'énergie psy-
chique, et j'ai essayé de montrer comment les modifications
de la mémoire pourraient s'expliquer par les pertes qui se
produisent dans les diverses transformations que subit l'éner-
gie dégagée sous l'influence d'une excitation quelconque,
celles quirésultentdunon-fonctionnementdes organes, de son
usure par le fait de l'âge, les résistances qui proviennent de la
nutrition du cerveau, les fuites qui se produisent dans le trajet
du courant nerveux au niveau des groupes de neurones éche-
lonnés entre la périphérie et les centres et où il se décharge
en partie sous forme de mouvements réflexes, par exemple.
Je ne me suis donc pas borné à montrer qu'il peut y avoir
desbarragesplus ou moins résistants interposés sur le passage
du courant nerveux, mais j'ai encore étudié ces variations de
résistance et les causes de déperdition de l'énergie nerveuse.
J'ai même cherché à montrer (p. 197), à l'aide de ce qu'on
observe dans certaines affections mentales, que la résistance
du cerveau aux impressions qui l'atteignent peut être
mesurée par sa résistance au courant galvanique.
SECTION DE PSYCHIATRIE. 301 1
Ayant ainsi examiné les analogies qui existent entre tous
les phénomènes de la mémoire clef de voûte de l'édifice
intellectuel, et les divers phénomènes électriques, j'avais
été amené à une conception toute physique du méca-
nisme de la mémoire qui se calque sur ce qu'on peut obser-
ver dans les différentes formes et applications de l'énergie
électrique. C'est pourquoi j'ai cru devoir rappeler ici, à
propos de la partie générale et fondamentale de la théorie de
neuro-diélectriques de I. Binet-Sanglé, ce travail antérieur,
et probablement ignoré de lui, où il pourra peut-être trouver
des arguments à l'appui de sa thèse de l'assimilation de
l'énergie nerveuse à l'énergie électrique.
J'avais conclu à la similitude, ce qui m'importait seul pour
démontrer que les phénomènes psychiques pouvaient et
devaient se ramener aux lois de la physique générale;
M. Binet-Sanglé pense qu'il y a identité. Je serais tout dis-
posé à le croire, tant il y a d'arguments, pour ne pas dire de
preuves, qui militent en faveur de cette opinion qui n'est
d'ailleurs pas nouvelle, car il existe à l'étranger un institut de
recherches physiologiques fondé primilivement dans le but
de démontrer cette identité.
XIII» CONÇUES INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Section de Psychiatrie.
Séance du 4 août. Phésidence de M. MAGXAN.
Anatomie pathologique de l'iüotie; par G.-E. SHUTTLE\\·oRTII, I. D.
(etc.), ex-médecin en chef de l'asile Royal Albert pour les idiots
et les imbéciles (Lancaster) et FLETCIIER Br.vcii, M. B., F. IL C. P.
Londres,ex-médecin en chef des écoles de Darenth pour les enfants
imbéciles (Dartl'ord, Kent).
Déjà, à une époque aussi reculée que celle d'Hippocrate, les
caractères physiques de l'idiotie avaient été observés. Dans le pre-
mier volume de la traduction anglaise de ses oeuvres, nous trou-
vons une allusion à une nation sauvage du voisinage du Caucase
302 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
qu'on appelait « Macrocéphales » à cause d'une coutume des habi-
tants, de produire une déformation cranienne, chez leurs enfants,
car, pensaient-ils, « aux plus illustres, appartiennent les plus lon-
gues têtes ». « Dès le début, » écrit Hippocrate, « l'usage était la
cause principale de la longueur de leur tète; mais maintenant la
nature coopère avec l'usage... D'abord, l'usage agissait, de sorte
que cette conformation était le résultat de la violence; mais dans
le cours du temps, elle fut formée naturellement, de sorte que
l'usage n'eut rien à faire avec elle; car le sperme vient de toutes
les parties du corps, le sain des parties saines, et le malade des
parties malades. »
Nous citonscette doctrine hippocratique de la perpétuation, dans
la race, de caractères artificiellement acquis par les ancêtres, parce
qu'il est intéressant de noter les vues des anciens au point de vue
de la pathogénie des anomalies; mais nous avons besoin des
lumières des écrits d'Hippocrate aussi bien que de celles des
ouvrages de Pline (Gens maurocephali : oppidum ceS(l]'us" portus cor-
dolce) qui, lui aussi, mentionne les macrocéphales comme présen-
tant des anomalies mentales associées à une difformité physique
(fait dont la confirmation a été donnée par la découverte dans les
tombeaux de Kertch, en Crimée, de squelettes avec des crânes
présentant de telles déformations). Jugeant par ce que nous savons
de l'histoire des premiers habitants du Mexique, qui pratiquaient
une déformation semblable, il ne s'ensuit pas nécessairement que
l'atrophie mentale résultait de cette entrave à l'impulsion normale
du développement du crâne.
Tulpius (dans ses « Observations medicte rariores ») consacre un
chapitre à l'hydrocéphalie qu'il avait vue associée à l'idiotie. Dans
les oeuvres complètes de Willis (édition anglaise), nous trouvons à la
partie qui traite de l'anatomie du cerveau, la description, avec des
planches, du cerveau d'un jeune homme complètement imbécile,
dont les dimensions atteignaient à peine 1/5 du cerveau normal;
et cette observation est le premier travail scientifique que nous
puissions trouver de l'affection aujourd'hui décrite sous le nom de
microcéphalie.
Pinel, dans son Traité de l'Aliénation mentale décrit aussi, avec
des figures, deux cas de microcéphalie, et Gall et Spurzheim dans
l'Atlas qui accompagne leur Anatomie et Physiologie du cerveau en
général, et du caveau en pal'ticuliel', donnent des planches représen-
tant des têtes et des crânes de microcéphales et d'hydrocéphales.
Jusqu'à présent, les observations citées contenaient des rensei-
gnements surtout sur les anomalies de dimensions et de forme.
Mais nous trouvons, dans les Mémoires de l'il Académie de Berlin pour
1760 des observations de Meckel sur les déformations osseuses du
crâne, par rapport aux anomalies de l'encéphale. Tulpius remar-
que dans ses Observations medicæ rariores que, dans les cas d'idio-
SECTION DE PSYCHIATRIE. 303
tie observés par lui, les circonvolutions cérébrales étaient moins
nombreuses que d'ordinaire et Malacarne (Encephalotomia 111lOvn
universale) établit que les lamelles du cervelet augmentent ou
diminuent par rapport au développement de l'intelligence.
Plus tard, nous trouvons des observations relatives, non seule-
ment à la conformation, mais encore à la structure du cerveau.
Meckel, en 1760, notait qu'il avait remarqué chez les idiots, de la
sécheresse et de la dureté de la substance cérébrale. Bonnet et
Haller, ensuite relatent des tumeurs et des ulcérations, produites,
chez les idiots, dans les cas de troubles mentaux. Finalement,
Esquirol dans le chapitre sur l'idiotie et dans son traité classique
des maladies mentales, note que les circonvolutions cérébrales des
idiots sont, en règle générale, petites, atrophiées, compactes et
minces, et que les ventricules latéraux sont de faible capacité.
Du bref résumé historique que nous venons de donner, nous
retiendrons que les anciennes observations insistent davantage sur
les dimensions et la forme de la tête, dans l'anatomie pathologique
de l'idiotie, et ce n'est qu'à une période ultérieure que les particu-
larités morphologiques de l'encéphale furent décrites, tandis que
la structure intime du cerveau a été l'objet d'investigations relati-
vement récentes '.
Si nous passons maintenant aux opinions contemporaines, nous
voyons que la façon de penser moderne au point de vue des vices
mentaux, est de considérer la pathologie et la classification comme
mutuellement dépendantes. Et, suivant ce plan, nous classerons
l'anatomie pathologique de l'idiotie sous les trois chefs suivants :
I. Vices de formation congénitale.
H. Vices survenant au cours du développement.
111. Vices acquis ou accidentels.
Sous le premier titre nous groupons :
1° La microcéphalie.
2° L'hydrocéphalie.
3° La scaphocéphalie.
4° Les imperfections cérébrales de type « mongol », des tissus
osseux, cutané, muqueux et cardiaque.
5° Les cas névropathiques congénitaux (genetous).
6° Les cas amaurotiques.
7° Le crétinisme sporadique.
8° Les cas présentant des atrophies partielles et locales.
1° Par microcéphalie en relation avec les vices mentaux, nous
entendons l'exiguïté anormale de la tête avec une conformation
' Esquirol. Des maladies mentales, t. II, p. 343, se réfère à des
observations d'llippocrate sur les microcéphales, et que nous n'avons pu
vérifier.
304 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
spéciale, brièvement résumée ainsi : front fuyant rapidement, avec
développement imparfait du frontal : vertex conique et occiput
défectueux; signes caractéristiques de ce type. Nous ne reconnais-
sons de limite définie, ni à la dimension de la tête ni au poids du
cerveau per se constituant la microcéphalie, quand les conditions
précédentes manquent. Des cas ont été rapportés d'idiots dont la
tête mesurait seulementl2pouces (30 centimètres) (casdu D'Beacli,
1. 31. Congres Trans., 1881), 13 pouces 1/4 33,6 (cas du D'Wilbur,
rapport Neio-York LunnticAsylunz (1837) et 16 pouces 3/142,6 (cas
du Dr Shuttleworth .1ollrll. Menti. Science, oct. 1878). Les caractères
anatomo-pathologiques communs semblent être : un raccourcis-
sement postérieur des hémisphères cérébraux tel que le cervelet
restait découvert; l'arrêt de développement pendant la vie intra-uté-
rine, ayant empêché la croissance postérieure (probablement entre
le troisième et le quatrième mois de la gestation) des deux hémi-
sphères, et contrarié le développement en détail dans ces derniers,
une fois formés. Tandis que toutes les parties du cerveau sont très
réduites, il a été noté que le frontal et le pariétal étaient plus
développés que la région temporo-sphénoïdale et occipitale. Dans
les deux cas décrits par Cunningham et Tell'ord Smith (Transac-
tions de la Société royale de Dublin, volume V, 8° partie, p. 285-
z2), la réduction marquée de cette partie de l'hémisphère située
derrière la scissure de ltulando est notée. Ces autorités remarquent
(p. 331), dans la microcéphalie « le caractère notoire et essentiel
du cerveau réduit est l'état abortif du lobe occipital ». La place qui
nous est assignée ne nous permet pas de puiser plus largement
dans l'excellente monographie des auteurs ci-dessus mentionnés,
mais ils nous ont autorisés à montrer quelques-unes de leurs
illustrations. '
La synostose prématurée des sutures craniennes a été indiquée
comme une cause de microcéphalie, mais nos observations, parmi
lesquelles dans un grand nombre de cas les sutures étaient impar-
faitement fermées au 10°, 12°,15°, 19° et même à la 9° année contre-
disent cette manière de voir. Comme l'a très bien dit le professeur
Sir A. Iluinplirey, après un examen de 19 crânes de microcéphales :
ci Il n'y a rien, dans ces sujets, qui nous autorise à dire que le
développement incomplet du cerveau était le caractère dominant
de la difformité, » et, allant plus loin, il conclut que « la crois-
sance du cerveau est le facteur déterminant de la forme du crâne».
A l'examen microscopique, les cellules étaient de formation
simple, généralement arrondies ou ovalaires, avec peu d'apophyses,
lesquelles étaient petites, rabougries. Le noyau était ordinairement
au centre de la cellule et présentait une lacune arrondie : parfois,
il était à la base. Le contenu était formé de protoplasma faible-
ment coloré.
2° L'hydrocéphalie comprend à la fois les cas d'origine posté-
SECTION DE PSYCHIATRIE. 305
rieure et antérieure à la naissance. Mais dans les deux cas, la
forme de la tête, inversement ovoïde, si on la regarde par-dessus,
de contour globulaire avec une saillie au-dessus des tempes, est
absolument caractéristique. L'anatomie pathologique nous aidera
toutefois à distinguer les deux variétés, car, d'après Meynert, on
trouve dans l'hydrocéphalie congénitale une extension des ventri-
cules latéraux dans leur long diamètre; alors que dans les cas
acquis, l'augmentation se fait dans le sens vertical et transversal.
Dans les cas congénitaux, la membrane pariétale (épendyme),
limitant les cavités ventriculaires, peut être résistante et simple.
Les lésions de l'hydrocéphalie peuvent être asymétriques et con-
sister en une dilatation considérable de l'un des ventricules, l'autre
restant près des dimènsions normales, le ventricule droit étant plus
fréquemment frappé que le gauche (Bourneville, Recherches, 1898,
p. 01). La dilatation peut atteindre aussi les troisième et quatrième
ventricules, et la compression et l'atrophie des parties comprimées
peuvent en résulter; le septum interventriculaire peut s'effacer et
les hémisphères offrir une grande similitude avec un kyste volu-
mineux ; la totalité du liquide contenu mesurant fréquemment
plus d'une pinte (0 litre Gi9) ; dans un cas relaté par le 1)' Beach,
on a trouvé 3 pintes de liquide. Les os du crâne sont séparés par
une pression interne toujours croissante, et plus le malade est
jeune, plus grande est l'expansion. L'atrophie par compression est
la lésiuu caractéristique dans ces cas, qui affectent, chez les enfants
dans la période de croissance, aussi bien les cellules que les fibres
nerveuses. Parfois, comme dans un cas rapporté par Bourneville,
où les hémisphères du cerveau étaient absents, l'hydrocéphalie
primaire est associée à une malformation résultant peut-être d'une
atrophie par compression antérieurement à la naissance. Un cas
intéressant de l'association des deux formes que nous venons de
décrire a été publié par le D1' Alexander llill dans le XIXe volume du
Journal cl'aau(onaie et physiologie (p. 363-365), sous le titre de :
Anatomie d'un cerveau le.lromierocéphude. Uans ce cas (jeune homme
de dix-neuf ans), la tête mesurait 18 pouces I / (4G centimètr. 1/2),
mais on ne trouva rien de suggestif dans celte configuration. Le
poids du cerveau, après macération dans l'alcool pendant une
semaine, était de 10 onces 1/4 (`lui grammes) frais, il avait dû
peser probablement 15 onces (320 grammes), et les parties infé-
rieures des hémisphères étaient normalement développées; mais
les hémisphères eux-mêmes étaient remarquablement insulfisants,
les ventricules étant fortement dilatés avec des parois tellement
amincies qu'elles semblaient formées pour la plus grande partie
de membranes; pas plus du cinquième (t/5) du cortex normal
était développé. Celui-ci était confiné à la région frontale jusqu'à
la partie antérieure de la circonvolution antéro-transverse, l'îlot
de lieil (qui était resté découvert), à la partie antérieure des lobes
Archives, 2 série, t. X. 20
306 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
temporal et sphénoidal et à la région orbitale derrière la fissure
triradiée. Même dans cette région, les circonvolutions avaient gardé
une disposition embryonnaire. Dans la région orbitaire, en avant
de la fissure triradiée, et dans les régions pariétale et occipitale,
le cortex était remplacé par une membrane polie et convexe, dont
l'épaisseur variait entre-75111111 et 2mm,b. Le corps calleux était tota-
lement absent, le fornix petit, et la capsule interne réduite dans
ses dimensions. Les altérations étaient évidemment congénitales,
et quoique la mère de cet enfant pensât qu'il était bien portant à
la naissance, il semblait probable qu'il ne pourrait jamais voir, et
il eut de fréquentes convulsions depuis l'âge de onze mois. Jamais
il ne parla ni ne marcha; il avait le bassin déformé et s'accrou-
pissait les jambes relevées et croisées. il reconnaissait les voix et
sentait sa nourriture. Si la personne qui le servait lui disait :
« Maintenant, llarry », il ouvrait la bouche et les aliments liquides
disparaissaient sans effort apparent de déglutition,. « on eut dit
comme de l'eau coulant dans un tube ».
3° La scaphocéphalie peut être due à un accolement prématuré
de la suture sagittale, avec exagération de croissance des sutures
coronale et lambdoïde, de telle sorte que la tôle se rétrécit d'un
côté à l'autre, s'allonge d'avant en arrière et quelquefois augmente
en hauteur. D'un autre côté, elle peut être le résultat d'une élon-
gation originelle et de l'étroitesse du crâne, et le Dr Minchin
a établi que des tètes de ce type ont été observées parmi les natu-
rels de la Nouvelle-Calédonie, des Nouvelles-Hébrides et des îles
Carolmes. D'après sir W. Turner, cette forme du crâne est due à
des causes agissant pendant la vie intra-utérine, comme inflamma-
tion intra-utérine, ou lésions de la mère pendant la grossesse.
La scaphocéphalie ne produit pas nécessairement l'idiotie, car
ce type de crâne a été rencontré chez des sujets d'intelligence nor-
male, non seulement dans le Hoyaume-Uni et chez les Australiens
primitifs sus-mentionnés, mais encore parmi quelques tribus du
Nord de l'Amérique, qui exerçaient une pression sur la tête pen-
dant la vie, dans le but de se conformer à une coutume ou à
quelque rite religieux.
4° Dans la variété d'idiotie désignée sous le nom de Mongolique,
la forme de la tête est caractéristique ; elle est brachycéphale, la
circonférence approximativement circulaire, avec une tendance au
parallélisme des plans frontal et occipital. Le crâne lui-même est
généralement mince et, entre autres particularités osseuses, nous
notons presque invariablement dans ce type une anomalie du petit
doigt, qui est anormalement court, avec un déplacement latéral de
la phalange terminale donnant une apparence incurvée à ce doigt.
Cette singularité est bien montrée dans une skiagraphie que nous
devons au D1' Telford Smith (publié dans The Pédiatrie, oct. 189G).
La peau est grossière, quelquefois furfuracée ; les cheveux souples,
SECTION DE PSYCHIATRIE. 307
sans boucles; la membrane muqueuse irritable, les lèvres souvent
crevassées et la langue grande, marquée par des sillons profonds
dus à l'hypertrophie des papilles fungiformes. Le Dr Archibald
Garrod (Transactions, Société clinique de Londres, vol. 30, 1899) a
appelé l'attention sur ia fréquence des imperfections cardiaques
chez les jeunes idiots mongoliques, et le 1)" John Thomson,
d'Edimbourg, a rapporté (Journal médical et chirurgical de l'Ecosse,
mars 1898) le cas d'un enfant de trois ans chez qui on trouva, à
l'autopsie, une insuffisance de la valvule tricuspide due probable-
ment à une endocardite intra-utérine. Pour ce qui est du cerveau,
les circonvolutions sont, en thèse générale, grandes et grossières,
mais on a trouvé peu de circonvolutions secondaires. Wilmarth
observe que, sur cinq cerveaux mongoliques examinés par lui,
ils étaient de bonne dimension pour des cerveaux d'imbéciles, le
pont de varole et la moelle seuls étant très petits, pesant dans
chaque cas environ une demi-once (il. gr.), tandis que le poids est
ordinairement presque deux fois plus grand Les vaisseaux sont
beaucoup plus minces que dans les cerveaux sains. La nutrition
et la circulation, défectueuses chez ces enfants, conduisirent l'un
à penser que l'état vicieux des vaisseaux peut être un état général.
Shuttlewortli exprime l'opinion que « ces idiots mongols sont
essentiellement des enfants inachevés et que cet aspect singulier
est réellement celui d'une phase de la vie foetale ». (Affections
mentales des enfants.)
5° Dans les cas névropathiques congénitaux (genetous), surtout
des enfants nerveux ordinairement issus de parents névrotiques,
nous trouvons très tôt dans la vie une irritabilité excessive, de
l'insomnie et une absence d'attention soutenue et de contrôle sur
soi-même. A l'autopsie de tels sujets, on a relevé des circonvolu-
tions petites, fragiles et frisées (microgyrie).
6Ù Les cas d'idiotie survenant très tôt dans la vie d'enfants atteints
de dégénérescence cérébrale, comme l'ont décrite Sachs, Ko-
plick, Kingdon et Hussell, sont groupés par Ireland sous le
chef d'idiotie amaurotique congénitale (genetous) bien que les
altérations mentales et physiques ne puissent être relevées géné-
ralement qu'à l'âge de trois mois. Des altérations symétriques de
la macula ont toujours été observées dans tels cas, et la lésion
essentielle du cerveau semble être la dégénérescence des cellules
pyramidales du cortex (Kingdon et Hussell, Transactions médico-
chirurgicales, vol. 80).
7° Dans le crétinisme sporadique, le cràne est très bien conformé
et les sutures unies. Dans quelques cas, le foramen magnum est
plus petit qu'à l'état normal, les procès basilaires horizontaux,
latéralement rétrécis, et le clivus, ou plan incliné formé par la
réunion des procès basilaires de l'occipital et du sphénoïde, est
très escarpé. Les fosses cérébelleuses sont aplanies. Le cerveau est
308 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
ordinairement de dimensions normales, mais les circonvolutions
sont arrangées simplement, et parfois sont d'une largeur considé-
rable, variant de 3/5 à 1/2 pouce, à l'examen microscopique,
les cellules sont vues arrondies ou piriformes et insuffisantes
dans les procès. Il y a excès de mucine dans la peau, et de tissu
fibrineux dans.les poumons, le foie, la rate et les reins. Les os des
extrémités sont courts et incurvés. La glande thyroïde a une struc-
ture rudimentaire ou est absente. Dans un cas, elle était hypertro-
phiée, mais elle ne pouvait pas accomplir sa fonction, à cause de
l'affection du tissu glandulaire. Dans les cas qui n'ont pas été
traités par le corps thyroïde, on tiouva aux deux extrémités du
cou des masses graisseuses s'étendant quelquefois vers le bas, au-
dessus des clavicules.
8° Parmi les vices locaux et partiels, notés dans les cas d'idiotie
nous pouvons mentionner les connexions imparfaitement commis-
surales des hémisphères, feu le 1), Langdon Down (Transactions
médicales et chirurgiccclas, 1861 et 1866), ayant décrit deux cas
d'idiotie dans lesquels le corps calleux étail presque entièrement
absent. La porencéphalie a été parfois notée dans la variété para-
lytique de l'idiotie. Shuttleworth a rapporté un cas dans lequel on
trouva une brèche de 4 pouces (10 centimètres) de longueur, s'éten-
dant de la partie antérieure du lobe frontal droit presque jusqu'à
l'occipital, laissant la lame orbitale nue et découvrant une partie du
ventricule latéral (Affections mentales des enfants, p. 51. Planche à
montrer). Dans un cas relaté par Beach les parties affectées étaient
le troisième ventricule, le ventricule latéral droit, le lobe occipital
droit, la face convexe de la région frontale droite, et le lobe
pariétal. Des vices plastiques du cervelet ont été enregistrés par
Bourneville, Shuttleworth, Beach et les autres.
Passant maintenant aux cas dans lesquels les troubles se mani-
festent à une époque importante du développement, nous trouvons
les types d'idiotie suivants :
I. Eclamptiques ;
IL Epileptiques ;
111. Syphilitiques (et aussi de la paralysie générale infantile);
IV. Cas paralytiques.
1. Les lésions pathologiques dans les cas éclamptiques, ceux
associés aux convulsions graves de la dentition, semblent être
localisés, des produits hémorrhagiques et des membranes adhé-
rentes épaisses s'opposant à la nutrition normale des circonvolu-
tions.
Le De Holt a trouvé dans le cas d'un enfant qui eut plus de
3 500 accès convulsifs distincts entre l'âge de dix-huit mois et de
deux ans, sans toutefois présenter de troubles mentaux, des alté-
SECTION DE PSYCHIATRIE. 309
rations de dégénérescence dans les cellules nerveuses du cortex,
dans la motor area, et une augmentation de la névroglie.
IL Dans les cas épileptiques de l'idiotie, le Dr Bevan-Lewis a noté
un durcissement de la névroglie, des fibres et des cellules local
ou diffus, avec une atrophie progressive des cellules nerveuses.
« Les cellules du cerveau des imbéciles épileptiques à l'âge adulte
(20 ans et au-dessus) offrent souvent une étendue considérable, un
développement des neurones ou des cellules nerveuses, pas plus
grand que celui qu'on observe chez l'enfant sain de trois à cinq
ans. » Le Dr Andriezen, aussi bien que Bevan-Lewis, a remarqué la
vacuité des noyaux des cellules corticales dans un pareil cas,
encore que, comme pour le premier observateur, de telles altéra-
tions ne fussent pas observées il des épileptiques qui étaient éga-
lement des imbéciles. Le D' Echeverria considère les états mor-
bides comme étant de caractère atrophique, diminution de la sub-
stance corticale et des éléments nerveux, avec production excessive
de tissu connectif, subissant une métamorphose régressive ou adi-
peuse. Dans quelques cas, on a trouvé les capillaires frappés de
dégénérescence crétacée ou graisseuse.
III. La syphilis, comme on le sait, n'est pas une cause commune
de l'idiotie, mais dans une autopsie faite par l'un de nous (Beach)
le cerveau, très petit, pesait seulement 27 onces (3C5 grammes) et
ladure-mère fut trouvée adhérente mais facilement séparable d'une
fausse membrane sous-jacente, qui avait été évidemment formée
depuis quelque temps. Elle était attachée, çà et là, à la face supé-
rieure de la pie-mère par une membrane mince qu'on pouvait
suivre sur une grande distance le long du plancher du crâne. La
syphilis est, d'ailleurs, une cause commune de paralysie générale
infantile.
Depuis que le D1' Clouslon décrivit, en 1877, un cas de l'affection
chez un garçon de seize ans, sous le nom de Paralysie générale de
développement, 100 observations environ ont été réunies. Mott a
vu 18 cas, et des relations ont été publiées sur 89 autopsies. Le
dernier observateur établit que, dans 16 cas où on a pratiqué
l'examen post mortem, les lésions macroscopiques ordinaires de
la paralysie générale furent relevées. Dans tous ces cas, l'atrophie
spécialement des circonvolutions frontales et centrales du cerveau,
l'épaississement de la pie-mère et l'arachnoïde, la dilatation des
ventricules et l'état granuleux de l'épendyme furent observés. Dans
6 cas, l'hémisphère gauche pesait moins que le droit. L'examen
microscopique montra l'atrophie des fibres tangentielles, l'atro-
phie et la désagrégation des neurones du cortex/spécialement des
circonvolutions frontales et centrales, les occipitales n'étant relati-
vement que peu affectées. Il y avait ordinairement une surproduc-
310 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
tion marquée de névroglie et une prolifération cellulaire autour des
vaisseaux (Archives de Neurologie).
IV. Dans les cas paralytiques, la paralysie peut survenir avant
ou après la naissance, mais la majorité des cas appartiennent à la
dernière catégorie. S'il n'y a pas de convulsions, et si la lésion du
cerveau est peu étendue, un progrès mental appréciable peut être
accompli, alors que l'amélioration est peu marquée du côté des
membres paralysés. Dans la forme acquise, il y a perte de substance
nerveuse, par inflammation du cerveau ou de ses méninges, anté-
rieure à la naissance, ou survenant dans le premier âge. Fréquem-
ment. on relève une atrophie de l'un des hémisphères, avec une
atrophie concomittante des membres du côté opposé. Dans un cas
signalé par Beach, il y avait épaississement des membres, épan-
chement de sérosité dans l'espace sous-arachnoïdien et les ventri-
cules, et atrophie du cervelet et du cordon spinal du côté opposé.
Sous le troisième chef, celui des « cas accidentels ou acquis »,
nous comprenons :
1° Les cas traumatiques, dus à la compression de la tète pen-
dant le travail anormalement prolongé ; ou moins souvent à
l'usage du forceps et les lésions produites par des accidents ;
2° Les cas post-fébriles (inflammatoires) comprenant l'idiotie
hypertrophique ;
3° L'idiotie sclérotique.
I. Les premiers cas du groupe iraunzalique qui s'offrent à nous
sont des paralysies de la naissance, dues aune pression sur la tête à
cause de l'étroitesse du bassin, ou, dans quelques rares cas, à l'écra-
sement par le forceps. En règle générale, les lésions sont localisées
à la région de la scissure de Rolando, et elles résultent de très
petites hémorragies suivies de dégénérescence sclérotique, et sou-
vent les circonvolutions frontales ne sont que peu intéressées.
Quand il y a diplégie cérébrale, Trend a trouvé que la cause la
plus fréquente est l'hémorragie méningée affectant spécialement
les veines qui circulent entre la pie-mère et la dure-mère, dans les
sinus longitudinaux. L'hémorragie trouvant sa voie dans la grande
fissure longitudinale, exerce une pression sur les bords supérieurs
des deux hémisphères. Osier ne croit pas que tous les cas sont
ainsi produits, et il pense avec Jacobi que certains cas sont dus
à des méninge-encéphalites foetales. Les symptômes varient avec
la compression ; quand elle est faible, ils sont relativement peu
apparents; si la pression est plus profonde, elle cause une rigidité
spasmodique, de la paraplégie, ou de la diplégie cérébrale. Dans
ces cas, l'intelligence peut n'être que peu atteinte, quoique l'affec-
tion soit marquée par des infirmités physiques. Les statistiques
semblent montrer que les paralysies de la naissance sont plutôt
dues à la négligeece qu'à l'usage judicieux du forceps.
SECTION DE PSYCHIATRIE. 311
Dans les cas d'accidents par chute sur la tête pendant le jeune
âge. entravant l'intelligence, une hémorragie méningée avec pro-
duits inflammatoires s'opposant au développement normal des
circonvolutions, a été relevée avec évidence. D'après Wilmurth, la
lésion par les coups est plutôt diffuse que locale, mais nous avons
noté des degrés variables de gravité.
2° Les cas post-fébriles (inflammatoires) comprennent ceux qui
résultent d'inflammation des méninges et des autres parties du
crâne, survenant au cours de maladies infectieuses aiguës, telles
que la variole, la typhoïde, la scarlatine. Dans des cas semblables,
on trouve un épaississement des méninges, quelquefois aussi un
épaississement du crâne, avec ossification prématurée des fonta-
nelles, Cullerre et Bernadini ont observé une augmentation de
la névroglie, une dégénérescence graisseuse et pigmentaire des
cellules nerveuses et une atrophie de leurs processus, avec dimi-
nution du nombre des ganglions et des cellules pyramidales.
L'hypertrophie du cerveau est une affection relativement rare,
et est généralement confondue avec l'hydrocéphalie. Non seule-
ment elle est causée par une augmentation de la névroglie et de la
substance blanche, mais encore la nutrition semble être modifiée.'
Généralement, sur une coupe, on voit le cerveau anémié, de sorte
que sa couleur parait blanche. Quand la calotte crânienne est
enlevée, le cerveau tout entier est soulevé comme s'il était délivré
d'une compression, et à l'examen, on aperçoit les circonvolutions
aplaties et comprimées ensemble, de sorte que les sulci sont obli-
térés. La partie principalement lésée est la substance blanche des
deux hémisphères. I.e poids du cerveau est très augmenté, dans
quelques cas, il dépasse de 15 onces le poids normal. D'après
Besch, l'hypertrophie du cerveau se distingue de l'hydrocéphalie
chronique par les caractères suivants : dans l'hypertrophie, il n'est
pas de règle que la tôle atteigne des dimensions aussi considé-
rables que dans l'hydrocéphalie, et dans celle-ci, l'accroissement
est plus marqué aux tempes, tandis que dans l'hypertrophie elle est
surtout au-dessus des arcades sourcilières ; dans l'hydrocéphalie
la tête est de forme arrondie; mais dans l'hypertrophie, elle se
rapproche du type carré ; dans l'hydrocéphalie, la distance entre
les yeux est augmentée, ce qui n'est pas le cas dans l'hypertrophie.
3° Cas sclérotiques. Cette variété a été soigneusement étudiée par
Bourneville, et, comme cet éminent observateur traitera, sans
doute de sa pathologie dans son rapport à la section nous
devons nous contenter d'une esquisse rapide. Dans un ensemble
de 300 autopsies faites par le D1' Wilmurth (Communication sur le
traitement précoce des troubles mentaux chez l enfant in Annales
de l'association médicale américaine, 16 août 1894) la sclérose
atrophique fut trouvée dans non moins de 96 cas. et la sclérose
tubéreuse fut relevée 13 fois. Les désordres sclérotiques sont, na-
312 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
turellement, dans beaucoup de cas, à la période terminale. D'après
ses expériences, Beach remarque que la sclérose est généralement
diffuse et s'étend sur une grande surface du cerveau. Elle n'est pas
nettement circonscrite, et affecte à peu près également la substance
médullaire et la substance grise. Les circonvolutions particuliè-
rement atteintes sont les frontale, frontale ascendante, pariétale
ascendante, pariétale et occipitale. En apparence, c'est comme du
blanc d'oeuf, dur et dense, vu l'augmentation de la névroglie et la
disparition d'une partie du tissu nerveux.
Jusqu'à maintenant, il y a quelques phénomènes pathologiques
qui n'ont pas été mentionnés, c'est-à-dire tumeurs du cerveau,
lésions chroniques des membranes, et altérations du crâne, lesquels
ont été notés à l'autopsie de sujets atteints d'idiotie.
Les tumeurs du cerveau sont de nature tuberculeuse ou glioma-
teuse, mais les premières sont les plus fréquentes. Elles varient
des dimensions d'un noyau de cerise à celles du poing fermé ; la .
plus grosse que Beach ait vue était comme une petite pomme ; et
elle était située dans la région frontale droite.
L'affection chronique des membranes du cerveau est beaucoup
' plus fréquemment observée que la forme aiguë mais toutes deux
attaquent principalement la face convexe. Les symptômes les plus
communs sont : la conge-lion et l'épaississement de la dure-mère;
l'épaississement et l'opacité de l'arachnoïde, l'accolement l'une il
l'autre des membranes, de la dure-mère au crâne, et de la pie-
mère au cerveau, l'augmentation du liquide sous-arachnoïdien et
un excès de sérosité dans les ventricules.
La surface convexe du crâne est souvent plus mince qu'à l'état
normal, mais elle peut-être épaissie et éburnée. Parfois, il y a
asymétrie, mais plus souvent le crâne est plus petit ou plus grand
que normalement. Pour ce qui est de la base, l'état le plus
intéressant est celui dans lequel il y a synostose prématurée des
deux parties du sphénoïde ensemble, et avec les procès basilaires
et une chute rapide du clivus ci-dessus mentionné. Pour ceux qui
s'intéressent à ce sujet, ils pourront trouver une description détail-
lée de la pathologie de l'idiotie par Beach, dans le Dictionnaire de
médecine psychologique, de Tuke (1892).
Pour ce qui est de l'aspect microscopique, dans les cas d'idiotie,
on a déjà fait allusion aux caractères principaux en traitant des
différents types. D'une façon générale, nous pouvons d'ailleurs
résumer les anomalies, en disant que les cellules nerveuses sont
ordinairement arrondies ou poirciformes, et pauvres en procès.
Dans des coupes durcies, le nucléus a attiré vers lui le protoplasma
et repoussé la matière granulée. Dans les préparations fraîches les
procès se colorent bien et on peut voir les branches primaires et
secondaires. Ce sont plus spécialement les cellules pyramidales qui
sont atteintes. Le Dur Andriezen (Bnil. Med. Jour. MllY 97) remarque
SECTION DE PSYCHIATRIE. 313
judicieusement qu'il y a une base pathologique commune à l'idiotie
et l'imbécillité épileptiques, et à l'épilepsie foetale survenant chez
l'enfant, c'est-à-dire : anomalies de croissance et de nutrition im-
primées à la cellule nerveuse croissante aussi bien qu'à la cellule
de névroglie, et affectant de préférence l'une ou l'autre région du
cerveau, fréquemment dans les territoires correspondant à une
distribution vasculaire particulière.
.Mais de tous les auteurs qui se sont adonnés à l'étude Je l'idiotie,
Hammerberg (hélas ! si prématurément enlevé par la mort) a fait
les plus laborieuses et les plus minutieuses observations micros-
copiques, et, en terminant notre travail, nous appelons l'attention
sur ses travaux et ses illustrations, qui montrent d'une façon con-
cluante la relation entre le nombre des cellules pyramidales et des
cellules fusiformes et le caractère de l'insuffisance mentale. Avec
une idiotie profonde, ces cellules sont en faible proportion, et elles
augmentent graduellement avec l'intelligence, tout en restant
anormalement rares, même dans les cas de plus faible insuffisance
mentale.
C'est à M. le D'' A.-W. Campbell, pathologiste de l'asile d'aliénés
de Lancashire à fiainhill, que nous devons une série de dessins de
préparations microscopiques faites dans 5 cas de cerveaux d'idiots
qu'il a examinés personnellement. Ils reproduisent successivement
les dispositions des cellules et des' fibres nerveuses dans les diffé-
rentes régions en jetant un coup d'oeil comparatif avec les cas
observés par Hammerberg.
Résumé du rapport sur l'Anatomie pathologique de l'idiotie; par
.1. 1111EBZEJI\I\'SKI, membre du Conseil médical, ancien professeur
de clinique mentale à Saint-Pétersbourg.
La classification des différentes formes de l'idiotie proposée par
M. Bourneville1, basée sur des changements anatomo-patbolo-
giques grossiers, évidents, la plupart morphologiques, du système
nerveux central, correspond aux besoins pratiques de la science
dans son état actuel ; mais la classification anatomo-palhologique
basée sur l'étude de la structure délicate du tissu nerveux et de ses
éléments, et sur des notions embryologiques précises, s'imposera
avec le progrès de nos connaissances.
La base de toutes les lésions anatomiques des cerveaux d'idiots
est la déviation du développement du tissu nerveux ; il faut cher-
cher son origine dans la vie embryonnaire ou dans les lésions
pathologiques qui se produisent dans la plus tendre enfance et
sont le point de départ des déviations de développement ulté-
' t3ourneville. Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie,
l'hystérie et l'idiotie. Compte rendu du service des enfants idiots, etc.,
de Bicêtre pendant l'année 1890.
314 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
rieures. Il n'existe pas de véritable arrêt de développement sous le
rapport morphologique et histologique comprenant le cerveau en
entier, mais il y a un véritable arrêt de développement de cer-
taines régions du tissu cérébral. qui peut être constaté par la pré-
sence desneuroblastes. Parmi les cerveaux d'idiotsquiappartiennent
il cette catégorie, dont la nature histologique délicate est mieux
étudiée, et qui d'après leur caractère spécial peuvent former un
groupe isolé, se trouvent les cerveaux dans lesquels la substance
blanche des hémisphères cérébraux est très peu développée, tan-
dis que la substance grise de l'écorce se distingue par son abon-
dance prodigieuse. Ces cerveaux, qui appartiennent aux microcé-
phales et demi-microcéphales, ont le plus souvent l'arrangement
des circonvolutions microgyriques, mais ils peuvent être sans
microgyrie (cas de Meine. Matell).
Le premier cas décrit dans la science est celui que j'ai commu-
niqué au Congrès international de Genève de 1877 et qui a été
publié dans les comptes rendus et mémoires de ce Congrès (p. 642
et suiv.). D'autre part, en 18-ils, je suis revenu avec plus de détails
sur ce cas, dans une communication sur l'anatomie pathologique
de l'idiotie publiée également avec des planches dans les comptes
rendus du Congrès international de médecine mentale de Paris'.
C'est cette même année, en 1S7S, qu'a paru l'observation de
Heschl2 (de Vienne) suivie de toute une série de recherches appar-
tenant à Chiai3, Potto\ Matell 5, Marchand0, menez, Scarpa-
tette 8, Oppenheim', Brisler10, Monakow m, etc.
1 Mierzewjesky. Recherches ll/la/oll1o-pa/ ! lOlo[jifjucs sur l'idiotie.
Compte rendu du Congres international de médecine mentale de 1878,
tenu à Pans (p. 215 et suiv.).
2 IIesclll. Uebu die vurtlem fjl/el'e Scltlafemnindung, u. s. w. 1878.
Festschrifïantassiich des 20.laljt,igeii Jtibilaeums der Irrenanstatt in Wien.
3 Chiari. Uebeu einen l'all von .111kJ'o[¡{¡I'ie bei einem 13 monallhigen
Knctben (Jahrbuch sur /\1nderheilknllde, 187 ! J).
' Otto. Casuisliche Beill'age : ;111' Kenlniss der Mikrogyric. Archiv. f.
Psychiatrie, XX blaiitl, 1 Ileft.
5 lfatell. T·.in Fall l'on lletenolopie der grauen .5tthslazz. Archiv. f.
Psychiatrie, XXV Uand, 1 lleff.'
1 Marchand. Beschreibang d;,eici-,11;lij,oapli(ile ? igehb-ne (Nova acte der.
lisl. I.iop. ]Jetitsclie \Izideiiiie tler NatLii-foisclif,r Abtlieiluii- 1, Bd.
LUI, A 3, Abth. Il. 13LI. LV, N. 3, 1890.
\Ieine. Ein Beitrag zur Lettre L'on der echlen lleterolopie gratter
]Ii-21stibsi(iiiz. Archiv. t. Psychiatrie, XXX 2 l Ilelt.
" Scarpatetti. Mtkrocephalia vera. Arch. f. Psych. XXX Bd., 2 Ileff.
" Oppeinheim. Ueber M : 7 ? oyyr;e. etc. Xeuroîogische Centralisait 1893,
l'i.3.
10 Brislpr. Klinisclte und hallrolnyisch-atzcvloraische 13eilrcte : ;1/1' Mi-
i-ltrogyrie. Archiv. f. Psychiatrie, XXXI 1;(1., 3 Ilelt.
" Monakow. Peler einetz Fall von Dliltrocehlttzlie. Archiv. f. Psychiatrie,
XXXI Ih ? 3 IlefL. 1815.
SECTION DE PSYCHIATRIE. 315
Les cerveaux d'idiots qui nous occupent se caractérisent par le
développement très faible du centre semi-ovale, par la distension
énorme des ventricules, les hémisphères cérébraux se transformant
en vessies à parois minces ; l'épaisseur des hémisphères dans lé
cas décrit par Monakow atteignait de l;i à 3 millimètres, et dans
le cas que j'ai décrit de 16 à 4 millimètres. Dans ce dernier cas, la
substance grise comprenait les deux tiers de la paroi des hémi-
sphères, et la substance blanche un tiers seulement et parfois
même moins.
Ces cas sont de beaux exemples de l'exiguïté que peut atteindre
la substance blanche des hémisphères, ils sont toujours accom-
pagnés de microcéphalie et de microgyrie. Dans les autres cas, la
substance blanche des hémisphères est amoindrie dans des dimen-
sions moins élevées et la microgyrie peut faire défaut. Dans les cas
bien étudiés sous le rapport histologique avec l'application des
nouvelles méthodes de recherches (cas de mates), Moine, Mona-
kob, etc.), on a trouvé le manque ou le développement insuffisant
des fibres myéliniques intracorticales transverses. Dans le cas de.
Monakow n'existaient ni fibres tangentielles zonales, ni stries de
Vicq-d'Azyr; dans le cas de Matell les fibres tangentielles zonales,
les stries de Baillarâer et de Vicq-d'Azyr étaient développée-; ; dans
les cas de Meine les stries tangentielles n'existaient pas, mais les
stries de Baillarger et de Vicq-d'Azyr étaient bien prononcées.
Quant aux associations sous-corticales courtes (unissant des cir-
convolutions voisines) et longues (unissant des circonvolutions
lointaines), dans le cas de Monakow elles disparaissaient pour la
plupart; dans le cas de mates, de Meine, les associations courtes
étaient assez développées, mais les longues voies d'association
manquaient complètement ou étaient dans un état de très faible
développement.
Les faisceaux radiés, assez bien développés dans le cas de Mona-
kow étaient extrêmement minces dans le cas de llatell.
L'insuffisance de la substance blanche des hémisphères se supplée
par la substance grise qui se distingue par la richesse de son
développement et l'épaisseur énorme de l'écorce. La substance
grise des circonvolutions se présente dans certains cas avec toutes
ses couches caractéristiques bien distinctes et leurs éléments,
parmi lesquels existent les cellules géantes; dans d'autres cas les
cellules sont ratatinées, il n'y a pas de régularité dans leurs arran-
gements et les cellules géantes manquent.
Ce qui caractérise la substance grise des hémisphères de pareils
cerveaux, c'est l'existence entre la quatrième couche de la subs-
tance grise de l'écorce et le centre semi-ovale, d'une couche inter-
médiaire large et puissante de neuroblastes (mon cas) ou une
couche d'éléments ganglionnaires ressemblant à la quatrième
couche de la substance grise des circonvolutions (cas de Mate)),
316 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Meine), mais se distinguant de cette dernière par l'irrégularité
d'arrangement des éléments ganglionnaires. Une strie de la subs-
tance blanche sépare, dans le cas de Meine, la quatrième couche
de la couche intercalée. Quant à cette couche intermédiaire,
elle est composée d'éléments ganglionnaires, les auteurs la nom-
ment l'hétérotopie de la substance grise, quoique cette hétérotopie
soit une hétérotopie diffuse et ne ressemble pas à l'hétérotopie
ordinaire, car cette dernière se présente sous la forme d'îlots de
cellules ganglionnaires incrustés dans la substance blanche. Chez
les microcéphales avec microgyrie, la couche intercalaire est formée
de neuroblastes chez les demi-microcéphales d'éléments plus dé-
veloppés, qui ressemblent à la quatrième couche de la substance
grise de l'écorce (cellules polymorphes).
Par conséquent il existe un type particulier du cerveau du micro-
céphale qui se caractérise par la richesse de' la substance grise et
le développement insuffisant de la substance blanche et qui s'ac-
compagne de microgyrie. Ce type se distingue du type ordinaire
du cerveau microcéphalique, parce que dans ce dernier, avec
amoindrissement général du tissu nerveux des hémisphères, les
proportions correspondantes entre la substance grise et la blanche
sont conservées. - Après ce type particulier propre à certains
cerveaux de microcéphales, type représentant l'arrêt de développe-
ment de la substance blanche des hémisphères cérébraux au degré
le plus avancé, viennent les cerveaux de certains demi-microcé-
phales ; chez lesquels l'arrêt de développement de la substance
blanche atteint un degré moins grand et s'accompagne de l'héléro-
topie sous-corticale diffuse de la substance grise. Mais dans ces
deux cas, le type reste le même, et son caractère spécial consiste
en ce que, entre la substance grise des hémisphères cérébraux et le
centre semi-ovale, le tissu nerveux parfois se trouve dans un état
d'arrêt de développement vrai (qui se constate par la présence des
neuroblastes), et dans les autres cas dans un état de déviation de
développement (qui s'exprime par la, présence des éléments
ressemblant aux cellules ganglionnaires de la couche profonde de
l'écorce).
Sur les préparations microscopiques faites du cerveau microcé-
phale avec microgyrie, que j'ai présentées cette année à la Société
psychiatrique de Saint-Pétersbourg, nous avons pu démontrer :
SECTION DE PSYCHIATRIE. 317
Sur une couche faite du lobe temporal droit :
318 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
très rares, dispersées, isolées et jamais agglomérées en forme
d'ilots dans la substance blanche. En outre, dans la couche zonale
de l'écorce paraissaient parfois descellulesganglionnairesde grande
dimension rappelant les grandes cellules pyramidales de la troi-
sième couche de l'écorce. Ainsi on constate dans ce cerveau la
présence de l'liétérotopie de cellules ganglionnaires dans la subs-
tance blanche sous-corticale et l'hétérotopie des grandes cellules
pyramidales dans la couche zonale.
L'examen des cerveaux d'idiots dont nous avons exposé les prin-
cipaux traits anatomo-pathologiques nous amène de prime abord
à la conclusion que la richesse de la substance grise et l'abondance
des cellules nerveuses peuvent être accompagnées d'idiolie. Mais
dans ces cas le système de liaison des circonvolutions est arrêté
dans son développement, et ce manque de voies de communication,
ce défaut d'harmonie dans le développement des différents élé-
ments nerveux, rend imparfait un organe si prodigieusement doté
sous certains rapports et si pauvres sous d'autres. Mais dans le
système nerveux central, tout dépend non pas de la quantité,
mais de la qualité des éléments et de leurs combinaisons récipro-
ques. De manière que la substance blanche n'est que la continua-
tion des prolongements des cellules nerveuses : ainsi la richesse
des ramifications dendriques et cylindraxiles de ces cellules
favorise le développement abondant de la substance blanche, et la
pauvreté de ces ramifications rend son développement insuffisant.
Ainsi dans les cerveaux où la substance blanche est peu déve-
loppée, les cellules nerveuses doivent être pauvres en prolonge-
ments et leur activité fonctionnelle affaiblie ou abolie. La mul-
tiplication et la grande étendue des connexions des cellules pyra-
midales semble être une des conditions principales des manifesta-
tions intellectuelles. Mais la suprématie intellectuelle semble donc
être le résultat moins du nombre que de la multiplicité et de
l'étendue de leur connexion (Déjerine). Par conséquent la richesse
des cellules nerveuses peut coexister avec l'idiotie, si les cellules
sont dépourvues de leurs ramifications multiples et étendues. C'est
ainsi que manquent les voies par lesquelles se propagent, s'accu-
mulent et se combinent les forces nerveuses.
L'abondance de la couche de neuroblastes dans les hémisphères
des idiots, qui indique le véritable arrêt de développement de cer-
taines parties du tissu cérébral, provoque sans doute l'insuffisance
des fonctions du système nerveux jointe à la manifestation de
l'intellect. Mais les neuroblastes dans des conditions favorables
de nutrition peuvent, peut-être, se transformer en éléments d'ordre
supérieur, c'est-à-dire en cellules nerveuses. Dans la couche des
neuroblastes se rencontrent quelquefois des cellules polymorphes.
Ainsi les neuroblastes qui conservent un certain temps leurs formes
embryonnaires, et qui se trouvent dans un état de léthargie fonc-
SECTION DE NEUROLOGIE. 319
tionnelle, peuvent sous l'influence d'une impulsion propice se
transformer en cellules nerveuses et contribuer à rehausser l'acti-
vité des fonctions cérébrales. C'est ainsi peut-être que s'expliquent
des cas de profonde idiotie' sans espérance, dans lesquels succède
quelquefois d'une manière, pour nous incompréhensible, une amé-
lioration notable des facultés intellectuelles, et l'idiot parait se
réveiller d'un sommeil prolongé, en conservant tout de même pour
toujours le cachet de son infirmité psychique mais dans un degré
moins prononcé.
Résumé du rapport sur 1'111wtomie pathologique de l'idiotie :
par le Du' Bourneville. '
Le rapporteur a fait à la Section une véritable leçon de
choses. Pour chaque forme pathologique il a montré deux
ou trois cerveaux ainsi que leurs photographies, avec les
crânes correspondants, les photographies des cerveaux et
celles des malades, prises tous les deux ans, depuis leur
enlrée jusqu'à leur mort. Puis il a terminé ainsi :
En nous appuyant sur les travaux que nous avons poursuivis
depuis vingt-cinq ans, soit à la Salpètrière, soit surtout à Bicêtre
et sur les mémoires et les notes qui ont été publiés durant la
même période sur l'idiotie ou mieux les idioties, nous sommes
amené à distinguer, quant à présent, au point de vue anato1l ! o-
pathologique, les formes suivantes :
1° Idiotie symptomatique de méningite chronique (idiotie ménin-
& : '< ? f6) ;
2° Idiotie symptomatique de méningo-encéphatite chronique
(I. méninyo-encéphalitiqué) ;
3° Idiotie symptomatique d'un (0'1 êt de développement des circon-
volutions sans malformations, avec lésions des cellules nerveuses
(Idiotie congénitale idiopathique);
4° Idiotie symptomatique de sclérose hypertrophique ou tubé-
reuse ;
5° Idiotie symptomatique de sclérose ulrophique : a) sclérose d'un
hémisphère ou des deux hémisphères du cerveau (sc. hémisphérique
ou di-hémisphérique) ; b) sclérose d'un lobe du cerveau (se. lo-
baire); c) sclérose des circonvolutions isolées : d) sclérose
chagrinée du cerveau ( ? ) ;
6° Idiotie hémiplégique ou diplégique symptomatiques de lésions
en foyer dues à une oblitération vasculaire ou à une hémorragie
(pseucto-porencéphalie, etc.);
7° Idiotie symptomatique de l'hydrocéphalie ventriculaire
simple ou compliquée d'h. extra-ventriculaire (Idiotie hydrocépha-
lique) ;
320 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
8° Idiotie avec cachexie pachydermique ou idiotie 111YJ;oedémalcuse
liée à l'absence de la glande thyroïde;
9° Idiotie symptomatique d'un arrêt de développement du cer-
veau avec malformations congénitales (p01'cncéphalw vraie, absence
du corps calleux, etc.). -
10° Idiotie symptomatique de microcéphalie par arrêt de déve-
loppement avec ou sans malformations, ou reconnaissant pour
causes des lésions survenues après la naissance (I. microcélrhaliqne
proprement dite ou symptomatique).
Nous n'avons observé aucun cas d'idiotie pouvant être rattaché
exclusivement à une lésion osseuse, en particulier à une synostose
prématurée des os du crâne 1.
M. le I)v 013EIITIIUR a complété la communication de M. l3outtnr-
ville par un exposé des examens histologiques pratiqués sur les
cerveaux des enfants décédés dans la section speciale de Bicêtre.
Nous publierons ultérieurement cette seconde partie du Rapport
de M. Bourneville sur l'anatomie pathologique de l'idiotie.
M. TOULOUSE a soulevé ensuite la question de la Paralysie géné-
mie infantile et discuté avec M. Régis la question de l'idiotie par
méningo-encéphalite-diffuse, avec ou saus térédo-syphilis. Ces cas
forment avec l'idiotie ordinaire d'une part, la paralysie générale
infantile et juvénile une série d'intermédiaires difficiles à catégo-
riser et pour lesquels il importerait d'adopter un terme de mesure,
âge ou phase de développement.
Séance du 6 août. Présidence de M. Magnan.
Cette séance est consacrée à la 3° question générale : De l'ulile-
lement dans le traitement de la folie ou clictolhércclfie. L'auteur du
premier rapport, M. le professeur Korsakow est mort peu avant la
réunion du Congrès. Avant de donner la parole à M. le D'' Serbski,
pour donner lecture de ce rapport qui figure en tête de notre
numéro, M. Ritti, secrétaire général de la section de psychiatrie,
retrace la vie scientifique du professeur Korsakow.
Voici maintenant les conclusions du second rapport sur la même
question, par M. le D'' Cl. 1\ct=sEa (de Leubus) :
1° Il est de principe général, que pour tous les individus dont
l'attitude et la conduite sont désordonnées, agitées ou seulement
frappantes, qu'il s'agisse des maniaques, mélancoliques, des hal-
lucinés, des malades atteints du délire systématisé, des épilep-
tiques, des paralytiques généraux ou des malades atteints de la
démence, le mieux est encore l'alitement. Naturellement, le méde-
1 Ce rapport sera publié ultérieurement soit dans le Progrès médical,
soit dans les Archives.
SECTION DE PSYCHIATRIE. 321
cin pourra permettre au malade, si bon lui semble, de quitter le
lit, pour prendre part à un travail, à une distraction, à une pro-
menade au jardin, et aux repas en commun; mais ce qu'il faut
rigoureusement interdire et remplacer par l'alitement, ce sont les
stations stupides, les flâneries et le grouillement dans les corridors
et dans les salles de réunion ;
2° Le malade sera mis au lit dès son arrivée, ou plutôt après le
bain, première application thérapeutique. Comme il est indispen-
sable que le malade soit au lit pour le premier examen médical,
toute indication spéciale pour cette application thérapeutique est
superflue. En d'autres termes, «l'alitement est le régime qui s'im-
pose tout naturellement » ; il ne pourra être supprimé, temporai-
rement ou définitivement, que dans des cas spéciaux déterminées-
par ordonnance médicale; J5 '« /
3° L'alitement facilite la surveillance et les soins nécessaires^,
sans lui, dans certains cas, ceux-ci seraient « même impossibles/ ;
donc, pour cette raison et dans l'intérêt général, son application*
« peut » être indiquée aussi pour des malades reconnus incapable^
de subir une action thérapeutique directe (soit dès l'abord, soit
pendant le cours de la maladie).
4° L'alitement n'est pas un traitement spécifique des psychoses,
pas plus que des maladies fiévreuses ou amenant la consomption.
Il n'est qu'un des moyens de la thérapeutique, qui d'ailleurs doit
être appropriée au cas et à l'individu. L'application de l'alitement,
moyen thérapeutique le plus simple, le plus naturel et le plus
général, à des aliénés, a été considérée comme un système presque
nouveau et spécial ; or, il ne l'est pas et de par sa nature même
ne peut pas l'être ; ce fait trouve son explication dans l'historique
de la psychiatrie ;
5° « L'alitement ne répond qu'à une seule indication thérapeu-
tique », le repos cérébral. Je tiens à bien préciser ce terme « phy-
siologique » et à le mettre en opposition avec les suggestions « psy-
chiques » ;
6° Il est donc indiqué dans tous les cas où il faut agir contre des
symptômes d'irritation, premièrement dans toutes les maladies de
forme aiguë ;
7° Il faut tenir compte de l'état mental individuel, surtout en
plaçant et groupant les malades d'une façon judicieuse, soit dans
une des salles communes, soit en chambre séparée, la porte étant
ouverte ou fermée, mais toujours sous une surveillance continue.
« L'individualisation la plus précise est une nécessité absolue dans
cette question » ; ;
8° D'une part, aussi longtemps qu'il existe un état maladif aigu,
l'essentiel dans la thérapeutique c est le repos physique, c'est-à-
dire le repos de l'organe malade; d'autre part, dès que les mani-
festations aiguës commencent à disparaître, sans tendance vers la
AncmvEs, 21 série, t. X. 21
e'2'.I, CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
guérison, la thérapeutique doit conserver et activer les restes de la
personnalité psychique en imposant au malade des occupations ad
lr.oc à partir d'un moment donné. Ce moment est difficile à déter-
miner. Si on le laisse échapper, le malade- prend facilement la
manie du lit, préjudiciable à son physique et à son moral, manie
difficile à combattre. Il'est donc à recommander, quelquefois déjà
pendant la période aiguë, de combiner l'alitement avec le travail
et le mouvement en plein air, ce qu'on peut faire du reste de plu-
sieurs manières (occupation au lit, succession alternative du repos
et du travail ou des promenades, système mixte de Toulouse). Il
est à remarquer que, dans la majorité des maladies mentales juvé-
niles, l'alitement ne doit passe prolonger trop longtemps).
1° L'alitement n'entraîne pas forcément des modifications consi-
dérables dans la construction et peut être pratiqué aussi dans les
anciens établissements, témoins les plans de Leubus;
20 Il faut repousser définitivement les divisions ne renfermant
que des cellules isolées (sauf dans les asiles des criminels) ;
3° Il est désirable d'avoir à sa disposition le plus grand nombre
possible de divisions pas trop grandes et vai iées. Etant donnés des
asiles mixtes pour des curables et des incurables, de dimension
moyenne, on établira la proportion suivante : pour chaque cen-
taine de malades, deux ou trois divisions renfermant chacune à
peu près vingt lits. Chacune de ces divisions comprendra trois ou
quatre chambres de différente grandeur et agréablement aména-
gées pour les alités en commun, une chambre de réunion et deux
ou trois chambres séparées. Les chambres doivent être disposées
de façon qu'une surveillance suffisante puisse être exercée par un
petit nombre de gardes. 11 y en aura toujours au moins deux en
service dans chaque division ;
4° Chaque division renfermera le nécessaire, pour les bains ;
5° On comptera 100, tout au plus 200 malades pour un seul
médecin, même si les malades ne changent pas fréquemment.
Autrement l'alitement est difficile à pratiquer de même que toute
espèce de traitement médical en général ;
6° L'alitement n'entraîne une augmentation du nombre des
gardes que si la durée de leur service est abrégée et que le rem-
placement se fait plus souvent. Il est évident qu'en soignant réel-
lement des malades on se fatigue davantage qu'en surveillant des
hommes renfermés en cellules ou même enchaînés ;
7° Les gardes sont forcément subordonnés au médecin et dirigés
par lui ;
8° Par l'alitement eu commun on gagne de la place, les cham-
bres à coucher séparées n'étant plus nécessaires pour nombre de
malades ;
9° Des statistiques faites à Leubus font voir que l'alitement est
SECTION DE PSYCHIATRIE. 323 3
une source de quelques économies aussi au point de vue adminis-
tratif (habillement).
Le troisième rapport qui avait été confié à notre très distingué
confrère, le D1' Julien bioaEl. (de Mons), se résume ainsi :
1. Tout aliéné admis dans un établissement devant faire l'objet
d'un examen physique et psychique, sera confié au quartier d'ob-
servation. Pour que cet examen soit aussi complet que possible, le
médecin devra pouvoir disposer de tous les éléments d'applice-
tion, suivant les dernières ressources de la science.
IL Seront confiés au lit : 1° tous les malades atteints de psy-
choses aiguës ou de psychoses chroniques présentant des états
intercurrents d'excitation ou de dépression ; 2° tous les malades
souffrant d'un trouble de la nutrition générale; 3° tous les malades
qui ne savent pas se conrluire conformément aux règles de la vie
ordinaire : gâteux, malades refusant leur nourriture, ou ayant une
tendance au suicide, à la destruction, etc. ; il tous les malades
atteints d'une affection somatique d'une certaine gravité.
111. Pour atteindre efficacement le but de l'alimentation il faut :
1° que l'établissement possède un corps médical compétent pro-
portionné aux nécessités du service ; 1° que les différents méde-
cins attachés à l'établissement, y soient logés et qu'ils aient chacun
un rôle efficace dans l'observation et le traitement des malades ;
3° qu'on ne se serve d'aucun moyen de contrainte, sauf dans des
cas très rares et exceptionnels; 4° que le personnel médical se
charge de l'instruction professionnelle des gardiens et qu'il en éli-
mine tous les éléments n'offrant pas des garanties suffisantes :
5° que le personnel des gardiens soit composé de personnes intel-
ligentes et à moral irréprochable suffisamment rémunérées et dis-
posant d'une pension de retraite après un certain nombre d'an-
nées de service ; G° que les bâtiments et les accessoires répondent
à tous les desiderata quant au confortable pour l'aliéné et pour le
personnel.
La lecture de ces trois ràpports a donné lieu à la discussion ci-
après :
M. DOUl'BElJE1\TI.; a fait l'essai de l'alitement dans son asile de
Blois, mais dans les proportions limitées que comporte un asile où
il n'y a que deux médecins. Il faut être très prudent dans le choix
des malades. Y a-t-il des résultats thérapeutiques, en dehors de
la mélancolie' ? Dans la paralysie générale et la démence précoce,
l'auteur a obtenu des résultats mauvais. Dans la manie franche,
les résultats furent meilleurs.
M. Neisser soutient que l'alitement est un procédé thérapeutique
de choix dans le traitement de toutes les affections mentales. z
324 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE. `
M. BRIAND pratique l'alitement depuis quatre ans. Certains para-
lytiques n'en sont pas justiciables, parce qu'il faut exercer une
certaine violence qui pourrait être préjudiciable.
M. Ischiscii dit que grâce à l'alitement l'aspect de l'asile est amé-
lioré, mais la durée des affections mentales n'est pas abrégée.
M. Magnan proteste contre cette manière de voir, de l'orateur
précédent. Ses observations lui prouvent au contraire que les
aliénés profitent sûrement de la méthode de l'alitement. Ainsi, la
manie suraiguë se trouve rapidement transformée en manie subai-
guë grâce à cette méthode. De plus, la convalescence arrive plus
rapidement.
Les recherches de ces deux auteurs ont porté sur 90 malades
femmes. Ils les ont divisées en deux groupes : 1° celles dont la folie
était ancienne ; sur celles-ci ils ont plus particulièrement étudié les
effets symptomatiques de l'alitement; 2° celles dont la folie était
récente ; sur ces dernières ils ont surtout étudié les effets de la
clinothérapie.
A. Les premières malades sont au nombre de 35 et réunissent
les divers genres de l'aliénation mentale. Chez celles-là, bien que
d'aucunes aient gardé le lit jusqu'à près de six mois, ils n'ont
obtenu aucun effet utile, quelles qu'aient été la nature et la forme
de l'aliénation mentale.
B. Les secondes sont au nombre de 55 et présentent toutes une
des formes ou l'un des genres d'aliénation mentale que l'on regarde
comme susceptibles de guérison (manie, lypémanie, folie post-
infectieuse, folie psycho-sensorielle, la folie des persécutions
exceptée, folie alcoolique).
Sur ces 55 malades : la guérison dans le lit a été obtenue 11 fois,
soit dans 20 p. 100 des cas; 35 fois les auteurs de la communica-
tion ont été obligés de faire lever leurs malades ; ou bien parce
que, malgré la prolongation de l'alitement pendant deux, trois
mois et plus, celui-ci ne produisait aucun effet utile ; ou bien parce
que se manifestaient des troubles physiques ou psychiques (perte
d'appétit, anémie, diminution de poids, céphalées, vertiges, ona-
nisme, gâtisme, aggravation du délire) ; parmi ces dernières
malades, 13 ont guéri ultérieurement, une fois levées. Enfin
6 décès se sont produits et 3 malades sont encore actuellement
alitées depuis plus de deux mois sans que leur état se soit modifié.
Ces constatations faites, MM. Mairet et Ardin-Delleil, prenant
leurs malades atteints des mômes genres de folie que les alitées,
ont établi pour les années 1896, 1897 et 1898, une proportion des
guérisons par rapport aux entrées, dans ces mêmes itégories. Ils
ont obtenu les proportions respectives de 42 p. 100, 4..6 p. 100 et
33,33 p. 100. '
SECTION DE NEUROLOGIE. j
Ces proportions, comparées à celle donnée par l'alitement, mon-
trent que celle-ci leur est bien inférieure (20 p. 100) ; si l'on porte
même à l'actif de ce procédé thérapeutique les 13 malades guéries
après le lever, la nouvelle proportion obtenue se meut dans les
limites de celles qu'on obtient par les méthodes ordinaires; elle
est, en effet, de 43,6 p. 100. D'où les conclusions suivantes : '
a) Dans la folie ancienne, l'alitement, comparé au lever, n'a
aucun effet utile ni sur la maladie, ni sur le délire, ni sur l'agita-
tion ou la dépression ; b) dans les folies récentes, envisagées au
point de vue de la curabilité :
1° L'alitement est loin de pouvoir être considéré comme une
méthode de traitement devant être généralisée à tous les cas;
2° La plupart du temps il est inutile, ou produit des troubles
physiqnes ou psychiques qui sont des indications formelles pour
l'aire lever les malades;
3° L'alitement, dans certains cas, parait utile en ce sens qu'il
diminue la durée de la maladie. Ce seraient plus particulièrement
la manie intermittente et les aliénations mentales post-infectieuses
qui bénéficieraient de ces effets utiles. Mais nos observations sont
trop peu nombreuses encore, pour peu que nous puissions formu-
ler des conclusions fermes à ce sujet;
4° L'alitement n'enraye en rien la mortalité.
Section de Neurologie.
Séance du 2 août (suite). Présidence du professeur Hitzig.
Résumé du rapport sur l'Importance du centre auditif du langage
comme organe d'arrêt du mécanisme du langage; par le professeur
A. l'rcs (de Prague).
Depuis que l'on a appris à connaître le mécanisme frénateur
dans le domaine des nerfs cardiaques, on était sur le point d'en
faire l'application aux phénomènes cérébraux supérieurs; mais on
ne peut méconnaître que ces essais, transportés aussi dans la
pathologie, découlaient tous essentiellement jusqu'ici d'une analo-
gie ; et, bien que tout récemment on ait montré des mécanismes
frénateurs en rapport avec des phénomènes intra-cérébraux, on
n'a pas réussi encore, notamment par suite de la complexité des
phénomènes connexes, il montrer de vraies actions d'arrêt et leurs
troubles dans le domaine des faits psychiques ou des phénomènes
attenants.
Seulement, avec le temps, lorsque l'étude approfondie du méca-
nisme du langage offrit l'occasion d'approcher avec espoir, au
moins d'un côté, de la compréhension de ces faits, la connais-
326 6 CONGRÈS, INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
sance nous apparut d'un vrai mécanisme frénateur dans ce
domaine même.
Tandis que tout d'abord Hughtings Jackson, dans le cadre de sa
doctrine de l'évolution et de la dissolution, cherchait à expliquer
toute la doctrine des aphasies dans son ensemble par un système
de mécanismes frénateurs et par leurs troubles, Wernicke et
Broadbent ont fourni la démonstration clinique que les fonctions
du centre moteur du langage s'accompagnent sous la direction du
centre auditif. Cependant, l'observation de cas analogues prouve
qu'il ne faut pas seulement considérer les fonctions auditives du
centre auditif dans sa relation avec le centre moteur, le trouble de
cette relation expliquant manifestement, pour ces auteurs, la
paraphasie ; mais, bien plus, cette observation montre que le
centre auditif de la parole est réellement un vrai centre frénateur
pour le moteur dont les fonctions, après la destruction ou l'affai-
blissement de la fonction du premier, se déchaînent au moins
pour quelque temps libres de tout frein; c'est le fait connu que
des malades avec surdité verbale survenue brusquement présen-
tent, en dehors de la paraphasie, un trouble tout spécial, une
q logorrhée » : ils bredouillent spontanément, pendant longtemps,
sans discontinuer, ou bien réagissent de cette façon, chaque fois
qu'une incitation quelconque est fournie au mécanisme du lan-
gage, par une question, par exemple.
On pourrait interpréter ce fait de deux façons : tout d'abord, on
admit un état d'excitation du centre moteur ; mais qu'on consi-
dère que ce phénomène ne se produisit chaque fois qu'avec une
lésion exclusive du centre auditif ou avec sa participation, jamais
avec une lésion isolée du centre moteur lui-même : cela seul écarte
la théorie de l'excitation, et une autre explication se présente, à
savoir que la logorrhée est la conséquence de la perte d'une fonc-
tion d'arrêt directrice dévolue au centre auditif.
Les rares auteurs qui se sont occupés de ce phénomène inclinent
bien vers cette explication, mais, en général, ce fait, significatif en
principe, n'est pas encore considéré comme suffisant.
Or, on peut montrer que non seulement la forme et la marche
du phénomène se comprennent au mieux par l'explication que
nous en donnons, mais encore que la relative rareté du phéno-
mène se comprend par l'influence nécessaire de maladies très
déterminées et par leur action sur le centre auditif et ses environs;
mieux encore, on peut prouver que d'autres troubles en partie
fonctionnels du même genre, certaines formes d'écholalie, la logor-
rhée paraphasique dans le petit-mal et dans l'hémicmpie conco-
mitante, non seulement se comprennent mieux avec cette expli-
cation, mais encore paraissent ainsi en connexion plus exacte avec
d'autres symptômes qui les accompagnent.
- Mais l'importance de principe de cette démonstration réside
SECTION DE NEUROLOGIE. 327
avant tout en ce que la première preuve certaine parait fournie,
que dans le domaine même des phénomènes psychiques supé-
rieurs, entrent en jeu des mécanismes frénateurs identiques à ceux
qu'on montre maintenant en nombre toujours plus grand, dans le
domaine des fonctions nerveuses inférieures; et, par là, les essais
tentés jusqu'ici d'appliquer des mécanismes frénateurs dans l'inter-
prétation de phénomènes psychiques et psychopalique reçoivent
une base assurée.
Résumé du rapport sur Aphasie motrice pure sans agraphie
(Aphémie pitre) ; par M. P. L.4DAU (de Genève).
La confusion qui règne encore dans la manière d'envisager les
diverses variétés d'aphasie motrice provient de ce qu'on n'a pas
tracé jusqu'ici une ligne de démarcation suffisamment nette entre
les aphasies et les auarthries. Nous pensons que la doctrine des
neurones peut jeter une vive lumière sur celte question, et nous
prenons le postulat suivant pour base de la distinction qui doit
être faite entre les anarthries et les aphasies :
Les anarthries résultent d'une lésion des neurones de pro-
jection qui constituent les faisceaux moteurs de l'appareil de la
phonation. Il existe ici, comme pour les autres mouvements volon-
taires, deux groupes au moins de neurones superposés : les neu-
rones périphériques dont les cellules d'origine sont dans les
noyaux bulbaires, et les neurones centraux, ou cortico-bulbaires,
qui ont leur origine dans les grandes cellules pyramidales des
opercules frontal et rolandique de chaque hémisphère. On voit que,
pour nous, l'anarthrie peut avoir une origine corticale, et n'est
pas seulement le symptôme d'une lésion bulbaire ou pseudo-bul-
baire de la région capsulaire, qui caractériserait l'aphasie motrice
dite sous-corticale.
Les aphasies, par contre, sont la conséquence de la lésion des
neurones d'association intra-corticaux ou trans-corticaux, et
trans-hémisphériques ou commissuraux. On sait que le centre de
Broca, où se trouve le siège de l'aphasie motrice, renferme surtout
des libres d'association qui le mettent en communication avec les
divers autres centres corticaux, et tout spécialement avec ceux du
langage articulé, sensoriels et moteurs, le centre auditif verbal, le
centre visuel des mots, celui des mouvements de la main éduquée
pour l'écriture, et les centres moteurs phonétiques bilatéraux,
ceux du larynx, de la langue et des lèvres, en rapport avec la voix
et la parole.
Dans l'aphasie motrice ordinaire (type Bouillaud-Broca), la plu-
part des voies d'association de la circonvolution de Broca sont
plus ou moins touchées, et les symptômes qui en découlent sont
en rapport avec la complication des lésions. Dans l'aphasie motrice e
328 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
pure (sans agraphie) ou aphémie pure, la lésion est localisée dans
les neurones d'association qui mettent le centre de Broca en
connexion avec les centres phonétiques des circonvolutions rolan-
diques des deux hémisphères. Le faisceau d'association qui relie
le pied de la'troisième frontale au centre moteur de l'écriture '
reste alors tout à fait indemne.
L'aphasie motrice pure peut donc être, à notre avis, aussi bien
corlicale que sous-corticale. Ce qui en fait la particularité, ce n'est
pas, comme on l'a enseigné, le siège de la lésion dans les faisceaux
blancs sous-jacents à l'écorce du pied de la troisième circonvolu-
tion frontale (le faisceau pédiculo-frontal inférieur de Pitres), mais
c'est plutôt la lésion localisée dans les faisceaux d'association que
nous pourrions appeler faisceaux d'association psycho-moteurs pho-
nétiques, aussi bien dans leur origine corlicale que dans leur trajet
sous-cortical, ou plus justement inter-cortical, et inter-hémisphé-
rique (par le corps calleux).
Cliniquement, l'aphasie motrice pure, sans complications d'au-
cune espèce, se manifeste par les symptômes suivants :
1° Perte de la parole volontaire ; 2° perte de la parole répétée ;
3° Perte de la lecture à haute voix.
Sont conservées : 1° l'écriture spontanée ; 2° l'écriture sous-
dictée ; 3° la faculté de copier; 4° la compréhension des mots
(parlés ou lus).
En un mot, il y a une intégrité complète du « langage inté-
rieur ».
Nous insistons spécialement sur un symptôme que nous avons
toujours retrouvé dans les cas typiques d'aphasie motrice pure :
c'est la perte absolue de la parole, le mutisme complet. Ce signe
suffirait à lui seul pour différencier les aphasiques moteurs purs
de ceux qui sont atteints de l'aphasie motrice vulgaire (type
Bouillaud-Broca), où l'on constate la conservation de quelques
mots, d'un membre de phrase ou d'une phrase, même de plusieurs
phrases entières.
Quant au diagnostic différentiel, l'aphasie motrice pure peut être
confondue avec le mutisme hystérique et la simulation du mutisme.
A ce point de vue, la variété d'aphasie que nous étudions a une
certaine importance médico-légale. L'aphasie motrice pure (sans
agraphie) se distingue de l'attaque d'aphasie de nature hystérique
par son étiologie, par les symptômes concomitants, par la marche
1 Remarquons que tout le monde est d'accord pour admettre un centre
cortical qui préside aux mouvements de l'écriture. La discussion porte
seulement sur la question de savoir, si l'écriture possède un centre
autonome dans le pied de F2, ou si son centre cortical se confond avec
celui des mouvements de la main droite dans la région moyenne de Fa
gauche, éduquée spécialement pour le langage écrit.
' SECTION DE NEUROLOGIE. 3 : 2t1
de la maladie et sa terminaison, enfin par les résultats du traite-
ment. La simulation du mutisme est infiniment plus rare que ne
le pensaient les anciens médecins. Elle sera facilement déjouée par
une observation attentive du malade et une étude soigneuse des
commémoratifs.
En résumé, nous concluons qu'il faut abandonner complètement
les termes impropres d'aphasie motrice corticale et sous-corticale
qui prêtent à l'équivoque et confondent dans une même catégorie
les anarthries centrales et les aphasies motrices proprement
dites.
Réservant le nom d'aphasie au trouble provoqué par la lésion
des neurones d'association dans la zone du langage des hémi-
sphères cérébraux, nous proposons en conséquence de classer les
aphasies motrices d'après le siège des lésions dans les faisceaux
d'association qui aboutissent à la circonvolution de Broca ou qui
en émanent, que ces lésions soient dans les cellules d'origine des
neurones ou dans les voies conductrices de la substance blanche.
En tenant compte des réalités cliniques connues, nous arrivons,
d'après ces principes, à la classification suivante :
APHASIES MOTRICES
A. Aphasies motrices pures. Lésion isolée des neurones d'asso-
ciation du centre de Broca avec les autres centres moteurs corti-
caux en rapport avec la parole, parlée ou écrite.
1. Aphémie pure, sans agraphie, ni autre complication motrice
corticale. Lésion des faisceaux de neurones qui mettent le centre
de Broca en communication avec les centres phonétiques des
opercules frontaux et rolandiques (faisceaux d'association psycho-
moteurs phonétiques).
2. Agraphie pure, sans aphémie, ni complication motrice ou
sensorielle corticales ( ? ). Lésion du faisceau des neurones qui
relient le centre de Broca au centre de la main éduquée pour
l'écriture. (Les observations de cette forme d'aphasie motrice pure
n'ont pas encore levé tous les doutes sur sa réalité clinique.)
B. Aphasies motrices complexes. Lésions combinées des divers
faisceaux qui partent du centre de Broca ou qui y aboutissent.
Trois groupes principaux :
1. Aphasie motrice vulgaire (type Bouillaud-Broca). Lésion
plus ou moins complète de plusieurs faisceaux des neurones d'as-
sociation reliant la circonvolution de Broca aux centres corticaux
psycho-moteurs, qui sont eux-mêmes plus ou moins atteints par
la lésion. (Les diverses variétés cliniques de l'aphasie motrice ordi-
naire, avec ou sans agraphie, avec paralysies, monoplégies ou
hémiplégies, accès épileptiformes, contractures, etc.) Nous devons
mentionner une variété particulière d'aphasie de ce premier
330 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
groupe, qui a souvent été décrite comme aphasie motrice sous-cor-
ticale, et qui est une conséquence de la lésion des neurones phoné-
tiques de projection des opercules, combinée à celle des faisceaux
phonétiques d'association de la circonvolution de Broca avec ces
centres. Il résulte de cette complication une ccplzérnie-a2urthrie,
avec troubles moteurs des organes de l'articulation des mots,
parésies variables des cordes vocales, du voile du palais, de la
langue et des lèvres. C'est ici le point de jonction où l'anarthrie
corticale et l'aphasie motrice se confondent.
2. Aphasie sensorio-motrice. Lésion plus ou moins complète
des neurones d'association qui mettent la circonvolution de Broca
eu connexion avec les centres des aphasies sensorielles. (Combi-
naisons diverses de l'aphasie motrice avec la surdité et la cécité
verbales.) Quand toutes les voies de communication des centres
corticaux du langage sont détruites, on dit qu'il y a aphasie
totale.
3. Aphasie avec troubles intellectuels. Lésions multiples et
variées des neurones d'association psychiques répandus sur toutes
les régions de l'écorce des hémisphères.
COMMUNICATIONS DIVERSES
L'Ecriture en miroir; par M. Gilbert Ballet (de Paris).
On sait que Buchwald, en 1878, a découvert chez certains hémi-
plégiques droits qu'on fait écrire de la main gauche une écriture
qu'il crut particulière et qu'il appela écriture en miroir. Il la con-
sidéra d'abord, et plus tard Erlenmeyer avec lui, comme une écri-
ture pathologique. Depuis, C. Vogt a montré que l'écriture eu
miroir est l'écriture normale de la main gauche. Cette formule est
exacte, mais exige quelques additions complémentaires. Les cas
analogues à celui d'une petite fille que nous avons récemment ob-
servée sont de nature à mettre en relief les conditions qui favorisent
ou entravent le développement de l'écriture en miroir : cette
enfant, âgée de huit ans et demi, née gauchère, apprit seule, à l'âge
de six ans, à écrire en regardant sa soeur aînée ; elle écrivit spon-
tanément de la main gauche en miroir; plus tard, sous l'influence
de l'enseignement qu'elle reçut et des habitudes qu'on lui inculqua,
elle prit celle d'écrire en écriture droite de la main droite d'abord,
puis de la main gauche. Le cas de cette fillette concourt à démon-
trer, ce qu'établissent beaucoup d'autres faits auxquels on n'a pas
attaché suffisamment d'importance, que ce sont les gauchers qui
sont capables d'écrire aisément et bien en miroir. Il aide, eu outre,
à comprendre pourquoi tous les gauchers n'écrivent pas de la main
gauche et en miroir : c'est que l'éducation vient entraver le déve-
loppement des tendances naturelles de beaucoup d'entre eux. On
SECTION DE NEUROLOGIE. 3 : : 1 l,
doit, à notre avis, substituer à la formule de C. Vogt la suivante,
qui est à la fois plus complète et plus précise : l'écriture en miroir
et de la main gauche est l'écriture normale chez- les gauchers dont
l'éducation n'a pas faussé la tendance naturelle.
L'Écriture en miroir ; par Paul SOLDER (de Paris). '
La question est beaucoup plus complexe qu'elle ne parait. Ni
l'attention, ni la faiblesse intellectuelle. ni un trouble moteur ne
suffisent à l'expliquer. Si on examine les gens atteints d'écriture
en miroir, on s'aperçoit qu'ils ont une erreur de perception dans
l'appréciation de la droite et de la gauche des objets et des per-
sonnes, alors qu'ils ne sont pas gauchers. Les variétés de cette
écriture qu'on observe chez les hystériques montrent qu'on doit
l'attribuer aussi il ce trouble de la représentation. Expérimentale-
ment, on peut reproduire toutes les particularités relevées chez
des sujets normaux ou'hystériques, en provoquant par suggestion
l'allochirie chez une hystérique. Le sens de la représentation des
mots écrits sur le front soit avec la main droite, soit avec la gau-
che, où le sens tactile intervient, est également interverti chez les
gens atteints d'écriture en miroir. Ce trouble de l'écriture, qui se
montre aussi pour la lecture, tient très vraisemblablement à un
trouble de représentation et de perception.
Sur la physiologie de la vision chez le chien; par le professeur Hitzig
(de Halle). (Projections.)
La plupart des partisans de la théorie des localisations du cer-
veau ont noté des troubles de la vue aussi bien dans les lésions du
cerveau antérieur que dans celles de la sphère visuelle, troubles
qui, d'après Munie, seraient uniquement dus à des troubles de voi-
sinage, portant sur la sphère visuelle, ou à des défauts de tech-
nique opératoire.
La communication que je fais aujourd'hui a trait à certaines
méthodes opératoires en même temps qu'aux rapports qui existent
chez le chien entre la vue et le gyrus sigmoïde et la sphère visuelle.
Après extirpation de la dure-mère sans lésion de la pie-mère, on
observe, en opérant aseptiquement,les même symptômes qu'après
l'extirpation des points correspondants de l'écorce. A la coupe on
trouve au niveau des régions dénudées des altérations anatomiques
intenses dans l'écorce et la substance blanche sous-jacente. Il s'en-
suit donc que, si légère que soit l'atteinte portée à l'écorce, on n'est
pas en droit de la localiser à l'écorce seule.
D'autres méthodes opératoires ont été employées : cautérisation
par l'acide phonique à 5 p. 100 qui provoque une nécrose profonde ;
des scarifications ou des extirpations plus ou moins étendues, des
332 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
séparations de l'écorce de la substance blanche sous-jacente. Tous
les chiens ont été observés dans l'appareil à suspension et l'épreuve
de leur champ visuel a été pratiquée à l'aide de morceaux de
viande. .
Grâce à l'application sur le gyrus sigmoïde de ces diverses mé-
thodes, des troubles de la vue se sont montrés avec évidence, qui
ne peuvent certainement pas être imputés à une lésion indémon-
trable au niveau de la sphère de Munk.
Mais si la région de Munie vient à être lésée et si on attend la
disparition des troubles qu'entraîne cette lésion, et qu'on inté-
resse par une altération superficielle le gyrus sigmoïde, on n'ob-
serve aucun trouble visuel. Ces troubles peuvent apparaître cepen-
dant après des extirpations profondes.
Si l'on opère d'abord sur le gyrus sigmoïde, et qu'ensuite, après
réparation des troubles ainsi provoqués, on lèse le point A. I. et
son voisinage, si enfin on pratique une coupe entre ce point et la
substance blanche, dans la règle aucun trouble visuel ne se
produit. '
Par ces opérations de contrôle il est prouvé que : 1° La locali-
sation de Munk ne peut pas être le siège du centre visuel cortical,
et 2° que cette localisation aussi bien que le gyrus sigmoïde est
en relation directe ou indirecte, par voie vraisemblablement sous-
corticale avec le centre visuel cortical qui, d'après Henschen et
d'autres auteurs, est situé sur les lèvres de la fissure calcarine.
Hémiplégie sensiliuo-molrice, accompagnée de mouvements ctllvéto.i-
formes et ({taxi/ormes et d'une paralysie des mouvements associés
des yeux ; néoplasie tuberculeuse, au voisinage des Tubercules
quadrijumeaux ; par le P'' F. RAYMOND (de Paris).
L'auteur communique l'observation d'un malade qui depuis l'âge
de quarante ans, présentait les symptômes d'une bronchite tuber-
culeuse. Au moment de son entrée dans le service de la Clinique
des maladies du système nerveux de la Salpêtrière, cet homme
réalisait l'association d'une hémiplégie sensitivo-motrice gauche
à une paralysie oculaire, le tout survenu sans ictus, et accompa-
gné, dans tout le côté paralysé, d'une sensation de picotements,
de fourmillements, ainsi que de douleurs assez vives et d'hypoes-
thésie. Le facial inférieur du côté gauche participait à la para-
lysie : c'est dire que celle-ci réalisait tous les caractères des hémi-
plégies de cause centrale. Elle était peu prononcée. Les réflexes
étaient très forts, mais sans trépidation spinale. On ne constatait
pas non plus le signe de Babinski. L'hypoesthésie du côté gauche,
très nette, s'accompagnait de la perte du sens musculaire, du sens
articulaire, de la perception stéréognostique, du sens des posi-
tions, de la faculté de localiser les sensations. Les organes des
SECTION DE NEUROLOGIE. 333
sens ne présentaient pas d'altérations sensorielles. L'hémiparésie
du côté gauche s'accompagnait de mouvements incessants athéto-
siformes, avec une certaine ataxie des mouvements intentionnels.
La démarche du malade était incertaine, par moment titubante.
Enfin le malade présentait une paralysie des mouvements associés
de latéralité des deux yeux. A l'état de repos, les globes oculaires
étaient en position normale, sans strabisme interne. L'action des
droits internes était parfaitement conservée pour la convergence.
Par contre, le regard de latéralité vers la droite ou vers la gauche
s'effectuait d'une façon très insuffisante, et non sans que le ma-
lade fut obligé de tourner la tête du côté correspondant.
Le tableau morbide ne s'est pas sensiblement modifié jusqu'à la
mort du malade, qui a été la conséquence des progrès de la bron-
chite tuberculeuse. Le diagnostic porté du vivant du malade a été
celui de néoplasie vraisemblablement tuberculeuse, siégeant dans
la protubérance, en dehors des noyaux moteurs des yeux, vers le
ruban de Reil, probablement à la hauteur des tubercules quadri-
jumeaux postérieurs. L'autopsie a fourni la confirmation de l'exac-
titude de ce diagnostic. La partie postérieure de la moitié droite
de la protubérance logeait un gros tubercule solitaire, ovoïde,
mesurant 4 centimètres en hauteur et 3 en largeur, qui intéres-
sait le ruban.de Heil, qui respectait les noyaux moteurs des yeux,
mais qui avait détruit les fibres allant de l'écorce à la sixième
paire, et celles qui sont censées unir entre eux les noyaux de la
troisième et de la sixième paire. C'est vraisemblablement à l'in-
terruption de ces dernières fibres qu'était due la paralysie des
mouvements associés de latéralité vers la droite, constatée chez le
malade. En tout cas, l'observation relatée par l'auteur fournit la
preuve du siège supra-nucléaire, au voisinage des tubercules qua-
drijumeaux postérieurs des paralysies associées des mouvements
de latéralité des globes oculaires.
Un cas de paralysie bulbaire aslhénique suivi d'autopsie; par
. J. DEJERInE et A. Thomas (de Paris).
Il s'agit d'uue malade âgée de cinquante-neuf ans : il n'y a rien
de particulier à signaler dans ses antécédents hériditaires ou per-
sonnels. Les troubles de la parole, qui furent les premiers symp-
tômes, sont apparus quatre ans auparavant à la suite de chagrins.
L'état de la malade s'aggrava assez rapidement un an avant son
entrée à l'hôpital et lorsqu'elle fut examinée par nous, elle présen-
tait les symptômes suivants : une ophtalmoplégie externe, une
paralysie des muscles innervés parle facial (supérieur et inférieur)
une paralysie presque complète de la langue ; une parésie des
muscles du larynx, du voile du palais, des muscles masticateurs.
La parole est impossible; la déglutition s'accompagne de quintes
334 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
de toux et de reflux des liquides par le nez ; une salive abondante
s'écoule des commissures labiales affaissées. La malade est prise
assez fréquemment d'accès de rire ou de pleurer spasmodiques.
Les réflexes tendineux sont exagérés aux membres supérieurs et
inférieurs. Il n'y a pas d'atrophie musculaire. Les phénomènes
paralytiques sont sujets à de grandes variations et s'accentuent à
la suite de mouvements répétés : il existe, en somme, un épuise-
ment assez rapide des muscles. Cet ensemble symptomatique
correspond au syndrome décrit par Erb et connu encore sous le
nom de paralysie bulbaire asthénique.
A l'autopsie il n'existait aucune lésion en foyer. L'examen micro-
scopique, pratiqué sur coupes sériées, décèle dans les circonvolu-
tions motrices du côté gauche l'existence de lésions assez limitées
de l'écorce cébrale. Le pied du pédoncule cérébral gauche est un
peu moins bien coloré dans son tiers moyen (méthode de Weigert
Pal). Des deux côtés les fibres du faisceau pyramidal sont primi-
tivement et partiellement atrophiées dans leur trajet bulbo-protu-
bérantiel et dans la moelle (faisceaux pyramidaux croisés). Les
noyaux des nerfs craniens sont sains (même avec la méthode de
Nissl). Il existe dans les muscles du larynx et de la langue, mais
surtout dans les premiers, une dégénérescence granulo-graisseuse
de plusieurs fibres musculaires (méthode de Marchi).
Les altérations musculaires sont trop récentes pour pouvoir, à
elles seules, rendre compte des symptômes. L'atrophie des fibres
pyramidales "a une plus grande importance et peut être rapprochée
de celle qu'on observe dans les cas de paralysie pseudo-bulbaire.
Cette observation ne saurait cependant permettre de conclure
d'une façon définitive à la nature organique de la paralysie bul-
baire asthénique qui est peut être moins une entité morbide qu'un
syndrome abritant sous son nom des affections de nature et d'ori-
gine diflérentes.
C/H'0) ! op/;o<o)'«p/tt[; appliquée ci l'étude des mouvements normaux
et pathologiques.
MM. Paul Riciiiiii et LoNDE (de Paris). Les mouvements d'en-
semble de la marche se présentent sous deux formes principales :
type de flexion et type d'extension. Dans les myopathies, c'est le
type d'extension qui domine ; dans la paralysie agitante c'est au
contraire le type de flexion.
Séance du 3 août (matin). Présidence de MM. PrcK (de Prague)
. ET A. OBERSTEINER (de Vienne). z
Résumé du rapport sur Les centres de projection et d'association
du cerveau humain; par Paul LLECIIS1G (Leipzig).
La division de l'écorce cérébrale qui résulte de mes travaux,
SECTION DE NEUROLOGIE. 33S
division en sphères sensorielles (centres sensoriels) et en centres
d'association (centres intellectuels ou organes de la pensée), ne se
montre dans toute sa rigueur que chez le foetus humain et chez le
jeune enfant. Ma divison est fondée sur l'emploi de la méthode
myélogénétir¡uc, méthode qui nous retrace l'histoire du développe-
ment des fibres, dans leur trajet à travers les centres. Pour bien
apprécier les motifs qui m'ont conduit à cette division, il est de
toute nécessité de fixer exactement la portée de cette méthode.
Il est un principe général d'après lequel des fibres nerveuses
équivalentes (c'est-à-dire appartenant au même faisceau) reçoivent
leur gaine de myéline sensiblement à la même époque, tandis que
des éléments dissemblables se recouvrent de myéline à des époques
différentes qui se succèdent suivant une loi. Ce principe général
trouve sa confirmation, d'une façon toute particulière, au niveau
des masses de fibres des hémisphères cérébraux. Ainsi, par exem-
ple après la formation successive des différentes voies sensorielles,
des voix motrices correspondantes, des systèmes courts et longs
d'association, on arrive à délimiter sur l'écorce cérébrale des
champs corticaux myélogénétiques, sur toute» l'étendue desquels
se retrouvent les mêmes stades de développement. Semblables à
des individus de même âge, ces territoires corticaux ont une éten-
due égale et sont semblablement disposés : ce ne sont donc pas
des découvertes fortuites, mais des formations régies par des lois.
Me fondant sur nies recherches qui. actuellement, s'étendent à
10 stades du développement, j'ai admis (Xeurologisckes Cenlral-
blatl, 1898, n° 21), que le nombre de ces territoires corticaux était
d'environ 40, et, pour que l'on puisse jeter sur eux un coup d'oeil
d'ensemble, je les ai répartis (me plaçant au point de vue purement
chronologique) en trois groupes :
al Les territoires à développement précoce (territoires primor-
diaux) ; b) Les territoires à développement plus tardif ou terri-
toires terminaux ; c) Les territoires qui, au point de vue du
développement, se placent entre les deux catégories précédentes,
ou territoires intermédiaires.
Celte classification n'est nullement destinée à rectifier ni à rem-
placer ma précédente division en centres sensoriels et en centres
d'association. Le principe de classification est dans les deux cas
essentiellement différent. Il résulte de tout ce que l'on sait sur
l'ordre de développement des fibres nerveuses, que les territoires
primordiaux, présentant sur certains points des fibres à myéline
quatre mois plus tct que les territoires terminaux, doivent occuper
dans l'ensemble du système une place essentiellement différente.
Néanmoins, seule l'étude de chaque champ myélogénétique pris
en particulier permet de déterminer sa topographie spéciale. Cette
étude ne peut être entreprise avec chance de succès qu'à l'aide de
méthodes qui s'appliquent directement au cerveau humain. Les
336 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
méthodes qui se basent sur l'anatomie comparée ne sont pas
applicables. Un seul fait suffit à le montrer. Le chien ne présente
qu'environ la moitié des territoires corticaux à évolution succes-
sive, que l'on trouve chez l'homme (Dhllkenl. De 18 à 20 des
champs corticaux que l'on observe chez l'homme sont absolument
impossibles à déceler chez le chien, au moyen de la méthode myé-
logénétique, la seule applicable ici. L'assertion que, néanmoins,
les champs corticaux existent chez le chien ne repose sur aucun
fait. A côté de l'anatomie normale, il n'est permis d'utiliser, pour
déterminer la signification des territoires corticaux à évolution
successive, que les documents pathologiques recueillis chez l'homme.
L'anatomie du cerveau normal adulte ne fournit que des rensei-
gnements peu sûrs, en comparaison de ceux que nous donne l'ana-
tomie du foetus et du nouveau-né. Chez ces derniers, on peut, dès
le début, noter des différences à un certain point de vue entre
plusieurs des champs corticaux.
1° Il y a de 18 à 20 champs myélogénétiques chez qui une cou-
ronne rayonnante bien développée est facile à mettre en évidence.
Il est d'autres champs où la présence d'une couronne rayonnante
ne peut être démontrée ni chez l'enfant ni chez l'adulte. Celle-ci
ne s'y forme donc pas plus tard ; elle ne s'y développe jamais.
2° Ces territoires dépourvus de couronne rayonnante sont riches
en longs systèmes d'association, tandis que ces systèmes ne se
trouvent qu'en faible quantité dans les territoires riches en cou-
ronne rayonnante.
3° On peut donc, au point de vue purement anatomique, diviser
les champs corticaux en centres de projection et centres d'associa-
tion. La présence de fibres de projection isolées, dans les centres
d'association, ne rend pas caduque cette classification, puisque la
dénomination n'implique qu'une question de prédominance de
l'un des éléments. Seule la preuve, que dans les deux groupes de
champs corticaux les longs systèmes d'association et les systèmes
de projection sont représentés en proportious égales, ne permet-
trait plus de mantenirla classification. Pour un grand nombre de
champs corticaux, les dégénérations secondaires n'ont pu prouver
exactement l'existence de fibres de projection isolées, à plus forte
raison d'une couronne rayonnante de fibres groupées en faisceaux,
unissant l'écorce cérébrale aux organes terminaux périphériques
et réalisant ainsi tous les caractères des fibres de projection. Dans
toutes les publications parues jusqu'à ce jour qui contestent ces
faits, il n'est pas tenu compte de causes d'erreur qui enlèvent toute
valeur démonstrative à leurs conclusions. (Voy. Pie Localisation
dcr geisligen Voigiinge, Leipzig, 1896, Tafel.)
Cenlues de projection.
J'ai distingué naguère quatre de ces centres : la sphère de la
SECTION DE NEUROLOGIE. ;-\ : -31
sensibilité corporelle ; la sphère visuelle ; la sphère auditive ; la
sphère olfactive et gustative.
D'après mes récentes découvertes, chacune de ces sphères (excep-
tion faite de la sphère auditive) est forméc par le groupement de
plusieurs champs corticaux myélogénétiques. La sphère de la
sensibilité corporelle en comporte 8, chacune des autres 3. De plus,
la sphère de la sensibilité corporelle (dite encore sphère tactile,
sphère de la sensibilité générale) occupe une surface un peu plus
étendue que celle que je lui avais attribuée : au niveau de la
ire circonvolution frontale, elle l'avance de quelques centimètres plus
loin en avant. Le segment le plus antérieur long d'environ 2 cen-
timètres du gyrus supra-marginalis doit lui être également annexé.
Le gyrus subangularis constitue un nouveau champ de projection
que j'ai découvert ultérieurement; il montre dans la structure de
son écorce les particularités caractéristiques des centres sensoriels.
Centres d'association.
J'ai distingué tout d'abord quatre centres d'association : le centre
frontal; le centre pariétal; le centre temporal; le centre insulaire.
Plus tard, j'ai groupé le centre temporal et le centre pariétal en
un seul centre : le grand centre postérieur d'association. L'exis-
tence prouvée dans le gyrus subangularis d'un centre de projec-
tion réduit à la partie postérieure de la 2° circonvolution temporale
l'union de ces deux centres. Ils ne se continuent l'un avec l'autre
que sur une faible largeur. Aussi me semble-t-il qu'il y a lieu de
conserver l'ancienne division en centre temporal et en centre parié-
tal.
Sur les centres pariétal et temporal il est particulièrement facile
de constater une subdivision en zones périphériques arrivant plus
tôt à leur développement complet, et en territoires centraux qui
n'atteignent que plus tard l'état adulte. Sur le centre frontal d'as-
sociation la même subdivision est évidente, mais la disposition est
plus compliquée. Les zones périphériques touchent les centres sen-
soriels et leur sont unies par de nombreuses fibres arquées. L'in-
sula et le précunéus ne semblent consister qu'en zones périphé-
riques. Peut-être les zones périphériques constituent-elles des
formations de transition entre les territoires riches en couronne
rayonnante et ceux qui en sont dépourvus. Parfois, bien que très
rarement, on trouve sur ces zones périphériques des faisceaux
atypiques de la couronne rayonnante, qui représentent des fibres
de projection aberrantes, des centres sensoriels. De telles décou-
vertes isolées ne prouvent en rien la présence générale et régu-
lière de faisceaux de la couronne rayonnante dans les zones péri-
phériques.
Les territoires centraux des zones d'association (surtout la partie
Archives, 2° série, t. X 22
338 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
moyenne du gyrus angularis, la 3° circonvolution temporale, la
moitié antérieure de la 2° circonvolution frontale), sont, selon
toute apparence, les points nodaux de systèmes longs d'associa-
tion, tandis que les zones périphériques ne présentent que faible-
ment ces caractères. Les territoires centraux sont des territoires
terminaux : ils sont essentiellement caractéristiques du cerveau
humain. Leur destruction isolée n'est jamais accompagnée de phé-
nomènes manifestant une altération de la motricité ou de la sen-
sibilité. Les phénomènes d'excitation d'ordre moteur dont peuvent
s'accompagner leurs lésions doivent être interprétés comme des
actions à distance.
Les territoires centraux des zones d'association sont des centres
qui sont en relation plus ou moins directe, chacun avec plusieurs
zones sensorielles, quelques-uns avec toutes; ils en combinent
vraisemblablement les activités (association). Après leur distraction
bilatérale, l'intelligence se montre affaiblie ; l'association des idées
est particulièrement troublée. Les territoires centraux sont donc,
suivant toute apparence, d'une haute importance pour l'exercice
des activités intellectuelles, pour la formation des images men-
tales composées de plusieurs qualités sensorielles, pour l'accom-
plissement d'actes tels que la dénomination des objets, la lecture,
etc., etc. Ces fonctions sont troublées avec une régularité particu-
lière dans les affections des centres postérieurs d'association ;
l'observation clinique s'établit, justifiant la légitimité de notre
division de l'écorce cérébrale en centres sensoriels (centres de
projection) et centres d'association.
Résumé du rapport sur Les centres de projection et d'association
du cerveau humain; par le professeur 131TZIG (Halle).
La doctrine de Flechsig de l'existence de centres de projection et
d'association qui auraient une fonction diflérente dans l'écorce du
cerveau, se fondent :
1° Sur l'existence prétendue de fibres de projection dans ceux-ci
et l'absence de fibres de projection dans ceux-là. Cette assertion
n'est plus soutenable clans toute son étendue, attendu que
11. Flechsig l'a abandonnée lui-même pour une partie de ses cen-
tres d'association et que d'autres auteurs affirment avoir observé
aussi des fibres de projection partant du reste des centres d'asso-
ciation. Mais il parait certain que certains territoires de l'écorce
cérébrale possèdent un bien moins grand nombre de fibres de pro-
jection que d'autres, qui de leur part sont en connexion plus ou
moins directe avec les terminaisons des nerfs sensitifs ou senso-
riels.
2° Sur la myélinisation chronologique des centres de projection
et d'association, ainsi que sur celle des différents centres de pro-
SECTION DE NEUROLOGIE. 33')
jection en particulier. Cette assertion ne peut être soutenue non
plus dans toute son étendue, attendu que M. Flechsig lui-même y
a trouvé des différences individuelles qu'il attribue, il est vrai, à
des influences pathologiques, tandis que ses adversaires les regar-
dent avec le même droit comme appartenant au domaine de la
physiologie. Cette loi d'évolution paraît donc bien fondée dans ses
grands traits ; mais elle a été pourtant affirmée d'une façon trop
absolue.
3° Sur la différence de la structure anatomique des centres de
projection entre eux et vis-à-vis des centres d'association. Les avis
des différents auteurs étant opposés les uns aux autres tout à fait,
il est impossible de se former à ce sujet une opinion positive.
M. Flechsig cherche la destination des centres sensitifs dans la
perception des irritations provenant des différentes surfaces des
sens et dans l'association de celles-ci à des images intellectuelles.
Il prouve cette thèse par l'analyse des faits pathologiques tels que
la paralysie tactile, l'aphasie sensorielle, etc. Ces vues sont en
général conformes aux nôtres.
La destination des centres d'association est trouvée par Flechsig
dans la conservation des images de mémoire ainsi que dans la
reproduction et l'association de celles-ci, soit par l'excitation des
sphères sensitives voisines, soit peut-être par l'excitation des
autres centres d'association. 11 les considère donc comme les vrais
organes de l'esprit et de la pensée.
Les opinions avancées sur ce sujet par M. Flechsig paraissent
pour le moment purement hypothétiques. L'hypothèse d'images
de mémoire déposées dans certains groupes de cellules n'est nul-
lement prouvée.
Malgré ses réserves, l'oeuvre de M. Flechsig et ses principales
idées fondamentales doivent sans doute être appréciées comme
un véritable progrès pour arriver à reconnaître la structure et la
fonction de l'organe de la pensée. Il le serait en-un plus haut degré
encore, s'il s'était prononcé avec plus de réserve et d'une manière
moins absolue. (A suivre.)
SOCIÉTÉS SAVANTES.
SOCIÉTÉ D'HYPNOLOGIE ET DE PSYCHOLOGIE.
Séance du mardi Il juillet 1900. - Présidence de M. Jules Voisin.
' Les suggestions religieuses.
M. Binet-Sanglé insiste sur la nécessité sociale d'introduire dans
les établissements d'instruction l'étude de l'hiérologie comparée
et des lois de la suggestion religieuse.
M. LIOnEL DAURiAC. Si l'on veut entrer dans cette voie, il est
logique de mettre les enfants en garde contre toute espèce de sug-
gestion qui n'a pas un intérêt thérapeutique. Cette intervention
n'est pas à recommander, car elle préjuge une solution touchant
l'erreur que comporte l'état actuel de notre ignorance.
Mélancolie traitée avec succès par la suggestion hypnotique.
M. BÉRILLON. -Une femme de cinquante-trois ans, à hérédité très
chargée, présentait il y a 18 mois, les symptômes suivants : tristesse,
aboulie, dégoût de la vie, idées et même tentatives de suicide, idées de
ruine et de culpabilité, scrupules religieux, hallucinations visuelles
et auditives, sitiophobié, etc. Il y a un an, je l'ai soignée pendant
un mois et très améliorée, mais non complètement guérie. J'ai
alors, de moi-même, momentanément interrompu le traitement
pour le reprendre quelques semaines après, et ainsi plusieurs fois
de suite. Dans l'intervalle qui séparait mes interventions sugges-
tives, il se faisait en elle un travail latent ; mes suggestions anté-
rieures germaient et mûrissaient dans le domaine du subconscient;
leur effet se trouvait, pour ainsi dire, décuplé. Donc, il ne faut pas
toujours vouloir atteindre à la guérison par un progrès lent mais
continu; dans certains cas, il convient. en quelque sorte, de don-
ner plusieurs coups d'épaule successifs. Grâce à cette technique,
sur laquelle j'insiste et que je recommande, cette malade est
aujourd'hui complètement guérie.
M. GARNAULT continue son étude sur la ventriloquie; il montre
comment les religions antiques ont utilisé les divers modes de la
phonation comme moyen de suggestion et d'auto-suggestion.
M. BLOCH appelle l'attention de la Société sur la trépidation épi-
leptoïde de tout le membre inférieur dans la sclérose en plaques.
BIBLIOGRAPHIE.
VIII. La mélancolie par KRA EPELIN. (Psychiati-ic, Barth, Leipzig, 1899.)
Sous le nom de folie de la période d'involution sénile, l'auteur
groupe tous les troubles psychiques qui sont en rapport, au point
de vue de l'étiologie, avec les modifications dues à l'àge avancé.
Sans aucun doute, il reste une série de troubles psychiques qui
peuvent apparaître aux diverses périodes de la vie ; mais il n'est
pas moins certain qu'à la période d'involution sénile peuvent écla-
ter des psychoses déterminées dont l'aspect clinique porte la trace
des processus de régression qui leur ont donné naissance. Cela est
plus particulièrement vrai pour la sénilité proprement dite; mais
déjà antérieurement, à partir de la cinquantième année, commen-
cent à se manifester les premiers signes de l'involution psychique
par l'apparition de formes spéciales de la folie. Malgré certains
traits communs avec les psychoses de la sénilité, les troubles
psychiques de la période d'involution s'en distinguent cependant.
La mélancolie comprend, pour Kraepelin, toutes les modifica-
tions anxieuses morbides de la période avancée de la vie qui ne
peuvent être considérées comme des phases d'autres formes de
la folie. En outre des troubles de la vie affective, le tableau cli-
nique de la mélancolie comprend encore en général des concep-
tions délirantes, surtout des idées de culpabilité, mais aussi des
idées de persécution et des idées hypocondriaques.
Des états mélancoliques simples on arrive par transition gra-
duelle à un groupe de faits, moins fréquents, et apparaissant à un
âge plus avancé, dans lesquels les conceptions délirantes ont un
contenu tout à fait absurde. C'est la forme clinique décrite sous le
nom de Wahnsinn dépressif. Tout l'entourage apparait transformé
d'une façon effrayante : les maisons sont des forteresses, l'asile est
le palais des morts, une prison, tous les mots ont un sens caché.
Rien ne parait naturel; les médecins sont des figurants, le soleil
la lune ne sont plus les mêmes, ni les arbres. Les interprétations
fausses sont nombreuses. Le malade s'accuse d'avoir plongé le
monde entier dans le malheur, il a mangé ses enfants; chaque
fois qu'il mange ou qu'il se retourne dans son lit, un homme est
exécuté, etc. Il veut être fusillé, guillotiné.
Dans quelques cas se manifestent des idées de négation : il n'y a
plus d'argent, plus de chemin de fer, plus de villes, plus de méde-
cins : tous les hommes sont morts, sont brûlés ; le malade n'a pas
de nom, ne peut pas mourir, est éternel. Des idées hypocondriaques
ubsuroes sont assez fréquentes : la peau est trop étroite, il n'a plus
de tête, ne peut plus s'asseoir, il est changé en bête, etc. Dans.
342 BIBLIOGRAPHIE.
certains cas surtout lorsque l'affaiblissement intellectuel l'ait des
progrès, se montrent des idées de grandeur. Les malades racontent
qu'ils peuvent faire de l'or, guérir des maladies; l'empereur va
venir les visiter, etc.
Les hallucinations sont plus actives dans le Wahnsilln dépressif
que dans la mélancolie simple.
La conscience est aussi dans cette forme plus gravement altérée,
l'orientation est défectueuse, la pensée est troublée, les mêmes
idées sont sans cesse répétées. Cependant on est étonné souvent
de la lucidité avec laquelle les malades peuvent répondre à cer-
taines questions et manifester leurs conceptions maladives. Parfois
même les sujets ont une certaine conscience de la nature de leur
mal, ils se plaignent de dire sans cesse des sottises, d'être devenus
fous, etc. Dans d'autres cas le malade n'est pas touché par les con-
tradictions les plus évidentes.
Dans un petit nombre de cas apparaissent des signes catatoni-
ques : mutisme, attitudes anormales, catalepsie, écholatie. Ces
symptômes sont accompagnés de troubles accusés de la conscience.
Ces formes, dont les unes guérissent et les autres se terminent
par la démence, appartiennent-elles à la mélancolie ou à la cata-
tonie ? On ne peut encore, trancher cette question, bien que la pre-
mière hypothèse soit plus probable, car les manifestations carac-
téristiques de la catatonie, le négativisme avec persistance de la
lucidité, les mouvements stéréotypés et les grimaces, les actes
impulsifs n'ont pas été constatés, et d'autre part, on peut observer
dans la paralysie générale des manifestations catatoniques.
. Ça et là on observe des signes de modifications séniles du côté
du cerveau : vertiges, réaction pupillaire paresseuse, parésie faciale,
tremblement de la langue et des mains, troubles aphasiques, sur-
dité plus ou moins accentuée, sensations pénibles dans la région
précordiale, diminution du tonus musculaire, sensation de fai-
blesse générale. On constate aussi une diminution du poids du
corps, de l'abaissement de la température, des troubles circula-
toires. -
La mélancolie telle qu'elle est décrite par Kraepelinest une ma-
ladie du début de la sénescence. Peut-être faut-il la considérer
comme l'expression maladive de ce sentiment spécial d'incapacité
et d'insuffisance croissantes qui se manifeste à l'état normal, et
que l'on peut opposer au sentiment de force surabondante de la
jeunesse. Plus de 61 p. 100 des malades se trouvaient être entre
cinquante et soixante ans ; les cas les plus précoces débutant peu
après la quarantième année ; les plus tardifs peu après la soixante
cinquième. On ne peut se prononcer sur le point de savoir s'il
faut ranger dans la mélancolie certaines formes, analogues au
point de vue clinique, qui sont en rapport avec la grossesse, ou la
lactation, et se montrent à une période moins avancée de la vie,
BIBLIOGRAPHIE. 33
Avec l'âge plus avancé des malades, on voit augmenter progressi-
vement les formes à conceptions délirantes absurdes.
Le sexe féminin est frappé dans 60 p. 100 des cas; il est par con-
séquent plus exposé que le sexe masculin. Cela est vrai surtout
pour la mélancolie qui survient de cinquante ans aux premières
années de la soixantaine : dans cette période, les hommes devien-
nent rarement mélancoliques, tandis que chez la femme la méno-
pause paraît constituer un terrain éminemment favorable pour le
développement de la mélancolie. Plus tard les deux sexes sont
frappés dans des proportions à peu près égales.
La prédisposition héréditaire parait moins importante que la
prédisposition acquise : l'hérédité n'a été relevée que dans 53 p. 100
des cas parfois il s'agissait de parents éloignés. Remarquable est
la fréquence chez les parents et les collatéraux de l'apoplexie, de
la démence sénile et aussi de l'alcoolisme. Il faut noter d'ailleurs
que chez les malades les plus âgés, les renseignements font sou-
vent défaut sur les parents et les collatéraux ce qui diminue un
peu la valeur des chiffres traduisant l'importance de la prédispo-
sition. Aussi bien l'expérience montre que la fréquence des trou-
bles psychiques chez les collatéraux est plus grande que chez les
parents. Un certain nombre de sujets étaient considérés comme
des originaux, des inquiets, des minutieux : souvent on constatait
une sénilité précoce.
Très fréquemment certaines circonstances extérieures ont paru
favoriser l'éclosion du mal : maladies somatiques (influenza, catarrhe
de l'estomac), opérations, pertes d'argent, frayeurs, soucis, chan-
gement dans le genre de vie, et surtout la maladie et la mort de
proches parents.
Ainsi délimitée la mélancolie comprend la plus grande partie
des observations que l'on avait l'habitude antérieurement de dé-
crire sous le nom de mélancolie simple et de mélancolie anxieuse,
de plus le Wahnsinn dépressif et enfin les états de dépression
séniles. Dans ces dernières années Kraepelin s'est convaincu que
ces formes et ces formes seules ont entre elles des rapports
étroits. De cette manière de voir, il résulte que tous les états
dépressifs des périodes moins avancées de la vie ne font point
partie de la mélancolie. Ils appartiennent, ou bien à la folie ma-
niaque-dépressive, ou à la démence précoce : quelques cas doivent
être attribués à la folie des dégénérés et peut-être aussi à l'hystérie.
D'autre part, il ne faut pas oublier que parfois la folie maniaque-
dépressive n'apparaitqu'àlapériode d'involution sénile. La marche
remarquablement rapide et favorable de l'accès et l'apparition de
quelques manifestations maniaques isolées (impulsions motrices
intenses, fuite des idées, idées de grandeur, humeur gaie sans
signes de faiblesse psychique) serviront au diagnostic, qui dans
certains cas pourra être difficile. Les éléments les plus utiles seront
314 BIBLIOGRAPHIE.
fournis par l'état psycho-moteur. Tandis que l'allure du mélan-
colique traduit son humeur anxieuse ou excitable, la période
dépressive de la folie circulaire est caractérisée avant tout par l'in-
capacité de prendre une résolution, le ralentissement des actes
volontaires. D'autre part l'humeur excitable que l'on observe
parfois dans cette dernière affection, s'accompagne en général
d'un vif besoin d'agir et de parler, tandis que l'excitabilité du
mélancolique porte l'empreinte de l'anxiété interne. La mélancolie
présente d'ailleurs une certaine tendance à la récidive. Parmi les
malades de Kraepelin il s'en trouvait 15 p. 100 qui avaient anté-
rieurement traversé une période mélancolique ; celle-ci était en
général survenue également dans la phase d'involution et n'avait
pas atteint un degré accentué.
Enfin il existe un petit groupe de cas dans lesquels des troubles
dépressifs se sont manifestés au cours de la quarantaine. Ces malades
paraissent très facilement influençables par des causes psychiques,
leur douleur est exaspérée par les influences extérieures, leur éLat
affectif est uniforme, leur délire pauvre. Il n'est pas sûr qu'il
faille attribuer ces cas à la mélancolie. Les formes de la mélanco-
lie avec faiblesse psychique grave et conceptions délirantes absurdes
conduisent par des transitions graduelles à la confusion sénile.
Dans certains cas on peut se demander s'il ne s'agit pas de dé-
mence précoce (affection rare d'ailleurs à cet âge), surtout lorsque
se produisent des signes de catatonie, si on constate un négati-
visme opiniâtre, des états d'excitation spéciaux puérils, des grimaces
et une conservation de l'orientation et de la lucidité.
De sérieuses difficultés se rencontrent pour le diagnostic avec la
paralysie générale. Les cas qui surviennent entre quarante-cinq et
cinquante-cinq ans, peuvent rester longtemps incertains, en rai-
son de l'analogie des signes psychiques. Plus de lucidité et de
clarté, un état affectif plus constant et plus vif, un développement
subaigu sans période prodromique parlent en faveur de la mélan-
colie ; la paralysie générale sera admise s'il existe des signes d'af-
faiblissement psychique accentué et des signes physiques, si la
maladie a évolué progressivement et sous la forme d'une démence
graduelle. Kraepelin ne se prononce pas encore sur les rapports de
l'artério-sclérose cérébrale avec les états mélancoliques.
Paul SÉRIEUX.
VARIA.
LES ALIÉNÉS EN LIBERTÉ.
- On vient de découvrir dans le canal, à Jorquenay, près Langres,
le cadavre de Mue Lhuillier Sommelet. Cette pauvre femme, qui
depuis quelque temps donnait des signes de dérangement céré-
bral, était sortie de chez elle vendredi soir; la mort est acciden-
telle. (Pelit Parisien, 17 septembre.)
Une femme Ballay, demeurant à Vinay (Isère), dans un accès
de folie, a profité du sommeil de son mari pour lui ouvrir le ventre
avec un rasoir. (Bonhomme Normand, 3 août.)
- lui. Louis Protat, âgé de trente-deux ans, employé de commerce,
demeurant.rue des Gatines, venait de rentrer chez lui, hier soir,
vers onze heures, lorsque son attention fut attirée par une sorte de
battement contre les carreaux de la fenêtre. Il s'approcha et ne fut
pas peu surpris d'apercevoir l'extrémité d'une échelle qu'on avait
dressée contre le mur de la maison à la hauteur de son logement,
qui est situé au deuxième étage. M. Protat s'arma d'un revolver
et se mit en observation.
Bientôt un individu lui apparut. L'homme s'arrêta à l'avant-
dernier échelon. Sans hésiter, M. Protat le mit en joue et tira. Les
vitres volèrent en éclat. Atteint par le projectile, l'homme poussa
un sourd gémissement, battit l'air de ses bras et culbuta dans le
vide. Accourus au bruit des détonations, des passants et des gar-
diens de la paix relevèrent le blessé et le transportèrent dans une
pharmacie où on constata que la balle lui avait fracturé l'épaule
droite. Le malheureux s'était en outre, dans sa chute, fracturé la
jambe gauche et fait une grave blessure à la tête.
Des soins lui furent prodigués, et lorsqu'il put articuler quelques
paroles, celui que M. Protat avait pris pour un cambrioleur fit
l'étrange déclaration suivante : «- Je voulais aller embrasser ma
mère, qui est au ciel. J'ai été téméraire. Dieu m'a puni. Il m'a tué
avec son tonnerre ! » Le pauvre fou continua à divaguer de la sorte
pendant qu'on le transportait à l'hôpital Tenon. On n'a pu jus-
qu'ici établir son identité. M. Protat, dont l'erreur est fort excu-
sable a été laissé en liberté. (Le Malin, 18 septembre.)
Pendant l'absence de sa femme, le nommé Gauthier, de
Pressigny, s'est pendu à une perche dans son grenier. Le malheu-
reux, depuis quelque temps, ne jouissait plus de toutes ses
facultés mentales. (Petit Parisien, 22 septembre.)
4H 6 VARIA.
Suicides. Dimanche, à Cesny aux-Vignes, le nommé Louis
Besnard, dix-neuf ans, au service de 111n'° de Reviers, s'est tué d'un
coup de revolver dans la tête. Besnard avait le cerveau dérangé à
la suite d'une maladie. (Bonhomme Normand, 27 septembre.)
Une désespérée. Une confectionneuse, M"10 Berthe Guérin, âgée
de quarante-quatre ans, demeurant 25, rue Bichat, atteinte de la
folie de la persécution, s'est suicidée hier à son domicile à l'aide
d'un réchaud de charbon. (Petit Parisien, ` ? i septembre.)
Un fou anthropophage. Un individu, âgé d'une trentaine
d'années, était assis, hier matin, vers dix heures, sur un banc,
boulevard Rochechouart, en face du numéro 42. Soudain, il se
mit à rire aux éclats ; puis il se leva et arracha ses vêtements,
qu'il jeta au milieu de la chaussée. Il avait déjà enlevé ses chaus-
sures, son veston, son gilet et ses bretelles, au grand amusement
de la foule nombreuse des gamins et des badauds qui l'entouraient
lorsque des agents, qui avaient opercule rassemblement, arrivèrent
et voulurent emmener au poste le pauvre déséquilibré. Mais, à la
vue de l'uniforme, celui-ci entra dans une fureur terrible. Il
poussa-un rugissement de fauve et, avant qu'on eut pu l'en empê-
cher, bondit avec une agilité surprenante sur le gardien de la
paix Aubert, le saisit par le cou, lui laboura le visage à coups
d'ongles et se mit à le mordre à belles dents. Un témoin de cette
scène, M. Georges Demay, demeurant 42, boulevard de Clichy,
ayant eu la mauvaise inspiration de vouloir porter secours à la
victime, le fou tourna sa fureur contre lui et, d'un terrible coup
de dents, lui enleva une partie de la joue droite. .
On eut toutes les peines du monde à maîtriser le pauvre insensé,
et on dut le ligoter pour le porter au commissariat de police, où
il il fut reconnu pour un nommé Gaston Poissignon, âgé de trente-
six ans, lithographe, demeurant 8, cité Marcadet. Il a été envoyé à
l'infirmerie spéciale du Dépôt. (Le Matin, 20 septembre.)
La folie des grandeurs chez un cocher de corbillard. Les jour-
naux de Paris racontaient, ces jours-ci, l'étrange cas de folie de ce
cocher des pompes funèbres, nommé François Legrand, qui, après
avoir accompagné le convoi du peintre Vollon au 'cimetière et
reconduit à leur domicile les personnes qui avaient pris place dans
sa voiture, sortit de Paris avec son attelage et, au bout d'une
course folle à travers la campagne, alla échouer à Marcilly, petit
village aux environs de Meaux. C'est là que les inspecteurs de la
Sûreté le découvrirent. Le Malin a recueilli sur ce pauvre diable
des renseignements très pittoresques :
« François Legrand n'était pas, ainsi qu'on va le voir, un mince
personnage : employé de la Compagnie des pompes funèbres
depuis vingt ans, il était réputé comme le meilleur cocher de
VARIA. " o'l'7 7
Paris, et tous ses confrères reconnaissaient ses mérites; tous,
même Mont jarret, le célèbre ex-piqueur de l'Elysée, à qui il donna
souvent d'utiles conseils. Car, non seulement Legrand conduisait
avec maîtrise son funèbre équipage, mais il n'avait pas son pareil,
paraît-il, pour faire la toilette d'un cheval. Il excellait dans l'art
de natter les crinières, travail qui n'est pas à la portée du premier
venu. Ce n'était pas seulement Montjarret, mais encore le piqueur
de M. de Rothschild, et beaucoup d'autres, qui venaient lui
demander son avis dans certaines circonstances délicates. Tant de
succès lui avaient déjà un peu tourné la tête.
« Mais ce fut le comble lorsqu'il apprit qu'il venait d'être choisi
entre tous par le gouvernement pour conduire au couronnement
du czar Nicolas 11 les équipages de l'ambassade de France. Un tel
honneur, à lui, Legrand, simple cocher de corbillard ! Le pauvre
homme en perdit encore un peu de la raison qui lui restait. 11 se
rendit à Moscou, remplit à la satisfaction de tous sa haute mis-
sion ; mais quand il revint en France, il était possédé de la manie
des grandeurs. Depuis cette époque, il se croyait appelé aux plus
hautes destinées, et à différentes reprises on dut lui ordonner un
repos absolu.
« On sait le reste : le malheureux est devenu complètement
toqué, et hier, sa folie, très douce jusqu'ici, s'est changée en furieuse
démence. 11 a tout brisé chez lui, et les siens ont dû requérir les
gardiens de la paix pour le faire conduire à l'infirmerie spéciale du
Dépôt. On a réussi à l'emmener en lui racontant que le czar l'atteu-
dait dans la gare de la Cité, pour le décorer devant toutes les
troupes de la garnison de Paris assemblées. » (La Petite Gironde,
10 septembre.)
Tous ces faits témoignent de l'état déplorable de l'assis-
tance des aliénés en France. Il en sera loujours ainsi tant que
chaque département n'aura pas l'asile ou les asiles qui lui
sont nécessaires, tant aussi que les départements qui ont des
asiles prendront des aliénés de la Seine payants au détriment
de leurs propres malades indigents.
Drames DE l'alcoolisme.
Un père qui étrangle, son enfant. Un drame navrant, ayant
pour cause l'alcoolisme, s'est déroulé hier matin dans un hôtel
meublé, 24, rue Broca. A cette adresse logeaient, depuis six mois,
un journalier, Joseph Grandjeau, âgé de vingt-neuf ans, et sa
maîtresse, Eugénie Millet, blanchisseuse. Tous deux, qui avaient
précédemment habité Dôle, étaient, depuis leur arrivée à Paris,
dans la plus effroyable misère.
3 48 VARIA .
L'homme se mit à boire, tandis que sa compagne, plus coura-
geuse, essayait de suffire aux besoins du ménage. Mais elle accou-
cha, il y a cinq semaines, d'une petite fille qu'elle fut obligée de
soigner et de nourrlr, ce qui l'empêcha de travailler. La naissance
de l'enfant avait contrarié Grandjean, qui ne rentra plus au logis
que tout à fait ivre. Hier, pris d'une crise d'alcoolisme, il prit dans
ses bras la fillette, la mordit, puis avec ses mains l'étrangla.
Lorsque quelques instants plus tard on vint pour l'arrêter, il ber-
çait le petit cadavre et chantait.
Encore sous l'influence de l'alcool, il déclara, au cours de l'inter-
rogatoire que lui a fait subir M. Carpin. commissaire de police du
quartier du Val-de-Grâce, qu'il avait voulu manger de caresses sa
petite fille. Le magistrat a fait diriger l'alcoolique sur l'infirmerie
spéciale du Dépôt. (Petit Parisien, 19 septembre.)
Alcoolisme et suicide. Le nommé Désiré l'errette, trente-trois
ans, maçon, à Saint-Pierre-Tarentaine, arrondissement de Vire,
s'est suicidé en se tranchant la gorge avec un couteau de cuisine.
Perrette avait accompli son service militaire aux colonies; il y
avait contracté les fièvres paludéennes. Il se livrait à la boisson.
(Bllnhomme Normand, 27 septembre.)
Un ouvrier typographe, le nommé Salaix, demeurant à Châ-
tillon-sur-Seine, rentrait à son domicile en état d'ivresse; sa
femme venait d'accoucher. La brute s'arma d'une hachette et se
précipita sur la malheureuse et sur son enfant; courageusement,
la garde-malade s'interposa et fit dévier l'arme, si bien que la
mère et l'enfant ne furent que légèrement atteints à la tête. Salaix
a été écroué. Il ne se trouvait à Châtillon que depuis quelques
jours et a été déjà renvoyé de divers ateliers pour inconduite.
(Petit Parisien, 25 septembre.)
Un casseur de pierres, nommé Isidore Baratte, âgé de
soixante-six ans, demeurant au Bailleul, près Flers, s'est pendu à
une solive de sa cave. Le suicide est attribué à l'alcoolisme. (Petit
Parisien, 15 septembre.)
- A Arcenant, près Dijon, une femme D..., qui avait absorbé une
grande quantité d'alcool, s'est précipitée, dans un moment de folie
furieuse, sur son petit-fils qui jouait avec d'autres enfants sur le
bord de la rivière. L'énergumène, d'un coup de dents, trancha
une oreille du pauvre petit et la mangea. On eut mille peines à lui
enlever l'enfant dont elle voulait absolument manger l'autre
oreille. La blessure de la petite victime est grave. Sa grand'mère
est dans un état de surexcitation terrible. (Petit Parisien du 9 sep-
tembre.)
Fantaisie d'ivrogne. Le sieur Gaston Corbin, vingt ans, demeu-
VARIA. 3W
rant à Saint-Germain-le-Vallon, près Falaise, ayant bu plus que
de raison, eut la malencontreuse idée de prendre un bain. Il se
précipita dans une carrière pleine d'eau, mais ne reparut pas.
Son cadavre n'a été retiré que le lendemain. (Bonhomme Normand,
30 août.)
Dernière lampée d'un ivrogne. Le nommé Alexandre Minot,
cinquante et un ans, cordonnier à Saint-Pierre-sur-Dives, s'est
levé dans la nuit pour aller se noyer dans la rivière, où on l'a
retrouvé le matin. Minot était un ivrogne incorrigible. Son suicide
est attribué à l'alcoolisme. (Bonhomme Normand, 30 août.)
Depuis quelque temps, les époux Latoulie, de Limoges, ne
vivaient pas en bonne intelligence. A la suite de scènes violentes,
la femme avait même dû quitter son mari, un alcoolique invétéré.
Aujourd'hui, vers une heure, ce dernier, qui lui avait plusieurs
fois demandé de reprendre la \ie commune, se présentait à son
domicile, rue Saint-Affre, et renouvelait la même demande.
Que se passa-t-il alors ? On ne le sait pas exactement. Les voi-
sins entendirent seulement le bruit d'une violente dispute et bientôt
des plaintes étouffées. On pénétra dans la maison et on vit gisant
sur le plancher la femme Letoulie blessée de trois coups de cou-
teau au sein gauche et à l'épaule. Auprès d'elle, son mari était
mort, avec un couteau planté dans le coeur. Le meurtrier doit être
Latoulie qui, croyant avoir tué sa femme, se sera fait justice lui-
même. La femme, dont l'état est grave, est soignée à l'hôpital.
(Petit Parisien, 6 septembre.)
Un pari stupide. - Hier soir, vers neuf heures, deux ouvriers
terrassiers nommés Emile Durand, âgé de quarante-deux ans,
demeurant 25, rue de Nantes, et Jacques Tabouré, âgé de trente-
sept ans, demeurant rue Curial, se trouvaient dans un débit de
vins situé, quai de l'Oise et, sous l'influence de l'ivresse, ils se van-
taient d'avoir accompli, en tant qu'émérites buveurs, de véritables
prouesses. A un certain moment la discussion devint orageuse et
un consommateur eut la stupide idée de vouloir mettre les anta-
gonistes d'accord en leur proposant le pari suivant :
Si vous voulez, dit-il aux terrassiers, nous allons assister à
une expérience qui sera concluante. Je m'engage à donner cinq
francs à celui d'entre vous qui boira le plus d'absinthe pure ! Le
pari fut accepté et les ouvriers se firent apporter un litre d'ab-
sinthe et des petits verres.
Les insensés se mirent à boire jusqu'au moment où tous deux
tombèrent à la renverse, les traits affreusement crispés, la figure
décomposée, la gorge douloureusement contractée et souffrant
atrocement de douleurs dans l'abdomen.
Ils furent aussitôt transportés dans une pharmacie, mais les
3raz VARIA.
soins prodigués en vue de les ranimer étant restés en pure perte,
il fallut les conduire en toute hâte à l'hôpital Bichat, où ils on été
admis d'urgence.
Une enquête a été ouverte par les soins de M. Rajaud, commis-
saire de police du quartier, afin de rechercher la part de responsa-
bilité qui incombe au débitant et au consommateur qui a orga-
nisé cette séance répugnante. (Petit Parisien, 15 septembre.)
Voilà le cas où jamais d'appliquer rigoureusement la loi
sur l'ivresse au cabaretier et au stupide consommateur qui
a provoqué le pari.
Epileptiques : Nécessité DE LEUR hospitalisation.
Lccs de souffrir. Le sieur Armand Lechonnaux, cinquante-sept
ans, journalier à Roullours, a mis fin à ses jours en se pendant.
Depuis longtemps, cet homme était atteint d'épilepsie et manifes-
tait l'intention de se donner la mort.
Ce fait, emprunté au Bonhomme Normand du 20 septembre,
montre une fois de plus la nécessité du traitement, de l'assistance
et de l'hospitalisation des épileptiques.
Assistance DES enfants anormaux.
A la séance du 12 septembre, dans l'après-midi, a eu lieu au
palais la deuxième audience de vacation du tribunal d'Angoulème,
sous la présidence de M. Legrand, vice-président. A l'audience
correctionnelle, ont été jugées, entre autres, les affaires suivantes :
1° Un enfant de treize ans, domestique près de Alouthiers, le jeune
Roty, ayant démoli une barrière en bois et ramassé des pierres
assez grosses, avait fait un tas du tout sur la voie ferrée au pont
du Chemin-Vert, au risque de causer un accident terrible. On s'en
est aperçu à temps. Cet enfant, à l'aspect inintelligent, répond à
peine à l'interrogatoire ; c'est un petit malheureux qui n'a pas
compris certainement la gravité de son acte. Ainsi en juge le
tribunal, qui l'acquitte comme ayant agi sans discernement et le
rend à ses parents. Roty a d'ailleurs été suffisamment puni par un
mois environ de prison préventive.
2° Un enfant de onze ans, le jeune Buisson, de la commune de
l'Houmeau-Pontouvre, que sa famille surveille fort peu, a, le
14 juillet, profité du moment où M. Marchand se baignait dans la
Charente, au Bouruet, pour fouiller dans ses vêtements laissés sur
la rive et y voler 4 francs environ dit le plaignant, 43 sous dit le
gamin. Pour celui-là aussi, le tribunal estime que la maison de
correction doit être évitée à raison de ses dangers et, l'ayant
acquitté comme ayant agi sans discernement, le laisse à sa
famille.
faits divers. 331 1
3° C'est encore un enfant, de neuf ans celui-là, d'lngoulème, fils
d'une fille qui habite rue de Périgueux, qui comparait sous l'in-
culpation de vol. Dans la maison où habite sa mère, en concubi-
nage avec un militaire, il a dérobé, au préjudice de co-locataires,
des vêtements qu'il a vendus à des chiffonniers et un accordéon
qu'il aurait vendu 3 francs à un soldat, dit-il. Les plus mauvais
renseignements sont fournis sur le délinquant, qui a nom Tamar,
et qui déjà, à Barbezieux, où il habitait avec sa mère avant de
venir ici, passait pour un petit voleur.
Le tribunal pourtant redoute encore pour ce malheureux enfant
la maison de correction et préfère, après l'avoir acquitté, lui aussi,
comme ayant agi sans discernement, le laisser à sa mère dans le
coeur de laquelle, des sentiments, qui semhlent lui avoir été étran-
gers jusqu'à ce jour, arriveront peut-être à se faire pour ce fruit
d'une liaison illégitime. (Petite Gironde, 13 septembre 1900.)
L'odyssée d'une fillette. Une fillette de onze ans, la nommée
Madeleine Chauvet, avait été, par les soins de M. le Directeur de
l'hospice, confiée à Mma Félicité Violet, âgée de soixante-trois ans,
ménagère à Croix-Chapeau. Samedi dernier, la femme Violet
envoya l'enfant à l'extrémité du village, pour faire une commission
et ne la revit plus. Elle vint alors faire sa déclaration à l'hospice,
et donna le signalement de la fillette.
Dimanche matin, le garde champêtre de Dompierre trouvait,
rôdant sur la route de Dompierre, une fillette qui lui parut aban-
donnée et qu'il conduisit â la gendarmerie de La Rochelle. Celle-ci
conduisit à son tour la fillette à l'hospice où on la reconnut pour
être la petite échappée de la veille. L'enfant ne paraît pas jouir de
toutes ses facultés. (Petite Gironde, 11 septembre 1900.)
FAITS DIVERS.
Asile d'aliénés. Promotions (septembre 1900) : M. le Dr. Dericq,
directeur médecin de l'asile public d'aliénés de Bonneval (Eure-
et-Loir) est promu à la Ire classe du cadre il partir du 1"roc-
tobre 1900) ; M. le Dr Bourdon, médecin-adjoint à la Charité
(Nièvre), promu de la 1 ? classe à la classe exceptionnelle; M. le
]F Santenoise, médecin-adjoint à Dijon est promu de la 1 1'0 classe
à la classe exceptionnelle ; M. le Dr DERICQ, médecin-adjoint à
Sainte-Gemmes (Maine-et-Loire) est promu de la 4r classe à la
classe exceptionnelle.
;J5 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
Asile public d'aliénés DE BLOIS. Une place d'interne est vacante
à l'asile de Blois ; nourriture, logement, blanchissage, chauffage,
éclairage et 900 francs à partir de 12 inscriptions ; 1 200 francs
avec 16 inscriptions. L'interne est admis obligatoirement aux
charges et avantages de la caisse des retraites. Un laboratoire
d'histologie et de. microbiologie est à sa disposition avec une
indemnité de 300 francs s'il justifie de connaissances spéciales
pour en être le chef.
Une jeune incendiaire. Deux incendies se sont déclarés à deux
jours d'intervalle, à Valsemé, près Pont-1'Evêque, et ont consumé
un pressoir appartenant aux sieurs Rouelle, Hommet et Lemaitre,
et un bâtiment appartenant au sieur Lecable. Certains indices
laissèrent supposer que ces incendies étaient dus à la malveillance.
On soupçonna la jeune Trouvé, treize ans, née à Pont-1'Evêque et
servante depuis un mois chez le sieur Lecable. Interrogée, elle a
reconnu avoir allumé les deux incendies, mais n'a pu dire dans
quel but. Elle a été arrêtée. (Bonhomme Normand, 23 août.)
Asile DE IARÉVILLE. A l'asile départemental d'aliénés de
Marévillr, près de Nancy, deux gardiens, les nommés Goerling et
Konkewitz, se sont livrés sur une malade à de telles violences, que
la malheureuse victime est dans un état désespéré. Ils ont été
arrêtés. (Tablettes des Deux-Charentes, 8 septembre.)
Bourneville. Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie,
l'hystérie et l'idiolie. Compte rendu du service des enfants idiots, épliep-
tiques et arriérés de Bicêtre pour l'année 1899. Publié avec la collabo-
ration de MM. Bellin, Boyer, Chapotin, Dardel, Katz, Noir (J.), Paul
Boncour et Poulard. Tome XX de la collection. In-8° de c.xaxw-19 ?
pages, avec 76 figures dans le texte et XIII planches hors texte.
Prix : 8 francs. Pour nos abonnés : 6 francs.
THULIÉ. - Le dressage des jeunes dégénérés ou orlhophrénopédie.
Tome VI de la Bibliothèque d'éducation spéciale de Ltourneville.
Volume in-8° de iv-678 pages, avec 53 figures. Prix : 8 francs. Pour
nos abonnés : 6 francs. Aux bureaux du Progrès médical, 14, rue des
Carmes.
ToNou (G.) ? Délia clinolel'apia nelle malallie mental. Brochure
in-8° de 31 pages. Ferrara, 1900. Tipografia dell' Eridano.
ZICIIEX (Th.). Leilfaden cler Physiologischen Psychologie in l5 Vor-
lesungen. Volume m-8° de 268 pages, avec 27 figures. Iena, 1900.
- Librairie G. Fischer.
Le rédacteur-gérant : Bourneville
Lwrem, Cli. 11ÉRISSF.V, imp. - 10-I : 00.
Vol. X. Novembre 1900. N° 59.
ARCHIVES DE NEUROLOGIE
THÉRAPEUTIQUE.
Le traitement mécanothérapique des hémiplégiq ? =FfC C
(massage, rééducation des mouvements et mécanothérapie
compensatrice) ; -, "
Par le D' P. ICOUI.IDJY.
Le traitement mécanothérapique de l'hémiplégie est un
traitement externe d'un symptôme, dont la lésion causale
échappe souvent aux investigations thérapeutiques de la
science. D'où il résulte, qu'il peut être appliqué parallèlement
avec n'importe quel traitement de la lésion centrale.
Le traitement mécanothérapeutique ou plutôt masso-méca-
nothérapique, tel que nous l'avons pratiqué soit dans la
clinique de notre très distingué maître, M. le professeur Ray-
mond, soit dans notre clientèle privée, se compose de trois
parties : du massage méthodique, de la rééducation des
mouvements et de la mécanothérapie compensatrice. C'est
du reste le même procédé que nous employons dans le trai-
tement de différentes paralysies.
Sans nous arrêter plus longtemps sur l'historique de la
question, nous devons faire remarquer, que la paternité de
ce traitement, ainsi que celui qui est présenté sous la déno-
mination kinésithérapique, appartient à Todd ', qui en 1856
se prononça d'une façon catégorique contre les traitements
internes de l'hémiplégie, connus de son temps, ainsi que
' tout). Clinical lectures ou pttrttlysis. 2° édition, p. 125.
Archives, 2' série, t. X. 23
354 -THÉRAPEUTIQUE.
contre le traitement exclusif par l'électricité. Todd exigea
pour les hémiplégiques « un système régulier d'exercice,
l'électrisation, maniée avec précaution et abandon de la
strychnine ». L'appel de Todd resta longtemps sans échos et
ce n'est que tout récemment, que le traitement des hémiplé-
giques par la mobilisation était proclamé par les neurolo-
gistes modernes, entre autres par nos maîtres le professeur
Raymond, MM. Gilles de la Tourette et P. Marie. Voici ce que
dit M. Marie ' dans son intéressant article sur le traitement
des hémiplégiques : « La gymnastique rationnelle peut à elle
seule, quand elle est employée assez tût et avec toutes les
persévérances-nécessaires, rendre les plus grands services,
car, c'est à elle surtout, que l'on devra d'empêcher le déve-
loppement des contractures et d'obtenir le rétablissement
relatif de la motilité dans les membres paralysés. » M. Gilles
de la Tourette 2 écrit dans son ouvrage sur la question, que,
« la mobilisation précoce des articulations devra être la base
du traitement externe chez les hémiplégiques ».
Dans ses intéressantes leçons de vendredi' le professeur
Raymond insista à maintes reprises sur le traitement des
hémiplégiques par la mobilisation et la mécanothérapie
rationnelle. La question s'est développée également au delà
de nos frontières et, en Allemagne, elle fut étudiée dans le
service de M. le professeur Leyden, grâce aux appareils de
mécanothérapie, inventés par notre confrère et ami le Dr Jacob
de Berlin pour le traitementdes ataxiques. Nous avons donné
une plus grande extension à la mécanothérapie compensa-
trice de MM. Leyden et Jacob 3, en modifiant les appareils et
en les appliquant dans le traitement des hémiplégiques. Ainsi
le traitement des hémiplégiques par le massage et par la
gymnastique rationnelle était admis en principe par quelques-
uns de nos confrères et même préconisé par quelques-uns de
nos maîtres. Mais, la plupart de nos confrères aussi bien de
la capitale que de la province est encore à la vieille routine,
qui considère l'hémiplégie comme un pis-aller de la situation et
qui veut qu'on laisse la malade tranquill e et au jeu du hasard.
' Il. Marie. Traitement de l'hémiplégie. Traité de thérapeutique de
A. Hobin. F. XIV, p. 209, 1S98.
= Cilles de la Tourette. Leçons sur les maladies nerveuses, 1898.
\'on Leyden et P. Jacob. Beriel itbcr die Anveendung der plt ? /sica-
nchen Ileilîneth) la. Cli arité-Annalen, YX111. Joluy. -
traitement mécanothérapique DES HÉMIPLÉGIQUES. 355
On est persuadé, dans un milieu médical, que l'hémiplégie
guérit toute seule, que l'hémiplégique marchera un beau
matin seul, si la lésion centrale guérit, sinon, tant pis, il
restera tel que et rien ne l'améliorera, surtout si l'électricité
n'a rien fait.
Cette expectation, quoique approuvée dans une certaine
mesure par des exemples, est néanmoins contraire au devoir
médical. L'immobilisation des membres paralysés et l'aban-
don de l'hémiplégique à son sort est peu humain, d'autant
plus que l'hémiplégique a plus besoin des soins de l'homme
compétent, que n'importe quel autre malade, ne serait-ce
que pour son état moral. L'hémiplégique, « cet enfant peu
gâté de la thérapeutique », comme l'appelle M. Gilles de la
Tourette 1, a besoin et de notre concours et de notre savoir
technique.
Ceci dit, nous passons maintenant à la description de notre
méthode.
Tout d'abord nous commençons par le massage, qui nous
permet, en dehors de son action directe, de nous rendre
compte de l'état tonique des muscles, du degré de l'atrophie,
des contractures, de l'oedème et de l'épaisseur des couches
adipeuses, qui couvrent souvent les muscles atrophiés et
masquent l'atrophie.
De plus, le massage permet d'étudier : les arthrites des
articulations des membres paralysés ; l'anesthésie et l'hyper-
esthésie des régions atteintes, la contractilité musculaire, la
rétraction tendineuse, la flaccidité de différents groupes
musculaires, etc. En un mot, pendant les premières séances
nous employons le massage à titre de diagnostic. Le diagnos-
tic palpatoire (die pal patorische Diagnose du professeur
Hoffa de Wurtzbourg) est la caractéristique du massage
raisonné ou méthodique. Il se fait plus ou moins bien, selon
l'aptitude personnel de celui qui l'applique.
Après s'être rendu compte de l'état des différents éléments
des régions atteintes, nous continuons le massage raisonné à
titre thérapeutique. Le procédé du massage a, dans le trai-
tement des hémiplégiques, peu d'importance et, contraire-
ment à ce que dit M. Courtade 3, nous massons l'hémiplé-
1 Leçons sur les maladies nerveuses, 1898.
5 Professeur A. IIof1'a. Technik der massage, Zw. auplage, p. 1,1897.
3 Courtade. Note sur quelques cas cl'leénaipli71e, cité par P. Marie.
356 - thérapeutique.
gique comme les autres, en commençant par la racine du
membre et en terminant par ses extrémités. A ce point de
vue nous partageons l'opinion de notre confrère 111. Golia-
lcllowsky', qui, avant de commencer le massage général du
membre, le prépare en partant de la racine vers l'extrémité.
En ce qui concerne les manoeuvres du massage, elles doivent
toujours être centrifugés, telles qu'elles furent indiquées par
Ilippocrate 2 et suivies par toutes les autorités du massage
scientifique. Ainsi, tous les procédés du massage thérapeutique,
sauf le « Koungfou » des Chinois, peuvent être appliqués
dans le traitement des hémiplégiques, si on suit une méthode
déterminée par l'hypotonie ou l'hypertonie des muscles des
membres paralysés. La force des manoeuvres appliquées varie
seule et selon les considérations précédentes. Dans le massage
méthodique il faut' commencer par l'effleurage et passer gra-
duellement au pétrissage et autres manoeuvres et sans inter-
ruption. C'est du reste l'avis de William Murel, de Beuster,
de Sreiber, de Mosengeil, de Max ScIIüller, de llabermman
et d'autres massothérapeutes bien connus. Les muscles atro-
phiés sont massés plus fortement que les muscles contractures.
Deux des muscles contracturés sont évités par nous, surtout
au début du traitement : le rond pronateur et l'adducteur du
pouce. A l'hôpital, où nous faisons masser les malades par
des aides peu expérimentés, nous recommandons deux séances
par jour, car le massage, fait par les empiriques, est de beau-
coup inférieur à celui qui est fait par l'homme de l'art.
Le massage méthodique au raisonné rend des énormes ser-
vices aux hémiplégiques : il arrête l'atrophie, qui les envahit
inévitablement, si on n'intervient pas à temps opportun;
il s'oppose à la propagation de l'oedème; il assouplit les arti-
culations, distend le tissu élastique rétracté et fortifie les
fibres musculaires, frappées de la parésie. Quel est le processus
de l'action du massage méthodique dans la paralysie ? On
, croit, et c'est l'opinion d'une majeure partie de nos confrères,
que le massage agit par le rétablissement de la circulation,
c'est-à-dire par l'activité de la nutrition des régions atteintes
soit de l'atrophie, soit de la parésie. On croit aussi, que c'est
par l'action directe sur la fibre nerveuse, que le massage
' GoliakhoWSky. La technique clunussage. Wratch, n" 12, p. 337, 1898.
1 Hippocrates. Édition Littré, p. 323.
traitement mécanothérapique DES hémiplégiques. 357'
méthodique donne les avantages indiqués plus haut. Le pro-
fesseur Zabloudowsky de Berlin ' fait même chez les hémi-
plégiques un massage spécial des nerfs pendant deux, trois
minutes. D'abord il frappe le nerf lésé avec la main fermée
d'une façon rythmique, en allant de la périphérie au centre; -,
puis il masse ce nerf à pleine main dans le mê.ne sens. Pour
nous, le massage méthodique agit plutôt par son influence
nutritive; il agit sur les fibres musculaires, non atteintes de
l'atrophie et qui, en proliférant, régénèrent le muscle para-
lysé. Le massage méthodique serait ici le régénérateur du
muscle en voie d'atrophie. Il faut masser avec précaution les
régions infiltrées. Les éruptions cutanées chroniques ne doi-
vent pas arrêter le massage. Dans un cas nous avons massé
tous les jours la face externe de l'avant-bras, malgré la pré-
sence d'une large plaque d'un vieux psoriasis, qui couvrait
complètement la région. Le massage n'a non seulement
aggravé le psoriasis, mais l'a même amélioré considéra-
blement.
Aussitôt que nous constatons le retour de la force muscu-
laire et que le membre est capable d'exécuter un mouvement
quelconque, nous commençons les exercices rationnels par
la rééducation des mouvements. Nous apprenons d'abord au
malade à se lever sur son séant el à descendre de son lit.
Descendre du lit et y remonter est pour l'hémiplégique une
grande occupation. On rencontre souvent cette impossibilité
ou plutôt cette crainte de ne pas pouvoir descendre de son
lit chez les vieux hémiplégiques, qui marchent depuis long-
temps. Chez une de nos malades, que nous avons soignée à,
la Salpêtrière, l'ictus remonta à six mois; la malade pouvait
marcher lorsqu'on la mettait debout et lorsqu'on la soutenait
par un bras. Mais elle était incapable de s'asseoir et de des-
cendre de son lit. Pour la mettre sur le lit, on était obligé de
la poser comme une seule masse. Dans un autre cas, l'accès
datait depuis deux ans et la malade ne pouvait pas se coucher
toute seule. Après quelques jours de rééducation nous arri-
vons à apprendre à nos malades la manière de descendre et
de remonter sur le lit sans aide de personne.
Si l'ataxique a table rase des coordinations des mouve-
1 Professeur Zabloudowsky. Le traitement par le massage : (iVnalch.,
n° 4, 1898, p. 105.) .
358 thérapeutique.
ments, comme le dit M. Frenkel 1, l'hémiplégique présente
la perte absolue de l'exécution des mouvements du membre
paralysé. Souvent l'hémiplégique hésite à faire le mouve-
ment dont il possède des éléments nécessaires : la force mus-
culaire et la mobilité des articulations. Ce qui lui manque,
c'est la notion de l'exécution du mouvement. On est donc
forcé, lorsqu'on s'occupe du traitement des hémiplégiques,
dé chercher patiemment quel est le mouvement qui se trouve
conservé chez ces malades, même en état de reliquat. Puis
on est obligé d'indiquer les moyens d'exécution de ce mou-
vement et prouver à l'hémiplégique qu'il est en mesure de
l'accomplir.
Pour prouver à nos malades qu'ils peuvent exécuter les
mouvements indiqués, nous cherchons à leur donner un point
d'appui sûr, afin que l'exécution du mouvement ne soit pas
entravée par'la crainte de tomber, crainte qui domine tant
chez les hémiplégiques. Mais avant d'ordonner un mouvement
quelconque, on doit être persuadé de la possibilité de son
exécution, car, après une chute, aussi inoffensive qu'elle soit,
l'hémiplégique devient réfractaire et se prête peu à l'exercice
qui a causé sa chute. Comme appui pour la rééducation de la
marche, nous nous servons d'abord de la béquille ; plus tard
nous la remplaçons par la canne-béquille. Nous préférons la
béquille aux mains de l'aide, parce que, grâce à elle, l'hémi-
plégique s'habitue à rester seul dans l'espace et cherche à
équilibrer son corps sans l'aide d'une seconde personne.
- Les premiers exercices de la marche consistent en exécution
des mouvements cardinaux des membres inférieurs : la
flexion,- l'extension, la circumduction, la rotation du pied en
dedans et la rotation du pied en dehors. Pour obtenir plus
facilement la flexion de la jambe, lorsque le malade est
debout, nous nous servons des petits bancs ou des petites
caisses de différentes hauteurs. Le malade, en s'appuyant sur
sa béquille ou sur sa canne, doit arriver à poser successi-
vement son pied malade et sans toucher le bord sur ces diffé-
rents bancs, jusqu'à ce qu'il arrive à mettre son pied sur la
première marche de la plate-forme (fig. 7), qui lui servira
pour apprendre à monter et descendre l'escalier. L'exercice,
que nous venons d'indiquer, est l'un des plus importants de
.' M. Frenkel. De l'exercice cérébral appliqué au traitement de certains
troubles moteurs. (Semaine médicale, 489fi, p. 123-124.)
traitement mécanothérapique DES hémiplégiques. 359
la rééducation de la marche. Grâce à lui, nos hémiplégiques
arrivent à marcher sans traîner leur jambe malade. Le pro-
cédé d'Erben pour obtenir la flexion de la jambe paralysée
sur la cuisse et qui consiste en flexion exagérée de deux
cuisses sur le bassin est au-dessous de notre procédé, car
' Erben. Zuo l3ehancllung e<' llemiplegiker. (Neurolog. CenlralLlall.,
1897.) -
Fig. 7. Plate-forme démontable. (Exercice de monter et de descendre
l'escalier.)
3GO thérapeutique.
en fléchissant les deux cuisses et en élevant le pied malade,
l'hémiplégique perd facilement l'équilibre et se dépêche de
poser sa jambe malade, n'importe comment. Dans notre cas,
nous lui donnons un point de repos au moment de la flexion
(le pied étant posé sur le petit banc), ce qui permet au malade
de relâcher le groupe musculaire fléchisseur et de réagir un
instant après avec toute la force acquise pour porter le pied
'du banc par terre. M. le professeur Marinesco, qui a essayé
le procédé d'Erben dans son service à Boucarest, nous a
affirmé verbalement qu'il le trouve complètement insuffisant,
et, contrairement à ce qu'avance notre confrère allemand, ne
lui a jamais donné de bons résultats.
En ce qui concerne la rééducation de la marche, nous ne
partageons pas également l'opinion de M. Erben, qui veut que
l'hémiplégique avance toujours la jambe saine. Nous appre-
nons au contraire aux hémiplégiques à marcher, non pas en
approchant le,pied paralysé du pied bien portant, mais en
posant, comme cela a lieu normalement, un pied devant
l'autre.
Tout récemment MM. Richer et Cestan ont montre dans
leur intéressant travail, fait dans la clinique du professeur
Raymond, que, normalement, l'homme porte un pied devant
l'autre, en formant ainsi un triangle de stabilité. D'où il
résulte, que pour la rééducation de la marche chez les hémi-
plégiques, il faut obtenir une ligure de stabilité et, celle-ci,
nous l'obtenons au commencement par la béquille, et, plus
tard par la canne. La béquille forme le troisième pied du
trépied de la stabilité. Le corps est ainsi supporté par ce
trépied, dont la faiblesse de la jambe paralysée est compen-
sée par la résultante de deux autres pieds.
Parfois on est obligé de décomposer la marche en trois,
quatre, cinq temps, etc. Dans un cas, que notre distingué
confrère M. Créquy a bien voulu nous confier, nous fûmes
obligés de commencer l'éducation de la marche par la pose-
du pied en quatre temps, le malade marchait sur le bord
externe de son pied malade. La pose du pied se composait ici
de quatre temps suivants : .
1 ? temps : flexion de la cuisse sur le bassin ;
2e temps : extension de la jambe; ' .
3° temps : rotation exagérée du pied en dehors;
4" temps : déplacement de la jambe saine.
TRAITFMENT II1&CANOTH&RAPIQUE DES HÉMIPLÉGIQUES. cGI
Grâce à cet exercice notre malade est arrivé à marcher
d'abord lentement, ensuite plus vite, en posant toujours son
pied un peu en dehors. Plus tard il corrigea plus vite ce
défaut et actuellement il pose son pied malade normalement.
Fiv. A Appareil de traction à double poulie. (Exercices de flexion
et d'extension du membre supérieure.)
362
THERAPEUTIQUE.
Pour aider aux groupes musculaires d'exécuter plus faci-
lement la flexion et l'extension de la jambe paralysée, nous
faisons préalablement ces exercices au moyen d'un appareil
de traction à double poulie (/ig. 8). On fixe sur une traverse
en bois deux poulies ordinaires. La corde qui passe sur ces
poulies, est munie, à l'une de ses extrémités, d'un crochet ou
d'un réceptable pour recevoir les poids, et, à l'autre extré-
mité, d'une poignée large ou d'une courroie ordinaire pour
le pied. Au sur et à mesure du développement de la force
musculaire, on ajoute les poids et on augmente ainsi la forcé
de la traction. La traction en parallélogramme permet d'ob-
Fiv, U. Hémiplégie droite. (Exercice de monter sur la plate-forme.)
TRAITEMENT MÉCANOTHÉRAPIQUE DES HÉMIPLÉGIQUES. 363
tenir une traction identique dans toute la durée de l'exercice.
Nous nous servons également pour le même exercice de l'ap-
pareil caoutchouté; mais les résultats y sont de beaucoup
inférieurs, qu'avec l'appareil à double poulie. La plate-forme
(fig. 9 et 10), qui nous sert pour apprendre aux hémiplégiques
de monter et descendre l'escalier, est composée de deux
caisses d'inégales dimensions. La plus petite peut être placée
à volonté sur la plus grande, qui forme la première marche
de la plate-forme. Celle-ci est munie de deux côtés de rampes
destinées aux exercices du bras paralysé pendant l'ascension
et la descente du malade. Nous nous servons également pour
apprendre à nos hémiplégiques, ainsi qu'aux autres paraly-
Fig. 10. Hémiplégie droite. (Exercice de descendre de la plate-forme.)
304
THERAPEUTIQUE. '
tiques, la station debout, la chaise roulante de MM. Leyden
et Jacob (ftg. '1 1).
Ainsi, les appareils les plus simples, comme bancs ou
caisses de différentes dimensions, comme appareils de trac-
tion caoutchoutés ou à doubles poulies, comme plan*
incliné, etc., nous servent à produire les différents mouve-
ments rationnels, les facteurs indispensables pour la réédu-
cation de la marche( De telle sorte, la mécanothérapie devient
Fig. 9. Chaise roulante de MM. Leyden et Jacoh.
(Paraplégie spasmodique.)
TRAITEMENT MÉCANOTHÉRAPIQUE DES HÉMIPLÉGIQUES. 365
dans notre méthode un agent secondaire, nécessaire pour
activer et faciliter l'exécution des différents mouvements -
c'est la mécanothérapie compensatrice du traitement; elle
occupe dans notre méthode la même place que la mécano-
thérapie compensatrice de MM. Leyden et Jacob dans le trai-
tement des ataxiques.
La rééducation des mouvements du membre supérieur
exige plus de temps et de sagacité, que la rééducation de la
marche, car les mouvements du membre supérieur sont plus
étendus que ceux du membre inférieur. Ici, nous commençons
toujours par les mouvements actifs et nous faisons peu de
mouvements passifs. Les mouvements passifs seuls ont peu
d'importance dans la rééducation des mouvements du
membre supérieur. On peut tourner le bras paralysé dans
tous les sens, du matin au soir, l'hémiplégique n'acquerra
pas pour cela plus de mouvements qu'il n'en possède : le bras
reste immobile ou contracture, malgré les mouvements répé-
tés. Les mouvements passifs, par contre, agissent bien,
comme agents prophylactiques contre les arthrites, et c'est à
ce litre que nous les employons chez les hémiplégiques. Dans
un de nos cas on lit matin et soir des mouvements passifs du
bras dès le début de l'hémiplégie et la malade pouvait à la
fin de la deuxième année à peine bouger son bras. Néan-
moins, ces mouvements ont fait disparaître complètement
les arthrites des articulations du membre atteint. Par consé-
quent, si on veut obtenir quelques mouvements du membre
supérieur, c'est aux mouvement» actifs qu'il faut donner pré-
férence. Nous faisons apprendre à l'hémiplégique la façon
d'exécuter le mouvement indiqué, quitte à le faire irréguliè-
rement. Plus tard, quand le malade est capable de faire le
mouvement, nous lui indiquons la correction à faire, pour
que le mouvement soit exécuté régulièrement.
Il faut d'abord chercher à activer les mouvements de
chaque articulation séparément, en passant par les mouve-
ments de flexion et d'extension ; puis on s'approche vers le
mouvement réel de l'articulation. Parmi les articulations'
atteintes, l'articulation scapulo-humérale tient la place prin-
cipale ; c'est par elle que nous commençons la rééducation
du bras. Toute une série de mouvements, ayant pour but de
provoquer la mobilité de l'articulation de l'épaule, est essayée
dès le début du traitement. On insiste davantage sur les mou-
366 . THÉRAPEUTIQUE.
vements actifs positifs pour passer aux mouvements réels.
Nous appelons mouvement actif positif- le mouvement cons-
taté, tel qu'il se présente devant nous, et le mouvement actif
réel, -.celui qui devrait être en réalité. Par exemple : un
hémiplégique écarte son bras du corps, en le portant en
arrière. Cet écartement sera positif; mais l'écartement du
bras du corps sera réel lorsque l'hémiplégique l'écartera laté-
ralement. Un autre exemple : un hémiplégique n'écarte son
bras paralysé du corps qu'en fléchissant l'avant-bras sur le
bras, c'est un mouvement positif; le mouvement sera réel
quand le malade écartera son bras en extension.
L'adduction exagérée du pouce désespère souvent les hémi-
plégiques ; par conséquent, pendant le traitement, nous ne
quittons jamais nos malades sans s'assurer du degré de l'ab-
duction de ce doigt, que nous obtenons, en massant pendant
l'exécution du mouvement d'abduction les muscles abduc-
teurs et opposant du pouce. Dans un cas, dont l'ictus remonta
à deux ans, nous sommes arrivé après deux mois de traite-
ment à permettre au malade d'allonger son pouce et de le
placer en dehors de la poignée pendant la flexion des autres
doigts. Nous passons sous silence une foule d'exercices par
étapes, qui ont pour but de porter la main paralysée sur
l'épaule opposée, sur la tête, derrière la tête, de saisir des
différents objets, etc.
Pour faciliter la rééducation des mouvements du membre
supérieur, nous employons comme appareils de mécanothé-
rapie compensatrice, des haltères (Jig. 13), des poids, des
bâtons à deux boules, des appareils de traction à caoutchouc,
à deux poulies, des roues pour la supination, pour la circum-
duction, etc. La construction de ces appareils ne demande
point des connaissances techniques spéciales, ils sont simples
par leur composition, mais présentent parfois de réelles diffi-
cultés dans leur application. Il faut savoir choisir l'appareil
correspondant et l'appliquer à temps opportun pour obtenir
les résultats voulus. Un appareil, appliqué mal à propos,
fatigue et désespère le malade.
- Voici l'ensemble de notre méthode de traitement des hémi-
plégiques. Elle consiste, comme nous l'avons déjà dit, en
massage raisonné, guidé par l'état tonique des muscles et
les manifestations pathologiques qui accompagnent l'hémi-
plégie ; en gymnastique rationnelle ou bien en rééducation
TRAITEMENT MÉCANOTHÉRAPIQUE DES HÉMIPLÉGIQUES. 367 Î
des mouvements des membres atteints de paralysie. La gym-
nastique rationnelle est produite par les exercices faits avec
des appareils simples, dont l'ensemble forme la mécanothé-
rapie compensatrice.
Ce traitement, si simple par sa description, présente cepen-
dant quelques difficultés. D'abord il exige de la part du méde-
cin une persévérance exceptionnelle. Les malades, surtout
les hémiplégiques résiduels, selon l'expression de Mann, en
possèdent plus qu'il en faut. On doit seulement leur prouver
117. Il. Hémiplégie droite, (exercices des haltères.)
/
368 THÉRAPEUTIQUE.
que le traitement leur est utile et leur rend de réels services,
parce, que nul autre malade ne se décourage plus vite qu'un
hémiplégique. La vue d'un membre immobile, qu'il considère
avec tous les siens comme mort, l'effraie. On est donc obligé
de lui inspirer confiance par le traitement, prouver et per-
suader qu'il tirera un réel profit, s'il suit régulièrement les
indications du médecin traitant.
L'époque de l'application du traitement ne doit même pas
se discuter. Plus tôt on le commence, plus sûr et plus vite on
constate ses bons effets. Nous l'avons appliqué dans un cas
trois jours après l'ictus, malgré l'interdiction formelle du
médecin traitant de ne pas toucher le malade et, au bout de
deux mois et demi, notre malade descendait déjà l'escalier.
Dans un autre cas, nous avons débuté à la fin du troisième
mois après l'accès, et notre malade se promenait dans la voi-
ture trois mois après le début du traitement. Six mois après,
il se coiffait avec son bras paralysé, prisait et se servait de
son bras le mieux possible. Dans un troisième cas, nous avons
commencé notre traitement six mois après l'ictus; les résul-
tats favorables s'obtenaient plus difficilement. Néanmoins,
au bout de deux mois et demi, la malade pouvait déjà tra-
verser seule l'énorme cour qui sépare l'infirmerie de la Sal-
pêtrière de la clinique Charcot. Si les bons effets du traite-
ment étaient plus lents à venir dans ce cas, c'est parce que la
malade fut massée par les masseuses du service, dont l'ins-
truction générale et l'état physique laissent souvent à désirer.
Dans un cas de monoplégie symptomatologique de la sclérose
en plaques du bulbe, le traitement masso-mécanothérapique
permit à la malade de quitter le service du professeur Ray-
mond trois mois après le commencement du traitement.
Outre la monoplégie droite supérieure, celte malade présen-
tait encore d'autres phénomènes bulbaires, comme le nasil-
lement, la paralysie du côté droit du palais, la difficulté de la
parole, de la respiration et de la déglutition. Tous ces phéno-
mènes restèrent à peu près sans modification au moment de
la sortie de la malade, tandis que la monoplégie s'améliora
considérablement.
Il résulte de tout ce qui précède, que notre traitement doit
être appliqué toutes les fois qu'on se trouve en présence d'une
hémiplégie ou d'une monoplégie de n'importe quelle nature.
En l'appliquant plus tôt on a des chances d'éviter les contrac-
TRAITEMENT MÉCANOTHÉRAPIQUE DES HÉMIPLÉGIQUES ? 569t;
tures qui forment souvent des freins à la marche propres-.
sive de l'amélioration chez les hémiplégiques ré"iduel ? {ô11 1
nous inscrivons contre l'emploi des appareils orthopédiques,
destinés à lutter contre la contracture des hémiplégiques ?
essais; que nous avons faits dans ce sens, nous ont fourni
toujours des résultats négatifs, car les appareils orthopédiques
augmentent l'atrophie et occasionnent une aggravation des
contractures. Par contre, le massage léger agit parfois utile-
ment sur les contractures musculaires. Au début nous évitons
de masser deux muscles les plus souvent contracturés. Ces
muscles sont le rond pronateur et l'adducteur du pouce. Inver-
sement nous insistons davantage sur les muscles atrophiés, à
qui nous faisons subir des manoeuvres habituelles du mas-
sage : effleurage, pétrissage, hachage, etc.
Si le massage et les exercices rationnels agissent d'une
façon bienfaisante sur les troubles moteurs des hémiplé-
giques, les troubles sensitifs restent souvent -sans grande
modification. Dans quelques-uns de nos cas nous avons cons-
taté que la sensibilité cutanée se modifiait trop peu sous
l'influence du traitement. Elle suivait pour ainsi dire son
cours normal, alors que les hémiplégiques marchaient et se
servaient de leur membre supérieur. Nous avons eu également
l'occasion de constater que l'aphasie s'améliora excessivement
peu sous l'influence du traitement. Par conséquent, l'influence
du traitement masso-mécanothérapique se manifeste par son
action locale, c'est-à-dire par son action directe sur les groupes
musculaires paralysés.
Quelques mots du traitement interne, que nous ne laissons
nullement de côté. Nous le prescrivons d'après les préceptes
de l'Ecole de la Salpêtrière : iodure de potassium à petites
doses à longue échéance, pur ou mélangé avec le bromure,
1 gramme par jour. Pour avoir les selles quotidiennes nous
donnons soit des pilules d'aloès, soit d'autres laxatifs.
L'électricité a été employée dans deux de nos cas avant
notre traitement. Dans ces deux cas elle n'a donné que des
résultats négatifs. Chez les enfants et chez les hémiplégiques,
au début de la maladie, l'électricité est plutôt nuisible, sur-
tout lorsqu'elle est confiée aux mains inexpérimentées. Notre
distingué confrère et ami, M. Oudin, dont la compétence
dans l'électrothérapie est incontestable, se prononce contre
l'emploi de l'électricité chez les hémiplégiques. J'admet
Archives, 2' série, t. X. 21
370 THÉRAPEUTIQUE.
parfois l'emploi d'un courant continu et très léger, mais
appliqué par l'électrothérapeute bien exercé. Parfois il est
même à craindre que l'électricité n'accélère pas trop l'atro-
phie musculaire. Sans discuter la valeur de l'électrothérapie
dans les cas des hémiplégiques, nous la laissons souvent de
côté et la considérons comme un agent peu utile, lorsqu'on
masse les régions atteintes de paralysie.
En résumé, nous croyons le traitement masso-mécanothé-
rapique, décrit plus haut, susceptible de rendre de réels ser-
vices aux hémiplégiques. Nous sommes même convaincu
que jusqu'à nouvel ordre, c'est le seul traitement qui est
capable de donner dans le traitement de l'hémiplégie de bons
résultats. En tout cas, il présente l'avantage d'être simple
dans son ensemble, d'être à la portée de tous ceux qui veulent
laisser de côté la vieille routine expectatrice et venir en aide
à leurs hémiplégiques, qui ont besoin et de leur soutien
moral et de leurs connaissances techniques. Mais avant de
conclure, nous devons répondre aux questions suivantes,
que chacun de ceux qui nous lisent a le droit de nous poser :
De quelle durée est le traitement ? Faut-il le continuer sans
interruption ? et peut-il être à la portée de tout le monde ?
Le traitement en question est dirigé, comme nous l'avons
déjà fait remarquer, contre un symptôme. Par conséquent,
il doit durer jusqu'à ce que le symptôme persiste. Dans les
cas légers, il est d'une courte durée ; dans les cas résiduels ou
bien dans les cas d'hémiplégie prolongée, il est également
prolongé. Dans tous les cas il accélère la guérison par l'amé-
lioration de l'hémiplégie. Comme il est à peu près difficile
d'affirmer, au début, si l'hémiplégie sera transitoire ou per-
sistante, il faut toujours appliquer le traitement dans toutes
ses règles. Nous arrêtons notre intervention quand nous
constatons que l'hémiplégique peut arriver à exécuter les
mouvements voulus et ordonnés, quelle que soit la vitesse de
leur exécution. La promptitude vient avec les exercices quo-
tidiens que nous recommandons à nos malades.
Le mieux est de ne pas discontinuer le traitement. Mais,
comme souvent ceci dépend des conditions secondaires au
traitement, il vaut mieux éloigner les séances que les inter-
rompre complètement. Par ce moyen, on arrive à entretenir
les résultats ohtenus et à progresser lentement (').
(1) Depuis plus de vingt ans nous employons les exercices des jointures .
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 371
Le traitement est à la portée de la classe aisée. Pour les
pauvres, il est facile de créer des services spéciaux (du moins
on doit les créer), à l'exemple des services d'électrothérapie,
où les indigènes reçoivent les soins aussi longtemps que pos-
sible. Il va sans dire qu'un service masso-mécanothérapique
bien organisé pourrait rendre d'énormes services à la popu-
lation, à la médecine et surtout aux élèves de nos cliniques
médicales de Paris '. .
ENSEIGNEMENT
Les Cliniques psychiatriques des Universités
allemandes 2 ;
Par le D' Paul SÉRIEUX,
Médecin des asiles publics d'aliénés de la Seine,
chargé de missions.
Université de Leipzig (Royaume de Saxe).
La faculté de médecine de l'université de Leipzig comptait, lors
de notre visite (semestre d'été 189É), 672 étudiants (dont
32 Saxons), 11 Professeurs ordinaires, 1 Professeur ordinaire
honoraire, 16 Professeurs extraordinaires, 23 Privat-docenten.
C'est, en Saxe, à Leipzig, qu'a pris naissance l'enseignement
clinique des maladies mentales en Allemagne. Ileinroth, élève de
Pinel, fut, en 1811, nommé par l'université de Leipzig professeur
de psychiatrie. Il continua ses leçons jusqu'en 1843.
La clinique universitaire actuelle et la seconde clinique psychia-
trique construite, en Allemagne, en vue de sa destination spéciale
et conformément aux indications formulées par Griesinger (la
première est celle de Ileidelberj). C'est le professeur Flechsig qui
en a conçu le plan. Commencée au printemps de 1880, elle a été
inaugurée en mai 1882. Primitivement destiné aux aliénés propre-
et le massage des masses musculaires pour empêcher l'apparition de la
contracture ou chez les enfants hémiplégiques (B).
' Un extrait de cet article fut communiqué au XIII, Congrès interna-
tional de médecine de Paris. Section de Neurologie.
' Voir Archives de Neurologie, n° 57, t. X, p. 193.
372 ENSEIGNEMENT.
ments dits, l'établissement est devenu, par arrêté ministériel
d'avril 1888, la « Clinique de psychiatrie et des maladies ner-
veuses » (l'sychiatrische und Nerven-Klinik).
Le chiffre des lits est de 155, mais la population réelle est plus
considérable. En 1898, le nombre des malades s'élevait à 145
(75 hommes, 70 femmes); 25 lits sont réservés aux sujets atteints
d'affections nerveuses.
Le prix de revient du lit a dépassé 10 000 francs. L'établisse-
ment tout entier a, en effet, coûté 1 475 000 francs (frais de
construction des bâtiments : 9t0 000 francs; terrain : 200 000 fr.).
Il est vrai de dire que la clinique saxonne, dont le terrain
d'assiette a une superficie de 3,3 hectares, et qui est située à
proximité des autres cliniques universitaires, peut être considérée
comme un établissement modèle au point de vue hygiénique. Il
est à regretter cependant que le système des pavillons détachés
n'ait pas été adopté de préférence au système caserne. Les
quartiers de malades, au lieu d'être répartis dans une série de
pavillons distincts, sont en effet compris tous dans un vaste
bâtiment affectant la forme suivante : ? Cette construction
monumentale est essentiellement composée d'un bâtiment
central, de près de 150 mètres de façade, des extrémités duquel
partent deux ailes perpendiculaires de 50 mètres de longueur'. 1.
Le bâtiment central (BB) est à deux étages; les deux ailes n'ont
qu'un seul étage; quant aux extrémités de ces ailes, réservées
aux agités, elles n'ont qu'un rez-de-chaussée. (Voir le plan.)
Les malades paisibles sont logés dans le bâtiment central : les
sujets affaiblis au rez-de-chaussée ; les pensionnaires de première
classe au 1er étage, ceux de deuxième classe au second. Des
cabinets médicaux, avec une installation électrothérapique
complète, sont placés dans les quartiers de paisibles. Les aliénés
agités et demi-agités, ceux qui ont besoin d'une surveillance
continue, habitent les ailes perpendiculaires au bâtiment central :
le premier groupe (agités), au rez-de-chaussée, le second au
premier étage.
La population des différents quartiers varie de G à 7, 8, 12
et 13 malades. Chaque quartier comprend : une salle de réunion,
des dortoirs et chambres à coucher (possédant 1 à 9 lits), un corri-
dor, de 3 ou de 5 mètres de largeur, pouvant servir de salle de
réunion, un office, une salle de bains, un cabinet de toilette, des
closets. Pas de salle spécialement affectée aux repas, sauf pour
les pensionnaires de première classe (dames). La surface et la
capacité des locaux ont été calculées de façon à ce que, pour
chaque malade, on dispose de 16 mètres carrés et de 36 mètres
1 Nous emprunterons un certain nombre de renseignements et le plan
de la Clinique au travail du Dr Buffet, A travers asiles, Luxembourg, 1888.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 373
cubes dans les salles de réunion, et de 25 mètres cubes dans les
dortoirs.
Les chambres d'isolement, au nombre de 15, sont réparties par
groupes de trois. Spacieuses. cimentées, peintes à l'huile, solide-
ment construites, elles sont munies de doubles portes et de judas.
Le parquet est en bois de chêne, sur lit de bitume. Sous ce parquet
étanche sont des conduites où circule l'eau chaude ; on évite
ainsi aux agités le refroidissement des pieds.
Aux fenêtres de certains quartiers sont placés des barreaux
légers en fer. Dans les locaux destinés aux aliénés tranquilles et
aux « nerveux », les barreaux sont supprimés. Les fenêtres des
cellules sont protégées intérieurement par des volets en fer ou des
treillis.
Les jardins et préaux sont au nombre de sept. Leur superficie
totale est de 2 hectares. Les jardins réservés aux malades tran-
quilles, aux « nerveux », sont vastes, avec pelouses, allées ombra-
gées, kiosques, bancs. Les jardins des agités sont de forme carrée,
assez grands, plantés d'arbres et bien.ombragés.
Parmi les aménagements spéciaux que nous avons remarqués,
nous citerons des lits pour épileptiques ou sujets agités et affaiblis.
Ces lits, en forme de caisse capitonnée, profonde, ont des parois
hautes de plus de 0 m. 75 et tapissées de matelas mobiles, renou-
velables en cas de besoin. L'une des parois se meut à charnière à
sa partie inférieure.
Les gâteux sont couchés sur une alèze en caoutchouc; leurs
matelas recouverts de toile à voile enduite de vernis. La ventilation,
très soignée, a nécessité des dépenses considérables. Les cellules,
en particulier, sont très bien ventilées. Les closets sont à irrigation
automatique; les liquides se rendent dans des fosses cimentées
étanches. Le chauffage se fait en partie à la vapeur d'eau et à l'air,
en partie à la vapeur et à l'eau.
En prévision des incendies, tous les escaliers, sans exception,
sont en construction massive et garantis absolument contre le
feu. Un réseau téléphonique dessert tous les locaux importants de
la clinique. Un fil spécial met en communication l'établissement
avec le poste central de pompiers de Leipzig.
Des ateliers ont été installés dans le sous-sol des bâtiments de la
division des hommes (cordonnerie, vannerie, bourrellerie). Il
existe aussi un atelier de couture. Tous les linges souillés sont
désinfectés par la vapeur sous pression. En outre de la grande
construction affectée aux malades, la clinique comprend encore
quatre bâtiments :
1° Le bâtiment d'administration (A), situé en avant du bàtiment
central avec lequel il est étroitement en rapport. Au rez-de-
chaussée : loge du concierge, bureaux, salle d'attente, logement
d'un assistant. Le premier étage est. occupé par la salle des
374 ENSEIGNEMENT.
cours, la bibliothèque, le cabinet du professeur, les salles
d'examen. Au second étage : logements de l'économe et d'un
assistant; 2° le pavillon du professeur, donnant sur la rue ; -
3° le bâtiment des machines (chauffage, ventilation, élévation des
eaux, élimination des eaux usées). Prix de revient : 300.000 fr.;
4° le pavillon d'isolement pour les contagieux, avec un jardin
spécial.
Les services généraux (cuisine, buanderie, etc.) sont placés au
centre de l'établissement, en arrière du bâtiment central (quartier
de malades) auquel ils sont réunis par des galeries couvertes.
Statistique. - Lors de notre visite (1894) la population de la
clinique était de 150 malades (chiffre normal : 435).- Nombre des
admissions dans le cours de l'année 1895 : 55 malades. Sor-
ties : 531k ; - décès : 68. Population, le 31 décembre 1895 : 156.
Sur le nombre total des cas traités en 1895, on a relevé 562 pa-
tients (291 hommes et 271 femmes) atteints de maladies mentales
proprement dites (psychoses, paralysie générale, psychoses épi-
leptiques ou hystériqnes, imbécillité, idiotie, crétinisme); 88 cas
(83 hommes et 5 femmes) de délire alcoolique, et 40 sujets
(26 hommes et 14 femmes) non aliénés (maladies nerveuses).
Les sorties pour cause de guérison ont été dans la proportion de
40 à 45 p. cent ; pour amélioration de 30 p. cent.- Décès 9 2 p.
cent.
Personnel médical. Le professeur de clinique est directeur
médecin en chef de l'établissement. Il est secondé au point de vue
du service administratif par un économe (Inspector). Il a pour
collaborateurs un médecin en second, deux assistants pour le
service de psychiatrie, un assistant ponr le service de neuro-
pathologie, et trois médecins volontaires.
Les admissions des malades se font avec un minimum de forma-
lités. Le directeur dispose de quinze lits gratuits, précieuse
ressource pour l'enseignement clinique. Il peut ainsi admettre les
malades intéressants, quels que soient leur nationalité, leur
domicile de secours, leur situation de fortune. 200 sujets ont
été présentés aux élèves dans le cours de l'année scolaire.
Le personnel de surveillance se compose de 26 infirmiers et
infirmières, soit 1 pour 5 malades. Les agents des services
généraux sont au nombre de 24. Le total est donc de 50 employés
et serviteurs pour moins de 150 malades. Les infirmieis n'ont
pas de chambre spéciale.
Le professeur Flechsig fait quatre conférences par semaine, à
8 h. 1/2 du matin, à 4 heures et à 5 heures de l'après-midi.
Le programme des quatre cours est le suivant : 1° cours de
psychiatrie clinique; 2° cours de diagnostic psychiatrique; 3° cours
de psychiatrie médico-légale avec présentation de malades; 4° cours
de physiologie du cerveau.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 375
Les cours du professeur sont très suivis et son laboratoire, d'où
sont sortis des travaux d'anatomie du cerveau du plus haut
intérêt, très fréquenté. Nous avons assisté à une conférence
clinique. Le professeur, qu'accompagne un seul des trois assis-'
tants, parle des idées de persécution en général, des idées
mélancoliques. Il présente trois malades, dont l'un, un mélanco-
lique avec conscience, est traité parla poudre d'opium.
Né en 1847, M. Paul Flechsig a été nommé professeur extraor-
dinaire de psychiatrie à Leipzig, il trente ans ; et, à l'âge de
trente-cinq ans, il était professeur ordinaire et directeur de la
Clinique. La plupart des travaux qui ont rendu son nom
célèbre ont eu pour base l'étude de l'anatomie du développement
du système nerveux. Tout le monde connaît ses recherches, vul-
garisées par Charcot, sur les voies de conductibilité de la moelle
et du cerveau, d'après l'histoire de leur développement (18 iG-1881) ;
sa méthode basée sur l'apparition de la myéline dans les centres
nerveux ; ses travaux sur les lésions systématiques de la moelle
(1877-1878), sur les lésions du tabès, sur l'anatomie du ceiveau et
l'histoire de son développement, sur le faisceau pyramidal et son
trajet dans le cerveau, (1881), sur le plan du cerveau humain (1883),
sur les centres sensoriels et sensitifs, et enfin sur les centres d'asso-
ciation et de projection. Ces derniers travaux ont complètement
renouvelé notre conception du cerveau.
Le professeur Flechsig est un partisan du non-reslreint et un
adversaire de l'isolement cellulaire. Les malades ne restent isolés
en cellule que durant quelques heures. Nous avons vu des malades
déchireurs avec les manches de leur maillot cousues, mais les
bras libres.
Population, le 1er janvier 1898 : ICI malades (85 hommes,
76 femmes). Nombre des admissions en 1897 : 580 malades
(358 hommes, 222 femmes).
Université de Halle (Prusse, province de Saxe).
(Faculté de médecine : 12 Professeurs ordinaires, 10 Professeurs
extraordinaires, 10 Privat-docenteu; 284 étudiants.)
La Faculté de médecine de l'université de Halle, ne disposa,
pendant plusieurs années, pour l'enseignement clinique des
maladies mentales, que de l'asile provincial de Nietleben, situé à
une heure de distance de la ville. C'est en 1879 que le professeur
Ilitzig y ouvrit une clinique psychiatrique. En raison des incon-
vénients multiples de cet état de choses, on installa, en 1885, une
clinique psychiatrique provisoire dans deux bâtiments en loca-
tion comprenant 10 lits. '
En 1888, l'Université, voulant construire une clinique modèle
376 G ENSEIGNEMENT.
pour les maladies mentales et nerveuses, fit. pour la somme de
150 000 francs, l'acquisition d'un terrain de 2,5 hectares situé
dans la ville même, à treize minutes des autres cliniques universi-
taires. Le p"ix de revient des constructions s'éleva à 832 000 francs.
La clinique de Halle, dont le chiffre normal des lits est de 110,
fut inaugurée le 29 avril 1891. C'est, en Prusse, la première
clinique de psychiatrie constituant un établissement tout à fait
autonome, et placée à proximité des autres cliniques universi-
taires. (Künigliche Psychiatrische und NCl'ven-Klinik clà Unive1'sitiit,
Halle a. S.)
Le professeur Ilitzig fut chargé d'en élaborer le plan.
Jusqu'alors, les cliniques psychiatriques des universités d'Alle-
magne, celles de Heidelberg, de Strasbourg, de Leipzig, de
Fribourg, avaient été construites d'après le style caserne'. Formées
d'un ensemble massif de bâtiments étroitement unis les uns aux
antres, ces cliniques ne répondent plus à la conception qu'on se
fait aujourd'hui d'un établissement d'aliénés. Les bâtiments à
vastes corridors, sur lesquels s'ouvrent dortoirs et chambres de
réunion, produisent, en général, une impression désagréable sur
les malades et sur leurs familles ; leur aspect rappelle trop celui
"des établissements pénitentiaires. « Pendant longtemps, dit
M. Hitzig,, et aujourd'hui même encore, le système de la prison ou
tout au moins celui de l'encasernement des aliénés a dominé la
construction des asiles... L'esprit inventif des architectes et des
médecins a réussi sans doute à apporter plus ou moins de com-
plications dans les façades, à briser les longues ligues droites et à
varier la monotonie des corridors : on a su combiner avec
habileté les jardins et les parcs avec l'emplacement des construc-
tions ; mais les traits fondamentaux du système sont toujours
restés ceux d'une caserne. » Hitzig, ajoute que la clinique psychia-
trique doit remplir dan3 l'assistance des aliénés une lacune
incontestable et que sa tâche humanitaire a une importance
infiniment plus grande que ne le soupçonnent beaucoup de ceux
qui ne l'envisagent qu'au seul point de vue de l'enseignement 1.
Ces considérations déterminèrent M. Hitzig à adopter le système
des pavillons détachés, à segmenter la clinique en un certain
nombre de bâtiments séparés par des jardins.
La clinique de Halle se compose de onze pavillons répar-
tis sur un terrain à peu près rectangulaire, avec 130 mètres de
façade. Une première série de constructions, séparée de la rue
par un jardin assez étendu, se compose d'un bâtiment principal
(Hauptgebaude) et de deux ailes (l3aracl;en) en retrait. Ces deux
' Voir P. Sérieux, loc. cil.
' madame. Le nouvel asile des aliénés il Genève. Genève, 1S'J ? p. i-i6.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 377 -i
ailes, à rez-de-chaussée, constituent les pavillons de traitement '.
A 30 mètres environ en arrière de ce premier plan de bâtiments
se trouvent deux villas séparées par le bâtiment des services écono-
miques ; ce dernier eu forme de T, élevé de deux étages, est situé
à 18 mètres de chaque villa. A 22 mètres en arrière, troisième'
plan de constructions composé de deux pavillons d'isolement, à
rez-de-chaussée ; entre ces quartiers, le bâtiment des machines à
vapeur, sur le grand axe du terrain d'assiette. Plus en arrière,
l'amphithéâtre. Les pavillons des malades sont tous entourés de
jardins avec jeux de boule. Un terrain de culture de 69 ares
permet d'occuper les patients aux travaux de jardinage. A la
partie sud du terrain, une route carrossable de 6 mètres de largeur
conduit à l'amphithéâtre, au bâtiment des services généraux, à
l'usine, au jardin potager.
Tous les bâtiments sont construits en briques rouges, avec, pour
éviter la monotonie, des assises de briques polychromes; les
toits, en ardoise, ont une inclinaison de 0 m. 25 pour 1 mètre.
Nous reviendrons plus loin sur les détails d'aménagement intérieur;
disons seulement qu'on s'est attaché à répandre partout l'air et la
lumière. Pas de corridors ni de coins obscurs.
L'ensemb ! e des bâtiments est entouré sur trois côtés d'un mur
de briques de 2 m. 50 de hauteur. Le quatrième côté, en façade.
est séparé de la rue, non par un mur, mais par une grille placée
sur un soubassement de pierre.
Le chiffre normal de la population est de'1 aliénés de première
classe, 6 de deuxième classe, 73 de troisième classe, plus 20 sujets
atteints d'affections nerveuses, soit un total de 110 malades
répartis en six pavillons (trois pavillons pour chaque sexe 2). Le
jour de notre visite (1894), la clinique comptait en tout 129 ma-
lades.
L'établissement étant destiné à recevoir aussi bien des « ner-
veux » que des aliénés, il a fallu écarter tout ce qui aurait pu
le faire ressembler à une prison. On a tenu compte aussi dans
l'aménagement de la clinique de la grande proportion des admis-
sions de malades aigus, ainsi que des installations spéciales
nécessitées par les 17 pensionnaires.
' Dans les pages qui vonl suivre nous utiliserons les notes prises au
cours de notre visite, et nous résumerons la description de la clinique de
Halle, tracée d'après un rappoit, de M. le professeur Hitzig dans une
publication ministérielle : -11st(illeii will Einrichliingendes ü/%ntliclren
Gesundheits wesen in J'I'eussen. Berlin, 1890,pages'9-310. ! Les prix de pension sont les snwantS :
378
ENSEIGNEMENT.
Description des divers bâtiments (voir flg. 13).
A. Bâtiment principal (G). Dans le sous-sol (hauteur,
3 m. 10), se trouvent, à droite et à gauche de l'entrée principale :
i inrp7zrllzeifie.
B Jlwillo/¿ dFaolcnrc·rrG
C ,If/Ife de.J' mac7tcic : r
D Hl/a/.
E liracce,^eitéraraa
F lfaracfc (Iitoil/.ori/
1 de. E Ci(-, '
(7 .B(Ïtime71¿ principal'.
l'ig. 11.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 37U
la loge du concierge, le logement d'un médecin, un local destiné à
servir d'atelier et un autre, plus petit, dans lequel sont placés un
moteur et une machine dynamo. Au centre du sous-sol, les calo-
rifères, des corridors et des appareils de ventilation.
M-c-c/taisee. On pénètre dans un vestibule de 9 m. 70 de lon-
gueur et de 5 m. 60 de largeur qui reçoit la lumière des quatie
côtés (hauteur, 4 m. ;i0). Ce vestibule sert de salle d'attente pour les
malades de la consultation et pour les autres visiteurs. Une autre
partie des malades de la policlinique trouvent place dans une
petite salle d'attente située à l'entrée et à laquelle sont annexées
deux chambres servant à l'examen et au traitement médical des
patients de chaque sexe. A gauche de l'entrée, le parloir et les
bureaux. La chapelle, qui mesure 9 m. 70 sur 7 m. 04, est en face
de l'entrée principale. A droite de la chapelle, le logement du
deuxième assistant ; il gauche, les water-closets et les bureaux de
l'économe. Un escalier double conduit au premier étage.
Premier étage (hauteur 4 m. 50). Les locaux sont distribués
autour d'un vestibule bien éclairé, de mêmes dimensions que celui
du rez-de-chaussée, qui sert de vestiaire aux auditeurs des cours
de la clinique. La salle des conférences (Auditorium) située
au-dessus de la chapelle, dont elle a la superficie, avec une
hauteur de 6 mètres., contient 72 auditeurs assis, plus un certain
nombre de places debout. Cette salle est aménagée en vue de
l'emploi de l'électricité et d'un appareil de projections à la lumière
électrique. Elle est en communication directe avec le cabinet du
professeur. Le premier étage est encore occupé par trois salles,
bien éclairées par deux fenêtres, et servant de laboratoires et de
musée; par la bibliothèque et le logement du premier assistant. A
l'étage supérieur, mansardes et logement du troisième médecin.
B. Pavillons de traitement (Baracken). Ces pavillons (F)
au nombre de deux, un pour chaque sexe, sont reliés au bâtiment
principal qui les sépare par uu couloir très court. Chaque
pavillon de traitement, composé seulement d'un rez-de-chaussés.
bâti sur caves de 1 mètre il : ! 2 m. 10 de hauteur, comporte les
éléments suivants : deux salles de 10 lits chacune, cinq chambres
d'isolement et les locaux accessoires (salle de bains, etc.) Les deux
salles sont à proprement papier des dortoirs puisque le pavillon a
été aménagé en vue du traitement par le lit : l'une est affectée aux
sujets excités ou ayant besoin d'une surveillance permanente ;
l'autre est destinée aux malades paisibles et aux nerveux. Elles
communiquent par un corridor de 10 mètres de longueur recevant
le jour par des sortes de coupoles vitrées. Chaque salle, éclairée
par huit larges fenêtres orientées à l'est et à l'ouest, présente les
dimensions suivantes : longueur, 10 m. 50 ; largeur, 6 m. la ;
hauteur, 4 m. 70. La superficie de la salle est donc de 96 mètres
380 ENSEIGNEMENT.
carrés, et la capacité de 560 mètres cubes; ce qui donne, pour
chaque malade, 9,6 mètres carrés et 56 mètres cubes. Les murs
sont peints à l'huile.
Quant aux chambres d'isolement, leur surface est de 16 mètres
carrés et leur capacité dépasse 70 mètres cubes. Elles possèdent
des doubles portes; l'une d'elles est munie d'une porte massive.
Un infirmier couche à proximité de ces chambres.
Le parquet des deux salles et des chambres d'isolement est en
bois de chêne ; pour les autres locaux, on a employé le bois de
sapin. Les salles de bains (au nombre de deux), les cabinets d'ai-
sance, l'office sont pavés en grès de cérame. Dans les salles de
bains sont disposés des mélangeurs munis de thermomètres.
La disposition très ingénieuse des fenêtres mérite d'être décrite
avec quelques détails. Le modèle en est dû à M. Hitzig qui en a
fait l'essai pour la première fois en t882, à l'asile de Nietleben.
Les fenêtres de'Hitzig n'ont ni grillages, ni barreaux, ni chainet-
tes ; elles s'ouvrent néanmoins au gré des malades, sans cependant
permettre les tentatives d'évasion.
Avec la plupart des aliénistes contemporains, M. Hitzig a toujours
considéré l'influence des barreaux aux fenêtres comme fâcheuse sur
les malades et sur le public : les grilles donnent l'impression d'une
prison et non d'un hôpital. Se basant sur l'expérience qu'il avait
faite à l'asile de Zurich, sur la proscription complète des barreaux
dans les asiles de Hambourg, Marbourg, Meerenbourg et Alt-Scher-
bitz, M. Hitzig a, dès 1879, fait construire à Nietleben un pavillon
d'admission dont les fenêtres ne se distinguaient des fenêtres ordi-
naires que par leur mode de fermeture. Mais cette disposition a des
inconvénients : M. Hitzig a eu à constater une évasion, suivie de sui-
cide, due à une inadvertance d'une infirmière qui, en fermant une
fenêtre à l'aide de la clef spéciale, n'avait pas remarqué que le verrou
n'avait pas fonctionné. Tenant compte à la fois des susceptibilités
légitimes des malades et des familles à l'endroit des grillages ou des
barreaux, et de la nécessité de protéger les aliénés contre eux-
mêmes, M. Hitzig a cherché à rendre matériellement impossibles
certains accidents que le relâchement de la surveillance du per-
sonnel doit toujours faire prévoir. Un grand nombre d'accidents
peuvent déjà être évités par l'emploi presque exclusif des bâtiments
à rez-de-chaussée. Aussi la plupart des malades de la clinique
sont-ils logés au rez-de-chaussée. Sur 110 malades, 17 seulement
(pensionnaires dé 1 ro et de 2° classe) habitent le premier étage des
villas que nous décrirons plus loin. En second lieu, par l'emploi de la
fenêtre spéciale qu'il a imaginée, M. Hitzig empêche toute évasion.
Cette fenêtre (voir ftg . 14) est divisée horizontalement en
deux parties : dont l'inférieure a les deux tiers de la hauteur
totale de la fenêtre. La partie inférieure, la plus importante,
est elle-même partagée verticalement en trois segments. Le seg-
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES.
381
ment moyen, plus large que les deux autres, est immobile; les
deux segments latéraux, au contraire, sont mobiles autour d'un
axe vertical; ils peuvent ainsi être ouverts par les malades à
leur guise, tout en ne laissant qu'une ouverture insuffisante
pour leur donner passage. La partie supérieure de la fenêtre est,
elle aussi, divisée verticalement en trois segments : le segment
moyen plus large, mobile autour d'un axe horizontal, peut bas-
culer à l'intérieur de la chambre. C'est une sorte de vasistas qui
peut être fermé à clef.
Firl. 14.
382 . ENSEIGNEMENT.
Toutes les fenêtres de la clinique, sauf celles des chambres d'iso-
lement, sout conformes â ce modèle. Grâce à ces fenêtres sans
barreaux, pas d'accidents, pas d'évasion, liberté complète laissée
aux malades d'ouvrir et de fermer les fenêtres à leur guise, pas
d'aspect anormal de nature à attirer l'attention du public.
Les deux pavillons que nous venons de décrire (Bamcken) ser-
vent de quartiers d'admission, de surveillance et de traitement.
C'est en prévision de cette destination qu'ils ont été placés à proxi-
mité du logement des médecins et de la salle des cours située dans
le bâtiment principal. Les sujets nouvellement admis sont couchés
dans celle des deux salles de dix lits qui est contiguë au bâtiment
principal, à moins qu'il ne s'agisse d'un agité, ou d'un malade
inoffensif, ou d'un « nerveux ». Si un accès d'agitation se déclare
chez un des patients de cette salle, et trouble le repos des autres,
ou bien si le malade a lui-même besoin de ménagements spéciaux
d'un calme complet, il est placé dans une des cinq chambres d'iso-
lement qui constituent ainsi une section de demi-agités. Une de
ces chambres, placée entre la salle et le bâtiment principal, a ses
murs et sa porte plus solidement construits afin de permettre l'iso-
lement d'un malade en proie à un accès d'agitation, peut-être pas-
sager, sans qu'on soit obligé de recourir au transfert du patient au
pavillon d'isolement. Cette chambre sert aussi au séjour provisoire
des maniaques qui doivent être présentés à la clinique.
La salle de surveillance et les cinq chambres d'isolement reçoi-
vent en outre les malades atteints d'affections intercurrentes. Quant
à la deuxième salle du pavillon, elle est réservée aux « nerveux ».
On dispose donc, en dehors des « nerveux », de vingt à trente lits
pour les catégories suivantes : malades à surveiller, malades sou-
mis au traitement par le lit, sujets atteints d'affections intercur-
rentes. La moitié des malades de troisième classe (au nombre de
73) peuvent donc ainsi être traités dans le pavillon de surveillance
(10 places leur sont en outre réservées au pavillon d'isolement). Le
personnel de surveillance se compose de trois infirmiers.
C. Les villas possèdent un sous-sol, un rez-de-chaussée, un
premier étage et un grenier. Ce sont les seuls pavillons de malades
ayant un premier étage. Dans le sous-sol de la villa des hommes
(hauteur 3 m. 30 c.) sont des locaux d'habitation et un calorifère.
Au rez-de-chaussée (hauteur 4 m. 30 c.), se trouve une salle de
12 m. 75 c. de long et 6 m. 25 c. de large qui peut être divisée en
deux parties par des cloisons mobiles : l'une, contiguë à la porte
d'entrée, sert de salle à manger ; l'autre est la salle de réunion des
21 pensionnaires. Autour de cette salle se groupent six chambres
à coucher, dont deux pour 0 malades, une pour 5, une pour 2
ou 3, une pour 1 ou 2 et une pour 1 malade. Les fenêtres des
chambres à coucher sont orientées vers l'Est et le Sud et un petit
LES CLINIQUES PSYCIII.%I'IIIQ--ES. 383
nombre vers l'Ouest. La salle de réunion et la salle à manger com-
muniquent avec une véranda et avec l'escalier. Les trois chambres
à coucher les plus vastes, servant à 17 pensionnaires, ont 117 mè-
tres carrés de superficie et 468 mètres cubes de capacité, ce qui
fait pour chacun d'eux 7 mètres carrés]de superficie et 2 î,5 mètres
cubes d'air, proportion suffisante pour des sujets tranquilles et
non alités.
Les murs des salles de réunion et des chambres à coucher sont
peints à l'huile jusqu'à une hauteur de 2 m. 50; peinture à la colle
au-dessus. Les fenêtres présentent les mêmes dispositions que
dans les pavillons décrits plus haut; mais elles peuvent, ainsi
que les portes, être ouvertes par les malades ; on ferme les jalou-
sies pendant la nuit. L'éclairage des chambres à coucher se fait
pendant la nuit à l'aide de vitres placées à la partie supérieure des
portes.
Au premier étage (4 m. 05 c. de hauteur), même disposition des
locaux. Les fenêtres sont analogues à celles du rez-de-chaussée,
mais les vitres en sont plus épaisses, et la partie médiane peut
être fermée à clef, les parties latérales restant mobiles sur leur axe
vertical. Au grenier est installé le vestiaire.
D. Les pavillons d'isolement (B). Chacun des pavilons d'iso-
lement (un par sexe), con-truit pour 5 malades, en contient néan-
moins de 10 à 12. Une porte vitrée donne accès dans une salle de
réunion de 10 m. 31 c. de long sur 5 mètres de large, éclairée par
la porte et par deux fenêtres. Autour de cette salle sont groupées
quatre cellules et une chambre d'observation. L'office, les closets,
la salle de bains en sont séparés par un corridor. Les cellules ont
5 mètres de long sur 3 mètres de large et 4 m. 40 c. de hauteur.
Elles sont orientées à l'est ; la chambre d'observation au sud. Deux
des cellules ouvrent directement sur la salle de réunion. Les deux
cellules destinées aux malades particulièrement bruyants don-
nent sur de petits corridors qui, eux-mêmes, ont une issue sur des
jardins.
Le parquet des cellules et de la chambre d'isolement est en bois
de chêne ; celui de la salle de réunion en bois de sapin ; la salle
de bains, les closets, l'office sont bitumés.
Les murs des cellules sont revêtus de mortier de ciment et peints
à l'huile sur toute leur hauteur. Les murs des autres locaux, en-
duits de chaux, sont peints à l'huile à leur partie inférieure et à la
colle à la partie supérieure.
Les cellules possèdent de solides doubles portes avec serrure à
bascule.
Les fenêtres sont construites sur le modèle de celles de la clinique
de Strasbourg : elles se composent d'un châssis de fer forgé enca-
drant des carreaux de 15 à 20 millimètres d'épaisseur; leur partie
384 ENSEIGNEMENT.
supérieure peut être soulevée à l'aide d'un contre-poids manoeuvré
de la salle de réunion. Les autres fenêtres ont des grilles.
Deux infirmiers assurent le service. L'un d'eux couche dans la
chambre d'observation, l'autre dans cette chambre ou dans la salle
de réunion.
E. Bâtiments des services économiques (E). Situé au milieu
du terrain d'assiette, d'un accès facile de tous côtés, ce bâtiment
a la forme d'un T renversé, dont la partie horizontale, antérieure,
a trois étages, et la partie verticale, postérieure, perpendiculaire
à la première, possède deux étages. Dans le sous-sol se trouvent
une salle de désinfection, un calorifère, etc.
Le rez-de-chaussée (4 mètres de hauteur)~du bâtiment central a
trois entrées : il renferme les salles de distribution (une par sexe),
la salle d'épluchage des légumes (36 mètres carrés), les closets, le
cabinet de l'inspecteur des services économiques. Le rez-de-chaus-
sée du bâtiment postérieur (i m. 50 c. de hauteur) renferme la
cuisine. Au premier étage des deux bâtiments : logements du
personnel, magasins, etc.
F. L'amphithéâtre (A), relégué à l'extrémité du terrain, se com-
pose d'un sous-sol pour la salle des morts et le dépôt des bières, et
d'un rez-de-chaussée avec une .salle d'autopsie très bien éclairée,
une chapelle et une chambre pour le garçon d'amphithéâtre.
Chauffage et ventilation. Tout l'établissement, sauf l'amphi-
théâtre et les logements des employés, est chauffé par un procédé
mixte (chauffage à la vapeur et chauffage à l'air). Les appareils
de ventilation sont, dans chaque chambre, aisément ouverts, fer-
més et réglés.
Dans tout l'établissement, on a installé de nombreux postes d'in-
cendre, composés d'une lance et d'un tuyau de toile contenus dans
une sorte d'armoire vitrée. En cas d'alarme, la vitre peut être
brisée et l'appareil est prêt à fonctionner. Ajoutons que, en prévi-
sion des incendies, les escaliers sont en fonte ou en granit et non,
comme dans certains asiles, en bois. Enfin, dans la loge du con-
cierge, on a placé un avertisseur qui met en communication la
clinique avec le poste central de pompiers de la ville. Le système
du tout à l'égout à été appliqué à la clinique de Halle. Les appareils
des water-closets sont manoeuvres à la main. Chaque pavillon
possède son vestiaire.
Le personnel médical de la clinique est ainsi composé : le direc-
teur-médecin en chef, professeur Hilzig ; deux médecins (0&<' ? 'a) ? <),
deux assistants, un médecin volontaire. -Le professeur fait deux
leçons par semaine, à 2 h. 30 et à 4 heures. En 1896, le nombre
des malades traités, soit à la consultation externe, soit à la clini-
que, s'est élevé à 700.
Le personnel de surveillance comprend 9 infirmières et une sur-
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 3g5
veillante en chef pour 56 malades femmes. Mêmes chiffres pour la
division des hommes. Les appointements des infirmières varient
de 225 et 562 francs par an. Celui de la surveillante est de 750 francs.
Le service de veille est ainsi organisé : un veilleur général, plus
des veilleurs spécialement attachés aux pavillons; ces derniers sont
de service, les uns de 9 heures du soir à 1 heure du matin, les autres
de 1 heure à 5 heures. Il est accordé aux agents du personnel
de surveillance quatre sorties par mois, dont deux grandes sorties.
M. Hitzig est partisan du traitement des psychoses aiguës par le
lit; aussi les salles du pavillon de traitement ont-elles été spécia-
lement aménagées dans ce but. Les lits sont munis à la tête et aux
pieds d'une tablette verticale, en substance mauvaise conductrice
de la chaleur (xylolithe), en vue de diminuer les pertes de calori-
que. Le sommier est de l'espèce dite « cotte de mailles ». Le quart
supérieur, correspondant à la tête, est mobile et peut être relevé
plus ou moins, formant ainsi un dossier à inclinaison variable grâce
auquel le malade peut, sans fatigue, rester assis à moitié dans son
lit. Cette disposition ingénieuse mériterait d'être imitée : elle facilite
la pratique du traitement par le lit en permettant au patient de
varier sa position et de garder la position assise sans aucune fatigue.
Le prix de revient de ces lits, en fer, est de 44 francs. Ce n'est pas
tout. En vue toujours de faciliter le traitement par le lit, M. Hitzig ZD
se sert d'une table spécialement construite dans le but de permet-
tre au malade de prendre commodément ses repas au lit. Cette
table a la forme suivante : =1 La partie horizontale inférieure
étant placée sous le lit, la partie horizontale supérieure se trouve
au-dessus du plan du ht et les aliments peuvent y être déposés
sans crainte de salir les draps. (Prix de revient de cette table,
G 1'1'. ? c.)
Dans la salle de surveillance est placée une chaise percée dont
l'usage est aussi indiqué pour des malades maintenus au lit. No-
tons encore un aménagement spécial qui a son utilité : dans la
salle se trouvent un certain nombre de paravents qui servent à
pratiquer l'isolement optique, à soustraire à la vue des autres pa-
tients les cancéreux, les moribonds, les malades qui ont besoin
d'examens spéciaux (organes génitaux). Les tables de nuit sont à
rebords et à tiroirs métalliques. Près des lits sont placés des porte-
serviettes.
Nous avons eu la bonne fortune, lors de notre visite à Halle, de
rencontrer lf. le professeur Ed. Hitzig. Les mémorables découver-
tes de ce savant, ont renouvelé, ou le sait, la physiologie et la
pathologie du cerveau. Il suffit de rappeler les résultats retentis-
sants auxquels est arrivé Hitzig, avec Fristch, en électrisant le
cerveau. Il a démontré, contrairement à l'opinion alors régnante,
Archives, 2e série, t. X. 25
386 ENSEIGNEMENT.
que le cerveau était excitable par les courants électriques dans une
zone déterminée, que l'écorce cérébrale se composait de centres
circonscrits possédant des fonctions différentes. La doctrine des
localisations cérébrales, dont Broca avait jeté les bases au point de
vue anatomo-clinique, recevait de la physiologie expérimentale une
éclatante confirmation. En 1874, Hitzig pouvait écrire « qu'une
portion considérable des masses nerveuses constituant les hémis-
phères cérébraux - on peut presque dire leur moitié est en
rapport immédiat avec les mouvements musculaires, tandis que
l'autre portion n'a évidemment rien à faire, au moins directement,
avec ceux-ci ». En outre de ces travaux sur la localisation des
fonctions motrices (18î0-l8ÏIr-1881-) il faut citer les recherches
de M. Hitzig sur les sphères visuelle et auditive de l'écorce cérébrale
(1874-1883-1889). En 1874, Hitzig fait remarquer qu'après une
lésion du lobe occipital, l'oeil du côté opposé est frappé de cécité.
Cette deuxième découverte de Hitzig est, déclare M. Soury, une des
grandes découvertes de ce siècle 1.
En 1874 et 1884, M. Hitzig a localisé dans le cerveau frontal les
organes particuliers de la pensée abstraite, se basant, sur l'anato-
mie comparée et à priori, sur l'invraisemblance qu'il y aurait à
attribuer des fonctions aussi simples que celles des mouvements
de la colonne vertébrale à l'énorme masse de substance cérébrale
qui constitue les lobes frontaux de l'homme. Expérimentalement,
il insiste sur la déchéance intellectuelle qui suit l'ablation des deux
lobes frontaux.
Dans ces dernières années, le professeur Ed. Hilzig a fait
paraitre une importante monographie sur la folie des persécutés-
persécuteurs, sur la place qu'il convient d'affecter à cette psy-
chose dans le cadre neurologique et sur l'examen des questions
médico-légales qu'elle soulève2. M. Hitzig considère la folie des
quérulants comme une forme du délire systématisé chronique,
caractérisée par une altération générale de la personnalité psy-
chique, avec prédominance des troubles de l'intelligence, ceux-ci
étant eux-mêmes plus spécialement localisés à certaines fonc-
tions. Il y a d'une part élaboration de conceptions maladives,
délirantes, et d'autre part absence des représentations et des asso-
ciations psychiques normales : il s'agit en un mot d'un état de
faiblesse mentale qui ne permet pas de rectifier les conceptions
délirantes. Cet état de débilité psychique, dont le degré est très
variable, doit vraisemblablement être rattaché à des modifications
histologiques du cerveau.
' Hitzig. UnlersuclmugetzüGe>WasGeleimz. Berlin, 187. Cité par Soury,
Les fonctions du cerveau, p. 10, 3G.
2 Hitzig. Peler den Qczcirvlanlezzwahztsizzrz, Seine nosologische Stellll1 ! fl,
iindseiiie forensische l3ecleulung. Leipzig, 1895.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 387
M. Hitzig, en outre du traitement au lit, se loue de l'emploi èhez
les mélancoliques de l'extrait thébaïque par la bouche, à la dole
de 0,10 à 0,30 centigrammes par jour. Les malades sont alimentés
à la sonde deux ou trois fois par jour et pesés chaque semaine : on
peut ainsi suivre de près les modifications de l'état général. Dans la
mélancolie circulaire, le professeur M. Halle a recours parfois aux
injections sous-cutanées de sulfate d'atropine (0,0003 à 1 milli-
gramme). Le trional (1, 2 gr.), le chlorhydrate d'hyoscine sont pré-
férés au chloral. Dans l'hystérie, la neurasthénie, M. Hitzig
applique le traitement de Weir-Mitchell : faradisation repos au
lit suralimentation massage de vingt minutes deux fois par
jour. Dans la neurasthénie, il a aussi recours parfois aux frictions
avec le drap mouillé, aux bains froids (18°-20°-25°) de 1 à 3 mi-
nutes de durée, la tête étant plongée sous l'eau le plus longtemps
possible. Les cas d'hystérie, de neurasthénie sont assez fréquem-
ment observés à la clinique, le professeur Hilzig étant habituelle-
ment désigné comme expert par les tribunaux prussiens dans les
questions de névrose traumatique.
Le service d'électrothérapie est installé d'une façon très com-
plète.
M. Hitzig nous fait remarquer que les pavillons d'isolement,
construits pour 5 malades chacun, sont insuffisants. Ils contiennent
en réalité de 10 à 12 malades chaque pour une population totale
de 120 sujets. Dans certaines cellules on a installé une sorte de
chaise percée fixée solidement au mur et aménagée spécialement
en vue d't mpêcher les agités de manger leurs excréments. Les ma-
tières fécales glissent sur une glace inclinée et vont tomber dans
un réservoir contenant une solution de créoline où le malade ne
peut aller les chercher. Le réservoir est régulièrement vidé.
Pour les femmes agitées on n'emploie pas le maillot, mais une
robe en coutil solide. Une partie de la vaisselle destinée aux agités
(gobelets, etc ) est en aluminium ; le prix de revient en est peu
élevé.
M. llitzig a organisé à la clinique de psychiatrie une école d'infir-
utiers et d'infirmières; mais une école moins théorique que pratique.
M. Hitzig a pour principe de n'admettre aucun infirmier qui ait été
employé antérieurement dans un hôpital ou un asile. 11 entend
former lui-même son personnel. C'est dans le pavillon de traite-
ment que les infirmiers nouvellement admis apprennent sous la
direction des médecins, des surveillants et des autres infirmiers
les soins à donner aux malades, la. petite chirurgie, la façon
de se conduire avec les aliénés ; ils font connaissance dans ce
pavillon avec les formes les plus graves des maladies men-
tales.
Un appareil ingénieux, dit à 11. Ilitzig, est employé à la clinique
pour l'examen du sens de la pesanteur (tabès, etc.). Cet appareil,
388 ENSEIGNEMENT.
le Kinésiesthésiomètre 1, se compose essentiellement de petites
spjières en bois au nombre de in, analogues à des billes de bil-
lard, contenant à l'intérieur une quantité de plomb variable pour
chacune d'elles (50 à 900 gr.) sans que leur apparence extérieure
cesse d'être pour toutes identique. On les place dans la main du
malade dont on veut-examiner l'appréciation des variations de
poids : pour les membres inférieurs, on adapte il une chaussette
un petit sac dans lequel on dépose les sphères. D'après les recher-
ches de E. II. Weber, au membre supérieur, on apprécie des diffé-
rences de poids de 1/40 ; Ferrier obtient la proportion de 1 ! Ii,
Mendel admet qu'en général les extrémités supérieures différencient
10 grammes et les inférieures GO grammes. D'après Bildermann ct
Lüvit, avec un poids de 2;i0 grammes, on apprécie des différences de
1/21. L'appréciation de la pesanteur s'accroît jusqu'à 1/1 ils, avec
l'augmentation du poids, pour diminuer ensuite. Les extrémités
inférieures fournissent des renseignements beaucoup plus impar-
faits que les membres supérieurs. D'après Chavet, on apprécie
aussi bien une augmentation de poids de 1 gr. aux membres
supérieui s qu'une augmentation de 30 à 40 gr. aux membres infé-
rieurs.
Nous empruntons à un travail récent de MM. E. et Ed. Hitzig
quelques renseignements sur le régime alimentaire des malades
de la Clinique de Halle. Ceux-ci sont groupés en trois catégories,
suivant le taux de la journée d'entretien.
Première classe : 1° Par jour : 37j gr. de pain ; 50 gr. de beurre;
2° Le matin : café, thé ou cacao, sucre, pain blanc;
3° A midi : soupe, viande bouillie ou étuvée avec légumes ou
sauce et pommes de terre, ou bien boulettes de viandes avec
fruits cuits, fricassée, poisson, etc., avec pommesde terre.
Une viande rôtie avec pommes de terre, de la compote, de la
salade ou pâtisserie ;
4° L'après-midi : café, thé ou cacao, sucre;
5° Le soir : viande rôtie avec pommes de terre et légumes, ou bien
une soupe, une bouteille de bière ou du tlié (avec sucre, beurre et
lait) et viande froide, ou encore des oeufs différemment préparés
avec salade, fruits, etc.
Les médecins ont le menu des malades de première classe,
mais en outre ils font un second déjeuner compote de 20 gr. de
beurre et de viande froide ou d'un mets analogue.
Deuxième classe : 1° et 2° Comme la première classe ;
3° A midi : menu analogue à celui de la première classe, sauf
suppression d'un plat de viande et du dessert. Le service de la
' V. Goldsclieider. Uiagtoslil der Krankheilen des Nervensyslems,
Berlin, l89ï.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 389
deuxième classe est identique à celui de la première (abstraction
faite du dessert), le dimanche et les jours de grande fête;
4° et 5° Comme la première classe.
Troisième classe : 1° Par jour : 375 gr. de pain et 35 gr. de beurre
2° Le matin : café au lait et pain blanc;
3° A midi : légumes, avec ou sans pommes de terre, et viande
bouillie ou étuvée ou bien saucisses ou poisson. Les diman-
ches et j0urs de fêle : soupe, viande rôtie avec pommes de terre,
salade ou compote;
4° L'après-midi : café au lait ; .
5° Le soir : soupe ou oeufs avec ou sans salade, ou bien pommes
de terre avec hareng et beurre.
Les infirmiers ont le menu de la troisième classe, et reçoivent en
outre par jour : 20 gr. de sucre ; le soir : fromage, saucissons,
hareng, etc.
Le prix d'entretien au point de vue de l'alimentation revient
ainsi en chiffres ronds à :
Pour les médecins : 2,04 marks par jour ; î 16 marks par an 1.
Pour les malades de la première classe : l,ï4 mark par jour;
fi37 marks par an.
Pour les malades de la deuxième classe : 1,47 mark par jour;
510 marks par an.
Pour le personnel : 0,72 par jour : 26 marks par an.
Pour les malades de la troisième classe : 0,61 mark par jour;
224 mal ks par an.
Voici le menu du dlner et du souper de la troisième classe
pour la seconde semaine de septembre :
Le 9, dimanche, à midi : soupe au vermicelle, rôti de veau, pom-
mes de terre et salade. Le soir, des oeufs.
Le 10, à midi : soupe au riz et au lait, saucisse. Le soir :
soupe aux pois et pain blanc.
Le 11, à midi : soupe aux pois frais, pommes de terre et bouilli.
Le soir : soupe à la semoule, beurre.
Le 12 à midi : salade et pommes de terre et viande de porc.
Le soir : soupe d'orge et prunes.
Le 13, à midi : soupe aux lentilles, pommes de terre et lard.
Le soir : soupe au lait battu.
Le Il, à midi : viande de boeuf, choux-rave et pommes de terre.
Le soir : soupe au riz, beurre.
Le 15, à midi : viande de mouton, haricots blancs, pommes de
terre. Le soir : hareng et pommes de terre.
Le menu varie chaque semaine.
Les auteurs ont calculé que les malades de troisième classe
recevaient par jour 12S,85 grammes, d'albumine, 85,62 grammes
' Le mail; vaut 1 fr. 25.
390 ENSEIGNEMENT.
de graisse, 4 ? O1 grammes d'hydrates de carbone; c'est-à-dire
29,5 grammes en plus de graisse et seulement 10 grammes d'albu-
mine et 75 grammes d'hydrates de carbone .en moins que Voit
n'en réclame pour un ouvrier du poids de 70 kgr., et se livrant à
un travail qui n'exige pas de fatigues exagérées. Les recherches
faites par les auteurs leur ont prouvé que ce régime était ample-
ment suffisant '.
En 1898, la situation de la clinique était la suivante :
Population : 123 malades (63 hommes, 60 femmes) ;
Personnel médical : le Directeur professeur Hilzig, un médecin
assistant ayant le titre d'06e ? \M'< et le grade universitaire de Pd-
vat doeent, un second médecin assistant chargé de la Policlinique,
trois autres assistants et un médecin stagiaire (17oloiiiii-tti,zt).
Le « mouvement » de la population avait été, pour l'année 1897,
de : Entrées : 6cJ5 malades (395 hommes, 300 femmes). Sujets
traités : 810 malades (461 hommes, 319 femmes). Sorties : 651
malades (368 hommes, 283 femme's). Décès : 36 (30 hommes,
G femmes).
Université de Bonn (Province Rhénane).
(Faculté de médecine : 11 Professeurs ordinaires ; 12 Professeurs
extraordinaires; 11 Privat-docenten ; 400 étudiants.)
La création d'une clinique psychiatrique universitaire remonte
à l'année 1882. Cette clinique a été installée à l'asile provincial de
Bonn (Rheinische Pt'ot)HHtt-7n'f) ? f. ! ( ? M Pilerlc-Allstall).
Le professeur de psychiatrie, le 0" Pelman, est en même temps
directeur médecin en chef de l'asile. La population normale de
l'établissement, ouvert en 1882, est de 600 malades Population
réelle (1er janvier 1890), 507 (232 hommes, 275 femmes). Nombre
des admissions (année 1889) : 313.
Le personnel médical se compose, outre le professeur, d'un mé-
decin chef de service (Oberart), d'un médecin assistant qui est
Privat-docent et de trois assistants.
Population (le,' janvier 1898) : 601 malades (26G hommes, 335
femmes). Nombre des admissions (1897) : 453 malades (221 hom-
mes, 232 femmes).
' E. et Ed. Ilitzig. L'alimentation des malades el du personnel de la
Clinique de psychiatrie el de médecine nerveuse de l'Université de
llctlle-1T'illenLea·ll. Ce qu'elle coûte. lima, Fischer, 1897.
Analysé in Bulletin de la Société de médecine mentale de Belgique,
1897, p. 350.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 391
Université de Kônigsberg (Prusse).
(Faculté de médecine : 8 Professeurs ordinaires ; 10 Professeurs
extraordinaires; 15 Privat-docenten ; 230 étudiants.)
Le quartier d'hospice de l'hôpital municipal de Kônigsberg
(Stiidtische Kranken-Anstalt) sert, depuis octobre 1893, de clinique
psychiatrique universitaire ; mais des conférences de psychiatrie
clinique y furent données dès 1879. Un pavillon d'agités y a été
construit en 1879. Un agrandissement de la clinique est pro-
jeté.
Le nombre des malades (fin 1893) s'élevait à 35, non compris
les cas de délire alcoolique.
392 li ENSEIGNEMENT.
ferts. La proportion des cas de délire alcoolique ne s'élève qu'à
2,2 p. 100 des admissions. Le prix de journée des aliénés du
régime commun est de 1 fr. 37 c.
Nous n'insisterons pas sur la constitution matérielle de l'asile,
qui n'a pas été construit en vue de servir spécialement à l'ensei-
gnement clinique. Son plan rappelle d'ailleurs celui de tous les
asiles élevés, il y a une quarantaine d'années, dans l'Europe
centrale : constructions monumentales (genre caserne), bâtiments
étroitement réunis entre eux, vaste bâtiment d'administration à
deux étages, avec deux ailes, sur le même plan ; celles-ci possè-
dent un premier étage et servent de quartiers pour les tranquilles.
Système du corridor : larges couloirs pouvant servir de salles de
réunion, sur lesquels ouvrent les portes de petits dortoirs (de 3 à
4 lits, parfois de 12).
Pas de bains centraux. Chaque quartier possède une salle de
bains avec deux baignoires et une balance.
Escaliers en granit. Chaises percées il fermeture hermétique
dans chaque dortoir. Chauffage central.
Cellules. Fenêtres : les unes hors de la portée des malades,
les autres munies de vitres incassables. Les murs sont peints à
l'huile. Dans certaines cellules, lit massif, scellé dans le parquet ;
dans d'autres, les malades couchent sur un matelas. Nous avons
remarquél'emploidevasesdenuit en « papier mâché », sorte de car-
ton assez résistant. Une des chambres d'isolement possède un siège
très solide sous lequel est placé un seau destiné à recevoir les
matières fécales. Ce seau peut être vidé du dehors, par une
ouverture ad hoc. Dans d'autres, se trouvent des chaises percées.
Dans les quartiers d'agités, bancs et tables massifs, fenêtres à
vitres incassables.
Chaque dortoir possède une chaise percée à fermeture her-
métique : les malades ne doivent pas se rendre au cabinet la
nuit. 11 y a également dans chaque dortoir des porte-manteaux
qu'on enlève, une fois les malades couchés, dans les quartiers
d'agités.
Couchage des gâteux : leur matelas est segmenté en trois
parties. La partie médiane, correspondant au siège, est recou-
verte d'une toile imperméable. Les paralytiques reposent sur un
coussin à air, soit au lit, soit dans un fauteuil.
Les jardins des malades tranquilles sont vastes, dessinés avec
goût : rien qui ressemble à l'odieux préau quasi pénitentiaire de
tant d'asiles.
Régime alimentaire. Nous ne parlerons que du régime des
aliénés indigents.
Pain : 500 grammes (hommes) ; 400 grammes (femmes).
~ Déjeuner : café au lait (3/8 de litre) correspondant à café en
grains : 8 grammes ; lait : 250 grammes; sucre : 10 grammes.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 393
Un petit pain de 85 grammes.
Déjeuner à la fourchette. - Soupe : 500 grammes (bouillon au
riz, sagou, lentilles, nouilles, etc.).
Viande de boeuf bouilli : 200 grammes (la ration de viande est
pesée crue et sans os).
Légumes variés suivant la saison (carottes, navets, choux blancs
ou rouges, pommes de terre, petits pois, choucroute).
Goûter (sur ordonnance médicale). Café au lait : 3[8 de litre,
ou bière.
Dîner. Soupe au pain, semoule, etc. : 500 grammes.-
Deux saucisses de 80 grammes, ou 100 grammes de charcu-
terie (saucisson, etc.); ou 200 grammes de rôti de -\eau avec
salade, ou 190 grammes de porc fumé, ou purées diverses.
Le dimanche, il y a des supplément.
Boisson : envilon 1 litre et demi de bière par jour, sauf pour
les alcooliques soumis, depuis 1890. à l'abstinence totale.
Personnel médical. Le professeur de psychiatrie, 1)" Grashey,
est directeur médecin en chef de l'asile (1894). Il est secondé par
un nombre suffisant de médecins, ayant chacun une tâche bien
définie et constituant ainsi des collaborateurs effectifs. Le médecin
en second est spécialement chargé d'une des deux divisions de-
l'asile, le professeur se réservant l'autre. Il y a, en outre, 4 méde-
cins assistants et 1 assistant volontaire. Les deux divisions étant
segmentées chacune en deux sections, chaque assistant se trouve
ainsi à la tête d'une section de 120 à 1 in malades. Les assistants
sont chargés en outre des rapports médico-légaux, de la corres-
pondance avec les familles. Ils* sont logés, nourris, etc. Leur
traitement varie, suivant leur ancienneté, de 1.250 à 1.825 francs.
Le directeur-médecin en chef fait sa visite seul, à 7 h. 30 du
soir, chaque jour alternativement dans une des deux divisions;
le médecin en second visite la division dont il est chargé. les
assistants font leur visite le matin avant 10 heures. De 10 heures
à 12 heures, rapport dans le cabinet du directeur médecin en
chef. Le soir, vers 4 ou 5 heures, contre-visite des assistants.
Le nombre des infirmiers est de 45 ; celui des infirmières de 50.
Le professeur fait, chaque semaine, deux conférences cliniques
à l'asile (de 4 à 6 heures), et deux leçons théoriques à l'université
(de 5 à 6 heures). 1
Nous avons assisté à une leçon clinique. Une centaine d'étu-
diants sont réunis dans la salle des Fêtes de l'asile qui sert aussi
de salle des cours. Ils se lèvent à l'entrée du professeur Grashey.
Ce dernier est accompagné d'un malade; il appelle de suite un
étudiant qui vient s'installer en face du sujet et commence l'in-
terrogatoire. Lorsque l'élève a terminé, le professeur reprend
l'examen clinique, et le fait durer fort longtemps, ne négligeant
aucun délail sur les antécédents personnels et héréditaires. Il
34 ENSEIGNEMENT.
s'agit d'un buveur de schnaps qui a eu un accès épileptique avec
amnésie complète ayant duré 14 jours. L'écriture est examinée :
elle est normale, malgré un léger tremblement des doigts. Une
fois l'interrogatoire du patient lerminé, celui-ci quitte la salle et
le professeur lit ensuite l'observation. Puis il interroge l'élève
sur l'épilepsie en général. M. Grashey admet l'existence de l'épi-
lepsie alcoolique, considère les équivalents psychiques comme plus
fréquents dans l'épilepsie tardive, discute minutieusement les
particularités du cas, formule le traitement : abstinence complète
et travail.
Le professeur Grashey n'est point partisan de l'isolement t
prolongé en cellule, en raison des habitudes de malpropreté
que les malades y contractent. Il applique le non-restreint, et
emploie chez les agités le maillot ordinaire avec, comme mode de
fermeture, un bouton spécial, dit bouton de Munich'. MI : Grashey
raconte avoir observé un cas de paralysie radiale chez un malade
camisolé dont on avait immobilisé les bras par un lien supplé-
mentaire. Les aliénés qui ont des tendances à l'auto-mutilation
ont des gants de cuir épais. Le traitement par le lit est employé
dans certains cas, chez les mélancoliques. L'alimentation artifi-
cielle est toujours pratiquée deux fois par jour : la quantité de
liquide ingéré chaque fois est de 500 grammes (lait, huile de foie
de morue, oeufs, cognac, vin rouge). Pour s'assurer que la sonde
est bien dans l'estomac, on presse une poire en caoutchouc adaptée
au pavillon de la sonde, pendant que l'oreille est appliquée au
niveau de l'estomac. Un thermomètre est plongé dans le liquide
dont la température doit se rapprocher de celle du corps.
Population le ter janvier 1898 : 530 malades (253 hommes,
285 femmes).
1 Ce bouton, dû au Dr Ilôrinaiin (1889), est en laiton nickelé, son dia-
mètre est de 25 millimètres, son poids de 39 grammes. Il est surmonté
de deux parties, dont l'une est surmontée d'une tige de 5 millimètres
de diamètre et de 16 à 22 millimètres de hauteur (suivant l'épaisseur du
maillot), et dont l'autre présente un oulice destiné à recevoir l'extré-
mité de cette tige. La partie supérieure du bouton renferme un ressort
dont l'action sur la tige de la partie inférieure détermine l'union des
deux segments. Les maillots n'ont pas besoin d'autre disposition préa-
lable que d'être munis de deux boutonnières superposables à travers
lesquelles on passe la tige dont la partie inférieure du bouton est munie.
Pour fermer, on n'a pas à se servir de clef. Il suffit d'appliquer sur la
tige qui fait saillie hors des boutonnières, la partie supérieure du bouton.
La fermeture se fait automatiquement, aussi facilement qu'on met un
bouton de manchette. Pour enlever le boulon, on introduit dans deux
orifices que présente la partie supérieure du bouton les deux pointes
d'une clef spéciale : on lait cesser ainsi l'action du ressort, et les deux
parties du bouton se séparent. (Dr 0. Snell. dlly. Zeilschr. f. Psychiatrie;
1891, fasc. 1.)
PHÉNOMÈNES DITS HALLUCINATIONS PSYCHIQUES. 395
Nombre des admissions en 1897 : 22 malades (124 hommes,
100 femmes).
Actuellement (1899) le professeur de psychiatrie est le Dr A.
Bumm. Il est secondé par un médecin chef de service (06euart)
et cinq médecins assistants. (A suivre.)
PSYCHOLOGIE.
Sur les phénomènes dits hallucinations psychiques;
Par le Dr J. SÉGLAS,
Médecin de Bicètre.
(Résumé analytique d'une communication faite au Congrès international
de psychologie. 1900.)
Les divergences d'opinion, qui se sont manifestées jusqu'à ce
jour à propos des phénomènes décrits par Baillarger sous le nom
d'hallucinations psychiques, tiennent à des causes multiples : -.
(u) générales : insuffisance de nos connaissances anatomo-physio-
logiques, complexité et subjectivité du symptôme ; ou (b) spé-
ciales : disparité des phénomènes multiples englobés sous ce
vocable, confusion résultant du mémoire même de Baillarger.
En effet après avoir indiqué d'après les mystiques la division
des fausses perceptions en intellectuelles et corporelles (halluci-
nations psychiques et psycho-sensorielle,), et signalé d'après eus,
en quelques lignes, qu'il y a des visions, des locutions, des odeurs
et des goûts « qui tantôt n'affectent que l'âme et tantôt arrivent
aux organes des sens », Baillarger consacre tout son mémoire
(observations et discussions) à l'étude exclusive des « locutions
intellectuelles » (voix intérieures, épigastriques, etc.).
De là, suivant les auteurs, l'acception différente, rarement géné-
rale, le plus ordinairement restreinte, du terme hallucinations
psychiques et les divergences d'opinion sur la nature de ces phé-
nomènes.
En réalité, il ne peut y avoir une interprétation unique de l'hal-
lucination psychique ; car, sous ce terme se trouvent englobés des
phénomènes de mécanisme psychologique et de signification cli-.
nique différents, et qu'il importe tout d'abord de distinguer.
396 PSYCHOLOGIE.
Le groupement qui nous parait le meilleur est celui qui s'ap-
plique à l'hallucination vraie. Nous distinguons ainsi les halluci-
nations psychiques en deux grandes classes, suivant qu'elles se
rapportent à des objets ou personnes, ou suivant qu'elles revêtent
un caractère verbal.
1° Les premières-(visions, bruits, goûts, odeuis spirituels des
auteurs mystiques) sont des phénomènes intermédiaires à l'idée
et à l'hallucination vraie, des représentations mentales vives, ani-
mées, précises, mais dépourvues du caractère (l'cxlél'i')1'ilé qui fait
l'hallucination vraie ; ce sont, en un mot, des psetcclo-lculluci-
nations dans le sens de Kandinsky.
2° Les secondes (locutions intellectuelles, voix intérieures, épi-
gastriques) se subdivisent en deux catégories principales.
a) La première de ces catégories est celle des hallucinations
verbales motrices. Elles comportent plusieurs variétés d'après leur
intensité (hallucinations verbales kinesthétiques simples ou mo-
trices vraies, c'est-à-dire avec exécution plus ou moins parfaite des
mouvements d'articulation correspondants) ; ou encore d'après
leur complexité. En effet, malgré la part prépondérante qui
revient à l'intervention du centre moteur d'articulation, ces hallu-
cinations ne sont pas uniquement une « épilepsie du centre de
Broca » pas plus que l'hallucination sensorielle n'est uniquement
« une épilepsie des centres sensoriels ». Sans doute, ainsi que
l'a fort bien montré Tamburini, l'excitation de tel ou tel centre
de l'écorce est une condition nécessaire de toute hallucination ;
mais elle n'en est pas la condition ci la fois nécessaire el suffi-
sainte. D'autres facteurs entrent en jeu, qui font de l'hallucination
un phénomène psychologique très complexe, un véritable délire
dans le sens le plus général du mot ; et les images précises, com-
plexes, intelligentes de l'hallucination ne semblent guère être
absolument comparables aux mouvements convulsifs de l'épilep-
sie. Plus que d'autres, les hallucinations motrices sont de nature
à prouver cette distinction. Il est hors de doute qu'elles sont sous
la dépendance des centres moteurs de l'écorce. Mais la seule exci-
tation, pure et simple, de ces centres ne pourrait expliquer
la différence qui existe entre la représentation de mouvements
déterminés, combinés, systématisés, de paroles articulées en rap-
port avec tel ou tel délire, constituant l'hallucination motrice et
les décharges spasmodiques, convulsives, désordonnées de l'épi-
lepsie.
Si l'on s'en tient au point de vue clinique, l'hallucination motrice
verbale peut se présenter sous différents aspects, plus ou moins
complexes. Parfois, l'image motrice verbale s'extériorise seule et
semble en apparence, être seule intéressée (hallucination motrice
pure). -
D'autres fois, elle s'accompagne d'une autre image verbale, le
revue D'ÉLECTROPHYSIOLOGIE ET d'électrothérapie. 397
plus souvent auditive, mais non extériorisée (hallucination mo-
trice mixte). ,
D'autres fois encore, cette seconde image s'extériorise elle aussi
et devient hallucinatoire comme l'image motrice (hallucinations
combinées).
Tous les phénomènes de cette première catégorie peuvent être
considérés comme de véritables hallucinations. A part la note
caractéristique due au rôle prépondérant du centre moteur, le
mécanisme central est le même que dans l'hallucination senso-
rielle. De plus il y a extériorité. Sans doute l'image motrice hal-
lucinatoire n'est pas localisée dans le monde extérieur ; sa nature
même s'y oppose. Mais, qu'il y ait ou non mouvement concomi-
tant, elle est du moins reportée excentriquement à la périphérie.
b) Dans une seconde catégorie, la voix intérieure ne présente
plus ce caractère. Elle reste à l'état de représentation mentale
vive, précise, sans aller jusqu'à l'hallucination vraie, sans s'exté-
rioriser. On pourrait dire que c'est une pseudo- hallucination 1'eT-
baie. Cette « conversation mentale » ne-diffère ainsi de la pensée
ordinaire que parla netteté plus grande des images verbales inté-
ressées. Aussi, celles-ci peuvent-elles être tout aussi bien audi-
lives que motrices ou visuelles suivant le sujet et aussi suivant
l'affection dont il est atteint. Toutefois, on est bien souvent auto-
risé à penser, sans pouvoir le démontrer d'une façon péremp-
toire, que la part principale revient il l'image motrice.
En résumé, le terme d'hallucination psychique qui, dans son
acception la plus générale, désigne des phénomènes disparates,
dont beaucoup ne sont pas des hallucinations, ne peut qu'entre-
tenir des confusions regrettables et doit disparaître de la nomen-
clature psychiatrique.
REVUE -D'ÉLECTROPHYSIOLOGIE
ET D'ÉLECTROTHÉRAPIE.
I. Electrophysiologie.
La physiologie des muscles et des neifs offre encore malgré les
nombreux travaux qui ont déjà été publiés un large champ de
recherches ainsi qu'on en pourra juger par ce qui a été fait dans
le courant de cette année sur cette importante question.
398 REVUE D'ÉLECTROPHYSIOLOGIE ET D'ÉLECTROTHÉRAPIE.
Je citerai en premier lieu le travail de MM. Carvalho et Weiss
sur la force limite du muscle. On sait combien les résultats obtenus
par les divers chercheurs sur ce point sont variables. Weber a
trouvé que le gastrocnémien de grenouille peut en se contractant
soulever 692 grammes tandis que ces auteurs constatent qu'il est
capable de mouvoir un poids égal à 50 fois celui de l'animal.
Rosenthal et Gréhant pensent être arrivés à l'extrême limite quand
le muscle ne soulève plus le poids tenseur que de 1/10 de millimè-
tre. En réalité la force limite d'un muscle est sa charge de rupture,
car celle-ci se produit avant que la contraction cesse de se faire.
Pour trouver cette force limite : 11\l. CarvarlUo et Weiss laissent
le muscle en place en conservant sa circulation. L'animal étant
fixé à un myographe de Marey, un fil attaché au gastrocnémien
passe sur une poulie et suppoi te le poids tenseur. Dès que celui-ci
exerce sa traction on fait périodiquement une série d'excitations
et, si le poids est bien choisi, la rupture se produit en 3 ou 4 se-
condes, le muscle répondant pendant ce temps par une contrac-
tion à chaque excitation. Quand le muscle est convenablement
fixé la rupture se fait par le milieu des fibres musculaires. Des
expériences sur les cobayes ont donné les mêmes résultats. Dans
ces conditions le gastrocnémien d'une grenouille pesant 60 gram-
mes soulevait un poids de 2.900 grammes, celui d'une autre de
99 grammes soulevait 3.500 grammes.
La hauteur du raccourcissement musculaire dépend de la forme
de l'excitation et de sa localisation. Une secousse unique donne
toujours un résultat plus faible qu'une secousse tétanique. La se-
cousse est plus grande lorsqu'elle est volontaire ou quand elle
porte sur la moelle que lorsqu'on la localise sur le nerf ou sur le
muscle.
Arloing et Chantre ont étudié la persistance de l'irritabilité mus-
culaire dans le sphinclcl' ani après la section des nerfs.
L'influence de la section des nerfs sur le sphincter détermine des
modifications. curieuses. La contractilité volontaire du muscle est
supprimée et cependant l'anus reste fermé ; il se dilate pour laisser
passer les fèces chassées par les forces expulsives, puis revient sur
lui-même parle fait de sa seule élasticité. Les contractions ryth-
miques signalées par Goltz et par Chauveau et les excitations ré-
flexes sont supprimées. Mais les muscles conservent longtemps la
propriété de réagir aux actions électriques médiates ; la contrac-
tion est seulement un peu moins vive et énergique que celle que
provoque l'excitation directe du bout périphérique des nerfs frai-
chement coupés. Le muscle répond également bien aux secousses
isolées et aux secousses tétanisantes et son excitabilité persiste à
peu près intacte un an après la destruction de l'influence directe
du système nerveux. Enfin le muscle conserve ses caractères his-
tologiques normaux ce qui tient peut-être aux rapports intimes
REVUE D'ÈLLCTROPHnIOLOGIE ET d'électrothérapie. 399
qu'il a avec la tunique musculeuse de l'intestin ; mais les auteurs
ne s'en sont pour le moment pas assurés.
V. Capriati, aide à la Clinique pychiatrique de Naples a étudié
l'influence de l'électricité sur la force musculaire. Les recherches
qu'il publie ont trait à l'action du courant voltaïque et de l'élec-
trisation statique. Elles ont été faites sur des personnes saines, infir-
miers ou médecins de la Clinique, jeunes hommes de vingt-quatre
à trente sept ans. Pour les applications voltaïque ? il a employé de
larges électrodes Ox 15 courant stable, ascendant dans quelques
expériences, descendant dans d'autres ; l'intensité variait de
dix à quinze mA la durée invariable des applications fut de dix
minutes. La fermeture et l'ouverture du courant a toujours été
lente et insensible. Pour l'électrisation statique il a employé une
machine Wimshurst à 4 plateaux de 70 centimètres de diamètre.
Séances de dix minutes. Pour évaluer la force musculaire il a em-
ployé l'ergographe de Mosso, les épreuves étant faites à la même
heure, avec le même poids (4 kilogrammes) et le même rythme
(une seconde). Le membre était fixe de manière à exclure le con-
cours de muscles autres que ceux qui travaillaient lorsque cru : \.-
ci commençaient à s'épuiser. Un écran placé entre le cylindre et
le sujet en expérience empêchait celui-ci de suivre des yeux la
courbe de son tracé.
A un intervalle variable de quelques jours l'expérimentateur
prend quatre tracés de la fatigue à douze, treize, quatorze ou
quinze heures. L'électricité est appliquée à des jours déterminés.
Ce jour-la des quatre tracés le premier est pris une heure avant
l'électrisation, des trois autres l'un immédiatement après l'élec-
trisation, le second une heure et le troisième trois heures après
celle-ci.
Les elfets de l'électrisation ont été révélés par la comparaison
du travail mécanique moyen correspondant au tracé pris après
l'électrisation par rapport avec celui qui la précédait. En calcu-
lant ensuite la variation des tracés obtenus les jours où il n'y
avait pas d'électrisation et en rapprochant les chiffres ainsi obte-
nus des précédents le sens de la variation est rendu plus manifeste.
Dans la première série d'expériences Capriati a employé la gal-
vanisation de l'épine dorsale, dans la seconde la galvanisation d'un
seul membre, dans la troisième le bain statique, tantôt positif.
tantôt négatif. La conclusion assez importante qui découle de ces
expériences c'est que l'électricité sous forme voltaïque ou statique
convenablement appliquée sur l'homme donne naissance à une
augmentation considérable et durable de la force musculaire.
Cette augmentation est-elle liée à l'état d'excitabilité des tissus
situés sur les lignes de flux, à l'activité des oxydations ou à l'aug-
mentation de la pression artérielle ? Est-ce une transformation di-
recte de l'énergie électrique en énergie mécanique ? C'est ce que
400 REVUE d'électrophysiologie ET d'électrothérapie.
l'auteur se propose d'étudier. Cependant on peut déjà affirmer que
cette augmentation n'est pas en rapport avec l'état dit éleclroto-
nique puisqu'elle se produit avec d'autres modalités électriques
que le courant voltaïque et reste indépendante du changement de
sens du courant.
L'action des courants électriques sur le coeur a été étudiée par
J. Froutowsky dans le laboratoire de Danilewsky à Karkoff, et par
Arullani.
Le premier, il l'aide de méthodes très précises, a déterminé
l'action physiologique des chocs électriques très' fréquents sur le
cceur, les nerfs et les muscles. La hauteur de la courbe de contrac-
tion tétanique augmente avec la fréquence de l'irritation électri-
que jusqu'à une certaine limite que l'auteur nomme : « seuil de
dépression. » Au delà la contraction tétanique diminue et la
courbe baisse. Ce phénomène avait déjà été établi par d'Arsonval.
Mais l'auteur a pu démontrer qu'il se produit aussi bien avec le
choc voltaïque fréquemment interrompu qu'avec les courants
alternatifs. La fatigue de l'appareil neuro-musculaire abaisse le
seuil de dépression qui remonte sous l'influence de l'élévation de
température à 28 ou 38°. Le muscle normal ne diffère pas sous ce
rapport du mnscle curarisé. Le. seuil de dépression varie suivant
l'animal. Les nerfs sensitifs, les centres nerveux, le coeur possè-
dent chacun leur seuil de dépression. Celui du coeur s'exprime par
son arrêt en diastole et dépend de l'intensité du courant. Pour le
moment l'auteur ne pense pas qu'il s'agisse là d'un phénomène
physique dépendant du fonctionnement des appareils excitateurs
et il ne se prononce pas sur sa vraie nature.
Arullani a recherché si le courant faradique ou galvanique ap-
pliqué sur la région du coeur peut produire des modifications de
la pression du sang et de la fréquence du pouls. Pour avoir des
modifications appréciables il faut des courants intenses, quinze
mA pour le courant voltaïque, 170 millièmes de volt pour le fara-
dique. Seule la pression du sang varie, le pouls reste à peu près
égal. L'augmentation de la pression sauguine est peu durable. On
peut l'obtenir en appliquant le courant intense sur d'autres ré-
gions du corps. D'où la conclusion que quand la cage thora-
cique est intacte on ne peut exciter le coeur avec les courants or-
dinaires et que les effels qu'on obtient avec des courants beaucoup
plus intenses sont dus aux réflexes douloureux que ceux-ci provo-
quent.
J.-L. Prevost a fait une longue étude sur les trémulation; :
rbrillaises du coell1' électrisé. De ses patientes recherches ressortent
des faits importants : les trémulations fibrillaires que produit
l'électrisation du coeur manquent chez les animaux à sang froid.
Chez le chien elles sont ordinairement suivies de la paralysie défi-
nitive du coeur, sauf quelquefois chez les jeunes ou chez les adultes
revue d'électrophysiologie et d'électrothérapie. 401
auxquels on fait une injection de bromhydrate de conicine. Chez
le rat il est impossible de produire des trémulations durables ;
chez le lapin, le chat, le pigeon les résultats ont varié. Chez le
cobaye le coeur entre en trémulation et est paralysé par l'électri-
sation à moins qu'on n'entretienne la vie par la respiration arti-
ficielle et le massage du coeur. Le rétablissement du coeur qui
trémule se fait brusquement; il est précédé d'un temps d'arrêt
diastolique comparable à celui que provoque l'électrisation du nerf
vague. Le coeur électrisé arrive à une accoutumance remarquable,
surtout chez le cochon d'Inde car des électrisations successives
provoquent des phases de trémulation de moins en moins durables ;
mais cette accoutumance n'est que momentanée. La théorie de
Kronecker, attribuant la trémulation des coeurs séparés du corps
et privés de circulation à la contraction des coronaires, ne suffit
pas à l'expliquer puisque les coeurs peuvent souvent reprendre
leur rythme après avoir trémulé quand on les soumet à l'irriga-
tion sanguine.
IIellwig a repris dans le laboratoire du professeur l3ernslein à
Halle les expériences de Mendelssohn sur le courant nerveux
axial c'est-à-dire sur la différence de potentiel qu'on observe entre
deux sections transversales du même nerf. Après avoir confirmé
les résultats des recherches de ce dernier il cherche à les inter-
préter à l'aide des nouvelles données de la neurologie. Suivant lui,
grâce à l'influence trophique des centres sur la fibre nerveuse, la
désorganisation se fait plus rapidement dans le bout central que
dans le bout périphérique et c'est là ce qui produirait la différence
de potentiel et déterminerait la direction du courant axial. L'in-
tensité de celui-ci est en rapport avec la longueur du nerf et pré-
sente une variation négative à la suite de son irritation.
Dans une communication un peu résumée Sarionoff publie les
résultats d'expériences qu'il a entreprises sur l'Evaluation galvano-
tlcétrigtce des courants électriques qui se prodiusent dans les circon-
volutions temporales ci la suite de l'excitation périphérique de
l'organe auditif. Ces expériences ont été faites sur des chiens. Au
moyen d'un galvanomètre Wiedemann-d'Arsonval il mesure la
différence de potentiel électricque existant entre la surface des
circonvolutions temporales et le fascia musculaire du pied du côté
opposé. En excitant le nerf acoustique à l'aide d'un diapason, il a
constaté que les courants de repos prennent toujours une direc-
tion descendante c'est-à-dire du cerveau vers le fascia où est la
seconde électrode. Les courants d'action prennent une direction
contraire dans le cas où l'électrode est appliquée sur le centre cortical
présumé de l'organe excité. Dans le cas contraire le courant de
repos est simplement renforcé. Il en déduit la réalité de la locali-
sation de la fonction auditive dans les circonvolutions temporales
et va même jusqu'à localiser les différents tons dans des régions
.lncmvrs, 21 série, t. X. 26
402 revue d'électrophysiûlogie .et L'ELECl'ROTIIER.1PIE.
corticales strictement limitées. Ces résultats demandent à être
contrôlés.
Meiromsky et Herrmann ont fait de nouvelles recherches sur
l'ondulation galvanique. Kuhne dès 1860 avait constaté les ondula-
tions que. présente un muscle traversé suivant son axe longitudinal
par un courant voltaïque intense ; il y voyait une conséquence
particulière du phénomène de la cataphorèse tandis que Herrmann
en fit une réaction physiologique. Meiromsky s'est attaché à déter-
miner les modifications que subit l'ondulation galvanique sous
l'influence des différents agents et il a pu constater que tous les
facteurs qui modifient l'irritabilité musculaire agissent sur l'in-
tensilé des ondulations galvaniques, d'où Herrmann conclut de
nouveau que celles-ci sont inhérentes à la contractilité musculaire,
et dépendent du degré d'excitabilité du muscle.
De ce travail on peut rapprocher la communication faite au
dernier congrès de l'ArAs par M. lleudelssohn sur les Variations de
l'état électrique des muscles chez l'homme sain et malade. Partant de
ce fait parfaitement démontré et admis par tous les physiologistes
que la contraction d'un muscle est toujours accompagnée du
dégagement d'un courant électrique décelable par le galvanomètre
et des expériences de du Bois-Heymond, d'Hermann et de Moussons
l'auteur a pu démontrer dès 1889 que dans les cas où l'impuis-
sance motrice est accompagnée d'une atrophie musculaire on
observe une diminution notable (une variation négative) de l'in-
tensité du courant produit par le mouvement volontaire du bras
et que l'intensité de la décharge décroît avec les progrès de celle
atrophie musculaire au point qu'elle disparaît à peu près totale-
ment lorsque les muscles sont réduits à tel point que le malade
ne puisse plus exécuter aucun mouvement. Uans d'autres cas où
la contracture naissante accuse un certain degré de l'hvperexcita-
bililé musculaire, on observe une augmentation du courant qui
-accompagne le mouvement du bras. Cette augmentation suif le
développement de la contraction jusqu'à un certain degré à partir
duquel l'intensité du courant après être restée stationnaire pendant
quelque temps diminue pour disparaître enfin quand la contraction
atteint son maximum et que tout mouvement devient par ce fait
impossible.
La clinique lui a fourni depuis de nouveaux moyens de contrôler
la part qui revient aux muscles dans la production de ces courant ? .
Chez quelques malades atteints d'hyperhydrose unilatérale d'on-
gine cérébro-spinale le mouvement du bras du côté affecté n'a pas
accusé un courant sensiblement plus fort que celui du côté sain,
bien qu'à l'état de repos on pût dériver de la surface cutanée du
bras du côté malade un courant (glandulaire) bien plus fort que
celui que fournissait le côté sain. Chez deux individus atteints
d'ichthyose s'accompagnant d'une suppression totale de la sueur
REVUE L'EI. ·GC13 ? .OL'NTS1QLOCxIE LT D'·L'LECTR,oTHEItAPIE. -403
du côté malade, la contraction du bras de ce côté-provoquait un
courant dont l'intensité ne différait pas sensiblement de celui du
côté. non atteint. D'autre.part chez quelques paralytiques flasques,
ayant des troubles vaso-moteurs très prononcés et une hypersécré-
tion sudorale très marquée, l'effort cérébral que le malade faisait
pour exécuter un mouvement sans y aboutir, se traduisait au
galvanomètre par quelques oscillations de l'aiguille à peine percep-
tibles et sans direction déterminée, tandis que l'hypersécrétion
sudorale due à l'effort donnait au courant dérivé de la peau une
intensité notable. Ces faits montrent donc que les phénomènes
électromoteurs sont réellement dus à la contraction musculaire et
que la sécrétion sudorale ne joue qu'un tôle tout à fait subalterne
dont on peut ne pas tenir compte.
Dans la communication présente, M. llenilelssohn nous démontre
qu'entre les phénomènes .galvaniques et les phénomènes mécani-
ques de la contraction musculaire chez l'homme il existe un paral-
lélisme complet.
Dans les paralysies simples 'sans troubles trophiques ou avec
atrophie musculaire, la variation négative est toujours moindre
que du côté sain et en rapport avec le degré de l'impuissance
motrice. Dans la paralysie simple et la paralysie atrophique la
variation négative s'établit rapidement mais elle dure plus long-
temps dans la dernière que dans la première.
Dans la contracture les phénomènes électromoteurs varient
suivant le degré et la période de celle-ci et sont toujours en rapport
direct avec l'énergie et l'étendue du mouvement que le bras peut
encore exécuter. Dans la contracture de l'hémiplégie organique
la courbe de la variation négative se présente avec un double ou
un triple sommet correspondant au tracé myographique et qui ne
se rencontrent jamais dans la contracture hystérique. Il était
intéressant aussi de rechercher quels résultats peut donner en
clinique l'expérience d'Hermann sur la contraction provoquée
artificiellement par le courant électrique. Le courant d'action qui
se produit alors est diphasique avec une première phase descen-
dante et uue seconde ascendante. Dans les processus morbides ce
courant d'action peut subir certaines modifications. Ainsi, dans un
bras paralysé qui ne peut exécuter presque aucun mouvement
volontaire mais dont les muscles ont conservé leur excitabilité
électrique, le courant d'action se manifeste très évidemment avec
ses deux phases.
Dans la paralysie compliquée d'atrophie musculaire avec affai-
blissement de la contraclilité et conservation de l'excitabilité
électrique, le courant d'action diphasique est nettement accusé, un
peu moindre que du côté sain, mais avec des phases plus pronon-
cées, si.bien qu'une diminution notable de la seconde phase du
courant d'aclion dans .un. bras, paralysé et en train de s'atrophier
404 REVUE d'électrophysiologie ET d'électrothérapie.
peut être considérée comme un signe certain de l'envahissement
du muscle par un processus de dégénérescence. Dans certains cas
de paralysie atrophique dégénérative la seconde phase du courant
d'action peut manquer totalement.
Dans la contracture à la seconde période le caractère diphasique
du courant d'action est très net, ses deux phases sont toujours
presque égales, quoique moins rapides que dans la première.
En somme il existe à l'état de santé comme à l'état de maladie
un parallélisme complet entre les phénomènes galvaniques et les
phénomènes mécaniques de l'activité musculaire.
On a donc tout intérêt en clinique à analyser les différentes
manifestations de l'énergie potentielle (chaleur, travail, électricité)
qui accompagnent l'activité de l'organisme et se modifient sous
l'influence du processus morbide, car en enregistrant ainsi les
transformations de l'énergie qui accompagnent les modifications
des échanges on pourra obtenir des données qui permettront de
suivre avec précision l'évolution du processus pathologique.
Les sensations provoquées par le courant voltaïque ont préoc-
cupé Muller et Bordier.
Le premier dans son intéressant travail a déterminé les sensa-
tions visuelles galvaniques.
L'électrode indifférente étant fixée à la nuque, une électrode
active spéciale est placée sur l'oeil. Le courant ascendant exagère
la perception du blanc et diminue celle du noir, il produit une
sensation chromatique du bleu vers le rouge. Le courant descen-
dant agit en sens inverse et la sensation chromatique va du jaune
au vert. L'action du courant ascendant est plus énergique, l'éclair
provoqué à sa fermeture donne la sensation de violet ; celui du
courant descendant apparaît vert jaune.
Bordier a cherché à déterminer les zones à partir desquelles se
produisent les phénomènes giistatifs et salivaires déterminés pur
l'action du courant voltaïque. Il place l'électrode indifférente sous
la cuisse et promène un rouleau dans différentes directions vertica-
lement de bas en haut de l'abdomen vers le cou.
Si on cherche le signe du pôle qui le premier développe les
phénomènes gustatifs on trouve que c'est le négatif. Les nombres
obtenus en cherchant la distance qui sépare le rouleau de la pomme
d'Adam au moment de l'apparition du phénomène montrent qu'il i)
commence à se manifester avant que le rouleau arrive soit sous le
menton soit sur la face et apparaît quand celui-ci se trouve sur les
pectoraux ou le trapèze. Ces zones s'étendent aussi en arrière de
la tête sur les muscles du dos ou de la nuque.
Ces manifestations gustatives et salivaires à distance sont dues
à l'excitation par les lignes de flux du courant des nerfs glosso-
pharyngien, lingual, facial et grand sympathique. L'influence
polaire est dissemblable en ce qui concerne la quantité de salive
REVUE d'électrophysiologie ET d'électrothérapie. 405
sécrétée ; c'est le pôle positif qui donne la plus forte. Mais l'ana-
logie de composition et de réaction de la salive sécrétée est com-
plète pour les deux pôles. Le goût styptique particulier provoqué
par l'excitation des filets nerveux gustatifs ne dépend donc que de
cette excitation et point comme on serait tenté de le croire a priori
d'une modification de la composition de la salive sécrétée. Il suffit
pour provoquer le goût électrique d'une très faible excitation.
M. Leduc (professeur à l'École de médecine de Nantes) a étudié
les modifications de l'excitabilité des nerfs et des muscles par les
courants continus. Après avoir rappelé les études de Pfiuger et
celle de Erb et de Watteville, il a repris sur lui-même les expé-
riences en employant la méthode monopolaire : électrode indiffé-
rente sur le sternum, électrode active sur le tronc nerveux ou le
muscle. Les résultats sont d'ailleurs identiques dans les deux cas.
Une bobine induite est placée dans le circuit d'une pile à courant
continu. Le passage du courant inducteur se fait toutes les
deux secondes pendant un instant suffisant pour provoquer une
contraction complète.
Les six premières expériences démontrent que avec la cathode
galvanique et la cathode faradique ou l'anode galvanique et l'anode
faradique sur le nerf l'excitabilité est augmentée et elle l'est
davantage dans le premier cas. Avec la cathode galvanique et
l'anode faradique sur le nerf l'excitabilité est diminuée ; elle est
totalement supprimée si c'est l'anode galvanique et la cathode
faradique qui sont sur le nerf. Les 5° et G' expériences dans les-
quelles le courant modificateur est successivement établi puis
supprimé confirment les résultats des quatre premières.
Les six expériences suivantes destinées à contrôler les effets
secondaires attribués par certains auteurs à la polarisation du
nerf et qui seraient de sens inverse aux précédents, montrent que
ces effets consécutifs ne sont pas appréciables.
Du même auteur je dois citer un important travail sur la gal-
vanisaiion cérébrale lu à la Société française d'électrothérapie et
dont découlent des conclusions importantes ; le cerveau semble
accessible au courant galvanique. Les expériences de physiologie
de Dana et d'autres l'avaient d'ailleurs déjà démontré. Mais ce qui
est plus important c'est que, contrairement à ce qui a été affirmé
à l'Académie de Médecine par Marey, la galvanisation cérébrale
est sans danger comme sans inconvénients lorsqu'elle est bien
appliquée. Il faut seulement éviter toute variation brusque de
potentiel. Les effets de la galvanisation cérébrale varient suivant
le pôle actif. Le négatif exerce une action excitante, le positif une
action calmante et dépressive. On pourra donc en employant
convenablement ces pôles avoir une action sur les affections cen-
trales et en particulier combattre avantageusement les effets du
surmenage intellectuel.
406 revue : d'électrophysiologie-. ET D'ELECTR01'HER1P10.
Pour terminer nous aurons- à. citer : les travaux : de Gaetano
Corrado sur les altérations des cellules nerveuses dans la mort par
l'électricité et ceux de Prévost et Batelli sur-la mort pur les courants
électriques.
Le premier, après- avoir passé en revue* les différents* travaux
publiés sur cette importante qliestiorule physiologie pathologique
et de médecine légale, expose ses- recherches personnelles faites
suit des chiens. Il a utilisé l'énergie de la station électrique de
Lanciano (Abbruzes) fournie par deux, dynamos lype Thury à
courant. continu donnant 1,500 volts et 34 ampères. Les électrodes
de cuivre de 8 X 2. cm. t'/2 étaient placées l'une sur la fête du
chien en expérience à 3 centimètres du rebord, orbitaire supérieur,
l'autre sur le dos à 10 ou 12 cenlimèlres de lai racine de la queue.
Ces électrodes étaient reliées par des fils isolés au-lableau. de distri-
bution de' l'usine; au moyen d'un commutateur. Il a utilisé tantôt
une, tantôt deux dynamos, le voltage variant de-4.00 à 2500 volts,
l'intensité restant toujours au-dessus* de 20 ampères. Les chiens
de 2 kg. 500 à 20 kilogrammes au moment de la fermeture- du
courant- sont soulevés du sol par une brusque-tension des quatre
membres et un tétanos rigide de tous les muscles du corps ; la tète
est en opistotonos. Ils restent ainsi jusqu'à l'ouverture du courant
qui détermine la. chute. La durée d'application du courant avarié
du.temps de fermer et-ouvrir le courant à quelques secondes. La
mort instantanée s'est produite sans,cris et sans.- plaintes. Dès le
premier moment la respiration est arrêtée, et les battements du.
coeur s'ils persistent quelques instants cessent bientôt. La mort
est réelle et les' tractions rythmées : de la langue ne. peuvent faire
revenir les animaux à la vie.
Les altérations du système nerveux, consistent- en. congestion ou.
hémorragies- des méninges des sinus de la-- dure-mère de la sur-
face du cerveau et de la moelle. On trouve, aussi sous les
méninges cérébrales ou spinales de nombreuses, bulles de gaz. Le
corps* des- cellules nerveuses : subit. des- déformations variées, éro-
suions, dentelures, mutilations : diverses. ; : le. contour est plus- ou
moins diffus, irrégulier, le protoplasma semble poussé tout entier
d'un côté de la cellule. l'intérieur la substance colorée est
dissoute, et il se produit une plasmolyse : intense-, la.vacuolisation
est fréquente et très prononcée ; la substance chromatique a-une
tendance marquée à se séparer- du reste de : la cellule; dans quel-
ques cellules de l'écorce on remarque des traces'd'ol'ientation mais
qui paraissent sans relation avec la. direction générale du.courant :
Ee noyau' subit les altérations les plus diverses tant dans sou
volume que dans sa. posilion. et sa substance colorante. Le nucléole
qui réoiste mieux, a une tendance à; s'excentrer à travers la mem-
brane nucléaire et iL se porter à la; périphérie de la cellule.
Prévost et Batelli qui avaient déjà présenté en mars 1899 une
REVUE' D'ÉLECTROPHYSIOLOGIE' ET D' liH. : NC'I'ROTHE1tAPIE. 407
note à l'Académie des sciences, sur l'action des courants aller-
natifs sur divers animaux et.'avaient constaté qu'ils tuent' les
animaux en mettant le coeur en état de trémulation librillaire qui
amène bientôt son arrêt puis celui de la respiration ont dans le
présent mémoire étudié l'action des courants continus. Ils ont
utilisé le courant de la station électrique deGenève donnant' une
différence de potentiel de 550 volts. Ils ont gradué leur courant
avec un rhéostat à spirale et placé une des électrodes dans la
bouche, l'autre dans le rectum ou sur le dos bien rasé Le méca-
nisme de la mort par les courants continus paraît dans ses
grandes lignes- analogue à celui qu'on constate avec les courants
alternatifs cependant il y a quelques différences. Chez tous
les animaux la sensibilité et la respiration semblent plus forte-
ment atteinte par les courants continus. Les convulsions sont
surtout provoquées par la secousse de rupture. Les trémulations
libtillaii-es du coeur peuvent survenir sans chocs de rupture ou de
fermeture.
L'examen des tracés de la pression artérielle semble indiquer
l'absence d'excitation vasomotrice que provoquera au contraire
le courant alternatif.
II. Electrodiagnostic-.
Lévi Sirugue a étudié les réactions électriques dans la maladie de
Utllc et ne les a pas trouvées modifiées; cela rapproche cette affec-
t'ou de l'hémiplégie spasmodique infantile, et de la paralysie
spasmodique familiale, mais cela permet aussi de la distinguer
de la paralysie infantile où la reaction de dégénérescence existe le z
plus souvent.
Lucien Roques chez un malade atteint du syndrome ,1'rlr, mais
qui ne présentait pas la réaction myasthéuique électrique de Jolly
conclut qu'on peut dans des cas identiques porter un pronostic
favorable. 11 y a lieu de penser en effet ou que dans la myasthénie
généralisée il y a des formes bénignes ou que le syndrome d'Erb
correspond à plusieurs entités morbides. Dans un cas que j'ai
observé la réaction de Jolly qui manquait dans les huit premiers
jours n'a pas tardé à apparaître et la maladie a suivi son cours
habituel.
Benedikt a continué ses recherches sur- la réaction lacunaire
totale ou partielle dans un certain nombre de, maladies nerveuses,
soit cérébrales, soit périphériques et l'a trouvée tantôt à la suite
de l'excitation faradique, tantôt et plus souvent à la suite de l'exci-
tation galvanique. 11 y aurait lieu daus ces derniers cas de tenir
compte de l'action polaire, car l'auteur a remarqué dans un certain
nombre de cas que l'épuisement n'étant pas complet, les muscles
récupéraient par le repos leur excitabilité.
408 REVUE d'électrophysiologie ET d'électrothérapie.
Il. Aubois a consacré sa thèse inaugurale à l'étude des atrophies
musculaires d'origine hystérique. Il a montré par cinq observa-
tions originales que ces atrophies quelles que soient leur cause et
leur localisation correspondent à la classe des atrophiés simples
sans lésions de la moelle et que jusqu'à présent la réaction de
dégénérescence ne peut être considérée comme un signe apparte-
nant aux atrophies musculaires d'origine hystérique.
III. Electrothérapie.
L'électrothérapie est toujours en bonne place dans les maladies
du système nerveux et des acquisitions nouvelles viennent chaque
année enrichir son patrimoine. Ainsi E. Alger a recommandé le
courant continu pour lutter contre la douleur chez les malades
atteints de zona. Il place le pôle positif au niveau de l'origine des
nerfs malades et promène le pôle négatif relié à un pinceau
métallique autour des plaques éruptives et sur les placards eux-
mêmes.
Armstrong à la Société médicale de Londres a cilé les boni
effets qu'il obtient de la galvanisation du système nerveux central
dans certaines névroses. Il nie que les effets de ces courants soient
dus à la seule suggestion et énumère leurs effets physiologiques
toniques, stimulants au sédatifs. Il s'en est servi avec avantage
dans les névroses cardiaques et gastriques, la neurasthénie,
l'hypochondrie, la fatigue cérébrale ou nerveuse. La migraine, le
goitre exolihthalmique, la maladie de Raynaud et l'asthme spas-
modique lui paraissent également justiciables de ce traitement. La
section d'électricité médicale du Congrès de l'Association française
pour l'avancement des sciences de f3oulonne-sur-\Ier a fourni de
très intéressants travaux.
M. Crocq (de Bruxelles) a lu une étude sur le traitement du mal
perforant plantaire par la faradisation du nerf tibial el de ses
branches terminales. L'élongation des nerfs préconisée par Chi-
pault a par ses résultats confirmé la théorie névritique de l'ori-
gine du mal perforant plantaire. On peut la remplacer par la
faradisation à interruptions lentes du nerf tibial postérieur.
L'électrode positive, très petile, étant placée sur le tronc de ce
nerf derrière la malléole interne, la négative plus grande est
appliquée un peu en arrière de l'ulcération. Ce traitement appli-
qué chez un homme de trente-deux ans, atteint depuis deux ans
d'un mal perforant plantaire durant depuis deux ans a amené
la cicatrisation en six semaines, la guérison se maintient depuis
huit mois. M. Levis Jones, traite l'incontinence d'urine nocturne et
diurne par l'électricité. Dans les cas d'incontinence nocturne les
applications un peu douloureuses sur le périnée peuvent agir par
une sorte d'éducation des centres cérébro-spinaux. Quand l'inconli-
REVUE D'ÉLECTROPHYSIOLOGIE ET D'ÉLECTROTHÉRAPIE. 409
nence est à la fois diurne et nocturne, c'est la faiblesse du sphinc-
ter qui est en cause ; il emploie alors l'électrisation directe de
celui-ci à l'aide d'une électrode introduite dans l'urètlire.
Claus emploie dans les mêmes cas les courants de Morton un
pôle est relié à la terre, l'autre à une sonde de Guyon introduite
dans l'urèthre. -
Ce traitement conviendrait bien, d'après l'auteur, à toutes les
incontinences d'origine nerveuse ou musculaire ou d'origine
centrale.
S. Leduc a communiqué un procédé de Traitement électrique des
paralysies périphériques. Il emploie le courant galvanique suivant
la méthode monopolaire négative. Le pôle positif, formé d'une
large électrode, est appliqué sur l'épigastre ou dans le dos ; le
négatif, relié à un tampon d'une surface d'autant plus grande que
le nerf est situé plus profondément, est appliqué sur le siège de
la lésion en général facile à déterminer.
Avec un hérostat. on règle l'intensité du courant qui doit
atteindre suivant la tolérance des malades de 1/3 de milliampére
à 3 milliampères par centimètre carré d'électrode. On laisse
passer pendant nu temps variable, de deux à douze minutes
suivant la tolérance de la peau.
Cette première partie du traitement a un' double but et un
double résultai. L'électrisation monopolaire négative a une action
résolutive marquée qui s'exerce sur la névrite chronique cause de
la paralysie. Elle produit l'état cathéleclrotonique qui augmente
l'excitabilité du nerf.
Dans la seconde partie du traitement, on excite le nerf ou les
muscles avec le courant galvanique interrompu dont on réglera
1 intensité de façon à éviter une contraction trop brusque surtout
pour les applications à la fête.
J'ai également communiqué un travail sur le Traitement du
goitre eXlJpht1wlmir¡lIe par la vollnïsaliorz statde. Le pôle négatif de
l'appareil est relié à une plaque de 200 centimètres carrés qui est
placée sur le dos du malade ; le pôle positif est placé sur le goitre
à l'aide d'une électrode de 60 à 80 centimètres carrés. L'intensité
du courant varie, suivant les malades, de 5 10 milliampères. La
durée d'application varie de 20 à 30 minutes. Séance fous les deux
jours. Sur six cas soignes, j'ai une guérison complète durant depuis
trois ans. Trois améliorations. Une malade a abandonné le traite-
ment après quelques séances Chez la sixième malade, qui avait
un goitre unilatéral, l'exophthalmie n'existait que de ce côté. La
résistance électrique y était de 800 ohms et de 1 200 ohms de
l'autre côté.
J'ai également communiqué un travail sur le Traitement des
névrites d'origine traumatique par les courants alternatifs à basse
fréquence. Le courant utilisé est celui du secteur parisien de la
410 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
rive gauche qui est à 92 périodes. Arrivant au tableau au potentiel
de 110 volts et à l'intensité do 10 ampères. Il est' réduit à l'aide de
bobines de résistance, et d'un réhostal de 0 au potentiel utilisable
qui varie de 12 à 25 volls.
Les cas traités' sont' : une atrophie musculaire survenue à la
suite d'un uévnome du~nerf médian; une paralysie du nerf cubital
à la suite d'une fractm de l'humérus qui avait déterminé une
pseudarthrose qu'on peut diagnostiquer par la radiographie. Le
nerf cubital, comprimé par le fragment inférieur, était des plus
enserré-, dans du tissu fibreux dont on le dégagea au moment de
l'opération.
Une seconde radiographie, prise un mois après l'intervention,
permit de constater que la consolidation était cette fois complèle
et régulière. L'électrisation des muscles incurvés par le nerf cubital
guérit ensuite rapidement l'atrophie musculaire.
Le troisième cas est une paralysie réflexe des muscles court
fléchisseur, opposant et long abducteur du pouce, survenue à la
suite d'une fracture du radius chez un enfaut de douze ans. Il a
guéri en vingt séances.
L'action des courants alternatifs à basse fréquence rappelle
celle de la galvano-faradisation. Dr L.-lt. nEG ? lU1.
.\ [Il CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Section de Neurologie.
Séance du vendredi 3 août (malin). PnÉs)DKKCE de click (de
Prague) et A. Ot3EIrSfE1\Cü (de Vienne).
Rapports sur les Centres de projection et d'association du cerveau hu-
lMI'1 : 1° par M. le professeur ILlicuac (voir p. 334) ; 3° par
M. le professeur UITZIG (de Halle) (voir p. 338) ; 3" par M. le pro-
fesseur von (de Zurich).
Résumé du rapport sur les centres de projection et d'association;
par le professeur C. von )lo1\.IKow.
La doctrine que Flechsig soutenait, en 1S93, sur les centres d'as-
sociation et de projection a été dès lors essentiellement modifiée et
étendue par son auteur dans une communication ultérieure parue
récemment dans If} Neu/'olouiscltes Centrct(Glull ! lu 1 ? novembre 1898.
SECTION DE. NEUROLOGIE. 411 L
Dans ce nouveau mémoire, qui marque un réel progrès des recher-
ches embryologiques, Flechsig partage la surface cérébrale en qua-
rante districts, chez lesquels laimyélinisation se fait à des époques
différentes; en outre, iLabandonne tout. fait certaines opinions
qu'il défendait naguère chaudement.
Les signes anatomiques d,fférenliels fondamentaux qui distin-
guent les centres de pro,ection des centres d'association apparais-
sent ici un peu effacée (entre eux se placent les régions intermé-
diaires qui ont une nature- mixte), et la question anatomique se
pose désormais en ces termes : les fibres de projection sont-elles
réellement beaucoup moins nombreuses dans les centres d'asso-
ciation que dans les centres sensoriels ? Les territoires primordiaux £
offrent aussi, selon Flechsig, une structure corticale particulière.
Voici les résultats auxquels nous sommes arrivé dans nos recher-
ches sur cette question : la somme des fibres de projection réunies
dans la couronne rayonnante, et répandues sur toute la surface
cérébrale, ne se trouve définitivement eu concrétion directe qu'avec
un nombre relativement petit de points corticaux. Dans toutes les
circonvolutions, les fibres de projection ne forment qu'une petite
fraction de toute la masse des fibres de la substance médullaire
limitante. Il existe en conséquence sur toute la surface cérébrale
des espaces considérables, plus ou moins étendus en circonférence
et empiétant les uns sur les-autres, où l'on ne trouve aucune : fibre
de piojpclion. Ou peut désigner l'ensemble de. ces parties corticales
privées' du fibres de projection sous-le nom de centres d'associa-
tion, en opposition aux foyers dispersés où se-réunissent les libres
de projection. Mais il n'est pas possible de limiter d'une façon
quelque; peu. précise les territoires qui sont pauvres- en libres de
projec iou, et ceux qui en renferment abondamment. l'as plus que
d'autres auteurs nous n'avons constaté de dilféiences,auatomiques
(un lamenlllies entre les deux sortes de territoires des hémisphères-.
Du reste, il existe dans d'autres régions cérébrales (la substance
grise centrale) des par tics, d'une moindre étendue il est vrai, mais
qui sont aussi dépourvues de libres de projection, et pour- les-
quelles il n'est pas d'usage- de distinguer des centres de projection
et d'association.
Il est certain que l'arrangement des libres dans la substance
blanche- du. cerveau ne se fait pas d'une manière uniforme. La.
division adoptée par Flechsig, qui ne considère que- les fibres de-
projection des voies sensorielles, ne tient pas suffisamment compte-
des multiples. postulats anatomiques de l'organisation du cerveau.
Nous n'y trouvons' pas la représentation du cervelet, .de la subs-
tance noircide Sümmeriug, du noyau rouge, de maintes- régions des
couches optiques (pulvinar), etc., dont les zones de rayonnement
empiètent de tous côtés sur les sphères sensorielles trop étroitement
limitées par Flechsig. La localisation qui se fait d'après la repré-
412 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
sentation des noyaux intracorticaux (les contingents cérébraux,
Gi,ossili ? n(i71lheile de von Monakow), dont les fibres de projection
pénètrent souvent dans les centres d'association de Flechsig, doit
être mise en parallèle avec la localisation qui résulte des observa-
tions embryologiques. Le mode de répartition des fibres de pro-
jection dans l'écorce cérébrale est inégal et varie beaucoup.
Il est sujet à de grandes différences individuelles. Dans les régions
primordiales, les faisceaux de projection sont très probablement
beaucoup plus denses que dans d'autres régions de l'écorce (Flech-
sig). Mais la méthode d'étude basée sur la myélinisalion, quelque
brillants qu'apparaissent au premier abord ses résultats, est bien
loin d'être suffisante pour résoudre le problème physiologiqne de
la fine organisation des neurones dans le cerveau. En considérant
la fréquence des variations individuelles dans le mode de succes-
sion du revêtement de la myéline dans les faisceaux de fibres ner-
veuses, on jugera que le matériel des recherches est vraiment trop
restreint jusqu'ici pour que l'on puisse en déduire des lois qui ser-
viraient de base au développement ultérieur des voies conductrices
et des centres. Tout ce que l'on peut dire, d'une manière générale,
c'est qu'il est vraisemblable et logique que le développement des
centres sensoriels précède celui des parties corticales qui servirait
de base à l'intelligence.
L'hypothèse qui place les fonctions psychiques supérieures dans
des foyers corticaux spécialement délimités et possédant une struc-
ture anatomique particulière (les centres intellectuels) est insoute-
nable. On doit plutôt se représenter les divers éléments qui con-
courent an travail psychique comme répandus sur l'écorce cérébrale
tout entière. Il existe sûrement pour le travail psychique des con-
ditions anatomiques nécessaires (des complications encore incon-
nues dans l'arrangement architectonique des neurones), dont les
structures diverses dominent tantôt dans l'une, tantôt dans l'autre
des circonvolutions.
Nous pensons que la théorie de Flechsig, d'après laquelle toutes
les fibres de projection d'une voie corticale sensorielle s'envelop-
pent à peu près simultanément de myéline, peut s'interpréter
autrement quant à la succession du développement et de l'organi-
sation des voies conductrices et des centres. Notre interprétation
se base sur l'unité architectonique des complexus de neurones. On
peut supposer que la myélinisation se fera, à une certaine période
du développement embryonnaire, dans un complexus de neu-
rones, de telle sorte que quelques éléments de ce complexus devan-
ceront les autres, en s'entourant plus tôt de myéline.
Sous le nom de complus de neurones nous comprenons la somme
des neurones individuels, qui s'articulent les uns avec les autres,
et forment progressivement des systèmes coordonnés (au sens des
systèmes des divers ordres de projection de Meynert), renfermant
SECTION DE NEUROLOGIE. 413
un nombre de neurones de plus en plus grand à mesure qu'ils se
rapprochent de l'écorce (cellules de projection et d'association), et
dont le minimum est nécessaire pour produire chez l'adulte un
acte nerveux (une impression lumineuse, par exemple). Une voie
sensorielle se compose d'un grand nombre de ces complexus de
neurones d'une nature analogue, dont les plus centraux se revê-
tent les premiers de myéline, tandis que les périphériques ne le
font que plus tard.
Discussion. M. 0. Vocr (de Berlin). Jusqu'au dernier
moment toutes nos études sur les fibres cérébrales n'ont fait que
confirmer ce que M"10 Vogt et moi avons déjà publié ' sur la théo-
rie de Flechsig. «
Voici les résultats auxquels toutes nos études nous ont amenés :
1° contrairement à ce que dit Flechsig, toutes les fibres de même
valeur ne se myélinisent pas en même temps ; 2° la loi de Flechsig
de la marche cellulifuge de la myélinisation n'a pas été confirmée
par nos recherches; 3° il y a des fibres myélinisées dans toute
l'écorce plus tôt que Flechsig ne l'a prétendu ; 4° il est vrai que
chez l'homme la myélinisation commence par les centres primor-
diaux de Flechsig ; mais contrairement à ce que M. Flechsig
enseigne, sans arrêt visible, la myélinisation s'étend peu à peu de
la périphérie de ces centres jusqu'à ce que toute l'écorce soit myé-
liuisée. Il est ainsi impossible de distinguer un nombre déterminé
de régions d'après leur myélinisation, étant donnée la marche con-
tinue du procédé; 5° on retrouve encore chez l'adulte des traces de
cette myélinisation non contemporaine des différentes régions
corlicales, car plus une région est tôt myélinisée, plus ses fibres
et leurs gaines sont grosses ; 6° sans pouvoir en donner la preuve,
car la méthode de la myélinisation est incapable de nous la four-
nir, je pense que tout au début, la plupart des fibres myélinisées
sont des fibres de projection. Mais il y a des fibres d'association
qui commencent très tôt à se myéliniser. Les fibres du corps cal-
1 0. Vogt. Sur la myélinisation de l'hémisphère cérébral du chat.
Comptes rendus des séances de la Soc. de Biologie, 189S.
0. Vogt. Zur Projectionsfaserung des Grosshirlles. Jachr. f. Psychia-
trie, vol. 56.
C. Vogt. Etude sur la i)2yéliiiisatioii des hémisphères cérébraux. Paris,
1900, Steinheil.
0. \'ot. Flechsig's Associationscentrenlehre im Liclite vergleiclmul
anatomischer Forschung. Cenlralblatt sur Psychiatrie, 1900.
0. Vogt. Valeur de l'étude de la myélinisation pour l'anatomie et la
physiologie du cerveau. Journal de Physiologie, 1900.
0. Vogt. Sur les différentes méthodes qui peuvent servir à l'établisse-
ment de l'homologie des différentes régions de l'écorce cérébrale.
Xlll- Congrès international de médecine. Section pour l'anatomiedescrip-
tive, 1900.
AU ! r
GOGIiI : ..INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
leux restent un peu en.retard ; cependant chez un enfant d'un
mois, où une..grande partie du cerveau ne contient pas encore de
fibres myélinisées , on trouve déjà des libres commissurales
myélinisées entre les régions corticales le plus tôt myélinisées;
7° absolument en opposition avec tout ce que Flechsig a pré-
tendu, aussi longtemps qu'il y a des régions corticales sans
.myéline, il y a également dans la capsule interne des parties
non myélinisées ; et ces parties sont justement celles dont les
dégénérescences secondaires nous montrent le.rapport avec les
régions coi ticales tard myélinisées ; de plus, ces parties tard myé-
linisées de la capsule interne sont assez étendues pour qu'on soit
en droit de conclure que les régions corticales correspondantes
possèdent des libres de projection en grand nombre ; 8° contraire-
ment à l'opinion de M. Flechsig, nous avons constaté chez les car-
nivores et .le lapin un procédé de myélinisation qui est, d'après
tout ce que nous savons de l'tiomologie corticale, identique, du
moins dans les grandes lignes, avec celui de l'homme ; 9° contrai-
rement à l'enseignement de Flechsig et Dollken, chez les carni-
vores, toutes les régions corticales possèdent des fibres de projec-
tion ; 10° mais de plus. contrairement à l'opinion de M. Flechsig, à
côté de ces fibres de projection il y a un nombre encore plus grand
de fibres d'association et commissurales. Donc, déjà chez les car-
nivores, il y a pour toutes les régions corticales plus de fibres
d'autre valeur que de fibres de projeclion, et nous ne pouvons pas
voir, dans .une minorité des fibres de projection, une,particularité
du cerveau humain; 11° chez les carnivores, il y a un grand
nombre de libres de projection qui ne vont pas en ligne directe
vers leur circonvolution, mais qui se recourbent plus ou moins
brusquement, comme l'a décrit en détail 1-0 Vogt. Avec cette
réserve que seulement une parlie des fibres de projection se recour-
bent ainsi, l'anatomie comparée appuie ce point de l'enseignement
de M. Flechsig; 12° quant aux fibres d'association, nous avons pu
constater chez les carnivores, par la méthode de la dégénérescence
secondaire, qu'il existe des fibres d'association dans toutes les
couches du centre ovale, entre l'écorce elle-même et l'épendyme
ventriculaire. Ces fibres sont d'autant plus longues qu'elles se rap-
prochent davantage de l'épendune. Spécialement, nous avons pu
constater l'existence d'un faisceau longitudinal inférieur, d'un fais-
ceau longitudinal supérieur et d'un faisceau occipito-frontal. Seu-
lement, ces faisceaux ont des limites moins nettes qu'on ne l'a
enseigné jusqu'à maintenant pour l'homme ; mais on a tout droit
de conclure, de cette observation sur l'animal, à leur'existence
chez l'homme, niée par -fl1. Flechsig; .13° Aussi bien que chez
l'homme, chez les animaux, la structure fixe des différentes régions
corticales est différente ? mais, contrairement à ce que dit 11. Flech-
sig, les animaux non plus que l'homme ne montrent une structure
SECTION .DE NEUROLOGIE. 415
identique des régions le plus tard myélinisées, dont .\1. Flechsig fait
des centres à structure uniforme.
Voici pour l'anatomie; je laisse de côté toute la discussion des
conclusions physiologiques et psychologiques Urées -par Flech-
.sig, parce que j'en parlerai au prochain Congrès de Psychologie.
COMMUNICATIONS DIVERSES.
Sur la nécessité de fonder des Instituts centraux pour l'anatomie du
cerveau; par 0. N'OGT (de Berlin).
En anatomie du cerveau, trois grandes questions intéressent le
neurologi-te : la cellule'et ses modifications normales et patholo-
giques ; la névroglie et ses modifications pathologiques ; enfin,
l'anatomie des fibres. Quoique du domaine des anatomistes et des
anatomo-patliologistes, l'étude de ces questions doit être laissée,
pour une grande part, aux neurologistes, car eux seuls peuvent
juger quelles sont les'questions importantes pour eux, et eux seuls
sonf capables de rapprocher les résultats d'un examen anatomo-
palhologiq.ue avec les constatations cliniques. Je parlerai seulement
de l'anatomie des fibres, mais ce que j'en dirai s'.applique aussi
bien à l'élude de la névroglie et de la cellule.
Malgré le grand nombre de travaux qu'on publie tous les ans
sur l'anatomie des fibres, nos connaissances avancent très lente-
ment. Le seul moyen capable de changer la situation acluelle.serait
une centralisation des études.
A. Une telle centralisation est nécessaire parce que c'est :
1. Le meilleur moyen d'épargner nos forces : 1° il est si difficile
de débrouiller le réseau enchevêtré des fibres du cerveau qu'il est
absolument nécessaire qu'un observateur soit contrôlé par d'autres
et on gagnerait un temps énorme si ce conttôte pouvait avoir lieu
sui--le même matériel et si chacun n'avait pas besoin d'abord de
se faire un matériel qu'un autre a déjà fait; .2° à côté de ce con-
trôle nécessaire, nous ne devons pas perdre nos forces en traitant
chacun la même question. Il y a tant de questions à éliminer dans
l'anatomie du cerveau, que chacun peut trouver sa besogne. Mais
pour éviter que différents travailleurs s'occupent de la même
question, il faut que les besognes soient distribuées; 3° cette divi-
sion du travail doit être rationnelle; elle doit tenir compte de
l'importance des différentes questions à résoudre, du matériel qui
existe, et des résultats que les méthodes actuelles peuvent donner;
lit les publications doivent être intelligibles et profitables pour les
autres. Avant tout, les-auteurs-doivenbapporter plus de soins aux
dessins. Pour faciliter la description, pour la rendre plus claire et
pour permettre de donner plus tard de bons dessins relativement
416 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
bon marché, il faut d'abord publier une série de dessins assez
giands, représentant des coupes, dans les différentes directions,
des cerveaux normaux de l'homme et des principaux animaux.
Ces dessins pourront alors servir de base à la description des cas
anormaux ou pathologiques. En même temps il ne sera plus néces-
saire que chaque auteur donne le dessin des coupes entières, mais
il suffira qu'il donne le dessin des détails qu'il a trouvés ; 5° nous
devons faciliter l'instruction des médecins qui veulent s'occuper
de l'anatomie du cerveau par une série de démonstrations pra-
tiques où on leur montre des préparations et où on leur apprend
à se servir des différentes méthodes.
II. Le seul moyen de profiter de toutes nos ressources :
1° De toutes les méthodes d'une façon rationnelle. Dans ce but,
nous devons : a) examiner ce que chaque méthode peut nous don-
ner. On a jusqu'à maintenant beaucoup négligé l'examen critique
des méthodes elles-mêmes. Une étude sérieuse des méthodes
employées nous empêcherait souvent de tirer des conclusions des
résultats que nous a fournis une méthode qui n'est pas du tout
capable de prouver ces conclusions; 6) employer tontes les mé-
thodes dont la valeur est vérifiée : Avec toutes les méthodes
actuelles, on ne peut pénétrer dans l'anatomie des libres que dans
une certaine mesure; aussi a-t-on besoin de combiner toutes les
méthodes, ce qui dépasse les forces d'un seul; c) examiner systé-
matiquement la valeur de toutes les nouvelles méthodes. Etant
donnée l'imperfection de toutes nos méthodes actuelles, nous
devons faire attention à chaque découverte technique et la sou-
mettre à un examen sérieux.
z Du matériel accessible : a) l'étude du cerveau humain adulte
et l'étude de la myélinisatian ne donnent que très peu de résultats
sûrs. L'anatomie comparée, surtout sous la forme de l'étude des
dégénérescences secondaires expérimentales, a, pour l'étude du
cerveau humain, une très grande valeur. Mais tous les résultats
donnés par cette méthode ne peuvent pas être directement appli-
qués à l'homme. La structure constatée chez les animaux ne doit
pas seulement être retrouvée chez l'homme, mais être étudiée dans
les particularités caractéristiques au cerveau humain. Pour toutes
ces questions, les méthodes qui donnent vraiment de bons résul-
tats sont la méthode de la dégénérescence et la méthode tératolo-
gique. Mais pour employer ces méthodes nous avons besoin d'un
matériel qui n'est pas toujours directement à la disposition du
neurologiste. C'est dans les grands hôpitaux et les asiles que ce
matériel se trouve et se perd. Il s'agit de le faire collectionner en
ces endroits pour l'envoyer à un Institut central où il sera étudié ; i
li) quelquefois une pièce unique ou du moins très rare, ou encore
préparée avec beaucoup de peine, peut servir il la solution de
SECTION DE NEUROLOGIE. 417
questions de différents ordres; mais jusqu'à maintenant de telles
pièces n'ont servi qu'à la solution de la question qui intéressait
spécialement leur possesseur et ont été perdues pour les autres
questions. Cela n'arriverait pas si ces pièces étaient dans un Insti-
tut central et à la disposition de tous les chercheurs.
B. Un tel Institut est possible. Cela m'a été prouvé par des expé-
riences :
I. Qui ont été faites dans d'autres branches scientifiques. Je
rappelle ici la haute division du travail et en même temps la cen-
tralisation que l'on trouve dans les observatoires astronomiques
et, pour pailer d'un sujet qui nous est plus proche, je rappellerai
la fondation géniale de Pasteur et les brillants résultats qu'elle a
donnés pour l'étude de la bactériologie et des maladies infectieuses.
II. Que j'ai faites moi-même depuis l'époque où je suis ce plan.
Mes expériences se rapportent à trois questions : 1° à la collec-
tion du matériel. J'ai trouvé que les médecins et les anatomo-
pathologistes des grands hôpitaux et des asiles aussi bien que les
médecins privés sont assez disposés à mettre le matériel à la dispo-
sition d'un tel Institut et cela surtout si on leur fait les conditions
suivantes : si on leur laisse la description de la pièce s'ils le
désirent et si on leur donne quelques coupes. De cette' façon le
médecin qui a observé le malade peut s'instruire des changements
anatomo-pathologiques et en même temps un hôpital peut se faire
peu à peu une bonne collection pour l'enseignement ; 2° j'ai pu
constater que des ouvrières propres et consciencieuses pouvaient
très bien préparer le matériel sous le contrôle d'un chef de labo-
ratoire. De cette façon la préparation, même d'un très grand nombre
de coupes sériées, se fait relativement vite et à bon marché ; 3° au
point de vue des dessins, malheureusement la micro-photographie
ne donne pas de bons résultats et, d'après l'assurance des gens
compétents, n'est pas près d'en donner. 11 faut donc dessiner les
préparations en employant de nouveaux microscopes présentant
une combinaison d'objectifs et d'oculaires spéciale ; si l'on fait les
dessins assez grands, et si un dessinateur contrôle l'autre, on peut
arriver à une très grande exactitude. Ces dessins faits soit directe-
ment à l'encre de Chine, soit d'abord au crayon, puis retracés à
l'encre de Chine, peuvent être reproduits d'une façon suffisamment
exacte et relativement bon marché par la photogravure,
' J'ajoute que j'aspire à une telle centralisation des études aussi
pour la neuro-physiologie et les parties de la psychologie, qui ont
un intérêt pour nous autres neurologistes et psychiatres.
Sur les causes d'erreur dans l'interprétation des résultats fournis par
la méthode osmio-ch1'omique (procédé de Mal'chi) ; par Paul Sain-
ion (de Paris).
Archives, 2 série, t. X. 27
418 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Etude clinique de la fonction kinesthésique (sens musculaire). Mesure
de la sensation d'innervation motrice dans un membre immobile
tendu. Seuil des poids perçus sans pression cutanée et sans mou-
vements (actifs ou passifs) du membre. - liizzesthésiomèlre indi-
quant la sensation minimale d'allégement ; par le professeur Gras-
SET (de Montpellier).
M. Grasset considère l'appareil nerveux kinesthésique et les modes
d'observation et d'expérimentation qui permettent d'en étudier les
altérations. Il donne un procédé pour apprécier, chez un malade,
la sensation de résistance, c'est-à-dire la sensation d'innervation
motrice dans un bras immobile tendu.
Le sujet examiné tient le bras immobile horizontalement (et cela
tout le temps de l'expérience). Il tient avec deux doigts un fil qui,
en se trifurquant plus bas, supporte un petit plateau avec des
poids. Le sujet a les yeux fermés et ne bouge pas. Un aide soulève,
lentement et sans bruit, un coussin ou un carton recouvert d'étoffe,
jusqu'à la rencontre des poids. Le sujet doit signaler le moment
précis de l'allégement. Dans l'expérience ainsi conduite il n'y a
plus du tout de déplacement du membre, ni mouvement actif, ni
mouvement passif. La pression cutanée est nulle (fil tenu entre les
doigts). La sensation éprouvée par le sujet est donc, bien réelle-
ment et exclusivement, la sensation de l'innervation motrice elle-
même. C'est la seule chose qui change au moment de l'allégement.
Au début de l'expérience, il y a une innervation motrice A
nécessaire pour soutenir le poids, pour lui résister. Lorsque le
contact est établi avec le coussin et que le poids, soutenu par-des-
sous, n'est plus soutenu par le fil, il faut une innervation motrice B
nécessaire pour tenir le bras immobile, mais le bras seul et sans
poids. La sensation perçue au moment de l'allégement est donc
due uniquement à ce changement d'innervation motrice, au pas-
sage de l'innervation motrice A à l'innervation motrice B. C'est
donc bien une sensation d'innervation motrice, une impression net-
tement et exclusivement kinesthésique. Ce petit appareil devient
donc en quelque sorte un vrai Iiinesthésiomèt1'e,
Grasset a fait un certain nombre d'expérienceschez des sujets sains
pour déterminer le seuil des poids capables de donner cette sen-
sation. Avec l'appareil qui est lui-même très léger, il faut environ
10 grammes pour donnera la plupart des sujets la sensation mini-
male d'allégement. G... montre par des exemples que dans cer-
tains malades le poids nécessaire à donner cette sensation doit
être beaucoup élevé (15 grammes, 20 grammes, 30 grammes).
De cette étude on peut conclure que nous n'avons pas seulement
la notion de position (sens des attitudes de Cherechevsky), pas
seulement la sensation des mouvements actifs ou passifs (sens du
mouvement de Bain et de Bastian) ; mais nous avons aussi, dans
SECTION DE NEUROLOGIE. 419
l'immobilité du membre, sans déplacement aucun, une sensation
de l'activité musculaire (conscience musculaire de Duchenne, sen-
timent de l'activité musculaire de Gerdy et de Landry, sens de la
force de Weber, sens de l'innervation de Wundt, faculté locomo-
trice ou sens del'énergie mentale motrice de Hamilton). C'est cette
sensation de l'activité musculaire au repos, sans déplacement du
membre, que l'on peut étudier très facilement en clinique courante
avec le petit appareil décrit dans cette note.
Discussion. - à. le professeur HITZIG (de Halle). Je ne sais pas
si M. Grasset connaît l'appareil que j'ai décrit sous le nom très
phonétique de « Kinesiaesthesiometer ». Il se compose d'un cer-
tain nombre de balles en bois remplies de balles de plomb d'un
poids différent. Je crois que son emploi donnerait des résultats
bien intéressants à M. Grasset. On peut éviter très facilement l'in-
convénient de l'abaissement du bras mentionné par M. Grasset
dans les expériences du même genre qui ont été faites. Il suffit de
défendre aux personnes à examiner de faire des mouvements, ce
que je leur ai défendu régulièrement.
M. le Dr Caoc (de Bruxelles). N'y a-t-il pas un mouvement
actif du bras dans l'effort que fait le malade pour tenir son bras
étendu ?
M. le professeur Grasset. C'est une contraction stérile en
quelque sorte.
M. le or PiLTz (de Lausanne). - Il me semble que dans l'expé-
rience de M. Grasset, au moment où le muscle revient à l'état de
repos, il se produit un mouvement qui consiste dans un déplace-
ment de la chair et de la peau qui la recouvre.
M. le professeur GRASSr.T (de Montpellier). Je n'ai pas voulu
entrer dans la question théorique, mais simplement faire connaître
un procédé d'expérience.
Un cas de ramolli -sèment complet des lobe droit et lobe moyen du
cervelet, avec destruction des noyaux centraux de ces lobes ; par
SwiTALsm (de Lemlerg).
Contribution à la théorie des hémiplégies ; par M. Friedel Pack
(de Prague).
M. Pick communique premièrement une observation, qui semble
avoir un intérêt spécial pour la théorie des hémiplégies. II a
observé un jeune homme, qui montrait, outre une perte de la
conscience musculaire du côté gauche, l'impuissance de mouvoir
volontairement les extrémités du côté gauche, les yeux clos; mais
il imitait très exactement chaque mouvement passif du côté droit.
420 0 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Alors il y avait du côté gauche : destruction du mouvement volon-
taire, conservation du mouvement imitatif. Ce syndrome ne se
trouve décrit dans aucun traité. Pick l'a trouvé seulement décrit
dans une communication d'Arton sur les troubles du sens muscu-
laire, par lésion cérébrale, où il se trouvait chez trois malades
atteints des lésions organiques. Ce syndrome rappelle un com-
plexus de symptômes que nous connaissons dans l'aphasie, c'est-
à-dire : langage volontaire détruit, langage imitatif conservé, ce
qu'on désigne sous le nom d'aphasie transcorticale motrice. C'est
ce qui a amené l'auteur à essayer de transformer le schéma de
Lichtheim-Wernicke de l'aphasie aux mouvements volontaires des
extrémités, essai qui est d'autant plus admissible, qu'il n'y a cer-
tainement aucune différence essentielle entre les muscles du mou-
vement et ceux du langage, lesquels sont sûrement, seulement des
muscles différenciés pour une fonction spéciale. C'est pourquoi il
est bien vraisemblable, que l'appareil central des muscles du mou-
vement est construit de même manière que celui du langage. Quand
on trace avec de certaines réserves (bilatéralité, spécialité du sens
auditif, etc.), un tel schéma, essai qui, à ce qu'il semble, n'a pas
encore été fait, on voit que les lésions sous-corticales et corticales
de la branche sensorielle et motrice sont bien connues ; mais il
ressort du schéma que pour la lésion transcorticale de la branche
motrice on doit supposer : destruction du mouvement volontaire,
conservation du mouvement imitatif, c'est-à-dire le même syn-
drome que la parallélokinésie. Pick conclut alors que ce syndrome
constitue pour les troubles du mouvement des extrémités un phé-
nomène analogue de l'aphasie motrice transcorticale, qu'il repré-
sente une akinésie motrice transcorticale, un syndrome exigé
d'ailleurs, comme on voit, par le schéma.
Discussion. M. le professeur A. PicK (de Prague) rappelle qu'il
existe des cas semblables à celui que vient de rapporter M. Friedel
Pick, ceux de Halm et de Bruns; quant aux cas où l'on a constaté
des lésions grossières du cerveau, on ne peut pas éliminer avec
sûreté la superposition de l'hystérie.
M. Bruns (de Hanovre). J'ai observé et publié un cas tout à
fait analogue à celui de M. Fr. Pick, également d'origine orga-
nique. Il s'agissait d'une lésion du premier lobe temporal gauche,
dans le gyrus supramarginalis, qui avait produit de la surdité ver-
bale, de l'hémianesthésie, de l'hémianopsie et la perle des mou-
vements intentionnels avec conservation des mouvements automa-
tiques et réflexes des yeux.
M. Friedel PicK (de Prague). -J'ai cité des cas analogues; mais
je.n'ai-pu recueillir tous les cas publiés, surtout le cas dont parle
MM.; A. Pick et Bruns et qui, d'après ce dernier, est enterré dans un
rapport d'asile. L'essentiel reste toujours de considérer ce syndrome
SECTION DE NEUROLOGIE. 421
comme l'analogue de l'aphasie transcorticale motrice et d'appli-
quer le schéma des aphasies à l'innervation motrice des extrémités.
De l'élongation permanente de la moelle dans l'ataxie et les myélopa-
thies scoliogèies; par CIIIPAULT (de Paris).
«
L'élongation intermittente de la moelle par suspension (Moczu-
kovski) ou par flexion du rachis (Gilles de la Tourelle et Chipault)
offre comme inconvénient son intermittence même, et dès lors, sa
dépendance de la volonté des malades si souvent affectée dans les
affections qu'il s'agit de traiter. L'élongation permanente de la
moelle remédie à ces deux inconvénients.
L'élongation permanente de la moelle est obtenue par le port
d'un appareil plàtré spécial qui se met. en place dans la position
tête en bas, position supportée sans incidents ni accidents et jugée
par tous les malades qui peuvent la comparer à la suspension tête
en haut comme dépourvue des inconvénients présentés par celle-ci.
L'appareil doit être très élevé, c'est-à-dire remonter très haut sous
les aisselles, et descendre très bas sous les hanches, tout en étant
soigneusement molletonné pour ne pas produire en ces points de
pressions excessives.
Les expériences cadavériques ont montré que l'appareil produit
un allongement réel de la moelle. Les observations cliniques
démontrent des modifications symptomatiques très favorables
chez les tabéliques : disparition rapide des douleurs, rétrocession
des accidents pupillaires et des troubles trophiques ; chez les syrin-
gomyéliques la disparition des douleurs rachidiennes, la rétroces-
sion des troubles sensitifs et trophiques; enfin dans certains cas
d'affection trophique à topographie dite radiculaire et avec asso-
ciation de scoliose, tels qu'un cas de sclérodermie et un cas de
neurofibromatose qui ont pu être ainsi traités, la rétrocession pour.
ainsi dire complète des troubles trophiques.
Il va de soi que dans les myélopathies scoliogènes, l'élongation
médullaire permanente a pour corollaire le redressement de la
scoliose ; il n'est pas rare de voir le redressement persister après
l'enlèvement de l'appareil.
En somme, l'élongation médullaire permanente dérivée de la
méthode d'élongation intermittente par suspension ou flexion du
rachis semble représenter à son égard un réel progrès.
422 2 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Séance de l'après-midi. PRÉSIDENCE DE M. LE PROFESSEUR 1j01'tI
(de Moscou).
Communications .
(fuelques procédés pour colorer les grandes coupes de cerveau;
par Paul SCIIROEDER (de Breslau).
Il s'agit d'expériences faites par la modification de Pal, de la
méthode de Weigert, pour les colorations de la myéline appliquée
à des coupes à travers les hémisphères entiers.
Dans le cerveau adulte, observation des rapports entre les tra-
jets des faisceaux très difficile. Les préparations Weigert donnent
une image indéchiffrable, qui pourtant fournit quelques renseigne-
ments.
Dans les préparations Weigert ou dans des imitations on ne
distingue que la substance grise décolorée à côté de la substance
blanche qui est très foncée; la différenciation entre la substance
blanche et la substance grise était bien le but de la méthode ; elle
suffit à reconnaître les dégénérescences secondaires. Mais s'il s'agit
de suivre le trajet des fibres à l'intérieur de la moelle, il faut pous-
ser plus loin la différenciation : jusqu'à décoloration complète ou
presque complète des parties isolées de la moelle. On constate
alors que les différentes parties de la moelle se comportent de
manière toute différente vis-à-vis du liquide de différenciation.
Les uns, sous l'influence du permanganate de potasse et de l'acide
sulfurique, se décolorent complètement; d'autres se maintiennent
dans leur coloration sombre. Entre les deux tous les degrés inter-
médiaires possibles.
Un fait important à énoncer, c'est que, d'après mes expériences,
dans le cerveau la réaction au liquide de différenciation d'un même
système de fibres, d'un même faisceau, est régulière, constante,
répétée dans les mêmes proportions.
-' Celte connaissance des intensités de coloration différentes n'est
pas nouvelle; Dejerine la connaît. Rappelez-vous la couleur foncée
du faisceau longitudinal inférieur en contraste avec la clarté des
radiations optiques de Gratiolet. Mais l'étude devient particulière-
ment aisée dès qu'on pousse à l'ex,lréme la différenciation. Il est
alors facile de faire de grandes coupes horizontales ou sagittales
de l'hémisphère entier, car tout de suite on voit réunis une multi-
tude de faisceaux qui se comportent différemment.-
Vous allez voir qu'on obtiendrait ainsi les résultats sur quelques
planches tirées de l'atlas photographique du cerveau publié par
Wernicke ou, déjà dans la première partie, mais surtout dans la
deuxième partie, la différenciation est poussée à l'extrême. Pour-
quoi ces réactions différentes des systèmes de fibres ? 2
SECTION DE NEUROLOGIE. 423
1° Différence de constitution chimique des parties ;
2° Conditions physiques dont le caractère commun est de s'ac-
centuer ou de s'évanouir au contact du liquide (de ces conditions
fait partie l'adhérence intime des fibres en faisceaux aussi denses
que le corps de la fibre elle-même) ;
3° Direction de la coupe. Un faisceau prend un aspect tout dif-
férent coupé en long (sombre) ou transversalement : c'est que
dans la coupe transversale, bien plus de fibres sont intéressées ;
mais, d'autre part, le liquide de différenciation pénètre bien plus
difficilement dans une coupe longitudinale de faisceau ;
4° Le ton de la couleur. On traite une coupe différenciée déjà
avec une solution légère de carbonate de lithine ; apparaît un bleu
encore plus intense ; et il arrive alors que quelques faisceaux,
avant de se décolorer, se teintent d'un brun, ou d'un brun jaune
très caractéristique, se distinguant très légèrement du bleu et du
gris des autres faisceaux. Ce brun, je le répète, est constant pour
certains faisceaux; par exemple : commissure antérieure, faisceau
uncinatus et une partie de la couronne rayonnante qui va du lobe
temporal au pied du pédoncule (faisceaux de Tùrck, de Dejerine).
J'ajoute incidemment que ces trois faisceaux émergent ensemble
du lobe temporal. Sur des photographies originales de prépara-
tions, trois parties au moins se dessinent : une partie bleu foncé
qui en grande partie nait de la première cirvonvolution tempo-
rale, la partie rétro-lenticulaire de la capsule interne en jaune
clair, et 3° le faisceau de Tiirck dont les fibres viennent surtout des
11° et 111° circonvolutions temporales, et qu'on peut, grâce à leur
bleu intense, suivre au milieu des fibres foncées jusqu'au cinquième
externe du « pes pedunculi ».
La différenciation s'accentue davantage pour la couronne rayon-
nante dans une coupe horizontale à travers la partie basale de la
capsule interne. Ici quatre coupes différentes : presque toute la
moitié antérieure est gris clair, légèrement jaune. Derrière, un
champ étroit beaucoup plus sombre ; puis le faisceau brun de
Türclc et enfin la limite de la partie rétro-lenticulaire de la cap-
sule interne, enfin un champ bleu foncé dont les fibres pénètrent
dans le corps optique. A travers tout le pied du pédoncule on
trouve des réactions correspondantes. Les fibres qui rayonnent vers
les lobes occipitaux se dessinent grâce à leur couleur intense ;
celles qui vont aux lobes temporaux se décolorent.
Enfin, voici comment dans tous les lobes du cerveau se compor-
tent les faisceaux différents. Le lobe temporal se décolore le plus
vite, exception faite de la partie limitrophe de la fosse de Syhius,
et de la partie avoisinante des circonvolutions pariétales infé-
rieures. Un peu plus lente est la décoloration des lobes frontaux.
Enfin les circonvolutions centrales se décolorent le moins vile et
avant tout les lobes occipitaux. .
424 £ . CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Application du cinématographe à l'élude des troubles de la marche
dans les maladies nerveuses; par Marinesco (de l3ucharest).
M... rappelle les travaux de Muybrige, Marey, Paul Richer, sur
la marche normale, ceux de Gilles de la Tourelle sur la marche
pathologique. La méthode des empreintes qu'employa ce dernier,
et la chronophotographie sont des méthodes qui se complètent,
mais qui ne se remplacent pas, suivant la juste remarque de
P. Richer.
M. Marinesco étudie la marche dans l'hémiplégie organique et
dans la paraplégie organique, marche qui comporte un certain
nombre de variétés. L'attention mérite surtout d'être attirée sur
un groupe de paraplégie où l'hypolonie des fléchisseurs coexiste
avec l'hypertonie des extenseurs de la jambe ; cette association est
remarquable non seulement au point de vue du mécanisme de la
marche, mais a aussi son intérêt par sa signification anatomo-
pathologique.
En ce qui concerne l'hémiplégie hystérique, il y a lieu de remar-
quer que le mécanisme de la marche n'est pas toujous le même,
comme l'avait admis Todd. Si la plupart des malades traînent le
membre paralysé comme une pièce de matière étrangère, il arrive
parfois que le pied paralysé balaie le sol seulement dans le pas
postérieur, tandis que dans le pas antérieur le sujet l'ait glisser
son pied malade assez en avant pour que le double pas du côté
paralysé soit il peu près égal à celui de la jambe saine.
Des différents états lacunaires du cerveau; par Pierre Marie
(de Paris). ,
On trouve dans le cerveau des lacunes de natures fort diverses
qui peuvent être rangées en quatre classes :
1° Foyers lacunaires de désintégration. C'est une lésion très fré-
quente dans les cerveaux de vieillards et qui très souvent, mais
non pas toujours, cela dépend de la localisation de ces lacunes,
détermine une hémiplégie incomplète avec troubles dysarlhriques
et dysphagiques, assez souvent aussi troubles psychiques, rire et
pleurer spasmodiques. Ces foyers lacunaires représentent des
ramollissements miliaires;
2" Etat criblé du cerveau de Durand-Fardel, siégeant surtout
dans la substance blanche du pôle temporal ;
3° Grosses dilatations isolées périvasculaires siégeant à la partie
inférieure du noyau lenticulaire;
4° Etat « fromage de gruyère » considéré par certains auteurs
comme une lésion véritable ; n'est en réalité qu'une altération
cadavérique.
Discussion. M. DUFOUR. - A propos des foyers lacunaires du
SECTION DE NEUROLOGIE. 425 "O
cerveau j'ai observé, depuis un certain temps, que ceux-ci se trou-
vent le plus souvent au niveau de la substance grise. Rapprochant
cela du fait que dans la moelle certaines formes de syringomyélie
dites myélites cavitaires affectionnent également les régions de
substance grise médullaire, je pense que l'on peut admettre que la
constitution de la substance grise nerveuse se prêle plus qu'aucune
autre à cette réaction cavitaire, et cela sous l'incitation de causes
variées.
M. le professeur A. PicK (de Prague). Tout en reconnaissant
que pour une partie des cas de M. P. Marie l'explication de celui-ci
soit la vraie, P... expose les raisons qui le font croire à la genèse
pathologique de l'autre série des cas, décrits comme état criblé.
M. le professeur OBERSTEINER (de Vienne). -Je pense, la subs-
tance cérébrale étant incompressible, que la formation de telles
cavités périvasculaires serait plutôt la conséquence d'un prolapsus
atrophique chronique du cerveau.
M. le professeur RAYMOND (de Paris). Je voudrais ramener la
question, un instant, sur le terrain clinique. En 1885, j'ai publié,
dans la Revue de médecine, un mémoire sur la pathogénie de certains
accidents paralytiques observés chez le vieillard. Or, quelques-unes
des observations de ce mémoire, recueillies à l'hospice d'Ivry,
m'ont montré, comme à d'autres auteurs, que les foyers lacunaires
étaient fréquents chez les vieillards, pour ainsi dire le fait habituel.
Parmi ces vieillards, à lésions cérébrales circonscrites, certains
peuvent devenir hémiplégiques ; d'autres ne le deviennent jamais,
et, cependant, chez les uns et chez les autres, il existe des foyers
lacunaires, à peu près de même dimension, de même siège, etc.,
dans le corps opto-strié par exemple. Comment s'expliquer cette
contradiction apparente ? Comment comprendre que les lésions,
dans un cas, n'engendrent pas de paralysie, alors qu'elles en pro-
duisent dans l'autre, ce dernier paraissant calqué sur le premier.
Eh bien ! il m'a semblé que la paralysie qui survenait dans ces
cas, avait besoin, pour se produire, d'un ou de plusieurs autres
facteurs se surajoutant à la ou aux lésions lacunaires; parmi ces
facteurs celui qui m'a paru primer tous les autres, c'est l'oedème
cérébral en rapport avec le mauvais fonctionnement de l'appareil
cardio-rénal. En seconde ligne, j'incriminerai l'artério-sclérose
localisée, avec anémie consécutive de certaines parties de l'encé-
phale.
. Que mon explication soit bonne ou mauvaise, il n'en reste pas
moins le fait suivant : des vieillards ont des foyers lacunaires dans
les corps opto-striés; les uns sont hémiplégiques ou le deviennent ;
les autres ne présentent, jusqu'à leur mort, aucun accident para-
lytique. Peut-être l'examen du cerveau, sur coupes microscopiques
sériées, donnera-t-il l'explication de ces faits.
426 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
M. von Moaaoow (de Zurich). Les lacunes selon le mode de
« fromage de gruyère » que l'on voit sur les préparations de
M. P. Marie sont des produits artificiels, probablement en rapport
avec le mode de préparation et de coupes du cerveau. M... a observé
des formations lacunaires analogues dans certains troubles circu-
latoires à la suite d'hémorragies méningées traumatiques comme
conséquence du contre-coup dans la substance blanche. M... pense
que leur origine doit être cherchée dans de multiples extravasats
sanguins qui, après avoir détruit partiellement le tissu, se résor-
bent plus tard avec le reste du tissu. ,
Rires et pleurs spasmodiques ; par le professeur Brissaud
(de Paris). Présentations de malades.
Troubles de la parole recueillis au moyen du phonographe ;
par M. DUPONT (de Paris).
Présentation d'un microtome pour cerveau ; par J. NAGEOTTE
. (de Paris).
L'appareil que je présente permet de débiter en coupes sériées
un cerveau tout entier inclus à la celluloïdine, dans le sens hori-
zontal aussi bien que dans le sens vertical. Les coupes sont aussi
faciles à recueillir que dans les autres systèmes actuellement en
usage; leur épaisseur, réglée automatiquement, peut varier de
1/10 à 1/30 de millimètre. La pièce est fixée, comme dans le
microtome de Gudden, sur le piston d'un volumineux cylindre ;
elle monte par l'effet d'une vis micrométrique qui est mise en
mouvement àchaque coupe par le mouvement de retour du rasoir.
Une disposition spéciale permet de faire tourner la pièce sur son
axe vertical pour que le rasoir l'attaque dans le sens le plus favo-
rable, eu égard à la direction des fibres; il est d'ailleurs facile
d'enlever la pièce après chaque séance et de la replacer sans chan-
ger son orientation.
Le rasoir, qui n'a que 37 centimètres de long, et qui pourtant
coupe facilement les deux hémisphères d'un cerveau pris dans leur
plus grande longueur, est fixé par ses deux extrémités à une sorte
de pont mobile qui passe par-dessus la cuve à eau. Une disposition
particulière permet de donner au rasoir une obliquité variable. Le
pont mobile glisse sur deux rails situés de chaque côte de la cuve ;
il prend deux points d'appui sur l'un de ces rails, qui a une forme
prismatique et sert de conducteur sur l'autre rail qui est plan : il
ne prend qu'un point d'appui. L'entraînement du pont qui porte
le rasoir se fait à l'aide d'une corde sans lin actionnée par une
poulie. , ,
Lés avantages de ce microtome sont les suivants : malgré la
SECTION DE PSYCHIATRIE. 427 Î
grandeur des pièces qu'il permet de couper, il tient peu de place ;
le rasoir ne tremble pas et les coupes sont absolument régulières ;
le maniement et commode et un seul opérateur peut facilement
faire mouvoir le rasoir d'une main et de l'autre parer aux petits
accidents qui viennent compromettre à chaque instant l'intégrité
de ces grandes coupes; il est facile d'enlever et de replacer le
rasoir chaque fois que le besoin d'un affûtage se fait sentir, sans
perdre une seule coupe de la série ; enfin le prix de l'appareil est
relativement modique. Il a été construit, pour le laboratoire de
M. Babinski, par les soins de M. Dumaige. (A szcivre.)
Section de Psychiatrie.
Séance du samedi 4 août. Présidence de M. Magnan.
M. Bourneville a présenté un groupe de 8 microcéphales, dont
3 avaient été montrés au Congrès international de médecine
mentale de 1889. Il indique, à l'aide des photographies de ces
malades, prises d'année en année ou tous les deux ans, et des
cahiers mensuels, les progrès réalisés chez tous grâce au traitement
médico-pédagogique qu'il a institué. Il insiste sur ce fait que la
preuve d'une amélioration très sérieuse obtenue chez les microcé-
phales, rend évidente la possibilité d'améliorer encore davantage,
jusqu'à l'état normal moyen, les enfants dont le cerveau est dans
de moins mauvaises conditions. Cette leçon de choses a été très
bien accueillie par l'Assemblée. Le reste de la séance a été
occupé par les communications suivantes :
Le domicol, hypnotique puissant, non toxique; par le D1' Kocu
(d'Aix-la-Chapelle).
Présentation d'un hémisphère cérébral pour la démonstration
et d'un eslhésiomètre; par le D1' Ilucncs (de St-Louis).
Sur les déformations spéciales des ongles au cours de l'aliénation
mentale ; par le Dl' Marco Trêves (de 'I urin).
Discussion : REGIS et Marco Trêves.
Sur la physionomie el la progression de certaines lésions cellulaires
corticales accompagnant les accidents mentaux des maladies
générales. (Laboratoire de M. Gilbert Ballet.)
M. Maurice FAURE (de Paris). Je présente 15 photographies
428 8 CONGRÈS international DE médecine.
microscopiques reproduisant l'aspect des cellules pyramidales
(grandes cellules du lobule paracentral) chez douze malades,
morts de maladies générales (pneumonie, 'tuberculose, lésions du
foie, lésions du rein), avec des troubles mentaux plus ou moins
accentués. On constate que, dans cinq cas, les cellules ont con-
servé le type normal, ce qui démontre, une fois de plus, que l'on
peut avoir certains troubles fonctionnels cérébraux; mêmes accen-
tués, sans que la lésion correspondante de l'organe soit appré-
ciable à nos investigations. Dans sept cas, au contraire, les cellules
sont manifestement altérées, et cette altération présente exacte-
ment les mêmes caractères dans tous les cas. Nous avons, dans
des publications antérieures, insisté sur la physionomie typique
de cette lésion, dont nous rappellerons seulement ici les caractères
fondamentaux : forme globuleuse de la cellule, migration périphé-
rique du noyau, décoloration centrale de la cellule. Ce qui nous
paraît aujourd'hui particulièrement digne d'être signalé, c'est
qu'en réunissant ainsi, dans une étude d'ensemble, ces divers cas
auxquels nous venons de faire allusion, nous pouvons mettre très
nettement en évidence le parallélisme d'intensité des lésions cor-
ticales, des troubles mentaux et des accidents généraux de la
maladie.
Si donc l'hypothèse, qui impute l'apparition des troubles men-
taux dans lesmaladies générales (délires fébrile, confusion mentale,
hallucinations, etc.) à l'action cérébrale des poisons fabriqués dans
un organisme infecté ou intoxiqué, est une hypothèse exacte, elle
peut s'appliquer avec la même vraisemblance à l'explication des
lésions que nous avons rencontrées.
Ces lésions, que nous avons vainement recherchées dans un
grand nombre d'autres autopsies d'origine variée, dont le type
est fort différent des lésions banales que l'hyphertermie, l'agonie,
la décomposition cadavérique peuvent réaliser, paraissent devoir
être rencontrées dans les cas où une toxi-infection, quels qu'en
soient la nature et le siège, agira sur les cellules nerveuses
pour en modifier la structure et la fonction. Dans les neurones
spino-périphériques, de semblables actions donneront naissance
aux polynévrites, qui s'accompagnent précisément fort souvent
d'altérations cellulaires spinales, exactement semblables à celles
que nous venons de montrer dans les cellules cérébrales. De même
que les polynévrites sont formées de symptômes et de lésions tou-
jours les mêmes ou à peu près, quel que soit leur cause (alcoo-
lisme, tuberculose, etc.); de même les lésions corticales, que nous
signalons, resteront les mêmes, bien que dues à des causes variées
(fièvre, infection, intoxication, etc.) ; il en est ainsi, d'ailleurs,
pour les troubles mentaux qui les accompagnent, et qui varient
peu malgré la variété des maladies qui les engendrent (délire de
fièvre typhoïde, de pneumonie, d'infection puerpérale, etc.) ;
SECTION DE psychiatrie. 429
M. TOULOUSE. Dans la paralysie générale on observe des
lésions cellulaires semblables. Les partisans de l'origine toxique
de la'paralysie générale tronveront là une confirmation anatomique
de leur opinion. J'ai eu récemment l'occasion de constater les
mêmes lésions dans des cerveaux de malades ayant présenté des
états maniaques et mélancoliques ne paraissant pas en rapport
avec de l'infection ou de l'auto-intoxicafion.
Séance du lundi 6 aoùt.- Présidence DE M. Magnan.
Cette séance a été occupée par la lecture des rapports sur la
question de l'alitement. Nous avons reproduit l'analyse de ces rap-
ports dans le numéro d'octobre (p. 273) et la première partie de la
discussion. Celle-ci a été suivie de la lecture, des communications
ci-après : .
L'alitement en aliénation mentale ; par MM. hiaIRET et DELTIIEtL
. (de Montpellier).
L'open-door el le traitement au lit dans la République Argentine;
par le D'' CAURED (de Buenos-Ayres).
Séance du mercredi 8 août. Présidence de M. Magnan.
Suite de la discussion sur l'alitement.
MM. Gvrnier et COLOUAN. La méthode de l'alitement ne vaut
que par l'homme qui l'applique. Avec cette méthode il faut la pré-
sence permanente du médecin et un personnel secondaire de choix.
M. Tokarski croit que l'alitement par intervalle peut, dans cer-
tain cas, donner des résultats plus utiles que l'alitement continu.
L'alitement peut quelquefois permettre l'emploi des narcotiques.
M. Régis. La question de l'alitement dans les psychoses est
inséparable de celle de l'alitement dans les névroses. L'alitement
est, en effet, pratiqué dans les neurasthénies cachectiques où il
lutte surtout contre la dénutrition.
A la suite de cette discussion à laquelle ont pris part également
les D1'5 CLE1EI-IS, NEISSER, DOUTREUENTE, Mello-Reis, KERAVAL et
Magnan, la section de psychiatrie adopte, à une forte majorité, le
voeu suivant ;
« La section émet le voeu que les quartiers exclusivement cellu-
laires disparaissent progressivement de nos asiles et que l'alilemen t
soit appliqué aussi souvent que possible dans le traitement des
maladies mentales, »
La section aborde ensuite la discussion de la quatrième ques-
tion :
Ja'3O CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Résumé du rapport survies perversions sexuelles obsédantes et
impulsives au point de vue médico-légal; par le professeur de
KRAFFT Ebing.
Le domaine presque exclusif des obsessions et des impulsions,
de même que des perversions sexuelles, c'est la dégénération psy-
chique ordinairement héréditaire. On a droit de les considérer
comme des stigmates de cette dégénérescence. La fréquence d'hy-
peresthésie sexuelle, l'état émotif qui en dépend, expliquent que
souvent chez les dégénérés les obsessions touchent la sexualité.
M'accordant aux vues de l'Ecole de l'Asile clinique, je définis
l'obsession « un mode d'activité cérébrale dans lequel un mot, une
pensée, une image s'impose à l'esprit en dehors de la volonté avec
une angoisse douloureuse, qui, la rend irrésistible » (Magnan).
Par impulsion je comprends : « un acte consciemment accompli
qui n'a pu être inhibé par un effort de la volonté » (Legrain).
Les conditions de l'obsession sont donc : la pleine conscience de
l'obsédé, sa lutte contre l'impulsion, l'état émotif avec le désespoir
de voir que ses forces psychiques (énergie d'association, volonté)
sont impuissantes dans cette lutte et que seulement la réalisation
de l'idée dont il est obsédé peut le délivrer de son terrible état.
Par conséquent, on ne doit pas confondre avec l'état d'obsession
les cas suivants :
1° Les actes sexuels commis par des individus dépourvus d'in-
telligence et de morale, qui, par ce manque, agissent aussitôt sans
aucune lutte dans le sens de leur incitation sexuelle, incapables
d'être impressionnés ni retenus par un sens moral ;
2° Les actes sexuels impulsifs commis par des dégénérés se trou-
vant constamment dans un état d'hyperesthésie sexuelle, qui sous
l'influence d'une incitation sexuelle soudaine et accablante sont
poussés à l'acte quasi automatiquement sans avoir la faculté d'y
réfléchir, ni même en avoir la connaissance;
3° Les actes sexuels dans des états inconscients épisodiques de
délire, commis par des alcooliques, des hystériques, des épilepti-
ques avec amnésie ;
4u Les actes provenant d'inversion sexuelle, laquelle, selon moi,
n'est que l'équivalent du sens génital normal.
Mais il y a là des cas exceptionnels où l'intensité et la durée
pathologique de l'incitation sexuelle conduisent à des complica-
tions que l'on doit admettre comme appartenant à la perversion
et à l'obsession. Ce même effet peut se produire par des anomalies
qui touchent au mode, au lieu ou au sujet de la satisfaction
sexuelle. C'est sans doute l'impuissance qui, sous l'influence de
l'hypéresthésie sexuelle dans les vraies perversions, joue un rôle
important. Dans ces cas, la perversion sexuelle obsédante apparaît
comme équivalent du coït impossible et la réalisation de l'idée
SECTION DE PSYCIIIA'I'Rlrt. 41) 1
obsédante n'est rien autre que la délivrance d'une émotion sexuelle
intolérable. En premier lieu, on doit compter sous cet ordre les
groupes sadistiques et souvent aussi fétichistiques des piqueurs
de filles, des coupeur-, de robes, des frotteurs, des exhibitionnistes,
des coupeurs de nattes, des voleurs de linge de femme, de tabliers,
de mouchoirs, de souliers, de même que certains cas de bestialité
et de pédophilie érotique.
Quant à la diagnose, l'existence apparente d'obsession de même
que de perversion sexuelle ne peut être considérée préliminaire-
ment que comme l'indice d'une dégénération psychique. C'est seu-
lement après la constatation de cette dernière qu'on a droit de
reconnaître ces cas pour des syndromes de cette dégénération.
Cou-talés comme tels, on a la base clinique et solide pour exami-
ne : ' l'action en elle-même, son cours et son mécanisme. Il est im-
posant de pouvoir baser la perversion comme telle sur des troubles
profonds de la vie sexuelle tout entière.
L'existence d'une obsession au temps de l'action et l'acte même
comme impulsion ressortira de l'étude approfondie de l'état d'âme
au temps de la réalisation de l'idée obsédante et du mode selon
lequel l'action a été commise. On constatera souvent des actions
antérieures identiques même sous l'influence de conditions iden-
tiques(excèsll'alcoul, menstruation, accès aigu de névrasthénie, etc.)
et avec retour périodique. Il y a du reste des cas rares dans les-
quels la lutte a été de très courte durée (cas de transition aux cas
purement impulsifs). On doit aussi mentionner des cas où, au
comble de la crise. la conscience se trouve troublée transitoire-
mcnt. Vu que l'obsession ne finit qu'exceptionnellement par l'im-
pulsion, la preuve qu'une obsession était en jeu ne suffit pas pour
excuser l'auteur d'un acte criminel. Le point décisif, c'est de four-
nir les raisons par lesquelles. soit en général, soit dans le cas
actuel, l'inculpé se trouvait sous le poids d'une impulsion.
L'irrésistibilité peut être l'effet de l'insuffisance des forces intel-
lectuelles et morales (cas de transition vers le groupe des crimi-
nets imbéciles) ; souvent elle est causée par une excitation sexuelle
tellement forte (effet de la continence, menstruation) que l'émotion
pénible provoquée par l'obsession était surabondamment compen-
sée par l'émotion voluptueuse de l'excitation sexuelle. Très sou-
vent, comme cause de l'irrésistibilité, on trouve l'alcool qui excite
la sexualité et abaisse en même temps la force morale. Quant à la
responsabilité criminelle, on doit reconnaître que, dans les cas
d'obsession où l'irrésistibilité de l'action est prouvée, il n'y a plus
crime ni délit.
Eu cas que le juge n'accepte pas ces états d'obsession-impulsion
comme appartenant à la folie, la défense aurait à plaider en prou-
vant que le prévenu a été contraint par une force (psychique) à
laquelle il n'a pu résister (art. 48, Code français, § 52 allemand,
432 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MEDECINE.
§ 2 lit. g. autrichien). Quand même l'irrésistibilité ne serait pas
prouvée, néanmoins, vu sa dégénérescence psychique, dont le pré-
venu ne peut être considéré coupable, sa culpabilité devrait être
atténuée jusqu'au degré le plus étendu que la loi peut accorder.
Résumé du rapport sur Les perversions sexuelles obsédantes et
impulsives au point de vue médico-légal; par le Dr Paul Garnies.
I. On ne saurait contester l'importance accordée, aujourd'hui,
en médecine légale, à l'étude des perversions sexuelles. La ques-
tion, éclairée par des documents cliniques de très grande valeur,
interprétée, dès lors, d'une manière judicieuse, grâce surtout à la
découverte d'analogies saisissantes dans l'ensemble des manifesta-
tions si variées de la dégénérescence mentale, a subi une véritable
transformation et nécessité une sorte de revision des appréciations
portées sur certains faits d'ailleurs fort délicats. Aussi bien, la
section de psychiatrie a-t-elle été heureusement inspirée eu
mettant à l'ordre du jour de ses discussions ce sujet fort intéres-
sant auquel de nombreux travaux, de date relativement récente,
donnent l'attrait de l'actualité.
II. Quelques mots sur l'obsession et l'impulsion sont néces-
saires pour la clarté de ce programme.
A. L'Obsession morbide, envisagée dans ses rapports avec les
perversions de l'instinct sexuel, se présente naturellement à l'étude
avec les grands caractères qui lui sont propres et reconnaît la
même dépendance pathogénique générale ; ici, comme partout
ailleurs, elle n'est qu'une expression symptomatique de la dégéné-
rescence mentale; et, même, ce rapport est si étroit que l'obses-
sion symbolise en quelque sorte l'état dégénératif. L'émotivité,
véritable stigmate moral du dégénéré, est le principe et la raison
même du phénomène, contrairement à ce qu'avait pensé Westphal.
La division des obsessions en (a) intellectuelles ou idéatives, (b)
émotives et (c) impulsives est donc toute fictive, puisque celui des
caractères qui est donné comme particulier à l'une des trois varié-
tés est, en réalité, commun à chacune d'elles. L'obsession est
comme un tic moral, expression que semblent justilier ses carac-
tères d'i ncoercibilité et d'automatisme. C'est cette activité invo-
lontaire et automatique que les malades désignent souvent par ces
formules significatives : « mon esprit marche malgré moi; il y It
deux personnes en moi », essayant ainsi de traduire cette sorte de
parasitisme qu'ils subissent. Un hôte importun s'est installé;
exigeant, intolérant, il commandera tout à l'heure en maître, en
dépit des tentatives faites pour son éviction. L'invasion de l'obses-
sion, dont les premières étreintes se font, le plus souvent sentir
dans l'enfance ou l'adolescence, est signalée généralement par une
commotion émotive, que peut seule expliquer, d'ailleurs, une
SECTION DE PSYCHIATRIE. 433
impressionnabilité maladive, créant un état de réceptivité. Cette
circonstance profondément perturbatrice est l'origine d'une série
de représentations mentales, d'associations d'idées destinées à
l'amplifier, à lui donner l'importance d'un événement susceptible
de s'imposer à toute l'existence.
Cette complicité émotive est bien la raison de l'incoercibilité et
de l'automatisme ; on oublie assez aisément ce qui n'a eu de place
que dans le fugitif mouvement de nos idées ; on oublie moins ce
qui a pris rang parmi nos sentiments, nos émotions, nos inquié-
tudes, nos angoisses.
Syndrome de la dégénérescence mentale, l'obsession est donc
une variété d'automatisme cérébral conscient, imposant ci. l'esprit
d'une façon paroxystique, et sous l'incitation première et essentielle
de l'émotivité, une idée, un mot, un nom ou une image, etc.,
le pliant, en fin, à un l ic moral quelconque, en dépit d'une résistance
angoissante s'accompagnant de troubles physiques déterminés
(sueurs, palpitations, constriction épigastrique, etc.), le malaise (le
celle lutte ne prenant fin que par la satisfaction du besoin qui amène
la détente et clôt l'accès ;
B. Les termes obsession et impulsion sont souvent confondus
dans le langage courant et employés assez indifféremment l'un
pour l'autre. Dans beaucoup de cas. ils apparaissent bien, en effet,
comme deux stades d'un même processus; mais, parfois, s'isolant
l'une de l'autre, l'obsession et l'impulsion montrent qu'elles peu-
vent avoir une existence à part. De plus, socialement et judiciaire-
ment, il s'en faut que le terme obsession ait la même portée que le
terme impulsion qui constitue une menace plus directe, plus immé-
diate. En somme, pour se pénétrer souvent, ces deux syndromes
n'en sont pas moins distincts.
Toute idée, pour peu qu'elle acquière quelque intensité, devient
représentative du mouvement correspondant et plus ces représen-
tations mentales s'accumulent et s'irradient, plus leur contenu
moteur tend à se dégager. De même que l'ononzalonzane, à force
dépenser le mot, le trouve tout formé sur la langue et le sent prêt
à s'échapper, de même que l'obsession se fait impulsive, une sorte
de mise en train se produit déjà vers la réalisation de l'acte appé-
titif. Tantôt l'impulsion est temporisatrice, tantôt elle est soudaine
et sidère la volonté; l'idée devient fait en s'affranchissant de toute
préméditation obsédante. C'est d'un seul bond qu'elle va jusqu'à
l'acte, au milieu d'une sorte d'éblouissement vertigineux, de con-
vulsion mentale, quoique la conscience reste présente, sinon
indemne de toute altération.
On pourrait dire que l'impulsion est une crise de besoin alors
que l'obsession n'est encore que l'étal de besoin ; pour décommander
l'accomplissement de l'acte, il n'est pas trop de toute l'énergie
Archives, '2* série, t. X, 28
434 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
inhibitoire du sujet; l'impulsion est conditionnée d'ailleurs par
les mêmes éléments émotionnels qui, sur le fond- de dégénéres-
cence mentale, président à la formation de l'obsession.
L'impulsion est une sollicitation motrice, à base émotive, vers un
acte appétiti ? qui n'inspire aucun délire et que la conscience rejette,
mais qui s'impose, parfois, automatiquement à la volonté, avec une
11 ? ésistibilité telle qu'elle entraîne la satisfaction du besoin, suivie
d'un apaisement immédiat, en lequel se dénoue l'accès.
III. Si les syndromes obsession el impulsion sont essentielle-
ment des stigmates moraux de la dégénérescence mentale, les
perversions de l'instinct sexuel, à leur tour, s'annoncent bien net-
tement comme des tares dégénératives. Il n'est donc point surpre-
nant que leurs manifestations respectives se rencontrent, s'asso-
cient, se combinent, au hasard de tel choc émotionnel subi dans
l'enfance ou l'adolescence, point de départ des représentations
mentales obsédantes et impulsives qui domineront désormais le
curriculum ville sexualis, en réalisant telle ou telle déviation de
l'instinct génésique. Cet instinct se présente bien, d'ailleurs,
comme l'élément biologique le plus propre à mettre en relief
l'émotivité pathologique du dégénéré, par cela même qu'il doit se
résoudre en une fonction complexe ayant pour première condition
de rapprocher, d'unir étroitement deux êtres hétérosexués aux
fins de la perpétuité de l'espèce.
Les perversions sexuelles obsédantes et impulsives qui en résul-
tent peuvent être ramenées à quelques types principaux sur les-
quels le médecin légiste est appelé, plus ou moins fréquemment,
à se prononcer : 1° L'exhibitionnisme, po Le fétichisme, 3° Le
sadisme (lequel s'associe souvent au précédent (sadi-félichisme),
4° L'inversion génitale ou homosexualité (uranisme), 5° L'érolo-
munie. Il faudrait y ajouter le masochisme ou passivisme, mais
son importance médico-légale étant fort restreinte, il n'y a pas lieu
de lui accorder de place dans ce court résumé.
IV. Exhibitionnisme impulsif. Les individus que Lasègue a
désignés sous le vocable pittoresque d'exhibitionnistes ne répon-
daient pas tous, dans sa description magistrale, à un type uni-
forme. Parmi eux se trouvaient des déments, des inconscients
épileptiques, paralytiques généraux, des alcooliques et, enfin, des
obsédés impulsifs. Mais aujourd'hui [que les termes de la question
sont mieux précisés, c'est vraiment à cette dernière catégorie que
convient cette qualification ; ailleurs, il est un acte quelconque né
au hasard des manifestations de l'inconscience; ici, il est systéma-
tique, intervient comme un étrange équivalent d'un rapprochement
sexuel ou son substitutif et, cela, en toute connaissance de cause
et, au travers des incidents divers des luttes angoissantes de l'ob-
session impulsive. C'est l'exhibitionniste impulsifque les tribunaux
SECTION DE PSYCHIATRIE. 438
condamnent itérativement. Pourtant, l'accumulation des récidives
la monotonie d'un délit toujours identique à lui-même, l'ineffica-
cité des pénalités finissent par frapper l'esprit du magistrat et c'est
bien souvent après toute une série de condamnations que le per-
verti sexuel comparaît devant le médecin.
Lasègue avait exposé les caractères principaux de l'exhibition-
nisme ; mais il appartenait à Magnan et à ses élèves de les préciser
et d'interpréter le syndrome avec toute la rigueur clinique dési-
rable : choix d'un endroit déterminé, d'un poste d'exhibition, faci-
litant un étalage à la fois public et discret, accomplissement de
l'acte appétitif à des heures généralement fixes et répétition de cet
acte [dans des conditions invariablement les mêmes, irrésistibilité
du besoin, lutte angoissante entre l'envie morbide qui commande
et la conscience qui apprécie et résiste, limitation étroite de l'ap-
pétit à une exhibition en laquelle il se résume, absence de tout
acte répréhensible en dehors de cette démonstration singulière,
alternance de rémissions el de paroxysmes, tels sont les principaux
traits symptomatiques de cette perversion sexuelle. Il faut y
adjoindre une fréquente frigidité.
Lorsqu'on fouille attentivement les antécédents de l'exhibition-
niste-impulsif, on y trouve, d'ordinaire, tout un ensemble de signes
révélateurs de l'état de déséquilibration mentale et parfois, aussi,
d'autres syndromes coexistant avec cette perversion sexuelle. Enfin,
uneenquète minutieuse permet, fréquemment, de saisir la circons-
tance de la vie, le choc émotionnel, à la suite desquels les repré-
sentations mentales obsédantes se sont développées pour aboutir
au dénouement decet automatisme cérébral conscient, c'est-à-dire
à la satisfaction du besoin.
L'exhibitionnisme impulsif, syndrome de la dégénérescence
mentale, est donc : Une perversion sexuelle obsédante el impulsive,
caractérisée par le besoin irrésistible d'étaler en public et, généra-
lement, avec une sorte de fixité d'heure et de lieu, ses organes géni-
taux, à l'étal de flaccidité, el en dehors de toute maneuvre lubrique
ou provocatrice, acte en lequel se résume l'appétit sexuel et dont
l'accomplissement , en mettant fin à là lutte angoissante, clôt l'accès.
V. Fétichisme. Il existe tout un groupe de pervertis
sexuels dont l'anomalie se traduit par une paresthésie de l'instinct
(Krafft-Ebing) ayant pour effet de placer la production del'orgasme
génital sous la dépendance nécessaire et exclusive d'un excitant
déterminé : le fétiche. Commotionné, alors qu'il est enfant ou ado-
lescent, par une impression forte, d'ordre sexuel, le perverti féti-
chiste ne pourra plus guère avoir pour objectif dans les choses de
l'amour, que le rappel de cotte impression, tellement a été tout de
suite étroit le rapport entre la sensation et l'idée représentative.
Anesthésié, en quelque sorte, pour ce qui est des impressions dont
436 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
le consensus engendre, d'ordinaire, l'excitation sensuelle, il gar-
dera seulement un point d'ltypereslliésie amoureuse. C'est une sin-
gulière interférence grâce à laquelle la partie prime le tout, le détail
se substitue au principal. Pour le fétichiste, ce détail est lotit, il
compte plus que la femme elle-même dont la possession arrive à
être chose indifférente. Dans cette étrange hérésie de l'amour, la
femme perd donc, à peu près, ses droits en tant qu'être destiné à
charmer l'homme, à le solliciter à l'acte où tend l'espèce dans son
mystérieux besoin d'assurer sa perpétuité. Tantôt le fétichisme est
impersonnel, c'est-à-dire ne recherche qu'un objet de la toilette
féminine (bottines, mouchoirs, tabliers, bonnet, etc., etc.) tantôt
il est corporel et ne vise, en ce cas, qu'une partie déterminée des
formes féminines, ou tel attribut de son sexe (mollets, pieds, seins,
proéminences fessières, cheveux, etc., etc.). Syndrome de la dégé-
nérescence mentale, le fétichisme est une perversion sexuelle obsé-
dante el impulsive conférant tantôt à un objet auquel nos usages
prêtent une signification sexuelle (fétichisme impersonnel) tantôt
à une partie du corps (fétichisme corporel) le pouvoir exclusif de
produire l'orgasme génital, le fétiche étant, soit directement, soit
par évocation ou représentation mentale, l'élément ci la fois iîéces-
saire et suffisant de l'excitation sexuelle.
VI. Sadisme ET S.\DI-FÉTICIllSIE, - A, Si l'homme qui apporte
dans l'accomplissement des rapports sexuels un raffinement cruel
et une sorte de férocité peut bien n'être qu'un individu vicieux et
brutal cédant à la colère de la volupté, c'est bien, par contre, à un
dégénéré psycho-sexuel, à un malade qu'on a affaire, lorsque l'in-
dividu obéit à une obsession impulsive irrésistible s'accompagnant
de phénomènes spéciaux. Pour le perverti sexuel sadique, il s'établit
un rapport entre le spectacle de la souffrance infligée et l'excitation
voluptueuse. Cette corrélation nécessaire est née d'un incident
mis en valeur par un état de réceptivité émotiveet dedésharmonie
fonctionnelle. A dater de ce jour marqué par cette commotion
émotionnelle, cette sorte de vertige mental initial, la subordina-
tion devient de plus en plus étroite entre la cruauté et la volupté.
Finalement, les deux éléments se juxtaposent et s'associent, Désor-
mais, ce ne sera plus que grâce à la réviviscence de cette impres-
sion ou à sa répétition que l'orgasme génital pourra se produire.
A l'inverse du masochiste ou passivisle, qui n'a de volnpté qu'à
s'humilier devant l'être aimé et à souffrir par lui, le sadique n'a
de jouissance qu'à imposer cette souffrance à autrui. Il n'y a donc
lieu de reconnaître comme une impulsion morbide sadique que
cette perversion sexuelle obsédante et impulsive caractérisée par
une dépendance étroite entre le besoin de la cruauté et la produc-
tion de l'orgasme génital. Rien n'est plus diversifié que la mani-
festation de l'impulsion sadique; depuis l'acte le plus puéril, le
SECTION DE PSYCHIATRIE. 3Î
plus absurde, depuis le sadisme simplement symbolique ou psy-
chique, il y a toute une série d'échelons qui, parcourus un à un,
nous mèneraient à la mention des forfaits les plus monstrueux dans
lesquels la fureur sadique se dépense en assassinats, en d'atroces
mutilations, en vampirisme, en anthropophagie, en nécrophilie. Le
crime sadique porte d'ordinaire sa marque d'origine. Produit d'une
impulsion se renouvelant avec une sorte de fatalité, il y a comme
sa signature dans la répétition d'un attentat qui révèle un système.
Syndrome de la dégénérescence mentale, le sadisme pathologique
est une perversion sexuelle obsédante et impulsive dont le caractère
réside dans une dépendance étroite entre la souffrance infligée, ou
mentalement représentée, et l'organisme génital, la frigidité restant
d'ordinaire absolue dans celle cond tion à la fois nécessaire el suffi-
sante.
B. Au premier abord, rien ne semble plus en contradiction que
ces deux termes : fétichisme et sadisme ; le premier éveille la
pensée d'un culte et tend à exprimer l'humilité de l'adoration ; le
second, au contraire, évoque l'idée d'une violence, d'une agression
cruelle, et en' somme, d'une manoeuvre attentatoire en vue de la
satisfaction d'une sensualité anormale. Pourtant, des observations
médico-légales absolument nettes et probantes montrent que les
éléments des deux perversions sexuelles se combinent fréquem-
ment pour former un composé hybride qu'il est permis d'appeler
le sadi-félichisme. Déjà, on peut trouver un appoint de sadisme
dans l'acte du fétichiste coupeur de nattes qui éprouve l'orgasme
génital lorsqu'il coupe et violente, par conséquent, lorsqu'il mutile
l'objet même de son fétichisme. Tout tend à montrer que la plu-
part des flagellateurs sont des sadi-fétichistes. Mais les cas les plus
démonstratifs sont fournis par les piqueurs de fesses, les coupeurs
d'oreilles. De plus, si dans les horribles mutilations, dans le vam-
pirisme et même dans la nécrophilie, le sadique laisse sa signature,
si on le suit à la trace par la remarque de ses procédés métho-
diques, systématiques, c'est sans doute parce qu'une attirance spé-
ciale, fétichiste dans son principe, dirige presque invariablement
sa main vers un point précis du corps. Mais le sadi-fétichisme
n'est pas seulement corporel, il peut être aussi iiil)-essioit2zel-
Comme dans le fétichisme des objets, le désir vise un objet exclu-
sif qui, seul, peut éveiller l'orgasme sexuel; mais, cette fois, à la
condition que l'objet fétiche subisse les violences de cet amour et
qu'il soit atteint dans son intégrité, qu'il soit lacéré, brisé, souillé,
brûlé, détruit parle feu ou des substances corrosives. De tels faits
ont une importance médico-légale qui va plus haut que la gravité
du délit en cause, car leur interprétation permet de rattacher des
actes bien autrement graves au même processus psycho-sexuel.
(A suivre.) '
BIBLIOGRAPHIE.
IX. Recherches sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie. - Comptes
rendus du service pendant l'année 1899, volume XX, par BOUR-
NV1LLE. Bureaux du Progrès médical, 1900.
Le volume XX de cette collection si riche en documents est peut-
être un des plus intéressants qu'ait publié l'auteur. La première
partie, consacrée à l'histoire du service (Bicêtre et fondation Valle)
pendant l'année 1899, attire et retient longuement l'attention.
Le premier chapitre, extrêmement intéressant et instructif nous
donne en effet le schéma de la méthode de l'auteur. Les idiots
complets ne sont pas tous incurables, on peut les améliorer à un
degré très notable.
Bourneville nous montre, avec dessins nombreux les appa-
reils employés pour donner de la force aux membres, et les
résultats très encourageants obtenus. Plus brillantes encore et
plus dignes d'intérêt pratique sont les pages consacrées à l'éduca-
tion de l'idiot valide. A la petite école, rationnellement et scien-
tifiquement la gymnastique, l'escrime, la danse sont utilisées pour
l'éducation et le développement des membres. Successivement on
éduque les jambes, la main, la parole, le dessin et l'écriture; de
très nombreux dessins nous montrent les appareils à employer,
le meilleur moyen de les utiliser et les résultats qu'on peut en
obtenir. Une fanfare et un orphéon permettent de compléter cette
éducation générale. Les résultats montrent ce que peut l'énergie
et la persévérance d'un homme qui a consacré toutes ses forces au
traitement des arriérés. Des idiots gâteux deviennent propres,
mangent seuls, s'habillent, apprennent à lire et à écrire, quelques-
uns à faire de la musique. Bourneville a donné cette année un déve-
loppement très détaillé à la première partie de son compte rendu.
Il faut l'en remercier. En nous faisant mieux connaître ses procédés,
il nous permet de mieux les apprécier et d'en comprendre toute la
portée et l'intérêt.
r Relevons encore dans cette première partie les statistiques rela-
tives à J'état du thymus et du corps thyroïde, et les tables de
décès avec un résumé clinique et anatomo-pathologique de chaque
observation.
Malgré les résultats obtenus, Bourneville veut encore mieux.
Les écoles primaires dans les grandes villes devraient être pour-
vues de classes spéciales pour les enfants arriérés. Une enquête a
été faite sur le fonctionnement de ces classes en Suisse, en Angle-
Fig. 10.
4-40 0 BIBLIOGRAPHIE.
terre, en Belgique, en Allemagne. Les résultats sont indiscutables.
Il s'agit d'en faire profiter notre pays. C'est à cette nouvelle tâche
que se consacre Bourneville.
La seconde partie est attribuée à la clinique et à l'anatomie
pathologique. Le traitement de l'épilepsie est encore bien difficile
et ses résultats bien précaires. Ni l'éosinate de soude, ni la jou-
barbe, n'ont montré aucune efficacité. Deux observations typiques
montrent l'influence néfaste de l'alcoolisme sur la production de
l'idiotie, de l'épilepsie, de la dégénérescence. D'ailleurs dans
d'autres observations de l'ouvrage (hystérie mâle) on retrouve
cette influence terrible de l'alcool.
L'hystérie infantile est une cause d'arriération intellectuelle, qui
guérit facilement par le traitement médico-pédagogique.
L'idiotie relève de lésions cérébrales variées : sclérose atrophique,
sclérose tubéreuse ou hyperlrophique : des observalions très com-
pletes, des photographies parfaitement faites des cerveaux per-
mettent de se rendre compte de la clinique et de la lésion.
Les deux planches que nous reproduisons, concernant un cas
d'idiotie symptomatique d'une destruction complète du lobule de l'in-
sula qui n'est plus représenté que par une plaque noire et de sclé-
rose atrophique du lobe sphénoïdal permettant de se rendre compte
des planches qui illustrent le volume (fLg. 15 et 16).
L'importance du thymus a lunguement attiré l'attention de
l'auteur. Sur son inspiration, son interne Katz a examiné le thy-
mus de 61 enfants de l'hôpital des Enfants-Malades, par suite chez
des enfants normaux. Chez tous, le thymus a été trouvé. Chez les
- enfants normaux, le thymus existe toujours : chez les enfants arrié-
rés, idiots, imbéciles ou épileptiques, il manque dans 73 p. 100 des
cas (Bourneville).
A relever une observation fort intéressante de sclérose en placée*
disséminées chez l'enfant. Bourneville en possède encore trois
autres observations, dont il donnera l'observation. Ces faits sont
fort importants à suivre, car ils touchent à un sujet encore très
discuté.
Un zona du tronc a reproduit intégralement la topographie du
troisième nerf intercostal. Si cette observation ne permet pas de
trancher la discussion en suspens au sujet du siège de la lésion
anatomique du zona, et malgré la présence de troubles sensitifs
nullement en rapport avec la distribution du nerf, elle est plutôt
en opposition avec la théorie spinale de Brissaud.
Complété par une observation d'hydrocéphalie, l'odyssée d'un
épileptique, un cas de fulie de l'adolescence, ce volume prendra place
parmi les meilleurs de cette collection, si riche en faits et en
matériaux de toutes sortes. ]\ ! IR.\ ! LLI ?
Fin. 1(;.
VARIA.
T fi.\ 1 'n; 11 E N DE L'ALIÉNATION MENTALE.
Nous croyons utile de reproduire les pages suivantes de
Leuret, empruntées à son beau livre : Le traitement moral
de la folie. On verra avec quelle bonne volonté le Conseil
général des hospices a encouragé l'initiative de Ferrus, de
Leuret, etc.
« Des trois hospices de Paris, Bicètre est le mieux partagé,
quant au nombre et à la variété des travaux exécutés par les
aliénés. Pinel avait désiié que l'exploitation d'une ferme fût t
confiée aux aliénés de Bicêtre ; ce désir, qui était aussi celui de
M. Desportes, a été réalisé par le Conseil des hôpitaux, sur la
demande de M. Ferrus, qui n'a pas craint d'envoyer travailler les
aliénés dans les champs, de mettre entre leurs mains des instru-
ments aratoires, et qui n'a jamais eu lieu de se repentir d'avoir
donné à ses malades cette marque de confiance.
« Depuis que j'ai succédé à M. Ferrus dans le service de Bicê-
tre, j'ai continué, sur ce point, ce qu'il avait si heureusement
entrepris, et je n'ai eu qu'à m'en féliciter. M. \Iallon, directeur de
Bicètre, laisse rarement les aliénés valides sans ouvrage ; en été,
tous ceux qui peuvent travailler vont aux champs ; l'hiver on les
occupe ordinairement à des travaux de terrassement. Quant au
petit nombre de ceux qui, ne pouvant travailler, ne sont cepen-
dant ni assez forts, ni assez sages pour étre envoyés au dehors, on
les occupe à faire des paillassons ou des chapeaux. J'avais vu, à
Halle, M. Damerow occuper de cette dernière façon, la plupart de
ses malades, j'ai cru bon d'imiter cet exemple à Bicêtre, et j'y ai
réussi sans peine, aidé que j'étais par la constante bonne volonté
de MM. Desportes et Mallon '.
« Dans plusieurs hôpitaux, on a, depuis quelques années surtout,
senti la nécessité de réunir les aliénés pour prendre leurs repas :
c'est un moyen de les faire manger proprement, d'encourager à
manger, ceux qui, par mauvais vouloir ou par oubli, pourraient
1 Dans ce temps-là, il y avait des administrateurs éclairés qui encou-
rageaient l'initiative des médecins. Les hôpitaux étaient gérés par le
Conseil général des hospices. Aujourd'hui, le chef-lieu supprime loule
initiative, seul il sait tout, les directeurs des hôpitaux n'ont aucune
initiative, l'on ne veut pas consulter les médecins (puisqu'on sait tout)
et on se propose de boycotter ceux d'entre eux qui voudraient voir notre
organisation devenir vraiment humaine et être à la hauteur des admi-
nistrations étrangères. (B.)
VARIA. 443
en être privés ; enfin c'est une ressource de plus, pour établir,
entre eux, des rapports de société et les distraire. M. Ferrus avait
obtenu que plusieurs centaines d'aliénés incurables fussent réunis
à la même table : on leur apportait et on leur apporte encore
maintenant à chacun, leur portion que l'on sert devant eux et
qu'ils mangent plus ou moins proprement. Il y a peu de mois
que, sur la proposition de deux de ses membres, MM. le comte
Hervé de Kergorlay et Cochin, le Conseil général des hôpitaux a
ordonné qu'nn réfectoire serait établi pour les aliénés en traite-
ment. Comme, alors, j'étais déjà seul chargé du service de Bicêtre,
j'ai eu à m'occuper de désigner les malades qui seraient admis à
cette table et de les classer. J'en ai choisi quatre-vingts, et je les
ai divisés par série de dix individus : dans chaque série, j'ai pris
un chef qui a eu pour fonction de réunir ses commensaux, de les
conduire à la salle à manger, d'avoir soin qu'en entrant, chacun
se découvre et se lave les mains, de faire les honneurs de la table
et de veiller à ce que, le repas fini, chacun remette sur son
assiette, sa cuillère, sa fourchette et son couteau ; car je n'ai pas
craint de leur donner des couteaux, à la condition bien entendu,
qu'ils ne les emporteraient jamais, et en prenant mes précautions
pour connaître, de suite', celui qui ne se conformerait pas à ce devoir.
« Dès la première fois, tout s'est passé en ordie, et depuis
lors, c'est une faveur à accorder aux aliénés, que de les faire
manger au réfectoire, et cette faveur tourne au profit de leur
guérison. Je n'ai admis à la table des aliénés, aucun infirmier; je
n'ai pas voulu non plus que les portions fussent coupées à
l'avance, parce que j'ai tenu à ce que tout se fit sans autorité
apparente, et en éloignant autant que possible ce qui rappelle
l'hôpital. Chaque chef de table doit savoir le nom de ses commen-
saux, veiller à ce que chacun d'eux soit bien servi, et les traiter
comme s'il les eût invités à manger chez lui.
« En même temps qu'il a ordonné l'établissement d'un réfec-
toire, le conseil a fait ouvrir une école destinée à l'enseignement
delà lecture, de l'écriture, du calcul et de l'orthographe. L'hospice
de Bicêtre étant destiné à des individus qui appartiennent presquè
tous à la classe pauvre et malheureusement ignorante, l'établisse-
ment d'une pareille école a, pour eux, une double utilité, celle de
les instruire et de les distraire.
« Je profite des ressources que me présente l'école pour exercer
l'intelligence de mes malades, ignorants ou instruits, et je multi-
plie, autant qu'il est en moi, les occupations de ceux qui y sont
admis. Les malades réunis, à l'école, au nombre de deux ou trois
cents, quelquefois plus, j'en désigne quelques-uns pour faire la
lecture à haute voix, pour réciter des vers ou pour chanter. La
lecture est faite ordinairement par plusieurs malades qui, ayant
chacun un exemplaire d'un même livre, tantôt lisent alternative-
44 i VARIA.
ment les phrases d'une histoire, tantôt lisent des passages tout
entiers, et sont remplacés par ceux que je désigne. Cette lecture,
quoique faite sur des tons différents, n'en est pas moins intéres-
sante pour ceux qui écoutent, et elle oblige ceux qui lisent bas à
être attentifs, parce que d'un moment à l'autre, ils s'attendent à
ce que je les inviterai il lire tout haut.
« Quelques-uns commencent cet exercice d'assez mauvaise
grâce, se font prier ou se laissent gronder, mais une fois qu'ils
ont surmonté leur première répugnance, animés par l'exemple des
autres et par la présence d'un nombreux auditoire, ils font des
efforts pour se bien acquitter de leur tâche, et cette tâche ne
tarde pas à être pour eux un plaisir. Ceux qui lisent bien entraî-
nent les autres, et bientôt l'amour-propre se mettant de la partie,
devient un conseiller plus puissant et mieux écouté, que je ne
pourrais l'être moi-même.
« Les lectures dialoguées ont quelque chose de plus piquant
que les lectures ordinaires. Je citerai par exemple, la lecture de
ce dialogue si comique de Trissotiu et de Vadius, dans les
Femmes Savantes de Molière. Nous avons déjà répété quelques
pièces : celle des Plaideurs, celle de Bruéis et Palaprat, etc.; j'ai
som de choisir les pièces et les acteurs ; les pièces gaies sont
celles que je préfère. Je ne veux rien de dramatique, et j'ai soin de
repousser tout ce qui prêterait à faire quelques allusions inconve-
nantes. Quant aux acteurs, je ne prends pas ceux qui peuvent le
mieux réciter leur rôle, mais ceux auxquels le rôle doit être le
plus utile : ainsi les apathiques et les lypémaniaqnes sont ceux
qne je m'efforce le plus démettre en avant, car mon but est, on le
comprend bien sans qu'il soit besoin de le dire, non pas de faire
jouer la comédie, mais de guérir mes malades.
« J'ai voulu aussi essager de la musique et du chant. Il est peu
de médecins d'aliénés qui n'aient eu recours à ces moyens de
distraction, soit parmi les anciens, soit parmi les modernes. Les
tentatives qui ont été faites, dans ce genre, m'ont paru néanmoins
trop incomplètes, pour résoudre la question de l'efficacité qu'elles
peuvent avoir dans le traitement de la folie, et j'adresserai à ceux
qui ont fait ces tentatives un reproche, celui de les avoir trop
promptement abandonnées.
« Comme je n'avais à ma disposition, ni chanteur, ni musicien,
il m'a fallu en chercher parmi les aliénés. J'avais un malade,
ancien ménétrier, dont jusqu'alors je n'avais pu rien tirer. Il se
croyait poursuivi par la police, et n'osait ou ne voulait pas bouger.
Pour le faire lever, le faire marcher, pour le nourrir, il fallait
recourir aux instances et même à la contrainte. Je ne savais plus
guère comment m'y prendre, afin d'agir sur lui, quand je songeai
au violon. Je conduisis le malade dans la salle de bains, je lis
couler, devant lui, la douche, et je lui présentai, en même temps.
. VARIA. 445
un violon ; il devait choisir. J'avais une grande peur qu'il ne
choisit la douche. Il hésita quelque temps, mais enfin le souvenir
de sa profession l'emporta ; il prit le violon et joua un air, celui
qu'il voulut : la Marseillaise. Il fallait vite obtenir quelque chose
de plus. Je le conduisis à l'école, quelques malades s'y trouvaient
que j'engageai à chanter, mon ménétrier les accompagna. Ce n'est
pas ici le lieu de raconter l'histoire de cet homme ; j'en parlerai
plus loin, avec tous les détails nécessaires; j'ajouterai seulement,
ici, que deux mois environ après avoir repris son instrument, il
est sorti gnéri pour continuer l'exercice de sa profession, et que
pour tout traitement, j'ai exigé qu'il fit de la musique. ·
« Un musicien trouvé, des chanteurs se présentèrent, et, en peu
de jours, on fut en état de chanter avec ensemble et harmonie.
Maintenant, après nos séances de lecture, on égaie la matinée par
quelques chansons, aux choix desquelles j'apporte une assez
grande sévérité, et j'ai la satisfaction, en quittant mes malades,
de leur laisser quelques idées et quelques sensations douces qui,
se multipliant chaque jour, chez ceux qui sont curables, ne
peuvent manquer de favoriser leur retour à la raison.
« Deux fois par semaine, nos réunions, plus solennelles que
celles des autres jours, ont pour but de chanter en musique ; si le
temps est mauvais, nous restons dans la salle de l'école ; s'il fait
beau, nous nous rendons dans un grand jardin attenant à l'hos-
pice, et là, tous nos malades rangés avec ordre autour des
musiciens et des chanteurs, assistent à une sorte de conce l,
auquel un certain nombre d'entre eux ne manque jamais de
prendre part. Les musiciens sont pris parmi les aveugles de
l'hospice ; les chanteurs parmi les aliénés.
« Cette institution se perfectionnera, je l'espère; plusieurs
membres du Conseil, parmi lesquels je ne puis m'empêcher de
citer avec reconnaissance MM. Hervé de Kergorlay et Cochin, en
ont suivi et secondé les progrès. M. Wilhem, qui a si heureuse-
ment institué des écoles de chant, dans tous les quartiers de
Paris, m'a offert le secours de son expérience, et, témoin de nos
premiers essais, il a conçu un projet d'éducation musicale adapté
à l'état intellectuel de nos malades, projet que j'espère pouvoir
bientôt mettre à exécution.
« Toutes les fois que le temps le permet, les malades, qui sont en
état de marcher, et qui ne peuvent pas ou qui ne veulent pas
travailler, sont réunis dans les cours de l'hospice et exercés à la
marche comme les soldats à l'exercice. L'imitation est un levier si
puissant, même sur les hommes les plus paresseux et les plus
obstinés, que j'en ai vu plusieurs, parmi ces derniers, qui, se
refusant d'abord à tout, ont cependant consenti à marcher. C'est
un commencement d'action méthodique, régulière, raisonnable, et
cette action conduit à d'autres.
446 VARIA.
« Pour commander les marches et les évolutions, je n'emploie
jamais aucun surveillant, mais seulement des malades. Ceux qui,
parmi les malades, font preuve de plus d'intelligence et de bonne
volonté que les autres, j'en fais des chefs qui sont en outre l'objet
de quelques faveurs, afin d'appeler l'attention sur eux et d'encou-
rager les malades qui voudraient les imiter.
« A l'aide de cette organisation quelque peu militaire, la visite
des malades, qu'elle se fasse dans les salles ou dans les cours,
devient facile, et je puis, chaque jour, donner au moins un coup
d'oeil aux aliénés incurables, réservant la plus grande partie de
mon temps, pour les aliénés soumis à un traitement actif. Je
m'assure si ces pauvres incurables jouissent d'une bonne santé
physique, si on les habille convenablement, s'ils se nourrissent
bien, s'ils ont quelque réclamation à faire ; enfin, parmi eux,
quand j'en aperçois qui ont quelque retour à la raison, je les
étudie et je cherche à seconder les efforts de la nature.
« Un commencement de bibliothèque ayant été mis à la disposi-
tion de l'instituteur chargé de l'école, les aliénés instruits peuvent,
le soir et dans les moments de repos du travail manuel, s'adonner
à la lecture; mais ce n'est là qu'une distraction sur laquelle je
compte peu ; je conseille plus volontiers aux aliénés instruits,
d'aider le professeur, en donnant eux-mêmes des leçons aux
ignorants ; de cette façon, le maître et l'élève travaillent, en même
temps, à la guérison l'un de l'autre. Jusqu'alors les aliénés se
couchaient à la nuit tombante, ce qui chagrinait plusieurs d'entre
eux et ce qui nuisait au rétablissement d'un grand nombre, car les
longues nuits d'hiver pendant lesquelles ils avaient le temps de
délirer à leur aise, et de s'occuper de leurs chimères, devenues
plus courtes, à cause de la veillée du soir, sont, au moins en
grande partie, employées au sommeil. Faites en sorte qu'un aliéné
soit si bien occupé, qu'il ne puisse pas songer à ce qui fait l'objet
de son délire ; que le reste du temps soit donné au sommeil, et la
guérison ne se fera pas attendre. Fixer l'attention des aliénés, c'est
là un précepte fondamental pour le traitement de ces malades,
précepte donné au moins depuis trente ans, par M. Esquirol.
mais trop rarement mis en pratique. (LEURET, Traitement moral de
la folie, p. 169 à 181.)
* ... Quand j'ai provoqué des idées tristes, c'a été dans le but
de prévenir des idées plus tristes encore, pour faire rechercher le
plaisir et en donner. Quelquefois, je me suis attaché à rendre
pénibles les idées déraisonnables, afin que le malade fit effort pour
les repousser ; et alors, j'ai toujours eu le soin d'en suggérer
d'autres, conforme au bon sens, et auxquelles je tâchais de donner
l'attrait du plaisir. » (Ibid, p. 157.)
« ... La volonté des aliénés ne doit pas servir de règle au
médecin chargé de les guérir; leurs répugnances méritent qu'on
VARIA. 447
en tienne compte, mais non pas qu'on y cède. Organisez des
travaux, préparez des ateliers, et avec un peu d'adresse et de
persévérance, il ne sera pas difficile d'y envoyer tous ou presque
tous les aliénés valides. Quelques légères privations pour ceux qui i
n'iraient pas, quelques faveurs à ceux qui s'y rendraient exacte-
ment, auraient bientôt peuplé vos ateliers. (Ibid., p. 182.)
« ... Le médecin d'aliénés doit avoir pour but de se rendre
maître de tous ses malades; mais il n'atteindra jamais ce but, s'il
ne multiplie, presque à l'infini, ses moyens d'action. Il doit
employer suivant le besoin, la rudesse ou les égards, la condescen-
dance ou le despotisme ; il doit flatter ou réprimer certaines
passions, tendre des pièges, ou se montrer plein de confiance et de
candeur; en un mot, chercher dans l'esprit de ceux qu'il veut
guérir, un ressort, un levier qui, mis en mouvement, redonne à
l'entendement, l'énergie ou la rectitude qu'il a perdue. (lbid, p. 292.)
« ... Le premier moyen à employer pour ne plus songer à ses
idées folles, c'est de n'en jamais parler, et le second c'est d'être
forcé de parler d'autre chose et d'occuper son esprit fortement et
assidûment. » (Ibid., p. 383.)
Que reste-t-il de cette organisation médicale conçue en vue
de l'intérêt absolu des malades ? Rien ou à peu près rien.
Nous avons essayé de la rétablir sans grand succès (1878-
1900). Ce n'est aussi qu'au milieu de difficultés sans cesse
renaissantes que nous avons créé et organisé la section des
enfants : toute initiative est mal vue, plus que jamais, à
l'Administration. (B.)
Kleptomanie.
La manie des livres. Dans l'après-midi d'hier, un garçon de
librairie remarquait un amateur qui mettait sous son bras un
livre, un vulgaire livre de' 3 francs et s'éloignait. Il l'appela.
L'autre répondit : « Ah ! oui, j'oubliais de payer. » Et il sortit son
porte-monnaie. Mais son air était si étrange que le vendeur le
pria de l'accompagner chez le commissaire de police du quartier.
Devant M. Lagaillarde, tout de suite l'amateur avoua qu'il avait
voulu voler. Le commissaire s'étonna, car la mise et la profession
de M. X... laissaient peu supposer que celui-ci avait besoin, pour
vivre, de voler un livre de 3 francs. Et M. X... s'expliqua : il
avait pour les livres, pour n'importe lesquels, un goût vraiment
maladif; il ne les lisait pas, il ne les vendait pas, il les accumulait.
Vous n'aviez qu'à les acheter, objecta le commissaire.
Ce n'est pas la même chose. Lorsque je ne suis pas devant
un libraire, je ne pense pas aux livres. Mais, dès que je vois des
448 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
livres accumulés, j'ai une envie irrésistible de mettre la main
dessus. Dans les premiers temps, j'essayais de lutter contre moi-
même ; j'ai été vaincu. Je me laisse faire.
Ce discours, peut-être, n'était-il qu'une défense habile. Le com-
missaire voulut en avoir le coeur net. Ce matin, il a perquisitionné
dans l'appartement qu'occupe, rue Servandoni, avec sa femme et
son fils, M. X... Celui-ci avait dit vrai. Les trois pièces de cet
appartement étaient pleines d'un amas inconcevable de livres. Il y
en avait de tous les formats et de tous les prix, depuis les éditions
de luxe, à 30 francs le volume, jusqu'aux volumes à 35 centimes.
Il est évident qu'il avait fallu deux ou trois années à M. X... pour
réunir une telle collection ; il était non moins évident qu'il ne les
vendait ni ne-les lisait. \l. Lagaillarde, assuré de ne pas avoir
devant lui un voleur responsable, a laissé M. X... en liberté pro-
visoire. (Le Temps, octobre 1900.)
FAITS DIVERS.
' Asile d'aliénés DE N.1UGE.T, près LIMOGES, - Deux places d'in-
ternes vont être vacantes dans cet asile. Les avantages sont les
suivants : logement, éclairage, nourriture et blanchissage. Le titu-
laire reçoit un traitement annuel de 800 l'rancs. Écrire au méde-
cin en chef, directeur, M. le D1' Doursout.
Ecole pratique DES Hautes-Etudes. Le laboratoire de psycho-
logie expérimentale de l'asile de Ville,juil' vient d'être rattaché à
l'Ecole pratique des Hantes.ltndes, et M. le D1' Toulouse, médecin
en chef de l'asile de Villejuif, son' fondateur, en a été nommé
directeur.
LEDUC (S.). Rhéostat oscillant pour la production des courants on-
dulés. brochure in-8° de 8 pages, avec 12 ligures. - Paris, 1900.
(Archives d'électricité médicale.)
LEDUC (S.). - Modifications de l'excitabilité des nerfs el des muscles
par les courants continus. - Brochure in-8° de 8 pages, avec 7 ligures.
Paris, 1900. (Archives d'électricité médicale.) 0
LEDUC (S.). - Réaction de l'urine dans les névropalhies. Effets psy-
chiques de la caféine. l3acligeoazaffe de gaïacol contre la fièvre lymphoïde
h. ! 11)eipyi-éli(liie. - Brochure iu-8° de 2 pages. - Paris, 1899. - (.Isso-
cialion pour l'avancement des sciences.) ,)
Le rédacteur-gérant : BOURNEVILLG.
Emtcux, Cli. llin : sssy, imp. 10-1900.
Vol. X. Décembre 1900. N° 60.
ARCHIVES DE NEUROLOGIE
CLINIQUE NERVEUSE.
Clinique psychiatrique DE Montpellier.
(Service du professeur MURET.)
Recherches sur le réflexe plantaire dans la
paralysie générale ;
AI;DIN-DGLTL : II,, et T Il. IlOU'I);R>;,
Chef de clinique, médecin adjoint Aide d'analomie, interne provisoire
de l'asile public d'aliénés de l'llél'aull. des hôpll"u\ de Monlpellier.
I. Il n'est pas d'investigation clinique, dans le domaine
des affections nerveuses, qui n'ait, comme complément
nécessaire, sinon comme exploration fondamentale, la re-
cherche minutieuse de l'état des réflexes. On reconnaît donc
implicitement à ceux-ci, malgré la contingence des résultats
qu'ils fournissent, une très grande importance tant au point
de vue clinique pur, qu'au point de vue de la recherche des
processus pathologiques. Qu'il s'agisse des réflexes tendi-
neux, qu'il s'agisse des réflexes cutanés, les études faites à
ce sujet sont encore bien loin d'avoir donné tous les résultats
que l'on est en droit d'en attendre. Ceci est surtout à re-
marquer pour certaines maladies du système nerveux central
et en particulier pour la paralysie générale.
Frappés, non seulement par la pénurie des travaux sur
Archives, 2° série, t. X. 29
- 150 CLINIQUE NERVEUSE.
cette dernière question, mais aussi par les renseignements
contradictoires que la lecture de ceux-ci nous a révélés, nous
avons eu l'idée d'étudier plus particulièrement les réflexes
dans la paralysie générale, en limitant nos recherches à
l'étude du réflexe plantaire et des rapports qu'il peut pré-
senter avec le réflexe rotulien.
Notre prétention n'est pas de faire l'accord entre des opi-
nions discordantes et de trancher, d'un seul coup, la question
d'une manière irrévocable.
Ce modeste travail n'a d'autre but que de nous permettre
de nous faire- une opinion personnelle, basée sur l'examen
d'un nombre de cas suffisant et capable de nous donner la
raison des divergences que nous venons de signaler.
II. Avant d'exposer les résultats que nous avons
obtenus, nous jetterons un rapide coup d'oeil sur les travaux
déjà faits à ce sujet, en ne retenant que les conclusions aux-
quelles ont abouti les différents auteurs.
Sepilli' croit remarquer que dans la paralysie générale,
le fait le plus fréquent est la permanence et non l'abolition
des réflexes tendineux.
Deux ans après, paraît en Angleterre une note dans
laquelle Beatley établit que les variétés qui existent dans
le réflexe patellairc chez les paralytiques généraux, sont en
relation avec un processus pathologique différent dans la
moelle. 11 divise ainsi en trois types les cas de paralysie
générale qui peuvent'se présenter.
Premier type. 7'a&eMe.'réflexes rotuliens manquent ;
il l'autopsie on trouve une lésion des
cordons postérieurs ;
Deuxième type. Paralysie avec sclérose latérale de la
moelle : les réflexes sont exagérés;
Troisième type. Forme cérébrale : les cordons de la moelle
sont intacts, les réflexes rotuliens nor-
maux ou légèrement affaiblis.
Mais jusque-là, dans la littérature médicale, l'on ne trouve
rien de bien particulier sur les réflexes cutanés et en parti-
' Seppilli. I reflessi lcmlinei, etc. (Hiv.sper. di (l'cn. e tli mcd,legale),
fasc. 3 (1882) et 1 (1883).
2 Beatley. General paralysies of the insane. li. G5, avril 18Sj).
RÉFLEXE PLANTAIRE DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 451
culier sur le réflexe plantaire dans la paralysie générale.
Dans sa thèse inaugurale, Bettencourt-Itodrigues ' soutient
que l'exagération des réflexes tendineux coïncide souvent
avec une abolition complète des réflexes cutanés et spéciale-
ment du réflexe plantaire. ,
Quelques années plus tard, Renaud = aboutit à des
conclusions toutes différentes. Il admet que, dans la
paralysie générale, les réflexes tendineux sont exagérés dans
la plupart des cas ; l'exagération des réflexes qui est la
règle au début de l'affection, peut faire place, dans certains
cas à l'abolition des réflexes au sur et à mesure que l'af-
fection progresse ; le réflexe cutané plantaire est altéré
dans les deux tiers des cas, et cette altération consiste aussi
souvent en exagération qu'en abolition ; le réflexe
plantaire s'exagère surtout chez les paralytiques géné-
raux dont les troubles psychiques l'emportent sur les
(roubles somatiques ; contrairement à ce que dit Betleu-
court, il n'existe aucun rapport entre l'exagération du
réflexe rotulien et une allure particulière du réflexe cutané
plantaire.
Ces. Aâostini 3 dit que dans la première période de la
paralysie générale, il y a défaut ou diminution des réflexes
cutanés, sauf le réflexe plantaire qui est exagéré, et accen-
tuation des réflexes tendineux. Dans la deuxième période le
réflexe s'exagère encore.
III. Par ce rapide historique, aussi bref que possible,
l'on voit que les résultats des auteurs sont loin de concorder.
La question semble donc être à reprendre, d'autant plus
que, depuis ces dernières années, entre en ligne la connais-
sance d'une perturbation dans le réflexe cutané plantaire, ou
plutôt d'une modification dans la forme de ce réflexe, dans
certains états pathologiques, signalée pour la première fois
par Babinsl : i en 1896 à la Société de biologie, et à laquelle on
s'accorde pour reconnaître une certaine valeur.
Successivement, dans une communication au Congrès de
1 l3ettenc : ourt-liodrigues. Contribution à l'élude des réflexes dans la
paralysie générale des aliénés. Thèse de Paris, 1880.
y Itenaiul. Elude des réflexes dans la paralysie générale el recherches
statistiques sur l'étiologie de celte affection. Thèse de Paris, 1S93.
3 Ces. Agostmi. Etude sur les réflexes superficiels et profonds comme
aide au diagnostic dans les maladies mentales, 189G.
452 li CLINIQUE NERVEUSE.
neurologie de Bruxelles (1897), dans une deuxième" note
publiée dans les comptes rendus de la Société de biologie et
dans une clinique médicale faite Li l'hôpital de la Pitié et
publiée dans la Semaine médicale (1898), Babinski montre
l'importance de ce qu'il appelle « le phénomène des
orteils ». Par sa constance dans certaines affections, avec
lésions du système nerveux central, ce phénomène acquiert
une signification particulière et devient en quelque sorte
« le témoin d'une perturbation dans le fonctionnement du
système pyramidal ».
Depuis lors, quelques recherches ont été faites concernant
le réflexe plantaire dans les différentes affections du système
nerveux central. Nous citerons principalement celles de
Cestan '. Parmi les malades qu'il a examinés, se trouvent
six paralytiques généraux ; chez tous, le réflexe plantaire
est normal, ou, pour mieux dire, il y a de la flexion des
orteils.
Mais, résumant dans son travail les recherches faites jus-
qu'alors, Cestan rappelle que Babinski a publié un cas de
paralysie générale avec suppression des réflexes tendineux et
phénomène des .orteils. Et Cestan dit : « Dans la paralysie
générale et surtout dans la forme clinique désignée sous le
nom de paralysie générale associée au tubes d'origine syphi-
litique, l'existence du signe de Babinski vient révéler une
altération du faisceau moteur volontaire, qui aurait sans lui
passé inaperçu, les réflexes tendineux étant supprimés ».
On conçoit donc qu'j, non seulement l'on doive s'attacher
à rechercher l'état du réflexe plantaire dans la paralysie
générale, mais qu'il soit encore indispensable d'en étudier la
modalité, capable de nous permettre d'apprécier avec plus
d'exactitude l'état du système nerveux dans cette maladie.
Pour mieux mettre en relief les caractères du réflexe
cutané plantaire sous ses différentes formes dans la paralysie
générale, nous décrirons en quelques mots ce qu'est ce réflexe
à l'état normal.
L'excitation de la plante des pieds provoque généralement
une flexion des orteils sur le métatarse, flexion surtout
marquée dans les derniers orteils et plus forte quand on
excite la partie interne de la plante du pied. Dans certains
1 Gazette des hôpitaux, 1900.
RÉFLEXE PLANTAIRE DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE. li53
cas pathologiques, l'excitation de la plante du pied pro-
voque au contraire l'extension des orteils ; ce mouvement
est surtout marqué pour les premiers orteils et en parti-
culier pour le gros orteil. De plus, le mouvement d'extension
se fait plus lentement que le mouvement de flexion et devient
plus fort pour une excitation de la partie externe de la face
plantaire (Babinski). C'est cette modalité pathologique du
réflexe plantaire que Babinski désigne sous le nom de
((phénomène des orteils ». On tend aujourd'hui à l'appeler
signe de Babinski, et non sans juste raison.
IV. Nos recherches ont porté sur trente-cinq malades
présentant le syndrome de la paralysie générale. Nous
aurions pu avoir une base statistique plus importante ; mais
nous avons cru devoir éliminer, comme sujets d'observation,
certains cas particuliers, pouvant devenir une cause d'erreur
dans l'interprétation des différentes formes du réflexe plan-
taire. C'est ainsi que nous avons laissé de côté ceux de nos
malades qui, pour une raison ou pour une autre, présen-
taient, surajoutés à leurs troubles moteurs, des troubles
paralytiques nettement localisés, tels qu'une hémiplégie par
exemple. Comme l'a montré Babinski, l'hémiplégie, en effet,
peut apporter non seulement une perturbation dans l'inten-
sité du réflexe plantaire, mais aussi un trouble dans la
forme de cette réaction motrice. Ceci ressort encore des
recherches récentes de MM. Vires et Calmctte 1.
La technique que nous avons suivie a été en grande partie
celle préconisée par Babinski. Pour l'examen de nos malades,
nous avons cherché à obtenir une résolution complète des
muscles du membre inférieur. Les malades sont étendus dans
le décubitus dorsal, les membres inférieurs un peu fléchis, le
pied dans une légère abduction. Nous faisons couvrir les
yeux au malade, afin qu'il ne soit pas prévenu des expé-
riences successives que l'on se propose de faire sur lui. Les
incitations ont été portées sur les différentes parties de la face
plantaire et, en particulier, du côté interne et du côté externe
de la plante du pied. Nous avons répété nos recherches à plu-
sieurs reprises et à quelques jours d'intervalle, tantôt en sui-
1 Vires et Calmetle, Recherches sur le phénomène des orteils (signe de
Babinski). Société de Xeurologie, 7 juin 1900, et Nouveau Montpellier
médical, 43° année, 29 juillet 1900.
z
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1
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1
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1
1
1
z
458 CLINIQUE NERVEUSE.
vant la technique que nous venons d'indiquer, tantôt en fai-
saut asseoir les malades sur le bord de leur lit, les jambes
pendantes, et en supprimant le plus possible toute contrac-
tion musculaire. Disons enfin que, pour chaque malade,
nous sommes passés successivement des incitations faibles
aux fortes incitations, c'esl-à-dire de la chatouille la plus
légère il la piqûre d'épingle. Dans les mêmes séances, on
examinait l'état du réflexe rotulien.
Le tableau ci-après résume les résultats que nous avons
obtenus pour chaque malade. Afin de rendre ce tableau à la
fois plus simple et plus clair, nous avons employé des signes
particuliers représentant soit une exagération, soit une
diminution, soit l'état normal, ou enfin une abolition du
réflexe rotulien ou du réflexe plantaire.
RÉFLEXE PLANTAIRE DANS LA PARALYSIE GÉNÉRALE. 459
A. En ce qui concerne l'état du réflexe plantaire :
1° Dans la paralysie générale, le réflexe plantaire serait plus
souvent diminué qu'exagéré ; il serait quelquefois normal et
très rarement aboli ;
° En outre, dans un certain nombre de cas spéciaux, le
réflexe subirait une perturbation rappelant celle désignée
par Babinski sous le nom de phénomène des orteils. Toute-
fois, la modalité que nous ont présentée nos malades, est
légèrement différente de celle observée par Babinski, dont il
ne faut pas oublier que les recherches ont porté principale-
ment sur des hémiplégiques organiques.
L'extension des orteils, quoique nettement marquée, est
en général peu intense. En outre, le mouvement d'extension
est beaucoup plus marqué pour les quatre derniers orteils
(6 fois sur 7), le gros orteil restant parfois immobile. Une
seule fois nous avons obtenu une extension très nette et très
prononcée du gros orteil pareille à celle indiquée par Ba-
binski.
B. Si nous étudions maintenant comparativement l'état du
réflexe plantaire et du réflexe rotulien, et. si nous cherchons à
établir un rapport entre l'état de ces réflexes et la période
évolutive il laquelle est parvenue la paralysie générale, d'une
part, et la nature de celle maladie d'autre part, nous voyons
que :
1° a). Il n'existe aucun rapport entre le réflexe plantaire
et le réflexe rotulien dans la paralysie générale vraie.
b). Au contraire, dans quelques cas de paralysie généra-
lisée syphilitique (pseudo-paralysie générale syphilitique des
auteurs), il nous a paru exister une relation assez constante
entre l'état du réllexe rotulien et celui du réflexe plantaire.
Nous avons observé, en effet, dans ce cas, la concomitance
de l'exagération du réflexe rotulien avec un mouvement
d'extension des orteils.
2' Quoique, d'une façon générale, on ne puisse affirmer a
priori une relation quelconque entre la période d'évolution
de la maladie et une allure particulière du réflexe cutané
plantaire', nous pouvons cependant dire :
a). Que, dans la première période, nous l'avons trouvé
tantôt normal, tantôt diminué, tantôt aboli, tantôt exagéré.
L'exagération du réflexe se rencontre : ait beaucoup plus
460 CLINIQUE NERVEUSE.
fréquemment i : t cette période que les autres modifications
(7 fois exagéré, 3 fois diminué, 3 fois normal).
b). Que, dans la deuxième période, le réflexe plantaire
ne s'est jamais trouvé exagéré. Il a été ou normal (2 fois),
ou, le plus souvent, diminué (6 fois).
c). Enfin, dans la troisième période, nous ne l'avons
trouvé jamais exagéré, et plus souvent diminué que nor-
mal.
Ce qui précède s'applique uniquement aux modifications
quantitatives du réllexe ;
3° On ne peut établir une relation quelconque entre l'état
des réflexes soit rotulien, soit plantaire, et la nature de la
paralysie générale observée. Ceci pour la paralysie générale
vraie.
4° Au contraire, dans la plupart des cas de paralysie géné-
ralisée syphilitique, nous avons observé une modalité parti-
culière du réflexe plantaire rappelant le signe de Babinski et
décrite plus haut (voir A, 2°).
a). Sur sept malades, présentant une démence avec trou-
bles paralytiques d'origine syphilitique, six d'entre eux, tous
parvenus soit à la période d'état, soit à la période de déclin
de la maladie ont présenté cette modalité ; celle-ci s'est
toujours trouvée correspondre à de l'exagération du réllexe
rotulien.
b). Sur quatre de ces six malades, l'extension des orteils
se produisait également du côté droit et du côté gauche;
chez les deux autres elle n'existait que d'un côté seulement,
le pied du côté opposé présentant alors une simple dimi-
nution du réflexe plantaire.
c). Le septième malade, tout à fait à la période initiale de
sa cérébropathie syphilitique, ne nous a présenté que de la
diminution du réflexe cutané plantaire, sans aucune pertur-
bation, mais coïncidant avec l'exagération du réflexe rotu-
lien.
5° Enfin, nous avons rencontré l'extension des orteils, en
dehors de la catégorie précédente, chez un seul paralytique
général. Celui-ci était en même temps atteint d'un ancien
mal de Pott, avec déformation de la colonne vertébrale. Il
n'existait chez lui aucun trouble paraplégique indiquant une
altération médullaire quelconque. Le signe de Babinski avec
l'exagération des réflexes rotuliens, venait cependant révéler
A propos DE l'éducation DES enfants arriérés. 4G1 1
l'existence d'un trouble latent du système pyramidal, mais
tout à fait indépendant, croyons-nous, de sa paralysie géné-
rale.
Si, comme le veut Babinski, le phénomène des orteils est
le témoin d'une perturbation dans le fonctionnement du
système pyramidal, les faits que nous venons de signaler,
viendraient donc à l'appui de l'opinion qui trace une ligne de
séparation absolue entre la paralysie générale vraie et la
prétendue paralysie générale syphilitique.
Nos constatations tendent, en effet, à prouver que, dans
les cas de paralysie généralisée syphilitique, il existerait un
trouble unilatéral ou bilatéral des fonctions du faisceau pyra-
midal. Ce trouble relèverait, évidemment, d'une lésion ner-
veuse localisée, ayant amené un certain degré de dégéné-
rescence du faisceau moteur volontaire.
Ceci démontrerait donc nettement l'existence de lésions
localisées dans la plupart des cas de pseudo-paralysie géné-
rale syphilitique; ce qui viendrait apporter un argument de
plus en faveur de la théorie dualiste défendue par Charcot,
Joffroy, et, à Montpellier, par notre maître, le professeur
Maire t.
ASSISTANCE ET PÉDAGOGIE SPÉCIALE.
A propos de l'éducation des enfants arriérés;
Par le Dl "'Ali L,
Médecin adjoint (les aik'5l1 alil'né ?
I
Le XX.0 Congrès de la Ligue de l'Enseignement, tenu à la
Sorbonne du 9 au 1 : 2 juillet 1900, a émis les voeux suivants :
1° Que la loi du 30 juin 1838 sur les aliénés soit revisée
dans le plus bref délai possible en adoptant l'obligation de
l'assistance et de l'éducation des enfants idiots, arriérés, épi-
leptiques, etc. ;
462 ) assistance et pédagogie spéciale.
2° Qu'il soit fait un recensement spécial de tous les enfants
anormaux ;
3° Qu'il soit créé pour les recevoir, un certain nombre
d'établissements régionaux, soit autonomes, soit annexés aux
asiles d'aliénés départementaux et qu'il soit pourvu à leurs
frais au moyeu d'un prélèvement opéré sur les fonds du pari
mutuel;
4° Que la direction et l'inspection de ces écoles soit réser-
vée au personnel enseignant avec la collaboration médicale
en ce qui concerne les idiots et les arriérés;
5° Qu'il soit créé un diplôme spécial pour cet enseignement,
que ce diplôme soit délivré par un jury comprenant au moins
un professeur spécialiste, que les différentes méthodes em-
ployées soient vulgarisées au moyen de livres spéciaux que
pourront consulter les candidats, les membres du jury, les
inspecteurs et que chaque établissement pour enfants anor-
maux, rédige annuellement sa monographie où seront consi-
gnées les améliorations apportées aux méthodes et les essais
suivis ou non de réussite ; .
0° Qu'il soit créé dans chaque département un internat ou
école d'apprentissage pour les jeunes vagabond» et pour les
élèves indisciplinés des écoles primaires (les élèves incorri-
gibles des écoles seront séparés des jeunes vagabonds et
occuperont dans les internats des bâtiments spéciaux).
C'est la première fois qu'en France, à notre connaissance,
un tel voeu est émis par un Congrès. C'est à ceux qui ont créé
dans notre pays l'éducation pédagogique des arriérés, à
Itard, à Seguin, à M. Bourneville et à ses collaborateurs, iL
M. Blin que sont dus ces résultats. Espérons que nous vei-
rons bientôt les pouvoirs publics exaucer de tels voeux !
Nous nous permettrons cependant de formuler d'abord
quelques critiques générales à l'adresse du Congrès : on n'y
a pas distingué, à tort suivant nous, l'idiot de l'imbécile.
L'idiot est, suivant la définition célèbre qu'en a donnée Esqui-
rol « un individu chez lequel les facultés intellectuelles ne se
sont pas développées ». Donc, chez lui, absence complète
d'intelligence, il est à ce point de vue inférieur aux
animaux même, il n'a généralement même pas l'instinct de
la conservation, et, s'il n'est pas toujours complètement
privé de la faculté du langage articulé, il n'arrive que très
tard à dire papa, maman et quelques autres mots très simples
A PROPOS DE L ÉDUCATION DES ENFANTS ARRIÉRÉS. 463
et ne dépasse jamais ce faible niveau. Un pareil être n'a rien
à apprendre dans une école si élémentaire qu'elle puisse
être. C'est dans un hospice qu'on doit le recueillir, lui
apprendre à être propre, à marcher, à parler. Ceci est uni-
quement de la compétence d'infirmiers bien dressés, sous la
direction d'un médecin et ne relève en rien de l'instituteur.
Tout au contraire l'imbécile « possède toutes les facultés
intellectuelles à un degré rudimentaire » (J. Voisin), ses
facultés peuvent êtres perverties, mais elles existent, on peut
donc les développer, les redresser; ici apparaît le rôle de
l'instituteur. C'est donc à lui qu'on doit confier ces enfants,
dans les conditions que nous discuterons plus loin, de même
que c'est à lui qu'il appartient d'instruire et d'éduquer les
enfants simplement arriérés, vicieux ou épileptiques que, en
raison de leur état, on ne peut recevoir dans les écoles pu-
bliques ordinaires. Ceci posé, permettons-nous quelques cri-
tiques spéciales sur les différents voeux émis par le XXe Con-
grès :
1° Tout d'abord est-il indispensable que l'obligation de
secourir, d'assister et d'instruire les enfants imbéciles, arrié-
rés et épileptiques, soit régie par une loi sur les aliénés, qui
reflète plus ou moins l'esprit de la loi du 30 juin 1838. Nous
ne le pensons pas : l'obligation de l'instruction résulte, pour
eux comme pour tous, de la loi du 28 mars 1882 sur l'ins-
truction obligatoire, la seule lacune à combler est d'étendre
le bénéfice de l'assistance à cette intéressante catégorie de
malades et d'infirmes. La loi sur les aliénés, quelle qu'elle
soit, 'cherchera toujours et surtout à sauvegarder la liberté'
individuelle et la fortune des malades ; ici nous avons affaire
à des mineurs dont les biens sont en tous cas protégés, les
parents on à leur défaut les tuteurs ont des obligations très
nettes définies par le Code civil et point n'est besoin, à ce
point de vue, d'une législation nouvelle ni spéciale. Quant à
la question de la liberté individuelle elle ne se pose pas davan-
tage ; les enfants élevés dans des maisons d'éducation pour
arriérés (qui ne peuvent être évidemment que des internats),
y seront soumis aux règles des établissements ordinaires
d'instruction avec cette différence toutefois qu'il ne saurait y
avoir de grandes vacances, mais seulement des congés très
courts; mais cnfin là non plus une loi n'a pas à intervenir.
C'est une maison d'éducation d'un genre spécial et voilà tout.
464 ASSISTANCE ET PÉDAGOGIE SPÉCIALE.
D'ailleurs, si pour les imbéciles et pour la majorité des
arriérés on ne saurait refuser le certificat de placement dans
un asile; il serait certainement abusif de considérer comme
aliénés tous les épileptiques sans distinction ; une pareille
manière de voir ne répond ni à l'esprit de la loi sur les aliénés
ni à la réalité des choses; beaucoup d'épilepliques, la majo-
rité assurément, ne présentent pas de troubles mentaux. Que
d'épilepliques ont tenu des places brillantes dans le monde et
quelques-uns d'entre eux sont universellement considérés
comme des grands hommes. D'ailleurs la gratuité clans les
asiles d'aliénés n'est obligatoire que pour les gens qui y sont
envoyés par l'autorité administrative : par placement d'office
et ce mode de placement est réservé aux malades qui trou-
blent l'ordre public et compromettent la sécurité des per-
sonnes, y compris la leur bien entendu. En général ce sont
les familles qui demandent le placement d'un enfant arriéré
dans une maison spéciale. Or, dans beaucoup de départe-
ments les placements faits à la demande des familles, ne sont
accordés qu'à titre onéreux. C'est pour toutes ces raisons
que nous ne croyons pas que l'obligation de l'éducation des
enfants imbéciles, arriérés et épileptiques, puisse être consi-
dérée comme une conséquence de la loi sur le régime des
aliénés. C'est une nouvelle loi à faire, loi sur l'éducation des
enfants qui par leurs troubles on leur faiblesse intellectuels
ne peuvent trouver place dans les écoles publiques.
2° Sur le voeu n° 2 : Recensement des enfants anormaux,
nous nous bornerons à signaler la difficulté d'une pareille
oeuvre et à poser la question comment et par qui sera fuit ce
recensement.
3°-4° Nous souhaitons, comme la Ligue de l'Enseignement,
que l'on crée pour les arriérés des établissements spéciaux
d'éducation, mais nous estimons que c'est à un médecin versé
dans l'étude des maladies mentales que doit en appartenir la
direction ; nous ne saurions admettre en effet le voeu n° 4.
L'état mental de ces enfants est un état pathologique ; c'est
donc au médecin et au médecin seul qu'en appartient la thé-
rapeutique. Ce n'est que sous sa direction que l'instituteur
doit agir, et non pas comme le veut la Ligue de l'Enseigne-
ment, l'instituteur maître de l'établissement faisant appel
quand il le juge utile, au médecin.
Tel qu'il est formulé, le voeu n° 4 est en contradiction for-
A propos DE l'éducation DES enfants arriérés. 465
mclle avec le voeu n° 3. Si on annexe l'école des arriérés à un
établissement d'aliénés; si même on fait des établissements
autonomes d'enfants anormaux régis par la loi sur les aliénés
il est impossible que la direction de l'éducation soit con-
fiée aux instituteurs. Le médecin, en effet, dans ces établis-
sements, a tout pouvoir et c'est à lui qu'incombe le soin de
diriger l'éducation des malades qui fait partie du traitement
moral. Tel est, suivant nous, ce qui doit être, mais pour les
raisons que nous avons énumérées plus haut, nous croyons
qu'il est indispensable de faire de la maison d'éducation des
arriérés un établissement autonome, sous la direction d'un
médecin aliéniste, mais non régi par la loi sur les aliénés.
- 1)0 Pour le voeu n° 5 nous ne pouvons que nous associer à
la commission du Congrès et souhaiter que les méthodes qui
donnent de bons résultats soient vulgarisées et que les échecs
même soient connus pour éviter qu'on ne retombe dans les
mêmes erreurs.
G° Quant au voeu n° 6, nous ne voyons pas pourquoi on
assimilerait les élèves indisciplinés des écoles primaires aux
jeunes vagabonds ; et en effet, parmi ces derniers, les uns,
ceux qui font des fugues plus ou moins prolongées sont
comme les indisciplinés dont ils ne sont qu'une variété, des
dégénérés que l'on doit soumettre au mode d'éducation que
M. le D'' Thulié appelle l'orthophrénopédie et pour la des-
cription duquel nous renvoyons à l'intéressant ouvrage de
l'auteur'. Les autres petits vagabonds sont ceux qui le sont
devenus parce qu'ils sont orphelins, ou parce que leurs
parents sont malades ou en prison, ou pour quelqu'autre
motif analogue. Ces petits malheureux devraient être, dans
les villes et dans les campagnes, remis, comme le fait l'Assis-
tance publique de Paris au service des Enfants assistés, qui
s'occupe d'eux en l'absence des' parents et les rend à ceux-ci
dès que les circonstances le permettent. D1' 'V.IllL.
II
La question d'assistance et d'éducation des enfants arriérés,
a été soulevée bien avant le Axe Congrès de la Ligue de
Th (ilié. Orlhophrénopédie. Paris, 1900. (Libraiiie du Progrès médical.)
Voir aussi les 20 volumes des Comptes rendus de Bicêtre de M. Itour-
neville (1880-1900).
Archives, 2° série, t. X. 30
466 - ASSISTANCE ET PÉDAGOGIE SPÉCIALE.
l'Enseignement. Dès '1879, M. le D'' Bourneville organisait à
Bicètre la section des enfants idiots et épileptiques, de même
qu'en 1890 il organisait la Fondation Vallée, consacrée aux
tilles, et en 1893 l'Institut médico-pédagogique, consacré aux
enfants arriérés et nerveux pour les familles aisées. Par de
nombreuses publications, il a montré chaque année ce qu'on
était en droit d'attendre d'un traitement approprié, et notam-
ment au Congrès d'assistance publique tenu en 1894 à Lyon.
Quant a la Ligue de l'Enseignement, ce n'est pas la première
fois qu'elle s'occupe en Congrès de cette question.
A Rouen en 1896. à Rennes en 1898, elle a émis des voeux
en faveur des enfants qu'avait laissés de côté la loi du
22 mars 1882, mais une fois les Congres terminés, personne
n'entendait plus parler de rien.
Il ne faut pas s'étonner si le XXe Congrès de la Ligue n'a
pas plus en 1900 qu'en 1896 et 1898, fait entre les dégénérés
inférieurs de tout ordre, la distinction qu'aurait désirée
le D' 'VaIJ1. 11 n'y a-vait pas de médecin, ne l'oublions pas 1.
D'ailleurs cette distinction entre l'idiot et l'imbécile peut-
elle se faire en réalité ? Je n'hésite pas à répondre non, au
moins au point de vue pédagogique. Nous avons vu des idiots
complets, ne parlant pas, ne marchant pas, se souillant con-
tinuellement, n'ayant en un mot qu'une vie végétative, s'amé-
liorer sous l'influence du traitement médico-pédagogique et
arriver à marcher, parler, être propre, lire, écrire et travail-
ler utilement. Puisqu'il est impossible de diagnostiquer a
priori l'incurabilité de l'idiot, pourquoi, de parti pris, laisser
ce malheureux en dehors de ceux que l'on croit pouvoir tirer
bénéfice du traitement.
Quant aux épileptiques, ceux que nous voudrions voir
assimiler aux idiots et aux arriérés, sont ceux qui, par suite
de la fréquence de leurs accès, de l'arriération de leur intel-
ligence, de la violence de leurs impulsions constituent un
danger pour les autres, comme pour eux-mêmes et ne peu-'
vent être confondus avec les enfants normaux.
La loi du 30 juin 1838 doit, à notre sens, être revisée pour
qu'elle ne considère plus simplement comme des aliénés
à enfermer les enfants idiots, mais comme des malades,
1 Disons en passant combien est regrettable l'indifférence que profes-
sent en France, il l'égard des questions d'enseignement, la plupart des
médecins.
A propos DE l'éducation DES enfants arriérés. 467
comme des enfants qui peuvent, dans la grande majorité des
cas, tirer bénéfice d'un traitement médico-pédagogique. Le
législateur devrait ordonner l'organisation dans chaque
département d'asiles-écoles où les familles, et à leur défaut
les communes, pourraient envoyer leurs malheureux idiots',
qui bénéficieraient ainsi du devoir absolu qu'a l'Etat de
pourvoir à l'instruction de toits.
Le nom que nous donnons à ces établissements spéciaux,
nous dispense de dire combien il nous paraît nécessaire, ou
plutôt logique, de confier à des médecins seuls, avec la colla-
boration pédagogique, la direction de ces établissements. Le
rapport que nous avons déposé sur la question à la Ve Com-
mission du Congrès de la Ligue de l'Enseignement, est très
explicite sur ce point.
Les indisciplinés, qui, pour nous, ne sont que des idiots
moraux, devraient être confiés aux mêmes personnes, sous
le bénéfice d'une rigoureuse catégorisation.
Parmi les vagabonds, il y a une distinction à faire ; nous
ne devons pas confondre les vagabonds par accident des
vagabonds par nature. Les premiers ne sont pas des anor-
maux, il suffit de supprimer la cause de leur vagabondage
pour en faire des enfants ordinaires ; quant aux seconds, ils
sont* des idiots moraux, et comme tels, des sujets tout indi-
qués pour les asiles-écoles.
Les contradictions relevées par M. le D'' Wahl s'expliquent
par ce fait que le Congrès a eu le tort, suivant nous, de ne
pas faire une distinction entre les aveugles et les sourds-
muets d'une part, et les idiots et les arriérés de l'autre. En
les englobant tous sous la rubrique générale d'enfants anor-
maux, la Commission du Congrès qui, comme nous l'avons
déjà dit, ne comptait que des membres de l'enseignement,
n'a voulu, malgré notre intervention, voir en eux que des
enfants à instruire et non des malades à soigner. La dis-
cussion des rapports de la Commission devant le Congres,
proposée et expédiée en quelques minutes, en fin de séance,
en l'absence du rapporteur et du secrétaire, n'a pu éclairer ni
mettre au point la question. Nous avons pu, en lisant les
1 Sous la dénomination générale d'idiots nous comprenons tous les
enfants qui présentent une arriération plus ou moins accentuée au point
de vue intellectuel et moral, depuis l'idiot complet jusqu'à l'enfant qui
présente une légère différence avec l'enfant normal.
468 ASSISTANCE ET PÉDAGOGIE SPÉCIALE.
procès-verbaux, constater avec regret combien l'assemblée
générale des congressistes s'était montrée indifférente sur
une question d'une aussi grave importance au point de vue
humanitaire et social. Alors que nous aurions dû montrer la
voie aux nations voisines, de longtemps encore nous leur
serons inférieurs sur ce point, comme, hélas ! sur bien
d'autres. Quand on se décidera, en France, à faire enfin
quelque chose pour les arriérés, on en sera réduit à copier
ce qui se fait depuis plusieurs années déjà dans les Pays
scandinaves, en Angleterre, en Belgique, en Allemagne, aux
Etats-Unis, etc.
J. Boyer,
SecréLaire de la Ve Commission
du Congrès de la Ligue de l'Enseignement; i
. professeur à IIuslilul mélico-pddapognlue,
\'111') -sur-Seille.
III
M. Camailhac, l'un de nos instituteurs à la section de
Bicêtre avait été chargé par la Ligue de l'Enseignement, de
faire à la Ve Commission du Congrès, un rapport préalable
sur une question ainsi formulée : Education des enfants
anormaux Moyens et employer pour assurer leur ins-
truction primaire et professionnelle.
Après avoir parlé des avettgles et des sourds-muets, il a
exposé la question qui nous intéresse dans les termes sui-
vants :
Idiots, arriérés, épileptiques. La statistique des idiots et arrié-
rés n'es pas mieux établie que celle des aveugles et des sourds-
muets. En se basant sur les états dressés par les conseils de
.revisiou 1.1 : \1. Couëtoux et Uamon du Fougeray évaluent leur
nombre à 50 OOU approximativement. Quelle est la situation de
ces malheureux ? Quand ils sont réputés inoffensifs, ils reslent
dans les familles; dans le cas contraire ils sont internés dans les
asiles d'aliénés.
C'est que l'idiotie rentrant dans le cadre des maladies mentales
tombe sous le coup de la loi du 30 juin 1838 sur les aliénés. Cette
loi comprend, sous le nom générique d'aliénés, les idiots, les imbé-
ciles, les crétins. Que le malade soit maniaque, mélancolique,
paralytique général, dément ou idiot, il est aliéné de son
espril. Une telle assimilation est aujourd'hui condamnée par les tra-
a PROPOS DE l'éducation DES enfants arriérés. 469
vaux de Ferrus, Falret, Edouard Seguin, Bourneville, Legrain, etc. ].
11 est prouvé que les enfanls dégénérés sont non seulement suscep-
tibles d'une éducation quelconque mais que cette éducation est
fructueuse puisqu'elle permet de rendre à la vie commune un
certain nombre de ces malades. Etant admis que l'on peut « trans-
former ces êtres inutiles et parfois dangereux en individus raison-
nables et utiles à la société », examinons ce qu'on a fait en France
pour atteindre ce but.
Le département de la Seine, toujours au premier rang lorsqu'il
s'agit d'oeuvres d'assistance et d'éducation, possède cinq établisse-
ments spéciaux (1.)icèti-e, la Salpêtrière, Vaucluse, Villejuif 2, Fon-
dation \'allée) dans lesquels il hospitalise environ un millier d'en-
faut.. En province, lo établissements privés reçoivent quelques
centaines d'enfants.
Dans les départements qui ne possèdent aucun établissement
spécial les enfants idiots reconnus dangereux sont enfermés dans,
les asiles d'aliénés où ils n'ont à leur disposition aucun moyen
d'instruction; les autres, les inoffensifs, sont la plupart du temps
privés des soins les plus élémentaires que réclament leur état.
C'est une faute dont les conséquences se font sentir chaque jour.
Il est du devoir de l'Etat de prendre au plus tôt les mesures
nécessaires pour améliorer cette situation. Il est vrai que l'on
parle depuis longtemps de la revision de la loi du 30 juin 183S.
Dans ses séances du 14 décembre 1886 et du 1 mars 1887 le
Sénat adoptait un projet dont l'article 1er était ainsi conçu :
« Les aliénés réputés incurables, les épileptiques, les idiots et
les crétins peuvent être admis dans les asiles d'aliénés tant qu'il
n'a pas été pourvu à leur placement dans des maisons de refuge,
des colonies ou des établissements appropriés spécialement à
l'isolement et au traitement des épileptiques et à l'isolement ou à
l'éducation des idiots et des crétins. »
Ce texte manquait de précision. Devant la Commission de la
Chambre des députés chargée d'examiner le projet, M. Ernest
Lafond fit prévaloir la rédaction suivante :
« Les asiles publics doivent comprendre deux quartiers annexes
destinés au traitement, l'un des épileptiques, l'autre des idiots et
des crétins. Les épileptiques, les idiots et les crétins continuent à
être admis dans les asiles d'aliénés en attendant l'ouverture de
quartiers spéciaux. Dans un délai de dix ans, les départements
devront ouvrir des établissements spéciaux ou des sections spé-
ciales destinées au traitement et à l'éducation des enfants idiots,
imbéciles, arriérés, crétins, épileptiques ou paralytiques. Plusieurs
' Le rapporteur aurait pu rappeler le nom de Delasiauve, très connu
encore à Bicêtre. Cette affirmation est trop absolue. (B.).
2 Le quartier consacré aux filles idiotes à Villejuif n'existe plus depuis
deux ans. \B.)
470 assistance ET pédagogie spéciale.
départements pourront se réunir pour créer ces établissements ou
sections. »
Comme pour les aveugles et les sourds-muets la question est
encore pendante.
Conclusion.- Dans ces conditions nous croyons devoir soumettre
à votre approbation les voeux suivants :
Viraux. - Le X.,11 Congrès de la Ligue française de l'Enseigne-
ment, réuni à Paris, émet le voeu :
Qu'une commission spéciale soit nommée. par les ministres de
l'Instruction publique et de l'Intérieur en vue de rechercher les
moyens d'étendre l'instruction obligatoire aux anormaux et que
cette commission soit composée, en majorité, de personnes s'occu-
pant de cet enseignement spécial.
Et subsidiairemeut : 1° Que la loi du 28 mars 1882 soit appli-
quée aux aveugles et aux sourds-muets; 2° Que la loi du 30 juin
1838 sur les aliénés soit revisée dans le plus bref délai possible en
adoptant l'obligation de l'assistance et de l'éducation des enfants
idiots, arriérés, etc. ; 3° Qu'il soit fait un recensement spécial de
tous les enfants anormaux ; 4° Qu'il soit créé, pour les recevoir, un
certain nombre d'établissements régionaux au moyen d'un pré-
lèvement opéré annuellement sur les fonds du pari mutuel ;
5° Que la direction et l'inspection de ces écoles soient réservées au
personnel enseignant.
IV
L'auteur de ce rapport ne paraît pas s'être rendu un
compte exact de ce qui a été fait dans le service même de
Bicêtre, au sujet de l'hospitalisation, du traitement et de
l'éducation des enfants anormaux de cette catégorie spéciale. *
Il ignore aussi notre rapport au Congrès national d'Assistance
publique de Lyon, notre rapport à la Chambre des députés
en z1889 et notre rapport au Conseil supérieur d'Assistance
publique en '1891 sur le projet de revision de la loi du 30 juin
1838. S'il avait consulté ces documents, il aurait vu que dans
le rapport de 1889 nous avions fait adopter un article ainsi
conçu :
AtITtCLE premier. Les établissements destinés au traitement el
à la garde des aliénés sont de deux sortes : publics ou privés. -
Les asiles publics doivent comprendre deux quartiers annexes
destinés au traitement : l'un des épileptiques, l'autre des idiots et
des crétins.
Les épileptiques, les idiots et les crétins continueront à être
A propos DE l'éducation DES enfants ARRIÉRÉS. 471 1
admis dans les asiles d'aliénés en attendant l'ouverture de quartiers
spéciaux.
Dans un délai de dix ans, les départements devront ouvrir des
établissements spéciaux ou des sections spéciales destinés au traite-
ment et à l'éducation des enfants idiots, imbéciles, ARRIÉRÉS, crétins,
épileptiques ou paralytiques. Plusieurs départements pourront se
réunir pour créer ces établissements ou sections.
11 aurait vu aussi dans le second rapport que nous avions
fait adopter parle Conseil supérieur de l'Assislance publique,
un arlicle analogue :
Article premier. Les établissements destinés au traitement el
ci la garde des aliénés sont de deux sortes : publics ou privés.
Les asiles publics doivent comprendre deux quartiers annexes
destinés au traitement : l'un des épileptiques, l'autre des idiots et
des crétins.
Les épileptiques, les idiots et les crétins continueront à être
admis dans les asiles d'aliénés en attendant l'ouverture de'quartiers
spéciaux.
Dans un délai de dix ans, les départements devront ouvrir des
établissements spéciaux ou des sections spéciales destinées au traite-
ment ci à l'éducation dCS E.\FANTS IDIOTS, 11113lsCILE, AItItlCItli, crétins,
épileptiques ou paralytiques. Plusieurs départements pourront se
réunir pour créer ces établissements ou sections.
Il aurait été ainsi amené à écrire que IL Ernest Lafond
n'avait fait que reproduire, en ce qui concerne les enfants
idiots, épileptiques, etc., les conclusions de nos deux rap-
ports. M. Lafont, d'ailleurs, le reconnait.
La première réforme à accomplir est celle que nous avons
proposée, c'est-à-dire créer des asiles-écoles^ dans tous les
départements, car il n'y en a pas un seul où il n'y ait pas
au moins trois cents enfants des 'deux sexes pour lesquels
s'impose impérieusement l'assistance, le traitement et l'édu-
cation spéciale. Elle sera facilitée aussi par une seconde
réforme qui s'impose la création de classes spéciales pour
les enfants arriérés, c'est-à-dire les moins malades et dont
le rapporteur ne dit pas un mot, dans toutes les villes, où ces
créations sont possibles. C'est alors que la loi sur l'obligation
de l'enseignement pourra être appliquée à cette catégorie
d'enfants anormaux, la plus considérable.
L'auteur du rapport émet le voeu que la direction des éta-
blissements consacrés aux idiots, imbéciles, etc., soit confiée
aux instituleurs. S'il avait parcouru les nombreuses obser-
472 PIII'sI0LOG11; pathologique.
valions contenues clans les comptes rendus du service de
Bicètre, mis à sa disposition chaque année, il aurait vu que
tous ces enfants sont incontestablement des malades et que,
p1.r conséquent, c'est à des médecins qu'ils doivent être confiés.
Les infirmières, les infirmiers, les institutrices, les institu-
teurs, sont eux, des auxiliaires. En ce qui concerne les classes
spéciales, le rôle de ces derniers. doit être plus étendu, mais
là encore l'intervention du médecin est indispensable.
BOUIt\ L1'ILLI : .
PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUE.
A propos de la théorie des neuro-diélectriques.
(Réponse à M. PAUL SOLLIER.)
Au début d'un travail intitulé Théorie des que
j'ai publié ici même en septembre 1900, j'ai eu soin de citer les
physiciens et les physiologistes dont les observations et les expé-
riences tendaient à faire admettre l'identité des ondes nerveuses
et des ondes électriques, ou tout au moins leur analogie, idée qui
date, je crois, de du l3ois-Raymontl.
Dans le numéro des Archives de Neurologie d'octobre, M. Paul
Sollier rappelle qu'il a lui-même soutenu cette idée dans des
conférences faites l'hiver dernier à l'Université nouvelle de Bruxelles,
conférences encore inédites, et dans un ouvrage intitulé le Problème
de la mémoire, paru en janvier 1900.
M. Paul Sollier, dont j'apprécie hautement plusieurs ouvrages,
doit bien penser que je n'aurais pas manqué de citer ceux-là au
même titre que ceux de ses prédécesseurs, si j'en avais eu con-
naissance. Toutefois, puisqu'il s'agit d'une question de priorité, je
dois dire que mes recherches sur ce sujet paraissent notablement
antérieures aux siennes, car j'en ai commencé la publication en
1898 dans les Archives médicales d'Angers. (Du tremblement à la
paralysie, 1898-1899-1900.)
Charles IW rr-S.wcu : .
ENSEIGNEMENT
Les Cliniques psychiatriques des Universités
allemandes ' ;
Par le D' Pau. SliRII : U\,
Médecin des asiles publics cl'alién5s de la Seine,
charge de missions.
Université de Berlin (Prusse).
(Faculté de médecine : 14 Professeurs ordinaires ; 33 Professeurs
extraordinaires; 0 Privat-docenteu ; 1,3-13 étudiants).
La clinique des maladies mentales et nerveuses de l'Université
de Berlin est installée dans le quartier d'aliénés de l'hôpital de la
Charité (I\ünig,-Charité-Krankenhaus). Cet établissement, qui
ne répond plus auv exigences de la psychiatrie moderne, a joué
un rôle capital dans l'histoire des progrès de la médecine mentale
en L'russe. Nous croyons devoir le rappeler brièvement.
C'est en nos que fut créé il la Charité un quartier spécial
d'aliénés, Ernstllorrn (mort en 1 8 tS) utilisa le premier, en 1818,
son service d'aliénés pour l'enseignement clinique. Ce quartier
spécial fut érigé, en 1832, en un service autonome que l'on confia
à W. Ideler. Ce médecin fit des conférences cliniques sans cepen-
dant donner un enseignement régulier. Ludwig Meyer, Weslphal,
firent ensuite également quelques leçons de psychiatrie. C'est
seulement en 1SG3 que renseignement clinique des maladies men-
tales fut organisé d'une façon régulière à l'Université de Berlin,
quand Griesinger fut nommé professeur de psychiatrie et directeur
de la clinique. L'influence de ce savant aliénisle fut considérable,
et se fait sentir encore aujourd'hui en Allemagne. On lui doit
d'importantes réformes : introduction du non-restreint, annexion
à la clinique d'une section de neuropathologie, réorganisation de
l'enseignement psychiatrique ; création d'asiles urbains pour les
cas aigus et de colonies ouvertes pour les chroniques, etc. A Grie-
singer succéda Westphal (1868). Tout le monde connaît les remar-
quables travaux du professeur de Berlin sur les réflexes tendineux
t Voir Archives de Xelll'ologie, nos ai et 59, t. X, p. 193 et 371.
474 ENSEIGNEMENT.
(signe de \Veslphal), sur la paralysie générale, l'agoraphobie,
l'inversion sexuelle. 1\'eslphal adjoignit à la clinique universitaire
un important service de policlinique. La clinique de psychiatrie de
Berlin a été une pépinière d'aliénistes et de neuropathologues dis-
tingués, aujourd'hui professeurs : Ludwig Meyer, Binswanger,
Fürstner, Bernhardt, Itemak, Moëli, Thomsen, Siemerling,
Oppenheim, etc.
Actuellement le titulaire de la chaire de psychiatrie est le doc-
teur Jolly, précédemment piofesseur à Strasbourg (1873-1890).
Le personnel médical de la clinique universitaire se compose,
pour la section de psychiatrie, en outre du professeur, de trois
médecins assistants dont l'un est professeur extraordinaire, le
Dr Koppen, et l'au 1 i-e pi@ivat-docent, le DI'W est ph al , et de trois méde-
cins volontaires. La section de neuropathologie (ïG lits) et le ser-
vice de la policlinique ont pour assistant M. le D'' i\I. Privas-
docent, qui est secondé par deux médecins militaires et deux
médecins volontaires.
Le professeur Jolly donne, chaque semaine, trois leçons de psy-
chiatrie clinique (lundi, mardi, vendredi, de 9 à 10 heures) et une
conférence de neuropathologie (jeudi, de 11 à 12 h. 112) avec poli-
clinique. La policlinique des maladies nerveuses de la Charité est
publique; elle a lieu trois fois par semaine (lundi, mercredi, ven-
dredi, de il heures à 1 heure).
En dehors des leçons magistrales, l'enseignement des maladies
nerveuses et mentales est encore assuré à Berlin (18\H-) par de
nombreux cours :
Les conférences cliniques de neuropathologie, de psychiatrie et
de médecine légale du professeur Mendel ; le cours (payant) du
professeur Bernhardt sur les maladies nerveuses, l'électrodiagnostic
et l'électrothérapie (présentation de malades et exercices pra-
tiques) ; -le cours (gratuit) d'électrodiagnostic et d'électrothérapie
du D' Remak (avec démonstrations) ; -le cours (payant) de dia-
gnostic des maladies du système nerveux et d'électrothérapie
du D' Hemah ; - le cours (payant) de diagnostic neuropathologique
et d'électrothérapie du D'' Eulenburg ; le cours (payant) de dia-
gnostic des maladies du système nerveux avec exercices pratiques
du D1' Goldscheider : -les conférences (payantes) de diagnostic et de
traitement des maladies du système nerveux, avec considérations
sur l'électrodiagnostic et l'électrothérapie, du professeur Oppen-
heim; les conférences publiques sur les maladies de la moelle
par les professeurs Jolly, Oppenheim, Leyden ; les conférences
(gratuites) sur les maladies du cerveau, du D'' Moëli; -le cours
public sur les rapports des maladies du système nerveux avec les
autres affections, du professeur Bernhardt; -les exercices pratiques
(payants) d'histologie appliquée à la pathologie du système ner-
veux, par les professeurs Oppenheim, Mendel et Kuppen;
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 475
les leçons (gratuites) sur la pathologie de la sensibilité et du mou-
vement, du D''Golischeider; -les conférences de psychiatrie géné-
rale, du professeur Mendel; -les conférences de psychiatrie médico-
légale, du Ut' Koppen ; - les conférences de thérapeutique générale
des maladies nerveuses, du D' Goldscheider.
Le non-restreint, introduit par Griesinger en 186, et le traite-
ment par le lit sont appliques à la clinique de Berlin. Il y a des
salles de surveillance continue.
La clinique psychiatrique a, jusqu'en 1892, servi de bureau d'ad-
mission pour les aliénés de la ville de Berlin. Le nombre des
entrées a été, pour l'année 1889-1890, de 2 097 aliénés et 766 épi-
leptiques et hystériques. Depuis quelques année ? , les asiles muni-
cipaux d'aliénés recevant directement des malades, le nombre des
admissions a diminué à la Charité, qui ne sert plus de bureau
d'admission que pour un secteur déterminé de la ville de Berlin.
En 1893, le nombre des malades admis a été de U47 (669 hommes
et 478 femmes). La durée moyenne du séjour est, pour les hommes,
de 20 jours, et, pour les femmes, de 21 jours.
La population de la clinique était, le 1er avril 1889, de 152 alié-
nés et de 32 épileptiques et hystériques.
Population (l01' janvier 1898) ; aliénés : 6 : ij névroses convulsives :
60 ; délirants : 26. Nombre des admissions en 1897 ; aliénés : sol ;
névroses convulsives : 9·i0 ; délirants : 5 ? 1 .
Nous ne dirons rien de l'organisation matérielle de cette clinique,
qui est située dans un vaste bâtiment à deux étages dont la cons-
truction remonte au siècle dernier (1798). La clinique psychia-
trique et neurologique de l'Université de Berlin va d'ailleui être
reconstruite. Elle comprendra 200 lits.
Université de Greisswald (Prusse, province de Poméranie).
(Faculté de médecine : 9 Professeurs ordinaires ; 9 Professeurs
extraordinaires; 3 Privat-llocenten; 380 étudiants )
Des cours de psychiatrie ont été faits dans cette Université dès 1831.
Dans ce but, on a utilisé l'asile provincial de Greisswald, trans-
formé, le le, avril 1889, en « Clinique royale psychiatrique». (liüni-
gliche psychiatrische Klinik.)
Population (le, janvier 1898) : 4 malades (21 hommes, 24 fem-
mes). - Nombre des admissions en 1897 : 48 (24 hommes, 24 fem-
mes).
Le professeur, Ut' IL Arndt, est directeur de la clinique ; il est
assisté de deux médecins.
476 ENSEIGNEMENT.
Université de Kiel (Prusse, province de Sclilesvig-Ilolsteiii).
(Faculté de médecine : 7 Professeurs ordinaires ; 8 Professeurs
extraordinaires; 8 Privat-docenten ; 257 étudiants.)
L'Université de Kiel décide (1897) la création d'une clinique de
psychiatrie, située à proximité de la ville, à vingt minutes seule-
ment des autres instituts universitaires. Le nombre des lits aété
fixé à 120, dont 100 pour aliénés du régime commun, et 20 pour
pensionnaires. La clinique a été construite aux frais de l'Etat. Elle
admet les malades ayant leur domicile de secours dans la province
à raison d'un prix de journée ne dépassant pas celui des [asiles
provinciaux.
Le Dr Siemerling vient d'être nommé professeur de clinique
psychiatrique à l'Université de Kiel (1900).
Université de Goettingen (Prusse, Province de Hanovre).
(Faculté de médecine : 12 Professeurs ordinaires ; 5 Professeurs
extraordinaires; Privat-docenten ; 211 étudiants.)
C'est l'asile provincial de Goettingen qui sert de clinique psychia-
trique universitaire. Celle-ci a été fondée en 1866. L'asile, ouvert
à la même époque, a été successivement agrandi par la construc-
tion de nouveaux pavillons, l'un pour 28 (1884), l'autre pour 10 ma-
lades (1888) et de deux quartiers de surveillance pour hommes et
femmes (1897).
Population (31 mars 1890) : 392 (235 hommes, 157 femmes).
Personnel médical : le professeur Ludwig Meyer; 1 médecin en
second, le professeur Cramer ; cinq assistants '.
Population (ter janvier 1898) : 315 malades (206 hommes, 139
femmes). 1\Tom6nn, des admissions (en 1897) : 138 malades
(82 hommes, 56 femmes).
Université de Tûbingen (Royaume de Wurtemberg).
(Faculté de médecine : 8 Professeurs ordinaires; 5 Professeurs
extraordinaires; 3 Privat-docenten; 232 étudiants.)
Les maladies mentales ont été enseignées à l'Université de
Tûbingen dans la première moitié du siècle par le professeur von
lschenmaycr, mais la clinique psychiatrique est de date toute
récente (1891). Elle est située à proximité des autres cliniques.
' Le professeur Ludwig Meyer, décédé le 8 février 1900, a été rem-
placé par M. Cramer.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 4ï7
Population normale : 120 malades de 3° classe ; 20 pensionnaires
de 1"° et de 2° classe. Le prix de revient total de la clinique a
été de lu.000 francs se décomposant ainsi : -.
478 S ENSEIGNEMENT.
Université d'Erlangen (Bavière).
(Faculté (le médecine : 9 Professeurs ordinaires ; 5 Professeurs
extraordinaires ; 1 Privat-docent ; 338 étudians.)
Il n'y a pas lieu d'insister sur la clinique psychiatrique de cette
Université, puisqu'elle' ne constitue pas un établissement spécial.
C'est en effet l'asile d'aliénés d'Erlangen qui sert à l'enseignement
clinique. La création de la chaire des maladies mentales à l'Uni-
versité d'Erlangen remonte à l'année 1850.
L'asile clinique, construit en 1846 en forme de croix, agrandi
en 1866, 1876, 1880, 1892, 1891 et ils9 : >, comptait, au le" janvier
1898, 704 malades (403 hommes, 361 femmes;. Le nombre des
admissions dans le courant de l'année 1897 a été de 200 (100 hom-
mes, 94 femmes).
Personnel médical : le professeur de clinique, Dr Specht et sept
médecins.
Nombre des lits : 857. -
Prix de revient du lit : j.24 francs.
Université de Heidelberg (Grand-Duché de Bade).
(Faculté de médecine : 13 Professeurs ordinaires; 8 Professeurs
extraordinaires; 11 Privat-docenten; 281 étudiants.)
L'Université de Heidelberg ne possède une chaire de maladies
mentales que depuis une vingtaine d'années. C'est le 15 octobre
1878 que fut inaugurée, sous la direction du professeur Fiirstner,
la nouvelle clinique de p"ychiatrie (UniveI'siLLits-1rrenklinik), située
à proximité des autres cliniques universitaires. C'est la première
clinique psychiatrique universitaire construite en Allemagne con-
formément aux indications judicieuses formulées par Griesinger.
Jusqu'alors, on s'était contenté d'utiliser pour l'enseignement des
maladies mentales les asiles provinciaux voisins des universités.
Le chiffre des lits est de 80. Le prix de revient de chaque lit a
dépassé 10.000 francs. Le terrain a une superficie de plus de 2 hec-
tares. Lapopulation réelle était, le le" janvier 1890, de 84 malades.
Le nombre des admissions s'est élevé, en 1889, à 152.
Le personnel médical se compose du professeur de psychiatrie,
en même temps directeur de la clinique, le Dl' Kraepelin, d'un
médecin en second qui est Privat-docent, de deux assistants et de
deux médecins stagiaires (Volontirür4te).
Population (1° janvier 1898) : 116 malades (00 hommes, 56
femmes). Nombre des admissions en 1897 : 280 malades (153
hommes, 127 femmes).
M. Kraepelin, qui considère les quartiers de surveillance continue
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. 479
comme des organes indispensables au bon fonctionnement d'une
clinique psychiatrique, estime que le nombre des lits de ces pavil-
lons spéciaux doit s'élever à 20 ou 30 p. 100 du nombre total des
lits. 11 faut, d'ailleurs, tenir compte aussi du chiffre des admis-
sions. Dans le quartier de surveillance continue doivent être placés
les sujets atteints de psychoses récentes, les malades à idées de
suicide, ceux qui refusent les aliments, les agités, les paralysés, les
gâteux et les aliénés atteints d'affections intercurrentes, en un mot
tous les patients pour lesquels une surveillance spéciale est néces-
saire. Il est bon d'avoir deux sections de surveillance distincte^,
l'une pour les malades calmes, l'autre pour les agités. La
lion des infirmiers doit être au minimum de 1 pour 3 malades.
Université de Marbourg (Prusse).
(Faculté de médecine : 12 Professeurs ordinaires; 4 Professeurs
extraordinaires ; 6 Privat-docent en ; 216 étudiants.)
L'Université a fondé, en 1877, une clinique psychiatrique qui a
été installée à l'asile d'aliénés de Marbourg (province de Hesse).
Cet asile, qui a coûté plus de 2 millions, a été construit (1872-75)
sur les plans du professeur Ludwig Meyer (de Güttingen). Situé il
deux kilomètres de la ville, sans mur d'enceinte ni grilles, il se
compose d'une série de dix pavillons séparés (Cottage-System), dont
deux sont consacrés aux sujets ayant besoin d'une surveillance
continue, aux agités. On y applique depuis longtemps le traite-
ment par le lit. Dans ces pavillons de traitement, les infirmiers sont
dans la proportion de 1 pour 2 malades. Dans les autres quar-
tiers, dont la population est de 20 malades environ, la proportion
est de 1 infirmier pour 3 aliénés.
Il n'y a pas de galeries couvertes, sauf pour relier les pavillons
cliniques au bâtiment central.
Pas de quartier d'isolement à proprement parler. Le quartier
des agités possède 7 chambres d'isolement pour 40 malades. Des
salles de bains sont contiguës aux chambres d'isolement (bai-
gnoires en cuivre rouge). Les autres pavillons ont une salle de.
bains et une chambre d'isolement (capacité : 15 mètres cubes).
Bâtiment central avec salle des cours (Auditorium) , labora-
toires, etc. Infirmiers et infirmières couchent dans les dortoirs des-
malades. Le surveillant en chef et la surveillante en chef sont logés
dans les pavillons de traitement.
Nombre de lits : 300.
Population au ler janvier 1898 : 2t7 malades (111 hommes, 13G
femmes).
Nombre des admissions (année 1897) : 228 malades (114 hommes,.
114 femmes).
480 0 ENSEIGNEMENT.
Personnel médical : le professeur Tuczek, directeur médecin en
chef de l'asile, un médecin en second, Privat-docent, deux assis-
tants, deux médecins volontaires.
La clinique psychiatrique étant à 2 kilomètres de la ville, les
étudiants y sont conduits en omnibus.
Le non-restreint, le traitement par le lit sont depuis longtemps
appliqués. Il en est-de même pour l'Open-door : on ne voit ni
murs d'enceinte, ni grilles.
Chauffage central vapeur età airchaud. Eclairageclectrique.
Eau de source en abondance.
Tout à l'égout et champ d'épuration 1.
Université de Fribourg (Grand-Duché de Bade).
(Faculté de médecine : 13 Professeurs ordinaires; 7 Professeurs
extraordinaires; 13 Privat-docenten; 327 étudiants.)
La clinique psychiatrique de Fribourg (Psychiatrische Klinik an
der Universitiit) a été ouverte en 1887, sous la direction d-u profes-
seur Emminghaus. Le nombre des lits est de 90.
Population (1° janvier 1S90) : 94 malades (39 hommes et 55
femmes).
Nombre des admissions en 1889 : 121 malades.
Population (fer janvier 1898) : 113 malades (18 hommes, G3
femmes).
Nombre des admissions en 1897 : 134 malades (81 hommes,
73 femmes).
Le personnel médical se compose, outre le professeur, d'un
médecin en second, d'un médecin assistant et d'un médecin vo-
lontaire.
Université de Breslau (Prusse, province de Sibérie).
(Faculté de médecine : 11 Professeurs ordinaires; 13 Professeurs
extraordinaires; 16 Privat-docenten ; 287 étudiants.)
- La clinique psychiatrique a été fondée en 1877. Elle est installée
depuis 1888 dans des bâtiments nouveaux (SlZicllisclces Krankenhaus)
qui servent aussi de quartier municipal d'aliénés.
Population (ICI' avril ils(0), 199 malades (103 hommes, 96
femmes).
Séjour moyen des malades, 70 jours.
Personnel médical ; le professeur Wernicke, un médecin en chel
(Oberarzt) et deux médecins assistants.
Population (1 ? janvier 1808) : 215 malades (107 hommes, 108
femmes).
' D'après Buffet, Voyage il travers asiles. 1888 et Laehr, Die Ileil- und
Pflege .lzcslallen, etc.
LES CLINIQUES PSYCHIATRIQUES. li 81
Nombre des admissions (1897) : 766 malades (532 hommes, 234
femmes).
Université de Strasbourg (Alsace-Lorraine). z
(Faculté de médecine : 12 Professeurs ordinaires; il Professeurs
extraordinaires; 10 Privat-docenten; 233 étudiants.)
La clinique des maladies mentales et nerveuses de l'Université
de Stiasbourga été fondée en 1872, agrandie en 1877. La nouvelle
clinique, construite, en partie du moins, conformément aux vues
de Griesinger, a été inaugurée en 1886. Il est regrettable qu'on
n'ait pas adopté pour cet établissement le système des pavillons
détachés à rez-de-chaussée. Le bâtiment de la clinique, construc-
tion massive, est situé à proximité des autres instituts cliniques.
Dans les chambres d'isolement les fenêtres sont constituées par
des châssis de fer forgé encadrant des carreaux de 15 millimètres
d'épaisseur.
Le chiffre normal de la population est de 90 aliénés et 30 épilep-
tiques ou nerveux. Au point de vue économique, la clinique dépend
de l'hôpital civil. Elle reçoit les aliénés arrêtés par la police à
Strasbourg et dans la banlieue ; ceux originaires de la Basse-
Alsace aux mêmes conditions que l'asile de district de Stephansfeld,
enfin ceux des autres districts et des pays voisins, aux frais du
fonds spécial de la clinique psychiatrique. La clinique admet aussi
un certain nombre de malades transférés de l'hôpital pour délire
alcoolique ou pour troubles délirants survenus au cours de mala-
dies somatiques.
Dans son discours d'inauguration, le professeur Jolly, faisant
allusion aux desiderata formulés par Griesinger, et dont la clinique
de Strasbourg était la réalisation, déclarait que les établissements
destinés à l'enseignement clinique de la psychiatrie devaient être
séparés des grands asiles ordinaires et placés dans les villes, en
intime connexion avec les autres cliniques. 11 montrait le rôle
important que peuvent remplir dans l'assistance des aliénés les
asiles urbains, et les considérait comme une nécessité pour toute
ville et pour tout hôpital d'une certaine importance.
La population de la clinique était, au commencement de 1889 :
aliénés, 73 ; épileptiques et « nerveux », 58.
Nombre des admissions en 1889 : aliénés : 274 ; épileptiques et
« nerveux » : 123.
Consultations, en 1889 : 564 cas.
Population de la clinique (juillet 1895) : 120 malades.
Personnel médical : le professeur Fürstuer et trois assistants, dont
l'un est Privat-docent.
Archives, 2° série, t. X. 31
482 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
Population (1° janvier 1898) : aliénés : Ci (23 hommes, 38
femmes); nerveux et épileptiques : 28 (16 hommes, 12 femmes).
Nombre des admissions en 1897 : aliénés : 304; nerveux et épilep-
tiques : 173. -
Malades traités à la policlinique : 554. (A suivre.)
XIII- CONGRES INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
. Section de Psychiatrie (suite).
YII. Inversion génitale (Homosexualité, uranisme). - Le per-
verti sexuel, qu'il soit exhibitionniste, fétichiste, sadique, se
réclame encore, en dépit de sa déviation, de 1 instinct naturel qui
pousse l'un vers l'autre deux êtres de sexe différent : il reste plié à
la grande loi de l'hétérosexualité. 11 appartient seulement à l'inverti
de s'y soustraire et de descendre à une substitution véritablement
tératologique en ne recevant d'excitation génitale que d'un individu
de son propre sexe. Il est à peine besoin de dire qu'il ne saurait
être question, ici, que de l'inverti constitutionnel et non du pédé-
raste vulgaire, individu acquis par démoralisation, par désir de
sensations nouvelles, à un vice qui a contaminé divers milieux
sociaux avec une fréquence plus ou moins grande suivant les pays
et l'époque de l'histoire. L'inverti constitutionnel est toujours un
malade dont les tendances doivent être irrésistibles puisqu'il
marche dans la vie dépouillé du sexe qu'il extériorise seulement,
alors qu'il porte au-dedans de lui-même le sexe opposé à celui que
son organisation physique affiche. C'est malgré lui et instinctive-
ment, tout en violant l'instinct naturel, qu'il va vers le sexe sem-
blable. Comment la détermination de cette homosexualité s'ac-
complit-elle ? Faut-il admettre que l'individu naît de toutes pièces
avec cette substitution qui fait de lui une femme dans un corps
d'homme, suivant une expression caractéristique, dont les termes
mêmes sont d'ailleurs discutables.
Convient-il de voir là le fait d'une hésitation et, finalement,
d'une ambiguïté anatomique ? Mais, si cette origine était vraiment
le résultat d'une erreur embryologique, est-ce que la répercussion
de cette origine ne se retrouverait pas, très fréquemment, dans la
constitution somatique de l'inverti ? Ne rencontrerait-on pas à
tout instant, prise en quelque sorte sur le fait, cette oscillation
entre le choix embryologique du sexe et les cas d'hermaphrodisme
SECTION DE PSYCHIATRIE. 483
physique ne viendraient-ils expliquer la formation de l'homo-
sexualité ? Or, on sait que le plus ordinairement l'uraniste est
doué de tous les attributs de la plus complète virilité. Il faut
chercher ailleurs. La clinique, elle, semble mieux nous guider.
Elle nous montre que le phénomène de l'inversion reconnaît, en
somme, la même pathogénie que les autres perversions sexuelles
et que, là encore, il faut demander surtout à l'émotivité morbide,
à la désharmonie fonctionnelle le secret delà détermination homo-
sexuelle. Un choc fortuit est survenu qui, de même que pour
toutes les autres obsessions, n'a pris de valeur que par l'état de
réceptivité émotionnelle. C'est en souvenir de cette impression
forte, avec les représentations mentales dont elle est l'occasion, que
l'idée s'impose peu à peu et que la tendance homosexuelle va
acquérir son énergie obsédante et impulsive. Et la chose n'est si
attractive bientôt que par la crainte qui s'y allie... Cette tendance,
au temps des imprécisions de la vie génitale, n'a été d'abord
qu'une sollicitation vague et confuse, et dissimulée en quelque
sorte, dans la pénombre de la vie subconsciente. Ce n'est que plus
tard qu'elle s'affirmera avec toute la netteté d'un besoin morbide
irrésistible.
Tout en tenant compte des variations que peut subir le type
clinique (Krafft-Ebing), il importe avant tout d'en retenir les véri-
tables signes distinctifs qui l'isolent si nettement du vice. C'est en
visant spécialement ce type clinique, qu'on peut définir l'inversion
génitale : Une perversion totale de l'instinct génésique, ci forme
obsédante et impulsive, impliquant une tendance homosexuelle i¡ ? é-
sistible el généralement si exclusive que le sexe semblable est seul
capable d'éveiller l'orgasme vénérien.
Des faits très rigoureusement observés prouvent que dans
l'amour homosexuel, le fétichisme, le masochisme, le sadisme et
même l'érotomanie, peuvent se rencontrer. La jalousie de l'inverti
appelle des réactions dont la médecine légale peut avoir à s'oc-
cuper.
VU ! . EI\OTOI.\"'1E, Dans la folie de l'amour chaste (Esquirol),
ce n'est pas la sphère génitale, à proprement parler, qui nous donne
l'image de l'aberration amoureuse, c'est l'esprit, c'est l'imagina-
tion. Il y a tant de sentiment dans cet amour qu'il ne s'y trouve
plus que cela... C'est une sorte de rêve d'adoration et tout se
borne il cette adoration mystique. La passion, absolument profonde
d'ailleurs, absorbante, exclusive, est affranchie de tout appétit
charnel. L'amour est tout intellectuel et plane dans le vagne des
tendresses éthérées. Non seulement il est immatériel, mais il va
jusqu'à être impersonnel : " on connait l'érotomane amoureux d'une
ombre, d'un symbole, d'une étoile ! ... Le cerveau postérieur n'a
aucune part dans son activité; le cerveau antérieur y préside seul
484 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
(Magnan). C'est l'idée qu'exprimait Esqnirol en disant : « Chez
l'érotomane, l'amour est dans la tête». Il est certain que, dans les
cas les plus nets, le désir est absolument idéal. L'idée de cohabi-
tation est assez souvent répulsive, en quelque sorte, pour ces
êtres maladivement épris... Rien n'est singulier comme l'illusion
grâce à laquelle l'érotomane se persuade que son amour est par-
tagé. Tout est interprété comme une démonstration significative
et si cette idyllique amour ne reçoit pas toute satisfaction, c'est
dans la conviction robuste de l'érotomane, que les méchants se
mettent en travers de cette réalisation... L'érotomane ne doute
pas de l'existence, chez l'être ainsi adoré, d'un état d'âme corres-
pondant au sien.
Généralement, cette aspiration amoureuse vise haut... C'est sou-
vent « une princesse lointaine » vers laquelle l'érotomane dirige
ses mystiques aspirations... D'abord timide et discret, il se dégage
enfin de l'ombre où il adorait en silence, et c'est alors que sa pour-
suite obsédante fait de lui une personne gênante et souvent dan-
gereuse. On peut définir l'érotomanie :
Une forme toute psychique de l'amour morbide dans laquelle la
perversion génésique, de nature essentiellement obsédante, pousse
irrésistiblement à la recherche de l'objet aimé, suscite des illusions
délirantes en rapport avec le roman pathologique el se dégage de
tout appétit charnel.
IX. Conclusions \IÉDlCO-LEG.1LES. Entre toutes les obsessions
impulsives, il faut mentionner celles qui ont rapport aux anoma-
lies de l'instinct sexuel parmi les plus impérieuses et les plus irré-
sistibles. Pour être déviée, la fonction n'en a pas moins les exi-
gences d'un instinct. Aussi bien la destinée de beaucoup de
pervertis sexuels est-elle d'aboutir à la satisfaction de l'appétit
morbide et de se heurter aux lois qui ont pour but le maintien
des bonnes moeurs, la garantie de la morale et de la sûreté publi-
que. Comme c'est un sentiment commun que, dans une société
bien organisée, on ne saurait être trop strict pour assurer cette
protection, la justice ne se fait jamais plus sévère qu'en matière
d'outrage et d'attentat à la pudeur. Mais l'appréhension d'un châ-
timent ne saurait être suffisante pour refréner une impulsion pa-
thologique, et la preuve de cette inefficacité est fournie, à tout
instant, par des faits démontrant que des pénalités accumulées
s'abattent sur le perverti sexuel sans le modifier en rien. Si l'état
psycho-moral d'un prévenu doit être l'objet d'une attention parti-
culière, c'est bien quand l'inculpé est appelé à répondre d'un délit
contre les bonnes moeurs, d'un crime empreint de fureur sexuelle.
Il faut reconnaître que beaucoup de magistrats inclinent à le penser
ainsi, et l'un d'eux, au Congrès d'anthropologie criminelle de
Bruxelles (1892), n'hésitait pas à déclarer que tout prévenu de ce
SECTION DE PSYCHIATRIE. 485
genre doit être soumis à l'examen d'un médecin. La préoccupation
de l'expert devra être de vérifier si l'état du sujet peut être juxta-
posé à l'un des types connus de perversion sexuelle ; et, si ce rap-
prochement peut être légitimement établi, il n'hésitera pas, étant
en face d'un malade, à le déclarer irresponsable, par application
logique de l'article or de notre Code pénal qui attribue cette irres-
ponsabilité à l'individu contraint par une force à laquelle il n'a
pu résister. Les pervertis sexuels exhibitionnistes, fétichistes, sadi-
ques, invertis, érotomanes, présentent des caractères distinctlfs
qui permettent au clinicien de les différencier des individus sim-
plement vicieux. C'est à l'asile et non à la prison qu'il faut envoyer
ces obsédés impulsifs, et le caractère odieux des attentats accom-
plis par certains d'entre eux ne doit pas faire oublier la nature
pathologique de l'acte. Il est rare, d'ailleurs, que la perversion
sexuelle soit le seul syndrome observé chez un dégénéré ; l'enquête
a, le plus souvent, pour résultat de révéler d'autres manifestations
épisodiques ; le syndromique est surtout un polysyndromique, et
lorsque l'observation médico-légale a pris note de tout cet ensemble
de signes précis, ce n'est plus seulement une opinion qu'on a
à fournir au magistrat, c'est une démonstration.
M. Régis. - Les rapporteurs n'envisagent pas le terme impulsion
de la même façon. Pour M. Garnier, l'impulsion est une sollicita-
tion motrice vers un acte. Pour M. Krafft-Ebing, c'est un acte
consciemment accompli. Il serait désirable de s'entendre exacte-
ment à cet égard, et de déterminer si l'impulsion est une tendance
morbide à un acte, susceptible d'être ou non réalisé, ou bien si
c'est l'acte lui-même. Pour ma part, je crois qu'il faut réserver le
mot « impulsion » à la propension à l'acte, et ne pas confondre
cette propension avec l'acte lui-même.
M. Garnier a laissé de côté le masochisme ou passivisme, cette
perversion ne lui paraissant pas avoir d'importance au point de
vue médico-légal. Je crois, au contraire, qu'elle peut en avoir non
par elle-même, mais par son association avec d'autres perversions :
l'exhibitionnisme, par exemple, comme cela existait chez J.-J. Rous-
seau, qui montrait son derrière sur le passage des femmes dans le
but d'évoquer la fessée qu'il eût voulu recevoir d'elles ; le fétichisme
également, comme chez un malade que j'ai récemment observé et
qui n'éprouvait de volupté que lorsque, revêtu de bas noirs, de
souliers jaunes, il était grondé, enfermé, mis au pain sec, attaché,
battu, par une femme également en bas noirs et en souliers jaunes. '
M. Garnier ne me parait pas avoir suffisamment insisté sur le côté
médico-légal de la question, celui cependant qui était en discus-
sion.
Il ne suffit pas, en effet, de constater que l'inculpé se juxtapose
à l'un des types cliniques connus pour le déclarer irresponsable
486 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.
La responsabilité des obsédés n'est pas celle des impulsifs et elle
varie également avec chaque obsédé et chaque impulsif. Il est des
obsédés sexuels, comme celui dont j'ai publié le cas dans les
Archives de l'anthropologie criminelle, dont la perversion est pres-
que purement psychique, représentative, platonique, tandis que
d'autres sont presque fatalement poussés à des actes médico-
légaux. Il y a donc là, comme toujours, en médecine légale, une
question d'espèce et de mesure, et dans chaque cas, il convient
d'étudier et de peser l'état obsédant proprement dit, et le degré
de dégénérescence, et l'existence possible des divers éléments
d'appoint, comme l'appoint alcoolique.
Une courte discussion s'engage entre M. Régis et M. Paul Gay-
nier.
La glande prostatique dans ses rapports avec les perversions
sexuelles; par SUTIIERLAND.
De la folie systématisée; par M. le Dr SEGL.1S.
De la suggestion hypnotique et de la psychothérapie dans le traite-
ment de la morphinomanie, de la dipsomanie ; par le Dr BËRILLO : '\.
Discussion : M. Doutrebente.
Séance du mercredi soir 8 août. Présidence DE M. Magnan.
Traitement de la masturbation par l'7toscia»tinc;
par les Du Mairet et DEL'l'EIL.
Du repos au lit dans le traitement des psychoses aiguës;
par le Dr BRACCO (de Jassy).
De la chirurgie des aliénes; par le Dr PicouÉ (de Paris).
Discussion : MM. Giraud et PiCQuÉ.
La famille des paralytiques généraux.
MM. Vallon et WAUL (Paris). 11 résulte de l'étude de nom-
breux cas de paralysie générale que l'on trouve fréquemment dans
les familles de ces malades, aussi bien chez leurs ascendants que
chez leurs descendants et leurs collatéraux, toutes les formes pos-
sibles de maladies nerveuses et mentales : en effet, il n'est pas
rare d'y rencontrer des aliénés vésaniques, des hystériques, des
épileptiques, des sujets atteints d'affections nerveuses de toute
nature et aussi des suicidés, des déséquilibrés de tous genres. C'est
donc suivant nous une erreur que de distinguer, comme le font
SECTION DE psychiatrie. 487
certains auteurs, l'hérédité congestive et l'hérédité vésanique et
d'admettre que la première seule se rencontre dans les familles de
paralytiques généraux.
M. Régis (Bordeaux). Nous n'avons jamais soutenu que les
descendances de paralytiques généraux n'étaient pas tarées. Nous
avons soutenu qu'elles l'étaient d'une autre façon que les familles
de vésaniques et qu'elles l'étaient moins. Elles le sont d'une autre
façon, car ce qui domine chez elles, c'est la fréquence de la fausse
couche et de la morte-naissance. Elles le sont moins, parce que la
lare qui pèse sur elles est surtout la lare syphilitique, et qu'elles
subissent une sorte d'épuration par le fait même de la mort avant
terme, qui élimine de la famille les éléments les plus mauvais.
Giraud, TOULOUSE, DOUTREBENTE et YfLLON ont également pris
part à la discussion. 1
Coahlorranznc crânien. Discussion : MM. BRiND,
BOJENOFF et BLm.
M. BLw (Vaucluse) présente un nouveau craniomètre auquel il
donne le nom de campylogramme cranien, destiné à déterminer
par la méthode des coordonnés polaires tous les points de la calotte
crânienne par rapport à un point fixe placé au centre de la ligne
bi-auriculaire. Cet appareil permet d'obtenir, par le report des
mesures sur des feuilles spéciales, toutes les courbes de la calotte
crânienne, horizontale maxima, antéro-postérieure, transverse,
obliques et d'obtenir ainsi le rayon moyen de la calotte crânienne.
La comparaison du rayon moyen de la partie gauche du crâne,
avec celui de la partie droite, donne une mesure exacte des asymé-
tries. M. Blin présente les courbes prises avec cet appareil sur divers
types pathologiques ou normaux.
Le placement des aliénés dans les familles, système d'Ecosse;
par le D1' SU'l'tIERLAND.
M. KERA VAL (d'Armentières) rappelle qu'au Congrès international
d'Assistance publique de 1889 il a fait un rapport sur : Les aliénés
hors des asiles publics et privés, les colonies d'aliénés, l'assistance
ci domicile. Sir John C113B.%LD, FLETCUER BE.1C11, CL.\1;1; BELI,,
A. Marie, BOJENOFF, TOULOUSE, SUTIIERL.1ND, DOUTREI3E\TE, Giraud
ont également pris part à la discussion. (On trouvera des ren-
seignements nombreux sur les divers modes d'assistance des alié-
nés dans les nombreux rapports de M. Bourneville, au Conseil
général de la Seine et à la Commission de surveillance.)
Des hallucinations visuelles complémentaires chez les amputés.
M, P. PARIGOT (Nancy). Chez quelques amputés il existe des
488 CONGRÈS international DE médecine.
hallucinations visuelles qui viennent se surajouter aux diverses hal-
lucinations que les auteurs ont déjà étudiées et groupées pour
constituer le membre fantôme.
D'après les faits cliniques que j'ai observés, un amputé ne sent pas
seulement son membre perdu, mais il peut le voir distinctement
sous un aspect analogue à celui du membre symétrique qui lui reste.
La vision du membre fantôme se modifie par l'inlerposition de
verres de couleur entre l'oeil du sujet et l'image caractérisée.
Les hallucinations visuelles sont tantôt spontanées, tantôt pro-
voquées par la volonté de l'amputé ou par une excitation cluclcon-
que du moignon; elles n'existent que chez les amputés qui ont un
membre fantôme, mais si ce dernier n'est senti que partiellement,
il est cependant vu dans sa totalité.
La persistance de l'association fonctionnelle du centre visuel cor-
tical avec les autres régions sensitivo-sensoriclles ou psycho-motri-
ces de l'écorce cérébrale explique la production de ces hallucina-
tions de la vue qui viennent ainsi compléter le membre fantôme.
Sur le délire consécutif aux brûlures graves.
M. Régis (Bordeaux). A mon sens, toute intoxication, quelle
qu'elle soit et d'où qu'elle vienne, si elle donne lieu à du délire,
doit produire'du délire onirique (réve en action) et, comme corol-
laire, tout délire onirique implique à son tour un substratum
d'intoxication. C'est ainsi quej'aipu établirque certaines psychoses,
par exemple la psychose traumatique et la psychose post-opéra-
toire vraies, j'entends celles dues à l'action directe ou indirecte du
shock ou des divers éléments de l'opération, et non pas à une dis-
position vésanique préexistante, étaient des psychoses aulo-toxi-
ques, à type onirique.
En est-il de même en ce qui concerne les brûlures ? On sait que
les accidents consécutifs aux brûlures graves et étendues, de même
que ceux du vernissage, sont considérés comme le résultat d'une
auto-intoxication que l'on a pu comparer à l'urémie.
Les recherches et expériences des auteurs récents, en particulier
celles de Foa, neiss, Vassale et Sacchi, Kianicine, Boyer et Gui-
mard, enfin Roger, sont très démonstratives à cet égaid. Les brû-
lures graves doivent donc, si ma proposition est vraie, se traduire,
elles aussi, cérébralement, par du délire onirique.
J'ai eu l'occasion d'étudier récemment un cas typique de délire
de brûlure, d'où il suit : Que les brûlures graves et étendues peu-
vent donner naissance à des troubles psychiques se manifestant
sous la forme de confusion mentale avec délire à type onirique ;
que c'est là un argument de plus à l'appui de l'opinion que le
délire onirique est le délire caractéristique des intoxications,
quelles qu'elles soient.
section DE psychiatrie. 489
De l'idiotie morale et de sa fréquence dans la descendance des aliénés :
par le D1' Daniel Brunet, directeur-médecin honoraire des asiles
publics d'aliénés.
Morel a démontré que les maladies mentales allaient en s'aggra-
vant d'une génération à l'autre, et qu'on rencontrait souvent la
folie morale dans la descendance des aliénés. L'exactitude de ces
deux faits, qui sont fondamentaux dans l'étude de l'aliénation
mentale, héréditaire est incontestable, et nous l'avons souvent
vérifiée nous-même. S'ils présentent d'assez nombreuses exceptions,
cela tient à ce que, lorsqu'il n'y a qu'un parent aliéné, son influence
nocive peut être diminuée, ou annihilée par celle du générateur
bien portant.
L'expression de folie morale désigne une grande perversion
morale, caractérisée par l'exaltation d'un ou plusieurs instincts
égoïstes, et l'absence plus ou moins complète des instincts altruis-
tes. Elle rend les individus, chez lesquels elle existe, incapables de
s'adapter à l'ordre social. Cette expression est impropre, parce
qu'elle parait supposer que cette perversion s'accompagne d'idées
délirantes, ce qui n'a pas lieu, à moins de complication qui, il est
vrai, n'est pas rare. Le nom d'idiotie employé par quelques auteurs
pour la désigner, quand elle est congénitale et, sous lequel Krafft-
Ebing la décrit, avec une grande précision, lui convient beaucoup
mieux. Quand elle est acquise, par suite de maladies accidentelles,
ou de mauvaises conditions sociales, on doit lui donner le nom de
démence morale.
On peut subdiviser l'idiotie morale, en idiotie proprement dite,
imbécillité et débilité morales, suivant les degrés de la perversion.
Cette idiotie est une dégénérescence, comme l'admettent Magnan,
Fèré, J. Voisin, et, non pas un retour à l'état sauvage de nos
ancêtres, comme le prétend Lombroso, au moyen d'arguments
spécieux 1.
Le peu ou pas de viabilité des enfants, des idiots moraux, ou
criminels nés, la stérilité fréquente de ceux-ci, l'absence de poils
sur plusieurs parties du corps qui en sont habituellement pourvues,
ne se rencontraient pas chez nos ancêtres, très prolifiques, doués
d'une vigoureuse santé, d'un système pileux très abondant, et qui
ne manquaient pas, d'ailleurs, de sentiments altruistes, sans quoi
ils n'auraient pas pu vivre en société.
Les stigmates physiques de la dégénérescence morale diffèrent
peu de ceux de la dégénérescence intellectuelle, que personne ne
regarde, pas plus que la folie, comme un retour atavique. Ils ne
sont d'ailleurs pas constants et, quand ils existent, ils sont parfois
1 Voir les nombreuses observations que nous avons publiées rlans nos
GOII ? ples-l'endus de Bicêtre de 1880 à 1900. (B.).
490 CONGRÈS international DE médecine.
très peu marqués, très peu nombreux, ce qui leur ôte alors toute
importance réelle. En outre, on peut les rencontrer chez des indi-
vidus dont toutes les facultés cérébrales sont bien développées.
L'idiotie morale s'accompagne souvent d'une certaine faiblesse
intellectuelle, mais elle peut aussi coexister avec la plus haute
intelligence, comme le fait justement remarquer Maudsley.
Les idiots moraux constituent un danger permanent pour la
société, et devraient être placés dans des maisons spéciales où l'on
, tâcherait d'améliorer leur état. Ils n'en sortiraient que sur l'avis
d'une commission compétente, qui examinerait si leur amélioration
est suffisante pour permettre de les rendre à la liberté.
Leur place n'est pas dans les asiles d'aliénés, où ils sont une
cause continuelle de désordre par leurs instincts vicieux et leurs
fréquentes tentatives d'évasion, contre lesquelles ces établisse-
ments ne présentent pas d'assez grandes garanties. Pour empêcher
la réussite de ces tentatives, on est forcé d'exercer sur eux une
surveillance très rigoureuse, de les priver souvent de tout travail.
ce qui rend leur vie très pénible et aggrave leur état.
On peut subdiviser les différentes formes de l'idiotie morale,
d'après l'instinct égoi-te le plus développé, et admettre des idioties
nutritive, sexuelle, destructive, ambitieuse '. L'idiotie destructive
caractérisée par l'excitation de l'instinct destructeur est la forme
la mieux caractérisée, la plus fréquente ; elle comprend la pyro-
manie, la monomanie homicide, tous les actes de violence et de
cruauté désordonnés. J'ai observé, pendant plusieurs années. deux
jeunes gens chez lesquels cet instinct était tellement irrésistible.
qu'ils ne pouvaient s'empêcher, quand ils avaient les mains libres,
de déchirer immédiatement tous leurs vêtements, de briser, de
casser tous les objets qui se trouvaient à leur portée, et l'un d'eux
se livrait, en outré, à des actes de violence sans aucun motif envers
ses gardiens, cherchait même à attenter à leurs jours. Ils n'étaient
pas épileptiques, n'avaient pas d'idées délirantes, mais présentaient
une légère faiblesse intellectuelle. Le moins violent était hémiplé-
gique depuis sa première enfance. -
L'idiotie morale est produite par des malformations et des
lésions morbides cérébrales ; elles sont moins bien connues que
celles de l'idiotie intellectuelle, parce que les individus qui en sont
atteints, meurent la plupart dans les maisons de détention, et que,
par un singulier excès de bienveillance à leur égard, l'admission
pénitentiaire refuse de laisser faire leurs autopsies, comme s'ils
étaient plus dignes d'intérêt que les aliénés, dont les autopsies sont
obligatoires, que les malades de nos hôpitaux.
L'idiotie morale est très fréquente chez les enfants des aliénés, et
'-Le même principe peut servir à établir une classification des diffé-
rentes formes de folie.
SECTION DE PSYCHIATRIE. 491 l
nous l'avons observée, nettement prononcée dans le tiers des cas
des dégénérés. Presque tous les autres, sans présenter une dégé-
nérescence aussi grande, avaient une certaine débilité morale.
Cette faiblesse des facultés morales chez les dégénérés s'explique
facilement par les causes de la folie, qui consistent ordinairement
dans une excitation, trop vive ou trop prolongée, des instincts
égoïstes, persistant pendant toute la durée des troubles intellec-
tuels, et, se prolongeait même souvent au-delà de cette durée.,
Cette excitation développe nécessairement ces instincts, et ce déve-
loppement morbide exagéré est encore accru chez les enfants des
aliénés, par la transmission héréditaire qui, comme nous l'avons
dit, est progressive.
Pour empêcher la folie et le crime, qui sont bien de la même z
famille, de se produire chez ces enfants, il importe de réprimer
leurs sentiments de la personnalité, de développer ceux de la
sociabilité, par une longue éducation morale bien dirigée, de leur
assurer une vie sobre, calme et laborieuse. L'instruction, qu'il ne
faut pas négliger, a une influence préventive, beaucoup moins
grande que l'éducation.
Séance du jeudi malin 9 août. - Présidence DE )1.
Contribution clinique el analomo-palhologique ci l'élude de la con-
fusion mentale, avec projeclions des préparations histologiques.
MM. ROUI31NO\'lTCll et Vlavianos (de Paris). Les auteurs dé-
montrent l'insuffisance des notions nosologiques, pathogéniques et
anatomo-patbologi<lues concernant le syndrome de la confusion
mentale. Ils apportent deux faits nouveaux dans lesquels le syn-
drome de la confusion mentale s'est développé nettement sous
l'inlluence d'une infection : dans le premier cas, à la suite d'un
abcès phlegmoneux du sein, dans le second, après une endomé-
trite purulente. Dans la première observation, la confusion mentale
typique était précédée d'un délire systématisé d'une durée de
quarante-huit heures. Le second cas constitue un type de confusion
mentale psycbo-primitive. Les deux cas se terminèrent rapide-
ment par la mort.
Au point de vue anatomo-pathologique, il s'agissait dans la
première observation, d'une congestion méningée, sans aucune
lésion histologique des cellules de l'écorce examinée par la mé-
thode de Nissl. Des lésions très importantes furent constatées chez
la malade dont la confusion mentale se déclara au cours d'une en-
dométrite purulente. Là, MM. Roubinovitcii et Ylavianos trouvèrent :
de l'oedème cérébral et de l'injection pie-mérienne très accentuée.
L'examen histologique des coupes faites par la méthode de Nissl
avec coloration au bleu de toluidine sur des segments de la partie
492 CONGRÈS international DE médecine.
inférieure de la troisième frontale gauche et du lobule paracentral
démontra l'existence des lésions suivantes :
1° Distension des grandes cellules de la couche pyramidale dont
la forme est devenue arrondie ; cette modification paraissant carac-
téristique et ayant été déjà signalée par Gilbert Ballet, etc.. les
auteurs proposent de la désigner par un terme spécial de Cyt-
tarcedènze (K6-¡;ê(po'l = grosse cellule ronde, o ! ô ? x = oedème), qui
.indique le changement morphologique de la grande cellule pyra-
midale ainsi que la nature oedémateuse de cette altération.
2° Chromatolyse cellulaire avec disparition des grains chroma-
tophiles ou aspect poussiéreux de ces grains.
3° Déplacement du noyau vers la périphérie de la cellule et par-
fois disparition complète du noyau.
4° Absence des prolongements dans les cellules ainsi lésées. : )0 Augmentation inusitée de noyaux névrogliques.
Contribution ci l'étude de la fréquence de l'hérédité dans l'étiologie
des états mentaux chez l'enfant.
M. Dans -)16 cas de débilité mentale ou d'imbécilité,
l'hérédité existait dans tous les cas. Dans Si- cas de psychoses di-
verses, l'hérédité se trouvait dans 6 cas, soit 92,8J p. 100. Sur ces
300 cas l'alcoolisme se rencontrait dans 68 p. 100 des cas comme
facteur étiologique et la folie dans 38 p. 100 des cas.
5m/" la physionomie el la progression de certaines lésions cellulaires
corticales accompagnant les accidents mentaux des 'Ina ladies amené-
¡'ales.
M. MATRICE FaunE (Paris) présente quinze photographies micros-
copiques reproduisant l'aspect des cellules pyramidales (grandes
cellules du lobule paracentral) chez douze malades, morts de mala-
dies générales (pneumonie, tuberculose, lésions du foie, lésions du
rein), avec des troubles mentaux plus ou moins accentués. On
constate que, dans cinq cas, les cellules ont conservé le type nor-
mal, ce qui démontre, une fois de plus, que l'on peut avoir cer-
tains troubles fonctionnels cérébraux, même accentués, sans que
la lésion correspondante de l'organe soit appréciable à nos inves-
tigations. Dans sept cas, au contraire, les cellules sont manifeste-
ment altérées, et cette altération présente exactement les mêmes
caractères dans tous les cas : forme globuleuse de la cellule,
"migration périphérique du noyau, décoloration centrale de la
cellule. '
Si donc l'hypothèse qui impute l'apparition des troubles men-
taux dans les maladies générales (délire fébrile, confusion mentale,
hallucinations, etc.) à l'action cérébrale des poisons fabriqués dans
. SECTION DE PSYCHIATRIE. 493
un organisme infecté ou intoxiqué est une hypothèse exacte, elle
peut s'appliquer avec la même vraisemblance à l'explication des
lésions que nous avons rencontrées.
Ces lésions, que nous avons vainement recherchées dans un
grand nombre d'autres autopsies d'origine variées, dont le type
est fort différent des lésions banales que l'hyperlhermie, l'agonie,
la décomposition cadavérique peuvent réaliser, paraissent devoir
être rencontrées dans les cas où une toxi-infection, quels qu'en
soient la nature et le siège, agira sur les cellules nerveuses pour
en modifier la structure et la fonction.
Discussion : MM. DOUTREBENTE, 13m.\"o, REY et Maurice FAURE.
De l'isolement des tuberculeux dans les asiles d'aliénés; par A. Marie
et 'l'ouLOUSE .
MM. Marie et TOULOUSE (Villejuif). Cette communication est
suivie de l'adoption du voeu suivant : « Le Congrès émet le voeu
qu'il soit procédé à l'isolement et au traitement des aliénés tuber-
culeux dans les asiles d'aliénés, en pavillons spéciaux pour un asile
ou en sanatoria affectés à plusieurs établissements. »
Discussion : REY, GIR.1UD, BRL1\U, DOUTREI3E¡';lE et A. Marie.
Passage entre la vie ordinaire el la maison d'aliénés; par le D' Gus-
tave d'OLAK (de Buda-Pesth).
' t
Rapport entre la criminalité des enfants et alcoolisme des parents ;
élude clinique; par M. ROI3l"OWITCli (de New-Yotk).
Conditions d'avancement du personnel des asiles; par Doutrebente.
Du travail comme moyen de traitement des aliénés et spécialement
du travail agricole à la colonie du Verger, annexée ci l'asile
d'A uxerre ; par le D1' Lapolnte.
Un cas d'empoisonnement par la strychnine par erreur d'un phar-
macien, manifestations physiques el psychiques consécutives Ú cet
empoisonnement ; parle De Terrien (Vendée). Ce travail a été
publié in extenso dans le n° 37 du Progrès médical, 1900, p. 177,
La colonie d'aliénés de Lie7·neux; par le Dr DrrEnov.
Des responsabilités pénales et civiles dans les cas de placements
familiaux d'aliénés; par les D'" Marie et TOULOUSE.
Discussion : M. DOUTRE13ENTE. - z
494 congrès international DE médecine.
Présentations de photographies, pièces tiiî«to21o-I)athologiql(es
parle D T.orr (de Lyon).
Nocivité de l'hérédité pathologique.
MM. Mairet 8t ARDIN-DEL'rEIL (Montpellier), au cours de recher-
ches faites sur les causes héréditaires de la folie; ont été amenés
à étudier, parmi les effets de ces causes sur les descendants, ceux
qu'elles exercent sur la natalité, sur la léthalité et sur le système
nerveux, ces derniers s'exprimant sous la forme de ces stigmates
que l'on regarde comme l'expression symptomatique de la prédispo-
sition. Ces auteurs ont étudié ainsi successivement, en les compa-
rant à l'hérédité normale : l'hérédité vésanique; l'hérédité qu'ils
désignent sous le nom de psychique, et qui comprend les cas dans
lesquels existent chez les ascendants des troubles du caractère por-
tés à un haut degré, sans toutefois constituer une véritable folie;
l'hérédité nerveuse; l'hérédité diathésique; l'hérédité cérébrale et
l'hérédité alcoolique.
Voici les conclusions générales auxquelles ces auteurs, sont arri-
vés : t° Aucune des causes héréditaires précédentes ne diminue la
natalité; 2° Ces diverses causes diminuent toutes la résistance
vitale, diminution exprimée par la léthalité plus grande des pro-
duits héréditaires. Cette diminution va en s'accentuant graduelle-
ment des familles saines aux familles d'aliénés, de psychiques, de
diathésiques, de nerveux, de cérébraux et d'alcooliques ; 3° La di-
minution de la' résistance vitale est surtout marquée chez les enfants
du premier âge, au-dessous de trois ans, dont la léthalité va en
croissant des familles saines aux familles des aliénés, des dialhé-
siques, des psychiques, des cérébraux, des nerveux et des alcooli-
ques ; il' La léthalité des survivants serait à peu près la même dans
les familles saines, vésaniques, psychiques et nerveuses; elle serait t
augmentée dans les familles diathésiques et alcooliques, ce qui
indique dans ces dernières une action plus générale de l'hérédité
sur les descendants; 5° Ces causes héréditaires peuvent marquer
leur action sur le système nerveux des descendants par des stig-
mates. A ce point de vue, celles qui marquent leur action sur le
moins grand nombre d'enfants sont : les hérédités vésanique et
cérébrale; puis viennent les hérédités diatéhsique et nerveuse,
dont l'action est déjà plus générale : et, enfin, l'hérédité psychique
et l'hérédité alcoolique, dont les effets sont plus généraux encore;
6° L'hérédité alcoolique, tient toujours le premier rang au point
de vue de l'influence nocive sur les descendants.
Après une allocution de MM. Magnan, Rilti et Meschède, la sec-
tion de Psychiatrie du NUI0 Congrès international de Médecine est
déclarée close. Nous rappelons à nos lecteurs que le Congrès
SECTION DE NEUROLOGIE. 49t)
des aliénistes et neu/'ologistes de langue française se tiendra au
commencement du mois d'août 1901, à Limoges.
Section de Neurologie (suite).
Séance du samedi 4 août (matin). Présidence DE M. Minor
(de Moscou).
Résumé du rapport sur La nature des réflexes tendineux ;
par le professeur E. JEKDRASSIE (de Budapest).
1° Les réflexes tendineux sont de vrais mouvements réflexes,
dont la voie mène directement à travers la substance grise de la
moelle, à la hauteur des deuxième et quatrième racines lombaires.
2° Le réllexe rotulien et les réflexes tendineux en général sont le
résultat d'une excitation brusque, mécanique, momentanée des
nerfs sensitifs des tissus environnant le tendon et ne sont pas
transmis au muscle par une vibration du tendon.
3° Le réllexe rotulien et les réflexes tendineux en général ne
peuvent être identifiés avec les autres mouvements réflexes ; les
réflexes cutanés ordinaires sont des réflexes dont l'arc remonte
jusqu'au cerveau, probablement jusqu'à l'écorce, tandis que les
mouvements réflexes qu'on observe chez les paraplégiques myéli-
tiques, à la suite d'une excitation cutanée quelque peu prolongée
et produisant des flexions de la cuisse, de la jambe et une flexion
dorsale du pied, rarement une autre forme de mouvement, sont
des réflexes pathologiques résultant d'une sorte de débordement
du courant nerveux empêché de trouver son chemin au cerveau,
ou d'une excitabilité accrue des éléments nerveux de la moelle
séparée des centres supérieurs.
4° Le tonus musculaire a une large influence sur les réflexes ten-
dineux ; s'il est augmenté, le réflexe est plus vif; l'abaissement du
tonus peut même abolir ces réflexes.
5° L'abolition des réflexes patellaires dans le tabes n'est pas suf-
fisamment expliquée par les théories actuelles; il est très vrai-
semblable que l'abaissement du tonus musculaire est la cause
ordinaire de cette abolition.
0° D'après les observations actuelles, l'abolition des réflexes ten-
dineux, en cas de maladie du cerveau, est exceptionnelle et peut
être causée par shock nerveux ou par une lésion secondaire de la
moelle. .
7° L'abolition des réflexes tendineux en cas de maladie du cer-
velet n'est notée que dans un nombre restreint de cas de cette
496 CONGRÈS international DE MÉDECINE.
affection, dans laquelle, au contraire, l'exagération de ces réflexes
est la règle. Aussi semble-t-il bien probable que dans les cas de
tumeur du cervelet cette abolition était plutôt un symptôme géné-
ral, dû à une hydromyélie consécutive ou il des contractures
rigides des muscles.
8° La perte des réflexes patellaires n'est nullement une preuve
d'une division transversale totale des éléments nerveux de la
moelle.
9° L'abolition des réflexes patellaires dans les lésions trauma-
tiques de la moelle cervicale ou dorsale est une preuve clinique
que la substance grise de la moelle lombaire est aussi atteinte;
cette extension du processus pathologique n'est pas toujours
démontrable par nos moyens histologiques actuels, mais elle est
prouvée par l'entrée en scène des troubles trophiques graves : -.
décubitus aigu, cystite et pyélite septiques, troubles vasomoteurs,
atrophie musculaire, etc. Donc l'abolition des réflexes rotuliens
est un symptôme de mauvais augure, excepté les cas possibles mais
rares où la perte de ces réflexes est causée par shock nerveux.
10° L'examen des réflexes rotuliens n'est pas toujours facile à
faire dans les états paraplégiques, il faut bien se tenir aux règles
de cet examen : il n'est pas rare qu'on réussisse à provoquer par
des moyens appropriés ce réflexe dans des cas où il semblait
absent, même avec des essais réitérés.
Résumé du rapport sur la Nature des réflexes tendineux;
par le professeur Shehrington (Liverpool).
On comprend sous ce nom deux espèces différentes de phéno-
mènes :
1° De vrais réflexes spinaux et spino-cérébraux partis des ten-
dons ;
2° Des pseudo-réilexes communément nommés phénomènes
tendineux ou « secousses » par les auteurs anglais et américains.
Les premiers (1°) sont faciles à expliquer. Les tendons des mus-
cles, que Bichat avait dès longtemps reconnus doués de sensibi-
lité, contiennent les organes terminaux des nerfs afférents. Ce
sont les organes terminaux décrits par Golgi, lluffini et d'autres.
Ces organes peuvent être excités par des moyens mécaniques, et
le stimulant qui est leur mode normal et approprié d'excitation est
probablement une tension mécanique. Les vrais réflexes tendineux
n'ont pas autant d'importance en clinique que les pseudo-réflexes
(phénomènes tendineux, « secousses »).
Les seconds (2°) ont pour type.la « secousse du genou ». On peut
objecter à la dénomination de « phénomène tendineux » le fait que
le tendon n'est pas essentiel à ce phénomène. On voit que ce ne
sont pas de vrais réflexes à ce que le temps de latence de la réac-
SECTION DE NEUROLOGIE. 497
lion est assez court pour exclure la possibilité d'une réaction par
l'intermédiaire d'un centre nerveux. La « secousse » est une réponse
directe du muscle à une tension mécanique subite. C'est seulement
quand l'excitabilité du muscle est grande qu'on peut obtenir celle
réponse directe du muscle. Quand le muscle est séparé des neu-
rones spinaux moteurs qui l'innervent, son excitabilité est trop
amoindrie pour que la réponse soit possible. Quand les racines
spinales afférentes en rapport avec le tonus spinal du muscle
sont sectionnées, l'excitabilité musculaire diminue trop pour qu'il
réponde directement à une tension mécanique subite. Aussi est-il
nécessaire pour que la « secousse » se produise que le tonus spi-
nal du muscle subsiste. L'arc réflexe dont dépend le tonus spinal
du muscle est composé de fibres nerveuses afférentes venant du
muscle lui-même (le triceps crural dans le cas de la « secousse» »
du genou) et des neurones moteurs innervant ce muscle. L'activité
de cet arc réflexe peut être exaltée ou inhibée par l'activité de
divers autres arcs spinaux ou spino-cérébraux. L'ablation des
hémisphères cérébraux entraîne immédiatement une très grande
exaltation du tonus du muscle triceps crural traduisant l'exalta-
tion de l'activité des neurones spinaux moteurs innervant ce mus-
cle. La « secousse du genou » est alors très exaltée au point qu'un
simple coup sur le tendon patellaire peut provoquer toute une
série de secousses rythmiques.
D'autre part, l'activité des neurones spinaux moteurs innervant
le triceps crural peut être amoindrie par l'excitation de l'activité
des neurones moteurs qui innervent les muscles antagonistes, les
fléchisseurs du genou. L'activité de ces neurones moteurs des flé-
chisseurs du genou est habituellement associée à un certain degré
d'inhibition des muscles extenseurs du genou. Le réflexe spinal le
plus facile à obtenir dans les membres postérieurs des animaux
par l'excitalion du membre lui-même est la flexion du membre au
genou et à la hanche. Aussi un moyen facile de provoquer l'inhi-
bition de la « secousse du genou » est d'exciter le mouvement
réflexe du membre postérieur dans une portion du membre parce
que les fléchisseurs du genou entrent en jeu, et l'activité des cel-
lules motrices des extenseurs est alors pai tiellement ou complète-
ment inhibée..L'inhibition peut être particulièrement bien obtenue
en excitant les muscles fléchisseurs eux-mêmes, par exemple le
demi-membraneux. ,
Communications diverses.
Etui actuel de la question des rapports des réflexes palelluires après
la section transversale et totale de la moelle au-dessus des lombes;
par Bruns (de Ilanovre).
1° Aucun cas nouveau n'est venu infirmer jusqu'à présent la
Archives, 2" série, t. X. 32
498 CONGRÈS international DE médecine.
communication de Bastian, d'après laquelle la lésion transversale
supra-lombaire est suivie d'une paralysie qui demeure station-
naire, accompagnée par l'abolition du réflexe patellaire ; 2° d'autre
part, les cas observés avec exactitude au point de vue du phéno-
mène de l'arc réflexe patellaire périphérique n'ont pas donné jus-
qu'à présent un bagage anatomique suffisant pour expliquer l'abo-
lition de ce réflexe ; 3° on observe encore la lésion transversale
complète et l'absence du réflexe dans les affections aiguës, eu par-
ticulier les « traumen » ; dans les inflammations et ramollisse-
ments intercurrents subaigus, dans les compressions et perfora-
tions lentes, les tumeurs par exemple; 4° si le siège de la lésion
supra-lombaire est plus élevé, on voit encore apparaître le syn-
drome de Bastian. C'est ainsi qu'on l'observe dans certaines lésions
dorsales, aussi bien que dans les lésions sous-cervicales ; 5° l'opi-
nion de Bastian n'est pas non plus contredite par les expériences
faites sur les animaux.
Chez le singe, par exemple, la section transversale lisse supra-
lombaire entraîne la perte du réflexe patellaire, souvent pendant
des semaines. 11 apparaît ensuite de nouveau, presque aussi accusé
qu'auparavant.
Au contraire, chez le chien et le lapin, le réflexe, dès le début,
est exagéré. 11 semble que chez les animaux les réflexes dépendent
en grande partie des influx cérébraux, et que chez l'homme ils ne
peuvent même pas exister sans ces influx.
Réflexes cutanés et réflexes tendineux; par Van Gehuchten
(de Louvain).
Des faits cliniques exposés, V. G... fait ressortir l'indépendance
absolue des réflexes cutanés vis-à-vis des réflexes tendineux : les
réflexes teudineux peuvent être abolis alors que les réflexes cuta-
nés persistent avec leurs caractères normaux ; les réflexes cutanés
peuvent être abolis alors que tous les réflexes tendineux sont exa-
gérés. - V. G... expose ses anciennes opinions sur les conditions
anatomiques nécessaires à la production des réflexes cutanés ou
tendineux et ses recherches nouvelles qui le portent à considérer
le noyau rouge comme un centre réflexe important. Il montre que
les centres nerveux supérieurs réagissent sur les cellules motrices
de la corne antérieure de la moelle par deux voies nettement dis-
tinctes : la voie cortico-spinale et la voie rubro-spinale. Ces deux
voies descendent dans le cordon latéral de la moelle épinière où
elles sont formées toutes les deux de libres croisées. Dans le tabes
spasmodique, dans la paraplégie spasmodique due à une com-
pression médullaire, il y a interruption des fibres cortico-spinales
et intégrité relative des libres rubro-spinales : or, c'est précisé-
ment dans ces deux états que l'on observe l'exagération des
SECTION DE neurologie. 499
réflexes tendineux et l'abolition des réflexes cutanés. Les réflexes
cutanés seraient liés à l'intégrité de la voie cortico-spinale et les
réflexes tendineux ci l'intégrité de la voie rubro-spinale. Les premiers
auraient une origine corticale. Les seconds seraient d'origine mésen-
céphalique.
De l'étude des réflexes cutunés et tendineux découle une autre
conséquence : la lésion des fibres cortico-spinales entraîne l'aboli-
tion complète du réflexe abdominal et du réflexe crémastérien ;
pour le réflexe plantaire il n'en est pas ainsi : le frôlement de la
plante du pied n'amène plus la flexion des orteils, mais l'extension
du gros orteil. V. G... ne voit pas là, avec Babinski, une perturba-
lion du réflexe plantaire normal; pour lui, le réflexe plantaire a
disparu comme le réflexe crémastérien et l'abdominal, le phéno-
mène des oileils ou réflexe de Babinski est quelque chose de tout à fait
nouveau; c'est incontestablement un réflexe cutané, mais ce n'est
pas un réflexe plantaire; il ne se produit pas exclusivement par
l'excitation de la plante du pied; il est un phénomène témoin de
l'activité réflexe exagérée du tronçon inférieur de la moelle lésée.
Mais cette exagération dans l'activité réflexe de la moelle ne s'ap-
plique pas aux réflexes physiologiques ; elle donne naissance à des
réflexes nouveaux, de nature pathologique. '
Discussion. M. le professeur IIitzig (de Halle). - La matière
que nous traitons est tellement compliquée que si chacun voulait
dire ce qu'il a sur le coeur, nous n'en finirions jamais. Je me borne
donc à adresser une seule question à M. Sherrington, et cela,
puisqu'il le désire, en anglais : « 1 want to ask Doctor Sherrington,
il' lie has eut other muscles th an the biceps or their nerves, for
instance of the sacral plexus, and, if he didso, if lie perhaps also
observed an increase of the knee-jerk. »
M. Sherrington (de Liverpool). - La section du biceps ou de
son nerf est suivie régulièrement d'une augmentation du réflexe
rotulien. Le même effet, quoiqu'à un degré moins prononcé, peut
être produit par la section d'autres muscles ou nerfs du plexus
sacré.
11. le professeur IIITZIG (de Halle). -- S'il en est ainsi, il sera
permis de considérer cette augmentation du réflexe non pas comme
un effet purement fonctionnel, mais comme l'effet d'un travail
anatomique qui se produit par suite d'une dégénération ascen-
dante de la moelle.
M. 0. VoGT (de Berlin). A propos du rapport de M. Sherring-
ton, je voudrais mentionner quelques expériences que j'ai faites à
l'aide du nouvel appareil de M. Sommer ; j'ai constaté, chez des
personnes normales, une influence caractéristique des divers états
de conscience sur l'intensité du réflexe patellaire. Par exemple, on
observe une exagération de ce réflexe avec tendance au clonus
500 congrès international de médecine.
sous l'influence de la gaieté et une diminution allant jusqu'à l'abo
lition sous l'influence de la tristesse.
Or, ces différents changements d'intensité du réflexe sont tou-
jours parallèles à des variations dans le tonus des muscles. Dans
les cas où le réflexe était fort, le tonus des extenseurs l'était pro-
portionnellement. Dans les cas de diminution du réflexe, il s'agis-
sait, soit simplement d'uue diminution du tonus des extenseurs,
soit directement, d'une contraction des fléchisseurs. Nous nous
trouvons donc ici en présence de phénomènes qui ont beaucoup de
ressemblance avec les expériences faites par M. Sherrington sur les
animaux et qui montrent aussi bien que celles-ci la dépendance
'des réflexes tendineux du tonus des différents groupes de muscles.
De plus, ces expériences montrent très nettement la dépendance du
tonus des muscles des procédés cérébraux, fait sur lequel M. Bruns
a insisté avec tant de raison.
M. Bruns (de Hanovre). - Les réflexes cutanés son ! en général,
même à l'état normal, si divers qu'ils perdent par là même beau-
coup de leur signification. En tout cas, dans les paraplégies spas-
modiqnes, ils sont souvent anormaux. Dans un cas de paraplégie
spastique avec exagération des réflexes tendineux, j'ai trouvé un
' type de flexion évident pour le réflexe plantaire.
M. Jendrassik (de Budapest). - J'ai déjà trop abusé de votre
temps, je voudrais seulement mentionner que j'ai supprimé quel-
ques pages de mon rapport et entre autres la description du cas de
section totale de la moelle que j'ai observé. Quant aux mensura-
tions du temps perdu, je suis d'avis que la différence de la longueur
de celte période tient à la différence de localisation des réflexes
qui vient d'être brillamment soutenue par M. van Gehuchten. On
croyait le temps perdu du réflexe patellaire trop court, parce
qu'on considérait les réflexes cutanés comme des réflexes spinaux
et on était d'avis que le temps de réaction des réflexes cutanés est
le temps perdu le plus court des réflexes.
M. van Gehuchten (de Louvain). Je crois que M. Bruns n'a pas
compris exactement ma pensée. Je n'ai pas dit que le réflexe de
Babinski n'était pas un réflexe cutané. Mais, je crois que ce n'est
pas un réflexe plantaire, et cela parce que ce réflexe peut survenir
non pas seulement à la suite de l'irritation de la plante du pied,
mais encore à la suite de la piqûre de la peau de n'importe quelle
partie de la jambe et même de la face postérieure de la cuisse.
Pour démontrer l'exagération de la réflectivité médullaire,
M. Bruns rapporte les cas de compression médullaire accompagnés
de paralysie et d'anesthésie et dans lesquels le moindre attouche-
ment de la peau est suivi de mouvements réflexes étendus aux
deux membres inférieurs, et il rapproche ces cas pathologiques
des faits que l'on observe chez la grenouille décapitée..
SECTION DE psychiatrie. 501
Je suis entièrement d'accord avec M. Bruns. Je n'ai pas dit que
dans les cas de lésion transversale complète de la moelle, toute
réflectivité médullaire était abolie. Celle abolition ne se rapporte
qn'aux réflexes physiologiques, aux réflexes normaux : l'abdo-
minal, le crémastérien, le plantaire, le rotulien, l'achillen, etc.
Ces réflexes normaux sont abolis.
Le tronçon inférieur de la moelle présente, dans ces conditions,
une réflectivité anormale, pathologique. C'est cette réflectivité
anormale qui est exagérée. Ces mouvements réflexes anormaux ne
sont pas liés à une irritation nettement localisée, mais on peut les
produire en excitant n'importe quelle partie de la surface cutanée
des membres inférieurs. Ce sont en quelque sorte des réflexes
défensifs analogues aux réflexes classiques de la grenouille déca-
pitée.
M. Il. IIIRS1113EItG (Paris). - Dans un cas de myélite syphilitique
j'ai eu l'occasion d'observer la diminution et ensuite l'abolition
successive des réflexes tendineux et cutanés. Dans l'ordre chrono-
logique c'est le réflexe crémastérien qui a disparu, ensuite le
réflexe abdominal. Cependant le réflexe plantaire reste encore trek
vif. Le réflexe tendineux rotulien s'affaiblit à son tour et finit par
disparaître. La trépidation spinale du pied s'éteint également
quelque temps après. Le réflexe cutané plantaire s'affaiblit à son
tour. Après l'excitation habituelle de la plante du pied il ne se
produisait plus de secousse de toute la jambe, mais simplement
un mouvement des orteils et une contraction du fascia lata. Enfin
le phénomène des orteils disparaît à son tour, mais jusqu'à ce
jour une faible contraction du fascia lata persiste. Ce dernier ves-
tige du réflexe cutané finira aussi probablement par disparaître.
Je crois donc que le phénomène de Brissaud doit être considéré
comme le minimum de réaction du réflexe cutané plantaire.
Du réflexe i léo-molcur de la pupille; par le DI' NO1;111\0\'ITCII
(Paris).
Séance de l'a prés-midi. - Présidence du MM. VON 1\Ios.\KOW
(de Zur.ch), et Van Gehuchten (de Louvain).
Contribution à l'élude des voies centrales des nerfs moteurs de l'ceil;
par Jean 1'1L1Z (de Varsovie). (Présentation des dessins.)
Les fibres aberrantes de la voie pédocz=ulairc; par 1\111\0 DÉJOEJNE
- (de Paris).
Dans les lésions corticales et sous-corticales de la zone sensitivo-
motrice il n'est pas rare de constater en particulier lorsque la
lésion remonte à l'enfance ou lorsque chez l'adulte elle est un peu
502 congrès international DE médecine.
ancienne - outre la dégénérescence de la voie pédonculaire et du
faisceau pyramidal une diminution de volume du ruban de Reil
du même côté que la lésion cérébrale et qui peut être suivie dans
les fibres arciformes internes et les noyaux des cordons de (;011 et
de Burdach du côté croisé. Cette diminution de volume consiste en
une atrophie simple du cylindre-axe et de sa gaine de myéline, en
un tassement en masse de ses fibres, particulièrement manifestes
dans la couche interolivaire du bulbe. Dans la région protubéran-
tielle il existe en outre une disparition des petits fascicules arron-
dis, faiblement colorés par l'hémaloxyline, que l'on trouve à l'état
normal en nombre variable irrégulièrement disséminés dans l'é-
paisseur du ruban de Reil.
L'application de la méthode de Marchi à l'étude systématique
d'une série de cas de lésions récentes corticales ou sous-corticales
dans la région rolandique sans paît t icipulion des masses grises cen-
trales, en particulier du thalamus, montre : .
1° Que la voie pédonculaire dégénérée abandonne au ruban de
Reil médian, soit à la partie inférieure de la région pédonculaire,
soit dans toute la hauteur de la protubérance, soit à la partie
supérieure du bulbe, un certain nombre de fascicules qui consti-
tuent le système des fibres aberrantes de la voie pédonculaire. Ces
fibres se portent en arrière, s'adossent au ruban de Beil médian
ou pénètrent dans son épaisseur, descendent dans le segment pro-
tubérantiel du ruban de lteil et plus ou moins loin dans la couche
interolivaire, puis réintègrent la voie pédonculaire aux différentes
hauteurs du bulbe et participent à l'entrecroisement moteur ou
inférieur des pyramides. A leur trajet bulbo-protubérantiel près,
ces fibres aberrantes dégénérées se comportent donc comme la
voie pédonculaire dont elles dérivent. Elles prennent leur origine
dans la corticalité rolandique, s'entrecroisent au collet du bulbe et
descendent dans les cordons antéro-latéraux de la moelle.
Ces libres présentent dans leur existence même, leur nombre,
leur volume, leur disposition et la longueur de leur trajet. les plus
grandes variétés individuelles. Elles sont tantôt très nombreuses,
tantôt font complètement défaut. Elles peuvent ne se détacher que
dans la région pédonculaire inférieure ou protubérantielle supé-
rieure ; ailleurs le contingent bulbaire existe seul. Tantôt elles
rentrent dans la voie pédonculaire après un court trajet ; tantôt
elles accompagnent le ruban de Reil dans toute la hauteur de son
trajet bulbo-protubérantiel.
Parmi les fibres aberrantes qui se détachent de la voie pédoncu-
laire au voisinage du sillon pédonculo-protubérantiel, les unes for-
ment le pes lemnicus profond et s'adossent à la partie antérieure et
externe du ruban de Reil médian; les autres constituent le pc.s
lemnicus superficiel, contournent la partie interne du pied du
pédoncule cérébral et descendent le long de la partie interne du
SECTION DE NEUROLOGIE. 503
ruban de Reil médian. Les fibres aberrantes prolubéranlielles peu-
vent se détacher de toute la largeur et de toute la hauteur du tra-
jet protubérantiel de la voie pédonculaire ; elles sont refoulées en
arrière et adossées au ruban de Reil médian par les fibres trans-
versales profondes du pont. Quant aux fibres aberrantes bulbaires,
elles s'incorporent dans le ruban de Reil médian au voisinage du
sillon bulbo-protubérantiel, immédiatement au-dessus des der-
nières fibres transversales profondes du pont.
2° Que la dégénérescence descendante du ruban de Reil constatée
dans ces cas est due à la dégénérescence des fibres aberrantes de
la voie pédonculaire. Elle n'occupe en effet qu'une partie du trajet
du ruban de Reil médian; elle fait défaut dans son segment sous-
optique et pédonculaire supérieur; elle fait défaut dans l'entre-
croisement sensitif du bulbe, dans les libres arciformes internes
croisées et dans les noyaux des cordons de Goll et de Burdach.
Elle n'existe que dans le segment bulbo-protubérantiel et présente
suivant le trajet, le nombre, la longueur et la catégorie des fibres
aberrantes les plus grandes variétés individuelles. Celle dégénéres-
' cerzcc ne peut être invoquée en faveur de l'existence d'un système de
fibres reliant directement et sans l'eltti ganglionnaire la corlicalité
rolandique aux noyaux des cordons de Goll et de Burdach.
Quant à la diminution de volume du ruban de Reil médian que
l'on constate dans les lésions de la zone sensitivo-motrice anciennes
ou remontant à l'enfance, elle tient en partie à la dégénérescence
des libres aberrantes de la voie pédonculaire, mais elle relève sur-
tout de l'atrophie simple, indirecte dans le sens de Gudden et von
Monakow qui frappe non seulement le ruban de Reil médian, mais
encore tous les faisceaux de la moitié du tronc encéphalique du
côté correspondant à la lésion corticale.
3° Que la voie pédônculaire peut posséder, outre les fibres aber-
ran;es qui s'adossent au ruban de Reil médian, d'autres fibres
aberrantes. Telles sont :
a) Les fibres aberrantes postéto-rxlcmes qui contournent la partie
externe du pied du pédoncule aux confins de la région sous-
optique, passent en avant du corps genouillé interne et peuvent
être suivies dans le tubercule quadrijumeau antérieur.
b) Les fibres pyramidales homolulérnles superficielles qui se déta-
chent du faisceau pyramidal dans la région moyenne du bulbe,
passent en avant de l'olive bulbaire et descendent dans la partie
latérale du bulbe, soit en arrière de l'olive, soit en avant de la
grosse racine descendante sensitive du trijumeau. Elles sont ren-
forcées au niveau du collet du bulbe par les fibres pyramidales
homolatét'ales profondes qui décapitent la corne antérieure homo-
latérale et descendent dans la partie postérieure et moyenne du
cordon latéral homolatéral de la moelle, c'est-à-dire dans la région
504 congrès international DE médecine.
qui correspond au faisceau pyramidal croisé et au faisceau pré-
pyramidal.
c) Les fibres aberrantes pyramidales croisées se détachent du fais-
ceau pyramidal croisé au niveau du collet du bulbe, descendent
dans la substance grise centrale de la moelle, puis réintègrent le
faisceau pyramidal croisé aux différentes hauteurs de la moelle
cervicale inférieure ou dorsale supérieure. Le faisceau dit de Pu/; k
n'est qu'une modalité anatomique de ces fibres; il se détache de
la pyramide antérieure dans la région bulbaire moyenne ou suré-
rieure, croise le raphé et la coucha interolivaire, descend dans la
parlie postérieure et interne de la formation réticulée grise du
bulbe, puis s'entremêle au niveau du collet du bulbe a\ec les fibres
du faisceau pyramidal croisé de la moelle épinière.
La connaissance du système des fibres aberrantes de la voie
pédonculaire est donc important pour qui veut interpréter à l'aide
de la méthode de Marchi les dégénérescences secondaires consé-
cutives aux lésions corticales, sous-corticales, pédonculaires ou
bulbo-protubérantielles de la voie pédonculaire. L'exislencc de ce
système de fibres démontre une fois de plus, dans l'étude de ces
recherches, la nécessité absolue de pratiquer des coupes micros
copiques sériées. \
Aphasie 1not1'ic : pure, avec lésion corticale circonscrite ;
par lAG.ILIBÈS (de Porto).
Homme de soixante-dix-huit ans, devenu aphasique après deux
ictus survenus à deux jours d'intervalle (1895). Pas d'hémiplégie,
pas de paralysie faciale, pas de paralysie de la langue.
Parole spontanée : vocabulaire réduit par perte surtout de noms
propres et de substantifs; périphrases, mots employés en dehors
de leur sens (paraphasie), mots nouveaux incompréhensibles (jar-
gonaphasie), pas de troubles d'articulation ; tous les objets sont
parfaitement reconnus, des objets usuels ; le nom de quelques-uns
peut être retrouvé ; en somme, aphémie incomplète, partielle.
Parole répétée : certains mots (drap, serviette) ne peuvent être
répétés ; d'autres (eau, chaise) le sont. Lecture : le malade dit
qu'il ne peut lire à haute voix. Chant : jamais le malade ne
chante ni ne fredonne. Ci.J1n¡,réhension des mois parlés : parfaite.
Ecriture : écrit tout ce qu'on lui demande, n'est pas AGR.\PIIIQLE.
- Mimique : juste et expressive. Influence d'un accès d'exalta-
tion maniaque sur 1'tiphti., i ? : un plus grand nombre de mots sont
retrouvés. Mort par hémorragie cérébrale dans le cerveau droit
(oct. 1896).
Autopsie : dans l'hémisphère gauche, un tout petit foyer de
ramollissement du pied de F3 (en paltie, délimité, en arrière par
le sillon prérolandique, en avant par la branche ascendante de
section DE NEUROLOGIE. ' 505
Sylvius, en bas par la scissure de Sylvius ; en haut la lésion n'ar-
rive pas jusqu'au sillon frontal inférieur ; elle est limitée à l'écorce.
Donc, aphasie motrice incomplète, à l'état isolé, suns a graphie,
sans cécité ou surdité verbale, sans trouble sensitif* ou moteur;
d'antre part, lésion corticale limitée à une partie du pied de 1-"3.
L'aphasie sans agraphie existe donc, ce qui montre le centre
moteur graphique fonctionne indépendamment du centre moteur
verbal.
Discussion. A. Thomas (de Paris). La parapliasie dont était
atteint le malade de M. Lemos devait éveiller l'attention sur l'état
anatomique du lobe temporal et pariétal ; et comme l'examen en
coupes sériées de ce ces régions n'a pas été fait, l'observation n'a
pas été absolument probante. D'une façon plus générale tout exa-
men anatomo-pathologique de cas d'aphasie doit être fait actuel-
lement sur coupes sériées.
M. Fernand 131-'RNIIEINI (de Paris). - Je me rallie entièrement à
l'opinion que vient d'émettre mon collègue M. Thomas. Il y a tro '
d'observations dans la littérature médicale de l'aphasie, où le con-
trôle anatomique a été insuffisant. Pour savoir si une lésion est
vraiment corticale ou sous-corticale, si elle est circonscrite ou dif-
fuse, il faut s'adresser aux coupes microscopiques sériées, qui
seules permettent de se prononcer sur le siège, le nombre et l'éten-
due des lésions de la corticalité et sur les faisceaux sous-jacents
intéressés. IL est en effet de petites altérations microscopiques qui
échappent à tout autre examen.
Quant à la localisation exacte de l'aphasie motrice, elle n'est
peut-être pas aussi certaine et surtout aussi étroitement limitée
qu'on l'admet aujourd'hui à peu près universellement. Si l'on con-
sulte le texte de Broca dans les Bulletins de la Société anatomique
en 1861, on voit qu'il accepte comme localisation probable de
l'aphasie motrice non seulement le pied de la 3e frontale gauch".
mais aussi ceux de la 2c et de la frontale ascendante. Ses conclu-
sions sont d'ailleurs faites avec prudence. Depuis, on a réduit à la
3e frontale gauche le centre de Broca, le centre de l'aphasie
motrice. Mais aussi longtemps qu'on n'aura pas fourni un cas
d'aphasie motrice pur au point de vue clinique comme au point
de vue anatomique, c'es-à-dire vérifié histologiquement par des
coupes sériées, il faudra être réservé sur la valeur absolue de la
3' frontale gauche comme centre de la parole articulée.
Dix-neuf cas d'hémipléuic avec hémiana-lhèsie tactile el douloureuse ;
par Touche (de 13révannes). '
Touche a fait 81 autopsies d'hémiplégie, dont 19 avec hémianes-
thésie tactile et douloureuse. De celles-ci, 7 correspondaient à des
lésions corticales, frappant le lobe pariétal seul, ou le lobe parié-
506 congrès international DE médecine.
tal et d'autres lobes. Les lésions pariétales s'étendaient en profon-
deur jusqu'au ventricule latéral. Les douze lésions centrales (six
hémorragies de la capsule externe, des lésions du noyau lenticu-
de la couche optique, etc.) intéressaient toutes le segment
rétro-lenticulaire de la capsule interne.
Du tabès avec cécité,-par Pierre Marie (de Paris), et SwiT\LSKf
(Lemberg).
Il y a lieu de séparer nettement l'une de l'autre deux formes de
tabes avec cécité. A. Le tubes avec atrophie papillaire. 13. L'a-
trophie papillaire des labélisants. La première de ces formes com-
prend des tabétiques classiques offrant tous l'aspect du tabes à un
degré le plus souvent très prononcé avec ataxie, signe de Rom-
berg, trouble de la nutrition générale. Dans l'atrophie papillaire
des tabétisants l'aspect des malades est différent. Les malades
sont bien nourris, ont un air de santé, il n'existe pas de troubles
trophiques. Les symptômes cliniques du tabès : les douleurs,
l'ataxie, les troubles vésicaux se montrent à un très faible degré
de développement. Au point de vue nosologique, il ne s'agit pro-
bablement pas d'espèces morbides essentiellement distinctes dans
ces deux formes de cécité tabétique, car l'étiologie est la même,
c'est la syphilis. Mais il s'agit de localisations différentes d'un même
processus ou peut-être même de processus différents.
Discussion. M. P. Marie (de Paris) s'élève contre l'idée actuel-
lement dominante, que le tabes soit toujours une affection uni-
voque ; il croit que sous le nom de tabes nous confondons des
états anatomiques et cliniques très différents et pense qu'il y
aurait lieu de pratiquer une dissociation de ces différents états.
M. J. Babinski (de Paris). - llï,l. P. Marie et Switalski viennent.
d'émettre cette idée que le tabes doit être soumis à une dissocia-
tion semblable il celle qu'on a fait subir autrefois à l'atrophie mus-
culaire progressive ; suivant eux, le tabes, de même que l'atrophie
musculaire, ne constituerait pas une espèce nosologique, mais un
groupe artificiel composé de plusieurs espèces distinctes ; c'est
ainsi que les deux malades présentés ici, tout en étant des tabé-
tiques, appartiendraient à deux espèces nosologiques différentes.
Je ne puis partager cette manière de voir. Le rapprochement qu'ils
viennent de faire entre l'atrophie musculaire et le tabes ne me
parait pas soutenable. En effet, l'atrophie musculaire, qui peut
être sous la dépendance de la sclérose latérale amyotrophique, de
la syringomyélie, de la lèvre, de la syphilis, appartient bien à
diverses espèces nosologiques essentiellement différentes; rien de
pareil pour le tabes qui semble bien dépendre toujours de la
syphili-; c'est là, du moins, mon opinion, et aussi, si je ne me
SECTION DE NEUROLOGIE. 507
trompe, celle de M. Marie. Je ne crois donc pas que le tabes soit
appelé à être décomposé en plusieurs espèces; mais, 'ce qui est
exacl, c'est qu'il en existe des variétés, des formes nombreuses.
Si sur cette première question je me trouve en désaccord avec
M. Marie, je suis porté comme lui à écarter l'idée émise par
M. Benedikt et acceptée par beaucoup de médecins, entre autres
par M. Déjerine, suivant laquelle la sclérose du nerf opiique arrê-
terait l'évolution du tabes. J'ai observé, il est vrai, ainsi que mes
collègues, beaucoup de malades atteints d'atrophie papillaire tabé-
tique et ne présentant pas d'incoordination motrice; mais j'en ai
vu plusieurs chez lesquels, malgré l'apparition de la lésion des nerfs
optiques, le tabes avait continué à évoluer en donnant naissance
à de l'incoordination, ainsi qu'à d'autres troubles tabétiques. Si
les cas de ce genre sont relativement rares, cela tient peut-être,
non pas à une sorte d'action d'arrêt que la lésion oculaire exerce-
rait, mais à ce que les formes dites frustes sont beaucoup plus
communes que la forme dans laquelle la plupart des symptômes
du tabcs sont réunis. Il faut bien remarquer que le tabes est une
affection des plus répandues, que l'ataxie, au contraire, est assez
rare. Je ne crois pas exagérer en déclarant, que dans mon service,
à l'hôpital de la Pitié, il me passe chaque année sous les yeux de
200 à 300 tabétiques, et sur ce nombre je ne vois pas plus de 15 à
20 sujets franchement ataxiques. J'ai, dans ma clientèle privée,
beaucoup de malades qui sont depuis un grand nombre d'années
atteints de tabes se traduisant par des signes caractéristiques
(signe de Hobertson, abolition des réflexes rotuliens, des réflexes
des tendons d'Achille, douleurs fulgurantes, phénomènes vési-
caux, etc.), et qui. sans avoir conservé d'une manière complète
leur coordination, vont et viennent, vaquent à leurs occupations
et n'ont jamais dépassé la période dite préataxique. En résumé,
si l'atrophie papillaire sans ataxie est bien plus fréquente que
l'association de ces deux ordres de troubles, c'est peut-être bien,
non pas parce que, pour rappeler l'expression pittoresque de notre
maitre Cliarcot, en détruisant les neifs optiques « le monstre s'était
satisfait », mais parce que les formes frustes du tabes sont beau-
coup plus communes que la forme complète.
M. Ilonm (d11elsingfors). - Je pourrais citer plusieurs de mes
cas de labes, dont au moins quatre, autant que je peux me rap-
peler dans ce moment, avec examen microscopique des pièces, où
il y avait de la cécité, c'est-à-dire atrophie papillaire, sans que la
maladie du reste, avec ses symptômes ordinaires : douleurs,
ataxie, signe de Romberg, etc., ait été arrêtée, mais pourtant sou-
vent modifiée. Si cette atrophie précède les lésions médullaires ou
survient dans un état plus ou moins avancé de la maladie, il se
produit des tableaux différents ou des modifications cliniques,
mais le processus anatomique reste au fond le même, les diffé-
508 congrès international DE médecine. 1
rences des lésions étant de nature quantitative, mais sans distinc-
tion en principe.
A rtliropalhies tabétiques avec fractures spontanées du bassin et du
fémur; par Jean Ferrand et L. Pécharmant (de Paris) (présenta-
tion de pièces).
Il s'agit d'un malade'du service de M. Pierre Marie, tabétique et
porteur d'arthropathies multiples. Le bassin, débarrassé de ses
parties molles, montre la trace d'un cal vicieux provenant d'une
fracture spontanée. Le trait de fracture coupe l'os iliaque gauche
dans sa plus grande hauteur, la branche horizontale du pubis et
contourne de près l'articulation coxo-fémorale. De plus, cette
articulation est complètement déplacée, par suite de la production
d'un ostéophyte énorme au niveau de l'épine iliaque A.-I. Il y a
eu production d'une nouvelle articulation. Enfin, celte pièce pré-
sente une arthropathie du genou droit et une fracture spontanée
du fémur droit. Nous ne connaissons dans la littérature médicale
qu'une seule fracture spontanée tabétique du bassin présentée par
Charcot en 1882 au Congrès de Londres.
Contribution ci l'élude de l'influence du liaumalismc du crâne sur la
production et l'écolulion des maladies de l'encéphale; par Ernst
Ehrnrooih (d'Elelsinfors, Finlande).
Des résultats de ses expériences sur environ 130 lapins, l'auteur
a en outre relevé les faits suivants : un traumatisme de la tête
prédispose, à la suite d'une injection intra-veineuse d'une culture
de streptocoque ou de staphylocoque, à l'infection microbienne du
cuveau ou des méninges. Cette infection est plus fréquente à la
suite de coups plus violents et se développe plus souvent dans la
partie de la tête exposée au traumatisme et avec une intensité
plus grande que dans la partie opposée. L'auteur pense que ces
expériences, dont 75,6 p. 100 des animaux frappés et infectés
simultanément, 56 p. 100 de tous les animaux frappés et infectés,
ont eu une infiltration microbienne de l'encéphale, tandis que les
animaux uniquement infectés sont atteints de la maladie en ques-
tion dans la proportion de 13,2 p. 1U0 Quant à la pathologie
humaine, elles peuvent donner un bon appui à l'opinion que le
traumatisme du crâne agit comme cause prédisposante à l'éclo-
sion des maladies infectieuses de l'encéphale, même sans l'exis-
tence d'une blessure de la muqueuse des cavités sensorielles voi-
sines. l.es agents pyogènes y arrivent, eu pareil cas, par le transport
indirect au moyen des voies sanguines.
C'est en ce sens là que les cas cliniques que l'auteur a mention-
nés, selon lui, s'expliquent le mieux.
section DE NEUROLOGIE. 509
Séance du mutin, lundi 6 août. - Présidence de MM. 1 enmrrc (de
Londres). Jendrassik (de Budapest), et FlSIlER (de New-York).
Résumé du rapport sur Les lésions 1lOn-tabélirlues des cordons i)os-
térieurs de la moelle ; par M. BRUCE (Edimbourg).
Le sujet sera discuté en deux sections : 1. Anatomilj1 ! cmcnt.
II. Palhologiquement.
I. La structure des cordons postérieurs est montrée par les
dégénérescences qui suivent : 1° les lésions des racines posté-
rieures, 2." les lésions de la moelle elle-même qui interrompent la
continuité des cordons, 3" les lésions de la substance grise.
Faisceaux exogènes. La distinction entre les cordons de Goll
et de Burdach dépend de la terminaison de leurs longues fibres
dans le nucleus gracilis et le nucleus cuneatus respectivement. Le
cordon de Burdach commence à la cinquième dorsale. Le cordon
de Goll montre une forme caractéristique et définie dans chaque
segment. Chaque déviation de cette forme indique une dégéné-
rescence incomplète de ses parties constituantes. La loi de Kahler
concernant la position des fibres exogènes dans les cordons est
généralement vraie, mais demande certaines rectifications, peur
les régions dorsales et cervicales. Elle est applicable également aux
branches descendantes des racines. La position relative des fibres
radiculaires ascendantes, en tant que connue, sera prise en con-
sidération. Les fibres exogènes descendantes des régions cervico-
dorsales occupent la position du faisceau en virgule de Schullze,
dans une partie de leur trajet. Les fibres exogènes descendantes
des régions dorsale inférieure, lombaire et sacrée entourent le
faisceau septo-marginal (centre ovale, triangle médian).
Fauceaux endogènes. La zone cornu-commissurale de
P. Marie, faisceau en virgule de Schullze, faisceau septo-marginal
(centre ovale de Flechsig et triangle médian de Gombault et
Philippe), le faisceau descendant de Hoche, la zone radiculaire
postéro-interne (Flechsig), seront pris en considération, et il sera
démontré qu'ils contiennent aussi des fibres exogènes, et qu'ils ne
sont pas purement endogènes. Les libres endogènes de la zone
cornu-commissurale sont courtes et entrent en dégénérescence
ascendante ; celles du faisceau en virgule dégénèrent en descen-
dant à travers plusieurs segments; celles du faisceau septo-mar-
ginal dérivent des segments jusqu'à la hauteur de la huitième
cervicale et dégénèrent en descendant. La zone radiculaire pos-
téro-interne est principalement composée des fibres radiculaires
d'une longueur intermédiaire, qui dans les régions sacrée et dor-
sale y entrent horizontalement et dans les régions lombaire et
cervicale y entrent obliquement.
Les zones de Flechsig seront considérées.
510 CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE.-
II. Les changements pathologiques des cordons postérieurs con-
sidérés en rapport avec les lésions qui les produisent.
a. L'atrophie musculaire progressive (type Charcot-Marie). Sclérose
des cordons postérieurs dans toute leur longueur à l'exception de
la région sacrée, qui implique le cordon de Burdach et, au degré
moindre, le cordon deGoll, et qui laisse intacte une zone nor-
male au bord de la commissure et de la coi ne postérieure et par-
tiellement aussi dans la zone postéro-interne. La zone postéro-
interne subit habituellement une sclérose. Les racines postérieures
sont dégénérées.
b) Les tumeurs cérébrales produisent fréquemment des lésions
dans les cordons postérieurs, qui sont parfois attribuées aux
dégénérescences rétrogrades à partir des noyaux des cordons. Ces
lésions sont dues probablement il des dégénérescences ascendantes
d'une ou de plusieurs racines qui ont été lésées à leur entrée dans
la moelle, soit par tension produite dans les leptoméninges par
l'accumulation de liquide cérébro-spinal, soit par l'action de
toxines au point vulnérable de Obersteiner et liedlich.
c) Syringomyèlie : Les régions affectées ont leur siège : 1° der-
rière la commissure postérieure, 2° le long du septum médian,
3° comme une bande étroite, entre les cordons de Goll et de 1,>ui--
dach. Ces lésions sont dues probablement à l'extension immédiate
de la substance grise, et non pas à une dégénérescence secondaire
qui tire son origine de la substance grise. La destruction de ces
régions est apte cependant à produire des dégénérescences secon-
daires à son tour.
cl) L'ataxie de Friedreich. La lésipn principale est une sclérose
dans les cordons postérieurs et anLéro-IaLéraux. Eu ce qui con-
cerne les cordons postérieurs, la sclérose est développée le plus
dans les régions dorsales inférieures et diminue en sens ascendant
et descendant. Elle est à peine 'sentie dans la région sacrée, et
cesse complètement au niveau des noyaux des cordons. La sclérose
présente un développement exubérant de la névroglie, dont les
fibrilles sont disposées en tourbillons et en faisceaux entrelacés.
Elle envahit la plus grande partie du cordon, à l'exception par-
tielle des zones dites endogènes. La pie-mère est ordinairement
normale, et les vaisseaux montrent peu ou point d'épaississement t
de leurs parois. Les racines postérieures présentent une sclérose
similaire avec des degrés variés d'amincissement et d'émyélini-
sation de leurs fibres (état embryonnaire). Des changements simi-
laires dans les nerfs sensitifs périphériques et l'atrophie des gan-
glions des racines postérieures, qui sont presque invariables, sug-
gèrent que la nature de la lésion est un développement des neu-
rones sensitifs défectueux dès le début, suivi de leur dégénéres-
cence, et d'une prolifération de névroglie secondaire.
e) Sclérose combinée des cordons postérieurs et antéro-latéraax.
SECTION DE NEUROLOGIE.. 511
Cette désignation comprend plusieurs groupes de maladies, qui
tous démontrent une dégénérescence simultanée dans ces cordons
suivie d'une sclérose, qui cependant ne se limite pas à des systè-
mes définis. Ces maladies diffèrent entre elles dans leur cours et
dans leur étiologie. Les différentes maladies comprises sont pel-
lagre, paraplégie ataxique de Gowers ou tabes ataxo paraplé-
gique de Déjerine, combinirte System Erkrankung des Allemands,
dégénérescence combinée d'anémie grave, dégénérescence com-
binée subaiguë des auteurs anglais.
Il est certain que tous ces titres n'indiquent pas des maladies
distinctes ; dans la pellagre, la sclérose, d'après Tuczek, affecte
principalement le cordon de Goll et la zone centrale radiculaire et
laisse relativement intactes les zones cornu-commissurales et
septo-marginales. Les racines, suivant Tuczek, sont normales ;
suivant Babès, elles sont dégénérées. Ces auteurs attribuent la
sclérose à l'action immédiate d'une substance toxique sur les
fibres nerveuses. Elle est attribuée par Marie à une affection de la
substance grise.
Dans le paraplégie ataxique les lésions ressemblent à celles de
la dégénérescence combinée subaiguë, mais en diffèrent par une
plus grande lenteur de leur évolution. Les dégénérescences dans
l'anémie grave paraissent avoir les mêmes caractères que la com-
binirte System Erkrankung de Rothmann et la dégénérescence
combinée subaiguë. La lésion est surtout marquée dans les ré-
gions dorsales et cervicales. Elle affecte le plus souvent la zone
centrale de la région lombaire, et dans la région cervicale princi-
palement le cordon de Goll. Les zones près de la commissure et
la corne postérieure, et dans la région lombaire celle près du
septum sont intactes. Le fait que la dégénérescence s'étend autour
de la périphérie de la moelle sans se limiter au septum, mais
correspond à la distribution des vaisseaux delà pie-mère et que les
racines postérieures sont normales, de même que les membranes,
indiquent que les maladies ont une origine vasculaire et qu'elles
sont probablement d'une nature toxique et non inflammatoire.
- (A suivre.)
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE
PATHOLOGIQUES.
XXV. De la valeur des réflexes des orteils; par M. Coiin. Obser-
vations sur les réflexes des orteils ; par L. Schueler. (.\'emv-
logisches CcaalalGl., 1899.)
Le chatouillement de la plante des pieds se traduit par la flexion
des orteils du côté plantaire, ou bien il ne se produit rien ; jamais,
a dit Babinski, chez un individu sain les doigts de pieds ne
s'étendent. C'est cette question qu'examine M. Colin en ayant soin
détenir solidement le pied de 1 individu en observation afin
d'éviter toute autre réflexe. Il trouve que chez la plupart des gens
normaux le chatouillement de la plante du pied fait fléchir les
orteils (GO p. 100), l'extension s'y voit en 20 p. 100 des cas. Quand
il existe une lésion organique ou une atteinte fonctionnelle des
cordons latéraux, les orteils s'étendent mais il est impossible de
faire de celte extension un signe i Ltliognomoniclue d'altération
des cordons latéraux. M. Schuler a trouvé la flexion réflexe des
orteils chez 80 p. 100 des hommes et des femmes normaux,
l'extension très rarement ; chez les enfants la flexion se produisit
en 30 p. 100 des cas, en 12 p. 100 il y eut extension évidente et en
40 p. 100 il n'y eut pas de réflexe du tout. L'extension, qui parait
manquer, comme tout autre réflexe des orteils, dans les névro-
pallies fonctionnelles tellesquel'liyslérie, la neurasthénie, est très
active quand il y a lésion du faisceau pyramidal ; il suffit alors,
pour produire une extension extrême des orteils, d'un léger
chatouillement qui, cliez un individu sain, ne provoquerait aucun
réflexe. 11 faut par une recherche prudente aniver à déterminer si
le réflexe de Babinski peut collaborer, de concert avec d'autres
symptômes, en diagnostic différentiel entre une affection organique
et fonctionnelle. P. Klraval.
XXVI. Contribution à l'étude des tumeurs du ceiveau et des
altérations de la moelle concomitantes ; par A. Schule. (iS'euro-
lo;i5clves Centrnlbl., XVIII, 1899.)
Une fillette de seize ans, jusque-là bien portante, présente rapi-
dement un complexus symptomatique indiquant l'existence d'une
tumeur cérébrale (céphalalgies, somnolence, vertiges, névrite
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 513
optique). On croit à l'existence d'une tumeur cérébelleuse à raison
de la céphalalgie occipitale, de la pupille étranglée, de la tituba-
tion en marchant, bien que ce ne soit pas de l'ataxie cérébelleuse
typique.
Bien qu'il n'y eût point de symptômes qui indiquassent l'atteinte
du centre ovale ou des ganglions de la base, pas de troubles
attribuables à la capsule interne (hémianesthétose, hémiplégie),
aucune perturbation de la sensibilité, des muscles, de la physio-
nomie, on trouve une grosse tumeur de la couche optique gauche
qui, plantée dans la partie médiane de cet organe, s'en va assez
loin en arrière dans la corne postérieure et dans la corne inférieure
du ventricule. Bien qu'elle ait exercé une compression sur la
branche postérieure de la capsule interne, les voies sensitivo-
motrices sont demeurées indemnes ; la malade, trois jours avant
sa mort, pouvait encore marcher seule.
Il existe une. dégénérescence des racines postérieures de la
moelle, elle a dû être déterminée, d'après l'auteur, par la pression
cérébrale : celle-ci aurait exercé sur la circulation de la moelle
une gêne aboutissant à l'oedème de l'organe, sans l'intermédiaire
du liquide cérébro-spinal. P. IiERAV.1L.
Nouvelles observations sur la raideur de la colonne verté-
brale avec examen anatomo-pathologique; par W. M. BECHTEREW.
(Obozrenie psichiat1'ii, n° 5, 1899.)
Voici une nouvelle observation de raideur de la colonne vertébrale
avec incurvation de type Bechterew. Raideur avec cyphose des
régions cervicale inférieure et thoracique supérieure dépourvue de
lordose compensatrice ; aplatissement de la cage thoracique en
avant ; respiration presque exclusivement abdominale ; atrophie
légère du système musculaire au niveau des omoplates et des
membres supérieurs ; quelques modifications de la sensibilité dans
le domaine de la ceinture scapulaire, des reins, des bras; réflexes
tendineux un peu exagérés dans les extrémités inférieures.
Articulation des membres intacte. Evolution progressive depuis
quatre années. -
Le terme de cyphose hérédo-traumatique proposé par P. Marie
et Castie ne vaut par suite rien ; d'autant que la syphilis n'y est
peut-être pas étrangère.
L'auteur procède ensuite à l'étude analytique de l'autopsie du
malade dont il a donné l'observalion dans le Nevrologisch. Viestnik.
t. V., 1, 1897 et la Deutsche Zeitschr. f. Nervenheilk, 1897. Ce malade
est mort de pneumonie. Il croit qu'il s'agit en l'espèce d'une
méningite localisée des méninges molles de la moelle; il en résulte
une lésion des racines postérieures et d'une partie des racines
antérieures de la moelle ; sous l'influence de la série des réactions
Archives, 2e série, t. X. 33
51.4 REVUE D'ANATOMIE ET DE'.PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES :
dégénératives et régénératives de ces racines, les muscles thoraci-
ques et spinaux sont parasiés ainsi qu'une partie de ceux des
extrémités supérieures ; ceux du thorax et de la ceinture de l'épaule
subissent quelque atrophie. De là les phénomènes de paresthésie
et de douleur ressortissant aux racines frappées. Enfin la colonne
vertébrale s'incurve en forme de bosse dans le creux des épaules,
comme cela a lieu souvent chez les vieillards bien- portants. Les
disques castilagineux comprimés s'atrophient, les vertèbres entrent
en contact, tournant l'une vers l'autre les faces supérieures de
leurs corps vertébraux et adhèrent entre elles. P. KERAVAL.
XXVIII. De quelques altérations des cellules nerveuses de l'écorce
du cerveau révélées par la méthode de Golgi dans la paralysie
générale ; par A. Agapôff. (Neurologie Centrufbl., XVI11, 1899.)
Disparition plus ou moins notable (figures) des appendices
pyriformes, gemmules, épines, des prolongements protoplasmi-
ques, des cellules pyramidales chez les paralytiques généraux,,
organes qui ont tout récemment été considérés par quelques,
auteurs comme des organes de contact.
Six observations (2 hommes et 4 femmes) concernent des
individus tout à fait en démence, presque incapables de mouve-
ment, atteints d'atrophie musculaire, des accidents gangreneux
du décubitin avec oedème et état trouble de la pie-mère adhérente
à la substance du cerveau ; collection liquide dans les ventricules ;
sclérose granuleuse.de l'épendyme; un cas en outre de pachymé-
ningite interne hémorragique.
Dans ces cas, les prolongements protoplasmiques d'un nombre
énorme de cellules pyramidales étaient privés de leurs appendices
latéraux pyriformes ; ils étaient devenus tout à fait lisses ou
présentaient, dans le sens de la longueur, des renflements ovoïdes,
arrondis ou- irréguliers. Les prolongements de beaucoup d'autres
cellules pyramidales n'étaient pourvus que d'un très petit nombre
d'appendices latéraux pyriformes situés à des distances très
considérables les uns des autres ; les cellules, débarrassées de
leurs prolongements latéraux pyriformes, avaient encore quelques
prolongements protoplasmiques. Nulle part il n'y avait de cellules
abondamment pourvues de ces prolongements pyriformes.
L'examen comparatif de cerveaux normaux au point de vue
intellectuel révèle l'abondance de ces prolongements sur l'immense
majorité des cellules pyramidales.
Trois aliénés atteints de délire aigu ou de démence secondaire
avaient : de nombreuses cellules abondamment pourvues d'appen-
dices latéraux ; et d'assez nombreuses cellules moins richement
dotées sous ce rapport que celles des individus normaux. Il est;
tout à fait exceptionnel en ces cas-là de constater des cellules dont;
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 515 j'
quelques prolongements protoplasmiques isolés manquent totale-
ment d'appendices latéraux pyriformes. P. Keraval.
XXIX. Sur le retour du phénomène du genou 'disparu ; par
A. AD.MKIF.WICZ. (Neurologie Centralbl., XVIII, 1899.)
Le phénomène du genou disparu revient : po dans le cours des
affections syphilitiques ; 2° dans les tabcs quand, dans le cours de
celui-ci, survient un ictus apoplectiforme. Voici comment on peut
l'expliquer :
Tout phénomène vital procède d'une force excitatrice qui crée
la fonction d'une force d'arrêt qui l'endigue dans les limites
exigées pour les opérations de la vie. Aux muscles qui doivent à
l'exactitude du travail joindre l'intensité de l'action, le cerveau et
le faisceau pyramidal apportent l'excitation ; le cervelet et les
cordons postérieurs sont des modérateurs. Le travail actif de ces
deux systèmes antagonistes aboutit à l'opération normale précise
et exacte du muscle. La rupture de l'accord entre eux, c'est-à-
dire d'une part l'affection du cerveau et des pyramides, d'autre
part du cervelet ou des cordons postérieurs, fait cesser l'harmonie
physiologique de la l'onction musculaire.
Dans le premier cas, il y a exagération de la tonicité des muscles,
ou spasme; dans le second, exagération de la volonté ou exagéra-
tion ataxique du mouvement. Le phénomène du genou enregistre
ces modifications. Quand les deux composants sont en équilibre,
c'est-à-dire quand les deux plateaux de la balance sont également
chargés, le phénomène du genou révèle comme l'aiguille de la
balance, des excursions égales du réflexe. Quand le plateau de la
tonicité l'emporte, il y a excès du phénomène du genou qui
disparait, au contraire, quand la tonicité est nulle ou quand il y a
exagération ataxique du mouvement.
Mais le phénomène du genou est, comme tous les réflexes
tendineux, constitué par deux facteurs. Un facteur physiologique ;
c'est la transmission aux racines postérieures, aux cornes posté-
rieures, de là aux centres des muscles contractiles (triceps crural)
sis dans les cornes antérieures, de l'excitation que le choc du
tendon produit sur les fibres nerveuses sensibles intratendineuses.
Un facteur physique : c'est la forme du mouvement produit par le
réflexe.
La transmission du réflexe dépend de l'intégrité de la voie
réflexe; le genre du mouvement réflexe dépend de la tension de
l'appareil musculo-tendineux excité. C'est pourquoi chez l'homme
sain, dont la tonicité musculaire est normale, le phénomène du
genou est toujours identique, c'est-à-dire de même intensité,
quelque variable que soit l'intensité du coup que l'on donne au
tendon, dans des limites données bien entendu. Chez l'homme
516 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.
ayant une tonicité musculaire exagérée, un coup très faible
provoque un réflexe très fort. Chez l'homme dont l'arc réflexe est
altéré ou qui possède une tension musculaire amoindrie, un coup
très fort n'engendre pas le plus petit réflexe.
Donc : la grandeur des phénomènes tendineux est produite par
la grandeur de la tension des muscles correspondants ; la grandeur
de la tension des muscles est sous l'influence non seulement des
nerfs des cordons postérieurs tonificateurs qui l'incitent directe-
ment, mais encore du système pyramidal qui la réprime.
Et, par suite, le phénomène du genou doit être, d'une part
vis-à-vis de la tension des muscles, d'autre part vis-à-vis de la
force d'excitation des pyramides, dans le même rapport physique
que celui dans lequel se trouvent les vibrations d'une membrane
ou d'une corde vis-à-vis de sa propre tension ou vis-à-vis de la
contrevibration d'un modérateur compensateur.
Le phénomène du genou normal est dû à ce que la tonicité
musculaire l'emporte sur l'action de la volonté actionnant ce
muscle; sa grandeur normale montre dans quelle mesure la force
de la tonicité l'emporte sur la force opposée de l'excitant volontaire,
mais dans des limites normales.
Supposons la tonicité musculaire affaiblie par une lésion céré-
belleuse et surtout par la dégénérescence tabétique des cordons
postérieurs dont les éléments nerveux sont atteints, non tous et
simultanément, mais graduellement et les uns après les autres,
non seulement l'excitation volontaire, qui est directement com-
pensée par la grandeur du tonus normal, dépassera graduellement
les limites normales, non seulement il y aura ataxie progressive,
mais l'excitation volontaire paralysera simultanément et graduel-
lement le tonus abaissé, et interrompra complètement le phénomène
du genou, à l'instant où la force de l'excitation volontaire station-
naire, c'est-à-dire relativement croissante par rapport au tonus
affaibli, sera égale à la prédominance normale du tonus.
Les formules mathématiques correspondantes indiquent nette-
ment que la décroissance progressive de la force du système
cérébelleux et des cordons postérieurs (tabes) amoindrit de plus
en plus le phénomène du genou : celui-ci devient égal à zéro, ci
l'instant où la dégénérescence des cordons postérieurs est égale à une
décroissance de tension de la tonicité musculaire égale à la grandeur
de la prépondérance normale de cette tonicité ; l'excès de la dégéné-
rescence rend le phénomène du genou négatif.
Si, maintenant, tandis que la tonicité musculeuse s'abaisse, et
que le phénomène du genou disparait, le second composant de la
fonction musculaire normale, c'est-à-dire la force de l'excitant
volontaire diminue par suite d'un ictus apoplectique qui déchire
une partie du système pyramidal, il faut que, dès que celte dimi-
notion équivaut simplement ci l'excès de la tonicité capable d'en-
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 517 î
gendrer normalement le phénomène du genou, il faut que le
phénomène du genou reparaisse, malgré la diminution de la tension
tonique des muscles, c'est-à-dire malgré la dégénérescence
tabétique (partielle) des cordons postérieurs.
11 en sera de même dans la syphilis ; on constatera les mêmes
alternatives.des phénomènes du genou dues à l'alternative des
forces opposées du cervelet et du cerveau (parésies temporaires)
et surtout des cordons postérieurs et des faisceaux pyramidaux (la
moelle étant surtout en jeu ici). Seulement ce ne sont pas, en
l'espèce, des hémorragies et des dégénérescences qui atteignent
cet affaiblissement l'action et la conductilité des appareils,
ce sont des troubles-de la circulation dans le territoire de certains
vaisseaux. Ces troubles étant essentiellement mobiles, le phéno-
mène du genou présente de bien plus grands changements dans
la syphilis de la moelle, que dans des hémorragies apoplectiques.
ou dans les dégénérescences tabétiques. Il s'agit cependant encore
de phénomènes physiologiques, 'car, dans le tube syphilitique
(dû à une affection syphilitique des vaisseaux de la moelle) le
phénomène du genou fait défaut sans qu'il soit du tout nécessaire
que la conductilité des nerfs sensitifs soit le moins du monde
atteinte. - P. IER.1VAL.
XXX. Un nouvel algésimètre ; par W. DE Bechterew. (Obowénie
psichialrii, n° 6, 1898. 11'euuologisclze Cent1'alúl., XVIII, 1899.)
Appareil dont les nombreuses figures font comprendre le mé-
canisme. Une aiguille sort de sa gaine d'une longueur déterminée
avec précision à l'aide d'un double système mécanique : déclan-
chement d'un ressort et collier à vis. L'adaptation d'un dynamo-
mètre à l'instrument permet de contrôler la pression. Enfin on
peut se servir de la surface lisse du bout terminal de l'appareil
comme d'un excitateur électrique, en y insérant, au moyen d'un
manchon de caoutchouc, les fils conducteurs nécessaires.
P. KERAVAL.
XXXI. Contribution à la physiologie du trijumeau et de la sensi-
bilité de la muqueuse buccale; par H. Schlesinger. (iYell-010g.
Genttalbl., XVIII, 1899).
L'auteur tente de déterminer la répartition des rameaux sensi-
tifs du trijumeau à la face et à la muqueuse buccale en étudiant
les allures cliniques de l'anesthésie et de l'analgésie de ces régions
dans les lésions spinales ascendantes. Il en tire que le territoire
cutané innervé par le rameau supérieur du trijumeau est com-
mandé par deux zones centrales nucléaires ; l'une de ces zones
donne la sensibilité à la peau du front, elle est la plus éloignée
518 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.
du centre ; l'autre donne la sensibilité à la peau du dos, du nez
elle est la plus près du centre.
Une grande partie du rameau frontal du trijumeau tirerait ses
fibres des groupes de noyaux les plus éloignés du centre. Puis,
viendraient les cellules destinées à la branche maxillaire inférieure,
et, tout près de celles-ci, les noyaux destinés à la branche
maxillaire supérieure, au nerf naso-ciliaire et au nasal interne.
Les parties les plus basses du système nerveux central amène-
raient les segments les plus postérieurs de la muqueuse des joues,
des gencives, la partie antérieure et le repli correspondant de la
muqueuse, les parties les plus antérieures du palais, peut-être
aussi les segments les plus reculés de la langue. Ces régions
recevraient probablement les éléments sensitifs de la même partie
du système nerveux central que les parties de la peau du front
voisines de la limite du cuir chevelu. Il parait démontré qu'une
moitié seulement de la muqueuse buccale est sensibilisée par un
côté du bulbe et à la moelle cervicale. Et il est probable que la
muqueuse de la cavité buccale est innervée par les segments les
plus éloignés du centre des racines spinales du trijumeau.
Quant aux organes proprement dits du pharynx tels que le
voile du palais et les amygdales, ils semblent avoir conservé leur
complète sensibilité au contact et à la douleur, alors qu'il existe
déjà de l'anesthésie et de l'analgésie de la muqueuse buccale,
soit que les organes tirent leur sensibilité d'une autre hauteur de
la moelle, soit que la lésion ait épargné certains segments de la
coupe de celle-ci. P. Keraval.
XXXII. De l'évacuation involontaire de l'urine pendant le rire ;
par'W. Bechterew. (06os)'('H : e psychiatrie, IV n° 1. 1899. 1\'eu-
rologisches Centr«lblalt XVIII, 1899.)
Il s'agit d'une femme de vingt ans tarée au point de vue mental et
héréditaire, qui urine toujours en abondance quand elle rit, où
qu'elle soit, sans présenter aucune anomalie fonctionnelle de la
vessie. L'auteur possède une seconde observation du même genre
également chez une femme, qu'il ne détaille pas. L'effort musculaire
(port de fardeaux) ne détermine jamais semblable évacuation ; il
n'existe pas d'incontinence nocturne d'urine. M. Bechterew croit
que c'est l'émotion en rapport avec le rire qui produit la miction
involontaire, exactement comme la peur, notamment chez les enfants
qui pleurent. Il en faudrait chercher la raison dans l'intimité trop
grande des centres d'évacuation de l'urine et des mouvements de
l'expression qui occupent la même place dans l'écorce et dans la
couche optique. Chez les deux malades en question cette infirmité
datait de l'enfance et tenait apparemment des conditions héré-
ditaires défavorables. P. KERAVAL.
REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 519
XXXIII. Lésion anatomique dans un cas de paralysie uni-latérale
de l'oculomoteur commun au cours de la paralysie générale ; par
0. JULIUSBERGER et L. KAPLAN. (Neul'ologis(;hes Cent1'aliJlatt XVIII,
1899.) .
Il s'agitd'une femme morte à l'Age de cinquante-un ans, atteinte de
paralysie générale à l'âge de quarante ans (son mari avait eu la syphi-
lis), elle était en outre depuis cinq ans affectée d'une paralysie de
l'oculomoteur commun du côté droit (mydriase, strabisme externe);,
elle était encore maîtresse de~sa paupière. On trouva, l'autopsie
les lésions de la paralysie générale et une atrophie microscopique
de l'oculomoteur commun du côté droit. L'étude microscopique du
noyau de ce nerf montre que le noyau central de Perlia y a
particulièrement souffert. Il y existe néanmoins encore quelques
cellules tout à fait normales. L'atrophie de la partie du noyau de
l'oculomoteur éloignée du centre est surtout prononcée dans le
plan antérieur et dans le plan postérieur ; les coupes de la portion.
moyenne de cette région sont normales. Aux points d'atrophie
correspond l'atrophie du réseau intranucléaire des fibres et des.
racines intramédullaires. Il existe encore une atrophie presque
complète des cellules externes du noyau qui sont disséminées dans
l'épaisseur et en avant du faisceau longitudinal postérieur. Enfin
l'oculomoteur commun lui-même présente, dans sa partie péri-
phérique, une atrophie avec prolifération interstitielle. Les autres
noyaux des autres nerfs craniens, notamment le noyau du pathé-
lique, sont normaux.
Ce serait, dans l'espèce, une lésion primaire des cellules,
exactement comme dans le cas de paralysie progressive multilo-
culaires des muscles des yeux. Il est intéressant de rapprocher la
continuité de la paralysie unilatérale qui nous occupe (cinq ans de
durée), et l'atrophie des fibres radiculaires intramédullaires,
l'atrophie nucléaire partielle circonscrite. Pourquoi l'intégrité d'une
grosse partie du noyau ? Parce que l'agent nocif inconnu a exercé
une action élective spéciale. P. KERAVAL.
XXXIV. Sur un réflexe particulier de la paume de la main ;
par Fla'. Holzinger (Obozrenie psichialrii, III, n° 6, 1898.)
Réflexe de l'éminence hypothénar. Voyez in Neurologische Cen-
tralblnlt XVII. 1898 Déjà analysé. P. KERAVAL.
XXXV. Du trouble des échanges nutritifs dans la' neurasthénie ; v
. par W ? \L 13ecnrt';nEw. (Obozrenie pslchivfnü, 111. na 7, 1898.) -
- Voyez Newologische Ce>atra1,61a1t, XVII, 1898. Analysé.
P. KERAVAL.
SOCIÉTÉS SAVANTES.
SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE.
Séance du 8 novembre 1900. Présidence de M. JorroS·.
Un cas de troubles de la sensibilité chez un amputé. M. Touche
rapporte l'histoire d'un malade atteint de bras fantôme; on provo-
quait dans le bras disparu des douleurs à type métamérique ou
radiculaire suivant le point du thorax que l'on palpait. Ce malade
est très probablement hystérique.
Psamm6me des méninges comprimant la moelle. M. Touche
présente les photographies de coupes se rapportant à deux cas de
cette affection affectant l'un la moelle dorsale, l'autre la moelle
lombaire et ayant donné tous les signes de compression médullaire
localisée aux points intéressés.
Paralysie du grand dentelé. - M. Souquer présente une malade
robuste, qui en tombant dans un escalier, s'est rattrapée violem-
ment à la rampe, de la main droite. L'effort a été tellement vif
que la main est restée crispée sur un barreau et que la malade a
dû avec la main gauche détacher la main droite ainsi contractée.
En même temps, elle a éprouvé une vive douleur au creux axil-
laire, et depuis ce moment le bras droit ne peut plus être élevé
au-dessus de l'horizontale; la paroi postérieure du creux axillaire
a disparu; le sillon de Duchenne est très net, le bord postérieur et
la pointe de l'omoplate étant detachés et portés en arrière et en
haut. L'examen électrique dénote la paralysie du grand dentelé
et du trapèze scapulaire, la brusquerie de l'effort ayant lésé les
nerfs correspondant à ces groupes musculaires.
Paralysie infantile avec scoliose tardive. M. Marie présente un
malade, qui ayant subi à l'âge de cinq ans une paralysie infantile
du membre inférieur droit, a recommencé à marcher avec appui
à huit ans et a pu ensuite marcher sans canne. A l'âge de trente-
quatre ans, il a eu une reprise d'amiotrophie avec scoliose très
prononcée alors qu'il avait été parfaitement droit jusque-là.
M. Marie montre 'des photographies relatives à d'autres cas iden-
tiques dont l'un montre une paralysie infantile à trois ans amé-
liorée avec scoliose apparaissant à dix-neuf ans.'
SOCIÉTÉS SAVANTES. 591
Arthropathie tabétique. - M. Pécharmant présente les phologra-
phies d'un cas de tabes ancien de six ans au cours duquel derniè-
rement se produisit une arthropathie énorme du genou. Celle-ci
fut en vain traitée par le salicylate de soude et s'amenda au con-
traire en trois jours sous l'influence de l'aspyrine. Il n'y avait ni
rougeur ni température. 1
Tremblement associé à une rétinite du côté opposé. M. I\LIPPEL
rapporte le cas d'un homme de quarante-huit ans, qui pendant
la convalescence d'une lièvre typhoïde fut pris de tremblement
choréiforme du membre supérieur droit associé à une rétinite
gauche. Il s'agit probablement d'une lésion des tubercules quadri-
jumeaux d'origine typhique.
Signe de Babinski dans la fièvre typhoïde.-M. Léopold LÉvi.
Le signe de Babinski s'est rencontré dans 10/20 cas de fièvre
typhoïde. Il est apparu aux différentes périodes de la maladie :
9° jour, 21°, 25°, a persisté un temps variable : 20 jours, 30 jours.
Certains malades ont quitté l'hôpital, le présentant encore.
Deux fois les phénomènes nerveux ont réalisé le tableau d'une
myélite aiguë bénigne.
Dans une autre observation, il y a eu rétention homogène d'urine
pendant la convalescence. Le délire a été fréquemment observé.
Dans aucun cas, il n'y a eu coïncidence du signe de Konig, ni
de phénomènes méningés.
La trépidation épileptoïde a coexisté avec le signe de Babinski
5 fois,
Le signe de Babinski a existé sans trépidation 5 fois.
La trépidation a existé sans signe de Babinsky 4 fois.
L'exagération des réflexes, la trépidation épileptoïde, le signe de
Babinski indiquent une altération de la marche (1 rC étape de la
myélite typhoïdique).
L'existence du signe de Babinsky au cours de la fièvre typhoïde
ne semble pas augmenter la gravité de la maladie. Tous les cas se
sont terminés par guérison.
M. Babinski. M. Lévi est peut-être tombé sur une série heu-
reuse, puisqu'il accuse le phénomène du pied dans 50 p. 100 des
cas de typhoïde où il l'a cherché; en tout cas, il y a la une notion
nouvelle, et la preuve que cette maladie atteint plus souvent qu'on
ne croit le névraxe.
M. Dupré. - L'intérêt sera maintenant de rechercher ce qui
restera de cette atteinte deux ou trois ans après guérison de la
fièvre typhoïde.
Réflexe plantaire dans la paralysie générale. MM. A. DELTEIL et
Bouvière (de Montpellier). - Il n'existe pas de rapport entre les
réflexes plantaire et rotulien dans la paralysie générale vraie. Il y
52 : 2 sociétés savantes.
en aurait un au contraire dans la pseudo-paralysie générale syphi-
litique. Ce rapport pourrait servir à les différencier.
M. Bi31NsKi présente la thèse de M. Charuel faite sous la direc-
tion de M. Lalanne de Maréville et intitulée : ' Recherches sur le
phénomène des' orteils dans la paralysie générale. Ce réflexe
serait souvent le seul indice de lésions pyramidales au cours de la
paralysie générale.
Zona thoracique en bande horizontale. m. Brissaud rapporte un
cas de zona s'étageant dans les 5e, 6° et 70 espaces intercostaux
sur une bande exactement horizontale intéressant par conséquent
sur une même ligne de niveau trois nerfs à trois étages différents
ce qui confirme ses conclusions antérieures sur ce sujet.
Phénomène des orteils dans l'épilepsie. - M. CROUSON, dans le
service de M. Bourneville, a cherché ce signe au cours des attaques.
Dans une première catégorie de malades, il y a immobilité abso-
lue pendant toute l'attaque et retour du réflexe un certain temps
après la fin de la crise; dans une seconde catégorie : immobilité
au début de l'attaque et retour du réflexe après un certain temps,
mais avant la fin de la crise. Enfin, dans une troisième catégorie,
il y a extension pendant toute la durée de l'attaque.
F. 13otssEn.
SOCIÉTÉ D'H1PNOLOGI1; ET DE PSYCHOLOGIE
Séance du mardi 16 octobre 1900. Présidence DE M. Voisin.
Un appareil pour produire l'hypnose.
M. L ? 1ESLE. Cet appareil comporte : 1° un mouvement d'hoilo-
gerie qui actionne un miroir rotatif; 3° un phonendoscope qui
emmagasine et amplifie les vibrations sonores. De cette manière,
on réalise l'inhibition oculaire et l'inhibition auriculaire.
La léthargie chez les poissons.
M. Cnncz signale le cas de poissons qui, pendant huit mois de
l'année restent en léthargie dans la vase desséchée et durcie des
rivières complètement à sec, puis sortent de leur sommeil dès que
l'eau recommence à couler.
M. IB : G\.1ULT. Ce genre de poisson est le protopterus ; dès que
Tient la sécheresse, il secrète des mucosités et se construit une
SOCIÉTÉS SAVANTES. 523
sorte de cocon auquel il ménage un canal d'air grand comme un
trou de souris. La léthargie ne se rencontre pas seulement chez
les hibernants, mais, en général, chez les animaux auxquels la
nourriture vient à faire défaut, chez des hérissons, des échidnés,
des fourmis des insectes, etc. Le sommeil hibernal existe aussi
chez l'homme, par exemple, dans certains districts russes qui
souffrent de la disette. La léthargie n'est ni étrange, ni exception-
nelle ; elle constitue un phénomène biologique en rapport avec
des modifications de la température et de la vaso-constriction
périphériques. -
M. Le Menant des Chesnais. Les fakirs présentent des phéno-
mènes de ce genre ; chez celui qui se fit emmurer pendant plu-
sieurs mois, on a très nettement constaté un refroidissement lent
et progressif. f.
M. Bouc. On sait, d'après des témoignages authentiques, qu'un
troupeau de moutons surpris par une avalanche, fut bloqué dans
une cavité naturelle et resta en léthargie pendant 25 jours.
M. Voisin. Les léthargiques ne font aucun mouvement quand
on ne les alimente pas. La fameuse dormeuse de Thenelles
esquisse parfois des ébauches d'attaques d'hystérie; c'est qu'on lui
administre des lavements nutritifs.
M. BÉRILLON. Forel (de Zurich) a très bien étudié la léthargie
chez les loirs. Il est parvenu à les réveiller partiellement et à leur
faire exécuter des mouvements purement automatiques. Ces expé-
riences mériteraient d'être reprises.
La pratique de l'hypnotisme à la campagne.
M. Perceau (de Nérondes) expose que, par l'hypnotisme, il a
pu guérir des malades rebelles à toute autre médication et qui
présentaient des crises hystéro-épileptiques, du mutisme, de l'ano-
rexie, de l'incontinence d'urine, etc.
Recherche du subconscient pendant le sommeil hypnotique.
1\1. BÉnILLON. Parfois nos suggestions restent inefficaces parce
qu'elles ne s'adressent qu'au symptôme. Si nous interrogeons nos
malades, après les avoir plongés dans le sommeil hypnotique,
nous arrivons parfois à découvrir que la véritable cause de leur
état malade réside dans une idée fixe, un rêve, etc., demeurés
subconscients pendant la veille. Le docteur Vogt (de Berlin) a
montré combien la thérapeutique devient efficace dès qu'on prend
soin de rechercher ce subconscient.
M. Farez. J'ai eu à soigner un littérateur qu'une femme s'amu-
sait à endormir à volonté par simple pression d'un point hypno-
524 VARIA.
gène artificiellement créé. Réveillé, ce sujet ne sa\ait même pas
qu'on l'avait endormi. Après l'avoir hypnotisé, j'ai pu faire revivre
chez ce sujet le souvenir de ce qui s'était passé pendant les som-
meils antérieurs. Mais, comme cette femme lui avait formellement
suggéré de n'en rien révéler à personne, j'ai longtemps échoué
dans mes tentatives de désuggestion. A force d'artifices, je suis
cependant parvenu à obtenir des aveux. Alors, seulement, par des
inhibitions suggérées, j'ai pu neutraliser l'action hypnotisante de
cette femme et affranchir cet homme d'une telle sujétion.
M. Jadis, à la Pitié, une malade de Dumontpallier
présenta des accidents syphilitiques, et, cependant, elle affirmait
n'avoir jamais eu aucun rapport. Hypnotisée, elle se rappela
qu'un jour de sortie, avant de rentrer à l'hôpital, elle s'était
endormie et qu'un individu, qu'elle désigna, avait profité de son
sommeil pour abuser d'elle.
- Sommeil naturel et suggestion.
M. F AREZ. Une femme fait à son mari des suggestions pendant
le sommeil naturel; elle lui suggère des paralysies psychiques, des
antipathies, des répulsions ; elle lui extorque les confidences les
plus intimes et en fait son véritable esclave. Le mari, à l'état de
veille, ignore le viol moral dont il est l'objet pendant la nuit. C'est
seulement quand je l'ai plongé dans le sommeil hypnotique qu'il
peut retrouver et faire revivre ces souvenirs subconscients. Ceux-
ci une fois évoqués, l'immunisation psychique peut être réa-
lisée.
VARIA.
Les aliénés EN liberté.
Une victime des maires. - Deux gardiens de la paix de service,
la nuit dernière vers une heure, sur le boulevard de Belleville,
apercevaient un cocher de fiacre qui, complètement nu, debout
sur son siège, fouettait son cheval à tour de bras en hurlant : « Je
suis le successeur de Monjaret, je conduis les maires au banquet
officiel ! dans le char do l'Etat ! »
Aiguillonné par la douleur, le cheval faisait des bonds à rendre
jaloux un pur-san et brûlait d'autant mieux les pavés qu'ils
étaient en bois.
VARIA. 526
N'écoutant que leur courage, les deux agents se jetèrent à la
tète de l'animal et, après avoir été trainés sur un parcours d'une
cinquantaine de mètres, réussirent, malgré les vociférations de
l'automédon, à l'arrêter. Ils conduisirent l'attelage et son conduc-
teur au poste de la rue Etienne-Dolet. Le pauvre deséquilibré avait
jeté ses vêtements à l'intérieur du véhicule. C'est un nommé Ernest
Prichey, âgé de trente-trois ans, demeurant rue des Vignolles. Il
a été envoyé à l'infirmerie du Dépôt. (Le Malin, 23 septembre 1900.)
La folle des Tuileries. Des gardiens remarquaient, hier après
midi, dans le jardin des Tuileries, non loin de la grille de la place
de la Concorde, une femme, jeune encore, entièrement vêtue de
noir, qui, au pied d'un arbre, au moyen d'une petite pelle, avait
creusé un trou et appelait un être invisible. Ils s'approchèrent et
interrogèrent l'inconnue. Je cherche mon enfant, leur déclara-
t-elle. Elle se cache au pied de cet arbre.
Les gardiens n'eurent pas de peine à s'apercevcir que la pauvre
femme ne jouissait pas de la plénitude de ses facultés mentales.
Ils la conduisirent chez M. Blondeau, commissaire de police, qui
l'a fait diriger sur l'infirmerie spéciale. L'enquête a établi que la
malheureuse, nommée' Jeanne Sorbin, âgée de trente-deux ans,
divorcée, était devenue folle à la suite de la perte d'une fillette de
quatre ans, son unique enfant. (Le Matin, 25 septembre 1900.)
L'aliéné de la rue Ramey. - Une scène tragique s'est déroulée,
hier dans la matinée, rue Ramey. Brandissant un long poignard,
un individu, vêtu seulement de sa chemise et de son pantalon, les
yeux injectés de sang, l'écume aux lèvres, allait et venait furieuse-
. ment, criant de temps à autre : « Je suis Robespierre ! Je vais vous
tuer tous, tous ! ... » Et, ce disant, le pauvre diable se jetait sur
les passants qui s'enfuyaient affolés. A un moment donné, il réus-
sit à saisir par les cheveux une femme d'une vingtaine d'années
qui, ayant au bras un- lourd panier, s'était trouvée immobilisée par
sa charge. Il la renversa et allait, sans aucun doute, la frapper
avec son arme, lorsque, voyant le danger que courait la malheu-
reuse, un gardien de la paix se précipita sur le forcené et, d'un
formidable coup de poing dans la poitrine, lui fit lâcher prise'et
l'envoya rouler sur la chaussée. En tombant, l'homme laissa
échapper son poignard. On réussit alors à s'emparer de lui. Soli-
demtent ligoté, il fut conduit au commissariat de police de M. Car-
pin et reconnu pour un nommé Joseph Bourdent, âgé de trente-
quatre ans, garçon coiffeur, demeurant 18, boulevard Barbès.
Bourdent qui, depuis quelque temps, ne jouissait plus de la pléni-
tude de ses facultés, avait été pris d'un accès de folie furieuse et
s'était enfui de chez lui, après avoir tenté d'assassiner sa femme.
M. Carpin l'a envoyé à l'infirmerie spéciale du Dépôt. (Le Malin,
27 septembre 1900.)
526 6 VARIA. ! L'homme au chien. Un monsieur extrêmement correct se ren-
dait, hier, au commissariat de police du Champ-de-Mars, condui-
sant en laisse un superbe caniche noir, autour des reins duquel il
avait noué un large ruban tricolore. Sur son passage, les visiteurs
se demandaient quelle était cette plaisanterie, que plus d'un trou-
vait de très mauvais goût.
Arrivé au commissariat de police, le maître du chien, introduit
auprès de M. Garnot, lui déclare qu'il venait le trouver afin de le
prier de prendre les mesures nécessaires « pour faire respecter le
maire de la Martinique ». Ne comprenant pas de quoi il s'agissait,
le magistrat demanda à l'inconnu : Mais le maire de la Marti-
nique n'a pas besoin de moi, il retrouvera bien son chemin tout
seul. - Hélas ! non, monsieur le commissaire, répondit le singu-
lier personnage ; le malheureux ne peut plus parler et ne sait pas
se faire comprendre. Mais où est-il ? s'écria le commissaire, de
plus en plus étonné. Le voici.
Et ce disant, le monsieur montrait son chien.
Comprenant aussitôt qu'il avait affaire à un fou, le commissaire
l'interrogea adroitement et apprit qu'il se nommait M. J..., ingé-
nieur, assez connu à Paris. Ce malheureux a été envoyé à l'infir-
merie spéciale du Dépôt. (Le Matin, 27 septembre 1900.)
Un fou furieux. - Les voyageurs qui se trouvaient hier matin
dans le train venant de Pontoise ont été vivement impressionnés
par un fou furieux qui était monté dans un compartiment de
première.
Après avoir quitté la station de Pontoise le conducteur du train
entendit la sonnette d'alarme. Il fit stopper le train et courut à un
compartiment de première classe, où un individu, la tête à la
portière, gesticulait et à coups de canne brisait les glaces en pro-
férant des menaces de mort pour quiconque l'approcherait.
Voyant qu'il avait affaire à un fou, le conducteur du train chercha
à le calmer, mais sans y parvenir.
Aidé alors de plusieurs voyageurs, il voulut maîtriser l'aliéné,
mais doué d'une force peu commune, le fou, griffant et mordant,
frappant à coups de pieds et de poings, les tint tous à dis-
tance.
Le chef de train voyant qu'on ne pouvait arriver à s'en rendre
maître, ferma la porte du compartiment, laissant dans un compar-
timent voisin deux employés pour le surveiller et il remit son
train en marche, tandis que la sonnette d'alarme, agitée fréné-
tiquement par l'aliéné, ne cessait de se faire entendre jusqu'à l'ar-
rivée en gare du Nord.
Là, lorsque le train stoppa, des inspecteurs du commissariat
spécial de la gare qui avait été prévenu par une dépêche envoyée
de Saint-Denis, se dirigèrent vers le wagon et entamèrent avec
VARIA. 57 7
l'aliéné, une lutte des plus vives, au cours de laquelle ils reçurent
force coups de pied, de poing et de canne. C'est absolument
ligotté que ce fou furieux fut conduit au poste de police où une
voiture de l'infirmerie spéciale- du Dépôt, vint le prendre à
Il heures. 11 n'a pas été possible encore d'établir son identité. (La
Fronde, du 10 octobre 1900.)
11,10 Rochon, épicière, boulevard du Roi, donnait depuis quelque
temps des signes d'aliénation mentale. Pendant que son mari faisait
brûler du café dans la cour, Mme Rochon réussit à absorber le
contenu d'une fiole de teinture d'iode et ne tarda pas à expirer.
(Journal de Scine-et-Oise, 20 octobre 1900.)
Un homme âgé d'une trentaine d'années avait assailli, à
plusieurs reprises, dans le parc de Versailles, des personnes seules,
sans qu'on eût jamais réussi à-l'arrêter. Il essayait de renouveler
ses exploits sur le champ de foire de Versailles. Cette fois, il fut
arrêté et conduit au commissariat central, où l'on reconnut que
l'on avait affaire à un fou. Cet individu a été interné à l'hôpital.
(Journal de Seine-et-Oise, 20 octobre 1900.)
Pauvre fou ! Un individu parcourait ce matin, à sept heures,
la rue d'Allemagne, tirant des coups de revolver sur les passants
qui, effrayés, se sauvaient. Désarmé par un agent, ce singulier
monomane a été emmené au commissariat de M. Pontailler. C'est
un nommé Joseph Lofin, coiffeur, demeurant, 7, rue Lauzun ; il a
été envoyé à l'infirmerie spéciale du Dépôt. (La France du 26 oc-
tobre 1900.)
Drame^de la folie. Mme Mélanie Gayltout, âgée de trente et
un ans et mère de deux enfants, demeurant à Rosny-sous-Bois, a
tenté de se suicider dans des circonstances toutes particu-
lières.
Hier, dans l'après-midi, profitant que son mari, maçon, était à
son travail, elle faisait absorber sa petite fille, âgée de six mois,
la moitié du contenu d'une fiole de laudanum et elle en buvait
elle-même l'autre moitié. Elle se couchait alors avec son enfant
sur son lit, puis trouvant que la mort ne venait pas assez vite, elle
allait dans la cuisine chercher deux couteaux avec lesquels elle se
fit quatre blessures profondes en dessous du sein droit.
Lorsque M. Gayltout rentra il trouva sa femme sans connais-
sance tenant son enfant embrassée sur le lit. Affolé, il courut cher-
cher du secours. ! ' -
Le docteur Estieu, ancien maire de Bagnolet, après des soins
immédiats, les a fait transporter à l'hôpital Tenon ! , Le mari a
déclaré que sa femme ne jouissait pas de la plénitude de ses' fàout-
tés mentales. (La France, du 22 octobre 1900.) "' . ", 1.. ? -'
M8 \ . VARIA.
Aliénée. Une rentière, d'origine anglaise, 1\1'"e Mill, demeu-
rant rue Franklin, donnait depuis quelque temps des signes d'alié-
nation mentale qui inquiétaient ses voisins. Hier soir, vers onze
heures, après s'être barricadée dans son appartement, Mme Mill
apparut à la fenêtre, en poussant des cris lamentables qui atti-
rèrent les passants. Puis elle se mit à lancer dans la rue, du haut
du second étage, des bijoux et des valeurs. Le concierge, n'ayant
pu arriver à forcer la porte de M-0 Mill, fit appel aux sapeurs-
pompiers, qui, au moyen d'une échelle, s'emparèrent de la mal-
heureuse, qui a été envoyée à l'infirmerie spéciale du Dépôt.
M. Flory, juge d'instruction, qui se trouvait sur les lieux, surveil-
lait les opérations des pompiers. (Le Temps, fer novembre 1900.)
Les drames DE l'alcoolisme.
à St-Etienne (Loire), le nommé Painturier, trente-neuf ans,
alcoolique, a tué à coups de revolver la femme Giraud, sa concubine,
puis s'est tué ensuite. (Le Bonhomme Norma'id, 27 juillet 1900.)
Suicide d'enfant. - A Pont-de-1'Arche (Eure), un petit domes-
tique, âgé de quatorze ans, s'est pendu dans la forêt. Il avait près
de lui une bouteille d'eau-de-vie vide. La cause de son suicide
est inconnue. (Le Bonhomme Normand, 27 juillet 1900).
Charles Broggi, quarante-deux ans, marin à Ajaccio, alcoolique
invétéré, a tué, à coups de couteau, sa femme parce que, absorbée
par les soins à donner son bébé de trente jours, elle n'avait pas
préparé le déjeuner. Il s'est suicidé ensuite. (Le Bonhomme Nor-
mand, 5 octobre 1900.)
- Deux jeunes gens de l'Hermitage (Ille-et-Vilaine), étant gris,
allèrent, la nuit, frapper avec persistance, à la porte de la veuve
Prodhomme, 63 ans. Celle-ci ouvrit la fenêtre pour leur jeter un
seau d'eau, mais l'un d'eux lui lança un énorme caillou qui la tua.
(Bonhomme Normand, 18 octobre 1900.)
La nuit dernière, un chaudronnier en cuivre, François Gilles,
âgé de trente-cinq ans, en rentrant à son domicile, 114, rue Demi-
dof, au Havre, en état d'ivresse, s'est précipité sur sa femme, née
Léontine Mauduit, âgée de vingt-huit ans, qui était couchée, l'a
frappée à coups de pied et de poing avec une férocité inouïe.
Comme la malheureuse poussait les cris : « Au secours ! à l'assas-
sin ! mais tu me tues ! » Le misérable répondit : « Oui, il faut
que je te tue aujourd'hui. » Puis, malgré les pleurs des cinq petits
enfants, qui imploraient pour leur mère en criant : « Maman !
maman ! » Gilles, fou furieux, saisit brutalement sa femme dans
ses bras, la porta près de la fenêtre et la lança dans le vide de la
hauteur du troisième étage, sur le pavé de la rue.
varia. 529
Relevée par les voisins, la victime a été transportée à l'hôpital
Pasteur, où elle est morte ce matin. Quant à Gilles, il a été arrêté
aussitôt. Il exprime de vifs regrets et assure que sa femme se
serait elle-même précipitée par la fenêtre. Mais le témoignage des
cinq enfants ainsi que les déclarations des voisins qui ont entendu
la scène sont contre lui. Des voisins charitables ont bien voulu se
charger provisoirement des cinq enfants dont l'aînée, une fille, est
âgée de sept ans. (Le Temps du 22 octobre 1900.)
Louis Bordeaux, 15 ans, garçon perruquier à Bretoncelles
(Orne), étant ivre, avait pris un fusil pour tuer son père et sa
mère. Ses oncles l'arrêtèrent. Le jeune assassin tira dessus, mais
ne les atteignit pas. Il a été arrêté. (Le Bonhomme Normand.)
Une léthargie PROLONGÉE. - Est-ce une fraude ?
11 y a environ vingt ans, le garde-frein Diettrich fut victime
d'un grave accident de chemin de fer, il fut blessé à la tête. perdit
connaissance et depuis il est dans un état de léthargie qui a été .
constaté et étudié par un grand nombre de célébrités médicales
venues à Nausslitz (royaume de Saxe), pour examiner ce dormeur
extraordinaire. Les voisins n'ont, paraît-il, jamais bien cru à cette
léthargie prolongée et souvent, depuis une dizaine d'années, des
dénonciations sont parvenues à la direction des chemins de fer
saxons prétendant que Diettrich était un vulgaire imposteur et
avait escroqué les grosses sommes, 30.000 marcs environ, que les
siens touchaient en guise d'indemnité.
Le brigadier de gendarmerie Nestmann a assuré que le soir il
avait vu avec sa lorgnette le prétendu dormeur s'approcher de sa
femme qui causait près de la fenêtre et s'asseoir sur une chaise.
Le brigadier appela plusieurs personnes qui constatèrent égale-
ment ce fait. Puis tous, ils se rendirent à la maison du dormeur
qu'on trouva comme toujours dans son lit plongé dans son som-
meil léthargique. Le brigadier de gendarmerie s'écria : « Diettrich,
levez-vous, maintenant votre comédie est éventée, on vous a vu il
y a quelques minutes à la fenêtre près de la machine à coudre ! »
Diettrich ne bougea pas, sa femme et sa fille se mirent à pleurer ;
le brigadier et ses amis se retirèrent en disant qu'ils allaient
dénoncer l'imposteur. Immédiatement l'administration des che-
mins de fer de l'Etat saxon a envoyé à Nausslitz plusieurs méde-
cins, dont l'un d'eux a nié énergiquement toute espèce de fraude
de la part de Diettrich.
« Diettrich, dit-il, n'est pas un imposteur, mais un pauvre
malheureux qui est hors d'état de faire le moindre mouvement.
Voici ce qui s'est passé le jour où le brigadier et ses amis l'ont vu
à la fenêtre. Tous les jours, Mmo Diettrich et sa fille portent le
Archives, 2 série, t. X. 31 Í
530 FAITS DIVERS.
malheureux sur une chaise près de la- fenêtre pendant que l'on
fait son lit. Le malade, qui ne peut pas se tenir sur son séant, a
été appuyé contre la machine à coudre, ce qui lui donnait l'air
d'un ouvrier se servant de la machine, à tel point que sa fille, en
plaisantant, lui mit un instant les lunettes de sa mère. Lorsque le
brigadier et ses amis ont pénétré chez la famille Diettrich, le
malade venait d'être reporté dans son lit et les pauvres femmes.
terrifiées, n'ont pas pu s'expliquer les motifs de cette brutale inva-
sion de leur domicile, pas plus que l'interpellation du brigadier
ordonnant au pauvre malade de se lever. »
Cette mystérieuse affaire a eu un épilogue tragique. 71lrno Diet-
trich, après avoir essayé d'étrangler- son mari, l'a tué d'un coup
de pistolet dans la tête, ensuite elle s'est pendue. Ceux qui ont
prétendu que Diettrich était un imposteur disent que les époux se
sont suicidés lorsqu'ils ont vu leur fraude découverte. Les méde-
cins et la majorité de la population pensent, au contraire, que ce
sont les calomnies des voisins qui ont poussé cette malheureuse
femme à cet acte de désespoir. On a trouvé, du reste, une lettre
qui confirme cette opinion.
Avant l'accident de chemin de fer qui retrancha, pour ainsi dire,-
Dietlrich du nombre des vivauts, cette famille jouissait de la con-
sidération générale qui se transforma en mépris lorsqu'on crut
dans lo pays que les époux jouaient une indigne comédie pour
continuer à toucher la pension relativement élevée que leur servait
l'administration des chemins de fer saxons.
Pendant dix-sept ans, 11°e Diettrich a eu à souffrir des dénon-
ciations des voisins, suivies de descentes de police, et bien que
toujours les médecins aient déclaré que l'infortuné garde-frein
était vraiment dans un état d'insensibilité complète, les envieux
n'ont' pas désarmé jusqu'à ce qu'ils aient poussé cette malheu-
reuse femme à l'acte de désespoir, qui a vivement impressionné
l'opinion publique. On a pratiqué l'autopsie du garde-frein; elle a
pleinement confirmé les diagnostics des médecins ; plusieurs
lésions du cerveau ont motivé l'état léthargique dans lequel Diet-
trich a végété pendant si longtemps. (Le Temps du 2S octobre
1900.)
FAITS DIVERS.
Asiles D'ALIÉNÉS. - Nominations et promotions : M. le Dr Jacquin,
premier du concours de Lyon, nommé médecin adjoint à St-Ylie
FAITS DIVERS. a531
(Jura) poste créé; -11. le Dr 130URDIN, médecin adjoint à la Charité
(Nièvre) promu à la classe exceptionnelle; - il. le D1' TRUY, méde-
cin adjoint à Auxerre, promu à la première classe du cadre ;
M. le D1' Lallemand, directeur-médecin à Quatre-Mares (Seine-Infé-
rieure), nommé à la première classe du cadre ; M. Lucipia,
ancien président du Conseil général de la Seine et du Conseil
municipal de Paris, nommé directeur de l'asile public d'aliénés de
Villejuif (Seine), en remplacement de M. Tondu, nommé directeur
honoraire; - ! IL Lesvier, directeur de l'asile des aliénés de Rennes,
nommé directeur de l'asile de Clermont (Oise); M. GnUHIEn,
directeur de l'asile de Clermont (Oise), nommé directeur de l'asile
des aliénés de Rennes; M. le D'' Siziut, directeur médecin à
Saint-Ylie (Jura), est promu à la 2° classe du cadre; M. le
D1' 130UDHlE, médecin en chef à l'asile de Vaucluse, nommé médecin
en chef à l'asile de Maison-Blanche (poste créé) ; -111. le Dr DUPAIN,
directeur médecin à Dun-sur-Auron (Cher), nommé .médecin en
chef à l'asile de Vaucluse (novembre).
Asile DE Maine-et-Loire. -Un concours pour une place d'Interne
en médecine à l'asile d'aliénés de Sainte-Gemmes-sur-Loire (Maine-
et-Loire) s'ouvrira à Angers, le lundi 3 décembre 1900, à 8 heures
du matin, à la Préfecture. Avantages : Indemnité annuelle de
700 francs; nourriture, logement, chauffage, éclairage. Pour tous
autres renseignements, s'adresser au Secrétariat de l'Asile.
Asiles d'aliénés de la Seine. Concours pour la nomination aux
places d'interne titulaire en médecine, vacantes au 1er janvier 1901,
dans les asiles publics d'aliénés du département de la Seine, asile
clinique, asiles de Vaucluse, Ville-Evrard, Villejuif et Maison-
Blanche et l'infirmerie spéciale des aliénés à la Préfecture de Police.
Le lundi 3 décembre 1900, à midi précis, il sera ouvert, à la
Préfecture de la Seine, annexe de l'Hôtel de Ville, rue Lobau, n° 2,
à Paris, un concours pour la nomination aux places d'interne titu-
laire en médecine vacantes dans lesdits établissements au 1er jan-
vier 1901. Les candidats qui désirent prendre part à ce concours,
devront se faire inscrire à la Préfecture de la Seine, service des
aliénés, annexe de l'Hôtel de Ville, n° 2, rue Lobau, tous les jours,
dimanches et fêtes exceptés,. de midi à. 5 heures, dm lundi 5 au
samedi 17 novembre 1900 inclusivement.
Psychiatrie- et Psychologie. Service de 31. Toulouse à ? asile de
Villejuif (Tramway du Chàtelet). - Le mercredi, visite du ser-
vice. - Le laboratoire du service de M. Toulouse fait partie de
l'école des hautes études sous la dénomination de Laboratoire de
Psychologie expérimentale. Les élèves sont exercés, sous la direc-
tion de M. Vaschide, chef des travaux, et d'autres spécialistes, à.
l'examen des malades et aux diverses manipulations de la psycha-
532 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
logie expérimentale. Les conférences, dont le programme sera
ultérieurement publié, seront faites par le Directeur, M. Toulouse,
et ses collaborateurs. On est prié de se faire inscrire au préalable
pour prendre part aux travaux pratiques qui sont gratuits.
Hystérique voleuse. - Gare aux poches. - 11 y avait ces jours-
- ci, à Vire, rue de la Gare,-une vente assez importante. Pendant
qu'elles regardaient, une voleuse visita les poches des dames
Augustine Aubeuf, Emilia Asselin et Augustine Jobard, et leur
enleva : à la première, 27 fr. ; à la seconde, î fr., et à la troi-
sième, 20 fr. Les soupçons se portèrent sur la nommée Azelma
Auvray, venant de Granville. Le commissaire se rendit à l'hôtel
où elle était descendùe et l'arrêta avec une autre femme qui
l'accompagnait. En prison, Azelma Auvray a été prise d'une
crise d'hystérie qui a dégénéré en folie furieuse et qui a motivé son
transfert à l'hôpital. (Le Bonhomme Normand, 18 octobre 1900.)
Encore un enfant qui MET le feu. Nous avons dit que deux
bâtiments, situés à Caumont-sur-Orne, près Harcourt, avaient été
détruits par le feu. Ils ont occasionné 8 1 10 fr. de pertes au sieur
Marguerite, 800 fr. au sieur Courvalet et 200 fr. au sieur Guillot.
11 y a assurance. Le petit René Marie, à peine âgé de quatre ans,
a déclaré qu'ayant trouvé une allumette il l'avait frottée contre le
mur de la grange et avait enflammé la paille qui s'y trouvait et
qui avait pris feu. (Le Bonhomme Normand, 18 octobre 1900.)
BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.
BODDAEBT (R.). - Etude sur une forme cl'oxomatomanie. - Brochure
in-8- de 8 pages. Bruxelles, 1900. - Imprimerie llayez.
CAhTÉRAS (de). Contribution à l'élude du traitement des psychoses
par l'alitement. In-8" de 100 pages. Lille, 1900. - Librairie
A. Casson.
CRocQ. - L'hypnotisme scientifique, avec une introduction par le pro-
fesseur PITRES (2° édition revue et augmentée). In-8° de xvm-610 pages,
avec 51 figures. Prix : la francs. - Paris, 1900. Société d'éditions
scientifiques.
Dubois (Ch.). - De l'action des anesthésiques sur les réflexes gan-
glionnaires. - In-8° de 42 pages. - Lille, 1900. - Librairie A. Massuil.
GÉLINEAU (J.-B.). - Traité des épilepsies. - Volume grand in-8° de
952 pages. Prix : 15 francs. Paris, 1900. - Librairie J.-B. Baillière
et fils.
AVIS A NOS ABONNÉS. 533
IIA31\I1RDRRG. Studien ilber Klinik und pathologie aer idiotie zrebsl
untersuchungen über die normale anatomIe du Ilirizule. tn-4° de
128 pages, avec 7 planches hors texte. - Upsala, 1895. Druck akade-
mischeu Buchdruclcerei.
LEDUC (S.). Effets psychiques de la caféine. Brochure in-8° de
si pages. Paris, 1899. - (Association pour l'avancement des sciences.)
LEDUC (S.). Traitement électrique des névralgies. Brochure in-80
de 18 pages, avec 2 planches hors texte. - Paris, 1900. - Congrès inter-
national d'électrolo,ie.
LEDuc (S.). Rapport entre la variation d'excitation des nerfs et la
variation de densité des courants excitateurs ii différents potentiels.
Brochure in-io de C pages, avec 4 figures. Paris, 1900. - Extrait des
Comptes rendus de l'Académie des sciences.
Léon (J. (le). Sirin,r¡omielia con 6[Mto/)'o/ ! 6[ lipo Aran Duc/ie/ute.
Brochure in-8° de 8 pages, avec 2 figures. - Montevideo, 1900. Impri-
merie de Turenne, Varzi y Cia.
Mncr.rHZe (S.). -A A case of 12eqi-o lelhrir7 willl a note on the hislolo-
flical changes of the nervolls System by F.-W. Choit. Brochure in-8° de
6 pages, avec une planche hors texte. - London, 1900.- Adlard and Son.
.1[anicomio nacional. Memoria correspondiente al ano 1899. In-4°
de 60 pages, avec planches hors texte. - Montevideo. 1900. - Escuela
Nacional de Artes y Oficios.
AVIS A NOS ABONNÉS.- L'échéance du 1° JflN 'lll
étant l'une des plus importantes de l'année, nous prions
instamment nos souscripteurs dont l'abonnement cesse à
cette date, de nous envoyer le plus tôt possible le montant
de leur renouvellement. Ils pourront nous adresser ce
montant par l'intermédiaire du bureau de poste de leur
localité, qui leur remettra un reçu de la somme versée.
Nous prenons à notre charge les frais de 3 p. 100 prélevés
par la poste, et nos abonnés n'ont rien à payer en sus du
prix de leur renouvellement.
Nous leur rappelons que, à moins d'avis contraire, la
quittance de réabonnement leur sera présentée, aug-
mentée des frais de recouvrement, à partir du
15 Janvier. Nous les engageons donc à nous envoyer DE
SUITE leur renouvellement par un mandat-poste.
Afin d'éviter toute erreur, nous prions également nos
abonnés de joindre à leur lettre de réabonnement et à toutes
leurs réclamations la BANDE de leur journal.
- Nous rappelons à nos lecteurs que l'abonnement collec-
tif des Archives de Neurologie et du Progrès Médical
est réduit à 30 francs pour la France et l'Étranger.
Le rédacteur-gérant : : . BOURNEVILLE.
TABLE DES MATIÈRES
Accessoire de Willis. L'- est un
nerf mixte, par Puraccini, 127.
Affaire Sauter, par Schrencl : Not-
zing, 229. 1
ALCOOL. L'- dans les asiles d'alié-
nés par Hoppe, 55. Drames de
l ? î9. Influence (je 1'- sur le
travail des muscles fatigués, par
de Boeck et Gunzbourg. 121.
Alcoolique. Cure de buveurs. A
propos du sérum aUli-, par Le-
gram, 50. Hospitalisation des-,
par Lentz, 54. Circulation céré-
brale dans l'intoxication - aiguë,
par Beinard, 223.
Alcoolisme. Influence de l'- mater-
nel sur la piogéniture, par Sulli-
van, 41. Traitements de l ? par
de Marines, 4 : <. Contre l'- 78.
Drames de l ? 187, 2G7, 317, 527.
Criminalité des enfants et - des
parents, par lioubmowitch, 493.
Aliénation. Déformation des ongles
au cours de l'- par Trêves,
427. Traitement de 1 ? 442.
Aliénés. Statistique des - d'An-
vers, par Sano, 57. Uéformes de
l'Assistance des -, par Pecters,
58. Système ncrveux chrz les-
par Brisière, 126. Maintien au lit
des -, par Tra¡1PwiJ\ow et Ossi-
pow, 138. Traitement par le lit
des - à Perm, par Fuschmann,
110. Les - en liberté, 180, 231,
266, 3+5, 52+. - méconnus et
condamnés, par Villeneuve el
Chaînon, 228. - devant la loi,
par Villeneuve, 228. Testaments
des par Morton, 23 ? Hespon-
.sabilité des -, par Noot, 33.
Placement des dans les famil-
les, par Shuterland, 487. Traite-
ment, des - par le travail, par
Lapointe, 493. Colonie d' - ,à
Lierneux, par Deperon, 493. Iles-
ponsabilité dans les placements
familiaux d ? par A. Marie et
Toulouse, 493.
Alitement dans le traitement des
formes aiguës des maladies men-
tales, par Korsakow, 273; par
Neisser, 3 ? 0; par Uoutrebente,
323, par Magnan, 324. - dans
l'aliénation mentale, par Mairet
et Dellheil, 429. Discussion sur
1 ? par Canner et Cololian, To-
karski, ltéa s, etc., 429.
Av5'o'rnormc progressive d'origine
traumatique, par Sano, 148.
Ankylose de la colonne vertébrale,
par de Bechterew, là4; par 1'0-
poil, 154.
Aphasie motrice pure sans agraphie,
par Ladame,327. -motticepure,
par llagalhaes, 504.
Apoplexie. Diagnostic de in hysté-
rique et de l'- organique,' par
Crccq, 148.
Arriéras. Education des enfants
- , par \\'ahl, par Boyer et Bour-
neville, 461.
Asile d'aliénés. - de Pontareuse
pour la guérison des buveurs,
par Châtelain, 53. - pour alcoo-
lisés incurables, par Forci, Si. L
L'alcool dans les - par Huppe,
55. Historique sur les du Ca-
nada, par Burgess, 56. femmes
médecins dans les -, par Lud-
whig, 5G. Rapport sur l'- de
Saratow, par ttnjenon', 57. Visites
aux - danois pour les faibles
d'esprit, par Jreland, 58. Gltcel
et Lieineux, colonies en Bel-
gique, par Sibhald, 60. - Sainte-
Agathe, à Liège, par Lhoest, 65.
Concours des médecins adjoints
des - 75. - 77. - 190. 270.
351. 448. 528. Isolement
des tuberculeux dans les -, par
A. Marie et Toulouse, 493. Pas-
sage de la vie ordinaire à l ?
par d'Olak, 493. Personnel des -
par Doutrebente 493.
Assistance des enfants anormaux,
350.
TABLE DES MATIERES.
635
Ataxie. Anatomie pathologique de
l'- héréditaire, par Meyer et
Brown, 131. Phénomène smgu-
lier de l'-locomotrice, parWard,
149. - cérébrale aiguë, par Din-
ides', 157.
Atrophie musculaire expérimen-
tale, par Levaditi, 137.
BLEU DE .méthylène Elimination du
- dans l'épilepsie, l'hystérie et
quelques formes mentales, par
û0lltlll, 45.
Cellulaires. Lésions - corticales
dans les accidents mentaux des
maladies générales, par Maurice
Faure, 4 : 7.
Cellules. Prolongements des -
nerveuses chez les invertébrés et
les vertébrés, par Ilavet, 133. Mo-
difications des - des cornes
antérieures en action, par Luxem-
burg, 133.
Cérébrale. Lésion - par contre-
coup, par de Buck et van der
Linden, 221.
Cerveau. Poids du -le plus lourd
décrit jusqu'ici, par van Walseu,
136. Centres de projection et d'as-
sociation du - par Flechsig,
334. -, par llitzig, 338; par Mo-
nakow, 410 ; par 0. Vogt, 413.
Instituts centraux pour l'anatomie
du -, par 0. Vogt, 415. Colora-
tion des grandes coupes du -
par Schroeder, 422. Etats lacu-
naires du -, part'. Marie,42t.
Tumeurs du - et altérations de
la moelle concomitantes , par
Sclmeler, 512.
Ciiohée maniaque chez un adoles-
cent, par Comen, 141. - hérérli-
taire, par Loewenfeid, 138. de
Sydenhdm et rhumatisme, par
Gilles de la Tourelle, 65.
Cn01\OPHOTOGRAPHIE appliquée à l'é-
tude des mouvements, par P. ni-
cher et [.onde, 334.
Clinique des maladies du système,
nerveux, par le Pr Ltaymond, 172.
Les-psychiatriques des Univer-
sités allemandes, par P. Sérieux,
193, 371, 473.
Cocaïne. Lésions nerveuses dans
l'empoisonnement leut par la-,
par Daddi, 127.
Colonne vertébrale. Bailleur delà
- , par de Bechterew, 513.
C031PYLOGR ? %IIIE crânien, par Blin,
1187.
Confusion mentale, par ltoubino-
witch et Vlavianos, 491.
Congestion cérébrale devant l'Aca-
démie, en 1861, par P. Marie,
225.
Congrès international de médecine.
Section de neurologie, 1 in, 325,
410, 482, -f9;. Discours de M. lay-
mond, 2 3. Section de Psychiatrie,
177 (Discours de M. llaânau, 234),
301, 127.
Crâne. Influence du traumatisme
du -dans les maladies mentales,
par Ehrnrooth, 08.
Chamectojiie pour industrie, pai i
Tettbrd Smith, 47.
Caf : Tl\IS11E. Cause du -, par .lllara,
127.
Délire hypocondriaque, par Castin,
161. systématisé, par Bon-
hm(Ter,2 : ;1.-consécuUf aux biû-
lures graves, par Régis, 488.
DELlRlml treuens. Traitement du-,
par les injections sous-cutanées
de sérum artificiel, par Masbre-
nier, 52.
DORNICOE hypnotique, par Koch,
427.
Écriture en miroir, par P. Sollier,
- 331.
Éducation des imbéciles au point
de vue de la loi sur les aliénés
indigents, par Carswell, 48. -
industnelle des imbéciles, par
Shuttleworth, 48. - rationnelle
de la volonté, par P.-I. Lévy,
70. - dans les écoles publiques.
76.
Electrothérapie. Revue d'électro-
phvsiologic et d' -, par Itégnier.
397.
ELOwTIOV de la moelle dans les
Illyoelopathies -, par Chipault,
421.
Energie nerveuse et - électrique,
par P. Sollier, 296.
Epileptiques. Mai iage des - par
Fèvre. 75. Accès et épilep-
toi(les se manifestant sous tonne
d'angoisses, par de Bechterew,
223. -,nécessité de leur hospita-
llaation, 350.
EI'ILEPSrr; jacksonienne guérie par
la ciàmectomie, par 13ul'l'ag-an, 49.
Recherches cliniques sur l' -,
536
TABLE DES MATIERES.
l'hystérie et l'idiotie, par Bour-
nevillp, 73, 438. Traitement de
1'- par la méthode de Fleclisig, par
Séglas et lIeitz, 81. - et trépa-
nation, par Boissier, 95. - avec
persistance du thymus et hyper-
plasie lymphatique, par Ohlma-
cher, l"28. Traitement de l'-
par l'adonis vernales, par de
Bechterew, 146 ; par 'l'ehoutiew.
446. - jacksonienne guérie par
l'opération, par van Gehuchten,
221. Des contractions de l'esto-
mac dans l ? par Ossipow, 223.
Phénomène des orteils dans l'
- , par- Crouson, 522.
ESTIIÉS10\IFTItE, par Huches, 427.
E IIOLOGIE en nenropathologie, par l'
Groljahn, 159.
Exercices. Méthode d' - et mou-
vements, proposée comme cure
des maladies nerveuses, par Thalo,
87.
Faiblesse d'esprit. Remarque sur le
terme-, 40.
Familiales. Maladies mentales -,
par Arnaud, Doutrebente, Ta-
guet, Christian, Girami, l3riand,
Magnan, Legrain, 162; par Bois-
sier, 163.
Fibres endogènes de la région
lombo sacrée, par Bruche, 131.
Polie. La - chez les enfants par
l3each, 44. - de l'adolescence,
par llourneville et Belin, 110. -
de l'assassinat, 1RÉ. Sur étude
pénale et-, par Douglas, 232.
systématisée, par Séglas, 486.
Fou. Le crime d'un z .182.
Goitre exophtalmique. Organothé-
rapie et -, par White, 47. Un cas
aigu de -, par Fowvell, 153. -
mortel avec coexistence demyxoe-
dème, par Faure, 226. Syndrome
du postyphoïdique, par Be-
naît, 289.
Hallucinations psychiques, par Sé-
glas, 395. - visuelles complé-
mentaires chez les amputés, par
Parisot, 487.
Hémianopsie et ses variétés transi-
toires, par flat-ris, If 1.
Hémiplégie et aphonie hystériques
avec symptômes mentaux, par
Montromery, 149. - sensitivo-
sensorielle accompagnée de mou-
vements atliétosiformes, et ataxi-
formes, par liaymond, 332. Théo-
rie des-. par Pick, 419. avec
hémianesthésië tactile et doulou-
reuse, par Touche, 505.
Hémiplégiques. Traitement mécano-
thérapique des -, par Kouindjy.
353.
Hémisphères. llvélinisation des - z
cérébraux, par Vogt, 174.
Hérédité dans les états mentaux de
l'enfant, par Blin, 492. Nocivité
de Il pathologique, par Mairet
et Ardin-Delteil, 494.
Hôpital. UU8 visite au plus récent
d'Athènes, par Peteisnn, 58.
Hystérie. Traitement de l' -, par
Stockley, 16. Recherches cliniques
sur l'épilepsie, Il - et l'idiotie,
par Bourneville, î3,-538.- et sug-
gestion, par Alvarez, 1 t5. de
l'enfance aux Etats-Unis, par
Sheffield, 150. Neurasthénie et -
traumatiques, par ICnapp, 153.
Cécité passagère dans l' -, par
Ilarlan, 218. Sur la nature de
l' -, par 0. Vogt. 247.
Hypnose. Appareil pour produire
Il-, par Lemesle, 522.
Hypnotisme et paralysies psychiques
motrices, par Bérillon, 68. -chez
les neurasthéniques, par Bérillon,
69. Dangers de l' 269, Pra-
tique de l' - à la campagne, pas
Perceau, 523.
Idiot. Traitement médico-pédago-
gique, 76. Traitement des
en Belgique, par Ley, 147.
Idiotie. ' Recherches cliniques sur
l'épilepsie, l'hystérie et l' -, par
Bourneville, 73,438. - épilep-
tiqne par Brunet. 215. Anatomie
pathologique de l' -, par Shutt-
ieworth et Flechter Beach, 301 ;
par Mierzejewski, 313, par Bout--
neville, 319, par Oberthnr, 320.
- morale, par Brunet, 489.
Images cérébrales et activité men-
tale, par Pau de Saint-Martin, 171. I.
Ivresse. Nouvelle loi sur l' -, par
Wood-llenton, 232.
KINESTHÉSIQUE. Etude de la fonction
- , par Grasset, 418.
Kleptomanie, 417.
Langage. Importance du centre au-
clilif du -, par Pick, 325.
TABLE DES MATIERES.
537
Léthargie chez les poissons, par
Farez, 522. -
LIT, Maintien au - des aliénés, par
Trapeznikow et Ossipow, 138 ; par
Flschmann, 140 ; par Lion. 142.
Manie aiguë chez un jeune garçon,
par Ray, 41.
Marche. Application du cinémato-
graphe à l'étude des 'troubles de
la -, par Marinesco, 424.
Mélancolie traitée par suggestion
hypnotique, par Bérillon, 310. -,
par Kraeplin, 31l.
.Mémoire. Problème de la -, par
solfier, 69.
Méningée. Sur un cas d'hémoiragie
sous-arachnoidienne , par Cour-
mont et Cade. sypliilitique avec
J\IÉIGo-m ÜI rE syphilitique avec
signe d'Argyll- ltobertson, pai
Cestan, 102.
Ménopause. Troubles psychiques de
la - virile, par Bombarda, 15.
Méthode de Golgi,parSmldt, 134. -
osmio-chromique de lllarclu, pai
Santon, 417. -
J\l1CHOCt : PHALlE, par Legrain, 160.
Micuogyrie et Kicrophtaline, par
IiliscUer, 156..
311cRoro'IE pour cerveau, par Na-
geotte, 426. -
Moelle émnunE. Géographie de la
, par Benoit, 126.
Mouvements de l'enfant, par Mum-
ford, 151,
J\hOGRAPIlE. Nouveau, -, par Bu-
falini, 126.
MnOEDE11ATEUX. Infantilisme , par
Goyanes, 151.
Nerfs moteurs de l'oeil, voies cen-
trales, par Piltz, 167.
Neurasthénie et hystérie trauma- 1
tiques, par Knapp, 153.
Neuro-diélectrioues. Théorie des
, par Binet-Sanglé, 208, 472.
Neurone. Doctrine des -, et nou-
velles théories sur les connexions
nerveuses, par van Gehuchten.
125.
Névrose . Rôle des mouvements
dans la thérapeutique des -, par
Sollier, 46. - d'angoisse, pai
Hartenberg, 250.
Ophtalmoplégie arbitraire, par
Crocq, 118, - nucléaire progres-
sive, par Ausset et Itaviatt, 224.
OREILLE. Déformation de l' - chez
les lutteurs japonais, par Chris-
tian, 163.
Orthopédie morale et hypnotisme,
par Voisin, 61. -, par Pau de
5amt-\lartm, 6S.
PACllnl ? rGI1 cervicale d'origine
syphilitique, par Sache, 217
Parakinésies, par de Buch, 12 ?
Paralytiqles généraux. Familles
de -, par Vallon et Wahl, 186.
P.1EAL1SIE générale . Du sens
génital chez les mêmes malades
aux trois périodes de la ,au
Marandon de Alontyel, 16, - chez
l'enfant, par Thomson et Welsch,
40. - juvénile par Boyle, 42.
Pseudo arthritique, parKlippel,
43. Hérédité dans la -, par
Hameline, 161. - et syphilis, par
Sérieux et Farnarier, 224. Vraie
cause de la -, par Tisch, 248.
Origine onirique de Cl'Il<uns dé-
lires dans la - par Régis et
Lalanne, 248. Fractures spon-
tanées dans la -, par Lalanne,
248. Période terminale de la -
par Arnaud, 250. chez un
sujet ayaut présenté dix-huit ans
auparavant du délire de persécu-
tion, par Jotl'i-oy et Gombault,
252 - infantile, par Toulouse,
320. Réflexe plantaire dans la -,
par AnI III - Dell ell et Rouvièr,
450. Cellules nerveuses rie 1'01-
corce dansia, par Agapoff,
514. - Lésion de la paralysie de
l'oculomoteur commun dans la
- , par Kaplan, 519. Réflexe
plantaire daus la -, par Delteil
et Bouvière, 52t.
Paralysie du mouvement associé
de l'abaissement des yeux, par
Babinski, 66 -. spinale chronique
d'oirgine syphilitique, parvis-
liamson, 126. de Landiy, par
Taylor et Clark, 219. - bulbaire
asthénique, par Déjerine et Tho-
mas, 333. du grand dentelé,
par Souques, 520, infantile
avec scoliose tardive, par P.
Marie, 520.
PEDO\CUL111tE. Fibres aberrantes de
la voie , par M"" Déjeune,
501.
Persécuteur persécuté, par Ray-
taud, 194.
Perversions SEXUELLES obsédantes et
impulsives, par Kraitt );binâ, 130,
538
TABLE DES MATIERES.
par P. Caruler, 432, 182. La
glande prostatique dans les -
par Sutterland, 486. 1
Phénomène du genou. Retour du ¡
- ,disparn, 1)ar .ldumlcievicz, 51,ï. I
Phobies. 1'Iaitemunt de certaines
, par Ilartenberg, 248.
I'1TUIT : 1(I1C. Tumeur du corps
- sans acromégalie avec arrêt de
développement des organes gé-
nitaux, par Babinski, 67.
Poliomyélite aiguë en voie de
guérison, par Crocq, 149, - anté-
rleure aiguë, par Sinlder, 218. -
succédant à une chute sur le dos,
par Decroly, 223.
Polynévrite avec incontinence d'u-
line, par Crocq, 217.
PORE ? Cel>11.11.IE incomplète , par
Clinch, 129.
I'SA.%1)10.IE des méninges, par Touche,
520.
Psychological LADOItATOn1' , par
Scripture, 74.
Psychoses. Traitement des ai-
guës par le repos, par Sérieux et
Farnaner 53. - de la puberté, par
Ziclten, 212 ; par Cullerre, 246.
Psychothérapie. Etudes de -, par
Seif, 49.
Pyramides. Disposition anormale des
fibres des - bulbaires par, van
Gehuchten, 132.
IIEGhLI\GI1,IUSt : \. Maladie de -, par
Henoll et Dufour, 67.
Réflexe. Exagération des tendi-
neux, par van Gehuchten, 121.
Nature des - tendineux, par Jen-
drassll : , 495; par Sherrington, 4 ! G.
Question des rapports des pa-
tellaires après la section de la
moelle, par Bruns, \97. - cutanés
et tendineux, par van Gehuchten,
493. idéo moteur de la pupille,
par Roubiiiovitch, 501. des or-
teils par Colin et pal Schncler 512.
Rougeur émotive par llartenber,
247.
Sclérose. Idiotie et épilepsie symp-
tomatiques de tubéreuse hyper-
trophique par f3ournevllle, 29.
pupillaire double, par Babinski, i,
167. - en plaques avec fou rire,
par Crocq, 221. - latérale amyo-
trophique par Crocq, 221.
Sciatique. Névralgie -, d'origine
grippale, par Dubois, 217. 0
Signe DE Babinski,- par Vires, G7. -
dans la lièvre typhoïde, par Léo-
pold Lévi, 521.
slTtonawE, par Ballet, 165.
Société DE Neurologie, par Bois-
sier, (i5, 161, 520.
Société D'UYJ' : iOLOGIE ET DE PSYCDO-
LOGIE, 67, 170, 340, 522.
SOCIÉTÉ médico PSYCIIOLOGIQUE, par
Briancl, 1G0.
Société DE patronage DES aliénés,
175.
Sommeil. Etude histologique du cer-
veau dans le -, par Stefanowsha,
222. Subconscient dans le -hyp-
noliyue, par Bérillon, 523. - et
suggestion, par Parez, 52 Í.
Strychnine. Empoisonnement par la
- , par Terrien, 493.
Suggestion. Hystérie et -, par ,Il-
varez, 145. Traitement par la
des perversions sexuelles et de
l'onanisme par de Bechterew, 145.
146. - envisagée comme cause
d'erreur. par Bérillcn, 170. - reli-
gieuses, par Binet-Sanglé, 340. -
hypnotique par Bérillon zig. Som-
meil naturel et-, par Farez, 521.
Suicide. - d'enfant, 78, 270. d'une
adolescente, 78.
Supplice de lloriu, 77.
Tabétiques. Lésions non - des
cordons postérieurs, par Bruce,
509.
Tabès, avec paralysie bulbaire, par
Bloch, 155. Question du syphi-
litique, par Homen, 156. Luxa-
tion spontanée dans le -, par
Hucbzerfneyer, 158. Arthropathie
du -, par Dupré, 164. Symptô- -
mes pupillaires dans le -, par
Piltz, 165. - et lésions syplnliu-
ques, par Babinski, 167. -
et traumatisme, par Leauve,
222. avec cécité, par P. Marie
et Swilalski, 506. Arthropathies
dans le - avec fractures sponta-
nées du bassin, par Ferrand et
Pecharmant, 508.
Thymus. Médication glandulaire, par
le -, par Parker, 17.
Thrombose de l'artère cérébrale an-
térieure, par Bllceles, 156.
Thyroïdien. Traitement des troubles
mentaux par l'extrait -, par Lee-
per, 16.
Torticolis mental, par Noguès- et
511'01, 40.
TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS.
539
Tremblement hystérique par Alda-
balde, 152. - associé il une réti-
nite par Klippel, 521.
Trijumeau. PhysIOlogie du -, par
Schlcesmer, 51 ï ? rtUropathie -
par Péclarmant, 521.
Tubercules. Traitement chirui-gical
des - cérébraux, par Treyer,
147.
Tubercules quadrijumaux. Con-
nexions des - chez le lapin, par
Paw;low, 123.
Tumeur cérébrale avec autopsie, par
Walton; 130, par van Gehuchten
et Le-i\lolt, t, 132.
Tumeur du lobe occipital, par Weber,
227.
Urine. Evacuation involontaire de
l' - pendant le rire, par de Bech-
terew, 518. '
Vision. Physiologie de la chez le
chien, par Hitzig, 331.
Zona thoracique en bande horizon-
tale, par Brissaud, 522.
' TABLE DES AUTEURS ET DES- COLLABORATEURS,-
Adamklcwicz,515.
Agapoff, 514.
Aldabalde, 152.
Allara, 1 ? i,
Alvarez, 145.
Ardin-Delteil, 450, 494.
Arnaud, 162, 163, 250.
Ausset, 221.
Babinski, 66,67, 167.
Bajelloff, 57.
Ballet, 60, 165.
Barra;an, 49.
Beach, 44.
Bechterew (de). 115,
146, 154, 223, 513,
517, 518.
Beinar, 223.
Belin, 11G.
Benoit, 126.
Bérillon, 69, 7 ? 170,
340, 333.
Blkeles, 156.
Binet-Sanglé, 208, 340,
472.
Blin, 487, 492.
Bloch, 155.
Boissier, 67, 95.
Bombarda, 45.
Bonfigli, 45.
Bonhoefl'er, 231.
Bourneville, 29, 73, 110,
319, 427.
Boyer, 73.
Boyle, 42.
Bracco, 486.
Briand, 162, 163.
Brisère, 126.
Brissaud, a22.
Brown, 131.
Bruce, 131, 509.
Brunet, 215, îS9.
Bruns, 497.
Buch (de), J : J4, 1"25, 221.
Bufalini, 126.
Burgess, 56.
Cade, 1.
Carswell, 48.
Castin, 161.
Cestan, 102.
Chagnon, 228.
Châtelain, 53. «
Chipalllt, 421. 1.
Christian, 162, 163.
Clark 219.
CUuch, 129.
colin, 512.
Cololian, 429.
Courmont, 1.
Cowen, 41.
Crocq, 148, 149, 217,
221.
Crouzon, 522.
Cullerre, 216.
Daddi, 127.
Decroly, 223.
Dé,jerine (M™"), 501.
Déjerine, 10 ? 333.
Deperon, 493.
Dinkeler, 157.
Douglas, 232.
Doutrebente, 162; 323,
493.
Dubois, 217.
Dufour, 67.
Ehrnrooth, 508
F;vrez, 6S, 1 î I, 52 ? 53f .
Farnatier, 53, 224.
Faure, 226, 427.
Ferrand, 508.
Févre, 75.
Fischmann, te.
Flechsig, 334.
Flechter-Beach, 301.
Forel, 54.
Foxwel, 153. '
Garnier (P), 429, 432,
482.
Gehuchten (vau), zut
f 125, 132, 221. 498.
Gilles de la Tourette, 6 ?
Giraud, 162, 486.
Gombault, 252.
Goyanes, 151.
Grasset, 418.
Grotjahn, 159.
.Gunsburg, 124.
zozo
TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS.
Hamelin, 161.
Harlan, 218.
Harric, 151.
Harlenberg, 217, 248,
250.
Ilavet, 133.
lleitz, 8t.
Hitzig, 331. 338.
Homen, 156.
Hoppe, 54.
Huclizermayer, 158.
Hughes, 427.
Ireland, 58.
Jendlassik, 495.
Jollroy, 66, 25 ? .
Iialischer, 156.
Kaplan, 519.
Klippel, 3, 521.
Knapp, 153.
Korsakow, 273.
Kouindji, 353.
Krallt J<.bing, 430.
Ladame, 327.
Lalanne, 248.
Lapointe, 493.
Leauve, 222.
Leeper,, 46. ..
Legrain, 50, 160.
Lemesle, 522.
Le Mort, 132.
Lentz, 5t.
Lepinay, 111.
Levait ! ,13 ?
Lpvi (L.), 521.
Lévy (l ? E.), 70.
Ley, 147.
Lhoest, 65.
Linden (valider), 221.
Lion, 112.
Londe, 334.
Ltidwj ? 56.
Luxeniburg, 133.
Jlagalhaes, 504.
Magnan, 160, 461, 234,
324. Î.
Magiiin, 69.
Maire), 486, 494.
Marandon de Montyel,
16.
Marchand, 160.
Marie (A.), 493.
Marie (P.), 225, 424,
506, 520.
\Iarinesco, 121.
Martines (de), 49.
Masbrenier, 5 : J.
Meyer, 131.
Micrzejewhki, 313.
Monakow, 410.
Montâomera, 149.
Moi-ton, 232*'
Iumlord, 1JI.
Nageotte, 426.
Neisser, 320.
Noguès, 40.
Noot, 233.
Oberthur, 320.
Ohlmacher, 128.
Ossipow, 138, 223.
Pactet, 161.
Parinaud, 6G.
Parisot, 487.
Parker, 47.
Pau de Saint-Martin,
69, 171.
Pawlow, 13.
Péchannant, 508, 521.
Peeters, 58.
Perceau, 523.
Peterson, 58.
Pieraccmi, 127,
Pics, 325, 419,
Plcqué, 486.
Piltz, 165, 167.
Popon, 154.
Raviart, 2 : J 1.
Ray, 41.
Raymond, 172, 253, 332,
426.
Raynaud, 161.
Régis, 248, tu9, 485,
488.
Régnier, 397,
Renon, 67.
liicller (P.l, 331.
Robinowitch, 493.
Roubmowitcll, t91,501.
Rouvière, 1;'0, 521.
Sache, 217.
Samton, 417.
Sano, 57, 148.
Sch)oesinger, 517.
Schrenck-Notzing, 229.
Schroeder, 422.
Schueber, 512.
Scripture, 7a.
Séglas, 81, 395, 486.
Seif, 49.
Sérieux, 53, 193, 224,
371, 473.
Sliellield, 150,
Sherrmgton, 496.
SlmttlewortU, 48,301.
Sibbald, 60.
Sinhler, 215.
Sirol, 40.
Smitlt, 13L
Sollier, .1G, G9, 29ü.
Souques, 520.
Stefanowska, 222.
Stochley, 46.
Sullivan, 41.
5utherland, 486, 487.
Switalski, (,06.
Taguet, 162.
Taty, -191..
Taylor, 219.
Tekoutiew, 146.
Tellord-Smith, 47.
Terrien, 493.
Thilo, 87.
Thomas, 333.
Thomson, 40.
Touche, 67, 505, 520.
Toulouse, 320, 493.
Trapeznihow, 138.
Trêves, -1-27.
Treyer, 147.
l'sclnscU, 2.8.
Vallon, 486.
Villeneuve, 228.
Vire, 67.
Vlavianos. 491.
Voisin, 67.
Vogt 174.
Vogt (0.), 247, 413,
tle.
\\'ahl, 461, 186.
Walsen (van), 136.
Wallon, 120.
Wird, 1 î9.
Weber, 227.
Welsh, 40.
Witlie, -t7.
Williamson, 126.
Wood-Rexton,232.
Ziehen, 242.
Evreux, Ch. Héiussey, imp.- 12-1900.