(1903) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des enfants idiots, épileptiques et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1902
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(1903) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des enfants idiots, épileptiques et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1902

RECHERCHES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET L'IDIOTIE '

PUBLICATIONS DU PROGRES' MEDICAL

RECHERCHES

CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET L'IDIOTIE

. COMPTE-RENDU DU SERVICE

DES ENFANTS IDIOTS, ÉPILEPTIQUES ET ARRIÉRÉS DE

BICÈTRE PENDANT L'ANNÉE 1902

PAR

BOURNEVILLE

Avec la collaboration de

MM. AMBARD, BERTHOUD, BLUMENFELD (M.),

BOYER (J.), CROUZON, LEMAIRE, MOREL (L.),

OBERTHUR, PAUL-BONCOUR, PHILIPPE ET FOULARD.

Volume XXIII

Avec 38 figures dans le texte et 9 planches.

PARIS

AUX BUREAUX DU

PROGRÈS MÉDICAL

14, rue des Carmes, 14.

FÉLix ALCAN

ÉDITEUR

108, Boulevard St-Germain, 108.

1903

PREMIERE PARTIE

Histoire du service pendant l'année 4902

(l31cët·c et Fondation Vallée)'

BOURNEVILLE, Dicêlre, 1902. *

PREMIÈRE PARTIE

Section 1 : Bieètre

Histoire du Service pendant l'année 1902.

I.

Situation ou service. Enseignement primaire.

Les enfants de la. quatrième section du quartier des

aliénés de l'hospice de Bicêtre sont répartis en trois

groupes principaux : 1° Les enfants idiots, gâteux, épi-

lepliques ou non, mais invalides (Bâtiment Séguin);

° les e721172fS'LCl20ls, gâteux ou non, mais valides ;

3° les enfants propres, valides, imbéciles, a1'l'ié-

rés, instables, pervers, épilcptiqucs et hystériques

ou non.

I. Enfants idiots, gâteux, épileptiques ou non,

mais invalides. Ce premier groupe est subdivisé

en deux catégories. La première se compose des

enfants idiots complets, ne parlant, ni ne marchant,

considérés généralement, a tort comme tout fait

m Enfants idiots complets.

incurables. La plupart d'entre eux sont, contrairc-

mentit l'opinion courante, susceptibles d'amélioration,

même il un degré très notable.

On fortifie leurs jambes avec la balançoire-trem-

plin ; on leur apprend ensuite se tenir debout à l'aide

des barres parallèles ; à marcher, soit en les tenant

sous les bras, soit à l'aide du chariot ; on fortifie leurs

membres en exerçant successivement chaque jour

toutes les articulations (exercices des jointures), en

leur faisant des frictions stimulantes, etc.

En 1932, trais enfants ont appris il marcher (1) ;

trois enfants ont été guéris du gâtisme (2) et trois

ont appris it manger seuls (3). Avec une meilleur

utilisation du personnel, il serait possible d'obtenir

de plus nombreuses améliorations.

Dès qu'un enfant marche sans aide, il doit être

envoyé à la Petite Ecole, le matin pendant une heure

ou deux, puis toute la journée, aussitôt que ses forces

le permettent. Tous ces enfants sont placés sur les

petits fauteuils spéciaux que nous avons décrits, à

l'usage des gâteux (3).

La seconde catégorie comprend les idiots absolu-

ment incurables, en beaucoup plus petit nombre qu'on

ne le croit d'habitude, et les épileptiques devenus

déments et gâteux sous l'influence des accès ou des

poussées congestives qui les compliquent ; ils ne

peuvent plus être que l'objet de soins hygiéniques et

doivent former un groupe spécial. Aussi sont-ils

réunis et surveillés dans un sous-sol aménagé pour

(I) Du, ..., Jl,trt ? Guill... - (,2) Bois..., Cfatel..., Bus... - (3) 131n ?

Clmtel ? Ca...

(3) Lors de notre arrivée dans le service les enfants étaient assis sur des

alèzes. Les fauteuils imaginés par nous sont en tubes de fer recouverts

d'un coussin largement percé au-dessous duquel est fixé un vase en porce-

laine afin d'être facilement lavé. Cette pratique a réalisé une notable écono-

mie de linge pour l'Administration, sans compter que les enfants y ont

gagné du bien-être..

Traitement 11)JDICO-I'I : UAC OCIQUE : résultats. v

eux, durant le jour, on mauvaise saison, car, lorsque

le temps le permet, ils sont promenés dans les jardins.

Ce sous-sol sert également à d'autres enfants, qui

nous arrivent tardivement à 15, 16, et même 17 ans,

idiots ou épileptique ? en déchéance, dont l'incura-

bi/ité est reconnue et que nous avions été obligé

jusqu'à l'année dernière, de maintenir dans les écoles,

où ils étaient une occasion de trouble, qu'ils con-

tribuaient à encombrer, même à infecter par leur

gâtisme, sans aucun bénéfice pour eux et au grand

détriment des enfants éducabics. Ces malades absolu-

ment incurables sont au nombre de quinze. Nous les

examinons de temps en temps et lorsqu'il se 'produit

chez l'un d'eux un arrêt dans la déchéance, une sorte

d'amélioration, nous le faisons remonter dans la 4 ?

classe de la grande école. '

IL Enfants idiots gâteux ou non gâteux, épilep-

1 iques on non, mais valides (Petite Ecole). Ces

enfants fréquentent la petite école, confiée exclusive-

ment il des femmes. Dans le courant de l'année,

174 enfants y ont été inscrits. Sur ce nombre, 5 sont

décédés, 2 sont sortis définitivement, ont été trans-

férés, 2 sont passés dans une des sections d'adultes.

Sur 1 GO enfants qui restaient à la petite école au

31 décembre 1902, loue mangent pas seuls, 60 se

servent de la cuiller, 60 de la cuiller et de la fourchette

et 25 se servent de la cuiller, de la fourchette et du

couteau. - Six enfants de ce groupe sont devenus

propres (1); 5 ont appris à manger seuls (2); 3 ont

appris à lire couramment (3) et 6 sont en bonne voie (4).

(Ij .lnl ? l.eo.. (T..). Lois ? Lecourt ? Leo.. ( : 1.), I-Ionr.. - (21 Dubr ? .,

Lécha ? Dnpo ? Sclineid ? Lecourt.. 1'1) Duf ? Desnov ? Copp.. z

(4) 13oul ? Dlign ? 13rant ? Sinn ? Goi ? T,nm.. (('s.)

VI Petite école.

Le traitement du gâtisme, qui consiste à placer,

au lever, au coucher, au milieu de la nuit et après

chaque repas, les enfants gâteux sur les sièges

d'aisance et qui a pour but principal d'amener l'enfant

gâteux -Et devenir propre, fait également réaliser à

l'Administration des économies notables de blanchis-

sage. Comme l'année dernière, nous avons fait faire

par la surveillante du service le relevé des enfants

ayant déféqué au siège après les repas, durant les

5 premiers jours de chaque mois. Voici ce relevé qui

a porté sur une moyenne de 50 enfants gâteux.

TRAITEMENT NlfDICO-1ÉD.IGOC.IQUE : RÉSULTATS. VII'.

Tous les enfants de la Petite école, sont exercés

au saut, à la montée et à la descente des escaliers,

à la gymnastique des échelles et des ressorts, sauf ceux

qui, venus du premier groupe, c'est-à-dire des INVALI-

des, étant encore trop infirmes, n'ont pu y prendre part.

Dix-huit enfants de la petite école et de la petite école

complémentaire, dont nous allons parler plus loin,

ont fait régulièrement les exercices de la grande gym-

nastique. Vingt-deux enfants ont travaillé cette année

dans les différents ateliers : tailleurs, cordonniers,

vanniers, brossiers, imprimeurs, serruriers, menui-

siers et jardiniers.

La petite école comprend : 1° le traitement du

gâtisme, exposé précédemment; 2° les leçons de toi-

lette qui consistent -CI apprendre aux enfants à se laver

la figure et les mains, il s'habiller, se déshabiller, `

brosser, ranger leurs vêlements ; 3° les leçons de

table qui consistent à leur enseigner à manger seuls,

à se laver la bouche, à se gargariser, etc. ; 4° les

exercices pour l'éducation de la main, des sens et de

la parole ; 5" les exercices élémentaires relatifs à

l'enseignement primaire, pour lesquels nous nous

servons de la Nouvelle méthode de M. J. Boyer, l'un

de nos plus anciens et dévoués collaborateurs, pour

l'enseignement t dc la lecture, de l'Alphabet du dessin

de }\111l" l3ru, ensuite du Syllabaire Regimbeau ; 6° les

leçons de choses, soit à l'école, soit dans les jardins

(avec le tableau roulant), soit au Musée scolaire, soit

aux ateliers, soit enfin dans les proJ1nnacles (1),

Voici quelques détails sur plusieurs des enfants

les plus malades (idiots profonds) améliorés à la

petite école, par Miles Blanche AGVUS, Amandine

]3oii ? iN et leurs collaboratrices.

(1) Voir Compte-rendu de 1899, pour tous les procédés en usage à la scc-

tion des enfants arriérés et épileptiques.

vin ... : Petite école.. .

Sou.... (lucien, 8 ans. (Imbécillité, a continué de s'a-

méliorer, au point de vue de sou langage, qui était presque

incompréhensible, de son caractère, violent malgré son jeune

âge, de ses colères fréquentes et quotidiennes. Il refusait de

travailler, ne supportait à côté de lui aucun autre enfant,

entrait dans de violentes colères, injuriait tout le monde,

jetait de tous côtés les objets qui se trouvaient sous sa main.

Actuellement, l'enfant est plus calme, son travail à la

classe ainsi qu'à la gymnastique, est bon. Sa tenue s'est

modifiée avantageusement. Il se lave, s'habille, se lace, se

boutonne et se tient plus propre.

Progrès à noter aussi sous le rapport des leçons de choses.

Hou... (Charles), 8 ans. 7f ! toh'e, épilepsie, turbulence;-

Absence de la parole, et compréhension presque nulle.

Actuellement l'enfant parle, fait des phrases, il rapporte

même sur les autres enfants, et bien qu'il ait lui-même un

langage un peu ordurier, il se trouve blessé quand un autre

enfant prononce un mot grossier. Il dit tous les mots, chante

bien et juste.

Il est devenu propre, va seul sur le siège et a été fier d'être

mis en pantalon. Quelques progrès sont à noter concernant

le lavage, la gymnastique, les exercices d'habillement (nouer,

lacer, boutonner) et sur les couleurs. Les accès sont moins

fréquents.

nE... (Henri, Paul), 8 ans. - Idiotie, gâtisme, absence de

langage. Enfant grand gâteux, privé de compréhension et

doué d'une grande indifférence, mis dans les premiers temps

de son entrée au milieu des enfants de la fanfare afin de se

rendre compte s'il entendait le bruit; le résultat a été nul

et aucun mouvement de sa part n'a prouvé qu'il entendait.

L'enfant avait l'air hébété, ne souriait jamais et ne répondait

pas il l'appel de son nom.

Tous les exercices qu'on voulait lui faire faire provoquaient

chez lui des cris perçants. Il avait l'habitude de se cogner la

tête et chaque fois qu'on lui parlait, il la cognait d'avantage.

Il était enclin à de nombreux tics existant encore aujourd'hui

mais moins fréquents.

Actuellement, l'enfant commence à comprendre, sourit,

chantonne, est devenu caressant et affectueux. Il reste à

présent sur le siège, se baisse lorsqu'il a besoin, n'est cepen-

Petite école. ix

dant pas encore propre et quand il s'adonne un tic quel-

conque et qu'on ]cg't'o)]dci ! s'at'rôtc.

L'enfant qui, h l'entrée, ne mangeait .pas seul et refusait

tous les aliments, voire même les friandises, mange mieux,

tient lui-même la cuiller. Remarqué curieuse à noter, l'enfant

ne boit jamais ou presque jamais, ni vin, ni eau, et quand il

a soif il boit un peu de lait. 11 reste quelquefois un mois sans

prendre de liquide ; il ne mange même l.1 soupe que si elle

est très épaisse et la rcfu-c si elle est claire.

Petite école complémentaire. Cette école est

confiée tt M"10 l3ôwr : r, qui, depuis 10 années s'est

mise gracieusement à notre disposition. Elle est aidée

par M"10 Randier, première infirmière. Quarante

enfants composent cette école. Trois infirmières sont

en outre adjointes à ce service pour la surveillance des

enfants (réfectoire, dortoir, promenades). Voici quel-

ques-uns des résultats obtenus au cours de l'année

1905, résumés d'après les notes de MIIIO Bonnet.

Cinq enfants qui avaient ét signalés les années précéden-

tes comme rendus propres le jour, urinaient encore fréquem-

ment au lit, ils sont maintenant tout à fait propres nuit et

jour. Ce sont les enfants 1)cli..., \Iille..., Prime..., Ster-

ling..., Bouilli...,; ce dernier n'était propre le jour qu'à la

condition d'être en robe, dès qu'on lui mettait un maillot, il

souillait ses vêlements, soit maladresse des mains, soit len-

teur des mouvements, aujourd'hui nous pouvons le mettre en

pantalon sans crainte d'accident. ,

Quatre enfants : Parrlo..., l'ellc..., Paccl..., Sterling..., ;

signalés déjà comme améliorés pour la parole ont continué à

progresser sous ce rapport, leur articulation est de moins en

moins défectueuse et leur vocabulaire s'augmente de mots

nouveaux. (Voir Compte-rendu de 1901, p. xiii, x;v).

Un enfant, ICziI : ov...lIc : lix), dont la parole était complète-

mcnt nullc à son arrivée, commence a répéter quelques mois

et même a faire de toutes petites phrases, d'une façon rudi-

mentaire mais assez intelligible; il a tendance iL faire précé-

der la réponse de la demande, ainsi il dira : Félix manze la

sou (soupe) ? oui faut manzé la sou; Félix méssant (méchant),

non pas mess : 1nl Félix, (etc).

X PETITE école complémentaire.

Un enfant a appris à lire couramment, Lcro.... (Félix), entré

le 29 juin 1805 Ù l'âge de 4 ans, parlant à peine et marchant sur

la pointe des pieds qui sont tournés en dedans, le corps pen-

ché en avant et ne semblant jamais en équilibre, tombant à

chaque instant. A son arrivée l'enfant ne mangeait pas seul,

ne parvenait pas il porter la cuiller à sa bouche, ne savait ni

s'habiller, ni se laver.

Caractère entêté, indocile, turbulent, taquin avec méchan-

ceté, excessivement colère : dès qu'on ne fait pas toutes ses

volontés, il crie, se roule par terre, mord, s'arrache les che-

veux, s'égratignc les oreilles et ne cède pas.

lin 1890 et 97, nous constatons des progrès pour la marche

qui devient moins titubante, l'enfant tombe moins fréquem-

ment. En 1900, nous signalons u't progrès notable pour la

parole. - Lero..., trouve et prononce tous les mots pour

exprimer ses besoins et même ses idées, il forme des phrases,

emploie les verbes et les pronoms.- L'articulation est nette,

seulement la langue semble se mouvoir avec effort, la parole

est lente, un peu embarrassée et présente une analogie avec

celle d'un vieillard.

Cet en faut qui a beaucoup d'amour-propre, aie plus grand

désir d'apprendre, aussi travaille-t-il avec ardeur en classe.

Quoiqu'atteint d'athétose et de paralysie incomplète, mais

généralisée, il c-t arrivé à tracer d'abord quelques lettres

puis il les assembler, il reproduire tous les chiffres et même

à écrire de mémoire un grand nombre de nos mots imprimés

sons forme de dictée.

L'écriture est très irrégulière, laisse beaucoup à désirer,

mais ce résultat est inespéré si l'on se reporte aux dillicultés

que nous n'aurions jamais vaincues sans la somme d'énergie

qu'apportait en toules choses notre malade.

Incapable au début de tenir un crayon, il pleurait de rage,

ramassait son crayon, essayait de tracer quelques lignes, le

crayon lui tombait de nouveau et cet enfant, avec une

volonté rare, recommençait cinq ou six fois non sans entrer

dans des colères folles, se mordant, se donnant des claques

et se tirant les cheveux. Enfin, grâce iL cette volonté persis-

tante, nous sommes arrivées au résultat que nous avons

signalé plus haut.

Notre malade fait l'addition et la soustraction avec retenues,

quelques exercices de grammaire. Ecoulant avec intérêt

toules les leçons orales, il est toujours le premier à répon-

dre aux questions qui sont posées. Malheureusement l'amé-

lioration du caractère n'a pas marché de pair avec le

Traitement médico-pédagogique : résultats. XI

développement de l'intellect. Les colères que cet enfant a

toujours eues sont allées en augmentant de. fréquence et

d'intensité jusqu'au traumatisme de l'oeil qu'ont suivi les

mutilations auxquelles il ne s'était jamais livré auparavant et

qui nous ont obligé à le conduire il l'infirmerie. (Voir son

observation plus loin).

Deux enfants sont en bonne voie pour la lecture et

lisent couramment : COTI'... (Henri), Ch,y". (Emile).

Co'rr... nous est arrivé en 1897, gâteux, marchant avec diffi-

cultn, hreclouillarh, d'une façon inintelligible, restant pres-

que toute la journée plongé dans une sorte de demi-sommeil,

indifférent il tout ce qui l'entourait : parole, jeux; nous ne

parvenions pas il secouer sa torpeur. Une sorte de bave san-

buinolcnte s'échappait presque- continuellement des commis-

sures des lèvres. Les mucosités du nez coulaient sans qu'il

songeât à les essuyer.

Les sentiment* affectifs ne scmblaient pas exister, l'enfant

voyait ses parents : ru h : crloir, les quittait sans que rien

trahit le plus petit élan.

Nous avons avec lui, dans noire service, son frère aîné

également très dépourvu, on n'aurait jamais soupçonné leur

lien de parenté tellement ils étaient indifférents l'un à l'autre.

Peu à peu, avec une extrême lenteur, nous avons vu

l'engourdissement qui enveloppait notre malade se dissiper,

la vie végétative a fait place il un peu tl'animation. Il a com-

mence il s'habiller, à parler, à s'attacher à nous, il son frère.

Devenu moins maladroit de ses mains, il nous a rendu quel-

([lIes services dans les dortoirs, mais il restait encore abso-

lument rèfractaire il lotis les exercices scolaires; la somno-

lence le repi enait dès qu'il était en face d'un livre ou d'un

cahier.

Ce n'est guère (pie l'année dernière qu'il a commencé a

prendre goût, d'abord aux leçons orales, puis à l'écriture et

au calcul et surtout à la lecture des mots imprimés.

Aujourd'hui il lit presque couramment, cop : e ce qu'il lit et

écrit même de mémoire un certain nombre de mots imprimés.

Il établit bien la relation entre le chiffre et la quantité, sait

écrire les nombres jusqu'à 100. commence à se familiariser

avec la monnaie. Il fait l'addition et la soustraction. Il tient

conversation, sa parole a encore quelques légères défectuo-

sités. Il joue et se montre assez docile.

XI ! École complémentaire.

Gava... (limite), âgé de 13 ans, idiotie, nanisme, s'est

beaucoup amélioré intellectuellement et moralement.

A s m entrée, il avait beaucoup de mauvais instincts, tels

que le vol, le mensonge, la méchanceté envers ses camarades,

la grossièreté et même l'obscénité dans ses paroles et dans

ses chants.

Actuellement il est doux, poli, docile, affectueux. L'incli-

naison au vol semble avoir disparu, il est encore taquin

avec ses camarades, parfois une grossièreté lui échappe,

mais ce qui était une habitude est devenu une exception.

Il est très studieux, fait avec goût tous les exercices sca-

laires ; aussi ses progrès sont-ils notables. Il lit presque

couramment, fait l'addition et la soustraction, écrit de mémoi-

re sous forme de dictée un certain nombre de nos mots

imprimés.

L'attention, qui semblait infixable au début, est mainte-

nant assez soutenue pour lui permettre de profiter dcsleçons

orales. L'onanisme qui était très fréquent n'est plus que très

rarement constaté. Le zézaiement, signalé à son arrivée

subsiste encore aujourd'hui. '

Quatre enfants ont beaucoup progressé pour tous les exer-

cices scolaires : DiMESX... (André). Beau... (Charles), LE-

mai... (Georges), Sterling... (Georges). Beau... (Charles)

progresse avec une extrême lenteur, mais sans arrêt; d'un

semestre £ 1 l'antre, il y a certainement une amélioration

notable dans tous les exercices classiques et dans l'ensem-

ble général. L'intellect s'ouvre peu à peu, le jugement

semble se former; notre élève qui, jusqu'à présent, était resté

tout à fait comme un bébé de 3 ans pour la raison, se réjouis-

sant de tout, poussantdes cris et faisant des démonstrations

tout à fait enfantines, commence à devenir un peu plus

sérieux, à se rapprocher non pas de la raison d'un jeune

homme de son âge (il a 18 ans) mais de celle d'un enfant

d'une dizaine d'années. Il ne pleure plus comme autrefois

dès qu'on lui faisait un léger reproche; de même le rictus

inintelligible tend à disparaître .

Cet enfant, dont la parole était complètement nulle son

arrivée et dont le quasi- mutisme s'est prolongé pendant do fou-

gues années, est parvenu à s'exprimer d'une façon défectueuse

mais compréhensible, 1 ucli-nutclilé et idiotie complète).

LE ! AI'l ? (Georges). Cet enfant a fait des progrès pour

les exercices classiques. Il a une mémoire extraordinaire

Petite école complémentaire. xiii

pour l'orthographe des mots qu'il a lus. Il fait l'addition, la

soustraction, ébauche la multiplication. Il fait quelques

exercices élémentaires de grammaire. Il devient de plus

en plus maniaque. Il ne faut jamais que rien vienne inter-

vertir l'ordre des choses établi, sinon il est furieux. Si pour

une cause ou une au tic, une des infirmières change son jour

de sortie il l'invective et bougonne toute la journée à ce

sujet. Dans une promenade, si l'on ne revient pas par le même

chemin que l'on a pris en allant, il se met en colère et récri-

mine pendant le trajet. Si le jour où j'ai l'habitude de faire la

leçon orale de grammaire, je fais une leçon de choses, il est

fâché, ne veut rien écouter, ne répond que des bêtises aux

questions que je lui pose et fait en sorte de troubler l'ordre.

Ses camarades qui s'aperço vent de sa bizarrerie de carac-

tère, le taquinant souvent, alors ce sont des rages, il crie,

trépigne, tape à droite, à gauche tout ce qui l'environne

(meubles et gens) et ne se calme que lorsque l'on fait signe de

le conduire en cellule. - 1\ l'entrée idiolie complète, aujour-

d'hui on poserait le diagnostic imbécillité.

Sterling... (Georges), s'améliore beaucoup, l'instabilité

physique et mentale que nous avions constatée il chaque

semestre s'atténue de plus en plus. Notre malade qui, à son

arrivée, faisait des fugues continuelles et nous obligeait à

être sans cesse à sa recherche dans les cours et les jardins,

reste assis tranquillement pendant les heures de classe. Son

attention qui était aussi vagabonde que ses jambes se fixe, il

écoute, répond aux questions qui lui sont posées; fait effort

pour comprendre et commence à raisonner. Son horizon

s'étend. Pendant de longues années le présent seul existait

pour lui; maintenant le passé et l'avenir tiennent leurs pla-

ces dans sa pensée; il nous raconte ce qu'il a fait pendant sa

dernière sortie. 11 nous dira qu'il ne sortira pas tel jour parce

que sa mère doit aller à Paris, mais qu'elle le prendra tel

autre jour. Il aime à rendre service, et ce que vous lui avez

commandé un jour il le fait le lendemain et les jours suivants

sans qu'on ait besoin de le lui répéter. Il est moins grossier

et plus caressant. L'onanisme a été moins fréquent.

La parole et encore défectueuse, les phrases incorrectes,

le langage enfantin, mais si nous remontons à son point de

départ, nous constatons une notable amélioration.

Les progrès scolaires ont suivi aussi une marche ascendante,

la lecture est en bonne voie, l'écriture aussi, il commence à

copier de mémoire quelques-uns de nos mots imprimés, fait

XIV Traitement médico-pédagogique.

l'addition avec retenues et la soustraction sans retenues. A

l'entrée : idiotie profonde, aujourd'hui : imbécillité.

Mail... (Laurent), dont le développement intellectuel

avait été signalé déjà les années précédentes, avait continué

à suivre une marche ascendante, lorsque la mort nous la

enlevé. Il avait fait beaucoup de progrès pour la parole qui

était devenue presque normale; pour la lecture, lisait et reco-

piait un certain nombre de mots imprimés ; l'écriture avait

surtout gagné, il faisait l'addition et la soustraction avec rete-

nues. L'instabilité mentale avait beaucoup diminué, nous

obtenions facilement une attention active pendant un certain

temps, l'attention passive était très clillicile a fixer, aussi pro-

fitait-il peu des leçons orales, il était d'ailleurs mal doué sous

le rapport de la mémoire.

L'amélioration morale n'avait pas marché de pair avec

l'amélioration de l'intelligence, notre malade était très elilli-

cile à diriger.

Turbulent, indocile, souvent grossier avec les infirmières,

méchant avec ses camarades plus faibles que lui, il exigeait

une surveillance incessante.

Tous mes enfants lisant couramment et faisant des devoirs

comme les enfants normaux travaillent toujours avec goût en

clisse. Nos plus grands élèves continuent à nous donner de

la satisfaction, avec les années nous voyons leur jugement se

former et les sentiments affectifs se développer. Nous cons-

tatons avec plaisir chez eux et chez quelques-uns de ceux qui

nous ont quitté, que le lien qui nous unissait, loin de se

rompre se fortifie; l'institutrice a fait place à l'amie que l'on

vient trouver avec confiance; l'un deux Bobl..., que nous

avons placé comme menuisier au deliors se montre particu-

lièrement reconnaissant : il vient souvent passer ses heures

de loisir près de nous, demandant conseil et cherchant en

toute occasion à nous faire plaisir, il semble avoir pris une

bonne voie, a de l'ordre, de l'amour-propre et tout nous fait

espérer qu'il fera un honnête ouvrier : c'est un sourd et muet.

Il a été l'ait allusion dans les dernières notices sur

les enfants de l'École complémentaire à l'emploi des

mots imprimés. Nous avons maintes fois donné des

Les mots imprimés. xv

renseignements sur ce procédé, notamment dans le

Compte-rendu de 1899 (p. 1.-L1). Nous croyons

utile d'y revenir aujourd'hui en citant des exemples

de leur application.

Un enfant est atteint d'idiotie complète, c'est-à-

dire qu'il ne marche pas, ne se sert pas de ses mains :

il faut le faire manger, le laver, l'habiller ; qu'il est

gâteux, ne parle pas, ne sait même pas, par signes,

exprimer ses besoins. Son attention est absolument

nulle, il a des tics plus ou muins nombreux.

La lJ/'ellliè1'c période du traitement métlico- péda- ! logique consiste à lui enseigner à se tenir debout

(balançoire-tremplin, barres parallèles, saut, chariot,

etc.) et à lui apprendre à devenir propre par le place-

ment sur le siège à des heures fixes.

La seconde période du traitement niéclzco-péclno-

gique consiste à éveiller l'attention de l'enfant, à

éduquer la main et le sens du loucher, puis le sens

cle la vue. C'est alors qu'on essaie, même l'enfant ne

parlant pas, à lui faire désigne)-, la nomination

viendra plus tard, les'différentes parties du corps,

de la (les objets du réfectoire, du dortoir,

de l'école, les personnes, les animaux, etc.. Bien que

l'enfant ne parle pas ou ne possède que quelques mots,

ne connaisse pas les lettres, ne syllabe pas, nous l'exer-

çons à reconnaître les mots.

Exemple : au réfectoire nous plaçons sur la table

des cartons portant en gros caractères les mots table,

banc, a8.siette,reITe, couteau, fourchette, etc.. - Au

lavabo, nous avons les mots : éponge, savon, ser-

viette, etc. Nous exerçons l'enfant à désigner les

objets et à mettre sur chacun d'eux le mot imprimé

correspondant. Les enfants reconnaissent l'image

du ? ? 201, comme ils reconnaissent l'image d'un chien,

d'un chat, etc..

XVI Traitement 111DICO-P1 : : DlioGIQUC. - - ?

On procède de même pour les objets du cileagiea° où

on leur apprend n brosser leurs vêtements et à cirer

Jours chaussures : brosse, brosser, cirage, cirer, etc..

L'enfant marche, est devenu propre, en môme temps

-qu'on lui enseigne à reconnaître les objets qui l'envi-

ronne, le nom de ces objets, on lui apprend à s'habiller, à

se laver, à manger seul. Alors il n'a plus besoin d'aide, il

entre en relation avec son milieu, il est préparé à l'édu-

cation de la parole, apte à profiter de plus en plus des

leçons de choses, qu'on ne saurait trop multiplier,

puis à aborder l'instruction primaire. Enfin lors-

que les notions de cette instruction primaire ont été

acquises, l'âge et le développement physique venant,

les enfants passent à la grande école (1).

Dans notre Compte-rendu de 1899 nous avons parlé

des services que nous rendaient, au point de vue de

l'éducation du système musculaire et de l'imitation,

les exercices à la barre d'entraînement. Nous avons

ormis de citer des exercices similaires, que nous

employons depuis la même époque, et qui ont trait à

l'éducation des fonctions respiratoires. Ils ont lieu

soit avec les barres d'entraînement, soit avec les "'

barres à sphères ou les haltères, soit les mains libres.

Ces exercices sont les suivants : mouvements ver-

ticaux des bras en 2 temps; mouvements latéraux

des bras en 2 temps. Les enfants au lieu de compter les

temps que le maître seul énonce font une inspiration

(1) Nous renvoyons pour tous les autres exercices, les détails sur la leçoil

de toilette, la gymnastique' des Échelles; des ressorts, etc., à nos rapports

antérieurs. Rappelons seulement que nous .envoyons les eufantsles plus amé-

liorés a la g1'aTLclc.gymna.sliquc, a la fanfare, 11'orphéon, aux ateliers pendant

15, 30 minutes, etc., afin de varier leurs occupations, d'améliorer l'éducation

de leur main, de fixer davantage leur attention. Ce travail n'est pour ces

enfants qu'un moyen d'éducation. Il est, en outre, pour, les plus âgés, un

moyen de traitement, de même que pour les aliénés adultes.

Traitement Médico-Pédagogique. XVII

prolongée aux temps impairs et une expiration de la

même durée aux temps pairs. A ces deux exercices, il

convient d'en ajouter un troisième exécuté les mains

libres et qui consiste en un haussement d'épaules pour

l'inspiration, et en un abaissement pour l'expiration.

Avec les idiots moins atteints ou améliorés, les temps

d'inspiration sont accompagnés d'écartement latéral

des bras et de projection alternative des membres infé-

rieurs ; l'expiration se fait en ramenant les jambes et

en abaissant les bras (1). Les mains sont tantôt libres,

tantôt munies d'haltères. En dehors des exercices de

respiration, clans les mouvements où les enfants comp-

tent eux-mêmes les temps, nous obtenons la cadence

voulue en leur faisant chanter des rondes enfantines à

rythme bien marqué, dont les paroles plus ou moins

naïves ont été remplacées par d'autres ayant trait à

une connaissance usuelle. C'est ainsi que nous avons :

Les 7 jours de la semaine, sur l'air du Petit navire ;

l'Histoire du blé, sur l'n i relu 1) ied Il ui remue; L'enfant

et le nid d'oiseau, sur l'air de A la volette, etc, etc.

Nous nous proposons du reste de les faire imprimer.

Pour donner aux idiots la notion de nombre si diffi-

cile à acquérir, nous mettons à profit lcuraptitudespé-

ciale pour percevoir tout ce qui est son ou bruit..

Un marteau en bois léger et une cloche sans battant

nous servent dans nos exercices. Nous faisons frapper

à l'enfant un nombre de coups donné, de même que

nous leur faisons compter le nombre de coups que nous

donnons nous-même. Nous leur faisons en même temps

reconnaître au tableau noir ou sur nos feuilles impri-

(1) Tous ces exercices de respiration nous ont puissamment aidé pour pré-

parer l'éducation de la parole et corriger le bégaiement.

130U11NGVILLL, Bicêtre, 1902. **

XVIII Traitement \((;l>ICO-I'I : D : 1GOGIQUE.

niées en gros caractères, le signe qui correspond a

ce nombre.

Cet exercice, que nous n'avons encore employé

qu'à l'Institut médico-pédagogique, amuse beaucoup

nos enfants ; et si nous disposons de marteaux de

couleurs différentes, nous leur faisons dire la couleur r

du marteau qui frappe, et nous leur faisons prendre,

sur ordre, le marteau rouge ou le marteau bleu, etc.

La vue et l'ouïe se trouvent ainsi exercées et aident

à l'acquisition de l'idée abislraite du nombre (1).

lll. Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,

instable ? pervers, épilepliques et hyslériqurs ou non

Grande école). La population de celle école était

de 16 enfants le 1 ? janvier 1\)02. Tous, sauf 23 qui

ne peuvent travailler, ont fréquenté les ateliers par

grande série. Douze possédant le certificat d'études,

forment une division supérieure, ne vont il l'école

qu'une demi journée par semaine et restent, les autres

jours, le matin et le soir il l'alelier. Les enfants

non pourvus du certificat d'études sont reparti en quatre

classes (o3,36, 31 et 30 enfants). Aux examens du cel'li-

ficat d'études qui ont eu lieu il Yillejuif, le 21 mars

deux enfants ont subi les épreuves avec succès,

(Cliattm.. et Lan ? 1... ('2)

Cette année encore, nos instituteurs et leurs aides,

ainsi que les sous-employées attachées aux écoles

(section de Bicêtre et Fondation Vallée), alin d'être

mieux en mesure d'améliorer la prononciation des

enfants et de développer leur parole, ont été envoyés

.successivement, par séries, au nombre d'unovinn'tainc,

(U Note dc \l..1. 13uver. ,

( ? ) A ce mme eaamen, li iafirmierS et 8 iufirmières cle l'I : cole lc 131c·t : o 0

ont également obtenu le certificat d'études.

- Enseignement du chant. xix

a l'Institution Nationale des 801l/'¡[S-luIICtS. De plus,

comme nous avons un certain nombre d'enfants aveu-

glcs, nos auxiliaires sont également allés, par séries,

il l'Institution Nationale des jeunes aveugles et il

l'Ecole Braille, dépendant du département. Leur

devoir est de prolitcr des notions 1nérlico-pél[ngo-

gique qu'ils acquièrent dans ces visites pour nous

seconder sérieusement dans le t /'nilcmcnt méil ico-

pédagogique des enfants de notre service. Aux insti-

tuteurs et aux surveillantes institutrices à comprendre

ce que nous faisons pour le développement de leur

instruction pédagogique. A l'Administration, d'en

exiger l'application. Nous ne saurions trop remercier

MM. Giraud, ]>(;phau, Robin et Haldon de leur pré-

cieux concours.

Notre but, en procédant ainsi, est de perfectionner

l'instruction pédagogique de nos collaborateurs l't col-

lahoratrices, de faire dans la mesure de nos rclaiions

ce qui devrait être l'ait pour tous les pédagogues d'en-

funls anormaux. Nous avons des idiots sourds et muets,

des idiots aveugles, des idiots atteints de nombreux

vices de prononciation, qui doivent profiter de l'ins-

truction supplémentaire que nous essayons de

procurer à notre personnel enseignant. Les péda-

gogues de chacun des groupes spéciaux d'enfants

anormaux profileraient, croyons-nous, de leur passage

plus ou moins prolongé, dans les autres établissements

d'anormaux. Un modique crédit sur le pari mutuel ou

sur les fonds du ministère de l'intérieur permettrait la

réalisation de cette modeste réforme. Jusqu'ici nos

indications, à cet égard, ont passé inaperçues. L'un

des obstacles qui s'opposent à la création de sections

spéciales d'enfants, annexées aux asiles ou Ü la créa-

\X ' Fanfare et Orphéon.

tion d'asiles-écoles et de classes ou écoles spéciales

pour les arriérés c'est assurément l'absence d'un

personnel enseignant. Cette dil11uulLé s'est présentée

récemment pour l'asile de Clermont (Oise) dont les

médecins en chefs et le directeur voudraient organi-

ser un traitement médico-pédagogique pour une cen-

taine d'idiotes qui existent dans leur établissement.

Enseignement du chant. - Cet enseignement

est fait par M. Eugène u'1°rr.ll, professeur de

chant à l'Asile-école de Hicétrc. De même que les

années précédentes, conformément à nos instruc-

tions, M. Suttcr s'est occuppé successivement de

tous les enfants susceptibles de proliter de son ensei-

gnement. 11 a divisé ceux de la petite école, de la

petite école complémentaire et ceux de la grande

école en trois groupes.

En maintes circonstances et les samedis où nous

avons des visiteurs, nous réunissons les petites filles

de la Fondation Vallée avec les garçons de Hicetrc et

nous les faisons chanter ensemble dans les choeurs.

Cette réunion des enfants des deux sexes, que nous

voudrions rendre plus fréquente, comme autrefois,

n'a jamais eu d'inconvénient. Elle ne sourit pas à cer-

tains fonctionnaires parce qu'elle entraîne pour eux

une surveillance, que leur rôle administratif exige,

mais dont ils préfèrent se dégager. Le nombre des

enfants qui prennent part à l'enseignement du chant

était de 5u0 au commencement de l'année et de 25 ?

il la fin de l'année. Voici, résumées par M. Suttcr,

quelques notes concernant son enseignement :

Les enfants chantent les morceaux contenus dans

deux livres spécialement composés pour leur usage.

Les voix, en général, sont assez, justes et l'ensemble

produit un bon effet. Toutefois les enfants ayant les

Influence DE la musique. xxi

meilleures voix sont désignés pour faire partie de

l'Orphéon et exécutent des chants et des eltceurs

devant les nombreux visiteurs qui viennent visiter

le service presque lotis les samedis. Une classe de

solfège et de théorie musicale est instituée spéciale-

ment pour former les élèves de l'Orphéon et de la

Fanfare.

Solfège et Théorie. « J'ai obtenu, dit M. Suttcr,

de très bons résultats avec les enfants qui ont suivi la

classe de solfège et de théorie musicale en procédant

de la manière suivante : chaque enfant possède un

cahier écolier sur lequel il a copié lui-même les dif-

férents exercices et leçons; après cette opération cha-

que enfant, à son tour, passe au tableau et remplit la

portée de notes et de silences, avec l'indication de la

mesure, de façon à bien lui faire comprendre la valeur

de chaque note et celle des silences; mesure de qua-

tre temps, trois temps, deux temps, six-huit.

Après cette composition, l'élève indique le nom de

chaque note ainsi que la valeur, le pouvoir des dièzes,

bémols et bécarres et cela en présence d'un de ses

camarades qui lui serl de moniteur. Le moniteur, ain

si improvisé, rectifie les fautes et en donne la raison.

L'élève en quittant le tableau devienl il son tour moni

teur de l'élève qui lui succède au lableau et ainsi de

suite jusqu'à ce que chaque enfant ait été élève et

moniteur il son tour. 50 enfants environ savent lire

les notes et en connaissent la valeur. »

Fanfare et Orphéon. 35 enfants font partie de la

Fanfare, 25 exécutants et dix élèves; dans ce nombre

4 clairons et 3 tambours. La Fanfare prend part aux

visites du samedi, elle accompagne les exercices de

gymmasliquo et fait défiler la fin de ces exercices les-

enfants aux sons d'une marche. La Fanfare et l'Orphé-

xxu Traitement 11 : : D ! CO-PI : : D.\nOnJQ[JE.

on organisent des concerts et des bais. Le Mardi-gras

et à la 111-carî·mc, la fanfare précède le défile, dans les

cours et à la Fondation Vallée, des enfants déguisés.

Concerts et Bals. Pendant l'année 1905, nous

avons organisé quatre grands concerts. Dans ces

matinées-concerts, j'ai fait exécuter par quelques

enfants de l'Orphéon et avec les fillettes de la fonda-

tion Vallée des rondes avec jeux et danses : ces rondes

ont obtenu beaucoup de succès; des chansonnettes et

une pièce de théâtre forment le complément de ces

fêtes. Les décors sont faits par les enfants ainsi que

les programmes et les billets de tombola.

A notre demande, M. Butter a organisé trois bals et

une tombola, cette dernière a obtenu un grand succès,

grâce au concours dévoué des employés delà section

et de généreux donateurs. Le bénéfice des deux pre-

miers bals a été versé à la caisse des jeux pour achat

de déguisements ; le 3" bal et la tombola ont été faits au

profit de la caisse de la Fanfare pour achat et répara-

tion des instruments, car l'Administration n'a jamais

de crédit pour faire les achats cl les réparations néces-

saires. Concerts et bals font la joie des enfants et de

leurs parents qui sont autorisés il y assister : ce sont

des fêtes organisées sans frais par et pour les enfants

eux-mêmes et non en vue du public, comme les con-

certs Lionnet. Nous avons constate'' que les enfants

ont rarement d'accès d'epilepsie pendant ces réjouis-

sances.

Pour récompenser les enfants qui, il un litre quel-

conque, ont pris part il l'organisation des bals et con-

certs, (chanteurs, acteurs, instrumentistes, impri-

meurs et menuisiers), nous leur faisons faire chaque

année une promenade à Itohinson, cette promenade

a été faite au mois d'octobre.

Exercices de la voix et des poumons. Un grand

Traitement 11' : [)¡C : O-PÍW,\GOGIQUE. XXIII

nombre de nus enfants ont la voix assez étendue et

assez juste pour exécuter nos chants scolaires. Tou-

tefois il y en a qui ont la voix voilée mais juste, cela

doit provenir de l'onanisme auquel ils se livrent;

malgré ms recommandations, la surveillance n'est

pas toujours ce qu'elle devrait être. La généralité de

nos enfants ont la voix assez grave après la période

de la miie, les ténors nous font défaut. La période de-

la miic est assez tardive chez les enfants idiots et plu-

tôt précoce chez les enfants nerveux (épileptiques,

amoraux, etc.) Nombre d'idiots retiennent facilement

un air de musique.

La voix s'étend en pratiquant les exercices sui-

vants : Faire attaquer la note par l'enfant et lui faire

tenir celte note pendant au moins quatre temps, mon-

ter ainsi progressivement d'un degré, de façon à arri-

ver aux notes aiguës, faire sortir les sons de la gorge en

ouvrant bien la bouche, en augmentant la force et en

la diminuant ensuite tout en conservant la note juste.

Par ccsexcicices l'enfant arrive à gagner une ou

deux notes dans l'aigu et même davantage sans le

concours de la voix de tête, celle-ci est purement arti-

ficielle et demande de longues études pour pouvoir

s'en servir convenablement. Ces exercices ont le don

de former l'oreille musicale de l'enfant et il saura

distinguer les différentes intonations des notes sui-

vant le degré et la position de celles-ci sur la partie.

Cette même manière de procéder pour la voix sert

aux instrumentistes de la Fanfare. Ces leçons forment

un ensemble d'exercices de gymnastique des pou-

'1110113 et la pression des lèvres que doivent faire

ceux-ci contre l'embouchure de l'instrument, forti-

fient celles-ci; les mêmes effets se produisent sur

les cordes vocales par les exercices d'intonation cités

plus haut. Ces exercices contribuent quelquefois à

la a'uérison des tics.

XXÏV Enseignement du dessin.

Enseignement du dc.s.s'N). Cet enseignement est

fait par M. Du.mont depuis le 15 avril 1901. Les leçons

ont lieu deux fois par semaine, le mercredi et le jeudi.

Elles durent chacune une heure. Cet enseignement

rend des services incontestables au point de vue de

l'éducation de la main et de l'ccil et est d'une utilité

évidente pour les apprentis de plusieurs ateliers.

Comme nous le disions l'an dernier, nous désirerions

cet enseignement non pas seulement pour les enfants

les moins malades mais aussi pour ceux qui sont plus

profondément atteints en suivant exactement les indi-

cations que nous avons fait tracer par D1 ? Bru dans

l'Alphabet du dessin, l'un des volumes de la lhblio-

thèque cl'él2lcalzcu2..slécinlc. Voici quelques notes

fournies par M. Dumonl sur son cours : -

« 130 élèves suivent les leçons de dessin ; presque

tous les enfants, sauf les élèves récemment entrés,

savent et dessinent les premières notions de géométrie.

Il s'est produit cette année un véritable progrès, tant

au point de vue de l'habileté de main que du soin et

de la propreté dans l'exécution du travail.

« Un certain nombre d'élèves ont montre'' un goût

réel pour le dessin d'art; d'ici peu de temps j'espère

les voir arrivera produire de jolis dessins. Les enfants

dessinncut des plâtres représentant des ornements,

tels que feuilles de lierre, de chêne, de vigne, rin-

ceaux, rosaces, etc.. et parmi les objets usuels des

entonnoirs, des vases, etc. Le matériel nécessaire

au fonctionnement de ce cours, étant sur le point de

se compléter, j'espère que la tâche sera plus facile et

les résultats plus certains dans l'année qui va suivre. »

Gm2zt.stirlue. - Il ne s'agit plus ici de la gymnas-

tique avec la balançoire-tremplin, avec les échelles

de cordes, les ressorts, etc., mais de la gymnastique

des mouvements d'ensemble cl aux agrès. Les exer-

Société de gymnastique. XXV

ciccs d'ensemble se font soit au tambour, soit avec

la fanfare, soit avec accompagnement de chants,

ou sont conduits avec l'harmonium (1). Les mou-

vements sont aussi variés que possible et chaque

année noire dévoué professeur, M. Goy, en introduit

de nouveaux. D'autres exercices ont lieu avec les hal-

tères, les échelles convexes et horizontales, la barre

fixe, les barres parallèles, le vindas, la balançoire

brachiale, etc.

Mais, et non no cessons do le redire, nous don-

nons la préférence aux exercices des mouvements

avec ou sans haltères, barres Ù sphères, etc. Parmi les

agrès, nous préférons les échelles horizontales, et con-

vexes, les barres parallèles, le mât horizontal, les

anneaux, évitant les exercices violents ou ceux qui i

peuvent avoir des inconvénients pour les épilepliques.

Nous avons dressé un infirmier afin de remplacer

le professeur en cas d'absence. Nous voudrions avoir

partout, aux ateliers, au chant, à la danse, etc. un

infirmier en mesure de remplacer le professeur ou le

maître absent. Nos réclamations dans ce sens sont

demeurées sans résultat.

Société de gymnastique. Les enfants faisant

partie de cette société, au nombre de 21, ont pris part,

sous la direction de leur maître, M. Ûor, il un concours

de gymnastique organisé parla commune du Kremlin-

Picêtrc où ils ont obtenu deux médailles d'argent et

une palme de vermeil.

Escrime. Cet exercice s'est fait régulièrement

sous la direction de MM. Pelletier et Chevreau, pré-

vôts au fort de l31ctrc. Ces militaires se sont acquit-

tés avec beaucoup de zèle et de dévouement de leurs

(1) Voir cle 1S0 ! ), p. ! .IX.

xxvi Musée scolaire, projections.

fonctions. 98 enfants participent, à des degrés divers,

à cet exercice, que nous considérons comme secon-

daire par rapport aux autres exercices physiques (1).

Danse. Les exercices de danse ont eu lieu ré-

gulièrement de midi à une heure sous la direction

de M. LANDOS-r, un de nos instituteurs. 124 enfants

de la grande école et 15 de la petite école y

prennent part; sur ce nombre, 95 savent danser la

polka, 30 connaissent la polka, la mazurka et la

scottish; 27 connaissent le quadrille français et toutes

les danses de caractères, et 15 de ces derniers ont

commencé à apprendre le pas de quatre. -

Musée scolaire. Ce musée continue à servir aux

séances de projection, aux leçons de choses et de salle

de lecture : Il s'est cette année enrichi tant au point de

vue de la bibliothèque qu'au point do vue des figures

pour projections. L'administration a acheté auec

des dons (2), cette année, 14 volumes, ce qui porte à 606

le nombre des volumes delà bibliothèque des enfants-

Le 1°1' janvier 1902, le nombre des unes pour projec-

tions était de 1766, à la fin de l'année ce chiffre attei-

gnait 1890 (81 ontété faites par M. Hubert, photographe

de la maison, 32 ont été achetées par l'Administration,

et 11 ont été faites par M. Mesnard). Les collections

qui ont le plus profité de ces vues sont : Les parasites,-

la Martinique (3), l'Histoire de France, les plantes

équatoriales ou tropicales. '

Grâce à ces collections qui se complètent de jour

en jour, le service n'emprunte plus que très rarement

(1) Voir Compte-rendu, de 1899, Tl. LXI" t.svt.

(2) Commission de surveillance des asiles (30 Ir.). TlIoo' Digoy, mère d'un dé

nos malades. 1 volume.

(3) Don fait par l'un de nos internes, M.Lutaud, d'u e collection de belles

photographies. ,

Traitement médico-pédagogique. xxvii

des vues au Musée pédagogique ou il la Ligue de l'en-

seignement.

Ces vues servent aux conférences du jeudi faites

aux enfants les moins malades, aux visites du samedi,

jour où nous recevons les étrangers, aux cours d'a-

natomic et de physiologie des Ecoles d'infirmières de

Hicctre et de la Pitié. Enfin tous les ans les internes

du service s'en servent pour différentes conférences

faites aux infirmiers et infirmières de l'hospice ; c'est

ainsi que M. More), l'un de nos anciens internes, a

fait au personnel une conférence très intéressante

sur l'alcoolisme (série nouvelle); une autre sur les

parasites de l'homme et une troisième sur Jenner, la

variole et la vaccine.

L'enseignement par les projections est très com-

plexe. Il sert pour les enfants de toutes les catégories :

1" pour les enfants idiots profonds à fixer l'attention

(images blanches ou colorées sur fond noir, images

blanches sur fond noir'), il apprendre les lettres (grandes

lettres noires sur fond blanc, puis lettres beaucoup

plus petites); pour l'éducation de la parole (syllabes

simples ou répétées ou combinées); 2" Pour les idiots

déjà un peu améliorés, il reconnaître les objets, les

animaux (images graduées); 3" Pour les enfants

imbéciles, arriérés et épileptiques, à faire tous les

jeudis une conférence dont les séries de vues énu-

mérées plus haut donnent une idée suffisante.

Dans les petites écoles et la grande école, on doit

sans cesse s'occuper de la guérison des tics, des

manies, s'opposer aux pratiques solitaires. Pour tous

les enfants, et en particulier pour les imbéciles intel-

lectuels avec impulsions et pour les imbéciles moraux

a tous les degrés, nous avons recours au traitement

moral, ou, pour employer le jargon il la mode, il la

suggestion il l'état de veille. Tous nos efforts tendent

XXVIII Résultats.

à faire comprendre à nos auxiliaires, pédagogues et

infirmiers, qu'ils ont affaire à des enfants malades,

relevant du. traitement 2éclieo-péclayoyicytte, envers

lesquels et comme en/'anls ? et comme malades, ils

doivent se montrer bienveillants et affectueux, et non

pas à des enfants vicieux, dont la place, serait, disent

certains administrateurs, plus à tort qu'a raison, dans

les maisons de correction ou les prisons.

Voici quelques notes concernant les enfants de

cette catégorie : ,

- Grande école : 1re classe. - 1° CIEaLL7n,..., 16 ans, atteint

d'arriération intellectuelle, de paralysie spinale infantile

du bras droit et d'épilepsie. - Cet enfant a fait de grands

progrès au point de vue primaire. Entré en classe en 1901,

il faisait un grand nombre do fautes d'orthographe; il ne

possédait que quelques notions assez confuses d'histoire et

de géographie. Grâce à sa bonna volonté, soutenue cons-

tamment par le conseil de ses maîtres, il est arrivé ii réussir

al'examen du certificat d'études primaires. Il s'est également

amélioré au point de vue du caractère. Bon apprenti tailleur.

Il écrit et coud avec la main gauche. .

2° Lang.... 19 ans, atteint d'épilepsie. Depuis plusieurs

années à Bicêtrc ; trépané. Progrès sensibles au point de vue

primaire. Après deux années d'efforts persévérants, il est

arrivé à obtenir le certificat d'études primaires. Par sa bonne

conduite et son travail soutenu à l'école et à l'atelier il a été

jugé digne d'obtenir le prix Gallois. Bon ouvrier brossier.

3° Franc... lî ans, atteint d'épilepsie. Grande améliora-

tion au point de vue de la conduite. C'était autrefois un enfant

auquel on ne pouvait faire la moindre observation, il était

sournois, grossier, impoli et paresseux. A force de douceur,

on est arrivé à le rendre poli d'abord, -moins grossier et plus

courageux. '

2e classe. 4° l3elllz... ? 26 ans : arriération intellectuelle,

épilepsie avec hémiplégie gauche, alcoolisme. A fait des

progrès très sensibles sur toutes les matières du programme.

Traitement \IIsUICO-l'1UAGOGI('IUG. XXIX

Les fautes d'orthographe sont moins nombreuses; la division

a été comprise. Cet élève apprend bien ses résumes d'histoire

et il fait de petits devoirs de géographie sur les montagnes et

les cours d'eau. Il Il est jardinier et son patron est satisfait

de sa bonne volonté.

5" Pic...., l."> ans : imbécillité, I ? Iepto)ta)iie, est

devenu bon élève. Assidu au travail, cherche à bien faire.

Ses dictées renferment peu de fautes d'orthographe et il fait

de petits problèmes simples sur les ! i règles. Ses résumés

d'histoire sont appris et ses devoirs de géographie bien faits.

Cet élève pourra passer en 1 ? classe. Apprenti tailleur, com-

mence à faire dcs doublures de manches.

t;° Rem Li ans : arriération intellectuelle, épilespie. -

Travaille bien en classe, sait appliquer les règles de gram-

maire et fait peu de fautes dans ses dictées. Il conjugue les

verbes réguliers aux temps simples, fait des analyses gram-

maticales renfermant sujet, verbe et complément direct ainsi

que des exercices d'invention. Il a appris la division. A retenu

les principaux faits de l'histoire de France, des origines il la

guerre de Cent ans et les notions élémentaires de géographie

ayant trait aux montagnes et aux cours d'eau. Bon apprenti

vannier.

7u Guil... ? Il ans, atteint (l'arriération intellectuelle avec

crises hystériques. - bon élève. Travaille bien et fait des

progrès sensibles. Fait peu de fautes d'orthographe, applique

bien les règles de grammaire et a beaucoup d'idée pour les

exercices d'invention. Il fait de petits problèmes sur les 4

règles. Sa mémoire et son intelligence sont bien développées.

Il apprend facilement ses résumés de leçon et oublie peu.

Pourra passer en lu, classe. ? « classe. 8" ScliarL... (Gustave. Maurice), 1 1 ans. -Imbé-

cillité : ( : pilep.,ie. - Lectures courantes; fait les trois pre-

mières opérations et commence à faire de petits problèmes.

Ses devoirs sont bien écrits; il comprend les explications don-

nées. La mémoire est assez bonne; il étudie et récite la plu-

part des leçons et quelques petites fables. Il y a amélioration

sérieuse au point de vue moral. Pas d'accès en 190". Apprenti

jardinier; commence a bien travailler ; beaucoup de bonne

volonté.

XXX " RÉSULTATS.

90 Mant. o. (Louis, Eugène), 'IIÎ ans. Imbécillité, dépres-

sion mélancolique. Cet enfant fait mieux les devoirs écrits; il

litapeu près couramment ; il fait assez bien les trois premières

opérations. Il est toujours très attentif, comprend les explica-

tions données et les met à profit. Bon caractère et très docile

en classe. Menuisier : grands progrès ; s'efforce il bien faire

tout travail.

10° Saiut-Lanth... (Uaslln René), 19 ans. - Imbécillité ;

Ipnep ? : 'o. Cet enfant n fait aucun progrès en calcul : mais

pour tout le reste il s'applique dans la mesure du possible; il

lit bien, fait bien les devoirs écrits et comprend les explica-

tions données. Bon caractère : très docile; nature serviable;

sentiments affectueux assez développés. Bon apprenti jardi-

nier.

11°'l'orai... Il ans. - Imbécillité. Epilepsie. -

Quoique écrivant moins bien que les précédents, cet enfant

fait des progrès sensibles ; il profite des explications données.

Très souvent il récite des leçons et apprend par coeur quel-

ques petites failles. Amélioration notable au point de vue

moral. Apprenti jardinier médiocre.

12° Besanc... (Jules, Emile), lli ans. Imbécillité. Epilcp-

sie. Ilémiparésie droite. Onycoplia ! 71e. - Cet enfant fait

également des progrès sensibles; les connaissances géné-

rales se développent progressivement. Il s'applique dans la

mesure du possible. Bon caractère ; docile en classe. Apprenti

cordonnier médiocre.

lie classe. - 13° Coudcy... (gorges), 1 '1 ans.

Epilepsie. Parésie droite. Lit couramment, fait les exer-

cices de copie. Plus en retard pour le calcul, est parvenu

cependant à faire l'addition, la soustraction et quelques

petites multiplications. Est passé en'3" classe depuis quel-

ques semaines. - Apprenti tailleur, travaille beaucoup, très

courageux, très docile. Ecrit et coud de la main gauche.

1-1° Mêla.. (Albert), l'ians.-In26écilli(. Epilepsie. Hémi-

plégie droite compliquée de contracture. Fait bien l'addi-

tion, la soustraction et la multiplication. L'écriture bien

qu'améliorée est encore défectueuse, mais le malade fait tout

son possible pour arriver à de meilleurs résultats. A fait de

Traitement 111 : DIC0-PI3D : 1GOGIQUC. XXXI

sérieux progrès en lecture et fait bien les exercices de copie.

Apprenti tailleur passable. Ecrit et coud de la main gauche.

15° Sim... (Eugène), 13 ans. Imbécillité. - Ce malade

très nonchalant aurait volontiers passé tout le temps de la

classe à dormir ou à rêver. A force de persuasion, je suis arri-

vé avec lui il des résultats assez appréciables. C'est ainsi que

Sim.. commence à lire dans la 11 partie du Syllabaire Regim-

beau, alors qu'il y a un an, en entrant dans le service il

connaissait il peine les lettres de l'alphabet et ne pouvait

syllaber. En calcul est parvenu à bien faire l'addition, la

soustraction et la multiplication. Apprenti menuisier mé-

diocre.

1(3° BOlLl'ge... (Auguste), 13 ans. Imbécillité avec perver-

sion des instincts. Epilepsie. Malgré ses accès et vertiges un

peu plus nombreux pendant le courant de cette année, co

malade a continué il faire des progrès, L'écriture devient

bonne; la lecture sera bientôt courante, si l'élève continue

à bien s'appliquer. Fait bien addition, soustraction et multi-

plication. Le caractère ne change malheureusement guère et

Bourg... est toujours aussi grossier. Bon apprenti tailleur.

Nous pourrions multiplier beaucoup ces petites

notices sur les enfants améliorés. Celles qui précèdent

et plus particulièrement celles de la petite école, cone.

cernant les enfants les plus gravement atteints, nous

paraissent suffire à témoigner des efforts faits par tous

pour améliorer les enfants qui nous sont confiés.

Pour obtenir encore de meilleurs résultats, plus

d'améliorations et de guérisons, il faudrait que les

enfants soient rigoureusement occupés ou distraits

du lever au coucher et qu'ils ne soient jamais désoeu-

vrés. Les jours où les maires sont en congé, pendant

les vacances, il y a des querelles, des disputes, des

traumatismes, des pratiques onanistiques, des accès

en plus grand nombre. C'est pour obvier à ces acci-

dents, sans causcr de préjudice au personnel cnsei-

XXXII RÉSULTATS.

gnant que nous avons réclamé, sans l'obtenir, qu'on

place dans le service des garçons de classe ayant

leur brevet de capacité, des infirmiers ayant exercé

la profession de menuisier, serrurier, cordonnier, etc.

De la sorte, les instituteurs et les chefs d'atelier

pourraient avoir leur congé sans qu'il en résulte un

préjudice pour les enfants. En effet, tandis que dans

les lycées, les écoles primaires, les élèves sont en

congé en même temps que leurs maîtres, à l'asile-

école de 131cctrc, comme dans les services analogues,

les enfants, eux, restent.

Aux exercices pédagogiques proprement dits, avec

leçons de choses faites dans les classes, dans les pro-

menades, ai musée scolaire (projections, etc.), clans

les jardins de la section où les arbres, les arbustes,

les plantes portent des étiquettes nominatives, s'ajou-

tent le travail manuel dans les ateliers, les exercices

physiques : gymnastique variée, danse, escrime, jeux

divers.

Cet ensemble de procédés constitue notre méthode

de traitement médico-pédagogique. Nos visiteurs du

samedi nous ont toujours paru l'apprécier d'une

manière favorable : la relation de leurs visites publiée

dans les journaux scientifiques ou autres en est la

preuve. Ce n'est pas toutefois qu'il ne se soit produit

des critiques, non point clc la part des médecins,

mais de la part de quelques conseillers, sans doute

mal renseignés, qui ont manifesté une certaine

hostilité contre l'organisation que nous avons créée

en faveur des enfants idiots, alors que les enfants

normaux ne disposaient pas d'avantages semblables.

Jardins d'enseignement. xxxiii

Loin de nous aider à mieux faire, ils auraient volon-

tiers demandé la réduction de nos moyens d'action. A

leurs yeux, nous avons trop fait pour de tels enfants.

Leurs visites à l'asilc-éco'e de Bicêtre devraient,

au contraire, les inciter à introduire progressivement

dans les écoles primaires les procédés qui composent

notre méthode. Pourquoi les arbres, les arbustes,

les fleurs de nos squares, de nos jardins publics ne

sont-ils pas dénommés comme dans les jardins de

notre service, et comme cela existe dans quelques

pays de l'étranger et même dans quelques villes de

France ? Pourquoi les exercices de gymnastique, de

chant, laissent-ils tant il désirer clans nos établisse-

ments d'enseignement ? Pourquoi les instituteurs et

les institutrices ne multiplient-ils pas les leçons de

choses ? Pourquoi, ainsi que nous l'avons proposé

il y a plus de 25 ans, n'utilisc-t-on pas les richesses

du Muséum d'histoire naturelle au bénéfice des cle-

ves des lycées et des écoles primaires ? (1).

En dehors des heures de classe, de gymnastique,

de chant, de dessin, de danse, d'escrime, d'atelier, nous

avons toujours essayé de faire participer les enfants

aux corvées de tout genre : salubrité, nettoyage des

hains, des classes, du musée scolaire, des cours,

des ateliers. Il est certain que si tout le personnel

nous secondait à cet égard, notre service serait d'une

propreté irréprochable dans la mesure que comporte

le défaut d'entretien des bâtiments.

Des enfants accompagnent les infirmiers à la cui-

sine, a la lingerie, il la buanderie, aident à apporter

non seulement leurs aliments, mais aussi ceux des

(1) Voir le Compte rendu de 1001, p. lxxv.

Bourneville, Bicêtre, 1902.

X\XtV Hygiène sexuelle.

sous-employés qui peuvent ainsi rester dans le service

au lieu de perdre du temps dans les services généraux.

Si dans ces courses les infirmiers et les infirmières

répondaient il nos désirs, il y aurait matière à des

J((> : ons de choses. En tout cas, c'est une distraction

pour les enfants qui se sentent plus fibres.

Quelques enfants, avec notre autorisation, et de

bonne volonté, rendent de petits services aux sous-

employés, montent du charbon, de l'eau - en particu-

lier dans les logements des ateliers puisque, malgré

nos réclamations, il n'y a pas de prise d'eau au second

étage. Ils en sont récompensés par do modiques

allocations. Les en priver les affligerait et les priverait

du plaisir de se rendre utiles aux personnes qui leur

sont dévouées.

Plus les enfants sont occupés, plus leurs occupations

sont variées, plus leur physique, leur moral et leur

-intelligence en profitent, moins il y a de querelles,

de rixes et de pratiques solitaires ou autres plus

graves. Ordre est venu de l'Administration de ne plus

employer les enfants il toutes ces petites besognes.

Inutile de dire que nous n'avons pas été consulté.

C'est ainsi que l'Administration nous seconde dans

notre tâche ! Espérons que M. Mesureur lèvera cet

interdit !

Hygiène 8cxu'llc. L'un des obstacles qui s'op-

posent le plus il l'acquisition de résultats encore plus

considérables que ceux que nous enregistrons, c'est

l'onanisme relevé comme fréquent chez les enfants.

Pour y remédier nous intervenons sans cesse auprès

des enfants, nous recommandons aux instituteurs de

veiller à ce que les enfants son-nt toujours accompa-

gnés des infirmiers de classe quand ils vont aux cabi-

nets d'aisances ; aux infirmiers-veilleurs d'être très

attentifs et d'empêcher les enfants de mettre leur

Promenades et distractions. xxv

mains dans les poches de leur pantalon, de se coucher

sur le ventre. Malheureusement soit indifférence, soit

incapacité et absence de conviction, nous n'obtenons

pas de tous le concours indispensable. Nous faisons

veiller le plus possible il l'hygiène sexuelle.

Pour appuyer la nécessité de se conformer à nos

indications, nous citons l'exemple de,; enfants dont

l'état mental est dû surtout aux habitudes solitaires.

Nous insistons sur les conséquences physiques, untel-

lectuelles et morales : amaigrissement, affaiblis-

sement progressif clés forces, troubles de la marche,

tremblements, hébétude de la physionomie (pupilles

dilatées, yeux cernés, teint jaunâtre, pustules d'acné,

etc.), la diminution de la volonté, (le la mémoire,, de.

l'activité intellectuelle, l'inaptitude non seulement au

travail scolaire mais aussi au travail manuel, l'indiffé-

rence aux jeux; la tendance à l'isolement, la diminu-

tion de la sociabilité, des sentiments affectifs envers

parents, maîtres, camarades; la disparition de la

gaieté, l'énervement, l'irritabilité, la désobéissance.,

L'onanistc n'a d'énergie que pour se livrer il ses mau-

vaises habitudes. Enfin nous nous appuyons sur les

conséquences quotidiennes de l'onanisme, apathie,

pour le travail, et ultérieurement : spermatorrhée,

impuissance, démence, pour inciter tous nos au-

xiliaires à exercer une surveillance très rigoureuse

et de tous les instants. -

Promenades et distractions. Les enfants de la

grande et ceux de la petite écoles, qui sont propres,

ont continué, comme les années précédentes, à faire

des promenades soit à Paris, soit aux environs de

l'hospice. Dans ces promenades, les instituteurs et'

les institutrices doivent donner des leçons de choses

xxxvi Promenades et distractions.

et exercer les enfants aux différents jeux en plein air

(jeu de 1) illes, de ballon, etc.) Voici rémunération des

principaux endroits où ils sont allés en promenade

cette année : Arcueil-Cachan, Crétcil, bois de Gournay,

Gentilly, Ivry, jardin d'Acclimatation (i), jardin des

Plantes, jardin du Luxcmbourg, musée de Cluny,

parc de Montsouris, Hobinson, Villejuif, Vincennes,

Vitry. Ils ont également visité la fête du Lion de Bel-

fort, de la place d'Italie, la Foire aux pains d'épices, etc.

Les distractions ont été aussi nombreuses cette

année que les années précédentes. Notons la distribu-

tion des jouets du jour de l'an, donnés par l'Admi-

nistration ; les déguisements du Mardi -Gras et do

la Mi-Carême, la distribution des jouets de Noël,

offerts par la société du « Joueux Noël ». Nous adres-

sons à cette société tous nos remerciements. - A citer

aussi le concert organisé par le « Comité des frères

Lionnet » auquel, comme les années précédentes,

les artistes des principaux théâtres et concerts de Paris

ont prêté leur concours. Tous les enfants valides de

Bicêtre et clc la Fondation Vallée y ont assisté.

Signalons enfin, organisés par les enfants, une grande

tombola (2) et quatre concerts dont un suivi d'une pié-

cette. Les familles assistent aux fêtes organisées par

les enfants.

Les enfants ont encore bénéficié de plusieurs repré-

sentations gratuites dans les divers cirques et théâtres

installés il la fête du Lion de Belfort, il la Place d'Italie,

il la foire au pain d'épice et sur l'avenue de Bicêtre. z

Les jardiniers sont allés avec leur maître, M. V. Mes-

(II Nous adressons à I'ORTL, directeur de ce bel établissement, tous nus

remerciements pou) )abonne grâce qu'il met chaque année, sur notre demande,

il. autoriser nos enfants et les petites filles de la Salpêtnère à visiter le Jar-

din d'Acclimatation.

fi) Ce produit de cette tombola, soit un bénéfice net de 50 ? fr. (i0, nous a

permis- d'acheter dos instruments pour la fanfare.

Caisse d'épargne, VISITES. XXXVII

nard, à l'Exposition de chrysanthèmes et à l'E : \ : posi-

lion d'horticulture. Les imprimeurs, sous la con-

duite de leur maître, M. \Irtr : er3ar,r ? T, ont visite-

dans tous ses détails l'école Estienne,

Caisse d'épargne. Elle est confiée au premier

de nos instituteurs, M. Mesnaud. Les recettes ont été,

pour l'année, de 72 fr. Le total général des sommes

recueillies depuis 1895 s'élève il 2.184 fr. 65.

Visites. Les enfants ont reçu 8.488 visites ;

les visiteurs ont été au nombre de 13.559. Voici la

statistique des permissions de sortie et des con-

fiés : .

.,\XXV111 : - -.Vaccination. - -- ."

Les visites des familles au parloir lie sont pas suffi-

samment surveillées, répéterons-nous. Trop souvent t

les parents ne se gênent pas pour introduire des ali1-

ments, du vin et des liqueurs qu'ils font absorber en

quantité exagérée aux malades. De là des accidents

auxquels il faut remédier et une augmentation des

accès épileptiques. De plus, les parents donnent de

l'argent aux enfants, autre abus qui est une source

d'ennuis pour tout le monde : rixes, vols, trafics, etc..

Nous signalons encore une fois à l'Administration la

nécessité de remédier à tous ces abus regrettables (1).

. Vaccination et revaccination. Nous avons con-

tinué, pratique qui remonte il 1880, la vaccination

et la revaccination de tous les malades entrés durant

l'année et des enfants dont la revaccination remonte

à 6 ou 7 ans. Comme d'habitude, cette opération a été

faite par les élèves de l'École d'infirmiers et

d'infirmières de Bicêtre, sous notre direction et celle

de nos internes, avec le concours de la sous-surveil-

lante, 1\1 ? Boxai : \, Elles ont été au nombre de 81;

7 infirmiers ou infirmières seulement ont consenti

à se faire revacciner. Parmi les malades 8 ont été

revaccinés avec succès.

Service dentaire. M. le Du DUSIOVT est vcnu

chaque semaine donner des soins il nos malades au

point de vue de la dentition et de l'hygiène de la

bouche. Il nous remet sur chacun d'eux une note

spéciale. Rappelons qu'en faisant instituer ce service

journée étant de 2 fI'. 20, il s'ensuit une économie pour l'Assistance publique

de 7.081 fI'. GO, qui, nous le répétons, devraient être appliques a l'entretien

des bâtiments qui sont dans un état de plus en plus déplorable.

(1) Les visites ont lieu le jeudi et le. dimanche de midi à i heures, il convien-

drait de les réduire de midi à 2 heures, ce qui permettrait de faire faire

insuitc une promenade aux enfants.. ; ,

Service dentaire et bains. xxxix

dentaire, notre but était de remédier aux nombreuses

défectuosités de la dentition chez nos enfants et aussi

d'avoir, chaque année, une note, prise par un homme

compétent, sur la dentition de tous les enfants.

Bains et hydrothérapie. Les hains et les dou-

ches, joints il la gymnastique, à l'emploi des bromu-

res, surtout de l'élixir polybromure (formule YvoN),

du bromure de camphre (préparations du D1' Clin),

plus actif et plus absorbable que les autres prépara-

lions similaires qui nous ont été fournies par l'Ad-

ministration, et des médicaments antiscrofukux, ont

continué comme par le passé il être, avec les purga-

tifs, surtout chez les épilepliques, la base du traitement

en 1901. Nous avons, de plus, essayé de nouveau l'a-

donis vernalis et les pilules de Mégi in, mais sans

résultats appréciables. Il a été donné dans le cours

de l'année 17.768 bains, ainsi répartis :

XL Hydrothérapie.

faisant procéder d'urgence aux réparations des bai-

gnoires ou il leur remplacement. Dans un tel service

la propreté ne peut être assurée et la guérison du

gâtisme obtenue que par un service régulier des

bains, douches, etc.

Nous avons toujours été un partisan convaincu de

l'hydrothérapie. Personnellement, sur les conseils et il

l'incitation de N. Pascal, notre co-rédactcur au Mou-

reinenl médical, et de notre collègue d'internat, le

Dr Laburthe, nous avons commencé il faire de l'hy-

drothérapie en 18G5-G6 el, depuis, nous n'avons jamais

cessé. Ce n'était pas la mode alors et nous nous sou-

venons qu'à l'hôpital Saint-Louis aucun de nos col-

lèges ne fréquentait la salle des douches.

Après la guerre, M. Charcot avait bien voulu nous

confier l'observation et le traitement de ses épi 1 epti-

ques : cela a duré jusqu'en 1879. Nous avons eu re-

cours souvent, chez elles, à l'hydrothérapie. De même

chez les épileptiques du service de Delasiauve, pen-

dant les remplacements que nous y avons faits (1877-

1879). Nous avons généralisé cette pratique lorsque

nous avons été chargé de la section des épileptiques

(adultes et enfants) de l'hospice de Bicêtre, ensuite

de la nouvelle section des enfants.

En 1882, dans sa remarquable thèse inaugurale,

l'un de nos élèves, P. Bricon, après avoir tracé un his-

torique aussi complet que possible de la question, a

consigné les résultats de notre pratique pendant les

années 1880 et 1881. L'année suivante dans un tra-

vail commun, nous avons résumé, en plus, les résultats

de 1882. Depuis, tous les ans, dans le Compte-rendu de

notre service, nous avons indiqué le nombre des dou-

ches et des bains administrés dans l'année.

Le grand nombre de douches données dans le ser-

Hydrothérapie. XLI

vice nous permet chaque année d'apprendre tous

nos infirmiers et infirmières, à une partie de ceux

de l'hospice, à les administrer d'une façon convenable.-

Sachant combien les doucheurs et les doucheuses

des hôpitaux, et il en est de même dans beaucoup

d'établissements ordinaires de la ville, sont inexpé-

rimentés, nous avons demandé à l'Administration de

nous envoyer les doucheurs et les doucheuses des éta-

blissements-écoles l'an dernier et cette année. La

plupart sont venus et ont pu à leur tour enseigner

aux élèves des écoles à donner des douches. En faisant

ces leçons de douches, nous pensons avoir été très

utile aux malades qui pourront retirer de l'hydro-

thérapie les bienfaits qu'ils sont en droit d'en

attendre.

Tantôt l'hydrothérapie est donnée seule in, tan-

tôt, ainsi que nous venons de le dire (2), nous y joi-

gnons divers médicaments, surtout les poly-bromurcs

et le bromure de camphre (grand mal et vertiges ou

vertiges seuls). Les bains, les douches, ajoutés à la

gymnastique [mouvements, agrès), il la danse, à

1 escrime, au travail manuel, soit clans les ateliers,

soit dans les jardins, constituent, il notre avis, les plus

puissants agents thérapeutiques contre les diverses

formes du mal caduc et ses complications. Joints aussi

aux purgatifs, ils assurent le bon fonctionnement

de la peau, l'élimination du bromure. Aussi n'avons-

nous jamais de bromisme.

Nous avons eu recours aussi, comme les années

(1) Douche froide en jet en éventail, seule, sur tout le corps (dos, côté droit,

poitrine, côté gauche, dos), en terminant par les pieds, eu tout de 5 à 35

secondes ou encore : jeton éventail et douche en pluie pendant il à secon-

des ; douche en jet pendant 10 à 15 secondes.

(2) Nous avons toujours prescrit les bains et l'hydrothérapie, aux silpilili-

tiques, en plus du traitement spécifique (deux fois par an) et des purgatif*.

Chez aucun de ceux que nous avons pu suivre et qui se sont conformés il

nos conseils, il n'est survenu, jusqu'ici, d'accidents cérébraux.

XLII Visites du service.

précédentes, avec des résultats incontestables, à la

médication thyroïdienne chez un certain nombre de

malades, idiots myxoedémateux (1), mongoliens, nains

et obèses. - Nous espérons pouvoir publier prochai-

nement un résume des améliorations enregistrées

chez ces différentes catégories de malades.

- Améliorations diverses. Le traitement de

MM. Mesnard, Landosse et D¡OEUETTE a été porté

pour le premier de 2.700 à 3.000; pour le deuxième

de 2.100 à 2.400 et pour le troisième de 1800 à 2.100

MM. Lelièvre, Gélin, infirmiers, 1Z ? BILLOT-.\IoHEL,

infirmière ont été promus à la première classe. Signa-

lons enfin que, M. Sutter, professeur de chant, a

obtenu les palmes académiques.

Au nombre des améliorations diverses, nous cite-

rons l'achat d'une seconde lanterne il projections, d'un

appareil photographique, d'un nouveau compendium

métrique, de diverses planches anatomiques, etc..

Visites du service. La section a été visitée,

en 1902, par le Dr Arraga, directeur de l'hôpital des

Enfants-Malades à Buenos-Ayres; M. Aubert institu-

teur à Orléans; Dr F. Hogdan, de Vienne (lutriohe) ;

`I1'e Marie Brichtova de l'ra ? uc (Bolcme) ; I)r Paul

Rybakoff, médecin-adjoint à l'asile d'aliénés Préo-

brajensky, à Moscou (Russie); M. Léon Bourgeois,

député de la Marne; Dr José; M. Baralt y Cneco, de

1 ? uerto-Pico ; Professeur L. Bianchi, député au parle-

ment italien ; fy Bomfini, directeur de l'Institut Médi-

co-pédagogique de Rio de Janeiro ; D1' Cullie et son

fils, à Hydc-Parck (Angleterre) ; Dr F. Cortaharria.

(Il Dans les observations que nous nvons publiées depuis 1880, nous avons

presque toujours mentionné leur régime alimentaire. D'après un relevé

comprenant 21 cas du service, tous prenaient de préférence ou exclusivement

du lait, des lépumes et des mnlfs : ne .f mangeaient un peu de viande.

.Visites du service. \LIII

Dr Ed. Claparédc, privat-docent il l'Université de

Genève (Suisse); Dr Vito Capriati, médecin aliéniste

, \aples; Mlle Doboowolska, à Librairie (Varsovie);

Dr A. Dupont, à Ermelo; I.)1' Dureau, bibliothécaire

de l'Académie de médecine de Paris; Dr Julio

N. Ferrer, de 1'orto-Iieo; D" Aclolfo i;üemes, cle

Ruenos-Ayres; D'' Joseph Ficheman, médecin de

l'asile des aliénés de Pérué (Russie) ; Miss Ethel L.

Bixon, de Sutten Surrey (Angleterre); Dr Manuel

Gurria, de Barcelone (Espagne); Dr Georges Guillain,

chef de clinique du Pr Raymond ; Dr Goyard, de Paris ;

D" Edmond E. Escomel et Médina d'aréquipa (Pérou) ;

Dr An t. Ileverocli, agrégé de l'Université Tchèque,

médecin de la Maison des aliénés, à Prague (Bohème).

' Dr Charles Ilacberlin ; DL' Harlet, de Roubaix(Nord);

IY Francisco de Jcaxa de Guoyaquil (République de

l'Equateur); Dr Pedro Ido`-aea, à Viscaya (Espagne);

Dr F. Kortlang J. Ezn; D. Victor de Klimenko, méde-

cin en chef des asiles pour les él)ileptiques ? dv I'étcrs-

- bourg et directeur de l'hôpital S0 Olga (Russie);

Dr Alexandre Lasoursky, assistant de clinique des

maladies mentales de Pétersbourg (Russie) ; ur Larri-

naga, à Viscaya (Espagne); M. René Lafargc, avocat

à la Cour d'Appel de Paris; M. Louis Lefèvrc, de

Paris; M. Gabriel Leitoissien, étudiant en médecine,

il Paris.

.M11" Lack, maîtresse de classe d'enfants anormaux de

Genève (Suisse) (1); h"Laclame, de Genève (Suisse) ; Dr

John Love, 1 ·las·,o\- ( : 1n ? lctcrrci; I)" Milan Mixa,

médecin de l'Hôpital général de Prague (Bohème);

Dr J. Martinex, de l3uenos-Ayres; Mlle Mengin, insti-

tutrice il Veizer surTrezè : Dr Oscar Orlitzky de Mos-

cou (Russie) ; D1' José Palancar. 1'1'0fef;C'ur il la Faculté

(1) M11» Lack est venue, comme autrefois M1" la Docteresse Montessort,

suivre régulièrement tous les exercices pendant plusieurs semaines. -'

xliv Visites du service.

de Madrid (Espagne) ; M. li. l'cgmen, instituteur en

Hollande : M. Marcel l'Icsia, sous-lieutenant au 5°

yénie (P ,ris); M11" Picard, institutrice à Ouzouer sur

Trezé; 1) ? Lotiise, G, Robinoyitch, de New-York;

D'' Vladimir Skalicha, chef de service il l'Institut ana-

tomo-pathologillue de Prague (Bohème).

Dr Charles Scapucci, assistant il la Clinique Médi-

cale de l'Institut Supérieur de Florence, sous-Directeur

du Sanatorium Casanuow(Itlie) ; D'' Soutzo fils, de

Paris; M Jiro Shimoda, Professeur il Tokio (Japon) ;

D'1\T. Stocncsco. médecin expertpresic Tribunal Itfow,

de Bucarest (Roumanie) ; D1' Albert Seilcr, de Zurich

(Suisse) ; Dr Serge Stoupine, médecin de l'hôpital

d'Aliénés d'Alexie", de Moscou ( Russie) Dr Viktor

Strctti, de Prague (Bohème) ; : '11"110 Seurewalde, de

Librairie (Varsovie) ; M. E. W. Scripture, Professeur

il l'Université de Yale (Etat-Unis); M. Démettre J.

Serbancsco, externe qes Hôpitaux de Paris; Dr Léon

Thivet, médecin en chef de l'asile de Clermont (Oise) ;

Melle Marie Vesolikova, de Prague (Bohème) ; Dr Vil-

leneuve, Professeur de pathologie mentale et de Méde-

cine légale à l'Université Laval, de Montréal (Canada);

D'Otto Veraguth, Président de l'Univesité de Zurich

(Suisse); Dr Agnès C. Victor, de Boston; Dry Votru-

ba, médecin général de Prague (Bohème); Dr Félix

Weber, clc Vesstal (Suisse); M. Hermann welter, de

Montréal (Canada. -

Enfin, de même que les années précédentes, la

Commission de surveillance des asiles de la Seine

et celle du Conseil général ont visité le service dans

le courant de l'année.

Nous consacrons d'habitude la matinée du samedi

à recevoir les visiteurs. Presque tous ceux dont nous

Visites DU service. XLV

venons de citer les noms sont venus ce jour-là. Nous

convoquons, à leur intention, les professeurs de chant,

de gymnastique, de danse et parfois les maîtres d'es-

crime, dont les heures de leçon ne coïncident pas avec

l'heure de notre visite (1). En leur demandant ce

déplacement et en nous imposant la fatigue très*

grande de montrer non seulement l'organisation du

service des enfants, mais encore son fonctionnement

mé(lico-p>édagogique dans tous ses détails, notre but

est de faire comprendre aux visiteurs l'importance de

l'oeuvre que nous avons pu réaliser naguère, avec

l'appui du Conseil municipal (1882-90), de fournir à

beaucoup d'entre eux les arguments qui militent en

faveur de l'hospitalisation malgré l'opposition de

l'Administration et du Conseil de surveillance de l'é-

poque 2) et de l'éducation de cette catégorie d'en-

fants anormaux et les convaincre de la possibilité de

les améliorer et même de les guérir par l'application

régulière, méthodique et prolongée du traitement

médico-pédagogique. Les visites faites dans la jour-

née, en dehors de nous, ne permettent pas d'avoir

une idée exacte de ce qui se fait dans le service.

On a une idée des bâtiments mais non du traitement

médico-pédagogique.

Nous nous efforcerons de maintenir ces visites du

samedi afin d'expliquer aux visiteurs, la plupart

médecins étrangers, l'organisation que nous avons

créée en dépit des obstacles dressés sans cesse devant

nous, pour nous décourager ; afin de les mettre ainsi

(1) Le professeur de gvinnastique icut le matin de 8 à 9 heures. Le

professeur de chant de 4 ii 5 heures.

U) Voir Histoire de la section des Enfants de Bicétre, par Bourneville,

( 19 î'.1-1 Ç ! ^o , '. ' z

'XLVI M¡ ? im 1'.\THOLOGH, ! UE.

en mesure de fonder dans leurs pays, s'ils en sont

dépourvus, des asiles-écoles semblables. Si, nous dis-

paru, notre oeuvre périclite ou disparait en France,

comme a disparu tout ce que Leuret et Séguin avaient

organisé, car nous ne nous faisons pas d'illusion sur

l'absence de conviction administrative, nous avons le

ferme espoir qu'elle sera continuée, développée, per-

fectionnée dans les autres pays et peut-être aussi en

province. Notre plaidoyer en faveur de ceux qui ne

peuvent plaider pour eux-mêmes n'aura pas été stérile.

M usée pathologique. -Ce musée s'est notablement

enrichi en 1902, ainsi que le montre le tableau suivant.

Enseignement professionnel. \LVII

photographies des cerveaux qui composent 12 volu-

mineux albums, les cahiers scolaires que nous avons

institués dès 1880, c'est-à-dire 7 ans avant leur intro-

duction dans les écoles publiques. Les visiteurs peu-

vent, au moyen du Catalogue que nous avons refait

nous-même pour les années 1879 à.1902, avoir tous les

renseignements désirables sur les pièces anatomo-pa-

tholoiducs du musée.

II.

,

Enseignement professionnel.

Cet enseignement a été dirigé en 1902, de même

que les années précédentes, par MM. LEROY pour la

menuiserie (1882-1902), Allène pour la couture

(1883-1902), Dumoulin pour la cordonnerie (1888-1902),

Moiux pour la vannerie, le paillage et le canage des

chaises (1889-1902), DI : nLCI3 : LL ? r pour l'imprimerie

(1889-1902), Gaie pour la serrurerie (1895-1902),

1\IESS ? nD pour le jardinage (1896-1902), Ganif pour

la brosserie (1901-1902) (1).

- ni Chaque fois que nous ayons un nouveau chef d'atelier nous insistons

pour qu'il suive les cours de l'Ecole d'infirmiers. En contact avec des malades

sujets à des chutes convulsives. it des impulsions, etc., il est nécessaire qu'il

soit en mesure de leur venir en aide de suite et comprenne qu'il a alïaire 1,-

des malades. MM. Ganif et Mesnard ont reconnu cette nécessité et suiveur

les cours. Il devrait en être de même pour tout le personnel en rapport avec

les malades. Dans un hôpital, un hospice, un asile, tous devraiettOr ? eh

mesure d'intervenir en cas de nécessité. ,

CL1'111 Enseignement professionnel.

De même aussi que les autres années, nous n'avons

qu'à les féliciter tous, non seulement pour le zèle et

l'intelligence qu'ils apportent chaque jour à donner

l'in8tl'llction pl'O{e)siol1ncl1c aux enfants, mais encore

pour la bonne direction morale qu'ils savent leur

imprimer. Le tableau suivant met en évidence les

résultats 'obtenus par eux en 1902 et qui se chiffrent

par 28.786 fr.

Les travaux de jardinage seuls ne sont pas évalués,

et comme nous l'avons souvent dit et écrit, bien qu'il soit

dillicile d'en faire une estimation précise, nous croyons

que l'Administration aurait intérêt à essayer d'en

avoir tout au moins une évaluation approximative.

Les sept maîtres, non compris le jardinier, dont le

travail de ses apprentis et le sien dépassent assurément

le salaire sont payés raison de 6 fr. 50 par jour,

soit pour l'année 16.607 fr. 50.

Le Travail des enfants, évalué par l'économe,

M. 1\lAUPI\I, et par l'architecte, M. Delaiiave, couvre

donc : 1° la dépense occasionnée par le salaire de

leurs maîtres ; 20 l'intérêt il -1 0/0' taux légal, du capi-

tal employé pour la construction des ateliers (210.000

francs), soit 8.400 fr. ; 3° les gratifications hebdoma-

daires données aux enfants, le samedi, à titre de récom-

pense variant de 5 a 50 cent. par semaine et qui s'élèvent

il 1.360 francs pour toute l'année. De plus, il y a un

bénéfice (le 2.219 fr. qui vient atténuer les dépenses

d'entretien des enfants. Cette somme, comme celle

réalisée sur les permissions de sortie et les congés,

7.684 fr. (1), soit au total près de dix mille francs

sans compter l'es économies de linge dont nous avons

parlé, devrait en bonne justice être employée, nous le

(l) Voir la note 1 de la page sww.

L . Enseignement professionnel.

Produits fabriqués dans les ateliers en 1902.

Brosserie.

9.OU brosses en tous genres (dont 6. î 10 pour le Magasin

Central des hôpitaux).

Vannerie.

243 mannes neuves fabriquées, 271 mannes réparées, 220

chaises cannées et rempaillées.

Couture.

490 pantalons, 521 vestons, 476 gilets, 131 robes, 135 mail-

lots, 10 maillots treillis pour décliireurs.

Menuiserie .

3 séries complètes des objets servant à l'enseignement. z

2 tables scolaires. - I armoire pour le musée. 1 armoire

pour l'imprimerie. - 9 grand cotTre-banquelle. Fait toutes

les réparations, bancs, tables, portes, jeux, etc.

Serrurerie.

30 chaises. - Objets de tour : 925. -

Cordonnerie .

365 paires de chaussures neuves, l'/O paires sur mesure,

575 ressemelages.

Imprimerie.

Compte-rendu du service de l'année. - Ordres du jour des

Commissions. Affiches diverses. Entâtes de lettres.

- Divers imprimés pour les Ecoles d'infirmières : Palmarès.

Diplômes, etc. Feuilles d'Alphabet pour les classes.

Travaux divers pour les hôpitaux, pour la Société Amicale

des Employés de l'A. P. Fait tous les imprimés pour la

Société du Personnel hospitalier de l'A. P., etc., etc..

Enseignement professionnel.' LI

répétons, sinon en totalité au moins en grande partie,

à assurer le bon entretien du service cl à l'améliora-

tion du matériel d'enseignement.

Pour permettre à tous d'apprécier les résultats éco-

nomiques de l'enseignement professionnel et du

travail accompli, au point de vue pratique, nous

avons donné à la page L rémunération sommaire

de ce qui a été fait dans les divers ateliers en 1902.

Nous n'insisterons pas sur les avantages que procu-

rent ces ateliers tant au point de vue de l'intérêt

des malades eux-mêmes qu'à celui de l'Administration.

Nous ajouterons seulement qu'il serait convenable, à

tous les égards, que nos anciens malades qui passent

soit dans les sections d'aliénés adultes, soit dans la

division des incurables de l'hospice, trouvent un

meilleur accueil dans les ateliers de l'hospice et que

les chefs de ces ateliers leur témoignent plus de bien-

veillance. Il y va de l'intérêt des malades, supé-

rieur il toute autre considération, et de l'intérêt

linancier de l'Administration..

Tel est le résumé de l'enseignement professionnel

en 1902. Il importe de ne pas oublier que nos ateliers

ne sont nullement comparables il ceux de l'orphelinat

Prévost à Cempuis et de l'école d'Alembert à Monté-

vrain, par exemple, où les apprentis sont des enfants

normaux, sains de corps et d'esprit, et même choisis

parmi les plus intelligents des candidats. Nos appren-

tis, à Bicêtre, sont non seulement des enfants anor-

maux, mais encore des enfants malades : quand ils

ont, les uns des accès épileptiques, convulsifs ou psy-

chiques, les autres des impulsions ou des périodes

d'excitation, ces jours-là et les jours qui suivent, ils

ne peuvent travailler ni à l'école, ni à l'atelier. Un

autre fait qui contribue à différencier nos apprentis

de ceux que nous avons cités, c'est qu'ils ont des peur-

LU Enseignement professionnel.

missions de sortie et des congés, sur la demande des

familles, il toutes les époques du l'année, qu'ils ont des

visites les jeudis et dimanches souvent trop prolon-

gées, enfin que deux fois par semaine ils l'ont des

promenades aux environs de l'hospice ou dans Paris,

promenades qui font perdre une demi-journée de

travail.

Administrativement, après avoir douté de la possi-

bilité de faire travailler les enfants idiots, arriérés et

épileptiques, et avoir protesté contre la construction

des ateliers, certains auraient de la tendance il vouloir

considérer nos malades comme des apprentis ont i-

11 ai l'es qui, suivant la pratique abusive des couvents,

doivent fournir régulièrement une somme de travail

fixe. Et on y tend administrativement, car on vou-

drait leur faire faire tous les travaux d'entretien de la

section, oubliant qu'il s'agit d'ateliers d'enseignement

et que si le maître et un apprenti sont occupés, par

exemple, à réparer une porte, les autres enfants n'ont

plus de guide et no s'instruisent pas.

Nous le répétons, ce qui doit primer dans notre

service, c'est l'influence morale du travail, qui est l'ad-

juvant du travail scolaire, des exercices physiques, du

traitement médical et non le produit lui-même (1), bien

qu'il ne soit pas il dédaigner. Les enfants eux-mêmes

sont heureux de voir que leur travail est productif,

qu'il se traduit par des résultats pratiques et que tout

ce qu'ils font contribue à leur bien-être, il leur ensei-

gnement et il l'entretien de leur section.

(1) Nous insistons sur ce fait : c'est que nous n'intervenons en quoi que ce

soit flans l'évaluation ,le ce produit; c'est l'affaire de 1\1. l'économe et de

ill. l'architecte.

Statistique, mouvement DE la population. lui

III.

Statistique. Mouvement de la Population.

Le premier janvier 1902, il y avait dans le service

138 enfants (1) se décomposant ainsi : 413 enfants

idiots, imbéciles, ou épilepliques, dits aliénés et 25

réputés non aliénés. Cette distinction, qui s'applique

aux épileptiques adultes aussi bien qu'aux enfants,

est purement administrative et il est difficile de la

justifier médicalement. Les épiléptiqucs dits non alié-

nés sont placés par l'Assistance publique et sont tt la

charge du budget municipal; les épileptiques aliénés

sont placés suivant les prescriptions de la loi du 30 juin

1838 et à la charge du budget départemental.

Sur ce nombre 122 étaient atteints de gâtisme; 41

d'incontinence nocturne d'urine seulement; 14 de

cécité complète ; 7 de cécité incomplète ; 7 de sUl'cli-

mutité; G de surdité; 3 étaient bègues ; 12 présen-

taient (lu nlllfismc volontaire; ;29 des impulsions

violentes ou des accès de colère; 44 étaient menteurs

il un degré vraiment pathologique ; 16 étaient atteints

de clacazoana.azic; 5 de pyromanie ; 10 d'écholalie ; 17

de 1; ouomaazie ; 16 de clastoanaazie ; 14 de coprolalie;

21 de kleptomanie; 6 d'ee1zo131zésie, 8 de rumination ;

3 étaient (1(,ciiiietti-s d'ongles; 16 étaient flaireurs, 17

(1) C'est-à-dire 38 de trop la section ayant été conçue seulement pour 400

enfants..

LIV Décès, Sorties.

étaient 'baveux; 2 étaient atteints cl'IcclronW 21e, 13.

d' hydrophobie, 18 de coprophagie; 54 étaient onyco-

phages, 155 onunisles; 22 présentaient du nystagmus;

72 étaient strabiques ; 3 présentaient de ladépl'cssion

mélancolique; 17 avaient des tics convulsifs (lèvres,

paupières, etc.), 45 avaient le tic du balancement du

corps avec ou sans rotation de la tête ; 15 avaient

un tic coordonné des mains ; 1G enfants idiots étaient

tourneurs; 19 9 étaient sauteurs et 5 étaient grimpeurs.

Deux enfants étaient atteints d'hémimélie; 1 de

polydarlylie, 1 de syndaclylie ; 3 do mal formations

pathologiques de la main, 1 d'encéphalocèle, 1 de

cyphose (' ? ), 47 présentaient des p>ieds-bols ; 2 étaient

hén21paésiclues, 1 5 paraplégiques, 32 hémiplégiques,

14 cliplL : giqucs; 9 étaient atteints de maladie de Utile;

enfin 13 étaient athétosiques.

Le tableau suivant résume le mouvement de la

population en 1902.

DÉCÈS. SORTIES, ÉVASIONS. LV

Décès. Les décès ont été au nombre de 21 durant

l'année 1902. Le tableau des pages LVII à Lxm fournit

les renseignements concernant le diagnostic, la date et

la cause du décès, ainsi que les principales particula-

rités présentées par les malades.

Sorties. - Des 67 malades sortis de la section,

1 ont été dirigés sur l'une des sections d'adultes,

19 ont été transférés, 2 sont passés clans un des quar-

tiers de l'hospice, 29 ont été rendus à leur famille,

guéris ou améliorés ou sur la demande de celle-ci. Le

tableau cle la page LXIII à lxix indique les motifs de

la sortie, la nature cle l'affection pathologique

dont étaient atteints les malades sortis. Comme nous le

disions encore l'an dernier* nous désirerions vivement

suivre nos malades après leur sortie, savoir ce qu'ils

deviennent, si l'amélioration réalisée par nous s'est

maintenue ou même a augmenté. Malheureusement

les moyens nous font défaut.

Nous envoyons le plus possible nos surveillants ou

surveillantes visiter un certain nombre d'entre eux. Il

ne les rencontrent pas toujours. Souvent la famille

a déménagé et on ne peut avoir sa nouvelle adresse.

Parmi les enfants sortis, il en est qui sont enlevés

prématurément par leurs parents. Ceux-ci les voyant

très améliorés, par rapport à leur situation il l'entrée,

les reprennent malgré nos conseils, alors qu'un séjour

plus prolongé nous aurait permis d'obtenir des résul-

tats plus complets.

Evasions. Neuf évasions ont eu lieu dans le cou-

rant de l'année, celles des enfants Se..., Delf...,

Mull ? Cuir...., lwaut..., Calb ? Pach ? Vign ? et

Crue... Ces différentes évasions n'ont donné lieu

il aucune formalité légale. Les enfants nous ont été

ramenés par leurs parents ou par des infirmiers

envoyés à leur recherche.

LVI DÉCÈS.

lvui Décès.

Ruz DÉCÈS.

Transferts, maladies INFECTIEUSES. LXIX

Transferts. Ils ont été au nombre de 19 : 16 à

Villejuif, 3 à Clermont (Oise). Nous avons pour

habitude de prendre la température des malades avant

leur départ, et cela dans le but d'éviter le transfert

de malades sous le coup d'une affection aiguë, de

même que nous prenons la température à l'entrée,

durant les cinq premiers jours (1) pour savoir si l'en-

fant n'est pas sous le coup d'une affection aiguë, con-

tagieuse ou non.

Maladies infectieuses. Une épidémie de rougeole

a éclaté dans le service sans cause connue ; elle a porté

sur 38 cas dont 2 fillettes, 4 malades dont l'éruption

s'est compliquée de broncho-pneumonie ont succombe.

Signalons également un cas'de rubéole, avec guérison

rapide ; 3 cas de varicelle, 3 cas. d'érysipèle. Mention-

nons enfin 5 cas de fièvre typhoïde dont 2 chez des

infirmières; aucun de ces cas n'a été suivi de décès.

(Il A l'entrée de tous les enfants, aussi bien à la Fondation Vallée qu'à

Bicêtre, nous faisons prendre un bain aux malades et examiner leur corps

au point de vue des plaies, des contusions, de la teigne, etc., et le lendemain,

au moment du certificat immédiat nous examinons nous-même l'enfant de

la tête aux pieds s'il y a lieu ; il en est ainsi depuis 18S0, ce que l'Adminis-

tration ignore. Voici la circulaire relative aux visites des malades à l'entrée.

Monsieur le Directeur. Mon attention a été appelée, vous savez à la

suite de quelle circonstance (a), sur la nécessité de faire examiner les aliénés

par l'interne de service à leur arrivée dans votre établissement.

Dans le cas où l'interne constaterait qu'un aliéné, soumis à son examen,

porte des traces de coups ou de blessures, il devra établir un certificat signé

par lui et une copie de cette pièce devra être adressée sans retard à l'Adminis-

tration centrale. - Je vous prie eu conséquence de veiller, dès la réception

de la présente, à ce que cette mesure soit mise à exécution. LeMaitre des ,s

Requêtes au Conseil d'Etat, Directeur de l'Administration Générale de

l'Assistance Publique. Signé : I)IOURIER.

(a) Une famille étant venue visiter un parent m.1lade, entré quelques jours

auparavant, avait constaté sur sou corps des contusions multiples. Ces con-

tusionsavaient-elles été produites 11 Bicêtre ou à l'Asile clinique, on ne savait.

LXX Maladies intercurrentes.

Le personnel d'un service de contagieux devrait

toujours être choisi avec soin, de préférence parmi

les infirmières déjà âgées, ou ayant eu, elles-mêmes,

les maladies infectieuses les plus communes. Nos

conseils à ce sujet n'ont jamais été suivis et presque

toujours on nous donne des infirmières jeunes. Il en

est de même, malheureusement, dans la plupart des

services de contagieux des hôpitaux, si nous en

croyons les renseignements que nous avons recueillis.

Teigne. Au premier janvier 1902, il restait dans

le service 17 teigneux et 5 teigneuses ; à la fin cle

l'année, ces chiffres étaient descendus it 12 pour les

garçons et étaient restés les mêmes pour les filles.

Maladies intercurrentes. 11 enfants ont été

atteints d'état de mal épilcptiquc ou de séries d'accès ;

aucun cas n'a été suivi de décès; 11 de broncho-

pzezcnonie; - 7 de pneumonie ; 1 de péritonite ;

3 de diarrhée; 40 d'ophtalmie ; 1 de cataracte

tra11matiquc; i d'engelures ; 3 d'abcès; 2 d'an-

gine; 1 de grippe, 1 de décollement du cuir chevelu

dans un accès; 3 de mammite ; l (le panaris; 1 de

fracture de la cuisse; 1 de fracture de l'avant-bras .-

1 d'en/.o ? 'se du poignet; 1 d'entorse du pied gauche;

49 (le plaies légères dans des accès. Ajoutons

que tous les enfants qui se font des contusions ou des

plaies, soit en jouant, soit dans des accès sont con-

duits it l'infirmerie où des pansements appropriés leur

sont faits par les deux infirmières, sous la surveillance

de Mmc Athénaïs BOHAI ? sous-surveillante du service,

sur nos indications ou celles de nos internes.

En 1899 l'un do nos internes, M. Foulard, s'était

Affections AIGUËS. LXXI

intéressé vivement aux enfants atteints de maladies

des yeux. Depuis il a rempli les fonctions d'interne

dans des services plus particulièrement consacrés à

l'ophtalmologie à Lariboisière et à l'IIrtcl-Dicu. Il a

continué à venir une fois par semaine dans notre

service, bénévolement, pour examiner tous nos mala-

des atteints d'affections oculaires.

Ses examens, les traitements qu'il a institués ont été

d'une grande utilité iL nos enfants malades, nous lere-

mercions (le son bienveillant concours que nous

croyons devoir signaler a l'attention de l'administra-

tion. Voici un rapide résumé de sa pratique pendant

l'année 1902.

Affections aiguës des y eux observées dans le service

au cours de l'année. - Parmi les affections aiguës

nous en retiendrons deux seulement, la conjonctivite

chronique ou subaigue à diplohacille de Morax et la

conjonctivite aiguë à bacille de Weeks.

('onjol1 cti vi tc chl'on iquc ou suba igiie iL di plobnci Il c.

Au cours de l'année 16 malades, dont trois infirmiè-

res, se sont présentées 1 nous atteintes de conjoncti-

vite subaiguë à diplobacille, cela ne signifie pas que 16

personnes seulement aient été, pendant cette période,

atteintes de conjonctivite à diplobteille. Ce chiffre

est même fort loin de ce qu'il devrait être en réalité.

Le nombre des malades vus par nous it la consulta-

tion ne permet même de se l'aire qu'une idée appro-

ximative du nombre des enfants atteints de conjoncti-

vite cliplolacillaire. En voici les raisons.

Les enfants sont choisis par les surveillantes qui

nous les amènent à la consultation. Il faut pour attirer

leur attention que la conjonctivite prenne des allures

sévères, que la rougeur de l'ceil soit marquée et la

sécrétion muco-pl11'ulcnte abondante. Mais il s'agit ici

LXXII Affections aiguës.

d'une conjonctivite chronique à symptômes très peu

aigus et qui, dans la plupart des cas, n'attirent cer-

tainement pas suffisamment l'attention du personnel,

malgré les recommandations incessantes qui lui sont

faites. Les 16 conjonctivites à diplobacilles que nous

avons vues ont présenté des symptômes d'une acuité

plus particulièrement intense. Sans cela les enfants

seraient restés dans leurs pavillons, conservant une

affection de durée presque indéfinie, et constituant

ainsi une source perpétuelle de contamination pour

l'entourage.

Un fait beaucoup plus précis et qui vient à l'appui

de nos opinions, c'est le résultat que nous a donné,

l'examen, fait par nous en 1901, d'enfants pris au

hasard, à la suite les uns des autres dans leurs pavil-

lons et qui étaient considérés comme indemnes de

toute conjonctivite.

La plus grande partie d'entre eux présentaient une

sécrétion modérée, très légère, souvent insignifiante

s'accumulant dans le grand angle de l'oeil, avec un

peu de rougeur de la conjonctive, manifestations qui

sont, en somme, celles de la conjonctivite chronique à

diplobacille, souvent si légère que les adultes eux-

mêmes la conservent cle longs mois sans aller consulter

l'oculiste. Nous avons fait l'examen microscopique de

la sécrétion prélevée sur chacun de ces enfants et,

)0 fois sur 90, nous avons trouvé le diplohacillc de

Morax. La présence du sur la conjonctive,

avec la conjonctivite torpide qui en est la conséquence,

était donc habituelle chez les enfants que nous avons

examinés ; les conjonctives saines étaient le petit

nombre. Quand, clc temps en temps, une conjonctivite

revêtait des allures plus aiguës, l'enfant nous était

conduit. C'est ainsi que nous avons pu en observer

16 au cours de l'année.

Affections aiguës. LXXIII

La lutte contre cette affection, essentiellement con-

tagieuse, ne peut être possible et fructueuse, que si

on agit à la fois sur tous les foyers microbiens, sur

toutes les conjonctives injectées. La transmission se

fait par les mains des enfants, par leurs habits avec

lesquels ils s'essuient, et peut-être par les linges qui

servent à laver leur figure chaque matin, en dépit des

recommandations qui sont faites et au personnel et

aux enfants, dans la mesure de leur compréhension. Les

enfants gâteux présentent une certaine insensibilité de

la conjonctive au contact et, l'été, on voit les mouches se

promener en grand nombre sur le bord de leurs paupiè-

res. 11 est fort possible que ces mouches, en allant d'un

enfant it l'autre, puissent constituer un moyen de trans-

mission. C'est un fait que nous espérons éluciderpro-

chainemenl.

Conjonctivite aiguë : 1. bacilles de 1'eelas. Les

allures de la conjonctivite aiguë à bacilles de Weeks

sont bien différentes. Ses symptômes, en général

beaucoup plus accentués que ceux de la conjonctivite

diplobaciliairc, frappent davantage l'attention du per-

sonnel, et les conjonctivites qui passent sans être

signalées au médecin sont beaucoup plus rares. Nous

avons observé clans l'année, 24 cas de conjonctivite à

bacilles (le Weeks et presque toutes se sont montrées

en même temps au cours d'une épidémie.

En 12 jours nous avons vu 20 cas de conjonctivite it

bacilles de Weeks, dont le plus grand nombre étaient

survenus dans .le même- pavillon. Cette épidémie fut

bénigne, n'amena aucune complication oculaire.

La conjonctivite chronique à diplobacille et la con-

jonctivite à bacille de Weeks donnent lieu à la grande

majorité des affections conjonctivales chez les enfants

du service. Nous avons bien observé quelques cas

L\\1\' Consultation DU jeudi.

de conjonctivite à pneumocoque, un cas fort grave

d'injection streptococcique, deux conjonctivites gra-

nuleuses el quclqucs cas de kéralo-conjonctivite impé-

tigineuse. Mais les deux infections conjonctivales que

nous venons d'étudier n'en restent pas moins, et de

beaucoup, les plus fréquentes et les plus importantes

et c'est contre elles que doivent se diriger nos efforts

de traitement curatif et surtout prophylactique.

Co)).stJ/H/;out ? Il n'y avait, autrefois, il

Bicêtre, que deux consultations, une de médecine faite

par le médecin de l'Infirmerie générale, une cle chirur-

gie faite par le chirurgien. A notre arrivée à Bicêtre,

nous avons établi une consultation non officielle, pour

les maladies nerveuses et mentales. Nos collègues de

la division des aliénés, nommés comme nous au con-

cours, en ont aussi créé successivement.

En 1905, 510 personnes se sont présentées. 102 pour

renseignements sur le placement d'enfants arriérés ou

épilepliques; 17'2 pour maladies diverses; 79

pour assistance. Il s'agit d'anciens malades des asiles

ou clu service. Nous profitons de la visite de ces der-

niers pour nous renseigner sur leur état mental ou

leur situation sociale. Dans ce groupe figurent ceux

qui vont tirer au sort et viennent réclamer un certifi-

cat devant aider il leur exemption du service mili-

taire ; 39 pour demandes d'emploi ou de placement

dans les hospices : infirmiers qui réclament leur rentrée

dans les hôpitaux, infirmes, vicifards, etc.; 118 I

pour renseignements sur les enfants du service présents

ou f'n('OJ]OE('.

Nous écrivions l'an dernier que « l'Administration

avait accordé à nos collègues et à nous, la faculté de

faire prendre des bains et des douches aux consultants

Population au 31 décembre 1902. LXXV

qui habitent la région dépourvue d'établissements bal-

néo-hydrothérapiques. Il n'en résulte pas une dépense

sérieuse pour l'Assistance publique ; les malades peu-

vent suivre leur traitement tout en continuant à exercer

leur profession et sans perdre de temps. Cette tolérance

fait honneur a l'Administration et rend service aux

malheureux. Nous ajoutions qu'il devrait en être ainsi

dans tous les établissements hospitaliers, suburbains,

départementaux, comme l'asile de Villejuif, ou muni-

cipaux comme Bicêtre, l'hospice -des Ménages tt Issy,

l'hospice des Incurables d'Ivry qui devraient être des

centres hospitaliers pour leur région (1).

Population au 31 décembre 1902, - Il Y avait à cette

époque dans le service 4118 enfants, se décomposant

ainsi : '417 enfants idiots, imbéciles ou épilepliques,

dits aliénés et.21 réputés non aliénés. Sur ce nombre

110 sont atteints de gâtisme; 32 d'incontinence noc-

turne d'urine seulement, 15 de cécité complète; 6 de

cécité incomplète; 5 de Il 4 -de surdité;

2 sont bègues; 9 présentent du mutisme volontaire;

31 des impulsions violentes ou des accès de colère; '-

57 sont menteurs un degré tout à fait pathologique;

13 sont atteints de daenomanie; 7 de pyromanie; 8

d'écholalie; 22 de krouomanie ; 24 de clastomanie ; 18

de coprolalie; 31 de kleptomanie ; 5 d-'écho7;iiésie;

(l)"L';\.351sttmpt'))i')'.i3.dis : om.nous dais une circulaire aux électeurs

sénatoriaux (Fémier 1813), est une question '1 laquelle je me suis attaché depuis

187G, épique où j'ai fait un rapport dans lequel j'ai demandé la création d'hô-

pitaux cantonaux. Depuis, la situation s'est améliorée par la création d'hôpi-

taux intercommunaux, l'agrandissement d'hôpitaux déjà existants, la créa-

tion de l'hospice Favier, etc....

a L'hospitalisation des vieillards est à peu près réalisée dans la moitié des

communes, mais n'existe pas dans l'antre moitié. Il serait possible, facile

même, de donner satisfaction aux malades d'une partie de la banlieue, par une-

entente avec l'assistance publique et le département en vue de la création aux

liusp-ces d'Ivry, del31cètre, d'Issy, et.^..., de pavillons pour les malades et les

blessés des communes environnantes. Ces annexes seraient administrées 11

peu de frais et desservies par les services généraux de ces maisons, restrei-

gnant ainsi très sensiblement le prix moyen d'hospitalisation. » ,

LXXVI Personnel du service EN 1905.

G de rumination; 3 sont déchireurs d'ongles; 5 sont

{taiI'C111'S; 41 sont baveux; 2 sont atteints d'hydl'o-

manie ; 10 d'hydrophobie ; 16 de coprophagie ; 62

sont orzcohh.ae.s; 198 sont mzaaziste.s ; 17 présentent

du nystagmus ; 6 sont slrabiques; 2 ont présenté de

la dépression mélancolique ; 12 ont des tics convulsifs

(lèvres, paupières etc.,) ; 4) ont le tic du balancement,

du corps avec ou sans rotation de la tête; 17 ont un tic

coordonné des mains; 14 enfants idiots sont tour-

neurs; 12 sont sauteurs ; 7 sont grimpeurs. Un enfant

était atteint d' hé mimé lie ; 1 de polydaclylie ; 1 de

syndactulie : 3 de malformations pathologiques de

la main; 1 d'encéphalocèlc ; plusieurs de ('Uplwsc

ou de scoliose; 10 présentent des pieds-bots; 2 sont

hémiparétiques; 7 sont paraplégiques ; 23 sont hémi-

plégiques; 7 sont diplégiques; 11 sont atteints de

maladie deLittle ; 8 sont nlhélosiqlles.

Personnel du service en 1902. Le personnel

était ainsi composé : 1° Service médical : Un conser-.

vateur du Musée, M. le Dr J. Nom. Deux internes titu-

laires, MM. YILLAIOET et Lemaire, M. Yillauet a été

remplacé par M. Max ULUMEXFELLE ; un interne en

pharmacie, M.

2° Service scolaire : A. Grande Ecole. 4 insti-

tuteurs : MM. MES : -<A1\O, LANDOSSE, CAMAILHAC et

DERUETTE; un professeur de chant, M. Sutteis; un

professeur de gymnastique, M. Gov; un professeur

cle dessin, M. Daaiowr : un maître de danse, M. Lan-

dosse ; deux maîtres d'escrime. 13. Petite Ecole.

Miles AGNUS (Blanche;) et 13oo11r (Amandine), surveil-

lantes ; une première infirmière, Mlle vlnnur..·r; et

10 infirmières de jour aidant les maîtresses d'école,

après avoir terminé le nettoyage clc leurs dortoirs

respectifs et accompli leurs corvées.

Personnel du service en 1902. LX1\'II

3° Enseignement professionnel . 8 maitres dont

nous avons donné les noms à la page XLVII, plus deux

infirmiers de garde. Ces infirmiers remplacent les

chefs d'ateliers momentanément absents, par exemple

pour faire des réparations dans les salles. Ils inter-

viennent quand les enfants ont des querelles, des

impulsions, des accès, pour les conduire il l'infirmerie,

etc. Ils devraient être choisis parmi les infirmiers

ayant exercé les professions correspondant à celles des

chefs d'ateliers, afin redirons-nous, de remplacer,

avec compétence, les chefs d'ateliers en congé ou

absents pour cause de maladie.

4° Service hospitalier. - Il se compose de M. Acard,

sous-surveillant, remplissant les fonctions de surveil-

lant ; M. Acahij a été remplacé clans ses fonctions le

10 octobre par M. Gerder, suppléant ; de M. Ouillou,

suppléant, faisant les fonctions de sous-surveillant ;

de M. LEHEVRE, 1 ? infirmier, faisant les fonctions de

suppléant; de M. Gklin, 1 ? infirmier; de Mme Bohain

(Athénaïs), sous-survcillantc (infirmerie) ; de 1\1mo MA-

LE : ,\(. : ON, sous-surveillante (bâtiment Séguin : gâteux);

de îI ? Grtrsarcn, suppléante (pavillon d'isolement);

de \I ? Derière, sous-surveillante de nuit ; de M.

Guère l, suppléant, attaché au service des bains et

douches; d'un infirmier portier, d'un perruquier; de

35 infirmières, 25 de jour et 10 cle nuit; de 31 infir-

miens, 22 de jour et 9 de nuit; total du personnel

secondaire : 86.

Section II : Fondation Vallée.

Histoire du service pendant l'année 1902.

I.

Situation du service. Enseignement primaire.

La Fondation Vallée par les diverses catégories

d'enfants qu'elle reçoit, ne correspond pas il la colonie

de Vaucluse dont elle devrait être le pendant c'cst-a-

dire ne recevoir ni épilepliques, ni gâteuses, mais au

service des enfants de Bicêtre, où nous recevons, en

outre des épileptiques et des hystériques, toutes les

catégories d'enfants idiots. Nous avons, à la Fonda-

tion, deux groupes principaux : 1° les enfants idiotes

et galeuses, valides ou non ; - 2° les enfants propres,

et dans les deux groupes, des épilepliques.

Enfants idiotes et galeuses. Elles étaient au

nombre de 78 au le' janvier 1902 et clc 84 à la fin de

l'année. Leurs installations de jour sont dans le sous-

sol du pavillon neuf dont l'aménagement est complè-

tement terminé. Au point de vue du traitement les

moyens et procédés sont les mêmes que ceux décrits

dans nos précédents Rapports.

Fondation Vallée. ' LXXIX

Les idiotes galeuses se divisent eu deux catégo-

ries : a) les enfants valides qui sont envoyées à l'école

durant une partie de la journée; - b) les enfants inva-

LIDES, qui séjournent clans le sous-sol. Ce sous-sol,

en réalité un rez-de-chaussée bien aéré, bien éclairé,

donne de plein pied sur une large terrasse exposée à

l'ouest et sur laquelle, en été, on dresse une tente

reposant sur un sol cimenté. Chez six d'entre elles,

nous avons pu supprimer le gâtisme : Bul..., Mugn ?

(Triffotil ? Lamb ? Saun ? Talib... Voici quelques

renseignements sur des enfants qui, parties de très-

bas, ont fait de sérieux progrès.

1° CHANE... (Germaine). 5 ans 1/2, entrée à la Fondation

en septembre 1900, atteinte d'idiotie complète avec gâtisme;

marche et parole nulles. L'amélioration produite chez cette

enfant depuis son arrivée est remarquable sur tous les points.

La physionomie, qui n'exprimait que l'hébétude, reflète aujour-

d'hui l'intelligence, le regard autrefois vague (strabisme inter-

miteux), est devenu vif et expressif.

Au début, l'enfant ne savait ni marcher, ni causer sauf

quelques syllabes incompréhensibles. Au réfectoire la tenue

était des plus mauvaises, elle ne mangeait pas seule, ne

sachant pas se servir des objets usuels, elle était heureuse

de plonger pleines mains dans son assiette.

L'enfant gâtait jour et nuit et poussait des cris affreux,

lorsqu'il s'agissait de la nettoyer, était en un mot d'une mal-

propreté repoussante.

Aujourd'hui, elle est pour ainsi dire méconnaissable à son

avantage. Le caractère autrefois hargneux et coléreux, est

devenu doux, caressant, affectueux, la parole' est bonne, à

part quelques défauts de prononciation, elle commence même

à faire quelques phrases et emploie le verbe. Les jambes

jadis très faibles sont devenues solides, l'enfant marche et

courtsans aucune fatigue, aime faire la gymnastique, elle est

souple dans ses mouvements. En classe, les progrès sont

également très notables; auparavant l'enfant qui ne pouvait

tenir quelques secondes en place, est actuellement plus tran-

quille, prend plaisir à placer les'lettres au tableau et cela

d'une façon intelligente. L'enfant est beaucoup plus soigneuse

dans ses vêtements, ne se traîne plus à terre et se salit rare-

LXXX Enseignement pratique ET primaire.

ment. Le gâtisme a complètement disparu. En un mot l'amé-

lioration se fait sentir tous les jours d'une manière particulière.

2° jMuGN... (Marie, Louise), 2 ans, à son entrée à la Fondation

en octobre 1900, atteinte d'idiotie complète, avec gâtisme,

marche et parole à peu près nulles.

Les progrès faits par l'enfant sont à signaler d'une façon

toute particulière. Elle ne prononçait aucun mot, ne faisait

entendre qu'un gazouillement tout-à-fait incompréhensible

aucun signe, aucun geste ne suppléait à la parole, l'enfant

essayait les premiers pas en chancelant et le moindre obstacle

suffisait pour l'effrayer et la faire tomber. Elle était gâteuse

et malpropre au suprême degré, n'aimait guère à être net-

toyée et les soins nécessaires concernant sa toilette lui étaient

extrêmement désagréables.

Deux années se sont écoulées depuis son arrivée et un grand

changement sous tous les rapports s'est opéré en elle. Elle

s'habille et se déshabille seule; elle est d'une propreté méti-

culeuse sur ses vêtements. L'enfant était autrefois grognon,

un rien provoquait une crise de larmes; actuellement, elle est

caressante, affectueuse, aime à se rendre utile dans la mesure

de ses petites forces. Elle commence à connaître l'alphabet,

sait compter jusqu'à 20 sans hésitation et place les chiffres

d'une façon remarquable. Elle, qui à l'entrée, savait à

peine marcher, trotte maintenant comme un petit furet, elle ? prouve un vif plaisir à faire la gymnastique, exécute par-

faitement les quatre premiers mouvements, sait de même

lacer, boutonner, agrafer, se prête volontiers à tous ces exer-

cices. Progrès notables sous tous les rapports.

3o Ultr... (Georgctte), 5 ans, entrée à la Fondation en juin

1901, atteinte d'idiotie avec gâtisme, marche et parole nulles.

Les progrès faits par cette enfant sont sensibles et méritent

une mention *particulière. La physionomie est expressive, le

sourire est doux et jovial.

A son entrée, elle ne prononçait que des mots sans suite,

incompréhensibles même pour les personnes de son entou-

rage, la marche était mauvaise, à peine pouvait-elle faire

quelques pas. Au réfectoire, l'enfant se tenait affreusement

mal, aimait à se salir et à se barbouiller avec les aliments

déposés devant elle, il était impossible de la tenir propre,

elle ne savait se donner et ne voulait recevoir aucun soin

concernant sa toilette, le caractère était méchant, jaloux.

Elle repoussait ses petites compagnes, ne voulant pas leur

Traitement \IDICO-PI·.D.1GOGIQUG. LXXXI

voir faire la moindre carrosse, l'égoïsme était son défaut

dominant : Tout pour elle. L'enfant, capricieuse, ne voulait

pas rester assise, les progrès en classe étaient nuls, la gym-

nastique de même. Elle gâtait du matin au soir, ne demandait

par aucun signe à aller aux cabinets.

Un grand changement s'est fait en elle : Gâtisme, colères,

caprices tout a disparu. Elle parle et marche très bien. En

classe les progrès sont notables, elle connaît ses lettres, com-

mence à compter, aime la gymnastique et le corps prend de

la souplesse. Elle connaît les couleurs, en sait faire la diffé-

rence, sait lacer les souliers, agrafer et boutonner, autant de

choses inconnues pour elle à son arrivée. Elle ne gâte plus

jamais ni jour, ni nuit, s'habille et se déshabille seule et

cherche il. se donner les soins élémentaires concernant sa

toilette, met en tout et pour tout beaucoup de bonne volonté.

Grande amélioration.

4° ESPoN.. (Yvonne), 6 ans, entrée à la Fondation en juin

1901, atteinte d'idiotie avec hémiplégie, marche nulle, parole

limitée à ces deux mots : papa, maman. A son entrée, elle

laissait à désirer sur bien des points; les premières notions

sur toutes choses lui étaient inconnues. Les progrès faits par

l'enfant sont de plus en plus satisfaisants.

Aujourd'hui, elle a pris des forces et bien que ne marchant

pas encore seule, se tient le long des tables et des bancs sans

fatigue aucune. La propreté est une de ses qualités ; sa tenue

à table est fort bonne. Autrefois, l'enfant était souventmaus-

sade et grognon, pleurait sans motif, à cause de son état

maladif sans doute.

Maintenant le caractère est gai, aimable avec ses petites

compagnes, serviable dans la mesure de ses moyens, cares-

sante envers lee personnes qui l'entourent. Elle commence à

rassembler ses lettres, connaît également les chiffres, sait

les placer exactement, s'intéresse à tout ce qui se passe

et demande mille explications. Elle a quelques diflicultés

pour les exercices de gymnastique en raison de ses jambes

qui sont encore faibles. Malgré toutes ces difficultés, les

progrès de l'enfant sont notables.

5° LI : rD... (Marguerite), 9 ans, est entrée il la Fondation

en août 1896 à l'âge de trois ans, atteinte d'idiotie avec épi-

lepsie. Elle parlait peu, mais n'avait pas de défaut de pro-

nonciation, elle gâtait nuit et jour, ne s'aidait en rien; res-

tait immobile quand il s'agissait de l'habiller et de la

BOUHNEVILLB, Bicêtre, 1902. ?

LXXXII Fondation Vallée.

déshabiller. Elle était presque toujours de mauvaise humeur ;

grognon, un rien la faisait pleurer, restait indifférente à tout.

Les accès et les vertiges survenaient par séries et étaient

assez nombreux. L'enfant traitée au l3wmtce de camphre

s'est beaucoup améliorée. Elle tombe rarement aujourd'hui,

n'a jamais plus d'un accès ou deux iL la fois. Il résulte de

cette amélioration un développement intellectuel très mar-

qué. Son caractère s'est beaucoup modifié; elle n'est plus

susceptible et maussade comme au début. Elle est devenue

très gaie, très joueuse, très active. Elle est propre nuit et

jour, se donne tous les soins qui lui sont nécessaires, fait sa

toilette avec minutie.

Les progrès, au point de vue de la classe n'ont pas été moins

rapides. Elle lit presque couramment, son écriture est lisible

et bien formée, fait des devoirs de grammaire, connaît l'addi-

tion et ébauche la soustraction. File commence bien à coudre,

suit la gymnastique avec beaucoup de facilité; l'enfant a, en

un mot, réalisé de réels progrès.

Le Pellet... du Coud... (Amélie), entrée à la Fondation, à

l'âge de 10 ans, en décembre 180'J, atteinte d'imbécillité pro-

noncée, avec perversions instinctives et lirbulence. Elle

avait des périodes d'excitation et de colère très fréquentes,

était très méchante envers ses compagnes, se plaignait sans

cesse de ces dernières et arrivait auprès de nous toujours

battue ou battant. Elle; était complètement nulle pour la

classe, ne paraissait rien comprendre de ce qu'on enseignait,

rien chez elle n'indiquait qu'une amélioration pourrait se

produire. Nous avons cependant à noter aujourd'hui de bons

résultats. Elle lit par syllabes, a appris à écrire, fait bien une

copie, commence quelques devoirs de grammaire et sait faire

l'addition. Son caractère, quoique susceptible et irritable,

s'est beaucoup amélioré; elle n'est plus aussi méchante avec

.ses compagnes. Sa tenue est devenue meilleure, elle suit avec

facilité les exercices de la gymnastique des échelles et des

ressorts et commence il faire des ourlets. En somme, cette

enfant s'est améliorée au-delà de ce qu'on pouvait espérer.

DA'\'... (Louise), 10 ans, entrée à la Fondation, en juin

1900, atteinte d'imbécillité prononcée, avec perversions ins-

tinctives, avec gâtisme et onanisme. L'enfant n'avait aucune

stabilité, elle était nulle ! en classe, rien ne l'intéressait. On

ne pouvait attendre d'elle que des résultats fort médiocres.

Nous constatons cependant aujourd'hui une. amélioration très

notable, sous tous les rapports.

IDIOTES gâteuses, invalides ou non. LSSIII

D'abord l'enfant est devenue tout à fait propre, procède

minutieusement aux soins de sa toilette ; il n'existe plus

aucune mauvaise habitude chez elle. Elle est actuellement

très douce et très affectueuse, elle se rend utile dans les soins

du ménage et n'est pas du tout maladroite. Elle s'occupe

même des plus jeunes, prend plaisir à leur donner les soins

de toilette ; si l'enfant continue ainsi, on pourra faire d'elle

une bonne ménagère.

Les progrès pour la classe n'ont pas été moins rapides. En

moins de trois ans, cette enfant a appris à écrire, à faire

quelques devoirs de grammaire, elle connaît les deux

premières opérations de l'arithmétique et lit presque

couramment. Elle suit avec facilité tous les exercices de

gymnastique et commence bien à coudre, ainsi qu'à repasser.

\In.ItI.. (Louise), âgée de 12 ans, entrée à l'Asile à l'âge de

9 ans, atteinte d'imbécillité très prononcée, avec turbulence

et instabilité. La prononciation était mauvaise, elle zézayait

beaucoup, prononçait les lettres j et g comme z; elle disait

zuze pour juge, toutou pour toujours; il en était de même

pour la syllabe che : elle disait marcer pour marcher. Elle

avait en outre une certaine difficulté pour prononcer l'r : elle

disait coude pour coudre, ouvoi pour ouvroir.

Aujourd'hui, il y a une grande modification dans son

langage. Elle ne zézaie plus et sa prononciation est normale.

Elle était nulle, en instruction primaire, ne connaissait

ni lettres, ni chiffres, ne savait môme pas tracer des basons

sur l'ardoise. Ajoutons encore que cette enfant ne paraissait

avoir aucune aptitude pour ce qui était enseignement.

Malgré toutes ces difficultés, nous enregistrons aujourd'hui

des progrès très notables. Elle est parvenue il écrire très

lisiblement, fait une copie, connaît et sait faire les chiffres

et lit par syllabes. Tout donne lieu d'espérer que sa lecture

sera tout à fait courante d'ici quelques mois ? La coulure

va bien, ainsi que le repassage, l'cnfant a fait de réels progrès

en gymnastique. ,

L'amélioration notable acquise chez ces enfants

atteints d'idiotie complète, d'idiotie profonde ou d'im-

bécillité très prononcée montre nettemcnt qu'on peut

obtenir des résultats au moins analogues ou plus

considérables, à plus forte raison, chez des enfants

LXXXIV IDIOTES gâteuses, imbéciles, etc., valides.

moins malades, imbéciles et arriérés. Nous pourrions

relater de nombreux exemples du même genre qui

n'ajouteraient rien aux précédents, tout à l'ait démons-

tratifs. --

2° Enfants idiotes, imbéciles, épileptiijiies, etc.,

Valides. Enseignement primaire et enseignement,

professionnel. Les procédés employés sont les mêmes

qu'a la section de Bicêtre. Les améliorations réalisées

dans les écoles des garçons sont introduites immédia-

tement à la Fondation. L'idéal que nous poursuivons

consiste à occuper les enfants du natit jtcscltc'aze soi ?

en variant le plus possible les exercices. Les jeux

mêmes doivent contribuer à leur éducation.

Au lever, on apprend aux enfants à faire leur toilette,

leur lit, 1 nettoyer leur dortoir, à brosser leurs vête-

ments. Aux repas, on surveille les enfants qui savent

manger seules et on corrige leurs mauvaises habitu-

des ; on apprend aux autres à se servir de la cuiller,

de la fourchette, etc. Nous ne cessons do répéter

au personnel de surveiller avec le plus grand soin

les aliments, d'enlever les fragments d'os ou de

tendons, susceptibles de produire des accidents, de

couper les aliments en très menus morceaux, de veiller

il la mastication et Ù la déglutition. Sur 222 enfants

présentes à la lin de l'année, 50 savent se servir

de la cuiller, de la fourchette et du couteau; 82 de la

cuiller et de la fourchette ; 52 de la cuiller seulement;

38 ne savent pas manger seules.

180 enfants ont fréquenté l'école et ont été exercées

a la gymnastique des échelles et des ressorts;

80 enfants participent aux exercices de la grande

gymnastique, sous la direction de M. Goy et de

la surveillante "\[c1lu Langlet. Ces leçons ont lieu

une fois par semaine, le jeudi. Mais, en raison do

Leçons DE choses; HYGIÈNE SEXUELLE. LXXXV

l'augmentation de la population, il serait nécessaire

que le professeur donnât deux leçons par semaine.

L'Administration départementale et la Commission

de surveillance ont reconnu la légitimité de notre

demande, déjà renouvelée plusieurs fois, et l'ont

signalée à l'Administration de l'Assistance publique,

dont nous attendons toujours la réponse.

Les lel : ol1 ? de choses, multipliées le plus possible,

ont lieu à la classe, dans les promenades et surtout

dans les jardins dont les arbres, les arbustes, les plan-

tes, etc., sont étiquetes. Les détails dans lesquels

nous sommes entré dans nos Rapporls de 1890 il 1901

au sujet de l'lwbillemenl (mannequin spécial, de

l'éducation, de la digestion, de la respiration, de la

circulation et de l'hygiène sexuelle, nous dispensent

d'y revenir celte année.

Notre personnel surveille attentivement l'appari-

tion et le développement de la puberté. Dès 1 appa-

rition des poils sous les aisselles et sur le mont de

Vénus, elles préviennent les fillettes qu'il s'agit-là

d'un fait nal\IJ'('1. On évite ainsi certaines inquiétudes

et des actes bizarres. Il en est qui essaient de s arra-

cher les poils sous prétexte que c'est delà mulpro-

prete, ou qui les coupent. Lorsque les seins ont pris un

certain accroissement, que le système pileux devient

de plus en plus abondant, on les avertit de prévenir

si elles éprouvaient des douleurs dans les reins ou le

bas-ventre et s'il leur arrivait de perdre un peu de

sang. A la première apparition des règles, on complète

les renseignements et on leur donne des conseils sur

les précautions à prendre. Les époques, avec leurs

caractères (douloureuses ou non, abondantes ou non,

durée, etc.) sont notées; on nous signale les pertes

blanches qui les précèdent ou les suivent ainsi que les

suspensions. Enfin on habitue les fillettes aux soins

Lxxxn Enseignement nu dessin.

de propreté. C'est ce que les mères de familles, les

institutrices, les maîtresses de pension devraient faire

toutes.. -

Enseignement du dessin. Cet enseignement,

est fait par M. Dtuowr. Il donne aux jeunes filles, au

nombre de 30, divisées en deux séries, une leçon tous

les jeudis de 8 à 9 heures du matin. Voici quelques

notes concernant son enseignement :

« La première série est composée des élèves qui

avaient suivi le cours de dessin l'année précédente ;

ces jeunes filles ont acquis une grande habileté de

main et une certaine justesse cl'ccil dans la mesure

clés proportions. On les voit dessiner des courbes avec

beaucoup de sûreté et de grâce. Dans l'exécution clés

ombres, elles ont montré un goût réel. Elles dessinent

des plâtres représentant des ornements, tels que

feuilles de lierre, de chêne, de vigne, rinceaux,

rosaces; parmi les objets usuels : des entonnoirs, des

chaudrons, des vases, etc., et dans quelques-uns de

ces dessins nous avons été étonné de voir qu'elles

avaient reproduit, avec bonheur, les ombres et les

jeux de lumière de ces modèles.

« Ladcuxième division est composés de jcunesdébu-

tantes ; nous espérons les amener progressivement

au niveau de leurs devancières n.

Enseignement du chant. - Cet enseignement

est fait depuis 18fJ : J, à titre gracieux, par M. Eiurène

Sutter, professeur de chant à l'asile-école de 131c ? trc.

De même que les années précédentes M. Sutter s'est

occupé successivement de toules les enfants, en état

de profiter dans une mesure quelconque de son ensei-

gnement. 101 enfants y ontparticipe.La classe spé-

Enseignement DU chant, DE la danse, ETC. L\YS\'II

cigale de théorie musicale et de solfège a donné de bons

résultats ; 32 enfants ont suivi cette classe. Comme

les années antérieures les enfants les moins atteintes

ont appris des mélodies et des petites romances chan-

tées dans les concerts organisés par les garçons de

l'hospice et aux réunions du samedi. Toutes y ont

pris un réel intérêt et y ont apporté beaucoup de bonne

volonté.

Danse. - Les exercices de danse ont lieu sous la

direction do M. Iewo3sL, instituteur à Bicêtre, tous

les mercredis de 4 à o heures et le dimanche, après la

visite des parents, sous la direction de la surveillante.

- 16u enfants ont pris part à ces exercices; 98 savent

danser la polka, 70 connaissent la polka, la mazurka

et la scotlish ; li2 connaissent toutes les danses de

caractère et les différentes ligures du quadrille.

Enseignement professionnel. A mesure que les

enfants se développent, on leur apprend tous les soins

du ménage, h mettre et à retirer le couvert, à nettoyer

les réfectoires, laver la vaisselle, etc. Une vingtaine

des moins arriérées aident le personnel à apprendre

il manger aux enfants incapables de manger seules

et h perfectionner celles qui mangent malproprement.

Les deux ateliers que nous possédons ont continué

il fonctionner régulièrement. Le travail, évalué par

M. Maupré, économe de Bicêtre, d'après le tarif réduit

de l'Administration, s'est élevé à 5.040 fr. 80 pour

l'atelier do coulure, dirigé par }\fIllO Ehrmann et à

i . i 19 fr. 80 pour l'atelier de repassage diriu-é par 11 ?

Baruet. Total G.1¡60 fr. 60 (1).

il) Ces ateliers, après prélèvement des salaires, de la nourriture, etc., des

deux maîtresses (3.240 fez donnent un bénéfice de 3.220 fr. G0

LXXXVII ! Enseignement professionnel.

Nous avions essayé il y a quelques années de monter

un. atelier de composition typographique, qui n'a pas

réussi faute d'une véritable entente et surtout d'un

crédit pour le maître. Nous aurions voulu avoir aussi

un atelier de brochage dont l'organisation a rencontré

malheureusement aussi des difficultés imprévues et

surtout une petite buanderie. Pour celle-ci, d'une

utilité incontestable, nous ne disposons malheureuse-

ment pas d'un local approprié. Peut-être arriverons-

nous prochainement il une solution.

Pour étendre les connaissances pratiques de nos

malades, donner plus de variétés il leurs travaux de

couture et de repassage, nous avons autorisé les

sous-employées à faire repasser ou coudre une partie

de leurs objets de toilette, bien entendu en dehors

des heures régulières de travail. Le travail, de ce

fait, ne rentre pas naturellement dans les évaluations

qui sont faites par l'Administration.

En plus des apprenties qui travaillent par séries

régulières, 40 ont travaillé une heure par jour ; 95

enfants savent faire complètement les layettes ; 3U du

crochet et de la dentelle ; 15 savent marquer ; 15 savent

faire de la tapisserie; 5 savent tricoter. Le tableau

suivant donne mois par mois le nombre des appren-

ties régulières et l'évaluation du travail.

Enseignement PROFESSIONNEL. LXXXIX

xc Visites ET congés.

Promenades ET distractions. Ici

anciennes hahitudes; que, à leur retour, elles se plient

moins bien à la discipline et travaillent avec moins

d'ardeur (1). Nous avons demandé maintes fois, sans

résultats à l'Administration de rappeler aux familles

qu'elles ne doivent pas, dans l'intérêt même de leurs

enfants, dépasser la durée des congés accordée.

La Commission de surveillance a visité la Fonda-

tion Vallée le 13 mai et la Commission du Conseil

général le 15 novembre.

Promenades. - Elles ont lieu deux fois par semaine,

soit dans les communes voisines, soit à Paris. Le

nombre des enfants qui prennent part à ces prome-

nades, avec leçons de choses, varie de 60 à 80.

Distractions. Comme les années précédentes,

et sans qu'il soit survenu des inconvénients de la pré-

sence simultanée à ces réunions des enfants des deux

sexes, les petites filles de la Fondation Vallée ont

participé en 1902, il toutes les distractions données

aux garçons de Bicêtre et dont l'énumération figure

dans le Compte-rendu de la section des garçons de

cet établissement.

Améliorations diverses. - Ouverture d'un nou-

veau dortoir (de 24 lits), installé d'après les indica-

tions données les années précédentes dans l'ancien

réfectoire. Création pour ce dortoir de deux emplois

d'infirmières (infirmière de jour, infirmière veilleu-

se). Réfection de la peinture des anciens dortoirs,

(1) Les permissions de sortie et les congés de 1 5.jours ont donné

t.( ! G2 journées qui sont payées 2 fr. 20 par le département à l'Assistance

publique, soit un bénéfice de 3.856 l'r. 80 cent. Si l'on ajoute à ce chiffre celui

du bénéfice dn travail professionnel soit 3.220 fr. tï0, on voit que nous réalisons

à l'Administration un bénéfice de 7.077 l'r. qui devrait amener l'Administration

à se montrer plus libérale envers la Fondation et la conduire à la dot r pro-

gressivement de tout ce qui est nécessaire au traitement médico-pédagogique.

XCII Maladies infectieuses.

du pavillon des gâteuses, de l'infirmerie, du gymnase,,

des classes et du réfectoire. Substitution de la

fibre de bois à la paille dans les matelas des

gâteux ! Nomination de M"10 Quatre, première infir-

mière au grade de suppléante.

Teigne. Six enfants ont été soignées pour la

teigne au pavillon d'isolement de la section de Bicêtre.

A la fin de l'année, il ne restait plus que 5 enfants en

traitement.

Maladies infectieuses. Trois fillettes ont été soi-

gnées au même pavillon pour la rougeole : Laha(l...,

Charu... et Die... ; cette dernière a succombé à une

b1·ol7clzo-p17cu17tonie. L'enfant Ro... y a été traitée

pour un ét¡¡sipèle de la face.

Maladies intercurrentes. 10 enfants ont été trai-

tées à l'infirmerie pour bronchite; 3 pour broncho-

pneumonie; 2 pour pneumonie; 0 pour tuberculose

pulmonaire ; 1 pour tuberculose intestinale ; 2 pour

méningite ; 10 pour la grippe; 15 pour séries d'accès

ou étals de mal; 11 pour ophtalmie, 9 pour engelures;

2 pour 15 pour clilJ ? rhée; 17 pour

migraines ; G pour constipation; 2 pour stomatite; G

pour embarras gastrique ; 1 llour zens ; 1 pour frac-

ture de la jambe; 1 pour fracture compliquée de

l'humérus.

Vaccinations et Pn.laccinaliol7s. Elles ont été

au nombre de 29 dont 5 avec succès. De même qu'à

Bicêtre nous revaccinons avec nos infirmières toutes

les entrantes et toutes les malades qui sont à la Fon-

dation depuis 5 ou G ans.

Bains et hydrothérapie. Comme les années pré-

cédentes, nous avons eu récours dans une large mesure

Bains, hïdrotiiéhapie, glande thyroïde. xciii

aux bains et aux douches. Chaque année nous assistons

plusieurs fois à l'administration des douches afin de

nous assurer que l'on continue il se conformer il nos

leçons. Quant aux autres moyens (le traitement, ils ont

été les mêmes que dans notre section de Bicêtre.

Signalons surtout les leçons de choses, soit en classe,

soit clans les jardins et les promenades. Nous recom-

mandons à notre personnel de veiller le plus possible

à l'hygiène sexuelle, principalement pour les petites

gâteuses et pour les filles pubères. Les enfants pren-

nent leurs douches il la Fondation; ce n'est qu'en cas

de répartaoins qu'elles les prennent à Bicêtre. Quant

aux bains, nous avons dû recourir encore cette année

aux (le Bicêtre. Les bains de pieds ont été

donnés à la Fondation où existe, ainsi que nous l'avons

dit, une installation convenable. Voici la statistique

des bains et des douches en 1902.

XGI' Mouvement de la population.

II.

Statistique. Mouvement DE la population.

0

Le '1 ? janvier 1902, il restait à la Fondation Vallée

216 enfants se répartissant ainsi :

IOUVL\Ili\11 : V'I' DE LA POPULATION. XCV

XCVI DECES. , I

XCVIII DÉCÈS.

Personnel du service. cm

fonctionnement aussi parfait que possible et très éco-

nomique de la Fondation Vallée, montre les avantages

incontestables des établissements dont la population

est limitée et qu'il est possible d'en confier la direc-

tion il une surveillante,

, : \1°110 Berthe Langlet que nous avions pour surveil-

lante depuis l'ouverture de la Fondation, en mars

1890, et dont chaque année, dans le Compte-rendu,

nous nous plaisions il signaler comme ils le méritaient

ses excellents services; a succombé en quelques

heures à une attaque d'apoplexie le 15 octobre 1902.

Ses obsèques ont eu lieu le 17 octobre. Appelé inopi-

nément à prendre la parole nous avons prononcé

l'allocution suivante :

. Mesdames, : \I6SfI : UItS,

Née il Ilomblières (Aisne), le Il juin 186'1, M1'" 13crthc LAX-

glet entra dans l'Administration le Il février 1880, il peine

âgée de ! Gans. Elle de))utaat'[n[ ! rme['ie générale de Bieêtre

et, malgré son jeune âge, sut s'attirer l'estime et la bienveil-

lance de ses chefs. Nommée suppléante dans notre service

le 30 avril 1882, elle était promue sous-surveillante deux ans

après, le Il 1 août IS8 ! .

En 1590, en organisant la Fondation Vallée, nous avons pro-

posé ce qui fut accepté, d'accord avec I. Roux, directeur

des affaires départementales, de faire de cet établissement

une dépendance de Bicêtre : la surveillance administrative,

le service médical, le personnel secondaire devaient être

empruntés ;'1 cet hospice. Notre choix, pour la nomination de

la surveillante se porta sur M"" Berthe, qui, grâce sa bien-

veillance, usa douceur envers les enfants, il son intelligence,

il sa fermeté, avait su pleinement conquérir notre confiance.

Elle hésitait, se croyant au-dessous de sa tâche. Nous

CIV Mort de Mademoiselle 13EllTIIE LANGLET.

l'encourageâmes et elle obéit. Elle sut prendre de suite une

autorité réelle sur les enfants .et sur son personnel. Ferme,

mais bienveillante, elle sut se faire aimer de tous comme en

témoignent les sanglots que l'on entend de toute part.

Connaissant à fond tous ses enfants, elle no nous fournis-

sait que des renseignements parfaits et scrupuleusement

exacts. La tenue de son service était aussi dans un état par-

fait et, dans leurs nombreuses visites, MM. Le Houx, Pelletier,

les membres de la Commission de surveillance ou du Conseil

général lui adressèrent toujours des compliments mérités.

En dehors de son service administratif et médical, Mllc

Berthe savait encore trouver des heures libres pour s'occu-

per de distractions it ses malades, organisant le dimanche do

petits bals, des concerts, etc. Le Mardi-Gras et la Mi-Carême

ne la trouvaient pas non plus inactive, s'occupant de toutes

ses malades avec un entrain charmant.

Au point de vue de la Société de patronage, elle nous fut

d'un précieux concours. Elle ne s'occupait pas seulement du

placement des plus améliorées au dehors, mais encore elle

rendait de fréquentes visites à celles reprises par les familles,

nous fournissant sur chacune d'elles une note détaillée et pré-

cise. : \[1le Langlet pouvait être donnée comme le modèle des sur-

veillants sous tous les rapports : ni l'Administration ni nous

n'avons jamais eu de reproches à lui adresser.

Hélas ! la vie a des iL-coups violents, brutaux ! Mllc Berthe

en a été la victime. Le mercredi matin, comme de coutume

nous nous rendîmes à la Fondation Vallée pour notre visite.

M"" Berthe. toujours alerte et vive, faisait son service comme

d'ordinaire. A un moment, elle sortit de notre bureau; ne la

voyant pas revenir, M ? Ath. Bohain, sa collègue et son amie,

alla à sa recherche.

Elle trouva notre pauvre amie, dans un dortoir situé en

face de notre bureau, les mains crispées après le montant

d'un lit, la bouche contorsionnée : «Je deviens paralysée,

s'écria-t-elle » .Mandé aussitôt, nous nous rendîmes auprès

d'elle et lui prodiguâmes tous les soins nécessaires. Lorsque

nous la quittâmes, vers midi, son état ne paraissait nullement

désespéré. Malheureusement, le soir en rentrant il Paris,

une nouvelle fatale nous attendait, M"1- Berthe Langlet était

morte.

Pour l'Administration, pour nous, pour les enfants, la mort

de Mlle Berthe est une perte cruelle.

Mort DE Mademoiselle Berthe LANGLET. CV

Que son exemple d'activité, de bonté, de dévouement, d'ac-

complissement de tous ses devoirs, d'hospitalière laïque, serve

de modèle à ses collègues. Elles honoreront ainsi la mémoire

de l'une de leurs meilleurs compagnes.

Mademoiselle ANGLET, adieu !

Section 111. - Assistance et enseianenieiit.

I.

Classes ou Écoles spéciales pour les enfants arriérés.

Depuis plus de 10 ans, nous faisons campagne pour

la création de classes ou d'écoles spéciales pour les

enfants arriérés et les enfants idiots améliorés. Tous

les ans, depuis 1896, nous profitons de la visite il Bicc-

tre de la Commission de surveillance des asiles d'alié-

nés pour lui communiquer des renseignements sur ce

qui se fait à l'étranger et nous lui faisons voir un

groupe d'enfants notablement améliorés qui pourraient

être rendus il leurs familles, s'il existait à Paris des

classes spéciales, comme il en existe dans la plupart

des pays civilisés. Quelque peu découragé par l'inu-

tilité de nos tentatives, nous nous sommes borné,

cette année, à montrer les enfants susceptibles d'être

reçus dans ces écoles, ce qui désencombrerait le ser-

vice, permettrait de recevoir les enfants, plus mala-

des, qui attendent. Les familles, qui ne doivent pas

oublier leurs devoirs les reprendraient avec ou sans

allocation, suivant leur situation. .

Ayant offert à nos collègues de la délégation canto-

nale du Ve arrondissement, notre Noie de l'an

dernier sur les classes spéciales, le président M.

Meurgé en a profité pour faire renouveler le voeu émis

Traitement ou éducation des idiots. c 11.1 1

précédemment et l'a transmis à quelques-unes des

délégations de Paris. Voici, comme suite, la lettre qui

nous a été transmise.

Monsieur le Docteur.

Conformément ;'¡ une décision de la Délégation cantonale,

j'ai l'honneur de porter à votre connaissance les réponses des

délégations des Hile et VII' arrondissements au voeu tondant

à la création dans quelques arrondissements de Paris de clas-

ses spéciales pour les enfants arriérés, voeu que la Déléga-

tion du Ve avait émis sur votre proposition et qui avait été

communiqué à toutes les Délégations de Paris.

Le maire du Il le arrondissement nous informe sans indi-

quer les motifs cle sa décision, que la Délégation qu'il

préside n'a pas cru devoir adopter ce voeu. Par contre, la

Délégation du VU' a déclaré appuyer le voeu précité et a fait

connaître son adhésion à M. le Directeur de l'Enseignement

primaire.

Veuillez agréer, Monsieur le Docteur, l'assurance de

nos sentiments les plus distingués. .

Le maire, A. Meurgé.

Il n'est pas facile, dans notre pays d'introduire les

réformes (1), même les plus justifiées. En revanche,

nous avons reçu de mille Lack qui est venue cette

année, pendant quelque temps, suivre notre visite et

étudier notre méthode de traitement médico-pédago-

gique, une lettre très intéressante sur les classes spé-

ciales de Genève. .

- Genève, rue du Jura 10, Ce 2 septembre 1902.

Monsieur le Docteur

Vous m'avez demandé, lors de ma visite 131cêtre, de

vous renseigner sur la situation actuelle des anormaux en

(1) Voir l'historique Je la question (Lins notre Coml te-rendu ds 1901, p.

cxv.

CVIII Classes ou écoles spéciales

Suisse. Le sort de cette catégorie d'enfants s'est tellement

amélioré durant ces dernières années que j'éprouve une

véritable satisfaction en répondant à votre désir.

La plupart de nos cantons sont aujourd'hui pourvus de

classes spéciales sinon d'établissements pour anormaux

non épileptiques, les épileptiques cle toute la Suisse étant

reçus dans l'Etablissement fédéral pour épileptiques de

Zurich (M. Kolle, directeur). "

Ce n'est qu'actuellement que la question des anormaux

est véritablement il l'ordre du jour dans la Suisse roman-

de ; aussi les créations pour ces malheureux sont-elles

assez récentes.

En mai 1898, M. le Docteur Ladame vous annonçait

l'ouverture d'une classe spéciale, la première il Genève.

Aujourd'hui cette ville (100.000 ho) en compte neuf. Ce

nombre est suffisamment éloquent pour due je m'abstien-

ne de démontrer l'urgence d'institutions semblables dans

des centres industriels et d'énumérer les bienfaits qu'elles

répandent.

Les résultats obtenus sont appréciables déjà, soit dans

les classes ordinaires, soit dans la population dont elles

mettent lestares à découvert. .

Le Département de l'Instruction publique peut chaque

année se féliciter d'avoir joint à l'Ecole primaire ces anne-

xes dont l'importance au point de vue social grandira pro-

portionnellement à la perfection de leur développement.

Car les classes spéciales de Genève ne sont pas encore

l'idéal, c. à d. qu'elles présentent les inconvénients des

classes spéciales disséminées, en ce sens qu'elles réunis-

sent dans un même local et sous la même direction les

éléments les plus disparates. Ces inconvénients sont peut-

être plus marqués qu'ailleurs car Genève est une ville

frontière et un centre d'attraction, grâce à la réputation

que lui ont faite ses nombreuses fondations philanthro-

piques, ses classes gardiennes et ses cuisines scolaires.

L'élément étranger domine dans les classes spéciales ;

il est recruté dans une population instable et illettrée, les

enfants, faute d'éducation et d'instruction premières, sont

de vrais arriérés pédagogiques quoique parfois intelli-

Traitement et éducation des idiots. CIX

gents et la fâche de la maîtresse est de s'acharner contre

leur ignoraucc pour les restituer il l'école ordinaire. A

coté de ces retardés, il y a les débiles, les indisciplinés et

les anormaux proprement dits qui ont des lésions céré-

brales apparentes. Les forces de la maîtresse qui seule

fait face il tant d'individualités, sont trop divisées pour

que les résultats obtenus répondent à l'énergie et à l'acti-

vité dépensées. Une sélection s'impose et à la rentrée des

ela-ses, en septembre, on inaugurera une petite école

d'enseignement spécial à l'exemple de celle de Bruxelles.

File ne se composera cette année que de trois classes

seulement, faute de locaux appropriés : 1° une classe

mixte pour les anormaux et les enfants de plus de huit

ans ne sachant pas lire ; 2" une autre pour les retardés,

mixte également ; 3,1 une encore pour les indisciplinés

garçons.

Les exercices physiques gymnastique, eurythmique au

son du piano, excursions, douches et les travaux manuels

dessin, pliage, construction, coloriage, modelage, brode-

rie, couture, tricot) occupent la moitié des heures de cla-

sse ; c'est la méthode intuitive développée à outrance qui

est la base de l'enseignement des autres disciplines. Les

élèves qui ne peuvent être rendus l'Ecole primaire sont

à leur sortie des classes spéciales, placés en apprentissage

par les soins de leur maîtresse, mais en juger l'intérêt

que ces enfants inspirent il la population, une société de

patronnage ne tardera pas il se fonder.

Cet automne ou tout au plus tard au printemps prochain

s'ouvrira un établissement qui recevra une quinzaine

d'anormaux disséminés dans la campagne de Genève.

Cette oeuvre, duc il 1 initiative privée, sera cependant sub-

ventionnée par l'Etat qui décrète l'instruction obligatoire

pour tous.

Enfin j'espère. Monsieur le Docteur, que la prochaine

fois que vous désirerez avoir des nouvelles de nos petits

déshérites, l'on pourra vous répondre que chacun d'eux,

sans distinction de nationalité, est placé dans les

meilleures conditions de développement possibles avec

garantie pour l'avenir.

ex Classes ou écoles SP1 : CI : 1T 1 : E.

Veuillez, Monsieur le Docteur, excuser le retard de

cette lettre et le mettre sur le compte de belles vacances

malheureusement terminées. Je vous enverrai sous peu

quelques informations sur nos autres cantons. Dois-je

m'étendre davantage sur certains détails ? ' ?

Recevez, Monsieur le Docteur, mes respectueuses et

reconnaissantes salutations.

Louise LACK, institutrice.

Nous avons essayé, un peu subrepticement, un

essai pour l'application du traitement mnéili.oo-ZUc1<-

gotique à des malades externes. Nous avons fait ve-

nir dans notre service, une fois par semaine, des

mères de famille avec leurs enfants auxquels des

leçons étaient faites pour que les mères elles-mêmes

apprennent comment elles doivent procéder pour

appliquer, chez elles, notre méthode de traitement et

d'éducation.

Le fils d'une sous-surveillante, Le) ? (Louis) est

venu en 1901 et en 1902, mais assez irrégulièrement,

à la petite école.

Un imbécile achondroplasique, administré de l'hos-

pice, a été envoyé par notre ami, le Dr P. Marie, et a

suivi l'une des classes pendant quelque temps.

L'enfant Fourn... iGélston) est venu également,

chaque semaine, prendre une leçon il la petite école

de DI ? Bonnet. Sa mère, intelligente, très attentive;

aux leçons, s'occupe sérieusement de son enfant..

Aussi avons-nous obtenu une amélioration déjà sé-

rieuse.

D'autres enfants sont venus un certain nombre de

fois mais ont discontinué, faute de temps, ou à cause

de la distance ou parce qu'elles n'obtenaient pas aussi

vite qu'elles l'auraient désiré, une transformation de

leurs enfants. '

IL

Condamnation d'un dégénéré épileptique.

M. le D1' Gilbert Petit, médecin en chef de l'asile

d'aliénés du Mans, par une lettre en date du 12 avril

dernier, nous communique le fait suivant : .

« Un jeune soldat, du nom de Bellanger 11'crnand), vient-

tout récemment ' d'être condamné par le conseil de guerre

siégeant il Besançon à cinq ans de travaux publics, inculpé

de violences envers ses supérieurs à l'occasion du service.

Or, ce nommé Hellanger a passe plus de trois ans il l'asile

des aliénés du Mans oit il a été transféré de votre service de

Bicêtre, en 1800.

« A mon arrivée à l'Asile du Mans, comme médecin en chef,

en 1808, j'y ai trouvé ce malade C'est un débile, fort impul-

sif, sujet il des alternatives cle dépression et d'excitation ; il

a même toujours passé pour épileplique. J'avoue qu'il ne m'a

pas été possible d'observer moi-même chez lui de grandes

crises : mais on a noté un accès dans la nuit du 13 au li Í

septembre 1800 et des vertiges en septembre et novembre

1808. D'autre vertiges, en raison de leur fugacité, ont proba-

blement échappé.

« Pendant l'instruction, personne ne s'est douté de son

séjour dans un asile et personne n a même émis un doute

relativement à l'intégrité de ses facultés mentales.

« C'est navré de voir de quelle façon les enquêtes judiciai-

res sont parfois conduites, que je me permets de vous écrire

en pensant que ce fait, qui est malheureusement bien loin

d'être isolé, pourrait vous intéresser, d'autant plus qu'il s'a-

git, dans le cas particulier, d'un de vos anciens malades.

«J'ajoute que les parents, qui habitent le Mans, n'ont été

avertis de la condamnation de Bellanger que fort indirecte-

ment par son avocat qui leur réclamait ses honoraires. Des

démarches vont être t'.dtes pour essayer de réviser celte

erreur et empocher ce malheureux d'aller aux bataillons

d'.\ fl'irfl1C. »

CXII Assistance des épileptiques.

Chan... est entré dans notre service le 1 : > avril 1896,

envoyé par la Préfecture de police, avec un certificat du

D' Legras, ainsi conçu : « Débilité mentale et vertiges

probablement épileptiques. Discernement insuffisant.

Actes impulsifs. Fugues. Instruction presque nulle. e

Stigmates physiques de dégénérescence. »

Dans son observation, un peu incomplète, nous rele-

vons les particularités ci-après : Père migraineux ; grand

père paternel excès de boisson; mère, d'un caractère

emporté, morte de tuberculose pulmonaire, ainsi qu'une

tante maternelle ; grand-père paternel paraplégique.

Accouchement au forceps, parole seulement il 4 ans,

accès de colère. De temps en temps il se sauvait dans la

rue, courait devant lui, puis s'arrêtait tout d'un coup. A

partir d'avril 1895, il a été sujet il des vertiges, revenant

plusieurs fois tous les 3 ou 4 jours.

Au point vue physique, nous avons noté : physionomie

un peu hébétée, front bas, oreilles écartées, bouche pres-

que toujours entr'ouverte, palais ogival, tremblement des

mains.

Au point de vue intellectuel et moral, nous relevons :

caractère irascible, emporté, indiscipliné, batailleur,

toujours prêt a frapper, instabilité très prononcée, de

sorte qu'il est difficile de le maintenir soit il râtelier, soit

il l'école. Son sommeil est agité et interrompu par des

réveils en sursaut. La mémoire est très faible, le raison-

nement défectueux, l'obéissance et le respect il peu près

nuls. Son instruction primaire, étant donné son âge, est

médiocre; il a été renvoyé successivement de plusieurs

écoles pour sa mauvaise conduite et son irritabilité. Placé

plusieurs fois en apprentissage, il a été congédié à cause

de ses impulsions violentes. L'enfant, étant né au Mans,

a été transféré à l'asile de cette ville, le 27 août 189G.

En résumé, il s'agit la d'un malade dégénéré, arriéré

intellectuellement, atteint en outre d'instabilité mentale,

sujet à des impulsions violentes et ayant présenté des

accès, des fugues et des vertiges épileptiques. Tel que

nous l'avons connu, tel qu'il a été observé a l'asile du

Assistance. CXI11 :

Mans, c'est un irresponsable sur lequel, nous associant

à notre collègue, M. leur Gilbert Petit, nous nous permet-,

tons d'appeler la bienveillance des pouvoirs publics (I).

Notre intervention, provoquée par notre excellent con-

frère le D'' Gilbert-Petit, a obtenu plein succès; Il a été

d'abord sursis à l'envoi du malade aux compagnies de

discipline, puis une enquête a été faite et finalement Bel...

a été réformé. (Progrès Méd., 1902, p. 271).

- BOURNEVILLE,

(1) La ville de Brunswick signale aux conseils de révision -les conscrits sor-

tis dés écoles spéciales d'enfants ari'iérés, de sorte que l'autorité militaire est

au courant de leur état mental. (Bourneville, Compte-rendu du service- des

enfants de 'B1Cétl'e pour 1'Jul, p. CXÀ711). - C'est une excellente pratique

qui. mente d'être appliquée* chez nous. '

BOURNEVILLE., Bicêtre, 1902. ? »**

III.

Les aliénés dans les hôpitaux.

Nous avons toujours soutenu la thèse qu'il y avait de

graves inconvénients à recevoir et surtout a maintenir

dans les hôpitaux les malades aliénés. Voici une nou-

velle démonstration de la justesse de cette opinion. Sous

ce titre : Un infirmier de Lariboisière poignardé par

un fou, un alcoolique, les journaux politiques rapportent

le fait suivant :

« Dans la nuit du 12 au 13 un nommé Michel Grindolet,

alcoolique, en proie à une crise de délire, ouvrit une

fenêtre et. poussant un hurlement sinistre, se jeta dans le

jardin de l'hôpital.

« L'infirmier Thiriot courut précihitamentàlarecherche

du malade qu'il rejoignit dans le jardin. L'exaltation de

Grindolcl semblait calmée. Thiviot l'exhorta il rentrer, : ,1 parlant doucement et le tenant par le bras pour le

men r. L'alcoolique répondit sur un ton paisible qu'il

élait calmé et qu'un accès de fièvre, sans doute, l'avait

moussé il se jeter ainsi dehors par la fenêtre. Les deux

hommes étaient rentrés dans l'hôpital et marchaient ainsi

été à côte dans un va te couloir faiblement éclairé par : veilleuses. Tout il coup, le malade se jeta sur l'infir-

,nier et, lui serraant fortement la gorge d'une main, lui

rongea dans la poitrine un couteau poignard qu'il avait

réussi à dissimuler dans sa manche.

« Le malheureux Tbiviol tomba en poussant un cri qui

'veilla tous les i firmiers. On accourut et on eut toutes

les peines du monde à s'emparer de l'alcoolique qui était

Assistance. civ

on proie il une exaltation extraordinaire. On put enfin le

ligoter et l'enfermer dans un cabanon ( ? ). Quant au mal-

heureux infirmier, il avait été porté en toute hâte sur son

lit. Il était évanoui. On le ranima et on le pansa. Le coup

lui a perforé le poumon. On désespère de le sauver. »

Ce fait s'ajoute à ceux que nous avons déjà rapportés

pour montrer la nécessité d'envoyer les malades aliénés

dans les asiles d'aliénés, aménagés et outillés en consé-

quence et de ne pas les maintenir dans les hôpitaux, où

rien n'existe; pour le traitement et la sécurité de ces mala-

des. C'est aussi une occasion de rappeler la nécessité de

faire passer, afin d'acquérir une expérience pratique

sérieuse, il Bicêtre, les élèves-inlirmiers, il la Salpêtrière,

les élèves-infirmières, dans les services d'aliénés. Il s'agit

là d'un enseignement pratique, indiscutable, que nous

réclamons sans succès depuis une vingtaine d'années.

(Progrès Médical, 1902, p. 253.) B.

IV.

Assistance des enfants nerveux : à propos des enfants

martyrs.

La police reçoit quelquefois, de la part de personnes,

de bonne foi souvent, des plaintes précises contre un de

leurs voisins qui maltraite son enfant. « Elles entendent à

chaque instant, disent-elles, dans le logement il côté, des

cris de rage et de douleur, des appels désespérés poussés

par un enfant que martyrise des parents indignes. » Si peu

qu'il y ait dans les rapports de voisinage, sinon de l'ini-

mitié, au moins une anthipathic quelconque, les dénon-

ciateurs donnent les détails, et ne parlent rien moins que

de brutalités systématiques, ayant pour but la suppres-

sion d'un enfant gênant.

Celtes, il arrive trop souvent que des parenls ignorants

corrigent manuellement leur enfant, soit qu'il soit idiot,

ou imbécile, soit qu'il soit indiscipliné, attribuant il sa

mauvaise nature ce qui n'est que la conséquence d'une

maladie. Mais il arrive aussi souvent qu'aucun sévice n'a

été exercé, et que les cris ne sont poussés par le petit

malade que sous l'influence d'une véritable crise, déter-

minée par des lésions irritalives de son cerveau. Ces sor-

tes d'accès, en effet, revêtent dans certains cas un carac-

tère réellement effrayant. On comprend que le voisinage

s'imagine avoir affaire à des enfants martyrs. Nous pour-

rions citer de nombreux exemples ; quelques-uns suni-

ront.

Pierre 1...., âgé de 1) ans, est atteint de crises épilep-

tiformes. En dehors de ses accidents convulsifs, il lui

arrive fréquemment, au moment où l'on s'y attend le

Assistance. cxvil

moins, de se rouler a terre en poussant des cris « comme

si on l'écorchait ». S'approchc-t-on de lui, il projette les

jambes de tous côtés, essayant cle frapper. Si on veut le

relever, il cherche à mordre, et s'il ne peut y réussir, il se

griffe la figure et se cogne violemment la tête sur le sol.

Et ces « rages » surviennent au milieu d'une promenade,

en classe, alors qu'il vient cle rire ou de causer avec son

maître.

Jean TL ? ïâé de 8 ans, a, durant des heures entières et

presque toujours aux mêmes moments, des accès décris,

dont la raucité exprime une véritable angoisse. Une per-

sonne qui ne le connaîtrait pas se demanderait coup sûr,

ce qu'on a pu lui faire pour qu'il se plaigne de la sorte.

Les enfants Lem... (Georges) et Dent... (Marcel), iL leur

arrivée dans notre service, poussaient subitement des

cris perçants et sans cause connue. Nous croyions tou-

jours qu'un cle leurs camarades leur avait fait quelque

méchanceté ; nous avons fini par nous convaincre qu'il

n'en était rien, que leurs cris n'avaient d'autres causes

que des accès de rage et de colère inexpliqués. Peu à

peu, pleurs, cris ont diminué et ont cessé presque com-

plètement. Deux autres enfants, G'sel... (René) et illill...

(Emile), il la moindre gronderie, poussent des cris, com-

me si on les maltraitait.

Rena... (Victor), 10 ans 1/2, est sujet à des accès de colère

non motivés dans lesquels il se roule par terre, se frappe le

visage, le nez surtout, avec les poings fermés, ce qui provo-

que des épistaxis assez abondantes. Tout en criant, l'enfant

répète : non a pu, il. pu, comme si on le frappait, et deman-

de pardon. Ces colères se reproduisent souvent, et il crie

tellement fort qu'il est entendu de très loin. Rien ne le cal-

me, et plus on lui parle, plus cela l'exaspère.

Grand... (Auguste), 14 ans 1/2, se met très facilement en

colère et sans aucun motif. Les cris qu'il pousse sont aigus

et de longue durée, capables d'éveiller l'attention, et ils sont

aussi fréquents la nuit que le jour.

Decttlt ... (Ch.), 10 ans 1/2, a des accès de colère terribles.

cxviii Assistance.

Il pousse des cris de douleur, puis des cris de rage, accom-

pagnés de violences, frappe les portes et renverse tout ce qui

se trouve à sa portée. Parfois un simple regard suffit pour

l'irriter.

Ogo2oa.. Brous... (Georges), (le 11 ans, se met en co-

lère journellement et sans motif. Il pleure ou plutôt crie en

se tappant la tète des deux mains ou sur sa chaise, ensuite

il se mord. Ces crises durent quelquefois des demi-journées

entières.

Daud... (René), âgé de 8 ans 1/2, se met en colère sans

motif et crie. II ne se frappe jamais, il mord ceux qui se trou-

vent à sa portée, mange ses effets, les déchire, les ronge.

Souvent on le calme momentanément en lui donnant un

morceau de pain qu'il dévore, puis la colère reprend, et l'on

est obligé de lui redonner du pain deux ou trois fois. Finale-

ment au bout de deux ou trois heures, il se calme.

Guéninga..., de 15 ans, a souvent des accès de colère.

Il suflit qu'on l'el11el1re en passant ou même que l'on passe

devant lui pour qu'il se mette il crier, à dire des grossièretés,

en secouant sa tète fortement de droite à gauche (rois ou

quatre fois, puis il se calme pour recommencer quelques

heures après.

Dans tous les cas qui précèdent, les enfants attirent

l'attention des voisins par leurs accès de colère accompa-

gnés de cris. Les parents sont souvent appelés chez le

commissaire de police. Rien n'est plus facile que de cons-

tater s'ils ont oui ou non reçu des coups. Il suffit cle les

faire déshabiller. On constate alors qu'ils ne présentent

ni plaies, ni ecchymoses. C'est ce qui est arrivé pour un

enfant qui nous a été amené, notre consultation de

Bicétre, le 13 février.

. Sim... (H.), âgé de 1'2 ans, se met en colère pour des

motifs futiles, injurie sa mère, il la maison et dans la rue,

ameute les passants par ses cris, par ses « hurlements x, se

cogne la tête. Il bat sa sieur, casse les portes, brise les

objets. Ces crises de colère durent quelquefois un. quart

d'heure. Un jour, ses cris ont déterminé, devant la maison

Enfants martyrs. CXIÏ

où il habite, un rassemblement de plus de 200 personnes. Des

agents ont été appelés. La mère a été forcée de le conduire

chez le commissaire de police. Celui-ci a eu la bonne idée de

faire déshabiller l'enfant et comme il n'a constaté- aucune

trace de coups, il a renvoyé la mère.

, D'ailleurs la présence de plaies, de bosses, d'ecchymo-

ses ne serait pas toujours la preuve de sévices exercés sur

les enfants. Ces lésions peuvent avoir été produites par les

enfants eux-mêmes.

])01'. (Lucie), 11 ans, imbécillié très prononcée, très colé-

reuse et rageuse. Une légère contrariété la met de mauvaise

humeur. Elle cherche il se faire du mal à elle-même et aux

personnes qui l'entourent. Elle se tape, se donne des claques,

se roule par terre, se cogne sur les murs, casse les carreaux,

soit avec sa tête, soit avec ses mains. Quand elle est dans

une rage semblable, elle pousse des cris, des hurlements qui

pourraient faire croire qu'elle est battue. La tête, la figure,

les mains, portent souvent des ecchymoses consécutives

aux coups qu'elle se donne.

llicli (Marthe), 10 ans, atteinte d'idiotie complète, réu-

nit en elle toutes les anomalies qui caractérisent l'idiot agité.

L'insensibilité parait très prononcée et l'enfant ne cesse de

se cogner la tête, de battre les murs, les tables, comme

ferait un bélier tout en poussant des rugissements. Le

dessus de la main gauche porte des durillons formés par les

coups qu'elle se donner constamment il la tête en frappant

avec sa main. Ses mains, ses oreilles, sa tète, sont parfois

ensanglantées et offrent très souvent des ecchymoses. Elle

pousse des cris intervalles réguliers comme si on la

battait.

Pramag.. (Armand), âgé de G ans, a été admis dans notre

service de Bicêtre, le 19 octobre dernier, Il est atteint d'idio-

tie à un degré prononcé. Il se tient généralement accroupi

sur les genoux et les coudes, sans cesse agité. Il crie, pousse

des renacicmonts comme un cheval, ou fait des bruits ana-

logues à ceux d'un chat en colère. Il remue violemment sa

fête, la heurte contre tous les corps durs à sa portée, le dos-

sier des chaises, les montants de son lit, etc.. Malgré la sur-

veillance, les capelines protectives. cet enfant présente sur

cxx Enfants martyrs .

les diverses régions de la face, des bosses, des ecchymoses,

des plaies.

Des faits de ce genre ne sauraient être assez connus,

pour qu'on ne porte pas à la légère des accusations préci-

pitées, soit contre des parents, soit contre le personnel

chargé de soigner ces malheureux. Toutes les fois qu'une

plainte semblable est formulée, une enquête s'impose, non

pas seulement une enquête administrative, qui en l'occur-

rence n'aurait aucune valeur, mais aussi une enquête

médicale sérieuse. (Progrès médical , 1903, p. 132.)

Bourneville.

DEUXIÈME PARTIE

Clinique, thérapeutique et anatomie pathologique.

BOURNGVILL, Bicêlre, 1902. 1

Idiotie du type mongolien; Tuberculose pulmo-

naire ; - Appendicite tuberculeuse ;

I' : W ItOUfI\Ts\'IT.T.13.

Parmi nos malades atteints d'idiotie, il en est qui

offrent un arrêt de développement physique souvent

très prononcé : le nanisme s'ajoute à l'idiotie. Il se

présente d'ailleurs sous plusieurs formes : 1° nanisme

avec infantilisme; 2° nanisme avec obésité;' 3° nanisme

avec mymeclèmc congénital ; 'i0 nanisme avec type

mongolien (1). En attendant que nous puissions

faire une description des deux premières formes,

nous allons rapporter un nouvel exemple de la der-

nière.

Pendant longtemps nous n'avons eu que des cas

isolés d'idiotie mongolienne. Dans ces dernières

années, ils sont devenus plus nombreux, ce qui nous

a permis, en nous servant également des mémoires

publiés en Angleterre et aux États-Unis surtout,

d'en donner un tableau clinique sommaire dans le

Traité de médecine de MM. Brouardel et Gilbert. Nous

(1) On pourrait y joindre aussi le nanisme avec achor.droplasie.

4 Idiotie mongolienne.

l'avons reproduit un peu plus complet dans le Compte-

rendu de 1901 (p. 136-151), en y joignant une obser-

vation, avec portrait, suivie de l'elL ? nGl2 hislologiqte

du cerveau de deux autres cas, l'ait par MM. les Drs

Philippe et Oberthur.

Sommaire. Père, convulsions de l'enfance, caractère

. emporté; excès -de boisson. Grand père paternel, excès

de boisson, mort de cirrhose du foie. Arrière grand père

paternel, excès de boisson. Arrière grand' mère pater-

nelle morte il 'J5 ans.

Mère lymphatique, morte d'une attaque d'apoplexie. Grand

père maternel, excès de boisson, mort de tuberculose.

Pas de consanguinité. - Inégalité d ? lge de 3 ans. Deux

frères, convulsions de l'enfance. - Demi frère paternel,

malformation de la verge. - -

Conception, grossesse, accouchement, naissance, rien de

particulier. - Anomalie de la dentition. Marche à 2

ans. Gâtisme. - Parole limitée à quelques mots.

Station assise en tailleur. Description de la malade en

- 1895. Paupières fendues en amande : regard mongolien;

- blépharile chronique. Coloration des joues et du men-

ton. Oreilles petites, à caractères spéciaux. Langue

fètcdillée, hachurée. -

1895. Diarrhée verte. - Exeat le 26 mai. Amélioration.

1900. Réintégration la Fondation Vallée. Parole un peu

plùs développée; prononciation défectueuse. Tendance

à l'isolement. Caractère plutôt triste. Nanisme : (13.

centimètres au-dessous de la moyenne.

1902. Traitement thyroïdien irrégulier (janvier-mars). Brun-'

chite tuberculeuse . Ulcérations de la langue. Chute

du rectum. Cachexie progressive. - Mort. -

Autopsie. Crâne trigone, persistance de la suture 111élopi'-

que. Simplicité des circonvolutions. Méni11go-e11cé-

phalite partielle : -

Tuberculose pulmonaire. - Appendicite tuberculeuse.

Mer... (Jeanne Léontine), née à Montereau, le 3 août 1891,

entrée pour la première fois le 7 janvier 1895 et pour la seconde

fois lé 26 juin 1900..

Renseignements fournis par le père (janvier 1895) et la

grand'mé1'e de l'enfant (juin 1902). Antécédents héréditaires. =

Antécédents héréditaires. 5

Père, 45 ans, marinier, a eu de 8 mois à 2 ans une ving-

taine de fois des convulsions ; rhumatisant, excès de bois-

sons (absinthe); caractère emporté. - [Famille du père : Père,

rhumatisant, nombreux excès de boissons, mort à 50 ans de

cirrhose du foie avec hydropisie. - Mère, sobre, pas d'acci-

dents nerveux, bien portante. - Grand père pat., excès de

boissons. Grand'mère pal., 95 ans. Grand père mat.,

très fort, sobre, mort du choléra. Grand'mère mat., morte

de tuberculose pulmonaire ( ? ). - ltiett à signaler sur ses

oncles et tantes des deux côtés. Deux soeurs, l'une décédée

à 19 mois de «langueur» ; l'autre en bonne santé, veuve, sans

enfant, pas de convulsions. Dans le reste de la famille, il

n'y aurait eu ni aliénés, ni épileptiques, ni bègues, ni strabi-

ques, ni suicidés, ni prostituées, ni criminels, ni mongoliens,

ni d'autres tuberculeux.]

Mère, pas de convulsions, un peu nerveuse, aurait eu des

humeurs froides avec cicatrices consécutives; morte ans.

en 1895, d'un « transport au cerveau » peu après être accou-

chée d'un garçon, qui, en 1900, était bien portant, intelligent

mais avait eu, pendant deux ans, plusieurs fois des convul-

sions. Elle s'est réveillée au milieu de la nuit, ne pouvait plus

parler, avait le côté droit paralysé ; dans l'après-midi, elle per-

dit connaissance, eut des convulsions et mourut en 7 heures.

[Famille DE la mère : Père, excès de boissons, mort vers

40 ans de tuberculose pulmonaire. - llèoc, G6 ans, atteinte

d'une affection cardiaque. - l'as de renseignements sur les

grands parents paternels et maternels, ni sur les oncles et

tantes. - Un frère est mort jeune, on ne sait de quoi; un

autre serait bien portant et n'aurait pas eu de convulsions.

Aucun détail sur le reste de la famille. Il n'y aurait eu, ni

d'un côté ni de l'autre, aucun exemple de mongolien, de

goitreux, ni d'autres cas de tuberculose que ceux cités.]

Pas de consanguinité. (Père de Nogent-sur-Scine, mère de

Paris). - Inégalité d'âge de 3 ans, père plus âgé.

4 enfants : 1° 6 G ans (en 1895), intelligent, bien por-

tant, pas de convulsions; 2° la malade; - 3° garçon, 6

mois (en 1895), vigoureux mais a eu des cuttmdstons assez

fréquentes, durant sou premier mois ; 4° ga1'çon dont il est

question plus haut.

Notre malade. - La conception n'aurait pas eu lieu durant

l'ivresse. Grossesse, rien à noter si ce n'est que la mère

G Idiotie .mongolienne.

était contrariée d'être enceinte. Accouchement à terme,

naturel, par le sommet. - A la naissance, belle enfant, pas

d'asphyxie. Elevée au sein, qu'elle a bien pris, par sa mère

jusqu'à 18 mois. Jamais d'accès de cris, ni de convulsions.

Elle a commencé à avoir ses grosses dents, puis les incisi-

ves. La dentition complète n'aurait eu lieu qu'à un âge avancé

qu'on ne peut préciser. Marche à 2 ans. Est encore gâteuse

la nuit pour les urines. La parole est limitée à quelques mots.

On arrivait assez facilement à fixer son attention; elle parais-

sait écouter lorsqu'on lui parlait ; était « timide », ne jouait pas

avec les autres enfants; paraissait aimer ses parents. Elle

s'asseyait en tailleur, même pour manger (1). Elle a toujours

bavé un peu. Pas de succion, pas de balancement, grinçait

souvent des dents; ni krouomanie, ni clastomanie. Mange de

tout : ni constipation, ni diarrhée. Aucune maladie infec-

tieuse. Aucun accident lymphatique, si ce n'est une blepha-

ritc chronique : « Elle a toujours les yeux collés au réveil. »

Ni vers ni onanisme.

État actuel (janvier 1895). Etat général satisfaisant. Physio-

nomie peu expressive, regard sournois, comme éteint.

Tète : ronde avec saillie issez prononcée des bosses parié-

tales, symétriques. Bosse occipitale en relief.

Visage arrondi, d'apparence un peu bouffie. Front bas et

surtout étroit. Il est bombé à sa partie moyenne au voisinage

des cheveux et déprimé au-dessus de la racine du ne ? Son

défaut de largeur est accentué par ce fait que les bosses

frontales sont couvertes de cheveux. Il y a une dépression

prononcée au-dessus des sourcils, châtains, presque noirs,

unis par un fin duvet. Le front a une hauteur de 5 cent. 1/2.

Les paupières, fendues en amande, sont collées tous les

matins. L'inférieure est bleutée ainsi que la racine du nez.

Les cils assez rares, sont longs aux paupières supérieures.

Les iris sont bleu clair; les pupilles, égales, réagissent bien

à la lumière et à la distance. l'as de nystagmus, ni de stra-

bisme. Ne; moyen, formant une concavité prononcée dans

sa moitié supérieure, extrémité grosse, arrondie. Narines

égales, elliptiques. Cloison non déviée. Joues grosses, colo-

rées.

Bouche petite (i cent. 1/2), lèvre supérieure portée légère-

(1) L'enfant Lehris ? mongolien, se met également un tailleur dans sou lit,

et s'endort ainsi. -

Description de la malade. 7

ment en avant. Sillon naso-labial assez accentué. Lèvre

inférieure plutôt étroite.

Dentition : Maxillaire supérieur très rétréci latéralement

en forme d'angle, sommet antérieur. L'articulation ne se

fait que sur les molaires. Les dents sont en mauvais état.

Les incisives médianes, imbriquées, sont très petites. A côté

d'elles se trouvent des chicots de dents de lait. Une petite

molaire définitive et deux petites molaires de lait branlan-

tes. Dents de si ans en voie d'évolution. Au maxillaire

inférieur les dents sont en très mauvais état. Les incisives

médianes sont plus élevées que les incisives latérales et for-

ment avec elles un arc de cercle à peine prononcé. Les

petites molaires de lait ne sont pas encore tombées. Les

dents de G ans et les petites molaires définitives sont en voie

d'évolution. (Note de M. le Dr Duatowr, dentiste de Bicétre).

Palais légèrement ogival en avant. La langue présente

une feule à la partie moyenne, au milieu de la pointe. Sur le

bord gauche, il y a une sorte d'encoche comme s'il y avait

une perte de substance. Menton, moyennement rond, rosé.

Pas de prognathisme. Oreilles très peu écartées; ourlet

assez bien dessiné dans les deux tiers antérieurs, ensuite très

effacé; anthélix saillant, fourche bien dessinée. Les lobules

sont petits, adhérents. Elles ont 4 cent. et demi de haut et

2 cent. et demi de large.

(.'ou gros, court, adipeux.

Thorax bien conformé, ainsi que le rachis. Rien à l'aus-

cultation du poumon et du coeur. Abdomen volumineux,

proéminent, à parois flasques. Pas de hernie ombilicale.

Membres supérieurs et inférieurs réguliers ; mouvements

souples, réflexes normaux.

Organes génitaux. Seins nuls ; aréoles pâles, mamelon

tout petit. (Une tête de grosse épingle). Pénil saillant. Grandes

lèvres un peu épaisses. Petites lèvres triangulaires, rudimen-

taires. Capuchon saillant. Clitoris tout petit. Orifice de l'hy-

men circulaire. Vulve un peu rouge. Anus, rien.

Les cheveux sont blonds, peu abondants surtout au niveau

du tourbillon. Pas d'épi. l'eau fine, blanche, glabre, sans

cicatrice sauf aux liras des cicatrices de vaccin. Pas de gan-

glions.

M... ne se sert pas de la cuillère, il faut la faire manger.

La mastication et la déglutition s'exécutent bien. L'enfant

n'est ni salace, ni vorace ; préfère la panade, les légumes, la

viande, les mets sucrés ; boit le vin, le lait avec avidité ;

selles régulières ; gâtisme.

8 Idiotie mongolienne.

Mer... ne sait ni s'habiller, ni se déshabiller, ni se laver.

La vue, l'ouïe, l'odorat et le goût semblent normaux. Elle

aime entendre la musique. - Son sommeil est bon. - carte-

tère doux, s'amuse seule avec un chiffon, un cordon, joue à

cache-cache, dévalise les armoires, embrasse ses compagnes,

leur sourit, est sensible aux reproches, affectueuse avec ses

parents. Inattention est facile à fixer. La parole est

limitée à quelques mots. L'enfant ne cherche pas à faire

comprendre ce qu'elle désire. En résumé, idiotie prononcée.

le février. Diarrhée verte, fétide, abondante, qui cesse au

bout de trois jours.

11 février. Chute des cheveux sur toute la partie posté-

rieure de la tète.

3-9 avril. Revaccinée sans résultat.

2G mm. Le père étant marinier, n'a pas de domicile

fixe : l'un de ses enfants est né à Saint-Maur, un autre il

Paris et notre malade à Montereau. Le département de Seine-

et-Marne a demandé son transfert, le père s'y refusant, on

signe la sortie. -

Depuis son admission, cette enfant a fait beaucoup de pro-

grès : elle prononce plusieurs mots distinctement, commence

à se servir de la cuillère, porte le pain à sa bouche, boit

seule. Elle est devenue presque tout à fait propre, va toute

seule sur le vase; se cache quand elle s'est oubliée. Son

attention, sa compréhension se sont développées.

De mai 1895 au 26 juin 1 ! Jllli, l'enfant est restée d'abord avec

sa grand'mère, puis elle a été envoyée à la campagne dans le

Limousin. Là, on a essayé plusieurs fois de lui faire suivre l'é-

cole ; nulle part on ne voulait la garder " parce qu'on ne pou-

vait rien en faire", parce qu'il faudrait, au dire des maîtresses,

une personne pour s'occuper d'elle seule, et qu'elle battait les

autres enfants. Le caractère de Mer... est triste, puis brus-

quement gai ; elle a des petites colères et des impulsions

subites, tire les cheveux des enfants qui jouent avec elle,

jette les objets par la fenêtre. Elle prend un livre et une

baguette et imite la maîtresse faisant l'école. Elle cligne des

paupières et plisse son front, ce qu'elle ne faisait pas au-

trefois.

Son père s'est remarié avec la soeur de sa première femme.

trois enfants : 1° fille, G ans, pas de convulsions, bonne santé ;

2° garçon avait la verge en vrille, n'urinait pas comme tout

État de la malade en 1900. 9

le monde, conduit aux Enfants-Malades, opéré, mort trois

jours plus tard par des convulsions ; 3" garçon bien portant,

pas de convulsions.

Température et la première entrée.

10 Traitement thyroïdien.

1901. Juin. - Elle est tranquille, a une tendance pronon-

cée à l'inertie, préfère; rester seule dans un coin que de

jouer avec ses camarades. Caractère triste. Elle pleure il la

moindre contrariété. Elle est très lente à s'habiller et se

déshabiller. A la gymnastique, on a beaucoup de peine à lui

faire exécuter quelques mouvements. -1\It : me traitement et

douches. Etat stationnaire.

Décembre. Même état. L'enfant mesure 1 m )2, elle devrait

avoir 1 m 249, soit une différence de 0 m 129.

1902.- A janvier. Traitement thyroïdien : 0 gr25 pen-

dant une semaine ; 0 gr 50, puis 0 gr 75, enfin 1 gramme.

Mars. - l3ronchite légère à droite, engelures.

11 mars. - La température étant de 39°, 2 on suspend la

glande thyroide, qui n'est reprise que le 23 mars.

12 avriL - Quelques râles au sommet du poumon droit.

Guérison des engelures. Suppression du traitement il cause

des accidents pulmonaires et des poussées de fièvre. Le

poids a baissé de 1 kg. 700, la taillc s'est augmentée seulement

d'un centimètre.

28 mui. - Depuis le commencement du mois, toux de plus

en plus fréquente, dyspnée, élévation de la température (tu-

berculose).

1'" j¡¡il/. - : llt}ll1cs symptômes pulmonaires. Appétit tris

faible, vomissements, chute du rectum. Langue rouge, dou-

loureuse, fissurée à sa partie moyenne, son extrémité est

comme rongée. On ne peut savoir si M.. s'est mordue ou si

la lésion est duc à la succion. Ces accidents ont été notés il

y a un mois. Amaigrissement, sommeil mauvais à cause de la

toux. La température se maintient élevée. Même état du corps

et des organes génitaux.

[2 juin. L'affaiblissement et l'amaigrissement continuent,

la toux et l'oppression persistent. l'as d'expectoration. La tem-

pérature est toujours élevée. La langue va mieux; il n'y a

plus d'inllamll1af,lon; le bout rongé il gauche semble repousser.

' 1.')Jmn. T P. 3ï° le matin, 37°, 3 le soir.

16 juin. On constate ce matin que la figure est bouffie ;

les pieds et les mains sont légèrement enflés. Soif vive, lan-

gue sèche. Persistance de tous les autres svmptomcs. 'rIt.

3go,2. 2.

- l7juin.-Lafaiblessevenconauâmcutu.Gèuedeladilu-

tition. Crise intense de dyspnée; syncopes répétées. La

malade meurt à 3 heures du matin.

poids après décès : la kilog.

Mensurations, poids, taille. 11

1 Traitement thyroïdien.

Traitement thyroïdien. 13

14 Idiotie mongolienne : crâne.

Idiotie mongolienne : cerveau. 1;'

la frontale et la pariétale ascendantes et le tiers antérieur du

lobe temporal. Il en est de même à la face interne, sur la

première circonvolution du corps calleux, ainsi que sur le

face orbitaire du lobe frontal. Il y a de nombreuses adhé-

rences de méningo-encéphalite sur le pli pariétal inférieur,

le pli courbe, les deux tiers postérieurs du lobe temporal et

le lobe carré.

Les trois circonvolutions frontales sont bien dessinées,

mais un peu petites, F2 envoie à F3 un pli de passage d'envi-

ron 01" 03. L'insertion de 1' : 1 sur la frontale ascendante est

maigre. A est peu développée, très irrégulière. Le sillon

de liolando est assez profond. P A décrit plusieurs sinuo-

sités, est médiocrement volumineuse et envoie un pli de pas-

sage curviligne à Pli. - Les plis pariétaux lez, P2 et P3 sont

assez développés, L O est plutôt peu volumineux. L I pré-

sente quatre digitations. 'l ? grêle, envoie un pli rayonnant

qui recouvre la 4 ? digitationde Ll, T2 est assez grosse ainsi

que T : i. La circonvolution de l'hippocampe et la corne d'Am-

mon n'offrent rien de signaler. (l. I).

' Face interne. 1 , peu sinueuse, reçoit un pli de passage

de C C ( ? L P a l'aspect d'une grosse masse quadrangulaire

coupée. Le lobe paracentral est largement confondu en avant

avec 1 , L Q est large et en avant se confond avec C C C.

Le coin, petit, est nettement distinct. De même que sur la

face externe, le lobe occipital est petit. V L., C C, couche

optique, corps ttrié, rien de particulier. D'une façon géné-

rale les sillons sont peu profonds. (PL. II).

En résumé, arrêt relatif des circonvolutions, plis de pas-

sage très peu nombreux, volume et poids au-dessous de la

normale.

Hémisphère gauche. Autant que nous avons pu en juger,

cet hémisphère, non décortiqué, conservé pour 1'8.vamen his-

tologique (Voir plus loin). parait ressembler iL l'hémisphère

droit. t.

eau. Thymus, 4 gr. Corps thyroïde assez volumineux

(12 gr.).

Thorax. Poumon gauche : La plèvre viscérale est

épaissie ; foyer caséeux en voie de ramollissement au sommet ;

les lobes adhèrent entre eux et sont farcis de tubercules.

Poumon droit : Plèvre moins épaissie; adhérences moins

16 IDIOTIE mongolienne : tuberculose; appendicite.

intimes des lobes; petite caverne et tubercules au sommet.

Lobe inférieur à peu près sain. Crellr, rien ; trou de Dotal

oblitéré.

Abdomen. - Foie, légère dégénérescence graisseuse; pas

de calcul ; vésicule biliaire presque vide. Raie, reins, cap-

sules surrénales, rien. L'appendice vermi forme, long de

0m 06, recourbé sur lui-même, adhère fortement au ccecum

contre lequel il est aplati en forme d'S. Le long de l'appen-

dice, ganglions engorgés. L'orifice de l'appendice communi-

que avec une cavité dont la paroi est infiltrée de tubercules.

On dirait que l'appendice a été détaché à sa base et relié au

coecum par cette sorte de cavité. Pas d'autres lésions tuber-

culeuses sur l'intestin grêle et le gros intestin. Pas d'altéra-

tions des organes génitaux.

Poids des organes

Idiotie mongolienne. t7

ciale, vieillote, moue, dédaigneuse; plissement et rides

du front; paupières fendues en amande, regard parti-

culier, coloration des joues et du menton,*voix un peu

masculine, langue fenclilliée, présentant des crevasses

en tous sens, constituant des carrés; conformation

typique des oreilles (toujours la môme chez ces

malades, oreilles mongoliennes), station assise en

tailleur que nous avons observée plusieurs fois,

nanisme : en 1909, à onze ans, sa taille n'était que

de alors qu'elle aurait dû être de l'"25 (1).

Après avoir constaté par la radiographie que Mer...

n'avait pas encore les cartilages épiphysaires des

genoux soudés, nous l'avons mise au traitement th-

i·oïrlien : 0 gr. 25 de glande thyroïde fraîche de mou-

ton pendant une semaine, puis 0 gr. 50, - 0 yr. 75 et

un gramme. Sa température rectale, plutôt un peu

inférieure à la normale, s'est élevée vite et souvent

nous avons eu des élévations thermiques, qui nous ont

obligé de suspendre le traitement. Comme l'enfant a

eu, durant celle période ('1 janvier - 9 mars) des pous-

sées de8bronchite, comme les doses de glande thyroïde

étaient minimes ci. de plus, souvent interrompues,

nous inclinons à mettre les élévations thermiques plus

sur le compte de la bronchite tuberculeuse que sur

celui du médicament. Le résultat a été médiocre : un

accroissement d'un centimètre. Il paraît être bien

attribuable au traitement thyroïdien car, depuis deux

ans (1900 et 1901) la taille était demeurée stationnaire

(li12). En raison de la maladie intercurrente, nous ne

pouvons tirer aucune déduction relative au poids qui

est allé diminuant progressivement.

(1) Nous aurons : 1 tracer un p1l'allèle entre les différentes formes de nanisme,

surtout le n. U1u.\'oedf ! ma ! cllx. Disons, dès maintenant que la l'orme de la tête,

l'aspect de la physionomie est très différente; la fontanelle antérieure, encore

ouverte chez le mywedémateus est fermée chez, le mongolien. Le premier est

surtout végétarien, le second est omninnre, etc.

z18 . Idiotie mongolienne;

III. Signalons la persistance de la suture métopi-

que, le petit nombre des plis de passage du cerveau.

la méningo-encéphalite et enfin l'appendicite tuber-

culeuse. - z

Bibliographie. Aux indications bibliographiques que

nous avons données dans le Compte-rendu de 1901 (p. 146-

147), nous ajouterons les suivantes :

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iri.rs, décembre 1001). -

II.

Examen histologique de deux cerveaux d'idiots mon-

goliens; -,

PAR CI. pnlUPl'E et J. ORERTI1UR.

L'examen a porté sur plusieurs circonvolutions choisies

dans les différents lobes du cerveau (circonv. rolandiques,

lobule paracentral ; 1° et 2e circonv. frontales; circonv.

occipitales : circonv. temporales ; etc.). - Colorations à

l'aide des principales méthodes : hématoxyline de Weigert-

Pal ; bleu polychrome d'Unna-Niss) ; fuchsine picriquée de

van Gieson ; hématoxyline alunée, etc.

- 10 Méninges. Sur des coupes verticales et passant assez

exactement par le centre de chaque circonvolution, les

méninges molles, pie-mère et arachnoïde, sont partout

épaissies, il un degré variable suivant les régions ; mais, tou-

jours le maximum des lésions siège au niveau de l'arach-

noïde viscérale, la pie-mère étant sensiblement moins frap-

pée par le processus. Ainsi, là où existe le plus grand

développement de la méningite, nous rencontrons une véri-

table membrane épaisse de plusieurs millimètres, membra-

ne nettement constituée par des fascicules conjonctifs assez

denses; beaucoup de ces fascicules ont été coupés paral-

lèlement si bien qu'ils apparaissent placés les uns à côté

des autres, souvent ondulés et décrivant des sinuosités

plus ou moins irrégulières. Dans leurs intervalles se voient

également des fibres élastiques en grand nombre. Fré-

quemment, cette aT7,ch7ziEis fibro-))IcSttCf2f.e en arrive à

constituer, du côté de la face libre des méninges, des

végétations assez volumineuses, semées de distance en

distance, et souvent coiffées par les cellules endothéliales

20 Idiotie mongolienne.

de la séreuse arachnoïdienne, cellules aisément recon-

naissantes à leurs lames protoplasmiques qui sont étalées

et pourvues d'un gros noyau saillant. Ces productions

hyperplastiques sont intéressantes à signaler, puisqu'elles

démontrent à elles seules toute l'intensité de l'inflamma-

tion méningée.'

Les vaisseaux de la méninge, artérioles et veinules, sont

souvent dilatés, présentant des tuniques externes franche-

ment épaissies, mais sans que les tuniques, interne ou

moyenne, paraissent altérées. -

Outre la prolifération des faisceaux conjonctifs de

l'arachnoïde viscérale et des tuniques externes des vais-

seaux, il convient de noter également la présence d'amas

cellulaires, qui se montrent un peu partout,. soit dans les

espaces conjonctifs élargis, soit autour des vaisseaux;

Toutefois, ces amas cellulaires ne sont jamais très nom-

breux. Il parait donc s'agir plutôt d'un processus méningé

à évolution assez lente.

Immédiatement en dedans de l'arachnoïde ainsi épais-

sie, nous rencontrons les travées conjonctives, elles aussi

notablement épaissies : travées qui, à l'état normal,

cloisonnent les lacs sous-arachnoidiens du liquide céphalo-

rachidien. De plus, les mailles formées par l'enchevêtre-

ment de ces travées sclérosées, contiennent fréquemment

des cellules blanches, gl. mononucléaires de toutes dimen-

sions ou gl. polynucléaires, rangés en amas d'ailleurs

assez discrets ; également des cellules conjonctives

enflammées, reconnaissables à leur masse protoplasmique

volumineuse et membraniforme, pourvue d'un noyau ova-

«-]aire gros et clair et de prolongements multiples et

ramifiés.

La pie-mère est certainement moins altérée, bien que

son épaississement existe partout où il y a une a1'8.chnitis

suffisamment développée.

2°. Ecorce cérébrale. La.couche névroglique sous pie-

mérienne est notablement augmentée d'épaisseur. Au

niveau de certaines régions plus particulièrement mala-

des, généralement là où existe le maximum de dévelop-

pementdes lésions méningées (lobule paracentral ; circonv.

Examen IIISTOLOGIQUE. 21

temporales), cette couche névroglique a doublé d'épaisseur.

De plus, elle est très dense, constituée par un feutrage de

fibrilles bien lassées et par des cellules-araignées souvent

volumineuses et entourées de prolongements gros et nom-

breux, bien capables d'être suivis sur une grande lon-

gueur. Enfin, de ses portions les plus externes se détachent,

en assez grand nombre, de grosses fibrilles qui paraissent

prendre insertion sur le feuillet le plus interne de la pie-

mère voisine, de façon à réaliser une véritable symphyse

méningo-corticale, comme il arrive dans toute encéphalite

suffisamment intense.

Les fibres tangentielles sont altérées surtout au niveau

de la couche d'Exner. Bien que ce feutrage n'ait nulle part

disparu, il est très-peu riche en fibres myéliniques, dans

toutes les circonvolutions examinées, même au niveau des

circonvolutions du lobule paracentral qui, à l'état normal,

contiennent un si grand nombre de fibres tangentielles. En

outre, les fibres encore existantes sont grêles, assez espa-

cées les unes des autres, mal orientées dans leur direction

générale, puisque ces fibres, au lieu de rester parallèles à

la surface de la circonvolution, deviennent obliques ou

môme perpendiculaires cette surface.

A mesure qu'on examine les couches corticales situées

plus profondément, les fibres tangcntielles augmentent

certainement, mais tout en restant de nombre sensible-

ment inférieur à la normale. Dans les circonvolutions où

existent bien nettement les feutrages super et inler-

radiaire ? , ces feutrages S3 : tt; p'u denses, et, sur les prépa-

rations colorées à l'aide de l'hémalol3·line de Weigert-Pal,

ils ne forment plus les bandes foncées qui, à l'état nor-

mal, se distinguent aisément d'avec les autres couches

faiblement teintées.

Cette même diminution de nombre se retrouve pour les

fibres radiaires; leurs fascicules sont peu denses, assez

espacés les uns des autres, même quand ils abordent le

centre ovale de chaque circonvolution.

Les couches cellulaires sont certainement bien moins-

atteintes que les fibres nerveuses, tangentielles ou radiai-

res, si l'on s'en rapporte aux résultats fournis par les

22 Idiotie mongolienne.

meilleures techniques actuellement employées, en parti-

culier par la méthode de Nissl. Sur les préparations colo-

rées à l'aide de cette dernière méthode, particulièrement

précieuse pour l'étude des colonnes cellulaires de l'écorce

cérébrale, ou remarque aisément le grand nombre des

cellules nerveuses, généralement bien orientées; c'est

ainsi qu'on retrouve les différentes couches bien connues

(Meynert), et, dans chacune de ces couches, les cléments

cellulaires sont nets, possédant leurs principaux caractè-

res de morphologie et de structure habituels; même, les

grandes cellules pyramidales des circonvolutions rolandi-

ques sont nombreuses et bien développées. Sans doute, fré-

quemment, les masses protoplasmiques sont craquelées,

fissurées, vacuolaires ; souvent même, elles sont le siège

d'une désintégration moléculaire surtout accusée dans les

portions les plus périphériques ; mais le noyau reste intact,

sans état chromopliiliclue nettement appréciable, sans

atrophie ni déplacement bien marqué. De même, l'espace

pèriccllulaire, souvent élargi, est parfois rempli par 2 et 3

noyaux fortement teintés par les hématoxylincs (neurono-

phagic, vraisemblablement par des noyaux lymphocytai-

res : plus exceptionnellement par des noyaux névrogliques).

Toutefois, malgré celte ncuronophagic et les lésions cel-

lulaires, évidentes, que nous venons de décrire, les élé-

mcnts persistent en très grand nombre, de telle sorte que

les altérations précédentes paraissent plus vraisemblable-

ment être sous la dépendance de processus aigus et termi-.

naux; les caractères de ces altérations plaident plutôt en.

faveur de cette dernière interprétation. Quoiqu'il en soit,

nous devons souligner le contraste, très-net, qui existe

entre les lésions, considérables, des fibres tangentielles

et radiaires d'une part; et les altérations minimes, pro-

bablement terminales, des cellules nerveuses, d'autre part.

En résumé, chez ces deux malades, nous avons cons-

taté l'existence des lésions méningées et corticales, que

nous avions déjà signalées l'année dernière dans deux

autopsies (Compte-rendus; de 1902.) Actuellement,

nous désirons simplement souligner la physionomie très

spéciale du processus pathologique rencontré dans tous

Examen histologique. "23 3

ces cas. Il ne s'agit certainement pas de la méningo encé-

phalite ordinaire, qui détermine des lésions destructives

intenses dans le cerveau tout entier, avec microgyrie consi-

dérable et agénésie des principaux faisceaux de projection

et d'association. Les altérations sont plus discrètes, plus

superficielles, puisqu'elles frappent surtout les fibres tan-

gcntielles, tandis que lescellulesnerveusessonthienmoins

malades. Très vraisemblablement, c'est une forme spéciale

de méningo-encéphalite corticale surtout prononcée clans

les régions les plus superficielles de l'écorce cérébrale. Le

processus nous a paru avoir envahi la presque totalité des

circonvolutions, dans tous les lobes du cerveau, avec une

intensité sensiblement égale. Cette méningo-encéphalite

des régions superficielles du cerveau a cntrainc la dimi-

nution assez considérable des libres nerveuses, tangentiel-

les et radiaires, quelle que soit la région examinée. Par

contre, les cellules nerveuses, il part un certain degré d'alro-

phie, nous ont paru suffisamment nombreuses, au niveau

de toutes les couches de l'écorce cérébrale. La processus

pathologique a été généralement plus intense chez Mer...

que chez Conné... Il) mais, dans les deux cas, il avait

sensiblement les mêmes caractères généraux.

xi) L'observation de Conné... a été publiée dans le Compte-rendu de 1C01,

1). 136.

. III.

,.

Imbécillité congénitale, probablement aggravée par

.- l'alcoolisme de la nourrice, qui a déterminé une

. méningite : Type mongolien ;

Par BOURNEVILLE ET J. DOYEn.

rS'0\IrtAIIiC. - Père, rhumatisant, très emporté. Grand'père

- paternel mort d'un «coup d'apoplexie ». il/ère, très ner-

veuse (Cuit paquet de nerfs», sujette à des accès d'oppres ?

sion antérieurs au mariage; toujours frigide dans, les

rapports sexuels, acceptant malles grossesses. Grand-

père maternel phtisique. Grand'mère maternelle,

morte d'apoplexie cérébrale. - Oncle maternel, très ner-

' veux, plusieurs congestions cérébrales, la dernière suivie

de paralysie transitoire. - Son fils, cousin germain de la

malade, mort de méningite. - Tante maternelle sujette à

des accès d'asthme. Frère, mort de méningite avec

convulsions à G mois. - Autre frère bien portant.

Pas de consanguinité. Inégalité d'âge d'un an (mère plus

âgée.) -

Grossesse, idées noires ? Accouchement t à mois et demis

Asphyxie à la naissance. Prise du sein difficile, protrtc-

sion de la langue à la naissance. Allaitement de 15 jours

par la mère, puis par une nourrice alcoolique. - Ménin-

gite à 6-7 mois. Avant, l'enfant paraissait déjà anor-

male. A un an, elle semblait n'avoir que 6 mois.

Première dent à 14 mois : dentition anormale. Marche

à 2 ans, Début de la parole après 3 ans, évolution très

lente et incomplète à l'entrée. Propre vers 10 ans

Caractère irritable. Affectivité, esprit d'ordre.

Mouvements lents, maladroits. Tendance ât'itnitation.

Réglée à 10 ans 1/2. Congestion pulmonaire à 6 ans.

Rougeole à 12 ans. Écolage nul. Manies bizarres,

Idiotie mongolienne. 25

pyromanie, impulsions. - Traitement médico-pé.dagogi-

que, disparition des manies, amélioration générale.

Marcelle F.... , née le 16 octobre 1882, est entrée à l'Ins-

titut médico-pédagogique le 2 juin 1898, sortie le 31 mai 1901.

Antécédents héréditaires. Père, 47 ans, pas d'accidents

nerveux graves; mais très emporté, « une soupe au lait. »

Rhumatisant, « tout le monde l'est dans ma famille. » Pas de

dartres, pas d'accidents vénériens. [Père, mort d'un coup

d'apoplexie, à 65 ans, sobre. Mère, morte en couches,

d'une hémorrhagie. Grand-père paternel, mort de vieil-

lesse, à 80 ans ainsi que la grand'mère paternelle. Pas de

renseignements sur les grands-parents maternels, ni sur les

oncles et tantes des deux côtés. Un frère, bien portant

sans enfant. Deux demi-soeurs, en bonne santé.]

Mère, 48 ans, aurait eu de l'asthme avant le mariage; a

eu depuis très souvent des accès d'asthme, parfois épouvan-

tables ; elle n'a plus de grandes crises depuis qu'elle a des

congestions du foie, des coliques hépatiques; très nerveuse,

« un paquet de nerfs». N'a jamais senti aucun plaisir dans

les rapports sexuels, plutôt du dégoût ; accepte ses gros-

sesses avec beaucoup de peine : elle « n'était pas faite pour

être mère de famille ; » n'a jamais éprouvé de bonheur dans

la maternité. Malgré cela, excellente femme, travailleuse,

« coeur d'or», [Père, mort poitrinaire à 39 ans. Mère,

morte à G3 ans» d'une paralysie cérébrale, d'une apoplexie

cérébrale; variqueuse. -Grand-père paternel mort à 49 ans,

on ne sait de quoi. Grand'mère paternelle morte assez

âgée, subitement. Grand-père maternel mort assez âgé à

la suite de chagrins dus à des pertes d'argent. Grand'mère

maternelle morte à 55 ans, on ne sait de quoi ; aurait eu des

pertes utérines. Un frère, très nerveux, a eu trois légères

congestions cérébrales (48 ans), actuellement mal portant; a

eu un peu de paralysie après la dernière congestion, mais

son intelligence n'a pas baissé. Il a ou un enfant mort de

méningite ; des deux autres, l'un a eu une coxalgie et boite,

mais n'a pas eu de convulsions, l'autre se porte bien. - Deux

soe¡¡.rs : une a 3 filles et 1 garçon en bonne santé, elle-même

est asthmatique, très calme ; l'autre, calme, a une fille bien

portante, mais nerveuse, sans convulsions- de l'enfance, a eu

un garçon mort du choléra. Pas d'autres apoplectiques,

pas d'aliénés, etc. dans le reste de la famille.]

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902. 3

G IDIOTIE mongolienne.

Pas de consanguinité ; inégalité d'âge d'un an, mère plus

âgée. Dans les deux familles aucun cas semblable à Mar-

celle.

Trois enfants et une fausse couche : -10 garçon, mort de

méningite avec convulsions à (i mois ; 2° noire malade;

3° fausse couche à G semaines, à la suite d'une émotion pro-

voquée par la chute d'une suspension à l'étage supérieur;

4° garçon, 11 ans, bien portant, pas de convulsions, apprend

bien.

Antécédents personnels. Conception, rien à relever. - Gros-

sesse, pas de chagrins, mais des idées noires, qui du reste ont

persisté jusqu'à maintenant. « Elle ne peut pas se trouver

heureuse. » Accouchement à 7 mois 1/2 à la suite d'un

voyage de Rambouillet à Paris (pas de chute) ; facile, par la

tête, avait perdu « pas mal d'eau le matin. » - A la nais-

sance, l'enfant était asphyxiée, on a été obligé de la fouetter,

revenue au bout de 6 minutes; était courte, potelée, bien

formée, avait des ongles. Prise du sein très difficile : prolru-

sion de la langue.

Allaitée par sa mère pendant 15 jours, puis confiée à une

nourrice qui s'est mise à boire du vin et de l'eau-dc-vie ; l'en-

fant avait 6 mois quand on s'en est aperçu, cela durait depuis

six semaines. La nourrice a été trouvée ivre-morte ; le len-

demain une méningite très-grave s'est déclarée chez l'enfant;

pas de convulsions. Avant la méningite, l'enfant n'avait pas

« de connaissance bien nette. » La méningite a duré 8-10 jours;

pas de paralysie.

Première dent à 14 mois ; les grosses dents ont paru les

premières, les incisives, les dernières. (Son père a eu sa pre-

mière dent à 8 mois). Dentition complète, on ne sait.

Elle a marché à deux ans (son frère à 13 mois). Parole,

début après trois ans. A 10 ans, elle parlait à peine (son frère

a bien parlé à 15 mois). Réglée à 10 ans 1/2, sans accident :

écoulement peu abondant ; pas de pertes blanches. Propre

vers 9 ans, (son frère vers 14 mois). Sommeil toujours agité,

un peu moins depuis quelque temps. Pas de céphalalgie.

Congestion pulmonaire très grave à 6 ans. Caractère

irritable, il ne faut pas la taquiner. Pas de clastomanie ( ? ). Ne

serait pas menteuse ( ? ). lion appétit, sans être gourmande ( ? ).

Très caressante. Susceptible d'attention, observatrice,

rien ne lui passe inaperçu, mémoire fidèle. Elle s'habille et

se déshabille, mais très lentement, se lave la figure, se sert

du couvert, essaie d^ coudre, mais ne sait pas, enfiler son

. Antécédents personnels. 27

aiguille, essaie de faire son lit, mais sans y réussir, met et

dessert le couvert. Elle n'a jamais pu apprendre à lire, il

écrire et à compter.

État à l'entrée. - Etat PHYSIQUE. - La physionomie exprime

l'hébétude, même quand le sourire se manifeste. Les che-

vettx sont bien plantés, châtains, assez épais, longs et un peu

grossiers ; ils n'empiètent pas sur le front. - Celui-ci est assez

bombé, plutôt large. Les bosses frontales rapprochées, sont

peu saillantes ; il y a deux rides à droite. Pas de dépres-

sion au niveau des arcades sourcilières. Les sourcils sont

bruns, clairsemés, légèrement arqués, sans solution de conti-

nuité. Les yeux sont assez ouverts, fendus en amande : iris

gris, pupilles dilatées môme en pleine lumière, strabisme

convergent de l'oeil droit ; paupières plutôt fortes, relevées il

leurs commissures externes, cils bruns raides et clairsemés.

Blépharite ciliaire datant de l'enfance.

Le ne : est petit, gros, saillant, relevé à son extrémité, très

différent de celui de ses parents, narines visibles de face,

ouvertes surtout celle de droite, ailes à peine dessinées.

Lèvre supérieure fuyante, mince, en retrait; lèvre inférieure

saillante, peu épaisse, retombante. Bouche presque toujours

ouverte; quand les lèvres sont closes, la bouche dessine un

croissant à branches retombantes. Langue épaisse, large,

longue, paresseuse, se mouvant difficilement. Elle présente de

chaque côté de la ligne médiane, à 2 cent. de la pointe, en

allant en arrière cinq ou six fentes un peu curvilignes, lon-

gues de 2 à 3 centimètres, s'étendant presque jusqu'aux bords,

non douloureuses (Langue mongolienne). - Dents mauvai-

ses ; mâchoire supéreure : incisives médianes espacées, incisi-

ves latérales cariées, pas de canines ; les premières molaires

sont cariées, les 'les manquent, les 3es sont également cariées.

Mâchoire inférieure : incisives longues, étroites, espacées ;

trois molaires à gauche, quatre à droite, toutes avec un point

de carie. Voûte du palais étroite, un peu ogivale. Le

menton est étroit, arrondi, rosé. - Les joues sont peu sail-

lantes, colorées. Les oreilles sont très petites, égales et

symétriques ; hélix et anthélix forts distincts, lobule très

petit, complètement adhérent.

Le crâne est légèrement ovoïde, petit, bosses pariétales et

occipitales il peine saillantes.

Le cou est assez long, circonférence médiane 31111 G.

Thorax un peu plat, seins bien dessinés mais peu saillants,

diam. vertical 0'" 08 à droite; O1" On à gauche; diam. horizon-

28 . Idiotie mongolienne.

tal 0m 10 à droite; 0m 11 à gauche. Aréole rosée, mamelon bien

dessiné 0m 005 à 0m 006. A l'oeil le sein gauche est plus bombé.

Bassin large, ventre assez gros. Colonne vertébrale légère-

ment déviée à gauche clans la région dorsale, et adroite'dans

la région lombaire.

Organes génitaux : poils noirs, longs, assez abondants sur

tout le pénil, sans trainée vers l'ombilic, commençant à enva-

hir les aines; poils longs et abondants sur les grandes lévres

qui sont assez grosses, petites lèvres débordant les grandes

lèvres; capuchon petit, clitoris peu volumineux, hymen cir-

culaire, non frangé ; anus rien.

Alembres supérieurs bien proportionnés, un peu courts

cependant. Mains petites, larges, doigts courts, légèrement

palmés, ongles bien plantés.

Membres inférieurs assez longs, cuisses fermes, jambes

grêles ; pieds courts et plats.

2° État physiologique. Marcelle est plutôt inerte. En

récréation, elle restera assise, mais ne se joindra pas à ses

compagnes pour jouer. La marche est lente, les jambes

sont écartées, les genoux se maintiennent en demi-flexion,

le tronc est un peu incliné en avant; cette dernière attitude

est conservée quand Marcelle est assise. Le saut est impos-

sible, la course aussi. Les mouvements sont limités, même

exercés passivement, les articulations sont incapables d'ex-

tension complète, pas de craquements. Souvent, en récréa-

tion, sur la pelouse, elle s'assied en tailleur.

A table, l'enfant se tient assez bien; se sert de la cuillère

et de la fourchette, coupe sa viande elle-même; boit seule,

mais ne tend pas son assiette, si on l'oubliait ne demande-

rait pas; lente à manger, mastication très difficile. Les

fonctions digestives paraissent s'effectuer assez bien, pas de

somnolence après les repas ; les selles sont quotidiennes,

normales. Pas de gâtisme proprement dit, mais la moindre

surprise, la moindre émotion suffit pour provoquer chez elle

une miction involontaire : c'est ainsi qu'à sa première douche,

à ses premiers exercices de gymnastique, et sous l'influence

de la peur à la vue d'un escargot, elle a uriné sous elle.

Le sommeil est profond, mais plaintes en dormant, et souvent

ronflement bruyant.

Organes des sens : la vue paraît assez bonne, M.. reconnaît

les personnes de loin, mais ne distingue pas les couleurs.

L'ouïe parait normale ; M.. aime la musique et le chant, mais

chante horriblement faux. Le goût est peu développé, M..

Description de la malade. 59

mange indistinctement de tout, sans présenter de salacité.

Le toucher est obtus, du reste la main est idiote, la pré-

hension est faible, 111.. laisse tout tomber, ne peut tenir ni

crayon, ni aiguille. L'odorat est assez développé, M.. aime

les odeurs, est flaireuse.

Pas de mouvements involontaires et spasmodiques; grima-

ces de la face presque continuelles mais non saccadées.

Marcelle est réglée, mais l'écoulement ne se produit pas

régulièrement. Le jour même de l'entrée (2 juin), époque appro-

ximative des menstrues, elle a eu à table comme une fai-

blesse, elle n'a pas mangé et on a dû la coucher; le lendemain

on a trouvé deux gouttes de sang sur son linge, et tout s'est

borné la ; le 15 juillet, même indisposition suivie d'un écoule-

ment aussi restreint. (Voir p. 34).

La parole est limitée il des mots mal prononcés, d'une voix

d'homme désagréable. Pas de phrases, quelques verbes à

l'infinitif. Parmi les sons vocaux o, eu, ou et sont données

o ; les labiales et les dentales sont correctes, toutes les Miman-

tes (s, z, cl, sont transformées en ch ; les liquides y compris

le r guttural sont bonnes ; les gutturales sont changées en

dentales, si ce n'est, chose bizarre, quand elles sont suivies du

son r; les autres syllabes complexes sont toutes défigurées.

3° État PSYCHOLCx.tQl'E. L'mte(f/e)tce est très peu déve-

loppée et correspond à cclle d'un enfant de 2 ans. Marcelle

comprend ce qu'on lui dit, se rend compte de ce qui l'entoure,

mais ses perceptions ne sont que sensorielles. La compréhen-

sion est très faible et surtout très laborieuse. L'attention est

apparente mais presque impossible. La réflexion n'existe pas.

L'imitation existe. Quant aux autres opérations intellectuelles,

elles sont tellement rudimentaires, qu'on ne peut en relever

la moindre manifestation. - La mémoire existe, surtout la

mémoire auditive.

Marcelle n'a jamais pu rien apprendre; elle ne sait aucune

lettre, et ne peut pas tenir un crayon; ne connaît aucune

couleur, n'a pas du reste la moindre connaissance des choses

usuelles, à l'exception toutefois de ce qui a rapport à ses

vêtements. r

4" Etat instinctif ET moral. Peureuse, aime la société;

a le sentiment de la propriété, jalouse de ce quilui appartient.

Propre, coquette, ordonnée. Le bien et le mal se com-

fondent avec le permis et le défendu. Très entêtée ; ne fait

que ce qu'elle veut ; se débat, griffe et donne des coups de

30 IDIOTIE MONGOLIENNE.

pieds quand on veut lui faire faire ce qui ne lui plait pas.

Manies bizarres : de sucer le nez d'une de ses compagnes, de

les griffer à la figure. Affectueuse néanmoins, s'attache

vite.

Traitement : Bains, douches, gymnastique, travaux du

ménage, exercices scolaires.

1898. Septembre. 1\I.. fait la suspension aux échelles

convexe et horizontale. Donne bien tous les sons vocaux;

fait quelques petites phrases au moyen des articulations cor-

rectement données. Connaît toutes les voyelles et les trace

d'après modèle. Compte jusqu'à 10. Connaît le rouge, le vert,

le jaune. - Les manies n'ont pas reparu.

Décembre. Fait en gymnastique les mouvements d'en-

semble. Marche le corps droit. Donne sur ordre les guttu-

rales. Connaît et trace d'après modèle les syllabes simples

composées d'un m, ? i, 2 et d'une voyelle, ainsi que leurs

combinaisons en mots. Fait les couvertures dans son dor-

toir, commence à faire son lit. Sait dire la couleur d'un

objet donné. Elle est plus docile.

1899. Mars. Exercices de gymnastique aux haltères et

aux barres à sphères. Stationnaire en lecture et écriture;

fait d'après modèles des 1 et des 2. Quelques mouvements

de colère à l'adresse de ses camarades.

Juin. Suspension aux anneaux et aux barres parallèles.

Sait écrire 1, 2 et 4. La parole est plus libre, M... se mêle

aux conversations.

Septembre. Stationnaire en lecture et en écriture; con-

naît le nom des figures géométriques, les usages du mètre et

du litre. Fait son lit.

Décembre. Connaît deux nouvelles lettres l et 1, lit leurs

combinaisons en syllabes simples et en mots usuels; copie

des mots, saurait écrire d'après modèle n'importe quel mot.

Notion'de nombre jusqu'à concurrence de 5. Impulsions :

casse un carreau, cherche à éteindre le gaz, jette une ser-

viette au feu.- Balaye, essuie, range.

1900. Mars. Sait lire v et ch dans les syllabes simples

et les mots usuels. Compte oralement jusqu'à 30, a la notion

de nombre jusqu'à 10,- Renverse par maladresse une casse-

role de lait, qu'elle avoue avoir voulu boire.- Sait tenir un

passe-lacet et une aiguille à tapisserie, fait le point toute

seule,

Traitement niI : DICO-I'T;D : 1GOGIQU. 31

. Juin. - Sait lire d, f, au, ou, ai et les mots formés de ces élé-

ments. Sait donner un nombre de boules jusqu'à concur-

rence de 22. Pyromanie; a plusieurs fois essayé de toucher

au gaz ; jette une clef dans les cabinets et demande elle-même

qu'on l'attache pour qu'elle ne puisse pas recommencer. -

Deux accidents de gâtisme.

Septembre. Nouvelles manifestations de pyromanie : fait

brûler des chiffons, renverse une lampe allumée sur ses effets ;

jette une chaussure dans les cabinets. En classe, quelques

progrès, écrit sous la dictée les mots qu'elle sait lire : donne

des boules jusqu'à 30. Fait du crochet. Essaye plusieurs

fois de frapper ses compagnes sans raison.

Décembre. - Mouvement de oolère parce qu'on l'a changée

de dortoir, arrache une applique de gaz. A part cela, bon

trimestre. Etat stationnaire en classe, mais on peut de plus

en plus l'occuper aux soins du ménage. Pas d'impulsions sans

motif. Fait des ourlets, et commence à marquer.

1901. Mars. De plus en plus habile aux soins du ménage,

apprend spontanément à ses petites compagnes à s'habiller

et à se nettoyer. Surprise en flagrant délit d'onanisme.

Mat. - Pas la moindre impulsion. En classe connaît les

solides, les usages du blé, du raisin, de la laine, de la soie,

du coton, du bois, du cuir, des principaux métaux et des

unités de mesure. Sait compter jusqu'à 100, connaît les

chiffres. Sait lire et écrire tous les mots formés de syllabes

simples. Dessine toutes les figures géométriques. Fait

des reprises. - Caractère docile; elle n'a plus de caprices.

1902. A Sa sortie de l'Institut médico-pédagogique,

Marcelle est rentrée dans sa famille où, après peu de temps,

elle a été placée chez une dame qui prend quelques pension-

naires aux environs du Bois de Boulogne. Elle a pris de

l'embonpoint. Voici quelques renseignements sur sa situation

à la fin de 1902.

La coloration des joues et du menton persiste mais est

moins accusée qu'autrefois. Les paupières sont moins

souvent collées le matin qu'autrefois. Toutes les dents de

la mâchoire supérieure sont tombées, M... porte un dentier

complet.

La poitrine, assez large, plate, mesure 75 cent. au niveau

des aisselles qui ne présentent qu'un petit nombre (le poils

courts (2 cent.sur 3). Les seins, ont Il cent. de large sur 9 de

haut. Elle est bien membrée : « le buste est resté enfant », dit

32 Imbécillité mongolienne.

son père. Le thorax tranche avec les membres qui sont

développés, " potelés ". Sa taille est due 11"52.

Ses règles auraient été régulières jusqu'à son entrée à

l'Institut, irrégulières durant son séjour, régulières depuis

sa sortie ; elles ont toujours été et sont encore peu abondan-

tes. Pas d'onanisme ni de manifestations génésiques.

Oreilles plutôt collées qu'écartées, très petites : 5 cent. et

demi de hauteur et à peine 3 de largeur, des deux côtés. Hélix

bien ourlé; son extrémité antérieure est brève, de sorte que

la cavité de la conque, assez profonde, n'est pas divisée.

Anthélix un peu saillant, bien fourchu, confondu en bas

avec l'antitragus de dimensions assez réduites ainsi que le

tragus. Le lobule, est très petit (6 à 7mlll, de hauteur),

triangulaire, incisure étroite, assez longue s'effile en bas,

se confond avec la joue. fllrésie très prononcée du conduit audi-

tif ; jamais d'écoulement. Ouïe fine. (Oreilles mongoliennes).

Fi{J. 1.

Évolution physique.

33

Le caractère, "resté enfant" s'est amélioré. Les crises d'en-

têtement sont moins fréquentes et moins longues. Marc...

n'est plus violente, ni coléreuse; elle n'est pas menteuse, n'a

plus eu d'impulsions à détruire, à incendier, à voler. La

mémoire est bonne, l'affectivité bien développée. La tenue

est très correcte, elle est propre, coquette. Elle aime les tra-

vaux manuels, la musique, danse la polka et le quadrille.

La parole est toujours défectueuse. Elle parle entre ses

dents, beautoltp pour beaucoup, taire pour quatre, crois pour

trois, tafé pour café, etc..

34 Imbécillité MONGOLIENNE. ·

pelouse). Les fonctions digestives s'accomplissent conve-

nablement. Marc... mange de tous les aliments, les viandes

aussi bien que les lé;umes. -Son2meil prolongé avec bruits

pharyngiens, sorte de plaintes plutôt que ronflements.

Règles.

Imbécillité mongolienne. 35

lesquels les organes génitaux ne se développent pas,

les organes génitaux évoluent à peu près régulière-

ment chez les mongoliens. Marcelle, à cet égard, a été

plutôt précoce puisqu'elle a été réglée à dix ans et

demi. Une autre de nos malades, Muni ? âgée de 12

ans, a eu ses règles à 11 ans et d'une façon régulière.

V. L'ensemble des symptômes observés à l'entrée

de Marcelle à l'Institut médico-pédadogique et les

renseignements obtenus sur sa situation antérieure

justifiaient le diagnostic : idiotie mongolienne ; l'a-

mélioration, lente mais progressive, réalisée pendant

son séjour, autorisent à la sortie le diagnostic :

imbécillité mongolienne. L'amélioration, depuis sa

sortie, non seulement s'est maintenue mais semble

encore s'être accentuée. Son observation, malgré l'âge

assez avancé quand on nous l'a confiée, montre que

les mongoliens sont susceptibles d'être amendés (1).

(1) Lois de sa dernière visite le père nous a rappelé qu'un jour, avant l'en-

trée à l'institut médico-pédagogique elle s'était ingéniée à manger des fraise ?

qu'elle avait arrosées de pétrole.

IV.

Epilepsie idiopathique, déchéance, suicide, fracture de

l'atlas et écrasement du bulbe, appendice anormal ;

- "PAR BOURNEVILLE. ETL. E. MOREL.

SOMMAIRE. - Père, nerveux, emporté, alcoolique, mort à 46

ails d'une maladie du foie.- - Un grand oncle maternel

atteint de paraplégie. Renseignements insuffisants sur

la famille. Mère, 46 ans, bien portante. Grand'mère

maternelle morte à 50 ans d'un cancer du pylore. Rien

' de spécial sur le teste de la famille, l'as de consanguinité.

Père deux ans de plus que la mère. -

Conception probablement pendant l'ivresse du père. Gros-

, sesse normale, rien à signaler. - Accouchement à terme,

rien de spécial. Première dent à 10 mois ( ? ¡; dentition

complète à 2 ans ? Début dela marche e21 mois. - Pro-

pre à deux ans. Normal jusqu'à 13 ans.

A t3ans., frayeur vive, brûlure grave; 8 mois plus tard premier

accès; succession régulière des accès toutes les semaines

pendant un an. Cessation des accès pendant un an.

Réapparition hebdomadaire des accès, sans cause appré-

ciable. Diminution de l'intelligence. Répétition des

accès. Crise de violence; suicide. Fracture de l'atlas et

de l'axis. - Mort. - Autopsie : fracture de l'arc antérieur z

de l'atlas, écrasement du bulbe. Appendice iléo-coecal

très long et très volumineux.

Lorth.... (Georges), né à Château Thierry, le 25 mai 1885,

est entré le 11 janvier 1901 à Bicêtre (service de M. BouarrE-

ville). ,

, Renseignements fournis par la mère. Antécédents

héréditaires. PÈRE mort à 46 ans d'une maladie du foie.

Antécédents héréditaires. 37

D'un caractère nerveux et emporté ; buvait avec excès sur-

tout à l'époque de la conception ; ne semble pas avoir eu la

syphilis. Employé dans une Cie d'assurances, il est resté de

longues années dans la même administration, mais avait

cessé tout travail durant les cinq ou six dernières années

de sa vie, à cause de sa maladie du foie. Il n'a jamais eu de

migraine, ni de convulsions. Son père, est mort à 40 ans,

on ne sait de quoi : les renseignements sont insuffisants.

Sa mère est morte à 85 ans, " usée", elle n'était ni démente

ni paralytique. Pas de renseignements sur les grands

parents tant paternels que maternels; toutefois, un frère de

la grand'mère avait une " paralysie des jambes". Ni frère,

ni sceur. - Il ne semble pas qu'il y ait eu dans la famille

d'aliénés, ou d'épileptiques, etc..

MÈRE, 46 ans, pas de convulsions, pas de chorée, a toujours

été nerveuse. Pas de céphalagie, ni de migraines. Son

père, qui était sobre, s'est tué accidentellement dans une

chute de montagne à l'âge de 60 ans. Sa mère est morte

vers 50 ans, d'un cancer du pylore. Les grands parents

paternels et maternels sont tous morts très vieux, sans avoir

jamais présenté d'accidents nerveux.

Du côté paternel, trois oncles et trois tantes sur lesquels

les renseignements manquent ; leurs enfants qui vivent encore

n'auraient pas eu de convulsions. Du côté maternel, un

seul oncle, bien portant. Un frère, 45 ans, hospitalisé à

Bicêlre. Une saur. 50 ans, en bonne santé, mariée, mère

de trois enfants qui n'ont jamais eu de convulsions.

Pas de consanguinité ; le père avait deux ans de plus que

la mère.

Douze enfants : 1° fille de 21 ans, pas de convulsions ;

2° garçon, 20 ans, pas de convulsions , 3° fille, morte à dix

mois de lluxion de poitrine. ; 4° Noire malade; - 5" gar-

çon de 14 ans ; 6- garçon, 13 ans ; 7o fille, 12 ans ;

8° fille, 11 ans, ; 9- fille, 10 ans ; 10° fille, 9 ans : 110

fille, 8 ans; 12° fille, morte il 3 ans de rougeole, compliquée

de broncho-pneumonie : Aucun d'eux n'aurait eu de convul-

sions.

Antécédents personnels. Conception. La mère était en par-

faite santé; par contre, le père s'adonnait à la boisson et la

mère (. croit que la conception a eu lieu pendant l'ivresse du

38 ' Antécédents personnels.

père". La grossesse fut bonne au début; ni coups, ni chute

n'en vinrent troubler le cours. Mais quand l'enfant commença

à remuer ( vers le 5° mois ) il se montra beaucoup plus vio-

lent que les trois enfants qui l'avaient précédé et que les

huit qui suivirent. accouchement à terme ; présentation

du sommet. Rien de spécial à noter.

A la naissance, bon aspect de l'enfant qui est immédiate-

ment envoyé en nourrice, et nourri au sein. La première

dent semble avoir percé vers dix mois; à deux ans la denti-

tion était complète. L'enfant fit ses premiers pas à 11 mois,

et marcha définitivement vers 14 mois. Vers deux ans, il

devint propre, et commença a parler. A 5 ans, il eut la rou-

geole, ce fut la seule maladie infectieuse qu'il eut; de même,

il n'eut ni dartres, ni suppurations de l'oreille, ni blépharite,

ni conjonctivite, ni adénites cervicales.

Jusqu'il 13 ans, son développement physique et intellec-

tuel fut absolument normal; il n'avait jamais eu la moindre

convulsion ; jamais un mal de tête, jamais un étourdissement.

Studieux et appliqué, il avait obtenu à 11 ans son certificat

d'études.

A 12 ans, un accident assez particulier lui causa une

frayeur vive qui provoqua l'apparition de symptômes ner-

veux que rien ne pouvait faire pressentir. L'enfant avait mis

dans la poche de son pantalon, une grande quantité d'amor-

ces au fulminate ; la grande chaleur qu'il faisait, ou le heurt

d'un petit couteau qui se trouvait dans la poche, détermina

l'éclatement des amorces qui mirent le feu aux vêtements.

Affolé, l'enfant se sauva dans le jardin, en poussant des cris

d'épouvante, et tout environné de flammes. Quand on le

secourut, on vit qu'il avait la main et la cuisse droites profon-

dément brûlées. Il dut rester alité pendant six semaines,

avec une grosse fièvre, mais pas de délire. Huit mois plus

tard, à 13 ans, il eut un premier accès. L'enfant était dans la

maison de ses parents ; on le vit pâlir et tomber, sans jeter

un cri; ses quatre membres étaient rigides " on ne put lui

desserrer les doigts". Pouce fléchi dans la paume, perte com-

plète de connaissance, pas d'émission d'urine, pas de mor-

sure de la langue. Stertor consécutif à l'accès. Le môme jour,

deux autres accès ; puis rémission de dix jours, nouvel accès ;

nouvelle rémission de quinze jours, et série d'accès. Après

quoi les séries d'accès se répètent chaque semaine, pendant

un an, pour cesser complètement pendant toute la l'Le année.

Durant cette période, la rémission a été complète, il n'y a

pas eu le moindre vertige. A 15 ans, les accès réapparaisse71 £

Epilepsie idiopathique. 39

sans qu'on relève de cause provocatrice. Ces accès différent

un peu des précédents. La chute s'accompagne d'un cri,

l'enfant d'abord pâle, est ensuite cyanose ; il émet des uri-

nes; écume, entre en stertor, puis s'endort pendant cinq ou

six minutes. Les accès reviennent parsérie,au maximum de dix

en 21 heures. On enregistre une série toutes les semaines.

L'état de l'enfant avant et après la série d'accès reste à peu

près le même, pendant un an, Une fois cependant, l'enfant

dit à sa mère : "je sens que je vais me trouver mal". Une

autre fois il dit : "cela me chauffe dans la tète, je vois trou-

ble, je vois rougie ". Il avait des accès tant de nuit que de

jour, mais les accès venaient surtout le jour, il tombait

de tous côtés, se faisant des bosses; il ne se fit jamais de

blessures sérieuses.

Au bout d'un an, son intelligence diminua, ainsi que son

goût pour le travail. Par contre, il resta affectueux comme

par le passé; raisonnant juste, appréciant le bien et le mal,

« il avait, dit sa mère, tout son moral, mais pas toute son

intelligence ».

On le conduisit successivement à la consultation de

Broussais, de St-Antoine, où le Dr G. Ballet le traita pendant

dix mois. Mais le bromure et les douches, qu'on avait ordonnés,

ne produisant pas d'amélioration, et l'intelligence de l'enfant

continuant à décroitre, les parents se décident à le placer

et il entre à Bicêtre le 11 janvier 1901.

État actuel. L'enfant est un peu maigre, mais bien con-

formé ; à ce point de vue, il est au-dessus de la moyenne. Sa

physionomie est ouverte, avec un peu d'abattement cepen-

dant. - Les cheveux châtains sont bien implantés ; il n'y a ni

épi, ni cicatrices dans le cuir chevelu. -Le crâne est allongé

très légèrement plagiocéphale ; les bosses frontales sont net-

tement dessinées, le front est bas. Le visage est ovale et ne

présente ni cicatrices, ni malformations. - Les yeux sont nor-

maux, les pupilles réagissent à la lumière et à l'accommoda-

tion. -Le ne : est aquilin. -La bouche est un peu grande. Les

tenures sont épaisses et sensuelles.-Le voile du palais, la voûte

palatine, la langue, les amygdales sont normaux. Le men-

ton, rond, est bien dessiné. -Les oreilles n'offrent rien de

particulier, sauf qu'elles sont volumineuses.

Le cou mesure 0,n 35 de circonférence ; le corps thyroïde est

perceptible. Les membres supérieurs et inférieurs sont

bien musclés et n'offrent rien à signaler. Pas d'onycophagie

Les réflexes sont normaux, peut-être un peu exagères. Le

'40 MÉLANCOLIE, EXCITATION

thorax et l'abdomen ne présentent aucune malformation con-

génitale ou acquise. L'auscultation du ccetcret des'poumons

montre la-parfaite intégrité de ces organes. Pas de modifica-

tion de la sensibilité.

A son entrée dans le service, le malade a plutôt une tem-

pérature un peu basse (Voir le tableau). Dans ses urines ni

sucre, ni albumine. Il pèse 53 kilog., mesure t lU 60 ; et donne

au dynamomètre une pression, de 28 à droite et 23 à gauche.

Organes génitaux et puberté. Lèvre supérieure, léger

duvet brun; lèvre inférieure, joues, menton, glabres.

Aisselles, petite touffe de poils bruns de 2 à 3 centimètres.

Thorax, ventre, fesses, glabres. Pénil abondamment

couvert de poils entourant la verge, bruns de 4 à 5 centimètres

de longueur. Verge : 7 centimètres de longueur sur 6 1/2 de

circonférence. Les testicules, de la dimension d'un oeuf de

pigeon,.sont descendus dans les bourses. Périnée, quelques

poils roux. Anus normal. Les bras, les avant-bras, les cuisses

et les jambes sont recouverts d'un léger duvet.

Dès les premiers jours de son admission, l'enfant se

montra sombre, impressionnable, irascible. Le 16 janvier,

cinq jours après son arrivée, il est en proie à une agitation

extraordinaire; sur une simle observation de l'instituteur il

entre en fureur et s'empare d'un lourd encrier de faïence

pour le jeter à la tête de son maître. Un infirmier lui retient

la main, maîtrise ses mouvements et le calme un peu. L'enfant

est alors placé dans une cellule sombre et éloignée de tout

bruit ; mais à peine la porte est-elle refermée, qu'il brise deux

vitres épaisses avec ses sandales et entre de nouveau en

fureur; on doit alors le conduire dans une cellule capitonnée

et lui mettre le manchon. Peu à peu sa fureur s'atténua, mais

vers cinq du soir (c'est-à-dire deux heures après le début de

sa crise) il a un accès; à sept heures nouvel accès; dans la

nuit il n'a pas moins de quinze accès. Vers le matin du 17 i

janvier le calme revient. L'enfant est alors conduit à l'infir-

merie du service, et mis en observation toute spéciale.

Sous l'influence de l'élixir polybromuré dont il prend

jusqu'à cinq cuillerées par jour (10 gr.) son état ne tarde pas à

s'améliorer, les crises de violence et les accès s'espacent ;

mais l'intelligence s'affaiblit de plus en plus; la parole devient

traînante, le malade entre'en déchéance. Il se promène, la par-

tie supérieure penchée en avant et la tête baissée ; il marche

à grands pas irréguliers, le jarret tendu, les jambes écar-

tées, la pointe du pied frappant le sol avant la plante. Peu

expansif, il ne parle que lorsqu'on lui adresse directement la

DÉCHÉANCE ; SUICIDE. 41

parole ; ses réponses sont pénibles, lentes à venir, exprimées

sur un ton trainant, monotone, avec des syllabes mal arti-

culées. Il mange indifférement tous les aliments, sans préfé-

rence aucune pour l'un ou pour l'autre, et ne témoigne

d'appétence que pour le vin. Du reste ses fonctions digestives

s'accomplissent dans de bonnes conditions ; et le sommeil

serait bon si l'enfant ne se livrait la nuit à l'onanisme. Ses

pratiques sont solitaires, il ne s'est jamais adonné à des

attouchements sur d'autres malades. Sa tenue est convenable;

malgré sa déchéance intellectuelle, il procède à sa toilette

assez spontanément; s'habille et se déshabille seul. Mais son

caractère se modifie de plus en plus; il est avant tout très

variable, tel jour il obéit sans répliquer aux ordres de son

maître, tel autre jour il ne se soumet qu'à regret et

manifeste son mécontentement par des paroles grossières. Il

évite de jouer ou d'échanger une conversation avec ses

camarades, supporte une plaisanterie mais ne la rend pas.

Enfin il se plaint de céphalée pénible, fréquente, mais très

passagère.

Ses accès, très rapprochés pendant le mois de janvier, vont

en s'espaçant pendant les mois de février et mars, comme on

peut le voir sur le tableau de la page ! i3 ; mais les vertiges qui

n'avaient pas alterné jusqu'ici avec les accès, se montrent à

leur tour.

Bientôt l'enfant tombe dans une période de tristesse pro-

fonde, dont il ne sort guère qu'en classe où il montre quel-

que goût pour l'arithmétique et les exercices de mémoire;

sorti de classe il redevient taciturne et refuse de participer

aux jeux des autres enfants.

Le 23 avril, à cinq heures de l'après-midi, trompant la sur-

veillance de l'entourage il se suicide, dans les conditions sui-

vantes : Ce jour-là, l'enfant montra, dès midi, une agitation

inaccoutumée, demandant du papier pour écrire à sa mère,

échangeant quelques paroles avec l'infirmier de service, et

contrairement à ses habitudes jouant à la balle. De temps à .

autre, il allait à la grille de la cour de récréation, pour y

guetter sa mère, qui, disait-il, allait venir lui souhaiter sa fête.

A un moment donné, profitant de l'éloignement de l'infir-

mier, alors à l'autre extrémité de la cour, il enfonça la porte

des ateliers. monta précipitamment au premier étage, ouvrit

une fenêtre et se jeta dans le vide. Il tomba d'une hauteur de

quatre mètres sur la terre battue et resta immobile, étendu

sur le dos. Il respirait encore, mais à peine, et son pouls

était imperceptible. Instantanément son visage s'était cyanose

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902.. 3bis

42 EPILEPSIE idiopathique.

et du sang coulait par sa narine droite. On le porta douce-

ment à l'infirmerie pour lui faire une injection de caféine, la

respiration artificielle et les tractions rythmées de la langue :

tout fut inutile, il mourut quatre à cinq minutes après l'acci-

dent.

Température à l'entrée

Fracture DE l'atlas; écrasement DU BULBE. 43

Tableau des accès et des vertiges.

44 " " Appendice anormal.

des circonvolutions bien nourries avec de nombreux plis de

passage.

Des deux côtés, la couche optique, le corps strié, le ven-

tricule latéral sont normaux. - Corps calleux volumineux.

De nombreuses coupes pratiquées sur l'hémisphère ne font

découvrir aucun foyer hémorragique.

L'autre hémisphère, conservé pour examen histologique,

parait macroscopiquement bien développé.

Cou. Corps thyroïde normal, gros. Thymus encore

assez volumineux.

THORAX. - Rien à noter aux poumons ; les plèvres sont

saines et ne présentent pas de traces d'inllammation ancienne

ou récente. Le coeur est mou et gras; la face antérieure

de l'éjlicarde présente plusieurs petites taches laiteuses. Le

myocarde, les valvules sont sains. Le trou de Bolal est

oblitéré. A la face profonde de la crosse de l'aorte, on note

quelques plaques d'aortite, qui descendent jusqu'à un centi-

mètre au-dessus de l'appareil sigmoïdien de l'orifice aorti-

que.

Abdomen. Le foie, très volumineux, possède un lobe

gauche extrêmement développé qui s'avance dansl'hypochon-

dre gauche jusqu'à la rate ; il est normal et sa coupe ne

montre aucune lésion macroscopique. L'estomac et les

intestins, très distendus par les gaz. , sont normaux. La

rate, très volumineuse, est crénelée sur son bord antérieur ;

son bord postérieur présente aussi quelques traces de lobula-

tion ; sa consistance et son aspect sont normaux. Les reins

sont très congestionnés, volumineux et lourds. Ils se décor-

tiquent sans dilliculté, la coupe ne montre que leur état

d'hypérémic.

. Le ececuttt et l'appendice sont assez particuliers pour

mériter une description. Le coecum très dilaté, ne contient

ni vers intestinaux, ni corps étrangers ; l'iléon s'y abouche

normalement; l'appendice vermicuhiire semble manquer.

En soulevant le fond du coecum pour renverser en haut

cet organe et rechercher si l'appendice est en situation

postérieure, on est arrêté par un méso très court limitant

le renversement ; il n'y a pour ainsi dire pas de fossette

rétro-coeoale. Après avoir désinséré la racine du mésocolon

ascendant et découvert la face postérieure du coecum, on

.voit enfin l'appendice. Il est énorme. Il prend naissance à la

EPILEPSIE idiopathique. 45

face postérieure du caecum, à 3 cent. du fond de l'organe,

décrit une courbe ouverte en dehors, longe ainsi le bord

postéro- interne du colon ascendant et se termine à un cent.

au-dessous du pôle inférieur du rein, sans prendre connexion

avec cet organe. Sur toute sa longueur il est accolé et adhé-

rent au coecum, sauf son dernier centimètre qui est libre. Sa

longueur est de vingt centimètres. A l'origine, il est plat et

mesure 8 millimètres de diamètre ; vers sa partie moyenne

il est cylindrique et mesure 12 millimètres de diamètre. Ses

dix derniers centimètres sont régulièrement calibrés et ne

mesurent plus que 6 millimètres de diamètre. Cet appendice'

ne contient aucun corps étranger et ne présente aucune

trace d'inflammation ancienne ou récente.

Poids des organes.

46 Hypertrophie DES glandes.

touchée la première, et tout d'abord, elle seule est

touchée; sous l'influence d'accès d'abord espacés,

puis répétés, puis sériés, l'intelligence baisse; mais

le moral n'a encore subi aucune modification.

Alors surviennent, des vertiges qui alternent avec

les accès ; en quinze jours l'enfant n'a pas moins de

108 accès ; à ce moment son caractère change : d'affec-

tueux il devient sournois, hargneux, il a clos crises de

violence ; son intelligence baisse de plus en plus, la

déchéance s'accentue avec rapidité; la sphère morale

se prend à son tour : l'enfant se suicide, deux ans

après son premier accès. L'hérédité, dans ce cas

est peu chargée.

II. Les autres particularités, clignes de remarque,

nous ont été révélées par l'autopsie. Nous notons

l'extrême rareté des fractures de l'atlas et de l'axis,

qui nécessitent pour se produire une chute sur l'occi-

put, rarement réalisée en dehors des conditions expé-

rimentalcs. Dans notre cas, la mort a été immédiate

et due à la compression du bulbe par l'apophyse odon-

toïde détachée, phénomène semblable à celui qui se

produit dans certains cas de pendaison.

III. Nous avons été frappé par le développement

extraordinaire des appareils glandulaires du sujet

et par les caractères foetaux que ses grosses glandes

avaient conservé. Son foie pèse 1850 gr., et le lobe

gauche y est prédominant. Sa rate pèse 250 gr., et

ses bords crénelés, attestent la lobulation primitive

de l'organe. Le corps thyroïde est volumineux et

pèse 18 gr., ce qui est au-dessus de la moyenne pour

un enfant de quinze ans; le thymus n'a pas encore

subi de régression ; les reins pèsent respectivement

170 et 180 gr.

IV. Enfin, signalons la longueur extraordinaire de

Anomalie DE l'appendice. 47 7

l'appendice iléo-coecal. Quoiqu'on en ait signalé de

plus longs encore (Lannclonuc, 22 centimètres, Cru-

veilhier, 23 centimètres) il n'en demeure pas moins

qu'un appcndice de 20 cent. est exceptionnel. Excep-

tionnel aussi est son siège en situation postérieure,

intérieurement appliqué contre la paroi colique. Enfin

il est très rare de voir l'appendice se détacher de la

paroi postérieure du coecum : généralement les appen-

dices postérieurs sont tout au moins internes tt leur

origine. S'il est exact que la situation rétrocolique de

l'appendice prédispose à l'appendicite, comme l'é-

crivent des auteurs récents, nous pouvons, pièce en

main, conclure la gravité de cette forme; la situation

de l'appendice, la brièveté du mésocolon ascendant

sont toutes conditions défavorables à la recherche de

l'appendice, et même it la découverte d'un foyer péri-

appendiculaire de suppuration.

V.

Action de l'alcoolisme sur la production de l'idiotie et

. de l'épilepsie ;

Par nOURl\'E\'ILI.E.

Le» médecins disent, quand on est ivre,

Que de sa femme on se doit abstenir

Et que, dans cet état, il ne peut provenir

Que des enfants sourds et qui ne sauraient vivre.

. (MOLIÈl1E : l'Ampllytl'iol1.)

Aux 2.554 cas relevés dans notre statistique de

1900, complétant et résumant nos statistiques anté-

rieurs, nous ajouterons les 156 entrées de 1901 (108

garçons et 48 filles) et les 136 entrées de 1902 (89 gar-

çons et 47 filles), soit un total de 2.846.

Le tableau suivant résumé la situation des pères et

mères de tous ces enfants sous le .rapport des excès

alcooliques et permet d'avoir, d'un coup d'oeil, une

idée exacte du rôle considérable que joue l'alcoo-

lisme dans la production de l'idotie et de l'épilepsie.

Action DE L'ACOOLISME sur l'idiotie. 49

Tableau statistique sur l'alcoolisme.

50 Action DE l'alcoolisme sur l'idiotie..

à des alcooliques, soit pour compléter les renseigne-

ments héréditaires, soit pour tout autre motif, nous

appuyant sur l'histoire même de leurs enfants, nous

leur recommandons d'éviter tout rapport sexuel avec

leur mari en état d'ivresse. 11 en est qui comprennent

l'importance de nos conseils et agissent en consé-

quence..., quand cela est possible. Trop souvent les

malheureuses cèdent sous la menace des coups, ou

sous les coups mêmes.

La lutte contre l'alcoolisme.

Des voeux tendant il la réglementation ou à la suppres-

sion des bouilleurs de cru ont été votés clans un certain

nomhre de départements, notamment le Pas-de-Calais, les

Vosges, la Haute-Loire, la Somme, etc. Divers journaux

ont prêté à M. Combes l'intention cle se préoccuper de

cette grave question et à M. Bouvier de proposer la sup-

presion de ce privilège. En le faisant, ils rendront au pays

un service de premier ordre.

Ainsi que nous l'avons dit souvent, le privilège des

bouilleurs cle cru est l'une des causes les plus sérieuses

de l'appauvrissement de la race, de sa dégénérescence,

et de l'accroissement de la folie. Malheureusement, il est

fort à craindre que l'intérêt électoral ne l'emporte encore

longtemps sur l'intérêt de la santé publique.

C'est à tous ceux qui en ont le souci cle combattre éner-

giquement, non pas pour l'abstinence complète, qui est

un leurre et un non-sens dans un pays, comme la France,

si riche en vignobles, mais contre l'abus des boissons

alcooliques.

Les médecins ne sont plus les seuls il faire campagne.

En effet, dans une très habile réponse à M. Jules Soury,

M. Eugène Fournière rappelle à la fois son rote et celui

du parti socialiste dans la lutte contre l'alcoolisme : .'

« En votant l'augmentation des droits sur l'alcool, je n'ai

pas été seulement fidèle à ma conscience, aux principes de

Lutte contre l'alcoolisme. 51

la moralité générale, j'ai encore obéi au voeu formellement

exprimé par le parti auquel j'appartiens, écrit- il dans la

Revue socialiste d'août 190 ? .

« Oui, M. Soury, « les troupeaux socialistes et collectivistes

de la porcherie contemporaine » ont poussé l'absence d'idéa-

lisme jusqu'à voter, à l'unanimité des GG2 délégués, repré-

sentant environ quatorze cents groupes socialistes, l'ordre

du jour que voici : « Le Congrès, considérant que l'alcoolisme

est un des plus puissants fadeurs de l'asservissement moral

et économique du prolétariat, émet le voeu que les militants,

socialistes le combattent de toutes leurs forces, en attendant

qu'un prochain Congrès prenne contre ce fléau des disposi-

tions cL'ensemble ». Me faut-il aussi vous apprendre, Monsieur,

que les socialistes belges proscrivent l'alcool de la Maison

du Peuple et de leurs coopératives, et ajouter que je connais

quelques-unes de nos coopératives parisiennes, notamment

dans les treizième et quinzième arrondissements, qui ont

suivi cet exemple salutaire ? Puisque le nationalisme existe

il l'état de parti, où sont ses actes dans ce sens, qui est celui

de la santé et de la moralité publiques ? Vous ne pourriez pas

en citer un seul. » .

Si tous ceux qui ont voté le voeu qui précède s'y confor-

ment et font une active propagande contre l'alcoolisme,

d'heureux résultats ne tarderont pas il se produire. Pour

cela, il faut donner soi-même l'exemple, agir sans relâche

et mieux que quiconque le Congrès socialiste est en

mesure de le faire. B.

; VI.

Idiotie complète avec diplégie plus marquée gauche,

- symptomatique de sclérose atrophique 'prédominant^

; dans l'hémisphère droit (circonvolutions et lobule de

l'insula) ; - - ?

PAH : BOURNErILLE m LE11A11tE.

Sommaire. - Père, syndactylie^ - Grand-père paternel,

'- alcoolisme. Grand'mère paternelle, tics. Grand'tante

- paternelle, chorée dans l'enfance, puis affection mentale.

(idées de suicide). - Grand' oncle paternel, affection men-

tale. Mère, symptômes nerveux au cours d'une' fièvre

typhoïde. Gra-nd-pére maternel : syndactylie.- Grande

' mère maternelle, migraines constantes.

Conception et grossesse, rien de particulier. - A ccou'ëhe1nenf

long. Asphyxie à la naissance. Accès de cris. Consul-

sions au dixième jour. Accidents épileptiformes à 11

mois. Paralysie spasmodique prédominant du côté

fauche.. -

Mort par tuberculose pulmonaire succédant à une rougeole;

popneumotho'ax : - -.

Autopsie. Asymétrie du crâne. Persistance des sutures.

Sclérose ah ophicXue foi,n7,int un foyer occupant la partie

moyenne du lobe frontal et la pariétale ascendante, à

gauche. Sclérose atrophique des circonvolutions plus

étendue à droite et intéressant le lobule de l'insula tout

entier. - Tuberculose pÚlmo11aÏ1'e avec pyopneu'¡awtho-'

. rax. Persistance du trou de Botal. - Ectopie testiculaire.

gauche, - - - '

Idiotie complète ; diplégie. 53

Joha... (Edmond), né à la Machine (Vienne), le 11 janvier

.1898, est entré dans le service le 3 avril 1901.

Antécédents héréditaires. [Renseignements fournis le 17

avril 1901 par sa mère). Père, ? 8 ans, rabatteur en fer, tra-

vaille dans une fabriqua de rails de tramway. Pas de convul-

sions, bonne santé dans le jeune âge. Pas de rhumatismes,

ni de chorée, ni de lièvre typhoïde, ni de migraines. Pas de

maladies vénériennes. Pas d'éthylisme, boit un litre de vin

par jour. Caractère doux et affectueux. Le père est syndac-

tyle : il a les 2c et 3° orteils des pieds collés. On ne peut les

écarter. Il n'y aurait pas de palmature.

Famille du père. Père, mort à 91 ans, éthylisme (eau

de vie). Aucun accident nerveux. Mère, 75 ans, a eu un tic

qui consistait en un relèvement brusque du bras gauche.

Caractère calme, sobre. Elle a eu le père du petit malade

alors qu'elle était déjà un peu âgée, elle avait 42 ans et son

mari 57. Aucun renseignement sur les grands parents.

Oncles et tantes paternels et maternels, nul détail. On ne

sait si leurs enfants ont eu des convulsions ou des affections

nerveuses. - Deux soeurs : l'une, 45 ans, pas nerveuse ; a eu

9 enfants dont 3 ou 4 sont morts en bas-âge, on ne sait de quoi.

Les survivants sont normaux. La seconde soeur, 13 ans, s'est

mariée à 17 ans et a eu la chorée peu après son mariage. Elle

est d'un caractère irritable, jaloux, envieux, ombrageux. Elle

a maintenant une affection mentale, consistant en idées noi-

res, idées de suicide : elle veut se jeter par la fenêtre. Cet état

s'aggrave, elle ne peut plus travailler. Elle a eu 2 enfants qui

sont bien portants et n'ont jamais eu de convulsions. Dans le

reste de la famille du père, on ne signale aucune autre tare

morale, intellectuelle et physique, aucun autre cas de dégé-

nérescence.

Mère, 28 ans, ménagère, sobre. Pas de convulsions ; fièvre

typhoïde grave il 12 ans, avec délire pendant plusieurs jours

Pas d'affections cutanées, ni de migraines. Caractère doux,

excellent ménage.

Famille de la mère. Père, 70 ans, bien portant, pas d'é-

thylisme, genu-valgum, syndactylie : 3 orteils médians des

deux pieds collés. Mère, 48 ans, bien portante. Migraineuse,

elle est obligée de se coucher à chaque migraine. Pas de

convulsions dans l'enfance. Aucune maladie infectieuse.

54 Antécédents PERSONNELS.

Gt'and-pére et grand'mère paternels, morts jeunes.

Grand-père maternel, mort à 75 ans, pas de tare nerveuse.

Grand'mère maternelle, morte à 52 ans d'un cancer abdo-

minal, nerveuse, irritable. Cinq oncles et une tante pater-

nels, un oncle avec 4 enfants bien portants. Un oncle et

une tante maternels en bonne santé. - Trois frères, vivants-,

n'ont pas eu de convulsions. Dans le reste de la famille

de la mère, pas d'autres tares physiques morales et intellec-

tuelles, notamment pas d'autres exemples de malformation

que ceux déjà cités.

Pas de consanguinité. Egalité d'âge des parents.

Notre malade. Enfant unique. - Conception, grossesse,

rien à signaler. La mère supporte très bien la gestation même

pendant les périodes ultimes. Mouvements indolents du foetus

ressentis à 4-5 mois.

Accouchement à terme, présentation du sommet. Durée

du travail, 10 heures. Asphyxie bleue pendant 10 à 15 minutes

et immobilité absolue (frictions énergiques). L'enfant se met

alors à crier et à respirer. Il crie de 10 h. du soir jusqu'au

lendemain 7 h. sans discontinuer. La mère essaie de lui

donner le sein, il ne le prend pas.

Quand l'enfant a eu cessé de crier, il est tombé dans une

sorte de torpeur qui a duré 8 à 10 jours. Premières convulsions

le 10^ jour, elles ont continué 3 jours. Les yeux se convulsaient

en haut. Le bras gauche se contracturait dans la 1/2 flexion

et se levait avec secousses. Le bras droit était immobile.

Comme l'enfant était emmailloté on ne peut rien dire sur ses

membres inférieurs. Pendant cette période de convulsions,

l'enfant ne put prendre le sein : les lèvres ne pouvaient se

rapprocher. Après les convulsions les mouvements auraient

- été sinon abolis du moins diminués dans les membres gau-

ches. Un mois ou deux après, on note de la raideur des

membres, raideur prédominant iL gauche. Main dans la

Ilexion, flexion qui va toujours croissant. La tète se met en

extension et s'incline sur la gauche.

. AU mois, à l'apparition des premières dents, l'enfant ne

cesse de crier nuit et jour. A cette époque également, l'enfant

est pris d'une série de crises : Il devenait violacé, semblait

- sur le point de mourir, ne faisait aucun mouvement. Au bout

de trois minutes, il devenait rouge, puis quelques minutes

après il redevenait normal. La mère a remarqué qu'à la fin

de la crise, l'enfant avait les mêmes secousses musculaires

qu'il avait présentées autrefois (extension et inclinaison de la

Description DU malade. . 55

tête sur la gauche, mouvements de flexion de la main). Ces

crises ont été au nombre de six, réparties sur trois jours.

La raideur des membres de l'enfant va toujours augmentant.

La tête reste constamment un peu inclinée sur la gauche, la

main et l'avant-bras dans une légère flexion, la cuisse dans

une légère flexion sur le bassin, la jambe dans une légère

flexion sur la cuisse.

Première dent à 11 mois, dentition complète à 3 ans.

Parole et marche nulles. L'enfant n'a jamais eu d'accès

de colère. Il a grincé momentanément des dents. Pas d'ona-

nisme, pas de krouomanie.

Digestion. Préhension et mastication nulles, occlusion

de la bouche incomplète. Bave abondante. L'enfant tette

en mangeant. Ne suce ni ses doigts, ni son linge. - Ni rumi-

nation, ni vomissements, selles régulières, gâtisme nuit et

jour. Helminthiase.

Sensibilité générale. Sensible h la douleur, ne semble

pas avoir de notion du froid ou du chaud.

Vue : Regard vague et hébété, a du strabisme. Odorat :

Ne flaire pas ses aliments. Goût : nul. Audition :

L'enfant n'est pas sourd mais ne prête aucune attention aux

bruits et sons émis à côté de lui.

Sentiments affectifs : nuls. Ne reconnaît pas son père. Sa

mère dit que son enfant la reconnaissait. Il parait être heu-

reux d'être caressé. Ni étourdissements, ni vertiges, ni

tremblements. Sommeil normal. Aucune manifestation

intellectuelle.

L'enfant n'a eu aucune maladie infectieuse, aucune fièvre

éruptive. Il n'a présenté aucun accident scrofuleux.

Les parents ne savent à quelle cause attribuer la maladie.

Examen de l'enfant. - Étut général médiocre : enfant maigre

et pâle. Physionomie : air hébété. Peau : ni éruption, ni

nævi.

Têle : cheveux châtain foncé, tourbillon, deux épis. Pla-

giocéphalie. Fontanelles soudées. Front bas et triangulaire à

sommet supérieur.

Visage piriforme. Arcades sourcillières peu proéminentes.

Pas de blépharite, cils fournis. Fentes palpébrales grandes.

Orbites peu grandes.

Yeux, strabisme convergent. Mobilité des yeux assez

grande. Iris brun et de couleur uniforme. Pupilles, réllexes

à l'accommodation et à la lumière normaux.

. L'examen fonctionnel de la vision n'a pu être fait : l'enfant

56 IDIOTIE complète ; diplégie.

étant idiot. - Nez petit aquilin, effilé. Lobules échancrés.

Narines ouvertes. Pommettes saillantes, joues volumi-

neuses. Bouche : de direction et de forme normales. Lèvre

inférieure un peu plus volumineuse que la supérieure.

Palais : voûte et voile de forme un peu ogivale.

Dents peu développées, petites, très espacées les unes des

autres. Les 20 dents de lait sont parties. - Menton, en retrait.

Langue normale.

Amygdales, Luette, Pharynx : rien à signaler. Goût ?

Fonctions : l'enfant ne mastique pas mais tette. Il n'avale très

difficilement que de la soupe. Ni vomissement, ni rumina-

tion, ni constipation. Gâtisme nuit et jour.

Oreilles, grandes, 4 centimètres 1/2 de haut sur 4 cent, de

large. Hélix assez large et bien ourlé dans son tiers supérieur,

à peine ourlée dans ses deux tiers inférieurs. L'anthélix est

assez saillant. Tragus et anti-tragus plutôt petits. Incisure

de la conque très large et très courte. Lobule à peu près

nul. Les oreilles sont assez fortement obliques en arrière,

larges en haut rappelant un peu les oreilles de la chauve-

souris.. -

Thorax régulier ; respiration abdominale. Coeur nor-

mal, ainsi que tous les organes abdominaux.

Organes génitaux. - Etat glabre de toutes les régions.-

Verge : 3 cent. de longueur sur 4 de circonférence. Phimosis.

Testicule gauche, gros comme un haricot. Testicule droit, dans

l'anneau ; on arrive à le faire descendre, il est un peu plus

petit.

Traitement : Sirop de fer, douche ; huile de foie de morue.

Exercices de la marche et des jointures. w

Température à l'entrée.

IDIOTIE complète ; diplégie. 57 Î

Les doigts sont légèrement fléchis. Les mouvements provo-

qués de flexion dans les articulations du membre supérieur

sont possibles complétement. Ceux d'extension sont incom-

plets. Les articulations du membre supérieur au palper ne

présentent rien d'anormal. La forme, la longueur des doigts;

des mains, des ongles est régulière; pas d'onychophagie. La

préhension est nulle.

Membres inférieurs. Forme et volume normaux. Cuisse

fléchie sur le bassin, jambe fléchie sur la cuisse, le pied est

en position normale sur la jambe. Orteils, voûte plantaire

normaux. Mouvements volontaires iL peu près nuls, provo-

qués faciles dans la flexion, difficiles dans l'extension.

Réflexes patcllaires et plantaires exagérés. L'exagération est

surtout marquée à gauche. L'enfant est incapable de se tenir

debout. Quand on l'asseoit, son corps tout entier forme une

courbe à concavité gauche. Couché, cette attitude est moins

marquée. L'enfant a beaucoup de peine à se tenir droit dans

le chariot. - Aucune malformation congénitale (Fig. 2).

3 décembre. Abcès du cou, incision, pansement borique.

1902. 23 février. Rougeole : l'enfant est envoyé à l'iso-

lement. Sorti le 25 mars.

Bourneville, Bicêtre, 1112. 4

Fig. 2. Johan.. à 7 ans (1001).

58 Tuberculose ; PNEUDIO-TIiORAX.

17 mai. L'enfant est amené à l'infirmerie. Amaigrissement

considérable, toux. Dyspnée. Diarrhée qui disparait rapide-

ment. Les poumons sont remplis de gros râles ronflants et

sous-crépitants. T. IL 38°.

Les jours suivants, du 18 au 24, la percussion thoracique

dénote de la matité au sommet droit et dans la fosse sous-

épineuse droite; matité également au niveau des régions qui

correspondent aux deux pédicules bronchiques. La sonorité

est peu modifiée iL gauche. Les signes d'auscultation sont les

mêmes que le premier jour.

21 mai. - Dyspnéc, cyanose, signes physiques plus pronon-

cés, râles ronflants et sous-crépitants dans les deux pou-

mons. Traitement, 4 bains sinapisés par jour. 25 et 26,

même état.

26. Soir : cyanose intense. Dyspnée. Toux sèche qui se

produit quand on déplace le petit malade. Signes physiques :

sonorité exagérée dans tout le poumon droit. Diminution de

l'ampliation thoracique du côté droit. Abolition des vibra-

tions. Suppression du murmure respiratoire. Bruits ampl to-

riques, bruit d'airain, respiration amphorique. Pouls 120.

Trait. : oxygène, cataplasmes sinapisés, etc.

Le 27. Mêmes signes physiques et mêmes signes fonction-

nels. Pouls 130. Même traitement. Mort à 6 heures. Poids

après la mort 8 kgr.

Mesures de la tête.

Autopsie ASYMETRIE du crâne. 59

Poids et Taille.

60 Sclérose ATIIOPHIQUE : Crâne.

pariétal. Face interne rien d'anormal. Les sillons de la

méningée moyenne sont bien marqués. Trous nourriciers

nombreux. - Face externe gauche. La bosse pariétale est

moins saillante que la droite bien que les deux pariétaux

semblent être d'égale superficie. Le trou pariétal, normal, est

remplacé par deux petits pertuis, fins comme la pointe d'une

aiguille qui traversent la paroi cranienne très près de la suture

inter-pariétale, à égale distance de la suture coronale et de la

suture lambdoïde. - Face interne gauche : sillons de la

méningée moyenne et trous nourriciers moins nombreux que

du côté opposé. Vus par transparence, les deux pariétaux sont

opaques, sauf dans la région des sutures. On constate de

part et d'autre de la suture interpariétale deux taches claires

de tissu compact sans interposition de tissu spongieux,

taches répondant au 1/3 antérieur de la suture en question.

Ecaille de l'occipital. Face externe. La bosse occipitale

gauche est plus saillante que la bosse occipitale droite.

Face interne. La fosse occipitale gauche est plus profonde

que la droite. La crête interne de l'occipital forme une courbe

très prononcée à concavité gauche. La partie gauche de l'oc-

cipital est plus développée que la partie droite. Pas de trans-

parence ; l'occipital est il peu près uniformément opaque.

Sutures. Les sutures normales existent. II n'y a pas de

synostose. Les sutures, bien dentelées, en particulierlasuture

lambdoïde, ne présentent aucun os wormien.

La partie droite de la suture coronale est plus développée

que la partie gauche. La partie gauche de la suture lambdoide

est plus développée que la partie droite. Le vertex se trouve

sur la suture interpariétale à égale distance du bregma et du

lambda.

/jase du crâne. La base du crâne semble normale. Les

différentes fosses sont régulières ainsi que le trou occipital.

L'apophyse crista-galli est arrondie et épaisse.

Dure-mère épaisse. Adhérences de la dure-mère à la pie-

mère au niveau des lobes pariétaux et des faces internes des

lobes orbitaires. - Pas de tubercules miliaires. - Le sinus

longitudinal est gorgé de sang. La glande pituitaire est

petite et pâle. Les nerfs crâniens, les artères de la base,

les tubercules mamillaires sont symétriques. Le bulbe

et la protubérance sont réguliers. Les olives paraissent

égales. Les pyramides antérieures sont aplaties et offrent une

sorte de petite gouttière ; pas de modification sensible de la

couleur. La glande pinéale n'offre rien de particulier.

62 HÉMISPHÈRE DROIT.

HÉMISPHÈRE DRQIT. 63

Sclérose atrophique : hémisphère gauche. Rb b

Cerveau. Hémisphère gauche. 1° Face interne : La pie-

mère est un peu vascularisée dans la région pariétale. Les

veines sont gorgées de sang. - Au palper foyer d'induration

répondant à la racine de F2 et F3.

Après décortication, ce qui frappe, c'est l'atrophie des

circonvolutions périsylviennes et périrolandiques.. La scis-

sure de Sylvius est normale comme longueur et comme

direction ; elle n'est pas fermée à la partie antérieure mais

fortement entrebaillée, ce qui permet de voir la partie anté-

rieure du lobule de l'insula. Cet écartement est dû à l'atrophie

de la moitié antérieure de la circonvolution d'enceinte de

Sylvius.

Le sillon de Rolando est normal comme direction et comme

coudure. Le sillon inter-pariétal ne présente rien à

signaler ; il en est de même des sillons temporaux et tem-

poro-occipitaux. - La scissure perpendiculaire externe est

très prononcée.

Lobe frontal. Il est coupé à sa partie moyenne, par un foyer

de sclérose atrophique, depuis son bord supérieur jusques et

y compris le bord inférieur de F3. L'atrophie s'étend sur F3

en arrière et sur le cinquième inférieur de FA. La sclérose

intéresse également P A dans toute sa hauteur. Cette circon-

volution est presque lamelliforme. L'opercule rolandique est

mince et atrophié. La région sclérosée comprend deux parties

verticales réunies par une partie horizontale. Entre elles se

trouvent, en apparence à peu près saines, l'extrémité posté-

rieure de I et F2 et les 4/5 supérieurs de FA. Les portions

scléreuses des trois circonvolutions frontales sont en retrait

par rapport aux parties environnantes, saines. En ce qui

concerne PA, l'atrophie porte sur son épaisseur et non sur sa

hauteur, car elle est de niveau avec les régions voisines.

L'extrémité antérieure des trois circonvolutions du lobe fron-

tal ne présente pas de sclérose mais un arrêt de développe-

ment. Le lobule de l'insula a quatre digitations ; ses deux

digitations antérieures sont bien développées et davantage

que les postérieures. Il reçoit un petit pli de passage de TI,

circonvolution très grêle mais ne paraissant pas scléreuse.

Lobe pariétal. Nous avons signalé la sclérose atrophique

très prononcée de la pariétale ascendante. Les pariétales supé-

rieure, I'i, et inférieure, 1'2, sont très incisées et semblent nor-

males ainsi que le lobule du pli courbe.

Lobe temporal. - Nous avons noté déjà un arrêt de

développement de T1 qui prédommine dans les deux tiers

postérieurs. Les autres circonvolutions temporales, sur les

ni) il) Sclérose du LOBULE de l'insula.

deux faces, sont assez bien développées, plus que les circon-

volutions des autres lobes, arrêtées dans leur développement.

Lobe occipital. Circonvolutions très grêles sur ses deux

faces.

2° Face interne. On y retrouve la sclérose atrophique de

la partie moyenne de FI. La partie moyenne et postérieure

cle la circonvolution du corps calleux est arrêtée dans son

développement. La sclérose atrophique de l'extrémité

supérieure de PA se prolonge sur le lobe paracentral qui est

sclérosé et atrophié dans sa moitié postérieure. Tandis que

la scissure calloso-maaginale est peu profonde, la scissure

perpendiculaire externe l'est à un degré prononcé.

Le lobe quadrilatère est très volumineux. Le coin est assez

gros.

Le corps calleux est un peu épais atrophié même, a l'as-

pect gauffré dans sa partie moyenne. Le ventricule latéral,

le corps strié, la couche optique, la corne d'Ammon parais-

sent sains. Le lobe orbitaire n'offre rien d'anormal dans

ses circonvolutions et ses sillons.

Hémisphère DROIT. Face externe. - Vascularisation

prononcée de la pie-mère sur les lobes pariétaux et occipi-

taux, sans engorgement veineux. La sclérose atrophique

verlnicellée a une distribution analogue il celle de l'hémis-

phère gauche, mais, en outre, s'étend à d'autres circonvo-

lutions. Elle intéresse l'extrémité postérieure de F2, le pied

de FA, toute la pariétale ascendante, la partie inférieure et

antérieure de Pa, tout le pli pariétal supérieur, P1, les deux

tiers postérieurs de la première temporale, T1, jusqu'au

prolongement du pli courbe, P C, la partie moyenne de la

deuxième temporale, T2. Le sillon de Rolando, un peu entr'ou-

vert, n'est interrompu par aucun pli de passage.

La scissure de Siili711ts est encore plus béante que sur

l'autre hémisphère. Elle laisso voir une grande partie du

lobule de l'insula. Ce lobule est sclérosé, d'aspect vitreux,

aplati, très dur et presque sans trace de digitations. Les cir-

convolutions voisines des circonvolutions sclérosées sont

arrêtées dans leur développement, les autres ne paraissent

avoir rien de particulier. Le pli fenporo-yrmi.ntrcl,to. est

sclérosé et atrophié à un degré prononcé mais non vermi-

celle (Fig. 3).

Face interne. La première circonvolution frontale, F1,

paraît saine dans toute sa longueur sauf une très petite par-

Tuberculose ; PYO-PNIJU11f0-THORAx, 67

tie correspondant à l'extrémité supérieure de la sclérose de

la face externe. La circonvolution du corps calleux, dans sa

moitié postérieure, est atrophiée, sclérosée, ainsi que la plus

grande partie du lobe paracentral et toute la moitié anté-

rieure du lobe carré. La scissure perpendiculaire interne

est très profonde; la scissure calcarine est peu prononcée.

Le coin, le lobe occipital, la circonvolution de l'hippocam-

pe, la quatrième temporale, T sont assez bien développées.

- Le ventricule latéral, la couche optique, CO, le corps strie,

CS, la corne d'Ammon sont macroscopiquement normaux.

(Fig. 4).

Cou. Larynx, rien. Corps thyroïde peu volumineux

sans lésion apparente. Pas de trace du thymus,

THORAX. - Poumon gauche. Plusieurs noyaux (quatre) de

booncho-pneumonie occupant le lobe inférieur (partie pos-

érieure) ; légère infiltration tuberculeuse du sommet. -

Poumon droit. Avant l'ouverture du thorax on constate la

présence d'air dans la plèvre. Il s'échappe de nombreuses

bulbes par un trou creusé dans le 4" espace intercostal.

Après l'ouverture du thorax, on trouve dans la plèvre un

liquide gangreneux, fétide, couleur chocolat (2 à 3 cuillerées).

Le poumon est d'une couleur verdâtre, recouvert de très peu

de fausses membranes qui semblent être récentes. Ce pou-

mon est creusé au niveau de son lobe moyen et de son lobe

supérieur d'une grosse cauerne ayant tous les caractères d'une

caverne gangreneuse. Cette caverne était très superficielle et

en communication avec la cavité pleurale.

Dans ce même poumon droit, on trouve dans la partie infé-

rieure du lobe inférieur un noyau de broncho-pneumonie.

Le bord antérieur du lobe est atélectasié. - Coeur flasque;

pas de symphyse périoardiaque. Le myocarde n'est pas altéré,

aucune lésion valvulairo. Persistance du trou de Botal.

Audomen. Foie un peu congestionné, vésicule biliaire

rien. - Reins. Se décortiquent facilement. Rien à la coupe.

Estomac, intestins sains. L'appendice mesure 0 08, est libre

et grêle. -- Organes génitaux : ectopie testiculaire droite.

Cause de la mort : Tuberculose pulmonaire. Bi,o7îclto-

pneumonie, Pi/o-pîiettiiolito7,ix. .

68 Idiotie, diplégie : sclérose ATROPHIQUE.

Poids des organes

IDIOTIE, diplégie : sclérose atrophique. 69

Joh... n'a jamais donné aucun signe d'intelligence :

il était atteint d'idiotie complète.

III. Nous n'avons pas à insister sur le caractère de

la diplégie avec contracture : ils étaient classiques

ainsi que le montrent les détails de l'observation.

IV. Le frontal est plus développé à gauche qu'à

droite ; il en est de même de l'occipital correspondant.

Toutes les sutures persistent. Les symptômes con-

convulsifs intéressaient les quatre membres : les

lésions cérébrales existent des deux côtés. Les symp-

tômes convulsifs et la paralysie prédominaient à gau-

che : les lésions cérébrales sont plus étendues plus

profondes sur l'hémisphère droit (Fig. 3 et 4), aussi

bien sur les circonvolutions que sur le lobule de l'in-

sula. Rien, pendant la vie ne pouvait faire croire à

unc méningite et, en effet, à l'autopsie nous n'avons

pas trouvé de lésions macroscopiques des méninges.

VII.

Idiotie microcéphalique, nanisme, main botte ; -)

l'An IIOUI\NE\'n,LK

Depuis longtemps nous avons l'intention de publier un

mémoire sur la main idiote sur laquelle nous avons

maintes fois donné des renseignements dans nos observa-

tions. Différentes circonstances ont retardé cette publica-

tion. Nous en détachons aujourd'hui la description d'une

main-botte observée chez un microcéphale.

Sidney (W.)..., 13 ans. Poids : 24 k. 300; Taille : 1"'28,

au lieu de 1111li2.

Main gauche.

Face supérieure. -- L'index, le médius et l'annulaire

sont assez bien conformés. L'index cependant s'incurve

légèrement vers le médius, surtout dans la phalangette.

Il est à 4 millimètres près aussi long que le médius et de

trois millimètres plus long que l'annulaire. L'annulaire

est dévié vers le bord cubital dans sa phalangine et vers

le bord radial dans sa phalangette (1). Les ongles de ces

trois doigts ne présentent rien de particulier ; ils sont assez

longs, convexes transversalement et un peu cannelés.

L'auriculaire est court; même en lui donnant sa plus

grande extension il arrive à peine il l'articulation de la

phalangine avec la phalangette de l'annulaire. Dans sa

il) De sorte qu'il existe un vide entre le bord cubital de la phalangine du

médius et le bord radial de la phalangine de l'annulaire.

IDIOTIE : MAIN BOTTE.

71

position naturelle, sa phalange suit une direction normale,

la phalangine a une direction en dehors ou cubitale, et la

phalangette une direction en dedans ou radiale; c'est la

phalange et la phalangine qui paraissent le plus courtes ;

la nhalanelte, à part son incurvation, ne présente rien de

particulier. Dans son

ensemble l'auriculaire e

décrit donc une courbe

à concavité radiale et

convexité cubitale (1).

De plus, sa face exter-

ne est renversée nota-

blement en dehors com-

me dans le pied-bot

varus, d'où une infle-

xion de la phalangette

vers la paume de la

main.

Le pouce, qui est

difficilement opposa-

ble, suit la direction

des autres doigts de la

main. Le premier méta-

carpien est long et grê-

le, son extrémité supé-

rieure est saillante ; il

en est de même de la

phalange. La phalan-

gette assez longue, va

s'écartant des autres

doigts. Lorsque le pou-

ce est dans sa position

naturelle, il s'incline vers la paume de la main et sa pha-

lange et sa phalangette forment un angle de 150 degrés

avec la face palmaire. On remarque également chez ce

même doigt une tendance à se fléchir. La phalangette

(1) Il résulte de cette incurvation, un creux entre la phalangine et la pha-

langette de l'auriculaire et de l'annulaire.

Fia. 5 - Main gauche.

7'2 IDIOTIE : MA)N BOTTE.

s'infléchit latéralement, en dehors, sur la phalange,

Pas de saillies musculaires ; atrophie très accentuée

de l'éminence thénard, Les tendons abducteurs et fléchis-

seurs du pouce sont dans un état permanent de légère

contracture qu on arrive

il vaincre facilement.

Face palmaire.

Sur la face palmaire, il

n'y a à signaler que la

dépression qui tient la

place de l'éminence

thénard.

Les mouvements des

trois doigts normaux

(index, médius et annu-

laire ) sont à peu près

tout à fait libres. En

les exerçant passive-

ment, on constate au

début un peu de raideur

qui disparait vite. La

raideur est un peu plus

marquée dans l'articu-

lation des phalangines

avec les phalangettes.

Un peu de raideur à

l'articulation de la pha-

lange avec la phalan-

gette du pouce. Un peu

de raideur également

dans les deux articula-

tions phalangiennes

avec la phalangette de

l'auriculaire.

Main droite.

A la main droite, le pouce, l'index, le médius et l'annu-

laire sont tout à fait normaux. L'auriculaire est absolu-

Fig. 6. - Main droite.

Idiotie : main BOTTE. 73

ment semblable à celui de la main gauche. Il y a un vide

entre les phalangines. du médius et de l'annulaire et un peu

de raideur clans leurs articulations phalangiennes. Les

éminences thénar et hypothénar sont également bien

développées. Les mouvements d'opposition du pouce sont

normaux.

Mensurations.

VIII.

La scoliose myxoedémateuse ;

Par MOUHKEVILLM

Bous ce titre, 1\1. le Dr A. Chipault a fait une commu-

nication intéressante à la Société de Pédiatrie de Paris,

clans la séance cle mars 1902. « Parmi les scolioses symp-

tomatiques, dit-il , il en est une qui semble avoir échappé

à l'attention des orthopédistes et des neurologistes, c'est

la scoliose du myxoedème. » r. Chipault relate ensuite

trois faits : le premier, concernant un garçonnet de 4 ans

1/2, présentant « il un léger degré, l'aspect myxoedéma-

teux ? avec une scoliose il convexité gauche, portant sur la

région dorso-Iombaire...» Le second a trait à une fillette

de 12 ans, atteinte de myu;dcme fruste et de scoliose dor-

sale inférieure ? Le troisième cas est relatif iL un garçon

cle 11 ans, offrant les mêmes affections. L'auteur termine

ainsi :

.1'ai cru devoir vous signaler ces trois cas, parce que, ]]la

connaissance du moins, l'attention n'a pas encore été attirée,

sur la scoliose comme manifestation du mvxH. : clèll1e. J'ai lu

bon nombre de traités et d'études sur la scoliose sans trou-

ver mentionnée cette modalité pathogénique; de même, clans

les descriptions si attentives de malades faites dans les étu-

des médicales sur le et dans le riche dépôt ico-

nographique qui les accompagne, je n'ai rien trouvé non plus

à ce sujet. Quelques documents ont pu m'échapper, ils doi-

vent être rares. Il semble donc que la scoliose ne soit qu'une

complication du myxcedèmc.

SCOLIOSE myxoedémateuse. 75

Contrairement il l'opinion de M. Chipault, les neurolo-

gistes ont signalé les déformations du rachis qui s'obser-

vent non pas à titre de complication exceptionnelle, mais

. au contraire, très fréquemment, dans le myxoedème infan-

tile. Pour le démontrer, il nous suffira d'emprunter quel-

ques citations à nos nombreuses publications sur la cache-

xie pachydermique.

1° La colonne vertébrale de Graf..., au niveau de la base

du thorax, offre une dépression très marquée; lorsque l'en-

fant est debout, il existe il ce niveau un sillon vertical assez

profond pour contenir le doigt. (Compte-rendu du service

des enfants de l31cêtt'e de 188C, p. 14.) .

2° Dans un cas de CI. Routh que nous avons publié en 1886

(p. G11, il est dit qu'il existait « une lordose bien marquée».

3° Dans le cas de Bail que nous avons publié (p. 6n), « la

taille est extrêmement cambrée et l'on pourrait presque pro-

noncer il cet égard le nom de cyphose.» »

/1° Chez l'enfant Pi... (Pauline), « le thorax est déformé

par une déviation du rachis. » (Compte-rendu de 1888, p. 5.)

5° Chez Amélina F..., « la colonne vertébrale est déviée à

la région dorsale ; la convexité, tournée adroite, fait une sail-

lie assez prononcée.» (77jtd., p. 9.)

(;01,' irisa X... : « La courbure dorsale de la colonne verté-

brale est prononcée, le dos est voûté, la poitrine globuleuse.»

(lIJÙ1., p. 14 et 15.)

7o Wat. (Augustine) a le dos courbé; la région lombaire

est excavée. (Comp/I'-rendu de 1889, p. G9.)

8° Le père d'une myxoedémateusc espagnole nous signale

qu' «il existe un peu d'enfoncement de la colonne verté-

brale. » (Ibid. p. 72.)

Dans notre mémoire de 1889 (Ibid., p. 103), nous écri-

vions : Le thorax offre d'ordinaire des déformations por-

tant sur les dernières côtes, déjetées en dehors, et sur la

colonne dorsale plus ou moins déviée. Le dos est voûté...

I" .Iules Deb... : «Les côtes sont saillantes, la base de la poi-

trine est élargie au niveau des fausses côtes qui sont rejetées

en arrière, la partie supérieure du thorax forme une conve-

xité très accusée, surtout au voisinage de la colonne dorsale.

La colonne vertébrale est sinueuse, la portion dorsale forme

16 SCOLIOSE myxoedémateuse.

une convcxitebeaucoup plus prononcée que d'habitude, princi-

palement au niveau des deux tiers supérieurs du thorax. Au-

dessous de cette convexité, on note une ensellure très mar-

quée. De plus, la colonne décrit une légère convexité à gau-

che. (IIu'd., p. 170 ).

IU° et 1 1° La malade, de l'observation II de notre mémoire

de 1890 offrait une lordose très prononcée. (C'olllllte-¡'('¡¡du de

1890, p. 213). Le malade de l'observation VII avait également

une lordose (p. 217).

12" Chez une myxoedémateuse que nous avons observée à

Maçon, « le thorax est élroit et notablement déformé; l'épaule

gauche est plus élevée que la droite, très saillante, ainsi que

la région scapulaire; In colonne dorsale décrit une convexité

à gauche très prononcée, les dernières côtes sont saillantes.

Ces déformations paraissent [dus accentuées lorsque l'on exa-

mine la malade debout. » (Compte-rendu de 9590, p. 21'J).

13° Chez Gang... « la colonne vertébrale forme une stillie

notablement exagérée au niveau de la partie supérieure du

dos. Il existe également une légère convexité à gauche des

vertèbres. L'ensellure est assez accusée, mais n'est pas aussi

exagérée que chez les autres idiots myxoedémateux. L'épaule

gauche est un peu affaisée et la droite relevée. » Compte-

rendu de 1895, p. 188\.

14° « Goss... avait une déformation du rachis et une enscl-

lure très prononcée de la région lombaire.» (<'0)) ! p/e-)'endu

de 189G, p. 51.)

Dans une communication il la Société médicale des /¡()jIÍ-

taux, nous répétions que : « Le thorax offre des déforma-

tions portant sur les dernières côtes, déjetées en dehors et

sur la colonne vertébrale plus ou moins déviée. Le dos

est voûté. )) (7 ? p. 13( ! .)

15° « Le thorax de Marie Bey..., élargi à sa base, est étroit

en haut et se continue presque sans ligne de démarcation

avec le cou élargi jusqu'en bas. Le sternum est projeté en

avant et la pointe de l'appendice xiphoidc proémine assez

l'ortement. Il n'y a pas de chapelet chondro-costal Le thorax

est un peu asymétrique par sa base, les côtes du côté droit

étant comme redressées et refoulées en dehors, tandis que

celles du côté gauche sont bombées. Cette asymétrie du

thorax correspond il une scoliose du rachis, les dernières

vertèbres cervicales et les trois premières dorsales formant

Scoliose myxoedémateuse. 77 7

une légère courbe il concavité tournée à gauche, tandis que

le reste de la colonne dorsale et de la colonne lombaire forme

une courbe marquée à concavité inverse. La concavité en

avant de la partie dorsale de la colonne est un peu exagé-

rée. » (Compte-rendu de 1894, p. 107.1

16o Chez Borj..., « la poitrine est courte, le dos un peu

bombé. Voussure dorso-lombaire de la colonne vertébrale. »

(Ibid., p. 1/iS.)

17° Félicie Tis... : « Le tronc, vu d'arrière, présente une

convexité thoracique très marquée et des déviations de la

colonne vertébrale. Celle-ci offre deux courbures de scoliose,

l'une supérieure, il convexité regardant à droite, l'autre infé-

rieure, à convexité regardant il gauche. La région lombaire

présente une ensellure très prononcée. (Compte-rendu de

1900, p. 32.) (1).

Les observations, maintenant très nombreuses, publiées

par les auteurs, en particulier celles de M. Herthoge

(d'Anvers), nous fourniraient sans doute des renseigne-

ments analogues à ceux qui précèdent.

Dans ses conclusions, M. Chipault dit « que la scoliose

du myxoedème semble se rencontrer surtout dans ses

formes frustes ». Or, tous les cas qui précèdent se rap-

portent à des cas-types de myxoedème infantile. Il ajoute

que « au point de vue thérapeutique, cette scoliose symp-

tomatique demande un traitement mixte : traitement

thyroïdien..... traitement orthopédique (appareil plâtré),

massages et a ff usions chaudes, les seules permises chez

les myxoedémateux. » A cet égard, nous ne partageons

pas l'opinion de M. Chipault. Nous prescrivons il tous nos

myxoedématcux la douche froide en jet en éventail, sur

tout le corps, et nos malades s'en trouvent parfaitement

bien. C'csl un excellent adjuvant du traitement thyroïdien.

Il termine son travail en disant qu' « il y a un réel intérêt

pour le médecin, et surtout pour l'orthopédiste, à songer

au besoin à cette variété, méconnue jusqu'à présent, je

crois, de scoliose symptomatique. » Les cas que nous

(1) On trouvera à la fin de cette observation l'énuniération de nos publi-

('ationssm'tcmyxoedpmeinfantHe.

78 Déformations du rachis.

venons de rappeler sommairement montrent que les défor-

mations cle la colonne vertébrale chez les myxcedémateux

n'ont pas été « méconnues jusqu'à présent ».

1 IX.

Technique pour l'examen des réflexes;

Par CROUZON.

Les réflexes usuels étudiés en clinique sont les réflexes

tendineux, cutanés et pupillaires.

Réflexes tendineux Pour l'étude des réflexes tendineux, il

est utile et presque nécessaire de se servir d'un marteau à

percussion. Ce n'est donc que dans les cas où le marteau fait

défaut qu'on se servira de la percussion avec le bord cubital

de la main, avec les doigts, avec le dos d'un couteau, avec

une cuiller, etc.

Réflexe rotulien. Les positions à donner au malade sont

nombreuses : on peut lui faire croiser les jambes l'une sur

l'autre, on peut le faire asseoir sur le bord d'un lit ou d'une

table, etc. Le meilleur procédé est le suivant : on fait asseoir

le malade sur une chaise, on lui commande d'étendre à moitié

les jambes sur les cuisses en laissant toutefois reposer ses

pieds sur le sol. Les jambes doivent alors former un angle

obtus il 135° avec les cuisses. On conseille au malade de ne

pas se raidir, de laisser ses jambes molles.

On percute alors le tendon rotulien. Le réflexe se perçoit :

a) par le mouvement de propulsion du pied;

b) par la contraction visible du triceps ;

c) en palpant le triceps dont on sentira la contraction

sous la main.

Quand le malade est couché, pour rechercher le réflexe, on

passe la main sous la cuisse du malade, on soulève légère-

ment celle-ci en laissant cependant le membre dans le

relâchement. Si l'on percute alors le tendon, la jambe s'étend

sur la cuisse.

Re/7exe contralateral des adducteurs (P. Marie). Au réflexe

rotulien doit être joint le réflexe contralatéral des adducteurs.

80 Examen des réflexes.

Ce réflexe consiste, en effet, dans uue contraction des adduc-

teurs provoquée par la percussion du tendon rotulien du côté

opposé. On peut le rechercher le malade étant assis ou cou-

ché. e

Si le malade est assis, on lui fait prendre la même position

que pour la recherche du réflexe rotulien en lui faisant z

écarter légèrement les cuisses. On voit alors il chaque per-

cussion du tendon rotulien une adduction légère de la cuisse

du côté opposé. Ce réflexe n'est bien apparent que lorsqu'il

est exagéré.

Si le malade est couché, on place une des deux jambes, la

droite par exemple, en flexion sur la cuisse et la cuisse en

abduction. On percute alors le tendon rotulien gauche en

soulevant légèrement la cuisse du malade, il se produit uue

extension de la jambe gauche et, en même temps, du côté

droit le réflexe contralatéral qui consiste en une adduction

de la cuisse.

Réflexe achillèen. Le réflexe du tendon d'Achille doit être

recherché de la façon suivante : le malade doit être autant

que possible déchaussé. On lui commande : Il mettez-vous il

genoux sur la chaise en me tournant le dos. » On lui conseille

de s'avancer aussi près que possible du dossier de la chaise

et de ne pas raidir ses jambes. On s'assure du relâchement

de ses muscles du mollet en les palpant ou en mobilisant le

pied sur la jambe, on frappe alors clu marteau le tendon

d'Achille : on voit le pied s'étendre sur la jambe, la plante du

pied tendant à passer du plan vertical vers le plan horizontal.

Sans entrer ici dans le séméiologic du réflexe achilléen, nous

ne pouvons mieux mettre sa valeur en relief qu'en signa-

lant sa disparition précoce dans le tabès alors même que

les réflexes rotuliens existent encore (Habinski).

Quand le réflexe est exagéré, la percussion peut faire appa-

raitre le phénomène du pied qui consiste en une série

d'extensions rythmiques et saccadées du pied sur la jambe.

Le clonus du pied peut, du reste, être recherché d'une autre

façon : en faisant étendre complètement le membre du malade

et en cherchant à provoquer la flexion forcée du pied sur la

jambe, le pied s'anime des secousses d'extension rythmiques

et saccadées qui constituent le clonus.

Réflexes du coude et du poignet. - Pour chercher le réflexe

du coude, on place l'avant-bras en demi-flexion sur le bras et

on le soutient de façon à le laisser clans le relâchement. On

Réflexes cutanés. 81

percute le tendon du triceps brachial au-dessus de l'olécràne :

il se produit un mouvement d'extension de l'avant-bras sur

le bras.

Les réflexes du poignet se recherchent aussi, le membre

étant dans le relâchement, la main du malade reposant dans

la main de l'observateur. La percussion se fait alors sur

les tendons du bord radial, du bord cubital, delafacedorsale,

et de la face palmaire du poignet et elle produit la contraction

des muscles correspondant aux tendons percutés.

Réflexe )nn.ssc<o'm. Nous rapprochons des réflexes tendi-

neux le réflexe du masséter. On le produit en percutant direc-

tement le muscle masséter ou mieux de la façon suivante : on

commande au malade d'entrouvrir la bouche sans faire d'effort.

On appuie la lame d'un couteau ou d'un coupe-papier sur les

arcades dentaires inférieures et on percute avec le marteau

la surface de la lame. L'arcade dentaire s'ahaisse sous le

choc, puis est soulevée par la contraction du masséter : c'est

le réflexe.

Réflexes cutanés.

Réflexe plantaire. - On le recherche en chatouillant légère-

ment la plante du pied, (sur son bord externe de préférence)

avec une épingle, une plume, une pointe de crayon, avec

l'ongle. Il faut recommander au malade de se raidir et, au

besoin, aux sujets impressionnables de fermer les yeux.

A l'état normal, les orteils se fléchissent, c'est-à-dire se

rabattent vers la plante du pied ; à l'état pathologique, ils

s'étendent, c'est-à-dire se renversent vers le dos du pied, la

face palmaire des orteils tendant à regarder le plafond.

C'est au gros orteil que se voit le mieux le mouvement

d'extension ou de flexion : c'est donc sur lui que doit se

concentrer l'examen de l'observateur. On devra éviter de

confondre l'extension des orteils, phénomène réflexe indépen-

dant de la volonté, avec les mouvements de défense du pied

d'un malade craintif qui, au moindre attouchement, fléchit

le pied sur la jambe et simule ainsi l'extension des orteils.

Le réflexe plantaire peut être diminué ou aboli et il y a

quelques années c'était le seul point que pouvait éclairer la

recherche de ce réflexe. Sa valeur s'est accrue depuis que

]3abiiisli a fait connaître la séméiologie de l'extension des

orteils : il a montré que le signe signifiait « trouble dans le

système pyramidal » et qu'il est lié le plus souvent à une

8 ? Examen des réflexes.

affection organique du système nerveux : hémiplégies, diplé-

gies, paraplégies, etc. Il fait défaut dans l'hystérie. On voit

donc de quelle importance est sa recherche.

Réflexe cré11wslérie11. On chatouille avec une épingle la

peau de la face interne des cuisses, on voit une élévation du

testicule du côté correspondant. On doit pratiquer cet examen

successivement sur chacune des cuisses pour observer chacun

des réflexes. On peut les provoquer aussi en serrant violem-

ment avec la main, de façon à comprimer les masses muscu-

laires de la face interne de la cuisse au-dessus du genou.

Réflexes abdominal et niga.clridttn. : - Un les recherche

en chatouillant d'une épingle la peau de la paroi abdominale

successivement à droite et à gauche de la ligne médiane, d'a-

bord au-dessous de l'ombilic, puis au niveau de la région

épigastrique. Il se produit du côté excité une contraction du

grand droit, des obliques et du transverse qui fait rentrer

l'abdomen.

U( : f7('xe Imlbo-c<ll'enu'/<.\'. Il est d'un usage plus rare en

clinique : on l'obtient en saisissant le gland entre les doigts

il travers le prépuce, on le comprime légèrement jusqu'à ce

qu'il s'échappe des doigts. On le perçoit en palpant l'urètre

au niveau de la région scroto-périnéale : on sent une con-

traction musculaire due au bulbocacrneux.

Réflexe anal. Il consiste dans la contraction et l'élévation

du sphincter de l'anus sous l'influence du chatouillement, avec

une épingle, de la peau de la région anale. Il importe de donner

au malade une des positions suivantes :

a. Debout le bassin fléchi sur les cuisses, le corps penché

en avant, les jambes éloignées, le malade écartant ses fesses

de ses mains.

b. Couché sur le dos, les jambes en l'air, les fesses écartées.

c. Le malade couché sur le flanc, la jambe de ce côté allon-

gée, l'autre jambe fléchie.

Réflexes pharyngé et pnlpèbral. - Nous joignons ces deux

réflexes aux réflexes cutanés. Le réflexe pharyngé s'obtient

en chatouillant le pharynx avec un tortillon de papier : il

provoque une sensation désagréable de picotement, des nau-

sées et quelquefois des vomissements. Ce réflexe fait défaut

dans l'hystérie, dans les paralysies pharyngées bulbaires ou

Réflexes PL'PILLAIBES. 83

pseudo-butbaires. Le réflexe lJalpéb1'a1 est la réaction d'oc-

clusion de la paupière qui se produit quand on touche du

doigt la cornée. Ce réflexe disparait dans le sommeil chloro-

formique, dans le coma épileptique, dans le coma apoplec-

tique, etc.

Réflexes pupillaires.

Il existe de nombreux réflexes pupillaires : à la lumière,

ex l'accommodation, à la douleur, à l'effort d'occlusion des

paupières, etc. Le réflexe lumineux est le seul important en

clinique : son absence est signe de tabès, de paralysie géné-

rale ou d'affection syphilitique du système nerveux.

Il doit être recherché de deux façons :

1° dans l'obscurité : on place a côté de l'oeil il examiner un

rat ou une bougie allumée. On fait avec la main un écran

interceptant la lumière entre et la source de lumière. *

On éclaire à volonté l'oeil en retirant la main : la pupille reçoit

la lumière, la contraction se produit. Cet examen nécessite

une chambre noire. On pourra cependant se contenter d'une

demi-obscurité que l'on obtiendra en couvrant la tête du

malade d'nn drap ou d'une alexe.

2° à la lumière du jour.

a) Examen direct : on ferme, les deux paupières et on ouvre

brusquement la paupière de l'oeil examiné en la soulevant

avec le pouce : la pupille se contracte ; on referme cette pau-

pière et on examine l'oeil opposé de la même façon.

b) Examen consensuel. On maintient ouvert l'oeil à exa-

miner, le droit par exemple : on ferme l'oeil gauche. Puis

brusquement on soulève la paupière de l'oeil gauche en main-

tenant l'attention fixée sur l'ceil droit. On voit alors apparaitre

la contraction de la pupille droite en même temps que se

produit la contraction de la pupille gauche par l'éclairage

direct. La réaction de la pupille droite est dite consensuelle

alors que celle de gauche est dite directe.

Histoire complète d'un cas d'idiotie myxoedémateuse

(D'u/.roedème infantile).

(1890-1903).

PATtBOURÎVEVItLE.

Cette observation concerne un malade, De])....

(Jules), que nous avons suivi pendant douze ans.

Nous avons publié ses antécédents et sa description

clinique dans les Archives de neurologie (1890, t. XVI,

p. 217) et dans le Compte-rendu de notre service

pour 1889 (p. 172). Puis, .en 1895, dans une commu-

nication au Congrès des aliénistes et des neurologistes

'(session de Bordeaux), intitulée : Trois cas d'idiotie

moedëmateuse traités par l'ingestion de glande

thyroïde, nous avons exposé les effets du traitement

thyroïdien chez ce malade. Deb... est mort au com-

mencement de 1902. Avant de résumer les particula-

rités- qu'il a présentées de 1896 à sa mort, de relater

son autopsie, de donner la description de son sque-

lette, l'examen histologique du cerveau, etc., nous

croyons devoir reproduire nos deux publications que

nous venons de rappeler. De la sorte, le lecteur aura

l'histoire complète de l'un des plus beaux exemples

de myxoedème infantile que l'on puisse rencontrer.

Sommaire. Père tuberculeux ( ? ). Oncle maternel para-

lysé, aliéné et sujet probablement à des accès d'épilepsie.

IIJlOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 85

Frère et soeur morts tuberculeux. - Soeur strabique à

la suite de convulsions de l'enfance, morte tuberculeuse.

Renseignements incomplets sur les antécédents du mala-

de. Marche il dix-huit mois. Propre de bonne heu-

re. Arrêt de développement, bouffissure et épaississe-

ment Ù partir de trois ans. Etat du malade au 1er février

1890. Lésions scrofuleuses et 1'ach.i.tiques. -.9b.sence de

la glande thyroïde; symptômes classiques de l'idiotie 111 ! J-

.ïoed ? m.ateuse. pseudo-lipomes ; persistance de la fontanel-

le antérieure ; hernie ombilicale ; eczéma; arrêt de déve-

loppement physique et intellectuel; parole, voix, etc.

1893-1894. Julep avec extrait de glande thyroïde et injections

sous-cutanées de liquide thyroïdien : résultats négatifs.

1895. Ingestion stomacale de glande thyroïde de 111outon.-

Amélioration : Elévation de la température;- diminution

de poids; phénomènes divers dus au traitement;- mo-

difications de la voix, accroissement de la taille, etc., etc.

1896. Dentition complète ; carie dentaire.

1897-190). Evolution il peu près nulle de la puberté. Même

étal général.

1902. Hydropisie pleurale et pèricardique. Cyanose subite :

mort ; abaissement considérable de la température. T.

après la mort- Rigidité cadavérique.

AUTOPSIE ? Persistance de la suture métopique. Abs-

ence complète de la glande thyroïde. Hydropisie de la

plèvre etdu péricarde. -.9 théronze. -Pet its Icstes rénaux.

Description du squelelle. - .1nalyse chimique de la peau,

Examen histologique du cerveau. Réflexions.

Debar... (Jules,) né il la Vcntic (Pas-de-Calais), le G octobre

1805, est entré le 23 février dans mon service, a Bicêtre. Ce

malade nous a été envoyé par M. le Dr Moizard, médecin de

l'hôpital Tenon, qui l'avait reçu dans ses salles en même

temps que sa soeur, atteinte d'une pleurésie. C'est elle qui a

fourni à notre ancien interne, M. Camescasse, les renseigne-

ments suivants sur sa famille.

Antécédents. Père, ouvrier dans une fabrique de toile,

sujet iL des hémoptysies ; grand, fort, brun, sobre, d'un carac-

tère doux, n'ayant pas d'accidents nerveux. Il est mort en

1873, à l'âge do quarante-cinq ans, d'une hémorrhagie (proba-

8H Idiotie myxoedémateuse.

blcment une hémoptysie), en deux heures. [Père, mort vers

quatre-vingts ans. Mère, pas de renseignements. Deux

soeurs seulement, bien portantes ainsi que leurs enfants (un

garçon et trois filles).]

Mère, morte en 1877, à quarante-quatre ans, d'une

maladie d'intestins, journalière à la campagne, sobre, sujette

il des maux de tète. Elle était d'une taille moyenne, forte,

brune et d'un caractère très doux. [Père et mère, aucun ren-

seignement. Un frère, mort il soixante-six ans, était para-

lysé. Il avait une bosse dans le dos, consécutive à un effort

et serait resté alité pendant douze ans, de quarante-six il

cinquante-huit ; puis il a pu marcher jusqu'à sa mort. Il avait

des idées tristes, croyait toujours qu'il allait mourir, il était

sujet à des attaques de nerfs avec chute, dans lesquelles il se

raidissait, se débattait, et suivies d'un moment d'hébétude.

Parfois, il avait une mousse blanche il la bouche. Il s'était

marié avec une femme plus âgée que lui de vingt-neuf ans,

dont il n'a pas eu d'enfants. - l'as de soeur. Aucun autre

détail.] .

Pas de consanguinité (père du Pas-de-Calais, mère de la

Manche). Inégalité d'âge d'environ deux ans.

Cinq enfants : 1° Garçon, grand, fort, intelligent, mort a

vingt-sept ans d'une affection pulmonaire aiguë, probable-

ment de nature tuberculeuse. Il s'était marié et avait eu un

enfant mort à deux ou trois mois;

2° Fille morte à dix ans, après quinze jours de maladie con-

sécutive il une peur occasionnée par la vue de la chute de sa

soeur dans l'eau. Elle était grande et bien constituée pour

son âge ; .

3° Pille, celle qui nous renseigne âgée de trente-sept

ans, d'une taille au-dessus de la moyenne ( t70), paraissant

assez forte, d'une physionomie régulière, plutôt agréable.

Elle a eu dans son enfance des convulsions qui ont laissé un

léger strabisme. Elle a eu une fièvre typhoïde à deux ans, en

même temps que son père et trois de ses frères ou soeurs.

Jusqu'à vingt-huit ans, elle a travaillé dans les champs, puis,

pendant trois ou quatre mois, elle a promené son frère dans

les foires avec des saltimbanques. Durant ces périgrinalious,

elle a contracté un rhumatisme articulaire pour lequel elle a

été soignée à l'hôpital de Lille. Ensuite, elle s'est placée

comme servante dans la même ville jusqu'en 1888, époque où

Description du malade. 87

elle a recommencé a exhiber son frère dans les marchés et

les foires, sous le titre de Roi des Esquimaux. Vers le milieu

de janvier 1890, elle est tombée malade, est entrée à Tenon

à la fin de ce mois pour une pleurésie avec tuberculose du

poumon gauche. Elle a succombé le 13 février (1) ;

'10 Pille morte à cinq ans, au bout de quinze jours, d'un

refroidissement. Elle était grande, forte et intelligente;

5" Notre malade. Les renseignements que nous possédons

sont très vagues. Il a été élevé par sa mère, a marché à dix-

huit mois, a été propre de bonne heure et n'aurait rien pré-

senté de particulier jusqu'à l'âge de trois ans (' ? ). Il causait et

jouait comme les autres enfants, dit-on. C'est à partir de trois

ans qu'il s'est arrêté dans son développement et qu'il est

devenu gros et bouffi. Il mange presque seul, il condition qu'on

lui coupe sa viande. Il a toujours été sujet à la constipation

et reste quelquefois six semaines ( ? ) sans aller à la selle. On

n'ajamais essayé de lui apprendre Ù lire. La parole est assez

limitée, comme nous le verrons tout à l'heure, ce que sa soeur

attribuait à ce qu'il sait qu'il prononce mal les mots. Il coud

avec une certaine habileté. Il fume la pipe et la cigarette.

Etat actuel (février 18%). L'aspect général et la physio-

nomie de ce malade rappellent de la façon la plus complète

ceux de tous les autres malades dont nous avons publié l'his-

toire (Fil). 7, 8, 9, 10).

Taille, 0 ? 915 ; poids, 2-i kil, 800.

Tète. Elle est ovoïde avec prédominance très accusée de

la région occipitale, saillie prononcée des bosses pariétales et

rétrécissement du front. La fontanelle antérieure n'est pas

entièrement ossifée ; on sent très bien à son niveau une

dépression de deux à trois centimètres de longueur et d'envi-

ron un centimètre de largeur. - Les cheveux sont d'un brun

tirant sur le roux, longs, gros, rudes, semblables à une cri-

nière. Ils sont abondants en arrière et au niveau des parié-

taux, au contraire rares au-dessus des bosses frontales.

Entre les places presque dénudées, il y a un toupet assez

fourni. Un peu il droite du vertex. les cheveux sont plus clair-

semés. Le cuir chevelu est le siège d'une éruption eczéma-

teuses (petites croûtes jaunâtres, squames, etc.).

(1) Nous aurions voulu avoir des renseignements plus détaillés, mais elle

ne parait pas avoir de parents il Paris, car son corps n'a pas été réclamé.

88 IDIOTIE myxoedémateuse.

Description DU malade.' 89

t

Mâchoire supérieure . - Cûté gauche. Incisive centrale

permanente, large et complètement évoluée. - Incisive la-

tépale, de volume ordinaire, déviée par une rotation sur l'a-

xe, de dedans en dehors et d'arrière en avant, d'environ 4.')

degrés. Canines de lait. Prémolaire permanente normale,

pointes très aiguës. Première grosse molaire en cours

d'évolution. Un tiers environ de la hauteur normale de la

couronne apparait hors de la gencive.

Côté gauche. L'incisive centrale est placée sur un plan

légèrement antérieur par rapport à la dent correspondante

du côté gauche, elle est large et a atteint à peu près sa lon-

gueur normale : malgré cela, elle est entièrement recouvertc

par la muqueuse distendue et laisse voir la dent par transpa-

rence, comme à travers une membrane mince de caoutchouc

fortement étirée et près de se rompre. Cette disposition ne

parait s'accompagner d'aucune douleur (spontanée ou pro-

voquée). L'incisive latérale a subi une déviation égale et

symétrique par rapport à la dent correspondante du côté

gauche (rotation sur l'axe de 45 degrés de dedans en dehors

et d'arrière en avant). Canine de lait. Deux prémolai-

comme du côté gauche. Pas de grosse molaire.

Mac/tOD'e m/erteure. Dents antérieures très écartées,

projetées en avant et divergeant en éventail. Les quatre in-

cisives appartiennent à la deuxième dentition; leur volume

est normal. Canines de lait. A droite et à gauche

après la canine, il y a un espace vide. Après cet espace vide

se trouve un tubercule à sommet mousse, d'un jaune sale,

fortement et profondément érodé, haut d'un demi centimètre

environ, d'une largeur à peu près égale au collet et affectant

très grossièrement la forme conique. Après cet organe un

nouvel espace libre qui correspond à l'emplacement de la

première grosse molaire permanente. La seule grosse molaire

que l'on trouve à la mâchoire inférieure est située très en

arrière et occupe la place de la grosse molaire de 13 ans (1).

Articulation. - Prognathisme inférieur.

Le cou est extrêmement court et gros (0,565me). En avant,

sous le doigt, on sent très nettement les cartilages du larynx

(1) Il a été impossible, par suite de la résistance du malade, d'examiner la

disposition de» tubercules de la face triturante de cette grosse molaire. Cet

examen, en admettant que la conformation de la dent fut normale, aurait

indiqué si on avait affaire ¡\ la première ou à la deuxième grosse molaire per-

manente.

Bourneville, Bicêtre, 1902. 6

90 IDIOTIE myxoedémateuse.

et de la trachée : il ne parait pas y avoir de glande thyroïde.

Des deux côtés du cou, existent deux masses lipomateuses,

tremblotantes, qui ne laissent pas d'empreinte, de la dimen-

sion d'un oeuf de poule, s'aplatissant par la pression et con-

tribuant encore à faire paraitre le cou plus court. On dirait

que la tête s'enfonce dans le thorax.

Thorax. La partie antérieure est proéminente, le ster-

num faisant un angle aigu de 25 degrés environ avec la

verticale. Les côtes sont saillantes, la base de la poitrine est

élargie au niveau des fausses côtes qui sont rejetées assez

fortement en dehors. En arrière, la partie supérieure du thorax

forme une convexité très accusée, surtout au voisinage de la

colonne dorsale. La colonne vertébrale est sinueuse, la portion

dorsale forme une convexité beaucoup plus prononcée que

d'habitude, principalement au niveau des deux tiers supé-

rieurs du thorax. Au-dessous de cette convexité on note une

ensellure très marquée. De plus, la colonne dorsale décrit

une légère convexité à gauche.

Il existe des masses lipomateuses sur les parties latérales s

et inférieures du tronc, ainsi que dans le creux axillaire.

DESCRIPTION DU malade. 91

Membres supérieurs.

92 Idiotie myxoedémateuse.

érythème assez prononcé du pli de l'aine gauche et des ) ! oeui,

de deux à cinq millimètres sur les joues, le dos, l'avant-bras

droit, etc., une cicatrice de vaccin sur le bras gauche, des

dilatations veineuses sur la convexité du dos. On trouve

de petites adénites nombreuses de. chaque côté du cou et

sous les masses lipomateuses des aisselles ; il n'y en a pas

dans les aines.

Deba.. mange seul; mais avec une grande lenteur; la tna.sttca-

tion s'effectue assez péniblement. Le foie et la rate sont nor-

maux. Les selles sont rares et le plus souvent il faut le purger.

Sous l'influence de la constipation, il s'est produit de,s hémor-

rhoïdes de la dimension d'une petite noisette. D... n'est pas

vorace ; il est très difficile pour la nourriture. Il est friand de

poulet, de pruneaux et d'oeufs durs.

La respiration, à 20, est un peu gênée et accompagné d'un

petit ronflement nasal. -Les battements du coeur sont régu-

liers, un peu lents et sourds ; le pouls radial est petit, très

difficile à sentir.

Les urines ont été examinées à plusieurs reprises ; leur

densité est de 1018, leur réaction faiblement acide; elles ne

renferment ni sucre, ni albumine.

La sensibilité générale est normale. Deb... est très sens;-

ble au froid. Sa température rectale a été prise du 12 au

21. Voici les chiffres :

DESCRIPTION du malade. 93

répète seulement, moi, il dit oui, non, merci, tabac, cigail-

lette (pour cigarette), almète (pour allumette), pain, vin, nez,

cayon (pour crayon), bague. On lui demande : Aimes-tu les

cigarettes ? Il répond : oui, mochieu... teur (pour docteur).

Il ne prononce souvent que la dernière syllabe ; teuil pour

fauteuil ; mino pour domino ; teille pour bouteille ; cuit pour

biscuit ; ban pour ruban ; von pour savon ; il dit bien porte,

sucre, bâton, etc.

L'intelligence est très peu développée. A cet égard, il est

sur la limite de l'imbécillité prononcée et de l'idiotie légère.

Il est propre dans sa tenue, mais il est incapable de s'habiller,

de se déshabiller, de boutonner, de lacer, etc.. On essaie de

lui faire déboutonner ses bretelles, il n'y parvient pas. Cepen-

dant, ainsi que nous l'avons déjà dit, il coud assez bien, il

ourle la moitié d'un mouchoir dans sa journée et son point est

régulier, Il n'aide en rien pour sa toilette. Il sait le nom de

la plupart des objets qui l'environnent. Il ne connaît aucune

lettre ; fait sur l'ardoise des n, des o, des u et des chiffres. Il

distingue le rouge, le bleu, le blanc et le noir.

Si on lui donne un objet qui lui fasse plaisir, par exemple

une cigarette, il sourit; sur invitation, il fait une révérence

en souriant. Sa physionomie hideuse exprime d'ordinaire

l'indifférence, même l'hébétude (fig. 7 et 8.) La laideur

parait encore plus grande lorsqu'on l'examine de profil (fig.

10); son profil rappelle le groin du cochon. D... reste toute la

journée assis sur une chaise auprès du feu, jamais il ne de-

mande il se promener. Parfois il réclame du tabac et fait si-

gne qu'on lui bourre sa pipe. Son appétence pour le tabac

est d'ailleurs modérée. Questionné sur ce qu'il faisait avant

son entrée à l'hospice, il a eu un mouvement d'impatience,

a levé les épaules et tourné le dos. De temps en temps, il

regarde ce qui se fait autour de lui, mais le plus souvent ne

s'en préoccupe pas. Son attention est facile à fixer ; il parait

assez affectueux. Il s'est choisi un autre enfant comme ca-

marade et n'aime pas que les autres enfants viennent autour

de lui. Dès qu'il est habillé, il prend sa chaise et la glisse

près du feu ; il en prend une seconde qu'il place devant lui i

et sur laquelle il pose son ardoise et ses pipes.

Réflexions. 1. Les renseignements très incom-

plets que nous possédons sur la famille et sur les

antécédents personnels clu malade, ne nous éclairent

94 IDIOTIE myxoedémateuse.

nullement sur l'étiologie. Rappelons seulement l'exis-

tence de la tuberculose chez le père de Deb., un

frère et une soeur. ' - `

II. Dans ce cas, de même que dans quelques autres

les premiers symptômes de la cachexie pachyde1'mi-

que, due à l'absence congénitale de la glande thy-

roide, auraient été constatés vers trois ans; aupara-

vant l'enfant paraissait avoir un développement nor-

mal. Peut-être serait-il possible d'en induire que l'ap-

parition de la cachexie pachydermique est retardée par

l'alimentation lactée et qu'elle se manifeste au sur et

à mesure que l'enfant est soumis au l'alimentation or-

dinaire.

Une connaissance précise de l'action physiologi-

que de la glande thyroïde est seule capable de tran-

cher la question.

III. Nous croyons superflu d'insister sur chacun des

symptômes du myxoedème. Ils se rencontrent tous

ici : aspect général, conformation de la tête, état

du cuir chevelu (cheveux-crins, brun-roux, eczéma,

persistance de la fontanelle, etc. ; bouffissure et faux

((,dème des paupières, des joues, des mains, des pieds,

etc; présence des pseudo-lipomes, absence de la glas-

de thyroïde; volume exagéré du ventre, hernie om-

bilicale ; absence des appétits sexuels, démarche

lourde, pesante, physionomie spéciale, voix rauque,

aigre, désagréable, constipation opiniâtre, arrêt du dé-

veloppement des organes génitaux, etc.

IV. Relevons cependant, d'une façon particulière,

l'existence chez D..., comme chez la plupart de nos

malades, de lésions scrofuleuses et de déformations

rachitiques , intéressant surtout la colonne vertébrale

et.,les membres, complications qui montrent combien

Idiotie myxoedémateuse. 95

est profonde l'atteinte portée à la nutrition par l'ab-

sence de la glande thyroïde.

V. Tous les idiots myxdén2ateua que nous avons

observés présentent la même physionomie hébétée,

lourde, sans expression. Ce ne sont pas des idiots

complets. La parole, toujours plus ou moins impar-

faite, existe à des degrés divers. Il en est de même de

la mémoire. L'attention, elle aussi, peut être fixée. La

compréhension est lente, mais non absente. Aussi

ces malades sont-ils susceptibles d'une certaine édu-

cation : tous deviennent propres, parviennent à man-

ger seuls, quelques-uns même à se laver, s'habiller,

coudre (exemples Graf.. et Deb..), à aider aux soins

du ménage (1). Aucun d'eux n'offre les tics si fré-

quents et si multiples chez les idiots par méningite,

sclérose, arrêt de développement des circonvolutions,

etc.

VI. Le traitement que nous avons institué dans les

cas de ce genre consiste, au point de vue pédagogi-

que, en l'application des méthodes spéciales d'éduca-

tion pour les enfants arriérés, au point de vue médical

en toniqnes, antiscrofuleux, bains salés, douches et

gymnastique.

A la suite de notre communication à l'Association

française pour l'avancement des sciences, nous avons

reçu le 15 Août, de M. le D" Arnaucl (de Saint-Gilles,)

qui avait assisté à la séance, une lettre dans laquelle

il soumettait à notre appréciation un mode particulier

de traitement qu'il est bon de signaler :

« M. Brown-Sequard, dit-il, pense, non sans raison peut-

être, que les glandes ou du moins quelques-unes d'entre elles,

(1) Ceci a été écrit en 1890 depuis, grâce à la médication thyroïdienne, nous

avons pu obtenir davantage nu point de vue intellectuel [Note de 1902).

96 IDIOTIE myxoedémateuse.

ont une action encore inconnue sur la nutrition, par suite de

certains principes qu'elles verseraient incessamment dans la

circulation. N'en serait-il pas de même du corps thyroïde ? ' ?

Dès lors on s'expliquerait facilement la cachexie consécutive

a l'absence de cette glande.

« En outre, cette théorie pourrait conduire à un traitement

rationnel de la cachexie pachydermique, le traitement par les

injections sous-cutanées (ou même peut-être par l'absorption

intestinale) de certains principes empruntés iL la glande thy-

roïde. » .

Nous n'avons pu essayer ce mode de traitement,

n'ayant plus dans notre service, avant l'admission de

Deb..., qu'un imbécile myxoedémateux, Gra..., âgé

de 33 ans. C'est peut-être il tenter. Nous rappellerons

il ce propos que, d'après Schiff, la greffe péritonéale

de la thyroïde procurerait aux chiens une immunité

presque complète contre les suites de la thyroïdec-

tomie totale (1). Ses expériences ont été répétées tout

récemment par MM. Anton von IJiselsJer·` et Ilorsley.

11 en résulte encore un nouveau mode de traitemenl

a expérimenter, mais cle préférence, suivant nous,

chez des malades encore jeunes (2).

1895.

Traitement lyroïdien.

La température rectale (3) du malade prise avec soin à

(1) S,'hil1' (1.) - R·sum d'une sirie d'expériences sur les effets (le l'abi.x-

lion des corps thyroïdes (lion. (le la Suisse romande, et aoûl

18S4).

(2) Bien que ce travail ait paru dans le n° des Archives de Neurologie du

z février 1890, nous avons cru utile de l'insérer dans le Compte-rendu

de 1889, afin de le rapprocher du mémoire sur le même sujet qui figure dans

1 : 0 volume.

(3) Nous prenons la température rectale des malades, la plus facile et la

plus sûre. La température axillaire, pour offrir des garanties, exige, en effet,

de quinze à vingt minutes : il faut veiller à ce que le bras soit bien appliqué

contre le thorax et que le thermomètre reste bien en place, conditions diffi-

cites iL réaliser complètement chez les malades ordinaires et, iL plus forte rai-

chez les enfants et surtout les idiots.

Traitement thyroïdien 97

diverses reprises n'a jamais dépassé 37° et a été en général

au-dessous de ce chiffre (2). C'est ce que montre le petittracé

qui figure à droite de la Planche VIII (que l'on trouvera à la

fin de notre Compte-rendu de 1S(5). Cette planche-indique les

modifications de la température et du poids sous l'influence

du traitement thyroïdien et l'indication des closes de glande

thyroïde données au malade. Le poids, relevé tous les six

mois depuis l'entrée du malade, a offert la progression sui-

vante : .

Fia. 7. - Deb... avec sa pipe et sa canne (Février 18 : 10).

98 ' IDIOTIE myxoedémateuse

Traitement thyroïdien. 99

midi, tremblement, faiblesse et sueurs. Deb... marche diffici-

lement. Sueurs dans la nuit. Urines de vingt-quatre heures :

750 grammes.

11 juin. Pas de glande. Pouls : 120. Haleine fétide, dou-

leur au niveau de l'esto-

mac. Urine : 650 gram-

mes. Le visage est beau-

coup moins gonflé, les

yeux sont plus ouverts.

Erythème des aines dû

aux poussées sudorales.

12 juin. Tremble-

ment de tout le corps

sans sueurs, affaiblisse-

ment, persistance des

douleurs s stomacales.

Urine : 500 grammes.

13 juin. Dans la

nuit, vomissemments ali-

mentaires. La faiblesse

des jambes est moins

prononcée. Le médica-

ment est suspendu jus-

qu'au 5 juillet. L'éry-

thème inguinal adisparu.

14 juin. - Tremble-

ment des jambes qui

oblige de maintenir le

malade au lit, pour évi-

ter le retour des fai-

blesses qui le prennent

dès qu'ils se lève. Dou-

leurs abdominales, dimi-

nution des tumeurs

graisseuses du cou.

Urine : 40 0grammes. Potion de Todd et caféine.

15 juin. - Agitation pendant la nuit : le malade s'est levé

sur son lit et voulait battre la veilleuse. Ce matin, il ne se

rappelle point ce qui s'est passé. - Urine : 500 grammes.

L'appétit est toujours médiocre et-le malade se nourrit sur-

tout de lait. -

17 juin. Le tremblement a diminué, les douleurs' ont

- -. Fi ! J. 8 - De... en Lévrier 1890.

100 . IDIOTIE myxoedémateuse.

disparu, la température descend à 37° ; le poids n'est plus

que de 24 kg. 100. La peau devient moite. Pouls : 120.

20 juin. - La langue-est moins épaisse, la prononciation

est meilleure ; les lévres sont moins violacées ; la marche,

qui, d'habitude, était lente et pesante, semble devenir plus

rapide. -.

21. juin. Le malade assiste au concert des frères Lionnet

et le soir, sans autre cause appréciable, la température s'élf ?

ve à 38°.

Durant la suspension du traitement, le poids qui's'était ? abaissé jusqu'à 24 kg. 100, est remonté à 25 kg. 050. Les uri-

Fig. 9.

Fig. 10.

De])... en iévrier 1890.

Traitement'; thyroïdien. 101

nés se maintiennent aux environs de 500 grammes. Jamais

elles n'ont contenu de l'albumine ou du sucre.

5 juillet. Reprise du traitement (demi-lobe). Deb... se

met. en colère, ce qu'on n'avait jamais vu, et casse sa pipe

parce que l'infirmier examinait ses poches. Le pouls est des-

cendu à 60.

6 juillet. Urine : 500 grammes. Pouls : 60.

7 juillet. - La température s'élève de nouveau à 37°,G.

Urine : 1 litre. Pouls 70.

8 juillet. - Pouls : 70; T il. 37°,2, Urine : 525 grammes.

Fig. 11. - Deb... en septembre 1S95.

102 Idiotie myxoedémateuse. ! ) juillet. La peau du malade reste toujours moite. Avant

le traitement, chez lui, comme chez les malades de cette caté-

gorie, la peau était sèche. Les croûtes du cuir chevelu ont t

complètement disparu. On observe une desquamation de la

peau des mains et des pieds. Deb... taquine les infirmiers,

par exemple ca-

che leur cas-

quette ; jamais

on n'avait noté

autant de spon-

tanéité. Diar-

rhée, douleurs

du ventre et du

dos, affaiblisse-

ment des jam-

bes. Pouls : 120.

.17a< ? M : T. Ii.

37% - Soir :

3°.

11 juillet.

Pouls petit :

130; T. R. 37%

Urine hier : 750,

aujourd'hui 500

grammes.

12 juillet. -

La diarrhée a

disparu, la fai-

blesse des jam-

besest moindre

Pouls : 120.

Urine : 500 gr.

13 juillet.

Depuis hier

soir, coliques,

diarrhée, cour-

bature générale. Le malade est affaissé, n'a pas d'appétit.

Urine : 500 grammes. Pas de glande. La desquamation de la

peau des mains et des pieds continue. Pouls : 120. Urine :

500 grammes.

14 juillet. Demi-lobe. Pouls : 120. Urine : 2GO grammes ( ? ).

15 juillet. Pas de glande. Pouls : 120. Urine : 500 gram-

mes. La peau est moite. ..

Fiy. 12. DeL... en septembre 1895.

Traitement thyroïdien. 103

16 juillet. - Demi-lobe. Pouls : 120. Urine : 500 grammes.

Quelques coliques.

17 juillet. Pas de glande. Pouls : 120. Urine : 500 grammes.

Coliques, sueurs.

18 juillet. Depuis hier soir, prolapsus du bourrelet hémor-

roïdaire. Pouls : 100. Sueurs, faiblesse générale. Urine : 560

grammes. Potion : bismuth, bétol, laudanum. On sup-

prime la glande thyroïde.

19 juillet. Le bourrelet hémorroïdaire est réduit et la

diarrhée a cessé. Pouls : 84.

20 juillet. - La physionomie exprime la fatigue. Le poids

qui avait augmenté, ainsi que nous l'avons vu, durant la

période de suspension du traitement sans revenir toutefois

au chiffre primitif, a notablement diminué depuis la reprise

du traitement, car il est descendu à 22 kg. 500; aussi l'amai-

grissement est-il évident : non seulement les pseudo-lipomes

ont diminué, mais le ventre est devenu beaucoup moins volu-

mineux : tandis qu'il mesurait au niveau de l'ombilic 0 m. 740,

il ne mesure plus que 0 m. 67. La peau des mains demeure

moite et devient souple ; les ongles poussent bien plus rapide-

ment et sont plus brillants. Les mouvements sont plus vifs,

la parole est moins lente, le malade est moins engourdi.

Pouls : 90. Urine : 500 grammes.

28 juillet. - Bien que la médication soit suspendue depuis

le 18 juillet, le poids a continué de baisser (22 kg. 300). Les

figures 11 et 12 comparées aux/taures 8 9 et 10 permettent d'ap-

précier les changements de la physionomie et l'amaigrisse-

ment général.

[Depuis notre communication (1), nous avons repris le traite-

ment à la date du 13 août, le malade ayant gagné 500 gram-

mes et la température descendant à 37° et au-dessous, ainsi

que cela existait avant tout traitement. Nous lui avons fait

prendre un lobe tous les deux jours jusqu'à la date du 30

septembre : les mouvements et la parole sont plus vifs, l'in-

telligence est un peu plus éveillée ; D... n'a éprouvé aucun

malaise et, depuis le 11 septembre, sa température n'est ja-

mais descendue au-dessous de 37°. Le poids, après avoir di-

minué du 16 août (22 kg 800 jusqu'au 7 septembre (22 kg.

450), est remonté à 22 kg. 800 (17 septembre) et s'est, mainte-

(1) l"-8 août 1895.

104 Idiotie myxoedémateuse.

nue à ce chiffre (28 septembre). Taille : 0 ni. UU."). soit une

augmentation de 25 millimètres, alors qu'elle était station-

naire depuis plus d'un an. - - . -

Voix. - Nous avons fait examiner le malade au point de

vue de la voix par M. Sutter, professeur de chant de notre

service. Voici la copie de la note qu'il nous a remise :

«Avant le traitement, Jules Debarg... n'avait qu'uneé tendue

très faible, correspondant à 2°, depuis la dernière observa-

tion l'enfant il gagné 4°. »] '. .' -

` `' ? . 1896-1902.

1896. - Dentition. Depuis le dernier examen, aucune modi-

fication n'est survenue. La dentition a acquis un développe-

ment complet. Les dents permanentes ont achevé leur éruption

et il n'y a plus de traces des dents temporaires. Toutes les

molaires, sous l'influence de la carie, continuent à se désa-

gréger progressivement. Leurs couronnes sont en partie

détruites. - : .

1897. 11 n'est survenu durant cette année, aucun acci-

dent.

1898. Juillet . - Puberté. Le visage, les aisselles et le tronc

sont glabres. Quelques poils noirs, rares, la racine des

bourses. Phimosis. Verge : long. 6 cm., circonf. 7 cm. Testi-

cules de la grosseur d'un oeuf de merle.

1900. Puberté : Les moustaches commencent il se dessi-

ner, les poils du pubis sont un peu plus longs et plus abon-

dants. Verge : long. 7 cm., circonf. 9 cm.; même état des

testicules. IIémorrhoïdcs persistantes.

1901. Mat.OEdème temporaire des paupières, surajouté il

leur bouffissure habituelle. Les urines ne renferment ni

sucre, ni albumine (Fig. 3. 4 et 5). '

Décembre. - Puberté. Le tiers moyen de la lèvre supé-

rieure est presque glabre ; de chaque côté existe un fin

duvet, formant une bande de 4 sur 10 mm. Rien aux

joues ni au menton. Rien aux aisselles. Bande de

poils très rares à la partie moyenne du pénil. De chaque

côté de la verge, quelques poils bruns plus longs, for-

IDIOTIE 111YXDÉMATEUSE. 105

mant une sorte de bouquet. Verge : long. 7 cm. 1/2, circonf. 8 cm.

Prépuce un peu long, gland non découvrable; méat un peu étroit.

Jamais d'onanisme. (rtg. 13, 14 et 15).

1902. - 18 février. A 4 heures de l'après-midi, Deb... était

auprès de la surveillante, à l'infirmerie, appuyé à la table, le,dos

tourné au foyer selon son habitude. Subitement il devient violacé.

Aussitôt on le déshabille et on le couche. Il se jette en arrière, les

membres supérieurs s'allongent et se raidissent; la respiration

devient de plus en plus courte, il meurt en quelques minutes sans

prononcer une seule parole. L'interne de garde, appelé, ne peut

que constater le décès. Poids après décès : 36 kg. 200.

Le matin et jusqu'au début des accidents mortels, Deb... n'avait

' rien offert de particulier. Il avait déjeuné comme d'ordinaire. A

2 heures il avait fumé une cigarette et mangé des bonbons.

Bourneville, Bicêtre, 190. ` 7

Fig. 13. -3Deb... en 1901.

106 MORT : Hypothermie. ? Température après la mort.

RIGIDITÉ cadavérique. 107

L'ensemble de la peau est jaune, le ventre est ballonné; les lèvres \

sont bleu pâle. Comme on le voit, la rigidité est plus prononcée

à droite qu'à gauche; jusqu'à 8 heures du soir les membres étaient

souples. Le cou était rigide.

20 février. - Membre supérieur gauche : rigidité assez prononcée

de l'épaule, très prononcée du coude; rigidité passez prononcée

des articulations métatarso-phalangiennes. Les doigts commen-

cent à être mous.

Membre supérieur droit : épaule molle, coude et poignet rigides,

ainsi que les articulations métalarso-phalangiennes. Les doigts

sont un peu raides.

Membre inférieur droit : rigidité très prononcée de la hanche et

du cou-de-pied. Les orteils sont raides.

Membre inférieur gauche : rigidité moyenne de la hanche, plus

Fig. 14. Deb... en 1901.

108 IDIOTIE MYXOEDEMATEUSE.

Autopsie : cerveau. 109

fourche (ff); elle parait un peu grêle par rapport à F2 qui est plus

large et bien plus sinueuse. Sur tout le lobe frontal, il n'y a qu'un

pli de passage entre F2 et F3, La frontale ascendante, FA, est

volumineuse et assez sinueuse ainsi que PA. Le sillon de Rolando,

Sli, est très tortueux, sans interruption. Les plis pariétaux, supé-

rieur, Pl, et inférieur P2, sont assez volumineux ainsi que le pli

courbe, PC et le lobe occipital LOC. Le pli courbe envoie un pli de

passage au lobe occipital qui est assez développé, Le lobe tempo-

nul a ses circonvolutions plutôt volumineuses. Les lèvres de la

scissure de Sylvius sont presque en contact et ne laissent voir que la

pointe du lobule de l'insula avec quatre digitations, sans compter

les trois prolongements qu'envoie en arrière la Tl (Planche 111).

1 Nous avons publié une série de ses photographies en 18S9 et en 1896

(Voir .Arc/¡. de 1\ eU1'olog., 1890, n°-l, et Comptes rendus de Bicêtre de

1889. u. 172; 1$95, li. 169.

Fig. 16. - Deb... en 1901'. 1.

HO Absence totale de 'la glande thyroïde.

Face interne. - La corne d'Ammon, les circonvolutions CH et TO

sont un peu grêles et s'envoient un pli de passage, FI, C C C, LP et

le lobe carré, LQ, sont bien développés, le coin, C, est petit. Le corps

calleux, C C, le corps strié, CS, la couche optique, CO,;et le ventricule

latéral n'ont rien à noter (Pl. IV).

En résumé le cerveau est assez volumineux et lourd. Les

circonvolutions sont développées mais n'offrentque de rares

plis de passage. Les sillons paraissent d'une profondeur à

peu près normale. Il n'y a, pas, macroscopiquement, trace de

méningo-encéphalite. l

Cou. L'examen le plus attentif ne fait découvrir aucune trace

de la glande thyroïde. 11 n'y a pas de trace du thymus.

Thorax. - Les poumons sont normaux. On recueille 50 gr. de

liquide dans la plévre droite et 180 gr. dans la cavité péricardique.

Coeur volumineux; les cavités et les valvules sont normales.

Le trou de Botal est oblitéré. Le coeur droit est un peu dilaté.

Plaque atéromateuse de 2 cm. de longueur sur l'aorte.

ABDOMEN. - L'estomac, les intestins ne paraissent le siège d'au-

cune lésion. Le foie est un peu congestionné et il y a des plaques

de péri-hépatite à la face supérieure du lobe droit. Vésicule biliaire,

rien. Rein droit hyperhémié. - Rein gauche lobulé, très conges-

tionné, présentant une série de dépressions circonscrivant 4 ou 5

gros lobes. Signalons aussi une série de petits kystes variant d'un

pois à une tête d'épingle, situés aux limites des zones corticale et

pyramidale. Aucune lésion des capsules surrénales.

ETUDE DU SQUELETTE. 111

La mort est due à une syncope provoquée sans doute par l'hy-

dropisie du péricarde, qui ne s'était traduite par aucun symptôme,

puisque le malade allait et venait comme d'habitude, avait mangé

à son ordinaire, ne se plaignant de rien.

POIDS DES organes ,

.12 Idiotie MYXOEDÉMA.TEUSE.

1 ? 7. 16. Squelette de Deb...

ETUDE DU squelette. 113

Fifl. 17. - Squelette de Deb...

114 IDIOTIE myxoedémateuse.

ment bornés à apprécier à vue d'oeil le degré d'atrophie ou d'hy-

pertrophie de telle ou telle .partie. D'abord cela n'offre aucune

garantie en raison des erreurs qui en découlentindiscutablement;

en second lieu, on ne peut comparer le cas particulier aux mo-

yennes générales; enfin il n'est pas possible de comparer les divers

cas de cette affection entre eux.

C'est dans ce but que nous avons autant que possible, mis en

regard de nos remarques, des mensurations rigoureuses, afin de

pouvoir les comparer, lorsque la chose était nécessaire, à des

moyennes normales. Nous n'avons pas utilisé toutes les mesures

que nous avons recueillies, mais nous les faisons néanmoins figurer

dans ce travail pour permettre aux médecins, désireux d'employer

une méthode exacte, de comparer leurs cas au nôtre 1. Ajoutons

enfin que la technique employée estcelle qu'on enseigne et qu'on

applique constamment au laboratoire d'anthropologie de l'Ecole

des Hautes Etudes.

Tète. - A première vue deux particularités s'imposent.

1° Le grand développement du crâne dans le sens antéro-posté-

rieur ; - 2° sa faible hauteur.

Précisons ces particularités par des mesures :

Le diamètre antéro-postérieur maximum est de 186 millimè-

tres. "

Le diamètre anléro-postérieur métopique de 184 millimètres.

La courbe partant de l'ophryon pour aboutira l'inion égale 304-

millimètres.

La hauteur, totale du crâne est de 103 millimètres.

Cette dernière dimension est considérablement réduite et la vue

du dessin stéréographique du crâne indique immédiatement la

cause de cette déformation : il existe un abaissement considérable

de la base crânienne tel que le trou auditif A correspond exacte-

ment au basion B (bord antérieur du trou occipital). Or, sur un

crâne normal, ces deux points sont situés à des hauteurs diffé-

rentes. La, hauteur du trou auditif au vertex est chez un individu

normal d'environ 126 millimètres (Papillault). Daus notre cas, cette

dimension est considérablement réduite et notons qu'elle repré-

sente également la hauteur totale du crâne par suite de la parti-

cularité que nous avons précédemment indiquée. Nous avons fait

remarquer que le crâne a des dimensions considérables dans le

sens antéro-postérieur : comparons nos mensurations à celles d'un

homme moyen (Papillaull); celui-ci présente un diamètre antéro-

1 Le dessin au stéréograplie qui ligure ici a le double avantage de

donner une reproduction fidèle du crâne, et de permettre à ceux qui ne

disposeraient pas du crâne de compléter nos mensurations d'une façon

rigoureuse. (P.III). ·

Etude DU squelette. Ho

Fig, 18. Squelette de Deb...

116 Idiotie MTXOEDÉMATEUSE.

postérieur maximum de 184,2 et un diamètre antéro-postérieur

métopique de 182,9. Les dimensions du crâne de Debarg.. sont

donc supérieures. '

Le diamètre antéro-postérienr maximum part en avant de la

glabelle, dont la saillie est précisément une cause importante

de son augmentation. Ur, chez notre sujet, cette saillie gla-

bellaire fait défaut, ce qui n'empêche pas le diamètre maximum

d'être encore supérieur à celui d'adultes normaux et à saillie forte.

Remarquons encore que; malgré la faible saillie glabellaire, le dia-

mètre métopique est inférieur au diamètre glubellaire. Cette cons-

tatation a son intérêt, car on voit écrit parfois que les myxcoedé-

mateux conservent un front infantile : c'est une erreur, tout au

moins partielle. Il y a bien un caractère infantile : l'absence de

la glabelle, mais il n'y a pas, comme chez l'enfant, la supériorité

de diamètre métopique. Si la glabelle eût été prononcée, il eût

existé une inclinaison considérable du front.

Examinons maintenant les dimensions transversales du crâne.

Nous mettons entre parenthèses les dimensions correspondantes

d'un individu normal. Le crâne deDeb... présente donc une légère

diminutiun de ses diamètres transversaux. -Mais elle est beaucoup

moins marquée que celle des dimensions verticales de l'os.

ETUDE DU squelette. 117

id., 96) que les os wormiens sont la preuve que les os normaux

ont été, à un moment donné, incapables de remplir leur rôle. Les

parties membraneuses ont été envahies à la longue par l'ossifica-

tion de centres supplémentaires, qui donnent les os en question.

Pour un os crânien, cette impossibilité de suffire à la tâche peut

provenir d'un manque de pouvoir ostéogénique, comme elle peut

être engendrée par un excès de pression intra-crânienne (hydro-

céphalie, volume relativement élevé de l'encéphale); le résultat est

le même. Dans notre cas particulier, il y a une double raison pour

que ces conditions se présentent : le myxoedème s'accompagne

d'un trouble considérable du pouvoir ossificateur et. de plus, la

boite crânienne renfermait une masse encéphalique relativement

volumineuse puisqu'elle pesait 12 ! r5 grammes. Et n'oublions pas

(ce qui est important) que le sujet n'avait qu'un mètre cinq cen-

timètres de taille (1 m O) et que son poids égalait 35 kilogr.

L'os occipital est légèrement saillant : il semble l'avoir été davan-

tage lors des premiers examens de Deb... à son arrivée à Bicêtre.

car la proéminence du bord supérieur de l'os avait attiré l'atten-

tion. La présence des os wormiens situés à ce niveau marquerait

assez bien la persistance d'une partie membraneuse qui se serait

ossifiée dans la suite à l'aide du processus snpplémentaire que

nous avons signalé plus haut. Cette saillie est en rapport avec la

poussée que le poids encéphalique a fait subir à la base d'une

façon générale et naturellement aux parties latérales voisines de

cette base. C'est ainsi que le diamètre transverse est situé très bas

et se confond presque avec le diamètre bimastoïdien.

Nous serions assez portés à attribuer une dépression située en

arrière dn bregma il l'inflexion de la base du crâne combinée avec

la persistance anormale de la membrane fontanellaire. La fonta-

nelle antérieure était encore ouverte lorsque Deb... avait vingt

ans (voir observation) elle s'est donc obturée fort tard. Mais lors-

qu'elle a été envahie par l'ossification, le cerveau avait déprimé la

base crânienne et n'exerçait aucune pression contre le paroi supé-

rieure. Celle-ci a, d'aiileurs, une épaisseur considérable qui semble

bien dénoter qu'aucune pression ne s'est opposée à l'ossification :

mais dans ces conditions la membrane fqntanellaire était déprimée

et c'est dans cette situation qu'elle a été envahie par l'ossifi-

cation. A ce niveau on retrouve d'ailleurs une transparence très

nette de la calotte. Telles sont les raisons qui permettent d'émettre

cette hypothèse sur la nature de cette déformation.

Base du crâne. - L'affaissement de la base du crâne méritait

d'être mesurée exactement. C'est pourquoi nous avons dessiné avec

l'aide de M. Papillault, professeur à l'École d'anthropologie, le

crâne au stéréographe et mené les lignes qui permettent de

mesurer d'une façon mathématique l'inclinaison des différentes

'1)8 ' IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

parties du crâne par rapport au plan orbitaire ou par rapport au

clivus (PL. 11l), -

- Voici nos valeurs angulaires et en regard celles d'un individu

normal :

Etude du squelette. 119

petit rond sont confondus. Les cloisons qui séparent ces trous sont

d'abord cartilagineuses, puis elles subissent au sur et à mesure

une transformation osseuse. Chez notre sujet le retard de l'ossifi-

cation alaissé persister cet état foetal. 11 existe sur toute la surface

endo-cranienne des éminences et des dépressions dénotant que

l'activité périostée a cependant été suffisante pour produire de l'os,

aux points où la pression encéphalique ne s'exerçait pas. D'ailleurs

le retard de l'ossification est bien moins marqué et même par-

fois complètement absent dans les points où la croissance était

interstitielle. Au niveau des sutures, le retard est plus accusé et

surtout avait été très marqué au début, comme l'indique des faits

de l'observation clinique (persistance de la fontanelle) et les parti-

cularités relevées au cours de notre examen (os wormiens). La

suture sphèno-basilaire n'est nullement synostosée : il y a eu, à ce

niveau, un arrêt complet de croissance, aussi la distance du basion

à la suture n'est-elle que de 19 millimètres : c'est là la persistance

d'un caractère véritablement infantile. Nous retrouverons cette dif-

férence entre les deux modes d'ossification encore plus prononcée au

niveau des os des membres. Signalons aussi une particularité qui

peut dépendre d'un défaut d'ossification : la partie antérieure de

l'apophyse crista-galli n'est pas reliée au niveau de sa base à la face

postérieure de l'os frontal : il y a un espace vide qui communique

directement avec les fosses nasales. A ce niveau, les deux portions

du frontal se terminent en formant une pointe en forme de V dont

la pointe est dirigée en bas. Les deux portions qui constituent le

frontal sont visibles et leur ligne de réunion sépare en deux parties

égales l'angle limité par les branches contiguës des V osseux signa-

lés à l'instant.

Face. - L'atrophie du massif facial est considérable : minceur

des apophyses zygomatiques, faible développement de l'os ma-

laire et du maxillaire supérieur, absence des arcades dentaires,

tout cela est très marqué. Les quelques mesures suivantes permet-

tent de s'en rendre compte.

120 Idiotie myxoedémateuse.

Nous donnons de suite quelques-unes des dimensions normales

de cette même région, indiquées par M. Papillault, dans son travail

sur la suture métopique (Mémoires de la Société d'A nthl'opologic, 1896).

ETUDE DU squelette. 121

l'aplatissement de la région chez le myxoedémateux. Venant d'in-

diquer la cause de l'élargissement de l'espace interorbitaire, nous

avons ainsi signalé complètement la raison d'être du faciès des

myxoedémateux, souvent attribué à d'autres motifs par ceux qui

ne se donnent pas la peine de mesurer et de comparer.

Ce qui est encore particulier, c'est l'absence complète des arca-

des alvéolaires. Il ne faut pas dire, comme on le fait parfois, leur

disparition, puisque c'est un arrêt de développement.

A première vue, il semblerait que la voûte palatine fut considé-

rablement agrandie transversalement et antéro-postérieurement.

mais c'est l'absence de la saillie alvéolaire qui exagère cette im-

pression.

122 -) Idiotie MYXOEDÉM : ATEUSE.

allongée en exagérant l'ouverture de son angle; 2° les dents inci-

sives ayant besoin de se mettre en eontact avec les incisives supé-

rieures, l'os s'est pour ainsi dire tordu, renversé en avant de ma-

nière que sa face postérieure (à la symphyse) regarde très

obliquement en haut et en arrière. L'inclinaison de cette face forme

avec l'horizontale l'angle que nous avons signalé.

Malgré ses faibles dimensions cet os s'est adapté a sa fonction mas-

ticatrice. C'est la démonstration pathologique de cette loi énoncée

par M. Papillault (Homme moyen) : la mandibule est un os qui

semble avoir fort peu d'autonomie, nul autre ne s'adapte plus rapi-

dement aux exigences de sa fonction et aux organes qui le touchent

de près.

Le thorax est aplati transversalement et le sternum est projeté

en avant. La courbe des côtes est à peine accentuée. La déforma-

tion thoracique est en rapport avec celle de la colonne vertébrale

qu'on a décrite dans l'observation prise durant la vie du sujet.

Nous donnons néanmoins quelques mensurations, mais elles ont

peu de valeur puisque les inflexions de la colonne ont disparu : on

n'en a pas tenu compte en montant le squelette. Voici quelques me-

sures des régions thoracique et vertébrale :

Etude DU SQUELETTE. '12'

124 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

sites nombreuses et saillantes et que leur action a pour résultat

de presser la tête humérale contre laface articulaire de l'omoplate.

La gouttière bicipitale manque.

Voici quelques mensurations : * -

Omoplate : .' '

ETUDE DU SQUELETTE. 125 15

reste de l'os ne présente pas de déformations susceptibles d'être

étudiées. Le pilastre est assez prononcé et il existe un élargissement

sous-tronchantérien de l'os.

Il y a une déformation très prononcée du plateau tibial. Alors

que la cavité glénoïde externe regarde en haut, l'interne regarde

obliquement en haut, en dedans et en arrière. Elle est en même

temps à un niveau très inférieur par rapport à l'externe.

De cet affaissement il résulte : 1° que la surface articulaire de l'os

est elle-même extrêmement oblique; 2° que la face interne de l'os,

au voisinage de la partie articulaire, présente une incurvation

résultant du déplacement et du tassement de la tubérosité interne.

Quelle est la cause de cette déformation ? Il nous est impossible

de trouver une explication satisfaisante : on ne voit pas par suite

de quel mécanisme le condyle interne du fémur aurait subi une

augmentation de volume, tandis que la partie correspondante du

tibia aurait subi un effondrement ? ou par suite de quel processus

l'extrémité inférieure du fémur restant normale, ainsi que la partie

externe de l'extrémité supérieure du tibia, la partie interne de ce

dernier os s'est déformée ? Le péroné a-t-il augmenté la solidité

de la partie externe ? On ne peut que faire des suppositions.

Une dernière remarque. De l'étude et de la comparaison de

nos chiffres il se dégage un fait absolument particulier. Relative-

ment à leur épaisseur, la longueur des os est extrêmement faible :

alors qu'il y a eu un retard, on pourrait même dire un arrêt de

croissance en longueur, la croissance en largeur est beaucoup

moins et quelquefois nullement atteinte. Ces deux croissances ne ,

sont nullement parallèles, puisqu'on a des os dont la longueur

rappelle celle d'un enfant en basâge, mais dont le volume est celui

d'un adolescent, presque d'un adulte. Cette dysharmonie entre les

deux modes d'accroissement osseux, l'un par les cartilages de conju-

gaison, l'autre par le périoste, est une caractéristique de l'affection.

Nous l'avions déjà constatée sur le crâne, nous la retrouvons ici

absolument nette.

Planche V. Or, voûte orbitaire. N, nasion. H, H, plan orbi- i

taire hoiizontal, passant par le centre de l'orbite et le trou optique, Op.

CC, plan du clivus. Ow, os wormiens. - Il, plan du rocher. La

ligne indiquée sans lettre, entre le plan orbitaire (H, H) et le plan du

rocher (R), répond au plan de l'inion. - op, plan du trou occipital.

Les signes XX répondent aux bosses frontales et pariétales. - E, fosse

ethmoïdale. T, fosse temporale. R. bord supérieur du rocher.

A, trou auditif. B, basion (bord antérieur du trou occipital).

' Voir sur les os du crâne des myxoedémateux infantiles nos autres

observations : Compte rendu de 1891, p. 35 -189, p. 35, etc. -

126 Idiotie myxoedémateuse.

Recherche de la mucine dans la peau d'un myxoedémateux; par

M. Berthoud, pharmacien en chef de Bicêtre.

On a noté à l'autopsie de certains myxoedémateux l'existence

d'une infiltration gélatineuse du tissu cellullaire sous-cutané,

infiltration dont la consistance serait due à une substance muci-

noïde. On a, de plus, constaté dans certains cas la présence de

mucine dans tous les tissus, y compris le sang. Il est donc inté-

ressant de chercher, chaque fois que l'occasion s'en présente, à

vérifier ces notions, afin de pouvoir établir s'il s'agit là d'un fait

général ou non.

A cet effet, un lambeau de peau, mesurant environ 270 centimè-

tres carrés, a été prélevé à la partie antéro-supérieure gauche du

thorax (région sous-claviculaire). Cette peau, glabre, est doublée

d'un pannicule adipeux abondant, dont l'épaisseur varie de 10 à

15 millimètres. Il n'y a pas d'infiltration gélatineuse du tissu cellu-

laire sous-cutané, sauf pourtant en deux points éloignés l'un de

l'autre, où se montrent deux caillots jaunâtres, tremblants, de la

grosseur d'une lentille. Ces deux caillots n'avaient pas été aperçus

lors du détachement du lambeau cutané sur le cadavre ; c'est vingt-

quatre heures, après qu'ils ont été remarqués, soit qu'ils aient

échappé au premier examen d'ailleurs rapide, soit qu'ils aient

apparu postérieurement par suite d'une altération cadavérique.

Voici la marche suivie pour la recherche de la mucine.

La peau proprement dite, débarassée aussi bien que possible de

la graisse sous-jacente, a été hachée et épuisée à l'eau froide à

plusieurs reprises. Les diverses macérations réunies après filtration

ont été prudemment additionnées d'une petite quantité d'acide

acétique, ce qui produisit un précipité blanc immédiat peu abon-

dant, qui, reçu sur filtre, lavé à l'eau acétifiée, séché et pesé, s'éleva

à 0 gr 032 pour 20 gr. 30 de peau mise en oeuvre, soit O,f : i7 pour

100 grammes.

D'autre part, le marc de macération fut maintenu, baignant dans

quantité suffisante d'eau distillée, à la température d'ébullition

pendant une heure, puis maintenu à l'autoclave vers -105° pendant

une autre heure. La filtration, assez rapide, donna un liquide opa-

lin; ce filtrat, augmenté des eaux de lavage,, qui passèrent très-

lentement, fut traité par l'acide acétique en quantité modérée, ce

qui détermine d'abord un louche laiteux, qui au bout de quelque

temps se condense en un dépôt floconneux blanc, surnagé par un

liquide clair. Ce dépôt, après dessication, fut trouvé égal àO gr. 0675

soit Ogr. 332 pour 100 grammes de peau.

Ainsi la macération et la décoction donnent à froid un précipité

par l'acide acétique. Or, c'est là un des principaux caractères de la

mucine, et c'est en la précipitant par l'acide acétique qu'on l'isole :

Analyse DE la PEAU. '127

généralement : lorsque, dans un liquide albumineux, cette réaction

se produit, on est conduit à soupçonner la présence de mucine.

Mais il faut contrôler cette indication en s'adressant à une autre

propriété de ce corps, décisive celle-là, et qui consiste dans la mise

en liberté d'un sucre réducteur lorsqu'on hydrolyse vers 100° une

solution de mucine par les acides minéraux.

Nous avons donc pratiqué cet essai sur le précipité obtenu par

l'acide acétique dans le décocté filtré de 11 gr. 923 de peau hachée.

Ce précipité lavé, a été délayé dans 200 centimètres cubes d'eau dis-

tillée par l'acide sulfurique à raison de 5 p. 100. et transvasé dans

un tube à essai qui a été maintenu au bain-marie bouillant au

delà d'une heure. Puis ce liquide a été neutralisé, et essayé à la

liqueur de Foehling. Celle-ci n'a pas été modifiée, ce qui indique

l'absence de sucre réducteur, et par suite de mucine dans le liquide

essayé.

La même opération a été pratiquée sur le filtrat obtenu lors de

la séparation sur le filtre du précipité déterminé par l'acide acéti-

que dans la macérationd e peau hachée. Il se pouvait, en effet, qu'il

fût passé en solution des corps voisins de la mucine, sinon la

mucine elle-même qui n'est pas toujours facilement rendue insolu-

ble par l'addition d'acide acétique. Le produit d'hydrolyse neutra-

lisé n'a pas réduit la liqueur de Fehling.

Nous ne sommes donc pas, devant ce résultat négatif, autorisés

à conclure à la présence en quantité appréciable de la mucine ou

d'un mucoïde quelconque dans l'échantillon de peau examiné.

Examen histologique ; par M. CI. Philippe.

L'examen histologique a été pratiqué sur plusieurs circonvolu-

tions choisies dans les principales régions de l'écorce cérébrale :

par exemple, au niveau des lobes frontal, occipital et rolandique

(lobule paracentral). Pour le dire dès maintenant, l'emploi com-

biné des méthodes usuelles (méthodes de Weigert-Pal, de Nissl, de

Marchi : fuchsine picriquée de van Gieson ; picro-carmiu ammo-

niacal ; éosine-hématoxylique), a permis de relever, sur la presque

totalité des coupes, les lésions suivantes : méningites, atrophies

cellulaires, légère sclérose névroglique des régions superficielles

de l'écorce cérébrale.

Méningite. -Cette méningite n'est nulle part très intense, un peu

plus marquée au niveau du lobule paracentral que partout ailleurs.

Il s'agit uniquement de 7cptoméIlÍIl ! lite. avec participation, sensible-

ment égale, des deux membranes molles, arachnoïde et pie-mère.

L'évolution fibro-plastique n'est pas très accusée; ainsi, on ne.

rencontre en aucun point ni les végétations volumineuses, ni les

128 8 Idiotie lIlYXOEDÉMATEUSE.

couches dpn<ps de lis=u fibreux, qui se voient toujours dans les

cas ilt, 111,'nillgiie 1'1'1111,'111-'1111'111. sclè"I"uP. CllPz 111'1)..., les feuillets

l'XII'\I11 ? IId "111" el l'X Il'1"111', olll, siiuplrnient plus épais qu'à

1"'1111 11(t,illiti ; 1 ? II."I'oi" ? S se soudent inlimineil, l'un à

failli ? quand ils s'engagent dans l ? petits sillons, de manière à

cOlislilll.'r une iiieiii[)i-iiii, assez forte. De même, les travées iller-

médiaires, très développées, >ont sclérosées, et elles cloisonnent

les espaces sous arachnoïdiens en une infinité de logettes actuel-

lement vides de tout contenu. Surtout, le réseau vasculaire est

riche, quelle que soit la région examinée ; artérioles et veinules

ont des parois, moyennes et externes, assez épaissies souvent, bien

que les tuniques internes ne présentent pas de grosses modifica-

tions. Ces néoformations vasculaires peuvent être suivies dans

toute l'écorce sous-jacente, jusqu'à une certaine profondeur.

Cellules nerveuses. - Les cellules nerveuses ne sont pas intactes.

Dans les régions où le processus pathologique parait bien avoir

atteint son maximum de développement (lobule paracentral, cir-

convolutions frontales), les cellules ne sont plus tassées à la suite

les unes des autres, de manière à former les colonnettes bien

connues, qui sont étagées dans toute la hauteur de l'écorce céré-

brale ; au contraire, elles sont certainement diminuées de nombre,

et elles se disposent fréquemment en petits amas ou en chainettes

courtes.

. De plus, toutes ces cellules sont peu différenciées, à tel point

qu'il devient difficile de distinguer les couches qui apparaissent si

nettement à l'état normal, dans la région rolandique par exemple.

Ainsi, les pyramidales, grandes et. moyennes, sont très peu nom-

breuses dans les couches dites profondes, là où ces éléments sont

d'ordinaire si faciles à reconnaître sur des circonvolutions saines.

Bref, la plupart des cellules ne dépassent guère le volume des

petites pyramidales, et encore beaucoup de ces dernières ressem-

blent-elles plutôt à des neuroblastes.

Cet état de dysgénésie est plus évident, quand on examine les

coupes aux forts grossissements. Ainsi, les cellules ont des prolon-

gements petits, grêles, peu nombreux, difficiles à suivre sur une

grande longueur; les masses proloplasmiques sont minces, peu

compactes, souvent fissurées, difficilement colorables à l'aide de

l'éosine ou du picro-carmin. peu chargées en corpuscules de Nissl;

les noyaux sont petits, faiblement teintés après action du bleu

polychrome d'Unna.

D'ailleurs, des lésions du même type se retrouvent sur les élé-

ments cellulaires autres que les pyramidales. Ainsi, toutes les cou-

'cites de l'écorce cérébrale contiennent moins de cellules qu'à l'état

normal; en outre, les cellules encore existantes, sont petites, défor-

mées, manifestement arrêtées dans leur développement, si bien

HISTOLOGIE DU cerveau. 129

que beaucoup d'entre elles rappellent plutôt la morphologie et la

structure générale des neuroblastes.

Dans les au lies régions ¡lobe occipital, par exemple), le pro-

ces>us pathologique n'a pas atteint un développement aussi accusé.

Toutefois, si l'on prend la peine d'examiner un certain nombre de

colonnes cellulaires, on rencontre i>émei)t, çà et là, sur une

étendue plus ou moins considérable, des zones où l'agencement

des cellules, de même que leurs caractères structuraux, reprodui-

sent absolument tout ce qui vient d'être dit pour les circonvolu-

tions du lobe frontal et du lobule paracentral.

FIBRES nerveuses. Etant donné les lésions cellulaires précé-

dentes, les fibres nerveuses ne sauraient être intactes. Partout, on

note une diminution de nombre des tubes nerveux, qu'il s'agisse

des couches tangentielles ou des fascicules radiaires. Mais cette

diminution de nombre ne va jamais jusqu'à la disparition totale

des fibres qui se retrouvent, encore assez nombreuses, dans toutes

les zones de l'écorce cérébrale, depuis la zone d'Exner jusqu'au

centre ovale proprement dit. En outre, les fibres nerveuses, exami-

nées isolément, sont plus grêles qu'à l'état normal, même quand

il s'agit des fibres relativement grosses, qui entrent dans la cons-

titution des fascicules radiaires. En un mot, on retrouve au

niveau des tubes nerveux la dysgénésie ou l'arrêt de développe-

ment si évident pour les cellules nerveuses.

Sclérose névroglique. Malgré les altérations parenchyma-

teuses, si accusées, qui viennent d'être décrites, le tissu névro-

glique n'a pas subi des modifications bien considérables. Sans

doute, la couche névroglique immédiatement sous-pie-mérienne

est épaissie, plus dense qu'à l'état normal; ses fibrilles, finement

ondulées, contractent çà et là quelques adhérences avec les feuil-

lets de la méninge voisine; mais, partout ailleurs, les éléments

névrogliques, cellules et fibrilles, conservent leur disposition habi-

tuelle. En résumé, à part la légère sclérose des régions tout-à-fait

superficielles de l'écorce cérébrale, la névroglie ne parait pas avoir

pris une part bien considérable à l'évolution du processus patho-

logique.

Réflexions.

I. Nous n'avons pas à revenir sur les symptômes clini-

ques, que nous avons minutieusement décrits dans le

Compte rendu de Bicêtre de 1889 - Deb..., nous le répé-

'Deb... est entré dans le service en février 1890. Mais, en raison de

l'importance de son observation, nous l'avons insérée à la fin du Compte

rendu de 1889 qui allait paraitre. Voir p. 93-96.

130 Idiotie liIxQ : DEI1'l'EUSE.

tons, était un des plus beaux types d'idiotie myxoedéma-

teuse que nous avons observé. Les figures 12, 13 et 14,

jointes à celles que nous avons données en 1889 et

en 1896, ne laissent aucun doute à cet égard.

II. Le traitement thyroïdien en julep, puis en injections sous-

cutanées n'avait produit, chez lui, aucun résultat. Appliqué

en ingestion stomacale en juin et juillet 1895, la taille n'a

gagné que deux centimètres et demi z1896). Bien que, en

raison des phénomènes graves occasionnés par le traitement,

nous n'ayions pas cru devoir le reprendre, la taille, station-

naire en 1897, s'est élevée à 97 centimètres en 1898, s'y est

maintenue en 1899 et 1900, puis est montée successivement

à 99 centimètres, à un mètre ( 1901), enfin à 1 m. 05 en 1902.

Elle n'en était pas moins à 63 centimètres au-dessous de la

taille moyenne à son âge (36 ans), qui est de '1 m. 68 :

nanisme myxoedénatezlx.

III. Sous l'influence du traitement, et sans doute aussi de

l'âge, la fontanelle antérieure, qui persistait encore il y a

quelques années, s'est fermée et, à l'autopsie, nous avons

trouvé à sa place une plaque osseuse transparente.

IV. Bien que Deb..., fut âgé de plus de trente-six ans, la

puberté, chez lui, ne s'était pas développée. La face, les ais--

selles, le corps étaient à peu près tout à fait glabres. Il

n'existait que quelques poils au pénil, les organes génitaux

étaient restés infantiles, et jamais il n'a manifesté d'impul-

sions génitales.

V. La température rectale de Deb... était d'habitude,

comme chez tous nos myxoedémateux, au-dessous de la nor-

male. Au moment de la mort, presque foudroyante, elle

était descendue à Ci, cas d'hypothermie s'ajoute à ceux

que nous avons consignés dans maintes publications, entre

autres dans le Compte rendu de lIicêtl'e de 1901 (p. 167). A

un moment, après la mort, elle a même été au-dessous de

la température du milieu ambiant.

VI. La description du squelette, peut-être la première

aussi détaillée, l'analyse chimique de la peau', l'examen

1 Voir une analyse semblable de MM. Yvon et Thabuis [Compte rendu

de 1886, p. 46); de M. Requiem (Compte rendu de 1889, p. 99 et de

M. Cornet (Compte rendu de 1894, p. 122).

RÉFLEXIONS. 131

histologique du cerveau ' font de cette observation l'une

des plus complètes, sinon la plus complète, qui ait été

publiée jusqu'à ce jour sur l'idiotie myxoedémateuse.

VII. Depuis 1880 jusqu'à ce jour, il a toujours existé

dans le service quelques cas de nzyxoedènze infantile. De là,

un certain nombre de publications personnelles que nous

croyons devoir rappeler à la fin de cette observation :

'1° Note sur un cas de crélinisme avec myxoedème ou

cachexie pachydennique. Compte rendu de 1880, p. 16 (en

collaboration avec d'Ollier); - 2° De l'idiotie compliquée de

cachexie pachydermique ou idiotie c1'étinoïde. Compte

rendu de 1886, p. 3 (en collaboration avec P. Bricon) ;

3° Nouveau cas d'idiotie avec cachexie pachydermique;

idiotie crétinoïde ou idiotie myxoedémateuse. Compte

rendu de 1888, p. 3; - 4° De l'idiotie avec cachexie pachy-

dermique. Compte rendu de 1889, p. 51, et Association

française pour l'avancement des sciences (août 1889) ;

5° Nouvelle observation d'idiotie myxoedématellse ou

cachexie p(/chyde1'1nique. Compte-rendu de 1889, p. 172;

6° Nouvelle contribution à l'étude de l'idiotie myxoedé-

mateuse. Compte-rendu de 1890, p. 206 (Congrès de méde-

cine mentale de Rouen); - 7° Etat du squelette d'un ma-

lade atteint d'idiotie ntyxcedénzateu.se. Compte-rendu de

1891, p. 34; 8° Idiotie my,r;oedématellse. Compte-rendu

de 1894, p. 9'2; - 9° Trois cas d'idiotie myxoedémateuse

traités par l'ingestion thyroïdienne. Compte-rendu de 1895,

p. 167, et Congrès des aliénistes et neurologistes de B01'-

deaux, t. II, p. 178; 10° Nouveau cas d'idiotie avec

cachexie pachydermique. Compte-rendu de 1896, p. 49.

Communication faite à la Société de Biologie, séance du

15 mai 1896; 1 1° Cinq cas d'idiotie myxoedématellse (Bul-

letin de la Société médicale des hôpitaux, 1897, p. 32;

12° De l'action de la glande thyroïde sur la croissance et

l'obésité chez les idiots myxoedématenx, obèses ou atteints de

nanisme (Congrès des aliénistes et neurologistes de Nancy,

1896, t. II, p. 372); 13° Myxoedème infantile (Communi-

1 Un de nos anciens internes, M. Pilliet, nous a donné un examen

histologique du cerveau de Cab ? (myxoedémateux) et de sa peau (Compte

rendu de 1889, p. 97). - Du même auteur : Encéphalites chroniques

de l'enfance (Ibidem, 1). 113).

132 ' Bibliographie.

cation faite au Congrès international de médecine de 1900,

section de neurologie); 14° Idiotie myxoedémateuse; '-

traitement thyroïdien; observation de Félicie T... Compte

rendu de 1900, p. 22. Toutes ces observations ont été

illustrées de nombreuses figures et de planches. - '1;)0 La

scoliose myxoedémateuse (Progrès médical, 1902, article

reproduit à la p. 74 de ce volume).

XI 1

Idiotie profonde avec nanisme et infantilisme;

amélioration considérable.

Par BOURNEVILLE.

En dehors des petites notices qui figurent dans la pre-

mière partie des Comptes rendus annuels de notre service,

des communications que nous faisons de temps en temps

aux Congrès des aliénistes et neurologistes et de deux

thèses', nous n'avons publié que rarement, à tort, les obser-

vations complètes des enfants idiots améliorés ou guéris.

L'observation que nous allons relater, choisie entre beaucoup

d'autres, dans laquelle on suit année par année les progrès

de l'enfant, montrera à nos lecteurs que même dans les cas

les plus graves on obtient de très sérieux résultats.

Sommaire. - Enfant naturel. - Père, rien à noter. - Renseigne-

ments nuls sur sa famille. - Mère eczémateuse, pas d'accidents

nerveux. - Grand-père maternel mort de paralysie du cerveau. -

Grand'mère maternelle, alcoolique, morte d'une congestion céné-

braie. - Deux cousins germains morts de convulsions. - Soeur,

convulsions de l'enfance.

Pas de consanguinité. - Inégalité d'dge de douze ans.

Conception, grossesse, accouchement, naissance, rien de particu-

lier. - Normal jusqu'à neuf mois. - Convulsions répétées de

neuf mois à trois ans. - Marche à deux ans et demi. - Parole

nulle. Gâtisme. - Intelligence nulle.

1890 : Teigne. - 1891 : rougeole. - 1892 : persistance de la

teigne ; diarrhée.

1893 : Guérison de la teigne. - Rumination. - Début de l'amé-

lioration, préhension plus sùre, attention plus fixable. - Carac-

tère toujours sournois.

Griffaut. - Contribution à l'élude du traitement de l'idiotie, 1896;

- Boyer Traitement médico-pédagogique de l'idiotie.

134 Idiotie profonde avec nanisme ET infantilisme.

1894 : Diminution progressive des tics.

1895 : Guérison du gâtisme. - Développement de la parole. -

Accès de colère persistants.

1896 : Progrès scolaires. - Manies, bizarreries.

1897-1902 : Développement progressif de l'intelligence, l'enfant

sait lire, écrire, faire les premières règles, etc. -Notions usuelles

très étendues. Parole libre. Guérison des tics.

Lem... (Georges), né à Paris le 21 mars 1887, entre à trois ans à

l'asile-école de Bicêtre, le 29 avril 1890. Enfant naturel.

Antécédents héréditaires. - Renseignements fournis par la mère

le a mai 1890. - Père : quarante-cinq ans, typographe, toujours

en bonne santé, non alcoolique. Intelligence ordinaire, travaillait

régulièrement, bon ouvrier. Pas de violence vis-à-vis de la mère.

Caractère calme. Il a abarrdonné la mère de ses enfants il y a

deux ans, et serait mort, on ne sait de quoi, peu de temps après

la séparation. Il n'a eu aucune discussion avec elle et, depuis, la

mère ne l'a pas-revu. Indifférent vis-à-vis de ses enfants. Pas de

migraines. Pas de dartres ou d'affections cutanées. Aucun indice

de syphilis. Nul renseignement sur sa famille.

Mère, trente-trois ans, brocheuse. Santé toujours bonne. Femme

de taille élevée, physionomie assez intelligente. Pas de convulsions.

réglée à quinze ans et demi. A quatorze ans, a eu un eczéma. Pas

de migraines, pas de signes de syphilis. Intelligence moyenne.

Famille DE la sikre. Père, sobre, mort d'une paralysie au cer-

veau ( ? ). - Mère, alcoolique, elle buvait de tout et s'enivrait plu-

sieurs fois par semaine, violente, morte d'une congestion cérébrale

avec aphasie.Gr.-për maternel, pas de renseignements.- Grand'-

mère maternelle, sobre, morte d'une tumeur de l'estomac. - Deux

tantes maternelles mortes jeunes de la poitrine.

Une soeur, en bonne santé ; de ses sept enfants un est mort

de convulsions ; un autre a eu des convulsions. - On ne connaît ni

aliénés, ni épileptiques, ni arriérés, etc., dans la famille, d'ailleurs

limitée.

Pas de consanguinité. 12 ans de différence d'âge entre les

parents (père plus âgé).

Quatre enfants : 1° Garçon mort du croup à deux ans et demi.

Pas de convulsions, intelligent ; 2° Garçon mort à six mois du

choléra infantile. Pas de convulsions; -' 3° Fillette de cinq ans,

bien portante, bien développée pour son âge. Intelligence ordinaire.

Trois ou quatre convulsions à six semaines qui n'ontjamais reparu

depuis. Pas d'incontinence nocturne d'urine.

4° Notre malade.-A la conception, les parents étaient encore bien

unis. Grossesse normale : pas d'accidents, pas de traumatisme; pas

d'émotions morales, pas de maladies infectieuses. - Accouchement

Antécédents. 135

normal, à terme par le sommet. Pas d'asphyxie à la naissance.

Nourri au sein pendant trois mois par une nourrice saine ; ensuite

a pris le lait au verre. A quatre mois, il se développait bien.

Revu par sa mère à huit mois, il était tout à fait normal, époque

où il a eu sa première dent : il regardait, gazouillait, jouait, se

tenait autour des chaises, en un mot paraissait tout à fait normal.

A neuf mois, début des convulsions. Il en a eu 5 en trois jours,

l'une d'elles, vue par la mère, aurait duré deux heures. Les mem-

bres étaient roides, retournés, la figure était de côté. Il ne pou-

vait plus se tenir sur les jambes. La mère l'a repris et l'a placé

à côté de son domicile. Les convulsions le prenaient deux ou trois

jours de. suite, puis cessaient pendant denx ou trois jours. Elles

étaient surtout toniques, étaient égales des deux côtés et duraient

trois ou quatre minutes. De deux à trois ans, les convulsions se

sont espacées, venant toutes les semaines puis tous les quinze

jours. La physionomie était devenue sans expression.

Il a commencé à marcher à deux ans et demi. On a alors remar-

qué que l'un des pieds (on ne peut dire lequel) était tourné et

appuyait sur son bord externe. Cette sorte de pied bot varus

n'existait plus à l'entrée à Bicétre.

. Il ne comprend rien. Parait complètement sourd, au dire de la

mère. Il a marché à deux ans et demi. n'a jamais dit qu'un mot

« maman » et encore il le dit très indistinctement et sans s'adres-

ser à sa mère. Il grimace beaucoup depuis ses premières convul-

sions, bave, tette sa langue, crie par moments, se jette de côté, se

ferait du mal si on ne le surveillait. Il ne reconnait passa mère. Il

repousse les autres enfants, même sa soeur. - Il ne demande

pas à manger, mastique mal, est gâteux. Le développement des

jambes ne parait pas proportionnel à celui des bras. -Pas de vers,

d'onanisme, de traumatisme. - La dentition n'a été complète qu'à

trois ans.

Pas d'autres maladies infectieuses qu'une rougeole à dix-huit

mois, qui aurait été forte (toux et fièvre). A deux ans il aurait eu

beaucoup de gourmes à la tète et à la face. On n'aurait pas remar-

qué de rumination ? - Aucun signe de connaissance et d'affection.

La mère, à qui il ressemble, dit-elle, attribue l'idiotie aux convul-

sions.

État actuel (14 mai 1890) (Fig. 19),-Enfant blond, lymphatique.

Pas d'adipose, d'émaciation ; air de maladie, crie fréquemment,

surtout s'il est seul ; quand on est près de lui, il se tait brusque-

ment. Peau blanche, glabre; aucune cicatrice de vaccin;

absence complète de poils. Ganglions assez nombreux au cou et

dans les plis de l'aine, aucun sous les aisselles. Cheveux implantés

régulièrement ; tourbillon postérieur non dévié. Sourcils blonds,

régulièrement implantés. Cils longs, châtains...., -

136 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.

Tête assez grosse, volumineuse à la partie supérieure. Crâne :

forme ovoïde : la partie postérieure est très volumineuse et de

beaucoup prédominante sur-la partie antérieure ; symétrique en

apparence. Bosses frontales très saillantes ; ecchymose au niveau

de la bosse frontale droite. Pas de persistance des fontanelles.

Front élevé (6 centimètres), mais peu large, se confondant rapi-

dement avec les tempes. Vi.-age oval, arcades sourcilières peu

saillantes, pas d'exophthalmie; paupières normales, fentes palpé-

braies horizontales. Les yeux sont mobiles en tous les sens. Pas de

strabisme, pas de paralysies, pas de nystagmus. Iris bleuâtre;

pupilles symétriques, non déformées, réagissant bien à la lumière

Fig. 19. - Lem..., ((;porges), né à Paris, le 21 mars 1887. Entré le

29 avril 1890. (l'holographie prise en mai 1890.)

DESCRIPTION DU malade. 137

et à l'accommodation. Pas de lésion de la cornée ou de la conjonc-

tive ; pas de larmoiement. L'examen fonctionnel ne peut être fait.

l'enfant fermant' les yeux constamment d'une part, d'autre part z

son absence complète d'intelligence, de compréhension empêchant

d'avoir des renseignements sur l'acuité visuelle, la notion des cou-

leurs. etc. Ne : . petit, arrondi, à courbe supérieure et dorsale ;

narines étroites, sillon naso-labial assez accentué. L'odorat paraît

exister. - Pommettes peu marquées, régulières, symétriques. -

Bouche petite, horizontale, lèvres minces, l'inférieure plus volumi-

neuse, mais non éversée. - Langue grosse, palais et voile nor-

maux. Amygdales normales. Le goût semble exister. Il y a 8

dents de lait à chaque mâchoire. - L'expression du visage indique

que l'enfant fait la différence des saveurs. Oreilles grandes, mais

non écartées. Ourlet régulier, ainsi que les autres parties consti-

tuantes de l'oreille ; conque large ; ouie obtuse, mais existante.

Cou court, circonférence 27 centimètres. Corps thyroïde percep-

tible. 1

Thorax assez large, dilaté à la base, potelé comme le reste du

corps, pas de saillie des omoplates ni de déviation du rachis.

Battements du coeur réguliers. Rien à l'auscultation des pou-

mons. - Abdomen peu volumineux. Rien du côté du foie ou de la

rate.

Organes génitaux : bourses petites, rétractées, les deux testicules

de la grosseur d'une olive sont dans les bourses. Verge : longueur,

4 centimètres ; circonférence, 3 centimètres. Prépuce long, gland

découvrable. Anus normal.

Membres supérieurs réguliers, normaux, cylindriques, potelés,

mais peu musclés ; doigts longs, ongles courts.

Membres inférieurs : rien à signaler, pas de déviation osseuse,

pas de pied plat. Ongles et orteils courts.

Sensibilité normale à la piqûre, au pincement, à la température.

Réflexes rotuliens semblant disparus ainsi que les réflexes olécra-

niens ( ? ) ; réflexe pharyngien normal. Pas de trépidation spinale.

Lem... ne s'aide en rien, sauf qu'il se sert un peu de la cuiller.

Parole nulle. Il mange seul en se servant uniquement de la

cuiller. La mastication est bonne, pas de bave, de rumination ni

de vomissements. La digestion est bonne. Diarrhée très fréquente.

Très turbulent et entêté. Sommeil bon. Ne s'habille, ni ne fait

seul sa toilette. - En résumé, idiotie profonde.

19 entrai : Bronchite légère. Guérison le 2 juillet.

29 juillet : Corps glabre. Verge courte, longueur 4 centimètres.

Circonférence 0,03 prépuce court, ne peut être ramené en arrière.

Bourses pendantes, testicules égaux, un peu plus gros qu'une

olive. Anus normal.

29 septembre. - Entre au pavillon d'isolement pour la teigne.

4, octobre, - Vaccination, Succès complet : six pustules vaccinales.

13ouRNEILLr, IVicêlre 1902. 9

138 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.

Pendant toute l'année 1891, l'enfant ne fait aucun progrès.

Parole nulle. Gâte la nuit et le jour.

- 1891. 20 juin. -Rougeole : éruption discrète qui commence à pâlir,

le 22. La température s'abaisse le même jour.

26 juin. - Il n'y a plus trace de l'éruption, pas de complication.

3 juillet : Guérison complète.

1892. Commence à être un peu propre le jour à partir de sep-

tembre. En décembre, va seul aux cabinets. Mange proprement,

mais il ne se sert toujours que de la cuiller.

'* 18 mars. Plaque de teigne assez bien délimitée au niveau

du tourbillon ; petites plaques disséminées en avant. Traitement :

épilation, sublimé, emplâtre de Vigo.

fin. 20. Lem... (Georges) eu octobre 1892.

Traitement médico-pédagogique. 139

Juillet. État stationnaire de la teigne. Diarrhée. Organes

génitaux : Verge : longueur, 6 cent., circonférence, 5 cent. Phimo-

sis. Le gland n'est pas découvrable. Testicules de la grosseur d'un

gros haricot, égaux. Région anale normale.

8 octobre. -Eruption pustuleuse disséminée sur toute la surface

de la tête. (Fig. 20). , .

1893. 16 juin. Amélioration considérable de la teigne, mais il

existe encore sur la tête une éruption papulo-pustuleuse. - Même

état des organes génitaux.

Août. Passe à la petite école. Il est guéri de la teigne. il con-

tinue à gâter le jour et la nuit. Il rumine presque continuellement

pendant l'heure qui suit le repas. En classe est toujours souriant et

montre de la bonne volonté.

Octobre. Va seul aux cabinets le jour. La parole est toujours

Fig. 21. Lem.... (Georges) en avril 1894.

140 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.

nulle, mais l'enfant aime beaucoup entendre parler et chanter. Il

sourit à tout ce qu'on lui dit et se montre très docile et très

attentif à la -classe. Il commence à lacer ses souliers et â placer

exactement les cartons sur le tableau de couleur, à exécuter les

premiers mouvements de gymnastique et saute les deux premiers

degrés de l'escabeau. Caressant, gai, joueur. Pleure très rare-

ment. Pas d'onanisme. Ni voleur, ni gourmand; Tenue générale

bonne, soigneux; se regarde quand on lui met une robe propre ou

des souliers neufs et son attitude exprime la joie. Il se balance

.latéralement, en levant alternativement les pieds et roulant la

langue dans la bouche.

1894. 16 juin.-Même état des organes génitaux (Fig. 21). Parole

toujours nulle. Parait comprendre ce qu'on lui dit. N'est presque

Fig. 22. Lem..., (Georges) en octobre 1895.

Traitement MÉDICO-PÉDAGOGIQUE. '141

plus du tout gâteux. Le balancement a presque disparu. Aujour-

d'hui il ne lui reste plus guère qu'un clignement de l'oeil gauche.

Caractère affectueux, aime les caresses, quelques colères sans

durée. Mange gloutonnement, ne semble jamais rassassié, flaire

ses aliments . Place bien les couleurs, distingue les surfaces, un plus

grand nombre d'un plus petit. Exécute les premiers mouvements

de la gymnastique des échelles. .

Décembre. Essaie de balbutier quelques paroles : «attends, va

voir. » Place quelques lettres et quelques chiffres, mais ne les dis-

tingue pas. Les tics de balancement et de grincement ont beaucoup

diminué. Les cris ont cessé. Il demande à aller aux cabinets en

disant « envie ».

1895. Juillet. - Puberté : visage, aisselles, pubis glabres. Verge,

longueur, 4 centimètres ; circonférence, 4 cent. 1/2. Testicules dans

les bourses, du volume d'un haricot, prépuce recouvrant entière-

ment le gland ; région anale normale.

Parole améliorée, essaie de répéter les mots, mais avec difficulté.

Articulation très défectueuse. 11 connaît les lettres, les chiffres, les

couleurs. Exécute bien tous les mouvements de petite gymnastique.

Décembre. Tout à fait propre le jour, gâte quelquefois la nuit.

Connaît les parties de son corps, les vêtements, un peu les jours

de la semaine. Il est toujours méchant et sournois avec ses cama-

rades (Fig. 22).

1896. Parler toujours défectueux dans l'articulation. Les pro-

grès scolaires sont lents, car l'attention est toujours distraite. Les

tentatives pour le faire syllaber ne donnent pas encore de résultats.

Lem... est absolument propre, ne gâte plus ni jour ni nuit. - Les

accès de cris, le balancement, les grincements de dénis ont com-

plètement disparu. Lem... tient mieux le crayon, trace des bâtons,

lace, boutonne, mais ne parvient pas à nouer.

Décembre. Caractère fantasque ; reste parfois plusieurs jours

isolé volontairement de ses camarades, criant, riant, sautant et

paraissant manquer totalement de lucidité. Dans ces périodes il

est impossible de rien en tirer; l'attention est absolument nulle.

D'autres fois, il est docile, s'applique à ce qu'il fait, est très heureux

qu'on s'occupe de lui, est sensible aux compliments et aux repro-

ches (Fig. 23). Il a la manie de promener sa langue dans sa bouche

et de la mordiller toutes les fois qu'il est occupé. Lorsqu'il est

joyeux, il ouvre la bouche démesurément, baisse la tête et saute

en crispant les poings.

1897. Août. Corps glabre. Verge : longueur, 5 centimètres ;

circonférence, 4 centimètres ; phimosis. Testicules égaux. Anus

normal. Parole très améliorée, commence à faire. de petites

142 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.

phrases, telles que : cc Je ne veux pas à la soupe. 11 a battu Geor-

ges,ete.B(/t.24).

Décembre. Beaucoup d'amélioration dans les exercices sco-

laires : il commence à savoir tenir la plume, à faire des C et des 0.

Il a fait beaucoup de progrès pour la lecture. Il est heureux quand

on le fait travailler. Lorsqu'on l'appelle pour lire, il se frotte

les mains et saule en signe de satisfaction. Il reconnaît et nomme

les petites quantités. Il est toujours colère et fantasque. Il aime à

frotter son visage sur les oreilles et le cou de ses camarades et très

souvent la caresse se transforme subitement et il mord avec

frénésie.

1898. Juin. Progrès dans l'écriture. Il lit et retient avec une

Fig. 23. - Lem..., (Georges) en juin 1896.

Traitement DIED1CC-PÉD.1GOGIQUE. '143

facilité surprenante les mots imprimés, mais n'apporte aucun goût

à la lecture dans le Syllabaire.

1899. Juin. Prend goût à la lecture du Syllabaire, qu'il ne

voulait pas regarder. Dans le Syllabaire de même que pour les

mots imprimés, il ne retient que les mots qu'il comprend et ces

mots il les lit indifféremment à l'envers et à l'endroit. Il est doué

d'une mémoire surprenante. L'écriture s'améliore. Progrès abso-

luments surprenants dans la parole qui était absolument nulle.

Chaque jour il emploie des mots nouveaux (Fig. 25).

1900. Janvier. - Lem... prend goût à tous les exercices clas-

siques. Il copie les mots qu'il lit et même en écrit un cer-

tain nombre de mémoire, tels que les jours de la semaine, les

Fig. 21. - Lem..., en octobre 1897.

144 Idiotie PROFONDE avec nanisme et infantilisme.

nombres dont il connaît la valeur jusqu'à 10. Caractère plus

doux, plus docile, moins rageur.

Juin. Amélioration persistante et progressive dans la paroie,

la lecture, l'écriture. Lem... trace tous les chiffres, commence à

faire de petites additions.

1901. -Tout le corps est glabre, verge, 6 cent. 1/2 de longueur ;

circonférence, 0 centimètres. Gland recouvert par le prépuce qui

ne décalotte pas. Testicules du volume d'un oeuf de moineau. Anus

normal.

Parole encore défectueuse, mais Lem ? a acquis cette année ch,

g, v, z, j, r, ill, gu, bl. Tous ces sons, bien articulés au commence-

''ment ou dans le corps des mots, sont nuls lorsqu'ils forment la

syllabe finale d'un mot terminé par un e muet. Progrès pour tous

les exercices, surtout pour les leçons de choses.

Fig. 2o. - Lem..., (Georges) en octobre 1899.

Traitement lltEDICG-PEDAGOGIQUE. 145

Juin. Progrès pour la classe, mais difficulté pour le calcul. Il

lit couramment, commence à faire des devoirs élémentaires sur la

grammaire. Caractère susceptible, ne supportant pas les taquine-

neries de ses camarades. Il a perdu l'habitude de flairer. Son goût

est encore bizarre, il ne veut ni charcuterie, ni aucun fruit.

Décembre. -Commence quelques petits exercices de grammaire.

Difficulté pour le calcul, fait l'addition, commence la soustraction.

La parole est encore défectueuse pour certaines consonnes se trou-

vant dans le corps d'un mot. Ainsi il dira ]JI'ojelion pour projection,

cccninet pour cabinet. De même, par paresse et non par difficulté.

il supprime d'habitude les syllabes finales, muettes, des mots. Son

caractère est toujours rageur. Lorsqu'il est en colère pour un motif

quelconque, Ions ceux qui sont à sa portée en subissent le contre-

coup, et à défaut de camarades dans son voisinage, ce sont les

tables, les portes, les fenêtres, qui reçoivent coups de poings et

coups de pieds.

1902. Décembre. - Lem... apporte beaucoup d'application à la

gymnastique et aux travaux de la classe. Il comprend bien ce qu'il

lit, écrit mieux, fait l'addition et la soustraction avec retenues,

ébauche la multiplication. Il a une mémoire extraordinaire pour

les mots qu'il a lus. 11 fait quelques exercices élémentaires de gram-

maire ; il applique assez bien le genre et le nombre, copie des

verbes, fait un pcu d'analyse. 11 reste toujours maniaque. Il ne

faut, pas que rien vienne intervertir l'ordre des choses établi, sinon

il est furieux. Si, pour une cause ou une autre, une des infirmières

change son jour de sortie, il l'invective et bougonne toute la jour-

née à ce sujet. Dans une promenade, si l'on ne revient pas par le

même chemin que l'on a pris en allant, il se met en colère et récri-

mine pendant le trajet. Si le jour où l'on a l'habitude de faire la leçon

orale de grammaire, on fait une leçon de choses, il est fâché, ne

veut rien écouter, ne répond que des bêtises aux questions qu'on

lui pose et fait en sorte de troubler l'ordre.

Ses camarades qui s'aperçoivent de sa bizarrerie de caractère,

le taquinent souvent, alors ce sont des rages : il crie, trépigne, tape

à droite, à gauche tout ce qui l'environne (meubles et gens) et ne

se calme que lorsque l'on fait signe de le conduire en cellule.

(Fig. 26).

Puberté et organes génitaux. Sauf un peu de duvet très fin

au-dessous des oreilles et aux extrémités de la lèvre supérieure,

tout le corps est glabre. Les bourses sont pendantes, les testicules

égaux, de la dimension à peine d'un oeuf de pie La verge mesure

0 cent, de longueur et de circonférence. Le prépuce est long, étroit

et ne permet de voir que l'extrémité du gland. Le méat paraît plu-

tôt petit (Phimosis). Rien à l'anus. - Lem... ressemble non à un

adolescent, mais à un enfant.

146 Idiotie profonde avec nanisme ET infantilisme.

RÉFLEXIONS. -1. Nous n'avons,rien à relever du côté du père,

enfant naturel, dont la famille est inconnue. - Du côté ma-

terne), nous notons la mort du grand-père de l'enfant par

une paralysie ducerveau, celle de la grand'mère, alcoolique,

par une congestion cérébrale, des convulsions chez plusieurs

cousins.

II. Lem..., d'après les renseignements fournis par sa mère

''et que nous avons tout lieu de croire exacts, aurait été tout

à fait normal, jusqu'à neuf mois. Surviennent à ce moment

des convulsions sous forme d'étal de mal (2 heures), qui se

F-ig. 26. - Lem.... Georges en octobre 1902,

Traitement MÉDICO-PÉDAGOGIQUE. 147

répètent trois jours et déterminent l'idiotie complète :

absence de développement de la parole, persistance du

gâtisme, impotence des membres, regard sans expression,

attention nulle, arrêt de la dentition, etc. Les convulsions

se sont répétées fréquemment de neuf mois à deux ans presque

quotidiennement sous forme plutôt de petits accès. De deux

à trois ans, elles s'éloignent de plus en plus et enfin dispa-

raissent à 3 ans. Il se produit alors une première améliora-

tion, légère toutefois et portant exclusivement sur l'état phy-

sique : l'espèce de paralysie de l'un des membres inférieurs

disparaît. Intellectuellement rien : l'attention ne s'éveille

pas, la physionomie reste idiote, on croit l'enfant sourd. z

III. De 1890 à 1893, en raison de la teigne, le traitement

médico-pédagogique n'a pas été sérieusement appliqué. Il

ne l'a été qu'à partir du mois d'août 1893. L'enfant est devenu

propre, la figure a offert un commencement d'expression,

l'attention s'est développée.

A partir de 1895, les tics ont diminué, puis disparu. La

parole est venue, l'enfant a appris à se laver, à s'habiller, à

manger seul, en un mot à ne plus avoir besoin d'aide. Enfin

il a appris à lire, à écrire, à compter, à faire les trois pre-

mières règles, à connaître, nommer les personnes et les

choses. Les sentiments affectifs, nuls autrefois. se sout déve-

loppés, l'enfant est affectueux pour sa mère et les personnes

qui l'entourent. En résumé, aujourd'hui, si l'enfant était

présenté pour la première fois, ce ne serait plus le dia-

gnostic : idiotie profonde que nous porterions, mais celui

d'imbécillité.

IV. Il suit aussi de ce qui précède que l'on doit s'occuper

activement des idiots les plus malades, complets, êtres végé-

tatifs et ne pas les reléguer dans le coin le plus dissimulé des

hospices ou des asiles, comme certains médeçins qui ne con-

naissent que superficiellement les malades, n'ont quelque-

fois ni vu ni lu, le demandent, les considérant comme insus-

ceptibles de toute amélioration. Il faut appliquer avec régula-

rité et patience le traitement ntédico-pédagogic2ce pendant

plusieurs années, avant de déclarer les idiots complets incu-

rables. L'histoire de Lem... en est la preuve. Nous avons cité

bien d'autres cas analogues qui justifient notre opinion.

148 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.

150 Traitement MEDICO-PEDAGOGIQUÈ.

V. Une particularité, observée chez Lem..., mérite d'être

relevée : c'est que pendant bien des années, jusqu'à son

admission à Bicêtre, il était considéré comme sourd. Il ne

l'était pas, en réalité; sa surdité n'était qu'apparente. Ce

quilui manquait, c'était l'attention auditive.

VI. L'idiotie, ici, était compliquée de nanisme avec infan-

tilisme. L'examen du tableau de la faille, prise deux fois par

an, de 1890 à 1902, montre qu'elle a toujours été notable-

ment au-dessous de la moyenne. A la fin de 19002, elle était

de 1 m. 36 au lieu de 1 m. 55, soit en moins z19 centimètres.

L'infantilisme est indubitable : physionomie enfantine,

absence de poils à la face, sur le corps, au pénil ; organes

génitaux peu développés, en somme aucun signe de puberté

malgré son âge (seize ans). Pas d'onanisme, aucune mani-

festation génitale.

VII. Bien que la mère n'ait pas remarqué la rumination ,

elle a été constatée peu après l'entrée. Elle a été plus mar-

quée à certaines périodes et revient encore de temps en

temps. Les cas de rumination qui étaient nombreux dans le

service, autrefois, deviennent de plus en plus rares'.

' Le tableau des mensurations de la tête, offre quelques différences

qui s'expliquent soit par un amaigrissement momentané, soit parce

que les cheveux étaient plus ou moins courts. Les irrégularités dynamo-

métriques tiennent à ce qu'on ne peut pas toujours obtenir la même

attention chez l'enfant.

XII

Un cas de maladie des tics; guérison;

Par BOURNEVILLE et POULARD'

L'affection nerveuse désignée par Charcot sous le nom de

maladie des tics est, en général, considérée comme incu-

rable. D'après beaucoup d'auteurs, les rémissions qu'elle pré-

sente ne seraient que passagères et incomplètes.

Une jeune fille, qui en est atteinte depuis dix ans, que

nous suivons depuis 1890, vient d'en être complètement, si-

non définitivement, débarrassée. C'est en raison de cette

guérison, contraire à la plupart des opinions reçues, que

nous avons cru devoir rapporter son histoire qui a naturelle-

ment sa place dans une discussion sur les tics.

Sommaire. - Père rhumatisant. Grand'mère paternelle, hémiplégie

gauche. Arrière- grand-père paternel mort d'une congestion cérd-

brale. Arrière-grand'mère paternelle morte avec une hémiplégie.

Grand-oncle paternel mort d'une attaque d'apoplexie.

Mère : céphalalgies, sourde, caféisme, morte d'apoplexie cérc-

brale. Grand-père maternel alcoolique, mort à si troisième attaque

d'apoplexie. Grand'mère maternelle morte d'un cancer de l'utérus.

Grand-oncle maternel bègue. Oncle maternel mort de tuberculose.

Frère mort de méningite. Autre frère, convulsions de l'enfance,

mort de tuberculose. Demi-soeur paternelle, morte d'une affection

du cerveau. Pas de consanguinité. Inégalité d'cige de onze ans (mère

plus âgée).

Conception, rien de particulier. Grossesse, ennuis et idées noires;

mouvements violents du foetus ci cinq mois. Rien d'anormal à l'accou-

' Communication au Congrès des aliénistes et neurologistes de Gre-

noble (août 1902).

'lâ2 Maladie DES tics; GUÉRISON.

chement et à la naissance. Première dent ci sept mois; dentition

complète à deux ans. Marche à onze mois. Propreté vers un ars. Acci-

dents nerveux mal déterminés et rachitisme des membres inférieurs

ri seize mois. Début de la parole à deux ans; prononciation défec-

tueuse pendant quelque temps. Accès de colère. Rachitisme guéri.

Prodromes et début des tics ri sept ans ; leurs variétés ; coprolalie ;

cla.stomanie; impulsions violentes, influence du chant, de la gym-

nastique, du traitement moral. Exacerbations et rémissions incom.

plètes. Guérison.

Vig... (Georgette), née à Paris le 19 janvier 1888, est entrée à la

Fondation Vallée le il mai 1900.

Antécédents héréditaires. - PÈRE, trente-huit ans, voyageur de

commerce à l'étranger, très sobre, rhumatisant, n'aurait pas eu la

syphilis. Pas d'accidents nerveux. Il aurait été « débauché » à dix-

sept ans par la mère de la malade, Mme veuve Lee..., alors âgée de

plus de vingt-huit ans et qui avait un enfant de six ans. Ils se sont

brouillés an bout de sept ans parce qu'il y avait des disputes entre

lui et le fils, grandi, de sa maitresse, et aussi parce qu'il la trou-

vait trop vieille. Il s'est marié depuis et a eu deux enfants légi-

times : une est morte, il dix-sept mois, de diarrhée ; la seconde est

bien portante : ni l'une ni l'autre n'ont eu de convulsions.- [Son

père, âgé de quatre-vingt-deux ans, sobre, est en bonne santé. Sa

mère est morte à soixante-dix-huit ans, dix-huit mois après une

attaque de paralysie (hémiplégie gauche). Grand-père paternel

décédé d'une congestion cérébrale, croit-on. - Grand'mère pater-

nelle, morte à soixante-dix-neuf ans, en deux jours, avec une

hémiplégie. Grand-père maternel mort asthmatique à soixante-

dix-sept ans. -- Grand'mère maternelle, morte d'une pneumonie. -

Un oncle paternel a succombé dans une attaque d'apoplexie fou-

droyante. - Ses autres oncles et tantes, ses quatre soeurs et leurs

enfants n'ont pas eu de maladies nerveuses ou mentales. [Ilien à

noter dans le reste de famille.]

Mère, quarante-huit ans, ménagère, tempérament nerveux,

caractère vif, sujette à des céphalalgies, ne paraissant pas de

nature migraineuse, surdité datant de vingt ans, attribuée à l'é-

motion qu'elle a éprouvée à la mort dé son mari, frappé de con-

gestion cérébrale et emporté en deux jours. Elle a toujours bti

énormément de café. Elle a succombé le 8 mai dernier à une

attaque d'apoplexie. [Son père, alcoolique, est mort à soixante-dix-

huit ans, à sa troisième attaque d'apoplexie. Sa mère est décédée

à quarante-cinq ans d'un cancer de l'utérus. Ses grands-parents

paternels et maternels sont morts âgés, de maladie inconnue. Un

oncle maternel est bègue. Une soeur est morte à neuf ans de la

lièvre typhoïde. Deux frères, l'un mort tuberculeux, l'autre boiteux

Antécédents. 'INJû

par accident, mais ayant une bonne santé. Rien à signaler dans le

reste de la famille : pas d'autres bègues, pas d'aliénés, etc.]

Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de plus de onze ans (mère

plus âgée).

Trois enfants : l°un garçon mort de méningite, sans convulsions,

en trois jours, à l'âge de neuf mois; 2° garçon mort à vingt-quatre

ans, de tuberculose pulmonaire ; 3° une fille, sujet de l'observation.

Antécédents personnels. - Notre malade. - Conception dans

des conditions normales, mais nous rappelons que le père avait

onze ans de moins que sa maîtresse. Grossesse sans aucune com-

plication, sauf des ennuis et des idées noires en raison de sa

situation irrégnlière et parce qu'elle craignait des reproches de

ses patrons, chez lesquels elle était depuis longtemps. Le foetus a

commencé à remuer à cinq mois, d'une manière exagérée, par

comparaison avec les mouvements de ses deux premiers enfants.

Accouchement à terme, naturel, sans chloroforme, par la tête. A la

naissance, l'enfant était petite, bien constituée, sans asphyxie, ni

circulaire du cordon. Elle a crié « énormément » les dix premiers

jours, ne dormait pas, il fallait lui donner le sein pour la calmer.

Au bout de cinq à six mois, elle était calme et le sommeil était

bon. Allaitement maternel, sevrage à deux ans. Premièredent à

sept mois, dentition complète à deux ans. Parole un peu tardive :

à deux ans elle ne disait que « papa » et « maman ». La pronon-

ciation aurait été défectueuse pendant quelque temps. Marche à

onze mois ; propreté à un an, mais elle avait été habituée au vase

à partir de trois mois.

V... aurait eu, selon sa mère, des convulsions à seize mois. Ces

prétendues convulsions paraissent se réduire à des accès de colère.

L'enfant s'est raidie, a crié, sans perdre connaissance ; elle n'a eu

ni contorsions des membres, ni convulsions des globes oculaires.

On n'aurait observé qu'une crise de ce genre. Aucune trace de

paralysie consécutive. L'intelligence ne fut pas atténuée. A cette

époque, V... avait des déformations rachitiques très accusées aux

membres inférieurs qui ont disparu vers sept ans. Caractère gai,

violent, coléreux. Turbulence extrême. Pas d'onanisme.

La santé générale a toujours été satisfaisante, sauf des bron-

chites et des troubles respiratoires, probablement de nature ner-

veuse, consistant en étouffements, en quintes violentes, suivies

d'épistaxis abondantes, sans hémoptysie. Ni céphalalgies, ni ver-

tiges, ni troubles vaso-moteurs de la face, ni rêves, etc.

V... raisonne convenablement, et bien qu'elle ait dû quitter sou-

vent l'école (le bruit qu'elle faisait en tapant du pied, en criant,

gênait ou amusait les autres enfants) ou changer de maîtresses à

cause de sa maladie, elle rattrapait très vite ses camarades. Elle

aime à faire les ouvrages minutieux, entre autres la broderie.

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902. 10

154 Maladie des tics; guérison.

Comme maladies infectieuses, elle n'a eu que la rougeole à quatre

ans. Aucune manifestation scrofuleuse. Pas de vers, ni de trauma-

tisme, ni de sévices.

Comme signes avant-coureurs de la maladie des tics, nous avons

à relever un changement du caractère qui devint violent, et des

mouvements désordonnés à la maison et dans la rue. Au début, à

sept ans, alors que les accidents rachitiques commençaient, à dis-

paraître, l'enfant était agitée, ne tenait plus en place, trépignait et

poussait des « ah ! ah ! » spasmodiques. Les premiers tics ont

consisté en grimaces de la face, projection en tous sens de la

langue hors de la bouche. Cette agitation et. ces tics, bientôt com-

pliqués de coprolalie, devenant de plus en plus accusés, les voisins

se plaignirent et ses parents durent déménager deux fois.

L'agitation intermittente des différentes parties du corps et les

cris auraient progressivement augmenté et varié dans leurs carac-

tères. Voici comment la mère de l'enfant les décrit.

V... frappait des pieds à chaque instant, démolissait le buffet à

coups de talon, prenait les chaises, les projetait au loin et les bri-

sait. A table, elle cassait les assiettes à coups de fourchette. Cette

agitation destructive se manifestait surtout lorsque, l'ayant laissée

seule dans le logement, on y rentrait. Dans ces derniers temps,

V... était devenue très méchante envers sa mère, qu'elle frappait.

Mais aussitôt, s'apercevant qu'elle avait fait mal, elle demandait

pardon, disant : « Je ne l'ai pas fait exprès. » Elle poussait des cris

divers à chaque instant, proférait des grossièretés. Pendant deux

ou trois mois elle a répété sans cesse : « 11 est mort ! il est mort ! »

Ayant un jour assisté à un incendie et entendu crier : « Au feu ! »,

elle n'a cessé, durant une semaine, de crier : « Au feu ! ». Ces

expressions, grossières ou non, avaient cours pendant une période

plus ou moins longue pour faire place à d'autres expressions. Elle

faisait tant de bruit, le jour (jamais la nuit), en s'agitant, elle di-

sait tant de grossièretés que les voisins, gênés autant par le bruit

que par l'inconvenance des expressions, envoyèrent à la mère une

délégation chargée d'exposer les griefs communs et la menacer

d'une demande d'expulsion par le commissaire de police. Elle se

décida, en conséquence, à faire entrer sa lille à l'Asile clinique,

d'où elle fut dirigée sur la Fondation Vallée.

État actuel (juin). - La tète est normale dans sa forme et ses

dimensions. Les cheveux, châtain foncé, sont régulièrement im-

plantés, sans épi, avec un tourbillon unique, médian. Le visage est

pâle, un peu amaigri. La physionomie semble exprimer de la

mélancolie, de l'inquiétude et de la timidité. Les différentes parties

de la face sont régulières (nez, bouche, oreilles, etc.), ainsi que les

dents et le palais. II existe sur la joue droite une cicatrice superfi-

cielle dont la présence est expliquée par un de ses tics qui consiste

Description DE la malade. 155

à projeter sa langue sur la joue et à essuyer ensuite de la main

l'humidité laissée par la langue. Le tronc et les membres sont

réguliers et n'offrent plus aucune des déformations rachitiques

qu'elle a eues dans son enfance.

Les aisselles, le dos, le ventre sont glabres. Il y a seulement

quelques poils rares et courts sur le pénil et les grandes lèvres; les

petites lèvres, triangulaires, sont très courtes; le clitoris est

moyen; l'orifice de l'hymen est circulaire, non frangé. Les seins

sont à peine naissants. La malade n'est pas réglée.

La sensibilité générale et spéciale, les fonctions digestives, etc.,

s'exécutent bien. Les différents viscères sont normaux. Pas de

mauvais instincts ni de phobies. Sentiments affectifs peu déve-

loppés ( ? ). D'après une tante paternelle, la mère de V..., très ner-

veuse, très bavarde, et sa fille « se disputaient comme deux

gamines ». Sommeil calme, prolongé. Voix souvent rauque, voilée ;

la parole est libre. L'intelligence est au-dessus de la moyenne. Il

n'y a de retard, au point de vue de l'écolage, que par suite d'une

fréquentation irrégulière de la classe.

Les membres supérieurs sont constamment agités, exécutant des

mouvements de préhension, se portant au visage, etc. L'enfant se

frotte énergiquement les paupières. Quelques secondes après, elle

remue brusquement l'un ou l'autre bras, sans but défini. Si on lui

fait tenir un objet des deux mains, on voit les doigts s'allonger

démesurément, d'une manière convjlsive. Souvent aussi les avant-

bras font tout à coup un mouvement de pronation. ,

Les membres inférieurs, eux aussi, sont animés de mouvements

brusques, violents. La malade frappe des pieds, surtout du droit,

comme un cheval impatient qui piaffe. Au moment même où s'ac-

complit ce mouvement de la jambe, un des bras ou les deux. sont

portés dans une des différentes attitudes signalées plus haut. Les

paupières clignent, les dents grincent, un mouvement respiratoire

bruyant a lieu soudain. Tous ces mouvements sont incoordonnés,

rapides, involontaires, se répétant sans rythme, à des intervalles

variables. La course, le saut s'exécutent bien. Dans la marche, elle

frappe des pieds, principalement du droit.

Traitement. - Sirop d'iodure de fer, capsules de bromure de

camphre, hydrothérapie, gymnastique, école et ouvroir.

1901. - Même traitement, et, en outre, huile de foie de morue.

V... est très propre, sa tenue ne laisse rien à désirer; elle

est adroite pour la couture, très agile pour la gymnastique. Elle

travaille assez bien en classe, mais comme elle exige un peu

trop d'immobilité, elle s'impatiente facilement, tape sur les tables.

Elle aime tout ce qui demande beaucoup d'exercice. Elle est

heureuse qu'on s'occupe d'elle, fait tout ce qu'elle peut pour se

156 Maladie DES tics ; guérison.

rendre intéressante, parait satisfaite quand on cause d'elle. Son

caractère est plutôt doux, gai, affectueux.

1902. Janvier. Persistance des mêmes tics et de la coprolalie.

L'enfant fait des efforts pour se retenir; elle y parvient parfois

pour la coprolalie, surtout quand elle est en présence de personnes

qu'elle ne connait pas. Progrès notables pour les ouvrages

manuels et à la gymnastique.

Voici la description aussi exacte que possible des tics de notre

malade :

Le cuir chevelu glisse en arrière, le front se plisse transversale-

ment et verticalement. Les paupières des deux côtés clignent,

s'ouvrent, se ferment vigoureusement (ces tics ne sont légitimés

par aucune affection des paupières ni des yeux) et en même temps

les muscles du nez et des joues se contractent, tantôt d'un côté,

tantôt de l'autre, mais plus à droite, et la bouche s'allonge trans-

versalement ou s'ouvre démesurément; la langue sort violemment

de la cavité buccale, se mettant en lire-bouchon, se portant vers

la droite, léchant la commissure labiale et la région avoisinante de

la joue ou sur la lèvre supérieure, ou sur le menton ; aussitôt que

la langue a passé sur la joue ou les lèvres, V..., d'un revers de

main, essuie la salive (parfois la région mouillée s'ulcère), secoue

la tète, soulève les épaules subitement et très fortement, en même

temps que la tête s'incline vers l'une des épaules avec un mouve-

ment de rotation, comme si elle voulait y essuyer sa joue. Souvent

aussi, mais d'une façon moins brusque, elle porte la main à son

oreille, exécutant le geste des femmes qui, d'un tour de main, re-

mettent en place les boucles de cheveux tombant sur leurs oreilles.

Même geste de la main vers les yeux qu'elle frotte vigoureusement.

Les mouvements de la main n'ont pas eu, devant nous, la brus-

querie des autres mouvements tiqueux. Elle l'ait entendre un bruit

d'aspiration semblable à celui que font certains fumeurs en allu-

mant leur pipe, elle aspire en claquant des lèvres. Elle renifle

fortement, tousse très souvent, fait claquer sa langue contre le

palais. Elle produit, en aspirant et en écartant brusquement ses

lèvres, un bruit ressemblant à celui d'un baiser. Tous ces bruits

et tous ces mouvements sont brusques, rapides, involontaires et

ont bien tous les caractères des tics. Si on porte son attention sur

les mains, on les voit brusquement et involontairement se mettre

en pronation, en supination, s'ouvrir et se fermer. Avec ses pieds

elle frappe le sol. Quelquefois, elle lance si fortement en avant son

pied fléchi que le genou semble vouloir atteindre la tète qui s'a-

baisse en même temps.

On note également un mouvement de rotation de la tête, le

menton se portant à droite ou à gauche par suite d'une violente

contraction des sterno-cléido-mastoïdiens. Elle se rifle, elle se

Tics ; coprolalie. 157

frappe le flanc avec le coude, elle tourne précipitamment les fesses

de droite à gauche, elle sourit, siffle comme une locomotive,

renifle comme un cheval, sautille comme une chèvre, elle pousse

parfois des cris perçants, aigus; d'autres fois elle grogne, mugit.

Elle présente, en outre, à un haut degré, la coprolalie : « Merde,

hou ! con ! ah ! vache ; aïe ! putain, hue ! cul, etc.. », sont des mots

qu'elle profère très souvent. Ce langage grossier est en désaccord

avec l'éducation convenable qu'elle a reçue et contraste avec son

air doux et timide. Nous devons faire remarquer que la coprolalie,

très accentuée en temps ordinaire, a toujours disparu en la pré-

sence de l'un ou de l'autre de nous.

V... offre également le phénomène de l'écholalic. Elle répète la

fin de certains mots ou certaines syllabes de ces mots, mais elle

fait une sorte de sélection; guidée par son besoin de coprolalie,

elle choisit les syllabes qui sont grossières ou qui, un peu modi-

fiées, rappellent une expression grossière : c'est plutôt une forme

de coprolalie qu'une véritable écholalie.

Exemples : S'il s'agissait d'une observation faite à une enfant,

elle la répétait tout en y ajoutant un de ses mots familiers. Disait-

on à une petite de marcher sur le bitume, elle répétait : « Oui,

marche sur le bitte, bitte au cul, bitume », et en même temps

elle tournait ses fesses de droite et de gauche tout en avançant son

corps en avant.

Un jour, en promenade, on commande aux enfants de ramasser

des pissenlits le long de la route ; V... se mit aussitôt en devoir de

faire ce qui était commandé. En ayant trouvé un très gros, elle le

porte à la surveillante en disant : « Oh ! Mademoiselle Berthe, le

beau pissenlit ! prenez ! merde, con, cul, vache ! » et ceci dit avec

une volubilité extraordinaire, tout en tirant la langue et ouvrant

démesurément la bouche.

A l'ouvroir, la maîtresse ordonne à une enfant de rabattre les

coutures, aussitôt V... s'écrie : « Bitte rabattue ! couture rabattue ! »

tout en rejetant l'ouvrage qu'elle tenait et en se donnant une claque

au visage. On fait une observation à une compagne de ne pas se

contrarier entre elles, Georgette reprend : « Oui, con, confessional,

se contrarier » et elle secoue, en même temps, ses membres supé-

rieurs. Ces expressions, ces mots, ont toujours été spontanés,

impulsifs, sans la moindre recherche.

A la classe, les mots de ce genre surgissaient à chaque instant.

Faisait-on une leçon sur le système métrique, les mesures cu-

biques, les nombres complexes, etc., elle répétait ces mots en y

ajoutant ceux de son vocabulaire : « Mesures cubiques, bitte au

cul, cubique, nombres complexes et incomplexes, con, cul, vache,

con, complexes. » Elle prenait plaisir à répéter les phrases d'une

dictée en les accompagnant toujours d'un mot grossier, ce qui

était pour les élèves un vrai sujet de distraction ; on se rappelle

158 Maladie des tics ; guérison.

entre autre ce mot : « Rubicon », qu'elle a répété avec une into-

nation peu ordinaire en appuyant sur chacun de ces mots : Rubi-

con, cul, cou, con, cul, bitte ! ... En même temps elle a relevé ses

jupons jusqu'à la hauteur de sa taille et elle s'est assise précipi-

tamment, les fesses nues, sur son banc, tout en tirant la langue

et en haussant les épaules. Ces faits se reproduisaient journelle-

ment. ,

Ses tics ne se présentent pas toujours isolés : ils s'associent sou-

vent, s'accompagnent de jeux de physionomie qui leur donnent

une certaine expression. Quelquefois, en effet, notre malade frappe

du pied, lâche ses mains qui étaient réunies devant elle, hausse les

épaules. Cela ressemble un geste d'impatience et la ligure ex-

prime le même sentiment. U'autres fois, elle hausse les épaules,

tandis que les traits du visage prennent un aspect triste, un air

d'ennui. C'est le soir que les tics sont à leur maximum. Ils dispa-

raissent durant le sommeil.

Nous devons compléter cette description avec les notes recueil-

lies par la surveillante et ses collaboratrices.

V... rejette la tète tout d'un coup en arrière. Elle mobilise son

cuir chevelu. Brusquement, bien que pudique, elle relève jupes et

chemise. En classe, elle bouscule souvent ses voisines, leur donne

des coups de poing, de coudes, de pieds, et tout cela sans méchan-

ceté, involontairement. Simultanément, exclamations grossières.

Mai's. L'enfant est plus agitée, plus excitée que jamais. Ses

mouvements sont de plus en plus brusques et fréquents. A relever

ceci : elle ouvre démesurément la bouche, tire la langue en tous

sens ou bien contracte la bouche, fait des grimaces, etc. Elle saute,

tape du pied avec ardeur, relève sas jupes, fait des contorsions en

marchant, simultanément elle pousse des cris perçants, prononce

des paroles grossières. Durant cette période d'exacerbation tout

travail régulier est difficile : elle coud mal, envoie souvent à

droite et à gauche l'ouvrage qu'elle tient entre ses mains. Elle écrit

mal, fait des taches sur son cahier, ce qui l'impatiente; elle

arrache les pages et pleure.

Bien des particularités seraient à relever dans les antécé-

dents héréditaires. Nous nous bornerons à rappeler les nom-

breux cas de congestion et d'apoplexie du cerveau, le caféisme,

l'alcoolisme, la tuberculose, enfin l'inégalité d'âge con-

sidérable des père et mère, celle-ci ayant près de douze ans

'de plus que celui-là.

Nous trouvons réunis chez V... un grand nombre de tics

Maladie DES tics; guérison. 159

très divers, compliqués de coprolalie. Les mouvements étaient

brusques, rapides, impulsifs, involontaires. Le lavage par la

langue des joues et des lèvres, puis l'essuyage un peu brutal

déterminaient de la rougeur, des excoriations, et même

des ulcérations des régions humectées. Nul autre accident

concomitant n'est à noter. Malgré ses tics, V... pouvait

chanter, le couplet fini, ils se manifestaient. Les exercices

de gymnastique, les mouvements divers, par exemple, ne

suspendaient pas les gesticulations et les grimaces. Il n'en

est pas de même des exercices respiratoires avec les barres

d'entraînement auxquels nous avons recours depuis long-

temps à l'Institut médico-pédagogique et plus récemment à

Bicêtre qui, en maintes circonstances, nous ont paru avoir

une influence salutaire sur la disparition des tics.

Pendant les premières années, il n'y avait que des mouve-

ments convulsifs, des gesticulations, des cris. La coprolalie

aurait paru peu de temps après une visite à la consultation

de la Salpêtrière. M. Gilles de la Tourette aurait demandé si

Georgette prononçait des mots orduriers. Sur la réponse né-

gative de la mère, il aurait dit : « Eh bien ! elle en dira ».

Nous citons le fait sans commentaires.

Les rémissions, incomplètes d'ailleurs, étaient rares. Ce-

pendant, en janvier 1901, les cris, les exclamations et les

mots grossiers avaient relativement diminué. Les mouve-

ments eux-mêmes étaient moins fréquents. Par contre, en

mars 1902, il y a eu une véritable exacerbation.

' Une fois par semaine, en mai, nous avons fait venir V...

dans notre cabinet où elle restait à côté de nous pendant

deux heures. Elle était soumise à une sorte de suggestion à

l'état de veille. Les tics persistaient, atténués par ses efforts

pour se retenir. Jamais, au cours de ces séances, elle n'a

prononcé de mots grossiers. C'était là un indice'favorable.

Après ces séances, les tics et la coprolalie reparaissaient,

mais sans exagération. Au commencement de juin, les tics

se sont éloignés de plus en plus, les mouvements des mem-

bres et du corps ont disparu presque subitement et, huit

jours plus tard, les tics de la face. Dans les dernières qua-

rante-huit heures l'enfant avait subi une véritable transfor-

mation.

160 Maladie DES tics ; guérison.

A la demande de sa tante, nous lui avons accordé un

congé. Elle est allée chez des parents en Normandie et, il y

a quelques jours, nous avons appris que la guérison se

maintenait'. 1.

' A la fin de décembre 1902, il n'y avait pas de rechute.

XI.

Epilepsie idiopathique, guérison;

Par BOURSE VILLE et Max BLUMEKFELD

SOMMAinE. Père : caractère emporté; rien de particulier.

G1'and'père paternel rhumatisant. Grand'mère

paternelle goitreuse. Oncle et grand'oncle paternels,

bègues. ?

Mère : convulsions de l'enfance avec strabisme, céphalalgies,

. migraines, caractère emporté - Grand'mère maternelle

morte de tuberculose. = Grand'oncle suicidé. Deux

oncles' maternels, convulsions de l'enfance, strabisme. -

Une tante maternelle, convulsions, strabisme. Cousin

germain strabique. .

Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 18 mois.

Frère, mort de 171L' ? zingitB.=S1GT, imperforation de l'anus

ac la naissance. -

Conception, 1'ien ? Grossesse, caféisme. Accouchement

et naissance, rien. Première dent il. 6 mois, dentition

complète à 2 ans ? . Marche et propreté à un an. Parole à

zig mois. Pas de convulsions. Accès de colère. .

Turbulence.. , Pneumonie à ans. Oreillons à ?

Traumatisme céphalique à 7 ans. Peur du feu, le len- z

- demain grimaces ou mieux vertiges. Quinze jours après

. accès très nombreux. - Pas d'automatisme, pas de pro-

czcrsiozz, pas de folie, pas de traumatisme dans les crises.

Guérison depuis février 1902. '

- sinon.. (Marcel J.), né à Paris le 11 janvier 1893, est entré

le 2 novembre 1901 et est sorti le 26 février z '

Antécédents. héréditaires. Renseignements fournis par le

pète le 11 novembre 1901,et complétés par la mère le. 26..

BOURNEVILLE,; Bicêtre., 1902. 11

16-2 Antécédents héréditaires.

février 1903. PEKE, 32 ans, rempailleur de chaises, né à

Vicrzon ; toujours bien portant, pas de convulsions, ni fièvre

typhoïde, ni chorée, ni rhumatismes, ni dartres, ni syphilis ;

pas de maladie de peau ; pas d'alcoolisme, tabagie moyenne,

pas de traumatisme céphalique, ni de migraines ; caractère

emporté, très vif.

Famille du père : Père, rhumatisant, Age de 5U ans, ne

boit pas, aucune autre, maladie. Mère, 59 ans, asthma-

tique, est porteuse depuis 35 ans d'un goitre très volumineux

qui fait saillir très nettement les lobes du corps thyroïde.

Elle a eu 13 enfants et a fait deux fausses couches. Grand-

père paternel ? . Grand'mère paternelle, morte à 85 ans.

G).ancl-p(l.ema ! l.rllel. ? -Gl.iII1(l.mèl.l.mall.rnelle ?

Oncles et tantes, rien de particulier. Dix frères, neuf morts

presque tous jeunes, de maladies courantes (dyssenterie,

lièvre typhoïde, grippe, pneumonie), le frère survivant,

bien portant. Une sntur, morte jeune.

Reste de la famille : pas d'idiots, d'aliénés, d'épileptiques,

de paralytiques, pas d'autres goitreux. Un frère et un oncle

bégaient un peu. Pas de polydactyle, de becs-de-lievrc, pas

de suicidés, pas de criminels.

MÈiu;, 31 ans, rempailleuse de chaises, parisienne.

Quelques convulsions h l'âge de deux ans, léger strabisme

consécutif, pas de fièvre typhoïde, pas de chorée, gourmes à

G ans, pas de rhumatismes, chlorose; avec battements de

Cll'ur de 16 il 20 ans; pas d'alcoolisme, pas de traumatisme

céphalique, réglée à 13 ans ; migraineuse la veille des règles :

douleurs vives, est étourdie par des brouillards ; pas de

phosphènes ; nausées sans vomissements; suspension des

migraines durant les grossesses et les allaitements, retour

avec les règles. Sobre, caractère nerveux, emporté.

Famille de la mère : Père, vivant, sobre, serait sujet à des

migraines et à des battements de coeur. Mère, n'était pas

migraineuse, elle parait être morte de I uberculose à 43 ans

(était devenue sèche). Grand-père paternel, mort à 87

ans. Grand'mère paternelle et grand-parents maternels,

pas de détails. Un oncle paternel suicidé par pendaison,

par chagrin de la mort de sa femme. Deux tantes pater-

2cllc· sont mortes, l'une d'une maladie de coeur, l'autre on

ne sait de quoi. Un oncle aurait disparu depuis environ 15

ans. « Cet oncle était le frère de ma. mère et avait épousé la

sceur de mon père, ils ont eu deux enfants, un garçon marié.

Peur : Epilepsie. 163.

sans enfants, une fille également mariée a eu 6 enfants, tous

bien portants. Trois frères, deux ont eu des convulsions

de l'enfance et louchent un peu; l'aîné des trois n'a eu ni

convulsions, ni strabisme, ainsi que ses deux enfants, le

second a G enfants dont l'un serait strabique, on ne sait s'il

a eu des convulsions. Quatre scetc·.5 : une a eu des

convulsions et louche un peu; deux ne sont pas mariées;

une a eu un enfant, mort une heure après la naissance ; une

autre a deux enfants très bien portants.

Reste de la famille : pas d'idiots, ni aliénés, ni épileptiques,

ni difformes, ni goitreux, ni bègues, ni muets, ni polydactyles,

ni becs-de-lièvre; pas de criminels, etc..

Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 18 mois (père

plus âgé).

Cinq enfants : 1 notre malade ; 2" un garçon, 7 ans, pas de

convulsions ; 3° garçon mort iL 19 mois de méningite,

aurait eu beaucoup de convulsions internes ; lia ? arçO ? 3

ans, pas de convulsions ; 5° fille, un an, née à terme avec

une imperforation de l'anus; a eu deux opérations à

Trousseau, va bien; défécation normale; pas de convul-

sions.

Notre malade. - Conception 16 mois après le mariage, bonne

entente, pas d'alcoolisme, pas de maladie. Grossesse : Pas

de chutes, pas de coups, très émotive, ne se rappelle pas avoir

eu de peur; envie d'aliments salés; pas d'albuminurie, ni

d'alcoolisme; caféisme (5 ou 6 bols par jour), pas d'éclampsie,

pas de tentative d'avortement, contente de se voir enceinte,

pas d'idées noires, a senti les mouvements du foetus à 4 mots

et demi comme les autres et de même force. Accouche-

ment à terme, naturel, travail très long (toute une journée),

présentation du sommet. Beaucoup plus d'eau qu'aux autres

accouchements.

A la naissance, pas d'asphyxie, pas de circulaire autour

du cou, bien portant; poids inconnu. Allaitement au sein

maternel qu'il a bien pris, sevré à un an. Première dent à

G mois; dentition complète à 2 ans. Parole à 16 mois.

Marche et propreté il un an.

Antécédents morbides : pas de convulsions, pas de

céphalalgies, pas de cauchemars, fluxion de poitrine à 5

ans.

Caractère gai, vif, accès de colère; tout jeune il était déjà

coléreux, les colères ont augmenté quand il a commencé à-

164 Description DU malade.

marcher. - Pas de mauvais instincts, très turbulent, pas

d'alcoolisme, ni d'onanisme. ,

Digestion : préhension, occlusion de la bouche, mastication,

et déglutition normales. Pas de vomissements, garde-robe

régulières, pas de vers intestinaux. Respiration : régu-

'.ère Sentiments affectifs : conservés, aime beaucoup ses

Vrrents. Quelquefois alourdissements ( ? ), quelques maux

ie tête ; pas de tremblement. Sommeil bot. pas de cau-

hemars. Mémoire, raisonnement très bons, assez instruit,

i eu des prix de dessin, d'écriture.

Ressemblance avec son père et davantage à un oncle pater-

el ; son caractère tient de celui du père.

Pas de maladies infectieuses, sauf les oreillons étant

petit. Aucun accident sCl'ofu/eu,\'. - Traumatisme sur

le front il y a un an (à 7 anus) : un chien l'a renversé et il s'est ? Lit à la tête une bosse avec plaie, pas de perte de connais-

sance, il n'a pas été très impressionné, conduit chez le

médecin, il s'est laissé faire des points de suture sans aucune

lifficulté, rien à la suite. Pas de sévices exercés par la

famille. La mère se plaint de ce qu'un maître l'a frappé à

la tête il y a un mois. -

Cause de la maladie : S.. a eu peur du feu un mois avant

son entrée à Bicêtre (le 1 cr octobre 1901) : de la fenêtre de la

chambre d'une parente chez laquelle il se trouvait, il a aperçu

e feu dans une scierie voisine et s'est imaginé que c'était

- liez son grand-père ; il a eu peur, a crié. Quand il a su que

feu n'était pas chez son grand-père, il s'est imaginé que

'était chez son père. Le lendemain on s'est aperçu qu'il fixait

. tapait des lèvres, cela durait cinq minutes environ. Sa mère

appelle ces accidents des grimaces. Les jours suivants ces

grimaces sont devenues de plus en plus fréquentes, si

fréquentes même qu'on ne pouvait les compter. «Au bout de

quinze jours il est tombé comme une masse, sans connais-

sance, comme quelqu'un qui tombe d'inanition.» Il se relevait

presque aussitôt; ni bave, ni écume, ni incontinence d'urine.

- Les grimaces continuaient quand même. On s'est décidé

à placer l'enfant. L'épilepsie n'a pas été précédée de cauche-

mars, ni de secousses.

Trois jours après le premier accès, à 5 heures du matin, une

autre crise durant ;1 à G minutes, et se reproduisant pendant

huit jours toujours le matin à 5 heures. Il y a un mois, nou-

velle crise, avec perte de connaissance, durée cinq minutes.

Depuis, il a 5 ou 6 crises par jour. Pas de blessures dans les

Description du malade. 165

accès; pas de miction, ni défécation, pas de morsures de la

langue, pas d'écume. Il parait tout à fait normal après sa

crise, reprend sa conversation, ne se souvient de rien. Il a les

mains brûlantes un moment.

État actuel (6 novembre 1901). - Pas d'adipose, pas d'éma-

ciation, air de bonne santé. Figure colorée. Physionomie

assez intelligente et calme.

Mesures delà tête.

1901.

166 Description DU malade.

écartées et droites ; lobule un peu adhérent ; tubercule de

Darwin.

Cor.'28 cent. 1/2 de circonférence, corps thyroïde petit mais

perceptible.

Thorax : pas de saillies, respiration (lial)lll.tlllati(1L1C. La

percussion ne révèle rien. A l'auscultation, on entend mieux

le murmure vésiculaire à gauche qu'a droite. f'rnttn : bat-

tements réguliers et assez lents. Pouls normal.

Abdomen .-souple; foie, rate, rien.

Organes génitaux : Verge : 5 cent. de long, G cent. 1/2 de

circonférence ; gland absolument recouvert par le prépuce,

il est impossible de voir le gland qui est caché par un

écoulement blanchâtre (phimosis). Pénil, glabre. Taches

jaunâtres sur la chemise. Urine : ni albumine ; ni sucre.

Membres supérieurs : forme et attitude normales, bien

développés. Pas d'onycophagie. '

Membres inférieurs, rien à noter; la station et la marche

régulières. Mouvements volontaires et provoqués s'exé-

cutent bien ; voûte plantaire régulière ; réflexes diminués.

Sensibilité générale. A la température, régulière ; au

contact, et à la douleur, diminuée. Intelligence : assez ouver-

te. Parole : normale, lit et écrit bien.

Tableau du poids et de la taille.

Marche de L'f· : PILI : PSII : . '1GÎ

22 novembre. - Cet enfant a eu depuis le 18 novembre

5 il 8 accès par jour. Pas de fièvre.

Traitement : Elixir polyhromuré : ? 2 cuillerées pendant 2

jours, 3 cuillerées pendant 2 jours. Purgatif. 2 gr. de

chloral.

Simon.. a eu en novembre 128 accès et 14 vertiges; en dé-

cembre, 49 accès. Traitement : Elixir polybrol11l ? <" de 2 il

3 cuillerées par jour; douches, gymnastique, école.

la02. En janvier, 2 accès. Même traitement.

Température de l'accès.

168 Epilepsie DITE idiopathique.

une tante et un cousin maternels, suicide d'un grand

oncle; méningite chez un frère, imperforation do

l;anus chez une soeur, etc.

II. Signalons le caféisme chez la mère pendant la

grossesse. C'est là une cause de nervosisme qui parait

devenir de plus en plus commune et qui mérite d'atti-

rer l'attention. L'abus du café, quoique bien moins

grave que l'abus des boissons alcooliques, n'en a pas

moins des conséquences fâcheuses, même en dehors

de la grossesse (excitation, tremblement, énervement,

etc.).

III. La mère est sujette h des migraines. Elles dis-

paraissent durant les grossesses et les allaitements,

particularité intéressante dont nous avons relaté bien

des exemples. Elles reviennent avec le retour des

règles.

IV. "L'épilepsie a été occasionnée par une peur

vive qui a agi sur un terrain bien préparé par l'héré-

dité. Elle s'est traduite d'abord par des vertiges qua-

lifiés de grimaces, puis par des accès de plus en plus

fréquents.

V. Sim... a été placé un mois après la première

manifestation épileptique ; il devrait toujours en être

ainsi. Les familles en temporisant, Y administration

en créant des obstacles à un prompt placement, con-

tribuent à incurabiliser les malades. Sous l'influence

du traitement (polybromure, bains, douches, gymnas-

tique), les vertiges et les accès très nombreux en

novembre, moins en décembre ont disparu à partir de

février 1902 et n'ont pas reparu jusqu'à la fin de février

1003, époque où nous avons vu le malade pour la der-

nière fois.

XII.

Canitie partielle congénitale héréditaire (Vitiligo) ;

PAR BOURNEVILLE,

Nous avons eu l'occasion d'observer récemment à notre

consultation de Bicêtre un cas de canitie partielle qui

nous parait digne d'être relaté.

Mme V... (Léonie), âgée cle 20 ans, née à Paris ainsi

que son père, bien constituée, s'est mariée à 1 i ans. Elle

a obtenu le divorce, en sa faveur, à cause des excès de

boisson et des violences de son mari. Elle n'a pas eu

d'enfant. Au niveau de la partie moyenne du cuir chevelu

répondant au front, elle présente une touffe de cheveux £

blancs, cle 3 il'4 centimètres de diamètre. Les poils qui

composent la mèche blanche sont aussi longs, mais plus

fins, plus soyeux, que les cheveux voisins. La peau d'où

sort la mèche est fine, d'une blancheur rosée. Au-dessous,

sur le front, il y a une partie de la peau, ayant la forme

d'un triangle, mesurant 3 centimètres sur 2 et demi qui

offre le même aspect. Plusieurs des cheveux blancs, .exa-

minés au microscope par M. Cnouzox, ancien interne du

service, qui vient de passer un an à l'hôpital Saint-Louis,

n'ont d'autres particularités qu'une absence de pigmenta-

tion et une réfringence très marquée, sans atrophie des par-

ties constituantes.

Mme V... a des cheveux châtains, longs et abondants,

des poils nombreux, bruns plus que châtains, dans les

aisselles et sur le pénil, où il n'y a ni touffe, ni plaque

170 Canitie partielle héréditaire.

blanches. Sa peau, en général assez fine, est plutôt

brune que blanche. Sur le buste, en arrière, à partir de

la base du cou jusqu'à la ceinture, la peau est de couleur

moins foncée que sur les membres et les fesses. Il en

est de même en avant, des clavicules à la ceinture. De

plus, au-dessous des seins, on observe une large pla-

que blanche de vitiligo, ayant la forme du devant d'un

corset de femme enceinte. Immédiatement au-dessous clc

cette tache blanche, vililigincuse, non rosée comme la

tache répondant à la mèche, qui se termine à la ceinture,

il y a une zone cutanée large de 3 il i centimètres, forte-

ment pigmentée, sans gradation. La pigmentation exa-

gérée, qui a son maximum le long de la tache blanche,

diminue graduellement jusqu'à se confondre avec la 'pig-

mentation normale de la peau saine qui est légèrement

brune. Le ventre et le thorax sont glabres.

Ni la mèche, ni la tache du cuir chevelu et du front,

ni celle de la poitrine, n'augmenteraient défendue depuis

qu'elle a atteint son développement d'adulte. La zone

brune ne s'accentuerait pas en été. Aucune des taches

n'est le siège de démangeaisons. Mme V... ne saurait

dire si les régions décolorées suent plus ou moins que

la peau saine.

Tel que nous venons de l'exposer, ce cas est déjà

intéressant. Il l'est encore davantage par ce que nous

allons raconter.

Le père de Mme V..., sa grand'mère paternelle, son

arrière-grand' mère paternelle, sa trisaïeule paternelle,

son frère, âgé cle 27 ans (1). sa soew', ses deux oncles pa-

temiels, la fille de l'un deux, 1 i ans, la fille et le garçon

de l'autre, soit onze personnes de la famille, ont tous,

comme elle et au même endroit, une mèche blanche. Son

frère et sa soeur ont aussi les mêmes lâches blanches sur

le tronc; ses autres parents, non.

Tous les parents ont des cheveux abondants. Ceux

(1) Marié depuis un non ; sa femme est enceinte.

Canitie partielle héréditaire. 171

qui sont morts n'étaient pas devenus chauves (1). Dans

la famille on désigne cette canitie partielle sous le uom

de mèche de Sylla. Pourquoi ? Mme V... n'a su nous

le dire. Plutarque (2) raconte de Sylla que « ses yeux es-

toyent ardents et étincelants à merveille ; la couleur de

son visage les rendoits encore plus effroyables à voir :

car il estoit fort couperosé et semé de taches blanches

par endroits, dont on dit que le nom de Sylla luy fut

imposé à raison de sa couleur, et y eut un des gaudis-

seurs de Athènes qui luy en donna un traict de moc-

queric par ce vers : '

Sylla est une meure asperse de farine.

La coloration brunâtre de la peau au-dessous de la

tache sous-ombilicale se rencontre parfois dans le viti-

ligo, auquel se rattache notre cas. On dirait, suivant

*la remarque cle Hardy (3), que « la matière colorante

abandonne une certaine étendue du tissu culané pour

se porter en excès sur la périphérie de la partie déco-

lorée ». Au premier abord, on pourrait croire que la ré-

gion la plus brune est la région malade et qu'il s'agit

d'une éphélide. '

D'après Hardy ( loc. cil., p. 61 ), la canitie partielle

coïnciderait avec le peu de développement du système

pileux. Il n'en est pas ainsi chez cette jeune femme.

Ses cheveux, châtains, sont longs et abondants. Les

poils des aisselles et du mont de Vénus, plutôt bruns,

sont bien fournis et tous les siens atteints de canitie

partielle ont des cheveux abondants et ceux qui sont

morts n'auraient pas eu de calvitie.

Nous faisons appel à nos lecteurs pour nous commu-

niquer les cas analogues qu'ils ont pu avoir l'occasion

d'observer.

(1) Mme '... a une fossette très profonde au menton. Elle prétend qiil en

est de même de son père et même de sa mère. Seul de ses parents son grand-

père paternel, qni n'avait pas la mèche, était rhumatisant.

(2) Plut arque. Les vies des hommes illustres, trad, Amyot, t. IV, p. z185,

édition de 182. - -

(3) IIARDY (A.). Traité pratique et descriptif des maladies de la peau;

1886, p. 57.

XIII.

Hémorragies de la peau et des muqueuses pendant et

après les accès d'épilepsie ; leur analogie avec les

stigmates des extatiques;

Par nouavFVrr.r.r...

L'an dernier, au Congrès des aliénistes et neuroloais-

tes de Limoges (1), nous avons rapporté un certain nom-

bre de cas de purpura, d'ecchymoses con jonc lion les et

d'hémorragies au niveau d'excoriations ou de plaies sur-

venues chez des épileptiques pendant les accès ou immé-

diatement après. Depuis cette époque, nous avons eu l'oc-

casion d'en observer quelques autres.

G ? C..., épilcptiquc-hémiplégiquc gauche, s'est fait, dans

un accès, une brûlure assez profonde sur la partie moyenne

de la face externe de la cuisse droite (18 mars). Le Icr avril,

alors que la plaie, était découverte pour renouveler le panse-

ment. le malade a eu un fort accès. Dès le début de la crise,

la plaie a été le siège d'une congestion violente suivie d'une

hémorragie ahondanle. A la fin de l'accès, l'hémorragie et

la congestion ont successivement disparu. On ne peut altri-

buer l'hémorragie ". une pre sion ou il un frottement quel-

conques puisque la plaie était découverte.

Ho... (Marcel), âge de 18 ans, a eu dans la soirée du ? si

mars, un accès d'cpiiepsie semblable à ceux qu'il a d'habitu-

de. Le lendemain matin, on constate un piqueté hémorragi-

que occupant les téguments péri-orbilaircs; les deux moitiés

(Voir : Compte-rendu de 1901, p. 84,

Accès D'ÉPILEPSIE ; hémorragie cutanée. 173

supérieures sont réunies par une bande d'un centimètre cou-

vrant le sillon naso-frontal. En bas le piqueté hémorragique

est interrompu entre les angles internes des yeux.

Pomm.... (Gilbert), âge de 28 ans, épileptique depuis l'âge

de 11 ans. Le 22 mai 1301, à la suite d'une crise, il s'est pro-

duit un piqueté hémorragique autour des yeux, sur la partie

avoisinante des yeux et sur le cou.-Pendant les accès, il a

toujours une congestion très forte de la face. « Parfois, dit sa

mère, il est comme noir ». - Dans la nuit du 22 au 23 août,

il a eu deux accès. A la fin du second accès, on a observé un

piqueté hémorragique, d'aspect purpurique, qui persiste le

matin (23 août). L'éruption occupe le front à partir des che-

veux jusqu'aux sourcils, les paupières, surtout les supérieu-

res. Sur la muqueuse de la paupière inférieure gauche, il y

a un point rouge d'un millimètre. L'éruption s'étend sur le

cou, d'une apophyse mastoïde il l'autre, formant un collier de

G centimètres cle largeur. Elle s'arrête en haut au niveau du

maxillaire inférieur; en bas, elle se prolonge jusqu'aux arti-

culations sterno-clavioulaires. Quelques points hémorragiques

en travers du larynx. Par places, l'hémorrhagie sous-cutanée

est conlluentc, formant des taches de 4 il 5 millimètres de dia-

mètre. Rien sur le reste du corps. -La pression du doigt ne

fait disparaître ni le pointillé, ni les taches, qui ont une cou-

leur lie de vin, alors que le matin, au réveil, d'après la mère

du malade, ils avaient une couleur vermillon.

La première éruption purpurique aurait paru y a dix ans.

Pendant plusieurs années, l'éruption se serait montrée 3 ou

4 fois par an. Depuis le ter janvier 1901, elle serait survenue

après la plupart des accè. Son siège est toujours le même.

Toute trace de l'hémorragie disparaît après 3 ou 4 jours. La

santé générale est bonne, il n'y a aucun signe de cachexie.

Nous revoyons le malade le 13 mars 1902. L'éruption pur-

purique observée le 23 août n'aurait disparu qu'au bout de 12

jours : c'est la une durée exceptionnelle. Dans la nuit du 11 l

au 12 mars 1902, un accès d'intensité moyenne a été suivi

d'une éruption semblable il celle que nous venons de décrire,

limitée aux mêmes régions, mais moins confluente que celle

du 23 août.

Voici un nouvel exemple d'ecchymose conjonctivale : .'

Gaucher... (L.-E), née le 10 mars 1885, est entrée le 1er mars

1890 à la Fondation Vallée. Idiotie complète. Epilepsie.- La

1 H. Stigmates DES .mystiques.' : . - .

malade a eu, le 21 mars 1901, un accès offrant les caractè-

res habituels, c'est-à- dire très prononcé, intense. Peu après,

on a constaté une ecchymose de la conjonctive oculaire, clans

l'angle interne de l'oeil gauche. Cette ecchymose a disparu au

bout de quelques jours.

Ces faits nous paraissent de nature a expliquer les plié- '

nomènes qui se produisent chez la catégorie des mystiques .

que l'on désigne sous le nom de stigmatisées. Leur esprit

est absolument concentré sur le siège des plaies clu Christ :

front, mains, pieds, côté. Elles voudraient les voir saigner.

D'où aussi, volontairement ou non, des attouchements, des,

frictions au niveau de ces régions, voire même des exco-

riations, en tout cas une diminution de la résistance de la

peau et finalement, au cours de l'arque extatique, l'écou-

lementsanguinsi ardemment désiré. Il s'opère delà même

façon que l'épanchement de sang sous la conjonctive, que

le suintement ou le giclagc du sang d'une éraf1me ou d'une

excoriation au cours des accès épilepliques.

XIV.

Traitement de l'épilepsie par les agents physiques ; ¡ .

t ? rur;raw : wr.r.r : . ..

Notre ami le D'' Vugt a publié clans le n° du 15 dé-

cembre 1902 de la Revue de thérapeutique médico-

clâ1'w'gicale, l'analyse d'un travail du IF Strasser,

parti dans ljl. ? lilin. 77;/d)'o<p)'apte du mois de

juin 1902. Nous la reproduisons in extenso parce

qu'elle nous paraît mériter quelques commentaires.

M. Strasser estime due la diminution du nombre et de l'in-

tensité des accès peut être obtenue grâce à des applications

réfrigérantes sur les régions crânienne et rachidienne. Il est

curieux cle constater, d'un autre côté, que les enveloppe-

ments humides, dont l'action calmante, en cas d'exagéra-

tion des réflexes, est si manifeste, ne présentent aucun avan-

tage en cas d'èpilepsie ; les demi-bains à 2G-30° C exercent

une action sédative bien plus marquée dans cette affection.

En outre, l'hydrothérapie, prudemment maniée, permet de

combattre les manifestions cutanées et gastro-intestinales

du bromisme : grâce son emploi, on peut arriver à abais-

ser la quantité de bromure administrée sans que les effets

thérapeutiques soient pour cela diminués. Il est indéniable

que l'hydrothérapie favorise l'élimination rapide du bro-,

mure.

Dans les cas graves, on n'emploiera que les demi-bains.

Chez l'épileptique jeune et robuste, des demi-bains de 20 ?

abaissés à 18° C. de 2 à 5 minutes, des allusions, même des

douches (éviter de doucher la tète) avec faible pression pour

le corps et pression plus forte pour les jambes et les pieds-

176 Epilepsie : hydrothérapie.

rendront de grands services. Les pratiques hydrothèrapiques

provoquent une forte sudation et les douches il haute pres-

sion seront prohibées. Les troubles dyspeptiques seront

combattus par des enveloppements humides locaux.

La mécanothérapie n'a pas donné de résultats bien mar-

qués : quant iL l'électrothérapie, sous quelque forme que ce

soit, elle n'a donné que des résultats négatifs ou nuisibles.

Nous avons toujours été un partisan convaincu do

l'hydrothérapie. Personnellement, sur les conseils et à

l'incitation des. Pascal, notre co-rc'·dactcur au Mou-

vement médical, et de notre collègue d'internat le Dr

Laburthc, nous avons commencé à faire de l'hydro-

thérapie en 1865-66 et depuis nous n'avons jamais

cessé. Ce n'étai t pas la mode alors, et nous nous souve-

nons qu'a l'hôpital Saint-Louis aucun de nos collègues

ne fréquentait la salle de douches. Aussi, par ironie,

nous appelaient-ils l'apôtre des douches.

Après la guerre, M. Charcot avait bien voulu nous

confier l'ohservation et le traitement clc ses épilepti-

ques : cela a duré jusqu'en 1879. Nous avons eu

recours souvent, chez elles, à l'hydrothérapie. De

même chez les épileptiques du service de M. Dela-

siauve, pendant les remplacements que nous y avons

faits (1877-1879). Nous avons généralisé cette pratique

lorsque nous avons été chargé de la section des

épileptiques (adultes et enfants) clc l'hospice de Bicê-

tre, ensuite de la nouvelle section des enfants.

En 1882, dans sa remarquable thèse inaugurale,

P. Bricon, après avoir fait un historique aussi com-

plet que possible de la question, a consigné les

résultats de notre pratique pendant les années 1880

et 1881. L'année suivante (1), dans un travail commun

(1) BounEiLLE. Tec/t. clin, et thérap. sur l'épilepsie, l'hystérie et

l'idiotie, Compte-rendu de 1882, p. 6 à 86.

Epilepsie : hydrothérapie. 177

nous avons donné en plus les résultats de 1882.

Depuis, tous les ans, dans le Compte-rendu de notre

service, nous avons indiqué le nombre des douches

et des bains administrés dans l'année (1880-1901).

Voici la statistique globale pour 1902 :

XVII.

De l'influence des professions insalubres sur la produc-

tions des maladies chroniques du système nerveux ;

Par BOURNEVILLIÏ.

Les discussions dont le blanc de réruse a été et est

encore l'objet au Comité d'hygiène publique de

France, dans la presse médicale et dans la presse politi-

que, nous ont engagé, il y a deux ans (1) faire un

relevé aussi exact que possible des cas de maladies

nerveuses de l'enfance ayant souvent pour cause cer-

taines professions réputées, avec raison, insalubres,

exercées par les parents.

Si aux 87 familles, figurant dans notre statistique

de 1900, et exerçant une profession insalubre, nous

ajoutons les 28 cas nouveaux, relevés sur les 292

entrées de 1901 et 1902 (95 filles et 197 garçons) nous

voyons :

1° Que ces 115 familles ont fourni 555 enfants, soit-

près de 5 enfants par famille ;

2° Que sur ces 555 enfants, 278 sont décédés, soit

une mortalité de 50 0/0.

Si aux 278 décédés, nous ajoutons les 115 enfants

idiots, épileptiques, et('. (une famille a deux enfants

o. (1) Compte-rendu de iJtIO, p. 131. - Duns toutes nos observations, nous

notons les professions exercées parles parents.

Saturnisme. 179

placés à Bicêtre), nous voyons que 78 0/0 de ces

enfants sont mortellement ou gravement impression-

nés par les différentes professions insalubres exer-

cées par les parents. Le tableau suivant complète

notre ancienne statistique.

Au point de vue des « Professions » ces 101 cas se

répartissent ainsi : .

Blanc de céruse. '

XVIII.

Note statistique sur le rôle de la consanguinité dans

l'étiologie de l'épilepsie, de l'hystérie, de l'idiotie et

de l'imbécillité;

PAR BOi,'Ii\L'IL1.G.

Dans notre statistique de l'année 1900 (1), portant

sur 2.784 observations et résumant nos statistiques an-

térieures, nous ne trouvions que 91 cas de consangui-

nité, soit 3,23 pour cent. Cette proportion, écrivions-

nous, montre le rôle à peu près insignifiant de la

consanguinité dans la genèse des maladies nerveuses

chroniques de l'enfance.

Nous avons complété cette statistique jusqu'au 31

décembre 1902. Onze cas nouveaux ont été observés

sur 292 entrées et 4 cas parmi nos anciens malades.

(Chaque fois que l'occasion le permet nous faisons

revenir les parents et, après avoir au préalable relevé

les lacunes des observations, prises généralement avec

soin par nos internes, nous complétons ces lacunes;

c'est ce qui explique ces quatre cas nouveaux chez

d'anciens malades.)

(1) Voir Compte-rendu de 1888, p. 17 et de 1900, l·. 77 et la liste des travaux

scientifiques à la fin du volume.

Consanguinité. 189

190 Consanguinité ; strabiques,

. XX.

Folie de l'adolescence ; guérison ;

Par BOURNEVILLE ET AMBARD.

Les troubles psychiques sont très nombreux et très

variés chez les enfants et chez les adolescents. Pour

s'en convaincre, il suffit de parcourir les observations

qui composent nos Comptes-rendus du service. Tantôt

ils correspondent il des lésions bien évidentes, comme

chez Ler... (p. 20 ! ) ; tantôt, de même que chez l'adulte,

on ne trouve pas de lésions caractéristiques. Tel fut

le cas de Marguerite II... (1901, p. 170). Parfois ils se

terminent par la démence, souvent par la guérison :

tel est le cas de la jeune fille dont nous allons relater

l'histoire.

SOMMAIRE. - Père très impressionnable, instabilité mentale

passagère, crises nerveuses dans la rue ; migraines ; sobre.

Demi-tante paternelle, migraineuse. Cousine germaine

paternelle idiote. Cousin, germain mort tuberculeux.-

Mère, rien de particulier. - Tante maternelle, crises de

nerfs. Pas de consanguinité. Inégalité d.'âgc de 3 ans

. (mère moins âgée). -

La malade : Irc dent à si.v mois. Dentition complète a ? ans. 'q

Pas de convulsions. Parole deux ans. Marche à un

an. Pèrityphlite à 7 ans et demi. Varicelle à 9 ans,

Éruption scarlalini forme il. 13 ans. Réglée, à II ans et

demi. - Début de la mélancolie à 14 ans, par périodes;

diminution de l'aptitude au travail; onanisme; anémie.

- Idées de culpabilité; mutisme, inertie; refus de manger-

- - Hallucinations de la vue. - Guérison,

192 Antécédents héréditaires ET PERSONNELS.

Roi... (Virginie Suzanne), née le 22 mai 188G, est entrée le

4 mars 1901 à la Fondation Vallée, avec un certificat du Dr

P. Garnier, ainsi conçu : « Atteinte de dégénérescence men-

tale avec accès de délire mélancolique ; idées de culpabilité,

d'indignité, refus d'aliments. Insomnie. »

Antécédents héréditaires. Père, 47 ans, employé d'une

administration publique, très « impressionnable». Quelques

jours après son mariage (1878), il aurait voulu brusquement,

sans raison plausible, changer d'état ; persistance de cette

idée pendant cinq jours durant lesquels il était très agité.

En 1884, chute dans la rue avec perte de connaissance

pendant une demi-heure. En 1887, à la suite d'une contrariété,

il entre dans une agitation extrême, déclare que quelqu'un

l'a frappé, et au lieu de rentrer chez lui, comme il en avait

l'habitude, son travail fini, il s'en va au Bois de Boulogne et

ne regagne son domicile qu'à minuit. Il ne fume pas; boit

très modérément. On ne sait s'il a eu des convulsions dans

l'enfance. Quelques migraines, surtout dans l'adolescence.

Réformé à 25 ans pour « faiblesse de constitution. » Pas

d'indice de syphilis. Caractère plutôt égal et doux.

Sa famille : Père et mère, rien à signaler. Demi-soeur

paternelle, migraineuse à ses époques, a eu deux enfants,

l'un mort de tuberculose pulmonaire à 9'.I ans, l'autre idiote.

Les autres parents ne paraissent avoir présenté aucune tare

ni physique ni mentale.

Mère, 44 ans, institutrice; pas de convulsions de l'enfance,

fièvre typhoïde à 15 ans, compliquée de délire. Pas de migrai-

ne. - Une soeur aurait des attaques de nerfs, se débat, crie,

mais ne perd pas connaissance. Elle est mariée et a un fils

sain. Les autres parents paraissent normaux. Pas de con-

sanguinité. Inégalité d'âge de G ans (père plus âgé).

Deux enfants : 1° un fils de 21 ans, intelligent, aucun acci-

dent nerveux; 2° notre malade. .

Notre malade. L'état des parents au moment de la concep-

tion était bon. Pendant la grossesse, la mère aurait été, le

premier mois, obsédée par le souvenir des images de cire

qu'elle avait vues au Musée-Grévin. Les mouvements actifs

du foetus perçus par la mère vers le quatrième mois et demi

étaient très violents sur la fin de la grossesse. L'accouchement

s'est effectué dans les délais coutumiers parla tête et spon-

tanément ; ni cordon, ni asphyxie. Nourrie au sein jusqu'à

16 mois.- Première dent à 6 mois ; dentition complète à

Histoire DE la malade. 193

2 ans. Elle a marché il un an, parlait bien dès l'âge de deux

ans. Pas de convulsions de l'enfance. - I'érit5-phlite il sept

ans et demi, varicelle à 9 ans. - Eruption scarlatiniforme à

13 ans. Elle a fréquenté l'école à partir de 10 ans, s'y montrait

très intelligente, mais aussi turbulente. Réglée normalement

il 11 ans demi et à peu près régulièrementjusqu'à l'admission.

Pas de traumatisme. Il y a un an, l'enfant est devenue triste,

son visage était impassible ; ni irritabilité excessive, ni peurs,

ni visions, mais insomnies fréquentes et entêtements inexpli-

qués. Elle confondait parfois les personnes ; en voyant tomber

les feuilles, elle s'imaginait que tout allait s'effondrer, que le

monde allait disparaitre. On notait une sorte d'insensibilité

morale et de la paresse intellectuelle, elle avait de la peine

à travailler et que la mémoire diminuait. Sa mère, une nuit,

la vit porter la main à ses organes génitaux. Elle lui demanda

si elle avait l'habitude de se loucher, sa fille lui aurait répon-

du : oui. Depuis cette époque, sa mère n'aurait jamais eu

l'occasion de la surprendre en faute, mais, de l'aveu de l'en-

fant, ses pratiques solitaires ont continué et, comme on le

verra plus loin, elle s'y adonnait encore à l'entrée et durant

les premiers temps de son séjour à la Fondation. En décembre

1900, elle rend un ascaride dans ses selles. C'est à cette épo-

que qu'elle a manifesté de la résistance à manger.

Dans le courant de janvier 1901, hallucinations de la vue :

elle voyait des lueurs constamment, pui; elle s'est plaint

qu'on lui servait toujours le même plat, elle s'accusait de ne

pas avoir été gentille : « Il me semble que je ne vous aime

pas ; je cherche mon âme ; je n'ai pas de coeur ; je veux aller

me confesser pour réparer mes mauvaises confessions. » Elle

n'a jamais été d'une grande dévotion. Pendant les vacances

de 1900, elle s'est surmenée pour ses devoirs. A la fin de jan-

vier 1901, l'enfant reprend momentanément un peu d'entrain.

Le 19 février, en se couchant, elle déclare qu'elle a la lèpre.

Les jours suivants elle refuse les aliments avec plus de téna-

cité qu'auparavant et pendant les cinq jours qui ont précédé

son placement on ne parvenait qu'avec beaucoup de peine à

lui faire prendre quelques aliments liquides ; elle ne voulait

pas se laver. Elle s'imaginait que, dans la rue, tout le monde la

regardait, que les gens voyaient de suite qu'elle n'avait pas

fait ce qu'elle devait faire. Elle s'accusait de se faire remar-

quer. Elle voyait des flammes et demandait qu'on ferme les

rideaux, avait peur des voleurs, des assassins, entendait des

voix sourdes sans pouvoir distinguer de qui elles venaient.

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902. 13

194 Description DE la malade.

Ces voix lui reprochaient de n'être pas assez attentive, assez

aimable, de donner de la peine aux autres. Elle avait lu les

Cordes fantastiques illustrés d'Hoffmann et voyait les figures

étranges du livre.

État actuel (9 mars 1901). - Rougeur et pâleur subites, phy-

sionomie douce, un peu triste. Regard un peu vague. - R...

a la parole tantôt libre, tantôt embarrassée et incompréhen-

sible, suivant son degré de mélancolie. Elle n'est jamais cau-

seuse, ni live parle que lorsqu'on l'y provoque.

Chevelure châtain foncée, tourbillon médian. Crâne de

forme intermédiaire de la brachyocéphalie à la dolychocé-

phalie. - Visage ovale, arcades sourcillières effacées, yeux

gris, hyperhémie conjonctivale fréquente, à la suite de lec-

tures prolongées. Pommettes peu saillantes. Bouche

moyenne, la lèvre supérieure proémine un peu. Palais très

ogival. Pharynx, amygdales, langue bien conformés. Menton

ovale. Oreilles régulières.

Cou : 29 centimètres ; corps thyroïde peu appréciable.

Thorax. - Coeur, léger bruit de souffle; pas de palpitations.

Elle n'est pas essouflée en dehors des courses rapides.

Poumons, rien.

Abdomen. Digestion bonne en général, « pourtant après

chaque repas, dit la malade, je me sentais comme gonflée ;

dernièrement, je rendais comme de l'eau ».

l'uberto, orraue.s é21tau.v. - Poils bruns, nombreux dans

les aisselles. Seins bien conformés, 16 centimètres sur 20 des

deux côtés, aréoles rosées, mamelons peu saillants. Léger

duvet le long de la colonne vertébrale. Ventre et fesses

glabres. Pénil recouvert de poils nombreux, bruns et courts.

Grandes lèvres, poils abondants et longs. Petites lèvres bien

développées. Clitoris moyen. Hymen : orifice il bord frangés.

Anus : poils assez nombreux à une certaine distance, pas d'hé-

nmrrhoides. Bras glabres, avant-bras poils follets; cuisses

glabres.

Membres supérieurs et inférieurs bien conformés.

Sensibilité générale et spéciale, normales. -Etat mental :

voit des bêtes dans son corps, les objets changent de forme,

voit des signes de deuil partout, tout le monde a de l'aver-

sion pour elle. L'tat intellectuel : Avant l'affection

actuelle, intelligence normale, a eu son certificat d'études ;

depuis, offaiblissement sensible de la mémoire : IL. dit qu'elle

a beaucoup oublié.

MÉLANCOLIE; IDÉES DE CULPABILITÉ. 195

Température des cinq premiers jours. '

196 Mélancolie; mutisme. z

yeux creux et cernés. Au déjeuner, elle refuse de manger,

Visitée par sa mère l'après-midi elle parait éprouver un cer-

tain plaisir, elle cause beaucoup mieux et mange facilement

une cuisse de poulet apportée de chez elle. T. lt. 37° le matin

et : jojo,3 le soir. Chloral t grammes, bain, etc.

12 mars. - Nuit meilleure. R... est hébétée de même que

les jours précédents. Elle parle sans cesse mais on ne peut la

comprendre la parole ne peut pas sortir. Il faut l'habiller,

la forcer il manger et la conduire comme un vrai bébé. Elle a

la ligure fatiguée, l'haleine mauvaise, comme celle d'une per-

sonne fiévreuse. T.R. 3<i",8 le matin et 37°, 2 le soir.

13 mars. Même état. L'enfant marmotte continuellement,

sans qu'on puisse saisir ce qu'elle dit : Sa physionomie est

toujours triste, hébétée, le regard vague. Les pupilles sont

très-dilatées. Même diiliculté pour la faire manger. T. R.

37 ? t et : nu,3. Su)tbna) ! gramme; bains, douches.

1 : i mars. Suzanne a assez bien dormi. Aussi ce matin

a-t-clle le teint plus frais. Le regard est moins vague. Il faut

toujours la conduire comme une enfant, insister pour la faire

marcher, manger, asseoir ou se tenir debout. La parole reste

incompréhensible. Quoiqu'elle n'arrête pas de remuer ses

lèvres, aucun son ne peut sortir de sa bouche.

L'après-midi il l'occasion de la Mi-Carême, il y a bal à la

Fondation. On y conduit Suzanne pour tâcher de la distraire.

Arrivée-là sa physionomie semble s'éveiller un peu, elle mange

seule plusieurs morceaux d'oranges. A un moment donné la

musique joue la polka des Anglais. Suzanne fredonne l'air

avec les musiciens. - Sa mauvaise haleine persiste et elle a

la langue très-sale. T. It. 37 ? i 4 et 31l,3. Purgatif, sulfonal

1 gr., etc.

15 mars. - L'état de notre malade reste stationnaire au

point de vue de la parole. Continuellement l'enfant passe

la main sur son front, elle semble souffrir de la tête. Plu-

sieurs fois dans la journée on remarque qu'elle maintient

ses yeux fermés durant quelques minutes et il lui est arrivé

une fois cet après-midi de nous demander la permission de

les ouvrir et cela assez franchement. Le soir, au réfectoire,

clic mange seule mais très-lentement. T. li. 3(je,8 8 et 3loi.

Purgatif, etc.. 16 mars : T. R. 37° et 37o,i.

17 mars. - Suzanne a passé une bonne nuit sans avoir pris

de sulfonal. Elle paraît plus gaie, le mutisme persiste cepen-

dant. Dans la journée, elle a prononcé quelques mots très

clairement mais elle ne peut finir la phrase commencée !

Mélancolie; illusions ; confusion mentale. 197

Par exemple questionnée au sujet de son fichu qu'elle n'avait

pas sur son cou, elle répond après un bon moment d'hésita-

tion je l'ai laissé.... On lui demande aussi : que voudrais-tu

Suzanne ? Je voudrais... ? Elle mange seule de bon appétit,

coupe sa viande, demande de l'eau dans son vin. Ses mouve-

ments ainsi que sa marche sont lents. T. R. 3ï°,3 et 37°,5.

18 mars. R... s'est endormie de bonne heure, sans sul-

fonal, sommeil calme.

Dans le courant de la journée, elle cause beaucoup mieux,

elle soutient mémo de petites conversations, nous dit : qu'on

s'occupe beaucoup d'elle. En classe elle écrit quelques phra-

ses de dictée, elle recopie et opère une addition, une sous-

traction, une multiplication,.posées sur le tableau noir ; elle

nous appelle par nos noms lorsqu'elle désire quelque chose.

Au réfectoire elle mange bien, convenablement ; elle nettoie

son fromage et nous dit que le brie est bon. T.R 37°, matin

37°,3 soir.

19-20-21 mars. - L'amélioration se maintient. Le 19, T. R.

36°, 9 et 37°, 2. Le 21, T. R. 36°,9 et 37"/[. ? 21121TS. - R.. a passé une bonne nuit, sans médicament.

Ce matin elle se lève bien gaie et son raisonnement est celui

d'une enfant normale. Sa physionomie n'est plus la même, son

regard n'est pas vague comme les jours précédents. Elle dit

se rappeler qu'elle ne voulait pas manger, ni parler, qu'elle

avait l'air d'une abrutie : « Je répétais, quand je parlais, tou-

jours la même chose, je voyais de drôles de choses, et j'avais

de drôles d'idées, je voudrais m'empècher d'être bête comme

ça, mais je ne puis. Enfin, dit-elle, aujourd'hui c'est fini,

je veux devenir comme les autres enfants et ne plus penser

rien. » T. R. 37°,1 et 37°,5.

3-` ? 'l-5 mars. Même état. L'enfant parait normale.

26 mars. L'enfant, qui était bien la veille, a mal dormi

cette nuit, et ce matin elle se lève toute hébétée; elle est

absolument comme les jours où elle délirait ou ne voulait

pas parler. Cependant cet état d'hébétude ne dure pas la

journée entière : à certains moments elle raisonne très bien

et tout à coup son état redevient le même, elle marmotte;

on ne peut comprendre ce qu'elle dit. - Purgatif, etc. T.R.

37° et 37 ? i.

30 mars. L'état de l'enfant reste stationnaire depuis plu-

sieurs jours, elle ne veut toujours pas parler, on pourrait

croire qu'elle y met un peu d'entêtement, car, visitée souvent

par ses parents, elle converse bien avec eux, mais aussitôt

198 Mélancolie ; onanisme.

revenue parmi nous, mutisme le plus complet ; il faut insis-

ter pour qu'elle nous réponde, très bas, lorsqu'on l'interroge.

A l'ouvroir elle exécute le travail qu'on lui donne mais sans

dire une parole. Elle est très lente dans tout ce qu'elle

fait.

Pour sortir du réfectoire ou de l'ouvroir, si elle est assise,

il faut employer la force pour la faire lever, il en est de même

pour marcher, c'est une vraie machine automatique. 'l'.It3G°,f).

2 avril. L'état de l'enfant reste stationnaire, elle ne nous

cause toujours pas, elle ne parle que lorsque ses parents vien-

nent la visiter. Depuis plusieurs jours, on remarque que

durant la nuit l'enfant se lève plusieurs fois pour aller aux

cabinets, malgré sa hâte pour y aller, elle urine tout le long

du dortoir, il lui est même arrivé d'uriner dans son lit. Surveil-

lée de très près, la veilleuse surprend notre malade en train

de se masturber.

R.. n'a pas eu ses règles ce mois-ci, c'est il peu près le mo-

ment où elles doivent venir. (Elle les a eues pour la dernière

fois en février. Jusque là elles avaient toujours été abondantes

et plutôt en avance.)

QILUT2l. Depuis deux jours l'enfant va beaucoup mieux,

elle suit les autres enfants dans tous les exercices mais très

lentement, la parole est plus compréhensible, elle répond

mieux aux questions qui lui sont posées. Sa physionomie est

bien plus éveillée, sa démarche est meilleure, en un mot un

mieux sensible s'est opéré. Purgatif toutes les semaines ;

deux douches par jour.

13 avril. L'enfant qui raisonnait assez bien depuis le

dimanche 7 avril a de nouveau, aujourd'hui, des idées bizar-

res. Elle prétend que l'on fait beaucoup de transformations

dans le service : « Il se passe, dit-elle, des allées et venues

extraordinaires. » Ses phrases sont absolument décousues,

elle tient absolument à écrire à son frère pour lui raconter

un tas de choses drôles qui se passent autour d'clle. On

accède à son désir, elle écrit, mais sa correspondance est

celle d'une personne peu sensée, ainsi qu'on va en juger.

Ce 13 avril.

Mon cher Gustave,

J'ai à te raconter des choses bien étranges; ce matin nous

sommes allée au champ (1) a Bicêtre nous sommes arrivés et

(1) Au chant, à l'orphéon.

Mélancolie ; onanisme. 199

nous nous sommes assise sur des bancs des infirmières sont

arrivés mais je crois plutôt que c'est des surveillantes. Des

enfants malades et diformes sont arrivée, mais il me semblait

que s'était comme d'anciens soldats. A côté de moi se trouvait

une petite fille qu'on appelle Julie mais il me semble qu'elle

se moque de moi. Et puis on a fait comme une lanterne

magique avec des mots et des images en expliquant, il me

semblait toujours dans un mauvais sens pour moi. Puis sont

arrivé des visiteurs M. Bourneville une dame des messieurs et

un officier ou du moins quelqu'un habillé en officier car il me

semble que maintenant on prend des costumes et des noms

étranges. Il se faisait des allée et venues à n'en plus finir et

puis je restait là à ne rien dire tandis due les autres parlaient

beaucoup. On a chanté. On a terminé par la Marseillaise je

me suis levé puis assise, je ne savais comment faire puis on

s'est mis en groupes je suis restée moi à côté de Julie (2)

et l'on faisait des signes on interrogeait et l'on se montrait

des photographies et différentes choses et je ne savait ou

me mettre. Puis M. Bourneville nous a dis allez manger mais

il me semble toujours que nous mangeons des choses sales

lorsque en nous en revenant on passe sous des couloirs et

l'on voit beaucoup de lits vides. Dans le dortoir où je couche

il y en a des petites des grandes et l'on fait frotter le soir

il me s'emble que tout cela est pour me faire aller et puis

on déménage tout en ce moment, mais ce qui me semble

le drôle c'est qu'on mange comme dans un restaurant et que

tout le monde me sert et qu'on ne mange pas tout le monde

à la même heure. Je vois ici beaucoup de monde et il me

semble que je vois des personnes que j'ai vu autrefois à

la maison, j'ai hâte de revenir à la maison pour pouvoir revoir

la famille. Ici je voudrais aider mais c'est tellement granp

je ne sais jamais par quel bout commencé. Mais il me semble

que tout ce que je- t'écris tu le sais. Si tu viens demain ici

avec papa et maman je voudrais bien partir avec vous pour

retrouver la maison. Depuis dimanche je vais mieux.

Ta soeur qui t'embrasse bien fort.

Suzanne.

Nous avons reproduit textuellement sa lettre avec ses fautes

et son absence de ponctuation. (Avant sa maladie, elle faisait

aussi des fautes d'orthographe, mais beaucoup moins.)

(2) Il s'agit d'une malade de son tige atteinte, comme elle, d'hébéphrénie.

2oxo' Mélancolie ; amélioration.

Il est bien difficile de lui faire faire de la gymnastique; elle

ne veut exécuter aucun mouvement et on ne peut arriver iL

la faire plier, elle n'y apporte du reste aucune bonne volonté-

15 avril. - L'état de la malade reste stationnaire, elle

répond mais lentement aux questions qui lui sont posées.

Elle répète continuellement qu'elle voudrait retourner il la

maison.

23 avril. - Même état. Elle cause peu avec nous ainsi

qu'avec ses compagnes. Très-bavarde avec ses parents à qui

elle raconte des choses plus ou moins vraies. Elle est tou-

jours à surveiller sous le rapport de l'onanisme.

L'appétit est bon, elle mange proprement mais là comme

ailleurs elle reste très-lente. L'enfant a engraissé de deux

kilogr. depuis 8 jours.

26 auril. - L'enfant a passé une bonne journée elle a été

beaucoup plus gaie et beaucoup plus causeuse qu'à son ordi-

naire, parlant même sans qu'on l'y invite, provoquant la

conversation et raisonnant très-bien. Sa physionomie est

plus éveillée, les pupilles moins dilatées, le teint plus clair,

et aujourd'hui on constate que l'état intellectuel de l'enfant

a fait un sensible progrès vers l'amélioration. Son som-

meil est moins agité. L'onanisme tend à diminuer. Trai-

temenl : Deux douches, une cuillerée à café de valérianate

d'ammoniaque. Gymnastique. Purgatif tous les 8 jours.

30 avril. - Depuis le 26 l'amélioration continue. R.. est

allée le 28 se promener il Robinson avec son père, sa mère

et son frère. Le soir elle a raconté sa promenade. Elle ne

paraît plus avoir d'idées de culpabilité. - Elle ne dit plus

qu'elle cause de chagrin aux autres. Elle ne se touche

plus depuis quelques jours. Elle cause convenablement.

Le raisonnement est correct. Les réponses sont toujours

lentes de même que les mouvements. Elle s'habille, se

déshabille, se donne tous les soins de propreté. Durant l'in-

terrogatoire, les pupilles se dilatent par instants. La malade

nous quitte, ouvre et referme la porte avec beaucoup de len-

teur.

10 mai. L'amélioration persiste, notre malade n'a plus la

même physionomie, ses pupilles sont moins dilatées et son

regard n'a plus l'expression d'hébétude qu'il avait pendant

la période de mutisme.

Son raisonnement est meilleur; elle cause davantage et

soutient une conversation ; cependant cette semaine il lui

est arrivé d'avoir des idées un peu bizarres et des réflexions

Mélancolie; guérison. ? O1

très drôles, ainsi par exemple : En classe 11» Lapeyre ayant

ouvert les portes à deux battants pour laisser passer les en-

fants, Suzanne a demandé pourquoi on ouvrait ces portes

Au réfectoire, étant à table, Suzanne dit tout à coup « toutes

les enfants desservent les tables, il n'y a que moi qui reste

assise. » Son père étant venu la visiter, elle lui a dit qu'elle

ne faisait rien de la journée et qu'on la laissait assise sur un

banc, ce qui est inexaet.

Tous ses mouvements sont lents, sa démarche n'est pas assu-

rée. Son sommeil est bon pour le moment et on ne constate

plus d'onanisme. Traitement : Purgation tous les huit

jours ; valérianate d'ammoniaque, 3 cuillerées à café tous les

jours; deux douches.

20 mat. Depuis le dimanche 12 mai, une véritable méta-

morphose s'est opérée chez notre malade, sa physionomie

n'est plus la même, l'expression est plus vive; son raisonne-

ment est bon, elle est même devenue bavarde, à toutes les

questions qui lui sont posées elle répond franchement, sa

parole et tous ses mouvements sont moins lents, sa démarche

qui laissait à désirer, est meilleure. (Elle marchait courbée et

inclinée sur le côté.)

L'enfant s'aperçoit qu'elle n'est plus la même, elle dit :

« Je vais mieux et j'ai la tête beaucoup plus libre. » Au réfec-

toire elle ne reste plus inerte comme autrefois, elle cherche

à se rendre utile, elle met et enlève le couvert. L'appétit est

bon ainsi que le sommeil. Elle n'est pas difficile pour la

nourriture, elle est étonnée elle-même de son appétit : « Moi

qui étais si difficile à la maison, il fallait que maman me fasse

des plats il part, ici je mange de tout et cela me semble très-

bon. »

Il juin. - Suzanne va tout-à-fait bien, elle paraît absolu-

ment normale, le mutisme a disparu et fait place au bavar-

dage, elle ne cesse de causer, jouer et chanter toute la journée.

Elle a beaucoup d'entrain pour tout ce qu'elle fait; sa tenue

est bonne et ne laisse rien à désirer. Grande amélioration.

18 juin. L'enfant va très-bien. Rien d'anormal à signa-

ler dans son état. Suppression du valérianate d'ammoniaque.

Juillet. Suzanne va tout-à-fait bien, elle suit tous les

exercices des classes et de la gymnastique comme les autres

enfants ; elle travaille bien à la couture et au repassage.

Sa conduite est excellente. Traitement : 2 douches par

jour, purgatif tous les 8 jours. Ecole et gymnastique.

202 Mélancolie ; guérison.

21 juillet. L'enfant va tout-à-fait bien, elle est envoyée

en congé d'essai.

8 octobre. Depuis son envoi en congé d'essai, Suzanne est

allée à la campagne jusqu'au 18 septembre. Elle s'occupait

des soins du ménage et se promenait. La physionomie est

naturelle, sa tenue très soignée. Elle a eu ses règles le 14'

août, le il et le 28 septembre (1). Les fonctions digestives s'ac-

complissent bien. Elle n'a plus présenté aucun trouble intel-

lectuel. De son départ Ù son retour, le traitement a été

le suivant : bain de rivière de 10 minutes ; purgatif toutes les'

semaines ; tisanes amères ; lotions froides, vinaigrées sur la

figure, au coucher. - A partir de ce jour, reprendre les dou-

ches froides en jet en éventail, 30 secondes.

31 décembre. - R.. est toujours en congé. Elle a pris exac-

tement ses douches. Elle a recommencé ses études sans fati-

gue (2). Parfois elle a quelques irrégularités de caractère, des

absences d'amabilité, des mouvements d'humeur ; elle est

plutôt exubérante. Elle a eu quatre ou cinq fois des maux,

de tête. Le sommeil est bon, un peu lent à venir. Les règles

sont venues réguiicrements mais avec dcux jours de retard.

Légères démangeaisons aux jambes.

1902. 19 mari. - En avril, fréquentes douleurs de tête. Deux,

fois, en se levant, brouillard devant les yeux. En raison de

ces accidents, durant lesquels le caractère est devenu plus

inégal, moins aimable, elle a moins travaillé intellectuelle-

ment. Son caractère naturel, dit sa mère, a repris le dessus.

Elle est redevenue aussi gaie qu'autrefois, un peu exubé-

rante. - Règles régulières ; leucorrhée légère. - Continuel'

les douches, les purgatifs ; capsules de bromure de camphre

du Dr Clin.

ter juillet. - Les douleurs de tète ont cessé. R.. va

bien sous tous les rapports. Toute trace d'anémie a dis-

paru. Même traitement.

Réflexions. I. Les renseignements sur la famille

de la malade sont un peu insuflisants. Nous avons à

relever cependant l'état névropathique du père, qui

(1) Depuis son entrée le 4 mars jusqu'au 10 juillet, It... n'avait pas eu ses

règles. A partir de là elles ont été régulières. '

( ? ) Elle s'occupe surtout de dessin en vue de se placer dans « l'industrie. »

Mélancolie ; GUÉRISON. 203

a des migraines, ainsi qu'une demi-tante paternelle

dont une fille, qui vit encore (26 ans), est idiote, ni

gâteuse, ni épileptique; elle n'a pas d'enfant (1). Sa

mère parait indemne, mais sa soeur, tante maternelle

de l'enfant, a eu des attaques de nerfs.

II. Signalons en passant, sans y insister dans ce cas,

une obsession de la mère pendant la grossesse.

III. A l'entrée et pendant une semaine, R... a été

tranquille, d'apparence saine, au point de vue mental.

Puis, du 10 au 18 mars, nous assistons à une période

de mélancolie très caractérisée : mutisme, hébétude,

sombreur, inertie physique et intellectuelle, refus de

manger, hallucinations de la vue, idées bizarres et de

culpabilité, inperprétations fausses, onanisme, amai-

grissement (2), abaissement de la température, etc.

Du 11 au 26 mars survient une rémission, suivie

d'uuc nouvelle période mélancolique, moins pronon-

cée que la première qui dure du 26 mars au 7 avril.

Après une rémission du 7 au 12 avril, troisième période

mélancolique qui persiste jusqu'au 20 mai. A partir

de là, et assez promptement, retour à l'état normal.

IV. A quelle cause attribuer la maladie ? L'hérédité

est en somme peu chargée. Toutefois elle suffit pour

expliquer l'impressionnabilité habituelle de l'enfant.

Elle n'a pas eu, semble-t-il, d'amourettes. En 1899,

une nuit, elle a été émotionnée, parce qu'on entendait

chez elle des bruits étouffés comme si on assassinait

(1) Nous avons appris au moment de la rédaction de l'observation que la

mère de S... avait une cousine ycrniaine atteinte d'un arrêt de développement

pLysique (1^,40) et était un peu bizarre.

(2) Son poids il l'entrée, en mars, était de 49 kil. ; à la fin de juin, après

guérison, il était de 50 kil. 500. La (aide est restée la même, 1"60.

204 MÉLANCOLIE ; GUÉRISON.

quelqu'un. Ses parents s'étaient levés, inquiets. On

apprit le lendemain qu'il s'agissait d'un homme,

habitant à l'étage supérieur, qui avait eu une crise

d'épilepsie. Cette émotion fut passagère. L'enfant

se livrait à l'onanisme depuis une année environ, ce

qui l'avait affaiblie, énervée et lui a inspiré, après

des remontrances, l'idée de mauvaises confessions,

l'idée de culpabilité. La jeune fille, elle, ne sait à

quoi attribuer son aliénation mentale.

V. Nous n'avons pas à revenir sur le traitement que

nous avons indiqué chemin luisant, au cours de l'ob-

servation. lia été suivi très exactement jusqu'à l'envoi

en congé (21 juillet), repris en octobre 1901 et conti-

nué en 1902.

Nous avons revu Suzanne R... il diverses reprises,

la dernière l'ois à la fin de 1902. Elle n'a plus présenté

de troubles intellectuels, est redevenue gaie, active.

Ses règles, qui avaient été suspendues durant les pre-

miers mois de 1901, ont reparu en juillet, peu après la

disparition des troubles. psychiques, et, depuis, ont été

régulières. En pareil cas, nous continuons le traite-

ment hydrolhérapique afin d'affermir la guérison et

de modifier autant clac possible le terrain névropa-

thique. Les parents l'ont compris et nous ont bien

secondé.

Bibliographie. Nous profitons de l'occasion qui nous

est fournie par la publication de cette observation pour

rappeler les principales publications que nous avons faites

soit seul, soit avec nos élèves, sur la folie des enfants.

1° Instabilité mentale arec perversion des instincts (en

collaboration avec ! ! u<)ur). Compte-rendu de 188'i, p. )47;

2° Instabilité mentale auec perversions de instincts, com-

Bibliographie. 205

pliquée d'hstéro-épilepsie; condamnations multiples (en

collaboration avec Leflaive . Ibid., p. 164; 3° Réflexions

sur les deux cas qui précèdent. Ibid., p. 174 ; 4° Halluci-

nations de la vue, de l'odorat et du goût (en collaboration

avec Courbarien). 7btd., 1885, p. 54; - 5° Folie de l'adoles-

cence; instabilité mentale; idées vagues de persécution ;

succube (en collaboration avec Sollier). Compte-rendu de

1887, p. 237 ; - 6° Imbécillité légère ; instabilité mentale avec

perversion des instincts et impulsions génitales (Klepto-

manie, onanisme, sodomie, syphilis) (en collaboration avec

Raoult). Compte-rendu de 1888, p. 61; 7° Imbécillité et

instabilité mentale; impulsions génitales (en collaboration

avec Sorel). Compte-rendu de 1891, p. 108; 8° Arriération

intellectuelle consécutive à une brûlure de la tête; instabi-

lité mentale; délire mystique (en collaboration avec Tissier).

Compte-rendu de 1805, p. 77; 9° Alcoolisme, instabilité

mentale, crises hY8téri[o1'Jnes, guérison (en collaboration

avec J. Boyer). Compte-rendu de 1896, p. 218 ; 10° Dip-

somanie de l'adolescence. Ibidem, p. 225; 4f° Imbécillité

et instabilité mentale avec perversions des instincts. Compte-

rendu de 1897, p. 1 ; - 12° Manie de l'adolescence avec nym-

phomanie (en collaboration avec Katz). Compte-rendu de

1898, p. 63 ; 13° Alcoolisme de l'enfance, instabilité men-

tale, imbécillité morale (en collaboration avec J. Boyer).

Ibid., p. 84; 44° Folie de l'adolescence (en collaboration

avec Belih). Compte-rendu de 1899, p. 194; - 15° Folie de

l'adolescence (en collaboration avec Ambard), Compte-rendu

de 1901, p. 111 et 170.

XXI.

Idiotie prononcée ; impulsions violentes : dacnomanie,

krouomanie ; mutilations ; autophagie ;

. PAnBOUR.%EVILLEET51axULUIIENFELD.

. Nous croyons devoir appeler tout particulièrement

l'attention de nos lecteurs sur l'observation qui suit :

le malade qui en fait l'objet nous fournit le plus bel

exemple d'autophagie que nous ayions rencontré

jusqu'ici.

Sommaire. Père, caractère vif, sobre. Grand-père pater-

nel, alcoolique.

Mère, rien de particulier : - Grand-père maternel, mort de

tuberculose pulmonaire. Arrière grand'mère malernelle,

morte aliénée.

Consanguinité. - Inégalité d'âge de 6 ans (père plus âgé).

Conception, grossesse, accouchement, rien de particulier.

Asphyxieà la naissance. - Ophtalmie des nouveaux-nés

Première dent à cinq mois. Dentition complète à ? .

Début de la marche à 20 mois, de la parole à 2 ans, de

la propreté à 3 ans. - Convulsions à un mois et demi à 3 ans

et demi. - Parésie consécutive des mains, surtout de la

droite.

Description du malade à Ventrée : Parole défectueuse; -

incapacité de se déshabiller, de manger seul. Marche

instable; parésie des membres du côté droit; accès de

colère; aime la musique. - Rougeole à un an et demi.

1895. Contusion de la tête; adénite suppurée, coque-

luche. Manie de griffer et de mordre (dacnomanie).

1897. Teigne. - 1899. Pleurésie du côté gauche.

Antécédents héréditaires ET PERSONNELS. 207

De 1895 à 1901. Traitement médico-pédagogique : améliora-

tion progressive.

1902. Accès de démangeaisons violentes à la face. -Con-

tusions, gonflement des paupières gauches. Erysipèle.

IT01rouomanie. - Phlegmon de l'orbite gauche. Sup-

puration et perte de l'oeil. Manie de s'écorcher ;

autophagie. (Lèvre). - Excitation maniaque. - Cachexie

progressive. - Mort.

Autopsie. - Ecchymoses du cuir chevelu. Os du crâne

durs, épais; pas de synostose; sclérose atrophique du lobe

carré et méningo-encéphalite disséminée. Congestion

pulmonaire récente.

Lero.. (Félix), né à Paris, le 12 juillet 1891, est entré dans

le service le 30 juin 1895.

Antécédents. (Renseignements fournis par sa mère en 1895J.

Père, 31 ans, cocher; marié à 25 ans, réformé pour rhu-

matismes ; pas de syphilis. Céphalgies à partir de 10 ans.

Très sobre, mais caractère vif, coléreux. [Père, mort à

53 ans de pneumonie, très nerveux, alcoolique (absinthe),

tombait alors dans des attaques de nerfs. Mère, morte à 53

ans de la rupture d'un anwry-smc de l'aorte. Grands-

parents, rien. Deux tantes et un oncle, bien portants ; ce

dernier aurait néanmoins des palpitations de coeur. -Rien

autre de saillant à noter dans le reste de la famille paternelle]. : IÉtrE, 26 ans, fille de boutique dans une pâtisserie, mariée

à 20 ans, fièvre muqueuse à 5-6 ans, assez nerveuse, cépha-

lalgies, ni syphilis, ni dartres, morte de tuberculose pulmo-

naire en 1898. [Père, mort à 38 ans de tuberculose pulmo-

il souffrait aussi d'une maladie de coeur, sobre. - Mère;

faible de santé; pleurésie il y a 3 ans; depuis ce temps jamais

bien portante.-Arrière grand'mère maternelle, morte aliénée

après un séjour de 6-7 ans à la Maison nationale de Charenton.

Tante maternelle, attaques d'l2stéricdepuisl' : iede 16ans.

- Un oncle maternel, fièvre typhoïde à 25 ans, santé délicate à

la suite; céphalalgies; a perdu un enfant de 6 mois de la

cholérine avec convulsions. Rien à noter chez les trois

autres oncles maternels, ainsi que chez l'oncle et la tante

maternels. Aucun accident nerveux dans le reste de la

famille].

Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de 6 ans (Père plus

âgé).

208 Antécédents personnels.

Notre malade. La conception a eu lieu dans de bonnes

conditions. - Grossesse : pas de coups, pas de chutes, pas

d'émotions, pas d'idées noires, pas d'alcool. Accouche-

ment à terme, naturel en 7 heures. Présentation de la tête.

A la naissance, l'enfant avait plusieurs tours de cordon,

ne respirait pas, était en asphyxie bleue; respiration artifi-

cielle, frictions ; il n'aurait bien respiré et crié qu'au bout do 24

heures. Nourri au biberon depuis la naissance jusqu'à

3 ans (lait de vache). - A un mois et demi petites convul-

sions limitées à la face, intermittentes, qui se sont renou-

velées pendant 4 ou 5 jours, et sur lesquelles des détails

précis font défaut. Première dent à 5 mois. Début de

la marche à 20 mois, de la parole à 2 ans. Propre à 3 ans.

Caractère turbulent. A3 ans et demi convulsions

débutant dans la nuit; les yeux sont tournés en haut, les

membres agités. Ces convulsions durent de 8 heures du soir

jusqu'à 4 heures du matin, s'accompagnent d'incontinence

d'urine et des matières fécales et se terminent par un

sommeil profond. Trois ou quatre jours plus tard, nouvelles

convulsionspendant une heure et demie. Comme les premières,

elles étaient généralisées ; on ne saurait dire si elles prédo-

minaient d'un côté. - Les parents ont remarqué, après ces

convulsions, que l'enfant présentait de la parésie des mains.

Dès qu'il a commencé à marcher, il a pris l'habitude de se

cogner la tète. On l'attribua à ce qu'il portait un bourrelet ;

on l'a supprimé, les cognements ont continué Ils se manifes-

taient tous les jours, plusieurs fois par jour. Ils ont augmenté

après les convulsions, Ler.. se jetait par terre et se cognait

la tète sur le sol. De plus, il se mordait, se griffait, mais ne

s'attaquait pas aux autres. Il semblait insensible à la douleur.

Parfois grincements de dents.

Les parents attribuent l'idiotie aux grandes convulsions de

3 ans et demi. Elle existait, suivant nous, bien avant. En effet,

la manie de se cogner la tête (Itoowontaniej, la manie de se

griffer (amyssomomanie) ont débuté vers 20 mois. Il était

en retard pour tout. La parole était limitée à quelques sylla-

bes plus ou moins mal articulées, les mains étaient déjà

maladroites (la maladresse paralytique a augmenté après les

états de mal). Les convulsions de 3 ans et demi n'auraient fait

qu'aggraver la situation pathologique préexistante.

Pas d'instincts spéciaux, pas d'onanisme. Rougeole à un an

et demi. Vacciné à G mois. Pas d'étourdissements, ni de

vertiges. Changements fréquents de coloration de la face.

Description DU malade. 209

Sommeil calme, sans cauchemars. La mémoire parait peu

développée. Il n'est jamais allé à l'école. Il ressemblerait

surtout au père. La famille ne connait aucune cause défi-

nie à la maladie.

État actuel. L'enfant présente un aspect de bonne santé

apparent. L'expression est un peu hébétée et craintive.

Les cheveux, châtains, sont irrégulièrement implantés autour

d'un tourbillon postérieur; ils sont rares sur les tempes et au

niveau des bosses pariétales ; pas d'épi. Crâne assez volu-

mineux, régulier. Les bosses pariétales sont proéminentes.

Les bosses frontales sont surtout très saillantes au niveau de

la ligne médiane. Face ovale ; pas de cicatrices. Arcades

sourcilières saillantes. Sourcils régulièrement implantés,

épais et fournis au niveau de l'extrémité externe. Fentes

palpébrales largement ouvertes. Cils à direction antéro-

postérieure, blonds cendrés. Blépharite à droite. Pli orbito-

palpébral excessivement saillant et chargé de graisse. Yeux

mobiles; pas de strabisme, de nystagmus, ni de paralysie.

Iris bruns foncés. Pupilles réagissant à la lumière et à

l'accommodation. Ne ? droit; narines regardant en bas,

largement ouvertes; lobule peu saillant. Odorat, normal.

Pommettes symétriques, peu saillantes. Bouche entrou-

verte ; lèvre supérieure un peu proéminente. Palais, nor-

mal. Amygdales, un peu hypertrophiées. Langue, peu

épaisse, à mouvements ditliciles ; pas de déviation, ni de trem-

blement. Goût : Ler ? perçoit les saveurs et les distingue.

Menton, régulier. Pli naso-labial peu marqué. Oreil-

les grandes, écartées de la tête. Angle céphalo-auriculaire

largement ouvert. Hélix bien ourlé. Tubercule à l'union de la

portion descendante et de la portion horizontale. Anthélix

normal. Lobule développé et bien détaché.

Cou, circonférence 25 cent. Corps thyroïde normal.

Thorax. Pas de déformation thoracique, ni de scoliose.

Rien à l'auscultation ni à la percussion du coeur ou des

poumons. Abdomen peu saillant; rien aux organes abdo-

minaux.

Organes génitaux. Région anale, rien. Pubis et corps

glabres. -Verbe : circonférence, 5 cent. 1/2; longueur 3 cent.

t/2. Prépuce long, recouvrant entièrement le gland. Testi-

cules dans les bourses, du volume d'un haricot.

Sensibilité générale normale au toucher et à la tempéra-

ture.

Bourneville, Bicêlre, 1902, 14

210 Idiotie profonde.

Membres supérieurs, réguliers ; cicatrices de vaccin aux

deux bras ; pas de malformation. Mouvements volontaires

et provoqués, affaiblis. Les mains sont un peu pendantes,

l'enfant prend à poignée. Les ongles ne sont pas rongés.

Membres inférieurs, normaux; mouvements volontaires et

provoqués, diminués ; « il marche du bout des pieds » qu'il

soulève péniblement et tombe souvent. Réflexes naturels

(Fig. 27).

État mental. Ler.. est très turbulent ot coléreux. Sa

parole est très défectueuse; pour dire : cc bonjour madame»,

Fig. 27. Ler.. (Félix) à 4 ans (Juin 1895).

. Description DU malade. 211

dit : «jou dame», a poupe pour soupe. Il cause peu, avec

difficulté, ne répond pas aux questions. Il marche sur la

pointe des pieds, le corps penché en avant, ne semblant

jamais être en équilibre et tombe souvent. Il tourne les pieds

en dedans, principalement le droit. Il monte et descend les

escaliers seul, sans hésitation, mais toujours le même pied

en avant.

Ler.. ne mange pas seul, essaie de porter la cuiller à sa

bouche, mais renverse presque tout le contenu sur lui; il boit

peu, n'a nulle appétence pour le vin, préfère l'eau. Il est très

gourmand, sait parfaitement reconnaître un bon plat d'un

mauvais et préfère de beaucoup les mets sucrés aux mets

salés.

L'enfant ne sait ni s'habiller, ni se déshabiller seul. Il est

propre le jour, mais il lui arrive quelquefois d'uriner la nuit.

Il est très maladroit de ses mains et semble avoir un peu

de paralysie, principalement de la main droite, d'où la néces-

sité des exercices de la main.

Comme manie l'enfant il celle de porter continuellement

les doigts à la bouche. Il a de nombreux accès de colère et

de cris; il pleure rarement et seulement dans ses grandes

colères ou lorsque ses parents viennent de le quitter : son

chagrin alors est long à apaiser.

Leur.. ne répond que par oui ou non, mais avec assez d'à

propos, aux questions qu'on lui pose. Il chantonne assez

juste et adore entendre chanter. Mené deux fois il la leçon de

chant, il y est resté absolument en extase, les yeux fixes et

la bouche entr'ouverte. Il ne connaît ni lettres, ni couleurs,

ne sait ni nouer, ni lacer, ni boutonner; ne fait pas de diffé-

rence d'un plus petit et d'un plus grand, d'un objet lourd d'un

plus léger.

Au point de vue du caractère, l'enfant est très entêté, indo-

cile, turbulent, malicieux, taquin avec méchanceté pour les

autres enfants dont il est jaloux. Il dérobe très prestement,

en ayant bien soin qu'on ne le voie pas, les gourmandises à

sa portée. Il est très poli, ne manquant jamais de remercier

pour les choses données.

Les sentiments affectifs paraissent bien développés. Ler...

est sensible aux caresses, mais très gâté par sa mère, il est

excessivement colère ; si on ne fait pas toutes ses volontés, il

crie, se roule par terre, mord, s'arrache les cheveux, s'égra-

tigne les oreilles ; il ne cède qu'à son père qui paraît avoir

une grande autorité sur lui.

212 Marche DE la maladie.

Températures à l'entrée.

Traitement médico-pédagogique. 213

a fait de réels progrès. Les mains sont toujours maladroites;

il est parvenu à lacer, mais ne peut ni nouer ni boutonner.

Ler..., a appris à connaitre les lettres de l'alphabet, les

chiffres, à distinguer sa droite et sa gauche, les cinq sens.

Il connait et nomme tout ce qui est contenu dans la boite aux

leçons de choses; écoute bien les leçons orales et répond

avec à propos aux questions. Au point de vue du carac-

tére, l'enfant est toujours très volontaire, très coléreux et

méchant avec les autres enfants qu'il griffe (1) et mord très

souvent. -La marche est moins titubante, l'enfant tombe

moins souvent.

1897. J 11111'S. - Ler.... entre au Pavillon d'isolement atteint

de teigne tondante. Traitement : Lavage au savon noir,

lotions au sublimé, teinture d'iode et cataplasmes de farine

de lin.

12 juillet. Organes génitaux. Corps, aisselles, absolu-

ment glabres. Verge : longueur 3 cent. z2 ; circonférence

5 cent. Testicules de la grosseur d'un haricot. Région anale

normale. - Traitement. Bains salés, sirop d'iodure de fer,

huile de foie de morue, douches, etc. (Fig. 28.)

1808. '1«,jazzLier. L'enfant est toujours à l'isolement pour

la teigne; les colères semblent être moins fréquentes.

1899. 25 mars. L'enfant sort de l'isolement guéri de la

teigne.

Juin. - Ler.... a fait des progrès assez sensibles, en rai-

son du peu de temps qu'il est sorti du pavillon des contagieux.

Il est moins maladroit de ses mains, est parvenu a nouer et

il boulonner; connait toutes les couleurs, compte jusqu'à 20,

place bien les bâtonnets. La marche est beaucoup plus assu-

rée, l'enfant ne tombe plus comme autrefois. Traitement :

Bains salés, sirop d'iodure de fer, huile de foie de morue, dou-

ches, etc. 1

"0 juillet.-Lpancltenzent pleuoétirlue à gauche. Le liquide

est en moyenne abondance. La matité remonte en arrière

seulement à deux travers de doigt au-dessous de l'angle

inférieur de l'omoplate. T. Il. 39°, 7.

21 juillet. T. R. matin, 38°, 9; soir, 40° mêmes signes à

l'auscultation et à la percussion. Pas de dyspnée.

(1) Amysson¡¡¡nie, de "I1.J77{,), je griffe.

214 Marche DE la maladie.

26 juillet.- L'épanchement a diminué et on entend dans

tout le côté, presque jusqu'en bas, des frottements pleuraux,

humides, de retour. Température du matin ST", 6; du soir 39°.

31 juillet. - Larespiration s'entend, encore un peu modi-

fiée, dans tout le poumon. L'épanchement parait avoir en

grande partie disparu.

6 août. L'épanchement a disparu. T. R. matin 37°, 1 ; soir

33,4.

12 août. Chute de la température; on entend la respira-

tion normale du poumon. ,

23 août. L'enfant sort de l'infirmerie guéri.

1900. Januier. - Ler... dont la parole était pour ainsi dire

nulle à son arrivée, dit tout aujourd'hui, forme des phrases er,

Fig. 28. Ler.. (F.) à 6 ans (1897).

Traitement MÉDICO-PRDAGOGIQtiL;I\tPGLSIONS. 215

employant les verbes. L'articulation est nette, seulement la

langue semble se mouvoir toujours avec peine, la parole est

lente, un peu embarrassée et présente une certaine analogie

avec celle d'un vieillard. Exercices de la langue.

Cet enfant a beaucoup d'amour-propre, il travaille avec

ardeur en classe, heureux que l'on s'occupe de lui et si une

teigne persistante ne l'avait retenu longtemps à l'isolement,

il serait certainement plus avancé. Il a appris à placer et à

lire les couleurs et les chiffres, établit bien le rapport de la

quantité avec le chiffre.

19 janvier. Plaque de teigne qui nécessite de nouveau

son envoi au pavillon d'isolement.

14 février. Le malade, en raison de son état paralytique,

est soumis au massage et, en particulier, aux exercices des

jointures.

Organes génitaux. Corps entièrement glabre ; verge 4 cent.

1/2 de long sur 2 cent. 1/2 de circonférence. Bourses peti-

tes. Testicules (haricot) à l'anneau. Anus normal.

Juin. - Ler..., guéri de la teigne, revient à l'école. Atteint

de paralysie incomplète mais généralisée, Ler... était incapa-

ble de tenir un crayon ; il pleurait de rage, ramassait son

crayon, essayait de tracer quelques lignes, le crayon tombait

de nouveau et cet enfant, avec une volonté rare, recommen-

çait cinq ou six fois non sans entrer dans des colères folles,

se mordant, se donnant des claques et se tirant les cheveux.

Enfin, grâce à cette volonté persistante, il est enfin arrivé à

tracer quelques lettres, puis à les assembler et former des

mots dans l'espace de quelques mois. Il est parvenu égale-

ment à tracer tous les chiffres. Il apporte non moins de

bonne volonté pour la lecture et fait de réels progrès.

Caractère affectueux mais jaloux, il voudrait toujours qu'on

s'occupe de lui. Doué de beaucoup d'amour-propre, il implore

continuellement des louanges qui le comblent de joie. Très

volontaire et très colère, il entre en rage lorsqu'on lui fait des

reproches ou si on ne lui donne pas ce qu'il désire. Très glou-

ton, il mangerait à se rendre malade s'il n'était surveillé.

1901. Janvier. - Ler... continue à apporter la même bonne

volonté pour tous les exercices scolaires, aussi continue-t-il

à réaliser de grands progrès pour la lecture et l'écriture. Il

commence à faire de petites additions. Il copie sur son

cahier un certain nombre de mots imprimés, tels que : cou-

216 MARCHE DE la maladie.

leurs, nombres, surfaces, famille, vêtements, qu'il lit avec la

même facilité.

Juin. Atteint pendant ce dernier semestre d'une sorte

d'eczéma à la face, cet enfant, qui fait partie des malades de

l'isolement pour la teigne, est venu peu en classe pendant ce

dernier semestre ot a réalisé peu de progrès bien qu'appor-

tant toujours une grande bonne volonté. Doué de mémoire, il

n'oublie pas ce qu'il a appris, fait des progrès très sensibles

en lecture dès qu'il nous est permis de le faire lire quelques

jours de suite. Ler... éprouve beaucoup plus de difficulté pour

l'écriture. Caractère : un peu plus docile, moins colère.

Décembre. Depuis que Ler.... est revenu de l'isolement,

Fig. 29. - Ler.. (F.) à 10 ans (1901).

Traitement nIÉ1)ICO-PÉDAGOGIQUE. 217

il a progressé pour tous les exercices classiques ; l'écriture

est en bonne voie; il fait quelques copies, quelques petits

exercices de grammaire qu'il comprend. Il fait l'addition et

la soustraction avec retenue sans en comprendre l'applica-

tion. La lecture marche de pair.

Cet élève, contrairement à la plupart de nos enfants au

début, a un désir ardent d'apprendre et se met toujours en

avant pour répondre. Il écoute avec beaucoup d'attention et

profite plus que tout autre des leçons orales.

Caractère toujours affectueux mais jaloux et rageur ; volonté

très tenace : lorsqu'il veut obtenir quelque chose il revient

sans cesse à son idée et lorsqu'il ne peut y arriver, il rage,

Fig. 30. - Ler.. (F.) à 10 ans (1901).

218 Marche de la maladie.

trépigne, pleure et passe toute sa colère sur lui-même; il a

quelquefois les joues toutes rouges des claques qu'il s'est

administrées, répétant sans doute ce qu'il nous a entendu

dire en pareille circonstance « C'est bien, Maurice, tu es un

entêté, tu n'auras pas de dessertpour te punir de ta colère, etc.

(Fig. 29, 30 et 31.)

1902. Juin. - Ler..., d'une volonté surprenante, apporte en

toutes choses une grande somme d'énergie; il fait beaucoup

d'efforts en classe, aussi a-t-il réalisé de grands progrès pour

la lecture, il est en bonne voie pour lire bientôt couramment.

Il fait l'addition et la soustraction avec retenues, copie tous

les jours un grand nombre de mots imprimés qu'il fait en

Fig. 31. - Ler.. (F.) à 10 ans (1901).

Traitement hiDICO-YEDAGOGIQIlE.

dictée, écrit également de mémoire les jours de la semaine

les mois de l'année, les saisons. L'écriture est très Ínégu-

. Hère, il nous semble même qu'au lieu de s'améliorer, elle

devient de plus en plus défectueuse, sans la moindre fermeté.

cependant il apporte beaucoup de bonne volonté, mais,

affecté d'un tremblement de la main, il a une grande diffi-

culté à tenir sa plume et à la diriger. '

Il est très attentif et retient bien ce que l'on explique aux

leçons .orales, il est toujours le premier à répondre aux ques-

Fig. 3. - Ler.. à 11 ans (Juin 19021. z

220 Colères; impulsions ; PIQURE.

tions qui sont posées. Il commence à avoir quelques notions

de grammaire, d'histoire et de géographie.

Ler.... a de violentes colères qu'il passe sur lui-même en

se calottant, s'égratignant, se mordant, tapant du pied,

mais ces colères n'ont pas de durée, elles tombent subite-

ment, il demande alors pardon, promet de ne plus recom-

mencer.

Cet enfant est sujet à des poussées de démangeaisons à la

figure, tantôt aux lèvres et à leur pourtour, tantôt aux yeux,

au nez, dans le cuir chevelu, il est alors porté à se gratter

d'une façon intolérable, on est obligé de lui mettre le man-

chon et, malgré cela, il arrive à s'égratigner, à s'écorcher, il

se produit alors de l'enflure, une suppuration blanchâtre et

des croûtes. Ces accidents se répètent très souvent, du reste.

La moindre écorchure, le plus petit bobo les déterminent.

l ? 5j'ttt ! ! ef. -Gonflement des paupières surtout il gauche

due peut-être à une piqûre d'insecte.

^juillet. Ler..., est amené à l'infirmerie ce matin; il

présente un gonflement assez considérable des paupières

surtout à droite, beaucoup moins à gauche. Pansement à

l'eau boriquée.

9 juillet. Gonflement persistant des paupières à droite

et à gauche, avec rougeur érésypélateuse s'étendant aux

mues. Un peu de pus dans l'oeil droit. Nitrate d'argent

et lavage de l'oeil. A cinq heures du soir l'enfant passe à

l'isolement.

Ler..., parait avoir été piqué par un insecte sous l'oeil gau-

che, et, à la suite des coups qu'il s'est donnés, est survenu un

érysipèle. Il se frappe continuellement la tête contre les bar-

res de son lit et se cogne la face. Pour parer à ces acci-

dents, on a mis des planches matelassées iL son lit et on lui

maintient continuellement le manchon.

11 juillet. Traitement : 10 gr. d'huile de ricin, Ogr. 25 de

sulfate de quinine, un bain tous les jours, pansements avec

des compresses d'eau bouillie, lavage de la bouche avec une

solution de chloral. Lait, bouillon, limonade avec du jus de

citron, chloral.

Traumatisme; ÉRÉSYPÉLE; phlegmon DE L'ORBITE. 221

Le malade est encore plus agité depuis l'alitement.

13 juillet.- L'aspect delà face est repoussant, l'oeil gauche

est en exophtalmie sous des paupières très oedématiées, la

paupière supérieure est sillonnée d'une plaie transversale

due à un coup qu'il s'est donné. La lèvre inférieure à gauche

est également coupée par une morsure. (Fig. 32). Cependant

l'état général semble s'être amélioré ainsi que l'état local.

15 juillet. A la suite de son érysipèle de la face, il a fait

un phlegmon de l'orbite quia entraîné la suppuration et la

perte du globe oculaire. Actuellement, tuméfaction considé-

rable des paupières de l'oeil gauche. La paupière supérieure,

sphacélée, a laissé évacuer une partie du pus. Dans le fonds

de ces vastes ouvertures, on voit le tissu orbitaire sphacélé.

La paupière inférieure, très tuméfiée, ne présente aucune

perforation, elle est fluctuante à la palpation, ce qui dénote

la présence dans les parties correspondantes de la cavité

orbitaire d'une collection purulente L'oeil droit est tout à fait

débarrassé.

Le globe oculaire, par suite de la suppuration orbitaire qui

l'entourait et le comprimait s'est rapidement atrophié. Aujour-

d'hui il est complètement détruit Les lésions du globe ocu-

laire (gauche) sont secondaires au phlegmon de l'orbite.

Traitement. - Large incision le long du rebord orbitaire

inférieur. Recherche du pus et débridement à la sonde canne-

lée. Drainage. Le pus évacué a été moins abondant que

ne le faisait supposer la tuméfaction.

16 juillet. - Ler.... s'est levé, a cassé 6 carreaux et s'est

fait une plaie au côté droit de la face et une autre à la main'

droite au niveau du second métatarsien. Il devient de plus en

plus agité. Malgré toutes les précautions que l'on prend, il

parvient à se faire du mal, il s'est mordu la lèvre inférieure

auec tant de violence qu'il en a presque détaché un morceau

de 4 cent, cle long sur un cent, de large. Il cherche à rame-

ner dans sa bouche le lambeau pendant pour le manger. Cet

enfant parait insensible il toute douleur physique. (Fiç7. 33.)

18 juillet. Ler.. devient de plus en plus difficile à soigner,

il cherche par tous les moyens possibles à enlever ses panse-

ments, à se frapper ou se mutiler malgré le manchon qu'on lui

laisse nuit et jour, on est obligé de l'attacher. Ses diverses

blessures, tant aux yeux qu'à la bouche, semblent entrer en

voie de cicatrisation.

21 juillet. L'enfant réussit à défaire son manchon, arra.

che son pansement et agrandit la plaie de la lèvre en s'ou-

22 AUTOPHAGIE.; excitation maniaque.

vrant démesurément la bouche avec les mains ce qui provoque

une hémorragie assez abondante. Après une nuit un peu plus

calme, l'enfant paraît très affaibli et a même une syncope.

Injections de sérum.

Cette période d'accalmie n'est que de courte durée et Ler...

est de nouveau retombé dans un état de surexcitation.

extrême ; alors que précédemment il ne cherchait qu'à se

faire du mal à lui-même, il s'en prend maintenant aux per-

sonnes qui l'entourent, aux infirmières qui le soignent ; par

deux fois différentes, il a réussi, en agissant sournoisement,

à mordre la veilleuse assez grièvement. (Dacnomanie.)

Cette situation se maintient sans changements notables jus-

qu'au 1S août. A ce moment, son agitation devient moins vive,

ses yeux, de même que la blessure de sa lèvre, sont en bonne

voie,l'enfant mange et boit bien, le sommeil est assez calme;

on le lève dans la journée.

20 septembre. Le mieux persiste, ]'oeil va tout à fait bien

malgré l'enflure. Ler... a des recrudescences d'agitation et

toujours il cherche il se faire du mal, il casse des carreaux

avec son manchon, cherche il en happer des morceaux qu'il

essaye de mâcher et d'avaler.

20 octobre. Cet enfant revient de l'isolement à l'Ecole,

mais dans un état de surexcitation extraordinaire. Impossi-

ble de lui dire un mot sans qu'il entre en colère et tout en

employant toute la douceur et la patience possibles, nous

n'arrivons pas à lui faire entendre raison. Pour le motif le plus

futile et même sans motif, il se met dans des rages d'une vio-

lence épouvantable, il s'arrache la bouche, les lèvres, enfonce

les doigts dans ses yeux, se mord (1) et cherche il mordre ceux

qui l'entourent (2), envoie des coups depied aux infirmières et

aux enfants, se frappe la tête contrôles murs, les tables, le

poêle, on est alors obligé de lui mettre soit le manchon, soit

même la camisole il laquelle il a fallu recourir, contrairement

il la pratique du service. Alors sa colère augmente, il se laisse

tomber de toute sa hauteur ce qui fait qu'il a la tête remplie

de bosses et de contusions. '

Le jour de sa rentrée à l'école, sans cause connue, dès son

arrivée, il s'est mis à frapper à coups redoublés sur ses

camarades, a cassé un carreau, déchiré ses vêtements et

(1) Dacnomomanic, manie de se mordre.

(2) Dacnomanie. manie de mordre les autres.

Excitation ; clastomanie. 223,

lorsqu'il n'a plus rien eu à mettre en pièces, il s'en est pris à

lui-même, se mordant, se griffant. (Amyssomomanie, de

(xjj.vc ? o ? se griffer.) La classe est complètement troublée par

ses cris.

La même agitation se produit la nuit. Il n'a pas de som-

meil ; à peine couché, il demande de l'eau, du lait, du chloral.

Lorsqu'on a satisfait tous ses désirs, il ne sait plus que

Fia. 33. - Ler.. (1<'.) (Otoure 1902).

224 Excitation ET impulsions VIOLENTES.

demander, il entre en fureur, se frappe la tète contre les

barres du lit, saute au-dessus des barreaux, s'arrache l'inté-

rieur de la bouche, passe son corps à travers les barreaux et

pousse des cris perçants que rien ne peut calmer, de sorte

que le sommeil de ses camarades est complètement troublé,

tous les enfants, petits et grands, sont épouvantés par le

spectacle qu'offre cet enfant dans ses crises d'agitation.

24 octobre. Ler... est isolé dans le pavillon des cellules.

Même état, agitation extrême. Il est à remarquer que cet

enfant répond aux questions qui lui sont posées avec la plus

grande lucidité, il reconnaît tout le monde et désigne chaque

personne par son nom, sans aucune hésitation. Il semble-

rait qu'il est atteint de la monomanie du suicide, car, plusieurs

fois, l'on a remarqué, que lorsqu'il se jetait volontairement à

terre, il choisissait un endroit présentant des angles aigus ou

des cailloux tranchants.

28 novembre. - Chute sur la région fessière ; hématome

de la partie profonde de la fesse et de toute la région. Vu le

gonflement il est impossible de savoir s'il y a fracture du bas-

sin. Le gonflement disparait au bout de deux jours et l'on

constate qu'il n'y a eu que contusion et non fracture.

L'enfant a maigri depuis deux ou trois semaines. Aucun

trouble, du côté des organes thoraciques et digestifs.

30 novembre. Le malade présente un gonflement de la

partie droite de la face, gonflement accompagné de rougeur

diffuse avec légèro élévation de température. Pouls 100. --

Application de pansements humides.

Malgré l'état d'affaiblissement de cet enfant, il n'y a pas de

changement dans son caractère, il continue à se frapper con-

tre les barres de son lit, à s'égratigner avec son manchon, il

urine et défèque au lit malgré toutes les précautions que l'on

prend. Du reste, ces actes sont volontaires certainement, car

narguant l'infirmière qui le conduit aux cabinets où il ne fait

rien, il s'empresse de lui annoncer qu'il exercera ses malpro-

pretés dans son lit, et il tient parole.

L'état de Ler... se maintient stationnaire jusqu'au 7 décem-

bre ; ce jour-là, sa faiblesse augmente notablement, il demande

sans cesse de l'eau, du lait, du sirop de chloral.

8 décembre. T. IL matin 38". Le malade tousse un peu,

(ventouses sèches); la face est très pâle, il ne cherche plus à

se cogner la tète comme précédemment, il est somnolent.

Quatre selles dans la journée, en diarrhée, fétides. Dans la

soirée, l'affaiblissement s'accroit, la respiration devient difli-

Autopsie : Mli1\INGO-ENCIiPHALI1'E. 225

cile, la face est couverte de sueur. Jusque-là, il avait conservé

sa connaissance. Dans la soirée, état comateux, l'enfant meurt

le 9 décembre il 4 h. du matin sans râle. Poids après décès

21 kilogr.

Autopsie faite le 10 décembre 1902, à 9 h. 45 du matin (soit

29 h. après le décès).

TÊTE. - Cuir chevelu très épais; ecchymose demi-circu-

laire de 2 cent, sur 5 ou 6 cent. sur le côté droit, au niveau

de l'occipital; plusieurs ecchymoses en avant au niveau des

pariétaux.

Crâne. Os durs, épais, sans synostose. Dure-mère un

peu épaissie, sans fausses membranes.\Les fosses de la base

du crâne sont symétriques. Glande pituitaire assez volu-

mineuse, pâle. Apophyse cristagalli petite, triangulaire.

Les différentes parties de la base de l'encéphale sont égales

et symétriques.

Hémisphère gauche. La pie-mère est très mince, sans pla-

ques laiteuses, avec de petites adhérences de ménill[Jo-encé-

phalite disséminées sur les trois faces du lobe frontal. Il

existe une atrophie très prononcée du bord supérieur du lobe

carré et de son bord antérieur. A l'angle de ces deux bords

il y a un foyer ocreux avec atrophie des circonvolutions

environnantes. Le foyer ocreux intéresse la partie corres-

pondante de la scissure calloso-marginale et l'angle postéro-

supérieur du lobule paracentral.

Face convexe. - Les circonvolutions du lobe frontal sont

assez bien développées. F' et r"2 s'insèrent assez largement

sur FA tandis que F3 n'est uni à FA que par un pli inférieur,

assez grêle. FA est coupée par un sillon transversal à

l'union de son quart inférieur avec ses trois quarts supé-

rieurs. Sillon de Rolando assez profond, ininterrompu. PA,

large dans son tiers inférieur, est étroite dans ses deux tiers

supérieurs. Les autres circonvolutions pariétales, le pli cour-

be et les circonvolutions occipitales supérieures sont plutôt

un peu grêles. - La lobe temporal est assez développé, en

particulier la circonvolution de l'hippocampe. Le lobule de

l'insula présente cinq digitations.

Face interne. fut, CCC, LP sont assez développés tandis

que les circonvolutions du lobe carré, du coin et du lobe

occipital sont plutôt petites.

Les plis de passage sont assez rares, les sillons sont peu

. profonds, la corne d'Ammon parait saine.

Bourneville. Bicêtre, 1902. 15

226 Idiotie; AUTOPHAGIE.

Hémisphère droit, Il a été réservé pour examen histo-

logique, et, pour cette raison, n'a pas été décortiqué.

Cou. Larynx et corps thyroïde, rien. Pas de thymus.

THOKAX. Coeur, rien de particulier, pas de persistance du

trou de Botal. Poumons : Le poumon gauche est fortement

congestionné mais cette congestion parait être récente. Pas

de foyer de broncho-pneumonie ni de foyer de tuberculose.

Aucune adhérence des plèvres. Pas d'épanchement.

ABDOMEN. - Foie gras ; vésicule biliaire remplie d'une bile

jaunâtre. - Reins légèrement congestionnés, surtout le rein

droit. Pas d'adhérences des capsules surrénales qui n'ont

rien de particulier. Rate normale. - Le péritoine, le tube

digestif, l'appendice, les ganglions n'offrent rien à signaler.

Il en est de même des organes génito-urinaires.

Au niveau de l'articulation de la 1 ? <= côte et du sternum,

foyer de tuberculose osseuse et articulaire.

Le malade présente autour des lèvres des cicatrices de

morsures. Ces cicatrices sont circulaires. - Une autre cica-

trice parallèle à celles de la lèvre, au-dessus dumenton, a été

produite de la même façon, les ailes du nez sont déchirées et

présentent de nombreuses cicatrices.

Le moignon de l'oeil gauche a été enlevé au milieu des tis-

sus graisseux de l'orbite, le globe oculaire est représenté par

une petite masse de la grosseur d'un petit pois.

Poids des Organes.

228 Idiotie méningitique. Autophagie..

Réflexions. I. L'hérédité, à peu près nulle du

côté paternel, est peu chargée du côté maternel.

II. L'enfant est né en état d'asphyxie bleue, occa-

sionnée sans doute par la constriction du cordon et on

a dû recouriràlarespiralion artificielle. C'est il la lésion

ou au trouble encéphalique, qui est survenu alors,

qu'il faut probablement atrihuer les petites cmlûltl-

sions survenues à six semaines, le retard de la mar-

che, de la parole et de la propreté (1). A 3 ans et

demi, convulsions qui se sont manifestées sous la

forme d'état de mal, et sur lesquelles nous n'avons pu

avoir que des renseignements incomplets (2).

III. A l'entrée, Ler.... était atteint d'idiotie à un

degré prononcée, compliquée d'un affaiblissement

paralytique prédominant dans les membres du côté

droit. Les changements de coloration de la face, les

accès de colère et de cris, l'impulsion à mordre, it

s'égratigner, les grincements clc dents, ont fait penser

il des lésions ménin g i tiques, et à cause de la parésie

droite, prédominant dans l'hémisphère cérébral

gauche.

IV. Malgré les conditions très défavorables que

présentait l'enfant, et malgré les intermittences occa-

sionnées par la teigne, par sa récidive, par une plcu-

(1) Ces symptômes n'ont qu'une valcurrelatice. L'enfant marche, parle, est

propre, plus ou moins tôt suivnnt que les parents, la mère surtout, sont intel-

ligents (ce qui existait dans ce cas) et s'occupent de leur enfant.

(2) C'est souvent là une lacune regrettable qui rend difficile un diagnostic

précis, au point de vue anatomo-pathologique. Les convulsions ont-elles

été précédées de prodromes, ont-elles été toniques, cloniques, ont-elles été

généralisées, ont-elles prédominé dans l'un des côtés du corps, ont-elles

été limitées à une moitié du corps ? Ont-elles été suivies de coma, de fièvre,

de folie, etc. - Y a-t-il eu des accidents consécutifs ? Quel était l'état intellec-

tael avant et après les convulsions ? Ce sont là autant de questions sur les-

quelles les parents ne sont pas toujours en mesure de répondre.

AUTOP11AÙlE. 229

résie, le traitement médico-pédagogique avait donné

des résultats extrêmement remarquables. Nous les

avons signalés dans le Cornpte-rendu de 1899, p. IV.

V. Dès l'entrée du malade, alors qu'il se présentait

avec tous les caractères de l'idiotie profonde, il avait,

depuis l'âge de deux ans, des impulsions violentes

envers lui-même surtout, mais aussi envers les autres

enfants, quelquefois envers le personnel. Dans ses

colères, il se gilllait, se mordait, s'égratignait sans

qu'il n'y eut de cause locale particulière.

Plus tard, peut-être sous l'influence de cas lrau-

matismes, il s'est produit une irritation locale qui a

occasionné des lésions cutanées superficielles, source

de démangeaisons qui, elles, à leur tour, ont provo-

qué l'enfant à redoubler ses son grattage,

ses égratignures, d'où écorchures, «ronflement (juin

1902).

En juillet, piqûre probable des paupières avec rou-

geur et gonflement, puis coups de poings sur les yeux,

principalement le gauche, cognements de la face sur

les barreaux du lit, plaie, érysipèle, phlegmon et

suppuration de l'oeil gauche.

Vers le milieu de juillet, il commence à se mordre

la lèvre inférieure d'une façon atroce, détache des

lambeaux qu'il avale. En même temps surviennent

des périodes d'agitation très violentes dans lesquelles

ses violences s'exercent non seulement sur lui mais

aussi sur ses infirmières. Il casse les carreaux, mal-

gré la surveillance dont il est l'objet, essaye de hap-

per et d'avaler des morceaux de verre. En septembre,

octobre, novembre et décembre, persistance des vio-

lences, des périodes d'excitation, de la krouomanie,

de la dacnomanie et de l'amyssomanie.

Il semble que Ler... était insensible à la douleur,

remarqu e déjà faite par ses parents, car il recherchait

230 . AUTOPHAGIE.

les angles des meubles pour se cogner, se jetait vio-

lemment par terre, sur des cailloux, se contusionnant,

se blessant la face, la tête. Avait-il des idées de sui-

cide ? On ne sait.

La manie cle se mordre les lèvres s'observe quel-

quefois, mais non d'une façon aussi fréquente que

l'onychophagie ou la manie de se déchirer les ongles,

mais nous ne l'avons jamais notée à un degré aussi

prononcé. Souvent le léchage des lèvres, comme

nous l'avons décrit dans l'observation de Viga... (Voir

p. '1'1.), détermine une irritation locale, des excoria-

tions, des croûtelles qui peuvent amener les malades

à se gratter, à se mordiller. Nous avons pu faire ces-

ser les accidents chez Vig.... Au contraire, chez Ler..

ils se sont aggravés de plus en plus, déterminant sans

doute une douleur qui, augmentant, produisait peut-

être une sorte de plaisir.

VI. L'enfant a maigri progressivement. Son poids

qui était de 23 k. 200 en juillet 1901, loin d'aug-

menter, est allé en diminuant jusqu'à la mort :

21 kilogr. au lieu de 27 k. il son âge. C'est à

cette sorte de cachexie qu'est duc la mort car les

lésions pulmonaires trouvées à l'autopsie étaient

récentes et peu prononcées.

Il existait chez Ler... une parésie des quatre

membres (diplégie), prédominant clans le côté droit

et intéressant davantage, scmhle-t-il, les mains. A l'au-

topsie, nous avons trouvé : 1 une inégalité de poids

des hémisphères cérébraux ; le gauche pesait 35 gr.

de ln01rUn1ue le droit; 2° des lésions, assez superfi-

cielles d'ailleurs, de méningo-encéphalite ; 3° un

petit foyer ocreux portant sur le lobe paracentral et

le coin.

L'idiotie, par conséquent, était attribuable à la

méningo-encéphalite. Nous avons déjà essayé de tra-

IDIOTIE VIÉNINGO-ENCÉPHALITIQUE. 231

cer le tableau clinique de cette forme d'idiotie.

Cette tâche sera reprise et peut-être y parviendrons-

nous, comme nous l'avons fait pour l'idiotie 1nyxoe-

démateuse, l'idiotie /i,7/drocep/a'que, et comme

nous essayons de le faire pour l'idiotie mongolienne

ou mongolisme.

XXII.

Un cas d'affection familiale à symptômes cérébrospi-

naux : diplégie spasmodique infantile et idiotie chez

deux frères ; hypothermie ; Atrophie du cervelet ;

PAR BOURNEVILLE et CROUZON (1).

Des travaux récents ont attiré l'attention sur les

affections familiales du système nerveux. Depuis le

travail de Frcnd sur les formes héréditaires des diplé-

gies cérébrales publié en 1893, on a vu successive-

ment paraître en 1896 le travail de Sachs sur l'idiotie

amaurotique familiale ; en 1898 la thèse de Lorrain

sur la ]Jal'8]Jléuie spa.sH1odiq11c familiale ; en janvier

1900 le travail de Trénel relatant un cas de maladie

familiale à symptômes cérébraux et médullaires

caractérisée par des troubles psychiques périodiques,

de la démence et une parésie spasmodique ; en avril

1900, la thèse cle \piu Pesker contenant les observa-

tions de deux frères, Thir..., malades cle notre ser-

vice, atteints d'une affection spasmodique rappelant

un peu la sclérose en plaques ( ? ) et complétée par

l'étude histologique du système nerveux de l'un des

deux, faite dans le laboratoire de M. P. Marie ; enfin

le travail de Cestan et Juillain paru dans la Revue de

(1) La première observation, avec les pièces et les photographies, a été

présentée il la section de psychiatrie du Congrès intern. de méd., de 19GO,

Antécédents héréditaires. 233

médecine d'octobre 1900, relatant l'histoire pathologi-

que de deux familles, atteintes l'une de paraplégie

spasmodique, l'autre de sclérose en plaques. Les deux

observations qui suivent sont celles de deux frères

atteints de diplégie spasmodique, et dont nous avons

pu faire l'autopsie (1).

SostrtAlns. - Père et mère bien portants, non alcooliques;

non syphilitiques ; aucune tare nerveuse. - Une cousine

germaine maternelle du père a été hémiplégique. - Une

cousine éloignée paternelle de la mère, épileptique. Sur

dix grossesses, trois fausses couches, cinq enfants bien

portants et nos deux malades. L'ainé aurait eu la rou-

geole à 18 mois, et il semble que sa maladie ait débuté à ce

moment. Pour le second, la mère fait une chute de

voiture huit jours avant l'accouchement. Convulsions à

dix-huit mois ( ? ). - Frère arriéré.

État actuel. Nystagmus chez les deux malades. Strabisme

\ divergent chez l'un ; convergent chez l'autre. - Chez les

deux malades, paralysie avec contracture de quatre mem-

bres. Exagération des réflexes. Chez les deux malades,

idiotie profonde.

Autopsie de l'aîné. - Congestion du poumon gauche. Les

autres viscères sont normaux. Aspect général de l'encé-

phale arrondi. Atrophie du cervelet et du pont de Varole.

Dans la moelle, diminution des fibres des faisceaux pyra-

midaux.

.

Les enfants Lecl Edouard-René et André-Lugène, nés

à Vitry-sur-Seine, le premier le 6 juillet 1883, le second le 7

octobre 1886, entrent à Bicêtre le 22 juin 1897, âgés l'un de

13 ans, l'autre de 10 ans, sur des certificats de M. Magnan les

déclarant atteints, le premier d'idiotie, gâtisme, paraplégie

avec légère contracture, le second d'idiotie, gâtisme et para-

plégie.

Antécédents héréditaires. -(Fournis par le grand-père mater-

(1) Voir sur les affections familiales : Bourneville, Une famille d'idiots (Ar-

chives des maladies mentales et nerveuses, 1861, p. 289) : - Bourneville et

Séglas, Familles d'idiots (Compte-rendu de Bicétre pour 1886, p. 3), etc.

23n Affection familiale.

nel et par la mère). Père, 43 ans, fait le commerce de

volailles, beurre et oeufs, est sobre, ne fume pas, est bien

portant et bien constitué. Il n'a pas eu de convulsions; marié

à 23 ans ; pas d'indices de syphilis. - [Père, mort à 71 ans,

subitement d'une maladie de coeur, était sobre, n'avait pas

eu de maladie de peau. - Mère, âgée de 71 à 72 ans, bien por-

tante, sans accidents nerveux, sobre, laborieuse. Pas de ren-

seignements sur les grands parents paternels. - Les grands

parents maternels sont morts vieux.-Deux oncles paternels :

l'un qui buvait un peu, est mort d'une fluxion de poitrine,

l'autre est en bonne santé. Il en serait de môme de ses

enfants et de ceux du précédent. Une tante paternelle est

morte âgée. On ne sait rien des oncles et tantes mater-

nels. Un frère, mort à 5 ou 6 ans, on ne sait de quoi. -Deux

soeurs mariées avec les deux frères, sans accidents nerveux :

l'une a deux enfants bien portants, l'autre a eu un enfant mort

du croup. Une cousine germaine maternelle, âgée de plus

de 60 ans, a été prise d'une hémiplégie avec aphasie à la

suite d'une vive frayeur. Rien à noter dans le reste de la

famille.]

Mère, 38 ans, très calme, n'ajamais eu d'accidents nerveux,

sauf quelquefois des doul-urs de tête; pas de maladie de

peau, a reçu une certaine éducation, a obtenu son certificat

d'études, s'est mariée a 18 ans. [ Père, celui qui nous ren-

seigne, âgé de 67 ans, bien conservé, n'a pas eu de maladies

de peau, ni de maladies vénériennes, sobre, a été soldat,

s'est marié à 2J ans. Mère, morte en 18U3, à 56 ans, d'une

affection du coeur, n'a jamais eu d'accidents nerveux, a

toujours été sobre. Grand-père paternel, cultivateur,

sobre ; est mort à 72 ans, usé par le travail. Grand'mère

paternelle, morte à 77 ans de vieillesse, n'avait jamais eu de

maladie nerveuse, sobre. Grand-père paternel, mort il

85 ans de vieillesse, cultivateur, sobre. Grand'mère pater-

nelle, morte jeune, on ne sait de quoi. - « Mon grand-père

paternel s'est marie trois lois, la troisième fois à 27 ans. »

Grand-père maternel, mort jeune. - Grand'mère, morte à

86 ans de vieillesse avec toutes ses facultés. - Pas de

grands-oncles paternels. Deux grand'tantes (pas de la

même mère), l'une morte à 78 ans, l'autre à 75 ou 76 ans.

Un grand-oncle et une grand' tante maternels, rien. Deux

grand-oncles paternels : l'aine à 75 ans, bien portant, a deux

filles mariées, sans enfants, en bonne santé ; l'autre est mort

il y a 3 mois, à 64 ans, sans accidents nerveux, avait trois de

Antécédents héréditaires. 235

ses quatre enfants bien portants ; pas de convulsions. Le qua-

trième enfant, une fille, est devenue épileptique après une

vive frayeur; elle s'est néanmoins mariée et a eu un'enfant

mort en venant au monde. Une tante paternelle, usée par le

travail, 69 ans, pas d'accidents nerveux. Elle a eu un fils qui

faisait des excès de boisson et est mort d'une fluxion de poi-

trine ses enfants n'ont pas d'accidents nerveux.-Deuxsoeurs :

l'aînée, âgée de 30 ans et demi, sans accidents nerveux, a eu

deux enfants : une fille morte du croup, pas de convulsions,

l'autre, garçon, âgé de 8 ans, pas de convulsions, intelligent ;

la deuxième soeur, intelligente, pas de convulsions, a un

enfant turbulent, entêté, qui n'a pas eu de convulsions. Un

frère, âgé de 21 ans, célibataire, n'a pas eu de convulsions,

sobre. Dans le reste de la famille, pas d'idiots, pas d'épilep-

tiques, d'aliénés. Un cousin à la quatrième génération, sourd-

muet, décédé vers 30 ans, ne s'était pas marié.]

Pas de consanguinité. Différence d'âge de 5 ans entre les

deux époux. (Père plus âgé.)

Sept enfants et trois fausses couches : 1° Une fausse cou-

che à deux.mois, sans cause connue ; 2° René ; 3° fille,

- la ans, en bonne santé, intelligente, pas de convulsions ;

/1° André; 5° une fille de 12 ans, forte, intelligente, pas de

convulsions, un peu nerveuse, apprend facilement ; 6° un

garçon, 4 ans, normal, sans convulsions ; - 7° un garçon,

intelligent, pas de convulsions; 8° une fausse couche;

9" une fausse couche; 10° garçon, se porte bien, pas de

convulsions; Depuis l'entrée de René et d'André à Bicétre

(1897), les parents ont ou : lin un garçon de 5 ans, intel-

ligent ; - 12° un garçon âgé de 2 ans, en retard, ne marchant,

ni ne parlant. Ni l'un, ni l'autre n'ont eu de convulsions.

Histoire de nos malades.

René et André.

Conception : Les parents vivaient en bonne intelligence et

étaient en bonne santé.

René

Grossesse : bonne, pas

d'ennuis, pas d'envies. Deux

ou trois faiblesses. Ni

André

Mouvements il 4 mois; rien

de particulier. Chute de

voiture huit jours avant

236

Affection familiale.

René

émotions, ni chutes. Mouve-

ments à 4 mois, normaux.

Accouchement : à terme,

naturel. Douleurs pendant

deux heures. Présentation

de la tête.

Naissance : Pas d'asphy-

xie, pas de circulaire du

cordon ; a crié de suite. Non

pesé, mais était tout petit.

Elevé au sein par sa mère

jusqu'à 9 mois, époque où

elle est devenue enceinte du

suivant. Nourri ensuite au

lait de vache. A bien pris le

sein; non criard.

Première dent à un an.-

Dentition complète à ? ?

N'a jamais été tout à fait

propre ; toutefois vers 18

mois demandait : caca, est

redevenu malpropre après

une rougeole très forte à 18

mois : pendant une nuit il

ne reconnaissait personne.

Commençait à marcher

quand il a eu la rougeole ;

après, il a cessé tout à fait.

Pas de convultions, ni il

la rougeole, ni avant, ni

après.

André.

l'accouchement; pas d'émo

tion après l'accident.

A eu lieu peut-être quel-

quesjoursavant terme. Dou-

leurs pendant 2 heures,

naturel; même présentation.

Pas d'asphyxie, a crié de

suite ; pas de circulaire du

cordon. Etait plus gros que

René.

Elevé au sein jusqu'à 5 ou

6 mois, puis au sein et au

biberon (lait de vache). Prise

régulière du sein ; non

criard.

Première dent vers un an.

Dentition complète il ? ?

N'a jamais été propre

même momentanément.

N'a jamais marché.

Vers 18 mois aurait eu des

convulsions, en l'absence

de sa mère qui ne peut en

dire ni les caractères ni

la durée. Elles ne se seraient

jamais reproduites. De 3 à 5

ou li ans, aurait eu des cpa-

moisons» précédées de cris,

se roidissant quand il était

contrarié, perdait connais-

sance, devenait noir.

ANTÉCÉDENTS PERSONNELS.

237

René

Parole : répétait quelques

mots jusqu'à sa rougeole :

papa, maman, caca. Avaitde

la connaissance, reconnais-

sait tout le monde et les re-

connaîtrait encore. "

Ne louchait pas, quand il

était petit : ses yeux se

seraient tournés vers deux

ans.

Parfois il a des secousses

dans les membres et de la

rotation des yeux. Ces

secousses revenaient pres-

que tous les jours et se mon-

traient surtout quand il vou-

lait quelque chose et qu'on

ne le comprenait pas. Il n'a

jamais eu de perte de con-

naissance.

Les jambes seraient deve-

nues raides et comme anky-

losées, après la rougeole,

sans qu'il y ait eu de convul-

sions à ce moment. Il avait

alors 16 ou 18 mois, s'es-

sayait il marcher avec les

chaises; il se tenait à peu

près bien. Après la rougeole,

il se tenait très mal. Les

bras sont devenus contrac-

turés vers la même époque

que les jambes, c'est-à-dire

après la rougeole.

Cou sans raideur. Tient

sa tète assez droite.

Prend les objets dans ses

mains ; porte le pain et les

André.

Aurait dit papa, maman,

mais avec difficulté. N'au-

rait jamais dit autant de

mots que René. Reconnais-

sait sa mère, attendu qu'il

ne voulait manger qu'avec

elle.

A les yeux un peu déviés

en bas, on ne sait depuis

quand.

Aurait eu aussi des mou-

vements nerveux.

Les jambes seraient deve-

nues raides vers 3 ans. On

ne se rappelle pas vers

quelle époqueila eu les bras

raides.

Cou raide, tète toujours

penchée.

Préhension un peu moins

bonne. Fait de grands mou-

238

DESCRIPTION de MALADES.

René

gâteaux à sa bouche. Les

mouvements de ses mains

sont assez sûrs. Ne tire la

langue que lors de ses se-

cousses.

Bave, grince des dents,

seulement depuis sa rou-

geole ; se cogne fréquem-

ment le derrière de la tôle.

Se met souvent en colère,

a souvent des accès de fou

rire sans motif. - Pas de

balancement. - A eu des

grimaces de la face, qui

tendent à disparaître. -Pas

de cris.

Reconnaissait ses parents

quittant tout le monde pour

caresser sa mère et surtout

son père.

Mâche assez bien. Bon

appétit; mange de tout; pas

de vomissements, constipa-

tion. Bonne santé physique.

Sommeil tranquille.

Maladies infectieuses :

Rougeole à 18 mois. Pas

de coqueluche. Une ophtal-

mie légère vers un an. Une

bronchite avant la rougeole.

André

vements avant de saisir un

objet, et quand il l'a saisi le

crispe entre ses doigts.

A des mouvements ner-

veux des mains, de la face

et des orteils, qui se cris-

pent. Tire la langue souvent.

Bave, grince des dents. Se

cogne la tète moins souvent

que son frère.

Se met en colère moins

souvent que son frère. - A

des accès de rire fréquents.

Pas de balancement. Fait

des grimaces qu'il accompa-

gne d'un petit cri.

Reconnaissait sa mère

même de la voix, sans la

voir.

Mâche assez bien. Appétit

bon, mange de tout; pas de

vomissements; selles régu-

lières, quelquefois diarrhéi-

ques. Bonne santé physique.

Sommeil tranquille.

Maladies infectieuses :

Rougeole à 18 mois, coque-

luche à 3 ans 1/2.

Vaccinés tous les deux avec succès.

Pas de varioloïde, de scarlatine, de fièvre muqueuse, d'an-

gine grave, de vers, d'onanisme, de chutes sur la tête, de

gourme, d'otite, d'adénite, d'abcès ni de fractures. -

DESCRIPTION DES malades.

239

On ne sait à quoi attribuer la maladie des deux enfants,

Les parents ont vu M. Charcot qui n'a pas donné de dignostic

précis et a ordonné du bromure, du phosphate de chaux et

des bains. Ils ont vu aussi M. Jules Simon, M. Lannelongue

qui n'a vu aucuue indication opératoire.

État des enfants Lecl... le 26 juin .897.

René.

Etat général satisfaisant,

malgré une maigreur assez

prononcée.

Crâne de volume moyen,

asymétrique : moitié droite

plus saillante et déjetée en

avant de telle sorte que le

grand axe est oblique d'a-

vant en arrière et de droite

à gauche. Front étroit et

fuyant sur les côtés (pas de

persistance des fontanelles).

Toute la moitié droite de la

face paraît plus saillante que

la gauche.

Oreilles grandes et très

écartées.

Yeux assez mobiles : 8tra-

bisme convergent, intermit-

tent, plus marqué à l'oeil

droit. Pas d'exophtalmie,

léger nystagmus. Pupilles

égales et symétriques, ne

paraissant pas réagir à l'ac-

commodation ; la réaction à

la lumière persiste. L'exa-

men du fond de l'oeil n'a pas

été pratiqué. .

Thorax mal conformé,

sans qu,il y ait de saillie,

rachitique, ni de déviation

And1'é.

Etat général assez mé-

diocre : maigreur et pâleur

prononcées.

Crâne asymétrique : la ré-

gion pariétale droite et la

région occipitale gauche

font saillie, de telle sorte

que le grand axe se dirige

d'avant en arrière et de

droite à gauche. Front

étroit et fuyant : son plan

prolonge le plan du visage

qui est incliné en arrière.

Un épi dans la région fron-

tale antérieure.

Oreilles, mômes carac-

tères.

Yeux présentent un léger

nystagmus. Pas d'au tretrou-

ble de lamotilité Les pupiles

réagissent à la lumière. La

réaction à l'accomodation

ne peut être constatée. Lé-

ger strabisme divergent.

Thorax mal conformé :

cyphose assez marquée.

Déformation ampulaire du

240

Affection familiale.

René. - --

de la colonne vertébrale. La

moitié gauche fait une sail-

lie plus marquèc que la

droite.

André.

sternum au niveau de l'ap-

pendice xiphoïde. Déviation

légère à convexité gauche

avec saillie des côtes gau-

ches au niveau de la ligne

axillaire.

Eig. 31. - René. (Juillet l8D7.) André.

Description DES malades.

2 il

René.

Testicules assez difficiles

à trouver, gros comme un

grain de blé.

Membre supérieurs mai-

gres : avant-bras en flexion

permanente avec pronation

sur le bras.Les mouvements

spontanés sont peu étendus

et paraissent surtout se pas-

ser clans l'articulation de

l'épaule. L'enfant ne peut

ni s'habiller, ni se donner

les soins usuels de propreté.

Il peut tendre les bras aux

personnes qui s'approchent

de lui.

Les mouvements provo-

qués sont limités : dans l'ar-

ticulation de l'épaule, il y a

une certaine résistance dans

la production des mouve-

ments de flexion et d'exten-

sion. Dans le coude qui est

en demi-flexion, la flexion

plus prononcée s'obtient

facilement, mais il y a une

résistance énergique à l'ex-

tension complète, surtout à

gauche. L'articulation du

poignet est normalement

mobile.

J11 emúres iii /(1 -ic ii)-s. L'en-

fant ne peut se tenir debout.

Il reste généralement assis

sur une chaise. La cuisse

est légèrement fléchie sur le

bassin, la jambe sur la cuis-

se ; les genoux se touchent

et les jambes .s'écartent très

légèrement en dehors. Les

pieds sont en valgus très

Bourneville, Bicêlre, 1902

André.

Mêmes caractères.

Membres supérieurs grê-

les, les bras écartés dutronc,

l'avant-bras fléchi sur le

bras, les mains en prona-

tion. Les mouvements spon-

tanés sont peu étendus ; le

malade est à peu près iner-

te. Il ne peut pas manger

ni s'habiller seul.

Les mouvements provo-

qués révèlent une certaine

résistance au niveau des

coudes et quand on arrive

a l'extension complète, on

perçoit à droite quelques

craquements.

Les membres inférieurs

sont grêles ; le malade étant

suspendu aux bras de l'infir-

mière, les cuisses sont légè-

rement fléchies sur le bassin,

les jambes sur les cuisses.

Les pieds sont en équin très

accusé ; les genoux font

saillie en dedans et se tou-

chent.

16

£ 42 . Affection familiale.

René. -

prononcé des deux côtés, les

orteils sont en crochet.

Les mouvements sponta-

né ? n'existent pas ou peu.

André.

Les mouvements sponta-

nés sont nuls : il ne peut

se tenir debout. -

Les mouvements provo-

qtcS-sout limités : on obtient

assez facilement- la ilexion

Fig. 35. - René. (Juillet 1897.) André.

Description des malades.

243

René.

Les mouvements provo-

qués sont à peu près tous

possibles, mais avec une

légère résistance dans l'arti-

culation de la hanche;

l'abduction parait être le

mouvement le plus limité.

On peut obtenir la flexion

complète des genoux, mais

l'extension est arrêtée par la

contracture des fléchisseurs

dont on sent la corde sail-

lante. Les mouvemenls de

l'articulation ti bio-tarsienne

sont très limités.

Les réflexes sont légère-

ment exasrérés.

. La sensibilité n'a pu être

étudiée avec précision.

Le malade gâte jour et

nuit.

. Il est idiot complet, ne

prononce aucun mot, regar-

de à peine quand on l'ap-

pelle, cependant si on lui

tend du pain il le saisit. Ne

reconnaît ni les odeurs

ni les substances sa-

.pides. Entend bien et voit

bien. Il a un tic : ouvre la

bouche et la referme aussitôt

sans proférer aucun son.

Son facies est dénué de

toute expression. Son carac-

tère est triste, mais affec-

tueux.

André. '

et l'extension de la hanche,

mais difficilement l'abduc-

tion. Dans le genou, on ob-

tient facilement la flexion

complète, mais les tendons

contractures opposent une

énergique résistance à l'ex-

tension. Dans les pieds, les

mouvements sont très limi-

tés et on ne peut redresser

le pied bot.

Les réflexes du poignet et

rotulien sont exagérés. Pas

de clonus du pied.

Lasezsibilité à la douleur

existe partout-

Le malade est grand gâ-

teux.

Il est idiot complet ; son

facies est dénué d'expres-

sion, ses yeux regardent

toujours dans le vague, il

ne dit aucun mot et ne

comprend rien.

1899. 12 décembre. L'état de René ne s'est en rien modi-

fié depuis l'entrée. Il cesse, ce jour, de se laisser nourrir.

244 Autopsie.

Le 13 décembre, on ne peut davantage l'alimenter; il est pâle,

a les mains, les bras, les pieds violacés et glacés et meurt dans

cet état sans jeter une plainte, ni tousser, ni faire aucun

mouvement. La température prise aussitôt après la mort était

de 3'10,4 (1).

Autopsie faite le 15 décembre 1899. Cadavre assez gras.

Tête. Le cuir chevelu est maigre et pâle, sans ecchymoses.

Les os du crâne sont moyennement épais, peu durs et offrent

des plaques transparentes. Les sutures persistent. Quel-

ques légères adhérences de la au niveau de la

scissure inter-hémisphérique. A la base du crâne, les

différentes fosses et crêtes sont sensiblement symétriques.

L'apophyse crista galli est mince, mousse. Le trou occipital

n'offre rien de particulier. Les apophyses clinoides sont effa-

cées. La glande pinéale est d'aspect normal ; il en est de même

du corps pituitaire. - Les nerfs, les htbercu ? smaon'a/re.s,

etc., sont égaux et symétriques. Le liquide colphalo-rachidien

est en petite quantité.

Encéphale. La forme générale de l'encéphale est un peu

modifié. La longueur de. l'hémisphère, mesurée au niveau du

grand axe fronto-occipital, est de 121 mm. (Sur un cerveau

d'enfant de 16 ans normal, cette longueur est d'environ

157 mm.). La largeur de l'encéphale est normale : elle est de

G` ? mm. sur notre encéphale et de Ci mm. sur le cerveau nor-

mal que nous avons pris comme point de comparaison. Il s'en-

suit que l'encéphale a un aspect arrondi et non allongé.

Au niveau de la face inférieure de l'encéphale, on remarque

encore la gracilité du chiasma, des nerfs et des bandelettes

optiques, sans modification de couleur.

Les deux hémisphères étant séparés, le corps calleux appa-

rait avec ses dimensions habituelles : il mesure dans le plus

grand axe 59 millimètres, alors que sur le cerveau de com-

paraison il mesure 62 millimètres.

Hémisphère droit. Face externe. Les circonvolutions

(1) On trouvera les tableaux de la T. à l'entrée, du poids et de la taille, des

mensurations de la tête et des membres dans le Compte-rendu de 1900, p, 11

15 et 10.

Atrophie du cervelet'.

215

sont assez volumineuses ; elles ne présentent aucune anomalie

dans aucune des régions.

Face interne. - Rien d'anormal à noter.

Face inférieure. La circonvolution fusiforme et la circon-

volution de l'hippocampe, particulièrement l'uncus, parais-

sent plus volumineux que les autres circonvolutions. En ré-

sumé, rien de spécial sur la morphologie de l'hémisphère droit.

Il n'y a à signaler, en plus, que quelques adhérences delapte-

màre, au niveau des circonvolutions pariétales et frontales.

Fig. 30. - Lecl... (René) en juin 1899.

246 Atrophie DU cervelet.

Hémisphère gauche. Sur la face interne et la face externe,

morphologie normale. Quelques adhérences de la pie-mère

analogues à celles de l'hémisphère droit. Au niveau de la

face inférieure, on remarque, comme à droite, le volume un peu

considérable des circonvolutions temporo-occipitales.

- Le cervelet est nettement atrophié dans sa tota-

lité : les hémisphères, le vermis, les lobules pneumogastriques,

sont très proportionnellement diminués de volume. Le grand

axe transversal du cervelet est de 75 millimètres (sur le cer-

veau de comparaison, il est de 103 millimètres). Le diamètre

maximum de l'hémisphère gauche mesuré depuis le cap bor-

dant l'incisure postérieure et passant par le point culminant de

la face inférieure est de 42 millim.. Sur le cervelet normal, il

est de 64 millim. (pu. VIII). Pourl'hémisphère droit, il est de 44

millimètres sur notre cervelet et de 53 sur le cervelet normal.

Le bulbe a gardé un volume normal, les olives sont saillan-

tes, leur longueur est à peu près normale, 14 millimètres au

lieu de 16 millimètres. La largeur est de 5 millimètres au lieu

de 8 millimètres. Le pont de Varole est très diminué de hau-

teur, 15 millimètres au lieu de li millimètres. La largeur des

pédoncules immédiatement au-dessus de la protubérance est

aussi au-dessous de la normale, 17 millimètres au lieu de 21

millimètres.

La moelle est d'aspect un peu grêle. I'P.rarnet Itistolo-

gique en a été pratiqué. Après avoir été chromée, elle a été

colorée suivant la méthode de \Veigert, et suivant la méthode

de de Pal avec surcoloration il la cochenille. Au niveau du ren-

flement cervical, on trouve une légère dilatation du canal de

l'épendyme. La substance grise est normale. Il y a une dimi-

nution des libres sans sclérose dans le cordon antérieur, au

niveau du faiscau pyramidal direct mais surtout dans le cor-

don latéral au niveau du faisceau pyramidal croisé. Il y a

conservation de libres dans le faiscau de dans le fais-

ceau cérébelleux et dans une zone formant bordure de la subs-

tance blanche à la périphérie de la moelle. Légère diminution

du nombre des fibres dans la partie antérieure du cordon

postérieur. Au niveau de la 6* dorsale, même disposition des

lésions. Au niveau du renflement lombaire les seules modi-

fications sont les suivantes : il n'y a plus d'apparence de con-

servation des fibres dans la zone bordante du cordon latéral

ni dans le faisceau cérébelleux.

- Réflexions. - I. La juxtaposition des deux obser-

Atrophie DU cervelet.. · 247

vations des frères Lecl.. a un double intérêt : clini-

que et anatomique. -

1° L'intérêt clinique réside dans la similitude des

affections dont étaient atteints les deux frères : ils pré-

sentaient tous deux les symptômes cérébro-spinaux qui

caractérisent la diplégie spasmodique cérébrale infan-

tile. Tous deux étaient atteints d'idiotie complète. La

première question qui se posait était de savoir s'il s'agis-

sait là d'une affection familiale. Suivant Pauly et Bonne,

pour mériter ce qualificatif, une affection doit : a) attein-

dre, sans changer de forme, plusieurs enfants d'une

même génération ; b) débuter à peu près au même

âge chez tous les enfants de cette génération ; c)

être cliniquement indépendante de toute influence exté-

rieure, d'une affection acquise ou d'un accident de la

vie intra-utérine ; - (1) ces caractères doivent consti-

tuer la règle et non l'exception. Dans le double cas que

nous présentons, il y a, il côté de nos deux malades,

cinq enfants qui n'ont eu aucune affection semblable.

De plus, si nous pouvons Ù peu près affirmer l'absence

de syphilis et l'absence de traumatisme obstétrical,

nous ne pouvons être certains de l'absence de convul-

sions ni d'infection méningitique. Celui de nos enfants

qui est mort a eu la rougeole dont l'influence sur la

maladie nons parait douteuse. Aussi croyons-nous

pouvoir conclure à la nature familiale de l'affection.

2° L'intérêt, anatomique de l'autopsie- de René

Lecl... réside dans Y atrophie cérébelleuse que nous

avons constatée. L'atrophie cérébelleuse est rare.

Tous les cas observés sont rapportés dans la thèse de

Thomas et le nombre des atrophies bilatérales est de

28. Dansce nombre, certains cas ont été des trouvailles,

d'autopsie chez des gens déjà avancés en âge, les au-

tres ont été révélés cliniquement par l'apparition de

248 Atrophie DU cervelet.

symptômes cérébelleux plus ou moins nets, trois cas

enfin semblent se rapprocher du nôtre et dater do

l'enfance. C'est le cas de Duguet, observé chez un

enfant cle 17 ans qui avait présenté uniquement des

troubles de la parole, et dont une soeur était idiote ; -,

c'est le cas de Spillcr chez un jeune homme de 19 ans

qui avait présenté des troubles de la parole, du stra-

bisme interne et quelques troubles de la motilité des

membres inférieurs. Enfin c'est le cas de Combettes

qui consiste en une absence complète du cervelet

chez une enfant morte it 11 ans et qui avait présenté

aussi des troubles moteurs des membres inférieurs et

des troubles de la parole.

II. Nous ne croyons pas que l'atrophie cérébelleuse

dans notre cas suffise à expliquer la symptomatologie

de l'affection : dans la moelle en effet, la dégénéres-

cence occupe les faisceaux pyramidaux. Nous ne

sommes point autorisés à affirmer que nous trouverons

une atrophie cérébelleuse il l'autopsie d'André Lecl...

et dans cette hypothèse quelle sera la caractéristique

anatomiquede son affection Mais il est permis actuel-

lement cle le supposer, aussi nous a-il paru intéres-

sant de juxtaposer aujourd'hui l'observation clinique

d'André Lecl... encore vivant à l'observation anato-

mo-cliniquc de son frère René. (Voir PL. I, II et III.)

III. Au point de vue de l'hérédité, nous trouvons

du côté paternel, un oncle buveur, une cousine hémi-

])léf/iquc, et du côté maternel, une petite cousine

épileptique, un cousin alcoolique, et un autre, d'un

degré très éloigné, sourd-muet. En somme, hérédité

modérément chargée. Collatéralement, un frère idiot,

André, et un frère arriéré.

IV. Mentionnons Y hypothermie très notable (3 ! 1°,4)

DIPLLGIE; contracture. 249

que l'autopsie n'a pas expliquée. Nous avons observé

le même phénomène chez d'autres idiots, qui étaient

cachectiques. Or, tel n'était pas le cas ici, car le poids

après décès était de 19 kil. 800, c'est-à-dire supérieur

à celui qui avait été constaté six mois plus tôt.

Nous avons communiqué au Congrès international

de médecine de 1900 (section de neurologie) et publié

dans notre Compte-rendu de 19001'histoire clinique

des deux frères Lecl... (René) et Lecl... (André) et

l'étude anatomique du système nerveux du frère aîné

(Lecl... René) dont nous avions pu faire l'autopsie (1).

Nous publions aujourd'hui la fin de l'observation

du frère cadet (Lecl... André) et les résultats de son

autopsie : l'hypothèse que nous avons faite en 1900

sur la nature familiale de cette affection se trouve

pleinement confirmée. ,

Suite DE l'observation D'A. LEC.. (1899-1903). Contracture,

progressive de plus en plus accentuée : recroquevillement.

Amaigrissement extrême jusqu'à 13 k. et 9 k.. Hypother-

mie jusqu'à 36°, 34°, et 33".8. Pas d'albuminurie.

AUTOPSIE. - (Mars 1902). Broncha-pneumonie à gauche.

Bronchite généralisée. Cerceau macroscopiquement

normal; atrophie, ponta-cérébelleuse identique à celle de

son frère aîné.

Lecl.... (André Eugène), né le 7 octobre 18SG, est entré

à Bicêtre à l'âge de 10 ans le 22 juin 1897, sur un certificat

de M. Magnan, le déclarant atteint d'idiotie, gâtisme et

paraplégie.

(I) Cette observation avec les photographies des malades et celles de l'encé-

. ¡¡hale du décédé à été reproduite dans le ne 17 du Progrès médical (1901,

p. 2731.

250 Affection familiale.

' Son histoire détaillée que résume le sommaire, est jointe à

celle de son frère dans la publication que nous avons faite,

Nous reprenons, ici, l'observation, là où nous l'avons laissée

c'est-à-dire depuis le mois do juin 1900.

Températures à l'entrée.

Augmentation de la contracture. 251

11900. Juin. - L'examen du malade fait constater une con-

tracture en flexion des membres supérieurs portant 'surtout

sur l'avant-bras ; les mains restent au contraire souples et

tombantes. Les membres inférieurs sont aussi contracturés

en flexion. Les réllexes du poignet sont exagérés, ainsi que

les réflexes rotuliens. Il n'y a pas de clonus du pied. Les

réflexes plantaires sont en flexion. Le malade est atteint

d'idiotie complète avec diplégie cérébrale infantile. On relé ?

ve chez lui une asymétrie crânienne aux dépens du côté

droit, et une malformation thoracique caractérisée par la

proéminence de l'extrémité inférieure du sternum.

Fig. 38 - Le Clèr... en 1902.

252 Stigmates de dégénérescence.

L'enfant gâte nuit et jour. Il ne comprend absolument rien,

ne fait rien de ses mains si ce n'est porter son pain à sa bou-

che.

Puberté (14 ans). Verge : longueur 4 cm. ; circonférence

4 cl, Testicules de la grosseur d'un pois. Glabre partout ;

quelques poils follets sur les membres inférieurs.

1901. 22 janvier. Tailla : 0"'94, soit 52 cent. au-dessous

de la taille moyenne à son âge qui est de lm169 (Quetelet). Le

nanisme est bien évident. (Fig. 3 i J.

Juillet. L'enfant se contracture de plus en plus. Quand

il est assis sur sa chaise, le corps est plié en deux et la tête

penchée en dehors du siège. Il est grand gâteux nuit et jour,

comme auparavant, ne comprend rien et ne- dit aucun mot.

1902. Ja)it;t'e) ? La contracture a augmenté : les cuisses et

les jambes sont plus fléchies qu'autrefois, le varus équin des

pieds n'a pas augmenté. La flexion et la pronation des avant-

bras, la flexion du corps ont augmenté. La contracture est

presque irréductible aux membres inférieurs. La recherche

des réflexes est difficile il cause de la contracture. Le faciès

de l'enfant, porte huit ans alors qu'il en a quinze. Poids :

14 k.800. Par suite du recroquevillemcnt du corps, il est difficile

d'avoir sa taille exacte. Elle parait être de 1 III 08.

Puberté. État glabre de tout le corps. Testicules : petit

oeuf de serin. Verge : 3 cm. sur 3 cm.

Juillet. L'enfant, après avoir beaucoup maigri, a

une tendance à reprendre. Il mange beaucoup et ne pleurni-

che plus comme auparavant.

Examen au point de vue des stigmates de dégénérescence

et de l'infantilisme. Asymétrie crânienne ; plagiocéphalie ;

asymétrie frontofaciale. On constate la présence d'un épi. II

existe un strabisme divergent. Il y a une saillie très mar-

quée du maxillaire supérieur et du maxillaire inférieur. Les

dents sont très écartées, amorphes, jaunâtres. Le tronc est

cylindrique, petit, peu développé, il n'y a pas de proéminence

de l'abdomen. Tout le tronc présente une courbure antéro-

postérieure concave en avant. L'émaciation est générale, la

peau est fine, le corps est glabre.

Examen des oreilles. Oreille droite : grande, allongée,

écartée du cràne. Hauteur G c·m., largeur G cm. L'hélix est

ourlé irrégulièrement, étroit en haut, assez large à son ori-

Cachexie ; hypothermie. ? 3 3

ginc et à sa partie moyenne. L'anthélix est bien marqué. Le

tragus est petit, l'antitragus est large, un peu renversé en

dedans. La fossette scaphoïde est bien dessinée, la fossette de

l'anthélix est assez superficielle. La conque est profonde,

triangulaire, la racine de l'hélix la sépare en deux parties.

Le lobule est large, mince, peu haut, légèrement soudé, un

peu renversé en arrière. Le conduit auditif est large. Il n'y

a pas d'écoulement d'oreille.

Oreille gauche. Hauteur : 5 cm. 5, largeur : 3 cm. 2. L'hélix

est bien marqué. L'anthélix est semblable à celui de l'oreille

droite. Le tragus est petit; l'antitragus est renversé un peu

en dedans. La fossette scaphoïde est bien marquée. La

fossette de l'anthélix est peu accusée. La conque est triangu-

laire, profonde, la racine de l'hélix ne la sépare pas complé-

tement. Le lobule est large, un peu épais, légèrement soudé,

très peu haut. Le conduit auditif est large, ne présente rien

de particulier.

Novembrc. - L'enfant mange moins, il maigrit depuis une

quinzaine de jours. (Fig. 38).

1903. Janvier. L'enfant a eu une syncope pendant qu'on

lui donnait un bain. Il revient facilement à lui. T. R.35°.

Pouls : 80. L'enfant avait continué à s'alimenter un peu de-

puis novembre. On ne constate pas chez lui d'autres symp-

tômes morbides.

L'examen des organes ne montre rien de particulier. Les

bruits du coeur sont bien frappés, mais assez rapides. Rien

à l'auscultation des poumons. Pas de troubles digestifs :

l'enfant est comme toujours constipé. Pas d'anorexie.

15 janvier. - T. IL 3° ; P. 110.

16 janvier. A 7 h. du matin, la température rectale prise

avec deux thermomètres successivement, laissés un quart

d'heure, marque 3'r ?

A 2 heures de l'après midi, on pratique un enveloppement

chaud avec couvertures de laine et bouillotes. Cet envelop-

pement dure une heure et demie. A l'intérieur de ce milieu,

le thermomètre mis dans le rectum, pendant toute la durée

de l'enveloppement, marque 35 ? f.

17 janvier. 7 h. du matin : T. R. 37° ; à 9 Il. du matin

37°,9. P. l'0. Face rouge, injectée. Toux légère.

18 janvier. T. R. 3G ? P. 430, bien frappé. On consta-

te quelques râles de bronchite. L'enfant se cachectise, geint,

sans cesse, s'amaigrit.

254 - Cachexie; contracture.

. 19 janvier. On constate encore des râles de bronchite.

Du 19 au z janvier. Le pouls bat de 90 il 100.

Du 2 ? janvier au 1 el' février, l'enfant prend peu à peu une

teinte cachectique et s'amaigrit. On ne constate aucun trou-

ble fonctionnel du côté du tube digestif, ni du côté de l'appa-

reil pulmonaire et circulatoire. L'enfant ne tousse plus. La

température oscille entre 36° et 37°. Le pouls est bien frap-

pé ; il oscille autour de 90.

La contracture en flexion des membres inférieurs s'est

encore accentuée et a atteint le maximum possible : les

cuisses sont fléchies de telle sorte que leur face antérieure

est en contact avec la partie antérieure de l'abdomen et que

les jambes sont appliqués contre la face postérieure des

cuisses. Le pied reste en attitude normale. Les membres

supérieurs sont contractures en flexion. (1,'ig. 38.)

Les réflexes plantaires sont en flexion. Il n'y a pas de clo-

nus du pied. Les réflexes rotuliens ne sont pas perceptibles :

il en est de même pour les réflexes du poignet.

Février. L'état général est toujours semblable. L'hypo-

thermie réapparaît : la température descend fréquemment

au-dessous de 3 in, et de a6°. Le pouls oscille aux environs de

70 pulsations. 19 février : Poids : 10 kilos.

22 février. L'aspect de l'enfant est semblable « celui

d'un singe ou d'un chien» (notes de l'infirmière). La physio-

nomie exprime la souffrance, Lecl.. pousse de temps à autre

des cris plaintifs qui n'ont pour ainsi dire rien d'humain. En

un mot. l'aspect de cet enfant est repoussant. Le visage est

décharné, le front est plissé. Les maxillaires sout nettement

dessinés. Les yeux sont injectés, toujours larmoyants ; les

paupières sont collées le matin. Le regard est vague, pres-

que éteint. Ler.. regarde machinalement quiconque passe

devant lui. Le corps de l'enfant est immobile : la tête seule

se tourne automatiquement à droite et à gauche ou se soulè-

ve légèrement. La maigreur est extrême, cadavérique. Les

os font saillie partout. Les bras sont repliés sur la poitrine et

les mains posées sur les avant-bras. Les bras sont collés

contre le tronc, les avant-bras repliés sur le tronc, les mains

iL angle aigu sur l'avant-bras; les pouces fléchis transversa-

lement dans la paume de la main, les quatre : autres doigts

fléchis sur le pouce. Il existe une contracture très prononcée

des épaules et des coudes qu'on ne peut étendre complète-

ment. La contracture du poignet peut être vaincue ainsi que

celle des doigts. Ces mouvements provoqués sont douloureux

Hypothermie. 255

et arrachent des cris à l'enfant. Durant ces cris, les rides de

la face s'accusent au niveau de la lèvre supérieure, des joues,

du nez, des paupières.

Quant aux membres inférieurs, les cuisses sont compléte-

ment fléchies sur le tronc, et le genou est collé sur la face

externe du bras au-dessous de la tête de l'humérus. Les

jambes sont complétement fléchies sur les cuisses, collées

contre elles, le talon reposant sur les fesses. Il existe une

rigidité invincible des hanches et des genoux. Les pieds sont

relevés fortement sur les hanches, la face dorsale regardant

un peu en dehors. Il existe une contracture très prononcée des

pieds, prédominant à droite. Le cou-de-pied est rigide, mais

moins que les hanches. Les orteils sont légèrement fléchis.

L'enfant présente de chaque côté des cinq dernières vertè-

bres dorsales et au niveau du sacrum de petites ulcérations

de t2 ? sur 8. Tous les muscles sont réduits, par exemple les

pectoraux ont l'aspect de simples membranes. Le ventre est

tout à fait rétracté. Il est impossible de l'examiner, les cuis-

ses rétractées le recouvrant complètement. Les stcrnocléï-

domastoïdiens sont nettement dessinés. Le cou est un peu

raide, mais ou peut faire disparaître cette raideur.

L'enfant ne tousse pas, il s'affaiblit et maigrit de jour en

jour. Il n'y a pas de vomissements, pas de diarrhée, mais un

peu de tendance à la constipation. L'enfant ne prend aucune

nourriture solide, il boit environ six verres de lait par jour

qu'il prend il la cuiller. On lui délaye deux oeufs dans son

lait : il prend le tout avec appétit. Les nuits sont mauvaises

et agitées : il n'a pour ainsi dire pas de sommeil, il crie une

partie de la nuit, mais par contre dormirait une partie de la

journée. T. R. 35° et 36°.

26 février. Examen des urines. (M. Wille, interne en

pharmacie.) Albumine : néant. Urée à la température de

15°, 16 gr. par litre.

1° mars. - La température oscille entre 35° et 38°. Le

pouls est petit, lent. L'amaigrissement continue : il n'y a ni

toux, ni diarrhée.

4 mars. - L'enfant s'affaiblit de plus en plus ; sa maigreur

s'accentue encore. La température est descendue à 35°. Poids :

il k.200 au lieu de 47 k. 500, c'est-à-dire 38 k. 300 au-dessous de

la moyenne il son âge (16 ans et demi).

6 mars. - L'enfant prend le lait moins bien que les jours

précédents. On ne remarque rien à l'examen de la bouche et

de la gorge. Les yeux sont larmoyants et vitreux, fortement

excavés dans les orbites. T.R. 34°,8 et 35°, 1. .

256 Mensurations : tète ET membres

-Mesures de la tête.

/ Affection familiale. 257

8 mar.s. L'enfant ne prend plus que quelques gouttes de

lait qui sont rejetées aussitôt. La dyspnée est intense,

l'abattement complet. L'aspect est cadavérique. L'enfant

meurt à cinq heures du soir, sans cri, ni râle, mais la phy-

sionomie est grimaçante. Poids après décès 9 k.

Tableau du poids et de la taille.

258 Atrophie CÉRÉBELLEUSE.

cerveau de son frère. La longueur du grand axe fronto-occi-

pital est de 153 ? (sur un cerveau de seize ans normal, cette

longueur est d'environ 157 ? et chez Lee... (René), elle

n'était que de 1 ? 1 ? «); cette longueur n'est donc pas très

diminuée. La largeur d'un hémisphère est de fi2»n, c'est-à-dire

la largeur de l'hémisphère normal. Les dimensions sont donc

sensiblement celles d'un hémisphère normal d'un enfant de

16 ans. Cependant la forme en parait un peu plus arrondie.

Le chiasma, les bandelettes optiques sont normaux dans

leurs dimensions, dans leur coloration. Le corps calleux

possède des dimensions normales ou un peu au-dessus de la

normale (62ml11); il mesure 68 ? Celui de Lee... (René)

mesurait 59 ? seulement. (PL. IX.)

Hémisphère droit. Face externe. On ne constate aucu-

ne anomalie à un premier examen. Les circonvolutions sont

de volume normal, il n'y a pas d'atrophie, ni de lésions.

La décortication se fait facilement, sans entrainer la subs-

tance corticale : il n'y a pas de méningo-encéphalite appré-

ciable, ni de lésions en foyer.

Face inférieure et face interne. - Elles ne présentent

rien d'anormal. La décortication s'y fait aussi facilement que

sur la face externe.

Hémisphère GAUCHE. - Cet hémisphère n'a pas été décor-

iqué. Il ne présente aucune anomalie, ni aucune lésion

apparente sur les circonvolutions de la face interne, de la

face externe, de la face inférieure. (Réservé pour examen

histologique).

La méninge donne en quelques endroits l'apparence d'être

un peu épaissie, mais si on tente sur ces points la décortica-

tion, on voit qu'elle se fait facilement et normalement. Il n'y

a donc pas la davantage de méningo-encéphalite.

CERVELET.-Il existe une atrophie régulière et uniforme

portant sur les deux hémisphères, sur le vermis, sur les lobu-

les pneumogastriques. Le grand axe transversal du cervelet

est de 76mm (Il est de t03 ? sur le cervelet normal de compa-

raison. Il était de 75 ? chez Lecl.. (André). Le diamètre

maximum de l'hémisphère gauche mesuré depuis le cap bor-

dant l'incisure postérieure et passant par le point culminant

de la face inférieure est de 1.GIIIIII. Il est de 64 ? sur le cerve-

let normal et de 42 ? chez Lecl.. (André). A droite, ce diamè-

tre est de 47 ? il est de 44 ? chez Lecl.. (André).

' Le bulbe semble atteint par l'atrophie. Le pont de Varole

Atrophie cérébelleuse. 259

est lui-même manifestement atrophié. Quant à la largeur

des pédoncules, elle ne parait pas diminuée.

Cou et THORAX. - Les deux poumons sont le siège de

bronchite généralisée.

Le poumon gauche présente un foyer de broncho-pneu-

monte. Il n'y a rien de particulier du côté du péricarde, ni

du coeur. Pas de persistance du trou de Botal. Aucune

adhérence des plèvres, pas d'épanchement.

Abdomen. Il n'y a rien de particulier dans la cavité

péritonéale; rien de particulier à l'estomac, ni aux intestins.

Le coecwn est pourvu d'un appendice très long (10 cm.) qui

est accolé par sa face postérieure au péritoine. Le mésentère

contient un certain nombre de ganglions légèrement tumé-

fiés. Le foie est un peu dur, mais n'offre aucune lésion

extérieurement ou à la coupe. La rate est également un

peu dure, mais n'est pas anormale à la surface ni à la coupe.

Les capsules surrénales et les reins sont normaux. Les

testicules se trouvent dans le canal inguinal. Rien de parti-

culier du côté de l'anus.

La cause de la mort est la broncho-pneumonie.

Poids des organes.

2GO Cachexie; hypothermie.

Déjà, cliniquement, les deux malades nous avaient

semblé identiques et nous avions émis l'hypothèse que

la lésion constatée il l'autopsie du premier malade

serait aussi constatée il celle du deuxième. L'événe-

ment nous a donné raison.

Notre deuxième malade est mort à 16 ans, comme

son frère aîné, et nous avons pu, ainsi qu'on l'a vu

plus haut, vérifier noire diagnostic : il s'agit d'une

atrophie cérébelleuse familiale. Nous ne connaissons,

pas plus qu'en 1900, d'autre exemple de cette affection

familiale.

Tableau des Températures.

Nanisme et infantilisme. 261

II. Accessoirement, nous attirerons l'attention sur la

cachexie de ce malade qui a été extrême et qui a fait

descendre son poids à 9 kilog., alors que le poids moyen

d'un enfant de son âge (16 ans et demi) est de 47k. 500.

Le poids de son frère s'était abaissé dans de moindres

proportions : 19 k. 700.

III. Nous relevons aussi chez notre malade une

hypothermie remarquable, plus accentuée que celle

que nous avions enregistrée chez l'aîné et qui ne peut

pas être davantage expliquée, sauf par la cachexie

arrivée à un degré véritablement squelettique. Le

tableau ci-dessus permet d'apprécier la marche de

l'hypothermie, qui dans ce cas s'est prolongée plus

de deux mois.

Nous avons eu soin, comme toujours, lorsqu'il s'agit

de températures anormales, de vérifier l'hypothermie

en prenant simultanémenlla température rectale avec

deux thermomètres, bien appliqués durant 5, 10 et

même 15 minutes. De plus, nous faisons contrôler nos

thermomètres, afin de nous assurer que les tempéra-

tures notées sont bien exactes.

IV. Les frères Lecl... nous fournissent deux

beaux exemples de nanisme avec infantilisme.

. Lee... (René), a 14 ans, mesurait un mètre, soit

quarante sept centimètres en moins de la taille

moyenne à cet âge (1). En juilet 1899, à 15 ans et

demi, avant la cachexie, il pesait 19 kilogr. 700 soit

25 kilogr. en moins du poids moyen.

En 1901, à 16 ans, alors qu'il ne s'était pas encore

recroquevillé, Lee... (André) avait cinquante-deux

(t) Dans la dernière année de sa vie, le recroquevillement a empêché de

prendre sa taille.

2ô2 Nanisme ET infantilisme.

centimètres au-dessous de la taille moyenne de son

âge.

Les détails que nous avons donnés sur l'aspect

général des malades, do leur face en particulier, sur

l'absence de développement du système pileux (visage,

aisselles, pénil) et sur l'arrêt de développement des

organes génitaux ne laissent aucun doute sur la réa-

lité de l'infantilisme.

XXIII.

Hypothermie ;

PAR BOURNEVILLE.

. Nous avons publié un grand nombre d'exemples d'hypo-

thermie due à des causes multiples. Nous en avons cité

quelques-uns dans notre Compte-rendu de 1901 (p. 166 et

169) et nous avons ajouté aux anciens, sept cas nouveaux,

que nous réindiquons avec 12 cas récents dans le tableau

suivant.

Dans quelques-uns des cas d'hypothermie, Occasionnée 'e

par un état cachectique (idiotie ou épilepsie) qui n'est pas

sans'analogie avec l'athrepsie des nouveau-nés, il est sur-

venu une broncho-pneumonie ou une congestion pulmo-

naire. Malgré cette complication terminale, l'hypothermie

a persisté. -

. four facilter la tâche à ceux qui voudraient traiter cette

intéressante question, nous rappellerons que nous avons

signalé l'abaissement de la température centrale dans l'a-

poplexie cérébrale (1870); dans l'urémie (187 1-) - (1) ? dans la

maladie bleue (1880) (2); lemyxoeclème infantile (1880) (3);

Y abstinence (4); dans la mélancolie, etc.

(1) De la température dans l'urémie (Revue phot. des hôp. de Paris, 1871, p.

147, etc; -Rech. cliniq. et thermomé triques dans les maladies du système

nerveux, etc., etc.)

(2) iYote sur la maladie bleue ; température centrale, en collaboration avec

d'Qlier (Soc. anal,, 1880, Progrès médical, 188o, p. 163, Compte-rendu de 1880).

(3) Note sur un cas de crétinisme avec myxoedème (Compte-rendu de 1880,

p. 16). Voir nos autres travaux, sur le myxoedème infantile dans les Com-

ptes-rendus de 1886 à ce jour.

(4) Un idiot jeûneur (Ibid., p. 23).

264 Hypothermie.

XXIV.

Inégalité de poids des hémisphères cérébraux et

cérébelleux ; -,

l'An nOUI\ : \'E\"'LLI,.

. Le tableau qui suit résume les cas dans lesquels

nous avons trouvé, à l'autopsie, une inégalité de poids

des hélllisJil/(¡'cs ('I ! ¡'(30¡',W,\'. Nous les avons classés

d'après le chiffre de la différence, en commençant

parles plus élevées (350 or., 320; etc.). Nous y avons

joint les pesées des hémisphères cérébelleux. Pour

être complet, ce tableau devrait comprendre le poids

du cerveau et du cervelet des enfants normaux du

même âge que nos décédés. Nous essaierons de com-

bler cette lacune l'an prochain.

Tel qu'il est, il présente un certain intérêt, car il

permet de comparer l'inégalité des hémisphères ccré-

hraux à celle des hémisphères cérébelleux.

Cette statistique méritait enfin d'être placée après

les deux beaux cas d'atrophie cérébelleuse qui précé-

dent.

Travaux scientifiques faits dans le service.

(Thèses et mémoires).

1880.

LEROY (A.). De l'étal de mai épileptique. Thèse de Paris.

S¡' : GLAS (J.). De l'influence des maladies intercurrentes

sur la marche de l'épilepsie. Thèse de Paris.

BOURNEVILLE. - Contribution a l'élude de l'idiotie. Ce

travail comprend deux parties, dont la seconde a été faite en

collaboration avec M. Brissaud. (Archives de neurologie,

1880, t. I, p. 69 et 399j. Contribution a l'élude de la dé-

mence épileptique. (Archives de neurologie, 1880, p. 213).

1881.

RIDEZ SAILLAItU (G.). De la cachexie pachydermique

(myxoedème des ailleurs anglais.) Thèse de Paris.

D'Olier (II ). De la coexistence de l'hystérie et de l'épi-

lepsie avec manifestations distinctes des deux névroses

considérées dans les deux sexes et en particulier chez

l'homme. Mém. qui a obtenu le prix Esquirol. (Annales médi-

co-psyclvolog., sept. 1881) et tirage à part aux bureaux du

Progrès Médical).

Sadrain (G.). Étude sur le traitement des attaques

d'hystérie et des accès d'épilepsie. In-8° de 56 p. Th. de Paris.

IIUBLL (M.). Reche.rches cliniques et thérapeutiques sur

l'épilepsie. Monobromure de camphre, bromure de zinc, de

sodium. Thèse de Paris.

MOBLOT (E.). Sur une forme grave de l'épilepsie. Thèse

de Paris.

COULBAUT (G.). Des lésions de la corne d'Ammon dans

l'épilspsie. Thèse de Paris.

Travaux faits dans le service. 275

1882.

BntcoN (L.). Du traitement de l'épilepsie : Hydrothéra-

pie. Arsenicaux. Magnétisme minéral. Aimants. - Sels

de pilocarpine, etc. Thèse de Paris.

Roux (G-L.). - Traitement de l'épilepsie et de la manie

par le bromure d'éthyle. Thèse de Paris.

WuiLLAMiÈ (Th.).-De l'épilepsie dans l'hémiplégie spas-

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Thèse de Paris.

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ment du strabisme. Thèse de Paris.

RENOULT (P. L.) - Contribution à l'étude des rapports de

l'Idiotie et du Rachitisme. Thèse de Paris. ·

Liste des Internes de notre service (1880-1902)

Liste des Internes de notre service (1880-1902)

EXPLICATION DES PLANCHES

282 Explication des planches.

Planche I.

(Obs. de llierc..., p. 13).

Hémisphère droit. Face externe.

F', F2, F3, lre, 20, 3' circonvolutions frontales.

P1, pli pariétal supérieur.

PA, circonvolution pariétale ascendante..

FA, circonvolution frontale ascendante.

SR, sillon de Rolando.

P2, pli pariétal inférieur.

P3, pli courbe.

Se S., scissure de Sylvius.

LOC, lobe occipital.

LO, lobule orbitaire.

Tl, T2, T3, 1 ? 2°, 3e circonvolutions temporales.

Se fs., scissure frontale supérieure.

Sc fi., scissure frontale inférieure.

Se p., scissure parallèle.

Se t2, 2e scissure temporale.

281 EYP1.ICA'I'10\ DES PLANCHES.

PLANCHE II.

(Obs. de Merc..., p. 13).

Face interne de l'hémisphère droit.

Fi, Première circonvolution frontale interne.

LP, Lobule paracentral.

CCC, Circonvolution du corps calleux.

CC, Corps calleux.

CS, Corps strié.

CO, Couche optique.

LQ, Lobule quadrilatère.

C, Coin.

P, Pédoncule cérébral.

CA, Corne d'Ammon.

CH, Circonvolution de l'hippocampe.

TO, Circonvolution temporo-occipitale.

Se cm, Scissure calloso-marginale.

F ca, Scissure calcarine.

Se to2, 2° scissure temporo-occipitale.

Bourneville, Bicêtre, 1902. yL, il

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902. PL. III.

BOURNECILLE, Bicêtre, 1902. \ PL. III.

286 Explication DES planches.

Planche III.

(Obs. de Joha..., p. 62).

Face externe de l'hémisphère droit.

r,Fa,F3, Ie", 2e, 3°, circonvolutions frontales.

P1, Pli pariétal supérieur.

P2, Pli pariétal inférieur.

PC, Pli courbe.

PA, Circonvolution pariétale ascendante.

FA, Circonvolution frontale ascendante.

SR, Sillon de Rolando.

LOC, Lobe occipital.

LO, Lobule orbitaire.

T',T2,T3, lire, 2e, 3°, circonvolutions temporales.

tpc, Pli de passage de T2 au PC.

to, Pli de passage de T2 au LOC.

Sep, Scissure parallèle.

(Cette planche et la suivante ont été placées aux pages 62

et 63 du volume).

Explication DES planches* 287

Planche IV.

(Obs. deJoha ? p. 63.)

Face interne de l'hémisphère droit.

h ? Première circonvolution frontale interne.

LP, Lobule paracentral.

CCC, Circonvolution du corps calleux.

CC, Corps calleux.

CS, Corps strié.

CO, Couche optique.

LQ, Lobule quadrilatère.

P, Pédoncule cérébral.

CA, Corne d'Ammon.

CH, Circonvolution de l'hippocampe

C, Coin.

LOC, Lobe occipital.

Sc cm, Scissure calloso-marginale.

Se ip, Scissure interpariétale.

288' EXPLICATION DES, PLANCHES.

Planche V.

(Obs. de Deba..., p. 109.) ,

Face externe de l'hémisphère droit.

F', F2, F3, Ire, 2e, 3° circonvolutions frontales.

LPS, lobe pariétal supérieur. '

LPI, lobe pariétal inférieur.

F, fourche. ,

PA, circonvolution pariétale ascendante.

FA, circonvolution frontale ascendante. ' r

SR, sillon de Rolando.

PC, pli courbe.

LOC, lobe occipital.

LO, lobe orbitaire.

Ti, T2, T3, 1re, 2e, 3" circonvolutions temporales

Se S., scissure de Sylvius.

Se fs., scissure frontale supérieure.

Se fi., scissure frontale inférieure.

Se p, scissure parallèle.

BOUItNE'ILLE; B2Clt'C 1S02. PL. IV.

BOURNEVILLE, Bicêtre,- 1902. 19

290 Explication DES planches.

Planche VI.

(Obs. de Deba..., p. 110.)

Face interne de l'hémisphère droit.

FI, Première circonvolution frontale.

LP, Lobule paracentral.

CC, Corps calleux.

CS, Corps strié.

CO, Couche optique.

CA, Corne d'Ammon.

CH, Circonvolution de l'hippocampe.

TO, Circonvolution temporo-occipitale.

T2, 2° circonvolution temporale.

LO, Lobule orbitaire.

Se cm, Scissure calloso-marginale.

Se pi. Scissure perpendiculaire interne.

Se to2, 2,, Scissure temporo-occipitale.

Sca, Scissure calcarine.

292 Explication DES planches.

Planche VII.

Squelette de la tête de Deb... (p. 1'14).

Or, voûte orbitaire. N, nasion. - H, II plan orbitaire

horizontal, passant par le centre de l'orbite et le trou optique,

Op. cc, plan du clivus. Os, os wormiens. - R, plan du

rocher. La ligne indiquée sans lettre, entre le plan orbi-

taire (l'I, II) et le plan du rocher (R), répond au plan de l'inion.

op, plan du trou occipital. - Les signes XX répondent aux

bosses frontales et pariétales. E, fosse ethmoidade. - T,

fosse temporale. R, bord supérieur du rocher. A, trou

auditif. B, basion (bord antérieur du trou occipital).

$OTJRNIL1 E : Biçétré. T902. PL. Y.

294 Explication DES planches.

Planche VIII. 1

. (Obs. de Lecl... René, p. 2'r6).

Base de l'encéphale montrant l'atrophie considérable du

cervelet.

l3oamevu.r,s, Bicêtre, 1 £ 02. 'IL. VIII.

296 Explication DES planches.

Planche IX.

(Obs. de Lecl.. (André, p. 258).

Base de l'encéphale montrant l'atrophie considérable du

cervelet.

Bourneville, Bicêtre, 1902. T'r,. IX.

ERRATA

Page 114, dans la note, au lieu de Planche III, lire PL. V.

, 161, lire Chap. XIII au lieu de XI.

169, XIV XII.

172, XV XIII.

175, XVI XIV.

TABLE DES MATIÈRES

PREMIÈRE PARTIE

Histoire du service pendant l'année 1902.

Section I : Bicêtre.

300

TABLE DES MATIÈRES.

Table des matières. 301

302 TABLE DES matières.

TAULE DES MATIÈRES. 303