RECHERCHES
SUR
L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE
ET L'IDIOTIE '
PUBLICATIONS DU PROGRES' MEDICAL
RECHERCHES
CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES
SUR
L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE
ET L'IDIOTIE
. COMPTE-RENDU DU SERVICE
DES ENFANTS IDIOTS, ÉPILEPTIQUES ET ARRIÉRÉS DE
BICÈTRE PENDANT L'ANNÉE 1902
PAR
BOURNEVILLE
Avec la collaboration de
MM. AMBARD, BERTHOUD, BLUMENFELD (M.),
BOYER (J.), CROUZON, LEMAIRE, MOREL (L.),
OBERTHUR, PAUL-BONCOUR, PHILIPPE ET FOULARD.
Volume XXIII
Avec 38 figures dans le texte et 9 planches.
PARIS
AUX BUREAUX DU
PROGRÈS MÉDICAL
14, rue des Carmes, 14.
FÉLix ALCAN
ÉDITEUR
108, Boulevard St-Germain, 108.
1903
PREMIERE PARTIE
Histoire du service pendant l'année 4902
(l31cët·c et Fondation Vallée)'
BOURNEVILLE, Dicêlre, 1902. *
PREMIÈRE PARTIE
Section 1 : Bieètre
Histoire du Service pendant l'année 1902.
I.
Situation ou service. Enseignement primaire.
Les enfants de la. quatrième section du quartier des
aliénés de l'hospice de Bicêtre sont répartis en trois
groupes principaux : 1° Les enfants idiots, gâteux, épi-
lepliques ou non, mais invalides (Bâtiment Séguin);
° les e721172fS'LCl20ls, gâteux ou non, mais valides ;
3° les enfants propres, valides, imbéciles, a1'l'ié-
rés, instables, pervers, épilcptiqucs et hystériques
ou non.
I. Enfants idiots, gâteux, épileptiques ou non,
mais invalides. Ce premier groupe est subdivisé
en deux catégories. La première se compose des
enfants idiots complets, ne parlant, ni ne marchant,
considérés généralement, a tort comme tout fait
m Enfants idiots complets.
incurables. La plupart d'entre eux sont, contrairc-
mentit l'opinion courante, susceptibles d'amélioration,
même il un degré très notable.
On fortifie leurs jambes avec la balançoire-trem-
plin ; on leur apprend ensuite se tenir debout à l'aide
des barres parallèles ; à marcher, soit en les tenant
sous les bras, soit à l'aide du chariot ; on fortifie leurs
membres en exerçant successivement chaque jour
toutes les articulations (exercices des jointures), en
leur faisant des frictions stimulantes, etc.
En 1932, trais enfants ont appris il marcher (1) ;
trois enfants ont été guéris du gâtisme (2) et trois
ont appris it manger seuls (3). Avec une meilleur
utilisation du personnel, il serait possible d'obtenir
de plus nombreuses améliorations.
Dès qu'un enfant marche sans aide, il doit être
envoyé à la Petite Ecole, le matin pendant une heure
ou deux, puis toute la journée, aussitôt que ses forces
le permettent. Tous ces enfants sont placés sur les
petits fauteuils spéciaux que nous avons décrits, à
l'usage des gâteux (3).
La seconde catégorie comprend les idiots absolu-
ment incurables, en beaucoup plus petit nombre qu'on
ne le croit d'habitude, et les épileptiques devenus
déments et gâteux sous l'influence des accès ou des
poussées congestives qui les compliquent ; ils ne
peuvent plus être que l'objet de soins hygiéniques et
doivent former un groupe spécial. Aussi sont-ils
réunis et surveillés dans un sous-sol aménagé pour
(I) Du, ..., Jl,trt ? Guill... - (,2) Bois..., Cfatel..., Bus... - (3) 131n ?
Clmtel ? Ca...
(3) Lors de notre arrivée dans le service les enfants étaient assis sur des
alèzes. Les fauteuils imaginés par nous sont en tubes de fer recouverts
d'un coussin largement percé au-dessous duquel est fixé un vase en porce-
laine afin d'être facilement lavé. Cette pratique a réalisé une notable écono-
mie de linge pour l'Administration, sans compter que les enfants y ont
gagné du bien-être..
Traitement 11)JDICO-I'I : UAC OCIQUE : résultats. v
eux, durant le jour, on mauvaise saison, car, lorsque
le temps le permet, ils sont promenés dans les jardins.
Ce sous-sol sert également à d'autres enfants, qui
nous arrivent tardivement à 15, 16, et même 17 ans,
idiots ou épileptique ? en déchéance, dont l'incura-
bi/ité est reconnue et que nous avions été obligé
jusqu'à l'année dernière, de maintenir dans les écoles,
où ils étaient une occasion de trouble, qu'ils con-
tribuaient à encombrer, même à infecter par leur
gâtisme, sans aucun bénéfice pour eux et au grand
détriment des enfants éducabics. Ces malades absolu-
ment incurables sont au nombre de quinze. Nous les
examinons de temps en temps et lorsqu'il se 'produit
chez l'un d'eux un arrêt dans la déchéance, une sorte
d'amélioration, nous le faisons remonter dans la 4 ?
classe de la grande école. '
IL Enfants idiots gâteux ou non gâteux, épilep-
1 iques on non, mais valides (Petite Ecole). Ces
enfants fréquentent la petite école, confiée exclusive-
ment il des femmes. Dans le courant de l'année,
174 enfants y ont été inscrits. Sur ce nombre, 5 sont
décédés, 2 sont sortis définitivement, ont été trans-
férés, 2 sont passés dans une des sections d'adultes.
Sur 1 GO enfants qui restaient à la petite école au
31 décembre 1902, loue mangent pas seuls, 60 se
servent de la cuiller, 60 de la cuiller et de la fourchette
et 25 se servent de la cuiller, de la fourchette et du
couteau. - Six enfants de ce groupe sont devenus
propres (1); 5 ont appris à manger seuls (2); 3 ont
appris à lire couramment (3) et 6 sont en bonne voie (4).
(Ij .lnl ? l.eo.. (T..). Lois ? Lecourt ? Leo.. ( : 1.), I-Ionr.. - (21 Dubr ? .,
Lécha ? Dnpo ? Sclineid ? Lecourt.. 1'1) Duf ? Desnov ? Copp.. z
(4) 13oul ? Dlign ? 13rant ? Sinn ? Goi ? T,nm.. (('s.)
VI Petite école.
Le traitement du gâtisme, qui consiste à placer,
au lever, au coucher, au milieu de la nuit et après
chaque repas, les enfants gâteux sur les sièges
d'aisance et qui a pour but principal d'amener l'enfant
gâteux -Et devenir propre, fait également réaliser à
l'Administration des économies notables de blanchis-
sage. Comme l'année dernière, nous avons fait faire
par la surveillante du service le relevé des enfants
ayant déféqué au siège après les repas, durant les
5 premiers jours de chaque mois. Voici ce relevé qui
a porté sur une moyenne de 50 enfants gâteux.
TRAITEMENT NlfDICO-1ÉD.IGOC.IQUE : RÉSULTATS. VII'.
Tous les enfants de la Petite école, sont exercés
au saut, à la montée et à la descente des escaliers,
à la gymnastique des échelles et des ressorts, sauf ceux
qui, venus du premier groupe, c'est-à-dire des INVALI-
des, étant encore trop infirmes, n'ont pu y prendre part.
Dix-huit enfants de la petite école et de la petite école
complémentaire, dont nous allons parler plus loin,
ont fait régulièrement les exercices de la grande gym-
nastique. Vingt-deux enfants ont travaillé cette année
dans les différents ateliers : tailleurs, cordonniers,
vanniers, brossiers, imprimeurs, serruriers, menui-
siers et jardiniers.
La petite école comprend : 1° le traitement du
gâtisme, exposé précédemment; 2° les leçons de toi-
lette qui consistent -CI apprendre aux enfants à se laver
la figure et les mains, il s'habiller, se déshabiller, `
brosser, ranger leurs vêlements ; 3° les leçons de
table qui consistent à leur enseigner à manger seuls,
à se laver la bouche, à se gargariser, etc. ; 4° les
exercices pour l'éducation de la main, des sens et de
la parole ; 5" les exercices élémentaires relatifs à
l'enseignement primaire, pour lesquels nous nous
servons de la Nouvelle méthode de M. J. Boyer, l'un
de nos plus anciens et dévoués collaborateurs, pour
l'enseignement t dc la lecture, de l'Alphabet du dessin
de }\111l" l3ru, ensuite du Syllabaire Regimbeau ; 6° les
leçons de choses, soit à l'école, soit dans les jardins
(avec le tableau roulant), soit au Musée scolaire, soit
aux ateliers, soit enfin dans les proJ1nnacles (1),
Voici quelques détails sur plusieurs des enfants
les plus malades (idiots profonds) améliorés à la
petite école, par Miles Blanche AGVUS, Amandine
]3oii ? iN et leurs collaboratrices.
(1) Voir Compte-rendu de 1899, pour tous les procédés en usage à la scc-
tion des enfants arriérés et épileptiques.
vin ... : Petite école.. .
Sou.... (lucien, 8 ans. (Imbécillité, a continué de s'a-
méliorer, au point de vue de sou langage, qui était presque
incompréhensible, de son caractère, violent malgré son jeune
âge, de ses colères fréquentes et quotidiennes. Il refusait de
travailler, ne supportait à côté de lui aucun autre enfant,
entrait dans de violentes colères, injuriait tout le monde,
jetait de tous côtés les objets qui se trouvaient sous sa main.
Actuellement, l'enfant est plus calme, son travail à la
classe ainsi qu'à la gymnastique, est bon. Sa tenue s'est
modifiée avantageusement. Il se lave, s'habille, se lace, se
boutonne et se tient plus propre.
Progrès à noter aussi sous le rapport des leçons de choses.
Hou... (Charles), 8 ans. 7f ! toh'e, épilepsie, turbulence;-
Absence de la parole, et compréhension presque nulle.
Actuellement l'enfant parle, fait des phrases, il rapporte
même sur les autres enfants, et bien qu'il ait lui-même un
langage un peu ordurier, il se trouve blessé quand un autre
enfant prononce un mot grossier. Il dit tous les mots, chante
bien et juste.
Il est devenu propre, va seul sur le siège et a été fier d'être
mis en pantalon. Quelques progrès sont à noter concernant
le lavage, la gymnastique, les exercices d'habillement (nouer,
lacer, boutonner) et sur les couleurs. Les accès sont moins
fréquents.
nE... (Henri, Paul), 8 ans. - Idiotie, gâtisme, absence de
langage. Enfant grand gâteux, privé de compréhension et
doué d'une grande indifférence, mis dans les premiers temps
de son entrée au milieu des enfants de la fanfare afin de se
rendre compte s'il entendait le bruit; le résultat a été nul
et aucun mouvement de sa part n'a prouvé qu'il entendait.
L'enfant avait l'air hébété, ne souriait jamais et ne répondait
pas il l'appel de son nom.
Tous les exercices qu'on voulait lui faire faire provoquaient
chez lui des cris perçants. Il avait l'habitude de se cogner la
tête et chaque fois qu'on lui parlait, il la cognait d'avantage.
Il était enclin à de nombreux tics existant encore aujourd'hui
mais moins fréquents.
Actuellement, l'enfant commence à comprendre, sourit,
chantonne, est devenu caressant et affectueux. Il reste à
présent sur le siège, se baisse lorsqu'il a besoin, n'est cepen-
Petite école. ix
dant pas encore propre et quand il s'adonne un tic quel-
conque et qu'on ]cg't'o)]dci ! s'at'rôtc.
L'enfant qui, h l'entrée, ne mangeait .pas seul et refusait
tous les aliments, voire même les friandises, mange mieux,
tient lui-même la cuiller. Remarqué curieuse à noter, l'enfant
ne boit jamais ou presque jamais, ni vin, ni eau, et quand il
a soif il boit un peu de lait. 11 reste quelquefois un mois sans
prendre de liquide ; il ne mange même l.1 soupe que si elle
est très épaisse et la rcfu-c si elle est claire.
Petite école complémentaire. Cette école est
confiée tt M"10 l3ôwr : r, qui, depuis 10 années s'est
mise gracieusement à notre disposition. Elle est aidée
par M"10 Randier, première infirmière. Quarante
enfants composent cette école. Trois infirmières sont
en outre adjointes à ce service pour la surveillance des
enfants (réfectoire, dortoir, promenades). Voici quel-
ques-uns des résultats obtenus au cours de l'année
1905, résumés d'après les notes de MIIIO Bonnet.
Cinq enfants qui avaient ét signalés les années précéden-
tes comme rendus propres le jour, urinaient encore fréquem-
ment au lit, ils sont maintenant tout à fait propres nuit et
jour. Ce sont les enfants 1)cli..., \Iille..., Prime..., Ster-
ling..., Bouilli...,; ce dernier n'était propre le jour qu'à la
condition d'être en robe, dès qu'on lui mettait un maillot, il
souillait ses vêlements, soit maladresse des mains, soit len-
teur des mouvements, aujourd'hui nous pouvons le mettre en
pantalon sans crainte d'accident. ,
Quatre enfants : Parrlo..., l'ellc..., Paccl..., Sterling..., ;
signalés déjà comme améliorés pour la parole ont continué à
progresser sous ce rapport, leur articulation est de moins en
moins défectueuse et leur vocabulaire s'augmente de mots
nouveaux. (Voir Compte-rendu de 1901, p. xiii, x;v).
Un enfant, ICziI : ov...lIc : lix), dont la parole était complète-
mcnt nullc à son arrivée, commence a répéter quelques mois
et même a faire de toutes petites phrases, d'une façon rudi-
mentaire mais assez intelligible; il a tendance iL faire précé-
der la réponse de la demande, ainsi il dira : Félix manze la
sou (soupe) ? oui faut manzé la sou; Félix méssant (méchant),
non pas mess : 1nl Félix, (etc).
X PETITE école complémentaire.
Un enfant a appris à lire couramment, Lcro.... (Félix), entré
le 29 juin 1805 Ù l'âge de 4 ans, parlant à peine et marchant sur
la pointe des pieds qui sont tournés en dedans, le corps pen-
ché en avant et ne semblant jamais en équilibre, tombant à
chaque instant. A son arrivée l'enfant ne mangeait pas seul,
ne parvenait pas il porter la cuiller à sa bouche, ne savait ni
s'habiller, ni se laver.
Caractère entêté, indocile, turbulent, taquin avec méchan-
ceté, excessivement colère : dès qu'on ne fait pas toutes ses
volontés, il crie, se roule par terre, mord, s'arrache les che-
veux, s'égratignc les oreilles et ne cède pas.
lin 1890 et 97, nous constatons des progrès pour la marche
qui devient moins titubante, l'enfant tombe moins fréquem-
ment. En 1900, nous signalons u't progrès notable pour la
parole. - Lero..., trouve et prononce tous les mots pour
exprimer ses besoins et même ses idées, il forme des phrases,
emploie les verbes et les pronoms.- L'articulation est nette,
seulement la langue semble se mouvoir avec effort, la parole
est lente, un peu embarrassée et présente une analogie avec
celle d'un vieillard.
Cet en faut qui a beaucoup d'amour-propre, aie plus grand
désir d'apprendre, aussi travaille-t-il avec ardeur en classe.
Quoiqu'atteint d'athétose et de paralysie incomplète, mais
généralisée, il c-t arrivé à tracer d'abord quelques lettres
puis il les assembler, il reproduire tous les chiffres et même
à écrire de mémoire un grand nombre de nos mots imprimés
sons forme de dictée.
L'écriture est très irrégulière, laisse beaucoup à désirer,
mais ce résultat est inespéré si l'on se reporte aux dillicultés
que nous n'aurions jamais vaincues sans la somme d'énergie
qu'apportait en toules choses notre malade.
Incapable au début de tenir un crayon, il pleurait de rage,
ramassait son crayon, essayait de tracer quelques lignes, le
crayon lui tombait de nouveau et cet enfant, avec une
volonté rare, recommençait cinq ou six fois non sans entrer
dans des colères folles, se mordant, se donnant des claques
et se tirant les cheveux. Enfin, grâce iL cette volonté persis-
tante, nous sommes arrivées au résultat que nous avons
signalé plus haut.
Notre malade fait l'addition et la soustraction avec retenues,
quelques exercices de grammaire. Ecoulant avec intérêt
toules les leçons orales, il est toujours le premier à répon-
dre aux questions qui sont posées. Malheureusement l'amé-
lioration du caractère n'a pas marché de pair avec le
Traitement médico-pédagogique : résultats. XI
développement de l'intellect. Les colères que cet enfant a
toujours eues sont allées en augmentant de. fréquence et
d'intensité jusqu'au traumatisme de l'oeil qu'ont suivi les
mutilations auxquelles il ne s'était jamais livré auparavant et
qui nous ont obligé à le conduire il l'infirmerie. (Voir son
observation plus loin).
Deux enfants sont en bonne voie pour la lecture et
lisent couramment : COTI'... (Henri), Ch,y". (Emile).
Co'rr... nous est arrivé en 1897, gâteux, marchant avec diffi-
cultn, hreclouillarh, d'une façon inintelligible, restant pres-
que toute la journée plongé dans une sorte de demi-sommeil,
indifférent il tout ce qui l'entourait : parole, jeux; nous ne
parvenions pas il secouer sa torpeur. Une sorte de bave san-
buinolcnte s'échappait presque- continuellement des commis-
sures des lèvres. Les mucosités du nez coulaient sans qu'il
songeât à les essuyer.
Les sentiment* affectifs ne scmblaient pas exister, l'enfant
voyait ses parents : ru h : crloir, les quittait sans que rien
trahit le plus petit élan.
Nous avons avec lui, dans noire service, son frère aîné
également très dépourvu, on n'aurait jamais soupçonné leur
lien de parenté tellement ils étaient indifférents l'un à l'autre.
Peu à peu, avec une extrême lenteur, nous avons vu
l'engourdissement qui enveloppait notre malade se dissiper,
la vie végétative a fait place il un peu tl'animation. Il a com-
mence il s'habiller, à parler, à s'attacher à nous, il son frère.
Devenu moins maladroit de ses mains, il nous a rendu quel-
([lIes services dans les dortoirs, mais il restait encore abso-
lument rèfractaire il lotis les exercices scolaires; la somno-
lence le repi enait dès qu'il était en face d'un livre ou d'un
cahier.
Ce n'est guère (pie l'année dernière qu'il a commencé a
prendre goût, d'abord aux leçons orales, puis à l'écriture et
au calcul et surtout à la lecture des mots imprimés.
Aujourd'hui il lit presque couramment, cop : e ce qu'il lit et
écrit même de mémoire un certain nombre de mots imprimés.
Il établit bien la relation entre le chiffre et la quantité, sait
écrire les nombres jusqu'à 100. commence à se familiariser
avec la monnaie. Il fait l'addition et la soustraction. Il tient
conversation, sa parole a encore quelques légères défectuo-
sités. Il joue et se montre assez docile.
XI ! École complémentaire.
Gava... (limite), âgé de 13 ans, idiotie, nanisme, s'est
beaucoup amélioré intellectuellement et moralement.
A s m entrée, il avait beaucoup de mauvais instincts, tels
que le vol, le mensonge, la méchanceté envers ses camarades,
la grossièreté et même l'obscénité dans ses paroles et dans
ses chants.
Actuellement il est doux, poli, docile, affectueux. L'incli-
naison au vol semble avoir disparu, il est encore taquin
avec ses camarades, parfois une grossièreté lui échappe,
mais ce qui était une habitude est devenu une exception.
Il est très studieux, fait avec goût tous les exercices sca-
laires ; aussi ses progrès sont-ils notables. Il lit presque
couramment, fait l'addition et la soustraction, écrit de mémoi-
re sous forme de dictée un certain nombre de nos mots
imprimés.
L'attention, qui semblait infixable au début, est mainte-
nant assez soutenue pour lui permettre de profiter dcsleçons
orales. L'onanisme qui était très fréquent n'est plus que très
rarement constaté. Le zézaiement, signalé à son arrivée
subsiste encore aujourd'hui. '
Quatre enfants ont beaucoup progressé pour tous les exer-
cices scolaires : DiMESX... (André). Beau... (Charles), LE-
mai... (Georges), Sterling... (Georges). Beau... (Charles)
progresse avec une extrême lenteur, mais sans arrêt; d'un
semestre £ 1 l'antre, il y a certainement une amélioration
notable dans tous les exercices classiques et dans l'ensem-
ble général. L'intellect s'ouvre peu à peu, le jugement
semble se former; notre élève qui, jusqu'à présent, était resté
tout à fait comme un bébé de 3 ans pour la raison, se réjouis-
sant de tout, poussantdes cris et faisant des démonstrations
tout à fait enfantines, commence à devenir un peu plus
sérieux, à se rapprocher non pas de la raison d'un jeune
homme de son âge (il a 18 ans) mais de celle d'un enfant
d'une dizaine d'années. Il ne pleure plus comme autrefois
dès qu'on lui faisait un léger reproche; de même le rictus
inintelligible tend à disparaître .
Cet enfant, dont la parole était complètement nulle son
arrivée et dont le quasi- mutisme s'est prolongé pendant do fou-
gues années, est parvenu à s'exprimer d'une façon défectueuse
mais compréhensible, 1 ucli-nutclilé et idiotie complète).
LE ! AI'l ? (Georges). Cet enfant a fait des progrès pour
les exercices classiques. Il a une mémoire extraordinaire
Petite école complémentaire. xiii
pour l'orthographe des mots qu'il a lus. Il fait l'addition, la
soustraction, ébauche la multiplication. Il fait quelques
exercices élémentaires de grammaire. Il devient de plus
en plus maniaque. Il ne faut jamais que rien vienne inter-
vertir l'ordre des choses établi, sinon il est furieux. Si pour
une cause ou une au tic, une des infirmières change son jour
de sortie il l'invective et bougonne toute la journée à ce
sujet. Dans une promenade, si l'on ne revient pas par le même
chemin que l'on a pris en allant, il se met en colère et récri-
mine pendant le trajet. Si le jour où j'ai l'habitude de faire la
leçon orale de grammaire, je fais une leçon de choses, il est
fâché, ne veut rien écouter, ne répond que des bêtises aux
questions que je lui pose et fait en sorte de troubler l'ordre.
Ses camarades qui s'aperço vent de sa bizarrerie de carac-
tère, le taquinant souvent, alors ce sont des rages, il crie,
trépigne, tape à droite, à gauche tout ce qui l'environne
(meubles et gens) et ne se calme que lorsque l'on fait signe de
le conduire en cellule. - 1\ l'entrée idiolie complète, aujour-
d'hui on poserait le diagnostic imbécillité.
Sterling... (Georges), s'améliore beaucoup, l'instabilité
physique et mentale que nous avions constatée il chaque
semestre s'atténue de plus en plus. Notre malade qui, à son
arrivée, faisait des fugues continuelles et nous obligeait à
être sans cesse à sa recherche dans les cours et les jardins,
reste assis tranquillement pendant les heures de classe. Son
attention qui était aussi vagabonde que ses jambes se fixe, il
écoute, répond aux questions qui lui sont posées; fait effort
pour comprendre et commence à raisonner. Son horizon
s'étend. Pendant de longues années le présent seul existait
pour lui; maintenant le passé et l'avenir tiennent leurs pla-
ces dans sa pensée; il nous raconte ce qu'il a fait pendant sa
dernière sortie. 11 nous dira qu'il ne sortira pas tel jour parce
que sa mère doit aller à Paris, mais qu'elle le prendra tel
autre jour. Il aime à rendre service, et ce que vous lui avez
commandé un jour il le fait le lendemain et les jours suivants
sans qu'on ait besoin de le lui répéter. Il est moins grossier
et plus caressant. L'onanisme a été moins fréquent.
La parole et encore défectueuse, les phrases incorrectes,
le langage enfantin, mais si nous remontons à son point de
départ, nous constatons une notable amélioration.
Les progrès scolaires ont suivi aussi une marche ascendante,
la lecture est en bonne voie, l'écriture aussi, il commence à
copier de mémoire quelques-uns de nos mots imprimés, fait
XIV Traitement médico-pédagogique.
l'addition avec retenues et la soustraction sans retenues. A
l'entrée : idiotie profonde, aujourd'hui : imbécillité.
Mail... (Laurent), dont le développement intellectuel
avait été signalé déjà les années précédentes, avait continué
à suivre une marche ascendante, lorsque la mort nous la
enlevé. Il avait fait beaucoup de progrès pour la parole qui
était devenue presque normale; pour la lecture, lisait et reco-
piait un certain nombre de mots imprimés ; l'écriture avait
surtout gagné, il faisait l'addition et la soustraction avec rete-
nues. L'instabilité mentale avait beaucoup diminué, nous
obtenions facilement une attention active pendant un certain
temps, l'attention passive était très clillicile a fixer, aussi pro-
fitait-il peu des leçons orales, il était d'ailleurs mal doué sous
le rapport de la mémoire.
L'amélioration morale n'avait pas marché de pair avec
l'amélioration de l'intelligence, notre malade était très elilli-
cile à diriger.
Turbulent, indocile, souvent grossier avec les infirmières,
méchant avec ses camarades plus faibles que lui, il exigeait
une surveillance incessante.
Tous mes enfants lisant couramment et faisant des devoirs
comme les enfants normaux travaillent toujours avec goût en
clisse. Nos plus grands élèves continuent à nous donner de
la satisfaction, avec les années nous voyons leur jugement se
former et les sentiments affectifs se développer. Nous cons-
tatons avec plaisir chez eux et chez quelques-uns de ceux qui
nous ont quitté, que le lien qui nous unissait, loin de se
rompre se fortifie; l'institutrice a fait place à l'amie que l'on
vient trouver avec confiance; l'un deux Bobl..., que nous
avons placé comme menuisier au deliors se montre particu-
lièrement reconnaissant : il vient souvent passer ses heures
de loisir près de nous, demandant conseil et cherchant en
toute occasion à nous faire plaisir, il semble avoir pris une
bonne voie, a de l'ordre, de l'amour-propre et tout nous fait
espérer qu'il fera un honnête ouvrier : c'est un sourd et muet.
Il a été l'ait allusion dans les dernières notices sur
les enfants de l'École complémentaire à l'emploi des
mots imprimés. Nous avons maintes fois donné des
Les mots imprimés. xv
renseignements sur ce procédé, notamment dans le
Compte-rendu de 1899 (p. 1.-L1). Nous croyons
utile d'y revenir aujourd'hui en citant des exemples
de leur application.
Un enfant est atteint d'idiotie complète, c'est-à-
dire qu'il ne marche pas, ne se sert pas de ses mains :
il faut le faire manger, le laver, l'habiller ; qu'il est
gâteux, ne parle pas, ne sait même pas, par signes,
exprimer ses besoins. Son attention est absolument
nulle, il a des tics plus ou muins nombreux.
La lJ/'ellliè1'c période du traitement métlico- péda- ! logique consiste à lui enseigner à se tenir debout
(balançoire-tremplin, barres parallèles, saut, chariot,
etc.) et à lui apprendre à devenir propre par le place-
ment sur le siège à des heures fixes.
La seconde période du traitement niéclzco-péclno-
gique consiste à éveiller l'attention de l'enfant, à
éduquer la main et le sens du loucher, puis le sens
cle la vue. C'est alors qu'on essaie, même l'enfant ne
parlant pas, à lui faire désigne)-, la nomination
viendra plus tard, les'différentes parties du corps,
de la (les objets du réfectoire, du dortoir,
de l'école, les personnes, les animaux, etc.. Bien que
l'enfant ne parle pas ou ne possède que quelques mots,
ne connaisse pas les lettres, ne syllabe pas, nous l'exer-
çons à reconnaître les mots.
Exemple : au réfectoire nous plaçons sur la table
des cartons portant en gros caractères les mots table,
banc, a8.siette,reITe, couteau, fourchette, etc.. - Au
lavabo, nous avons les mots : éponge, savon, ser-
viette, etc. Nous exerçons l'enfant à désigner les
objets et à mettre sur chacun d'eux le mot imprimé
correspondant. Les enfants reconnaissent l'image
du ? ? 201, comme ils reconnaissent l'image d'un chien,
d'un chat, etc..
XVI Traitement 111DICO-P1 : : DlioGIQUC. - - ?
On procède de même pour les objets du cileagiea° où
on leur apprend n brosser leurs vêtements et à cirer
Jours chaussures : brosse, brosser, cirage, cirer, etc..
L'enfant marche, est devenu propre, en môme temps
-qu'on lui enseigne à reconnaître les objets qui l'envi-
ronne, le nom de ces objets, on lui apprend à s'habiller, à
se laver, à manger seul. Alors il n'a plus besoin d'aide, il
entre en relation avec son milieu, il est préparé à l'édu-
cation de la parole, apte à profiter de plus en plus des
leçons de choses, qu'on ne saurait trop multiplier,
puis à aborder l'instruction primaire. Enfin lors-
que les notions de cette instruction primaire ont été
acquises, l'âge et le développement physique venant,
les enfants passent à la grande école (1).
Dans notre Compte-rendu de 1899 nous avons parlé
des services que nous rendaient, au point de vue de
l'éducation du système musculaire et de l'imitation,
les exercices à la barre d'entraînement. Nous avons
ormis de citer des exercices similaires, que nous
employons depuis la même époque, et qui ont trait à
l'éducation des fonctions respiratoires. Ils ont lieu
soit avec les barres d'entraînement, soit avec les "'
barres à sphères ou les haltères, soit les mains libres.
Ces exercices sont les suivants : mouvements ver-
ticaux des bras en 2 temps; mouvements latéraux
des bras en 2 temps. Les enfants au lieu de compter les
temps que le maître seul énonce font une inspiration
(1) Nous renvoyons pour tous les autres exercices, les détails sur la leçoil
de toilette, la gymnastique' des Échelles; des ressorts, etc., à nos rapports
antérieurs. Rappelons seulement que nous .envoyons les eufantsles plus amé-
liorés a la g1'aTLclc.gymna.sliquc, a la fanfare, 11'orphéon, aux ateliers pendant
15, 30 minutes, etc., afin de varier leurs occupations, d'améliorer l'éducation
de leur main, de fixer davantage leur attention. Ce travail n'est pour ces
enfants qu'un moyen d'éducation. Il est, en outre, pour, les plus âgés, un
moyen de traitement, de même que pour les aliénés adultes.
Traitement Médico-Pédagogique. XVII
prolongée aux temps impairs et une expiration de la
même durée aux temps pairs. A ces deux exercices, il
convient d'en ajouter un troisième exécuté les mains
libres et qui consiste en un haussement d'épaules pour
l'inspiration, et en un abaissement pour l'expiration.
Avec les idiots moins atteints ou améliorés, les temps
d'inspiration sont accompagnés d'écartement latéral
des bras et de projection alternative des membres infé-
rieurs ; l'expiration se fait en ramenant les jambes et
en abaissant les bras (1). Les mains sont tantôt libres,
tantôt munies d'haltères. En dehors des exercices de
respiration, clans les mouvements où les enfants comp-
tent eux-mêmes les temps, nous obtenons la cadence
voulue en leur faisant chanter des rondes enfantines à
rythme bien marqué, dont les paroles plus ou moins
naïves ont été remplacées par d'autres ayant trait à
une connaissance usuelle. C'est ainsi que nous avons :
Les 7 jours de la semaine, sur l'air du Petit navire ;
l'Histoire du blé, sur l'n i relu 1) ied Il ui remue; L'enfant
et le nid d'oiseau, sur l'air de A la volette, etc, etc.
Nous nous proposons du reste de les faire imprimer.
Pour donner aux idiots la notion de nombre si diffi-
cile à acquérir, nous mettons à profit lcuraptitudespé-
ciale pour percevoir tout ce qui est son ou bruit..
Un marteau en bois léger et une cloche sans battant
nous servent dans nos exercices. Nous faisons frapper
à l'enfant un nombre de coups donné, de même que
nous leur faisons compter le nombre de coups que nous
donnons nous-même. Nous leur faisons en même temps
reconnaître au tableau noir ou sur nos feuilles impri-
(1) Tous ces exercices de respiration nous ont puissamment aidé pour pré-
parer l'éducation de la parole et corriger le bégaiement.
130U11NGVILLL, Bicêtre, 1902. **
XVIII Traitement \((;l>ICO-I'I : D : 1GOGIQUE.
niées en gros caractères, le signe qui correspond a
ce nombre.
Cet exercice, que nous n'avons encore employé
qu'à l'Institut médico-pédagogique, amuse beaucoup
nos enfants ; et si nous disposons de marteaux de
couleurs différentes, nous leur faisons dire la couleur r
du marteau qui frappe, et nous leur faisons prendre,
sur ordre, le marteau rouge ou le marteau bleu, etc.
La vue et l'ouïe se trouvent ainsi exercées et aident
à l'acquisition de l'idée abislraite du nombre (1).
lll. Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,
instable ? pervers, épilepliques et hyslériqurs ou non
Grande école). La population de celle école était
de 16 enfants le 1 ? janvier 1\)02. Tous, sauf 23 qui
ne peuvent travailler, ont fréquenté les ateliers par
grande série. Douze possédant le certificat d'études,
forment une division supérieure, ne vont il l'école
qu'une demi journée par semaine et restent, les autres
jours, le matin et le soir il l'alelier. Les enfants
non pourvus du certificat d'études sont reparti en quatre
classes (o3,36, 31 et 30 enfants). Aux examens du cel'li-
ficat d'études qui ont eu lieu il Yillejuif, le 21 mars
deux enfants ont subi les épreuves avec succès,
(Cliattm.. et Lan ? 1... ('2)
Cette année encore, nos instituteurs et leurs aides,
ainsi que les sous-employées attachées aux écoles
(section de Bicêtre et Fondation Vallée), alin d'être
mieux en mesure d'améliorer la prononciation des
enfants et de développer leur parole, ont été envoyés
.successivement, par séries, au nombre d'unovinn'tainc,
(U Note dc \l..1. 13uver. ,
( ? ) A ce mme eaamen, li iafirmierS et 8 iufirmières cle l'I : cole lc 131c·t : o 0
ont également obtenu le certificat d'études.
- Enseignement du chant. xix
a l'Institution Nationale des 801l/'¡[S-luIICtS. De plus,
comme nous avons un certain nombre d'enfants aveu-
glcs, nos auxiliaires sont également allés, par séries,
il l'Institution Nationale des jeunes aveugles et il
l'Ecole Braille, dépendant du département. Leur
devoir est de prolitcr des notions 1nérlico-pél[ngo-
gique qu'ils acquièrent dans ces visites pour nous
seconder sérieusement dans le t /'nilcmcnt méil ico-
pédagogique des enfants de notre service. Aux insti-
tuteurs et aux surveillantes institutrices à comprendre
ce que nous faisons pour le développement de leur
instruction pédagogique. A l'Administration, d'en
exiger l'application. Nous ne saurions trop remercier
MM. Giraud, ]>(;phau, Robin et Haldon de leur pré-
cieux concours.
Notre but, en procédant ainsi, est de perfectionner
l'instruction pédagogique de nos collaborateurs l't col-
lahoratrices, de faire dans la mesure de nos rclaiions
ce qui devrait être l'ait pour tous les pédagogues d'en-
funls anormaux. Nous avons des idiots sourds et muets,
des idiots aveugles, des idiots atteints de nombreux
vices de prononciation, qui doivent profiter de l'ins-
truction supplémentaire que nous essayons de
procurer à notre personnel enseignant. Les péda-
gogues de chacun des groupes spéciaux d'enfants
anormaux profileraient, croyons-nous, de leur passage
plus ou moins prolongé, dans les autres établissements
d'anormaux. Un modique crédit sur le pari mutuel ou
sur les fonds du ministère de l'intérieur permettrait la
réalisation de cette modeste réforme. Jusqu'ici nos
indications, à cet égard, ont passé inaperçues. L'un
des obstacles qui s'opposent à la création de sections
spéciales d'enfants, annexées aux asiles ou Ü la créa-
\X ' Fanfare et Orphéon.
tion d'asiles-écoles et de classes ou écoles spéciales
pour les arriérés c'est assurément l'absence d'un
personnel enseignant. Cette dil11uulLé s'est présentée
récemment pour l'asile de Clermont (Oise) dont les
médecins en chefs et le directeur voudraient organi-
ser un traitement médico-pédagogique pour une cen-
taine d'idiotes qui existent dans leur établissement.
Enseignement du chant. - Cet enseignement
est fait par M. Eugène u'1°rr.ll, professeur de
chant à l'Asile-école de Hicétrc. De même que les
années précédentes, conformément à nos instruc-
tions, M. Suttcr s'est occuppé successivement de
tous les enfants susceptibles de proliter de son ensei-
gnement. 11 a divisé ceux de la petite école, de la
petite école complémentaire et ceux de la grande
école en trois groupes.
En maintes circonstances et les samedis où nous
avons des visiteurs, nous réunissons les petites filles
de la Fondation Vallée avec les garçons de Hicetrc et
nous les faisons chanter ensemble dans les choeurs.
Cette réunion des enfants des deux sexes, que nous
voudrions rendre plus fréquente, comme autrefois,
n'a jamais eu d'inconvénient. Elle ne sourit pas à cer-
tains fonctionnaires parce qu'elle entraîne pour eux
une surveillance, que leur rôle administratif exige,
mais dont ils préfèrent se dégager. Le nombre des
enfants qui prennent part à l'enseignement du chant
était de 5u0 au commencement de l'année et de 25 ?
il la fin de l'année. Voici, résumées par M. Suttcr,
quelques notes concernant son enseignement :
Les enfants chantent les morceaux contenus dans
deux livres spécialement composés pour leur usage.
Les voix, en général, sont assez, justes et l'ensemble
produit un bon effet. Toutefois les enfants ayant les
Influence DE la musique. xxi
meilleures voix sont désignés pour faire partie de
l'Orphéon et exécutent des chants et des eltceurs
devant les nombreux visiteurs qui viennent visiter
le service presque lotis les samedis. Une classe de
solfège et de théorie musicale est instituée spéciale-
ment pour former les élèves de l'Orphéon et de la
Fanfare.
Solfège et Théorie. « J'ai obtenu, dit M. Suttcr,
de très bons résultats avec les enfants qui ont suivi la
classe de solfège et de théorie musicale en procédant
de la manière suivante : chaque enfant possède un
cahier écolier sur lequel il a copié lui-même les dif-
férents exercices et leçons; après cette opération cha-
que enfant, à son tour, passe au tableau et remplit la
portée de notes et de silences, avec l'indication de la
mesure, de façon à bien lui faire comprendre la valeur
de chaque note et celle des silences; mesure de qua-
tre temps, trois temps, deux temps, six-huit.
Après cette composition, l'élève indique le nom de
chaque note ainsi que la valeur, le pouvoir des dièzes,
bémols et bécarres et cela en présence d'un de ses
camarades qui lui serl de moniteur. Le moniteur, ain
si improvisé, rectifie les fautes et en donne la raison.
L'élève en quittant le tableau devienl il son tour moni
teur de l'élève qui lui succède au lableau et ainsi de
suite jusqu'à ce que chaque enfant ait été élève et
moniteur il son tour. 50 enfants environ savent lire
les notes et en connaissent la valeur. »
Fanfare et Orphéon. 35 enfants font partie de la
Fanfare, 25 exécutants et dix élèves; dans ce nombre
4 clairons et 3 tambours. La Fanfare prend part aux
visites du samedi, elle accompagne les exercices de
gymmasliquo et fait défiler la fin de ces exercices les-
enfants aux sons d'une marche. La Fanfare et l'Orphé-
xxu Traitement 11 : : D ! CO-PI : : D.\nOnJQ[JE.
on organisent des concerts et des bais. Le Mardi-gras
et à la 111-carî·mc, la fanfare précède le défile, dans les
cours et à la Fondation Vallée, des enfants déguisés.
Concerts et Bals. Pendant l'année 1905, nous
avons organisé quatre grands concerts. Dans ces
matinées-concerts, j'ai fait exécuter par quelques
enfants de l'Orphéon et avec les fillettes de la fonda-
tion Vallée des rondes avec jeux et danses : ces rondes
ont obtenu beaucoup de succès; des chansonnettes et
une pièce de théâtre forment le complément de ces
fêtes. Les décors sont faits par les enfants ainsi que
les programmes et les billets de tombola.
A notre demande, M. Butter a organisé trois bals et
une tombola, cette dernière a obtenu un grand succès,
grâce au concours dévoué des employés delà section
et de généreux donateurs. Le bénéfice des deux pre-
miers bals a été versé à la caisse des jeux pour achat
de déguisements ; le 3" bal et la tombola ont été faits au
profit de la caisse de la Fanfare pour achat et répara-
tion des instruments, car l'Administration n'a jamais
de crédit pour faire les achats cl les réparations néces-
saires. Concerts et bals font la joie des enfants et de
leurs parents qui sont autorisés il y assister : ce sont
des fêtes organisées sans frais par et pour les enfants
eux-mêmes et non en vue du public, comme les con-
certs Lionnet. Nous avons constate'' que les enfants
ont rarement d'accès d'epilepsie pendant ces réjouis-
sances.
Pour récompenser les enfants qui, il un litre quel-
conque, ont pris part il l'organisation des bals et con-
certs, (chanteurs, acteurs, instrumentistes, impri-
meurs et menuisiers), nous leur faisons faire chaque
année une promenade à Itohinson, cette promenade
a été faite au mois d'octobre.
Exercices de la voix et des poumons. Un grand
Traitement 11' : [)¡C : O-PÍW,\GOGIQUE. XXIII
nombre de nus enfants ont la voix assez étendue et
assez juste pour exécuter nos chants scolaires. Tou-
tefois il y en a qui ont la voix voilée mais juste, cela
doit provenir de l'onanisme auquel ils se livrent;
malgré ms recommandations, la surveillance n'est
pas toujours ce qu'elle devrait être. La généralité de
nos enfants ont la voix assez grave après la période
de la miie, les ténors nous font défaut. La période de-
la miic est assez tardive chez les enfants idiots et plu-
tôt précoce chez les enfants nerveux (épileptiques,
amoraux, etc.) Nombre d'idiots retiennent facilement
un air de musique.
La voix s'étend en pratiquant les exercices sui-
vants : Faire attaquer la note par l'enfant et lui faire
tenir celte note pendant au moins quatre temps, mon-
ter ainsi progressivement d'un degré, de façon à arri-
ver aux notes aiguës, faire sortir les sons de la gorge en
ouvrant bien la bouche, en augmentant la force et en
la diminuant ensuite tout en conservant la note juste.
Par ccsexcicices l'enfant arrive à gagner une ou
deux notes dans l'aigu et même davantage sans le
concours de la voix de tête, celle-ci est purement arti-
ficielle et demande de longues études pour pouvoir
s'en servir convenablement. Ces exercices ont le don
de former l'oreille musicale de l'enfant et il saura
distinguer les différentes intonations des notes sui-
vant le degré et la position de celles-ci sur la partie.
Cette même manière de procéder pour la voix sert
aux instrumentistes de la Fanfare. Ces leçons forment
un ensemble d'exercices de gymnastique des pou-
'1110113 et la pression des lèvres que doivent faire
ceux-ci contre l'embouchure de l'instrument, forti-
fient celles-ci; les mêmes effets se produisent sur
les cordes vocales par les exercices d'intonation cités
plus haut. Ces exercices contribuent quelquefois à
la a'uérison des tics.
XXÏV Enseignement du dessin.
Enseignement du dc.s.s'N). Cet enseignement est
fait par M. Du.mont depuis le 15 avril 1901. Les leçons
ont lieu deux fois par semaine, le mercredi et le jeudi.
Elles durent chacune une heure. Cet enseignement
rend des services incontestables au point de vue de
l'éducation de la main et de l'ccil et est d'une utilité
évidente pour les apprentis de plusieurs ateliers.
Comme nous le disions l'an dernier, nous désirerions
cet enseignement non pas seulement pour les enfants
les moins malades mais aussi pour ceux qui sont plus
profondément atteints en suivant exactement les indi-
cations que nous avons fait tracer par D1 ? Bru dans
l'Alphabet du dessin, l'un des volumes de la lhblio-
thèque cl'él2lcalzcu2..slécinlc. Voici quelques notes
fournies par M. Dumonl sur son cours : -
« 130 élèves suivent les leçons de dessin ; presque
tous les enfants, sauf les élèves récemment entrés,
savent et dessinent les premières notions de géométrie.
Il s'est produit cette année un véritable progrès, tant
au point de vue de l'habileté de main que du soin et
de la propreté dans l'exécution du travail.
« Un certain nombre d'élèves ont montre'' un goût
réel pour le dessin d'art; d'ici peu de temps j'espère
les voir arrivera produire de jolis dessins. Les enfants
dessinncut des plâtres représentant des ornements,
tels que feuilles de lierre, de chêne, de vigne, rin-
ceaux, rosaces, etc.. et parmi les objets usuels des
entonnoirs, des vases, etc. Le matériel nécessaire
au fonctionnement de ce cours, étant sur le point de
se compléter, j'espère que la tâche sera plus facile et
les résultats plus certains dans l'année qui va suivre. »
Gm2zt.stirlue. - Il ne s'agit plus ici de la gymnas-
tique avec la balançoire-tremplin, avec les échelles
de cordes, les ressorts, etc., mais de la gymnastique
des mouvements d'ensemble cl aux agrès. Les exer-
Société de gymnastique. XXV
ciccs d'ensemble se font soit au tambour, soit avec
la fanfare, soit avec accompagnement de chants,
ou sont conduits avec l'harmonium (1). Les mou-
vements sont aussi variés que possible et chaque
année noire dévoué professeur, M. Goy, en introduit
de nouveaux. D'autres exercices ont lieu avec les hal-
tères, les échelles convexes et horizontales, la barre
fixe, les barres parallèles, le vindas, la balançoire
brachiale, etc.
Mais, et non no cessons do le redire, nous don-
nons la préférence aux exercices des mouvements
avec ou sans haltères, barres Ù sphères, etc. Parmi les
agrès, nous préférons les échelles horizontales, et con-
vexes, les barres parallèles, le mât horizontal, les
anneaux, évitant les exercices violents ou ceux qui i
peuvent avoir des inconvénients pour les épilepliques.
Nous avons dressé un infirmier afin de remplacer
le professeur en cas d'absence. Nous voudrions avoir
partout, aux ateliers, au chant, à la danse, etc. un
infirmier en mesure de remplacer le professeur ou le
maître absent. Nos réclamations dans ce sens sont
demeurées sans résultat.
Société de gymnastique. Les enfants faisant
partie de cette société, au nombre de 21, ont pris part,
sous la direction de leur maître, M. Ûor, il un concours
de gymnastique organisé parla commune du Kremlin-
Picêtrc où ils ont obtenu deux médailles d'argent et
une palme de vermeil.
Escrime. Cet exercice s'est fait régulièrement
sous la direction de MM. Pelletier et Chevreau, pré-
vôts au fort de l31ctrc. Ces militaires se sont acquit-
tés avec beaucoup de zèle et de dévouement de leurs
(1) Voir cle 1S0 ! ), p. ! .IX.
xxvi Musée scolaire, projections.
fonctions. 98 enfants participent, à des degrés divers,
à cet exercice, que nous considérons comme secon-
daire par rapport aux autres exercices physiques (1).
Danse. Les exercices de danse ont eu lieu ré-
gulièrement de midi à une heure sous la direction
de M. LANDOS-r, un de nos instituteurs. 124 enfants
de la grande école et 15 de la petite école y
prennent part; sur ce nombre, 95 savent danser la
polka, 30 connaissent la polka, la mazurka et la
scottish; 27 connaissent le quadrille français et toutes
les danses de caractères, et 15 de ces derniers ont
commencé à apprendre le pas de quatre. -
Musée scolaire. Ce musée continue à servir aux
séances de projection, aux leçons de choses et de salle
de lecture : Il s'est cette année enrichi tant au point de
vue de la bibliothèque qu'au point do vue des figures
pour projections. L'administration a acheté auec
des dons (2), cette année, 14 volumes, ce qui porte à 606
le nombre des volumes delà bibliothèque des enfants-
Le 1°1' janvier 1902, le nombre des unes pour projec-
tions était de 1766, à la fin de l'année ce chiffre attei-
gnait 1890 (81 ontété faites par M. Hubert, photographe
de la maison, 32 ont été achetées par l'Administration,
et 11 ont été faites par M. Mesnard). Les collections
qui ont le plus profité de ces vues sont : Les parasites,-
la Martinique (3), l'Histoire de France, les plantes
équatoriales ou tropicales. '
Grâce à ces collections qui se complètent de jour
en jour, le service n'emprunte plus que très rarement
(1) Voir Compte-rendu, de 1899, Tl. LXI" t.svt.
(2) Commission de surveillance des asiles (30 Ir.). TlIoo' Digoy, mère d'un dé
nos malades. 1 volume.
(3) Don fait par l'un de nos internes, M.Lutaud, d'u e collection de belles
photographies. ,
Traitement médico-pédagogique. xxvii
des vues au Musée pédagogique ou il la Ligue de l'en-
seignement.
Ces vues servent aux conférences du jeudi faites
aux enfants les moins malades, aux visites du samedi,
jour où nous recevons les étrangers, aux cours d'a-
natomic et de physiologie des Ecoles d'infirmières de
Hicctre et de la Pitié. Enfin tous les ans les internes
du service s'en servent pour différentes conférences
faites aux infirmiers et infirmières de l'hospice ; c'est
ainsi que M. More), l'un de nos anciens internes, a
fait au personnel une conférence très intéressante
sur l'alcoolisme (série nouvelle); une autre sur les
parasites de l'homme et une troisième sur Jenner, la
variole et la vaccine.
L'enseignement par les projections est très com-
plexe. Il sert pour les enfants de toutes les catégories :
1" pour les enfants idiots profonds à fixer l'attention
(images blanches ou colorées sur fond noir, images
blanches sur fond noir'), il apprendre les lettres (grandes
lettres noires sur fond blanc, puis lettres beaucoup
plus petites); pour l'éducation de la parole (syllabes
simples ou répétées ou combinées); 2" Pour les idiots
déjà un peu améliorés, il reconnaître les objets, les
animaux (images graduées); 3" Pour les enfants
imbéciles, arriérés et épileptiques, à faire tous les
jeudis une conférence dont les séries de vues énu-
mérées plus haut donnent une idée suffisante.
Dans les petites écoles et la grande école, on doit
sans cesse s'occuper de la guérison des tics, des
manies, s'opposer aux pratiques solitaires. Pour tous
les enfants, et en particulier pour les imbéciles intel-
lectuels avec impulsions et pour les imbéciles moraux
a tous les degrés, nous avons recours au traitement
moral, ou, pour employer le jargon il la mode, il la
suggestion il l'état de veille. Tous nos efforts tendent
XXVIII Résultats.
à faire comprendre à nos auxiliaires, pédagogues et
infirmiers, qu'ils ont affaire à des enfants malades,
relevant du. traitement 2éclieo-péclayoyicytte, envers
lesquels et comme en/'anls ? et comme malades, ils
doivent se montrer bienveillants et affectueux, et non
pas à des enfants vicieux, dont la place, serait, disent
certains administrateurs, plus à tort qu'a raison, dans
les maisons de correction ou les prisons.
Voici quelques notes concernant les enfants de
cette catégorie : ,
- Grande école : 1re classe. - 1° CIEaLL7n,..., 16 ans, atteint
d'arriération intellectuelle, de paralysie spinale infantile
du bras droit et d'épilepsie. - Cet enfant a fait de grands
progrès au point de vue primaire. Entré en classe en 1901,
il faisait un grand nombre do fautes d'orthographe; il ne
possédait que quelques notions assez confuses d'histoire et
de géographie. Grâce à sa bonna volonté, soutenue cons-
tamment par le conseil de ses maîtres, il est arrivé ii réussir
al'examen du certificat d'études primaires. Il s'est également
amélioré au point de vue du caractère. Bon apprenti tailleur.
Il écrit et coud avec la main gauche. .
2° Lang.... 19 ans, atteint d'épilepsie. Depuis plusieurs
années à Bicêtrc ; trépané. Progrès sensibles au point de vue
primaire. Après deux années d'efforts persévérants, il est
arrivé à obtenir le certificat d'études primaires. Par sa bonne
conduite et son travail soutenu à l'école et à l'atelier il a été
jugé digne d'obtenir le prix Gallois. Bon ouvrier brossier.
3° Franc... lî ans, atteint d'épilepsie. Grande améliora-
tion au point de vue de la conduite. C'était autrefois un enfant
auquel on ne pouvait faire la moindre observation, il était
sournois, grossier, impoli et paresseux. A force de douceur,
on est arrivé à le rendre poli d'abord, -moins grossier et plus
courageux. '
2e classe. 4° l3elllz... ? 26 ans : arriération intellectuelle,
épilepsie avec hémiplégie gauche, alcoolisme. A fait des
progrès très sensibles sur toutes les matières du programme.
Traitement \IIsUICO-l'1UAGOGI('IUG. XXIX
Les fautes d'orthographe sont moins nombreuses; la division
a été comprise. Cet élève apprend bien ses résumes d'histoire
et il fait de petits devoirs de géographie sur les montagnes et
les cours d'eau. Il Il est jardinier et son patron est satisfait
de sa bonne volonté.
5" Pic...., l."> ans : imbécillité, I ? Iepto)ta)iie, est
devenu bon élève. Assidu au travail, cherche à bien faire.
Ses dictées renferment peu de fautes d'orthographe et il fait
de petits problèmes simples sur les ! i règles. Ses résumés
d'histoire sont appris et ses devoirs de géographie bien faits.
Cet élève pourra passer en 1 ? classe. Apprenti tailleur, com-
mence à faire dcs doublures de manches.
t;° Rem Li ans : arriération intellectuelle, épilespie. -
Travaille bien en classe, sait appliquer les règles de gram-
maire et fait peu de fautes dans ses dictées. Il conjugue les
verbes réguliers aux temps simples, fait des analyses gram-
maticales renfermant sujet, verbe et complément direct ainsi
que des exercices d'invention. Il a appris la division. A retenu
les principaux faits de l'histoire de France, des origines il la
guerre de Cent ans et les notions élémentaires de géographie
ayant trait aux montagnes et aux cours d'eau. Bon apprenti
vannier.
7u Guil... ? Il ans, atteint (l'arriération intellectuelle avec
crises hystériques. - bon élève. Travaille bien et fait des
progrès sensibles. Fait peu de fautes d'orthographe, applique
bien les règles de grammaire et a beaucoup d'idée pour les
exercices d'invention. Il fait de petits problèmes sur les 4
règles. Sa mémoire et son intelligence sont bien développées.
Il apprend facilement ses résumés de leçon et oublie peu.
Pourra passer en lu, classe. ? « classe. 8" ScliarL... (Gustave. Maurice), 1 1 ans. -Imbé-
cillité : ( : pilep.,ie. - Lectures courantes; fait les trois pre-
mières opérations et commence à faire de petits problèmes.
Ses devoirs sont bien écrits; il comprend les explications don-
nées. La mémoire est assez bonne; il étudie et récite la plu-
part des leçons et quelques petites fables. Il y a amélioration
sérieuse au point de vue moral. Pas d'accès en 190". Apprenti
jardinier; commence a bien travailler ; beaucoup de bonne
volonté.
XXX " RÉSULTATS.
90 Mant. o. (Louis, Eugène), 'IIÎ ans. Imbécillité, dépres-
sion mélancolique. Cet enfant fait mieux les devoirs écrits; il
litapeu près couramment ; il fait assez bien les trois premières
opérations. Il est toujours très attentif, comprend les explica-
tions données et les met à profit. Bon caractère et très docile
en classe. Menuisier : grands progrès ; s'efforce il bien faire
tout travail.
10° Saiut-Lanth... (Uaslln René), 19 ans. - Imbécillité ;
Ipnep ? : 'o. Cet enfant n fait aucun progrès en calcul : mais
pour tout le reste il s'applique dans la mesure du possible; il
lit bien, fait bien les devoirs écrits et comprend les explica-
tions données. Bon caractère : très docile; nature serviable;
sentiments affectueux assez développés. Bon apprenti jardi-
nier.
11°'l'orai... Il ans. - Imbécillité. Epilepsie. -
Quoique écrivant moins bien que les précédents, cet enfant
fait des progrès sensibles ; il profite des explications données.
Très souvent il récite des leçons et apprend par coeur quel-
ques petites failles. Amélioration notable au point de vue
moral. Apprenti jardinier médiocre.
12° Besanc... (Jules, Emile), lli ans. Imbécillité. Epilcp-
sie. Ilémiparésie droite. Onycoplia ! 71e. - Cet enfant fait
également des progrès sensibles; les connaissances géné-
rales se développent progressivement. Il s'applique dans la
mesure du possible. Bon caractère ; docile en classe. Apprenti
cordonnier médiocre.
lie classe. - 13° Coudcy... (gorges), 1 '1 ans.
Epilepsie. Parésie droite. Lit couramment, fait les exer-
cices de copie. Plus en retard pour le calcul, est parvenu
cependant à faire l'addition, la soustraction et quelques
petites multiplications. Est passé en'3" classe depuis quel-
ques semaines. - Apprenti tailleur, travaille beaucoup, très
courageux, très docile. Ecrit et coud de la main gauche.
1-1° Mêla.. (Albert), l'ians.-In26écilli(. Epilepsie. Hémi-
plégie droite compliquée de contracture. Fait bien l'addi-
tion, la soustraction et la multiplication. L'écriture bien
qu'améliorée est encore défectueuse, mais le malade fait tout
son possible pour arriver à de meilleurs résultats. A fait de
Traitement 111 : DIC0-PI3D : 1GOGIQUC. XXXI
sérieux progrès en lecture et fait bien les exercices de copie.
Apprenti tailleur passable. Ecrit et coud de la main gauche.
15° Sim... (Eugène), 13 ans. Imbécillité. - Ce malade
très nonchalant aurait volontiers passé tout le temps de la
classe à dormir ou à rêver. A force de persuasion, je suis arri-
vé avec lui il des résultats assez appréciables. C'est ainsi que
Sim.. commence à lire dans la 11 partie du Syllabaire Regim-
beau, alors qu'il y a un an, en entrant dans le service il
connaissait il peine les lettres de l'alphabet et ne pouvait
syllaber. En calcul est parvenu à bien faire l'addition, la
soustraction et la multiplication. Apprenti menuisier mé-
diocre.
1(3° BOlLl'ge... (Auguste), 13 ans. Imbécillité avec perver-
sion des instincts. Epilepsie. Malgré ses accès et vertiges un
peu plus nombreux pendant le courant de cette année, co
malade a continué il faire des progrès, L'écriture devient
bonne; la lecture sera bientôt courante, si l'élève continue
à bien s'appliquer. Fait bien addition, soustraction et multi-
plication. Le caractère ne change malheureusement guère et
Bourg... est toujours aussi grossier. Bon apprenti tailleur.
Nous pourrions multiplier beaucoup ces petites
notices sur les enfants améliorés. Celles qui précèdent
et plus particulièrement celles de la petite école, cone.
cernant les enfants les plus gravement atteints, nous
paraissent suffire à témoigner des efforts faits par tous
pour améliorer les enfants qui nous sont confiés.
Pour obtenir encore de meilleurs résultats, plus
d'améliorations et de guérisons, il faudrait que les
enfants soient rigoureusement occupés ou distraits
du lever au coucher et qu'ils ne soient jamais désoeu-
vrés. Les jours où les maires sont en congé, pendant
les vacances, il y a des querelles, des disputes, des
traumatismes, des pratiques onanistiques, des accès
en plus grand nombre. C'est pour obvier à ces acci-
dents, sans causcr de préjudice au personnel cnsei-
XXXII RÉSULTATS.
gnant que nous avons réclamé, sans l'obtenir, qu'on
place dans le service des garçons de classe ayant
leur brevet de capacité, des infirmiers ayant exercé
la profession de menuisier, serrurier, cordonnier, etc.
De la sorte, les instituteurs et les chefs d'atelier
pourraient avoir leur congé sans qu'il en résulte un
préjudice pour les enfants. En effet, tandis que dans
les lycées, les écoles primaires, les élèves sont en
congé en même temps que leurs maîtres, à l'asile-
école de 131cctrc, comme dans les services analogues,
les enfants, eux, restent.
Aux exercices pédagogiques proprement dits, avec
leçons de choses faites dans les classes, dans les pro-
menades, ai musée scolaire (projections, etc.), clans
les jardins de la section où les arbres, les arbustes,
les plantes portent des étiquettes nominatives, s'ajou-
tent le travail manuel dans les ateliers, les exercices
physiques : gymnastique variée, danse, escrime, jeux
divers.
Cet ensemble de procédés constitue notre méthode
de traitement médico-pédagogique. Nos visiteurs du
samedi nous ont toujours paru l'apprécier d'une
manière favorable : la relation de leurs visites publiée
dans les journaux scientifiques ou autres en est la
preuve. Ce n'est pas toutefois qu'il ne se soit produit
des critiques, non point clc la part des médecins,
mais de la part de quelques conseillers, sans doute
mal renseignés, qui ont manifesté une certaine
hostilité contre l'organisation que nous avons créée
en faveur des enfants idiots, alors que les enfants
normaux ne disposaient pas d'avantages semblables.
Jardins d'enseignement. xxxiii
Loin de nous aider à mieux faire, ils auraient volon-
tiers demandé la réduction de nos moyens d'action. A
leurs yeux, nous avons trop fait pour de tels enfants.
Leurs visites à l'asilc-éco'e de Bicêtre devraient,
au contraire, les inciter à introduire progressivement
dans les écoles primaires les procédés qui composent
notre méthode. Pourquoi les arbres, les arbustes,
les fleurs de nos squares, de nos jardins publics ne
sont-ils pas dénommés comme dans les jardins de
notre service, et comme cela existe dans quelques
pays de l'étranger et même dans quelques villes de
France ? Pourquoi les exercices de gymnastique, de
chant, laissent-ils tant il désirer clans nos établisse-
ments d'enseignement ? Pourquoi les instituteurs et
les institutrices ne multiplient-ils pas les leçons de
choses ? Pourquoi, ainsi que nous l'avons proposé
il y a plus de 25 ans, n'utilisc-t-on pas les richesses
du Muséum d'histoire naturelle au bénéfice des cle-
ves des lycées et des écoles primaires ? (1).
En dehors des heures de classe, de gymnastique,
de chant, de dessin, de danse, d'escrime, d'atelier, nous
avons toujours essayé de faire participer les enfants
aux corvées de tout genre : salubrité, nettoyage des
hains, des classes, du musée scolaire, des cours,
des ateliers. Il est certain que si tout le personnel
nous secondait à cet égard, notre service serait d'une
propreté irréprochable dans la mesure que comporte
le défaut d'entretien des bâtiments.
Des enfants accompagnent les infirmiers à la cui-
sine, a la lingerie, il la buanderie, aident à apporter
non seulement leurs aliments, mais aussi ceux des
(1) Voir le Compte rendu de 1001, p. lxxv.
Bourneville, Bicêtre, 1902.
X\XtV Hygiène sexuelle.
sous-employés qui peuvent ainsi rester dans le service
au lieu de perdre du temps dans les services généraux.
Si dans ces courses les infirmiers et les infirmières
répondaient il nos désirs, il y aurait matière à des
J((> : ons de choses. En tout cas, c'est une distraction
pour les enfants qui se sentent plus fibres.
Quelques enfants, avec notre autorisation, et de
bonne volonté, rendent de petits services aux sous-
employés, montent du charbon, de l'eau - en particu-
lier dans les logements des ateliers puisque, malgré
nos réclamations, il n'y a pas de prise d'eau au second
étage. Ils en sont récompensés par do modiques
allocations. Les en priver les affligerait et les priverait
du plaisir de se rendre utiles aux personnes qui leur
sont dévouées.
Plus les enfants sont occupés, plus leurs occupations
sont variées, plus leur physique, leur moral et leur
-intelligence en profitent, moins il y a de querelles,
de rixes et de pratiques solitaires ou autres plus
graves. Ordre est venu de l'Administration de ne plus
employer les enfants il toutes ces petites besognes.
Inutile de dire que nous n'avons pas été consulté.
C'est ainsi que l'Administration nous seconde dans
notre tâche ! Espérons que M. Mesureur lèvera cet
interdit !
Hygiène 8cxu'llc. L'un des obstacles qui s'op-
posent le plus il l'acquisition de résultats encore plus
considérables que ceux que nous enregistrons, c'est
l'onanisme relevé comme fréquent chez les enfants.
Pour y remédier nous intervenons sans cesse auprès
des enfants, nous recommandons aux instituteurs de
veiller à ce que les enfants son-nt toujours accompa-
gnés des infirmiers de classe quand ils vont aux cabi-
nets d'aisances ; aux infirmiers-veilleurs d'être très
attentifs et d'empêcher les enfants de mettre leur
Promenades et distractions. xxv
mains dans les poches de leur pantalon, de se coucher
sur le ventre. Malheureusement soit indifférence, soit
incapacité et absence de conviction, nous n'obtenons
pas de tous le concours indispensable. Nous faisons
veiller le plus possible il l'hygiène sexuelle.
Pour appuyer la nécessité de se conformer à nos
indications, nous citons l'exemple de,; enfants dont
l'état mental est dû surtout aux habitudes solitaires.
Nous insistons sur les conséquences physiques, untel-
lectuelles et morales : amaigrissement, affaiblis-
sement progressif clés forces, troubles de la marche,
tremblements, hébétude de la physionomie (pupilles
dilatées, yeux cernés, teint jaunâtre, pustules d'acné,
etc.), la diminution de la volonté, (le la mémoire,, de.
l'activité intellectuelle, l'inaptitude non seulement au
travail scolaire mais aussi au travail manuel, l'indiffé-
rence aux jeux; la tendance à l'isolement, la diminu-
tion de la sociabilité, des sentiments affectifs envers
parents, maîtres, camarades; la disparition de la
gaieté, l'énervement, l'irritabilité, la désobéissance.,
L'onanistc n'a d'énergie que pour se livrer il ses mau-
vaises habitudes. Enfin nous nous appuyons sur les
conséquences quotidiennes de l'onanisme, apathie,
pour le travail, et ultérieurement : spermatorrhée,
impuissance, démence, pour inciter tous nos au-
xiliaires à exercer une surveillance très rigoureuse
et de tous les instants. -
Promenades et distractions. Les enfants de la
grande et ceux de la petite écoles, qui sont propres,
ont continué, comme les années précédentes, à faire
des promenades soit à Paris, soit aux environs de
l'hospice. Dans ces promenades, les instituteurs et'
les institutrices doivent donner des leçons de choses
xxxvi Promenades et distractions.
et exercer les enfants aux différents jeux en plein air
(jeu de 1) illes, de ballon, etc.) Voici rémunération des
principaux endroits où ils sont allés en promenade
cette année : Arcueil-Cachan, Crétcil, bois de Gournay,
Gentilly, Ivry, jardin d'Acclimatation (i), jardin des
Plantes, jardin du Luxcmbourg, musée de Cluny,
parc de Montsouris, Hobinson, Villejuif, Vincennes,
Vitry. Ils ont également visité la fête du Lion de Bel-
fort, de la place d'Italie, la Foire aux pains d'épices, etc.
Les distractions ont été aussi nombreuses cette
année que les années précédentes. Notons la distribu-
tion des jouets du jour de l'an, donnés par l'Admi-
nistration ; les déguisements du Mardi -Gras et do
la Mi-Carême, la distribution des jouets de Noël,
offerts par la société du « Joueux Noël ». Nous adres-
sons à cette société tous nos remerciements. - A citer
aussi le concert organisé par le « Comité des frères
Lionnet » auquel, comme les années précédentes,
les artistes des principaux théâtres et concerts de Paris
ont prêté leur concours. Tous les enfants valides de
Bicêtre et clc la Fondation Vallée y ont assisté.
Signalons enfin, organisés par les enfants, une grande
tombola (2) et quatre concerts dont un suivi d'une pié-
cette. Les familles assistent aux fêtes organisées par
les enfants.
Les enfants ont encore bénéficié de plusieurs repré-
sentations gratuites dans les divers cirques et théâtres
installés il la fête du Lion de Belfort, il la Place d'Italie,
il la foire au pain d'épice et sur l'avenue de Bicêtre. z
Les jardiniers sont allés avec leur maître, M. V. Mes-
(II Nous adressons à I'ORTL, directeur de ce bel établissement, tous nus
remerciements pou) )abonne grâce qu'il met chaque année, sur notre demande,
il. autoriser nos enfants et les petites filles de la Salpêtnère à visiter le Jar-
din d'Acclimatation.
fi) Ce produit de cette tombola, soit un bénéfice net de 50 ? fr. (i0, nous a
permis- d'acheter dos instruments pour la fanfare.
Caisse d'épargne, VISITES. XXXVII
nard, à l'Exposition de chrysanthèmes et à l'E : \ : posi-
lion d'horticulture. Les imprimeurs, sous la con-
duite de leur maître, M. \Irtr : er3ar,r ? T, ont visite-
dans tous ses détails l'école Estienne,
Caisse d'épargne. Elle est confiée au premier
de nos instituteurs, M. Mesnaud. Les recettes ont été,
pour l'année, de 72 fr. Le total général des sommes
recueillies depuis 1895 s'élève il 2.184 fr. 65.
Visites. Les enfants ont reçu 8.488 visites ;
les visiteurs ont été au nombre de 13.559. Voici la
statistique des permissions de sortie et des con-
fiés : .
.,\XXV111 : - -.Vaccination. - -- ."
Les visites des familles au parloir lie sont pas suffi-
samment surveillées, répéterons-nous. Trop souvent t
les parents ne se gênent pas pour introduire des ali1-
ments, du vin et des liqueurs qu'ils font absorber en
quantité exagérée aux malades. De là des accidents
auxquels il faut remédier et une augmentation des
accès épileptiques. De plus, les parents donnent de
l'argent aux enfants, autre abus qui est une source
d'ennuis pour tout le monde : rixes, vols, trafics, etc..
Nous signalons encore une fois à l'Administration la
nécessité de remédier à tous ces abus regrettables (1).
. Vaccination et revaccination. Nous avons con-
tinué, pratique qui remonte il 1880, la vaccination
et la revaccination de tous les malades entrés durant
l'année et des enfants dont la revaccination remonte
à 6 ou 7 ans. Comme d'habitude, cette opération a été
faite par les élèves de l'École d'infirmiers et
d'infirmières de Bicêtre, sous notre direction et celle
de nos internes, avec le concours de la sous-surveil-
lante, 1\1 ? Boxai : \, Elles ont été au nombre de 81;
7 infirmiers ou infirmières seulement ont consenti
à se faire revacciner. Parmi les malades 8 ont été
revaccinés avec succès.
Service dentaire. M. le Du DUSIOVT est vcnu
chaque semaine donner des soins il nos malades au
point de vue de la dentition et de l'hygiène de la
bouche. Il nous remet sur chacun d'eux une note
spéciale. Rappelons qu'en faisant instituer ce service
journée étant de 2 fI'. 20, il s'ensuit une économie pour l'Assistance publique
de 7.081 fI'. GO, qui, nous le répétons, devraient être appliques a l'entretien
des bâtiments qui sont dans un état de plus en plus déplorable.
(1) Les visites ont lieu le jeudi et le. dimanche de midi à i heures, il convien-
drait de les réduire de midi à 2 heures, ce qui permettrait de faire faire
insuitc une promenade aux enfants.. ; ,
Service dentaire et bains. xxxix
dentaire, notre but était de remédier aux nombreuses
défectuosités de la dentition chez nos enfants et aussi
d'avoir, chaque année, une note, prise par un homme
compétent, sur la dentition de tous les enfants.
Bains et hydrothérapie. Les hains et les dou-
ches, joints il la gymnastique, à l'emploi des bromu-
res, surtout de l'élixir polybromure (formule YvoN),
du bromure de camphre (préparations du D1' Clin),
plus actif et plus absorbable que les autres prépara-
lions similaires qui nous ont été fournies par l'Ad-
ministration, et des médicaments antiscrofukux, ont
continué comme par le passé il être, avec les purga-
tifs, surtout chez les épilepliques, la base du traitement
en 1901. Nous avons, de plus, essayé de nouveau l'a-
donis vernalis et les pilules de Mégi in, mais sans
résultats appréciables. Il a été donné dans le cours
de l'année 17.768 bains, ainsi répartis :
XL Hydrothérapie.
faisant procéder d'urgence aux réparations des bai-
gnoires ou il leur remplacement. Dans un tel service
la propreté ne peut être assurée et la guérison du
gâtisme obtenue que par un service régulier des
bains, douches, etc.
Nous avons toujours été un partisan convaincu de
l'hydrothérapie. Personnellement, sur les conseils et il
l'incitation de N. Pascal, notre co-rédactcur au Mou-
reinenl médical, et de notre collègue d'internat, le
Dr Laburthe, nous avons commencé il faire de l'hy-
drothérapie en 18G5-G6 el, depuis, nous n'avons jamais
cessé. Ce n'était pas la mode alors et nous nous sou-
venons qu'à l'hôpital Saint-Louis aucun de nos col-
lèges ne fréquentait la salle des douches.
Après la guerre, M. Charcot avait bien voulu nous
confier l'observation et le traitement de ses épi 1 epti-
ques : cela a duré jusqu'en 1879. Nous avons eu re-
cours souvent, chez elles, à l'hydrothérapie. De même
chez les épileptiques du service de Delasiauve, pen-
dant les remplacements que nous y avons faits (1877-
1879). Nous avons généralisé cette pratique lorsque
nous avons été chargé de la section des épileptiques
(adultes et enfants) de l'hospice de Bicêtre, ensuite
de la nouvelle section des enfants.
En 1882, dans sa remarquable thèse inaugurale,
l'un de nos élèves, P. Bricon, après avoir tracé un his-
torique aussi complet que possible de la question, a
consigné les résultats de notre pratique pendant les
années 1880 et 1881. L'année suivante dans un tra-
vail commun, nous avons résumé, en plus, les résultats
de 1882. Depuis, tous les ans, dans le Compte-rendu de
notre service, nous avons indiqué le nombre des dou-
ches et des bains administrés dans l'année.
Le grand nombre de douches données dans le ser-
Hydrothérapie. XLI
vice nous permet chaque année d'apprendre tous
nos infirmiers et infirmières, à une partie de ceux
de l'hospice, à les administrer d'une façon convenable.-
Sachant combien les doucheurs et les doucheuses
des hôpitaux, et il en est de même dans beaucoup
d'établissements ordinaires de la ville, sont inexpé-
rimentés, nous avons demandé à l'Administration de
nous envoyer les doucheurs et les doucheuses des éta-
blissements-écoles l'an dernier et cette année. La
plupart sont venus et ont pu à leur tour enseigner
aux élèves des écoles à donner des douches. En faisant
ces leçons de douches, nous pensons avoir été très
utile aux malades qui pourront retirer de l'hydro-
thérapie les bienfaits qu'ils sont en droit d'en
attendre.
Tantôt l'hydrothérapie est donnée seule in, tan-
tôt, ainsi que nous venons de le dire (2), nous y joi-
gnons divers médicaments, surtout les poly-bromurcs
et le bromure de camphre (grand mal et vertiges ou
vertiges seuls). Les bains, les douches, ajoutés à la
gymnastique [mouvements, agrès), il la danse, à
1 escrime, au travail manuel, soit clans les ateliers,
soit dans les jardins, constituent, il notre avis, les plus
puissants agents thérapeutiques contre les diverses
formes du mal caduc et ses complications. Joints aussi
aux purgatifs, ils assurent le bon fonctionnement
de la peau, l'élimination du bromure. Aussi n'avons-
nous jamais de bromisme.
Nous avons eu recours aussi, comme les années
(1) Douche froide en jet en éventail, seule, sur tout le corps (dos, côté droit,
poitrine, côté gauche, dos), en terminant par les pieds, eu tout de 5 à 35
secondes ou encore : jeton éventail et douche en pluie pendant il à secon-
des ; douche en jet pendant 10 à 15 secondes.
(2) Nous avons toujours prescrit les bains et l'hydrothérapie, aux silpilili-
tiques, en plus du traitement spécifique (deux fois par an) et des purgatif*.
Chez aucun de ceux que nous avons pu suivre et qui se sont conformés il
nos conseils, il n'est survenu, jusqu'ici, d'accidents cérébraux.
XLII Visites du service.
précédentes, avec des résultats incontestables, à la
médication thyroïdienne chez un certain nombre de
malades, idiots myxoedémateux (1), mongoliens, nains
et obèses. - Nous espérons pouvoir publier prochai-
nement un résume des améliorations enregistrées
chez ces différentes catégories de malades.
- Améliorations diverses. Le traitement de
MM. Mesnard, Landosse et D¡OEUETTE a été porté
pour le premier de 2.700 à 3.000; pour le deuxième
de 2.100 à 2.400 et pour le troisième de 1800 à 2.100
MM. Lelièvre, Gélin, infirmiers, 1Z ? BILLOT-.\IoHEL,
infirmière ont été promus à la première classe. Signa-
lons enfin que, M. Sutter, professeur de chant, a
obtenu les palmes académiques.
Au nombre des améliorations diverses, nous cite-
rons l'achat d'une seconde lanterne il projections, d'un
appareil photographique, d'un nouveau compendium
métrique, de diverses planches anatomiques, etc..
Visites du service. La section a été visitée,
en 1902, par le Dr Arraga, directeur de l'hôpital des
Enfants-Malades à Buenos-Ayres; M. Aubert institu-
teur à Orléans; Dr F. Hogdan, de Vienne (lutriohe) ;
`I1'e Marie Brichtova de l'ra ? uc (Bolcme) ; I)r Paul
Rybakoff, médecin-adjoint à l'asile d'aliénés Préo-
brajensky, à Moscou (Russie); M. Léon Bourgeois,
député de la Marne; Dr José; M. Baralt y Cneco, de
1 ? uerto-Pico ; Professeur L. Bianchi, député au parle-
ment italien ; fy Bomfini, directeur de l'Institut Médi-
co-pédagogique de Rio de Janeiro ; D1' Cullie et son
fils, à Hydc-Parck (Angleterre) ; Dr F. Cortaharria.
(Il Dans les observations que nous nvons publiées depuis 1880, nous avons
presque toujours mentionné leur régime alimentaire. D'après un relevé
comprenant 21 cas du service, tous prenaient de préférence ou exclusivement
du lait, des lépumes et des mnlfs : ne .f mangeaient un peu de viande.
.Visites du service. \LIII
Dr Ed. Claparédc, privat-docent il l'Université de
Genève (Suisse); Dr Vito Capriati, médecin aliéniste
, \aples; Mlle Doboowolska, à Librairie (Varsovie);
Dr A. Dupont, à Ermelo; I.)1' Dureau, bibliothécaire
de l'Académie de médecine de Paris; Dr Julio
N. Ferrer, de 1'orto-Iieo; D" Aclolfo i;üemes, cle
Ruenos-Ayres; D'' Joseph Ficheman, médecin de
l'asile des aliénés de Pérué (Russie) ; Miss Ethel L.
Bixon, de Sutten Surrey (Angleterre); Dr Manuel
Gurria, de Barcelone (Espagne); Dr Georges Guillain,
chef de clinique du Pr Raymond ; Dr Goyard, de Paris ;
D" Edmond E. Escomel et Médina d'aréquipa (Pérou) ;
Dr An t. Ileverocli, agrégé de l'Université Tchèque,
médecin de la Maison des aliénés, à Prague (Bohème).
' Dr Charles Ilacberlin ; DL' Harlet, de Roubaix(Nord);
IY Francisco de Jcaxa de Guoyaquil (République de
l'Equateur); Dr Pedro Ido`-aea, à Viscaya (Espagne);
Dr F. Kortlang J. Ezn; D. Victor de Klimenko, méde-
cin en chef des asiles pour les él)ileptiques ? dv I'étcrs-
- bourg et directeur de l'hôpital S0 Olga (Russie);
Dr Alexandre Lasoursky, assistant de clinique des
maladies mentales de Pétersbourg (Russie) ; ur Larri-
naga, à Viscaya (Espagne); M. René Lafargc, avocat
à la Cour d'Appel de Paris; M. Louis Lefèvrc, de
Paris; M. Gabriel Leitoissien, étudiant en médecine,
il Paris.
.M11" Lack, maîtresse de classe d'enfants anormaux de
Genève (Suisse) (1); h"Laclame, de Genève (Suisse) ; Dr
John Love, 1 ·las·,o\- ( : 1n ? lctcrrci; I)" Milan Mixa,
médecin de l'Hôpital général de Prague (Bohème);
Dr J. Martinex, de l3uenos-Ayres; Mlle Mengin, insti-
tutrice il Veizer surTrezè : Dr Oscar Orlitzky de Mos-
cou (Russie) ; D1' José Palancar. 1'1'0fef;C'ur il la Faculté
(1) M11» Lack est venue, comme autrefois M1" la Docteresse Montessort,
suivre régulièrement tous les exercices pendant plusieurs semaines. -'
xliv Visites du service.
de Madrid (Espagne) ; M. li. l'cgmen, instituteur en
Hollande : M. Marcel l'Icsia, sous-lieutenant au 5°
yénie (P ,ris); M11" Picard, institutrice à Ouzouer sur
Trezé; 1) ? Lotiise, G, Robinoyitch, de New-York;
D'' Vladimir Skalicha, chef de service il l'Institut ana-
tomo-pathologillue de Prague (Bohème).
Dr Charles Scapucci, assistant il la Clinique Médi-
cale de l'Institut Supérieur de Florence, sous-Directeur
du Sanatorium Casanuow(Itlie) ; D'' Soutzo fils, de
Paris; M Jiro Shimoda, Professeur il Tokio (Japon) ;
D'1\T. Stocncsco. médecin expertpresic Tribunal Itfow,
de Bucarest (Roumanie) ; D1' Albert Seilcr, de Zurich
(Suisse) ; Dr Serge Stoupine, médecin de l'hôpital
d'Aliénés d'Alexie", de Moscou ( Russie) Dr Viktor
Strctti, de Prague (Bohème) ; : '11"110 Seurewalde, de
Librairie (Varsovie) ; M. E. W. Scripture, Professeur
il l'Université de Yale (Etat-Unis); M. Démettre J.
Serbancsco, externe qes Hôpitaux de Paris; Dr Léon
Thivet, médecin en chef de l'asile de Clermont (Oise) ;
Melle Marie Vesolikova, de Prague (Bohème) ; Dr Vil-
leneuve, Professeur de pathologie mentale et de Méde-
cine légale à l'Université Laval, de Montréal (Canada);
D'Otto Veraguth, Président de l'Univesité de Zurich
(Suisse); Dr Agnès C. Victor, de Boston; Dry Votru-
ba, médecin général de Prague (Bohème); Dr Félix
Weber, clc Vesstal (Suisse); M. Hermann welter, de
Montréal (Canada. -
Enfin, de même que les années précédentes, la
Commission de surveillance des asiles de la Seine
et celle du Conseil général ont visité le service dans
le courant de l'année.
Nous consacrons d'habitude la matinée du samedi
à recevoir les visiteurs. Presque tous ceux dont nous
Visites DU service. XLV
venons de citer les noms sont venus ce jour-là. Nous
convoquons, à leur intention, les professeurs de chant,
de gymnastique, de danse et parfois les maîtres d'es-
crime, dont les heures de leçon ne coïncident pas avec
l'heure de notre visite (1). En leur demandant ce
déplacement et en nous imposant la fatigue très*
grande de montrer non seulement l'organisation du
service des enfants, mais encore son fonctionnement
mé(lico-p>édagogique dans tous ses détails, notre but
est de faire comprendre aux visiteurs l'importance de
l'oeuvre que nous avons pu réaliser naguère, avec
l'appui du Conseil municipal (1882-90), de fournir à
beaucoup d'entre eux les arguments qui militent en
faveur de l'hospitalisation malgré l'opposition de
l'Administration et du Conseil de surveillance de l'é-
poque 2) et de l'éducation de cette catégorie d'en-
fants anormaux et les convaincre de la possibilité de
les améliorer et même de les guérir par l'application
régulière, méthodique et prolongée du traitement
médico-pédagogique. Les visites faites dans la jour-
née, en dehors de nous, ne permettent pas d'avoir
une idée exacte de ce qui se fait dans le service.
On a une idée des bâtiments mais non du traitement
médico-pédagogique.
Nous nous efforcerons de maintenir ces visites du
samedi afin d'expliquer aux visiteurs, la plupart
médecins étrangers, l'organisation que nous avons
créée en dépit des obstacles dressés sans cesse devant
nous, pour nous décourager ; afin de les mettre ainsi
(1) Le professeur de gvinnastique icut le matin de 8 à 9 heures. Le
professeur de chant de 4 ii 5 heures.
U) Voir Histoire de la section des Enfants de Bicétre, par Bourneville,
( 19 î'.1-1 Ç ! ^o , '. ' z
'XLVI M¡ ? im 1'.\THOLOGH, ! UE.
en mesure de fonder dans leurs pays, s'ils en sont
dépourvus, des asiles-écoles semblables. Si, nous dis-
paru, notre oeuvre périclite ou disparait en France,
comme a disparu tout ce que Leuret et Séguin avaient
organisé, car nous ne nous faisons pas d'illusion sur
l'absence de conviction administrative, nous avons le
ferme espoir qu'elle sera continuée, développée, per-
fectionnée dans les autres pays et peut-être aussi en
province. Notre plaidoyer en faveur de ceux qui ne
peuvent plaider pour eux-mêmes n'aura pas été stérile.
M usée pathologique. -Ce musée s'est notablement
enrichi en 1902, ainsi que le montre le tableau suivant.
Enseignement professionnel. \LVII
photographies des cerveaux qui composent 12 volu-
mineux albums, les cahiers scolaires que nous avons
institués dès 1880, c'est-à-dire 7 ans avant leur intro-
duction dans les écoles publiques. Les visiteurs peu-
vent, au moyen du Catalogue que nous avons refait
nous-même pour les années 1879 à.1902, avoir tous les
renseignements désirables sur les pièces anatomo-pa-
tholoiducs du musée.
II.
,
Enseignement professionnel.
Cet enseignement a été dirigé en 1902, de même
que les années précédentes, par MM. LEROY pour la
menuiserie (1882-1902), Allène pour la couture
(1883-1902), Dumoulin pour la cordonnerie (1888-1902),
Moiux pour la vannerie, le paillage et le canage des
chaises (1889-1902), DI : nLCI3 : LL ? r pour l'imprimerie
(1889-1902), Gaie pour la serrurerie (1895-1902),
1\IESS ? nD pour le jardinage (1896-1902), Ganif pour
la brosserie (1901-1902) (1).
- ni Chaque fois que nous ayons un nouveau chef d'atelier nous insistons
pour qu'il suive les cours de l'Ecole d'infirmiers. En contact avec des malades
sujets à des chutes convulsives. it des impulsions, etc., il est nécessaire qu'il
soit en mesure de leur venir en aide de suite et comprenne qu'il a alïaire 1,-
des malades. MM. Ganif et Mesnard ont reconnu cette nécessité et suiveur
les cours. Il devrait en être de même pour tout le personnel en rapport avec
les malades. Dans un hôpital, un hospice, un asile, tous devraiettOr ? eh
mesure d'intervenir en cas de nécessité. ,
CL1'111 Enseignement professionnel.
De même aussi que les autres années, nous n'avons
qu'à les féliciter tous, non seulement pour le zèle et
l'intelligence qu'ils apportent chaque jour à donner
l'in8tl'llction pl'O{e)siol1ncl1c aux enfants, mais encore
pour la bonne direction morale qu'ils savent leur
imprimer. Le tableau suivant met en évidence les
résultats 'obtenus par eux en 1902 et qui se chiffrent
par 28.786 fr.
Les travaux de jardinage seuls ne sont pas évalués,
et comme nous l'avons souvent dit et écrit, bien qu'il soit
dillicile d'en faire une estimation précise, nous croyons
que l'Administration aurait intérêt à essayer d'en
avoir tout au moins une évaluation approximative.
Les sept maîtres, non compris le jardinier, dont le
travail de ses apprentis et le sien dépassent assurément
le salaire sont payés raison de 6 fr. 50 par jour,
soit pour l'année 16.607 fr. 50.
Le Travail des enfants, évalué par l'économe,
M. 1\lAUPI\I, et par l'architecte, M. Delaiiave, couvre
donc : 1° la dépense occasionnée par le salaire de
leurs maîtres ; 20 l'intérêt il -1 0/0' taux légal, du capi-
tal employé pour la construction des ateliers (210.000
francs), soit 8.400 fr. ; 3° les gratifications hebdoma-
daires données aux enfants, le samedi, à titre de récom-
pense variant de 5 a 50 cent. par semaine et qui s'élèvent
il 1.360 francs pour toute l'année. De plus, il y a un
bénéfice (le 2.219 fr. qui vient atténuer les dépenses
d'entretien des enfants. Cette somme, comme celle
réalisée sur les permissions de sortie et les congés,
7.684 fr. (1), soit au total près de dix mille francs
sans compter l'es économies de linge dont nous avons
parlé, devrait en bonne justice être employée, nous le
(l) Voir la note 1 de la page sww.
L . Enseignement professionnel.
Produits fabriqués dans les ateliers en 1902.
Brosserie.
9.OU brosses en tous genres (dont 6. î 10 pour le Magasin
Central des hôpitaux).
Vannerie.
243 mannes neuves fabriquées, 271 mannes réparées, 220
chaises cannées et rempaillées.
Couture.
490 pantalons, 521 vestons, 476 gilets, 131 robes, 135 mail-
lots, 10 maillots treillis pour décliireurs.
Menuiserie .
3 séries complètes des objets servant à l'enseignement. z
2 tables scolaires. - I armoire pour le musée. 1 armoire
pour l'imprimerie. - 9 grand cotTre-banquelle. Fait toutes
les réparations, bancs, tables, portes, jeux, etc.
Serrurerie.
30 chaises. - Objets de tour : 925. -
Cordonnerie .
365 paires de chaussures neuves, l'/O paires sur mesure,
575 ressemelages.
Imprimerie.
Compte-rendu du service de l'année. - Ordres du jour des
Commissions. Affiches diverses. Entâtes de lettres.
- Divers imprimés pour les Ecoles d'infirmières : Palmarès.
Diplômes, etc. Feuilles d'Alphabet pour les classes.
Travaux divers pour les hôpitaux, pour la Société Amicale
des Employés de l'A. P. Fait tous les imprimés pour la
Société du Personnel hospitalier de l'A. P., etc., etc..
Enseignement professionnel.' LI
répétons, sinon en totalité au moins en grande partie,
à assurer le bon entretien du service cl à l'améliora-
tion du matériel d'enseignement.
Pour permettre à tous d'apprécier les résultats éco-
nomiques de l'enseignement professionnel et du
travail accompli, au point de vue pratique, nous
avons donné à la page L rémunération sommaire
de ce qui a été fait dans les divers ateliers en 1902.
Nous n'insisterons pas sur les avantages que procu-
rent ces ateliers tant au point de vue de l'intérêt
des malades eux-mêmes qu'à celui de l'Administration.
Nous ajouterons seulement qu'il serait convenable, à
tous les égards, que nos anciens malades qui passent
soit dans les sections d'aliénés adultes, soit dans la
division des incurables de l'hospice, trouvent un
meilleur accueil dans les ateliers de l'hospice et que
les chefs de ces ateliers leur témoignent plus de bien-
veillance. Il y va de l'intérêt des malades, supé-
rieur il toute autre considération, et de l'intérêt
linancier de l'Administration..
Tel est le résumé de l'enseignement professionnel
en 1902. Il importe de ne pas oublier que nos ateliers
ne sont nullement comparables il ceux de l'orphelinat
Prévost à Cempuis et de l'école d'Alembert à Monté-
vrain, par exemple, où les apprentis sont des enfants
normaux, sains de corps et d'esprit, et même choisis
parmi les plus intelligents des candidats. Nos appren-
tis, à Bicêtre, sont non seulement des enfants anor-
maux, mais encore des enfants malades : quand ils
ont, les uns des accès épileptiques, convulsifs ou psy-
chiques, les autres des impulsions ou des périodes
d'excitation, ces jours-là et les jours qui suivent, ils
ne peuvent travailler ni à l'école, ni à l'atelier. Un
autre fait qui contribue à différencier nos apprentis
de ceux que nous avons cités, c'est qu'ils ont des peur-
LU Enseignement professionnel.
missions de sortie et des congés, sur la demande des
familles, il toutes les époques du l'année, qu'ils ont des
visites les jeudis et dimanches souvent trop prolon-
gées, enfin que deux fois par semaine ils l'ont des
promenades aux environs de l'hospice ou dans Paris,
promenades qui font perdre une demi-journée de
travail.
Administrativement, après avoir douté de la possi-
bilité de faire travailler les enfants idiots, arriérés et
épileptiques, et avoir protesté contre la construction
des ateliers, certains auraient de la tendance il vouloir
considérer nos malades comme des apprentis ont i-
11 ai l'es qui, suivant la pratique abusive des couvents,
doivent fournir régulièrement une somme de travail
fixe. Et on y tend administrativement, car on vou-
drait leur faire faire tous les travaux d'entretien de la
section, oubliant qu'il s'agit d'ateliers d'enseignement
et que si le maître et un apprenti sont occupés, par
exemple, à réparer une porte, les autres enfants n'ont
plus de guide et no s'instruisent pas.
Nous le répétons, ce qui doit primer dans notre
service, c'est l'influence morale du travail, qui est l'ad-
juvant du travail scolaire, des exercices physiques, du
traitement médical et non le produit lui-même (1), bien
qu'il ne soit pas il dédaigner. Les enfants eux-mêmes
sont heureux de voir que leur travail est productif,
qu'il se traduit par des résultats pratiques et que tout
ce qu'ils font contribue à leur bien-être, il leur ensei-
gnement et il l'entretien de leur section.
(1) Nous insistons sur ce fait : c'est que nous n'intervenons en quoi que ce
soit flans l'évaluation ,le ce produit; c'est l'affaire de 1\1. l'économe et de
ill. l'architecte.
Statistique, mouvement DE la population. lui
III.
Statistique. Mouvement de la Population.
Le premier janvier 1902, il y avait dans le service
138 enfants (1) se décomposant ainsi : 413 enfants
idiots, imbéciles, ou épilepliques, dits aliénés et 25
réputés non aliénés. Cette distinction, qui s'applique
aux épileptiques adultes aussi bien qu'aux enfants,
est purement administrative et il est difficile de la
justifier médicalement. Les épiléptiqucs dits non alié-
nés sont placés par l'Assistance publique et sont tt la
charge du budget municipal; les épileptiques aliénés
sont placés suivant les prescriptions de la loi du 30 juin
1838 et à la charge du budget départemental.
Sur ce nombre 122 étaient atteints de gâtisme; 41
d'incontinence nocturne d'urine seulement; 14 de
cécité complète ; 7 de cécité incomplète ; 7 de sUl'cli-
mutité; G de surdité; 3 étaient bègues ; 12 présen-
taient (lu nlllfismc volontaire; ;29 des impulsions
violentes ou des accès de colère; 44 étaient menteurs
il un degré vraiment pathologique ; 16 étaient atteints
de clacazoana.azic; 5 de pyromanie ; 10 d'écholalie ; 17
de 1; ouomaazie ; 16 de clastoanaazie ; 14 de coprolalie;
21 de kleptomanie; 6 d'ee1zo131zésie, 8 de rumination ;
3 étaient (1(,ciiiietti-s d'ongles; 16 étaient flaireurs, 17
(1) C'est-à-dire 38 de trop la section ayant été conçue seulement pour 400
enfants..
LIV Décès, Sorties.
étaient 'baveux; 2 étaient atteints cl'IcclronW 21e, 13.
d' hydrophobie, 18 de coprophagie; 54 étaient onyco-
phages, 155 onunisles; 22 présentaient du nystagmus;
72 étaient strabiques ; 3 présentaient de ladépl'cssion
mélancolique; 17 avaient des tics convulsifs (lèvres,
paupières, etc.), 45 avaient le tic du balancement du
corps avec ou sans rotation de la tête ; 15 avaient
un tic coordonné des mains ; 1G enfants idiots étaient
tourneurs; 19 9 étaient sauteurs et 5 étaient grimpeurs.
Deux enfants étaient atteints d'hémimélie; 1 de
polydarlylie, 1 de syndaclylie ; 3 do mal formations
pathologiques de la main, 1 d'encéphalocèle, 1 de
cyphose (' ? ), 47 présentaient des p>ieds-bols ; 2 étaient
hén21paésiclues, 1 5 paraplégiques, 32 hémiplégiques,
14 cliplL : giqucs; 9 étaient atteints de maladie de Utile;
enfin 13 étaient athétosiques.
Le tableau suivant résume le mouvement de la
population en 1902.
DÉCÈS. SORTIES, ÉVASIONS. LV
Décès. Les décès ont été au nombre de 21 durant
l'année 1902. Le tableau des pages LVII à Lxm fournit
les renseignements concernant le diagnostic, la date et
la cause du décès, ainsi que les principales particula-
rités présentées par les malades.
Sorties. - Des 67 malades sortis de la section,
1 ont été dirigés sur l'une des sections d'adultes,
19 ont été transférés, 2 sont passés clans un des quar-
tiers de l'hospice, 29 ont été rendus à leur famille,
guéris ou améliorés ou sur la demande de celle-ci. Le
tableau cle la page LXIII à lxix indique les motifs de
la sortie, la nature cle l'affection pathologique
dont étaient atteints les malades sortis. Comme nous le
disions encore l'an dernier* nous désirerions vivement
suivre nos malades après leur sortie, savoir ce qu'ils
deviennent, si l'amélioration réalisée par nous s'est
maintenue ou même a augmenté. Malheureusement
les moyens nous font défaut.
Nous envoyons le plus possible nos surveillants ou
surveillantes visiter un certain nombre d'entre eux. Il
ne les rencontrent pas toujours. Souvent la famille
a déménagé et on ne peut avoir sa nouvelle adresse.
Parmi les enfants sortis, il en est qui sont enlevés
prématurément par leurs parents. Ceux-ci les voyant
très améliorés, par rapport à leur situation il l'entrée,
les reprennent malgré nos conseils, alors qu'un séjour
plus prolongé nous aurait permis d'obtenir des résul-
tats plus complets.
Evasions. Neuf évasions ont eu lieu dans le cou-
rant de l'année, celles des enfants Se..., Delf...,
Mull ? Cuir...., lwaut..., Calb ? Pach ? Vign ? et
Crue... Ces différentes évasions n'ont donné lieu
il aucune formalité légale. Les enfants nous ont été
ramenés par leurs parents ou par des infirmiers
envoyés à leur recherche.
LVI DÉCÈS.
lvui Décès.
Ruz DÉCÈS.
Transferts, maladies INFECTIEUSES. LXIX
Transferts. Ils ont été au nombre de 19 : 16 à
Villejuif, 3 à Clermont (Oise). Nous avons pour
habitude de prendre la température des malades avant
leur départ, et cela dans le but d'éviter le transfert
de malades sous le coup d'une affection aiguë, de
même que nous prenons la température à l'entrée,
durant les cinq premiers jours (1) pour savoir si l'en-
fant n'est pas sous le coup d'une affection aiguë, con-
tagieuse ou non.
Maladies infectieuses. Une épidémie de rougeole
a éclaté dans le service sans cause connue ; elle a porté
sur 38 cas dont 2 fillettes, 4 malades dont l'éruption
s'est compliquée de broncho-pneumonie ont succombe.
Signalons également un cas'de rubéole, avec guérison
rapide ; 3 cas de varicelle, 3 cas. d'érysipèle. Mention-
nons enfin 5 cas de fièvre typhoïde dont 2 chez des
infirmières; aucun de ces cas n'a été suivi de décès.
(Il A l'entrée de tous les enfants, aussi bien à la Fondation Vallée qu'à
Bicêtre, nous faisons prendre un bain aux malades et examiner leur corps
au point de vue des plaies, des contusions, de la teigne, etc., et le lendemain,
au moment du certificat immédiat nous examinons nous-même l'enfant de
la tête aux pieds s'il y a lieu ; il en est ainsi depuis 18S0, ce que l'Adminis-
tration ignore. Voici la circulaire relative aux visites des malades à l'entrée.
Monsieur le Directeur. Mon attention a été appelée, vous savez à la
suite de quelle circonstance (a), sur la nécessité de faire examiner les aliénés
par l'interne de service à leur arrivée dans votre établissement.
Dans le cas où l'interne constaterait qu'un aliéné, soumis à son examen,
porte des traces de coups ou de blessures, il devra établir un certificat signé
par lui et une copie de cette pièce devra être adressée sans retard à l'Adminis-
tration centrale. - Je vous prie eu conséquence de veiller, dès la réception
de la présente, à ce que cette mesure soit mise à exécution. LeMaitre des ,s
Requêtes au Conseil d'Etat, Directeur de l'Administration Générale de
l'Assistance Publique. Signé : I)IOURIER.
(a) Une famille étant venue visiter un parent m.1lade, entré quelques jours
auparavant, avait constaté sur sou corps des contusions multiples. Ces con-
tusionsavaient-elles été produites 11 Bicêtre ou à l'Asile clinique, on ne savait.
LXX Maladies intercurrentes.
Le personnel d'un service de contagieux devrait
toujours être choisi avec soin, de préférence parmi
les infirmières déjà âgées, ou ayant eu, elles-mêmes,
les maladies infectieuses les plus communes. Nos
conseils à ce sujet n'ont jamais été suivis et presque
toujours on nous donne des infirmières jeunes. Il en
est de même, malheureusement, dans la plupart des
services de contagieux des hôpitaux, si nous en
croyons les renseignements que nous avons recueillis.
Teigne. Au premier janvier 1902, il restait dans
le service 17 teigneux et 5 teigneuses ; à la fin cle
l'année, ces chiffres étaient descendus it 12 pour les
garçons et étaient restés les mêmes pour les filles.
Maladies intercurrentes. 11 enfants ont été
atteints d'état de mal épilcptiquc ou de séries d'accès ;
aucun cas n'a été suivi de décès; 11 de broncho-
pzezcnonie; - 7 de pneumonie ; 1 de péritonite ;
3 de diarrhée; 40 d'ophtalmie ; 1 de cataracte
tra11matiquc; i d'engelures ; 3 d'abcès; 2 d'an-
gine; 1 de grippe, 1 de décollement du cuir chevelu
dans un accès; 3 de mammite ; l (le panaris; 1 de
fracture de la cuisse; 1 de fracture de l'avant-bras .-
1 d'en/.o ? 'se du poignet; 1 d'entorse du pied gauche;
49 (le plaies légères dans des accès. Ajoutons
que tous les enfants qui se font des contusions ou des
plaies, soit en jouant, soit dans des accès sont con-
duits it l'infirmerie où des pansements appropriés leur
sont faits par les deux infirmières, sous la surveillance
de Mmc Athénaïs BOHAI ? sous-surveillante du service,
sur nos indications ou celles de nos internes.
En 1899 l'un do nos internes, M. Foulard, s'était
Affections AIGUËS. LXXI
intéressé vivement aux enfants atteints de maladies
des yeux. Depuis il a rempli les fonctions d'interne
dans des services plus particulièrement consacrés à
l'ophtalmologie à Lariboisière et à l'IIrtcl-Dicu. Il a
continué à venir une fois par semaine dans notre
service, bénévolement, pour examiner tous nos mala-
des atteints d'affections oculaires.
Ses examens, les traitements qu'il a institués ont été
d'une grande utilité iL nos enfants malades, nous lere-
mercions (le son bienveillant concours que nous
croyons devoir signaler a l'attention de l'administra-
tion. Voici un rapide résumé de sa pratique pendant
l'année 1902.
Affections aiguës des y eux observées dans le service
au cours de l'année. - Parmi les affections aiguës
nous en retiendrons deux seulement, la conjonctivite
chronique ou subaigue à diplohacille de Morax et la
conjonctivite aiguë à bacille de Weeks.
('onjol1 cti vi tc chl'on iquc ou suba igiie iL di plobnci Il c.
Au cours de l'année 16 malades, dont trois infirmiè-
res, se sont présentées 1 nous atteintes de conjoncti-
vite subaiguë à diplobacille, cela ne signifie pas que 16
personnes seulement aient été, pendant cette période,
atteintes de conjonctivite à diplobteille. Ce chiffre
est même fort loin de ce qu'il devrait être en réalité.
Le nombre des malades vus par nous it la consulta-
tion ne permet même de se l'aire qu'une idée appro-
ximative du nombre des enfants atteints de conjoncti-
vite cliplolacillaire. En voici les raisons.
Les enfants sont choisis par les surveillantes qui
nous les amènent à la consultation. Il faut pour attirer
leur attention que la conjonctivite prenne des allures
sévères, que la rougeur de l'ceil soit marquée et la
sécrétion muco-pl11'ulcnte abondante. Mais il s'agit ici
LXXII Affections aiguës.
d'une conjonctivite chronique à symptômes très peu
aigus et qui, dans la plupart des cas, n'attirent cer-
tainement pas suffisamment l'attention du personnel,
malgré les recommandations incessantes qui lui sont
faites. Les 16 conjonctivites à diplobacilles que nous
avons vues ont présenté des symptômes d'une acuité
plus particulièrement intense. Sans cela les enfants
seraient restés dans leurs pavillons, conservant une
affection de durée presque indéfinie, et constituant
ainsi une source perpétuelle de contamination pour
l'entourage.
Un fait beaucoup plus précis et qui vient à l'appui
de nos opinions, c'est le résultat que nous a donné,
l'examen, fait par nous en 1901, d'enfants pris au
hasard, à la suite les uns des autres dans leurs pavil-
lons et qui étaient considérés comme indemnes de
toute conjonctivite.
La plus grande partie d'entre eux présentaient une
sécrétion modérée, très légère, souvent insignifiante
s'accumulant dans le grand angle de l'oeil, avec un
peu de rougeur de la conjonctive, manifestations qui
sont, en somme, celles de la conjonctivite chronique à
diplobacille, souvent si légère que les adultes eux-
mêmes la conservent cle longs mois sans aller consulter
l'oculiste. Nous avons fait l'examen microscopique de
la sécrétion prélevée sur chacun de ces enfants et,
)0 fois sur 90, nous avons trouvé le diplohacillc de
Morax. La présence du sur la conjonctive,
avec la conjonctivite torpide qui en est la conséquence,
était donc habituelle chez les enfants que nous avons
examinés ; les conjonctives saines étaient le petit
nombre. Quand, clc temps en temps, une conjonctivite
revêtait des allures plus aiguës, l'enfant nous était
conduit. C'est ainsi que nous avons pu en observer
16 au cours de l'année.
Affections aiguës. LXXIII
La lutte contre cette affection, essentiellement con-
tagieuse, ne peut être possible et fructueuse, que si
on agit à la fois sur tous les foyers microbiens, sur
toutes les conjonctives injectées. La transmission se
fait par les mains des enfants, par leurs habits avec
lesquels ils s'essuient, et peut-être par les linges qui
servent à laver leur figure chaque matin, en dépit des
recommandations qui sont faites et au personnel et
aux enfants, dans la mesure de leur compréhension. Les
enfants gâteux présentent une certaine insensibilité de
la conjonctive au contact et, l'été, on voit les mouches se
promener en grand nombre sur le bord de leurs paupiè-
res. 11 est fort possible que ces mouches, en allant d'un
enfant it l'autre, puissent constituer un moyen de trans-
mission. C'est un fait que nous espérons éluciderpro-
chainemenl.
Conjonctivite aiguë : 1. bacilles de 1'eelas. Les
allures de la conjonctivite aiguë à bacilles de Weeks
sont bien différentes. Ses symptômes, en général
beaucoup plus accentués que ceux de la conjonctivite
diplobaciliairc, frappent davantage l'attention du per-
sonnel, et les conjonctivites qui passent sans être
signalées au médecin sont beaucoup plus rares. Nous
avons observé clans l'année, 24 cas de conjonctivite à
bacilles (le Weeks et presque toutes se sont montrées
en même temps au cours d'une épidémie.
En 12 jours nous avons vu 20 cas de conjonctivite it
bacilles de Weeks, dont le plus grand nombre étaient
survenus dans .le même- pavillon. Cette épidémie fut
bénigne, n'amena aucune complication oculaire.
La conjonctivite chronique à diplobacille et la con-
jonctivite à bacille de Weeks donnent lieu à la grande
majorité des affections conjonctivales chez les enfants
du service. Nous avons bien observé quelques cas
L\\1\' Consultation DU jeudi.
de conjonctivite à pneumocoque, un cas fort grave
d'injection streptococcique, deux conjonctivites gra-
nuleuses el quclqucs cas de kéralo-conjonctivite impé-
tigineuse. Mais les deux infections conjonctivales que
nous venons d'étudier n'en restent pas moins, et de
beaucoup, les plus fréquentes et les plus importantes
et c'est contre elles que doivent se diriger nos efforts
de traitement curatif et surtout prophylactique.
Co)).stJ/H/;out ? Il n'y avait, autrefois, il
Bicêtre, que deux consultations, une de médecine faite
par le médecin de l'Infirmerie générale, une cle chirur-
gie faite par le chirurgien. A notre arrivée à Bicêtre,
nous avons établi une consultation non officielle, pour
les maladies nerveuses et mentales. Nos collègues de
la division des aliénés, nommés comme nous au con-
cours, en ont aussi créé successivement.
En 1905, 510 personnes se sont présentées. 102 pour
renseignements sur le placement d'enfants arriérés ou
épilepliques; 17'2 pour maladies diverses; 79
pour assistance. Il s'agit d'anciens malades des asiles
ou clu service. Nous profitons de la visite de ces der-
niers pour nous renseigner sur leur état mental ou
leur situation sociale. Dans ce groupe figurent ceux
qui vont tirer au sort et viennent réclamer un certifi-
cat devant aider il leur exemption du service mili-
taire ; 39 pour demandes d'emploi ou de placement
dans les hospices : infirmiers qui réclament leur rentrée
dans les hôpitaux, infirmes, vicifards, etc.; 118 I
pour renseignements sur les enfants du service présents
ou f'n('OJ]OE('.
Nous écrivions l'an dernier que « l'Administration
avait accordé à nos collègues et à nous, la faculté de
faire prendre des bains et des douches aux consultants
Population au 31 décembre 1902. LXXV
qui habitent la région dépourvue d'établissements bal-
néo-hydrothérapiques. Il n'en résulte pas une dépense
sérieuse pour l'Assistance publique ; les malades peu-
vent suivre leur traitement tout en continuant à exercer
leur profession et sans perdre de temps. Cette tolérance
fait honneur a l'Administration et rend service aux
malheureux. Nous ajoutions qu'il devrait en être ainsi
dans tous les établissements hospitaliers, suburbains,
départementaux, comme l'asile de Villejuif, ou muni-
cipaux comme Bicêtre, l'hospice -des Ménages tt Issy,
l'hospice des Incurables d'Ivry qui devraient être des
centres hospitaliers pour leur région (1).
Population au 31 décembre 1902, - Il Y avait à cette
époque dans le service 4118 enfants, se décomposant
ainsi : '417 enfants idiots, imbéciles ou épilepliques,
dits aliénés et.21 réputés non aliénés. Sur ce nombre
110 sont atteints de gâtisme; 32 d'incontinence noc-
turne d'urine seulement, 15 de cécité complète; 6 de
cécité incomplète; 5 de Il 4 -de surdité;
2 sont bègues; 9 présentent du mutisme volontaire;
31 des impulsions violentes ou des accès de colère; '-
57 sont menteurs un degré tout à fait pathologique;
13 sont atteints de daenomanie; 7 de pyromanie; 8
d'écholalie; 22 de krouomanie ; 24 de clastomanie ; 18
de coprolalie; 31 de kleptomanie ; 5 d-'écho7;iiésie;
(l)"L';\.351sttmpt'))i')'.i3.dis : om.nous dais une circulaire aux électeurs
sénatoriaux (Fémier 1813), est une question '1 laquelle je me suis attaché depuis
187G, épique où j'ai fait un rapport dans lequel j'ai demandé la création d'hô-
pitaux cantonaux. Depuis, la situation s'est améliorée par la création d'hôpi-
taux intercommunaux, l'agrandissement d'hôpitaux déjà existants, la créa-
tion de l'hospice Favier, etc....
a L'hospitalisation des vieillards est à peu près réalisée dans la moitié des
communes, mais n'existe pas dans l'antre moitié. Il serait possible, facile
même, de donner satisfaction aux malades d'une partie de la banlieue, par une-
entente avec l'assistance publique et le département en vue de la création aux
liusp-ces d'Ivry, del31cètre, d'Issy, et.^..., de pavillons pour les malades et les
blessés des communes environnantes. Ces annexes seraient administrées 11
peu de frais et desservies par les services généraux de ces maisons, restrei-
gnant ainsi très sensiblement le prix moyen d'hospitalisation. » ,
LXXVI Personnel du service EN 1905.
G de rumination; 3 sont déchireurs d'ongles; 5 sont
{taiI'C111'S; 41 sont baveux; 2 sont atteints d'hydl'o-
manie ; 10 d'hydrophobie ; 16 de coprophagie ; 62
sont orzcohh.ae.s; 198 sont mzaaziste.s ; 17 présentent
du nystagmus ; 6 sont slrabiques; 2 ont présenté de
la dépression mélancolique ; 12 ont des tics convulsifs
(lèvres, paupières etc.,) ; 4) ont le tic du balancement,
du corps avec ou sans rotation de la tête; 17 ont un tic
coordonné des mains; 14 enfants idiots sont tour-
neurs; 12 sont sauteurs ; 7 sont grimpeurs. Un enfant
était atteint d' hé mimé lie ; 1 de polydaclylie ; 1 de
syndactulie : 3 de malformations pathologiques de
la main; 1 d'encéphalocèlc ; plusieurs de ('Uplwsc
ou de scoliose; 10 présentent des pieds-bots; 2 sont
hémiparétiques; 7 sont paraplégiques ; 23 sont hémi-
plégiques; 7 sont diplégiques; 11 sont atteints de
maladie deLittle ; 8 sont nlhélosiqlles.
Personnel du service en 1902. Le personnel
était ainsi composé : 1° Service médical : Un conser-.
vateur du Musée, M. le Dr J. Nom. Deux internes titu-
laires, MM. YILLAIOET et Lemaire, M. Yillauet a été
remplacé par M. Max ULUMEXFELLE ; un interne en
pharmacie, M.
2° Service scolaire : A. Grande Ecole. 4 insti-
tuteurs : MM. MES : -<A1\O, LANDOSSE, CAMAILHAC et
DERUETTE; un professeur de chant, M. Sutteis; un
professeur de gymnastique, M. Gov; un professeur
cle dessin, M. Daaiowr : un maître de danse, M. Lan-
dosse ; deux maîtres d'escrime. 13. Petite Ecole.
Miles AGNUS (Blanche;) et 13oo11r (Amandine), surveil-
lantes ; une première infirmière, Mlle vlnnur..·r; et
10 infirmières de jour aidant les maîtresses d'école,
après avoir terminé le nettoyage clc leurs dortoirs
respectifs et accompli leurs corvées.
Personnel du service en 1902. LX1\'II
3° Enseignement professionnel . 8 maitres dont
nous avons donné les noms à la page XLVII, plus deux
infirmiers de garde. Ces infirmiers remplacent les
chefs d'ateliers momentanément absents, par exemple
pour faire des réparations dans les salles. Ils inter-
viennent quand les enfants ont des querelles, des
impulsions, des accès, pour les conduire il l'infirmerie,
etc. Ils devraient être choisis parmi les infirmiers
ayant exercé les professions correspondant à celles des
chefs d'ateliers, afin redirons-nous, de remplacer,
avec compétence, les chefs d'ateliers en congé ou
absents pour cause de maladie.
4° Service hospitalier. - Il se compose de M. Acard,
sous-surveillant, remplissant les fonctions de surveil-
lant ; M. Acahij a été remplacé clans ses fonctions le
10 octobre par M. Gerder, suppléant ; de M. Ouillou,
suppléant, faisant les fonctions de sous-surveillant ;
de M. LEHEVRE, 1 ? infirmier, faisant les fonctions de
suppléant; de M. Gklin, 1 ? infirmier; de Mme Bohain
(Athénaïs), sous-survcillantc (infirmerie) ; de 1\1mo MA-
LE : ,\(. : ON, sous-surveillante (bâtiment Séguin : gâteux);
de îI ? Grtrsarcn, suppléante (pavillon d'isolement);
de \I ? Derière, sous-surveillante de nuit ; de M.
Guère l, suppléant, attaché au service des bains et
douches; d'un infirmier portier, d'un perruquier; de
35 infirmières, 25 de jour et 10 cle nuit; de 31 infir-
miens, 22 de jour et 9 de nuit; total du personnel
secondaire : 86.
Section II : Fondation Vallée.
Histoire du service pendant l'année 1902.
I.
Situation du service. Enseignement primaire.
La Fondation Vallée par les diverses catégories
d'enfants qu'elle reçoit, ne correspond pas il la colonie
de Vaucluse dont elle devrait être le pendant c'cst-a-
dire ne recevoir ni épilepliques, ni gâteuses, mais au
service des enfants de Bicêtre, où nous recevons, en
outre des épileptiques et des hystériques, toutes les
catégories d'enfants idiots. Nous avons, à la Fonda-
tion, deux groupes principaux : 1° les enfants idiotes
et galeuses, valides ou non ; - 2° les enfants propres,
et dans les deux groupes, des épilepliques.
Enfants idiotes et galeuses. Elles étaient au
nombre de 78 au le' janvier 1902 et clc 84 à la fin de
l'année. Leurs installations de jour sont dans le sous-
sol du pavillon neuf dont l'aménagement est complè-
tement terminé. Au point de vue du traitement les
moyens et procédés sont les mêmes que ceux décrits
dans nos précédents Rapports.
Fondation Vallée. ' LXXIX
Les idiotes galeuses se divisent eu deux catégo-
ries : a) les enfants valides qui sont envoyées à l'école
durant une partie de la journée; - b) les enfants inva-
LIDES, qui séjournent clans le sous-sol. Ce sous-sol,
en réalité un rez-de-chaussée bien aéré, bien éclairé,
donne de plein pied sur une large terrasse exposée à
l'ouest et sur laquelle, en été, on dresse une tente
reposant sur un sol cimenté. Chez six d'entre elles,
nous avons pu supprimer le gâtisme : Bul..., Mugn ?
(Triffotil ? Lamb ? Saun ? Talib... Voici quelques
renseignements sur des enfants qui, parties de très-
bas, ont fait de sérieux progrès.
1° CHANE... (Germaine). 5 ans 1/2, entrée à la Fondation
en septembre 1900, atteinte d'idiotie complète avec gâtisme;
marche et parole nulles. L'amélioration produite chez cette
enfant depuis son arrivée est remarquable sur tous les points.
La physionomie, qui n'exprimait que l'hébétude, reflète aujour-
d'hui l'intelligence, le regard autrefois vague (strabisme inter-
miteux), est devenu vif et expressif.
Au début, l'enfant ne savait ni marcher, ni causer sauf
quelques syllabes incompréhensibles. Au réfectoire la tenue
était des plus mauvaises, elle ne mangeait pas seule, ne
sachant pas se servir des objets usuels, elle était heureuse
de plonger pleines mains dans son assiette.
L'enfant gâtait jour et nuit et poussait des cris affreux,
lorsqu'il s'agissait de la nettoyer, était en un mot d'une mal-
propreté repoussante.
Aujourd'hui, elle est pour ainsi dire méconnaissable à son
avantage. Le caractère autrefois hargneux et coléreux, est
devenu doux, caressant, affectueux, la parole' est bonne, à
part quelques défauts de prononciation, elle commence même
à faire quelques phrases et emploie le verbe. Les jambes
jadis très faibles sont devenues solides, l'enfant marche et
courtsans aucune fatigue, aime faire la gymnastique, elle est
souple dans ses mouvements. En classe, les progrès sont
également très notables; auparavant l'enfant qui ne pouvait
tenir quelques secondes en place, est actuellement plus tran-
quille, prend plaisir à placer les'lettres au tableau et cela
d'une façon intelligente. L'enfant est beaucoup plus soigneuse
dans ses vêtements, ne se traîne plus à terre et se salit rare-
LXXX Enseignement pratique ET primaire.
ment. Le gâtisme a complètement disparu. En un mot l'amé-
lioration se fait sentir tous les jours d'une manière particulière.
2° jMuGN... (Marie, Louise), 2 ans, à son entrée à la Fondation
en octobre 1900, atteinte d'idiotie complète, avec gâtisme,
marche et parole à peu près nulles.
Les progrès faits par l'enfant sont à signaler d'une façon
toute particulière. Elle ne prononçait aucun mot, ne faisait
entendre qu'un gazouillement tout-à-fait incompréhensible
aucun signe, aucun geste ne suppléait à la parole, l'enfant
essayait les premiers pas en chancelant et le moindre obstacle
suffisait pour l'effrayer et la faire tomber. Elle était gâteuse
et malpropre au suprême degré, n'aimait guère à être net-
toyée et les soins nécessaires concernant sa toilette lui étaient
extrêmement désagréables.
Deux années se sont écoulées depuis son arrivée et un grand
changement sous tous les rapports s'est opéré en elle. Elle
s'habille et se déshabille seule; elle est d'une propreté méti-
culeuse sur ses vêtements. L'enfant était autrefois grognon,
un rien provoquait une crise de larmes; actuellement, elle est
caressante, affectueuse, aime à se rendre utile dans la mesure
de ses petites forces. Elle commence à connaître l'alphabet,
sait compter jusqu'à 20 sans hésitation et place les chiffres
d'une façon remarquable. Elle, qui à l'entrée, savait à
peine marcher, trotte maintenant comme un petit furet, elle ? prouve un vif plaisir à faire la gymnastique, exécute par-
faitement les quatre premiers mouvements, sait de même
lacer, boutonner, agrafer, se prête volontiers à tous ces exer-
cices. Progrès notables sous tous les rapports.
3o Ultr... (Georgctte), 5 ans, entrée à la Fondation en juin
1901, atteinte d'idiotie avec gâtisme, marche et parole nulles.
Les progrès faits par cette enfant sont sensibles et méritent
une mention *particulière. La physionomie est expressive, le
sourire est doux et jovial.
A son entrée, elle ne prononçait que des mots sans suite,
incompréhensibles même pour les personnes de son entou-
rage, la marche était mauvaise, à peine pouvait-elle faire
quelques pas. Au réfectoire, l'enfant se tenait affreusement
mal, aimait à se salir et à se barbouiller avec les aliments
déposés devant elle, il était impossible de la tenir propre,
elle ne savait se donner et ne voulait recevoir aucun soin
concernant sa toilette, le caractère était méchant, jaloux.
Elle repoussait ses petites compagnes, ne voulant pas leur
Traitement \IDICO-PI·.D.1GOGIQUG. LXXXI
voir faire la moindre carrosse, l'égoïsme était son défaut
dominant : Tout pour elle. L'enfant, capricieuse, ne voulait
pas rester assise, les progrès en classe étaient nuls, la gym-
nastique de même. Elle gâtait du matin au soir, ne demandait
par aucun signe à aller aux cabinets.
Un grand changement s'est fait en elle : Gâtisme, colères,
caprices tout a disparu. Elle parle et marche très bien. En
classe les progrès sont notables, elle connaît ses lettres, com-
mence à compter, aime la gymnastique et le corps prend de
la souplesse. Elle connaît les couleurs, en sait faire la diffé-
rence, sait lacer les souliers, agrafer et boutonner, autant de
choses inconnues pour elle à son arrivée. Elle ne gâte plus
jamais ni jour, ni nuit, s'habille et se déshabille seule et
cherche il. se donner les soins élémentaires concernant sa
toilette, met en tout et pour tout beaucoup de bonne volonté.
Grande amélioration.
4° ESPoN.. (Yvonne), 6 ans, entrée à la Fondation en juin
1901, atteinte d'idiotie avec hémiplégie, marche nulle, parole
limitée à ces deux mots : papa, maman. A son entrée, elle
laissait à désirer sur bien des points; les premières notions
sur toutes choses lui étaient inconnues. Les progrès faits par
l'enfant sont de plus en plus satisfaisants.
Aujourd'hui, elle a pris des forces et bien que ne marchant
pas encore seule, se tient le long des tables et des bancs sans
fatigue aucune. La propreté est une de ses qualités ; sa tenue
à table est fort bonne. Autrefois, l'enfant était souventmaus-
sade et grognon, pleurait sans motif, à cause de son état
maladif sans doute.
Maintenant le caractère est gai, aimable avec ses petites
compagnes, serviable dans la mesure de ses moyens, cares-
sante envers lee personnes qui l'entourent. Elle commence à
rassembler ses lettres, connaît également les chiffres, sait
les placer exactement, s'intéresse à tout ce qui se passe
et demande mille explications. Elle a quelques diflicultés
pour les exercices de gymnastique en raison de ses jambes
qui sont encore faibles. Malgré toutes ces difficultés, les
progrès de l'enfant sont notables.
5° LI : rD... (Marguerite), 9 ans, est entrée il la Fondation
en août 1896 à l'âge de trois ans, atteinte d'idiotie avec épi-
lepsie. Elle parlait peu, mais n'avait pas de défaut de pro-
nonciation, elle gâtait nuit et jour, ne s'aidait en rien; res-
tait immobile quand il s'agissait de l'habiller et de la
BOUHNEVILLB, Bicêtre, 1902. ?
LXXXII Fondation Vallée.
déshabiller. Elle était presque toujours de mauvaise humeur ;
grognon, un rien la faisait pleurer, restait indifférente à tout.
Les accès et les vertiges survenaient par séries et étaient
assez nombreux. L'enfant traitée au l3wmtce de camphre
s'est beaucoup améliorée. Elle tombe rarement aujourd'hui,
n'a jamais plus d'un accès ou deux iL la fois. Il résulte de
cette amélioration un développement intellectuel très mar-
qué. Son caractère s'est beaucoup modifié; elle n'est plus
susceptible et maussade comme au début. Elle est devenue
très gaie, très joueuse, très active. Elle est propre nuit et
jour, se donne tous les soins qui lui sont nécessaires, fait sa
toilette avec minutie.
Les progrès, au point de vue de la classe n'ont pas été moins
rapides. Elle lit presque couramment, son écriture est lisible
et bien formée, fait des devoirs de grammaire, connaît l'addi-
tion et ébauche la soustraction. File commence bien à coudre,
suit la gymnastique avec beaucoup de facilité; l'enfant a, en
un mot, réalisé de réels progrès.
Le Pellet... du Coud... (Amélie), entrée à la Fondation, à
l'âge de 10 ans, en décembre 180'J, atteinte d'imbécillité pro-
noncée, avec perversions instinctives et lirbulence. Elle
avait des périodes d'excitation et de colère très fréquentes,
était très méchante envers ses compagnes, se plaignait sans
cesse de ces dernières et arrivait auprès de nous toujours
battue ou battant. Elle; était complètement nulle pour la
classe, ne paraissait rien comprendre de ce qu'on enseignait,
rien chez elle n'indiquait qu'une amélioration pourrait se
produire. Nous avons cependant à noter aujourd'hui de bons
résultats. Elle lit par syllabes, a appris à écrire, fait bien une
copie, commence quelques devoirs de grammaire et sait faire
l'addition. Son caractère, quoique susceptible et irritable,
s'est beaucoup amélioré; elle n'est plus aussi méchante avec
.ses compagnes. Sa tenue est devenue meilleure, elle suit avec
facilité les exercices de la gymnastique des échelles et des
ressorts et commence il faire des ourlets. En somme, cette
enfant s'est améliorée au-delà de ce qu'on pouvait espérer.
DA'\'... (Louise), 10 ans, entrée à la Fondation, en juin
1900, atteinte d'imbécillité prononcée, avec perversions ins-
tinctives, avec gâtisme et onanisme. L'enfant n'avait aucune
stabilité, elle était nulle ! en classe, rien ne l'intéressait. On
ne pouvait attendre d'elle que des résultats fort médiocres.
Nous constatons cependant aujourd'hui une. amélioration très
notable, sous tous les rapports.
IDIOTES gâteuses, invalides ou non. LSSIII
D'abord l'enfant est devenue tout à fait propre, procède
minutieusement aux soins de sa toilette ; il n'existe plus
aucune mauvaise habitude chez elle. Elle est actuellement
très douce et très affectueuse, elle se rend utile dans les soins
du ménage et n'est pas du tout maladroite. Elle s'occupe
même des plus jeunes, prend plaisir à leur donner les soins
de toilette ; si l'enfant continue ainsi, on pourra faire d'elle
une bonne ménagère.
Les progrès pour la classe n'ont pas été moins rapides. En
moins de trois ans, cette enfant a appris à écrire, à faire
quelques devoirs de grammaire, elle connaît les deux
premières opérations de l'arithmétique et lit presque
couramment. Elle suit avec facilité tous les exercices de
gymnastique et commence bien à coudre, ainsi qu'à repasser.
\In.ItI.. (Louise), âgée de 12 ans, entrée à l'Asile à l'âge de
9 ans, atteinte d'imbécillité très prononcée, avec turbulence
et instabilité. La prononciation était mauvaise, elle zézayait
beaucoup, prononçait les lettres j et g comme z; elle disait
zuze pour juge, toutou pour toujours; il en était de même
pour la syllabe che : elle disait marcer pour marcher. Elle
avait en outre une certaine difficulté pour prononcer l'r : elle
disait coude pour coudre, ouvoi pour ouvroir.
Aujourd'hui, il y a une grande modification dans son
langage. Elle ne zézaie plus et sa prononciation est normale.
Elle était nulle, en instruction primaire, ne connaissait
ni lettres, ni chiffres, ne savait môme pas tracer des basons
sur l'ardoise. Ajoutons encore que cette enfant ne paraissait
avoir aucune aptitude pour ce qui était enseignement.
Malgré toutes ces difficultés, nous enregistrons aujourd'hui
des progrès très notables. Elle est parvenue il écrire très
lisiblement, fait une copie, connaît et sait faire les chiffres
et lit par syllabes. Tout donne lieu d'espérer que sa lecture
sera tout à fait courante d'ici quelques mois ? La coulure
va bien, ainsi que le repassage, l'cnfant a fait de réels progrès
en gymnastique. ,
L'amélioration notable acquise chez ces enfants
atteints d'idiotie complète, d'idiotie profonde ou d'im-
bécillité très prononcée montre nettemcnt qu'on peut
obtenir des résultats au moins analogues ou plus
considérables, à plus forte raison, chez des enfants
LXXXIV IDIOTES gâteuses, imbéciles, etc., valides.
moins malades, imbéciles et arriérés. Nous pourrions
relater de nombreux exemples du même genre qui
n'ajouteraient rien aux précédents, tout à l'ait démons-
tratifs. --
2° Enfants idiotes, imbéciles, épileptiijiies, etc.,
Valides. Enseignement primaire et enseignement,
professionnel. Les procédés employés sont les mêmes
qu'a la section de Bicêtre. Les améliorations réalisées
dans les écoles des garçons sont introduites immédia-
tement à la Fondation. L'idéal que nous poursuivons
consiste à occuper les enfants du natit jtcscltc'aze soi ?
en variant le plus possible les exercices. Les jeux
mêmes doivent contribuer à leur éducation.
Au lever, on apprend aux enfants à faire leur toilette,
leur lit, 1 nettoyer leur dortoir, à brosser leurs vête-
ments. Aux repas, on surveille les enfants qui savent
manger seules et on corrige leurs mauvaises habitu-
des ; on apprend aux autres à se servir de la cuiller,
de la fourchette, etc. Nous ne cessons do répéter
au personnel de surveiller avec le plus grand soin
les aliments, d'enlever les fragments d'os ou de
tendons, susceptibles de produire des accidents, de
couper les aliments en très menus morceaux, de veiller
il la mastication et Ù la déglutition. Sur 222 enfants
présentes à la lin de l'année, 50 savent se servir
de la cuiller, de la fourchette et du couteau; 82 de la
cuiller et de la fourchette ; 52 de la cuiller seulement;
38 ne savent pas manger seules.
180 enfants ont fréquenté l'école et ont été exercées
a la gymnastique des échelles et des ressorts;
80 enfants participent aux exercices de la grande
gymnastique, sous la direction de M. Goy et de
la surveillante "\[c1lu Langlet. Ces leçons ont lieu
une fois par semaine, le jeudi. Mais, en raison do
Leçons DE choses; HYGIÈNE SEXUELLE. LXXXV
l'augmentation de la population, il serait nécessaire
que le professeur donnât deux leçons par semaine.
L'Administration départementale et la Commission
de surveillance ont reconnu la légitimité de notre
demande, déjà renouvelée plusieurs fois, et l'ont
signalée à l'Administration de l'Assistance publique,
dont nous attendons toujours la réponse.
Les lel : ol1 ? de choses, multipliées le plus possible,
ont lieu à la classe, dans les promenades et surtout
dans les jardins dont les arbres, les arbustes, les plan-
tes, etc., sont étiquetes. Les détails dans lesquels
nous sommes entré dans nos Rapporls de 1890 il 1901
au sujet de l'lwbillemenl (mannequin spécial, de
l'éducation, de la digestion, de la respiration, de la
circulation et de l'hygiène sexuelle, nous dispensent
d'y revenir celte année.
Notre personnel surveille attentivement l'appari-
tion et le développement de la puberté. Dès 1 appa-
rition des poils sous les aisselles et sur le mont de
Vénus, elles préviennent les fillettes qu'il s'agit-là
d'un fait nal\IJ'('1. On évite ainsi certaines inquiétudes
et des actes bizarres. Il en est qui essaient de s arra-
cher les poils sous prétexte que c'est delà mulpro-
prete, ou qui les coupent. Lorsque les seins ont pris un
certain accroissement, que le système pileux devient
de plus en plus abondant, on les avertit de prévenir
si elles éprouvaient des douleurs dans les reins ou le
bas-ventre et s'il leur arrivait de perdre un peu de
sang. A la première apparition des règles, on complète
les renseignements et on leur donne des conseils sur
les précautions à prendre. Les époques, avec leurs
caractères (douloureuses ou non, abondantes ou non,
durée, etc.) sont notées; on nous signale les pertes
blanches qui les précèdent ou les suivent ainsi que les
suspensions. Enfin on habitue les fillettes aux soins
Lxxxn Enseignement nu dessin.
de propreté. C'est ce que les mères de familles, les
institutrices, les maîtresses de pension devraient faire
toutes.. -
Enseignement du dessin. Cet enseignement,
est fait par M. Dtuowr. Il donne aux jeunes filles, au
nombre de 30, divisées en deux séries, une leçon tous
les jeudis de 8 à 9 heures du matin. Voici quelques
notes concernant son enseignement :
« La première série est composée des élèves qui
avaient suivi le cours de dessin l'année précédente ;
ces jeunes filles ont acquis une grande habileté de
main et une certaine justesse cl'ccil dans la mesure
clés proportions. On les voit dessiner des courbes avec
beaucoup de sûreté et de grâce. Dans l'exécution clés
ombres, elles ont montré un goût réel. Elles dessinent
des plâtres représentant des ornements, tels que
feuilles de lierre, de chêne, de vigne, rinceaux,
rosaces; parmi les objets usuels : des entonnoirs, des
chaudrons, des vases, etc., et dans quelques-uns de
ces dessins nous avons été étonné de voir qu'elles
avaient reproduit, avec bonheur, les ombres et les
jeux de lumière de ces modèles.
« Ladcuxième division est composés de jcunesdébu-
tantes ; nous espérons les amener progressivement
au niveau de leurs devancières n.
Enseignement du chant. - Cet enseignement
est fait depuis 18fJ : J, à titre gracieux, par M. Eiurène
Sutter, professeur de chant à l'asile-école de 131c ? trc.
De même que les années précédentes M. Sutter s'est
occupé successivement de toules les enfants, en état
de profiter dans une mesure quelconque de son ensei-
gnement. 101 enfants y ontparticipe.La classe spé-
Enseignement DU chant, DE la danse, ETC. L\YS\'II
cigale de théorie musicale et de solfège a donné de bons
résultats ; 32 enfants ont suivi cette classe. Comme
les années antérieures les enfants les moins atteintes
ont appris des mélodies et des petites romances chan-
tées dans les concerts organisés par les garçons de
l'hospice et aux réunions du samedi. Toutes y ont
pris un réel intérêt et y ont apporté beaucoup de bonne
volonté.
Danse. - Les exercices de danse ont lieu sous la
direction do M. Iewo3sL, instituteur à Bicêtre, tous
les mercredis de 4 à o heures et le dimanche, après la
visite des parents, sous la direction de la surveillante.
- 16u enfants ont pris part à ces exercices; 98 savent
danser la polka, 70 connaissent la polka, la mazurka
et la scotlish ; li2 connaissent toutes les danses de
caractère et les différentes ligures du quadrille.
Enseignement professionnel. A mesure que les
enfants se développent, on leur apprend tous les soins
du ménage, h mettre et à retirer le couvert, à nettoyer
les réfectoires, laver la vaisselle, etc. Une vingtaine
des moins arriérées aident le personnel à apprendre
il manger aux enfants incapables de manger seules
et h perfectionner celles qui mangent malproprement.
Les deux ateliers que nous possédons ont continué
il fonctionner régulièrement. Le travail, évalué par
M. Maupré, économe de Bicêtre, d'après le tarif réduit
de l'Administration, s'est élevé à 5.040 fr. 80 pour
l'atelier do coulure, dirigé par }\fIllO Ehrmann et à
i . i 19 fr. 80 pour l'atelier de repassage diriu-é par 11 ?
Baruet. Total G.1¡60 fr. 60 (1).
il) Ces ateliers, après prélèvement des salaires, de la nourriture, etc., des
deux maîtresses (3.240 fez donnent un bénéfice de 3.220 fr. G0
LXXXVII ! Enseignement professionnel.
Nous avions essayé il y a quelques années de monter
un. atelier de composition typographique, qui n'a pas
réussi faute d'une véritable entente et surtout d'un
crédit pour le maître. Nous aurions voulu avoir aussi
un atelier de brochage dont l'organisation a rencontré
malheureusement aussi des difficultés imprévues et
surtout une petite buanderie. Pour celle-ci, d'une
utilité incontestable, nous ne disposons malheureuse-
ment pas d'un local approprié. Peut-être arriverons-
nous prochainement il une solution.
Pour étendre les connaissances pratiques de nos
malades, donner plus de variétés il leurs travaux de
couture et de repassage, nous avons autorisé les
sous-employées à faire repasser ou coudre une partie
de leurs objets de toilette, bien entendu en dehors
des heures régulières de travail. Le travail, de ce
fait, ne rentre pas naturellement dans les évaluations
qui sont faites par l'Administration.
En plus des apprenties qui travaillent par séries
régulières, 40 ont travaillé une heure par jour ; 95
enfants savent faire complètement les layettes ; 3U du
crochet et de la dentelle ; 15 savent marquer ; 15 savent
faire de la tapisserie; 5 savent tricoter. Le tableau
suivant donne mois par mois le nombre des appren-
ties régulières et l'évaluation du travail.
Enseignement PROFESSIONNEL. LXXXIX
xc Visites ET congés.
Promenades ET distractions. Ici
anciennes hahitudes; que, à leur retour, elles se plient
moins bien à la discipline et travaillent avec moins
d'ardeur (1). Nous avons demandé maintes fois, sans
résultats à l'Administration de rappeler aux familles
qu'elles ne doivent pas, dans l'intérêt même de leurs
enfants, dépasser la durée des congés accordée.
La Commission de surveillance a visité la Fonda-
tion Vallée le 13 mai et la Commission du Conseil
général le 15 novembre.
Promenades. - Elles ont lieu deux fois par semaine,
soit dans les communes voisines, soit à Paris. Le
nombre des enfants qui prennent part à ces prome-
nades, avec leçons de choses, varie de 60 à 80.
Distractions. Comme les années précédentes,
et sans qu'il soit survenu des inconvénients de la pré-
sence simultanée à ces réunions des enfants des deux
sexes, les petites filles de la Fondation Vallée ont
participé en 1902, il toutes les distractions données
aux garçons de Bicêtre et dont l'énumération figure
dans le Compte-rendu de la section des garçons de
cet établissement.
Améliorations diverses. - Ouverture d'un nou-
veau dortoir (de 24 lits), installé d'après les indica-
tions données les années précédentes dans l'ancien
réfectoire. Création pour ce dortoir de deux emplois
d'infirmières (infirmière de jour, infirmière veilleu-
se). Réfection de la peinture des anciens dortoirs,
(1) Les permissions de sortie et les congés de 1 5.jours ont donné
t.( ! G2 journées qui sont payées 2 fr. 20 par le département à l'Assistance
publique, soit un bénéfice de 3.856 l'r. 80 cent. Si l'on ajoute à ce chiffre celui
du bénéfice dn travail professionnel soit 3.220 fr. tï0, on voit que nous réalisons
à l'Administration un bénéfice de 7.077 l'r. qui devrait amener l'Administration
à se montrer plus libérale envers la Fondation et la conduire à la dot r pro-
gressivement de tout ce qui est nécessaire au traitement médico-pédagogique.
XCII Maladies infectieuses.
du pavillon des gâteuses, de l'infirmerie, du gymnase,,
des classes et du réfectoire. Substitution de la
fibre de bois à la paille dans les matelas des
gâteux ! Nomination de M"10 Quatre, première infir-
mière au grade de suppléante.
Teigne. Six enfants ont été soignées pour la
teigne au pavillon d'isolement de la section de Bicêtre.
A la fin de l'année, il ne restait plus que 5 enfants en
traitement.
Maladies infectieuses. Trois fillettes ont été soi-
gnées au même pavillon pour la rougeole : Laha(l...,
Charu... et Die... ; cette dernière a succombé à une
b1·ol7clzo-p17cu17tonie. L'enfant Ro... y a été traitée
pour un ét¡¡sipèle de la face.
Maladies intercurrentes. 10 enfants ont été trai-
tées à l'infirmerie pour bronchite; 3 pour broncho-
pneumonie; 2 pour pneumonie; 0 pour tuberculose
pulmonaire ; 1 pour tuberculose intestinale ; 2 pour
méningite ; 10 pour la grippe; 15 pour séries d'accès
ou étals de mal; 11 pour ophtalmie, 9 pour engelures;
2 pour 15 pour clilJ ? rhée; 17 pour
migraines ; G pour constipation; 2 pour stomatite; G
pour embarras gastrique ; 1 llour zens ; 1 pour frac-
ture de la jambe; 1 pour fracture compliquée de
l'humérus.
Vaccinations et Pn.laccinaliol7s. Elles ont été
au nombre de 29 dont 5 avec succès. De même qu'à
Bicêtre nous revaccinons avec nos infirmières toutes
les entrantes et toutes les malades qui sont à la Fon-
dation depuis 5 ou G ans.
Bains et hydrothérapie. Comme les années pré-
cédentes, nous avons eu récours dans une large mesure
Bains, hïdrotiiéhapie, glande thyroïde. xciii
aux bains et aux douches. Chaque année nous assistons
plusieurs fois à l'administration des douches afin de
nous assurer que l'on continue il se conformer il nos
leçons. Quant aux autres moyens (le traitement, ils ont
été les mêmes que dans notre section de Bicêtre.
Signalons surtout les leçons de choses, soit en classe,
soit clans les jardins et les promenades. Nous recom-
mandons à notre personnel de veiller le plus possible
à l'hygiène sexuelle, principalement pour les petites
gâteuses et pour les filles pubères. Les enfants pren-
nent leurs douches il la Fondation; ce n'est qu'en cas
de répartaoins qu'elles les prennent à Bicêtre. Quant
aux bains, nous avons dû recourir encore cette année
aux (le Bicêtre. Les bains de pieds ont été
donnés à la Fondation où existe, ainsi que nous l'avons
dit, une installation convenable. Voici la statistique
des bains et des douches en 1902.
XGI' Mouvement de la population.
II.
Statistique. Mouvement DE la population.
0
Le '1 ? janvier 1902, il restait à la Fondation Vallée
216 enfants se répartissant ainsi :
IOUVL\Ili\11 : V'I' DE LA POPULATION. XCV
XCVI DECES. , I
XCVIII DÉCÈS.
Personnel du service. cm
fonctionnement aussi parfait que possible et très éco-
nomique de la Fondation Vallée, montre les avantages
incontestables des établissements dont la population
est limitée et qu'il est possible d'en confier la direc-
tion il une surveillante,
, : \1°110 Berthe Langlet que nous avions pour surveil-
lante depuis l'ouverture de la Fondation, en mars
1890, et dont chaque année, dans le Compte-rendu,
nous nous plaisions il signaler comme ils le méritaient
ses excellents services; a succombé en quelques
heures à une attaque d'apoplexie le 15 octobre 1902.
Ses obsèques ont eu lieu le 17 octobre. Appelé inopi-
nément à prendre la parole nous avons prononcé
l'allocution suivante :
. Mesdames, : \I6SfI : UItS,
Née il Ilomblières (Aisne), le Il juin 186'1, M1'" 13crthc LAX-
glet entra dans l'Administration le Il février 1880, il peine
âgée de ! Gans. Elle de))utaat'[n[ ! rme['ie générale de Bieêtre
et, malgré son jeune âge, sut s'attirer l'estime et la bienveil-
lance de ses chefs. Nommée suppléante dans notre service
le 30 avril 1882, elle était promue sous-surveillante deux ans
après, le Il 1 août IS8 ! .
En 1590, en organisant la Fondation Vallée, nous avons pro-
posé ce qui fut accepté, d'accord avec I. Roux, directeur
des affaires départementales, de faire de cet établissement
une dépendance de Bicêtre : la surveillance administrative,
le service médical, le personnel secondaire devaient être
empruntés ;'1 cet hospice. Notre choix, pour la nomination de
la surveillante se porta sur M"" Berthe, qui, grâce sa bien-
veillance, usa douceur envers les enfants, il son intelligence,
il sa fermeté, avait su pleinement conquérir notre confiance.
Elle hésitait, se croyant au-dessous de sa tâche. Nous
CIV Mort de Mademoiselle 13EllTIIE LANGLET.
l'encourageâmes et elle obéit. Elle sut prendre de suite une
autorité réelle sur les enfants .et sur son personnel. Ferme,
mais bienveillante, elle sut se faire aimer de tous comme en
témoignent les sanglots que l'on entend de toute part.
Connaissant à fond tous ses enfants, elle no nous fournis-
sait que des renseignements parfaits et scrupuleusement
exacts. La tenue de son service était aussi dans un état par-
fait et, dans leurs nombreuses visites, MM. Le Houx, Pelletier,
les membres de la Commission de surveillance ou du Conseil
général lui adressèrent toujours des compliments mérités.
En dehors de son service administratif et médical, Mllc
Berthe savait encore trouver des heures libres pour s'occu-
per de distractions it ses malades, organisant le dimanche do
petits bals, des concerts, etc. Le Mardi-Gras et la Mi-Carême
ne la trouvaient pas non plus inactive, s'occupant de toutes
ses malades avec un entrain charmant.
Au point de vue de la Société de patronage, elle nous fut
d'un précieux concours. Elle ne s'occupait pas seulement du
placement des plus améliorées au dehors, mais encore elle
rendait de fréquentes visites à celles reprises par les familles,
nous fournissant sur chacune d'elles une note détaillée et pré-
cise. : \[1le Langlet pouvait être donnée comme le modèle des sur-
veillants sous tous les rapports : ni l'Administration ni nous
n'avons jamais eu de reproches à lui adresser.
Hélas ! la vie a des iL-coups violents, brutaux ! Mllc Berthe
en a été la victime. Le mercredi matin, comme de coutume
nous nous rendîmes à la Fondation Vallée pour notre visite.
M"" Berthe. toujours alerte et vive, faisait son service comme
d'ordinaire. A un moment, elle sortit de notre bureau; ne la
voyant pas revenir, M ? Ath. Bohain, sa collègue et son amie,
alla à sa recherche.
Elle trouva notre pauvre amie, dans un dortoir situé en
face de notre bureau, les mains crispées après le montant
d'un lit, la bouche contorsionnée : «Je deviens paralysée,
s'écria-t-elle » .Mandé aussitôt, nous nous rendîmes auprès
d'elle et lui prodiguâmes tous les soins nécessaires. Lorsque
nous la quittâmes, vers midi, son état ne paraissait nullement
désespéré. Malheureusement, le soir en rentrant il Paris,
une nouvelle fatale nous attendait, M"1- Berthe Langlet était
morte.
Pour l'Administration, pour nous, pour les enfants, la mort
de Mlle Berthe est une perte cruelle.
Mort DE Mademoiselle Berthe LANGLET. CV
Que son exemple d'activité, de bonté, de dévouement, d'ac-
complissement de tous ses devoirs, d'hospitalière laïque, serve
de modèle à ses collègues. Elles honoreront ainsi la mémoire
de l'une de leurs meilleurs compagnes.
Mademoiselle ANGLET, adieu !
Section 111. - Assistance et enseianenieiit.
I.
Classes ou Écoles spéciales pour les enfants arriérés.
Depuis plus de 10 ans, nous faisons campagne pour
la création de classes ou d'écoles spéciales pour les
enfants arriérés et les enfants idiots améliorés. Tous
les ans, depuis 1896, nous profitons de la visite il Bicc-
tre de la Commission de surveillance des asiles d'alié-
nés pour lui communiquer des renseignements sur ce
qui se fait à l'étranger et nous lui faisons voir un
groupe d'enfants notablement améliorés qui pourraient
être rendus il leurs familles, s'il existait à Paris des
classes spéciales, comme il en existe dans la plupart
des pays civilisés. Quelque peu découragé par l'inu-
tilité de nos tentatives, nous nous sommes borné,
cette année, à montrer les enfants susceptibles d'être
reçus dans ces écoles, ce qui désencombrerait le ser-
vice, permettrait de recevoir les enfants, plus mala-
des, qui attendent. Les familles, qui ne doivent pas
oublier leurs devoirs les reprendraient avec ou sans
allocation, suivant leur situation. .
Ayant offert à nos collègues de la délégation canto-
nale du Ve arrondissement, notre Noie de l'an
dernier sur les classes spéciales, le président M.
Meurgé en a profité pour faire renouveler le voeu émis
Traitement ou éducation des idiots. c 11.1 1
précédemment et l'a transmis à quelques-unes des
délégations de Paris. Voici, comme suite, la lettre qui
nous a été transmise.
Monsieur le Docteur.
Conformément ;'¡ une décision de la Délégation cantonale,
j'ai l'honneur de porter à votre connaissance les réponses des
délégations des Hile et VII' arrondissements au voeu tondant
à la création dans quelques arrondissements de Paris de clas-
ses spéciales pour les enfants arriérés, voeu que la Déléga-
tion du Ve avait émis sur votre proposition et qui avait été
communiqué à toutes les Délégations de Paris.
Le maire du Il le arrondissement nous informe sans indi-
quer les motifs cle sa décision, que la Délégation qu'il
préside n'a pas cru devoir adopter ce voeu. Par contre, la
Délégation du VU' a déclaré appuyer le voeu précité et a fait
connaître son adhésion à M. le Directeur de l'Enseignement
primaire.
Veuillez agréer, Monsieur le Docteur, l'assurance de
nos sentiments les plus distingués. .
Le maire, A. Meurgé.
Il n'est pas facile, dans notre pays d'introduire les
réformes (1), même les plus justifiées. En revanche,
nous avons reçu de mille Lack qui est venue cette
année, pendant quelque temps, suivre notre visite et
étudier notre méthode de traitement médico-pédago-
gique, une lettre très intéressante sur les classes spé-
ciales de Genève. .
- Genève, rue du Jura 10, Ce 2 septembre 1902.
Monsieur le Docteur
Vous m'avez demandé, lors de ma visite 131cêtre, de
vous renseigner sur la situation actuelle des anormaux en
(1) Voir l'historique Je la question (Lins notre Coml te-rendu ds 1901, p.
cxv.
CVIII Classes ou écoles spéciales
Suisse. Le sort de cette catégorie d'enfants s'est tellement
amélioré durant ces dernières années que j'éprouve une
véritable satisfaction en répondant à votre désir.
La plupart de nos cantons sont aujourd'hui pourvus de
classes spéciales sinon d'établissements pour anormaux
non épileptiques, les épileptiques cle toute la Suisse étant
reçus dans l'Etablissement fédéral pour épileptiques de
Zurich (M. Kolle, directeur). "
Ce n'est qu'actuellement que la question des anormaux
est véritablement il l'ordre du jour dans la Suisse roman-
de ; aussi les créations pour ces malheureux sont-elles
assez récentes.
En mai 1898, M. le Docteur Ladame vous annonçait
l'ouverture d'une classe spéciale, la première il Genève.
Aujourd'hui cette ville (100.000 ho) en compte neuf. Ce
nombre est suffisamment éloquent pour due je m'abstien-
ne de démontrer l'urgence d'institutions semblables dans
des centres industriels et d'énumérer les bienfaits qu'elles
répandent.
Les résultats obtenus sont appréciables déjà, soit dans
les classes ordinaires, soit dans la population dont elles
mettent lestares à découvert. .
Le Département de l'Instruction publique peut chaque
année se féliciter d'avoir joint à l'Ecole primaire ces anne-
xes dont l'importance au point de vue social grandira pro-
portionnellement à la perfection de leur développement.
Car les classes spéciales de Genève ne sont pas encore
l'idéal, c. à d. qu'elles présentent les inconvénients des
classes spéciales disséminées, en ce sens qu'elles réunis-
sent dans un même local et sous la même direction les
éléments les plus disparates. Ces inconvénients sont peut-
être plus marqués qu'ailleurs car Genève est une ville
frontière et un centre d'attraction, grâce à la réputation
que lui ont faite ses nombreuses fondations philanthro-
piques, ses classes gardiennes et ses cuisines scolaires.
L'élément étranger domine dans les classes spéciales ;
il est recruté dans une population instable et illettrée, les
enfants, faute d'éducation et d'instruction premières, sont
de vrais arriérés pédagogiques quoique parfois intelli-
Traitement et éducation des idiots. CIX
gents et la fâche de la maîtresse est de s'acharner contre
leur ignoraucc pour les restituer il l'école ordinaire. A
coté de ces retardés, il y a les débiles, les indisciplinés et
les anormaux proprement dits qui ont des lésions céré-
brales apparentes. Les forces de la maîtresse qui seule
fait face il tant d'individualités, sont trop divisées pour
que les résultats obtenus répondent à l'énergie et à l'acti-
vité dépensées. Une sélection s'impose et à la rentrée des
ela-ses, en septembre, on inaugurera une petite école
d'enseignement spécial à l'exemple de celle de Bruxelles.
File ne se composera cette année que de trois classes
seulement, faute de locaux appropriés : 1° une classe
mixte pour les anormaux et les enfants de plus de huit
ans ne sachant pas lire ; 2" une autre pour les retardés,
mixte également ; 3,1 une encore pour les indisciplinés
garçons.
Les exercices physiques gymnastique, eurythmique au
son du piano, excursions, douches et les travaux manuels
dessin, pliage, construction, coloriage, modelage, brode-
rie, couture, tricot) occupent la moitié des heures de cla-
sse ; c'est la méthode intuitive développée à outrance qui
est la base de l'enseignement des autres disciplines. Les
élèves qui ne peuvent être rendus l'Ecole primaire sont
à leur sortie des classes spéciales, placés en apprentissage
par les soins de leur maîtresse, mais en juger l'intérêt
que ces enfants inspirent il la population, une société de
patronnage ne tardera pas il se fonder.
Cet automne ou tout au plus tard au printemps prochain
s'ouvrira un établissement qui recevra une quinzaine
d'anormaux disséminés dans la campagne de Genève.
Cette oeuvre, duc il 1 initiative privée, sera cependant sub-
ventionnée par l'Etat qui décrète l'instruction obligatoire
pour tous.
Enfin j'espère. Monsieur le Docteur, que la prochaine
fois que vous désirerez avoir des nouvelles de nos petits
déshérites, l'on pourra vous répondre que chacun d'eux,
sans distinction de nationalité, est placé dans les
meilleures conditions de développement possibles avec
garantie pour l'avenir.
ex Classes ou écoles SP1 : CI : 1T 1 : E.
Veuillez, Monsieur le Docteur, excuser le retard de
cette lettre et le mettre sur le compte de belles vacances
malheureusement terminées. Je vous enverrai sous peu
quelques informations sur nos autres cantons. Dois-je
m'étendre davantage sur certains détails ? ' ?
Recevez, Monsieur le Docteur, mes respectueuses et
reconnaissantes salutations.
Louise LACK, institutrice.
Nous avons essayé, un peu subrepticement, un
essai pour l'application du traitement mnéili.oo-ZUc1<-
gotique à des malades externes. Nous avons fait ve-
nir dans notre service, une fois par semaine, des
mères de famille avec leurs enfants auxquels des
leçons étaient faites pour que les mères elles-mêmes
apprennent comment elles doivent procéder pour
appliquer, chez elles, notre méthode de traitement et
d'éducation.
Le fils d'une sous-surveillante, Le) ? (Louis) est
venu en 1901 et en 1902, mais assez irrégulièrement,
à la petite école.
Un imbécile achondroplasique, administré de l'hos-
pice, a été envoyé par notre ami, le Dr P. Marie, et a
suivi l'une des classes pendant quelque temps.
L'enfant Fourn... iGélston) est venu également,
chaque semaine, prendre une leçon il la petite école
de DI ? Bonnet. Sa mère, intelligente, très attentive;
aux leçons, s'occupe sérieusement de son enfant..
Aussi avons-nous obtenu une amélioration déjà sé-
rieuse.
D'autres enfants sont venus un certain nombre de
fois mais ont discontinué, faute de temps, ou à cause
de la distance ou parce qu'elles n'obtenaient pas aussi
vite qu'elles l'auraient désiré, une transformation de
leurs enfants. '
IL
Condamnation d'un dégénéré épileptique.
M. le D1' Gilbert Petit, médecin en chef de l'asile
d'aliénés du Mans, par une lettre en date du 12 avril
dernier, nous communique le fait suivant : .
« Un jeune soldat, du nom de Bellanger 11'crnand), vient-
tout récemment ' d'être condamné par le conseil de guerre
siégeant il Besançon à cinq ans de travaux publics, inculpé
de violences envers ses supérieurs à l'occasion du service.
Or, ce nommé Hellanger a passe plus de trois ans il l'asile
des aliénés du Mans oit il a été transféré de votre service de
Bicêtre, en 1800.
« A mon arrivée à l'Asile du Mans, comme médecin en chef,
en 1808, j'y ai trouvé ce malade C'est un débile, fort impul-
sif, sujet il des alternatives cle dépression et d'excitation ; il
a même toujours passé pour épileplique. J'avoue qu'il ne m'a
pas été possible d'observer moi-même chez lui de grandes
crises : mais on a noté un accès dans la nuit du 13 au li Í
septembre 1800 et des vertiges en septembre et novembre
1808. D'autre vertiges, en raison de leur fugacité, ont proba-
blement échappé.
« Pendant l'instruction, personne ne s'est douté de son
séjour dans un asile et personne n a même émis un doute
relativement à l'intégrité de ses facultés mentales.
« C'est navré de voir de quelle façon les enquêtes judiciai-
res sont parfois conduites, que je me permets de vous écrire
en pensant que ce fait, qui est malheureusement bien loin
d'être isolé, pourrait vous intéresser, d'autant plus qu'il s'a-
git, dans le cas particulier, d'un de vos anciens malades.
«J'ajoute que les parents, qui habitent le Mans, n'ont été
avertis de la condamnation de Bellanger que fort indirecte-
ment par son avocat qui leur réclamait ses honoraires. Des
démarches vont être t'.dtes pour essayer de réviser celte
erreur et empocher ce malheureux d'aller aux bataillons
d'.\ fl'irfl1C. »
CXII Assistance des épileptiques.
Chan... est entré dans notre service le 1 : > avril 1896,
envoyé par la Préfecture de police, avec un certificat du
D' Legras, ainsi conçu : « Débilité mentale et vertiges
probablement épileptiques. Discernement insuffisant.
Actes impulsifs. Fugues. Instruction presque nulle. e
Stigmates physiques de dégénérescence. »
Dans son observation, un peu incomplète, nous rele-
vons les particularités ci-après : Père migraineux ; grand
père paternel excès de boisson; mère, d'un caractère
emporté, morte de tuberculose pulmonaire, ainsi qu'une
tante maternelle ; grand-père paternel paraplégique.
Accouchement au forceps, parole seulement il 4 ans,
accès de colère. De temps en temps il se sauvait dans la
rue, courait devant lui, puis s'arrêtait tout d'un coup. A
partir d'avril 1895, il a été sujet il des vertiges, revenant
plusieurs fois tous les 3 ou 4 jours.
Au point vue physique, nous avons noté : physionomie
un peu hébétée, front bas, oreilles écartées, bouche pres-
que toujours entr'ouverte, palais ogival, tremblement des
mains.
Au point de vue intellectuel et moral, nous relevons :
caractère irascible, emporté, indiscipliné, batailleur,
toujours prêt a frapper, instabilité très prononcée, de
sorte qu'il est difficile de le maintenir soit il râtelier, soit
il l'école. Son sommeil est agité et interrompu par des
réveils en sursaut. La mémoire est très faible, le raison-
nement défectueux, l'obéissance et le respect il peu près
nuls. Son instruction primaire, étant donné son âge, est
médiocre; il a été renvoyé successivement de plusieurs
écoles pour sa mauvaise conduite et son irritabilité. Placé
plusieurs fois en apprentissage, il a été congédié à cause
de ses impulsions violentes. L'enfant, étant né au Mans,
a été transféré à l'asile de cette ville, le 27 août 189G.
En résumé, il s'agit la d'un malade dégénéré, arriéré
intellectuellement, atteint en outre d'instabilité mentale,
sujet à des impulsions violentes et ayant présenté des
accès, des fugues et des vertiges épileptiques. Tel que
nous l'avons connu, tel qu'il a été observé a l'asile du
Assistance. CXI11 :
Mans, c'est un irresponsable sur lequel, nous associant
à notre collègue, M. leur Gilbert Petit, nous nous permet-,
tons d'appeler la bienveillance des pouvoirs publics (I).
Notre intervention, provoquée par notre excellent con-
frère le D'' Gilbert-Petit, a obtenu plein succès; Il a été
d'abord sursis à l'envoi du malade aux compagnies de
discipline, puis une enquête a été faite et finalement Bel...
a été réformé. (Progrès Méd., 1902, p. 271).
- BOURNEVILLE,
(1) La ville de Brunswick signale aux conseils de révision -les conscrits sor-
tis dés écoles spéciales d'enfants ari'iérés, de sorte que l'autorité militaire est
au courant de leur état mental. (Bourneville, Compte-rendu du service- des
enfants de 'B1Cétl'e pour 1'Jul, p. CXÀ711). - C'est une excellente pratique
qui. mente d'être appliquée* chez nous. '
BOURNEVILLE., Bicêtre, 1902. ? »**
III.
Les aliénés dans les hôpitaux.
Nous avons toujours soutenu la thèse qu'il y avait de
graves inconvénients à recevoir et surtout a maintenir
dans les hôpitaux les malades aliénés. Voici une nou-
velle démonstration de la justesse de cette opinion. Sous
ce titre : Un infirmier de Lariboisière poignardé par
un fou, un alcoolique, les journaux politiques rapportent
le fait suivant :
« Dans la nuit du 12 au 13 un nommé Michel Grindolet,
alcoolique, en proie à une crise de délire, ouvrit une
fenêtre et. poussant un hurlement sinistre, se jeta dans le
jardin de l'hôpital.
« L'infirmier Thiriot courut précihitamentàlarecherche
du malade qu'il rejoignit dans le jardin. L'exaltation de
Grindolcl semblait calmée. Thiviot l'exhorta il rentrer, : ,1 parlant doucement et le tenant par le bras pour le
men r. L'alcoolique répondit sur un ton paisible qu'il
élait calmé et qu'un accès de fièvre, sans doute, l'avait
moussé il se jeter ainsi dehors par la fenêtre. Les deux
hommes étaient rentrés dans l'hôpital et marchaient ainsi
été à côte dans un va te couloir faiblement éclairé par : veilleuses. Tout il coup, le malade se jeta sur l'infir-
,nier et, lui serraant fortement la gorge d'une main, lui
rongea dans la poitrine un couteau poignard qu'il avait
réussi à dissimuler dans sa manche.
« Le malheureux Tbiviol tomba en poussant un cri qui
'veilla tous les i firmiers. On accourut et on eut toutes
les peines du monde à s'emparer de l'alcoolique qui était
Assistance. civ
on proie il une exaltation extraordinaire. On put enfin le
ligoter et l'enfermer dans un cabanon ( ? ). Quant au mal-
heureux infirmier, il avait été porté en toute hâte sur son
lit. Il était évanoui. On le ranima et on le pansa. Le coup
lui a perforé le poumon. On désespère de le sauver. »
Ce fait s'ajoute à ceux que nous avons déjà rapportés
pour montrer la nécessité d'envoyer les malades aliénés
dans les asiles d'aliénés, aménagés et outillés en consé-
quence et de ne pas les maintenir dans les hôpitaux, où
rien n'existe; pour le traitement et la sécurité de ces mala-
des. C'est aussi une occasion de rappeler la nécessité de
faire passer, afin d'acquérir une expérience pratique
sérieuse, il Bicêtre, les élèves-inlirmiers, il la Salpêtrière,
les élèves-infirmières, dans les services d'aliénés. Il s'agit
là d'un enseignement pratique, indiscutable, que nous
réclamons sans succès depuis une vingtaine d'années.
(Progrès Médical, 1902, p. 253.) B.
IV.
Assistance des enfants nerveux : à propos des enfants
martyrs.
La police reçoit quelquefois, de la part de personnes,
de bonne foi souvent, des plaintes précises contre un de
leurs voisins qui maltraite son enfant. « Elles entendent à
chaque instant, disent-elles, dans le logement il côté, des
cris de rage et de douleur, des appels désespérés poussés
par un enfant que martyrise des parents indignes. » Si peu
qu'il y ait dans les rapports de voisinage, sinon de l'ini-
mitié, au moins une anthipathic quelconque, les dénon-
ciateurs donnent les détails, et ne parlent rien moins que
de brutalités systématiques, ayant pour but la suppres-
sion d'un enfant gênant.
Celtes, il arrive trop souvent que des parenls ignorants
corrigent manuellement leur enfant, soit qu'il soit idiot,
ou imbécile, soit qu'il soit indiscipliné, attribuant il sa
mauvaise nature ce qui n'est que la conséquence d'une
maladie. Mais il arrive aussi souvent qu'aucun sévice n'a
été exercé, et que les cris ne sont poussés par le petit
malade que sous l'influence d'une véritable crise, déter-
minée par des lésions irritalives de son cerveau. Ces sor-
tes d'accès, en effet, revêtent dans certains cas un carac-
tère réellement effrayant. On comprend que le voisinage
s'imagine avoir affaire à des enfants martyrs. Nous pour-
rions citer de nombreux exemples ; quelques-uns suni-
ront.
Pierre 1...., âgé de 1) ans, est atteint de crises épilep-
tiformes. En dehors de ses accidents convulsifs, il lui
arrive fréquemment, au moment où l'on s'y attend le
Assistance. cxvil
moins, de se rouler a terre en poussant des cris « comme
si on l'écorchait ». S'approchc-t-on de lui, il projette les
jambes de tous côtés, essayant cle frapper. Si on veut le
relever, il cherche à mordre, et s'il ne peut y réussir, il se
griffe la figure et se cogne violemment la tête sur le sol.
Et ces « rages » surviennent au milieu d'une promenade,
en classe, alors qu'il vient cle rire ou de causer avec son
maître.
Jean TL ? ïâé de 8 ans, a, durant des heures entières et
presque toujours aux mêmes moments, des accès décris,
dont la raucité exprime une véritable angoisse. Une per-
sonne qui ne le connaîtrait pas se demanderait coup sûr,
ce qu'on a pu lui faire pour qu'il se plaigne de la sorte.
Les enfants Lem... (Georges) et Dent... (Marcel), iL leur
arrivée dans notre service, poussaient subitement des
cris perçants et sans cause connue. Nous croyions tou-
jours qu'un cle leurs camarades leur avait fait quelque
méchanceté ; nous avons fini par nous convaincre qu'il
n'en était rien, que leurs cris n'avaient d'autres causes
que des accès de rage et de colère inexpliqués. Peu à
peu, pleurs, cris ont diminué et ont cessé presque com-
plètement. Deux autres enfants, G'sel... (René) et illill...
(Emile), il la moindre gronderie, poussent des cris, com-
me si on les maltraitait.
Rena... (Victor), 10 ans 1/2, est sujet à des accès de colère
non motivés dans lesquels il se roule par terre, se frappe le
visage, le nez surtout, avec les poings fermés, ce qui provo-
que des épistaxis assez abondantes. Tout en criant, l'enfant
répète : non a pu, il. pu, comme si on le frappait, et deman-
de pardon. Ces colères se reproduisent souvent, et il crie
tellement fort qu'il est entendu de très loin. Rien ne le cal-
me, et plus on lui parle, plus cela l'exaspère.
Grand... (Auguste), 14 ans 1/2, se met très facilement en
colère et sans aucun motif. Les cris qu'il pousse sont aigus
et de longue durée, capables d'éveiller l'attention, et ils sont
aussi fréquents la nuit que le jour.
Decttlt ... (Ch.), 10 ans 1/2, a des accès de colère terribles.
cxviii Assistance.
Il pousse des cris de douleur, puis des cris de rage, accom-
pagnés de violences, frappe les portes et renverse tout ce qui
se trouve à sa portée. Parfois un simple regard suffit pour
l'irriter.
Ogo2oa.. Brous... (Georges), (le 11 ans, se met en co-
lère journellement et sans motif. Il pleure ou plutôt crie en
se tappant la tète des deux mains ou sur sa chaise, ensuite
il se mord. Ces crises durent quelquefois des demi-journées
entières.
Daud... (René), âgé de 8 ans 1/2, se met en colère sans
motif et crie. II ne se frappe jamais, il mord ceux qui se trou-
vent à sa portée, mange ses effets, les déchire, les ronge.
Souvent on le calme momentanément en lui donnant un
morceau de pain qu'il dévore, puis la colère reprend, et l'on
est obligé de lui redonner du pain deux ou trois fois. Finale-
ment au bout de deux ou trois heures, il se calme.
Guéninga..., de 15 ans, a souvent des accès de colère.
Il suflit qu'on l'el11el1re en passant ou même que l'on passe
devant lui pour qu'il se mette il crier, à dire des grossièretés,
en secouant sa tète fortement de droite à gauche (rois ou
quatre fois, puis il se calme pour recommencer quelques
heures après.
Dans tous les cas qui précèdent, les enfants attirent
l'attention des voisins par leurs accès de colère accompa-
gnés de cris. Les parents sont souvent appelés chez le
commissaire de police. Rien n'est plus facile que de cons-
tater s'ils ont oui ou non reçu des coups. Il suffit cle les
faire déshabiller. On constate alors qu'ils ne présentent
ni plaies, ni ecchymoses. C'est ce qui est arrivé pour un
enfant qui nous a été amené, notre consultation de
Bicétre, le 13 février.
. Sim... (H.), âgé de 1'2 ans, se met en colère pour des
motifs futiles, injurie sa mère, il la maison et dans la rue,
ameute les passants par ses cris, par ses « hurlements x, se
cogne la tête. Il bat sa sieur, casse les portes, brise les
objets. Ces crises de colère durent quelquefois un. quart
d'heure. Un jour, ses cris ont déterminé, devant la maison
Enfants martyrs. CXIÏ
où il habite, un rassemblement de plus de 200 personnes. Des
agents ont été appelés. La mère a été forcée de le conduire
chez le commissaire de police. Celui-ci a eu la bonne idée de
faire déshabiller l'enfant et comme il n'a constaté- aucune
trace de coups, il a renvoyé la mère.
, D'ailleurs la présence de plaies, de bosses, d'ecchymo-
ses ne serait pas toujours la preuve de sévices exercés sur
les enfants. Ces lésions peuvent avoir été produites par les
enfants eux-mêmes.
])01'. (Lucie), 11 ans, imbécillié très prononcée, très colé-
reuse et rageuse. Une légère contrariété la met de mauvaise
humeur. Elle cherche il se faire du mal à elle-même et aux
personnes qui l'entourent. Elle se tape, se donne des claques,
se roule par terre, se cogne sur les murs, casse les carreaux,
soit avec sa tête, soit avec ses mains. Quand elle est dans
une rage semblable, elle pousse des cris, des hurlements qui
pourraient faire croire qu'elle est battue. La tête, la figure,
les mains, portent souvent des ecchymoses consécutives
aux coups qu'elle se donne.
llicli (Marthe), 10 ans, atteinte d'idiotie complète, réu-
nit en elle toutes les anomalies qui caractérisent l'idiot agité.
L'insensibilité parait très prononcée et l'enfant ne cesse de
se cogner la tête, de battre les murs, les tables, comme
ferait un bélier tout en poussant des rugissements. Le
dessus de la main gauche porte des durillons formés par les
coups qu'elle se donner constamment il la tête en frappant
avec sa main. Ses mains, ses oreilles, sa tète, sont parfois
ensanglantées et offrent très souvent des ecchymoses. Elle
pousse des cris intervalles réguliers comme si on la
battait.
Pramag.. (Armand), âgé de G ans, a été admis dans notre
service de Bicêtre, le 19 octobre dernier, Il est atteint d'idio-
tie à un degré prononcé. Il se tient généralement accroupi
sur les genoux et les coudes, sans cesse agité. Il crie, pousse
des renacicmonts comme un cheval, ou fait des bruits ana-
logues à ceux d'un chat en colère. Il remue violemment sa
fête, la heurte contre tous les corps durs à sa portée, le dos-
sier des chaises, les montants de son lit, etc.. Malgré la sur-
veillance, les capelines protectives. cet enfant présente sur
cxx Enfants martyrs .
les diverses régions de la face, des bosses, des ecchymoses,
des plaies.
Des faits de ce genre ne sauraient être assez connus,
pour qu'on ne porte pas à la légère des accusations préci-
pitées, soit contre des parents, soit contre le personnel
chargé de soigner ces malheureux. Toutes les fois qu'une
plainte semblable est formulée, une enquête s'impose, non
pas seulement une enquête administrative, qui en l'occur-
rence n'aurait aucune valeur, mais aussi une enquête
médicale sérieuse. (Progrès médical , 1903, p. 132.)
Bourneville.
DEUXIÈME PARTIE
Clinique, thérapeutique et anatomie pathologique.
BOURNGVILL, Bicêlre, 1902. 1
Idiotie du type mongolien; Tuberculose pulmo-
naire ; - Appendicite tuberculeuse ;
I' : W ItOUfI\Ts\'IT.T.13.
Parmi nos malades atteints d'idiotie, il en est qui
offrent un arrêt de développement physique souvent
très prononcé : le nanisme s'ajoute à l'idiotie. Il se
présente d'ailleurs sous plusieurs formes : 1° nanisme
avec infantilisme; 2° nanisme avec obésité;' 3° nanisme
avec mymeclèmc congénital ; 'i0 nanisme avec type
mongolien (1). En attendant que nous puissions
faire une description des deux premières formes,
nous allons rapporter un nouvel exemple de la der-
nière.
Pendant longtemps nous n'avons eu que des cas
isolés d'idiotie mongolienne. Dans ces dernières
années, ils sont devenus plus nombreux, ce qui nous
a permis, en nous servant également des mémoires
publiés en Angleterre et aux États-Unis surtout,
d'en donner un tableau clinique sommaire dans le
Traité de médecine de MM. Brouardel et Gilbert. Nous
(1) On pourrait y joindre aussi le nanisme avec achor.droplasie.
4 Idiotie mongolienne.
l'avons reproduit un peu plus complet dans le Compte-
rendu de 1901 (p. 136-151), en y joignant une obser-
vation, avec portrait, suivie de l'elL ? nGl2 hislologiqte
du cerveau de deux autres cas, l'ait par MM. les Drs
Philippe et Oberthur.
Sommaire. Père, convulsions de l'enfance, caractère
. emporté; excès -de boisson. Grand père paternel, excès
de boisson, mort de cirrhose du foie. Arrière grand père
paternel, excès de boisson. Arrière grand' mère pater-
nelle morte il 'J5 ans.
Mère lymphatique, morte d'une attaque d'apoplexie. Grand
père maternel, excès de boisson, mort de tuberculose.
Pas de consanguinité. - Inégalité d ? lge de 3 ans. Deux
frères, convulsions de l'enfance. - Demi frère paternel,
malformation de la verge. - -
Conception, grossesse, accouchement, naissance, rien de
particulier. - Anomalie de la dentition. Marche à 2
ans. Gâtisme. - Parole limitée à quelques mots.
Station assise en tailleur. Description de la malade en
- 1895. Paupières fendues en amande : regard mongolien;
- blépharile chronique. Coloration des joues et du men-
ton. Oreilles petites, à caractères spéciaux. Langue
fètcdillée, hachurée. -
1895. Diarrhée verte. - Exeat le 26 mai. Amélioration.
1900. Réintégration la Fondation Vallée. Parole un peu
plùs développée; prononciation défectueuse. Tendance
à l'isolement. Caractère plutôt triste. Nanisme : (13.
centimètres au-dessous de la moyenne.
1902. Traitement thyroïdien irrégulier (janvier-mars). Brun-'
chite tuberculeuse . Ulcérations de la langue. Chute
du rectum. Cachexie progressive. - Mort. -
Autopsie. Crâne trigone, persistance de la suture 111élopi'-
que. Simplicité des circonvolutions. Méni11go-e11cé-
phalite partielle : -
Tuberculose pulmonaire. - Appendicite tuberculeuse.
Mer... (Jeanne Léontine), née à Montereau, le 3 août 1891,
entrée pour la première fois le 7 janvier 1895 et pour la seconde
fois lé 26 juin 1900..
Renseignements fournis par le père (janvier 1895) et la
grand'mé1'e de l'enfant (juin 1902). Antécédents héréditaires. =
Antécédents héréditaires. 5
Père, 45 ans, marinier, a eu de 8 mois à 2 ans une ving-
taine de fois des convulsions ; rhumatisant, excès de bois-
sons (absinthe); caractère emporté. - [Famille du père : Père,
rhumatisant, nombreux excès de boissons, mort à 50 ans de
cirrhose du foie avec hydropisie. - Mère, sobre, pas d'acci-
dents nerveux, bien portante. - Grand père pat., excès de
boissons. Grand'mère pal., 95 ans. Grand père mat.,
très fort, sobre, mort du choléra. Grand'mère mat., morte
de tuberculose pulmonaire ( ? ). - ltiett à signaler sur ses
oncles et tantes des deux côtés. Deux soeurs, l'une décédée
à 19 mois de «langueur» ; l'autre en bonne santé, veuve, sans
enfant, pas de convulsions. Dans le reste de la famille, il
n'y aurait eu ni aliénés, ni épileptiques, ni bègues, ni strabi-
ques, ni suicidés, ni prostituées, ni criminels, ni mongoliens,
ni d'autres tuberculeux.]
Mère, pas de convulsions, un peu nerveuse, aurait eu des
humeurs froides avec cicatrices consécutives; morte ans.
en 1895, d'un « transport au cerveau » peu après être accou-
chée d'un garçon, qui, en 1900, était bien portant, intelligent
mais avait eu, pendant deux ans, plusieurs fois des convul-
sions. Elle s'est réveillée au milieu de la nuit, ne pouvait plus
parler, avait le côté droit paralysé ; dans l'après-midi, elle per-
dit connaissance, eut des convulsions et mourut en 7 heures.
[Famille DE la mère : Père, excès de boissons, mort vers
40 ans de tuberculose pulmonaire. - llèoc, G6 ans, atteinte
d'une affection cardiaque. - l'as de renseignements sur les
grands parents paternels et maternels, ni sur les oncles et
tantes. - Un frère est mort jeune, on ne sait de quoi; un
autre serait bien portant et n'aurait pas eu de convulsions.
Aucun détail sur le reste de la famille. Il n'y aurait eu, ni
d'un côté ni de l'autre, aucun exemple de mongolien, de
goitreux, ni d'autres cas de tuberculose que ceux cités.]
Pas de consanguinité. (Père de Nogent-sur-Scine, mère de
Paris). - Inégalité d'âge de 3 ans, père plus âgé.
4 enfants : 1° 6 G ans (en 1895), intelligent, bien por-
tant, pas de convulsions; 2° la malade; - 3° garçon, 6
mois (en 1895), vigoureux mais a eu des cuttmdstons assez
fréquentes, durant sou premier mois ; 4° ga1'çon dont il est
question plus haut.
Notre malade. - La conception n'aurait pas eu lieu durant
l'ivresse. Grossesse, rien à noter si ce n'est que la mère
G Idiotie .mongolienne.
était contrariée d'être enceinte. Accouchement à terme,
naturel, par le sommet. - A la naissance, belle enfant, pas
d'asphyxie. Elevée au sein, qu'elle a bien pris, par sa mère
jusqu'à 18 mois. Jamais d'accès de cris, ni de convulsions.
Elle a commencé à avoir ses grosses dents, puis les incisi-
ves. La dentition complète n'aurait eu lieu qu'à un âge avancé
qu'on ne peut préciser. Marche à 2 ans. Est encore gâteuse
la nuit pour les urines. La parole est limitée à quelques mots.
On arrivait assez facilement à fixer son attention; elle parais-
sait écouter lorsqu'on lui parlait ; était « timide », ne jouait pas
avec les autres enfants; paraissait aimer ses parents. Elle
s'asseyait en tailleur, même pour manger (1). Elle a toujours
bavé un peu. Pas de succion, pas de balancement, grinçait
souvent des dents; ni krouomanie, ni clastomanie. Mange de
tout : ni constipation, ni diarrhée. Aucune maladie infec-
tieuse. Aucun accident lymphatique, si ce n'est une blepha-
ritc chronique : « Elle a toujours les yeux collés au réveil. »
Ni vers ni onanisme.
État actuel (janvier 1895). Etat général satisfaisant. Physio-
nomie peu expressive, regard sournois, comme éteint.
Tète : ronde avec saillie issez prononcée des bosses parié-
tales, symétriques. Bosse occipitale en relief.
Visage arrondi, d'apparence un peu bouffie. Front bas et
surtout étroit. Il est bombé à sa partie moyenne au voisinage
des cheveux et déprimé au-dessus de la racine du ne ? Son
défaut de largeur est accentué par ce fait que les bosses
frontales sont couvertes de cheveux. Il y a une dépression
prononcée au-dessus des sourcils, châtains, presque noirs,
unis par un fin duvet. Le front a une hauteur de 5 cent. 1/2.
Les paupières, fendues en amande, sont collées tous les
matins. L'inférieure est bleutée ainsi que la racine du nez.
Les cils assez rares, sont longs aux paupières supérieures.
Les iris sont bleu clair; les pupilles, égales, réagissent bien
à la lumière et à la distance. l'as de nystagmus, ni de stra-
bisme. Ne; moyen, formant une concavité prononcée dans
sa moitié supérieure, extrémité grosse, arrondie. Narines
égales, elliptiques. Cloison non déviée. Joues grosses, colo-
rées.
Bouche petite (i cent. 1/2), lèvre supérieure portée légère-
(1) L'enfant Lehris ? mongolien, se met également un tailleur dans sou lit,
et s'endort ainsi. -
Description de la malade. 7
ment en avant. Sillon naso-labial assez accentué. Lèvre
inférieure plutôt étroite.
Dentition : Maxillaire supérieur très rétréci latéralement
en forme d'angle, sommet antérieur. L'articulation ne se
fait que sur les molaires. Les dents sont en mauvais état.
Les incisives médianes, imbriquées, sont très petites. A côté
d'elles se trouvent des chicots de dents de lait. Une petite
molaire définitive et deux petites molaires de lait branlan-
tes. Dents de si ans en voie d'évolution. Au maxillaire
inférieur les dents sont en très mauvais état. Les incisives
médianes sont plus élevées que les incisives latérales et for-
ment avec elles un arc de cercle à peine prononcé. Les
petites molaires de lait ne sont pas encore tombées. Les
dents de G ans et les petites molaires définitives sont en voie
d'évolution. (Note de M. le Dr Duatowr, dentiste de Bicétre).
Palais légèrement ogival en avant. La langue présente
une feule à la partie moyenne, au milieu de la pointe. Sur le
bord gauche, il y a une sorte d'encoche comme s'il y avait
une perte de substance. Menton, moyennement rond, rosé.
Pas de prognathisme. Oreilles très peu écartées; ourlet
assez bien dessiné dans les deux tiers antérieurs, ensuite très
effacé; anthélix saillant, fourche bien dessinée. Les lobules
sont petits, adhérents. Elles ont 4 cent. et demi de haut et
2 cent. et demi de large.
(.'ou gros, court, adipeux.
Thorax bien conformé, ainsi que le rachis. Rien à l'aus-
cultation du poumon et du coeur. Abdomen volumineux,
proéminent, à parois flasques. Pas de hernie ombilicale.
Membres supérieurs et inférieurs réguliers ; mouvements
souples, réflexes normaux.
Organes génitaux. Seins nuls ; aréoles pâles, mamelon
tout petit. (Une tête de grosse épingle). Pénil saillant. Grandes
lèvres un peu épaisses. Petites lèvres triangulaires, rudimen-
taires. Capuchon saillant. Clitoris tout petit. Orifice de l'hy-
men circulaire. Vulve un peu rouge. Anus, rien.
Les cheveux sont blonds, peu abondants surtout au niveau
du tourbillon. Pas d'épi. l'eau fine, blanche, glabre, sans
cicatrice sauf aux liras des cicatrices de vaccin. Pas de gan-
glions.
M... ne se sert pas de la cuillère, il faut la faire manger.
La mastication et la déglutition s'exécutent bien. L'enfant
n'est ni salace, ni vorace ; préfère la panade, les légumes, la
viande, les mets sucrés ; boit le vin, le lait avec avidité ;
selles régulières ; gâtisme.
8 Idiotie mongolienne.
Mer... ne sait ni s'habiller, ni se déshabiller, ni se laver.
La vue, l'ouïe, l'odorat et le goût semblent normaux. Elle
aime entendre la musique. - Son sommeil est bon. - carte-
tère doux, s'amuse seule avec un chiffon, un cordon, joue à
cache-cache, dévalise les armoires, embrasse ses compagnes,
leur sourit, est sensible aux reproches, affectueuse avec ses
parents. Inattention est facile à fixer. La parole est
limitée à quelques mots. L'enfant ne cherche pas à faire
comprendre ce qu'elle désire. En résumé, idiotie prononcée.
le février. Diarrhée verte, fétide, abondante, qui cesse au
bout de trois jours.
11 février. Chute des cheveux sur toute la partie posté-
rieure de la tète.
3-9 avril. Revaccinée sans résultat.
2G mm. Le père étant marinier, n'a pas de domicile
fixe : l'un de ses enfants est né à Saint-Maur, un autre il
Paris et notre malade à Montereau. Le département de Seine-
et-Marne a demandé son transfert, le père s'y refusant, on
signe la sortie. -
Depuis son admission, cette enfant a fait beaucoup de pro-
grès : elle prononce plusieurs mots distinctement, commence
à se servir de la cuillère, porte le pain à sa bouche, boit
seule. Elle est devenue presque tout à fait propre, va toute
seule sur le vase; se cache quand elle s'est oubliée. Son
attention, sa compréhension se sont développées.
De mai 1895 au 26 juin 1 ! Jllli, l'enfant est restée d'abord avec
sa grand'mère, puis elle a été envoyée à la campagne dans le
Limousin. Là, on a essayé plusieurs fois de lui faire suivre l'é-
cole ; nulle part on ne voulait la garder " parce qu'on ne pou-
vait rien en faire", parce qu'il faudrait, au dire des maîtresses,
une personne pour s'occuper d'elle seule, et qu'elle battait les
autres enfants. Le caractère de Mer... est triste, puis brus-
quement gai ; elle a des petites colères et des impulsions
subites, tire les cheveux des enfants qui jouent avec elle,
jette les objets par la fenêtre. Elle prend un livre et une
baguette et imite la maîtresse faisant l'école. Elle cligne des
paupières et plisse son front, ce qu'elle ne faisait pas au-
trefois.
Son père s'est remarié avec la soeur de sa première femme.
trois enfants : 1° fille, G ans, pas de convulsions, bonne santé ;
2° garçon avait la verge en vrille, n'urinait pas comme tout
État de la malade en 1900. 9
le monde, conduit aux Enfants-Malades, opéré, mort trois
jours plus tard par des convulsions ; 3" garçon bien portant,
pas de convulsions.
Température et la première entrée.
10 Traitement thyroïdien.
1901. Juin. - Elle est tranquille, a une tendance pronon-
cée à l'inertie, préfère; rester seule dans un coin que de
jouer avec ses camarades. Caractère triste. Elle pleure il la
moindre contrariété. Elle est très lente à s'habiller et se
déshabiller. A la gymnastique, on a beaucoup de peine à lui
faire exécuter quelques mouvements. -1\It : me traitement et
douches. Etat stationnaire.
Décembre. Même état. L'enfant mesure 1 m )2, elle devrait
avoir 1 m 249, soit une différence de 0 m 129.
1902.- A janvier. Traitement thyroïdien : 0 gr25 pen-
dant une semaine ; 0 gr 50, puis 0 gr 75, enfin 1 gramme.
Mars. - l3ronchite légère à droite, engelures.
11 mars. - La température étant de 39°, 2 on suspend la
glande thyroide, qui n'est reprise que le 23 mars.
12 avriL - Quelques râles au sommet du poumon droit.
Guérison des engelures. Suppression du traitement il cause
des accidents pulmonaires et des poussées de fièvre. Le
poids a baissé de 1 kg. 700, la taillc s'est augmentée seulement
d'un centimètre.
28 mui. - Depuis le commencement du mois, toux de plus
en plus fréquente, dyspnée, élévation de la température (tu-
berculose).
1'" j¡¡il/. - : llt}ll1cs symptômes pulmonaires. Appétit tris
faible, vomissements, chute du rectum. Langue rouge, dou-
loureuse, fissurée à sa partie moyenne, son extrémité est
comme rongée. On ne peut savoir si M.. s'est mordue ou si
la lésion est duc à la succion. Ces accidents ont été notés il
y a un mois. Amaigrissement, sommeil mauvais à cause de la
toux. La température se maintient élevée. Même état du corps
et des organes génitaux.
[2 juin. L'affaiblissement et l'amaigrissement continuent,
la toux et l'oppression persistent. l'as d'expectoration. La tem-
pérature est toujours élevée. La langue va mieux; il n'y a
plus d'inllamll1af,lon; le bout rongé il gauche semble repousser.
' 1.')Jmn. T P. 3ï° le matin, 37°, 3 le soir.
16 juin. On constate ce matin que la figure est bouffie ;
les pieds et les mains sont légèrement enflés. Soif vive, lan-
gue sèche. Persistance de tous les autres svmptomcs. 'rIt.
3go,2. 2.
- l7juin.-Lafaiblessevenconauâmcutu.Gèuedeladilu-
tition. Crise intense de dyspnée; syncopes répétées. La
malade meurt à 3 heures du matin.
poids après décès : la kilog.
Mensurations, poids, taille. 11
1 Traitement thyroïdien.
Traitement thyroïdien. 13
14 Idiotie mongolienne : crâne.
Idiotie mongolienne : cerveau. 1;'
la frontale et la pariétale ascendantes et le tiers antérieur du
lobe temporal. Il en est de même à la face interne, sur la
première circonvolution du corps calleux, ainsi que sur le
face orbitaire du lobe frontal. Il y a de nombreuses adhé-
rences de méningo-encéphalite sur le pli pariétal inférieur,
le pli courbe, les deux tiers postérieurs du lobe temporal et
le lobe carré.
Les trois circonvolutions frontales sont bien dessinées,
mais un peu petites, F2 envoie à F3 un pli de passage d'envi-
ron 01" 03. L'insertion de 1' : 1 sur la frontale ascendante est
maigre. A est peu développée, très irrégulière. Le sillon
de liolando est assez profond. P A décrit plusieurs sinuo-
sités, est médiocrement volumineuse et envoie un pli de pas-
sage curviligne à Pli. - Les plis pariétaux lez, P2 et P3 sont
assez développés, L O est plutôt peu volumineux. L I pré-
sente quatre digitations. 'l ? grêle, envoie un pli rayonnant
qui recouvre la 4 ? digitationde Ll, T2 est assez grosse ainsi
que T : i. La circonvolution de l'hippocampe et la corne d'Am-
mon n'offrent rien de signaler. (l. I).
' Face interne. 1 , peu sinueuse, reçoit un pli de passage
de C C ( ? L P a l'aspect d'une grosse masse quadrangulaire
coupée. Le lobe paracentral est largement confondu en avant
avec 1 , L Q est large et en avant se confond avec C C C.
Le coin, petit, est nettement distinct. De même que sur la
face externe, le lobe occipital est petit. V L., C C, couche
optique, corps ttrié, rien de particulier. D'une façon géné-
rale les sillons sont peu profonds. (PL. II).
En résumé, arrêt relatif des circonvolutions, plis de pas-
sage très peu nombreux, volume et poids au-dessous de la
normale.
Hémisphère gauche. Autant que nous avons pu en juger,
cet hémisphère, non décortiqué, conservé pour 1'8.vamen his-
tologique (Voir plus loin). parait ressembler iL l'hémisphère
droit. t.
eau. Thymus, 4 gr. Corps thyroïde assez volumineux
(12 gr.).
Thorax. Poumon gauche : La plèvre viscérale est
épaissie ; foyer caséeux en voie de ramollissement au sommet ;
les lobes adhèrent entre eux et sont farcis de tubercules.
Poumon droit : Plèvre moins épaissie; adhérences moins
16 IDIOTIE mongolienne : tuberculose; appendicite.
intimes des lobes; petite caverne et tubercules au sommet.
Lobe inférieur à peu près sain. Crellr, rien ; trou de Dotal
oblitéré.
Abdomen. - Foie, légère dégénérescence graisseuse; pas
de calcul ; vésicule biliaire presque vide. Raie, reins, cap-
sules surrénales, rien. L'appendice vermi forme, long de
0m 06, recourbé sur lui-même, adhère fortement au ccecum
contre lequel il est aplati en forme d'S. Le long de l'appen-
dice, ganglions engorgés. L'orifice de l'appendice communi-
que avec une cavité dont la paroi est infiltrée de tubercules.
On dirait que l'appendice a été détaché à sa base et relié au
coecum par cette sorte de cavité. Pas d'autres lésions tuber-
culeuses sur l'intestin grêle et le gros intestin. Pas d'altéra-
tions des organes génitaux.
Poids des organes
Idiotie mongolienne. t7
ciale, vieillote, moue, dédaigneuse; plissement et rides
du front; paupières fendues en amande, regard parti-
culier, coloration des joues et du menton,*voix un peu
masculine, langue fenclilliée, présentant des crevasses
en tous sens, constituant des carrés; conformation
typique des oreilles (toujours la môme chez ces
malades, oreilles mongoliennes), station assise en
tailleur que nous avons observée plusieurs fois,
nanisme : en 1909, à onze ans, sa taille n'était que
de alors qu'elle aurait dû être de l'"25 (1).
Après avoir constaté par la radiographie que Mer...
n'avait pas encore les cartilages épiphysaires des
genoux soudés, nous l'avons mise au traitement th-
i·oïrlien : 0 gr. 25 de glande thyroïde fraîche de mou-
ton pendant une semaine, puis 0 gr. 50, - 0 yr. 75 et
un gramme. Sa température rectale, plutôt un peu
inférieure à la normale, s'est élevée vite et souvent
nous avons eu des élévations thermiques, qui nous ont
obligé de suspendre le traitement. Comme l'enfant a
eu, durant celle période ('1 janvier - 9 mars) des pous-
sées de8bronchite, comme les doses de glande thyroïde
étaient minimes ci. de plus, souvent interrompues,
nous inclinons à mettre les élévations thermiques plus
sur le compte de la bronchite tuberculeuse que sur
celui du médicament. Le résultat a été médiocre : un
accroissement d'un centimètre. Il paraît être bien
attribuable au traitement thyroïdien car, depuis deux
ans (1900 et 1901) la taille était demeurée stationnaire
(li12). En raison de la maladie intercurrente, nous ne
pouvons tirer aucune déduction relative au poids qui
est allé diminuant progressivement.
(1) Nous aurons : 1 tracer un p1l'allèle entre les différentes formes de nanisme,
surtout le n. U1u.\'oedf ! ma ! cllx. Disons, dès maintenant que la l'orme de la tête,
l'aspect de la physionomie est très différente; la fontanelle antérieure, encore
ouverte chez le mywedémateus est fermée chez, le mongolien. Le premier est
surtout végétarien, le second est omninnre, etc.
z18 . Idiotie mongolienne;
III. Signalons la persistance de la suture métopi-
que, le petit nombre des plis de passage du cerveau.
la méningo-encéphalite et enfin l'appendicite tuber-
culeuse. - z
Bibliographie. Aux indications bibliographiques que
nous avons données dans le Compte-rendu de 1901 (p. 146-
147), nous ajouterons les suivantes :
- Beach (F.), Diagnoses and Tl'ea/mrnl 01' llliocy, vit h Remarlis
on l ? ozosis. (Lancel, 1878. vol. II, p. 761); - On Types Imùeri-
lily (Jlcd. Times and Gaz., LOI1(lon, Vol. I, 1882. p. : 300).
Shutt.lcworlli, The Plrllsical Feill1U'r. 01' Irli.ncy in Relation lo
Classification and Prognosis (Lice/'pool Merl. C'lria. Jour., ]883.)
p. 283.; - Shutlleworl : h, Clini(-;zl Lecture on Idinry 111111 ImlJer'i-
lily, (Brilish Médical Journal, Vol. L. 18SG).
Jones (R.), The moulh in ac/na)' (11111)Ccilcs) oflhe
11JOnr ? inn Tlllrr. (.T01/1'I1. of mental Science, 1800 vol. XXXVI, p.
187).'
Smith Tc7'/)C//))/i'o ? 7')'<'a/men/ 01' ('l'elinism andlmbe-
cilily in C'lri.lrli·caz (P.ril. med. Journal, 18%. p. (i1G); - Thomson
and l3ury, ilidem; - Lnl'1. (Carl). Klinish oU acliologishe sou-
cli.er 2recpslris)re lirlri. /¡lil1r ? J[al1r//rl' Irns Ùnrn. 13cr ? en, 1807.
Sutherlm1L1, Mnngolian imberililal in Infants (Prnclilioner,
dce. '[809) ; Différentiel cli,,tgnossis of Mongolinn and c¡'r./il11.ml
(Lamcel, Jan. fi. 1000) ; - Still, 3[oi-tgolii)î. Imliecilily lI{inç¡'s Coll.
Hosp. Rep., vol. Vis, 188-l8'ltl) : - liras. 1V'iez. 7\'/tn. 1Voc/wns-
chrifl, 1890. p. 73.1); Ncumann (11.), Uber den Mon(/lJloillr/1
T;/pt(.sde)'7d/c(o. 7OE ? 1T'och.,ISO ! J, n" 10).
Taylor (J.), The Lon.cel, 1900, vol. IT. p. 1-120.
Wost (.1, P.), Etrlil Dia(JJ1osi. o( Idioc) ! , (('01umú11s Med..TOIl1 ?
Mardi, 1900). - est, (J. P. A.), Noie on the Lillle Finger oflhe
illo71goli,in Idiot and o/' rr.ornznl r : hilr.l¡'I'J1. (Archives nI' Pedia-
iri.rs, décembre 1001). -
II.
Examen histologique de deux cerveaux d'idiots mon-
goliens; -,
PAR CI. pnlUPl'E et J. ORERTI1UR.
L'examen a porté sur plusieurs circonvolutions choisies
dans les différents lobes du cerveau (circonv. rolandiques,
lobule paracentral ; 1° et 2e circonv. frontales; circonv.
occipitales : circonv. temporales ; etc.). - Colorations à
l'aide des principales méthodes : hématoxyline de Weigert-
Pal ; bleu polychrome d'Unna-Niss) ; fuchsine picriquée de
van Gieson ; hématoxyline alunée, etc.
- 10 Méninges. Sur des coupes verticales et passant assez
exactement par le centre de chaque circonvolution, les
méninges molles, pie-mère et arachnoïde, sont partout
épaissies, il un degré variable suivant les régions ; mais, tou-
jours le maximum des lésions siège au niveau de l'arach-
noïde viscérale, la pie-mère étant sensiblement moins frap-
pée par le processus. Ainsi, là où existe le plus grand
développement de la méningite, nous rencontrons une véri-
table membrane épaisse de plusieurs millimètres, membra-
ne nettement constituée par des fascicules conjonctifs assez
denses; beaucoup de ces fascicules ont été coupés paral-
lèlement si bien qu'ils apparaissent placés les uns à côté
des autres, souvent ondulés et décrivant des sinuosités
plus ou moins irrégulières. Dans leurs intervalles se voient
également des fibres élastiques en grand nombre. Fré-
quemment, cette aT7,ch7ziEis fibro-))IcSttCf2f.e en arrive à
constituer, du côté de la face libre des méninges, des
végétations assez volumineuses, semées de distance en
distance, et souvent coiffées par les cellules endothéliales
20 Idiotie mongolienne.
de la séreuse arachnoïdienne, cellules aisément recon-
naissantes à leurs lames protoplasmiques qui sont étalées
et pourvues d'un gros noyau saillant. Ces productions
hyperplastiques sont intéressantes à signaler, puisqu'elles
démontrent à elles seules toute l'intensité de l'inflamma-
tion méningée.'
Les vaisseaux de la méninge, artérioles et veinules, sont
souvent dilatés, présentant des tuniques externes franche-
ment épaissies, mais sans que les tuniques, interne ou
moyenne, paraissent altérées. -
Outre la prolifération des faisceaux conjonctifs de
l'arachnoïde viscérale et des tuniques externes des vais-
seaux, il convient de noter également la présence d'amas
cellulaires, qui se montrent un peu partout,. soit dans les
espaces conjonctifs élargis, soit autour des vaisseaux;
Toutefois, ces amas cellulaires ne sont jamais très nom-
breux. Il parait donc s'agir plutôt d'un processus méningé
à évolution assez lente.
Immédiatement en dedans de l'arachnoïde ainsi épais-
sie, nous rencontrons les travées conjonctives, elles aussi
notablement épaissies : travées qui, à l'état normal,
cloisonnent les lacs sous-arachnoidiens du liquide céphalo-
rachidien. De plus, les mailles formées par l'enchevêtre-
ment de ces travées sclérosées, contiennent fréquemment
des cellules blanches, gl. mononucléaires de toutes dimen-
sions ou gl. polynucléaires, rangés en amas d'ailleurs
assez discrets ; également des cellules conjonctives
enflammées, reconnaissables à leur masse protoplasmique
volumineuse et membraniforme, pourvue d'un noyau ova-
«-]aire gros et clair et de prolongements multiples et
ramifiés.
La pie-mère est certainement moins altérée, bien que
son épaississement existe partout où il y a une a1'8.chnitis
suffisamment développée.
2°. Ecorce cérébrale. La.couche névroglique sous pie-
mérienne est notablement augmentée d'épaisseur. Au
niveau de certaines régions plus particulièrement mala-
des, généralement là où existe le maximum de dévelop-
pementdes lésions méningées (lobule paracentral ; circonv.
Examen IIISTOLOGIQUE. 21
temporales), cette couche névroglique a doublé d'épaisseur.
De plus, elle est très dense, constituée par un feutrage de
fibrilles bien lassées et par des cellules-araignées souvent
volumineuses et entourées de prolongements gros et nom-
breux, bien capables d'être suivis sur une grande lon-
gueur. Enfin, de ses portions les plus externes se détachent,
en assez grand nombre, de grosses fibrilles qui paraissent
prendre insertion sur le feuillet le plus interne de la pie-
mère voisine, de façon à réaliser une véritable symphyse
méningo-corticale, comme il arrive dans toute encéphalite
suffisamment intense.
Les fibres tangentielles sont altérées surtout au niveau
de la couche d'Exner. Bien que ce feutrage n'ait nulle part
disparu, il est très-peu riche en fibres myéliniques, dans
toutes les circonvolutions examinées, même au niveau des
circonvolutions du lobule paracentral qui, à l'état normal,
contiennent un si grand nombre de fibres tangentielles. En
outre, les fibres encore existantes sont grêles, assez espa-
cées les unes des autres, mal orientées dans leur direction
générale, puisque ces fibres, au lieu de rester parallèles à
la surface de la circonvolution, deviennent obliques ou
môme perpendiculaires cette surface.
A mesure qu'on examine les couches corticales situées
plus profondément, les fibres tangcntielles augmentent
certainement, mais tout en restant de nombre sensible-
ment inférieur à la normale. Dans les circonvolutions où
existent bien nettement les feutrages super et inler-
radiaire ? , ces feutrages S3 : tt; p'u denses, et, sur les prépa-
rations colorées à l'aide de l'hémalol3·line de Weigert-Pal,
ils ne forment plus les bandes foncées qui, à l'état nor-
mal, se distinguent aisément d'avec les autres couches
faiblement teintées.
Cette même diminution de nombre se retrouve pour les
fibres radiaires; leurs fascicules sont peu denses, assez
espacés les uns des autres, même quand ils abordent le
centre ovale de chaque circonvolution.
Les couches cellulaires sont certainement bien moins-
atteintes que les fibres nerveuses, tangentielles ou radiai-
res, si l'on s'en rapporte aux résultats fournis par les
22 Idiotie mongolienne.
meilleures techniques actuellement employées, en parti-
culier par la méthode de Nissl. Sur les préparations colo-
rées à l'aide de cette dernière méthode, particulièrement
précieuse pour l'étude des colonnes cellulaires de l'écorce
cérébrale, ou remarque aisément le grand nombre des
cellules nerveuses, généralement bien orientées; c'est
ainsi qu'on retrouve les différentes couches bien connues
(Meynert), et, dans chacune de ces couches, les cléments
cellulaires sont nets, possédant leurs principaux caractè-
res de morphologie et de structure habituels; même, les
grandes cellules pyramidales des circonvolutions rolandi-
ques sont nombreuses et bien développées. Sans doute, fré-
quemment, les masses protoplasmiques sont craquelées,
fissurées, vacuolaires ; souvent même, elles sont le siège
d'une désintégration moléculaire surtout accusée dans les
portions les plus périphériques ; mais le noyau reste intact,
sans état chromopliiliclue nettement appréciable, sans
atrophie ni déplacement bien marqué. De même, l'espace
pèriccllulaire, souvent élargi, est parfois rempli par 2 et 3
noyaux fortement teintés par les hématoxylincs (neurono-
phagic, vraisemblablement par des noyaux lymphocytai-
res : plus exceptionnellement par des noyaux névrogliques).
Toutefois, malgré celte ncuronophagic et les lésions cel-
lulaires, évidentes, que nous venons de décrire, les élé-
mcnts persistent en très grand nombre, de telle sorte que
les altérations précédentes paraissent plus vraisemblable-
ment être sous la dépendance de processus aigus et termi-.
naux; les caractères de ces altérations plaident plutôt en.
faveur de cette dernière interprétation. Quoiqu'il en soit,
nous devons souligner le contraste, très-net, qui existe
entre les lésions, considérables, des fibres tangentielles
et radiaires d'une part; et les altérations minimes, pro-
bablement terminales, des cellules nerveuses, d'autre part.
En résumé, chez ces deux malades, nous avons cons-
taté l'existence des lésions méningées et corticales, que
nous avions déjà signalées l'année dernière dans deux
autopsies (Compte-rendus; de 1902.) Actuellement,
nous désirons simplement souligner la physionomie très
spéciale du processus pathologique rencontré dans tous
Examen histologique. "23 3
ces cas. Il ne s'agit certainement pas de la méningo encé-
phalite ordinaire, qui détermine des lésions destructives
intenses dans le cerveau tout entier, avec microgyrie consi-
dérable et agénésie des principaux faisceaux de projection
et d'association. Les altérations sont plus discrètes, plus
superficielles, puisqu'elles frappent surtout les fibres tan-
gcntielles, tandis que lescellulesnerveusessonthienmoins
malades. Très vraisemblablement, c'est une forme spéciale
de méningo-encéphalite corticale surtout prononcée clans
les régions les plus superficielles de l'écorce cérébrale. Le
processus nous a paru avoir envahi la presque totalité des
circonvolutions, dans tous les lobes du cerveau, avec une
intensité sensiblement égale. Cette méningo-encéphalite
des régions superficielles du cerveau a cntrainc la dimi-
nution assez considérable des libres nerveuses, tangentiel-
les et radiaires, quelle que soit la région examinée. Par
contre, les cellules nerveuses, il part un certain degré d'alro-
phie, nous ont paru suffisamment nombreuses, au niveau
de toutes les couches de l'écorce cérébrale. La processus
pathologique a été généralement plus intense chez Mer...
que chez Conné... Il) mais, dans les deux cas, il avait
sensiblement les mêmes caractères généraux.
xi) L'observation de Conné... a été publiée dans le Compte-rendu de 1C01,
1). 136.
. III.
,.
Imbécillité congénitale, probablement aggravée par
.- l'alcoolisme de la nourrice, qui a déterminé une
. méningite : Type mongolien ;
Par BOURNEVILLE ET J. DOYEn.
rS'0\IrtAIIiC. - Père, rhumatisant, très emporté. Grand'père
- paternel mort d'un «coup d'apoplexie ». il/ère, très ner-
veuse (Cuit paquet de nerfs», sujette à des accès d'oppres ?
sion antérieurs au mariage; toujours frigide dans, les
rapports sexuels, acceptant malles grossesses. Grand-
père maternel phtisique. Grand'mère maternelle,
morte d'apoplexie cérébrale. - Oncle maternel, très ner-
' veux, plusieurs congestions cérébrales, la dernière suivie
de paralysie transitoire. - Son fils, cousin germain de la
malade, mort de méningite. - Tante maternelle sujette à
des accès d'asthme. Frère, mort de méningite avec
convulsions à G mois. - Autre frère bien portant.
Pas de consanguinité. Inégalité d'âge d'un an (mère plus
âgée.) -
Grossesse, idées noires ? Accouchement t à mois et demis
Asphyxie à la naissance. Prise du sein difficile, protrtc-
sion de la langue à la naissance. Allaitement de 15 jours
par la mère, puis par une nourrice alcoolique. - Ménin-
gite à 6-7 mois. Avant, l'enfant paraissait déjà anor-
male. A un an, elle semblait n'avoir que 6 mois.
Première dent à 14 mois : dentition anormale. Marche
à 2 ans, Début de la parole après 3 ans, évolution très
lente et incomplète à l'entrée. Propre vers 10 ans
Caractère irritable. Affectivité, esprit d'ordre.
Mouvements lents, maladroits. Tendance ât'itnitation.
Réglée à 10 ans 1/2. Congestion pulmonaire à 6 ans.
Rougeole à 12 ans. Écolage nul. Manies bizarres,
Idiotie mongolienne. 25
pyromanie, impulsions. - Traitement médico-pé.dagogi-
que, disparition des manies, amélioration générale.
Marcelle F.... , née le 16 octobre 1882, est entrée à l'Ins-
titut médico-pédagogique le 2 juin 1898, sortie le 31 mai 1901.
Antécédents héréditaires. Père, 47 ans, pas d'accidents
nerveux graves; mais très emporté, « une soupe au lait. »
Rhumatisant, « tout le monde l'est dans ma famille. » Pas de
dartres, pas d'accidents vénériens. [Père, mort d'un coup
d'apoplexie, à 65 ans, sobre. Mère, morte en couches,
d'une hémorrhagie. Grand-père paternel, mort de vieil-
lesse, à 80 ans ainsi que la grand'mère paternelle. Pas de
renseignements sur les grands-parents maternels, ni sur les
oncles et tantes des deux côtés. Un frère, bien portant
sans enfant. Deux demi-soeurs, en bonne santé.]
Mère, 48 ans, aurait eu de l'asthme avant le mariage; a
eu depuis très souvent des accès d'asthme, parfois épouvan-
tables ; elle n'a plus de grandes crises depuis qu'elle a des
congestions du foie, des coliques hépatiques; très nerveuse,
« un paquet de nerfs». N'a jamais senti aucun plaisir dans
les rapports sexuels, plutôt du dégoût ; accepte ses gros-
sesses avec beaucoup de peine : elle « n'était pas faite pour
être mère de famille ; » n'a jamais éprouvé de bonheur dans
la maternité. Malgré cela, excellente femme, travailleuse,
« coeur d'or», [Père, mort poitrinaire à 39 ans. Mère,
morte à G3 ans» d'une paralysie cérébrale, d'une apoplexie
cérébrale; variqueuse. -Grand-père paternel mort à 49 ans,
on ne sait de quoi. Grand'mère paternelle morte assez
âgée, subitement. Grand-père maternel mort assez âgé à
la suite de chagrins dus à des pertes d'argent. Grand'mère
maternelle morte à 55 ans, on ne sait de quoi ; aurait eu des
pertes utérines. Un frère, très nerveux, a eu trois légères
congestions cérébrales (48 ans), actuellement mal portant; a
eu un peu de paralysie après la dernière congestion, mais
son intelligence n'a pas baissé. Il a ou un enfant mort de
méningite ; des deux autres, l'un a eu une coxalgie et boite,
mais n'a pas eu de convulsions, l'autre se porte bien. - Deux
soe¡¡.rs : une a 3 filles et 1 garçon en bonne santé, elle-même
est asthmatique, très calme ; l'autre, calme, a une fille bien
portante, mais nerveuse, sans convulsions- de l'enfance, a eu
un garçon mort du choléra. Pas d'autres apoplectiques,
pas d'aliénés, etc. dans le reste de la famille.]
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902. 3
G IDIOTIE mongolienne.
Pas de consanguinité ; inégalité d'âge d'un an, mère plus
âgée. Dans les deux familles aucun cas semblable à Mar-
celle.
Trois enfants et une fausse couche : -10 garçon, mort de
méningite avec convulsions à (i mois ; 2° noire malade;
3° fausse couche à G semaines, à la suite d'une émotion pro-
voquée par la chute d'une suspension à l'étage supérieur;
4° garçon, 11 ans, bien portant, pas de convulsions, apprend
bien.
Antécédents personnels. Conception, rien à relever. - Gros-
sesse, pas de chagrins, mais des idées noires, qui du reste ont
persisté jusqu'à maintenant. « Elle ne peut pas se trouver
heureuse. » Accouchement à 7 mois 1/2 à la suite d'un
voyage de Rambouillet à Paris (pas de chute) ; facile, par la
tête, avait perdu « pas mal d'eau le matin. » - A la nais-
sance, l'enfant était asphyxiée, on a été obligé de la fouetter,
revenue au bout de 6 minutes; était courte, potelée, bien
formée, avait des ongles. Prise du sein très difficile : prolru-
sion de la langue.
Allaitée par sa mère pendant 15 jours, puis confiée à une
nourrice qui s'est mise à boire du vin et de l'eau-dc-vie ; l'en-
fant avait 6 mois quand on s'en est aperçu, cela durait depuis
six semaines. La nourrice a été trouvée ivre-morte ; le len-
demain une méningite très-grave s'est déclarée chez l'enfant;
pas de convulsions. Avant la méningite, l'enfant n'avait pas
« de connaissance bien nette. » La méningite a duré 8-10 jours;
pas de paralysie.
Première dent à 14 mois ; les grosses dents ont paru les
premières, les incisives, les dernières. (Son père a eu sa pre-
mière dent à 8 mois). Dentition complète, on ne sait.
Elle a marché à deux ans (son frère à 13 mois). Parole,
début après trois ans. A 10 ans, elle parlait à peine (son frère
a bien parlé à 15 mois). Réglée à 10 ans 1/2, sans accident :
écoulement peu abondant ; pas de pertes blanches. Propre
vers 9 ans, (son frère vers 14 mois). Sommeil toujours agité,
un peu moins depuis quelque temps. Pas de céphalalgie.
Congestion pulmonaire très grave à 6 ans. Caractère
irritable, il ne faut pas la taquiner. Pas de clastomanie ( ? ). Ne
serait pas menteuse ( ? ). lion appétit, sans être gourmande ( ? ).
Très caressante. Susceptible d'attention, observatrice,
rien ne lui passe inaperçu, mémoire fidèle. Elle s'habille et
se déshabille, mais très lentement, se lave la figure, se sert
du couvert, essaie d^ coudre, mais ne sait pas, enfiler son
. Antécédents personnels. 27
aiguille, essaie de faire son lit, mais sans y réussir, met et
dessert le couvert. Elle n'a jamais pu apprendre à lire, il
écrire et à compter.
État à l'entrée. - Etat PHYSIQUE. - La physionomie exprime
l'hébétude, même quand le sourire se manifeste. Les che-
vettx sont bien plantés, châtains, assez épais, longs et un peu
grossiers ; ils n'empiètent pas sur le front. - Celui-ci est assez
bombé, plutôt large. Les bosses frontales rapprochées, sont
peu saillantes ; il y a deux rides à droite. Pas de dépres-
sion au niveau des arcades sourcilières. Les sourcils sont
bruns, clairsemés, légèrement arqués, sans solution de conti-
nuité. Les yeux sont assez ouverts, fendus en amande : iris
gris, pupilles dilatées môme en pleine lumière, strabisme
convergent de l'oeil droit ; paupières plutôt fortes, relevées il
leurs commissures externes, cils bruns raides et clairsemés.
Blépharite ciliaire datant de l'enfance.
Le ne : est petit, gros, saillant, relevé à son extrémité, très
différent de celui de ses parents, narines visibles de face,
ouvertes surtout celle de droite, ailes à peine dessinées.
Lèvre supérieure fuyante, mince, en retrait; lèvre inférieure
saillante, peu épaisse, retombante. Bouche presque toujours
ouverte; quand les lèvres sont closes, la bouche dessine un
croissant à branches retombantes. Langue épaisse, large,
longue, paresseuse, se mouvant difficilement. Elle présente de
chaque côté de la ligne médiane, à 2 cent. de la pointe, en
allant en arrière cinq ou six fentes un peu curvilignes, lon-
gues de 2 à 3 centimètres, s'étendant presque jusqu'aux bords,
non douloureuses (Langue mongolienne). - Dents mauvai-
ses ; mâchoire supéreure : incisives médianes espacées, incisi-
ves latérales cariées, pas de canines ; les premières molaires
sont cariées, les 'les manquent, les 3es sont également cariées.
Mâchoire inférieure : incisives longues, étroites, espacées ;
trois molaires à gauche, quatre à droite, toutes avec un point
de carie. Voûte du palais étroite, un peu ogivale. Le
menton est étroit, arrondi, rosé. - Les joues sont peu sail-
lantes, colorées. Les oreilles sont très petites, égales et
symétriques ; hélix et anthélix forts distincts, lobule très
petit, complètement adhérent.
Le crâne est légèrement ovoïde, petit, bosses pariétales et
occipitales il peine saillantes.
Le cou est assez long, circonférence médiane 31111 G.
Thorax un peu plat, seins bien dessinés mais peu saillants,
diam. vertical 0'" 08 à droite; O1" On à gauche; diam. horizon-
28 . Idiotie mongolienne.
tal 0m 10 à droite; 0m 11 à gauche. Aréole rosée, mamelon bien
dessiné 0m 005 à 0m 006. A l'oeil le sein gauche est plus bombé.
Bassin large, ventre assez gros. Colonne vertébrale légère-
ment déviée à gauche clans la région dorsale, et adroite'dans
la région lombaire.
Organes génitaux : poils noirs, longs, assez abondants sur
tout le pénil, sans trainée vers l'ombilic, commençant à enva-
hir les aines; poils longs et abondants sur les grandes lévres
qui sont assez grosses, petites lèvres débordant les grandes
lèvres; capuchon petit, clitoris peu volumineux, hymen cir-
culaire, non frangé ; anus rien.
Alembres supérieurs bien proportionnés, un peu courts
cependant. Mains petites, larges, doigts courts, légèrement
palmés, ongles bien plantés.
Membres inférieurs assez longs, cuisses fermes, jambes
grêles ; pieds courts et plats.
2° État physiologique. Marcelle est plutôt inerte. En
récréation, elle restera assise, mais ne se joindra pas à ses
compagnes pour jouer. La marche est lente, les jambes
sont écartées, les genoux se maintiennent en demi-flexion,
le tronc est un peu incliné en avant; cette dernière attitude
est conservée quand Marcelle est assise. Le saut est impos-
sible, la course aussi. Les mouvements sont limités, même
exercés passivement, les articulations sont incapables d'ex-
tension complète, pas de craquements. Souvent, en récréa-
tion, sur la pelouse, elle s'assied en tailleur.
A table, l'enfant se tient assez bien; se sert de la cuillère
et de la fourchette, coupe sa viande elle-même; boit seule,
mais ne tend pas son assiette, si on l'oubliait ne demande-
rait pas; lente à manger, mastication très difficile. Les
fonctions digestives paraissent s'effectuer assez bien, pas de
somnolence après les repas ; les selles sont quotidiennes,
normales. Pas de gâtisme proprement dit, mais la moindre
surprise, la moindre émotion suffit pour provoquer chez elle
une miction involontaire : c'est ainsi qu'à sa première douche,
à ses premiers exercices de gymnastique, et sous l'influence
de la peur à la vue d'un escargot, elle a uriné sous elle.
Le sommeil est profond, mais plaintes en dormant, et souvent
ronflement bruyant.
Organes des sens : la vue paraît assez bonne, M.. reconnaît
les personnes de loin, mais ne distingue pas les couleurs.
L'ouïe parait normale ; M.. aime la musique et le chant, mais
chante horriblement faux. Le goût est peu développé, M..
Description de la malade. 59
mange indistinctement de tout, sans présenter de salacité.
Le toucher est obtus, du reste la main est idiote, la pré-
hension est faible, 111.. laisse tout tomber, ne peut tenir ni
crayon, ni aiguille. L'odorat est assez développé, M.. aime
les odeurs, est flaireuse.
Pas de mouvements involontaires et spasmodiques; grima-
ces de la face presque continuelles mais non saccadées.
Marcelle est réglée, mais l'écoulement ne se produit pas
régulièrement. Le jour même de l'entrée (2 juin), époque appro-
ximative des menstrues, elle a eu à table comme une fai-
blesse, elle n'a pas mangé et on a dû la coucher; le lendemain
on a trouvé deux gouttes de sang sur son linge, et tout s'est
borné la ; le 15 juillet, même indisposition suivie d'un écoule-
ment aussi restreint. (Voir p. 34).
La parole est limitée il des mots mal prononcés, d'une voix
d'homme désagréable. Pas de phrases, quelques verbes à
l'infinitif. Parmi les sons vocaux o, eu, ou et sont données
o ; les labiales et les dentales sont correctes, toutes les Miman-
tes (s, z, cl, sont transformées en ch ; les liquides y compris
le r guttural sont bonnes ; les gutturales sont changées en
dentales, si ce n'est, chose bizarre, quand elles sont suivies du
son r; les autres syllabes complexes sont toutes défigurées.
3° État PSYCHOLCx.tQl'E. L'mte(f/e)tce est très peu déve-
loppée et correspond à cclle d'un enfant de 2 ans. Marcelle
comprend ce qu'on lui dit, se rend compte de ce qui l'entoure,
mais ses perceptions ne sont que sensorielles. La compréhen-
sion est très faible et surtout très laborieuse. L'attention est
apparente mais presque impossible. La réflexion n'existe pas.
L'imitation existe. Quant aux autres opérations intellectuelles,
elles sont tellement rudimentaires, qu'on ne peut en relever
la moindre manifestation. - La mémoire existe, surtout la
mémoire auditive.
Marcelle n'a jamais pu rien apprendre; elle ne sait aucune
lettre, et ne peut pas tenir un crayon; ne connaît aucune
couleur, n'a pas du reste la moindre connaissance des choses
usuelles, à l'exception toutefois de ce qui a rapport à ses
vêtements. r
4" Etat instinctif ET moral. Peureuse, aime la société;
a le sentiment de la propriété, jalouse de ce quilui appartient.
Propre, coquette, ordonnée. Le bien et le mal se com-
fondent avec le permis et le défendu. Très entêtée ; ne fait
que ce qu'elle veut ; se débat, griffe et donne des coups de
30 IDIOTIE MONGOLIENNE.
pieds quand on veut lui faire faire ce qui ne lui plait pas.
Manies bizarres : de sucer le nez d'une de ses compagnes, de
les griffer à la figure. Affectueuse néanmoins, s'attache
vite.
Traitement : Bains, douches, gymnastique, travaux du
ménage, exercices scolaires.
1898. Septembre. 1\I.. fait la suspension aux échelles
convexe et horizontale. Donne bien tous les sons vocaux;
fait quelques petites phrases au moyen des articulations cor-
rectement données. Connaît toutes les voyelles et les trace
d'après modèle. Compte jusqu'à 10. Connaît le rouge, le vert,
le jaune. - Les manies n'ont pas reparu.
Décembre. Fait en gymnastique les mouvements d'en-
semble. Marche le corps droit. Donne sur ordre les guttu-
rales. Connaît et trace d'après modèle les syllabes simples
composées d'un m, ? i, 2 et d'une voyelle, ainsi que leurs
combinaisons en mots. Fait les couvertures dans son dor-
toir, commence à faire son lit. Sait dire la couleur d'un
objet donné. Elle est plus docile.
1899. Mars. Exercices de gymnastique aux haltères et
aux barres à sphères. Stationnaire en lecture et écriture;
fait d'après modèles des 1 et des 2. Quelques mouvements
de colère à l'adresse de ses camarades.
Juin. Suspension aux anneaux et aux barres parallèles.
Sait écrire 1, 2 et 4. La parole est plus libre, M... se mêle
aux conversations.
Septembre. Stationnaire en lecture et en écriture; con-
naît le nom des figures géométriques, les usages du mètre et
du litre. Fait son lit.
Décembre. Connaît deux nouvelles lettres l et 1, lit leurs
combinaisons en syllabes simples et en mots usuels; copie
des mots, saurait écrire d'après modèle n'importe quel mot.
Notion'de nombre jusqu'à concurrence de 5. Impulsions :
casse un carreau, cherche à éteindre le gaz, jette une ser-
viette au feu.- Balaye, essuie, range.
1900. Mars. Sait lire v et ch dans les syllabes simples
et les mots usuels. Compte oralement jusqu'à 30, a la notion
de nombre jusqu'à 10,- Renverse par maladresse une casse-
role de lait, qu'elle avoue avoir voulu boire.- Sait tenir un
passe-lacet et une aiguille à tapisserie, fait le point toute
seule,
Traitement niI : DICO-I'T;D : 1GOGIQU. 31
. Juin. - Sait lire d, f, au, ou, ai et les mots formés de ces élé-
ments. Sait donner un nombre de boules jusqu'à concur-
rence de 22. Pyromanie; a plusieurs fois essayé de toucher
au gaz ; jette une clef dans les cabinets et demande elle-même
qu'on l'attache pour qu'elle ne puisse pas recommencer. -
Deux accidents de gâtisme.
Septembre. Nouvelles manifestations de pyromanie : fait
brûler des chiffons, renverse une lampe allumée sur ses effets ;
jette une chaussure dans les cabinets. En classe, quelques
progrès, écrit sous la dictée les mots qu'elle sait lire : donne
des boules jusqu'à 30. Fait du crochet. Essaye plusieurs
fois de frapper ses compagnes sans raison.
Décembre. - Mouvement de oolère parce qu'on l'a changée
de dortoir, arrache une applique de gaz. A part cela, bon
trimestre. Etat stationnaire en classe, mais on peut de plus
en plus l'occuper aux soins du ménage. Pas d'impulsions sans
motif. Fait des ourlets, et commence à marquer.
1901. Mars. De plus en plus habile aux soins du ménage,
apprend spontanément à ses petites compagnes à s'habiller
et à se nettoyer. Surprise en flagrant délit d'onanisme.
Mat. - Pas la moindre impulsion. En classe connaît les
solides, les usages du blé, du raisin, de la laine, de la soie,
du coton, du bois, du cuir, des principaux métaux et des
unités de mesure. Sait compter jusqu'à 100, connaît les
chiffres. Sait lire et écrire tous les mots formés de syllabes
simples. Dessine toutes les figures géométriques. Fait
des reprises. - Caractère docile; elle n'a plus de caprices.
1902. A Sa sortie de l'Institut médico-pédagogique,
Marcelle est rentrée dans sa famille où, après peu de temps,
elle a été placée chez une dame qui prend quelques pension-
naires aux environs du Bois de Boulogne. Elle a pris de
l'embonpoint. Voici quelques renseignements sur sa situation
à la fin de 1902.
La coloration des joues et du menton persiste mais est
moins accusée qu'autrefois. Les paupières sont moins
souvent collées le matin qu'autrefois. Toutes les dents de
la mâchoire supérieure sont tombées, M... porte un dentier
complet.
La poitrine, assez large, plate, mesure 75 cent. au niveau
des aisselles qui ne présentent qu'un petit nombre (le poils
courts (2 cent.sur 3). Les seins, ont Il cent. de large sur 9 de
haut. Elle est bien membrée : « le buste est resté enfant », dit
32 Imbécillité mongolienne.
son père. Le thorax tranche avec les membres qui sont
développés, " potelés ". Sa taille est due 11"52.
Ses règles auraient été régulières jusqu'à son entrée à
l'Institut, irrégulières durant son séjour, régulières depuis
sa sortie ; elles ont toujours été et sont encore peu abondan-
tes. Pas d'onanisme ni de manifestations génésiques.
Oreilles plutôt collées qu'écartées, très petites : 5 cent. et
demi de hauteur et à peine 3 de largeur, des deux côtés. Hélix
bien ourlé; son extrémité antérieure est brève, de sorte que
la cavité de la conque, assez profonde, n'est pas divisée.
Anthélix un peu saillant, bien fourchu, confondu en bas
avec l'antitragus de dimensions assez réduites ainsi que le
tragus. Le lobule, est très petit (6 à 7mlll, de hauteur),
triangulaire, incisure étroite, assez longue s'effile en bas,
se confond avec la joue. fllrésie très prononcée du conduit audi-
tif ; jamais d'écoulement. Ouïe fine. (Oreilles mongoliennes).
Fi{J. 1.
Évolution physique.
33
Le caractère, "resté enfant" s'est amélioré. Les crises d'en-
têtement sont moins fréquentes et moins longues. Marc...
n'est plus violente, ni coléreuse; elle n'est pas menteuse, n'a
plus eu d'impulsions à détruire, à incendier, à voler. La
mémoire est bonne, l'affectivité bien développée. La tenue
est très correcte, elle est propre, coquette. Elle aime les tra-
vaux manuels, la musique, danse la polka et le quadrille.
La parole est toujours défectueuse. Elle parle entre ses
dents, beautoltp pour beaucoup, taire pour quatre, crois pour
trois, tafé pour café, etc..
34 Imbécillité MONGOLIENNE. ·
pelouse). Les fonctions digestives s'accomplissent conve-
nablement. Marc... mange de tous les aliments, les viandes
aussi bien que les lé;umes. -Son2meil prolongé avec bruits
pharyngiens, sorte de plaintes plutôt que ronflements.
Règles.
Imbécillité mongolienne. 35
lesquels les organes génitaux ne se développent pas,
les organes génitaux évoluent à peu près régulière-
ment chez les mongoliens. Marcelle, à cet égard, a été
plutôt précoce puisqu'elle a été réglée à dix ans et
demi. Une autre de nos malades, Muni ? âgée de 12
ans, a eu ses règles à 11 ans et d'une façon régulière.
V. L'ensemble des symptômes observés à l'entrée
de Marcelle à l'Institut médico-pédadogique et les
renseignements obtenus sur sa situation antérieure
justifiaient le diagnostic : idiotie mongolienne ; l'a-
mélioration, lente mais progressive, réalisée pendant
son séjour, autorisent à la sortie le diagnostic :
imbécillité mongolienne. L'amélioration, depuis sa
sortie, non seulement s'est maintenue mais semble
encore s'être accentuée. Son observation, malgré l'âge
assez avancé quand on nous l'a confiée, montre que
les mongoliens sont susceptibles d'être amendés (1).
(1) Lois de sa dernière visite le père nous a rappelé qu'un jour, avant l'en-
trée à l'institut médico-pédagogique elle s'était ingéniée à manger des fraise ?
qu'elle avait arrosées de pétrole.
IV.
Epilepsie idiopathique, déchéance, suicide, fracture de
l'atlas et écrasement du bulbe, appendice anormal ;
- "PAR BOURNEVILLE. ETL. E. MOREL.
SOMMAIRE. - Père, nerveux, emporté, alcoolique, mort à 46
ails d'une maladie du foie.- - Un grand oncle maternel
atteint de paraplégie. Renseignements insuffisants sur
la famille. Mère, 46 ans, bien portante. Grand'mère
maternelle morte à 50 ans d'un cancer du pylore. Rien
' de spécial sur le teste de la famille, l'as de consanguinité.
Père deux ans de plus que la mère. -
Conception probablement pendant l'ivresse du père. Gros-
, sesse normale, rien à signaler. - Accouchement à terme,
rien de spécial. Première dent à 10 mois ( ? ¡; dentition
complète à 2 ans ? Début dela marche e21 mois. - Pro-
pre à deux ans. Normal jusqu'à 13 ans.
A t3ans., frayeur vive, brûlure grave; 8 mois plus tard premier
accès; succession régulière des accès toutes les semaines
pendant un an. Cessation des accès pendant un an.
Réapparition hebdomadaire des accès, sans cause appré-
ciable. Diminution de l'intelligence. Répétition des
accès. Crise de violence; suicide. Fracture de l'atlas et
de l'axis. - Mort. - Autopsie : fracture de l'arc antérieur z
de l'atlas, écrasement du bulbe. Appendice iléo-coecal
très long et très volumineux.
Lorth.... (Georges), né à Château Thierry, le 25 mai 1885,
est entré le 11 janvier 1901 à Bicêtre (service de M. BouarrE-
ville). ,
, Renseignements fournis par la mère. Antécédents
héréditaires. PÈRE mort à 46 ans d'une maladie du foie.
Antécédents héréditaires. 37
D'un caractère nerveux et emporté ; buvait avec excès sur-
tout à l'époque de la conception ; ne semble pas avoir eu la
syphilis. Employé dans une Cie d'assurances, il est resté de
longues années dans la même administration, mais avait
cessé tout travail durant les cinq ou six dernières années
de sa vie, à cause de sa maladie du foie. Il n'a jamais eu de
migraine, ni de convulsions. Son père, est mort à 40 ans,
on ne sait de quoi : les renseignements sont insuffisants.
Sa mère est morte à 85 ans, " usée", elle n'était ni démente
ni paralytique. Pas de renseignements sur les grands
parents tant paternels que maternels; toutefois, un frère de
la grand'mère avait une " paralysie des jambes". Ni frère,
ni sceur. - Il ne semble pas qu'il y ait eu dans la famille
d'aliénés, ou d'épileptiques, etc..
MÈRE, 46 ans, pas de convulsions, pas de chorée, a toujours
été nerveuse. Pas de céphalagie, ni de migraines. Son
père, qui était sobre, s'est tué accidentellement dans une
chute de montagne à l'âge de 60 ans. Sa mère est morte
vers 50 ans, d'un cancer du pylore. Les grands parents
paternels et maternels sont tous morts très vieux, sans avoir
jamais présenté d'accidents nerveux.
Du côté paternel, trois oncles et trois tantes sur lesquels
les renseignements manquent ; leurs enfants qui vivent encore
n'auraient pas eu de convulsions. Du côté maternel, un
seul oncle, bien portant. Un frère, 45 ans, hospitalisé à
Bicêlre. Une saur. 50 ans, en bonne santé, mariée, mère
de trois enfants qui n'ont jamais eu de convulsions.
Pas de consanguinité ; le père avait deux ans de plus que
la mère.
Douze enfants : 1° fille de 21 ans, pas de convulsions ;
2° garçon, 20 ans, pas de convulsions , 3° fille, morte à dix
mois de lluxion de poitrine. ; 4° Noire malade; - 5" gar-
çon de 14 ans ; 6- garçon, 13 ans ; 7o fille, 12 ans ;
8° fille, 11 ans, ; 9- fille, 10 ans ; 10° fille, 9 ans : 110
fille, 8 ans; 12° fille, morte il 3 ans de rougeole, compliquée
de broncho-pneumonie : Aucun d'eux n'aurait eu de convul-
sions.
Antécédents personnels. Conception. La mère était en par-
faite santé; par contre, le père s'adonnait à la boisson et la
mère (. croit que la conception a eu lieu pendant l'ivresse du
38 ' Antécédents personnels.
père". La grossesse fut bonne au début; ni coups, ni chute
n'en vinrent troubler le cours. Mais quand l'enfant commença
à remuer ( vers le 5° mois ) il se montra beaucoup plus vio-
lent que les trois enfants qui l'avaient précédé et que les
huit qui suivirent. accouchement à terme ; présentation
du sommet. Rien de spécial à noter.
A la naissance, bon aspect de l'enfant qui est immédiate-
ment envoyé en nourrice, et nourri au sein. La première
dent semble avoir percé vers dix mois; à deux ans la denti-
tion était complète. L'enfant fit ses premiers pas à 11 mois,
et marcha définitivement vers 14 mois. Vers deux ans, il
devint propre, et commença a parler. A 5 ans, il eut la rou-
geole, ce fut la seule maladie infectieuse qu'il eut; de même,
il n'eut ni dartres, ni suppurations de l'oreille, ni blépharite,
ni conjonctivite, ni adénites cervicales.
Jusqu'il 13 ans, son développement physique et intellec-
tuel fut absolument normal; il n'avait jamais eu la moindre
convulsion ; jamais un mal de tête, jamais un étourdissement.
Studieux et appliqué, il avait obtenu à 11 ans son certificat
d'études.
A 12 ans, un accident assez particulier lui causa une
frayeur vive qui provoqua l'apparition de symptômes ner-
veux que rien ne pouvait faire pressentir. L'enfant avait mis
dans la poche de son pantalon, une grande quantité d'amor-
ces au fulminate ; la grande chaleur qu'il faisait, ou le heurt
d'un petit couteau qui se trouvait dans la poche, détermina
l'éclatement des amorces qui mirent le feu aux vêtements.
Affolé, l'enfant se sauva dans le jardin, en poussant des cris
d'épouvante, et tout environné de flammes. Quand on le
secourut, on vit qu'il avait la main et la cuisse droites profon-
dément brûlées. Il dut rester alité pendant six semaines,
avec une grosse fièvre, mais pas de délire. Huit mois plus
tard, à 13 ans, il eut un premier accès. L'enfant était dans la
maison de ses parents ; on le vit pâlir et tomber, sans jeter
un cri; ses quatre membres étaient rigides " on ne put lui
desserrer les doigts". Pouce fléchi dans la paume, perte com-
plète de connaissance, pas d'émission d'urine, pas de mor-
sure de la langue. Stertor consécutif à l'accès. Le môme jour,
deux autres accès ; puis rémission de dix jours, nouvel accès ;
nouvelle rémission de quinze jours, et série d'accès. Après
quoi les séries d'accès se répètent chaque semaine, pendant
un an, pour cesser complètement pendant toute la l'Le année.
Durant cette période, la rémission a été complète, il n'y a
pas eu le moindre vertige. A 15 ans, les accès réapparaisse71 £
Epilepsie idiopathique. 39
sans qu'on relève de cause provocatrice. Ces accès différent
un peu des précédents. La chute s'accompagne d'un cri,
l'enfant d'abord pâle, est ensuite cyanose ; il émet des uri-
nes; écume, entre en stertor, puis s'endort pendant cinq ou
six minutes. Les accès reviennent parsérie,au maximum de dix
en 21 heures. On enregistre une série toutes les semaines.
L'état de l'enfant avant et après la série d'accès reste à peu
près le même, pendant un an, Une fois cependant, l'enfant
dit à sa mère : "je sens que je vais me trouver mal". Une
autre fois il dit : "cela me chauffe dans la tète, je vois trou-
ble, je vois rougie ". Il avait des accès tant de nuit que de
jour, mais les accès venaient surtout le jour, il tombait
de tous côtés, se faisant des bosses; il ne se fit jamais de
blessures sérieuses.
Au bout d'un an, son intelligence diminua, ainsi que son
goût pour le travail. Par contre, il resta affectueux comme
par le passé; raisonnant juste, appréciant le bien et le mal,
« il avait, dit sa mère, tout son moral, mais pas toute son
intelligence ».
On le conduisit successivement à la consultation de
Broussais, de St-Antoine, où le Dr G. Ballet le traita pendant
dix mois. Mais le bromure et les douches, qu'on avait ordonnés,
ne produisant pas d'amélioration, et l'intelligence de l'enfant
continuant à décroitre, les parents se décident à le placer
et il entre à Bicêtre le 11 janvier 1901.
État actuel. L'enfant est un peu maigre, mais bien con-
formé ; à ce point de vue, il est au-dessus de la moyenne. Sa
physionomie est ouverte, avec un peu d'abattement cepen-
dant. - Les cheveux châtains sont bien implantés ; il n'y a ni
épi, ni cicatrices dans le cuir chevelu. -Le crâne est allongé
très légèrement plagiocéphale ; les bosses frontales sont net-
tement dessinées, le front est bas. Le visage est ovale et ne
présente ni cicatrices, ni malformations. - Les yeux sont nor-
maux, les pupilles réagissent à la lumière et à l'accommoda-
tion. -Le ne : est aquilin. -La bouche est un peu grande. Les
tenures sont épaisses et sensuelles.-Le voile du palais, la voûte
palatine, la langue, les amygdales sont normaux. Le men-
ton, rond, est bien dessiné. -Les oreilles n'offrent rien de
particulier, sauf qu'elles sont volumineuses.
Le cou mesure 0,n 35 de circonférence ; le corps thyroïde est
perceptible. Les membres supérieurs et inférieurs sont
bien musclés et n'offrent rien à signaler. Pas d'onycophagie
Les réflexes sont normaux, peut-être un peu exagères. Le
'40 MÉLANCOLIE, EXCITATION
thorax et l'abdomen ne présentent aucune malformation con-
génitale ou acquise. L'auscultation du ccetcret des'poumons
montre la-parfaite intégrité de ces organes. Pas de modifica-
tion de la sensibilité.
A son entrée dans le service, le malade a plutôt une tem-
pérature un peu basse (Voir le tableau). Dans ses urines ni
sucre, ni albumine. Il pèse 53 kilog., mesure t lU 60 ; et donne
au dynamomètre une pression, de 28 à droite et 23 à gauche.
Organes génitaux et puberté. Lèvre supérieure, léger
duvet brun; lèvre inférieure, joues, menton, glabres.
Aisselles, petite touffe de poils bruns de 2 à 3 centimètres.
Thorax, ventre, fesses, glabres. Pénil abondamment
couvert de poils entourant la verge, bruns de 4 à 5 centimètres
de longueur. Verge : 7 centimètres de longueur sur 6 1/2 de
circonférence. Les testicules, de la dimension d'un oeuf de
pigeon,.sont descendus dans les bourses. Périnée, quelques
poils roux. Anus normal. Les bras, les avant-bras, les cuisses
et les jambes sont recouverts d'un léger duvet.
Dès les premiers jours de son admission, l'enfant se
montra sombre, impressionnable, irascible. Le 16 janvier,
cinq jours après son arrivée, il est en proie à une agitation
extraordinaire; sur une simle observation de l'instituteur il
entre en fureur et s'empare d'un lourd encrier de faïence
pour le jeter à la tête de son maître. Un infirmier lui retient
la main, maîtrise ses mouvements et le calme un peu. L'enfant
est alors placé dans une cellule sombre et éloignée de tout
bruit ; mais à peine la porte est-elle refermée, qu'il brise deux
vitres épaisses avec ses sandales et entre de nouveau en
fureur; on doit alors le conduire dans une cellule capitonnée
et lui mettre le manchon. Peu à peu sa fureur s'atténua, mais
vers cinq du soir (c'est-à-dire deux heures après le début de
sa crise) il a un accès; à sept heures nouvel accès; dans la
nuit il n'a pas moins de quinze accès. Vers le matin du 17 i
janvier le calme revient. L'enfant est alors conduit à l'infir-
merie du service, et mis en observation toute spéciale.
Sous l'influence de l'élixir polybromuré dont il prend
jusqu'à cinq cuillerées par jour (10 gr.) son état ne tarde pas à
s'améliorer, les crises de violence et les accès s'espacent ;
mais l'intelligence s'affaiblit de plus en plus; la parole devient
traînante, le malade entre'en déchéance. Il se promène, la par-
tie supérieure penchée en avant et la tête baissée ; il marche
à grands pas irréguliers, le jarret tendu, les jambes écar-
tées, la pointe du pied frappant le sol avant la plante. Peu
expansif, il ne parle que lorsqu'on lui adresse directement la
DÉCHÉANCE ; SUICIDE. 41
parole ; ses réponses sont pénibles, lentes à venir, exprimées
sur un ton trainant, monotone, avec des syllabes mal arti-
culées. Il mange indifférement tous les aliments, sans préfé-
rence aucune pour l'un ou pour l'autre, et ne témoigne
d'appétence que pour le vin. Du reste ses fonctions digestives
s'accomplissent dans de bonnes conditions ; et le sommeil
serait bon si l'enfant ne se livrait la nuit à l'onanisme. Ses
pratiques sont solitaires, il ne s'est jamais adonné à des
attouchements sur d'autres malades. Sa tenue est convenable;
malgré sa déchéance intellectuelle, il procède à sa toilette
assez spontanément; s'habille et se déshabille seul. Mais son
caractère se modifie de plus en plus; il est avant tout très
variable, tel jour il obéit sans répliquer aux ordres de son
maître, tel autre jour il ne se soumet qu'à regret et
manifeste son mécontentement par des paroles grossières. Il
évite de jouer ou d'échanger une conversation avec ses
camarades, supporte une plaisanterie mais ne la rend pas.
Enfin il se plaint de céphalée pénible, fréquente, mais très
passagère.
Ses accès, très rapprochés pendant le mois de janvier, vont
en s'espaçant pendant les mois de février et mars, comme on
peut le voir sur le tableau de la page ! i3 ; mais les vertiges qui
n'avaient pas alterné jusqu'ici avec les accès, se montrent à
leur tour.
Bientôt l'enfant tombe dans une période de tristesse pro-
fonde, dont il ne sort guère qu'en classe où il montre quel-
que goût pour l'arithmétique et les exercices de mémoire;
sorti de classe il redevient taciturne et refuse de participer
aux jeux des autres enfants.
Le 23 avril, à cinq heures de l'après-midi, trompant la sur-
veillance de l'entourage il se suicide, dans les conditions sui-
vantes : Ce jour-là, l'enfant montra, dès midi, une agitation
inaccoutumée, demandant du papier pour écrire à sa mère,
échangeant quelques paroles avec l'infirmier de service, et
contrairement à ses habitudes jouant à la balle. De temps à .
autre, il allait à la grille de la cour de récréation, pour y
guetter sa mère, qui, disait-il, allait venir lui souhaiter sa fête.
A un moment donné, profitant de l'éloignement de l'infir-
mier, alors à l'autre extrémité de la cour, il enfonça la porte
des ateliers. monta précipitamment au premier étage, ouvrit
une fenêtre et se jeta dans le vide. Il tomba d'une hauteur de
quatre mètres sur la terre battue et resta immobile, étendu
sur le dos. Il respirait encore, mais à peine, et son pouls
était imperceptible. Instantanément son visage s'était cyanose
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902.. 3bis
42 EPILEPSIE idiopathique.
et du sang coulait par sa narine droite. On le porta douce-
ment à l'infirmerie pour lui faire une injection de caféine, la
respiration artificielle et les tractions rythmées de la langue :
tout fut inutile, il mourut quatre à cinq minutes après l'acci-
dent.
Température à l'entrée
Fracture DE l'atlas; écrasement DU BULBE. 43
Tableau des accès et des vertiges.
44 " " Appendice anormal.
des circonvolutions bien nourries avec de nombreux plis de
passage.
Des deux côtés, la couche optique, le corps strié, le ven-
tricule latéral sont normaux. - Corps calleux volumineux.
De nombreuses coupes pratiquées sur l'hémisphère ne font
découvrir aucun foyer hémorragique.
L'autre hémisphère, conservé pour examen histologique,
parait macroscopiquement bien développé.
Cou. Corps thyroïde normal, gros. Thymus encore
assez volumineux.
THORAX. - Rien à noter aux poumons ; les plèvres sont
saines et ne présentent pas de traces d'inllammation ancienne
ou récente. Le coeur est mou et gras; la face antérieure
de l'éjlicarde présente plusieurs petites taches laiteuses. Le
myocarde, les valvules sont sains. Le trou de Bolal est
oblitéré. A la face profonde de la crosse de l'aorte, on note
quelques plaques d'aortite, qui descendent jusqu'à un centi-
mètre au-dessus de l'appareil sigmoïdien de l'orifice aorti-
que.
Abdomen. Le foie, très volumineux, possède un lobe
gauche extrêmement développé qui s'avance dansl'hypochon-
dre gauche jusqu'à la rate ; il est normal et sa coupe ne
montre aucune lésion macroscopique. L'estomac et les
intestins, très distendus par les gaz. , sont normaux. La
rate, très volumineuse, est crénelée sur son bord antérieur ;
son bord postérieur présente aussi quelques traces de lobula-
tion ; sa consistance et son aspect sont normaux. Les reins
sont très congestionnés, volumineux et lourds. Ils se décor-
tiquent sans dilliculté, la coupe ne montre que leur état
d'hypérémic.
. Le ececuttt et l'appendice sont assez particuliers pour
mériter une description. Le coecum très dilaté, ne contient
ni vers intestinaux, ni corps étrangers ; l'iléon s'y abouche
normalement; l'appendice vermicuhiire semble manquer.
En soulevant le fond du coecum pour renverser en haut
cet organe et rechercher si l'appendice est en situation
postérieure, on est arrêté par un méso très court limitant
le renversement ; il n'y a pour ainsi dire pas de fossette
rétro-coeoale. Après avoir désinséré la racine du mésocolon
ascendant et découvert la face postérieure du coecum, on
.voit enfin l'appendice. Il est énorme. Il prend naissance à la
EPILEPSIE idiopathique. 45
face postérieure du caecum, à 3 cent. du fond de l'organe,
décrit une courbe ouverte en dehors, longe ainsi le bord
postéro- interne du colon ascendant et se termine à un cent.
au-dessous du pôle inférieur du rein, sans prendre connexion
avec cet organe. Sur toute sa longueur il est accolé et adhé-
rent au coecum, sauf son dernier centimètre qui est libre. Sa
longueur est de vingt centimètres. A l'origine, il est plat et
mesure 8 millimètres de diamètre ; vers sa partie moyenne
il est cylindrique et mesure 12 millimètres de diamètre. Ses
dix derniers centimètres sont régulièrement calibrés et ne
mesurent plus que 6 millimètres de diamètre. Cet appendice'
ne contient aucun corps étranger et ne présente aucune
trace d'inflammation ancienne ou récente.
Poids des organes.
46 Hypertrophie DES glandes.
touchée la première, et tout d'abord, elle seule est
touchée; sous l'influence d'accès d'abord espacés,
puis répétés, puis sériés, l'intelligence baisse; mais
le moral n'a encore subi aucune modification.
Alors surviennent, des vertiges qui alternent avec
les accès ; en quinze jours l'enfant n'a pas moins de
108 accès ; à ce moment son caractère change : d'affec-
tueux il devient sournois, hargneux, il a clos crises de
violence ; son intelligence baisse de plus en plus, la
déchéance s'accentue avec rapidité; la sphère morale
se prend à son tour : l'enfant se suicide, deux ans
après son premier accès. L'hérédité, dans ce cas
est peu chargée.
II. Les autres particularités, clignes de remarque,
nous ont été révélées par l'autopsie. Nous notons
l'extrême rareté des fractures de l'atlas et de l'axis,
qui nécessitent pour se produire une chute sur l'occi-
put, rarement réalisée en dehors des conditions expé-
rimentalcs. Dans notre cas, la mort a été immédiate
et due à la compression du bulbe par l'apophyse odon-
toïde détachée, phénomène semblable à celui qui se
produit dans certains cas de pendaison.
III. Nous avons été frappé par le développement
extraordinaire des appareils glandulaires du sujet
et par les caractères foetaux que ses grosses glandes
avaient conservé. Son foie pèse 1850 gr., et le lobe
gauche y est prédominant. Sa rate pèse 250 gr., et
ses bords crénelés, attestent la lobulation primitive
de l'organe. Le corps thyroïde est volumineux et
pèse 18 gr., ce qui est au-dessus de la moyenne pour
un enfant de quinze ans; le thymus n'a pas encore
subi de régression ; les reins pèsent respectivement
170 et 180 gr.
IV. Enfin, signalons la longueur extraordinaire de
Anomalie DE l'appendice. 47 7
l'appendice iléo-coecal. Quoiqu'on en ait signalé de
plus longs encore (Lannclonuc, 22 centimètres, Cru-
veilhier, 23 centimètres) il n'en demeure pas moins
qu'un appcndice de 20 cent. est exceptionnel. Excep-
tionnel aussi est son siège en situation postérieure,
intérieurement appliqué contre la paroi colique. Enfin
il est très rare de voir l'appendice se détacher de la
paroi postérieure du coecum : généralement les appen-
dices postérieurs sont tout au moins internes tt leur
origine. S'il est exact que la situation rétrocolique de
l'appendice prédispose à l'appendicite, comme l'é-
crivent des auteurs récents, nous pouvons, pièce en
main, conclure la gravité de cette forme; la situation
de l'appendice, la brièveté du mésocolon ascendant
sont toutes conditions défavorables à la recherche de
l'appendice, et même it la découverte d'un foyer péri-
appendiculaire de suppuration.
V.
Action de l'alcoolisme sur la production de l'idiotie et
. de l'épilepsie ;
Par nOURl\'E\'ILI.E.
Le» médecins disent, quand on est ivre,
Que de sa femme on se doit abstenir
Et que, dans cet état, il ne peut provenir
Que des enfants sourds et qui ne sauraient vivre.
. (MOLIÈl1E : l'Ampllytl'iol1.)
Aux 2.554 cas relevés dans notre statistique de
1900, complétant et résumant nos statistiques anté-
rieurs, nous ajouterons les 156 entrées de 1901 (108
garçons et 48 filles) et les 136 entrées de 1902 (89 gar-
çons et 47 filles), soit un total de 2.846.
Le tableau suivant résumé la situation des pères et
mères de tous ces enfants sous le .rapport des excès
alcooliques et permet d'avoir, d'un coup d'oeil, une
idée exacte du rôle considérable que joue l'alcoo-
lisme dans la production de l'idotie et de l'épilepsie.
Action DE L'ACOOLISME sur l'idiotie. 49
Tableau statistique sur l'alcoolisme.
50 Action DE l'alcoolisme sur l'idiotie..
à des alcooliques, soit pour compléter les renseigne-
ments héréditaires, soit pour tout autre motif, nous
appuyant sur l'histoire même de leurs enfants, nous
leur recommandons d'éviter tout rapport sexuel avec
leur mari en état d'ivresse. 11 en est qui comprennent
l'importance de nos conseils et agissent en consé-
quence..., quand cela est possible. Trop souvent les
malheureuses cèdent sous la menace des coups, ou
sous les coups mêmes.
La lutte contre l'alcoolisme.
Des voeux tendant il la réglementation ou à la suppres-
sion des bouilleurs de cru ont été votés clans un certain
nomhre de départements, notamment le Pas-de-Calais, les
Vosges, la Haute-Loire, la Somme, etc. Divers journaux
ont prêté à M. Combes l'intention cle se préoccuper de
cette grave question et à M. Bouvier de proposer la sup-
presion de ce privilège. En le faisant, ils rendront au pays
un service de premier ordre.
Ainsi que nous l'avons dit souvent, le privilège des
bouilleurs cle cru est l'une des causes les plus sérieuses
de l'appauvrissement de la race, de sa dégénérescence,
et de l'accroissement de la folie. Malheureusement, il est
fort à craindre que l'intérêt électoral ne l'emporte encore
longtemps sur l'intérêt de la santé publique.
C'est à tous ceux qui en ont le souci cle combattre éner-
giquement, non pas pour l'abstinence complète, qui est
un leurre et un non-sens dans un pays, comme la France,
si riche en vignobles, mais contre l'abus des boissons
alcooliques.
Les médecins ne sont plus les seuls il faire campagne.
En effet, dans une très habile réponse à M. Jules Soury,
M. Eugène Fournière rappelle à la fois son rote et celui
du parti socialiste dans la lutte contre l'alcoolisme : .'
« En votant l'augmentation des droits sur l'alcool, je n'ai
pas été seulement fidèle à ma conscience, aux principes de
Lutte contre l'alcoolisme. 51
la moralité générale, j'ai encore obéi au voeu formellement
exprimé par le parti auquel j'appartiens, écrit- il dans la
Revue socialiste d'août 190 ? .
« Oui, M. Soury, « les troupeaux socialistes et collectivistes
de la porcherie contemporaine » ont poussé l'absence d'idéa-
lisme jusqu'à voter, à l'unanimité des GG2 délégués, repré-
sentant environ quatorze cents groupes socialistes, l'ordre
du jour que voici : « Le Congrès, considérant que l'alcoolisme
est un des plus puissants fadeurs de l'asservissement moral
et économique du prolétariat, émet le voeu que les militants,
socialistes le combattent de toutes leurs forces, en attendant
qu'un prochain Congrès prenne contre ce fléau des disposi-
tions cL'ensemble ». Me faut-il aussi vous apprendre, Monsieur,
que les socialistes belges proscrivent l'alcool de la Maison
du Peuple et de leurs coopératives, et ajouter que je connais
quelques-unes de nos coopératives parisiennes, notamment
dans les treizième et quinzième arrondissements, qui ont
suivi cet exemple salutaire ? Puisque le nationalisme existe
il l'état de parti, où sont ses actes dans ce sens, qui est celui
de la santé et de la moralité publiques ? Vous ne pourriez pas
en citer un seul. » .
Si tous ceux qui ont voté le voeu qui précède s'y confor-
ment et font une active propagande contre l'alcoolisme,
d'heureux résultats ne tarderont pas il se produire. Pour
cela, il faut donner soi-même l'exemple, agir sans relâche
et mieux que quiconque le Congrès socialiste est en
mesure de le faire. B.
; VI.
Idiotie complète avec diplégie plus marquée gauche,
- symptomatique de sclérose atrophique 'prédominant^
; dans l'hémisphère droit (circonvolutions et lobule de
l'insula) ; - - ?
PAH : BOURNErILLE m LE11A11tE.
Sommaire. - Père, syndactylie^ - Grand-père paternel,
'- alcoolisme. Grand'mère paternelle, tics. Grand'tante
- paternelle, chorée dans l'enfance, puis affection mentale.
(idées de suicide). - Grand' oncle paternel, affection men-
tale. Mère, symptômes nerveux au cours d'une' fièvre
typhoïde. Gra-nd-pére maternel : syndactylie.- Grande
' mère maternelle, migraines constantes.
Conception et grossesse, rien de particulier. - A ccou'ëhe1nenf
long. Asphyxie à la naissance. Accès de cris. Consul-
sions au dixième jour. Accidents épileptiformes à 11
mois. Paralysie spasmodique prédominant du côté
fauche.. -
Mort par tuberculose pulmonaire succédant à une rougeole;
popneumotho'ax : - -.
Autopsie. Asymétrie du crâne. Persistance des sutures.
Sclérose ah ophicXue foi,n7,int un foyer occupant la partie
moyenne du lobe frontal et la pariétale ascendante, à
gauche. Sclérose atrophique des circonvolutions plus
étendue à droite et intéressant le lobule de l'insula tout
entier. - Tuberculose pÚlmo11aÏ1'e avec pyopneu'¡awtho-'
. rax. Persistance du trou de Botal. - Ectopie testiculaire.
gauche, - - - '
Idiotie complète ; diplégie. 53
Joha... (Edmond), né à la Machine (Vienne), le 11 janvier
.1898, est entré dans le service le 3 avril 1901.
Antécédents héréditaires. [Renseignements fournis le 17
avril 1901 par sa mère). Père, ? 8 ans, rabatteur en fer, tra-
vaille dans une fabriqua de rails de tramway. Pas de convul-
sions, bonne santé dans le jeune âge. Pas de rhumatismes,
ni de chorée, ni de lièvre typhoïde, ni de migraines. Pas de
maladies vénériennes. Pas d'éthylisme, boit un litre de vin
par jour. Caractère doux et affectueux. Le père est syndac-
tyle : il a les 2c et 3° orteils des pieds collés. On ne peut les
écarter. Il n'y aurait pas de palmature.
Famille du père. Père, mort à 91 ans, éthylisme (eau
de vie). Aucun accident nerveux. Mère, 75 ans, a eu un tic
qui consistait en un relèvement brusque du bras gauche.
Caractère calme, sobre. Elle a eu le père du petit malade
alors qu'elle était déjà un peu âgée, elle avait 42 ans et son
mari 57. Aucun renseignement sur les grands parents.
Oncles et tantes paternels et maternels, nul détail. On ne
sait si leurs enfants ont eu des convulsions ou des affections
nerveuses. - Deux soeurs : l'une, 45 ans, pas nerveuse ; a eu
9 enfants dont 3 ou 4 sont morts en bas-âge, on ne sait de quoi.
Les survivants sont normaux. La seconde soeur, 13 ans, s'est
mariée à 17 ans et a eu la chorée peu après son mariage. Elle
est d'un caractère irritable, jaloux, envieux, ombrageux. Elle
a maintenant une affection mentale, consistant en idées noi-
res, idées de suicide : elle veut se jeter par la fenêtre. Cet état
s'aggrave, elle ne peut plus travailler. Elle a eu 2 enfants qui
sont bien portants et n'ont jamais eu de convulsions. Dans le
reste de la famille du père, on ne signale aucune autre tare
morale, intellectuelle et physique, aucun autre cas de dégé-
nérescence.
Mère, 28 ans, ménagère, sobre. Pas de convulsions ; fièvre
typhoïde grave il 12 ans, avec délire pendant plusieurs jours
Pas d'affections cutanées, ni de migraines. Caractère doux,
excellent ménage.
Famille de la mère. Père, 70 ans, bien portant, pas d'é-
thylisme, genu-valgum, syndactylie : 3 orteils médians des
deux pieds collés. Mère, 48 ans, bien portante. Migraineuse,
elle est obligée de se coucher à chaque migraine. Pas de
convulsions dans l'enfance. Aucune maladie infectieuse.
54 Antécédents PERSONNELS.
Gt'and-pére et grand'mère paternels, morts jeunes.
Grand-père maternel, mort à 75 ans, pas de tare nerveuse.
Grand'mère maternelle, morte à 52 ans d'un cancer abdo-
minal, nerveuse, irritable. Cinq oncles et une tante pater-
nels, un oncle avec 4 enfants bien portants. Un oncle et
une tante maternels en bonne santé. - Trois frères, vivants-,
n'ont pas eu de convulsions. Dans le reste de la famille
de la mère, pas d'autres tares physiques morales et intellec-
tuelles, notamment pas d'autres exemples de malformation
que ceux déjà cités.
Pas de consanguinité. Egalité d'âge des parents.
Notre malade. Enfant unique. - Conception, grossesse,
rien à signaler. La mère supporte très bien la gestation même
pendant les périodes ultimes. Mouvements indolents du foetus
ressentis à 4-5 mois.
Accouchement à terme, présentation du sommet. Durée
du travail, 10 heures. Asphyxie bleue pendant 10 à 15 minutes
et immobilité absolue (frictions énergiques). L'enfant se met
alors à crier et à respirer. Il crie de 10 h. du soir jusqu'au
lendemain 7 h. sans discontinuer. La mère essaie de lui
donner le sein, il ne le prend pas.
Quand l'enfant a eu cessé de crier, il est tombé dans une
sorte de torpeur qui a duré 8 à 10 jours. Premières convulsions
le 10^ jour, elles ont continué 3 jours. Les yeux se convulsaient
en haut. Le bras gauche se contracturait dans la 1/2 flexion
et se levait avec secousses. Le bras droit était immobile.
Comme l'enfant était emmailloté on ne peut rien dire sur ses
membres inférieurs. Pendant cette période de convulsions,
l'enfant ne put prendre le sein : les lèvres ne pouvaient se
rapprocher. Après les convulsions les mouvements auraient
- été sinon abolis du moins diminués dans les membres gau-
ches. Un mois ou deux après, on note de la raideur des
membres, raideur prédominant iL gauche. Main dans la
Ilexion, flexion qui va toujours croissant. La tète se met en
extension et s'incline sur la gauche.
. AU mois, à l'apparition des premières dents, l'enfant ne
cesse de crier nuit et jour. A cette époque également, l'enfant
est pris d'une série de crises : Il devenait violacé, semblait
- sur le point de mourir, ne faisait aucun mouvement. Au bout
de trois minutes, il devenait rouge, puis quelques minutes
après il redevenait normal. La mère a remarqué qu'à la fin
de la crise, l'enfant avait les mêmes secousses musculaires
qu'il avait présentées autrefois (extension et inclinaison de la
Description DU malade. . 55
tête sur la gauche, mouvements de flexion de la main). Ces
crises ont été au nombre de six, réparties sur trois jours.
La raideur des membres de l'enfant va toujours augmentant.
La tête reste constamment un peu inclinée sur la gauche, la
main et l'avant-bras dans une légère flexion, la cuisse dans
une légère flexion sur le bassin, la jambe dans une légère
flexion sur la cuisse.
Première dent à 11 mois, dentition complète à 3 ans.
Parole et marche nulles. L'enfant n'a jamais eu d'accès
de colère. Il a grincé momentanément des dents. Pas d'ona-
nisme, pas de krouomanie.
Digestion. Préhension et mastication nulles, occlusion
de la bouche incomplète. Bave abondante. L'enfant tette
en mangeant. Ne suce ni ses doigts, ni son linge. - Ni rumi-
nation, ni vomissements, selles régulières, gâtisme nuit et
jour. Helminthiase.
Sensibilité générale. Sensible h la douleur, ne semble
pas avoir de notion du froid ou du chaud.
Vue : Regard vague et hébété, a du strabisme. Odorat :
Ne flaire pas ses aliments. Goût : nul. Audition :
L'enfant n'est pas sourd mais ne prête aucune attention aux
bruits et sons émis à côté de lui.
Sentiments affectifs : nuls. Ne reconnaît pas son père. Sa
mère dit que son enfant la reconnaissait. Il parait être heu-
reux d'être caressé. Ni étourdissements, ni vertiges, ni
tremblements. Sommeil normal. Aucune manifestation
intellectuelle.
L'enfant n'a eu aucune maladie infectieuse, aucune fièvre
éruptive. Il n'a présenté aucun accident scrofuleux.
Les parents ne savent à quelle cause attribuer la maladie.
Examen de l'enfant. - Étut général médiocre : enfant maigre
et pâle. Physionomie : air hébété. Peau : ni éruption, ni
nævi.
Têle : cheveux châtain foncé, tourbillon, deux épis. Pla-
giocéphalie. Fontanelles soudées. Front bas et triangulaire à
sommet supérieur.
Visage piriforme. Arcades sourcillières peu proéminentes.
Pas de blépharite, cils fournis. Fentes palpébrales grandes.
Orbites peu grandes.
Yeux, strabisme convergent. Mobilité des yeux assez
grande. Iris brun et de couleur uniforme. Pupilles, réllexes
à l'accommodation et à la lumière normaux.
. L'examen fonctionnel de la vision n'a pu être fait : l'enfant
56 IDIOTIE complète ; diplégie.
étant idiot. - Nez petit aquilin, effilé. Lobules échancrés.
Narines ouvertes. Pommettes saillantes, joues volumi-
neuses. Bouche : de direction et de forme normales. Lèvre
inférieure un peu plus volumineuse que la supérieure.
Palais : voûte et voile de forme un peu ogivale.
Dents peu développées, petites, très espacées les unes des
autres. Les 20 dents de lait sont parties. - Menton, en retrait.
Langue normale.
Amygdales, Luette, Pharynx : rien à signaler. Goût ?
Fonctions : l'enfant ne mastique pas mais tette. Il n'avale très
difficilement que de la soupe. Ni vomissement, ni rumina-
tion, ni constipation. Gâtisme nuit et jour.
Oreilles, grandes, 4 centimètres 1/2 de haut sur 4 cent, de
large. Hélix assez large et bien ourlé dans son tiers supérieur,
à peine ourlée dans ses deux tiers inférieurs. L'anthélix est
assez saillant. Tragus et anti-tragus plutôt petits. Incisure
de la conque très large et très courte. Lobule à peu près
nul. Les oreilles sont assez fortement obliques en arrière,
larges en haut rappelant un peu les oreilles de la chauve-
souris.. -
Thorax régulier ; respiration abdominale. Coeur nor-
mal, ainsi que tous les organes abdominaux.
Organes génitaux. - Etat glabre de toutes les régions.-
Verge : 3 cent. de longueur sur 4 de circonférence. Phimosis.
Testicule gauche, gros comme un haricot. Testicule droit, dans
l'anneau ; on arrive à le faire descendre, il est un peu plus
petit.
Traitement : Sirop de fer, douche ; huile de foie de morue.
Exercices de la marche et des jointures. w
Température à l'entrée.
IDIOTIE complète ; diplégie. 57 Î
Les doigts sont légèrement fléchis. Les mouvements provo-
qués de flexion dans les articulations du membre supérieur
sont possibles complétement. Ceux d'extension sont incom-
plets. Les articulations du membre supérieur au palper ne
présentent rien d'anormal. La forme, la longueur des doigts;
des mains, des ongles est régulière; pas d'onychophagie. La
préhension est nulle.
Membres inférieurs. Forme et volume normaux. Cuisse
fléchie sur le bassin, jambe fléchie sur la cuisse, le pied est
en position normale sur la jambe. Orteils, voûte plantaire
normaux. Mouvements volontaires iL peu près nuls, provo-
qués faciles dans la flexion, difficiles dans l'extension.
Réflexes patcllaires et plantaires exagérés. L'exagération est
surtout marquée à gauche. L'enfant est incapable de se tenir
debout. Quand on l'asseoit, son corps tout entier forme une
courbe à concavité gauche. Couché, cette attitude est moins
marquée. L'enfant a beaucoup de peine à se tenir droit dans
le chariot. - Aucune malformation congénitale (Fig. 2).
3 décembre. Abcès du cou, incision, pansement borique.
1902. 23 février. Rougeole : l'enfant est envoyé à l'iso-
lement. Sorti le 25 mars.
Bourneville, Bicêtre, 1112. 4
Fig. 2. Johan.. à 7 ans (1001).
58 Tuberculose ; PNEUDIO-TIiORAX.
17 mai. L'enfant est amené à l'infirmerie. Amaigrissement
considérable, toux. Dyspnée. Diarrhée qui disparait rapide-
ment. Les poumons sont remplis de gros râles ronflants et
sous-crépitants. T. IL 38°.
Les jours suivants, du 18 au 24, la percussion thoracique
dénote de la matité au sommet droit et dans la fosse sous-
épineuse droite; matité également au niveau des régions qui
correspondent aux deux pédicules bronchiques. La sonorité
est peu modifiée iL gauche. Les signes d'auscultation sont les
mêmes que le premier jour.
21 mai. - Dyspnéc, cyanose, signes physiques plus pronon-
cés, râles ronflants et sous-crépitants dans les deux pou-
mons. Traitement, 4 bains sinapisés par jour. 25 et 26,
même état.
26. Soir : cyanose intense. Dyspnée. Toux sèche qui se
produit quand on déplace le petit malade. Signes physiques :
sonorité exagérée dans tout le poumon droit. Diminution de
l'ampliation thoracique du côté droit. Abolition des vibra-
tions. Suppression du murmure respiratoire. Bruits ampl to-
riques, bruit d'airain, respiration amphorique. Pouls 120.
Trait. : oxygène, cataplasmes sinapisés, etc.
Le 27. Mêmes signes physiques et mêmes signes fonction-
nels. Pouls 130. Même traitement. Mort à 6 heures. Poids
après la mort 8 kgr.
Mesures de la tête.
Autopsie ASYMETRIE du crâne. 59
Poids et Taille.
60 Sclérose ATIIOPHIQUE : Crâne.
pariétal. Face interne rien d'anormal. Les sillons de la
méningée moyenne sont bien marqués. Trous nourriciers
nombreux. - Face externe gauche. La bosse pariétale est
moins saillante que la droite bien que les deux pariétaux
semblent être d'égale superficie. Le trou pariétal, normal, est
remplacé par deux petits pertuis, fins comme la pointe d'une
aiguille qui traversent la paroi cranienne très près de la suture
inter-pariétale, à égale distance de la suture coronale et de la
suture lambdoïde. - Face interne gauche : sillons de la
méningée moyenne et trous nourriciers moins nombreux que
du côté opposé. Vus par transparence, les deux pariétaux sont
opaques, sauf dans la région des sutures. On constate de
part et d'autre de la suture interpariétale deux taches claires
de tissu compact sans interposition de tissu spongieux,
taches répondant au 1/3 antérieur de la suture en question.
Ecaille de l'occipital. Face externe. La bosse occipitale
gauche est plus saillante que la bosse occipitale droite.
Face interne. La fosse occipitale gauche est plus profonde
que la droite. La crête interne de l'occipital forme une courbe
très prononcée à concavité gauche. La partie gauche de l'oc-
cipital est plus développée que la partie droite. Pas de trans-
parence ; l'occipital est il peu près uniformément opaque.
Sutures. Les sutures normales existent. II n'y a pas de
synostose. Les sutures, bien dentelées, en particulierlasuture
lambdoïde, ne présentent aucun os wormien.
La partie droite de la suture coronale est plus développée
que la partie gauche. La partie gauche de la suture lambdoide
est plus développée que la partie droite. Le vertex se trouve
sur la suture interpariétale à égale distance du bregma et du
lambda.
/jase du crâne. La base du crâne semble normale. Les
différentes fosses sont régulières ainsi que le trou occipital.
L'apophyse crista-galli est arrondie et épaisse.
Dure-mère épaisse. Adhérences de la dure-mère à la pie-
mère au niveau des lobes pariétaux et des faces internes des
lobes orbitaires. - Pas de tubercules miliaires. - Le sinus
longitudinal est gorgé de sang. La glande pituitaire est
petite et pâle. Les nerfs crâniens, les artères de la base,
les tubercules mamillaires sont symétriques. Le bulbe
et la protubérance sont réguliers. Les olives paraissent
égales. Les pyramides antérieures sont aplaties et offrent une
sorte de petite gouttière ; pas de modification sensible de la
couleur. La glande pinéale n'offre rien de particulier.
62 HÉMISPHÈRE DROIT.
HÉMISPHÈRE DRQIT. 63
Sclérose atrophique : hémisphère gauche. Rb b
Cerveau. Hémisphère gauche. 1° Face interne : La pie-
mère est un peu vascularisée dans la région pariétale. Les
veines sont gorgées de sang. - Au palper foyer d'induration
répondant à la racine de F2 et F3.
Après décortication, ce qui frappe, c'est l'atrophie des
circonvolutions périsylviennes et périrolandiques.. La scis-
sure de Sylvius est normale comme longueur et comme
direction ; elle n'est pas fermée à la partie antérieure mais
fortement entrebaillée, ce qui permet de voir la partie anté-
rieure du lobule de l'insula. Cet écartement est dû à l'atrophie
de la moitié antérieure de la circonvolution d'enceinte de
Sylvius.
Le sillon de Rolando est normal comme direction et comme
coudure. Le sillon inter-pariétal ne présente rien à
signaler ; il en est de même des sillons temporaux et tem-
poro-occipitaux. - La scissure perpendiculaire externe est
très prononcée.
Lobe frontal. Il est coupé à sa partie moyenne, par un foyer
de sclérose atrophique, depuis son bord supérieur jusques et
y compris le bord inférieur de F3. L'atrophie s'étend sur F3
en arrière et sur le cinquième inférieur de FA. La sclérose
intéresse également P A dans toute sa hauteur. Cette circon-
volution est presque lamelliforme. L'opercule rolandique est
mince et atrophié. La région sclérosée comprend deux parties
verticales réunies par une partie horizontale. Entre elles se
trouvent, en apparence à peu près saines, l'extrémité posté-
rieure de I et F2 et les 4/5 supérieurs de FA. Les portions
scléreuses des trois circonvolutions frontales sont en retrait
par rapport aux parties environnantes, saines. En ce qui
concerne PA, l'atrophie porte sur son épaisseur et non sur sa
hauteur, car elle est de niveau avec les régions voisines.
L'extrémité antérieure des trois circonvolutions du lobe fron-
tal ne présente pas de sclérose mais un arrêt de développe-
ment. Le lobule de l'insula a quatre digitations ; ses deux
digitations antérieures sont bien développées et davantage
que les postérieures. Il reçoit un petit pli de passage de TI,
circonvolution très grêle mais ne paraissant pas scléreuse.
Lobe pariétal. Nous avons signalé la sclérose atrophique
très prononcée de la pariétale ascendante. Les pariétales supé-
rieure, I'i, et inférieure, 1'2, sont très incisées et semblent nor-
males ainsi que le lobule du pli courbe.
Lobe temporal. - Nous avons noté déjà un arrêt de
développement de T1 qui prédommine dans les deux tiers
postérieurs. Les autres circonvolutions temporales, sur les
ni) il) Sclérose du LOBULE de l'insula.
deux faces, sont assez bien développées, plus que les circon-
volutions des autres lobes, arrêtées dans leur développement.
Lobe occipital. Circonvolutions très grêles sur ses deux
faces.
2° Face interne. On y retrouve la sclérose atrophique de
la partie moyenne de FI. La partie moyenne et postérieure
cle la circonvolution du corps calleux est arrêtée dans son
développement. La sclérose atrophique de l'extrémité
supérieure de PA se prolonge sur le lobe paracentral qui est
sclérosé et atrophié dans sa moitié postérieure. Tandis que
la scissure calloso-maaginale est peu profonde, la scissure
perpendiculaire externe l'est à un degré prononcé.
Le lobe quadrilatère est très volumineux. Le coin est assez
gros.
Le corps calleux est un peu épais atrophié même, a l'as-
pect gauffré dans sa partie moyenne. Le ventricule latéral,
le corps strié, la couche optique, la corne d'Ammon parais-
sent sains. Le lobe orbitaire n'offre rien d'anormal dans
ses circonvolutions et ses sillons.
Hémisphère DROIT. Face externe. - Vascularisation
prononcée de la pie-mère sur les lobes pariétaux et occipi-
taux, sans engorgement veineux. La sclérose atrophique
verlnicellée a une distribution analogue il celle de l'hémis-
phère gauche, mais, en outre, s'étend à d'autres circonvo-
lutions. Elle intéresse l'extrémité postérieure de F2, le pied
de FA, toute la pariétale ascendante, la partie inférieure et
antérieure de Pa, tout le pli pariétal supérieur, P1, les deux
tiers postérieurs de la première temporale, T1, jusqu'au
prolongement du pli courbe, P C, la partie moyenne de la
deuxième temporale, T2. Le sillon de Rolando, un peu entr'ou-
vert, n'est interrompu par aucun pli de passage.
La scissure de Siili711ts est encore plus béante que sur
l'autre hémisphère. Elle laisso voir une grande partie du
lobule de l'insula. Ce lobule est sclérosé, d'aspect vitreux,
aplati, très dur et presque sans trace de digitations. Les cir-
convolutions voisines des circonvolutions sclérosées sont
arrêtées dans leur développement, les autres ne paraissent
avoir rien de particulier. Le pli fenporo-yrmi.ntrcl,to. est
sclérosé et atrophié à un degré prononcé mais non vermi-
celle (Fig. 3).
Face interne. La première circonvolution frontale, F1,
paraît saine dans toute sa longueur sauf une très petite par-
Tuberculose ; PYO-PNIJU11f0-THORAx, 67
tie correspondant à l'extrémité supérieure de la sclérose de
la face externe. La circonvolution du corps calleux, dans sa
moitié postérieure, est atrophiée, sclérosée, ainsi que la plus
grande partie du lobe paracentral et toute la moitié anté-
rieure du lobe carré. La scissure perpendiculaire interne
est très profonde; la scissure calcarine est peu prononcée.
Le coin, le lobe occipital, la circonvolution de l'hippocam-
pe, la quatrième temporale, T sont assez bien développées.
- Le ventricule latéral, la couche optique, CO, le corps strie,
CS, la corne d'Ammon sont macroscopiquement normaux.
(Fig. 4).
Cou. Larynx, rien. Corps thyroïde peu volumineux
sans lésion apparente. Pas de trace du thymus,
THORAX. - Poumon gauche. Plusieurs noyaux (quatre) de
booncho-pneumonie occupant le lobe inférieur (partie pos-
érieure) ; légère infiltration tuberculeuse du sommet. -
Poumon droit. Avant l'ouverture du thorax on constate la
présence d'air dans la plèvre. Il s'échappe de nombreuses
bulbes par un trou creusé dans le 4" espace intercostal.
Après l'ouverture du thorax, on trouve dans la plèvre un
liquide gangreneux, fétide, couleur chocolat (2 à 3 cuillerées).
Le poumon est d'une couleur verdâtre, recouvert de très peu
de fausses membranes qui semblent être récentes. Ce pou-
mon est creusé au niveau de son lobe moyen et de son lobe
supérieur d'une grosse cauerne ayant tous les caractères d'une
caverne gangreneuse. Cette caverne était très superficielle et
en communication avec la cavité pleurale.
Dans ce même poumon droit, on trouve dans la partie infé-
rieure du lobe inférieur un noyau de broncho-pneumonie.
Le bord antérieur du lobe est atélectasié. - Coeur flasque;
pas de symphyse périoardiaque. Le myocarde n'est pas altéré,
aucune lésion valvulairo. Persistance du trou de Botal.
Audomen. Foie un peu congestionné, vésicule biliaire
rien. - Reins. Se décortiquent facilement. Rien à la coupe.
Estomac, intestins sains. L'appendice mesure 0 08, est libre
et grêle. -- Organes génitaux : ectopie testiculaire droite.
Cause de la mort : Tuberculose pulmonaire. Bi,o7îclto-
pneumonie, Pi/o-pîiettiiolito7,ix. .
68 Idiotie, diplégie : sclérose ATROPHIQUE.
Poids des organes
IDIOTIE, diplégie : sclérose atrophique. 69
Joh... n'a jamais donné aucun signe d'intelligence :
il était atteint d'idiotie complète.
III. Nous n'avons pas à insister sur le caractère de
la diplégie avec contracture : ils étaient classiques
ainsi que le montrent les détails de l'observation.
IV. Le frontal est plus développé à gauche qu'à
droite ; il en est de même de l'occipital correspondant.
Toutes les sutures persistent. Les symptômes con-
convulsifs intéressaient les quatre membres : les
lésions cérébrales existent des deux côtés. Les symp-
tômes convulsifs et la paralysie prédominaient à gau-
che : les lésions cérébrales sont plus étendues plus
profondes sur l'hémisphère droit (Fig. 3 et 4), aussi
bien sur les circonvolutions que sur le lobule de l'in-
sula. Rien, pendant la vie ne pouvait faire croire à
unc méningite et, en effet, à l'autopsie nous n'avons
pas trouvé de lésions macroscopiques des méninges.
VII.
Idiotie microcéphalique, nanisme, main botte ; -)
l'An IIOUI\NE\'n,LK
Depuis longtemps nous avons l'intention de publier un
mémoire sur la main idiote sur laquelle nous avons
maintes fois donné des renseignements dans nos observa-
tions. Différentes circonstances ont retardé cette publica-
tion. Nous en détachons aujourd'hui la description d'une
main-botte observée chez un microcéphale.
Sidney (W.)..., 13 ans. Poids : 24 k. 300; Taille : 1"'28,
au lieu de 1111li2.
Main gauche.
Face supérieure. -- L'index, le médius et l'annulaire
sont assez bien conformés. L'index cependant s'incurve
légèrement vers le médius, surtout dans la phalangette.
Il est à 4 millimètres près aussi long que le médius et de
trois millimètres plus long que l'annulaire. L'annulaire
est dévié vers le bord cubital dans sa phalangine et vers
le bord radial dans sa phalangette (1). Les ongles de ces
trois doigts ne présentent rien de particulier ; ils sont assez
longs, convexes transversalement et un peu cannelés.
L'auriculaire est court; même en lui donnant sa plus
grande extension il arrive à peine il l'articulation de la
phalangine avec la phalangette de l'annulaire. Dans sa
il) De sorte qu'il existe un vide entre le bord cubital de la phalangine du
médius et le bord radial de la phalangine de l'annulaire.
IDIOTIE : MAIN BOTTE.
71
position naturelle, sa phalange suit une direction normale,
la phalangine a une direction en dehors ou cubitale, et la
phalangette une direction en dedans ou radiale; c'est la
phalange et la phalangine qui paraissent le plus courtes ;
la nhalanelte, à part son incurvation, ne présente rien de
particulier. Dans son
ensemble l'auriculaire e
décrit donc une courbe
à concavité radiale et
convexité cubitale (1).
De plus, sa face exter-
ne est renversée nota-
blement en dehors com-
me dans le pied-bot
varus, d'où une infle-
xion de la phalangette
vers la paume de la
main.
Le pouce, qui est
difficilement opposa-
ble, suit la direction
des autres doigts de la
main. Le premier méta-
carpien est long et grê-
le, son extrémité supé-
rieure est saillante ; il
en est de même de la
phalange. La phalan-
gette assez longue, va
s'écartant des autres
doigts. Lorsque le pou-
ce est dans sa position
naturelle, il s'incline vers la paume de la main et sa pha-
lange et sa phalangette forment un angle de 150 degrés
avec la face palmaire. On remarque également chez ce
même doigt une tendance à se fléchir. La phalangette
(1) Il résulte de cette incurvation, un creux entre la phalangine et la pha-
langette de l'auriculaire et de l'annulaire.
Fia. 5 - Main gauche.
7'2 IDIOTIE : MA)N BOTTE.
s'infléchit latéralement, en dehors, sur la phalange,
Pas de saillies musculaires ; atrophie très accentuée
de l'éminence thénard, Les tendons abducteurs et fléchis-
seurs du pouce sont dans un état permanent de légère
contracture qu on arrive
il vaincre facilement.
Face palmaire.
Sur la face palmaire, il
n'y a à signaler que la
dépression qui tient la
place de l'éminence
thénard.
Les mouvements des
trois doigts normaux
(index, médius et annu-
laire ) sont à peu près
tout à fait libres. En
les exerçant passive-
ment, on constate au
début un peu de raideur
qui disparait vite. La
raideur est un peu plus
marquée dans l'articu-
lation des phalangines
avec les phalangettes.
Un peu de raideur à
l'articulation de la pha-
lange avec la phalan-
gette du pouce. Un peu
de raideur également
dans les deux articula-
tions phalangiennes
avec la phalangette de
l'auriculaire.
Main droite.
A la main droite, le pouce, l'index, le médius et l'annu-
laire sont tout à fait normaux. L'auriculaire est absolu-
Fig. 6. - Main droite.
Idiotie : main BOTTE. 73
ment semblable à celui de la main gauche. Il y a un vide
entre les phalangines. du médius et de l'annulaire et un peu
de raideur clans leurs articulations phalangiennes. Les
éminences thénar et hypothénar sont également bien
développées. Les mouvements d'opposition du pouce sont
normaux.
Mensurations.
VIII.
La scoliose myxoedémateuse ;
Par MOUHKEVILLM
Bous ce titre, 1\1. le Dr A. Chipault a fait une commu-
nication intéressante à la Société de Pédiatrie de Paris,
clans la séance cle mars 1902. « Parmi les scolioses symp-
tomatiques, dit-il , il en est une qui semble avoir échappé
à l'attention des orthopédistes et des neurologistes, c'est
la scoliose du myxoedème. » r. Chipault relate ensuite
trois faits : le premier, concernant un garçonnet de 4 ans
1/2, présentant « il un léger degré, l'aspect myxoedéma-
teux ? avec une scoliose il convexité gauche, portant sur la
région dorso-Iombaire...» Le second a trait à une fillette
de 12 ans, atteinte de myu;dcme fruste et de scoliose dor-
sale inférieure ? Le troisième cas est relatif iL un garçon
cle 11 ans, offrant les mêmes affections. L'auteur termine
ainsi :
.1'ai cru devoir vous signaler ces trois cas, parce que, ]]la
connaissance du moins, l'attention n'a pas encore été attirée,
sur la scoliose comme manifestation du mvxH. : clèll1e. J'ai lu
bon nombre de traités et d'études sur la scoliose sans trou-
ver mentionnée cette modalité pathogénique; de même, clans
les descriptions si attentives de malades faites dans les étu-
des médicales sur le et dans le riche dépôt ico-
nographique qui les accompagne, je n'ai rien trouvé non plus
à ce sujet. Quelques documents ont pu m'échapper, ils doi-
vent être rares. Il semble donc que la scoliose ne soit qu'une
complication du myxcedèmc.
SCOLIOSE myxoedémateuse. 75
Contrairement il l'opinion de M. Chipault, les neurolo-
gistes ont signalé les déformations du rachis qui s'obser-
vent non pas à titre de complication exceptionnelle, mais
. au contraire, très fréquemment, dans le myxoedème infan-
tile. Pour le démontrer, il nous suffira d'emprunter quel-
ques citations à nos nombreuses publications sur la cache-
xie pachydermique.
1° La colonne vertébrale de Graf..., au niveau de la base
du thorax, offre une dépression très marquée; lorsque l'en-
fant est debout, il existe il ce niveau un sillon vertical assez
profond pour contenir le doigt. (Compte-rendu du service
des enfants de l31cêtt'e de 188C, p. 14.) .
2° Dans un cas de CI. Routh que nous avons publié en 1886
(p. G11, il est dit qu'il existait « une lordose bien marquée».
3° Dans le cas de Bail que nous avons publié (p. 6n), « la
taille est extrêmement cambrée et l'on pourrait presque pro-
noncer il cet égard le nom de cyphose.» »
/1° Chez l'enfant Pi... (Pauline), « le thorax est déformé
par une déviation du rachis. » (Compte-rendu de 1888, p. 5.)
5° Chez Amélina F..., « la colonne vertébrale est déviée à
la région dorsale ; la convexité, tournée adroite, fait une sail-
lie assez prononcée.» (77jtd., p. 9.)
(;01,' irisa X... : « La courbure dorsale de la colonne verté-
brale est prononcée, le dos est voûté, la poitrine globuleuse.»
(lIJÙ1., p. 14 et 15.)
7o Wat. (Augustine) a le dos courbé; la région lombaire
est excavée. (Comp/I'-rendu de 1889, p. G9.)
8° Le père d'une myxoedémateusc espagnole nous signale
qu' «il existe un peu d'enfoncement de la colonne verté-
brale. » (Ibid. p. 72.)
Dans notre mémoire de 1889 (Ibid., p. 103), nous écri-
vions : Le thorax offre d'ordinaire des déformations por-
tant sur les dernières côtes, déjetées en dehors, et sur la
colonne dorsale plus ou moins déviée. Le dos est voûté...
I" .Iules Deb... : «Les côtes sont saillantes, la base de la poi-
trine est élargie au niveau des fausses côtes qui sont rejetées
en arrière, la partie supérieure du thorax forme une conve-
xité très accusée, surtout au voisinage de la colonne dorsale.
La colonne vertébrale est sinueuse, la portion dorsale forme
16 SCOLIOSE myxoedémateuse.
une convcxitebeaucoup plus prononcée que d'habitude, princi-
palement au niveau des deux tiers supérieurs du thorax. Au-
dessous de cette convexité, on note une ensellure très mar-
quée. De plus, la colonne décrit une légère convexité à gau-
che. (IIu'd., p. 170 ).
IU° et 1 1° La malade, de l'observation II de notre mémoire
de 1890 offrait une lordose très prononcée. (C'olllllte-¡'('¡¡du de
1890, p. 213). Le malade de l'observation VII avait également
une lordose (p. 217).
12" Chez une myxoedémateuse que nous avons observée à
Maçon, « le thorax est élroit et notablement déformé; l'épaule
gauche est plus élevée que la droite, très saillante, ainsi que
la région scapulaire; In colonne dorsale décrit une convexité
à gauche très prononcée, les dernières côtes sont saillantes.
Ces déformations paraissent [dus accentuées lorsque l'on exa-
mine la malade debout. » (Compte-rendu de 9590, p. 21'J).
13° Chez Gang... « la colonne vertébrale forme une stillie
notablement exagérée au niveau de la partie supérieure du
dos. Il existe également une légère convexité à gauche des
vertèbres. L'ensellure est assez accusée, mais n'est pas aussi
exagérée que chez les autres idiots myxoedémateux. L'épaule
gauche est un peu affaisée et la droite relevée. » Compte-
rendu de 1895, p. 188\.
14° « Goss... avait une déformation du rachis et une enscl-
lure très prononcée de la région lombaire.» (<'0)) ! p/e-)'endu
de 189G, p. 51.)
Dans une communication il la Société médicale des /¡()jIÍ-
taux, nous répétions que : « Le thorax offre des déforma-
tions portant sur les dernières côtes, déjetées en dehors et
sur la colonne vertébrale plus ou moins déviée. Le dos
est voûté. )) (7 ? p. 13( ! .)
15° « Le thorax de Marie Bey..., élargi à sa base, est étroit
en haut et se continue presque sans ligne de démarcation
avec le cou élargi jusqu'en bas. Le sternum est projeté en
avant et la pointe de l'appendice xiphoidc proémine assez
l'ortement. Il n'y a pas de chapelet chondro-costal Le thorax
est un peu asymétrique par sa base, les côtes du côté droit
étant comme redressées et refoulées en dehors, tandis que
celles du côté gauche sont bombées. Cette asymétrie du
thorax correspond il une scoliose du rachis, les dernières
vertèbres cervicales et les trois premières dorsales formant
Scoliose myxoedémateuse. 77 7
une légère courbe il concavité tournée à gauche, tandis que
le reste de la colonne dorsale et de la colonne lombaire forme
une courbe marquée à concavité inverse. La concavité en
avant de la partie dorsale de la colonne est un peu exagé-
rée. » (Compte-rendu de 1894, p. 107.1
16o Chez Borj..., « la poitrine est courte, le dos un peu
bombé. Voussure dorso-lombaire de la colonne vertébrale. »
(Ibid., p. 1/iS.)
17° Félicie Tis... : « Le tronc, vu d'arrière, présente une
convexité thoracique très marquée et des déviations de la
colonne vertébrale. Celle-ci offre deux courbures de scoliose,
l'une supérieure, il convexité regardant à droite, l'autre infé-
rieure, à convexité regardant il gauche. La région lombaire
présente une ensellure très prononcée. (Compte-rendu de
1900, p. 32.) (1).
Les observations, maintenant très nombreuses, publiées
par les auteurs, en particulier celles de M. Herthoge
(d'Anvers), nous fourniraient sans doute des renseigne-
ments analogues à ceux qui précèdent.
Dans ses conclusions, M. Chipault dit « que la scoliose
du myxoedème semble se rencontrer surtout dans ses
formes frustes ». Or, tous les cas qui précèdent se rap-
portent à des cas-types de myxoedème infantile. Il ajoute
que « au point de vue thérapeutique, cette scoliose symp-
tomatique demande un traitement mixte : traitement
thyroïdien..... traitement orthopédique (appareil plâtré),
massages et a ff usions chaudes, les seules permises chez
les myxoedémateux. » A cet égard, nous ne partageons
pas l'opinion de M. Chipault. Nous prescrivons il tous nos
myxoedématcux la douche froide en jet en éventail, sur
tout le corps, et nos malades s'en trouvent parfaitement
bien. C'csl un excellent adjuvant du traitement thyroïdien.
Il termine son travail en disant qu' « il y a un réel intérêt
pour le médecin, et surtout pour l'orthopédiste, à songer
au besoin à cette variété, méconnue jusqu'à présent, je
crois, de scoliose symptomatique. » Les cas que nous
(1) On trouvera à la fin de cette observation l'énuniération de nos publi-
('ationssm'tcmyxoedpmeinfantHe.
78 Déformations du rachis.
venons de rappeler sommairement montrent que les défor-
mations cle la colonne vertébrale chez les myxcedémateux
n'ont pas été « méconnues jusqu'à présent ».
1 IX.
Technique pour l'examen des réflexes;
Par CROUZON.
Les réflexes usuels étudiés en clinique sont les réflexes
tendineux, cutanés et pupillaires.
Réflexes tendineux Pour l'étude des réflexes tendineux, il
est utile et presque nécessaire de se servir d'un marteau à
percussion. Ce n'est donc que dans les cas où le marteau fait
défaut qu'on se servira de la percussion avec le bord cubital
de la main, avec les doigts, avec le dos d'un couteau, avec
une cuiller, etc.
Réflexe rotulien. Les positions à donner au malade sont
nombreuses : on peut lui faire croiser les jambes l'une sur
l'autre, on peut le faire asseoir sur le bord d'un lit ou d'une
table, etc. Le meilleur procédé est le suivant : on fait asseoir
le malade sur une chaise, on lui commande d'étendre à moitié
les jambes sur les cuisses en laissant toutefois reposer ses
pieds sur le sol. Les jambes doivent alors former un angle
obtus il 135° avec les cuisses. On conseille au malade de ne
pas se raidir, de laisser ses jambes molles.
On percute alors le tendon rotulien. Le réflexe se perçoit :
a) par le mouvement de propulsion du pied;
b) par la contraction visible du triceps ;
c) en palpant le triceps dont on sentira la contraction
sous la main.
Quand le malade est couché, pour rechercher le réflexe, on
passe la main sous la cuisse du malade, on soulève légère-
ment celle-ci en laissant cependant le membre dans le
relâchement. Si l'on percute alors le tendon, la jambe s'étend
sur la cuisse.
Re/7exe contralateral des adducteurs (P. Marie). Au réflexe
rotulien doit être joint le réflexe contralatéral des adducteurs.
80 Examen des réflexes.
Ce réflexe consiste, en effet, dans uue contraction des adduc-
teurs provoquée par la percussion du tendon rotulien du côté
opposé. On peut le rechercher le malade étant assis ou cou-
ché. e
Si le malade est assis, on lui fait prendre la même position
que pour la recherche du réflexe rotulien en lui faisant z
écarter légèrement les cuisses. On voit alors il chaque per-
cussion du tendon rotulien une adduction légère de la cuisse
du côté opposé. Ce réflexe n'est bien apparent que lorsqu'il
est exagéré.
Si le malade est couché, on place une des deux jambes, la
droite par exemple, en flexion sur la cuisse et la cuisse en
abduction. On percute alors le tendon rotulien gauche en
soulevant légèrement la cuisse du malade, il se produit uue
extension de la jambe gauche et, en même temps, du côté
droit le réflexe contralatéral qui consiste en une adduction
de la cuisse.
Réflexe achillèen. Le réflexe du tendon d'Achille doit être
recherché de la façon suivante : le malade doit être autant
que possible déchaussé. On lui commande : Il mettez-vous il
genoux sur la chaise en me tournant le dos. » On lui conseille
de s'avancer aussi près que possible du dossier de la chaise
et de ne pas raidir ses jambes. On s'assure du relâchement
de ses muscles du mollet en les palpant ou en mobilisant le
pied sur la jambe, on frappe alors clu marteau le tendon
d'Achille : on voit le pied s'étendre sur la jambe, la plante du
pied tendant à passer du plan vertical vers le plan horizontal.
Sans entrer ici dans le séméiologic du réflexe achilléen, nous
ne pouvons mieux mettre sa valeur en relief qu'en signa-
lant sa disparition précoce dans le tabès alors même que
les réflexes rotuliens existent encore (Habinski).
Quand le réflexe est exagéré, la percussion peut faire appa-
raitre le phénomène du pied qui consiste en une série
d'extensions rythmiques et saccadées du pied sur la jambe.
Le clonus du pied peut, du reste, être recherché d'une autre
façon : en faisant étendre complètement le membre du malade
et en cherchant à provoquer la flexion forcée du pied sur la
jambe, le pied s'anime des secousses d'extension rythmiques
et saccadées qui constituent le clonus.
Réflexes du coude et du poignet. - Pour chercher le réflexe
du coude, on place l'avant-bras en demi-flexion sur le bras et
on le soutient de façon à le laisser clans le relâchement. On
Réflexes cutanés. 81
percute le tendon du triceps brachial au-dessus de l'olécràne :
il se produit un mouvement d'extension de l'avant-bras sur
le bras.
Les réflexes du poignet se recherchent aussi, le membre
étant dans le relâchement, la main du malade reposant dans
la main de l'observateur. La percussion se fait alors sur
les tendons du bord radial, du bord cubital, delafacedorsale,
et de la face palmaire du poignet et elle produit la contraction
des muscles correspondant aux tendons percutés.
Réflexe )nn.ssc<o'm. Nous rapprochons des réflexes tendi-
neux le réflexe du masséter. On le produit en percutant direc-
tement le muscle masséter ou mieux de la façon suivante : on
commande au malade d'entrouvrir la bouche sans faire d'effort.
On appuie la lame d'un couteau ou d'un coupe-papier sur les
arcades dentaires inférieures et on percute avec le marteau
la surface de la lame. L'arcade dentaire s'ahaisse sous le
choc, puis est soulevée par la contraction du masséter : c'est
le réflexe.
Réflexes cutanés.
Réflexe plantaire. - On le recherche en chatouillant légère-
ment la plante du pied, (sur son bord externe de préférence)
avec une épingle, une plume, une pointe de crayon, avec
l'ongle. Il faut recommander au malade de se raidir et, au
besoin, aux sujets impressionnables de fermer les yeux.
A l'état normal, les orteils se fléchissent, c'est-à-dire se
rabattent vers la plante du pied ; à l'état pathologique, ils
s'étendent, c'est-à-dire se renversent vers le dos du pied, la
face palmaire des orteils tendant à regarder le plafond.
C'est au gros orteil que se voit le mieux le mouvement
d'extension ou de flexion : c'est donc sur lui que doit se
concentrer l'examen de l'observateur. On devra éviter de
confondre l'extension des orteils, phénomène réflexe indépen-
dant de la volonté, avec les mouvements de défense du pied
d'un malade craintif qui, au moindre attouchement, fléchit
le pied sur la jambe et simule ainsi l'extension des orteils.
Le réflexe plantaire peut être diminué ou aboli et il y a
quelques années c'était le seul point que pouvait éclairer la
recherche de ce réflexe. Sa valeur s'est accrue depuis que
]3abiiisli a fait connaître la séméiologie de l'extension des
orteils : il a montré que le signe signifiait « trouble dans le
système pyramidal » et qu'il est lié le plus souvent à une
8 ? Examen des réflexes.
affection organique du système nerveux : hémiplégies, diplé-
gies, paraplégies, etc. Il fait défaut dans l'hystérie. On voit
donc de quelle importance est sa recherche.
Réflexe cré11wslérie11. On chatouille avec une épingle la
peau de la face interne des cuisses, on voit une élévation du
testicule du côté correspondant. On doit pratiquer cet examen
successivement sur chacune des cuisses pour observer chacun
des réflexes. On peut les provoquer aussi en serrant violem-
ment avec la main, de façon à comprimer les masses muscu-
laires de la face interne de la cuisse au-dessus du genou.
Réflexes abdominal et niga.clridttn. : - Un les recherche
en chatouillant d'une épingle la peau de la paroi abdominale
successivement à droite et à gauche de la ligne médiane, d'a-
bord au-dessous de l'ombilic, puis au niveau de la région
épigastrique. Il se produit du côté excité une contraction du
grand droit, des obliques et du transverse qui fait rentrer
l'abdomen.
U( : f7('xe Imlbo-c<ll'enu'/<.\'. Il est d'un usage plus rare en
clinique : on l'obtient en saisissant le gland entre les doigts
il travers le prépuce, on le comprime légèrement jusqu'à ce
qu'il s'échappe des doigts. On le perçoit en palpant l'urètre
au niveau de la région scroto-périnéale : on sent une con-
traction musculaire due au bulbocacrneux.
Réflexe anal. Il consiste dans la contraction et l'élévation
du sphincter de l'anus sous l'influence du chatouillement, avec
une épingle, de la peau de la région anale. Il importe de donner
au malade une des positions suivantes :
a. Debout le bassin fléchi sur les cuisses, le corps penché
en avant, les jambes éloignées, le malade écartant ses fesses
de ses mains.
b. Couché sur le dos, les jambes en l'air, les fesses écartées.
c. Le malade couché sur le flanc, la jambe de ce côté allon-
gée, l'autre jambe fléchie.
Réflexes pharyngé et pnlpèbral. - Nous joignons ces deux
réflexes aux réflexes cutanés. Le réflexe pharyngé s'obtient
en chatouillant le pharynx avec un tortillon de papier : il
provoque une sensation désagréable de picotement, des nau-
sées et quelquefois des vomissements. Ce réflexe fait défaut
dans l'hystérie, dans les paralysies pharyngées bulbaires ou
Réflexes PL'PILLAIBES. 83
pseudo-butbaires. Le réflexe lJalpéb1'a1 est la réaction d'oc-
clusion de la paupière qui se produit quand on touche du
doigt la cornée. Ce réflexe disparait dans le sommeil chloro-
formique, dans le coma épileptique, dans le coma apoplec-
tique, etc.
Réflexes pupillaires.
Il existe de nombreux réflexes pupillaires : à la lumière,
ex l'accommodation, à la douleur, à l'effort d'occlusion des
paupières, etc. Le réflexe lumineux est le seul important en
clinique : son absence est signe de tabès, de paralysie géné-
rale ou d'affection syphilitique du système nerveux.
Il doit être recherché de deux façons :
1° dans l'obscurité : on place a côté de l'oeil il examiner un
rat ou une bougie allumée. On fait avec la main un écran
interceptant la lumière entre et la source de lumière. *
On éclaire à volonté l'oeil en retirant la main : la pupille reçoit
la lumière, la contraction se produit. Cet examen nécessite
une chambre noire. On pourra cependant se contenter d'une
demi-obscurité que l'on obtiendra en couvrant la tête du
malade d'nn drap ou d'une alexe.
2° à la lumière du jour.
a) Examen direct : on ferme, les deux paupières et on ouvre
brusquement la paupière de l'oeil examiné en la soulevant
avec le pouce : la pupille se contracte ; on referme cette pau-
pière et on examine l'oeil opposé de la même façon.
b) Examen consensuel. On maintient ouvert l'oeil à exa-
miner, le droit par exemple : on ferme l'oeil gauche. Puis
brusquement on soulève la paupière de l'oeil gauche en main-
tenant l'attention fixée sur l'ceil droit. On voit alors apparaitre
la contraction de la pupille droite en même temps que se
produit la contraction de la pupille gauche par l'éclairage
direct. La réaction de la pupille droite est dite consensuelle
alors que celle de gauche est dite directe.
Histoire complète d'un cas d'idiotie myxoedémateuse
(D'u/.roedème infantile).
(1890-1903).
PATtBOURÎVEVItLE.
Cette observation concerne un malade, De])....
(Jules), que nous avons suivi pendant douze ans.
Nous avons publié ses antécédents et sa description
clinique dans les Archives de neurologie (1890, t. XVI,
p. 217) et dans le Compte-rendu de notre service
pour 1889 (p. 172). Puis, .en 1895, dans une commu-
nication au Congrès des aliénistes et des neurologistes
'(session de Bordeaux), intitulée : Trois cas d'idiotie
moedëmateuse traités par l'ingestion de glande
thyroïde, nous avons exposé les effets du traitement
thyroïdien chez ce malade. Deb... est mort au com-
mencement de 1902. Avant de résumer les particula-
rités- qu'il a présentées de 1896 à sa mort, de relater
son autopsie, de donner la description de son sque-
lette, l'examen histologique du cerveau, etc., nous
croyons devoir reproduire nos deux publications que
nous venons de rappeler. De la sorte, le lecteur aura
l'histoire complète de l'un des plus beaux exemples
de myxoedème infantile que l'on puisse rencontrer.
Sommaire. Père tuberculeux ( ? ). Oncle maternel para-
lysé, aliéné et sujet probablement à des accès d'épilepsie.
IIJlOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 85
Frère et soeur morts tuberculeux. - Soeur strabique à
la suite de convulsions de l'enfance, morte tuberculeuse.
Renseignements incomplets sur les antécédents du mala-
de. Marche il dix-huit mois. Propre de bonne heu-
re. Arrêt de développement, bouffissure et épaississe-
ment Ù partir de trois ans. Etat du malade au 1er février
1890. Lésions scrofuleuses et 1'ach.i.tiques. -.9b.sence de
la glande thyroïde; symptômes classiques de l'idiotie 111 ! J-
.ïoed ? m.ateuse. pseudo-lipomes ; persistance de la fontanel-
le antérieure ; hernie ombilicale ; eczéma; arrêt de déve-
loppement physique et intellectuel; parole, voix, etc.
1893-1894. Julep avec extrait de glande thyroïde et injections
sous-cutanées de liquide thyroïdien : résultats négatifs.
1895. Ingestion stomacale de glande thyroïde de 111outon.-
Amélioration : Elévation de la température;- diminution
de poids; phénomènes divers dus au traitement;- mo-
difications de la voix, accroissement de la taille, etc., etc.
1896. Dentition complète ; carie dentaire.
1897-190). Evolution il peu près nulle de la puberté. Même
étal général.
1902. Hydropisie pleurale et pèricardique. Cyanose subite :
mort ; abaissement considérable de la température. T.
après la mort- Rigidité cadavérique.
AUTOPSIE ? Persistance de la suture métopique. Abs-
ence complète de la glande thyroïde. Hydropisie de la
plèvre etdu péricarde. -.9 théronze. -Pet its Icstes rénaux.
Description du squelelle. - .1nalyse chimique de la peau,
Examen histologique du cerveau. Réflexions.
Debar... (Jules,) né il la Vcntic (Pas-de-Calais), le G octobre
1805, est entré le 23 février dans mon service, a Bicêtre. Ce
malade nous a été envoyé par M. le Dr Moizard, médecin de
l'hôpital Tenon, qui l'avait reçu dans ses salles en même
temps que sa soeur, atteinte d'une pleurésie. C'est elle qui a
fourni à notre ancien interne, M. Camescasse, les renseigne-
ments suivants sur sa famille.
Antécédents. Père, ouvrier dans une fabrique de toile,
sujet iL des hémoptysies ; grand, fort, brun, sobre, d'un carac-
tère doux, n'ayant pas d'accidents nerveux. Il est mort en
1873, à l'âge do quarante-cinq ans, d'une hémorrhagie (proba-
8H Idiotie myxoedémateuse.
blcment une hémoptysie), en deux heures. [Père, mort vers
quatre-vingts ans. Mère, pas de renseignements. Deux
soeurs seulement, bien portantes ainsi que leurs enfants (un
garçon et trois filles).]
Mère, morte en 1877, à quarante-quatre ans, d'une
maladie d'intestins, journalière à la campagne, sobre, sujette
il des maux de tète. Elle était d'une taille moyenne, forte,
brune et d'un caractère très doux. [Père et mère, aucun ren-
seignement. Un frère, mort il soixante-six ans, était para-
lysé. Il avait une bosse dans le dos, consécutive à un effort
et serait resté alité pendant douze ans, de quarante-six il
cinquante-huit ; puis il a pu marcher jusqu'à sa mort. Il avait
des idées tristes, croyait toujours qu'il allait mourir, il était
sujet à des attaques de nerfs avec chute, dans lesquelles il se
raidissait, se débattait, et suivies d'un moment d'hébétude.
Parfois, il avait une mousse blanche il la bouche. Il s'était
marié avec une femme plus âgée que lui de vingt-neuf ans,
dont il n'a pas eu d'enfants. - l'as de soeur. Aucun autre
détail.] .
Pas de consanguinité (père du Pas-de-Calais, mère de la
Manche). Inégalité d'âge d'environ deux ans.
Cinq enfants : 1° Garçon, grand, fort, intelligent, mort a
vingt-sept ans d'une affection pulmonaire aiguë, probable-
ment de nature tuberculeuse. Il s'était marié et avait eu un
enfant mort à deux ou trois mois;
2° Fille morte à dix ans, après quinze jours de maladie con-
sécutive il une peur occasionnée par la vue de la chute de sa
soeur dans l'eau. Elle était grande et bien constituée pour
son âge ; .
3° Pille, celle qui nous renseigne âgée de trente-sept
ans, d'une taille au-dessus de la moyenne ( t70), paraissant
assez forte, d'une physionomie régulière, plutôt agréable.
Elle a eu dans son enfance des convulsions qui ont laissé un
léger strabisme. Elle a eu une fièvre typhoïde à deux ans, en
même temps que son père et trois de ses frères ou soeurs.
Jusqu'à vingt-huit ans, elle a travaillé dans les champs, puis,
pendant trois ou quatre mois, elle a promené son frère dans
les foires avec des saltimbanques. Durant ces périgrinalious,
elle a contracté un rhumatisme articulaire pour lequel elle a
été soignée à l'hôpital de Lille. Ensuite, elle s'est placée
comme servante dans la même ville jusqu'en 1888, époque où
Description du malade. 87
elle a recommencé a exhiber son frère dans les marchés et
les foires, sous le titre de Roi des Esquimaux. Vers le milieu
de janvier 1890, elle est tombée malade, est entrée à Tenon
à la fin de ce mois pour une pleurésie avec tuberculose du
poumon gauche. Elle a succombé le 13 février (1) ;
'10 Pille morte à cinq ans, au bout de quinze jours, d'un
refroidissement. Elle était grande, forte et intelligente;
5" Notre malade. Les renseignements que nous possédons
sont très vagues. Il a été élevé par sa mère, a marché à dix-
huit mois, a été propre de bonne heure et n'aurait rien pré-
senté de particulier jusqu'à l'âge de trois ans (' ? ). Il causait et
jouait comme les autres enfants, dit-on. C'est à partir de trois
ans qu'il s'est arrêté dans son développement et qu'il est
devenu gros et bouffi. Il mange presque seul, il condition qu'on
lui coupe sa viande. Il a toujours été sujet à la constipation
et reste quelquefois six semaines ( ? ) sans aller à la selle. On
n'ajamais essayé de lui apprendre Ù lire. La parole est assez
limitée, comme nous le verrons tout à l'heure, ce que sa soeur
attribuait à ce qu'il sait qu'il prononce mal les mots. Il coud
avec une certaine habileté. Il fume la pipe et la cigarette.
Etat actuel (février 18%). L'aspect général et la physio-
nomie de ce malade rappellent de la façon la plus complète
ceux de tous les autres malades dont nous avons publié l'his-
toire (Fil). 7, 8, 9, 10).
Taille, 0 ? 915 ; poids, 2-i kil, 800.
Tète. Elle est ovoïde avec prédominance très accusée de
la région occipitale, saillie prononcée des bosses pariétales et
rétrécissement du front. La fontanelle antérieure n'est pas
entièrement ossifée ; on sent très bien à son niveau une
dépression de deux à trois centimètres de longueur et d'envi-
ron un centimètre de largeur. - Les cheveux sont d'un brun
tirant sur le roux, longs, gros, rudes, semblables à une cri-
nière. Ils sont abondants en arrière et au niveau des parié-
taux, au contraire rares au-dessus des bosses frontales.
Entre les places presque dénudées, il y a un toupet assez
fourni. Un peu il droite du vertex. les cheveux sont plus clair-
semés. Le cuir chevelu est le siège d'une éruption eczéma-
teuses (petites croûtes jaunâtres, squames, etc.).
(1) Nous aurions voulu avoir des renseignements plus détaillés, mais elle
ne parait pas avoir de parents il Paris, car son corps n'a pas été réclamé.
88 IDIOTIE myxoedémateuse.
Description DU malade.' 89
t
Mâchoire supérieure . - Cûté gauche. Incisive centrale
permanente, large et complètement évoluée. - Incisive la-
tépale, de volume ordinaire, déviée par une rotation sur l'a-
xe, de dedans en dehors et d'arrière en avant, d'environ 4.')
degrés. Canines de lait. Prémolaire permanente normale,
pointes très aiguës. Première grosse molaire en cours
d'évolution. Un tiers environ de la hauteur normale de la
couronne apparait hors de la gencive.
Côté gauche. L'incisive centrale est placée sur un plan
légèrement antérieur par rapport à la dent correspondante
du côté gauche, elle est large et a atteint à peu près sa lon-
gueur normale : malgré cela, elle est entièrement recouvertc
par la muqueuse distendue et laisse voir la dent par transpa-
rence, comme à travers une membrane mince de caoutchouc
fortement étirée et près de se rompre. Cette disposition ne
parait s'accompagner d'aucune douleur (spontanée ou pro-
voquée). L'incisive latérale a subi une déviation égale et
symétrique par rapport à la dent correspondante du côté
gauche (rotation sur l'axe de 45 degrés de dedans en dehors
et d'arrière en avant). Canine de lait. Deux prémolai-
comme du côté gauche. Pas de grosse molaire.
Mac/tOD'e m/erteure. Dents antérieures très écartées,
projetées en avant et divergeant en éventail. Les quatre in-
cisives appartiennent à la deuxième dentition; leur volume
est normal. Canines de lait. A droite et à gauche
après la canine, il y a un espace vide. Après cet espace vide
se trouve un tubercule à sommet mousse, d'un jaune sale,
fortement et profondément érodé, haut d'un demi centimètre
environ, d'une largeur à peu près égale au collet et affectant
très grossièrement la forme conique. Après cet organe un
nouvel espace libre qui correspond à l'emplacement de la
première grosse molaire permanente. La seule grosse molaire
que l'on trouve à la mâchoire inférieure est située très en
arrière et occupe la place de la grosse molaire de 13 ans (1).
Articulation. - Prognathisme inférieur.
Le cou est extrêmement court et gros (0,565me). En avant,
sous le doigt, on sent très nettement les cartilages du larynx
(1) Il a été impossible, par suite de la résistance du malade, d'examiner la
disposition de» tubercules de la face triturante de cette grosse molaire. Cet
examen, en admettant que la conformation de la dent fut normale, aurait
indiqué si on avait affaire ¡\ la première ou à la deuxième grosse molaire per-
manente.
Bourneville, Bicêtre, 1902. 6
90 IDIOTIE myxoedémateuse.
et de la trachée : il ne parait pas y avoir de glande thyroïde.
Des deux côtés du cou, existent deux masses lipomateuses,
tremblotantes, qui ne laissent pas d'empreinte, de la dimen-
sion d'un oeuf de poule, s'aplatissant par la pression et con-
tribuant encore à faire paraitre le cou plus court. On dirait
que la tête s'enfonce dans le thorax.
Thorax. La partie antérieure est proéminente, le ster-
num faisant un angle aigu de 25 degrés environ avec la
verticale. Les côtes sont saillantes, la base de la poitrine est
élargie au niveau des fausses côtes qui sont rejetées assez
fortement en dehors. En arrière, la partie supérieure du thorax
forme une convexité très accusée, surtout au voisinage de la
colonne dorsale. La colonne vertébrale est sinueuse, la portion
dorsale forme une convexité beaucoup plus prononcée que
d'habitude, principalement au niveau des deux tiers supé-
rieurs du thorax. Au-dessous de cette convexité on note une
ensellure très marquée. De plus, la colonne dorsale décrit
une légère convexité à gauche.
Il existe des masses lipomateuses sur les parties latérales s
et inférieures du tronc, ainsi que dans le creux axillaire.
DESCRIPTION DU malade. 91
Membres supérieurs.
92 Idiotie myxoedémateuse.
érythème assez prononcé du pli de l'aine gauche et des ) ! oeui,
de deux à cinq millimètres sur les joues, le dos, l'avant-bras
droit, etc., une cicatrice de vaccin sur le bras gauche, des
dilatations veineuses sur la convexité du dos. On trouve
de petites adénites nombreuses de. chaque côté du cou et
sous les masses lipomateuses des aisselles ; il n'y en a pas
dans les aines.
Deba.. mange seul; mais avec une grande lenteur; la tna.sttca-
tion s'effectue assez péniblement. Le foie et la rate sont nor-
maux. Les selles sont rares et le plus souvent il faut le purger.
Sous l'influence de la constipation, il s'est produit de,s hémor-
rhoïdes de la dimension d'une petite noisette. D... n'est pas
vorace ; il est très difficile pour la nourriture. Il est friand de
poulet, de pruneaux et d'oeufs durs.
La respiration, à 20, est un peu gênée et accompagné d'un
petit ronflement nasal. -Les battements du coeur sont régu-
liers, un peu lents et sourds ; le pouls radial est petit, très
difficile à sentir.
Les urines ont été examinées à plusieurs reprises ; leur
densité est de 1018, leur réaction faiblement acide; elles ne
renferment ni sucre, ni albumine.
La sensibilité générale est normale. Deb... est très sens;-
ble au froid. Sa température rectale a été prise du 12 au
21. Voici les chiffres :
DESCRIPTION du malade. 93
répète seulement, moi, il dit oui, non, merci, tabac, cigail-
lette (pour cigarette), almète (pour allumette), pain, vin, nez,
cayon (pour crayon), bague. On lui demande : Aimes-tu les
cigarettes ? Il répond : oui, mochieu... teur (pour docteur).
Il ne prononce souvent que la dernière syllabe ; teuil pour
fauteuil ; mino pour domino ; teille pour bouteille ; cuit pour
biscuit ; ban pour ruban ; von pour savon ; il dit bien porte,
sucre, bâton, etc.
L'intelligence est très peu développée. A cet égard, il est
sur la limite de l'imbécillité prononcée et de l'idiotie légère.
Il est propre dans sa tenue, mais il est incapable de s'habiller,
de se déshabiller, de boutonner, de lacer, etc.. On essaie de
lui faire déboutonner ses bretelles, il n'y parvient pas. Cepen-
dant, ainsi que nous l'avons déjà dit, il coud assez bien, il
ourle la moitié d'un mouchoir dans sa journée et son point est
régulier, Il n'aide en rien pour sa toilette. Il sait le nom de
la plupart des objets qui l'environnent. Il ne connaît aucune
lettre ; fait sur l'ardoise des n, des o, des u et des chiffres. Il
distingue le rouge, le bleu, le blanc et le noir.
Si on lui donne un objet qui lui fasse plaisir, par exemple
une cigarette, il sourit; sur invitation, il fait une révérence
en souriant. Sa physionomie hideuse exprime d'ordinaire
l'indifférence, même l'hébétude (fig. 7 et 8.) La laideur
parait encore plus grande lorsqu'on l'examine de profil (fig.
10); son profil rappelle le groin du cochon. D... reste toute la
journée assis sur une chaise auprès du feu, jamais il ne de-
mande il se promener. Parfois il réclame du tabac et fait si-
gne qu'on lui bourre sa pipe. Son appétence pour le tabac
est d'ailleurs modérée. Questionné sur ce qu'il faisait avant
son entrée à l'hospice, il a eu un mouvement d'impatience,
a levé les épaules et tourné le dos. De temps en temps, il
regarde ce qui se fait autour de lui, mais le plus souvent ne
s'en préoccupe pas. Son attention est facile à fixer ; il parait
assez affectueux. Il s'est choisi un autre enfant comme ca-
marade et n'aime pas que les autres enfants viennent autour
de lui. Dès qu'il est habillé, il prend sa chaise et la glisse
près du feu ; il en prend une seconde qu'il place devant lui i
et sur laquelle il pose son ardoise et ses pipes.
Réflexions. 1. Les renseignements très incom-
plets que nous possédons sur la famille et sur les
antécédents personnels clu malade, ne nous éclairent
94 IDIOTIE myxoedémateuse.
nullement sur l'étiologie. Rappelons seulement l'exis-
tence de la tuberculose chez le père de Deb., un
frère et une soeur. ' - `
II. Dans ce cas, de même que dans quelques autres
les premiers symptômes de la cachexie pachyde1'mi-
que, due à l'absence congénitale de la glande thy-
roide, auraient été constatés vers trois ans; aupara-
vant l'enfant paraissait avoir un développement nor-
mal. Peut-être serait-il possible d'en induire que l'ap-
parition de la cachexie pachydermique est retardée par
l'alimentation lactée et qu'elle se manifeste au sur et
à mesure que l'enfant est soumis au l'alimentation or-
dinaire.
Une connaissance précise de l'action physiologi-
que de la glande thyroïde est seule capable de tran-
cher la question.
III. Nous croyons superflu d'insister sur chacun des
symptômes du myxoedème. Ils se rencontrent tous
ici : aspect général, conformation de la tête, état
du cuir chevelu (cheveux-crins, brun-roux, eczéma,
persistance de la fontanelle, etc. ; bouffissure et faux
((,dème des paupières, des joues, des mains, des pieds,
etc; présence des pseudo-lipomes, absence de la glas-
de thyroïde; volume exagéré du ventre, hernie om-
bilicale ; absence des appétits sexuels, démarche
lourde, pesante, physionomie spéciale, voix rauque,
aigre, désagréable, constipation opiniâtre, arrêt du dé-
veloppement des organes génitaux, etc.
IV. Relevons cependant, d'une façon particulière,
l'existence chez D..., comme chez la plupart de nos
malades, de lésions scrofuleuses et de déformations
rachitiques , intéressant surtout la colonne vertébrale
et.,les membres, complications qui montrent combien
Idiotie myxoedémateuse. 95
est profonde l'atteinte portée à la nutrition par l'ab-
sence de la glande thyroïde.
V. Tous les idiots myxdén2ateua que nous avons
observés présentent la même physionomie hébétée,
lourde, sans expression. Ce ne sont pas des idiots
complets. La parole, toujours plus ou moins impar-
faite, existe à des degrés divers. Il en est de même de
la mémoire. L'attention, elle aussi, peut être fixée. La
compréhension est lente, mais non absente. Aussi
ces malades sont-ils susceptibles d'une certaine édu-
cation : tous deviennent propres, parviennent à man-
ger seuls, quelques-uns même à se laver, s'habiller,
coudre (exemples Graf.. et Deb..), à aider aux soins
du ménage (1). Aucun d'eux n'offre les tics si fré-
quents et si multiples chez les idiots par méningite,
sclérose, arrêt de développement des circonvolutions,
etc.
VI. Le traitement que nous avons institué dans les
cas de ce genre consiste, au point de vue pédagogi-
que, en l'application des méthodes spéciales d'éduca-
tion pour les enfants arriérés, au point de vue médical
en toniqnes, antiscrofuleux, bains salés, douches et
gymnastique.
A la suite de notre communication à l'Association
française pour l'avancement des sciences, nous avons
reçu le 15 Août, de M. le D" Arnaucl (de Saint-Gilles,)
qui avait assisté à la séance, une lettre dans laquelle
il soumettait à notre appréciation un mode particulier
de traitement qu'il est bon de signaler :
« M. Brown-Sequard, dit-il, pense, non sans raison peut-
être, que les glandes ou du moins quelques-unes d'entre elles,
(1) Ceci a été écrit en 1890 depuis, grâce à la médication thyroïdienne, nous
avons pu obtenir davantage nu point de vue intellectuel [Note de 1902).
96 IDIOTIE myxoedémateuse.
ont une action encore inconnue sur la nutrition, par suite de
certains principes qu'elles verseraient incessamment dans la
circulation. N'en serait-il pas de même du corps thyroïde ? ' ?
Dès lors on s'expliquerait facilement la cachexie consécutive
a l'absence de cette glande.
« En outre, cette théorie pourrait conduire à un traitement
rationnel de la cachexie pachydermique, le traitement par les
injections sous-cutanées (ou même peut-être par l'absorption
intestinale) de certains principes empruntés iL la glande thy-
roïde. » .
Nous n'avons pu essayer ce mode de traitement,
n'ayant plus dans notre service, avant l'admission de
Deb..., qu'un imbécile myxoedémateux, Gra..., âgé
de 33 ans. C'est peut-être il tenter. Nous rappellerons
il ce propos que, d'après Schiff, la greffe péritonéale
de la thyroïde procurerait aux chiens une immunité
presque complète contre les suites de la thyroïdec-
tomie totale (1). Ses expériences ont été répétées tout
récemment par MM. Anton von IJiselsJer·` et Ilorsley.
11 en résulte encore un nouveau mode de traitemenl
a expérimenter, mais cle préférence, suivant nous,
chez des malades encore jeunes (2).
1895.
Traitement lyroïdien.
La température rectale (3) du malade prise avec soin à
(1) S,'hil1' (1.) - R·sum d'une sirie d'expériences sur les effets (le l'abi.x-
lion des corps thyroïdes (lion. (le la Suisse romande, et aoûl
18S4).
(2) Bien que ce travail ait paru dans le n° des Archives de Neurologie du
z février 1890, nous avons cru utile de l'insérer dans le Compte-rendu
de 1889, afin de le rapprocher du mémoire sur le même sujet qui figure dans
1 : 0 volume.
(3) Nous prenons la température rectale des malades, la plus facile et la
plus sûre. La température axillaire, pour offrir des garanties, exige, en effet,
de quinze à vingt minutes : il faut veiller à ce que le bras soit bien appliqué
contre le thorax et que le thermomètre reste bien en place, conditions diffi-
cites iL réaliser complètement chez les malades ordinaires et, iL plus forte rai-
chez les enfants et surtout les idiots.
Traitement thyroïdien 97
diverses reprises n'a jamais dépassé 37° et a été en général
au-dessous de ce chiffre (2). C'est ce que montre le petittracé
qui figure à droite de la Planche VIII (que l'on trouvera à la
fin de notre Compte-rendu de 1S(5). Cette planche-indique les
modifications de la température et du poids sous l'influence
du traitement thyroïdien et l'indication des closes de glande
thyroïde données au malade. Le poids, relevé tous les six
mois depuis l'entrée du malade, a offert la progression sui-
vante : .
Fia. 7. - Deb... avec sa pipe et sa canne (Février 18 : 10).
98 ' IDIOTIE myxoedémateuse
Traitement thyroïdien. 99
midi, tremblement, faiblesse et sueurs. Deb... marche diffici-
lement. Sueurs dans la nuit. Urines de vingt-quatre heures :
750 grammes.
11 juin. Pas de glande. Pouls : 120. Haleine fétide, dou-
leur au niveau de l'esto-
mac. Urine : 650 gram-
mes. Le visage est beau-
coup moins gonflé, les
yeux sont plus ouverts.
Erythème des aines dû
aux poussées sudorales.
12 juin. Tremble-
ment de tout le corps
sans sueurs, affaiblisse-
ment, persistance des
douleurs s stomacales.
Urine : 500 grammes.
13 juin. Dans la
nuit, vomissemments ali-
mentaires. La faiblesse
des jambes est moins
prononcée. Le médica-
ment est suspendu jus-
qu'au 5 juillet. L'éry-
thème inguinal adisparu.
14 juin. - Tremble-
ment des jambes qui
oblige de maintenir le
malade au lit, pour évi-
ter le retour des fai-
blesses qui le prennent
dès qu'ils se lève. Dou-
leurs abdominales, dimi-
nution des tumeurs
graisseuses du cou.
Urine : 40 0grammes. Potion de Todd et caféine.
15 juin. - Agitation pendant la nuit : le malade s'est levé
sur son lit et voulait battre la veilleuse. Ce matin, il ne se
rappelle point ce qui s'est passé. - Urine : 500 grammes.
L'appétit est toujours médiocre et-le malade se nourrit sur-
tout de lait. -
17 juin. Le tremblement a diminué, les douleurs' ont
- -. Fi ! J. 8 - De... en Lévrier 1890.
100 . IDIOTIE myxoedémateuse.
disparu, la température descend à 37° ; le poids n'est plus
que de 24 kg. 100. La peau devient moite. Pouls : 120.
20 juin. - La langue-est moins épaisse, la prononciation
est meilleure ; les lévres sont moins violacées ; la marche,
qui, d'habitude, était lente et pesante, semble devenir plus
rapide. -.
21. juin. Le malade assiste au concert des frères Lionnet
et le soir, sans autre cause appréciable, la température s'élf ?
ve à 38°.
Durant la suspension du traitement, le poids qui's'était ? abaissé jusqu'à 24 kg. 100, est remonté à 25 kg. 050. Les uri-
Fig. 9.
Fig. 10.
De])... en iévrier 1890.
Traitement'; thyroïdien. 101
nés se maintiennent aux environs de 500 grammes. Jamais
elles n'ont contenu de l'albumine ou du sucre.
5 juillet. Reprise du traitement (demi-lobe). Deb... se
met. en colère, ce qu'on n'avait jamais vu, et casse sa pipe
parce que l'infirmier examinait ses poches. Le pouls est des-
cendu à 60.
6 juillet. Urine : 500 grammes. Pouls : 60.
7 juillet. - La température s'élève de nouveau à 37°,G.
Urine : 1 litre. Pouls 70.
8 juillet. - Pouls : 70; T il. 37°,2, Urine : 525 grammes.
Fig. 11. - Deb... en septembre 1S95.
102 Idiotie myxoedémateuse. ! ) juillet. La peau du malade reste toujours moite. Avant
le traitement, chez lui, comme chez les malades de cette caté-
gorie, la peau était sèche. Les croûtes du cuir chevelu ont t
complètement disparu. On observe une desquamation de la
peau des mains et des pieds. Deb... taquine les infirmiers,
par exemple ca-
che leur cas-
quette ; jamais
on n'avait noté
autant de spon-
tanéité. Diar-
rhée, douleurs
du ventre et du
dos, affaiblisse-
ment des jam-
bes. Pouls : 120.
.17a< ? M : T. Ii.
37% - Soir :
3°.
11 juillet.
Pouls petit :
130; T. R. 37%
Urine hier : 750,
aujourd'hui 500
grammes.
12 juillet. -
La diarrhée a
disparu, la fai-
blesse des jam-
besest moindre
Pouls : 120.
Urine : 500 gr.
13 juillet.
Depuis hier
soir, coliques,
diarrhée, cour-
bature générale. Le malade est affaissé, n'a pas d'appétit.
Urine : 500 grammes. Pas de glande. La desquamation de la
peau des mains et des pieds continue. Pouls : 120. Urine :
500 grammes.
14 juillet. Demi-lobe. Pouls : 120. Urine : 2GO grammes ( ? ).
15 juillet. Pas de glande. Pouls : 120. Urine : 500 gram-
mes. La peau est moite. ..
Fiy. 12. DeL... en septembre 1895.
Traitement thyroïdien. 103
16 juillet. - Demi-lobe. Pouls : 120. Urine : 500 grammes.
Quelques coliques.
17 juillet. Pas de glande. Pouls : 120. Urine : 500 grammes.
Coliques, sueurs.
18 juillet. Depuis hier soir, prolapsus du bourrelet hémor-
roïdaire. Pouls : 100. Sueurs, faiblesse générale. Urine : 560
grammes. Potion : bismuth, bétol, laudanum. On sup-
prime la glande thyroïde.
19 juillet. Le bourrelet hémorroïdaire est réduit et la
diarrhée a cessé. Pouls : 84.
20 juillet. - La physionomie exprime la fatigue. Le poids
qui avait augmenté, ainsi que nous l'avons vu, durant la
période de suspension du traitement sans revenir toutefois
au chiffre primitif, a notablement diminué depuis la reprise
du traitement, car il est descendu à 22 kg. 500; aussi l'amai-
grissement est-il évident : non seulement les pseudo-lipomes
ont diminué, mais le ventre est devenu beaucoup moins volu-
mineux : tandis qu'il mesurait au niveau de l'ombilic 0 m. 740,
il ne mesure plus que 0 m. 67. La peau des mains demeure
moite et devient souple ; les ongles poussent bien plus rapide-
ment et sont plus brillants. Les mouvements sont plus vifs,
la parole est moins lente, le malade est moins engourdi.
Pouls : 90. Urine : 500 grammes.
28 juillet. - Bien que la médication soit suspendue depuis
le 18 juillet, le poids a continué de baisser (22 kg. 300). Les
figures 11 et 12 comparées aux/taures 8 9 et 10 permettent d'ap-
précier les changements de la physionomie et l'amaigrisse-
ment général.
[Depuis notre communication (1), nous avons repris le traite-
ment à la date du 13 août, le malade ayant gagné 500 gram-
mes et la température descendant à 37° et au-dessous, ainsi
que cela existait avant tout traitement. Nous lui avons fait
prendre un lobe tous les deux jours jusqu'à la date du 30
septembre : les mouvements et la parole sont plus vifs, l'in-
telligence est un peu plus éveillée ; D... n'a éprouvé aucun
malaise et, depuis le 11 septembre, sa température n'est ja-
mais descendue au-dessous de 37°. Le poids, après avoir di-
minué du 16 août (22 kg 800 jusqu'au 7 septembre (22 kg.
450), est remonté à 22 kg. 800 (17 septembre) et s'est, mainte-
(1) l"-8 août 1895.
104 Idiotie myxoedémateuse.
nue à ce chiffre (28 septembre). Taille : 0 ni. UU."). soit une
augmentation de 25 millimètres, alors qu'elle était station-
naire depuis plus d'un an. - - . -
Voix. - Nous avons fait examiner le malade au point de
vue de la voix par M. Sutter, professeur de chant de notre
service. Voici la copie de la note qu'il nous a remise :
«Avant le traitement, Jules Debarg... n'avait qu'uneé tendue
très faible, correspondant à 2°, depuis la dernière observa-
tion l'enfant il gagné 4°. »] '. .' -
` `' ? . 1896-1902.
1896. - Dentition. Depuis le dernier examen, aucune modi-
fication n'est survenue. La dentition a acquis un développe-
ment complet. Les dents permanentes ont achevé leur éruption
et il n'y a plus de traces des dents temporaires. Toutes les
molaires, sous l'influence de la carie, continuent à se désa-
gréger progressivement. Leurs couronnes sont en partie
détruites. - : .
1897. 11 n'est survenu durant cette année, aucun acci-
dent.
1898. Juillet . - Puberté. Le visage, les aisselles et le tronc
sont glabres. Quelques poils noirs, rares, la racine des
bourses. Phimosis. Verge : long. 6 cm., circonf. 7 cm. Testi-
cules de la grosseur d'un oeuf de merle.
1900. Puberté : Les moustaches commencent il se dessi-
ner, les poils du pubis sont un peu plus longs et plus abon-
dants. Verge : long. 7 cm., circonf. 9 cm.; même état des
testicules. IIémorrhoïdcs persistantes.
1901. Mat.OEdème temporaire des paupières, surajouté il
leur bouffissure habituelle. Les urines ne renferment ni
sucre, ni albumine (Fig. 3. 4 et 5). '
Décembre. - Puberté. Le tiers moyen de la lèvre supé-
rieure est presque glabre ; de chaque côté existe un fin
duvet, formant une bande de 4 sur 10 mm. Rien aux
joues ni au menton. Rien aux aisselles. Bande de
poils très rares à la partie moyenne du pénil. De chaque
côté de la verge, quelques poils bruns plus longs, for-
IDIOTIE 111YXDÉMATEUSE. 105
mant une sorte de bouquet. Verge : long. 7 cm. 1/2, circonf. 8 cm.
Prépuce un peu long, gland non découvrable; méat un peu étroit.
Jamais d'onanisme. (rtg. 13, 14 et 15).
1902. - 18 février. A 4 heures de l'après-midi, Deb... était
auprès de la surveillante, à l'infirmerie, appuyé à la table, le,dos
tourné au foyer selon son habitude. Subitement il devient violacé.
Aussitôt on le déshabille et on le couche. Il se jette en arrière, les
membres supérieurs s'allongent et se raidissent; la respiration
devient de plus en plus courte, il meurt en quelques minutes sans
prononcer une seule parole. L'interne de garde, appelé, ne peut
que constater le décès. Poids après décès : 36 kg. 200.
Le matin et jusqu'au début des accidents mortels, Deb... n'avait
' rien offert de particulier. Il avait déjeuné comme d'ordinaire. A
2 heures il avait fumé une cigarette et mangé des bonbons.
Bourneville, Bicêtre, 190. ` 7
Fig. 13. -3Deb... en 1901.
106 MORT : Hypothermie. ? Température après la mort.
RIGIDITÉ cadavérique. 107
L'ensemble de la peau est jaune, le ventre est ballonné; les lèvres \
sont bleu pâle. Comme on le voit, la rigidité est plus prononcée
à droite qu'à gauche; jusqu'à 8 heures du soir les membres étaient
souples. Le cou était rigide.
20 février. - Membre supérieur gauche : rigidité assez prononcée
de l'épaule, très prononcée du coude; rigidité passez prononcée
des articulations métatarso-phalangiennes. Les doigts commen-
cent à être mous.
Membre supérieur droit : épaule molle, coude et poignet rigides,
ainsi que les articulations métalarso-phalangiennes. Les doigts
sont un peu raides.
Membre inférieur droit : rigidité très prononcée de la hanche et
du cou-de-pied. Les orteils sont raides.
Membre inférieur gauche : rigidité moyenne de la hanche, plus
Fig. 14. Deb... en 1901.
108 IDIOTIE MYXOEDEMATEUSE.
Autopsie : cerveau. 109
fourche (ff); elle parait un peu grêle par rapport à F2 qui est plus
large et bien plus sinueuse. Sur tout le lobe frontal, il n'y a qu'un
pli de passage entre F2 et F3, La frontale ascendante, FA, est
volumineuse et assez sinueuse ainsi que PA. Le sillon de Rolando,
Sli, est très tortueux, sans interruption. Les plis pariétaux, supé-
rieur, Pl, et inférieur P2, sont assez volumineux ainsi que le pli
courbe, PC et le lobe occipital LOC. Le pli courbe envoie un pli de
passage au lobe occipital qui est assez développé, Le lobe tempo-
nul a ses circonvolutions plutôt volumineuses. Les lèvres de la
scissure de Sylvius sont presque en contact et ne laissent voir que la
pointe du lobule de l'insula avec quatre digitations, sans compter
les trois prolongements qu'envoie en arrière la Tl (Planche 111).
1 Nous avons publié une série de ses photographies en 18S9 et en 1896
(Voir .Arc/¡. de 1\ eU1'olog., 1890, n°-l, et Comptes rendus de Bicêtre de
1889. u. 172; 1$95, li. 169.
Fig. 16. - Deb... en 1901'. 1.
HO Absence totale de 'la glande thyroïde.
Face interne. - La corne d'Ammon, les circonvolutions CH et TO
sont un peu grêles et s'envoient un pli de passage, FI, C C C, LP et
le lobe carré, LQ, sont bien développés, le coin, C, est petit. Le corps
calleux, C C, le corps strié, CS, la couche optique, CO,;et le ventricule
latéral n'ont rien à noter (Pl. IV).
En résumé le cerveau est assez volumineux et lourd. Les
circonvolutions sont développées mais n'offrentque de rares
plis de passage. Les sillons paraissent d'une profondeur à
peu près normale. Il n'y a, pas, macroscopiquement, trace de
méningo-encéphalite. l
Cou. L'examen le plus attentif ne fait découvrir aucune trace
de la glande thyroïde. 11 n'y a pas de trace du thymus.
Thorax. - Les poumons sont normaux. On recueille 50 gr. de
liquide dans la plévre droite et 180 gr. dans la cavité péricardique.
Coeur volumineux; les cavités et les valvules sont normales.
Le trou de Botal est oblitéré. Le coeur droit est un peu dilaté.
Plaque atéromateuse de 2 cm. de longueur sur l'aorte.
ABDOMEN. - L'estomac, les intestins ne paraissent le siège d'au-
cune lésion. Le foie est un peu congestionné et il y a des plaques
de péri-hépatite à la face supérieure du lobe droit. Vésicule biliaire,
rien. Rein droit hyperhémié. - Rein gauche lobulé, très conges-
tionné, présentant une série de dépressions circonscrivant 4 ou 5
gros lobes. Signalons aussi une série de petits kystes variant d'un
pois à une tête d'épingle, situés aux limites des zones corticale et
pyramidale. Aucune lésion des capsules surrénales.
ETUDE DU SQUELETTE. 111
La mort est due à une syncope provoquée sans doute par l'hy-
dropisie du péricarde, qui ne s'était traduite par aucun symptôme,
puisque le malade allait et venait comme d'habitude, avait mangé
à son ordinaire, ne se plaignant de rien.
POIDS DES organes ,
.12 Idiotie MYXOEDÉMA.TEUSE.
1 ? 7. 16. Squelette de Deb...
ETUDE DU squelette. 113
Fifl. 17. - Squelette de Deb...
114 IDIOTIE myxoedémateuse.
ment bornés à apprécier à vue d'oeil le degré d'atrophie ou d'hy-
pertrophie de telle ou telle .partie. D'abord cela n'offre aucune
garantie en raison des erreurs qui en découlentindiscutablement;
en second lieu, on ne peut comparer le cas particulier aux mo-
yennes générales; enfin il n'est pas possible de comparer les divers
cas de cette affection entre eux.
C'est dans ce but que nous avons autant que possible, mis en
regard de nos remarques, des mensurations rigoureuses, afin de
pouvoir les comparer, lorsque la chose était nécessaire, à des
moyennes normales. Nous n'avons pas utilisé toutes les mesures
que nous avons recueillies, mais nous les faisons néanmoins figurer
dans ce travail pour permettre aux médecins, désireux d'employer
une méthode exacte, de comparer leurs cas au nôtre 1. Ajoutons
enfin que la technique employée estcelle qu'on enseigne et qu'on
applique constamment au laboratoire d'anthropologie de l'Ecole
des Hautes Etudes.
Tète. - A première vue deux particularités s'imposent.
1° Le grand développement du crâne dans le sens antéro-posté-
rieur ; - 2° sa faible hauteur.
Précisons ces particularités par des mesures :
Le diamètre antéro-postérieur maximum est de 186 millimè-
tres. "
Le diamètre anléro-postérieur métopique de 184 millimètres.
La courbe partant de l'ophryon pour aboutira l'inion égale 304-
millimètres.
La hauteur, totale du crâne est de 103 millimètres.
Cette dernière dimension est considérablement réduite et la vue
du dessin stéréographique du crâne indique immédiatement la
cause de cette déformation : il existe un abaissement considérable
de la base crânienne tel que le trou auditif A correspond exacte-
ment au basion B (bord antérieur du trou occipital). Or, sur un
crâne normal, ces deux points sont situés à des hauteurs diffé-
rentes. La, hauteur du trou auditif au vertex est chez un individu
normal d'environ 126 millimètres (Papillault). Daus notre cas, cette
dimension est considérablement réduite et notons qu'elle repré-
sente également la hauteur totale du crâne par suite de la parti-
cularité que nous avons précédemment indiquée. Nous avons fait
remarquer que le crâne a des dimensions considérables dans le
sens antéro-postérieur : comparons nos mensurations à celles d'un
homme moyen (Papillaull); celui-ci présente un diamètre antéro-
1 Le dessin au stéréograplie qui ligure ici a le double avantage de
donner une reproduction fidèle du crâne, et de permettre à ceux qui ne
disposeraient pas du crâne de compléter nos mensurations d'une façon
rigoureuse. (P.III). ·
Etude DU squelette. Ho
Fig, 18. Squelette de Deb...
116 Idiotie MTXOEDÉMATEUSE.
postérieur maximum de 184,2 et un diamètre antéro-postérieur
métopique de 182,9. Les dimensions du crâne de Debarg.. sont
donc supérieures. '
Le diamètre antéro-postérienr maximum part en avant de la
glabelle, dont la saillie est précisément une cause importante
de son augmentation. Ur, chez notre sujet, cette saillie gla-
bellaire fait défaut, ce qui n'empêche pas le diamètre maximum
d'être encore supérieur à celui d'adultes normaux et à saillie forte.
Remarquons encore que; malgré la faible saillie glabellaire, le dia-
mètre métopique est inférieur au diamètre glubellaire. Cette cons-
tatation a son intérêt, car on voit écrit parfois que les myxcoedé-
mateux conservent un front infantile : c'est une erreur, tout au
moins partielle. Il y a bien un caractère infantile : l'absence de
la glabelle, mais il n'y a pas, comme chez l'enfant, la supériorité
de diamètre métopique. Si la glabelle eût été prononcée, il eût
existé une inclinaison considérable du front.
Examinons maintenant les dimensions transversales du crâne.
Nous mettons entre parenthèses les dimensions correspondantes
d'un individu normal. Le crâne deDeb... présente donc une légère
diminutiun de ses diamètres transversaux. -Mais elle est beaucoup
moins marquée que celle des dimensions verticales de l'os.
ETUDE DU squelette. 117
id., 96) que les os wormiens sont la preuve que les os normaux
ont été, à un moment donné, incapables de remplir leur rôle. Les
parties membraneuses ont été envahies à la longue par l'ossifica-
tion de centres supplémentaires, qui donnent les os en question.
Pour un os crânien, cette impossibilité de suffire à la tâche peut
provenir d'un manque de pouvoir ostéogénique, comme elle peut
être engendrée par un excès de pression intra-crânienne (hydro-
céphalie, volume relativement élevé de l'encéphale); le résultat est
le même. Dans notre cas particulier, il y a une double raison pour
que ces conditions se présentent : le myxoedème s'accompagne
d'un trouble considérable du pouvoir ossificateur et. de plus, la
boite crânienne renfermait une masse encéphalique relativement
volumineuse puisqu'elle pesait 12 ! r5 grammes. Et n'oublions pas
(ce qui est important) que le sujet n'avait qu'un mètre cinq cen-
timètres de taille (1 m O) et que son poids égalait 35 kilogr.
L'os occipital est légèrement saillant : il semble l'avoir été davan-
tage lors des premiers examens de Deb... à son arrivée à Bicêtre.
car la proéminence du bord supérieur de l'os avait attiré l'atten-
tion. La présence des os wormiens situés à ce niveau marquerait
assez bien la persistance d'une partie membraneuse qui se serait
ossifiée dans la suite à l'aide du processus snpplémentaire que
nous avons signalé plus haut. Cette saillie est en rapport avec la
poussée que le poids encéphalique a fait subir à la base d'une
façon générale et naturellement aux parties latérales voisines de
cette base. C'est ainsi que le diamètre transverse est situé très bas
et se confond presque avec le diamètre bimastoïdien.
Nous serions assez portés à attribuer une dépression située en
arrière dn bregma il l'inflexion de la base du crâne combinée avec
la persistance anormale de la membrane fontanellaire. La fonta-
nelle antérieure était encore ouverte lorsque Deb... avait vingt
ans (voir observation) elle s'est donc obturée fort tard. Mais lors-
qu'elle a été envahie par l'ossification, le cerveau avait déprimé la
base crânienne et n'exerçait aucune pression contre le paroi supé-
rieure. Celle-ci a, d'aiileurs, une épaisseur considérable qui semble
bien dénoter qu'aucune pression ne s'est opposée à l'ossification :
mais dans ces conditions la membrane fqntanellaire était déprimée
et c'est dans cette situation qu'elle a été envahie par l'ossifi-
cation. A ce niveau on retrouve d'ailleurs une transparence très
nette de la calotte. Telles sont les raisons qui permettent d'émettre
cette hypothèse sur la nature de cette déformation.
Base du crâne. - L'affaissement de la base du crâne méritait
d'être mesurée exactement. C'est pourquoi nous avons dessiné avec
l'aide de M. Papillault, professeur à l'École d'anthropologie, le
crâne au stéréographe et mené les lignes qui permettent de
mesurer d'une façon mathématique l'inclinaison des différentes
'1)8 ' IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
parties du crâne par rapport au plan orbitaire ou par rapport au
clivus (PL. 11l), -
- Voici nos valeurs angulaires et en regard celles d'un individu
normal :
Etude du squelette. 119
petit rond sont confondus. Les cloisons qui séparent ces trous sont
d'abord cartilagineuses, puis elles subissent au sur et à mesure
une transformation osseuse. Chez notre sujet le retard de l'ossifi-
cation alaissé persister cet état foetal. 11 existe sur toute la surface
endo-cranienne des éminences et des dépressions dénotant que
l'activité périostée a cependant été suffisante pour produire de l'os,
aux points où la pression encéphalique ne s'exerçait pas. D'ailleurs
le retard de l'ossification est bien moins marqué et même par-
fois complètement absent dans les points où la croissance était
interstitielle. Au niveau des sutures, le retard est plus accusé et
surtout avait été très marqué au début, comme l'indique des faits
de l'observation clinique (persistance de la fontanelle) et les parti-
cularités relevées au cours de notre examen (os wormiens). La
suture sphèno-basilaire n'est nullement synostosée : il y a eu, à ce
niveau, un arrêt complet de croissance, aussi la distance du basion
à la suture n'est-elle que de 19 millimètres : c'est là la persistance
d'un caractère véritablement infantile. Nous retrouverons cette dif-
férence entre les deux modes d'ossification encore plus prononcée au
niveau des os des membres. Signalons aussi une particularité qui
peut dépendre d'un défaut d'ossification : la partie antérieure de
l'apophyse crista-galli n'est pas reliée au niveau de sa base à la face
postérieure de l'os frontal : il y a un espace vide qui communique
directement avec les fosses nasales. A ce niveau, les deux portions
du frontal se terminent en formant une pointe en forme de V dont
la pointe est dirigée en bas. Les deux portions qui constituent le
frontal sont visibles et leur ligne de réunion sépare en deux parties
égales l'angle limité par les branches contiguës des V osseux signa-
lés à l'instant.
Face. - L'atrophie du massif facial est considérable : minceur
des apophyses zygomatiques, faible développement de l'os ma-
laire et du maxillaire supérieur, absence des arcades dentaires,
tout cela est très marqué. Les quelques mesures suivantes permet-
tent de s'en rendre compte.
120 Idiotie myxoedémateuse.
Nous donnons de suite quelques-unes des dimensions normales
de cette même région, indiquées par M. Papillault, dans son travail
sur la suture métopique (Mémoires de la Société d'A nthl'opologic, 1896).
ETUDE DU squelette. 121
l'aplatissement de la région chez le myxoedémateux. Venant d'in-
diquer la cause de l'élargissement de l'espace interorbitaire, nous
avons ainsi signalé complètement la raison d'être du faciès des
myxoedémateux, souvent attribué à d'autres motifs par ceux qui
ne se donnent pas la peine de mesurer et de comparer.
Ce qui est encore particulier, c'est l'absence complète des arca-
des alvéolaires. Il ne faut pas dire, comme on le fait parfois, leur
disparition, puisque c'est un arrêt de développement.
A première vue, il semblerait que la voûte palatine fut considé-
rablement agrandie transversalement et antéro-postérieurement.
mais c'est l'absence de la saillie alvéolaire qui exagère cette im-
pression.
122 -) Idiotie MYXOEDÉM : ATEUSE.
allongée en exagérant l'ouverture de son angle; 2° les dents inci-
sives ayant besoin de se mettre en eontact avec les incisives supé-
rieures, l'os s'est pour ainsi dire tordu, renversé en avant de ma-
nière que sa face postérieure (à la symphyse) regarde très
obliquement en haut et en arrière. L'inclinaison de cette face forme
avec l'horizontale l'angle que nous avons signalé.
Malgré ses faibles dimensions cet os s'est adapté a sa fonction mas-
ticatrice. C'est la démonstration pathologique de cette loi énoncée
par M. Papillault (Homme moyen) : la mandibule est un os qui
semble avoir fort peu d'autonomie, nul autre ne s'adapte plus rapi-
dement aux exigences de sa fonction et aux organes qui le touchent
de près.
Le thorax est aplati transversalement et le sternum est projeté
en avant. La courbe des côtes est à peine accentuée. La déforma-
tion thoracique est en rapport avec celle de la colonne vertébrale
qu'on a décrite dans l'observation prise durant la vie du sujet.
Nous donnons néanmoins quelques mensurations, mais elles ont
peu de valeur puisque les inflexions de la colonne ont disparu : on
n'en a pas tenu compte en montant le squelette. Voici quelques me-
sures des régions thoracique et vertébrale :
Etude DU SQUELETTE. '12'
124 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
sites nombreuses et saillantes et que leur action a pour résultat
de presser la tête humérale contre laface articulaire de l'omoplate.
La gouttière bicipitale manque.
Voici quelques mensurations : * -
Omoplate : .' '
ETUDE DU SQUELETTE. 125 15
reste de l'os ne présente pas de déformations susceptibles d'être
étudiées. Le pilastre est assez prononcé et il existe un élargissement
sous-tronchantérien de l'os.
Il y a une déformation très prononcée du plateau tibial. Alors
que la cavité glénoïde externe regarde en haut, l'interne regarde
obliquement en haut, en dedans et en arrière. Elle est en même
temps à un niveau très inférieur par rapport à l'externe.
De cet affaissement il résulte : 1° que la surface articulaire de l'os
est elle-même extrêmement oblique; 2° que la face interne de l'os,
au voisinage de la partie articulaire, présente une incurvation
résultant du déplacement et du tassement de la tubérosité interne.
Quelle est la cause de cette déformation ? Il nous est impossible
de trouver une explication satisfaisante : on ne voit pas par suite
de quel mécanisme le condyle interne du fémur aurait subi une
augmentation de volume, tandis que la partie correspondante du
tibia aurait subi un effondrement ? ou par suite de quel processus
l'extrémité inférieure du fémur restant normale, ainsi que la partie
externe de l'extrémité supérieure du tibia, la partie interne de ce
dernier os s'est déformée ? Le péroné a-t-il augmenté la solidité
de la partie externe ? On ne peut que faire des suppositions.
Une dernière remarque. De l'étude et de la comparaison de
nos chiffres il se dégage un fait absolument particulier. Relative-
ment à leur épaisseur, la longueur des os est extrêmement faible :
alors qu'il y a eu un retard, on pourrait même dire un arrêt de
croissance en longueur, la croissance en largeur est beaucoup
moins et quelquefois nullement atteinte. Ces deux croissances ne ,
sont nullement parallèles, puisqu'on a des os dont la longueur
rappelle celle d'un enfant en basâge, mais dont le volume est celui
d'un adolescent, presque d'un adulte. Cette dysharmonie entre les
deux modes d'accroissement osseux, l'un par les cartilages de conju-
gaison, l'autre par le périoste, est une caractéristique de l'affection.
Nous l'avions déjà constatée sur le crâne, nous la retrouvons ici
absolument nette.
Planche V. Or, voûte orbitaire. N, nasion. H, H, plan orbi- i
taire hoiizontal, passant par le centre de l'orbite et le trou optique, Op.
CC, plan du clivus. Ow, os wormiens. - Il, plan du rocher. La
ligne indiquée sans lettre, entre le plan orbitaire (H, H) et le plan du
rocher (R), répond au plan de l'inion. - op, plan du trou occipital.
Les signes XX répondent aux bosses frontales et pariétales. - E, fosse
ethmoïdale. T, fosse temporale. R. bord supérieur du rocher.
A, trou auditif. B, basion (bord antérieur du trou occipital).
' Voir sur les os du crâne des myxoedémateux infantiles nos autres
observations : Compte rendu de 1891, p. 35 -189, p. 35, etc. -
126 Idiotie myxoedémateuse.
Recherche de la mucine dans la peau d'un myxoedémateux; par
M. Berthoud, pharmacien en chef de Bicêtre.
On a noté à l'autopsie de certains myxoedémateux l'existence
d'une infiltration gélatineuse du tissu cellullaire sous-cutané,
infiltration dont la consistance serait due à une substance muci-
noïde. On a, de plus, constaté dans certains cas la présence de
mucine dans tous les tissus, y compris le sang. Il est donc inté-
ressant de chercher, chaque fois que l'occasion s'en présente, à
vérifier ces notions, afin de pouvoir établir s'il s'agit là d'un fait
général ou non.
A cet effet, un lambeau de peau, mesurant environ 270 centimè-
tres carrés, a été prélevé à la partie antéro-supérieure gauche du
thorax (région sous-claviculaire). Cette peau, glabre, est doublée
d'un pannicule adipeux abondant, dont l'épaisseur varie de 10 à
15 millimètres. Il n'y a pas d'infiltration gélatineuse du tissu cellu-
laire sous-cutané, sauf pourtant en deux points éloignés l'un de
l'autre, où se montrent deux caillots jaunâtres, tremblants, de la
grosseur d'une lentille. Ces deux caillots n'avaient pas été aperçus
lors du détachement du lambeau cutané sur le cadavre ; c'est vingt-
quatre heures, après qu'ils ont été remarqués, soit qu'ils aient
échappé au premier examen d'ailleurs rapide, soit qu'ils aient
apparu postérieurement par suite d'une altération cadavérique.
Voici la marche suivie pour la recherche de la mucine.
La peau proprement dite, débarassée aussi bien que possible de
la graisse sous-jacente, a été hachée et épuisée à l'eau froide à
plusieurs reprises. Les diverses macérations réunies après filtration
ont été prudemment additionnées d'une petite quantité d'acide
acétique, ce qui produisit un précipité blanc immédiat peu abon-
dant, qui, reçu sur filtre, lavé à l'eau acétifiée, séché et pesé, s'éleva
à 0 gr 032 pour 20 gr. 30 de peau mise en oeuvre, soit O,f : i7 pour
100 grammes.
D'autre part, le marc de macération fut maintenu, baignant dans
quantité suffisante d'eau distillée, à la température d'ébullition
pendant une heure, puis maintenu à l'autoclave vers -105° pendant
une autre heure. La filtration, assez rapide, donna un liquide opa-
lin; ce filtrat, augmenté des eaux de lavage,, qui passèrent très-
lentement, fut traité par l'acide acétique en quantité modérée, ce
qui détermine d'abord un louche laiteux, qui au bout de quelque
temps se condense en un dépôt floconneux blanc, surnagé par un
liquide clair. Ce dépôt, après dessication, fut trouvé égal àO gr. 0675
soit Ogr. 332 pour 100 grammes de peau.
Ainsi la macération et la décoction donnent à froid un précipité
par l'acide acétique. Or, c'est là un des principaux caractères de la
mucine, et c'est en la précipitant par l'acide acétique qu'on l'isole :
Analyse DE la PEAU. '127
généralement : lorsque, dans un liquide albumineux, cette réaction
se produit, on est conduit à soupçonner la présence de mucine.
Mais il faut contrôler cette indication en s'adressant à une autre
propriété de ce corps, décisive celle-là, et qui consiste dans la mise
en liberté d'un sucre réducteur lorsqu'on hydrolyse vers 100° une
solution de mucine par les acides minéraux.
Nous avons donc pratiqué cet essai sur le précipité obtenu par
l'acide acétique dans le décocté filtré de 11 gr. 923 de peau hachée.
Ce précipité lavé, a été délayé dans 200 centimètres cubes d'eau dis-
tillée par l'acide sulfurique à raison de 5 p. 100. et transvasé dans
un tube à essai qui a été maintenu au bain-marie bouillant au
delà d'une heure. Puis ce liquide a été neutralisé, et essayé à la
liqueur de Foehling. Celle-ci n'a pas été modifiée, ce qui indique
l'absence de sucre réducteur, et par suite de mucine dans le liquide
essayé.
La même opération a été pratiquée sur le filtrat obtenu lors de
la séparation sur le filtre du précipité déterminé par l'acide acéti-
que dans la macérationd e peau hachée. Il se pouvait, en effet, qu'il
fût passé en solution des corps voisins de la mucine, sinon la
mucine elle-même qui n'est pas toujours facilement rendue insolu-
ble par l'addition d'acide acétique. Le produit d'hydrolyse neutra-
lisé n'a pas réduit la liqueur de Fehling.
Nous ne sommes donc pas, devant ce résultat négatif, autorisés
à conclure à la présence en quantité appréciable de la mucine ou
d'un mucoïde quelconque dans l'échantillon de peau examiné.
Examen histologique ; par M. CI. Philippe.
L'examen histologique a été pratiqué sur plusieurs circonvolu-
tions choisies dans les principales régions de l'écorce cérébrale :
par exemple, au niveau des lobes frontal, occipital et rolandique
(lobule paracentral). Pour le dire dès maintenant, l'emploi com-
biné des méthodes usuelles (méthodes de Weigert-Pal, de Nissl, de
Marchi : fuchsine picriquée de van Gieson ; picro-carmiu ammo-
niacal ; éosine-hématoxylique), a permis de relever, sur la presque
totalité des coupes, les lésions suivantes : méningites, atrophies
cellulaires, légère sclérose névroglique des régions superficielles
de l'écorce cérébrale.
Méningite. -Cette méningite n'est nulle part très intense, un peu
plus marquée au niveau du lobule paracentral que partout ailleurs.
Il s'agit uniquement de 7cptoméIlÍIl ! lite. avec participation, sensible-
ment égale, des deux membranes molles, arachnoïde et pie-mère.
L'évolution fibro-plastique n'est pas très accusée; ainsi, on ne.
rencontre en aucun point ni les végétations volumineuses, ni les
128 8 Idiotie lIlYXOEDÉMATEUSE.
couches dpn<ps de lis=u fibreux, qui se voient toujours dans les
cas ilt, 111,'nillgiie 1'1'1111,'111-'1111'111. sclè"I"uP. CllPz 111'1)..., les feuillets
l'XII'\I11 ? IId "111" el l'X Il'1"111', olll, siiuplrnient plus épais qu'à
1"'1111 11(t,illiti ; 1 ? II."I'oi" ? S se soudent inlimineil, l'un à
failli ? quand ils s'engagent dans l ? petits sillons, de manière à
cOlislilll.'r une iiieiii[)i-iiii, assez forte. De même, les travées iller-
médiaires, très développées, >ont sclérosées, et elles cloisonnent
les espaces sous arachnoïdiens en une infinité de logettes actuel-
lement vides de tout contenu. Surtout, le réseau vasculaire est
riche, quelle que soit la région examinée ; artérioles et veinules
ont des parois, moyennes et externes, assez épaissies souvent, bien
que les tuniques internes ne présentent pas de grosses modifica-
tions. Ces néoformations vasculaires peuvent être suivies dans
toute l'écorce sous-jacente, jusqu'à une certaine profondeur.
Cellules nerveuses. - Les cellules nerveuses ne sont pas intactes.
Dans les régions où le processus pathologique parait bien avoir
atteint son maximum de développement (lobule paracentral, cir-
convolutions frontales), les cellules ne sont plus tassées à la suite
les unes des autres, de manière à former les colonnettes bien
connues, qui sont étagées dans toute la hauteur de l'écorce céré-
brale ; au contraire, elles sont certainement diminuées de nombre,
et elles se disposent fréquemment en petits amas ou en chainettes
courtes.
. De plus, toutes ces cellules sont peu différenciées, à tel point
qu'il devient difficile de distinguer les couches qui apparaissent si
nettement à l'état normal, dans la région rolandique par exemple.
Ainsi, les pyramidales, grandes et. moyennes, sont très peu nom-
breuses dans les couches dites profondes, là où ces éléments sont
d'ordinaire si faciles à reconnaître sur des circonvolutions saines.
Bref, la plupart des cellules ne dépassent guère le volume des
petites pyramidales, et encore beaucoup de ces dernières ressem-
blent-elles plutôt à des neuroblastes.
Cet état de dysgénésie est plus évident, quand on examine les
coupes aux forts grossissements. Ainsi, les cellules ont des prolon-
gements petits, grêles, peu nombreux, difficiles à suivre sur une
grande longueur; les masses proloplasmiques sont minces, peu
compactes, souvent fissurées, difficilement colorables à l'aide de
l'éosine ou du picro-carmin. peu chargées en corpuscules de Nissl;
les noyaux sont petits, faiblement teintés après action du bleu
polychrome d'Unna.
D'ailleurs, des lésions du même type se retrouvent sur les élé-
ments cellulaires autres que les pyramidales. Ainsi, toutes les cou-
'cites de l'écorce cérébrale contiennent moins de cellules qu'à l'état
normal; en outre, les cellules encore existantes, sont petites, défor-
mées, manifestement arrêtées dans leur développement, si bien
HISTOLOGIE DU cerveau. 129
que beaucoup d'entre elles rappellent plutôt la morphologie et la
structure générale des neuroblastes.
Dans les au lies régions ¡lobe occipital, par exemple), le pro-
ces>us pathologique n'a pas atteint un développement aussi accusé.
Toutefois, si l'on prend la peine d'examiner un certain nombre de
colonnes cellulaires, on rencontre i>émei)t, çà et là, sur une
étendue plus ou moins considérable, des zones où l'agencement
des cellules, de même que leurs caractères structuraux, reprodui-
sent absolument tout ce qui vient d'être dit pour les circonvolu-
tions du lobe frontal et du lobule paracentral.
FIBRES nerveuses. Etant donné les lésions cellulaires précé-
dentes, les fibres nerveuses ne sauraient être intactes. Partout, on
note une diminution de nombre des tubes nerveux, qu'il s'agisse
des couches tangentielles ou des fascicules radiaires. Mais cette
diminution de nombre ne va jamais jusqu'à la disparition totale
des fibres qui se retrouvent, encore assez nombreuses, dans toutes
les zones de l'écorce cérébrale, depuis la zone d'Exner jusqu'au
centre ovale proprement dit. En outre, les fibres nerveuses, exami-
nées isolément, sont plus grêles qu'à l'état normal, même quand
il s'agit des fibres relativement grosses, qui entrent dans la cons-
titution des fascicules radiaires. En un mot, on retrouve au
niveau des tubes nerveux la dysgénésie ou l'arrêt de développe-
ment si évident pour les cellules nerveuses.
Sclérose névroglique. Malgré les altérations parenchyma-
teuses, si accusées, qui viennent d'être décrites, le tissu névro-
glique n'a pas subi des modifications bien considérables. Sans
doute, la couche névroglique immédiatement sous-pie-mérienne
est épaissie, plus dense qu'à l'état normal; ses fibrilles, finement
ondulées, contractent çà et là quelques adhérences avec les feuil-
lets de la méninge voisine; mais, partout ailleurs, les éléments
névrogliques, cellules et fibrilles, conservent leur disposition habi-
tuelle. En résumé, à part la légère sclérose des régions tout-à-fait
superficielles de l'écorce cérébrale, la névroglie ne parait pas avoir
pris une part bien considérable à l'évolution du processus patho-
logique.
Réflexions.
I. Nous n'avons pas à revenir sur les symptômes clini-
ques, que nous avons minutieusement décrits dans le
Compte rendu de Bicêtre de 1889 - Deb..., nous le répé-
'Deb... est entré dans le service en février 1890. Mais, en raison de
l'importance de son observation, nous l'avons insérée à la fin du Compte
rendu de 1889 qui allait paraitre. Voir p. 93-96.
130 Idiotie liIxQ : DEI1'l'EUSE.
tons, était un des plus beaux types d'idiotie myxoedéma-
teuse que nous avons observé. Les figures 12, 13 et 14,
jointes à celles que nous avons données en 1889 et
en 1896, ne laissent aucun doute à cet égard.
II. Le traitement thyroïdien en julep, puis en injections sous-
cutanées n'avait produit, chez lui, aucun résultat. Appliqué
en ingestion stomacale en juin et juillet 1895, la taille n'a
gagné que deux centimètres et demi z1896). Bien que, en
raison des phénomènes graves occasionnés par le traitement,
nous n'ayions pas cru devoir le reprendre, la taille, station-
naire en 1897, s'est élevée à 97 centimètres en 1898, s'y est
maintenue en 1899 et 1900, puis est montée successivement
à 99 centimètres, à un mètre ( 1901), enfin à 1 m. 05 en 1902.
Elle n'en était pas moins à 63 centimètres au-dessous de la
taille moyenne à son âge (36 ans), qui est de '1 m. 68 :
nanisme myxoedénatezlx.
III. Sous l'influence du traitement, et sans doute aussi de
l'âge, la fontanelle antérieure, qui persistait encore il y a
quelques années, s'est fermée et, à l'autopsie, nous avons
trouvé à sa place une plaque osseuse transparente.
IV. Bien que Deb..., fut âgé de plus de trente-six ans, la
puberté, chez lui, ne s'était pas développée. La face, les ais--
selles, le corps étaient à peu près tout à fait glabres. Il
n'existait que quelques poils au pénil, les organes génitaux
étaient restés infantiles, et jamais il n'a manifesté d'impul-
sions génitales.
V. La température rectale de Deb... était d'habitude,
comme chez tous nos myxoedémateux, au-dessous de la nor-
male. Au moment de la mort, presque foudroyante, elle
était descendue à Ci, cas d'hypothermie s'ajoute à ceux
que nous avons consignés dans maintes publications, entre
autres dans le Compte rendu de lIicêtl'e de 1901 (p. 167). A
un moment, après la mort, elle a même été au-dessous de
la température du milieu ambiant.
VI. La description du squelette, peut-être la première
aussi détaillée, l'analyse chimique de la peau', l'examen
1 Voir une analyse semblable de MM. Yvon et Thabuis [Compte rendu
de 1886, p. 46); de M. Requiem (Compte rendu de 1889, p. 99 et de
M. Cornet (Compte rendu de 1894, p. 122).
RÉFLEXIONS. 131
histologique du cerveau ' font de cette observation l'une
des plus complètes, sinon la plus complète, qui ait été
publiée jusqu'à ce jour sur l'idiotie myxoedémateuse.
VII. Depuis 1880 jusqu'à ce jour, il a toujours existé
dans le service quelques cas de nzyxoedènze infantile. De là,
un certain nombre de publications personnelles que nous
croyons devoir rappeler à la fin de cette observation :
'1° Note sur un cas de crélinisme avec myxoedème ou
cachexie pachydennique. Compte rendu de 1880, p. 16 (en
collaboration avec d'Ollier); - 2° De l'idiotie compliquée de
cachexie pachydermique ou idiotie c1'étinoïde. Compte
rendu de 1886, p. 3 (en collaboration avec P. Bricon) ;
3° Nouveau cas d'idiotie avec cachexie pachydermique;
idiotie crétinoïde ou idiotie myxoedémateuse. Compte
rendu de 1888, p. 3; - 4° De l'idiotie avec cachexie pachy-
dermique. Compte rendu de 1889, p. 51, et Association
française pour l'avancement des sciences (août 1889) ;
5° Nouvelle observation d'idiotie myxoedématellse ou
cachexie p(/chyde1'1nique. Compte-rendu de 1889, p. 172;
6° Nouvelle contribution à l'étude de l'idiotie myxoedé-
mateuse. Compte-rendu de 1890, p. 206 (Congrès de méde-
cine mentale de Rouen); - 7° Etat du squelette d'un ma-
lade atteint d'idiotie ntyxcedénzateu.se. Compte-rendu de
1891, p. 34; 8° Idiotie my,r;oedématellse. Compte-rendu
de 1894, p. 9'2; - 9° Trois cas d'idiotie myxoedémateuse
traités par l'ingestion thyroïdienne. Compte-rendu de 1895,
p. 167, et Congrès des aliénistes et neurologistes de B01'-
deaux, t. II, p. 178; 10° Nouveau cas d'idiotie avec
cachexie pachydermique. Compte-rendu de 1896, p. 49.
Communication faite à la Société de Biologie, séance du
15 mai 1896; 1 1° Cinq cas d'idiotie myxoedématellse (Bul-
letin de la Société médicale des hôpitaux, 1897, p. 32;
12° De l'action de la glande thyroïde sur la croissance et
l'obésité chez les idiots myxoedématenx, obèses ou atteints de
nanisme (Congrès des aliénistes et neurologistes de Nancy,
1896, t. II, p. 372); 13° Myxoedème infantile (Communi-
1 Un de nos anciens internes, M. Pilliet, nous a donné un examen
histologique du cerveau de Cab ? (myxoedémateux) et de sa peau (Compte
rendu de 1889, p. 97). - Du même auteur : Encéphalites chroniques
de l'enfance (Ibidem, 1). 113).
132 ' Bibliographie.
cation faite au Congrès international de médecine de 1900,
section de neurologie); 14° Idiotie myxoedémateuse; '-
traitement thyroïdien; observation de Félicie T... Compte
rendu de 1900, p. 22. Toutes ces observations ont été
illustrées de nombreuses figures et de planches. - '1;)0 La
scoliose myxoedémateuse (Progrès médical, 1902, article
reproduit à la p. 74 de ce volume).
XI 1
Idiotie profonde avec nanisme et infantilisme;
amélioration considérable.
Par BOURNEVILLE.
En dehors des petites notices qui figurent dans la pre-
mière partie des Comptes rendus annuels de notre service,
des communications que nous faisons de temps en temps
aux Congrès des aliénistes et neurologistes et de deux
thèses', nous n'avons publié que rarement, à tort, les obser-
vations complètes des enfants idiots améliorés ou guéris.
L'observation que nous allons relater, choisie entre beaucoup
d'autres, dans laquelle on suit année par année les progrès
de l'enfant, montrera à nos lecteurs que même dans les cas
les plus graves on obtient de très sérieux résultats.
Sommaire. - Enfant naturel. - Père, rien à noter. - Renseigne-
ments nuls sur sa famille. - Mère eczémateuse, pas d'accidents
nerveux. - Grand-père maternel mort de paralysie du cerveau. -
Grand'mère maternelle, alcoolique, morte d'une congestion céné-
braie. - Deux cousins germains morts de convulsions. - Soeur,
convulsions de l'enfance.
Pas de consanguinité. - Inégalité d'dge de douze ans.
Conception, grossesse, accouchement, naissance, rien de particu-
lier. - Normal jusqu'à neuf mois. - Convulsions répétées de
neuf mois à trois ans. - Marche à deux ans et demi. - Parole
nulle. Gâtisme. - Intelligence nulle.
1890 : Teigne. - 1891 : rougeole. - 1892 : persistance de la
teigne ; diarrhée.
1893 : Guérison de la teigne. - Rumination. - Début de l'amé-
lioration, préhension plus sùre, attention plus fixable. - Carac-
tère toujours sournois.
Griffaut. - Contribution à l'élude du traitement de l'idiotie, 1896;
- Boyer Traitement médico-pédagogique de l'idiotie.
134 Idiotie profonde avec nanisme ET infantilisme.
1894 : Diminution progressive des tics.
1895 : Guérison du gâtisme. - Développement de la parole. -
Accès de colère persistants.
1896 : Progrès scolaires. - Manies, bizarreries.
1897-1902 : Développement progressif de l'intelligence, l'enfant
sait lire, écrire, faire les premières règles, etc. -Notions usuelles
très étendues. Parole libre. Guérison des tics.
Lem... (Georges), né à Paris le 21 mars 1887, entre à trois ans à
l'asile-école de Bicêtre, le 29 avril 1890. Enfant naturel.
Antécédents héréditaires. - Renseignements fournis par la mère
le a mai 1890. - Père : quarante-cinq ans, typographe, toujours
en bonne santé, non alcoolique. Intelligence ordinaire, travaillait
régulièrement, bon ouvrier. Pas de violence vis-à-vis de la mère.
Caractère calme. Il a abarrdonné la mère de ses enfants il y a
deux ans, et serait mort, on ne sait de quoi, peu de temps après
la séparation. Il n'a eu aucune discussion avec elle et, depuis, la
mère ne l'a pas-revu. Indifférent vis-à-vis de ses enfants. Pas de
migraines. Pas de dartres ou d'affections cutanées. Aucun indice
de syphilis. Nul renseignement sur sa famille.
Mère, trente-trois ans, brocheuse. Santé toujours bonne. Femme
de taille élevée, physionomie assez intelligente. Pas de convulsions.
réglée à quinze ans et demi. A quatorze ans, a eu un eczéma. Pas
de migraines, pas de signes de syphilis. Intelligence moyenne.
Famille DE la sikre. Père, sobre, mort d'une paralysie au cer-
veau ( ? ). - Mère, alcoolique, elle buvait de tout et s'enivrait plu-
sieurs fois par semaine, violente, morte d'une congestion cérébrale
avec aphasie.Gr.-për maternel, pas de renseignements.- Grand'-
mère maternelle, sobre, morte d'une tumeur de l'estomac. - Deux
tantes maternelles mortes jeunes de la poitrine.
Une soeur, en bonne santé ; de ses sept enfants un est mort
de convulsions ; un autre a eu des convulsions. - On ne connaît ni
aliénés, ni épileptiques, ni arriérés, etc., dans la famille, d'ailleurs
limitée.
Pas de consanguinité. 12 ans de différence d'âge entre les
parents (père plus âgé).
Quatre enfants : 1° Garçon mort du croup à deux ans et demi.
Pas de convulsions, intelligent ; 2° Garçon mort à six mois du
choléra infantile. Pas de convulsions; -' 3° Fillette de cinq ans,
bien portante, bien développée pour son âge. Intelligence ordinaire.
Trois ou quatre convulsions à six semaines qui n'ontjamais reparu
depuis. Pas d'incontinence nocturne d'urine.
4° Notre malade.-A la conception, les parents étaient encore bien
unis. Grossesse normale : pas d'accidents, pas de traumatisme; pas
d'émotions morales, pas de maladies infectieuses. - Accouchement
Antécédents. 135
normal, à terme par le sommet. Pas d'asphyxie à la naissance.
Nourri au sein pendant trois mois par une nourrice saine ; ensuite
a pris le lait au verre. A quatre mois, il se développait bien.
Revu par sa mère à huit mois, il était tout à fait normal, époque
où il a eu sa première dent : il regardait, gazouillait, jouait, se
tenait autour des chaises, en un mot paraissait tout à fait normal.
A neuf mois, début des convulsions. Il en a eu 5 en trois jours,
l'une d'elles, vue par la mère, aurait duré deux heures. Les mem-
bres étaient roides, retournés, la figure était de côté. Il ne pou-
vait plus se tenir sur les jambes. La mère l'a repris et l'a placé
à côté de son domicile. Les convulsions le prenaient deux ou trois
jours de. suite, puis cessaient pendant denx ou trois jours. Elles
étaient surtout toniques, étaient égales des deux côtés et duraient
trois ou quatre minutes. De deux à trois ans, les convulsions se
sont espacées, venant toutes les semaines puis tous les quinze
jours. La physionomie était devenue sans expression.
Il a commencé à marcher à deux ans et demi. On a alors remar-
qué que l'un des pieds (on ne peut dire lequel) était tourné et
appuyait sur son bord externe. Cette sorte de pied bot varus
n'existait plus à l'entrée à Bicétre.
. Il ne comprend rien. Parait complètement sourd, au dire de la
mère. Il a marché à deux ans et demi. n'a jamais dit qu'un mot
« maman » et encore il le dit très indistinctement et sans s'adres-
ser à sa mère. Il grimace beaucoup depuis ses premières convul-
sions, bave, tette sa langue, crie par moments, se jette de côté, se
ferait du mal si on ne le surveillait. Il ne reconnait passa mère. Il
repousse les autres enfants, même sa soeur. - Il ne demande
pas à manger, mastique mal, est gâteux. Le développement des
jambes ne parait pas proportionnel à celui des bras. -Pas de vers,
d'onanisme, de traumatisme. - La dentition n'a été complète qu'à
trois ans.
Pas d'autres maladies infectieuses qu'une rougeole à dix-huit
mois, qui aurait été forte (toux et fièvre). A deux ans il aurait eu
beaucoup de gourmes à la tète et à la face. On n'aurait pas remar-
qué de rumination ? - Aucun signe de connaissance et d'affection.
La mère, à qui il ressemble, dit-elle, attribue l'idiotie aux convul-
sions.
État actuel (14 mai 1890) (Fig. 19),-Enfant blond, lymphatique.
Pas d'adipose, d'émaciation ; air de maladie, crie fréquemment,
surtout s'il est seul ; quand on est près de lui, il se tait brusque-
ment. Peau blanche, glabre; aucune cicatrice de vaccin;
absence complète de poils. Ganglions assez nombreux au cou et
dans les plis de l'aine, aucun sous les aisselles. Cheveux implantés
régulièrement ; tourbillon postérieur non dévié. Sourcils blonds,
régulièrement implantés. Cils longs, châtains...., -
136 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.
Tête assez grosse, volumineuse à la partie supérieure. Crâne :
forme ovoïde : la partie postérieure est très volumineuse et de
beaucoup prédominante sur-la partie antérieure ; symétrique en
apparence. Bosses frontales très saillantes ; ecchymose au niveau
de la bosse frontale droite. Pas de persistance des fontanelles.
Front élevé (6 centimètres), mais peu large, se confondant rapi-
dement avec les tempes. Vi.-age oval, arcades sourcilières peu
saillantes, pas d'exophthalmie; paupières normales, fentes palpé-
braies horizontales. Les yeux sont mobiles en tous les sens. Pas de
strabisme, pas de paralysies, pas de nystagmus. Iris bleuâtre;
pupilles symétriques, non déformées, réagissant bien à la lumière
Fig. 19. - Lem..., ((;porges), né à Paris, le 21 mars 1887. Entré le
29 avril 1890. (l'holographie prise en mai 1890.)
DESCRIPTION DU malade. 137
et à l'accommodation. Pas de lésion de la cornée ou de la conjonc-
tive ; pas de larmoiement. L'examen fonctionnel ne peut être fait.
l'enfant fermant' les yeux constamment d'une part, d'autre part z
son absence complète d'intelligence, de compréhension empêchant
d'avoir des renseignements sur l'acuité visuelle, la notion des cou-
leurs. etc. Ne : . petit, arrondi, à courbe supérieure et dorsale ;
narines étroites, sillon naso-labial assez accentué. L'odorat paraît
exister. - Pommettes peu marquées, régulières, symétriques. -
Bouche petite, horizontale, lèvres minces, l'inférieure plus volumi-
neuse, mais non éversée. - Langue grosse, palais et voile nor-
maux. Amygdales normales. Le goût semble exister. Il y a 8
dents de lait à chaque mâchoire. - L'expression du visage indique
que l'enfant fait la différence des saveurs. Oreilles grandes, mais
non écartées. Ourlet régulier, ainsi que les autres parties consti-
tuantes de l'oreille ; conque large ; ouie obtuse, mais existante.
Cou court, circonférence 27 centimètres. Corps thyroïde percep-
tible. 1
Thorax assez large, dilaté à la base, potelé comme le reste du
corps, pas de saillie des omoplates ni de déviation du rachis.
Battements du coeur réguliers. Rien à l'auscultation des pou-
mons. - Abdomen peu volumineux. Rien du côté du foie ou de la
rate.
Organes génitaux : bourses petites, rétractées, les deux testicules
de la grosseur d'une olive sont dans les bourses. Verge : longueur,
4 centimètres ; circonférence, 3 centimètres. Prépuce long, gland
découvrable. Anus normal.
Membres supérieurs réguliers, normaux, cylindriques, potelés,
mais peu musclés ; doigts longs, ongles courts.
Membres inférieurs : rien à signaler, pas de déviation osseuse,
pas de pied plat. Ongles et orteils courts.
Sensibilité normale à la piqûre, au pincement, à la température.
Réflexes rotuliens semblant disparus ainsi que les réflexes olécra-
niens ( ? ) ; réflexe pharyngien normal. Pas de trépidation spinale.
Lem... ne s'aide en rien, sauf qu'il se sert un peu de la cuiller.
Parole nulle. Il mange seul en se servant uniquement de la
cuiller. La mastication est bonne, pas de bave, de rumination ni
de vomissements. La digestion est bonne. Diarrhée très fréquente.
Très turbulent et entêté. Sommeil bon. Ne s'habille, ni ne fait
seul sa toilette. - En résumé, idiotie profonde.
19 entrai : Bronchite légère. Guérison le 2 juillet.
29 juillet : Corps glabre. Verge courte, longueur 4 centimètres.
Circonférence 0,03 prépuce court, ne peut être ramené en arrière.
Bourses pendantes, testicules égaux, un peu plus gros qu'une
olive. Anus normal.
29 septembre. - Entre au pavillon d'isolement pour la teigne.
4, octobre, - Vaccination, Succès complet : six pustules vaccinales.
13ouRNEILLr, IVicêlre 1902. 9
138 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.
Pendant toute l'année 1891, l'enfant ne fait aucun progrès.
Parole nulle. Gâte la nuit et le jour.
- 1891. 20 juin. -Rougeole : éruption discrète qui commence à pâlir,
le 22. La température s'abaisse le même jour.
26 juin. - Il n'y a plus trace de l'éruption, pas de complication.
3 juillet : Guérison complète.
1892. Commence à être un peu propre le jour à partir de sep-
tembre. En décembre, va seul aux cabinets. Mange proprement,
mais il ne se sert toujours que de la cuiller.
'* 18 mars. Plaque de teigne assez bien délimitée au niveau
du tourbillon ; petites plaques disséminées en avant. Traitement :
épilation, sublimé, emplâtre de Vigo.
fin. 20. Lem... (Georges) eu octobre 1892.
Traitement médico-pédagogique. 139
Juillet. État stationnaire de la teigne. Diarrhée. Organes
génitaux : Verge : longueur, 6 cent., circonférence, 5 cent. Phimo-
sis. Le gland n'est pas découvrable. Testicules de la grosseur d'un
gros haricot, égaux. Région anale normale.
8 octobre. -Eruption pustuleuse disséminée sur toute la surface
de la tête. (Fig. 20). , .
1893. 16 juin. Amélioration considérable de la teigne, mais il
existe encore sur la tête une éruption papulo-pustuleuse. - Même
état des organes génitaux.
Août. Passe à la petite école. Il est guéri de la teigne. il con-
tinue à gâter le jour et la nuit. Il rumine presque continuellement
pendant l'heure qui suit le repas. En classe est toujours souriant et
montre de la bonne volonté.
Octobre. Va seul aux cabinets le jour. La parole est toujours
Fig. 21. Lem.... (Georges) en avril 1894.
140 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.
nulle, mais l'enfant aime beaucoup entendre parler et chanter. Il
sourit à tout ce qu'on lui dit et se montre très docile et très
attentif à la -classe. Il commence à lacer ses souliers et â placer
exactement les cartons sur le tableau de couleur, à exécuter les
premiers mouvements de gymnastique et saute les deux premiers
degrés de l'escabeau. Caressant, gai, joueur. Pleure très rare-
ment. Pas d'onanisme. Ni voleur, ni gourmand; Tenue générale
bonne, soigneux; se regarde quand on lui met une robe propre ou
des souliers neufs et son attitude exprime la joie. Il se balance
.latéralement, en levant alternativement les pieds et roulant la
langue dans la bouche.
1894. 16 juin.-Même état des organes génitaux (Fig. 21). Parole
toujours nulle. Parait comprendre ce qu'on lui dit. N'est presque
Fig. 22. Lem..., (Georges) en octobre 1895.
Traitement MÉDICO-PÉDAGOGIQUE. '141
plus du tout gâteux. Le balancement a presque disparu. Aujour-
d'hui il ne lui reste plus guère qu'un clignement de l'oeil gauche.
Caractère affectueux, aime les caresses, quelques colères sans
durée. Mange gloutonnement, ne semble jamais rassassié, flaire
ses aliments . Place bien les couleurs, distingue les surfaces, un plus
grand nombre d'un plus petit. Exécute les premiers mouvements
de la gymnastique des échelles. .
Décembre. Essaie de balbutier quelques paroles : «attends, va
voir. » Place quelques lettres et quelques chiffres, mais ne les dis-
tingue pas. Les tics de balancement et de grincement ont beaucoup
diminué. Les cris ont cessé. Il demande à aller aux cabinets en
disant « envie ».
1895. Juillet. - Puberté : visage, aisselles, pubis glabres. Verge,
longueur, 4 centimètres ; circonférence, 4 cent. 1/2. Testicules dans
les bourses, du volume d'un haricot, prépuce recouvrant entière-
ment le gland ; région anale normale.
Parole améliorée, essaie de répéter les mots, mais avec difficulté.
Articulation très défectueuse. 11 connaît les lettres, les chiffres, les
couleurs. Exécute bien tous les mouvements de petite gymnastique.
Décembre. Tout à fait propre le jour, gâte quelquefois la nuit.
Connaît les parties de son corps, les vêtements, un peu les jours
de la semaine. Il est toujours méchant et sournois avec ses cama-
rades (Fig. 22).
1896. Parler toujours défectueux dans l'articulation. Les pro-
grès scolaires sont lents, car l'attention est toujours distraite. Les
tentatives pour le faire syllaber ne donnent pas encore de résultats.
Lem... est absolument propre, ne gâte plus ni jour ni nuit. - Les
accès de cris, le balancement, les grincements de dénis ont com-
plètement disparu. Lem... tient mieux le crayon, trace des bâtons,
lace, boutonne, mais ne parvient pas à nouer.
Décembre. Caractère fantasque ; reste parfois plusieurs jours
isolé volontairement de ses camarades, criant, riant, sautant et
paraissant manquer totalement de lucidité. Dans ces périodes il
est impossible de rien en tirer; l'attention est absolument nulle.
D'autres fois, il est docile, s'applique à ce qu'il fait, est très heureux
qu'on s'occupe de lui, est sensible aux compliments et aux repro-
ches (Fig. 23). Il a la manie de promener sa langue dans sa bouche
et de la mordiller toutes les fois qu'il est occupé. Lorsqu'il est
joyeux, il ouvre la bouche démesurément, baisse la tête et saute
en crispant les poings.
1897. Août. Corps glabre. Verge : longueur, 5 centimètres ;
circonférence, 4 centimètres ; phimosis. Testicules égaux. Anus
normal. Parole très améliorée, commence à faire. de petites
142 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.
phrases, telles que : cc Je ne veux pas à la soupe. 11 a battu Geor-
ges,ete.B(/t.24).
Décembre. Beaucoup d'amélioration dans les exercices sco-
laires : il commence à savoir tenir la plume, à faire des C et des 0.
Il a fait beaucoup de progrès pour la lecture. Il est heureux quand
on le fait travailler. Lorsqu'on l'appelle pour lire, il se frotte
les mains et saule en signe de satisfaction. Il reconnaît et nomme
les petites quantités. Il est toujours colère et fantasque. Il aime à
frotter son visage sur les oreilles et le cou de ses camarades et très
souvent la caresse se transforme subitement et il mord avec
frénésie.
1898. Juin. Progrès dans l'écriture. Il lit et retient avec une
Fig. 23. - Lem..., (Georges) en juin 1896.
Traitement DIED1CC-PÉD.1GOGIQUE. '143
facilité surprenante les mots imprimés, mais n'apporte aucun goût
à la lecture dans le Syllabaire.
1899. Juin. Prend goût à la lecture du Syllabaire, qu'il ne
voulait pas regarder. Dans le Syllabaire de même que pour les
mots imprimés, il ne retient que les mots qu'il comprend et ces
mots il les lit indifféremment à l'envers et à l'endroit. Il est doué
d'une mémoire surprenante. L'écriture s'améliore. Progrès abso-
luments surprenants dans la parole qui était absolument nulle.
Chaque jour il emploie des mots nouveaux (Fig. 25).
1900. Janvier. - Lem... prend goût à tous les exercices clas-
siques. Il copie les mots qu'il lit et même en écrit un cer-
tain nombre de mémoire, tels que les jours de la semaine, les
Fig. 21. - Lem..., en octobre 1897.
144 Idiotie PROFONDE avec nanisme et infantilisme.
nombres dont il connaît la valeur jusqu'à 10. Caractère plus
doux, plus docile, moins rageur.
Juin. Amélioration persistante et progressive dans la paroie,
la lecture, l'écriture. Lem... trace tous les chiffres, commence à
faire de petites additions.
1901. -Tout le corps est glabre, verge, 6 cent. 1/2 de longueur ;
circonférence, 0 centimètres. Gland recouvert par le prépuce qui
ne décalotte pas. Testicules du volume d'un oeuf de moineau. Anus
normal.
Parole encore défectueuse, mais Lem ? a acquis cette année ch,
g, v, z, j, r, ill, gu, bl. Tous ces sons, bien articulés au commence-
''ment ou dans le corps des mots, sont nuls lorsqu'ils forment la
syllabe finale d'un mot terminé par un e muet. Progrès pour tous
les exercices, surtout pour les leçons de choses.
Fig. 2o. - Lem..., (Georges) en octobre 1899.
Traitement lltEDICG-PEDAGOGIQUE. 145
Juin. Progrès pour la classe, mais difficulté pour le calcul. Il
lit couramment, commence à faire des devoirs élémentaires sur la
grammaire. Caractère susceptible, ne supportant pas les taquine-
neries de ses camarades. Il a perdu l'habitude de flairer. Son goût
est encore bizarre, il ne veut ni charcuterie, ni aucun fruit.
Décembre. -Commence quelques petits exercices de grammaire.
Difficulté pour le calcul, fait l'addition, commence la soustraction.
La parole est encore défectueuse pour certaines consonnes se trou-
vant dans le corps d'un mot. Ainsi il dira ]JI'ojelion pour projection,
cccninet pour cabinet. De même, par paresse et non par difficulté.
il supprime d'habitude les syllabes finales, muettes, des mots. Son
caractère est toujours rageur. Lorsqu'il est en colère pour un motif
quelconque, Ions ceux qui sont à sa portée en subissent le contre-
coup, et à défaut de camarades dans son voisinage, ce sont les
tables, les portes, les fenêtres, qui reçoivent coups de poings et
coups de pieds.
1902. Décembre. - Lem... apporte beaucoup d'application à la
gymnastique et aux travaux de la classe. Il comprend bien ce qu'il
lit, écrit mieux, fait l'addition et la soustraction avec retenues,
ébauche la multiplication. Il a une mémoire extraordinaire pour
les mots qu'il a lus. 11 fait quelques exercices élémentaires de gram-
maire ; il applique assez bien le genre et le nombre, copie des
verbes, fait un pcu d'analyse. 11 reste toujours maniaque. Il ne
faut, pas que rien vienne intervertir l'ordre des choses établi, sinon
il est furieux. Si, pour une cause ou une autre, une des infirmières
change son jour de sortie, il l'invective et bougonne toute la jour-
née à ce sujet. Dans une promenade, si l'on ne revient pas par le
même chemin que l'on a pris en allant, il se met en colère et récri-
mine pendant le trajet. Si le jour où l'on a l'habitude de faire la leçon
orale de grammaire, on fait une leçon de choses, il est fâché, ne
veut rien écouter, ne répond que des bêtises aux questions qu'on
lui pose et fait en sorte de troubler l'ordre.
Ses camarades qui s'aperçoivent de sa bizarrerie de caractère,
le taquinent souvent, alors ce sont des rages : il crie, trépigne, tape
à droite, à gauche tout ce qui l'environne (meubles et gens) et ne
se calme que lorsque l'on fait signe de le conduire en cellule.
(Fig. 26).
Puberté et organes génitaux. Sauf un peu de duvet très fin
au-dessous des oreilles et aux extrémités de la lèvre supérieure,
tout le corps est glabre. Les bourses sont pendantes, les testicules
égaux, de la dimension à peine d'un oeuf de pie La verge mesure
0 cent, de longueur et de circonférence. Le prépuce est long, étroit
et ne permet de voir que l'extrémité du gland. Le méat paraît plu-
tôt petit (Phimosis). Rien à l'anus. - Lem... ressemble non à un
adolescent, mais à un enfant.
146 Idiotie profonde avec nanisme ET infantilisme.
RÉFLEXIONS. -1. Nous n'avons,rien à relever du côté du père,
enfant naturel, dont la famille est inconnue. - Du côté ma-
terne), nous notons la mort du grand-père de l'enfant par
une paralysie ducerveau, celle de la grand'mère, alcoolique,
par une congestion cérébrale, des convulsions chez plusieurs
cousins.
II. Lem..., d'après les renseignements fournis par sa mère
''et que nous avons tout lieu de croire exacts, aurait été tout
à fait normal, jusqu'à neuf mois. Surviennent à ce moment
des convulsions sous forme d'étal de mal (2 heures), qui se
F-ig. 26. - Lem.... Georges en octobre 1902,
Traitement MÉDICO-PÉDAGOGIQUE. 147
répètent trois jours et déterminent l'idiotie complète :
absence de développement de la parole, persistance du
gâtisme, impotence des membres, regard sans expression,
attention nulle, arrêt de la dentition, etc. Les convulsions
se sont répétées fréquemment de neuf mois à deux ans presque
quotidiennement sous forme plutôt de petits accès. De deux
à trois ans, elles s'éloignent de plus en plus et enfin dispa-
raissent à 3 ans. Il se produit alors une première améliora-
tion, légère toutefois et portant exclusivement sur l'état phy-
sique : l'espèce de paralysie de l'un des membres inférieurs
disparaît. Intellectuellement rien : l'attention ne s'éveille
pas, la physionomie reste idiote, on croit l'enfant sourd. z
III. De 1890 à 1893, en raison de la teigne, le traitement
médico-pédagogique n'a pas été sérieusement appliqué. Il
ne l'a été qu'à partir du mois d'août 1893. L'enfant est devenu
propre, la figure a offert un commencement d'expression,
l'attention s'est développée.
A partir de 1895, les tics ont diminué, puis disparu. La
parole est venue, l'enfant a appris à se laver, à s'habiller, à
manger seul, en un mot à ne plus avoir besoin d'aide. Enfin
il a appris à lire, à écrire, à compter, à faire les trois pre-
mières règles, à connaître, nommer les personnes et les
choses. Les sentiments affectifs, nuls autrefois. se sout déve-
loppés, l'enfant est affectueux pour sa mère et les personnes
qui l'entourent. En résumé, aujourd'hui, si l'enfant était
présenté pour la première fois, ce ne serait plus le dia-
gnostic : idiotie profonde que nous porterions, mais celui
d'imbécillité.
IV. Il suit aussi de ce qui précède que l'on doit s'occuper
activement des idiots les plus malades, complets, êtres végé-
tatifs et ne pas les reléguer dans le coin le plus dissimulé des
hospices ou des asiles, comme certains médeçins qui ne con-
naissent que superficiellement les malades, n'ont quelque-
fois ni vu ni lu, le demandent, les considérant comme insus-
ceptibles de toute amélioration. Il faut appliquer avec régula-
rité et patience le traitement ntédico-pédagogic2ce pendant
plusieurs années, avant de déclarer les idiots complets incu-
rables. L'histoire de Lem... en est la preuve. Nous avons cité
bien d'autres cas analogues qui justifient notre opinion.
148 IDIOTIE PROFONDE avec nanisme ET infantilisme.
150 Traitement MEDICO-PEDAGOGIQUÈ.
V. Une particularité, observée chez Lem..., mérite d'être
relevée : c'est que pendant bien des années, jusqu'à son
admission à Bicêtre, il était considéré comme sourd. Il ne
l'était pas, en réalité; sa surdité n'était qu'apparente. Ce
quilui manquait, c'était l'attention auditive.
VI. L'idiotie, ici, était compliquée de nanisme avec infan-
tilisme. L'examen du tableau de la faille, prise deux fois par
an, de 1890 à 1902, montre qu'elle a toujours été notable-
ment au-dessous de la moyenne. A la fin de 19002, elle était
de 1 m. 36 au lieu de 1 m. 55, soit en moins z19 centimètres.
L'infantilisme est indubitable : physionomie enfantine,
absence de poils à la face, sur le corps, au pénil ; organes
génitaux peu développés, en somme aucun signe de puberté
malgré son âge (seize ans). Pas d'onanisme, aucune mani-
festation génitale.
VII. Bien que la mère n'ait pas remarqué la rumination ,
elle a été constatée peu après l'entrée. Elle a été plus mar-
quée à certaines périodes et revient encore de temps en
temps. Les cas de rumination qui étaient nombreux dans le
service, autrefois, deviennent de plus en plus rares'.
' Le tableau des mensurations de la tête, offre quelques différences
qui s'expliquent soit par un amaigrissement momentané, soit parce
que les cheveux étaient plus ou moins courts. Les irrégularités dynamo-
métriques tiennent à ce qu'on ne peut pas toujours obtenir la même
attention chez l'enfant.
XII
Un cas de maladie des tics; guérison;
Par BOURNEVILLE et POULARD'
L'affection nerveuse désignée par Charcot sous le nom de
maladie des tics est, en général, considérée comme incu-
rable. D'après beaucoup d'auteurs, les rémissions qu'elle pré-
sente ne seraient que passagères et incomplètes.
Une jeune fille, qui en est atteinte depuis dix ans, que
nous suivons depuis 1890, vient d'en être complètement, si-
non définitivement, débarrassée. C'est en raison de cette
guérison, contraire à la plupart des opinions reçues, que
nous avons cru devoir rapporter son histoire qui a naturelle-
ment sa place dans une discussion sur les tics.
Sommaire. - Père rhumatisant. Grand'mère paternelle, hémiplégie
gauche. Arrière- grand-père paternel mort d'une congestion cérd-
brale. Arrière-grand'mère paternelle morte avec une hémiplégie.
Grand-oncle paternel mort d'une attaque d'apoplexie.
Mère : céphalalgies, sourde, caféisme, morte d'apoplexie cérc-
brale. Grand-père maternel alcoolique, mort à si troisième attaque
d'apoplexie. Grand'mère maternelle morte d'un cancer de l'utérus.
Grand-oncle maternel bègue. Oncle maternel mort de tuberculose.
Frère mort de méningite. Autre frère, convulsions de l'enfance,
mort de tuberculose. Demi-soeur paternelle, morte d'une affection
du cerveau. Pas de consanguinité. Inégalité d'cige de onze ans (mère
plus âgée).
Conception, rien de particulier. Grossesse, ennuis et idées noires;
mouvements violents du foetus ci cinq mois. Rien d'anormal à l'accou-
' Communication au Congrès des aliénistes et neurologistes de Gre-
noble (août 1902).
'lâ2 Maladie DES tics; GUÉRISON.
chement et à la naissance. Première dent ci sept mois; dentition
complète à deux ans. Marche à onze mois. Propreté vers un ars. Acci-
dents nerveux mal déterminés et rachitisme des membres inférieurs
ri seize mois. Début de la parole à deux ans; prononciation défec-
tueuse pendant quelque temps. Accès de colère. Rachitisme guéri.
Prodromes et début des tics ri sept ans ; leurs variétés ; coprolalie ;
cla.stomanie; impulsions violentes, influence du chant, de la gym-
nastique, du traitement moral. Exacerbations et rémissions incom.
plètes. Guérison.
Vig... (Georgette), née à Paris le 19 janvier 1888, est entrée à la
Fondation Vallée le il mai 1900.
Antécédents héréditaires. - PÈRE, trente-huit ans, voyageur de
commerce à l'étranger, très sobre, rhumatisant, n'aurait pas eu la
syphilis. Pas d'accidents nerveux. Il aurait été « débauché » à dix-
sept ans par la mère de la malade, Mme veuve Lee..., alors âgée de
plus de vingt-huit ans et qui avait un enfant de six ans. Ils se sont
brouillés an bout de sept ans parce qu'il y avait des disputes entre
lui et le fils, grandi, de sa maitresse, et aussi parce qu'il la trou-
vait trop vieille. Il s'est marié depuis et a eu deux enfants légi-
times : une est morte, il dix-sept mois, de diarrhée ; la seconde est
bien portante : ni l'une ni l'autre n'ont eu de convulsions.- [Son
père, âgé de quatre-vingt-deux ans, sobre, est en bonne santé. Sa
mère est morte à soixante-dix-huit ans, dix-huit mois après une
attaque de paralysie (hémiplégie gauche). Grand-père paternel
décédé d'une congestion cérébrale, croit-on. - Grand'mère pater-
nelle, morte à soixante-dix-neuf ans, en deux jours, avec une
hémiplégie. Grand-père maternel mort asthmatique à soixante-
dix-sept ans. -- Grand'mère maternelle, morte d'une pneumonie. -
Un oncle paternel a succombé dans une attaque d'apoplexie fou-
droyante. - Ses autres oncles et tantes, ses quatre soeurs et leurs
enfants n'ont pas eu de maladies nerveuses ou mentales. [Ilien à
noter dans le reste de famille.]
Mère, quarante-huit ans, ménagère, tempérament nerveux,
caractère vif, sujette à des céphalalgies, ne paraissant pas de
nature migraineuse, surdité datant de vingt ans, attribuée à l'é-
motion qu'elle a éprouvée à la mort dé son mari, frappé de con-
gestion cérébrale et emporté en deux jours. Elle a toujours bti
énormément de café. Elle a succombé le 8 mai dernier à une
attaque d'apoplexie. [Son père, alcoolique, est mort à soixante-dix-
huit ans, à sa troisième attaque d'apoplexie. Sa mère est décédée
à quarante-cinq ans d'un cancer de l'utérus. Ses grands-parents
paternels et maternels sont morts âgés, de maladie inconnue. Un
oncle maternel est bègue. Une soeur est morte à neuf ans de la
lièvre typhoïde. Deux frères, l'un mort tuberculeux, l'autre boiteux
Antécédents. 'INJû
par accident, mais ayant une bonne santé. Rien à signaler dans le
reste de la famille : pas d'autres bègues, pas d'aliénés, etc.]
Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de plus de onze ans (mère
plus âgée).
Trois enfants : l°un garçon mort de méningite, sans convulsions,
en trois jours, à l'âge de neuf mois; 2° garçon mort à vingt-quatre
ans, de tuberculose pulmonaire ; 3° une fille, sujet de l'observation.
Antécédents personnels. - Notre malade. - Conception dans
des conditions normales, mais nous rappelons que le père avait
onze ans de moins que sa maîtresse. Grossesse sans aucune com-
plication, sauf des ennuis et des idées noires en raison de sa
situation irrégnlière et parce qu'elle craignait des reproches de
ses patrons, chez lesquels elle était depuis longtemps. Le foetus a
commencé à remuer à cinq mois, d'une manière exagérée, par
comparaison avec les mouvements de ses deux premiers enfants.
Accouchement à terme, naturel, sans chloroforme, par la tête. A la
naissance, l'enfant était petite, bien constituée, sans asphyxie, ni
circulaire du cordon. Elle a crié « énormément » les dix premiers
jours, ne dormait pas, il fallait lui donner le sein pour la calmer.
Au bout de cinq à six mois, elle était calme et le sommeil était
bon. Allaitement maternel, sevrage à deux ans. Premièredent à
sept mois, dentition complète à deux ans. Parole un peu tardive :
à deux ans elle ne disait que « papa » et « maman ». La pronon-
ciation aurait été défectueuse pendant quelque temps. Marche à
onze mois ; propreté à un an, mais elle avait été habituée au vase
à partir de trois mois.
V... aurait eu, selon sa mère, des convulsions à seize mois. Ces
prétendues convulsions paraissent se réduire à des accès de colère.
L'enfant s'est raidie, a crié, sans perdre connaissance ; elle n'a eu
ni contorsions des membres, ni convulsions des globes oculaires.
On n'aurait observé qu'une crise de ce genre. Aucune trace de
paralysie consécutive. L'intelligence ne fut pas atténuée. A cette
époque, V... avait des déformations rachitiques très accusées aux
membres inférieurs qui ont disparu vers sept ans. Caractère gai,
violent, coléreux. Turbulence extrême. Pas d'onanisme.
La santé générale a toujours été satisfaisante, sauf des bron-
chites et des troubles respiratoires, probablement de nature ner-
veuse, consistant en étouffements, en quintes violentes, suivies
d'épistaxis abondantes, sans hémoptysie. Ni céphalalgies, ni ver-
tiges, ni troubles vaso-moteurs de la face, ni rêves, etc.
V... raisonne convenablement, et bien qu'elle ait dû quitter sou-
vent l'école (le bruit qu'elle faisait en tapant du pied, en criant,
gênait ou amusait les autres enfants) ou changer de maîtresses à
cause de sa maladie, elle rattrapait très vite ses camarades. Elle
aime à faire les ouvrages minutieux, entre autres la broderie.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902. 10
154 Maladie des tics; guérison.
Comme maladies infectieuses, elle n'a eu que la rougeole à quatre
ans. Aucune manifestation scrofuleuse. Pas de vers, ni de trauma-
tisme, ni de sévices.
Comme signes avant-coureurs de la maladie des tics, nous avons
à relever un changement du caractère qui devint violent, et des
mouvements désordonnés à la maison et dans la rue. Au début, à
sept ans, alors que les accidents rachitiques commençaient, à dis-
paraître, l'enfant était agitée, ne tenait plus en place, trépignait et
poussait des « ah ! ah ! » spasmodiques. Les premiers tics ont
consisté en grimaces de la face, projection en tous sens de la
langue hors de la bouche. Cette agitation et. ces tics, bientôt com-
pliqués de coprolalie, devenant de plus en plus accusés, les voisins
se plaignirent et ses parents durent déménager deux fois.
L'agitation intermittente des différentes parties du corps et les
cris auraient progressivement augmenté et varié dans leurs carac-
tères. Voici comment la mère de l'enfant les décrit.
V... frappait des pieds à chaque instant, démolissait le buffet à
coups de talon, prenait les chaises, les projetait au loin et les bri-
sait. A table, elle cassait les assiettes à coups de fourchette. Cette
agitation destructive se manifestait surtout lorsque, l'ayant laissée
seule dans le logement, on y rentrait. Dans ces derniers temps,
V... était devenue très méchante envers sa mère, qu'elle frappait.
Mais aussitôt, s'apercevant qu'elle avait fait mal, elle demandait
pardon, disant : « Je ne l'ai pas fait exprès. » Elle poussait des cris
divers à chaque instant, proférait des grossièretés. Pendant deux
ou trois mois elle a répété sans cesse : « 11 est mort ! il est mort ! »
Ayant un jour assisté à un incendie et entendu crier : « Au feu ! »,
elle n'a cessé, durant une semaine, de crier : « Au feu ! ». Ces
expressions, grossières ou non, avaient cours pendant une période
plus ou moins longue pour faire place à d'autres expressions. Elle
faisait tant de bruit, le jour (jamais la nuit), en s'agitant, elle di-
sait tant de grossièretés que les voisins, gênés autant par le bruit
que par l'inconvenance des expressions, envoyèrent à la mère une
délégation chargée d'exposer les griefs communs et la menacer
d'une demande d'expulsion par le commissaire de police. Elle se
décida, en conséquence, à faire entrer sa lille à l'Asile clinique,
d'où elle fut dirigée sur la Fondation Vallée.
État actuel (juin). - La tète est normale dans sa forme et ses
dimensions. Les cheveux, châtain foncé, sont régulièrement im-
plantés, sans épi, avec un tourbillon unique, médian. Le visage est
pâle, un peu amaigri. La physionomie semble exprimer de la
mélancolie, de l'inquiétude et de la timidité. Les différentes parties
de la face sont régulières (nez, bouche, oreilles, etc.), ainsi que les
dents et le palais. II existe sur la joue droite une cicatrice superfi-
cielle dont la présence est expliquée par un de ses tics qui consiste
Description DE la malade. 155
à projeter sa langue sur la joue et à essuyer ensuite de la main
l'humidité laissée par la langue. Le tronc et les membres sont
réguliers et n'offrent plus aucune des déformations rachitiques
qu'elle a eues dans son enfance.
Les aisselles, le dos, le ventre sont glabres. Il y a seulement
quelques poils rares et courts sur le pénil et les grandes lèvres; les
petites lèvres, triangulaires, sont très courtes; le clitoris est
moyen; l'orifice de l'hymen est circulaire, non frangé. Les seins
sont à peine naissants. La malade n'est pas réglée.
La sensibilité générale et spéciale, les fonctions digestives, etc.,
s'exécutent bien. Les différents viscères sont normaux. Pas de
mauvais instincts ni de phobies. Sentiments affectifs peu déve-
loppés ( ? ). D'après une tante paternelle, la mère de V..., très ner-
veuse, très bavarde, et sa fille « se disputaient comme deux
gamines ». Sommeil calme, prolongé. Voix souvent rauque, voilée ;
la parole est libre. L'intelligence est au-dessus de la moyenne. Il
n'y a de retard, au point de vue de l'écolage, que par suite d'une
fréquentation irrégulière de la classe.
Les membres supérieurs sont constamment agités, exécutant des
mouvements de préhension, se portant au visage, etc. L'enfant se
frotte énergiquement les paupières. Quelques secondes après, elle
remue brusquement l'un ou l'autre bras, sans but défini. Si on lui
fait tenir un objet des deux mains, on voit les doigts s'allonger
démesurément, d'une manière convjlsive. Souvent aussi les avant-
bras font tout à coup un mouvement de pronation. ,
Les membres inférieurs, eux aussi, sont animés de mouvements
brusques, violents. La malade frappe des pieds, surtout du droit,
comme un cheval impatient qui piaffe. Au moment même où s'ac-
complit ce mouvement de la jambe, un des bras ou les deux. sont
portés dans une des différentes attitudes signalées plus haut. Les
paupières clignent, les dents grincent, un mouvement respiratoire
bruyant a lieu soudain. Tous ces mouvements sont incoordonnés,
rapides, involontaires, se répétant sans rythme, à des intervalles
variables. La course, le saut s'exécutent bien. Dans la marche, elle
frappe des pieds, principalement du droit.
Traitement. - Sirop d'iodure de fer, capsules de bromure de
camphre, hydrothérapie, gymnastique, école et ouvroir.
1901. - Même traitement, et, en outre, huile de foie de morue.
V... est très propre, sa tenue ne laisse rien à désirer; elle
est adroite pour la couture, très agile pour la gymnastique. Elle
travaille assez bien en classe, mais comme elle exige un peu
trop d'immobilité, elle s'impatiente facilement, tape sur les tables.
Elle aime tout ce qui demande beaucoup d'exercice. Elle est
heureuse qu'on s'occupe d'elle, fait tout ce qu'elle peut pour se
156 Maladie DES tics ; guérison.
rendre intéressante, parait satisfaite quand on cause d'elle. Son
caractère est plutôt doux, gai, affectueux.
1902. Janvier. Persistance des mêmes tics et de la coprolalie.
L'enfant fait des efforts pour se retenir; elle y parvient parfois
pour la coprolalie, surtout quand elle est en présence de personnes
qu'elle ne connait pas. Progrès notables pour les ouvrages
manuels et à la gymnastique.
Voici la description aussi exacte que possible des tics de notre
malade :
Le cuir chevelu glisse en arrière, le front se plisse transversale-
ment et verticalement. Les paupières des deux côtés clignent,
s'ouvrent, se ferment vigoureusement (ces tics ne sont légitimés
par aucune affection des paupières ni des yeux) et en même temps
les muscles du nez et des joues se contractent, tantôt d'un côté,
tantôt de l'autre, mais plus à droite, et la bouche s'allonge trans-
versalement ou s'ouvre démesurément; la langue sort violemment
de la cavité buccale, se mettant en lire-bouchon, se portant vers
la droite, léchant la commissure labiale et la région avoisinante de
la joue ou sur la lèvre supérieure, ou sur le menton ; aussitôt que
la langue a passé sur la joue ou les lèvres, V..., d'un revers de
main, essuie la salive (parfois la région mouillée s'ulcère), secoue
la tète, soulève les épaules subitement et très fortement, en même
temps que la tête s'incline vers l'une des épaules avec un mouve-
ment de rotation, comme si elle voulait y essuyer sa joue. Souvent
aussi, mais d'une façon moins brusque, elle porte la main à son
oreille, exécutant le geste des femmes qui, d'un tour de main, re-
mettent en place les boucles de cheveux tombant sur leurs oreilles.
Même geste de la main vers les yeux qu'elle frotte vigoureusement.
Les mouvements de la main n'ont pas eu, devant nous, la brus-
querie des autres mouvements tiqueux. Elle l'ait entendre un bruit
d'aspiration semblable à celui que font certains fumeurs en allu-
mant leur pipe, elle aspire en claquant des lèvres. Elle renifle
fortement, tousse très souvent, fait claquer sa langue contre le
palais. Elle produit, en aspirant et en écartant brusquement ses
lèvres, un bruit ressemblant à celui d'un baiser. Tous ces bruits
et tous ces mouvements sont brusques, rapides, involontaires et
ont bien tous les caractères des tics. Si on porte son attention sur
les mains, on les voit brusquement et involontairement se mettre
en pronation, en supination, s'ouvrir et se fermer. Avec ses pieds
elle frappe le sol. Quelquefois, elle lance si fortement en avant son
pied fléchi que le genou semble vouloir atteindre la tète qui s'a-
baisse en même temps.
On note également un mouvement de rotation de la tête, le
menton se portant à droite ou à gauche par suite d'une violente
contraction des sterno-cléido-mastoïdiens. Elle se rifle, elle se
Tics ; coprolalie. 157
frappe le flanc avec le coude, elle tourne précipitamment les fesses
de droite à gauche, elle sourit, siffle comme une locomotive,
renifle comme un cheval, sautille comme une chèvre, elle pousse
parfois des cris perçants, aigus; d'autres fois elle grogne, mugit.
Elle présente, en outre, à un haut degré, la coprolalie : « Merde,
hou ! con ! ah ! vache ; aïe ! putain, hue ! cul, etc.. », sont des mots
qu'elle profère très souvent. Ce langage grossier est en désaccord
avec l'éducation convenable qu'elle a reçue et contraste avec son
air doux et timide. Nous devons faire remarquer que la coprolalie,
très accentuée en temps ordinaire, a toujours disparu en la pré-
sence de l'un ou de l'autre de nous.
V... offre également le phénomène de l'écholalic. Elle répète la
fin de certains mots ou certaines syllabes de ces mots, mais elle
fait une sorte de sélection; guidée par son besoin de coprolalie,
elle choisit les syllabes qui sont grossières ou qui, un peu modi-
fiées, rappellent une expression grossière : c'est plutôt une forme
de coprolalie qu'une véritable écholalie.
Exemples : S'il s'agissait d'une observation faite à une enfant,
elle la répétait tout en y ajoutant un de ses mots familiers. Disait-
on à une petite de marcher sur le bitume, elle répétait : « Oui,
marche sur le bitte, bitte au cul, bitume », et en même temps
elle tournait ses fesses de droite et de gauche tout en avançant son
corps en avant.
Un jour, en promenade, on commande aux enfants de ramasser
des pissenlits le long de la route ; V... se mit aussitôt en devoir de
faire ce qui était commandé. En ayant trouvé un très gros, elle le
porte à la surveillante en disant : « Oh ! Mademoiselle Berthe, le
beau pissenlit ! prenez ! merde, con, cul, vache ! » et ceci dit avec
une volubilité extraordinaire, tout en tirant la langue et ouvrant
démesurément la bouche.
A l'ouvroir, la maîtresse ordonne à une enfant de rabattre les
coutures, aussitôt V... s'écrie : « Bitte rabattue ! couture rabattue ! »
tout en rejetant l'ouvrage qu'elle tenait et en se donnant une claque
au visage. On fait une observation à une compagne de ne pas se
contrarier entre elles, Georgette reprend : « Oui, con, confessional,
se contrarier » et elle secoue, en même temps, ses membres supé-
rieurs. Ces expressions, ces mots, ont toujours été spontanés,
impulsifs, sans la moindre recherche.
A la classe, les mots de ce genre surgissaient à chaque instant.
Faisait-on une leçon sur le système métrique, les mesures cu-
biques, les nombres complexes, etc., elle répétait ces mots en y
ajoutant ceux de son vocabulaire : « Mesures cubiques, bitte au
cul, cubique, nombres complexes et incomplexes, con, cul, vache,
con, complexes. » Elle prenait plaisir à répéter les phrases d'une
dictée en les accompagnant toujours d'un mot grossier, ce qui
était pour les élèves un vrai sujet de distraction ; on se rappelle
158 Maladie des tics ; guérison.
entre autre ce mot : « Rubicon », qu'elle a répété avec une into-
nation peu ordinaire en appuyant sur chacun de ces mots : Rubi-
con, cul, cou, con, cul, bitte ! ... En même temps elle a relevé ses
jupons jusqu'à la hauteur de sa taille et elle s'est assise précipi-
tamment, les fesses nues, sur son banc, tout en tirant la langue
et en haussant les épaules. Ces faits se reproduisaient journelle-
ment. ,
Ses tics ne se présentent pas toujours isolés : ils s'associent sou-
vent, s'accompagnent de jeux de physionomie qui leur donnent
une certaine expression. Quelquefois, en effet, notre malade frappe
du pied, lâche ses mains qui étaient réunies devant elle, hausse les
épaules. Cela ressemble un geste d'impatience et la ligure ex-
prime le même sentiment. U'autres fois, elle hausse les épaules,
tandis que les traits du visage prennent un aspect triste, un air
d'ennui. C'est le soir que les tics sont à leur maximum. Ils dispa-
raissent durant le sommeil.
Nous devons compléter cette description avec les notes recueil-
lies par la surveillante et ses collaboratrices.
V... rejette la tète tout d'un coup en arrière. Elle mobilise son
cuir chevelu. Brusquement, bien que pudique, elle relève jupes et
chemise. En classe, elle bouscule souvent ses voisines, leur donne
des coups de poing, de coudes, de pieds, et tout cela sans méchan-
ceté, involontairement. Simultanément, exclamations grossières.
Mai's. L'enfant est plus agitée, plus excitée que jamais. Ses
mouvements sont de plus en plus brusques et fréquents. A relever
ceci : elle ouvre démesurément la bouche, tire la langue en tous
sens ou bien contracte la bouche, fait des grimaces, etc. Elle saute,
tape du pied avec ardeur, relève sas jupes, fait des contorsions en
marchant, simultanément elle pousse des cris perçants, prononce
des paroles grossières. Durant cette période d'exacerbation tout
travail régulier est difficile : elle coud mal, envoie souvent à
droite et à gauche l'ouvrage qu'elle tient entre ses mains. Elle écrit
mal, fait des taches sur son cahier, ce qui l'impatiente; elle
arrache les pages et pleure.
Bien des particularités seraient à relever dans les antécé-
dents héréditaires. Nous nous bornerons à rappeler les nom-
breux cas de congestion et d'apoplexie du cerveau, le caféisme,
l'alcoolisme, la tuberculose, enfin l'inégalité d'âge con-
sidérable des père et mère, celle-ci ayant près de douze ans
'de plus que celui-là.
Nous trouvons réunis chez V... un grand nombre de tics
Maladie DES tics; guérison. 159
très divers, compliqués de coprolalie. Les mouvements étaient
brusques, rapides, impulsifs, involontaires. Le lavage par la
langue des joues et des lèvres, puis l'essuyage un peu brutal
déterminaient de la rougeur, des excoriations, et même
des ulcérations des régions humectées. Nul autre accident
concomitant n'est à noter. Malgré ses tics, V... pouvait
chanter, le couplet fini, ils se manifestaient. Les exercices
de gymnastique, les mouvements divers, par exemple, ne
suspendaient pas les gesticulations et les grimaces. Il n'en
est pas de même des exercices respiratoires avec les barres
d'entraînement auxquels nous avons recours depuis long-
temps à l'Institut médico-pédagogique et plus récemment à
Bicêtre qui, en maintes circonstances, nous ont paru avoir
une influence salutaire sur la disparition des tics.
Pendant les premières années, il n'y avait que des mouve-
ments convulsifs, des gesticulations, des cris. La coprolalie
aurait paru peu de temps après une visite à la consultation
de la Salpêtrière. M. Gilles de la Tourette aurait demandé si
Georgette prononçait des mots orduriers. Sur la réponse né-
gative de la mère, il aurait dit : « Eh bien ! elle en dira ».
Nous citons le fait sans commentaires.
Les rémissions, incomplètes d'ailleurs, étaient rares. Ce-
pendant, en janvier 1901, les cris, les exclamations et les
mots grossiers avaient relativement diminué. Les mouve-
ments eux-mêmes étaient moins fréquents. Par contre, en
mars 1902, il y a eu une véritable exacerbation.
' Une fois par semaine, en mai, nous avons fait venir V...
dans notre cabinet où elle restait à côté de nous pendant
deux heures. Elle était soumise à une sorte de suggestion à
l'état de veille. Les tics persistaient, atténués par ses efforts
pour se retenir. Jamais, au cours de ces séances, elle n'a
prononcé de mots grossiers. C'était là un indice'favorable.
Après ces séances, les tics et la coprolalie reparaissaient,
mais sans exagération. Au commencement de juin, les tics
se sont éloignés de plus en plus, les mouvements des mem-
bres et du corps ont disparu presque subitement et, huit
jours plus tard, les tics de la face. Dans les dernières qua-
rante-huit heures l'enfant avait subi une véritable transfor-
mation.
160 Maladie DES tics ; guérison.
A la demande de sa tante, nous lui avons accordé un
congé. Elle est allée chez des parents en Normandie et, il y
a quelques jours, nous avons appris que la guérison se
maintenait'. 1.
' A la fin de décembre 1902, il n'y avait pas de rechute.
XI.
Epilepsie idiopathique, guérison;
Par BOURSE VILLE et Max BLUMEKFELD
SOMMAinE. Père : caractère emporté; rien de particulier.
G1'and'père paternel rhumatisant. Grand'mère
paternelle goitreuse. Oncle et grand'oncle paternels,
bègues. ?
Mère : convulsions de l'enfance avec strabisme, céphalalgies,
. migraines, caractère emporté - Grand'mère maternelle
morte de tuberculose. = Grand'oncle suicidé. Deux
oncles' maternels, convulsions de l'enfance, strabisme. -
Une tante maternelle, convulsions, strabisme. Cousin
germain strabique. .
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 18 mois.
Frère, mort de 171L' ? zingitB.=S1GT, imperforation de l'anus
ac la naissance. -
Conception, 1'ien ? Grossesse, caféisme. Accouchement
et naissance, rien. Première dent il. 6 mois, dentition
complète à 2 ans ? . Marche et propreté à un an. Parole à
zig mois. Pas de convulsions. Accès de colère. .
Turbulence.. , Pneumonie à ans. Oreillons à ?
Traumatisme céphalique à 7 ans. Peur du feu, le len- z
- demain grimaces ou mieux vertiges. Quinze jours après
. accès très nombreux. - Pas d'automatisme, pas de pro-
czcrsiozz, pas de folie, pas de traumatisme dans les crises.
Guérison depuis février 1902. '
- sinon.. (Marcel J.), né à Paris le 11 janvier 1893, est entré
le 2 novembre 1901 et est sorti le 26 février z '
Antécédents. héréditaires. Renseignements fournis par le
pète le 11 novembre 1901,et complétés par la mère le. 26..
BOURNEVILLE,; Bicêtre., 1902. 11
16-2 Antécédents héréditaires.
février 1903. PEKE, 32 ans, rempailleur de chaises, né à
Vicrzon ; toujours bien portant, pas de convulsions, ni fièvre
typhoïde, ni chorée, ni rhumatismes, ni dartres, ni syphilis ;
pas de maladie de peau ; pas d'alcoolisme, tabagie moyenne,
pas de traumatisme céphalique, ni de migraines ; caractère
emporté, très vif.
Famille du père : Père, rhumatisant, Age de 5U ans, ne
boit pas, aucune autre, maladie. Mère, 59 ans, asthma-
tique, est porteuse depuis 35 ans d'un goitre très volumineux
qui fait saillir très nettement les lobes du corps thyroïde.
Elle a eu 13 enfants et a fait deux fausses couches. Grand-
père paternel ? . Grand'mère paternelle, morte à 85 ans.
G).ancl-p(l.ema ! l.rllel. ? -Gl.iII1(l.mèl.l.mall.rnelle ?
Oncles et tantes, rien de particulier. Dix frères, neuf morts
presque tous jeunes, de maladies courantes (dyssenterie,
lièvre typhoïde, grippe, pneumonie), le frère survivant,
bien portant. Une sntur, morte jeune.
Reste de la famille : pas d'idiots, d'aliénés, d'épileptiques,
de paralytiques, pas d'autres goitreux. Un frère et un oncle
bégaient un peu. Pas de polydactyle, de becs-de-lievrc, pas
de suicidés, pas de criminels.
MÈiu;, 31 ans, rempailleuse de chaises, parisienne.
Quelques convulsions h l'âge de deux ans, léger strabisme
consécutif, pas de fièvre typhoïde, pas de chorée, gourmes à
G ans, pas de rhumatismes, chlorose; avec battements de
Cll'ur de 16 il 20 ans; pas d'alcoolisme, pas de traumatisme
céphalique, réglée à 13 ans ; migraineuse la veille des règles :
douleurs vives, est étourdie par des brouillards ; pas de
phosphènes ; nausées sans vomissements; suspension des
migraines durant les grossesses et les allaitements, retour
avec les règles. Sobre, caractère nerveux, emporté.
Famille de la mère : Père, vivant, sobre, serait sujet à des
migraines et à des battements de coeur. Mère, n'était pas
migraineuse, elle parait être morte de I uberculose à 43 ans
(était devenue sèche). Grand-père paternel, mort à 87
ans. Grand'mère paternelle et grand-parents maternels,
pas de détails. Un oncle paternel suicidé par pendaison,
par chagrin de la mort de sa femme. Deux tantes pater-
2cllc· sont mortes, l'une d'une maladie de coeur, l'autre on
ne sait de quoi. Un oncle aurait disparu depuis environ 15
ans. « Cet oncle était le frère de ma. mère et avait épousé la
sceur de mon père, ils ont eu deux enfants, un garçon marié.
Peur : Epilepsie. 163.
sans enfants, une fille également mariée a eu 6 enfants, tous
bien portants. Trois frères, deux ont eu des convulsions
de l'enfance et louchent un peu; l'aîné des trois n'a eu ni
convulsions, ni strabisme, ainsi que ses deux enfants, le
second a G enfants dont l'un serait strabique, on ne sait s'il
a eu des convulsions. Quatre scetc·.5 : une a eu des
convulsions et louche un peu; deux ne sont pas mariées;
une a eu un enfant, mort une heure après la naissance ; une
autre a deux enfants très bien portants.
Reste de la famille : pas d'idiots, ni aliénés, ni épileptiques,
ni difformes, ni goitreux, ni bègues, ni muets, ni polydactyles,
ni becs-de-lièvre; pas de criminels, etc..
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 18 mois (père
plus âgé).
Cinq enfants : 1 notre malade ; 2" un garçon, 7 ans, pas de
convulsions ; 3° garçon mort iL 19 mois de méningite,
aurait eu beaucoup de convulsions internes ; lia ? arçO ? 3
ans, pas de convulsions ; 5° fille, un an, née à terme avec
une imperforation de l'anus; a eu deux opérations à
Trousseau, va bien; défécation normale; pas de convul-
sions.
Notre malade. - Conception 16 mois après le mariage, bonne
entente, pas d'alcoolisme, pas de maladie. Grossesse : Pas
de chutes, pas de coups, très émotive, ne se rappelle pas avoir
eu de peur; envie d'aliments salés; pas d'albuminurie, ni
d'alcoolisme; caféisme (5 ou 6 bols par jour), pas d'éclampsie,
pas de tentative d'avortement, contente de se voir enceinte,
pas d'idées noires, a senti les mouvements du foetus à 4 mots
et demi comme les autres et de même force. Accouche-
ment à terme, naturel, travail très long (toute une journée),
présentation du sommet. Beaucoup plus d'eau qu'aux autres
accouchements.
A la naissance, pas d'asphyxie, pas de circulaire autour
du cou, bien portant; poids inconnu. Allaitement au sein
maternel qu'il a bien pris, sevré à un an. Première dent à
G mois; dentition complète à 2 ans. Parole à 16 mois.
Marche et propreté il un an.
Antécédents morbides : pas de convulsions, pas de
céphalalgies, pas de cauchemars, fluxion de poitrine à 5
ans.
Caractère gai, vif, accès de colère; tout jeune il était déjà
coléreux, les colères ont augmenté quand il a commencé à-
164 Description DU malade.
marcher. - Pas de mauvais instincts, très turbulent, pas
d'alcoolisme, ni d'onanisme. ,
Digestion : préhension, occlusion de la bouche, mastication,
et déglutition normales. Pas de vomissements, garde-robe
régulières, pas de vers intestinaux. Respiration : régu-
'.ère Sentiments affectifs : conservés, aime beaucoup ses
Vrrents. Quelquefois alourdissements ( ? ), quelques maux
ie tête ; pas de tremblement. Sommeil bot. pas de cau-
hemars. Mémoire, raisonnement très bons, assez instruit,
i eu des prix de dessin, d'écriture.
Ressemblance avec son père et davantage à un oncle pater-
el ; son caractère tient de celui du père.
Pas de maladies infectieuses, sauf les oreillons étant
petit. Aucun accident sCl'ofu/eu,\'. - Traumatisme sur
le front il y a un an (à 7 anus) : un chien l'a renversé et il s'est ? Lit à la tête une bosse avec plaie, pas de perte de connais-
sance, il n'a pas été très impressionné, conduit chez le
médecin, il s'est laissé faire des points de suture sans aucune
lifficulté, rien à la suite. Pas de sévices exercés par la
famille. La mère se plaint de ce qu'un maître l'a frappé à
la tête il y a un mois. -
Cause de la maladie : S.. a eu peur du feu un mois avant
son entrée à Bicêtre (le 1 cr octobre 1901) : de la fenêtre de la
chambre d'une parente chez laquelle il se trouvait, il a aperçu
e feu dans une scierie voisine et s'est imaginé que c'était
- liez son grand-père ; il a eu peur, a crié. Quand il a su que
feu n'était pas chez son grand-père, il s'est imaginé que
'était chez son père. Le lendemain on s'est aperçu qu'il fixait
. tapait des lèvres, cela durait cinq minutes environ. Sa mère
appelle ces accidents des grimaces. Les jours suivants ces
grimaces sont devenues de plus en plus fréquentes, si
fréquentes même qu'on ne pouvait les compter. «Au bout de
quinze jours il est tombé comme une masse, sans connais-
sance, comme quelqu'un qui tombe d'inanition.» Il se relevait
presque aussitôt; ni bave, ni écume, ni incontinence d'urine.
- Les grimaces continuaient quand même. On s'est décidé
à placer l'enfant. L'épilepsie n'a pas été précédée de cauche-
mars, ni de secousses.
Trois jours après le premier accès, à 5 heures du matin, une
autre crise durant ;1 à G minutes, et se reproduisant pendant
huit jours toujours le matin à 5 heures. Il y a un mois, nou-
velle crise, avec perte de connaissance, durée cinq minutes.
Depuis, il a 5 ou 6 crises par jour. Pas de blessures dans les
Description du malade. 165
accès; pas de miction, ni défécation, pas de morsures de la
langue, pas d'écume. Il parait tout à fait normal après sa
crise, reprend sa conversation, ne se souvient de rien. Il a les
mains brûlantes un moment.
État actuel (6 novembre 1901). - Pas d'adipose, pas d'éma-
ciation, air de bonne santé. Figure colorée. Physionomie
assez intelligente et calme.
Mesures delà tête.
1901.
166 Description DU malade.
écartées et droites ; lobule un peu adhérent ; tubercule de
Darwin.
Cor.'28 cent. 1/2 de circonférence, corps thyroïde petit mais
perceptible.
Thorax : pas de saillies, respiration (lial)lll.tlllati(1L1C. La
percussion ne révèle rien. A l'auscultation, on entend mieux
le murmure vésiculaire à gauche qu'a droite. f'rnttn : bat-
tements réguliers et assez lents. Pouls normal.
Abdomen .-souple; foie, rate, rien.
Organes génitaux : Verge : 5 cent. de long, G cent. 1/2 de
circonférence ; gland absolument recouvert par le prépuce,
il est impossible de voir le gland qui est caché par un
écoulement blanchâtre (phimosis). Pénil, glabre. Taches
jaunâtres sur la chemise. Urine : ni albumine ; ni sucre.
Membres supérieurs : forme et attitude normales, bien
développés. Pas d'onycophagie. '
Membres inférieurs, rien à noter; la station et la marche
régulières. Mouvements volontaires et provoqués s'exé-
cutent bien ; voûte plantaire régulière ; réflexes diminués.
Sensibilité générale. A la température, régulière ; au
contact, et à la douleur, diminuée. Intelligence : assez ouver-
te. Parole : normale, lit et écrit bien.
Tableau du poids et de la taille.
Marche de L'f· : PILI : PSII : . '1GÎ
22 novembre. - Cet enfant a eu depuis le 18 novembre
5 il 8 accès par jour. Pas de fièvre.
Traitement : Elixir polyhromuré : ? 2 cuillerées pendant 2
jours, 3 cuillerées pendant 2 jours. Purgatif. 2 gr. de
chloral.
Simon.. a eu en novembre 128 accès et 14 vertiges; en dé-
cembre, 49 accès. Traitement : Elixir polybrol11l ? <" de 2 il
3 cuillerées par jour; douches, gymnastique, école.
la02. En janvier, 2 accès. Même traitement.
Température de l'accès.
168 Epilepsie DITE idiopathique.
une tante et un cousin maternels, suicide d'un grand
oncle; méningite chez un frère, imperforation do
l;anus chez une soeur, etc.
II. Signalons le caféisme chez la mère pendant la
grossesse. C'est là une cause de nervosisme qui parait
devenir de plus en plus commune et qui mérite d'atti-
rer l'attention. L'abus du café, quoique bien moins
grave que l'abus des boissons alcooliques, n'en a pas
moins des conséquences fâcheuses, même en dehors
de la grossesse (excitation, tremblement, énervement,
etc.).
III. La mère est sujette h des migraines. Elles dis-
paraissent durant les grossesses et les allaitements,
particularité intéressante dont nous avons relaté bien
des exemples. Elles reviennent avec le retour des
règles.
IV. "L'épilepsie a été occasionnée par une peur
vive qui a agi sur un terrain bien préparé par l'héré-
dité. Elle s'est traduite d'abord par des vertiges qua-
lifiés de grimaces, puis par des accès de plus en plus
fréquents.
V. Sim... a été placé un mois après la première
manifestation épileptique ; il devrait toujours en être
ainsi. Les familles en temporisant, Y administration
en créant des obstacles à un prompt placement, con-
tribuent à incurabiliser les malades. Sous l'influence
du traitement (polybromure, bains, douches, gymnas-
tique), les vertiges et les accès très nombreux en
novembre, moins en décembre ont disparu à partir de
février 1902 et n'ont pas reparu jusqu'à la fin de février
1003, époque où nous avons vu le malade pour la der-
nière fois.
XII.
Canitie partielle congénitale héréditaire (Vitiligo) ;
PAR BOURNEVILLE,
Nous avons eu l'occasion d'observer récemment à notre
consultation de Bicêtre un cas de canitie partielle qui
nous parait digne d'être relaté.
Mme V... (Léonie), âgée cle 20 ans, née à Paris ainsi
que son père, bien constituée, s'est mariée à 1 i ans. Elle
a obtenu le divorce, en sa faveur, à cause des excès de
boisson et des violences de son mari. Elle n'a pas eu
d'enfant. Au niveau de la partie moyenne du cuir chevelu
répondant au front, elle présente une touffe de cheveux £
blancs, cle 3 il'4 centimètres de diamètre. Les poils qui
composent la mèche blanche sont aussi longs, mais plus
fins, plus soyeux, que les cheveux voisins. La peau d'où
sort la mèche est fine, d'une blancheur rosée. Au-dessous,
sur le front, il y a une partie de la peau, ayant la forme
d'un triangle, mesurant 3 centimètres sur 2 et demi qui
offre le même aspect. Plusieurs des cheveux blancs, .exa-
minés au microscope par M. Cnouzox, ancien interne du
service, qui vient de passer un an à l'hôpital Saint-Louis,
n'ont d'autres particularités qu'une absence de pigmenta-
tion et une réfringence très marquée, sans atrophie des par-
ties constituantes.
Mme V... a des cheveux châtains, longs et abondants,
des poils nombreux, bruns plus que châtains, dans les
aisselles et sur le pénil, où il n'y a ni touffe, ni plaque
170 Canitie partielle héréditaire.
blanches. Sa peau, en général assez fine, est plutôt
brune que blanche. Sur le buste, en arrière, à partir de
la base du cou jusqu'à la ceinture, la peau est de couleur
moins foncée que sur les membres et les fesses. Il en
est de même en avant, des clavicules à la ceinture. De
plus, au-dessous des seins, on observe une large pla-
que blanche de vitiligo, ayant la forme du devant d'un
corset de femme enceinte. Immédiatement au-dessous clc
cette tache blanche, vililigincuse, non rosée comme la
tache répondant à la mèche, qui se termine à la ceinture,
il y a une zone cutanée large de 3 il i centimètres, forte-
ment pigmentée, sans gradation. La pigmentation exa-
gérée, qui a son maximum le long de la tache blanche,
diminue graduellement jusqu'à se confondre avec la 'pig-
mentation normale de la peau saine qui est légèrement
brune. Le ventre et le thorax sont glabres.
Ni la mèche, ni la tache du cuir chevelu et du front,
ni celle de la poitrine, n'augmenteraient défendue depuis
qu'elle a atteint son développement d'adulte. La zone
brune ne s'accentuerait pas en été. Aucune des taches
n'est le siège de démangeaisons. Mme V... ne saurait
dire si les régions décolorées suent plus ou moins que
la peau saine.
Tel que nous venons de l'exposer, ce cas est déjà
intéressant. Il l'est encore davantage par ce que nous
allons raconter.
Le père de Mme V..., sa grand'mère paternelle, son
arrière-grand' mère paternelle, sa trisaïeule paternelle,
son frère, âgé cle 27 ans (1). sa soew', ses deux oncles pa-
temiels, la fille de l'un deux, 1 i ans, la fille et le garçon
de l'autre, soit onze personnes de la famille, ont tous,
comme elle et au même endroit, une mèche blanche. Son
frère et sa soeur ont aussi les mêmes lâches blanches sur
le tronc; ses autres parents, non.
Tous les parents ont des cheveux abondants. Ceux
(1) Marié depuis un non ; sa femme est enceinte.
Canitie partielle héréditaire. 171
qui sont morts n'étaient pas devenus chauves (1). Dans
la famille on désigne cette canitie partielle sous le uom
de mèche de Sylla. Pourquoi ? Mme V... n'a su nous
le dire. Plutarque (2) raconte de Sylla que « ses yeux es-
toyent ardents et étincelants à merveille ; la couleur de
son visage les rendoits encore plus effroyables à voir :
car il estoit fort couperosé et semé de taches blanches
par endroits, dont on dit que le nom de Sylla luy fut
imposé à raison de sa couleur, et y eut un des gaudis-
seurs de Athènes qui luy en donna un traict de moc-
queric par ce vers : '
Sylla est une meure asperse de farine.
La coloration brunâtre de la peau au-dessous de la
tache sous-ombilicale se rencontre parfois dans le viti-
ligo, auquel se rattache notre cas. On dirait, suivant
*la remarque cle Hardy (3), que « la matière colorante
abandonne une certaine étendue du tissu culané pour
se porter en excès sur la périphérie de la partie déco-
lorée ». Au premier abord, on pourrait croire que la ré-
gion la plus brune est la région malade et qu'il s'agit
d'une éphélide. '
D'après Hardy ( loc. cil., p. 61 ), la canitie partielle
coïnciderait avec le peu de développement du système
pileux. Il n'en est pas ainsi chez cette jeune femme.
Ses cheveux, châtains, sont longs et abondants. Les
poils des aisselles et du mont de Vénus, plutôt bruns,
sont bien fournis et tous les siens atteints de canitie
partielle ont des cheveux abondants et ceux qui sont
morts n'auraient pas eu de calvitie.
Nous faisons appel à nos lecteurs pour nous commu-
niquer les cas analogues qu'ils ont pu avoir l'occasion
d'observer.
(1) Mme '... a une fossette très profonde au menton. Elle prétend qiil en
est de même de son père et même de sa mère. Seul de ses parents son grand-
père paternel, qni n'avait pas la mèche, était rhumatisant.
(2) Plut arque. Les vies des hommes illustres, trad, Amyot, t. IV, p. z185,
édition de 182. - -
(3) IIARDY (A.). Traité pratique et descriptif des maladies de la peau;
1886, p. 57.
XIII.
Hémorragies de la peau et des muqueuses pendant et
après les accès d'épilepsie ; leur analogie avec les
stigmates des extatiques;
Par nouavFVrr.r.r...
L'an dernier, au Congrès des aliénistes et neuroloais-
tes de Limoges (1), nous avons rapporté un certain nom-
bre de cas de purpura, d'ecchymoses con jonc lion les et
d'hémorragies au niveau d'excoriations ou de plaies sur-
venues chez des épileptiques pendant les accès ou immé-
diatement après. Depuis cette époque, nous avons eu l'oc-
casion d'en observer quelques autres.
G ? C..., épilcptiquc-hémiplégiquc gauche, s'est fait, dans
un accès, une brûlure assez profonde sur la partie moyenne
de la face externe de la cuisse droite (18 mars). Le Icr avril,
alors que la plaie, était découverte pour renouveler le panse-
ment. le malade a eu un fort accès. Dès le début de la crise,
la plaie a été le siège d'une congestion violente suivie d'une
hémorragie ahondanle. A la fin de l'accès, l'hémorragie et
la congestion ont successivement disparu. On ne peut altri-
buer l'hémorragie ". une pre sion ou il un frottement quel-
conques puisque la plaie était découverte.
Ho... (Marcel), âge de 18 ans, a eu dans la soirée du ? si
mars, un accès d'cpiiepsie semblable à ceux qu'il a d'habitu-
de. Le lendemain matin, on constate un piqueté hémorragi-
que occupant les téguments péri-orbilaircs; les deux moitiés
(Voir : Compte-rendu de 1901, p. 84,
Accès D'ÉPILEPSIE ; hémorragie cutanée. 173
supérieures sont réunies par une bande d'un centimètre cou-
vrant le sillon naso-frontal. En bas le piqueté hémorragique
est interrompu entre les angles internes des yeux.
Pomm.... (Gilbert), âge de 28 ans, épileptique depuis l'âge
de 11 ans. Le 22 mai 1301, à la suite d'une crise, il s'est pro-
duit un piqueté hémorragique autour des yeux, sur la partie
avoisinante des yeux et sur le cou.-Pendant les accès, il a
toujours une congestion très forte de la face. « Parfois, dit sa
mère, il est comme noir ». - Dans la nuit du 22 au 23 août,
il a eu deux accès. A la fin du second accès, on a observé un
piqueté hémorragique, d'aspect purpurique, qui persiste le
matin (23 août). L'éruption occupe le front à partir des che-
veux jusqu'aux sourcils, les paupières, surtout les supérieu-
res. Sur la muqueuse de la paupière inférieure gauche, il y
a un point rouge d'un millimètre. L'éruption s'étend sur le
cou, d'une apophyse mastoïde il l'autre, formant un collier de
G centimètres cle largeur. Elle s'arrête en haut au niveau du
maxillaire inférieur; en bas, elle se prolonge jusqu'aux arti-
culations sterno-clavioulaires. Quelques points hémorragiques
en travers du larynx. Par places, l'hémorrhagie sous-cutanée
est conlluentc, formant des taches de 4 il 5 millimètres de dia-
mètre. Rien sur le reste du corps. -La pression du doigt ne
fait disparaître ni le pointillé, ni les taches, qui ont une cou-
leur lie de vin, alors que le matin, au réveil, d'après la mère
du malade, ils avaient une couleur vermillon.
La première éruption purpurique aurait paru y a dix ans.
Pendant plusieurs années, l'éruption se serait montrée 3 ou
4 fois par an. Depuis le ter janvier 1901, elle serait survenue
après la plupart des accè. Son siège est toujours le même.
Toute trace de l'hémorragie disparaît après 3 ou 4 jours. La
santé générale est bonne, il n'y a aucun signe de cachexie.
Nous revoyons le malade le 13 mars 1902. L'éruption pur-
purique observée le 23 août n'aurait disparu qu'au bout de 12
jours : c'est la une durée exceptionnelle. Dans la nuit du 11 l
au 12 mars 1902, un accès d'intensité moyenne a été suivi
d'une éruption semblable il celle que nous venons de décrire,
limitée aux mêmes régions, mais moins confluente que celle
du 23 août.
Voici un nouvel exemple d'ecchymose conjonctivale : .'
Gaucher... (L.-E), née le 10 mars 1885, est entrée le 1er mars
1890 à la Fondation Vallée. Idiotie complète. Epilepsie.- La
1 H. Stigmates DES .mystiques.' : . - .
malade a eu, le 21 mars 1901, un accès offrant les caractè-
res habituels, c'est-à- dire très prononcé, intense. Peu après,
on a constaté une ecchymose de la conjonctive oculaire, clans
l'angle interne de l'oeil gauche. Cette ecchymose a disparu au
bout de quelques jours.
Ces faits nous paraissent de nature a expliquer les plié- '
nomènes qui se produisent chez la catégorie des mystiques .
que l'on désigne sous le nom de stigmatisées. Leur esprit
est absolument concentré sur le siège des plaies clu Christ :
front, mains, pieds, côté. Elles voudraient les voir saigner.
D'où aussi, volontairement ou non, des attouchements, des,
frictions au niveau de ces régions, voire même des exco-
riations, en tout cas une diminution de la résistance de la
peau et finalement, au cours de l'arque extatique, l'écou-
lementsanguinsi ardemment désiré. Il s'opère delà même
façon que l'épanchement de sang sous la conjonctive, que
le suintement ou le giclagc du sang d'une éraf1me ou d'une
excoriation au cours des accès épilepliques.
XIV.
Traitement de l'épilepsie par les agents physiques ; ¡ .
t ? rur;raw : wr.r.r : . ..
Notre ami le D'' Vugt a publié clans le n° du 15 dé-
cembre 1902 de la Revue de thérapeutique médico-
clâ1'w'gicale, l'analyse d'un travail du IF Strasser,
parti dans ljl. ? lilin. 77;/d)'o<p)'apte du mois de
juin 1902. Nous la reproduisons in extenso parce
qu'elle nous paraît mériter quelques commentaires.
M. Strasser estime due la diminution du nombre et de l'in-
tensité des accès peut être obtenue grâce à des applications
réfrigérantes sur les régions crânienne et rachidienne. Il est
curieux cle constater, d'un autre côté, que les enveloppe-
ments humides, dont l'action calmante, en cas d'exagéra-
tion des réflexes, est si manifeste, ne présentent aucun avan-
tage en cas d'èpilepsie ; les demi-bains à 2G-30° C exercent
une action sédative bien plus marquée dans cette affection.
En outre, l'hydrothérapie, prudemment maniée, permet de
combattre les manifestions cutanées et gastro-intestinales
du bromisme : grâce son emploi, on peut arriver à abais-
ser la quantité de bromure administrée sans que les effets
thérapeutiques soient pour cela diminués. Il est indéniable
que l'hydrothérapie favorise l'élimination rapide du bro-,
mure.
Dans les cas graves, on n'emploiera que les demi-bains.
Chez l'épileptique jeune et robuste, des demi-bains de 20 ?
abaissés à 18° C. de 2 à 5 minutes, des allusions, même des
douches (éviter de doucher la tète) avec faible pression pour
le corps et pression plus forte pour les jambes et les pieds-
176 Epilepsie : hydrothérapie.
rendront de grands services. Les pratiques hydrothèrapiques
provoquent une forte sudation et les douches il haute pres-
sion seront prohibées. Les troubles dyspeptiques seront
combattus par des enveloppements humides locaux.
La mécanothérapie n'a pas donné de résultats bien mar-
qués : quant iL l'électrothérapie, sous quelque forme que ce
soit, elle n'a donné que des résultats négatifs ou nuisibles.
Nous avons toujours été un partisan convaincu do
l'hydrothérapie. Personnellement, sur les conseils et à
l'incitation des. Pascal, notre co-rc'·dactcur au Mou-
vement médical, et de notre collègue d'internat le Dr
Laburthc, nous avons commencé à faire de l'hydro-
thérapie en 1865-66 et depuis nous n'avons jamais
cessé. Ce n'étai t pas la mode alors, et nous nous souve-
nons qu'a l'hôpital Saint-Louis aucun de nos collègues
ne fréquentait la salle de douches. Aussi, par ironie,
nous appelaient-ils l'apôtre des douches.
Après la guerre, M. Charcot avait bien voulu nous
confier l'ohservation et le traitement clc ses épilepti-
ques : cela a duré jusqu'en 1879. Nous avons eu
recours souvent, chez elles, à l'hydrothérapie. De
même chez les épileptiques du service de M. Dela-
siauve, pendant les remplacements que nous y avons
faits (1877-1879). Nous avons généralisé cette pratique
lorsque nous avons été chargé de la section des
épileptiques (adultes et enfants) clc l'hospice de Bicê-
tre, ensuite de la nouvelle section des enfants.
En 1882, dans sa remarquable thèse inaugurale,
P. Bricon, après avoir fait un historique aussi com-
plet que possible de la question, a consigné les
résultats de notre pratique pendant les années 1880
et 1881. L'année suivante (1), dans un travail commun
(1) BounEiLLE. Tec/t. clin, et thérap. sur l'épilepsie, l'hystérie et
l'idiotie, Compte-rendu de 1882, p. 6 à 86.
Epilepsie : hydrothérapie. 177
nous avons donné en plus les résultats de 1882.
Depuis, tous les ans, dans le Compte-rendu de notre
service, nous avons indiqué le nombre des douches
et des bains administrés dans l'année (1880-1901).
Voici la statistique globale pour 1902 :
XVII.
De l'influence des professions insalubres sur la produc-
tions des maladies chroniques du système nerveux ;
Par BOURNEVILLIÏ.
Les discussions dont le blanc de réruse a été et est
encore l'objet au Comité d'hygiène publique de
France, dans la presse médicale et dans la presse politi-
que, nous ont engagé, il y a deux ans (1) faire un
relevé aussi exact que possible des cas de maladies
nerveuses de l'enfance ayant souvent pour cause cer-
taines professions réputées, avec raison, insalubres,
exercées par les parents.
Si aux 87 familles, figurant dans notre statistique
de 1900, et exerçant une profession insalubre, nous
ajoutons les 28 cas nouveaux, relevés sur les 292
entrées de 1901 et 1902 (95 filles et 197 garçons) nous
voyons :
1° Que ces 115 familles ont fourni 555 enfants, soit-
près de 5 enfants par famille ;
2° Que sur ces 555 enfants, 278 sont décédés, soit
une mortalité de 50 0/0.
Si aux 278 décédés, nous ajoutons les 115 enfants
idiots, épileptiques, et('. (une famille a deux enfants
o. (1) Compte-rendu de iJtIO, p. 131. - Duns toutes nos observations, nous
notons les professions exercées parles parents.
Saturnisme. 179
placés à Bicêtre), nous voyons que 78 0/0 de ces
enfants sont mortellement ou gravement impression-
nés par les différentes professions insalubres exer-
cées par les parents. Le tableau suivant complète
notre ancienne statistique.
Au point de vue des « Professions » ces 101 cas se
répartissent ainsi : .
Blanc de céruse. '
XVIII.
Note statistique sur le rôle de la consanguinité dans
l'étiologie de l'épilepsie, de l'hystérie, de l'idiotie et
de l'imbécillité;
PAR BOi,'Ii\L'IL1.G.
Dans notre statistique de l'année 1900 (1), portant
sur 2.784 observations et résumant nos statistiques an-
térieures, nous ne trouvions que 91 cas de consangui-
nité, soit 3,23 pour cent. Cette proportion, écrivions-
nous, montre le rôle à peu près insignifiant de la
consanguinité dans la genèse des maladies nerveuses
chroniques de l'enfance.
Nous avons complété cette statistique jusqu'au 31
décembre 1902. Onze cas nouveaux ont été observés
sur 292 entrées et 4 cas parmi nos anciens malades.
(Chaque fois que l'occasion le permet nous faisons
revenir les parents et, après avoir au préalable relevé
les lacunes des observations, prises généralement avec
soin par nos internes, nous complétons ces lacunes;
c'est ce qui explique ces quatre cas nouveaux chez
d'anciens malades.)
(1) Voir Compte-rendu de 1888, p. 17 et de 1900, l·. 77 et la liste des travaux
scientifiques à la fin du volume.
Consanguinité. 189
190 Consanguinité ; strabiques,
. XX.
Folie de l'adolescence ; guérison ;
Par BOURNEVILLE ET AMBARD.
Les troubles psychiques sont très nombreux et très
variés chez les enfants et chez les adolescents. Pour
s'en convaincre, il suffit de parcourir les observations
qui composent nos Comptes-rendus du service. Tantôt
ils correspondent il des lésions bien évidentes, comme
chez Ler... (p. 20 ! ) ; tantôt, de même que chez l'adulte,
on ne trouve pas de lésions caractéristiques. Tel fut
le cas de Marguerite II... (1901, p. 170). Parfois ils se
terminent par la démence, souvent par la guérison :
tel est le cas de la jeune fille dont nous allons relater
l'histoire.
SOMMAIRE. - Père très impressionnable, instabilité mentale
passagère, crises nerveuses dans la rue ; migraines ; sobre.
Demi-tante paternelle, migraineuse. Cousine germaine
paternelle idiote. Cousin, germain mort tuberculeux.-
Mère, rien de particulier. - Tante maternelle, crises de
nerfs. Pas de consanguinité. Inégalité d.'âgc de 3 ans
. (mère moins âgée). -
La malade : Irc dent à si.v mois. Dentition complète a ? ans. 'q
Pas de convulsions. Parole deux ans. Marche à un
an. Pèrityphlite à 7 ans et demi. Varicelle à 9 ans,
Éruption scarlalini forme il. 13 ans. Réglée, à II ans et
demi. - Début de la mélancolie à 14 ans, par périodes;
diminution de l'aptitude au travail; onanisme; anémie.
- Idées de culpabilité; mutisme, inertie; refus de manger-
- - Hallucinations de la vue. - Guérison,
192 Antécédents héréditaires ET PERSONNELS.
Roi... (Virginie Suzanne), née le 22 mai 188G, est entrée le
4 mars 1901 à la Fondation Vallée, avec un certificat du Dr
P. Garnier, ainsi conçu : « Atteinte de dégénérescence men-
tale avec accès de délire mélancolique ; idées de culpabilité,
d'indignité, refus d'aliments. Insomnie. »
Antécédents héréditaires. Père, 47 ans, employé d'une
administration publique, très « impressionnable». Quelques
jours après son mariage (1878), il aurait voulu brusquement,
sans raison plausible, changer d'état ; persistance de cette
idée pendant cinq jours durant lesquels il était très agité.
En 1884, chute dans la rue avec perte de connaissance
pendant une demi-heure. En 1887, à la suite d'une contrariété,
il entre dans une agitation extrême, déclare que quelqu'un
l'a frappé, et au lieu de rentrer chez lui, comme il en avait
l'habitude, son travail fini, il s'en va au Bois de Boulogne et
ne regagne son domicile qu'à minuit. Il ne fume pas; boit
très modérément. On ne sait s'il a eu des convulsions dans
l'enfance. Quelques migraines, surtout dans l'adolescence.
Réformé à 25 ans pour « faiblesse de constitution. » Pas
d'indice de syphilis. Caractère plutôt égal et doux.
Sa famille : Père et mère, rien à signaler. Demi-soeur
paternelle, migraineuse à ses époques, a eu deux enfants,
l'un mort de tuberculose pulmonaire à 9'.I ans, l'autre idiote.
Les autres parents ne paraissent avoir présenté aucune tare
ni physique ni mentale.
Mère, 44 ans, institutrice; pas de convulsions de l'enfance,
fièvre typhoïde à 15 ans, compliquée de délire. Pas de migrai-
ne. - Une soeur aurait des attaques de nerfs, se débat, crie,
mais ne perd pas connaissance. Elle est mariée et a un fils
sain. Les autres parents paraissent normaux. Pas de con-
sanguinité. Inégalité d'âge de G ans (père plus âgé).
Deux enfants : 1° un fils de 21 ans, intelligent, aucun acci-
dent nerveux; 2° notre malade. .
Notre malade. L'état des parents au moment de la concep-
tion était bon. Pendant la grossesse, la mère aurait été, le
premier mois, obsédée par le souvenir des images de cire
qu'elle avait vues au Musée-Grévin. Les mouvements actifs
du foetus perçus par la mère vers le quatrième mois et demi
étaient très violents sur la fin de la grossesse. L'accouchement
s'est effectué dans les délais coutumiers parla tête et spon-
tanément ; ni cordon, ni asphyxie. Nourrie au sein jusqu'à
16 mois.- Première dent à 6 mois ; dentition complète à
Histoire DE la malade. 193
2 ans. Elle a marché il un an, parlait bien dès l'âge de deux
ans. Pas de convulsions de l'enfance. - I'érit5-phlite il sept
ans et demi, varicelle à 9 ans. - Eruption scarlatiniforme à
13 ans. Elle a fréquenté l'école à partir de 10 ans, s'y montrait
très intelligente, mais aussi turbulente. Réglée normalement
il 11 ans demi et à peu près régulièrementjusqu'à l'admission.
Pas de traumatisme. Il y a un an, l'enfant est devenue triste,
son visage était impassible ; ni irritabilité excessive, ni peurs,
ni visions, mais insomnies fréquentes et entêtements inexpli-
qués. Elle confondait parfois les personnes ; en voyant tomber
les feuilles, elle s'imaginait que tout allait s'effondrer, que le
monde allait disparaitre. On notait une sorte d'insensibilité
morale et de la paresse intellectuelle, elle avait de la peine
à travailler et que la mémoire diminuait. Sa mère, une nuit,
la vit porter la main à ses organes génitaux. Elle lui demanda
si elle avait l'habitude de se loucher, sa fille lui aurait répon-
du : oui. Depuis cette époque, sa mère n'aurait jamais eu
l'occasion de la surprendre en faute, mais, de l'aveu de l'en-
fant, ses pratiques solitaires ont continué et, comme on le
verra plus loin, elle s'y adonnait encore à l'entrée et durant
les premiers temps de son séjour à la Fondation. En décembre
1900, elle rend un ascaride dans ses selles. C'est à cette épo-
que qu'elle a manifesté de la résistance à manger.
Dans le courant de janvier 1901, hallucinations de la vue :
elle voyait des lueurs constamment, pui; elle s'est plaint
qu'on lui servait toujours le même plat, elle s'accusait de ne
pas avoir été gentille : « Il me semble que je ne vous aime
pas ; je cherche mon âme ; je n'ai pas de coeur ; je veux aller
me confesser pour réparer mes mauvaises confessions. » Elle
n'a jamais été d'une grande dévotion. Pendant les vacances
de 1900, elle s'est surmenée pour ses devoirs. A la fin de jan-
vier 1901, l'enfant reprend momentanément un peu d'entrain.
Le 19 février, en se couchant, elle déclare qu'elle a la lèpre.
Les jours suivants elle refuse les aliments avec plus de téna-
cité qu'auparavant et pendant les cinq jours qui ont précédé
son placement on ne parvenait qu'avec beaucoup de peine à
lui faire prendre quelques aliments liquides ; elle ne voulait
pas se laver. Elle s'imaginait que, dans la rue, tout le monde la
regardait, que les gens voyaient de suite qu'elle n'avait pas
fait ce qu'elle devait faire. Elle s'accusait de se faire remar-
quer. Elle voyait des flammes et demandait qu'on ferme les
rideaux, avait peur des voleurs, des assassins, entendait des
voix sourdes sans pouvoir distinguer de qui elles venaient.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902. 13
194 Description DE la malade.
Ces voix lui reprochaient de n'être pas assez attentive, assez
aimable, de donner de la peine aux autres. Elle avait lu les
Cordes fantastiques illustrés d'Hoffmann et voyait les figures
étranges du livre.
État actuel (9 mars 1901). - Rougeur et pâleur subites, phy-
sionomie douce, un peu triste. Regard un peu vague. - R...
a la parole tantôt libre, tantôt embarrassée et incompréhen-
sible, suivant son degré de mélancolie. Elle n'est jamais cau-
seuse, ni live parle que lorsqu'on l'y provoque.
Chevelure châtain foncée, tourbillon médian. Crâne de
forme intermédiaire de la brachyocéphalie à la dolychocé-
phalie. - Visage ovale, arcades sourcillières effacées, yeux
gris, hyperhémie conjonctivale fréquente, à la suite de lec-
tures prolongées. Pommettes peu saillantes. Bouche
moyenne, la lèvre supérieure proémine un peu. Palais très
ogival. Pharynx, amygdales, langue bien conformés. Menton
ovale. Oreilles régulières.
Cou : 29 centimètres ; corps thyroïde peu appréciable.
Thorax. - Coeur, léger bruit de souffle; pas de palpitations.
Elle n'est pas essouflée en dehors des courses rapides.
Poumons, rien.
Abdomen. Digestion bonne en général, « pourtant après
chaque repas, dit la malade, je me sentais comme gonflée ;
dernièrement, je rendais comme de l'eau ».
l'uberto, orraue.s é21tau.v. - Poils bruns, nombreux dans
les aisselles. Seins bien conformés, 16 centimètres sur 20 des
deux côtés, aréoles rosées, mamelons peu saillants. Léger
duvet le long de la colonne vertébrale. Ventre et fesses
glabres. Pénil recouvert de poils nombreux, bruns et courts.
Grandes lèvres, poils abondants et longs. Petites lèvres bien
développées. Clitoris moyen. Hymen : orifice il bord frangés.
Anus : poils assez nombreux à une certaine distance, pas d'hé-
nmrrhoides. Bras glabres, avant-bras poils follets; cuisses
glabres.
Membres supérieurs et inférieurs bien conformés.
Sensibilité générale et spéciale, normales. -Etat mental :
voit des bêtes dans son corps, les objets changent de forme,
voit des signes de deuil partout, tout le monde a de l'aver-
sion pour elle. L'tat intellectuel : Avant l'affection
actuelle, intelligence normale, a eu son certificat d'études ;
depuis, offaiblissement sensible de la mémoire : IL. dit qu'elle
a beaucoup oublié.
MÉLANCOLIE; IDÉES DE CULPABILITÉ. 195
Température des cinq premiers jours. '
196 Mélancolie; mutisme. z
yeux creux et cernés. Au déjeuner, elle refuse de manger,
Visitée par sa mère l'après-midi elle parait éprouver un cer-
tain plaisir, elle cause beaucoup mieux et mange facilement
une cuisse de poulet apportée de chez elle. T. lt. 37° le matin
et : jojo,3 le soir. Chloral t grammes, bain, etc.
12 mars. - Nuit meilleure. R... est hébétée de même que
les jours précédents. Elle parle sans cesse mais on ne peut la
comprendre la parole ne peut pas sortir. Il faut l'habiller,
la forcer il manger et la conduire comme un vrai bébé. Elle a
la ligure fatiguée, l'haleine mauvaise, comme celle d'une per-
sonne fiévreuse. T.R. 3<i",8 le matin et 37°, 2 le soir.
13 mars. Même état. L'enfant marmotte continuellement,
sans qu'on puisse saisir ce qu'elle dit : Sa physionomie est
toujours triste, hébétée, le regard vague. Les pupilles sont
très-dilatées. Même diiliculté pour la faire manger. T. R.
37 ? t et : nu,3. Su)tbna) ! gramme; bains, douches.
1 : i mars. Suzanne a assez bien dormi. Aussi ce matin
a-t-clle le teint plus frais. Le regard est moins vague. Il faut
toujours la conduire comme une enfant, insister pour la faire
marcher, manger, asseoir ou se tenir debout. La parole reste
incompréhensible. Quoiqu'elle n'arrête pas de remuer ses
lèvres, aucun son ne peut sortir de sa bouche.
L'après-midi il l'occasion de la Mi-Carême, il y a bal à la
Fondation. On y conduit Suzanne pour tâcher de la distraire.
Arrivée-là sa physionomie semble s'éveiller un peu, elle mange
seule plusieurs morceaux d'oranges. A un moment donné la
musique joue la polka des Anglais. Suzanne fredonne l'air
avec les musiciens. - Sa mauvaise haleine persiste et elle a
la langue très-sale. T. It. 37 ? i 4 et 31l,3. Purgatif, sulfonal
1 gr., etc.
15 mars. - L'état de notre malade reste stationnaire au
point de vue de la parole. Continuellement l'enfant passe
la main sur son front, elle semble souffrir de la tête. Plu-
sieurs fois dans la journée on remarque qu'elle maintient
ses yeux fermés durant quelques minutes et il lui est arrivé
une fois cet après-midi de nous demander la permission de
les ouvrir et cela assez franchement. Le soir, au réfectoire,
clic mange seule mais très-lentement. T. li. 3(je,8 8 et 3loi.
Purgatif, etc.. 16 mars : T. R. 37° et 37o,i.
17 mars. - Suzanne a passé une bonne nuit sans avoir pris
de sulfonal. Elle paraît plus gaie, le mutisme persiste cepen-
dant. Dans la journée, elle a prononcé quelques mots très
clairement mais elle ne peut finir la phrase commencée !
Mélancolie; illusions ; confusion mentale. 197
Par exemple questionnée au sujet de son fichu qu'elle n'avait
pas sur son cou, elle répond après un bon moment d'hésita-
tion je l'ai laissé.... On lui demande aussi : que voudrais-tu
Suzanne ? Je voudrais... ? Elle mange seule de bon appétit,
coupe sa viande, demande de l'eau dans son vin. Ses mouve-
ments ainsi que sa marche sont lents. T. R. 3ï°,3 et 37°,5.
18 mars. R... s'est endormie de bonne heure, sans sul-
fonal, sommeil calme.
Dans le courant de la journée, elle cause beaucoup mieux,
elle soutient mémo de petites conversations, nous dit : qu'on
s'occupe beaucoup d'elle. En classe elle écrit quelques phra-
ses de dictée, elle recopie et opère une addition, une sous-
traction, une multiplication,.posées sur le tableau noir ; elle
nous appelle par nos noms lorsqu'elle désire quelque chose.
Au réfectoire elle mange bien, convenablement ; elle nettoie
son fromage et nous dit que le brie est bon. T.R 37°, matin
37°,3 soir.
19-20-21 mars. - L'amélioration se maintient. Le 19, T. R.
36°, 9 et 37°, 2. Le 21, T. R. 36°,9 et 37"/[. ? 21121TS. - R.. a passé une bonne nuit, sans médicament.
Ce matin elle se lève bien gaie et son raisonnement est celui
d'une enfant normale. Sa physionomie n'est plus la même, son
regard n'est pas vague comme les jours précédents. Elle dit
se rappeler qu'elle ne voulait pas manger, ni parler, qu'elle
avait l'air d'une abrutie : « Je répétais, quand je parlais, tou-
jours la même chose, je voyais de drôles de choses, et j'avais
de drôles d'idées, je voudrais m'empècher d'être bête comme
ça, mais je ne puis. Enfin, dit-elle, aujourd'hui c'est fini,
je veux devenir comme les autres enfants et ne plus penser
rien. » T. R. 37°,1 et 37°,5.
3-` ? 'l-5 mars. Même état. L'enfant parait normale.
26 mars. L'enfant, qui était bien la veille, a mal dormi
cette nuit, et ce matin elle se lève toute hébétée; elle est
absolument comme les jours où elle délirait ou ne voulait
pas parler. Cependant cet état d'hébétude ne dure pas la
journée entière : à certains moments elle raisonne très bien
et tout à coup son état redevient le même, elle marmotte;
on ne peut comprendre ce qu'elle dit. - Purgatif, etc. T.R.
37° et 37 ? i.
30 mars. L'état de l'enfant reste stationnaire depuis plu-
sieurs jours, elle ne veut toujours pas parler, on pourrait
croire qu'elle y met un peu d'entêtement, car, visitée souvent
par ses parents, elle converse bien avec eux, mais aussitôt
198 Mélancolie ; onanisme.
revenue parmi nous, mutisme le plus complet ; il faut insis-
ter pour qu'elle nous réponde, très bas, lorsqu'on l'interroge.
A l'ouvroir elle exécute le travail qu'on lui donne mais sans
dire une parole. Elle est très lente dans tout ce qu'elle
fait.
Pour sortir du réfectoire ou de l'ouvroir, si elle est assise,
il faut employer la force pour la faire lever, il en est de même
pour marcher, c'est une vraie machine automatique. 'l'.It3G°,f).
2 avril. L'état de l'enfant reste stationnaire, elle ne nous
cause toujours pas, elle ne parle que lorsque ses parents vien-
nent la visiter. Depuis plusieurs jours, on remarque que
durant la nuit l'enfant se lève plusieurs fois pour aller aux
cabinets, malgré sa hâte pour y aller, elle urine tout le long
du dortoir, il lui est même arrivé d'uriner dans son lit. Surveil-
lée de très près, la veilleuse surprend notre malade en train
de se masturber.
R.. n'a pas eu ses règles ce mois-ci, c'est il peu près le mo-
ment où elles doivent venir. (Elle les a eues pour la dernière
fois en février. Jusque là elles avaient toujours été abondantes
et plutôt en avance.)
QILUT2l. Depuis deux jours l'enfant va beaucoup mieux,
elle suit les autres enfants dans tous les exercices mais très
lentement, la parole est plus compréhensible, elle répond
mieux aux questions qui lui sont posées. Sa physionomie est
bien plus éveillée, sa démarche est meilleure, en un mot un
mieux sensible s'est opéré. Purgatif toutes les semaines ;
deux douches par jour.
13 avril. L'enfant qui raisonnait assez bien depuis le
dimanche 7 avril a de nouveau, aujourd'hui, des idées bizar-
res. Elle prétend que l'on fait beaucoup de transformations
dans le service : « Il se passe, dit-elle, des allées et venues
extraordinaires. » Ses phrases sont absolument décousues,
elle tient absolument à écrire à son frère pour lui raconter
un tas de choses drôles qui se passent autour d'clle. On
accède à son désir, elle écrit, mais sa correspondance est
celle d'une personne peu sensée, ainsi qu'on va en juger.
Ce 13 avril.
Mon cher Gustave,
J'ai à te raconter des choses bien étranges; ce matin nous
sommes allée au champ (1) a Bicêtre nous sommes arrivés et
(1) Au chant, à l'orphéon.
Mélancolie ; onanisme. 199
nous nous sommes assise sur des bancs des infirmières sont
arrivés mais je crois plutôt que c'est des surveillantes. Des
enfants malades et diformes sont arrivée, mais il me semblait
que s'était comme d'anciens soldats. A côté de moi se trouvait
une petite fille qu'on appelle Julie mais il me semble qu'elle
se moque de moi. Et puis on a fait comme une lanterne
magique avec des mots et des images en expliquant, il me
semblait toujours dans un mauvais sens pour moi. Puis sont
arrivé des visiteurs M. Bourneville une dame des messieurs et
un officier ou du moins quelqu'un habillé en officier car il me
semble que maintenant on prend des costumes et des noms
étranges. Il se faisait des allée et venues à n'en plus finir et
puis je restait là à ne rien dire tandis due les autres parlaient
beaucoup. On a chanté. On a terminé par la Marseillaise je
me suis levé puis assise, je ne savais comment faire puis on
s'est mis en groupes je suis restée moi à côté de Julie (2)
et l'on faisait des signes on interrogeait et l'on se montrait
des photographies et différentes choses et je ne savait ou
me mettre. Puis M. Bourneville nous a dis allez manger mais
il me semble toujours que nous mangeons des choses sales
lorsque en nous en revenant on passe sous des couloirs et
l'on voit beaucoup de lits vides. Dans le dortoir où je couche
il y en a des petites des grandes et l'on fait frotter le soir
il me s'emble que tout cela est pour me faire aller et puis
on déménage tout en ce moment, mais ce qui me semble
le drôle c'est qu'on mange comme dans un restaurant et que
tout le monde me sert et qu'on ne mange pas tout le monde
à la même heure. Je vois ici beaucoup de monde et il me
semble que je vois des personnes que j'ai vu autrefois à
la maison, j'ai hâte de revenir à la maison pour pouvoir revoir
la famille. Ici je voudrais aider mais c'est tellement granp
je ne sais jamais par quel bout commencé. Mais il me semble
que tout ce que je- t'écris tu le sais. Si tu viens demain ici
avec papa et maman je voudrais bien partir avec vous pour
retrouver la maison. Depuis dimanche je vais mieux.
Ta soeur qui t'embrasse bien fort.
Suzanne.
Nous avons reproduit textuellement sa lettre avec ses fautes
et son absence de ponctuation. (Avant sa maladie, elle faisait
aussi des fautes d'orthographe, mais beaucoup moins.)
(2) Il s'agit d'une malade de son tige atteinte, comme elle, d'hébéphrénie.
2oxo' Mélancolie ; amélioration.
Il est bien difficile de lui faire faire de la gymnastique; elle
ne veut exécuter aucun mouvement et on ne peut arriver iL
la faire plier, elle n'y apporte du reste aucune bonne volonté-
15 avril. - L'état de la malade reste stationnaire, elle
répond mais lentement aux questions qui lui sont posées.
Elle répète continuellement qu'elle voudrait retourner il la
maison.
23 avril. - Même état. Elle cause peu avec nous ainsi
qu'avec ses compagnes. Très-bavarde avec ses parents à qui
elle raconte des choses plus ou moins vraies. Elle est tou-
jours à surveiller sous le rapport de l'onanisme.
L'appétit est bon, elle mange proprement mais là comme
ailleurs elle reste très-lente. L'enfant a engraissé de deux
kilogr. depuis 8 jours.
26 auril. - L'enfant a passé une bonne journée elle a été
beaucoup plus gaie et beaucoup plus causeuse qu'à son ordi-
naire, parlant même sans qu'on l'y invite, provoquant la
conversation et raisonnant très-bien. Sa physionomie est
plus éveillée, les pupilles moins dilatées, le teint plus clair,
et aujourd'hui on constate que l'état intellectuel de l'enfant
a fait un sensible progrès vers l'amélioration. Son som-
meil est moins agité. L'onanisme tend à diminuer. Trai-
temenl : Deux douches, une cuillerée à café de valérianate
d'ammoniaque. Gymnastique. Purgatif tous les 8 jours.
30 avril. - Depuis le 26 l'amélioration continue. R.. est
allée le 28 se promener il Robinson avec son père, sa mère
et son frère. Le soir elle a raconté sa promenade. Elle ne
paraît plus avoir d'idées de culpabilité. - Elle ne dit plus
qu'elle cause de chagrin aux autres. Elle ne se touche
plus depuis quelques jours. Elle cause convenablement.
Le raisonnement est correct. Les réponses sont toujours
lentes de même que les mouvements. Elle s'habille, se
déshabille, se donne tous les soins de propreté. Durant l'in-
terrogatoire, les pupilles se dilatent par instants. La malade
nous quitte, ouvre et referme la porte avec beaucoup de len-
teur.
10 mai. L'amélioration persiste, notre malade n'a plus la
même physionomie, ses pupilles sont moins dilatées et son
regard n'a plus l'expression d'hébétude qu'il avait pendant
la période de mutisme.
Son raisonnement est meilleur; elle cause davantage et
soutient une conversation ; cependant cette semaine il lui
est arrivé d'avoir des idées un peu bizarres et des réflexions
Mélancolie; guérison. ? O1
très drôles, ainsi par exemple : En classe 11» Lapeyre ayant
ouvert les portes à deux battants pour laisser passer les en-
fants, Suzanne a demandé pourquoi on ouvrait ces portes
Au réfectoire, étant à table, Suzanne dit tout à coup « toutes
les enfants desservent les tables, il n'y a que moi qui reste
assise. » Son père étant venu la visiter, elle lui a dit qu'elle
ne faisait rien de la journée et qu'on la laissait assise sur un
banc, ce qui est inexaet.
Tous ses mouvements sont lents, sa démarche n'est pas assu-
rée. Son sommeil est bon pour le moment et on ne constate
plus d'onanisme. Traitement : Purgation tous les huit
jours ; valérianate d'ammoniaque, 3 cuillerées à café tous les
jours; deux douches.
20 mat. Depuis le dimanche 12 mai, une véritable méta-
morphose s'est opérée chez notre malade, sa physionomie
n'est plus la même, l'expression est plus vive; son raisonne-
ment est bon, elle est même devenue bavarde, à toutes les
questions qui lui sont posées elle répond franchement, sa
parole et tous ses mouvements sont moins lents, sa démarche
qui laissait à désirer, est meilleure. (Elle marchait courbée et
inclinée sur le côté.)
L'enfant s'aperçoit qu'elle n'est plus la même, elle dit :
« Je vais mieux et j'ai la tête beaucoup plus libre. » Au réfec-
toire elle ne reste plus inerte comme autrefois, elle cherche
à se rendre utile, elle met et enlève le couvert. L'appétit est
bon ainsi que le sommeil. Elle n'est pas difficile pour la
nourriture, elle est étonnée elle-même de son appétit : « Moi
qui étais si difficile à la maison, il fallait que maman me fasse
des plats il part, ici je mange de tout et cela me semble très-
bon. »
Il juin. - Suzanne va tout-à-fait bien, elle paraît absolu-
ment normale, le mutisme a disparu et fait place au bavar-
dage, elle ne cesse de causer, jouer et chanter toute la journée.
Elle a beaucoup d'entrain pour tout ce qu'elle fait; sa tenue
est bonne et ne laisse rien à désirer. Grande amélioration.
18 juin. L'enfant va très-bien. Rien d'anormal à signa-
ler dans son état. Suppression du valérianate d'ammoniaque.
Juillet. Suzanne va tout-à-fait bien, elle suit tous les
exercices des classes et de la gymnastique comme les autres
enfants ; elle travaille bien à la couture et au repassage.
Sa conduite est excellente. Traitement : 2 douches par
jour, purgatif tous les 8 jours. Ecole et gymnastique.
202 Mélancolie ; guérison.
21 juillet. L'enfant va tout-à-fait bien, elle est envoyée
en congé d'essai.
8 octobre. Depuis son envoi en congé d'essai, Suzanne est
allée à la campagne jusqu'au 18 septembre. Elle s'occupait
des soins du ménage et se promenait. La physionomie est
naturelle, sa tenue très soignée. Elle a eu ses règles le 14'
août, le il et le 28 septembre (1). Les fonctions digestives s'ac-
complissent bien. Elle n'a plus présenté aucun trouble intel-
lectuel. De son départ Ù son retour, le traitement a été
le suivant : bain de rivière de 10 minutes ; purgatif toutes les'
semaines ; tisanes amères ; lotions froides, vinaigrées sur la
figure, au coucher. - A partir de ce jour, reprendre les dou-
ches froides en jet en éventail, 30 secondes.
31 décembre. - R.. est toujours en congé. Elle a pris exac-
tement ses douches. Elle a recommencé ses études sans fati-
gue (2). Parfois elle a quelques irrégularités de caractère, des
absences d'amabilité, des mouvements d'humeur ; elle est
plutôt exubérante. Elle a eu quatre ou cinq fois des maux,
de tête. Le sommeil est bon, un peu lent à venir. Les règles
sont venues réguiicrements mais avec dcux jours de retard.
Légères démangeaisons aux jambes.
1902. 19 mari. - En avril, fréquentes douleurs de tête. Deux,
fois, en se levant, brouillard devant les yeux. En raison de
ces accidents, durant lesquels le caractère est devenu plus
inégal, moins aimable, elle a moins travaillé intellectuelle-
ment. Son caractère naturel, dit sa mère, a repris le dessus.
Elle est redevenue aussi gaie qu'autrefois, un peu exubé-
rante. - Règles régulières ; leucorrhée légère. - Continuel'
les douches, les purgatifs ; capsules de bromure de camphre
du Dr Clin.
ter juillet. - Les douleurs de tète ont cessé. R.. va
bien sous tous les rapports. Toute trace d'anémie a dis-
paru. Même traitement.
Réflexions. I. Les renseignements sur la famille
de la malade sont un peu insuflisants. Nous avons à
relever cependant l'état névropathique du père, qui
(1) Depuis son entrée le 4 mars jusqu'au 10 juillet, It... n'avait pas eu ses
règles. A partir de là elles ont été régulières. '
( ? ) Elle s'occupe surtout de dessin en vue de se placer dans « l'industrie. »
Mélancolie ; GUÉRISON. 203
a des migraines, ainsi qu'une demi-tante paternelle
dont une fille, qui vit encore (26 ans), est idiote, ni
gâteuse, ni épileptique; elle n'a pas d'enfant (1). Sa
mère parait indemne, mais sa soeur, tante maternelle
de l'enfant, a eu des attaques de nerfs.
II. Signalons en passant, sans y insister dans ce cas,
une obsession de la mère pendant la grossesse.
III. A l'entrée et pendant une semaine, R... a été
tranquille, d'apparence saine, au point de vue mental.
Puis, du 10 au 18 mars, nous assistons à une période
de mélancolie très caractérisée : mutisme, hébétude,
sombreur, inertie physique et intellectuelle, refus de
manger, hallucinations de la vue, idées bizarres et de
culpabilité, inperprétations fausses, onanisme, amai-
grissement (2), abaissement de la température, etc.
Du 11 au 26 mars survient une rémission, suivie
d'uuc nouvelle période mélancolique, moins pronon-
cée que la première qui dure du 26 mars au 7 avril.
Après une rémission du 7 au 12 avril, troisième période
mélancolique qui persiste jusqu'au 20 mai. A partir
de là, et assez promptement, retour à l'état normal.
IV. A quelle cause attribuer la maladie ? L'hérédité
est en somme peu chargée. Toutefois elle suffit pour
expliquer l'impressionnabilité habituelle de l'enfant.
Elle n'a pas eu, semble-t-il, d'amourettes. En 1899,
une nuit, elle a été émotionnée, parce qu'on entendait
chez elle des bruits étouffés comme si on assassinait
(1) Nous avons appris au moment de la rédaction de l'observation que la
mère de S... avait une cousine ycrniaine atteinte d'un arrêt de développement
pLysique (1^,40) et était un peu bizarre.
(2) Son poids il l'entrée, en mars, était de 49 kil. ; à la fin de juin, après
guérison, il était de 50 kil. 500. La (aide est restée la même, 1"60.
204 MÉLANCOLIE ; GUÉRISON.
quelqu'un. Ses parents s'étaient levés, inquiets. On
apprit le lendemain qu'il s'agissait d'un homme,
habitant à l'étage supérieur, qui avait eu une crise
d'épilepsie. Cette émotion fut passagère. L'enfant
se livrait à l'onanisme depuis une année environ, ce
qui l'avait affaiblie, énervée et lui a inspiré, après
des remontrances, l'idée de mauvaises confessions,
l'idée de culpabilité. La jeune fille, elle, ne sait à
quoi attribuer son aliénation mentale.
V. Nous n'avons pas à revenir sur le traitement que
nous avons indiqué chemin luisant, au cours de l'ob-
servation. lia été suivi très exactement jusqu'à l'envoi
en congé (21 juillet), repris en octobre 1901 et conti-
nué en 1902.
Nous avons revu Suzanne R... il diverses reprises,
la dernière l'ois à la fin de 1902. Elle n'a plus présenté
de troubles intellectuels, est redevenue gaie, active.
Ses règles, qui avaient été suspendues durant les pre-
miers mois de 1901, ont reparu en juillet, peu après la
disparition des troubles. psychiques, et, depuis, ont été
régulières. En pareil cas, nous continuons le traite-
ment hydrolhérapique afin d'affermir la guérison et
de modifier autant clac possible le terrain névropa-
thique. Les parents l'ont compris et nous ont bien
secondé.
Bibliographie. Nous profitons de l'occasion qui nous
est fournie par la publication de cette observation pour
rappeler les principales publications que nous avons faites
soit seul, soit avec nos élèves, sur la folie des enfants.
1° Instabilité mentale arec perversion des instincts (en
collaboration avec ! ! u<)ur). Compte-rendu de 188'i, p. )47;
2° Instabilité mentale auec perversions de instincts, com-
Bibliographie. 205
pliquée d'hstéro-épilepsie; condamnations multiples (en
collaboration avec Leflaive . Ibid., p. 164; 3° Réflexions
sur les deux cas qui précèdent. Ibid., p. 174 ; 4° Halluci-
nations de la vue, de l'odorat et du goût (en collaboration
avec Courbarien). 7btd., 1885, p. 54; - 5° Folie de l'adoles-
cence; instabilité mentale; idées vagues de persécution ;
succube (en collaboration avec Sollier). Compte-rendu de
1887, p. 237 ; - 6° Imbécillité légère ; instabilité mentale avec
perversion des instincts et impulsions génitales (Klepto-
manie, onanisme, sodomie, syphilis) (en collaboration avec
Raoult). Compte-rendu de 1888, p. 61; 7° Imbécillité et
instabilité mentale; impulsions génitales (en collaboration
avec Sorel). Compte-rendu de 1891, p. 108; 8° Arriération
intellectuelle consécutive à une brûlure de la tête; instabi-
lité mentale; délire mystique (en collaboration avec Tissier).
Compte-rendu de 1805, p. 77; 9° Alcoolisme, instabilité
mentale, crises hY8téri[o1'Jnes, guérison (en collaboration
avec J. Boyer). Compte-rendu de 1896, p. 218 ; 10° Dip-
somanie de l'adolescence. Ibidem, p. 225; 4f° Imbécillité
et instabilité mentale avec perversions des instincts. Compte-
rendu de 1897, p. 1 ; - 12° Manie de l'adolescence avec nym-
phomanie (en collaboration avec Katz). Compte-rendu de
1898, p. 63 ; 13° Alcoolisme de l'enfance, instabilité men-
tale, imbécillité morale (en collaboration avec J. Boyer).
Ibid., p. 84; 44° Folie de l'adolescence (en collaboration
avec Belih). Compte-rendu de 1899, p. 194; - 15° Folie de
l'adolescence (en collaboration avec Ambard), Compte-rendu
de 1901, p. 111 et 170.
XXI.
Idiotie prononcée ; impulsions violentes : dacnomanie,
krouomanie ; mutilations ; autophagie ;
. PAnBOUR.%EVILLEET51axULUIIENFELD.
. Nous croyons devoir appeler tout particulièrement
l'attention de nos lecteurs sur l'observation qui suit :
le malade qui en fait l'objet nous fournit le plus bel
exemple d'autophagie que nous ayions rencontré
jusqu'ici.
Sommaire. Père, caractère vif, sobre. Grand-père pater-
nel, alcoolique.
Mère, rien de particulier : - Grand-père maternel, mort de
tuberculose pulmonaire. Arrière grand'mère malernelle,
morte aliénée.
Consanguinité. - Inégalité d'âge de 6 ans (père plus âgé).
Conception, grossesse, accouchement, rien de particulier.
Asphyxieà la naissance. - Ophtalmie des nouveaux-nés
Première dent à cinq mois. Dentition complète à ? .
Début de la marche à 20 mois, de la parole à 2 ans, de
la propreté à 3 ans. - Convulsions à un mois et demi à 3 ans
et demi. - Parésie consécutive des mains, surtout de la
droite.
Description du malade à Ventrée : Parole défectueuse; -
incapacité de se déshabiller, de manger seul. Marche
instable; parésie des membres du côté droit; accès de
colère; aime la musique. - Rougeole à un an et demi.
1895. Contusion de la tête; adénite suppurée, coque-
luche. Manie de griffer et de mordre (dacnomanie).
1897. Teigne. - 1899. Pleurésie du côté gauche.
Antécédents héréditaires ET PERSONNELS. 207
De 1895 à 1901. Traitement médico-pédagogique : améliora-
tion progressive.
1902. Accès de démangeaisons violentes à la face. -Con-
tusions, gonflement des paupières gauches. Erysipèle.
IT01rouomanie. - Phlegmon de l'orbite gauche. Sup-
puration et perte de l'oeil. Manie de s'écorcher ;
autophagie. (Lèvre). - Excitation maniaque. - Cachexie
progressive. - Mort.
Autopsie. - Ecchymoses du cuir chevelu. Os du crâne
durs, épais; pas de synostose; sclérose atrophique du lobe
carré et méningo-encéphalite disséminée. Congestion
pulmonaire récente.
Lero.. (Félix), né à Paris, le 12 juillet 1891, est entré dans
le service le 30 juin 1895.
Antécédents. (Renseignements fournis par sa mère en 1895J.
Père, 31 ans, cocher; marié à 25 ans, réformé pour rhu-
matismes ; pas de syphilis. Céphalgies à partir de 10 ans.
Très sobre, mais caractère vif, coléreux. [Père, mort à
53 ans de pneumonie, très nerveux, alcoolique (absinthe),
tombait alors dans des attaques de nerfs. Mère, morte à 53
ans de la rupture d'un anwry-smc de l'aorte. Grands-
parents, rien. Deux tantes et un oncle, bien portants ; ce
dernier aurait néanmoins des palpitations de coeur. -Rien
autre de saillant à noter dans le reste de la famille paternelle]. : IÉtrE, 26 ans, fille de boutique dans une pâtisserie, mariée
à 20 ans, fièvre muqueuse à 5-6 ans, assez nerveuse, cépha-
lalgies, ni syphilis, ni dartres, morte de tuberculose pulmo-
naire en 1898. [Père, mort à 38 ans de tuberculose pulmo-
il souffrait aussi d'une maladie de coeur, sobre. - Mère;
faible de santé; pleurésie il y a 3 ans; depuis ce temps jamais
bien portante.-Arrière grand'mère maternelle, morte aliénée
après un séjour de 6-7 ans à la Maison nationale de Charenton.
Tante maternelle, attaques d'l2stéricdepuisl' : iede 16ans.
- Un oncle maternel, fièvre typhoïde à 25 ans, santé délicate à
la suite; céphalalgies; a perdu un enfant de 6 mois de la
cholérine avec convulsions. Rien à noter chez les trois
autres oncles maternels, ainsi que chez l'oncle et la tante
maternels. Aucun accident nerveux dans le reste de la
famille].
Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de 6 ans (Père plus
âgé).
208 Antécédents personnels.
Notre malade. La conception a eu lieu dans de bonnes
conditions. - Grossesse : pas de coups, pas de chutes, pas
d'émotions, pas d'idées noires, pas d'alcool. Accouche-
ment à terme, naturel en 7 heures. Présentation de la tête.
A la naissance, l'enfant avait plusieurs tours de cordon,
ne respirait pas, était en asphyxie bleue; respiration artifi-
cielle, frictions ; il n'aurait bien respiré et crié qu'au bout do 24
heures. Nourri au biberon depuis la naissance jusqu'à
3 ans (lait de vache). - A un mois et demi petites convul-
sions limitées à la face, intermittentes, qui se sont renou-
velées pendant 4 ou 5 jours, et sur lesquelles des détails
précis font défaut. Première dent à 5 mois. Début de
la marche à 20 mois, de la parole à 2 ans. Propre à 3 ans.
Caractère turbulent. A3 ans et demi convulsions
débutant dans la nuit; les yeux sont tournés en haut, les
membres agités. Ces convulsions durent de 8 heures du soir
jusqu'à 4 heures du matin, s'accompagnent d'incontinence
d'urine et des matières fécales et se terminent par un
sommeil profond. Trois ou quatre jours plus tard, nouvelles
convulsionspendant une heure et demie. Comme les premières,
elles étaient généralisées ; on ne saurait dire si elles prédo-
minaient d'un côté. - Les parents ont remarqué, après ces
convulsions, que l'enfant présentait de la parésie des mains.
Dès qu'il a commencé à marcher, il a pris l'habitude de se
cogner la tète. On l'attribua à ce qu'il portait un bourrelet ;
on l'a supprimé, les cognements ont continué Ils se manifes-
taient tous les jours, plusieurs fois par jour. Ils ont augmenté
après les convulsions, Ler.. se jetait par terre et se cognait
la tète sur le sol. De plus, il se mordait, se griffait, mais ne
s'attaquait pas aux autres. Il semblait insensible à la douleur.
Parfois grincements de dents.
Les parents attribuent l'idiotie aux grandes convulsions de
3 ans et demi. Elle existait, suivant nous, bien avant. En effet,
la manie de se cogner la tête (Itoowontaniej, la manie de se
griffer (amyssomomanie) ont débuté vers 20 mois. Il était
en retard pour tout. La parole était limitée à quelques sylla-
bes plus ou moins mal articulées, les mains étaient déjà
maladroites (la maladresse paralytique a augmenté après les
états de mal). Les convulsions de 3 ans et demi n'auraient fait
qu'aggraver la situation pathologique préexistante.
Pas d'instincts spéciaux, pas d'onanisme. Rougeole à un an
et demi. Vacciné à G mois. Pas d'étourdissements, ni de
vertiges. Changements fréquents de coloration de la face.
Description DU malade. 209
Sommeil calme, sans cauchemars. La mémoire parait peu
développée. Il n'est jamais allé à l'école. Il ressemblerait
surtout au père. La famille ne connait aucune cause défi-
nie à la maladie.
État actuel. L'enfant présente un aspect de bonne santé
apparent. L'expression est un peu hébétée et craintive.
Les cheveux, châtains, sont irrégulièrement implantés autour
d'un tourbillon postérieur; ils sont rares sur les tempes et au
niveau des bosses pariétales ; pas d'épi. Crâne assez volu-
mineux, régulier. Les bosses pariétales sont proéminentes.
Les bosses frontales sont surtout très saillantes au niveau de
la ligne médiane. Face ovale ; pas de cicatrices. Arcades
sourcilières saillantes. Sourcils régulièrement implantés,
épais et fournis au niveau de l'extrémité externe. Fentes
palpébrales largement ouvertes. Cils à direction antéro-
postérieure, blonds cendrés. Blépharite à droite. Pli orbito-
palpébral excessivement saillant et chargé de graisse. Yeux
mobiles; pas de strabisme, de nystagmus, ni de paralysie.
Iris bruns foncés. Pupilles réagissant à la lumière et à
l'accommodation. Ne ? droit; narines regardant en bas,
largement ouvertes; lobule peu saillant. Odorat, normal.
Pommettes symétriques, peu saillantes. Bouche entrou-
verte ; lèvre supérieure un peu proéminente. Palais, nor-
mal. Amygdales, un peu hypertrophiées. Langue, peu
épaisse, à mouvements ditliciles ; pas de déviation, ni de trem-
blement. Goût : Ler ? perçoit les saveurs et les distingue.
Menton, régulier. Pli naso-labial peu marqué. Oreil-
les grandes, écartées de la tête. Angle céphalo-auriculaire
largement ouvert. Hélix bien ourlé. Tubercule à l'union de la
portion descendante et de la portion horizontale. Anthélix
normal. Lobule développé et bien détaché.
Cou, circonférence 25 cent. Corps thyroïde normal.
Thorax. Pas de déformation thoracique, ni de scoliose.
Rien à l'auscultation ni à la percussion du coeur ou des
poumons. Abdomen peu saillant; rien aux organes abdo-
minaux.
Organes génitaux. Région anale, rien. Pubis et corps
glabres. -Verbe : circonférence, 5 cent. 1/2; longueur 3 cent.
t/2. Prépuce long, recouvrant entièrement le gland. Testi-
cules dans les bourses, du volume d'un haricot.
Sensibilité générale normale au toucher et à la tempéra-
ture.
Bourneville, Bicêlre, 1902, 14
210 Idiotie profonde.
Membres supérieurs, réguliers ; cicatrices de vaccin aux
deux bras ; pas de malformation. Mouvements volontaires
et provoqués, affaiblis. Les mains sont un peu pendantes,
l'enfant prend à poignée. Les ongles ne sont pas rongés.
Membres inférieurs, normaux; mouvements volontaires et
provoqués, diminués ; « il marche du bout des pieds » qu'il
soulève péniblement et tombe souvent. Réflexes naturels
(Fig. 27).
État mental. Ler.. est très turbulent ot coléreux. Sa
parole est très défectueuse; pour dire : cc bonjour madame»,
Fig. 27. Ler.. (Félix) à 4 ans (Juin 1895).
. Description DU malade. 211
dit : «jou dame», a poupe pour soupe. Il cause peu, avec
difficulté, ne répond pas aux questions. Il marche sur la
pointe des pieds, le corps penché en avant, ne semblant
jamais être en équilibre et tombe souvent. Il tourne les pieds
en dedans, principalement le droit. Il monte et descend les
escaliers seul, sans hésitation, mais toujours le même pied
en avant.
Ler.. ne mange pas seul, essaie de porter la cuiller à sa
bouche, mais renverse presque tout le contenu sur lui; il boit
peu, n'a nulle appétence pour le vin, préfère l'eau. Il est très
gourmand, sait parfaitement reconnaître un bon plat d'un
mauvais et préfère de beaucoup les mets sucrés aux mets
salés.
L'enfant ne sait ni s'habiller, ni se déshabiller seul. Il est
propre le jour, mais il lui arrive quelquefois d'uriner la nuit.
Il est très maladroit de ses mains et semble avoir un peu
de paralysie, principalement de la main droite, d'où la néces-
sité des exercices de la main.
Comme manie l'enfant il celle de porter continuellement
les doigts à la bouche. Il a de nombreux accès de colère et
de cris; il pleure rarement et seulement dans ses grandes
colères ou lorsque ses parents viennent de le quitter : son
chagrin alors est long à apaiser.
Leur.. ne répond que par oui ou non, mais avec assez d'à
propos, aux questions qu'on lui pose. Il chantonne assez
juste et adore entendre chanter. Mené deux fois il la leçon de
chant, il y est resté absolument en extase, les yeux fixes et
la bouche entr'ouverte. Il ne connaît ni lettres, ni couleurs,
ne sait ni nouer, ni lacer, ni boutonner; ne fait pas de diffé-
rence d'un plus petit et d'un plus grand, d'un objet lourd d'un
plus léger.
Au point de vue du caractère, l'enfant est très entêté, indo-
cile, turbulent, malicieux, taquin avec méchanceté pour les
autres enfants dont il est jaloux. Il dérobe très prestement,
en ayant bien soin qu'on ne le voie pas, les gourmandises à
sa portée. Il est très poli, ne manquant jamais de remercier
pour les choses données.
Les sentiments affectifs paraissent bien développés. Ler...
est sensible aux caresses, mais très gâté par sa mère, il est
excessivement colère ; si on ne fait pas toutes ses volontés, il
crie, se roule par terre, mord, s'arrache les cheveux, s'égra-
tigne les oreilles ; il ne cède qu'à son père qui paraît avoir
une grande autorité sur lui.
212 Marche DE la maladie.
Températures à l'entrée.
Traitement médico-pédagogique. 213
a fait de réels progrès. Les mains sont toujours maladroites;
il est parvenu à lacer, mais ne peut ni nouer ni boutonner.
Ler..., a appris à connaitre les lettres de l'alphabet, les
chiffres, à distinguer sa droite et sa gauche, les cinq sens.
Il connait et nomme tout ce qui est contenu dans la boite aux
leçons de choses; écoute bien les leçons orales et répond
avec à propos aux questions. Au point de vue du carac-
tére, l'enfant est toujours très volontaire, très coléreux et
méchant avec les autres enfants qu'il griffe (1) et mord très
souvent. -La marche est moins titubante, l'enfant tombe
moins souvent.
1897. J 11111'S. - Ler.... entre au Pavillon d'isolement atteint
de teigne tondante. Traitement : Lavage au savon noir,
lotions au sublimé, teinture d'iode et cataplasmes de farine
de lin.
12 juillet. Organes génitaux. Corps, aisselles, absolu-
ment glabres. Verge : longueur 3 cent. z2 ; circonférence
5 cent. Testicules de la grosseur d'un haricot. Région anale
normale. - Traitement. Bains salés, sirop d'iodure de fer,
huile de foie de morue, douches, etc. (Fig. 28.)
1808. '1«,jazzLier. L'enfant est toujours à l'isolement pour
la teigne; les colères semblent être moins fréquentes.
1899. 25 mars. L'enfant sort de l'isolement guéri de la
teigne.
Juin. - Ler.... a fait des progrès assez sensibles, en rai-
son du peu de temps qu'il est sorti du pavillon des contagieux.
Il est moins maladroit de ses mains, est parvenu a nouer et
il boulonner; connait toutes les couleurs, compte jusqu'à 20,
place bien les bâtonnets. La marche est beaucoup plus assu-
rée, l'enfant ne tombe plus comme autrefois. Traitement :
Bains salés, sirop d'iodure de fer, huile de foie de morue, dou-
ches, etc. 1
"0 juillet.-Lpancltenzent pleuoétirlue à gauche. Le liquide
est en moyenne abondance. La matité remonte en arrière
seulement à deux travers de doigt au-dessous de l'angle
inférieur de l'omoplate. T. Il. 39°, 7.
21 juillet. T. R. matin, 38°, 9; soir, 40° mêmes signes à
l'auscultation et à la percussion. Pas de dyspnée.
(1) Amysson¡¡¡nie, de "I1.J77{,), je griffe.
214 Marche DE la maladie.
26 juillet.- L'épanchement a diminué et on entend dans
tout le côté, presque jusqu'en bas, des frottements pleuraux,
humides, de retour. Température du matin ST", 6; du soir 39°.
31 juillet. - Larespiration s'entend, encore un peu modi-
fiée, dans tout le poumon. L'épanchement parait avoir en
grande partie disparu.
6 août. L'épanchement a disparu. T. R. matin 37°, 1 ; soir
33,4.
12 août. Chute de la température; on entend la respira-
tion normale du poumon. ,
23 août. L'enfant sort de l'infirmerie guéri.
1900. Januier. - Ler... dont la parole était pour ainsi dire
nulle à son arrivée, dit tout aujourd'hui, forme des phrases er,
Fig. 28. Ler.. (F.) à 6 ans (1897).
Traitement MÉDICO-PRDAGOGIQtiL;I\tPGLSIONS. 215
employant les verbes. L'articulation est nette, seulement la
langue semble se mouvoir toujours avec peine, la parole est
lente, un peu embarrassée et présente une certaine analogie
avec celle d'un vieillard. Exercices de la langue.
Cet enfant a beaucoup d'amour-propre, il travaille avec
ardeur en classe, heureux que l'on s'occupe de lui et si une
teigne persistante ne l'avait retenu longtemps à l'isolement,
il serait certainement plus avancé. Il a appris à placer et à
lire les couleurs et les chiffres, établit bien le rapport de la
quantité avec le chiffre.
19 janvier. Plaque de teigne qui nécessite de nouveau
son envoi au pavillon d'isolement.
14 février. Le malade, en raison de son état paralytique,
est soumis au massage et, en particulier, aux exercices des
jointures.
Organes génitaux. Corps entièrement glabre ; verge 4 cent.
1/2 de long sur 2 cent. 1/2 de circonférence. Bourses peti-
tes. Testicules (haricot) à l'anneau. Anus normal.
Juin. - Ler..., guéri de la teigne, revient à l'école. Atteint
de paralysie incomplète mais généralisée, Ler... était incapa-
ble de tenir un crayon ; il pleurait de rage, ramassait son
crayon, essayait de tracer quelques lignes, le crayon tombait
de nouveau et cet enfant, avec une volonté rare, recommen-
çait cinq ou six fois non sans entrer dans des colères folles,
se mordant, se donnant des claques et se tirant les cheveux.
Enfin, grâce à cette volonté persistante, il est enfin arrivé à
tracer quelques lettres, puis à les assembler et former des
mots dans l'espace de quelques mois. Il est parvenu égale-
ment à tracer tous les chiffres. Il apporte non moins de
bonne volonté pour la lecture et fait de réels progrès.
Caractère affectueux mais jaloux, il voudrait toujours qu'on
s'occupe de lui. Doué de beaucoup d'amour-propre, il implore
continuellement des louanges qui le comblent de joie. Très
volontaire et très colère, il entre en rage lorsqu'on lui fait des
reproches ou si on ne lui donne pas ce qu'il désire. Très glou-
ton, il mangerait à se rendre malade s'il n'était surveillé.
1901. Janvier. - Ler... continue à apporter la même bonne
volonté pour tous les exercices scolaires, aussi continue-t-il
à réaliser de grands progrès pour la lecture et l'écriture. Il
commence à faire de petites additions. Il copie sur son
cahier un certain nombre de mots imprimés, tels que : cou-
216 MARCHE DE la maladie.
leurs, nombres, surfaces, famille, vêtements, qu'il lit avec la
même facilité.
Juin. Atteint pendant ce dernier semestre d'une sorte
d'eczéma à la face, cet enfant, qui fait partie des malades de
l'isolement pour la teigne, est venu peu en classe pendant ce
dernier semestre ot a réalisé peu de progrès bien qu'appor-
tant toujours une grande bonne volonté. Doué de mémoire, il
n'oublie pas ce qu'il a appris, fait des progrès très sensibles
en lecture dès qu'il nous est permis de le faire lire quelques
jours de suite. Ler... éprouve beaucoup plus de difficulté pour
l'écriture. Caractère : un peu plus docile, moins colère.
Décembre. Depuis que Ler.... est revenu de l'isolement,
Fig. 29. - Ler.. (F.) à 10 ans (1901).
Traitement nIÉ1)ICO-PÉDAGOGIQUE. 217
il a progressé pour tous les exercices classiques ; l'écriture
est en bonne voie; il fait quelques copies, quelques petits
exercices de grammaire qu'il comprend. Il fait l'addition et
la soustraction avec retenue sans en comprendre l'applica-
tion. La lecture marche de pair.
Cet élève, contrairement à la plupart de nos enfants au
début, a un désir ardent d'apprendre et se met toujours en
avant pour répondre. Il écoute avec beaucoup d'attention et
profite plus que tout autre des leçons orales.
Caractère toujours affectueux mais jaloux et rageur ; volonté
très tenace : lorsqu'il veut obtenir quelque chose il revient
sans cesse à son idée et lorsqu'il ne peut y arriver, il rage,
Fig. 30. - Ler.. (F.) à 10 ans (1901).
218 Marche de la maladie.
trépigne, pleure et passe toute sa colère sur lui-même; il a
quelquefois les joues toutes rouges des claques qu'il s'est
administrées, répétant sans doute ce qu'il nous a entendu
dire en pareille circonstance « C'est bien, Maurice, tu es un
entêté, tu n'auras pas de dessertpour te punir de ta colère, etc.
(Fig. 29, 30 et 31.)
1902. Juin. - Ler..., d'une volonté surprenante, apporte en
toutes choses une grande somme d'énergie; il fait beaucoup
d'efforts en classe, aussi a-t-il réalisé de grands progrès pour
la lecture, il est en bonne voie pour lire bientôt couramment.
Il fait l'addition et la soustraction avec retenues, copie tous
les jours un grand nombre de mots imprimés qu'il fait en
Fig. 31. - Ler.. (F.) à 10 ans (1901).
Traitement hiDICO-YEDAGOGIQIlE.
dictée, écrit également de mémoire les jours de la semaine
les mois de l'année, les saisons. L'écriture est très Ínégu-
. Hère, il nous semble même qu'au lieu de s'améliorer, elle
devient de plus en plus défectueuse, sans la moindre fermeté.
cependant il apporte beaucoup de bonne volonté, mais,
affecté d'un tremblement de la main, il a une grande diffi-
culté à tenir sa plume et à la diriger. '
Il est très attentif et retient bien ce que l'on explique aux
leçons .orales, il est toujours le premier à répondre aux ques-
Fig. 3. - Ler.. à 11 ans (Juin 19021. z
220 Colères; impulsions ; PIQURE.
tions qui sont posées. Il commence à avoir quelques notions
de grammaire, d'histoire et de géographie.
Ler.... a de violentes colères qu'il passe sur lui-même en
se calottant, s'égratignant, se mordant, tapant du pied,
mais ces colères n'ont pas de durée, elles tombent subite-
ment, il demande alors pardon, promet de ne plus recom-
mencer.
Cet enfant est sujet à des poussées de démangeaisons à la
figure, tantôt aux lèvres et à leur pourtour, tantôt aux yeux,
au nez, dans le cuir chevelu, il est alors porté à se gratter
d'une façon intolérable, on est obligé de lui mettre le man-
chon et, malgré cela, il arrive à s'égratigner, à s'écorcher, il
se produit alors de l'enflure, une suppuration blanchâtre et
des croûtes. Ces accidents se répètent très souvent, du reste.
La moindre écorchure, le plus petit bobo les déterminent.
l ? 5j'ttt ! ! ef. -Gonflement des paupières surtout il gauche
due peut-être à une piqûre d'insecte.
^juillet. Ler..., est amené à l'infirmerie ce matin; il
présente un gonflement assez considérable des paupières
surtout à droite, beaucoup moins à gauche. Pansement à
l'eau boriquée.
9 juillet. Gonflement persistant des paupières à droite
et à gauche, avec rougeur érésypélateuse s'étendant aux
mues. Un peu de pus dans l'oeil droit. Nitrate d'argent
et lavage de l'oeil. A cinq heures du soir l'enfant passe à
l'isolement.
Ler..., parait avoir été piqué par un insecte sous l'oeil gau-
che, et, à la suite des coups qu'il s'est donnés, est survenu un
érysipèle. Il se frappe continuellement la tête contre les bar-
res de son lit et se cogne la face. Pour parer à ces acci-
dents, on a mis des planches matelassées iL son lit et on lui
maintient continuellement le manchon.
11 juillet. Traitement : 10 gr. d'huile de ricin, Ogr. 25 de
sulfate de quinine, un bain tous les jours, pansements avec
des compresses d'eau bouillie, lavage de la bouche avec une
solution de chloral. Lait, bouillon, limonade avec du jus de
citron, chloral.
Traumatisme; ÉRÉSYPÉLE; phlegmon DE L'ORBITE. 221
Le malade est encore plus agité depuis l'alitement.
13 juillet.- L'aspect delà face est repoussant, l'oeil gauche
est en exophtalmie sous des paupières très oedématiées, la
paupière supérieure est sillonnée d'une plaie transversale
due à un coup qu'il s'est donné. La lèvre inférieure à gauche
est également coupée par une morsure. (Fig. 32). Cependant
l'état général semble s'être amélioré ainsi que l'état local.
15 juillet. A la suite de son érysipèle de la face, il a fait
un phlegmon de l'orbite quia entraîné la suppuration et la
perte du globe oculaire. Actuellement, tuméfaction considé-
rable des paupières de l'oeil gauche. La paupière supérieure,
sphacélée, a laissé évacuer une partie du pus. Dans le fonds
de ces vastes ouvertures, on voit le tissu orbitaire sphacélé.
La paupière inférieure, très tuméfiée, ne présente aucune
perforation, elle est fluctuante à la palpation, ce qui dénote
la présence dans les parties correspondantes de la cavité
orbitaire d'une collection purulente L'oeil droit est tout à fait
débarrassé.
Le globe oculaire, par suite de la suppuration orbitaire qui
l'entourait et le comprimait s'est rapidement atrophié. Aujour-
d'hui il est complètement détruit Les lésions du globe ocu-
laire (gauche) sont secondaires au phlegmon de l'orbite.
Traitement. - Large incision le long du rebord orbitaire
inférieur. Recherche du pus et débridement à la sonde canne-
lée. Drainage. Le pus évacué a été moins abondant que
ne le faisait supposer la tuméfaction.
16 juillet. - Ler.... s'est levé, a cassé 6 carreaux et s'est
fait une plaie au côté droit de la face et une autre à la main'
droite au niveau du second métatarsien. Il devient de plus en
plus agité. Malgré toutes les précautions que l'on prend, il
parvient à se faire du mal, il s'est mordu la lèvre inférieure
auec tant de violence qu'il en a presque détaché un morceau
de 4 cent, cle long sur un cent, de large. Il cherche à rame-
ner dans sa bouche le lambeau pendant pour le manger. Cet
enfant parait insensible il toute douleur physique. (Fiç7. 33.)
18 juillet. Ler.. devient de plus en plus difficile à soigner,
il cherche par tous les moyens possibles à enlever ses panse-
ments, à se frapper ou se mutiler malgré le manchon qu'on lui
laisse nuit et jour, on est obligé de l'attacher. Ses diverses
blessures, tant aux yeux qu'à la bouche, semblent entrer en
voie de cicatrisation.
21 juillet. L'enfant réussit à défaire son manchon, arra.
che son pansement et agrandit la plaie de la lèvre en s'ou-
22 AUTOPHAGIE.; excitation maniaque.
vrant démesurément la bouche avec les mains ce qui provoque
une hémorragie assez abondante. Après une nuit un peu plus
calme, l'enfant paraît très affaibli et a même une syncope.
Injections de sérum.
Cette période d'accalmie n'est que de courte durée et Ler...
est de nouveau retombé dans un état de surexcitation.
extrême ; alors que précédemment il ne cherchait qu'à se
faire du mal à lui-même, il s'en prend maintenant aux per-
sonnes qui l'entourent, aux infirmières qui le soignent ; par
deux fois différentes, il a réussi, en agissant sournoisement,
à mordre la veilleuse assez grièvement. (Dacnomanie.)
Cette situation se maintient sans changements notables jus-
qu'au 1S août. A ce moment, son agitation devient moins vive,
ses yeux, de même que la blessure de sa lèvre, sont en bonne
voie,l'enfant mange et boit bien, le sommeil est assez calme;
on le lève dans la journée.
20 septembre. Le mieux persiste, ]'oeil va tout à fait bien
malgré l'enflure. Ler... a des recrudescences d'agitation et
toujours il cherche il se faire du mal, il casse des carreaux
avec son manchon, cherche il en happer des morceaux qu'il
essaye de mâcher et d'avaler.
20 octobre. Cet enfant revient de l'isolement à l'Ecole,
mais dans un état de surexcitation extraordinaire. Impossi-
ble de lui dire un mot sans qu'il entre en colère et tout en
employant toute la douceur et la patience possibles, nous
n'arrivons pas à lui faire entendre raison. Pour le motif le plus
futile et même sans motif, il se met dans des rages d'une vio-
lence épouvantable, il s'arrache la bouche, les lèvres, enfonce
les doigts dans ses yeux, se mord (1) et cherche il mordre ceux
qui l'entourent (2), envoie des coups depied aux infirmières et
aux enfants, se frappe la tête contrôles murs, les tables, le
poêle, on est alors obligé de lui mettre soit le manchon, soit
même la camisole il laquelle il a fallu recourir, contrairement
il la pratique du service. Alors sa colère augmente, il se laisse
tomber de toute sa hauteur ce qui fait qu'il a la tête remplie
de bosses et de contusions. '
Le jour de sa rentrée à l'école, sans cause connue, dès son
arrivée, il s'est mis à frapper à coups redoublés sur ses
camarades, a cassé un carreau, déchiré ses vêtements et
(1) Dacnomomanic, manie de se mordre.
(2) Dacnomanie. manie de mordre les autres.
Excitation ; clastomanie. 223,
lorsqu'il n'a plus rien eu à mettre en pièces, il s'en est pris à
lui-même, se mordant, se griffant. (Amyssomomanie, de
(xjj.vc ? o ? se griffer.) La classe est complètement troublée par
ses cris.
La même agitation se produit la nuit. Il n'a pas de som-
meil ; à peine couché, il demande de l'eau, du lait, du chloral.
Lorsqu'on a satisfait tous ses désirs, il ne sait plus que
Fia. 33. - Ler.. (1<'.) (Otoure 1902).
224 Excitation ET impulsions VIOLENTES.
demander, il entre en fureur, se frappe la tète contre les
barres du lit, saute au-dessus des barreaux, s'arrache l'inté-
rieur de la bouche, passe son corps à travers les barreaux et
pousse des cris perçants que rien ne peut calmer, de sorte
que le sommeil de ses camarades est complètement troublé,
tous les enfants, petits et grands, sont épouvantés par le
spectacle qu'offre cet enfant dans ses crises d'agitation.
24 octobre. Ler... est isolé dans le pavillon des cellules.
Même état, agitation extrême. Il est à remarquer que cet
enfant répond aux questions qui lui sont posées avec la plus
grande lucidité, il reconnaît tout le monde et désigne chaque
personne par son nom, sans aucune hésitation. Il semble-
rait qu'il est atteint de la monomanie du suicide, car, plusieurs
fois, l'on a remarqué, que lorsqu'il se jetait volontairement à
terre, il choisissait un endroit présentant des angles aigus ou
des cailloux tranchants.
28 novembre. - Chute sur la région fessière ; hématome
de la partie profonde de la fesse et de toute la région. Vu le
gonflement il est impossible de savoir s'il y a fracture du bas-
sin. Le gonflement disparait au bout de deux jours et l'on
constate qu'il n'y a eu que contusion et non fracture.
L'enfant a maigri depuis deux ou trois semaines. Aucun
trouble, du côté des organes thoraciques et digestifs.
30 novembre. Le malade présente un gonflement de la
partie droite de la face, gonflement accompagné de rougeur
diffuse avec légèro élévation de température. Pouls 100. --
Application de pansements humides.
Malgré l'état d'affaiblissement de cet enfant, il n'y a pas de
changement dans son caractère, il continue à se frapper con-
tre les barres de son lit, à s'égratigner avec son manchon, il
urine et défèque au lit malgré toutes les précautions que l'on
prend. Du reste, ces actes sont volontaires certainement, car
narguant l'infirmière qui le conduit aux cabinets où il ne fait
rien, il s'empresse de lui annoncer qu'il exercera ses malpro-
pretés dans son lit, et il tient parole.
L'état de Ler... se maintient stationnaire jusqu'au 7 décem-
bre ; ce jour-là, sa faiblesse augmente notablement, il demande
sans cesse de l'eau, du lait, du sirop de chloral.
8 décembre. T. IL matin 38". Le malade tousse un peu,
(ventouses sèches); la face est très pâle, il ne cherche plus à
se cogner la tète comme précédemment, il est somnolent.
Quatre selles dans la journée, en diarrhée, fétides. Dans la
soirée, l'affaiblissement s'accroit, la respiration devient difli-
Autopsie : Mli1\INGO-ENCIiPHALI1'E. 225
cile, la face est couverte de sueur. Jusque-là, il avait conservé
sa connaissance. Dans la soirée, état comateux, l'enfant meurt
le 9 décembre il 4 h. du matin sans râle. Poids après décès
21 kilogr.
Autopsie faite le 10 décembre 1902, à 9 h. 45 du matin (soit
29 h. après le décès).
TÊTE. - Cuir chevelu très épais; ecchymose demi-circu-
laire de 2 cent, sur 5 ou 6 cent. sur le côté droit, au niveau
de l'occipital; plusieurs ecchymoses en avant au niveau des
pariétaux.
Crâne. Os durs, épais, sans synostose. Dure-mère un
peu épaissie, sans fausses membranes.\Les fosses de la base
du crâne sont symétriques. Glande pituitaire assez volu-
mineuse, pâle. Apophyse cristagalli petite, triangulaire.
Les différentes parties de la base de l'encéphale sont égales
et symétriques.
Hémisphère gauche. La pie-mère est très mince, sans pla-
ques laiteuses, avec de petites adhérences de ménill[Jo-encé-
phalite disséminées sur les trois faces du lobe frontal. Il
existe une atrophie très prononcée du bord supérieur du lobe
carré et de son bord antérieur. A l'angle de ces deux bords
il y a un foyer ocreux avec atrophie des circonvolutions
environnantes. Le foyer ocreux intéresse la partie corres-
pondante de la scissure calloso-marginale et l'angle postéro-
supérieur du lobule paracentral.
Face convexe. - Les circonvolutions du lobe frontal sont
assez bien développées. F' et r"2 s'insèrent assez largement
sur FA tandis que F3 n'est uni à FA que par un pli inférieur,
assez grêle. FA est coupée par un sillon transversal à
l'union de son quart inférieur avec ses trois quarts supé-
rieurs. Sillon de Rolando assez profond, ininterrompu. PA,
large dans son tiers inférieur, est étroite dans ses deux tiers
supérieurs. Les autres circonvolutions pariétales, le pli cour-
be et les circonvolutions occipitales supérieures sont plutôt
un peu grêles. - La lobe temporal est assez développé, en
particulier la circonvolution de l'hippocampe. Le lobule de
l'insula présente cinq digitations.
Face interne. fut, CCC, LP sont assez développés tandis
que les circonvolutions du lobe carré, du coin et du lobe
occipital sont plutôt petites.
Les plis de passage sont assez rares, les sillons sont peu
. profonds, la corne d'Ammon parait saine.
Bourneville. Bicêtre, 1902. 15
226 Idiotie; AUTOPHAGIE.
Hémisphère droit, Il a été réservé pour examen histo-
logique, et, pour cette raison, n'a pas été décortiqué.
Cou. Larynx et corps thyroïde, rien. Pas de thymus.
THOKAX. Coeur, rien de particulier, pas de persistance du
trou de Botal. Poumons : Le poumon gauche est fortement
congestionné mais cette congestion parait être récente. Pas
de foyer de broncho-pneumonie ni de foyer de tuberculose.
Aucune adhérence des plèvres. Pas d'épanchement.
ABDOMEN. - Foie gras ; vésicule biliaire remplie d'une bile
jaunâtre. - Reins légèrement congestionnés, surtout le rein
droit. Pas d'adhérences des capsules surrénales qui n'ont
rien de particulier. Rate normale. - Le péritoine, le tube
digestif, l'appendice, les ganglions n'offrent rien à signaler.
Il en est de même des organes génito-urinaires.
Au niveau de l'articulation de la 1 ? <= côte et du sternum,
foyer de tuberculose osseuse et articulaire.
Le malade présente autour des lèvres des cicatrices de
morsures. Ces cicatrices sont circulaires. - Une autre cica-
trice parallèle à celles de la lèvre, au-dessus dumenton, a été
produite de la même façon, les ailes du nez sont déchirées et
présentent de nombreuses cicatrices.
Le moignon de l'oeil gauche a été enlevé au milieu des tis-
sus graisseux de l'orbite, le globe oculaire est représenté par
une petite masse de la grosseur d'un petit pois.
Poids des Organes.
228 Idiotie méningitique. Autophagie..
Réflexions. I. L'hérédité, à peu près nulle du
côté paternel, est peu chargée du côté maternel.
II. L'enfant est né en état d'asphyxie bleue, occa-
sionnée sans doute par la constriction du cordon et on
a dû recouriràlarespiralion artificielle. C'est il la lésion
ou au trouble encéphalique, qui est survenu alors,
qu'il faut probablement atrihuer les petites cmlûltl-
sions survenues à six semaines, le retard de la mar-
che, de la parole et de la propreté (1). A 3 ans et
demi, convulsions qui se sont manifestées sous la
forme d'état de mal, et sur lesquelles nous n'avons pu
avoir que des renseignements incomplets (2).
III. A l'entrée, Ler.... était atteint d'idiotie à un
degré prononcée, compliquée d'un affaiblissement
paralytique prédominant dans les membres du côté
droit. Les changements de coloration de la face, les
accès de colère et de cris, l'impulsion à mordre, it
s'égratigner, les grincements clc dents, ont fait penser
il des lésions ménin g i tiques, et à cause de la parésie
droite, prédominant dans l'hémisphère cérébral
gauche.
IV. Malgré les conditions très défavorables que
présentait l'enfant, et malgré les intermittences occa-
sionnées par la teigne, par sa récidive, par une plcu-
(1) Ces symptômes n'ont qu'une valcurrelatice. L'enfant marche, parle, est
propre, plus ou moins tôt suivnnt que les parents, la mère surtout, sont intel-
ligents (ce qui existait dans ce cas) et s'occupent de leur enfant.
(2) C'est souvent là une lacune regrettable qui rend difficile un diagnostic
précis, au point de vue anatomo-pathologique. Les convulsions ont-elles
été précédées de prodromes, ont-elles été toniques, cloniques, ont-elles été
généralisées, ont-elles prédominé dans l'un des côtés du corps, ont-elles
été limitées à une moitié du corps ? Ont-elles été suivies de coma, de fièvre,
de folie, etc. - Y a-t-il eu des accidents consécutifs ? Quel était l'état intellec-
tael avant et après les convulsions ? Ce sont là autant de questions sur les-
quelles les parents ne sont pas toujours en mesure de répondre.
AUTOP11AÙlE. 229
résie, le traitement médico-pédagogique avait donné
des résultats extrêmement remarquables. Nous les
avons signalés dans le Cornpte-rendu de 1899, p. IV.
V. Dès l'entrée du malade, alors qu'il se présentait
avec tous les caractères de l'idiotie profonde, il avait,
depuis l'âge de deux ans, des impulsions violentes
envers lui-même surtout, mais aussi envers les autres
enfants, quelquefois envers le personnel. Dans ses
colères, il se gilllait, se mordait, s'égratignait sans
qu'il n'y eut de cause locale particulière.
Plus tard, peut-être sous l'influence de cas lrau-
matismes, il s'est produit une irritation locale qui a
occasionné des lésions cutanées superficielles, source
de démangeaisons qui, elles, à leur tour, ont provo-
qué l'enfant à redoubler ses son grattage,
ses égratignures, d'où écorchures, «ronflement (juin
1902).
En juillet, piqûre probable des paupières avec rou-
geur et gonflement, puis coups de poings sur les yeux,
principalement le gauche, cognements de la face sur
les barreaux du lit, plaie, érysipèle, phlegmon et
suppuration de l'oeil gauche.
Vers le milieu de juillet, il commence à se mordre
la lèvre inférieure d'une façon atroce, détache des
lambeaux qu'il avale. En même temps surviennent
des périodes d'agitation très violentes dans lesquelles
ses violences s'exercent non seulement sur lui mais
aussi sur ses infirmières. Il casse les carreaux, mal-
gré la surveillance dont il est l'objet, essaye de hap-
per et d'avaler des morceaux de verre. En septembre,
octobre, novembre et décembre, persistance des vio-
lences, des périodes d'excitation, de la krouomanie,
de la dacnomanie et de l'amyssomanie.
Il semble que Ler... était insensible à la douleur,
remarqu e déjà faite par ses parents, car il recherchait
230 . AUTOPHAGIE.
les angles des meubles pour se cogner, se jetait vio-
lemment par terre, sur des cailloux, se contusionnant,
se blessant la face, la tête. Avait-il des idées de sui-
cide ? On ne sait.
La manie cle se mordre les lèvres s'observe quel-
quefois, mais non d'une façon aussi fréquente que
l'onychophagie ou la manie de se déchirer les ongles,
mais nous ne l'avons jamais notée à un degré aussi
prononcé. Souvent le léchage des lèvres, comme
nous l'avons décrit dans l'observation de Viga... (Voir
p. '1'1.), détermine une irritation locale, des excoria-
tions, des croûtelles qui peuvent amener les malades
à se gratter, à se mordiller. Nous avons pu faire ces-
ser les accidents chez Vig.... Au contraire, chez Ler..
ils se sont aggravés de plus en plus, déterminant sans
doute une douleur qui, augmentant, produisait peut-
être une sorte de plaisir.
VI. L'enfant a maigri progressivement. Son poids
qui était de 23 k. 200 en juillet 1901, loin d'aug-
menter, est allé en diminuant jusqu'à la mort :
21 kilogr. au lieu de 27 k. il son âge. C'est à
cette sorte de cachexie qu'est duc la mort car les
lésions pulmonaires trouvées à l'autopsie étaient
récentes et peu prononcées.
Il existait chez Ler... une parésie des quatre
membres (diplégie), prédominant clans le côté droit
et intéressant davantage, scmhle-t-il, les mains. A l'au-
topsie, nous avons trouvé : 1 une inégalité de poids
des hémisphères cérébraux ; le gauche pesait 35 gr.
de ln01rUn1ue le droit; 2° des lésions, assez superfi-
cielles d'ailleurs, de méningo-encéphalite ; 3° un
petit foyer ocreux portant sur le lobe paracentral et
le coin.
L'idiotie, par conséquent, était attribuable à la
méningo-encéphalite. Nous avons déjà essayé de tra-
IDIOTIE VIÉNINGO-ENCÉPHALITIQUE. 231
cer le tableau clinique de cette forme d'idiotie.
Cette tâche sera reprise et peut-être y parviendrons-
nous, comme nous l'avons fait pour l'idiotie 1nyxoe-
démateuse, l'idiotie /i,7/drocep/a'que, et comme
nous essayons de le faire pour l'idiotie mongolienne
ou mongolisme.
XXII.
Un cas d'affection familiale à symptômes cérébrospi-
naux : diplégie spasmodique infantile et idiotie chez
deux frères ; hypothermie ; Atrophie du cervelet ;
PAR BOURNEVILLE et CROUZON (1).
Des travaux récents ont attiré l'attention sur les
affections familiales du système nerveux. Depuis le
travail de Frcnd sur les formes héréditaires des diplé-
gies cérébrales publié en 1893, on a vu successive-
ment paraître en 1896 le travail de Sachs sur l'idiotie
amaurotique familiale ; en 1898 la thèse de Lorrain
sur la ]Jal'8]Jléuie spa.sH1odiq11c familiale ; en janvier
1900 le travail de Trénel relatant un cas de maladie
familiale à symptômes cérébraux et médullaires
caractérisée par des troubles psychiques périodiques,
de la démence et une parésie spasmodique ; en avril
1900, la thèse cle \piu Pesker contenant les observa-
tions de deux frères, Thir..., malades cle notre ser-
vice, atteints d'une affection spasmodique rappelant
un peu la sclérose en plaques ( ? ) et complétée par
l'étude histologique du système nerveux de l'un des
deux, faite dans le laboratoire de M. P. Marie ; enfin
le travail de Cestan et Juillain paru dans la Revue de
(1) La première observation, avec les pièces et les photographies, a été
présentée il la section de psychiatrie du Congrès intern. de méd., de 19GO,
Antécédents héréditaires. 233
médecine d'octobre 1900, relatant l'histoire pathologi-
que de deux familles, atteintes l'une de paraplégie
spasmodique, l'autre de sclérose en plaques. Les deux
observations qui suivent sont celles de deux frères
atteints de diplégie spasmodique, et dont nous avons
pu faire l'autopsie (1).
SostrtAlns. - Père et mère bien portants, non alcooliques;
non syphilitiques ; aucune tare nerveuse. - Une cousine
germaine maternelle du père a été hémiplégique. - Une
cousine éloignée paternelle de la mère, épileptique. Sur
dix grossesses, trois fausses couches, cinq enfants bien
portants et nos deux malades. L'ainé aurait eu la rou-
geole à 18 mois, et il semble que sa maladie ait débuté à ce
moment. Pour le second, la mère fait une chute de
voiture huit jours avant l'accouchement. Convulsions à
dix-huit mois ( ? ). - Frère arriéré.
État actuel. Nystagmus chez les deux malades. Strabisme
\ divergent chez l'un ; convergent chez l'autre. - Chez les
deux malades, paralysie avec contracture de quatre mem-
bres. Exagération des réflexes. Chez les deux malades,
idiotie profonde.
Autopsie de l'aîné. - Congestion du poumon gauche. Les
autres viscères sont normaux. Aspect général de l'encé-
phale arrondi. Atrophie du cervelet et du pont de Varole.
Dans la moelle, diminution des fibres des faisceaux pyra-
midaux.
.
Les enfants Lecl Edouard-René et André-Lugène, nés
à Vitry-sur-Seine, le premier le 6 juillet 1883, le second le 7
octobre 1886, entrent à Bicêtre le 22 juin 1897, âgés l'un de
13 ans, l'autre de 10 ans, sur des certificats de M. Magnan les
déclarant atteints, le premier d'idiotie, gâtisme, paraplégie
avec légère contracture, le second d'idiotie, gâtisme et para-
plégie.
Antécédents héréditaires. -(Fournis par le grand-père mater-
(1) Voir sur les affections familiales : Bourneville, Une famille d'idiots (Ar-
chives des maladies mentales et nerveuses, 1861, p. 289) : - Bourneville et
Séglas, Familles d'idiots (Compte-rendu de Bicétre pour 1886, p. 3), etc.
23n Affection familiale.
nel et par la mère). Père, 43 ans, fait le commerce de
volailles, beurre et oeufs, est sobre, ne fume pas, est bien
portant et bien constitué. Il n'a pas eu de convulsions; marié
à 23 ans ; pas d'indices de syphilis. - [Père, mort à 71 ans,
subitement d'une maladie de coeur, était sobre, n'avait pas
eu de maladie de peau. - Mère, âgée de 71 à 72 ans, bien por-
tante, sans accidents nerveux, sobre, laborieuse. Pas de ren-
seignements sur les grands parents paternels. - Les grands
parents maternels sont morts vieux.-Deux oncles paternels :
l'un qui buvait un peu, est mort d'une fluxion de poitrine,
l'autre est en bonne santé. Il en serait de môme de ses
enfants et de ceux du précédent. Une tante paternelle est
morte âgée. On ne sait rien des oncles et tantes mater-
nels. Un frère, mort à 5 ou 6 ans, on ne sait de quoi. -Deux
soeurs mariées avec les deux frères, sans accidents nerveux :
l'une a deux enfants bien portants, l'autre a eu un enfant mort
du croup. Une cousine germaine maternelle, âgée de plus
de 60 ans, a été prise d'une hémiplégie avec aphasie à la
suite d'une vive frayeur. Rien à noter dans le reste de la
famille.]
Mère, 38 ans, très calme, n'ajamais eu d'accidents nerveux,
sauf quelquefois des doul-urs de tête; pas de maladie de
peau, a reçu une certaine éducation, a obtenu son certificat
d'études, s'est mariée a 18 ans. [ Père, celui qui nous ren-
seigne, âgé de 67 ans, bien conservé, n'a pas eu de maladies
de peau, ni de maladies vénériennes, sobre, a été soldat,
s'est marié à 2J ans. Mère, morte en 18U3, à 56 ans, d'une
affection du coeur, n'a jamais eu d'accidents nerveux, a
toujours été sobre. Grand-père paternel, cultivateur,
sobre ; est mort à 72 ans, usé par le travail. Grand'mère
paternelle, morte à 77 ans de vieillesse, n'avait jamais eu de
maladie nerveuse, sobre. Grand-père paternel, mort il
85 ans de vieillesse, cultivateur, sobre. Grand'mère pater-
nelle, morte jeune, on ne sait de quoi. - « Mon grand-père
paternel s'est marie trois lois, la troisième fois à 27 ans. »
Grand-père maternel, mort jeune. - Grand'mère, morte à
86 ans de vieillesse avec toutes ses facultés. - Pas de
grands-oncles paternels. Deux grand'tantes (pas de la
même mère), l'une morte à 78 ans, l'autre à 75 ou 76 ans.
Un grand-oncle et une grand' tante maternels, rien. Deux
grand-oncles paternels : l'aine à 75 ans, bien portant, a deux
filles mariées, sans enfants, en bonne santé ; l'autre est mort
il y a 3 mois, à 64 ans, sans accidents nerveux, avait trois de
Antécédents héréditaires. 235
ses quatre enfants bien portants ; pas de convulsions. Le qua-
trième enfant, une fille, est devenue épileptique après une
vive frayeur; elle s'est néanmoins mariée et a eu un'enfant
mort en venant au monde. Une tante paternelle, usée par le
travail, 69 ans, pas d'accidents nerveux. Elle a eu un fils qui
faisait des excès de boisson et est mort d'une fluxion de poi-
trine ses enfants n'ont pas d'accidents nerveux.-Deuxsoeurs :
l'aînée, âgée de 30 ans et demi, sans accidents nerveux, a eu
deux enfants : une fille morte du croup, pas de convulsions,
l'autre, garçon, âgé de 8 ans, pas de convulsions, intelligent ;
la deuxième soeur, intelligente, pas de convulsions, a un
enfant turbulent, entêté, qui n'a pas eu de convulsions. Un
frère, âgé de 21 ans, célibataire, n'a pas eu de convulsions,
sobre. Dans le reste de la famille, pas d'idiots, pas d'épilep-
tiques, d'aliénés. Un cousin à la quatrième génération, sourd-
muet, décédé vers 30 ans, ne s'était pas marié.]
Pas de consanguinité. Différence d'âge de 5 ans entre les
deux époux. (Père plus âgé.)
Sept enfants et trois fausses couches : 1° Une fausse cou-
che à deux.mois, sans cause connue ; 2° René ; 3° fille,
- la ans, en bonne santé, intelligente, pas de convulsions ;
/1° André; 5° une fille de 12 ans, forte, intelligente, pas de
convulsions, un peu nerveuse, apprend facilement ; 6° un
garçon, 4 ans, normal, sans convulsions ; - 7° un garçon,
intelligent, pas de convulsions; 8° une fausse couche;
9" une fausse couche; 10° garçon, se porte bien, pas de
convulsions; Depuis l'entrée de René et d'André à Bicétre
(1897), les parents ont ou : lin un garçon de 5 ans, intel-
ligent ; - 12° un garçon âgé de 2 ans, en retard, ne marchant,
ni ne parlant. Ni l'un, ni l'autre n'ont eu de convulsions.
Histoire de nos malades.
René et André.
Conception : Les parents vivaient en bonne intelligence et
étaient en bonne santé.
René
Grossesse : bonne, pas
d'ennuis, pas d'envies. Deux
ou trois faiblesses. Ni
André
Mouvements il 4 mois; rien
de particulier. Chute de
voiture huit jours avant
236
Affection familiale.
René
émotions, ni chutes. Mouve-
ments à 4 mois, normaux.
Accouchement : à terme,
naturel. Douleurs pendant
deux heures. Présentation
de la tête.
Naissance : Pas d'asphy-
xie, pas de circulaire du
cordon ; a crié de suite. Non
pesé, mais était tout petit.
Elevé au sein par sa mère
jusqu'à 9 mois, époque où
elle est devenue enceinte du
suivant. Nourri ensuite au
lait de vache. A bien pris le
sein; non criard.
Première dent à un an.-
Dentition complète à ? ?
N'a jamais été tout à fait
propre ; toutefois vers 18
mois demandait : caca, est
redevenu malpropre après
une rougeole très forte à 18
mois : pendant une nuit il
ne reconnaissait personne.
Commençait à marcher
quand il a eu la rougeole ;
après, il a cessé tout à fait.
Pas de convultions, ni il
la rougeole, ni avant, ni
après.
André.
l'accouchement; pas d'émo
tion après l'accident.
A eu lieu peut-être quel-
quesjoursavant terme. Dou-
leurs pendant 2 heures,
naturel; même présentation.
Pas d'asphyxie, a crié de
suite ; pas de circulaire du
cordon. Etait plus gros que
René.
Elevé au sein jusqu'à 5 ou
6 mois, puis au sein et au
biberon (lait de vache). Prise
régulière du sein ; non
criard.
Première dent vers un an.
Dentition complète il ? ?
N'a jamais été propre
même momentanément.
N'a jamais marché.
Vers 18 mois aurait eu des
convulsions, en l'absence
de sa mère qui ne peut en
dire ni les caractères ni
la durée. Elles ne se seraient
jamais reproduites. De 3 à 5
ou li ans, aurait eu des cpa-
moisons» précédées de cris,
se roidissant quand il était
contrarié, perdait connais-
sance, devenait noir.
ANTÉCÉDENTS PERSONNELS.
237
René
Parole : répétait quelques
mots jusqu'à sa rougeole :
papa, maman, caca. Avaitde
la connaissance, reconnais-
sait tout le monde et les re-
connaîtrait encore. "
Ne louchait pas, quand il
était petit : ses yeux se
seraient tournés vers deux
ans.
Parfois il a des secousses
dans les membres et de la
rotation des yeux. Ces
secousses revenaient pres-
que tous les jours et se mon-
traient surtout quand il vou-
lait quelque chose et qu'on
ne le comprenait pas. Il n'a
jamais eu de perte de con-
naissance.
Les jambes seraient deve-
nues raides et comme anky-
losées, après la rougeole,
sans qu'il y ait eu de convul-
sions à ce moment. Il avait
alors 16 ou 18 mois, s'es-
sayait il marcher avec les
chaises; il se tenait à peu
près bien. Après la rougeole,
il se tenait très mal. Les
bras sont devenus contrac-
turés vers la même époque
que les jambes, c'est-à-dire
après la rougeole.
Cou sans raideur. Tient
sa tète assez droite.
Prend les objets dans ses
mains ; porte le pain et les
André.
Aurait dit papa, maman,
mais avec difficulté. N'au-
rait jamais dit autant de
mots que René. Reconnais-
sait sa mère, attendu qu'il
ne voulait manger qu'avec
elle.
A les yeux un peu déviés
en bas, on ne sait depuis
quand.
Aurait eu aussi des mou-
vements nerveux.
Les jambes seraient deve-
nues raides vers 3 ans. On
ne se rappelle pas vers
quelle époqueila eu les bras
raides.
Cou raide, tète toujours
penchée.
Préhension un peu moins
bonne. Fait de grands mou-
238
DESCRIPTION de MALADES.
René
gâteaux à sa bouche. Les
mouvements de ses mains
sont assez sûrs. Ne tire la
langue que lors de ses se-
cousses.
Bave, grince des dents,
seulement depuis sa rou-
geole ; se cogne fréquem-
ment le derrière de la tôle.
Se met souvent en colère,
a souvent des accès de fou
rire sans motif. - Pas de
balancement. - A eu des
grimaces de la face, qui
tendent à disparaître. -Pas
de cris.
Reconnaissait ses parents
quittant tout le monde pour
caresser sa mère et surtout
son père.
Mâche assez bien. Bon
appétit; mange de tout; pas
de vomissements, constipa-
tion. Bonne santé physique.
Sommeil tranquille.
Maladies infectieuses :
Rougeole à 18 mois. Pas
de coqueluche. Une ophtal-
mie légère vers un an. Une
bronchite avant la rougeole.
André
vements avant de saisir un
objet, et quand il l'a saisi le
crispe entre ses doigts.
A des mouvements ner-
veux des mains, de la face
et des orteils, qui se cris-
pent. Tire la langue souvent.
Bave, grince des dents. Se
cogne la tète moins souvent
que son frère.
Se met en colère moins
souvent que son frère. - A
des accès de rire fréquents.
Pas de balancement. Fait
des grimaces qu'il accompa-
gne d'un petit cri.
Reconnaissait sa mère
même de la voix, sans la
voir.
Mâche assez bien. Appétit
bon, mange de tout; pas de
vomissements; selles régu-
lières, quelquefois diarrhéi-
ques. Bonne santé physique.
Sommeil tranquille.
Maladies infectieuses :
Rougeole à 18 mois, coque-
luche à 3 ans 1/2.
Vaccinés tous les deux avec succès.
Pas de varioloïde, de scarlatine, de fièvre muqueuse, d'an-
gine grave, de vers, d'onanisme, de chutes sur la tête, de
gourme, d'otite, d'adénite, d'abcès ni de fractures. -
DESCRIPTION DES malades.
239
On ne sait à quoi attribuer la maladie des deux enfants,
Les parents ont vu M. Charcot qui n'a pas donné de dignostic
précis et a ordonné du bromure, du phosphate de chaux et
des bains. Ils ont vu aussi M. Jules Simon, M. Lannelongue
qui n'a vu aucuue indication opératoire.
État des enfants Lecl... le 26 juin .897.
René.
Etat général satisfaisant,
malgré une maigreur assez
prononcée.
Crâne de volume moyen,
asymétrique : moitié droite
plus saillante et déjetée en
avant de telle sorte que le
grand axe est oblique d'a-
vant en arrière et de droite
à gauche. Front étroit et
fuyant sur les côtés (pas de
persistance des fontanelles).
Toute la moitié droite de la
face paraît plus saillante que
la gauche.
Oreilles grandes et très
écartées.
Yeux assez mobiles : 8tra-
bisme convergent, intermit-
tent, plus marqué à l'oeil
droit. Pas d'exophtalmie,
léger nystagmus. Pupilles
égales et symétriques, ne
paraissant pas réagir à l'ac-
commodation ; la réaction à
la lumière persiste. L'exa-
men du fond de l'oeil n'a pas
été pratiqué. .
Thorax mal conformé,
sans qu,il y ait de saillie,
rachitique, ni de déviation
And1'é.
Etat général assez mé-
diocre : maigreur et pâleur
prononcées.
Crâne asymétrique : la ré-
gion pariétale droite et la
région occipitale gauche
font saillie, de telle sorte
que le grand axe se dirige
d'avant en arrière et de
droite à gauche. Front
étroit et fuyant : son plan
prolonge le plan du visage
qui est incliné en arrière.
Un épi dans la région fron-
tale antérieure.
Oreilles, mômes carac-
tères.
Yeux présentent un léger
nystagmus. Pas d'au tretrou-
ble de lamotilité Les pupiles
réagissent à la lumière. La
réaction à l'accomodation
ne peut être constatée. Lé-
ger strabisme divergent.
Thorax mal conformé :
cyphose assez marquée.
Déformation ampulaire du
240
Affection familiale.
René. - --
de la colonne vertébrale. La
moitié gauche fait une sail-
lie plus marquèc que la
droite.
André.
sternum au niveau de l'ap-
pendice xiphoïde. Déviation
légère à convexité gauche
avec saillie des côtes gau-
ches au niveau de la ligne
axillaire.
Eig. 31. - René. (Juillet l8D7.) André.
Description DES malades.
2 il
René.
Testicules assez difficiles
à trouver, gros comme un
grain de blé.
Membre supérieurs mai-
gres : avant-bras en flexion
permanente avec pronation
sur le bras.Les mouvements
spontanés sont peu étendus
et paraissent surtout se pas-
ser clans l'articulation de
l'épaule. L'enfant ne peut
ni s'habiller, ni se donner
les soins usuels de propreté.
Il peut tendre les bras aux
personnes qui s'approchent
de lui.
Les mouvements provo-
qués sont limités : dans l'ar-
ticulation de l'épaule, il y a
une certaine résistance dans
la production des mouve-
ments de flexion et d'exten-
sion. Dans le coude qui est
en demi-flexion, la flexion
plus prononcée s'obtient
facilement, mais il y a une
résistance énergique à l'ex-
tension complète, surtout à
gauche. L'articulation du
poignet est normalement
mobile.
J11 emúres iii /(1 -ic ii)-s. L'en-
fant ne peut se tenir debout.
Il reste généralement assis
sur une chaise. La cuisse
est légèrement fléchie sur le
bassin, la jambe sur la cuis-
se ; les genoux se touchent
et les jambes .s'écartent très
légèrement en dehors. Les
pieds sont en valgus très
Bourneville, Bicêlre, 1902
André.
Mêmes caractères.
Membres supérieurs grê-
les, les bras écartés dutronc,
l'avant-bras fléchi sur le
bras, les mains en prona-
tion. Les mouvements spon-
tanés sont peu étendus ; le
malade est à peu près iner-
te. Il ne peut pas manger
ni s'habiller seul.
Les mouvements provo-
qués révèlent une certaine
résistance au niveau des
coudes et quand on arrive
a l'extension complète, on
perçoit à droite quelques
craquements.
Les membres inférieurs
sont grêles ; le malade étant
suspendu aux bras de l'infir-
mière, les cuisses sont légè-
rement fléchies sur le bassin,
les jambes sur les cuisses.
Les pieds sont en équin très
accusé ; les genoux font
saillie en dedans et se tou-
chent.
16
£ 42 . Affection familiale.
René. -
prononcé des deux côtés, les
orteils sont en crochet.
Les mouvements sponta-
né ? n'existent pas ou peu.
André.
Les mouvements sponta-
nés sont nuls : il ne peut
se tenir debout. -
Les mouvements provo-
qtcS-sout limités : on obtient
assez facilement- la ilexion
Fig. 35. - René. (Juillet 1897.) André.
Description des malades.
243
René.
Les mouvements provo-
qués sont à peu près tous
possibles, mais avec une
légère résistance dans l'arti-
culation de la hanche;
l'abduction parait être le
mouvement le plus limité.
On peut obtenir la flexion
complète des genoux, mais
l'extension est arrêtée par la
contracture des fléchisseurs
dont on sent la corde sail-
lante. Les mouvemenls de
l'articulation ti bio-tarsienne
sont très limités.
Les réflexes sont légère-
ment exasrérés.
. La sensibilité n'a pu être
étudiée avec précision.
Le malade gâte jour et
nuit.
. Il est idiot complet, ne
prononce aucun mot, regar-
de à peine quand on l'ap-
pelle, cependant si on lui
tend du pain il le saisit. Ne
reconnaît ni les odeurs
ni les substances sa-
.pides. Entend bien et voit
bien. Il a un tic : ouvre la
bouche et la referme aussitôt
sans proférer aucun son.
Son facies est dénué de
toute expression. Son carac-
tère est triste, mais affec-
tueux.
André. '
et l'extension de la hanche,
mais difficilement l'abduc-
tion. Dans le genou, on ob-
tient facilement la flexion
complète, mais les tendons
contractures opposent une
énergique résistance à l'ex-
tension. Dans les pieds, les
mouvements sont très limi-
tés et on ne peut redresser
le pied bot.
Les réflexes du poignet et
rotulien sont exagérés. Pas
de clonus du pied.
Lasezsibilité à la douleur
existe partout-
Le malade est grand gâ-
teux.
Il est idiot complet ; son
facies est dénué d'expres-
sion, ses yeux regardent
toujours dans le vague, il
ne dit aucun mot et ne
comprend rien.
1899. 12 décembre. L'état de René ne s'est en rien modi-
fié depuis l'entrée. Il cesse, ce jour, de se laisser nourrir.
244 Autopsie.
Le 13 décembre, on ne peut davantage l'alimenter; il est pâle,
a les mains, les bras, les pieds violacés et glacés et meurt dans
cet état sans jeter une plainte, ni tousser, ni faire aucun
mouvement. La température prise aussitôt après la mort était
de 3'10,4 (1).
Autopsie faite le 15 décembre 1899. Cadavre assez gras.
Tête. Le cuir chevelu est maigre et pâle, sans ecchymoses.
Les os du crâne sont moyennement épais, peu durs et offrent
des plaques transparentes. Les sutures persistent. Quel-
ques légères adhérences de la au niveau de la
scissure inter-hémisphérique. A la base du crâne, les
différentes fosses et crêtes sont sensiblement symétriques.
L'apophyse crista galli est mince, mousse. Le trou occipital
n'offre rien de particulier. Les apophyses clinoides sont effa-
cées. La glande pinéale est d'aspect normal ; il en est de même
du corps pituitaire. - Les nerfs, les htbercu ? smaon'a/re.s,
etc., sont égaux et symétriques. Le liquide colphalo-rachidien
est en petite quantité.
Encéphale. La forme générale de l'encéphale est un peu
modifié. La longueur de. l'hémisphère, mesurée au niveau du
grand axe fronto-occipital, est de 121 mm. (Sur un cerveau
d'enfant de 16 ans normal, cette longueur est d'environ
157 mm.). La largeur de l'encéphale est normale : elle est de
G` ? mm. sur notre encéphale et de Ci mm. sur le cerveau nor-
mal que nous avons pris comme point de comparaison. Il s'en-
suit que l'encéphale a un aspect arrondi et non allongé.
Au niveau de la face inférieure de l'encéphale, on remarque
encore la gracilité du chiasma, des nerfs et des bandelettes
optiques, sans modification de couleur.
Les deux hémisphères étant séparés, le corps calleux appa-
rait avec ses dimensions habituelles : il mesure dans le plus
grand axe 59 millimètres, alors que sur le cerveau de com-
paraison il mesure 62 millimètres.
Hémisphère droit. Face externe. Les circonvolutions
(1) On trouvera les tableaux de la T. à l'entrée, du poids et de la taille, des
mensurations de la tête et des membres dans le Compte-rendu de 1900, p, 11
15 et 10.
Atrophie du cervelet'.
215
sont assez volumineuses ; elles ne présentent aucune anomalie
dans aucune des régions.
Face interne. - Rien d'anormal à noter.
Face inférieure. La circonvolution fusiforme et la circon-
volution de l'hippocampe, particulièrement l'uncus, parais-
sent plus volumineux que les autres circonvolutions. En ré-
sumé, rien de spécial sur la morphologie de l'hémisphère droit.
Il n'y a à signaler, en plus, que quelques adhérences delapte-
màre, au niveau des circonvolutions pariétales et frontales.
Fig. 30. - Lecl... (René) en juin 1899.
246 Atrophie DU cervelet.
Hémisphère gauche. Sur la face interne et la face externe,
morphologie normale. Quelques adhérences de la pie-mère
analogues à celles de l'hémisphère droit. Au niveau de la
face inférieure, on remarque, comme à droite, le volume un peu
considérable des circonvolutions temporo-occipitales.
- Le cervelet est nettement atrophié dans sa tota-
lité : les hémisphères, le vermis, les lobules pneumogastriques,
sont très proportionnellement diminués de volume. Le grand
axe transversal du cervelet est de 75 millimètres (sur le cer-
veau de comparaison, il est de 103 millimètres). Le diamètre
maximum de l'hémisphère gauche mesuré depuis le cap bor-
dant l'incisure postérieure et passant par le point culminant de
la face inférieure est de 42 millim.. Sur le cervelet normal, il
est de 64 millim. (pu. VIII). Pourl'hémisphère droit, il est de 44
millimètres sur notre cervelet et de 53 sur le cervelet normal.
Le bulbe a gardé un volume normal, les olives sont saillan-
tes, leur longueur est à peu près normale, 14 millimètres au
lieu de 16 millimètres. La largeur est de 5 millimètres au lieu
de 8 millimètres. Le pont de Varole est très diminué de hau-
teur, 15 millimètres au lieu de li millimètres. La largeur des
pédoncules immédiatement au-dessus de la protubérance est
aussi au-dessous de la normale, 17 millimètres au lieu de 21
millimètres.
La moelle est d'aspect un peu grêle. I'P.rarnet Itistolo-
gique en a été pratiqué. Après avoir été chromée, elle a été
colorée suivant la méthode de \Veigert, et suivant la méthode
de de Pal avec surcoloration il la cochenille. Au niveau du ren-
flement cervical, on trouve une légère dilatation du canal de
l'épendyme. La substance grise est normale. Il y a une dimi-
nution des libres sans sclérose dans le cordon antérieur, au
niveau du faiscau pyramidal direct mais surtout dans le cor-
don latéral au niveau du faisceau pyramidal croisé. Il y a
conservation de libres dans le faiscau de dans le fais-
ceau cérébelleux et dans une zone formant bordure de la subs-
tance blanche à la périphérie de la moelle. Légère diminution
du nombre des fibres dans la partie antérieure du cordon
postérieur. Au niveau de la 6* dorsale, même disposition des
lésions. Au niveau du renflement lombaire les seules modi-
fications sont les suivantes : il n'y a plus d'apparence de con-
servation des fibres dans la zone bordante du cordon latéral
ni dans le faisceau cérébelleux.
- Réflexions. - I. La juxtaposition des deux obser-
Atrophie DU cervelet.. · 247
vations des frères Lecl.. a un double intérêt : clini-
que et anatomique. -
1° L'intérêt clinique réside dans la similitude des
affections dont étaient atteints les deux frères : ils pré-
sentaient tous deux les symptômes cérébro-spinaux qui
caractérisent la diplégie spasmodique cérébrale infan-
tile. Tous deux étaient atteints d'idiotie complète. La
première question qui se posait était de savoir s'il s'agis-
sait là d'une affection familiale. Suivant Pauly et Bonne,
pour mériter ce qualificatif, une affection doit : a) attein-
dre, sans changer de forme, plusieurs enfants d'une
même génération ; b) débuter à peu près au même
âge chez tous les enfants de cette génération ; c)
être cliniquement indépendante de toute influence exté-
rieure, d'une affection acquise ou d'un accident de la
vie intra-utérine ; - (1) ces caractères doivent consti-
tuer la règle et non l'exception. Dans le double cas que
nous présentons, il y a, il côté de nos deux malades,
cinq enfants qui n'ont eu aucune affection semblable.
De plus, si nous pouvons Ù peu près affirmer l'absence
de syphilis et l'absence de traumatisme obstétrical,
nous ne pouvons être certains de l'absence de convul-
sions ni d'infection méningitique. Celui de nos enfants
qui est mort a eu la rougeole dont l'influence sur la
maladie nons parait douteuse. Aussi croyons-nous
pouvoir conclure à la nature familiale de l'affection.
2° L'intérêt, anatomique de l'autopsie- de René
Lecl... réside dans Y atrophie cérébelleuse que nous
avons constatée. L'atrophie cérébelleuse est rare.
Tous les cas observés sont rapportés dans la thèse de
Thomas et le nombre des atrophies bilatérales est de
28. Dansce nombre, certains cas ont été des trouvailles,
d'autopsie chez des gens déjà avancés en âge, les au-
tres ont été révélés cliniquement par l'apparition de
248 Atrophie DU cervelet.
symptômes cérébelleux plus ou moins nets, trois cas
enfin semblent se rapprocher du nôtre et dater do
l'enfance. C'est le cas de Duguet, observé chez un
enfant cle 17 ans qui avait présenté uniquement des
troubles de la parole, et dont une soeur était idiote ; -,
c'est le cas de Spillcr chez un jeune homme de 19 ans
qui avait présenté des troubles de la parole, du stra-
bisme interne et quelques troubles de la motilité des
membres inférieurs. Enfin c'est le cas de Combettes
qui consiste en une absence complète du cervelet
chez une enfant morte it 11 ans et qui avait présenté
aussi des troubles moteurs des membres inférieurs et
des troubles de la parole.
II. Nous ne croyons pas que l'atrophie cérébelleuse
dans notre cas suffise à expliquer la symptomatologie
de l'affection : dans la moelle en effet, la dégénéres-
cence occupe les faisceaux pyramidaux. Nous ne
sommes point autorisés à affirmer que nous trouverons
une atrophie cérébelleuse il l'autopsie d'André Lecl...
et dans cette hypothèse quelle sera la caractéristique
anatomiquede son affection Mais il est permis actuel-
lement cle le supposer, aussi nous a-il paru intéres-
sant de juxtaposer aujourd'hui l'observation clinique
d'André Lecl... encore vivant à l'observation anato-
mo-cliniquc de son frère René. (Voir PL. I, II et III.)
III. Au point de vue de l'hérédité, nous trouvons
du côté paternel, un oncle buveur, une cousine hémi-
])léf/iquc, et du côté maternel, une petite cousine
épileptique, un cousin alcoolique, et un autre, d'un
degré très éloigné, sourd-muet. En somme, hérédité
modérément chargée. Collatéralement, un frère idiot,
André, et un frère arriéré.
IV. Mentionnons Y hypothermie très notable (3 ! 1°,4)
DIPLLGIE; contracture. 249
que l'autopsie n'a pas expliquée. Nous avons observé
le même phénomène chez d'autres idiots, qui étaient
cachectiques. Or, tel n'était pas le cas ici, car le poids
après décès était de 19 kil. 800, c'est-à-dire supérieur
à celui qui avait été constaté six mois plus tôt.
Nous avons communiqué au Congrès international
de médecine de 1900 (section de neurologie) et publié
dans notre Compte-rendu de 19001'histoire clinique
des deux frères Lecl... (René) et Lecl... (André) et
l'étude anatomique du système nerveux du frère aîné
(Lecl... René) dont nous avions pu faire l'autopsie (1).
Nous publions aujourd'hui la fin de l'observation
du frère cadet (Lecl... André) et les résultats de son
autopsie : l'hypothèse que nous avons faite en 1900
sur la nature familiale de cette affection se trouve
pleinement confirmée. ,
Suite DE l'observation D'A. LEC.. (1899-1903). Contracture,
progressive de plus en plus accentuée : recroquevillement.
Amaigrissement extrême jusqu'à 13 k. et 9 k.. Hypother-
mie jusqu'à 36°, 34°, et 33".8. Pas d'albuminurie.
AUTOPSIE. - (Mars 1902). Broncha-pneumonie à gauche.
Bronchite généralisée. Cerceau macroscopiquement
normal; atrophie, ponta-cérébelleuse identique à celle de
son frère aîné.
Lecl.... (André Eugène), né le 7 octobre 18SG, est entré
à Bicêtre à l'âge de 10 ans le 22 juin 1897, sur un certificat
de M. Magnan, le déclarant atteint d'idiotie, gâtisme et
paraplégie.
(I) Cette observation avec les photographies des malades et celles de l'encé-
. ¡¡hale du décédé à été reproduite dans le ne 17 du Progrès médical (1901,
p. 2731.
250 Affection familiale.
' Son histoire détaillée que résume le sommaire, est jointe à
celle de son frère dans la publication que nous avons faite,
Nous reprenons, ici, l'observation, là où nous l'avons laissée
c'est-à-dire depuis le mois do juin 1900.
Températures à l'entrée.
Augmentation de la contracture. 251
11900. Juin. - L'examen du malade fait constater une con-
tracture en flexion des membres supérieurs portant 'surtout
sur l'avant-bras ; les mains restent au contraire souples et
tombantes. Les membres inférieurs sont aussi contracturés
en flexion. Les réllexes du poignet sont exagérés, ainsi que
les réflexes rotuliens. Il n'y a pas de clonus du pied. Les
réflexes plantaires sont en flexion. Le malade est atteint
d'idiotie complète avec diplégie cérébrale infantile. On relé ?
ve chez lui une asymétrie crânienne aux dépens du côté
droit, et une malformation thoracique caractérisée par la
proéminence de l'extrémité inférieure du sternum.
Fig. 38 - Le Clèr... en 1902.
252 Stigmates de dégénérescence.
L'enfant gâte nuit et jour. Il ne comprend absolument rien,
ne fait rien de ses mains si ce n'est porter son pain à sa bou-
che.
Puberté (14 ans). Verge : longueur 4 cm. ; circonférence
4 cl, Testicules de la grosseur d'un pois. Glabre partout ;
quelques poils follets sur les membres inférieurs.
1901. 22 janvier. Tailla : 0"'94, soit 52 cent. au-dessous
de la taille moyenne à son âge qui est de lm169 (Quetelet). Le
nanisme est bien évident. (Fig. 3 i J.
Juillet. L'enfant se contracture de plus en plus. Quand
il est assis sur sa chaise, le corps est plié en deux et la tête
penchée en dehors du siège. Il est grand gâteux nuit et jour,
comme auparavant, ne comprend rien et ne- dit aucun mot.
1902. Ja)it;t'e) ? La contracture a augmenté : les cuisses et
les jambes sont plus fléchies qu'autrefois, le varus équin des
pieds n'a pas augmenté. La flexion et la pronation des avant-
bras, la flexion du corps ont augmenté. La contracture est
presque irréductible aux membres inférieurs. La recherche
des réflexes est difficile il cause de la contracture. Le faciès
de l'enfant, porte huit ans alors qu'il en a quinze. Poids :
14 k.800. Par suite du recroquevillemcnt du corps, il est difficile
d'avoir sa taille exacte. Elle parait être de 1 III 08.
Puberté. État glabre de tout le corps. Testicules : petit
oeuf de serin. Verge : 3 cm. sur 3 cm.
Juillet. L'enfant, après avoir beaucoup maigri, a
une tendance à reprendre. Il mange beaucoup et ne pleurni-
che plus comme auparavant.
Examen au point de vue des stigmates de dégénérescence
et de l'infantilisme. Asymétrie crânienne ; plagiocéphalie ;
asymétrie frontofaciale. On constate la présence d'un épi. II
existe un strabisme divergent. Il y a une saillie très mar-
quée du maxillaire supérieur et du maxillaire inférieur. Les
dents sont très écartées, amorphes, jaunâtres. Le tronc est
cylindrique, petit, peu développé, il n'y a pas de proéminence
de l'abdomen. Tout le tronc présente une courbure antéro-
postérieure concave en avant. L'émaciation est générale, la
peau est fine, le corps est glabre.
Examen des oreilles. Oreille droite : grande, allongée,
écartée du cràne. Hauteur G c·m., largeur G cm. L'hélix est
ourlé irrégulièrement, étroit en haut, assez large à son ori-
Cachexie ; hypothermie. ? 3 3
ginc et à sa partie moyenne. L'anthélix est bien marqué. Le
tragus est petit, l'antitragus est large, un peu renversé en
dedans. La fossette scaphoïde est bien dessinée, la fossette de
l'anthélix est assez superficielle. La conque est profonde,
triangulaire, la racine de l'hélix la sépare en deux parties.
Le lobule est large, mince, peu haut, légèrement soudé, un
peu renversé en arrière. Le conduit auditif est large. Il n'y
a pas d'écoulement d'oreille.
Oreille gauche. Hauteur : 5 cm. 5, largeur : 3 cm. 2. L'hélix
est bien marqué. L'anthélix est semblable à celui de l'oreille
droite. Le tragus est petit; l'antitragus est renversé un peu
en dedans. La fossette scaphoïde est bien marquée. La
fossette de l'anthélix est peu accusée. La conque est triangu-
laire, profonde, la racine de l'hélix ne la sépare pas complé-
tement. Le lobule est large, un peu épais, légèrement soudé,
très peu haut. Le conduit auditif est large, ne présente rien
de particulier.
Novembrc. - L'enfant mange moins, il maigrit depuis une
quinzaine de jours. (Fig. 38).
1903. Janvier. L'enfant a eu une syncope pendant qu'on
lui donnait un bain. Il revient facilement à lui. T. R.35°.
Pouls : 80. L'enfant avait continué à s'alimenter un peu de-
puis novembre. On ne constate pas chez lui d'autres symp-
tômes morbides.
L'examen des organes ne montre rien de particulier. Les
bruits du coeur sont bien frappés, mais assez rapides. Rien
à l'auscultation des poumons. Pas de troubles digestifs :
l'enfant est comme toujours constipé. Pas d'anorexie.
15 janvier. - T. IL 3° ; P. 110.
16 janvier. A 7 h. du matin, la température rectale prise
avec deux thermomètres successivement, laissés un quart
d'heure, marque 3'r ?
A 2 heures de l'après midi, on pratique un enveloppement
chaud avec couvertures de laine et bouillotes. Cet envelop-
pement dure une heure et demie. A l'intérieur de ce milieu,
le thermomètre mis dans le rectum, pendant toute la durée
de l'enveloppement, marque 35 ? f.
17 janvier. 7 h. du matin : T. R. 37° ; à 9 Il. du matin
37°,9. P. l'0. Face rouge, injectée. Toux légère.
18 janvier. T. R. 3G ? P. 430, bien frappé. On consta-
te quelques râles de bronchite. L'enfant se cachectise, geint,
sans cesse, s'amaigrit.
254 - Cachexie; contracture.
. 19 janvier. On constate encore des râles de bronchite.
Du 19 au z janvier. Le pouls bat de 90 il 100.
Du 2 ? janvier au 1 el' février, l'enfant prend peu à peu une
teinte cachectique et s'amaigrit. On ne constate aucun trou-
ble fonctionnel du côté du tube digestif, ni du côté de l'appa-
reil pulmonaire et circulatoire. L'enfant ne tousse plus. La
température oscille entre 36° et 37°. Le pouls est bien frap-
pé ; il oscille autour de 90.
La contracture en flexion des membres inférieurs s'est
encore accentuée et a atteint le maximum possible : les
cuisses sont fléchies de telle sorte que leur face antérieure
est en contact avec la partie antérieure de l'abdomen et que
les jambes sont appliqués contre la face postérieure des
cuisses. Le pied reste en attitude normale. Les membres
supérieurs sont contractures en flexion. (1,'ig. 38.)
Les réflexes plantaires sont en flexion. Il n'y a pas de clo-
nus du pied. Les réflexes rotuliens ne sont pas perceptibles :
il en est de même pour les réflexes du poignet.
Février. L'état général est toujours semblable. L'hypo-
thermie réapparaît : la température descend fréquemment
au-dessous de 3 in, et de a6°. Le pouls oscille aux environs de
70 pulsations. 19 février : Poids : 10 kilos.
22 février. L'aspect de l'enfant est semblable « celui
d'un singe ou d'un chien» (notes de l'infirmière). La physio-
nomie exprime la souffrance, Lecl.. pousse de temps à autre
des cris plaintifs qui n'ont pour ainsi dire rien d'humain. En
un mot. l'aspect de cet enfant est repoussant. Le visage est
décharné, le front est plissé. Les maxillaires sout nettement
dessinés. Les yeux sont injectés, toujours larmoyants ; les
paupières sont collées le matin. Le regard est vague, pres-
que éteint. Ler.. regarde machinalement quiconque passe
devant lui. Le corps de l'enfant est immobile : la tête seule
se tourne automatiquement à droite et à gauche ou se soulè-
ve légèrement. La maigreur est extrême, cadavérique. Les
os font saillie partout. Les bras sont repliés sur la poitrine et
les mains posées sur les avant-bras. Les bras sont collés
contre le tronc, les avant-bras repliés sur le tronc, les mains
iL angle aigu sur l'avant-bras; les pouces fléchis transversa-
lement dans la paume de la main, les quatre : autres doigts
fléchis sur le pouce. Il existe une contracture très prononcée
des épaules et des coudes qu'on ne peut étendre complète-
ment. La contracture du poignet peut être vaincue ainsi que
celle des doigts. Ces mouvements provoqués sont douloureux
Hypothermie. 255
et arrachent des cris à l'enfant. Durant ces cris, les rides de
la face s'accusent au niveau de la lèvre supérieure, des joues,
du nez, des paupières.
Quant aux membres inférieurs, les cuisses sont compléte-
ment fléchies sur le tronc, et le genou est collé sur la face
externe du bras au-dessous de la tête de l'humérus. Les
jambes sont complétement fléchies sur les cuisses, collées
contre elles, le talon reposant sur les fesses. Il existe une
rigidité invincible des hanches et des genoux. Les pieds sont
relevés fortement sur les hanches, la face dorsale regardant
un peu en dehors. Il existe une contracture très prononcée des
pieds, prédominant à droite. Le cou-de-pied est rigide, mais
moins que les hanches. Les orteils sont légèrement fléchis.
L'enfant présente de chaque côté des cinq dernières vertè-
bres dorsales et au niveau du sacrum de petites ulcérations
de t2 ? sur 8. Tous les muscles sont réduits, par exemple les
pectoraux ont l'aspect de simples membranes. Le ventre est
tout à fait rétracté. Il est impossible de l'examiner, les cuis-
ses rétractées le recouvrant complètement. Les stcrnocléï-
domastoïdiens sont nettement dessinés. Le cou est un peu
raide, mais ou peut faire disparaître cette raideur.
L'enfant ne tousse pas, il s'affaiblit et maigrit de jour en
jour. Il n'y a pas de vomissements, pas de diarrhée, mais un
peu de tendance à la constipation. L'enfant ne prend aucune
nourriture solide, il boit environ six verres de lait par jour
qu'il prend il la cuiller. On lui délaye deux oeufs dans son
lait : il prend le tout avec appétit. Les nuits sont mauvaises
et agitées : il n'a pour ainsi dire pas de sommeil, il crie une
partie de la nuit, mais par contre dormirait une partie de la
journée. T. R. 35° et 36°.
26 février. Examen des urines. (M. Wille, interne en
pharmacie.) Albumine : néant. Urée à la température de
15°, 16 gr. par litre.
1° mars. - La température oscille entre 35° et 38°. Le
pouls est petit, lent. L'amaigrissement continue : il n'y a ni
toux, ni diarrhée.
4 mars. - L'enfant s'affaiblit de plus en plus ; sa maigreur
s'accentue encore. La température est descendue à 35°. Poids :
il k.200 au lieu de 47 k. 500, c'est-à-dire 38 k. 300 au-dessous de
la moyenne il son âge (16 ans et demi).
6 mars. - L'enfant prend le lait moins bien que les jours
précédents. On ne remarque rien à l'examen de la bouche et
de la gorge. Les yeux sont larmoyants et vitreux, fortement
excavés dans les orbites. T.R. 34°,8 et 35°, 1. .
256 Mensurations : tète ET membres
-Mesures de la tête.
/ Affection familiale. 257
8 mar.s. L'enfant ne prend plus que quelques gouttes de
lait qui sont rejetées aussitôt. La dyspnée est intense,
l'abattement complet. L'aspect est cadavérique. L'enfant
meurt à cinq heures du soir, sans cri, ni râle, mais la phy-
sionomie est grimaçante. Poids après décès 9 k.
Tableau du poids et de la taille.
258 Atrophie CÉRÉBELLEUSE.
cerveau de son frère. La longueur du grand axe fronto-occi-
pital est de 153 ? (sur un cerveau de seize ans normal, cette
longueur est d'environ 157 ? et chez Lee... (René), elle
n'était que de 1 ? 1 ? «); cette longueur n'est donc pas très
diminuée. La largeur d'un hémisphère est de fi2»n, c'est-à-dire
la largeur de l'hémisphère normal. Les dimensions sont donc
sensiblement celles d'un hémisphère normal d'un enfant de
16 ans. Cependant la forme en parait un peu plus arrondie.
Le chiasma, les bandelettes optiques sont normaux dans
leurs dimensions, dans leur coloration. Le corps calleux
possède des dimensions normales ou un peu au-dessus de la
normale (62ml11); il mesure 68 ? Celui de Lee... (René)
mesurait 59 ? seulement. (PL. IX.)
Hémisphère droit. Face externe. On ne constate aucu-
ne anomalie à un premier examen. Les circonvolutions sont
de volume normal, il n'y a pas d'atrophie, ni de lésions.
La décortication se fait facilement, sans entrainer la subs-
tance corticale : il n'y a pas de méningo-encéphalite appré-
ciable, ni de lésions en foyer.
Face inférieure et face interne. - Elles ne présentent
rien d'anormal. La décortication s'y fait aussi facilement que
sur la face externe.
Hémisphère GAUCHE. - Cet hémisphère n'a pas été décor-
iqué. Il ne présente aucune anomalie, ni aucune lésion
apparente sur les circonvolutions de la face interne, de la
face externe, de la face inférieure. (Réservé pour examen
histologique).
La méninge donne en quelques endroits l'apparence d'être
un peu épaissie, mais si on tente sur ces points la décortica-
tion, on voit qu'elle se fait facilement et normalement. Il n'y
a donc pas la davantage de méningo-encéphalite.
CERVELET.-Il existe une atrophie régulière et uniforme
portant sur les deux hémisphères, sur le vermis, sur les lobu-
les pneumogastriques. Le grand axe transversal du cervelet
est de 76mm (Il est de t03 ? sur le cervelet normal de compa-
raison. Il était de 75 ? chez Lecl.. (André). Le diamètre
maximum de l'hémisphère gauche mesuré depuis le cap bor-
dant l'incisure postérieure et passant par le point culminant
de la face inférieure est de 1.GIIIIII. Il est de 64 ? sur le cerve-
let normal et de 42 ? chez Lecl.. (André). A droite, ce diamè-
tre est de 47 ? il est de 44 ? chez Lecl.. (André).
' Le bulbe semble atteint par l'atrophie. Le pont de Varole
Atrophie cérébelleuse. 259
est lui-même manifestement atrophié. Quant à la largeur
des pédoncules, elle ne parait pas diminuée.
Cou et THORAX. - Les deux poumons sont le siège de
bronchite généralisée.
Le poumon gauche présente un foyer de broncho-pneu-
monte. Il n'y a rien de particulier du côté du péricarde, ni
du coeur. Pas de persistance du trou de Botal. Aucune
adhérence des plèvres, pas d'épanchement.
Abdomen. Il n'y a rien de particulier dans la cavité
péritonéale; rien de particulier à l'estomac, ni aux intestins.
Le coecwn est pourvu d'un appendice très long (10 cm.) qui
est accolé par sa face postérieure au péritoine. Le mésentère
contient un certain nombre de ganglions légèrement tumé-
fiés. Le foie est un peu dur, mais n'offre aucune lésion
extérieurement ou à la coupe. La rate est également un
peu dure, mais n'est pas anormale à la surface ni à la coupe.
Les capsules surrénales et les reins sont normaux. Les
testicules se trouvent dans le canal inguinal. Rien de parti-
culier du côté de l'anus.
La cause de la mort est la broncho-pneumonie.
Poids des organes.
2GO Cachexie; hypothermie.
Déjà, cliniquement, les deux malades nous avaient
semblé identiques et nous avions émis l'hypothèse que
la lésion constatée il l'autopsie du premier malade
serait aussi constatée il celle du deuxième. L'événe-
ment nous a donné raison.
Notre deuxième malade est mort à 16 ans, comme
son frère aîné, et nous avons pu, ainsi qu'on l'a vu
plus haut, vérifier noire diagnostic : il s'agit d'une
atrophie cérébelleuse familiale. Nous ne connaissons,
pas plus qu'en 1900, d'autre exemple de cette affection
familiale.
Tableau des Températures.
Nanisme et infantilisme. 261
II. Accessoirement, nous attirerons l'attention sur la
cachexie de ce malade qui a été extrême et qui a fait
descendre son poids à 9 kilog., alors que le poids moyen
d'un enfant de son âge (16 ans et demi) est de 47k. 500.
Le poids de son frère s'était abaissé dans de moindres
proportions : 19 k. 700.
III. Nous relevons aussi chez notre malade une
hypothermie remarquable, plus accentuée que celle
que nous avions enregistrée chez l'aîné et qui ne peut
pas être davantage expliquée, sauf par la cachexie
arrivée à un degré véritablement squelettique. Le
tableau ci-dessus permet d'apprécier la marche de
l'hypothermie, qui dans ce cas s'est prolongée plus
de deux mois.
Nous avons eu soin, comme toujours, lorsqu'il s'agit
de températures anormales, de vérifier l'hypothermie
en prenant simultanémenlla température rectale avec
deux thermomètres, bien appliqués durant 5, 10 et
même 15 minutes. De plus, nous faisons contrôler nos
thermomètres, afin de nous assurer que les tempéra-
tures notées sont bien exactes.
IV. Les frères Lecl... nous fournissent deux
beaux exemples de nanisme avec infantilisme.
. Lee... (René), a 14 ans, mesurait un mètre, soit
quarante sept centimètres en moins de la taille
moyenne à cet âge (1). En juilet 1899, à 15 ans et
demi, avant la cachexie, il pesait 19 kilogr. 700 soit
25 kilogr. en moins du poids moyen.
En 1901, à 16 ans, alors qu'il ne s'était pas encore
recroquevillé, Lee... (André) avait cinquante-deux
(t) Dans la dernière année de sa vie, le recroquevillement a empêché de
prendre sa taille.
2ô2 Nanisme ET infantilisme.
centimètres au-dessous de la taille moyenne de son
âge.
Les détails que nous avons donnés sur l'aspect
général des malades, do leur face en particulier, sur
l'absence de développement du système pileux (visage,
aisselles, pénil) et sur l'arrêt de développement des
organes génitaux ne laissent aucun doute sur la réa-
lité de l'infantilisme.
XXIII.
Hypothermie ;
PAR BOURNEVILLE.
. Nous avons publié un grand nombre d'exemples d'hypo-
thermie due à des causes multiples. Nous en avons cité
quelques-uns dans notre Compte-rendu de 1901 (p. 166 et
169) et nous avons ajouté aux anciens, sept cas nouveaux,
que nous réindiquons avec 12 cas récents dans le tableau
suivant.
Dans quelques-uns des cas d'hypothermie, Occasionnée 'e
par un état cachectique (idiotie ou épilepsie) qui n'est pas
sans'analogie avec l'athrepsie des nouveau-nés, il est sur-
venu une broncho-pneumonie ou une congestion pulmo-
naire. Malgré cette complication terminale, l'hypothermie
a persisté. -
. four facilter la tâche à ceux qui voudraient traiter cette
intéressante question, nous rappellerons que nous avons
signalé l'abaissement de la température centrale dans l'a-
poplexie cérébrale (1870); dans l'urémie (187 1-) - (1) ? dans la
maladie bleue (1880) (2); lemyxoeclème infantile (1880) (3);
Y abstinence (4); dans la mélancolie, etc.
(1) De la température dans l'urémie (Revue phot. des hôp. de Paris, 1871, p.
147, etc; -Rech. cliniq. et thermomé triques dans les maladies du système
nerveux, etc., etc.)
(2) iYote sur la maladie bleue ; température centrale, en collaboration avec
d'Qlier (Soc. anal,, 1880, Progrès médical, 188o, p. 163, Compte-rendu de 1880).
(3) Note sur un cas de crétinisme avec myxoedème (Compte-rendu de 1880,
p. 16). Voir nos autres travaux, sur le myxoedème infantile dans les Com-
ptes-rendus de 1886 à ce jour.
(4) Un idiot jeûneur (Ibid., p. 23).
264 Hypothermie.
XXIV.
Inégalité de poids des hémisphères cérébraux et
cérébelleux ; -,
l'An nOUI\ : \'E\"'LLI,.
. Le tableau qui suit résume les cas dans lesquels
nous avons trouvé, à l'autopsie, une inégalité de poids
des hélllisJil/(¡'cs ('I ! ¡'(30¡',W,\'. Nous les avons classés
d'après le chiffre de la différence, en commençant
parles plus élevées (350 or., 320; etc.). Nous y avons
joint les pesées des hémisphères cérébelleux. Pour
être complet, ce tableau devrait comprendre le poids
du cerveau et du cervelet des enfants normaux du
même âge que nos décédés. Nous essaierons de com-
bler cette lacune l'an prochain.
Tel qu'il est, il présente un certain intérêt, car il
permet de comparer l'inégalité des hémisphères ccré-
hraux à celle des hémisphères cérébelleux.
Cette statistique méritait enfin d'être placée après
les deux beaux cas d'atrophie cérébelleuse qui précé-
dent.
Travaux scientifiques faits dans le service.
(Thèses et mémoires).
1880.
LEROY (A.). De l'étal de mai épileptique. Thèse de Paris.
S¡' : GLAS (J.). De l'influence des maladies intercurrentes
sur la marche de l'épilepsie. Thèse de Paris.
BOURNEVILLE. - Contribution a l'élude de l'idiotie. Ce
travail comprend deux parties, dont la seconde a été faite en
collaboration avec M. Brissaud. (Archives de neurologie,
1880, t. I, p. 69 et 399j. Contribution a l'élude de la dé-
mence épileptique. (Archives de neurologie, 1880, p. 213).
1881.
RIDEZ SAILLAItU (G.). De la cachexie pachydermique
(myxoedème des ailleurs anglais.) Thèse de Paris.
D'Olier (II ). De la coexistence de l'hystérie et de l'épi-
lepsie avec manifestations distinctes des deux névroses
considérées dans les deux sexes et en particulier chez
l'homme. Mém. qui a obtenu le prix Esquirol. (Annales médi-
co-psyclvolog., sept. 1881) et tirage à part aux bureaux du
Progrès Médical).
Sadrain (G.). Étude sur le traitement des attaques
d'hystérie et des accès d'épilepsie. In-8° de 56 p. Th. de Paris.
IIUBLL (M.). Reche.rches cliniques et thérapeutiques sur
l'épilepsie. Monobromure de camphre, bromure de zinc, de
sodium. Thèse de Paris.
MOBLOT (E.). Sur une forme grave de l'épilepsie. Thèse
de Paris.
COULBAUT (G.). Des lésions de la corne d'Ammon dans
l'épilspsie. Thèse de Paris.
Travaux faits dans le service. 275
1882.
BntcoN (L.). Du traitement de l'épilepsie : Hydrothéra-
pie. Arsenicaux. Magnétisme minéral. Aimants. - Sels
de pilocarpine, etc. Thèse de Paris.
Roux (G-L.). - Traitement de l'épilepsie et de la manie
par le bromure d'éthyle. Thèse de Paris.
WuiLLAMiÈ (Th.).-De l'épilepsie dans l'hémiplégie spas-
modique infantile. Thèse de Paris.
1884.
Félibiliu. Contribulionà l'étude de la folie de l'enfance.
Thèse de Paris.
t887.
Mme SOLLIEn (aide l'état de la dentition chez les enfants
idiots et arriérés. Thèse de Paris.
1888.
TfHXAL. Contribution à l'étude de la sclérose tubéreuse
ou hypertruphique du cerveau. Thèse de Paris.
l'J;Nassc. - Contribution à l'étude des méningites chro-
niques et spécialement d'une terminaison fréquente chez
les enfants, l'Idiotie. Thèse de Paris.
Pison. De {'asymétrie fronto- faciale clans l'épilepsie.
Thèse de Paris.
1889.
Cornet (P.). de l'épilepsie. Bromures d'or et
de camphre, Picrotoxine. Thèse de Paris.
Go2·rscHaLh (A.). Valeur de l'influence de la consan-
guinité sur la production de l'idiotie et de l'épilepsie. Thèse
de Paris.
SOLLIER (P.). Du rôle de l'hérédité da ? is l'alcoolisme.
1891.
SOLLIER (P.). - Psychologie de l'idiotie etde l'imbécillité.
Thèse de Paris.
276 Travaux faits dans LE SERVICE.
Retrouvey (A.). Contribution à l'étude de l'hémiplégie
spasmodique infantile.
1892.
TAQUET. - De l'oblitération des sutures du crâne chez
les idiots. Thèse de Paris.
Vivier (A.). Contribution à l'étude clinique de l'épi-
lepsie chez les enfants. Thèse de Paris.
1893
Noir (J.). Étude sur les tics. Thèse de Paris.
1894.
BOYER (J.). Traitement hygiénique et pédagogique de
l'idiotie. (Prix Belhomme à la Société Médico-psychologi-
que de Paris.)
1895.
LEBLAIS (H.). De la puberté dans l'hémiplégie spasmo-
dique infantile. Thèse de Paris.
1896.
Boullenger (F.). De l'action de la glande thyroïde sur la
croissance. Thèse de Paris. '
Griffault (G.). Contribution à l'étude du traitement de
l'idiotie. Thèse de Paris.
1897.
BOYER (J.). Éducation du sens musculaire chez l'idiot.
(Prix Belhomme à la Société Médico-psychologique de Paris.)
1898.
BALLARD. (J.). Comment meurent les épileptiques.
Thèse de Paris.
RELLA y (P.). Essai sur le traitement chirurgical de
l'épilepsie. Thèse de Paris.
Travaux faits dans LE SERVICE. 277
1899.
OESTAN (R.). Le syndrome de Little. Sa valeur nosolo-
gique. Sa pathogénie. Thèse de Paris.
TissIER (P.). De l'influence de l'accouchement anormal
sur le développement des troubles cérébraux de l'enfant.
Thèse de Paris.
FÈVRE (A.). Du mariage des épileptiques. Thèse de
Paris. e
LE DUIGOU (E.). Contribution à l'étude du pronostic de
l'épilepsie chez les enfants. Thèse de Paris.
HASLÉ (L.). Du bromure de camphre dans le traitement
de l'épilepsie. Thèse de Paris.
1900.
Bourneville. De l'Anatomie pathologique de l'Idiotie
(Rapport fait à la Section de psychiatrie du Congrès interna-
tional de médecine de 1900 (Comptes-rendus de la Section,
p. 167). .
Mit. PESKER (D.). Un cas d'affection familiale à symp-
tômes cérébro-spinaux. Thèse de Paris.
LEBRETON. - De la sclérose en plaques chez les enfants.
Thèse de Paris.
DENIS (C.). Étude sur un cas anormal de perforation
crânienne congénitale. Thèse de Paris.
Prime (J.). Des accidents toxiques produits par l'éosinate
de sodium. Thèse de Paris.
GILLET (Th.). Étude du rôle de la consanguinité dans
l'étiologie de l'épilepsie, de l'hystérie, de l'idiotie et de l'im-
bécillité. Thèse de Paris.
1901. '
Pareur (P). Purpura dans l'Épilepsie. Thèse de Paris.
Robin (E.) Contribution à l'étude des malformations
dentaires chez les idiots, hystériques et épileptiques.
Thèse de Paris.
278 Travaux faits dans LE service.
1902.
BOYER (Jules).- Contribution à l'étude du traitement de
l'Idiotie. Thèse de Paris.
Carton (J). -De la Durée delà vie chez les Epileptiques.
Thèse de Paris.
ESMÉNARD (J). -Contribution à l'étude du Phénomène des
orteils dans l'Epilepsie. Thèse de Paris.
LE Roux (Henri). De l'emploi des verres dans le traite-
ment du strabisme. Thèse de Paris.
RENOULT (P. L.) - Contribution à l'étude des rapports de
l'Idiotie et du Rachitisme. Thèse de Paris. ·
Liste des Internes de notre service (1880-1902)
Liste des Internes de notre service (1880-1902)
EXPLICATION DES PLANCHES
282 Explication des planches.
Planche I.
(Obs. de llierc..., p. 13).
Hémisphère droit. Face externe.
F', F2, F3, lre, 20, 3' circonvolutions frontales.
P1, pli pariétal supérieur.
PA, circonvolution pariétale ascendante..
FA, circonvolution frontale ascendante.
SR, sillon de Rolando.
P2, pli pariétal inférieur.
P3, pli courbe.
Se S., scissure de Sylvius.
LOC, lobe occipital.
LO, lobule orbitaire.
Tl, T2, T3, 1 ? 2°, 3e circonvolutions temporales.
Se fs., scissure frontale supérieure.
Sc fi., scissure frontale inférieure.
Se p., scissure parallèle.
Se t2, 2e scissure temporale.
281 EYP1.ICA'I'10\ DES PLANCHES.
PLANCHE II.
(Obs. de Merc..., p. 13).
Face interne de l'hémisphère droit.
Fi, Première circonvolution frontale interne.
LP, Lobule paracentral.
CCC, Circonvolution du corps calleux.
CC, Corps calleux.
CS, Corps strié.
CO, Couche optique.
LQ, Lobule quadrilatère.
C, Coin.
P, Pédoncule cérébral.
CA, Corne d'Ammon.
CH, Circonvolution de l'hippocampe.
TO, Circonvolution temporo-occipitale.
Se cm, Scissure calloso-marginale.
F ca, Scissure calcarine.
Se to2, 2° scissure temporo-occipitale.
Bourneville, Bicêtre, 1902. yL, il
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1902. PL. III.
BOURNECILLE, Bicêtre, 1902. \ PL. III.
286 Explication DES planches.
Planche III.
(Obs. de Joha..., p. 62).
Face externe de l'hémisphère droit.
r,Fa,F3, Ie", 2e, 3°, circonvolutions frontales.
P1, Pli pariétal supérieur.
P2, Pli pariétal inférieur.
PC, Pli courbe.
PA, Circonvolution pariétale ascendante.
FA, Circonvolution frontale ascendante.
SR, Sillon de Rolando.
LOC, Lobe occipital.
LO, Lobule orbitaire.
T',T2,T3, lire, 2e, 3°, circonvolutions temporales.
tpc, Pli de passage de T2 au PC.
to, Pli de passage de T2 au LOC.
Sep, Scissure parallèle.
(Cette planche et la suivante ont été placées aux pages 62
et 63 du volume).
Explication DES planches* 287
Planche IV.
(Obs. deJoha ? p. 63.)
Face interne de l'hémisphère droit.
h ? Première circonvolution frontale interne.
LP, Lobule paracentral.
CCC, Circonvolution du corps calleux.
CC, Corps calleux.
CS, Corps strié.
CO, Couche optique.
LQ, Lobule quadrilatère.
P, Pédoncule cérébral.
CA, Corne d'Ammon.
CH, Circonvolution de l'hippocampe
C, Coin.
LOC, Lobe occipital.
Sc cm, Scissure calloso-marginale.
Se ip, Scissure interpariétale.
288' EXPLICATION DES, PLANCHES.
Planche V.
(Obs. de Deba..., p. 109.) ,
Face externe de l'hémisphère droit.
F', F2, F3, Ire, 2e, 3° circonvolutions frontales.
LPS, lobe pariétal supérieur. '
LPI, lobe pariétal inférieur.
F, fourche. ,
PA, circonvolution pariétale ascendante.
FA, circonvolution frontale ascendante. ' r
SR, sillon de Rolando.
PC, pli courbe.
LOC, lobe occipital.
LO, lobe orbitaire.
Ti, T2, T3, 1re, 2e, 3" circonvolutions temporales
Se S., scissure de Sylvius.
Se fs., scissure frontale supérieure.
Se fi., scissure frontale inférieure.
Se p, scissure parallèle.
BOUItNE'ILLE; B2Clt'C 1S02. PL. IV.
BOURNEVILLE, Bicêtre,- 1902. 19
290 Explication DES planches.
Planche VI.
(Obs. de Deba..., p. 110.)
Face interne de l'hémisphère droit.
FI, Première circonvolution frontale.
LP, Lobule paracentral.
CC, Corps calleux.
CS, Corps strié.
CO, Couche optique.
CA, Corne d'Ammon.
CH, Circonvolution de l'hippocampe.
TO, Circonvolution temporo-occipitale.
T2, 2° circonvolution temporale.
LO, Lobule orbitaire.
Se cm, Scissure calloso-marginale.
Se pi. Scissure perpendiculaire interne.
Se to2, 2,, Scissure temporo-occipitale.
Sca, Scissure calcarine.
292 Explication DES planches.
Planche VII.
Squelette de la tête de Deb... (p. 1'14).
Or, voûte orbitaire. N, nasion. - H, II plan orbitaire
horizontal, passant par le centre de l'orbite et le trou optique,
Op. cc, plan du clivus. Os, os wormiens. - R, plan du
rocher. La ligne indiquée sans lettre, entre le plan orbi-
taire (l'I, II) et le plan du rocher (R), répond au plan de l'inion.
op, plan du trou occipital. - Les signes XX répondent aux
bosses frontales et pariétales. E, fosse ethmoidade. - T,
fosse temporale. R, bord supérieur du rocher. A, trou
auditif. B, basion (bord antérieur du trou occipital).
$OTJRNIL1 E : Biçétré. T902. PL. Y.
294 Explication DES planches.
Planche VIII. 1
. (Obs. de Lecl... René, p. 2'r6).
Base de l'encéphale montrant l'atrophie considérable du
cervelet.
l3oamevu.r,s, Bicêtre, 1 £ 02. 'IL. VIII.
296 Explication DES planches.
Planche IX.
(Obs. de Lecl.. (André, p. 258).
Base de l'encéphale montrant l'atrophie considérable du
cervelet.
Bourneville, Bicêtre, 1902. T'r,. IX.
ERRATA
Page 114, dans la note, au lieu de Planche III, lire PL. V.
, 161, lire Chap. XIII au lieu de XI.
169, XIV XII.
172, XV XIII.
175, XVI XIV.
TABLE DES MATIÈRES
PREMIÈRE PARTIE
Histoire du service pendant l'année 1902.
Section I : Bicêtre.
300
TABLE DES MATIÈRES.
Table des matières. 301
302 TABLE DES matières.
TAULE DES MATIÈRES. 303