(1902) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des enfants idiots, épileptiques et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1901
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(1902) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des enfants idiots, épileptiques et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1901

PUBLICATIONS DU PROGRÈS MÉDICAL

RECHERCHES

CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET L'IDIOTIE

COMPTE-RENDU DU SERVICE

DES ENFANTS IDIOTS, ÉPILEPTIQUES ET ARRIÉRÉS DE

BICÈTRE PENDANT L'ANNÉE 1901

PAR

BOURNEVILLE

Avec la collaboration de

MM. AMBARD, BOYER (J.), CROUZON, MOREL (L.),

PAUL-BONCOUR, PHILIPPE ET OBERHUR.

Volume XXII

Avec 14 figures dans le texte et 1G planches.

PARIS

AUX BUREAUX DU 1

PROGRÈS MÉDICAL

14, rue des Carmes, 14.

FÉLix ALCAN

ÉDITEUR

108. Boulevard St-Germain, 108.

1902

PREMIÈRE PARTIE

Histoire du service pendant l'année 1901

(Bicêtre et Fondation Vallée)

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1901.

PREMIÈRE PARTIE

SECTION I : Bicêtre,

Histoire du Service pendant l'année 1901.

I.

Situation DU SERVICE. ENSEIGNEMENT primaire.

Les enfants de la 4° section du quartier des aliénés

de l'hospice de Bicêtre sont répartis en trois groupes

principaux : 1° Les enfants idiots, gâteux, épilepti-

ques ou non, mais invalides (Bâtiment Séguin) ;

2° les enfants idiots, gâteux ou non, mais valides ;

- 3° les enfants propres, valides, imbéciles, arrié-

rés, instables, pervers, épileptiques et hystériques

ou non.

I. Enfants idiots, gâteux, épileptiques ou non,

mais invalides. Ce premier groupe est subdivisé

en deux catégories. La première se compose des

enfants idiots complets, ne parlant, ni ne marchant,

ne sachant pas se servir de leurs mains, incapables

IV Enfants IDIOTS complets.

de s'aider en quoi que ce soit, sans attention, gâteux,

etc. On les considère généralement, mais à tort,

comme tout à fait incurables. La plupart d'entre eux

sont, contrairement a l'opinion courante, susceptibles

d'amélioration, même à un degré très notable.

Sous l'influence du traitement l2éclico-Zéclaoicllce,

ils passent successivement du groupe des idiots

complets dans ceux des idiots profonds, des ilnbéci-

les et enfin des simples arriérés.

On fortifie leurs jambes avec la balançoire- 1 rem-

plin ; on leur apprend ensuite à se tenir debout à l'aide

des barres parallèles ; à marcher, soit en les tenant

sous les bras, soit à l'aide du chariot (1) ; en exerçant,

chaque jour, et à plusieurs reprises, toutes les articu-

lations (exercices des jointures), en leur faisant des

frictions stimulantes, etc.

En 1901, un enfant a appris à marcher seul (2);

trois enfants ont appris à manger seuls (3) ; deux sont

devenus propres (4). Voici quelques notes concernant

ces enfants.

Mans... (Lucien), à l'entrée en 1898, ne posait pas ses pieds

à terre. Aujottrd'hui il fait quelques pas seul. Il n'avait jus-

qu'alors prononcé aucun mot, aujourd'hui il répète bien

quelques petites phrases. L'enfant a eu une grande partie

de l'année des engelures aux pieds ce qui a retardé les pro-

grès de la marche.

Car... (Camille), à Ventrée, ne s'était jamais servi de ses

mains que pour se frapper et se mordre; aujourd'hui il

mange et boit seul.

POPELA.. (André), à. l'entrée, ne comprenait rien, ne mar-

chait pas, avait même de la peine à se tenir dans le chariot,

était grand gâteux. Aujourd'hui il est propre (1901) mange

(1) Voir Compte-rendu, a. 1800 : 8g. I, II, III et IV, p. IV, V, VI et VII.

(2) Mans... - (3) Car... l'opel... Delp... - (4) Pop... Jacq...

Petite ÉCOLE. V

seul et dit papa, maman. Il marche seul depuis 1899. Son

attention était très difficile à fixer ; maintenant, si on l'ap-

pelle, il vient; si on le gronde, il s'en va en pleurant.

Delp. (Eugène) est arrivé ne marchant pas, ne comprenant

rien, ne parlant pas, grand gâteux et ne se servant pas de

ses mains. Il marche seul, comprend un peu ; si on le gronde

il s'en va tapant du pied et des mains. Il dit papa, maman,

à boire, du pain, lolo, cola pour chocolat, mange et boit

seul (1901).

Jacqua.. (Julien) est entré en mars 1889 marchant mais

grand gâteux et ne se servant pas de ses mains, il sait man-

ger seul depuis 1899 et a été rendu propre cette année. Il a

gagné un peu pour la parole, et pourtant il a toujours à peu

près autant de vertiges.

Dès qu'un enfant de ce groupe marche sans aide,

il doit être envoyé à la Petite École, d'abord pendant

une heure ou deux, puis toute la journée, aussitôt que

ses forces le permettent. Tous ces enfants gâteux

sont placés sur les petits fauteuils spéciaux que nous

avons décrits (1).

La seconde catégorie comprend les idiots absolu-

ment incurables, en beaucoup plus petit nombre qu'on

ne le croit d'habitude, et les épileptiques devenus

déments et gâteux sous l'influence des accès ou des

poussées congestives qui les compliquent. Ils ne

peuvent plus être que l'objet de soins hygiéniques et

doivent former un groupe it part. Aussi avons-nous

obtenu, pour les plus âgés d'entre eux, l'aménagement

de l'un des sous-sols encore disponibles où ils sont

réunis et surveillés durant le jour, en mauvaise saison,

car, lorsque le temps le permet, ils sont promenés

dans les jardins.

Ce sous-sol nous sert également à d'autres enfants,

(1) Voir Compte-rendu de 1899, flg. 5 et 6, p. vm.

VI Traitement 111BDICO-PDAGOCIQUE : résultats.

qui nous arrivent tardivement à 15, 16 ans, 17 ans et

même quelques mois ou quelques jours avant la limite

fixée (18 ans), idiots ou épileptiques en déchéance,

dont l'incurabilité est reconnue et que nous avions

été obligé jusqu'ici, de maintenir dans les écoles,

où ils étaient une occasion de trouble, qu'ils con-

tribuaient à encombrer, même à infecter par leur

gâtisme, sans aucun bénéfice pour eux et au grand

détriment des enfants éducables. Ces malades absolu-

ment incurables sont au nombre de huit.

II. Enfants idiots gâteux ou non gâteux, épilep-

tiques ou non, mais valides (Petite École). - Ces

enfants fréquentent la petite école, confiée exclusive-

ment à des femmes. Dans le courant de l'année,

170 enfants y ont été inscrits. Sur ce nombre, 9 sont

décédés, 8 sont sortis définitivement, 1 a été transféré,

2 sont passés dans une des sections d'adultes et 10 ont

été envoyés à la grande école. ·

Sur 140 enfants qui restaient à la petite école au

31 décembre 1901, 9 ne mangent pas seuls, 60 se

servent de la cuiller, 51 de la cuiller et de la fourchette

et 20 se servent de la cuiller, de la fourchette et du

couteau. Cinq enfants gâteux de ce groupe sont

devenus propres (1) ; 5 ont appris à manger seuls (2) ;

8 ont appris à lire (3).

Le traitement du gâtisme, qui consiste à placer,

après chaque repas, les enfants gâteux sur les sièges

d'aisance et qui a pour but principal d'amener l'enfant

gâteux à devenir propre, fait également réaliser à

(1) Rost ? Deno ? Lecourt ? DIuff ? Troes..

(2) Baud..., Dubr..., Sehneid ? Gagn ? Paum..

(3) Lesu ? Guya ? Boul ? Brant ? Via.. Gabor ? Copp ? Georg..

PETITE ÉCOLE.

VII

l'Administration des économies notables de blanchis-

sage. Nous avons fait faire par la surveillante du ser-

vice le relevé des enfants ayant déféqué au siège

après les repas, durant les 5 premiers jours de chaque

mois. Voici ce relevé qui a porté sur une moyenne

de 50 enfants gâteux. '

vin Traitement MÉDICO-PÉDAGOGIQUE : résultats.

qui, venus du premier groupe, c'est-à-dire des INVALI-

DES, étant encore trop infirmes, n'ont pu y prendre part.

Quinze enfants de la petite école et de la petite école)

complémentaire, dont nous allons parler plus loin,

ont fait régulièrement les exercices de la grande gym-

nastique. Vingt-et-un enfants ont travaillé cette année

dans les différents ateliers : tailleurs, cordonniers,

vanniers, brossiers, imprimeurs, serruriers, menui-

siers et jardiniers.

La petite école comprend : 1° le traitement du

gâtisme, exposé précédemment, 2° les leçons de toi-

lette qui consistent à apprendre aux enfants à se laver

la figure et les mains, à s'habiller, à manger seuls, etc. ;

3° les exercices pour l'éducation de la main, des sens

et de la parole ; 5° les exercices élémentaires relatifs

à l'enseignement primaire ; 6° les leçons de choses,

soit à l'école, soit dans les jardins (avec le tableau

roulant), soit enfin dans les promenades (1). Les fig. 1,

2 et 3 complétant celles du Compte-rendu de 1899,

représentent les boiteux qui renferment les substances

dont nous nous servons pour l'éducation des sens du

goût (2) et de l'odorat (3) et le petit appareil en usage

pour apprendre aux enfants à nouer.

Voici quelques détails sur plusieurs des enfants

améliorés à la petite école, par DZ"°9 Blanche Agnus,

Amandine BoHAiN et leurs collaboratrices.

CoRN... Maurice A l'entrée, il n'était pas gâteux, mais

sa tenue était très mauvaise, il se tenait malproprement, ne

savait ni se vêtir ni se laver seul.

Aujourd'hui, il se donne lui-même les soins de toilette, et

s'habille seul. - Sans notions des exercices classiques, il

(1) Dans nos précédents Compte-rendus, notamment dans celui de 1899

nous avons décrit minutieusement tous les procédés en usage il la section

des Enfants arriérés et épileptiques (Voir les fig. 7 à 51 de ce Compte-rendu

Petite ÉCOLE. JX

commence à assembler les lettres, et à tracer les o, a et u

sur le cahier. Les progrès à la gymnastique sont satisfai-

sants.

Tno.. aoaraw. Compte-rendu de 1900, p. m).- L'amélio-

ration continue, l'enfant parle aujourd'hui très bien, interroge

et répond exactement quand on lui parle. Il a appris a con-

naître quelques lettres et, sur le cahier, il peut reproduire

des barres et des o.

Fig. 1. -Flacons renfermant : Eau de rose, Acide acétique, Teinture d'assa

foetida, Alcoolat d'unis, Teinture de valériane, Eau de Cologne, Eau de

menthe, Acide tliymique.

X Traitement médico-pédagogique : résultats.

Il connaît le nom et l'usage des objets usuels qui l'entourent,

ainsi que les différentes parties de son corps et de ses vête-

ments. Sa tenue est soignée, il commence à se nettoyer

seul ainsi qu'à s'habiller. Son caractère est gai, il chante,

retient facilement les airs et les chansons que nous lui appre-

nons ; il a même une voix juste et jolie. ·

LECOURT... (Léon). L'enfant s'améliore sensiblement sous le

rapport de la pa7,ole. L'attention, plus facile à obtenir, permet

aujourd'hui à l'enfant d'arriver à pouvoir nouer, lacer, bou-

tonner et faire les deux premiers mouvements à la gymnâs-

Fig. 2. - Flacons renfermant : Rhubarbe, Quinine, Gentiane, Sucre, Sel

Poudre de Quinquina.

PETITE ÉCOLE.

XI

tique. De pleureur qu'il était autrefois, il est devenu gai, il

joue et chante continuellement et il se plaît à entendre chan-

ter, il retient du reste très facilement les airs. 1

Au point de vue du gâtisme, une grande amélioration s'est

produite, il n'est pas encore tout à fait propre, mais il va à

présent seul sur le siège. - Il commence à se laver les mains

et le visage. Toutefois il faut encore l'aider.

IIour... (Charles), 7 ans 112. L'enfant, dont la parole était

nulle à l'entrée, était gâteux, et sujet à de fréquents ver- i

tiges, ce qui lui rendait presque impossible la marche, et

le faisait tomber à tout instant. Il était dans une situation

telle qu'on ne croyait pas obtenir de résultats. - A la suite

des exercices de gymnastique, de lavage et de parole, l'enfant

s'est amélioré. Il a débuté par une prononciation défectueuse

accompagnée d'écholalie prononcée, puis peu à peu l'écholalie

tend à disparaître et l'enfant commence à répondre plus exacte-

ment quand on lui parle. Il devient gai, chante et commence

à s'approprier en ce qui concerne le gâtisme.

Rie... (Henri), 7 ans. - Idiotie profonde. - Il reste assis

J. i ! l. 3. - Petit appareil pour appendre il nouer.

XII Traitement médico-pédagogique : résultats.

dans un coin, sans faire aucun mouvement, indifférent au

bruit que font les autres enfants, ne se retournant même pas,

et n'ayant pas l'air d'entendre le son des clairons, ni le bruit

des tambours (même placé au milieu), ne répondant pas à

l'appel de son nom, criant, pleurant et se cognant le front

quand on voulait le prendre sur les bras, Il marchait très-

peu, pour ainsi dire pas du tout. La physionomie était triste

et peu gracieuse.

Quelques progrès sont à noter et l'enfant aujourd'hui,

vient à l'appel de son nom, est devenu joueur, affectueux,

commence à envoyer des baisers, à faire les deux premiers

mouvements à la gymnastique des échelles, tenu encore il

est vrai par le moniteur et il se plait à entendre chanter et

le prouve en souriant quand on chante près de lui, vous prend

les mains et essaie de fredonner. - Il prononce quelques

mots, tels que maman, papa, babo, ce qui veut dire bobo

quand il a du mal, et le mot quaqua.

Il n'est pas encore devenu propre, cependant lorsqu'il sent

qu'il a besoin il se baisse, ce qui est un avertissement, et

permet d'empêcher qu'il ne se salisse.

POLIA'rs.. (Henri). Idiotie profonde. - Aux résultats anté-

rieurs ajoutons qu'il s'est produit une amélioration con-

cernant l'attention. L'enfant répond, aujourd'hui, à l'appel

de son nom, ce qu'il ne faisait pas autrefois. Il comprend

maintenant quand on le flatte ou qu'on le gronde, est sen-

sible aux caresses qu'il ne recherchait pas autrefois, étant t

même d'une grande indifférence.

Au point de vue du gâtisme, il peut être même considéré

comme étant propre, il va du reste seul dehors quand il a

besoin et se salit rarement.

KRIÉG... (Maurice) Idiotie profonde, est en voie de trans-

formation. A son entrée, à 3 ans 1/2, il était gâteux, ne pro-

nonçait aucun mot, ne mangeait pas seul, ne savait ni s'habil-

ler, ni se déshabiller. Très turbulent, ayant continuellement

des accès de colère et de cris, indocile, d'une attention

impossible il fixer, il offrait le type de l'idiot profond.

L'enfant est âgé actuellement de 8 ans 42. Aux amélio-

rations constatées durant les deux précédentes années :

propreté, habillement et acquisition de quelques mots usuels,

nous ajouterons, pour cette année, les progrès suivants : non

seulement il s'habille et se déshabille très adroitement tout

seul mais il habille et déshabille les autres enfants de la salle ;

PETITE école. xiii

il cire leurs chaussures. Il reconnait et nomme toutes les

personnes du service, même les parents de certains de ses

camarades.

La parole (à part la coprolalie) et la mémoire se sont aussi

énormément enrichies en mots usuels. Kr.. fait de petites

phrases. Enfin les accès de cris persistant encore sont bien

moins fréquents et ont fait place iL une attention relative-

ment soutenue.

Ces progrès remarquables, chez un tel malade, sont dus

surtout aux soins de Mme Athénais Bohain, sous-surveil-

lante à l'infirmerie. ok

Petite école complémentaire. Cette école est

confiée à M"10 BONNET, femme d'un grand dévouement

dont l'éloge n'est plus à faire et qui s'est mise gra-

cieusement à notre disposition. Elle a été aidée, jus-

qu'au mois de juillet, date de son départ de l'Admi-

nistration, par une suppléante aussi active qu'intelli-

gente, 1\I ? Cordonnier. Cette suppléante avait éga-

lement la surveillance des deux dortoirs où couchent

les enfants de cette école, au nombre de 40. Elle a été

remplacée par Mm0 Randier, simple infirmière, ayant

5 ans de services et pour laquelle nous avons demandé

l'élévation au grade de 1 re infirmière ce qui fait 2 franca

de plus par mois. Trois infirmières sont en outre

adjointes à ce service pour la surveillance des enfants.

Voici quelques-uns des résultats obtenus au cours

de l'année 1901, résumés par Mme Bonnet.

Dans le courant de l'année trois enfants ont été

rendus propres :

1° PARD... (Marcel). - Idiotie du second degré avec hémi-

plégie a été signalé l'année précédente (p. X) comme très amé-

lioré pour la parole qui était complètement nulle à son

entrée, parle davantage et plus distinctement.

Cet enfant qui pleurait sans cesse, ne mangeait pas seul,

gâtait nuit et jour est devenu tout à fait propre : dans la

journée il exprimeses besoins. Il mange seul convenablement,

joue avec ses petits camarades. Il connaît et nomme les

xiv Traitement vIrDIGO-P);D : 1GOGIQUL7 : résultats.

différentes parties de son corps. Comme exercices classiques

nous n'avons encore rien obtenu.

2° DELI... (Marcel), G ans. Idiotie complète, signalé

également en 1900 (p. XI) pour l'amélioration de la parole. -

Ne se salit plus jamais dans la journée, exprime ses besoins.

Il est plus gai, plus affectueux, la prononciation est moins

défectueuse. Del.. retient et fredonne tous les airs qu'il

entend.

3° PEL... (Léon). - Idiotie du second degré, sclérose en

plaques. - A son entrée ne se tenait debout que soutenu

sous les bras, ne mangeant pas seul, gâtait nuit et jour et

parlait avec difficulté. Cet enfant a commencé en 1897 à se

tenir debout dans un chariot et à se servir de la cuiller. En

1898, la marche est devenue plus assurée, les mains moins

maladroites. En 1899, il est parvenu it se déshabiller seul et

à parler plus intelligiblement. Il gâtait encore très souvent

jour et nuit.

Actuellement il a plus d'équilibre dans la marche, il est

tout à fait propre le jour ; s'habille complètement seul, tient

conversation, emploie les verbes, les pronoms, fait des

réflexions sensées. Il a pris goût à la classe, connaît et

nomme toutes les lettres de l'alphabet ainsi que les chiffres,

les couleurs et les surfaces.

Il s'intéresse aux leçons de choses et distingue un certain

nombre d'objets. Il sait lacer, boutonner, compter les objets

jusqu'à 10. Pour l'écriture nous n'avons encore rien pu

obtenir en raison du tremblement dont il est affecté. Cet

enfant a été notablement amélioré pour la parole.

4° Grégo... (Marcel). - Idiotie du second degré. - La

parole était complètement nulle à son arrivée. Il a commencé

par répéter les syllabes simples et redoublées, puis peu à peu

il s'est mis à prononcer un certain nombre de mots. L'arti-

culation est très défectueuse mais comme cet enfant apporte

de la bonne volonté, elle sera facile à rectifier. La plupart

des consonnes sont bien prononcées isolément, mais dans le

corps d'un mot elles sont complètement dénaturées.

Notre malade, très maladroit de ses mains au début, est

parvenu à s'habiller seul, il sait lacer, boutonner, nouer mais

sans rosettes. Il place par comparaison les lettres et les

chiffres sur les cartons correspondants mais ne les nomme pas

encore. Il arrive à tracer quelques bâtons sur l'ardoise. Il

aime beaucoup le chant et fredonne les airs qu'il entend.

Petite école complémentaire. xv

5o, tio, j,. Nos microcéphales : Laun... (\Iarcel), Ctt : tz...

(Louis), STEttL... (Georges), signalés l'année dernière (p. XI .

et XI continuent à s'améliorer à tous les points de vue.

La parole est presque normale, l'esprit d'observation

s'exerce. La mémoire s'éveille et dans leur conversation on

s'aperçoit des progrès de l'intellect. Ce n'est plus comme

autrefois, les faits présents qui occupent uniquement leurs

pensées, le passé tient aussi sa place et ils savent trouver

les mots et même les tournures de phrases pour exprimer

leurs idées. Ils travaillent avec plaisir en classe, l'écriture a

beaucoup gagné. Ils assemblent les lettres, savent écrire

leur nom, leur âge, les jours de la semaine, les mots de la

leçon de lecture de chaque jour. La lecture au Syllabaire va

lentement mais ils lisent et comprennent un grand nombre

de nos mots imprimés. Ils sont parvenus à faire seuls l'addi-

ion sans retenues. L'instabilité mentale a sensiblement

diminué. Ils rendent quelques services manuels et le fu nt

avec empressement. '

8°, 9°, 10°, 4U°. Chez quatre autres enfants signalés anté-

rieuremment, la parole s'est modifiée favorablement. Ce

sont : Cn1\t.. (Fernand) (1), BEA.. (Charles), LEMAIT.. (Geor-

ges) (2) et COTTE.. (Henri).

Deux enfants ont appris iL lire couramment :

12° Ctinno.. (Victor) Idiotie profonde, entré en 1892; parole

et marche nulles, ne mangeant pas seul, restant toute la

dans un état somnolent, cet enfant semblait n'être

doué que de la vie végétative, l'eu à peu, lentement, les ténè-

bres qui enveloppaient cette intelligence se sont dissipées

et enfin nous sommes arrivés à ce résultat inespéré de la

lecture courante. En voyant la physionomie, encore si

dépréciée, de notre malade, on peut se rendre compte des

dillicultés que nous avons rencontrées. Malgré la difformité

de ses mains CHAR)[.. est parvenu à former une- écriture assez

lisible cette année, ce que nous n'avions pu obtenir jusqu'à

présent.

Il est vrai que grâce au traitement persévérant des douches

en pluie sur ses mains malades et toujours gonflées (3), elles

(t) Compte-rendu de 18n ? p. T..

(2) Compte-rendu de 18nl1, p. L et de f900, p. zv.

(3) C'est là une des nombreuses applications de l'hydrothérapie que nous

avons;l'aites, dans notre service de Bicêtre, depuis 20 ans et il l'Institut médi-

xvi École complémentaire.

ne se sont pas ulcérées comme les années précédentes ; ses

doigts se sont allongés et lui ont permis de tenir la plume.

Il fait l'addition et la soustraction sans retenues mais n'en

comprend pas encore l'application. La parole est très amé-

liorée, l'articulation est nette, il fait des phrases assez

correctes, emploie à propos verbes et pronoms, mais ne

converse pas volontiers. Ce n'est qu'au prix d'un effort qu'il

répond aux questions qui lui sont posées. Il a de la mémoire

et retient les leçons orales.

13° iIILL.. (Emile), 10 ans. - Idiotie complète. (Compte-

rendu de 1900, p. XIII). Lorsque nous avons pris cet enfant

en 1895, il était pâle, maladif, dormait continuellement et ne

se réveillait que pour pleurer et se plaindre. Il parlait à peine,

ne s'habillait pas seul, et n'avait aucune notion classique.

Il est resté stationnaire pendant les deux premières années

qui ont suivi son entrée : ce n'est qu'en 1897 que l'intelligence

a paru s'éveiller; il est devenu moins endormi et peu à peu

a pris goût à la classe. Les progrès ont été très lents mais

sans arrêt : notre malade s'est intéressé à la lecture grâce à

nos mots imprimés, et enfin cette année, il passe à la lecture

courante. L'écriture marche à peu près de pair et est devenue

lisible.

Il fait des petits exercices de grammaire, distingue le genre

et le nombre, sait faire l'addition, la soustraction, la multi-

plication, commence à calculer mentalement. - Mill.. aime

beaucoup à rendre service et s'en acquitte bien. Il a de l'a-

mour-propre, est très sensible aux reproches et aux compli-

ments.

Trois autres enfants sont en bonne voie pour la lecture

courante : Gava.. (Emile), Lero. (Maurice), Bea. (Charles).

Tous nos élèves signalés précédemment comme lisant cou-

ramment ont suivi une marche ascensionnelle, lente mais

sans arrêt ; leur travail classique se rapproche de plus en

plus de celui des enfants normaux.

A mesure que l'intellect se développe, nous voyons géné-

ralement s'atténuer les mauvais instincts que nous déplorions

au début, et chez certains d'entre eux, nous constatons môme

l'éclosion de quelques sentiments de loyauté, de bonté et de

co-pédagogique depuis 1803. Puisque l'occasion s'en offre nous rappellerons

que depuis la même époque nous employons l'hydrothérapie pour les foulures,

les entorses, les tumeurs hémorroïdales, etc.

ÉCOLE COMPLÉMENTAIRE. XVII

désintéressement ; cela nous console des mauvais jours, en

nous prouvant que, suivant l'opinion encourageante de

M. Bourneville, quelque ingrat que paraisse le terrain, la

bonne semence arrive souvent à germer et iL porter des fruits.

Pour entretenir le zèle et l'émulation de nos élèves, nous

avons plusieurs moyens d'encouragement. Presque chaque

jour les enfants, dont la conduite et le travail ont été satis-

faisants, reçoivent du dessert. Ils savent si bien que c'est une

récompense et non un dû que, lorsque l'un d'eux a commis

quelque méfait que nous ignorons, nous le voyons rien qu'à

sa physionomie, au moment du partage : il a un air si piteux,

si confus, qu'après information nous apprenons qu'en effet

il n'a pas mérité de recevoir sa part.

Tous les samedis nos élèves passent à la distribution des

récompenses et reçoivent chacun quelques sous pour leur

travail manuel et classique. Le gain, quelque modeste qu'il

soit, a pour eux un grand attrait : pour les plus jeunes, il

représente une tasse de chocolat au lait le dimanche, une

gourmandise quelconque ; pour les plus grands, il est mis à

la caisse où chacun d'eux a un compte ouvert et apprend

ainsi l'épargne, ils arrivent à former la somme nécessaire pour

l'achat d'un objet convoité par eux.

A toutes les fêtes de l'année, je sors chez moi pour la jour-

née, à titre de récompense, quelques enfants, choisissant de

préférence ceux dont on n'a pas eu à se plaindre et qui, peu

ou point visités par leurs familles, ne vont jamais en permis-

sion de sortie ou en congé.

Enfin pour clore l'année scolaire nous avons une distribu-

tion des prix. Notre classe, par l'initiative des enfants, se

pavoise de guirlandes, de banderolles en papiers de couleurs

et prend un air de fête. L'harmonium est descendu grâce à

l'obligeance du professeur de chant, M. Sutter et, sous sa

direction, nos enfants entonnent quelques chants joyeux qui

apportent leur note de gaité à la cérémonie. Quelques parents

sont invités et, devant eux, petits et grands récitent des fables,

des monologues, etc.

Puis les nominations commencent à la grande joie de nos

malades dont l'émotion est partagée par leurs familles qui

tout en les couronnant essuient parfois une larme. Pour atté-

nuer la tristesse de l'internement qui prive nos petits malades

des joies de la famille, nous nous efforçons d'apporter un

rayon de gaité dans leur vie et de leur procurer quelques fêtes

familiales.

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1901. **

SVIII Traitement )11,"DICO-PÉD ? GOGIQUE.

C'est ainsi que nous célébrons la St-Nicolas, le bonhomme

Noël qui, la nuit, dépose des bonbons et des oranges dans les

souliers bien cirés. Nous faisons un arbre de Noël et c'est

plaisir de regarder toutes ces figures épanouies à la vue des

lumières et des jouets.

Le G janvier, le pâtissier apporte la traditionnelle galette des

rois et chacun de chercher le bébé ; et bien qu'en République

de boire à la santé du roi. - A Pâques, la cloche en passant

jette des oeufs en sucre pour les enfants sages. D'autrefois,

c'est la fête de l'une de nous que l'on souhaite et notre classe

se couvre encore de guirlandes et de fleurs, tandis qu'un

couvert se dresse aussi élégant que possible à la grande joie

de nos petits invités qui, pendant longtemps, se rappellent le

menu du goûter.

Chaque semaine nous faisons une promenade. Cet été une

voiture de l'Administration nous a conduils à l'exposition de

l'enfance, une autre fois, nous avons passé la journée au bois

de Clamart. Pendant les vacances, nous avons été faire un

goûter champêtre au bois de Vincennes et une autre fois aux

Buttes Chaumont par le chemin de fer de ceinture.

Nous avons tenu à donner en entier ce très intéres-

sant rapport de 1'1111" Bonnet, rapport que nous avons

dû exiger en ce qui concerne la dernière partie. Ce

qu'elle ne dit pas, c'est que récompenses, goûter,

jouets, dépenses de promenades, etc., son ! dûs à sa

générosité seule, sans aucune participation de

l ? ll/minÍ811'ation de l'Assistance publique qui ignore

ce qu'elle fait. L'Administration départementale,

mieux au courant, lui a témoigné sa reconnaissance

de ses admirables services.

Il a été fait allusion dans les dernières notices sur

les enfants de l'Ecole complémentaire à l'emploi des

mots imprimés. Nous avons maintes fois donné des

renseignements sur ce procédé, notamment dans le

Compte-rendu de 1899 (p. r.v-LVI). Nous croyons

LES mots imprimés. XIX

utile d'y revenir aujourd'hui en citant des exemples

de leur application.

Un enfant est atteint d'idiotie complète, c'est-à-

dire qu'il ne marche pas, ne se sert pas de ses mains ;

qu'il faut le faire manger, le laver, l'habiller ; il est

gâteux, ne parle pas, ne sait même pas, par signes,

exprimer ses besoins. Son attention est absolument

nulle, il a des tics plus ou moins nombreux.

La première période du traitement médico- péda-

gogique consiste à lui enseigner à se tenir debout t

(balançoire-tremplin, barres parallèles, saut, chariot,

etc.) et à lui apprendre à devenir propre.

La seconde période du traitement znéctieo-péclago-

gique consiste à éveiller l'attention de l'enfant, à

éduquer la main et le sens du toucher, puis le sens

de la vue. C'est alors qu'on essaie,- même l'enfant ne

parlant pas, à lui faire désigner, - la nomination

viendra plus tard, les différentes parties du corps,

de la vêture, des objets du réfectoire, du dortoir,

de l'école, les animaux, etc.. Bien que l'enfant ne

parle pas ou ne possède que quelques mots, ne con-

naisse pas les lettres, ne syllabe pas, nous l'exerçons à

reconnaître les mots.

Exemple : au réfectoire nous plaçons sur la table

des cartons portant en gros caractères les mots table,

banc, assiette, verre, couteau, fourchette, etc.. Nous

exerçons l'enfant à désigner les objets et à mettre sur

chacun d'eux le mot imprimé correspondant. Les

enfants reconnaissent l'image du mot, comme ils

. reconnaissent l'image d'un chien, d'un chat, etc..

On procède de même pour les objets du ciragier où

on leur apprend Ü brosser leurs vêtements et à cirer

leurs chaussures : brosse, brosser, cirage, cirer, etc..

L'enfant marche, est devenu propre, en même temps

xx Traitement HI1;DIGO-PDAGOGIQUR.

qu'on lui enseigne à reconnaître les objets, le nom de

ces objets, on lui apprend à s'habiller, à se laver, à

manger seul. Alors il n'a plus besoin d'aide, il entre

en relation avec son milieu, il est préparé à l'éducation

de la parole, apte à profiter de plus en plus des

leçons de choses, puis à aborder l'instruction

primaire. Enfin lorsque les notions de cette instruc-

tion primaire ont été acquises, l'âge et le développe-

ment physique venant, les enfants passent iL la grande

école (1).

III. Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,

instables, pervers, épileptiques et hystériques ou non

(Grande école). - La population de cette école était

de 166 enfants le 1 ? janvier. 1901. Tous, sauf 14 qu

ne peuvent travailler, ont fréquenté les ateliers par

grande série. Treize possédant le certificat d'études,

forment une division supérieure, ne vont il l'école

qu'une demi-journée par semaine et rcstent, les autres

jours, le matin et le soir il l'atelier. Les enfants

non pourvus du certificat d'études sont répartis en quatre

classes (60,33, 39 et 34cnfants). Aux examens du certi-

ficat d'études qui ont eu lieu il Villejuif, le 22 mars,

quatre enfants ont, subi les épreuves avec succès

(Delv ? Hesbér ? Léon.. Ra..) (2). '

Cette année encore, nos instituteurs et leurs aides,

(1) Nous renvoyons pour tous les autres exercices, les détails sur la leçon

de toilette, la gymnastique des échelles, des ressorts, etc., nos rapports

antérieurs. Rappelons seulement que nous envoyons les enfants les plus amé-

liorés it la grande gymnastique, la fanfare, iL l'orphéon, aux ateliers pendant

15, 30 minutes, etc., atin de varier leurs occupations, d'améliorer l'éducation

de leur main, de fixer davantage leur attention. Ce travail n'est pour ces

enfants qu'un moyen d'éducation. Il est, en outre, pour les plus âgés, un

moyen de traitement, de même que pour les aliénés adultes.

(2) A ce même examen, 7 infirmiers et 3 infirmières de l'École d'infirmiers

et d'infirmières de Bicêtre ont également obtenu le certificat d'études.

Education DES maîtres. XXI

ainsi que les sous-employées attachées aux écoles

(section de Bicêtre et Fondation Vallée), afin d'être

mieux en mesure d'améliorer la prononciation des

enfants et de développer leur parole ont été envoyés

successivement, par séries, au nombre d'une vingtaine,

il l'Institution Nationale des sourds-muets. De plus,

comme nous avons un certain nombre d'enfants aveu-

files, nos auxiliaires sont également allés, par séries,

à l'Institution Nationale des jeunes aveugles et il

l'Ecole Braille, dépendant du département. Leur

devoir est de profiter des notions zéclieo-2éclago-

gique qu'ils acquièrent dans ces visites pour nous

seconder sérieusement dans le traitement médico-

pédagogique des enfants de notre service. Aux insti-

tuteurs et institutrices à comprendre ce que nous

faisons pour le développement de leur instruction'

pédagogique. A l'Administralion, d'en exiger l'appli-

cation. Nous ne saurions trop remercier MM. Giraud,

Péphau, Robin et Baldon de leur précieux concours.

Notre but, en procédant ainsi, est de perfectionner

l'instruction pédagogique de nos collaborateurs et col-

laboratrices, de faire dans la mesure de nos relations

ce qui devrait être fait pour tous les pédagogues d'en-

fants anormaux. Nous avons des idiots sourds et muets,

des idiots aveugles, des idiots bègues, qui doivent pro-

fiter de l'instruction supplémentaire que nous essayons

de procurer a notre personnel enseignant. Les péda-

gogues de chacun des groupes spéciaux d'enfants

anormaux profileraient, croyons-nous, de leur passage

plus ou moins prolongé, dans les autres établissements

d'anormaux. Un modique crédit sur le pari mutuel ou

sur les fonds du ministère de l'intérieur permettrait la

réalisation de cette modeste réforme. Jusqu'ici nos

indications, à cet égard, ont- passé inaperçues.

xxii Enseignement du chant..

Enseignement du chant. - Cet enseignement

est fait' par M. Eugène Sutter, professeur de

chant à l'Asile-école de Bicêtre. De même que les

années précédentes, conformément il nos instruc-

tions, M. Sutter s'est occuppé successivement de

fous les enfants. Il a divisé ceux de la petite école,

de lapetite école complémentaire et ceux de la grande

école en trois sections. - Presque tous les enfants qui

assistent aux visites du samedi et qui participent au

chant savent lire leurs notes de musique.

, En maintes circonstances et les samedis où nous

avons des visiteurs, nous réunissons les petites filles

de la Fondation Vallée avec les garçons de Bicêtre et

nous les faisons chanter ensemble dans les choeurs.

Cette réunion des enfants des deux sexes, que nous

voudrions rendre plus fréquente, comme autrefois,

n'a jamais eu d'inconvénient. Elle ne sourit pas tt cer-

tains fonctionnaires parce qu'elle entraîne pour eux

une surveillance, que leur rôle administratif exige,

mais dont ils préfèrent se dégager. - Le nombre des

enfants qui prennent part à renseignement du chant

était de 245 au commencement de l'année 1901 et

de 260 il la fin de l'année.

Nous relèverons ici quelques observations faites par

M. Sutter au point de vue de la mue. « Depuis 5 ans

que j'observe l'étendue de la voix des malades qui me

sont confiés, j'ai remarqué que chez les enfants arriérés,

la mue est généralement tardive; que, d'après la mue,

il est facile de se rendre compte si le malade est onaniste

ou non : dans le premier cas, en effet, l'étendue de la

voix est limitée, la voix elle-même est voilée et le chant

est très souvent difficile. Chez l'enfant idiot, en géné-

ral, la voix est rauque, et d'une étendue très faible.

Chez l'épileptique, sans idiotie, la voix, au contraire,

Fanfare ET Orphéon. xxiii

a une étendue normale et est juste. - Chez les épilep-

tiques en déchéance, la voix est fausse, sans timbre

défini. Quant aux enfants soumis au traitement

thyroïdien le timbre de leur voix s'est beaucoup amé-

lioré au sur et à mesure de l'action du médicament. »

Fanfare et Orphéon. La fanfare se compose de

24 exécutants et de 7 élèves. Elle est placée sous la

direction de M. Suttcr, professeur de chant. - Cette

fanfare qui, l'an dernier, était en pleine réorganisa-

tion (1) a fait cette année de réels progrès. Parmi les

jeunes musiciens, nous citerons Bezom..., Lestier....

Fane... qui jouent la basse très convenablement.

Lech... (alto), atteint de cécité (saxophone

ténor), Trip... (également atteint de cécité (saxophone

alto), Méni... et Franc... (Bugle), Delv... et Opzom...

(piston), Rob... (baryton) et Dup... (trombone), qui sont

progressivement devenus de bons musiciens. A citer

aussi le zèle des clairons et tambours qui jouent avec la

fanfare dans les différents défilés. Les clairons sont

au nombre de 5 : Lévêch... Poitev..., Peuc... Sib... et

un élève, Rem... Les deux tambours, Cuizin... et

Bred..., savent convenablement faire lcur partie; - 2

autres élèves tambour prendront bientôt place dans les

rangs. Nous étonnerons même beaucoup de personnes

en disant que la grosse caisse est tenue par l'enfant

Boh..., atteint de surdi-mutité, qui malgré cette infir-

mité s'acquitte fort bien de ses fonctions.

Influence des sons musicaux sur les enfants arrié-

rés et nerveux. - Il nous a été permis de constater

une fois de plus, dit M. Sutter, l'heureuse influence

que parait exercer la musique sur les enfants idiots de

toute catégorie. Il est rare, en effet, de voir un

(1) (Voir Compte-rendu de 1900, p. xix.

xxiv Influence DE la MUSIQUE.

enfant présenter des accès durant un concert ou une

matinée : « l'esprit est occupé ». le malade se réjouit

et est charmé...

La musique produit sur l'ouïe des effets analogues,

suivant les modes employés (mode majeur ou mineur),

à ceux des couleurs pour la vue. C'est ainsi que le mode

majeur a le don de provoquer une sorte de superacti-

vité, comme la couleur rouge; et la mineure, au

contraire, a le don d'apaiser les nerfs, de la même

façon que la couleur bleue. D'autre part, certains

instruments produisent égalemeut des effets incon-

testables.

L'orgue et l'harmonium sont les instruments les

plus propres à ces sortes d'observations : c'est ainsi

que, employant sur ces instruments la note mineure,

on arrive à calmer les plus excités; tandis que pour

les mélancoliques on a recours à la note majeure

(aiguë et criarde) qui a le don de les sortir de leur

torpeur.

Le procédé qui consiste à faire percevoir des

sons musicaux par l'os frontal aux enfants atteints

de surdi-mutité, produit des résultats surprenants.

« J'ai eu comme élève, pour piano, ajoute M. Sutter,

un enfant atteint de surdité incomplète. Le malade,

au début, ne pouvait entendre ce qu'il exécutait sur

l'instrument ; j'ai eu alors recours à un système de

transmission des sons musicaux très simple : Au

moyen d'un bâton que je fais communiquer avec la

table harmonique du piano, offrant une échancrure

au niveau du couvercle du piano, afin que ce dernier

puisse se fermer librement, le dit bâton se termine

par une applique sur laquelle l'enfant appuie le front.

Le cerveau enregistre immédiatement les vibrations

de l'instrument et l'enfant qui, au début, était obligé

de se servir de ce transmetteur pouvait, tout en jouant

très juste, s'en passer au bout d'un an et demi de

Traitement ? 11'DICO-PÉD;IGOGIQUE. xxv

pratique. On peut conclure de ces faits que, au moyen

de la vibration des sons musicaux, on peut atténuer

la surdité incomplète ou tout au moins en diminuer

les inconvénients. »

Nous ajoutons que les résultats, obtenus par M. Sut-

ter, facilitent la tâche de l'instituteur dans l'éducation

proprement dite de l'oreille. L'enfant ayant maintenant

la notion du son musical, est préparé il l'acquisition

d'autres sons plus complexes, tels que la parole.

Enseignement du dessin. Cet enseignement est

fait par M. Dumont depuis le 15 avril 1901. Le maté-

riel nécessaire est fabrique au sur et à mesure par les

enfants des ateliers de menuiserie et de serrurie. Les

leçons ont lieu deux fois par semaine, le mercredi et

le jeudi. Elles durent chacune une heure. Cet ensei-

gnement rend des services incontestables au point de

vue de l'éducation de la main et de l'oeil et est d'une

utilité évidente pour les apprentis deplusieursateliers.

Nous le désirerions non pas seulement pour les enfants

les moins malades mais aussi pour ceux qui sont plus

profondément atteints en suivant exactement les indi-

cations que rfous avons fait formuler par 1\ ! ( ? Bru dans

l'Alphabet du dessin.

Gymnastique. - Il ne s'agit plus ici de la gymnas-

tique avec la balançoire-tremplin, avec les échelles

de cordes, les ressorts, etc., mais de la gymnastique

des mouvements d'ensemble et aux agrès. Les exer-

cices d'ensemble se font soit au tambour, soit avec

la fanfare, soit avec accompagnement de chants,

ou sont conduits avec l'harmonium (1). Les mou-

vements sont aussi variés que possible et chaque

année notre dévoué professeur, M. Gov, en introduit

(1) Voir Compte-rendu de 1899, p. i.ix.

xxvi Traitement médico-pédagogique.

de nouveaux. D'autres exercices ont lieu avec les hal-

tères, les échelles convexes et horizontales, la barre

fixe, les barres parallèles, le vindas, la balançoire

brachiale, etc.

Mais, et nous no cessons de le redire, nous don-

nons la préférence aux exercices des mouvements

avec ou sans haltères, barres il sphères, etc. Parmi les

agrès, nous préférons les échelles horizontales, et con-

vexes, les barres parallèles, le mat horizontal.

Nous avons essayé de dresser un infirmier afin de

remplacer le professeur en cas d'absence.

Société de gymnastique. - Les enfants faisant

partie de cette société, au nombre de 2'i, ont pris part,

sous la direction de leur maître, M. Gov, à un concours

de gymnastique organisé parla commune du Kremlin-

Bicètre où ils ont obtenu une médaille de vermeil, une

médaille d'argent et une palme de vermeil.

Escrime. Cet exercice s'est fait régulièrement

sous la direction de MM. Pelletier et Chevreau, pré-

vôts au fort de Bicêtre. Ces militaires se sont acquit-

tés avec beaucoup de zèle et de dévouement de leurs

fonctions. 85 enfants participent, il des degrés divers,

à cet exercice, que nous considérons comme secon-

daire par rapport aux autres exercices physiques (1).

Danse. - Les exercices de danse ont eu lieu ré-

gulièrement de midi à une heure sous la direction

de M. L ? NI)OS,-3E, un de nos instituteurs. 130 enfants

de la grande école et 15 de la petite école y

prennent part; sur ce nombre, 107 savent danser la

polka, 9 connaissent la polka, la mazurka, et la

scottish; 22 connaissent le quadrille français et toutes

(1) Voir Compte-rendu, de 1899. p. lxiv il i.xxyi.

Musée scolaibe, PROJECTIONS. x'XVII

les danses de coractères, et 6 de ces derniers ont

commencé à apprendre le pas de quatre.

' Musée scolaire. Ce musée continue à servir aux

séances de projection, aux leçons de choses et de- salle

de lecture. Il s'est notablement enrichi tant au point de

vue de la bibliothèque qu'au point de vue des figures

pour projections. - L'administration a acheté avec

des dons (1), cette année, 17 volumes, ce qui porte à 592

le nombre des volumes delà bibliothèque des enfants

Le 1 ? janvier 1901, le nombre des vues pour projec-

tions était de 1639, il la fin de l'année ce chiffre attei-

gnait 1766 (75 on[ été'raites par M. Hubert, photographe

de la maison et 52 ont été achetées par l'Administra-

tion). - Comme séries nouvelles, notons l'Egypte,

l'Histoire de Paris, Petits métiers, la fécondation

des plantes, les solanées, les tableaux du Louvre,

M. Mesnard, notre premier instituteur, a montré une

série de vues ayant trait à l'Exposition de 1900.

Grâce à ces collections qui se complètent de jour

en jour, le service n'empruntc plus que très rarement

des vues au Musée pédagogique ou à la Ligue de l'en-

seignement.

Ces vues servent aux conférences du jeudi, aux

visites du samedi, aux cours d'anatomie et de phy-

siologie des Écoles d'infirmières de Bicêtre et de la

Pitié. Enfin tous les ans les internes du service s'en

servent pour différentes conférences faites aux infir-

miers'et infirmières de l'hospice ; c'est ainsi que M.

Morel, l'un de nos internes les plus dévoués, a fait

au personnel une conférence très intéressante sur

l'alcoolisme (série nouvelle)

Le musée scolaire s'est enrichi encore d'objets

(1) Commission de surveillance des asiles (30 fr.). M"" Jukowski, mère d'un

de nos malades, a fait don de 37 petits volumes, dont plusieurs en double.

XXVIII Traitement 1111 : DICO-PFDAGOf'sIQUL ?

nouveaux offerts par M. Mesnard : coquillages, bois

de différentes essences, pierres, cailloux offrant des

formes particulières ou présentant l'empreinte de

coquillages, d'étoiles de mer, etc.. - Une collection

de graines a été commencée.

L'enseignement par les projections est très com-

plexe. Il sert pour les enfants de toutes les catégories :

1° pour les enfants idiots profonds à fixer l'attention

(images blanches ou colorées sur fond noir), à appren-

dre les lettres (grandes lettres noires sur fond blanc),

pour l'éducation de la parole (syllabes simples ou répé-

tées ou combinées); 2° Pour les idiots déjà un peu

améliorés, à reconnaître les objets, les animaux

(images graduées) ; 3° Pour les enfants imbéciles,

arriéres et épileptiques, à faire tous les jeudis une con-

férence dont les séries de vues énumérées plus haut

donnent une idée suffisante.

Dans les petites écoles et la grande école, on doit

sans cesse s'occuper de la guérison des tics, des

manies, s'opposer aux pratiques solitaires. Pour tous

les enfants, et en particulier pour les imbéciles intel-

lectuels avec impulsions et pour les imbéciles moraux

à tous les degrés, nous avons recours au traitement

moral, ou, pour employer le jargon à la mode, à la

suggestion à l'état de veille. Tous nos efforts tendent

à faire comprendre à nos auxiliaires, pédagogues et

infirmiers, qu'ils ont affaire à des enfants malades,

relevant du traitement méclico-péclagogiqte, envers

lesquels et comme enfants, et comme malades, ils

doivent se montrer bienveillants et affectueux, et non

pas à des enfants vicieux, dont la place, serait, disent

certains administrateurs, plus à tort qu'à raison, dans

les maisons de correction ou les prisons.

Voici quelques notes concernant les enfants de

cette catégorie :

Résultats. xxix

A. Enfants de la 1re classe.

1° IIAP. (Henri), 20 ans. Imbécillité, obésité, nanisme. -

S'est signalé par sa bonne conduite, son travail assidu en

classe et a fait assez de progrès pour être présenté au certi-

ficat d'études qu'il a obtenu. L'amélioration acquise a per-

mis de le faire passer aux vieillards où il se conduit très bien;

il est très propre, très poli.

2° Léon.. (Henri), 18 ans 1 ? . - Imbécillité, Epilepsie. -

Après une longue période de paresse, l'enfant s'est mis au

travail, est devenu courageux, moins emporté, plus persé-

vérant et a obtenu son certificat d'études ; il a été amélioré

au point que sa famille a réclamé sa sortie.

3° DcLV.. (Fernand), 17 ans. Arriération et Épilepsie.

A obtenu le certificat d'études également cette année ; il

travaille actuellement, sauf le mercredi, toute la journée à

l'atelier de serrurie dont il est le meilleur apprenti. Parfois

encore emporté envers ses camarades, il semble néanmoins

mieux comprendre le prix d'une bonne conduite.

B. Enfants de la 2me classe.

11° Opzomr.. (Lucien), 15 ans. - Imbécillité et Epilepsie

(guérie) (1). Cet enfant, passé de la petite à la grande école

en septembre 1900. L'amélioration déjà obtenue a sensible-

ment augmenté. Au point de vue intellectuel, il a fait des

progrès sensibles sur toutes les matières de l'enseignement :

il fait peu de fautes dans ses dictées du cours élémentaire, il a

appris à faire la division, fait même de petits problèmes sur

les 3 premières opérations et est apte à comprendre et à

retenir ce qu'il entend en histoire et en géographie. En

résumé, Opzoo.. s'achemine vers la moyenne des enfants

normaux.

5° REM.. (Alfred), li ans. - Idiotie et Epilepsie. - Cet

enfant admis il la grande école (2me classe) en décembre 1901

a fait des progrès très sensibles depuis cette époque. A

l'heure actuelle, il fait peu de fautes dans ses dictées, sait

trouver le rôle des mots assez facilement pour lui permettre

(1) N'a plus d'accès depuis 5 ans.

XXX Traitement nIDICO-PLDAGOGIQU1;.

A

de faire de petites analyses oit il entre un sujet, un verbe et

ses compléments; en arithmétique, il a appris les nombres

décimaux et la division ; il réussit souvent des problèmes

sur les 3 premières opérations. Rem., est doué d'une bonne

mémoire. Son caractère s'est amélioré; l'enfant est plus docile,

moins répondeur. 11 pourra passer prochainement en 1"'classe.

6°. Sauz.. (Eugène), 18 ans. - Imbécillité, Hémiplégie

droite et Epilepsie. - A fait des progrès principalement en

écriture et en orthographe. Cet enfant bien que gaucher, par

suite de son hémiplégie droite, a une écriture régulière, à

lettres bien formées, penchées dans le même sens, ce qui ne

se rencontre guère que chez les .personnes écrivant de la

main droite. Il analyse de petites phrases renfermant un

sujet, un verbe et ses compléments direct et indirect, en

indiquant le rôle de chaque mot. Il fait aussi peu de fautes

dans ses dictées de cours élémentaire.

7° Dupu.. (Charles), 16 ans. - A1'I'Ü : ration intellectuelle,

incontinence nocturne d'urine. - A fait des progrès princi-

palement en arithmétique et en écriture. Il a appris cette

année l'addition, la soustraction et la multiplication des

nombres décimaux ainsi que la division par un chiffre. Il fait

de petits problèmes sur les trois premières opérations. Les

progrès en orthographe sont moins sensibles mais il y a

néanmoins de l'amélioration iL constater sur cette matière.

La mémoire et l'intelligence sont sorties de l'état d'engour-

dissement où elles étaient depuis plusieurs années.

Les élèves de la 30nu ! classe dont les noms suivent

sont ceux qui se sont le mieux appliqués et qui ont

fait le plus de progrès au cours de l'année 1901.

8° GII,r.Ia.. (Fernand), 12 ans. Arriération et épilepsie. -

Application dans les devoirs écrits, progrès assez sensibles

en lecture, calcul, grammaire, les connaissances usuelles se

sont également développées.

9° JIAI3SIÈ( ? (Louis), l5ans. Imbécillité et epilepsie. Cet

enfant s'applique dans la mesure du possible ; progrès assez

satisfaisants portant sur les conraissances usuelles.

- 10° Mante. (Louis), 15 ans. Imbécillité et épilepsie. -

Application dans les devoirs écrits ; progrès assez sensibles

RÉSULTATS. XXXI

à tous les points de vue. Enfant docile et d'un bon carac-

tère.

11 SAINT-1,ANIBE.. (Gaston), 18 ans. - Imbécillité et épi-

lepsie. - Application sérieuse dans les devoirs écrits ; pro-

grès assez sensibles en tout sauf en calcul ; il ne peut pas

encore faire une soustraction sans se tromper. Bon élève ;

très docile; bon caractère.

D. Enfants de la 4 ? classe.

12° Mêla.. (111ert). 17 ans. Imbécillité, hémiplégie

droite, epilepsie. - Entré dans la section en octobre ne

sachant rien. Lit maintenant quelques petites phrases; lira

couramment sous peu. Est passé à la 2 ? = partie du syllabaire

Regimbeau. A appris à bien faire l'addition, la soustraction

et la multiplication. Fait verbalement le résumé de quelques

petites leçons de choses sur les objets les plus usuels.

13° COUDFYII.. (Georges), 13 ans. Il est arrivé

à lire à peu près couramment. Plus en retard pour le calcul,

l'élève a fait cependant de sérieux progrès et fait bien

l'addition et la soustraction, - L'écriture est bonne et assez

régulière, bien que l'élève se serve de la main gauche pour

écrire (hémiplégie droite). L'élève donne le nom des objets

les plus usuels, leur forme, leur couleur, leur usage, le nom

de l'ouvrier qui les a faits, etc.

14° l3oonG... (Emile), 13 ans. - Imbécillité, épilepsie. -

Entré en mai 1901 il la grande école, ne sachant pas syllaber.

Est arrivé à lire à peu près couramment dans le syllabaire

Hégimbeau. En calcul les progrès sont plus lents et il n'est

parvenu à bien faire que l'addition et la soustraction. Il

possède quelques notions sur les objets d'un usage courant

et sait faire verbalement quelques petits résumés sur les

leçons de choses faites dans les jardins.

15° Franco.. (Eugène), 17 ans 112. Idiotie aux impul-

sions violentes. - Il continue à faire des progrès en lecture

et en calcul. Sa mauvaise articulation de l's et du ch l'a

beaucoup retardé pour lire couramment. Il est cependant

passé à la 2e partie du Syllabaire 13eimheau. Il continue à

bien faire l'addition, la soustraction et la multiplication.

L'écriture s'est bien améliorée et l'élève fait bien les exerci-

ces de copie.. .

xxxii Traitement AL1;DIC0-PI.DAGOGIQUI;.

Nous pourrions multiplier beaucoup ces petites

notices sur les enfants améliorés. Celles qui précèdent

nous paraissent suffire à témoigner des efforts faits

par tous pour améliorer les enfants qui nous sont

confiés.

Aux exercices pédagogiques proprement dits, avec

leçons de choses faites clans les classes, dans les pro-

menades, au musée scolaire (projections, etc.), dans

les jardins de la section où les arbres, les arbustes,

les plantes portent des étiquettes nominatives, s'ajou-

tent le travail manuel dans les ateliers, les exercices

physiqttes : gymnastique variée, danse, escrime, jeux

divers.

Cet ensemble de procédés constitue notre méthode

de traitement médico-pédagogique. Nos visiteurs du

samedi nous ont toujours paru l'apprécier d'une

manière favorable : la relation de leurs visites publiée

dans les journaux scientifiques ou autres en est la

preuve. Ce n'est pas toutefois qu'il ne se soit produit

des critiques, non point de la part des médecins,

mais de la part de quelques conseillers, sans doute

mal renseignés, qui ont manifesté une certaine

hostilité contre l'organisation que nous avons créée

en faveur des enfants idiots, alors que les enfants

normaux ne disposaient pas d'avantages semblables.

Loin de nous aider à mieux faire, ils auraient volon-

tiers demandé la réduction de nos moyens d'action.

A leurs yeux, nous avons trop fait pour de tels

enfants. Leurs visites à l'asile-école de Bicêtre devrait,

au contraire, les inciter à introduire progressivement

dans les écoles primaires les procédés qui composent

notre méthode. Pourquoi les arbres, les arbustes,

, Jardins d'enseignement. xxxiii

les fleurs de nos squares, de nos jardins publics ne

sont-ils pas dénommés comme dans les jardins de

notre service, et comme cela existe dans quelques

pays de l'étranger et même dans quelques villes de

France ? Pourquoi les exercices de gymnastique, de

chant, laissent-ils tant à désirer dans nos établisse-

ments d'enseignement ? Pourquoi les instituteurs et

les institutrices no multiplient-ils pas les leçons de

choses ? Pourquoi, ainsi que nous l'avons proposé

il y a plus de 25 ans, n'utilise-t-on pas les richesses

du Muséum d'histoire naturelle (1) ? P

En dehors des heures de classe, de gymnastique,

de chant, de dessin, de danse, d'escrime, d'atelier, nous

avons toujours essayé de faire participer les enfants

aux corvées de tout genre : salubrité, nettoyage des

bains, des classes, du musée scolaire, des cours,

des ateliers. Il est certain que si tout le personnel

nous secondait cet égard, notre service serait d'une

propreté irréprochable dans la mesure que comporte

le défaut d'entretien des bâtiments.

Des enfants accompagnent les infirmiers à la cui-

sine, à la lingerie, à la buanderie, aident à apporter

non seulement leurs aliments, mais aussi ceux des

sous-employés qui peuvent ainsi rester dans le service

au lieu de perdre du temps dans les services généraux.

Si dans ces courses les infirmiers et les infirmières

répondaient à nos désirs, il y aurait matière à des

leçons de choses. En tout cas, c'est une distraction

pour les enfants qui se sentent plus libres.

Quelques enfants, avec notre autorisation, et de

bonne volonté, rendent de petits services aux sous-

(1) Voir page Lxxv le texte de la proposition que nous avons déposée le 8

août 1876 au Conseil municipal.

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1901. ?

xxxiv Promenades et distractions.

employés, montent du charbon, de l'eau - en particu-

lier dans les logements des ateliers puisque, malgré

nos réclamations, il n'y a pas de prise d'eau au second

étage. Ils en sont récompensés par de modiques

allocations. Les en priver les affligerait et les privcrait

du plaisir de se rendre utiles aux personnes qui leur

sont dévouées.

Plus les enfants sont occupés, plus leurs occupations

sont variées, plus leur physique, leur moral et leur

intelligence en profitent, moins il y a de querelles,

de rixes et de pratiques solitaires ou autres plus

graves.

Promenades et distractions. - Les enfants de la

grande et ceux de la petite écoles, qui sont propres,

ont continué, comme les années précédentes, à faire

des promenades soit à Paris, soit aux environs de

l'hospice. Dans ces promenades, les instituteurs et

les institutrices doivent donner des leçons de choses

et exercer les enfants aux différents jeux en plein air

(jeu de halles, de ballon, etc.) Voici l'énumération des

principaux endroits où ils sont allés en promenade

cette année : Arcueil-Cachan, Créteil, bois de Gournay,

Gentilly, Ivry, jardin d'Acclimatation ( ! ), jardin dos

Plantes, jardin du Luxembourg, musée de Cluny,

parc de Montsouris, Robinson, Villejuif, Vitry. Ils ont

également visité la fête du Lion de 13effort, de la place

d'Italie, la Foire aux pains d'épices, etc. -Les enfants

de la petite et de la grande écoles ont été conduits,

par groupe, il l'Exposition de « l'Enfance à travers

(il Nous adressons a 11. Porte, directeur de ce bel établissement, tous nos

remerciements pou la bonne grâce qu'il met chaque année, sur notre demande,

à autoriser nos enfants et les petites filles de la Salpêtrière à visiter le Jar-

din d'Acclimatation.

Promenades et distractions. xxxv

les âges », où les différents procédés en usage dans

le service, ainsi que les objets fabriqués par les enfants .

étaient exposés : Nous avons pu faire là l'exposition

complète que M. Napias avait rendue impossible à

l'Exposition universelle de 1900.

Les distractions ont été aussi nombreuses cette

année que les années précédentes. Notons la distribu-

tion des jouets du jour de l'an, donnés par l'Adminis-

tration ; les déguisements du Mardi -Gras et de la

Mi -Carême (1), la distribution des jouets de Noël,

offerts par la société du « Joyeux Noël ». Nous adres-

sons à cette société tous nos remerciements. - A citer

aussi le concert organisé par le ce Comité des frères

Lionnet » auquel, comme les années précédentes,

les artistes des principaux théâtres et concerts de Paris

ont prêté leur concours. Tous les enfants valides de

Bicêtre et de la Fondation Vallée y ont assisté. -

Signalons enfin, organisés par les enfants, une grande

tombola suivie de bal, et un concert suivi d'une pié-

cette. Cette dernière a été fort bien réussie grâce au

concours de M. MOHEI" interne du service. Les famil-

les assistent aux fêtes organisées par les enfants.

Les enfants ont encore bénéficié de plusieurs repré-

sentations gratuites dans les divers cirques et théâtres

installés à la fête du Lion de Belfort, à la Place d'Italie

et sur l'avenue de Bicêtre. Les jardiniers sont allés

avec leur maître, M. V. 1-II;sAZln, à l'Exposition

de chrysanthèmes et à l'L';\ : posi60n d'horticulture.

Les imprimeurs, sous la conduite de leur maître,

M. lflARI.CI-IALL : 1T, ont visité dans tous ses détails

l'école Estienne.

Jusqu'ici nous nous sommes contenté de citer les

fêtes diverses organisées par les enfants avec le con-

cours des maîtres, des surveillants, sous-surveillants

des deux sexes et des infirmières. Il en a été ainsi

depuis 20 ans. Nous croyons utile de donner cette

XXXVI Caisse d'épargne, visites.

année quelques explications sur les fêtes du Mardi-

Gras et de la Mi-Carême.

Les enfants forment trois groupes : un de la grande

école (19 déguisés), un de la petite école (43 déguisés),

un de la petite école complémentaire (20 déguisés).

Les costumes sont devenus de plus en plus nombreux

depuis le début en 1883. C'est le personnel qui contri-

bue surtout tt l'achat des étoffes et à la confection des

costumes. De plus, un certain nombre d'enfants don-

nent une cotisation annuelle variant de 50 centimes

à un franc. On achète des fleurs, vendues aux familles

qui assistent à ces fêtes. On vend les brioches que

fournit l'Administration. On installe un petit buffet

où l'on vend des sirops. On fait une quête. A toutes

ces petites ressources s'ajoutent quelques dons.

Les dépenses pour les trois groupes de l'Asile-école se

sont élevées 84 fr. 95, les recettes a 93 fr. 20. Dans la

matinée, les enfants, précédés de la fanfare, font une

promenade dans les sections d'aliénés et dans les cours

de l'hospice. Dans l'après-midi ils s'amusent à danser.

Caisse d'épargne. Elle est confiée au premier

de nos instituteurs, M. MESNAUD. Les recettes ont été,

pour l'année, de 156 fr. 35. Le total général des som-

mes recueillies depuis 1892 s'élève à 2.112 fr. 65.

Visites. - Les enfants ont reçu 14.068 visites ;

les visiteurs ont été au nombre de 8.129. Voici la

statistique des permissions de sortie et des congés :

Vaccination. xxxvii

Nous n'insisterons pas sur les nombreux avantages

des visites des familles, des permissions de sortie.

pour la journée et des congés. Nous nous bornerons

à répéter ce que nous avons dit bien des fois : « Ajou-

tés aux promenades et aux distractions, ces sorties,

ces congés, qui n'offrent aucun inconvénient et qui

font réaliser des économies notables (1), nous fournis-

sent un excellent moyen de maintenir la discipline

et d'encourager les enfants. Ils rendent le séjour tut

l'asile-écolo plus supportable et contribuent à mainte-

nir les liens entre les familles et leurs enfants. »

Les visites des familles au parloir ne sont pas suffi-

samment surveillées. Trop souvent les parents ne se

gênent pas pour introduire des aliments, du vin et

des liqueurs qu'ils font absorber en quantité exagérée

aux malades. De là des accidents auxquels il faut

remédier et une augmentation des accès épileptiques.

De plus les parents donnent de l'argent aux enfants,

autre abus qui est une source d'ennuis pour tout

le monde : rixes, vols, trafics, etc.. Nous signalons

encore une fois a l'Administration la nécessité de

remédier à tous ces abus regrettables (2).

Vaccination et revaccination. - Nous avons con-

tinué, pratique qui remonte à 1880, la vaccination

et la revaccination de tous les malades entrés durant

l'année et des enfants dont la revaccination remonte

à 6 ou 7 ans. Comme d'habitude, cette opération a été

faite par les élèves de l'École d'infirmiers et

d'infirmières de Bicêtre, sous notre direction et celle

(1) Il n'y a pas eu moins de 3.115 journées d'absence d'enfants; le prix de

journée étant de 2 fr. 20, il s'ensuit une économie pour l'Assistance publique

de 0.8b3 fr., qui devraient être appliqués à l'entretien des bâtiments qui sont

dans un état de plus en plus déplorable.

(2) Les visites ont lien le jeudi et le dimanche de midi à 4 heures, il convien-

drait de les réduire de midi il 2 heures, ce qui permettrait de faire faire

ensuite une promenade aux enfants.

XXXVIII Service dentaire ET bains.

de nos internes, avec le concours de la sous-surveil-

lante, BOHAIN. Elles ont été au nombre de 184.

11 infirmiers ou infirmières seulement ont consenti

à se faire revacciner. Parmi les malades 10 cas ont

été couronnés de succès.

Service dentaire. M. le D1" DUDIONT qui a rem-

placé M. le Dr Bouvet, comme dentiste, le 111 juillet,

est venu chaque semaine donner des soins il nos

malades au point de vue de la dentition et de

l'hygiène de la bouche. M. le Dr Dumont, qui prend

ses notes avec beaucoup de soin, nous incite à rap-

peler qu'en faisant instituer ce service dentaire,

notre but était de remédier aux nombreuses défectuo-

sités de la dentition chez nos enfants et aussi d'avoir,

chaque année, une note, prise par un homme compé-

tent, sur la dentition de tous les enfants (1).

Bains et hydrothérapie. - Les bains et les dou-

ches, joints à la gymnastique, à l'emploi des bromu-

res, surtout de l'élixir polybromuré (formule YvoN),

du bromure de camphre (préparations du Dr CLIN),

plus actif et plus absorbable que les autres prépara-

tions similaires qui nous ont été fournies par l'Ad-

ministration, et des médicaments antiscrofuleux, ont

continué comme par le passé à être, avec les purga-

tifs, surtout chez les épileptiques, la base du traitcment

en 1901. Nous avons, de plus, essayé de nouveau l'a-

donis vernalis et les pilules de 111églin, mais sans

(1) Ayant constaté l'absence complète de l'enseignement de l'art dentaire à

la Faculté de médecine et l'insuffisance ou les dangers de la pratique de l'art

dentaire aux consultations des hôpitaux, sauf à la'consultation de l'hôpital

des Enfants-malades, nous avons entrepris dans le Mouvement médical (1875)

une campagne pour l'organisation d'un enseignement sérieux. C'est pourquoi

nous avons obtenu en 1880 la nomination d'un médecin dentiste pour les

sections d'enfants idiots de Bicêtre et de la Salpêtrièrc, création qui a été le

point de départ de l'organisation actuelle des services dentaires des hôpitaux.

Vaccination. xxxix

résultats appréciables. Il a été donné dans le cours

de l'année 12.278 bains, ainsi répartis (1) :

Améliorations diverses. XLI

le répétons, une pratique qui remonte Ù une ving-

taine d'années.

Améliorations diverses. - Le traitement de

M. Camailhac, instituteur, a été porté de 1.800 fr.

à 2,100 fr. - Nomination do M. Dumont à l'emploi

de professeur de dessin (par arrêté préfectoral du 6

avril). \2 ? Malençon, suppléante au pavillon

Séguin (gâteux), a été nommée sous-surveillante sur

place; M"10' Grisard, Acard et HUGUET, premières

infirmières, ont été nommées suppléantes, les deux

premières sur place, la dernière à l'hospice de

Brévannes.

Au nombre des améliorations diverses, nous citerons

encore la pose, dans les réfectoires de la petite et de

la grande école, de bouches de chaleur, sur les côtés

latéraux, en remplacement de celles, existant aupara-

vant, qui se trouvaient au milieu des réfectoires et

gênaient le nettoyage. Signalons enfin le rempla-

cement delà chaudière des bains (1).

Visites du service. La section a été visitée en 1901

par : M. le Dr Bruel, de Paris ; - Dr Bayvel, médecin-

major au 102° régiment d'Infanterie ; - Molle Blum,

artiste dramatique, étudiante en médecine, de Paris ;

Dr Baud, médecin consultant, à Divonne-les-Bains

(Ain) ; M. Léon Bourgeois, député et son fils;

M. Gustave Boyer, interne à l'asile d'aliénés de

Montauban ; - Dr Beresford, de Londres; M. J.

Casanova, du journal « Le Soir ». - ici. Ciganda Eva-

risto, consul général de l'Uruguay; Melle Corbin,

institutrice à l'hospice de la Salpêtrière ; -\I°'1° Laure

(I) Nous avons réclamé depuis longtemps la constitution d'un trousseau

pour chaque enfant et des serviettes de table. L'Administration, faute de res-

sources sans doute, Il'a pu jusqu'ici nous donner satisfaction.

XLII VISITES DU SERVICE.

Cariou, journaliste à « la Réforme », de Bruxelles;

M°'a° del Campillo de Perdriez, docteur en médecine

(République Argentine) ; D1' Charlier, de Vervins

(Belgique) ; - M. Carton, interne de l'asile d'aliénés

de Clermont (Oise) ; - D'' Chevastelon, de Paris ; -

Dr de Dorrégo, de Buénos-Ayres ; - lui. Deminy, pro-

fesseur au Lycée Henri IV (de Paris) ; M. Duplay,

étudiant en médecine, à Paris; Melle E. Devaux,

directrice de l'école des enfants à l'asile d'aliénés de

Saint-Yon ; - M. Dusouchet, professeur au Lycée

Henri IV, de Paris ;

M. le Dr Deler Bonaventure, ancien interne de

l'hôpital de la Charité de Montevideo, de Paris; -

D'' Isatel de Egaren, de Buénos-Ayres ; - Dr Fenald ;

DTukuhara, secrétaire au ministère de l'Instruction

publique du Japon; M. Gasquet, ingénieur, à Paris;

- D1' Goransson, médecin adjoint à l'asile d'aliénés

d'Upsala (Suède) ; Dr ( eoryanclas, de Paris ;

Melle Guineva, étudiante en médecine à Montpellier;

- Merle Karen Gundel, diplômée du Conseil Royal de

médecine de Stockholm, attachée au service orthopé-

dique du professeur Kirmisson à l'hôpital Trousseau ;

Melle Corner, de Londres;M. Iligoutchi, profes-

seur il l'École normale supérieure de Tokio ; - z

Mme Kauffmann, secrétaire de la « Solidarité des Fem :

mes » ; M. Kavada, correspondant du journal

japonais « Ji2nin- » ; - M. le D'' Kohayaski de llikone

(Japon). - lui. Klein, externe des hôpitaux, de Paris ;

M.J. Liouville, étudiant en médecine, de Paris.

Dr de Lébédev, de l'hôpital militaire Saint-Nicolas,

à Saint-Pétersbourg; - Dr Ley, médecin de l'école

d'enseignement spécial à Anvers ; - M. : \renier, de

Paris ; M"10 Modena, DI' en médecine à Milan ;

12 ? Maroger et son fils, de Paris; - \I. le 1)' et : \Imo

Georges Martin, de Paris ; - r'11' de Mouy, de Paris;

- M. le Dr llatyas, de Budapest; M. le D1' Murait, pri-

VISITES DU service. XLII

vat-docent, de ZLmicll ; - M. Mednicaroff, étudiant en

médecine à Montpellier; - M. le D1' Pouey, professeur

à la faculté de médecine de Montevideo ; M. Pareur,

interne en médecine, du Havre. - 11"I' Pidoux, de

Paris ; - NIelle Patoueille, institutrice à l'hospice de

la Salpêtrière ; -D`' Pineles, privat-docent, de Vienne ;

- M. Paul Passy, directeur adjoint à l'école des Hau-

tes Etudes, de Paris ; - D`' Rubrah, de Baltimore ; -

D1' Rologis, de Paris ; - Der Roycn, de Paris ; - Dr

Frey Svenson, médecin à l'asile d'aliénés de Kristi-

nehamn (Suède) ; - Dr Séguinaud, médecin-major au

104° régiment d'infanterie ; - M110 Simonsen, de

Copenhague ; ? IL Tagrine, publiciste, de Paris. -

M. le Dr Terrien, de Nantes; - l'l'ne de Vassilicos,

déléguée du Gouvernement de la République argentine

pour études des écoles pratiques ; Dr Vitek, de

Prague ; IY Zakaroff, médecin en chef de la colonie

familiale des aliénés, de - Enfin, de même

que les années précédentes, la Commission de sur-

veillance des asiles de la Seine et celle du Conseil

général ont visité le service dans le courant de

l'année.

Nous consacrons d'habitude la matinée du samedi

à recevoir les visiteurs. Presque tous ceux dont nous

venons de citer les noms sont venus ce jour-là. Nous

convoquons, à leur intention, les professeurs de chant,

de gymnastique, de danse et parfois les maîtres

d'escrime, dont les heures de leçon ne coïncident pas

avec l'heure de notre visite. En leur demandant ce

déplacement et en nous imposant la fatigue très

grande de montrer non seulement l'organisation du

service des enfants, mais encore son fonctionnement

médico-pédagogique dans tous ses détails, notre but

XLIV Musée pathologique.

est de faire comprendre aux visiteurs l'importance de

l'oeuvre que nous avons pu réaliser naguère, avec

l'appui du Conseil municipal (1882-90), de fournir à

beaucoup d'entre eux les arguments qui militent en

faveur de l'hospitalisation et de l'éducation de cette

catégorie d'enfants anormaux et les convaincre de la

possibilité de les améliorer et même de les guérir par

l'application régulière, méthodique et prolongée du

traitement rtécl.i-co-hécl2oiqze. Les visites faites

dans la journée, en dehors de nous, ne permettent pas

d'avoir une idée exacte de ce qui se fait dans le service.

On a une idée des bâtiments mais non du traitement

médico-pédagogique.

Nous nous efforcerons de maintenir ces visites du

samedi afin d'expliquer aux visiteurs, la plupart

médecins étrangers, l'organisation que nous avons

créée en dépit des obstacles dressés sans cesse devant

nous, pour nous décourager ; afin de les mettre ainsi

en mesure dé fonder dans leurs pays, s'ils en sont

dépourvus, des asiles-écoles semblables. Si, nous dis-

paru, notre oeuvre périclite ou disparait en France,

comme a disparu tout ce que Leuret et Séguin avaient

organisé, car nous ne nous faisons pas d'illusion sur

l'absence de conviction administrative, nous avons le

ferme espoir qu'elle sera continuée, développée, per-

fectionnée dans les autres pays. Notre plaidoyer en

faveur de ceux qui ne peuvent plaider pour eux-mêmes

n'aura pas été stérile.

Musée pathologique. - Ce musée s'est notablement

enrichi en 1901, ainsi que le montre le tahleau suivant.

Enseignement professionnel. XLV

Comme les années précédentes, nous avons continué

à reprendre dans le cimetière de la commune de

Gentilly, lors du relèvement des corps de nos malades

décédés cinq ans auparavant, les crânes et les sque-

lettes entiers, quand il s'agit d'hémiplégiques ou de

malades dont le squelette présente des particularités.

C'est cette pratique qui explique l'enrichissement

rapide de notre musée depuis l'année 1887 (1).

XLVI Enseignement professionnel.

que les années précédentes, par MM. LE, noy pour la.

menuiserie (1882-1901), ÂLLËNE pour la coulure.

(1853-1901), DuuouLrN pour la cordonnerie (1888-1901),

Morin pour la vannerie, le paillage et le canarde des

chaises (1889-1901), Maréchallat pour l'imprimerie

(1889-1901), Gaie pour la serrurerie (1895-1901),

MES,NARD pour le jardinage (1896-1901), 1\I. Mercier

qui était chef de l'atelier de brosserie a pris sa

retraite le 1 ? janvier et a été remplacé le 10 du même

mois par M. GANIF (1)

De même aussi que les autres années, nous n'avons

qu'à les féliciter tous, non seulement pour le zèle et

l'intelligence qu'ils apportent chaque jour il donner

l'inslructionprofessionnelle aux enfants, mais encore

pour la bonne direction morale qu'ils savent leur

imprimer. Le tableau suivant met en évidence les

résultats obtenus par eux en 1901 et qui se chiffrent

par 29.792 fr.

Les travaux de jardinage seuls ne sont pas évalués,

et comme nous l'avons souvent écrit, bien qu'il soit

difficile d'en faire une estimation précise, nous croyons

que l'Administration aurait intérêt il essayer. d'en

avoir tout au moins une évaluation approximative.

Les sept maîtres, non compris le jardinier, dont le

travail de ses apprentis et le sien dépassent assurément

le salaire - sont payés à raison de 6 fr. 50 par jour,

soit pour l'année 16.607 fr. 50.

Le Travail des enfants, évalué par l'économe,

(1) Chaque fois que nous avons un nouveau chef d'atelier nous insistons

pour qu'il suive les cours de l'Ecole d'infirmiers. En contact avec des malades

sujets à des chutes, à des impulsions, etc., il est nécessaire qu'il soit en mesure

de leur venir en aide de suite et comprenne qu'il a alTaire il des malades.

MM. Ganif et Mesnard ont compris cette nécessité et suivent les cours. Il

devrait en être de même pour tout le personnel en rapport avec les malades.

XLVIII Enseignement professionnel.

Produits fabriqués dans les ateliers en 1901.

Brosserie.

8.968 brosses en tous genres (dont G. 940 pour le Magasin

Central des hôpitaux.)

Vannerie .

227 mannes neuves fabriquées (dont 40 pour le Magasin

Central), 270 mannes réparées, 195 chaises cannées et rem-

paillées.

Couture.

498 pantalons, 472 vestons, 463 gilets, 164 robes, 1G0 mail-

lots.

Menuiserie.

2 coffres-banquettes, Armoires, Bureau, 4 casses d'impri-

merie ; objets servant à l'Enseignement pour l'Exposition

de l'enfance à travers les âges, coffres des salles et classes,

fait toutes les réparations des jeux, portes, bancs, etc.,

croisées et parquet du gymnase, tout le travail neuf lixe du

service, cloison, porte vitrée avec petits carreaux pour le

sous-sol de l'infirmerie, la chambre noire au Musée pour la

photographie, etc., etc.

Serrurerie.

80 porte-vases pour chaises de gâteux, 220 ferrures et char-

nières, réparations de fauteuils en fer. - 330 objets en bois

faits au tour : pieds de meubles, pieds de table, poignées

boules, cylindres, cônes, etc. - Ferrage de tous les meu-

bles, échelles, coffres divers, tonneaux, boites, etc., confec-

tionnés par la menuiserie. - Fait toutes les réparations

journalières du service.

Cordonnerie .

572 paires de diaussures neuves, 640 ressemclages.

. Imprimerie .

Compte-rendu du service de l'année. - Ordres du jour des

Commissions. - Recueil de chants (1 ? partie). -- Affiches

diverses. - Entêtes de lettres, registres et tableaux divers

pour la Direction et l'Economat. Circulaires pour le bureau

de la 5we ; demandes de tabac, Palmarès, relevés de points,

présences, etc., pour les Ecoles municipales -d'infirmiers et

d'infirmières. Feuilles d'alphabet, etc., pour les Ecoles de

Bicêtre et de la Fondation Vallée. Travaux divers pour

les hôpitaux et hospices : Boucicaut, Bicêtre, Maison de santé,

Saint-Louis, Salpêtrière. Travaux pour la Société des Sous-

employés de l'Assistance publique et la Société amicale des

Employés de l'Assistance publique : affiches, cartes, procès-

verbaux, compte-rendu, feuilles d'admission, carnet de bal,

fiches, Catalogue général de l'Exposition de l'enfance à

travers les âges de 1901, Société de patronage, etc., etc.

Enseignement professionnel. XLIX

M. NInunRÉ, et par l'architecte, M. DI;LAII ? 1;, couvre

donc : 1° la dépense occasionnée par le salaire DE

LEURS maîtres ; 2° l'intérêt à li 0 ? taux légal, du capi-

tal employé pour la construction des ateliers (210.000

francs), soit 8.400 i'r.; 3° les gratifications hehdoma-

daires données aux enfants, le samedi, à titre de récom-

pense variant de 5 à 50 cent. par semaine et qui s'élèvent

à 1.560 francs pour toute l'année. De plus, il y a un

bénéfice de 3.225 fr. qui vient atténuer les dépenses

d'entretien des enfants. Cette somme, comme celle

réalisée sur les permissions de sortie et les congés,

soit au total plus de dix mille francs - sans compter

les économies de linge dont nous avons parlé, devrait

en bonne justice être employée, nous le répétons, sinon

en totalité au moins en grande partie, à assurer le bon

entretien du service et à l'amélioration du matériel

d'enseignement.

Pour permettre à tous d'apprécier les résultats éco-

nomiques de l'enseignement professionnel et du

travail accompli, au point de vue pratique, nous

avons donné à la page CLVIII l'énumation sommaire

de ce qui a été fait dans les divers ateliers en 1901.

Nous n'insisterons pas sur les avantages que procu-

rent ces ateliers tant au point de vue de l'intérêt

des malades eux-mêmes qu'à celui de l'Administration.

Nous ajouterons seulement qu'il serait convenable, à

tous les égards, que nos anciens malades qui passent

soit dans les sections d'aliénés adultes, soit dans la

division des incurables de l'hospice, trouvent un

meilleur accueil dans les ateliers de l'hospice et que

les chefs de ces ateliers leur témoignent plus de bien-

veillance. Il y va de l'intérêt des malades, supé-

rieur à toute autre considération, et de l'intérêt

financier de l'Administration..

Tel est le résumé de l'enseignement professionnel

Bourneville, Bicêtre, 1901. ?

L ' Enseignement professionnel.

en 1901. Il importe de ne pas oublier que nos ateliers

ne sont nullement comparables a ceux de l'orphelinat

Prévost à Cempuis et de l'école à à Monté-

vrain, par exemple, où les apprentis sont des enfants

normaux, sains de corps et d'esprit, et même choisis

parmi les plus intelligents des candidats. Nos apprenez

tis, à Bicêtre, sont non seulement des enfants anor-

maux, mais encore des enfants malades : quand ils

ont, les uns des accès épileptiques, convulsifs ou psy-

chiques, les autres des impulsions ou des périodes

d'excitation, ces jours-là et les jours qui suivent, ils

ne peuvent travailler ni à l'école, ni à l'atelier. Un

autre fait qui contribue à différencier nos apprentis

de ceux que nous avons cités, c'est qu'ils ont des per-

missions de sortie et des congés, sur la demande des

familles, à toutes les époques de l'année, qu'ils ont des

visites les jeudis et dimanches souvent trop prolon-

gées, enfin que deux fois par semaine ils font des

promenades aux environs de l'hospice ou dans Paris,

promenades qui font perdre une demi-journée de

travail.

Administrativement, après avoir douté de la possi-

bilité de faire travailler les enfants idiots, arriérés et

épileptiques, et avoir protesté contre la construction

des ateliers, certains auraient de la tendance à vouloir

considérer nos malades comme des apprentis ordi-

naires qui, suivant la pratique abusive des couvents,

doivent fournir régulièrement une somme de travail

fixe. Et on y tend administrativement, car on vou-

drait leur faire faire tous les travaux d'entretien de la

section, oubliant qu'il s'agit d'ateliers d'enseignement

et que si le maître et un apprenti sont occupés, par

exemple, iL réparer une porte, les autres enfants n'ont

plus de guide et ne s'instruisent pas.

Nous le répétons, ce qui doit primer dans notre

- service, c'est l'influence morale du travail, qui est

Statistique, mouvement DE la population. LI

l'adjuvant du travail scolaire, du traitement médical

et non le produit lui-même, bien qu'il ne soit pas à

dédaigner. Les enfants eux-mêmes sont heureux de

voir que leur travail est productif, qu'il se traduit par

des résultats pratiques et que tout ce qu'ils font con-

tribue à leur bien-être, a leur enseignement et à l'en-

tretien de leur section.

III.

STATISTIQUE. MOUVEMENT DE LA POPULATION.

Le premier janvier 1901, il y avait dans le service

437 enfants (1) se décomposant ainsi : 405 enfants

idiots, imbéciles ou épileptiques, dits aliénés et 32

réputés non aliénés. Cette distinction, qui s'appliqne

aux épileptiquees adultes aussi bien qu'aux enfants,

est purement administrative et il est difficile de la

justifier médicalement. Les épileptiques non aliénés

sontplacés parl'Assistance publique et sont il la charge

du budget municipal ; les épileptiques aliénés sont

placés suivant les prescriptions de la loi du 30 juin

1838 et à la charge du budget départemental.

Sur ces 437 enfants, 11 étaient atteints de cécité;

2 de surdi-mutité ; 16 étaient ruminants ; 6 flaireurs ;

23 ozycophages; 1 cléclzioezc2· d'ongles; 15 baveux ;

101 gâteux ; 45 hémiplégiques ou paraplégiques et

5 étaient atteints de maladie de Little.

Le tableau suivant résume le mouvement de la

population en 1901.

(1) C'est-à-dire 37 de trop la section ayant été conçue seulement pour 400

enfants.

LU

Décès, SORTIES.

SORTIES, évasions. lui

maintenue ou même a augmenté. Malheureusement

les moyens nous font défaut. '

Nous envoyons le plus possible nos surveillants ou

surveillantes rendre visite à un certain nombre d'entre

eux. Il ne les rencontrent pas toujours. Souvent la

famille a déménagé et on ne peut avoir sa nouvelle

adresse.

Parmi les eufants sortis, il en est qui sont enlevés

prématurément par leurs parents. Ceux-ci les voyant

très améliorés, par rapport à leur situation à l'entrée,

les reprennent malgré nos conseils, alors qu'un séjour

plus prolongé nous aurait permis d'obtenir des résul-

tats plus complets.

le

Évasions. Dix évasions ont eu lieu dans le courant

de l'année, celles des enfants Calb ? llull ? Criet..

Barthél..., Fornc..., Thyr..., Dclf..., Rém..., Faue...

et Land Ces différentes évasions n'ont donné lieu

à aucune formalité légale. Les enfants nous ont été

ramenés par leurs parents ou par des infirmiers

envoyés à leur recherche.

LIV DÉCÈS.

DÉCÈS.

LV

DÉCÈS.

Décès.

LVII

LVIII

DÉCÈS.

Décès.

LIX

Transferts, maladies infectieuses. LXVII

Transferts. Ils ont été au nombre de 19 : 18 à

Villejuif, 1 à Alençon. Les transferts ont souvent

pour conséquence de compromettre les résultats

obtenus chez les malades. Nous citions l'an dernier (1),

à l'appui de notre thèse, le cas d'un enfant atteint

d'hystéro-épilepsie, âgé de 13 ans, qui a été transféré

l'asile de Saint-Georges (Yonne). - Sous l'influence

du traitement médico-pédagogique, le nombre de ses

attaques était allé en diminuant progressivement pour

tomber à zéro dans le mois qui a précédé le transfert.

Ajoutons enfin, que nous avons pour habitude de

prendre la température des malades avant leur départ,

et cela dans le but d'éviter le transfert de malades

sous le coup d'une affection aiguë, de même que nous

prenons la température à l'entrée, durant les cinq

prémiers jours (2).

Maladies infectieuses. Une épidémie de coquelu-

che a débuté à la Fondation Vallée le 11 février ; 22

fillettes en ont été atteintes et 6 garçons ; 3 cas ont été

suivis de décès, ceux des enfants : Bea..., Connét... et

Lan... Le 21 mars, 19 de ces fillettes sont renvoyées

Ü la Fondation à cause d'une épidémie de varicelle qui

(1) Compte-rendu de 190C p. L. Cas de l'enfant Clievr..

( ? 1 A l'entrée de tous les enfants, aussi bien à la Fondation Vallée qu'à

Bicêtre, nous faisons prendre un bain aux malades et examiner leur corps

au point de vue des plaies, des contusions de la teigne, etc. et le lendemain,

au moment du certificat immédiat nous examinons nous-méme l'enfant de

la tête aux pieds s'il y a lieu ; il en est ainsi depuis 1S80. Voici la circulaire

de l'Administration relative aux visites des malades à l'entrée.

Monsieur le Directeur. - Mon attention a été appelée, vous savez à la suite

de quelle circonstance, sur la nécessité de faire examiner les aliénés par

1'interne de service à leur arrivée dans votre établissement.

Dans le cas où l'interne constaterait qu'un aliéné soumis à son examen

porte des traces de coups ou de blessures, il devra établir un certificat signé

par lui et une copie de cette pièce devra être adressée sans retard à l'Adminis-

tration centrale. - Je vous prie en conséquence de veiller dès la réception

de la présente à ce que cette mesure soit mise à exécution. Le Maire des

Requêtes au Conseil d'État, Directeur de l'Administration Générale do

l'Assistance Publique. Signé : Mouhieh.

LXVIII Maladies infectieuses.

avait débuté le 5 janvier et prenait des proportions

inquiétantes. Cette dernière épidémie qui a porté sur

22 cas, n'a déterminé aucun décès.

Signalons encore 4 cas de diphtérie et 3 cas d'angine

pultacée. Parmi ces trois derniers cas, 2 ont été suivis

de décès, ceux des enfants Carr... et Feldin...

Mentionnons encore 2 cas de variole, (1) 4 cas d'éry-

sipèle, et enfin un cas de rougeole, tous ces cas suivis

de guérison. - Notons enfin 2 cas d'oreillons dont

l'un chez une infirmière, M0110 Frap...

Le personnel d'un service de contagieux devrait

toujours être choisi avec soin, de préférence parmi

les infirmières déjà âgées, ou ayant eu, elles-mêmes,

les maladies infectueuses les plus communes. Nos

conseils à ce sujet n'ont jamais été suivis et presque

toujours on donne des infirmières âgées de moins de

50 ans. Il en est de même, malheureusement, dans la

plupart des services de contagieux des hôpitaux,

d'après les renseignements que nous avons recueillis.

Teigne. - Au premier janvier 1901, il restait dans le

service 9 teigneux et 15 teigneuses ; a la fin de l'année

ces chiffres étaient tombés il 7 pour les garçons et

5 pour les filles. - Nous ne parvenons point, malgré

nos soins, à nous débarrasser complètement de la

teigne. Elle se trouve entretenue par de nouveaux

arrivants et par les enfants déjà atteints, pour la

plupart desquels les recommandations sont de nul

effet, qui ne conservent pas leur pansement, frottent

leur tête contre -colle de leurs camarades.

De temps immémorial, probablement depuis l'ou-

verture de Bicêtre en 1656, il y a toujours eu, en

(1) Enfant Fringn ? épileptique, variole moyenne; - enfant Labol ?

variole très forte. Ces deux malades avaient été revaccinés sans succès en

1900.

Maladies intercurrentes. LXIX

nombre variable, des cas de teigne dans cet établisse-

ment. La suppléante, chargée du pavillon d'isolement,

notons-le enpassant, apprend, sur notre invitation,

l'épilation à toutes les infirmières. Ignorant l'anti-

quité de la teigne à Bicêtre et croyant qu'il s'agissait

là d'un accident récent, l'Administration a chargé

M. le D'' Sabouraud de faire une inspection parfaite-

ment inutile dans la circonstance (12 août 1901). Si, au

préalable, l'Administration nous avait demandé des

explications, ce que fait toujours l'Administration

départementale pour les asiles d'aliénés - elle aurait

constaté qu'il n'y avait besoin de déplacer personne et

que nous pouvions continuer à soigner les teigneux

en 1901, comme nous le faisons depuis 1879.

Maladies intercurrentes. 14 enfants ont été

atteints d'état de mal épileptique, (trois décès : Sur...,

Bel... et Cend...) ou de .séries d'accès; - 9 d'ictère; -

6 de b·oncho-hnezcoonie ; - 8 de pneumonie; -

1 de stomatite ulcéro-memb ? 11wllse; - 5 de cliar-

rhée; - 2 de fièvre typhoïde; - 1 d'ophtalmie

blennorrhagique ; - 1 de blenn01Thagie (1) ; - 6 de

maux d'yeux ; 2 de rhumatismes ; -15 de grippe;

5 d'abcès .divers; 1 de brûlure à la jambe; - 1

d'un ongle 12camzé; - 1 de fracture et luxation du

coude; - 1 de fracture de l'avant-bras droit, dans un

accès ; - 2 de morsures ; 40 de plaies légères dans

des accès. Ajoutons que tous les enfants qui se font

des contusions ou des plaies, soit en jouant, soit dans

des accès sont conduits à l'infirmerie où des panse-

ments appropriés leur sont faits par les deux infir-

mières, sous la surveillance de Mrao Athénaïs BOHAIN,

sous-surveillante du service.

(1) L'enfant Saint-Lam..., âgé de 15 ans, aurait contracté cette maladie

durant son congé.

LXX Consultation DU jeudi. "

Consultation du jeudi. - Il n'y avait, autrefois, à

Bicêtre, que deux consultations, une de médecine faite

parle médecin de l'Infirmerie générale, une de chirur-

gie faite par le chirurgien. A notre arrivée à Bicêtre,

nous avons établi une consultation non officielle, pour

les maladies nerveuses et mentales. Nos collègues de

la division des aliénés, nommés comme nous au con-

cours, en ont également créé successivement. Nous

en donnons, pour la première fois, un court résumé,

pour l'année 1901. 404 personnes se sont présentées.

72 pour renseignements sur le placement d'enfants

arriérés ou épileptiques;

141 pour maladies diverses;

44 pour assistance. Il s'agit d'anciens malades des

asiles ou du service. Nous profitons de la visite de ces

derniers pour nous renseigner sur leur état mental ou

leur situation sociale. Dans ce groupe figurent ceux

qui vont tirer au sort et viennent réclamer un certi-

ficat devant aider à leur exemption.

26 pour demandes d'emploi ou de placement dans

les hospices : infirmiers qui réclament leur rentrée

dans les hôpitaux, infirmes, etc.

121 pour renseignements sur les enfants du service

présents ou en congé.

Nous avons toujours obtenu de l'Administration la

faculté de faire prendre des bains et des douches aux

consultants qui habitent la région dépourvue d'éta-

blissements balnéo-hydrothérapiques. Il n'en résulte

pas une dépense sérieuse pour l'Assistance publique;

les malades peuvent suivre leur traitement tout en

continuant leur profession et sans perdre de temps.

Cette tolérance fait honneur à l'Administration et rend

service aux malheureux. Il devrait en être ainsi dans

tous les établissements hospitaliers, suburbains, dé-

'POPULATION au 31 décembre 1901. LXXI

partementaux, comme l'asile de Villejuif, ou munici-

paux comme Bicêtre, l'hospice des ménages à Issy,

l'hospice des incurables d'Ivry qui devraient être des

centres hospitaliers pour leur région (1).

Population au 31 1901.- Il y avait à cette

époque dans le service 438 enfants, se décomposant

ainsi : 413 enfants idiots, imbéciles ou épileptiques,

dits aliénés et 25 réputés non aliénés. Sur ce nombre

122 sont atteints de gâtisme; 41 1 d'incontinence noc-

turne d'urine seulement, 14 de cécité complète; 7 de

cécité incomplète; 7 de surdi-mutité; 1 de surdité;

3 sont bègues ; 12 présentent du mutisme volontaire ;

29 des impulsions violentes ou des accès de colère;

44 sont menteurs à un degré vraiment pathologique;

16 sont atteints de clacn01nanie; 5 de pyromanie ; 10

d'écholalie; 17 (le ltozcnnzazie; 16 de clastomanie ; 14

de coprolalie; 21 de kleptomanie ; 6 d'échokinésie ;

8 de rumination ; 3 sont déchireurs d'ongles; 16 sont

flaireurs (2); 17 sont baveux; 2 sont atteints d'hy(17o-

manie ; 13 d'hydrophobie ; 18 de coprophagie ; 54

sont onycoplznges; 55 sont onanismes ; 12 présentent

du nystagmus ; 72 sont strabiques; 3 ont présenté de

la dépression mélancolique ; 17 ont des tics convulsifs

(1) « L'Assistance publique, disions-nous dans une circulaire aux électeurs

sénatoriaux (février 18n10), est une question à laquelle je me suis attaché depuis

181l, époque où j'ai fait un rapport dans lequel j'ai demandé la création d'hô-

pitaux cantonanx. Depuis, la situation s'est améliorée par la création d'hôpi-

taux intercommunaux, l'agrandissement d'hôpitaux déjà existants, la créa-

tion de l'hospice Favier, etc

z- L'hospitalisation des vieillards est à peu près réalisée dans la moitié des

communes, mais n'existe pas dans l'autre moitié. Il serait possible, facile

même, de donner satisfaction aux malades d'une partie de la banlieue, par une

entente avec l'assistance publique et le département en vue de la création aux

hospices d'Ivry, de Bicêtre, d'Issy, etc ? de pavillons pour les malades et les

blessés des communes environnantes. Ces annexes seraient administrées à

peu de frais et desservies par les services généraux de ces maisons restrei-

gnant ainsi très sensiblement le prix moyen d'hospitalisation. »

( ? ) Voir : Séguin lE .), Education des idiots, nouvelle édition, chap. XII,

;XI, p. 100.

LXEII PERSONNEL DU SERVICE EN 1901.

(lèvres, paupières etc.) 45 ont le tic du balancement du

corps avec ou sans rotation de la tête; 15 ont un tic

coordonné des mains; 16 enfants idiots sont tour'

neurs ; 19 sont sauteurs; 5 sont grimpeurs.

Deux enfants étaient atteints d')témnélie; 1 de

polydactylie ; 1 de syndactylie ; 3 de malformations

pathologiques de la main; 1 d'encéphalocèle ( ? ); 1 de

cyphose; 1 de scoliose; 11 présentent des pieds-bots;

2 sont hémiparésiques; 6 sont paraplégiques ; 17 sont

hémiplégiques ; 6 sont dipléiqzzes; 9 sont atteints

de maladie de Little ; enfin 13 sont athétosiques.

Personnel du service en 1901. Le personnel

était ainsi composé : 1° Service médical : Un conser-

vateurdu Musée, M. le Dr J. Nom. Un interne titulaire,

M. IIEITZ-BOYE11 qui a été remplacé par M. Lafarge,

étudiant en médecine, le 15 octobre ; un interne provi-

soire, M. MORES - un interne en pharmacie, M. COULON.

2° Service scolaire : A. Grande École. 4 insti-

tuteurs : MM. MESNARD, LANDOSSE, CAMAIUJAC et

DERUETTE; un professeur de chant, M. SUTTER,; un

professeur de gymnastique, M. GoY ; un professeur

de dessin, M. Dumont; un maître de danse, M. LAN-

dosse ; deux maîtres d'escrime. - B. Petite Ecole.

Mlle, AGNus (Blanche) et Bohain (Amandine), surveil-

lantes ; deux premières infirmières, 1111, 1-IuGUET et

MARQUET; et 10 infirmières de jour aidant les mai-

tresses d'école après avoir terminé le nettoyage de

leurs dortoirs respectifs.

3° Enseignement professionnel. - 8 maîtres dont

nous avons donné les noms à la page XLVI, plus deux

infirmiers de garde. Ces infirmiers remplacent les

chefs d'ateliers momentanément absents, par exemple

pour faire des réparations dans les salles, pour aider

PERSONNEL DU service EN 1901. LXXIII

quand les enfants ont des querelles, des impulsions,

des accès, pour les conduire iL l'infirmerie, etc

4° Service hospitalier. Il se compose de M. AcARD,

sous-surveillant, remplissant les fonctions de surveil-

lant ; de M. Guillon, suppléant, faisant les fonctions

de sous-surveillant, de M. Petit, 1 cr infirmier, faisant

les fonctions de suppléant; de Mmo Bohain (Athénaïs),

sous-surveillante (infirmerie), de Mra0 SOUS-

surveillante (bâtiment des gâteux); de Mme Grisard,

suppléante (pavillon d'isolement), de Mme DEBIfaE,

sous-surveillante de nuit; de M. Chérel, suppléant,

attaché au service des bains et douches; de M. GERDER,

suppléant, attaché au musée et chargé du service de

distribution de la pharmacie ; d'un infirmier portier,

d'un perruquier; de 35 infirmières, 25 de jour et 10 de

nuit; de 31 infirmiers, 22 de jour et 9 de nuit; total

du personnel secondaire : 86. Les mutations en 1901

ont été de 43 infirmiers et de 26 infirmières.

Dans les bureaux de la Maison, on trouve ce per-

sonnel exagéré. Souvent, au détriment du service, on

fait des emprunts à ce personnel pour des corvées ou

des remplacements dans l'hospice. On ne se gêne pas,

naturellement sans nous prévenir, pour faire suppléer

le vaguemestre par notre baigneur-doucheur. Si un

jour, par malheur, il survenait un accident aux bains

durant ces absences, l'Administration encourrait une

sérieuse responsabilité. Si le baigneur a du temps de

reste, c'est à collaborer au massage qu'il devrait être

employé. Ce qui contribue à faire paraître le chiffre

du personnel considérable, c'est qu'il y a un service

complet de jour et un service complet de veille. On

oublie aussi que les enfants gâteux exigent des

nettoyages fréquents, qu'un grand nombre d'enfants

doivent être exercés a la marche, soumis au massage,

LXXÏV Personnel DU service EN 1901.

qu'il y a une grande perte de temps pour les courses

à la cuisine, à la lingerie, à la buanderie, le charroi

du charbon, etc., avec des arrêts beaucoup trop longs,

faute d'une bonne méthode de travail, dans ces divers

services (1).

(1) Les infirmiers et infirmières vont le 00;00 soit à l'école primaire (3 fois

par semaine), silt aux cours professionnels (i ou 3 fois par semaine). Ils

vont par séries aux exercices pratiques une fois par semaine. Enfin,- ils ont

une sortie hebdomadaire de midi il il heures du soir.

APPENDICE.

I.

Enseignement populaire des sciences naturelles : Leçons

de choses.

Nous avons réclamé un grand nombre de fois l'organi-

sation de nos squares et jardins publics en vue de l'ensei-

gnement par les leçons de choses, comme nous l'avons

organisé dans notre service (1). Nous aurions voulu surtout

que le Jardin des plantes fut largement utilisé dans ce

but. C'est pourquoi nous avons déposé la proposition sui-

vante au Conseil municipal (séance du 8 août 1876) (2).

Parmi les institutions scientifiques de Paris, aucune n'est

plus assidûment fréquentée, aucune n'est plus populaire que

le Muséum d'histoire naturelle, plus connu sous le nom de

Jardin des Plantes. Le Jardin des Plantes, fondé par Guy

de la Brosse, en 1635, ne fut, pendant quelque temps, qu'une

simple école de botanique. Un siècle plus tard, Buffon y ajouta

des collections d'anatomie, de minéralogie, de zoologie, y fit

créer trois chaires et par l'achat de terrains voisins, agrandit

la superficie du jardin.

Telle était la situation lorsque éclata la Révolution. En

1792, Bernardin de St-Pierre fut chargé de la direction du

jardin. Il s'empresse d'étudier les besoins de l'établissement

(t) Voir, entre autres, le Compte-rendu de 1898 (p. XCI).

(2) Nous l'exhumons des Procès-verbaux du Conseil municipal dans l'espoir

qu'il se trouvera un conseiller municipal pour la reprendre à défaut de l'Admi-

nistration.

LXXVI Jardins DES Plantes.

dont il était chargé ; il signale les améliorations à réaliser et,

en particulier, l'utilité d'une ménagerie. Dans son rapport il

s'exprime ainsi : « Ce n'est pas à ma voix, dit-il, que vous

devez vous rendre, c'est à celle du peuple. De tous les établis-

sements nationaux, celui du Jardin des Plantes est le seul

qu'il ait respecté, parce qu'il est le seul à son usage. »

Lakanal, qui se préoccupait avec tant d'ardeur et de com-

pétence de toutes les questions relatives à l'enseignement, fut

chargé de faire un rapport à la suite duquel la Convention

décréta la réorganisation ou plutôt la création du Muséum

d'histoire naturelle. On installa douze chaires au lieu de

trois ; on éleva des locaux pour les collections nouvelles, on

fonda une bibliothèque et une ménagerie, on acheta de

nouveaux terrains. Le Muséum, en un mot, se trouva orga-

nisé de manière que toutes les sciences naturelles pouvaient

y être également enseignées, et que chacune d'elles était

susceptible d'agrandissements successifs.

Il n'était pas de mode, à cette époque, de mesurer parci-

monieusement l'espace aux établissements scientifiques. En

obéissant aux nécessités du présent, on songeait aux besoins

de l'avenir. Grâce à l'impulsion donnée par la Convention, le

Muséum, pendant la première moitié de notre siècle, fut, en

son genre le plus bel établissement du monde entier ; mais

depuis une vingtaine d'années, il s'est laissé dépasser par la

plupart des établissements similaires de l'Europe.

En 1858, l'Empire nomma une Commission pour s'occuper

des améliorations a introduire au Muséum. Cette Commission,

de même que presque toutes les Commissions analogues

instituées par ce gouvernement, ne fit absolument rien. Aussi

les collections sont-elles aujourd'hui mal installées, les plantes

insuffisamment étiquetées et la ménagerie inférieure à celle

de Londres, d'Amsterdam, d'Anvers, etc.

Sous un seul rapport le Muséum a conservé sa supériorité.

Tandis que, dans les autres pays, il faut payer pour être

admis à visiter les ménageries, les collections, etc., le

Muséum est resté ouvert gratuitement à tous. Il en résulte

qu'il est demeuré un foyer précieux d'enseignement popu-

laire. En effet, les dimanches et à certains jours de fête, le

nombre des visiteurs est évalué à trente mille. Toutefois on

ne tire pas de cette institution tout ce qu'elle est susceptible

de donner. Rien ne serait pourtant plus facile que d'arriver

à de meilleurs résultats.

Tout récemment, sur la proposition de M. le Préfet, le Con-

seil a voté un crédit pour permettre aux élèves les plus méri-

LEÇONS DE CHOSES. LXXVI

tants de nos écoles primaires, d'aller faire des excursions

à Dieppe. Les soussignés estiment que l'on pourrait

fructueusement compléter ces excursions en conduisant,

à certains jours, les élèves les plus avancés de nos écoles

visiter les ménageries, les collections de toutes sortes qui

sont accumulées au Muséum et dans le Jardin des Plantes.

La vue des objets est plus utile que leur description, et les

enfants pourraient, sous la direction de leurs maîtres, rece-

voir, en parcourant les galeries, des notions qui se grave-

raient dans leur mémoire. L'étude de l'histoire naturelle.

trop négligée, non seulement dans le programme de l'ins-

truction primaire, mais encore dans celui de l'enseignement

secondaire, est certainement celle qui développe le plus

l'esprit d'observation, et nous pouvons ajouter qu'elle est

toujours bien comprise des enfants et des jeunes gens.

Se fondant sur ces considérations qui montrent combien

sont considérables les avantages que le Muséum peut fournir

à l'enseignement populaire de toutes les branches de l'histoire

naturelle ;

Considérant que cet établissement n'a pas de ressources

suffisantes pour compléter la nomenclature de toutes ses

plantes ;

Considérant que sa ménagerie ne reçoit de l'État qu'une

subvention annuelle de 4.000 francs, alors que le Zoological

Garden de Londres a un crédit de 75.000 francs, celui d'An-

vers un crédit de 200.000 francs ;

Les soussignés émettent le voeu qu'une subvention de

60.000 francs soit accordée au Muséum à la condition, pour

les administrateurs de cet établissement, de prendre toutes

les mesures nécessaires dans le but de rendre les collections,

les ménageries, le jardin botanique et les serres accessibles,

dans les meilleures conditions possibles, aux enfants des

écoles municipales et des écoles primaires libres.

Signé : Bourneville, Asseline, Collin, Léveillé, Germer

Baillière, Lafon, Dubois, Lauth, Martin, Réty, Braleret,

Marais, Clamageran, Vauthier, de Heredia, Cadet, Desou-

ches aine, Jacques, François Combes, Hérisson, Mallet.

II.

Arrêté relatif à la nomination du professeur

de dessin.

Nous reproduisons ici l'arrêté relatif à la nomination

du professeur de dessin à titre de document.

Le Préfet de la Seine,

Vu la loi du 18 juillet 1866.

Vu la délibération du Conseil Général de la Seine, en date

du 19 décembre 1900, en vertu de laquelle un cours de dessin

est créé dans le service des enfants arriérés et épileptiques

de Bicêtre et à la Fondation Vallée.

Vu la proposition du Directeur de l'Administration Géné-

rale de l'Assistance publique à Paris;

Le Secrétaire Général de la Préfecture entendu ;

Arrête :

Art. 1er. - M. Dumont (Adolphe, Charles), est nommé pro-

fesseur de dessin dans le service des enfants arriérés et épi-

leptiques de Bicêtre et à la Fondation Vallée.

M. Dumont recevra en cette qualité une indemnité fixe et

annuelle de G00 fr.

Le montant de cette indemnité sera prélever sur le crédit

de mille francs, qui a été affecté, en vertu de la délibération

susvisée, aux dépenses du nouveau cours de dessin le dit

crédit étant lui-même imputable sur le crédit de sept mille

francs, inscrit à l'art. 8 du chapitre du Budget départemental

(Subvention à l'Assistance publique). ZD

Art. 2. - Le présent arrêté aura son effet à partir du jour

de l'entrée en fonctions de l'intéressé.

Le Secrétaire Général de la préfecture et le Directeur de

l'Assistance publique sont chargés, chacun en ce qui le con-

cerne, d'en assurer l'exécution.

Fait il Paris, le G avril 1901.

Signé : J. de Selves.

SECTION II : Fondation Vallée.

Histoire du service pendant l'année 1901.

I.

Situation DU service. Enseignement primaire.

Quand la Fondation Vallée a été organisée, et

c'est à dessein que nous le rappelons encore, elle

devait être pour les filles ce qu'est la colonie de

Vaucluse pour les garçons, c'est-à-dire qu'on ne

devait y admettre ni gâteuses, ni épileptiques. Mais,

dès l'origine, par suite des besoins du service des

aliénés, il n'a pas été tenu compte de cette catégori-

sation. Il s'ensuit que la Fondation Vallée ne corres-

pond pas et n'a jamais correspondu à la colonie de

Vaucluse, mais au service des enfants de Bicêtre, où

nous recevons, en outre des épileptiques et des hysté-

riques, toutes les catégories d'enfants idiots. Nous

avons, à la Fondation, deux groupes principaux : 1° les

enfants idiotes et gâteuses, 2° les enfants propres, -

et dans les deux groupes, des épileptiques.

Enfants idiotes et gâteuses. - Elles étaient au

nombre de 85 au 1"' janvier 1901 et de 78 à la fin de.

LXXX Fondation Vallée.

l'année. Leurs installations de jour sont dans le sous-

sol du pavillon neuf dont l'aménagement est complè-

tement terminé. Au point de vue du traitement les

moyens et procédés sont les mêmes que ceux décrits

dans nos précédents Rapports.

Les idiotes gâteuses se divisent en deux catégo-

ries : a) les enfants valides qui sont envoyées à l'école

durant une partie de la journée; b) les enfants JNVA-

LIDES, qui séjournent dans le local dont il est question

plus haut, c'est-à-dire le sous-sol. Ce sous-sol bien

aéré, donne de plein pied sur une large terrasse expo-

sée à l'ouest et sur laquelle, en été, on dresse une tente

reposant sur un sol cimenté. Chez huit d'entre elles,

nous avons pu supprimer le gâtisme : Uri ? Muni ?

Chanev ? Robe ? Isel ? Barth ? Wit ? Espond..

Voici quelques renseignements sur des enfants qui,

parties de très-bas, ont fait de sérieux progrès.

VIJt... (Suzanne), entrée à la Fondation en mai 1897, à'âge

de 4 ans, atteinte d'idiotie p1'ofonde, compliquée de rachitisme.

Cette enfant était gâteuse nuit et jour, ne marchait pas, par-

lait à peine, ne pouvait ni s'habiller, ni se déshabiller ; en un

mot, elle était incapable de se donner le moindre soin.

Le caractère de l'enfant était détestable, toujours grognon,

de mauvaise humeur, indifférente à tout. Rien ne faisait pré-

sager de grands résultats, lorsqu'une vraie métamorphose s'est

opérée en elle. Un développement autant physique qu'intellec-

tuel s'est produit en peu de temps. La marche et la parole ont

été très rapides ; le gâtisme a complètement disparu ; l'enfant

se donne elle-même tous les soins de toilette nécessaires, se

suffît à elle-même. - Le caractère s'est également très amé-

lioré ; elle est devenue gaie, joueuse, et apporte beaucoup

d'activité en tout et partout.

Pour la classe, l'enfant n'est pas avancée. Ceci provient de

ce qu'elle a séjourné un certain laps de temps à l'isolement

(teigne). Mais à l'heure actuelle, elle est en bonne voie d'amé-

lioration. Elle aime l'école, connait les lettres, les chiffres et

commence à écrire. Ses progrès n'ont pas été moins rapides,

pour la couture et pour la gymnastique. Aujourd'hui l'enfant

Enseignement pratique ET primaire. LXXXI

commence à travailler aux robes et aux tabliers et suit avec

facilité la grande gymnastique.

Rouss... (Elisabeth), entrée en juin 1898, à l'âge de 13 ans,

atteinte d'imbécillité et de rachitisme, avec perversions ins-

tinctives.

Cette enfant parlait, causait, marchait, ne gâtait pas, mais

elle était nulle en instruction, connaissait à peine les lettres.

Le caractère était méchant, querelleur ; elle se faisait détester

de toutes ses compagnes. La mémoire paraissait très faible

pour les leçons classiques, l'enfant disait elle-même qu'elle

était allée en classe chez les soeurs, mais qu'elle n'avait jamais

rien appris. Vu son raisonnement insouciant et son âge

avancé, on n'attendait que des résultats fort médiocres.

Malgré toutes ces difficultés, l'enfant a réalisé aujourd'hui

de réels progrès. Elle lit lentement, mais couramment ; son

écriture est lisible et même très régulière ; elle fait des devoirs

variés de grammaire et de géographie, ainsi que les trois pre-

mières opérations de l'arithmétique.

Le caractère est également bien changé, elle raisonne bien,

se rend compte de tout; elle est devenue plus calme et plus

affectueuse ; elle a même une certaine délicatesse de senti-

ments. Elle aime à rendre service et s'entend très bien pour

les soins du ménage. Elle était nulle pour tous les ouvrages

manuels, aujourd'hui elle coud très bien, repasse de même,

a appris à faire de la dentelle. Elle exécute facilement tous

les mouvements de la gymnastique, elle qui n'avait aucune

notion iL son entrée.

Ces deux cas et celui dont nous avons parlé (p.

lxxxiii) montrent que, même chez les enfants qui

semblent incurables, si l'un persiste dans l'application

du traitement médico-pédagogique, on arrive des

résultats considérables qui étonnent, même les per-

sonnes expérimentées.

Gus.. (Marcelle), entrée en septembre 1898, il l'âge de 7 ans,

atteinte d'imbécillité assez prononcée avec epilepsie. Au

début, l'enfant était pour ainsi dire nulle pour tout ce. qui

concerne l'enseignement. Elle ne connaissait qu'une partie

des lettres et des chiffres, commençait à peine à écrire et

avait des accès assez fréquents. Aujourd'hui, elle va beaucoup

mieux, ses accès ont diminué insensiblement et tendent

Bouuneville, Bicêtre, 1901. ?

LXXXII Traitement lIfEDICO-PED : 1GOGIQUE.

même à disparaître, il s'en suit un développement physique et

intellectuel. Sa physionomie est plus éveillée et plus expres-

sive, elle travaille bien en classe, lit couramment, connaît

l'addition et la soustraction, son écriture est bien formée, elle

fait quelques devoirs de grammaire et s'occupe de son

mieux.

Rien à désirer au point de vue du caractère, l'enfant est très

facile à diriger ; sa tenue est irréprochable. Elle raisonne bien,

aime à rendre service et travaille bien, tant à l'ouvroir qu'au

repassage. Elle a fait des progrès très sensibles pour les

ouvrages manuels et a beaucoup de disposition pour la cou-

ture. Il est à remarquer que l'enfant était nulle au début pour

les deux ateliers. Elle a appris à faire de la tapisserie et de la

dentelle. Elle connaît tous les exercices de la gymnastique.

DESES.... (Émilie), entrée à la Fondation, en mai 1897, à l'âge

de 10 ans, atteinte d'imbécillité prononcée, avec luxation con-

génitale des hanches.

La parole était libre chez cette enfant qui répondait aux ques-

tions posées, mais elle marchait très difficilement et urinait

parfois au lit. L'expression de la physionomie était peu mobile,

le regard vague, rien chez cette enfant n'indiquait l'intelli-

gence. Elle ne savait pas lire, mais formait les lettres et les

chiffres; elle ne savaitpas compter, ne possédait pas les notions

les plus rudimentaires. L'enfant avait beaucoup de difficultés

pour tout ce qui concerne l'enseignement, malgré cela nous

constatons aujourd'hui des progrès réels. Elle lit assez cou-

ramment, son écriture est régulière. Elle connaît les trois

premières opérations de l'arithmétique sans toutefois en com-

prendre encore très exactement l'application.

Le caractère s'est également modifié. L'enfant parlait peu

au début, était maussade, restait inerte ; aujourd'hui elle est

devenue très active, s'occupe à faire de la dentelle aux heures

de récréation. Elle aime les soins du ménage. A l'ouvroir elle

est parvenue à faire entièrement robes, tabliers, pantalons.

Elle fait bien la gymnastique et n'avait cependant aucune

notion à son entrée. Elle est, en outre, devenue très propre ;

sa tenue ne laisse rien à désirer.

GuILLAU.. (Laure), entrée en avril 1891, atteinte d'imbécillité

prononcée avec perversions instinctives. - Cette enfant cau-

sait, mais ne pouvait répondre exactement aux questions qui

lui étaient posées. Elle était très craintive, restait inerte, sa

mémoire paraissait très faible ; elle était nulle pour la classe.

Fondation Vallée. LXXXIII

Elle était très gâteuse la nuit et avait une tendance très pro-

noncée pour l'onanisme.

Malgré tous ces obstacles, nous constatons une amélioration

très notable chez cette enfant. Actuellement, elle lit par syl-

labes, écrit très lisiblement, fait une copie, ainsi que l'addition

et la soustraction.

Le caractère est totalement changé, l'enfant est devenue

plus enjouée, affectueuse, parle même beaucoup, tient con-

versation, s'amuse aux récréations comme le ferait une enfant

ordinaire.

Ajoutons aussi que l'enfant est devenue tout à fait propre ;

elle se tient bien, se suffit à elle-même et ses mauvaises habi-

tudes ont complètement disparu.

VELLa... (Henriette), entrée'à la Fondation en août 1893,

à l'âge de 8 ans, atteinte d'imbécillité prononcée, avec

épilepsie (vertiges et accès nombreux). Cette enfant, à son

entrée, ne savait ni lire, ni compter, ne faisait que quelques

copies, sans se rendre compte de ce qu'elle écrivait. L'enfant

qui possédait une certaine mémoire pour les choses usuelles

et les lieux, avait beaucoup de difficulté pour retenir les leçons

les plus élémentaires, elle semblait n'avoir aucune aptitude

pour l'instruction. Son caractère laissait beaucoup à désirer;

elle était très susceptible, turbulente, extravagante, taquine

et contrariante au suprême degré ; elle était toujours portée

à faire ce qui était défendu, ne tenait aucun compte des

observations qui lui étaient faites. Elle était propre, mais elle

avait une tendance très prononcée pour l'onanisme ; en

somme on n'attendait de cette enfant qu'une amélioration

fort médiocre. Cette prévision a été fort heureusement déçue :

chez elle nous avons, en effet, obtenu des résultats sur-

prenants. Hâtons-nous de dire aussi qu'elle n'a eu ni accès

ni vertiges depuis juin 1898. C'est à partir de cette époque

qu'a commencé chez elle le développement physique et intel-

lectuel.

Elle a appris à lire couramment, donne à la lecture une

bonne intonation, son écriture quoique peu régulière, est

néanmoins très lisible. Ve... suit des dictées du cours moyen,

son orthographe est encore défectueuse mais elle peut rédi-

ger une lettre ; connait les trois premières opérations de

l'arithmétique et en comprend l'application, fait quelques

petits problèmes. Elle a quelques notions sur l'histoire et la

géographie, elle travaille bien au dessin. Ce n'est qu'à force

de travail que l'enfant a pu réaliser ces progrès, car elle a

L\1\11' IDIOTES gâteuses, invalides ou NON.

toujours peu de facilité pour la classe. Il n'en est pas de même

pour les soins du ménage et pour les ouvrages manuels ; elle

se plaît à ces différents travaux et on voit que l'enfant est

tout à fait dans son élément. Aujourd'hui elle fait le ménage

comme une grande personne avec beaucoup d'adresse et

d'agilité. Elle est une des plus avancées pour la couture et le

repassage. Elle qui, au début, ne savait même pas tenir

une aiguille, a appris à faire la dentelle et la tapisserie ; elle

est même très vive dans tout ce qu'elle fait. Elle travaille très

bien à la gymnastique dont elle ne possédait aucune notion

à l'entrée.

Le caractère s'est également transformé; elle est beaucoup

plus calme, très travailleuse de son naturel, elle aime à se

rendre utile en tout et partout. Toute mauvaise habitude a

complètement disparu. En résumé, amélioration très notable.

L'amélioration notable acquise chez ces enfants

montre nettement ce qu'on peut obtenir chez ceux

qui sont même profondément atteints. Des résultats

analogues ou plus considérables peuvent, à plus forte

raison, être réalisés chez des enfants moins malades.

Nous pourrions en relater de nombreux exemples qui

n'ajouteraient rien aux précédents, tout à fait démons-

tratifs.

2° Enfants idiotes, imbéciles, épileptiques, etc.,

VALIDES. - Enseignement primaire et enseignement

professionnel. Les procédés employés sont les mêmes

qu'à la section de Bicêtre. Les améliorations réalisées

dans les écoles des garçons sont introduites immédia-

tement à la Fondation. L'idéal que nous poursuivons

consiste à occuper les enfants du matin jusqu'au soir,

en variant le plus possible les exercices. Les jeux

mêmes doivent contribuer à leur éducation.

Au lever, on apprend aux enfants a faire leur toilette,

leur lit, it nettoyer leur dortoir, a brosser leurs vête-

ments. Aux repas, on surveille les enfants qui savent

manger seules et on corrige leurs mauvaises habitu-

des ; on apprend aux autres it se servir de la cuiller,

IDIOTES gâteuses, imbéciles, ETC., valides, LXXXV

de la fourchette, etc. Nous ne cessons de répéter

au personnel de surveiller avec le plus grand soin

les aliments, d'enlever les fragments d'os ou de

tendons, susceptibles de produire des accidents, de

couper les aliments en menus morceaux, de veiller

à la mastication et à la déglutition. Sur 216 enfants

présentes Ù la fin de l'année, 44 savent se servir

de la cuiller, de la fourchette et du couteau; 82 de la

cuiller ot de la fourchette ; 52 de la cuiller seulement;

38 ne savent pas manger seules.

179 enfants ont fréquenté l'école et ont été exercées

a la gymnastique des échelles et des ressorts;

80 enfants participent aux exercices de la grande

gymnastique, sous la direction de M. Goy et de

la surveillante Melia LANGLET. Ces leçons ont lieu

une fois par semaine, le jeudi. Mais, on raison de

l'augmentation de la population, il serait nécessaire

quo le professeur donnât doux leçons par semaine.

L'Administration départementale et la Commission

de surveillance ont reconnu la légitimité de notre

demande, déjà renouvelée plusieurs fois, et l'ont

signalée à l'Administration de l'Assistance publique,

dont nous attendons toujours la réponse.

Les leçons de choses, multipliées le plus possible,

ont lieu dans los jardins dont los arbres, les arbustes,

les plantes, etc., sont étiquetés. Les détails

dans lesquels nous sommes entré dans nos Rapports

de 1890 à 1900 au sujet de l'habillement (mannequin

spécial, Fig. 4). de l'éducation, de la digestion, de

la respiration, de la circulation et de l'hygiène

sexuelle, nous dispensent d'y revenir cette année.

LXXXVI

HYGIÈNE SEXUELLE.

Notre personnel surveille attentivement l'appari-

tion et le développement de la puberté. Dès l'appa-

rition des poils sous les aisselles et sur le mont de

Vénus, elles préviennent les fillettes qu'il s'agit-là

d'un fait naturel. On évite ainsi certaines inquiétudes

et des actes hizarres. Il en est qui essaient de s'arra-

cher les poils sous prétexe que c'est de la malpropreté,

ou qui les coupent. Lorsque les seins ont pris un

certain accroissement, que le système pileux devient

de plus en plus abondant, on les avertit de prévenir

si elles éprouvaient des douleurs dans les reins ou le

Fig. 4. Leçon d'habillement (mannequin).

LEÇONS DE CHOSES, DESSIN, chant, ETC. LYXXVII

bas-ventre et s'il leur arrivait de perdre un peu de

sang. A la première apparition des règles, on complète

les renseignements et on leur donne des conseils sur

les précautions à prendre. Les époques, avec leurs

caractères (douloureuses ou non, abondantes ou non,

durée, etc.) sont notées ; on nous signale les pertes

blanches qui les précèdent ou les suivent ainsi que les

suspensions. Enfin on habitue les fillettes aux soins

de propreté. C'est ce que les mères de familles, les

institutrices, les maîtresses de pension devraient faire

toutes.

Enseignement du dessin. - Cet enseignement,

fait primitivement et à titre gracieux par Mme Bru,

était complètement suspendu depuis 1897 à la Fon-

dation Vallée, par suite du départ de Mme Bru, dont le

mari avait été nommé directeur de l'hôpital Ricord.

M. Dumont, nommé à l'emploi de professeur de dessin,

a pris possession de son poste le 6 avril. Il donne

aux jeunes filles, au nombre de 25 une leçon tous

les jeudis de 8 à 9 .heures du matin. L'année pro-

chaine nous donnerons quelques détails sur les

progrès accomplis.

Enseignement du chant. Cet enseignement

est fait depuis 1895, à titre gracieux, par M. Eugène

Sutter, professeur de chant à l'asile-école de Bicêtre.

De même que les années précédentes M. Sutter s'est

occupé successivement de toutes les enfants, en état

de profiter dans une mesure quelconque de son ensei-

gnement. 95 enfants y ont participé. - La classe spé-

ciale de théorie musicale et de solfège a donné de bons

résultats; 30 enfants ont suivi cette classe. Comme

les années antérieures les enfants les moins atteintes

ont appris des mélodies et des petites romances chan-

LYIlVIII Enseignement professionnel.

tées dans les concerts organisés par les garçons de

l'hospice et aux réunions du samedi. Toutes y ont

pris un réel intérêt et y ont apporté toute leur bonne

volonté.

Les exercices de danse ont lieu sous la direction

de M. LA : \'DOSSE, instituteur Ù Bicêtre, tous les mer-

credis de 4 à 5 heures et le dimanche, après la visite

des parents, sous la direction de la surveillante.

160 enfants ont pris part à ces exercices ; 92 savent

danser la polka, 64 connaisscnt la polka, la mazurka

et la scottish ; 55 connaissent toutes les danses de

caractère et les différentes figures du quadrille.

Enseignement professionnel. A mesure que les

enfants se développent, on leur apprend tous les soins

du ménage, à mettre et à retirer le couvert, à nettoyer

les réfectoires, laver la vaisselle, etc. Une vingtaine

des moins arriérées aident le personnel a apprendre

à manger aux enfants incapables de manger seules

et à perfectionner celles qui mangent malproprement.

Les deux ateliers que nous possédons ont continué

à fonctionner régulièrement. Le travail, évalué par

M. Maupré, économe de Bicêtre, d'après le tarif réduit

de l'Administration, s'est élevé à 5.185 fr. 50 pour

l'atelier de couture, dirigé par 1\'1'"C EHmIANr\ et à

1.238 fr. 65 pour l'atelier de repassage dirigé par Mme

BARUET. Total 6.424 fr. 15 (1).

Nous avions essayé il y a quelques années de monter

un atelier de composition typographique, qui n'a pas

réussi faute d'une véritable entente et surtout d'un

crédit pour le maître. Nous aurions voulu avoir aussi

un atelier de brochage dont l'organisation a rencontré

malheureusement aussi des difficultés imprévues et

(1) Ces ateliers, après prélèvement des salaires, de la nourriture, etc., des

deux maîtresses (3.240 fr.) donnent un bénéfice de 3.224 fr.

Enseignement professionnel. LXXXIX

surtout, une petite buanderie. Pour celle-ci, d'une

utilité incontestable, nous ne disposons malheureuse^

mont pas d'un local approprié.

Pour étendre les connaissances pratiques de nos

malades, nous avons autorisé les sous-employées à

faire repasser ou coudre une partie de leurs objets de

toilette, bien entendu en dehors des heures régulières

de travail. Le travail, de ce fait, ne rentre pas natu-

rellement dans les évaluations qui sont faites par

l'Administration.

En plus des apprenties qui travaillent par séries

régulières, 60 ont travaillé une heure par jour ;

30 enfants savent faire complètement les layettes ;

30 du crochet et de la dentelle; 20 savent marquer ; 15

saventfaire de la tapisserie; 6 savent tricoter. Le tableau

de la page suivante, donne mois par mois le nombre des

apprenties régulières et l'évaluation du travail.

Visites, permissions de sorties, congés. Les

enfants ont reçu 3.688 visites ; les visiteurs ont été

au nombre de 5.968. Ces chiffres témoignent de la

sollicitude des familles envers leurs malheureuses

enfants. Il semble que, se rendant compte de la

responsabilité héréditaire qui leur incombe, elles

redoublent d'affection pour elles.

xc

VISITES ET CONGÉS.

accorder des congés de plus de cinq jours, parce que le

séjour des enfants dans leurs familles se prolongeant,

il est moins facile de les faire rentrer et surtout

parce qu'elles reprennent vite, chez elles, leurs

anciennes habitudes; que, à leur retour, elles se plient

moins bien à la discipline et travaillent avec moins

d'ardeur (1). La Commission de surveillance a visité

Promenades ET distractions. XCI

la Fondation Vallée le 7 mai et la Commission du

Conseil général le 16 novembre.

Promenades. -Elles ont lieu deux fois par semaine,

soit dans les communes voisines de la Fondation Val-

lée, soit à Paris. Le nombre des enfants qui prennent

part à ces promenades varie de 60 à 80. '

Distractions. - Comme les années précédentes,

et sans qu'il soit survenu des inconvénients de la pré-

sence simultanée à ces réunions des enfants des deux

sexes, les petites filles de la Fondation Vallée ont

participé en 1901, il toutes les distractions données

aux garçons de Bicêtre et dont l'énumération figure

dans le Compte-rendu de la section des garçons de

cet établissement (1).

Améliorations diverses. - Aucune nomination à

enregistrer cette année. Notons au nombre des

améliorations : 1° la transformation des appareils à

gaz par des becs Auër ; la réfection de portes et

peinture diverses ; - l'achèvement de l'installation

du sous-sol du pavillon neuf (service des gâteuses

invalides et des épileptiques démentes).

De même qu'à Bicêtre, les déguisements du Mardi-

Gras et de la Mi-Carême, la décoration du gymnase

où dansent les enfants, le buffet sont faits par les

enfants et le personnel. Celles-là, durant l'année,

donnent 25 centimes par mois. Quelques parents

remettent un peu d'argent pour accroître la petite

caisse des enfants. musc Raymond, suppléante a remis

25 fr. Une dame Roussel, en remerciement d'un mo-

dèle de dentelle qui lui a été donné, a envoyé 10 fr.

(1) Citons parmi les jeux les plus intéressants au point de vue pédagogique

le jeu de dominos ordinaire et notre jeu de dominos en couleur (dominos

colorés, dominos chromatiques, etc.). Avec les premiers nous apprenons aux

enfants à compte ? ', avec les deuxièmes nous leur enseignons les couleurs.

xcii Maladies infectieuses.

L'Administration fournit cent brioches qui sont ven-

dues au buffet 0 fr. 10 cent. et c'est tout. Les dépenses

consistent en achats d'étoffes, rubans, mousseline, coif-

fures, musiciens, etc. Au Mardi-Gras, la caisse conte-

nait 120 fr. les recettes ont été de 84 fr. Le déficit a été

comblé par la surveillante. A la 1Li-Carcme, la caisse

s'était enrichie de 40 fr., les recettes ont été de 74 fr.,

soit 114 fr. Après le remboursement des avances fai-

tes par la surveillante, il est resté en caisse 17 fr.

pour servir aux déguisements de 1902. Cinquante

enfants ont été travesties. Comme d'habitude, la fan-

fare des enfants de Bicêtre est allée les chercher à

la Fondation. Elles se sont réunies aux garçons dégui-

sés dans le gymnase de la section de Bicêtre, où nous

avons l'habitude de les passer on revue avec le direc-

teur, l'économe et les employés de la Maison, puis

tous réunis ont parcouru, musique en tête, les sections

d'aliénés et les cours de l'hospice, à la vive satisfac-

tion des aliénés et des administrés. Après le déjeuner,

de 2 à 6 heures, elles ont dansé dans le gymnase de

la Fondation. Nombre de parents assistent à ces fêtes

qui se renouvellent chaque année, modestement,

depuis l'ouverture de la Fondation en 1890.

Teigne. - Quinze enfants ont été soignées pour la

teigne au pavillon d'isolement de la section de Bicêtre.

A la fin de l'année, il ne restait plus que 5 enfants en

traitement.

Maladies infectieuses. Deux fillettes ont été soi-

gnées au même pavillon, l'une pour la diphtérie, l'autre e

pour une angine pultacée, cette dernière a succombé

(Feldm... Pauline). L'enfant Bartholom... y a été trai-

tée à deux reprises différentes pour un érysipèle de

la face; enfin l'enfant Dun... y a été soignée et guérie

de la rougeole. Signalons au nombre des maladios

infectieuses, l'épidémie de coqueluche qui avait débuté

Maladies intercurrentes. xciii

à la Fondation Vallée lo 18 février et qui s'est termi-

née le 4 juin sans cas mortel. Toutes les enfants au

nombre de 32, sauf 3 mises en observation à l'isole-

ment, ont été soignées à la Fondation où nous les

avions installées dans la même salle, désinfectée,

naturellement, à la fin de l'épidémie.

Maladies intercurrentes. -8 enfants ont été traitées

à l'infirmerie pour bronchite ; 3 pour broncho-pneu-

monie; 1 pour congestion cérébrale; 2 pour pnewno-

nie ; 3 pour tuberculose pulmonaire ; 1 pour ménin-

gite; 1 pour accidents cérébraux (congestion); 2 pour

fièvre typhoïde ; 9 pour la grippe ; 15 pour séries

d'accès ou états de mail; 80 pour ophtalmie (conjonc-

tivite, kérato-conjonctivite); 6 pour engelures; 15 pour

impétigo; ! ¡ pour entérite; 1 pour brûlure; 2 pour exci-

tation maniaque ; 1 pour fracture des os de l'avant-

bras droit. Ajoutons aussi que, de même qu'à l'infir-

merie des garçons de Bicêtre, les fillettes qui, soit en

jouant, soit dans des accès se font des contusions sont

immédiatement conduites à l'infirmerie, où Mlle JA-

MOULLE, première infirmière, attachée spécialement à

ce service, leur fait sur nos indications ou celles de

notre interne, les pansements nécessaires avec le plus

grand soin.

Vaccinations et Revaccinations. Elles ont été

au nombre de 41 dont 6 avec succès. De même qu'à

Bicêtre nous revaccinons avec nos infirmières toutes

les entrantes et toutes les malades qui sont à la Fon-

dation depuis 5 ou 6 ans.

Bains et hydrothérapie. - Comme les années pré-

cédentes, nous avons eu recours dans une large mesure

aux bains et aux douches. Quant aux autres moyens de

traitement, ils ont été les mêmes que dans notre sec-

tion de Bicêtre. Signalons surtout les leçons de choses,

xciv Bains, hydrothérapie, glande thyroïde.

soit en classe, soit dans les jardins et les promenades.

Nous veillons le plus possible à l'hygiène sexuelle, et

pour les petites gâteuses et pour les petites filles pubè-

res. Les enfants prennent leurs douches à la Fonda-

tion ; ce n'est qu'en cas de réparations qu'elles les

prennent à Bicêtre. Quant aux bains, nous avons dû

recourir encore cette année aux bains de Bicêtre. Les

bains de pieds ont été donnés à la Fondation où

existe, comme nous l'avons dit, une installation con-

venable. Voici la statistique des bains et des douches

en 1901.

MOUVEMENT DE LA POPULATION. XCV

XCVI Particularités pathologiques.

Evasions. - Comme les années précédentes nous

n'avons pas eu d'évasions en 1901.

Transferts. - Ils ont été au nombre de 7 seulement,

6 à Villejuif et 1 en Suisse.

Population au 31 décembre. Il restait à la Fon-

dation, le 31 décembre 216 enfants, se décomposant

ainsi :

PERSONNEL DU SERVICE. xcvii

prêté un concours dévoué pour la prise des observa-

tions de l'année ; d'une surveillante, Molle LANGLET, de

3 sous-surveillantes, Mmes IJHanInNrr, LAPEYHE et CRor-

ZELLE ; d'un sous-surveillant-portier, M. CROIZELLE ; de

3 premières infirmières, 111 ? S Quatre, JAMOULLE et

BARUET; d'un infirmier, M. Piederrière, de 12 infir-

mières de jour et 6 de nuit. Total du personnel secon-

daire, 26.

Les résultats obtenus encore cette année à la Fon-

tion Vallée sont dignes des plus grands éloges. C'est

au personnel, et en premier lieu à M110 LANGLET, et a

ses collaboratrices, citées plus haut, que nous les

devons. Nous sommes heureux de les signaler. Le

fonctionnement aussi parfait que possible et très éco-

nomique de la Fondation Vallée, montre les avantages

incontestables des établissements dont la population

est limitée et qu'il est possible, quand il s'agit de

filles, de les confier à des femmes.

Boukneville. Bicêtre, 1901. , ♦* ?

XCVIII "

C . DFCs.

Section III. - Assistance et enseignement.

Classes ou Écoles spéciales pour les enfants arriérés.

Communication à la Commission de surveillance des

asiles d'aliénés de la Seine.

Messieurs ET chers Collègues.

Nous vous.avons montre, au cours de votre visite, un cer-

tain nombre d'enfants idiots, imbéciles et arriérés, amé-

liorés au point de pouvoir être rendus à leurs familles, s'il

était possible, en ville, de continuer le traitement médico-

pédagogique et de poursuivre avec succès l'amélioration

déjà obtenue. Ce moyen est trouvé : ce sont les Classes

spéciales annexées aux écoles primaires ou mieux les

Ecoles spéciales pour les enfants arriérés .

Vous connaissez tous mes efforts pour la réalisation de

cette réforme à laquelle vous avez donné votre assenti-

ment. Avant de vous soumettre de nouveaux documents,

il nous parait y avoir quelque utilité il rappeler sommaire-

ment les premières étapes.

Après nous être borné à signaler au jour le jour,

dans le Progrès Médical et les Archives de neurologie

les tentatives faites à l'étranger pour l'instruction et le

traitement des enfants arriérés, dont l'hospitalisation ne

s'impose pas, en instituant pour eux des cours spéciaux,

nous avons soumis la question en 1891, à la délégation

. cantonale du Vue arrondissement. Sur nos indications,

cvi Traitement ET éducation DES IDIOTS.

l'inspecteur primaire des Vmc et Vlan, arrondissements a

fait une enquête sommaire qui a montré que le nombre

des arriérés était plus considérable qu'on ne le pensait et

que notre proposition était justifiée.

En juin 1894. au Congrès national d'assistance de Lyon,

nous avons insisté sur la création des classes spéciales

comme moyen d'assistance, dans la famille, du groupe

important des enfants arriérés (1).

En décembre 1895, rapport il la délégation cantonale du

yme arrondissement qui, conformément à notre conclu-

sion, émet le voeu « qu'il soit créé clans quelques-uns des

arrondissements de Paris, des classes spéciales pour les

enfants arriérés n'offrant ni perrersïons des instincts,

ni accidents convulsifs . »

Le 2 juin 1896, nous vous avons fait une communica-

tion démontrant l'utilité incontestable des classes spécia-

les, au point de vue de l'assistance, parce qu'elles per-

mettraient de désencombrer les sections d'enfants en y

envoyant ceux qui sont sullisamment améliorés. La Com-

mission a émis un voeu analogue à celui de,la délégation

cantonale du Vs arrondissement.

En décembre de la même année, communication il la

Commission d'assistance du Conseil général comprenant

une Lettre de JI. C : l1'1'iot au sujet de la statistique des

enfants arriérés existant dans les écoles primaires de la

ville de Paris, et notre réponse donnant la Classification

et la définition de toutes les formes de l'idiotie et préci-

sant celles qui relèvent des classes spéciales.

Le 7 juin 1898, nous vous avons remis une nouvelle

Note renfermant des renseignements sur la Suisse, l'Ait-

gleterre, la Belgique, et vous avez renouvelé votre voeu.

Le 16 mai 1899 : Lettre il M. Ch. Dupuy, président du

Conseil, ministre de l'intérieur ; Note sur les classes

spéciales en Prusse et en 13elgi.cuo. Renouvellement

de votre voeu. ,

Le 8 mars 1900, Note sur le mouvement en faveur des

(1) Bourneville. -Assistance publique, traitement et éducation des enfants

arriérés, rapport au Congrès national d'assistance de Lyon.

Classes ou écoles spéciales. CVII

enfants arriérés en Italie, asiles-écoles, classes spécia-

les ; - Ecole spéciale pour enfants arriérés à Amster-

dam . ' ,

Le le'' août 1900, communication sur le même sujet au

Coures international el'assistance publique (Procès verh.,

t. IV, p. 295).

Le 7 mai 1901, Note sur les classes spéciales pour les

enfants arriérés il Berlin. En 1900 et en 1901, vous avez

encore renouvelé votre voeu.

En octobre 1901, discussion au Congrès d'assistance

familliale, du rapport de M. Manheimer sur l'Assistance

familliale des enfants arriérés.

Toutes ces communications figurent dans nos Procès

verbaux. Elles ont été distribuées en brochures, adres-

sées aux autorités compétentes, aux membres de la

Commission d'assistance du Conseil général. Si nous les

rappelons, c'est afin que ceux qui traiteront à leur tour de

cette question puissent utiliser les nombreux documents

qu'elles renferment et, dans la mesure de leur honnêteté,

rendre justice à nos efforts plus persévérants que fruc-

tueux.

Voici maintenant de nouveaux documents sur les pro-

grès des Classes ou des Écoles spéciales pour les enfants

arriérés dans différents pays. Nous commencerons par la

traduction, duc à l'un de nos internes, M. Morel, d'un

travail d'ensemble sur cette question qui intéresse vive-

ment les médecins et pédagogues... au-delà de nos fron-

tières.

Écoles spéciales pour enfants anormaux ;

Par le D' SAMUEL FOUT. Ellicotcity, M. D.

Au commencement de novembre 1892, le Ministre de

l'Instruction Publique à Berlin, prenait l'arrêté suivant

CVIII Traitement ET éducation DES IDIOTS.

relatif à la sélection pratiquée parmi les élèves des écoles

par les autorités locales, dans plusieurs villes de Prusse.

- Ces autorités séparaient du gros des élèves, les enfants

d'intelligence lourde et lente, mais normaux par ailleurs

et absolument distincts des idiots et organisaient pour

eux des écoles spéciales, ou des classes spéciales dans

les écoles les plus nombreuses. Le ministre insistait

particulièrement pour qu'on n'admit pas les idiots dans

ces écoles spéciales, les idiots relevant des asiles quant

aux soins que leur état nécessite, - mais seulement

les enfants spéciaux, anormaux, qui sont « poids mort »

dans une école, leur peu de disposition il assimiler

les mettant en état d'infériorité, comparativement il la

moyenne des élèves. - Or, ces enfants, peuvent bénéficier

de méthodes spécialement adoptées à leur niveau intel-

lectuel, et le cours de leurs études peut être prolongé ou

abrégé selon les moyens qu'on leur reconnaît. En outre,

recommandation spéciale de soumettre à l'examen médi-

cal tout enfant envoyé aux écoles ou aux classes de sujets

anormaux, afin qu'on puisse déterminer la cause de son

infirmité intellectuelle, et la mesure dans laquelle on peut

remédier à cet état de choses. L'arrêté se terminait par

une demande de rapports des Inspecteurs des Ecoles,

affectés à un district possédant des établissements spé-

ciaux.

En 1891, on publie le résultat de cette enquête, qui

établit que 18 villes de Prusse possèdent des écoles ou

des classes spéciales, où sont traités les seuls enfants

arriérés, les idiots qui les occupaient antérieurement

ayant été évacués. On constatait en outre qu'un certain

nombre d'enfants bénéficiaient de 2 ou 3 années d'éco-

lage, sans toutefois pouvoir été ramenés au niveau des

enfants normaux. Voici les chiffres du rapport de 1894 :

18 villes possédant 26 institutions ; plusieurs centaines

d'enfants en traitement; 43 instituteurs, 21 institutrices;

et un total moyen de 24 heures de travail par école. -

Le rapport scolaire de 189G c w late que les villes pour-

vues d'établissements spéciaux sont au nombre de 27,

et que le nombre des élèves est porté à 2.017.

Classes spéciales. CIX

La même année, une commission royale reconnaît que

le Comité pour enfants arriérés et épileptiques, constitué

par sa grâce le duc de Devonshire a montré avec toutes

les preuves désirables la nécessité de séparer les enfants

arriérés et épileptiques, des enfants normaux dans les

écoles de la Grande-Bretagne. Le rapport de la commis-

sion de 1896, publié en 1898, est une étude complète et

conçue dans un esprit très scientifique de deux variétés

d'enfants anormaux étudiés par des spécialistes familia-

risés avec les soins, l'instruction et le genre de vie qu'ils

réclament. Et il a fallu il ces hommes et ces femmes

cinquante années d'efforts et de travail pour que le public

s'intéressât il leur oeuvre. Ces différents rapports, ainsi

que les travaux publiés à l'étranger constitueront, il n'en

pas douter, un pas en avant dans le domaine des sciences

psychologiques et sociologiques. - L'importance de la

question, au point de vue national, ne saurait être discutée.

En effet, il y a, aux États-Unis, près de 100.000 arriérés ;

dont un vingtième à peine reçoit des soins spéciaux ;

déplus, pour 800 enfants normaux, il faut compter un anor-

mal ; ajoutons encore, ce fait bien établi, que 1 pour 100

des enfants de nos écoles publiques, a besoin d'une édu-

cation spéciale en raison de son infériorité comparative-

ment à ses camarades. La conclusion de cette statistique

du large pourcentage d'enfants au-dessous de la moyenne

intellectuelle, est qu'il faut examiner de près ce qu'on peut

faire pour eux. Nous estimons que l'État doit assumer

la charge de toutes les variétés d'enfants anormaux et que

la question intéresse les contribuables par deux points :

le premier consiste iL prévenir l'augmentation de cette

catégorie d'enfants ; le second consiste à les soigner,

il les éduquer de telle manière qu'ils puissent - en partie,

du moins pourvoir il leur subsistance. Nous ne discu-

terons que le second point qui doit être examiné quant à

deux variétés d'enfants arriérés.

Il est regrettable que l'accord ne soit pas fait sur ce qu'il

faut entendre par « débile mental » ; il y a peut-être une im-

possibilité à le définir, en ce que ce terme embrasse tous

les degrés de défectuosité mentale, depuis l'inperfcction

ex Traitement ET éducation des IDIOTS.

peu sensible, et si près de la normale, dit Séguin père, que

des médecins compétents peuvent il peine établir la diffé-

rence, jusqu'au degré très marqué où le traitement ne

pourra obtenir quelque résultat que dans l'exécution de

travaux élémentaires, tels que le balayage ou le lavage

des planchers.

Iicrlin donne la classification la plus schématique des

enfants anormaux, qu'il divise en :

Classes spéciales. cxi

délinquants il un degré quelconque; mais beaucoup d'en-

tre eux reçoivent de l'influence du milieu une atteinte plus

grave que celle qui résulte de leur état cérébral. Il nous

suffit d'examiner nos propres enfants et de supposer un

instant dans quelle situation sociale ils S3 trouveraient, si

nous ne leur fournissions les moyens de parvenir dont nous

disposons, pour mieux comprendre que ne le fait le corps

politique, le besoin qu'il y a de faire de ces malheureux

enfants des hommes honorables et sachant se faire res-

pecter.

L'avenir n'a pas dit son dernier mot sur la question des

besoins des enfants délinquants. Ainsi que je l'ai déjà éta-

bli, on reconnaîtra qu'une forte proportion n'ayant qu'une

mentalité inférieure doit être placée dans des institutions

spéciales. et non dans les maisons de correction de l'Etat.

Du moins, sont-ils soumis à quelque traitement, ce qui

vaut encore mieux que rien, et peut-être le jour n'est-il

pas éloigné ou nous pourrons faire pour eux plus que nous

faisons.

A quoi reconnaît - on l'Arriéré ?

D'une façon générale, l'instituteur peut choisir une forte

proportion de sujets sur chaque centaine de malades, et

les soumettre il l'analyse compétente d'un médecin qui

tâchera de diagnostiquer les arriérés et d'en dresser le

pourcentage.

C'est la raison d'être d'une surveillance médicale auto-

risée dans nos écoles publiques, car il est évident que

nous devons fournir aux maîtres les meilleurs éléments si

nous voulons exiger d'eux les meilleurs résultats. Alors

que les salles de classe ne sont pas encore établies sur les

règles d'hygiène, laissez le maitre nous dire combien un

arriéré, garçon ou fille, porte entrave à tout travail sco-

laire ; comment toute tentative quoiqu'elle soit doit être

fondée en vue du butspécial il obtenir chez l'enfant arriéré,

qui livré il lui-même, sans jugement et sans force morale,

peut être le jouet de camarades plus favorisés et parfois

en mesure de comprendre son imperfection, sans la plain-

dre, ou bien être nanti d'un certain jugement qui en fait

un danger social. -- - 1 .. -- -. - . - ? - 1

eXIl Traitement ET éducation des IDIOTS.

Le maître, alors, en conférant avec un expert médical

compétent, découvrira sans grande peine les arriérés.

Le rapport anglais précité n'établit pas de distinction

entre les enfants normaux et les arriérés au-dessous de

sept ans. Je voudrais en finir avec cette question, en m'ap-

puyant sur mon expérience personnelle qui me permet

d'affirmer que les éducateurs du premier âge, s'occupant

d'enfants normaux dans les écoles maternelles publiques,

sont parfaitement en mesure de reconnaître un arriéré ou

un débile mental. Et tant qu'on emploiera au-dessous de

sept ans la même méthode d'instruction pour les enfants

normaux et pour les arriérés, je me déclarerai incapable

de comprendre qu'on trouve des esprits autorisés pour ad-

mettre qu'un système de traitement et déducation appli-

cable il un arriéré n'a pas besoin d'être modifié et adapté

il chaque malade. Il est évident que le terrain pathologi-

que évolue, à preuve que les experts admettent qu'à sept

ans, un arriéré réclame un traitement pédagogique con-

forme à son éducation cérébrale, mais j'estime que le trai-

tement spécial pratiqué par des maîtres autorisés a donné

toute la mesure de son efficacité chez des enfants de moins

de sept ans ; et je ne puis m'empêcher de croire que plus

jeune un arriéré sera soumis au traitement pédagogique,

meilleurs seront les résultats, et plus facile sera la tâche

de ses futurs maîtres.

Il y a quantité d'enfants dont on ne fera actuellement

- rien de bon avec les méthodes disciplinaires, et qui, si on

les avait traités dès leur plus bas-âge, eussent été très amé-

liorés. Les instituteurs des écoles spéciales doivent être

rompus à leur métier, quelque aptitude qu'ils semblent

posséder. Il leur faut une santé robuste, sous peine de ne

pouvoir mener à bien leur travail scolaire, une aptitude

quelconque ne tient pas devant une digestion laborieuse. Il

leur faut un tact infini, de l'originalité et une grande per-

sévérance. L'habitus extérieur est pour beaucoup dans

les résultats d'un maître; il lui faut donc être propre, soi-

gné dans sa personne et dans sa tenue, tout cela commande

le respect, force l'obéissance, tous facteurs de succès. Pour

cette raison je crois que les femmes feraient de meilleurs

Classes spéciales. cxiii

professeurs que les hommes, dans nos établissements spé-

ciaux : du reste, le fait que j'avance est prouvé dans la

pratique des institutions d'arriérés. Quoi qu'il en soit,

homme ou femme, le maitre idéal doit être familiarisé avec

les détails des travaux manuels ; il doit savoir dessiner; et

il n'y auraitpas d'inconvénient a ce qu'il connaisse les soins

a donner aux tous petits enfants. En plus de tout cela,

il faut être bon marcheur, pouvoir courir, pouvoir sauter;

sous peine de ne pouvoir diriger une classe, dont chaque

individu a besoin de marcher, de courir et de sauter.

Des heures d'étude.

Dans le traitement des enfants anormaux, il ne faut évi-

demment pas multipler outre mesure les heures d'étude;

il ne faut pas non plus reporter pour telle occupation, le

temps accordé pour telle autre, En Allemagne, pour une

période de six jours on attribue 24 heures à l'étude.

A Londres, 25 heures de travail intellectuel par semaine

de 5 jours avec un repos de deux heures h midi, et des

poses de cinquante minutes le matin et le soir.

Il est plus que probable que le meilleur emploi du temps

est le suivant : le matin, deux heures et demie d'étude, cou-

pées par deux repos de dix minutes. L'après midi : deux

heures d'études. Entre l'étude du matin et celle du soir, un

repos d'une heure et demie.

Progression de l'instruction.

Quand on veut établir la direction à imprimer au trai-

tement des arriérés, on est parfois arrêté par la difficulté

de préciser le point exact où on veut aboutir. Il est évi-

dent que si nous avons affaire à un enfant susceptible de

faire un adulte normal au point de vue mental, le traite-

ment pédagogique sera plus compliqué que s'il s'agit d'un

enfant destiné passer toute sa vie dans un asile d'aliénés.

N'y a-t-il pas là une grave question à résoudre ? Et

devons-nous nous arrêter il cette théorie qu'il existe des

cerveaux à fonctions latentes et qu'un traitement bien diri-

BOURN&VILLE, Bicêtre, 1901. ?

cxiv Traitement et éducation des idiots.

gé peut faire de l'enfant qui possède un tel organe non

seulement un individu en mesure de gagner sa vie,

mais un être qui s'approche tellement de la normale

que son état mental devient mieux équilibré que celui de

ses parents. C'est lit un point qu'il faut étudier et discuter

avec tact. Les méfaits de l'hérédité pathologique, de l'al-

cool, de la syphilis, de la tuberculose sont connus, et

appellent la réforme de la législation du mariage, réforme

qui mettrait un frein aux effets désastreux qu'entraînent

ces fléaux sociaux. Mais je doute qu'il faille considérer

tout arriéré comme le produit d'une hérédité pathologique.

Etudions maintenant les meilleures méthodes d'éduca-

tion employées dans nos écoles.

La base du traitement pédagogique doit être adaptée aux

moyens intellectuels dont l'enfant dispose ; et mon expé-

rience me conduit il limiter le premier stade du traitement

il l'enseignement de la lecture et de l'écriture et de quel-

ques notions d'arithmétique; en considérant cet enseigne-

ment comme simplement complémentaire de l'éducation

manuelle, qui est, j'en suis convaincu, la sphère où l'on

doit se mouvoir avec de tels enfants.

L'instituteur aura la plus grande latitude pour établir

l'emploi du temps, sous cette réserve que : le travail in-

tellectuelle plus difficile soit exécuté le matin; que la

leçon ne dure pas plus de 30 minutes; que la leçon soit

précédée de quelques minutes d'exercice physique.

Les enfants d'un âge donné varient beaucoup quant à

la rapidité de leur évolution mentale, aussi est-il sage de

laisser il l'instituteur plus ou moins de latitude dans la

- progression du travail de ses élèves.

Le choix du traitement et de l'éducation manuelle a une

grande importance. Pour les petits enfants, toutes les occu-

pations physiques de la petite enfance conviennent. Pour

les enfants plus âgés, il faut choisir entre diverses profes-

sions : menuisier, vannier, tailleur, tisserand, relieur, cor-

donnier, rempailleur, fabricant de brosse et de balais.

Les filles seront plus spécialement exercées aux tra-

vaux d'aiguille, à la cuisine, à la buanderie et autres

. Classes spéciales. cxv

travaux peu pénibles qu'on leur apprend d'ordinaire (1).

Beaucoup de raisons plaident en faveur de l'éducation

physique dans les écoles dont nous nous occupons. C'est

maintenant un fait bien connu qu'une forte proportion

des enfants de nos écoles a une vision défectueuse :

la myopie est la plus habituelle, et s'accroit avec l'âge.

De même, les auristes nous ont appris la fréquence des

imperfections du sens auditif; et on peut affirmer que

beaucoup, beaucoup d'arriérés ne sont arriérés qu'à cause

d'une malformation sensorielle telle que les précédentes.

Aussi en enseignant les arts mécaniques, ou le dessin,

qui mettent en jeu l'oeil et la main, avons-nous une véri-

table pierre de touche du bon fonctionnement des sens.

Et, nouvel argument en faveur de la présence nécessaire

d'un médecin dans toutes les écoles d'arriérés, dès que

l'instituteur découvre une anomalie dans le fonctionne-

ment des sens, il doit soumettre l'enfant à l'examen

médical, en vue du diagnostic à poser et du traitement

à indiquer.

Feu Francis A. Walker, président de l'Institut de

Technologie du Massachusetts, et bien connu a Baltimore,

s'exprime ainsi au sujet de l'éducation manuelle : a J'esti-

me que, chez l'enfant, l'éducation manuelle est à l'intelli-

gence ce que la chirurgie orthopédique est au corps.

Je ne vise pas son influence sur l'oeil et sur la main ; mais,

j'estime que son rôle capital est avant tout de redresser

l'intelligence : comme la chirurgie redresse une jambe

tordue, renforce une articulation malade, cicatrise une

lésion, qui, livrée à elle-même, produirait des dégâts

sérieux et irréparables. Il n'est personne d'entre nous qui

n'ait vu des difformités et des malformations infantiles

prétendues incurables, absolument guéries par les attel-

les, le massage, les topiques et le bistouri de l'orthopé-

diste. - Eh bien, j'estime, en fin de compte, que nombre

d'enfants venus dans nos écoles, arriérés, défectueux au

point de vue mental, peuvent être absolument transformés

(1) C'est exactement ce que nous faisons il Bicêtre et la. Fondation Val-

lée.

cxvi Traitement ET éducation DES IDIOTS.

par l'emploi judicieux d'appareils spéciaux et l'enseigne-

ment des arts mécaniques. Je parle, ajoute l'auteur, pour

ces nombreux enfants qui, mis entre les mains de maîtres

intelligents et très habiles, soumis au traitement pédago-

gique et à l'emploi d'appareils spéciaux, peuvent être

transformés et guéris, alors qu'abandonnés à eux-mêmes,

ils eussent vu leurs tares grandir sans espoir de régres-

sion, sous l'influence du temps et des a-coups de l'exis-

tence. »

Traitement physique.

De la fréquence des anomalies physiques chez les

arriérés, découle la nécessité de l'intervention d'un méde-

cin qui arrêtera chaque détail du traitement physique

destiné à atténuer dans la mesure du possible la défec-

tuosité en question. Les muscles les plus importants

seront éduqués avant les muscles secondaires ; une

attention toute spéciale sera accordée aux mouvements

de la cage thoracique, et à tout exercice destiné à aug-

menter la capacité respiratoire. L'enseignement des jeux

doit marcher de pair avec l'éducation physique; et

j'estime que le professeur doit veiller aussi soigneusement

aux progrès dans les jeux qu'aux progrès dans les études.

J'ai souvent vu des enfants fuire sans goût le devoir

assigné par leur maître, qui tout à coup devenaient gais

et pleins de vie quand la cloche les appelait aux jeux.

Quelques points spéciaux.

Il est évidemment impossible de multiplier il l'infini

les écoles spéciales pour arriérés ; pourtant on doit veiller

à' ce qu'une classe d'instituteur ne comporte pas plus de

vingt élèves ; à ce que les appartements soient aussi

grands que possible ; il leur faut au moins 20 pieds (1)

carrés par individu ; ce qui, sur 12 pieds de plafond,

donne 240 pieds cubes. L'aération doit être parfaite et

l'éclairage aussi satisfaisant que possible, les pièces doi-

(1) Le pied anglais est égal à 0m,301 (Note du T.)

Classes spéciales. CXVII

vent réaliser les perfectionnements hygiéniques les plus

minutieux et les cours contiguës doivent être assez spa-

cieuses pour qu'on y puisse jouer.

« D'une façon générale, le but des exercices physiques

est de maintenir la santé en bon état, avant tout ; puis,

ensuite de développer l'aptitude aux fonctions motrices

de la vie active. Le premier but est d'ordre hygiénique,

le second est d'ordre pédagogique. Mais, que l'on consi-

dère l'action particulière d'un muscle isolé, ou un groupe

de muscles, ou un système musculaire comme celui de la

phonation, ou cet ensemble complexe qui est le corps

humain, ou une classe d'écoliers, ou une équipe de foot-

ball, ou un régiment de fantassins, le hut des exercices

physiques est - en pratique - le même dans tous les cas,

et ne peut être obtenu que grâce il l'observance des

mesures d'hygiène et du traitement pédagogique.

La culture pédagogique doit surtout porter sur la sphère

nerveuse, et la plupart des systèmes d'éducation qui

comportent un traitement physique sont fondés sur la

propriété que possède le système nerveux de recevoir

les impressions, et d'en enregistrer les effets ; ou, en

d'autres termes, sur son aptitude il se remémorer le rôle

qu'il a joué dans l'aquisition d'un mouvement, et à revivre

ce rôle pour répéter le mouvement. Le neuro-pathologiste

note avec soin les particularités du moindre mouvement

de son malade, afin de déterminer la nature, le siège et

le stade évolutif de son affection. Il est également néces-

saire que l'éducateur physique connaisse le sens de tel ou

tel mouvement spontané ou acquis que présentent ses

élèves, depuis les mouvements de recherche délicate,

jusqu'aux plus apparents, jusqu a ceux qui donnent la

preuve du succès obtenu et de l'habileté du professeur.

Ceci ne s'applique pas seulement à la pratique du foot-

ball, des exercices militaires, de la gymnastique, des

travaux de couture ou de cordonnerie ; mais aussi aux

exercices de chant, de dessin, et à l'étude des trois R (1).

(1) On nomme ainsi : la lecture, l'écriture et l'arithmétique; par abrévia-

tion. (N du T.)

CgVIII Traitement ET éducation DES IDIOTS.

Il est évident que le succès, dans quelque branche que

ce soit, du traitement pédagogique précité, ne peut être

réalisé que grâce à l'intelligence et à l'habileté dont les

professeurs auront fait preuve dans le choix du procédé

d'éducation à appliquer à un malade présentant tel âge,

telle capacité, telle équation neuro-musculaire (1). »

L'importance de l'élément musculaire est telle dans

l'éducation physique que nous avons en vue, que nous

n'hésitons pas prédire, que l'étude raisonnée des mouve-

ments est destinée à jouer un rôle beaucoup plus consi-

dérable que par le passé, dans l'instruction professionnelle

des instituteurs de tous degrés. « On ne saurait trop

répéter, dit l'aliéniste anglais Mercier, dans son ouvrage

sur le Système nerveux et la pensée, on ne saurait trop

répéter que l'étude des mouvements est souvent le seul

renseignement qui nous puisse l'aire juger de l'état du

système nerveux. »

S'il en est ainsi et personne n'y vient contredire -

n'est-il pas évident que chaque détail du système d'éduca-

tion doit être choisi et assorti à la formule neuro-muscu-

laire et au développement de l'enfant ou de l'adolescent ? `t

Serait-ce aussi trop demander que les éducateurs se con-

formassent aux lois de l'évolution qui les instruirait sur

l'état fonctionnel et la résistance des centres cérébraux

et des muscles, si intimement liés au fonctionnement des

centres ? Je reconnais que les lois du développement sont

enseignées, depuis longtemps, dans les écoles de tous

degrés : primaires, secondaires et supérieures ; mais je

voudrais que les instituteurs, professeurs, et chargés de

cours, accordassent plus de soin à l'étude et à l'exposé

des particularités physiques et mentales qui différencient

l'enfant du jeune homme, celui-ci de l'adolescent, etc. (2) »

Tout ce qui a été dit de l'enfant arriéré, dans les pages

qui précèdent, peut également être appliqué à l'enfant

(1) Nous nous proposons d'introduire à Bicêtre et Vallée, des exercices

de gymnastique respiratoire qui fonctionnent depuis quelque temps à l'Institut

médico-pédagogique avec le concours de M. J. Boyer.

(2) Rapport du D' E. M. tlartewell, clirecleurde l'éducation physique, dans

les écoles publiques de Boston.

Classes spéciales. cxix

épileptique en ce qui concerne l'éducation mentale,

manuelle et physique. Nous estimons que ces écoles spé-

ciales doivent être établies au rez-de-chaussée (1), autant

que faire se peut. Quant à la question de maintenir ces

enfants dans des classes séparées, c'est encore un pro-

blème à résoudre.

Je crois que ceux qui ont vécu dans le commerce

d'enfants affligés de cette terrible maladie peuvent hardi-

ment demander il nouveau la discussion de leur cas

devant l'assistance et présenter leur situation comme

digne de toute la sollicitude humaine.

Nous autres médecins, nous confessons notre impuis-

sance a réaliser autre chose qu'une sédalion dans les

accidents, et, dans certains cas, à sauvegarder par le trai-

tement et l'éducation tel degré d'intelligence que l'enfant

présente ; pour le moment, il ne faut pas nous demander

plus. Mais pour ceux qui ne sont pas atteints d'une telle

affection, il reste à pourvoir à leurs nécessités et à leur

rendre, dans leur réclusion, l'existence aussi douce et

aussi confortable que possible. L'enfant qui souffre, qu'il

soit riche ou pauvre, souffre il titre égal ; mais la fortune

apporte à l'un des soulagements et des heures de plaisirs

dont est privé le malheureux qui ne peut s'offrir des livres,

des images, des jouets, une villégiature, et des compa-

gnons de jeu. Victor Hugo disait : « Ceux qui ont vu

souffrir des hommes n'ont rien vu, il faut avoir vu souffrir

des femmes ; ceux qui ont vu souffrir des femmes n'ont

rien vu, il faut avoir vu souffrir des enfants. »

Dans tous les cas, nous ne devons pas abandonner cette

question et la conscience nous ordonne de voir dans nos

proches, malheureux, autre chose que des êtres qu'il faut

empêcher de tomber à Litre criminel, entre les griffes de

la loi ; mais au contraire, lorsqu'un individu est dûment

reconnu comme incapable de pourvoir à ses besoins

comme tout le monde ; de contribuer à son entretien pour

(1) On sait que nous avons fait prévaloir les rez-de-chaussée V Bicêtre.

cxx Traitement ET éducation DES IDIOTS.

telle ou telle part, et, sous une tutelle bien appropriée,

de leur rendre la vie douce sinon féconde en résultats.

L. E. MOREL

§ I. Allemagne.

Sous ce titre : Écoles d'assistance pour les alTié-

rés, leur importance au point de vue médical et

social, le D'' Léopold Laquer, médecin neurologiste

à Francfort sur Mcin, a publié l'an dernier un rapport

de 64 pages. Une préface du D'' l11.1 ? PLIN, professeur

de psychiatrie à IIeidellaerg, donne de ce rapport

une idée générale et met en relief la portée scientifi-

que et sociale des Écoles spéciales pour les enfants

arriérés. Voici cette préface (1).

Le rapport que vous avez présenté à Baden-Baden m'a

vivement intéressé. A mon avis, il n'est pas de médecin,

d'éducateur, de personne même, qui prenne souci de l'a-

venir du pays, qui ne puisse reconnaître de quelle impor-

tance seront pour la génération future, les classes d'assis-

tance, sous la surveillance médicale, telle que vous les

concevez. Ces choses se défendent elles-mêmes;je ne puis

cependant m'empêcher de faire ressortir que ces classes

feront disparaître les troubles intellectuels et physiques

d'un grand nombre d'enfants, et qu'elles permettront

d'utiliser des forces, qui, sans elles, auraient été laissées

en friche, ou engagées dans de dangereuses voies. Elles

débarrasseront les écoles ordinaires du poids mort des

arriérés. Les nouvelles exigences scolaires demandent

une catégorisation plus rigoureuse des élèves, impossible

sans ces classes spéciales. -

(1) Nous en devons la traduction il M. J. Boyer, professeur il l'Institut

médico-pédagogique.

Classes spéciales. cxxi

Grâce à elles, l'attention de chacun sera attirée sur des

enfants malades ; leur organisation provoquera entre les

médecins et les pédagogues une collaboration à la fois

intime et touchante, au grand avantage non seulement de

ce médecin et de ce pédagogue, mais encore et surtout de

leurs pupilles. Cette collaboration amènera la connais-

sance exacte d'états morbides, que nous désignons encore

sous le nom vague de dégénérescences. L'activité médi-

cale qui ne manquera pas de se créer autour de ces classes

d'assistance finira par faire découvrir les causes profon-

des de ces dégénérescences, sur lesquelles plane encore

une complète obscurité, et par atténuer peut-être la

déchéance de la race.

A ma grande joie, vous avez ouvert la voie; d'autres

vous suivront, qui, se servant des remarques et observa-

tions faites à la faveur de ces classes spéciales, détermine-

ront les causes d'hérédité alcoolique et syphilitique, et

d'acquisition des troubles mentaux (1).

Puisse votre rapport obtenir l'attention et l'estime que

mérite le sujet dont il s'occupe !

Avec mes salutations confraternelles, agréez l'assuran-

ce de la considération du vôtre, ,

E. Iil3 : r.PrLIV.

A coté des renseignements statistiques qui nous mon-

trent une fois de plus que l'Allemagne est en avance sur

nous au point de vue des écoles spéciales pour enfants

arriérés puisque, dès 1897, cette nation était pourvue de.43

installations de ce genre, nous trouvons dans le rapport

de M. Laquer quelques détails sur ces établissements

qui nous en dévoilent le fonctionnement.

D'abord ne sont reçus dans ces écoles spéciales que des

enfants ayant sans succès fréquenté deux ans les écoles

communales. Chaque élève a une feuille individuelle qui

(1) Le lecteur, médecin ou' pédagogue, trouvera de nombreux renseigne-

ments sur toutes les causes de « dégénérescences,» en particulier sur l'héré-

dité, l'alcoolisme, la syphilis et le saturnisme dans les vingt-deux volumes

de nos Comptes-rendus du service des enfants de Bicêtre (1880-1901).

CXXII Traitement et éducation DES idiots.

mentionne ses antécédents héréditaires et personnels, ain-

si que sa vie scolaire et une observation médicale détail-

lée. Le maître ou la maîtresse accompagne l'enfant pen-

dant 5 ans, la scolarité se poursuit jusqu'à 11 ans. L'en-

seignement n'a lieu que le matin. Les exercices varient

de demi-heure en demi-heure. Chaque heure de travail

est suivie de 10 iL 15 minutes de repos. Les chants,

les exercices en plein air, les leçons de choses, les tra-

vaux manuels, les leçons de prononciation et de diction

occupent une large place dans le plan de l'enseignement.

Ainsi que cela se pratique du reste depuis longtemps à

l'asile-école de Bicêtre, on apprend d'abord aux enfants

à connaître leur nom, puis les parties du corps, ensuite

l'école, la rue, la ville, le nom des objets familiers, lonom

des personnes qui les entourent, etc. En toutes classes,

on fait simultanément l'enseignement du calcul, de sorte

que l'enfant, suivant ses dispositions, peut être affecté il

une classe inférieure ou à une classe plus élevée. Quand

c'est possible, on leur donne de courts devoirs faits à la

main. Les punitions sont réduites au minimum.

A sa sortie de l'école spéciale, l'élève n'est pas perdu de

vue. Le gouvernement saxon alloue môme 150 marks do

récompense aux maitres ouvriers qui réussissent il appren-

dre un métier aux élèves de Dresde et de. Leipzig.

Comme on le voit c'est une oeuvre de véritable relève-

ment.

La ville de Brunswick signale également aux conseils

de révision les conscrits sortis de ces écoles spéciales, de

sorte que l'autorité militaire est au courant de leur état

mental.

Comme nous l'avons, du reste, dit si souvent nous-même,

M. Laquer estime en terminant que, dans ces sortes d'éta-

blissements scolaires, la collaboration des médecins et (les

maîtres est indispensable, que le médecin doit seul en

avoir la direction, et que l'institution des médecins d'éco-

le peut seule permettre de découvrir dans les écoles ordi-

naires les arriérés de toutes soi lis et les idiots à diriger

soit dans les asiles, soit dans les écoles spéciales.

Classes spéciales. cxxiii

Il. Angleterre.

I,

L'éducation des enfants arriérés devant les comités

des écoles.

18chool Roard Ga;ctte, April 1900.)

PAR le 1)' SIIUTTf.Ii\'OItTI, GK.

Le Dr dhuttleworth, particulièrement à même d'exposer

la question, tant par sa haute situation qu'en raison de son

expérience, lit cette note il la Ch2lc(Itood Society.

Il fait remonter le mouvement en faveur de l'éducation

spéciale des enfants arriérés, à l'année 1863 ; le point de

départ a été Ilalle, en Allemagne. Des écoles répondant

à ce but, furent ensuite fondées à Dresde, Leipzig et Bruns-

wick. En 1896 on ne comptait pas moins de 30 écoles spéciales,

avec un personnel enseignant de 115 professeurs, pour l'Alle-

magne seule. - Les dernières statistiques montrent, que

6.000 enfants environ reçoivent actuellement celte éducation

spéciale sur le territoire de l'Empire Allemand.

L'auteur esquisse ensuite le mouvement pédagogique

dans les Pays Scandinaves, et remarque, qu'ici, les profes-

seurs font presque tous des femmes, alors qu'en Allemagne,

il est presque de règle que ce soient des hommes. En ce qui

concerne son pays, le D1' Shuttlcworlh se montrepleind'espoir

et croit qu'en dépit de nos instincts routiniers nous profite-

rons de l'expérience de nos voisins, et que nous ferons

beaucoup mieux dans la suite. A Londres, nous devons

la création de ces établissements spéciaux pour enfants

arriérés, il l'initiative de feu le général Moberly. - L'affaire

fut examinée au préalable, et un des rapports communiqués

au Pal'lws'Mnsewn, sur la « Scienlific Stttdy o/'the Mental

and Physical Conditions of' Childhoocl, » contient l'exposé

des travaux antérieurs, relatifs la question.

L'auteur rappelle les rivalités courtoises entre le Conseil

des Ecoles de Londres et le Conseil de Leicester, au sujet

CXXIV Traitement ET éducation DES IDIOTS.

de la priorité de la mise en pratique de renseignement des

arriérés, et la conclusion en faveur du Conseil des Ecoles

de Leicester qui ouvrit la première école spéciale (la lro en

Angleterre) en avril 4S`l ? . A ce joui', la capitale ne possède

pas moins de 50 centres d'éducation spéciale, instruisant

2. 125 enfants. Puis lenteur communique quelques schémas

indiquant l'expansion prise par ces études dans divers grands

centres manufacturiers.

Les dépenses occasionnées par les écoles spéciales doivent

paraitre nécessairement élevées comparativement aux frais

qu'occasionnent les écoles ordinaires (le tableau comparatif

présenté par l'auteur montre que ces chiffres sont doublés.)

Les professeurs sont mieux payés et le coût des constructions

est plus élevé. L'auteur remarque avec plaisir, que le gou-

vernement se propose d'allouer, dans chaque école spéciale

et par unité, une subvention moyenne de 50 s. pour l'instruc-

tion générale, et pour l'éducation manuelle, une subvention

de 30 s. pour les enfants les plus jeunes et de 10 s. pour les

enfants plus âgés.

L'expérience du D1' Shuttleworth le conduit it penser qu'il

y a grand intérêt dans l'appréciation individuelle des métho-

des d'enseignement : les systèmes les moins rigides donnent

les résultats les plus satisfaisants.

Quant aux heures de classe, il pense qu'on doit accorder

un fort total d'heures libres aux écoliers ; car, bien que

l'atmosphère des écoles spéciales soit généralement préférable

- physiquement et moralement à celle du foyer, il n'est pas

prouvé que 5 heures d'étude soutenue soient sans préjudice

pour des enfants cérébralemcnl débiles, et qui sont rarement

indemnes au point de vue physique.

11 note avec plaisir que dans la plupart des villes,

les Conseils ont l'avantage de l'adjonction d'une compétence

médicale dans les écoles et que l'état physique des enfants

a une telle importance que dans leur éducation, médecin et

professeur doivent marcher « la main dans la main. »

En terminant, le Dr Shuttleworth discute les méthodes

spéciales de traitement préconisées par divers professeurs (1).

(Trad. de M. L. E. MonEL). Ces deux notes ont paru dans The

Journal of mental Science, avril 1901.

(1) Du même auteur : Menlally Déficient Children, ineir treatment and

Training, deuxième édition.

Classes spéciales. cxxv

II.

Classes spéciales dans les écoles pour jeunes débiles mentaux,

PAR le D' CII1VVING W.

(Charte Rev. Avril 1900.)

Dans cet article, le Dr Channing donne un lumineux

aperçu de la question de l'éducation des jeunes débiles men-

taux. Il insiste particulièrement sur la nécessité d'un diag-

nostic précoce du développement anormal de l'enfant (tant

physique que mental, car les deux sont généralement associés)

et il s'appuie sur la remarque de Mosso « que le système

d'éducation doit, avant tout, viser il améliorer le terrain

névropathe, pour soumettre secondairement le cerveau au

travail intellectuel (1). » Ce système est en parfait accord

avec les idées depuis longtemps exprimées par Warner, et,

du reste, depuis Séguin, tout le monde est fixé, et tous les

systèmes successifs d'éducation des débiles mentaux ont été

établis sur le principe que le traitement physique doit précé-

der le traitement psychique. L'âge avancé, auquel, en

thèse générale, les jeunes débiles mentaux sont soumis il

l'éducation spéciale, constitue un regrettable contre-temps

et le Dr Channing estime très justement que les résultats

obtenus seraient beaucoup meilleurs si les sujets étaient

traités scientifiquement dès la plus tendre enfance.

Toutefois, remarque le Dr Channing, le système d'éduca-

tion actuel n'est pas il l'abri de la critique, aussi bien celui

qui s'adresse au bas-âge, que celui qui s'adresse aux premiè-

res années de la vie scolaire.

Examinant ensuite les détails pratiques du traitement des

enfants anormaux, le ])1' Channing rappelle les méthodes appli-

quées depuis longtemps en Suisse, en Allemagne et en Suède

(méthodes qui commencent il s'implanter en Angleterre)

pour le traitement des enfants les plus débiles.

(t) C'est notre pratique depuis plus de vingt ans : traitement physique 1

d'abord (exercices de la station, de la marche, des jointures, massage, bains,

hydrothérapie), puis traitement psychique et éducation des sens.

CXXVI Traitement ET éducation DES IDIOTS.

Quoique l'Amérique ait été abondamment pourvue de mai-

sons d'éducation pour les débiles mentaux (en comprenant

sous ce nom les idiots et les imbéciles), il ne semble pas

que les résultats obtenus jusqu'ici soient meilleurs dans les

classes spéciales que dans les classes annexées aux écoles

primaires; et le Dr Channing termine on plaidant la cause

de ces dernières, surtout dirigées par des instituteurs bien

prépares.(Trad. de M. t.. H. Morel, interne prov. du service.)

En ce qui concerne les enfants idiots de toute catégorie,

nous avons toujours soutenu l'opinion. avec d'autres d'ail-

leurs, que le traitenetat wécdico-oda7origice devait être mis

en oeuvre dès qu'on a constaté les premiers signes de l'idio-

tie, au plus tard à deux ans.

§ III. BELGIQUE.

Anvers, rue Jordaens, 25.

15 mars 1902.

Honoré Confrère Bourneville,

Voici quelques renseignements sur le fonctionnement

de l'école d'enseignement spécial d'Anvers.

C'est une école qui a été créée pour les enfants arriérés

et non des classes spéciales ; c'est seulement dans un éta-

blissement semblable que peut être réalisé le traitement

sérieux de ces cnfants; les classes éparpillées dans les éco-

les ordinaires ne peuvent donner de bons résultats.

L'école d'Anvers en est à sa troisième année d'existence.

Le nomhre des élèves est resté depuis le début assez sta-

tionnaire : une honne centaine. Depuis quelque temps

cependant, le nomhre tend à s'accroître et bientôt une

sixième classe devra être créée; il en existe cinq actuelle-

ment, le nomhre des enfants à un même instituteur ne

devant jamais dépasser vingt. Les cinq instituteurs, guidés

par un directeur, s'occupent de l'instruction des enfants.

Classes spéciales. cxxvii

Un médecin, possédant lui-même son diplôme d'institu-

teur, cstattaché spécialement à l'école.

Il y a un laboratoire où les enfants peuvent être examinés

physiquement et l7sycllicluemcnt. Ce laboratoire n'est pas

encore très riche en instruments, mais on y trouve cepen-

dant les principaux appareils anthropométriques, une bas-

cule, et divers objets nécessaires à l'examen des sens. Un

outillage complet pour l'examen de la gorge et du nez y

existe aussi.

Les enfants sont examinés au point de vue de l'hérédité .

et du passé pathologique : un dossier de ces renseigne-

ments est dressé pour chacun d'eux. L'examen anthropo-

métrique, l'examen physique et l'exploration psychique

des enfants sont faits de façon détaillée.

Un examen pédagogique, au point de vue de l'instruc-

tion proprement dite, est pratiqué par le directeur et les

instituteurs.

Les enfants sont répartis dans les classes, en se basant

plutôt sur le degré d'instruction qu'ils possèdent et non

sur leur état intellectuel proprement dit. Ceci est un défaut,

à mon avis. C'est le diagnostic psychique qui devrait

servir de base au classement des enfants. (J'espère dans

un temps donné arriver à corriger cette erreur).

Prochainement des bains-douches seront installés à

l'école. La gymnastique est enseignée une demi-heure

journellement pour chaque classe ; elle se fait au son

du piano (un pianiste est attaché à l'établissement).

Les jeux et le jardinage prennent aussi leur part dans

l'éducation physique des enfants.

L'enseignement est essentiellement intuitif. - Tous les

enfants arrivent Ù apprendre à lire, il écrire, à calculer, à

parler assez correctement, il part évidemment quelques-

uns dont l'état est sur les limites de l'idiotie ou de l'imbé-

cillité.

L'éducation manuelle (modelage, pliage, cartonnage) se

fait avec soin. - Les enfants embrassent tous une profes-

sion manuelle.

Il existe une oeuvre post-scolaire spéciale à l'école, c'est

la « section anversoise de l'école d'enseignement spécial »

C1XVIII Traitement ET éducation DES IDIOTS.

qui est rattachée à la Société protectrice de l'enfance anor-

male dont le siège est à Bruxelles. Cette section, sorte de

comité de patronage, s'occupe du placement des enfants à

leur sortie de l'école.

Voila, honoré confrère l3ourncville, les principaux ren-

seignements que je puis vous fournir sur l'école d'Anvers.

Je pense que dans votre propagande, que j'espère vive-

ment voir arriver à un résultat, il y aurait peut-être intérêt

à remplacer l'expression « classes spéciales » par « école

spéciale ». A Bruxelles, en Allemagne, en Hollande, on à

expérimenté les classes et partout- on est devenu partisan

des écoles spéciales.

Autant, je pense, demander une installation durable et

complète du premier coup.

Veuillez, je vous prie, honoré confrère Bourneville ,

croire en mes sentiments bien dévoués.

Docteur LE ?

Médecin de l'école d'enseignement spécial d'Anvers.

Bruxelles, le 7 avril 1902.

. Très honoré Docteur,

Voulez-vous, tout d'abord, m'excuser de répondre si

tardivement à votre lettre du -2[ mars ? Je suis rentré

hier soir d'un voyage d'études en Allemagne et c'est ce

matin seulement que j'ai pu en prendre connaissance

Comme vous le savez, c'est le 1er mai 1897 que s'est

ouverte l'école d'enseignement spécial de Bruxelles. A la

fin de l'année scolaire 1897-98, les médecins et moi nous

avons adressé à l'administration centrale, chacun de

notre côté, un rapport détaillé sur la le,«,, année d'existen-

ce du nouvel organisme. Ce sont, je pense, des extraits de

ces rapports qui vous ont été communiqués au commen-

cement de 1899. Depuis cette époque, tous nos efforts ont

tendu à perfectionner notre système et nos méthodes, de

façon à les rendre efficaces pour notre très intéressante

population. Bien que nous n'ayons plus adressé de rap-

ports à l'administration, nous avons eu la satisfaction de

voir le monde officiel et le public s'intéresser vivement à

Classes spéciales. ÇXXIX

notre oeuvre, grâce au bienveillant appui qu'a bien voulu

nous prêter la presse toute entière.

Cette année, nous nous proposons de publier un double

rapport médical et pédagogique, sur nos travaux au cours

de ces cinq dernières années. Je m'empresserai de vous le

communiquer dès qu'il aura vu le jour, c'est-à-dire vers

la mi-juin probablement.

Au cours de 1901, nous avons fondé sous la présidence

effective de l'infatigable M. Jules Lejeunc, Ministre

d'Etat, la « Société protectrice de l'enfance anormale », en

vue de créer un mouvement d'opinion en faveur de l'édu-

cation des enfants arriérés, quels qu'ils soient, et de

chercher à obtenir des Pouvoirs publics la création d'éta-

blissements destinés à ces malheureux.

Malgré l'inertie et l'indifférence que nous avons sou-

vent rencontrées, malgré l'hostilité systématique et irré-

ductible de certains, nous avons le plaisir de constater

que Vidée est en marche et que notre oeuvre de propa-

gande commence à porter ses fruits.

Ainsi, Bruxelles, qui n'avait qu'une école pour garçons

arriérés, fonde en ce moment des classes spéciales pour

filles dans plusieurs établissements d'instruction primaire,

en attendant que ses ressources lui permettent de fonder

une école d'instruction spéciale à leur usage.

A Ixelles, la question est résolue affirmativement, en

principe. L'école s'ouvrira dès que le budget le permettra.

Saint-Gilles, SchaerbecK, Gand et Verviers s'occupent

également de l'éducation des arriérés, et tout fait espérer

une solution favorable.

Comme vous le voyez, nous ne restons pas inactifs.

Nous ne nous dissimulons pas, toutefois, que nous aurons

beaucoup de peine à ébranler la lourde machine qui s'ap-

pelle l'Etat, pour obtenir qu'il crée des organismes à

l'usage des idiots, des épileptiques, etc.. Déjà, à présent,

nous avons une peine incroyable, rien que pour faire

dresser la statistique des malheureux auxquels aucune

école ne peut être ouverte en Belgique. Il est vrai qu'il est

impossible de soulever cette question sans toucher aussi

à celle de l'Instruction obligatoire, qui est la bète noire de

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1901. ?

cxxx Traitement ET éducation DES idiots.

notre gouvernement clérical.

Il va sans dire, très honoré docteur, que si pour un

travail quelconque, vous avez besoin de statistiques im-

médiates, je me mets entièrement à votre disposition pour

vous fournir ceux que je possède actuellement.

En vous réitérant mes regrets pour le retard forcé

qu'a subi ma réponse, je vous présente l'expression de

ma très haute considération.

Signé : Em. LACROIX (1).

§ IV. Danemarck..

Copenhague, 8 avril 1902.

A Monsieur le Dr Bourneville, médecin de Bicêtre.

En Danemarck, il n'y a qu'à Copenhague où existent des

classes spéciales d'enfants arriérés. Ces classes sont au

nombre de neuf. Elles contiennent 150 enfants (90 garçons

et 60 filles ? Trois classes ont été établies en 1900, trois en

1901, trois en 1902.

Les classes spéciales ne forment pas encore une institu-

tion distincte. Elles sont provisoirement installées dans les

écoles publiques des divers quartiers de la ville. On ne

reçoit dans les classes spéciales que des enfants imbéciles

aux degrés les plus légers, mais pas d'enfants idiots.

Quant aux institutions Danoises consacrées aux enfants

11) Nous avons eu, il : " a plusieurs années, la visite, quelquefois renouvelée,

de les 0" de Moor et Ley, et celle de M. Lacroix, auxquels nous avons

montré eu détails l'organisation et le fonctionnement de notrc service.

Classes spéciales. cxxxi

idiots ou imbéciles à des degrés divers, il y en a deux, une

en Sélande, Garnie 13,ilOehvs Ebbei'odgoard, la seconde

en Jutland, Keller Austalt.

I. Garnie l3altle)mcs Ebberodoard comprend quatre éta-

blissements :

1° Garnie Bakkehus, asile école (200 pupilles des deux

sexes, situé à Copenhague V. fli,ahbelcs Allée2l). C'est l'ins-

titution Danoise la plus vieille. Elle a été fondée en 1855

par le Dr .T. Il. llùbertz. - 2° Ebberoclgoarcl, asile et ate-

lier de travail pour environ 400 enfants et adultes des deux

sexes, fondée en 1892 par la direction de Garnie Bakkehus,

située près de Birkeved il 24 kilom. de Copenhague.

Il0 13 illenwseun : ucl, asile pour environ 100 adultes

mâles, situé près de Lyngby à 16 kil. de Copenhague et

4° Kavensilbincle, asile pour environ 100 enfants des deux

sexes, situé près de Copenhague, à deux kil. de la ville.

II. Keller Austalt, fondée à Copenhague en 1865 par

Johan Keller, a été transférée en 1900-1901 à Bréjning,

Jutland (à env. 15 kil. de Vejle).

Kellers Austalt comprend un asile école et un atelier de

travail pour environ 600 pupilles, adultes et enfants des

deux sexes.

Chaque institution est sous la direction de trois mem-

bres (pour Gl. l3ulclcelius-Ehherodgoard, en attendant 5

membres). ).

Le Président de la direction de Gl. Bakkehus-Ebberod-

goard est M. A. Asmussen, chef de division au ministère

des cultes et de l'instruction publique. Le Président de la

direction de Keller-Austalt est M. le Préfet Bardenfleth à

Vejle.

Les membres des directions sont nommés par le Minis-

tre de l'instruction publique pour trois ans. Le Directeur

administratif de Gl. Bakkehus est M. E. V. Rolsted : celui

de Ebberodgoard, M. le Dr A. Friis, et de Keller-Aus-

talt, M. le professeur et Dr Chr. Keller.

Les institutions sont propriétaires d'elles-mêmes; mais

pour chaque pupille sont payées 600 couronnes par année

CXXXII Traitement ET éducation DES IDIOTS.

(environ 850 francs). L'Etat paye 300 couronnes, la com-

mune 300 couronnes.

La loi de finance pour 1901-1902 accorde 3tu)3 cou-

ronnes pour l'installation des idiots dans les deux institu-

tions et, de plus, 10.000 couronnes pour l'installation des

idiots adultes capables de travailler chez des familles pri-

vées, mais sous le contrôle des institutions.

Je me permets, Monsieur, de vous envoyer par la poste

un article sur Bicêtre que j'ai fait dans notre journal pé-

riodique.

Veuillez agréer, Monsieur le Docteur, 1 expression de ma

considération la plus distinguée.

M. Dam m.

Quelques considérations générales ressortent de ces

documents.

1° Dans la plupart des pays, on se préoccupe activement

du traitement médico-pédagogique des enfants arriérés

dans des classes ou mieux des écoles spéciales. Les caté-

gories qu'on y reçoit sont celles que nous avons indiquées

dans notre Lettre à M. CaJTiot.

2° Tous les enfants considérés comme un « poids mort »

sont envoyés, après examen médical, dans les Ecoles spé-

ciales. Leur observation, ou feuille individuelle, ou dossier

est dressé avec soin (1) .

3° Les résultats obtenus sont partout très-encourageants.

La majorité des enfants sont améliorés au point de pouvoir

vivre en société et de subvenir à leurs principaux besoins.

On soustrait de la sorte un groupe important de malheu-

reux, malades, aux maisons de correction et aux prisons,

dont la population est constituée dans l'immense majorité

(1) Voir à cet égard les observations de nos Compte-rendus de Bicélrc et

nos Instructions médico-pédagogiques.

Classes spéciales. cxxxiii

des cas par des malades. On restreint le vagabondage, le

nombre des (,léli2qLtiits ; on fait oeuvre de préservation

sociale, oeuvre d'humanité (1).

4° La nécessité de commencer le traitement et l'éduca-

tion des arriérés le plus tôt possible, sur laquelle nous

avons si souvent insisté, la possibilité de laguérison, sont

confirmées par les auteurs que nous avons cités. Les avan-

tages de l'éducation spéciale, de la bonne tenue et de la

propreté des maîtres et des maîtresses, de la variété des

occupations, l'importance des exercices physiques, du

travail manuel, du dessin, du chant, le rôle capital du

médecin, l'hygiène des classes, la limitation du nombre

des élèves, l'utilité d'un matériel complet d'examen, le

rôle des femmes, sont mis en relief par tous les auteurs

cités.

Messieurs,

Nous appuyant sur tous ces documents, sur l'intérêt

social de la réforme, que nous défendons et dont la Loi

sur l'obligation de l'instruction primaire fait un devoir,

sur les avantages de sa réalisation au point de vue de

l'assistance, nous vous prions de renouveler encore une fois

votre voeu en faveur de la Création de Classes spéciales

ou d'Ecoles spéciales pour les Enfants arriérés.

(li En 1803 les membres du Congrès des aliénistes et neurologistes ovt

visité le pénitentier de l'ile de Ré. On a fait ranger les condamnés dans une

des cours. L'un de nos collègues, s'adressant a nous, nous dit : « Vous

retrouvez là vos malades de liicctre." » La remarque était très juste. On

observait, en effet, chez eux, les mêmes signes de dégénérescences, les mêmes

déformations de la tète.

I.

Assistance, traitement et éducation des dégénérés;

PAR nOURNE\'IU.E,

A l'une des séances du Congrès d'assistance familiale qui

a eu lieu en octobre 1901, M. Paul Robin a fait une commu-

nication ayant pour titre : Une cause d'inefficacité de l'Assis-

tance familiale et de toutes les assistances en général.

L'auteur s'élève contre les sacrifices faits par l'Assistance

publique ou privée en faveur des inférieurs qui sont nés tels,

ou le sont devenus par de fâcheuses circonstances.... On

fait vivre les pires dégénérés, notamment les faibles d'esprit.

Les assistances, au prix de quelques misérables soulagements

individuels, préparent à toutes les imprévoyances, poussent

à la procréation aveugle d'une multitude d'inférieurs et de

dégénérés. Le remède : « Obtenir à tout prix des inférieurs et

des dégénérés qu'ils soient les derniers de leur race. »

« Qu'ils aient donc les plaisirs qu'ils désirent tant, ces in-

fortunés qui en ont si peu d'autres ! mais qu'à ceux qui sont

capables de le comprendre, on apprenne à ne pas les obtenir

aux dépens de misérables descendants ; et qu'aux dégénérés

extrêmes incapables de sauver eux mêmes et leur race virtu-

elle, les savants artistes de la physiologie viennent fournir

une aide humanitaire en leur apportant efficacement et sans

douleur les bienfaits de la stérilité. »

Puis l'auteur fait l'éloge des sociétés malthusiennes, invite

les membres du Congrès à y faire adhésion, affirme que

grâce à la suppression directe ou indirecte des dégénérés,

« à la satisfaction sexuelle sagement dirigée », à l'application

des doctrines malthusiennes, « les assistances deviendront

vite de plus en plus riches. » - C'est à cette étrange

communication que nous avons cru devoir répondre en ces

termes.

Assistance DES dégénérés. CXXXV

M BOURNEVILLE. Je ne puis, pour mon compte, lais-

scr passer sans protestation les idées anti-physiologiques,

anti-naturelles, antj-1ll1maines qui viennent d'être expri-

mées devant vous.

L'homme et la femme sont faits pour créer la famille.

Le devoir et l'intérêt de la Société, c'est d'assurer il tous

des moyens d'existence. C'est dans cette voie qu'il faut

marcher. C'est cet idéal qu'il faut réaliser. l'otu cula, est-il

nécessaire de supprimer ou de mutiler les malheureux qui

constituent une charge pour l'assistance publique, comme

le propose M. Robin ? Il parle des dégénérés, des inutiles,

d'une façon générale, visant toutefois plus particulièrement

les idiots, les imbéciles et les arriérés intellectuels. Or, ce

sont les moins dangereux an point de vue de la procréation.

A côté d'eux, il y a les idiots, les imbéciles et les arriérés

moraux. C'est parmi eux qu'on trouve les perversions les

plus nombreuses, les impulsions génitales les plus violen-

tes, le plus grand danger de la procréation. Ils manquent

à leurs obligations professionnelles, familiales, sociales.

Faut-il les supprimer aussi ? Et les criminels, si souvent

des malades, victimes de l'hérédité, de la misère et des

excès, vous en débarrasserez-vous, : \1. Bobin, par les

mêmes procédés ? 't

Vous êtes utilitaire. Vous ne voulez pas qu'on fasse des

sacrifices pour les dégénérés, les débiles, les non-valeurs ;

qu'on fasse des dépenses à leur profit, au détriment des

normaux. Vous oubliez, vous, éducateur, pédagogue, que

la grande majorité d'entre eux sont améliorables, que

beaucoup peuvent être rendus sans inconvénient il la so-

ciété. Soyez logique, allez jusqu'au bout. Supprimez tous

les inutiles, tous les coûteux, ceux qui peuvent engendrer

une descendance tarée : phtisiques, cancéreux, syphiliti-

ques, alcooliques. Où vous arrêterez-vous ? Quelle est la

limite que vous tracerez entre les êtres les plus dépour-

vus soit physiquement, soit intellectuellement, soit mora-

lement et les individus de vigueur physique, de force

intellectuelle, de valeur morale, moyennes ou faibles.

Oui, les ressources de l'Assistance publique, à Paris,

cxxxvi Assistance DES dégénérés.

dans toute la France, sont insuffisantes : mais on peut les

trouver sans supprimer les dégénérés, sans les mutiler,

sans commettre des actes de cruellc barbarie.

Que les favorisés do la fortune donnent largement, géné-

reusement, c'est le meilleur moyen d'atténuer des reven-

dications légitimes. En le faisant, ils s'acquitteront de leur

devoir de solidarité sociale.

Tout ce que, personnellement, nous avons fait ou essayé

d'accomplir, en fait d'assistance, nous a été inspiré par

les idées de la Révolution française sur l'organisation de

l'assistance : assister, soutenir, aider tous les malheu-

reux : vieillards, malades, infirmes de corps ou d'esprit,

orphelins, citoyens sans travail. Remplir cette tâche avec

l'esprit d'humanité le plus large, tel est le devoir de la

République. Restons dans la nature, soyons humains.

II.

L'Assistance des idiots, imbéciles et arriérés.

Dernièrement, nous avons relaté plusieurs faits dé-

montrant la nécessité de l'assistance des épileptiques

sous forme d'hospitalisation. Nous avons indiqué aussi

dans quelles conditions l'assistance familiale ou à

domicile pouvait s'exercer utilement, sans nuire au

malade, sans causer de préjudice à la société. En

maintes circonstances aussi, toujours en nous appuyant

sur des faits, empruntés il des journaux de toutes les

opinions politiques, nous avons insisté sur la nécessité

non moins urgente de l'assistance des idiots, imbéciles

et arriérés, adultes et enfants. Voici un fait nouveau,

emprunté au Progrès de l'Eure du 13 décembre,

inséré sous le titre : Vol et attentat la pudeur :

« La gendarmerie a ouvert une enquête au sujet d'un vol

et d'un attentat à la pudeur dont s'était rendu coupable un

nommé Philippe Hébert, de la commune de Le Fresne, figé

de 28 ans. Il en résulte que cet individu est faible d'esprit,

considéré comme à peu près irresponsable ».

Ce malade, soumis, jeune, à un traitement et à une

éducation appropriés, aurait pu probablement être

rendu à peu près normal ; devenu adulte, son état ne

s'étant pas modifié, il aurait dû être interné. Après des

attentats contre la propriété et les personnes, on va

reconnaître l'utilité de cette mesure, il moins qu'on ne

le condamne à la prison. Dans le premier cas, hospi-

talisation avec traitement et éducation, on faisait une

CXXXVIII Assistance DES IDIOTS, IMBECILES, ETC.

dépense productive, avec l'hospitalisation tardive ou

l'incarcération, ce sera une dépense improductive.

Le département de l'Eure possède un vaste asile

pouvant faire face à tous ses besoins. Mais, au lieu de

faire une assistance complète au bénéfice de ses ma-

lades, il préfère diminuer le nombre des aliénés sa

charge et réserver le plus grand nombre possible de

places pour les aliénés de la Seine, dont il tire profit.

Rappelons que la Famille, la Commune, le Départe-

ment et enfin l'Etat ont l'impéiieux devoir de faire

face, d'une façon complète, sans préoccupation de ce

que peut tenter l'assistance privée, à toutes les dé-

penses d'assistance des malades, des infirmes de corps

et d'esprit, des aliénés et des vieillards. Bourneville.

Le fait suivant, que nous retrouvons, montre combien

nos réflexions en ce qui concerne l'hospitalisation des

aliénés dans l'Eure sont justifiées :

Depuis quinze ans, M. Jean .1 ? (le 'i.3 ans, cordonnier

à Ezy, était atteint du délire de la persécution, dit le Progrès

de l'Eure. Il couchait toujours avec son revolver, qu'il mon-

trait il sa femme, en disant que c'était son médecin. Depuis

plusieurs nuits, il dormait à peine, de plus en plus obsédé

par son idée fixe. Mercredi matin, Mn1P .)... fut réveillée par

le bruit d'une détonation. Sans prendre le temps de s'ha-

biller, elle courait à la boutique, où elle aperçut son mari

gisant inanimé dans une mare de sang, et près de lui le

revolver dont il s'était tiré un coup dans la bouche. Affolée,

la pauvre femme ouvrit la porte de la maison et se mit il

appeler au secours. Les voisins accoururent et la trouvèrent

évanouie sur le seuil, Mme J... fut transportée chez M. Letel-

licr, où elle reprit ses sens bientôt après, grâce aux soins du

docteur Dauvel, clui venait de constater la mort de son mari.

Les aliénés doivent être hospitalisés le plus près pos-

sible du début de la maladie. C'est le moyen le plus

efficace pour obtenir, ,-i possible, la guérison. Plus on

retarde, plus il y a à redouler l'incurahilité. Si, plus

tard, le malade quoique tout à fait guéri n'est pas

dangereux, on peut le rendre à sa famille, avec ou sans

secours, ou le placer dans une colonie familiale.

III.

Placements des aliénés, des épileptiques, des enfants

arriérés, etc.

Nous avons eu l'occasion de voir, il y a quelques jours,

un épileptique de 17 ans, né à Paris et habitant une com-

mune du département de la Seine. Il nous était amené

par un employé de la préfecture de la Seine, adminis-

trateur d'un Bureau de bienfaisance, sur le conseil d'un

fonctionnaire d'un grade élevé de l'Assistance publique.

On nous demandait quels étaient les voies et moyens de

faire admettre le malade dans un asile spécial. Nous avons

remis aux intéressés les imprimés indiquant les formalités

à remplir pour le placement du malade. Ces conditions

auraient dû être connues de l'introducteur, administrateur

d'un Bureau de bienfaisance. Elles auraient dû être con-

nues surtout du fonctionnaire de l'Assistance publique, qui

n'aurait pas eu besoin de venir nous déranger gratui-

tement il notre consultation particulière. En tous cas, il

aurait pu nous l'adresser à notre consultation gratuite de

Bicêtre, qu'il devrait connaître.

D'où la nécessité, pour les employés de l'Assistance

publique, d'être en mesure de renseigner exactement

et avec bienveillance tous les citoyens qui s'adressent il

eux pour des placements dans les établissements hospi-

taliers, hôpitaux, hospices, fondations, asiles et bureaux

de bienfaisance. Toutes les mairies de Paris et du dépar-

tement de la Seine, comme nous l'avons déjà tant de fois

réclamé, devraient être pourvues dcs imprimés concer-

nant les modes d'admission. On éviterait ainsi des démar-

ches fastidieuses et coûteuses. On ferait de la véritable

assistance républicaine. Nous en sommes toujours à la

faveur, it l'aumône et aux protections. Bourneville.

IV.

L'Assistance des Epileptiques.

Nous avons depuis longtemps l'habitude de consigner

dans les Farta des Archives de neurologie les faits que

nous recueillons dans les journaux politiques concernant

les épileptiques. Et, en nous appuyant sur ces faits, nous

essayons de montrer la nécessité de l'hospitalisation de

ces malades, dont la situation est digne d'intérêt et de

pitié. En voici quelques-uns récents, qui s'ajoutent aux

anciens et justifient surabondamment notre opinion.

Hier après mia, écrit l'Aurore du 6 octobre, : \1 Il Marie

Lisconet, 18 ans, 1 ? prise rue du Commerce d'une attaque

d'épilepsie. Elle tomba sur la chaussée juste au moment où

arrivait un camion chargé de 2.000 kilogr. de tabac qui lui

passa sur le corps. Tranportée à l'hôpital Necker, elle y est

morte en arrivant.

Le sieur Léon Gauthier, 43 ans, journalier à Cully, a été

trouvé sans vie, la face contre terre, Sur le bord d'un chemin

à Creully. Le malheureux avait succombé iL une attaque

(l'épilepsie il laquelle il était sujet. (Bonhomme Normand).

A 8 h. 1/2 du soir, un chanteur ambulant du nom de Joseph

Lespris, 27 ans, a été pris d'une crise d'épilepsie sur le boule-

vard de Bazeilles, au Mourillon. Un attroupement s'était

formé autour de ce malheureux. [Petit Var, 5 octobre).

La darne Pauline Sarthou, 60 rtns. a Lannecombe (Basses-

Pyrénées), étant tombée prise d'épilepsie en donnant la pâ-

ture il ses porcs, ceux-ci lui ont dévoré la tète et une partie

du ventre. (Bonhomme Normand, 30 août-5 septembre.)

Assistance des épileptiques. CXLI

Comment doit-on entendre l'assitancc à ce groupe de

malades ? Parlant d'eux dans un Ia.2yo1°t sur le service

des aliénés en 1878, au Conseil général delà Seine, nous

nous exprimions ainsi :

« Nombre d'entre eux présentent des améliorations assez

notables, des suspensions assez longues de leurs accès, qui

permettraient de les rendre il leurs familles. Mais celles-ci

hésitent souvent il les reprendre et le médecin à les leur

rendre, par suite des difficultés nombreuses exigées en-

suite pour leur réadmission. Une fois sortis, s'ils retombent,

si les crises deviennent plus fréquentes, il faut recommen-

cer les démarches déjà faites lors du premier placement :

certificat de médecin, visa du commissaire de police, séjour

à la Préfecture de Police, passage à Sainte-Anne, enfin

transfert à Bicètre pour les hommes, à la Salpêtrière pour

les femmes. Votre commission est d'avis d'appeler, sur cette

situation intéressante, toute la sollicitude de l'Administra-

tion, en l'invitant à examiner si, pour les malades incontes-

tablement épileptiques et qui ont séjourné à ce titre dans

nos asiles, il ne serait pas possible de diminuer les forma-

lités et de les faire réadmettre directement dans les sec-

tions spéciales de Bicêtre et de la Salpêtrière. Nos finances

y gagneraient, en ce sens que les médecins hésiteraient

moins à renvoyer les malades améliorés, s'ils savaient que,

en cas de recrudescence de la maladie, ils trouveront les

portes largement ouvertes pour rentrer. Une étude attentive

de ces malades nous autorise à penser qu'un nombre res-

pectable d'entre eux pourraient passer plusieurs mois de-

hors chaque année, ce qui serait utile à leur santé et dimi-

nuerait nos dépenses. Nous vous prions, Messieurs, d'inviter

encore une fois l'administration à examiner cette question

et à en préparer la solution. »

Notre opinion est restée la même. Nous pensons qu'en

raison du triste spectacle donné par les épileptiques en

accès, sur la voie publique, spectacle qui n'est pas sans

inconvénient pour les enfants et les femmes enceintes qui

en sont témoin ; de la difficulté, sinon l'impossibilité,

pour eux, d'un travail suivi, leurs accès les faisant ren-

voyer des ateliers où ils ont pu trouver momentanément

de l'occupation, il est indispensable de les hospitaliser.

Cette hospitalisation ne doit pas être absolue et nous con-

CXLII Assistance des épileptiques.

tinuons à penser qu'en cas de rémission, surtout s'ils ont

des parents pouvant les recevoir, il faut les leur rendre,

en atténuant les charges par un secours à domicile.

Ils devraient avoir facilement, sans perte de temps, sans

démarches inutiles, sans difficulté, les médicaments, les

bains et les douches jugés nécessaires, soit dans les hôpi-

taux, soit dans les maisons de secours. La réadmission,

en cas de rechute, devrait se faire directement dans les

quartiers d'épileptiques par placement volontaire.

En combinant ces deux modes d'assitance, hospitalisa-

tion, assistance dans la famille avec secours en argent,

délivrance des médicaments, on diminuerait l'encombre-

ment des asiles, on maintiendrait les liens familiaux,

on diminuerait les charges des contribuables et il serait

possible d'assister un plus grand nombre de malheureux.

Bourneville.

V.

Les aliénés en liberté : Attentat contre

le Dr Loir.

Il est très commun de lire dans les journeaux politiques

des articles contrôles asiles d'aliénés, que l'on qualifie de

bastilles modernes, et contre les médecins de ces établis-

sements, sans cesse en danger, que l'on accuse de se

rendre coupables ou complices de séquestrations arbi-

traires. Pour qui connaît les uns et les autres, ces accu-

sations n'ont pas le sens commun. La conséquence de ces

accusations, souvent violentes, c'est que les familles et les '

médecins hésitent à faire procéder en temps opportun à

l'internement des aliénés, d'où de redoutables accidents

comme celui qui vient de se produire à Tunis.

« Le correspondant du Temps il Tunis a télégraphié à ce

journal (28 mai) que ce matin il ! ) h. 1/2, devant le laboratoire

de l'Institut de la régence, M. Panet, préparateur, a tiré qua-

tre coups de revolver sur le D1' Loir, directeur, qui arrivait.

Tous les coups portèrent. Le meurtrier fut immédiatement

arrêté.

« Il résulte des premiers renseignements que cet employé

était en proie au délire de la persécution. Il avait donné, ces

jours-ci, sa démission à grand fracas et avait dit, à certaines

personnes, qu'il était poursuivi par un juif, que cette vie-là

allait finir. Néanmoins, personne ne supposait qu'il pousse-

rait les choses iL ce point et attentrait à la vie d'un docteur

universellement estimé. Le Dr Loir est neveu de Pasteur ; il

fut commissaire général de l'exposition de Tunisie. Il est ma-

rié et père de deux enfants. Transporté il l'hôpital, les balles

qui l'avaient atteint ont été extraites. Aucun centre vital

n'étant touché, on espère sauver le D1' Loir. »

CXLIV Les ALIÉNÉS : EN liberté.

Le premier devoir qui s'impose en présence d'une per-

sonne aliénée, c'est de procéder à son placement, soit dans

une maison privée, soit dans un asile public. Il y va de

son intérêt immédiat, car plus tôt on aura recours a l'iso-

lement et il un traitement approprié, plus grandes seront

les chances de guérison. La sécurité publique n'est pas

moins intéressée à l'application de cette mesure. Les cas

que nous rapportons tous les mois dans les Archives de

Neurologie montrent, d'une façon évidente, les graves

inconvénients qui résultent de la liberté laissée aux alié-

nés. On éviterait ainsi beaucoup de suicides d'aliénés et

beaucoup de meurtres commis par eux.

Médecins, commissaires de police, maires et préfets ne

devraient donc jamais hésiter à conseiller dans ce sens les

familles. Très lourde est la responsabilité de ceux qui

ajournent, par crainte de récriminations ou pour ne pas

surcharger le budget communal, ou le budget départe-

mental. Ils servent mal leurs malades et fabriquent des

incurables.

DEUXIÈME PARTIE

Instructions médico-pédagogiques.

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1901. ?

ASILE-ÉCOLE DE ItICÎ : TItE

SERVICE DU Dr BOURNEVILLE

(1880-1901.)

Antécédents

PÈRE : a profession; en cas de profession insalubre, y a-

t-il eu intoxication ? En quoi a-t-elle consisté ? 't

CXLVIII Asile-École DE Bicêtre.

Grossesse : Coups, chutes, peur, émotions (nature, durée),

envies, syncopes, attaques de nerfs, albuminurie, alcoolisme

opium, café, éther, laudanum, cocaïne; att. d'éclampsie,

tentative d'avortcment, constriction du ventre, tisanes de

bonnes femmes, ennui de se voir enceinte, idées noires,

somnolence, date de l'apparition des mouvements du foetus ;

leur intensité, leur fréquence ; comparaison avec ceux des

enfants antérieurs ou postérieurs. Persistance des règles.

Maladies infectieuses.

Accouchement : a terme ou prématuré (cause), naturel ou

avec intervention, durée du travail, chloroforme, mode de

présentation; quantité des eaux de l'amnios.

. État de l'enfant t la naissance : asphyxie (blanche ou bleue,

durée de l'état bleu), cordon autour du cou, poids, chétif m(

bien portant. Premiers cris : naturels ou avec stridor ou

respiration retentissante.

Allaitement. Sein, mère ou nourrice, prise du sein, biberon

(lait de vache ou de chèvre), sevrage. - arc dent, dentition

complète. - Début et évolution de la parole, de la marche,

de la propreté.

Alcoolisme de la nourrice ; grossesse.

Alimentation : administration de vin ou de liqueurs.

Époque de la fermeture des fontanelles ; athrepsie.

Antécédents morbides. -Coauul.;iot2s : Prodromes, début,

durée, toniques, cloniques, prédominance d'un côté, nombre

des attaques de convulsions. Etat de l'intelligence arant et

après; paralysie, contracture, athétose, chorée, hémichorée,

consécutives. '

Caractère : gai, triste, violent, accès de colère.

Instincts : vol, gourmandise, salacité, pyromanie, clasto-

manie, onanisme, rapports sexuels, turbulence, alcoolisme.

Penchants au suicide, iL l'homicide, tentatives.

Digestion. Préhension, occlusion ou non de la bouche,

bave, mastication, succion, ingestion de corps étrangers, dé-

glutition, rumination, vomissements, garde-robes, consti-

pation, diarrhée, gâtisme, hémoroïdes, vers intestinaux,

corps étrangers (cailloux, etc.) ..

Instructions \fI : DICO-PD.4GOGIQUCS. CXLIX

Respiration. Bronchite, hémoptysie. Circulation.

Sensibilité générale : froid, chaleur, anesthésie, hyperes-

thésie.

Etat des sens. Anatomie, physiologie normales ou patholo-

giques ; hallucinations.

Sentiments affectifs; impressionnabilité.

Etourdisse ment*, céphalalgies, krouomanie, changements

de coloration de la face, secousses brusques, vertiges, trem-

blements.

Sommeil : durée, rêves, cauchemars, accès de cris, attaques

de sommeil; somnambulisme.

Mémoire, raisonnement, attention; écolagc : degré d'ins-

truction ; aptitudes particulières.

Ressemblance de l'enfant; tient-il plus du père que de la

mère au point de vue physique et au point de vue psychique ? ' ?

S'il y a eu des aliénés dans la famille, placés dans les asiles,

prendre note du nom de l'aliéné, de l'asile, et de l'époque

d'internement. Traitements antérieurs. Placements dans

des maisons de correction. Placements comme apprenti.

Maladies infectieuses : rougeole, scarlatine, variole, vac-

cin (âge), coqueluche, fièvre typhoïde, accidents syphilitiques,

diphtérie, faux croup, oreillons.

Accidents scrofuleux. Gourmes, dartres, otorrhée, blé-

pharite ciliaire, conjonctivite, adénites, engelures, maladies

de la peau, rachitisme.

Traumatismes céphaliques et divers, fractures, luxations,

brûlures; sévices exercés par les familles.

Cause il laquelle les parents attribuent la maladie.

Premiers signes de l'idiotie, constatés par les parents.

Premiers signes de l'épilepsie : cauchemars, céphalal-

gies, irritabilité, absences, vertiges, secousses, fugues.

CL Asile-Ecole de Bicêtre.

Accès : aura, diurnes, nocturnes ; blessures clans les

accès; miction, défécation, pertes séminales ; morsures de la

langue, bave, écume; état consécutif, automatisme, procur-

sion, fol e pré ou post épileptique, accès sériels, état de mal.

En cas d'état de mal, préciser. Maximum des accès en 24

heures pendant l'année qui a précédé le placement. Rémis-

sion la plus longue pendant l'année qui a précédé le place-

ment.

Chez les hémiplégiques : préciser le début et la marche

de la paralysie, sa diminution, son aggravation ; le début

de la contracture ; le début de l'athutose. de l'atrophie.

Lorsque ces renseignements ont été donnés par la famille,

nous prenons ou nous faisons prendre la description de l'en-

fant. Afin de faciliter la tâche de nos internes, nous avons

établi le schéma suivant.

INSTHUCTIDNS \rÉDICO-pÉDAGOGIQliES. CLI

Etat actuel

CLII ASILE-ECOLE DE BICÊTl\E.

Cou : circonférence, corps thyroïde, larynx (voix), dévelop-

pement de la pomme d'Adam (cartilage thyroïde).

Membres supérieurs : forme, attitude, volume, motilité,

pression (dynamomètre), sensibilité, toucher, etc. Etat des

jointures ; - des mains, des doigts; - des ongles : onycho-

phagic, déchirure des ongles. - Préhension.

Membres inférieurs : forme, attitude, état des jointures,

des orteils; station, marche, voûte plantaire.

Instructions 91ÉDIC0-PEDAGOGIQUI;S. cliii

3° Etat des jointures : a) contracture, b) cra-

quements.

4° Etat des mouvements : a) spontanés,

b) provoqués.

5° Contractions fibrillaires. Etat des mus-

cles : a) 1 contractilité, b) amaigrissement,

c) atrophie musculaire.

Go IIémicliorée, athétose.

7° Epilepsie spinale, trépidation, phénomène

du pied. Signe de Babinski.

8° Réflexes (bras, genou, pied).

9° Comparaison des deux côtés du tronc

(thorax, bassin, membres).

10° Développement du système pileux côté

paralysé, b) côté sain.

1 1° Organes génitaux : comparaison des tes-

ticules, des seins, de-* grandes et petites

lèvres. -

Nous avons fait faire un certain nombre de tableaux,

les uns communs iL tous les enfants, les autres spéciaux

à certaines catégories d'entre eux.

Les tableaux communs sont les suivants :

as Tableau de la température des cinq premiers jours de

l'admission. - Nous faisons prendre, matin et soir, la tcm-

péralure rectale de tous les enfants qui entrent dans le ser-

vice. Maintes fois, cette pratique nous a permis de constater

que les entrants étaient it la période d'incubation d'une

affection aiguë ordinaire ou infectieuse. De même, en cas de

transfert, nous faisons prendre la température la veille et le

matin et nous maintenons l'enfant s'il a de la fièvre. -

b) Tableau des mensurations de la tête. - c) Tableau des

poids, taille et force musculaire (dynamomètre). -cl)Tableau

de la Puberté. e Tableau des urines. /) Tableau de la

vaccination. - 0) Tableau de la température après la mort.

Ces lablfaux ont été reproduits dans le Compte-rendu de

189 p. p. 5'i. Les <ab<eau.A'.spëc ! au ? sont relatifs aux épileptiques

(accès et vertiges), aux hystériques (attaques), à la tempéra-

ture des accès et des attaques, aux règles.

CLIV

ASILE-ÉCOLE DE BICrTRI : .

Afin de connaître le mieux possible nos malades, les maî-

tres et les maîtresse d'école, nos infirmiers et nos infirmières

nous fournissent pour le certificat de quinzaine que nous

devons rédiger conformément il l'article 11 de la loi du 30 juin

1838 sur les aliénés - des renseignements détaillés, en se

conformant aussi bien qu'ils le peuvent aux indications sui-

vantes :

Physionomie.

Altitude.

Tenue générale.

Marche.

Course.

Saut.

Montée et descente.

Toilette.

Lavage de la figure et des

mains.

Propreté.

Habillement.

Ordre.

DIGESTION.

Préhension (cuillère, four-

chette, couteau). ,

Appétit (perversions).

Bave.

Succion.

Mastication.

Déglutition.

Vomissements.

Rumination.

Gâtisme.

Constipation ou diarrhée.

Vers, corps étrangers dans

les selles.

Ilémorrhoïdcs.

URINATION.

Fonctions respiratoires.

Voix.

Respiration.

Oppression.

Toux.

Parole.

Nulle, limitée ou régulière.

Défauts de prononcia-

tion. Ëcholatie. Cris.

Pleurs. Rires.

Circulation.

Congestion des pieds, des

mains, des oreilles et de

la face ; pâleur.

Accès de colère.

Douleurs de tête.

Grincements de dents.

Tics. Manies.

Onychophagie.

Coprophagie ou salacité.

Sommeil.

Instructions IIrDIf.l7-PrDAGOGIQIiT : F.

CLV

1W réc. - Calme ou agité.

Soubresauts.

Cauchemars (terreurs noc-

turnes).

Sentiments affectifs.

SENS spéciaux.

Vue.

Ouie.

Aptitudes musicales.

Odorat.

Flaireurs.

GOUT.

Toucher.

Mains. Forme. (Gaucher,

droit ou ambidextre).

Chatouillement. Douleur.

- Chaleur. - Froid.

Toucher proprement dit.

Fonctions INTELLECTI;ELL'"\

Attention : fîxable, mobile,

nulle, volontaire ou invo-

lontaire.

Mémoire (auditrice, visuelle,

olfactive, gustative des

personnes, des lieux.

Conception des idées. Ré-

flexion ; jugement. Asso-

ciation des idées. Incohé-

rence.

Imitation personnelle ou

impersonnelle.

Caractère : envieux, jaloux,

impatient, irritable, hai-

neux, triste, gai, sociable.

Instincts.

I. de conservation. Cons-

cience ou inconscience du

danger.

I. de de-truction ou clasto-

manie.

I. de propriété, kleptomanie

I. de vanité ou besoin

d'approbation.

I. de domination

Egoïsme ou altruisme.

I. sexuel ; onanisme, soli-

taire, à deux, inversion,

perversion, sadisme, etc.

ECOLAÜE. - Les notes sont prises par nos instituteurs et

institutrices qui doivent établir le bilan, a l'entrée. des con-

naissances scolaires des enfants. - Cahier scolaire, que

nousavons institué dès notre arrivée à Bicêtre (1879).

Dans le but de faciliter la tâche de tous nos collabora-

teurs et de leur permettre de mieux se rendre compte des

renseignements qu'ils ont nous fournir, nous avons cru

devoir ajouter aux schémas qui précèdent les définitions

ci-après.

CLVI ASILE-ÉCOLE DE BICÈTHE.

Brachycéphalie

Plagiocéphalie

(plaios, ol,l : cjue)

Scaphocéphalie

(scipltos, bateau)

Dolichocéphalie

(dolichns, allongé)

Indice céphalique

Glabelle

Vertex

Ilion.

Obelion.

. Lambda.

Définitions

Brachycéphale. (De deux mots grecs,

brakus, court et héphalè, tête.)

Le diamètre transversal se rap-

proche sensiblement du diamètre

antéro-postérieur. Tous les crânes

humains sont,' en général plus longs

que larges, le diamètre antéro-posté-

rieur l'emporte sur le diamètre trans-

versal. Donc dans la hrachycéphalie,

crâne large, tête carrée.

Les deux moitiés du crâne chevau-

chent en quelque sorte l'une sur

l'autre ; il s'en suit que la bosse

frontale gauche, par exemple, est

déprimée, aplatie, tandis que la moitié

correspondante de l'occipital fait

saillie. Inversement la bosse frontale

droite est saillante et la moitié

correspondante de l'occipital est

déprimée. (Crâne oblique.) ..

Déformation du crâne qui prend la

figure d'un bateau.

Le diamètre antéro-postérieur

l'emporte de beaucoup sur le dia-'

mètre transvere. Crâne long.

Rapport entre les diamètres trans s

verse et antéro-postérieur du crâne.

Partie médiane inférieure du fron-

tal, placée entre les bosses fronta-

les et les extrémités internes des

arcades sourcilières au-dessus de la

racine du nez.

Sommet de la tête.

Protub. occipitale ext.

Milieu de la suture inter-pariétale.

Point de jonction de la suture inter-

pariétale et de la suture occip.-p1,\riétlo;

Instructions médico-pédagogiques.

CLVII

Grand empan

Petit empan

Clastomanie

(IilasLG, je ltrise)

Coprolalie

(liopros, ordure ; laleù, je

parle)

Coprophagie

du grec liopros, ordure et

])Iw(IClH. JUang('I" ou encore

Salacité.

Cryptomanie

(lirptd, je caclte)

Cynophobie

(Kltô1l, chien, phobéo, j'ai

peur)

Dacnomanie

(Hfnô, je mords)

Echolalie

ICcho, laléo, je parle).

Krouomanie

(1ÙOll(¡, je heurte)

Onychophagie

(Oll1l.\ : , nngle, pltapein,

manger).

Psittacisme

i/'s;tlaC1LS, perro,/net)

Pyromanie

(Pyr, feu)

Distance du rebord externe de

l'extrémité supérieure de l'auricu-

laire au rebord externe de l'extré-

mité supérieure du pouce, la main

étant dans son extension la plus

complète, les doigts écartés.

Largeur de la main au niveau des

articulations métaearpo-phalangien-

ne, les doigts rapprochés et allongés.

Manie de briser.

Manie de dire des mots grossiers.

Acte des enfants qui mangent tou-

tes sortes d'ordures, môme les excré-

ments.

Manie de cacher.

Peur des chiens.

Manie de mordre.

Manie de répéter les mots qu'on

prononce devant vous, ou qui termi-

nent les phrases.

Manie de se cogner la tête.

Manie de se manger les ongles.

Manie de répéter des mots sans

liaison entre eux et sans à propos,

à la façon des perroquets.

Manie de mettre le feu ; 10 pour

voir briller le feu ; 2° pour détruire.

CLVIII ASILE-ÉCOLE DE BiCETHE.

Zoophobie

(Zoôn, animal ; phobéô,

j'ai peur).

Agoraphobie.

Peur des animaux.

Peur des espaces et des foules.

Cyphose

(du grec Ktuphos, courbé.)

Lordose z

(du grec lordos, courbé.)

Scoliose

(du grec sltolios, tortueux

sinueux.)

Courbure anormale de la colonne

vertébrale en arrière, c'est-à-dire

dont la convexité est postérieure.

On dit encore voussure, clos voûté,

excurvation.

Courbure de la colonne vertébrale

en avant.

Déviation latérale de la colonne

vertébrale.

Troubles de la parole.

I. - Ceux qui ont pour cause l'absence ou la faiblesse

de l'idéal ion.

Mutisme

Langage nègre

L'enfant entend, mais ne parle pas

sans qu'il y ait lésion des organes

phonateurs.

L'enfant possède un certain nom-

bre des vocables, mais n'emploie pas

le verbe, ne fait pas de phrase.

II. - Ceux qui proviennent d'un défaut de transmission

aux organes et de coordination -dans leur fonctionnement .

Bredouillement

Il y a bredouillement, lorsque la

pensée allant plus vite que les or-

ganes phonateurs, n'a pour ainsi dire

pas le temps de s'exprimer intégrale-

ment. De ce fait se produisent des

articulations rapides, tronquées, fon-

dues les unes dans les autres, et par

suite incompréhensibles.

Instructions médico-pédagogiques.

CLIX

Bégaiement

C'est un état choréique intermittent

des appareils qui président à la pho-

nation articulée, l'acte respiratoire y

étant compris. Il est inspiré, quand

il se produit au moment de l'aspira-

tion, expiré quand il se manifeste

dans l'expiration, et mixte quand il

existe dans les deux temps de la

respiration.

III. - Ceux qui proviennent des organes phonateurs.

Blésité

a) Zézaiement

b) Sesseyement

c) Jotement

d) Chuintement

e) Grasseyment

f) Mytacisme

gj Clichement

h) Substitutions

i) Accents divers

j) Déformation

Elle consiste dans la substitution,

la déformation ou la suppression

d'une consonne.

Prépondérance du z ; substitution

du ; au a, j, etc. zouzou pour joujou.

Prépondérance du s ; substitution

du s au ch, vasse pour vache.

Substitution du son vocal i au l :

lapin pour lapin.

Substitution du ch au s : chauchi-

chon pour saucisson.

Tonalité gutturale du r ou suppres-

sion du r (langage des muscadins).

Substitution du b, m, p à d'autres

consonnes : berceau pour morceau.

Addition du son l mouillé après

certaines consonnes : chiante)' pour

chanter.

Diverses du n au l, des dentales

aux gutturales, etc.

Midi, serrement de dents, etc.

des sons vocaux et nasaux.

CLX

Asile-Ecole de Bicêtre.

Enfin nous mettons il la disposition de notre personnel

médical, pédagogique et secondaire les documents suivants :

1° le Compte-rendu du service, 2° Des épileptiques et de

leurs accès; rôle de l'infirmière, 3° Instructions aux infir-

miers et infirmières de la seclion des enfants de Bicêtre.

Acrocéphalie

(iAli1'oS, j1011,t111

Trigonocéphalie

(lri,qon. à trois angles)

Microcéphalie

imihros, hetiy

Macrocéphalie

()Iali7.os, gros)

Hydrocéphalie

(hyd{l1'; eau)

Kleptomanie

(hleplo,je vole)

Échokninésie

(écho, écho, Icinésis, mou-

vement)

APPENDICE

Tête pointue.

Tète en forme de triangle.

Tète petite.

Tête volumineuse.

Tête renfermant de l'eau.

Manie du vol.

Répétition du même mouvement.

Signes de la mort.

Tous les ans, à l'école d'infirmiers et d'infirmières de

Bicêtre, comme dans les autres écoles, il est fait une leçon

sur les signes de la mort, le nettoyage du cadavre et l'en-

sevelissement. Dans le service, nous faisons prendre la tem-

pérature rectale du corps, jusqu'à ce qu'elle soit en équilibre

avec la température de la chambre, d'abord d'heure en

heure, puis toutes les 2 heures.

TROISIÈME PARTIE

Clinique, thérapeutique, anatomie pathologique.

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1901. 1

I.

Nouvelle contribution à l'étude de l'épilepsie vertigi-

neuse et à son traitement par le bromure de

camphre ; ,

PALI ICOUiNLVdLLE et AXBAJUD 1

Depuis bien des années le bromure camphre est employé

dans le service des enfants de Bicêtre2. Les résultats théra-

peutiques obtenus soit dans la chorée, soit contre l'insomnie,

et les cauchemars, soit surtout dans l'épilepsie ont été consi-

gnés dans des thèses inaugurales ou des notes insérées dans

les Compte rendus annuels3. Aux faits anciens, nous allons en

ajouter quelques-uns qui nous paraissent de nature à encou-

rager les médecins praticiens à recourir z, ce médicament,

1 Extrait des Archives de Neurologie, 1902, n° 80.

, ° Bibliographie. Bourneville,- Communications à la Société dé bio-

logie, z et Progr. znécl., US74, 1815, résumées dans la thèse de M. le

Dr Palliait, 1875. - Revues des travaux publiés sur le bromure de

camphre (Progr. méd., passim) ; Cornet, Traitement de l'épilepsie, 1889

(avec observations de notre service); - Bourneville, Observation de chorée

guérie par le bromure de camphre, avec spécimens de (compte

rendu du service de Bicêtre pour 1885, p. 49); - Du bromure de camphre

dans l'épilepsie (Compte rendu de 1889, p. 33). De l'emploi thérapeu-

tique d1t bromure de camphre (érections douloureuses et cystalgie,

accidents dus à la dentition, spermatorrhée, insomnie, hystérie, délirium

trémens), et en particulier dans l'épilepsie vertigineuse, 5 observations

(Compte rendu de 1895, p. 218) ; Chorée, bromure de camphre, guérison.

En collaboration avec M. Katz, (Compte reudu de 1898, p. 3); - Clin, Note

le bromure de camphre. Académie des sciences, 9 août 1875. On trou-

vera un grand nombre d'indications bibliographiques dans les Revues et

Thèses citées.

, Dernièrement, nous avons vu une malade de Pologne, atteinte d'une

affection douloureuse de la vessie, à laquelle le professeur Lotar a donné,

avec succès, des capsules de bromure de camphre du Dr Clin. -

.1 " THÉRAPEUTIQUE.

moins employé qu'il ne devrait l'être, non seulement dans

l'épilepsie, mais dans un grand nombre d'affections du sys-

tème nerveux.

Observation I. - Epilepsie symptomatique.

Sommaire. - Père, excès de boissons. Oncle paternel, excès de bois-

sons, mort de tuberculose. Renseignements insuffisants sur le reste

de la famille. - Mère sujette ci des céphalalgies. Un frère et une

soeur, morts de méningite. Pas de consanguinité. Inégalité d'âge

de cinq ans (père plus âgé).

Notre malade : première dent à sept mois. Propre ti dix mois.

Premières convulsions à sept mois. Tics convulsifs de l'épaule du

côté droit. Convulsions fréquentes de sept mois à trois uns. Début

de l'épilepsie à neuf ans. Accès et vertiges nombreux. Irritabilité,

jalousie, turbulence. Description des accès et des vertiges. l'roeur- : ;ion. Bromure de camphre. Diminution progressive et, enfin, dispa-

rition des vertiges. - Sortie, mariage.

Du... (Hache)), née le 14 juin 98883, entrée le 21 mai 189a à la

Fondation Vallée, en est sortie le 5 février 4901.

Antécédents héréditaires. - Père : mort à trente-huit ans d'une

hernie étranglée; pas de rhumatismes, pas de convulsions, pas de

maladies vénériennes, ni de fièvre typhoïde. Il buvait beaucoup, mais

n'était que rarement ivre. [Père : pas de renseignements. Mère :

soixante-quatorze ans, rhumatisante. Grands parents inconnus.

Une saur et sa fille bien portantes. Un frère mort de tuberculose.]

Mère : fièvre typhoïde à douze ans, pas de troubles intellectuels

consécutifs; céphalalgies mais pas de migraines, ni de syphilis, ni

alcoolisme, vive et emportée. [Père : sobre, mort il cinquante-neuf

ans. Mère : morte à quarante-cinq ans, de cause inconnue. Grands

parents, pas de renseignements. Un frère : vingt-huit ans, sobre.

Deux sceurs : rien à signaler. Pas d'idiots, d'épileptiques, de mal-

formés dans le reste de la famille.]

Pas de consanguife. Inégalité d'âge de cinq ans. (Père plus âgé).

Dix enfants : 4° garçon, dix-neuf ans, sain; 2" fille morte en

venant au monde, à terme ; la mort a été attribuée par la mère à

une chute ; 3° garçon mort à vingt-deux ans d'une méningite qui a

duré onze mois; 4° fausse couche de trois mois, suite d'une peur;

garroii, lièvre typhoïde à sept ans et demi, intelligent.; 0° tille

morte à six semaines de cholérine ; 7° notre malade ; 8° garçon,

dix ans, rien à signaler; 9° fille, sept ans, otite suppurée; 10° fille

morte à deux mois et demi de méningite.

EPILEPSIE VERTIGINEUSE ET BROMURE DE CAMPHRE. 5

Notre malade. Rien de spécial à la conception i. - Grossesse abso-

lument normale, ni chutes, ni émotions, ni frayeurs, ni éclampsie.

Accouchement à terme en une heure. Elle a perdu beaucoup d'eau;

présentation du sommet. Pas d'asphyxie, pas de cordon. Nourrie

au sein par sa mère jusqu'à dix-sept mois. Prise du sein normale,

pas de cris. Première dent à sept mois. Dentition complète il dix-

huit mois. Elle a commencé à parler à huit mois, a été propre à

dix mois. Ni bave, ni succion, ni onanisme.

Premières convulsions à sept mois, avec la première dent, pen-

dant trente minutes. Aurait été toute raide, sans secousses, yeux

grands ouverts. Depuis lors, jusqu'à trois ans, au moins cent

convulsions. C'est la première qui a été la plus longue. Les pre-

mières convulsions n'ont pas modifié l'intelligence. A la suite des

premières convulsions, à sept mois, l'enfant, au dire de sa mère,

aurait conservé un mouvement spasmodique de l'épaule droite.

De trois il neuf ans, aucun accident convulsif, ni cauchemars, ni

terreurs, ni vertiges. Le premier accès est survenu dans les

conditions suivantes : A la fête de la place d'Italie, l'enfant

demandait un sou pour monter sur les chevaux de bois. Sa

mère refuse, l'enfant persiste dans sa demande et tout d'un coup

tombe raide; elle resta quarante-huit heures sans connaissance.

Un médecin, pendant ce temps, tenta vainement de la ranimer.

Elle se réveilla spontanément, appela sa mère et demanda à

manger. Elle fut menée à la Salpêtrière où Charcot ordonna des

douches et du bromure. Nouvel accès trois jours après, sans cri.

Elle se laissa glisser le long d'un mur, resta raide, puis elle ronlla.

Ni bave, ni écume, ni évacuations : durée cinq minutes. Pas de folie

pré-ou post-épileptique. Sa mère n'aurait pas constaté de vertiges

et cependant on les a notés dès l'entrée. Pas d'atteinte de l'intel-

ligence. Aucune maladie infectieuse, ni accidents scrofuleux; plu-

sieurs bronchites légères.

Etat actuel. - L'enfant parait en bonne santé, son attitude est

normale. La physionomie intelligente. Lèvres et conjonctives bien

colorées.

Tête : Cheveux châtains bien plantés. Crâne, configuration arron-

die, symétrique. Front bombé. Visage ovale, cicatrice à la partie

gauche du front, suite de chute. Arcades sourcillières normales,

symétriques. Sourcils abondants, châtain foncé, bien plantés. Pau-

pières mobiles et régulières. Yeux normaux. Nez droit. Pommettes

régulières. Voûte du palais, amygdales, langue, normales. Dents

bien plantées, saines. Menton rond. Oreilles régulières, lobule

bien détaché. Tronc bien conformé. Membres supérieurs et infé-

' Le père, comme nous l'avons dit, commettait de fréquents ercès de

boisson, et les rapports sexuels avaient souvent lieu quand il avait bu.

6 THÉRAPEUTIQUE.

rieurs normaux, ainsi que les réflexes; onychophagie bila-

térale. Tous les ongles sont rongés dans une longueur qui varie

de 5 il 6 millimètres. L'auscultation et la percussion ne décèlent

rien de particulier.

Puberté. - Aisselles et pénil glabres. Seins : 7 centimètres de

large sur 6 1/2 de haut. Grandes lèvres peu développées. Petites

lèvres normales. Hymen, fissure antéro-postérieure. l'as d'hémor-

rhoïdes. Anus glabre. Non réglée. Pas d'onanisme.

Caractère variable, triste si on la laisse seule, pas d'accès de

colère. Pas de perversions des instincts. Vagues tendances au sui-

cide, aurait essayé de se jeter par la fenêtre, au dire de sa mère.-

Digestion et respiration normales. Sujette il paresser. - Sensibi-

tité spéciale et générale normales. Aucun signe d'hystérie. Som-

meil bon, naturel. Sentiments affectifs excellents. Parole et voix

nettes. Propre, soigneuse de sa personne.

Température à l'entrée.

ÉPILEPSIE VERTIGINEUSE ET BROMURE DE CAMPHRE. 7

49.-Il ... dont les vertiges sont très nombreux, a son premier

accès aujourd'hui, précédé d'une série de vertiges. Pendant cinq

minutes, elle est restée debout, immobile, le regard fixe, le visage

pâle. Puis elle a dit : Oh ! que j'ai mal au coeur J'ai mangé trop

de poires. On l'a couchée et, au bout de quelques secondes, rigi-

dité générale, secousses très fortes des quatre membres, l'ace pâle

puis violacée, bave assez abondante, ront1pment. Au bout de deux

minutes environ elle est revenue à elle : Où suis-je ? J'ai mal au

coeur ; j'ai mangé trop de poires, je n'en mangerai plus. » Ensuite

elle a vomi beaucoup. Elle s'est endormie deux heures après. La

nuit a été bonne. - Cet accès, le premier, depuis l'entrée, paraît

avoir été provoqué par une indigestion.

Température dans l'accès.

8 THÉRAPEUTIQUE.

course. En reprenant connaissance, elle est toute étonnée du che-

min parcouru.

Décembre. - Le bromure de camphre, suspendu le 8 octobre et

remplacé par l'élixir polybromuré, est repris de 2 à 10 capsules et

de 10 à 2; élixir polybromuré de 1 à 4 grammes et de 4 il 1.

Puberté. Seins 7 centimètres sur 7 et demi à droite, 7 sur 6 et

demi à gauche. Fin duvet sur les deux tiers médians du pénil.

Quelques poils à l'extrémité supérieure des grandes lèvres, qui sont

assez développées, écartées l'une de l'autre d'un centimètre, lais-

sant passer les petites lèvres brunes. Les règles n'ont point encore

paru.

989foi. Juin. - P : <&f ! '<ë.Quelques rares poils dans les aisselles.

Seins, 14 centimètres de haut sur 11 de large. Aréoles bien pig-

mentées. Poils assez abondants sur le pénil. Les petites lèvres,

très larges, débordent les grandes d'un centimètre. Capuchon long,

recouvrant un clitoris petit. Hymen, orifice laissant passer l'index.

Les premières règles ont apparu sans accidents particuliers. - Le

traitement, outre les douches, les travaux scolaires et manuels et

la gymnastique a continué ainsi qu'il suit :

Tableau A. Mesures de la tête

'lO THÉRAPEUTIQUE.

Le caractère s'améliore, mais Rachel reste turbulente, taquine

et semble aimer à faire de la peine aux autres enfants. Sous tous les

autres rapports, les progrès signalés plus haut persistent.

1898. Janvier. - Puberté. - Seins, 16 sur 18. L'orifice de l'hy-

men parait un peu large et permet facilement l'entrée de l'index.

Son travail, son activité et sa tenue ne laissent rien à désirer,

mais elle est souvent peu attentive, dissipe ses compagnes. Elle est

moqueuse, arrogante, voudrait dominer tout le monde et n'agit

qu'à sa guise. Depuis quelque temps, elle se livre à l'onanisme et

essaye de se faire toucher par les autres. Elle exige à cet égard

une surveillance toute particulière.

Novembre. - Persistance de l'onanisme, cherche à entrainer ses

compagnes et à profiter du moindre relâchement, de surveil-

lance.

1899. Janvier. - Puberté. - Mêmes dimensions des seins, pénil

garni de poils longs et noirs sur toute sa longueur. Poils moyen-

nement abondants sous les aisselles.

Rachel tient mieux compte des observations qui lui sont faites;

elle pourrait faire de plus grands progrès en classe si elle était

moins étourdie et moins distraite. Elle est toujours orgueilleuse,

voudrait qu'on l'admire en toutet partout, essaye en promenade d'at-

tirer les regards des hommes. Elle aime les jeux bruyants, est très

adroite pour les travaux manuels, sait faire marcher la machine à

coudre. A la gymnastique, elle est d'une agilité et d'une adresse

sans pareilles.

Juillet. - Puberté. Poils nombreux, mais courts sous les

aisselles formant une bande de 8 centimètres sur 3. Seins 18 cen-

timètres sur 15. Tout le pénil est couvert de poils noirs et assez

longs. Même état de la vulve.

1 900. Janvier. - Puberté. - Le sein droit mesure 21 centimètres

transversalement sur 17 verticalement, le gauche 20 sur 17, aréoles

bien dessinées, mamelons bien développés. Même état du système

pileux. Grandes lèvres un peu plus épaisses.

Rachel travaille avec plus d'assiduité à la classe. Elle est tou-

jours un peu légère et étourdie, il faut lui faire des remontrances

qu'elle accepte beaucoup mieux qu'autrefois. Elle s'accorde bien

avec les compagnes de son âge, est serviable. C'est l'une des plus

avancées pour le travail manuel. Celte amélioration du caractère

coïncide avec une diminution considérable des vertiges.

Juin. - Puberté. - Pas de changement notable, sauf que les

grandes lèvres ont un peu grossi, sont plus pigmentées et pré-

sentent des poils au niveau du lier,; supérieur de la face externe.

A signaler une vanité croissante, le désir d'attirer sur elle l'atten-

tion des hommes qui viennent dans le service. Pour le reste, rien

EPILEPSIE VERTIGINEUSE ET BROMURE DE CAMPHRE.

11

de spécial à noter. Intelligence, attention, activité très satisfai-

santes.

Rachel a fait des progrès sons tous les rapports. C'est une nature

passionnée, des plus impressionnables. Il faut exercer sur elle une

surveillance constante, principalement, quand des ouvriers ou des

jardiniers sont dans la maison. Elle l'ait tout ce qu'elle peut pour

attirer leurs regards, passe et repasse devant eux. Ses allures, ses

manières, son regard, tout est provoquant chez elle. Elle céderait

volontiers à la moindre invitation. Pour tout ce qui concerne les

travaux de repassage et à l'aiguille elle est très adroite. Elle pique

à la machine avec beaucoup d'adresse. C'est une des meilleures

ouvrières de l'ouvroir. Elle continue à faire de la gymnastique avec

une agilité surprenante.

Se¡Jlemb1'e ? Comme les vertiges ont considérablement diminué,

3, 4, 9 dans les trois derniers mois au lieu de 300 à 400 dans les

premiers mois de son séjour, nous lui accordons, sur la demande

de sa mère, un congé de deux mois.

Tableau B. - Tableau du poids et de la taille.

12 U),

THERAPEUTIQUE.

27 novembre. - Sa mère nous apprend que Rachel travaille dans

une imprimerie, qu'on est content d'elle, qu'elle se conduit bien et

ellea/yw'mequ'elle n'a eu, depuis son départ,aucun accident nerveux.

990t.- Le 23 janvier, nous recevons une lettre d'un M. X... nous

demandant un rendez-vous afin d'avoir des renseignements sur la

maladie de Rachel. Le signataire ne serait autre qu'un prétendu.

5 février. - Sa mère vient nous demander si R... peut se marier.

Le prétendu, âgé de vingt-quatre ans, ouvrier en vitraux, serait

fils de sourds et muets, son père à partir de quatre ans, à la suite

d'une chute, sa mère, de naissance, ce qu'on a attribué à une peur

de sa mère pendant la grossesse. Rachel continue à travailler dans

une imprimerie où l'on est satisfait d'elle. Sa mère n'a remarqué

aucun vertige, ce qui est probable, car on en aurait vu à l'impri-

merie, d'autant plus qu'elle travaille partout, même aux machines.

1902. Nous apprenons que Rachel s'est mariée en novembre

dernier. Son mari, qui est bien au point de vue physique, parait

intelligent, s'exprime avec facilité, se déclare très content de son

mariage, n'avoir à se plaindre en aucune façon de sa femme.

Celle-ci est en bonne santé, bien qu'elle ait un peu maigri et n'au-

rait eu aucun accident nerveux. La surveillante, Mile Langlet, qui

est allée aux renseignements a trouvé leur logement très soigné,

très propre. Rachel était absente.

Voir page 11 marche des accidents épileptiques.

Réflexions. - I. L'hérédité est très peu chargée. Ce qui

domine, c'est l'alcoolisme du père, qui parait s'être traduit

chez ses enfants, par deux cas de méningite et l'épilepsie

de notre malade,

II. Cette affection aurait été précédée de nombreuses con-

vulsions depuis l'âge de sept mois jusqu'à trois ans. De là à

neuf ans aucun accident convulsif. C'est à neuf ans qu'aurait

débuté l'épilepsie. Elle était surtout caractérisée par des

vertiges.

III. Sous l'influence du traitement par le bromure de

camphre, administré sous forme de capsules, les vertiges ont

diminué et finalement disparu. L'histoire de Rachel met bien

en évidence les heureuses modifications survenues dans son

caractère, au sur et à mesure de la diminution des vertiges.

A cet égard, c'est une observation typique.

IV. La description que nous avons tracée d'un accès et de

plusieurs vertiges s'ajoute à celles qui sont disséminées dans

nos Comptes-rendus et dont les auteurs des traités de

médecine pourraient assurément tirer profit.

Tableau C. - Tableau des accès.

14 THÉRAPEUTIQUE.

Observation II. - ÉPILEPSIE idiopathique ( ? ). Bromure DE CAUP11RIS.

. Guérison.

Sommaire. - Père, aucun accident nerveux, mort de tuberculose en

décembre 1890. - Renseignements à peu près nuls sur sa famille.

- Mère, migraineuse. - Grand' mère maternelle sujette à des ne-

vralgies. - Bien de particulier dans le reste de la famille. SleU1'

morte probablement de tuberculose. - Pas de consanguinité . -

Inégalité d'âge de huit ans. (Père plus âgé.)

Conception, rien d'anormal. Grossesse tourmentée par une

7rzalud e de son 7nrri. - Accouchement un peu long. - Cyanose à

la naissance. - Première dent à six mois. Dentition complète ri ! '

Début de la parole à un an ; - de la marche à quatorze mois.

Propre de bonne heure. Intelligence développée. Certificat

d'études à dxlac a7zs.-Erznuis el et tristesse dans la douzième année.

- Première crise à treize ans (février 1898). - Ensuite quelques

cri>es espacées sur un laps de temps de deux mois (1898). - Ver-

tiges très nombreux. - Traitement par le bromure de camphre

Disparition complète des crises en juin de la même année. Main-

tien de la guérison de juin 1899 à 1902.

DeMich... (Marguerite), née le 4 avril 1885, entrée le 7 janvier

1899 à la Fondation Vallée, est sortie le 20 avril 1901.

Antécédents HÉRÉDITAIRES. {Renseignements fournis par sa mère).

- Père, quarante-cinq ans, rhumatisant ; tourneur de sou métier,

mort en décembre 1899 de tuberculose. -Pas de convulsions, pas

de migraines, pas d'abusd'alcool ni de tabac. Caractère vif. Marié

à vingt-sept ans. - Le père de la malade est d'origine italienne,

et on ne peut donner de renseignements sur sa famille, mais on

pense quil ii*y a jamais eu de cas de maladie nerveuse.

Mère, trente-huit ans, migraines fréquentes des l'âge de douze

ans. Réglée à quatorze ails. - Les migraines, très fréquentes dans

les premières années, se sont un peu espacées, au point de ne repa-

raitre actuellement que tous les mois. - Elles consistent en une

céphalalgie, accompagnée de nausées et parfois de vomissements :

pas de brouillard, mais souvent, elle voit un fil noir tendu devant

l'oeil gauche..Ni rhumatisme, ni chorée, ni lièvre typhoïde. [Père,

mort à soixante-un ans, d'un refroidissement, sobre, pas de

migraines. - Mère, soixante dix-sept ans, bien portante, pas de

migraines, mais elle a « comme des névralgies ». - Pas de ren-

seignements sur les grands parents. -Un frère, quarante-cinq ans,

en bonne sauté ainsi que ses dix enfants qui n'ont pas eu de con-

vulsions. - Une soew', mariée, aeu une fille, laquelle elle-même a

une enfant : ni les uns, ni les autres n'ont eu de convulsions.

EPILEPSIE VERTIGINEUSE ET BROMURE DE CAMPHRE. 15

Rien dans le reste de la famille, ni bègues, ni paralytiques, ni

malformés, ni strabiques, etc.]

Pas de consanguinité. Différence d'âge de huit ans (père plus

âgé). - Aucun indice de syphilis ni chez l'un, ni chez l'autre.

Deux enfants. 1° Notre malade; 2° une tille morte à huit ans

et demi de péritonite tuberculeuse aux Enfants-malades.

Antécédents personnels. - A la conception, rien de spécial si ce

n'est que le père était déjà souffrant. - Grossesse dans des condi-

tions à peu près parfaites, sauf que la mère était continuellement

préoccupée par la santé de son mari. Elle ne sait pas exactement

àquelle époque elle a senti remuer l'enfant ; les mouvements étaient

modérés. - Accouchement à terme, travail assez long, l'enfant est

venue toute noire, à la naissance, néanmoins elle aurait crié de

suite. (Frictions). Accès de cris nuit et jour pendant les premières

semaines.

L'enfant a été nourrie simultanément au sein et au biberon (lait

de vache). Première dent à six mois.-A quatre mois, on la met-

tait déjà sur le vase. - Elle a commencé à causer il un an, à mar-

cher à quatorze mois. - Pas de convulsions.

A six ans, M... fréquente l'école; elle y aurait été heureuse sauf

dans la dernière année où elle ne pouvait s'entendre avec sa mai-

tresse de classe. Elle y aurait travaillé en général avec succès et a

eu son certificat d'études à douze ans.

Avant la première crise (février 1898) qui a duré deux à trois

heures, la malade semble avoir eu une contracture des membres

inférieurs, elle avait les pieds tournés en dedans. Cette contracture

a été attribuée à une longue course à Paris, avec un grand refroi-

dissement ( ? ). A la suite de quelques exercices de marche, cette con-

tracture a disparu. C'est alors qu'est apparue une sensation de boule

venant de l'estomac et s'arrêtant dans la gorge. Ces crises avec

boule revenaient tous les jours pendant une heure.

Vers le mois de mai 1898, les crises avec boule onC été remplacées

par des crises complètes. Elles étaient annoncées par une envie de

partir, d'aller chez une voisine, dans la rue. Sa mère le lui

défendant, elle tombait. Pas de cri, chute subite, rigidité générale,

poings fermés, pouces en dedans; pas de grands mouvements, pas

d'arc de cercle, mais perte d'urine et écume abondante.

La malade revenait à elle en poussant des cris et en souffrant

du coeur. La première crise dura deux heures. Les grandes crises

se sout reproduites tous les jours jusqu'à quatre par jour.

Durant les deux semaines ayant précédé sou placement à la Sal-

pêtrière (2C juillet 1898), elle aurait eu après ses crises des atta-

ques de folie. Elle mangeait de l'herbe, se roulait par terre, dans le

ruisseau, criait, refusait d'obéir aux ordres, essayait de battre sa

mère, serrait et desserrait son corset sans motifs, cassait les car-

16 THÉRAPEUTIQUE.

reaux. Deux fois elle est montée sur le barreau de la fenêtre du

premier étage comme si elle voulait se jeter dans la rue. Les crises

de folie duraient deux ou trois heures. Pas d'onanisme.

A la Salpêtrière où elle reste jusqu'au 28 novembre, elle a eu

deux crises en juillet et 5 en août (lettre de M. J. Voisin).

Les parents la reprennent alors chez eux. Bientôt la malade

accuse une douleur sourde dans les jambes suivie au bout de cinq

à six jours, de vertiges.

En somme après des phénomènes prémonitoires surviennent des

accès d'épilepsie qui durentsix mois. Trois mois d'accalmie. Enfin,

retour des accidents épileptiques qui motivent l'entrée dans le ser-

vice.

Étal actuel. - Tête petite, arrondie, cheveux châtains, pas

d'anomalie d'implantation. Front bas. Face allongée. Joues symé-

triques. Nez droit. Vue normale, pas de dyschromatopsie. Lèvres

moyennes. Langue mobile. Amygdales grosses. L'enfant respire par

la bouche sans que l'examen de la gorge explique ce fait. Maxil-

laires normaux. Dentition régulière. - Oreilles. Pavillon grand,

écarté de la tète. Physionomie douce, intelligente. Attitude bonne.

Cou. - Corps thyroïde perceptible à la palpation.

Thorax symétrique et viscères normaux. Abdomen régulier.

Foie dépassant les fausses côtes d'un doigt.

Puberté. - Seins, 16 centimètres de haut sur 18 de large, symé-

triques. Aisselles glabres. Pénil à peine garni de quelques poils

Grandes lèvres épaisses. Petites lèvres normales. Clitoris bien déve-

loppé. Hymen, orifice circulaire laissant pénétrer le petit doigt.

Région anale naturelle. La malade n'est pas réglée. Pas d'ona-

nisme.

Mich... parle, comprend et répond bien, marche lentement, pa-

rait absorbée, court bien, mais est assez vite essoufflée à cause de

son embonpoint qui est assez prononcé. Appétit bon, sans trouble

de la digestion. Elle s'endort assez lentement, semble parfois en

proie à des cauchemars ; s'agite et parle quelquefois tout haut la

nuit.

Elle est d'une propreté irréprochable, allant même jusqu'à une

certaine coquetterie. Caractère calme, n'aime pas les jeux bruyants;

s'emporte néanmoins assez facilement, quand on la contredit. Elle

aime bien sescompagnes et joue volontiers avec elles. Elle dit s'en-

nuyer beaucoup, parle souvent de ses parents. Elle n'a jamais

pleuré. Parfois accès de petits rires, courts et « nerveux ».

Elle ne souffre de la tète qu'après ses vertiges, la céphalalgie

dure peu. Pas de phénomènes vasomoteurs appréciables à la

face. Le sensibilités générale et spéciale sont physiologiques. Les

seutiments affectifs sont développés.

Tics. - Quand elle est inactive, elle compte successivement tous

EPILEPSIE VERTIGINEUSE ET BROMURE DE CAMPHRE.

17 'i

les doigls de la main droite avec une vivacité extraordinaire et

sans s'en apercevoir.

Très attentive, fait des réflexions sur tout ce qu'elle voit, prend

un plaisir extrême à la musique. - Lit facilement, très vite, sem-

ble avoir hâte de terminer sa lecture. Elle écrit régulièrement et

rapidement. En géographie, histoire, calcul, force moyenne, elle

possède d'ailleurs son certificat d'éludés. Néanmoins, elle se plaint

d'un affaiblissement de la mémoire depuis qu'elle a ses vertiges. Tel

est l'état de la malade au moment et dans les premiers temps de

son entrée il la Fondation Vallée.

Température à l'entrée.

18 THÉRAPEUTIQUE.

son caractère avant de tomber. Elle paraissait calme. Immédiate-

ment avant la chute, étant à l'école, elle dit à sa voisine : « Je n'y

vols plus bien clair. » Aussitôt sa tète s'est rejetée en arrière, elle

est tombée sur sa voisine de droite. La ligure s'est congestionnée,

les paupières ont battu vivement, ses yeux se sont dirigés en

haut, ses mâchoires se sont contractées. Les membres rigides ont

été pris de fortes secousses. Après cette première période qui a

duré environ une minute, le corps est devenu flasque, la malade

a ronflé et à chaque ronflement elle envoyait un jet de bave (non Il

sanguinolente). Elle a uriné sous elle et s'est endormie pendant

quelques minutes. On l'a montée au dortoir pour la changer.

C'est alors seulement qu'elle est revenue tout à fait à elle. Elle

était tout étonnée d'être au dortoir : « Pourquoi m'avez-vous fait

monter ici ? » Elle ne se souvenait de rien. Température au mo-

ment du ronflement, : 37«, 6 ; un quart d'heure après 3-il, 8 deux

heures après, 31n, 3. C'est le seul accès constaté jusqu'à la sortie.

Dans ce cas, de même que dans le précédent, nous cons-

tatons une élévation de la température sous l'influence de

l'accès. Cette élévation est bien mise en relief par le tableau

de la température durant les cinq premiers jours de l'ad-

mission.

Juin. - Les vertiges diminuent. De Mich... a assez de goût

pour les travaux scolaires. Elle n'est maladroite ni pour la cou-

ture, ni pour le repassage, toutefois il faut la stimuler. Elle met

de la bonne volonté à la gymnastique, mais n'est pas très agile

dans ses mouvements à cause de son embonpoint. Très affectueuse

envers ses compagnes, un peu turbulente, la moindre observation

l'ennuie et la surexcite et elle accueille les remontrances avec un

sourire moqueur. Même traitement.

Puberté. - Quelques poils rares sous les aisselles. Seins symé-

triques, 18 centimètres de haut sur 20. Poils bruns, assez longs,

peu nombreux sur le pénil. Grandes lèvres épaisses. Petites lè-

vres normales. Clitoris assez développé. Même état de l'hymen et

de la région anale.

Décembre. - Elle a eu trois vertiges le jour où elle a appris la

mort de son père.

1900. Janvier. - Puberté. Même état des aisselles. Seins, 2,; sur

18 à droite, 24 sur 18 à gauche. Mamelons peu saillants. Aréoles

bien dessinées. Poils plus abondants et plus longs sur pénil. Pas

d'autres changements. Les règles ont paru, pour la première fois,

du 12 au 19 juillet, puis du 13 au 18 août. Elles ont été suspen-

dues en septembre et ont reparu du 8 au 14 octobre, du 2 au

9 novembre, du 2 au 8 décembre.

EPILEPSIE VERTIGINEUSE ET BROMURE DE CAMPHRE.

19-

DeMich..., dont les vertiges sont devenus déplus en plus rares, s'est

améliorée sous tous les rapports. Elle travaille bien à l'école, fait

parfois la classe à des compagnes moins avancées. Elle est plus

calme, moins irritable, plus prévenante et plus serviable. Elle se

montre habile et courageuse à l'ouvroir. Elle apporte à la gymnas-

tique beaucoup de bonne volonté. Même traitement sauf que les

capsules de bromure de camphre ne seront données que de 2 à 6.

.Juin. - L'amélioration a continué, M... n'a eu ni accès, ni ver-

tige, depuis le l01' janvier.

Poids de la taille.

120 THÉRAPEUTIQUE.

fluence du traitement par le bromure de camphre, la décroisssnce

suivante :

ÉPILEPSIE VERTIGINEUSE ET BROMURE DE CAMPHRE. z'1

II. L'action du bromure de camphre s'est fait sentir bien

plus rapidement que chez la malade de la première observa-

tion. La guérison s'est maintenue puisque de juillet 1900 au

commencement de 1902, il n'est survenu ni accès, ni vertiges.

Observation III. - Imbécillité ET ÉPILEPSIE symptomatique.

Sommaire. Père, enfant naturel, aucun accident syphilitique.

Céphalalgies après la naissance du malade. - Grand'mère pater-

nelle nerveuse, sujette à de violentes colères et à des crises épilep-

déserteur on ne sait pourquoi, à été condamné à la prison (belge).

- Mère, ouvrière dans une manufacture de tabac, convulsions de

l'enfance, violente, a voulu tuer son mari, dont elle s'est séparée

après huit ans de mariage. - Deux tantes maternelles déséquili-

brées. - Une soew' et un frère morts de convulsions.

Consanguinité (cousins germains). - Inégalité d'âge de quatre

ans.

Grossesse : vomissements. Rien de particulier à l'accouchement et

à la naissance. - Première dent à six mois. - Début de la parole

et de la marche à dix mois. - Convulsions internes à sept mois. -

A huit ans et demi, chute dans l'eau. - A neuf ans, enfermé, pen-

dant dix minutes, dans une salle de discipline pour avoir jeté des

pierres contre un factionnaire : affolement à la sortie. -Premiers

accidents épileptiques deux semaines après cette émotion. Ver-

tiges de plus en plus fréquents, jusqu'à cinquante ( ? ) par jour avant

l'entrée. Renvoi des écoles. Placements multiples en appren-

tissage. - Accès et vertiges.

1894. Elixir polybromuré (de 2 à 4 gr.) et bromure de camphre

de 2 à 6 puis 8) ; hydrothérapie, etc. - Guérison ( ? ).

Henné... (F. P.), né à Lille, le 8 septembre 1883, est entré à

Bicêtre, le 5 octobre 1893.

1893. 6 octobre. - Description d'un vertige. - L'enfant est de-

bout. Subitement, sans cri, la tête et le tronc sont jetés en avant

et si l'on n'était pas intervenu aussitôt, il se serait contusionné la

face sur la table. On le maintient debout en le soutenant sous les

bras, sans cela il s'affaisserait. La tête, dans l'extension, est pen-

chée sur l'épaule droite. La face et les yeux sont dirigés en haut et

à gauche. Paupières ouvertes. Bouche secouée à gauche. Quel-

ques secousses du bras correspondant. Les joues deviennent rou-

ges. Au bout d'environ deux minutes, l'enfant qui, jusque là,

était resté penché en avant, se redresse, regarde tout étonné,

pàlit, et revient à lui sans se rendre compte qu'il a été malade. 11

appelle ces vertiges des accès debout.

22 THÉRAPEUTIQUE.

1895. 6 avril. - Description d'un accès. II... tombe violemment

à la renverse. Corps rigide, en extension. Face congestionnée,

plutôt violacée que rouge. Mains fermées, les pouces en dedans.

Secousses cloniques des membres. Ni stertor, ni bave, ni miction.

Au bout d'une minute il revient tout à fait à lui. - Parfois, il

tombe en avant (cicatrices du menton).

24 juin. - Autre accès. Sans avertissement, sans cri, il tombe

en arrière. Nous le voyons alors qu'il a des mouvements cloniques

des paupières (les yeux sont portés directement en haut) et des

bras qui se rapprochent et s'éloignent successivement de la ligne

médiane et des membres inférieurs. Ni ronflement, ni bave, ni

évacuation involontaire. Durée une minute. Il se relève, ramasse et

remet sa ceinture.

On assure qu'au réfectoire, s'il a un vertige, il continue à man-

ger comme s'il n'avait rien du tout. (C'est le cas d'un autre malade,

Siga...).

1896. Juin. Parallèlement à la diminution des vertiges, les mai-

tres constatent que la mémoire devient meilleure.

1897. Avril. Accès : Avant de tomber en arrière, II... tourne plu-

sieurs fois sur lui-môme comme une toupie. Un peu de bave. Sou-

bresauts à la fin. T. IL 3 ? 2, un quart d'heure après, T. R. 3 îo.à,

deux heures après, 37», 4. Dans un accès de 1901, on a noté : T. Il.

3î°,5, 37°,7 et 37°,2.

1902. Janvier. Envoyé en congé. Sa mère nous a écrit depuis

qu'il n'avait eu ni accès, ni vertiges.

EPILEPSIE VERTIGINEUSE ET BROMURE DE CAMPHRE. 23

liginense où l'efficacité du bromure de camphre a été remar-

quable. Les trois qui précèdent nous semblent suffisamment

démonstratives pour ne laisser aucun doute. Elles corroborent

tout ce que nos élèves et nous avons dit dans des publications

antérieures. Ainsi que le montrent nos observations, le trai-

tement doit, souvent, être longtemps prolongé, ce n'est qu'à

cette condition qu'un peut attendre un heureux résultat.

Il.

Réflexions sur la puberté à propos des deux premières

observations ;

Pau 16AYL;IfiEd'I1.3,E.

Nous avons noté tous les six mois, à peu près régulière-

ment l'évolution de la puberté chez Rachel D... de 1895

à 1901. Au début, les aisselles et le pénil étaient glabres,

les grandes et les petites lèvres peu développées. Seuls les

seins indiquaient une transformation prochaine.

En 1896, le pénil se garnit de poils alors que les aisselles

n'en offrent qu'un petit nombre. Les grandes et les petites

lèvres surtout grossissent, les seins doublent presque de

volume et les règles apparaissent.

Tandis que les poils du pénil s'étendent, s'allongent sur

tout le pénil, envahissent la face externe des grandes lèvres,

surtout en haut, ceux des aisselles n'augmentent que lente-

ment en abondance et en longueur.

Les seins qui avaient en 19, 7 centimètres de large sur

0 cent. 5 de haut, mesuraient en '1902, 21 cent. sur 17.

Les aréoles et les mamelons s'accusent progressivement.

Les grandes lèvres deviennent peu à peu plus volumineuses

et leur face interne se pigmente.

Les règles ont toujours été régulières et se sont établies

sans douleur.

Parallèlement, de 1895 à 1900, la taille s'est élevée de

1 mètre 44 à 1 mètre 58 et le poids a monté de 30 kilogram-

mes à 49.

Chez la seconde malade, nous voyons une évolution à peu

près semblable : la puberté commence par le développement

des seins, puis par l'apparition du système pileux du pénil

et enfin dans les aisselles. L'établissement des règles s'est

annoncé par une poussée du côté des seins 1.

' Le lecteur trouvera de nombreuses descriptions de la puberté chez

les garçons et les filles dans nos Comptes rendus du service des enfants

de Bicêtre.

III.

Contribution à l'étude de l'idiotie morale et en particu-

lier du mensonge comme symptôme de cette forme

mentale;

Par BOURNEVILLE ET J. BOYER.

Nombreuses sont les observations que nous avons publiées

sur l'idiotie morale, sur ses manifestations si variées. Celles

que nous allons rapporter sont destinées surtout à mettre en

relief l'un des symptômes de cette maladie : le mensonge.

Observation I. Idiotie morale ; légère arriération

, , INTELLECTUELLE 1.

Sommaire. - Père mort aliéné. 'Grand-oncle, grand'mère et grand'-

tante paternels suicidés. Tante paternelle nerveuse, morte

phtisique.

Mère, convulsions de l'enfance, morte phtisique. Grand-oncle

maternel mort de morphinomanie et de cocaïnisme. - Fl'ère ins-

table, paresseux.

Pas de cotzsangzczté. - Inégalité d'tîge de sept ans {père plus âgé).

Conception, grossesse, accouchement, naissance, rien de pa1'ticl/-

lier. Convulsions de l'enfance à plusieurs reprises. - Parole

tardive, zézaiement, bégaiement. - Mensonges (10 ans), instabi-

lité, onanisme (14 ans). - Kleptomanie. - Fugues, écolage irré-

gulier, une exclusion pour onanisme, une autre pour mensonges.

- Sournois, hypocrite, jaloux. - Périodes de mélancolie (1896).

- Traitement médico-pédagogique, amélioration relative.

A. R..., né le 14 juillet 1879 est entré à l'Iris li tut médico-pédago-

gique le 14 mars 1896, d'où il est sorti le 31 décembre 1897. -

Antécédents héréditaires- - Père mort' à quarante ans d'une

«paralysie au cerveau»; interné. Etait dans l'industrie, affaires difil-

ciles, accident de voiture où il faillit être tué : consécutivement,

bizarrerie de caractère, irritabilité, affaiblissement progressif de

la mémoire, vie de famille impossible. -Un oncle paternel se sui-

1 Un résumé de cette observation a été communiqué par M. Boyer à la

Société libre POlll'l'étudepsychologique de l'enfant {Bulletin, nez 5, p. 120,

1901).

2l> IDIOTIE morale; mensonge.

cide à vingt et un ans, parce que sa famille s'oppose à son

mariage. Grand'mère paternelle s'est jetée par la fenêtre, sous

le coup de la démence à soixante-dix-sept ans. - Grand'tante

paternelle, suicidée il la suite de chagrins intimes. -'l'ante pater-

nelle très nerveuse, morte phtisique à trente-neuf ans ; ses enfants

sont malingres, très nerveux, surtout l'ainé, qui a eu des con-

mulsions.

Mère morte phtisique à trente-quatre ans; convulsions de l'en-

fance. - Le seul cas pathologique à relever dans la famille mater-

nelle, est celui d'un grand-oncle maternel, médecin, mort de

morphinomanie et de cocaïnisme.

Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de sept ans (père plus

âge).

Deux enfants : 1° un garçon de dix-huit ans et demi, bien por-

tant, est dans le commerce; n'a jamais eu dégoût pour l'étude,

dépensier, instable; - 2° notre malade.

Antécédents personnels. Rien à signaler à propos de la con-

ceplion, de la grossesse et de l'accouchement. L'évolution physique

aurait suivi son cours normal, sauf en ce qui touche la parole, qui i

aurait été tardive et aurait toujours présenté du zézaiement et du

bégaiement. Convulsions de l'enfance, à plusieurs reprises, qui

auraient amené les troubles de la parole. - A eu la rougeole, la

scarlatine et peut-être la coqueluche. - A eu toujours de la

difficulté pour apprendre; on le change à chaque instant d'école :

partout on se plaint de ses mensonges (dès l'âge de dix ans), on est.

obligé de le retirer des divers établissements qu'il a fréquentés, de

peur d'exclusion. A quatorze ans, on constate l'onanisme fréquent,

et la kleptomanie. Fait de véritables détournements : on lui donne

20 francs pour aller solder une note, il garde l'argent; il vole des

bijoux à ses bonnes, des livres à son grand-père pour les vendre;

va emprunter de l'argent au nom de son grand-père (jusqu'à

100 francs) à des amis de famille, il a acheté une fois avec de l'ar-

gent volé ou emprunté pour 39 francs de bonbons chez un épicier.

Uans une pension où il est, il va trouver son professeur pour lui

demander des leçons particulières, à l'insu de ses parents, et en

prend ainsi plusieurs mois. Fugues de plusieurs jours à la suite

d'emprunts ou de vols. On n'a jamais pu savoir comment il pas-

sait son temps et où il dépensait l'argent. A toutes les observa-

tions qu'on lui faisait, il répondait qu'il ne pouvait s'empêcher de

voler. « C'est le mensonge incarné, nous disent ses grands-

parents ; il parait nous aimer, mais il est si hypocrite et si faux,

que nous ne savons s'il nous aime réellement ». Les observations

que l'on trouvera plus loin donneront une idée plus précise des

mensonges ordinaires de l'enfant.

Etat de l'enfant à son entrée à l'Institut médico-pédagogique.

IDIOTIE MORALE. 2 1

Etat physique. - (Nous ne relèverons que ce que l'on peut con-

sidérer comme des stigmates physiques de dégénérescence). -

Front fuyant et étroit; nez long, pointu; lèvre supérieure en saillie,

lèvre inférieure en retrait, le bas de la ligure va en s'amincissant;

le profil de la figure rappelle celui de la l'ouine; les oreilles sont

longues (Ga mm.) et larges dans leur partie supérieure (4 cm.),

fortement décollées. - Crâne : légère dépression de la moitié

droite de l'occipital; la moitié gauche du frontal est moins saillante

que la moitié droite; cette asymétrique se remarque aussi sur la

face, dont la partie gauche est moins développée. La voûte pala-

tine est étroite, un peu ogivale. - Les membres sont longs et

grêles; rien autre à signaler.

Etat physiologique. - (Nous ne relèverons également ici que ce

qui présente un caractère pathologique). Troubles digestifs con-

sistant en vomissements sans douleur, mais l'enfant a été surpris

plusieurs fois en train de les provoquer; alternativement, constipa-

tion opiniâtre et diarrhée. -Troubles cardiaques : bruit de souffle

assez prononcé au premier temps, il la base ; l'enfant se plaint du

reste de palpitations et a quelquefois des crises d'étouffement. Mais

il nous a été donné de constater que sur ce point aussi l'enfant a

fait de l'exagération. - Marche sautillante, sur la pointe du pied.

- Blésité très prononcée; le son ch parait impossible. De plus

bégaiement intermittent au début des mots, quelle qu'en soit la

syllabe initiale.

Etat psychologique. - L'intelligence présente une arriération

légère, mais réelle. L'enfant du reste, par suite de son écolage

irrégulier, et de ses nombreux changements de pensions, ne possède

que quelques connaissances élémentaires assez précises. Nous

avons pu constater que son attention et sa réflexion tout en étant

possibles sont capricieuses et de peu de durée. Il n'y a aucune

persévérance dans le travail intellectuel. Très instable, il veut

changer à chaque instant d'occupation. Il s'adonnera quelque

temps il la géographie, pour ne plus s'y intéresser de plusieurs

mois. La mémoire est laborieuse, mais elle parait assez (idèle.

C'est précisément grâce à elle que, dans ses conversations, il donne

souvent l'illusion du jugement et du raisonnement, mais on

s'aperçoit vite que tout n'est que surface et que l'enfant est inca-

pable de coordonner les idées acquises et d'en tirer des déduc-

tions. Son imagination, du fait même de sa mémoire, parait

féconde, mais en réalité elle ne fait que reproduire en les exagé-

rant maladroitement des récits lus dans des aventures de voyages,

qu'il aime par-dessus tout. Cette exagération préside il toutes ses

conceptions, et, chose digne de remarque, elle est consciente,

elle est voulue.

Etat instinctif et moral. - L'instinct de conservation est plutôt

28

IDIOTIE MORALE ; MENSONGE.

exagéré chez lui. A... a peur de se faire du mal, au moindre

malaise il se croit perdu. - Il aime la société, ne recherche la

solitude que lorsqu'il vient d'être pris en flagrant délit de men-

songe, et que son amour-propre est blessé. - L'instinct géné-

sique s'est manifesté : nous avons eu l'occasion de constater

l'onanisme solitaire, mais du fait de la surveillance dont il était

l'objet, nous n'avons pu que fortement soupçonner ses tendances à

l'onanisme à deux. - L'instinct de véracité est prolondément

atteint chez lui. C'est le mensonge incarné, nous ont dit ses grands

parents, et de fait, on dirait qu'il lui est impossible de manifester

la vérité. Avec ses camarades, il ment pour se donner de l'impor-

tance ; il a tout vu, tout fait, il renchérit sur tout; avec ses

maîtres il ment encore pour se disculper d'une faute et pour se

faire bien venir d'eux. Sa conduite générale est un mensonge per-

pétuel. Il fait celui qui est le plus docile, pour mieux capter la

confiance, il est toujours de votre avis, et s'il est réprimandé, ses

larmes et ses paroles humbles font croire à la sincérité du repen-

tir. C'est le type du dissimulateur et de l'hypocrite. 11 pousse ses

camarades à commettre une faute, et il est le premier à venir en

prévenir. - Il est pour certaines choses d'une sensiblerie outrée,

pleurera en apprenant que son frère a été puni, et restera indif-

férent devant la peine de ses grands parents.-11 11 est très jaloux, et

c'est sous le coup de la jalousie, que nous l'avons vu se mettre le

plus en colère. Dans ces moments, il est même dangereux, il

frappe tout le monde en cherchant il donner de mauvais coups; il

est grossier et méprisant; quand il est en colère le zézaiement

persiste, mais le bégaiement ne se manifeste plus. - Il a la

notion du bien et du mal, en ce sens qu'il cherche il simuler le

bien puur s'attirer les bonnes grâces, et cache le mal sachant qu'il

perdra la confiance de ceux qui vivent auprès de lui. Il ades idées

religieuses, qu'il sait exagérer en temps opportun, mais elles ne

sont chez lui qu'habitudes prises, et môme imposées.

1890. Mars. - Durant les premiers jours, rien à dire sur sa

conduite générale. Il est poli avec tout le monde, docile aux obser-

vations, assidu à son travail scolaire. Il fait régulièrement la gym-

nastique, s'occupe à de petits travaux de jardinage et paraît faire

tous ses efforts pour éviter les reproches. Il est heureux quand on

le félicite sur sa bonne volonté. Comme traitement, il prend

d'abord une douche, puis deux douches par jour', fait la gym-

nastique spéciale, travaille en classe et au jardin ; traitement

moral.

' La gymnastique et l'hydrothérapie ont pour but, dans les cas de ce

jjenre, de modifier non seulement les accidents actuels, niais encore,

après la disparition de ceux-ci, la diathèse nerveuse, et de mettre le ma-

lade dans île meilleures conditions pour bénéficier du traitement moral.

IDIOTIE MORALE. 29

Avril. Le naturel annoncé se manifeste par trois mensonges

à quelques jours d'intervalle. - 1° Il annonce à ses maîtres et à

ses camarades que son frère tient à sa disposition une loge à

l'Opéra pour une fête organisée, nous dit-il, par les anciens élèves

de l'Ecole Centrale. 11 écrit même à son frère à cette intention,

nous donne sa lettre qui part au domicile des parents. Quelques

jours après, visite de ses grands parents, qui ne comprennent rien

à la lettre et nous affirment qu'il n'y a rien de vrai dans la pro-

messe qu'il a faite. A... est l'objet des railleries de ses camarades,

et des reproches de ses maitres, i) pleure, boude quelques jours et

oublie tout. Questionné sur les motifs qui l'ont fait agir, il ne

répond pas. - 2» Après avoir reçu la visite d'un de ses oncles, il

nous annonce qu'il a un cousin atteint d'une maladie de nerfs et

que ses parents désirent le placer dans le même établissement que

lui. Nous souvenant du premier mensonge, nous nous tenons sur

nos gardes; comme il demande même quel jour nous pourrons

recevoir son cousin, nous lui répondons qu'il connait parfaitement

les jours de visites. Or, nous avons appris quelques jours après,

que son cousin était un enfant normal, fréquentant un lycée de

Paris, et que son oncle n'avait jamais eu l'intention de le placer

en traitement. - 3° Il revient un jour de congé en racontant à

tout le monde qu'il a chez lui un violoncelle, dont il sait jouer,

qu'on va le lui envoyer et qu'il est chargé par ses parents de s'en-

tendre avec le professeur de musique pour prendre des leçons par-

ticulières. Cette idée lui était venue sans doute parce qu'à plu-

sieurs reprises nous avions organisé avec deux de ses camarades

de petits concerts de violon et de piano, et voyant le succès que

ses camarades avaient remporté, il voulut faire croire, au moins

un moment, qu'il était capable lui aussi de faire de la musique.

Or, il n'a jamais aimé la musique, et n'a jamais eu de vio-

loncelle.

Plusieurs petites scènes de surexcitation chez déjeunes malades

avec lesquels il était lié, et qui jusque-là s'étaient montrés tran-

quilles, nous firent supposer que son influence n'était pas étran-

gère à ce changement.

Mai. - Pas de mensonges caractérisés. Il se plaint le 26, de

douleurs dans le creux de l'estomac et le 27 d'étouffements. Comme

ses grands parents nous ont prévenu que plusieurs l'ois il a fait de

la simulation, et qu'il était même resté une semaine sans manger,

disait-il, alors qu'il avait été surpris se gavant à la dérobée, il est

l'objet d'une visite médicale plus minutieuse que jamais, d'une

surveillance rigoureuse, et nous constatons qu'A... ne ment pas

cette fois. Il est en effet des choses qu'on ne peut simuler, quel-

qu'artiste qu'on soit : selles infectes, pâleur de la face, vomisse-

ments caractéristiques, troubles cardiaques, etc. Il est soumis à

un régime spécial qui fait tout disparaitre.

30 IDIOTIE morale; mensonge.

Juin. - Discussions nombreuses avec ses camarades, qui

viennent à chaque instant se plaindre de lui; il essaie de les exci-

ter les uns contre les autres, en racontant a. chacun d'eux, des

médisances inventées de toute pièce, fait disparaître des livres et

va raconter à leur propriétaire que c'est un tel qui les lui a

volés, etc. Si on fait à un enfant des reproches sur telle ou telle

incartade, qu'il a lui-même provoquée, il renchérit sur les

reproches du maitre et l'ait le moralisateur. Nous apprenons vite

la vérité au moyen de confrontations. - Un jourqu'il travaillait

seul au jardin potager, il nous ramène un malade plus jeune que

lui et qui, ne parlant pas, ne pouvait nous renseigner, nous annon-

çant qu'il venait de lui sauver la vie, qu'il l'avait retiré du bassin

où il se noyait, etc. Or il était impossible matériellement, que cet

accident ait pu arriver, l'enfant en question venant de quitter son

infirmière; d'autre part, nous remarquons que seules les chaus-

sures du petit malade sont mouillées. Pressé de questions, A...

finit par avouer que c'est lui-même qui a essayé de le mettre dans

le bassin, pour faire croire il un sauvetage. Pourquoi ? Toujours

même mutisme. Ce mensonge l'a tellement ridiculisé auprès de

ses camarades, qu'il est resté plusieurs jours sans causer à qui

que ce soit.

Juillet. Bon mois au point de vue de la véracité et de l'assi-

duité au travail. Du 14 au 21, période de mélancolie et de tacitur-

nité provoquée sans doute par un trouble des fonctions diges-

tives. Un purgatif remet tout en état.

Aozlt. - Par suite d'un silence prolongé de ses parents, qui ne

sont pas venus le voir depuis plusieurs semaines, A... est triste et

ennuyé et présente quelques accidents cardiaques (palpitations). Il

écrit à son grand-père pour lui dire que, « puisqu'il met tant

d'obstination à lui donner de ses nouvelles (sic), il va en mettre

aussi et au lieu de prendre ses douches qui lui font énormément

du bien, il ne les prendra plus ». « Ce n'est pas la peine qu'on me

soigne, écrit-il, si d'un autre côté on me fait des sottises. Je com-

mence à en avoir assez de cette vie-là et veux savoir le fin mot ».

On le remonte par des paroles d'encouragement et il semble se ras-

séréner. Il parait à nouveau gai et bien disposé, et reprend ses

occupations ordinaires. Le 19, profitant d'un moment où maître et

infirmiers sont occupés auprès d'un de ses camarades suintement

indisposé, il disparait dans le petit bois contigu au pavillon des

classes et saute par-dessus le mur, non sans avoir deposé en vue

sur un banc du jardin une lettre il l'adresse d'un de ses maîtres, où il

annonce l'intention bien arrêtée qu'il a de « donner (in à ses jours.

En sortant de l'Institut, y a-t-il écrit, je vais me diriger du côté

du garage (barrage) pour me jeter dans la Seine. Je vous donne

tous ces détails pour que ma famille fasse rechercher mon

corps ».

IDIOTIE morale. il

Son absence est remarquée aussitôt et la lettre trouvée de

suite. Nous envoyons au barrage un infirmier, tandis qu'un autre

va au domicile des parents avec la lettre en question. La famille

nous répond : « Il n'y a pas de danger qu'il se noie ! Il est bien

trop poltron ». Comme A.... avait pris, ainsi que nous l'apprimes

plus tard, un chemin opposé à celui qu'il avait indiqué, toutes les

recherches furent vaines. Le lendemain soir, il rentre seul à

l'Institut il G h. 1/2. Il avoue qu'il a été d'abord à la gare d'Or-

léans où il a couché dans les salles d'attente. De là il est parti à

Passy où il a emprunté sous un prétexte quelconque 2 francs à

un fournisseur de sa tante, a été retrouver des amis avec lesquels

il a déjeuné dans un restaurant de la rue de Rivoli, puis a

remonté la Seine jusqu'à Choisy-le-Roi, et est revenu à Vitry. Une

enquête faite par ses parents démontre qu'il avait dit la vérité

au sujet des 25 francs et de sa promenade à Choisy. Après son

escapade il parait honteux. De quelques jours il ne prend part

à aucun jeu et reste silencieux aussi bien en classe qu'en

récréation.

Mensurations permettant de se rendre compte du développement

physique du malade.

32 , IDIOTIE morale; mensonge.

per, maraudes de fruits au jardin, discussions sans importance

avec ses camarades, mais plus de ces mensonges prémédités et

vraisemblables. En classe il fait des progrès, s'habitue à un travail

régulier, et en gymnastique acquiert une adresse et une force de

résistance auxquelles il ne nous avait pas habitués.

1897. Janvier. - Les grands-parents constatent une améliora-

tion sérieuse. Pour le récompenser, ils le font, sur notre avis,

sortir quelques jours, et il rentre seul avec une lettre de son

grand-père manifestant l'agréable impression qu'A... a faite sur

toute la famille. Un nuage cependant le 25 : l'enfant comptait aller

à un mariage; un contre-ordre provoque chez lui un accès d'hy-

pochondrie de plusieurs jours. 11 boude même sa grand'mère à sa

première visite. En même temps s'était produit un embarras gas-

trique qui dura cinq jours.

Février. - Malgré nos observations, la famille espace de plus en

plus ses visites et le laisse trop longtemps sans nouvelles. A...

s'énerve, il dit même que ce n'est pas la peine de se bien conduire

pour qu'on ne lui en tienne pas plus compte que ça. Il est mal

avec ses camarades, nous sommes obligés d'intervenir à chaque

instant pour éviter un échange de coups. Cet état d'irritabilité

extrême persiste jusqu'en Mars. Une visite de la famille et un congé

de trois jours paraissent remonter l'enfant.

En Avril et en Mai l'amélioration continue. Plus de mensonges.

A... parait accessible au raisonnement ; il aime maintenant causer

avec ses maîtres, se préoccupe de son avenir, parle de s'engager,

et comme on lui fait remarquer que sa santé n'est pas assez affer-

mie et son caractère assez malléable pour se plier à la discipline

militaire, il se rend à nos raisons et n'en parle plus. Il sort de

temps en temps pour aller chez ses parents, il part et revient seul.

Tout parait bien aller.

Juin, juillet. - Bonnes périodes, mais il parait se produire à son

sujet des tiraillements dans le conseil de famille. Les uns vou-

draient le faire engager, d'autres n'y tiennent pas. Malheureuse-

ment A... est au courant de ces divergences, et il parait dérouté.

parlant un jour d'aller à la caserne, et manifestant le lendemain

de la répulsion pour l'état militaire. - Un voyage en famille an

bord de la mer pendant les mois d'août et septembre fait oublier

tout et remettre à plus tard la décision.

En octobre, A... revient à l'Institut, mais un changement s'est

produit dans le conseil de famille. C'est un oncle qui connaît peu

A... qui est nommé tuteur, et l'enfant va essayer d'agir auprès de

lui pour satisfaire ses caprices. La dissimulation reparait et avec

elle les mensonges. Il annonce à son oncle que l'Institut s'est

chargé de lui procurer une place, alors qu'il n'en a été nullement

question. Il quitte définitivement l'Institut au : 11 décembre 489ï,

prématurément.

L'IDIOTIE morale. 33

REFLEXIONS. I. A... est un malade, et les troubles que

nous avons relevés dans son état psychologique et moral

sont la conséquence de son état morbide. Bien qu'au moment

de la conception, le père de l'enfant n'ait pas encore pré-

senté de troubles mentaux, l'hérédité paternelle est forte-

ment chargée, puisque nous relevons parmi les ascendants

trois suicidés. De ce fait A... avait besoin d'un traitement

médico-pédagogique spécial, mais avant tout d'une inter-

vention médicale.

II. A... est le type du menteur, dénaturant la vérité non

dans un but intéressé, mais pour le simple plaisir de trom-

per son entourage.

III. Si l'amélioration n'a été que passagère, cela tient à ce

que la famille ne nous a pas suffisamment aidés dans notre

oeuvre de relèvement, mais cela tient surtout à ce que l'en-

fant ne nous a été confié qu'à un âge trop avancé pour arri-

ver à un sérieux résultat. Ce n'est pas à dix-sept ans qu'on

peut espérer un redressement complet. D'où la nécessité de

commencer de bonne heure le traitement médico-pédago-

gique des idiots intellectuels et moraux, et d'initier tous les

éducateurs à la psychopathologie pour les mettre à même

de relever, dès leurs premières manifestations, les symp-

tômes qui font pressentir l'anormalité de l'enfant, et pour

qu'ils puissent conseiller aux parents, alors qu'il en est

temps encore, le traitement médico-pédagogique.

Observation IL - IDIOTIE morale. Ariération INTELLECTUELLE.

Sommaire. Père, rhumatissant, déséquilibré. - Grand'père

paternel, rhumatissant, alcoolique, épileptique, mort interné en

démence. Mère,rhumatissante, affection cardiaque, goitre exoph-

talmique probable; caractère irascible, menteuse. - Deux tantes

maternelles atteintes de goitre exophtalmique ( ? ). - Pas de con-

sanguinité. - Inégalité d'âge de 6 ans (père plus âgé).

Conception, grossesse, accouchement, naissance, rien de notable.

. Retard de la dentition, de la marche et de la parole. - Gâtisme

jusqu'à 6 ans. Sévices fréquents. Caractère sournois.

31eîitetise « depuis qu'elle a commencé à parler. » Kleptomanie.

- Paresse. - Fugues. - Accusation de viol contre son père. -

Description de la malade à l'entrée. - Détails sur les attouche-

ments paternels ( ? ). Versatilité du caractère. - Evolution de la

l1oUI\ : "\E\'ILLE, Bicêl¡'c, -1901. 3

34 IDIOTIE MORALE ; MENSONGE.

puberté. -- Réglée à ans. - Amélioration progressive. - Pla-

cement comme domestique.

Tar. (A.), née le 7 octobre 1882, est entré à la Fondation Vallée,

le 17 août 1890.

Père, cinquante-six ans, cordonnier. Pas de convulsions de l'en-

fance. Fièvre scarlatine à quatre ans; fièvre muqueuse à douze ans;

bronchite capillaire à quarante-cinq ans ; très rhumatisant, dou-

leurs continuelle dans les bras, dans les jambes, aux articulations,

gonflements fréquents et douloureux l'empêchant de se servir des

mains ; herpès à quarante-six ans ; quelque temps après chute

brusque des poils de la moustache, qui repoussèrent plus tard ;

pas de maladie nerveuse, ne boit pas, ne fume pas ; migraines, il

y a une dizaine d'années, disparues depuis ; à la suite de contra-

riétés ces migraines duraient cinq à six jours et étaient accompa-

gnées de vertiges et de « mouches volantes ». Depuis quelques

années, sa vue a baissé. Veuf à cinquante-trois ans ; ne s'est pas

remarié ; a vécu par périodes avec une ancienne malade de la

Salpêtrière, « alcoolique et noceuse ». Vit actuellement avec une

autre femme. - Grand-père paternel, mort en 1860 ; rhumatisant ;

avait des picotements et des tremblements continuels ; buvait beau-

coup, surtout de l'absinthe et de l'alcool ; avait de continuelles

pertes de mémoire, des « accès » durant lesquels il semblait perdre

l'intelligence et qui duraient quelques heures. Epilepsie acquise.

Il est entré à l'Asile clinique, d'où il a été dirigé sur Bicêtre :

y est resté cinq mois, puis a été transféré à Pont-1'Abbé-Picau-

ville où il est mort en démence 1. - Arrière-grand-père paternel,

mort en Savoie, à soixante-dix ans. - Arrière grand'mère pater-

nelle, aucun renseignement.

Mère morte à l'âge de quarante-sept ans; rhumatisme chronique;

avait les doigts volumineux; bossue, une épaule plus haute que

l'autre ; avait des vertiges : pendant quelque temps elle perdait la

respiration et s'évanouissait. Affection cardiaque. Goitre exophtal-

mique probable; caractère irascible, emportée « menteuse à l'excès ».

- Grands parents maternels, pas de renseignements. - Grand-oncle

maternel bien portant ; deux tantes maternelles ayant présenté,

semble-t-il, un goitre exophtalmique ( ? ) ; un oncle et une tante

maternels morts en bas âge, on ne sait de quoi. Ni aliénés, ni

épileptiques, ni difformes, ni suicidés, ni prostituées dans le reste

de la famille maternelle.

Pas de consanguinité (père savoyard, mère luxembourgeoise).

- Inégalité d'âge de six ans (père plus âgé).

Deux enfants : 1° Notre malade. - 2° Garçon, mort à vingt mois :

' M. le D' Viel nous a écrit que Tar... (Louis) était arrivé avec le cer-

tificat « Epilepsie » et qu'il a succombé à une congestion cérébrale.

IDIOTIE MORALE. do

athrepsie, rachitisme (ne pouvait se tenir sur son séant), bronchite

finale.

Notre malade. Conception : préoccupations d'argent et fré-

quentes querelles entre les époux. - Grossesse : bonne, pas la

moindre indisposition, ni syncopes, ni malaises d'aucune sorte. -

Accouchement : à terme, facilement ; présentation du sommet ;

quantité d'eau normale.

A la naissance rien de particulier : pas d'asphyxie, l'enfant a crié

aussitôt ; était mince et petite. Elevée au biberon (lait de vache),

sevrée à dix-huit mois ; brûlures de la face à quatorze mois, qui

ont laissé des cicatrices; plus tard, à l'école, ses camarades se mo-

quaient d'elle, ce qui l'irritait. - lire dentition en retard.

Parole à vingt mois ; marche à vingt-un mois. Gâtisme jusqu'à

six ans ; aurait été propre du jour où son père, pour la corriger,

lui aurait mis le nez dans ses excréments.

A quatre ans, elle a successivement la variole, la rougeole et la

scarlatine, mais sans aucune complication. Le père aurait cepen-

dant remarqué que l'enfant marchait ensuite « courbée en dehors,

et le pied légèrement dévié ». Cet affaissement et cette déviation

se manifestent encore par périodes. Chutes nombreuses. Gourmes

fréquentes : les plaies de sa tête étaient longues à guérir ; enge-

lures depuis son plus jeune âge ; l'enfant a été souvent battue,

mais les sévices n'ont jamais eu de conséquences visibles ; ne

pleurait même pas ; du reste n'a jamais pleuré avant l'âge de

treize ans ; à cet âge-là, accès de cris, pour attirer l'attention sur

elle. - A mangé de façon dégoûtante jusqu'à l'âge de douze ans,

elle mâchait sans avaler, rumination ( ? ). - Dès sa première

enfance, aucun jouet ne l'intéressait, elle passait des journées à

enrouler autour de ses doigts des bouts de fil, des morceaux

d'étoffe qu'elle déchiquetait, des morceaux de papier qu'elle <cou-

passait ». - A toujours eu un caractère doux, mais fourbe et

sournois, menteuse, du reste a menti du jour où elle a parlé. - A

été en classe de quatre à treize ans : ses maîtresses la trouvaient

intelligente, mais paresseuse et incapable de bonne volonté. A la

mort de sa mère (1893) ses défauts et ses vices, mensonges, vols,

se sont accentués d'une manière prodigieuse, surtout depuis qu'elle

a fréquenté les ateliers. Elle commettait de petits larcins, et pour

se disculper disait que c'étâit parce qu'elle manquait du nécessaire

chez elle. Un jour, elle vole à sa tante un porte-monnaie contenant

20 francs, en dépense 2, et raconte à son père que son cousin, sa

cousine, sa tante lui ont donné, l'un 10 francs, l'autre 5 francs,

l'autre 3 francs. Une autre fois, on l'envoie à la poste avec

six lettres non affranchies et 2 francs ; elle garde l'argent et fait

partir les lettres ; comme les destinataires se plaignent dans la

suite, elle affirme qu'elle les a affranchies, puis avoue qu'une de

36 IDIOTIE MORALE ; MENSONGE.

ses amies, en la bousculant, lui a fait perdre l'argent. Peu à peu

elle ne veut plus travailler ; elle se fait renvoyer de partout à

cause de sa paresse et de ses mauvais propos ; fait des contes in-

sensés pour expliquer ses.erreurs de comptes d'argent ; un jour,

craignant d'être corrigée par son père, elle ne rentre pas, disant

partout qu'on l'avait mise à la porte ; elle est arrêtée pour vaga-

bondage et dit au commissaire qu'on la battait chez elle. Elle ment

sans cesse, dit à son père qu'elle va travailler et n'y va pas. Chez

elle, elle brise tout, pour se venger, nous dit le père, des repro-

ches et des corrections qu'elle encourait. Elle perd l'argent qu'on

lui confie, parle mal de son père à tout le monde et finit par le

dénoncer au commissaire de police comme ayant avec elle, depuis

trois ans, des rapports sexuels. Comme elle se contredit dans ses

réponses, le commissaire se méfie, fait appeler le père et le met en ici

demeure de faire visiter sa fille par le docteur D. ; l'examen médi-

cal constate que l'enfant est intacte.

A la suite de ces faits, Albertine est placée à l'Asile clinique, d'où

elle est envoyée à la Fondation Vallée, le 18 août 1890.

Etat actuel pris : 1 l'entrée. - Air de santé, expression intelli-

gente. Cheveux châtain clair. Pas de ganglions. Crâne de volume

moyen, symétrique, ni bosses, ni fontanelles ; front assez élevé.

Forme du visage ovale. - Cicatrice de brûlure très étendue

existant à la partie supérieure du front et s'étendant de chaque

côté des joues, jusque sur le menton et le cou. - Arcades sourci-

lières peu marquées. - Les paupières s'ouvrent et se ferment

bien. - Fentes palpébrales allongées dans le sens transversal ;

sourcils peu abondants. Cils de coloration plus foncée que les che-

veux. - Orbites peu excavés. - Yeux mobiles, ni exophtalmie,

ni strabisme, ni paralysie ; iris bleu ; pupilles réagissant bien ;

l'acuité visuelle est bien développée, pas de rétrécissement du

champ visuel. - Nez, un peu aplati, surtout à la partie inférieure,

lobule assez gros, pas de déviation. - L'odorat est bon. - Les

pommettes sont peu saillantes, régulières. - La bouche est de

forme transversale ; la lèvre inférieure volumineuse et épaisse ;

dentition normale. - La voûte du palais est bien constituée. -

La langue est large, sans tremblemeut de la pointe. - Les amyg-

dales sont peu volumineuses. - Le goût est normal. - Le men-

ton est allongé, assez bien fait. - Les oreilles sont décollées, le

lobule est peu développé.

Coit Circonférence : 26 centimètres.- Corps thyroïde appréciable.

Membres supérieurs bien conformés ; sensibilité bien conservée.

- Membres inférieurs également bien conformés ; réflexes patel-

laires normaux.

Thorax, pas de déformation. Percussion et auscultation, rien

d'anormal. - Abdomen régulier ; région anale naturelle.

IDIOTIE morale. 37.

Puberté : quelques poils au niveau du pubis ; grandes lèvres;

peu développées ; clitoris, peu visible ; petites lèvres triangu- :

laires ; hymen intact, triangulaire ; fourchette normale. :

Traitement : douches et bains ; sirop de fer ; huile de foie de.

morue ; gymnastique ; travaux scolaires ; travaux mauuels ; trais

tement moral.

Des observations prises au jour le jour, nous relevons les détails

suivants : Albertine n'a pas le regard franc, elle baisse toujours la

tête quand on lui parle ; très peu expansive ; est loin d'être

timide ; parait ( ? ) avoir un bon caractère, aime à rendre service ;

courageuse ; réservée dans ses propos ; s'entend bien avec ses

compagnes ; mais peu affective ; ne témoigne pas sa sympathie ;

parle de son père qu'elle semble aimer ; elle raisonne assez bien,

se rend compte de tout, très avancée pour son âge.

II a été difficile au début du traitement d'obtenir d'elle une con-

fidence quelconque ; peu à peu, elle se laisse aller et raconte avec

des détails, qui font supposer une réelle expérience, que son père

avait des rapports avec elle depuis plus de trois ans. « Lorsque ma

mère allait livrer son travail, papa se nettoyait devant moi, puis

levait sa chemise et il me prenait la main pour me faire tenir sa

verge toute raidie et bien dure. Il me mettait sur son lit, en

m'appelant sa petite chérie. Il me l'enfonçait jusqu'à ce que cela

me fasse mal ; il l'avait énorme, alors il se tenait à une certaine

distance et se contentait de me frotter et de me chatouiller avec ».

Après, avait lieu le nettoyage, pendant lequel le père faisait des

menaces si elle s'avisait jamais de raconter ce qui se passait.

Albertine aurait été poussée à se plaindre au commissaire par

des voisines, qui remarquant qu'elle avait les yeux cernés lui

auraient demandé si elle ne « s'amusait pas toute seule ». « On dit

que je mens, c'était forcé, bien sur on croira papa, qui voulez-vous

qui sache lequel des deux ment, il n'y avait pas de témoins ! »

D'après le père, ces femmes qui l'auraient ainsi poussée à faire ces

racontars au commissaire, avaient eu des discussions avec lui au

sujet d'un pot de fleurs tombé d'une fenêtre qui avait failli

l'atteindre. La plainte avait une apparence de fondement sur ce

fait qu'un soir d'hiver en rentrant tard, il avait fait coucher la

petite avec lui, un quart d'heure, pour la réchauffer. De plus

Albertine aurait travaillé dans un atelier où une apprentie avait

la réputation de coucher avec son père.

En janvier 1897, le caractère d'Albertine après avoir été jusque-

là docile et sociable, se modifie ; elle s'emporte souvent, elle bat

ses camarades, en sournoise, guettant toujours pour voir si on

l'aperçoit. En dehors de cela, va bien, travaille en classe, au repas-

sage et au ménage. - Puberté : aisselles glabres, seins dessinés,

diamètre transversal 11, diamètre vertical 7, des deux côtés ;

38 IDIOTIE morale. MENSONGE.

aréoles accusés ; quelques poils au pénil, grandes lèvres peu déve-

loppées, petites lèvres triangulaires, n'occupant que la moitié

supérieure de la vulve, clitoris peu développé, méat urinaire diffi-

cile à apercevoir, fourchette saillante, hymen triangulaire, région

anale normale. - Apparition physiologique des règles en février.

1898. Janvier. Se montre très indisciplinée et aussi très gros-

sière. - Puberté : les seins se développent, diamètre transversal.

13 des deux côtés, diamètre vertical 9 à droite, 8 à gauche. Règles

en avril, juin et juillet.

Juillet. Amélioration légère. Est peu communicative avec le

personnel, mais bavarde sans cesse avec ses camarades, sans se

disputer comme autrefois. A soin de plusieurs fillettes, plus jeunes

qu'elle.- Puberté : quelques poils rares sous les aisselles ; hymen

triangulaire à orifice frangé. Les règles se produisent tous les

mois à partir de juillet 1898.

1899. Janvier. - L'amélioration se coufirme en classe et aux

travaux manuels. Fait de la dentelle au lieu de jouer. Parait

devenir plus sérieuse. Toujours peu communicative. - Puberté :

seins : diamètre transversal 16, vertical 12 des deux côtés.

Juillet. - En classe travaille avec goût ; fait bien la gymnas-

tique. Est susceptible, la moindre observation la fait rougir et la

met de mauvaise humeur. - Puberté : seins : 18 sur 14 des deux

côtés.

1900. Janvier. - Moins susceptible, accepte bien les observa-

tions. - Puberté : seins bien développés, 22 sur 20 des deux côtés.

Juillet. - Passe avec succès l'examen du certificat d'études.

Amélioration générale. - Puberté : poils abondants sur le pénil ;

hymen annulaire admettant l'extrémité de l'index.

1901. Janvier. - L'amélioration persiste. A la fin de l'année

Albertine, dont nous aurions voulu faire une infirmière ', est pla-

cée comme bonne chez Mac B., où elle est encore actuellement.

Puberté : poils abondants sur les grandes lèvres.

Elle a toujours persisté dans ses accusations, elle nous a dit une

seule fois que si elle avait été chez le commissaire, c'était parce

que « des voisines lui avaient monté la tête »,sans vouloir déclarer

formellement qu'elle n'avait pas dit la vérité.

1

' A ce sujet, il nous revient à la mémoire le cas d'un garçon que sa

mère, sous le coup d'un sentiment maternel au moins exagéré, prenait

avec elle dans son lit, serrait contre sa poitrine, les jambes enlacées ;

lui permettant même des caresses dangereuses. Cet enfant, qui était éga-

lement un idiot moral, est devenu un onaniste effréné. Cette intimité

dura jusqu'au moment où le jeune malade nous fut confié ; il avait alors

seize ans. Il devenait par trop dangereux, mais à qui la faute ?

idiotie morale. 39

Réflexions. I. Albertine est sous le coup d'une hérédité

assez chargée : père à migraines violentes, accompagnées de

vertiges ; grand'père paternel alcoolique, épileptique,

dément, mort interné ; - mère atteinte de troubles car-

diaques et de goitre exophtalmique probable.

II. Nous avons à faire à un cas d'idiotie morale caractérisée

par la perversion de l'instinct de véracité, et de l'instinct de

propriété (mensonges et vols). '

III. Il est à croire que s'il n'y a pas eu de mensonge

absolu, imaginé de toute pièce, au sujet du viol dont elle a

porté plainte, il y a eu, pour ainsi dire, interprétation cons-

ciemment fausse de faits peu répréhensibles en eux-mêmes,

et exagérations voulues dans le but de porter tort à son

père. Le père avoue qu'il eut, une nuit d'hiver, l'imprudence

de la coucher un quart d'heure avec lui pour la réchauffer.

Peut-être y a-t-il eu d'autres imprudences, peut-être le père

n'a pas eu devant sa fille, soit dans sa toilette, soit dans ses

rapports avec sa maîtresse, la retenue et la pudeur qu'il

aurait dû avoir'. Nous pouvons même aller jusqu'à supposer

qu'il y a eu attouchements réciproques, ce qui expliquerait

les détails donnés sur la grosseur de la verge en érection,

mais il n'a pas pu y avoir rapports complets, pendant trois

ans, comme Albertine se plaît à le dire, puisque la visite

faite par le D1' D..., le D'' Chaslin et nous-même, a constaté

l'intégrité de l'hymen.

IV. La genèse de ce mensonge monstrueux peut s'expli-

quer d'abord par l'imprudence du père, qui, comme cela se

passe si souvent dans les ménages ne possédant qu'une seule

chambre, ne se gêne pas assez devant sa fille; ensuite parce

que l'enfant voit ou apprend dans les ateliers, où elle entend

dire, entre autres choses, qu'une apprentie « couche » avec

son père; enfin par l'intervention de ces voisines, qui, ins-

pirées par la haine qu'elles ont vouée au père, ont pu, volon-

tairement ou non, suggérer l'idée de l'accusation.

1 La maîtresse, alors, Alice M..., devenue femme G..., était une hys-

térique que nous avons observée naguère à la Salpêtrière dans le service

de M. Charcot et dont nous avions soigné la soeur Dina M... dans le

service de M. Delasiauve, Leur mère, alcoolique, est morte de tubercu-

lose. Alice était devenue elle-même alcoolique et vivait de la prostitution.

- 40 IDIOTIE morale ; mensonge.

V. Ne devons-nous pas faire constater une fois de plus, le

danger qu'il y a d'accepter trop à la lettre un témoignage

d'enfant ? Car enfin que serait-il arrivé si Albertine, dans une

de ses fugues, ou simplement dans ses fréquentations d'ate-

lier avait eu, comme cela arrive trop souvent, des rapports

complets avec un autre homme ? On aurait certainement cru

sur parole la malheureuse.

VI. Quoiqu'il en soit, sous l'influence du traitement

médico-pédagogique, T... s'est notablement améliorée. Elle

avait manifesté le désir de devenir infirmière 1. Nos tenta-

tives, dans ce but, ayant échoué, nous avons pu, par l'inter-

médiaire de la surveillante, la placer comme domestique

dans une famille de la commune où elle s'est parfaitement

conduite jusqu'ici.

' Nous avons eu l'occasion de faire suivre les cours de l'écoled'infir-

merie de Bicêtre, à des jeunes filles améliorées, afin de les mettre en

situation de gagner leur vie à leur sortie de la Fondation. On a voulu

tenter le même essai avec le nouveau directeur de l'Assistance publique,

M. Napias, qui, sans doute, mal renseigné, a refusé. Il était pourtant

tout naturel que le chef de l'administration contribuât à l'oeuvre du

patronage sollicité par le médecin.

III.

Considérations anatomo-cliniques sur les rapports de

l'impotence musculaire et de certains troubles osseux

dans l'hémiplégie infantile ;

Par BOURNEVILLE ET PAUL-BONCOUR.

INTRODUCTION.

Nous avons l'habitude depuis 1887 de recueillir,

pour notre Musée pathologique les squelettes des

enfants hémiplégiques morts dans notre service de

Bicêtre, lors du relèvement des corps au cimetière,

c'est-à-dire cinq ans après l'inhumation. Notre collec-

tion comprend aujourd'hui 43 squelettes d'hémiplé-

giques.

Jusqu'ici nous n'en n'avons utilisé qu'un seul (1).

Le moment est venu d'en tirer un plus grand parti,

d'étudier un certain nombre de ces squelettes et de

mettre en regard des constatations anatomiques les

documents cliniques rassemblés durant la vie des

malades qui les ont fournis (observations, photogra-

phies, mensurations, etc.). Les causes de l'atrophie

(I) Compte-rendu du service des enfants de Bicêtre pour 1896, p. 82, avec

figure du squelette.

Bourneville, Bicêtre, 1301. 4

42 SQUELETTE DES hémiplégiques.

osseuse notamment, paraissaient devoir retirer des

éclaircissements d'une étude détaillée et scrupuleuse

des formes osseuses. Il y a longtemps qu'on discute

sur la pathogénie des troubles trophiques osseux.

Y a-t-il un trouble trophique direct ? L'impotence

fonctionnelle est-elle seule en cause ? On apporte des

faits pour ou contre. Les auteurs, clans les différents

traités, se contentent, avec un éclectisme traditionnel,

d'enregistrer les divergences sans prendre un parti

bien net.

Ayant en main les os et les documents cliniques,

nous allons essayer dans les pages qui vont suivre

de résoudre le problème ainsi posé :

Étant donné d'une part le degré d'atrophie d'un

os correspondant à un membre hémiplégie; étant

donné d'autre part le degré d'impotence des muscles

qui l'entouraient, chercher dans quelles proportions

le muscle est l'agent du trouble trophique. Autre-

ment dit quel rapport eiili-e les uaniitions

osseuses et les variations musculaires ?

Si le degré d'impotence nous était suffisamment

connu par les renseignements cliniques recueillis

journellement sur les malades, il fallait y joindre la

connaissance non moins exacte de l'état osseux, mais

pour cola, on ne doit pas se contenter d'évaluations à

vue d'ceil, de constatations vagues, telles qu'on les

rencontre généralement. Il ne suffit pas de signaler

l'atrophie ou la gracilité de l'os, de donner sa circon-

férence ou de noter superficiellement la différence

de longueurs entre les deux ossymétriques. Nous ver-

rons ultérieurementquelamensurationde la longueur

INTRODUCTION. 43

fémorale, par exemple, n'est pas aussi simple qu'on

le croit et qu'il y a de nombreuses causes d'erreur

résultant d'une technique défectueuse.

Pour substituer aux à peu près des documents vrai-

ment précis, nous avons demandé à l'un de nos

anciens internes, plus particulièrement compétent

dans ces sortes d'études, M. Paul-Boncour, d'entre-

prendre un travail préliminaire tout à fait spécial

destiné anous donner une étude anatomique complète

des os. C'est ce qu'il a fait en mettant en pratique les

procédés utilisés en anthropologie, en traduisant

en chiffres les variations morphologiques osseuses, en

comparant les formes anormales aux formes saines ou

à d'autres formes de la série animale. Naturellement,

il a été tenu compte de l'âge du sujet et de l'état de

croissance des os : c'est là une condition capitale, la

caractéristique de Y hémiplégie infantile étant de frap-

per un être en voie d'évolution.

Cettcétudc, faite aulaboratoirecd'anthropologie sous

la direction de M. le professeur Manouvrier, a été com-

muniquée à la Société d'Anthropologie (1), où elle a

été l'objet d'une discussion. Nous en extrairons les

notions qui nous sont utiles, pour affirmer nos con-

clusions. Nous les développerons ou les résumerons

suivant les besoins do nos raisonnements.

Voici en tout cas rémunération des particularités

qui ont été étudiées anatomiquement par Paul-Bon-

cour et qui distinguent les deux catégories à propos

(Il Le fémur. {Bulletin de la Suciété d'Anthropologie de Paris, fascicule

V, 1900); - Humérus; radius, cubitus. (Idem, juin 1901.) ?

44 Squelette DES hémiplégiques.

desquelles nous nous proposons d'établir les rapports

entre les variations osseuses et les variations muscu-

laires : 1° La diaphyse de l'os malade est plus arrondie

que celle de l'os sain par suite de l'absence- ou de la

diminution du pilastre (variations de l'indice pilas-

trique) ; - 2° La courbure antéro-postérieure est

moins accentuée sur les os atrophiés ; - 3° La face

externe d'un os sain est plus large, plus aplatie, et

légèrement excavée ; 4° Le degré et la forme du pla-

tymérie sont différents ; 5° L'obliquité du plan poplité

augmente sur un fémur sain ; 6" Le col du fémur et

l'axe diaphysaire ont des inclinaisons variables.

Il y a d'autres particularités (comme le développe-

ment inégal des crêtes d'insertion tendineuse) que

nous jugeons inutile de mentionner en raison de la

facilité de leur explication. De même d'autres points

intéressants de la morphogenèse de nos os, par exemple

les variations de la fossette hypotrochantérienne, ou le

troisièmetrochanter,serontlaissésde côté car, s'ils ont

de l'importance pour fixer certains faits d'ordre général,

ils n'apporteraient que peu de lumière à nos démons-

trations et allongeraient inutilement ce mémoire. Ces

remarques générales exprimées, nous cédons la parole

à M. Paul-Boncour.

CHAPITRE I.

L'impotence musuclaire et son retentissement sur la forme

- - - - du fémur.

A la partie moyenne de sa diaphyse l'os malade est plus

LE fémur. 45

arrondi que l'os sain, mais son aspect estsujeta de nom-

breuses variations et l'on rencontre tous les intermédil11-

res entre la forme complètement arrondie (indice pilas-

trique = 100) et la forme aplatie transversalement qui est

celle d'un fémur normal. (Tableau A.)

La détermination de l'indice de section, l'analyse raison-

née et comparative des os indiquent que ces variations

dépendent uniquement de l'absence (indice pilastri-

que = 100) ou du moindre développement du pilastre.

Nous n'insistons pas sur ces faits étudiés ailleurs et aux-

quels nous renvoyons, afin de considérer le rôle de l'hé-

miplégie dans la production de ces formes morbides.

S'il est admis que la saillie pilastrique est le résultat'

de l'activité musculaire et que son degré de développe-

ment est proportionnel à cette activité, nous devons

rechercher si, sur nos os, sa disparition ou son amoindris-

sement reconnaissent un mécanisme en sens inverse.

En se basant sur l'observation d'un grand nombre de

faits, M. MANOUVHIEH (1) a démontré que la formation du

pilastre étaitliée al'action du muscle crural. C'est pour les

besoins de ses fibres qui s'insèrent directement sur la sur-

face osseuse, condition essentielle pourpouvoirlamodifier,

que le fémur humain prend la forme prismatique. Le

muscle agissant sur la face externe de l'os la transforme

en l'aplatissant et en l'agrandissant, autrement dit en

donnant à l'os une forme prismatique et triangulaire. En

raison de ]'unilatéralité de la cause qui produit la saillie

pilastrique, la ligne âpre qui couronne cette saillie n'est

pas rectiligne, mais inclinée en dedans. Le pilastre pré-

sente en outre une convexité postérieure destinée à favo-

riser l'extension musculaire. Ces faits, très-accentués sur

des os trapus et vigoureux, le sont moins sur les fémurs à

faible développement. Ceci étant donné on peut affirmer

que sur nos os les variations pilas triques sont égale-

ment d'origine musculaire.

(1) Variations morphologiques du corps du fémur dans l'espèce humaine.

(Société d'anthropologie, octobre 1892).

46 SQUELETTE DES Hr311PLI`frIQUES.

LE FÉMUR. ' 47

facile. La photographie le montre d'ailleurs assez claire-

ment. Aussi voit-on sur la Planche II que la différence

entre les pilastres est peu sensible. Sur les Planches III et

IV les différences sont au contraire marquées. L'attitude

indique la gêne de la marche et le peu d'activité des mus-

cles. Les pilastres traduisent ces modifications : l'os

malade n'en possède pas : les deux lèvres de la ligne

âpre qui normalement surmontent la saillie pilastrique

ne sont môme pas réunies (1). Nous pourrions multiplier

ces exemples.

L'inspection des os atrophiés montre que lessignes énu-

mérés plus haut et constatés sur des fémurs normaux

{déviation du pilastre, sa convexité postérieure etc.) sont

moins marques ou ? m<s suivant les cas. Sur la Planche

IV le fémur malade (situé à gauche) a une ligne aprerecti-

ligne, ce qui n'existe pas sur l'os opposé. Sur la Planche II

l'aspect est identique. Les Pt.wcota V et VIoffrent àlavue

des faces externes réduites sur le fémur malade, très larges

sur le fémur sain. Les os pathologiques des Planches II et

V sont en outre intéressants parce qu'on voit à leur partie

supérieure un espace resté inoccupé (cerclé de noir sur V

complètement teinté sur II). Cette disposition signifie'que

les muscles n'ont pas utilisé toute la surface disponible

ce cpti n'existe pas, ou alors très peu, suez un os sain, où le

système musculaire est au contraire obligé, vu son déve-

loppement, de modifier les surfaces d'insertion. Nous

signalons donc pour la première fois, car nous y revien-

drons encore, cette opposition entre l'atrophie osseuse

accompagnée d'un moindre développement musculaire et

l'activité du membre sain pourvu de muscles à grande

extension. Sur les Planches V et VI la convexité posté-

rieure du pilastre (côté sain) est visible.

Réponse à une objection. Si malgré tout, considérant

la saillie pilastrique comme un simple renforcement osseux

indice d'une bonne nutrition on avançait qu'il est bien

naturel de la rencontrer sur un os sain, bien nourri et actif

(1) Nous reviendrons sur ce fait il la page 49.

48 SQUELETTE DES hémiplégiques.

et de la voir absente sur l'os malade atteint de troubles

trophiques ou encore que les muscles n'ont rien à voir

dans la production de ces formes ; nous ferions remar-

quer :

1° Que la forme saine ne diffère pas seulement de la

forme malade par un simple support osseux surajouté

mais qu'il a transformation complète de la forme

osseuse. Nous en expliquerons ultérieurement le méca-

nisme, mais le tableau précédent A est démonstratif, car il

indique qne pour acquérir un pilastre, l'os sain a dû

modifier complètement la forme primitive donnée par l'os

pathologique. Il s'aplatit et gagne en longueur ce qu'il

perd en épaisseur, autrement dit le diamètre transversal

est relativement et même parfois effectivement supérieur

au diamètre antéro-postérieur sur un os malade. Si l'on

invoquait uniquement un trouble trophique, cette supério-

rité du diamètre transversal deviendrait inexplicable.

2° Nous ferons remarquer à ceux qui regarderaient le

pilastre comme le résultat d'une bonne nutrition osseuse,

qu'il leur devient impossible d'expliquer la différence de

courbure relevée sur les deux séries d'os, car ce sont

précisément les fémurs les plus vigoureux et les plus soli-

des, c'est-à-dire les os sains, qui présentent la courbure

antéro-postérieure la plus accusée. Les os malades, sui-

vant les cas, sont peu ou pas courbés ; et cependant le poids

supporté par le membre malade était encore assez accen-

tué pour qu'un os atrophié et mal nourri traduisît plus

encore que son congénère la pression du corps ! Etant

donné surtout que cet os sain, en vertu de sanutrilionpar-

faite, est en outre pourvu d'un contrefort osseux, le pilastre !

C'est absolument le contraire qui a lieu : les PL. IV, VII,

VIII, entre autres, montrent assez bien les différences de

courbure.

En adoptant notre manière de concevoir la production

de la saillie pilastrique, tout s'explique aisément. En même

temps que la saillie pilastrique s'accuse (nous parlons d'un

os normal) et que la surface externe s'élargit, il se produit

un évidement de cette face postéro-externe bien visible

LE fémur. ' 49

d'ailleurs sur tous' les fémurs normaux. Inversement, il se

produit un renforcement compensateur sur la face opposée,

qui empêche la diminution de volume. Aussi sur un os

normal le centre de courbure ne siège pas à la partie

moyenne de l'os, lieu de moindre résistance, mais au niveau

du maximum de largeur de l'insertion musculaire. De

môme la courbure n'atteint pas également les deux moitiés

de l'os.

Tous les faits qui précèdent et qui ont trait aux os nor-

maux ont été mis en relief par M.Manouvrier (1), qui a

encore insisté sur leur accentuation d'autant plus marquée

que l'os est plus vigoureux. Il a aussi remarqué que les

fémurs féminins et d'enfants sont moins incurvés que les

masculins et cependant la femme supporte une charge

relativement plus lourde en raison des proportions fémi-

nines du tronc. Tout ceci 17'oul,e qvce l'incurvation fémo-

rale n'est nullement mécanique, mais sous la dépendance

du système musculaire .

Sur nos os nous retrouvons des oscillations analogues

il celles-ci, mais beaucoup plus marquées, puisque l'état

musculaire est lui-même beaucoup plus différencié. Nos

résultats s'accordent d'une façon absolue avec ceux qui

précèdent et l'impotence musculaire suffit seule, on le

voit, à expliquer la forme de l'os malade.

Il existe une modification de la ligne âpre qui indique

encore mieux la part considérable qu'il faut faire au

développement musculaire dans la production des formes

pathologiques. Normalement, sur l'os de la cuisse, la ligne

âpre présente deux lèvres et un interstice ; mais cette dis-

position est purement schématique, car en réalité ces trois

éléments sont confondus et surmontent la saillie pilas-

trique. Sur les os pathologiques, ou bien les de la

ligne âpre sont éloignées l'une de l'autre, ou bien elles

tendent à s'écarter. Cette dernière alternative est cons-

tituée par ce fait que les deux lignes qui sont confondues

normalement sur un espace de plusieurs centimètres, ne

(I) Loco citato.

50 Squelette des HÉMIPLÉGIQUES.

le sont plus que sur un espace de 3 à ! i centimètres et

quelquefois moins. En un mot la bifurcation inférieure

de la ligne âpre se fait a un niveau plus ¡'a]7]J¡'oclté de la

partie moyenne de la diaphyse : on en voit des exemples

remarquables sur les Planches IV, VI, IX.

La 1"IAN(IIE I\7 représente une dissociation complètcdes

lignes âpres. U en est de même sur la PL. IX.SurlaPL.

VI on voit la bifurcation se l'aire à un niveau plus élevé.

Cet écartement, complet ou incomplet, ne peut encore être

rattaché à des troubles trophiques d'origine centrale.

Quand même on réussirait à expliquer correctement la

disparition du pilastre, il est nécessaire d'invoquer l'action

musculaire pour comprendre la cause d'un écartement qui

peut avoir un ou deux centimètres.

Cette variation est facile il expliquer, en se reportant à

la genèse des formes normales. Le rapprochement des

lèvres et la saillie pilastrique naissent sous l'influence d'une

même cause. C'est une loi bien démontrée et basée sur

l'observation raisonnée des formes osseuses humaines ou

animales que l'os s'adapte aux fonctions du muscle. Autre-

ment dit : si celui-ci tout en se développant trouve une

surface large et suffisant à ses attaches, il n'a nullement

besoin delà modifier. Si, au contraire, la surface d'insertion

n'est plus en rapport avec le volume du muscle accru par

l'exercice, la forme osseuse se modifie dans un sens déter-

miné. Or c'est pour cette cause, que, sur un os normal,

les crêtes de la ligne âpre sont d'autant plus rapprochées

que le développement musculaire est plus grand relative-

ment au volume de l'os. Qu'un fémur fournisse une large

surface d'insertion il une masse musculaire relativement

minime (fémur du gorille par exemple) l'os restera arrondi

et les deux lèvres qui marquent les limites de l'insertion

n'ont aucune tendance à se rapprocher. L'aspect sera celui

de la figure 1. Que cette masse musculaire s'accroisse,

l'os se modifiera, il s'aplatira, ce que nous savons déjà ;

la coupe de l'os, de circulaire, deviendra triangulaire,

l'angle postérieur s'allongera et le pilastre sera ainsi

constitué; mais en même temps le muscle repoussera

les deux lèvres vers la partie postérieure et leur dépla-

cement ultime sera leur confusion sur le sommet du pilas-

'-LE FÉMUR ? ? , 51

tre. Tel est l'aspect représenté sur la figure 3 : on voit sur

la fig. 2 un stade intermédiaire. Toute la morphologie,

à ce niveau dépend donc du volume des muscles relative-

ment àla surface osseuse. Il est évident que nos fémurs

malades représentent des os dont le développement mus-

culaire est relativement faible, et comme conséquence,

les lèvres de la ligne âpre sont écartées ou tendent à s'é-.

carter. Suivant les cas, ils représentent sur une coupe le

cas de la figure 1 ou le cas intermédiaire représenté sur

la fig. 2- (1).

Figures schématiques empruntées à 1\1. Manouvrier et montrant sur une

coupe la forme de plusieurs fémurs,- e, lèvre externe de la ligne âpre; i,

livre interne de la ligne ;lpre. - Fig.1,eoupe du fémur d'un gorille, ou d'un'

hémiplégique : le développement musculaire est relativement faible; Fig.

2, représentant la coupe d'un fémur dont le pilastre commence à être plus

prononcé ; certains fémurs féminins sont ainsi faits, et quelques-uns de

nos fémurs malades, correspondant à une paralysie légère, s'en rapprochent

absolument; Fig. 3, fémur il fort développement musculaire. La partie

rayée représente ce qu'il faut ajouter il l'os de la fig. 1 pour qu'il prenne la.

forme de la fig. 3.

A lapartieinférieure de l'os, on retrouve d'autressymp-

tômesengendrés uniquement par l'impotence musculaire.;

Sur unfémur normal lepiara poplilé est incliné en dedans,'

en raison de la saillie supérieure de sa partie externe.

Sur un fémur cl' hémiplégique, cette inclinaison est moins

(1) Sur la figure 3 on voit un os normal et ce qu'il faut retrancher de sa

surface de coupe pour en faire un os atrophié. 1 .

Fia. 1.

Fig. 2.

Fig. 3.

52 SQUELETTE des hémiplégiques. '

prononcée ou absente. Lit encore va-l-on faire intervenir

un trouble trophique Iflri ne porterait que sur une moitié

de l'os ? Ce serait tellement absurde que nous n'insistons

pas, en faisant remarquer que le plan est incliné sur un fé-

mur normal en raison de l'action du muscle crural qui agran-

dit la surface d'insertion en repoussant la bifurcation exter-

ncdelaligneàpre, commcil l'avaitfait à la partie moyenne.

Sur les planches précédentes on voit, mal la différence

de ces inclinaisons, mis on s'aperçoit au contraire

fort bien que le prolongement externe de la ligne âpre est

plus marqué sur l'os sain et y descend plus bas : variation

en rapport encore avec le développement musculaire. Il est

nécessaire de rappeler ici que toutes les formes morbides

ne sont pas absolument spéciales à l'hémiplégie infantile.

Sur des fémurs parfaitement normaux et sains, M. Manou-

vriera relevé des formes poplitées identiques aux nôtres et

en se basant sur les signes répartis sur le reste de l'os, il

avait conclu que l'affaissement de la partie externe du plan

poplité était le résultat d'un faible développement muscu-

laire. De même, il propos des coupes, nous avons insisté sur

ce fait que la forme de la li. 2 était celle (1) de fémurs

normaux peu vigoureux et de certains os malades.

Bien que nous ayions il parler encore de deux autres

variations, nous pouvons insister auparavant sur quelques

notions qui se dégagent spontanément de ce qui précède.

1° Sur nos fémurs malades on note la persistance de

nombreux caractères infantiles.

Le fémur n'a pas au début de la vie la forme qu'il revêt

chez un adulte. Nous avons déjà signalé il plusieurs

reprises les modifications de cet os sous l'influence du

muscle et de son activité. Chez un enfant, en dehors de

toute lésion, le fémur a des caractères tout particuliers :

(1) A propos de nos formes poplitées nous croyons intéressant de signaler le

rapprochement, qu'on peut en faire avec le fémur du pithecanthropus erectus

(voir Bulletin de la Société c1'Anlhroholoiv,jalet t;lOU, yagN400). Ceci démon-

trera qu'au point de vue évolutionniste, on pcut retirer un énorme bénéfice de

l'étude des faits pathologiques, à la condition de les expliquer au moyen de

la clinique.

LE fémur. 53

il est recliligne; le pilastre est à peu près absent ; le plan

poplité est aplati, la ligne âpre n'a pas ses éléments

confondus : ces caractères se modifient au sur et à mesure

que l'enfant grandit ; et en examinant des os correspon-

dant à un âge plus avancé et par conséquent à un degré

plus avancé de développement musculaire, les différences

entre l'os observé et un os dont la croissance est terminée

sont de moins en moins marquées. Le pilastre devient

plus saillant, la forme arrondie se perd par suite de l'apla-

tissement transversal, l'obliquité poplitée s'accuse. Or,

ces caractères sont précisément, ceux qui différencient

aussi nos fémurs sains et nos fémurs malades. On n'a qu'à

comparer un fémur sain d'enfant et un fémur malade

d'adulte pour être convaincu de la réalité du fait que nous

avançons.

2° Il est non moins éciclent que ces caractères infantiles

sont à peine marqués si la paralysie a été légère. ,

Qu'on se reporte il la Planche II où sont représentés des

fémurs pourvus de muscles peu différents les uns des

autres, l'existence incontestable d'une paralysie : le

fémur malade ne diffère que très peu du fémur sain.

3° On peut donc dire que les fémurs dépendant d'un

membre hémiplégie, représentent un stade intermédiaire

entre un fémur normal et un fémur d'enfant.

Les caractères infantiles disparaissent si l'hémiplégie

a été très légère : ils sont accusés si l'impotence a été

accentuée ; si l'hémiplégie a été d'intensité moyenne les

caractères du fémur malade représentent un stade plus

avancé de développement. Cela se conçoit aisément si

on a présent à l'esprit et ce que venons de dire sur la

morphogénie du fémur, et ce qu'a publié l'un de nous

comme introduction à ce travail sur les modifications

osseuses, et d'une façon générale ce qui a trait aux varia-

tions morphologique de l'os de la cuisse. On saisira les stades

par lesquels passe un fémur normal au cours de la crois-

sance. Il n'acquiert que progressivement sa forme parfaite

et parmi les causes qui président à son évolution, il faut,

V

64 Squelette DES hémiplégiques.

placer avant tout l'activité musculaire. Mais alors nos

formes pathologiques peuvent prendre rang dans cette

sériation ; ils auront bien certains caractères particuliers

qui permetteront de ne pas les confondre complètement

avec un os sain, mais dans la majorité des cas si on les

présente isolément à une personne non prévenue (ce qui

a été fait) celle-ci remarquera simplement qu'ils corres-

pondaient à un faible développement musculaire. Chemin

faisant nous avons rappelé que certaines formes patholo-

giques se rencontraient sur des os incontestablement

normaux.

4° Cette façon de comprendre les formes pathologiques

se trouve vérifiée par les faits exposés jusque ici ; les cas

suivants qui en sont pour ainsi dire la contre-partie la

confirment encore. Quand le fémur sain d'un hémi-

plégique a donné insertion à une masse musculaire peu

active quoique normale, il est à son tour peu différencié

du fémur malade.

Tel est le cas représenté sur la Planche X. Le membre

sain n'avait qu'une activité très médiocre par suite de l'é-

tat intellectuel du sujet et des crises épileptiques qui se

renouvelaient fréquemment. Tout cela s'opposait à la loco-

motion. De ce fait, l'os sain n'a subi qu'une modification

légère et proportionnée à ce faible développement muscu-

laire. Les deux formes se rapprochent : mais ce n'est plus

comme précédemment le fémur malade dont l'évolution

est plus avancée; c'est au contraire l'os sain qui diminue

la distance.

5e Si le fémur sain n'a subi qu'une transformation

incomplète par suite de l'âge peu avancé du sujet qui en

était porteur il ressemble à son congénère malade.

Théoriquement cela découle de ce qui précède : étant

donné que le fémur subit des variations successives au

cours de la croissance et parallèlement au développement

du système musculaire, son degré de transformation sera

d'autant moins accentué, qu'on sera à une époque moins

éloignée de la naissance. Puisque l'os malade subit un-

LE fémur ? ... ? 55

arrêt ou un retard d'évolution, il est naturel que le fémur

sain rappelle une forme par laquelle il vient lui-même de

passer. C'est ce qu'on constate sur tous les fémurs d'hé-

miplégiques du musée de Bicêtre dont les épiphyses n'é-

taient pas encore soudées (1).

6° De peuttttssi que

chez un hémiplégique infantile la forme des os, aussi bien

du fémur sain que du fémur malade, est liée à l'étut de la

musculature.

L'os malade subit peut-être des troubles trophiques

indépendants de ceux qui sont occasionnés par l'impotence

musculaire : ils sont négligeables, et ce qui est certain,

c'est que même un os malade s'adapte entièrement à la

fonction du muscle. Tout ce qui précède le prouve et les

remarques suivantes y contribuent encore.

L'histologie pathologique enseigne que dans l'hémiplégie

spasmodique les groupes musculaires sont inégalement

frappés et que même dans un muscle un faisceau isolé peut

conserver son activité a l'exclusion des autres. Il est par-

fois difficile de trouver des symptômes de ce genre sur

un os, mais à la partie supérieure de quelques-uns de nos

fémurs nous constatons la juxtaposition de l'activité et de

l'inactivité des deux faisceaux d'un même muscle.

Sur un fémur normal ilexiste souvent, à la partie supé-

rieure de la diaphyse, au-dessous du petit trochanter une

tendance à l'aplatissement antéro-postérieur. Aplati trans-

versalement à la partie moyenne l'os l'est en sens inverse à

ce niveau, et il l'est parfois d'une façon extrêmement mar-

quée. Ce caractère porte le nom de platymérie : il est

engendré par l'action musculaire et lui est proportionné ;

par suite de cette transformation, l'os offre une plusgrande

surface relativement à son volume phénomène éminem-

ment favorable à l'insertion musculaire. Sans insister sur

(t) Le tableau A montre aussi que les fémurs I, J, K, sont it peu prés égaux

les chiffres différent peu et surtout les proportions n'indiquent qu'une modi-

fication légère de la forme. -

56 SQUELETTE DES hémiplégiques.

les causes physiologiques qui nécessitent en ce point un

plus fort développement musculaire (1), disons que cet

aplatissement produit deux faces (antérieure et postérieure)

et deux bords saillants continuant les faces internes et

externes disparues par suite de cette modification. Les

deux bords sont généralement dénommés crête fémorale

interne et crête fémorale externe. Cetaplatissement antéro-

postérieur de la surface de l'os a un autre résultat; c'est de

masquer plus ou moins la base du petit trochanter que la

crête fémorale interne surplombe. Ceci dit il est évident

que les os sains doivent être plus platymères que les

malades, mais les indices calculés par Paul-Boncour ne

l'indiquaient pas d'une façon formelle et cela parce que, à

ce niveau, les os pathologiques présentent une bizarrerie

facile à expliquer. Ceux-ci subissent réellement un agran-

dissement de leur surface antérieure et comparé au dia-

mètre antéro-postérieur le diamètre transverse (indiquant

l'agrandissement précité) dénote un aplatissement.

Mais ce que ne peut dire le rapport c'est que, seule, la

partie externe de la face antérieure est augmentée, et com-

me ce léger agrandissement coïncide avec une atrophie

de l'épaisseur de l'os, on obtient un indice de platymérie

erroné. Cette partie externe de la face antérieure est seule

augmentée, par ce que elle a donné insertion à un faisceau

musculaire très actif tandis que sa partie adjacente (inter-

ne) n'a fourni aucune insertion. Sur la Planche XI, on voit

une sorte de dos d'anc séparant la face antérieure en deux

versants. Le versant externe est lisse, large, et on voit l'a-

grandissement de la surface osseuse dont la limite externe

(bord externe de l'os, crête fémorale externe) ne continue

pas la direction primitive de l'os ; elle s'écarte de l'axe

médian. Le versant interne est étroit ; la surface loin

d'être lisse est ridée (stries d'atrophie). Sur l'exemple

représenté sur la Planche XI, il existait une plaque blan-

(1) Si l'on veut comprendre ces formes et sutout avuir une notion complète

sur leur production et leurs variations, il faut se reporter aux travaux de

Manouvricr (loco citato) et De la Platymérie {Congrès d'a71tit)-opologie et d'ar-

théologie préhistoriques, 18'Jl) et à ceux de Paul-Boncour qui s'occupent spé-

cialement d'os anormaux et des rapports des différentes formes de platymérie.

Le fémur. 57

châtre, teintée sur la photographie et qui témoigne de

l'inoccupation de l'os à ce niveau.

Comme confirmation de ce fait, on remarquera que- si la

crête fémorale externe existe, l'interne est absente. Aussi

sur les os malades le petit Irochanter n'est nullement

masqué, il semble même, pour cette raison, plus développé

que du côté sain (Planches XII et XIII).

A la partie postérieure des os malades, la saillie de la

crête fémorale externe contribue a exagérer la dépression

simulant la fossette hypotrochantérienne. On le voit,

l'os s'adapte parfaitement Ù l'activité d'un faisceau mus-

culaire isolé, môme quand celui-ci correspond au côté

atrophié.

Sans nier la possibilité do troubles trophiques d'origine

centrale, après tout ce qui précède, nous devons constater

l'importance de l,y,oit clu muscle dans la détermination

de l'atrophie osseuse. On peut même ajouter que par la

seule impotence fonctionnelle nous avons réussi à expli-

quer d'une façon rationnelle les formes de l'os malade.

Pourquoi d'aillcurs, dans ce cas particulier, n'admet-

trait-on pas une origine qu'on reconnait possible pour des

phénomènes analogues amincissement de la mâchoire

après la chute des dents, rétrécissement de la cavité

orbitairc après l'énuléation de l'oeil, disparition ou amoin-

drissement de la cavité cotyloïde si la sphère fémorale

n'y est plus ? P

Mais il faut préciser le rôle du muscle, car le mot

atrophie est impropre : l'os du membre hémiplégie est

atteint d'un arrêt de développement ou mieux d'un retard

de développement. Comme l'a si bien dit le professeur

Brissaud (1), ce qu'on appelle dans le langage courant

atrophie « n'est pas un phénomène régressif. » La maladie

atteint un organisme en voie de croissance, elle agit aussi

sur les facteurs de cette croissance, les trouble, les vicie

et de même qu'elle produit une arriération intellectuelle,

(1) Lorons sur les maladies neroeuses. (Salpêtrière, 1893-95).

Bourneville, Bicêtre, 1901. 5

58 SQUELETTE des hémiplégiques.

elle produit un retard dans le développement de l'ossifi-

cation.

Le système osseux prÓsen te de l' /1(;1)/ i..infantilisnw : c('d

est tellement vrai qu'on peut constater dans quelques cas

malheureusement trop rares vu la difficulté d'avoir des

autopsies complètes la persistance de certains cartilages

de conjugaison sur le seul côté hémiplégie. Ceci existe sur

les membres, comme sur d'autres parties du squelette : sur

un bassin nous avons relevé un arrêt unilatéral de l'ossifi-

cation : alors que le côté sain est complètement calcifié, le

côté malade présente encore des centres cartilagineux. Ce

sont lit des faits qui empêchent toute assimilation entre les

formes que nous signalons et une véritable atrophie La

direction du traitement doit s'inspirer de ces constata-

tions et tout il l'heure nous montrerons comment elles

servent à expliquer des malformations définitives.

CHAPITRE II.

Inclinaison du col fémoral, Variations de l'angle cervico-diaphysaire

expliquées par la pathologie.

Il nous reste encore deux particularités à envisager :

1° l'inclinaison du col fémoral :

2° l'inclinaison de l'axe de la diaphyse.

Ces inclinaisons ne sont pas identiques sur les deux os

d'un même sujet. La seconde particularité est en partie

d'origine musculaire, tandis que la première dépend de

causes purement mécaniques. Nous parlerons néanmoins

de celle-ci en premier lieu, car elle nous permettra de

mieux comprendre les variations d'inclinaison de l'axe

diaphysaire (1).

(1) De même, nous passons sous silence dans ce chapitre et dans le suivant

l'action de ces inclinaisons sur l'augmentation et la diminution de longueur

des os. Nous traitons cette question en détail dans le chapitre IV.

Le fémur. 59

L'inclinaison du col n'est pas la même sur les deux fé-

- Il suffit de considérer avec un peu de soin les deux

fémurs d'un individu ayant été atteint d'hémiplégie infan-

tile pour remarquer une différence dans l'inclinaison du

col fémoral : autrement dit, l'angle formé par la rencontre

de l'axe du col avec celui de la diaphyse, a une valeur

différente suivant qu'il correspond il l'os du membre sain

ou il l'os du membre paralysé. Cette inégalité passerait

facilement inaperçue si l'on se contentait de juxtaposer

les deux os; elle devient, au contraire, très appréciable

en leur donnant une direction convenable. Qu'on ne soit

pas prévenu et qu'on saisisse un fémur dans chaque main

on leur imprimera une direction défectueuse, car, instinc-

tivement on' oriente chaque os de façon -'IL ce que les angles

cervico-diaphysaire se correspondent exactement. Or,

celte direction ne correspond nullement à celle qui existe

sur le vivant et elle est absolument fantaisiste.

Sans insister maintenant sur les erreurs occasionnées

par l'ignorance de ces faits dans l'évaluation delà longueur

fémorale (ce sera l'objet d'un chapitre auquel celui-ci et le

suivant servent pour ainsi dire d'introduction), contentons-

nous déplacer les deux fémurs d'un hémiplégique absolu-

mentverlicaux (1). Ils se présentent alors comme les repro-

duit la I't. : w : ur : IV (ils n'y sont vus que par leur partie

postérieure, mais leur aspect antérieur offrirait les mômes

particularités.) Cette planche montre :

1° Que l'angle cervico-diaphysaire est plus ouvert du

côté malade ;

2° Que la tête fémorale correspondant au fémur malade

est sur un plan plus élevé que normalement. En effet, son

extrémité supérieure ne dépasse pas le hord du grand tro-

chanter sur le fémur sain. 11 n'en est pas de même sur le

fémur pathologique ;

3° Que le bord supérieur du col fémoral est plus arqué

qu'à l'état normal.

(.) Cette situation n'est nullement celle qui correspond à la situation sur

le vivant, mais pour ne pas embrouiller la discussion, nous la considérons

comme normale.

60 SQUELETTE DES hémiplégiques.

Ces modifications se rencontrent dans la plupart des cas

qui ont été soumis à notre observation et les rares excep-

tions dont nous parlerons d'ailleurs, loin d'infirmer cette

règle générale que dans l'hémiplégie, infantile l'angle du

col du fémur est plus ouvert du côté malade, serviront

au contraire a justifier nos explications sur la genèse de

cette déformation. La vue ne suffit pas à apprécier le degré

des variations angulaires et il vaut mieux les mesurer et

traduire en chiffres les différences. Nous ne donnons pas

la technique suivie : nous renvoyons pour tous les détails

au mémoire préliminaire dont nous avons déjà parlé puis-

que nous nous bornons ici il des conséquences cliniques

et médicales.

La valeur angulaire est indiquée dans le tableau 13. Les

fémurs G G', Il II', I I', J J', KK', ont été étudiés depuis la

communication de Paul-Boncour il la Société cl'at7fnoltolo-

gaie : ils apportent des arguments nouveaux et nous au-

rons à nous y arrêter.

Devant ces résultats une première question se pose :

Quelle est la cause de la moindre inclinaison du col du

fémur malade ? Quel est lu mécanisme de cette déforma-

tion y

Beaucoup de théories ont été proposées pour expliquer

les variations individuelles de l'ouverture de l'angle.

D'après les travaux antérieurs, parmi lesquels il faut

surtout citer celui de 13,oclct (de Lyon) et d'après les recher-

ches récentes de l'un de nous sur lesquelles nous allons

insister pour les préciser, on peut admettre que c'est le

poids du corps qui produit l'inclinaison du col fémoral.

Il est moins incliné, en effet, chez l'enfant que chez

l'adulte. D'autre part, il ne change plus après 20 ou 25

ans, c'cst-à-dire quand la croissance est terminée. On a

bien prétendu que chez le vieillard on observait des frac-

tures en raison de la fermeture exagérée de l'angle cer-

vico-diaphysaire : c'est un trouble trophique d'origine

sénile et nullement un mécanisme assimilable au précé-

dent. Il est donc naturel de conclure qu'au sur et à mesure

que l'individu avance en âge l'inclinaison du col s'accentue

sous l'influence de l'augmentation concomitante du poids

1,E r,,i.,âfuii.

1)1

du corps. Tous ces raisonnements auxquels on a reproché

d'être un peu théoriques, gagneraient évidemment il s'ap-

puyer sur l'expérimentation.

La pathologie vient combler cette lacune : tous nos

fémurs ayant été placés dans des conditions qui ont la

valeur d'une véritable expérience.

Il serait, en effet, curieux de savoir ce que deviendrait

62 SQUELETTE DES hémiplégiques.

lesquelles se sont trouvés nos sujets. Nos observations ont

porté sur des faits remplissant toutes les conditions dési-

rables. Les individus qui étaient porteurs de nos os on

été hospitalisés dans le service de M. Bourneville, a 131cc-

tre, où, suivant sa méthode habituelle, ils ont été étudiés;

leur observation a été prise avec soin, leur façon de mar-

cher soigneusement examinée ; plusieurs photographies

ont été réunies dans les archives du service ainsi qu'on

peut en juger. Il nous est donc possible de mettre en

regard de chaque os, l'histoire du malade et le degré

d'impotence d'un de ses membres inférieurs.

2° Les déformations sont bien survenues pendant la

croissance. On a vu plus haut que les variations angulai-

res ne se produisaient que grâce il cette flexibilité nor-

male qui persiste durant la croissance. Nos fémurs rem-

plissent hien cette condition : la caractéristique de l'hé-

miplégie spasmodique infantile est de survenir chez un

individu en état de développement. L'hémiplégie d'un

adulte ne présente que des troubles paralytiques ; chez

l'enfant la lésion cérébrale s'accompagne de troubles tro-

phiques atteignant tous les éléments du membre, os y com-

pris : et il en est ainsi parce que les trouilles ont frappé un

organe en état de croissance.

3° Les deux fémurs d'un même individu ont supporté

des pressions différentes.. '

Etant donné les conditions qui précèdent et le méca-

nisme invoqué plus haut pour expliquer la fermeture de

l'angle cervico-diaphysaire, on conçoit facilement que si

d'un côté la pression a été moins forte, l'inclinaison du

col sera en même temps moinsaccuséc. On ne peut mettre

en doute que le fémur du côté malade ait eu il subir une

moindre pression que son congénère. Celle-ci est com-

plexe et ainsi que l'a dit l'un de nous, il ne faut pas

considérer le poids du corps comme un poids brut mais

comme un poids augmenté de toute la force vive provenant

de la vitesse de la masse en mouvement. A une influence

purement mécanique s'ajoute encore celle de l'activité des

mouvements, bien représentée par la force musculaire.

LE fémur. 63

Or, les os donnent des preuves de cette diminution de

l'activité musculaire. Le chapitre précèdent et surtout

l'étude purement anatomique qui en a été faite et laquelle

nous renvoyons, montrent la diminution de l'indice pilas-

trique, la moindre saillie de la branche externe de la

bifurcation de la ligne âpre, la faiblesse de l'indice poplité

il 4 centimètres au-dessus des condyles, une moindre

platymérie, etc., etc., autant de particularités qui indi-

quent un faible développement musculaire. Les observa-

tions sont lit enfin pour indiquer le moindre volume des

masses musculaires mesurées sur le vivant.

Indépendamment de cette paralysie le poids supporté

par le membre malade était diminué. Observons un hémi-

plégique infantile.

Au repos, un individu abandonné à lui-même prend

instinctivement l'attitude hanchée, c'est-ai-dire que le

poids du corps repose sur une seule jambe : le tronc est

alors placé de façon que la ligne verticale passant par le

centre de gravité vienne tomber sur le pied supportant la

masse du corps. Pour éviter la fatigue, l'individu prend

alternativement un point d'appui sur chaque membre. Il

est clair qu'un paralysé utilisera le membre le plus stable.

C'est instinctif et toutes les photographies prises dans la

station debout, représentent a un degré plus ou moins

accentué la physionomie de la Planche III. Le membre

sain est soumis il une pression plus forte et plus longue

que le membre malade. Le fait est d'autant plus marqué

que la rétraction du tendon d'Achille force souvent

l'hémiplégique à ne prendre un appui que sur l'extrémité

d'un pied au lieu de reposer sur la largeur de la surface

plantaire.

Observons maintenant la démarche d'un hémiplégique

et analysons ses mouvements. On y retrouve cette inéga-

lité du travail effectué par chaque membre. Quand le corps

progresse en avant d'une façon normale il existe : 1° une

période durant laquelle le corps repose sur les deux pieds,

c'est le temps du double appui ; 2° une période où l'un des

membres, quittant le sol pour y revenir, l'appui est unilaté-

64 Squelette DES hémiplégiques.

rai et simple. Normalement les membres offrent alternative-

ment un appui de môme durée. Dans la paralysie, le corps

s'appuie de préférence sur le membre le plus solide, aussi

le membre sain sert-il d'appui plus longuement que le

paralysé. Nous allons voir que, de plus, la pression y est

plus intense en raison des modifications de la marche.

Le membre sain supporte une 11·,·.s.sion plus longue :

même dans les cas les plus bénins, il y a une légère

claudication qui devient très manifeste dans les cas moyens.

Durant le pas, l'hémiplégique abrège le plus possible le

travail de son membre malade et se hâte de retrouver un

point d'appui solide sur le membre sain. La longueur du

pas exécuté par le côlé hémiplégie s'en ressent et c'est en

cela que le rythme normal se trouve modifié : « la mar-

che qui commence généralementpar le pied du côté malade

s'effectue comme il suit : le membre paralysé ne dépasse

pas le talon du membre sain, le pied malade est tiré pour

ainsi dire en avant en traînant sur le sol par son bord inter-

ne et en décrivant non une ligne droite mais un arc de

cercle ; il passe ensuite il l'appui, mais sans dépasser le pied

du côté indemne pour former ce que M. Gilles de la Tou-

rette appelle le pas proprement dit. » C'est ainsi que s'ex-

prime M. Letort(t) qui a analysé la marche chez l'enfant et

qui s'est inspiré dans cette étude des travaux de M. Gilles

de la Tourette.

La lJ1'ession est plus intense sur le membre sain. La dé-

marche décrite précédemment le prouve déjà, car, en résu-

mé, c'est uniquement le membre bien portant qui sert il

progresser. L'enfant prend un point d'appui solide sur lui

en s'inclinant en avant et en dehors (position hanchée de

Gilles de la Tourette) pour pouvoir entraîner le membre

paralysé qui est toujours postérieur, ainsiqu'on i'a vu tout à

l'heure. Le développement musculaire supérieur est d'ail-

leurs en rapport avec cette augmentation (le poids, si on se

souvient du rôle important joué par l'activité des mouve-

(1) Troubles de la marche chez l'enfant (Jouve, 1891).

Le fémur. 65

ments pour exagérer le poids brut de la masse supportée. Les

muscles sont nécessaires à la marche : pendant longtemps

on a cru avec les frères Woher que les mouvements du

membre i nfe ri curetai enta ssi mi) ab tes a une oscillation pen-

dulaire, les muscles n'y prenant qu'une part insignifiante.

M. le professeur Marcy, par ses magnifiques et intéressan-

tes recherches aidées de la chromophotographie, a défini-

tivement mis au point la physiologie des mouvements

et démontré le rôle actif de muscles durant l'oscillation

du membre inférieur. Sans analyser leur rôle, constatons

que, si la force du système musculaire est amoindrie, le

type normal de la marche sera défiguré, l'hémiplégique

modifiant en conséquence ses mouvements (1).

Tous ces faits sont tirés de l'observation et on peut faci-

lement les comprendre en examinant les photographies

représentant diverses altitudes durant la marche; ils per-

mettent d'affirmer le rôle bien différent des deux cols fémo-

raux, aussi le tableau B nous révèle-t-il des variations dans

leur inclinaison. Faisons quelques remarques à ce sujet.

Dans les fémurs primilivement étudiés, on voit que le

cas F fait exception. La théorie n'est pas en défaut pour

cela, mais on se trouve en face d'un individu qui tout en

ayant été atteint d'hémiplégie n'a eu qu'une impotence

peu considérable. C'était un cas bénin. En examinant la

Pal. II, on remarquera d'abord que l'atrophie est difficile à

constater. A la vue, le volume semblait le môme et seules

les mensuration ont dénoté la moindreéncrgiemuseutairc.

L'indice pilastrique et l'indice poplité le prouvent. I'apla-

tissemenlptatymérique est moins prononcé. Sur la planche

nous avons noirci les parties inoccupées de l'os et l'on voit

que les muscles étaient, en effet, moins développés sur l'os

malade. L'observation prise à l'hôpital nous apprend d an-

leurs qu'il y avait «plutôt un affaissement paralytique il

droite qu'une véritable hémiplégie ». On relève encore la

phrase suivante : « quand on fait marcher le malade, il

(I) Il serait intéressant d'étudier l'es paralysés infantiles à l'aide de la chro-

mophotographic et on en retirerait certainement des indications cliniques fort

utiles.

66 SQUELETTE DES hémiplégiques.

présente une claudication due seulement a la différence de

longueur des deux membres, il ne Irainepas le pied, il ne

fauche pas. » En un mot, on a remarqué le peu d'impotence

que présentait ce malade comparé aux autres. Sa photo-

graphie, d'ailleurs, suffît à l'indiquer (l'Lw,ICr 11 et en la

rapprochant de la PLANCHE Ht on conçoit aisément que

des attitudes aussi tranchées aient une répercussion bien

différente sur l'inclinaison des cols.

Nous avons ajouté au tableau publié antérieurement

des cas nouveaux ; si le cas II rentre dans la règle géné-

rale, les autres paraissent s'en éloigner. Le peu de diffé-

rence notée entre les fémurs G, T, J etG ? l',J et de même

l'égalité que semblent offrir les deux fémurs K et K' méri-

tent d'être expliqués. Nous émettons un doute au sujet

de ces derniers; ces os qui n'ont qu'une longueur de 17

à 19 centimètres sont en très mauvais état, les épiphyses

non soudées sont absentes et la partie supérieure de la

diaphyse est brisée : nous n'avons donc pu donner un chif-

fre précis; les angles nous semblent les mêmes, ce qui

parait d'ailleurs naturel ; l'enfant qui en était porteur est

décédé à l'âge de 5 ans; il est resté pendant ce temps

dans un état de déchéance continue; il a eu il 3 ans une

série de convulsions il la suite desquelles « il ne recom-

mença que difficilement il se tenir sur les jambes. » Son

observation nous dit aussi « qu'il marchait peu et qu'il

avait les jambes recroquevillées sous le menton n. La

pression a donc été égale des deux côtés par suite d'un

non fonctionnement du a l'état général. Les causes de

l'inclinaison ont fait défaut aussi bien du côté sain que du

côté malade : aussi a-t-on un angle égal et de plus un angle

très ouvert représentant un angle infantile (130°; on peut

faire le même raisonnement pour les fémurs G, I, J et G',

1', J'. Ils ont appartenu il des enfants dont les épiphyses

n'étaient pas encore sondées : leurs cols aussi bien sur l'os

sain que sur l'os malade n'ont subi que peu l'influence de

la pression et lit encore nous retrouvons unc transforma-

tion incomplète du col sain ; ce qui ne le différencie que

faiblement du col du côté opposé, Ex : 129" et 131°, 1- ? 7°

et 129°, 125° et 126°.

Le fémur. 67

En raisonnant comme nous l'avons fait au cours du

chapitre précédent, nous sommes donc amenés à consta-

ter que le type de nos angles cervico-diaphysaires mala-

des se rapproche du type rencontré chez l'enfant. L'incli-

naison primitive n'est que peu modifiée, c'est presque

la persistance de 1'(,I;tt infantile. Ces variations, en tous

cas, ne sont pas dues à un trouble trophique et dépendent

uniquement d'un moindre fonctionnement du membre.

CHAPITRE III.

Influence de l'hémiplégie infantile sur la direction de l'axe fémoral

et la production du génu-valgum. Mécanisme de cette déformation.

Avant d'envisager les conséquences que peuvent avoir

les variations angulaires du col du fémur dans la compa-

raison des longueursdesdeuxos d'un même individu, il faut

signaler une autre modification, qui s'allie il la précédente

pour troubler les résultais. Précédemment, nous avons

fait remarquer que la direction verticale que nous don-

nions aux os n'était pas la véritable, c'est-à-dire qu'elle

n'était pas analogue a cette que ces os ont sur le vivant.

Pour obtenir la position réelle, il faut appuyer les deux

condyles de l'os sur un plan vertical et lui laisser pren-

dre sa direction naturelle. Les fémurs sont représentés

dans cette situation sur les l ? watrs VII-VIII-\-1111.

Mais on s'aperçoit que les deux os ne se placent pas

symétriquement par rapport il la verticale, et que dans

cette position l'inclinaison est différente. Pour parler plus

exactement, les axes anatomiques ont une inclinaison dif-

férente. Cet axe encore appelé géométrique est celui qui,

suivant la direction d'un os long, le partage en deux parties

égales. Pour le fémur cet axe passe en bas par l'échan-

crure interuonlvlicnne et aboutit en haut au sommet

recourbé du grand trochanter. Sur nos Planches les

axes ont donc une inclinaison qui varie suivant qu'on

considère le côté sain ou le côté malade. Ils forment avec

68

SQUELETTE DrS HÉMIPLÉGIQUES.

la verticale un angle également différent qui mesure leur

inclinaison. Dans tous les. cas, sauf un, cet angle est plus

ouvert du côté malade. Les valeurs angulaires sont ins-

crites dans le tableau C ci-après :

Tableau C.

Angle d'inclinaison de l'axe des fémurs.

LE fémur. 69

son ; chez nos sujets c'est le contraire qui a lieu ; à un col.

plus court et il une inclinaison moins forte correspond une

divergence plus grande. Nous passons sous silence les

théories, envisageant cette inclinaison comme un perfec-

tionnement de la station bipède, ou un état permettant un

développement plus intense de la masse musculaire. Ce

sont des conceptions purement spéculatives qui, mises en

face de nos faits, ne peuvent pas servir à les éclairer. On le

voit toutes ces explications sont insuffisantes mais puis-

que l'inclinaison plus prononcée du fémur correspond au

côté malade, il est naturel, plus naturel peut-être d'en

rechercher l'explication par une cause pathologique.

A notre connaissance on n'a jamais encore attiré l'atten-

tion sur la divergence différente des axes fémoraux des

hémiplégiques. On a bien signalé la production du génu-

valgum, mais on n'en a pas expliqué la pathogénie; on

n'a pas montré que cette déformation n'était que l'abou-

tissant et l'exagération de l'inclinaison normale de l'os

et qu'entre elle et la direction normale il y avait tous les

intermédiaires. De mème, on n'a jamais parlé des particu-

larités morphologiques liées il cette inclinaison constante

des os correspondant au côté hémiplégie. L'ignorance de

ces faits, bien pardonnahle d'ailleurs si on n'a pas fait un

examen rigourcux des os et bien compréhensible si on n'a

pas comme nous les éléments d'étude collectionnés depuis

20 ans, empêche de comprendre le mécanisme réel pro-

duisant ce génu-valgum spécial.

Les traités médico-chirurgicaux, dans leur désir de

schématiser les questions, rangent les théories proposées

pour expliquer le genu-valgum dans trois catégories :

musculaire, ligamenteuse et osseuse. Evidemment, il y a

des cas ressortissant uniquement à l'une quelconque de

ces classes : le genu-valgum survenant à la suite d'un

rachitisme général ou local en est la preuve. Mais il n'est

pas démontré qu'on soit autorisé à placer avec autant de

certitude le génu-valgum des hémiplégiques infantiles

exclusivement parmi les déviations appartenant, aux

théories musculaires. La paralysie est vue cause impor-

tante, mais pour modifier l'os il doit en exister un autre

70 SQUELETTE DES hémiplégiques.

aussi nécessaire. La première ne peut produire isolé-

ment qu'un faux génu-valgum, (;'est-il-dire une déviation

et où l'os n'ait subi aucune modification de la

direction axiale. On cite des cas où l'impotence de cer-

tains muscles (muscles de la patte d'oie en particulier)

avait amené une distension des ligaments internes de l'ar-

ticulation du genou et consécutivement le bâillement des

surfaces articulaires il leurs parties internes. Pour que la

déviation soit fixée, l'os doit présenter momentanément un

certain degré de malléabilité au-dessus de son articula-

tion, après quoi cette mollesse disparait et la direction de

l'os redevenu rigide est irrémédiablement modifiée. C'est

ce que produit le rachitisme sous l'influence du poids du

corps : l'inclinaison normale du fémur s'accentue puis le

ramollissement disparait et l'ossification fixe la disposition

transitoire.

Mais l'os présente durant la croissance un certain degré

de flexibilité : nous l'avons déjà dit antérieurement, et

nous le répétons ici pour l'extrémité inférieure de l'os. Tant

que la croissance existe, le cartilage de conjugaison cons-

titue un point faible au niveau duquel des modifications de

l'inclinaison osseuse peuvent se produire. L'épiphysc res-

tant fixe, la diaphyse peut diverger plus ou moins suivant

les circonstances. C'est sur ce fait que M. Papillault(l) s'est

appuyé pour expliquer la production de génu-valgum chez

un géant et après lui Paul-Boncour a invoqué une théorie

identique pour nos cas présentés il la Société d'Anlhl'O-

apologie.

Nous allons maintenant apporter d'autres preuves à

ces théories. ,

Voici, en résumé, comment il faut comprendre les faits.

A l'état normal le poids du corps se fait sentir sur l'extré-

mité supérieure du fémur et tend, par suite de son inclinai-

son héréditaire, à le repousser en dehors. Mais cet effet

est contrebalancé par les ligaments latéraux de l'articula-

tion et aussi par les muscles de la région interne de la

(1) Mode de croissance chez un géant. (Société d'Anthropologie f8J0.)

Le fémur. 71

cuisse dont la tonicité s'ajoute il celle des ligaments . Si

par suite des circonstances la masse musculaire est insuf-

fisante (faiblesse musculaire relativement au développe-

ment osseux clans le cas du géant, paralysie dans nos

cas), l'inclinaison tend il s'exagérer; mais les ligaments

ne permettant pas 1'écarlement des surfaces articulaires

la déviation se fait nenamoins autour du cartilage de

conjugaison. Pour cela, il faut que la croissance ne soit

pas terminée.

On a noté la production du génu-valgum chez les indivi-

dus qui, il l'époque où normalement la croissance se ter-

mine, continuent à grandir. Les sujets atteints de gigan-

tisme sont dans ce cas : leur masse musculaire devient

par ce l'ait insuffisante.

Nos sujets ont été atteints de leur affection hémiplégi-

que durant cette période de croissance : leur musculature

faible les a mis dans une situation analogue à celle dont

nous venons de parler, et lorsque la croissance s'est ter-

minée, l'os s'est solidifié clans la direction acquise. Une

autre cause contribue encore il diminuer la résistance

osseuse relativement au poids du corps : c'est la persis-

tance du cartilage de conjugaison sur l'os malade. Il y a

la une prolongation anormale de l'état infantile, de la crois-

sance par conséquent, qui favorise l'exagération de l'incli-

naison puisque la calcification s'y fait plus tardivement.

Des preuves d'un autre genre viennent s'ajouter à

ces explications. On peut retrouver sur certains os mala-

des les traces de celte déviation supra-condylienne. Sur

les Planches IV, IX, on remarque une courbure à convexité

interne qui a pour résultat de relever la partie externe de

l'extrémité inférieure et d'abaisser la partie interne, de

sorte que la surface articulaire au lieu de regarder direc-

tement en bas est dirigé en bas et en dehors. Cette modi-

fication apparaît nettement sur les Planches. On voit aussi

la différence que présente la juxtaposition des os dans

la situation verticale. Si on leur imprime leur direction

naturelle, c'est-à-dire les deux condyles appuyés sur un

plan horizontal, la diaphyse de l'os malade prend alors

une direction plus oblique. On peut examiner la Planche

72 Squelette DES hémiplégiques.

VIII représentant les mômes os que la Planche IV dans

celte position naturelle et juger ainsi des résultats.

Faisons remarquer que Mac Ewen, avant nous, avait

relevé cette courbure sur des fémurs atteints dogénu-val-

gums d'origine purement osseuse ; et qu'il en faisait la

lésion principale. M. Kirmisson (I) a fait aussi observer que

cette incurvation du fémur a été la seule difformité ren-

contrée par lui clans un cas qu'il a communiqué à la Société

de chirurgie. Peut-être parmi les faits rattachés à une

théorie purement osseuse et où l'on fait intervenir le rachi-

tisme parce que on ne trouve pas d'autres explications, y

aurait-il lieu de rechercher si des circonstances particu-

lières ne doivent pas être invoquées ?

Nos cas sont spéciaux, mais les faits observés s'en rap-

prochent souvent. Dans le Traité de chirurgie, 1\1. Kit'mis-

son remarque précisément que le génu-valgum se rencon-

tre avant 20 ans autrement dit durant la croissance : il

déclare aussi que l'affection se rencontre avec le plus de

fréquence « sur les jeunes gens qui présentent une taille

élevée avec un faible développement musculaire» et « chez

ceux chez lesquels la croissance s'est faite rapidement. »

Tous ces cas peuvent ètre expliqués sans qu'on ait besoin

d'un ramollissement pathologique de l'os : et surtout de

cette supposition souvent fantaisiste d'un rachitisme

local !

Sur nos os il n'existe pas d'hypertrophie du condyle

interne- ni d'allongement de ce condyle pas plus que

d'arrêt d'accroissement du condyle externe. Nous tenons

à signaler cette remarque, parce que, à première vue, il

semblerait en être autrement, et que l'erreur a été commise

sous nos yeux. En tenant les os verticalement ainsi qu'il

est représenté sur les Planches V, VI et IX, il parait en

effet que le condyle interne soit plus saillant que l'externe,

mais si l'on met les os dans leur position naturelle, ceci

n'existe plus. Or, nous nous demandons si, clans les obser-

vations relatant la forme des extrémités articulaires, on

(1) Traité de chirurgie de Duplay et Reclus, tome VIII.

Le fémur. 73

n'en a pas parfois donné une interprétation erronée, car on

y lit que la surface articulaire présente une obliquité mani-

feste, que le condyle interne descend plus bas que l'externe.

Le phénomène peut exister réellement, mais il est rare, et

comme on ne fait pas mention en même temps du degré

d'inclinaison, on peut supposer que les os furent examinés

dans une situation défectueuse : et que l'interprétation a été

faussée par ce fait môme.

Avant de terminer ce chapitre et d'entreprendre des

considérations d'un autre genre, il faut nous expliquer sur

l'exception (cas Ei qu'on a pu remarquer sur le tahlcau C.

Le porteur de ces fémurs était bien paralysé : l'observation

recueilliedanslc service de Dicèlre et les symptômes osseux

en font foi. Il y a donc eu un phénomène particulier et on

remarquera que d'après les chiffres indiqués (11° et 129)

et par comparaison avec les autres cas, c'est le fémur sain

plutôt que le malade qui se sépare de la règle générale en

tant que fémur normal. La juxtaposition des deux os n'in-

dique pas qu'il y ait eu sur le fémur sain un développement

musculaire bien considérable : les diaphyses se différen-

cient à peine. (C'est le cas représenté sur la Planche X) :

l'indice pilastrique exprime bien que l'os sain était d'une

vigueur supérieure, mais en comparant les éléments

d'information on est en droit de supposer que néanmoins

il y a eu un manque de corrélation entre le système mus-

culaire et le système osseux. L'os sain, ayant supporté un

poids supérieur, et ayant été pourvu malgré cela d'une

musculature disproportionnée à son travail, a été le siège

d'un phénomène identique à ceux que nous venons de

signaler. Cette exception mise à part on est en droit d'af-

firmer que l'inclinaison plus prononcée des fémurs malades

dépend en partie de l'impotence musculaire favorisée

par la flexibilité de l'os.

Là encore il est inutile d'invoquer un trouble trophique

d'origine centrale.

BOURNEVILLE, Bicêtre, z1901, 6

74 Squelette DES hémiplégiques :

CHAPITRE IV

Résultats pratiques qui peuvent être déduits de l'étudeprécédente.

Leur application au fémur.

Ce chapitre, qui est plutôt une sorte d'appendice il notre

travail, a pour but de démontrer que les considérations

qui précèdent ne sont pas purement spéculatives et que la

clinique peut en retirer un bénéfice.

Pour nous en tenir au fémur, on va voir que sa longueur

subit des modifications en sens inverse suivant la direc-

tion qu'on lui imprime : par conséquent sur le vivant la

façon de procéder aux mensurations ne sera pas indiffé-

reute, si l'on veut éviter des causes d'erreur. Un clinicien

qui se pique de précision ne devrai t pas ignorerlcs principes

qui se dégagent de notre étude anatomique. En agissant

autrement il arrive : ou bien que les observations

relatant des cas d'hémiplégie infantile et voulant indiquer

l'état des membres inférieurs se contentent de remarquer

qu'il y a un racourcissement sans en donner la valeur :

c'est absolument regrettable et cette façon d'agir témoi-

gne d'une étude superficielle; ou bien que les observa-

tions constatent des différences de plusieurs centimètres

sans indiquer les points de repère choisis : si les différen-

ces sont très marquées, cela n'a qu'une importance rela-

tive ; si, au contraire, elles sont minimes (et c'est le cas

le plus fréquent), ces mensurations ont une valeur très

discutable, puisque l'orientation de l'os a un effet consi-

dérable sur sa longueur, ce que nous allons démontrer.

Il y a un choix il faire parmi les procédés de mensura-

tion auxquels on a recours : les classiques sont excellents

lorsqu'on se trouve en face d'une affection autre que l'hé-

miplégie infantile ; mais pour cette affection où il s'agit

surtout de comparer afin de se rendre compte du degré

de racourcissement, il faut prendre sur le vivant la môme

mesure que sur un os isolé. Dans ce but nous allons

étudier :

LE fémur. 75

1° Les modifications que les variations d'inclinaison sont

susceptibles d'apporter dans la longueur des os ;

2° La méthode il employer pour mesurer les os directe-

ment ;

3° Le procédé il suivre pour avoir sur le vivant des résul-

tats précis.

Il y a une distinction à faire entre les longueurs du

fémur. Quand on parle de la longueur d'un fémur, il est

bon de spécifier ce qu'on entend par là. Cet os est, en effet,

un de ceux sur lesquels on peut prendre plusieurs mesures

et il est nécessaire de distinguer :

a) La longueur maximum totale c'est-à-dire celle qui

comprend la plus grande longueur de l'os en projection.

Dans ce cas, le bord interne de l'os est dirigé en bas, le

condyle interne et la tête fémorale touchent seuls le plan

horizontal sur lequel repose l'os.

b) La longueur maximum Irochanlérienne. Dans cette

situation l'os reste placé comme précédemment, mais on

mesure simplement la longueur maximum comprise entre

l'extrémité du condyle le plus inférieur et le sommet du

grand trochanter.

c) La longueur totale de l'o.shlacé en position. Le fémur

regarde en haut par sa face antérieure, les deux condyles

sont appuyés contre un plan vertical et la diaphyse prend

d'elle-même une direction plus ou moins oblique. On prend

la longueur comprise entre le plan vertical elle sommet

de la tète fémorale.

d) La longueur troeltatzlérieizize de l'os en position. Le

fémur reste placé comme dans le cas précédent mais on

ne mesure que la distance comprise entre le plan vertical

et le sommet du grand trochanter.

Ces longueurs ne peuvent être employées indistincte-

ment et sont d'inégale importance. A notre point de vue

la seule longueur que nous puissions accepter est celle

qui, permettant une comparaison entre les deux os d'un

môme individu, nous donne exactement la mesure d'un

fémur considéré sur le vivant. On doit donc mesurer l'os

en position. Cette mesure est la seule qui représente l'os

avec l'obliquité naturelle de son axe. Dans notre cas parti-

76 Squelette DES hémiplégiques.

culier ceci a une importance capitale puisque l'inclinaison

fémorale n'est pas identique des deux côtés. Sans s'occu-

per des chiffres dès maintenant, qu'on veuille bien considé-

rer l'une après l'autre les deux Planches IV et VIII, on y voit t

les mêmes os étudiés d'une part dans leur longueur totale en

projection, d'autre part en position; et on comprend que la

première façon de comparaison est défectueuse puisqu'elle

tend à augmenter la longueur de l'os qui est précisément

le plus court par suite des troubles trophiques inhérents

à la maladie.

Nous prions de remarquer en outre, que d'après la

Planche IV, on croirait volontiers à une saillie du condyle

interne, alors qu'en réalité c'est une erreur d'interpré-

tation (1). Ce qui n'empêche qu'avec cette situation ni

naturelle, ni physiologique on augmente l'os malade

d'une longueur absolument faussa.

S'il faut examiner les os dans une situation oblique, il

reste à savoir quel point de repère doit être pris il la

partie supérieure. Est-ce la tête ? Est-ce le grand tro-

chanter ? ' ?

En se souvenant des considérations dans lesquelles nous

sommes entrés à propos des variations de l'angle du col,

et en examinant les Planches, on saisit que l'ouverture

cle l'angle a pour effet d'augmenter la longueur de l'os

malade. Le seul moyen d'éviter cette erreur est donc de

prendre la longueur trochantéricnne. Nous sommes ainsi

amenés par un simple raisonnement à une conclusion

pratique. En comparant les différentes mesures qui sont

inscrite au tableau D on contrôle nos assertions.

1° On voit d'après ces chiffres que la longueur maximum

totale est inacceptable : elle dénote une supériorité du

fémur malade et même dans certains cas la différence

est considérable : cela n'a rien qui puisse étonner, le fémur

malade étant augmenté et par le fait de l'ouverture cer-

vico-diaphysaire et par le fait de sa situation verticale qui

fait saillir le condyle interne. Et faisons remarquer que le

(1) Nous avons dit pourquoi au chapitre précédent.

Tableau D.

Longueur fémorale en millimètres.

78 Squelette des hémiplégiques.

col du fémur malade est plus court que celui du fémur

sain : par conséquent il y a encore une correction légère à

l'erreur qu'apporte cette position.

2° En éliminant l'ouverture angulaire, c'est-à-dire en pre-

nant la longueur maximum tl'ocl¡;Jlltdl'irmw, on élimine

donc une des causes d'errcur, mais l'inclinaison de l'os

n'est pas modifiée et dans plusieurs cas le fémur malade

est encore supérieur au fémur sain. La saillie plus faible

du grand trochanter tend il diminuer la différence, mais

malgré tout les résultats sont mauvais.

3° En prenant la longueur totale de l'os en position on

évite l'erreur causée par la situation verticale, mais on a

de nouveau des résultats incertains en raison des varia-

tions de l'angle cervico-diaphysaire qui influencent les

longueurs.

4'Avec la longueur trochantérienne (l'os étant toujours

en position) la supériorité du fémur sain est constante.

Il n'y a qu'un cas où il en est autrement, nous en avons

donné l'explication.

Par conséquent en mesurant sur un hémiplégique vivant

le raccourcissement d'un membre, on doit tenir compte des

variations de l'ouverture de l'angle cervico-diaphysaire et

de l'inclinaison de l'axe fémoral. Pour cela il faut prendre

la longueur comprise entre le sommet du grand tro-

chanter et l'interligne articulaire. Les autres mesures

doivent être repoussées, que ce soit le procédé dit de

Giraud-Teulon, que ce soit celui de Malgaignc, qu'on fasse

aboutir supérieurement la longueur il un point quelcon-

que de l'os iliaque où à l'ischion, toutes ces longueurs

englobent des parties osseuses nullement équivalentes

comme les os iliaques, ou n'éliminent pas les influences

du col et de l'inclinaison diaphysaire.

Pour effectuer cette mensuration avec toute l'exactitude

désirable, le mieux est de mesurer le sujet debout en lui

laisant prendre un appui naturel sur ses deux membres.

On se sert du compas glissière avec tiges indicatrices

mobiles ou encore, ce qui est préférable, de la toise anthro-

Humérus, radius et CUBITUS. 79'

pométrique. La recherche des points de repère est délicate,

car on commet facilement des erreurs et par conséquent

on arrive a des résultats incertains. Pour trouver le bord

supérieur du grand trochanter, il faut déprimer la peau à

plusieurs reprises, afin de bien se pénétrer des rapports

de la masse osseuse. On peut aussi faire hancher le malade

et ce n'est qu'après avoir comparé avec le côté opposé

qu'on doit mesurer la distance qui le sépare de l'interligne

articulaire. Celui-ci est situé à un centimètre 1/2 au-dessus

de la tète du péroné ; en tout cas il faut se rappeler qu'il

correspond généralement au pli articulaire postérieur. Il

est bien entendu que dans ces mesures, c'est toujours la

pointe de la glissière qni doit affleurer le point choisi.

CHAPITRE V.

L'impotence musculaire et son retentissement : 1° Sur l'humérus,

2° Sur le radius et le cubitus.

Variations de l'humérus, du radius et du cubitus.

Nous devrions répéter pour les os du bras et de l'avant-

bras tout ce que nous venons d'énoncer au sujet du fémur.

Les formes pathologigues dérivent d'une moindre activité

musculaire et l'aspect nouveau ne constitue pas une forme

anormale à proprement parler : il est possible de retrou-

ver une forme correspondante il un moment donné de

l'évolution normale des os au cours de la croissance.

Pour simplifier la discussion qu'il serait oiseux de réédi-

ter (1), nous nous bornons : 1° à passer en revue les trans-

formations des os longs du membre supérieur pendant la

durée de la croissance en insistant sur le rôle du muscle;

(1) On peut trouver des détails plus complets sur la genèse des formes

humérales, radiales et cubitales dans la communication de l'un de nous à la

Société d'Anthropologie (Paul-l3oucour), llumérevs et os de l'avant-bras, in

Bulletins de la Société d'Anthropologie, 19'), page 38 ? .

80

SQUELETTE DES hémiplégiques.

2° à montrer qu'un os pathologique ne diffère d'un os sain

que par un état moins avancé de l'évolution normale.

Humérus.

Transformation de la diaphyse pendant la croissance.

Au tiers supérieur chez le nouveau-né, l'humérus est

aplati d'avant en arrière sur une coupe il est ( 4)

elliptique, mais à sa partie antérieure il y a une gouttière

limitée par deux bords arrondis et dont l'externe peut être

Coupes schématiques représentent l'humérus plusieurs niveaux. -

Fig. 4 et 5. Tiers supérieur; a et b bords de la gouttière ; - le bord

externe a devient sur 5 le bord antérieur, i et e faces internes et externes.

Fig. G et 7. Tiers inférieur; - a, bord antérieur; - e, bord externe ; - i,

bord interne. - Sur la fig. 7 agrandissement de la partie a e (ptère sus

épicondylienne) ; - Fig. 8 et 9. Tiers moyen ; - L'os est aplati trllusversa-

lement et triangulaire; - la face interne i est aplatie (plntyomie). Sur la

face externe on voit les irrégularités du V deltoïdien d. La Fig. 8 représente

un os de nouveau-né.

légèrement plus saillant que l'interne. Ajoutons que d'une

façon générale l'os est rectiligne et que sa torsion est mi-

nime (nouveau-né 133°, - adulte 172°).

Sous l'influence des muscles les modifications suivantes

sont survenues.

Fig. 8.

fig. 4.

Fig. 6.

Fig. 9.

Fig. 5.

Fig. 7.

Humérus, radius et CUBITUS. 81

La lèvre externe de la dépression antérieure donnant

insertion au tendon du muscle grand pectoral, l'activité

de ce muscle va produire d'une part l'apparition de rugo-

sités, d'autant plus saillantes, d'autant plus nombreuses

que les mouvements musculaires auront plus d'intensité.

Les rugosités atteignent, dans certains cas, un développe-

ment considérable en un point où les fibres du grand pec-

toral s'entremêlent avec celles du faisceau antérieur du

deltoide : cette variation existe sur les os particulièrement

vigoureux. D'autre part, étant donné le sens suivant lequel

agit le muscle gr. pectoral, et son influence sur l'activité

du périoste excité par des fibres tendineuses insérées

obliquement sur lui, l'ossification va être très active au

niveau de l'insertion ; mais cet accroissement osseux se

fait dans le sens de la traction, c'est-à-dire qu'en même

temps que le bord se développe en hauteur et devient

rugueux, il tend à s'avancer vers la partie interne et

médiane de l'os. De cette translation vers la partie médiane

de l'os il résulte : '

1° Que la lèvre externe devient le bord antérieur de l'os,

tout en continuant it limiter en dehors la coulisse bicipi-

tale ;

2° Que le déplacement de cette lèvre externe a pour con-

séquence de dévier la coulisse bicipitalc : cette gouttière

sur un os de nouveau-né descend verticalement continuant

la direction première donnée par l'échancrure placée entre

lesdeux tubérosités de la tète. Elleestreportéevers la par-

tie interne sur un os d'adulte ;

3° Que l'os d'elliptique devient triangulaire et qu'il se

forme une face externe très étendue par suite du déplace-

ment du bord externe de la gouttière et de sa saillie fiq.

5). .

4° Il faut remarquer en outre que le bord antérieur n'est

pas rectiligne, mais qu'il décrit une courbe il convexité

interne. Cette modification est d'origine musculaire, elle

correspond au point où a lieu le maximum de l'effort

82 SQUELETTE des hémiplégiques.

musculaire. C'est en ce point que nous avons déjà signalé

l'existence d'une rugosité (en forme de tubercule dans

certains cas), plus volumineuse que les autres. Les deux

faits se complètent donc parfaitement.

Au tiers moyen on retrouve encore l'action muscu-

laire.

L'os qui tend à s'arrondir chez un nouveau-né (fit. 8)

devicnt triangulaire par suite de la présence du tendon

deltoïdien qui s'insère sur le prolongement du bord anté-

rieur au-dessous du grand pectoral et agit également sur

l'ossification. Mais la forme triangulaire est loin d'être

parfaite pour deux raisons : en premier lieu, l'insertion du

deltoïde s'étend sur la face externe et produit une série

de saillies qui déforment l'os à ce niveau. Leur dévclop-

pement est en rapport avec l'activité du muscle : cela ne

souffre aucune contradiction. En second lieu, chez un

adulte, il y a un élargissement de la face interne de l'os

et un aplatissement transversal de la diaphyse : cette va-

riation très marquée sur certains os a été étudiée il plu-

sieurs reprise et a reçu le nom de platoztie ouplatybra-

chie il).

Elle est mise sous la dépendance du muscle brachial

antérieur, qui s'insère sur l'os par des fibres musculaires

et tend à en modifier la surface de façon à l'adapter son

activité et il son degré de développement (fil..7-) 5 et 9) en

vertu d'un mécanisme analogue il celui que nous avons

signalé pour la saillie pilastrique.

Au tiers- inférieur, le muscle est encore l'agent des

transformations. L'os jeune est aplati d'avant en arrière :

il présente une arête antérieure arrondie que sépare les

deux versants de l'os don tics dimensions et les formes sont

semblables (fit. G). Sur un humérus âgé, la partie externe

de l'extrémité inférieure s'élargit considérablement (/i ! t.

7) ; la surface se creuse légèrement, la concavité du bord

externe tend il disparaître. Celte modification nommée p/è¡'e

susepiconcllierzne (2) sert il donner inscrtion à un muscle

(1) ltudiée lar LcLman-\ietsclic, Anoutc : : i : c, 711;tnouvrier.

(2) C'est le nom donné par Manouvrier.

Humérus, radius et CUBITUS. 83

actif le brachial antérieur : et l'on conçoit fort hien que ce

soit sur le versant externe et non sur l'autre que le muscle

ait amené cette forme. Du côté interne nous avons vu le

muscle produire de la platvoruic h la partie moyenne'de

l'os, à la hautcur du V deltoïdien; mais les rugosités de

ce V occupent une partie importante de la face externe et le

muscle ne pouvant prendre son extension a ce niveau, le

fait il la partie inférieure et y produit la ptère SUS-éJ1Ú : ondy-

liennc. Telles sont en résumé les transformations de l'os

et leurs causes. Le muscle en est l'agent exclusif aussi son

affaiblissement s'accompagnc-t-il d'une moindre transfor-

mation.

Rappelons aussi que la cavité olécrânienne aune pro-

fondeur plus grande chez l'adulte par suite de l'impres-

sion répétée du bec de l'oléerziiie. Son accentuation est le

fait des mouvements plus intenses et elle peut aller jusqu'à

la perforation. De môme la torsion humorale est supérieure

sur un os adulte.

Il suffit d'examiner les o.s des squelettes hémiplégiques

du musée de Bicêtre, pour être convaincu que les os

malades présentai des modifications uniquement impu-

tables au moindre développement des muscles et à une

diminution de lmen actirife. Suivant le degré d'impotence

ils représentent un slade plus ou moins avancé de l'évo-

lution de l'humérus. On y remarque toujours un déve-

loppement moindre des crêtes d'insertion, un aspect plus

grêle, et déplus, une différence variable dans les caractères

énoncés plus haut : le bord antérieur est moins saillant, il

est plus externe, son incurvation est moindre : les rugosités

sont nulles ou moins accentuées : la face externe est moins

large : la coulisse bicipitale n'est pas ou est moins déviée :

la face interne ne présente pas de platyomie, sa surface est

moins étendue, il n'y a pas de ptère sus-uhicondylienne :

la cavité otécranicnnc est moins profonde : le degré de

torsion est inférieur ainsi qu'en témoigne le tableau

suivant :

84 Squelette DES hémiplégiques.

Torsion des humérus (1).

Humérus, radius ET cubitus. 85

2° un bord saillant intérieur, représentant le pilastre. Les

lieux bords intérieurs (externe pour le cubitus, interne

pour le radius), sont opposés l'un il l'autre et limitent l'es-

pace interosseux. Leur rapprochement est donc en raison

direct du développement musculaire Aussi voit-on un es-

pace interosseux élargi sur le membre hémiplégie, rétréci

sur le membre opposé et limité par deux bords minces et

tranchants. - Sur un avant liras de nouveau-né l'espace

est relativement large, par suite de l'absence des bords

interosseux.

Nota. - Tous les raisonnements précédents peuvent s'appli-

quer au reste du squelette (tibia, péroné, omoplate, bassin,

etc., etc. Les cannelures du péroné etleurs variations, la crète

postérieure du tibia et son accentuation, tout cela est lié à

l'activité musculaire de certains muscles et nos os malades

présentent continuellement ces modalités osseuses à un

faible degré. - Nous nous en tenons à ce qui précède momen-

tanément et nous nous proposons de reprendre les faits qui

restent à d'autres points de vue.

IV,

Des hémorrhagies de la peau et des muqueuses pendant

et après les accès d'épilepsie et de leur analogie avec

les stigmates des extatiques ; .

PAR itOUlt\I3ViLLI's.

Quelques auteurs ont signalé des hémorrhagies de la

peau immédiatement après l'accès épileptique. Tels sont

Hcrpin, Kaposi, Apert, Oowers, etc. Elles consistent en

un pointillé hémorragique, confluent, semblable à des

piqûres de puce et constituant une variété de purpura.

Bien que nous ayons vu un grand nomhre d'épileptiques,

hommes et femmes, adultes et enfants, nous n'avons que

par exception observé cette complication de l'accès.

Dans un seul cas, celui de Vandcn Il..., l'éruption était

généralisée. Les photographies que nous vous présentons

en donnent une idée, mais non la représentation exacte.

Le 14 août 1897, il a un accès d'intensité moyenne, à la

suite duquel il se produit rapidement une éruption compo-

sée de petites taches occupant la face, le tronc et les mem-

bres. L'étendue des téguments occupée par elles parait au

moins égale à l'étendue de la peau restée normale. Les

plus grandes taches ont il peine les dimensions d'une

petite lentille. Elles ont une coloration rouge, pourprée,

ne disparaissent pas par la pression. Leur maximum de

confluence est au niveau des chevilles et des poignets. Il

existe un léger oedème des paupières et des malléoles. Il

ne s'est produit aucune hémorragie des muqueuses. Le

17 août, l'éruption est très atténuée ; le pointillé et les

taches sont jaunâtres, l'oedème a disparu. Elle s'efface

Epilepsie : hémorragies dans LES accès. 87

complètement au bout de deux ou trois jours. Il n'a eu

aucun symptôme général, les urines ne contenaient ni

sucre, ni albumine.

Le plus souvent l'éruption est localisée au front, aux

paupières, à la partie voisine des tempes, au cou, d'une

apophyse mastoïde à l'autre ; elle s'étend parfois un peu

au-dessus et au-dessous des clavicules. L'éruption a cessé

en quelques jours, 10 ou 12 au maximum. Les accès aux-

quels elle a succédé n'ont point paru plus violents que d'ordi-

naire. Les accès survenus pendant l'éruption ne semblent

pas la modifier. Le père de l'une de nos malades, Cast...,

nous a affirmé avoir eu à 17 ou 18 ans un purpura tout à

fait comparable comme aspect, siège et marche, à celui '

de sa fille, consécutivement à une violente colère,) ]JUi'}JUl'LL

émotif').

Nous rapprocherons de ces cas les hémorragies de la

conjonctive oculaire formant de véritables ecchymoses,

siégeant soit dans l'angle interne, soit dans l'angle externe

des yeux. Celles-ci, au contraire des précédentes, c'est-à-

dire du purpura, sont assez communes et peuvent faire

penser aux personnes non prévenues que, dans l'accès, il

y a eu un traumatisme grave de la base du crâne.

Chez une jeune épileptique, Gir..., atteinte d'une kérato-

conjonctive aiguë, nous avons remarqué que, dans les

accès survenus au cours de l'affection oculaire, la vaseu-

larislion de la conjonctivite oculaire augmentait considé-

rablement, au point de faire craindre un épanchement

sanguin avec ecchymose.

Les épileptiques qui tombent en avant se blessent le

visage : contusions avec ou sans plaies, éraflures, exco-

riations. Il y a intérêt à noter ce qui se passe durant des

accès ultérieurs, au niveau des plaies superficielles.

Un de nos malades, Ennemond Y ? appartient à cette

catégorie. Le 16 juillet, ïl se fait une éraflure du nez. Le

16, dans un accès très léger, la période congestive, le

sang a coulé de l'éraflure, formant une sorte de trainée le

long du nez. Chez le même malade, auparavant, dans un

grand accès, ce n'est pas quelques gouttes de sang que

nous avons vues sous l'influence de la congestion de la

face : le sang a giclé d'une excoriation antérieure.

88 Stigmates DES mystiques.

X... (G.), 18 ans, a son premier accès en novembre 1898 et

le second en janvier 189 : ). Le troisième accès, survenu le 19

juin, a offert les mêmes caractères. On a eu beaucoup de

peine a desserrer le col de la chemise. « Le cou paraissait très

serré, plus que les autres fois, la congestion n'a pas été plus

forte que d'ordinaire. Une demi heure après, on a observé

un piqueté hémorragique rouge lie de vin, sur le front,

les paupières, les régions mastoïdiennes, la moitié inférieure

de la conjonctive oculaire. On a noté aussi des plaques rouges

disséminées sur le cuir chevelu. Le piqueté prédominait sur

le front. L'éruption qui, d'après le médecin, avait tous les

caractéres du purpura disparut au bout de 18 heures. Il s'agit

d'un jeune homme, grand, fort, et, comme nos autres malades,

non sujet aux hémorragies.

Ces faits nous ont fait penser aux phénomènes qui se

produisent chez certaines mystiques, lesslirr2a,tisées. Leur

esprit est absolument concentré sur le siège des plaies du

Christ : front, mains, pieds, côté.. Elles voudraient les

voir saigner. D'où aussi, volontairement ou non, des

attouchements, des frictions au niveau de ces régions,

voire même des excoriations, en tout cas une diminution

de la résistance de la peau et, finalement, au cours de

l'attaque extatique, l'écoulement sanguin si ardemment

désiré. Il s'opère de la même façon que l'épanchement de

sang sous la conjonctive, que le suintement ou le giclage

du sang d'une éraflure ou d'une excoriation au cours des

accès épileptiques.

II) Note communiquée au Congrès des aliénistes et neurologistes, session

de Limoges, 1901. Par erreur, elle ne figure pas dans le volume des Comptes-

rendus de ce Congrès.

V.

Idiotie symptomatique d'une sclérose atrophique limitée

aux circonvolutions du coin gauche ; -,

Par BOURNEVILLE ET CROUZON.

Sommaires Père : chorée à 13 ans, assez nerveux. -

Grand-père paternel rhumatisant, mort probablement

d'une rupture du coeur. Grand'mère paternelle morte

de la poitrine. Arrière-grand-père paternel mort de la

rupture d'un anëurt/sme. Arrière-grand'mère paternelle

morte de fièvre cérébrale. Oncle paternel mort de la

poitrine. Mère, rien de particulier. - Grand'mère

maternelle, migraineuse, crises hystériformes. - Arrière-

grand-père maternel mort de la rupture d'un anévrysme.

Arrière-grand-père maternel mort d'une attaque

d'apoplexie. - Cousin maternel hydrocéphale.

Pas de consanguinité. Inégalité d'aîge de 6 ans. (Père plus

âgé.) Gémellarité dans les deux familles.

Naissance à 8 mois. - Arrêt de développement à la nais-

sance (1500 gr. ; ongles à peine formés). - Convulsions

dès le 3e jour, se répétant quotidiennement 6 ou 8 fois

pendant 15 jours. Obésité à partir du 3e mois. Vertiges au

réveil de 3 mots à 18 mois. - Durant la même période,

crises convulsives tous les 3 mois prédominant à droite et

durant deux heures (états de mal); tics multiples; balance-

ment du tronc, etc., cognements de tête, bave, grincement

de dents. - Accès de colère, accès de cris la nuit.

Première dent à 11 mois. Dentition complète à 26 mois.

Parole nulle. Coqueluche at 18 mois. Rougeole à 2 ans.

Ictère à 13 ans. Congestion pulmonaire ; mort.

AUTOPSIE. - Os du crâne peu durs, moyennement épais.

Plaques transparentes. - Atrophie de tout le coin de

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1901. 7

90 Idiotie symptomatique DE sclérose.

l'hémisphère gauche; atropine moins accentuée du lobe

occipital. - Hémisphère droit presque normal. - Iné-

galité de poids des hémisphères. Congestion pulmonaire

double. Ectopie testiculaire double.

Guich... (Henri), né le 3 septembre 1883, à Amiens (Somme),

entre à l'asile de Bicêtre le G juin 1887.

Antécédents (Renseignements fournis par son père et sa

mère les 17 et 20 juin 1887). Père, 37 ans, voyageur de com-

merce (vins), grand, mince, blond-roux, physionomie régu-

lière, fume une ou deux pipes par jour. Jamais d'excès de bois-

sons (n'est clans les vins que depuis six mois, avant négociant

en lainage de velours à Amiens). Pas de convulsions dans

l'enfance. Chorée à 13 ans. Pas de migraines ; pas de rhuma-

tismes, pas de maladies de peau, pas de névralgies. Marié à

31 ans. Assez nerveux, mais non emporté. - [Père, mort

il 60 ans d'une congestion cérébrale, dans le cabinet du mé-

decin, enlevé en quelques minutes (probablement une rup-

ture du coeur en raison de la brusquerie du début par un

étouffement), négociant en lainages ; sobre ; aurait eu un

rhumatisme articulaire aigu. - Mère, morte à 36 ans de la

poitrine (en 3 ou 4 ans), pas d'accidents nerveux. - Grand-

père paternel mort à 70-72 ans d'un anévrysme ( ? ) dans la rue

en se promenant, sobre, pas d'autres détails. - Grand'mère

paternelle morte iv une trentaine d'années d'une fièvre céré-

brale, était « extrêmement intelligente ». Grand'mère ma-

ternelle, morte un ou deux mois après son mari de chagrin ;

avait plus de 70 ans. - Un frère mort de la poitrine, 27 ans,

sobre, pas d'enfants. - Une soeur bien portante, ainsi que ses

deux enfants qui n'ont pas eu de convulsions. - Dans le

reste de la famille, on ne connait aucune tare : pas d'aliénés,

pas d'épileptiques, pas de paralytiques, pas d'idiots, etc., etc.]

Mère, 31 ans, s'occupe de son ménage ; pas de convulsions

de l'enfance. Couperose de la face, même avant le mariage.

A eu des boutons d'acné. Pas de migraines, ni de rhuma-

tismes. Peu nerveuse; pas d'attaques de nerfs. Physionomie

régulière, intelligente ; grande, châtaine. Pas de maladies

depuis le mariage. [Père, mort d'une affection du coeur à 58

ans, négociant en oeufs, beurre, etc., sobre. Mère, bien por-

tante, mais se plaint de douleurs de tète depuis la ménopause ;

autrefois, étant réglée, elle avait il. ses époques des migrai-

nes qui duraient 3 jours ; très nerveuse ; aurait eu des crises

/stërt/br)nes sans perte de connaissance. Elle s'occupe de son

Antécédents personnels. 91

intérieur, sobre. - Grand père paternel, mort tout d'un coup,

vers 60 ans, d'un anévrysme ( ? ) en voyage. Grancl'rt2ère pa-

ternelle, morte « d'une hydropisie de poitrine » à 12 ans.

Grand père maternel mort d'une attaque d'apoplexie (en

avait eu deux), à 74 ans, sobre. - Grand'mère maternelle

morte il 91 ans, était en enfance. Deux frères ayant eu un

et trois enfants, sont bien portants ; un enfant est mort en

naissant, il avait la tète grosse « pleine d'eau » ; (le père de

cet enfant avait épousé sa cousine germaine, il aurait eu à

plusieurs reprises des polypes du nez). - Deux soirs : une,

mariée, a 3 enfants en bonne santé ; l'autre, 29 ans, non mariée

« par peur des enfants et des tracas de ménage, » bien por-

tante. Pas d'aliénés, pas de suicidés, etc.]

Pas de consanguinité [Père d'Amiens; mère née en Belgique,

de parents français, originaires d'Abbcville

Quatre enfants : 1° garçon, 5 ans 1/2, fort, intelligent, pas de

convulsions, non nerveux, n'a été en retard pour rien; - 2

notre malade ; - 3° et 4° deux jumeaux, 19 mois, bien portants

(un garçon et une fille); pas de convulsions; ils ont marché,

le garçon à 14 mois, la fille à 16 mois; ils commencent il par-

ler. Leur médecin, le Dr Peulcvé, aurait dit que la fille était

de 3 semaines en retard ; elle n'avait pas d'ongles, cependant,

assure la mère, « mes règles n'étaient pas revenues. »

(Une cousine, née d'une demi-soeur du grand père maternel

de l'enfant a eu une fois une couche double. Du côté paternel

un oncle paternel a eu deux jumeaux mort nés.)

Notre malade. A la conception, père et mère bien portants ;

ils n'avaient pas encore d'ennuis d'affaires ; la mère avait

sevré deux mois auparavant son premier né, étant un peu fati-

guée. Grossesse assez bonne les premiers mois, puis fati-

gue pendant les derniers temps, la tête très basse, ce qui

l'empêchait de marcher. Pas de traumatisme. Frayeur passa-

gère due à la vue d'une souris qui se promenait il ses pieds;

pas de perte de connaissance, s'est remise au bout de moins

d'une minute et en a ri. Pas d'envies de boire. accouche-

ment trois semaines avant terme, naturel, sans chloroforme,

cordon très mince « comme un porte-plume'), pas de sang.

A la naissance, pas d'asphyxie, il a crié de suite. Il était

maigre, pesait trois livres, avait les ongles il peine formés,

n'a tété qu'au 17° jour, a eu 5 nourrices en 3 semaines,

on les trayait pour lui donner le lait; le 2e jour cependant

avait tété sa mère convenablement.

92 IDIOTIE symptomatique DE sclérose.

11 a eu des convulsions le troisième jour : visage bleu, yeux

tournés, bras et jambes raides; «on aurait pu le tenir

comme une barre » puis il devenait mou. 11 aurait eu 6 ou 8

crises par jour, durant de cinq minutes à une heure au

maximum. Les convulsions ont continué jusqu'au 18e jour,

toujours à peu près de même nombre. La rigidité était la

même des deux côtés, pas de secousses cloniques. C'est

dans les premiers jours des convulsions qu'on a cherché des

nourrices, la mère étant faible.

A partir du 18° jour jusqu'à 3 mois, rien. Il devenait gros,

fort, même à un degré exagéré. « On aurait dit qu'il avait les

bras doubles. Il ne pouvait lés tenir rapprochés, il tour-

nait en graisse. » (On a fait faire sa photographie, mais on

ne l'a pas fait tirer, parce qu'il était trop hideux).

A partir de trois mois, quand il a commencé à avoir ses

dents, chaque fois qu'il se réveillait, jour et nuit, il avait

comme un vertige, il poussait deux ou trois cris, jetait les

bras en l'air, avait l'air effrayé « comme quelqu'un qui a

le vertige. » Tout le corps se raidissait dans une secousse

analogue à une secousse électrique, les yeux tournaient,

la face pâlissait. Durée au plus une minute. - Pas de secous-

ses isolées. Ces crises sont venues tous les jours jusqu'à

un an et demi, mais de un an à un an et demi, elles avaient

diminué. Durant cette période, il lui est arrivé d'avoir à peu

près tous les trois mois de grandes crises convulsives avec

contractions de la face, battements des paupières, battements

de la langue, claquement des dents, rigidité du corps et mou-

vements cloniques des membres, mais prédominant à droite

ainsi que la rigidité. Ces séries duraient environ deux heures.

La dernière grande crise a eu lieu à 18 mois. Il aurait eu 6

grandes séries ou plutôt des états de mal éclamptiques, d'une

durée de 2 heures, 1 heure, 1/2 heure.

Depuis l'âge de dix-huit mois jusqu'à ce jour, l'enfant n'a

plus eu de convulsions, ni de vertiges, mais il a été pris d'une

agitation c/t0 ? 'ë ! /b)'me ou mieux de tics : il est toujours en

mouvement, balance son tronc d'avant en arrière, tapote la

lèvre inférieure jusqu'à la faire saigner avec les quatre der-

niers doigts de la main gauche (jamais avec la droite), ou

bien il regarde fixement la main gauche en l'éloignant et la

rapprochant de son visage ( pas de grimaces de la face, peu

de mouvements des yeux). Depuis un an, il a pris l'habitude

de se cogner la région postérieure de la tète ; quand il est

couché, trouvant l'oreiller trop doux, il se cogne contre les

Antécédents personnels. 93

barreaux de son lit (pas de plaie, pas d'alopécie) ; se donne

souvent des claques très fortes des deux mains, surtout s'il

est contrarié.

Appétit bon, fait le mouvement pour porter à la bouche

mais ne sait pas, ne peut pas boire; ignore l'usage de la cuil-

ler. Pas de salacité. Mastication bonne depuis un an ; pas de

vomissements, pas de rumination. Ventre souple et indolore ;

selle quotidienne, gâtisme complet. Aime les caresses; cher-

chait, mais par des mouvements brusques à caresser sa bonne,

à toucher ses cheveux. On assure qu'il ne voit pas clair ;

M. Peulevé aurait dit qu'il avait des pointes de cataracte. Le

strabisme est consécutif aux premières convulsions. G... ne

distingue pas les odeurs. Bave par moments, moins depuis

G mois. Pas de succion, grince souvent des dents. Pas d'ona-

nisme. Pas de vers.

G... est sujet à des accès de colère quand on ne fait pas ce

qu'il veut, par exemple le lever lorsqu'il est couché, ou le

sortir de son chariot : il crie, trépigne, se raidit, sa face se

congestionne et la colère cesse dès qu'on fait ce qu'il veut.

Depuis l'Age de dix-huit mois, on a essayé de le mettre au

chariot. De 18 il 21 mois, il n'y restait que quelques minutes;

à partir de deux ans, il s'y est peu à peu habitué : 1/2 heure,

3/4 d'heure, une heure ; enfin il y reste maintenant deux heu-

res. L'an dernier (juin), marchait à peu près seul; il marche

moins bien parce que l'hiver précédent on l'a moins sorti et

que la naissance des deux jumeaux a occupé ses parents. Il

ne s'aide en rien du tout. Sommeil très irrégulier, il n'y a que

depuis 11 mois qu'il a commencé à dormir un peu régulière-

ment ; auparavant, il dormait une heure ou deux, criait très

fort « à l'entendre des maisons voisines », se rendormait une

heure ou deux puis criait. Toutes les nuits, il en était ainsi,

avec plus ou moins d'accès de cris. Pas de cauchemars, cepen-

dant on croit qu'il se réveillait en sursaut, comme s'il avait

des saisissements. - Pas de griffures, parfois cherchait à

mordre les bras de sa bonne.

Première dent à onze mois ; les autres ont poussé vite ; à

2G mois, il les avait toutes; n'a pas souffert des dents « qui

sont jaunes ».

Parole nulle, réduite à n 2am mam man qu'il répète quand

il est content. - Il reconnaît très bien sa bonne, reconnait

un peu sa mère et son père et c'est tout. Il parait aimer la

« musique douce » mais pas la « forte musique ».

Pas de croûtes dans les cheveux, pas d'ophthalmie, pas d'o-

94 IDIOTIE symptomatique DE sclérose.

tite ; dartres sèches à la face, mais pas de suintement; aurait

eu une adénite sous-maxillaire droite non abcédée ; pas de

traumatismes ; a des engelures les hivers, « a toujours froid

aux pieds, aime beaucoup la chaleur. »

Rougeole à 2 ans, moyenne. - Coqueluche à 18 mois, pen-

dant quatre mois, quintes modérées. Jaunisse l'an dernier

(3 semaines). - Pas de scarlatine, pas de varioloïde. Vacciné

au vaccin de vache. Pas de fièvre muqueuse, pas d'angine, etc.

On s'est aperçu, aussitôt après les convulsions qu'il n'était

pas comme les autres enfants ; il ne semblait voir personne,

ne cherchait pas à faire de petites caresses. - Soigné par

M. Peulevé et une fois par M. Cazin : Bromure de potassium,

bains de sel, de tilleul, sirop d'éther.

État actuel (17 juin 18S7). - T'été asymétrique : côté gauche

du front plus aplati que le droit ; bosse frontale gauche moins

proéminente que la droite qui est très saillante. Front peu

large et bas. Cheveux assez fournis, blonds, ainsi que les sour-

cils. Dépressions sus-sourcilières peu marquées. Ne- bien

fait, droit. L'odorat semble nul. - Yeux gris, vert foncé ;

strabisme divergent ; cils longs et fournis il la paupière supé-

rieure, beaucoup plus courts et moins fournis à l'inférieure.

Il va de soi que G... ne reconnaît pas les couleurs. Oreilles

régulières, bien ourlées, semblables des deux côtés. G... entend

bien.-I3ouche moyenne : lèvre supérieure très mince, lèvre

inférieure plus grosse, avançante, fait la lippe. Voûte pala-

tine plate. - Dents petites, écartées, arrondies. Menton

petit, un peu fuyant. Faciès inintelligent.

Thorax bien développé. A la partie inférieure du dos, fos-

sette coccygienne transformée en un véritable orifice canali-

culaire.

Membres supérieurs gras, bien développés ; G. ne sait pas se

servir de ses mains, pourtant il peut tenir les objets et tapoter

sa tète avec la main gauche. Membres inférieurs bien déve-

loppés. Il marche tenu par la main.

Respiration, circulation, digestion bonnes : pas de vomis-

sements, pas de rumination, ni de succion ; pas de salacité, ni

de voracité; n'est pas gourmand, mastication mauvaise, suce

en mangeant. Selles quotidiennes, gâteux complet.

Organes génitaux : bourses bien développées ; testicules des-

cendus, égaux, du volume d'une petite olive ; verge : longueur,

4 cent. '/2 ! grosseur, 4 cent. 1/2' Phimosis complet et très étroit.

Pas d'onanisme.

Marche DE la maladie. 95

Parole nulle. Tics : Balancement antéro-postérieur du

tronc, porte continuellement la main à la lèvre inférieure qu'il

tiraille. Cris pour le moindre motif qui le fera rire l'instant

d'après. Colères fréquentes. Difficulté de si ver son atten-

tion. Ne reconnaît personne. Ni affectueux, ni cares-

sant. Ne distingue pas si on le gronde ou si on le ca-

resse ; rit ou pleure indistinctement, ne sait pas manger tout

seul, même le pain ou les gâteaux ; ne sait pas boire non

plus, ne sait se faire comprendre en rien. Pleure du matin

au soir. Ne sait pas s'habiller, ni se déshabiller. Toilette nulle.

Sommeil très agité.

1887. 23 juin. Depuis l'entrée, l'enfant a pris des bains d'ami-

don, du sirop d'iodure de fer, de l'huile de foie de morue. Il

a fait quelques progrès au point de vue de la marche. Le

pied gauche qui se renversait sur le bord interne est devenu

plus solide et ne se renverse plus que rarement. G... marche

assez bien tenu par la main; il soulève moins bien le pied

gauche que le pied droit ( ? ).

Traitement : bains salés, sirop d'iodure de fer, exercices des

membres (flexion et extension), frictions stimulantes, exercices

de la marche.

29 août. - L'enfant se tient bien seul et marche facile-

ment, s'il est tenu par la main.

5 décembre. - Vaccination sans résultat.

6 décembre. Blépharite ciliaire double et bronchite

légère.

7 décembre. - Bronchite, gros râles.

1888 Janvier. -Sort de l'infirmerie.. Même traitement.

25 avril. - Revient à l'infirmerie pour cyanose des pieds

et oedème chronique. (Engelures.)

10 mai. - Apparition de plaques nombreuses d'herpès cir-

culé sur le front, le sourcil droit et sur le menton.

1"- octobre. - Verge : longueur, 4 c. 1/2, circonférence, 4 c.

412. Prépuce long, phimosis complet, bourses demi pendan-

tes. Testicules égaux remontant dans l'anneau, de la grosseur

d'une petite olive.

16 octobre. Angine érythémateuse.

15 décembre - Cyanose et oedème des jambes et des pieds.

4 janvier. - Persistance de l'herpès.

1889. 25 février. Guérison : le petit malade ne présente

plus de plaques où les cheveux se cassent. La tête est encore

96 IDIOTIE symptomatique DE SCLÉROSE.

couverte d'écaillés blanchâtres, adhérentes. Lotions glycé-

rinées.

12 mars. Les écailles ne sont pas toutes tombées et on

trouve à leur niveau des cheveux cassants.

Septembre. L'enfant s'éveille souvent pendant la nuit,

en criant et en pleurant; tire toujours la lèvre inférieure;

gâteux jour et nuit, il a beaucoup d'engelures aux pieds.

Octobre. - Il est très rageur, pleure pendant des heures

entières, surtout quand on l'habille et le déshabille.

24 octobre. Corps glabre, sauf dans l'espace interscapu-

laire où il existe un léger duvet blond, les deux testicules

sont dans les bourses de volume égal à celui d'une noisette.

Gland découvrable, méat normal. Verge : longueur 56 ?

circonférence 45 ?

Novembre et Décembre. L'enfant a des engelures aux pieds ,

qui l'empêchent de marcher et qui l'ont forcé il garder le lit

pendant une quinzaine de jours; il crie continuellement et se

met facilement en colère.

1890. 6 janvier. - Rougeole :

8 janvier. - L'éruption a complètement disparu. Epista-

xis légères, maïs persistantes depuis deux jours.

30 janvier. - Exeat. Puberté : visage et menton glabres;

pas de poils sous les aisselles, ni au pubis. Verge'l5m.n de

longueur, 40 ? de circonférence. - Prépuce long, pas de

phimosis. Bourses pendantes. Testicules de la grosseur

d'une olive. Périnée glabre. Anus normal.

Août-octobre. Pas de progrès. - Gàte le jour et la

nuit.

1891. 31 janvier. - Météorisme, pas d'ascite. Exagération de

la circulation collatérale des parois abdominales. Selles régu-

lières et quotidiennes. - Traitement : 30 gr. huile de ricin

L'enfant toujours la teigne. Pas de progrès pour la marche.

Quand on veut le faire marcher, il porte ses pieds en arrière

comme s'il voulait se mettre il genoux. Caractère pleureur.

15 juin. - Météorisme sans ascite avec élargissement

considérable des hypochondres. Pas de constipation, pas de

diarrhée. Cuirasse de collodion.

1892. 16 mars. L'enfant a la teigne tondante très intense

au sommet de la tête. Epilation et lotions parasiticides.

9 avril. Pas d'amélioration de la teigne. Depuis trois

jours environ il est survenu au sommet de la tête un petit

NOUVELLE description DU malade. 97

abcès agminé, d'aspect furonculeux. Ouverture du furoncle :

pus épais, jaune, filant. Pansement au sublimé.

20 avril. - Tout le sommet de la tête étant épilé, friction

au sublimé éthéré et application de gutta-percha dissoute

dans le chloroforme.

5 juin. -État assez satisfaisant ; les pustules du sommet

de la tête ont disparu. Même traitement. L'enfant

est atteint d'un tic qui consiste il saisir avec le pouce et

l'index sa lèvre inférieure et à opérer ainsi sur elle, des trac-

tions répétées et très-rapides avec un geste analogue à celui

des personnes qui endettent du pain. Sous l'influence de ces

tractions répétées, la lèvre est devenue volumineuse et s'est

allongée considérablement. Elle modifie désagréablement la

physionomie de l'enfant

24 juillet. Puberlé : Visage glabre. Thorax, aisselles,

pénil, membres glabres. Verge longueur : 6 centimètres.

Circonférence : 4 cent. Phimosis. Testicules remontés.

Erythème intense au pli inguino-crural et à la région anale.

Cet érythème serait dû à un tic que possède l'enfant de se

frotter continuellement les cuisses l'une contre l'autre et le

scrotum avec un talon, étant couché sur le côté.

30 septembre. Recommence à faire quelques progrès pour

la marche. - Traitement : 3 bains salés par semaine. Sirop

d'iodure de fer. - Huile de foie de morue. Exercices de mar-

che. Pour la teigne, continuer les lavages et les frictions au

sublimé.

28 octobre. L'enfant était presque guéri de sa teigne.

Récemment, il lui est survenu une éruption pustuleuse au

sommet de la tête, qui nécessite encore un traitement pro-

longé. L'enfant doit causer ses éruptions par les mouve-

ments répétés et les frottements de la tète contre ses draps,

lorsqu'il est au lit.

5 novembre. - État du malade. État général : Visage peu

coloré; adiposité médiocre. L'enfant n'a pas l'air maladif.

Sa physionomie exprime la bestialité -et le dégoût. Peau blan-

che. Pas de ganglions engorgés. Cheveux blonds bien implan-

tés ; teigne tonsurante.

Tête. Crâne de volume moyen, peu allongé ; bosses peu déve-

loppées. Front étroit et bas. Visage proéminent, progna-

thisme très-accentué. Fentes palpébrales grandes, légèrement

obliques de dehors en dedans et de haut en bas. Sourcils

blonds assez abondants, transversaux. Cils longs, bien implan-

tés. Orbites assez creux et grands, arcades sourcilières sail-

lantes. Yeux, léger strabisme divergent de l'oeil gauche, pas

98 IDIOTIE symptomatique DE SCLÉROSE.

de nystagmus. Iris jaune verdâtre. Pupilles dilatées et égales

à réaction normale. Examen fonctionnel de l'oeil impossible.

En lui montrant néanmoins plusieurs couleurs, on constate

nettement que le rouge orangé attire surtout ses regards

Nez camard il lobule volumineux, très-légèrement busqué à

son extrémité, ailes aplaties, volumineuses'. Narines assez

larges, regardant directement en bas. Odorat et sensibilité

nasale presque nuls.

Pommettes saillantes, régulières. Bouche, grande, hori-

zontale. Lèvres lippues : l'inférieure dépasse de le. 5 la

supérieure. Menton large.

Palais aplati, ne formant pas la cavité normale, mais presque

plan, voile du palais large. Luette moyenne. Amygdales assez

volumineuses. Denis implantées assez régulièrement, mais

obliques en avant, comme celles des frugivores. Les dents

supérieures passent, grâce à une plus grande obliquité, par

dessus les inférieures. Ces dents sont courtes et implantées

à une certaine distance les unes des autres. Goût nul.

Oreilles larges, longues, assez bien ourlées, à conque pro-

fonde, à lobule détaché et peu développé, s'écartant beaucoup

à leur partie supérieure de la paroi crânienne. Conduit auditif

externe dirigé horizontalement. Ouie : l'enfant entend, mais

parait entendre mal ; pour fixer son attention, on doit frapper

fortement les mains à côté d'une de ses oreilles et ce n'est

que quelques secondes après qu'il se retourne. Il semble qu'il

existe un retard assez considérable dans la perception des

sons ou dans l'exécution de l'acte qui s'établit ensuite sous

leur influence. Les joues de l'enfant sont charnues, épaisses :

les plis nasolabiaux, égaux, se creusent nettement. Le visage

se congestionne sous l'influence des contrariétés et des émo-

tions. Un duvet fin recouvre la partie supérieure des joues

et les faces latérales du front.

Cou : circonférence, 25 cent; pas de goitre, stcrnocléido-

mastoïdiens saillants.

Membres supérieurs normaux, peu musclés. Mains assez

normalement constituées; ongles bien implantés. Un léger

duvet recouvre les membres supérieurs.

Thorax : il présente des déformations : très large à la base,

la région sternale est en retrait sur les régions latérales. Vers

les 4e ou 5° côtes, en avant, le thorax fait saillie. Muscles peu

saillants. Rien d'anormal à la percussion, ni à l'auscultation.

La partie postérieure du thorax est recouverte d'un duvet

abondant et assez long.

Abdomen de batracien, très développé, présentant une cir-

Nouvelle description DU malade. 99

conférence de 82 cent. à 4 cent. au-dessus du nombril (partie

la plus large). Des veinosités nombreuses s'étendent sur l'ab-

domen et sur le thorax. La cicatrice ombilicale est légèrement

saillante. Tout l'abdomen résonne à la percussion et le foie

semble de petit volume. Malgré le tympanisme léger, pas de

diarrhée.

Région anale. Les fesses petites, peu charnues, rouges,

présentent des cicatrices nombreuses de pustules. L'anus

n'offre rien de particulier. Au niveau de la pointe du coccyx,

invagination de la peau semblant être l'orifice d'une ancienne

fistule ( ? ).

Cuisses en parenthèse, peu musclées, recouvertes de duvet.

Réflexes tendineux, rotulien et tricipital exagérés.

Jambes et pieds livides, violacés, à température bien moins

élevée que celle des mains. Pieds oedématiés, en équin valgus,

recouverts d'engelures et offrant à leur surface dorsale de

nombreuses cicatrices.

La sensibilité à la piqûre et à la température existe sur

toutes les parties du corps. l'as de retard dans les réactions

musculaires se produisant à la suite de ces excitations.

Intelligence il peu près nulle : G... parait comprendre quand

on l'appelle par son nom; il ne veut absolument rien tenir

dans ses mains, pourtant il commence à boire au verre. Il

commence aussi à marcher clans son chariot; c'est le seul

point sur lequel il a fait de réels progrès : c'est un type

d'idiotie complète.

1892. 9 novembre. - Les parents habitent Paris depuis

6 ans. Le préfet de la Somme réclame l'enfant pour l'asile de

Dury-lès-Amiens. - Depuis le placement de l'enfant, les

parents ont perdu leur petite jumelle d'une angine consé-

cutive à la rougeole ; pas d'autre décès dans la famille. -

L'enfant présente toujours un tympanisme prononcé.

Traitement : huile de foie de morue, sirop de fer, 2 bains

salés par semaine. Purgation toute les semaines (25 gr.

d'huile de ricin).

18 novembre. Le certificat de transfert est établi.

19 nouembre. - Une lettre du médecin en chef de l'Asile

de Dury-lès-Amiens autorise le maintien de l'enfant à l'Asile

de Bicêtre.

1893. 13 janvier. - L'enfant a eu récemment une légère

éruption pustuleuse, au sommet de la tète. Cette éruption est

actuellement guérie. Etat satisfaisant. Traitement : sublimé

à 1/2000. -

100 IDIOTIE symptomatique DE sclérose.

29 mars. Amélioration très notable. Même traitement.

17 mat. - Guérison de la teigne. - On continue le traite-

ment. t.

iS9't.- Januiea. - Puberté : léger duvet sur le pubis.

Verge : longueur, O ? 06 ; circonférence : 0 ? 05. Prépuce long,

gland découvrable, le testicule droit est descendu; le gauche

est il l'anneau. Léger duvet à l'anus.

1895. - Puberté : pas de poils aux aisselles, ni aux organes

génitaux. Verge : 6 cent. de longueur, circonférence : 5 cent.

Prépuce excessivement développé. Pas de testicules dans les

bourses. - Exercice des jointures et de la marche; douches.

1896. Sjuillet. -Continuar les douches. Raser la tête. Mettre

un vésicatoire sur la moitié delà tête. 1;) jours après en mettre

un autre sur le côté opposé. Pas de progrès chez cet enfant ;

il ne comprend rien, ne connaît personne ; gâteux, ne peut

pas se tenir debout. Passe une partie de la journée, les

mains dans la bouche.

Puberté : visage et corps glabres, un seul testicule dans les

bourses, gros comme une noisette ; le testicule gauche est

arrêté à l'anneau. Verge : longueur 7 cent., circonférence

5 cent. Phimosis. Anus normal.

1897. ? 0 janvier. Est entré à l'infirmerie pour un para-

phimosis. Après réduction facile, le prépuce reste oedématié,

mais pas de sphacèle, ni d'éraillurc. C'est la seconde fois

que cet accident lui survient. Son état général reste station-

nairc. Il jette des cris par intervalle, pourtant il ne parait pas

souffrir, il mange et boit bien. Les vésicatoires posés il y a

quelques mois n'ont produit aucun effet.

Puberté : visage et corps glabres ; un seul testicule dans

les bourses, gros comme un oeuf de merle ; le gauche est

arrêté à l'anneau. Anus normal. Verge : longueur 7 cent.,

circonférence G cent.

1898. Juillet. - L'enfant est à l'infirmerie. Même état : ne

comprend rien du tout, ne connaît personne, attention abso-

lument nulle. Grand gâteux.

189OJaii,iej,. - Pu'aerté : Visage, aisselles, tronc, membres,

pénil, périnée glabres, testicules en place, gros comme un

oeuf de merle. Anus normal. Mêmes dimensions de la verge,

circonférence : 3 0. 1 ? .

Cachexie, congestion pulmonaire, mort. 10t

Juillet. - L'enfant maigrit énormément, quoiqu'il s'ali-

mente bien. Souvent il jette des cris perçants, prolongés.

La déchéance a subi un léger temps d'arrêt.

1900. - Puberté. Joues : fin duvet. Lèvres, aisselles,

thorax, glabres. Pubis : poils de 3 à 4 cent. Testicules égaux

gros comme un oeuf de merle. Verge : longueur : 5 c., circon-

férence 4 c. 112.

Entre quelque temps à l'infirmerie ; en sort toujours dans le

môme état de maigreur. Jette souvent des cris le jour et la

nuit. Mange bien. Dort peu.

10 février. Même état ; mange beaucoup et néanmoins

maigrit ; depuis quelques jours, diarrhée.

15 février. La diarrhée n'existe plus; G... mange très

bien et dort mieux.

4 mars. - On descend l'enfant à l'infirmerie à 5 heures..

La face est pâle, les paupières gonflées, les pupilles dilatées

et égales ; les membres sont raides. L'enfant pousse quel-

ques cris de temps en temps. - 5 1)1a1's. Mort à 4 heures.

102 SCLÉROSE ATROPHIQUE DU COIN.

différentes cavités de la base paraissent normales ainsi que le

trou occipital. - L°s nerfs et les artères de la base de

l'encéphale semblent égaux et symétriques. La glande

pinéale n'offre rien de particulier. La pie-mère ne présente

qu'une vascularisation très modérée. La protubérance et le

bulbe (olives et pyramides) n'ont rien de particulier nu.

Hémisphère cérébral GAUCHE. - La scissure de Sylvius

(Se. S) est profonde, normale : ses rameaux ascendant et

horizontal n'offrent rien de notable. Le sillon de Rolando est

sinueux, présente deux convexités antérieures et trois

postérieures et se termine au niveau du rameau ascendant

de la scissure de Sylvius.

Lobe frontal. - La Il', circonvolution frontale (F1 ) est unie

par un pli de passage à la frontale ascendante et par un pli

de passage, situé à la partie antérieure du lobe, à la deu-

xième frontale. Celle-ci (l'=), sinueuse, est unie par un pli de

passage à la frontale ascendante et à la 3e frontale en avant,

à la 3e frontale seulement en arrière ; elle est très développée

et divisée à sa partie moyenne en deux parties par une scis-

sure horizontale supplémentaire (se. f. ss). La 3e frontale

(F.3) est peu développée. La scissure frontale supérieure

(se. f.s) est normale, sinueuse. La scissure frontale inférieure

(se. f i) est moins accentuée. La scissure parallèle frontale

(se. p. f. ) est assez courte, sinueuse.

Lobe pariétal. - La scissure interpariétale (se. ip.) est sinu-

euse. La scissure parallèle (se. p.) est courte. Les trois circon-

volutions pariétales ne présentent rien de particulier. Elles

sont unies par des plis de passage aux 1 ? et -'e temporales

(T et T2|.

Lobe temporal. - Les circonvolutions temporales (Tl, T2,

T3) sont normales. T et T2 sont unies au lobe occipital par

des plis de passage. Les circonvolutions occipito-temporales

sont sinueuses, très peu développées, et forment un contraste

avec les circonvolutions pariétales : l'atrophie commence

au niveau des plis de passage.

Face interne. - Ce qui frappe avant tout, c'est l'atrophie du

coin et de la partie postérieure du lobe occipital. La partie

comprise entre la scissure perpendiculaire interne (se. p.

i) et la scissure calcarine (f. ca) est composée de circonvolu-

tions plus blanches, de moindre volume surtout dans la par-

tie supérieure qui répond au pli de passage pariéto-occipital.

Le lobule paracentral (L. l'.), le lobule quadrilatère (L. Q.

les scissures calloso-marginale (se. c. m.) et sous-pariétale

(sc. s. p.) ne présentent rien de particulier.

Autopsie. 103

Les circonvolutions frontales, temporales et la circonvo-

lutions du corps calleux sont normales.

Hémisphère droit. Il est presque complètement normal.

Face externe. La scissure de Sylvius (Se. S) est profonde,

le sillon de Romande (S. Il) est sinueux comme du côté gauche.

La scissure perpendiculaire externe est bien marquée.

Lobe frontal. La scissure frontale parallèle (se. p. f.) est in-

complète, coupée par un pli de passage entre la 2e frontale (F2)

et la frontale ascendante (Fa). F', F, F : ¡ n'ont rien d'anor-

mal.

Lobe pariétal. La scissure in ter-pariétale est complète ; les

circonvolutions pariétales sont bien développées.

Lobe temporal. La scissure parallèle (se. p.) est bien mar-

quée, les 3 circonvolutions Tri, T2, T3 sont de volume normal.

Lobe occipital. Le lobe occipital a un volume ordinaire. Il

est toutefois à remarquer que les circonvolutions temporo-

occipitales et pariéto-occipitales sont un peu grêles.

Face interne. - Au niveau du coin et des circonvolutions

Toi, To2, un peu d'atrophie, mais sans qu'il y ait rien de sem-

blable à l'atrophie du coin de l'hémisphère gauche. Les

lobes frontal, temporal, le lobule quadrilatère et la circonvo-

lution du corps calleux sont normaux. Les scissures calloso-

maginales, calcariue, perpendiculaire interne, sous-pariéta-

les, sont normales. - Pas d'épaississement de la pie-mère,

qui, partout, se détache très bien.

Cou et thorax : pas de persistance du thymus ; le corps

thyroïde n'offre rien de particulier. Il en est de môme des

plèvres, et du péricarde. - Les deux poumons sont assez

fortement congestionnés à la base. - Coeur : les parois du

ventricule gauche sont assez épaisses, tandis que les parois

du ventricule droit sont minces. L'orifice mitral admet ditli-

cilement l'extrémité de l'auriculaire. La valvule est suffisante

mais ses valves sont épaissies assez considérablement en com-

paraison de celles de l'orifice tricuspide. Rien de particulier à

l'orifice aortique, ni au coeur droit. Pas de persistance du trou

de Botal.

Abdomen. - Foie très congestionné, vésicule biliaire pleine

de bile verte. Raie normale; petite rate supplémentaire. - Cap-

stiles sttnrénales, rien; les reins se décortiquent difficilement,

ils sont rouges et durs. Pancreas et intestins, rien à signaler.

Estomac dilaté. Appendice vermiculaire petit, mince,

mesurant 3 cent.; il est relié au coecum. Vessie distendue

10'1 Il

EVOLUTION DE LA TAILLE.

par une urine limpide, claire, d'odeur ammoniacale, légère-

ment alcaline. Elle contient 5 gr. 85 d'urée par litre; ni sucre,

ni albumine. Les deux testicules sont en ectopie dans le

canal inguinal. -Cause de la mort : congestion pulmonaire.

106

Hémiplégie; croissance.

Membres supérieurs.

Examen histologique. 107

Poids des organes.

108 Examen histologique.

elle aussi, infiltrée d'un grand nombre de cellules rondes.

Enfin la couche sous-jacente de la substance grise n'est pas

nette. ,

La substance blanche nous montre une grande proliféra-

tion de tissu néviogliquc. Les seules colorations qui aient pu

être employées ne permettent pas d'étudier les fibres ner-

veuses. En résumé, on se trouve en présence de lésions des

méninges, d'atrophie des circonvolutions et de sclé1'ose de

la substance corticale grise et blanche-

Moelle. Des morceaux de diverses hauteurs ont été

inclus à la celloidine et coupés. Les cellules nerveuses

n'ont pas paru altérées sur les coupes colorées au carmin-

natron. Quant aux fibres nerveuses, leur étude n'a pu être

faite qu'incomplètement : la pièce n'ayant pas été chromée,

la méthode de Weigert ou celle de Pal n'ont pu être

employées. Nous avons tenté la coloration par la teinture

d'orcanette, préconisée par Achard, et elle a été suffisamment

réussie pour que nous puissions dire qu'il n'existe pas de

grosses lésions des fibres nerveuses. Les méninges rachi-

diennes apparaissent normales à l'examen microscopique.

Réflexions. I. L'hérédité est assez chargée. D^u

côté paternel, nous avons à relever, chez le père lui-

même, un tempérament nerveux et la chorée clans

l'enfance ; la mort par fièvre cérébrale d'une des

grancl'-mères, par chagrin ( ? ) de l'autre. - Du côté

maternel, des migraines et des crises hystériformes

chez la grand'mère, des attaques apoplectiques chez

l'un des arrière-grands pères, l'hydrocéphalie chez un

cousin. Mentionnons, en passant, deux cas do gémella-

'.1'ité.

II. Rien de notable à la conception et durant la gros-

sesse. L'accouchement aurait eu lieu trois semaines

avant terme; l'enfant était petit et ses ongles étaient

,iL peine formés. Notons la gracilité du cordon.

III. Du troisième au dix-huitième jour, l'enfanta eu

des convulsions généralisées, égales des deux côtés ;

Puberté, croissance. 109

puis de 3 à 18 mois, des vertiges avec secousses très

fréquentes, et environ tous les trois mois des grandes

crises dans lesquelles les convulsions prédominaient

h droite ; enfin, de 18 mois à son entrée (4 ans), il a

été sujet à des tins multiples et se livrait sur lui-même

à des actes de violence. Eu pareil cas, n'est pas

rare de voir les parents accusés par les voisins de sé-

vices dont il sont innocents.

Comme autres symptômes importants, signalons les

grincements de dents, le strabisme, les accès de colère

et de cris, etc. En résumé, l'enfant offrait tous les

symptômes de l'idiotie complète, avec impulsions

violentes.

IV. En nous appuyant sur un certain nombre de

symptômes : cognements de tête, grincement des

dents, accès de colère, congestion intermittente de la

face. sommeil agité, pleurs, tendance à mordre, cya-

nose des pieds et des mains, etc., nous avions cru

devoir rattacher l'idiotie à une méningite ou une

1Hihângo-encélJhalite chroniques. L'autopsie a vérifie

en partie ce diagnostic.

V. Malgré l'âge relativement avancé du malade

(17 ans), la puberté et la croissance ne s'étaient pas

développées normalement. En effet, la taille n'était

que de 1 ? 15, au lieu de 1 ? 59 et le poids de 14k. 500

au lieu de 55 k. 500. Les lèvres, les aisselles, les

membres étaient glabres ; ce n'est que dans la dernière

année qu'on a noté quelques poils sur les joues et sur

le pénil. La verge et les testicules étaient restés petits.

Ceux-ci ont souvent varié de situation, tantôt tous les

deux, ou l'un d'entre eux remontés clans l'anneau,

tantôt descendus dans les bourses. A l'autopsie, on

les a trouvés dans le canal inguinal. Les tableaux qui

accompagnent cette observation, permettent de se

110 Puberté, croissance.

rendre compte de l'arrêt de développement physique

du malade.

VI. L'autopsie et l'examen histologique ont montré

que la méninge-encéphalite, très limitée d'ailleurs,

était peu prononcée et que la lésion prédominante était

une sclérose des circonvolutions du coin. Par suite

de l'hémipi11'ésie GAUCHI" on aurait pu croire que l'hé-

misphère céréoral droit pesait moins que le gauche.

Les pesées ont montré que c'était celui-ci, au con-

traire, qui était le moins lourd. La différence est

minime, 30 gr., et, peut-être, est-elle due a une irré-

gularité de la section des deux hémisphères. D'un

autre côté, pourtant, il faut se souvenir que, durant

une période, les convulsions ont prédominé à droite,

ce qui répondrait à la prédominance des lésions à

gauche.

VII. On sait que le ramollissement du coin amène

l'hérniill1opsie latérale homonyme chez l'adulte. Étant

donné l'état mental de l'enfant, nous n'avons pu recher-

cher ce symptôme. La relation entre la lésion et le

symptôme, tant de fois constatée chez l'adulte, n'a donc

pu être établie dans notre cas. Par conséquent, nous

ne savons pas si la sclérose atrophique dans l'enfance,

produit la même symptomatologie que le ramollisse-

ment chez l'adulte ou le vieillard.

VI. -

Folie de l'adolescence.

Excitation maniaque avec idées de grandeur ; dépression mélanco-

lique avec idées d'empoisonnement, refus de manger, etc. Gué-

rison de l'aliénation mentale ; tuberculose, mort.

Par BOURNEVILLE ET AMBARD.

SOMMAIRE. - Père, convulsions de l'enfance ; quelques excès,

de boisson postérieurs à la naissance de l'enfant, mort

d'un cancer de l'estomac. - Grand-père paternel mort de

bronchite chronique. -Gmnd'mè1'e maternelle, morte d'un

cancer de l'estomac. - Arrière-grands-parents des deux

côtés, morts vieux sans accidents nerveux.

Mère, morte hémiplégique et aphasique. Renseignements

[insuffisants sur les grands et arrière-grands-parents,

morts vieux ? Tante' maternelle morte d'un cancer du

.foie.

Pas de consanguinité. - Mère, plus âgée de dix-huit mois

Conception, grossesse, accouchement, naissance^ rien de

notable. - Rougeole vers deux ans et,deini. Consècutivér

ment, troubles de la parole qui, de distincte auparavant,

était devenue lente et bredouillante. De sept à quatorze

ans écolage souvent interrompu par un état d'affaiblisse-

ment attribué par les parents à la mauvaise hygiène de-

l'école et à l'ardeur qu'apportait l'enfant au travail. A

12 ans première attaque de folie : excitation pendant deux

jours suivie de torpeur. A 14 ans (septembre 1898), nouvel

accès d'aliénation mentale : excitation, divagations, copro-

lalie, clastomanie. - Après huit jours d'excitation corres-

pondant à l'époque menstruelle absente, période 111élancoti-

que durant. trois semaines, Retour de l'excitation

coïncidant avec l'époque menstruelle qui, cette fois, manque

112 Folie DE l'adolescence.

encore. Placement a l'Asile clinique, d'où elle est

envoyée à la Fondation Vallée (fi décembre 189). - L'état

d'agitation dure jusqu'il la fin de janvier 1899. Nouvelle

période d'excitation, précédant les règles. En mai, l'enfant

redevient normale. Envoyée en congé rie 8 jours, elle

ne revient pas. - Troisième attaque de folie a la fin de

décembre 1899 : guérison en mai 1900. - Céphalalgies,

douleurs abdominales, conjonctivite purulente. Tuber-

culose abdominale; cachexie progressive, mort. - Examen

du cerveau.

Ha.. (Marguerite), israélite, née le 18 avril 1884, est entrée

dans le service le G décembre 1898.

Antécédents héréditaires. (Renseignements fournis par la

soeur de la malade et complétés par le père). Père, 54 ans,

marchand colporteur, a eu des convulsions au moment de

la dentition; pas de fièvre typhoïde, pas de chorée, de rhu-

matismes, de dartres, de migraines ; on ne note pas d'acci-

dents permettant de soupçonner la syphilis. Depuis 30 ans,

il prend régulièrement deux absinthes par jour ; aux repas,

il absorbe de préférence de la bière, boit beaucoup de café

(trois ou quatre tasses par jour), mais d'une façon irrégulière.

Depuis quelques années, il fait de temps en temps des excès

de boisson, obligé, qu'il est, de trinquer avec' ses clients.

Il fume pour 0 fr. 25 centimes de tabac par jour. - Caractère

très vif, s'emporte facilement, mais la colère ne dure pas.

Son caractère nous semble un peu bizarre, il fournit les

renseignements qu'on lui demande d'un air maussade, a a

l'air de ne pouvoir tenir en place, il se lève, marmotte quel-

ques mots incompréhensibles, se rassied, se relève pour aller

se placer devant le feu et tout cela sans raisons (1).

Famille du père. Son père est mort à 52 ans de bronchite

chronique. - Sa mère est morte à 58 ans d'un cancer de l'esto-

marc. - La soeur de l'enfant, vue isolément, insiste beaucoup

sur ce que : « lors de l'accident de notre malade la famille

s'estenquisede l'état d'esprit deleurs parents les plus éloignés,

sans pouvoir retrouver aucune trace d'un ascendant qui aurait

eu l'esprit dérangé. » - Pas de renseignements précis sur les

grands parents, tant paternels que maternels qui seraient

(1) Il est mort d'un cancer de l'estomac le 2fi octobre 1901, à 57 ans.

Antécédents héréditaires. 1 ff

morts très âgés, et auraient toujours joui d'une bonne santé.

Deux frères : L'ainé, âgé de fi'[ ans, est veuf, 5 enfants, tous

très bien portants, pas de convulsions. Le frère cadet, âge'

de 59 ans, est marié, il a quatre filles et un garçon ; l'ainée

des filles est mariée, elle a deux enfants très bien portants,'

pas de convulsions. Trois soeurs : L'aînée est morte à 55

ans d'une maladie clans le ventre ( ? ), a eu cinq enfants bien

portants, pas de convulsions. La seconde, âgée de Gl ans, est

veuve; elle a trois garçons, âgés respectivement de 32, 28 et

25 ans, tous en bonne santé, n'ayant jamais eu de convul-'

sions. La 3c soeur, âgée de ilS ans, mariée, a il filles et un

garçon ; une des filles est mariée, a une fille 1 1 e bien portante,

pas de convulsions. Dans le reste de la famille, on ne trouve

rien à noter, et en particulier aucun cas de tuberculose.

MÈRE morte à 53 ans, d'une hémiplégie droite, ayant débute

brusquement pendant la nuit, aphasie. Cette hémiplégie dura'

près d'une année et, à la lin, elle s'est compliquée de para-

lysie des sphincters. Elle n'avait jamais été malade aupara-1

vaut. Notons aussi qu'elle est morte il y a 19 mois et que

notre malade aurait donné les premiers signes de déran-

gement cérébral avant la mort de sa mère. Celle-ci avait

un caractère très doux, elle ne se plaignait jamais de la

tête.

Famille de la mère. Son père et sa mère sont morts

vieux ( ? ). On n'a pas de renseignements précis sur les

grands-parenls tant paternels que maternels, on sait seule-

ment qu'ils sont morts aussi très âgés. Pas de renseigne-

ments, sur les oncles paternels ni sur les oncles maternels-

Nombreuses tantes maternelles et paternelles, toutes

mortes âgées; l'une serait morte en 18 ! )(i iL 99 ans. '

Trois frères : L'ainé, SO ans, a une fille de 4U ans, bien-

portante, habitant la Suisse, chez laquelle notre malade

iL séjourné pendant quelque temps lors de sa première atta-

que; Le second, 75 ans, bien portant, marié, a six enfants,

tous âgés aujourd'hui et en bonne santé ; Le 3e, (15 ans,

marié sans ('.i7fLLIIIS. - L)I11t1't' S ! l'IGI'.s : L'une morte it 72 ans,

une autre, 70 ans, mariée, n'a jamais eu d'enfants : - La

troisième est morte à Ii5 ans d'un cancer du foie; La qua-

trième, 58 ans, mariée, n'a jamais eu d'enfants. Dans le

reste de la famille, il n'y a rien à signaler; pas de tuberculose.

Pas de consangllinité. - Différence d'âge, de dix-huit mois

(mère plus âgée).

114 Folie DE l'adolescence.

Le père a eu dix enfants : quatre d'un premier mariage,

six d'un second. Des quatre enfants du premier lit, l'un est

mort athrepsique : a six mois en nourrice ; les trois autres

sont très bien portants : l'un est âgé de 29 ans, une fille âgée

de 28 ans est mariée, a deux enfants n'offrant aucun accident

nerveux ; le troisième est âgé de 2G ans.

Des six enfants du deuxième lit : 1° fille, qui nous fournit

ces renseignements; elle est bien développée, n'a pas de

migraines, etc. ; 2° garçon, la ans, bien portant ; 3" fille

de 17 ans, en bonne santé, strabisme convergent de l'oeil

gauche ; - 4° garçon mort h 18 mois, on ne sait de quoi ;

5° notre malade ; - G° fillette de 13 ans, bien purtante.

Aucun de ces enfants n'aurait eu de convulsions.

Notre malade. - Rien à signaler au moment de la co ? i-

ceplion ni au cours de la grossesse. - L'accouchement s'est

fait à terme, normalement; pas de chloroforme, ni de forceps.

On n'a pas de renseignements ni sur le mode de présentation,

ni sur l'état de l'enfant à la naissance. Nourrie au sein,

par sa mère. L'enfant a parlé de bonne heure, on ne peut

préciser davantage, mais, à la suite d'une rougeole survenue

à 2 ou 3 ans, elle aurait « bredouillé » et pendant quelque

temps sa parole était lente, confuse, absolument comme celle

d'un enfant qui apprend à parler, alors qu'avant la rougeole

elle parlait assez bien. l'as de scarlatine, pas de convulsions.

Propre de bonne heure. Elle a été gardée par ses parents

jusqu'à 5 ans. Durant cette période elle s'est toujours bien

portée.

De 5 à 7 ans, elle fréquente un asile d'enfants et continue

se bien porter. A sept ans, on la met à l'école commu-

nale. A partir de cette époque, l'enfant devient chétive.

Pour expliquer ce fait, deux causes sont invoquées par la

famille : d'abord l'air confiné de la classe, car, l'enfant

était-elle retirée de l'école pendant un mois ou deux, sa

santé redevenait florissante; en second lieu, son ardeur

au travail, il lui arrivait souvent de se lever au milieu de la

nuit pour faire ses devoirs. Aussi son écol ige ne fut-il qu'une

suite d'interruptions et de reprises d'études. Malgré cela,

elle eut son certificat d'études en juin 1898.

En juillet 189G, avant la puberté, notre malade aurait eu

une première allaque de folie : elle allait chez les voisins,

chez les amis, leur tenait des propos bizarres. Elle criait

qu'elle était grande fille, qu'elle avait ses règles, ce qui était

faux. Elle tenait des propos incohérents, racontait des choses

Antécédents personnels. 115 Z-)

n'ayant jamais existé. Elle était devenue violente, nous dit-on :

« elle tombait sur la plus jeune de mes soeurs et la battait. »

Cette excitation disparut au bout de deux jours, une sorte

de torpeur lui succéda. Son père l'emmena avec lui à Besan-

çon. C'est avec la plus complète indifférence que l'enfant

quitta sa mère et ses soeurs.

A leur arrivée à Besançon, au grand étonnement de son

père, l'enfant était absolument dans son état normal.

De Besançon notre malade passa en Suisse où elle séjourna

durant trois mois chez une tante. De là. elle revint à Besan-

çon oit elle resta jusqu'en septembre 1897. On assure que

depuis cette époque, jusqu'en septembre 1898, l'enfant était

naturelle, bien que d'un caractère sombre.

En septembre 1898, du jour au lendemain, elle se met à

divaguer, elle s'adresse au premier venu, dit des « horreurs »

à ses saurs ; de plus, elle est très agitée, elle jette par la

fenêtre tout ce qui se trouve sous sa main. Elle ne fait pas

d'inconvenances, pas d'exhibition. Cet état de surexcitation

avec délire, dure huit jours, correspondant à l'époque de ses

règles absentes. Puis, pendant trois semaines, l'enfant est

taciturne, elle garde un 111 utisme presque complet, contras-

tant avec la loquacité qu'elle avait montrée durant huit jours.

L'n mois après ce premier accès, à l'époque des règles,

absentes encore, nouvel accès avec exaltation, divagations,

turbulence comme aux deux premières attaques. C'est alors

que la famille se décide à la placer. Elle est admise -IL l'Asile

clinique le 29 octobre 1898 ; elle y est restée jusqu'au 6

décembre, époque oit elle est transférée à la fondation Vallée.

Température rectale il l'entrée.

116 Folie de l'adolescence.

pressionnabililé de l'enfant. - Les arcades sourcilières, proé-

minentes, sont recouvertes d'épais sourcils noirs qui donnent

à la physionomie une expression de sévérité. Les cils sont

longs, régulièrement implantés. Les yeux, très mobiles,

ne présentent pas de lésions, pas d'empthalmie, de strabisme

de paralysie, de nystagmus. Iris bruns. Pupilles dilatées'

réagissant faiblement il la lumière et l'accommodation.

Acuité visuelle normale : l'enfant distingue parfaitement les

couleurs.

' Le ne : est droit, à lobule arrondi, les ailes du nez sont très

mobiles, la respiration nasale s'cffectue sans dilliculté.

Les pommelles sont tombantes, les joues amaigries.

La bouche est de dimension moyenne, la lèvre supérieure

mince, la lèvre inférieure plus épaisse, rosées. Le palais est

peu excavé, le pharynx normal, le réflexe pharyngien l'est

également, déglutition facile, pas de végétations adénoïdes-

- La langue est mobile, ne présente pas de tremblement de

la pointe. Les amygdales, symétriques, sont peu saillantes.

Goût normal. - Les dénis sont presque toutes envahies par

la carie, plusieurs molaires manquent; léger prognathisme

du maxillaire inférieur. Oreilles : le pavillon est norma-

lement écarté de la base du crâne, l'hélix est bien ourlé,

ébauche du tubercule de Darwin, anthélix à double racine ;

concilie profonde. Audition normale.

Le cou a 29 centimètres de circonférence, le corps

thyroïde est facilement palpable ; la pomme d'Adam com-

mence à proéminer, rien au larynx.

. Thora.\'. Pas de déformation du squelette. L'examen du

poumon et du cceun ne révèle rien de particulier. Rien à

noter du côté delà paroi abdominale, ni des organes intra-

abdominaux.

Puberté. - Les mamelles sont assez bien développées ;

elles présentent un diamètre vertical de 12 cm. et 14 cm. de

diamètre transversal. Symétrie parfaite des deux cotés.

Aréole 3 centimètres, mamelon .') millimètres. Au niveau de

l'aisselle, à droite, bande de poils de 7 cm. sur 2 cm., il gauche

près de 8 on. de long, sur 2 cm. lj3 de largeur. Fin duvet

entre les épaules et les omoplates, sur les reins, la région

sacrée, sur la face antéro-externc des bras et des avant-bras

où il y a, non plus du duvet, mais des poils assez longs;

poils assez abondants sur les deux tiers externes des cuisses.

Sur le pénil, poils noirs sur une largeur de G centimètres

et une hauteur de 9 centim., poils plus abondants autour

du capuchon, sur la face externe des grandes lèvres qui sont

Description de la malade. 117

saillantes ; petites lèvres peu développées, 3 ou 4 mm., clitoris

très petit, ouverture de l'hymen frangée, laissant pénétrer

l'index, poils abondants de chaque coté de la fourchette

et au pourtour de l'anus. Pas trace d'hémorrhoïdes, la

malade dit avoir perdu du sangparl'anus( ? ). Pas d'onanisme.

Réglée irrégulièrement depuis le mois de mai 1898.

Les membres supérieurs sont normaux de forme et de

développement ; pas d'onycophagie, ongles normaux. Pres-

sion au dynamomètre 10 kg. à droite et à gauche.

Membres inférieurs réguliers, ivllexes physiologiques ; un

peu d'hyperesthésie cutanée au niveau de la plante des pieds.

Quand la malade a été placée à l'Asile clinique, elle était

bien plus agitée qu'elle ne l'avait été à sa première attaque

de folie, et qu'à son arrivée il la Fondation : la nuit elle se

levait et jetait tout par la fenêtre. Sa famille allait la voir

deux fois par semaine et a pu apprécier les changements.

Traitement : chloral 4 gr. par jour, plus 2 gr. de bromure

de sodium Un bain de 20 minutes tous les deux jours.

Dès son entrée à la Fondation, lia... est mise en observa-

tion à l'infirmerie. Elle est assez calme, parait s'ennuyer,

elle refuse de manger avec ses compagnes disant : « Moi,

jeune fille israélite, je ne peux manger avec les françaises. »

T.R. 37°. - La nuit a été bonne, l'enfant a bien dormi.

Durant la journée, on remarque qu'elle parle continuellement

seule, fait des gestes avec les mains, lève les yeux vers le

ciel. Quand elle élève la voix, on comprend ce qu'elle dit :

« Oh ! la guerre, j'ai été battue par M... J'ai perdu, je me suis

revenjèe. Je gagnerai ! .... mes cousins ! ils se sont vengés

aussi... les juifs cela se soutient entre eux.. les youpins

vivent les youpins ? et moi, reine d'Angleterre, je laisserais

passer tout cela ? .. non, jamais ! le drapeau rouge me suivra

partout, le drapeau français... et je gagnerai. » Pendant le

reste de la journée, même état. A sept heures du soir,

l'enfant étant très énervée se met à injurier les infirmières :

« Salopes, vaches, cons de marasses ( ? ), dit-elle. » Elle se

proclame reine d'Angleterre, disant : « Ils veulent prendre

mon nom pour déclarer la guerre il Dreyfus, à Zola, pour me

déshonorer, mais ils ne l'auront pas, je leur casserai plutôt

la gueule à tous, tas de cochons, vaches ! nous arrivons

bientôt à la 3P guerre puisque la lie est celle de M... ( ? ).

Je marcherai en avant. Ils veulent mon sang. Je les tuerai...

Je me vengerai ! ils veulent Marguerite lia ? jeune fille

israélite, ils veulent mon nom à moi ! à moi, la belle youpine !

non, jamais ! Je leur crèverai la peau ? mes cousins.. allez

118 Folie de l'adolescence.

donc leur dire quelque chose, ils vous foutront des coups de

revolver dans votre gueule, mes cousins les youpins officiers

de l'infanterie de marine, ils viendront m'outrager, hé ! bien,

je les entm.... tous, nom de Dieu ! et eux aussi vous emmerd....

Allez donc tous à l'Ile du Diable, retrouver Dreyfus, allez

donc nous venger ! ... allez donc crever là-bas, tas de

salauds ! ... tas de nom de Dieu ! ... » Par instant, elle cesso

de déclamer pour chanter des choses sans suite qu'elle

compose elle-même, telles que :

« La belle youpine, »

« La connaissez-vous ? . ?

« C'est votre cousine »

« Qui tue tous les rois »

« Ils ont brisé mon violon »

« Parce que j'ai l'âme française »

« Et que sans cause, avec les avalions »

« J'ai fait changer la belle française »

Les nuits sont mauvaises, l'enfant est agitée, ne dort pas.

L'agitation atteint son maximum dans la soirée vers sept

heures. - Les jours suivants, même état.

10 décembre. - Ce matin, Marguerite parait tranquille;

elle est abattue. Sa soeur et sa cousine viennent la voir, elle

les accueille froidement. La journée a été bonne. Il n'en n'est

pas de même des jours suivants, même exaltation, mêmes

idées de guerre, même insomnie.

1899. Janvier. - Depuis quelques jours, on constate une

sensible amélioration au point de vue intellectuel, bien que

la malade continue à parler seule, et il rechercher l'isole-

ment. Elle a des alternatives de galle et de tristesse. Même

instabilité dans les idées, ce qui fait qu'on ne peut l'occuper

il quoi que ce soit.

15 janvier. - L'enfant parait moins calme depuis plusieurs

jours. Elle recommence ses extravagantes déclamations. Le

sommeil a disparu pour faire place aux insomnies des pre-

miers jours. Les remontrances l'excitent. Hier au soir elle a

menacé de se jeter par la fenêtre, elle s'est contentée de se

jeter sur son lit. - Même état les jours suivants avec cepen-

dant une légère tendance à l'amélioration.

25 janvier. - Les règles ont reparu pour la première fois

depuis l'admission à la Fondation sans le moindre malaise ;

elles ont duré 6 jours.

RÉMISSION. 119

Février. - Ha... est redevenue à peu près tranquille,

commence à s'habituer à la vie générale de l'établissement,

bien qu'elle recherche toujours la solitude. Son appétit est

régulier, son sommeil calme. Elle suit la classe et semble

s'y intéresser; il n'en est pas de même des travaux manuels

pour lesquels elle ne montre aucun goût. Les règles

réapparaissent le 23 février et sont normales.

Mars. L'état de l'enfant est satisfaisant, elle est calme,

raisonne bien, a bon appétit, bon sommeil, elle va en classe

et prend part à tous les exercices.

20 mars. - Le mieux persiste, l'enfant travaille et raisonne

bien ; elle ne se souvient plus de ce qu'elle disait ni de ce

qu'elle faisait en ses moments de folie. Elle demande à. être

renvoyée dans sa famille. Depuis son entrée, son poids a

augmenté de 12 kgr. et sa taille de 1 cm. Même traite-

ment, douches, bains, etc. Les règles sont venues régu-

lièrement.

Avril. - L'amélioration est de plus en plus marquée, l'en-

fant semble être complètement revenue à son éiat normal.

Elle est affectueuse, soumise, mais d'humeur triste,- elle ne

joue pas comme les autres enfants.

Mat. - La guérison persiste, l'enfant est affectueuse avec

ses compagnes, elle aime beaucoup ses soeurs, ses frères,

son père ; elle parle souvent d'eux et manifeste le désir de

retourner clans sa famille.

L'état de l'enfant est tout-à-fait satisfaisant. Elle est calme,

raisonne bien, suit tous les exercices, s'applique de son

mieux tant à -t'étude qu'aux travaux manuels, mais elle est

un peu nonchalante et l'on doit souvent la stimuler. Elle

parle fréquemment de sa famille qu'elle semble aimer beau-

coup. Elle lit avec plaisir, lirait les journaux, si on les lui

laissait prendre, la politique surtout semble attirer son

attention.

Juillet. Depuis le mois de mai, on ne trouve abso-

lument ricn iL signaler, l'enfant n'a cessé d'être docile et

raisonnable.

l ? a0t'(t. - Marguerite part en congé pour 8 jours dans

sa famille. Elle a pris très exactement deux douches par jour,

fait de la gymnastique quotidiennement. Elle n'offre plus

de troubles intellectuels. Afin d'assurer sa guérison par

un traitement régulier, nous recommandons à la famille de

a ramener exactement a la fin de son congé, ce qu'ils n'ont

pas fait.

120 Nouvelle attaque DE folie.

1900. 8 janvier. - L'enfant est ramenée dans un état de

folie aussi prononcé que celui qu'elle avait présenté l'année

précédente à la Fondation. Elle déclame, sans cesse : << Je suis

la Reine d'Angleterre ! les Boers veulent; tuer la Reine ! la

reine les emm.... ! ils veulent mon nom, mon honneur, d'ail-

leurs, les morts ont toujours tort ! »

Les phrases sont sans suite, tantôt elle pleure parce qu'elle

n'a plus de famille et qu'elle se trouve dans le deuil le plus

complet : « Que voulez-vous, je suis toute seule, il faut que

je me défende et puis, les morts ont toujours tort. -

Elle refuse de boire et do manger. En la couchant,

on s'aperçoit qu'elle a ses règles.

9 et il janvier. - Même état. II... frappe ses compagnes

en disant qu'elle veut les tuer; elle déclare que tous les ali-

ments sont empoisonnés.

13 janvier. II. est propriétaire des magasins Dufayel,

tout Paris lui appartient : « Je me fous de tout le monde,

je suis riche ! Vous n'avez qu'iL trouver mon père à son

bureau, il vous donnera 500.000 francs ! »

15 janvier. - Elle dit que ses frères lui ont donné des

coups de couteau et qu'elle les leur rendra, car ce sont des

cochons, ils couchent tous avec la bonne. Elle chante :

« Marguerite, ô mon espoir !

« Lève ta chemise et fais moi voir !

Elle passe ensuite de chanson en chanson, sans en conti-

nuer aucune. Elle estgrossière, obscène vis-à-vis des enfants

qui l'approchent. Elle va et vient sans cesse ; court de tous les

côtés.

20 jaamiei ? 1 /'éurien. - Même état

J février. H... devient de plus en plus triste, sa physio-

nomie exprime une grande souffrance, son visage est pâle,

livide, ses joues se creusent, le regard est vague, effaré. Elle

regarde avec effroi les personnes qui l'entourent. Elle fuit

dès qu'on veut lui donner les soins physiques néceessaires.

Elle répond à peine quand on lui pose une question. Elle ne

tient aucune conversation. Malgré cela, elle a un besoin de

mouvement incessant.

5 février. - Physionomie triste et sombre. Elle parait en

proie à une grande peine : « Qu'est-ce-qu'il y a donc de nou-

veau ! quel malheur est-il arrivé pour que tout le monde soit

si triste depuis quelques jours. Crises de pleurs très fréquentes.

7 février. II... s'affaiblit. Ses traits sont tirés. Tout dans

sa personne exprime l'inquiétude, la souffrance. On ne peut

Marche DE la maladie. , 121

parvenir il chasser les idées noires qui la poursuivent conti-

nuellement. Elle ne se rend pas compte de ce qu'elle fait, ne

peut rester en repos, court, va et vient. Au réfectoire, elle va

de table en table, prenant tantôt le verre, tantôt l'assiette de

ses compagnes, dérobe à la hâte et avale leurs aliments,

refuse les siens pour lesquels elle a de la méfiance. Elle ne

s'habille, ni se déshabille, ne procède à aucun soin de toilette.

On est obligé de la nettoyer comme un enfant en bas-âge,

l'haleine o-t mauvaise. Elle n'accepte sa nourriture qu'après

l'avoir flairée. Ne parle pas. Gâte continuellement. Insomnie.

10 février. - II... est très affaissée. Sa physionomie est

anxieuse, son teint cadavérique. Ses traits sont tirés, son

haleine est très mauvaise. Elle ne veut prendre aucune nour-

riture : « mangez dans mon assiette, buvez dans mon verre,

je mangerai et boirai après vous » dit-elle. C'est ce qui a été

fait mais elle n'a rien voulu prendre quand môme : elle.craint

donc d'être empoisonnée. Le soir, on lui donne un lavement

avec du lait et des oeufs. Ayant été à la selle durant la nuit,

elle a pris ses excréments dans sa main et les a portés à la

veilleuse. Agitation la nuit. Tendance à devenir violente, à

griffer.

14 février. - On est obligé de faire manger II... il la sonde

malgré sa résistance qu'elle accompagne d'injures telles que :

« sale cochon, vache, putain. Allez donc faire le trottoir ! j'en

veux plus de voire sale tuyau ! »

18 février. - Légère amélioration au point de vue mental.

Elle mange toute seule. - Persistance néanmoins de

l'anxiété. Quand elle est seule, elle est calme, mais elle

devient violente dès qu'on la touche, qu'on veut la faire

s'habiller ou la faire manger. Elle continue ses douches;

28 février. Un mutisme complet a succédé à une loquacité

excessive. II... est toujours triste et méfiante. Elle refuse

maintenant les aliments qu'on lui sert pour prendre ceux

de ses voisines et rejette ceux-ci bientôt de même. Elle n'a

pas voulu prendre part aux divertissements de ses compagnes

à l'occasion du Mardi-gras. Nous n'en tirons aucune parole.

Sa ligure exprime toujours l'inquiétude. Parfois mouvements

des lèvres comme si elle parlait, crispation de la face, yeux,

pleins de larmes. Ce qui domine, c'est la dépression. mélan-

colique.

1T117s. - Meilleure mine, mais ne mange encore que des

aliments liquides et par contrainte. Elle exécute différents

exercices scolaires, sans trop de difficulté. Elle gâte toujours.

5 5 mars. - Visitée par ses parents, elle a semblé rester

Bourneville, Bicêtre, 1901. - . 9

122 FOLIE DE l'adolescence.

complètement indifférente à leur venue. Toutefois, elle a

mangé gloutonnement les friandises qu'ils lui avaient appor-

tées dès qu'elle a remarqué qu'elle n'était plus observée.

13 mars. Amélioration notable, regard moins inquiet,

moins dur; physionomie meilleure, augmentation de poids,

haleine moins mauvaise. II... a peu de spontanéité, toutefois

elle cherche à taquiner. Elle ne parle pas encore, sourit ou

fait une légère grimace quand on lui adresse la parole. Elle

mange seule pour la première fois, mais gâte encore et ne se

lave pas. Elle ne s'habille seule qu'après la douche ; le matin

et le soir, il faut l'aider.

14 mars. - Tristesse marquée. Elle ne semble pas avoir

d'hallucinations de la vue ou de l'ouïe.

19 mars. - Amélioration très légère. Mélancolie persis-

tante. II... pleure très souvent, ne mange que lorsqu'on l'y

oblige. Elle a gardé un morceau de pain qu'elle a mangé en

classe, profitant des moments où elle ne se croyait pas sur-

veillée. Elle se rend elle-même en classe, s'asseoit à sa place,

ne fait rien, s'endort.

15 mars. Nous faisons assister II... à la leçon de chant.

On lui donne le livre ; elle suit tous les morceaux, chante même

tout en guettant si elle n'est pas observée. Elle se tait dès

qu'elle s'aperçoit qu'on la remarque. Aujourd'hui elle a de

nouveau mangé seule, mais il faut l'y inciter fortement sinon

elle resterait une heure devant son assiette sans y toucher.

19 mars. H.. est allée au parloir hier, elle a mangé les

friandises que ses parents lui avaient apportées, s'est pro-

menée avec eux et a répondu à quelques questions. « Puis-

je fumer ? lui demande son frère. - Ce n'est pas défendu. »

A une de ses soeurs, elle a dit : « Au revoir, Marthe. » Elle

refuse toujours de parler au personnel et à ses camarades, elle

est gâteuse nuit et jour, en classe, au réfectoire, au préau,

au lit. Aucun soin de toilette. Sommeil bon. Santé physique

meilleure.

22 mars. Tantôt elle mange seule, tantôt il faut l'exciter.

- Elle ne parle pas. - Elle ne voulait pas se rendre au bal

donné aux enfants, on l'y a obligée, elle a dansé une polka,

puis elle a pleuré abondamment comme si elle avait commis

une faute. On lui a donné un sucre d'orge. Quelque temps

après on lui a demandé ce qu'elle en avait fait : « Je l'ai

mangé par mégarde, » Les larmes ont recommencé à couler,

parce qu'elle avait laissé échapper ces mots. Si, provoquée,

elle dit : « bonjour, bonsoir, » aussitôt les mots prononcés, elle

pleure à chaudes larmes, entre dans une sorte de rage, tape

du pied, bouscule les objets.

Guérison. 123

2G mars. - Sommeil bail, tendance à dormir dans la jour-

née est triste, mélancolique, comme plongée dans une pro-

fonde méditation ; elle semble revenir d'un rêve, quand on lui

parle vivement. Les pleurs et les larmes se succédent rapi-

dement.

27 mars. En classe, on lui a donné un livre de lecture ;

son tour arrivé, on l'a forcée à lire comme toutes ses com-

pagnes. Après beaucoup d'insistance, elle a lu très couram-

ment une quinzaine de lignes. Elle a pleuré ensuite et n'a

plus suivi la lecture.

10 avril. Elle suit volontiers ses compagnes partout,

mais résiste toujours pour aller au réfectoire. Même résis-

tance pour la faire manger.

30 avril. L'état physique s'améliore progressivement,

elle est moins pâle, les couleurs semblent revenir. Elle

mange toujours avec difficulté. Le gâtisme, l'entêtement, le

mutisme, la mauvaise expression du regard persistent. 11. z

faut toujours l'habiller et faire sa toilette.

8 mat. Une métamorphose subite s'est opérée chez

Marguerite. Sa physionomie exprime le contentement. Son

regard est doux et non plus triste et sombre. Elle accompa-

gne les autres enfants à la visite de Bicêtre. Revenue à la

Fondation, elle se rend sans peine au réfectoire, mange sans

se faire prier à la grande stupéfaction de tout le monde. Elle

sourit amicalement et répond aux questions qui lui sont

posées. Elle semble toute surprise de se trouver au milieu

d'enfants. On dirait qu'elle sort d'un sommeil profond, d'un

long rêve et qu'elle renait à la vie. Elle chante avec ses

camarades, les accompagne dans les divers exercices. Elle

a mis son costume de gymnastique et s'est déshabillée spon-

tanément, alors que la veille encore il avait fallu l'habiller.

Le soir, elle a mangé seule, a dit bonsoir à tous et parait

heureuse.

9 mat. Marguerite s'habille, se lave, parle, fait la dictée,

travaille iL l'ouvroir absolument comme elle faisait durant

sa rémission de 1899. Elle urine encore au lit, mais est pro-

pre dans la journée. Elle n'a rien perdu de ses connais-

sances primaires. L'amélioration physique s'accentue.

10 ? ) ? a*i. Elle écrit spontanément à ses parents; est

affectueuse avec tout le monde.

14 mai. Le gâtisme a disparu complètement depuis deux

jours. Le sommeil est tranquille et profond. Elle aide à la

toilette des enfants, elle est de plus en plus vive dans tout ce

124 FOLIE DE l'adolescence.

qu'elle fait. Elle n'aime pas songer à sa maladie. Elle parait t

honteuse d'avoir été «si entêtée et si sale.cc

22 mai. - La situation physique ei mentale devient de plus

en plus satisfaisante. Marguerite est portée au sommeil, il

faut la stimuler sans cesse pour qu'elle ne s'endorme pas

dans la journée. Aussi, pour s'y opposer l'emploie- 1- on à

toutes sortes d'occupations. Elle serait paresseuse si on ne la

secouait pas de temps en temps. Elle sourit quand on lui fait

une observation et en tient compte Elle est gaie, polie, douce,

affectueuse, très propre, minutieuse même.

1 ? - 30 juin. - Il ... continue d'aller de mieux en mieux,

prend part volontiers, etde bonnegrace, à tous les exercices, à

fous les travaux scolaires et manuels. Son intelligence est

revenue à son état normal ainsi que sa santé physique. Elle

dit cependant que sa mémoire a diminué et qu'autrefois elle

allait plus vite pour faire un exercice de mémoire. Elle a

toujours besoin d'être stimulée pour n'importe quelle occu-

pation. Elle est très gaie, chante, joue et parait très satis-

faite. Elle ne pleure jamais.

Oc<o)'c.Margucrit''va très bien, mange beaucoup, ne sem-

ble jamais rassasiée, a pris beaucoup d'embonpoint. On l'oc-

cupe aux soins du ménage. Elle participe à tous les exercices.

Elle est très douce, affectueuse,a bon caractère, raisonne bien.

1901. Janvier. La situation se maintient parfaite sous

tous les rapports. II... se fait aimer de toutes ses compa-

nes;elle raisonne et travaille bien. En classe ? elle conserve ce

qu'elle a appris mais avance peu. Sa mémoire est restée un

peu paresseuse et se fatigue vite Bien qu'elle mange conve-

nablement, elle maigrit.

Puberté. Aisselles, poils châtains, abondants; seins déve-

loppés, un peu tombants, mamelons saillants, aréoles brunes.

Ventre glabre. - Pénil couvert de poils abondants (G centi-

mètres de large sur 3 centimètres de haut). Grandes lèvres

peu épaisses, poils abondants ; petites lèvres linéaires. Cli-

toris rudimentairc. IIymen frangé iL l'orifice central petit

admettant il peine le bout du petit doigt.

Juin. - Diminution de l'appétit, soif vive. II... mange machi-

nalement. accuse des douleurs d'estomac et du ventre; elle a

eu delacliarrhée à plusieurs reprises. Elle maigrit. Sa physio-

nomie dénote une certaine souffrance, les yeux paraissent t

s'agrandir. La température s'est élevée à 39° et 39°, 5. Elle a dû

rester à l'infirmerie du 1"' au Gjuin. Durant tout le mois elle a

été déprimée. Elle parle beaucoup, à propos de tout, s'ima-

TUBERCULOSE intestinale. à

gine qu'on l'abandonne parce qu'on ne vient pas la voir aussi

souvent qu elle le désire. Elle a parfois, de nouveau, des cri-

ses de larmes sans motif.

Juillet. Mêmes douleurs gastro-intestinales spontanées,

vomissements et diarrhée. Face pâle, yeux brillants, amai-

glissement. préoccupations, voit tout du mauvais côté,

bavarde, se mêle à toutes les conversations, cherche dispu-

te il ses camarades. Malgré cela, elle continue à travailler à

l'école, il l'ouvroir, au repassage. Les régies n'ont paru ni en

mai ni en juin.

30 juillet. rentre à l'infirmerie, enrouement; ausculta-

tion négative. Le sommet droit est peut-être moins sonore.

Conjonctivite purulente à droite.

10 août. - La conjonctivite est guérie. - Cacodylate de

soude, Ogr. 10 par jour; toniques.- L'amaigrissement conti-

nue.

Septembre. A la période de. préoccupation et de loqua-

cité a succédé une période d'indifférence. Elle participe non-

chalemment aux exercices, ne bavarde plus, se force pour

manger, a un peu de fièvre de temps en temps, transpire

beaucoup.

28 septembre. Amaigrissement progressif. Dans la fosse

sus-épineuse droite, inspiration rude, expiration prolongée.

Continuation du cacodylate, etc.

16 octobre. - Même état de déchéance physique, avec

crainte de tuberculose.

Novembre. - Marguerite devient un peu plus gaie .Sa phy-

sionomie est moins déprimée. Elle cause naturellement,rai-

sonne bien, est redevenue bonne avec ses compagnes, est

affectueuse a même une certaine délicatesse de sentiments.

Elle s'occupe de son mieux, accomplit tout ce qu'elle peut

pour se rendre utile et faire plaisir à tous. La mort de son

père, survenue en octobre, l'a beaucoup affectée mais ni son

physique ni son moral n'ont été modifies. Elle s'est mon-

trée calme et résignée.

Sommeil interrompu parla toux, des sueurs, de la diarrhée,

et des douleurs dans l'estomac et le ventre. Vomissements ali-

mentaires qui la fatiguent beaucoup. En dépit de ces accidents,

H.... conserve sa gaieté et son humeur habituelles.

Décembre. - Puberté. Aisselles : bandes de poils cha-

tains, longue de 6 centimètres et large de 1 centimètre 11 ? .

Seins : 14 sur 10 centimètres des deux côtés. Pénil :

triangle poilu large de 7 centimètres et haut de 9 centi-

mètres. Grandes lèvres, poils longs de 5 centimètres. Petites

lèvrespeu accusées, ainsiduelccapuclion.I-Iymen, même état.

126 Tuberculose intestinale; cachexie.

1902. 10 janvier. - L'affaiblissement augmente. Les symp-

tômes déjà notés persistent. Marguerite ne se lève que quel-

ques heures. La température est peu élevée.- Traitement :

lait, oeufs, côtelettes, poulet, bagnols, champagne, naphtol,

cataplasmes et frictions sur le ventre avec l'onguent hydrar-

girique belladone.

14 janvier. - La malade ne peut plus se lever. Elle a sou-

vent des faiblesses : pâleur de la face, nez pincé, traits tirés.

Ni toux, ni expectoration, signes thoraciques nuls, voix

couverte. Ce qui domine ce sont les symptômes de tuberculose

intestinale.

25 janvier. Malgré le traitement, auquel on a ajouté la

glace, les vomissements continuent.

30 janvier. Moeléna ; moins de diarrhée, abdomen

douloureux ; à la palpation, rien de perceptible. Vomisse-

ments opiniâtres, dyspnée de plus en plus intense mais pas

de signe d'auscultation, pas de crachats, mais une salive

gluante. Amaigrissement considérable. Sommeil léger, elle

est plutôt assoupie qu'endormie. Son caractère devient de

plus en plus susceptible. Elle ne peut supporter personne

autour d'elle ; elle ronchonne lorsqu'on ne peut faire à son

idée. Ses exigences sont sans nombre, voulant à chaque ins-

tant une chose ou une autre. - Même traitement, eau oxy-

génée.

5 février. - Aggravation rapide. Marguerite ne prendplus

que des aliments liquides, en petite quantité, qu'elle rend

aussitôt. Le ventre, en bateau, est devenu douloureux à la

pression. Diarrhée. Le muguet envahit la bouche. Les lypo-

thymies sont fréquentes. Le teint est livide, les yeux enfon-

cés, cerclés de noir, les joues creusées. La physionomie expri-

me une grande souffrance. La voix est voilée, quelques râles

à la base du poumon droit; dyspnée intense.

7 février. - Faiblesse extrême. Gâtisme, aphonie. Lypothy-

mies continuelles. Insomnie, tendance au refroidissement. IL.

couche sur le côté droit, les jambes repliées et éprouve parfois

le besoin de changer de lit.

Vers une heure du matin, elle demande à boire; elle sent que

ses forces s'éteignent : c'est la dernière fois, dit-elle, désire

qu'on l'embrasse parce qu'elle va mourir. Sur ce, elle

rend le dernier soupir, sans agonie, sans cri, sans râle (2

heures du matin, 6 février).

T. aussitôt après la mort z,3 3

- il' ! d'heure après .................. 29°'2

Folie DE l'adolescence.

127

158 * Autopsie. '

au crâne. La dure-mère n'était pas épaissie et n'offrait aucune

fausse membrane. Les différentes parties de la base de l'en-

céphale, nerfs, artères,- tubercules mammillaires. etc.. sont

symétriques. La glande pinéalc n'offre rien de particulier.

Hémisphère droit. Face cor2te.w. - La scissure de Sylvius

est profonde, son extrémité postérieure s'arrête brusque-

ment sans se bifurquer; son rameau antérieur d'abord s'in'7

cline sans- tarder en avant pour continuer sans aucune ligne

de démarcation avec le sillon qui sépare la troisième de la

deuxième frontale : enfin son deuxième anneau postérieur

très long coupe le pied de la deuxième pour ne se terminer

qu'au sillon qui sépare la deuxième de la première frontale.

Le sillon de Rolando est normal ainsi que la scissure perpen-

diculaire externe.

Le lobe frontal est très développé et très plissé. La première

circonvolution est presque dédoublée sur toute sa longueur.

La deuxième frontale est dédoublée sur toute sa longueur et

très sinueuse. La troisième frontale est absolument anormale ?

Pas de plis de passage avec la frontale ascendante. Pas de

continuité entre le pied et le cap à cause de la longueur

insolite du rameau postérieur de la scissure de Sylvius. La

tête de la circonvolution est très volumineuse et excessive-

ment compliquée par plusieurs sillons anormaux. La circon-

- solution préfontale est bordée en avant par un sillon presque

centinu, interrompu seulement par un pli de passage pour la

deuxième frontale ; elle est grêle.

Lobe temporal. Très réduit de volume. Le sillon interpa-

riétal se bifurque en arrivant au niveau de l'extrémité pos-

térieure de la scissure de Sylvius. La pariétale ascendante

est normale.

Lobe pariétal. - La première pariétale est très large, divi-

sée en deux par un sillon transversal. La deuxième pariétale

est très réduite de longueur. Le lobe occipital est de même

normal.

Face interne. La cissure calloso-margina]e est sinueuse,

régulière. Il en est de même de la scissure perpendiculaire

interne. La circonvolution du corps calleux et la scissure

calloso-marginale sont régulières. Le lobe paracenlral est

volumineux. Le lobe quadrilatère est très réduit, long d'à

peine deux centimètres. Le cuneus n'offre rien de particu-

lier.

Face inférieure Le sillon qui sépare la troisième temporale

de la deuxième tempo-occipitale est incomplet, interrompu

REFLEXIONS. -129

dans son extrémité postérieure. La deuxième tcmporo-occipi-

tale est dédoublée. La première temporo-occipitale est nor-

male. La circonvolution orbitaire est normale. Le sillon

crucial est irrégulier. La circonvolution olfactive interne est

deux lois moins large que l'externe. - '

Le corps calleux, le corps strié, la coucheoplique, le ven-

tricule latéral, la corne d'Ammon, le bulbe, la protubérance

et le cervelet, ne présentent rien il signaler. L'hémisphère

droit pèse 5f15 gr. le gauche (i00br.. Le cervelet et l'isthme

pèsent 107 gr., le bulbe et la protubérance 28 gr.

Hémisphère cérébral droit. Face externe. - La scissure

de Sylvius est régulière sauf son extrémité postérieure qui

n'est pas bifurquée.

Réflexions. T. Le père de notre malade a eu des

convulsions de l'enfance ; il avait un caractère emporte,

a commis des excès de boisson et est mort d'un can-

cer de l'estomac. La grand'mère paternelle a égale-

ment succombé à la même maladie. Sa mère est

décodée après avoir présenté une hémiplégie droite

avec aphasie. Une tante maternelle est morte d'un

cancer du foie. Ni d'un côté, ni de l'autre, il n'y

aurait eu, dit-on, d'exemples de tuberculose, mais

les renseignements sur les deux familles sont assez

incomplets.

II. A deux ou trois ans, à la suite d'une rougeole,

Marguerite aurait offert des troubles de la parole ; elle

aurait dû presque réapprendre à parler.

111. La première attaque de folie est survenue,

avant la puberté, Ù 15 ans; elle aurait consisté en une

période d'excitation suivie d'une période de torpeur.

Au bout de quelques jours, IL. était revenue à son

état naturel. Toutefois, elle était moins affectueuse

et triste.

La seconde attaquc (llobutaen septemhre 1808 (H. ans)

et offrit les mêmes caractères. Elle dura une semaine.

Pendant trois semaines, mutisme presque complet.

130 Folie DE l'adolescence.

A cette rémission, d'ailleurs incomplète, succéda une

troisième attaque (octobre 1898), qui obligea la famil-

le à l'interner à l'Asile clinique où elle resta jusqu'au

commencement de décembre et d'où elle nous fût en-

voyée.

Ce qui domine, dans ses troubles mentaux, ce sont

les idées de vanité, de grandeur, entremêlées d'idées

relatives à l'affaire du jour qui préoccupait tout le

monde, une loquacité intarissable, une instabilité con-

stante; au point de vue physique, c'est une agitation

extrême, des gesticulations incessantes, de l'insom-

mie, do l'amaigrissement.

La phase aiguë passée, nous notons des alternatives

de gaité et de tristesse, une tendance à l'isolement.

Une amélioration sensible coïncide avec le retour des

règles, suspendues depuis plusieurs mois; elle s'accen-

tue progressivement, Marguerite travaille à l'école, à

l'ouvroir, est affectueuse, mais se mêle difficilement

aux jeux de ses compagnes. Le mieux continue, tous

les troubles intellectuels disparaissent, l'état physique

s'améliore et, au mois d'août, nous accordons un congé

de quelques jours, en insistant auprès de la famille

sur la nécessité d'une prolongation de traitement, afin

d'affermir la guérison, de modifier le terrain patholo-

gique et d'empêcher le retour de nouveaux accidents.

Ces conseils n'ont pas été suivis.

Depuis son envoi en congé jusqu'à la fin de décem-

bre 1899, elle a demeuré Ù Troyes chez une tante qu'elle

affectionnait beaucoup. A cette dernière date, elle est

devenue très irritable et a maigri d'une manière

effrayante. Elle ne prenait aucune nourriture, dit-on.

Elle disparaissait de la maison et on avait mille peines à

la retrouver. Elle se croyait Reine et faisait des lions

par millions. 11 y avait quatre jours qu'elle était mala-

de quand on nous l'a ramenée à la Fondation. Ces

accidents coïncidaient avec son époque. Sa sceur, qui

SUCCESSION DES attaques. 131

nous a fourni ce complément de renseignements avec

une grande complaisance, nous assure que Marguerite

n'a jamais eu d'amourette et qu'on ignore absolument

la cause de ses différentes attaques de folie.

Quatrième attaque de folie au commencement de

janvier 1900. Du 8 janvier au 1 ? février, ce qui domine

c'est l'excitation. A partir du 3 février, l'agitation fait

place il une période de mélancolie : Marguerite devient

de plus en plus triste, est en proie il des idées noires,

s'imagine qu'on veut l'empoisonner, flaire ses aliments,

ne parle pas, s'affaiblit physiquement, gâte, refuse

de manger et on est obligé de l'alimentcr avec la sonde

pondant quelques jours. En mars et avril 1900, il y a

une atténuation légère et intermittente des symptômes

mélancoliques et de l'état physique. Le 8 mai, il se pro-

duit une métamorphose soudaine et complète : .1\1 argue-

rite a recouvré la raison .

Les quatre attaques cle folie, sauf l'intensité, ont

offert les mêmes caractères : période d'excitation

maniaque, période mélancolique. Elles ont eu une

durée différente : 4 jours, 8 jours, 6 mois et 4 mois et

demi.

IV. La température rectale, prise matin et soir,

durant les cinq premiers jours de l'entrée, selon l'ha-

bitude pour tous les malades, a oscillé entre 36°, 8 et

37°,4 et du 12 au 31 décembre entre 36°, 8 et 3 il, 6.....

Après sa réadmission, en janvier 1900 jusqu'à sa

guérison en mai, la température s'est maintenue en

général entre 37° et 37°, 0. Nous avons relevé une

ascension à 38°,2 le soir du 16 février et un abaisse-

ment matitudinal à 36°,8 et 36°, 6 du 24 mars au 14 avril.

A partir de là jusqu'au 12 juin latempérature a varié de

37° â 37°,G.

V. Pendant le temps qui s'est écoulé entre la guérison

132 FOLIE de l'adolescence.

de sa quatrième attaque de folie jusqu'au début de sa

tuberculose intestinale, la température est, comme

auparavant, restée normale. Le 17 juillet 1901 la

T. R. était à 39°; le lendemain matin elle tombe à

36",8. A partir de là jusqu'au 26 août, elle oscille entre

37 et 38" ; puisjusqu'au ! ¡ 4 septembre entre 38 ? 4 et 36" ;

elle se maintient entre 37° et 38° jusqu'au 27 septem-

bre; alors nouvelles oscillations entre 37" et 38",6.

Jusqu'au 25novembre elle varie de 37 à 38" ; de ce jour

au 10 décembre de 37 à 39" ; du 10 au 23 décembre

de 36e,'1 il 37 ? 1; de ce jour au 21 janvier entre 37. et

38° ; du 21 au 23 entre entre 360 et 37° ; du 25 au 30 entre

36" et 37",8 ; du 31 janvier au 7 février entre 330,8 et

36°, 6. Elle meurt le 7 avec une température de 35°,3.

VI. La tuberculose n'a point paru envahir sérieuse-

ment les poumons. L'auscultation et la percussion ont

été presque toujours négatives. L'enfant n'a jamais

craché, ce quia rendu impossible tout examen bacté-

riologique. L'affection intestinale a eu une évolution

classique. Les détails dans lesquels nous sommes

entrés au cours de l'observation nous dispensent d'in-

sister davantage.

. VIL L'évolution de la puberté semble avoir été natu-

relle Les règles ont débuté sans douleurs il 4 ans.

Elles ont été irrégulières. La première attaque d'aliéna-

tionm entale était survenue deux ans auparavant. La

seconde et la troisième attaques auraient coïncidé avec

une absence des règles. Entre elles, les règles auraient

été régulières.

La quatrième attaque a débuté au commencement

de janvier 1900. Sur le tableau on note à la date du 15

de ce mois «lin des règles», puis une suspension de

février il mai, c'est-à-dire pendant toute la durée

du 4° accès de folie. A partir de là jusqu'au mois

Puberté. -133

d'avril 1901, les menstrues ont été régulières, retar-

dant en général, d'un jour, assez abondantes, durant

ordinairement cinq jours. Elles n'ont point reparu du

mois de mai 19001, époque où sont apparus les pre-

miers symptômes de la tuberculose jusqu'à la mort.

(8 février 1902.)

Les aisselles qui n'offraient que quelques poils

rares en 1898, en étaient garnies en 1901 (0m,06 sur

0 ? 01.').) Le duvet des membres s'était transformé en

véritables poils. Le pénil qui ne présentait de poils

que dans sa partie inférieure en 1898, sur une hau-

teur et une largeur de 0 ? 06 en avril 1899, en était cou-

vert sur une étendue de 0 ? 07 de hauteur sur 0 ? 09 de

largeur en 1901.

Les seins, égaux, bien conformés, après s'être déve-

loppés physiologiquement avaient ensuite diminué de

volume, suivant en cela l'amaigrissement général :

134 FOLIE DE l'adolescence.

1901, sans que rien ne l'explique, elle a maigri nota-

blement (44 kil.) . En janvier, surviennent les premiers

symptômes de tuberculose intestinale, en juillet elle

ne pèse plus que 43 kil. L'amaigrissement s'accentue

progressivement ; elle ne pèse plus que 39 k. 500 en

janvier 1902 et, après la mort, 24 k. 500, soit 37 kil.

au-dessous de la moyenne normale. Cette énorme dimi-

nution de poids donne une idée de la cachexie pro-

fonde dans laquelle elle était tombée.

VI. A notre très vif regret, l'autopsie du cerveau,

seule a pu être pratiquée. Il n'offrait aucune lésion

macroscopique. Les circonvolutions étaient bien

développées, les plis de passage nombreux, les sil-

lons profonds. (Voir la Note complémentaire de la

page 170.)

Bibliographie. Nous profitons de l'occasion qui nous

est fournie par la publication de cette observation pour

rappeler les principales publications que nous avons faites

soit seul, soit avec nos élèves sur la folie des enfants.

z Instabilité mentale avec perversion des instincts (en

collaboration avec Budor). Compte-rendu de 1884, p. 147;

2o Instabilité mentale avec perversions des instincts, com-

pliquée d'hyslèro- epilepsie ; condamnations multiples (en

collaboration avec Leflaive). Ibid., p. 164; 30 Réflexions

sur les deux cas qui précèdent. Ibid., p. 174; - °77a ! ! uct-

nations de la vue, de l'odorat et du goût (en collaboration

avec Courbarien). Ibid., 1885, p. 54; 5° Folie de l'adoles-

cence ; instabilité mentale; idées vagues de persécution;

succube (en collaboration avec Sollier). Compte-rendu de

1887, p. 237;- Go Imbécillité légère; instabilité mentale avec

perversion des instincts et impulsions génitales (Klepto-

manie, onanisme, sodomie, syphilis) (en collaboration avec

Raoult). Compte-rendu de 1888, p. 61 ; - 7° Imbécillité et

instabilité mentale; impulsions génitales (en collaboration

avec Sorel). Compte-rendu de 1891, p. 108; 8o Arriération

Bibliographie. 135

intellectuelle consécutive à une brûlure de la tête; instabi-

lité mentale; délire mystique (en collaboration avec Tissier).

Compte-rendu de 1895, p. 77; - 9° Alcoolisme, instabilité

mentale, crises hystériformes, guérison (en collaboration

avec J. Boyer). Compte-rendu de 1896, p. 218; - 10° Dip-

somanie de l'adolescence. Ibidem, p. 22u ; - 11° Imbécillité

et instabilité mentale avec perversions des instincts. Compte-

rendu de 1897, p. 1 ; - 12° Manie de l'adolescence avec nym-

phomanie (en collaboration avec Katz). Compte-rendu de

1898, p. 63; 13o Alcoolisme de l'enfance, instabilité men-

tale, imbécillité morale (en collaboration avec J. Boyer).

Ibid., p. 84; - '14 Folie de l'adolescence (en collaboration

avec Belin). Compte-rendu de 1899, p. 194.

VIL

Idiotie du type mongolien ; i'

PAR BOURNEVILLE. v

SOMMAIRE. - Père et sa famille, rien de particulier, sauf f

un oncle paternel suicidé. Mère, migraineuse, attaques

de nerfs. Arrière grand-père paternel mort d'apo-

plexie. - Oncle maternel mort de convulsions.

Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de 2 ans (mère plus

âgée). -

Conception rien d'anormal. - Grossesse accidentée par des

ennuis et une- peur; mouvements tardifs du foetus. -

Accouchement naturel. ? Ála naissance, 1500 gr.

Première dent à 7 ou 8 mois ( ? ). Dentition très tardive. -

Propreté à un an. Marche, à 14 mois. Début de la parole,

restée incomplète, à 18.mo ? s.. Jamais de convulsions.

Description de la malade en février 1901 : caractères du type

. mongolien. Tuberculose pulmonaire, mort.

AUTOPSIE. - Granidations tuberculeuses des poumons, du

péritoine et de l'intestin. - Gracilité des circonvolutions,

rareté des plis de passage.

Conn... (Yvonne), née à Cr.. (Seine-et-Oise), le 11 mai 1894,

est entrée dans le service le 18 février 1901.

Renseignements fournis par son père et sa mère le 23

février 1901. Antécédents héréditaires. Père, 45 ans, jar-

dinier, sobre, aucun indice de syphilis. « A 19-20 ans, j'ai

eu une sorte de congestion cérébrale, compliquée de douleurs

dans toutes les jointures, attribuée au froid (purgatif, sang-

sues), guérie en 48 heures. [Son père, 67 ans,- sobre, est en

bonne santé.- Sa mère est morte à 35 ans de fièvre typhoïde.-

Un oncle paternel, souffrant d'une maladie des reins, après

Antécédents héréditaires. 137

avoir essayé de s'asphyxier par le charbon, s'est pendu. Rien

à noter dans le reste de la famille.]

Mère, 47 ans, très nerveuse, pas de convulsions de l'enfance,

sujette, dès l'âge de 11 ans, à des migraines qui ont diminué

d'intensité lors de l'apparition des règles. Elles ont été suspen-

dues pendant la grossesse de sa première fille, compliquée

d'attaques de nerfs consécutives à des ennuis de famille. Elle

aurait même eu une attaque de 2 heures avec perte de connais-

sance : «J'étais comme folle.» Les migraines, qui viennent aux

époques, semblent nettement caractérisées : brouillard épais,

bleuâtre ou rougeatre, étourdissements, nausées sans vomis-

sements, etc. [Père, maçon, sobre, tué en tombant d'un écha-

faudage. Sa mère, enfant assistée, qu'on a connu par

hasard et peu, est morte d'une congestion pulmonaire à 60

ans; elle n'avait jamais été malade.- Grands-parents paternels

morts très vieux, ainsi que la grand' mère maternelle.- Grand-

père maternel mort subitement d'apoplexie.- Sa mère a eu

onze grossesses, dont neuf à terme ; un enfant est mort de

convulsions ; les survivants, trois frères et trois soeurs, sont

bien portants ainsi que leurs enfants. Rien à relever dans le

reste de la famille. Pas de cas analogue à l'enfant.]

Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de 2 ans (mère plus

âgée).

Deux enfants : 1° une fille, 23 ans, très intelligente, ainsi

que son enfant ; pas de convulsions ; 2° la malade.

Antécédents personnels. - Rien de notable à la conception.

Grossesse : contrariétés assez vives dues à la mort de sa mère,

à une maladie de sa soeur, à des démêlés de famille, dans le

deuxième mois de sa grossesse. A la même époque, peur oc-

casionnée par une chute dans une cave : «Je suis tombée

toute droite par la trappe, et ne me suis fait aucun mal ; je

me suis sentie fatiguée, mais n'ai pas été obligée de me cou-

cher. » Mouvements du foetus à 5 mois et demi seulement, ils

étaient intenses et brusques, se produisant surtout la nuit,

cessant complètement pendant quelques heures. « Pour ma

première fille, ce n'était pas la même chose, je les sentais tout

le temps, régulièrement, la nuit et le jour. » - Accouchement

à terme, naturel, en 3 heures, par le sommet ; eaux abondan-

tes, - A la naissance, ni cordon, ni asphyxie ; 1500 grammes :

« « Elle était toute petite. » Allaitement par sa mère ; prenait

130U\E'ILL, Bicêtre, 1901. 10

138 IDIOTIE mongolienne. '

mal le sein ; pas d'accès de cris. « A part son état chétif, elle

était comme les autres enfants. Son développement s'est un

peu accusé à 6 mois, quand on lui a donné, en plus du sein,

du lait de vache.»

Première dent à 7 ou 8 mois; elle n'a pas encore toutes

ses dents. Propre à un an. Début de la marche à 14 mois,

de la parole à 18 mois.

Jamais de convulsions ni autre accident nerveux. Aucune

maladie infectieuse. Caractère doux; pas d'accès de colère;

sentiments affectifs assez développés. - Nul mauvais ins-

tinct ; point d'onanisme. Elle a la manie de cacher les objets,

de les briser, de déchirer les livres qu'on lui donne.

« Elle fait cela, dit la mère, sans méchanceté, comme par

indifférence ». Sensibilité générale et spéciale, rien d'anor-

mal ainsi que la motilité. Grincements de dents. - Ni vers,

ni traumatisme, ni sévices. - Respiration, digestion, régu-

lières. ' '

Elle a été mise à l'école pendant trois semaines : « J'ai été

obligée de la retirer parce qu'elle était le bouffon des autres

enfants qui s'en moquaient, parce qu'elle parlait peu, et la

battaient. » La mémoire serait assez bonne. - Pas de res-

semblance bien nette. La mère attribue l'état de son en-

fant aux ennuis qu'elle a éprouvés pendant sa grossesse et

peut-être aussi à une peur vers l'âge de deux ans et demi à

la suite d'un incendie arrivé chez ses parents. Depuis, elle

serait toujours restée peureuse, surtout dans l'obscurité.

Etat actuel (Février 1901). Teint pâle, sauf les joues qu1

sont rouges, cyanotiques. Physionomie hébétée, regard

sans expression, paupières elliptiques fendues en amande,

nez un peu écrasé. (PL. XIV.)

Tête. Le crâne est court, les bosses frontales sont effa-

cées, les arcades sourcilières légèrement saillantes. Iris

bleus; pas de paralysie des muscles de l'oeil; accommodation

normale. La racine du nez est plutôt aplatie. - Pommet-

tei moyennes. Bouche grande; lèvre supérieure normale,

lèvre inférieure un peu épaissie et constamment pendante.

Langue non épaisse, constamment en dehors de la bouche.

- Prognathisme marqué, exagéré encore du fait que la lèvre

inférieure est très saillante. - Palais et voûte palatine nor-

maux. Dentition irrégulière. - Menton saillant en avant.

Oreilles, en position normale, très petites, 4 cent. de hau-

eur sur 3 cent. de largeur. L'hélix est large dans sa moitié

supérieure (8mm), très étroit dans l'inférieure (4m), L'anthélix

Description DU malade, 139.

n'a rien de particulier. Conque, régulière. Tragus petit,

anti-tragus assez développé. Lobule en partie distinct en

avant, confondu en arrière avec l'hélix. En somme, l'oreille

est plutôt mieux conformée chez elle que chez les autres

mongoliens. Ouïe bonne.

Mesures de la tête.

140 IDIOTIE mongolienne.

Pas de douleurs de tête ( ? ), grincements des dents fréquents,

pas de troubles vaso-moteurs, ni de tics, ni de manies.

L'attention est difficile iL fixer, la vue semble bonne. Il est

difficile de dire s'il en est de même de l'ouïe, car, quand on

l'appelle, on dirait qu'elle ne comprend pas que c'est d'elle

dont il s'agit.- 1/odorat et le toucher sont obtus ( ? ). La

parole est limitée à quelques syllabes : apa pour papa, ama

pour maman, oui, non !

Température à l'entrée.

DESCRIPTION DU cerveau. 141

Hémisphère droit.- La pie-mère, sans aucune granulation

tuberculeuse ni lésion de méningite, s'enlève facilement. Il

n'y a que quelques adhérences très légères au niveau du pli pa-

riétal inférieur. Les circonvolutions sont en général grêles,

surtout celles du lobe frontal. Les plis de passage sont rares,

les sillons peu profonds - Le lobe frontal est très distinct et

séparé de FA complètement, sans plis de passage. Il n'en existe

pas non plus entre PA et FA et par conséquent le sillon de

Rolando est ininterrompu. Les trois circonvolutions pariétales

sont bien dessinées. La scissure parallèle sépare complète-

ment la première temporale de la seconde. La deuxième scis-

sure temporale est interrompue dans sa partie moyenne par

un volumineux pli de passage de '1 ? à Ta. Le lobule de l'insula

présente une digitation antérieure trifurquée, puis deux autres

simples. T envoie à la partie postérieure de ce lobule deux

digitations. A la face interne, mêmes caractères : circonvolu-

tions élémentaires, plis de passage rares, sillons superficiels.

Pas de lésion en foyer, pas d'aspect chagriné, ni foetal. Les

masses centrales, la corne d'Ammon, le ventricule latéral(et

il en est de même à gauche) n'ont rien de particulier. - Le

corps calleux est épais.

Le quatrième ventricule, la protubérance et le bulbe sem-

blent normaux. (L'hémisphère gauche a été réservé pour

l'exmen histologique). '

Cou. Le corps thyroïde (7 gr.) paraît sain; ses lobes sont

égaux. Persistance du thymus réduit aux dimensions d'une

noisette (5 gr.).

Thorax. - Le poumon gauche, qui a trois lobes, est farci de

granulations miliaires et présente des foyers d'hépatisation

dont l'un en suppuration. - Le poumon droit n'a de granu-

lations tuberculeuses que dans son lobe inférieur.- Coeur,

péricarde, cavités, rien. Pas de persistance du trou de Botal.

Abdomen. - Le foie est recouvert de fines granulations.

La vésicule biliaire, extrêmement petite, est cachée par un

prolongement de la face inférieure du foie. La rate a la

forme d'une sorte de cube; elle est verdâtre, non diffluente,

d'un gris marbré à la coupe. - Estomac, reins, sains. - Le

péritoine est le siège de quelques rares granulations. (Aucun

symptôme péritonéal pendant la vie). L'appendice vermi-

culaire, qui occupe sa position naturelle, mesure 9 cent. de

long; il est sain. L'incision du ccecum, du gros intestin, de

l'iléon, montre une injection assez prononcée de la muqueuse

- 14'2 ' Idiotie mongolienne .

et quelques granulations tuberculeuses. Il n'y a pas trace de

lésion des plaques de Peyer (Etat typhoïde). Les organes

génitaux étaient normaux. Le péritoine externe offrait quel-

ques granulations.

Poids des Organes.

Symptômes. 143

mouvements du foetus auraient été très différents de

ceux de l'enfant précédent. En pareil cas, nous essay- i-

ons toujours de faire faire la comparaison par la mère.

C... était chétive ,il la naissance, ce qui est fréquent

dans cette forme d'idiotie. Elle a été en retard pour

la dentition, la marche, la parole qui ne s'est jamais

développée complètement.

IV. La température rectale, prise pendant les cinq

jours qui ont suivi son entrée avarié entre 3G,,8 8 et 37°, 3.

Voici ce que nous avons noté dans quelques autres : cas

chezDaut. de 36°, a 37°,2; - chez Laust. de 36°,8 à

37°,5; chez L... de 36°,8 à 3 7°,3; - chez Mûre... de

3Ce,8 à 37°,4 ; chez Cott... de 36°,8 il 37°,3 ; chez

Brèg.. de 37° v 3 7°,5 ; chez Dourn... de 370, n, 37°,3;

- chez Van de Cast... de 37°,1 a 37°,3. - D'où il suit

que, en général, chez les mongoliens, la température

est plutôt au-dessous de la normale, mais à un degré

bien moindre que chez les myxcclémateux.

V. Tandis que la glande thyroïde est absente chez

les myxoedémateux infantiles, elle existe chez les

mongoliens. Elle pesait 7 gr. chez Conn... ; 6 gr. chez

Lous... ; 12 gr. chez Lcrc.... Chez une quatrième

Dant... nous n'avons pu examiner que le cerveau.

En ce qui concerne le thymus, les mêmes malades

nous ont donné : Conn..., 5 gr. ; - Loust..., 5 gr.; -

Merc..., 5 gr. La voix est un peu masculine, un peu

aigre et se rapproche de celle des myxoedémateux.

VI. La taille de Conn.... était de 1 ? 09, c'est-à-dire

inférieure de 7 c. à la taille moyenne de son âge. C'est

à peu près la règle chez les idiots du type mongolien,

ainsi qu'en fait foi le tableau suivant :

114 i

Idiotie mongolienne.

IDIOTIE mongolienne. 145

« Elle est relativement rare. Nous n'en avons quo

huit cas dans notre service (août 1901) : quatre garçons

et quatre filles.

« La totalité des cas que nous avons observés ne

dépasse pas une vingtaine. En voici les caractères

principaux : tête petite, arrondie, parfois un peu bra-

chycéphalc : les diamètres antéro-postérieur et trans-

versal sont à peu près égaux. Physionomie rappelant

celle des Mongols, accusée par les caricatures : les

enfants du service ont désigné un de nos mongoliens

le plus typique, sous le nom de «chinois».

« Le front est bas. Le bord supérieur de l'orbite, les

sourcils et les paupières sont plus obliques que nor-

malement, clans une certaine mesure elliptiques, en-

dues en amande. [Les paupières sont comme bridées,

suivant l'expression de la mère de l'un de nos enfants.

Elles présentent parfois un repli semi-lunaire de la

peau au-devant de l'angle interne des yeux (épican-

thus), qui contribue encore à faire paraître plus large

la racine du nez. ]

Presque tous sont lymphatiques, ont une blépharite

chronique. Le pont du nez, la racine, est plus large

qu'al l'état naturel. Cependant, chez l'un de nos mala-

des, les sourcils, abondants, se rejoignent à la racine

du nez, qui est étroite.

« D'après les auteurs anglais, le nez est court et

épaté. Ce caractère n'est pas absolu, car chez plusieurs

de nos mongoliens le nez est légèrement aquilin, chez

les autres court, mais non épaté. [Différent d'ailleurs

du nez camus des myxoedématcux.] La bouche, plutôt

petite, est d'habitude entr'ouverte, laissant voir, plus

ou moins, la langue qui est hachurée. La dentition est

tardive.

« Dans son ensemble la figure est plate. Les joues ont

une coloration rouge, un peu vineuse. [Il en est de

même quelquefois du menton.] Les oreilles sont peti-

- HG IDIOTIE mongolienne.

tes en général bien conformées [mais offrant des par-

ticularités de détail, sur lesquelles nous reviendrons.]

La tête est d'ordinaire penchée.

, «Les mains, idiotes, et les pieds sont courts et lar-

ges. Les testicules, dit-on, sont petits, non descendus

ou il y a une cryptorchidie unilatérale. D'après nos

observations, ce ne serait pas la règle. En effet, trois de

nos mongoliens ont un développement sexuel en rap-

port avec leur âge, verge et testicules. Chez un seul,

il y a cryptorchillie unilatérale droite (1). Chez tous, le

ventre est gros, disproportionné, [sans hernie ombili-

cale ou inguinale comme chcz les myxédématcux. ] Il

.y a un arrêt de développement du corps (nanisme).

. ce Sous le rapport intellectuel, ces idiots ne se distin-

guent pas notablement des autres et présentent à peu

près tous les degrés de l'idiotie. Leur caractère est

plutôt sournois; leur éducabilité, relative.» ,

L'observation de Conn ? les commentaires dont nous

l'avons accompagnée, complètent dans une certaine

mesure ce résumé clinique.

Bibliographie. Nous n'avons pas la prétention de don-

ner ici une bibliographie complète de la question, mais

seulement l'indication des travaux les plus importants, à

notre connaissance.

Ka ! mu/t Idiocy ; Report of a case with autopsu, by John

1RASEP. VVilh notes on sixty-lwo cases, by Arthur 1lIITCIjELL

bum. of mental Science, vol. XXII, July 1877, p. 169-179).

Avec un portrait, une planche du crâne, de la tête, du pied

et une planche du cerveau. Ces deux mémoires constituent

peut-être l'ensemble le plus complet sur l'idiotie mongo-

(1) Une seule de nos malales était réglée, For ? depuis t'age de Il ans et

pemi. Les mongoliennes différent à cet égard des m ? lxoedmnt; ! llses.

IDIOTIE mongolienne. 117 î

lienne. Talford Smith, Pediatrics, l" oct. 1896; - John

Thomson, Certains forms of Imbecillity in Infancy (The

Scot, Met, and 8urg., march 1898); Archibald Garrod,

Trans. clin. Soc. London, 1899; A. W. Wilmarth, Report

ou th.e examination of 100 or Feeble-Minded chil-

dren; - Fournier (A.), Les affections paï·asyphil., 489'{ ; z

Shuttleworth, Congrès inter. de médecine de 1900 (section de

psychiatrie, p. 159); Winston Hall, A case of Mongolism

(pédiatries, 1901, p. 445/

VIII.

Etude histologique de deux cas d'idiotie

type « Mongolien »;

Par PHILIPPE et OnERTIIUR.

L'un des cas (Lou..) a été étudié complètement à l'aide de

toutes les techniques habituelles. L'examen a porté sur

une série de morceaux prélevés dans tous les points de

l'écorce cérébrale. Le deuxième cas (Dou..) a été examiné

à l'aide d'un moins grand nombre de préparations.

Disons tout d'abord que les lésions sont essentiellement

diffuses, s'étendant aussi bien à la substance blanche qu'à

la substance grise et aux méninges. Partout, elles sont du

même type. Toutefois, elles sont notablement plus accusées

au niveau de l'écorce frontale, au niveau de la région

pariétale postérieure, aux environs du pli courbe, et il la

région occipitale (surtout scissure calcarine et circonvo-

lutions occipitales internes).

Les types lésionnels sont très analogues dans les deux

cas, avec une moindre intensité dans le cas de D... que

dans le cas de L...

1° Méninges. - A l'état frais, les méninges molles

étaient légèrement épaissies et plus opaques qu'à l'état

normal.- Examinées au microscope, elles sont plus riches

en vaisseaux; leur adhérence avec le tissu nerveux sous-

jacent est faible, aussi bien sur le dôme des circonvolutions

que dans l'intérieur des sillons. Après décorlication, il n'y

a pas d'érosion de la substance grise, bien que la face pro-

fonde de la pie-mère se montre légèrement tomenteuse et

IDIOTIE mongolienne-. llg

hérissée de fins tractus conjonctifs. L'examen histologi-

que fait voir qu'il s'agit d'une méningite fibreuse légère

envoyant dans la région sous-pie-mérienne des prolonge-

ments nombreux et de fins vaisseaux. Au sein des mailles

formées par le tissu conjonctif des méninges, on rencontre

un certain nombre de noyaux de cellules fixes, mais relati-

vement peu d'éléments migrateurs. Nulle part, on ne voit

de nodules lymphocytaires autour des vaisseaux, ni les

traînées de cellules embryonnaires, si habituelles dans

certains types de méningo-encéphalites de l'enfance.

Du côté des vaisseaux méningés, il y a peu de chose à

signaler : pas d'endartérite, ni d'cndophlébite, mais sim-

plementune scléroseportant surtout sur la tunique externe,

quelquefois avec aspect hyalin des parois. Nulle part dans

leur voisinage, on ne constate de phénomènes diapédéti-

ques ou franchement inflammatoires.

2° Ecorce CÉRÉBRALE. - L'écorce, ainsi qu'on peut le

voir même à l'oeil nu sur les pièces convenablement

imprégnées par les sels de chrome, est amincie ; cet amin-

cissement s'étend aussi à la substance blanche : il s'agit

donc d'une véritable micro(J)J1'ie sans sclérose cérébrale.

La région sous-pie-mérienne. outre sa pénétration

abondante par les tractus scléreux issus de la méninge et

déjà signalés plus haut, présente un épaississement marqué.

La substance grise de l'écorce doit être étudiée succes-

sivement par rapport à l'état : a) des cellules nerveuses ;

b) de son réseau nyélinique ; c) de son stroma név1'o(Jli-

que et de ses vaisseaux.

a) Cellules nerveuses. - Outre l'amincissement des

couches, il existe une raréfaction notable des cellules

encore plus considérable qu'il ne paraît, étant donnée

l'atrophie de celles-ci. En effet, les cellules sont petites,

presque d'égale dimension dans toutes les régions, souvent

arrondies, quelquefois fusiformes (apparence de neuro-

blastes), si bien qu'il faut une certaine attention pour les

distinguer des éléments névrogliques.

La méthode de Nissl permet de constater la fréquence

d'un état de surcoloration du noyau (chromophile), et sou-

vent sa déformation avec plissement de ses contours. Le

150 Examen histologique DU cerveau.

nucléole est bien délimité et très visible. Le protoplasma-

est peu riche en prolongements ; il contient très peu d'é-,

léments chromatophiles, si bien qu'il s'agit parfois d'une

véritable achromatose, même pour les grandes cellules

pyramidales. Nulle part on ne découvre de surcharge pig-

mentairc des cellules.

L'agencement des cellules les unes par rapport aux

autres est assez régulier ; les bouleversements et les hé-

térotopies de ces éléments sont ici tout-à-fait exception-

nels. Les lésions cellulaires semblent atteindre leur maxi-

mum dans les circonvolutions pariétales inférieures et

au niveau du pli courbe.

b) Réseau myélinique. Le réseau d'Exner, quoique très

grêle, n'a nulle part disparu, mais ses fibres sont d'une

extrême ténuité, et cette minceur des gaines parait bien

être la caractéristique des lésions myéliniques, ici consta-

tées. Les autres couches de fibres tangentielles, sous-cor-

ticales et intra-corticales, sont moins bien représentées

que le réseau d'Exner. Le tableau histologique est donc,

encore dans cet ordre d'idées, bien différent de celui de la

paralysie générale. Les fascicules des fibres radiaires sont

également peu fournis; de plus, leur direction est souvent

assez irrégulière.

Névroglie et vaisseaux- La trame névroglique est peu

visible, et sa fibrillation peu nette; nulle part on ne ren-

contre de cellules-araignées avec leurs volumineux pro-

longements. Par contre, les noyaux névrogliques sont

nombreux, surtout dans le voisinage des cellules ner-

veuses et principalement dans les couches les plus infé-

rieures de l'écorce, cela sans neuronophagic évidente; les

noyaux névrogliques sont pour la plupart petits et riches

en chromatine, sans protoplasma visible.- Les vaisseaux

ne sont nombreux qu'au niveau des dernières assises cel-

lulaires corticales, et leur aspect est identique à celui que

nous allons rencontrer dans la substance blanche.

Substance blanche. Celle-ci présente partout un type

IDIOTIE .mongolienne. 151

uniforme. Le centre ovale des circonvolutions apparait,

par la coloration de Weigert-Pal, beaucoup moins foncé

qu'à l'ordinaire; c'est une décoloration massive, uniforme

et non en foyers. Il était d'ailleurs aisé de prévoir cette

formule, étant donnée la rareté des fibres radiaircs de

l'écorce. Prises individuellement, ces fibres sont, comme

plus haut, d'une excessive minceur : c'est encore l'indice

d'un arrêt de développement, d'une véritable dystrophie,

encore démontrée par toutes les autres lésions.

Entre ces fibres, la névroglie fibrillaire est rare; nul

indice de sclérose au début; les noyaux sont en grand

nombre, quelques-uns sont entourés de protoplasma légè-

rement granuleux.

L'abondance des vaisseaux caractérise la substance

blanche; leurs parois sont très scléreuses ou hyalines.

Ce qui. frappe encore davantage que le nombre des vais-

seaux, c'est la dilatation de leur gaine adventice, qui

atteint ici des proportions inaccoutumées. -.

Ainsi, il n'est pas possible de constater dans ces deux

cas la moindre lésion permettant de les rattacher aux

autres types de méningo-cncéphalites de l'enfance, pas

plus qu'on ne peut, s'appuyant sur la rétraction apparente

dcs circonvolutions, songer à la sclérose cérébrale atro-

phique, même à son début; l'absence de sclérose névro..

glique fibrillaire suffirait à elle seule, croyons-nous, pour

permettre d'écarter ce diagnostic.

En résumé, il convient plutôt de penser à un processus

dégénératif, avec lésions dystrophiques très avancées. Pour

le dire dès maintenant, à ce processus se rapportent,

croyons-nous, bien des cas d'idiotie dite essentielle, et

même beaucoup de cas désignés improprement sous l'ap-

pellation de méningo-encéplialites, Cette dernière dénomi-

nation ne saurait s'appliquer à nos cas, puisqu'elle préjuge

nécessairement un processus inflamm atoire qui ne nous

parait pas avoir existé ici, au moins si l'on s'en rapporte aux

lésions ordinaires des méningo-encéphalites.

[Nous publierons les obs. deD.. etdeL.. dans le Compte-

rendu de 1902.] - ;

Porencéphalie vraie de l'hémisphère gauche ; pseudo-

porencéphalie des deux hémisphères ;

Par BOURNEVILLE ET MOREL.

Sommaire. Père, déserteur, envoyé aux Cies de discipline,

. divorcé; nombreux excès de boisson; caractère violent.

- Tante, convulsions de l'enfance. Une cousine aliénée,

excès de boisson. - Renseignements insuffisants sur la

famille. Mère, rien de particulier. Grand-père

. maternel, excès de boisson.

[Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de 10 ans.

Première dent à 13 mois. Dentition complète à deux ans ?

Parole, marche, propreté nulles. Convulsions à 15 jours.

Aucune maladie infectieuse avant l'entrée. - Rubéole

en 1901. Hypothermie <34<', 2). mort.

-Autopsie : PSelldO-rJOrBnCé711a118 bilatérale. -Porencéplzalie

vraie à gauche. -

Bouch..... (Jeanne), née à Marval (IIte-Vienne), le 13 avril

1893, est entrée le 5 avril 1901, à la Fondation Vallée.

. Antécédents héréditaires. (Renseignements fournis par la

mère). - Père, 39 ans, employé de commerce. N'a jamais 's

été malade dans son enfance, n'aurait pas eu de convulsions

(une de ses soeurs en a eu). Engagé volontaire à 18 ans, il a

fait son service dans l'artillerie à Angoulême et a déserté

' « parce qu'il s'ennuyait au régiment ». Repris par les gendar-

mes, il fut envoyé aux compagnies de discipline jusqu'à l'ex-

piration de son temps de soldat. Rentré dans la vie civile, il

- reprit son ancien métier d'employé de commerce et se maria

à 30 ans à Limoges. A cette époque il se met à boire du vin,

des liqueurs et du rhum; pas d'absinthe; il a des céphalalgies

fréquentes, attribuées à la boisson. Après un an de mariage

ses habitudes alcooliques deviennent plus fréquentes ; ivre

Idiotie complète. 153

tous les soirs, violent et emporté il bat sa femme à différentes

reprises, et pour les motifs les plus futiles ; brise son mobi-

lier et commet « mille folies ». Entre ses périodes d'ivresse il

semble « intelligent, mais dépourvu de jugement. » Fumeur

sans excès. Pas de maladies vénériennes ; pas d'affections

cutanées. Très paresseux, il se fondait sur ce que sa femme,

institutrice, gagnait quelque argent, pour ne rien faire. Pous-

sée il bout, sa femme renonça à la vie conjugale qui était

devenue impossible et habita dés lors l'école où elle ensei-

gnait, à St. Yriex. Un jour, pendant une courte absence qu'elle

fit pour aller voir sa famille, son mari pénétra par ruse dans

l'école, enleva tout le mobilier et le vendit pour se faire de

l'argent. Il renouvela cet exploit quelques mois plus tard,

mais compliqua son cas de vol avec effraction. Après 3 ans

de ménage, il avait alors 34 ans- il s'engagea dans la Légion

étrangère, où il sert encore actuellement. Depuis lors sa

femme ne l'a revu qu'une fois, lorsqu'elle alla en Afrique

présenter sa demande en divorce.

[Son père est mort il 63 ans, depuis le divorce, on ne sait de

quelle affection. Contrairement à son fils, il était sobre et de

caractère doux. - Sa mère était sobre, douce, pas nerveuse;

ce sont les seuls renseignements qu'on ait sur elle. Aucun

renseignement sur les grands parents, tant parternels que

maternels. - Pas d'oncles parternels. Quatre tantes pater-

nelles, sur lesquelles on n'a aucun renseignement, sauf que

l'une d'elles, veuve d'un médecin, et de bonne santé, en a eu

deux filles. La première aurait présenté des signes d'aliéna-

lion mentale intermittente : elle « déclamait sans raison,

faisait des discours », elle buvait abondamment du vin et des

liqueurs. La seconde était normale, sobre, et n'a jamais

présenté d'accidents nerveux. Ni l'une ni l'autre n'ont eu

des enfants. Pas d'oncles paternels, pas de tantes mater-

nelles.

Un frère, capitaine à Valenciennes, est sobre, bien portant,

pas de renseignements sur les convulsions ; il est marié et aun

garçon, sur lequel il n'existe aucun renseignement. Quatre

soeurs, deux sont mariées iL des sous-olliciers; elles ont une

bonne santé ; l'une à un enfant qui n'a jamais eu de convul-

sions. - Deux autres soeurs, célibataires, n'ont rien de

notable. La mère de l'enfant qui fournit les détails, dit n'avoir

jamais bien connu la famille de son mari. Elle ne saurait dire

s'il y a eu des aliénés, des épileptiques, des idiots, etc., etc.]

Mère, 30 ans, institutrice depuis de '21 ans, a eu, à o

Bourneville, .Bicêtre, 1901. Il

15 Il Antécédents héréditaires.

ans, une fièvre typhoïde bénigne, sans délire ni accidents

cérébraux. Pas de convulsions, pas de chorée, pas de rhuma-

tismes, pas de migraines, pas le moindre accident nerveux.

Caractère doux. Sobre, elle boit habituellement de la bière.

[Son père, est mortà.61 ans, en novembre 1901, d'une tumeur

au cou. C'était un grand buveur « mais qui portait bien la

boisson et avait bien conservé toute sa raison ». Sa mère,

vivante, est âgée de 61 ans, de caractère doux, elle n'a jamais

eu d'accidents nerveux. - Grand père paternel, mort à 77 ans,

n'était ni dément, ni paralytique. - Grand mère maternelle,

morte d'une affection cardiaque. Pas de renseignements

sur les grands oncles et les grandes tantes. - Pas d'oncles

paternels. Deux(a)i(espater)ees, bien portantes, mariées,

ont des enfants bien portants qui n'ont jamais eu de convul-

sions. - Un oncle maternel s'est suicidé à la suite de

mauvaises affaires. Il a laissé deux enfants normaux, sans

convulsions. - Pas de tantes maternelles.

Pas de consanguinité. - Différence d'âge de près de 10

ans (père plus âgé).

Enfants : un seul, notre malade. Pas de fausses couches.

Conception. A eu lieu après un mois de mariage. Le père

n'était pas ivre : « quand il avait bu il était comme une masse

inerte u. La mère ne présentait rien de spécial. Il n'y avait dans

le ménage, à cette époque, ni misère, ni mauvaise entente.

Grosesse. A peu près normale ; pas de coups. pas de chu-

tes, mais des émotions fréquentes pendant toute la grossesse,

provoquées par les scènes que lui faisait constamment son

mari toujours ivre. Pas de convulsions, peu de vomissements,

et seulement pendant le premier mois, pas d'albuminurie. A

4 mois et demi, elle sentit son enfant remuer, les mouvements

étaient rares et faibles.

Accouchement a terme, après cinq heures de travail ; il fut

facile, ne nécessita ni le concours d'un médecin, ni l'interven-

tion du chloroforme. Les eaux « étaient de quantité normale

la sage-femme l'a dit.»

Naissance. L'enfant naquit par le sommet ; elle avait un

circulaire du cordon autour du cou, et se présenta en asphyxie

bleue qui ne dura que quelques instants. La sage-femme «lui

donna une violente claque, et elle respira largement». C'était

une très belle enfant.

Allaitement. La mère essaya de nourrir son enfant au sein,

mais comme, au début, elle n'avait pas de lait, elle lui donna

Antécédents personnels. 155

un biberon rempli de lait de vache ; l'enfant fut ainsi nourrie

pendant tout le premier mois. Au bout d'un mois, la mère

ayant du lait, laissa le biberon de côté, et donna le sein jusqu'à

la fin du 13e mois. Durant les quinze premiers jours, l'enfant

cria peu, mais ensuite elle eut des accès de cris, surtout

nocturnes, qui se répétèrent pendant trois ou quatre mois,et

qu'on attribua à des coliques.

A 15 jours, elle eut ses premières convulsions : « ses

petits doigts remuaient, ses paupières battaient, sa bouche

était contorsionnée, ses bras et ses jambes -n'étaient pas

raides» ( ? ), Les mains seules remuaient, et surtout la main

droite qui dans la suite fut paralysée. Ces convulsions durè-

rent dix-huit heures. On put faire boire à l'enfant, à l'aide

d'une cuiller, un peu de tilleul. On ne sait si les mâchoires

étaient serrées.

A treize mois, l'enfant perça sa première dent; il. deux ans,

sa première dentition était complète. Sa deuxième dentition ne

débuta guère qu'à huit ans. Pendant son enfance, elle n'eut

aucune des maladies habituelles aux enfants (rougeole,

variole, varicelle, scarlatine, oreillons, diphtérie, coqueluche).

Son caractère était enjoué, mais elle ne parla jamais, ne

marcha pas et ne fut jamais propre.

L'enfant qui, avant les convulsions, était grosse, et bien

remuante ( ? ) des bras et des jambes, sembla se porter aussi

bien, après cette crise. On ne remarqua pas de paralysie , on

assure même qu'à huit mois elle essaya de marcher ( ? ). Ce n'est

que vers le 15° mois qu'on s'aperçut que le côté droit (bras et

jambe) était moins développé que ie coté gauche. L'enfant ne

pouvait se tenir debout, elle avait les jambes molles. Vers le ? ))" mois les jambes prirent de la raideur. De même le bras

droit devenait inhabile et l'enfant saisissait de sa main gauche-

la cuiller ou le gâteau qu'on lui présentait, pour les porter à

sa bouche. Elle portait le bras droit plutôt allongé, mais la

main était fléchie sur l'avant-bras, le poignet raide, le coude

un peu diflicile à mobiliser; pas de tremblement dans le mem-

bre supérieur droit qu'elle pouvait élever un peu au-dessus

du plan du lit. A la jambe droite, des phénomènes analogues

s'observaient, mais la raideur était moins marquée qu'au bras

correspondant. La raideur s'est manifestée dans la jambe

droite entre le 20° et le 2'Ic mois. C'est à cette époque que les

jambes se sont croisées, tous les efforts de la mère n'arrivaient

pas à obtenir une position régulière, malgré l'attention cons-

tante qu'y apportait la mère : «je les décroisais d'une façon,

elle les croisait d'une autre ». Assez fréquemment elle était

156 Antécédents personnels.

prise d'un tremblement convulsif qui durait 10 h 15 secondes

et quelquefois la faisait rire convulsivement. Le côté droit, bras

et jambe, a toujours été plus raide que le gauche.

Les pieds étaient un peu tournés en dedans, mais cette

difformité s'accentua beaucoup quand, vers le 20e mois, on

essaya de la faire marcher, le pied droit s'incurva plus que le

gauche.

Elle ne manifestait, par aucune initiative, l'état de son intel-

ligence. Toutefois elle semblait préférer être assise sur les

genoux de sa mère que sur ceux de sa grand'mère. Elle

aimait les caresses, mais ne les rendait pas ; elle aimait qu'on

la fit jouer, mais ne jouait pas spontanément. Elle était vive-

ment impressionnée par les sons musicaux : un air gai la

faisait rire, un air triste provoquait ses larmes.

Elle n'avait aucun mauvais instinct, n'était ni gourmande,

ni voleuse, ni colère, ne se livrait pas à l'onanisme. A la suite

de ses convulsions, elle eut aussi des frayeurs survenant par

accès. «Elle avait comme peur, criait, se retournait brusque-

ment et ne se calmait que quand je la prenais dans mes bras. »

Ces frayeurs, qui revenaient tous les mois, furent au maxi-

mum vers l'âge de 5 à 6 ans ; elles s'atténuèrent dans la

suite.

L'enfant ne présentait ni troubles vaso-moteurs, ni change-

ments brusques de coloration ; sa mère affirme que la fonta-

nelle, qui avant les convulsions battait sensiblement, était

devenue dure et ne battait plus après cette crise.

Ces convulsions du 15° jour furent les seules qu'on observa

chez Jeanne Bouch.. A mesure qu'elle grandissait, sa mère

constatait plus nettement sa paraplégie et le développement

presque nul de son intelligence ; aussi se décida-t-elle à placer

l'enfant, qui entre le 5 avril 1901 à la Fondation Vallée. A

son entrée dans le service, l'enfant présente une légère éléva-

tion de la température.

Température rectale à l'entrée.

Description DE la malade.

157

châtain foncé. Pas de cicatrices, pas de ganglions engorgés.

Le crâne est brachycéphale, symétrique; les fontanelles sont '

soudées. Le visage est rond, les arcades sourcilières assez

saillantes, pas de blépharite. Les yeux sont normaux ; ni

exophtalmie, ni strabisme. Iris gris clair. Impossible d'avoir

des renseignements sur la chromatopsie, l'acuité visuelle,

étant donné l'état d'idiotie de l'enfant.

Le nez est aquilin et normalement conformé, les pommettes

légèrement saillantes, les joues moyennes et symétriques.

La bouche et les lèvres n'offrent rien à noter. Voûte palatine

abaissée ; la suture des apophyses palatines des deux os

Fig. 10.

158 Description de la malade.

maxillaires supérieurs est très marquée et forme un raphé

saillant. - Les dents de la mâchoire supérieure sont pour

la plupart cariées : ce sont des dents de la première dentition;

comme dents définitives, il n'y a que les incisives médianes,

une distance de Om,003 sépare ces deux incisives. A la mâchoire

inférieure la dentition estpresqae normale ? Le menton est

arrondi, sans fossette. - Les oreilles sont volumineuses,

assez écartées du crâne, surtout l'oreille droite, mais par

ailleurs bien conformées.

Cou. Le corps thyroïde n'est pas perceptible à la

palpation.

Le thorax est bien conformé ; pas de nouures costales

rachitiques ; sternum bien incurvé. Les seins sont iL peine

indiqués. Le coeur et les poumons sont normaux.

L'abdomen est petit, non douloureux; rien à signaler quant

au foie, il la rate ou aux fosses iliaques.

Les membres supérieurs, grêles, sont cyanoses à leur extré-

mité (mains et partie antérieure des avant-bras) le membre'

supérieur droit est contracturé, le coude est appliqué contre

le corps, l'avant-bras fléchi à angle aigu sur le bras et la

main dans une flexion sur l'avant-bras, un peu inférieure à

l'angle droit. Cette attitude est presque permanente, les

mouvements volontaires sont très peu marqués, néanmoins

par un effort prolongé on arrive aisément à réduire sans

exception toutes ces attitudes vicieuses. Le membre supérieur

gauche ne présente pas d'attitude vicieuse, mais les muscles

n'ont pas leur souplesse normale. Les mouvements volontai-

res de ce côté sont possibles, avec une grande amplitude.

Les membres inférieurs sont cyanosés il leur extrémité

(pied et partie inférieure de la jambe). Les cuisses, fortement

entrecroisées à leur partie moyenne, la droite passant sur la

la gauche, sont fixées d'une façon constante dans cette atti-

tude vicieuse. La cuisse droite est dans un état d'abduction

plus marqué due celui de la cuisse gauche. Les deux cuisses

sont fléchies sur le bassin; les jambes fléchies sur les cuisses,

les deux pieds en varies très marqué : ces attitudes vicieu-

ses complètement réductibles au pied et au genou, ne le sont

pas à la hanche. La marche est absolument impossible. Les

réflexes sont très exagérés. La sensibilité générale existe,

mais il est difficile d'en apprécier les divers modes, car

l'enfant pleure sans cesse.

Corps glabre y compris le pénil et les grandes lèvres, bien

formées ; petites lèvres bien dessinées.

Dès les premiers jours de son séjour la Fondation Vallée,

Rubéole; hypothermie. 159

on constate que l'enfant est atteinte d'idiotie complète. Elle

ne marche pas. Elle est gâteuse de nuit et de jour ; elle sait

à peine manger avec l'aide de ses doigts ; elle ne peut se

servir d'aucun objet de table, et quant à ses aliments ils doi-

vent être de consistance molle pour qu'elle les avale, le mau-

vais état de sa dentition ne lui permettant qu'une mastication

insuffisante. Du reste, les digestions sont faciles ; l'enfant ne

vomit pas, ne rumine pas ; les selles sont régulières sans

constipation, ni diarrhée. L'enfant qui a été très gâtée chez

elle est exigeante, il faut la tenir sans cesse occupée, la cares-

ser, la promener dans les bras, chanter, pour calmer ses cris

et ses pleurs, qui ne cessent pour ainsi dire, quoiqu'ils ne

soient pas motivés; l'enfant sourit rarement. Le soir avant de

s'endormir, elle a fréquemment des crises de colère ; son

sommeil est parfois entrecoupé de réveils brusques, de pleurs

et de cris. On ne l'a jamais vu se livrer à l'onanisme.

L'enfant ne saurait procéder à sa toilette, ni même y parti-

ciper dans une mesure quelconque ; elle s'y prête à contre

coeur, n'aime pas à être débarbouillée, et pleure dès qu'on la

nettoie.

Elle a la manie de se mordre l'extrémité des doigts jusqu'à y

faire des excoriations quand elle se met en colère. Elle parait

avoir des maux de tête de temps autre : elle cherche à

appuyer son front contre le mur, ou sur la table, sur un siège.

Brusquement, ses pommettes deviennent très rouges, puis,

l'instant d'après, le teint reprend la coloration mate qui lui

est habituelle.

L'attention de l'enfant est facile à fixer; sa vue est bonne ;

son ouïe est spécialement bien développée; la musique vocale

ou instrumentale la fait sourire et la rend joyeuse. Elle ne fait

pas de différence entre les bonnes et les mauvaises odeurs,

mais elle distingue un aliment sucré d'un aliment Salé, et

parmi les liquides elle préfère avant tout la bière qu'elle boit

avidement. Tel était l'état de l'enfant au mois d'avril 1901 ; le

- 22 du même mois, elle quitte la Fondation Vallée pour passer

il l'Isolement avec une éruption suspecte.

1901. 27 avril. Entre à l'isolement pour éruption rubéoli-

forme assez discrète ; au maximum à la face antérieure du

thorax, mais disséminée surtout le corps. Pas de température.

Pas d'angine, pas de vomissements. Conjonctives rouges,

pas de catarrhe nasal.

28 avril. L'éruption mieux sortie et plus colorée couvre les

membres inférieurs, et commence à pâlir au niveau du visage.

160 Rubéole; Hypothermie.

Toujours pas de fièvre. L'état général est bon ; légère diarrhée;

état d'intégrité absolu des poumons.

2 mais Disparition complète de l'exanthème. Il s'agit

d'une rubéole bénigne, dont l'enfant ne garde actuellement

que de petits abcès très superficiels au niveau des fesses.

15 mai. L'enfant reste à l'isolement en convalescence. Pas

de fièvre, rien à signaler, si ce n'est un amaigrissement assez

marqué.

30 mai. Ce matin il 6 heures, l'enfant 1new t brusquement

sans avoir présenté, à aucun moment, de la fièvre ou un

symptôme quelconque. Hier l'enlant avait mangé avec appétit

deux potages gras et deux oeufs frais ; elle avait bu quelques

cuillerés d'une potion de Todd. Ce n'est que vers minuit qu'elle

a paru souffrante; la surveillante fit prendre sa température :

on nota 34°, 2; cette hypothermie fut constatée avec deux

thermomètres et par deux personnes différentes. C'est le

seul symptôme qu'on ait constaté. A .1 heures du matin, l'inter-

ne de garde, appelé, voit l'enfant mourir sous ses yeux «aussi

simplement qu'on s'endort.» Au moment de la mort, la tem-

pérature du corps était de 30°.

Tableau des Poids et Taille.

Autopsie. 161

Autopsie pratiquée le 31 mai, vingt six heures après le

décès.

Tète. - Ctcir chevelu peu épais, sans ecchymoses. - Crâne e

arrondi ; plagiocéphalie prononcée ; aplatissement du frontal

gauche, saillie de l'occipital droit ; os durs, assez épais ; pla-

ques transparentes; pas de synostose. Les sutures sont très

finement dentelées. Il existe un os wormien à la partie posté-

rieure de la suture interpariétale et un os épactal, irrégulier, à

la jonction de cette suture avec les sutures pariéto-occipitales.

Les sutures et les contours des os wormiens sont très nets à

la face interne. - Liquide céphalo-rachidien, 30 gr. -Adhé-

rences assez nombreuses et assez résistantes de la dure-mère

au crâne ; cette méninge est épaisse et d'aspect blanc laiteux.

Les différentes parties de la base du crâne et le trou occipi-

tal n'offrent rien à signaler. Il en est de même de la glande

pituitaire.

Les nerfs olfactifs sont égaux. Le nerf optique et la bande-

lette gauches sont un peu plus petits que les parties droites

correspondantes.

Le tubercule mamillaire gauche est aussi un peu plus

petit que le droit.- Le pédoncule cérébral gauche est moins

bombé que le droit. La moitié gauche de la protubérance

est un peu moins bombée que la droite. - Le bulbe a été

maladroitement coupé trop court et un peu abîmé dans l'ex-

traction de l'encéphale, en sorte qu'il est impossible de com-

parer les pyramides et les olives.

L'encéphale n'est examiné que le 31 mars, soit 305 jours

après l'autopsie; il pèse, après imbibition dans le formol

1.1 [;jar. Lorsqu'on incise les pédoncules cérébraux la coupe

du côté gauche est moins large que la droite. Pas de diffé-

rence sensible de coloration. - Sur la coupe correspondant à

la protubérance, on voit très nettement l'aqueduc de Sylvius

Cervelet et isthme, 152 gr. Chacun des hémisphères cérébel-

leuxpèse GG gr. -Le quatrième ventricule n'offre rien de par.

ticulier. - Les artères de la base sont symétriques. -Des

deux côtés il existe un ancien foyer d'infiltration celluleuse

qui a détruit l'extrémité antérieure du lobe temporal. - La

glande pinéale est un peu volumineuse. Le genou du

corps calleux est assez développé, mais le corps calleux lui-

même n'a que 0°004 dans sa moitié antérieure et 0003 dans

sa moitié postérieure. Le bourrelet est également peu volu-

mineux.

Hémisphère cérébral droit. Les circonvolutions du lobe

lû2 PSEUDO-POREVC1 : PH : 1LIE.

frontal ont leur couleur naturelle et sont très grêles; seule la

moitié postérieure de F2 est assez développée. FA et surtout

PA sont aussi peu développées. - P1, Pu, PC et les parties

postérieures des circonvolutions temporales sont bien déve-

loppées. - Couche optique, aspect gris très prononcé. - La

lésion qui a abouti à une infiltration celluleuse (pseudo-

porencéphalie) a détruit la corne d'Ammon et un peu du

bord de la circonvolution de l'hippocampe et l'extrémité

des trois circonvolutions temporales. - Elle porte surtout

sur les deuxième et troisième temporales.

Hémisphère gauche. Il existe un foyer analogue d'infil-

tration celluleuse (psewlo-porencéplwlie) sur cet hémisphère,

situé dans la même région. De plus, sur le bord interhémis-

phérique, au niveau du lobe paracentral, se voit un second

foyer qui a détruit la partie antérieure de Fi (face externe),

toute la partie antérieure du lobe paracentral ainsi que la

moitié postérieure de I (face interne) et la partie corres-

pondante du sillon calloso-marginal. Porencèphalie vraie.

La lésion s'étend en profondeur, en arrière du bord infé-

rieur du lobe carré jusque dans le ventricule.

Lorsque la pie-mère est enlevée, on a sous les yeux comme

une sorte de cratère communiquant jusqu'au ventricule laté-

ral. (Planche XVI.)

Les circonvolutions du lobe frontal sont assez sinueuses

avec des plis de passage et des sillons assez profonds. La FA

est peu développée ; sa partie supérieure a été détruite par

la lésion congénitale. Nous avons vu que la branche horizon-

tale du porus se confondait avec le sillon de Rolando. PA est

déformée et incomplète, étant intéressée par la lésion dans

son bord antérieur et son bord supérieur. Le lobe occipital

n'offrait rien de particulier.

L'examen de cette portion du cerveau montre que le porus

a la forme d'une large crevasse qui interrompt la continuité

du bord supérieur de l'hémisphère au niveau du lobule para-

central et se continue sur les versants interne et externe de

l'hémisphère, figurant un angle légèrement obtus, a branche

verticale courte répondant iL la face interne de l'hémisphère

et à branche horizontale longue coupant perpendiculairement

la direction des ciconvolutions de la face externe. La branche

horizontale mesure Om05 de longueur, la branche verticale

0°03. L'écartement entre les deux lèvres de la crevasse est de

Om0 ? au niveau du bord supérieur de l'hémisphère ; il la ter-

minaison de la branche verticale interne, l'écartement est de

PORENCÉPHAUE vraie. 163

On0l; au contraire les lèvres de la crevasse sur la branche

horizontale se rapprochent insensiblement en descendant

sur la face externe de l'hémisphère et finissent par se fusion-

ner en une commissure, à la partie inférieure du sillon de

Rolando qu'elle paraît remplacer. D'une façon générale les

bords de la crevasse sont à pic et laissent plonger le regard

jusqu'au ventricule. Pour décrire exactement la perte de

substance dans la profondeur, nous avons coulé de la para-

fine dans la crevasse et nous avons obtenu le moulage du

porus. Dans son ensemble, et abstraction faite de petits

prolongements qui s'amorcent dans la cavité principale, le

porus a la forme d'une pyramide triangulaire dont la base,

dirigée en dedans, occupe le bord interne de l'hémisphère

et dont les faces peuvent être distinguées en supérieure

(répondant à la face externe de l'hémisphère), en antérieure

(répondant à la partie postérieure absente de la Fi (sur la

face interne), et de la partie supérieure de F. A., et en posté-

rieure (répondant iL la partie antérieure de la PA).

Les deux faces, antérieure et postérieure, se réunissent

dans la profondeur par un angle assez aigu qui suit de

dedans en dehors la circonvolution du corps calleux, la partie

supérieure du noyau caudé, et tombe enfin dans la cavité

ventriculaire.

La base du ponts est limitée en avant par la partie anté-

rieure de 1 (face interne) ; en arrière par le lobe carré ; en bas

par la circonvolution du CC; en haut elle se continue avec la

face supérieure de la cavité. En somme la base du porus a fait

disparaître la partie postérieure de Fi, la plus grande partie

du lobe paracentral et la partie supérieure de F A et la partie

postérieure de la circonvolution du C C.

La face supérieure du porus est limitée en avant et de

dedans en dehors par la partie postérieure de la 1 , le bord

postérieur de la F A ; en arrière par la partie antérieure de

la P1, et le bord antérieur de la P ? En somme la face supé-

rieure du porus a fait disparaître la portion postérieure de

la 1 , la partie toute supérieure de la F A, et la portion anté-

rieure de la l' A.

La face antérieure du porus, comprise de haut en bas entre

l'écorce de la face externe et la paroi supérieure du ven-

tricule, et de dedans en dehors entre le bord interne de

l'hémisphère et le bord postérieur de la F A, a intéressé une

portion de la l ; notons l'intégrité de la F2 dont la partie

postérieure saille dans la cavité du porus et se traduit par

une dépression sur notre moulage ?

164 PORENCUPHALIE vraie.

La face postérieure du porus, comprise de haut en bas

entre l'écorce et la paroi supérieure du ventricule et de

dedans en dehors entre la scissure calloso-marginale et le

bord antérieur de la P A, a intéressé toute l'extrémité anté-

rieure de la pariétale supérieure et (dans la profondeur seule-

ment) la partie antérieure de la P A.

Le moulage nous montre un boyau de communication entre

le porus et la cavité ventriculaire. Ce boyau, qui permet le

passage d'un crayon, est aplati dans le sens supéro-inférieur

et étiré dans le sens antéro-postérieur. Il s'amorce non loin

de la base du porus, sur la crête inférieure qui réunit les

parois antérieure et postérieure de la cavité, puis se dirigeant

en bas, en dedans et un peu en avant, il passe en dehors de

la circonvolution du corps calleux, en dehors du corps calleux

et aboutit au ventricule, au niveau de la face supérieure de

la couche optique.

Etant données la densité de la substance cérébrale et les

dimensions du porus, on peut évaluer la perte de substance

de 25 à 30 grammes.

Les parois du porus sont parfaitement lisses. Les portions

de circonvolutions qui bordent sa branche horizontale sont

perpendiculaires et arrondies.

A la partie supérieure du porus les circonvolutions ont une

coloration grise et immédiatement au-dessous les parois sont

blanches offrant également des portions arrondies.

Cou. - Le corps thyroïde, plutôt petit, n'offre rien de

particulier dans sa forme ou sa situation. Pas de persistance

du thymus.

Thorax. - Les poumons sont retractés dans les gouttières

costo-vertébrales. Le poumon droit, d'aspect normal, crépite

et surnarge. A la coupe, il ne présente aucune lésion macros-

copique. - Le poumon gauche est sain. Le coeur est flasque;

le coeur gauche est peu épais, le myocarde un peu feuille-

morte. Pas de lésion valvulaire, pas de persistance du trou de

Botal.

Abdomen. - Le foie, de forme irrégulière, présente à la

coupe un tissu compact et splénisé ; il est très congestionné

et très dense. Il n'offre aucune lésion tuberculeuse. La vési-

cule biliaire est très grosse, très mobile, et contient une cer-

taine quantité de bile incolore. L'estomac est petit, normal

d'aspect, muqueuse détériorée par les altérations cadavériques.

Les anses intestinales, normalement distendues par les gaz,

Hérédité ; Alcoolisme. -165

n'ont aucune lésion. Le caecum est sain ; il ne contient pas de

corps étrangers. L'appendice, en situation inféro-interne, est

libre, long de 0 ? 10 ; large de Om, 008. Nulle trace d'inflam-

mation. Le rectum et le colon transverse sont pleins de

matières fécales. Le péritoine pelvien est sain. La rate n'offre

rien à noter. Leiein gauche court, rond, est hyperémié ; il

se décortique mal. La substance corticale est amoindrie. Le

rein droit est également ferme ; il se décortique plus facile-

ment que le gauche. L'appareil génital est normal.

Cause de la mort : Cachexie post 1'ubéolique.

Poids des organes.

1G6 Idiotie complète congénitale.

ennui», voleur avec effraction à deux reprises. Rappe-

lons aussi qu'une de ses cousines était buveuse et alié-

née.

Du côté maternel, nous ne relevons pas de tares, en

ce qui concerne la mère, mais nous avons à signaler

l'alcoolisme du grand-père maternel et le suicide d'un

grand'oncle.

II. La conception de l'enfant, bien que le père fut

alcoolique, n'aurait pas eu lieu dans l'ivresse. Notons

la faiblesse des mouvements de foetus, la stricturc du

cou par un circulaire de cordon et l'asphyxie bleue

à la naissance.

III. Au point de vue clinique, il s'agit d'un cas

d'idiotie complète (parole, marche, propreté nulles.)

En outre, l'état de contracture permanent aux deux

membres inférieurs et au membre supérieur droit,

permettait de rattacher cette idiotie à clos lésions en

foyer. Les accidents de la grosesse, l'asphyxie à la

naissance ont placé l'enfant dans de mauvaises con-

ditions qui expliquent l'apparition des convulsions au

quinzième jour cle l'existence. Ces convulsions ont

été générales, prédominant toutefois dans la moitié

droite du corps. Il y aurait eu d'abord une paralysie

flasque, peut-être progressive si l'on en croit la mère,

rendant la station verticale, et a plus forte raison la

marche, impossibles. La contracture n'aurait paru

qu'à 20 mois ( ? ). En résumé, diplégie spasmodique ,

plus accusée à droite.

IV. L'enfant n'a fait qu'un court séjour dans le

service. Le 29 avril, elle est atteinte d'une rubéole au

cours de laquelle la température rectale a oscillé entre

3 il,3 et 3G,,6 le plus souvent au-dessous de 37". Or, le

tableau de la température des cinq premiers jours de

l'admission nous montre que sa température habituelle

Hypothermie. 9fi

était normale (7 fois sur 9 de 37°,1 à 37°,5). Il y avait donc

réellement hypothermie. Cette hypothermie s'est

accusée à partir du 23 mai, la température restant au

dessous de 37°, descendant à 36°,6 puis dans la nuit de

la mort à 34°,2 2 L'abaissement de la température et

l'amaigrisscment(lc poids est tombé de 15kil. à 12 kil.

500) ont été les principaux caractères de sa cachexie

progressive.

A propos d'une communication de M. le professeur

Joffroy au Congrès de Limoges (août 1901) sur Deux

observations d'algidité centrale d'assez longue durée

chez deux paralytiques généraux, l'un de nous a rap-

pelé quelques-unes de ses observations antérieures

sur l'hypothermie. « Outre les cas d'urémie et d'apo-

plexie cérébrale accompagnés d'un abaissement de

la température, dont nous nous sommes occupé naguère

nous avons signalé une hypothel'lnie très notable

dans un cas de refroidissement durant l'hiver de 1870,

un autre, dans un cas d'iUl'cssc comateuse, tous deux

consignés dans les Comptes-rendus de la Société de

Biologie. En outre, nous avons noté un abaissement

do la température rectale, en maintes circonstances

chez les idiots cachectiques, en dehors des idiots 1r/'y-

wmclénztztezcx chez lesquels la température rectale, est

toujours au-dessous de 37°. (Voir page 169).

lu Fcld ? idiote microcéphale à un haut degré, âgée

de cinq ans, morte avec des symptômes de broncho-

pneumonie avec une température de 24° (Israélite,

opposition à l'autopsie); 2° Thom... (Louise), deux

ans, idiote myxccclémateuse, morte de broncho-pneu-

monie (autopsie) avec 3 ? 1 ; - 3° Bivin.. (Germaine),

cinq ans et demi, imbécilité hydrocéphalique, morte

de brûlures superficielles, avec 350,2; - 4° Gl'en...

(Marcellin), six ans, idiotie congénitale, mort de

tuberculose pulmonaire avec 36°. Tous ces enfants ont

succombé durai) les jours les plus froids de l'hiver ; -

168 I'EUDO-POItENCPI-I : 1LIE et porencéphalie vraie.

5° Girard... (Henriette), huit ans, 35°,9 ; 6° Poir...

(Lucie), sept ans, 36° ; - 7° Dclom... (Henri), dix ans,

36°. Dans ces trois cas l'hypothermie s'est présentée

au cours d'une grippe. Ces trois derniers enfants ont

survécu. La température a été prise avec plusieurs

thermomètres et les thermomètres vérifiés avec

soin, ainsi que nous avons l'habitude de le faire

en présence de températures anormales.

V. Les lésions trouvées à l'autopsie sont de deux

ordres : deux foyers cle pseudo-porencéphalie et un

loyer de porencaphalie vraie.

a) Les foyers pseudo-ponencéphaliques sont symé-

triques, ont détruit l'extrémité antérieure des lobes

temporaux, plus à gauche qu'à droite, car à gauche le

lobule de l'insula est plus découvert que de l'autre

côté. Ils consistent en ZseZCdo-hstes, cloisonnés par

des tractus celluleux formant des logettes (Infiltra-

tion celluleuse de Cruveilhier). Les circonvulutions

restantes, dans leur partie contiguë aux pseudo-kys-

tes, sont irrégulières, anfractueuses, sans sclérose, sans

atrophie à l'oeil nu. Il s'agit la d'une lésion acquise,

destructive, survenue après la naissance et qui s'est

traduite clininiquement par l'état de mal convulsif du

quinzième jour de la vie.

b) Le foyer de porencéphali-e vraie intéressait la

région paracentrale, l'extrémité postérieure de la pre-

mière frontale, celle des frontale et pariétale ascen-

dantes, se confondait extérieurement avec le sillon de

Rolando et communiquait intérieurement avec le ven-

tricule latéral. Nous avons donné plus haut une des-

cription trop détaillée pour qu'il ne soit pas superflu

d'y revenir encore. Relevons seulement deux particu-

larités capitales : 10 le porus n'offrait ni tractus cellu-

leux, ni logettes; 2° les circonvolutions, profondément

l'SEUDO-POHENCI\ ! 'HALIE ET POHENCÈPHALIE vraie. 169

modifiées au voisinage de la cavité, n'étaient ni irré-

gulières, ni déchiquetées, mais au contraire parfaite-

ment lisses, arrondies. L'orifice do communication

aboutissait à la partie supérieure de la couche optique

et avait environ 0"'005 de diamètre. Cette lésion coN-

génitale, est due à des troubles survenus durant la

vie intra-utérine.

VI. C'est la première fois, croyons-nous, que nous

voyons réunies sur un même cerveau la Poll>;NGi,-

phalie VRAIE et la PSEUDO-POIOE);C¡ : ;PHALIE zip.

VII. Comme dans les cas de pseiido-poreiicépliilie

double, avec prédominance des lésions d'un côté,

nous relevons une légère atrophie du nerf optique, de

la bandelette optique, du tubercule mamillairc, du

pédoncule cérébral gauches, de la moitié gauche delà

protubérance. - Les artères de la base étaieul ici nor-

males et symétriques.

Comme exemple d'hypothermie il ajouter à ceux que

nous avons cités (p. 1G6-168), voir dans le Compte-rendu

du service de 1887, p. 224 : Un cas d'asphyxie par stran-

gulation : abaissement considérable de la température

centrale (34°, 1), guérison ; par Bourneville.

(1) Voici le relevé de nos principales publications sur la vraie et la fausse

porencéphalie : 1^ PorencéyltaLies vrnies. Comptes-rendus de 1890, p. 170-

li2; - 1891, p. 9G; 1802. p. 89; 1897. p. 03. 2' l'setulo-porencépha-

lies. Comptes-rendus de 18S4, p. 2, 49 ; 1889, p.154 ; 1890, p. 185-192;

1892, p. 10 ; 1895, p. 52 ; 1890, p. 42-56. -

Bourneville, Bicêtre, 1901. 12

Folie de l'adolescence.

(Addition à l'obs. de Marguerite II...) p. 111).

Notre ami Magnan, médecin en chef de l'Asile clinique,

a eu l'obligeance de nous envoyer les notes suivantes sur

l'état de Marguerite lIa.. à son arrivée il l'Asile clinique

ctpendant son séjour dans cet asile, jusqu'à son envoi dans

notre service. Elles complètent très utilement noire obser-

vation. Nous l'en remercions.

Le 19 octobre 1898, l'excitation recommence ; la malade crie,

chante, gesticule, bavarde, très incohérente dans ses discours

et dans ses actes, avec cependant une conscience partielle de

son état : «je suis excitée, dit-elle, laissez moi tranquille. »

Cela persiste ainsi avec des intervalles d'accalmie jusqu'au ? 8

octobre où l'agitation devient plus intense et plus désor-

donnée. Elle se prétend la reine d'Angleterre, dit qu'elle veut

sauver la France, se livre à toutes sortes d'extravagances,

lance par la fenêtre ses vêtements et divers objets. C'est

alors qu'on se décide à la conduire à l'infirmerie du Dépôt

d'où elle est amenée à l'Asile clinique. Là, en présence de

son agitation intense on l'installe dans la salle d'alitement.

On donne un lavement avec du chloral le soir, et la malade

reste tranquille la nuit, dort jusqu'au matin. Au réveil l'agi-

tation reparait : bavardage incessant, incohérent dans une

fuite d'idées très rapide, où l'on peut ça et là percevoir des

idées ambitieuses, ébauchées, mais où surtout prédominent

les propos grossiers où triviaux. « Foutez-lui une claque !

crie-t-elle, attention ça y est, sauvez votre honneur,... pas

moins de 4 millions,... duel,... allons 4 témoins,... voulez-

vous que je signe,... je venge mon pays,... je ne suis pas

une salope,... je venge déjà mon honneur; » discours qu'elle

Folie DE l'adolescence^ '174

débite assise sur son lit, gesticulant, grimaçant, secouant là

tête en tous sens, s'interrompant parfois pour chanter où

éclater de rire ; le tout, au milieu dune assez grande lui-

dite d'esprit qui lui permet de répondre aux questions' posées,

et accompagné d'une conscience partielle de l'état d'agitation'.

Cela dure ainsi sans autre interruption que les. nuits qui

sont ordinairement calmes. Le 3 novembre, dans la journée,

s'établissent des périodes d'accalmie, de dépression même,

où la malade vite enfouit la tête sous les draps, ne répondant

il aucune question. Puis brusquement, à nouveau, l'agitation

reparait avec les mêmes caractères incohérents. A noter le

31 octobre une élévation,subite de la température, qui .le

matin est iL 38° sans que rien dans l'état somatique de la

petite malade, même pas une simple constipation puisse

l'expliquer. ?

Le 5 novembre la malade, qui le soir après un lavement

avec du chloral s'était endormie comme d'habitude, se

trouve au matin, dans un état semi-comateux ; inertie

musculaire complète, ancsthésie totale, température 38°, 5 le

matin, 38°, 6 le soir; pouls bon, mais rapide, 116 par minute,

respiration superficielle et précipitée, 21 par minute : les

pupilles sont resserrées, la cornée injectée et insensible. Cet

état persiste jusqu'au soir il /1 heures, puis après quelques

heures d'abattement l'agitation et les bavardages grossiers

reprennent. Le lendemain 6, les conjonctives restent injec-

tées, la malade se plaint de souffrir de la tôle, la langue est

sèche et très chargée. Constipation qui cède il l'administra-

tion de 0. fr 50 de calomelT- la température est normale. L'état

d'agitation persiste : la malade bavarde, déclame, grimace,

continue il répéter it plusieurs reprises : « J'ai sauvé mon

honneur, » tout en faisant par derrière des pieds de nez aux

personnes qui la soignent et restant très attentive à ce qui

se passe autour d'elle, dans la salle. Ce qui actuellement

prédomine et va dans la suite de beaucoup prédominer

sont les propos orduriers et grossiers. Les nuits continuent

à être assez calmes et la malade dort de 6 à 7 heures d'un

sommeil tranquille. Le 19 novembre on retrouve le même

état semi-comateux qui persiste jusqu'à 3 heures de l'après

midi. Cette fois il n'y a pas d'élévation de température; de

plus, la résolution musculaire et l'anesthésie sont moins com-

plètes. A partir du 26 novembre l'agitation tend progressive-

ment il disparaître, les périodes de tranquillité sont plus

longues et plus rapprochées ; mais on constate que, même

dans ces périodes de calme, la malade n'est pas complètement

172 FOLIE DE l'adolescence.

bien : elle répond difficilement aux questions, se contentant

de sourire quand on lui cause; elle semble, de plus, légère-

ment confuse ; elle prétend le lendemain ne pas se rappeler

la visite que lui a faite sa soeur la veille. Le 30 novembre on

note une dépression avec tendance à la somnolence, obtu-

sion intellectuelle, inertie habituelle ; la malade dit ne pas se

souvenir de ses crises passées. Le 1 cr décembre et les jours

suivants l'excitation parait se réveiller un peu, la malade

salue la visite du matin par ces mots : « Je vous emm.... tous,

c'est l'anniversaires des juifs. » Néanmoins il y a peu d'agi-

tation motrice, tout se passe en paroles et en quelques ges-

ticulations. Cette crise est loin d'égaler les précédentes par

son intensité, aussi le 6 novembre on transfère la petite

malade à la Fondation Vallée.

APPENDICE

XI.

De l'emploi de la subvention départementale spéciale aux

Ecoles d'enfants arriérés, aux Ecoles d'infirmiers

et infirmières et aux Bibliothèques des services des

aliénés de Bicêtre et de la Salpêtrière.

Note adressée à M. Mouriez, directeur de l'Admi-

nistration générale de l'Assistance publique;

l'An nOURNE\'IIÆE.'

Ancien conseiller général de la Seine.

Monsieur le Directeur,

Il y a quelques jours, je vous ai entretenu des subven-

tions spéciales votées depuis février 1878 (1), pour divers

services de Bicêtre par le Conseil général, je vous ai dit

que cette subvention ne recevait pas sa complète affecta-

tion et vous m'avez demandé de vous remettre une note

explicative : c'est ce que je viens faire aujourd'hui, en

comparant les textes des budgets départementaux et des

bugets de l'Assistance publique.

- (I) Dans tout ce qui va suivre, l'intérêt des malades était seul en jeu et pour

mettre à néant de suite les sous-entendus de certains fonctionnaires, nous

dirons que rien ne pouvait faire supposer alors (fin 1877), qu'un jour nous

serions médecin de Bicêtre et à la tic du service (les enfants que l'on consi-

dérait comme le DERNIER des services des hôpitaux. -

176 Subvention départementale.

Budgets des Asiles d'aliénés.

Budget DE 1878.

(Rapport fait le 16 février 1878, p. 5.)

Après avoir relevé dans le budget de la Préfecture de

la Seine et dans le budget spécial (le la Préfecture de

police ce qui avait trait l'inspection des asiles d'aliénés

et des quartiers d'hospice, et donné quelques explications,

nous résumions ainsi la situation :

« En réunissant ces divers éléments, nous voyons que

le personnel de l'Inspection est ainsi composé :

Budgets départementaux. 177

Puis, après avoir rappelé le projet de création des Lco-

les d'infirmierset d'infirmières » réclamées par un vote du

Conseil municipal en décembre 1877 dans la discussiondu

Budget de l'Assistance publique pour 1878, nous disions :

« Déjà des études ont été faites à la Salpêtrière ; nous

devons inviter M. le Préfet il intervenir auprès de l'ad-

ministration de l'Assistance publique pour que ces études

aboutissent promptement et. afin d'aider à la création de

ces écoles, nous vous proposerons de voter une subvention

de 1000 fr. pour chacune d'elles. (Même rapport, p. 20. ) »

De même que nous avions demandé au Conseil munici-

pal d'encourager la création de bibliothèques pour les

malades et de voter des subventions aux bibliothèques

médicales (1), de même nous demandions au Conseil

général de créer des bibliothèques pour les aliénés (2).

« Ib., p. 23. - «Aussi, votre Commission vous propose-

t-elle de consacrer nnc partie du Crédit (5.000 fr.) devenu

lihre par la suppression de l'inspectorat général, à la

création de bibliothèques dans nos asiles ou à l'extension

de celles qui existent déjà. »

Dans ses visites, à la fin de l'année 1877, aux quartiers

d'enfants de Bicêtre et de la Salpêtrière, la Commission

d'assistance du Conseil général (3) avait été vivement

impressionnée par l'état déplorable de cette partie des ser-

vices d'aliénés, surtout il Bicêtre (4). Aussi nous changea-

t-elle, comme rapporteur, de réclamer la séparation des

(1) Ces bibliothèques sont dues en grande partie à notre initiative ( Voir

Mouvement médical, 18U5 -IBn et napp, au Conseil municipal, 1876 - 1883).

(2) Voir aussi nos rapports au Conseil municipal sur les Bibliothèques

populaires. Nous avons créé en )856, étant au collège d'Évreux, une biblio-

thèque populaire dans notre commune d'origine, à Garencières (Eure).

(3) Cette commission était composée de MM Tliulié, président ; Bourneville,

secrétaire, Cadet, Cattiaux, Cauhet, Dubois, Dujarier, Goudchaud, Lautli,

Level, Loiseau et. MailLar<l.

(4) Voir notre Histoire de la section des Enfants de Bicêtre et nos Comptes-

rendus du service des Enfants de Bicétrc, à partir de 1880.

178 Subvention départementale.

enfants des adultes et partant la création d'un quartier

spécial. En attendant, elle voulut améliorer un peu la

situation des enfants et du personnel.

Ibidem, p. 28. - «Votre commission vous propose

d'inviter l'Administration il prendre en sérieuse considé-

ration les améliorations et les créations que nous venons

d'énumérer et à voter une subvention de 2.000 ffr. pour

Bicêtre etde 2.000 fr. pour la Salpêtrière, afin d'améliorerla

situation du personnel attaché aux enfants idiots et épilep-

tiques et afin d'augmenter ce personnel. »

Et comme conclusion, la Commission proposa la délibé-

ration suivante qui fut adoptée :

Ibid., p. 35. - «Le Conseil général, après avoir entendu

le rapport présenté au nom de sa 3e Commission ; Délibère :

Art. 1 cr : Est supprimé le traitement de l'Inspecteur

général du service des aliénés inscrit à l'art. 3 du sous-

chap. VII du projet de budget de 1878, pour une somme

de 13.000 fr.

« Les crédits portés à l'art. 1er du même sous-chap. III,

afférents à l'asile de Vaucluse, sont réduits comme suit :

Frais de culte, de 1. 200 à 600 fr ;

Traitement des aumôniers de 2. 900 fr. à 2. 600 ; soit en

moins 900 fr. La somme de 13. 900 fr. restée libre par suite

des réductions ci-dessus sera répartie de la manière sui-

vante :

Sous-chap. VII. art. le, , Asile de Sainte Amie. -

Elévation de 580 à 8011 fr. du traitement du surveillant

en chef 220 fr.

Asile de Vaucluse :

Subvention au laboratoire de'pharmacie.... 300 »

Subvention à la colonie des jeunes idiots

pour achat d'appareils de gymnastique 1.000 »

Subvention à la colonie des jeunes idiots, pour

l'amélioration du matériel de l'école 1.380 »

Subvention aux écoles d'infirmiers et infir-

mières de Bicêtre et de la Salpêtrière, 1. 000 fr.

chacune, ci 2. 000 »

Budgets DÉRIRTENIENTAUX. t79 :

Subvention aux écoles d'enfants idiots et

épileptiques de Bicêtre et de la'Salpêtrière, pour

l'amélioration de la situation et l'augmentation

du personne] , 2 . 000 fr, chacune, ci.......... Il. 000 »

Subvention de 1 .000 fr à chacune des biblio-.

thèques affectées aux malades dans les asiles

de Bicêtre, la Salpêtrière, Sainte-Anne, Vau-

cluse et ci ..................... 5.000 »

Budget DE 1879.

(Rapport fait le 26 novembre 1878, p. 5 et 39.)

Nous nous bornons à citer la partie de la délibération

relative à la question qui nous occupe.

Sous-chap. VII, art. lui. - Crédit de 7.000 fr. pour sub-

vention à l'Assistance publique en faveur de chacune des

Ecoles d'infirmiers et d'infirmières de Bicêtre et de la

Salpêtrière, dans la proportion de 1.000 fr, soit ensem-

blé 2.000 fr.

De chacune des Ecoles d'enfants, idiots et épi-

leptiquesdes mêmes quartiers dans la proportion

de 2.000 fr. soit ensemble 4.000 »

De chacune des bibliothèques d'aliénés de ces

quartiers, dans la proportion de 500 fr. soit

ensemble .................................. 1.000 »

BUDGET DE 1880.

(Rapport fait le 2 déc. 1879, p. 7 du tirage a part.)

Subvention at l'Assistance publique (sous-chap. VII, art.

4). Cette subvention qui s'élève à 7. OÙO fr. doit être répartie

delà manière suivante : 1.OUI1 fr. a chacune des Ecoles d'in-

firmières et d'infirmiers de Bicêtre et cle la Salpêtrière,

ensemble 2.000 fr. ; - 2.000 fr. à chacune des Ecoles

d'enfants idiots el épileptiques des mêmes établissements,

ensemble 4.000 fr ; enfin 50U fr. à chacune des Biblio-

thèques des aliénés des deux hospices sus-nommés,

ensemble 1 . 000 fr.

180 Subvention départementale.

Dans l'esprit de la Commission et de son Rapporteur,

ces subventions étaient destinées, non pas à faire face aux

dépenses régulières, dues par l'Administration de l'assis-

tance publique sur le prix de journée, mais à des amélio-

rations de tous genres (Matériel, bibliothèque, personnel).

Budget de 1881.

(Rapport fait en décembre 1880. p. 3.)

Subventions diverses aux services d'aliénés de Bicêtre

et de la Salpêtrière (sous-chap. VII, art. 4). Il s'agit d'un

crédit de 7.000 fr. (Subventions aux Ecoles d'infirmiers et

d'infirmières cle Bicêtre et de la Salpêtrière et aux biblio-

thèques des aliénés, aux Ecoles des enfants idiots et épilep-

tiques de ces deux établissements) : il a reçu l'affectation

que le Conseil lui avait destinée.

4° Ib. p. 74. -Pour subventions diverses aux services

d'aliénés de Bicètre et de la Salpêtrière.... o. 7.000 »

Budget DE 1882.

(Rapp. fait le 12 décembre 1881, p. 35 du tirage il part :

Sous-chap. VII, art. 4. - Subvention à l'Assistance

publique 7.000 fr »

Ce crédit est destiné aux Ecoles d'infirmiers et d'infir-

mières laïques de Bicêtre et de la Salpêtrière, aux Ecoles

d'enfants idiots et épileptiques, enfin aux Bibliothèques

des mêmes établissements.

Ib. p. 59. Après avoir entendu le rapport présenté au

nom de la commission ; -

Délibère :

II estouvertau Budget de 1882. Même sous-chap. art. 4,

un crédit de 7.000 »

Budget DËPATEMEXTAL de 1883.

(Rapp. fait en clée. 188 ? .

Le crédit de 7.000 fr. inscrit au sous-chap. VII : Art. 4,

BUDGETS DE l'Assistance publique. 181

pour subvention aux écoles de Bicêli'e et de la Salpêtrière

a été employé suivant les désirs du Conseil général.

Ib. p. 72. - 4° Même sous-chap., art. 4, un crédit de

7.000 fr. pour subventions diverses aux services d'aliénés

de Bicêtre et de la Salpêtrière. (Délibérai ion).

Tous les ans. depuis 1883 jusqu'à 1901, le Conseil géné-

ral a voté le même crédit avec la môme affectation, c'est-

à-dire dans le but d'améliorer la situation des écoles

d'enfants, des écoles d'infirmières et non de faire face

aux dépenses régulières des Ecoles et desbiibliothèques

auxquelles l'Administration de l'Assistance publique doit

subvenir avec le prix de journée qu'elle reçoit du départe-

ment. En ce qui concerne le crédit pour les Bibliothèques

des aliénés, il doit, lui aussi, non pas remplacer le crédit

municipal pour les bibliothèques des deux hospices, mais

s'y ajouter. '

Examinons maintenant comment l'Administration de

l'Assistance publique s'est conformée aux indications du

Conseil général, en reproduisant les passages de son Bud-

get, Recettes et dépenses, concernant cette subvention.

Budgets de l'Assistance publique (1880-1901).

Budget de 1880.

Recettes.

(p. 28.)

Sous-chapitre XXX.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpêtrière i . i 00 fr.

DÉPENSES.

(p. 57.) .)

Sous-chapitre IX.

Virement au sous-cha-

pitre. Frais de bureau et de

cours du crédit alloué pour

écoles d'infirmiers et d'in-

lirmières ........ 7.700 fr.

: 182

SUBVENTION DÉPARTEMENTALE.

Budget de -1881.

RECETTES supplémentaires

in.2'1.)

Sous-chapitre III.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

Dépensés complémentaires

(p. 59.) - .1

Sous-chapitre III.

Subvention départemen-

tale pour Bibliothèque d'a-

liénés, pour écoles- des en-

fants idiots, et pour contri-

bution aux Dépenses des

Ecoles municipales d'infir-

miers et d'infirmières laï-

quel 7.000 fr.

Budget de 1882.

Recettes.

(p. 30.)

Sous-chapitre XXXII bis-

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpêtrière 7.000 fr.

DÉPENSES.

(p. 44.)

Sous-chapitre II.

Virement au sous-cha-

pitre. Frais de bureau et de

cours du crédit alloué pour

écoles d'infirmiers et d'in-

firmières ........ 7.000 fr.

Budget de 1883.

Recettes supplémentaires

- (p. 28.)

Sous-chapitre XXXIII.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, d'erifants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 0 7.000 fr.

Dépenses complémentaires S

(p. 40.)

Sous-chapitre II.

Subvention départemen-

tale pour Bibliothèque d'a-

liénés, pour écoles de sen-

fants idiots, et pour contri-

bution aux Dépenses des

Ecoles municipales d'infir-

miers et d'infirmières lai-

ques............ 7000. fur.

BUDGETS DE l'Assistance PUBLIQUE.

183

Budget cle 1884.

Recettes.

. (p. 28.) ,

Sous-chapitre XXXIV.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicétre et de la

Salpêtrière. 7.000 fr.

Dépenses.

.. (p. 40.) *

Sous-chapitre II.

Virement au sous-cha-

pitre. Frais de bureau et de

cours du crédit alloué pour

écoles d'infirmiers, et d'in-

firmières ........ 7.000 fr.-

Budget de 1885.

RECETTES supplémentaires

(p. 28.)

Sous-chapitre XXXIV.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, 'd'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

Dépenses complémentaires S

(p. 42.)

Sous-chapitre II.

Subvention départemen-

tale pour Bibliothèque d'a-

liénés,, pour écoles des en-

fants idiots, et pour contri-

bution aux Dépenses .des

Ecoles municipales d'infir-

miers et d'infirmières laï-

quels 7.000 fr.

Budget de 1886,

Recettes.

(p. 28.)

Sous-chapitre XXXIII.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpêtrière 7.000 fr.

DÉPENSES.

(p. 42.)

Sous-chapitre II.

Virement au sous-clia-

pitre. Frais de bureau et de

cours du crédit alloué pour,

écoles d'infirmiers et d'in-

firmières 7.000 fr.

184

SUBVENTION DÉPARTEMENTALE.

Budget de 1887.

Recettes supplémentaires

(p. 28.)

Sous-chapitre XXXIV.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèques des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

Dépenses complémentaires

(1). ! ? .)

Sous-chapitre IL

Subvention départemen-

tale pour Bibliothèques d'a-

liénés, pour écoles des en-

fants idiots, et pour contri-

bution aux Dépenses des

Ecoles municipales d'infir-

miers et d'infirmières laï-

([tics ............ 7.000 fr.

Budget de 1888.

Recettes.

(p. 28.)

Sous-chapitre XXXV.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpêtrière...... 7.000fur.

DÉPENSES.

(p. 42.)

Sous-chapitre II.

Virement au sous-clm-

pitre. Frais de bureau et de

cours du crédit alloué pour

écoles d'infirmiers et d'in-

firmières 7.000 fr.

Budget de 1sus\ ! .

Recettes supplémentaires

(p. 28.)

Sous-chapitre XXXV.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

DÉPENSES COMPLÉMENTAIRES

(p. 42.)

Sous-chapitre II.

Subvention départemen-

tale pour Bibliothèque d'a-

liénés, pour écoles des en-

fants idiots, et pour contri-

bution aux Dépenses des

Ecoles municipales d'infir-

miers et d'infirmières laï-

dues .......... , . 7.000 fr.

BUDGETS DE l'Assistance publique.

185

Budget de 1890.

Recettes,

(p. 28.)

Sous-chapitre XXXVI.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpêtrière 7.000 fr.

Dépenses.

(p. '1'l.)

Sous-chapitre IL

Virement au sous-clia-

pitre. Frais de bureau et de

cours du crédit alloué pour

écoles 'd'infirmiers et d'in-

firmières 7.000 fr

Budget de 1891.

Recettes supplémentaires

(p. 28.)

Sous-chapitre XXXVI.

Subvention du départe-

mcnt de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

Dépenses complémentaires

(p. 42.)

Sous-chapitre II.

Subvention départemen-

tale pour Bibliothèque d'a-

liénés, pour écoles des en-

fants idiots, et pour contri-

bution aux Dépenses des

Ecoles municipales d'infir-

miers et d'infirmières laï-

quel 7.000 fr

Budget de 1892.

Recettes.

(p. 28.) .

Sous-chapitre XXXIX.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicèlre et de la

Salpêtrière 7.000 fur.

BOUIlNLVILL1, Bicêtre, 1901.

DÉPENSES.

(p. 42.)

Sous-chapitre II.

Virement au sous-chx-

pitre : Frais, de bureau et de

cours, du crédit alloué pour

écoles d'infirmiers et d'in-

firmières 7.000 fr.

13

186

Subvention départementale.

Budget de 1893.

Recettes supplémentaires

(p. 28.)

Sous-chapitre XXXIX.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7. 000 fr.

Dépenses complémentaires

(p. 42 )

Sous-chapitre II.

Subvention départemen-

tale pour Bibliothèque d'a-

liénés, pour écoles des en-

fants idiots, et pour contri-

bution aux Dépenses des

Ecoles municipales d'infir-

miers et d'infirmières laï-

dues ............ 7.000 fr.

Budget de 189-4.

Recettes.

. (p. 30.)

Sous-chapitre XLI.

Subvention pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpètrière ...... i .000 fr.

Dépenses.

(p. 44.)

Sous-chapitre II.

Art. G. Ecoles d'enfants

arriérés et cours primaires

(1) pour les infirmiers et in-

firmières 9.000 fr.

Budget de 1895.

RECETTES supplémentaires

(p 2f.)

Sous-chapitre XXIV.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

Dépenses complémentaires

(p. li 6.)

Sous-chapitre II les.

Art. 5. - Ecoles d'enfants

arriérés et cours primaires

pour les infirmiers et infir-

misères 9.000 fr.

(1) Voici une nouvelle affectation, imaginée par qui ?

BUDGETS de l'Assistance PUBLIQUE.

187

Budget cle 1896.

Recettes.

(p. 26.)

Sous-chapitre XXIV.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpêtrière 7.000 fr.

Dépenses.

(p. 48.)

Sous-chapitre II bis.

Art. 5. - Ecoles d'enfants

arriérés et cours primaires

pour les infirmiers et infir-

mières 9.000 fr.

Budget de 1897.

RECETTES supplémentaires

(p. 26.)

Sous-chapitre XXIV.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque' des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

DÉPENSES COMPLÉMENTAIRES

(1). ts.)

Sous-chapitre II bis,

Art. 5. - Ecoles d'enfants

arriérés et cours primaires

pour les infirmiers et infir-

mières .......... 9.000 fr.

Budget de 1898.

Recettes.

(p. 26.)

Sous-chapitre XXIV.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpêtrière 7.000 fr.

Dépenses.

(p. 48.) .

Sous-chapitre II bis.

Art. 5. Ecoles d'enfants

arriérés et cours primaires

pour les infirmiers et infir-

mières .......... Il. 200 fr.

188

SUBVENTION départementale .

Budget de 1899.

RECETTES supplémentaires

(p. 26.)

Sous-chapitre XXIV.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

Dépenses complémentaires

(p. 48.)

Sous-chapitre II bis-

Art. 5. - Ecoles d'enfants

arriérés et cours primaires

pour les infirmiers et infir-

mières .......... 11.` ? 00 fr.

Budget de 490b.

Recettes.

(p. 26.)

Sous-chapitre XXIV.

Subventions pour écoles

d'infirmiers et infirmières

laïques de Bicêtre et de la

Salpêtrière 7.000 fr.

DÉPENSES.

(p. 48.)

Sous-chapitre II bis,

Art. 5. Ecoles d'enfants

arriérés et cours primaires

pour les infirmiers et infir-

mières 'Il. '200 fr.

Budget de 1901 (1).

RECETTES supplémentaires

(p. 26.)

1 Sous-chapitre XXIV.

Subvention du départe-

ment de la Seine pour bi-

bliothèque des écoles d'in-

firmiers, d'enfants idiots et

épileptiques et des malades

aliénés 7.000 fr.

DÉPENSES COMPLÉMENTAIRES

(p. 48.)

Sous-chapitre II bis.

Art. 5. Ecoles d'enfants

arriérés et cours primaires

pour les infirmiers et infir-

miires .......... 12.700 fr.

(1) Par suite d'une délibération du Cunseil général, prélevant sur subven-

tion de 7.000 fr., 1.000 fr. pour le professeur de dessin (poste créé), il ne reste

plus que G.000 fr. pour les Ecoles d'enfants, les Ecoles d'inlirmières et les

Bibliothèques des aliénés. Le crédit aurait dû être fourni par l'Assistance

publique sur son budget comme celui des professeurs de cliant, de gymnas-

tique, etc.

RÉSUMÉ COMPARATIF. 189

Ce relevé de textes comporte quelques réflexions.

Dès 1880, le libellé n'est pas conforme à la délibération

du Conseil général. Il est exact en 1881 ; il ne l'est plus en

1882. Il ! c redevient en 1883, ne l'est plus en 1884, le rede-

vient en 1885, ne l'est plus en 188G, le redevient en 1887,

ne l'est plus en 1888, le redevient en 1889, ne l'est plus en

1890, le redevient en 1891, cesse de l'être on 1892 où il n'est

plus question ni des Ecoles d'enfants, ni des Bibliothè-

ques des aliénés. Exacte en 1893, l'inscription du crédit ne

l'est plus en 1891. En 1895, l'inscription aux recettes est

régulière; aux dépenses ne figurent pas les Bibliothèques

des aliénés et on attribue la subvention aux cours pri-

maires, etc.

Pourquoi toutes ces modifications, l'addition de crédits

au crédit spécial du Conseil général, l'oubli tantôt des

bibliothèques des malades, tantôt des Ecoles d'enfants, la

différence du libellé du même article aux recettes et aux

dépenses, alors que le texte du Conseil général et de l'Admi-

nistration préfectorale est toujours le même depuis 1878.

Le voici encore une fois, d'après le Mémoire de M. de

Selves au Conseil général en 1901 (p. 189).

Chap. VIII, § 1 ? art. 9. - Subeenlion pour les quar-

tiers d'hospice de Bicêtre et de la Salpêtrière.

Le montant du crédit soit 7.000; »

a été mandaté au profit des Ecoles d'infirmiers et d'infir-

mières de ces établissements, des Ecoles d'enfants- idiots

et des Bibliothèques des quartiers d'aliénés.

En 189G, aux recettes (7.000 fr.), il n'est pas question des

Ecoles d'enfants, ni de la biblothèque des aliénés. Aux

dépenses reparaissent les Ecoles d'enfants et la dépense

est de 9.000 fr. alors que le Conseil général n'a voté que

7.000 fr.. En 1897, l'inscription, conforme aux recettes

(7.000 fr.), ne l'est plus aux dépenses (9.000 fr.) ; même

erreur en 1898 où la dépense est de 11.200 fr. Omission

des bibliothèques des aliénés qui reparaissent aux recettes

de 1899 mais non aux dépenses. En 1900, il n'estpasdues-

tion des Ecoles d'enfants, ni des bibliothèques, les premiè-

res reparaissent aux dépenses, mais non les bibliothèques.

190 RÉPONSE de M. 1\Ioumrn.

En 1901, le texte est exact aux recettes (7.000 fr.) mais les

bibliothèques sont oubliées aux dépenses qui s'élèvent il

1 ? î00 fr.

J'appelle votre attention. M. le Directeur, sur les trans-

formations, modifications de texte que j'ai relevées. Je me

permets de vous rappeler que les crédits votés pour les

bibliothèques des aliénés de Bicêtre et de la Salpêtrière

doivent s'ajouter aux crédits votés pour les bibliothèques

des vieillards ; - que les crédits votés pour les Ecoles d'in-

firmières et les Écoles d'enfants sont destinés, non ;i faire

face aux besoins de ces écoles, mais à permettre de réaliser

des améliorations que peuvent vous réclamer vos chefs

de service dans l'intérêt des malheureux enfants que l'Ad-

ministration leur confie (1).

Veuillez agréer, etc. B.

Réponse de M. Mourier. directeur de l'Administration

générale de l'Assistance publique.

Paris, 28 Février 1902.

Monsieur le Docteur,

Vous avez bien voulu appeler mon attention sur l'em-

ploi qui est fait de la subvention départementale de 7.000

francs versée depuis 1878 à mon administration et qui doit

être répartie par moitié entre les hospices de Bicêtre et de

la Salpêtrière de la façon suivante :

RÉPONSE DE M. MOURIR. - 191

Des recherches auxquelles j'ai fait procéder, il résulte

que, jusqu'en 1893 inclusivement, la dépense correspondant

à cette subvention était imputée sur un sous-chapitre et

sur un article uniques (sous-chap. 2, art. 6).

Depuis lors, cette dépense, pour des causes diverses ( ? ? ),

et notamment par suite du dédoublement du sous-chap. II

a été imputée sur 3 articles différents : savoir :

192 REPONSE DE M. mourir. RÉFLEXIONS.

Voeux. 193

cèdent. Donc, à l'avenir, l'inscription de la subvention

aux Recettes et aux Dépenses sera faite exactement.

l)u.m t à son emploi, nous comptons sur la. promesse de

M..Mourier, sur son esprit d'équité, pour qu'il soit fait con-

formément aux intentions primitives et persistantes du

Conseil général, que nous avons rappelées, d'après nos

Rapports et que, il l'occasion, pourrait confirmer M. le

Dr Tiiulié, alors président de la Commission d'Assis-

tance publique de ce Conseil. Il va de soi que les chefs

de service devront s'entendre avec les directeurs de

Bicêtre et de la Salpêtrière, pour la meilleure destination

de cette subvention au point de vue de l'intérêt et de

l'agrément des malades et que leurs propositions commu-

nes devront être soumises à l'Administration centrale.

B.

Travaux scientifiques faits dans le service.

(Thèses et mémoires).

1880.

LEROY (A.). De l'état de 1 ! 1-al épileptique. Thèse de Paris.

SÉCHAS (J.). De l'influence des maladies intercurrentes

sur la. marche de l'épilepsie. Thèse de Paris.

Bourneville.. Contribution à l'étude de l'idiotie. - Ce

travail comprend deux parties, dont la seconde a été faite en

collaboration avec M. Brissaud. (Archives de neurologie,

1880, t. I, p. 69 et 399). - Contribution à l'élude de la dé-

mence épileptique. (Archives de neurologie, 1880, p. 213).

1881.

RIDEL SAILLARD (G.). De la cachexie pachydernique

(myxoerlème des auteurs anglais.) Thèse de Paris.

D'OL»n (IL). - De la coexistence de l'hystérie et de l'épi-

lepsie avec manifestations distinctes des deux névroses

considérées dans les deux' sexes et en particulier chez

l'homme. Mém. qui a obtenu le prix Esquirol. (Annales médi-

co-psycholog., sept. 1881) et tirage à part aux bureaux du

Progrès Médical). -

SADR AIN (G.). - Etude sur le traitement des attaques

d'hystérie et des accès d'épilepsie. In-8° de 56 p. Th. de Paris.

IIUSr.>; (M.). - Recherches cliniques et thérapeutiques sur

l'épilepsie. Mono-bromure de camphre, de zinc, de sodium.

Thèse de Paris.

Moreot (E ). Sur une forme grave de l'épilepsie. Thèse

de Paris. -

COULBAUT (G.). - Des lésions de la corne d'Ammon dans

l'épilepsie. Thèse de Paris. -

Travaux faits dans LE service. 195

1882.

BRICON (L.). Du traitement de l'épilepsie : Hydrothéra-

pie. - Arsenicaux. Magnétisme minéral, Aimants. Sels

de pilocarpine, etc. Thèse de Paris.

Roux (G.-L.). Traitement de l'épilepsie et de la manie

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WutLLAMfER (Th.). - Le l'épilepsie dans l'hémiplégie

spasmodique infantile. Thèse de Paris.

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1887.

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TIIIIiAL. - Contribution à l'étude de la sclérose tubéreuse

ou hypertrophique du cerveau. Thèse de Paris.

PEXASSE. - Contribution à l'étude des méningites chro-

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Pison. - De l'asymétrie /'ro9fo ? acta ! e clans l'épilepsie.

Thèse de Paris.

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Cornet (P.). - Traitement de l'épilepsie. Bromures d'or et

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GOTTSCHALK (A.). Valeur de l'influence de la consan-

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Sollier (P.). - Du rôle de l'hérédité dans l'alcoolisme.

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LEBRETON. - De la sclérose en plaques chez les enfants.

Thèse de Paris.

DENIS (C.). - Elude sur un cas anormal de perforation

crânienne congénitale. Thèse de Paris.

Primé (J.). Des accidents toxiques produits par l'éosirzate

de~sodium. Thèse de Paris.

GILLET (Th.). Élude du rôle de la consanguinité dans

l'étiologie de l'épilepsie, de l'hystérie, de l'idiotie et de l'im-

bécillité. Thèse de Paris.

1901.

PAREÙR (P). - Purpura dans t'Épilepsie ? Thèse de Paris.

Robin (E.) - Contribution à l'étude des malformations

dentaires chez les idiots, hystériques et épileptiques.

Thèse de Paris.

Liste des Internes de notre service (1880-1901).

Liste des Internes de nuire service (l88(I-I ! 101)

EXPLICATION DES PLANCHES

1'.11jl. 14

202 Explication DES PLANCHES.

Planche I.

Malade chez lequel il n'y avait qu'une impotence mnscu-

laire légère. La marche était facile el nullement rilc)(11liée.

Bourneville, liicûlrc, 1901. l'i.. 1.

204

EXPLICATION 1JES Pi,.%NcHEs.

Planche 11.

Ces fémurs appartenaient au malade représenté sur la

Pi anche ]JIt"cédcnlc di. Un remarque : i

1°) Lne plus grande ouverture de l'angle cervico-diaphy-

sairc sur l'os malade ; '

2°) L ne surface noircie non envahie par le système muscu-

lairc 1(;galclllCnt SUI' l'os malade) ;

3°) Une atrophie de l'os malade très peu marquée. La dif-

férence entre les pilastres est peu sensible. '.

BOCR ? LE, Lio(rt, I;), 1. 1'1.. Il

: 2( : (i Explication les planches.

Planche 111.

Sujet chez lequel l'hémiplégie (''[ait 1res accentuée : atrophie

consiclor.cblc, ulninismc,clc. L;mnarclnt (·I;it clil'ficilc cn raison.

dccssmoditicatifins.

Le malade, représenté au repos, s'appuie sur le membre sain.

130URNIL\'ll.l.l : . Ilicïloc, 1901. PL. 111.

i.'08

EXPLICATION1 les planches.

Planche IV.

Fémurs du malade précédent.

On voit

1°) L'atrophie de l'os malade ; ? °) L'ouverture plus grande de l'angle cpnico-diaphysail'e

sur l'os malade ;

3°) L'écartement des deux lèvres (le la ligne Apre sur l'os

malade ; leur rapprochement sur l'os sain ;

4°) La saillie apparente du condyle interne de l'os patholo-

tique ;

5°) La différence des courbures ;

6°) Une courbure sus-condylienne à convexité interne, qui

transforme la direction de l'axe condylien, et est la cause de

la saillie condylienne interne. f

10TA. - Ces os ont une direction fantaisiste.

Io : avcu.t.n, l31c ! Iw, 1`JO1. Ili.. 1\-.

10 Explication des planches.

Planche Y,

A remarquer'sur celle planche :

1° Il reste sur l'os malade un espace (cerclé de noir) qui

était inoccupé ;

2" Le pilastre est plus accentué sur l'os sain ; .

3° La face est plus large sur l'os sain ;

40 Sur l'os sain, le pilastre présente une convexité postérieure.

Bourneville, Bici'lre, 1901. - PL. V.

121-2 1- : \ : 1'1.10110 : -1 N 1) 1,,S PLANCHES.

Planche l.

On voit :

1° Que l'os malade est atrophié ;

2° Que son pilastre est moins saillant ;

.3" Que sa courbure antero-posterieure est à peine marquée ;

le contraire existe sur l'os sain ;

4" Que la bifurcation de la ligne Apre est située pins haut

sur l'os malade ; ? Que la convexité postérieure du pilastre est plus nette

sur l'os sain.

Bourneville, Bicêtre, 1901. PL. \'1.

214 EXPLICATION des planches.

Planche VII. l.

Ces fémurs sont en position, c'est-Ù-dil'e que leurs deux

condyles reposent sur un plan horizontal. On voit alors que

le condyle interne, au lieu de faire saillie connue sur la Plan-

che IV (os malade), se place au même niveau que l'externe ;

nmui, I'mc cliallysairc csl nuolilié cC s'ulminc clc I : v,rlials.

Le petit trochanter .semble plus volumineux sur le fémur

malade, parce que l'aplatissement yLilyuerilnc, qui le mas-

que en partie sur l'os sain, n'existe pas.

Bourneville, Bicêtre, 1901. ]Il.. nI.

- 216 Explication DES planches.

Planche \ 111.

; Les os sont en poiilion.

On voil :

1° La variation des angles du col ;

2° La différence des courbures : : ;)0 L'atrophie de l'os malade ;

4° Par comparaison avec la I'lvnche h : I\ , qui représente les

mêmes os, non en position, la disparition de la saillie appa-

rente du condyle interne au côté malade.

Bourneville, l31céi'c, 1901. ? Pl,. VIII.

Us sain. Os malade.

130L;11\E'ILLE, Bicetl'l', 1901. 1;

218 Explication DES planches.

' PLANCHE']\ : ,

j

i 1° Ces os n'étant pas en position, le condyle interne (côté

malade) semble plus saillant ;

2° Les éléments de la ligne Apre restent écartés sur l'os ma-

lade et la bifurcation s'y l'ail par conséquent à un niveau très

élevé.

3u Il y a, comme sur la planche IV, une courbure sus-con-

. dyliennc sur l'os malade.

130URNEVILLE Bicêtre, 1901. . PL. Il.

212() EXPLICATION DES PLANCHES.

Planche X.

Ces os ayant appartenu à un sujet q ni, pa l' su ile des circons-

tances, marcha pcn, l'crs.ain ayant donné attache un système

musculaire peu actif, est peu différencié de l'os malade.

Bourneville, Bicêtre, 1901. l'i. X.

222 « Explication DES planches

Planche \.1.

Sur ce fémur malade, la plfllYl1ll'rip est incomplète. Le sys-

tème musculaire n'a prodllit l'agrandissement, ((lie de la

moitié externe de la face antérieure. La moitié interne présente

une dépression atrophillue (teintée sur la planche).

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1901. . PL. XI-

226 . EXPLICATION DES PLANCHES.

Planche zizi. - ' !

Pour la même raison que sur la Planche XII, le petit tro- :

chanter semble plus saillant du côté malade.

Bourneville, Bicêtre, 1901. Pl. XIII.

228 Explication des planches.

Planche XIV. z

Idiotie mongolienne,

(Obs. de Conn..., il 130)

l3ot;aevc ? F, 131eêt'e, 1901.

PL. \1.\.

230 Explication des planches.

Planche \T.

(le 13o\1ch..., P. 15 1.)

Face convexe de l'hémisphère cérébral gauche.

L0, lobe orbitaire.

't, F2, F3, première,, seconde et troisième circonvolutions

frontales.

FA, frontale ascendante.

PA, pariétale ascendante.

S 11, sillon de Rolando.

S, extrémité du lobe temporal en partie détruite par la lésion

et laissant en partie à découvert le lobule de l'insula.

Sc p, scissure parallèle.

Tel, 1'=", Ta, circonvolutions temporales.

P1, pli pariétal supérieur.

P2, pli pariétal inférieur. ,

PC, pli courbe.

LOC, lobe occipital.

232 .. EXPLICATION DES PLANCHES.

PUNCHE XVI. 1. '

(Obs. de Bouch..., p. 151.)

Face interne de l'hémisphère cérébral gauche.

1 ? première circonvolution frontale. (La lettre F1, placée en

arrière, ne répond pas il la première frontale, mais au coin,

qui aurait dû être marqué e.);

CC, corps calleux.

CGC, circonvolution du corps calleux.

La lige indique le (lu parus, parlant du bord supé-

rieur de l'hémisphère et aboutissant au ventricule latéral.

Bourneville, Bicêtre, 1901. Pr.. XVI

BoUwrwr.r.e. Bicêtre, 19ü(. Hi

TABLE DES MATIERES

PREMIÈRE PARTIE

Histoire du service pendant l'aunée 1 J01.

SECTION 1 : llicêtl'C.

I. Situation du service. - Enseignement primaire.. III

10 Enfants idiots, pâteux, épileptiques ou

non, mats INVALIDES (Bâtiment Béguin) .. III

20 Enfants idiots, pâteux ou non gâteux,

épileptiques ou non, mats VALIDES (Petite

Ecole)................................... , VI

3° Traitement 172éclieo-hécl<gogique : Résul-

tats.................................... vu

4° Petite école complémentaire......... ? x

50 Enfants propres et valides, imbéciles,

a1'rié7·és, instables, pervers, épileptiques

et hystériques ou non (Grande école).... xx

Certificats d'études obtenus ............. xx

Enseignement du chant.................. XXII

Enseignement du dessin. , ............... xxv

Gymnastique............................ xxv

Escrime................................. xxvi

Danse................................... xxvi

Société de gymnastique.................. xxvi

Fanfare et orphéon...................... XXIII

Musée scolaire.......................... XXVII

Enseignement par les projections........ XXAIII

Promenades et distractions.............. xxxiv

Caisse d'épargne........................ xxxvi

Visites des enfants...................... xxxvi

Vaccination et revaccination. Service den-

taire. Bains et hydrothérapie........... xxxvil

Améliorations diverses................... xi

UOUIlNEVILLE, Bicêtre, 1901. 6

234

Table DES matières.

Visites du service ....................... xLI

Musée pathologique..................... XLIV

IL Enseignement professionnel................... XLV

Évaluation du travail des enfants........ XLII

Enumération des produits fabriqués par

les ateliers............................ CLVIII

111. Statistique. Mouvement de la population........ LI

Tableau générât ........................ LII

Décès, Sorties ......................... ni

Tableau des décès ...................... LIv

Tableau des sorties ..................... LX

Évasions, Transferts .................... LXVII

Maladies infectieuses.................... LXVII

Teigne................................. LXVIII

Maladies intercurrentes................. LXIX

Population au 31 décembre 1901......... LXXII

Personnel du service en 1901............ LXXII

Service scolaire......................... LXXII

Enseignement professionnel............. XLII

Service hospitalier...................... LXXIII

Appendice : Enseignement populaire des scien-

ces naturelles. Leçons de choses....... LXXV

Arrêté relatif à la nomination du pro-

fesseur de dessin....................... LXXIII

SECTION II : Fondation Vallée.

L Situation du service. - Enseignement primaire.. LXXIX

1 Enfants idiotes et gâteuses............ LXXX

2 Enfants idiotes, imbéciles, épileptiques,

etc., VALIDES. Enseignement primaire et

enseignement professionnel ........... LXXXIV

Enseignement du dessin................. LXXXVI

Enseignement du chant................. LXXXVI

Danse................................... LXXXVIII

Enseignement professionnel............ LXXXIX

Visites, permissions de sortie, congés... XCI

Promenades, Distractions ............... XCI

Améliorations diverses ................... xcn

Teigne.................................. xoi

Maladies infectieuses.................... xcIII

Maladies intercurrentes ................. xciii

Vaccinations et revaccinations .......... xcm

Bains et hydrothérapie .................. LXI

TABLE DES MATIÈRES. 235

II. Statistique. - Mouvement de la population..... xcv

Tableau général......................... xxv

Décès, Sorties, Evasions, Transferts..... xcv

Population au 31 décembre 1900.......... xcv

Tableau des décès....................... xcviii

Personnel............................... XCVIII

Tableau des sorties...................... en

SECTION III. - Assistance et enseignement.

Classes ou Écoles spéciales pour les enfants arriérés.

I. Communication il. la Commission de sur-

veillance des asiles d'aiénés de la

Seine ................................. cv

Ecoles spéciales pour enfants anormaux ;

par le D Samuel FORT................. CVII

Classes spéciales dans les écoles pour

jeunes débiles mentaux, par le Dr CHAN-

NING ................................... CXXV

I. Assistance, traitement et éducation des

dégénérés, par Bourneville ........... CXXXIV

II. L'Assistance des idiots, imbéciles et arrié-

rés.................................... CXXXVII

III. Placement des aliénés, des épileptiques,

des enfants arriérés, etc............... cxxxix

IV. L'Assistance des épileptiques ............ CXL

V. Les aliénés en liberté : attentat contre le

D Loir................................ CxLIII

DEUXIÈME PARTIE -

Instructions médico-pédagogiques.

Antécédents............................. cxLVII

Etat actuel.............................. en

Définition............................... CLVI

Troubles de la parole.................... CLVIII

Appendice .............................. CLX

TROISIÈME PARTIE

Clinique, thérapeutique, anatomie pathologique.

1. Nouvelle contribution à l'étude de l'épilep-

sie vertigineuse et à son traitement par

le bromure de camphe; par BOURNEVILLE

et Ami3. £ RD ............................. 3

P36 Table DES matières.

II. Réflexions sur la puberté àpropos des deux

premières observations ; par BounNE-

VILLE ................................. 24

III. Contribution iL l'étude de l'idiotie morale

et en particulier du mensonge comme

symptôme de cette forme mentale ; par

BOURNEVILLE et J. Boyer 25

IV. Considérations anatomo-cliniques sur les

rapports de l'impotence musculaire et de

certains troubles osseux dans l'hémiplé-

gie infantile ; par BounNEVILLE et Paul

BoNCOUR 41

V. Des hémorrhagies de la peau et des mu-

queuses pendant et après les accès

d'épilepsie et de leur analogie avec les

stigmates des extatiques ; par Bamum-

ville 84

VI. Idiotie symptomatique d'une sclérose atro-

phique limitée aux circonvolutions du

coin gauche; par BOURNEVILLE et CROU-

ZON ................................... 90

VII. Idiotie du type Mongolien, par Boun-

NEVILLE............................... 136

VIII. Etude histologique de deux cas d'idiotie

du type « Mongolien » ; par Philippe et

Oberthur 148

IX. Porencéplialie vraie de l'hémisphère gau-

che ; pseudo-porencéphalie des deux

hémisphères ; par BOURNEVILLE et More l. 1'l

Hypothermie. 1G7

X. Folie de l'adolescence 170

Appendice.

XI. De l'emploi de la subvention départemen-

tale spéciale aux Écoles d'enfants arriérés,

aux Ecoles d'intirmiers et infirmières et

aux Bibliothèques des services d'aliénés

de Bicêtre et de la Salpêtrière. Note

adressée it M. Mourier, par BounNEVILLE 175

Explication DES planches 201

Imp. des Enfants de Bicêtre.