RECHERCHES
SUR
L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE
ET L'IDIOTIE
PUBLICATIONS DU PROGRÈS MÉDICAL
RECHERCHES
CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES
SUR
L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE
ET L'IDIOTIE
COMPTE-RENDU DU SERVICE
DES ENFANTS IDIOTS, ÉPILEPTIQUES ET ARRIÉRÉS DE
BICËTRE PENDANT L'ANNÉE 1896
PAR
BOURNEVILLE
Avec la collaboration de
MM. METTETAL, NOIR (J.), REGNAULT, RELLAY
VAQUEZ ET BOYER(J.)
Volume XVII
Avec 41 figures dans le texte-et 9 planches.
9 14 3 5
FAILLIS
AUX BUREAUX DU
PROGRÈS MÉDICAL
14, Rue des Carmes, 14.
FELix ALCAN
ÉDITEUR
108, Boulevard Saint-Germain, 108.
1897
PREMIÈRE PARTIE.
Histoire du Service pendant l'année 1896.
(Bicétre et Fondation Vallée).
Bourneville, Bicêtre, 1896. *
PREMIERE PARTIE
Section I : Bicêtre,.
Histoire du Service pendant l'année 1896.
I.
Situation du SERVICE. Enseignement primaire.
Les enfants de la 4° section du quartier des aliénés
de l'hospice de Bicêtre sont répartis en trois groupes :
1° Les enfants idiots, gâteux, épileptiques ou non,
mais invalides ; 2° les enfants idiots gâteux ou
non, mais vAr,tul : 7 ; - 3° les enfants propres, valides,
imbéciles, arriérés, instables, pervers, épileptiques
et hystériques ou non.
I. Enfants idiots gâteux, épileptiques ou non,
mais invalides. - Ce premier groupe est subdivisé
en deux catégories. La première se compose des en-
fants idiots complets, ne parlant, ni ne marchant,
considérés généralement, mais à tort, comme tout à
fait incurables. En effet, la plupart d'entre eux sont
susceptibles d'amélioration, même à un degré très
IV Enfants IDIOTS complets.
notable. On leur apprend se tenir debout a l'aide
de barres parallèles (1), à marcher soit en les tenant
sous les bras, soit a l'aide du chariot; on fortifie leurs
membres en exerçant successivement chaque jour et
à plusieurs reprises toutes les articulations (exercices
des jointures), en leur faisant des frictions stimu-
lantes, etc... En 159G, ') enfants ont appris à marcher
('2) ; 4 ont été rendus propres ( : ),) ; (; ont appris il man-
ger seuls (4). Dès qu'un enfant marche sans aide, il
est envoyé à la petite école, d'abord le matin, puis
toute la journée, aussitôt que ses forces le permettent.
Tous ces enfants sont placés sur les petits fauteuils
spéciaux que nous avons décrits, à l'usage des gâteux.
La seconde catégorie comprend les idiots absolu-
ment incurables, en beaucoup plus petit nombre
qu'on ne le croit d'habitude, et les épileptiques de-
venus déments et gâteux sous l'influence des accès
ou des poussées congestives qui les compliquent; ils
ne peuvent plus être que l'objet de soins hygiéniques
et devraient former un groupe spécial. Aussi essayons-
nous de faire aménager pour eux l'un des sous-sols
encore disponibles où ils seront réunis et surveillés
durant le jour. Cette installation, qui est en train
depuis deux ans et ne s'achève pas, nous servira égale-
ment pour d'autres enfants, qui nous arrivent tardi-
vement, u 1'I, I Ï>, li ans, dont l'incurabilité est recon-
nue et que nous sommes obligé, aujourd'hui, de main-
tenir dans les écoles où ils sont une occasion de trouble
et qu'ils contribuent à encombrer sans aucun bénéfice
pour cux. -
II. Enfants idiots, gâteux ou non gâteux, épilep-
tiques ou non mais valides (l'élite école). Ces
(II Voir Comptc-rentln de 18Si, {iO. l, p, II.
(2) Krièg ? U.-iud ? BIulli...
1 : 1) Joeg ? (¡IIY ? l'dl ? Ot ! ...
(1) IJouIl",TuuOllr ? Jeo'" JJerlr ? Cu ? l'elo...
Petite école. V
enfants fréquentent la petite école confiée exclusive-
ment à des femmes. Dans le courant de l'année, 231
y ont été inscrits. Sur ce nombre 2 sont décédés, 8
sont sortis définitivement, 20 sont passés à la grande
école, 4 ont été envoyés dans les sections affectées
aux adultes et 5 ont été transférés.
Sur 180 enfants qui restaient à la petite école au 31
décembre 1890, 10 ne mangent pas seuls, G4 se servent
de la cuiller, GO de la cuiller et de la fourchette, 40
de la cuiller, de la fourchette et du couteau. 7 enfants
gâteux, de ce groupe, sont devenus propres (1). Dix
enfants ont appris à manger seuls (2). Tous les enfants
sont exercés à la gymnastique Pichery, sauf ceux qui,
venus du groupe des invalides étant encore trop
infirmes, n'ont pu y prendre part.
Vingt enfants de la petite école et de la petite école
complémentaire ont fait régulièrement les exercices
de la grande gymnastique. - 20 enfants ont travaillé
cette année dans les différents ateliers : tailleurs,
cordonniers, vanniers, menuisiers.
La petite école comprend : 1° le traitement du
gâtisme qui consiste il placer, après chaque repas, les
enfants gâteux sur les sièges d'aisance que nous avons
décrits dans l'un do nos Compte-rendus précédents (3),
les leçons de toilette qui consistent il apprendre aux
enfants à se laver la figure et les mains et à s'habil-
ler ; - 3° les exercices pour l'éducation de la main,
des sens et de la parole ; - 4° les leçons de petite
gymnastique; - G" les exercices élémentaires relatifs
à\' enseignement primaire dont nous avons si souvent
parlé dans nos Comptes-rendus de 1880 à 1895.
Petite école complémentaire. - Elle est confiée à
(I) IIoquin ? I'enuu ? \'err ? \\'ill ? l'von ? \I;ir... (Gaston), Iloulje...
p : ) \'at ? Ley ., I)ecult ? Sclmeid ? G;tu ? l3auV ? : llnss ? Desbar ?
Dupon ? Riclia...
(3) Le matin, au lever, le soir, ail coucher, les enfants gâteux sont placés
sur les sièges installés jiour rebut dans leurs dortoirs. s.
VI Petite école complémentaire.
une femme dévouée, 11'11" Bonnet, qui s'est mise géné-
reusement à notre disposition. Elle est aidée par une
première infirmière, \I ? Cordonnier, qui a également
la surveillance de l'un des dortoirs où couchent les
enfants de cette école. Aux 40 enfants qui y étaient
présents le IL, janvier 1896, nous en avons ajouté 10
autres au mois de novembre, ce qui porte à cinquante
le nombre des enfants présents à cette école. M ?
Bonnet a, on outre, pour surveiller les cnfants deux
infirmières et deux jeunes malades arriérées do la
Fondation Vallée, Briss... et dont, elle amé-
liore d'ailleurs l'instruction.
Trois enfants ont été rendus propres :
1° G'se.. (René), pris à son arrivée très gâteux et jouant
avec ses excréments, est tout rat fait propre aujourd'hui et sait
exprimer ses besoins; cet enfant qui ne comprenait pas un
mot, qui ne semblait ni voir, ni entendre, comprend et dit
presque tout.
2° Sélèg... (Armand), qui urinait fréquemment dans son
pantalon, ne se salit plus du tout. Cet enfant qui n'avait
aucune notion classique, ne connaissait ni lettres, ni chiffres,
ne savait môme pas tenir un crayon, commence à écrire,
même à assembler quelques lettres, a et à compter.
La mémoire et l'attention, qui semblaient nulles, se sont sen-
siblement développées dans ces derniers mois.
3° Tliiri... (Jules), dont l'intelligence était absolument fer-
mée, qui se balançait continuellement d'avant en arrière,
qui, toujours, était solitaire, se un mutisme
volontaire dès qu'on s'occupait de lui, qui, de plus, était très
gâteux, est arrivé a aller de lui-même au siège lorsqu'il en
éprouve le besoin. Il communique un peu avec ses camarades
et répond assez souvent aux questions que lui adresse son
institutrice.
Sept enfants ont été améliorés pour la parole :
Il Laur... (Marcel) qui, il y a Il ans, disait avec peine :
papa, maman, bobo, prononce maintenant a peu près tous
Petite école complémentaire. vu
les mots, néanmoins l'articulation est encore défectueuse ;
cet enfant est resté longtemps écliolalique, ce qui n'existe
plus aujourd'hui. Il était également atteint de turbu-
lence, aujourd'hui il se lient assez tranquille en classe,
fait des bâtons sur l'ardoise, connaît les couleurs, les surfaces,
compte jusqu'à 10, lace, boutonne, s'habille et se déshabille
seul.
2° Sterling... (Paul), atteint d'idiotie avec turbulence, n'a
plus sa monomanie de fugues. Qucnt il la parole, son voca-
bulaire, qui était très-restreint, augmente chaque jour.
3° Guim.... (Henri), pris à son arrivée, était sujet à de vio-
lents accès de colère. Un n'employant avec cet enfant que la
patience et la douceur, on est arrivé à supprimer presque
complètement ces accès ; il est assidu en classe, assez docile,
montre beaucoup de bonne volonté, mais comme il est très-
mal doué, les progrès sont lents. La parole surtout s'est
modifiée, grâce à de nombreux exercices d'articulation.
4° Bobliq... (Maurice), demi-sourd, pris à son arrivée, il y a
4 ans, n'entendait que les sons, ne comprenait le sens d'aucun
mot; aujourd'hui il peut converser avec tout le monde, lit
sur les lèvres et l'audition semble avoir beaucoup gagné.
Il fait la dictée avec ses camarades, apprend des leçons, fait
des rédactions, des problèmes. L'articulation devient chaque
jour meilleure. Il va à l'atelier de menuiserie où il apporte
beaucoup de goût et d'adresse.
5° Thier... (Paul), sourd-muet, renvoyé de l'école d'Asniè-
res, possède un vocabulaire de cent-vingts mots, fait de
petites dictées sur les lèvres, l'addition, la soustraction.
6, et 7° Cam.... et Lem.... (G.) qui, il y a trois ans, ne pro-
nonçaient aucun mot, continuent à s'améliorer d'une façon
remarquable.
Cinq enfants ont appris à lire couramment :
1° Bel... (Charles), atteint d'instabilité mentale avec perver-
sion des instincts.
2° Derep... (Louis), atteint d'arriération intellectuelle. -3°
Cuizin... (Pierre) atteint également d'arriération intellectuelle.
Ces trois enfants lisent couramment, font des dictées, des
exercices, et les deux premières opérations.
VIIr Petite école complémentaire.
4° Prim... (Frédéric). Cet enfant dont on avait constaté l'in-
telligence paresseuse, l'esprit obtus, qui ne paraissait songer
qu'à boire, manger et dormir, a réalisé de sensibles progrès,
tant au point de vue du développement que du caractère et de
l'intelligence. Il ne dort plus jamais dans la journée; il fait
maintenant de longues promenades sans se plaindre de la
fatigue, et prend part aux jeux de ses camarades ; il est aussi
moins sensible au froid, mange avec appétit, mais n'a plus
cette voracité, qui forçait à le surveiller constamment sous
peine d'indigestion. Le caractère est plus ouvert, plus gai,
moins colère. Il lit couramment, fait de petites dictées, se
rend bien compte des quantités représentées par les chiffres,
écoute avec attention les leçons orales et répond bien aux
questions.
5- Jes... (Edouard), qui n'avait rien appris jusqu'en juin
1895, époque à laquelle il fut confié il ? lIme Bonnet, lit aujour-
d'hui couramment, a quelques notions de grammaire et de
géographie, compte jusqu'à .">0 (esprit très fermé pour le cal-
cul). Il travaille avec goût, tandis qu'autrefois il pleurait dès
qu'on entrait en classe. Cet enfant a besoin d'être toujours
encouragé : au moindre signe d'impatience, à la plus légère
remontrance, il ne comprend rien et ne sait plus rien faire.
Chez tous les élèves de cette école signalés l'année
dernière comme lisant couramment, l'intelligence con-
tinue à s'éveiller sensihlement, En même temps on apu
faire germer chez certains d'entre eux quelques
notions de morale. Actuellement il y a dans la
classe de Dt ? Bonnet, douze enfants, qui, pris à leur
début, ne savaient absolument rien et qui mainte-
nant font tous les devoirs donnés journellement dans
les écoles d'enfants normaux, c'est donc surtout par
eux qu'il est possible de montrer aux plus sceptiques
la possibilité de transformer intellectuellement des
enfants réputés idiots. Ces résultats sont dus au dé-
vouement et aux aptitudes éducatriecs de l'lllles Bon-
net et Cordonnier. Toutes deux, dans le cours de
l'année, ont préparé courageusement les matières du
programme du brevet de capacité et ont suhi les exa-
mens avec succès. Elles ont donné la un hel exemple.
Puisse-t-il avoir des imitateurs et des imitatrices !
Grande école. IX
III. Enfants propres et valides, imbéciles, aJ'J'ié-
rés, instables, percées, épileptiques et hystériques
ou non (Grande École). - La population de cette
école était de '21-'1 enfants au premier janvier. Tous,
sauf 10 qui ne peuvent travailler, ont fréquenté les
ateliers par grande série. 18, ayant le certificat d'é-
tudes, forment une division supérieure, ne vont à
l'école qu'une demi-journée par semaine et restent à
l'atelier toute la journée. Les autres enfants sont
répartis en quatre classes (7u, 44, 30, 40 enfants).
Aux examens clu certifient d'études qui ont eu lieu
à Ville-juif le 4 avril, deux enfants do Bicêtre (Gom...
et Rat ..) ont subi les épreuves avec succès (1).
Cette année encore, nos instituteurs et leurs aides,
ainsi que des sous-employées attachées aux éco-
les, afin d'être mieux en mesure d'améliorer la pro-
nonciation des enfants et de développer leur parole,
ont été envoyés successivement, par séries, au nombre
d'une vingtaine, à l'Institution nationale des sourds-
muets. Nous profitons de l'occasion pour remercier
M. Délias, directeur, et M. Dubranlo, censeur, du con-
cours qu'ils veulent bien nous prêter chaque année.
Enseignement du chant. - Cet enseignement est
fait par M. Sutter depuis le 1"' janvier 1895. Confor-
mément à nos instructions, il s'est occupé successive-
mont de tous les enfants. Il a réparti ceux de la petite
école et de la petite école complémentaire en deux
sections et ceux de la grande école en trois sections.
Aucun d'eux ne savait lire la musique et ne possédait
de notions sur la théorie musicale, sauf une demi-
douzaine d'enfants appartenant a la fanfare. Presque
tous les enfants savent, aujourd'hui, lire eux-mêmes
les notes, en connaissent la valeur, et possèdent les
(1) Au morne examen 3 infirmières et 24 infirmiers de l'École municipale
d'infirmiers et d'infirmières de Bicètre ont également obtenu le certificat d'é-
tttdes.
x Enseignement du chant.
notions élémentaires de la théorie de la musique.
Quand les enfants sont suffisamment avancés pour
bien lire un morceau de chant et l'apprendre avec
fruit, on leur fait chanter des choeurs il deux, puis à
trois parties.
En maintes circonstances, nous avons réuni les peti-
tes filles de la Fondation Vallée avec les garçons do Hicé-
tre et nous les avons fait chanter ensemble dans les
choeurs. Tous les six mois nous faisons relever l'éten-
due et le timbre de la voix des enfants. Ce travail nous
fournira, croyons-nous, des renseignements intéressants
sur la mue de la voix au moment de la puberté. Ces
recherches avaient déjà permis do constater, l'an der-
nier, que chez les épileptiques, qui sont dans leurs
périodes d'accès, le timbre de la voix devient moins
clair et moins sonore et que son étendue diminue par-
fois très notablement. La pratique de l'an 189G a con-
firmé ses constatations et fait voir aussi que, à la suite
des pratiques solitaires, la voix est également modi-
fiée. Le nombre des enfants qui participaient Ù l'ensei-
gnement du chant était de 274 à la fin de 1895 et de
385 à la fin de l'année 1896.
Escrime. Cet exercice s'est fait régulièrement
sous la direction de M. Loiseau, prévôt, jusqu'au 29
octobre, époque à laquelle ce militaire a dû, pour rai-
son de libération, céder sa place il son collègue, M.
Joly, qui s'en est acquitté consciencieusement jusqu'à
la fin de l'année.
Danse. - Les exercices de danse se font l'égnliè-
rement, mais toujours sans direction sérieuse. Nous
n'avons cessé de réclamer un nouveau maître depuis
plus de deux ans.
Instincts (il· : VI ? iIlUl.S 0\A\III ? j perversions
sexuelles, : IIl-fill ? \1. et éducation. Parmi les per-
versions des instincts, il en est qui n'ont aucun retcn-
Hygiène sexuelle. XI
tissement fâcheux sur l'organisme en général. Il n'en
est pas ainsi dos perversions de l'instinct sexuel. Elles
se rencontrent sous toutes les formes chez les enfants
des services spéciaux, chez les filles aussi bien que
chez les garçons. Rien n'est inconnu pour un certain
nombre d'entre eux. De là, la nécessité d'examiner ces
enfants de la façon la plus complète. Car si la con-
naissance d'habitudes vicieuses a une grande impor-
tance au point de vue de la santé physique et justifie
déjà pleinement l'examen complet de ces enfants, la
connaissance des troubles physiques engendrés par
l'onanisme solitaire ou il deux, par des rapports contre
nature, etc., fournit des indications précieuses au point
de vue do l'état moral des enfants, et conduit à pres-
crire une surveillance toute particulière, à employer il
l'occasion des moyens mécaniques, à ordonner certains
médicaments ou à pratiquer certaines opérations.
L'onanisme chez les idiots pourrait fournir matière
à un volume. Nous nous bornerons à quelques consi-
dérations générales que nous ferons suivre d'un rapide
exposé des moyens qui peuvent contribuer à com-
battre, à atténuer ou ci faire disparaître celle funeste
habitude.
On observe l'onanisme même dès les premiers mois
de la vie. Il est souvent provoqué par des irritations
locales, par le décubitus abdominal, la réplétion de
la vessie qui peut déterminer un certain degré d'éré-
thisme, par la constriction dos vêtements ; plus tard
par des vulvites, des balanites, de l'eczéma, des adhé-
rences du prépuce au gland, etc.. Tout d'abord l'enfant
porte inconsciemment la main il la vulve ou à la verge,
éprouve du fait de cet attouchement occasionnel une
sensation agréable et se trouve ainsi amené à recom-
mencer. L'onanisme devient alors une habitude chez
des enfants qui sont d'ailleurs sains. 6
Chez d'autres, cotte habitude peut être entretenue
\fI Hygiène sexuelle.
et aggravée par un état nerveux congénital, ou être ac-
quis il la suite (le convulsions ; alors il faut non-seule-
ment traiter l'onanisme proprement dit, mais la mala-
die nerveuse qui l'entretient.
« On a exagéré les suites de l'onanisme, dit M.
Christian, principalement en ce qui concerne les ado-
lescents et les adultes (1). » Toutefois notre conviction
en ce qui touche les enfants, est que son action nocive
est incontestable. « Ce qui est réel, ajoute l'auteur
précité, c'est l'influence exercée par certains états
pathologiques du cerveau. L'onanisme est commun
chez les idiots, chez les imbéciles, chez les crétins,
chez les épileptiques. Beaucoup de ces infirmes ne
doivent être séquestrés qu'à cause de leur salacité.
J'ai eu dans mon service, il Mareville, un jeune idiot
de seize ans, qui s'était rendu coupable de nombreux
attentats il la pudeur et qui se masturbait avec fureur ;
il avait un pénis énorme ».
L'onanisme chez des enfants sains, qu'il soit déter-
miné par des irritations locales, commc nous l'avons
dit, ou enseigné, s'il est répété et se perpétue, peut
amener un affaiblissement progressif des facultés intel-
lectuelles et morales et aboutir à l'imbécillité, même
à l'idiotie. Tel était le cas d'un enfant nommé Dupo..
que nous avons eu l'occasion d'observer pendant plu-
sieurs années, et qui rappelait dans ses grands traits
le Chariot de Bonnetain. Il peut aussi, soit qu'il y
ait ou non état héréditaire, déterminer dans certains
cas l'épilepsie.
L'onanisme chez les idiots et les imbéciles ou chez
les enfants atteints d'imbécillité morale, aggrave la
maladie d'une façon sérieuse.
Ainsi que l'a fait judicieusement remarquer M.
Christian, c'est l'épuisement nerveux qui joue le rôle
(1) Clrri,tiun.-rDiclirmnaireencclnpvlirne rles sciences médicales, article
olwnÍS1H('.
Perversions sexuelles. ' Nul
principal. « L'enfant, en effet, n'a pas de sperme et
cependant c'est chez lui que l'onanisme est le plus
désastreux, et d'autant plus désastreux que l'enfant est
plus jeune. C'est dans la première enfance que l'ona-
nisme mérite tous les anathèmes dont on l'a chargé,
c'est alors qu'il compromet directement la santé,
l'intelligence et la vie. Les tout jeunes enfants s'étio-
lent, pâlissent, deviennent stupides, engourdis, quand
ils ont cette fatale habitude. Le danger vient princi-
palement de ce que l'organisme n'a pas encore atteint
le développement nécessaire pour l'exercice do la
fonction génitale. »
L'onanisme étant une entrave puissante aux bons
résultats qu'on peut attendre du traitement médico-
pédagogique des enfants idiots et imbéciles, méde-
cins, instituteurs, institutrices, infirmiers et infirmiè-
res doivent prescrire ou prendre toutes les mesures
nécessaires pour les en guérir. Dans les familles on
ne saurait faire de recommandations trop pressantes
aux parents.
Il faut occuper sans cesse l'enfant, ne le laisser
jamais sans surveillance, le faire accompagner aux
cabinets, le faire coucher sur le dos ou sur le côté, de
préférence sur le côté droit, assurer la régularité des
garde-robes, voir si elles renferment ou non des
vers ; donner aux enfants des pantalons larges, sans
poches, varier les exercices scolaires, de façon à ce
que les enfants ne restent pas trop longtemps assis,
tenir les organes génitaux dans un état constant et
parfait de propreté ; remédier aux défauts de confor-
mation des organes génitaux, pratiquer la circoncision
chez les enfants atteints de phimosis, etc. On peut
recourir aussi, pour la nuit, il l'usagcdumanchon,d'une
chemise longue se fermant au-delà des pieds, de calc-
çons à ouverture placée en arrière et boutonnée (1).
(1) Il faudra aussi se métier de certains exercices de gymnastique, tels que
XIV Hygiène SEXUELLE.
On a conseillé aussi l'application d'un certain' nombre
d'appareils mécaniques dont l'utilité paraît fort dou-
teuse en tout cas et qui présentent a nos yeux le
a-rand inconvénient de faire diminuer la surveillance
par suite de l'excessive confiance qu'on a en eux. On a
prescrit encore un certain nombre de médicaments :
onctions d'huile camphrée ou opiacée sur le pubis, le
périnée, la partie inférieure de la colonne vertébrale ;
des anaphrodisiaques, camphre, lupulin, extrait de né-
nuphar, bromures alcalins, bromure de camphre, etc.
Quand il s'agit d'enfants adolescents devenus pubè-
res, il faut recourir aux grands moyens, user encore
plus chez eux que chez les précédents de la persuasion,
leur faire voir, si l'occasion s'en présente, les enfants
devenus malades à la suite de l'onanisme.
Ceux qui se sont occupés de l'éducation d'une façon
générale, ou en particulier de l'éducation des enfants
idiots, imbéciles et arriérés, se sont tous trouvés très
embarrassés en ce qui concerne les conseils à donner
lorsque l'enfant est devenu un adolescent vigoureux.
Pour ce qui est des enfants ordinaires nous nous
bornerons à quelques citations de J..1. Rousseau : « Si
les fureurs d'un tempérament ardent deviennent
invincibles, mon cher Emile, je te plains ; mais je ne
balancerai pas un moment, je ne souffrirai pas que la
lin de la nature soit éludée. »
« S'il faut qu'un tyran te subjugue je te livre par pré-
férence celui dont je peux te délivrer quoiqu'il arrive;
je t'arracherai plus aisément aux femmes top. »
« Quand la faiblesse humaine rend une alternative
inévitable, des deux maux préférons le moindre ; en
tout état de cause, il vaut mieux commettre unc faute
que de contracter un vice (1) ». -
la perche, la corde lisse et empêcher les enfants, surtout les 11 lies, de se met-
tre à cheval sur les genoux des personnes.
11) Le D'1'. Garnier dans son livre sur l'Onanisme /h. 18 ! 1 ct i ! )0) : litlne l' : m
doit prescrire le mariage aux jeunes filles atteintes de cette terrible manie,
Hygiène, sexuelle. xv
En ce qui concerne les enfants arriérés, Itard a eu
des scrupules, il a hésité devant le Sauvage de l'Avey-
7-on et il n'a pas osé donner à son élève là satisfaction
du besoin sexuel, de peur de provoquer de cyniques
manifestations. « Dans le cas de manie solitaire décla-
rée, on ne saurait, dit Séguin (1), être blâmé d'avoir
essayé d'un dérivatif plus moral et moins dangereux...
mais faisant la part du feu, qu'on n'oublie jamais que
c'est un feu qui consume et qu'il faut la lui- faire la plus
petite possible. » Dans son Rapport sur l'éducation
à propos de l'Exposition de Vienne de '1877, Séguin
revient encore sur cette question délicate : Conduite
à tenir de la part du médecin et de l'éducateur vis-
à-vis d'un adolescent en plein développement, et
tout en inclinant vers la solution physiologique, il se
tient sur la réserve et ne précise pas davantage ; nous
l'imiterons. '
Société de gymnastique. - Cette société continue
à fonctionner comme l'année précédente sous la direc-
tion de M. Grandvilliers. - Les enfants faisant partie
de la société, au nombre de 35, ont fait une promenade
à Robinson. Ils ont pris part, en outre, sous la direc-
tion de leur maître dévoué, M. Goy, à deux concours
de gymnastique. Au premier de ces concours, orga-
nisé par la ville de Vitry, ils ont remporté deux prix :
le premier pour les mouvements individuels, qui con-
siste en un magnifique volume offert par M. le Préfet
de la Seine, au non du Conseil général et ayant pour
titre : « Le Louv1'e et son histoire » ; le second pour
les mouvements d'ensemble et qui consiste en une
belle coupe offerte par notre ami, M. Alexandre
Lefèvre, sénateur de la Seine (2 août). Au deuxième
encore faut-il être prudeut, car il peut être inefficace, sinon meurtrier, chez
lés filles faibles, délicates, énervées, anémiées. Le commerce sexuel est aussi
prescrit aux jeunes gens; mais il faut y regarder à deux fois avec les jeunes
gens faibles, timides, etieminés et souvent tiliaplirodiles.
(1) Traitement et hygiène 'des idiots, p. 314.
X \"1 Gymnastique; fanfare. ,
concours, organisé à Villejuif, les enfants ont rem-
porté un prix d'honneur offert par le Conseil général,
consistant en un diplôme et une médaille en argent
doré grand module.
Ir<77 ? are. La fanfare a été placée sous la direction
de M. Sutter, professeur de chant. Elle se compose de
14 enfants. Elle a prêté son concours à la distribution
des prix aux enfants incurables de l'hospice d'Ivry (2;-)
juillet), a la distribution desprix del'Eeolc d'infirmiers
et d'infirmières de Bicêtre (7 juillet', il celle de l'Ecole
d'infirmières de la Salpetriero (28 juillet). Elle a égale-
ment accompagné la Société de gymnastique aux con-
cours de Vi try et de Gentilly.
Musée scolaire. Ce musée continue il servir aux
séances de projections, aux leçons de choses, aux lec-
tures récréatives. Il s'est notablement enrichi tant au
point de vue de sa bibliothèque qu'au point de vues
des ligures pour projection.
La librairie Hachette a fait don à la llibliollièque
de 20 volumes clu .lotr711 de la jeunesse, l'Adminis-
tration a acheté 40 nouveaux volumes de voyages et
de sciences.
Le 1 cr janvier le nombre des vues pour projection
était de 483, il la fin de l'année ce chiffre était porté
à ti : 3.` ? , soit une augmentation de 117 sur l'année der-
nière et se répartissant ainsi : 1'2 vues représentant
les parasites de l'homme, (i vues représentant le four
crématoire sous différents aspects, 12 vues représen-
tant les premières syllabes des tableaux que nous
avons faits avec M. noyer pour l'enseignement de la
parole ; 8 vues représentant les figures géométriques ;
14 les machines zut vapeur et 0 les funérailles chez
les différents peuples. En janvier le musée scolaire
recevait le modèle d'un navire, pourvu de tous ses
organes, construit et donné par un administré et sus-
Promenades et distractions. XVII
ceptible de servir à donner des explications très
claires aux enfants (Leçons de choses).
Société des jeux. - Les recettes (le la Société des
jeux se sont élevées pour l'année 188G, à la somme de
131 fr. 05 et les dépenses à celle de 104 fr. 65, l'excé-
dent des recettes est de 26 fr. 40. La société a fait l'a-
chat de 9 nouveaux costumes pour les déguisements
du Mardi-Gros et de la Mi-Carême.
Caisse d'épargne. - Elle est confiée à l'un des ins-
tituteurs, M. Mcsnard. Les recettes ont été pour cette
année de 218 fr. 80. 52 enfants ont versé pendant
l'année. Le nombre des nouveaux livrets retirés est
de 23, qui, ajoutés aux 98 retirés pendant les années
antérieures, forment un total de 121 livrets. Les som-
mes recueillies depuis 1892 s'élèvent à 1.110 fr. 05.
Promenades et distractions. - Les enfants de la
grande et de la petite école qui sont propres ont con-
tinué à faire des promenades soit à Paris, soit aux
environs. Dans ces promenades les instituteurs et les
institutrices doivent donner des leçons de choses et
exercer les enfants aux jeux de balle et de ballons.
Voici rémunération des différents endroits où ils ont
allés en promenade cette année : Arcueil, Avenue de
Choisy, Bois de Gournay, Cachan, Créteil, Fête de
la Place d'Italie, Fête du Lion de Ipclfort, Foire aux
pains d'épices, Fort do Bicêtre, Gentilly, Gare Mont-
parnasse, Jardin des Plantes, Jardin du Luxembourg,
Jardin d'Acclimatation (1), Lion de Belfort, Manufac-
ture des Gobelins, Musée de Cluny, Montrouge, Parc
de Montsouris, Place de la Salpêtrière, Place de
l'Hôtel de Ville, Place de la Nation, Porte d'Orléans,
Il) Nous profitons de l'occasion ponr remercier très-vivement la Direction
du Jardin d'Acclimatation qui veut bien, chaque année, sur notre demande,
autoriser nos enfants et les petites filles de la Salpêtrière, il visiter ce bel
établissement. t.
HUURNEVILLE, Bicêtre, 1896. **
xviii Distractions.
Robinson, Route do l'Hay, Square Cluny, Saint-
Mandé, Villcjuif, Vitry, etc....
Les distractions ont été nombreuses. A noter la
distribution de jouets du jour de l'an, donnés par
l'Administration ; les déguisements du Mardi-Gras et
do la Mi-Carêmc ; une matinée par les artistes de la
Gaitc-Montparnasso ; une séance de marionnettes,
continuée par une représentation dramatique, plu-
sieurs représentations gratuites dans divers cirques
installés il la Foire au pain d'épiées, la Fête du Lion
de 13clfort ot sur l'Avenue de Bicêtre. Les jardiniers
sont allés il l'Exposition de chrysanthèmes et à l'Expo-
sition d'horticulture. Les imprimeurs sont allés à
l'Exposition de lithographie ; ils ont visité aussi dans
tous ses détails l'Ecole Esticnne dont le directeur,
M. Frayssinet, a hicn voulu lcur expliquer le fonc-
tionnement.
Visites. - Les enfants ont reçu lO.ll;) ! ) visites; les
visiteurs ont été au nomhre de 10.014. Voici la sta-
tistique des permissions de sortie et des congés :
Bains et hydrothérapie. YINS
Elles rendent le séjour à l'asile plus supportable, et
contribuent Ù maintenir les liens entre les familles
et leurs enfants ».
Vaccinations et revaccinations. - Elles ont été au
nombre de 60 cette année, 10 en mars, 20 en juin et
30 en octobre. Comme d'habitude, elles ont été prati-
quées sous notre direction et celle de nos internes
par les élèves de l'École municipale d'infirmiers et
d'infirmières de Bicêtre. 14 infirmiers ou infirmières
ont été revaccinés.
Service deau'c. M. le D1' Bouvet a continué à
venir chaque semaine donner des soins à nos malades
au point de vue de la dentition et de l'hygiène de la
bouche et à relever chaque année les modifications
survenues dans la dentition des enfants. Nous n'avons
eu qu'a nous féliciter de son service.
Bains et hydrothérapie. Les bains et les douches,
joints à la gymnastique, à l'emploi des bromures, sur-
tout de l'élixir polybromuré d'Yvon, du bromure de
camphre dulD'' Clin, plus actif et plus absorbable que
les autres préparations similaires qui nous ont été
fournies par l'Administration, et des médicaments
antiscrofuleux, ont continué, comme par le passé, à
être la base du traitement en 189G. - Il a été donné
dans le cours de l'année 22.08 bains ainsi répartis :
XX Améliorations diverses. - .
Nous avons eu recours aussi it la médication thy-
roïclienne sur un plus grand nombre de malades que
par le passé. On trouvera l'exposé des principaux
résultats dans la deuxième partie de ce Compte-
rendu.
Améliorations diverses. Le traitement de M.
Mesnard, premier instituteur chargé de la direction
et de la surveillance générale des quatre classes au
point de- vue de l'enseignement, est porté de 2.100 fr.
à 2.h00 fr. Pour la petite école nous avons fait
faire un tableau divisé en deux carrés peints en rouge
et jaune destinés à l'éducation de la vue, à fixer
l'attention des idiots les plus malades, ce qui est plus
facile que le tableau qui renferme toutes les couleurs
et qui égare l'oeil de cette catégorie d'enfants, au lieu
de le fixer ; de plus avec ce tableau ils acquièrent la
notion de ces deux couleurs. Nous avons réclamé :
1" l'installation d'un moteur à gaz pour les enfants;
2° le prolongement du gymnase ; 3° la construc-
tion d'un préau couvert pour la petite école ; 4° la
reconstruction du parloir des familles.
Visites du service. La section a été visitée en
1890 par le D1' Athanassio (Alexandre), ancien interne
des hôpitaux (Bukarest) ; D1' Arnaud (le 13eanvoisin);
M0 Byasson; Dénierons de llaan, médecin de l'Uni-
versitc (1' U tredlt (Pays-Bas) ; 1)'" Crarnostow (de Var-
sovie) ; M. Carriot, directeur de l'enseignement pri-
maire de Paris et de la Seine; le professeur Cornil;
Dr Chyzer (Corneille), conseiller ministériel, chef de
la section sanitaire au ministère de l'Intérieur, mem-
bre de l'Académie Hongroise des Sciences (Budapest);
M. Doat (J.) ; D'' Guedovansi ; D'' GuédevanolT (A.)
(t.-I'tcrsJour); D'' Giovanni Spingazzini; Jorge
Vines; 1>'' Koenig'; D'' Luhrmann (F.), médecin à
l'asile d'aliénés de Drcsden; Loue John; Lehegue
(E.), chef d'institution ; Loys, chirurgien; Laporte,
Musée YATHOLOGIQTE. xxi
médecin-aide-major; May, chef de bureau à la direc-
tion de l'enseignement; D1' Mitassis (T.), ancien interne
de l'asile d'Athènes; Mazerolle (Louis), ingénieur des
ponts et chaussées; Nicdermann; i\I' Négroscoul
(Marie); D'' Pornain; Dr Planât (Xavier) (de Nice);
D'' Pirato; Dur Rivière, interne des hôpitaux
do Paris; le professeur lléuard (('.) ; Dr Régis (de
Bordeaux) ; Refortmatski (N. N.), médecin directeur de
l'hôpital des aliénés de Novosnamensk (Saint-Pélurs-
bourg) ; M" Soloviefl' (Mélanie), docteur en médecine
(de Saint-Pétershoury) ; D'' Séglas ; D'' Sans Fritz ; Dr
de Tornery, ex-interne des hôpitaux de Paris ; D'' Var-
riest, professeur il l'Université de Louvain ; Vervenno ;
- De même que les années précédentes, la Commis-
sion de surveillance des asiles de la Seine (2 juin) et
la Commission d'Assistance publique du Conseil géné-
ral (22 décembre) ont visité le service.
Musée pathologique. - Le musée s'est enrichi
notablement en 189G ainsi que le montre le tableau
suivant :
XXII Musée pathologique.
C'est cette pratique qui explique l'enrichissement
rapide de notre musée depuis l'année 1887. Le musée
reçoit en outre toutes les photographies des malades
décédés, leurs observations, reliées chaque année,
qui forment actuellement 34 volumes; les cahiers
scolaires que nous avons institués dès 1880 ; les pho-
tographies des cerveaux qui composent aujourd'hui
7 volumineux albums. Les visiteurs peuvent, au
moyen clu Catalogue que nous avons dressé, avoir
tous les renseignements désirables sur les pièces
anatomo-llatlioloiqucs du musée.
Toutes les richesses scientifiques, laborieusement
rassemblées dans le Musée, ont failli être détruites par
un incendie occasionné par l'imprudence d'un admi-
nistré chargé du chauffage du calorifère. Le feu a été
communiqué au parquet par l'intermédiaire d'une
bouche de chaleur. Le surveillant, M. Malençon, pré-
venu qu'une fumée épaisse s'échappait du laboratoire
situé à l'extrémité du Musée, courut se rendre compte
de l'accidcnt. En ouvrant la porte du Musée il fut
suffoqué par la fumée, faillit perdre connaissance,
mais eut l'heureuse idée de se coucher sur le parquet
et d'aller en rampant ouvrir une fenêtre. Aussitôt il
jeta quelques seaux d'eau et obstrua la conduite de gaz.
Grâce à son activité et au sang-froid dont il a fait
preuve dans cette circonstance, le feu a été circonscrit,
le musée et les 24 volumes d'observations relatives
aux pièces du Musée ont été sauvés. Nous n'avons
perdu que des volumes imprimés, une collection de
photographies de microcéphales, des notes, des impri-
més divers et malheureusement une des plus belles
observations de l'année relative à un malade du nom
de Delab... atteint d'idiotie et (l'épilepsie d'origine
traumatique, avec méningo-encéphalite et sclérose
consécutives.
Nous espérons que, à l'occasion, l'Administration
Enseignement professionnel. xxiii
voudra bien tenir compte à M. lllalenç.on du service
qu'il a rendu dans cette circonstance.
II.
Enseignement professionnel.
Cet enseignement a été dirigé en 18aG, comme les
années précédentes, par ? ID ! . LEl\oypourla 1nenuisel'Ïe
(1882-1896), Allène pour la couture (1883-1896),
Dumoulin pour la cordonnerie (1888-1896), MoniN
pour la vannerie, le paillagc et le cannue des chaises
(1889-1896), Mercier pour la brosserie (1888-1896),
Maréciiallat pour l'imprimerie (1889-1896), G. Gaie
pour la serrurerie (1895-1896). M. Mesnard a remplacé
pour le jardinage, l'ancien jardinier le 1 cr mars 1896,
Do môme aussi que les années précédentes, nous
n'avons qu'a les féliciter tous, non seulement pour le
zèle et l'intelligence qu'ils apportent chaque jour à
donner l'instruction professionnelle aux enfants,
mais encore pour la bonne direction morale qu'ils
savent leur imprimer.
Le tableau ci-après met en évidence les résultats
obtenus en 1895 par nos chefs d'atelier (p. xxiv).
Les travaux du jardinage seul ne sont pas évalués.
Il est en effet assez didicilc de faire une estimation
précise. Pourtant nous croyons que l'Administration
aurait intérêt a essayer d'en avoir une approximation.
Les sept maîtres - non compris le jardinier dont
le travail de ses apprentis et le sien dépassent assuré-
ment le salaire - sont payés à raison de 6 fr. 50 par
jour, soit pour l'année 1(i.GU i fr..p0. Cette somme étant
Enseignement professionnel. xxv
déduite de celle du travail des enfants (30.072 fr. 75),
il reste un bénéfice de 13.465 fr. (1). Le travail des
enfants couvre donc : .1° la dépense occasionnée par
le salaire de leurs maîtres ; 2° l'intérêt à 4 °/0 - taux
au-dessus du cours actuel du capital employé pour
la construction des ateliers (210.000 fr.) et, de plus,
il y a un bénéfice de 5.000 fr. qui vient atténuer les
dépenses d'entretien des enfants (2).
- Nous n'insisterons pas sur les avantages que pro-
curent ces ateliers tant au point de vue de l'intérêt
des malades qu'à celui do l'Administration. Nous
ajouterons seulement clu'il serait convenable, à tous
les égards, que nos anciens malades qui passent soit
aux aliénés adultes, soit aux incurables trouvent un
meilleur accueil dans les ateliers de l'hospice et que
les chefs de ces ateliers leur témoignent plus de
bienveillance.
Bien des fois, dans nos Compte-rendus annuels,
nous avons rappelé nos réclamations auprès de l'Ad-
ministration afin qu'elle récompense nos chefs d'ate-
liers en les admettant à jouir de la pension de repos
qu'elle accorde aux agents du personnel secon-
daire (3). On a invoqué contre notre demande les règle-
ments de l'Administration de l'Assistance publique
qui refusent au personnel payé au mois et non logé,
aux ouvriers à la journée, l'admission.à la pension de
repos, accordée à tous les agents du personnel secon-
(1) L'évaluation est faite non par nous, qui sommes incompétent, mais par
l'inspecteur du service d'architecture, M. Delahaye, et par.)I. Bru, économe
(2) Voir nos Comptes-rendus précédents et entre antres, 1892, p. XXI et
XXII; - 1883, p. XXI ; - 18'JS, p-. XIX; - 189a, p. XXV. -
(3) Lorque nous avons établi le programme de la construction de nos ate-
liers nous avions prévu au second étape des logements pour les chefs d'ate-
lier. Ultérieurement, nous appuyant sur les inconvénients qui résultent dans
les établissements hospitaliers du logement d'un grand nombre de personnes
dont la présence n'est pas indispensable, nous avons demandé que les chefs
d'atelier fussent logés au dehors où ils sont plus libres. Nous ne pensions
pas qu'on en tirerait argument contre eux pour leur refuser la pension de
repos.
XX\' ! Enseignement professionnel.
claire (surveillants, infirmiers, etc.) Nous avions beau
demander que cet avantage ne fut donné qu'au bout
de dix ans, à titre de récompense, nous n'aboutissions
il, aucune solution. A la visite de la Commission du
Conseil général en octobre 1895, nous souvenant que les
agents dits du service professionnel, et entre autres
les chefs d'atelier, étaient clans la plupart des asiles
de la Seine dans les mêmes conditions que les chefs
des ateliers des enfants, c'est-à-dire payés à la fin du
mois et logés au dehors et que néanmoins, ils avaient
droit à la. pension de repos, nous avons fait valoir
cette similitude de situation, insistant en outre sur ce
fait que notre service faisait partie non de l'hospice
affecté aux vieillards et aux infirmes, mais du quar-
tier consacré aux aliénés, en d'autres termes d'un
véritable asile. Ces nouveaux arguments, joints aux
anciens, ont apporté la conviction dans l'esprit de
quelques-uns des membres de la Commission. L'un
d'eux, M. L;rnest lorcc,u, a deposéau Conseil général,
avec l'appui de ses amis, la proposition suivante le 5
novembre 1895 :
Messieurs,
a L'hospice de Bicêtre possède un quartier d'asile et compte
il la section des enfants des chefs d'atelier, dont la situation
est inférieure à celles de leurs eollètnies des autres asiles de
la Seine. Leur salaire est moindre et ils n'ont droit à aucune
indemnité et il. aucune pension de retraite. Celle situation
nous parait anormale. Eu conséquence, j'ai l'honneur de
déposer sur le bureau du Conseil, au nom de plusieurs de mes
collègues, la proposition suivante :
« Le Conseil mènerai, délibère :
« Les chefs d'atelier de la section des enfants de Bicêtre
sont assimilés au point de vue du traitement et de la retraite
à leurs collègues des asiles de la Seine.
Signé : Ernest Moreau, Landrin, Cornet, Chausse, Ceorws
Girou, 1'icall, Aiioill-Tailfcr, Itclllus, Alfred Moreau, l'aul
Brousse, Champoudry, Louis Lueipia.
M. E. Moreau a demandé le renvoi à la 3° Commis-
Enseignement professionnel. 'XXVII
sion qui a été prononcé. Celle-ci a renvoyé l'examen
do cette proposition à la 5" Commission du Conseil
municipal. Celle-ci a chargé M. Navarre de rapporter r
cette affaire au Conseil municipal, ce qu'il a fait dans
la séance du 3 avril 1896. Voici l'extrait du Bulletin
municipal officiel du samedi 4 avril, qui nous inté-
resse :
M. Navarre au nom de le 5" Commission. - Nous avons
été saisis d'une demande d'assimilation des chefs d'atelier
de Bicêtre aux surveillants de t olassede l'Assistance publi-
que. La 5° Commission vous propose d'accueillir favorablement
celte demande; en conséquence, elle vous prie de vouloir
bien adopter le projet de délibération suivant : le Conseil
délibère :
H. Article Ynsotrn. - Les chefs d'atelier de Bicêtre rece-
vront, après 25 années de services dans cet établissement,
l'indemnité représentative de repos alloués aux surveillants
de 1 ? classc de l'Assistance publique.
« Ars. ? Pour les agents ne comptant pas 25 années de
services, une indemnité proportionnelle, en cas d'infirmités,
pourra être accordée, après dix ans d'exercice. Après six ans
d'exercice, les chefs d'atelier seront admis à faire compter
leurs services non déjà rémunérés par une pension de retraite
ou par une allocation représentative quelconque, à la préfec-
turc ou dans l'arméc. »
Le Conseil ayant adopté les conclusions du rappor-
teur, la délibération a été transmise à l'Administration
de l'Assistance publique. M. Pcyron l'a soumise à son
Conseil de surveillance qui a chargé une commission,
composée de : \01. Baudin, : \Iourier et liisler de l'exa-
miner et de la rapporter. L'affaire a été discutée dans
la séance du 18 mars. Nous reproduisons le passage
du procès-verbal qui y est relatif.
M. Hisler, rapporteur, expose (pie. en dehors du personnel
hospitalier réparti par des prudes et auquel l'arrête du 1 ? fé-
vriur 131 : accorde le bénéfice de l'admission au repos, l'Ad-
ministration emploie un certain nombre d'agents qui com-
posent le personnel professionnel et qui, rétribués ;\ la
la journée, n'ont droit; aucune retraite.
XXVIII ENSEIGNEMENT professionnel.
Toutefois, une exception a été faite en faveur d'une certaine
catégorie de ces agents, qui, en raison de la nature de leurs
fonctions et de.la stabilité dont ils font prouve, méritaient
cette faveur, C'est ainsi que le personnel professionnel de la
Boulaneriecéntrale béncficic depuis longtemps de l'admis-
sion au repos. -
Le même avantage est réclamé aujourd'hui par certains
ouvriers à la journée de l'hospice de Bicêtre qui, sous le nom
de chefs d'atelier, ont à diriger, les uns, au quartier d'hos-
pice, le travail d'autres ouvriers et d'un' certain nombre
de pensionnaires; les autres, au quartier des enfants, l'ap-
prentissage et le travail des enfants arriérés ou épilepti-
ques.
Ce personnel est stable : il s'acquitte avec beaucoup de soin
et de patience des fonctions qui lui incombent et que rendent
d'autant plus difficiles et même pénibles les ménagements à
garder à l'égard des administrés adultes ou des enfants arrié-
rés placés sous sa direction, M. le Rapporteur estime donc
qu'il faut encourager les chefs d'atelier de Bicètre, et les atta-
cher à leur fonction par l'espoir d'une retraite qu'ils auront
certainement bien gagnée. '
Mais, ce principe une fois admis, il parait nécessaire de
faire quelques réserves en ce qui concerne son application.
En effet, l'arrêté du 12 février 1845, cité plus haut et qui est
toujours en vigueur en ce qui concerne les conditions géné-
rales d'admission au repos des sous-employés, dispose :
1 Que la pension -entière ne sera attribuée qu'aux agents
comptant au moins trente ans de service (et 60 ans d'âge sauf
le cas d'infirmités) ; .
2° Que la pension proportionnelle de repos ne pourra être
accordée qu'après un minimum de 15 ans de services.;
En outre, aucune décision n'autorise l'Administration à
faire compter, pour la retraite des sous-employés et serviteurs,
ni le temps passé sous les drapeaux, ni celui passé au service
des asiles de la Seine.
Enfin, l'arrêté du 29 mai 1891, qui réglemente les con-
ditions d'admission au repos du personnel de la boulangerie,
qui se trouvait dans une situation analogue à celle des chefs
d'atelier de Bicêtre, n'accorde qu'aux agents iL l'année le bé-
néfice du repos de'isolasse (rang des surveillants). Les agents
à la journée bénéficient seulement du repos de 2° classe (rang
des sous-surveillants), et les hommes de peine de celui de 3°
classe (rang des serviteurs). '
Or, dans sa séance du 3 avril dernier, le conseil municipal
a pris une délibération qui assimile les chefs de l'atelier de
Enseignement PROFESSIONNEL. XXIX
l'hospice de Bicêtre aux surveillants des asiles d'aliénés, en
oc qui concerne l'admission au repos.
Les conditions faites par les asiles de la Seine à leur per-
sonnel secondaire sont plus avantageuses que celles en vi-
gueur pour le personnel de l'Assistance. Ces conditions, d'ail-
leurs rappelées dans la délibération sus-visée, sont les
suivantes : Pension entière après 25 ans ne -services sans
condition d'âge (au lieu de 30 ans de service et 50 ans d'âge
il l'Assistance publique) ; Pension proportionnelle après 10 ans
de service (au lieu de z15 ans) ; Admission, comme valables
pour la retraite, des services militaires (cette condition n'e-
xiste pas pour les employés de l'Assistance publique).
Enfin, la délibération du Conseil municipal attribue aux
chefs d'atelier le repos de 1 classe, alors que les brigadiers
de four de la Boulangerie centrale,, dont le salaire est cepen-
dant supérieur it celui des chefs d'atelier, n'ont droit qu'au
repos de 2e classe,. et elle fait entrer, dans le décompte des
années valables pour le repos, le temps passé dans les asiles
du département, ce que n'autorise pas le règlement actuelle-
ment en vigueur pour les pensions de repos de nos sous-em-
ployés. Dans ces conditions, il paraît- bien diffiile de créer,
pour les seuls chefs d'atelier de Bicêtre, qui ne sont au nombre
que de 22, une catégorie spéciale et avantagée de reposants.
M. le Directeur propose, pour le moment, d'accorder sim-
plement il ces agents le bénéfice du repos de 2° classe, tel
qu'il est accordé actuellement aux agents de l'Assistance
publique. Il est bien difficile de prévoir, même approximatif
vement, quelles pourront être les conséquences financières
de cette mesure. Actuellement un seul titulaire se trouve-
rait dans les conditions réglementaires pour bénéficier du
repos, et ce n'est que dans plusieurs années que quelques s
autres agents y pourraient faire valoir leurs droits; d'autre
part, la moitié de ce personnel compte peine quelques an-
nées de services; dans ces conditions, la dépense très minime
pendant une dizaine d'années, ne pourra guère, par la suite,
dépasser une somme maxima d'environ 5.000 francs.
M. le Rapporteur demande au Couscil d'adopterles propo-
sitions de l'Administration tendant à accorder aux chefs d'a-
telier de Bicêtre le bénéfice du repos de deuxième classe
(rang de sous-surveillant.)
Le Conseil a émis un avis favorable. Dans quelques
jours, un arrêté sera pris par M. Peyron et soumis à
l'approbation préfectorale. Nous sommes heureux que
notre persistance ait enfin sa récompense, tout en re-
grettant que l'assimilation de nos chefs d'ateliers ait
été faite seulement avec les sous-surveillants et non
avec les surveillants comme le demandait, et c'était
juste, la délibération du Conseil municipal.
III.
STATISTIQUE. MOUVEMENT DE LA POPULATION.
Le'1 ? janvier 1896, il restait dans le service 519
enfants (1) : 491 idiots, imbéciles ou épileptiques, dits
Sorties, décès, etc. xxxi
aliénés et 25 réputés non aliénés. On sait qu'il s'agit
la d'une distinction purement administrative et qu'il
est dillicile de justifier médicalement. Sur ce nombre
5 sont atteints de 8 8 de cécité, 16 de
rumination, 21 de syndaclylie complète ou partielle ;
1 d'l2émi-nzél i.e; 93 sont gâteux, 81 hémiplégiques,
54 baveux, 45 onycoplzaes, 4 Cléclz2)'euTS d'ongles.
Décès.- Les décès ont été au nombre de 27. Le
tableau ci-après fournit les renseignements concer-
nant le diagnostic, la date ot la cause du décès, ainsi
que les principales particularités présentées par les
malades (p. xxxu).
Sorties. - Des 61 malades sortis de la section, 16
ont été dirigés sur l'une des sections d'adultes de la
division des aliénés ; 3 ont été admis comme incu-
rables dans l'une des sections de l'hospice ; 45 ont été
rendus à leur famille, guéris ou améliorés ou sur la
demande de celles-ci. Le tableau des pages XXXIII et
suivantes indique les motifs de la sortie et la natvre de
l'affection pathologique dont étaient atteints ces ma-
lades sortants.
Evasions. - Une seule évasion s'est produite dans
le courant de l'année : celle de l'enfant Simon... qui
a été ramené, par un infirmier envoyé a sa recherche,
8 heures après son départ.
. ? ^ ? - DECES.
XXXIV DÉCÈS.
4XXVI Décès.
Thymus ; GLANDE thyroïde. XLVII
Thymus et glande thyroïde. - Nos études sur
l'idiotie 7nyxcudérrtateuse nous ont conduit à repren-
dre, il y a sept ans, des recherches anciennes (1868)
sur la glande thyroïde, et incidemment sur le thy-
mus. Le tableau ci-après donne quelques renseigne-
ments sur ces deux organes chez nos malades décédés
en 1896.
XLVIII Maladies infectieuses.
Nous essaierons un jour de voir s'il y a lieu de
tirer quelque conclusion des pesées du thymus et de
la glande thyroïde que nous consignons tous les ans
dans nos Comptes-rendus. Mais elles n'auront qu'une
valeur relative jusqu'à ce que nous puissions les mettre
en regard de pesées analogues faites cliez des enfants
réputés normaux.
Maladies infectieuses. Nous avons eu une petite
épidémie de scarlatine et une épidémie assez grave
de rougeole. - L'épidémie de scarlatine a commencé
le 7 mars et a fini le i septembre. Elle a porté sur 13
enfants : 9 garçons, 3 filles et une infirmière. Deux
garçons ont succombé : et Cai.. Chez celui-ci,
la scarlatine s'est compliquée d'une angine diphté-
1'iti(jue, de même que chez Iloubc.. qui a guéri.-
L'épidémie de rougeole a débuté le 29 novembre, per-
sistait à la fin de décembre et a continué en 1897
jusqu'au 20 mars. Le nombre des cas, en 1896, a été
de 17; 11 se sont terminés parla guérison ; un a été
suivi de décès l;lancli ? Henri) ; 5 enfants restaient en
traitement le 31 décembre. La rougeole a été apportée
par l'enfant .1é ? ... chez lequel elle s'est montrée 12 '2
jours après son admission. - Nous avons eu un seul
cas de coqueluche qui s'est terminé par la guérison.
Notons enfin un cas d'angine gangreneuse avec issue
fatale.
Teigne. Au 1er janvier 1896, il restait clans le
pavillon 7 teigneuses et 9 teigneux; à la fin de l'an-
née ce chiffre était descendu il G pour les garçons et
était monté à 12 pour les filles. - 7 enfants sont
sortis guéris dans le courant de l'année.
Maladies intercurrentes. - Elles ont été relative-
ment nombreuses : 9 enfants sont entrés il l'infirmerie
atteints d'étal de mal épileplùpie, deux ont succombé :
Tholll.. et Mail ? ; congestion pulmonaire, 5 ;
Personnel DU service. XLIX
tuberculose pulmonaire, 1 ; - gangrène pulmonaire,
1 ; - pneumonie, 1 ; broncho-pneumonie, 2 ;
pleurésie, 1 ; - méningite, 1 ; - gastro-entérite, 1 ;
- hémorrhagie méningée, 1 ; embolie, 1 ; oph-
thalmie, 2; - ictère, 1.
Personnel du service e'n 1896. - Le personnel
était ainsi composé : 1° Service médical : deux inter-
nes titulaires, M. M. Mettetal et Luys et un interne
provisoire, M. Pelisse. M. Luys a été remplacé le 1er
août par M. lella3.
2° Sercice scolaire : a) grande école : 4 instituteurs,
MM. Mesnard, Landosse, Grandvilliors et Fromont;
un professeur de chant, M. Sutter ; - un professeur
de gymnastique, AL Goy ; un maître d'escrime, M.
Joly et deux infirmiers tous les deux ayant le grade
de 1er infirmier. - b) Petite école : Miles Agnus et
Bohain, surveillantes; - Zip", Beaumnnt, suppléante ;
- deux premières infirmières : Mllos Iluguet et Pac-
cluclct et 8 infirmières de dortoir, aidant les maîtresses
d'école ; en outre 4 infirmières, n'ayant pas de dortoir,
sont affectées aux soins et à l'enseignement des enfants
de la petite école.
3° Enseignement professionnel : 8 maitres dont
nous avons donné les noms plus haut (p. xxiii) ; plus
deux infirmiers de garde.
4" Service hospitalier : il se compose de M. Malen-
çon, sous-surveillant, remplissant les fonctions de
surveillant; de M. Acard, suppléant, faisant fonctions
de sous-surveillant, de Il11,11, Ronzier, sous-surveillante
(infirmerie); de M"10 Malcnçon, suppléante (bâtiment
des gâteux) ; de Mille Grisard, 1 ? infirmière (pavillon
d'isolement); de lI ? Gladel, suppléante de nuit; de
deux suppléants, M. Givallois (baigneur), M. Fournier,
(service du gymnase), d'un infirmier attaché plus
spécialement au Musée et chargé du service de distri-
bution de la pharmacie, M. Gerder ; d'un infirmier
DO URNE VILLE , Bicêtre, 1896. uu
L Personnel DU service.
(portier), d'un perruquier, de 2W infirmières cle jour
ou de nuit, de 29 infirmiers de jour ou do nuit;
total du personnel secondaire : 85.
Section II : Fondation Vallée.
Histoire du service pendant l'année 1896.
I.
Situation DU service. Enseignement primaire.
Lorque la Fondation Vallée a été organisée, elle
devait être pour les filles ce qu'est la Colonie de
Vaucluse pour les garçons, c'est-à-dire qu'on devait
en exclure les gâteuses et les épileptiques. Même, dès
l'origine, il n'a pas été tenu compte de cette catégori-
sation. Il s'ensuit que la fondation Vallée ne correspond
plus à la Colonie de Vaucluse mais au service des
enfants de Bicêtre, où nous recevons toutes les ca-
tégories. De là deux groupes principaux : 1° les en-
fants idiotes et gâteuses ; 2° les enfants propres.
Enfants idiotes gâteuses. Elles étaient au nom-
bre de 50 au l ? janvier 1896 et de 56 à la fin de l'an-
née. Elles sont installées dans le bâtiment situé à
droite de la cour d'entrée dont elles occupent le rez-
de-chaussée et le premier ; cette installation est des
plus défectueuses. Nous dirons même que, en raison
des infirmités physiques des enfants, elle est dange-
reuse. Le gâtisme exigeant un lavage quotidien du
parquet mal jointoyé, non hourdé, du premier étage,
il en résulte des infiltrations d'eau tout le long des
murs. Ce n'est que grâce au zèle et au dévouement
LII ENSEIGEMËNENT pratique et primaire.
de l'infirmière qui est chargée de ce service, Mile Su-
zanne Raymond, que nous avons pu atténuer les incon-
vénients de cette installation et obtenir chaque année
quelques bons résultats au point de vue du traite-
ment. Nous continuons à avoir recours aux moyens
et aux procédés que nous avons décrits clans nos pré-
cédents rapports.
Les idiotes gâteuses se divisent on deux catégo-
ries : a) les enfants valides qui sont envoyées à l'école
durant une partie de la journée. Bien qu'une classe
leur ait été affectée spécialement, il n'en résulte pas
moins des inconvénients pour les autres classes qui
reçoivent des enfants propres. - ù) Les enfants inva-
licles qui séjournent dans les locaux et la cour situés
entre leur pavillon et le pavillon d'infirmerie qui leur
sont affectés. Chez trois d'entre elles, on a pu suppri-
mer le gâtisme : Onégl ? Kracm ? Le Gu... Trois ont
appris à manger sans aide : Borj ? Frank ? Gudef...
Enfants idiotes, imbéciles, épileptiques, elc., zrzli-
des. Enseignement primaire et enseignement
professionnel. Les procédés employés sont égale-
ment les mêmes la section de Bicêtre. Les amélio-
rations réalisées dans les écoles des garçons sont intro-
duites immédiatement a la Fondation. L'idéal que
nous cherchons à réaliser consiste a occuper les
enfants du matin jusqu'au soir, en variant le plus
possible les exercices. Les jeux même doivent contri-
buer à leur éducation.
Au lever, on apprend aux enfants il faire leur toi-
lette, à faire leur lit, il nettoyer leur dortoir. - Aux
repas, on surveille les enfants qui savent manger
seules et on corrige leurs mauvaises habitudes ; on
apprend aux autres il se servir de la cuiller, de la four-
chette, etc. Sur 162 enfants présentes ;\ la fin de l'an-
née, 2 savent se servir de la cuiller, de la fourchette
DESSIN, chant. lui
et du couteau ; 58 de la cuiller et de la fourchette ;
30 de la cuiller seulement. 22 ne savent pas manger
seules.
132 enfants ont fréquenté l'école et sont exercées
à la gymnastique Pichery, 52 enfants participent aux
exercices de la grande gymnastique, sous la direction
de M. Goy et sous la surveillance de 11" .Langlet. ]\1.
Goy vient tous les jeudis à la Fondation.
Les leçons de choses sont multipliées le- plus possi-
ble et ont lieu soit dans les jardins, dont les arbres,
les arbustes, les plantes, etc., sont étiquetés. Les
détails dans lesquels nous sommes entré dans nos
rapports de 1890 il 1895, au sujet de l'habillement et
de l'éducation de la digestion, de la respiration, et
de la circulation nous dispensent d'y revenir cette
année. (Voir p. x : Hygiène sexuelle.)
Enseignement du dessin. - Les cours ont eu lieu
deux fois par semaine régulièrement jusqu'au mois
d'août sous la direction de 1\1'110 Br3u, femme de l'éco-
nome de Bicêtre, puis ils ont été faits irrégulière-
ment en raison d'une grossesse de la maîtresse de des-
sin qui, d'ailleurs, fait cet enseignement il titre gracieux.
Ils ont été suivis par 20 élèves divisées en deux classes.
Enseignement du chant. - Cet enseignement est
fait par M. Sutter, professeur de chant il l'asile-école
de Bicêtre. 70 enfants divisés en 3 séries ont suivi
ces cours. Conformément nos instructions, il s'est oc-
cupé successivement de tous les enfants, en mesure de
profiter dans une mesure quelconque de son ensei-
gnement. 9) fillettes, divisées en trois séries, y ont
participé. Par suite des nombreuses entrées en 1896,
M. Sutter ne peut donner qu'un compte-rendu très
incomplet de son cours quant aux nouvelles. Voici
comment il s'exprime :
« Les anciennes élèves connaissent toutes leurs
LI' Danse, enseignement professionnel.
notes et chantent dans les choeurs la première partie
avec les garçons ; toutes ces jeunes filles ont une
étendue de voix assez remarquable, principalement
celles qui ont passé la quinzième année. J'ai remar-
qué, d'après mes observations périodiques, que les
plus jeunes n'ont qu'une étendue de voix très res-
treinte, que celle-ci est généralement grave sans être
fausse.
« Quant aux m'xoellémaleuses mises au traitement
parla glande thyroïde, leur timbre cle voix s'est totale-
ment modifié et retendue s'est accrue progressive-
ment (Voir p. IG;} et 1 i ii. Enfin les progrès d'en-
semble de l'année sont satisfaisants, les nouvelles se
mettent au travail avec zèle et cherchent Ù suivre les
anciennes dans la lecture des notes et l'accompagne-
ment des choeurs. »
Danse. - Les exercices de danse ont lieu tous les
dimanches après le parloir, sous la direction de M"0
Langlet et de ses collaboratrices. '
Enseignement professionnel. A mesure que les
enfants se développent, on leur apprend tous les soins
du ménage ; Ù mettre et à retirer le couvert, à net-
toyer les réfectoires, laver la vaisselle, etc. Dix des
moins arriérées, aident le personnel à apprendre à
manger aux enfants incapables de manger seules et
à perfectionner celles qui mangent malproprement.
Deux des enfants de la Fondation Vallée, Briss....
et Jup.... ont continue; il être employées comme
demi-infirmières. L'Administration leur alloue une
indemnité mensuelle de 5 fr.
Les deux seuls ateliers que nous possédons ont
continué à fonctionner régulièrement. Le travail,
évalué par M. Bru, économe de Bicêtre, d'après le
tarif réduit de l'Administration, s'est élevé il /i.5'il l l'r.
pour l'atelier de couture, dirigé par M ? 1< : 111'1\\allll, et
Enseignement professionnel. LV
il 624 fr. pour l'atelier de repassage, dirigé par Mmo Le-
jeune. Total : 5.165 fr., soit 1.292 fr. cle plus qu'en 1895.
En plus des apprenties qui travaillent par séries régu-
lières, 31 enfants ont travaillé une heure par jour. 14
enfants savent faire complètement les layettes ; 10 du
crochet; 6 savent marquer, 6 savent faire la tapisse-
rie. - Le tahleau suivant donne mois par mois le
nombre des apprenties et l'évaluation du travail.
LVI VISITES, CONGÉS.
Bains ET hydrothérapie. LU'IN
section de Bicêtre. - Nous veillons le plus possible à
l'hygiène sexuelle et pour les petites gâteuses et pour
les petites filles pubères. Les enfants ont pris
généralement leurs douches à la Fondation. - Quant
aux bains, l'installation de la Fondation n'ayant pu
fonctionner une partie de l'année, nous avons dû nous
servir des bains de Bicêtre. - Les bains cle pieds ont
été donnés également à Bicêtre où il existe, nous
tenons à le rappeler, une installation rendant facile
le lavage simultané des pieds d'un grand nombre de
malades ; aussi avons-nous réclamé une installation
semblable à la Fondation Vallée. Le sous-sol du
bâtiment neuf pourra être en partie utilisé dans ce but.
- Voici la statistique des bains et des douches en 1896.
LVIII Statistique.
grade le 1 ? mai. M"0 Raymond (Suzanne), si ans de
services, première infirmière depuis 2 ans, a été nom-
mée suppléante le 1 ? mai. Le dévouement, l'intelli-
gence qu'elles n'ont cessé cle déployer pour l'améliora-
tion clos enfants justifient complètement l'avancement
qui leur a été donne. Héparation d'une partie du mur,
sur la ruelle Jean-Louis. Héinslallation des liai-
gnoires. - Ameublement du nouveau bâtiment.
Teigne. Sept enfants ont été soignées au pavil-
Ion des contagieux de l'hospice de Bicêtre : Cierc,
Gclillaum ? Cral'f ? Olivi ? IIuss ? l3cr ? Laport...
Cette dernière en est sortie guérie le 22 octobre.
Maladies intercurrentes. Nous n'avons à noter,
en outre des maladies qui ont occasionné la mort et
dont on trouvera la liste au tableau des décès, que des
accidents légers dont voici le résumé : 3 enfants ont été
traitées pour bronchite, 6 pour gourmes, 2 pour coxal-
gie, pour abcès ; 10 pour accès d'épilepsie ; 8 pour en-
gelures ; 12 pour éruptions légères ; 1 pour rhuma-
tismes.
Nous n'avons eu que trois cas cle maladies conta-
r¡¿ense8 : l'enfant 1mb ? (Jeanne), entrée au pavillon
des contagieux de Bicêtre, atteinte de coqueluche, en
est sortie guérie le 22 juillet.
Les enfants Bij... et Moul... sont entrées au même
pavillon atteintes d'angine. La première en est sortie
le 1 : ) août, la deuxième y est morte de .stomate oran-
gréneuse avec infection généralisée.
II.
Statistique. Mouvement DE la population.
Le 1"' janvier J890, il restait à la Fondation 139 en-
fants se répartissant ainsi :
Mouvement de la population. LIX
LX DÉCÈS. t
LXIV PnngOXXEL DU SERVICE.
Personnel. Il a été composé en 1896, d'un méde-
cin, d'un interne titulaire, M. lllettétal; d'une sur-
veillante, Mll0Bertbe Lin'.1et; de 3 sous-surveillantes,
l'I ? Ehrmann, Lapeyre et Croirelle ; d'une supplé-
ante, M"0 Raymond; d'un suppléant-portier, M. Croi-
zelle ; d'un infirmier, de 11 infirmières cle jour et 6 de
nuit. Total du personnel secondaire : 24. Nous ne pou-
vons que répéter ce que nous écrivions l'an passé :
« Nous n'avons eu qu'a nous louer, disions-nous, du
zèle et du dévouement du personnel. C'est à lui et en
premier lieu à la surveillante, M"" Lanclet que nous
devons les résultats que nous avons enregistrés encore
cette année.
La mise en service du bâtiment neuf laissait dis-
ponibles les anciennes classes et l'ancien réfectoire
que, clans nos rapports précédents à la Commission
de surveillance, 'nous avons indiqué comme devant
être transformés en dortoir. M. Le Roux, directeur
des affaires départementales, a fait établir le devis
des dépenses qu'entraînerait l'aménagement en dor-
toir des anciennes classes. Ce projet a été renvoyé il
la Commission de surveillance qui, sur le rapport de
notre ami, le 1), Du Mesnil, a émis un avis favorable.
Le Conseil général dans sa session cle nov.-cléc. ne
s'est pas prononcé, de sorte que les locaux restent
inutilisés.
Par suite de la pente du terrain sur lequel a été
construit le nouveau bâtiment, il résulte que du côté
de l'ouest ce bâtiment offre un sous-sol très élevé.
Nous avons demandé l'utilisation de ce sous-sol et
dressé un programme détaillé des installations qui
y étaient possibles. Les devis ont été faits ; le projet
Nouveau bâtiment DE CENT LITS. LX7
a été rapporté, également par M. Du Mesnil, et
adopté par la Commission de surveillance. Ce projet
a été, comme le précédent, ajourné par le Conseil
général. L'an 1897 en verra sans doute l'exécution.
III.
Agrandissement de la Fondation Vallée :
le nouveau B\1'I\II : \T de cent lits. (1).
Le nouveau bâtiment au sujet duquel nous vous
avons présenté une série de rapports est terminé
depuis le 15 avril. Les devis d'ameublement ont été
transmis le 22 novembre 1895 il la Préfecture de la
Seine par l'Administration cle l'Assistance publique.
L'Administration préfectorale a introduit cette affaire
au Conseil général dans sa session de décembre sui-
vant. Le Conseil général a voté les crédits s'élevant à
la somme de 35.031 francs le 3 avril 1896. Par suite
de notre situation comme rapporteur du programme
et du projet nous vous demandons la permission de
faire quelques remarques sur la façon dont l'architecte
s'est conformé au programme qui a été adopté par
vous et accepté par l'Administration.
1" On pénètre clans le bâtimentpar un large vestibule,
où s'ouvrent, a droite, un dortoir qui doit être provi-
soirement affecté au réfectoire et al'ouvroir, avec leurs
annexes ; à gauche, un dortoir qui est provisoirement
affecté aux écoles, avec des annexes analogues ; z
en face l'escalier qui conduit au premier étage. La
disposition de cet escalier n'est nullement conforme à
votre programme et au programme généralement ac-
(1) Note commlllli4111éc à la Commission de surveillance à sa visite du 2
illkli 1896. ·
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1896. ?
LXVI . Fondation Vallée.
cepté dans les asiles d'aliénés. Cet escalier est libre-
ment ouvert, au lieu d'être inaccessible en dehors du
service. Il occupe une vaste cage limitée par des ram-
pes sur lesquelles pourront aisément grimper les en-
fants. La disposition de l'escalier sur le palier du pre-
mier étage est dangereuse et peut fournir, comme les
barreaux, des moyens de suicide : il aurait donc fallu
supprimer ce vide.
Nous signalons ces graves inconvénients afin
de dégager notre propre responsabilité et celle du
personnel secondaire. Primitivement la main courante
consistait en une rampe en fer, maintenue cle place en
place par des supports fixés au mur. Sur la critique
que nous en avons faite, l'architecte l'a remplacée par
la main courante en bois avec gorge que vous voyez.
2° Il est de règle, dans les locaux destinés aux alié-
nés, de ne laisser à leur disposition le fonctionne-
ment d'aucun appareil. Or, clans les cabinets d'ai-
sances, le cordon cle tirage de la chasse d'eau est
absolument il la disposition des enfants.
3° Vous nous avez entendu insister bien des fois sur
les avantages qu'il y avait clans les services de ce
genre à avoir des portes et des fenêtres avec de pe-
tits carreaux semblables à ceux qui existent dans
certaines parties de la section de Bicêtre. Nous
appuyions cette opinion sur l'expérience que nous
avons acquise dans cette section. L'architecte s'est
conformé à cette indication pour les portos qui
donnent sur le vestibule du rez-de-chaussée et le
palier clu premier étage. Mais les vitres des fenêtres
sont démesurément grandes et ceux des impostes le
sont encore davantage. Il en résulte deux inconvé-
nients : a) Un accroissement delà dépense d'entretien
et, b) ce qui est plus grave, la possibilité pour les
enfants de passer au travers des carreaux.
Nouveau bâtiment : critiques. LXVII ! il Quant aux cases destinées il déposer les enfants en
accès, elles n'ont pas été faites non plus conformément
au programme ; elles ont été réunies à l'une des
extrémités du bâtiment. Aussi sera-t-on obligé, pour
porter les enfants en accès de la première classe à ces
boxes, de traverser les trois autres classes qui les en
séparent : ce sera le désordre permanent.
On pourrait dire : Réunissez vos épileptiques dans
la même classe et choisissez la classe rapprochée de
ce que l'architecte appelle des cellules. Or, cela n'est
pas possible. Nous avons des épileptiques d'inégale
intelligence qui doivent être par conséquent réparties
dans des classes différentes. Nous avons, par exem-
ple, des épileptiques parmi les gâteuses qui, elles,
doivent être dans la classe la plus rapprochée des cabi-
nets et des lavabos, c'est-à-dire il l'extrémité opposée
aux cellules. Ajoutons que la surveillance sera insuf-
fisante, puisque au lieu d'être à cheval sur la cloison
(le deux classes et être surveillées par le personnel de
ces doux classes, ces cellules ou boxes se trouveront
il l'extrémité de la dernière classe. La surveillance est
d'autant plus nécessaire que si les épileptiques sont
prises d'un nouvel accès étant couchées sur le ventre,
la face peut être appliquée sur le matelas : alors
l'asphyxie due à l'accès est complétée par cette com-
pression et la malade meurt. Ces raisons purement
médicales n'ont pas apporté la conviction dans l'esprit
des architectes. L'exemple de Bicêtre était là, mais on
a voulu faire autrement. Tant pis pour les malades,
tant pis pour le personnel.
Telles sont, Messieurs, les remarques générales que
nous avons cru devoir vous présenter. Il nous semble
qu'il est de notre devoir il tous (le tenter de faire mieux
dans nos constructions nouvelles que ce qui existe dans
les anciennes constructions.
LXVl1 ! Fondation Vallée.
Telles sont les observations que nous avons sou-
mises il la Commission de surveillance des asiles lors
de sa visite il la Fondation le 2 mai dernier. Malheu-
reusement nous en avons encore d'autres à soumettre
à la Commission du Conseil général (décembre).
1" Lorsqu'on a installé les lits dans les dortoirs et
les tables dans le réfectoire provisoire, on s'est aperçu,
non sans quelque étonnement, qu'il était impossible de
placer les lits et les tables de chaque rangée en face
les uns des autres. Cela tient il ce que les grands murs
du bâtiment ne sont point parallèles, eu un mot le
bâtiment est de guingois, comme on dit vulgairement.
2° Le pavillon neuf doit être chauffé il la vapeur.
La chaudière installée dans le sous-sol a été cons-
truite par la maison Imbcrt de Saint-Chamond
(Loire), fournie et posée par la maison Geneste et
Horcher. Cette chaudière, verticale, il foyer extérieur
(système üfield), estdestineo à fournir la vapourpourle
chauffage des salles et il les ventiler.
L'Administration de l'Assistance publique, chargée
par le Département, de l'administration de la Fonda-
tion a invité son ingénieur il examiner le système de
chauffage et à décider le nombre d'employés nécessaire
pour son fonctionnement. L'ingénieur, M. Krcmcr,
s'est rendu à la Fondation le 21 octobre, accompagné
du représentant de la maison (Jcneste-1 Percher. Ce der-
nier aurait dit que l'installation faite il la Fondation
conviendrait mieux à un service plus grand, car les
frais eussent été les mêmes ; il a déclaré que le chauf-
fage était assuré pour 15".
L'ingénieur de l'Administration estime que la ma-
chinerie actuelle offre des dangers constants et que,
de plus, elle nécessite la nomination de quatre chauf-
feurs, été et hiver, l'hiver pour le chauffage et l'été
pour la ventilatioll. Il estime, en outre, qu'un système
Nouveau bâtiment : critiques. LXIX
à basse pression eut été préférable et eut offert moins
de dangers tout en permettant de n'avoir qu'un chauf-
feur. Nous n'avons pas été prévenu de cette visite et
nous n'avons pu être renseigné qu'indirectement. Au
bout de quelques jours, le froid se faisant sentir, nous
avons reçu des plaintes des enfants et du personnel, en
particulier du personnel de nuit. Nous avons demandé
à l'Administration de l'Assistance publique de prendre
une décision et peu après nous avons prévenu M. le
Directeur des affaires départementales. Le froid con-
tinuant et aucune réponse n'arrivant au sujet de la
mise en marche des appareils de chauffage, nous avons
prié M. Pinon, directeur de Bicêtre, de donner des
instructions pour que les salles soient chauffées par
un procédé quelconque et les enfants protégés contre
le froid. L'architecte de Bicêtre, M. Delahaye, en
quelques jours, a fait poser des cloches. Il ne pouvait
faire mieux.
A la séance du 1G novembre de la Commission de
surveillance, nous avons signalé cette situation et, après
avoir énuméré les inconvénients du chauffage provi-
soire, opéré à l'aide des cloches (variations de la tem-
pérature qui s'élève Ù plus de vingt degrés, absorption
de l'oxygène de l'air par la surface rougie des appa-
reils, etc.), nous avons réclamé une solution définitive.
Ou bien le système installé est bon, n'offre pas de
dangers et alors il doit fonctionner, ou bien il est dan-
gereux et doit être remplacé d'urgence. M. Le Roux,
s'appuyant sur un certain nombre d'expériences, a
affirmé que le système était bon et sans danger. Il
ne reste plus qu'a mettre les ingénieurs d'accord et
cela dans le plus bref délai, la santé clés enfants est en
jeu, l'excès de chaleur produit par les cloches les
expose, en effet, il voir augmenter le nombre de leurs
crises nerveuses.
Section III. - Assistance des enfants idiots :
création de classes spéciales annexées aux écoles
primaires pour les enfants arriérés.
I.
A MM. les membres de la 3° Commission du Conseil général
de la Seine.
Messieurs,
Depuis plusieurs années, nous profitons des visites
de la 3" Commission du Conseil général et de la Com-
mission de surveillance pour attirer leur attention sur t-
la création do classes spéciales qui seraient an-
nexées à quelques-unes des écoles primaires de chaque
arrondissement et recevraient les enfants arriérés de
toutes les écoles cle l'arrondissement, les enfants ren-
voyés à cause de ce qu'on appelle leur indiscipline,
enfin les enfants des services d'arriérés sullisamment
améliorés pour bénéficier do ces classes.
Dans le but de vous renseigner exactement, nous
avons pensé utile de mettre sous vos yeux les docu-
ments qui suivent, où sont résumées les raisons qui
militent en faveur de la création que nous proposons.
Voici, en premier lieu, la Note que nous avons
communiquée il la Commission de surveillance lors
de sa visite du 2 mai dernier (189G).
Assistance ces enfants IDIOTS. LXXI
Note A la Commission DE surveillance.
Malgré les sacrifices considérables faits par le départe-
ment de la Seine qui assiste, traite et instruit, a l'heure
actuelle, plus d'un millier d'enfants idiots et épileptiques,
l'assistance cle ces malheureux est loin d'être suffisante.
La section de Bicêtre, que vous venez de visiter, renferme
52 enfants, c'est-à-dire 124 de plus que le nombre pour
lequel elle a été construite. La Fondation Vallée, que vous
visiterez cette après-midi, on contient 133, c'est-à-dire 33
de plus que le chiffre primitivement fixé. Bien que l'encom-
brement ait atteint en quelque sorte ses limites extrêmes,
nous avons, pour ici seulement, 22 demandes d'admission
dont l'inscription de quelques-unes remonte à près d'un
an. Les lits vacants à la colonie de Vaucluse, affectée aux
enfants de 7 à 16 ans qui ne sont ni gâteux ni épileptiques,
seront occupés dans un délai rapproché et le désencom-
brement des dortoirs actuels de la Fondation Vallée pren-
(]¡'après de la moitié du nouveau bâtiment (1). En l'état
des nuances départementales et des besoins, malheureu-
sement croissants, du service des aliénés adultes, il n'est
guère permis d'espérer qu'on puisse songer à de nouvel-
les constructions pour les enfants, dans un temps prochain.
C'est pour cela que nous devons appeler votre attention
sur un mode, plus économique et facilement réalisable,
d'assistance et d'éducation de la catégorie la moins ma-
lade des enfants idiots, nous voulons parler des arriérés.
Les arriérés et môme les imbéciles du degré le moins
accusé existent en certain nombre dans les services con-
sacrés aux idiots. Il y a aussi des arriérés, des retardés
dans les écoles ordinaires ou qui, renvoyés des écoles,
restent dans leurs familles ou vagabondent dans les rues.
Pour ces enfants nous proposons la création de classes
spéciales annexées aux écoles primaires ordinaires.
Afin de justifier cette création, nous devons citer des
(1) Ainsi qne nous l'avons dit souvent, dans le programme général de la
construction des asiles indispensables au département de la Seine, on ne devra
pas perdre de vue la construction d'un asile pO'H1'les idiots et les idiotes adul-
tes, avec des ateliers, une ferme, etc.
LXXII Classes spéciales.
faits, des chiffres et exposer brièvement ce qui se fait à
l'étranger.
Les faits abondent ici. et nous allons faire passer sous
vos yeux des enfants qui pourraient être envoyés à ces
classes spéciales.
Ils peuvent se diviser en deux catégories. La première
comprend les enfants arriérés ou atteints d'imbécillité
sans perversion des instincts qui, si ces classes avaient
existé, n'auraient pas eu besoin d'être hospitalisés. La
seconde se compose d'enfants qui nous sont arrives atteints
d'idiotie, gâteux moine, et qui ont été considérablement
améliorés. Leur photographie, prise à diverses époques,
met en évidence les heureux changements qui ont été
obtenus. L'examen de leurs cahiers scolaires en fournit
également la démonstration. Le tableau suivant donne sur
chacun d'eux, les principaux renseignements (p. LXXIII et
LXXIV).
Nous devons faire une remarque au sujet des enfants
de la seconde catégorie. Lorsque leurs parents se rendent
compte qu'ils sont dans une bonne : voie, ils réclament leur
sortie. Nous sommes obligé de nous incliner, souvent
avec regret, car nous craignons qu'au dehors l'évolution
en train ne s'arrête. Cela arrive malheureusement quel-
quefois et, au bout d'un temps plus ou moins long, on nous
ramène les enfants ayant en grande partie perdu ce que
nous leur avions donné péniblement. Sur l'avenir de la
plupart, nous manquons de renseignements. On peut en
inférer que leurs progrès ont continué. Il y aurait un réel
intérêt à savoir ce qu'ils deviennent, ce que, personnelle-
ment, nous aurions voulu connaître si le temps et les
moyens ne nous manquaient. Cette enquête, à notre avis
si désirable, pourra être entreprise le jour où sera enfin
créée la Société de patronage des aliénés sortis des asiles
du département de la Seine, adultes ou enfants. Nous de-
vons ajouter que dans les autres services consacrés aux
enfants idiots et arriérés on en trouverait également de
semblables aux nôtres, c'est-à-dire susceptibles d'être
traités et éduqués dans les classes spéciales.
Classes spéciales. lxxv
Dans les écoles primaires de la ville, il y a aussi nombre
d'enfants retardés qui ne peuvent suivre utilement leurs
camarades, qui troublent les classes, qui font le tourment
des maîtres et sont la risée ou les souffre-douleurs de leurs
petits camarades. Nous avons fait procéder sur ce point à
une petite enquête dans les circonstances suivantes. L'i-
dée de la création des classes spéciales, sur laquelle notre
attention a été appelée par la lecture des travaux publics iL
l'étranger (1), a été de notre part l'occasion de diverses
communications il la délégation cantonale clu 5" arrondis-
sement et au Congrès national de Lyon en 1891.
C'est il ce propos et avec l'assentiment de la Déléga-
tion que M. Faubert, inspecteur de renseignement pri-
LXXVt Assistance des enfants idiots.
maire, à notre instigation, a invité les instituteurs et les
institutrices des 5° et 6' arrondissements a lui dresser une
liste des enfants arriérés et indisciplinés qu'ils avaient
dans leurs écoles. Nous avons résumé le résultat de cette
enquête dans le tableau ci-dessus qui figure dans le Rap-
port (I) que nous avons lu en décembre 1895 à la Délé-
gation cantonale.
« En ce qui concerne les écoles maternelles, sur 12
écoles, une seule, celle de la rue du Sommcrard, signale
quatre arriérés. Il est évident que cette enquête, faite a la
bâte, par des personnes qui n'ont pas de connaissances
médicales, aurait besoin d'être reprise en leur donnant des
indications détaillées sur le but que l'on poursuit. Certains
maîtres et certaines maîtresses, par exemple, ont craint
d'être accusés do négligence s'ils mentionnaient l'exis-
tence dans leurs classes d'enfants indisciplinés ou arrié-
rés. Cependant, telle qu'elle est, cette enquête sommaire
montre qu'il y a 83 enfants arriérés et 49 indisciplinés des
deux sexes dans les écoles des V" et VI" arrondissements
sur une population scolaire de 3.575 garçons et de 3.207
filles. Elle met en relief l'utilité de la création des classes
spéciales dont nous venons de parler. »
Notre proposition ne constitue pas une innovation. Les
classes spéciales dont nous demandons la création exis-
tent déjà dans un certain nombre de pays. Nous en avons
fait l'énumération dans les publications auxquelles nous
avons fait allusion. Nous n'y reviendrons pas ; nous nous
bornerons à une citation empruntée au docteur G.-E.
Shuttleworth, ancien médecin-directeur du Royal Allie1't
Asglum (or idiots and imbéciles (2), citation dans laquelle
il donne d'ailleurs quelques renseignements historiques.
Après avoir parlé de la grande enquête qui a été faite en
Angleterre dans les écoles publiques, pour se rendre
(1) Ce rapport 0. éte reproduit dans le Compte-¡'cndu de notre service pour
1895, p. LVII.
(1) Mentally-Deficient Chilctren, Thei)' troalment and training. London, 1895.
Classes spéciales. L\S7-II
compte du nombre et de la situation des enfants anor-
maux, il continue ainsi :
« En donnant la prééminence- à cette enquête, qui est
peut-être la première recherche scientifique compréhen-
sive d'anormalités chez les enfants des écoles, nous n'avons
pas l'intention de réclamer la priorité pour l'Angleterre
dans l'instruction pratique des arriérés, «¡¡¡en/ally-feeule »,
terme que nous regrettons de ne pas voir adopter pour
dénommer cette catégorie spéciale d'enfants exception-
nels, de façon à éviter l'ambiguïté du terme américain
« fecllc-otü2decl » (enfants d'un esprit faible).
« Dès 1881, nous trouvons une « classe auxiliaire »
(I1Ülfs-Klasse) établie en connexité avec les écoles muni-
cipales de lrunswick pour le bienfait des enfants qui,
quoique non idiots et imbéciles, étaient mentalement infé-
rieurs a leurs condisciples, au point de rendre leur ins-
truction inefficace dans les écoles ordinaires. A force d'at-
tention individuelle, rendue possible par le zèle sans
cesse croissant des maîtres chargés de l'instruction de
ces enfants, et d'une adaptation du système d'éducation
sensorielle et manuelle, qui rend de si grands services
dans les institutions pour les imbéciles, llerr Kielhol'l1, le
directeur de ces classes, a obtenu les résultats les plus
satisfaisants.
« Des classes semblables, - ou écoles spéciales, -
ont aussi été créées à Cologne, il Dusseldorf, il Crefeld,
il Ocra, a Dresde, à Leipzig, etc. Dans les classes de
Brunswick, il y a actuellement 110 élèves environ ; à
Cologne, il existe deux écoles spéciales avec un total de
près de 300 enfants. Comme règle, un maître ne doit pas
avoir plus de 20 élèves ; et comparativement un progrès
lent (une année de travail d'école ordinaire étant obtenue
en quatre) est tout ce qu'attendent les autorités scolaires.
Quelques enfants restent dans ces classes jusqu'à 18 ans ;
et, s'il est nécessaire, lorsqu'ils quittent, un aide charitable
leur trouve un emploi convenable. Dans les Pays-Scan-
dinaves, aussi comme annexes des établissements pour
les imbéciles, des classes pour l'instruction spéciale des
enfants anormaux ont été organisées depuis longtemps. A
LXXVJII Assistance DES enfants IDIOTS.
Christiania et il Bergen, ces classes sont annexées aux
écoles élémentaires publiques sous la direction respective
de lIen' Lippcstad et l £ en Soethre, directeurs des insti-
tutions voisines consacrées aux imbéciles. A Copenhague,
cette oeuvre fait partie de l'organisation remarquable du
])'' Keller, pour les soins et l'éducation des enfants arrié-
rés. Le fait qu'il a un personnel de 25 maîtres pour
200 enfants, montre que l'instruction est individualisée
autant que possible et d'après notre examen personnel,
nous pouvons affirmer son caractère admirablement pra-
tique. L'éducation industrielle est donnée sur une large
échelle, et des emplois dans les formes, ainsi que chez les
fabricants de brosses et de balais, sont procurés aux
garçons qui ont liai leur temps d'école, tandis que des
places de domestiques et de tilles de laiterie sont trouvées
pour les tilles. Celles-ci sont surveillées soigneusement,
d'où il résulte que « très peu tournent mal au de-
hors ».
«Le 5 mars 1891, le Comité des écoles de Londres char-
gea quelques-uns de ses membres d'examiner l'oppor-
tunité de mettre en pratique la recommandation de la
Commission royale a laquelle nous avons précédemment
fait allusion et qui était formulée en ces termes : « Que,
en ce qui concerne les enfants d'un esprit faible, ils seraient
séparés des écoliers ordinaires dans des écoles publiques
élémentaires, afin qu'ils puissent recevoir une instruction
spéciale. » Le résultat fut la création, l'année suivante,
d' Ecoles pour l'Instruction spéciale » des enfants qui, en
raison de leurs défectuosités physiques ou intellectuelles,
ne pouvaient pas être convenablement instruits dans les
classes ou par les méthodes ordinaires et M™ l3urjwin
fut chargée de leur organisation. Sous son habile direction
pas moins de J centres d'instruction spéciale ont été créés
jusqu'à présent, principalement dans les districts les plus
pauvres de la métropole. Il y a maintenant près de GOO
enfants sur le rôle et ce nombre augmente sans cesse.
Le conseil des écoles (Scllt>cl73oo.i'il) a sagement ordonné
que 30 élèves au plus seraient assignés il chaque maître ;
et dans la pratique les classes n'atteignent même pas ce
chiffre. La proportion des élèves est, il vrai dire, beau-
Classes spéciales. LXXIX
coup plus grande que dans les écoles des Pays Scandina-
ves, où chaque maître n'est chargé que de l'éducation de
dix élèves; mais le directeur utilise de la façon la plus
remarquable la force enseignante, qu'il a it sa disposi-
tion, par un horaire bien établi. Il est à remarquer, rela-
tivement à ce qui précède, que quoique la nomenclature
habituelle des études scolaires soit conservée, on a recours
à l'éducation osensorielle et manuelle, ainsi qu'aux métho-
des objectives de démonstration, plutôt qu'à l'instruction
ordinaire.
«Les occupations, qui forment une partie importante du
travail de chaquejour, sont spécialement adaptées aux ca-
pacités ou aux incapacités diverses et individuelles des élè-
ves. Les résultats, montrés à une exposition récente des pro-
duits de l'enseignement manuel des écoles de Londres, en
général, sont fort encourageants et même, dans quel-
ques cas, surprenants. On peut constater, à vrai dire, que,
à cette exposition, l'étalage des travaux de chaque enfant,
dans la classe spéciale, honorablement considérée comme
la sienne, est placé it côté de celui des enfants normaux.
La sélection des élèves pour ces classes est faite par le
directeur de cet enseignement spécial, d'après les rensei-
gnements donnés par le maitre qui a observé l'imperfection
et avec l'approbation du médecin du Conseil des écoles.
Cette répartition habile des élèves dans la catégorie qui
leur est propre est, sans nul doute, essentielle au succès
de cette oeuvre digne d'éloges.
« Quelques maisons privées d'éducation, clans lesquelles
des enfants mentalement défectueux (me¡¡[allv-rle/icient)
qui ne peuvent pas être, -'IL proprement parler, considérés
comme idiots ou imbéciles, sont instruits par les mêmes
procédés que ceux des classes spéciales du Conseil des
écoles, ont été établies dans ces dernières années. Comme,
dans beaucoup de cas, la faiblesse de corps coïncide avec
la faiblesse d'esprit, une habile surveillance médicale
d'une telle éducation est un avantage. Il est évident qu'un
enfant dont l'imperfection mentale ou l'état nerveux n'est
que léger, aura plus de chance d'amélioration lorsqu'il
sera instruit avec des enfants qui offrent des conditions
LXXX Education des enfants idiots.
mentales semblables que s'il est soumis dans une école
ordinaire à une rivalité sans espoir avec des enfants nor-
maux, ou, d'un autre côté, exposé aux influences dépri-
mantes d'une institution où les idiots sont reçus.
« En outre des arrangements spéciaux organisés par
les Conseils scolaires, certaines agences philanthropiques
ont fondé, dans ces dernières années, de petites maisons
industrielles clans les diverses parties de la contrée, pour
l'cmploi, sous une surveillance judicieuse, des adolescents
faibles d'esprit. Quant aux filles, une surveillance hicn-
veillante est naturellement nécessaire, et les maisons
établies dès maintenant sont exclusivement pour elles,
mais on espère que la nécessité de cette direction du sexe
« inférieur » si elle n'est pas pressante, ne sera pas
finalement perdue de vue.
« Quelques cas démonstratifs, donnant une idée de la
classe des enfants auxquels la désignation de « feeble-
minded (it l'esprit faible) ou de « (eeble-mentallu, » est
appliquée ajuste titre, peuvent aider à éclaircir le sujet.
De tels enfants sont aussi décrits comme « arriérés,
cbackwardH » ou comme enfants atteints d'un «arrêt de
développement mental» - termes correspondant aux
« Enfants arriérés » des écrivains français, aux « geistigzu-
ruck-geblicbone » des Allemands, et aux « tardivi » des
Italiens » .
M. Shuttleworth rapporte trois cas concernant des en-
fants arriérés dont l'histoire fournit un argument en faveur
de sa thèse et qu'il nous parait inutile de relater ici.
A la suite de la lecture et cle la discussion du rapport,
dont nous avons parlé plus haut, la Délégation'cantonale
du 5e arrondissement a adopté le voeu suivant : ,
« La délégation cantonale du, V° arrondissement émet
le voeu qu'il soit créé dans quelques-uns des arrondisse-
ments de Paris des classes spéciales pour les enfants
Classes spéciales. LXXXI
arriérés n'offrant ni perversion des instincts, ni acci-
dents convulsifs. »
Le président de la Délégation cantonale, M. Meurgé,
a transmis ce voeu à M. le Préfet de la Seine qui l'a ren-
voyé pour examen à M. Carriot, directeur de l'ensei-
gnement primaire. M. Carriot, accompagné de M. May,
nous a fait l'honneur de venir visiter le service le 11 t
avril.
Nous lui avons montré une partie des enfants que nous
venons de vous faire voir. Après cet examen, il a conclu
qu'il y avait lieu d'étudier notre proposition. Comme il
s'agit là, Messieurs, d'une question qui intéresse à la fois
l'Enseignement et l'Assistance, nous avons pensé qu'il
était de notre devoir de l'exposer cevant vous. Il est en
effet naturel que la Commission de Surveillance et la
Direction des affaires départementales soient représen-
tées dans la Commission qui devra être nommée. En con-
séquence nous vous prions de bien vouloir adopter le voeu
suivant :
La Commission de Surveillance des asiles d'aliénés du
Département de la Seine émet le voeu qu'il soit créé,
près des écoles de la Ville, des classes spéciales pour les
enfants arriérés.
On nous a reproché vivement, dans des circonstances
récentes, d'avoir fait dépenser trop d'argent pour l'Assis-
tance publique, c'est-à-dire pour les malheureux, à Paris
et clans le Département de la Seine : nous signalons au-
jourd'hui un moyen de réaliser des économies tout en
assistant, traitant et éduquant un plus grand nombre d'en-
fants.
Ce voeu a été adopté par la Commission de surveil-
lance dans sa séance du 18 juin (1).
(1) j>¡'ocès-¡;cr¡¡a"x, 1 ! 111, p. lî9.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1896. ?
LXXXII ASSISTANCE DES ENFANTS IDIOTS.
IL w
Lettre DE 1\1. Carriot au sujet de la statistique
DES enfants arriérés existant dans les écoles
primaires de la Ville de Paris. Réponse.
La visite que M. Carriot avait faite dans notre
service les exemples que nous avions placés sous
ses yeux ont eu l'heureux résultat de le convaincre
de l'utilité des classes spéciales dont nous réclamons
la création. -
Il a pensé qu'avant de nommer la Commission qui
serait chargée d'étudier l'organisation de ces classes,
il convenait de dresser une statistique des enfants
arriérés existant clans les écoles primaires do la ville
de Paris. Pour l'aider dans l'élaboration de la circu-
laire qu'il se proposait d'adresser aux directeurs et
aux directrices, il nous a demandé, par une lettre en
date du 12 septembre, quelques renseignements com-
plémentaires. Voici sa Lettre et notre Réponse.
A M. le Dr l3oanw : wu.i.r, médecin de la section des
enfants arriérés de Bicêtre.
Paris, le 12 septembre 189G.
Monsieur le Docteur,
Dès la rentrée des classes, je voudrais faire procé-
der au récolemcnt des enfants arriérés ou iudisuipli-
nés qui fréquentent les écoles de la Ville de Paris.
Classes spéciales. LXXXIII
Ce travail, qui a été fait dans le V"10 arrondissement,
n'a peut-être pas donné des résultats précis en raison
de l'ignorance dans laquelle se trouvaient maîtres et
maîtresses du sens exact, médical, des mots arriérés
et indisciplinés.
Pour que la nouvelle enquête à laquelle je me pro-
pose, d'ailleurs, d'associer les médecins-inspecteurs,
offre toutes les garanties possibles, je désirerais que,
dans la circulaire qui sera adressée aux maires avec
les procès-verbaux do la Commission de surveillance
clos Asiles d'aliénés, se trouvât une définition de ces
mots arriérés et indisciplinés, avec l'indication des
caractères clistinctifs et scientifiques de l'un et l'autre
état.
Je ne puis mieux faire que de vous prier de vouloir
bien me faire connaitre en quels termes doivent être
rédigées ces définitions, afin d'enlever au personnel
enseignant toute incertitude.
Si, pour cette enquête, il vous paraissait nécessaire
d'adopter une autre classification, je vous serai recon-
naissant de m'en prévenir.
Veuillez agréer, Monsieur le Docteur, la nouvelle
assurance de mes sentiments les plus distingués et
dévoués.
L'inspecteur d'Académie, Directeur de l'Enseignement
primaire du Département de la Seine.
CARRIOT.
il Monsieur CAHHIOT, directeur de l'Enseignement
primaire du département de la Seine.
Paris, le 5 novembre 1896.
Monsieur le Directeur,
Convaincu de l'utilité de classes spéciales pour les
LXXXIV Assistance ET éducation DES IDIOTS.
enfants des écoles primaires plus ou moins retardés clans
leur développement intellectuel, ou encore sujets une
instabilité mentale qui les rend turbulents, indisciplinés,
vous m'annoncez l'intention de faire procéder dans tous
les arrondissements de la ville de Paris à une enquête
analogue il celle qui a éte faite clans les VO et VIe arron-
dissements.
Pour cette nouvelle enquête à laquelle vous désirez,
avec juste raison, associer les médecins-inspecteurs des
écoles, vous me demandez de vous donner « une défini-
tion des mots arriérés et indisciplinés avec l'indication
des caractères distinctifs et scientifiques de l'un et l'au-
tre état. » Je vais essayer, autant que possible, de répon-
dre il vos désirs.
Sous le nom d'idiotie, on désigne un état constitution-
nel, physique, intellectuel et moral, du soit il des troubles
survenus pendant la vie foetale ou au moment de la nais-
sance, soit il des affections pathologiques surtout de la
première enfance (le la naissance il 7 ans,
moins souvent de la seconde enfance, c'est-à-dire de 7 ans
au début de la puberté (13 ou 14 ans).
L'idiotie est donc congénitale ou acquise.
Considérée dans son intensité, elle est complète ou
incomplète, se rapprochant dans sa forme la plus allé-
nuée de l'état de l'enfant normal le moins bien doué.
Dans toutes les variétés, l'idiotie peut être simple ou
compliquée (paralysie, épilepsie, chorée, rachitisme, scro-
fule, etc.).
Idiotie complète, absolue ou iclioliecltcpi'emienderpn.
Marche, préhension, parole, attention nulles. Incapacité
de s'aider en quoi que ce soit. Inconscience du besoin de s'a-
limenter, ou gloutonnerie avec absence du sentiment de la
satiété. Ecoulement permanent de la salive (bave) et des
mucosités nasales. Excrétions involontaires. Accès de
cris, tics multiples (balancements, grimaces, agitations
des mains, etc.). Bien que les organes des sens puissent
Classes spéciales. LXXXV
être intacts au point de vue anatomique, l'ouïe, la vue,
l'odorat, le goût, le toucher semblent absents. Sensibilité
générale très obtuse, d'où indifférence à la douleur, au
froid et a la chaleur. Aucune connaissance de leurs parents,
ni des personnes qui les soignent. Sans idée, sans parole,
sans mouvement, les idiots de cette catégorie sont des
êtres en quelque sorte végétatifs (1).
Idiotie profonde ou du second degré. La motilité est
moins atteinte que dans le premier degré. La marche est
possible, parfois exubérante. La préhension se fait, mais
d'une façon défectueuse, le pouce ne s'opposant pas ou
s'opposant mal aux autres doigts.
L'appétit est exagéré ; le sentiment de la satiété fait
défaut; legoùtest nul ou obtus, d'où la salacité. La diges-
lion se complique parfois de rumination. Les excrétions
sont involontaires.
La parole est nulle ou limitée à quelques monosyllabes
ou à des syllabes répétées. Les besoins, les détermina-
taons instinctives se traduisent plutôt par un langage
d'action (cris de joie ou de douleur). Ces idiots reconnais-
sent assez souvent leurs parents, les infirmières qui s'oc-
cupent d'eux. Ils témoignent des préférences pour cer-
taines personnes. Ils ont fréquemment des aptitudes
musicales, retiennent d'emblée les airs qu'ils entendent
et les chantonnent sans cesse, signe d'une mémoire au
moins partielle. L'attention est fugitive ; ils regardent
sans voir, entendent ce qui leur plaît et semblent absolu-
ment sourds pour les bruits ou les appels qui ne les inté-
ressent pas. L'odorat, le toucher sont obnubilés ou indiffé-
rents.
Ces enfants n'ont aucune conscience du danger, et comme
les idiots du premier degré, ont des tics très variés, sont
destructeurs, rongent leurs ongles, se déchirent, se mor-
dent ou mordent les autres, se livrent il l'onanisme, etc.
En résumé, vie végétative surtout, et vie de relation
très bornée.
(1) Une personne du monde, a écrit Calmeil, vivement impressionnée par
la vue de ces idiots, s'écria : le Il existe des bêtes humaines ! ' »
LXXXVI Classes spéciales.
Ce qui différencie ce second groupe du précédent, c'est
l'existence du mouvement, la marche et la préhension, qui
les rend dangereux pour eux et pour les autres puisque
le mouvement les expose il des accidents par suite de leur
inconscience du danger, et expose les autres à subir les
conséquences de leurs impulsions.
Imbécillité^proprement DITE. - Les facultés intellec-
. tuelles existent mais à un degré très incomplet. L'atten-
tion est fugace, la mémoire peu active, peu sûre, la vo-
lonté sans énergie : ils veulent et ne veulent pas. Ils peu-
vent comparer, combiner; toutefois ils s'élèvent difficile-
ment à des notions générales et abstraites. Ils ont des
idées, mais en petit nombre ; ils ne pensent et n'agissent
que par autrui, bien qu'ils soient capables de quelques
raisonnements.
Ils ont des^ déterminations instinctives, comme les
idiots du second degré et y obéissent sans frein.
Parmi ces malades, il en est chez lesquels l'imbécillité
se complique d'une perversion des instincts. Ils sont men-
teurs, querelleurs, paresseux, poltrons, entêtés, mobiles,
incapables d'un effort soutenu. Ils ont des besoins se-
xuels auxquels ils cèdent sans retenue. Ne possédant qu'une
notion vague du tien et du mien, ils ont des impulsions à
voler, détruire, incendier, etc.
La parole existe, mais la prononciation est souvent dé-
fectueuse. Leur langage est borné, leurs phrases impar-
faites, le verbe y est parfois ahsent; ils parlent d'eux la
troisième personne.
Ilspeuventremplir des occupations simples, uniformes,
toujours les mêmes.
Ils ont des sentiments affectifs, souvent superficiels. La
sensibilité générale est d'ordinaire émoussée. Les sens,
sont fréquemment intacts, mais peu délicats.
r Imbécillité légère ou arriération intellectuelle. Les
facultés intellectuelles, considérées dans leur ensemble,
existent mais sont retardées, notablement au-dessous des
facultés des enfants du même âge. L'attention laisse beau-
coup à désirer, toutefois il est possible de la fixer, au moins
Assistance ET éducation DES IDIOTS. LXXXVH
pendant quelque temps : ce temps augmente si l'on varie 1
les occupations intellectuelles. La réflexion, la prévo-
yance n'existent qu'à un faible degré. La conception est
lente, la mémoire paresseuse : ils n'apprennent que par :
périodes.
Les arriérés ont des penchants particuliers, des aptitu-
des spéciales. Leur intelligence se manifeste principale-
ment pour tout ce qui est relatif à ces penchants ou à ces
aptitudes. On doit en profiter et s'en servir pour agrandir
leur champ intellectuel. Parmi ces aptitudes, relevons les
réparties piquantes, les saillies plaisantes, les manières
joviales qui caractérisaient, par exemple, les malheureux
qui remplissaient autrefois la fonction de fou du Roi. Ils
ont dcs sentiments moraux, de la gaieté, de l'affection
familiale. Ils possèdent ie un ccrtain degré la notion du
devoir, l'esprit d'ordre.
Leur regard a peu d'éclat, mais ne fuit, ni ne se perd
dans le vague. Le mouvement, la marche, la préhension,
la sensibilité générale, la sensibilité spéciale sont en gé-
néral intacts. Au point de vue physique les arriérés offrent
des stigmates de dégénérescence moins nombreux et
moins prononcés que les imbéciles et surtout que les
diots.
Instabilité mentale. Elle est parfois simple, consti-
tuant alors une variété distincte mais est le plus souvent
liée il l'imbécillité, il l'arriération intellectuelle, désignée
encore sous le nom de débilité mentale.
Les instables ont une mobilité physique exubérante.
Ils ne restent en place nulle part, se lèvent de table il
chaque instant, sans motif. S'ils jouent, ils passent rapt-
dément d'un jeu à un autre.
Leur mobilité intellectuelle n'est pas moindre. A peine
ont-ils commencé il lire qu'ils veulent écrire ou compter,
etc. Ils n'obéissent pas.
Il en est de même au point de vue du travail manuel-
Peu après avoir débuté dans l'apprentissage d'une profes-
sion qu'ils ont eux-mêmes choisie, ils veulent en changer,
essayant tour à tour, sans se fixer, une foule de professions.
Ils ont des impulsions suintes, se sauvent de l'école, de
LXXXVIII Imbécillité morale.
la maison paternelle, errent durant un temps plus ou
moins long, rentrent spontanément ou se font arrêter par
la police. Ils sont prodigues de promesses, les font sou-
vent de bonne foi avec l'intention, à ce moment, de les
tenir et quelques heures ou quelques minutes plus tard,
\ exécutent ce qu'ils venaient de promettre de ne plus faire.
Imbécillité morale. Les onfants ou les adolescents
de ce groupe peuvent posséder des facultés intellectuelles
intactes, être les égaux des enfants de leur âge, appartenir
à la même classe, avoir leur certificat d'études, etc. Leur
défectuosité intellectuelle en tout cas ne constitue qu'un
caractère secondaire. Les stigmates de dégénérescence
physique sont même quelquefois tout-il-fait absents.
L'imbécillité morale, de même que l'idiotie, reconnaît
pour cause l'hérédité, l'alcoolisme, mais elle est aussi
due souvent à l'incapacité, il la brutalité, à l'immoralité
des parents.
Elle peut s'annoncer par des cauchemars, des accès
de colère, des caprices irraisonnahles, inaccoutumés,
des périodes de bouderie, survenus après une maladie
fébrile ordinaire, accompagnée ou non d'accidents céré-
braux (délire, convulsions, etc.), ou il l'occasion d'une
croissance précoce avec développement rapide de la pu-
berté. A l'inverse des imbéciles intellectuels, ils devan-
cent sexuellement leur âge; d'où clos impulsions génitales
qui les rendent dangereux.
L' instabilité et la perversion des instincts caractérisent
au premier chef l'imbécillité morale.
L'instabilité mentale se présente chez eux avec les ca-
ractères que nous avons précédemment décrits et sur les-
quels il est inutile de revenir.
Quant à la perversion des instincts, elle offre les traits
suivants : la conduite, de ces malades est inexplicable, en
désaccord avec leur état antérieur avec le milieu dans
lequel ils vivent; ils sont désobéissants, en révolte con-
tre toutes les conventions sociales, récalcitrants a toutes
les remontrances, à toutes les prières, aux témoignages
d'amitié, aux encouragements, aux récompenses, aussi
bien qu'aux punitions, Ils se laissent aller il des mon-
Classes spéciales. LXXXIX
songes intentionnels, soutenus avec entêtement. Ils sont
souvent crédules à l'excès envers ceux auxquels ils
s'abandonnent et qui les dominent.
Les sentiments affectifs sont émoussés ou nuls, ce qui
est dû parfois il l'indifférence coupable des parents. Ils
sont sujets il toutes les impulsions mauvaises : vols, in-
cendies, destructivité, cruauté envers les animaux, envers
leurs camarades plus faibles, etc. Ils éprouvent du plai-
sir à la vue de la souffrance ; aiment voir couler le sang;
sont en général durs pour eux-mêmes bien qu'ils soient
égoïstes.
L'imbécillité morale se complique quelquefois d'al-
coolisme, d'épilepsie, de folie, de perversions sexuel-
les.
Le traitement médico-pédagogique, la aussi, doit s'appu-
yer sur le peu qui reste de sain et s'en servir de base
pour corriger les défectuosités morales et, s'il y a lieu,
les imperfections intellectuelles.
Les enfants atteints d'idiotie au premier et au second
degré, les enfants affectés d'imbécillité morale doivent
être hospitalisés. Il en est de môme, au moins au déhut
de la création des classes spéciales, des enfants frappés
d'imbécillité proprement dite.
Ces classes nous paraissent devoir être consacrées aux
enfants atteints : 1° d'imbécillité légère ou arriération
intellectuelle ; 2o d'instabilité mentale (sans perversion
des instincts) ; 3° elles recevront aussi, plus tard, ve-
nant des services hospitaliers spéciaux, les enfants idiots
et imbéciles qui auront été améliorés et jugés aptes il prou-
ter de ces classes.
J'espère, M. le Directeur, que les définitions ou mieux
les tableaux en raccourci qui précèdent, malgré leur
insuffisance, pourront aider les directeurs et les direc-
trices des écoles primaires municipales dans le travail de
statistique que vous avez l'intention de leur confier et que
bientôt vous aurez des renseignements intéressants à
fournir à la Commission chargée de concourir avec vous
xc Classes spéciales.
à la création de classes spéciales pour les enfants arrié-
rés et les enfants instables.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'assurance de
mes sentiments les plus dévoués.
Bourneville.
Nous aurions hésité, Messieurs, à vous parler de nou-
veau de la création de ces classes spéciales si M. Le
Roux ne nous avait engagé à y revenir. C'est que, en sa
qualité cle directeur des affaires départementales, il
connaît tous les besoins du service clos aliénés et que
pour leur donner satisfaction, il convient de recourir
à tous les modes d'assistance et de traitement. Cette
préoccupation est également l'une de celles qui vous
assaillent. L'idée que nous vous soumettons aurait
l'avantage de maintenir, ou de renvoyer d'ici et des
autres services analogues, dans leur famille un nombre
considérable d'enfants, tout en les traitant et les édu-
quant, et aussi de diminuer dans une certaine mesure
les charges du département.
Nous osons espérer, Messieurs, que vous vous join-
drez à tous ceux qui, déjà, ont reconnu l'utilité cle la
réforme que nous examinons et que vous y associe-
rez le Conseil général en lui faisant désigner quel-
ques-uns d'entre vous pour la Commission qui ne man-
quera pas d'être nommée prochainement.
Votre ancien collègue,
Bourneville.
10 décembre 189G.
III.
Les médecins aliénistes des hôpitaux.
En 1840, le Conseil général des hôpitaux et hos-
pices de Paris institua le concours pour le recrute-
ment des médecins des services d'aliénés de Bicêtre
et de la Salpêtrière. Les médecins qui furent nommés
au concours et qui tous ont contribué à l'illustra-
tion de la Science française : Arclamhault, Baillarger,
Delasiauve, Moreau (de Tours), Trélat, jouissaient de
toutes les prérogatives des médecins des hôpitaux; ils
pouvaient, entre autres, faire partie de 10118 les jurys
des concours, sans exception : bureau central, amphi-
théâtre d'anatomie, etc. Lc concours, supprimé par
l'Empire, a été rétabli par la République.
Comme beaucoup de médecins et d'administrateurs
ignorent ou ont oublié les conditions clans lesquelles a
été réinstitué le concours, nous profitons de la mise à
l'ordre du jour du Conseil de Surveillance d'une ques-
tion concernant les médecins aliénistes qui ont été
nommés avant le rétablissement du concours, pour
réunir ici plusieurs documents de nature à préciser
la situation et à permettre de donner aux médecins
aliénistes, nommés au concours, les satisfactions aux-
quelles ils ont légitimement droit.
I. -ARRÉTÉ établissant le concours pour la nomination
des médecins titulaires des services d'aliénés des quar-
tiers d'hospice de Bicêtre et de la Salpêtrière.
Le Préfet cle la Seine, vu la loi du 10 janvier .1R',a et la loi
du 30 juin 1838 vu l'arrêté préfectoral du 30 juin 1878, insti-
tuant une commission à l'effet de donner son avis sur le
programme et les conditions du concours ouvrir pour la
nomination des médecins attachés aux services des quartiers
iioliiinatioit (les iitta(5lié- aux cles quartiers
XCII Médecins aliénistes DES HOPITAUX.
d'aliénés clans les hospices dépendant de l'Administration de
l'Assistance publique ;
Vu les procès-verbaux des séances de la dite commission,
du 27 février au 27 mars 1875, ensemble le rapport présenté
en son nom et adopté par elle dans la séance du 27 mars. où
sont formulées ses conclusions avec un double projet de pro-
gramme applicable au concours dont il s'agit, suivant le
mode d'assimilation complète ou partielle des médecins alié-
nistes, qui seront nommés d'après les épreuves de ces
concours, aux médecins nommés d'après les épreuves des
concours du bureau central des hôpitaux et hospices de Paris;
Vu le rapport spécial du président de la commission, doyen
de la Faculté de médecine, membre du Conseil de surveil-
lance de l'Administration de l'Assistance publique, en date
du 28 mai 1818; vu le mémoire présenté au sujet du règle-
ment de la dite question, par le directeur de l'Administration
de l'Assistance publique au Conseil de surveillance de cette
administration ;
Vu la délibération approbative en date du 18 octobre 1878,
prise par le dit Conseil de surveillance, sur le rapport d'un
de ses membres, et ce rapport y annexé, tendant : 1° A ce
que le système de l'assimilation partielle des médecins alié-
nistes aux médecins du bureau central soit adopté de préfé-
rence, avec le programme préparé en accord avec ce système
par la commission d'études, sans autre changement que la
suppression de l'épreuve sur titres scientifiques ; '2° A ce que
la composition du jury de concours soit modifiée en consé-
quence et simplifiée, arrête :
Article pbemieb. A l'avenir, en cas de vacances dans le
personnel des médecins titulaires des services d'aliénés
dépendant de l'administration de l'Assistance publique à
Paris, il sera ouvert, pour le choix de chaque médecin à
nommer, un concours dans les formes des concours du
bureau central des hôpitaux et hospices, en tant que ces
formes ne seront pas en contradiction avec les dispositions
spéciales du présent arrêté.
Art. 2. Les conditions d'admissibilité au nouveau con-
cours, ci-dessus spécifié, seront les suivantes : les candidats
devront avoir : 10 28 ans d'âge; 2° soit quatre années d'inter-
nat dans les hôpitaux et hospices de Paris ou dans les asiles
publics d'aliénés, et une année de doctorat, soit deux années
d'exercice en qualité de médecins-adjoints des dits asiles,
soit encore cinq années de doctorat.
AnT. 3. Les épreuves du concours sont réglées ainsi
qu'il suit :
1° Epreuve écrite sur l'anatomie et la physiologie du
.système nerveux. (Il sera accordé trois heures aux candidats
pOlir .traiter celte question) ;
2° Épreuve clinique commune sur un malade. (Dix minutes
MÉDECINS ALIÉNISTES DES HOPITAUX. XCIII
d'examen et vingt minutes de dissertation après cinq minutes
de réllexion).
3" épreuve clinique sur les maladies mentales : un seul
malade (vingt minutes d'examen et vingt minutes de disser-
tation, après cinq minutes cle réflexion :
Il'' Epreuve écrite, comprenant : une consultation après
l'examen d'un aliéné, un rapport sur un cas d'aliénation
mentale. (H sera accordé aux concurrents quinze minutes
pour l'examen de chacun des malades et une heure et demie
pour la rédaction du rapport et de la consultation ; la lecture
de cette consultation et du rapport sera faite au début de la
séance suivante) ;
5° Epreuve clinique sur deux malades d'un service d'aliénés.
(Les candidats auront quinze minutes pour l'examen de
chacun des deux malades et trente minutes pour la disserta-
tion après cinq minutes de réflexion).
Le nombre des points attribués il chaque épreuve est ainsi
fixé :
XCIV MÉDECINS ALIÉNISTES DES HOPITAUX.
exercice dans les quartiers d'hospice dépendant de l'Admi-
nistration de l'Assistance publique auront le droit de passer
dans les dits quartiers, d'un service d'aliénés, clans un autre
service d'aliénés suivant leur rang d'ancienneté.
Art. 8. Le secrétaire général de la préfecture, le direc-
teur de l'Administration de l'Assistance publique, sont char-
gés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent,
arrêté.
Fait à Paris, le 3 mars 1879. Signé : F. IIkrold.
II. A la suite de cet arrêté, un concours fut ouvert. Il
se termina par la nomination de M. Jules Voisin et la
nôtre (juin 1879). L'année suivante, à l'occasion de
l'élection d'un délégué des médecins des hôpitaux au
Conseil de surveillance, nous avons demandé (8 fé-
vrier 1888) à M. Michel Moring, alors directeur de
l'Administration générale de l'Assistance publique, de
bien vouloir préciser les prérogatives que l'arrêté pré-
fectoral du 3 mars 1879 accordait aux médecins alié-
nistes, nommés au concours. Peu après, M. le direc-
teur nous transmettait les deux pièces suivantes :
Extrait d'un RAPPORT adressé Ù Monsieur le Sénateur,
Préfet de la Seine.
« Je ne crois pas que la pensée qui a inspiré il Monsieur
le Préfet les dispositions de l'article dont il s'agit puisse
soulever le moindre doute. L'assimilation des Médecins
des Services d'aliénés aux Médecins des Hôpitaux est
complète, sauf sur un point qui concerne le droit de siéger
dans les Jurys institués pour la nomination des Médecins
du Bureau central. Cette réserve faite, les Médecins alié-
nistes doivent jouir de tous les droits et de toutes les pré-
rogatives des Médecins des Hôpitaux, puisqu'ils sont, du
reste, astreints aux mêmes charges, et en particulier
soumis comme eux au Règlement sur la limite D'AGE.
Leur droit de voter pour la présentation du Médecin chargé
de représenter ses collègues des Hôpitaux au sein du
Conseil de Surveillance me parait donc incontestable.
Paris, le 17 février 1880.
Le Directeur de l'Administration générale de
l'Assistance publique.
Signé : Michel MOHING.
MÉDECINS ALIÉNISTES DES HOPITAUX. XCV
A M. le Docteur Bourneville, Médecin de l'Hospice de
Bicêtre.
Paris, le 26 février 1880.
Monsieur le Docteur,
Vous m'avez fait l'honneur de m'écrire pour me deman-
der si, en vertu de l'article G de l'arrêté préfectoral du 3
mars 1879, les Médecins aliénistes nommés à la suite du
Concours et ceux qui le seront dans l'avenir, auront le
droit de faire partie des commissions que l'Administra-
tion est dans l'usage do consulter, et surtout de voter pour
la présentation du délégué de MM. les Médecins des hôpi-
taux au Conseil de surveillance.
«Aucun doute ne peut, à mon avis, s'élever sur le sens
des dispositions de cet article. L'assimilation des Jléde-
cins des services d'aliénés aux médecins des hôpitaux est
complète sous la seule réserve qu'ils ne siégeront pas s
dans les jurys des Concours pour la nomination des Mé-
decins du Bureau central. Dès lors, ils doivent jouir de
tous les droits et de toutes les prérogatives attribués aux
Médecins des Hôpitaux, de même qu'ils sont soumis aux
mêmes charges et en particulier au Règlement sur la li-
mite d'âge. Le droit des Médecins aliénistes de siéger
lorsqu'il y a lieu dans les Commissions administratives et
de voter pour la présentation du Médecin chargé de repré-
senter ses collègues au Conseil de surveillance est donc
incontestable.
J'ajouterai, que M. le Préfet, consulté par moi, vient do
me faire savoir que l'interprétation qui précède est con-
forme iL l'esprit qui lui a dicté l'arrêté du 3 mars 1879.
Veuillez agréer, Monsieur le Docteur, l'assurance de
ma considération la plus distinguée et de mes sentiments
dévoues.
Le Directeur de l'Administration générale de
l'Assistance publique.
Signé : \licliel DlonrrrG.
III. A M. le 1F Pevuon, directeur de l'Administration
générale de l'Assistance publique.
Paris, le 1888.
' Monsieur le Directeur,
Permettez-nous d'attirer aujourd'hui votre attention sur
la situation faite aux médecins des quartiers d'aliénés de
XGVI Médecins aliénistes des hôpitaux.
la Salpêtrière et de l31cètre; nommés au concours, vis-a-
vis des autres médecins des hôpitaux.
D'après l'arrêté préfectoral du 3 mars 187 ! ) l'assimila-
tion doit être complète. Une lettre de M. Michel Moring,
adressée à M. Bourneville il la date du 2G lévrier iSSU,
en réponse il une demande d'interprétation de l'arrêté
préfectoral, ne laisse d'ailleurs aucun doute à cet égard.
Nous en extrayons le passage suivant :
« L'assimilationdcs médecins des services d'aliénés aux
médecins des hôpitaux est complète sous la seule réserve
qu'ils ne siégeront pas dans les jurys des concours pour
la nomination des médecins clu Bureau central. Dès lors
ils doivent jouir de tous les droits et prérogatives attri-
bués aux médecins des hôpitaux, de même qu'ils sont
soumis aux mêmes charges, et en particulier au règle-
ment sur la limite c1 ;îrte. J'ujonterai que Monsieur le Pré-
fet consulté par moi, vient de me faire savoir que l'inter-
prétation qui précède est conforme à l'esprit qui lui a dicté
l'arrêté du 3 mars 1879. »
Gr, jusqu'ici, en pratique, l'assimilation n'a pas été
aussi complète que le ferait penser cet arrêté. A la suite
de l'intervention de notre collègue auprès de vous et de
M. Barbier, alors secrétaire général de l'Administration,
nous avons, il est vrai, été appelés il voter le 27 décembre
1886 pour la présentation du médecin chargé de représen-
ter le corps médical au Conseil de surveillance. Mais jamais
aucun de nous n'a encore siégé dans lesjurys de concours
pour le recrutement des élèves des hôpitaux.
Ces pcrogalivcs dont nos prédécesseurs nommés au
concours ont joui jusqu'en 18;-¡D a disparu avec le concours
lui-même. Mais clic pourrait, il nous semble, nous être
accordée de nouveau aujourd'hui que les médecins
de la Salpêtrière et de Bicêtre sont recrutés par la
voie du concours, tout comme les autres médecins des
hôpitaux.
Nous voue demanderons donc, Monsieur le Directeur,
cle vouloir bien compléter notre assimilation aux méde-
cins des hôpitaux en mêlant uns noms aux leurs dans
l'urne d'où sort la liste du jury des concours de l'exter-
nat, de l'internat, et des prix de l'internat.
Il est d'ailleurs assez naturel que nous désirions pou-
voir prendre part aux concours où se recrutent les élèves
de nos services et notre demande n'outrepasse pas les limi-
MÉDECINS aliénistes DES HOPITAUX. XCVII
tes des prérogatives que nous attribue l'arrêté préfectoral
que nous avons rappelé plus haut.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'assurance
de nos sentiments dévoués.
.[.Voisin, SsL ! .s, DENY, Charpentier,
Bourneville, Ch. Féré, CHASLIX.
A M. le D1' J. Voisin, médecin de la Salpêtrière.
Paris, le 6 juillet 1888.
Monsieur le Docteur,
J'ai reçu la lettre que \1\f. les médecins du service des
aliénés n'ont fait l'honneur de m'écrire pour me demander
d'être appelés, en vertu cle l'art. 6 de l'arrêté préfectoral
du mars 1879 qui institue le concours pour leur nomina-
tion, a siéger dans les jurys de l'Externat, de l'Internat
et des prix de l'Internat.
MM. les médecins du service des aliénés me rappellent,
à celle occasion, une lettre adressée il M. le 1)'" Hourne-
ville par l'un de mes prédécesseurs et dans laquelle M.
Moring déclare, avec l'assentiment de M. Herold, alors
préfet de la Seine, que « l'assimilation des médecins des
services d'aliénés aux médecins des hôpitaux est complète,
sous la seule réserve qu'ils ne siégeront pas dans les jurys
des concours pour la nomination des médecins du Bureau
central, et que, dès lors, ils doivent jouir de tous les droits
et de toutes les prérogatives attribués aux médecins des
hôpitaux.
Cette interprétation de l'art. G de l'arrêté préfectoral du
9 mars 18ïH ne soulève aucun doute et subsiste toujours.
Mais elle doit faire l'objet d'un article il introduire dans
le règlement sur le service de santé et cette régularisation
ne peut être effectuée sans le concours de la commission
spéciale chargée de réviser et de refondre le règlement
sur le service de santé.
MM. les médecins des services d'aliénés peuvent être
assurés que j'aurai soin de soumettre cette question a la
commission dès la reprise de ses séances, et d'appeler il
prendre part aux travaux de la commission, comme j'en
ai, d'ailleurs, depuis longtemps déjà l'intention, l'un de
liouoN>;vtt.t.e, l31cêtte, 18 ! )G. ?
XCVIII Médecins aliénistes des hôpitaux.
MM. les médecins aliénistes, chargé de représenter ses
collègues.
Recevez, M. le Docteur, l'assurance de ma considération
la plus distinguée.
Le Directeur de l'Administration générale de
l'Assistance ]J1l/J/ique,
Signé : E. Pevuon.
Les circonstances ayant empêché l'Administration
de s'occuper de cette réclamation, l'année suivante,
les médecins aliénistes ont adressé à M. P¡';Y1\ON la
lettre cle rappel suivante :
Paris, le 25 mai 1889.
Monsieur le Directeur.
L'année dernière nous avons eu l'honneur de vous
adresser une réclamation au sujet de la non-participation
des médecins aliénistes de la Salpêtrière et cle Bicêtre,
nommés au concours, aux jurys des concours de l'exter-
nat; de l'internat et des bourses de voyage.
Vous nous avez répondu le (i juillet 1888 en reconnais-
sant la justice de notre réclamation et en nous promet-
tant d'y faire droit.
Vous nous informiez que vous soumettriez cette affaire
a la commission chargée de la revision des règlements
sur le service de santé.
Près d'une année s'est écoulée sans qu'il y ait eu de
solution il notre connaissance. C'est pourquoi, nous nous
permettons, Monsieur le Directeur, de vous rappeler la
promesse que vous nous avez faite.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l'assu-
rance de notre considération la plus distinguée.
Charpentier., Voisin (.T.), DHXY, Réglas, Chaslin,
1·I : f : , Bourneville.
IV.
Au mois de janvier dernier, le journal l'Assistance
publique a reproduit un article de la 45"ez irtc rrtuli-
cale du 6 janvier, en le faisant suivre de réflexions.
Voici comment s'exprimait la 5'crr-im.c médicale : .'
MÉDECINS ALIÉNISTES DES HOPITAUX. XCIX
« Au moment où viennent d'avoir lieu les mutations des
chefs de service dans les hôpitaux de Paris, il nous parait
utile d'attirer l'attention sur la situation des médecins alié-
nistes de l'Assistancc publique.
« Actuellement ces médecins se divisent en deux catégo-
ries, suivant que leur nomination est antérieure ou postérieure
à l'année 1879. Les premiers, qui n'ont pas eu à subir les
épreuves d'un concours et qui ont été nommés directement
par arrêté préfectoral, jouissent du privilège de rester en
fonction jusqu'à un aire indéterminé.
« Les seconds, au contraire, qui ont été nommés au con-
cours, sont assimilés, au point de vue de la limite d'âge, aux
médecins des hôpitaux, c'est-à-dire qu'il sont mis à la retraite
à soixante-cinq ans.
« Le privilège singulièrement paradoxal, dont jouissent les
premiers de ces médecins vis-a-vis des seconds ne laisse pas
que d'avoir cle graves inconvénients. Outre qu'il empêche
ceux-ci de passer de Uicetre à la Salpêtrière à la période de
la vie où cette mutation devrait se faire, il recule indéfini-
ment l'entrée on fonction des médecins suppléants. Le recru-
tement de ces mêmes médecins se trouve du même coup
compromis, les candidats ne pouvant s'immobiliser dans la
perspective d'une carrière dont la porte ne s'ouvre plus. Il y
a dix ans, en effet, que les médecins suppléants actuels ont
été nommés, ot, depuis cette époque, il n'y a plus eu ni con-
cours, ni mutations de chefs de service. Cette situation, si
elle se prolongeait, équivaudrait donc à la suppression pure
et simple du concours.
Tel n'est pas, sans doute, le résultat cherché par l'adminis-
tration ;c'est pourquoi nous avons cru devoir lui signaler le dan-
ger, persuadés qu'elle saura y porter promptement remède ».
« Maintes réclamations, ajoute le journal l'Assis-
sistance publique, ont déjà été présentées à ce sujet
à la 3" commission du Conseil général de la Seine lors
de ses visites à Bicêtre et à la Salpêtrière. Enfin, au
mois de juin dernier, M. le D1' Féré, médecin de
Bicêtre, a profité de la visite delà Commission de
surveillance pour « appeler l'attention de la Commis-
sion sur les inconvénients déjà plusieurs fois signalés
du système actuel du recrutement des médecins sup-
pléants dont la nomination se trouve indéfiniment re-
tardée par suite du défaut de retraite pour une caté-
gorie de médecins qui ont atteint la limite d'âge et
dont la nomination est antérieure aux concours
actuels. ·
« Le Président de la Commission, M. Barbier, pre-
C MÉDECINS ALIÉNISTES DES HOPITAUX.
mier président honoraire de la Cour de cassation, a ré-
pondu que la Commission « serait désireuse, afin
d'être mise à même dans la modeste mesure de son
influence, de remédier Ù l'état de choses existant,
qu'un rapport lui lut adressé, pour être discuté en
temps et lieu ».
« C'est à l'auteur de la proposition, avec l'aide ou non
de ses collègues nommés au concours, de répondre
aux désirs de la Commission. Quant à nous, continue
l'Assistance, nous nous associons complètement à cette
réclamation qui nous paraît justifiée. »
Le Journal de médecine de Paris, la Gazelle
médicale, la Gazette hebdomadaire, la Tribune médi-
cale, la Presse médicale, etc., se sont associés à la
réclamation formulée dans l'article que nous venons
de reproduire. Cette unanimité d'opinion a décidé
M. PEYRON, directeur de l'Assistance publique, à
demander à son Conseil de surveillance :
1° De mettre la retraite M. le D'' Jules Falret,le 31
décembre prochain.
2° De mettre M. le D' Auguste Voisin à la retraite
à la fin de l'année dans laquelle il aura atteint sa 70'
année.
On ne peut ([n'applaudir à ces propositions inspirées
par un véritable esprit de conciliation et qui, nous
l'espérons, seront ratifiées par le Conseil de surveil-
lance.
Nous terminerons cette Note en demandant au Con-
seil de surveillance et il M. Peyron de bien vouloir
régler définitivement la situation des médecins ulié-
nistes des hôpitaux, nommés au concours, en les
mettant en possession des prérogatives qui leur appar-
tiennent légitimement en vertu de l'arrêté préfectoral
du 3 mars 1879, notamment la participation aux con-
cours de l'externat, de l'internat, et des prix de l'in-
ternat. B.
15 mars 1807.
DEUXIÈME PARTIE
Clinique, thérapeutique, anatomie pathologique
Bourneville, Bicêtre, 1896. 1 i 1
I.
Paréso-analgésie droite avec panaris analgésiques ou
maladie de Morvan ; hémiplégie droite et paraplégie
inférieure;
Par BOURNEVILLE.
Sommaire. - Père, excès de boisson. - Grand-oncle paternel
suicidé. Grand tante paternelle morte de congestion cérébrale.
- Autre grand'tante paternelle démente. - Mère, convulsions de
l'enfance, fièvre cérébrale ci quatorze ans accompagnée de canitie
partielle, très nerveuse. - Grand-père et oncle maternels, excès de
boisson. - Consanguinité. - Inégalité d'âge de huit ans.
Impression maternelle vive pendant la grossesse. - Convul-
sions répétées vers deux ans. - Affaiblissement paralytique du
côté droit et mains en crochet, constatés ci deux ans et demi. -
Traumatisme du genou suivi d'arthrite à quatre ans. - Aggrava-
tion de la paralysie et contracture des membres inférieurs. -
Abcès multiples du genou droit. - Brûlure de la main gauche à
neuf ans et, peu après, premier panaris analgésique. - A qua-
torze ans, second panaris analgésique. - Quelques semaines après,
deux abcès dit membre supérieur droit. - Description du malade
en 1889 : différence de coloration des iris ; - malformation des
oreilles ; déformation du thorax ; malformations pathologi-
ques de l'index et du médius gauche ; arrêt de développement du
bassin et du train postérieur ; - hémiplégie droite -- paraplégie ;
- dissociation de la sensibilité, etc. - Luxation du radius droit.
- Ankylose du genou droit, doigt ci ressort, etc.
1890. Furoncles, abcès. - Brûlure provoquée au dos de la main
droite sans douleur.
1893. Phlegmon du coude et fracture de l'extrémité inférieure de
l'humérus.
1894-1895. Amélioration progressive de l'état intellectuel et phy-
sique.
- 1896. Ma1's-aVl'il. -, Nouvelle description du malade.
4 PARÉSO-ANALGI : SIE DES extrémités supérieures.
Bis... (Charles), né à Paris le 12 novembre 1815, est entré dans
notre service le 24 novembre 1888.
Antécédents héréditaires. - Père, cinquante-cinq ans, homme de
peine dans un lavoir. Il paraît plus vieux que son âge. Il a la lèle-
conique et le sillon naso-labial gauche plus creux que le droit, bien
qu'ilaffirmen'avoirjamaiseu d'accidents nerveux.Durant l'enfance,
il n'a eu ni manifestations scrofuleuses, ni convulsions, ni fièvres
infectieuses, ni syphilis, ni migraines, ni maladies de peau, ni
panaris. Il avoue faire des excès de boisson quotidiens : il boit deux
à trois litres de vin par jour et un litre de café mélangé d'eau-de-
vie. Sa physionomie dénote ses habitudes alcooliques. - [Père
mort à quarante-huit ans (fusillé au fort d'Ivry) ; il était séparé de
sa femme, aussi ne peut-on donner d'autres renseignements sur
lui. - Grand-oncle paternel suicidé par pendaison. - Grand' tante'
paternelle morte de congestion cérébrale à soixante-quatorze ans.-
Mère morte à soixante-dix ans en trois jours, on ne sait de quoi.-
Tante, quatre-vingt-quatre ans, démente. Frère mort à cinquante-
neuf ans de la poitrine; - six autres frères et sûrs morts en bas
âge. Grands parents paternels et maternels, pas de détails. - Point
d'aliénés ni d'épileptiques, etc., dans la famille].
Mère, blanchisseuse, sobre, morte à quarante-six ans en 1883
d'une tumeur blanche du genou ; à quatorze ans, elle avait eu une
fièvre cérébrale grave, durant laquelle une grande partie de ses
cheveux aurait blanchi (canitie partielle), haie aurait eu des convul-
sions, mais on ne sait si c'est pendant sa lièvre ou dans l'enfance.
Pas d'attaques de nerfs ni de migraines, mais des accès de colère
suivis de pleurs. - [Père mort de bronchite chronique; nombreux
excès de boisson. - Mère, soeur du grand-père paternel de notre
malade, pas de renseignements. Frère mort on ne sait de quoi,
faisait des excès alcooliques. Pas d'aliénés, etc., dans la famille.]
Consanguinité (cousins germains); différence d'âge .de huit ans.
Dix enfants, tous des garçons;, huit sont morts du croup à diffé-
rentes époques. Ils étaient intelligents et n'avaient jamais eu de
convulsions. Il en est de même du septième qui est soldat dans un
régiment de cuirassiers.
Antécédents personnels du mn/rule. - La conception n'aurait pas en
lieu durant l'ivresse. - Grossesse : pas de traumatismes, ni d'envie de
boire, ni de syncopes, ni d'attaques, mais dans les premiers mois, 'z'
sa mère aurait eu « un regard» : « un mendiant de lavoir », para-
lysé d'un côté du corps est venu demander l'aumône; elle l'a tm',
ce que voyant, une de ses camarades l'a interpellée vivement :
=Adèle que faites-vouslà o » Elle est revenue aussitôt à elle comme
d'un rêve. « Mon enfant a un bras et une jambe qui ressemblent à
ceuxdumen()iantetdufm''mec0tè. </t ? co ! <c/t('mftnatureiet
sans chloroforme, en quatre heures. - la naissance, pas d'as-
· Antécédents. 5
nhyxie. Elevé .à la campagne, au biberon, avec du lait de
chèvre, il aurait eu, vers deux ans, à trois reprises des convulsions,
qui, chaque fois, auraient duré deux ou trois heures et sur lesquelles
on ne peut fournir de détails. Depuis lors il n'en a plus eu, affirme
son père.
Quand 15... est revenu chez ses parents, à deux ans et demi, il était
Lieu portant, mais sa mère remarqua qu'il avait le côté droit moins
ijroscl plus faible que le gauche, qu'il marchait en tortillant et trai-
nant la jambe, que ses mains étaient en crochet : «les doigts, dit-on,
se refermaient toujours ». Cette rétraction était plus prononcée du
côté droit. '
A quatre ans, étant à l'asile, il a reçu un coup de pied d'nn de ses
camarades. Dès le lendemain le genou droit était gontlé. C'est pour
cet accident et pour la rétraction de ses doigts que ses parents
font conduit au bout d'un mois à l'hôpital des Enfants-Malades où il
n'a fait qu'un court séjour ; le diagnostic posé était : méningo-
myélite. Puis il y est rentré le 17 août 1881, en est sorti le 8 octobre'
et le 29 du même mois, il a été envoyé il l'hôpital de Berclc. Il en
est revenu le 10 juin 1881.
D'après les notes qu'à bien voulu transmettre M. le Directeur des
Enfants-Malades, le diagnostic était au départ : Coxalgie avec appa-
reil, état général bon; et, au retour, coxalgie améliorée. Les noies
du Directeur de l'hôpital de Bcrk-sur-Mer, copiées sur le registre
de la maison, ne nous fournissent aucun renseignement utile. On
parle d'une tumeur blanche, d'un redressement du genou qui sera
prochainement tenté. Et c'est Loti[. - Le malade, lui, prétend
qu'on lui aurait retiré un petit os du genou droit et qu'on lui aurait
maintenu la jambe dans l'extension pendant quarante jours, à
l'aide de poids.
Lorsque ! ! ...est rentré de Berck, son père a remarqué qu'il avait
les genoux collés et qu'il lui était impossible d'écarter la jambe droite
sans douleur, symptômes qui n'existaient pas au moment du départ :
« Avant mou départ, mon père me portait sur ses épaules et j'écar-
Lais bien les jambes, dit l'enfant. » En raison de son infirmité et
aussi à cause de la mort de sa mère, 13... fut placé quelques
semaines après son retour à l'asile des incurables des frères Saint-
Jean de Dieu. Durant son séjour dans cet établissement(dix-huit mois),
on lui aurait ouvert deux abcès au niveau du genou. Ces abcès,
si l'on en croit l'enfant, renfermaient beaucoup de pus et les inci-
sions auraient produit de vives douleurs. Au dire du père,13 ? n'au-
rait rieu appris dans celte maison : a J'ai payé pendant plus d'un
an 15 francs par mois, puis m'étant trouvé sans travail, je n'ai pas
pu payer et, au bout de cinq mois, les frères m'ont ramené l'en-
fant. Je l'ai gardé deux ou trois semaines et ensuite j'ai obtenu
son placement à la colonie de Vaucluse (26 février 1887). » Il y est
6 P : 11;ES0- : 111LGES1E DES extrémités supérieures.
resté jusqu'au 24 novembre 1888, sans aucune amélioration, pré-
tend-on. C'est là qu'il a eu, il treize ans (janvier 1888), son premier
panaris siégeant à l'index gauche. Voici d'après le malade lui-
même dans quelles circonstances.
Il s'amusait à tisonner un feu de charbon de bois. Un morceau
de charbon incandescent ayant été projeté du foyer, il voulut le
ramasser, tomba et posa le dos de la main gauche sur le charbon,
sans s'en apercevoir : « Pendant ce temps, affirme-t-il, l'infirmière
me parlait, j'avais la tête tournée et je ne m'apercevais de rien. »
Il prit le charbon entre ses doigts et le remit dans le feu, sans avoir,
à aucun moment, éprouvé une sensation douloureuse. Peu après, il
s'aperçut qu'il avait une cloque au niveau de l'articulation méta-
carpo-phalangienne el la phalange de l'index gauche, du côté de la
face dorsale. Il aurait enlevé l'épidémie » pour faire sortir l'eau »,
aurait refusé tout pansement et quand il se produisait des croûtes
il les détachait. Jamais il n'aurait souffert durant les deux mois
que la plaie a mis à se cicatriser.
Environ quinze jours plus tard, sans cause connue, il serait sur-
venu un gonflement très prononcé de 1 "index gauche. Le gonflement
qui, à l'origine, occupait la phalange, aurait ensuite gagné la pha-
langine et la phalangette. Fièvre vive, céphalalgie, insomnie.
Absence complète de douleurs locales. Pendant deux jour; on appli-
qua des cataplasmes et, le troisième jour, on fit une incision qui
n'aurait occasionné aucune souffrance (pansement phéniqué).
Deux jours après l'opération, ¡'ol1ule était tombe et l'extrémité du
doigt était nécrosée. On procéda sans chloroforme et sans douleur si
l'ablation des os de la phalangette et de la phalangine.La cicatrisa-
tion aurait été lente et n'aurait pas duré moins d'un mois : c'était
le PREMIER PANARIS WaLCnsye : .
Sauf une tendance à mentir, 13... n'a pas de mauvais instincts, il
n'est ni gourmand, ni voleur, ni méchant, ni destructeur,, ni ona-
niste, ni coléreux. Il esldoux et affectueux. 11 n'a eu ni vers ni aucune
maladie infectieuse, sauf la coqueluche à trois ans et peu après des
croûtes dans le cuir chevelu. Il n'aurait en aucune autre manifes-
tation lymphatique. Il aurait eu beaucoup d'engelures qui se seraient
ulcérées ( ? ) ; on ne saurait dire si elles étaient plus prononcées d'un
côté que de l'autre.
En novembre 1888, le père de B... a demandé et obtenu son
transfert de la colonie de Vaucluse à Bicêtre, à cause des dépenses
que lui occasionnaient les visites à la colonie.
Notre dévoué collaborateur, le D1' BLirr, médecin de la colonie de
Vaucluse, a eu l'obligeance de nous envoyer les notes ci-après sur
les particularités offertes par Bi... durant son séjour à Vaucluse :
Certificat du Dr LECnas (février 1887) : a B..., idiotie, violences
passagères; rétraction du membre droit; malformation de la main
Antécédents personnels. 7
droite, voûte palatine en ogive, inégalité pupillaire, contusion très
légère à l'oeil gauche. Ce malade est dans un état mental qui exige
son placement dans un asile d'aliénés. »
Certificat du D' Magnan (20 février 1887) : « Débilité mentale avec
excitation passagère; ankylose du genou droit. »
Certificat du Dr 11E(i : lV : lL (27 février 1887) : « Débilité mentale
compliquée de manifestations strumeuses du côté des os; associa-
tion des idées excessivement lente; mémoire très rudimentaire. »
Mars 1887. - Infirme par accidents scrofuleux ; enfant paraissant
extrêmement doux ; perfectible.
Novembre. Insubordination, « hypocrisie " brutalités, frappe
son entourage avec ses béquilles.
Décembre. Grossièreté, trivialité, indocilité. Aucun progrès
dans l'état mental.
Janvier 1888. - Panaris ostéomyélilique de l'index gauche.
Mars. Mauvais instincts, taquineries incessantes. Son esprit
n'est tourné que vers le mal.
Avril. - Indiscipline constante; cet enfant ferait le martyre des
gardiennes si son infirmité lui permettait d'être agile.
Mai. - Abcès sous-axillaire à droite, produit par le frottement
de la béquille.
Juin. - Grossier, malpropre, brutal, frappe ses camarades avec
ses béquilles quand il ne peut les atteindre autrement.
Septembre. - Plus doux et plus tranquille.
Octobre. - L'amélioration se maintient, parait avoir quelques
sentiments affectifs et s'attache à son entourage.
Voici maintenant ce que nous avons observé durant son séjour
dans notre service de 1889 à 1896.
1889. Janvier. - B... reste quatre jours à l'infirmerie pour une
angine e) ? Ae'm<;<e ! <M.
, 13 macs. - Salivation; opalescence des commissures labiales,
exulcération transversale de la face interne de la joue gauche ;
petite plaque rouge près de la dernière molaire. Petites adénites s
sous-maxillaires, cervicales, axillaires et inguinales. Rien aux
organes génitaux, à l'anus, au cuir chevelu, à la peau. Dans Vais-
selle droite, on trouve une demi-douzaine de croûtes épaisses repo-
sant sur des plaques indurées, rosées à la périphérie, ayant une
direction antéro-postérieure. Ces accidents ont disparu en trois
semaines 1.
Avril. - Second panaris analgésique. - B... s'aperçoit par
hasard d'un gonflement du médius gauche. Fièvre vive, insomnie;
ni céphalalgie, ni douleur au niveau du doigt malade. Incision
indolore ; issue de pus en abondance. L'extrémité du droit se
nécrose. Cicatrisation lente.
8 PARESO-ANALGÉS1E DES extrémités SUPÉRIEURES.
En juin 1889, B... a eu un abcès sans cause connue au niveau de
la partie supérieure de l'avant-bras droit, à 3 ou 4 centimètres du
pli du coude. La fièvre aurait été assez vive; l'incision transversale
qui adonné issue à une grande quantité de pus aurait été douloureuse
et on dut tenir vigoureusement le malade. Guérison rapide; cica-
trice de 3 centimètres. Peu après deuxième abcès au niveau du tiers
moyen de la face antérieure du brus droit; mêmes phénomènes.
Cicatrice longitudinale de 2 centimètres.
1 890. Juillet. - En travaillant à la cordonnerie, il s'est fait à la face
postérieure de l'avanl-bras droit, un peu au-dessus du poignet, une
plaie en biseau de 3 centimètres de longueur : il dit n'avoir abso-
lument rien senti.
Etat actuel (5 août) (fig. i, 2, 3). - Tète de volume à peu près
moyen, régulière, à peu près symétrique, presque ronde. Le cuir
chevelu présente en arrière trois cicatrices.
Face. - Front peu élevé, un peu fuyant avec des bosses frontales
peu saillantes. Arcades sourcilières plutôt déprimées. Les yeux sont
assez petits. L'iris, bleu à droite, a une couleur jaune verdâtre ti
gauche. Les pupilles sont égales et réagissent bien à la lumière el
à l'accommodation. L'acuité et le champ visuels sont normaux.
Oreilles longues, écartées en haut, non ourlées, à lobule adhérent.
Nez aquilin, régulier, légèrement dévié à droite. Les plis du front,
les sillons naso-labiaux soit au repos, soit dans les mouvements
provoqués, le rire, etc., sont égaux. Les angles de la mâchoire
inférieure sont fortement accentués. Bouche d'habitude légère-
ment entr'ouverte, lèvres assez épaisses. Langue, amygdales,
palais, rien à noter. Luette courte. Menton un peu carré.
" Dentition. - Il existe, à chaque mâchoire, 14 dents déforme
normale, d'assez bonne qualité, peu serrées, bien rangées. L'arli-
culation est naturelle. Les gencives sont en bon état.
Cou assez long; circonférence, 28 centimètres. La glande thyroïde
est peu volumineuse'. ,
1 Titoi,ax M're ! <<t0', très développé dans ses deux tiers supérieurs,
rétréci dans son tiers inférieur. Les muscles pectoraux sont volumi-
neux ; leur -bord inférieur forme un relief prononcé. La région
pectorale droite est plus relevée que la gauche. En avant la moitié
droite est moins large que la gauche. La partie comprise entre le
bord inférieur des régions pectorales et le rebord des fausses côtes,
nettement convexe en avant et à gauche, est aplatie à droite. En
arrière le thorax est notablement déformé. L'épaule gauche est un
peu plus élevée et plus bombée que la droite. Il y a une dépression
assez prononcée entre les deux omoplates. Très large en haut, la
poitrine se rétrécit à partir de la pointe de ces os. Le reste du tronc
* En 1896, la circonférence du cou est de 31 centimètres.
DESCRIPTION DU malade.... -' 9
et le bassin tout entier sont notablement arrêtés dans leur développe-
ment par rapport à là moitié supérieure du tronc. -
La colonne vertébrale décrit une légère courbure à convexité
B... en 1888, à l'âge de treize ans et demi.
dirigée à droite au niveau de la partie moyenne de la région dbr-
sale ; elle est rectiligne dans la partie inférieure de cette région.;
enfin les deux dernières vertèbres dorsales et. les vertèbres lbm-
baires offrent une seconde convexité dirigée à gauche. Les apo-
physes épineuses des cinq dernières vertèbres dorsales et surtout
les trois dernières sont assez saillantes. La peau qui les .recouvre
est épaissie par suite du frottement de la ceinture, ce qui contribue
encore à augmenter la saillie. ? ? ,o. ?
Membres supérieurs. - On n'observe pas de déformation des bras
' Pig. -1.
10 PARÉSO-ANALGÉSIE DES extrémités SUPÉRIEURES.
mais le gauche est mieux développé que le droit. Les saillies mus-
culaires, malgré cette différence, se dessinent nettement : aucun
indice d'atrophie. L'aisselle droite est le siège de troubles tl'oph'(l/¡eS
IL. treize ans et demi.
cutanés. La peau est brunâtre, épaissie dans son ensemble, avec
des papules larges, mamelonnées. Durant son séjour à la colonie de
.Vaucluse, il est arrivé maintes fois que ces lésions ont été plus
accusées, en quelque sorte par poussées. Les papules grossissaient,
étaient le siège d'une sécrétion légère, et se recouvraient de croûtes'. '.
Les muscles deltoïdes, biceps et triceps brachiaux forment des
1 Les lésions ont toujours été beaucoup plus étendues et beaucoup
plus prononcées sur la paroi externe de l'aisselle que sur la paroi
interne.
ng- 2.
Description DU malade. 11
saillies très nettes. Ils sont plus volumineux il gauche (voir le
Tableau des mensurations des membres). Les coudes sont déformés
par suite d'une grande laxité des ligaments.
B... treize ans et demi.
La flexion des coudes est normale, mais l'extension est exagérée.
Les mouvements de rotation de l'avant-bras ne s'opèrent que par
la rotation du bras et de l'épaule. Aucun traumatisme connu du
père et de l'enfant n'explique cette laxité des ligaments aux deux
coudes, qui est un peu plus prononcée à droite.
Il existe une luxation de l'extrémité supérieure du radius dont
on ignore et la date et la cause.
L'état des mains mérite une description détaillée.
a) Main gauche. - La peau de toute la main, surtout des doigls,
Fi ! l. 3.
'13 Paréso-analgésie DES extrémités supérieures.
est épaissie, rugueuse. On noie sur la face dorsale deux cicatrices
blanchâtres, consécutives à des brûlures volonlaires qui n'ont occa-
sionné aucune douleur, et qu'il s'était faites à la suite d'un pari,
avec une cuillère chauffée au rouge. L'index, composé seulement
de la phalange, se termine par une masse arrondie sur laquelle
s'implante un petit fragment d'ongle. Les mouvements de flexion
et d'extension sont peu étendus. Le médius se termine par un
fragment d'ongle un peu plus large que celui de l'index. La peau
de ce doigt est le siège dune induration cornée; la phalangette
persiste. Les autres doigts n'offrent qu'une hypertrophie de la peau.
Il n'y a pas d'atrophie des éminences thénar et hypothénar (fig. 4).
b) Main droite. - La peau est épaisse, principalement autour
des articulations des doigts. Il existe un durillon au point de contact
I'ir. -r. 1.
. ' Description DU malade. 13
du pouce avec la paume. L'extension des doigts est incomplète.
Rétraction de la phalangette du pouce; mouvements très limités.
La peau des deux mains est le siège de crevasses assez profondes.
L'écartement des doigts, des deux côtés, est nul. Au dynamomètre,
10 à gauche, 6 à droite (fig. 4 et 6).
Membres inférieurs. - Dans l'attitude habituelle, la cuisse droite
est tléchie sur le bassin ; elle forme un angle d'environ 45° et ne
peut être étendue davantage. De plus, elle' est dans l'adduction et
croisée sur la cuisse gauche (fig. 2 et 3). L'adduction est limitée;
laflexion complète est possible. Le genou ne semble pas déformé,
mais les mouvements sont très circonscrits. ·
La jambe est fléchie à angle droit, c'est à peine si on peut lui
faire décrire un angle de quelques degrés dans le sens de la flexion
et de l'extension (ankylose incomplète). Le tendon d'Achille est
rétracté et forme une corde saillante sous la peau; Le pied semble
ankylose. Il est dans l'extension presque complète, avec un léger
degré d'abduction et de rotation en dedans. Il est possible de pro-
voquer quelques mouvements très peu étendus dans tous les sens.
Les mouvements des orteils sont faciles.
A gauche, les mouvements de la cuisse sont un peu limités dans
le sens de l'extension et de l'abduction; l'extension complète de la
jambe sur la cuisse est impossible; les mouvements du pied et des
orteils ont peu d'amplitude.
Les réflexes tendineux paraissent normaux ( ? ).
Organes génitaux. - Bourses pendantes ; testicules égaux du
volume d'une olive. Verge : longueur et circonférence, 5 ces-
timètres; prépuce un peu long; gland découvrable; méat normal.
Une demi-douzaine de poils de chaque côté de la racine de la
verge. Rien à l'anus. Le corps est glabre.
Sensibilité spéciale. - La vue, l'ouïe, le goût, l'odorat sont con-
servés et au même degré des deux côtés.
Sensibilité gêné) ale. - a) Sensibilité au contact. Les yeux fermés,
le malade reconnait bien les objets que l'on place entre ses doigts,
sur la face dorsale du carpe, de l'avaut-bras et du bras. Il sent bien
le contact de l'épingle que l'on passe sur le bras et l'avant-bras. Il
ne sent pas le frottement du doigt dans la zone analgésique, ni le
passage des poils d'un pinceau; il ne sent pas non plus le contact de
gros objets appuyés avec pression sur sa main.
b) Sensibilité à la douleur. - Il Côté gauche : anesthésie en gant
remontant jusqu'à deux travers de doigt au-dessus de l'ayticulation
du poignet. Au niveau de l'avanl-bras et du bras, le malade ne
ressent qu'une piqûre lorsque les deux épingles sont à 15 .milli-
mètres l'une de l'autre. '
2° Côté droit. L'anesthésie occupe, à la main les mêmes régions
sauf que l'éminence thénar a conservé la sensibilité. Sur l'avant-
z4 PARE50-AN11.GES1E L1 : 5 extrémités supérieures.
bras et le bras, la sensibilité à la piqûre est normale et le malade
distingue nettement la pointe de deux épingles à 5 millimètres
d'écartement.
c) Sensibilité thermique. - Thcrmo-anesthésie de la main gauche
dépassant l'analgésie de deux il trois travers de doigt. - Thermo-
anesthésie de la main droite ayant la même distribution que l'anal-
gésie, mais occupant toute la face palmaire.
B... a conservé la notion déposition et se rend compte qu'on ment
ses jointures, qu'on les tord mais sans éprouver de douleur.
Au niveau de la, face interne du tiers supérieur du bras droit et
de l'aisselle correspondante, analgésie, très marquée et ilternzo-anes-
thésie avec conservation de la sensibilité tactile. - Dans les
mêmes régions, Ii gauche, les différents modes de la sensibilité sont
conservés 1.
La physionomie dénote un certain degré d'intelligence, mais offre
eu même temps une expression de niaiserie due au regard un peu
vague et à la bouche presque toujours légèrement béante. - La
parole est libre, le langage rarement grossier. B... est peu appliqué
à l'école où très souvent il s'amuse et se dispute avec ses camarades.
Son caractère est assez doux; il aime à jouer et ne se fâche presque
jamais. Il est toujours dans les groupes où l'on se distrait, car,
quoique ne marchant qu'avec des béquilles, il prend part à tous les
jeux. Il a de la volonté, distingue le bien du mal. Il est toutefois
facile il entraîner à mal faire, ment quelquefois en classe pour évi-
ter des réprimandes ou couvrir ses camarades. Il est attentif, à
condition d'être surveillé. Il aime assez les exercices de lecture,
mais ne sait pas lire couramment, fait les trois premières opérations,
commence à faire la division, mais ne peut réussir le plus simple
problème. Il possède quelques notions d'histoire et de géographie;
toutefois, il s'embrouille facilement et confond les termes et les
dates. Sa tenue est en général bonne. Pas de mauvais instincts.
Il a choisi le métier de cordonnier.
25 septembre. - B... travaille à l'atelier de cordonnerie. Il a
laissé tomber un tranchet sur la partie inférieure de sa cuisse droite
et s'est fait une plaie transversale qui a nécessité deux points de
suture. Guérison en quelques jours (cicatrice de 3 centimètres
au-dessous du condyle interne du fémur).
1890. Janvier. - B... est taquin, grossier, paresseux, violent et
frappe ses camarades avec ses béquilles.
Février. - Embarras gastrique bilieux. Un nouvel examen de la
sensibilité donne les résultats suivants : anesthésie totale à la cha-
leur, au tact et à la douleur au niveau de la face dorsale des doigts,
1 Nous avons rédigé tout cet état actuel d'après les notes recueillies par
notre ancien interne de 188 ! ), le D' Hobert Sollel. (du Havre).
... Marche DE la maladie. 15
de la main et du poignet jusqu'à une ligne passant à deux travers
de doigt au-dessus du pli articulaire. - A la face palmaire de la
main, le malade reconnaît les objets qu'on lui fait saisir, mais il
ne perçoit ni la chaleur, ni le froid, ni la douleur (dissociation de
la sensibilité). Pas de troubles de la sensibilité sur le tronc et les
membres inférieurs.
Avril. - Deux furoncles l'un au côté du mamelon droit, l'autre sur
la cuisse droite.
Juillet. - Puberté. Le corps est toujours entièrement glabre,
sauf quelques poils rares au pénil. Longueur et circonférence de la
verge, 7 centimètres. Pas d'autres changements.
Août. - Abcès tubéreux de l'aisselle droite dû au frottement de
la béquille.
Septembre. - Brûlure sur le dos de la main droite qui n'a occa-
sionné aucune douleur.
1891. Rien de particulier durant cette année. B... préfère l'atelier
à l'école. Il commence à faire des chaussures neuves. Son écriture
(de la main gauche) est restée lisible, mais il sait à peine lire. Sa
tenue laisse à désirer. Ses mains surtout sont sales, pleines de cre-
vasses ; il les brûle souvent exprès. « Cela ne me fait aucun mal »,
dit-il. Souvent il s'amuse il marcher « à quatre pattes P. Il est
bruyant en classe, disputeur, grossier, et se moque des répri-
mandes. Les malades plus âgés ou plus vicieux s'en servent pour
faire de mauvais coups, voler du vin, par exemple, le battant s'il
refuse.
1892. Juillet. - Puberté. Le visage, le tronc et les membres sont
glabres. Quelques poils sous l'aisselle gauche. Mêmes lésions
cutanées de l'aisselle droite dépourvue de poils. Poils abondants et
longs à la partie inférieure du pénil. Les testicules outla dimension
d'un oeuf de moineau. Verge : longueur, 41 centimètres; circon-
férence, 9.
Décembrc. - Même indiscipline à l'école. Tenue malpropre.
Caractère irritable. Accès de colère, déchire ses livres, ses cahiers,
casse les carreaux, ne cède jamais, ne veut pas reconnaître ses
torts. Il est très souvent répréhensible.
1893. 14 janvier. -'Avant-hier et hier matin, il est tombé de son
lit sur le coude droit qui est le siège d'un oedème douloureux consi-
dérable, s'étendant à 10 centimètres au-dessus et au-dessous de
l'interligne articulaire. Tout mouvement de l'articulation déter-
mine une vive souffrance. La bourse séreuse olécranienne est
enflammée. Le débridement au bistouri donne issue à du pus
mélangé de sérosité. Pansement humide au sublimé ; gouttière.
45 janvier. - Insomnie, battements et élancements douloureux
dans le coude. Malin : T. R. 38°. Soir : 39°.
16 janvier. - llême état. Persistance du gonflement et de la
16 P1RES0-ANALGESIE DES extrémités supérieures.
douleur. T. H. 38°,7 et 39°,5. Bain de bras phonique pendant
trois heures; môme pansement.
il janvier. - L'mdème a un peu diminué; il s'écoule peu de pus.
T. H. 380,5 et 39°.
18 janvier. - Le malade est chloroformé. On constate que les
surfaces articulaires ne sont pas changées; que le sommet de l'olé-
crâne, l'épicondyle et l'épilrochlée sont sur la même ligne; qu'il
y a un décollcment épiphysail'c de l'cxtrémi lé inférieurode l'humérus.
Pendant la réduction par traction il jaillit de la plaie un jet de
sérosité purulente semblant veuir de la jointure. Pansement
humide ; gouttière antérieure plâtrée sur le coude en demi-flexion
avec une échancrure laissanLlibre l'olécrâne. T. B. 39° et 39°, ? .
19 janvier. - La nuit a été bonne. L'oedème a, diminué,
T. R. 38° et 38°,4.
20 janvier. - Le coude est le siège de douleurs vives, lancinantes
qui ont empêché l'enfant de dormir. La plaie mise à nu laisse
voir un tissu lardacé, infiltré. Il est enlevé à la curette; la plaie
saigne abondamment. On aperçoit dans le fond de la plaie l'olé-
crâne dénudé. Drainage à la gaze iodoformée, pansement
humide, etc.
A partir de là, amélioration progressive, consolidation de la
fracture, cicatrisation de la plaie. L'enfant sort de l'infirmerie
dans les premiers jours d'avril.
Juillet. - B... est allé un peu plus fréquemment à l'école ; on le
retient trop volontiers il l'atelier de cordonnerie dont il est l'un
des meilleurs apprentis. Amélioration en classe, mais durant les
récréations, il se montre toujours indiscipliné.
Puberté. - Les modifications sont les suivantes : poils follets à
la lèvre supérieure et au menton ; poils longs, frisés à la racine
des bourses ; poils assez abondants à l'anus. Verge : longueur,
11 centimètres; circonférence, 10 centimètres. Testicules de la
grosseur d'un petit oeuf de pigeon.
1894. Janvier. - B... aime toujours à se mêler aux jeux les plus
bruyants, les plus actifs, malgré son infirmité. Il devient plus rai-
sonnable, plus docile, et se soumet plus volontiers aux observations
qu'on lui adresse. La tenue est meilleure.
Mars. - Phlegmon de la main droite; incision.
Juillet. - Puberté. Pas de changement notable.
La conduite de) ! ...est bonne et nous lui promettons, s'il conti-
nue, de ne pas le faire passer aux aliénés il dix-huit ans comme
c'est la règle, mais il vingt ans, dans la division des incurables de
l'hospice. Afin de l'encourager, nous l'autorisons à aller travailler
pendant une partie de la journée chez un cordonnier du dehors.
1895. Janvier. - Puberté. Poils fins à la lèvre supérieure et au
menton. Quelques poils dans l'aisselle gauche. Fin duvet sur les
État intellectuel ET moral.' 17
avant-bras, sur la face externe des cuisses et des jambes. Poils
assez abondants sur la partie inférieure du pénil ; quelques poils
sur les bourses. Verge : longueur, 11 centimètres; circonférence,
10cm,5.
B... continue à travailler chez un cordonnier du dehors, qui lui
donne G francs par semaine.
18QG. Janvier. - Mêmes lésions trophiques de l'aisselle droite.
Même état de la puberté, si ce n'est que la moustache se dessine
davantage.
9laa·s-cavril. - Bis... s'est notablement amélioré au point de vue
intellectuel. Sa conduite ne laisse rien à désirer. Il continue à tra-
vailler au dehors chez un cordonnier du voisinage. Pour ces rai-
sons, au lieu de le faire passer à dix-huit ans dans l'une des sec-
tions du quartier des aliénés, nous l'avons gardé jusqu'à ce jour
(vingt ans), afin d'obtenir son placement, justifié par ses infirmités
et sa maladie, dans l'une des divisions de l'hospice. L'autorisation
étant arrivée, nous avons procédé à un dernier examen, dont nous
ne relèverons que les points principaux.
La différence entre la partie supérieure du thorax et la partie
inférieure persiste, et il en est de même de l'arrêt de développe-
ment du reste du tronc (fig. 29). Les mesures suivantes en donnent
une idée.
18 PARÉSO-ANALGÉSIE DES extrémités SUPÉRIEURES.
sant la phalangette, on produit un bruit sec, et dès qu'on retire son
propre doigt, immédiatement la phalangette reprend avec le même
qruit sa position à angle droit, à l'instar d'un ressort. L'index et le
médius sont recourbés dans la demi-flexion ; l'annulaire est un peu
moins recourbé ; l'auriculaire est presque droit. Le malade ne peut
pas relever ses doigts jusqu'à la ligne droite; il peut les fléchir
jusque sur la paume de la main, sauf l'auriculaire qui en resle très
écarté, en conservant la demi-flexion, ce qui doit être attribué à
ce qu'il y a plusieurs années il s'est fait au niveau de l'articulation
phalango-phalanginienne (face palmaire) une plaie avec un tran-
chet.
Les doigts sont boudinés; les ongles sont réguliers. La peau est
épaissie sur le dos du métacarpe et sur la face dorsale des doigts;
elle est en outre légèrement rouge. Il existe une induration pro- ? i. 5.
Malformations DES mains. 19
fessionnelle de la moitié radiale de l'index, et un durillon à la face
palmaire, sur la moitié inférieure du deuxième métacarpien. On
arrive à redresser les doigts, ce que ne peut faire le malade, mais
avec une certaine résistance.
A gauche, les mouvements de l'épaule et du coude sont libres;
parfois, il y a des craquements.
Main. Les doigts sont plus qu'à demi fléchis sur la paume de
la main, et dans leur totalité portés vers le bord cubital, tandis que
le métacarpe est incliné vers le bord radial (fig. et 6). Tous sont l
plus ou moins déformés. La phalange du pouce est presque à angle
droit sur le premier métacarpien et la phalangette est relevée à angle
droit sur la phalange. On ne peut complètement ni redresser le
pouce, ni fléchir la phalangette ; par conséquent, les mouvements
de flexion et d'extension sont limités. L'index a la forme d'un
moignon boudiné terminé par une sorte de cône bas (un centi-
mètre et demi au plus), formé par la peau très épaissie, et terminé
par un tout petit fragment d'ongle. L'os de la phalange seul existe.
Les mouvements provoqués sont très limités, et encore plus les
mouvements spontanés. Le médius est composé d'une phalange et
d'une phalangine bien développées, d'une phalangette raccourcie.
Les mouvements provoqués sont presque complets dans l'articula-
tion métacarpo-plialangienne, limités dans l'articulation phalango-
phalanginieune, nuls dans la dernière articulation. La phalange a
5 centimètres de longueur, la phalangine 4 centimètres, et la pha-
langette à peine un centimètre el demi. Celle-ci est légèrement
Fig. 6...
20 PARÉSO-ANALGÉSIE DES EXTRÉMITÉS SUPÉRIEURES.
fléchie et portée vers le pouce. Elle se termine par un ongle
déformé, épais de 3 à 5 millimètres. Toute la peau de la phalan-
gette, sauf sur la face externe, est épaissie, et le siège de fissures
et même de crevasses. L'annulaire peut être fléchi complètement,
mais non étendu. Les articulations sont assez roides. Tandis que
les doigts précédents n'ont pas do mouvements spontanés de laté-
ralité, ils existent à l'auriculaire, dont l'articulation métacarpienne
est libre, et les autres articulations un peu roides. Les deuxième,
troisième et quatrième doigts sont plus volumineux au niveau de
la jointure de la phalangine avec la phalangette qu'au niveau de
l'articulation phalango-métacarpienne (les doigts de la main
droite sont bien moins cylindriques). Les productions épidermiques
prédominent sur le deuxième, et principalement sur le quatrième
doigt. Sur les autres doigts et à la paume de la main, les épais-
sissements paraissent dus à la profession. Très souvent, le pouce,
passant au-dessous du moignon de l'index, vient s'appuyer sur la
phalangine du médius.
Le malade prétend qu'il fatigue davantage de la main droite,
bien qu'il s'en serve moins que de l'autre : « J'écris et je fais tout
de la main gauche,» dit-il. Avant son entrée à Vaucluse, quand il
n'avait pas de béquilles, il marchait sur les mains. Il s'appuyait
principalement sur les articulations phalango-phalanginiennes. De
là, des épaississements anciens de la peau qui s'étendent jusqu'aux
articulations des phalanges avec le métacarpe. A la colonie de
Vaucluse, il lui arrivait assez souvent de marcher sur les mains.
Ici, il ne le fait qu'en jouant ou lorsque ses camarades lui cachent
ses béquilles.
B... rappelle qu'autrefois les doigts des deux mains étaient
placés en crochets. Ils se sont allongés progressivement. Cet allon-
gement a commencé avant l'entrée à Bicêtre et est allé en aug-
mentant.
Les mensurations suivantes donnent une idée des différences qui
existent entre les doigts des deux mains.
NOUVELLE DESCRIPTION DU malade. 21 1
22 PARÉ50-ANALGESIf; DES extrémités SUPERIEURES.
autres orteils sont à peu près normaux (rétraction du fléchisseur du
deuxième orteil qui est déformé).
Côté gauche. - Roideur assez prononcée de la hanche. Flexion
jusqu'à angle droit; extension incomplète : il n'est pas possible de
coller la cuisse sur le lit; abduction presque nulle; adduction
assez étendue. Contracture très prononcée des adducteurs.
Rigidité moyenne du genou; flexion presque totale, extension
imparfaite. Mouvements de latéralité très limités. B... soulève la
jambe, la plie, la porte en dehors et en dedans, mais tout cela
d'une façon imparfaite. Les articulations métatarso-phalangiennes
sont rigides, les autres articulations des orteils sont libres.
Le gros orteil est étendu sur la face dorsale du pied (contrac-
ture). Les mouvements spontanés sont assez étendus. Les ongles
sont réguliers. Le pied est plat.
Dans la station verticale qui, comme la marche, n'est possible
qu'avec des béquilles, la jambe gauche est un peu fléchie, portée
en dedans et le lalon est un peu relevé. La cuisse droite croise la
gauche au-dessus de son genou et la jambe droite croise la gauche
au-dessous de son genou, de telle sorte que le genou gauche est
encadré dans le jarret droit. Le pied droit est vertical et ne repose
sur le sol que par la pointe du gros orteil. Dans la marche, Il...
avance ses béquilles simultanément, les membres inférieurs con-
servant leur attitude de la station verticale, le tronc repose sur le
gros orteil droit et sur les deux tiers antérieurs de la piaule du
pied gauche. Les béquilles fixées, il porte en masse le train posté-
rieur en avant, le pied gauche frottant sur le sol.
Sensibilité spéciale, normale et égale des deux côtés. L'examen
complet des yeux, pratiqué par notre ami le D1' i\OENtG, n'a décelé
aucune lésion. - Il en est de même de la sensibilité des muqueuses.
Sensibilité générale. - Elle est conservée sur la face, au cou, sur
le tronc et les membres inférieurs. Toutefois 1;... prétend que le
froid (projection d'eau) est plus vif à droite qu'à gauche ; que d'ha-
bitude le membre inférieur gaucho est toujours assez chaud tandis
que le droit est toujours froid. Le chatouillement de la plante des
pieds n'est pas perçu. Le réflexe rotulien, conservé à gauche, est
très affaibli à droite. Pas de trépidation spinale. A ce moment de
l'examen on observe un léger tremblotement des muscles de la
jambe. - La notion de position est normale.
En ce qui concerne les membres supérieurs, les divers modes de
la sensibilité sont conservés des deux côtés de l'épaule jusqu'au
pli du coude en avant, jusqu'à l'olécrâne eu arrière. Au-dessous on
note les particularités suivantes :
Aneslhésic du pli du coude à l'extrémité des doigts ; </terme-
anesthésie dans les mêmes régions; analgésie depuis l'extrémité des
doigts jusqu'à cinq centimètres au-dessous du pli du coude et de
Développement de la tète. 23
l'oléc('âne. Les piqûres d'épingle ont déterminé autant de petites
papules arrondies de trois à quatre millimètres de diamètre (urti-
caire artificielle) réunies par une bande érytbémateuse. Ces troubles
vaso-moteurs sont plus accusés à gauche qu'à droite.
La force musculaire est notablement plus faible à droite (côté
paralysé) qu'à gauche ainsi que le montrent les expériences dyna-
momélriques faites durant cinq jours avec le même instrument.
24 PARÉSO-ANALGÉSIE DES EXTRÉMITÉS supérieures.
Imbécillité ET hémiplégie droite. 25 5
II. Bien qu'il faille être réservé sur l'influence des
impressions maternelles, nous devons rappeler que, dans les
premiers mois de la grossesse, la mère a été vivement frappée
par la vue d'un mendiant atteint d'hémiplégie et que le père
prétend que son fils a un bras et une jambe qui ressemblent
à ceux du mendiant. Les convulsions survenues à trois reprises,
vers deux ans et qui auraient duré chaque fois deux ou trois
heures, nous paraissent expliquer d'ailleurs l'hémiplégie qui
existe du côté droit, ainsi que la paraplégie inférieure. Si,
d'après le père, on n'a pas remarqué de paralysie à la nais-
sance, il n'y a plus de doute sur sa réalité, au retour de l'en-
fant de nourrice, à deux ans et demi; sa mère, en effet, a
remarqué alors, que le côté droit de son enfant était moins
gros et plus faible que le gauche, qu'il marchait en traînant la
jambe droite et que les mains étaient en crochet.
III. - Nous croyons donc devoir rattacher aux convulsions,
probablement symptomatiques d'une sclérose cérébrale, le
premier groupe' d'accidents pathologiques observés chez B...
et qui se sont traduits : a) par une arriération intellectuelle ;
b) par une hémiplégie du côté droit, par une paralysie de
la jambe gauche, et enfin c) par l'altitude des mains en
crochet.
IV. - L'arriération intellectuelle qui, au début, confinait à
l'imbécillité est bien mise en relief par les certificats que nous
avons reproduits et par les notes scolaires recueillies tant à la
colonie de Vaucluse qu'à Bicêtre. Il s'y joignait une perversion
des instincts assez prononcée, qui a paru s'exagérer par
périodes durant lesquelles, entraîné par ses impulsions mala-
dives ou cédant sans trop de résistance aux mauvais conseils
d'enfants plus âgés, B... commettait de nombreux petits méfaits.
Nous avons pu obtenir cependant, avec le temps, une amélio-
ration assez sérieuse aussi bien sous le rapport intellectuel
que sous le rapport moral. Si, à l'école, les progrès de B...
ont été limités, en revanche, nous avons pu lui faire apprendre
suffisamment pour en tirer profit, malgré son infirmité, le
métier de cordonnier.
' L'enfant ayant été envoyé en nourrice trois ou quatre jours après sa
naissance, nous n'avons. pu savoir si certains accidents, comme la laxité-
des ligaments des coudes, était ou non congénitale.
26 Paréso-analgésie DES extrémités SUPÉRIEURES.
V. - L'hémiplégie du côté droit qui prédomine au membre
inférieur se complique d'une paralysie du membre inférieur
gauche. Il semblerait donc que les régions motrices du cer-
veau, correspondant aux membres inférieurs auraient été plus
atteintes que les régions qui correspondent aux membres
supérieurs. Les mensurations des membres faites à différentes
reprises et dont nous ne citons que les deux extrèmes (1888 et
1896) mettent bien en relief les différences qui existent entre
les membres des deux côtés du corps et donnent une idée de
leur croissance durant cette période de huit années.
L'hémiplégie s'accompagne en outre, comme d'habitude,
d'un arrêt de développement de la moitié correspondante du
tronc, la face et le crâne demeurant à peu près tout à fait
indemnes, - d'arthropathies, de rétractions musculaires et
tendineuses peu prononcées aux jointures du membre supé-
rieur mais très accusées au membre inférieur où elles ont été
aggravées par des traumatismes et des lésions de nature scro-
fuleuse( ? ). . ' ' '
Y a-t-il eu autrefois une coxalgie à droite, ainsi que le fait
supposer la note provenant de l'hôpital des Enfants-Malades,
on ne saurait l'admettre d'une façon absolue. En tout cas,
aujourd'hui, la hanche droite n'offre aucune déformation 1 elle
est le siège de rétractions musculaires et tendineuses, qui res-
treignent considérablement les mouvements, et l'ensemble de
ces lésions, qui répond aux a1'lhl'opathies des hémiplégiques- ,
est, sauf le degré plus accusé, le même que celui qu'on observe
à la hanche gauche.
Quant à l'attitude de la jambe droite, à l'ankylose du
genou, à la déformation du pied, elles diffèrent de ce qu'on
note d'ordinaire dans l'hémiplégie, mais ces modifications sont
évidemment dues au traumatisme subi par le genou, aux
abcès qui se sont formés, aux opérations qui ont été prati-
quées. Le membre inférieur gauche, dans son attitude générale,
' Cette opinion a été confirmée par notre collègue, M. le Dr Chaput,
chirurgien de Bicêtre, qui a bien voulu examiner le malade au point de
vue Cllil'UrâiC8l.
'Bourneville. - Etude sur les arlhropalhics consécutives à quelques
maladies de la moelle el du cerveau (Revue pliotogr. des hôpitaux, 1871,
p. 9, 52, 67, etc.)..
Maladie DE MORVAN. 27
dans ses jointures, présente les symptômes habituels (craque-
ments, rigidité, arrêt de développement, etc.) des membres
frappés de paralysie. - Rappelons que l'arrèt de développe-
ment qui atteint les membres inférieurs, le droit plus que le
gauche, a également intéressé le bassin et la partie la plus
inférieure du thorax comme les figures 2, 3 et 4 permettent
de le vérifier.
D'après le malade, qui a été soumis chaque année depuis
son admission (1888) jusqu'à cette année à un traitement
antiscrofuleux pendant l'hiver, à l'hydrothérapie durant l'été,
les membres inférieurs, surtout le gauche, seraient devenus rela-
tivement plus agiles, les membres supérieurs se seraient fortifiés
et l'attitude en crochet des mains aurait notablement diminué.
VI. - Nous nous bornerons, au point dé vue chirurgical, à
une simple énumération : pouce à ressort, luxation de l'extré-
mité supérieure du radius, mutilations pathologiques de deux
doigts de la main gauche, ankylose et altitude vicieuse du
genou droit, rétractions musculaires et tendineuses multiples.
VII. - Il nous reste maintenant à faire ressortir les points
principaux d'une autre affection dont est atteint notre malade
et qui parait répondre à la paréso-analgésté, décrite par
M. Morvan '.et à laquelle on donne généralement son nom.
La maladie de Morvan et la syringomyclie, remises à jour
dans ces dernières années, ont été l'objet, durant cette période,
de nombreux travaux. Elles ont d'abord été étudiées séparé-
ment. Puis, divers auteurs ont soutenu que cette séparation
n'était pas justifiée, que la paréso-analgésie des extrémités
supérieures n'était qu'une variété clinique de la syringomyélie.
MM. A. Joffroy et Achard, entre autres, se sont faits les défen-
seurs de cette théorie unitaire'=.
Au contraire, MM. Morvan, Charcot, Déjerine11 et Bruhl*,
1 Morvan. - Gaz. hebd.. 1883, p. 580, 590, 627, 722; - 1887 (cas de
l'rou0'), p. 249; z 1889 (cas de Prouff et Gombault), p. 308, etc., etc.
' Jnttroy et Achard. .Soc. taétl. des hôpitaux, 11 juillet 1890, et
Archives de méd. expert m., 1890, p. 540.
'Déjeune. - Soc. de biologie, 5 juillet 1890, et Médecine moderne,
10 juillet 1890.
' l3ruhl. - Conlribulioa ù l'élucle tle la sringouyélic, 1890, p. 72. '
28 PARÉSO-ANALGÉSIE des extrémités supérieures.
ont soutenu qu'il s'agissait là de deux maladies distinctes.
M. Charcot a formulé son opinion dans une leçon faite en
1890, à la Salpêtrière, et a conclu en ces termes : « Il était
opportun de vous parler de la maladie de Morvan, après nos
dernières leçons sur la syringomyélie, car les deux affections
ont certains traits de ressemblance et sont confondues à tort,
selon moi, par quelques auteurs. »
Récemment, M. le professeur Grasset, dans une leçon très
intéressante, a discuté minutieusement cette question et a
conclu qu'il y avait lieu de distinguer la paréso-analgésie à
panaris des extrémités supérieures de la syringomyélie '.
Le cas qui précède nous parait appartenir à la maladie de
Morvan. Tout d'abord, les troubles de la sensibilité sont ana-
logues à ceux qu'a décrits cet auteur. Notre malade a une anes-
thésie, une analgésie, une thermo-anesthésie des doigts, des
mains, des avant-bras jusqu'au voisinage du pli du coude.
Toutefois, la région analgésique est un peu moins étendue, en
ce sens qu'au-dessous du pli du coude et au-dessous de l'olé-
cràne, c'est-à-dire à la partie tout à fait supérieure de l'avant-
bras, et cela des deux côtés, il y a une zone d'environ cinq
centimètres de hauteur au niveau de laquelle la sensibilité à
la douleur persiste , alors que la sensibilité tactile, au froid, à
la chaleur est abolie. Nous devons faire remarquer que les
troubles de la sensibilité semblent quelquefois varier. C'est
ainsi qu'en février 1890 nous avons noté une dissociation par-
tielle de la sensibilité. Ce ne serait pas là une exception.
« Aujourd'hui, dit M. Grasset, il est démontré par des faits
nombreux que dans la maladie de Morvan la dissociation de la
sensibilité peut parfaitement exister. » (Loc. cit., p. 194.)
Les troubles trophiques sont aussi très nets. Le malade a eu
deux panaris graves, absolument indolores; il y a eu une éli-
mination d'une phalangette et d'une phalangine. De plus, il
présente un épaississement de la peau, des crevasses, une
1 Grasset. - Leçons cle clinique médicale, 116 série, Montpellier et Paris,
1896. - Nous ne pouvons pas, à propos de cette observation, refaire
l'historique de ces deux maladies. Nous renvoyons le lecteur à la thèse
si consciencieuse de M. Bruhl et à la leçon toute récente de M. le pro-
fesseur J. Grasset. -
Examen électrique. 29
sorte d'hypertrophie des doigts. Signalons aussi l'attitude des
mains en crochet et une atrophie, à droite, des éminences
thénar et hypothénar.
Nous avons eu la bonne fortune de montrer notre malade à
MM. Morvan, Prouff et Déjerine au cours d'une visite qu'ils
faisaient dans notre service et ils ont confirmé notre diagnostic. "
Notre ami, M. le D'' Régnier, très expert dans les questions
d'électrothérapie, a bien voulu examiner notre malade et nous
a remis à son sujet la note ci-après :
EXAMEN ÉLECTRO-DIAGNOSTIQUE ' '
.. , Du cas précédent par le D' RÉGNIER.
Pour mesurerla diminution de la sensibilité, comme nous n'avions
pas à notre disposition de pont différentiel de Boudet de Paris ni
de machine statique, nous avons adopté la technique suivante :
une électrode indifférente constituée par une large plaque de zinc
de 8 x 12 centimètres est appliquée sur la colonne vertébrale, à la
région cervicale pour l'examen des membres supérieurs, à la région
lombaire pour les membres inférieurs, l'électrode active est cons-
tituée par un tampon de charbon recouvert de peau de chamois de
2 centimètres de diamètre. Nous déterminons d'abord dans les
régions saines la limite minima à laquelle malade a la sensation
du passage du courant. Elle correspond au 0 de l'appareil portatif
à chariot de Chardin. La division de la règle est en centimètres.
Pour l'appréciation des modifications de la conlractililé muscu-
laire nous avons suivi la méthode de Erb. '
MEMBRE supérieur gauche
A. Sensibilité. Main. Face dorsale '" ?
30 Paréso-analgésie DES extrémités supérieures.
Face palmaire.
Examen électrique. ' ' .31
Face interne.
32 PARÉSO-ANALGÉSIE DES extrémités supérieures. '
En resumé, l'examen électrique démontre que tant au point de
vue de la sensibilité que de la contractilité, les signes sont plus pro-
noncés à droite qu'à gauche aux deux membres. Sur le tronc et la
face, la sensibilité et la contractilité n'ont pas subi de modifi-
cations.
]J.
Idiotie symptomatique d'atrophie cérébrale ; pachy-
méningite ; kyste de la dure-mère ;
Par BOURNEVILLE et METTETAL.
Sommaire. Père et mère sans particularités. - Grand'père
maternel mort d'excès de boisson. -Pas de consanguinité.
- Inégalité d'âge de 4 ans. - Gémellarité. - Un frère,
convulsions. -Émotions auneuvième mois de la grossesse.
- Asphyxie prolongée à la naissance. - Convulsions à l'âge
de jours limitées au côté droit.-Cécité complète.-Tuber-
culose. - Ophthalmie. Cachexie. - Eschares. Mort.
Autopsie. - Tuberculisation et oedème des poumons. -
Tuberculose intestinale. - Atrophie du cerveau surtout
des lobes frontaux et occipitaux. - Développement exagéré
du cervelet. - Pac/t.Mmënmgite. Kyste de la dure-mère.
Maq... (Jeanne), née à la Ferté-Gaucher (Seine-et-Marne) le
24 juillet 1892, est entrée à la Fondation Vallée le 13 juin 1895.
Antécédents. (Renseignements fournis par sa mère). -
Père, 31 ans, employé de chemin de fer, n'a eu ni convulsions,
ni fièvre typhoïde, ni rhumatismes, ni dartres, ni syphilis. Très
sobre, mais fume beaucoup, ni migraines, ni traumatismes
céphaliques. - [Père, 68 ans, se porte bien, ne boit ni ne fume.
- Mère, pas de renseignements. Aucun détail sur les
grands-parents maternels et paternels. - Deux oncles pater-
nels morts à 78 et à 58 ans, tous deux d'une fluxion de poitrine;
une tante paternelle, qu'on n'a pas connue. - Un oncle ma-
ternel, sobre, sans symptômes nerveux. Deux soeurs, sans
tare nerveuse. - Dans le reste de la famille, ni idiots, ni
épileptiques, ni paralytiques; pas de difformes, de bègues et
de sourds-muets; ni suicides, ni criminels, ni prostituées].
Mère, 27 ans, sans profession, n'a pas eu de convulsions,
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1896. 3
34 Antécédents héréditaires ET PERSONNELS.
pas de fièvre typhoïde, de rhumatismes, de dartres, de syphi-
lis, de traumatismes céphaliques. - [Père, 64 ans, mécani-
cien, fait des excès de boisson et de tabac ; nerveux, emporté,
mais n'aurait pas d'attaques. - Mère, 63 ans, sobre, très vive
de caractère. - Grand-père et grand' mère paternels, incon-
nus. - Grand-père maternel, mort d'accident de voiture, était
sobre et peu nerveux. - Grand'mère maternelle, sobre, un
peu nerveuse. - Oncles et tantes maternels, pas de rensei-
gnements. - Ni frères, ni soeurs, - Dans le reste de la famille,
rien de particulier, pas d'aliénés, etc...]
Pas de consanguinité. - Quatre ans de différence d'âge.
4 enfants : 10 la malade ; - 2° garçon (20 mois), très ner-
veux, très éveillé, se porte bien; a eu de petites convulsions
intermittentes et localisées à la face de 2 à 6 mois ; - 3° et 40
deux jumelles (1) qui ont trois mois, se portent bien et ne
sont pas nerveuses.
Notre malade. - Au moment de la conception, pas de
misère, bonne entente entre les deux époux. - Grossesse : ni
chutes, ni coups, mais une peur très forte en voyant un
accès d'épilepsie, 15 jours avant l'accouchement. L'épilepti-
que, dans sa chute, l'a saisie, elle est tombée, a perdu con.
naissance, n'est revenue à elle qu'au bout d'une heure et a
tremblé le reste de la journée. Pas de syncopes, d'attaques de
nerfs, d'albuminurie, d'alcool, d'éclampsie. - Accouchement
à terme, naturel, sans chloroforme ; cependant le travail, non
pénible, a duré 25 heures (présentation du sommet). La tète
est demeurée 4 heures au passage. Les eaux étaient en très
petite quantité. (Il en a été de même à ses autres grosses-
ses). - A la naissance, l'enfant était asphyxiée, elle serait
restée noire pendant une heure, elle aurait beaucoup souf-
fert bien qu'il n'y eut pas de circulaire du cordon. - Allaite-
ment au biberon avec du lait de vache. - Première dent à
18 mois ; actuellement la dentition n'est pas encore complète.
Les convulsions auraient commencé le 13- jour après la
naissance. Aussitôt avant, l'enfant aurait poussé un « cri de
bête. » La mère dit que les convulsions étaient limitées au
bras droit, l'autre bras n'avait rien, les jambes n'étaient pas
raides. Les convulsions durèrent une demi-heure; elles se
reproduisirent plusieurs fois dans la même journée. Les yeux
(1) On ne connaît pas de cas de gémellarité dans la famille du père, mais
l'arrière grand'mère maternelle de l'enfant a eu deux jumeaux.
DESCRIPTION DE la malade. 35
étaient retournés, la langue relevée contre le palais. La ma-
lade criait au milieu de ses convulsions, qui ont persisté
jusqu'à l'entrée de l'enfant à la Fondation Vallée, avec les
mêmes caractères. Il s'y est ajouté des accès de cris et de
colères qui persistent.
Huit jours après la naissance, on s'est aperçu que l'enfant
ne voyait pas. Depuis les premiers temps de la vie, on a
remarqué aussi qu'elle portait fréquemment la main au front
comme pour en chasser quelque chose. - Elle tétait souvent
sa langue. - Grincements de dents à partir de leur apparition,
La tête, qu'elle se cognait contre le lit, paraissait à cette
époque proportionnellement plus grosse qu'elle ne l'est main-
tenant. La fontanelle n'est pas encore fermée. - L'enfant ne
se sert ni du bras droit, ni du gauche pour tenir les objets.
Jamais depuis la naissance le sommeil n'a été calme.
État actuel (21 juin 1895). - L'enfant est très pâle et
a l'attitude d'un enfant souffrant. Ses lèvres sont très décolo-
rées, ainsi que ses conjonctives.
Tête. Cheveux châtains, abondants bien plantés, avec un
tourbillon au milieu. - Crâne arrondi, à diamètre transversal
exagéré, légèrement hydrocéphale. Le front présente une
hauteur médiane de 6 cent. ; il est bombé et les parties latérales
ne sont pas masquées par les cheveux. Visage rond sans
cicatrices. Arcades sourcilières normales et symétriques.
Sourcils très peu abondants, assez bien plantés et de colo-
ration châtain-clair. Paupières régulières et mobiles. Fentes
palpébrales de dimension moyenne. - Cils longs, châtain
foncé, assez bien fournis. Yeux bleus, mobiles dans toutes les
directions; ni strabisme, ni exophtalmie; pas de paralysie,
de nystagmus. Les pupilles ne réagissent pas à la lumière et
tout réflexe oculaire est aboli. La cécité est complète. - Le
nez est légèrement relevé, son extrémité est peu large, sa
direction normale. L'odorat semble conservé ( ? ). Pommettes
régulières. Sur la joue droite, légère plaque violacée qui
repose sur une induration. Pas de ganglions sous-maxillaires
du côté correspondant. - Bouche petite ; lèvres épaisses,
décolorées ; commissures normales sans déviation. - Les
dents sont assez bien plantées ; pas de stries. - La langue est
normale. Les amygdales sont un peu grosses. - Le menton est
rond et symétrique. - Oreilles grandes, bien ourlées, lobule
à demi adhérent. L'enfant entend un peu ; quand on pro-
nonce son nom, elle cherche de quel côté on l'appelle.
Elle ne parle pas et pousse quelques gémissements.
36 DESCRIPTION DE la malade.
Dentition. - Les maxillaires présentent un assez large
développement de l'arcade alvéolaire. La voûte palatine offre
une légère atrésie. L'évolution dentaire est retardée. L'enfant
possède bien ses 20 dents temporaires, mais les dernières
molaires ne font encore qu'une légère saillie sur le rebord
gingival n'ayant pas achevé leur complète éruption. Les
dents de la région antérieure en haut et en bas sont de
volume très réduit, tandis que les canines ont absolument
le type de dents de chien par le développement exagéré de
leurs tubercules. Les tubercules des molaires sont usés par
le frottement fréquent et très accentué des molaires corres-
pondantes, l'enfant ayant l'habitude constante de grincer des
dents .
Cou, pas de goitre, ni de ganglions ; circonférence : 30 cen.
timètres.
Membres supérieurs. - Bien conformés. Le bras droit
présente une raideur que l'on ne retrouve pas au bras gau-
che. De ce côté, on ne peut pas étendre complètement l'avant-
bras sur le bras. La motilité spontanée, normale à gauche,
est à peu près abolie à droite, où les doigts sont contractu-
rés et fléchis dans la paume de la main. Du côté gauche,
les mouvements spontanés sont conservés, et les doigts ont
gardé leur motilité. L'enfant ne se ronge pas les ongles.
Membres inférieurs. - Le membre inférieur gauche est
plus long que le membre inférieur du côté droit. Les mouve-
ments de la tête du fémur dans la cavité cotyloide droite
paraissent très douloureux. L'enfant dessine des mouvements
nets de défense. On ne constate pas de ganglions dans les
aines. - A gauche, on peut fléchir successivement la cuisse
sur l'abdomen, la jambe sur la cuisse. A droite, ces mouve-
ments se font aussi mais entrainent de la douleur. On trouve
des nodosités, au niveau desquelles la pression est très dou-
loureuse.
La pression des apophyses épineuses des dernières vertè-
bres cervicales et premières dorsales est très douloureuse
et l'enfant pousse des cris. Elle ne peut tenir sa tête droite ;
elle se renverse d'elle-même un peu dans tous les sens sur-
tout en arrière.
Thorax. - Coeur normal. - Poumons. On entend des sibi-
lances au niveau des deux sommets et une respiration extrê-
mement rude.
MÉNINGO-ENCÉPHALITE. x 3 î
Abdomen. - Foie et rate normaux. - La pression dans la
fosse iliaque gauche est très douloureuse et arrache des cris
à l'enfant. - Appétit médiocre, l'enfant ne prend que des
panades et du lait ; elle ne s'aide en rien ; selles régulières
mais diarrhéiques. Gâtisme. (Fig. 7). ).
Mensurations des membres (1).
38 MÈNINGO -ENCÉPHALITE.
Traitement. - Sirop de raifort iodé, poudre de viande et
bains salés. '
26 juillet. - On remarque que l'enfant rejette son lait aus.
sitôt après l'avoir pris. Elle crie et se plaint toute la journéei
La température n'était cependant que de 36°, z 8. Mais par
trois fois dans la nuit l'enfant. été prise d'un frisson avec
refroidissement accentué. On eut de grandes difficultés à la
réchauffer, et sitôt revenue à elle, elle se mit à crier.
6 juillet. - La malade n'a pas de température ; le corps et
les extrémités sont froids. Pas d'éruption ut le corps, pas
d'angine. La respiration est embarrassée et souillante des deux
côtés. On trouve de gros râles muqueux à droite et il gauche.
La sonorité du poumon est légèrement diminuée. Dans la
soirée, le corps de l'enfant se réchauffe, sans qu'il y ait de fiè-
vre. Les selles sont régulières.
Traitement : cataplasmes sinapisés et plusieurs fois par
jour, frictions avec de l'essence de térébenthine ou de l'eau de-
vie camphrée. Au bout de deux jours, ces accidents avaient dis-
paru et l'enfant revenait à son état antérieur.
16 août. - Revaccination ; résultat négatif.
Fig. 7.
MÉNINGO-ENCÉPHALITE. 39
28 novembre. - L'enfant s'affaiblit beaucoup, elle a conti-
nuellement de la diarrhée, s'amaigrit notablement. - Rien à
l'auscultation. - Matin : T. R. 37°, 6. - Soir : 38°, 2. - Ré-
gime lacté.
1896. 23 mars. - Depuis le commencement du mois de
mars, l'enfant se cachectise de plus en plus. Elle est en proie
à une diarrhée considérable qui oblige les infirmières à la
changer continuellement. Les matières fécales sont verdâ-
tres et décolorées. Cependant la nutrition de l'enfant est
complète. Elle boit tous les jours environ un litre de lait. A
plusieurs reprises, elle a vomi, mais actuellement elle
conserve bien ses aliments.
Aucune réaction aux diverses sensations extérieures; il faut
pincer l'enfant vigoureusement pour qu'elle profère quelque
gémissement. Elle est dans le décubitus dorsal, les bras et
les mains fléchis sur les extrémités des membres et dans un
degré très prononcé de contracture. Ce n'est que par un
effort violent qu'on peut arriver à redresser le membre con-
tracture. L'état de maigreur de l'enfant est extrême et la ca-
chexie fait de rapides progrès. Aucun médicament ne peut
être supporté.
4 avril. - La cachexie va sans cesse croissant. Les mem-
bres ont une maigreur squelettique. Les inférieurs conservent
une attitude de flexion, avec croisement de la jambe droite sur
la gauche. Une contracture difficile à vaincre les maintient
dans cette position. Les téguments de la région sacrée sont le
siège d'un érythème assez prononcé; toutefois, il n'y a pas
encore d'escharcs. L'alimentation est très difficile.
{cr mai. - L'enfant est dans un état d'affaiblissement ex-
trême ; elle se tient inerte, sans mouvement, dans le décubitus
latéral droit, et on perçoit à peine la respiration. L'attitude des
membres inférieurs est toujours la même : ils sont contrac-
tures en flexion et croisés l'un sur l'autre. L'enfant réagit à
peine aux sensations extérieures. Les bras sont accolés
au thorax, les avant-bras à angle droit sur les bras reposent
sur la poitrine, les doigts sont légèrement infléchis. La main
droite est très fléchie sur le bord cubital, mais non sur l'a-
vant-bras.
Les membres inférieurs sont très amaigris et conservent tou-
jours la même attitude. La cuisse gauche est croisée sur la
droite à angle droit ; elle est contracturée en flexion sur le
bassin et offre une résistance qu'il est impossible de vaincre.
Le genou gauche est fléchi à angle droit, et les tendons pos-
40 PACHYMÉNINGITE, KYSTE DE LA DURE-MÈRE.
térieurs se dessinent sous la forme de cordes saillantes. Le
pied gauche est contracturé en extension et la peau de ce
pied est cyanosée. Le membre inférieur droit est en extension
dans toute sa longueur. Il est encore possible de fléchir la
cuisse droite sur le bassin. Le genou droit est en extension
forcée, le pied droit en attitude de valgus équin. La peau
est cyanosée. Les réflexes, exagérés de chaque côté, se pro-
duisent à la plus légère percussion. Le pouls est faible et
ralenti. Le poids de l'enfant est de 7 kilog. (Fig. 8).
Fig. 8.
PACHYMÉNINGITE ; KYSTE DE LA DURE-MÈRE. 41
10 mai. - L'état cachectique continue : la respiration de-
vient de plus en plus faible. - Ophtalmie purulente : du côté
gauche, la paupière est volumineuse, tuméfiée; en la retour-
nant, on y constate du pus; - du côté gauche, la paupière
est peu volumineuse ; la conjonctive est injectée. Appli-
cation continue d'eau boriquée sur les yeux de la malade, et
cautérisation au nitrate d'argent.
il mai. - Même état. - L'ophtalmie ne s'accentue pas
davantage.
13 inti. - L'enfant meurt à 11 heures et demie du soir, sans
grimaces, ni secousses. - Température au moment de la
mort : 40°.
42 ARBHT DE DÉVELOPPEMENT DU CERVEAU.
adhérences. On est obligé de la détacher avec le ciseau.
- La calotte est très-mince (2 à 3 millimètres au plus), trans.
lucide dans la plus grande partie de son étendue. La suture
fronto-pariétale n'offre aucune trace de synostose. La fonta-
nelle antérieure n'est pas ossifiée, mais elle est réduite à un
petit triangle de 6 millimètres sur 3 ou i. La suture inter-
pariétale est synostosée dans presque toute son étendue. A
son niveau et sur ses bords, sauf dans son cinquième anté-
rieur, on note un épaississement des os assez prononcé. La
calotte ayant été sciée un peu trop haut, on ne peut donner
aucun renseignement sur les sutures pariéto-occipitalcs,
On pratique une incision horizontale et on s'aperçoit qu'au
niveau de l'occipital, la dure-mère est très épaissie, et qu'il
existe entre le cervelet et l'extrémité postérieure des deux
hémisphères, un espace libre rempli de liquide. C'est ce qui
nous a amenés à détacher aussi complètement que possible
la dure-mère de la base. Dans les manoeuvres d'ablation, il
s'écoule 330 gr. de liquide mole d'un peu de sang. L'encé-
pyrale et la dure-mère presque entière, base et convexité,
pèsent 750 gr.
La cavité dure-mèrienne, dont nous venons de parler, était
limitée en avant par les méninges et à ce niveau la dure-mère
était remarquablement épaissie, dure, comme cartilagineuse,
toutefois sans trace d'ossification. En dedans et en arrière,
la cavité était limitée par le cervelet, qui divisait aussi la
poche en deux parties symétriques mais communiquant l'une
avec l'autre. En avant en haut et en dehors la cavité était
limitée par les lobes occipitaux du cerveau. Ceux-ci offrent
un aspect gélatiniforme et bosselé. Au doigt, ils donnent
une sensation pseudo-cartilagineuse.
On pratique une incision d'avant en arrière sur la dure-
mère, et à la base on note ça et là de petits paquets d'adhé-
rences qui sont très multipliés il. la pointe des lobes frontaux.
L'encéphale se présente, vu par sa face convexe, sous la forme
d'un coeur de carte à jouer. Les lobes frontaux sont atrophiés
et les lobes postérieurs, également atrophiés, laissent à décou-
vert presque toute la face supérieure des hémisphères céré-
belleux. L'encéphale, débarrassé de la dure-mère, pèse 595
grammes (Fig. 9 et 10).
Les artères de la base et les tubercules mamillaires sont
sensiblement égaux. Le pédoncule cérébral gauche paraît
plus large et plus épais que le droit. - La protubérance est
également asymétrique ; du côté gauche, elle est plus boni-
Arrêt de développement du cerveau. 43
bée qu'à droite. Ces caractères se retrouvent au niveau du
bulbe. La pyramide antérieure gauche est un peu plus
épaisse que la droite ; elle est plus bombée et plus développée.
Le cervelet est petit. '
Sur les deux faces, la pie-mère est finement vascularisée,
mais à un degré moyen, sauf sur la face convexe des lobes
frontaux, où elle l'est à un degré très accusé. Bien que la mort
ne remonte qu'à 36 heures, le cerveau est un peu ramolli et
a une tendance à se détacher ; aussi le met-on dans le formol.
Hémisphère droit. - On est frappé de suite de l'atrophie
considérable des deux lobes frontaux. Dans son ensemble, bien
Fig. 9.
44 Arrêt de développement DU cerveau.
que moins long que l'hémisphère gauche d'un demi centimè-
tre environ, l'hémisphère droit semble un peu plus épais et
plus volumineux. - La scissure de Sylvius, profonde, bien
marquée, laisse voir l'insula qui semble normal.
Le sillon de Rolando est peu profond. En avant, on trouve
sur les circonvolutions frontale ascendante et première fron-
tale, des lésions de pachyménirtgite, qui forment un ilôt
allongé et transversal, atteignant le sillon de Rolando. Le
reste du lobe est bien diminué de volume. - Le lobe tempo-
ral parait normal, les sillons et scissures y sont bien accen-
tués. - Sur le lobe pariétal, on retrouve également des traces
Fig. 10.
Arrêt DE développement DU cerveau. ' 45
de pachyméningite ; elles sont surtout développées au voisi-
nage du pli courbe, où elles forment un sillon large qui se
continue avec des traces analogues situées sur la pariétale
ascendante. Les lobes occipitaux dont nous avons déja signalé
l'atrophie, sont durs au toucher, arrondis et bosselés (Fig. 9
et 10). Cet hémisphère est un peu plus long que le gauche et
son ventricule latéral est dilaté d'une façon uniforme.
Hémisphère 'gauche. - Il est plus petit que le droit, pré-
sente une scissure de Sylvius bien marquée. L'insula est
normal. Le sillon de Rolando est peu profond et élargi. En
avant de lui on note une atrophie et un aplatissement du lobe
frontal, qui paraît même déprimé et concave au niveau du
pied de la frontale ascendante. Sur cette circonvolution on
note des plis de passage très nombreux et un peu de pachy-
méningite à sa partie supérieure.- Le lobe temporal est
normal à sa partie inférieure. En suivant la scissure parallèle,
d'avant en arrière, on trouve aussi à son tiers postérieur,
sous ses deux lèvres supérieure et inférieure, des traces bien
nettes de pachyméningite, se présentant comme deux rubans
parallèles entre eux et presque parallèles à la scissure. -
Au-dessous les dernières temporales sont normales. - Le
lobe pariétal est régulier bien que légèrement atrophié. - Le
lobe occipital est lisse, régulier; il est atrophié à sa partie
postérieure, mais beaucoup moins que le droit.
Des deux côtés l'ablation de la pie-mère occasionne l'enlè- ·
vement d'une couche plus ou moins épaisse de la substance
grise. Sur presque toute l'étendue des trois faces des lobes
frontaux, la substance blanche de la première circonvolution
frontale des deux côtés, de la frontale et la pariétale ascen-
dantes gauches, de la circonvolution des lobes olfactifs des
deux côtés, la partie antérieure des deux lobes temporaux
est complètement mise à nu et se présente sous forme de
crêtes indurées et atrophiées. La dénudation de la substance
blanche existe sur un plus grand nombre de circonvolutions
de l'hémisphère droit que de l'hémisphère gauche. La partie
postérieure des lobes temporaux et ce qui représente les
, lobes occipitaux n'offrent que des lésions de méningite ou
de méningo-encéphalite superficielle. - La glande pinéale
a son volume normal. Le corps calleux n'a que deux millimè-
tres d'épaisseur au plus.
Moelle épinière : 27 gr. ; elle présente au niveau de la ré-
gion dorsale, une légère pigmentation rosée des cordons pos-
térieurs.
46 MÉNINGO-ENCÉPHALITE.
Cou. - Corps thyroïde, très petit (6 gr.) ; les deux lobes
sont séparés sans isthme intermédiaire. Le lobe droit est deux
fois plus épais que le lobe gauche. - Pas de traces de thy-
mus. ' : ,
Thorax. -- Le coeur est petit (30 gr.) ; les valvules sont in-
tactes ; le ventricule gauche est légèrement hypertrophié. Pas
d'adhérences du péricarde. - Poumons ramassés l'un sur
l'autre et très diminués de volume. Le droit (85 gr.) présente
une lobulation très nettement accentuée. Au toucher la con-
sistance est augmentée à la base, et à la coupe on voit des
traces de congestion. Le sommet présente des granulations
tuberculeuses. Le gauche (60 gr.), qui est remarquablement
petit, offre les mômes lésions surtout au niveau de la base.
Abdomen. - Foie, très gros (530 gr.); violacé, conges-
tionné et très dur. - Vésicule biliaire, très dilatée. A la
coupe on n'y trouve aucune concrétion. - Rate, petite (25
gr.) ; elle est divisée en 3 lobes. - Reins, normaux : le gauche
pèse 38 gr.; le droit un peu allongé 40 gr. Capsules surréna-
les, normales. Estomac, plein d'un liquide muqueux, parait
légèrement épaissi au niveau de la grande courbure. -
L'intestin grêle est un peu vascularisé et congestionné et
présente dans sa partie moyenne quelques granulations de
nature tuberculeuse. 1
Réflexions. I. Il n'existe rien de bien significa-
tif dans les antécédents héréditaires.
II. Si l'influence de l'émotion vive ressentie par la
mère dans le dernier mois de la grossesse est sujette
à discussion au point de vue de l'étiologie de la mal-
formation du cerveau, il n'en est plus de même de
l'action d'asphyxie à la naissance qui a été très pro-
noncée et persistante : c'est à elle qu'il convient de
rattacher les convulsions qui ont débuté le troisième
jour de la vie.
III. C'est à la fin delà première semaine qu'on aurait
constaté la cécité absolue et ultérieurement une série
de symptômes qui décelaient une mënmo-eTtcëpha.-
lite chronique; grincements de dents, cognements
SYNOSTOSE PARTIELLE DU CRANE. 47
de tête (krouomanie), sommeil agité, accès de
cris, etc. -
IV. Le développement de la méningo-encéphalite
et l'apparition de la tuberculose ont amené une
cachexie progressive et déterminé en même temps
une contracture des membres très accusée (Fig. 8).
II. Nous avons trouvé dans ce cas une synostose.
partielle des sutures. Elle occupe la suture interpa-
riétale dans presque toute sa longueur. Toutefois la
non ossification des sutures fronto-pariétales et la
minceur de la plus grande partie de la calotte cra-
nienne auraient assuré le libre développement du cer-
veau s'il n'avait été frappé primitivement d'un arrêt
de développement, s'il n'avait existé une méningo-
encéphalite presque généralisée et, en outre, une
pachyméningite. De tous les crânes d'enfants idiots,
environ 300, que nous avons réunis dans notre Musée
de Bicêtre, six autres seulement offrent une synos-
tose partielle analogue à celui de Maq... Rappelons
aussi que, bien que l'enfant eut 4 ans, la fontanelle
antérieure n'était pas encore tout à fait ossifiée.
V. Les rit. 7 et 8 mettent bien en évidence l'aspect
général de l'enfant et donnent aussi une idée exacte
des progrès de la contracture.
VI. Parmi les accidents qui ont compliqué la situa-
tion dans les derniers temps de l'existence, nous de-
vons mentionner les troubles trophiques (escharres
et ophthalmie purulente.)
VII. L'hydrocéphalie, prévue pendant la vie, dès
l'admission, était réelle ainsi que le prouve la quan-
tité considérable de liquide céphalo-rachidien (330
gr.) recueillie à l'autopsie.
48 Synostose partielle DU crâne.
VIII. Nous n'essaierons pas de décrire les hémis-
phères cérébraux, circonvolution par circonvolution.
Les figures 9 et 10, qui donnent une idée exacte de
la malformation et de l'arrêt de développement du
cerveau, permettent de se rendre compte de l'irrégu-
larité des circonvolutions.
Nous avons dit que les conditions dans lesquelles
l'autopsie avait été pratiquée nous avaient obligé de
placer l'encéphale immédiatement dans le formol,
sans essayer de le décortiquer. Il pesait alors 595 gr.
Lorsque la pie-mère a été enlevée, opération qui a
entraîné l'ablation d'une partie plus ou moins épaisse
de la substance blanche des circonvolutions, l'encé-
phale ne pesait plus que 415 gr. L'hémisphère droit
pesait 175 gr. et le gauche 165. Dans les diverses
manipulations faites au cours de l'examen, il s'est
détaché des fragments du cervelet de sorte que son
poids n'a pu être noté. Les lésions de méningo-encé-
phalite étaient dans ce cas très étendues et rappe-
laient les lésions macroscopiques qu'on observe dans
la paralysie générale. Elles se voient très nettement
sur la figure 10.
III.
Nouveau cas d'idiotie avec cachexie pachy-
dermique (myxoedème infantile);
l'AK ItOUIt\1 : 41LLB.
§ I. - Avant LE tiiaitement par l'ingestion stomacale
DE GLANDE THYROÏDE (1).
Nous avons fait, à la séance du 13 janvier de la
Société, une communication sur l'Action de la glande
thyroïde sur la croissance et l'obésité. A ce propos,
nous avons rappelé nos recherches sur le Traitement
thyroïdien de l'idiotie ')')t ? ? \'03de ? 7tatettse qui avaient
été le point de départ de notre travail. Nos dires ont
paru vous intéresser. Aussi, afin de vous mettre mieux
en mesure de vous rendre compte par vous-mêmes des
effets physiologiques et thérapeutiques de l'ingestion
par la voie stomacale de la glande thyroïde sur le myx-
oedème infantile, nous vous présentons un exemple
typique de cette maladie. Vous allez en constater
vous-mêmes les principaux symptômes. Le traitement
commencera ce soir et alors qu'il se sera produit des
changements sérieux, nous vous ramènerons la petite
malade. Après avoir résumé, en une sorte de som-
maire, son histoire familiale et personnelle, nous
décrirons son état actuel.
Antecedents héréditai1'es. - GOll... est née dans le dépar-
tement de la Seine le 15 juillet 1892.
III Communication faite il la Société de Biologie, séance du 15 mai 1896.
130UANEVILLE, Bicêtre, 1896. 4
50 Médication thyroïdienne.
Père, grand, bien portant, excès de boisson ; aucun accident
nerveux ou vénérien. - Grand'mère paternelle, migrai-
neuse. Arrière-grand-père paternel mort à quatre-vingt-
quatre ans d'un coup de sang. - Arrière-grand'mère mater-
nelle, morte à soixante-dix-huit ans, paralysée. - Autre
arrière-grand' mère maternelle, morte d'un cancer au sein.
Cousine, à un degré éloigné, arriérée.
Mère, crises nerveuses de dix-neuf à vingt-six ans. Grand-
père maternel, excès de boisson, mort aliéné. - Arrière-
grand-père, excès de boisson. - Arrière-grand'mère, morte
poitrinaire (' ? ).- Second arrière-grand-père atteint de trek.
blement, suicidé à soixante-quatorze ans. Deux oncles
maternels, morts de la poitrine. - Tante maternelle, danse de
Saint-Guy dans l'enfance ; crises hystériques. Pas de con-
sanguinité. - Inégalité d'âge de 3 mois.
Antécédents personnels. - Conception et grossesse, rien
de particulier. accouchement trois semaines avant terme.
- Asphyxie à la naissance, due au volume de la tête qui est
restée longtemps au passage, ongles peu ou pas formés.
Teinte subictérique de huit jours à deux mois, hernie ombili-
cale constatée au quinzième jour (bandage). - Jamais de
convulsions. - Élevée au sein par sa mère jusqu'à quinze
mois. - Cri aigre. - Crasses du cuir chevelu.
L'hérédité, comme on le voit, est assez chargée des
deux côtés, paternel et maternel. Mais elle ne diffère
guère de celle qu'on rencontre dans un grand nom-
bre de cas d'idiotie autres que l'idiotie myxoedéma-
teuse. En ce qui concerne l'enfant elle-même, nous
n'avons à noter que la naissance un peu avant terme
et l'asphyxie, d'ailleurs passagère. Rien ne nous four-
nit une cause très nette de l'affection de l'enfant.
État actuel. - L'aspect général de l'enfant ne laisse aucun
doute sur la réalité du myxoedème infantile : idiotie, décélée
par la physionomie; nanisme, obésité, cachexie pachyder-
mique, absence de la glande thyroïde.
La tête est brachycéphale. Les cheveux sont longs, châtain
roux; le cuir chevelu est le siège de pellicules et de crasses.
La fontanelle antérieure, ainsi que cela est la règle dans les
cas de ce genre, persiste. La face est plutôt ronde : front
bombé, arcades sourcilières déprimées, paupières gonflées,
rétrécissant les yeux; nez camus (les parents ont le nez aqui-
lin) ; joues gOlll1ées)lipomateuses ; lèvres volumineuses; bouche
entr'ouverte ; langue hypertrophiée dans tous lés sens, faisant
Idiotie avec cachexie PACHYDE1t11fIQUE. 51
saillie au dehors ; dentition incomplète ; menton court, aplati,
lipomateux; oreilles décolorées. (Fig. 11).
Cou très court, gros; pas de glande thyroïde; pseudo-li-
pomes sus et sous-claviculaires.
Tronc assez long, large. Ventre de batracien ; petite hernie
ombilicale, accident commun chez ces malades. Défor-
mation du rachis ; ensellure très prononcée de la région lom-
baire. Saillie exagérée des fesses.
Membres supérieurs et inférieurs gros, courts, incurvés.
- Etat pachydermique des mains et des pieds. Ongles petits
poussant lentement. Peau pâle, cireuse, sèche, sans transpi-
ration habituelle, sauf quelquefois aux mains. Développement
exagéré du tissu adipeux formant des pseudo-lipomes ou des
lipomes diffus.
Circulation : pouls petit, battements du coeur à 112 ; souffle
intense au premier temps à la base; cyanose des lèvres, de la
langue, des mains, des pieds. - Respiration toujours gênée,
sans râles. - Cri aigre, rauque.
Digestion : L'enfant ne prend que du lait ; bave, constipation
habituelle; pas de chute du rectum, accident fréquent chez
ces malades; gâtisme.
Sensibilité vive au froid. Vue et ouïe, normales. Tempéra*
lare rectale oscillant d'ordinaire entre 36 et 37 degrés. - phi-
sionomie caractéristique, exprimant une obnubilation pro-
fonde de l'intelligence ; toutefois, on peut fixer l'attention ; la'
mémoire existe; G... reconnaît ses parents, les personnes qui la
soignent, semble relativement affectueuse, sourit parfois. Pa-
role absente.
Marcheimpossible ainsi que la station verticale. Préhension
très défectueuse. - Poids : le 8 mai, Il kilog. 100 ; - Taille :
0'" 68 aux mêmes dates.
Telle est, dans ses grandes lignes, la situation de
l'enfant, ainsi que vous le montrent l'examen direct
et les différentes photographies que nous plaçons
sous vos yeux. Si nos prévisions, basées sur les faits
antérieurs, se réalisent, vous constaterez, chez cette
enfant, une véritable transformation, après le traite-
ment thyroïdien.
Fig. il. l.
Médication thyroïdienne. 53
Il. - Après LE traitement (1).
Dans la séance du 9 mai, nous vous avons présenté
une petite fille de 3 ans, atteinte d'idiotie 2112yxcl-
Nous vous avions annoncé que nous vous la
ferions voir de nouveau après qu'elle aurait été sou-
mise durant un temps convenable au traitement par
l'ingestion thyroïdienne. Et, afin que vous puissiez
vous rendre compte des effets du traitement, nous
avions mis en relief les principaux caractères de son
affection. Malheureusement, au bout de quelques jours,
l'enfant a été prise d'accidents pulmonaires auxquels
elle a rapidement succombé. Nous avons cru, cepen-
dant, qu'il était bon de vous faire connaître les résul-
tats obtenus, car ils étaient significatifs et s'annon-
çaient de bon augure.
li) mai. - Un demi-lobe de glande thyroïde. T. It. 36°,9, et 37°.
10 mai. - Un demi-lobe. T. Il. 37°, 5 et 38°. Les mains et les
pieds, qui avaient une coloration rouge vineuse, ont pris la
teinte cireuse du reste du corps et le gonflement pachydermique
a diminué. La langue, qui pendait en avant des arcades den-
taires, est devenue notablement moins volumineuse au point
qu'elle se replie maintenant dans l'arrière-fond de la cavité
buccale et occasionne des périodes de demi-asphyxie durant
lesquelles la respiration est interrompue.
41 mat. Au cours de la nuit l'enfant a été agitée et s'est
réveillée en sursaut à plusieurs reprises. T. R. 38°, 3; P. 67;
R. 21. En raison des symptômes observés, on ne donne pas
de glande thyroïde. -Soir : T. R. 38°, 5.
12maï. - L'agitation a continué. L'amélioration s'accentue.
Les paupières sont moins tuméfiées, aussi les yeux sont-ils
davantage découverts. Les lèvres sont beaucoup moins vio-
lacées. - Poids : 10 kg. 500. - T. R. 37°, 9. A midi, l'enfant
prend un gramme de glande thyroïde. - Le soir, elle parait
affaissée. Toutefois, elle saisit plus facilement les objets qu'on
(1) Communication faite à la Société de Biologie dans la séance du 27 juin.
54 Idiotie avec cachexie pachydermique.
lui présente. Pour la première fois, depuis son admission, elle
a une garde-robe sans lavement. - Soir : T. R. 39°.
11 mai. - En raison de l'élévation de la température obser-
vée hier soir, et bien que la température soit descendue ce
matin à 380, 2, nous ne lui faisons pas prendre de glande thy-
'roide. L'enfant continue à être un peu agitée et à être très
énervée. ,
14 mai. - Le sommeil a été à peu près nul et l'enfant a
remué sans cesse. T. R. 38°, 8. Un gramme de glande thyroïde.
- Les mains se dégonflent de plus en plus. Les cheveux
tombent. On note un commencement de desquamation mais
pas de sueurs. Dans l'après-midi, plaintes, agitations, refus
de boire le lait. - Soir : T. R. 39", 6.
15 mais La nuit a été mauvaise. La respiration était pré-
cipitée, l'oppression très grande, la température très élevée
(40°). Dans la matinée, Gon.. est plus calme, bien que la respi-
ration soit gênée et fréquente. La température est descendue
;"t 380, 4. Dans la journée, alternatives d'agitation et d'abatte-
ment, plaintes, pleurs, déglutition difficile, bouche close ; la
langue ne sort plus; la face est moins bouffie, la coloration
rouge des mains atout à fait disparu. - Soir : T. R. 39°, 4.
lti mais Pendant la nuit, plaintes, dyspnée, toux,
T. R. 38^, 1. Ce matin, G... est moins affaissée, semble mieux,
mais, dans l'après-midi, la dyspnée reparaît, la toux persiste.
L'enfant se gratte le nez, frotte sa tête contre l'oreiller. Une
selle sans lavement. - Soir : 38", 5.
17 mai. Bien qu'on lui ait administré hier soir un lavement
au chloral, G.... n'a pas dormi. Parfois son regard devient
fixe et d'autres fois ses yeux se retournent comme si elle avait
des convulsions ( ? ). - Le matin, T. R. 38°, 3. Dyspnée, toux
plus fréquente, nausées. L'enfant semble souffrir beaucoup.
Rien à l'auscultation. La pression du côté gauche est dou-
loureuse. Deux selles spontanées dans la journée. Le soir,
Gon... est plus calme. T. R. 39°, 3.
18 mat. - La nuit a été mauvaise en raison de la dyspnée.
On a mis des ventouses sèches et appliqué des cataplasmes
sinapisés. A 10 heures du matin, T. R. 38°, G; P. à 96; R. à
50. Oppression de plus en plus accusée. Lèvres pâles. Regard
sans expression. Déglutition très difficile. A la percussion, la
sonorité est conservée sauf en arrière à gauche où il y a de la
submatité. A l'auscultation, l'inspiration est rude presque
partout, mais on n'entend ni souffle, ni râles. - Ventouses
sèches, sur la poitrine, inhalations d'éther, lotions vinaigrées ;
ipéca; potion de Tood.
Soir. - Le traitement a été fait très régulièrement. Un se-
Médication thyroïdienne. 55
cond vomitif n'a, comme le premier, produit aucun effet. On
a remplacé les inhalations d'éther par des inhalations d'am-
moniaque et on a fait une nouvelle application de ventouses
sèches. La température est descendue à 38° (une heure de l'a-
près-midi) pour remonter à 39°, 8 (9 heures du soir). Sueurs
abondantes. Oppression extrême. P. à 100 ; R. à 56. Coma.
L'enfant meurt le 19 mai, à 6 heures du matin. T. R. 390. -
Poids après décès : 9 kilog. La famille a fait opposition à
l'autopsie. -
Résumons le traitement et ses effets :
56 Idiotie avec cachexie PACHYDERMIQUE,
Quelle est la cause de la mort ? Nous croyons qu'il
faut écarter la médication parce qu'elle a été de très
courte durée (4 jours) avec une interruption d'un jour;
parce que la dose quotidienne était très faible (1 gr.
50 deux fois, Igr. deux fois). Ajoutons que, en raison
de la résistance de l'enfant, aucune de ces closes n'a
été ingérée complètement, l'enfant en ayant rejeté
une partie, chaque fois, surtout la seconde fois.
A l'appui, nous pouvons invoquer le cas d'un enfant
- une fille également. - Bor ? moins âgée de 5 mois,
, qui a pris un demi-lobe (1 gr. 50) pendant 12 jours avec
une seule interruption, le 5e jour, sans offrir (lesymp-
Fig. 12.
IDIOTIE avec cachexie PACHYDERMIQUE. 57
tomes anormaux, en particulier la dyspnée, l'élévation
de température, etc., notés chez Gonich... Rappelons
que les phénomènes principaux dus à l'ingestion de la
«lande thyroïde s'atténuent très vite, d'habitude en 24
heures, dès qu'on suspend le traitement. Enfin nous
n'avons pas observé les crises épileptiformes, la tachy-
cardie proprement dite, le tremblement, la paralysie,
les éruptions cutanées, etc., signalés comme étant les
phénomènes qui accompagnent l'intoxication complète.
C'est donc à une affection pulmonaire qu'il convient,
;\ notre avis, d'attribuer la mort. La toux, l'oppression,
la douleur à la pression, la submatité, les nausées,
l'élévation persistante de la température nous parais-
sent rendre fort probable cette opinion. Il est bien
regrettable que l'opposition à l'autopsie ne nous ait
pas permis d'en apporter la certitude.
IV.
Idiotie myxoedémateuse ;
Par BOUR\I.VI1.LF et METTETAL
Dans la communication qui précède, nous n'avons
donné qu'un résumé succinct de l'histoire de la malade
qui en faisait l'objet, aussi croyons-nous utile de la
rapporter ici avec tous les détails qu'elle comporte.
SOMMAIRE. - Père, caractère un peu emporté, excès de bois-
son, céphalalgies. - Grand'mère paternelle migraineuse.
- Arrière grand-père paternel mort d'un coup de sang.
Arrière-grands'mères paternelles mortes l'une d'une para-
lysie, l'autre d'un cancer du sein. - Petite-cousine arriérée.
Mère, crises hystériques de 19 il 26 ans. - Grand-père
maternel, alcoolique, mort aliéné, - Arrière-grand-père
maternel, atteint d'un tremblement, suicidé. - Une tarife
épileptique a eu la chorée dans son enfance. - Nombreux
accidents de tuberculose dans la famille. - Pas de cons ?
guinité. - Inégalité d'âge de deux mois.
Accouchement trois semaines avant terme. - Asphyxie
à la naissance. - Hernie ombilicale congénitale. - Idio-
tie et myxcedène. - Teint cireux, état pachydermique,
avec pseudo-lipomes. Peau froide. Plaques d'alopécie. -
Fontanelle antérieure non oblitérée. Langue énorme.
Nez très aplati et camard. - Impossibilité de la station
debout. - Respiration s'accompagnant de grognements,-
Souffle systolique au coeur.
Traitement. Injections de suc thyroïdien, en 1893-94, résultat
négatif. - Effets considérables de l'ingestion de la glande
elle-même. Modifications du côté de la peau, diminution
du volume de la langue. - Développement rapide
du système dentaire. -Agitation de l'enfant et élévation
thermique nécessitant l'arrêt de l'ingestion de corps
thyroïde. - Broncho-pneumonie intercurrente se ter-
IDIOTIE avec cachexie pachydermique. 59
minant en 3 jours par la mort de l'enfant. - Pas
d'autopsie.
Con...., née à Ivry, le 17 juillet 1892, est entrée à la Fon-
dation V allée le 10 avril 1896.
Antécédents (Renseignements fournis par la mère et la
qrand'mère maternelle en 1893). Père, 28 ans, mécanicien
a la C"' Bison, grand, bien portant. Marié à 26 ans, ca-
ractère d'ordinaire calme, parfois emporté, excès de bois-
son, fume beaucoup ; céphalalgies, mais pas de migraines. Sa
femme le connaît depuis l'âge de 8 ans. Il n'a eu ni convul-
sions, ni fièvres intermittentes, ni maladies de peau. Elle ne
pense pas qu'il ait eu de maladie vénérienne. - [Père, 53 ans,
bien portant, a tenu des bains, puis une fabrique d'encres; il
est grand, fort et n'a aucun accident nerveux, - Mère, 55 ans,
tenait les bains avec son mari, est assez grande; douleurs
névralgiques dans les deux côtés de la tête ; caractère calme,
serait sujette à des migraines, qui auraient diminué dans ces
derniers temps. - Grand-père paternel, mort d'un coup de
sang à l'âge de 82 ans, sobre. - Grand'mère paternelle,
morte à 78 ans de paralysie. - Grand-père maternel, mort
à 99 ans d'accident. - Grand'mère maternelle, morte d'un
cancer du sein à l'âge de 56 ans. - Une demi-soeur pater-
nelle, 49 ans, bien portante, sans accident nerveux. - Un
oncle paternel mort d'une fluxion de poitrine sans accidents
nerveux. Pas de tantes paternelles. - Une tante maternelle,
(60 ans environ) devenue aveugle (cataracte) sans accidents
nerveux. - Arrière-cousine maternelle arriérée, morte à 15
ans. - Dans le reste de la famille, ni aliénés, ni apoplectiques,
épileptiques, pieds-bots, bègues, etc.].
Mère, 28 ans, pas de convulsions dans l'enfance, grande,
châtain foncé, physionomie régulière, nez aquilin légèrement
retroussé (il n'y a pas de nez camus dans la famille), réglée
à 16 ans sans accidents. A l'Age de 19-20 ans, elle est devenue
anémique, a eu des crampes d'estomac et a été prise de crises
nerveuses occasionnées par les contrariétés dues à ce que son
père faisait de nombreux excès de boisson, puis s'emportait
voulant battre sa femme et ses filles. Ces crises ont duré jus-
qu'au mariage. D'abord quotidiennes, elles se sont espacées de
plus en plus. Elle s'affaissait, serait tombée si elle n'avait
été soutenue, poussait parfois un grand cri, se raidissait, se
débattait, étouffait et cherchait à se « déchirer l'estomac, »
puis au bout de 35 à 30 secondes, revenait à elle en pleurant
60 Idiotie avec cachexie pachydermique.
beaucoup et enfin rendait une urine claire. La crise était
précédée d'une aura ovarienne aboutissant à un étourdisse-
ment. Depuis le mariage, elle n'a eu qu'une crise, quinze
jours avant d'accoucher, il la suite d'une discussion avec son
frère. Depuis l'accouchement, pas de crises, pas de chorée,
de migraines, de maladie de peau. - [Père, facteur d'orgue
s'est mis à boire au bout de 15 ans de mariage, avait des idées
de grandeur, se croyait contre-maître de sa maison. Celle-ci
ayant fermé, il s'est adonné davantage à la boisson et s'est
fait arrêter. On l'a conduit à l'Asile clinique, où il est mort
d'une fluxion de poitrine 3 semaines après. - Mère, blanchis.
seuse, grande, brune, bien portante, pas de migraines. Carac-
tère calme, un peu emportée dans sa jeunesse. - Grand-père
paternel, mort d'une fluxion de poitrine , il faisait de fré-
quents excès de boisson. - Grand'mère paternelle, morte
poitrinaire à 35 ans. - Grand-père maternel, sobre, suicidé
il 74 ans, il était devenu infirme à la suite d'un tremblement
qui l'empêchait de se servir de ses mains. - Grand'mère
maternelle, 80 ans, sobre, devenue aveugle. - Deux oncles
paternels morts de fluxion de poitrine. Ils étaient sobres et
forts. - Pas de tantes paternelles. - Un oncle maternel en
bonne santé ainsi que ses trois enfants. - Deux tantes
maternelles sans accidents nerveux, de même que leurs
enfants. - Quatre frères, deux morts de la poitrine; un
autre aurait eu une bronchite sans hémoptysie, l'autre est
bien portant. Aucun d'eux n'a eu de convulsions. - Deux
soeurs âgées l'une de 30 ans, sans attaques de nerfs, a eu deux
enfants qui n'auraient pas eu de convulsions ; l'autre, âgée de
23 ans, a eu la danse de Saint-Guy à plusieurs reprises. Elle
est grande, forte, a de temps en temps des crises de nerfs
qui reviennent toujours la nuit. Elle se mord la langue. (Ce
n'est pas du tout le genre de mes crises, dit la mère). - Pas
de suicide, d'aliénés, d'autres elioi-éîciues, de goitres dans la
famille.]
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de deux mois.
Antécédents personnels. - A la conception qui a eu lieu
dès les premiers jours du mariage, la mère était bien portante
et contente d'être enceinte. - Grossesse bonne, sans coups,
ni chutes, ni peurs, ni syncopes, ni idées noires, ni envies
de boire, pas d'opiacés, etc.- L'accottchement a eu lieu trois
semaines auant terme ; il a été naturel ; elle a eu 3 heures
de fortes douleurs, mais à peu près rien avant : elle attribue
l'accouchement prématuré, iL ce qu'elle avait fait son ménage
avant, ce qui a déterminé une perte et son accouchement
Antécédents personnels. 61
huit jours après. - A la naissance, l'enfant était asphyxiée,
parce que, dit-on, elle avait la tête volumineuse et que
celle-ci était restée longtemps au passage. Elle n'avait pas
d'ongles ou seulement des rudiments. On ne sait pas combien
la cyanose a duré.
Élevée au sein par sa mère jusqu'au 7 décembre. Elle a eu
la jaunisse au bout de 8 jours, et serait restée jaune pendant
2 mois. Mais le blanc des yeux n'était pas jaune. Ensuite la
coloration jaune de la peau a diminué peu à peu. - Quinze
jours après la naissance, on s'est aperçu que l'enfant avait une
hernie ombilicale : elle était grosse comme une prune. Trai-
tement par des bandages que l'on a supprimés parce qu'ils
écorchaient la peau. - Pas d'accès de cris diurnes ou noc-
turnes. Jamais de convulsions, - Gon... pleure facilement.
- Elle n'a pas encore de dents. Marche nulle; l'enfant ne sait
pas se tenir sur les jambes. Les cheveux étaient très abon-
dants dès la naissance et le sont encore. Elle a eu des cras-
ses dans les cheveux, qui ont persisté jusqu'à la 3e visite ici.
Aucune maladie, ni indisposition. Elle a été vaccinée à l'âge
de 3 mois. Parole nulle, attention facile à fixer, sa voix a tou-
jours été rauque. Avant son admission en 1896, l'enfant a
subi le traitement thyroïdien à deux reprises.
1890. - L'enfant est entrée dans le service le
28 avril pour être soumise à la méclication thyroï-
drenne, Elle vient des environs de Berck-sur-Mer où
elle avait été placée chez des paysans. Elle n'aurait
eu aucune maladie depuis que nous l'avons vue. -
Sa tante maternelle n'aurait plus de crises depuis
plusieurs mois et, dans le dernier semestre de l'an
dernier, elle n'en aurait eu que deux ou trois. -
Notre malade a une soeur, âgée de 23 mois, très bien
portante, semblant tout à fait naturelle ; elle marche
bien, a 12 dents, prononce presque tous les mots, n'a
pas eu de convulsions.
ü2 Idiotie avec cachexie pachydermique.
Voici quel était l'État de l'enfant pris à deux ans et demi
d'intervalle.
1893 : Octobre.
L'aspect général dénote
d'emblée l'idiotie avec cache-
xie pachydermique
L'enfant a la peau d'un as-
pect cireux, un peu luisant,
les joues sont légèrement
rosées.
Cheveux châtains, assez
foncés, fins et soyeux. Le cuir
chevelu ne semble pas épais;
il est le siège de crasses jau-
nâtres. Au dire de la grand'-
mère, qui a eu neuf enfants,
elles n'auraient pas été plus
abondantes que d'habitude.
On a essayé vainement de les
enlever. L'enfant est venue
au monde avec beaucoup de
cheveux, qui ne sont pas
tombés. Au niveau des bosses
occipitales, il existe une
bande d'alopécie ayant 10
centimètres de long et 3 de
haut. Les poils sont absents
au centre, et rares au bord
de cette plaque. Cette alopé-
cie aurait débuté il y a deux
mois.
1896 : Avril.
L'aspect général est encore
plus caractéristique.
Le corps trapu, arrêté dans
son développement est sur-
monté d'une tête relative-
ment énorme (Fig. 11).
L'habitus extérieur décèle
une apathie très marquée,
aussi bien intellectuelle que
physique. L'enfant se tient
le plus souvent dans la posi-
tion où elle a été placée. La
physionomie exprime l'hébé-
tude ; le regard est éton-
né, l'attention difficile il fixer.
Partout, même aux joues,
la peau a une coloration
cireuse et offre une infiltra-
tion m3wccdémateuse, d'où
un embonpoint factice.
Cheveux blonds en avant,
de plus en plus châtains à me-
sure qu'on s'éloigne du front;
ils sont assez longs (ta cent.),
roides, ne s'enroulent t
pas sur eux-mêmes. Le cuir
chevelu est le siège de pelli-
cules, mais il n'y a plus de
véritables crasses. Les pla-
ques d'alopécie persistent,
toutefois elles sont moins
étendues.
IDIOTIE avec cachexie Y : 1CH1'DERniI(UE. 63
Tête brachycéphale, avec
plagiocéphalie légère.
1% ottanelles,-L'antérieure
mesure 0 m., 07 d'avant en
arrière et 0 m., 045 transver-
salement. La postérieure pa-
rait fermée. Les autres os
paraissent soudés. Les bos-
ses pariétales sont assez
saillantes et égales. La bosse
occipitale gauche est plus
saillante que la droite.
La face est ronde, on peut
fixer l'attention de l'enfant.
Elle sourit et son sourire est
assez expressif. La physio-
nomie est douce. Le front est
bombé et assez haut : il est
un peu déprimé à droite.
Lesarcades sourcilières sont
déprimées, les sourcils figu-
rés par des poils fins, abon-
dants dans les deux tiers
externes. - Les cils sont
longs, noirs, assez abondants
aux paupières supérieures,
rares et courts aux paupières
inférieures. Pas de blépharite
ciliaire. Les paupières supé-
rieures sont commes bouffies,
et elles l'ont toujours été, dit
la mère. - Les iris sont gris
après avoir été bleus à la nais-
sance. Les pupilles sont nor-
males et sensibles à la lu-
mière.
La racine du nez est tout à
fait déprimée et creuse. Le
nez est petit, camus, très pro -
nonce. Les narines sont diri-
gées en haut. - Les jottes
sont bouffies et l'auraient
été davantage. Les lèvres
sont épaisses ; l'inférieure
mesure à peu près 8 milli-
Tête : même conformation.
Fontanelles. - La f. anté-
rieure mesure 35 millimètres
d'avant en arrière et 25 mm.
transversalement. Les autres
sont fermées.
Face arrondie, d'un aspect
massif.
Sourcils, cils, pas de mo-
dification appréciable.
Les paupières supérieures
sont boullies, fermes au tou-
cher ; les inférieures, non
boursouffiées, présentent des
plis transversaux. L'ouvertu-
re palpébrale est petite et les
yeux semblent enfoncés.
Même état des pupilles.
Nez, aucun changement.
L'odorat parait exister.
Les pommettes sont sail-
lantes, symétriques ; à leur
niveau, la peau est très épais-
se, infiltrée de graisse (joues
pseudo - lipomateuses). Les
64 IDIOTIE avec cachexie PACHYDERIIQUE.
mètres, la supérieure 9 mil.
Les mâchoires normales
ne portent pas de dents;
cependant les deux incisives
supérieures sont un peu ap-
parentes.
La langue est épaisse et
large, et cela depuis la nais-
sance. La voûte palatine est
un peu plate et cependant
arrondie.
Le menton est court,
aplati; au-dessous on trouve
un double menton de graisse.
sillons naso-géniens sont ac-
clissés.
La bouche est très grande.
La lèvre supérieure est très
épaisse ; son sillon médian
est un peu dévié à droite.
L'inférieure aussi très épaisse
a son bord inférieur décliné
en bas. Leur muqueuse est
cyanosée. La salive s'écoule
par l'ouverture buccale cons-
tamment ouverte pour laisser
passer la langue.
La dentition est incom-
plète. En haut, quatre inci-
sives et deux molaires de
chaque côté, dont la cou-
ronne est réduite à une petite
saillie. En bas, quatre inci-
sives et une canine à droite.
Les autres dents dessinent
des saillies arrondies sur le
bord alvéolaire des maxillai-
res. - Le maxillaire infé-
rieur reste en arrière du su-
périeur.
La langue, énorme, sort au-
dehors entre les arcades den-
taires. Elle est hypertrophiée
dans toutes ses dimensions
(Fig. 11). Sa pointe est arron-
die. Le volume de la langue
ne permet pas de voir le fond
de la gorge ; mais l'explora-
tion digitale permet d'appré-
cier le volume des amygdales
qui est moyen et l'existence
du réflexe pharyngien.
Le menton, très petit, ridé,
forme une petite masse
arrondie, cachée en partie
par la lèvre inférieure ren-
versée. La peau du cou qui
se continue avec le menton
est très épaissie, et un pli
IDIOTIE avec cachexie pachydermique. 65
Oreilles d'un blanc de cire, 1
assez bien ourlées, peu écar-
tées, lobule distinct.
Cou. - Le cou est court :
on sent très bien sous la
main les anneaux de la tra-
chée et les cartilages du la-
rynx. Il ne paraît pas y avoir
de traces du corps thyroïde.
Le cri cle l'enfant est un
peu aigre, mais 11101nSSt1'1(1(.'Ilt
que chez les autres myxoedé-
mateux.
Thorax. En avant la poi-
trine paraît comme carrée et
bombée au niveau des régions
pectorales. Les côtes sont un
peu déjetées, ce qui donne au
ventre de l'enfant l'aspect du
ventre d'un batracien. Le
raclns est normal. On sent des
paquets gratsseu.v dans les
creux sus et sous-clavicu-
laires.
Respiration. - A l'auscul-
totion, rien du côté des pou-
mons ; la respiration serait
parfois bruyante. Au coeur,
on trouve un bruit de souffle
très intense iL la base. Ce
bruit de souille paraît couvrir
les deux temps. l'as d'accès
de cyanose ; les lèvres sont
plutôt rosées.
transversal y constitue un
double menton, d'autant plus
accusé que la tête est incli-
née en avant.
Oreilles, rien à noter.
Cou très court, mesurant
30 centimètres de circonfé-
rence. La peau est flasque,
comme bouffie. - Le palper,
fait avec le plus grand soin,
n'y fait découvrir aucune
trace de la glande thyroïde.
Le doigt arrive sans interpo-
sition d'aucun organe sur
les cartilages du larynx qu'il
délimite aisément ainsi -que
sur la trachée.
Thorax. - Il est élargi, a
une forme presque cylindri-
que, n'est pas le siège de dé-
formations rachitiques. Les
dépressions de la cage thora-
cique sont masquées par l'é-
paississement du tissu cellu-
laire par la graisse. - La
colonne vertébrale, régulière
aux régions cervicale et dor-
sale, forme à la région lom-
baire une ensellure qui contri-
bue à rendre les fesses très
proéminentes.
La respi7*atio ? i s'effectue
selon le type costal, sans dys-
pnée. Elle s'accompagne de
cris gutturaux, constituant
'une sorte degrognementins-
piratoire. La sonorité est nor-
male. - L'auscultation du
ccettr décèle un souffle très
iutense, plus fort pendant la
systole, ressemblant à un rou
lement. Il s'entend aussi bien
BOURNEVILLE, Btcêtre, 1896. 5
66
IDIOTIE avec cachexie PACHYDERMIQUE.
IDIOTIE avec cachexie PACHYDERMIQUE.
67
avant-bras et les mains sont
bouffis : et cette bouffissure
est nettement d'origine lipo-
mateuse. Les doigts sont
courts et gros. Les ongles
sont petits (4 mm. à peine). j,
L'eufant serre bien des deux
mains et ni it l'oeil, ni aux me".
surations il n'y a pas de ditTé.
rence entre les deux mem-
bres .
Membres inférieur...;, - Les
cuisses sont arquées. Le dé-
veloppement adipeux est très
prononcé. Gros pli profond a
la partie moyenne de la
cuisse et un autre moins pro-
fond, moins long Ù 1 cent. 1/2
au-dessous du pli de l'aine.
Les deux plis circonscrivent
une bande dn 3 cent. 1/2 de
hauteur, qri est treuil) lot-
tante. Les jambes sont égale-
mcnt baumes. mais la lipoma-
tose domine aux cuisses. Les
pieds sont très gros, arrondis,
bouffis et plats. Les orteils
sont gros, cylindriques et
existent au niveau des join-
tures et sont tous profonds.
Les bras sont rapprochés du
tronc, les avant-bras demi-
fléchis dans la main, le pouce
écarté en dehors. Du moi-
gnon de l'épaule descend un
sillon circulaire qui passe
sous la racine du bras pour le
diviser dans le creux de l'ai-
selle en plis secondaires. La
main est globuleuse, la peau
y est bouffie, vioiacée. Les
doigts sont très courts, élar-
gis en massue, ridés. Le pli
d'opposition du pouce esttrès
marqué. Les éminences thé-
nar et hypothénar sont plu-
tôt hypertrophiées. Les ongles
sont petits, réguliers. - Les
mouvements spontanés sont
lents. Les mouvements pro-
voqués s'exécutent facile-
ment. Il n'y a pas de contrac-
ture. - La sensibilité est un
peu obtuse. - Les réflexes
paraissent normaux.
Membres inférieurs. - Ils
sont remarquables par leur
peu de longueur et le déve-
loppement adipeux. Les cuis-
ses sont fléchies sur le bassin.
Le pli de l'aine est creux. A
la face interne des cuisses, il
existe des masses empâtées,
des pseudo-lipomes. Il en est
de même au-devant de la ro-
tule. Les jambes sont rectili-
ges, Les mollets sont volu-
mineux, ce qui est dû à
l'infiltration graisseuse.
Les pieds ont une bonne alti-
tude. La face plantaire est un
peu aplalic. La peau y est
68 IDIOTIE avec cachexie pachydermique
courts. Les ongles ont 3 mm.
au plus. - L'enfant se tient
un peu et momentanément
sur les jambes. Elle parait
bien appuyer la plante des
pieds. La peau de la face dor-
sale seule est un peu colorée.
Organes génitaux. - Pénil
peu saillant. Grandes et peti-
tes lèvres bien conformées,
de dimensions rudimentaires.
Clitoris petit. Méat étroit.
Hymen labié, orifice très res-
treint.
épaisse, froide et cyanosée.
Tous les mouvements pro-
vogues se font aisément, en
revanche les, mouvements
volontaires sont v peu près
nuls. G... ne peut encore se
tenir debout, mais on sent
les muscles se contracter
avec force. - Les réflexes
rotulien et plantaire sont
conservés. Les quelques
mouvements spontanés
qu'elle exécute le sont avec
lenteur.
La sensibilité générale au
contact, à la température, à
la douleur existe partout.
L'intelligence est complè-
tement arrêtée dans son dé-
veloppement. Par moments,
G... semble contente et sou-
rit. La parole est nulle.
Organes génitaux. - Le
mont de Vénus est asser sail-
lant, il en est de même des
grandes lèvres, le capuchon
est très court, de 5 à mm.
Les petites lèvres mesurent
autant. Pas de rougeur de la
vulve (1).
1893. Injections sous-culanées de suc thyroïdien, tes )C,
18, 21, 23, 25, 28, 30 novembre, et les 2, 5, 7, 8, 9, 12 décem-
bre 1893. Après ces injections, d'après la mère et la grand-
(1) L'état de Gon... en 189G a été rédigé en partie avec des notes recueil-
lies par M. RELLAY') interne : provisoire du service.
IDIOTIE avec cachexie pachydermique. 69
mère, la situation serait la môme, mais les cheveux tombent
moins sans cependant repousser. La peau qui jaunissait com-
me par accès, jaunit un peu moins. Les cris de l'enfant sont
les mêmes. - Les injections de suc thyroïdien ont été faites
ensuite les 10. 12, li, 17, 19, 21 décembre. Le traitement est
suspendu pendant un mois.
1891. 1er {écJ'ie ? Reprise du traitement par les injections
sous-cutanées. L'enfant devient plus gaie, s'occupe davan-
tage, de ce qu'on fait autour d'elle. Son attention devient
plus grande. Les cheveux tombent moins. La coloration
jaune de la face persiste L'enfant ne parle pas, mais, dit ah,
quand elle voit quelque chose et sourit : la bouche est tou-
jours ouverte laissant voir une langue épaisse que l'enfant
commence il. allonger quand elle est contente. Elle commence
à se tenir mais mal sur les jambes la mère essaie de la faire
sauter sans y parvenir. Les pseudo-lipomes sont restés
les mêmes. Dentition encore nulle. Onze injections de suc
thyroïdien en février.
1896. 0 mat. Un demi lobe de glande thyroïde ingéré
par la wie slonwcillc. T. IL 3C", 9 le matin et 37" le soir.
10 mai. Un demi lobe. T. 11. 37", 5. Soir : 380, 1. Quel-
ques modifications se produisent déjà dans l'aspect cle l'en-
fant Les mains qui étaient de coloration rouge vineux ont pris
la teinte cireuse du reste du corps. Les pieds offrent les
mômes changements et paraissent également moins oedéma-
teux. La langue ne tend plus à pendre en avant des arcades
dentaires : elle se replie dans l'arriôre-fond de la cavité buc-
cale, se renversant sur l'epigtottc, et occasionnant des pério-
des de demi-asphyxie, pendant lesquelles la respiration est
interrompue, par suite de cette bascule delà langue. Enfin l'en-
fant parait fort agitée durant la nuit et se réveille en sur-
saut à plusieurs reprises. Elle agite les bras dans tous les sens.
11 mat. l'as de lobe. Pouls à G7 ; respiration il 21 ; T. R.
38°, 3. -- Soir : 38", 5.
13 mai. L'enfant continue à être très agitée. T. R. 370.9.
Les paupières sont moins tUn1élié,.s et découvrent les deux
yeux. La face reprend une coloration moins foncée ; les lèvres
sont .également moins violacée ? Poids : 10 kg. 500.
12 mai. - T. R. 37", 9. L'enfant prend 1 gr. de glande
70 Médication thyroïdienne.
thyroïde dégraissée. Elle parait assez affaissée ; elle a pa-sé
encore une nuit sans sommeil et a été fortement agitée.
Elle prend facilement les objets qu'on lui présente. Elle a été
à la garde-robe sans lavement pour la première fois. - Soir :
T. R. 39°.
13 mai. - Pas de lobe. T. R. 38°, 2. Soir : T. R. 38°, 5. L'en-
fant continue à être très agitée. - Vers 9 heures du soir, la
surveillante du service s'est aperçue qu'elle présentait
quelques gouttes de sang au niveau de la vulve, dont l'ori-
gine paraissait être interne.
14 mai. - Un gramme de glande thyroïde. - T. R. 38^,8. 8.
L'enfanta refusé toute nourriture : elle a été extrêmement agi.
tée toute la journée et pendant la nuit a eu une dyspnée très
prononcée, allant jusqu'à l'orthopnée.
15 mai. T. R. 38°, 4. - Pas cle glande thyroïde. L'enfant
continue à se modifier ; sa figure parait moins bouffie, la
coloration rougeâtre de ses mains a tout-il-fait disparu. La
langue est rentrée dans la bouche qui parait maintenant être
fermée. Peau sèche ; insomnie toujours complète la nuit. Les
dents ont légèrement poussé depuis que l'enfant est en trai-
tement. -Soir : T. Il. 39o, 9 ; R. à 42.
17 mai. - Pas de glande. - Le matin, l'enfant est très
abattue et oppressée, bien que la T. R. soit descendue il 38°, 3.
A 6 heures on envoie chercher l'interne de garde qui se borne
à prescrire du lait. - La surveillante met des ventouses dans
le dos et applique un cataplasme sinapisé. - Soir : T. Il.
39°. 3. - Pendant la nuit pas d'agitation, mais insomnie et
oppression.
18 mais Le matin, l'enfant a une dyspnée violente. P.
96 ; R. 56. Les lèvres sont pâles mais non bleuâtres. La lan-
gue est rentrée dans la bouche. Le regard est en grande par-
tie éteint. A la percussion, la sonorité paraît conservée sauf
en arrière au niveau du poumon gauche. A l'auscultation,
souffle rude à peu près partout, mais pas de râles. Toux assez
intense et assez fréquente. On applique des ventouses sèches
sur le devant de la poitrine, on fait des lotions vinaigrées
toutes les heures, des inspirations d'ammoniaque tous les
1/.1 d'heure. Potton de Tood, lait. On administre un vomitif.
19 mai. -Le traitement a tté fait très régulièrement toute
la journée T. Il. 39°, Dans l'après-midi, l'oppression aug-
médication THYROIDIENNE. 71
mente. Un second vomitif ne donne, comme le premier, au-
cun résultat (ipéca) ; on applique de nouvelles ventouses. -
Soir : P. '12 ; R 56 ; T. R. 39°. A 9 heures du soir, l'enfant est
do plus en plus oppressée : le pouls devient faible et irrégu-
lier, sueurs abondantes. - Mort le matin à 6 heures. -
Poids après décès : 9 hg.
V.
Forme de l'orbite des aveugles ;
PAR BOURNEVILLE ET F. RKGKAULT.
Nous présentons (1) le crâne d'un enfant de dix ans,
atteint d'idiotie par arrêt de développement du cerceau,
Cret... De plus il était affecté de cécité complète de l'oeil
droit à la suite d'une ophtalmie purulente consécutive à
la rougeole à l'âge de 3 ans. Sur ce crâne, qui appartient
au Musée de Bicêtre, on voit d'une façon très nette les
modifications des parois osseuses de l'orbite sous l'influ-
ence de l'atrophie du globe oculaire.
Nous lisons, en effet, sur l'observation : l'oeil droit est
atrophié, les paupières sont fermées et enfoncées clans
l'orbite. L'oeil gauche n'est pas atrophié, les paupières
sont ouvertes et offrent un iris bleu, terne et pâle.
Or, sur le crâne, les diamètres de l'orbite droit sont
diminués, mais surtout le vertical. Voici les mensurations.
OEil droit : hauteur 28 - Largeur 32, 5. Ind. 8G, 2.
(Ebauche : hauteur 33 - Largeur 31, 05. Ind. 104, 7
Les os frontal, maxillaire et malaire droits ont poussé
du côté de la cavité orbitaire vide de son oeil. La bosse
frontale droite est un peu plus saillante que la gauche. Au
dessous de l'orbite droit, le maxillaire supérieur est creusé
en une cavité plus profonde qu'à gauche.
(1) Communication faite a la Société anatomique (Séance du G juin 1890).
VI.
Idiotie congénitale par arrêt de dévelcppement ;
PAR BOURNEVILLE et J. NOIR.
SOMMAIRE.Père., crises convulsives. - Grand-père pater-
nel buveur.- Grand' mère paternelle, aliénée et paraly-
tique. - Mère emportée. Grand' mère maternelle, délire
très violent durant une fièvre typhoïde. ? A1'1'ière-graml'
mère maternelle, paralytique. - Cousin, bec de lièvre. -
Pas de consanguinité. - Egalité d'âge.
Conception, grossesse, accouchement, rien de particu-
lier. - Pas d'asphyxie à la naissance. - Allaitement au
sein.- Crises convulsives à 2 ans. - Peurs à 3 ans.
Hernie inguinale à la naissance disparue.
Première dent à 7 mois ( ? ). Dentition complète à 4
ans. - Gâtisme. - Tics.
Etat actuel. - Notes d'école. - Syphilis acquise. - Con-
gestion pulmonaire ; mort.
AUTOPSIE. - Description de l'encéphale, etc.
Léb... (Robert), né le 27 janvier 1884, à Paris, est entré le
28 mai 1889 à Bicêtre (service de M. Bourneville) où il est
décédé le 11 janvier 1890.
Antécédents. (Renseignements fournis par sa mère le 5
juin 9889J. - PÈRE, 33 ans, l'allineur, aurait eu à 15 ans,
'durant 18 mois les fièvres paludéennes et plus tard une affec-
tion pulmonaire (chaud et froid ? ) ; à l'âge de 20 ans, il fut pris
fréquemment de crises nerveuses, qui se répétèrent durant 6
ans- environ. Les crises consistaient en chute bru-que sans
cris avec mouvements convulsifs des bras et jambes. Il se
relevait seul, parait-il, une fois la crise passée mais avait
les membres brisés et restait éreinté et hébété durant le reste
de la journée. Le peu de précision de ces renseignements ne
nous permet pas d'affirmer l'origine de ces crises épilep-
74 Antécédents HÉRÉDITAIRES. v
tif'ormes. Il n'a pas servi, exempté par un frère soldat, il est
relativement sobre, ne boit guère que les jours de paye, fume
pour 0 fr. 20 de tabac par jour. Il n'a jamais fait d'excès véné-
riens, n'a jamais eu de traces de syphilis, ni de dermatoses.
- Caractère violent, il se met facilement en colère. - [Père,
70 ans, n'a jamais eu de crises analogues à celles de son fils.
Il « boit sec » et malgré cela se porte assez bien et ne se
plaint que de douleurs dans une jambe. - Mère, très nerveuse,
a été à deux reprises différentes frappée d'aliénation men-
tale et de paralysie d'un côté. Elle n'aurait pas eu d'attaques
de nerfs. Grands parents paternels et maternels morts âgés,
on ne sait de quoi. - Deux oncles paternels sont bien por-
tants. - Trois frères : un est mort assez jeune de fièvre
typhoïde ; les ceux autres sont sains, mais violents et colé-
reux. Trois soeurs, dont une est morte à 11 ans de la scar-
latine, les deux autres sont mariées et de parfaite santé ; une
de ces dernières est mère de deux enfants bien portants. -
Aucun autre antécédent névropathique ou psychopathique
dans la famille du père.]
Mère, 30 ans, femme de ménage, brune à physionomie
régulière et intelligente ; réglée depuis 17 ans régulièrement,
elle n'a eu dans son enfance aucune maladie Infectieuse, ni
aucune manifestation nerveuse. Elle est vive, emportée môme
mais n'a pas eu de crises de nerfs. Elle aurait toujours eu
une conduite régulière, n' dirait pas fait d'excès et n'aurait
jamais eu de traces de dermatoses. ni de syphilis. - [Père,
mort à 35 ans, sa fille ne peut donner aucun renseignement
sur lui. - Mère, bien portante, a eu, peu après la naissance
de sa fille, une fièvre typhoïde grave avec délire violent, elle
se levait de son lit et s'échappait dans la cour de la maison.
- Grand-père paternel, rien de particulier. - Grand'mère
paternelle, est restée six mois paralysée avant de mourir
Grands-parents maternels : pas de renseignements. Deux
oncles maternels bien portants. - Une soeur, très grosse,
souffre constamment de l'estomac. Cette soeur aurait eu deux
enfants morts en bas âge, le premier de rougeole, le second
d'athrepsie; cet enfant était porteur d'un bec de lièvre. -
Aucun autre accident morbide ou trouble de développement
dans le reste de la famille de la mère.] Pas de consanguinité.
- Différence d'âge de 3 mois (mère plus jeune.)
Trois enfants : 1° Garçon, mort à 22 mois du croup, se
portait jusqu'alors très bien, n'avait jamais eu de convulsions ;
- 2 Garçon, 7 ans 1/2, bien portant, intelligent ; pas de
convulsions.
Antécédents personnels. 75
3° Notre malade. - Rien de particulier à la conception. -
Pas d'accidents bien graves durant la grossesse, vomissements
assez fréquents, émotion assez vive, sans accidents une seule
fois, la mère croyant avoir perdu son petit garçon au marché ;
pas d'envies, pas d'excès, pas de traumatisme. - Accouche-
ment rapide, à terme et normal. - l'as d'asphyxie à la
naissance, pas de circulaires, ni de torsion du cordon. Allai-
tement maternel au sein jusqu'à 17 mois.
La santé générale de l'enfant fut assez éprouvée ; la mère
a constaté les premières crises conndsives à l'âge de deux
ans seulement. Ces convulsions se bornaient à quelques
grimaces de la bouche sans mouvements des yeux et sans
accidents du côté des membres. Aucun trouble n'accompa-
gnait ces crises qui survenaient à des intervalles de 3 à 15
jours et se manifestèrent durant une période d'environ six
mois. Depuis sa naissance l'enfant est porteur d'une petite
hernie inguinale droite. De 4 à 7 mois, il a eu à diverses
reprises des attaques de bronchite. A 3 ans, sa mère remarqua
qu'il était pris de peurs brusques, qu'il sursautait la nuit et
était très agité. Conduit au Havre, on lui fit prendre des
bains de mer, et à la suite, il aurait eu de la diarrhée et
pendant un mois environ la jaunisse. Enfin récemment il a
été atteint de rougeole. Là se sont bornées toutes les mala-
dies aiguës ou infectieuses remarquées par sa mère.
La première dent apparut à 7 mois ( ? ). La dentition fut
complète à 4 ans. Leb... n'a jamais été propre. Il n'a marché
qu'à 3 ans et demi et n'a commencé à parler qu'à 4 ans. Dès
l'âge de 4 mois, la mère s'aperçut de l'arriération de son enfant.
Il ne pouvait à cette époque maintenir la tète droite et la
laissait tomber sur l'épaule gauche. Il grinçait parfois des
dents et grimaçait. Mais bien qu'il ne parlât pas à 3 ans, sa
mère ne le considéra comme idiot que, lorsqu'après sa jau-
nisse, il fut pris d'un tic étrange. L'enfant s'arrachait les
cheveux et les regardait en les roulant rapidement dans les
doigts. Il passait la journée à cet exercice et s'y livrait la
nuit dès qu'il se réveillait. Outre cela, il était sujet depuis
l'âge de ans à de fréquents balancements antéro-postérieurs,
il avait l'habitude de têter sa langue et de baver. Malgré cela,
prétend-on, il comprenait assez bien. Il fut envoyé momen-
tanément à l'école, mats il se tenait isolé dans un coin et
ne jouait jamais avec les autres enfants. Il n'a pas présenté
de pyromanie, de clastomanie, ni de kleptomanie. L'onanisme
n'a pas été constaté par ses parents Les fonctions digestives
sont normales, sauf le gâtisme. Il tousse encore un peu.
Conduit, il y a quelques jours, à l'hôpital Trousseau pour y
76 DESCRIPTION DU malade.
faire traiter sa hernie, l'enfant y fut examiné et l'on conseilla
à la mère de le placer il Bicêtre.
État actuel. (10 juin 1889). État général. Crâne
symétrique, il bosses frontales et pariétales très accentuées;
front presque vertical. Cheveux châtains, irrégulièrement
implantés, le tourbillon postérieur est presqu'au niveau de la
bosse pariétale gauche. Le cuir chevelu est il peu près com-
plètement dépourvude cheveux en avant aux régions tem-
pjro-parietalcs et à la partie inférieure de l'occiput, ce qui
est vraisemblablement dû au tic de Le))... qui s'arrache les
cheveux.
Visage rond..1l'cades sourcilières peu accentuées, recou-
vertes d'un fin duvet châtain, fentes palpébrales régulières.
Paupières tuméfiées surtout les supérieures par le fait d'une
bléiltai'o-conjo2cli.i;ile. 1'eu\ : ! lOl'l1l : tllX et motilité nor-
male. Iris verts. Pupilles égides et à réactions normales.
La vision parait bien s'effectuer. Ne : ; un peu aplati à sa
racine, légèrement épaté, narines assez étroites ; léger coryza
chronique. Lèvres épaissscs. Bouche moyenne. Rien de par-
ticulier à la voûte palatine, à la langue, ni à la muqueuse buc-
cale. Menton petit et rond. Joues épaisses et tombantes, élar-
gissant la base du visage. Dentition de lait complète, la
plupart des dents, surtout à la mâchoire supérieure, sont atta-
quées par la carie. L'articulation parait exacte. Oreilles assez
grande-- it ourlet épais.
Cou moyen, quelques ganglions sous-sterno-mastoïdiens
tuméfiés, tant à droite qu'à gauche. l'as de goitre.
1'Iorn.v, un peu étroit. Les insertions des cartilages costaux
au sternum donnent lieu a une double ligne saillante. Les
fausses côtes sont déjetées en dehors de façon iL imposer au
thorax la forme d'un sablier. Il n'y a pas de déviation de la
colonne vertébrale. Rien de notahle à la percussion. A l'aus-
cultation, l'inspiration est un peu rude aux sommets et l'ex-
piration est sifflante et prolongée. Mouvements respiratoires
2t il la minute. Creut' normal; 80 pulsations.
Ventre souple. Le foie ne déborde pas les fausses côtes.
Estomac non dilaté, .bues normal. Organes génitaux. Tes-
ticules dans les bourses qui sont rétractées, très petits, du
volume d'un pois Pliimosis léger. Verge : longueur et circon-
férence 3a mm. Aucune trace de hernie n'est constatée.
Membres supérieurs égaux et réguliers; il en de même des
membres inférieurs
Petites adénites chroniques dans les aissel'es et les aines,
La sensibilité générale sous ses divers modes (tact, dou-
Description DU malade. 77
leur, chaleur.) parait physiologique. L'odorat est peu déve-
loppé. Le goût existe.
78 Autopsie.
tité, râles sous-crépitants aux deux bases. Souffle à gauche.
Vésicatoire. Potion de Todd.
1890. 2 janvier. - Épistaxis léger. Température vespérale
40°. Respiration à 46 par minute.
5 janvier. - La bronchopneumonie devient de plus en plus
grave. Dyspnée croissante. Asphyxie imminente. - T.R.
38°, 8. - Soir : 41°, 4.
6 janvier. - T. R. 40°, 8. - Soir : 4 la.
7 janvier. Légère amélioration le matin. T.R. 40°. -
Soir : 41°, 4.
8 janvier. T.R. 40°, 4. - Soir : 39°, 6.
9 janvier. T.R. 39°. - Soir : 40 ? ? .
10 janvier. T.R. 39°. - Soir : 39°, 5. Collapsus.
11 janvier. T.R. 3S°,5. Mort. - Poids après la mort :
10 k., 300.
Autopsie le 13 janvier. - Cou : Larynx, trachée : rien de
particulier. Corps thyroïde : 5 gr. Pas de trace de thymus.
Thorax. - Ni adhérences, ni épanehement dans les plèvres.
Poumon gauche (210 sr.) IIépatisation grise de la base de ce
poumon, les bronches à la pression laissent sur la coupe
sourdre du pus. - Poumon droit (180 gr.) : congestion très-
intense de la base avec noyaux d'hépatisation. Pas de
tubercules dans les poumons. - Péricarde, normal. Coeur
(70 gr.) : rien de particu ier.
Abdomen. - Estomac et tube digestif : à relever. Pan-
créas : (30 gr ) hate : (30 gr.) Foie : .- (540 gr.) aucune
lésion. - Rein gauche : (75 gr ) ; rein droit : z70 gr.); un peu
pâles mais se décortiquant bien. - Vessie : rien de particulier.
Crâne. - Calotte symétrique, mince partoutsaufau niveau
de la partie moyenne de l'occipital où elle est assez épaisse
et mesure 7 nullim. Non seulement les sutures ne sont pas
synostosées, mais encore on voit le jour au travers et on fait
jouer les os les uns sur les autres.
La suture coronale est très dentelée, excepté à la partie
moyenne. La suture inter-pariétale offre des dentelures
étroites. L'os épactal est divisé en deux par un prolongement
de la suture inter-pariétale : ces deux petits os épactaux sont
mobiles et de niveau avec les parties voisines des pariétaux.
La partie de l'occipital, située immédiatement au-dessous, est
épaissie et forme une légère saillie par rapport aux pariétaux.
Les trous pariétaux sont très visibles. Base symétrique.
- Pas d'adhérences, ni de traces de méningite.
Congestion de la pie-mère et des plexus choroïdes.
ARRÊT DE DÉVELOPPEMENT DU CERVEAU. 79
80 Arrêt de développement du cerveau.
de ce côté offrent un aspect tout différent de celles de gau-
che. La scissure de Sylvius, l'insula, le sillon de Rolando déli-
mitent normalement le lobe mais les circonvolutions très
contournées ont une morphologie différente. 1, assez mince
surtout à son origine est bien contournée et communique
avec F2 par trois petits plis de passage F2 est coupée par un
sillon à son tirer. postérieur, tres contournée elle communi-
que dans ses 2/ : ¡ antérieurs par trois plis de passages assez
volumineux avec F3 et en arrière se jette dans FA en faisant
un grand crochet aconcavite inférieure dont l'extrémité anté-
rieure se continue avec le tiers postérieur de Fa. Ceci joint
aux deux plis antérieurs avec F, lui fait perdre au premier
abord son autonomie. Quant à SOI-1 tiers postérieur très
milice et très réduit est séparé de ses deux tiers antérieurs
par un sillon profond, FA conserve son aspect normal, un sil-
lon la coupe en deux à sa partie moyenne.
Ce sillon transversal se continue dans le lobe frontal bor-
dant une partie de F2 et coupant le sillon préfrontal et du
côté du lobe pariétal en coupant PA à sa partie moyenne. Il
est parallèle à la scissure de Sylvius. Il se continue avec le
sillon intra-pariétal de sorte que le lobe pariétal offre deux
régions très nettement séparées, l'une formée d'une longue
circonvolution représentant la moitié supérieure de PA et le
lobule pariétal supérieur ; l'autre plus contournée compre-
nant la partie inférieure de PA, le lobe pariétal inférieur et le
pli courbe.
Le lobe temporal n'offre rien de particulier si ce n'est
comme à gauche les nombreux plis de passage entre T2 et T3.
La scissure perpendiculaire, externe est nette, plus accusée
qu'a gauche. Le lobe occipital est toujours d'aspect rudimen-
taire mais un peu plus compliqué qu'a gauche.
La face interne de l'hémisphère n'offre rien de particulier
Fi, le lobeparacentral, l'avant-coin, le coin, la circonvolution
du corps calleux, le lobe temporo-sphénoïdal, sont normaux
morphologiquement, peut-être un peu rudimentaires. - Rien
de particulier du côté du ventricule, ni du corps opta-strié,
Les tubercules ont leur aspect macroscopi-
que normal. Il en est de même des pédoncules, des deux
hémisphères cérébelleux, du bulbe, de la protubérance, du
quatrième ventricule et de la moelle.
Réflexions. I. Les antécédents héréditaires de
Le]) ... sont insignifiants du côté de la mère, mais
sont graves du côté paternel : grand père buveur,
Arrêt de développement du cerveau. 81
grand'mère aliénée et paralytique, père atteint de
crises convulsives, probablement hystériques ou épi-
leptiques, deux oncles coléreux et violents, voilà
plus qu'il n'en faut pour créer à l'enfant des prédis-
positions aux affections nerveuses. .
II. Les antécédents personnels de l'enfant sont peu
compliqués. Ce n'est qu'à l'âge de deux ans qu'appa-
raissent les premières convulsions, qui ont sans
doute aggravé la situation de Leb...
III. L'état physique et mental du malade observé
à Bicêtre permet de le considérer comme un type de
dégénéré. Les tics, le gâtisme, le manque de parole
il peu près complet sont les symptômes les plus sail-
lants.
IV. L'autopsie n'a révélé aucune lésion céré-
brale macroscopique. Néanmoins la morphologie
rudimentaire et souvent anormale des hémisphères
est sans doute la cause de l'état intellectuel cle Leb...
dont le diagnostic doit être : idiotie congénitale.
Bourneville, Bicêtre, 1896. p
VII.
Sclérose cérébrale hémisphérique : idiotie, hémiplégie
, - droite et épilepsie consécutives ; ..
Par BOURNEVILLE.
Sommaire. - Père, excès de boisson, fièvres, intermittentes
, Grand'mère paternelle, excès cle boisson. Grandrpèré
maternel, quelques excès de boisson. - Une ' cousine
maternelle, épileptique. - Une autre arriérée, bègue'.
Un oncle, excès de boisson Tante et cousine, idiotes.
° - Plusieurs frères et soeurs, convulsions.
Cyanose à la naissance. Premières convulsions sous formé
d'état de mal à 5 ans auec prédominance à droite. - H(iiii7
plégie droite et idiotie consécutives. - Convulsions pen2-
' "dant trois mois. - Début de l'épilepsie à 13 ans 1/2.
Description du malade ? Impulsions violentes : colères,
injures, obscénités. - Légère torsion dé la verge et épissa-
dias. - Onanisme fréquent. - pièces sériets de plus en
plus fréquents. - Escharres et gâtisme consécutifs à une
série. -Attitude voûtée et inclinaison du corps de plus
en plus prononcée. - Evolution de la puberté. - État de
mal. - Élévation notable de la température. - Mort.
Marche de la température et de la rigidité, cavadèriques.
Autopsie. Liquide céphalo-rachidien abondant. - Atro-
phie totale de l'hémisphère cérébral gauche. Atrophie
du pénoncule cérébral, du tubercule mamillaire et de la
bandelette optique gauches. - Description du cerveau.
- Description du squelette : Arrêt de développement de
toute la moitié droite.
Doue... (René), né à Paris le 16 mars 1865, est entré à Bicê-
tre, dans notre service, le 20 juin 1879.
Antécédents. (Renseignements fournis par sa mère.)
Antécédents héréditaires. 83
Père, 47 ans, homw ,le prioe : 1 ? 7, r ? '1" ,r.ld : n'¡r". f;iit
des excès de boisson et a « le vin très exa L,' 1) -, bien ponant,
a eu les fièvres intermittentes de n il 35 ; c'est dans cette
période qu'est né le malade. Pas de syphilis. - [Père, inconnu,
Mère, faisait des excès de boisson, morte à 72 ans. Une
soeur, bien portante, mère d'enfants sains. - Pas de maladies
nerveuses dans le reste de la famille].
Mère, 50 ans, fruitière, intelligente, sobre, peu nerveuse
bien portante. - [Père, débardeur, quelques excès de bois-
son, plusieurs hémoptysies, mort à 45 ans, à la suite d'un
coup reçu dans la poitrine, au cours d'une joute. - Mère, 74
ans, en bonne santé. Un frère a deux filles : l'une, forte et intel.
ligente, aurait eu, au moment de la puberté, des accès d'épi-
lepsie qui auraient reparu pendant un an; ils auraient cessé
depuis plus d'une année. L'autre a « l'intelligence lourde et
bégaie un peu ». Un autre frère (de mère seulement), nerveux,
fait des excès de boisson. - Une soeur, morte idiote à 19 ans,
sans avoir parlé, ni marché. - Une cousine germaine « a
la tête faible », mais gagne sa vie].
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 3 ans (mère
plus âgée).
Six enfants d'un premier lit : 1° une fille un peu nerveuse
dont un des enfants a eu des convulsions internes ; - 2° un
garçon mort athrepsique à 2 ans ; - 3° un garçon mort du
croup ( ? ) à 9 mois ; - 4° un garçon mort de « rougeole rentrée »
à 2 ans ? ; - 5° un garçon « bossu », a eu beaucoup de
convulsions, est mort à 18 ans, à la suite d'un abcès par
congestion; - 6° un garçon, 27 ans, bien portant, a eu des
convulsions internes.
Cinq enfants d'un second lit : 1° une fille, 18 ans t ? médit.
crement intelligente et qui a eu beaucoup de convulsions; -
2° notre malade ; 3° une fille, 15 ans (/2, nerveuse, peureuse,
sujette à des cauchemars, a eu des convulsions ; elle est in-
telligente ;- 4° un garçon, intelligent, a eu des convulsions;-
5°un garçon, passablement intelligent, a eu des convulsions,
Noire malade. - Pas de rapports sexuels durant l'ivresse.
- Grossesse bonne, - Accouchement naturel, à terme.
D... était à sa naissance « aussi gros qu'un enfant de trois
mois » ; il était cyanose et on dut saigner le cordon. Sa mère
l'a nourri jusqu'à 15 mois ; c'est vers 13 mois qu'ont paru les
premières dents. D... commencé à parler à 15 mois; 11 n'a
marché qu'à 18 mois. Jusqu'A 6 ans il a pissé au lit, mais il
84 Antécédents personnels.
était propre dans le jour. On l'envoya à l'asile : il apprenait
assez bien, savait des prières, des chansonnettes.
Il avait 5 ans, lorsque, une après-midi, et à peine couché,
il fut pris de convulsions généralisées aux quatre membres,
et qui ne durèrent que quelques minutes. Vers 7 heures du
soir, le même jour, il fut pris d'une nouvelle crise, qui dura
jusqu'à minuit, sous forme d'état de Les secousses (;0,1-
vttlsiues, qui étaient très fortes, portèrent uniquement sur
le côté droit. A dater de ce jour, D... eut quotidiennement,
pendant trois mois, des crises convulsives qui duraient d'une
demi-heure à une heure, et portaient uniquement sur le côté
droit. Il passa ces trois mois presque complètement au lit,
sans bouger, sans parler, paraissant souffrir lorsqu'on le
remuait, surtout du côté droit. On le faisait manger, et il ne
dépérit pas trop.
Après cette période, on put le lever, et on s'aperçut que le
côté droit était paralysé et que les membres de ce côté étaient
devenus rigides. Il dut apprendre de nouveau à marcher et
il ne put le faire qu'en traînant la jambe ; le bras était inerte ;
lorsqu'il recommença il parler, ce fut en bégayant. L'intel-
ligence, elle-même, avait considérai dément diminué; le
caractère, primitivement doux, s'était modifié : D... était
devenu colère, violent, brutal.
Jusqu'à 15 ans c>, il n'eut plus de crise convulsive, mais sa
paralysie ne se modifia pas, non plus que son intelligence :
à l'école il n'apprit rien du tout. Puis, il la suite « d'une
colère rentrée » contre un voisin, il eut dans la nuit un pure-
miel' accès d'épilepsie, auec prédominance des convulsions
dans le côté paralysé. Nouvel accès dans la nuit, quatre ou cinq
jours après. Les accès se succédèrent ensuite, toujours noc-
tl),l'nes; trois étaient précédés d'un cri plaintif, étouffé ; puis
tout le corps devenait raide avec inclinaison du côté droit,
déviation conjuguée de la tète et des yeux à droite, grin-
cement de dents. Les secousses étaient peu fortes et prédo.
minaient à droite ; pas d'écume, pas cle morsure de la langue,
pas d'évacuations involontaires. A la fin, sterlor, et retour
assez rapide cle la connaissance ; pas de troubles psychiques
consécutifs. Dans, la journée, pas d'accès, à moins qu'on ne
le couchât, mais quelques élouJ'cli8scnwnls : il devenait tout
drôle, regardait avec des yeux hagards, blêmissait un peu et
en quelques secondes c'était fini.
" Chez ses parents, il passait la journée sans rien faire. Il
était souvent dans la rue avec des chiffonniers, qui lui ont
appris les expressions ordurièr s qu'il débite effrontément;
il n'avait pas de tic, mais bavait en. parlant et suçait son
DESCRIPTION DU malade. 85
pouce. Pas d'onanisme. Quoique colère, il avait bon coeur,
demandait volontiers pardon, n'était pas vindicatif, partageait
avec ses camarades, jouait avec les animaux. Il ne rêvait
que de travailler pour avoir de l'argent, il connaît la valeur
des pièces, prenait des sous pour les donner aux enfants.
État actuel ? Tète assez grosse ; crâne oval, symétrique,
assez développé aux régions occipitale et mastoïdienne.
8ci DESCRIPTION DU malade.
l'index, le médius. et l'annulaire, la phalangine est en exten-
sion forcée, et la phalangette en demi-flexion toutes les par-
ties de l'auriculaire sont en demi-flexion. Si on observe le
malade, on voit qu'il- n'imprime à son membre que des mou-
vements de totalité ; si on l'engage à remuer tel ou tel seg-
ment, il secoue tout le membre, et les mouvements se passent
16P.t're l'omoplate et le tronc. Néanmoins, nous sommes par-
venus à communiquer à l'épaule tous ses mouvements nor-
maux. On fléchit facilement le coude, mais son extension offre
plus de résistance et demande qu'on l'opère avec lenteur; et,
Fig. 13. - Doue... en juillet 1884 (19 ans).
Description DU malade. 87
de même au poignet, la flexion est facile, mais l'extension est
limitée par les fléchisseurs contractures. Pas de craquements
dan- les articulations ; pas d'athéose, pas de modification de
la nutrition de la peau, ni du système pileux. A la palpation,
le membre paralysé parait, plus froid que le gauche.
Membres inférieurs. Le membre droit, moins développé
que l'autre à première vue, est très légèrement fléchi, le pied
n'est pas angle droit, mais retombe un peu. Le malade étant
couché, si on lui dit de lever la jambe droite, on voit ce mem-
bre se roidir et être pris de tremblement, ce qui n'empêche
pas le malade de le soulever. Pendant cet effort, le bras cor-
respondant se raidit et se soulève par un mouvement associé
très net.
D... arrive à fléchir et étendre le genou, quoique très len-
tement ; nous ne pouvons lui faire comprendre de remuer son
pied. En marchant, légère boiterie. comme si ce membre,
était trop court ; le pied retombe de la pointe, et fauche légè-
rement. Il est facile de communiquer des mouvements lents
à toutes les articulations, dans lesquelles on ne perçoit aucun
craquement. On obtient parfois, sur les deux membres infé-
rieurs, des phénomènes d'épilepsie spinale. Pourtant il n'y a
pas de phénomènes du tendon bien nets. Pas de mouve-
ments choréiformes ; pas de modification nutritive de la peau
ni du système pileux; température plus basse du côté para-
lysé.
Peau et tissu cellulaire. Cheveux, sourcils et cils châ-
tains clair-, assez abondants ; moustache blonde naissante ;
quelques poils au menton ; poils abondants aux aisselles, au
pénil ; tronc glabre ; poils aux quatre membres. Pas d'adénite. '
- Quelques petites cicatrices sur le dos du poignet droit ;
une cicatrice de brûlure au tiers inférieur de la face dorsale
de l'avant-bras droit. Quelques érosions, quelques ecchymoses
sur le bras droit, qui parait recevoir des chocs plus fréquents.
Une petite cicatrice sur la crête du tibia droit.
Organes génitaux. Verge très volumineuse, pas de phi-
mosis ; testicules gros, égaux. Onanisme fréquent.
Digestion : appétit excellent, digestion facile, selles régu-
lières ; rate, foie, normaux. Respiration : sonorité à la
percussion; pas cle ritles. - Circulation : coeur régulier;
pas de bruit morbide.
Sensibilité générale conservée sous ses divers modes;
parait être égale des deux côtés. Vue, ouïe, odorat, goût,
conservés, mais dilliciles iL juger comme qualité.
Force musculaire, - Prise à droite avec le dynamomètre
88 Description DU malade.
Mathieu : 8 kilogr. l' ? l; à gauche, 25 kilogr. En juillet 1881 :
Taille, 1m,6l¡; poids, 58 kilogr. 20.
Intelligence. On a essayé, sans succès, d'envoyer Doue...
à l'école ; il se refuse à toute application, et quitte la classe
pour passer sa journée à traîner sur les bancs dans la cour. Il
ne connaît pas ses lettres, ni ses chiffres, n'a rien appris en
gymnastique, n'a ni discernement, ni mémoire. Si on lui
montre un objet usuel, en lui en demandant le nom, les
usages, il répond le plus souvent par un rire bête et détourne
la tête. 11 est grossier, et s'il prononce spontanément un mot,
ce sera une injure. Très colère, si on veut le contraindre à
faire quelque chose, il répond par des injures, mord les per-
sonnes, lance ses sabots contre elles, déchire ses vêtements;
il frappe à tout propos les enfants plus jeunes que lui. Pour-
tant il peut s'habiller, quoiqu'avec une lenteur désespérante;
sait se laver, mange seul, et ne gâte pas d'habitude. Il est
incapable de retrouver son lit au dortoir ou sa place à l'école.
Actuellement les accès sont à la foi diw'I1eS et nocturnes ;
ils sont très fréquents, ainsi que le montre le tableau ci-
après (1).
L'état d'idiotie prononcée de D mec... rend impossible la
recherche d'une aura : rien d'ailleurs ne nous autorise à en
admettr l'existence. Il nous a été donné d'observer un accès
durant la visite, et voici quelle a été son évolution :
Sans aucun cri initial, Doue... est tombé de sa chaise, et
c'est sa chute qui nous a fait retourner. Durant quelques ins-
tants, il est resté immobile, comme dans un étourdissement;
puis tout le corps s'est raidi, il peu près également des deux
côtés, la face tournée à gauche. La phase tét'1niforme qui a
suivi a prédominé aux deux membres inférieurs. Les secous-
ses cloniques ont iL peu près impressionné également les
quatre membres. Pas d'écume : stertor terminal et sommeil
consécutif assez prolongé.
Le traitement, pour ce malade, n'est borné à peu de chose.
Avant son entrée à l'hôpital, on ne lui donnait que quelques
bains, A Bicêtre on l'a mis au bromure de potassium jusqu'à
la dose de 8 grammes, on lui a fait suivre un traitement
hydrothérapique à diverses reprises, mais très irrégulière-
ment, aussi, pas d'amélioration notable. Le seul bénéfice
qu'on en a retiré a été de la rendre plus traitable, plus calme (2).
(1) La' plupart des vertiges doivent avoir échappé à l'observation.
(2) Cette première partie de l'observation a été déjà publiée dans la thèse
de l'un de nos internes, le 1) Wtiilliinié. (De I*épilepsie dans l'hémiplégie
snnsmoüyue, t88 ? ).
Description du malade.
89
Entré à l'école le 20 octobre 1879, D.... ne connaît pas
les lettres ni tracer aucun caractère d'écriture. Il additionne
des nombres simples, tels que 2 et 1, 4 et 3,-mais ne connait
pas tous les chiffres. Pas de mémoire. Pas de discerne-
ment. - Gymnastique : sans aucune notion, mauvaise
volonté, ne veut rien faire.
Membres supérieurs.
90 Marche DE LA maladie.
1 ? septembre. - L'enfant prendrégulièrement ses douches
en jet en éventail. Ilest plus tranquille, mais toujours violent. L.
2 décembre. - Doue .... refuse absolument de faire quoi
que ce soit ; en classe il frappe les petits enfants, qu'il mord
lorsqu'on veut le contraindre â travailler. A la plus petite
contrariété, il déchire ses vêtements. Il insulte sans cesse les
maîtres par les paroles les plus grossières ; il est rebelle aux
avis les plus bienveillants. - Les douches ont été conti-
nuées jusqu'à ce jour.
1880. 5 mars. - D...' est revacciné sans succès avec du
vaccin d'enfant.
21 septembre. - Le maître obtient de lui faire répéter les
lettres et d'en tracer pendant S à 10 minutes. - D... est tou-
jours enclin à la colère et aux paroles injurieuses, grossières
'et obscènes.
18 août. - Amélioration légère. - On continue les douches.
8 'novembre. - Suspension des douches ; bromure de
potassium de 2 à 8 grammes; école. D... lit un peu; gym-
nastique (où il y a peu de progrès). .
1381. 4 juillet. - D... ne veut rien faire et devient d'une
violence extrême si on veut le contraindre.
22 septembre. Fluxion à la suite de carie dentaire.
1er novembre. - Eruption papuleuse et vésiculeuse. apy-
rétique, presque généralisée, plus abondante sur le ventre,
la verge et les mains. Sillons dans les espaces interdigitaux
(gale). Traitement : Un bain de savon noir, friction avec
la pommade d'I-Ielmerich. bains sulfureux.
, 7 nou';mb)'e. Nouvelle friction ; bains d'amidon alterna-
tivement avec des bains sulfureux. . ,.
11 nov. - Amélioration notable.- 17 nou ? Pas de réci-
dive de la gale. -
1882. - L'enfant a suivi le traitement hydrothérapique
d'avril à septembre.
1883. - Hydrothérapie du 1er au 30 novembre.
10 novembre. - A eu 436 accès du 1er avril au 31. octobre
tandis qu'il en avait eu 652 dans la même période- de 188°.
Onanisme fréquent.
20 nov. - Plaie à la partie supérieure de l'oreille dans un '
accès. L'étendue du traumatisme est peu .considérable.
Pansement phéniqué.
24 ? ? ou. La plaie marche vers la cicatrisation, qui est
Marche DR la maladie. 0)
entravée parce que le malade cherche constamment à enlever
le pansement.
1884. Hydrothérapie du 1.' avril au 1er septembre.
1.r juillet. Même état. D... passe son temps il flâner
dans la cour de l'infirmerie. Il lui arrive, mais très-rarement,
de gâter.
Puberté. Poils abondants et frisés au pénil. Bourses
pendantes. Testicules volumineux. Verge tres-dévetoppéc.
Gland, peu découvert. Le méat, dont les bords
sont convexes, est étroit et situé a l'extrémité du gland
sur la face antérieure. (Léger degré d'¡;pisjJaclias). Ona-
nisme.
1885. 5 janvier. Pas de folie après les : 1 ces. Pas
d'inégalité des pupilles. Pas d'embarras de la parole. Persis-
tance (le l'ominisme. On l'habille et le déshabille. Gâteux
la nuit et tous les jours, même quand il n'a pas d'accès. Son
attitude est la même, toujours voûtée. Quand on veut l'ha-
biller ou le déshabiller, il se sauve au bout de la salle. Les
recherches avec le dynamomètre sont impossibles.
7-10 j;¡¡wier. Embarras gastrique.
il juillet. Puberté. Moustache blonde, assez fournie.
Poils abondants et longs à la lèvre inférieure et au menton.
Léger duvet sur les joues. Poils abondants et longs au
pénil et a la racine des bourses qui sont pendantes, de niveau.
Testicules égaux, de la grosseur d'un petit wuf de pigeon.
Verge volumineuse, un peu tordue vers la droite. Circonfé-
rence'); longueur 9 ? - D... continue à se masturber
Poi's assez abondants il l'anus.
La pupille droite est un peu plus dilatée que la gauches
On ne peut obtenir de 1)... qu'il fasse sortir la langue et
c'est à peine si on peut lui arracher quelques paroles.
Attitude : Il est penché en avant, toujours très voûté; il
lève péniblement le pied droit, dont la pointe frotte. Le bras
droit est pendant le long du thorax, l'avant-bras 11Üehi. la
main tout à fait fléchie. - D... est toujours gâteux, grossier.
Il n'aime pas aller aux douches. Parfois crises de colère dans
lesquelles il déchire ses habits.
20 décembre, - Depuis ? jours, D... a des accès très fré-
quents. Il présente des ulcérations, les unes arrondies, les
autres ovalaires sur presque tout le dos, sur la région tro-
chantérienne droite, de volume variable.
1880. 9 février. Puberté. Moustache blonde, bien dessi-
née, assez épaisse, égale. des deux côtés. Barbe assez abon-
92 Marche DE la maladie.
dante au menton ; mouche bien fournie. Duvet sur- les joues..
Poils roux, très abondants ¡¡ou pénil. Les poils sont également
très abondants et très longs à la racine des bourses, pendan-
tes. Les testicules sont égaux, de la dimension d'un petit
oeuf de pigeon. Verge : circonférence, 82 mm. ; longueur, 105
mm. Le gland est en partie découvert, découvrable. Le méat
est un peu étroit avec excoriation. Poils assez abondants iL
l'anus et aux aisselles. Il ne parait pas y avoir de différence
entre les deux côtés au point de vue du développement et de
la répartition du système pileux. '
D... hrésente a.u niveau du sacruni à droite : '10 une es-
charre de 2 centimètres de diamètre ; 2° trois larges cicatri-
ces d'escharres un peu plus petites. Hien de semblable à gau-
che, mais sur les deux côtés du thorax et les trochanters,
macules et cicatrices de petites escharres consécutives au
décubitus et au gâtisme qui a débuté pendant la série d'ac-
cès qu'il a eue au mois de janvier. Pupilles égales.
21 juin. - Le malade a eu six accès. Il est pâle, -abattu, ne
mange pas. Le pouls est petit. '
22 juin. - D... a encore eu six accès. Son état reste le
même.
23 juin. -Depuis hier quatre accès. Prostration. Beaucoup
de difficulté pour avaler. Les quelques mots qu'il disait dans
ces derniers temps ne peuvent plus être articulés. Il n'allonge
plus ses jambes, il a un i-ertaiii degré de contracture. Quand
on veut défléchr la jambe gauche, l'on n'y parvient pas. Le
membre supérieur gauche n'est pas contracture, les membres
du côté droit ont leur ancienne attitude. La face est hébétée.
- Au sacrum, eschare grosse comme une pièce de cinq cen-
times. Pas d'autres eschares. ..
24 juin. - Ce matin D... est très agité, sa face est rouge,
un peu congestionnée, les yeux sont hagards, il agite fré-
quemment son bras gauche et sa jambe droite, cherche à
mordre ceux qui l'approchent, mord ses draps. Quatre accès
depuis hier. " .'
. 16 juillet. - Plaques rouges un peu ulcérées au trochanter
droit. .
23 juillet. - Depuis sa dernière période de grands accès
(21 et 25 juin) ses jambes ne le supportent plus ; elles ontten-
dance à se replier; en tous cas elles s'allongent difficilement.
Les eschares, dont une ait sacrum et deux sur le haut de Ih
jambe droite, qui étaient en bonne voie de guérison, se sont
rouvertes et ont augmenté de dimension. D... continue à se
masturber,- mais moins qu'autrefois. Selles régulières, invo-
lontaires. Appétit revenu.
>
n
R
o
M
r
ro
C
en
S
w
Tableau des accès et des vertiges.
94 Etat de MAL; mort.
4 août. - 9 accès. T. R. 38°, 4. - Soi¡' : T. R. 38°, 6.
5 août. - État de Ill : l 1 depuis hier, 10 accès ce matin. 18 accès
hier. T. IL 38°. - Soir : T H" 38°. 3.
G août. - Même état - K. Br. Bouillon et lait. Dans les
trois deriners jours de l'existence, le malade n'a pas prononcé
un seul mot. Les accès du 5 sont venus de la façon suivante :
12 le matin, en 4 heures de temps; G dans l'après-midi. Dans
les accès du matin la connaissance n'était pas revenue, elle
n'est pas revenue non plus entre la série du matin et la série
du soir. L'amaigrissement a l'ait des progrès assez rapides
depuis quelques mois ; le malade était affaibli et ces derniè-
res séries l'ont achevé. 3 accès. T. It. 37°, 9. - Soir : T. Il.
38 ? ).
7 août L'enfant meurt à 7 h. 15 du matin avec une tem-
pérature de 41°, 2, sans avoir repris connaissance et sans
avoir eu de nouveaux accès.
Tableau du poids et de la taille.
État du corps après décès. *)5
angle droit sur le poignet. Rigidité très forte de la hanche,
du genou; le cou-de-pied est souple ainsi que les orteils.
..1 gauche, rigidité moindre de l'épaule, maigreur du coude,
rigidité très prononcée du poignet et des doigts qui sont flé-
chis. Rigidité assez prononcée de la hanche, prononcée du
genou ; cou-de-pied souple, légère raideur des orteils. La
jambe est légèrement fléchie sur la cuisse, tandis que la
droite est il demi fléchie.
La face est tournée it gaucho. Les paupières sont entrou-
vertes. La pupille droite est presque moitié plus grande que
la gauche. Les lèvres sont bleues.
2" Le 7 août it 3 heures du soir, rigidité cadavérique amoin-
drie. On peut, sans trop d'efforts, plier les membres supérieur
et inférieur gauches, beaucoup plus difficilement les membres
supérieur et inférieur droits.
Autopsie faite le 9 août 9SSG. Au moment de l'autopsie,
la rigidité cadavérique a complètement disparu sauf au
cou-de-pied gauche où elle existe encore un peu. Le
cadavre est très amaigri; l'abdomen très excavé.
Escharres peu profondes sur les deux régions trochantc-
riennes, toutefois l'escharre à droite est plus profonde, la
peau est décollée sur une asse grande étendue, environ 5
cent.; l'os n'est pas dénudé. Le tissu sous-cutané est très
diminué; les organes abdominaux ont leur position naturelle.
L'estomac n'est pas dilaté : le foie remonte a A ou 5 travers
de doigts au-dessus du rebord costal ; le diaphragme remonte
à droite jusqu'au bord supérieur de la 4° côte, et, à gauche
jusqu'au bord inférieur de la même côte.
Les vaisseaux huméraux droits et gauches paraissent nor-
maux : même couleur, même calibre, etc., ainsi clueles11e7 ? S.
Le ne// médian gauche parait de même mesure que le droit.
A gauche l'artère fémorale est plus large, ses parois sont
plus épaisses. Les nerfs scialiytes semblent normaux.
Adroite, les articulations du coude et de l'épaule sont moins
développées qu gauche. La surface articulaire est normale ;
la synoviale ne présente pas de particularités. La coloration
est un peu bleuâtre à droite, blanc-jaune à gauche.
Sternum proéminent surtout à droite vers l'insertion des
dernières côtes.
Cou. Pas de t/n/nms. Glande thyroïde assez devetop-
pée à droite, très peu à gauche. Larynx, oesophage, tra-
chée, rien d'anormal.
96 Autopsie : atrophie hémisphérique.
Thorax. -Adroite le poumon est entièrement adhérent aux
parois costales et au péricarde; à gauche il n'y a pas d'adhé-
rence entre les deux plèvres. Pas de liquide anormal, dans la
cavité pleurale..Péricarde, rien de particulier. - Coeur 1250
gr.) en systole; dans les cavités, sang liquide et caillots noirs,
Imbibition des valvules de l'aorte et de l'artère pulmonaire.
Le trou de Botal est oblitéré. Valvules, myocarde, endo-
carde rien de notable. - Poumon droit (295 gr.) ne pré-
sente aucune lésion. - Poumon gauche (440 gr.) très forte
congestion et oedème du lobe inférieur.
Abdomen. Estomac, sain. - Foie ()450 gr.) conges-
tionné, ayant un aspect un peu muscade. Vésicule biliaire nor-
male. Canalcholédoque pel'll1éable, - Pancréas, rien. -Hat
()2 ! ) gr.) très adhérente au diaphragme, capsule ridée etcica-
trice médianes. - Rein gauche (125 gr.) lobule, hypérémié,
étoiles de Verrheyen. Rein droit/130 gr.) -lobule, même état :
. Capsules surrénales normales. Vessie pleine, saine.- Ure-
tère, testicules, intestin grêle et colon, rien de particulier.
Tête. - A l'ouverture de la cavité crânienne, il s'écoule
une grande quantité de liquide céphalo-rachiclien. La calotte
est dure, épaisse, congestionnée, symétrique, toutefois le
côté droit présente une épaisseur moindre que le côté gau-
che. Il en est de même à la base qui parait symétrique (Voir
plus loin la description complète du squelette). - Le trou
occipital est normal. - La dure-mère est très congestionnée,
de môme que le cuir chevelu, sur toute sa surface et princi-
palement en arrière et à gauche. La pie-mère est aussi
très congestionnée, très épaissie et cedématiée -à gauche,
' mince et oer1ématiée à droite. - Les artères et les nerfs de la
base, sauf le nerf optique, ne présentent rien de particulier.
L'hémisphère gauche est très petit, atrophié dans son-
ensemble; les circonvolutions sont vermiformes, l'hémisphère
ne recouvre qu'en partie le lobe cérébelleux correspondant et
est en retrait en avant et en arrière de l'hémisphère droit qui
paraît bien conformé. Pas d'adhérences. Le ventricule latéral
est très dilaté. - Le pédoncule cérébral gauche, la moitié,
gauche de la protubérance et du bulbe paraissent moins déve-
loppées qu'à droite. Il en est de même du tubercule tamil-
laire et de la bandelette optique gauches. Le pédoncule
cérébral gauche .est fortement déprimé. Il mesure 9 millim.
à sa base tandis que le droit mesure 13. millim. à la môme,
hauteur. Au niveau de la bandelette optique, il mesure 20 mm.,
Sclérose TROPHIQUE hémisphérique. 97
à droite, 17 à gauche. La protubérance est un peu déprimée
dans sa moitié gauche et est plus courbe (25 millim. à droite,
27 million. de l'autre côté).
Hérédité ; Etat DE MAL convulsif.
dimensions relativement assez grande sur les circonvolutions
très grêles du lobe quadrilatère et de l'extrémité du lobe fron-
tal. Les circonvolutions du lobe occipital sont aussi plusgré.
les que ne le fait voir la planche. La circonvolution du corps
calleux est tout à faitlisse (Pl. 111, lig. 2). Le ventricule latéral
est un peu clilaté, la couche optique et le corps strié sont très
atrophiés. Les sillons sont relativement assez profonds. Les
coupes pratiquées sur les masses centrales no révèlent aucune
lésion.
Hémisphère droit. - Les circonvolutions sont en général
bien développées (PL. I et II). Les sillons sont assez profonds,
mais les plis de passage sont peu nombreux. Relevons en par-
ticulier le développement de F,1\,; I'.A. ; In. et I'.I., sur la
face convexe ; - de I ? L.Q., Ciel, T : ! sur la face interne. Les
Planches I et II nous dispensent d'en faire une description
détaillée.
1l : rLl : xloNS. - I. Les antécédents héréditaires sont
assez chargés. Le père, sous l'influence de fièvres
intermittentes lorsque l'enfanta été conçu, commet-,
tait de fréquents excès de boisson, comme sa mère
la grand'mère paternelle de l'enfant. Il en était de
même, mais à un moindre degré, du grand-père et
d'un demi-frère maternels du malade. Signalons
encore, dans la ligne maternelle, une tante idiote,
uue cousine imbécile et une autre épilel.dii3e;- z
deux demi-frères maternels et un neveu, deux frères
et deux 8(ptij-.s, dont l'une est arriérée, qui ont eu
tous des convulsions.
II. L'enfant est né cyanose. Est-ce il cette condition,
dont le degré n'a pu être précisé, ou au terrain hérédi-
taire qu'il faut attribuer le retard de la dentition, de
la parole et de la marche, ainsi que l'incontinence
nocturne d'urine, nous ne saurions nous prononcer.
III. C'est il 5 ans que débutent les lésions qui ont
eu pour conséquence : 1° l'idiotie ; - 2" l'hémiplégie
droite; - 3° Y épilepsie.
Les lésions, sur lesquelles nous reviendrons tout
État de (.1L convulsif ; hémiplégie. 9')
il l'heure, ont eu pour symptôme capital les convul-
sions qui se sont présentées sous la forme d'un état
de mal. Elles ont duré sept heures sans arrêt et ont
porté uniquement sur le côté droit. Souvent, après
cet état de mal, les malades de cette catégorie ont un
répit, les convulsions, soit isolées, soit srcbinloa ? te.s, ne
réapparaissant qu'au bout de plusieurs mois, d'un an,
etc. Ici, pendant trois mois, les crises convulsives sont
revenues quotidiennement, affectant toujours, exclusi-
vement, la moitié droite du corps. Les convulsions ont
eu pour conséquence immédiate l'hémiplégie et l'i-
diotie, et pour conséquence ultérieure l'épilepsie,
1° L'hémiplégie occupait les membres du cûtédooil,
qui avaient été le siège des convulsions. Elle était
complète pour le membre supérieur, incomplète pour
l'inférieur. Le membre supérieur était contracture,
le bras collé contre le tronc, l'avant-bras presqu'à
angle droit sur le bras et la main à angle droit sur
le poignet (Pif], 13). D... marchait en traînant assez
fortement la jambe.
Ainsi que cela est constant, quoique variable en
degré, dans l'hémiplégie infantile, la paralysie se
compliqua d'un arrêt de développement. Les mensu-
rations comparatives que nous avons consignées (p. 89)
't diverses reprises font voir que l'atrophie, ou mieux
l'arrêt de développement, était plus accusé au membre
supérieur qu'au membre inférieur, qu'il allait en quel-
que sorte eu diminuant de la partie supérieure du
corps à l'inférieure. Elles montrent encore que les
memhres du côté paralysé se sont développés de 1879
à 188"2, mais que leur développement à été sensiblement
moindre que celui des membres du côté sain. Ajoutons
que l'hémiplégie se compliquait d'un arrêt de déve-
loppement de la moitié droite du tronc, thorax et
abdomen, et d'une double incurvation de la région dor-
sale de la colonne vertébrale (fit. 13, 14, 15).
100 Hémiplégie, idiotie, épilepsie.
2° L'idiotie, comme le prouvent les détails donnés
au courant de l'observation, existait à un degré pronon-
cé. Le caractère était irritable, violent. Les instincts
sexuels étaient très développés. Tous les efforts faits
pour obtenir une amélioration de l'état intellectuel ont
échoué. Le traitement, d'ailleurs, a été commencé
trop tard, dans la quinzième année et, alors, on avait
à lutter et contre la maladie elle-même et contre les
habitudes de vagabondage et de paresse contractées
par le malade.
3° Dix années après l'apparition des lésions céré-
brales - encéphalite - qui s'était traduite clinique-
ment par l'état de mal convulsif, débuté l'épilepsie.
Dans les accès, les convulsions prédominaient du côté
paralysé. Selon la règle dans l'épilepsie hémiplégique
- sauf celle qui reconnaît pour cause la méningo-
encéphalite - les vertiges étaient absents ou rares.
Ils sont devenus fréquents en 1884 et en 1885 pour
disparaître presque complètement dans les dix der-
niers mois de la vie. Les accès se présentaient par
séries, ainsi qu'on l'observe communément dans cette
forme symptomatiqne du mal comitial. Bien que, en
général, il n'y ait pas non plus de folie après les crises,
que l'intelligence se maintienne telle qu'elle était à
l'origine, ces malades n'en sont pas moins sujets à
l'état de mal épileptique. Doue... nous en fournit un
nouvel exemple : il a succombé à cette complication
avec une température centrale très élevée ('il0, 2).
IV. La sclérose atrophique, affectant tout l'hémis-
phère cérébral gauche, fournit l'explication du syndro-
me clinique : état de ntal convulsif, hémiplégie et idio-
tie, épilepsie. La description que nous avons tracée,
les Planches I, II, III qui l'accompagnent nous dis-
pensent d'insister. Rappelons seulement qu'il s'agit
là d'une forme assez rare de sclérose cérébrale^
"Irp Sclérose cérébrale hémisphérique. - 101
Comme lésions consécutives nous devons mention-
ner : in l'épaississelne2t du crâne notablement plus
accusé à gauche - côte de la lésion cérébrale - qui
contribuait, avec une grande quantité de liquide cé-
phalo-rachidien et la dilatation du ventricule latéral
gauche, à combler le vide qui existait entre la surface
de l'hémisphère gauche et la moitié correspondante
de la calotte crânienne, car, nous l'avons déjà dit, il
n'y avait pas de différence sensible, pas d'asymétrie
notable entre les deux côtés de la tête ; - 2° les dégé-
nérations secondaires, intéressant la bandelette opti-
que, le tubercule mamillaire, le pédoncule cérébral
gauches, de même que la moitié correspondante de la
protubérance et du bulbe.
V. Profitant de l'autorisation qui nous a été
accordée d'assister au relèvement des corps de nos
anciens malades au bout de cinq ans, nous avons re-
cueilli, dans le cimetière de la commune, le squelette
entier de D... La question qui nous intéressait sur-
tout, c'était de savoir quel était le degré de l'arrêt de
développement, des os du côté paralysé. Les mensura-
tions comparatives ci-après nous renseignent complè-
tement. (Fig. 14 et 15).
CRANE. - Il est allongé, légèrement asymétrique, assez
épais et notablement plus à gauche qu'à droite :
102 HÉMIPLÉGIE DROITE ; SQUELETTE.
1 i ? la.
Fig. 15.
Description DU crâne ET DU thorax. 103
A la base, toutes les sutures persistent, au point que les tem-
poraux et les pariétaux chevauchent. La voûte orbitaire gauche
est un peu plus saillante que la droite. Par contre la fosse tem-
porale gauche paraît un peu plus profonde et plus étroite que
la droite. - L'apophyse crista-galli, assez large et haute, est
couchée complètement sur la voûte orbitaire gauche. - La
fosse pituitaire est normale. - Les différentes parties de la
face paraissent symétriques ainsi que le maxillaire inférieur.
10 i HÉMIPLÉGIE DROITE : SQUELETTE. W
Pour les sept premières côtes, les mensurations ont été
prises depuis l'insertion au sternum ; elles comprennent donc
les cartilages. Les mensurations suivantes ne comprennent
que la côte osseuse :
HÉMIPLÉGIE DROITE ; SQUELETTE. 105
L'articulation sacro-iliaclue parait plus relevée que la gau-
che. La fosse iliaque droite paraît un peu moins profonde
que la gauche. Le maximum d'épaisseur de l'os est à droite de
2Z millim. et à gauche de 23 millim.
Membres inférieurs.
VIII.
Idiotie complète : Pseudo-porencéphalie double;
Par BOURNEVILLE et Julien NOIR,
Nous publions cette observation, bien qu'elle
présente de nombreuses lacunes, à cause de l'intérêt
qu'elle offre au point de vue b,natomo-patholoidue.
Différentes circonstances nous ont empêché de com-
pléter les lacunes qui existent et dans les antécédents
et dans la description clinique. '
SOMMAIRE. - Père, bronchite ' chronique, rhumatisant,
caractère emporté. - Mère, convulsions de l'enfance,
phénomènes d'hystérie. Renseignements insuffisants
sur sa famille.
Émotion et chute durant la grossesse. - Emotion pendant
l'allaitement. - Accès d'agitation de 3 à 5 ans. - Rensei-
gnements incomplets sur l'histoire personnelle de l'en-
fanl.
AUTOPSIE. - Pseudo-kystes occupant le lobe temporal et Vin-
sula de l'hémisphère cérébral gauche. - Pseudo-kyste
occupant la seconde circonvolution temporale droite.
Atrophie de la troisième circonvolution temporale droits.
Regn... (Jean), âgé de 6 ans 1/2, né à Paris, le 16 décembre
1886, est entré le 28 juillet 1893 à Bicêtre (service de M. Bon-
NI : VIL : .1·;). Le certificat d'admission porte qu'il est atteint
d'arrêt de développement des fonctions intellectuelles avec
poussées méningitiques fréquentes.
Antécédents (Renseignements fournis par sa mère en juillet
1895). - PÈRE, 38 ans, représentant de commerce, a eu une
fièvre typhoïde à 15 ans, maladie qui fut longue mais sans
complication. Il a fait son service militaire, et a été enfant
de troupe durant son jeune Age . Depuis 7 ans, il serait atteint
Antécédents. 107 î
de bronchite chronique avec emphysème pulmonaire. Il a eu
aussi, à diverses reprises, des attaques de rhumatisme articu-
'laire, mais sans complication cardiaque. Il n'a jamais pré-
senté de traces d'affections vénériennes, ne fume pas, ne boit
pas. Violent, coléreux, il ne présente néanmoins aucun trouble
psychique ou neuropathique. Famt ! ! e dupet'e.Père, mort
z 55 ans ( ? ), était d'une forte constitution et d'une bonne santé
ordinaire. - Mère, 60 ans, est « asthmatique ». Frère,
emphysémateux, très impressionnable, sans affection ner-
veuse. - Pas d'autres renseignements sur la famille du père].
Mère, 27 ans, a eu des convulsions fréquentes en bas âge.
Elle aurait été atteinte de strabisme jusqu'à l'âge de 10 ans.
Elle a été successivement frappée de variole, de rougeole et
de scarlatine. Réglée à 10 ans, elle l'a toujours été régulière-
ment depuis. Mariée à 19 ans, elle a eu 4 enfants. Assez ner-
veuse, elle n'a eu aucune attaque convulsive. Durant sa pre-
mière grossesse elle a remarqué de « l'insensibilité de tout
le côté droit » ; depuis, elle ressent la sensation de la boule
hystérique et est sujette à des palpitations fréquentes.
[Famille de la mère. - Père, mort à 25 ans, pas de rensei-
gnements. - Mère, morte à 62 ans d'une affection cardiaque,
assez nerveuse. - Une soeur, morte jeune durant la guerre
après avoir subi toutes sortes de privations. - Autre soeur,
36 ans, nerveuse mais bien portante. - Aucun autre rensei-
gnement sur la famille de la mère].
Quatre enfants : 1" Notre malade ; 2" lille, morte à 3 ans,
d'une congestion pulmonaire consécutive à la variole ; - 3°
fille, âgée de 3 ou z ans environ, toujours en bonne santé ;-
4" garçon de 2 ans, assez bien portant, mais ayant tendance
à se trouver mal à la moindre émotion.
Notre malade. - Grossesse de durée normale. A 5 mois, co-
lère violente qui faillit déterminer un avortement. A G mois,
chute dans l'escalier sur le ventre sans conséquences appa-
rentes. - Accouchement à 9 mois, rapide, sans accident.
Enfant très beau ( ? ) à la naissance. Allaitement au sein. La
mère en nourrissant l'enfant, à 3 mois, aurait été témoin d'un
accès cl'épilepsie qui lui fit une grand'peur. A deux ans et
demi, l'enfant a eu la variole. Il aurait eu ses dents de bonne
heure ( ? ). La marche aussi fut précoce ( ? ). Durant la poussée
de ses dents vers un an et demi, l'enfant aurait souffert beau-
coup et n'aurait cessé de crier. De 3 à 5 ans, il avait des
accès d'agitation dans lesquels il se cognait la tête, jetait
108 Description DU malade.
tout ce qui lui tombait sous la main, frappait ses frère et
smur, Il aurait été propre de bonne heure.
A un an, l'enfant commençait à bégayer « papa » et « ma-
man », mais les troubles dentaires lui enlevèrent la parole,
il ne fit que crier à dater de cette époque. Regn... compren-
drait néanmoins ce qu'on lui commande. Il est parfois agité
la nuit et soulève la tête sur son oreiller.
La mère s'est décidée à le placer parce qu'elle a remarqué
que depuis quelque temps à la suite d'indispositions l'en.
fant était pris de raideurs musculaires à gauche, au cou et
le long de la colonne vertébrale. De plus, il maigrit, refusa
'de manger, fut pris de vomissements et de douleurs de tête.
État actuel (2f) juillet 1893). Teint très pâle, visage amaigri.
Expression inintelligente, cris continus.
Cheveux blonds, bien fournis, bien implantés. Pas d'engor-
gement ganglionnaire apparent. Crâne asymétrique, le côté
droit est plus développé que le gauche (bosses frontales et
pariétales). Pas de persistance des fontanelles. - Visage
plat; arcades sourcillières peu développées, sourcils assez
épais. Paupières bleuâtres, pas de blépharite. - I'e2twor-
maux, mobiles, sans strabisme, ni nystagmus, pupilles égales
à réactions normales. La vue paraît bonne ( ? ). Nez mince,
pas de déviations de la cloison, narines circulaires. - Pom-
mettes saillantes. Bouche horizontale (G centimètres, lèvres
minces. Menton non proéminent. - Oreilles larges, mal our-
lées, peu écartées du crâne.
Cou et thorax normaux mais extrêmement maigres. -
Abdomen assez volumineux et distendu.
Mesures de la tête.
Autopsie : état DU crâne. 109
État de la dentition. Diamètre transversal des maxillaires
exagéré. Dents assez espacées. Dents temporaires en voie de
remplacement. Les quatres premières molaires permanentes
existent.
Poids et taille.
110 PSEUDO-PORENCÉPHALIE.
crâne. Cette suture redevient ensuite sinueuse pour gagner le
lambda. A la face interne, éminences mamillaires, gouttières
marquées mais non exagérées des vaisseaux méningés sen-
siblement égaux iL droite et à gauche. La gouttière sagittale
est nette ; son rebord est plus accentué iL gauche. - Rien de
particulier à noter à la région occipitale. La suture lambdoïde
est très sinueuse, régulière, asymétrique. Le pariétal gauche
empiète plus sur l'occipital que le droit La crête occipitale
du côté de la face interne est très saillante.
Cerveau. - Hémisphère droit. La configuration générale
de cet hémisphère est assez compliquée ; les scissures prin-
cipales sont assez bien accusées (scissure de Sylvius, sillon
de Rolando).
Lobe frontal. Les trois circonvolutions frontales sont nettes
mais de nombreux plis de passages et des sillons secondaires
longitudinaux compliquent leur morphologie. Quelques centi-
mètres carrés de FA à 3 cm. de la corne frontale sont sclérosés.
Le sillon préfrontal sépare nettement FA du reste du lobe.
Ce sillon se continue par un autre formant crochet, coupant
profondément à son tiers postérieur Fg, ce tiers parait la
continuation de FA qui en haut se termine sans discontinuité
avec ) ! 1.
Lobe pariétal. Il est très sinueux et très complexe. Les
circonvolutions y sont petites et nombreuses, le pli courbe
est mal délimité. PA garde seule son autonomie. Il en est de
même du lobe occipital qui est sclérosé et atrophié dans toute
la partie qui borde la scissure perpendiculaire externe.
Le lobe temporal se divise en deux régions : Une supérieure
normale formée de T ; une inférieure complètement atrophtëe
et presque totalement disparue répondant à la destruction
complète de T2 remplacée par un pseudo-kyste. Lorsqu'il
est vidé, la scissure temporale qui se termine au pli courbe
se trouve très élargie.
Le lobule de l'insula d'aspect normal iL sa partie supérieure
est sclérosé et atrophié dans toute la région qui borde la corne
(lu lobe temporal. La face interne de l'hémisphère droit est
d'aspect normal.
Les lobes pariétaux et occipitaux n'offrent aucune particu-
larité si ce n'est dans leur rapport avec le lobe temporal qui,
à vrai dire, n'existe pas. A peine peut-on reconnaître le vestige
de son quart postérieur.
La face interne de cet hémisphère ne présente absolument
aucune anomalie dans sa morphologie, si ce n'est le manque
absolu de la circonvolution de l'hippocampe.
PSNUDO-POItUNCrPHILIE. 111 1
Hémisphère gauche. Cet hémisphère, absolument anormal,
présente au centre de sa face inférieure une poche de 5 cm.
de long sur 3 cm. de hauteur et 2 cm. environ de profondeur.
Cette poche est formée aux dépens de l'atrophie complète du
lobule de l'insula et de la partie antérieure des circonvolu-
tions temporales. Elle est limitée, en haut, par le rebord en
fer à cheval de la branche postérieure de la scissure de Syl-
vius qui est restée à peu près normale. En arrière, par les
vestiges du lobe temporal ; - en avant par la partie inférieure
du lobe frontal d'aspect normal. Cette cavité est limitée par
la pie-mère épaissie et offrant une sorte d'infiltration cellu-
laire. La poche membraneuse repose sur la base. Le ventri-
cule latéral ne communique pas avec cette poche dont il
n'est cependant séparé que par une très mince membrane
(Planche IV).
Le lobe frontal est formé de ses trois circonvolutions nor-
males sauf la partie antérieure de FA, atrophiée sur un trajet
de 2 ou 3 cm. dès la corne frontale. FA d'aspect normal est
séparé de l'A par un sillon de Rolando normal.
Les ventricules sont peu dilatés. Le corps calleux, les
corps oplo-striès de volume et d'aspect normaux.
112 l'ORENCE1'IfrILIE VRAIE ET FAUSSE.
personnels de ce malade, ni sur le début de la
marche, des lésions qui ont déterminé l'idiotie.
II. L'autopsie a décélé l'existence de deux foyers
anciens se montrant sous l'aspect de pseudo-kystes.
Celui du côté gauche, plus petit, étroit, allongé, occu-
pait toute la seconde circonvolution temporale qui
était complètement détruite/Le pseudo-kyste de l'hé-
misphère droit'remplaçait tout le lobe de l'insula et en.
viron la moitié antérieure du lobe temporal. Comme il
n'y avait pas de communication avec le ventricule laté-
ral, il s'agit là d'un cas de ? sezcdo ? orezcé2halie. La
Planche IV, qui représente la face inférieure et la par-
tie inférieure de la face convexe de l'hémisphère
gauche, fournit une idée exacte de la lésion que para-
chève les pesées et les mensurations comparatives
des deux hémisphères du cerveau. Notons en pas-
sant qu'il n'y avait pas de modifications des pédon-
cules cérébraux, de la protubérance et du bulbe.
Parmi les cas des pseudo-kystes ou de pseudo-
porencéphalie que nous avons publié (1), deux (1881,]J,
77 et'1892 p. 10) tout t fait comparables au cas actuel.
La belle planche, due à M. Lcuba qui accompagne
le premier, la planche qui est jointe au second, ne lais-
sent à cet égard aucun doute. Si l'on veut rapprocher
ces cas de ceux qui ont trait à la poencéphalie vraie.
on voit aisément qu'ils forment deux groupes bien dis-
tincts (2).
(Il Voir les Comptes rendus de 1884, p. 1 et 4 ! J (phmches); 1892, p. 10
(Pl.), etc.
(2j Voir les Comptes rendus de 18 ! )0, p. 1G7; - de 18 ! J1; IL un (planches) ) 1
de 1892, 1', 89 (1'[')' etc.
IX.
Méningo-encéphalite chronique ou idiotie méningo-
encéphalitique ;
Par BOURNEVILLE et METTETAL.
Sommaire. - Père, rhumatisant, migraineux, contusion de
la tête. - Une tante et deux oncles sourds et muets.
Tante paternelle, prostituée. - Mère, chorée à 13 ans,
rhumatisante, migraineuse, caractère emporté. - Grand-
père mort d'excès de boisson et de tabac; très emporté,
migraineux. - Grand'mère maternelle, caractère emporté.
- Arrière-grand' tante maternelle, aliénée. - Tante
maternelle, excès de boisson. - Frère mort de méningite.
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 12 ans.
Première dent à 7 mois, dentition complète et début de la
parole à 2 ans 1 j ? . - Début de la marche à 18 mois, de la
propreté à 8 mois.
Premières convulsions a 11 mois : durée 29 heures. -Secondes
convulsions après une rémission de deux jours : durée 4S
heures : affaiblissement intellectuel consécutif et parésie
droite transitoire. - Ecolage à peu près normal. - A
onze ans, convulsions et hémiplégie droite consécutive. -
Nouvelle crise à il ans et 3 mois : hémiplégie droite et
aphasie transitoires. - Tendance invincible au sommeil.
- Perversion des instincts (Izleptoi)îa711e); - irritabilité.
- Disparition de l'hémiplégie droite à l'entrée à la
Fondation Vallée. - Sept mois d'accalmie, puis baisse
progressive de l'intelligence. - Gâtisme, déchéance,
amaigrissement, cachexie. - Apparition de contractures
très prononcées des deux côtés, prédominant aux membres
inférieurs. -Attaques épileptiformes, - Eschares. -Mort.
Autopsie. - Crâne épais ; pas de synostose prématurés.
- Lésions de méningo-encéphalite des deux côtés à
peu près symétriquement, mais plus prononcées à gauche.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1896. 8
114 Antécédents héréditaires.
- Topographie des lésions : en dedans sur toute la face
interne sauf le lobule paracentral : en dehors sur presque
tout le lobe frontal et la pariétale ascendante. - Atrophie
des circonvolutions sylviennes et insulaires. - Mise à
nu de la substance blanche dans ces régions en décollant
la pie-mère. - Analogie des lésions avec celle de la para-
lysie générale de l'adulte.
Pern... (Emilie), née à Saint-Ouen le 16 octobre 1883, est
entrée à la Fondation Vallée le 2 mai 1895.
Antécédents (Renseignements fournis par lanière). - Péri ?
45 ans, forgeron, ni convulsions, ni accidents nerveux; rhu-
matisant, pas de dartres, ni de syphilis : il fume beaucoup,
est sujet iL des migraines fréquentes; caractère calme. Il
a reçu sur la tète un coup violent dû à la chute d'une pièce
d'acier, alors que sa femme était déjà enceinte (premier
mois) de notre malade. - [Père, 70 ans, forgeron, très bien
portant, très nerveux, ne fume ni ne boit, pas de rhuma-
tisme. - Mère, 65 ans, très nerveuse, en bonne santé, ni
rhumatisme, ni migraines. - Soeur, sourde-muette, mariée
à un sourd-muet, pas d'enfants. - Deux frères, sourds-muets
dont l'un marié à une femme bien portante, pas d'enfants.
Soeur prostituée, qui est entrée dans une maison de tolérance
à Tours, après le départ de son mari pour le service militaire;
pas d'enfants. -Une soeur boiteuse dès sa naissance. Dans
le reste de la famille, aucune autre tare ; ni idiots, ni alié-
nés, ni épileptiques, ni paralytiques, ni diffurmes, ni suici-
dés, ni criminels, ni autres sourds-muets].
Mère, 33 ans, sans profession, a eu une choree à (le
13 ans qui a duré un an et demi, et n'a plus reparu depuis;
rhumatisme articulaire à 17 ans. Depuis sa naissance, elle a
la vue faible. Dès son enfance, migraines fréquentes accom-
pa11ées de vomissements, se répétant plusieurs fois par se-
maine. Depuis l'apparition des règles, les migraines ont été
plus rares et surviennent seulement 8 jours avant les époques.
Elles sont très douloureuses, s'accompagnent de vomisse-
ments bilieux et de troubles de la vue : « Je vois, dit-elle,
des papillons blancs, rouges, des pointes de feu des deux
cotés et ma vue est brouillée. Caractère vif et emporté.
[Père, 72 ans, cordonnier, a eu la syphilis, mais après la
naissance de sa fille; excès de boisson et de tabac. Carac-
tère vif et emporté, Ni migraines, ni traumatismes cépha-
liques. - Mère, 60 ans, bien portante, caractère violent;
Antécédents PERSONNELS. 115
pas de migraines. - Grands-pa1'ents paternels, aucun rensei-
gnement. - Grand'mère maternelle, morte à 74 ans, à. la -i
suite d'une fracture de jambe. - Grand-père maternel, mort
aliéné, à la suite de la perte de sa fortune. Pas d'oncles, ni
de tantes paternels. Du côté maternel, oncles et tantes bien .
portants. - Soeur, 2G ans, en bonne santé, nerveuse, à carac-
tère vif et emporté, pas de migraines. - Dans le reste de la
famille, aucune espèce de tare, ni d'affection nerveuse.]
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 12 ans (père
plus âgé).
Six enfants : l'un est mort de méningite, les cinq autres sont
bien portants, n'ont jamais eu de convulsions, ni d'affections
nerveuses .
Notre malade. - Au moment de la conception, les parente
étaient à leur aise, n'avaient pas de préoccupation, vivaient
en bonne entente. - Grossesse normale : ni traumatisme, ni
émotions, etc. La mère était contente de se voir enceinte.
Pendant la grossesse, les migraines dont la mère souffrait,
ont disparu complètement, comme d'ailleurs pendant l'allai-
tement. - Accouchement à terme, régulier, présentation
du sommet, pas de chloroforme, durée du travail, six heures.
Il y avait une grande quantité d'eau dans la poche des eaux.
beaucoup plus qu'aux précédentes grossesses. - A la nais-
sance, allaitement au sein pendant deux mois, puis au bibe-
ron (lait de vache) ; sevrage à 18 mois. Première dent à 7 mois,
dentition complète à 2 ans et demi. - Début de la parole à la
môme date, de la marche à 18 mois, de la propreté à 6 mois.
A l'âge de 18 mois, Per... a eu des convulsions, occupant
tout le corps. Il s'est produit deux états de mai convulsifs. Le
premier a duré 24 heures, le second qui a eu lieu deux jours
après le premier a duré 48 heures. Avant ces convulsions,
l'enfant était normale et ressemblait aux autres enfants,
mais elle était en retard pour la parole, bien qu'elle pronon-
çât un certain nombre de mots. Après ces convulsions, l'en-
fant resta 15 jours au lit, ayant de la fièvre, du délire. La
tète tombait quand on la soulevait. L'enfant grinçait des
dents. Au bout de 15 jours, elle s'est levée, sans paralysie et
sans diminution notable, prétend-on, de l'intelligence. Elle
avait un peu maigri
A 7 ans, on l'a mise à l'école : tout d'abord, pendant six mois
elle n'apprenait rien, puis elle s'y est mise progressivement et
a appris à lire et à écrire. Elle connaissait ses quatre règles
et aidait la mère au ménage. A 11 ans, se trouvant dans une
cour, elle fait deux tours sur elle-même et tombe sans con-
116 lÉ ? INGO-1NCi,.I'H.1,LITF CHRONIQUE.
naissance, les yeux tournés, la jambe et le bras droits raidis.
Rien à gauche. Pas de secousses, pas d'évacuations involon-
taires. Cet état dure 2 heures, puis l'enfant revient à elle.
La bouche et la moitié droite de la face étaient tirées à droite.
Pendant quatre jours, le côté droit reste plus faible que le
gauche. L'enfant traîne la jambe droite, peut cependant sai-
sir les objets de la main droite, mais ne les garde que quelques
instants, et les laisse ensuite retomber.
A partir de 8 ans, elle a eu pendant un an, à de nombreuses
reprises, des vers intestinaux qui paraissent avoir été des asca-
rides. Aucune espèce d'accidents scrofuleux, de gourmes, de
dartres, d'adénites, d'engelures, de maladie de peau. Elle n'a
jamais eu de traumatismes céphaliques, n'a jamais reçu de
coups, n'a jamais été maltraitée. L'enfant est, aujourd'hui,
très indifférente, n'a pas de mémoire, de raisonnement, d'atten-
tion. Elle sait encore un peu lire, écrire et coudre, ressemble
physiquement plus à son père qu'à sa mère et psychique-
ment plus à sa mère qu'à son père. Tendance invincible au
sommeil : si on l'avait laissé faire, elle aurait dormi jour et
nuit, dit sa mère. Son sommeil était calme, sans secousses,
ni cris. La vue est un peu affaiblie, et on constate un certain
degré de myopie. L'ouïe est bonne, l'odorat et le goût nor-
maux. Elle n'a jamais eu de rougeole, ni de scarlatine, ni de
variole. Vaccinée à l'âge de deux ans, le vaccin n'a pas pris,
A l'âge de 3 ans, elle a une coqueluche assez forte qui a
persisté six semaines.
A 11 ans et 3 mois, elle a eu une nouvelle crise : elle a laissé
tomber tout à coup sa tête dans son assiette. A la suite, le
côté droit fut encore atteint. Après être restée quatre heures
sans connaissance, sans secousses, ni tremblements, on a
retrouvé à droite la même déviation de la face et de la bouche.
Durant les trois semaines qui ont succédé, elle n'a pas pu mar-
cher. Elle est restée 15 jours sans parler. Puis la parole elle
mouvement sont revenus progressivement.
A la suite de ces crises, le caractère était devenu triste et
violent. Peu à peu elle devenait méchante vis-à-vis des autres
enfants, les battait, les pinçait, les griffait. Sa mère consta-
tait qu'elle devenait moins obéissante et plus entêtée. Elle
prenait des instincts de vol, et partout où elle allait dérobait
des bonbons, des épingles, du papier, des images ; jamais elle
n'a pris d'argent. Elle était turbulente, grossière, cherchait
à mordre. Elle a failli mettre le feu à plusieurs reprises.
- Pas d'habitudes d'onanisme. Dans les derniers
temps son appétit s'était exagéré : elle mangeait de tout en
excès, mêlait ses aliments, mâchait mal. Jamais cependant
DESCRIPTION DE la malade 117 Î
elle n'a ingéré de corps étrangers. Les selles étaient régu-
lières ; il n'y avait pas de gâtisme. Quelquefois, après le repas,
l'enfant devenait blême, puis très colorée, la tête et les oreilles
prenant alors une teinte cramoisie.
En février 1895, nouvelle crise. Per... a été prise en mangeant.
Mêmes caractères que dans les précédentes, durée 2 heures.
Conduite à l'hôpital Trousseau, elle y resta S jours, puis fut en-
voyée à l'Asile clinique où elle ne séjourna pas 24 heures. Elle
en sort en traînant la jambe, avec la parole très embarrassée,
et la figure devenue très dure. En même temps, elle se plaignit
de douleurs de tète, qui revenaient tous les 3 ou li jours, et
s'accompagnaient de vomissements bilieux, analogues à ceux
'qui se produisaient lors .des migraines de la mère. Ces acci-
l''i;l. 1f1. - \Ini 180.
118 DESCRIPTION DE la malade.
dents ont duréjusqu'àl'entrée, aumois demai.-On attribue
l'état de l'enfant aux convulsions.
État actuel (17 mai 1895). - Aspect général. Pas d'émacia-
tion, air général de santé ; physionomie assez expressive,
mais ne dénotant pas beaucoup d'intelligence. (fini. 16).
Cheveux châtain clair, régulièrement plantés, tourbillon
au centre, pas de ganglions. - Le crâne est régulièrement
conforme, symétrique, arrondi. D'un volume moyen, il n'offre
rien de particulier. Les bosses pariétales et occipitales sont
normales, les fontanelles soudées. - Le visage est rond,
sans cicatrices ; les arcades sourcilières sont régulières, les
paupières sont mobiles et de dimension moyenne, les fentes
palpébrales sont bien ouvertes. Les sourcils sont d'un châ-
tain foncé, les cils sont longs et noirs. Pas de lésions ocu-
laires. - Les yeux sont mobiles dans toutes les directions.
Pas d'exophtalmie ni de strabisme. Pas de paralysie oculaire,
ni de nystagmus. Les iris sont de coloration marron. Les pu-
pilles de dimension moyenne et égales réagissent bien à
la lumière et à l'accommodation. L'acuité et le champ visuel
sont normaux. L'enfant distingue très bien les couleurs, n'a
ni diplopie, ni polyopie. - Les pommettes sont égales. La
bouche est petite. Les lèvres sont un peu pâles et de dimen-
sion moyenne. Le palais est normal, le voile régulier. - La
langue est épaisse et peu large. Les amygdales sont nor-
males. Le réflexe pharyngien est conservé. - Le goût est
intact, l'enfant perçoit bien les saveurs. - Les dénis, réguliè-
rement plantées, ne présentent pas de stries ni d'incisures;
elles sont blanches, non cariées. - Le menton est rond, de
dimension moyenne, il est situé symétriquement par rapport
au maxillaire inférieur. - Les oreilles sont bien ourlées, de
dimension moyenne, pas très écartées ; le lobule est assez
saillant, adhérent dans la plus grande partie de son étendue.
L'hélix et l'antéhélix sont réguliers, le tragus est peu déve-
loppé.
Le cou a une circonférence de 28 centimètres. Le corps
thyroïde est petit mais appréciable ; pas de goitre ni de gan-
glions. ....
Thorax. - Pas de rachitisme, pas de déviation de la co-
lonne vertébrale, pas de douleurs à la pression. Itien de pa-
thologique au coeU1' et aux poumons. Pouls normal.
Abdomen, - Souple et indolore à la pression. Le foie est
normal, ainsi que l'estomac, la rate échappe à la percussion.
DÉMENCE PARALYTIQUE. 11 H
Puberté. - Corps glabre. Pas de développement des seins.
Mont de Vénus absolument glabre. Grandes lèvres épaisses
et peu développées. Petites lèvres triangulaires se termi-
nant par un capuchon étroit et ne descendant pas plus loin
que la moitié de la hauteur des grandes lèvres. Pénil sail-
lant. Hymen circulaire. Région anale normale ; pas d'hémor-
rhoides.
Membres supérieurs. - La forme des bras est normale ;
leurs dimensions égales des deux côtés. Attitude régulière. Pas
de déformations. Mouvements dans tous les sens. Sensibilité
au contact, à la température et à la douleur conservée, la
même des deux côtés. L'enfant se ronge un peu les ongles.
Membres inférieurs. -A l'inspection, les membres infé-
rieurs ont une forme naturelle. A droite et à gauche, même
longueur. Les cuisses se fléchissent très bien sur le bassin,
les pieds et les jambes sont mobilisés très aisément. Ni rai-
deur, ni contracture, ni déformation. A l'examen fonc-
tionnel, les mouvements volontaires et provoqués sont nor-
maux, ainsi que les mouvements réflexes. Il est à remarquer
que l'hémiplégie droite, qui avait été manifeste lors des
accidents cérébraux, parait avoir complètement disparu.
Marche de la maladie. - 20 ïnai. - Hydrothérapie jusqu'au
15 décembre.
A ce moment, elle parle lentement, mais distinctement et
répond aux questions qu'on lui pose après une courte hési-
tation. Un peu myope, elle fixe facilement son attention sur
un objet quelconque qu'elle regarde en baissant la tête. Elle
est peu agile, a de la difficulté à jouer avec ses compagnes,
cependant elle monte facilement les escaliers. Elle mange
bien, se sert de sa fourchette et de sa cuillère, dénote une cer-
taine préférence pour les aliments sucrés, le vin et le lait.
Elle sait s'habiller seule, mais ne peut se peigner elle-
même ; elle marque une certaine répugnance pour se laver
et se nettoyer seule. - Elle ne gâte pas, n'a pas d'habitude
d'onanisme. Son sommeil est calme, sans cris ni cauchemars.
Son caractère est indifférent : elle est maussade, ne fait
pas attention à ce qu'on lui dit et est insensible aux re-
proches. En classe, elle est assez tranquille, mais n'apporte
aucune attention ; elle ne sait pas lire et peut à peine épeler
quelques lettres. Elle sait former ses lettres, connaît ses
chiffres et peut compter jnsqu'à 100 Elle connaît les princi-
pales couleurs, ainsi que les diverses parties de son corps et
de ses vêtements. Elle exécute les mouvements élémentaires
120 MÉNINGO-ENCÉPHALITE CHRONIQUE.
de gymnastique, mais est très peu agile dans ces exercices.
16 aoitt. Elle passe l'été et l'automne à peu près dans le
même état.
z1896. - En février, elle est atteinte d'engelures aux pieds
et entre à l'infirmerie, où elle reste jusqu'au mois d'avril 1896.
Mais à cette époque la déchéance intellectuelle s'accuse,
Per... est devenue incapable de se servir de ses membres. Ses
jambes fléchissent, elle tremble constamment. (Fia..17 et 18)
Elle est devenue gâteuse. - Son sommeil est maintenant très
agité, elle déclame la nuit, chante pendant des heures entiè-
res, déchire les draps et la toile cirée qui les protège.
Fiy, 17. -.1 UIIl 1896.
Contracture des membres ; ESCHARES. 121
Mai et juin. - La déchéance devient de plus en plus com-
plète. - L'enfant ne parle plus, ne fait pas de mouvements,
est incapable de marcher. Dans son lit, elle ne bouge qu'à
peine, mange ses excréments et s'en barbouille la figure.
Quand on s'approche d'elle, elle se cache, a peur, ses paupiè-
res battent. Quand on lui parle elle ne paraît pas comprendre,
regarde avec hébétement.
Les pupilles sont dilatées, la droite plus que la gauche. -
La face est pâle et le regard égaré. Quand I'... tire la langue
celle-ci tremble beaucoup. Aucune réaction fébrile, la tem-
pérature reste entre 37° et 37°, 6.
9 juillet.- Large yésicatoire sur la tête, sans aucun effet
appréciable.
FI(I. 18. - ,ltlilllS9li.
z122 Attaque épileptiforme; cachexie.$ z
9 septembre. - L'enfant décline de plus en plus. On observe
de la contracture aux membres inférieurs. Ceux-ci sont en
flexion à angle aigu. Les cuisses fléchies sur le bassin, les
jambes sur les cuisses. La contracture est tenace et très dif-
ficile à vaincre. - Les membres inférieurs sont indemnes.-
L'enfant a beaucoup maigri, s'alimente d'une façon très
défectueuse, refusant de manger. On la soutient à l'aide de
kola. Pas de diarrhée, pas de phénomènes morbides aux
poumons.
2 octobre. - Pern... est dans un état de cachexie très pro-
noncé : elle est dans le décubitus dorsal, le bras droit replié
sur la tète. Sa figure exprime l'effarement, elle semble avoir
peur lorsqu'on s'approche d'elle. Les plis du front et de la
face sont très marqués, les yeux hagards, les pupilles dila-
tées. La sensibilité à la lumière est conservée ; la sensibilité
au tact est diminuée. - La face est pâle et amaigrie. - De
temps en temps et surtout la nuit, l'enfant pousse un cri
hydrencephalique. Elle grince souvent des dents. Le bras
droit est fortement contracture, l'avant-bras fléchi sur le
bras; les doigts repliés en crochet et difficiles à ouvrir.
Rien aux poumons. - Le ventre est souple, un peu creusé
en bateau, indolore à la pression. L'enfant gâte, mais se
nourrit suffisamment, prenant du lait en quantité normale.
Les deux cuisses sont dans l'adduction et dans la flexion
complète sur le tronc. Les jambes sont fléchies, les talons
sur les fesses. L'enfant est recroquevillée sur elle-même.
A droite, la contracture de la hanche est si prononcée
qu'on ne peut étendre la cuisse sans faire crier la malade. Tout
ce qu'on peut faire, c'est de ramener la cuisse dans l'axe du
corps, dans une position intermédiaire à l'abduction et à l'ad-
duction. Le cou-de-pied et les orteils sont souples. (Fig. 19).
On observe des eschares au début : l'une à la face interne du
genou, delalargeurd'une pièce de 2 francs, l'autre au niveau
de la tubérosité interne, une troisième un peu au-dessus de l'é-
pine iliaque antéro-supérieure.
A gauche, la contracture est un peu moins prononcée ; on
peut davantage fléchir la cuisse et la jambe. Eschares au
début au niveau de la tubérosité interne du tibia, sur le grand
trochanter, et au-dessus de l'épine iliaque antéro-supérieure.
L'enfant ne reconnaît personne, répond par monosyllabes
aux questions qu'on lui pose, tire la langue, rit, déchire tout
ce qu'elle a sous la main.
28 octobre. - Pern... décline de plus en plus. Dans la nuit,
elle a eu une convulsion. Au milieu de râles stridents, la face
s'est congestionnée surtout à gauche avec des plaques
Attaque épileptiforme; cachexie 123
ecchymotiques. Les veines du front deviennent turgescentes :
les yeux s'injectent de sang ; ils tournent à droite et à
gauche, en même temps que la face grimace. Cette crise
dure trois quarts d'heure, et s'accompagne d'une température
de 39°,7.
29 octobre. - Ce matin, l'enfant est très affaissée, ne mange
plus, ne parle pas. Elle ne reconnaît personne ; elle pousse de
temps en temps un cri strident. La cont1'actu1'e s'exagère
encore. Les eschares s'étendent à toute la région sacrée.
T.R. 37°, 5. - Soir : T. R. 36°, Il.
30 octobre. - Dénutrition complète, l'enfant est repliée
sur elle-même, ne fait plus de mouvements. Seuls ses doigts
tremblotent toujours. La bouche est grande ouverte, le pouls
est très faible, l'oeil gauche tout injecté de sang. - Le matin :
T. R. 36°, 4. Mort à deux heures de l'après-midi; aussitôt
après la mort l'enfant devient violacée.
Fig. 19. - 21 octobre 1896.
124 Autopsie.
111\I\GO-NCI : PHAL1TE chronique. 125
est de couleur très pâle : petit, ratatiné, il présente quelques ! Joints d'emphysème. - Cour normal ; pas de persistance
du trou de Botal. - L'estomac est rempli d'un liquide
glaireux, verdâtre, on y trouve quelques ecchymoses, au
niveau de la grande courbure. Les intestins sont petits, rata-
tinés, sans lésions. Les ganglions mésentériques sont un peu
hypertrophiés. Le péritoine est sain.
ilbdomen, - Le foie est volumineux (670 gr.), très vascu-
larisé, d'aspect violet foncé, laissant échapper beaucoup de
sang à la coupe. La vésicule biliaire est très dilatée et ren-
ferme une grande quantité de bile très foncée : pas de cal-
culs. La rate est petite et aplatie ( 60 gr.) Les reins, de
volume normal, sont légèrement congestionnés : la capsule
se détache facilement.
(,'ou. - Le corps thyroïde, très développé, est à peu près
régulier et symétrique (10 gr.). - Pas de traces de thymus.
Tête. - Le cuir chevelu est maigre avec une large plaque
ecchymotiduc, occupant tout le tiers moyen de la moitié an-
térieure du cuir chevelu. Pas de taches ecchymotiques sur
la partie postérieure.
La calotte crânienne est assez épaisse, d'une façon uni-
forme ; elle ne présente pas de plaques transparentes. Elle
parait à peu près symétrique bien que légèrement bombée
dans la région pariétale gauche. - Les fontanelles antérieure
et postérieure sont fermées. Pas de synostose. Les sutures
sont régulières : la suture sagittale n'est pas sur la ligne
médiane, mais un peu iL gauche de l'axe du crâne. Sur la face
interne on trouve des traces de sillons, très profondément
marqués. Il n'y a pas de synostose.
La quantité de liquide céphalo-rachidien est plutôt moins
abondante que d'ordinaire.
La dure-mère est un peu épaissie d'une façon générale. En
certains points, l'épaississement est plus prononcé surtout au
niveau de la fosse temporale droite. Pas de fausses membra-
nes. La pie-mère est partout vascularisée : elle a un aspect
rouge-vermillon louche.
On constate une très grande adhérence entre la dure-mère
et la paroi osseuse, surtout au niveau de la voûte et en avant,
où il faut exercer de fortes tractions pour décoller les mé-
ninges.
Les différentes parties de la base du crâne, les nerfs olfac-
126 MËNINGO-ENCHPHALITE chronique.
tifs, optiques, les bandelettes, les pédoncules cérébraux : tes
deux moitiés de la protubérance, les pyramides et les olives
paraissent égaux et symétriques. - La glande pinéale n'offre
rien de particulier.
Cerveau. Les deux lobes frontaux sont accolés au niveau
des 2/3 postérieurs de leur face interne. - Sur la face in-
terne des hémisphères la vascularisation est générale.
Les sillons paraissent comme fermés, accolés les uns aux
autres jusqu'à la surface. Les deux lèvres de la scissure de
Sylvius sont également accolées. Il existe des traînées blan-
châtres au niveau des sillons et des vaisseaux. - Le corps
calleux n'offre rien de particulier. Quand on enlève la pie-
mère, on la trouve notablement épaissie sur les deux hémis-
phères.
Hémisphère droit. Face interne. - En détachant la pie-
mère, on entraine à peu près toute la substance grise sur la
circonvolution du corps calleux, la première frontale, le lobe
quadrilatère, le lobe occipital et le lobe temporal. Seul le
lobe paracentral, le sillon calloso-marginal et ceux qui
séparent le coin du lobe quadrilatère et du lobe occipital ne
présentent pas d'adhérences. Aux points atteints, on trouve
un accollement des circonvolutions qui ne permettent plus
d'en retrouver les sillons de séparation. La surface du cer-
veau se présente comme villeuse et déchiquetée. (Planche V.)
Face convexe, - L'ablation de la pie-mère, entraîne des par-
ties plus ou moins étendues de la substance grise, sur tout le
lobe frontal. Sur les F2 et F3 presque dans toute leur étendue,
sur FI sauf au niveau de son pied, sur le tiers inférieur de FA.
et sur la moitié inférieure de l'A, on met il nu la substance
blanche. Il en est de même sur le pli pariétal inférieur et sur
la moitié postérieure de T2 et de T3. Sur le lobe frontal, on
trouve un très grand développement des circonvolutions et
des plis de passage. A partir de la moitié postérieure du
lobe frontal, les deux faces des sillons ne présentent pas
d'adhérences, et la pie-mère s'enlève sans entraîner de subs-
tance grise, notamment sur le sillon de Rolando, et sur la
face interne de la scissure de Sylvius et le lobule de l'insula.
dont les circonvolutions sont très grêles. - Les lobes occi-
pitaux et pariétaux sont normaux.
Hémisphère gauche. Face interne. - La répartition des
lésions est à peu près la même, mais elles sont plus pronon-
IIrNINGO-ENCliPHALtTI : chronique. 127
cées comme intensité, notamment sur les circonvolutions
frontales, qu'elles intéressent dans leurs 3/4 supérieurs.
Face cot2uexe. Même répartition des lésions, mais le sque-
lette blanc est mis à nu d'une façon plus complète sur les
circonvolutions malades. Les circonvolutions de la face infé-
rieure sont tout à fait dépouillés de leur substance grise : il
en est de même de F2, F3, du tiers inférieur de F A, de P A,
des deux plis pariétaux, et de presque tout le lobe temporal.
(Planche VI.)
Des deux côtés, les ventricules latéraux sont dilatés, mais à
un degré moyen, surtout dans les cornes occipitales et tem-
porales. Leurs parois sont lisses et régulières. Les couches
optiques et les corps striés paraissent normaux. Les deux
lobes du cervelet, ainsi que sa partie médiane, n'offrent au-
cune adhérence des méninges. Ils sont réguliers, symétriques
et normaux.
La moelle épinière pèse 40 gr., elle est normale.
Poids des organes
128 - SPÉCIMENS DE L'ÉCRITURE.
Fig. 21. - Février 1894. -
129 Spécimen DE l'écriture.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1896. 9
130 DÉMENCE, CONTRACTURE, ESCHARES.
fait bien des fois, la disparition complète des migrai-
nes de la mère pendant la grossesse et rabattement.
C'est là une question qui pourrait faire l'objet d'un
mémoire ou d'une thèse.
III. Jusqu'à 18 mois, les renseignements qui nous
ont été fournis indiquent que l'enfant était normale.
Alors surviennent des convulsions, dues à une mé-
nitrite (lièvre, délire, grincement des dents, etc.)
On prétend qu'à la suite, l'intelligence n'aurait pas
été notablement affaiblie. Quoiqu'il en soit, l'enfant
mise à l'école à 7 ans, après une période d'écolage
médiocre, avait fini par être entraînée et avait appris
à lire, écrire, compter, etc. Jusqu'à 11 ans, la situation
se maintient, l'intelligence ne parait pas trop atteinte.
Alors, surviennent de nouveaux accidents convulsifs,
répondant sans doute à une exacerbation des anciennes
lésions, suivis d'une hémiplégie passagère du côté
droit. Nouveaux accidents trois mois plus tard avec
réapparition de l'hémiplégie droite et aphasie l'une
et l'autre transitoires.
Ces doubles accidents ont eu pour conséquences un
affaiblissement des facultés intellectuelles et morales,
une perturbation des instincts (kleptomanie, pyroma-
nie, etc.).
Une troisième crise en février 1895 n'a fait qu'accé-
lérer la tendance vers la déchéance : traînement de la
jambe droite, embarras de la parole, congestion delà
face, douleurs de tête, vomissements bilieux, etc.
Pendant les huit premiers mois du séjour de Pern...
à la Fondation, il ne se produit pas de changement
sérieux. Mais à dater de février 189G, les facultés
intellectuelles déclinent, la force musculaire des
membres surtout des inférieurs diminue, les mouve-
ments s'accompagnent de tremblemont, les pupilles
se dilatent, la droite plus que la gauche, la langue
tremble ; on note des périodes d'excitation ; la
DÉMENCE, CONTRACTURE, ESCHARES. 131
nomie perd son expression; Pern... gâte, grince des
dents, est salace.
Enfin, durant les dernières semaines, à la démence,
devenue complète, s'ajoute une contracture des mem-
bres, le corps se recroqueville, des eschares se déve-
loppent et Pern... qui ne reconnaît plus personne suc-
combe à la cachexie.
La déchéance physique et même la déchéance intel-
lectuelle ressortent bien nettement sur les fig. 16, 17
18, 19. Les spécimens de l'écriture offrent aussi un
intérêt d'autant plus grand que nous avons pu repré-
senter quelques lignes de son écriture tracée plu-
sieurs mois avant l'entrée à la Fondation Vallée.
(Fig. 21-25). Photographies et spécimens de l'écriture
permettent de suivre la marche de la maladie.
La température rectale a oscillé du 23 septembre
au 3 octobre entre 37° et 38° ; puis du i au 20 octobre
entre 37°, 7 et 36°, 5 ; enfin du 21 au 2G octobre elle se
maintient en général au-dessus de 37°, avec une pous-
sée à 38", 7 le 21 et à 40°, 7 le 27, coïncidant avec les
attaques épileptifol'1nes. Enfin le 30, au matin, légère
hypothermie (36°, 4) suivie d'une élévation thermo-
métrique (39°, 8), au moment de la mort (Fig. 26).
IV. L'aictnpsie a montré un peu d'épaississement
des os du crâne, de la dure-mère qui adhérait forte-
ment à la calotte, et de la pie-mère. Mais les lésions
principales consistaient en une méningo-encéphalite
très prononcée et très étendue, car elle occupait
presque toute la surface des hémisphères à l'excep-
tion des frontale et pariétale ascendantes et que,
d'autre part, elle intéressait toute l'épaisseur do la
substance grise qui s'enlevait en même temps que
la la pie-mère, laissant Ù nu la substance blanche des
circonvolutions. On avait là des lésions tout-à-fait ?
DÉMENCE, CONTRACTURE, ESCHARES. 133
comparables, au point de vue macroscopique, aux lé-
sions que l'on rencontre dans la paralysie générale
de l'adulte lorsqu'elle est parvenue à sa dernière
période. (Voir les Planches V et VI).
X.
Six cas d'idiotie myxoedémateuse ; traitement par
l'ingestion de glande thyroïde; .
Communication à la Société médicale des hôpitaux.
(Séance du 17 janvier 189o).
M. Bourneville présente six malades atteints d'idiotie
ou d'imbécillité myxoedémateuse et résume ainsi les prin-
cipaux symptômes qu'ils présentent :
L'idiotie 7-111 ou compliquée de cachexie
pachydermique, désignée aussi sous le nom de TIlJlxoe.
dème infantile, est aujourd'hui bien connue. Personnel-
lement, nous avons contribué il ce résultat par un certain
nombre de publications depuis ISSU jusqu'à ce jour (I).
Aussi, aurions-nous hésité à venir devant vous si la pré-
sentation d'un groupe de six idiots avec cachexie pachy-
dermique ne nous avait paru de nature à vous inté-
resser et à vous permettre de fixer votre opinion sur les
points, peut-être encore litigieux, de la nosographie de
cette maladie. Une autre raison nous a décidé. Si cle ces
six malades trois ont été soumis avec avantage a la médi-
cation thyroïdienne (2), les deux plus jeunes ne l'ont pas
encore été et, désirant vous les faire voir au bout de trois
mois de traitement, nous avons pensé qu'il était bon de
vous les présenter, afin que les ayant vus avant tout trai-
(1) Bourneville. Nota sur un cas de ï ? ? oed<*mf ottcac/f.YtGpac/tdo'tHt's
(avec d'Ollier), ! 880. - De t'idiotie compliquée de cachexie pachUdc""IIfl"c
(avec Bricon), 1886. - Nouveaux cas d'idiotie mijxoedémateuse, 1888, 1889,18 ! )0,
1801, 1805. Tous ces travaux, parus dans le l'roltrcs indilical ou dans les
chiues de Neurologie, ont été réimprimés dans les Comptes-rendus de Bicètre.
(2) Bourneville. Trois cas d'i<<tot''c nT ? < : oedc)na<cu.sc Imités par l'mrleslion
thyroïdienne. (Congrès des aliénistes et ncurologistes. Bordeaux, août 18115).
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 135
tement, vous puissiez, les examinant ensuite, juger vous-
mêmes des résultats thérapeutiques.
I. Ce qui frappe immédiatement, c'est que nos six mala-
des ont enlre eux la plus grande ressemblance. Tous
offrent un arrêt de développement intellectuel l'idiotie
il des degrés divers - et un arrêt de développement phy-
sique - le nanisme avec des troubles profonds de la
nutrition. Tous sont obèses.
136 Description clinique,
. dimensions, se montre presque constamment au-dehors.
Ce phénomène est surtout accusé chez Bor...
Les dents, irrégulièrement implantées, sont cariées ;
la seconde dentition est incomplète. Le menton est petit,
on dirait qu'il a été écrasé jusqu'à la limite de la lèvre
inférieure. Les oreilles n'offrent pas de malformations,
mais elle sont épaissies, d'une pâleur cireuse, d'aspect
oedémateux, sans conserver toutefois, ainsi que les pau-
pières, les mains, les pieds, l'empreinte du doigt qui les
comprime.
Le cou est gros, court, et la tête semble s'enfoncer entre
les épaules. L'examen le plus attentif ne permet pas de
découvrir la glande thyroïde. Des masses pseudo-lipo-
matheuses, mal délimitées, parsemées de ganglions légè-
rement hypertrophiés, s'observent constamment dans les
creux sus et sous-claviculaires, clans les aisselles, quel-
quefois dans d'autres régions.
Le thorax offre des déformations portant sur les der-
nières côtes, déjetées en dehors, et sur la colonne verté-
brale plus ou moins déviée. Le dos est voûté.
Le ventre, très gros, très large, rappelle l'aspect du
ventre des batraciens ; il existe chez eux une petite hernie
ombilicale, d'autres fois une hernie inguinale (Gr...). Le
bassin est rétréci.
Les organes génitaux sont arrêtés clans leur dévelop-
pement chez nos trois malades les plus âgés. Chez Gra...,
la moustache se dessine et quelques poils ont poussé au
pénil.
Les membres supérieurs et inférieurs sont gros, courts
et offrent des incurvations ra lritiques. Leurs articulât ions
sont noueuses. Les mains et les pieds, souvent cyanosés,
sont ramassés, épais, présentent en un mot l'aspect pach1j-
dermique, pour employer les expressions de Charcot.
La peau, glabre, blanche, sèche, rugueuse, ichthyosi-
que par places, est, chez la plupart, le siège d'une éruption
eczémateuse assez étendue. A la face, la peau est un peu
jaunâtre, cireuse, analogue dans une certaine mesure à.
celle des cachectiques.
La digestion s'effectue d'une façon assez régulière.
Les troubles qu'on observe de ce côté sont d'habitude
IDIOTIE myxoedémateuse. 137
légers. L'appétit est très modéré ; souvent ils ont de la
répugnance pour la viande. La mastication est laborieuse.
Les selles sont rares, la constipation fréquente, d'où la
production d'hémorroïdes ou de chute du rectum.
La respiration est gênée. Ils c'essouflent rapidement.
L'haleine est désagréable. Le pouls est petit, plutôt fré-
quent. Les extrémités et les lèvres sont cyanosées. La
température centrale est au-dessous du chiffre normal.
Tous sont très sensibles au froid.
La sécrétion urinaire semble un peu diminuée. Exa-
minées il de nombreuses reprises, les urines n'ont jamais
présenté d'ai6u ? rtine. La miction est normale. La sécré-
tion sudorale, au contraire, s'est toujours montrée impar-
faite. Jamais nous ne les avons vus suer, même au moment
des plus fortes chaleurs. Tous ont la voix rauque, aigre,
stridente, en quelque sorte pathognomonique. Leur dé-
marcha est pesante, accompagnée d'un balancement laté-
ral, d'une sorte de dandinement. Ils ont la plus grande
répugnance au mouvement.
Bien que trois de nos malades soient déjà âgés, ils ne
sont pas pubères. La barbe fait totalement défaut chez
Jules D... ; ni lui, ni les filles n'ont de poils sous les ais-
selles, au pénil, etc. Chez deux de nos filles (vingt ans et
quatorze ans neuf mois) les règles n'ont point paru ; les
seins sont rudimentaires ; les appétits sexuels sont nuls :
l'onanisme, si commun chez les idiots ordinaires, n'a été
signalé chez aucun de nos six malades.
La sensibilité générale est naturelle. Il paraît en être
de même de la sensibilité spéciale, autant du moins que
l'état intellectuel des malades permet d'en juger. La pa-
role est généralement assez limitée.
Au point de vue des facultés intellectuelles, tous sont
atteints, à des degrés variables, d'idiotie ou d'imbécillité.
Chez aucun d'eux, toutefois, nous ne trouvons les carac-
tères de l'idiotie profonde, tels qu'ils se rencontrent par
exemple dans l'idiotie symptomatique de méningite, de
sclérose atrophique ou hypertrophique, ou d'un arrêt de
développement congénital du cerveau. Ils n'ont pas de tics,
pas de balancement antéro-postérieur, ne grincentpas des
dents, ne poussent pas de cris, ne sont pas salaces. Ils sont
138 DESCRIPTION clinique. ' "
susceptihles d'attention, ils ont de la mémoire. Ils devien-
propres, apprennent à manger seuls, à s'habiller, se laver,
coudre, etc. Tous ont un caractère calme, à l'excep-
tion de Kra..., qui, contrariée, est sujette à de violents ac-
cès de colère. Tous ont conservé les sentiments affectifs,
s'attachent aux personnes qui les soignent, reconnaissent
et caressent leurs parents quand ils viennent les visiter.
II. Nous appelons plus particulièrement votre attention
sur nos deux plus jeunes malades (Kram... etBorj...) qui,
comme vous le voyez, présentent, pour ainsi dire au plus
haut degré, tous les caractères de l'idiotie myxoedéma-
teuse. Ce sont elles qui motivent notre communication.
Elles n'ont pas encore été soumises à la médication thy-
roïdienne. Notre intention est de le faire dès demain et,
comme nous l'avons dit en commençant, de vous les pré-
senter de nouvcau dans deux ou trois mois. Alors nous
donnerons leur observation détaillée, que nous ferons sui-
vre d'un résumé des effets du traitement. Nous insisterons
plus particulièrement sur les modifications du poids, de
la taille, de lit quepréalabhementnousavons
fait prendre pendant un mois et demi et dont nous vous pré-
sentons les tracés. Nous procéderons de même pour les
changements produits sur la dentition, ltroix, les urines,
qui, nous le répétons, contrairement il certaine opinion,
ne renferment pas d'albumine ; enfin, grâce à l'obligeance
de notre collègue ? If. le 1)1* Vaquez, nous pourrons vous
apporter, il moins qu'il ne désire le faire lui-même, des
renseignements sur l'action de l'ingestion de la glande
thyroïde sur le sang.
M. L. Gutaov. Les injections sous-cutanées d'extrait thy-
roïdien présentent un certain danger dans le jeune Age. On
a publié trois cas de mort survenue dans ces conditions chez
des enfants, et j'ai tout lieu de croire que les faits malheu-
reux de ce genre n'ont pas été tous livrés à la publicité. Au
contraire, l'ingestion de corps thyroïde n'a pas, à ma con-
naissance, provoqué jusqu'ici d'accidents graves, et semble
avoir donné, en général, de bons résultats.
M. llm;raN..1e demande à M. Bourneville de bien préciser
Médication thyroïdienne. 139
la technique de la médication thyroïdienne et les doses de
corps thyroïde administrés.
J'ai fait prendre à un enfant de trois ans, atteint de myxoe-
dème congénital, la dixième partie environ du quart d'un lobe
de thyroïde de mouton. J'ai observé, dès le lendemain, des
accidents très graves : température à t0 degrés, pouls extrême-
ment fréquent, facies toxique ; puis disparition du m3w<xdème
en quarante-huit heures, avec desquamation très abondante :
éruption de trois dents en huit jours. Mais l'enfant est tombé
dans un tel état que je n'ai osé continuer.
Depuis, je me suis servi des « tabloïds » de corps thyroïde
d'origine anglaise; j'ai donné à divers enfants du premier
tige, atteints de myxoedème congénital, un quart ou un huitième
de tabloïds. J'ai toujours observé des accidents, toujours de la
fièvre, de l'accélération du pouls, un amaigrissement avec
apparence de cachexie.
L'action du traitement thyroïdien est très évidente ; le
myxoedème disparait toujours. Mais chez les enfants du pre-
miel' âge, ce traitement présente de grands dangers.
M. Bourneville. J'ai essayé, il y a plusieurs années, les
injections sous-cutanées de suc thyroïdien chez trois mala-
des atteints de cachexie pachydermique infantile : les résul-
tats ont été à peu près tout il fait nuls. Puis, j'ai eu recours
à une préparation liquide de suc thyroïdien que m'avait
donnée M. Chantemesse : je n'ai pas eu plus de succès. C'est
au mois de mai dernier que j'ai employé la glande thyroïde
fraîche de mouton, coupée en petits fragments et donnée dans
du bouillon. En général, l'ingestion est acceptée sans (lilli-
culté par les malades. La dose a varié d'un demi-lobe a un
lobe. Les enfants sont surveillés avec le plus grand soin et
dès qu'il se manifeste des symptômes un peu sérieux (vomis-
sements, parésie, tremblements, tendances lypothymiqucs,
etc.), nous suspendons le médicament pour le reprendre au
bout de quelques jours. Dans certains cas, au lieu de donner
un demi-lobe tous les jours,' nous n'avons administré le demi-
lobe que tous les deux jours. A l'heure actuelle, dix malades
sont en traitement. Les glandes thyroïdes sont examinées
soit par nous, soit par l'un de nos internes. Nous en avons
fait peser un certain nombre. Le poids moyen d'un lobe frais
est de 2 grammes.
M. Rendu. J'ai eu l'occasion de soigner, l'été dernier, un
enflwt m3s<eclémateav de quatre ans, qui m'avait été amené
des environs de Chartres. Très peu développé, à tous les
140 Discussion.
points de vue, cet enfant n'avait que deux ou trois dents. Il
avait une grosse langue et sa physionomie offrait l'aspect
hébété qui caractérise ces pauvres êtres. Je conseillai de
faire prendre chaque jour une seule pastille de Burroughs et ? elcomc, de Londres. Deux mois plus tard, l'enfant était à
tel point transformé que j'en fus moi-même très agréable-
ment surpris. Du mois d'août au mois d'octobre, il avait fait
six nouvelles dents, son intelligence s'était sensiblement
éveillée et il commençait à s'intéresser aux personnes et aux
choses qui l'entouraient.
M. 13r : r,r,i;nc..Te crois qu'étant donné le poids si variable
des glandes thyroïdes de mouton, il est nécessaire d'évaluer
toujours la dose médicamenteuse de ces ces organes non pas en
lobes ou en fractions de lobes, mais en grammes et fractions
de grammes. Je crois aussi, comme je l'ai dit déjà et vous
me permettrez de le répéter, que, pour éviter autant qu'il
est possible les risques de la médication thyroïdienne, il
importe, au plus haut point, de surveiller le fonctionnement
du coeur. Le coeur est, en effet, le premier organe qui réponde
à cette médication. Il y répond par la fréquence augmentée
de ses battements, mais surtout par leur instabilité qui se
manifeste aussitôt que le malade en traitement passe du
décubitus horizontal à la station debout, par une subite
accélération : en un instant le pouls peut s'élever de 100 à
I°0, de 170 v 140 battements par minute. Dans ces conditions,
on comprend qu'une marche rapide, qu'un brusque effort
puisse aboutir a une syncope. En l'absence de toute élévation
de la température, c'est au coeur qu'est le danger, c'est par
le coeur qu'est survenue la mort dans les cas malheureux
qui ont été publiés. Expérimentalement, ce sont des acci-
dents cardiaques qui, à plusieurs reprises, ont mis en dan-
ger et ont fini par terminer la vie d'un singe que j'avais
soumis à l'alimentation thyroïdienne intensive. Si donc, il
est bon, au cours de la médication thyroïdienne, d'avoir l'oeil
sur le thermomètre, je dirai qu'il importe bien davantage
d'avoir le doigt sur le pouls.
M. Bourneville. Comme notre collègue, M. Béclère, nous
avons noté une fréquence notable du pouls, 100, 1"0 et davan-
tage, avec des variations multiples dans la même journée. De
même aussi l'augmentation clés mouvements respiratoires. Si
nous n'en avons pas parlé clans notre communication, c'est
que notre but était seulement de vous montrer nos six idiots
myxoedémateux, de décrire l'ensemble symptomatique qu'ils
Médication thyroïdienne. 141
présentent et surtout de mettre en relief les caractères offerts
par les deux plus jeunes, non encore traités, nous réser-
vant d'exposer les phénomènes dus au traitement lorsque nous
vous ramènerons dans deux ou trois mois les deux mêmes
malades, ayant été soumises à la médication thyroïdienne.
M. Fernet. M. Déclère nous a présenté l'an dernier un très
bon travail sur les accidents que peut provoquer la médica-
tion thyroïdienne, mais je me demande s'il n'accorde pas une
importance exagérée aux modifications du pouls qui survien-
nent dès qu'on fait changer les malades de position. Il me
semble que ce phénomène se rencontre très fréquemment
chez les malades les plus divers, en dehors du myxoedème
et du traitement thyroïdien.
Graves a déjà signalé cette particularité dans les fièvres
et notamment dans les états adynamiques, et j'ai pu l'obser-
ver moi-même bien souvent : c'est un des bons signes de l'ady-
namie cardiaque. Il suint de faire asseoir certains malades ou
de les faire changer de position dans le lit pour que le nombre
des pulsations augmente de 20, 30 et quelquefois même 40
dans une minute. Il ne faudrait donc pas attribuer unique-
ment à l'intoxication thyroïdienne une accélération du pouls
qui peut relever de plusieurs circonstances variées.
M. 131;CL];I\E. C'est à l'intoxication thyroïdienne qu'il faut
attribuer la fréquence et l'instabilité du pouls, quand ces deux
phénomènes, comme je l'ai vu maintes fois, suivent de près
la première ingestion du médicament et disparaissent avec la
suspension du traitement. Mais il est certain que d'autres
causes peuvent les produire, et M. Fernet ne me démentira
pas si j'ajoute qu'au cours des fièvres graves comme de la
médication thyroïdienne la grande instabilité du pouls, sous
l'influence des changements de position du malade, est tou-
jours l'indice d'un danger possible et que l'apparition de ce
signe doit éveiller l'inquiète attention du médecin.
M. Bourneville. J'ai fait examiner et peser aussi exacte-
ment que possible les quantités de glande thyroïdie données
aux malades. Leur poids ne variait guère que de 1 gr 25 à
2 grammes, et en surveillant avec soin les malades, je pense
que l'on n'a pas à redouter d'accidents (1).
(1) Ces pesées répondent aux glandes telles qu'elles nous sont livrées, c'est-
à-dire avec la graisse et le tissu cellulaire. Dépouillées de ces élément», elles
pèsent naturellement moins, à peine un gramme par lobe.
142 Discussion.
M. IIA.YEM. lime parait très difficile de surveiller rigoureu-
sement cette les poids des glandes, leur richesse
en principes actifs ne sauraient être contrôlés. Il serait pré-
férable de ne pas employer les glandes fraîches et de recou-
rir aux préparations bien dosées, qui semblent à la fois plus
efficaces et moins dangereuses, comme les tablettes anglai-
ses qui ont été déjà expérimentées par plusieurs de nos collè-
lègucs.
M. Rendu. Ces tablettes sont assez désagréables au goût.
Elles ont une odeur et une saveur qui rappellent la poudre
de viande, que l'on trouve généralement dans le commerce.
M. Fernet. Des produits analogues existent en France.
MM. Yvon et Berlioz préparent depuis quelque temps des
capsules exactement dosées qui contiennent de la poudre de
corps thyroïde desséché.
M. Bourneville. M. Régis (de Bordeaux) s'est servi aussi
de tablettes préparées, non plus par des pharmaciens anglais
mais par un pharmacien de Bordeaux (il, Flourens).
M. Béclére. J'ai eu l'occasion de soumettre à la médica-
tion thyroïdienne quatre ou cinq malades à la fois, dans le
même service d'hôpital, un myxoedémateux et plusieurs
femmes atteintes clu goitre simple. Tous prenaient la même
préparation consistant en glandes fraîches apportées de
l'abattoir et pulpées ensemble. Mais ils réagissaient à
la médication cle façons très différentes : les uns pouvaient
absorber pendant bien des jours, sans en éprouver de trou-
bles notables, d'assez fortes doses, tandis que les autres,
au bout de très peu de temps, supportaient mal des doses
beaucoup moindres. C'est aux malades et non au médicament
que tenaient bien évidemment ces différences. Tout autre
préparation eut certainement produit chez les divers sujets
des effets aussi dissemblables, et il n'en est pas une qui puisse
mettre il l'abri des accidents. Mais pourquoi recourir à
des médicaments de fabrication étrangère quand nous en
possédons de bien meilleurs ? A la Société de thérapeutique
une intéressante discussion s'est élevée dernièrement sur la
valeur des diverses préparations de corps thyroïde et notre
collègue M. Ferrant ! a insisté sur ce fait que la glande don-
née en nature paraissait plus efficace que les préparations
pharmaceutiques; A cette occasion, M. F. Vigies (1) a fait
(1) Société de thérapeutique. Séance du 11 décembre 1895.
Médication thyroïdienne. 143
connaître un moyen facile de conserver au corps thyroïde
toutes ses propriétés sans lui faire subir l'action de la cha-
leur capable de l'altérer. Son procédé consiste à débarrasser
les glandes fraîches de tous les corps étrangers qu'elles ren-
ferment, graisse, kystes etc., à les pulpcr, à les mélanger
immédiatement à clu biborate de soude et à de la poudre
de charbon, puis à diviser la masse en capsules de 10 centi-
grammes. Nos collègues, \III. 13esnier, Bucquoy, Chauffard
et moi-même avons employé avec succès cette préparation (1),
(1) Bulletins et mémoires de la Société médicale des de Paris,
1MUô, il- 2, p. 32.
XI.
Idiotie myxoedémateuse (myxoedème infantile) :
Traitement par l'ingestion de glande thyroïde du mouton;
Par BOURNEVILLE
Communication à (a Société médicale des hôpitaux.
(Séance du 22 janvier 1897).
Messieurs,
Il y a un an (1), nous vous avons présenté six ma-
lades atteints d'idiotie myxoedémaleHse, dont l'âge
variait de 38 à 3 ans. A ce propos, nous avons tracé
une fois de plus le tableau s ylnptomaticl2ce de cette
affection. L'un de ces malades, le plus vieux, n'avait
pas été soumis à la médication thyroïdienne qui,
chez trois autres, avait produit une amélioration con-
sidérable et nous avons appelé plus particulièrement
votre attention sur les deux plusjeuncs, Borj.. et Kra ?
avant tout traitement, vous demandant la permission
de vous les faire voir après le traitement par la mé-
dication thyroïdienne. Aujourd'hui nous vous les ra-
menons, aiin que vous puissiez juger par vous-mêmes
des résultats obtenus.
Observation I.
Sommaire. - Père et mère, rien de particulier . - Un cas de
gémellarité du côté maternel. Coisasfuuntë ? ea-
lité d'âge de 2 ans.
(1) Séance du 17 janvier 1896.
e IDIOTIE myxoedémateuse. 14 ! i
Chute sans conséquences appréciables au quatrième mois
de la grossesse. - Apparence normale à la naissance.
Première dent à 8 mois. Gâtisme. - Ne marche pas
seule. - Préhension très lente. - Croûtes du cuir che-
velu depuis l'âge de 10 mois. - Premiers symptômes de
cachexie pachydermique à 8 mois.
Description de l'enfant avant tout traitement. Réunion de
tous les symptômes du myxoedème infantile : nanisme,
idiotie, absence de la glande thyroïde, retard de la denti-
tion, cachexie pachydermique, etc..
Ingestion de glande thyroïde du mouton du 8 janvier au
31 mai et du 1er au 31 juillet.
Effets remarquables du traitement. - Amélioration physi-
que et intellectuelle.
Suspension du traitement du leur août au 2 octobre : Réappa-
rition de la plupart des symptômes myxoedémateux.
Reprise du traitement du 3 octobre à ce jour : Transforma-
tion remarquable de l'enfant. - Développement physique
et intellectuel.
Borj.... (Lucie), née le 14 décembre 1892, à Sermoyer (Ain),
est entrée le 10 octobre 1895 à la Fondation Vallée.
Antécédents héréditaires. - (Renseignements fournis par sa
mère, oct. 1895). - Père, 26 ans, homme de peine ; taille
un peu au-dessus de la moyenne ; pas de convulsions, ni de
migraines ou de rhumatismes ; aucun stigmate de syphilis.
Pas d'excès de boisson ; pus de goitre. - [Famille du père.
- Père, 60 ans, vit à Sermoyer, dans l'Ain, cultivateur, bien
portant, sobre, pas de goitre, pas d'accidents nerveux.
Mère, 50 ans, ménagère, pas de migraines, caractère assez
calme, pas de maladie de peau ni de rhumatismes. Aucun
détail sur les grands-parents paternels ou maternels. Deux
oncles paternels bien portants, pères d'enfants en bonne
santé. Pas de tantes paternelles. Un oncle maternel bien
portant lui aussi. Sept frères ou soeurs, laboureurs, sobres,
sans accidents nerveux. - Pas d'aliénés, de difformes, d'épi-
leptiques, de goitreux, ni de myxoedémateux, etc.]
MÈRE, 24 ans, travaillait autrefois à la terre ; depuis son
mariage, à 19 ans, elle est employée dans une fabrique de
corsets; brune, taille petite sans exagération. Jamais dé
convulsions dans l'enfance, parait intelligente et dit qu'elle
apprenait facilement à l'école; nez aquilin ; jamais d'attaques,
de migraines, ni de rhumatismes. - [Famille de la mère.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1896. 10
146 IDIOTIE myxoedémateuse.
Père, 53 ans, bien portant, sobre, aucun accident nerveux.
- Mère, 53 ans, bonne santé, caractère calme ; pas de
dermatoses. - Grand-père et grand'mère paternels : « ce
sont les mêmes que ceux cle mon mari, car nous sommes
cousins germains : mon père et le père de mon mari étaient
frères. » Grand-père et mère maternels, aucun détail. -
Deux oncles paternels ; les mômes que ceux du père de
l'enfant. - Pas d'onces ni de tantes maternels, - Un frère
« du même age que moi, nous étions jumeaux » ; célibataire
sans enfants. Pas de soeurs. Elle dit qu'il n'y a pas eu
d'autres jumeaux ni dans sa famille, ni dans celle de son mari.
- Pas d'aliénés, d'épileptiques, de goitreux, d'idiots, etc.]
Consanguinité ; cousins germains. - Inégalité d'âge de
deux ans. Père et mère du même pays. - Une seule enfant :
la malade.
Antécédents personnels. - Rien il signaler à la conception
qui a eu lieu six mois après le mariage : ils étaient heureux
d'être unis. - Grossesse : à 4 mois chute dans un escalier,
sans syncope ni émotion sérieuse : elle s'est relevée de suite;
pas de pertes. Jamais de contrariétés ni d'idées noires; pas
de vomissements, pas de cauchemars, ni d'oedème. - .Accou-
chement à terme, naturel, sans chloroforme ; le travail a duré
quatorze heures. - l'as d'asphyxie à ta naissance. L'enfant
a crié de suite et, dit-on, avait la voix d'un enfant ordinaire;
le teint n'était pas cireux ; elle pesait 3 kilogr. - Elevée au sein
par sa mère pendant deux mois, puis mise en nourrice dans
son pays. « Quand je l'ai quittée elle était bien. » On fut
obligé de la retirer de nourrice au bout d'un mois et demi,
car elle dépérissait tous les jours. Alors sa grand'mère mater-
nelle l'a élevée au biberon avec du lait de vache. On croit
qu'elle a eu sa première dent à 8 mois. La dentition est
loin, encore, d'être complète.
Bor.. n'a jamais marché seule. Sa mère dit qu'elle marche
très lentement et lourdement en la tenant par la main.
Elle n'est pas propre. Elle ne dit que deux mots « dada »
pour désigner le cheval de son grand'père et « tatain »
pour désigner sa tante. « C'est le patois du pays. » Pas d'accès
de colère. Sommeil prolongé, calme. On affirme qu'elle
reconnaissait bien son grand-père, sa grand'mère et ses
autres parents du pays. La mère ne saurait dire si son
enfant la reconnaît, car elle ne l'a avec elle que depuis le 29
septembre dernier. B... prend les objets qu'on lui donne
avec une très grande lenteur. Elle n'est pas gloutonne, ni
Antécédents personnels. 147
vorace, mange peu, mâche mal, n'aime guère que le lait.
Bave abondante ; point de vomissements. Constipation habi-
tuelle ; garde-robes dures, involontaires; la défécation est
douloureuse; pas de prolapsus rectal. On n'a pas remarqué
d'hémorroïdes. La mère dit que l'enfant paraissait souffrir en
urinant, qu'elle tousse parfois, est toujours oppressée, que la.
respiration s'accompagne de bruits de râle. Pas de bronchite.
Vers 10 mois, apparition de quelques croûtes dans les che-
veux. Les croûtes ont persisté jusqu'à ce jour.
A 2 mois et demi, quand sa mère l'a quittée, elle ressem-
blait aux autres enfants ; ce ne serait qu'à 8 mois que la
grand'mère se serait aperçue de quelques différences : la
langue s'est épaissie et sortait de la bouche, paraît-il. On ne
peut préciser le début de l'épaississement des joues, des
paupières, du cou et du ventre.
Pas de varioloïde, de rougeole, ni de scarlatine ; pas de
coqueluche ni cle mal de gorge. A 4 mois, elle aurait eu
quelques « boutons » dans le dos, sur la nature desquels il
est impossible de se prononcer. Pas d'adénites, d'otorrhée,
etc. .
« Il n'y a pas de goitreux dans le pays, affirme la mère,
c'est un ..pays de plaine ; la rivière est à 6 kilomètres. » Pas
de marais ; les fièvres intermittentes n'y sont pas endé-
miques. La mère ne sait à quoi attribuer la maladie.
État de l'enfant le 29 octobre 1895. - Crâne à peu près
arrondi avec proéminence assez marquée de l'occipital. Les
bosses pariétales sont volumineuses. Le front est étroit, lé-
gèrement bombé en avant, à peu près rectangulaire et me-
sure 4 cent. de hauteur. Les bosses frontales bien indiquées
sont aussi nettement accusées d'un côté que de l'autre. Les
fontanelles ne sont pas soudées ; la postérieure mesure à peu
près 1 cent. 1/2 dans le sens antéro-postérieur ; l'antérieure
mesure 6 cent. dans le sens antéro-postérieur et 5 cent. dans
le sens transversal. Les arcades sourcilières sont assez bien
marquées. Les paupières sont un peu gonflées, ont une ap-
parence oedémateuse, mais il ne se produit pas de godet à
la pression du doigt. Cils longs aux paupières supérieures,
très peu développés, rares et comme naissants aux paupières
inférieures. l'as de blépharite. Conjonctives palpébrales pâles.
Iris bleus ; pupilles dilatées, égales. Au niveau de sa racine
le nez est enfoncé, à peine appréciable, le lobule semble en
constituer la plus grande partie ; il est relevé et les narines
sont dilatées (nez camus). Coryza chronique qui se traduit
par un écoulement séro-muqueux, sans odeur. Les sillons
148
Idiotie myxoedémateuse.
naso-labiaux sont fortement creusés de chaque côté et limi-
tent en dedans les joues bouffies, saillantes, de couleur jaune
cireuse. Lèvre inférieure grosse et éversée. La bouche me-
sure 4 cent. 1/2 et est toujours entr'ouverte. La langue est
épaisse et fait une saillie prononcée au [¡'avers de l'ouver-
ture buccale. Menton court; les fossettes en sont très creu-
sées ce qui tient à la proéminence de la lèvre inférieure.
Oreilles, pâles, cireuses, bien ourlées, le lobule n'est pas
adhérent. - La face est à peu près carrée.
Le cou est gros, très court; il semble que la tète repose
directement sur les épaules. Sa circonférence est de 30 cent.
Il n'est pas possible de percevoir de glande thyroïde par la
palpation la plus minutieuse. On ne trouve pas de pseudo-
lipomes sus-claviculaires.
La région pectorale offre un développement marqué avec
un lacis veineux, nettement dessiné pour peu qu'on tende la
peau. On ne trouve pas de dilatations veineuses sur les
épaules. - La poitrine est courte, le dos un peu bombé.
Voussure dorso-lombaire de la colonne vertébrale. - Le vent
tre est gros, bombé; l'ombilic est saillant; pointe de hernie
ombilicale. - Les .seins sont à peine dessinés.
Fig. 27. - B... en octobre 1895.
Description DE la malade. 149
Organes génitaux. - Grandes lèvres développées ; petites
lèvres réduites à un léger repli de 4 à 5 millimètres.
Membres supérieurs. -Le développement des bras est en
rapport avec celui des autres parties du corps; la peau est
sèche, pas très épaissie. Rien au niveau des articulations.
Mains violacées, froides.
Membres inférieurs . - Légère incurvation des tibias en
dedans. (On trouve encore chez Borj... d'autres signes de ra-
chitisme, tels que chapelet rachitique, etc.). La voûte plan-
taire est un peu affaissée.
La peau est d'une couleur de cire, décolorée à la face.
Cheveux gros, secs et raides, châtains, claisemés au niveau
des bosses frontales. Cuir chevelu rugueux, couvert de croît-
tes. - Sourcils assez fournis. Le reste du corps est glabre.
Pas d'adénopathies cervicales.
La sensibilité générale est un peu obtuse, autant qu'il est
possible d'en juger. B... est très sensible au froid, répugne à
tout mouvement. L'acuité visuelle paraît normale, ainsi que
l'audition. Il est impossible de savoir si l'enfant reconnaît
les saveurs et les odeurs.
Respiration : 15 à 16 mouvements inspiratoires par minute.
Le pouls est à peine perceptible au poignet. Le pouls cru-
ral, plus perceptible, indique 80 pulsations par minute.
Rien de spécial à noter à l'auscultation du coeur ou des pou-
mons. Rien à l'examen des organes abdominaux. L'enfant
n'est pas vorace. Mastication très lente et difficile. Pas de
vomissements. Constipation opiniâtre à l'entrée (10 oct.).
actuellement les selles sont plus régulières.
État de la bouche et de la dentition. Maxillaires supé-
rieur et inférieur, il large diamètre transversal. Voûte pa-
latine affaissée, ne présentant pas l'excavation centrale nor-
male. Langue très volumineuse, remplissant toute la cavité
buccale qu'elle déborde en avant. Elle sort entre les lèvres
qu'elle dépasse comme en prolapsus. L'évolution de la den-
tition est retardée, puisque l'enfant ayant 34 mois ne possède
que six incisives temporaires dont les deux incisives latérales
inférieures n'ont pas achevé l'éruption complète de leur
couronne. Elles sont disposées avec un assez grand écart
interdentaire sur la large étendue du bord alvéolaire et légère-
ment tournées sur leur axe. Le plus grand espace interden-
taire existe entre les incisives centrales et les latérales, ce
t50 IDIOTIE MYXOHDEMATEUSE : température.
qu'explique d'ailleurs l'absence actuelle d'autres dents laté-
rales. La disposition de la langue et son volume semblent
devoir amener un rejet en avant des dents antérieures.
Traitement : Bains salés, sirop d'iodure de fer, huile de foie
de morue, exercices de la marche.
Nous avons l'habitude de faire prendre la tempéra-
ture rectale de nos malades pendant les cinq premiers
jours de leur entrée afin de nous assurer qu'elles ne
sont pas sous le coup d'une maladie infectieuse, et
aussi de nous rendre compte si la température des
idiots et des épileptiques est la môme que celle des
enfants normaux. Dans le cas particulier la recherche
a été continuée durant 11 jours. En voici les résultats.
MÉDICATION THYROÏDIENNE. 151
152 Idiotie myxoedémateuse.
27 et 28 janvier. - B ? toujours gaie, semble énervée. Elle
agite ses membres « comme des petits ressorts ».
29 janvier. - B... a vomi, n'a pas dormi. La voix se rap-
proche maintenant de la voix d'un enfant ordinaire. - Les
cheveux tombent au-dessus des oreilles. - Suspension du
traitement, ainsi que les 30, 31 janvier et 1er février.
31 janvier. - Agitation très grande, pleurs continuels. La
peau, qui n'est plus d'un jaune cireux, est chaude. Il y a de
l'oppression. Le soir, comme les accidents persistent, que
l'enfant souffre, et que la température est élevée, la surveil-
lante fait appeler l'interne de garde qui prescrit de l'antipy-
rine. Durant la nuit, l'agitation continue ; B... se tourne et
retourne sans cesse, tire ses doigts comme si elle voulait les
allonger, se gratte par tout le corps.
.{or février. Nuit bonne. Journée calme. 13... ne veut pas
manger, mais boit beaucoup de lait.
2 février. B... est très gaie, il faut s'occuper constamment
d'elle. Ses parents sont de plus en plus heureux de la voir
devenue attentive, rieuse, vive, car, au dire du père « c'était
une masse de chair que l'on faisait boire et manger, qui ne
remuait jamais et qu'on ne pouvait faire rire. » - Tremble-
ment de la tète et des membres « comme une petite vieille. e
Sueurs peu abondantes. - Reprise du traitement : un demi-
lobe tous les deux jours.
3 février. Le cuir chevelu est le siège de démangeaisons
qui portent l'enfant à se gratter. Les cheveux continuent à
tomber par grosses mèches. Ils sont devenus doux au tou-
cher, tandis qu'avant le traitement ils étaient rudes, sembla-
bles il des crins. La sensibilité exagérée au froid a disparu.
4-7 février. - L'appétit est redevenu excellent. L'enfant
conserve sa gaieté, frappe la table, les chaises, etc. : il faut
qu'elle fasse du bruit.
8 février. - Desquamation des pieds et des mains. Dispa-
rition du tremblement des mains. Respiration facile, la bou-
che fermée. Bave presque nulle. Lorsque B... dort elle est
calme et la langue est complètement rentrée dans la bouche
qui demeure close.
9 février. - Dès que l'enfant aperçoit ses parents, elle rit,
pousse des « ga, ga », agite ses mains pour exprimer sa joie.
Ses mouvements sont devenus vifs, elle saisit avec empres-
sement les biscuits que ses parents lui ont apportés. Elle tire
les cheveux et la barbe de son père. Elle essaie d'imiter ce
qu'on fait devant elle. Ainsi son père faisant claquer ses lè-
vres et disant ta-ta-ta, Lucie l'a très bien imité.
11 février. - L'amélioration continue, est très remarqua-
" MÉDICATION THYROÏDIENNE. 153
ble et frappe les personnes qui l'ont vue avant le traitement.
B... voudrait qu'on s'occupe sans cesse d'elle. Tout l'intéresse.
Elle s'efforce d'imiter les gestes qu'on exécute devant elle,
de causer, répète dada, gaga.
16 février. La mastication, qui était nulle, s'effectue con-
venablement. L'enfant est toujours heureuse de voir ses père
et mère et se montre très gentille avec eux. On dirait qu'elle
veut participer à leur bonheur de la voir transformée.
17 février. - Les cheveux qui étaient tombés en grande
quantité ou qu'on avait coupés, repoussent bien et sont moins
durs. Les croûtes du cuir chevelu disparaissent peu à peu :
On note une tendance de la colonne vertébrale à se voûter.
28 fèv. Desquamation du menton. B.. est grognon, mord
continuellement ses mains, souffre des dents, dont deux
viennent de percer.
29 février. - T.R. 37°, 4.
1er mars. B... est très agitée, maussade, se gratte conti-
nuellement, tire ses doigts « comme si elle voulait les allon-
5er n . Vomissements, diarrhée, température élevée (T.R.
37°, 4). - Suspension de la glande thyroïde.
6 mars. Tout malaise a cessé. B... est très gaie, gazouille
et ne pense qu'à manger. On reprend la glande thyroïde :
un demi-lobe tous les deux jours.
12 mars. Lucie est de plus en plus éveillée. Chaque jour
on constate un changement nouveau dans ses manières. Elle
est caressante et veut toujours être câlinée, mise en mouve-
ment, faire du bruit. Elle est contente d'entendre la musique.
La poussée des dents lui a fait prendre l'habitude de mettre
constamment les doigts dans sa bouche.
24 mars. Depuis quelque temps, la constipation a dispa-
ru ainsi que la;diarhée qui, à un moment, l'avait remplacée ;
Il... a trois ou quatre selles molles, principalement le matin.
Cette enfant qui, avant le traitement, ne comprenait rien,
ne portait attention à rien, s'intéresse aujourd'hui à tout.
Une porte qu'on ouvre la fait retourner. Elle incline sa tête
et pose sa joue sur celle de la personne qui la porte pour
qu'on l'embrasse. Si on crie un peu fort, elle fait la moue et
pleure, s'imaginant qu'on la gronde. Lorsqu'on lui met sa pè-
lerine et son chapeau, elle comprend que c'est pour aller à la
promenade et rit aux éclats. - Elle a bon appétit, mange de
tout, mastique bien et boit maintenant du vin sans grimacer.
Elle a plus de forces dans les reins, se tient mieux et plus
droite sur les bras.
26 mars, - Gonflement des gencives qui sont douloureuses.
154 Idiotie myxoedémateuse amélioration.
Plusieurs dents vont percer. Il n'y a plus de sueurs, ni de
desquamation.
30 mars. - On la met dans le chariot pour lui apprendre à
marcher. Elle ne s'y prête guère, mais pourtant fait aller ses
jambes.
1 ? 10 avril. - Il n'y a plus de croûtes du cuir chevelu. Les
cheveux repoussent plus fins et moins foncés. - Emmenée
en congé de 24 heures dans sa famille, les voisins ne pouvaient
la reconnaître, tellement elle s'est améliorée. - Son intelli-
gence se développe, elle s'occupe de tout ce qui se fait au-
tour d'elle, témoigne de l'affection aux enfants qui l'amusent.
2ï avril. - B... se tient très bien assise.
4 mai. - Les progrès continuent. Par gestes, elle dit merci,
bonjour, non. Elle est toujours gaie.- Les mains et les pieds
sont normaux, les doigts effilés. - Sueurs fréquentes de la
tète.
I 1 mai. - T.R. 39°, 9, bien que l'enfant n'ait pas pris de
glande hier. Suspension du traitement qu'on recommence le
13 mai.
18 mai. - Enervement depuis quelques jours. Sueurs assez
abondantes. Suspension de la glande thyroïde qui est reprise
le ..
Fig. 29. - B..., en juin 1896.
MÉDICATION THYROÏDIENNE. 155
25 mais Lucie se' rapproche de plus en plus des enfants
ordinaires. Elle essaie d'imiter tout ce qu'elle voit faire, de
causer et prononce « papa ». Ses forces augmentent et elle
se tient debout. Son sommeil est un peu agité ; elle est sou-
vent réveillée par des secousses dans les membres, elle se
rendort aussitôt.
Jili12.- Le traitement a été suspendu du 1er au 30 juin.
On a noté un peu de diarrhée. La parole se développe len-
tement : papa, auvoir, attends. Le caractère de B.. s'est modi-
fié : naguère très calme, inerte, elle devient coléreuse et dans
ses colères cherche à s'égratigner, se tire les cheveux.
1 juiltet. - Reprise du traitement.
Fig. 30. - en mai 189G.
156 Idiotie myxoedémateuse : amélioration.
21 juillet. - Progrès notables. Parole : papa, caca, pain
ay est (pour ça y est), auvoir (pour au revoir), etc.
Aperçoit-elle un objet qu'elle désire, elle le désigne avec
l'index et dit : euh ! A table, elle indique si elle veut manger
ou boire. Elle refuse par un signe négatif de la tête. Elle
distingue les personnes, témoigne ses préférences. Elle est
de plus en plus solide sur les jambes, veut être continuelle-
ment debout, se tient bien le long d'un banc, d'une table, se
plait beaucoup dans son chariot, enfin marche tenue par la
main. Elle comprend bien le jeu, est très joueuse ; il faut
constamment la distraire. Aucun malaise depuis le le'juillet.
31 juillet. - Suspension du traitement.
le août. - B... est atteinte de gastro-entérite avec un état
général mauvais, refroidissement des extrémités, vomisse-
ments, diarrhée abondante, selles séreuses, avec grumeaux
de lait, sans coloration verte. La diarrhée et les vomisse-
ments ont débuté il y a deux jours. T.R. 37°, .'i.
2 août. - Les vomissements et la diarrhée continuent ; ;-
douleurs dentaires. Matin : T. Il. 38°.
3 août. - L'ensemble des accidents n'a pas changé.
4 août. - Les vomissements ont cessé et la diarrhée a
diminué.
5-6 août. - Disparition progressive des accidents.
11 août. - B... est tout à fait remise, a recouvré sa gaîté
et mange avec appétit.
30 septembre. Peu à peu depuis la suspension du traite-
ment, nous avons vu reparaître la plupart des symptômes
myxoedémateux. L'infiltration graisseuse, les pseudo-lipomes
se sont reproduits. La face est redevenue bouffie, les lèvres
épaisses et déformées; les mains, les pieds ont de nouveau
augmenté de volume et revêtu l'aspect pachydermique. Par-
tout la peau a une coloration cireuse. La physionomie est en
partie revenue à son ancienne expression d'hébétude ; le re-
gard est éteint, les yeux sont souvent fixes. Le cuir chevelu
est réenvahi par les croûtes ; la langue s'est épaissie, est vio-
lacée et tend à sortir de la bouche comme autrefois. L'enfant
est oppressée, et la nuit, elle est très gênée pour respirer.
L'intelligence est obnubilée, La parole et la marche sont
restées ce qu'elles étaient à la fin de juillet. Le poids de l'en-
fant est de 10 k. 850.
En résumé, retour partiel à; L'état antérieur au traitement.
3 octobre. - On reprend le traitement : un gr. de glande
thyroïde du mouton.
MÉDICATION THYROÏDIENNE. 157
16 octobre. - Aucun malaise. Selles diarrhéiques. La phy-
sionomie s'est modifiée avantageusement. La langue est moins
volumineuse. L'infiltration graisseuse a déjà diminué (Poids :
10 k. 300 au lieu de 10 k. 850 ls 4 oct.). B... est redevenue très
taie, mange avec appétit, seule, se servant de sa cuillère
qu'elle porte bien à la bouche. Elle boit aussi seule, tenant
bien son gobelet. La station verticale s'affermit; B... se tient
de mieux en mieux aux meubles environnants.
25-28 octobre. - Cris, colères, attribués à la poussée de
nouvelles dents. Lucie bave, refuse de manger, met ses doigts
dans sa bouche.
17 novembre, - L'enfant supporte bien son traitement.
Bile devient malicieuse, imite tout ce qu'elle voit faire, imite
sa camarade Kram... dont elle copie les manières et les accès
de colère.
19 décembre. Interruption du traitement pendant cinq
jours (du 19 au 24 déc.) parce que la malade était souffrante,
toussait, avait de la diarrhée. -De temps à autre, crises den-
taires. - Desquamation abondante, prédominant aux mains
et surtout aux pieds qui changent de peau. Lucie a gagné en
activité; elle demande toujours qu'on la fasse marcher, cher-
che à grimper partout. Elle essaie de parler, prononce de
nouvelles syllabes, par exemple : aboiboi, pour à boire, ati
pour merci. Lorsqu'on a soin de la placer régulièrement sur
le vase, elle ne gâte pas et ne pleure plus quand on l'y pose.
31 décembre, - Progrès sensibles en tout. Si on n'avait
vu l'enfant il y a un an, avant le traitement, on ne croirait
pas que c'est la même enfant. Sa physionomie expressive la
rapproche des enfants normaux. Elle marche bien, tenue à la
main et il est probable que, sous peu, elle marchera seule.
Elle demande à aller sur le vase ce qui fait présumer que
bientôt elle sera propre. Le caractère est très gai, B... veut
toujours jouer, et ne s'endort plus comme autrefois : elle
aime le mouvement autant qu'il lui inspirait de répugnance.
Les ongles poussent mieux qu'à l'entrée et elle s'en sert quel-
quefois pour griffer ses compagnes. Elle mange seule, quoi-
qu'encore peu proprement. Elle fait des efforts pour parler,
pour imiter, etc., et son attention est très facile à fixer.
Résumons maintenant les particularités les plus sail-
lantes du traitement.
Durant la première période qui va du 18 janvier au
1 ? juin, puis du 1er au 31 juillet, soit 166 jours, B.. a
pris la glande thyroïde pendant 166 jours à la dose
158 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
d'un demi-lobe c'est-à-dire environ 0 gr. 962 chacun
de ces jours, au total 36 gr. 075.
Les résultats obtenus étaient vraiment remarquables
et nous aurions voulu vous amener, alors, la malade,
mais plusieurs circonstances nous en ont empêché.
Nous avons suspendu le traitement et, peu à peu.
nous avons vu réapparaître la plupart des symptômes
myxoedémateux, physiques et psychiques. Aussi nous
sommes-nous empressé de recourir de nouveau à la
médication thyroïdienne.
Durant la seconde période de traitement qui s'étend
du 3 octobre au 31 décembre, soit 89 jours, B.. a pris
un gramme de glande pendant 19 9 jours et un gramme
25 centigr. pendant 20 jours, soit au total 28 gr. 75.
La glande, dépouillée de la graisse, a été adminis-
trée, coupée finement, dans du bouillon.
La nutrition a été profondément modifiée : diminu-
tion de l'infiltration graisseuse, du volume de la
l'i. ;1.- IL., en décembre 1891;.
MÉDICATION THYROÏDIENNE. -159
langue, des lèvres, des paupières ; - disparition de
la dyspnée, de la cyanose; - régularisation des garde-
robes ; - retour de la peau à l'état presque normal ;
développement de la croissance qui a offert la progres-
sion suivante : '
Premier traitement.
160 Idiotie ITXORDI : IfATBUS1; : croissance.
Ott
Suspension du 1er août au 2 octobre.
Médication thyroïdienne. 161
sion du mois de juin, le poids remonte à 9 k. 900, s'abais-
se d'un kil. en juillet durant la reprise du traitement.
Pendant la suspension du traitement, le poids qui
était de 8 kil. 100 (31 juillet) est remonté à 10 kil. 850
(1er octobre) ; - la taille a continué à s'accroître et
s'est élevée de 732 millim. à 750 millim.
Durant le second traitement, le poids s'est abaissé
de 10 kil. 850 à 9 kil. 400 avec quelques oscillations,
puis est remonté à 10 hil. 500.
La tête a profité du développement général du sys-
tème osseux. Toutes ses dimensions, sauf la demi-cir-
conférence bi-auriculaire, se sont accrues, ainsi que
le montre le tahleau ci-après.
162 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE,
ment de la dentition qui a été, ici, très remarquable.
Les notes que nous avons fait prendre à différentes
reprises avant et pendant la médication thyroïdienne,
par M. le D'' Bouvet, médecin dentiste de Bicêtrc, et
qu'il a résumées ainsi qu'il suit, ne laissent aucun
doute à cet égard.
Etat de la dentition (Déc. 1896). - L'état actuel de la bou-
che et de la dentition du sujet présente un état si normal et
si satisfaisant qu'on ne peut croire, en relisant la première
observation prise en octobre 1895, qu'elle s'applique il l'en-
fant que nous avons aujourd'hui sous les yeux. A cette
époque, en effet, le maxillaire supérieur présentait un affais-
sement presque horizontal de la voûte palatine, tandis qu'ac-
tuellement le palais a pris sa voussure normale.
La langue qui, d'un volume énorme, pendait constamment
hors de la bouche, a diminué d'épaisseur pour reprendre des
dimensions régulières et se trouve constamment maintenue
dans la cavité buccale. *
La dentition, réduite en 1895 à un total de 6 incisives, se
présente aujourd'hui complète en nombre. Seules les secon-
des molaires n'ont pas entièrement achevé leur éruption,
leurs tubercules faisant seuls saillie hors des gencives. C'est
donc un ensemble de 14 dents qui ont effectué leur éruption
en l'espace de 15 mois et même un peu moins, car ce n'est
qu'à partir du mois de mars 1896 que nous avons constaté une
progression active du travail de sortie des dents. A dater de
cette époque, en effet, l'enfant a bénéficié d'un mouve-
ment de surnutrition générale extrêmement marqué, même
accéléré, comme pour compenser le ralentissement des an-
nées antérieures.
Il est toutefois résulté de ces sauts brusques du dévelop-
pement dentaire une légère irrégularité dans la rencontre
des dents des deux arcades qui fait que les incisives infé-
rieures heurtent la face postérieure des incisives supérieures
et empêchent le croisement complet des deux mâchoires.
Quant aux contacts encore non établis entre les prémolaires
ils ne tarderont pas à s'effectuer, la couronne de ces dents
devant encore subir un allongement qui régularisera complè-
tement les rapports dentaires.
Notons en passant la tendance de la colonne verté-
brale à s'incurver (notée le 17 février), accident qui ne
Médication thyroïdienne. 163
s'est point présenté durant le second traitement et
qui a été mentionné naguère par Telford Smith. Ce
phénomène tient-il iL l'emploi trop prolongé de la
glande thyroïde ou à l'ingestion d'une dose qui agirait
plus que la glande thyroïde à l'état normal, nous ne
savons : c'est là un point iL éclaircir (1).
Relativement aux modifications du sang , nous avons
eu la bonne fortune d'obtenir de notre collègue M.
Vaquez, dont vous connaissez la compétence dans ce
genre de recherches, qu'il voulût bien les étudier, ce
qu'il a fait à différentes phases clu traitement. Nous
lui laissons naturellement le soin de vous donner le
résultat de ses observations.
La voix a subi, sous l'influence du traitement, des
modifications qui ont été consignées par M. SuTTER,
professeur de chant dans notre service. En voici
l'analyse. A son entrée B... n'avait pas de voix;
on ne distinguait qu'un cri. - Douze jours après le
début du traitement, l'enfant avait un timbre de voix
sonore, avec une étendue de 4 notes et de 6 notes le
2 avril. Elle a gagné successivement 7, 8, 9 et enfin
10 notes à la fin de l'année 189G. La voix quoique assez
faible, est sonore et gagnera encore en étendue.
Dans l'ordre intellectuel, nous avons à mentionner
des progrès aussi remarquables que sous le rapport
physique. La physionomie s'est transformée, est deve-
nue expressive. L'enfant, auparavant inerte, obtuse,
indifférente, est gaie, enjouée, affectueuse, attentive :
elle s'intéresse à tout ce qui se fait autour d'elle, a de
la spontanéité, se souvient.
L'enfant devient de plus en plus propre, elle n'a pas
gâté une seule fois depuis 15 jours. Elle marche en
tenant légèrement par le doigt ; la crainte de tomber
parait seule l'empêcher de partir définivement.
(1) Voir : Danis (C). De l'influence de la glande thyroïde sur le développe-
ment du squelette. Tit. de Lymt; 18HO.
164 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
OBSERVATION II :
Sommaire. Rien de particulier du côté du père, - Rensei-
gnements insuffisants sur sa famille. - Mère, nerveuse,
migraineuse. - Grand'père, arrière grand'père et deux
oncles maternels, nombreux excès de boisson. - Grand'-
tante maternelle morte d'un cancer du sein. Deux oncles
maternels, morts de tuberculose pulmonaire. - Cousine
choréique.
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de G ans.
Rien d'anormal à la naissance. - Alimentation au lait de
chèvre. - Accès de colère. - Retard de la denlition. -
Persistance de la fontanelle antérieure. Hernie ombili-
cale. Sensibilité au froid. - Alopécie partielle. - Colo-
ration cireuse de la peau, etc.
Description de la malade en juillet 1895 : Elle présente tous
les caractères de l'idiotie avec cachexie pachydermique :
absence de glande thyroïde, nanisme, etc. - Etat de la
malade à la fin de décembre 189 ?
Premier traitement par la médication thyroïdienne : 18
janvier 1896-31 mai; Suspension du 1er au 30 juin.
Reprise du 1er au 31 juillet : Amélioration très notable.
- Suspension du 'ler août au 2 octobre.
Second traitement du 3 octobre à ce jour : Amélioration
considérable.
Kroem..., (Aline), née le 15 juillet 1891, à Paris, est entrée
à la Fondation Vallée le 17 juillet 1895.
Antécédents (Renseignements fournis par sa' mère les 23
juillet et 31 décembre 1895). - PÈRE, 32 ans, de nationalité
russe (Odessa), tailleur, cheveux noirs, nez camus, taille
petite (lu55). On ne trouve rien à signaler dans ses antécé-
dents, ni accidents nerveux, ni syphilis, ni alcoolisme, ni
fièvres intermittentes, etc. - On ne connaît aucune tare
nerveuse dans sa famille, sur laquelle les renseignements
sont un peu insuffisants.
Mère, 26 ans, couturière, nez aquilin, cheveux châtains,
nerveuse, migraineuse, ni convulsions, ni fièvres intermit-
tentes. Elle est originaire de Phalsbourg où, assure-t-elle, il
n'y a pas de goitreux. [Famille de la mère. - Père,
Antécédents héréditaires ET personnels. 165
nombreux excès de boisson, a quitté sa femme et est allé en
Amérique oit il est mort on ne sait de quoi. - Mère, 52 ans,
sobre, nul accident nerveux. Grand-père paternel, pas de
renseignements. Grand'mère paternelle morte à 76 ans,
on ne sait de quoi; elle avait toujours eu une bonne santé.
Grand-père maternel, fréquents excès alcooliques, mort
étant ivre. - Grand'mère maternelle morte à 82 ans. - Deux
oncles paternels étaient buveurs, trois autres sobres, sans
accidents névropathiques. Il en était de même de deux de ses
tantes; une troisième est morte d'un canceJ' du sein.
Quatre oncles et trois tantes maternels, rien à signaler, ni
chez leurs enfants. Deux frères ont succombé à la tuber-
culose pulmonaire. Quatre soeuJ's jouissent d'une bonne
santé. - Ni aliénés, ni difformes, ni goitreux, etc., dans le
reste de la famille, sauf une cousine atteinte de la chorée.]
Pas de consanguinité. - Différence d'âge de six ans. Un
seul enfant, la malade.
Notre malade. - Rien de particulier à la conception. -
Grossesse bonne, ni syncopes, ni émotions, etc., etc. Elle
buvait un demi-litre de café par jour (1). - Accouchement à
terme, naturel, en deux heures ; présentation du sommet.
A la naissance, pas d'asphyxie, aspect naturel, plutôt
grosse; la peau n'était ni jaune ni bouffie ; la langue n'était
pas épaissie. Au bout de quatre jours, elle fut envoyée en
nourrice où elle a été élevée au biberon avec du lait de
chèvre. Elle a toujours dormi beaucoup et n'a jamais eu de
convulsions ni d'accès de cris. Première dent il 8 mois. Elle
n'aurait eu aucune maladie, sauf deux bronchites légères
jusqu'à deux ans. Quand sa mère l'a reprise (2 ans), elle n'était
pas propre, ne parlait pas. Son ventre était fort, elle avait une
petite hernie ombilicale. « La fontanelle, dit la mère, n'était
pas fermée et ne l'est pas encore ». Kr.. était sujette à des
colères qui persistent. La voix a toujours été criarde. Kr.. est
très sensible au froid et aime qu'on l'approche du feu. La colo-
ration jaune, cireuse, de la peau n'aurait paru qu'au mois de
mars de cette année ( ? ). On n'a pas remarqué de crasses du
cuir chevelu. Kr.. est restée longtemps sans cheveux (2).
(1) Depuis que ces renseignements ont été donnés, il est né un second enfant t
qui a remué dès le quatrième mois tandis que la malade n'aurait remué qu'au
cinquième mois. Celle-ci aurait eu des mouvements bien moins prononcés
que la seconde, saine. - Cette dernière, âgée de 13 mois, n'a jamais eu de
convulsions, a marché à 11 mois, prononce quelques mots, parait intelligente
mais n'a encore que quatre dents.
(2) La mère, revue le 31 décembre 1S9;), dit que les cheveux n'ont poussé que
depuis son entrée à la Fondation (juillet 1895).
166 IDIOTIE myxoedémateuse.
Dans sa famille, elle mangeait comme ses parents, de
préférence des pommes de terre, mâchait très lentement,
buvait près d'un litre de lait par jour, ne vomissait pas, était
très constipée, mais n'a pas eu de chute du rectum.
L'attention est très difficile a fixer. L'enfant paraît affec-
tueuse. Depuis son arrivée à Paris, elle aurait eu la rougeole.
Pas de manifestations lymphatiques ni de vers.
État actuel. (Juillet). - L'enfant offre tous les caractères clas-
siques de l'idiotie my : \ : oedémateuse. - Tète brachycéphale.
Front haut, bombé un peu plus iL droite qu'à gauche ; bosses
pariétales et région occipitale saillantes. Cuir chevelu épais,
recouvert d'une desquamation furfuracée ; cheveux un peu
drus, implantés par touffes. Alopécie partielle au-dessus des
bosses frontales et au niveau du vertex. La fontanelle anté-
rieure n'est pas fermée et mesure 0,08 d'avant en arrière;
descend en avant jusqu'à la racine des cheveux ; 0,06 trans-
versalement. Ce qui frappe immédiatement, quand on examine
la face, c'est l'apparence bombée du front et le prognathisme.
Au-dessus des arcades sourcilières, on trouve une dépression
très accusée ; les sourcils sont fins, abondants dans leur
moitié interne, beaucoup moins fournis dans leur moitié
Fig. 32. - Kr... en juillet 1895.
Description DE la malade. 1G i
externe. Paupières gonflées, laissant apparaître à peine les
globes oculaires ; l'écartement habituel est de moins d'un cen-
timètre. Les cils, peu abondants aux paupières supérieures, le
sont moins encore aux paupièresinférieures qui sont le siège
d'une légère irritation. Les conjonctives palpébrales sont
décolorées, les sclérotiques blanches, les iris bleus, les pupilles
égales, contractiles. Aucune lésion oculaire, aucun trouble
fonctionnel. - Nez camus, narines elliptiques presque hori-
zontales. - Lèvres saillantes, épaisses. Bouche habituelle-
ment eHt)''OMue)'te ! aissant apercevoir la pointe delà langue. Les
joues sont grosses, épaisses, lipomateuses. Le menton, petit,
parait rejeté en arrière à cause de la saillie des lèvres.
Oreilles pâles, cireuses, collées, bien ourlées, avec un lobule
distinct. - Pas de coryza ni d'otorrhée. - La voûte palatine
n'est pas profonde ; elle est large, ogivale. - Langue hyper-
trophiée (Fig. 32.)
Cou très court : la palpation la plus minutieuse ne permet
pas de sentir la plus petite trace de glande THYROIDE. Dans
les creux sus-claviculaires, on découvre des masses grais-
seuses modérément développées.
Thorax court, large, bombé en avant ; régions pectorales
développées, graisseuses. La partie interscapulaire du dos
forme une convexité prononcée. Il ne semble pas y avoir de
déviation delà colonne vertébrale, cependant, au-dessus du sa-
crum, on trouve une véritable ensellure. - Le ventre est très
gros,surtout dans la partie sus-ombilicale. l'ointe de hernie
ombilicale.
Membres supérieurs. Ils sont épais, cylindriques ; les
doigts sont courts ainsi que les ongles qui cassent facilement.
Cyanose des téguments des mains ; sous les aisselles graisse
assez abondante.
Membres inférieurs. Cuisses grasses ainsi que les mollets.
Il existe partout une infiltration graisseuse prononcée. Pas
de cyanose des orteils.
Les mensurations comparatives des membres supérieurs et
inférieurs n'ont décélé aucune différence. Les mouvements
des membres supérieurs sont relativement vifs surtout quand
l'enfant est en colère. L'enfant ne marche pas seule mais se
traine lourdement en s'appuyant aux meubles.
Organes génitaux. Mont de Vénus et grandes lèvres grais-
seux.
168 Idiotie myxoedémateuse.
La peau a partout une coloration jaune cireuse, en parti-
culier à la face. Nombreuses veinules visibles sur la face
antérieure de la poitrine, entre les deux seins et jusqu'au
rebord des fausses côtes.
Voici les températures rectales de Kr... durant les
10 premiers jours de son admission :
Médication thyroïdienne.. , 169
nuellement, son sommeil est toujours agité, elle se plaint, se
tourne et retourne, ne veut pas rester couverte.
2 février. - L'enfant, qui paraît souffrir, pleure presque
toute la journée et ne dort pas, ce qu'explique le lendemain,
l'apparition d'un gonflement de la joue droite, dû à la poussée
des dents.
6 février. - Kr.. ne souffre plus, est gaie, est moins colé-
reuse, ne se fâche plus aussi facilement qu'autrefois, comprend
mieux le jeu. '
9 février. - Un demi-lobe tous les deux jours. Bon appétit.
Sommeil calme. Teint plus clair. Amélioration sensible ;
toutefois la transformation est moins rapide et partant moins
frappante que chez Borj..
1 : i. 3J. - Mr... en mui lS9li.
170 Idiotie 1fI'S(IED\(ATT : UFE.
2/( février. Kr.. comprend ce qu'on lui dit, essaie de par-
ier, imite ce qu'on fait devant elle, est gaie, n'éprouve aucun
malaise, dort bien. La desquamation commence aux pieds et
aux mains.
28 février. Une enfant la fait tomber, ce qui occasionne
une petite plaie au front. La douleur n'a pas été bien vive, car
Kr.. n'a pas pleuré.
29 février. Aline est mal à son aise, de mauvaise humeur,
vomit plusieurs fois, refuse démanger, boit beaucoup de lait.
Au lit, elle se découvre sans cesse. T. R.37u, 6, ce qui est un
chiffre relativement élevé pour elle. - Suspension de la
glande.
1er mal'8, - Aline n'a pas dormi, a été agitée. T.R. 370,7 7
(chez elle, une température fébrile). Toute la figure, y
compris les paupières, est gonflée. Elle montre qu'elle a
mal aux dents et au front. Dans l'après-midi, elle est de meil-
leure humeur, demande à manger, s'amuse avec ses compa-
gnes. - Soir : T. R. 37°, 4.
2 mars. -Nuit meilleure. L'enfant revient à ses anciennes
habitudes. Le soir la T. R. est redescendue à 36°, 8. - Le
traitement est repris le 6 mars.
17 mars. Aucun malaise. Kr... est toujours gaie, mais dès
qu'elle voit qu'on fait des caresses à Lucie 8..., sa camarade,
ou qu'on la prend sur ses genoux, elle pleure et entre dans
des rages furieuses, car elle est très jalouse. Elle connaît ses
petites camarades de l'infirmerie où elle couche.
31 mars. - Kr ? toujours capricieuse, devient moins ja-
louse. Elle apporte de la bonne volonté pour les exercices de
la parole. Quant à la marche, elle préfère s'y essayer le long
d'un lit ou à l'aide d'une chaise que d'aller dans son chariot :
dès qu'elle le voit, elle se met en colère, devient toute bleue
et on est amené il lui céder.
7-30 avril. - L'enfant est craintive, capricieuse, jalouse,
gourmande. Il lui arrive quelquefois de gâter la nuit.
Mat. - Bien qu'elle ait de la répugnance pour les exercices
de la marche, on est parvenu à lui faire faire, seule, quelques
pas. Elle continue à se mettre dans des colères violentes
quand on veut la placer dans le chariot, se mord les mains,
se cogne la tête, trépigne, pousse des cris épouvantables.
Elle supporte bien le traitement. (Fig. 33).
.Juin.- Kr... comprend bien tout ce qu'on lui dit, sait quand
Médication thyroïdienne. 171
elle fait mal et pleure dans la crainte qu'on ne la gronde.
Elle est très joueuse, taquine. Elle ne veut marcher qu'à, l'aide
de la main ou d'une chaise, va trop vite et tombe, ce qui l'ef-
fraie et la retarde. Appétit bon, pas de vomissements ni de
diarrhée, sueurs assez abondantes, occasionnées peut-être
plus par la température extérieure que par la médication qui
a été suspendue le 31 mai (Fig. 34).
Juillet. - L'enfant exécute seule quelques pas. Le carac-
tère est toujours irritable, volontaire. La médication a été
reprise le le, de ce mois et continuée jusqu'au 30.
- 1er octobre. - Poids : 12 k. 500 ; - taille : 0'" 77. L'enfant a
donc une tendance à l'obésité. Elle est devenue plus gâ-
teuse, moins gaie, plus coléreuse, plus méchante, frappe ses
camarades. Enfin elle n'a pas fait de progrès pour la marche.
La température est redescendue entre 36° et 37°. Il y a donc
une tendance vers le retour des symptômes myxoedémateux.
3 octobre. - On reprend le traitement : un gramme de
glande thyroïde.
13 octobre. - Aucun malaise, ni sueur, ni tremblement.
Selles régulières. Amaigrissement.
Fig. 34. - Kr... en juin 1896.
172 IDIOTIE myxoedémateuse.
20 octobre. - Kroem..., qui n'acceptait le médicament qu'a-
vec difficulté, le prend bien maintenant. Elle marche seule,
mais encore par caprices : s'il y a des spectateurs, elle ne
veut même pas se tenir debout. Dans le jour, elle est propre
demande le vase ; elle gâte encore la nuit.
31 octobre. - Elle marche de mieux en mieux; on dirait
une « poupée à ressorts» ; elle suit partout les personnes qui
la soignent; elle est de meilleure humeur, ne paraît ressentir
aucun malaise, dort bien; propre le jour, gâteuse la nuit.
Novembre. - L'amélioration s'accentue de jour en jour,
sans qu'on note aucun symptôme particulier. Les fonctions
digestives sont régulières, le sommeil est bon. Les accès de
Fig. ;la. - Kir ... en décembre 1890.
;, Médication thyroïdienne. 173
colère s'éloignent. Kr... paraît contente de marcher seule,
cherche à se faire comprendre, se montre affectueuse avec
ses parents. Elle est joueuse, malicieuse, distingue bien ses
camarades et les infirmières les unes des autres, s'efforce de
parler. - Depuis le 10 novembre, elle prend tous les deux
jours 1 de glande.
Décembre. - L'enfant est redevenue gâteuse. Elle se rend
compte qu'elle a mal fait et essaie de faire disparaitre ses excré-
ments. On dirait qu'elle se laisse aller un peu par taquinerie (1).
Les cheveux tombent, les ongles poussent naturellement.
Elle marche très-bien, trotte sans cesse, grimpe partout, aussi
est-on obligé de la surveiller très-attentivement. Son caractère
est moins violent, plus affectueux et, par ses càlineries, elle
essaie de faire oublier ses petits méfaits. - La parole s'est
un peu développée. Toutefois, Kr ? ne prononce encore dis-
tinctement qu'un petit nombre de mots : maman, papa, caca,
dodo, pot-pot, bonbon, nez, dent, tiens, dos, en haut, en bas, à
plus, feu, bas, pain, etc. En raison de ses colères, de la difficulté
de maintenir assez longtemps son attention, les exercices de
prononciation sont difficiles et relativement peu fructueux.
- L'appétit est bon, la mastication normale. Kr.. se sert de
la cuillère; pas de vomissements; selles régulières, sans
diarrhée. - Kr... aime iL être propre et dès que sa figure ou
ses mains sont sales, elle vient vers les infirmières pour qu'on
la nettoie. (Fig. 35).
Les détails dont nous avons fait suivre la première
observation nous autorisent à nous borner, au sujet
de Kr ? aux points principaux.
Durant le premier traitement qui a porté sur 166
jours, elle a pris un demi lobe de glande thyroïde
pendant 77 jours, soit 37 n'r. 01 L'amélioration due au
traitement a été très notable Ù tous égards.
Pendant la suspension (1 cr août au 2 octobre) nous
avons vu réapparaître une partie des symptômes my-
xoedémateux, toutefois à un degré moins prononcé que
chez Bor...
Au cours du second traitement du 2 octobre, à la fin
il) Actuellement 12"2 janvier 1801) elle est propre durant le jour, mais il lui
arrive souvent de gâter pendant la nuit.
174 Idiotie myxoedémateuse.
décembre ou 89 jours, Kr... a pris un gramme (19
jours), puis 1 gr. 25 de glande thyroïde (23 jours), soit
47 gr. 75 (1).
Les changements survenus dans le poids et la taille
sont résumés dans le tableau ci-après :
Premier traitement.
MÉDICATION THYROÏDIENNE. 175
t76 IDIOTIE )[YXU8DÉ)[ATEUSE.
que cela ressort des mensurations comparatives du ta-
bleau ci-dessous :
Médication thyroïdienne. 177
27 novembre. - Les gencives ulcérées au commencement
du mois sont aujourd'hui guéries.
1890. Mars. - L'état des gencives supérieures est très
satisfaisant. Elles ne saignent plus et ont leur teinte et leur
aspect normaux. L'évolution dentaire progresse manifeste-
ment, car les secondes molaires temporaires sont en voie
d'évolution.
Juin. - Les gencives sont en parfait état. Depuis quelques
mois, la dentition temporaire a fait de grands progrès dans
son évolution. Les secondes molaires inférieures ont achevé
leur éruption et les secondes molaires supérieures sont à demi
sorties de la gencive.
Août. - La première molaire inférieure droite est en évo-
lution.
Décembre. L'état actuel de la bouche et des dents de
Kra... se présente clans des conditions normales. L'éruption
des dents, fort retardée, il y a quinze mois, est aujourd'hui
complètement achevée. L'enfant présenterait son nombre
régulier de dents, si une première molaire supérieure gauche,
profondément cariée, n'avait dû être extraite antérieurement.
La première molaire supérieure droite, symétrique de la
dont enlevée, est aussi ravagée par la carie et quelques vesti-
ges de sa couronne persistent seuls sur la gencive. - Les
incisives supérieures sont les seules dents qui présentent une
anomalie de structure. Marquées d'érosions leur tiers infé-
rieur, le bord inférieur de la couronne érodée s'est éliminé peu
il peu prenant une forme concave semi-lunaire. Toutes les
autres dents ont effectué normalement et dans des condi-
tions de nutrition très suractivée, leur éruption depuis la pre-
mière observation, la couronne des secondes molaires étant
sortie jusqu'au niveau de son collet. - Les gencives sont très
saines, rosées, et portent l'indice d'une circulation et d'une
nutrition très régulières..
Relativement à la voix, voici le résumé des consta-
tations faites par M. Butter. Le 17 juillet 1895, K...
avait une étendue problablc de quatre notes. Le 10
février 1896, elle avait une étendue de cinq notes, le
2 avril huit notes, et enfin le 14 janvier 1897, une
étendue de neuf notes. Le timbre de la voix est sonore
et assez fort. Kr... a donc deux notes de moins dans
le haut que Bor... et une note de plus dans le grave.
Bourneville, Bicêtre, 1896. 12 *2
178 IDIOTIE MYXOEDËMATHUSE.
Elle aura un timbre de voix bien plus grave que Bor...
et plus fort avec l'âge.
Enfin, l'intelligence s'est sensiblement développée
à peu près sous tous les rapports. Le cal'nl' ! (}'e de ]\ : 1'...
s'est amélioré, les accès de colère se sont éloignés. Son
vocabulaire s'enrichit, quoique lentement. La marche
s'exécute d'une manière normale et l'inertie a fait
place au mouvement.
Messieurs,
Vous avez vu ces deux enfants il y un an. Elles
offraient à un degré très prononcé tous les symptômes
du myxoedùmc infantile. Vous pouvez j ug'er aujourd'hui
et par l'observation directe cl; par l'examen de leurs
photographies, prises plusieurs l'ois dans l'année, de
la transformation opérée chez elles par la médication
thyroïdienne.
XII.
Examen du sang de sujets myxoedémateux ;
Par M. II. VAQUEZ (1).
M. le D1' Bourneville a bien voulu s'en remettre à
nous du soin d'examiner le sang de sujets myxoedéma-
teux et de noter les modifications que la maladie et
son traitement pouvaient y déterminer. Nos études ont
porté sur sept sujets, les uns adultes, les autres plus
jeunes; mais nos observations n'ont trait aujourd'hui
qu'à deux de ces derniers, les nommées B... et K...
âgés de 4 ans et de 5 ans, dont l'observation vient d'ê-
tre communiquée à la Société.
180 Idiotie myxoedémateuse.
abaissé, à ouverture d'angle beaucoup plus grande, à
maxima et minima plus étendue, est hien celle que l'on
voit d'ordinaire dans les processus de rénovation du
sang. Cela est en rapport avec l'accroissement du
nombre des globules, si manifeste à ce moment (Fig.
36). L'examen de préparations sèches, colorées à
l'éosine et à l'liématéiuc a donné parallèlement les
résultats suivants :
Le 18 décembre, quelques globules rouges nucléés
en petit nombre peuvent être vus dans les prépara-
tions, on n'en retrouve pas dans les examens ulté-
rieurs.
Les variations des leucocytes sont peu accentuées ;
comme on le voit, d'après le tableau précédent, leur
nombre total est sensiblement égal à la normale. Le
rapport des variétés de globules hlancs entre elles,
n'a présenté que de légères différences. Cependant,
en procédant à la numération sur des chiffres impor-
Fig. : : 0.
Examen du sang. 181
tants de leucocytes (300 à 400), comme l'a bien recom-
mandé l'ÚCel11ment .rolly (Il J'ch. deméd. expérimentale,
juillet 189G), on voit que, le 18 décembre, le rapport
des mononucléaires aux polynucléaires est de 28 °j0,
alors que, le 15 mars il est de 40 ? : L'augmentation
s'est faite surtout par l'apparition plus fréquente de
grands mononucléaires à protoplasma peu coloré.
Nous avons déjà signalé ce fait clans une communica-
tion précédente (1).
Le deuxième cas a donné des résultats différents :
- 182 Idiotie MYXOEDÉMATEUSE.
tion, fait sur lequel le professeur Haycm a bien insisté.
Dans le cas présent, ces variations peuvent nous expli-
quer la raison de la divergence des auteurs, relati-
vement à la composition du sang chez les myxoedé-
mateux.
Tout d'abord il est certain que le nombre des 0'0-
bulges rouges, pour la raison précédente, peut varier
dans d'assez fortes proportions. Sous l'influence du
traitement on voit parfois, clans les premiers jours, le
chiffre des hématies s'abaisser. C'est coque nous avons
constaté chez Borj... et chez d'autres sujets. Il ne
faudrait pas croire Ù une hypoglobulie par anémie. La
disparition de la cyanose digitale, lorsqu'elle existe,
l'activité plus grande de la circulation et la diminu-
tion de la stase périphérique expliquent parfaitement
ce fait en apparence paradoxal. Quant au chiffre to-
tal des globules rouges, il peut être augmenté, normal,
ou abaissé. Lorsqu'il est augmenté, cela est toujours
en rapport avec une stase locale. Chez l'adulte, il peut-
être normal comme Mrc·11e11n, Schotteu l'ont remar-
qué. Chez l'enfant, en dehors cle ce cas spécial, il est
habituellement abaissé, et un des effets du traitement
est de le relever progressivement ; mais ce relèvement
n'est pas très rapide ; il faut, pour le produire, que le
traitement soit longtemps prolongé, et il est toujours
postérieur à l'augmentation de la valeur hémoglobi-
nique.
L'abaissement du chiffre de l'hémoglobine chez les
myxoedémateux, son augmentation à la suite du trai-
tement, ont été signalés par Mendel, Lichtenstcin,
Schotten, Masoin et nous-même. L'examen du sang
de 13... donne un résultat conforme à ce qui a été
avancé. Les mêmes modifications ont été constatées
également sur deux autres nl5wcccli,matcuwlu service
de M. Bourneville : Gan... âgée de 14 ans et \Y a ? âgée
de 20 ans. Dans le premier cas le chiffre de l'hémoglo-
bine, par million de globules rouges, passa de 27 . ye.
Examen du sang 183
à 38 ? g ? dans le deuxième de 32 p. g. à 34 p. g. Il
ne semble donc pas douteux que le chiffre de l'hémo-
globine soit diminué, d'une manière absolue et rela-
tive, dans le sang des m5-xcedémateux et qu'un des
premiers effets du traitement soit de le relever. Masoin
a constaté des modifications analogues chez les ani-
maux thyroïdectomisés. L'importance de ces conclu-
sions n'échappera il personne, car celles-ci sont capa-
bles d'expliquer plusieurs des phénomènes cliniques
propres au myxoedème. Seules, les conditions de la
circulation locale sont capables dans certains cas de
modifier les résultats.
Ce n'est pas tout. Kroepelin a signalé, et nous avons
noté après lui, l'augmentation du diamètre globu-
chez les myxoedémateux. Nos récentes observa-
tions conlirment encore cette donnée. Chez B..., avant
tout traitement lo diamètre globulaire atteignait 8 p. 24,
chiffre tout il fait insolite. Ultérieurement il descendit,
il 8 11 puis il 7 v, 90, pour se maintenir à ce chiffre
encore très élevé. Chez Kr... il varia de 7 8 8 à 7 9.
Dans le cas rapporté précédemment par nous, la
moyenne, avant le traitement était de 8 v. 10.
Dans cette même communication nous avons expli-
qué assez longuement la méthode suivie par nous,
d'après les conseils de notre maître, M. Malassez, pour
qu'il soit inutile de la rappeler ici. Cette méthode
donne, on le sait, une approximation presque parfaite,
puisqu'elle permet de réduire l'écart d'erreur à un
dixième de p.. environ. Nous dirons de plus que l'aug-
mentation de volume constatée ne peut pas tenir à la
concentration du sang, car elle diminue lorsque le
chiffre des globules augmente sous l'effet du traite-
ment. Elle ne tient pas non plus à une surcharge anor-
male en hémoglobine, puisque des modifications in-
verses, analogues à la précédente, ont toujours été
constatées. Le fait signalé par Kroepelin et par nous-
même parait donc avoir une signification réelle et
)84 Idiotie myxoedémateuse.
constante jusqu'à présent, parmi les altérations cons-
tatées par les auteurs, dans le sang des myxoedéma-
teux.
Nous avons, d'autre part, attiré l'attention sur la
présence de globules rouges noyaux dans le sang
de ces malades. Nous l'avions signalée dans le cas
rapporté devant la Société, avec M. Lcbrcton. Nous
l'avons retrouvée encore dans la première de nos ob-
servations. Avant le traitement, le sang de 13... conte-
nait, en très petit nombre il est vrai, des hématies
nucléées.
Nous avons eu l'occasion de confirmer encore ce fait
dans un cas de myxoedème chez un adulte, observé avec
notre ami le DI' Regnault. L'examen de nombreuses
préparations sèches nous a permis de retrouver plu-
sieurs de ces éléments. Ceux-ci, comme on le sait, ne
se retrouvent jamais, ou pour ainsi dire jamais dans
le sang, après la naissance. En dehors de l'anémie ex-
trême, où ils sont rares, due la leucémie oit ils peuvent
être très abondants, on n'cn connaît guère d'autres
exemples. Ce fait a donc une réelle valeur. Après le
traitement, il nous a été impossible de retrouver des
globules rouges nucléés dans le sang de nos malades.
Quant aux variations des globules blancs, nous n'en
dirons que quelques mots. La leucocytose constatée
au début par Mindel, Scliotten, etc., n'a pas été re-
trouvée par nous. Dans le cas de nous avons note ?
après le traitement, une modification dans le rapport
des divers éléments et une augmentation très mani-
feste des grands mononucléaires relativement au chiffre
des polynucléaires. Nous avons antérieurement rap-
porté une observation identique. Dans les autres cas,
nous n'avons pas pu arriver une conclusion lormclle.
Disons seulement que le chiffre clos leucocytes éosino-
philes ne nous a pas paru présenter de modifications,
Examen du sang. 185
si ce n'est chez un myxoedémateux adulte où il était
augmenté.
Bien que nos observations aient porté jusqu'ici sur
un nombre déjà considérable de myxoedémateux, puis-
que nous avons pu en examiner neuf, il serait téméraire
d'en tirer des conclusions définitives. Il y a des faits qui
paraissent acquis et que nous avons signalés au cours
de ce travail, d'autres seront probablement rappor-
tés. Nous continuerons nos recherches sur ce sujet,
en y joignant l'expérimentation, persuadé que l'on
pourra en tirer d'intéressantes déductions au point
de vue de la physiologie pathologique du myxoedèaie
et de la physiologie normale du corps thyroïde.
M. IIayem. M. Vaquez a trouvé chez les myxoedémateux
des globules rouges à noyau avec une anémie du deuxième
degré ; la fréquence des globules à noyau est d'autant plus
grande que l'enfant est plus jeune.
Chez l'adulte, les globules nucléés n'apparaissent que si
l'anémie atteint le troisième et surtout le quatrième degré,
il moins qu'il n'y ait une altération des organes hématopoiéti-
ques. Il semble donc que les myxoedémateux soient des infan-
tiles ayant conservé une aptitude particulière à former des
globules rouges à noyau.
M. Vaquez. Je ne saurais dire si la présence de globules
nucléés dans le sang des m5-xcedématem est véritablement
constante. Mais je ne crois pas qu'elle soit toujours imputable
à la seule anémie, car je l'ai aussi constatée chez un myxoe-
démateux adulte très faiblement anémique.
M. Marie. Les deux enfants présentés par M. Bourneville
avaient, quand on commença leur traitement, de trois à qua-
tre ans. Le résultat est assurément remarquable; mais les
myxoedémateux ne sont pas toujours aussi facilement modi-
fiables ; j'ai eu un insuccès complet chez deux malades de
deux ans il trois ans et demi. Il est vrai que tous deux étaient
albuminuriques, qu'ils avaient le pouls très fréquent, toutes
mauvaises conditions pour tolérer le traitement thyroïdien.
Je trouve que la dose employée par M. Bourneville, près de
l gramme, est considérable, car j'ai eu des accidents chez ces
deux jeunes enfants avec 25 centigrammes.
Médication thyroïdienne. 186
M. DEBOVE. M. Bourneville a-t-il observé des accidents ? 't
M. Bourneville. Oui-, dans la première série cle cas que j'ai
traités. Chez un malade de trente et un ans, j'ai observé clu
tremblement, l'accélération du pouls a 130, une tendance à la
syncope et au refroidissement, l'affaiblissement des jambes,
etc.
M. DEBOYE. Il est important de signaler ces accidents,
parce que je connais clés cas traités par le corps thyroïde,
suivis de mort et qui n'ont pas été publiés.
M. Bourneville. Vous avez parfaitement raison. Dès que
des symptômes un peu inquiétants apparaissent, j'ai soin de
suspendre le traitement ; c'est ce qui ressort des détails de
mes observations.
XIII.
Examen des urines de trois malades atteintes d'idiotie
myxoedémateuse Gangl... et Kræ...) avant
et pendant la médication thyroïdienne ;
PAR 1·A.1AU11,
Interne en pharmacie du service.
Nous avons essayé de recueillir pour analyse, les
urines de nos malades myxoedémateuses. Nous n'avons
réussi que pour trois d'entre elles. L'interne en phar-
macie du service, M. l'ajaud, a bien voulu se charger
des analyses qui ont été vérifiées par son chef immé-
diat, M. 13>;nTlroun, pharmacien de Bicêtre. Nous
reproduisons ces analyses à titre de document.
1° Wath... a été mise en traitement du 4 janvier au 1er mai
1890.
Urine du 26-27 décembre 1895. (Avant le traitement).
Caractères généraux.
Votante : 325 cm.
Aspect : louche avec dépôt blanc.
Couleur : jaune pale.
Odeur : fétide.
Réaction : légèrement acide.
Densité : 103'1. i.
Éléments normaux.
188 Idiotie MYYOEDÊMATEUSE.
Analyse DES urines. 189
. Observations ET conclusions.
Urine toujours très dense, a gagné considérablenent en
urée.
2° Gangl... a été mise en traitement du 4 janvier au ter
mai 1896.
Urine du 27-28 décembre 1895. (Avant le traitement).
Volume : zizi.
Aspect : louche avec dépôt blanc.
Couleur : jaune pâle. -
Odeur : ruineuse forte.
- Réaction : légèrement acide.
Densité il '15° : 1026.
Éléments normaux.
190 IDIOTIE -myxoedémateuse.
. Analyse des urines. 191
3° 1-roe... a été mise en traitement du 18 janvier au 31 mai,
puis du 1er au 31 juillet 1896, etc.
Urine du 2-3 novembre 1895. (1re analyse, avant tout traite-
ment.)
Volume : 530 cm3.
Aspect : louche avec dépôt blanc, léger, floconneux.
Couleur : jaune pâle.
Odeur : forte et repoussante.
Réaction : très légèrement acide.
Densité à 15° : 1016.
Éléments normaux.
192 . IDIOTIE myxoedémateuse.
Examen des urines. 193
Urine du 5-6 novembre 1895 (4° analyse, avant tout traitement).
Volume : 608 cm3
Aspect : comme le premier jour.
Couleur : idem.
Odeur : idem.
Réaction : idem.
Densité à 150 : 1022.
Éléments normaux.
,19'1 Idiotie MYXOËDÈMATEUSË.
, .
Éléments anormaux.
Albumine : traces non dosables.
Glycose : néant.
Pigment biliaire : néant.
Indican : des traces.. , ' z
Examen microscopique.
Totijotii,s des crist<iux de pliospliaiiiiiiioiiiico-ilia,,iiC,-
Toujours des cristaux de phosphate ammoniaco-magné-
siens et des granulations de phosphate de chaux.
Observations et conclusions.
Cette urine est toujours remarquable par son acidité à
peine -sensible.
Ces analyses, malgré leur intérêt, sont trop peu
nombreuses pour qu'on puisse en tirer des conclu-
sions. Elles constituent des documents qui pourront
être rapprochés d'analyses ultérieures. Notons seule-
ment l'absence d'albumine, contrairement à l'opi-
nion de quelques auteurs qui pensent que l'albumine
se trouve dans les urines de la plupart des myxoedé-
iiiateux.
ŸIV.
De l'action de la glande thyroïde sur la croissance et
l'obésité chez les idiots myxoedémateux, obèses ou
atteints de nanisme ;
Par BOUKKEVtLLE (1).
L'an dernier, à la session de Bordeaux de notre
Congrès, nous vous avons entretenus de l'action de la
glandc thyroïde chez trois idiots ou imbéciles myxoe-
démateux (1). Nous avons continué l'emploi de la mé-
dication thyroïdienne chez deux de ces malades mêmes,
chez deux autres du même groupe et, de plus, sur
des idiots ou des imbéciles obèses ou atteints d'un
arrêt de développement notable, mais n'atteignant pas
le degré de nanisme que vous avez pu observer chez
Bébé, le nain du roi Stanislas, que vous avez tous vu
au Musée lorrain.
§ I. - Idiotie myxoedémateuse.
Ons. I. \Va... (Augustine), née le 7 décembre 1875 (21 ans). I
Sa taille est demeurée stationnaire (88 cent.) du mois de mail
1888 au mois de janvier 1895. Sous l'influence d'un premier
traitement par la glande thyroïde (31 mai-fin septembre 1895)i
la taille s'est élevée à 92 centim. Soumise de nouveau à la
glande thyroïde., du G janvier 1896 au 1er mai, (113 jours; -,
554 gr. de glande thyroïde), la taille est montée de 93 centim.
à 06 centim. Le poids est descendu de 21 kg. 200 à 19 kg.
800. - Aucune action sur la puberté. [Nouveau traitement du
II) Communication au Congrès des aliénistes et ncurologistes, session de
Nal1C)', août 1896.
196 Idiotie myxoedémateuse.
3 octobre 1896 au 31 janvier 1897, soit 59 jours et 56 gr. 75 de
glande. La taille qui était de 97 cent. le 1er octobre était de
99 cent. le 31 janvier 4897].
005. IL - Gang... (Marie), était âgée de 14 ans quand elle
a été mise en traitement à la fin de mai 1895. Sa taille, qui
n'avait pas changé depuis son admission en août 1894 (89 cent.),
a augmenté de six centimètres en quatre mois (95 cent.). -
Nouveau traitement du 4 janvier au 1er mai 1896 : 75 jours;
36 gr. de glande ; la taille atteint 1'" 01 cent. - Le poids est
descendu de 16 kg. 700 à 14 kg. 300, puis est remonté à 15 kg.
900. -Aucune action sur la puberté (organes génitaux, glandes
mammaires).
013s. III. - Bor... (Lucie) est née le 14 décembre -1892. Elle
a été en traitement du 18 janvier 18% au 31 mai, puis du 1'"
au 31 juillet. Son poids, qui était de 8 kg. 600, est descendu à
7 kg. 300 en 20 jours, s'est relevé à 8 kg. 400 en 34 jours, est
redescendu à 8 kg., puis est remonté à 8 lcg. -1110, après 13 : f
jours. Durant la suspension du mois de juin, le poids remonte
à 9 kg. 100 et s'abaisse de nouveau d'un kilogramme durant
la reprise du traitement en juillet. - il ? a pris de la glande
thyroïde pendant 75 jours, à la dose d'un demi-lobe, au total
36 gr.
La taille était, avant le traitement, de 655 millim. ;
elle s'est élevée à 750 millim. ; soit un accroissement
de 95 millim. Selon Quetelet, chez les filles, la taille
est de 854 millim. à 3 ans - âge de notre malade -
et de 3 à 4ans, l'augmentation est de 61 millim. Bor...
en 6 mois a donc gagné plus du double de la crois-
sance naturelle.
[Nouveau traitement du 3 octobre 1896 au 31 janvier. 59
jours et 56 gr. 75 de glande. La taille qui était de 75 cent. le
1er octobre, était de 765 millim. le 31 janv. 1897].
Ous. IV. - Krce... est née le 15 juillet 1891. Le traitement
a été le même : un demi-lobe de glande thyroïde du mouton
tous les jours, puis tous les deux jours, en tout 77 jours et
37 gr. de glande. -
Le poids a offert des oscillations analogues à celles de 13...
Il s'est abaissé de 12 kg. 500 il 10 kg. 500 et est remonté à
11 kg. 300 (fin juillet).
Médication THYROIDIENNE. 197
La taille qui était au début de 69 cent. est montée à 77 cent.
A l'état physiologique, la taille moyenne à 4 ans, étant de
915 millim. (Quetelet), Kr... avait donc 225 millim. au-des-
sous de la moyenne. L'aeroissement de la taille ayant été de
8 cent. en six mois, et l'accroissement moyen normal étant
(de 4 à 5 ans) de 5 cent. 9, Kr... a donc grandi plus du double
de la croissance naturelle.
[\ouveau traitement du 3 octobre 1896 au 31 janvier 1897.
59 jours de traitement. 56 kg. 75 de glande. La taille s'est éle-
vée de 77 cent. à 79 cent.]. .
Dans ce groupe des idiots myxoeclénwteux,l'action
de l'ingestion de la glande thyroïde sur la taille est
tout à fait remarquable. Son action sur l'obésité est
aussi très nette. Toutefois, au bout d'un certain temps,
il y a une sorte d'arrêt suivi d'un retour vers l'aug-
mentation du poids.
§ IL - IDIOTS obèses.
Ons. I. - Dri... est née le 16 août z1881. " : '
Du mois de janvier 1894 au mois de juillet 1895 le poids
s'était élevé de 26 kgr. à 28 kgr. 500 et la taille de 1 m. 07 à
1 m. 08 seulement.
Du 23 juillet au 5 novembre 1895, la malade a ingéré un demi-
lobe de glande thyroïde tous les deux jours; puis du 9 octobre
au 4 novembre un demi-lobe tous les jours. Voici quelles ont
été les modifications de la taille et du poids.
198 Obésité.
Médication thyroïdienne. 199
200 Nanisme.-
10 janvier de cette année, elle atteignait le chiffre de
1 m. 235 millimètres.
Second traitement du 4 janvier au 1er juin 1896 (87 jours;
42 gr. de glande). - Le poids est descendu de 33 kg. à 30 kg,
500 et est remonté à 33 kg. 500. -- La taille était de -1"1235,
elle est montée à lm 26.
Les résultats ont été à peu près analogues à ceux
qu'on avait enregistrés durant le premier traite-
ment.
§ III. Idiots et imbéciles avec arrêt de développement ou
nanisme.
OBs. I. - Carl... est née le 17 avril 1881 (15 ans).
Médication thyroïdienne. 201'
, L'accroissement a.été très faible dans ce cas, Mais
il faut se souvenir que le malade a 23 ans et que
depuis le mois de janvier 1893 jusqu'au mois corres-
pondant de 1896, c'est-à-dire pendant TROIS ANS, la
taille était demeurée stationnaire (1 m. 45).
Otss. III. Vaill... (Gabriel-Eugène), est né le 2 mars 1880.
Traitement du 1 el' janvier au 31 j uille t 1896. Le poids qui était
de 32 kg., est descendu it 29 kg., puis est remonté à 37 kg. 900
(fin juillet). La taille qui était h lm 27 s'est élevée à lm '29.-
Fig. 37.
202 Nanisme.
182 jours; 87 'r. u5 de glande. [Second traitement du 1 août
au 31 novembre. Glande fraîche. Le poids est descendu à
3'1 1\.08 le -¡ ? oclobre, La taille est montée à 1 ? 30.]
OBS. IV. - Gautr... (Louis), né le 17 septembre 1872. Traite-
ment du 8 février au 30 juin 1896 (Tablettes de glande thyroïde,
une pendant 25 jours ; 2 jusqu'à la fin). H3 jours ; 9 gr. 30 en
tabloids Welcome and 13urrouglis.
Le poids qui était de 35 kg. 900, est monté il 37 kg. 500 au
bout de 8 jours, puis est redescendu iL 35 kg. 400 (21 mai). -
La taille qui était de 1'" 40 s'est élevée il 1"' 435. [Second trai-
tement du 1 CI' juillet au 15 août. Tablettes de Flourens et du
fin. 38.
Médication thyroïdienne, ' 203
30 septembre au 19 novembre, glande fraîche, - La taille est
restée la même.]
Ons, V, - Delcam ? (Léandre), nue le 7 octobre 1873
(Glande thyroïde de mouton), - 150 jours ; 72 gr. de glande
Le poids qui était de 37 ka. est monté est iL 38 kg. 980, puis
redescendu iL 37 lt, -- La taille qui était de 1"' 425 s'est éle-
vée iL 1m 455. [Second traitement du 1 ? juillet au 30 novem-
bre z1892. Glande fraîche, La taille est montée iL l'"47.]
Ons, VI. Quém... (Emile), né le 29 janvier 1878. Traitement
1 tablette pendant 25 jours et 2 jusqu'à la fin, en tout 143
jours ot 9 gr, 30 de glande on tabloïds.).
Le poids qui était de 211 kg. 700, ost descendu à 25 kg, 500
(29 mai), il ost remonté iL 27 kg. 500 (30 juin). - La taille, qui
était. de 1«> 32, s'est élevée iL 1111 35. [Second traitement du 1 ?
juillet nu 30 août, Glande fraîche, La taille est montée à -1 m 35G,]
Ons, VIL- Sienne\\ ? (Stanislas-Jean), né le 2 juillet 1877),
Traitement du 1'" janvior 1896 au 30 juin. (Glande thyroïde du
mouton).t82jours;88gr.50.
Lo poids qui était de 32 kg. ! jojo est descendu iL 27 kg. 700
du 8 février 189.6-au 30 juin. La taille qui était de l"v't7 s'est
élevée il lui .ldJ.
[Second traitement du ICI' juillet au 15 août, Glande fraîche,
Du 15 septembre au 10 octobre tablottos do "\Yo1cQn)e, La
taille est montée il 1 m 495.]
Ous. VIII. - 13ar1>..., 18 ans, hystérie et nanisme. 70
jours de traitement par les capsulos do th3rroïdine Yvon. :
Sa taille stationnaire lui 43 du 1 ? janvier 1895 au 1r jan-.
vier 189G n'a gagné que cinq millimètres durant le traitement, 1
§ IV. Considérations GÉNÉRALES. - Conclusions,
Pour chacun de nos malades, nous avons fait faire
les graphiques que vous avez devant vous. Les carrés
verts indiquent les jours où les malades ont pris lo
médicament ; la ligne rouge correspond à la tempe-
rature, la ligne bleue au poids, la ligne jaune à
la taille. Ces graphiques résument bien l'action de la
glande thyroïde, médicament qu'il importe, de surveil-
204 Conclusions.
1er avec le plus grand soin : à ce point de vue la tem-
pérature centrale rend d'incontestables services.
La médication thyroïdienne , chez les idiots my-
xoedémateux, facilite, rend plus fructueux, d'une façon
indubitable le traitement médico-pédagogique. Aussi
n'hésitons-nous pas à la mettre à contribution comme
nous sommes disposé à le faire pour toute autre
intervention thérapeutique, médicale ou non, comme
nous le ferions pour la craniectomie si l'anatomie
pathologique et les résultats négatifs de l'opération
que nous constatons chez les craniectomisés ne four-
nissaient des arguments péremptoires contre toute
intervention chirurgicale dans l'immense majorité
des cas.
Des détails que nous vous avons donnés, des gra-
phiques que vous voyez, ressort, Messieurs, avec
une grande netteté, selon nous, l'action de la glande
thyroïde sur la nutrition, en particulier sur la crois-
sance et sur l'obésité (1).
(1) Dans nos précédents travaux sur le myxoedéme infantile depuis les
communications que nous avons faites à l'Association française pour l'Avan-
cement des sciences en 1880, au Congrès des aliénistes de Rouen en 18f10, au
Congres deBordeaux11895 ,ulaSociétEdc Biotoyic, (l8janvier 1890), etc., nous
avons donné des indications bibliographiques nombreuses. Voir aussi :
Boullenger (F.), De l'action de la glande thyroïde sur la croissance, Tli.
de Paris, 1896, - Flourens (A.), Étude sur la médication thyroïdienne.
Bordeaux, 1890. - Sclilesinger, Revue médicale de Louvain, 1890, p. 493, etc.
XV.
Influence étiologique de l'alcoolisme sur l'idiotie ;
PAIl nOUR111"\¡IJ,J,E (1).
Dès le début de nos études médicales, le hasard a fait
que notre attention a été appelée sérieusement sur l'al-
coolisme et toutes les conséquences pathologiques et so-
ciales qui en résultent. Nous avons, en effet, collaboré à
cette époque, sur la demande de notre maitre Delasiauve,
avec son interne, notre excellent confrère, L. Duchesne,
son externe, E. Dugès, à la statistique qui figure dans la
thèse d'agrégation de Racle sur l'alcoolisme.
Depuis, la recherche de l'alcoolisme, comme agent étio-
logique, chez les malades adultes et enfants, n'a cessé
d'être l'objet de nos préoccupations et nous en avons con-
signé l'action néfaste dans de très nombreuses observa-
tions.
Parmi ces observations, celles qui composent les seize
volumes de nos Comptes rendus du service des enfants
idiots, imbéciles, arriérés, épileptiques, etc., de Bicêtre
(1880-1895) fournissent des renseignements tout à fait dé-
monstratifs. Toujours nous avons soin de relever l'exis-
tence ou l'absence des excès de boisson chez les père et
mère et chez les ascendants de nos malades. Toujours,
nous nous enquérons des conditions dans lesquelles la
conception a eu lieu, s'il y a des probabilités qu'elle s'est
effectuée alors que l'un des conjoints était en état d'ivresse,
si la mère a fait abus des boissons alcooliques ou des li-
queurs fortes durant sa grossesse, enfin si l'on a donné du
il) Communication à la Société de médecine puGlique et d'hygiène pro/'es-
sionnelle, séance du 25 novembre 18 ! JG,
206 Idiotie et alcoolisme.
vin plus que de raison aux enfants qui nous sont amenés.
Aujourd'hui, répondant à l'appel du bureau de notre
Société, nous vous adressons une statistique portant sur
mille de nos enfants de toute catégorie, entrés de 1880 à
1890. L'alcoolisme a été relevé :
XVI.
Alcoolisme ; hémiplégie gauche et épilepsie consécutives.
Sclérose atrophique ; pachyméningite et méningo-
encéphalite ; ,
PAR BOURNEVILLE ET RELLAY
SOMMAIRE. Père, rien de particulier. Arrière-grand-père
paternel, excès de boisson. - Grand-oncle paternel, excès
de boisson, suicidé. - Cousin bègue. - Mère, rien de
particulier. - Oncle maternel bègue. - Renseignements
insuffisants sur la famille de la mère- .
Pas de consanguinité, - Inégalité d'âge de 10 ans.
Enfant normal jusqu'à t ans. Excès alcooliques. - 1 ()l'esse.
complète : convulsions avec perte de connaissance pen-
dant trois jours. - Prédominance des convulsions aï
gauche. - Hémiplégie gauche consécutive. - Retour
partiel des mouvements.
AUTOPSIE. - Adhérences de la dure-mère au crâne. Pachy-
méningite à un degré très p1'ononcé. - Méningo-encépha-
lite auec épaississement très considérable de la pie-mère,
prédominant à droite.- Sclérose atrophique de l'hémis-
phère droit. - Dégénérliltions secondaires.
Pleurésie gauche, - Gangrène partielle du poumon du même
côté.
1 1
Nar... (Alix-Emile), né le 30 juin 1885 à Pagny-sur-Meuse,
est entré à Bicêtre (Service de M. Bourneville), le 9 mai 1895,
et y est mort le l4 décembre 1890. - Le certificat d'admission
porte que ce malade « présente des signes très manifestes
d'idiotie et d'épilepsie ». ?
Antécédents héréditaires. - Père, 45 ans, chauffeur mécani-
cien, bonne santé, ne boit pas, n'a jamais eu de convulsions,
ni aucune maladie, syphilis, etc. ; caractère très doux.
[Famille du père. » Son père et sa mère sont morts à un âge
208 Alcoolisme DE l'enfance.
avancé, sans présenter de troubles nerveux ; sobres. - Grand-
père maternel disparu en 1848; il était bien portant, maisfai-
sait beaucoup d'excès de boisson. - Grand'mère maternelle,
morte it 72 ans d'une maladie de coeur; ni démence, ni para-
lysie. Grand-père paternel, mort à 89 ans ; dans les der-
nières années de sa vie, il était « tombé en enfances
Grand'mère paternelle, morte à 8G ans, avait joui jusqu'alors
d'une bonne santé. - Une tante paternelle, âgée de 77 ans,
est très emportée. - Deux oncles maternels, l'un mort à 10
ans, de la variole, l'autre, alcoolique, s'est pendu à 42 ans. Un
frère (50 ans), et une soeur (52 ans), sobres et bien portants,
ainsi que leurs enfants qui n'auraient pas eu de convulsions.
- Un cousin issu de germain est bègue. - Pas d'aliénés, de
paralytiques, de difformes, etc., dans le reste de la famille.]
\Ii.nt : , 36 ans, en bonne santé, caractère très calme, ne boit
pas; ni convulsions, ni migraines. [Famille de la mère.
Père; 58 ans, se porte bien, sobre. - La mère, morte à 54 ans,
d'une maladie de coeur, était très emportée, sans avoir d'at-
taques de nerfs. - Pas de renseignements sur les grands-
parents paternels et maternels. -Deux frères et deux soeurs :
l'un d'eux est bègue; leurs enfants n'ont pas eu de convul-
sions. Rien à signaler dans le reste de la famille, pas d'idiots;
pas d'aliénés, pas d'épileptiques, pas d'autres bègues, etc.]
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 10 ans (père
plus âgé).
Trois enfants : Une fille de 13 ans, et une autre de Il ans;
toutes deux bien portantes, intelligentes, n'ont pas eu de con-
vulsions; 3° Notre malade.
Antécédents personnels. - Les parents étaient en bonne
santé au moment de la conception. Dans le début de sa gros-
se,'se, la mère a eu des idées noires parce qu'elle était mécon-
tente d'être de nouveau enceinte. Ni coups1, ni syncopes, ni
émotions ; elle a bu beaucoup de café. Accouchement natu-
rel, à terme, en deux heures, par le sommet, sans chloro-
forme. Elle ne peut dire si elle a eu peu ou beaucoup d'eau.
A la naissance, l'enfant avait assez bel aspect, n'offrait au-
cun signe d'asphyxie. La mère l'a d'abord nourri au sein, puis
au biberon (lait de vache et lait de chèvre), parce qu'elle
n'avait pas assez de lait. Il a eu sa première dent à un an; on
ne sait à quel âge la première ! dentition a été complète,
mais elle a été retardée. Sevré iL 14 mois, l'enfant a commencé
à marcher et à être propre à 15 mois, il parler à 18 mois.
f Alcoolisme : état de mal convulsif. 209
C'est à i ans, qu'aurait débuté la maladie nerveuse. Avant,
il ressemblait aux autres enfants, il fréquentait l'école du vil-
lage et on le disait très avancé pour son âge. Il ne se plaignait
pas de la tète, n'avait ni cauchemars, ni absences, ni secous-
ses, ni vers, n'avait pas fait de chutes, ni reçu de coups sur
la tète. Un soir il est pris de vomissements, attribués à une
indigestion; il s'endort et le lendemain au réveil, son père
le trouve sans connaissance et froid, la tète aux pieds du
lit. Pondant trois jours, les convulsions ont persisté sans
retour de la connaissance; elles étaient plus prononcées du
côté gauche. La bouche était fortement tirée à gauche ; tout
le côté gauche était paralysé. L'avant-bras était fléchi, le
pouce dans la main. Pendant 14 jours, l'enfant n'a pas quitté
le lit ; les convulsions reparurent, mais en s'espaçant. Le mé-
decin n'a pas parlé de méningite. Il a pensé que les accidents
étaient dus à l'alcool, car il paraît que l'enfant avait l'habi-
tude de boire les restes des verres des clients, qui venaient
boire citez aubergiste, avec lequel il habitait à
cette époque, ainsi que ses parents. On faisait tout pour l'en
empêcher, mais il trompait la surveillance. Le jour où il est
tombé malade, il avait bu au-delà de toute mesure, le nom-
bre des clients étant plus considérable que d'habitude en
raison de la fête du pays.
Après ces dix-sept jours de convulsions, l'intelligence avait
diminué ; l'enfant ne parlait plus comme auparavant ; il était
devenu très irritable, « on ne pouvait plus en venir à bout u.
Il répondait aux questions, mais avait perdu l'habitude de
questionner.
La paralysie du côté gauche s'est peu à peu améliorée; au
bout de 1 : ) mois, l'enfant courait très bien ; mais la jambe
gauche est toujours restée plus faible. Qant au bras gauche,
il serait toujours resté paralysé ; l'enfant avait de la peine à
porter la main sur la tète ; on devait l'habiller et le déshabil-
ler. '
A partir du moment oit il s'est relevé, il a toujours eu des
accès épileptiques. Rarement ces accès étaient isolés; tou-
jours 3 ou 4 accès se montraient dans la même journée, puis
il restait sept ou huit jours sans en avoir. n'a jamais eu plus
de S accès en 21 heures. Depuis janvier 1895 jusqu'à son entrée,
il aurait eu des accès presque tous les jours. En outre, dès le
début de son mal, il aurait été sujet à des vertiges et à des
secousses dans le côté gauche. Dans tous ses accès, et par-
fois dans ses vertiges, il urinait sous lui.
Au sur et à mesure des progrès de la maladie il devenait
plus grossier et plus violent, « il ne pouvait pas supporter
Bourneville, Bicêtre, 189G. 14
210 Alcoolisme ; hémiplégie gauche. 1-
les autres enfants ». Il montait sur les toits et cherchait iL s'en
aller. On était obligé de l'enfermer et parfois cle l'attacher
sur une chaise. Durant les dix-huit mois qui ont précédé son
entrée, il était à Paris chez ses père et mère. Là aussi ou
était obligé de l'attacher, sans cela il essayait de se sauver,
sansbut, sans motif. La parole était devenue difficile : il béga-
yait par moments. On s'est décidé iL le placer il cause de ses
fugues.
On ne voit pas d'autre cause de la maladie que l'abus des
boissons spiritucuscs. Le jour du début des accidents, attri-
bués aune indigestion, l'enfant était ivre-mort.
Du 9 au 13 mai, la température rectale, prise matin et soir,
a oscille entre 37° et 31o, 4, soit en moyenne 37", 17.
État actuel. L'enfant présente un état général satisfai-
sant. Son faciès a une expression peu intelligente, d'ailleurs
l'état intellectuel de l'enfant est très arriéré. Il comprend
certaines choses et répond difficilement en articulant avec
lenteur.
Le crâne a une forme brachycéphale et un volume normal.
La bosse pariétale droite est plus saillante que la gauche.
Le visage, déforme arrondie, présente un certain degré d'asy-
métrie faciale, le côté gaucho est moins développé. l'as cle
troubles oculaires, ni sensoriels.
Le tronc, poitrine, abdomen et bassin et l'examen des orga-
nes thoraciques et abdominaux ne révèlent rien de particulier.
Les organes génitaux sont bien conformés.
Les membres du côté droit sont normaux et jouissent de
tous les mouvements.
Les membres du côté gauche sont, au contraire, paralysés.
Le supérieur est absolument impotent, l'enfant est incapable
de s'en servir. Le bras est accolé au tronc, l'avant-bras
-fléchi, la main pendante, la face dorsale en avant. Au membre
inférieur la paralysie est incomplète, l'enfant marche, court
même, en trainant la jambe. Il n'y a pas de contracture, le
-réflexe rotulien parait aboli ( ? ). Les membres clu côté gauche
offrent un léger arrêt de développement ainsi que cela res-
sort des mensurations comparatives ci-après (p. 213).
L'enfant se tient assez bien à table, mange avec appé-
tit, sans voracité, mais malproprement, se barbouille le
visage et les mains. La mastication s'effectue d'une façon
-convenable. l'as de vomissements ; selles régulières, volon-
taires. Il ne gâte jamais dans le jour, mais, toutes les nuits,
il urine au lit.
'. N.. est assez long à s'endormir, puis dort tranquillement.
If;NIVGO-P`CI : PII : 1T.ITIï ; épilepsie. 21.1
Il ne sait ni s'habiller, ni se déshabiller, ni se laver. Ni tics,
ni céphalalgie, ni grincements de dents, ni cognements de
tête, ni troubles vaso-motcurs, ni bave.
Caractère assez doux, sentiments affectifs assez développés.
X.. a la manie de se sauver sans cesse dans les jardins. Il ne
sait ni lire, ni écrire, ni compter, etc.
La sensibilité générale et la sensibilité spéciale sont con-
servées. N.. parle assez bien, en nasonnant toutefois et
très lentement. L'attitude est régulière.
Juillet. - La face, le corps, et le pénil sont glabres. - La
circonférence de la verge et sa longueur sont de 5 cent.
Le prépuce dépasse le gland d'un centimètre, le méat est
normal. - Testicules égaux, de la dimension d'un oeuf de
pierrot.
189G. 5 janvier. T. R. à la période terminale d'un accès
37°, 4 ; - un quart d'heure après 37°, 4 ; deux heures après
37°, G.
G janvier. - T. R. à la lin d'un accès T. R. 37", 5; un
quart d'heure après, 37°, 7 ; deux heures après, 37°, 8.
10-20 janvier. L'enfant est à l'infirmerie parce que, à la
suite d'accès, il a de la peine à se tenir sur les jambes et est
de plus en plus en déchéance. Il en sort le 15 février. -
Elixii- polybromuré, sirop d'iodure de fer.
.to't't. Même traitement; hydrothérapie.
27 juin. La déchéance s'accentue. L'enfant dort après
ses accès et reste anéanti tout le reste de la journée. -L'at-
titude est devenue moins bonne. Nar... ne peut plus courir,
ni sauter ; il gâte souvent, et la parole devient de plus en
plus dillicile. Il bave fréquemment. On était parvenu à lui
apprendre ses lettres, il les a oubliés. La mémoire diminue.
Hydrothérapie, elc. ,
3 cléc. - Affaiblissement considérable. Etat infectieux. A
l'auscultation râles humides généralisés, gargouillement à la
base du poumon gauche. T. R. 39° le malin et 39°, 8 le soir.
4 cléc. T. R. 39° et o9", 7. 5 déc. T. R. 390, 6 et 39°, 8
6 déc. T. R. 39", 7 et 39°, S. - 7 cdéc. T. R. 39", 7 et 40°, 2. -
8 liée. T. H. 3cJ ? 6 et lieu ? 2. La situation s'aggrave ; l'état
général devient plus mauvais l'enfant maigrit. Les signes à
l'auscultation sont les mêmes.
9 dcc. T. R. 3f1 ? 8 et 40", 4. - 10 déc. T. R. /10°, - Il
déc. T. 1{. 40", 4 matin et soir. - 12 dés T. R. 39 ? 4 et 400, 5.
- 13 cléc. 'l'. R. 3Je et 40". - L'enfant meurt le Il décembre
à 3 heures 1/2 du matin (390, ù).
212 MAUCHEDKS accès.
POIDS, TAILLE, MEMBRES. 213
214 Alcoolisme r.nnÉnnAL ; pachyméningite.
pariéto-occipitalu du côté droit se succèdent six os wormiens
contigus. Le plus volumineux siège au niveau de l'angle
postérieur et supérieur du pariétal droit. Il mesure 25 mm,
sur 30 mm. A gauche, il n'y a que trois os wormiens allongés,
immédiatement en dehors de l'angle supérieur et postérieur
de l'occipital. - L'os frontal est fuyant et, au-dessus de sa
partie moyenne, on note une dépression très prononcée répon.
dant aux angles antérieurs et supérieurs des pariétaux. - Les
bosses pariétales sont proéminentes. On observe des deux
côtés une dépression des pariétaux au-dessus du tiers interne
de chacune des sutures pariéto-occipitales.
La dure-mère, épaisse, sans fausses membranes, offre de
nombreuses adhérences au crâne. La pie-mère se présente
non pas sous son aspect habituel, mais avec l'apparence de
la dure-mère tellement elle est épaissie, et cela presque sur
toute l'étendue des deux hémisphères. Sauf sur la face interne
des lobes temporal et occipital droits et sur la région pariétale
gauche où il existe une injection ecchymotique, la pie-mère
a une couleur blanchâtre. Lisse à sa face externe, elle est
rugueuse en maints endroits de sa face interne. Les deux
lobes frontaux sont accolés dans leur moitié postérieure. Il
en est de même des lèvres de la scissure de Sylvius. Les
nerfs olfactifs, les nerfs et les bandelettes optiques sont égaux.
- Le tubercule mamillaire, le pédoncule cérébral droits sont
plus petits qu'à gauche. La moitié correspondante cle la
protubérance est moins bombée que la gauche. La eyra-
mide antérieure droite est plus petite que la gauche. Les
olives sont égales. - Le liquide céphalo-rachidien est en
quantité ordinaire.
Sclérose cérébrale ; fÉNIN('0-rNCI"PITALITE. 215
Rolando est moins marqué. Les circonvolutions de la zone
rolandique sont les plus atrophiées; elles présentent un as-
pect vermiforme. - Les circonvolutions du lobe temporal
et le lobule pariétal inférieur sont relativement les mieux
développées, - A la surface de cet hémisphère on observe
des foyers de sclérose lobulaire atrophique et des lésions de
1W iiiJo-evcépluclite disséminées d'une façon irrégulière.
La sclérose porte surtout sur le lobule paracentral, sur le
lobe frontal, sur FA et l'.1; la méningo-encéphalite atteint le
lobule pariétal supérieur, la pariétale ascendante et '1'2,
elle est principalement accusée 3 la région du pli courbe où
la substance corticale présente l'aspect d'une vraie bouillie.
A la face interne la méningo-encéphalite porte sur la cir-
convolution du corps calleux. - Le ventricule latéral n'est
pas dilaté. - Les masses centrales ont leur aspect naturel
mais sont moins volumineuses qu'à gauche.
Hémisphère gauche. - Cet hémisphère est bien développé ;
ses circonvolutions sont bien dessinées et volumineuses. A
la coupe, la substance grise présente son épaisseur normale
et la substance blanche est également bien développée. Cet
hémisphère offre des lésions de méningo-encéphalite encore
plus étendues du' : 1 droite, presque généralisées ; toutefois,
elles sont moins profondes et n'intéressent que la couche
superficielle de la substance grise sans la détruire, comme
cela existe il droite. Ces lésions portent surtout sur les cir-
convolutions rolandiqucs et sur le lobule pariétal inférieur.
La scissure de Sylvius est profonde et a son .aspect normal,
de sorte qu'il faut écarter ses lèvres pour voir le lobule de
l'insula (pal. VIII). - Le ventricule latéral est sain. La cou-
che optique et le corps strié sont bien développés.
Cote. - Le corps thyroïde est petit. Pas de traces de thy-
mus. - Larynx normal.
Thorax. -La cavité pleurale gauche renferme une quan-
tité considérable d'un liquide louche, extrêmement fétide. -
La base du poumon gauche est le siège d'une vaste excava-
lion dont le contenu et les parois exhalent une odeur
gangreneuse très nette (265 ger.). Rien dans la cavité pleu-
rale droite. Le poumon de ce côté (260 gr.) présente simple-
ment de la congestion à la base. - CoeuJ', aucune lésion
(160 gr.).
Abdomen. - Foie (820 gr.) ; pas de calculs. - .Rate (70 gr.) ;
Pancréas (30 gr.) ; rein droit (80 gr.), rein gauche (85 gr.) ;
216 Alcoolisme infantile.
capsules sm ? e)ta6s, normaux ; vessie, pas de calculs, esto-
mac, intestins, rien de particulier.
Réflexions. I. Au point de vue de l'hérédité,
nous avons à noter du côté paternel des excès alcoo-
liques chez un arrière grand-père et un grand oncle,
qui s'est suicidé et du bégaiement chez un cousin ;
- du côté maternel, un oncle bègue.
Dans les antécédents personnels de l'enfant, nous
n'avons aucun accident à relever jusqu'à l'époque où
l'enfant, placé dans des conditions particulières, a
contracté l'habitude de boire. Cette habitude existait
déjà depuis quelque temps lorsque, à l'occasion de la
fête du village, il a bu jusqu") l'ivresse la plus com-
plète. C'est donc Ù l'alcool qu'il faut attribuer l'élut de
mal convulsif.
II. Les accidents aigus observés chez cet enfant
paraissent s'être développés sur un état alcoolique
antérieur, alcoolisme chronique. Chez un adulte,
en pareille circonstance, on aurait vu probablement
se produire l'ensemble symptomatique qui caractérise
le clelini2tn toetens. Cllcr l'enfant, et nous en avons
rapporté d'autres exemples, c'est plutôt par des convul-
sions que se manifeste l'action de l'alcool. L'état de
mal convulsif qui a duré (rois jours, dans le cas actuel,
expliquerait la sclérose ;)/)'o/x'f ? (encéphalite) avec
arrêt de développeme¡¡t de 10111 /'fI( : nti,phèi'C c{¡'oil,
atrophie du tubercule mamillaire, du pédoncule
cérébral, de la pyramide antérieure, delà moitié de la
protubérance, etc., du même côté, et atrophie croi-
sée de l'hémisphère cérébral droit et de l'hémis-
phere cérébelleux gauche. (PL. YII). Les convul-
sions intermittentes, et les symptômes concomit-
tants sur lesquels nous manquons de détails précis et
qui ont porté sur 1 jours, se seraient traduits par la
pachyméningite et la méninge-encéphalite. Celle-ci,
. Température APRÈS l'accès ET après la mort, 217
à son tour, rendrait compte des accès épileptiques et
de la démence.
III. Dans notre service, ce sont les suites cérébrales
deTalcoolisme que nous observons. Mais l'alcoolisme
chez l'enfant de même que chez l'adulte peut porter
son action nocive sur les autres organes. M. Lance-
reaux, dans une intéressante communication à l'Aca-
démie de médecine (1), a consigné l'observation de deux
fillettes, âgées l'une de 13 ans et demi, l'autre de 14
ans, atteintes de cirrhose alcoolique du foie. Tout
récemment, M. Marfan a fait une bonne leçon clinique
sur un Cas de cirrhose alcoolique chez une fillette de
4 ans (2), à laquelle, depuis l'âge de 15 mois, on faisait
ingurgiter des liqueurs, du vin, des grogs, etc. Ces
faits s'ajoutent à ceux qui ont été rapportés par Toed-
ten et Wilks, relatifs aussi à la cirrhose alcoolique
des enfants. -
Dans un mémoire intéressant de MM. A. Gilbert-
et L. Fournier : La cirrhose hypertrophique avec
ictère chronique chez les enfants (3), basé sur sept
observations, l'alcoolisme n'aurait joué aucun rôle.
Les auteurs insistent sur l'arrêt de la croissance,
relevé ultérieurement par M. Lancereaux. Le volume
LIIdes Guy's Hospital Ile ? ols contient un mémoire
important -de M. Fr. Taylor (4), reposant sur trois
cas où l'alcoolisme aurait été également absent.
IV. Nous avons vu que la température rectale
moyenne, de l'enfant d'après les températures prises
, matin et soir pendant 5 jours, était à peine de 37°, 2.
Cette constatation préalable permettait de se rendre
un compte plus précis des modifications produites
(0 Bulletin de l'Acad. de méd, séance du 13 ocL ISOfi. '
('11 Bul/ctin mc ! d, dll : ! Ojnnv : 'IS07,
(3) Cases of cÎ1'J'lwsi8 of thc Huer in children; with some remarhs on Cir-
1'lwsis, -
(4)'Revue mensuelle des maladies de l'enfance, juillet 1895, t. XIII, p. 309.
218 Température après l'accès ET après la mort.
sur la température par les accès. Les notations ther-
mométriques enregistrées, le 5 et le 6 janvier 1896, ont
mis en évidence l'augmentation de la température
sous l'influence des accès : ce qui confirme tout ce que
nous avons dit, appuyé sur les faits, depuis 18G9.
V. Puisque nous relevons ce qui a trait à la tempé-
rature, répétons que nous avons ici encore une nou-
velle démonstration en faveur de l'emploi du thermo-
mètre comme moyen de s'assurer de la réalité de la
mort. La température terminale, qui était de 39°, 5,
est descendue en 12 heures à 18°, température de la
salle où était déposé le cadavre.
XVII.
Alcoolisme : instabilité mentale, crises hystériformes,
guérison;
Par BOURNEVILLE et J. norrn (1).
L'alcoolisme infantile ne se traduit pas toujours
par des accidents et des lésions aussi graves que
ceux qui ont été consignés dans l'observation qui
précède et dans une autre que nous avons publiée
dans le Compte-rendu de notre service pour l'année
1886 sous ce titre : Alcoolisme chez un enfant de 4
ans ; démence et épilepsie symptomatiques de ménin-
go-encéphalite (2). Il est des cas où. les effets de
l'alcoolisme déterminent seulement des accès d'exci-
tation, des crises hystériformes, une vive irritabilité
du caractère et des troubles, passagers de l'intelli-
gence. Tel est, entre autres, le cas suivant.
SOMMAIRE. - Renseignements insuffisants sur la famille
paternelle. - Mère migraineuse. - Pas de consanguinité.
Inégalité d'âge de cinq ans. - Émotion vive au septième
mois de la grossesse avec perte de connaissance ? Ma1'che'
complète seulement à trois ans. Strabisme, opération. -
Syndactylie partielle. -A dix ans, influenza, otite suppu-
rée, trépanation. -A douze ans, modification du caractère,
violents accès de colère, céphalalgies, vanité exagérée. -
Excès de boisson. - Crises hystériformes fréquentes. -
Description du malade à treize ans. - Traitement médico-
(1) Cette observation a été publiée dans les Archives de Neurologie, 1896,
P.
(2) Compte rendu pour 188G, p. 142-153.
220 Alcoolisme infantile.
pédagogique. Disparition cles crises et de l'irritabilité
nerveuse. - Amélioration progressive de l'état moral.
Guérison.
` Camille X. C..., né à Paris en IS80, est entré a l'Institut
médico-pédagogique le J avril 1803.
Antécédents (Renseignements fournis par le père et la mère,
en mai 1893.) Père, quarante ans, bien portant, grand et
fort, marchand de vins en gros. Aucun renseignement [précis
sur sa famille. Il n'y aurait eu, toutefois, ni aliénés, ni nerveux,
ni apoplectiques, ni paralytiques, ni difformes dans sa famille
Mère, trente-cinq ans, bien portante, grande, forte, lym-
phatique, grosse, pas de convulsions de l'enfance, 71erceu.se.
facile à contrarier. Migraines accompagnées de vomissements
avant ou après les règles : étourdissements, troubles de la
vue : « Je vois double, comme du brouillard, quelquefois des
flammes, un jour ou deux avant mes époques. » Pas d'atta-
ques de nerfs. Pertes de connaissance de treize il quatorze
ans. Réglée il douze ans et demi. [Faillite de la mère.-
Père, bien portant, cultivateur, sobre. - Mère, douleurs dans
les jambes, pas de migraines. Aucun cas de. démence ou de
paralysie, etc.] Pas de consanguinité; inégalité d'âge de
cinq ans.
Deux enfants : 1° notre malade; 2" garçon de quatre ans,
bien venant, pas de convulsions, intelligent.
Notre malade, - Conception au dix-huitième mois du
mariage; entente complète, pas de chagrins. Grossesse
assez bonne, ni chute, ni coups; émotion au septième mois :
la mère a eu une discussion avec une femme qui l'avait insul-
tée ; syncope consécutive de quinze minutes, puis, douleurs
abdominales qui ont fait croire que l'accouchement allait
avoir lieu.- Accouchement v terme, naturel, sans chloro-
forme, assez long, les grandes douleurs ont duré douze heures.
- A la naissance, pas d'asphyxie, bel enfant; a un mois, il
pesait (J kilogrammes. Elevé au sein par sa mère, sevré iL
quatorze mois, marche à treize mois, mais n'a bien marché
qu'à trois ans, parole de bonne heure, propre à six mois, pre-
mière dent à quatre mois, dentition complète a dix-huit mois.
Rougeole à trois ans; scarlatine peu après. Pas de variole;
pas d'angine, cependant très « susceptible de la gorgo » ; le
Dr Reynier aurait conseillé la section des amygdales. Pas de
dartres, ni de toux.
Alcoolisme infantile : crises hystériformes. 221
L'enfant a été placé dès l'âge de sept ans dans une école
publique de la Creuse. A neuf ans, il acte à une école primaire
de Paris. On en était très content. Il a eu son certificat d'étu-
des à douze ans (1892).
En janvier 1890, influenza. En septembre, refroidissement,
otite suppurée à gauche ; trépané deux fois par AI. Mènière
en novembre 1890 et en décembre 1892.
Début de la maladie actuelle en décembre 1892. L'enfant
avait toujours eu un caractère dillicile, hautain et désobéis-
sant. A cette époque, il devient violent et emporté, n'en fait
qu'à sa tète, se moque de sa mère, la menace. Depuis le mois
de janvier 1893, accès de colère à la moindres contrariété ;
frappe clu pied, renverse les chaises. Il vent une bicyclette,
son père refuse, il se sauve et va en louer une.
En février, première crise nerveuse : l'enfant était en train
de déjeuner, il s'est trouvé mal, sans motif, sans contrariété ;
il est tombé de sa chaise, son corps était « mou »; il a repris
connaissance au bout de dix minutes et a pleuré abondamment
en revenant à lui. Trois jours après, deuxième crise, même
aspect, on venait de lui reprocher sa mauvaise tenue à table.
Depuis, crises fréquentes, sans perles cle connaissance ; ce
sont plutôt des accès de colère : il se roule par terre, se cogne
la tète, se tire les cheveux; cela lui arrive tous les jours;
c'est toujours après une contrariété. Depuis le mois de
février, céplinlalgies; pas de vertiges, parfois ; face un peu
congestionnée.
Idées de grandeur, ne veut pas travailler : « Je ne suis pas
né pour cela, » ne dé répéter. Il ne veut même pas
débarrasser la table, après les repas. Onanisme depuis l'âge
de cinq ou six ans.
Les parents ne savent à quoi attribue ! ' la maladie, ils s'ac-
cusent l'un et l'autre de l'avoir trop gâté. Ils pensent qu'il
a dû boire en cachette clans le débit de vins qu'ils tiennent.
Du reste l'enfant nous l'a avoué lui-même plus tard. « Le
matin surtout, et quelquefois dans la journée, nous a-t-il dit,
quand j'avais soif, je prenais au comptoir cle ma mère un bon
verre de vin blanc, et quand il me fallait entamer une bou-
teille, je la vidais pour que mes parents ne s'en aperçoivent
pas. » Une fois, en dinant chez des amis, il s'est grisé avec
du cidre, il si; roulait par terre et ne voulait pas se coucher.
Aucun enfant de la famille ne lui ressemble.
Etal du malade à son entrée le 9 avril 1893 à l'Institut
médico-pédagogique. a) Liât physique. - Physionomie
222 Description DU malade.
intelligente et malicieuse ; les yeux sont vifs, mais jamais
complètement ouverts, paupières en accent circonflexe;
lorsque l'enfant rit aux éclats, ce qui lui arrive souvent, les
yeux sont presque entièrement ferr.tQs. L'oeil gauche est plus
fermé que le droit. L'enfant a subi une opération sur l'ccil
gauche parce qu'il louchait. L'iris est marron foncé. Les cils
sont noirs et courts, les sourcils clairsemés et blonds avec
une forte solution de continuité ; les cheveux châtain clair,
abondants, assez tins. Peau satinée, teint mat; visage rond,
joues pleines, légèrement rosées. Léger affaissement dans
l'habitude générale du corps. La tête est un peu rejetée en
arrière, le tronc arqué, les bras pendants, les jambes molles.
Légère palmature entre les deuxième et troisième orteils des
deux pieds qui sont creux. A la main gauche, cicatrice consé-
cutive probablement à un abcès scrofuleux. Poitrine et tronc
bien conformés. Cicatrice en dehors de l'olécrâne gauche,
cicatrice de vésicatoire sur la partie moyenne du bras gauche.
Derrière l'oreille gauche, cicatrice se terminant en infundi-
bnlum. La peau est fine, sensible aux contusions. Les oreilles
sont bien faites, la gauche coule toujours.
Puberté : visage glabre ainsi que les aisselles, le tronc et
les membres. Rien au pénil ni aux bourses qui sont pendantes,
plus à gauche droite. Testicules égaux, de la grosseur
d'une noix moyenne. Tendance au varicocèle il gauche.
Prépuce un peu long. Méat normal, un peu dirigé en bas,
légère adhérence à la base du gland en haut.
b) Etat physiologique. - Un peu apathique, se fatigue vite,
aime à changer d'occupation, est capable de montrer de l'ac-
tivité, mais pour un moment seulement. Quand il marche, il
fléchit sur ses jambes, et prend le bras de la personne qui
l'accompagne. - Très irritable, un rien l'agace et l'énen'e.- z
Parle haut et fort, bavarde sans cesse. - Très sensible au
froid. - l'as de mouvements spasmodiques. - Les mouve-
ments volontaires s'accomplissent normalement. - Les orga-
nes des sens ne présentent rien de particulier, sinon la vue
qui est faible; myopie accentuée. - Fonctions respiratoires,
circulatoires et digestives, rien de particulier. Tendance à la
constipation. - Sommeil bon; pas de cauchemars.
c) Etat psychologique. L'intelligence paraît être norma-
lement développée. L'attention el la réJ1exion sont possibles.
L'enfant arrive il résoudre des problèmes assez compliqués.
Dans sa conversation, on sent qu'il raisonne assez bien pour
son âge, ne dit jamais de naïvetés et fait preuve souvent de
Alcoolisme infantile : crises hystériformes. 223
beaucoup de logique dans ses déductions. A l'entendre causer,
on constate qu'il a lu beaucoup de romans-feuilletons, a fré-
(IL[enté le théâtre, aimait les drames, nous dit-il. - Se fait
une idée juste de ce qui l'environne, a du reste uns instruc-
tion élémentaire convenable. Pèche plus par étourderie que
par ignorance, - Imagination peu vive.- Préfère le calcul à
toute autre occupation scolaire. - En résumé, au point de
vue du développement intellectuel, l'enfant a les apparences
d'un enfant normal.
d) Etat instinctif et moral. - Camille a l'instinct de la
conservation personnelle très développé. Peureux, il n'irait pas
seul dans un appartement, même dans la journée, et cepen-
dant si l'on n'y veillait, il se livrerait à toutes sortes d'exercices
dangereux. Peu d'ordre dans ses affaires, il faut lui dire à
chaque instant de ranger ce dont il vient de se servir. -Aime
à dire que telle ou telle chose lui appartient, n'est pas égoïste.
- Foncièrement indépendant et indiscipliné. Ne fera telle ou
telle chose que parce qu'elle lui a été défendue. Si on lui
résiste, se met à crier, à frapper du pied et à se rouler par
terre; affecte de ne pas faire comme les autres, mauvaise te-
nue en classe, à table oit il se couche a moitié près de son
assiette. Siffle continuellement.. - Très vaniteux, dans les
discussions tranche en maître. Sait et connaît tout. Très fat.
- N'a de respect pour qui que ce soit. Il faut prendre beau-
coup de ménagements pour lui parler. Aime qu'on s'occupe
de lui. Sentiments affectifs exagérés; souvent importun par
ses câlineries qu'il prodigue à la personne dont il veut obtenir
quelque chose.Très osé, se rend vite familier. - Parait
avoir la notion du bien et du mal, il lui arrive de morigéner
ses camarades. Volonté active et énergique ; quand on veut
la contrecarrer, crises de colère. - Aime la société. - Ten-
dance iL l'onanisme. Yeux cernés au réveil. Instinct génésique
précocement développé.
1'untTrocsT. - Bain d'un quart d'heure tous les huit jours,
douche complète en jet en éventail (30 secondes) tous les
jours, gymnastique et travaux manuels, travail intellectuel à
heure fixe, traitement moral.- Injections auriculaires à l'eau
boriquée tiède.
` 1833. Avril. Le jour de son entrée à l'Institut médico-
pédagogique, Camille C... a eu une violente crise de colère
accompagnée de mouvements convulsifs. Ses parents durent
le quitter à l'improvistc. Dès qu'il s'en aperçoit, Camille se
met à pousser de véritables hurlements : il se jette il terre en
524 Alcoolisme infantile.
donnant des coups de pied et des coups de poing. On ne peut
l'approcher. Par moments son corps se raidit et paraît agité
de mouvements convulsifs. 11 ne s'arrête pas cle crier. Grossiè-
retés obscènes à l'adresse des personnes qui sont près delui.
Nous faisons semblant de ne pas nous occuper de lui, nous
le plaçons sur une pelouse et nous nous éloignons en le sur-
veillant. Pendant une heure et quart, Camille C... n'a cessé
de crier, de pleurer et de se rouler en projetant les pieds et
les poings de tous cotés. La face est congestionnée, les oreilles
sont pourpres. Il ne s'arrêta que lorsque ses forces furent à
bout. Il resta un quart d'heure immobile, il paraissait essou-
né. Nous nous approchâmes de lui en l'invitant à se lever, il
nous écouta, se leva et nous suivit. Il resta une heure sans
paraître faire attention iL ce que nous lui disions. 11 se mit à
table, mangea modérément. La nuit fut lionne, le lendemain
il était habitué à son nouveau genre de vie. Il fut aussitôt
soumis iL un travail régulier.
Mai.- Même traitement. Nous constatons déjà une sérieuse
améloration. Camille travaille à heure fixe, il s'occupe au
jardinage et iL des travaux de terrassement. 11 a fallu insister
beaucoup pour l'entraîner. S'y est mis au bout de deux se-
maines. Se rend utile. Fait lire de petits camarades plus
jeunes que lui. A eu cependant une petite crise de colère le
1 7, parce qu'on ne voulait pas lui prêter un outil dangereux.
Camille a frappé du pied, crié et pleuré, mais comme 011 ne fit
pas attention à lui, il s'est calmé lui-même, et est venu faire
des excuses. Durée vingt minutes, - Le 21 mai, l'enfant va
passer chez lui les fêtes de la Pentecôte. Il rentre sans difli-
culté le 21. Ses parents sont très heureux de l'amélioration
obtenue. Durant ce mois, l'écoulement de l'oreille gauche
a persisté, mais les douleurs que l'enfant éprouvait paraissent
avoir disparu.
Juin. Même traitement : les injections auriculaires à
l'eau boriquée, sont remplacées par des injections d'une solu-
tion de sublimé. Le mois de juin a été bon. Une crise de
colère le li,, qui n'a pas duré cinq minutes. L'amélioration
s'est accentuée. L'enfant est docile aux ordres qu'on lui donne.
Sa tenue est moins négligée. A table, il ne s'accoude plus, Se
fait rien sans demander la permission. Fait preuve de persé-
vérance dans son travail. Ne laisse plus un travail inachevé.
Beaucoup plus sociable, joue sans se disputer avec des cama-
rades plus jeunes que lui. L'enfant ne parait plus avoir de
migraines. L'écoulement de l'oreille gauche est beaucoup
moins abondant.
Traitement MÉDICO-PÉDAGOGIQUE : guérison. 225
Juillet. - Même traitement. L'enfant est de plus en plus*
tranquillle. - Au li juillet, ses parents le font sortir une se-
conde fois. Ils en sont tellement contents qu'ils décident, un
peu prématurément peut-être, de le reprendre ;\ la fin du
mois. -Nous avons ou l'occasion de revoir Camille C... iL trois
reprises différentes depuis son départ de l'Institut meclico-pé-
dagogique. Toutes les fois les parents nous en ont fait des
éloges. En nous quittant il a été passer deux mois iL la cam-
pagne et, en 1S')S, il est entré comme interne au collège de
Sens, où il est encore en ce moment. Il est en quatrième
moderne, et dans une classe de vingt-quatre élèves, il occupe
le huitième rang. Nous avons pu lire ses bulletins trimestriels,
ils fournissent tous sur le travail de Camille de bonnes notes,
et ne se plaignent en rien de sa conduite (janvier 1896).
Les accidents observés chez cet enfant consistaient
beaucoup plus en troubles moraux, qu'en troubles
intellectuels. L'irritabilité croissante du caractère, les
accès de colère et les crises nerveuses nous parais-
sent devoir être rattachés à l'alcoolisme. Grâce à l'iso-
lement qui a supprimé les excès de boisson, à l'hy-
drothérapie et au traitement moral, nous avons obtenu
une assez prompte guérison. Deux ans et demi se sont
écoulés depuis, et il n'y a pas eu de rechute.
Ce malade et le précédent répondent à deux des
formes de l'alcoolisme dans la première enfance et z
clans la seconde enfance. Mais, dans la seconde
période de l'enfance et dans l'adolescence, on peut
observer une troisième forme : la dipsomanie. Alors,
par accès, on note une propulsion irrésistible à
boire, surtout des liqueurs fortes, et on voit se
dérouler tous les symptômes, se produire tous les
actes qui sont le cortège habituel de la dipsomanie
chez l'adulte, avec cette différence que, tandis que
chez l'adulte, après l'accès de dipsomanie, l'intelli-
gence peut revenir à son degré antérieur, chez l'en-
fant ou l'adolescent, elle est affaiblie et est compro-
mise si les accidents se multiplient.
Bourneville, Bicêtre, 1896. 15
XVIII.
Imbécillité ; paraplégie spasmodique ;
(Maladie cle Little)
Par BOURNEVILLE ET UELLAY.
Les maladies nerveuses chroniques de l'enfance
- ou remontant à l'enfance - deviennent chaque
jour l'objet de travaux intéressants de plus en plus
nombreux. Nous n'avons pas cessé depuis longtemps
de contribuer à leur étude clinique et anatomo-pa-
thologique en publiant - soit seul, soit en collaho-
ration avec nos internes - des exemples de pres-
que toutes les affections cérébrales de l'enfance. Les
affections paralytiques et spasmodiques y occupent
une large place : 1° diplégies, dues à des lésions
symétriques, foyers anciens de ramollissement ou
d'hémorragie (pseudo-porencéphalie), méningo en-
céphalite, sclérose atrophique et hypertrophique,
hydrocéphalie, porencéphalic vraie, etc. ; - 2° 1'tigi-
(lité spasmodique, sous forme diplégique ou paraplé-
gique ; - 3° Athétose double; - 4° chorée générali-
sée ; 5° hémiplégie avec contracture permanente,
accompagnée ou nom d'exacerbation spasmodique,
compliquée d'arrêt de développement, d'hémichoréc,
d'athétose, d'épilepsie, etc. Ces travaux qui ont paru
dans le Progrès médical, clans les Archives de neu-
rologie, dans des thèses inaugurales de nos élèves
et dans les Comptes-rendus annuels de Bicêtre
de 1880 à 1897, n'ont pas toujours eu l'honneur d'ap-
peler l'attention. Peut-être l'avenir leur réserve-t-il
Antécédents héréditaires. 227
un sort meilleur. Nous poursuivrons l'oeuvre commen-
cée, en rapportant successivement de nouvelles obser-
vations qui, comme la suivante, exemple typique de
paraplégie spasmodique infantile, nous paraissent
offrir un réel intérêt.
SOI111AIR1 ? Père, céphalalgies. - Grand-père paternel, ex-
cès de boisson. Grand'mère paternelle, hémiplégie droite.
Un oncle paternel, mort d'apoplexie. - Un autre mort d'un
cancer de l'estomac.
Mère, très nerveuse, peurs durant l'enfance, céphalalgies,
hémiplégie transitoire. - Grand-père maternel, excès de
boisson, mort de tuberculose. Oncle maternel, ivrogne. -
Cousine germaine, crises nerveuses. - Trois petits cou-
sins, morts de convulsions. - Pas de consanguinité.
Inégalité d'âge de 9 anS.-Cinq frères ou soeurs morts de
convulsions.
Pertes prolongées durant la grossesse. - Pas d'asphyxie à
la naissance. - Constatation de l'arrêt de l'intelligence à
onze mois. Impossibilité de la station debout à 2 ans et
demi, attribuée à un mal de Pott, qui n'a jamais existé.
Membres inférieurs ratatinés sur le tronc, contractu-
res. - Marche à 6 ans et demi, les jambes fléchies. -
Développement de la parole au même âge. Rougeole à 3
ans.
Description du malade en 1886 et en '1896, - Développement
physique : poids, taille, tête, membres, puberté. - Amé-
lioration intellectuelle très limitée ; améliorationphysique.
Maladies intercurrentes de 1886 à 1896.
Lupi.. (Iuyènc), né à Paris le 18 octobre 1875, a été admis le
17 avril 1886 à Bicêtre.
Antécédents héréditaires. -Père, 55 ans, menuisier, sobre, sujet
à des céphalalgies et il des bronchites avec hémoptysie ; a eu un
rhumatisme articulaire aigu. Pas de syphilis. Caractère assez
calme. [Famille du père. Son père, qui faisait de nom-
breux excès de boisson, est mort à 70 ans. - Sa mère est morte
à 70 aus un an après avoir eu une hémiplégie droite.-Aucun
détail sur ses grands-parents paternels et maternels (1). -
(t) Sa mère avait 48 ans et son père 45 quand il est né, ce qui explique
nous dit-on, pourquoi il n'a pas connu ses grands-parents.
228 Imbécillité et paraplégie spasmodique. '
Trois frères morts, l'un d'accident, l'autre d'apoplexie, l'autre
d'un cancer de l'estomac. Tous trois étaient sobres. Le se-
cond a laissé trois enfants bien portants. Rien de particulier il
signaler dans le reste de la famille : ni aliénés, ni difformes, etc,
etc.]
Mère, 1G ans, blanchisseuse, sobre, très-nerveuse, sujette
pendant plusieurs années, jusqu'à 7 ans à des peurs presque
tous les soirs. Elle a de fréquents maux de tête. A l'âge de 38
ans, durant une grossesse, elle aurait eu une hémiplégie du
côté gaucho, qui aurait disparu au bout de trois mois, six
semaines après l'accouchement. Elle n'a jamais eu de crises
nerveuses. [Famille de la mère. Son père est mort de
tuberculose à 57 ans ; il faisait tous les mois des excès de bois-
son. Sa mère, morte à 82 ans, avait toujours joui d'une bonne
santé. Nul renseignement sur ses grands parents paternels et
maternels. Un frère est ivrogne (1). - Unc soeur, en bonne
santé, a deux enfants : l'un bien portant, l'autre, fille, âgée
aujourd'hui de 30 ans, a eu des crises nerveuses de 3 à 15 ans;
elle a eu quatre enfants, dont trois paraissent être morts de
convulsions. - Rien iL noter dans le reste de la famille.]
Pas de consanguinité. Inégalité d'âge de fl ans (père plus
âge). H enfants, dont cinq survivants. Cinq d'entre eux sont
morts de convulsions. Ceux qui survivent sont intelligents et
bien portants. (3 garçons, 2 filles ; l'une de celles-ci a une fille
de 19 ans, qui n'a pas eu de convulsions).
Antécédents personnels.-Notre malade (le -13).-Att moment
de la conception, les parents étaient en bonne santé. Dans le
courant du cinquième mois de la grossesse, la mère a eu, sans
cause connue, une forte perte qui a duré deux semaines (2).
Ni traumatisme, ni émotion, ni alcoolisme, etc. Accouche-
ment à terme, naturel (3). -A la naissance, l'enfant avait bel
aspect (4) et n'a pas présenté d'asphyxie. Elevé au sein en nour-
rice (5), iL son retour, iL onze mois, il était très maigre, « sec
comme un morceau de bois » et ne semblait pas intelligent.
(1) Il est mort en 1800, épuisé par des excès de boisson. Il a un fils en bonne
santé (37 ans), sobre.
(2) Elle a perdu non seulement du sang liquide mais de gros caillots et son
médecin aurait dit qu'elle avait rendu un " faux germe » ; c'était vers le 4"
mois. (Note de 1896).
(3) Présentation de la tête; a rendu peu d'eau à toutes ses couches, chaque
fois il a fallu percer la poche. (Note de 1890).
(4) « J'ai toujours eu, dit la mère, de très beaux enfants, très gros. Il était
aussi beau que les autres. »
(5) Elle ne sait pas si les jambes étaient raides et si les genoux se collaient
à la naissance.
. Antécédents personnels. 229
La mère le conduisit aux Enfants-Malades où on lui dit qu'il
était « rachitique ». Elle le garda cinq semaines et, durant
ce temps, constata que sort enfant était tout ratatiné, que
ses jambes pouvaient être allongées, mais se « remontaient
elles-mêmes » dès qu'on ne les tenait plus et qu'il avait
une constipation opiniâtre. Lorsqu'il fut amélioré, elle le
conduisit iL l'Institution des Sourds-Muets où on lui déclara
qu'il n'était ni sourd, ni muet. « Quand on lui parlait, il vous
regardait comme un insensé. » Elle le plaça il la campagne
chez une autre nourrice qui en eut bien soin. Elle le reprit ;'1
2 ans et demi.
C'était alors un bel enfant, mais il ne pouvait pas se tenir sur
ses jambes et, lorsqu'on essayait, « il poussait des cris de feu ».
Placé aux Enfants-Malades, il fut considéré comme atteint de
mal de Pott ( ? ). Il y resta cinq mois, puis sa mère le reprit
parce qu'il était redevenu très maigre et le garda, tantôt
couché au lit, tantôt assis. On essayait de temps en temps de
le faire marcher, mais il poussait toujours des cris. Ce n'est
qu'a 6 ans et demi qu'il commença il marcher en poussant un
tabouret devant lui. La parole s'est montrée très tard. Ce
n'est qu'a Il ans qu'il a commencé il prononcer quelques
mots : puis de 6 à 7 ans, la parole s'est bien développée. On
ne peut préciser la date de l'apparition des premières dents,
maisonassurccladentition a été précoce (1). Tousles autres
enfants ont eu leurs dents, ont marché et parte de bonne
heure. La mère atlirme qu'on lui a toujours dit que son enfant
n'avait pas eu de convulsions, mais elle doute de la véracité
de la première nourrice. Il a bavé longtemps, cela ne lui
arrive plus que quand il pleure. 11 est tout le temps resté
avec sa mère ; on n'en voulait pas à l'école. Chez lui, il pas-
sait son temps il jouer, surtout jouer au cheval, à l'aide d'un
tréteau et d'un fouet. Il se sauvait souvent dans la rue et
aimait aller près des chevaux, voulant les monter ; il a été
renversé trois fois dans ses tentatives. Jamais de traumatis-
mes sérieux. Son caractère est doux et affectueux ; il a bon
('(fur, pleure s'il voit pleurer, et partage ce qu'il a. 11 affec-
tionne Ions les animaux, surtout les chevaux. Pas de mau-
vais instincts : pas d'onanisme. Il n'a été propre qu'il G ans et
demi, quand il a commencé il marcher ; « Jusque la il était sale
de tout. » Il n'a eu, comme maladie infectieuse, qu'une rou-
geole à ans. Pas d'accidents scrofuleux, ni syphilitiques.
Son intelligence est notablement arriérée. On n'a pas pu lui
(1) « Il avait des dents plein l;p bouche quand il est venu il onze mois.
(Note de 18UIi) ,
230 Imbécillité ET paraplégie spasmodique.
apprendre ses lettres, ni à compter. Il sait bien s'habiller
et se déshabiller, mais est incapable de. boutonner, de lacer,
etc.; se lave mal; mange assez proprement; se sert bien de
la fourchette et de la cuiller, mais pas du couteau. Sa mère
prétend que l'enfant aurait eu des secousses dans les bras (1), et
que jusqu'à près de 10 ans, il balançait le tronc d'avant en
arrière et la tête latéralement ; il avait les « yeux en l'air. »
Les jambes seraient raides depuis l'âge de 11 mois ; alors elles
étaient ratatinées, on ne pouvait que difficilement les allonger
et les manoeuvres exécutées dans ce but le faisaient pleurer;
à 2 ans elles étaient encore « ratatinées ». A 6 ans et demi,
il marchait les jambes fléchies, les genoux collés l'un contre
l'autre : « il n'a pas d'écartement du tout. » - Elle termine
ses renseignements en disant que Lep... se met facilement en
colère quand on le contrarie et qu'alors il est grossier.
État actuel (488G).- La tête est arrondie, sans déformation ;
les bosses crâniennes sont normales, la protubérance occi-
pitale est proéminente. Le visage est ovale, régulier. Le
front, d'une hauteur moyenne, est assez large. Les arcades
orbitaires sont peu accusées. Les paupières sont bien fendues.
Les iris sont gris, les pupilles sont égales; on note un léger
strabisme interne ( ? ). La vision est normale. Pas de nysta-
mus ( ? ). - Le nez est droit, sa racine est large, comme apla-
tie ; les narines sont obliques et elliptiques. La bouche,
toujours béante, est petite ; les lèvres et surtout l'inférieure
sont épaisses (plus de 25 mm.) ; celle-ci est rcnversie.-Voûte
palatine un peu profonde. Piliers, luette, amygdales, rien à
noter. Les deux mâchoires possèdent 12 dents (canines de
lait) bien rangées. En bas les incisives sont en éventail sur
une ligne transversale. L'articulation est normale. Les gen-
cives sont en bon état. - Le goût et l'odorat semblent un
peu obtus. - Menton arrondi. - Oreilles égales, longues,
bien ourlées, très détachées et écartées du crâne; lobule
distinct. Ouïe normale.
Le cou a une circonférence, de 27 cent. à sa partie moyenne.
Le thorax est bien conformé; le sternum aplati en haut,
bombé à sa partie moyenne, est déprimé à sa partie infé-
rieure ; le creux épigastrique continue cette dépression. Le
(1) Les doigts se fléchissaient, les bras s'allongeaient et se portaient brus-
quement en avant. On ne saurait dire si, en môme temps, il y avait perte de
connaissance ou vertige.
DESCRIPTION DU malade. 231
rebord costal est peu saillant et allongé. La colonne verté-
brale ne présente aucune déviation, aucune saillie, ce qui
écarte l'idée du prétendu mal de Pott que l'enfant aurait eu
à trois ans (1).
232 Imbécillité ET paraplégie spasmodique.
le sol (1); il dit être plus solide quand il court, ce qu'il fait lour-
dement ; on craint à chaque instant qu'il ne tombe. Dans la
marche, le tronc est animé d'un balancement et le côté gauche
est plus gêné que le droit. Les mouvements divers sont assez
limités, par suite de la contracture de certains groupes muscu-
laires et de la raideur des diverses jointures. La raideur est lé-
gère dans les hanches et les cous-de-pied ; elle est très prononcée
aux genoux. Quand l'enfant est couché, le genou gauche est
plus élevé que le droit, et on ne peut pas appliquer la jambe
sur le lit. Sa mère prétend que, il la maison, quand on le
couchait, les jambes s'étaient allongées et que, il mesure qu'il
s'endormait, elles se ratatinaient petit en petit. On perçoit des
craquements dans ce genou. A droite la raideur est moindre,
on peut appliquer la jambe sur le lit, et il n'y a pas de
craquements. Il y a une légère syndactylie des deuxième et
troisième orteils des deux côtés (2). Les réflexes rotuliens
sont rapides et plus prononcés à gauche. Par la flexion des
pieds, on obtient une trépidation épilerloïde aussi intense
des deux côtés. Cette trépidation se produirait spontanément :
« C'est selon comme il a posé ses pieds », nous dit sa mère.
Tous ces phénomènes de contracture, d'exagération clu
réflexe rotulien et le clonus du pied indiquent bien un état
d'éréthisme des centres réflexes médullaires, d'où l'état
spasmodique (paraplégie spasmodique).
La sensibilité au contact, à la douleur, à la température
est conservée et la même des deux côtés clu corps. D'ailleurs
l'enfant n'accuse aucun trouble sensitif d'ordre subjectif; il
n'éprouve aucune douleur, n'a jamais d'élancements dans les
jambes, etc.
Les fonctions digestives, respiratoires et circulatoires
n'offrent aucun trouble, sauf une incontinence nocturne
d'urine .
Les facultés intellectuelles, ainsi que cela ressort des ren-
seignements fournis par la mère et de l'examen direct, sont
très affaiblies et font porter le diagnostic : imbécillité.
Cheveux châtain-clair, assez abondants, bien implantés.
Le cuir chevelu présente une demi-douzaine de cicatrices
consécutives il des plaies dues à des chutes ayant eu lieu
avant son entrée. Sourcils bien marqués. Cils bien fournis. Le
(1)11 usait ses souliers seulement des bouts et en dedans. (Note de la
mère en 1 ? 1(i).
(2) Il n'y a pas d'exemples de cette malformation dans les familles de son
père et de sa mère .
Imbécillité ET paraplégie spasmodique. 233
visage et le reste du corps sont glabres. Noevus rouge au-
dessous du pli du coude et ncevi à la partie supérieure du
bras, vers l'aisselle. Taches brunes sur l'omoplate gauche, et
sur le bras droit. Cicatrices blanches au niveau de la région
lombaire, consécutives probablement à des pointes de feu.
Petites adénites cervicales. Peau assez fine, généralement
pigmentée.
1887. 18 janvier ? Revacciné avec du vaccin de génisse
sans succès. i
1888. Février-septembre. - Plaques de teigne tondante.
1889. Janvier, - Embarras -Depuis son entrée,
le malade a pris de l'huile de foie de morue, du sirop d'iodure
de fer et des bains pendant l'hiver et des douches d'avril à
novembre. Exercices des jointures. - L'attitude, l'état des
membres supérieurs et inférieurs sont les mêmes.
Puberté. Le visage est glabre ainsi que les aisselles, le
tronc et le pénil. Pigmentation assez prononcée de la verge
et des bourses. Le testicule gauche, maintenant descendu,
est de la grosseur d'une olive. On ne sent pas le testicule
droit. Le gland est en partie découvert, le méat normal. La
longueur de la verge est de 5 centimètres, sa circonférence
de 58 millimètres.
')9 avril. - Abcès de la paupière inférieure droite. - juin-
let : avulsion d'une molaire cariée. - Décembre : plaie
tranchante de la face dorsale de la main droite.
1890. Juillet. - Même traitement. - Puberté. - Le déve-
loppement pileux est toujours nul. L'état des testicules, de
la verge, etc., est le même.
1891. Février. - Lép... passe de la petite à la grande école.
Juillet. - Cet enfant est très turbulent, peu docile, gesti-
cule, crie. Il est très gai, aime à participer à tous les jeux,
malgré son infirmité. Il est assez propre dans sa tenue. Il ne
connaît pas encore toutes ses lettres, ne trace que des bâ-
tons, place bien les cartons de couleur, les figures géométri-
ques et fait bien les petites constructions avec les briquettes.
Ni tics, ni onanisme.
Puberté. On sent le testicule droit au niveau de l'orifice
inguinal externe. - Pas d'autre changement.
29 octobre-/¡ novembre, - Gale contractée dans une sortie.
Décembre. La parole est libre. La mémoire est faible, un
peu par suite d'inattention. Lép... s'exprime correctement.
23 li Imbécillité et paraplégie spasmodique.
Aucun progrès pour l'écriture, la connaissance des lettres,
des chiffres. Il sait le nom du jour et non du mois. Il connaît
les couleurs, la forme des objets. Caractère irascible, parfois
grossier, aime tout ce qui est bruyant. La conduite est sou-
vent reprëhensible ; malgré son infirmité on le trouve partout
où se fait du tapage. - Nous avons essayé de le placer à l'a-
telier de couture sans résultat; il préfère le balayage des
cours à l'atelier et à l'école.
1892. Juillet. - Pas de progrès à l'école. Lép... fait des pa-
ges de bâtons sans s'appliquer aucunement et répond en gri-
maçant avec grossièreté aux observations qu'on lui adresse.
Il bavarde constamment en classe et se montre parfois re-
belle aux ordres qu'il reçoit. Il est assez fanfaron et veut pa-
raître ne rien craindre. Il connaît le nom des jours et des
mois, mais non la date exacte. Il se tient assez proprement,
est très actif, aime beaucoup travailler au balayage.
Puberté. Le visage est toujours glabre, mais il y a quel-
ques poils aux aisselles et un léger duvet sur le pénil. Le
testicule gauche a le volume d'un oeuf de merle, le droit est
encore dans l'anneau. La verge mesure 5 cent. et demi de
longueur et 6 cent. de circonférence.
Décembre. -Aucun progrès à l'école, c'est tout au plus si
on est parvenu iL lui apprendre à épeler.
1893. Juin. - La physionomie a une expression dure et
vague, ce qui tient ce que les yeux sont un peu saillants
et ne fixent pas, mais se portent en dehors; d'où aussi,
parfois, un regard qui semble égaré, étonné et parfois une
expression d'effronterie. L'activité est assez grande, sauf pour
les travaux scolaires, pour tout ce qui exige une attention
intellectuelle soutenue. Il continue, à- déployer une activité
physique plus grande que ne paraît le comporter son infirmité :
il affectionne les travaux de ménage. Il n'aime pas être
soumis it la règle, pleure quand il ne peut faire ce qu'il veuf,
déchire ses vêtements, Sa tenue est moins lionne qu'autrefois.
Il n'a pas l'esprit d'ordre. Il aime la société de ses camarades,
participe à leurs jeux; s'émotionne aux matinées dramatiques,
¡'¡ l'audition de la musique, rit bruyamment.
La parole est toujours libre ; le langage souvent grossier,
l'attention distraite, le raisonnement médiocre, la faculté de
comparaison imparfaite, la mémoire faible ainsi que l'asso-
ciation des idée.<, - Ses connaissances scolaires restent il peu
près les mêmes.
180 \. Juin.- Nul progrès en classe où il est difficile de le
Marche de la maladie. 235
maintenir, parce qu'il taquine en cachette ses camarades.
Lorsqu'il est pris sur le fait, il rit sournoisement. Il est insen-
sible aux punitions, aux reproches, la bienveillance.
Puberté. Même ('1 a 1;, Toutefois la verge a grossi (89 mm. de
longueur et 85 de circonférence). Même traitement.
1895. Aucun changement sous le rapport physique et intel-
lectuel.
1896. Décembre. - On a dû se décider il laisser Lép... en
dehors de la classe. Il continue à s'occuper aux travaux du
ménage, il affectionne particulièrement le nettoyage des
bains. '
La santé physique est généralement bonne. La physiono-
mie s'est éclairée, l'expression du regard est vague, tantôt
les yeux paraissent normaux, tantot au contraire, ils se por-
tent en haut, comme s'il y avait momentanément du strabisme.
La bouche reste toujours béante, la lèvre inférieure toujours
renversée et très volumineuse, ce qui, avec l'écartement des
oreilles lui donne une expression d'imbécillité.
L'examen des yeux, pratiqué par notre ami le Dr Koenig,
a donné les résultats suivants : les pupilles sont égales, réa-
gissent bien. Il n'y a pas de lésion de l'oeil, ni de rétrécisse-
ment du champ visuel. L'acuité visuelle est normale. Lép...
reconnaît le bleu et compare les autres couleurs ; quelque-
fois pourtant il arrive à les dénommer, mais il en perd aus-
sitôt la notion quand on lui fait examiner plusieurs teintes.
A l'état de repos, les yeux occupent une situation natu-
relle, mais le malade fixe mal les objets qu'on lui présente.
Lorsqu'on sollicite les mouvements, on constate un certain
degré de rigidité qui fait que les globes oculaires ne suivent
que très difficilement les mouvements du doigt. Ces mouve-
ments ne s'exécutent que par saccades. Les mouvements de
latéralité à gauche sont un peu limités. Les globes n'attei-
gnent pas la commissure externe et on observe quelques
secousses systagniformes. Quand on commande au malade
de fermer les yeux il contracte violemment ses paupières
qui se gonflent outre mesure, et on voit apparaître des mou-
vements fibrillaires sur la peau des paupières dans la région
de l'orbiculaire.
Etat de la dentition. - Le maxillaire supérieur présente
un certain degré d'atrésie déterminant un enfoncement
236 Imbécillité ET paraplégie spasmodique. W
assez marqué de la voûte palatine, de forme légèrement ogivale.
Le maxillaire inférieur est normal. Les dents sont régulière-
ment implantées. Elles ne présentent aucune anomalie de
forme, de structure ou de volume. Elles apparaissent recou-
vertes de végétations et de mucosités ties à
l'absence de soins. Beaucoup sont cariées profondément et
plusieurs molaires ont été extraites. L'incisive latérale gau-
che a eu sa couronne détruite par la carie.
Les membres et le thorax offrent toujours un
développement normal et comparativement plus prononcés
que le ventre, le bassin et les membres inférieurs. Au lit,
flexion des cuisses sur le bassin, flexion des jambes sur les
cuisses. Genoux accolés l'un contre l'autre ; le malade parvient
cependant à les écarter lui-même, l'un de l'autre de 0,07 à
0,08 cent. ; l'écartement provoqué est de 0,25 à 0,30. Le malade
dit que c'est lajambe et le bras gauches qui sont les plus forts.
Il élève les pieds au-dessus du plan du lit en fléchissant lé-
gèrement la jambe, il ne parait pas pouvoir les élever sans
cette flexion préalable. La peau des condyles internes des
fémurs est un peu épaissie et rouge par suite de l'accolement
et du frottement des genoux. Les orteils des deux côtés, dans
leur ensemble, se portent en dehors.
Lép... peut fléchir les cuisses presque à angle droit sur le
bassin, il ne peut les étendre de façon il les appliquer sur le
lit, le genou gauche reste à 0,07 centimètres, et le genou droit
il 0,12 cent. au-dessus du plan du lit. La Ilexion des jambes
est à peu près la même des deux côtés, et peut aller jusqu'à
55 degrés. Toutes les jointures sont raides des deux côtés il
peu près au même degré, sauf celles des orteils, où la roideur
est un peu moins prononcée. Les mouvements spontanés des
orteils sont très limités ; c'est il peine si Lép... peut esquisser
un mouvement de flexion ou d'extension.
Durant l'examen, il se produit parfois une trépidation qui
est plus forte il droite. La flexion des orteils en masse déter-
mine il droite une trépidation npileptuëcle qui se manifeste
assez vite, est assez prononcée, mais s'arrête au bout de
quelques instants. A gauche, la même manoeuvre lie parvient
pas il provoquer la trépidation épileptoide bien qu'on l'ob-
serve, spontanément, à un degré plus faible toutefois, que
de l'autre côté. - Pas de changement des réflexes.
La station debout n'est possible que pendant quelques
minutes; le malade qui sent son équilibre instable cherche
il s'accrocher aux objets environnants. Les figures : 11, 40 et
il donnent une idée si exacte de son attitude que nous ne la
Imbécillité ET paraplégie spasmodique. 237
décrirons pas de nouveau; nous nous bornerons à dire que
les pieds sont très plats, se portent fortement en dehors,
exagérant en quelque sorte l'écartement des jambes. Le talon
gauche ne porte pas sur le sol.
Dans la marche le tronc est incliné légèrement en avant,
les cuisses et les jambes fortement fléchies, autant que dans
l'attitude verticale, les genoux frottant l'un contre l'autre,
l'épaule gauche étant plus basse que la droite. Les bras, en
fig. 39
238 Imbécillité ET paraplégie spasmodique.
/
se portant alternativement en arrière et en avant, lui servant
en quelque sorte de balancier. Les jambes ont l'attitude en
V contrairement à d'autres cas de paraplégie spasmodique
où les membres ont l'attitude en X..Le malade assure que la
marche ne le fatigue pas et on sait qu'il a pu aller aisément de la
section jusqu'à la barrière (2 kilomètres environ). La station sur
une seule jambe, le saut sont impossibles. La coin'se, assez ra-
pide, s'effectue lourdement, avec un balancement latéral du
corps et en traînant les pieds principalement le gauche.
(tg. 40
Imbécillité ET paraplégie spasmodique. 239
Puberté. - Très fin duvet sur les joues. La moustache,
composée de poils blonds, fins, se dessine bien. Poils assez
longs sur le bord du menton ; rien au-dessous. Entre le menton
et les angles du maxillaire la peau est glabre. Petite mouche
à la lèvre inférieure. Plaques blanchâtres aux commissures
labiales dues à ce que la bouche est toujours ouverte et que la
salive s'écoule continuellement. Poils assez abondants sous
les aisselles qui sont le siège d'une sécrétion sudorale assez
abondante. Tronc glabre. Duvet très fin sur les membres
/ip. 41 1
240 Imbécillité et paraplégie spasmodique.
supérieurs, poils assez abondants sur les cuisses, peu
abondants sur le pourtour des jambes. Poils noirs, abon-
dants, frisés au niveau du pénil ; le rebord supérieur forme
un V dont le sommet est dirigé vers la racine de la verge.
Rien aux aines. Poils assez nombreux au pourtour de l'anus.
- La verge mesure S5 mm. de longueur et 90 mm. de cir-
conférence. Le testicule gauche, descendu dans les bourses,
a le volume d'un oeuf de pigeon. Le droit, plus petit, est
toujours arrêté dans l'anneau.
Les muscles réagissent très-bien sous l'influence du cou-
J'ant électrique (Pile de Chardin). La sensibilité électrique
est égale des deux côtés. Il en est de même de la sensibilité
au toucher, à la douleur, à la température et pour la peau et
pour les muqueuses (bouche, pharynx, nez, oeil, oreille). Dans
certaines explorations le malade prétend un peu mieux sentir
le chaud et le froid sur la moitié antérieure gauche du corps.
- La sensibilité spéciale (goût, odorat audition) est conser-
vée et il ne parait pas y avoir de différences appréciables
entre les deux côtés. Les réponses parfois contradictoires
du malade tiennent il son état intellectuel et peut-être à la
façon dont les questions sont posées.
Réflexions. - I. Sous le rapport de l'hérédité,
nous devons relever, du côté paternel : grand-pùre
alcoolique, grand' mère hémiplégique, oncle apoplec-
tique, autre oncle cancéreux ; du côté maternel,
mère très nerveuse, peurs dans l'enfance, hémi-
plégie transitoire au cours d'une grossesse ; grand-
père excès de boisson et tuberculose ; oncle ivrogne;
cousine germaine hystérique ( ? ) ; trois petits cousins
ou cousines et cinq frères ou soeurs morts de c'orwul-
suions, Il ressort de cette énumération que l'hérédité
est très chargée; peut-être même l'est-elle davantage,
car nous manquons de détails sur une partie de la fa-
mille. .
II. Lep... est atteint d'imbécillité avec paraplégie
spasmodique, dont l'origine paraît être congénitale.
Nous allons donc relever ce qui a trait à l'imbécillité
et à la paraplégie.
Paraplégie spasmodique. 211
III. D'un au iL 7 ans, Lep... offrait l'ensemble des
symptômes qui caractérisent Y idiotie, même un de-
gré avancé : physionomie égarée, ne dénotant aucune
intelligence; parole et marche nulles ; incapacité de
s'aider en quoi que cc soit, gâtisme, etc. A la fin de
cette période, la marche commence à devenir possible,
la parole débute, le gâtisme diminue.
Depuis son entrée dans le service, iL 10 ans et demi,
jusqu'à la fin de 1896 (21 ans), il se produit une cer-
taine amélioration. Nous n'avons pas obtenu de pro-
grès scolaires bien frappants, par suite de sa répu-
gnance pour tout ce qui exige une attention soutenue.
Mais ses notions sur toutes les choses usuelles se
sont étendues : ((Autrefois, dit sa mère, sa conversation
était décousue, maintenant quand il cause ses idées
se suivent. » D'autre part, il a acquis une habileté assez
grande pour tout ce qui n'exige qu'une activité
physique. Il sait se déshabiller, s'habiller, nouer, la-
cer, faire sa toilette, etc. Sa tenue, d'habitude, est pro-
1'1'('. A l'atelier de couture, il travaille médiocrement
parce qu'il faut rester immobile. En revanche, il aime
à balayer, nettoyer et apporte, en particulier, un soin
méticuleux iL concourir au nettoyage du service des
bains, lise conduit bien, n'est plus grossier, est affec-
tueux envers les siens, ne décèle aucun instinct mau-
vais ni dans la section, ni dans ses sorties. En résumé,
aujourd'hui, au point de vue clinique, on ne porte-
rait plus le diagnostic : idiotie, mais le diagnostic : 12-
bécillité, de sorte que devant le faire passer aux
adultes, en raison de son âge, nous hésitons entre
une des sections de l'Asile comme aliéné ou l'une des
divisions de l'Hospice comme incurable.
IV. Si l'accouchement a été naturel et si l'on n'a pas
noie d'asphyxie iL la naissance, par contre la gros-
sesse a été accidentée par une perte sanguine sérieuse
qui a été rattachée iL l'expulsion d'un germe ( ? ). On ne
B(JL'HXEVlLLl ? tCC'C,i80G. 16
242 Paraplégie Sl' : %S,10DIQUI : .
saurait dire si dès les premiers jours de l'existence,
comme cela existait chez, une petite (ille de la Fondation
l'allée, Glay., les membres inférieurs étaient contrac-
turés, mais ils l'étaient certainement il 11 mois et de
2 ans et demi il G ans, la contracture s'accompagnait
de douleurs qui rendaient très pénibles les tentatives
faites pour apprendre au malade à marcher.
Ce qui frappe tout d'abord c'est l'arrêt de dévelop-
pement relatif des membres inférieurs et de la moitié
correspondante du tronc par rapport à la poitrine et
aux membres supérieurs qui sont bien développés;
puis l'altitude générale du tronc, penché en avant et
celle des membres inférieurs : flexion des cuisses en
adduction très prononcée sur le bassin; flexion des
jambes en abduction forcée, sur les cuisses ; déforma-
tion des pieds dont la pointe est exagérément portée
en dehors. Cette attitude des jambes en V renversé
(¡\.) est à mettre en parallèle avec un groupe d'autres
cas de paralysies spasmodiques dans lequel l'attitude
des membres inférieurs contractures est comparable
à un X.
La contracture l'emporte en intensité sur la para-
lysie, qui n'intéresse pas les sphincters. Les réflexes
sont conservés, presque égaux des deux côtés. La
trépidation épileploïde, spontanée ou provoquée par
l'extension du pied, prédomine il droite. Au dire du
malade c'est le membre inférieur droit qui serait, le
plus atteint. C'est ce que confirme sa mère et notre
propre examen.
La station debout, sans appui, ne pcut se prolonger
au-delà de quelques minutes. La plante du pied droit
repose à peu près complètement sur le sol, tandis
qu'à gauche l'arrière-pied est soulevé. - La marche
s'effectue sans fatigue, et sans aucun soutien Le
saut est impossible. - La course, au contraire,
s'opère en quelque sorte avec; plus de solidité et sans
aide et le malade l'exécute avec une certaine rapidité.
Imbécillité et paraplégie spasmodique. 43
V. Pendant les dix années de la présence de Lép...
dans le service, nous avons suivi son développement
physique avec une certaine régularité. Le poids et
la taille sont allés croissant parallèlement et progres-
sivement comme le montre le tableau ci-après. Com-
parée chaque année la taille moyenne normale de
son âge, elle a toujours été inférieure. L'attitude par-
ticulière clu malade rend compte, en partie, de cette
infériorité. ? ,
L'étude de la force musculaire à l'aide clu dyna-
momètre ne nous fournit pas de notions bien précises.
D'une façon générale, il semble que le côté droit est
plus fort que le gauche. Cette conclusion cl'ailleurs
est sujette il critique, car en dépit des explorations
dynamométriques, le malade prétend, lui, que c'est
son côté gauche qui est le plus fort (p. 2 ?
La tète, dont les mensurations ont été prises une
ou deux fois par an depuis 1887, a augmenté dans
toutes ses dimensions ; seule la hauteur médiane du
front n'a pas subi de modification (p. 2'iGi.
Les membres supérieurs, égaux, ont continué il se
développer en grosseur et en longueur et dans les
mêmes proportions. Le membre inférieur droit
aurait été un peu arrêté dans son évolution d'après
les mensurations de 1889 et de 189), mais en 1892 et
en 15911, nous les trouvons égaux comme en 1887
(p. 2-,7). .
Ces diverses mensurations, qui ne sont pas toujours
laites semestriellement comme nous le désirerions,
n'ont de valeur que dans leur ensemble. Il y a, en
effet, de temps en temps des chiffres contradictoires.
Cela tient il ce que ce n'est pas toujours la même per-
sonne qui prend les mensurationsnos internes
changeant tous les ans et [aussi à ce que, pour la
? D
Il
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cn
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Tableau du Poids et de la Taille.
Tableau ci2atométricluc
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Et
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H
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Tableau des mensurations de la tête.
,1/e mores supérieurs.
248 .. PARAPLÉGIE spasmodique.
tête, les cheveux sont plus ou moins longs, et, pour les
membres, parce qu'il peut survenir un amaigrisse-
ment occasionné par -Lino maladie intercurrente, sans
compter les attitudes anormales semblables celle
de Lép... (1) ...
La puberté s'est développée avec lenteur. Ce n'est
qu'à 17 ans qu'a commencé l'apparition de quelques
poils aux aisselles et au pénil. Les testicules n'étaient
pas descendus à l'entrée (ûwo°ch7plie à 11 ans); le
gauche est descendu seulement à 14 ans et le droit est
encore arrêté à l'anneau (22 ans). Le testicule gauche
est d'ailleurs peu volumineux (2). Le système pileux
est maintenant assez bien fourni. En résumé, en plus
de la cryptorchydie incomplète droite qui. persiste, il
y a eu un arrêt do développement de la puberté.
VI. Les observations. concernant les maladies ne1'-
veuses chroniques des enfants, ou remontant à l'en-
fance, sont souvent incomplètes. Les médecins qui les
publient n'ont, en général, étudié qu'une période delà
maladie. Les accoucheurs, - pour les paraplégies ou
les clipléies spasmodiques, les médecins des hôpi-
taux consacrés aux maladies aiguës de l'enfance - z
pour les hémiplégies, l'idiotie, la méningite, etc.
voient les cas au début. Les médecins des services
affectés aux enfants nerveux et idiots, puis les méde-
cins des services d'aliénés adultes ou les médecins des
hospices les observent les uns. avant, les autres après
la période de croissance. Et ces derniers sont obligés
de s'en fier aux souvenirs soit de la famille, soit sim-
(1) Pour bien des raisons un service, comme le nôtre, aurait besoin d'un
assistant qui serait nommé pour 4 ou 5 ans. Nos interne : ! quittent le service
alors qu'ils en comprennent bien les nécessités et le fonctionnement. Et tous
les ans nous recommençons un apprentissage (le 5 ou 6 mois ! '
(vil La descente tardive des testicules pent être l'occasion d'accidents tlon-
loureux qui méritent d'attirer l'attention. Notre maître, Delasiauve, n. publie
dans la -Revue médicale de mars 18-40 une note tics intéressante sur cette
question, intitulée : Descente tardive du testicule gauche prise pour une her-
nie étranglée, été.
Observations scientifiques. 249
plement des malades. De là des lacunes regrettables,
des conclusions contradictoires. Tous les enfants de-
vraient avoir leur livret de famille : si cela est difficile en
ville, cela est possible dans les hôpitaux par l'établis-
sement de fiches, sur lesquelles chaque entrée dans un
établissement hospitalier serait inscrite, avec le dia-
gnostic et le nom du médecin. En s'adressant aux
médecins - qui, eux, devraient prendre ou faire pren-
dre exactement l'observation de tous leurs malades
et qui devraient encourager ceux-ci, en cas de besoin,
à revenir dans leurs services, ou arriverait souvent
à reconstituer plus rigoureusement qu'aujourd'hui
l'histoire scientifique des malades au grand bénéfice
de la science (1). - . ,
(1) Ce n'est pas le moment de donner des indications bibliographiques com-
plètes sur les paralysies de l'enfance, nous rappellerons cependant à nos lec-
teurs les leçons publiées pai notre ami le professeur 1 ? . Raymond dans le
Progrès médical sur les Affections spasmo-pamtytirf'WS in¡'l1Jtiles (1SU4, n" 2,
4 et 6).
Thèses faites dans le service.
1851.
12rDr : r. SAILLARD (G.). De la cachexie pachydermique
(iyceoedème des auteurs anglais.) Thèse de Paris.
13S9.
Cornet (P.). - Traitement de l'épilepsie. Thèse de Paris.
. 1891.
TAQUET. - De l'oblitération des sutures du crâne chez
les idiots. Thèse de Paris.
Noir. (J.). Étude sur les tics. Thèse de Paris.
1S92.
Vivier (A.). Contribution à l'élude clinique de l'épi-
lepsie chez les enfants. Thèse de Paris.
1895.
LEBLAIS (IL). De la puberté dans l'hémiplégie spasmo-
dique infantile. Thèse de Paris.
1896.
l3ouLL ? Gro (F.). De l'action de la glande thyroïde sur la
croissance. Thèse de Paris.
GniLLAULT (G.). - Contribution à l'élude du traitement de
l'idiotie. Thèse de Paris.
Retrouvey (A.). - Contribution à l'étude de l'hémiplégie
spasmodique infantile.
EXPLICATION DES PLANCHES.
25' ? EXPI.1CATION DES PLANCHES.
Planche I.
Sclérose cérébrale hémisphérique.
Face convexe de l'encéphale (p. 97).
Cette planche montre à quel degré est prononcée l'atrophie
de l'hémisphère cérébral gauche.
25 i Explication des planches.
Planche II.
Sclérose cérébrale hémisphérique.
Face inférieure de l'encéphale (p. 97).
Même remarque. Sur cette planche on se rend compte,
en outre, de l'atrophie du pédoncule cérébral gauche, P,
cle la moitié gaucho de la protubérance, l'r., de la pyramide
antérieure du même coté, Pi et du l'hémisphère cérébelleux
droit.
,, Bourneville, mettre, 1BCJ1 ! , *;î35PiPRWE ? < : -^WPBBRw '^OTBfflP^BBBSPiîPBffl^.^i^WWP-ï-1' FIL. Il 1
IfWMIOi. If. BACLE, Parti.
256 Explication DES planches.
Planche III.
Sclérose cérébrale hémisphérique.
Fig. 4. - Face convexe de l'hémisphère gauche.
fez, F3, seconde et troisième circonvolutions frontales.
) : .A., frontale ascendante. ,
S.R., sillou de Rolando.. -
P.A., pariétale ascendante.
P.P.I., pli pariétal inférieur.
T1, première temporale.
L.O., lobe occipital.
Fig. 2. - Face interne du même hémisphère.
C.C., corps calleux.
C.C.C., circonvolution du corps calleux.
r, première circonvolution frontale.
L.P., lobe paracentral.
L.Q., lobe quadrilatère.
L.O., lobe occipital.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 189'" £
PL. III
Bourneville, Bicêtre. 1896. 11
258 Explication DES planches.
Planche IV.
Pseudo-porencéphalie.
Hémisphère cérébral gauche (p. 106).
F2, rl;i, seconde et troisième circonvolutions frontales.
F. A., frontale ascendante.
S.R., sillon de Rolando.
P.A., pariétale ascendante.
P.I., pli pariétal inférieur.
Tl, T2, T-1, première, seconde et troisième circonvolutions
temporales.
L.O., lobe occipital.
Le foyer a détruit la circonvolution d'enceinte de la scis-
sure de Sylvius, le lobule de l'ins«laet l'extrémité antérieure
du lobe temporal.
Bourneville. Bicêtre, 1896. l'1.. IV.
260 Explication DES planches.
Planche V.
Méningo-encéphalite.
Face interne de l'hémisphère droit (p. l '26¡,
Fi, premiers circonvolution frontal ?
C.C.C., circonvolution du corps calleux.
L.P., lobe paracentral.
L.Q., lobe quadrilatère.
L.()., lobe occipital.
C.lI., circonvolution de l'hippocampe.
BOURNEVILLE,, Bicêtre, 1896. PL. V.
211l, Explication des planches.
Planche VII.
Méningo-encèphalite et atrophie cérébrale.
Face convexe de l'hemisphère cérébral droit (p. 5 ! )
Sclérose atrophique très notable des circonvolutions, entre
autres des circonvolutions qui bordent la scissure de Syl-
vius, d'où il suit que le lobule de l'insula est il découvert.
Lésions de méningo-encéphalite.
BOCRNGV1LLR, Bicêtre, 1896. - PL. vil.
5M Explication des planche ?
Planche VIII. ?
Mëningo-ellcëphalite.
Face conuexe de l'hémisphère cérébral gauche (p. 2,15).
Les lésions sont très étendues mais superficielles.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1893. - PL. VIII.
JiiS Explication des planches.
Planche IX.
Bâtiment neuf de la Fondation Vallée.
(Voir p. Liv).
Plan du 1'e : -de-chaussèe.
1 Vestibule des classes.
2 (Cellules ou plutôt cham-
3 j bres d'isolement pour les
4 ( épileptiques.
I 5 1
Classes.
sl 1
9 l
10 Cabinets d'aisances.
Il Dépôt.
12 Grand vestibule.
13 Cabinets d'aisances.
1'f Réfectoire.
15 Bureau.
1fi Lavabos.
17 Escalier.
18 Office ?
Plan du ler étage.
1 Dortoir.
2 Cabinets d'aisances.
3 Dépôt.
4 - z
5 Cabinets d'aisances.
ti Vestibule du dortoir et
lavabos.
7 Grand vestibule.
S Vestibule du dortoir et
lavabos.
9 Dortoir.
10 Chambre de l'infirmière.
Il 1 Lavabos.
12 Escalier.
13 Lavabos.
14 Chambre de l'infirmi -re.
TABLE DES MATIERES
PREMIERE PARTIE
Histoire du service pendant l'année 1896.
Section 1 : Bicêtre.
2`Îll Taule des matières.
Table DES matières. 271
272 Taule des matières