RECHERCHES
SUR
L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE
ET .
L'IDIOTIE
RECHERCHES
SUR
L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE
ET
L'IDIOTIE
PUBLICATIONS DU PROGRÈS MÉDICAL'
RECHERCHES
CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES
SUR
L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE
1 ET
L'IDIOTIE
COMPTE RENDU DU SERVICE
DES ENFANTS IDIOTS, ÉPILEPTIQUES ET ARRIÉRÉS DE BICÊTRE
PENDANT L'ANNÉE 1889
PAR
BOURNEVILLE
MÉDECIN DE nrclhRE
SOLLIER
CONSERVATEUR DU MUSÉE DE BICËTRE.
N ."
1 A. PILLAT
1 ANCIEN INTERNE DU
1 ? .... ?
Volume X
avec 22 figures dans le texte et une planche chromo-lithographique.
. PARIS
AUX BUREAUX DU
PROGRÈS MÉDICAL
14, rue des Carmes, 14.
1 LECROSNIER ET BABÉ
ÉDITEURS
Place de l'Ecole de Médecine.
1890
PREMIÈRE PARTIE
Histoire du service pendant l'année 1889.
BOURNEVILLE,, Bicêtre, 1889.
PREMIÈRE PARTIE
Histoire du service pendant l'année 1888.
Pavillon des cellules. Construction des trois
derniers pavillons de dortoirs.
I.
Situation DU service. Enseignement primaire.
Pour rendre plus facile la compréhension de ce qui
va suivre, nous rappellerons que la section comprend
trois groupes : 1° les Enfants idiots, gâteux, éile2-
tiques ou non, mais invalides ; - 20 les Enfants idiots
gâteux ou non gâteux, épileptiques ou non, mais
valides; -3° les Enfants propres, valides, imbéciles,
arriérés, épileptiques et hystériques ou non.
1. Enfants idiots, gâteux, épileptiques ounon, mais
invalides. - Ils se subdivisent en 2 catégories : lapre
mière est composée d'idiots gâteux ne parlant, ni ne mar-
chant et souvent incapables de se tenir debout, mais la
plupart susceptibles d'amélioration; la seconde, d'idiots
tout à fait incurables ou d'enfants atteints d'épilepsie
IV PETITE ECOLE.
ou de méningo-encéphalite devenus gâteux sous l'in-
fluence des accès ou des poussées congestives qui les
compliquent. Ceux-ci ne sont plus que l'objet de soins
hygiéniques. Ceux-là, au contraire, sont soumis à un
certain nombre d'exercices que nous avons décrits
précédemment et sur lesquels il est .superflu de revenir.
Disons seulement que dès qu'ils sont capables de mar-
cher, ils sont envoyés à la petite école d'abord le matin
pendant quelque temps, puis toute la journée aussitôt
que leur forces le permettent.
II. Enfants idiots, gâteux ou non gâteux, épilep-
tiques ou non, mais valides. Ces enfants fréquen-
tent la petite école confiée exclusivement à des
femmes. 222 enfants y ont été inscrits dans l'année.
Sur ce nombre, huit sont décédés, 6 sont sortis
définitivement ; 1 est passé à la grande école. Sur
les 207 enfants qui restaient au 31 décembre 1889, 58
se servent de la cuiller seulement, 99 de la cuiller et
de la fourchette, 50 de la cuiller, de la fourchette
et du couteau. 11 enfants gâteux sont devenus pro-
pres (1). Tous les enfants vont à la petite gymnastique
(système Pichery), à l'exception de sept qui ne viennent
à l'école que le matin. 5, plus avancés, ont pris part
aux exercices de la grande gymnastique. 35 enfants
ont travaillé comme apprentis; ils se répartissent
ainsi : 1 menuisier, 4 cordonniers, 3 rempailleurs,
5 vanniers, 22 tailleurs. Les [leçons de toilette
(lavage de la figure, des mains, propreté de la cheve-
lure, cirage des souliers, etc.), les exercices des
mains (fermer, ouvrir les mains, agiter les doigts,
les allonger, les étendre et les plier isolément, etc.),
les leçons de choses, les promenades avec interro-
(1) Ce sont les enfants Barb..., Cleme..., Couta..., Corb..., Feut..., I ? ntai...,
Gir..., Guy... (L.J.), Han..., Ler...(A.), Mol...
GRANDE ECOLE. V
gâtions, l'éducation des sens et de la parole consti-
tuent, comme toujours, la base de l'enseignement.
III. Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,
instables, épileptiques et hystériques ou non. Grande
école. La population de cette école était le 1er Jan-
vier 1889 de 168 et le 31 Décembre de 164. Après de
nouvelles instances pour avoir un troisième institu-
teur, nous avons eu enfin satisfaction. ,Un troisième
instituteur, M. Mesnard, nous a été donné par un ar-
rêté en date du 6 mars. Le maître de danse ayant
donné sa démission, l'enseignement a été fait par l'un
des instituteurs, M. BOYER. Après une suspension de
quelques mois, les exercices d'escrime ont été repris
sous la direction du Prévôt d'armes du fort de Bicê-
tro. Avec le concours d'un de leurs maîtres, M. Broyer,
les enfants ont organisé, en 1888, un orphéon et une
fanfare qui se sont développés sérieusement en 1889.
Ils se composaient à la fin de l'année de 47 exécu-
tants.
Le 15 avril, un certain nombre d'enfants ont concouru
pour le certificat d'études qui a été attribué à 8 d'en-
tr'eux : Chiquel, Verrien, Silly, Colombié (L.), l3rucl : ,
Gueny, Carton et Othe. Ces résultats font honneur à
nos maîtres et en particulier au premier instituteur,
M. BOUTILLIER (1).
Nous avons multiplié le plus possible les leçons de
choses, non seulement à la classe, mais encore dans
les jardins de la section, organisés, comme nous
l'avons dit dans les précédents Comptes-rendus, en
vue de l'enseignement. Pour rendre ces leçons cle cho-
(1) Le certificat d'études a été également accordé le même jour à 6 infir-
miers et Il 6 infirmières.
VI GRANDE ÉCOLE.
ses plus productives, et aussi pour utiliser des ma-
lades qui ne prennent pas goût au travail des ateliers,
nous avons réclamé de nouveau un maître jardinier.
Jusqu'ici, cette réclamation est restée sans effet.
Nous avons insisté l'an dernier sur les exercices relatifs
à l'enseignement, - 11) i,),n Ip, chez les idiots. Dans le but
de mieux faire comprendre aux maîtres la possibilité
de cet enseignement, nous avons obtenu de M. Javal,
directeur de l'Institution nationale des sourds-muets,
l'autorisation d'envoyer notre personnel enseignant
suivre pendant quelques semaines les classes de cette
institution. Ces visites répétées ont été fructueuses
et aujourd'hui maîtres et maîtresses mettent plus d'ar-
deur à apprendre à parler aux enfants idiots et à
appliquer les idées que nous avions cherché à leur
inculquer.
Parmi les améliorations de détail, nous citerons l'in-
troduction de la grammaire de Da Costa et l'emploi de
cubes en bois destinés à apprendre aux enfants à faire,
à l'exemple du maître, de petites constructions de mo-
dèles divers.
Les projections à la lumière oxhydrique ont été
mises plus souvent à contribution, au point de vue de
l'instruction des enfants. On a fait passer à diverses
reprises sous leurs yeux des sujets d'histoire naturelle,
des vues de l'Exposition et des grandes journées de
la Révolution, dont les clichés ont été mis gracieuse-
ment à notre disposition par M. Jean Macé, directeur
de la Ligne de l'Enseignement.
Promenades et distractions. Les enfants de la
grande école et ceux de la petite école qui sont pro-
pres ont continué à faire, sous la conduite de leurs
PROMENADES ET DISTRACTIONS. VU
maîtres et de leurs maîtresses, de nombreuses prome-
nades, soit dans les environs de l'hospice ou à Paris
même : Boulevard St Marcel, caveaux du Panthéon,
quai de Bercy, Observatoire, Jardin du Luxembourg,
Jardin des plantes, parc de Montsouris, Villejuif, bords
de la Seine, Fêtes du trône, de Bicêtre, du XIII" arron-
dissement, du Panthéon, de Gentilly; promenades au
parc de Vitry, à Chevilly, à l'Haï, Vincennes, Bourg
la Reine, Port à l'Anglais, etc.
Jamais ces promenades, même dans des lieux très fré-
queutés, n'ont donné lieu à des accidents capables d'at-
tirer l'attention et de troubler la tranquillité publique.
Mentionnons enfin les distractions diverses, com-
munes a tous les enfants valides : 1er janvier, distri-
bution de jouets et de bonbons ; 7 janvier, distribution
de jouets par M. Mayer, rédacteur en chef de la
Lanterne ; 14 janvier, séance de pupazzi; fêtes du
mardi gras et de la mi-carême, distribution de beignets
et de gâteaux, déguisements ; avril, les instituteurs'
apprennent le jeu de paume aux enfants ; 2 juin, in*i»3
tiné.e dramatique organisée par l'Orphéon-Fanfare ide
l'école, au profit de la caisse de la société ; séances h.0
lanterne magique ; 7 juillet, représentation dramatique;
au profit de la caisse de la Fanfare ; 13 juillet, retraite-
aux flambeaux dans le quartier du Kremlin par la'
Fanfare ; 14 juillet, les enfants assistent au défilé du
bataillon scolaire de la commune ; 15 juillet, les en-
fants de la grande école assistent à la course en sac
organisée par la commune ; juillet, concert des frères
Lionnct ; novembre, matinée dramatique, séance de
lanterne magique a la petite école, etc. Ces prome-
nades et ces distractions, outre qu'elles font plaisir aux
enfants, contribuent à leur bien-être physique ser-
vent à leur instruction. Les en priver constitue une
punition auxquels ils sont très sensibles.
VIII VISITES ET CONGES.
Visites, permissions de sortie et congés. - Les
enfants ont reçu 7.892 visites ; les visiteurs ont été
au nombre de 10.889. Voici la statistique des per-
missions de sortie et des congés :
BAINS ET HYDROTHÉRAPIE. IX
Bains et hydrothérapie. - Les bains et les dou-
ches, joints à la gymnastique et à l'emploi des bro-
mures, surtout de l'élixir polybromuré de Yvon et du
bromure de camphre du Dr Clin (1) et aux médicaments
anti-scrofuleux ont continué à être la base du traite-
ment pendant l'année 1889. Ainsi qu'on le verra plus
loin, nous avons également employé le bromure d'or
et la picrotoxine.
X VISITEURS DU SERVICE.
fréquentes destructions de ces toiles par les enfants,
nous aurions préféré des tables de marbre, qui, en outre,
sont plus faciles à entretenir dans un état constant de
propreté. L'an dernier, nous avons obtenu deux tables
de marbre à titre d'essai. Contrairement à ce que l'on
craignait, les enfants n'ont pas cassé plus de vaisselle
qu'avec les tables en bois. L'expérimentation ayant
été reconnue bonne, le directeur de Bicêtre a fait
acheter quatre nouvelles tables de marbre.
Nous avons continué, l'emploi de la laine de tourbe,
de la tannée, du varech et de la paille pour les lits
des gâteux. L'expérience nous a montré les avantages
incontestables des matelas de laine de tourbe.
On se rappelle que par suite de la disposition incli-
née du terrain sur lequel s'élèvent les pavillons,
ceux-ci, à leur extrémité nord, ont des sous-sols éle-
vés nous avons fait agrandir les petites fenêtres du
sous-sol de l'un des pavillons et nous y avons fait ins-
taller un magasin pour les chaussures et une salle de
cirage. On apprend aux enfants à nettoyer réciproque-
mont leurs souliers. Ce travail avait lieu autrefois sans
aménagement spécial dans le gymnase, ce qui offrait
de nombreux inconvénients. y
Visites du service. - 1\1. M. AnLonoiT, médecin en
chef de l'hôpital de Tirnowa ; Bourde, rédacteur au
Temps, Dr Briboll (Christiania), Dr Botto (de Rio Ja-
neiro), Dr Comby, D1' Chaumier (de Tours), Dr L. M.
Clarke, D'' Combe (de Lausanne), Dr Dubrisay, D'' Du
Mesnil, Dr Durbay (Liège), D'' Duquay, D1' Dind (Lau-
sanne), Dr Danitch, Dr Flechter Beach, Dr J. F. Tuttle,
D1' Fischer, D1' Figerio, médecin directeur du mani-
come d'Alexandrie, M. Louis Gallet, directeur de
l'hôpital de Lariboisière, M. Godard, directeur de
l'asile de l'enfance à Saint-Cyr, Dr Getscheff, direc-
teur du service sanitaire de Bulgarie, Dr Hart, clirec-
YISITEUns DU SERVICE. XI
teur du 1»i-l"18lt médical, D1' lIuffenhcim, conseiller
général de Seine-et-Oise, Dr Hirschfelder (de San
Francisco), Milo Hulda Hanson, professeur des enfants
anomaux à Copenhague, M. Izos, architecte (Lau-
sanne), Dr Ireland, Dr Janvier, D1' Jossy, Dr Lelan-
dais, D'' Morst (Christiania), D'' Maroll Francisco , Dl'
Dol' Muller (Graz), Dr de Musgrave Claye,.
D'' Narich, Dr Pachoud, médecin directeur de l'asile
d'aliénés de Bois de Céry (Suisse), Dr Palido
Fernandez, rédacteur au Siglo medico, D1' Peltier
(de Sedan), Dr Peyron, directeur de l'Assistance publi-
que, M. Pigeonneau, professeur à la Faculté des let-
tres, Dr Pons, médecin en chef de l'asile d'aliénés de
Bordeaux, D'' E. A. Pokrowsky (Malte), le professeur
Rossolino, D'' Sellier, Dr Salgo, médecin en chef de
l'asile d'aliénés de Buda-Pesth, M. Schrceder, rédac-
teur à l'Europe artiste, D'' Sikorsky IÜcw-), M. Thuil-
lier, membre du Conseil de surveillance de l'Assistance
publique, Mlle Taunis, institutrice à Christiania, Pro-
fesseur Taverni(Catane), l'dme le Docteur Katcheff, M.
L. Todesco, correspondant du Dio-itto de Rome, D''
Tozo, Dr Wallaert (de Courtrai), Dr Vallée, médecin de
l'asile d'aliénés de Longue-Pointe (Canada), Dr Wa-
ren-Lombart, Dr Wilhem.
Nous devons signaler enfin les visites des membres
du Congrès d'Assistance publique au nombre de 100,
le 2 août, et celle des membres du Congrès interna-
tional de médecine mentale au nombre de 80, le 9 août.
Maladies épidémiques. Dans le cours de l'an-
née nous avons eu deux enfants atteints de diphtérie.
L'unl'avait contractée avant son admission. Cet enfant,
nommé Clut ? a succombé. C'était un bel exemple
d'idiotie microcéphalique. Son observation figure
in extenso dans le mémoire que nous avons commu-
niquée, avec notre interne M. Camescasse, au Congrès
XII
MALADIES ÉPIDÉMIQUES.
international de médecine mentale. L'autre enfant
a également succombé.
Une petite épidémie de rougeole a éclaté le 23
octobre. 22'enfants (3 décès), un infirmier et une infir-
mière en ont été atteints. Voici le tableau des cas :
MALADIES ÉPIDÉMIQUES. XIII
Dans le précédent Compte-rendu, nous sommes
entrés dans des détails au sujet de l'existence de la
teigne parmi les enfants pour ainsi dire depuis que
Bicêtre existe. Nous avons également indiqué les
mesures d'isolement qu'il nous avait été enfin possible
de prendre, grâce à la bienveillante autorisation de
M. Peyron. Ces mesures ont porté leurs fruits et,
malgré un certain nombre de récidives, nous n'avions
plus que 25 enfants teigneux en voie d'améloration, il
la fin de 1889.
Influenza. L'épidémie de grippe a débuté dans
le service le 21 décembre ; elle a fini le 21 janvier 1890.
53 enfants en ont été atteints. Elle a d'ailleurs été bé-
nigne. Nous n'avons enregistré aucun décès. 2 infir-
miers et 3 infirmières en ont été également atteints.
Nous aurons peut-être l'occasion de résumer les prin-
cipaux traits de cette épidémie dans le prochain
Compte-rendu.
Nous n'avous eu qu'un seul cas de lièci-e (n/1>hoicl.e.
2 enfants ont eu des affections, d'ailleurs légères,
des yeux.
Musée pathologique. Le Musée placé sous la di-
rection de notre ami le D'' P. Brion j'usqu'à sa mort
le 7 avril, a été confié à partir du le" juin à l'un
de nos anciens internes, M. Paul SOLLIER. Le Musée
s'est augmenté sensiblement en 1889, ainsi que le
montre le tableau comparatif ci-après : .
XIV MUSÉE PATHOLOGIQUE. ,
Nous avons continué à reprendre, lors du relève-
ment, dans le cimetière de la commune (Gentilly), des
corps de 12 malades décédés il y a plus de 5 ans, les
crânes et les squelettes entiers quand il s'agit d'hémi-
plégiques. C'est cette pratique qui explique l'enrichis-
sement rapide du Musée dans les 2 dernières années.
Au point de vue des photographies, comme par le
passé, nous faisons prendre les photographies de tous
les malades à l'entrée, puis celles des malades qui
offrent des changements notables en bien ou en mal.
Quand un malade meurt, toutes ses photographies
sont déposées au Musée. A la fin de l'année, les obser-
vation des malades décédés sont réunies en volumes.
Il en résulte que toutes les pièces pathalogiques, bus-
tes, crânes, etc., ont leur histoire complète et peu-
vent servir à des études sérieuses. Elles ne sont pas
là seulement à titre d'objets curieux. Nous ajouterons
aussi que les photographies des cerveaux forment au-
jourd'hui 5 volumineux Albums (1).
L'installation actuelle du Musée est encore suffi-
sante. L'an prochain, il sera transporté dans l'un des
pavillons en construction, dont nous parlerons plus
loin. Une fois qu'elle sera effectuée, le temps sera venu
d'organiser un service scientifique convenable à l'hos-
pice de Bicêtre. A ce propos, nous ne pouvons que ré-
péter ce que nous écrivions dès 1885 : « Nous pensons
qu'il conviendrait de choisir un emplacement peu
éloigné de l'infirmerie générale et de la division des
aliénés, et d'y construire le service des morts et des
autopsies, le musée, les laboratoires, l'atelier de pho-
tographie et celui de moulage... »
(1) Nous profitons de l'occasion pour remercier de nouveau nos collabora-
teurs, MM. Hubert et Hurel, qui apportent le plus grand zèle à l'exécution
des phofofl1'ap}¡ie. et des 111 (JH111(fes.
ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL. XV
II.
ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.
Cet enseignement a été dirigé en 1889 par MM. Le-
roy, pour la menuiserie; - Alêne, pour la couture.
- Bénard, pour la serrurerie; - Dumoulin pour la
cordonnerie ; Morin pour la vannerie et le rem-
paillage des chaises; Mercier, pour la brosserie\
Le maître vannier, qui enseigne en même temps le
rempaillage des chaises, a eu l'heureuse idée d'appren-
dre le canage des chaises ce qui lui permet d'ensei-
gner aux enfants un nouveau métier.
Dans nos plans primitifs nous avions toujours compris
l'installation d'un atelier d'impri1nerie. Avant d'en
réclamer l'ouverture, nous avons voulu démontrer la
possibilité d'apprendre des métiers aux malades de
notre service et d'arriver à en tirer parti au point de
vue de la société et de l'Assistance. Cette preuve étant
faite depuis plusieurs années, nous avons réclamé
un maître typographe et imprimeur. Nous avons fini
par avoir gain de cause. M. Peyron a soumis le projet
au Conseil de surveillance de son administration, qui,
dans sa séance du 16 mai, sur le rapport verbal de
M. V. Goupy, a émis l'avis suivant.
Le Conseil, Vu le Mémoire par lequel M. le Directeur
propose de créer à l'hospice de Bicôtre, pour les enfants épi-
leptiques, un atelier d'imprimerie qui serait installé dans les
localités disponibles du bâtiment des ateliers; considérant
qu'en dehors des raisons d'ordre médical qu'a pu faire valoir
M. le Chef du service, l'ouverture de cet atelier permettra de
donner aux enfants les mieux doués sous le rapport intellec-
tuel un enseignement professionnel qui leur permettra plus
XVI ATELIER D IMPRIMERIE.
tard, lorsqu'ils auront quitté l'hospice, de suffire aux besoins
de leur existence ;
Emet l'avis : 1° Qu'il y a lieu de créer un atelier d'imprimerie
à l'hospice de Bicêtre pour les enfants épileptiques, et de
placer à la tête de cet atelier un chef ouvrier payé à raison
de 6fr. 50 par jour.
2° D'imputer la dépense résultant de l'achat et de l'installa-
tion du matériel sur le crédit inscrit au Sous-chapitre XV du
Budget hospitalier, art. 3 : Fond commun de réserve, et la
dépense résultant de la création d'un emploi de chef d'atelier
sur le crédit du Sous-chapitre XIX : Frais des diverses exploi-
tations (1).
L'imprimeur du Progrès 'médical, M. Goupy, qui
avait plaidé notre cause au Conseil de surveillance où
il représente le conseil des prud'hommes, a bien voulu
mettre à notre disposition ses connaissances et ses
relations professionnelles. C'est à lui que nous devons
la bonne installation de l'atelier d'imprimerie qui
fonctionne depuis le 8 Juin, et dont tous les meubles et
les casses ont été fabriqués par les apprentis menui-
siers ; c'est à lui aussi que nous devons l'excellent mai-
tre qui est à la tête de cet atelier. Nous sommes heu-
reux de pouvoir le remercier publiquement de son
concours empressé.
Nous n'avons eu qu'à nous féliciter du zèle que tous
les maîtres de l'enseignement professionnel apportent
dans leurs fonctions. Aussi serions-nous heureux de
voir l'Administration les en récompenser en accueil-
lant la demande que nous lui avons adressée de les ad-
mettre successivement à jouir de la pension de repos
qu'elle accorde aux sous-employés et aux infirmiers.
Le tableau suivant met en évidence les résultats
obtenus :
(1) Procès verbaux du Conseil de surveillance, 1â88-89, p. 531.
FONCTIONNEMENT DES ATELIERS.
XVII
XVIII ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.
vices d'un ordre bien autrement supérieur. Il permet
de donner à un certain nombre d'enfants un métier
qui, à leur sortie, les mettra en mesure de gagner
leur vie. Quelques-uns ont déjà quitté l'hospice
et sont placés ; d'autres le seront aussitôt que
les circonstances le permettront. Il nous aide à don-
ner à un plus grand nombre d'enfants le moyen
d'atténuer, dans une proportion variable, les sacrifices
que la Société s'impose pour eux. Précisons par un
exemple : Nous avons à l'atelier de couture 24 hémi-
plégiques, c'est-à-dire des malheureux condamnés
presque certainement à passer toute leur existence à
l'hospice, 5 sont déjà de bons tailleurs, la plupart des
autres le deviendront. Autrefois, ils ne savaient rien
faire ; maintenant, grâce à l'enseignement qu'ils reçoi-
vent une fois passés aux épileptiques adultes, s'ils ont
encore des accès, ou passés dans les divisions de l'hos-
pice, s'ils n'en ont plus, ils pourront travailler à l'atelier
commun de la maison et leur travail compensera en
partie, et pendant de longues années, les dépenses de
leur entretien, en même temps qu'il leur fournira quel-
ques ressources personnelles.
Six apprentis, sachant leur métier, sont sortis dans
le courant de l'année : Guen.. (A.), menuisier; z
Eym.. (P.), vannier; - Oth. (Ph.), cordonnier ; -
Chiq.. (G.), tailleur; - Bonvar.. (A.), menuisier;
Comm.. (M.), tailleur.
Chaque année, l'habillement et la chaussure des
enfants sont notablement améliorés et l'amélioration
sera encore plus grande, car nous avons enfin obtenu
que le maître tailleur fut autorisé à faire la coupe des
effets d'habillement. Nous espérons arriver un jour à
faire que chaque enfant ait son trousseau numéroté.
STATISTIQUE. XIX
Le tableau suivant fait voir que les enfants qui
profitent de l'enseignement professionnel est allé en
augmentant. Cette progression s'arrêtera bientôt,
quand nous aurons la population entière que doit
contenir la section.
XX
MOUVEMENT DE LA POPULATION.
enfants se décomposant ainsi : 354 enfants idiots, im-
béciles, épileptiques etc., aliénés; 24 enfants idiots,
épileptiques, etc., réputés non aliénés. On sait qu'il
ne s'agit là que d'une division purement administra-
tive. Voici le mouvement de la population en 1889.
PERSONNEL DU SERVICE. XXI
bre, il restait dans le service 393 enfants se décom-
posant ainsi : 369 enfants idiots, imbéciles ou épilep-
tiques, dits aliénés, et 24 réputés non aliénés. Sur ce
chiffre, 15 enfants sont atteints de surdi-mutité et 6
sont aveugles.
Personnel du service en 1889. - Le personnel était t
ainsi composé : 1° pour le service médical : d'un in-
terne titulaire, M. Camescasse, et d'un interne provi-
soire, M. Sorcl ; de M. le D'' Bricon, puis de M. P.
Sollier, conservateur du Musée pathologique ; - 2°
pour le service scolaire : a) grande école : d'un insti-
tuteur M. Boutillier et de deux instituteurs adjoints,
MM. Boyer et Mesnard ; d'un professeur de chant,
M. Pény; d'un professeur de gymnastique, Gon,
de 2 moniteurs, administrés de l'hospice ; d'un maître
d'escrime, M. Caudroy; d'un suppléant M. Joly et de 3
infirmiers, garçons de classe ; - L) Petite école : de
11 ? Blanclie AIIUS, aurveillante ; de Melles Berthe Lan-
glet et Amandinc Bohain, sous-surveillantes ; de Mulle
Ferret, suppléante et de 1 infirmière; - 3° pour l'en-
seignement professionnel, de 7 maîtres dont nous avons
cité lesnomsplus haut; - 4"pourle service hospitalier
de M. Agnus, surveillant; de M. Siégcl, sous-surveil-
lant, de M"10 Jolliot, sous-surveillante, chargée de la
surveillance du bâtiment des gâteux invalides et du
pavillon des maladies contagieuses ; de Mollo Athénaïs
Bohain, suppléante, chargée de l'infirmerie ; de 28 in-
firmiers de jour ou de nuit ; de 29 infirmières de jour
ou de nuit; d'un baigneur (suppléant) ; d'un perruquier
et d'un portier. Total du personnel secondaire : 69.
XXII DÉCÈS.
DÉCÈS. XXIII
IYIV DÉCÈS.
DÉCÈS. XXV
XXVI DÉCÈS.
DÉCÈS.
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RAPPORT DE M. THUILLIER. XXXI
IV.
La NOUVELLE section. - Construction DES trois
derniers pavillons.
Nous avons donné l'an dernier la description du pa-
nillon des cellules qui nous rend de très grands ser-
vices en nous fournissant le moyen d'isoler momen-
ttll('111CT1t, iL l'abri de toute promiscuité fâcheuse et
sous une surveillance efficace, les malades indisciplinés,
violents ou atteints d'excitation maniaque. Nous avons
également inséré a la fin du Compte rendu de 1888
deux figures qui représentent ce pavillon.
Nous terminions le chapitre relatif aux travaux exé-
cutés en 1888, en annonçant que M,. Peyron, appré-
ciant les raisons sérieuses que nous lui avions données,
avait fait préparer les devis des travaux restant à faire
pour compléter la section et qu'il nous avait promis de
soumettre le projet au Conseil de surveillance dans le
cours du mois de janvier 1889 : c'est ce qu'il a fait. Et
dans la séance du 7 février, M. Thuillier, chargé de
rapporter cette affaire, a lu le mémoire suivant pré-
senté par l'Administration :
Messieurs,
J'ai l'honneur de soumettre à votre examen un Projet de
travaux pour l'achèvement du quartier des Enfants idiots et
épileptiques à Bicètre. Le Conseil sait que le programme ou
plan d'ensemble, qui a été adopté pour la création de ce
quartier destiné à recevoir une population de 400 enfants,
comportait l'organisation et les constructions suivantes :
Serutce de joUI' ........
Réfectoires.
Ecoles ou Classes.
Ateliers.
Préaux couverts.
XXXII RAPPORT DE M. THUILLIER.
Hôpital proprement dit.
Service de nuit
Infirmerie.
Pavillon d'isolement pour les mala-
dies contagieuses.
Pavillon disposé en cellules pour
les malades agités ou indiscipli-
nés.
Service des gâteux (1 pavillon).
Huit pavillons pour dortoirs.
En 1882, on a détaché du plan d'ensemble le bâtiment à
usage d'ateliers ; cette construction a coûté 16 ? .690 fr. 67. -
En 1883, il a été affecté à la réalisation partielle du programme,
un crédit de 1.560.261 fr. 91 fourni pour 960.261 fr. 91 par un
prélèvement sur la subvention extraordinaire de 3 millions
allouée en 1883 à l'Administration, et, pour 600.000 francs, par "
une subvention municipale complémentaire allouée la même
année. Ce crédit avait été calculé en vue de la construction
des réfectoires, des classes, de deux pavillons pour dortoirs,
du pavillon pour les gâteux, de l'infirmerie; mais en utilisant
les bonis produits par les rabais d'adjudication, il a été pos-
sible de construire en plus 2 pavillons pour dortoirs d'isole-
ment.
En 1887 un prélèvement de 318.533 fr. 81 a été autorisé sur
la subvention extraordinaire de 1. 500.000 fr. pour la conti-
nuation des travaux, et en vue spécialement de la construc-
tion d'un cinquième pavillon à l'usage de dortoirs, du pavillon
des cellules et des préaux couverts. Il ne reste donc aujour-
d'hui à faire que trois pavillons pour dortoirs.
Le Projet qui vous est soumis comprend la construction de
ces trois derniers pavillons, qui, à 40 lits chacun, fourniraient
120 lits nouveaux, et compléteraient a 400, chiffre du pro-
gramme, le total des lits du quartier, non compris les lits de
rechange du pavillon des gâteux et ceux de l'infirmerie, du
pavillon de l'isolement et du pavillon des cellules.
En ce moment 60 enfants occupent encore des lits dans la
section des épileptiques adultes ; 30 couchent au quartier
dans des lits supplémentaires, et un certain nombre attendent
à l'asile Sainte-Anne leur translation a Bicêtre.
Les 120 lits nouveaux permettraient donc à l'Administration
de remédier à l'état d'encombrement actuel et de restituer il,
la section des épileptiques adultes son nombre de lits normal.
Les trois pavillons à construire sont figurés, comme empla-
cement, au plan d'ensemble du quartier ; des plans de détail,
RAPPORT DE M. THUILLIER. XXXIII
avec coupes et élévations, en montrent la disposition exté-
rieure et intérieure, la distribution, l'aménagement, etc.
Deux de ces pavillons sont en tout semblables à celui qui
vient d'être construit à gauche du pavillon des gâteux, et
sont disposés en échelons à sa suite ; ils se composent d'un
rez-de-chaussée élevé sur sous-sol et renferment l'un et
l'autre :
Au rez-de-chaussée, deux dortoirs de 20 lits chacun avec
services généraux au milieu et chambres de surveillants aux
extrémités; - En sous-sol, dans la partie nord du pavillon,
qui se trouve sur une déclivité de terrain, des chambres pour
le logement des serviteurs.
Le troisième pavillon, placé en échelon, à la suite des deux
précédents, rappelle par sa disposition extérieure le pavillon
des gâteux. Il est élevé sur sous-sol d'un rez-de-chaussée et
d'un premier étage qui formera le prolongement du bâtiment
des classes. Le rez-de-chaussée renfermera deux dortoirs de
po lits chacun avec leurs annexes ordinaires, comme dans les
autres pavillons, plus un logement de surveillant qui sera
aménagé à l'extrémité nord. Le premier étage sera utilisé
pour agrandir les locaux destinés à l'enseignement et instal-
ler un musée pédagogique (1).
Le projet comprend aussi la construction d'un groupe de
cabinets d'aisances el, d'urinoirs dans la cour de récréation
des enfants, et l'établissement d'urinoirs dans la cour du
parloir.
Il prévoit, enfin, les travaux d'assainissement et d'adduction
d'eau et de gaz dans les cours et chemins, et les travaux de
viabilité nécessaires pour mettre en communication facile les
nouveaux bâtiments projetés et ceux déjà construits. Un petit
chemin de fer, système Decauville, serait établi le long de la
clôture grillagée du côté du marais, avec une plaque tournante
au droit de chaque pavillon.
Les divers travaux à exécuter pour la réalisation de ce pro-
jet sont décrits et estimés dans les deux devis joints au dos-
sier. La dépense est évaluée, au devis estimatif, à la somme
totale de 736.480 francs, en y comprenant un dixième d'im-
prévu et un vingtième pour frais de direction et d'agence.
En voici le détail par nature d'ouvrage :
(1) Une moitié de cet étage sera affectée au Musée anatomo-patholo-
f¡i'1ue (I3.).
XXXIV ACHEVEMENT DE LA SECTION.
RAPPORT DE M. THUILLIER. XXXV
L'Administration ne recouvrera, il est vrai, la disponibilité
de ces crédits pour les affectera de nouveaux travaux qu'après
la clôture de l'Exercice 1888 et l'approbation des Chapitres ad-
ditionnels de 1889; cependant, si besoin, un arrêté préfectoral
pourrait, après avis favorable du Conseil, en autoriser l'ouver-
ture d'urgence à l'Exercice 1889. En utilisant cette première
XXXVI RÉSISTANCE AU CONSEIL DE SURVEILLANCE.
des parties successives de ce travail. II était donc naturel que
M. le Rapporteur, nouveau venu dans le Conseil, pensât que
ses collègues, plus anciens que lui, eussent tous leur opinion
faite sur un projet qui était parfaitement connu.
M. le Rapporteur pense inutile de donner des détails sur
les travaux qui sont proposés aujourd'hui, puisque le mémoire,
présenté par l'Administration sur cette affaire, a été inséré
in extenso au procès-verbal de la dernière séance, dont tous
les membres du Conseil ont reçu une épreuve.
Au nom de la commission M. le Rapporteur propose d'é-
mettre un avis favorable à l'exécution des travaux pour l'achè-
vement de la section des enfants idiots et épileptiques à Bicêtre.
Toutefois, il ne se prononce pas sur l'intérêt qu'il pourrait y y
avoir à construire le musée pédagogique prévu au projet.
M. DE Salvehte demande quel est le chiffre de la dépense
prévue.
M. le Rapporteur. La dépense avant rabais est évaluée à
700,000 fr. en chiffres ronds. Mais on peut compter sur un rabais
de 330/0 en moyenne. C'est donc en réalité une dépense ap-
proximative de 500,000 fr.
M. RoCaAItD. - C'est là une somme importante. Ne pour-
rait-elle pas être employée à des travaux d'une utilité plus
grande, qui donneraient satisfaction à des besoins plus urgents ?
M. LE Directeur fait observer que les services à créer pour
l'isolement des maladies contagieuses, les chroniques et les
infirmes, ne seront ni plus ni moins vite édifiés si l'on ne
dépense pas cette somme de 500,000 fr. pour l'achèvement
du quartier des enfants idiots. Cette assertion peut paraître
au premier abord paradoxale, et pourtant elle est exacte.
En effet, ce qui empêche l'Administration de créer avec
toute la rapidité qu'elle désirerait ces nouveaux services, c'est,
pour les hôpitaux d'isolement, l'opposition des Maires des
communes suburbaines, et pour les chroniques et les in-
firmes, ce n'est point le manque de ressources pour cons-
truire les édifices et faire les frais de premier établisse-
ment, c'est l'incertitude où elle se trouve de pouvoir compter
sur les ressources annuelles nécessaires au fonctionnement
de ces nouveaux services, et que peut seule procurer une aug-
mentation de la subvention municipale.
Une somme de dix millions a été réservée il l'Assistance
publique sur le dernier emprunt de la Ville pour grands tra-
vaux, et l'Administration n'a encore engagé de dépenses sur
cette somme que pour 2,500,000 francs. Par conséquent, elle
peut achever le quartier des enfants idiots sans diminuer
RESISTANCE AU CONSEIL DE SURVEILLANCE. XXXVII
l'importance des hôpitaux projetés, et dont la construction a
été retardée, non pour des motifs financiers, mais par suite
de l'opposition des autorités municipales où ces établissements
doivent être créés ou l'insuffisance des ressources annuelles
d'entretien.
M. ROCHARD reconnaît sans doute qu'il est bon de donner
des soins à ces enfants idiots et épileptiques ; mais, en se
plaçant au point de vue social, il lui semble plus urgent de
venir en aide à ces malades qui ne peuvent trouver place
dans nos hôpitaux, et qui, guéris, constituent une force
sociale que le devoir, aussi bien que l'intérêt, commande de
sauver.
M. Thomas pense que précisément l'achèvement du quartier
des enfants idiots à Bicétre permettra indirectement de recueil-
lir des adultes que la société a un intérêt tout particulier à se-
courir. En effet, dans les nouvelles constructions, on installera
les 60 enfants idiots qui se trouvent actuellement dans la sec-
tion des épileptiques adultes.
C'est donc 60 nouvelles places que l'on pourra donner des
adultes qui ne peuvent être abandonnés à eux-mêmes, qu'il est
même nécessaire de ne pas laisser dans leurs familles, car ils
sont plus encombrants que des vieillards, et constituent un dan-
ger et pour eux-mêmes et pour les autres. Donc, en se plaçant au
point de vue indiqué par l'honorable M. Ilochard, on doit re-
connaître que le projet proposé présente un sérieux et réel
intérêt social.
M. Fehiiy rappelle que c'est lui qui a été rapporteur de la
Commission chargée de l'examen du plan d'ensemble. On avait
dit avec raison, et lui-même était de cet avis, que la dépense
engagée par ce projet était excessive en raison du but qui se-
rait atteint. Mais enfin le principe fut voté ; successivement
on vota aussi diverses parties du projet. Aujourd'hui, il s'agit
de terminer l'opération.
Il ne reste plus que trois pavillons à construire. Il n'est
plus possible de reculer et de laisser inachevé un service pour
lequel on a déjà fait tant de sacrifices. M. Ferry votera donc
l'achèvement du quartier des idiots il Bicètre, non point avec
enthousiasme, mais parce qu'il y a une nécessité devant la-
quelle il faut s'incliner.
M. HOCHAHD persiste à croire que cette somme de 500,000 fr.
pourrait être employée plus utilement. M. le Directeur craint
de manquer de ressources pour l'entretien de nouveaux ser-
vices destinés aux malades ou aux infirmes, mais il peut tou-
jours formuler ses propositions. Le Conseil de surveillance
XXXVII ! vote du projet d'achèvement.
émettra son avis, et l'Administration aura ainsi mis sa respon-
sabilité à couvert.
M. LE Directeur déclare qu'à bref délai il fera des propo-
sitions pour la construction de nouveaux services destinés aux
malades et aux infirmes; mais, même si ces projets sont adop-
tés par le Conseil municipal, ils ne pourront être terminés que
dans un certain laps de temps.
Au contraire, le projet en ce moment en discussion est d'une
réalisation immédiate. Il y a donc un intérêt véritable à ne
point le repousser.
M. de SALVERTE combat le projet par des motifs d'économie,
et demande, à titre d'amendement, que la somme prévue pour
l'achèvement du quartier des enfants idiots soit affectée a une
destination autre qui sera ultérieurement déterminée.
L'amendement de M. de Salverte, mis aux voix, est rejeté.
M. THUILLIER demande la permission de présenter une
observation avant que le Conseil passe au vote des conclu-
sions de la Commission. Le devis prévoit 5 o/o pour frais
d'agence, indemmités et honoraires. La Commission demande
que ce chiffre soit réduit à 3 o/o. Le montant total du devis
serait ainsi réduit de 736,480 francs à 722,451 fr. 82.
M. le Président met aux voix les conclusions de la Com-
mission, le montant du devis étant fixé à 722,451 fr. 82. Les
conclusions de la Commission sont adoptées. En conséquence
le Conseil émet l'avis suivant :
Le Conseil, vu le Mémoire par lequel M. le Directeur sou-
met à son examen un projet de travaux pour l'achèvement du
quartier des enfants idiots et épileptiques, a Bicêtre, et pro-
pose de subvenir à la dépense de la manière suivante, savoir :
1° Jusqu'à concurrence de 179,117 francs 67. sur boni de pa-
reille somme réalisé dans la partie de l'opération autorisée en
1883 et dont le compte vient d'être apuré ; 2° Pour le surplus,
sur la subvention extraordinaire de 1,500,000 fr. allouée en 1889
à l'administration pour grosses réparations et grands travaux
(4° annuité de l'emprunt municipal de 2.')U millions);
Vu les plans,-vu le devis estimatif des travaux s'élevant
avant rabais, y compris l'imprévu et les frais de direction, à
la somme de 73G,4g0 francs ;
Emet l'avis : 1" Qu'il y a lieu d'approuver les plans et devis
sus-visés, ayant pour objet l'achèvement du quartier des en-
fants idiots et épileptiques à Bicètre; 2" D'imputer la dépense
évaluée avant rabais, imprévus et frais de direction compris,
il la somme de 722,451 fr. 82 ;
NOUVEAUX PAVILLONS. XXXIX
D'abord et jusqu'à concurrence de 179,477 fr. 67. sur le boni
de pareille somme réalisé clans l'exécution de la partie de
l'opération autorisée en 1883, et qui figurera dans les crédits
a ouvrir aux chapitres additionnels du Budget de 1889, cha-
pitre III, section 2, ? . : Fonds spéciaux périmés à faire re-
vivre. Dépenses subventionnées, et, pour le surplus, sur la
subvention extraordinaire de 1,500,000 fr. allouée en IS89 à
l'Administration pour grosses réparations et grands travaux
(4« annuité de l'emprunt municipal de 250 millions) ;
3° De mettre en adjudication publique, aux clauses et con-
ditions des cahiers des charges ordinaires de l'Administration,
et par nature d'ouvrage, les travaux de diverse nature prévus
au devis de l'opération, à l'exception des travaux de plomberie
pour gaz, qui, en raison de leur peu d'importance, seront con-
fiés à l'entrepreneur de l'entretien, et des travaux de dallage
en grès cérame et d'établissement d'un petit chemin de fer
système Decauville, qui, eu égard il leur spécialité, feront
l'objet de marchés de gré à gré.
Cette discussion témoigne de la persistance de
l'hostilité d'une partie des membres du Conseil de
surveillance contre la réforme que nous avons essayé
de réaliser à Bicêtre avec l'appui constant du Conseil
municipal. Certains de nos adversaires, n'ayant jamais
vu le « dépotoir» où séjournaientautrefoislesenfants et
n'ayant jamais visité la nouvelle section, ne compren-
nent pas encore la nécessité de l'Assistance des enfants
idiots et épileptiques. D'autres qui l'ont visité ne
veulent pas reconnaître leur erreur et, forcés et con-
traints, s'inclinent de mauvaise grâce devant la néces-
sité. Aussi peut-on dire que la section des enfants
de Bicêtre est l'oeuvre du Conseil municipal et faite
avec les subventions municipales.
Le dossier a été envoyé quelques jours après le vote
a la Ville pour être introduit au Conseil municipal.
Celui-ci l'a adopté dans sa séance du 29 mars, sur le
rapport de notre ami P. Strauss. Cette fois-ci, M. A.
Després n'a pas cru utile de reproduire ses accusations
XL
NOUVEAUX PAVILLONS.
et ses erreurs. M. Poubelle, préfet de la Seine, a eu
l'obligeance de signer promptement l'arrêté de mise
en adjudication. Celle-ci a eu lieu le 24 mai et a donné
des rabais considérables que fait ressortir le tableau
suivant :
Adjudication du v4 mai 118.'l.
MORT DE M. GALLOIS. XLI
M. Gallois (M.-P.), architecte de l'administration générale
de l'Assistance publique et de celle du Mont-de-Pitié, est mort
à Paris, le 6 mars, à de Go ! ans. C'est une véritable perte
pour ces deux administrations. Personnellement, nous regret-
tons très vivement la mort prématurée de M. Gallois. Nous
n'oublierons jamais que, abandonnant les plans et devis primitifs
de la section des enfants de Bicêtre, qu'il avait préparés con-
formément au programme administratif, il a accepté le plan
général que nous avions conçu : choix de l'emplacement;
pavillons iL rez-de-chaussée, en fer et briques; disposition
des pavillons (ateliers, réfectoires, écoles, etc.); installation
des idiots invalides, des malades, des contagieux, des agités,
dans autant de pavillons distincts et suffisamment isolés.
Nous garderons toujours le souvenir du talent incontestable,
de l'habileté consommée et de l'activité continue qu'il a
mis il l'exécution de cette oeuvre. Nous avions pu obtenir pour
lui, il force de persistance, l'honneur auquel il attachait le plus
grand prix. Malheureusement, une mort prématurée l'a empê-
ché d'en jouir longtemps et de présider à l'achèvement inté-
gral de la section des enfants.
V.
Consultation exthrne. Placement des enfants.
Transferts et rappel d'une ancienne
délibération du conseil général.
Depuis notre arrivée à Bicêtre en 1879, nous avons
consacré la matinée du jeudi à recevoir les malades du
dehors. Peu à peu, notre clientèle ordinaire s'est
accrue d'une clientèle d'un genre particulier, celle
des familles qui ont un enfant épileptique ou aliéné
à placer, et celle des vieillards et des infirmes qui
sollicitent leur admission dans un hospice.
Les enfants nous sont envoyés par des parents de
XLII PRATIQUES DEFECTUEUSES DE L ASSISTANCE.
nos malades, par des médecins de la ville et des hôpi-
taux. Le premier mode d'envoi se comprend sans
peine, mais il n'en est pas de môme du second. En effet,
les médecins et l'Administration devraient éviter un
déplacement long, pénible surtout l'hiver, coûteux, inu-
tile aux familles et à leurs enfants, aux vieillards et
aux infirmes. Les médecins delà ville et plus encore
ceux des hôpitaux devraient connaître les formalités
à remplir. En 1889, soixante-douze familles sont ve-
nues de tous les quartiers de Paris ou de diverses com-
munes du département de la Seine s'adresser à nous
pour leurs enfants. Voici la note, imprimée dans la
section, que nous leur remettons :
Placement DES Enfants.
« 1° 0 Certificat médical constatant l'état intellec-
tuel et les accès de l'enfant, et concluant Ù la néces-
sité de son placement dans un établissement spécial
au point de vue de la sécurité publique ;
« 2° Faire légaliser la signature du médecin par le
commissaire de police de son quartier ;
« 3" Copie ou extrait de l'acte de naissance de l'en-
fant ; .
« 4° Conduire le malade, avec ces pièces, à l'Asile
clinique (Sainte-Annel, rue Cahanis, n" 1, le matin de
9 heures à il heures. »
Comme on le voit, rien n'est plus simple (1). Fai-
sons remarquer qu'il n'est nul besoin de l'interven-
tion du commissaire de police, ni du passage par le
dépôt de la préfecture de police où trop de médecins
envoient encore les malades et même les enfants,
(1) Les formalités sont exactement les mêmes pour les aliénés adultes.
PLACEMENT DES ENFANTS. XLI Il
mais qu'on peut placer directement les aliénés,
adultes ou enfants, à l'Asile clinique.
Mais c'est surtout l'Administration qui est coupable.
N'est-ce pas elle qui devrait fournir tous ces rensei-
gnements ? Est-ce que toute personne qui en a besoin
ne devrait pas trouver au chef-lieu, dans les hôpitaux,
dans les mairies et les bureaux de bienfaisance, des
feuilles imprimées contenant l'indication des formalités
ou des conditions il remplir pour l'inscription au bureau
de bienfaisance, l'obtention des secours pour les
enfants nouveau-nés, les secours de nourrice ; pour
le placement dans les fondations, les maisons de
retraite, les hospices, les orphelinats, etc. Et ces
renseignements devraient être donnés libéralement,
avec la plus grande bienveillance. C'est dans les bu-
reaux où viennent les souffrants, les déshérités, qu'on
devrait rencontrer le plus de complaisance et de bonté.
Malheureusement, loin d'aller au-devant des misères,
de faciliter l'accession aux secours, le placement dans
les établissements hospitaliers, on semble éviter, au
contraire, de donner les renseignements, chercher à
décourager les pauvres gens afin d'éloigner le moment
où on ne pourra pas éviter les secours, et écarter le
plus possible de malheureux de la liste des secourus
ou des hospitalisés. On prend en un mot plus de souci
de la caisse que des souffrances et des misères.
L'Administration de l'Assistance publique est encore
empreinte des traditions catholiques et monarchiques :
faire des aumônes ; elle n'est pas encore républicaine,
c'est-à-dire fraternelle, humaine. Le droit du mal-
heureux il l'assistance n'est pas encore reconnu inti-
mement par elle ; c'est trop souvent une faveur qu'elle
accorde, une aumône qu'elle donne.
Nous avons parlé bien des fois dans les Comptes
rendus antérieurs des demandes de transfert qui sont
XHV TRANSFERTS DES ENFANTS.
adressées par les préfets des départements au sujet
des enfants de notre service nés dans ces départements,
mais dont les familles habitent le département de la
Seine. Nous avons indique aussi la délibération prise
par le Conseil général de la Seine, en vue de faire
cesser cette mesure barbare, puisqu'elle éloigne ces
malheureux malades de leur famille.
Dans la séance du 7 février 1889 de la Commisson
de surveillance des asiles, nous sommes revenu sur
l'application de cette délibération. Voici l'extrait du
procès-verbal : .
Maintien dans les asiles de la Seine des enfants aliénés : îrW cle moins de deux arts et ayant conservé leur domicile de
secours en province. M. le Dr Bourneville appelle la bien-
veillante attention de l'Administration sur les dispositions de
la délibération du Conseil général cle la Seine, en date du ! I
mai 1881, prise en vue du maintien dans les asile-; de la Seine,
aux prix de la journée des asiles de province, des enfants
aliénés, âgés de moins de dix-huit ans, qui, par leur domicile de
secours, appartiennent à des départements étrangers, mais
dont la famille habite Paris depuis deux ans au moins. A cette
occasion, M. le Dp Bourneville donne lecture d'une lettre
écrite aux parents d'un malade traité à Bicêtre, lettre par
laquelle M. le Préfet de la regrette de ne pouvoir
maintenir cet enfant dans ce quartier d'hospice où il sérail
obligé de payer un prix de journée supérieur à celui de l'asile
de La floche-Gant/on. M. Bourneville demande à celle occa-
sion que les dispositions humanitaires de la délibération pré-
citée soient portées à la connaissance des préfets des autres
départements. Il ajoute qu'il ne cesse, en ce qui le concerne,
de rappeler cette délibération sur tous les certificats qui lui
sont demandés pour transfert d'enfants.
M. Roux, directeur des affaires départementales, répond
que, chaque fois que les familles le sollicitent, le maintien
dans les asiles de la Seine de cette catégorie de malades est
autorisé, mais que l'Administration, vu l'encombrement des
sections d'enfants, n'a pas cru prudent de notifier la délibé-
ration précitée aux préfets des départements. M. Roux ajoute
qu'en ce qui concerne le cas signalé par M. le 1)'' Bourneville
il s'empressera de proposer, à M. le Préfet de la Mayenne, le
'I'It : 1\jI'I : It'l'v U13S I : \1·' : 1\'l'S. XLV
maintien à Bicêtre du malade //... au prix de journée de l'asile
de La Roche-Gandon.
M. le Président déclare l'incident clos.
Ce que le Conseil général a voulu c'est une règle
générale, égale pour tous et non pas donner à l'Admi-
nistration l'occasion d'accorder des faveurs. Pour cela
il n'était pas besoin d'une délibération ; cette faculté
existait.
Nous rappellerons enfin que le département de la
Seine ne réclame aux autres départements que le prix de
revient que ces départements paient dans leurs asiles,
mettant à sa charge le surplus du prix de journée payé
dans les asiles de la Seine.
VI.
Aliénés mineurs ET enfants IDIOTS.
Dans la séance du jeudi 29 août 1889 du Conseil général de
la Loire-Inférieure a eu lieu la discussion suivante :
M. Vivier présente le rapport sur les aliénés. Le crédit de
291.000 fr. nécessité par ce service est adopté. Le rapport examine
deux voeux formulés par M. Biaute, médecin en chef de ce service.
L'un de ces voeux concerne les aliénés mineurs étrangers à la
Loire-Inférieure, mais dont les familles demeurent dans le départe-
ment. Leur entretien est à la charge de leur déparlement d'origine.
Or, pour une minime différence de tarif, ces communes font entre-
tenir ces mineurs dans les asiles de leurs départements respectifs,
éloignant ainsi les enfants de leur famille. Le département pourrait
accepter la petite charge qui résulterait pour lui de la réduction
du tarif au même prix que celui des asiles rivaux. Le rapport est
accepté. L'autre demande du médecin en chef est plus importante.
Il s'agit des enfants idiots que, dans l'état actuel de la science, on
peut ramener par des soins à l'état presque intelligent. M. Biaute
XLVI ASSISTANCE DES ENFANTS IDIOTS.
demande la création d'un service spécial à ces déshérités. Le rapport
rejette cette demande en raison des frais qu'elle nécessiterait.
M. SmILLE se prononce en faveur des deux demandes de
M. Biaute. Sur le premier point, il y aurait de la cruauté à main-
tenir, pour une minime différences de frais, un état de choses qui
éloigne de leur famille les enfants malades, le domicile de secours
étant fixé au département d'origine. Cette situation est déplorable.
M. Vivier. - Nous sommes parfaitement d'accord.
Le Conseil adopte les modifications proposées.
M. SIBILLE, parlant des idiots, fait observer que l'asile Saint-
Jacques ne pouvant conserver ces sujets, on les renvoie, après un
court séjour, à leurs parents. Il demande la création d'un service
pour les soins à donner aux idiots à St-Jacques, mais il convient
auparavant de faire une enquête et d'établir les frais d'établisse-
ment du pavillon spécial destiné à ce genre de pensionnaires.
Diverses opinions sont émises. Aucune ne conteste l'utilité de la
création d'un service des enfants idiols, mais le Conseil recule
devant les travaux matériels que cette création nécessiterait à
Saint-Jacques, hospice qui n'a qu'un caractère provisoire et devra
forcément être reconstruit avant peu.
M. DE la FERRONNAYS verrait avec regret le Conseil entrer
dans la voie de constructions nouvelles à Saint-Jacques, la situation
des finances ne le permettant pas.
M. ViviER. - Le rapport ne parle de constructions nouvelles
qu'incidemment; il propose l'ajournement de cette question.
Le rapport est adopté.
Il Proposition adoptée. Les mineurs, nés en départements
étrangers, dont les parents habitent la Loire-Inférieure depuis
deux ans au moins, seront conservés en traitement à l'asile de
Nantes, avec l'autorisation du département d'origine qui paiera
leur entretien au prix de journée de son asile, le département de la
Loire-Inférieure supportant ce surplus s'il y a lieu. z
2° Proposition ajournée. - Construction d'un pavillon spécial
pour les jeunes idiots, imbéciles, arriérés, pour leur traitement et
leur éducation, selon les méthodes suivies à Bicêtre.
VII.
DE l'assistance des enfants idiots A l'étranger.
Ainsi que nous l'avons dit souvent, l'assistance, le traite-
ment et l'éducation des enfants idiots et arriérés sont en voie
de grands progrès dans presque tous les pays, sauf en France
ASSISTANCE DES ENFANTS IDIOTS. XLVII
où, jusqu'ici, on ne paraît pas se rendre compte de l'urgence
de ces réformes et des résultats qu'elles peuvent donner. C'est
pour cela que nous allons donner de nouveaux renseigne-
ments susceptibles d'apporter la conviction dans les esprits
qui n'ont d'autre souci que le bien public et l'intérêt des
malheureux.
D'après les documents communiqués à la 5c session de la
Conférence allemande relative à l'assistance des idiots, il exis-
tait en Allemagne 36 établissements donnant l'assistance et
l'éducation à 4.247 idiots. Nous devons signaler aussi l'exis-
tence, dans un certain nombre de villes, de classes destinées
aux arriérés. Ces enfants qui, dans les écoles ordinaires,étaient
laissés de côté, tournés en dérision, ne faisaient aucun progrès,
parce qu'on ne s'occupait pas d'eux,et,finalement, devenaient des
non-valeurs, se trouvent très bien de ces classes à part et
tirent un grand profit de l'enseignement spécial qui leur est
donné.
Tous les ans, dans les pays scandinaves, il y a un congrès
où l'on discute toutes les questions relatives à l'assistance et
au traitement de ces malheureux. D'après le compte rendu du
Congrès du 18 mars 1887, on a fondé deux nouveaux asiles
d'idiots à Hessieholm et à Karbshanm, et un autre était projeté
à Falun.
En 1886, on a ouvert un asile d'idiots incurables épileptiques
âgés, à Sceckerstad. - La Société pour les enfants de
Stockholm estime que les grands établissements conviennent
aux idiots et arriérés d'un certain âge et que les petits établis-
sements sont plus convenables pour les jeunes idiots. Eu
Suède, il existe des asiles-écoles pour les idiots : à Stockholm
(35 places), dans l'arrondissement de Stockholm (22); à Upsala
(1G); dans le Soedermanland (8); dans l'OEstergcetland (24); dans
le Smalund (24) ; dans le Blekinge (12); à Khristianstad (36) ;
à Malmoehut (45) ; à Johannesberg (40) ; à OErebro (20) ; à
Gelle (20).
A Copenhague, l'institution fondée par J. Keller en 1865 a
reçu 459 enfants idiots, faibles d'esprit ou épileptiques durant t
l'année 1887.
D'après Mme Matrat, inspectrice générale des écoles mater-
nelles, qui a visité les pays scandinaves en 1888, il y aurait ac-
tuellement, en Suède, 17 établissements pour l'éducation des
idiots. Tous, sauf un, sont dirigés par des femmes.
En Norwège, la loi de 1881 rend obligatoire l'enseignement t
pour ceux des idiots de sept à vingt ans qui sont aptes à le
recevoir. MmJ Matrat cite l'Ecole des filles idiotes iL Thorsangj
XLVIII ASSISTANCE DES ENFANTS IDIO'l'S.
faubourg de Christiania, fondée en 1876 et qui compte
135 élèves. Elle ajoute que « la Norwège a une écolo semblable
pourles garçons et un autre grand établissement à Trondghen;
la quatrième et dernière école sera ouverte dans un an » (1).
Au dernier Congrès des médecins aliénistes russes, qui
s'est tenu à Moscou, M. Maliarewski a fait une communication
sur l'éducation et la protection des enfants arriérés ; il montre
que pour remédier aux dégénérescences dont sont atteints ces
malades, il était nécessaire d'instituer des maisons médico-
pédagogiques spéciales. Il a rappelé que, le premier en Russie,
il avait fondé un établissement de ce genre, il y a quelques
années, à Saint-Pétersbourg (2).
Nous avons donné autrefois les renseignements sur les nom-
breux asiles pour les idiots et les faibles d'esprit qui existent
en Angleterre et aux Etats-Unis. En ce qui concerne ce dernier
pays les Proceedings of lite Association of médical O ? icers o/'
,il Institutions four 1 clioUe (Incl feeble-miided Persons
(1876-1886) renferment des plans, des mémoires et des docu-
ments de toutes sortes qui devraient être connus de tous ceux
qui s'occupent d'Assistance publique. D'autre part, l'Annuaire
Médical des Etats-Unis renferme les indications suivantes
sur les établissements des enfants idiots et faibles d'esprit aux
Etats-Unis :
Californie : Institution privée sous le patronage de l'Etat,
25 lits, fondée en 1884 à Vallejo ; - Connecticut : Institution
privée sous le patronage de l'Etat, 10 ? lits, fondée en 1858, à
Lalr,euille; - Autre institution fondée en 1881, à DZcriden ; -
Illizois : Institution d'Etat, 300 lits, fondée en 1865, à Lin-
coln : Inclina : Institution d'Etat, 82 lits, fondée en 1878, à
Knighstown ; lo·tva : Asile d'Etat, '21) lits, fondé en 1870, à
Gleenwood. - Kansas : Asile d'Etat, 160 lits, fondé en 1860 à
1·'ranlcfort.-Dlassasu.clcetls : Institution privée, fondée en regs
à layville ; - Asile d'Etat, HO lits, fondé en 1818 à South-
Boston ; Mtc/ucUt : Institution privée fondée en 1884 avala-
mazoo. -Dlin2esula : Institution d'Etat fondée en 1879 à Fari-
bault. -New-York (Etat de) : Asile d'Etat fondé à Giddes;
Autre asile d'Etat fondé en 1878 àNw.u'k; Hôpital pour
les idiots et les épileptiques à New-York; Autre institution,
(t) Voir L'éducation des enfants anormaux dans les pays
Scandinaves, par Mme Matrat (Uevue pédagogique, nov. 1888,
p. 425).
(2) Arch. de Neurologie, 1887, tome XIV, p. 302.
ASSISTANCE DES ENFANTS IDIOTS. XLIX
200 lits, fondée en 1860 à New-York. - Institution privée du
Dr Seguin, 11 lits, fondée en 1880, à New-York. - Ohio : Asile
d'Etat, 560 lits, fondée en 1857 auprès de Collimbus. - Pen-
sylvanie : Institution privée, 405 lits, fondée en 1863, à Elwyn.
En Ecosse, il existe trois institutions pour les enfants imbé-
ciles, l'une à Baldovan, l'autre à Larbert, la dernière à Colum-
bia-Lodge, près d'Edimbourg. Nous citerons, en Irlande, la
Stewart Institution; en Angleterre et dans le pays de Galles, il
existe une dizaine d'établissements parmi lesquels nous cite-
rons l'asile modèle de Earslwood qui renferme 594 enfants des
deux sexes.
Si l'on compare la situation de notre pays à celle des pays
scandinaves, de l'Angleterre, des Etats-Unis, de l'Allemagne,
on est obligé de reconnaître que la France est demeurée bien
en arrière de tous ces pays, et cependant c'est à un Français,
à Edouard Seguin, que revient l'honneur d'avoir organisé le
traitement et l'éducation des enfants idiots et arriérés, et c'est
lui qui est le véritable promoteur de cette grande réforme. Le
département de la Seine est à peu près le seul qui ait com-
mencé à organiser les services spéciaux pour les enfants idiots.
L'un d'eux relève directement de la Préfecture de la Seine ; les
deux autres de l'Assistance publique. Ce serait un honneur pour
cette dernière administration, si, en attendant la transforma-
tion et l'agrandissement de la section des petites filles de la
Salpêtrière, elle hâtait l'achèvement de la section des enfants
de Bicêtre, et la montrait en plein fonctionnement au moment
du Congrès international d'Assistance publique qui doit avoir
lieu au mois d'août prochain à l'occasion de l'Exposition uni-
verselle. (Progrès médical, 15 février 1889, p. 132). B.
L MORT DE P. BRICON.
VIII.
Mort du Dr Paul BRICON.
Notre ami, le Dr BRICON, ancien secrétaire do la
rédaction du Progrès médical et l'un de nos plus
fidèles collaborateurs depuis 1882, a succombé
dimanche dernier à la suite des accidents qui
viennent si souvent compliquer les affections car-
diaques anciennes.
Toute la rédaction du Progrès médical ot tous
nos lecteurs, qui ont pu apprécier son dévouement
à la science, joindront leurs regrets à ceux des
nombreux amis de Bricon et aux nôtres. Ils conser-
veront de Bricon le souvenir d'un vaillant mort à
la tâche, et son nom, de même que celui d'Amédée
Blondeau, son regretté prédécesseur, restera dans
leur mémoire, comme celui d'un homme dont la
vie entière a été consacrée à la science et à toutes
les idées généreuses. Fidèle aux principes do toute
sa vie, Bricon a voulu que ses obsèques fussent ci-
viles et que son corps fût soumis à l'incinération.
Nous nous faisons un devoir de publier plus
loin la relation de ses obsèques.
Obsèques du D' BRICON.
. Mercredi, 10 avril, ont eu lieu les obsèques de notre re-
gretté collaborateur, le Dr Paul BRICON. Ses nombreux amis
se sont réunis à la maison mortuaire et ont accompagné
son corps jusqu'au cimetière du Père-Lachaise, où a eu
lieu l'incinération.
Le deuil était conduit par les deux exécuteurs testamen-
OBSÈQUES DU Dr P. BRICON. LI
taires : M. Perrier, l'un de ses plus anciens amis, et
M. Bourneville.
Parmi les personnes présentes à la cérémonie, nous
avons distingué : M. et Mme Déjerine, les Dru Bouchereau,
Capitan, Poirier, Josias, Dagonet, Quesneville, Ch. II.
Petit-Vendol, Taule, etc., etc.; MM. Imard, inspecteur de
l'Assistance publique; Goupy, membre du Conseil de sur-
veillance de l'Assistance publique ; Leroux, chef de divi-
sion à la Préfecture de la Seine ; Ventujol, directeur de
Bicêtre,; Baron, économe, une délégation des infirmiers et
des infirmières de l'Ecole municipale d'infirmiers et infir-
mières du môme hospice, ayant à leur tête deux des ins-
tituteurs : MM. Boutillier et Boyer. On remarquait égale-
ment MM. Cluseret, Douville-Maillefeu, D Jules Carrette,
députés ; Vaillant, Humhert et Guichard, conseillers muni-
cipaux ; MM. Desesquelle, Jaclard, Protot, Verchère,
Vuillaume, Rogeard, Charlier ; la plupart des rédacteurs
du Progrès médical : MM. Marcel Baudouin, secrétaire de
la rédaction ; Dr Paul Loye, P. Sollier, etc., etc.; M. Durand,
administrateur, et les employés du Progrès médical. *
Arrivé au crématoire du Père-Lachaise, le corps a été
déposé dans la salle d'attente où ont été prononcés les dis-
cours suivants. Notre rédacteur en chef s'est exprimé ainsi :
Mesdames, Messieurs,
D'autres amis vous diront tout à l'heure le rôle politique de
Paul Bricon. A nous, incombe seulement le pénible devoir de
rappeler la vie scientifique de notre malheureux ami.
Bricon est né à Paris, le 1 ? août 1848. Son père, n'écoutant
que ses propres préférences, voulut qu'il commençât ses
études de droit et le plaça dans une étude d'avoué, profession
qu'il désirait luivoir embrasser. Bricon céda momentanément.
Peu après éclata la guerre de 1870. Il fut envoyé comme mo-
bile au camp de Châlons, puis au fort de Saint-Denis; c'est là
que, à la suite d'une sortie, il eut sa première attaque de rhu-
matisme articulaire aigu.
Exilé après les événements politiques de 1871, Bricon se ré-
fugia en Belgique où il subit une seconde attaque de rhuma-
tisme articulaire aigu à laquelle il faillit succomber. Le 3 dé-
cembre 1871, ne voulant pas abandonner son ami Desesquelle,
LII OBSÈQUES DU Dr P. BRICON.
proscrit aussi, et que le gouvernement belge expulsait, il
partit avec lui pour Berne. Quelques mois après, obéissant à
ses goûts et non à ceux d'autrui, il prit sa première inscription
à la Faculté de médecine de Berne. En 1874, il passa six mois à
la Faculté de Wurtzbourg. Il eut dans cette ville une troisième
attaque de rhumatisme non moins grave que les précédentes.
Une fois remis, il se rendit à la Faculté de Strasbourg, où il
prit ses grades et se fit recevoir docteur avec une thèse très
intéressante, intitulée : Nouvelles recherches physiologiques
sur les nerfs vaso-moteurs. Il vint ensuite à Genève, où
son assiduité au travail, le fit choisir comme assistant par le
professeur d'anatomie pathologique, M. le D" Zahn, poste qu'il
occupa jusqu'en 1879. lise fit également recevoir docteur de
la Faculté de Genève. Dans l'intervalle, en raison de sa santé,
il alla passer 7 ou 8 mois à Lisbonne.
Bricon profita de son séjour dans ces différentes Facultés non
seulement pour y faire de solides études, mais encore pour se
rendre un compte exact de l'organisation scientifique de la
Suisse, de l'Allemagne et du Portugal. Partout il se créa des
relations sérieuses et laissa de solides amitiés. -
L'amnistie de 1879 permit à Bricon de rentrer en France.
C'est peu après qu'il nous fut présenté par un ami commun,
M. Maillard, alors notre collègue au Conseil municipal. Bricon
avait formé le dessein de prendre ses grades à la Faculté de
médecine de Paris, et c'était dans le but de préparer une nou-
velle thèse qu'il avait cherché à être mis en rapport avec nous.
A partir de là, Bricon suivit très régulièrement notre ser-
vice à l'hospice de Bicêtre et bientôt, grâce à une commu-
nauté d'idées politiques et scientifiques, des liens d'amitié
nous unirent étroitement.
En assistant, en quelque sorte jour par jour, à l'élaboration
de sa thèse : Du traitement de l'épilepsie, qu'il subit en
juin 1882 et qui lui valut une honorable récompense de la
Faculté de médecine, nous avons pu constater les qualités so-
lides qui le caractérisaient : rectitude d'observation, esprit cri-
tique éclairé, scrupuleuse exactitude dans les détails même les
plus minutieux, connaissances bibliographiques très étendues
et très sûres, désir ardent de ne rien omettre et de rendre justice
à tous, en un mot l'honnêteté scientifique la plus absolue.
Bricon devenu, à dater de cette époque, l'un de nos collabo-
rateurs les plus actifs et les plus dévoués, publia dans le
Progrès médical - dont il fut secrétaire de la rédaction de
1882 à 1886 - et dans les Archives de Neurologie, soit seul,
soit avec quelques-uns de nos élèves, soit avec nous-même,de
OBSÈQUES DU Dr P. BRICON. LUI
nombreux travaux qui furent souvent analysés ou reproduits
avec éloges par la presse spéciale.
Les uns, relatifs à la thérapeutique, étaient le complément
des recherches consignées dans sa thèse ou portaient sur des
médicaments nouveaux. Le plus important, dans ce genre de
recherches, est le Manuel des injections sous-cutanées (fait
en commun), ouvrage qui a eu déjà l'honneur d'une seconde
édition et d'être traduit successivement en anglais, en espagnol
et en italien.
D'autres travaux scientifiques de Bricon, qui remontent à
18882 et 1883, concernent la microbiologie, science alors peu
cultivée chez nous, mais qui avait été l'objet de beaucoup de
mémoires et de multiples recherches à l'étranger, surtout en
Allemagne; ses revues critiques et bibliographiques sur les
bacilles de la tuberculose, de la fièvre typhoïde, de la diphtérie,
du choléra, de la pneumonie, de la syphilis, de la blennorrha-
gie, sur l'actinomycose, etc., etc., sont des plus remarquables
et ont certainement contribué au développement qu'ont pris les
études microbiologiques dans ces dernières années.
L'un des maîtres de la science française, dont la compétence
dans cette branche des sciences médicales est reconnue de
tout le monde, notre ami le professeur Cornil, nous faisait, il
y a quelques jours, l'appréciation la plus flatteuse de ces tra-
vaux et nous rappelait qu'il les avait lui-même largement mis
il contribution.
Citons encore, comme relevant plus particulièrement de la
clinique, les mémoires que nous avons faits ensemble : De
la Rubéole ou roséole idiopathique; - De l'Idiotie c1'éti-
noïde (avec cachexie })achyde1'lnique) ; - De l'Epilepsie }))'o-
cursive, et de nombreuses observations.
Mais les préférences de notre ami se dirigeaient plus spé-
cialement vers les recherches anatomo-pathologiques qui lui
avaient valu son titre d'assistant à la Faculté de Genève. Aussi,
accepta-t-il avec empressement notre proposition de pratiquer
avec nous toutes les autopsies des malades qui mouraient dans
notreservice. De làaussi la publication du Manuel de technique
des autopsies. C'est en nous appuyant sur ses travaux spé-
ciaux que nous avons demandé, au début de l'année 1885, à
M. le Directeur de l'Assistance publique, qui nous l'a aussitôt
accordé avec empressement (16 mars 1885), de confier à
Bricon les modestes fonctions de conservateur du musée ana-
tomo-pathologique que nous avions commencé à la fin de 1879
et qui, grâce à son précieux concours, est, à l'heure actuelle,
parfaitement ordonné.
Nous avons encore eu en Bricon un collaborateur empressé
LIV OBSÈQUES DU Dr P. BRICON.
pour une réforme d'une importance scientifique et sociale in-
contestable, et qui sera de mieux en mieux appréciée au sur
et à mesure qu'elle sera plus directement connue : l'enseigne-
ment professionnel des infirmiers et des infirmières des hôpi-
taux. Bien des fois, nous avons fait appel à son dévouement,
d'abord pour nous aider à faire passer des examens à l'Ecole
municipale de Bicêtre, puis pour y enseigner l'hygiène hospi-
talière, enseignement qu'il a fait pendant trois années (1).
Bricon était tout dévoué à la science. Il n'a jamais voulu
faire de clientèle; cependant il était toujours prêta mettre son
expérience et ses connaissances indiscutables au service des
malheureux et de ses anciens compagnons d'exil. En cela, il a
été fidèle à ses opinions socialistes. Libre-penseur, il a voulu
que ses obsèques fussent civiles. Partisan du progrès, en hy-
giène, comme en tout, il s'était fait inscrire parmi les membres
de la Société pour la propagation de la. crémation et il a de-
mandé que son corps fut soumis à l'incinération.
C'était un devoir pour moi, mon ami, de rendre ici, un hom-
mage public à ton existence toute de travail, de probité, de
dévouement, à toi qui, jusqu'au-delà de la mort, as su rester
fidèle à tes principes.
Mon cher Bricon, adieu !
Puis, M. DESESQUELLE,, a prononcé l'allocution ci-après :
« Au nom des amis les plus anciens et les plus intimes du
mort que nous pleurons, je vous remercie tous, corréligion-
naires politiques, savants, collègues ou amis, d'avoir bien
voulu lui donner ce dernier gage d'affection de l'accompagner
jusqu'au bord de l'éternel néant.
« D'autres voix, plus autorisées que la mienne, auraient pu
vous adresser ce témoignage de gratitude, mais j'ai été si inti-
mement et depuis si longtemps mêlé à la vie de notre mort
que je me crois, jusqu'à un certain point, le droit de me con-
sidérer un peu de la famille.
« Si cette dernière n'a pas de représentant plus autorisé à cette
manifestation de l'expresse et extrême volonté de notre ami,
nous n'avons du reste pas le droit de lui en vouloir.
« Pour vous tous, en effet, qui connaissez les lois si pondérées
et partant si lentes à s'accomplir de l'évolution scientifique,
vous admettrez bien que des ancêtres comme le sont les plus
(t) 1er Août 1884-31 décembre 1886.
OBSÈQUES DU D1' P. BRICON. LV
proches parents de notre ami aient eu quelque scrupule devant
l'essai à tenter, sur un être qui leur était si cher, de théories
encore si nouvelles.
« Mais, et j'en suis certain, ils aimaient trop leur enfant pour
lorsqu'ils les connaîtront et les jugeront sainement ne pas
être profondément touchés des preuves multiples d'affection
que votre présence vient ajouter aux preuves passées de leur
amour paternel. -
« A peine à la moitié de la vie et encore peu soucieux, par
conséquent, des préoccupations du lendemain ; attaché comme
il l'était à toutes les choses du progrès, à toutes les idées géné-
reuses, et travaillant peu pour lui pour avoir plus le temps de
travailler pour autrui, notre ami est mort pauvre.
« C'est lelot de ceux qui meurent jeunes, surtout de ceux qui
se dévouent.
« Si nous avons pu, pour un acte intime de fraternité sur la
réalisation duquel notre ami n'avait, du reste, aucune inquié-
tude, aider à exécuter une partie des volontés qu'il nous avait
confiées, il nous laisse encore; une dette à payer au dévoue-
ment inaltérable^ à l'affection désintéressée qui, née à l'exil, l'a
accompagné jusqu'à la tombe.
« Pour l'acquit de cette dette sacrée, laissez-nous espérer,
vous tous qui aimiez notre ami, que nous ne ferons pas en vain
- quand le moment en sera venu - appel à l'esprit de soli-
darité républicaine qui vous anime.
« Encore une fois merci à tous, et à toi, notre cher mort,
un dernier adieu ! »
Les discours terminés, le corps, renfermé dans un cer-
cueil en pichpin, a été transporté dans la salle de l'inci-
nération et déposé sur une sole en fonte, recouverte d'un
voile d'amiante qui, à l'aide d'un mécanisme spécial, a été
introduite à 11 heures 20 m. dans le four recouvert de ten-
tures de deuil frangées d'argent et formant, au milieu de
la salle, également tendue de draperies noires, un cata-
falque au chiffre du défunt. Ce n'est qu'à 1 h. 35 que le
four a été ouvert pour retirer la sole contenant les cendres
de notre malheureux ami.
Les débris furent ensuite recueillis sur une pelle d'ar-
gent et déposés dans une urne funéraire en terre, et de là
dans un petit cercueil de chêne, qui a été descendu dans
le dépositoire de la Ville, à côté des restes précédemment
incinérés du fils du Dr Jacoby et de 111 ? Benon.
A. ROUSSELET.
LVI thèses DE 1889.
THÈSES DE 1889.
CORNET .(Paul.) . - Traitement de l'épilepsie.
GOTTSCHALK (A.). - Valeur de l'influence de la consan-
guinité sur la production de l'idiotie et de l'épilepsie.
DEUXIÈME PARTIE
Thérapeutique.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1889.
1.
Bromure d'or.
Notre interne en pharmacie, M. Cornet, qui faisait en
même tempsses études de médecine, nous ayant demandé
de lui donner un sujet de thèse, nous l'avons engagé à
choisir un sujet de thérapeutique et nous lui avons pro-
posé, ce qu'il a accepté, de suivre avec nous les malades
que nous avions mis en traitement par le bromure d'or, le
bromure de camphre et la picrol,oxine. Il a passé sa thèse
le 16 mai de cette année (1889). Dans son travail, il a
donné sur chacun de ces médicaments un résumé de
leurs propriétés chimiques et physiologiques; il a étudié
leur mode d'élimination, leur action toxicologique,puis
a tracé un aperçu historique de leur emploi en théra-
peutique et terminé par l'exposé des résultats obtenus
jusqu'à J'époque de la soutenance de sa thèse. Nous
avons prolongé ces expériences thérapeutiques durant
plusieurs mois, afin d'avoir une idée encore plus exacte
de leur action sur la marche de l'épilepsie.
Nous avons employé le bromure d'orpour la première
fois en 1882 (4), et nous terminions la courte note con-
sacrée à ce sujet en déclarant que « le bromure d'or était
1. Bourneville. - Recherches cliniques el thérapeutiques sur l'épilepsie.
compte rendu du service pendant l'année 1882, p. 1
4 l'il eit.-ipr17,PI QUE.
absolument inefficace contre l'épilepsie, au moins à la
dose de 10 centigrammes. » M. le Dr E. Goubert ayant
publié en 1888 une note sur le bromure d'or dans la-
quelle il attribue à ce médicament une « activité
remarquable et constante dans tous les cas d'épilepsie »,
nous avons cru devoir l'expérimenter de nouveau.
Nous avons administré le bromure d'or à dose massive,
en une fois avant le coucher, en commençant par la
dose de 5 milligr. pour arriver progressivement jusqu'à
3 centigr. Nous avons adopté le mode d'administration
suivant :
BROMURE D OR. 5
55 ans, employé à la Ville, bien portant, sobre, pas d'acci-
dents nerveux, aucune maladie. Son père, mort subitement
d'une hernie étranglée à 84 ans, était sobre. Sa mère est
morte à 35 ans, à la suite de couches. Aucune trace d'acci-
dents nerveux clans le reste de la famille.
Mère, 54 ans, ménagère, santé délicate ; très faible, mais
pas de maladie, pas de convulsions de l'enfance, pas d'atta-
ques de nerfs. Très impressionnable et sujette à se trouver
mal, depuis son enfance. Pas de migraines, mais douleurs de
tête jusqu'à la ménopause (32 ans). - Père mort d'apoplexie
à 52 ans. Mère morte d'une fluxion de poitrine à 66 ans.
Grand'mère maternelle morte après avoir été paralysée pen-
dant douze à quinze mois.
l'as de consanguinité. - Inégalité d'âge d'un an.
Huit enfants, dont un garçon bien portant, qui aurait eu
des convulsions jusqu'à 2 ans 1/2 ; deux jumelles (1) mortes à
15 jours, et deux filles dont l'une est morte de convulsions à
9 mois, et l'autre bien portante (20 ans) qui a eu un enfant
mort également de convulsions. Notre malade est le septième
enfant.
Notre malade. - Rien à la conception, né à terme, facile-
ment, sans asphyxie, après une grossesse normale. Elevé en
nourrice au biberon ; repris à 2 ans 1/2, àge auquel il par-
lait, mais mal, et marchait, mais avec beaucoup de faiblesse
dans les jambes. Propre à trois ans. Pas de renseignements
sur la dentition.
Début de la maladie. - A 2 ans i/2, le jour de sa rentrée
de nourrice, convulsions ou mieux un accès de deux ou trois
minutes, après lequel il ne pouvait se tenir debout. La
nourrice n'a donné aucun renseignement sur le début et la
cause des crises. A partir de là, il a eu des accès diurnes et
nocturnes tous les jours.
De 6 il 7 ans, rémission complète. A partir de 7 ans 1/2,
retour des accès ; il tombait comme une masse, tous les
jours, et jusqu'à quinze fois dans une nuit.
De 10 à 11 ans, rémission de six mois, puis retour des accès,
mais moins souvent qu'auparavant. Depuis octobre 1881,
1. Il n'y a pas de jumeaux du côté maternel, mais une cousine germaine
du père du malade a eu deux jumeaux.
(i l'HI : R : 1 f'l' : 1"l'IQI,'1 ?
les accès sont devenus quotidiens ; le maximum a été de
20 en un jour.
D'après la mère, l'enfant ne prévient jamais; il pousse par-
fois un cri sourd ; la rigidité et les secousses cloniqucs
seraient égales des deux côtés. Cyanose, puis pâleur comme
s'il était mort. Pas de ronflement, ni d'écume, mais de la
salivation. Se mord la langue ; urine rarement sous lui.
N'aurait jamais eu de folie; mais il serait devenu voleur et il
demande des sous à tout le monde.-Les accès se sont com-
pliqués de vertiges.
On a dû le retirer de l'école parce que les enfants se mo-
quaient de lui, l'appelaient fou, toqué, et le battaient. 11 est
devenu peureux depuis il mois, et, depuis la même époque,
la mémoire a diminué. Le raisonnement a toujours été
puéril. Il n'est pas méchant mais très sujet à se mettre en
colère. -Pas d'onanisme. - Il eu des oxyures et a rendu
un ascaride lombricoïde. Aucune manifestation scrofuleuse.
Eta.lcccturl(1'J,juillet 18884). - Crâne rond, régulier, bien
conformé. Bosses assez saillantes il la partie supérieure de
la portion écailleuse du temporal. Front assez élevé ;
dépressions latérales assez prononcées ; bosses frontales peu
marquées. Nez droit régulier. Face ronde ; joue droite plus
pendante que la joue gauche. Lèvres épaisses ; commis-
sure gauche plus élevée que la droite surtout pendant le
rire. Maxillaires réguliers : gencives assez régulières, mais il
manque des dents. Voûte palatine très profonde, ogivale,
symétrique. Les membres, le thorax, l'abdomen et le bassin
sont bien conformés.
Organes génitaux. - Pénil complètement glabre ; testi-
cules égaux, de la grosseur d'une petite olive ; verge peu
développée; gland découvrable.
Parole un peu traînante; mémoire assez bonne; C... est
assez intelligent, affectueux et courageux ; sa tenue est
bonne ; il a fait quelques progrès depuis son entrée ; met de
la bonne volonté au travail.
Les différentes fonctions n'offrent aucun trouble.
Sensibilités générale et spéciale : normales.
Traitement . - Antérieurement il son entrée il Bicêtre : bro-
mure de potassium, dragées de Gélineau, chloral.
It130\fS'ISI; 1) OR. 7
1884. Hydrothérapie du l" juillet au 15 octobre. Ainsi
qu'on le voit par le tableau général des accès, il y a
eu, sous l'influence de l'hydrothérapie, une amélioration
sérieuse qui s'est traduite d'abord par une diminution, puis
par une suspension des accès pendant trois mois. Tandis
que du 1 ? juin au 31 octobre 1883 on avait compté trois
cent trente accès, durant la période correspondante de 1884
on en a noté seulement trente-quatre.
1885. Du 1 ? février à la fin de mars, Car.... a pris du bro-
mure de potassium, en commençant par deux grammes, en
augmentant d'un gramme par semaine jusqu'à huit grammes-
Pas d'amélioration appréciable. Du 10 juin au 1er novembre
hydrothérapie, sans diminution des accès comme l'année
précédente.
1886. Elixir polybromuré d'Y von.
le, avril : Suspension de l'élixir. Hydrothérapie. Reprise
de l'élixir.
1887. 7 mars. Accès fréquentslanuit, avec chute sur le lit.
Sirop polybromuré.
1888. Nouvelles séries d'accès, lesquels, au dire du père
seraient ramenés par les douches.
1889. janvier. Puberté. Léger duvet commençant à ombrer
la lèvre supérieure. Le reste du visage et les aisselles sont
glabres. - Quelques poils d'un brun foncé sur le pénil et
autour de la racine de la verge. Bourses pendantes; testi-
cules égaux, du volume d'un oeuf de pigeon, tous les deux
descendus au fond des bourses. Longueur de la verge :
9 centimètres ; circonférence : 7 centimètres. Gland clécou-
vrable.
21 janvier. Bromure d'or : 0 gr. 005 millig. en une fois.
6 février. 0 gr. 01 centig. de bromnre d'or.
THÉRAPEUTIQUE.
Tableau général des accès et des vertiges (1).
BROMURE (l'OR. 9
ler avril. 0 gr. 03 centig.
7 mai. Le bromure d'or a été suspendu le 30 avril. Il est
repris aujourd'hui à la dose de 0 gr. 03 centig.
24 juin. L'enfant qui semblait se remonter intellectuelle-
ment baisse de nouveau. Il n'avait que des accès nocturnes.
Depuis 8 jours, on a noté 3 accès de jour. Bromure d'or,
Ogr. 02 centig.
17 août. 0 gr. 03 centig. de bromure d'or.
25 août. 0 gr. 04 centig., jusqu'au 31 août. - A partir
du le, septembre, le malade a été mis à l'hydrothérapie.
Tableau des accès et des vertiges durant la période
de traitement et les périodes correspondantes des années
précédentes.
)0 o THÉRAPEUTIQUE.
Durant les quatre premiers mois du traitement, nous
avions noté une diminution sensible des accès par rap-
port aux périodes correspondantes des années précé-
dentes (47 accès aulieu de 228 en 1887) ; mais, en revan-
che, les vertiges qui avaient disparu presque complète-,
ment depuis trois ans, étaient revenu de nouveau. Cette
amélioration, relative d'ailleurs, ne s'est pas maintenue
et la comparaison des totaux du tableau le montre
d'une manière évidente.
Nous avons l'habitude de prendre deux fois par an le
poids et la taille de nos malades, espérant plus tard nous
en servir pour une étude du développement physique
des enfants (I). Dans le cas particulier, nous avons, de
plus, noté le poids du malade, tous les mois, pendant
qu'il était en traitement par le bromure d'or. Du mois - "
de janvier au mois de mars, nous avons une augmenta-
tion de 100 grammes puis un abaissement de 300 gram-
mes, et à la fin du traitement, une augmentation de
300 grammes.
I\IIQ)II'RI, D OR.
OBSERVATION Il
Epilepsie qui ri commencé de 8 à 10 ans. - Pas d'antécédents
héréditaires. - Accès d'abord rares au début, puis de plus
en plus lIomh1'ell.r : . - Amélioration.
Mor... Lucien, 17 ans, est entré à Bicêtre (service de
\Ll3ouur,vr.r.i;) le 23 juillet 1884.
1889. Traitement par le bromure d'or :
Tableau des accès et des vertiges.
12 2 THÉRAPEUTIQUE.
21 janvier, 5 milligr. - 6 février, 1 centigr. z6 février,
0 gr. 025 millig. - 1" avril 0 gr.03 cent. - Suspension du
bromure d'or du Il, au 6 mai.- 7 mai, 0 gr. 035milligr.. -
20 mai, 0 gr. centig.- 6 août, Ogr. 03centigr. - 15 août,
0 gr. 02 centigr. - 20 août,0 gr.01 centigr. - Suppression
du traitement le Il, septembre.
En 1885, mot... a eu 12 accès; - en 4886, -16; - en
1887, 21; - en 1888, 27; on 1889, 34. Si l'on
compare le nombre des accès durant les huit premiers
mois de cette année, correspondant au traitement, on
voit qu'il n'y a eu qu'une diminution de i accès par
rapporta la période correspondante de 1888. - Voici
maintenant le tableau du poids et de la taille.
BROMURE D'OR. 13
lytique. Un cousin (côté paternel), idiot. -- Début, il y
a 2 ans, un premier accès la nuit, un autre accès 5 jours
après, puis toutes les semaines . - Légère amélioration.
Gil... Félix Jean, 18 ans, entré à Bicêtre (service deid.BoiiR-
NE, -VILLE) le 4 mai 1888.
Traitement par le bromure d'or : mêmes doses progressives
que dans les observations précédentes.
Nous ne pouvons ici établir une comparaison entre la pé-
riode du traitement, et les années précédentes; le malade
n'étant il Bicêtre que depuis trop peu de temps.- De mai à
décembre 1888. G... a eu 159 accès et 1 vertige.
1 4
THÉRAPEUTIQUE.
Géra... Gustave, 17 ans, entré à Bicêtre (service de
M. Bourneville) le 14 juillet 1884.
1889. 21 janvier. - Traitement par le bromure d'or :
mêmes doses.
21 janvier, 5 mgr. - 5 février, 1 centig. - 12 février,
1 centig. 1 ? - ° ? 0 février, 2 centig. 21 février, 2 cent. 1/2
lor avril, 3 centig. Suspension du le, au 6 mai ; 7 mai,
3 centg. 1/2. - 21 juin, 2 centig. - Suppression le -1"" sep-
tembre.
Tableau des accès et des vertiges.
BROMURE D OR. 15
Il) si THÉRAPEUTIQUE.
Tableau des accès et des vertiges.
BROMURE D'OR.
17
OBSERVATION VI
Epilepsie partielle gauche. - Père, sciatique : excès de bois-
son avec crises nerveuses. - Tante et oncle : excès de bois-
son. - Premier accès à 8 ans suivi d'hémiplégie gauche. -
Peu d'amélioration.
Duf... Joseph, 9 ans, entré à Bicêtre (service de M. BOUR-
rrmLLC) le 28 juillet 1884.
1889. 21janvier.-Traitement par le bromure d'or : mêmes
doses. Suppression le 31 août.
Tableau des accès et des vertiges.
18 8 THÉRAPEUTIQUE.
En 1888, Duf.· a eu 246 accès, et un vertige, soit une
moyenne mensuelle de 20 accès ;. durant les huit pre-
miers mois de 1889, la moyenne a été de 18,7. L'amélio-
ration a donc été à peu près insignifiante. La tem-
pérature a été prise du 29 au 31 mai. Elle paraît avoir
subi un abaissement assez marqué sous l'influence du
traitement.
EMMURE D'OR.
tu 9
OBSERVATION VII
Epilepsie. Pas d'antécédents névropathiques. - Pas de
convulsions dans l'enfance. - Premier accès à 7 ans. -
Amélioration légère.
Bertr... Christian, 17 ans, entré à Bicêtre (service de
M. BOURNEVILLE) le 11 août 1887.
1889. 21 janvier. - Traitement par le bromure d'or :
mêmes doses.
Tableau des accès et des vertiges.
g 0 THÉRAPEUTIQUE.
La température n'a pas subi de modification appré-
ciable.
BROMURE D'OR.
21
Tableau des accès et des vertiges.
9 2 - THÉRAPEUTIQUE.
MATIN SOIR
BROMURE D'OR. 23
OBSERVATION IX
Pas d'antécédents névropathiqzzes. - Une soeur morte de mé-
ningite. - Premières convulsions à 8 mois à la suite d'une
maladie ( ? ), avec convulsions dans la face et le membre du
côté gauche. - Amélioration.
Messag... Ernest, 15 ans, entré à Bicêtre (service de
M. BOURNEVILLE) le 29 septembre 1888.
1889. 21 janvier. - Traitement par le bromure d'or :
mêmes doses.
Les accès ont beaucoup diminué du commencement à la
fin du traitement, si l'on en juge par l'aperçu suivant :
4 THÉRAPEUTIQUE.
BROMURE D OR.
25
OBSERVATION X
Premier accès à 7 ans. - Vertiges peu fréquents. - Amé-
lioration.
Doist... Albert,14 ans, entré à Bicêtre (service de M. Boun-
nEVILLE) le 13 octobre 1887.
1889. 21 janvier. Traitement par le bromure d'or :
mêmes doses.
Tableau des accès et des vertiges.
26 6 THÉRAPEUTIQUE.
La température rectale n'a pas subi d'abaissement
appréciable.
BROMURE DE CAMPHRE. 27 7
II.
Bromure de camphre
A maintes reprises, nous avons démontré l'action de
ce médicament sur les vertiges épileptiques. Nous ne
reviendrons pas sur l'exposé, déjà fait dans nos précé-
dentes publications, des propriétés chimiques et phy-
siologiques du bromure de camphre, ni sur l'élimina-
tion du médicament, ni sur ses usages en thérapeutique,
que M. Cornet a complétés ; nous nous bornerons à re-
produire l'observation suivante, qui confirme très nette
ment nos conclusions antérieures.
OBSERVATION XI
Epilepsie et imbécillité prononcée, symptomatiques. - Père
peu intelligent, alcoolique, violent; attaques de folie ?
Oncle paternel paralysé du bras. - Grand-père maternel,
troubles intellectuels passagers. - Grand'mère maternelle
hémiplégique. - Deux tantes maternelles probablement
hystériques. -Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de
9 ans. - Mère et 9oe/lr, convulsions de l'enfance.
Plusieurs convulsions à 4 4 mois. - Convulsions Iréqueil-
tes pendant un an, puis plus rares, jusqu'à quatre ou cinq
ans. - Accès véritables à 4, 5 ans. - Absences à 7 ans 1/2.
2 8 THÉRAPEUTIQUE.
- Parésie des membres inférieurs après les accès. - 1885,
Elixir polybromuré. - 1886, Erythème noueux. - Bro-
mure de camphre : .' diminution des vertiges. - Suspen-
sion du médicament : retour des vertiges. - 1887, Reprise
du bromure de camphre, diminution puis disparition
des vertiges. - Rougeole. - Suspension du bromure de
camphre : retour des vertiges. - 1888, Nouvelle administra-
tion du bromure de camphre : diminution des vertiges.
Suspension du médicament : Rechute. 1889, Nouveau
traitement par le bromure de camphre, nouvelle améliora-
tion.
Lel... Antoine, 12 ans, est entré à Bicêtre (service de
M. Bourneville) le 21 août 1885.
Renseignements fournis par sa mère et sa tante, le 23 sep-
tembre 1883. -Père, 40 ans, scieur delong, d'une intelligence
au-dessous de la moyenne ; pas de convulsions de l'enfance ;
fièvre typhoïde à 8 ans. Il y a 10 ans, chute d'un peuplier
sur la tête; d'où 6 mois d'aliénation. Excès de boissons
habituels. Colères violentes. - Père, boulanger, bien por-
tant, 72 ans. - [Mère morte subitement en apprenant àl'im-
proviste les infidélités de son mari avec sa servante. - Pas
de renseignements sur les grands parents. - Un oncle
paternel aurait une paralysie du bras. - Pas d'aliénés, pas
d'épileptiques, pas de difformes, etc., dans la famille.]
lllère, 31 ans, blanchisseuse, bien portante, sans aucun
accident nerveux. Réglée à sept ans pendant un an puis
réglée définitivement à 12 ans. - [Père, entrepreneur, puis
homme de peine, sobre, mort d'une hernie étranglée. Il
aurait eu la tête dérangée pendant quelque temps, après
une perte d'argent. - Mère morte à 74 ans, après avoir été,
durant 6 mois, paralysée de la langue et du côté droit. Une
tante maternelle de l'enfant a eu plusieurs crises nerveuses ;
une autre a eu des attaques nerveuses très fréquentes durant
sa jeunesse, qui reviennent encore, mais à de longs inter-
valles. - Pas d'aliénés, etc., dans le reste de la famille.
Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 9 ans.
Trois enfants : 1° notre malade ; 2° une fille âgée de
7 ans, chétive, convulsions dans la première enfance; -
BROMURE DE CAMPHRE. 29 9
3° garçon, 4 ans, intelligent, convulsions à l'âge de 4 ou
5 mois.
Notre malade.-La conception a eu lieu dans de mauvaises
conditions. Son mari, souvent ivre, frappait sa femme, ce
qu'il avait commencé de faire huit jours après le mariage.
Grossesse dans de fâcheuses conditions : mauvais traite-
ments et misère. Accouchement naturel, à terme, sans chlo-
roforme. A la naissance, enfant bien développé, pas d'as-
phyxie, nide circulaires du cordon. Nourri au sein par sa
mère.
Premières convulsions à 4 mois, générales, avec déviation
des yeux, cyanose, d'une durée de 4 à 5 minutes. Pendant
un an, elles se sont reproduites très fréquemment, puis à des
intervalles variés jusqu'à l'âge de 4 ou 5 ans, ensuite elles
ont revêtu le caractère des accès. Consécutivement, on n'a pas
noté de paralysie, mais une parésie des membres inférieurs.
Vers 7 ans 1/2, apparition des vertiges ou mieux des absen-
ces : l'enfant s'arrête toutà coup de causer, devient immobile,
et, au bout de quelques secondes,il revient à lui tout étonné.
Il en aurait eu jusqu'à 30 par jour.
Pas de manifestations scrofuleuses, aucune fièvre érup-
tive. Lel... aurait eu beaucoup de vers. Il a commencé à
prononcer quelques mots vers 15 ou 16 mois, et a marché
très difficilement vers 17 mois.- Pas de renseignements sur
la dentition. - Caractère violent : si on le contrarie, il crie,
il pleure, il se griffe. - Pas de mauvais instincts.
Durant les derniers mois de l'année 1885 jusqu'au com-
mencement d'avril, l'enfant a pris de l'élixir polybromuré.
1886. 7 avril. - Erythème noueux sur les deux jambes.
23 avril. -- Traitement : deux capsules de bromure de
camphre du Dr Clin (chaque capsule contient 0 gr. 20) pen-
dant une semaine; trois pendant une semaine; quatre pen-
dant une semaine.
15 juin. - Les capsules ont été suspendues le 7 juin. On
peut voir par le tableau que les vertiges ont diminué consi-
dérablement. Il n'en n'a pas eu depuis le 1er du mois. Nous
devons signaler, en revanche, de nombreux accèsen mai. On
maintient la suspension du bromure de camphre, à seule
3 0 THÉRAPEUTIQUE.
fin de voir si l'amélioration persisterait, et si elle est bien
due au médicament. - Sirop d'iodure de fer. Deux bains
salés.
10 juillet. - L'enfant n'a eu ni accès ni vertiges depuis le
le, juin. Hydrothérapie.
1887. 12 janvier. - L'hydrothérapie, a été suspendue le
31 octobre. - Les vertiges ont reparu et ont augmenté con-
sidérablement : nouveau traitement par le bromure de cam-
phre : 2 capsules du 15 au 20 janvier ; 3 du 21 au 31, sus-
pendre une semaine et recommencer. A partir du mois de
février, les vertiges ont diminué et ont été suspendus com-
plètement durant 4 mois. En août l'enfant a eu la rubéole,
et le traitement n'a pas été repris.
1888. 1er avril. Hydrothérapie.
1 cr juillet. - Les vertiges après avoir été rares d'octobre
1887 au 31 mars 1888 ont augmenté considérablement. On
reprend le bromure de camphre, et on continue les douches.
30 juillet. - L'enfant n'a pris que 2 capsules de bromure
de camphre : à partir d'aujourd'hui, 3 pendant une semaine,
4 pendant une semaine, 5 pendant une semaine. Suspendre.
1889. ` ? 9janvier.-L'enfantacontinuélesdouches jusqu'au
31 décembre. Les vertiges ont augmenté depuis la suspen-
sion du bromure de camphre. On reprend ce médicament :
1 capsule (0 gr. 20 centig. form. du Déclin) pendant 2 jours;
2 du 1er au 5 février; 2 du 1" au 11 ; 3 du 11 au 5 mars ;
4 du 5 au 23 mars; 6 durant 3 jours, puis 7 jusqu'au
31 mars.
On continue jusqu'à la fin de juillet en avril les mêmes
séries de doses progressives, entre lesquelles on laisse des
suspensions de 8 jours. L'action du médicament se manifeste
promptement par une diminution des vertiges.
BROMURE DE CAMPHRE.
31 1
Tableau des accès et des vertiges (1).
3 2 THÉRAPEUTIQUE.
médicament a été administré, nous voyons les vertiges
diminuer, puis disparaître pendant une période plus ou
moins longue. Chaque fois aussi qu'il est supprimé nous
voyons rapidement reparaître les accidents.
Pour qu'il n'y eut pas de doute nous avons suspendu
de nouveau le médicament à la fin de juillet. A partir
de septembre et d'octobre les vertiges deviennent de
plus en plus nombreux jusqu'à la fin de l'année.
PICROTOXINE., 3 3
III.
Picrotoxine (1).
Nous avons employé la picrotoxine cristallisée, en la
faisant dissoudre avec soin, en potion, selon la formule
suivante : -.
3 4 THÉRAPEUTIQUE.
Frayeur occasionnée par son père qui le battait. Premiers
accès à 10 ans à la la suite de coups. Aggravation des accès.
Elixir polybromuré : Rémission de 18 mois. - Troubles in-
tellectuels consécutifs à un accès. -- Fugues. - Idées de
suicide. -Etat du malade en 1887. - Température durant
les accès. - Poids, taille et puberté. - Modification défa-
vorable du caractère, diminution de la mémoire. - Hydre-
thérapie. Picrotoxine.
Ram... Gabriel, 18 ans, est entré à Bicêtre (service de
M. BOURNEVILLE le 11 août 1887.
Renseignements fournis par la mère (24 septembre 1887). -
Père mort à 38 ans de tuberculose pulmonaire ; employé de
la Ville. Pas de renseignements sur son enfance et sa jeu-
nesse. Engagé volontaire, il prit l'habitude de boire (alcool,
absinthe, bitter). Marié à 25 ans, il continua à faire les
mêmes excès et rentrait gris presque tous les jours ; il était
très violent, très brutal, et par moments « on voyait qu'il
n'avait plus la tête à lui et qu'il lui prenait comme des mo-
ments de folie ». En dehors de ces excès il était d'un carac-
tère doux. Il était très nerveux sans jamais avoir d'attaques
et avait la tête exaltée. Il n'a pas fait d'autres maladies que
la tuberculose qui l'a emporté en un an. - mort à
75 ans, on ne sait de quoi ; il s'adonnait à la boisson. -
Mère morte à 65 ans, probablement de congestion pulmo-
naire. - Pas de renseignements sur les grands-parents ni
sur les oncles et tantes. - Pas d'aliénés, ni d'épileptiques,
ni de suicidés, etc., dans la famille.]
Mère, 42 ans, couturière, bien portante, n'a jamais eu
d'accidents nerveux, ni de rhumatisme, ni de maladie de
peau. - [Père, 73 ans, a eu dernièrement une attaque de
paralysie. Mère bien portante. Pas d'aliénés, ni de ner-
veux, etc., dans tout le reste de la famille.]
Pas de consanguinité ; inégalité d'âge d'un an.
Un seul enfant, notre malade. - La conception ne paraît
pas avoir eu lieu pendant l'ivresse. « Mon mari, dit-elle,
n'était pas porté aux rapports quand il avait bu. »-Grossesse
bonne. - Accouchement normal, à terme. - : 1 La naissance,
PICnOTOxI1'OE. 3 t
l'enfant était tout petit, très vif, sans asphyxie. -On ne sait
à quelle époque il a été propre et a eu sa première dent.
Il a parlé et marché vers 15 mois. -Il n'a jamais eu de con-
vulsions, ni de vers intestinaux, ni de manifestations scrofu-
leuscs.
Bien venant jusqu'à deux ans et demi, époque où on l'a
retiré de nourrice. De là on l'a mis chez ses grands-parents
jusqu'à 8 ans. Durant cette période, on a remarqué qu'il se
mettait souvent dans de fortes colères.
A 8 ans il allaita l'école, était intelligent, apprenait bien.
A la maison, lorsque son père avait bu, il le battait beaucoup
et l'enfant avait de lui « une grande terreur ». C'est peu
après, vers 9 ans, qu'on nota les premiers accidents épilepti-
ques : il commença à grimacer (face, bouche et nez) et à
avoir des mouvements automatiques des mains. Le premier
accès s'est montré à 10 ans, un soir, après avoir été battu
par son père. A l'origine, il ne perdait pas tout à fait con-
naissance durant ses crises : il sautait en l'air, frappait la
table à coups de poing. Peu à peu les accès ont augmenté
d'intensité et se sont accompagnés de perte de connaissance.
Pas d'aura, pas de cris; grimaces de la face, prédominance
des convulsions dans le côté gauche ; bave mais pas de mic-
tion involontaire, durée de 4 à 5 minutes; sommeil consé-
cutif. Quelquefois, les accès le prenaient au moment d'aller
au cabinet, au moment d'uriner. Ils étaient nocturnes, et
surtout diurnes, de préférence le matin au réveil. Pas d'é-
tourdissements. Maximum des accès en 24 heures : 3. Il
y avait quelquefois des rémissions de 8 et 15 jours. A la
suite d'un traitement par l'élixir polybromuré, prescrit
par M. Charcot, il est resté 18 mois sans accès. Ils reparu-
rent en 1883 à la mort de son père, dont il fut témoin et
qui l'impressionna vivement. Il a continué à aller à l'école ;
on était content de lui, mais, ses accès augmentant, on dut
le renvoyer. Suivant sa mère, l'intelligence n'aurait pas di-
minué. 11 disait quelquefois qu'il voulait se suicider à cause
de sa maladie ; mais il n'a fait aucune tentative. Quelquefois
après ses accès il se sauvait sans savoir où il allait. Il
n'avait pas de mauvais instincts, on pense qu'il se touchait
depuis assez longtemps.
36 6 THÉRAPEUTIQUE.
Etat actuel. - Tête asymétrique : la partie postérieure
droite est un plus saillante que la partie gauche. L'occipital
est très développé. La bosse frontale droite est un peu plus
saillante que la gauche. Yeux grands, pupilles égales ; R...
distingue bien les couleurs. Nez aquilin, un peu obliqué à
droite. Dents bien plantées; articulation normale ; gencives
en bon état. Oreilles symétriques, bien ourlées; lobule
adhérent.
Membres supérieurs et inférieurs bien conformés, ainsi
que le tronc et le rachis.
Sensibilité générale et spéciale, parole, fonctions digestives,
respiratoire, etc.,normales.
Puberté. - Fines moustaches commençant à ombrer la
lèvre supérieure. Poils assez abondants en avant des oreilles
et sous le menton, formant collier. Ils sont également assez
nombreux dans les aisselles, mais il n'y en a pas sur le
tronc. Poils longs, frisés, très abondants sur tout le pénil,
envahissant les aines, et envoyant une traînée jusqu'à l'om-
bilic. - Bourses rétractées, parsemées de poils. - Testi-
cules du volume d'une olive. Gland découvert; méat
normal, légèrement en épispadias. - Verge : circonférence,
9 centim. ; longueur : 8 1/2. - Poils nombreux à l'anus, pas
d'onanisme avoué.
Les facultés intellectuelles paraissent assez développées;
toutefois la mémoire semble un peu faible. La tenue est
bonne, le caractère docile.
19 octobre 1887. - Il a essayé de se sauver par le Gym-
nase. Il dit que depuis une douzaine de jours il s'ennuie;
que l'ennui l'empêche de dormir et qu'il ne veut pas rester
à Bicêtre. - 1 novembre. - Angine légère.
13 décembre. Revacciné sans succès.
1888. 4 jazzvie7·.- Bronchite légère.
28 février. - Le malade paraît devenir violent. Il riposte
par des coups de poings a de petites taquineries.
24 avril. - Angine pultacée.
15-16 juin. - Série de 13 accès.
18 août. -- Fumeur, joueur, cache dans ses bas l'argent
PICROTOXINE.
37
que ses parents lui donnent, malgré la défense qui leur
en est faite. Traitement : Hydrothérapie.
8 décembre. - Hier, il a donné un coup de poing sur
l'oeil d'un de ses camarades ; et, à la promenade, il a essayé
de s'étrangler avec sa cravate. On a remarqué que son
caractère devient de moins en moins sociable.
Du 11 août au 31 décembre 27 accès et 7 vertiges. - En
1888 : 106 accès et 36 vertiges.
1889. 25 mars. - Puberté. Moustache assez bien fournie.
Petite mouche à la lèvre inférieure. Poils assez abondants à
la région intermammaire du sternum. Poils abondants sur
le ventre et à la partie supérieure et antérieure des cuisses,
Testicules gros comme un oeuf de pigeon.
Température pendant et après les accès :
3 8 THÉRAPEUTIQUE.
Tableau des accès et des vertiges.
PICROTOXINE.
39
Grand-père paternel : excès de boissons. - Grand-père
maternel : pied bot consécutif ri. des convulsions. - Cousinf)
germaine morte de méningite . - Picrotoxine.
Kl... Charles, 8 ans, entré à Bicêtre (service de M. BOURNE-
ville) le 24 décembre 1887.
En raison du jeune Age, nous nous sommes arrêté à la
dose maximum de 1 mill. 1/2 par jour. Traitement, du
1" février 1889, au 31 décembre 1889.
Tableau des accès et des vertiges.
4 0 THÉRAPEUTIQUE.
OBSERVATION XIV
Epilepsie. - Accès et vertiges. Traitement par la picro-
toxine.
Vulc. Joseph, 15 ans, entré à Bicêtre (service de 1\1. BOUR-
NEVILLE) le 24 décembre 1886.
4S89.4éirie ? Traitement par la picrotoxine : mêmes
doses. - Du 19 au 31 août, trois millig. - Suppression le
1°r septembre.
Tableau des accès et des vertiges.
PICROTOXINE. & 9
En 1887, l'enfant a eu 4-7 accès; - en 1888, 28 accès et
7 vertiges. Il ressort du tableau qu'il n'y a eu une
amélioration assez sensible. Toutefois déjà en 1888, les
accès avaient baissés par rapport à 1887.
OBSERVATION XV
Epilepsie idiopathique. Père : excès de boisson. - Grand-
père maternel mort de délire aigu.- Grand'mère maternelle
apoplectique. - Deux tantes : nombreux excès de boisson.
Une tante choréique à 14 ans. Picrotoxine. -
Rouss.. Jules, 10 ans, entré à Bicêtre (service de M. BouR-
neville) le 12 mars 1888.
L'enfant a été soumis à la picrotoxine pendant 11 mois,
de février, à décembre : 1 milligr. du 4 fév. au 25 mars.
puis 2 jusqu'au 31 décembre. - Voici ce que l'on a observé :
19 2
THÉRAPEUTIQUE.
OBSERVATION XVI
Pas d'antécédents névropathiques. - De 5 à G arls, tics, gri-
maces, clignements des yeux. - Crises épileptiques en 1885.
Traitement par la picrotoxine.
Joucl.... Aime, 11 ans, entré à Bicêtre (service de
M. BOURNEVILLE) le 21 mars 1888.
1889. 1 cr février. -- Traitement par la picrotoxine : mêmes
doses que dans la première observation. (Un demi-milli-
gramme jusqu'au le, mars, 1 milligramme jusqu'au 11 mars,
1 milligramme et demi jusqu'au 25 mars, 2 milligrammes
jusqu'au 31 décembre.)
Tableau des accès et des vertiges.
PICROTOXINE.
43
Du 21 mars à décembre 1888, l'enfant a eu 43 accès
et 16 vertiges. Moyenne mensuelle : 4 accès, 3; tandis
que dans la période de traitement la moyenne a été de
près de 10 accès.
OBSERVATION XVII
Rien dans les' antécédents. -Asphyxie à la naissance. - Elevé
au biberon. Muguet à 1 mois. - Coqueluche à18 mois. -Pre-
mières convulsions à 2 ans. - Accès. - -7'2,ciiie ? ? tent par la
picrotoxine.
Même dose. (2 milligrammes du 25 mars au 31 décembre).
Aub....Jean, 17 ans, entré à Bicêtre (service de nl. Boun-
nEVrLr.) le 24 décembre 1888.
Cet enfanta eu :
44
THÉRAPEUTIQUE.
OBSERVATION XVIII
Pas d'antécédents névropathiqices. - Asphyxie à la naissance.
- Convulsions à 3 mois. - Picrotoxine.
Brouck... Charles, 18 ans, entré à Bicêtre (service de
M. Bourneville) le 21 mai 1885.
1889. 1er février. - Traitement par la picrotoxine. Un
demi-milligr., un milligr., un milligr. et demi, puis deux
milligr. du 25 mars au 31 décembre.
Tableau des accès et des vertiges.
PICROTOXINE. 4 5
Du21 mai au 31 décembre 1885, on a compté 17 accès ;
- en 1886, 18 accès et 3 vertiges; - en 1887, 97 accès
et 5 vertiges; -en 1888, 62 accès et 10 vertiges. Le
tableau ci-dessus montre qu'il y a eu une augmentation
du nombre des accès.
OBSERVATION XIX
Epilepsie idiopathique. - Mère migraineuse. - Grand'mère
1 maternelle morte d'une fièvre cérébrale. - Grand-père
maternel mort paralytique. - Premières convulsions à
15 mois. - Accès à 5 ans. - Picrotoxine.
Lavern... Georges, 19 ans, entré à Bicêtre (service de
M. BOURiVVILLE le 16 octobre 1885.
1889. 1er février. -Traitement par la picrotoxine : mêmes
doses. (Un demi-milligramme... deux milligr. du 25 mars an
19 août.)
THÉRAPEUTIQUE.
Tableau des accès et des vertiges.
iCOT0g11V.
OBSERVATION XX
47 i
Bien dans la famille. Cousin germain hystérique.
Première crise à 8 ans, puis 2 ou 3 accès par mois, puis
jusqu'à 10 en une nuit. Traitement par la picrotoxine.
Marce... Maximilien, 9 ans, entré à Bicêtre (service de
M. BOURNEVILLE) le 21 avril 1888... ·
1889. 1 cr février. Traitement par la picrotoxine. Mêmes
doses à suppression le 31 décembre.
Tableau des accès et des vertiges.
48
THÉRAPEUTIQUE. '
Si on compare le nombre des accès des mois d'avril
à décembre en 1888 et 1889, on voit qu'il y a une
diminution assez considérable, et partant, une améliora-
tion relative.
OBSERVATION XXI
Epilepsie idiopathique. - Grand'mère paralytique. -
Grand-père paternel et père suicidés. Oncle paternel
aliéné. - Cousine paternelle épileptique. - Cousine morte
de méningite. - Soeur morte de convulsions. Premières
convulsions à 11 mois. - Picrotoxine.
Vitr... Louis, 11 ans, entré à Bicêtre (service de M. BOURNE-
ville) le 11 octobre 1888, sorti le ter mai.
Tableau des accès et des vertiges
DEUXIEME PARTIE
Clinique et Anatomie pathologique.
Bourneville, Bicêtre, 1889. 4
I.
De l'idiotie avec cachexie pachydermique
[Idiotie z.wclén2ateec.sel ;
Par bouiixe ville,
Les travaux que nous avons poursuivis depuis une
quinzaine d'années soit à la Salpêtrière, soit à Bicêtre,
et les notes assez rares d'ailleurs qui ont été publiées
durant la même période sur l'idiotie, nous ont amené à
distinguer, quant à présent, au point de vue anatomo-
pathologique, les formes suivantes :
1° Idiotie symptomatique de l'hydrocéphalie (idiotie
7zclooeéZ)zaliclzee) ; 2° Idiotie symptomatique de
microcéphalie (idiotie microcéphalique) ; 3° Idiotie
symptomatique d'un arrêt de développement des cir-
convolutions ; - 4° Idiotie symptomatique d'une mal-
formation congénitale du cerveau (J01'e72CZJ17,a12e,
absence du corps calleux, etc.) ; 5° Idiotie sympto-
matique de sclérose hypertrophique ou tubéreuse ;
6° Idiotie symptomatique de sclérose atl'ophique :
a) Sclérose d'un hémisphère ou des deux hémisphères ;
b) Sclérose d'un lobe du cerveau ; c) Sclérose des cir-
convolutions isolées ; d) Sclérose chagrinée du cer-
veau ( ? ) ; 7° Idiotie symptomatique de méningite ou
52 CLINIQUE.
de méningo-encéphalite chronique (idiotie méninge-
tique) ; - 8° Idiotie avec cachexie pachydermique ou
idiotie myxoedémateuse liée à l'absence de la glande
thyroïde.
Notre but, dans cette communication (1), c'est de faire
connaître l'idiotie myxoedémateuse qui constitue un
chapitre important de l'histoire d'une maladie dont la
connaissance récente est due d'une part à M. Charcot,
à ses élèves (2) et au Dr Morvan (3) et, d'autre part, aux
auteurs anglais, en tête desquels il convient de placer
MM. Gull, Ord, Hadden, etc. ; nous voulons parler de
la cachexie pachydermique ou myxoedème.
C'est en 1880 que nous avons publié la première
observation d'idiotie avec cachexie pachydermique.
Depuis lors, nous n'avons cessé de nous occuper de
cette question. Une partie des matériaux que nous
avions recueillis a été utilisée par l'un' de nos élèves, le
Dr Bricon, pour un mémoire couronné par la Société
médico-psychologique (concours Belhomme, 1885).
Nous avons complété ces documents et publié avec lui,
en 1886 (4) un mémoire reposant sur 13 observations,
puis en 1888 (5), nous avons donné la relation de nou-
velles observations personnelles ou empruntées à d'au-
tres auteurs. Avant d'aborder l'exposé des documents
inédits que nous avons rassemblés, nous croyons utile
(1) Ce travail a été communiqué à la section de médecine de
l'Association française pour l'avancement des sciences (séance
du 14 août 1889).
(2) G. Ballet iProg. méd.. 1880, n» 30) : Hadden (Il : icl.,n°8 30 et 31);
Bourneville et d'Olier (Ibid, n° 35) ; Thaon (Revue cle med. et de
cn'urg.), août 1880) ; Ridel-Saillard (Thèse de Paris, 188 ! ), etc.
(3) Voir Gaz. hebcl. de mécl. et de chirurg.. 1881, p. 542, 5)7,
573, 590.
(4) Arch. de Neurologie, Tome XII, p. 43î, 99.
(5) Arch. de Neurologie, Tome XVI, p. 431 ; Tome XVII,
p. 85, 90, 4î9.
IDIOTIE N'iSOEDÉ\I3TEUSE.
53
de résumer, dans un tableau, les observations qui ont
servi de base à nos premiers travaux :
54 clinique.
dans trois autres cas, l'autopsie du cou n'a pas été pra-
tiquée. Chez les autres malades vivants, l'examen
attentif de la région cervicale n'a pu faire découvrir de
glande thyroïde.
Nous arrivons maintenant aux cas nouveaux, au nom-
bre de huit, dont trois ont été empruntés aux journaux
spéciaux et dont les cinq autres ont été recueillis par
nous. Nous allons donner une rapide analyse des pre-
miers.
Observation I. - Il s'agit d'un pauvre homme, quasi men-
diant, qui excitait la charité des voyageurs à la station do
Sagunto, en Espagne. Tout le monde le connaissait sous le so-
briquet de Quiquorum auquel ses innocentes bouffonneries
avaient donné origine. Son type rappelait celui d'un crétin.
C'est à ce titre qu'il avait attiré l'attention de quelques mé-
decins et entre autres du Dr Gimeno. Ce médecin, ayant eu
l'occasion do lire les travaux de M. Charcot et de ses élèves, en
particulier, l'observation du Pacha et les mémoires des au-
teurs anglais, fut amené à examiner plus attentivement le
prétendu crétin de Sagunto et le fit venir à Valence. Il en
prit plusieurs photographies. « Le dessin qui accompagne
cette note, dit-il, est la copie de l'une d'elles. On y voit,moins
bien pourtant que sur la photographie, les mains, la jambe et
le pied gauches notablement augmentés de volume, avec tous
les caractères assignés par les cliniciens étrangers au my-
xoedème de Ord, ou à la cachexie pachydermique de Charcot.
Néanmoins, en raison de la limitation du gonflement, qui ne
s'étendait pas aux autres parties du corps et que l'on pouvait
à peine retrouver à la face, je ne me hasardai pas, bien que
j'admisse dès à présent l'analogie entre mon malade et ceux
qui ont été observés en Angleterre et en France, à assurer
que l'affection fut identique ; et c'est à cause de cela, comme
aussi à cause de l'existence du crétinisme, que j'appelai pachy-
dermie crélinoïde l'altération pathologique dont je m'occupe.
« Quelque temps après, dans les Archives de Neurologie,
fut publié, par MM. Bourneville et Bricon, un remarquablo
travail sur la cachexie pachvdermique, travail dans lequel,
après avoir passé en revue tous les malades cités par les diffé-
rents auteurs, ils disaient que Charcot, dans ses voyages,
avait vu deux cas de la même maladie, l'un on Vénétie et
idiotie MYXOEDÉMATEUSE. 55
l'autre sur le trottoir de la station de Sagunto en Espagne,
ce qui donnait à mon opinion une flatteuse confirmation (1). »
Observation II. - X..., âgé de 4 ans. Parents suédois, en
bonne santé, intelligents et bien développés. Aucun exemple
d'une semblable maladie dans la famille, de l'un et l'autre
côté. Le père est un artisan dans une situation confortable.
Deux autres enfants, l'un plus vieux, l'autre plus jeune que le
malade sont normaux.
Le malade est très petit (77 cent. 1/2). Sa tête est large, les
fontanelles sont ouvertes, le nez est aplati, les lèvres sont
épaisses et la bouche reste ouverte. Dans la première enfance,
les cheveux étaient noirs et frisés. Ils sont devenus graduelle-
ment blonds, raides et assez épais. Au-des3us de la clavicule,
en dehors du bord externe des muscles sterno-cléido-mastoï-
diens, existent des tumeurs graisseuses caractéristiques ;
elles sont presque du volume d'un oeuf de poule. Des tumeurs
graisseuses analogues, mais moins volumineuses, existent dans
les aisselles, au niveau des mollets ( ? ). Le ventre est pendant,
les côtes légèrement écartées ( ? ). Les épiphyses des différents
os n'ont pas un volume exagéré. Les membres supérieurs et
inférieurs sont très courts, les doigts et les orteils sont épais.
On ne peut sentir la glande thyroïde. L'enfant peut se tenir
debout, mais avec un aide ; il n'a jamais marché. Lorsqu'on
l'excite, il fait entendre un bruit particulier de croassement
ressemblant quelque peu à celui que l'on entend dans la la-
ryngite striduleuse, mais sans dyspnée. Son caractère est
doux, son développement mental est très arriéré : c'est un im-
bécile. Digestion bonne ; constipation habituelle ; il n'a jamais
eu de maladie pouvant expliquer le développement du myxoe-
dème, La première dent a paru vers le 6e mois ; les pre-
mières tumeurs du cou se sont montrées vers le 7° mois et
celles do l'aisselle peu après ('2).
Observation III. Le D1' Suckling a montré à la Midland
médical Society une petite fille âgée de 4 ans, atteinte de cré-
tinismo sporadique, née à Birmingham. Son père, homme
rangé, est mort d'une inflammation des poumons. Un demi-
frère ( ? ) paternel a un enfant idiot. Uno tante paternelle
(1) Gimeno (Amalio). -La paquicierma cretizzoïdes (La medi-
cina praclica, 3 avril 1889, p. 437. Nous devons la traduction de
l'article, dont nous extrayons cette note, à notre ami Cli.-II. Petit-
Vendol.
(2) Emmet Holt. - L'indication a été égarée. '
5G clinique.
ivrognesse consommée est en traitement pour une paralysie
alcoolique. Un frère, mort dans les convulsions, à la suite
d'une coqueluche, était bien conformé. «
Dès les premiers temps de la vie, la mère de la petite ma-
lade a remarqué que la langue était pendante, puis, que la
voix avait quelque chose de particulier.
L'état actuel de l'enfant rappelle tout à fait le type du myxoe-
dème : Peau de la face pâle et translucide ; faux oedème des
paupières supérieures et inférieures; nez large et aplati; lèvre
inférieure large, légèrement cyanosée et pendante.
Langue très grosse, ordinairement sortie de la bouche ; pa-
pilles hypertrophiées. Peau généralement très rude, surtout
aux mains et aux pieds qui sont gonflés, parfois cyanoses.
Taille, 65 centimètres (1). Poids : 10 kit. 885.
Circonférence de la .tête, 46 centimètres. Le front n'est
pas très fuyant, l'occiput est un peu proéminent, le sommet
de la tête est aplati. Les fontanelles sont fermées ( ? ),.les che-
veux sont peu abondants, les dents sont toutes détériorées. Les
bras et les jambes sont courts, le ventre n'est pas très gonflé.
Caractère placide. Parole limitée à quelques mots. Station de-
bout impossible. Aucune trace de la glande thyroïde. Cou
court et épais. Pas de tumeurs graisseuses dans les triangles
postérieurs. Température au-dessous de la normale. Urine
exempte d'albumine. L'état de l'enfant n'était pas la consé-
quence d'une autre maladie (2).
Cette observation, de même que la précédente,
telles que nous les rapportent les recueils auxquels
nous les avons empruntées sont très incomplètes et les
malades ne semblent pas avoir été étudiés avec beau-
coup de soin. Le D' Suchling écrit par exemple que chez
sa malade, âgée seulement de 4 ans, les fontanelles
étaient fermées. On peut en douter, car, ainsi que nous
le verrons plus loin, même chez des malades âgés de
25 ou 30 ans, on constate encore leur persistance.
Les nouvelles observations qui nous sont person-
nelles sont au nombre de cinq. La première concerne
(1) L'auteur fait remarquer qu'à cet âge, la (aille est en
moyenne de 90 centimètres.
(2) The Lancet, 1889, Tome I, p. 895.
idiotie myxoedémateuse. 57
une petite fille de 14 ans que nous avons montrée aux
membres de la section médicale de l'Association fran-
çaise pour l'avancement des sciences.
Observation IV. - Père, fièvres intermittentes. - Grand-
père paternel apoplectique. - Grand'mère maternelle, excès
de boisson. - Cousine germaine, paralysie consécutive à
des convulsions ; cousine germaine sujette à des attaques. -
Grand-père maternel apoplectique, - Grand'mère mater-
nelle, excès de boisson. - Oncle maternel probablement
apoplectique ; tante maternelle aliénée. - Consanguinité.-
Un frère mort de convulsions, un autre idiot et épilepiique;
un troisième a eu des convulsions.
Accouchement à 10 mois ( ? ). -fl la naissance, fontanelle
antérieure très large. - Hernie ombilicale. - Premières
dénis il sept mots/1. deux ans chute sur la face, écrase-
ment du nez et fracture du maxillaire inférieur. Ozène
consécutive. - Développement de la cachexie pachyderlni-
que. - Rachitisme. - Description de la malade. - Absence
probable de la glande thyroïde. - Malformation de l'un des
orteils. - Dentition.
Wat.... Augustine est née à Paris le 16 décembre 1875.
Renseignements fournis par sa mère. (Juin 1887.) -
Père de 52 ans, menuisier ébéniste, assez grand et fort,
cheveux bruns, nez aquilin, fume peu et ne fait pas d'excès
de boisson; il n'a eu aucun accident nerveux, mais a contracté
en Afrique, étant soldat dans l'artillerie, des fièvres interdit-
tentes dont il a souffert jusqu'à 50 ans. Il est mort en 1888 d'un
cancer du larynx. [Père, fossoyeur, sobre, mort d'une atta-
que d'apoplexie il. 75 ans. - llère, blanchisseuse, morte,
on ne sait de quoi, à 72ans ; elle était affaiblie, gâteuse, mais
ne déraisonnait pas; elle a fait de nombreux excès de boisson,
surtout d'eau-de-vie. - Aucun renseignement sur ses grands
parents des deux côtés. - 4 frères, bien portants ainsi que
leurs enfants, sauf une fille qui a une paralysie d'un bras
consécutive à des convulsions. - 2 soeurs, mortes l'une « à son
retour d'âge u , l'autre après trois mois de maladie, à 50 ans ;
leurs enfants jouissent d'une bonne santé, excepté une fille
d'une quarantaine d'années « qui tombe dans des attaques».
Celles-ci se sont montrées il y a environ dix ans, à la suite
d'une peur. - Pas d'aliénés, pas d'épileptiques, pas d'autres
paralytiques, pas de difformes, ni de suicidés, ni de criminels
dans la famille.]
Mère, 51 ans, passementière, assez grande, sobre, intelii-
5S . clinique.
gence moyenne, caractère doux, aucun accident nerveux, che-
veux blonds un peu roux, nez aquilin. [Père, couvreur, sobre,
mort d'une attaque d'apoplexie à 65 ans. - Mère, femme de
ménage, fréquents excès de boisson, d'eau-de-vie surtout,
morte à 60 ans en 2'i heures : « on la croyait endormie». -
Nul détail sur ses grands parents. Une tante paternelle bossue,
morte on ne sait de quoi. Deux tantes maternelles mortes ;
l'une était la mère du père de la malade. - 3 frères, deux
sont morts jeunes, l'un de cause inconnue, l'autre tué par un
autre enfant, de coups de pieds dans le ventre, pour une querelle
à propos de billes. Le dernier est mort à 40 ans d'une attaque
subite dans l'exercice de sa profession, il la gare de Rumilly.
5 soeurs : deux sont mortes, l'une d'une «maladie de matrice»,
l'autre, on ne sait de quelle maladie. Une troisième est dans
une maison de santé comme aliénée, elle a eu des convulsions
dans l'enfance. Les deux autres se portent bien ; il en est de
même de leurs enfants. Pas d'autres aliénés, etc., dans la
famille.]
Consanguinité : La mère du père et celle de la mère de la
malade étaient les deux soeurs et toutes les deux alcooliques.
- Inégalité d'âge d'un an. - Tous deux sont nés à Metz.
Sept enfants : 1° garçon, mort de convulsions à dix mois ;-
2° garçon, 23 ans; 3° garçon, 21 ans, bien portants, intelli-
gents, pas de convulsions ; 4° garçon, 19 ans, a eu, à deux
reprises, des convulsions attribuées aux vers; 5° fille, intel-
ligente, grande, forte, pas do convulsions ; 6,1 garçon, at-
teint d'idiotie à un degré prononcé et d'épilersie. Il n'aurait
jamais eu de convulsions. Il est dans notre service et c'est en
interrogeant sa mère sur sa famille que nous avons eu l'occasion
d'examiner sa soeur. ·
7° Notre malade. Rien de particulier à la conception qui a
eu lieu à une époque assez éloignée d'un accès de fièvre inter-
mittente du père. - Grossesse bonne, sauf une chute avec
contusion de la vulve, quinze jours avant l'accouchement.
Celui-ci aurait eu lieu plus d'un mois après terme, assure-t-
on. Durant les quinze derniers jours qui ont suivi la chute,
elle aurait eu de fortes douleurs et perdu de l'eau. L'enfant
serait venue tout d'un coup, sans évacuation d'eau, contraire-
ment à ce qu'elle observait à ses autros accouchements.
A la naissance, l'enfant n'était pas asphyxiée ; elle a crié de
suite. Elle avait des cheveux et des cils longs et abondants,
des poils sur le front et de grands ongles. Elle était petite :
à on aurait dit une poupée » ; elle avait la \ fontanelle
idiotie MYXOEDËMATEUSE. 59
antérieure « très creuse et occupant tout le travers
de la tête. - Elevée au sein par sa mère jusqu'à 10 mois;
puis avec de la soupe, du lait de vache et de l'eau rougie.
Elle a commencé à marcher à huit mois et à prononcer quel-
ques mots vers un an : « Tous mes enfants, dit la mère, ont
marché de bonne heure, sauf le quatrième, mais parlé assez
tard». Première dent à sept mois, la deuxième à huit mois.
On ne sait à quel âge sa première dentition a été complète.
L'enfant a été propre vers un an; elle n'a jamais eu de con-
vulsions On prétend qu'elle ressemblait aux autres en-
fants jusqu'à deux ans, époque où elle a fait une chute sur la
face. Son frère, l'idiot, qui la portait, ayant glissé sur nne
pelure d'orange, l'enfant a été projetée sur le trottoir ; elle
n'a eu ni perte de connaissance ni hémorrhagie ce jour-là. Six
semaines après, elle a rendu beaucoup de sang infect par le
nez. Sa mère l'a conduite à la consultation de l'hôpital Trous-
seau où on lui a enlevé les quatre incisives de la mâchoire
supérieure qui ne tenaient plus. C'est à partir de la chute
qu'on a remarqué l'épaississement des joues et l'augmentation
de volume du ventre ; la hernie ombilicale date de la nais-
sance. Les masses graisseuses du cou n'auraient été consta-
tatées que vers 5 ans. Le gonflement des paupières serait
venu progressivement. On ne peut dire à quelle époque les
pieds et les mains se sont épaissis. Avant la chute, les che-
veux étaient fins, ils sont devenus ensuite gros et durs comme
des crins, en même temps que les croûtes du cuir chevelu
ont paru. La coloration jaune de la peau de la face se serait
montrée à 5 ans, peu après la blépharite ciliaire. L'enfant a
bavé jusqu'à 10 ans. Les os des jambes se sont recourbés à 12
ans et sont devenus noueux. La voix, qui, avant le trauma-
tisme, était normale, affirme-t-on, s'est ensuite modifiée.
L'enfant s'occupe à faire un peu de crochet, à coudre ou à
faire des bâtons sur le papier, à laver et essuyer la vaisselle,
à balayer. Elle peut descendre et monter les escaliers. Elle
s'habille à peu près seule, se boutonne, lace ses souliers, met
ses jarretières. Tout ce qu'elle fait, elle l'exécute avec une
très grande lenteur. Elle reconnaît tout le monde, est très pu-
dique, paraît affectueuse. Elle n'est pas jalouse. Elle est très
sensible au froid, ne pleure ni ne rit, n'est pas coléreuse. Elle
répète tous les mots, dit le nom des objets, fait avec peine
quelques petites phrases. Elle reste parfois deux ou trois jours
sans causer. On l'a envoyée à l'asile où elle n'a rien appris.
Elle marche assez bien et longtemps, mais très doucement :
elle peut faire plus d'une lieue à pied.
Elle n'a jamais eu de tics ni d'onanisme, ni de vers, ni de
co
CLINIQUE.
gourme. Quelque temps après sa chute, elle aurait eu un
abcès de la jambe droite; l'enfant n'a jamais eu de fièvres
éruptives.
1882 : 29 juin. - Taille, 77 cent. ; Poids, 12 kilogr. 500.
1887 : 15 juin. - Taille, 82 cent. 1/2; Poids, 13 kilogr. 300.
- Cette enfant présente l'ensemble complet des phénomènes
qui caractérisent l'icliotie myxxdèmateuse. (Fig. 1).
Tète longue, avec une proéminence assez prononcée de
l'occipital, surmontée d'un méplat. Les bosses pariétales, assez
volumineuses, paraissent égales. Le front est un peu carré,
étroit ; il a 4 centimètres de hauteur, Les bosses frontales sont
1\ peine accusées, la gauche peut-être moins que la droite. Les
arcades sourcillières, légèrement saillantes, vont en s'effaçant
Fig. 1. - Wa... en 1887 (11 ans et demi).
IDIOTIE MYXUËDËMATEUSE. GL l
en dehors, surtout à gauche. Les 'paupières sont gonflées,
comme oedémateuses, sans que la pression du doigt y laisse
d'empreinte; elles sont très fendues. Les cils, très longs et
abondants aux paupières supérieures, sont beaucoup pluscourts
et rares aux paupières inférieures; elles [sont le siège d'une
blépharite ciliaire chronique. Les conjonctives palpébrales
sont un peu pâles; les oculaires sont nettes; les iris sont gris,
les pupilles égales. - Le nez est complètement aplati ; les
narines regardent en haut. L'aplatissement du nez est consécutif
au traumatisme survenu à l'âge de deux ans. Depuis cette
époque, il existe une rhinite chronique purulente (ozène) des
deux côtés ; l'écoulement purulo-sanguin exhale une odeur
nauséabonde, malgré les injections désinfectantes. Les joues
sont bouffies, gonflées; « elles enflent à chaque instant », dit
la mère. La lèvre supérieure est aplatie. Dans la chute, les
incisives médianes supérieures ont été cassées et probablement
le bord alvéolaire de la mâchoire supérieure a été fracturé,
d'où une perte de substance. La bouche mesure quatre centi-
mètres. Le bord libre de la lèvre supérieure est moyennement
prononcé. La lèvre inférieure est plus grosse et un peu ren-
versée en dehors. La langue est assez épaisso et la malade la
tient toujours sur le bord des lèvres, le menton est court. -
Les oreilles, convenablement ourlées, sont appliquées contre la
tête et ont leur lobule adhérent. - Face carrée.
Le cou est très court (24 cent. 1/2 de circonférence) et le
semble encore davantage, par suite do l'inclinaison habituelle
de la tête en avant.
L'examen minutieux de la région antérieure du cou ne per-
met pas cle découvrir la glande thyroïde. On sent les anneaux
de la trachée et le cartilage thyroïde comme s'ils étaient sous
la peau, sans aucune interposition. - Il existe, dans les creux
sus-claviculaires, des tumeurs pseudo-liponateuses qui,
d'après la mère, seraient parfois encore plus prononcées. « Je
pense, dit-elle, que c'est du vent. » Elle prétend que lorsque
ces tumeurs ont leur maximum de développement, et qu'elle
les frotte en débarbouillant son enfant, celle-ci vomit aussitôt
que l'eau froide touche les grosseurs.
La région pectorale offre un développement assez accentué,
avec un lacis veineux à mailles assez petites, qui se continue
avec un lacis veineux à mailles très longues sur le ventre. On
trouve aussi des dilatations veineuses sur les épaules, mais
moins apparentes.
Circonférence sous les aisselles (expiration).. 53 cent. 05.
Circonférence au niveau de l'appendice
typhoïde 52 cent. 05.
gaz CLINIQUE.
L'épaule gauche est un peu plus saillante et plus élevée que
la droite. La poitrine est courte; le dos est bombé, les reins
excavés.
Le ventre est très gros et l'ombilic présente une petite hernie
de 12 à 15 millimètres de hauteur. Les fesses sont arrondies.
Organes génitaux. - Le mont de Vénus est légèrement
saillant, glabre. Les grandes lèvres sont assez développées,
les petites lèvres réduites à un petit rebord de 2 millimètres de
hauteur. Pas d'onanisme.
Membres. - Les bras sont courts, l'articulation du coude un
peu grosse, les avant-bras légèrement déformés, les apophyses
styloîdes développées, les mains sont plutôt potelées ; les carac-
tères pachydermiques sont relativement peu accusés. - Les
cuisses sont courtes ainsi que les jambes; les fémurs sont
arqués, le gauche plus que le droit; les genoux sont noueux;
les jambes aussi sont courtes et offrent des déformations rachi-
tiques très prononcées. Les pieds sont plats et légèrement
bouffis. « Par moments, dit la mère, ils sont très gonflés, sur-
tout au niveau des cous-de-pied. » L'orteil médius, de chaque
côté, est plus court que les orteils voisins.
La 'peau de la face est d'une blancheur cireuse. Elle est
blanche et assez fine. Au niveau du dos, il y a une desquamation
furfuracée, qui, suivant la mère, est constante et souvent beau-
coup plus prononcée. On la retrouve également au niveau du
front. - Les cheveux, secs et gros, sont châtains roux, assez
abondants, excepté au niveau de la partie antérieure des régions
pariétales, où ils sont beaucoup plus rares. Le cuir chevelu
est rugueux, couvert de petites écailles et de petites croûtes qui
lui donnent un aspect jaunâtre. Ces croûtes se reproduisent
sans cesse, malgré les soins de propreté. Les sourcils sont fins
et moyennement fournis. Le reste du corps est glabre. Sous
les aisselles, on trouve de petites glandes disséminées dans
des bourrelets de graisse, d'où la sensation d'un empâtement
graisseux. Petites adénites sous-maxillaires et de chaque côté
du cou (du volume d'un pois). On ne sent pas de glandes
mammaires. Le mamelon a environ 2 à 3 millimètres de dia-
mètre et il fait une saillie de 1 millimètre. L'aréole très pro-
noncée mesure 5 millimètres de diamètre
La dentition mérite de nous arrêter. Les premières dents
(incisives médianes supérieures) ont poussé iL huit mois. La
première dentition, assure la mère, était complète à un an.
Mâchoire supérieure : Les incisives médianes ont com-
plètement disparu ; l'incisive latérale gauche ébranlée présente
depuis le collet, jusqu'à une petite distance du bord tranchant,
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 63
une couleur noirâtre due iL la mortification de la pulpe, consé-
cutive probablement à l'ancienne fracture ; canine gauche
très pointue ; une prémolaire et une grosse molaire de lait,
avec cinq tubercules. A droite, l'incisive latérale manque, la
canine est conoidc et excessivement pointue, une prémolaire,
une grosse molaire permanente et une en voie d'éruption. -
Toutes les dents de la mâchoire supérieure sont recouvertes,
autour du collet, d'une couche de tartre jaune verdàtre.
Mâchoire inférieure : Deux incisives médianes en voie
d'éruption ; leur bord tranchant est dentelé en scie. Leur face
antérieure présente la trace de trois sillons verticaux aboutissant
au petit tubercule du bord tranchant. En avant de ces deux
incisives, on trouve une incisive de lait tout à fait projetée hors
de l'arcade dentaire et on demi-rotation externe sur son axe.
- A gauche, une incisive latérale, une canine et deux molaires
de lait complètement détruites par une carie du troisième
degré. - A droite, une incisive latérale, une canine, une pré-
molaire réduite à la couronne, deux grosses molaires, une de
lait et une permanente en voie d'éruption. Toutes ces dents ont
une coloration jaune verdàtre due au limon qui les recouvre
autour du collet.
L'articulation est défectueuse : les dents do la mâchoire
inférieure ne se croisent pas avec celles de la supérieure.
Elles sont distantes d'un centimètre à peu près ; la langue de
l'enfant est toujours entre les deux arcades dentaires. Les
gencives sont rosées, très basses. La salive n'est ni visqueuse,
ni filante. La voûte palatine est large et très plate. Les impres-
sions digitales sont bien marquées.
La seconde dentition, comme on le voit, est très en retard.
A dix ans, éruption do deux grosses molaires permanentes de
la mâchoire supérieure, l'une iL droite, l'autre à gauche. A
onze ans, éruption des deux incisives médianes de la mâchoire
inférieuro qui sont en évolution au moment do l'examen.
Début d'éruption d'une grosse molaire permanente en bas et
il. droite.
La sensibilité générale parait normale. W... pleure quand
elle se cogne. Elle est assez chatouilleuse et très sensible au
froid. La vue est bonne ; sa mère dit qu'elle distingue plu-
sieurs couleurs. L'ouïe est normale ; pourtant l'enfant prétend
qu'elle n'entend pas le tic-tac de la montre appliquée sur son
oreille ( ? ). L'odorat semble un peu obtus, Passa faetida ne
détermine pas de grimace bien accusée. Lo goût serait normal,
l'enfant aime les choses salées. La respiration et la circu-
lalion n'offrent rien de particulier. Pouls petit, régulier à 72.
64 CLINIQUE.
Digestion. - W... mange seule, se sert de la fourchette et
même du couteau; loin d'être vorace, elle a l'appétit médiocre.
Sa nourriture favorite est la soupe, le pain, les pommes de
terre frites (elle préfère celles de la rue à celles que prépare
sa mère). Elle ne mange presque pas de viande ; elle n'aime
pas le lait, ni le sucre, ni les gâteaux. Le vin lui fait plaisir,
mais elle boit peu; elle ne vomit jamais ; les selles sont quoti-
diennes ; pas de vers, pas d'hémorrhoïdes. La mastication s'o-
père convenablement...
1888, 20 août L'état général est le même. Le cuir chevelu
est toujours envahi par une éruption eczémateuse. Le ne :
paraît encore plus écrasé, les paupières, les joues, les masses
lipomateuses sus-claviculaires plus volumineuses. Les seins
ne sont pas développés ; les grandes lèvres seraient un peu
plus saillantes. La voix est aigre, rauquo ; la parole, d'après
la mère de l'enfant, serait assez développée. Il y aurait depuis
un an un progrès à cet égard. W... est entêtée. Dès qu'il y a
quelqu'un, elle refuse de parler. On l'envoie à l'asile où elle
reste immobile sur sa chaise; elle n'aime pas jouer avec les
autres enfants, qui, d'ailleurs, se moquent d'elle, et lui re-
prochent de sentir mauvais (ozène).
1V... s'habille seule, sait lacer, attacher les cordons de ses
souliers et faire du crochet. Elle a un sentiment très prononcé
de la pudeur. Nous avons beaucoup de peine à la mettre toute
nue pour l'examiner. A la maison, elle prend des précautions
infinies pour changer do chemise, même devant sa soeur.
La fontanelle antérieure persiste dans une hauteur de
15 millim. et une largeur de 4 à 5 cent.
1889, 10 mai. - Taille, 0 m. 835. Poids, 14 k. 800. Comme
on le voit, en deux ans, elle n'a grandi que d'un centimètre.
Son poids a augmenté de 1 k. 500. L'enfant a eu les oreillons
il y a environ un mois. Les cheveux sont longs, gros, raides,
très secs, noirs en arrière, châtain-uoux en avant. Ils sont
abondants presque partout, sauf au-dessus des deux côtés du
front, où ils sont rares. Dans ces derniers temps les cheveux
sont tombés par plaques de 1 ou 2 centimètres ; ils repoussent
très vite. La fontanelle antérieure persiste, ainsi que l'érup-
tion eczémateuse. Le front a 3 centimètres. Les paupières sont
toujours bouffies, bleuâtres. Les cils des paupières inférieures
sont longs, tombent et repoussent. La blépharite ciliaire n'a
pas diminué. L'écoulement nasal n'a pas cessé, mais exhale
une odeur moins infecte, bien que, faute de ressources, la
IDIOTIE 1111b0EDGl11 : ITb : LTSC.
65
mère ne puisse faire régulièrement les injections anti-
septiques.
La langue est très épaisse, saillante, il n'y a pas de bave.
Les oreilles sont pâles, un peu bouffies. Les masses lipoma-
teuses des joues, des creux sus-claviculaires n'ont pas dimi-
nué. Il n'y a rien de changé en ce qui concerne l'appétit, les
aliments, la digestion. L'aspect du ventre, le volume de la
hernie ombilicale (circonf. à la base 5 cent., haut. 15 millim.)
n'ont pas changé. Les seins sont nuls ; les grandes lèvres
BOURIEVILLE, Bicêtre., 18S9. 5
Fig. 2. - W..., à 14 ans (mai 1839).
G6
CLINIQUE.
n'ont pas grossi; le pénil est glabre, ainsi que les aisselles et
toute la peau, jamais de sueurs. (Fig. 2, 3 et 4).
W... fait de petites commissions, une à la fois, parle assez
bien et fait de petites phrases, au dire de sa mère. La voix est
toujours aigre, rauque, un peu nasonnée. Le sommeil est bon,
assez long. La sensibilité au froid est toujours asssez pro-
noncée. Il en est de même de la répugnance à tout mouve-
ment.
14 août. - La malade, ainsi que les membres de la section
ont pu le constater eux-mêmes, présente toujours le même
Fig. 3. - \V..., à 14 ans (mai 1889).
IDIOTIE myxoedémateuse.
67
aspect et les mêmes symptômes. Voici les dimensions de la
tête et des membres prises en 1887 et 1889. '
68 CLINIQUE.
IDIOTIE myxoedémateuse. 69
te1'lwlle morte aliénée. Mère nerveuse. Grand'mère
maternelle morte de phtisie, ainsi que huit grands oncles
maternels.
Accouchement à 10 mois ( ? ).- Persistance de la fontanelle
antérieure à 5 ans. - Symptômes caractéristiques de l'idiotie
myxoedémateuse.
Y... X...'de B... (Espagne), est âgée de ans. - Père, 33 ans,
négociant, assez grand, jouit d'une bonne santé, est très
intelligent, bien que son crâne soit peu développé (microcé-
phalie légère) et que le front soit étroit et bas; le visage est très
allongé, le nez aquilin. Il est plutôt sanguin que nerveux, pas
de diathèse, aucun accident nerveux; il a eu à 18 ans des fine-
vres intermittentes qui ont duré'cinq jours. [Père, 70 ans, opéré
autrefois par Ricord d'un calcul de la vessie, bien portant. -
Mère, morte d'un cancer de l'utérus. - Grand-père paternel
mort de la goutte.- Grand'mère paternelle morte agence.
Grand-père maternel, pas de détails. Grand'mère mater-
nelle morte à 80 ans. - Deux frères et deux soew's bien por-
tants, sans accidents nerveux, ainsi que leurs enfants. - l'as
d'aliénés, etc., dans la famille.]
Mère, 32 ans, lymphatique, nerveuse, ni migraines, ni con-
vulsions, de taille plutôt petite, est ordinairement en bonne
santé, quoique anémique. [Père, grand, bien constitué, lym-
phatique. Mère, morte phtisique, ainsi que ses huit frères.
- Grands parents, pas de détails. - Une soeur en bonne
santé; pas d'enfants. Pas d'aliénés, etc.]
Pas de consanguinité. Inégalité d'âge d'un an. Trois enfants :
1° notre malade; - 2° garçon, 4 ans, bien portant, intelligent,
pas do convulsions; - 3° fille, 3 ans, en bonne santé, sans ac-
cidents convulsifs : tous deux diffèrent complètement du
malade.
Noire malade. Grossesse bonne. - Accouchement très
laborieux, prolongé (3 jours) « avec un retard indubitable
d'un mois, assure-t-on ». - .1 la naissance,* l'enfant avait
beaucoup de cheveux et les ongles très longs. Pendant les six
premiers mois, elle ressemblait à tous les autres enfants. A
partir de là, ses mouvements ont diminué jusqu'à arriver à la
presque immobilité des membres. La physionomie qui expri-
mait la vivacité et les autres caractères communs aux enfants
de cet âge changea. Elle prit un air d'imbécillité qu'elle con-
serve encore, quoique à un moindre degré.
Pendant les deux premières années, la tête penchait en
divers sens, mais aujourd'hui, elle se tient assez bien. Durant
70 clinique.' *
les premières années, la tête et la langue s'étaient développées
d'une façon disproportionnée, mais depuis deux ans, elles
n'augmentent pas sensiblement de volume. La partie supé-
rieure du crâne est souple, comme si l'enfant avait un an. La
fontanelle antérieure n'est pas ossifiée dans un espace de
trois centimètres d'avant en arrière et de deux centimètres
transversalement. La région frontale est aplatie; la suture
interfrontale n'est pas fermée; elle est même large. On note
une déclivité très prononcée du vertex à la racine du nez et,
en revanche, une saillie notable de la partie postérieure du
crâne. - Les cheveux sont peu abondants et courts à la
Fig. 5. Y... X..., en 1889.
IDIOTIE MYXOEDEMATEUSE.
71
région antérieure et moyenne. Le cuir chevelu est le Siège de
petites croûtes qui se reproduisent sans cesse.
La physionomie est sans expression. (Fig. 5, 6 et 7).
Les paupières, boursouflées, sont le siège d'une blépharite
ciliaire chronique. - Les globes oculaires sont normaux.
Le ne-, est court et camus. - Les joues sont très deve-
loppées. - La bouche est large; les lèV1'es sont épaisses, gon-
flées ; la langue est volumineuse et sort habituellement; il n'y
a pas de bave. A mesure qu'elles ont poussé, les dents se sont
cariées et sont tombées, de sorte qu'il n'en reste, pour la plu-
part, que des racines. La première dent serait sortie vers
vingt mois.
Fig. G. - ... ..., en 1889.
72
CLINIQUE.
Le cou est gros et court. - Le tronc serait assez régulier,
mais il existe un peu d'enfoncement de la colonne vertébrale.
- Le ventre, très gros, mesure 56 centimètres au niveau de
l'ombilic qui est lo siège d'une hernie de 3 centimètres de
longueur et d'un à deux centimètres de diamètre. Elle aurait
été plus volumineuse.
Les divers segments des membres sont gros, trapus; les
os des jambes sont incurvés. Les pieds et les mains sont
gonflés, épais, courts ainsi que les doigts et les orteils.
L'enfant, malgré la température toujours assez élevée de son
pays, est sensible au froid; elle ne marche pas, elle se tient
seulement debout, et encore sans équilibre. L'intelligence ne
1,'ig. 7. - Y... X..., on 1$S',i.
IDIOTIE myxoedémateuse. 73
s'est pas développée; cependant Y... comprend différentes
choses, reconnaît toutes les personnes de son entourage et
leur témoigne même un peu d'affection. Elle ne supporte pas
la contradiction; elle s'emporte facilement et alors fait de
grands efforts et veut se jeter par terre. - La voix est rauque,
criarde. - La parole est limitée à pa pour papa et à telta, mot
qui désigne sa gouvernante.
Jusqu'à dix-huit mois elle fut allaitée par des nourrices;
jusqu'à quatre ans, elle fut alimentée avec du lait concentré et
des jaunes d'oeuf. Depuis lors, elle se nourrit de lait de
chèvre, d'oeufs, de cerveaux, de poulet et de viande triturée.
Elle n'a jamais voulu boire d'eau si ce n'est dans le cours d'une
maladie fébrile.
La déglutition serait un peu gênée. Y..... n'est pas sujette
à vomir. Elle est gâteuse, a des selles quotidiennes et n'aurait
pas eu de chute du rectum.
Comme maladies ordinaires nous n'avons à relever unique-
ment que des bronchites, une otite double, qui a disparu en
huit jours, et une angine simple.
Cette observation a été rédigée d'après les notes très
bien prises que nous a remises son père et d'après les
renseignements complémentaires qu'il nous a donnés
en venant nous consulter. Cette enfant, ainsi qu'il est
facile de le constater en examinant les figures 4, 5 et 6
faites sur des photographies, offre tous les principaux
symptômes qui caractérisent l'idiotie myxoeclémateuse.
Observation VI. - Père mort tuberculeux. Grand-père
paternel excès de boisson. - Grand'mère paternelle morte
d'un cancer de l'utérus. - Oncle paternel, excès de boisson.
- Tante paternelle, migraineuse. - Deux cousins issus
de germains, idiots. - Mère sujette à des douleurs névralgi-
ques, très nerveuse. Grand-père maternel, excès de boisson.
- Grand'mère maternelle, hystérique. - Arrière grand-père
maternel, excès de boisson, mort d'une attaque de paralysie.
- Grand'oncle maternel, excès de boisson.
Grossesse mauvaise : envie insurmontable de dormir,
chute. - Asphyxie à ta naissance. - Premières convulsions
a 14 mois. - Refroidissement et cyanose de la moitié infe-
rieure du corps. Jeûne. - Pertes de connaissance à
partir de 3 a2s. - Caractères complets de la cachexie pachy-
dermiqcce : physionomie typique, cheveux brun-roux; per-
74 CLINIQUE.
sistance cle la fontanelle antérieure ; gonflements lipomateux
des joues, des creux sus-claviculaires, des aisselles ; peau
cireuse, eczémateuse ; état pachydermique des pieds et des
mains ; hernie ombilicale ; rachitisme; absence de la glande
thyroïde, etc. - Congestion pulmonaire intense, mort en
syncope.
Autopsie : Absence complète de la glande thyroïde.
Persistance de la fontanelle antérieure. - Aspect gélalitti-
forme des circonvolutions cérébrales.
Bourg... Fernand-Auguste, né à Paris le 'le juillet 1883, est
entré dans notre service à Bicêtre le 6 décembre 1887.
Renseignements fournis par sa mère (16 décembre z
Père, 32 ans, garçon de café depuis l'âge de 13 ans. n'a pas eu
de convulsions de l'enfance, laborieux, sobre, d'une conduite
régulière, sujet à des douleurs de tête et à des étourdissements,
fume très peu, caractère doux, aucun indice de syphilis; ni
rhumatisme, ni maladies de peau. Il est actuellement soigné à
l'hôpital Lariboisière pour une bronchite tuberculeuse p).
[Père, cultivateur, mort étouffé sous un sac de blé, étant
ivre ; il faisait de nombreux excès alcooliques et vénériens.
Mère très nerveuse, sobre, morte à 55 ans, probablement d'un
cancer de l'utérus. - Grands parents paternels et maternels,
pas de renseignements. - Un frère, en bonne santé, mais
commettant de très fréquents excès de boisson qui ont amené
une séparation entre lui et sa femme. - Deux soeurs, dont
l'une est sujette à des migraines ; leurs enfants n'ont pas eu
de convulsions.- Deux cousins germains, âgés l'un de 39 ans,
l'autre de 22 ans, sont devenus tout à fait idiots à la suite de
convulsions de l'enfance. - Ni aliénés, ni épileptiques, ni
myxoedémateux, ni goitreux, ni difformes, etc., dans la famille.
Mère, 24 ans, couturière, bien portante, brune, physionomie
régulière ne rappelant aucunement celle du malade, sobre,
bonne tenue, pas de convulsions de l'enfance. Elle a des dou-
leurs névralgiques occupant la moitié antérieure du crâne ;
deux fois elle a eu des crises nerveuses consécutives à une
peur et à une contrariété. Tempérament très nerveux, caractère
changeant. - [Père, charron, excès de boisson, mort en 1870,
à 43 ans, d'une variole hémorrhagique. - Mère, 50 ans, bro-
canteuse, sobre, a eu de fréquentes attaques de nerfs jusqu'à
47 ans. - Grands parents paternels, pas de détails. - Grand-
père maternel, mort à 65 ans d'une paralysie du côté droit en
(1) Il est mort le 14 mai 1888.
idiotie MYXOEDÉMATEUSE. 75
trois jours; il avait fait beaucoup d'excès de boisson . Grand'
mère maternelle, 70 ans, sobre, bien portante.-Pas de frères.
- Deux soeurs jouissant d'une bonne santé et n'ayant pas
d'accidents nerveux. - Deux oncles paternels, rien de parti-
culier. - Un oncle maternel bien portant, adonné à la boisson.
- Pas d'aliénés, etc., dans la famille.
Pas de consanguinité (Père de l'Oise, mère de Romorantin :
dans ce pays, il y a des gens qui sont goitreux, mais il n'y en
a pas d'exemple dans la famille).- Inégalité d'âge de neuf ans.
Deux enfants et une grossesse presque à terme (il s'agit de
l'enfant Suzanne dont nous rapportons l'histoire plus loin) :
1° Fernand; - ° Garçon, 32 mois, bien portant, intelligent; il
a marché à 10 mois, a été propre à 14; il parle couramment.
Notre malade. - A la conception, qui a eu lieu un mois
après le mariage, ils étaient bien portants tous les deux.
Grossesse assez mauvaise : anorexie et vomissements ; à partir
de la quatrième semaine, jusqu'à la fin du 6e mois, elle a été
sujette à des envies de dormir auxquelles il lui était impossible
de résister. Au cinquième mois, elle a fait une chute qui a
failli provoquer l'avortement et l'a forcée de garder le lit pen-
dant plusieurs semaines. « L'enfant, dit-elle, était descendu. »
Pas de syncopes, pas d'oedème des pieds, etc. - Accouchement
à terme, naturel, en vingt-six heures. - L1 la naissance, l'en-
fant était tout noir; on a dû le frictionner énergiquement; il
n'a crié qu'au bout de sept ou huit minutes; la tête était très
grosse, déformée; la sage-femme l'aurait pétrie pour lui donner
une forme naturelle. - Elevé au sein par sa mère, jusqu'à huit
mois; ensuite au biberon (lait de vache). Sa mère prétend que,
depuis le premier mois, l'enfant a toujours eu le même aspect,
c'est-à-dire le teint cireux, les joues et les lèvres épaisses, les
mains et les pieds gonflés, et qu'il a toujours eu des croûtes
du cuir chevelu, à partir de la cinquième semaine, tandis que
le second enfant n'en a jamais présenté. Première dent à 13 mois.
11 aurait été bien portant jusqu'à 14 mois (Fig. 8), époque où
il aurait eu des convulsions qui ont duré dix minutes : les
membres étaient raides, les paupières closes, les yeux retour-
nés ; tout le corps au-dessous de la ceinture était froid; ni
secousses, ni écume. Durant les six mois qui ont suivi, les
membres inférieurs restèrent froids et bleuâtres. On était obligé
de les envelopper dans de l'ouate. Après les convulsions, pen-
dant six semaines, il aurait eu de la congestion pulmonaire.
Puis sa santé redevint assez bonne. Cependant, il lui est arrivé
plusieurs fois de rester deux ou trois jours sans rien prendre,
ni aliments, ni eau, ni lait (jeûnes). Si on le faisait boire de
76
CLINIQUE.
force, il vomissait. - Il a bavé jusqu'à 18 mois, il n'a jamais
été propre. Il a été mis en garde chez une parente, à la cam-
pagne, à 25 mois. Quand sa mère l'a repris, à trois ans, elle a
constaté des pertes de connaissance qui n'existaient pas aupa-
ravant : il pleurait, ses yeux se fermaient, la tête tombait; il
restait inconscient pendant quelques minutes, puis rouvrait
les yeux. Ces accidents réviennent environ deux fois par
semaine; il lui est arrivé d'être un mois sans en avoir.
Depuis un an, il commence à se tenir le long des chaises; il
n'a jamais marché seul. - La parole est à peu près nulle. Il
paraît comprendre assez bien ce qu'on lui dit, semble affec-
tueux avec ses parents : nous le faisons venir auprès de sa
mère; en la voyant, il pleure d'une manière stridente, comme
Fig. 8. - Bour ? 1 ? à 14 mois.
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
77
pleurait Then... dit le Pacha. Il approche sa tête, mais n'em-
brasse pas et caresse avec sa main. Il entre parfois en colère
quand on ne fait pas ce qu'il veut. Il sait se servir un peu de la
cuiller et de la fourchette, mais il est incapable de boire seul.
Il aurait eu beaucoup de gourme dans la tête. Pas d'adénite,
ni d'abcès, ni de fièvres éruptives. Il a rendu une fois des lom-
brics. Pas d'onanisme. Plusieurs médecins consultés ont déclaré
qu'il n'y avait rien à faire.
État actuel (15 janvier 1888). Tête symétrique, un peu carrée.
La région occipitale est assez volumineuse; les bosses parié-
tales peu proéminentes. Les cheveux sont peu abondants,
d'une couleur brune tirant sur le roux. Le cuir chevelu est
couvert de petites croûtes et de squames. - Le front a 4 cen-
Fig. 9. - l3our..., F., il ans et demi.
78 CLINIQUE.
timètres à peine de hauteur; il est étroit, déprimé latéralement.
Les sources sont bien marqués et assez fournis. Les paupières
supérieures sont notablement bouffies et recouvrent en partie
les globes oculaires. Les cils sont longs et collés (blépharite
ciliaire). - Les yeux sont petits, les iris d'un bleu clair; le
gauche semble un peu plus foncé que le droit. - Les joues
sont très grosses, gonflées. Le nez est petit; sa racine est
aplatie, les narines sont larges. La bouche est continuellement
ouverte; les lèvres sont volumineuses, l'inférieure esten partie
renversée. Le menton est petit, rond, presque caché par le
renversement de la lèvre inférieure. - Les oreilles sont nor-
males, bien ourlées et leur lobule est distinct (Fia. 9).
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
79
trouve des masses lipomateuses au niveau de la hanche et
de la partie supérieure de la face interne des cuisses. Les ré-
flexes rotuliens sont très marqués.
Organes génitaux : Pénil très développé, bourses rétrac-
tées, raphé médian très prononcé ; testicules non descendus.
Phymosis complet. ,La verge a 4 centimètres de longueur et
5 centimètres de circonférence.
La peau est glabre, rugueuse, sèche, bouffie, jaunâtre, sauf
au niveau- des pieds et des mains où elle est rosée. Légère
desquamation furfuracée au niveau des avant-bras et des
jambes. Quatra cicatrices de vaccin sur le haut des bras.
La sensibilité générale paraît être conservée dans ses dif-
férents modes. Il en est de même de la sensibilité spéciale,
autant que l'état intellectuel de l'enfant permet d'en juger :
l'assa-foetida placée sous ses narines, la coloquinte déposée
sur sa langue le font crier et faire des grimaces. La circula-
tion et la respiration n'offrent rien de particulier.
Fig. 10. - 13our..., F., à 4 ans et demi.
80 CLINIQUE.
Il tient bien la cuiller et la fourchette, mais ne peut s'en
servir. Il n'est ni gourmand, ni salace, ni vorace. La masti-
cation est très défectueuse ; il suce en mangeant ; il n'aime
pas la viande; si on lui en introduit des morceaux dans la
bouche, il les rejette ; pas de rumination, pas de vomissements,
selles quotidiennes, gâtisme.
L'enfant ne marche qu'étant soutenu sous les bras, très
lourdement ; il se tient assez bien aux chaises ou au lit ; lors-
qu'on le met dans le chariot, il s'y tient convenablement et le
fait avancer seul.
La préhension s'accomplit normalement, l'enfant saisit tous
les objets qu'on lui présente, porte son pain à la bouche et le
mange seul. - Le sommeil est bon. - Pas de tics.
L'attention est facile à fixer; le caractère est doux et affec-
tueux. Fernand comprend ce qu'on lui dit, mais ne prononce
aucun mot. La voix est aigre, rauque, gutturale.
Taille : 0m, 72 cent. - Poids : 11 kilogrammes.
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 81
tique la respiration artificielle, on fait des frictions stimulantes,
mais en vain. - Un quart d'heure après la mort, 31o,8 ; une
heure après, 3S ? ? ; deux heures après, 37°.
Autopsie le 1.juin. - Tète. - Le cuir chevelu, d'une épais-
seur normale, est pâle, humide, comme lavé. - Le crâne est
peu épais et normal. La fontanelle antérieure persiste, elle
mesure 6 centimètres d'avant en arrière et 4 centimètres trans-
versalement. - La dure-mère est très adhérente au crâne,
principalement au niveau de la grande scissure. L'enlèvement
de l'encéphale est très difficile. - Le cerceau est très mou ;
les circonvolutions sont molles, gélatiniformes, comme foc-
tales. L'examen immédiat étant impossible, on met le cerveau
dans l'alcool, afin de le faire durcir (I).
Cou.- Les glandes sous-maxillaires et linguales paraissent
normales. Elles Mont entourées de petites boules graisseuses,
d'aspect humide. - Un examen attentif ne fait découvrir
aucune TRAC¡;; DE la glande thyroïde. Le thymus persiste;
il recouvre en partie le péricarde et est enveloppé par un
tissu graisseux assez abondant. - Les pseudo-lipomes sus-
claviculaires sont composés de petites boules graisseuses
humides, sans limitation bien nette.
Thorax. - Le tissu adipeux sous-cutané est peu développé;
on dirait qu'il a été lavé, ainsi que les muscles du thorax, qui
sont très pâles. Le tissu conjonctif, situé au-dessous du ster-
num et qui rejoint le péricarde, a un aspect oedémateux. Dans
la cauité pleurale gauche, on trouve environ un verre de
liquide. - Poumon gauche, 120 gr. ; ecchymoses ponctuée ? ,
principalement sur le lobe supérieur ; oedème et congestion
du lobe inférieur.- Poumon droit, 240 gr. ; oedème très pro-
noncé de tout le poumon. Pas d'hépatisation. - Le péricarde
contient un demi-verre de sérosité. Coeur, 70 gr.. en systole,
pointe formée surtout par le ventricule gauche. Caillots blancs
dans l'oreillette droite. Imbibition do l'endocarde. Plaque
athéromateuse sous-aortique. Trou de total oblitéré.
Abdomen très ballonné. L'intestin et l'estomac sont forte-
ment dilatés par les gaz. - L'estomac, le foie (570 gr.), la
rate (40 gr.), le rein gauche (40 gr.), le rein droit (45 gr.) ne
présentent aucune lésion.
Le grand sympathique parait normal des deux côtés.
(1) Ce cerveau a été égaré ou jeté par l'ancien gardien du musée,
de sorte que nous sommes obligé de nous borner à cette simple
indication.
BOURNEVILLE, Bicêtre, 1889. 6
82 CLINIQUE.
Voici maintenant l'histoire de la soeur de cet enfant,
atteinte, elle aussi, d'idiotie myxoedémateuse.
Observation VII. - Père tuberculeux au moment de la
conception. - Pertes abondantes au troisième mois de la
grossesse ; fausses douleurs durant le dernier mois. -
Asphyxie et gonflement de toute la moitié droite du corps
à la naissance. - Influence du lait morphine. Premières
convulsions internes à 5 mois, suivies de 12 à 15 crises jus-
qu'à 6 mois. - Symptômes classiques de la cachexie pachy-
denmique. - 1\lCT',UtIS. - Nouveau gonflement de la moitié
gauche du corps à 9 mois. - Morle de convulsions il 1 mois.
- Autopsie : absence de la glande thyroïde.
Bourg... Suzanne, est née à Paris le 18 janvier 1888.
Cette enfant est la soeur du malade précédent. A l'époque
de la conception, le père était déjà sous le coup de la tuber-
culose pulmonaire à laquelle il a succombé, le 14 mai 1888, et
la mère était un peu affaiblie et fatiguée. Ils vivaient d'accord
et rien n'autorise à songer à une interposition. - Grossesse : .'
son état de fatigue a continué durant les trois premiers mois ;
de temps en temps, douleurs de tête avec nausées, quelquefois
vomissements, accidents qui se sont présentés au début de la
première grossesse (OBSERV. VI). A la fin du troisième mois,
perte abondante pendant trois heures et qui a nécessité un
repos au lit de huit jours. Ni traumatisme, ni émotions, ni
envies de boire, ni syncopes, ni attaques de nerfs, ni oedème
des pieds. Le dernier mois, elle est allée trois fois à l'hôpital
Saint-Antoine, ayant des douleurs lui faisant croire qu'elle
allait accoucher : le lendemain matin, les douleurs disparais-
saient et elle retournait chez elle. - Accouchement à terme,
sans chloroforme, naturel, en cinq heures. La mère de l'en-
fant raconte qu'elle a rendu peu de sang et beaucoup d'eau
après la délivrance qui a été normale, « au moins plein un
petit vase de nuit », particularité absente aux précédents
accouchements, qui se sont accompagnés, au contraire, d'un
flux sanguin assez abondant.
A la naissance, tout le corps de l'enfant était violet, bien
que la tète ne fut pas demeurée longtemps au passage ; néan-
moins, l'enfant a crié tout de suite et on n'a pas été obligé de
la frictionner; elle était grosse, pesait 4.060 gr. La face tout
entière était bouffie; foute ta moitié droite du corps était
enflée ; la main et le pied de ce côté avaient un volume double
de la main et du pied sains. -
Elevée au sein par sa mère, Suzanne a tété assez mal la pre-
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 83
mière semaine, puis elle a bien pris le sein. Au bout d'un mois,
sa mère est devenue malade (périmétrite) et a dû rentrer à
l'hôpital (février 1888). Alors l'enfant avait peu augmenté,
car elle ne pesait que 4.400 gr. Durant le séjour à l'hôpital,
elle eut une bronchite légère du côté droit et maigrit notable-
ment, de telle sorte que, à la sortie, le 7 mai, elle ne pesait plus
que 3.900 gr. Signalons que, pendant près d'un mois, la mère a
pris tous les jours du sirop de morphine auquel elle attribue
une certaine influence sur la situation de son enfant qui était
exclusivement nourrie au sein.
Nous avons dit que l'enfant était violette à la naissance; cette
coloration aurait été remplacée, le second jour, par une colo-
ration rouge-orange qui se serait maintenue jusqu'au com-
mencement du mois de mai, époque où la peau a blanchi. La
mère pense que cette modification est due au calomel qui a
été donné à l'enfant.
Après sa sortie de l'hôpital, « Suzanne a repris de la figure
et du corps. ); Vers la fin du mois de mai, elle a eu, pour la
première fois, des convulsions internes : elle se réveillait en
frayeur, faisait un petit saut, tournait ses yeux, plissait le front.
La bouche n'était pas tirée, les membres, croit-on, ne devenaient
pas rigides. - Depuis lors, jusqu'à ce jour (11 juin), Suzanne
a eu l' ou 15 crises semblables. Leur durée a varié de à à
15 minutes. On n'a pas remarqué de secousses cloniques pen-
dant les crises, ni de paralysie consécutive. - Parfois le
sommeil est interrompu par une sorte de peur avec suffocation.
Ces accidents se montreraient aussi, quelquefois, lorsque l'en-
fant est éveillée.
Etat actuel (11 juin 1888). - Tête ovoïde, l'occipital for-
mant une saillie assez prononcée et le front étant au contraire
étroit. La fcntanello antérieure a G centimètres de long sur 4
de large. La fontanelle postérieure persiste ; les pariétaux
sont écartés dans leur tiers postérieur. Les sutures temporo-
frontales sont fermées ; les sutures pariéto-occipitales sont
ouvertes. Les cheveux, blonds, sont très rares au niveau du
vertex, assez abondants sur le reste de la tète, un peu plus à
gauche qu'à droite. Tout le cuir chevelu est envahi par des
petites croûtes qui reviennent sans cesse, malgré les savon-
nages. Sur la tempe gauche, au-dessus de l'oreille, iloevtis
congénital, un peu saillant, d'un centimètre de diamètre.
84
CLINIQUE.
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
85
Le dos et le ventre ressemblent à ceux de Fernand. La cou-
che graisseuse des creux sus-claviculaires est plus prononcée
que chez les autres enfants de cet âge. Le thorax mesure
36,5 au niveau des ;seins ; le ventre, 40*= à deux centimètres
au-dessus du nombril qui est un peu saillant. Tandis que le
dos et la région lombaire sont larges, le bassin paraît rétréci.
La fossette coccygienne est couverte de poils nombreux.
. Le mont de Vénus est proéminent ; les grandes Mures
sont très saillantes, bouffies ; la muqueuse de la vulve est
humide.
Les bras sont gros et courts. La circonférence est de 13e au
niveau des plis du coude et 9<,5' au niveau des poignets. Les
mains sont bouffies ; les doigts un peu violacés et froids. (A
la naissance, les ongles étaient, dit la mère, cachés par la chair
du bout des doigts.) Les cuisses et les jambes sont également
courtes. On trouve 21e au niveau des plis de l'aine et 15e au
niveau des mollets. Les pieds sont épais, cyanosés ; les orteils
normaux, mais les ongles sont à peine formés. (Ils ne se voyaient
pas à la naissance). (Fig. 11 et 12).
Fig. 12. - Bour..., 5..., à six mois.
86 CLINIQUE.
L'enfant tette bien, ne vomit pas, est sujette à la constipation.
Sa mère a fait déjà la remarque que sa fille ressemble à son
petit garçon et qu'elle se présente tout à fait sous le même
aspect que lui au même âge. - Taille : 56 cm. ; poids :
4 kil. 800.
31 juillet. - L'enfant paraît venir assez bien. La peau est
sèche et a, partout, un teint cireux. Les cheveux sont rares.
Le cuir chevelu est parsemé de croûtes et de pellicules. La
fontanelle antérieure a 6e d'avant en arrière sur gaz transver-
salement. La fontanelle postérieure a 4e d'avant en arrière
sur le de largeur. La bosse frontale droite et la bosse occipi-
tale gauche sont plus saillantes que leurs congénères. Les cils
sont longs et fournis. L'enfant regarde et sourit. Les joues
sont pendantes. La langue est très épaisse, la salivation abon-
dante. Il n'y a pas de dents.
Un nouvel examen de la région antérieure du cou no fait
que confirmer ce que nous avons dit sur l'absence probable
de la glande thyroïde. - La mère déclare que l'enfant a la
tète très lourde et qu'elle entraîne le corps.
25 octobre. - Suzanne a eu une bronchite à la fin du mois
d'août. Elle a guéri en 15 jours. Il y a deux semaines, elle
aurait eu, pendant quatre jours, toute la moitié gauche du
corps enflée. « Ses yeux n'ont pas grande signification, dit sa
mère; elle ne sourit pas. » La semaine dernière, sans motif,
elle a ri aux éclats. Elle ne se sert pas du tout de ses mains
et ne se tient pas sur les jambes. Son sommeil est prolongé.
Elle paraît très sensible au froid.
Les cheveux sont secs, chatain-roux, peu abondants sur
les tempes et sur le vertex (1) ; les croûtes persistent. Même
état des fontanelles.
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 87
le nez long et pointu). La poitrine est plus bombée ; le ventre
toujours gros avec une petite hernie ombilicale. Les pseudo-
lipomes des creux sus-claviculaires sont plus apparents. -
Les pieds et les mains sont gonflés, froids, cyanosés. La teinte
jaunâtre et cireuse de la peau, surtout à la face, est plus pro-
noncée. La voix est criarde comme celle de son frère.
1er décembre. - L'enfant est devenue souffrante le 15 nov.
et a maigri progressivement. Le 29, elle a été prise de convul-
sions vers 4 heures du soir : rigidité, puis secousses générales,
écume; durée 4 à 5 minutes. - Nouvelles convulsions vers
11 heures du soir, puis, le 30 novembre, à 2 heures du matin,
qui se sont terminées par la mort.
AUTOPSIE. - L'enfant étant morte chez sa mère, en ville, il
ne nous a pas été possible de faire l'examen du cou. Nous
avons enlevé le larynx, la trachée et les muscles, et un examen
attentif nous a permis de constater l'absence complète de la
glande thyroïde.
Ces deux cas, observés dans la même famille, sont
tout à fait typiques. Relevons en passant deux particu-
larités curieuses, présentes également dans tous les cas
qui nous sont personnels : 1° la forme spéciale du nez
des malades - nez camus - alors que leurs parents
ont le nez aquilin ou différent; la couleur rousse des
cheveux, tandis que les parents ont les cheveux bruns
ou blonds.
Observation VIII. - Père, fièvres intermittentes, paraly-
tique général. - Arrière-grand-père paternel apoplectique.
- Oncle paternel migraineux ; mère nerveuse. - Grand-
père paternel mort de tuberculose. - Grand'mère maternelle
paralysée. - Arrière grand-père maternel aliéné. - Oncle
maternel migraineux. - Mère nerveuse, un peu micro-
céphalique. - Grand-père maternel mort tuberculeux. -
Grand'mère maternelle hémiplégique. - Arrière-grand-père
maternel aliéné.
Père au début de sa paralysie générale à l'époque de la-
conception. - Premières convulsions à huit mois. - Bron-
chite. - Symptômes classiques du myxoedème. - Morte a
l'âge de 7 ans. -
Autopsie : Persistance de la fontanelle antérieure. -
Absence complète de glande thyroïde. - Persistance du
thymus. '
i CLINIQUE.
Cab... Marie-Pauline, néeà Sedan, le 29 juillet 1882, est entrée
à l'asile do Villejuif dans le service de M. le Dr BRIAND, le
29 avril 1889 (24 mars 1889) (1).
Renseignements fournis par sa mère. - Père, 44 ans, ser-
gent de ville, est depuis trois mois à l'asile d'aliénés de Ville-
Evrard pour une paralysie générale. Depuis sept ans, il était
sujet à des accès de colère et battait sa femme; depuis long-
temps, mais davantage depuis un an, il s'adonnait à la boisson;
il a été sujet à des accès mensuels de fièvre intermittente bien
caractérisés depuis son mariage jusque dans ces dernières
années. - [Père, sobre, mort d'une attaque d'apoplexie, en
8 jours ; il a été sujet à des accès mensuels de fièvres inter-
mittentes bien caractérisées depuis son mariage jusque dans
ces derniers temps. - Mère, très nerveuse, bien portante, pas
d'excès de boisson. - Grands-parents paternels et maternels,
pas de détails. - Un oncle maternel est mort aliéné. Frère
migraineux. - Soeur nerveuse et d'un caractère violent ; elle a
deux enfants bien portants ; sans convulsions. - Pas d'autres
aliénés, pas d'épileptiques, pas d'autres paralytiques, pas d'en-
fants semblables à la malade].
Mère, 33 ans, nerveuse, migraineuse, brune, intelligente,
d'une physionomie toute différente de celle de sa fille.- Léger
prognathisme de la mâchoire supérieure. Dents mal implantées ;
oreilles mal ourlées. - [Père, sobre, mort à 27 ans de tuber-
culose. - Mère irritable, paralysée du côté gauche depuis
quatre ans. - Grand-père paternel mort à 66 ans, de bronchite
chronique, laboureur, sobre. - Grand'mère paternelle, mi-
graineuse, morte à 81 ans, d'un cancer de la face. - Grand-
père maternel mort aliéné à 72 ans. - Grand' mère maternelle
morte à 84 ans. - Un oncle et une tante paternels sont morts
tuberculeux ; un autre oncle est en bonne santé. Il en est de
même de 2 oncles et d'une tante maternels ainsi que de leurs
enfants. - Ni frère, ni soeur. Pas d'autres aliénés, pas de
goitreux, bien qu'il y en ait dans son pays, etc.]
Pas de consanguinité. - Père de Mirecourt; mère de Sedan.
Inégalité d'âge de 11 ans.
Quatre enfants : 10 Fille, dix ans, intelligente, nerveuse;
jamais de convulsions; - 2° Fille morte de méningite à
2 ans; - 3° Fille morte à 3 ans d'une fluxion de poitrine;
pas de convulsions ; 4° Pauline.
(1) Les renseignements que nous avons donnés dans notre com-
munication à l'Association française étaient incomplets. Nous
avons pu retrouver la mère et avoir d'elle, nous-même, des ren-
seignements précis.
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 89
Notre malade. - A l'époque de la conception, le père, as-
sure-t-on, ne présentait aucun indice de trouble mental, n'était
pas violent; ils vivaient en bonne intelligence; mais depuis
quelque temps déjà, il s'était mis à la boisson et, je pense, dit
la mère, que la petite a « été faite quand il avait bu. » -
Grossesse, assez mauvaise : « J'ai vomi depuis le premier jour
jusqu'au dernier»; pas de coups, de chutes, pas d'émotions,
pas d'alcool ni d'opium; à 7 mois, sans cause connue, est sur-
venu un commencement de travail : « La matrice restait
ouverte » au dire de la sage-femme. Pas de métrorrha-
gie. Pendant les deux derniers mois, douleur3 tous les huit
jours. - Accouchement à terme naturel, sans chloroforme,
en 15 heures. Les autres accouchements ont été plus rapides.
A la naissance pas d'asphyxie, bien que l'enfant eut deux
circulaires du cordon autour du cou; elle a crié de suite. La
tête était grosse, non déformée; les ongles étaient réguliers;
il n'y avait pas de développement exagéré du système pileux.
- Elevée au sein par sa mère jusqu'à cinq mois, puis au bi-
beron avec du lait de vache. Jusqu'à huit mois bien venante,
mais elle avait la langue, les pieds et les mains épais et la
peau cireuse, et, dès la naissance, on avait remarqué qu'elle
avait une voix différente de celle des autres enfants.
A huit mois, dans le cours de sa première bronchite, au
bout de deux semaines, elle a eu pendant trois jours et chaque
jour à diverses reprises, des convulsions qui ont duré chaque
fois dix minutes; elle devenait roide, toute bleue, avait des
secousses dans les quatre membres, égales des deux côtés.
- A partir de ces convulsions, l'enfant « n'a plus poussé du
tout », dit la mère. Elle grossissait mais ne grandissait pas et
son ventre devenait plus volumineux. C'est alors seulement
qu'on a noté l'existence de la hernie ombilicale.
Première dent à 17 mois; elle n'avait pas ses 20 dents à son
entrée à Villejuif. « Elle n'a eu ses oeillères qu'à 4 ans. » A la
maison, elle restait assise presque tout le temps, s'amusant
avec une poupée, avec des jouets, soit seule, soit avec sa soeur,
qu'elle aimait beaucoup ainsi que sa mère. Elle reconnaissait
tous ses parents. Son caractère était sauvage; elle n'aimait pas
voir des étrangers. Très coléreuse, elle se raidissait, se renver-
sait sur sa chaise et se frappait la tête avec ses poings. - Aucun
tic. Pas d'onanisme. Pas de vers.
Pas de rougeole, pas de varioloïde, etc. - Pas de coque-
luche, ni d'angine. Elle aurait toujours bavé et la langue restait
hors de la bouche. Coryzas fréquents.
Première ophtalmie à 4 mois; depuis, elle en a eu souvent ; les
paupières restaient constamment collées. ,- Elle a eu quelques
90
CLINIQUE.
croûtes d'impétigo sur les tempes, de l'eczéma des oreilles; -
des adénites autour du menton; - pas d'otite; - plusieurs fois
des furoncles un peu partout (Fig. 13). -
Mat. - M. le D1- Briand, ayant eu l'obligeance de nous
envoyer la malade à Bicêtre, pour la faire photographier, nous
en avons profité pour recueillir les notes sommaires ci-après :
Tête volumineuse, se rétrécissant en avant, surtout dans la
moitié postérieure; front assez haut, mais très étroit.
Persistance de la fontanelle médiane antérieure. Cheveux
gros, rudes, noirs et assez abondants sur les côtés et en arrière ;
d'un noir tirant sur le roux et peu abondants sur la partie
moyenne des pariétaux et du frontal. Nombreuses crasses du
cuir chevelu, se desquamant et se reproduisant. Sourcils clairs.
Fig. 13. - Cab..., à G ans et 10 mois..
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
91
Les paupières sont bouffies, ont une pâleur bleuâtre et sont le
siège d'une blépharite chronique. Les cils sont très longs et
assez fournis aux paupières supérieures et très rares aux infé-
rieures. Il existe un léger degré d'entropion à la paupière
inférieure gauche. Iris bleus. Pas de lésions des globes ocu-
laires. Nez camus (1), épaté. Joues épaisses, surtout dans leur
partie postérieure, ballottantes, gélatiniformes. Erythème de la
joue gauche. Lèvres très grosses, bouche assez large, langue
très épaisse, que la malade laisse voir entre les arcades den-
(1) Le père a le nez aquilin et les cheveux très bruns et très
fins ; la mère a le nez allongé et un peu relevé à la pointe, les
cheveux bruns et fins.
Fig. 14. - Cab..., à 6 ans et 10 mois.
92
CLINIQUE.
taires, qui sont comme aplaties en avant. En haut, quelques-
unes des dents sont usées; la voûte palatine est large et plate.
Le menton est comme doublé. Ganglions sous-maxillaires assez
volumineux. Les oreilles sont bien ourlées, les lobules sont
adhérents et un peu relevés. Le visage est plutôt rond, la phy-
sionomie offre l'aspect dit crétinoïde que nous avons signalé
chez les autres malades. Le regard est vague, mais peut être
fixé (Fig. 14, 15 et 16).
ILIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
93
Le cou est très court; sa circonférence est de 30 centimètres.
On sent très bien es cartilages de la trachée, mais ni nous, ni
nos internes, n'avons pu percevoir la glande thyroïde. On
trouve des masses pseudo -lipomateuses très prononcées,
tremblotantes, dans les creux sus-ctaviculaires et sous les ais-
selles. Le tronc est ramassé, le ventre large et volumineux,
surtout dans sa moitié supérieure ou sus-ombilicale, avec
une pointe de hernie ombilicale; les grandes lèvres sont assez*
saillantes. La colonne vertébrale est régulière. Le bassin et les
fesses sont étroits par rapport à la partie supérieure du thorax.
Circonférence du thorax au niveau des aisselles. 50 cent.
- . - des mamelons. 53 cent.
- - do l'ombilic . 16 cent.
Fi[j. 16. - Cab..., à 6 ans et lU mois.
94 CLINIQUE.
Les membres supérieurs sont gros et courts; les mains volu-
mineuses, épaisses, rouges et froides. - Les membres inférieurs
présentent absolument les mêmes caractères. La peau a une
teinte mate, d'aspect cireux et est rugueuse.
IDIOTIE myxoedémateuse. 95
.est très réduite. Les os peu épais sont durs. La fontanelle
antérieure persiste ; elle mesure 3 cm. 1/2. d'avant en arrière
et 3 cm. transversalement (1). Les sutures sont ossifiées en
très grande partie, mais transparentes dans certaines parties
de leur étendue. Il existe des adhérences nombreuses entre
la voûte du crâne et la dure-mère, qu'il a fallu en quelque
sorte décoller de la voûte du crâne (2). - La quantité de
liquide céphalo-rachidien ne paraît ni augmentée, ni dimi-
nuée. La pie-mère n'offre qu'une très légère vascularisation.
Les artères, les nerfs et les différentes parties de la base de
l'encéphale sont normaux.
Cerveau.- Hémisphère droit.-a) Face externe. - La plus
grande partie des circonvolutions de cet hémisphère ont laissé,
par places, après la pie-mère une très lègère couche de subs-
tance grise. La scissure de Sylvius est large, profonde, et
montre la moitié environ de la circonvolution de l'insula.
qui est formée de cinq digitations bien développées, dont deux
sont bifurquées. La scissure de Rolando est profonde. Fi, volu-
mineuse, très flexueuse, s'anastomose vers son milieu avec Po ! ,
par deux plis très voisins l'un de l'autre. P.= est également très
développée, très sinueuse; elle dessine un véritable gyrus sur
le milieu de son trajet. F : j, bien développée, très flexueuse,
envoie des replis dans les sillons de la 2° frontale. - F. A.
est petite et s'anastomose à son pied avec la pariétale ascen-
dante, interrompant la scissure de Rolando. - Les 1 rc, 2e et
3e circonvolutions pariétales sont maigres, surtout la première;
la deuxième a été entamée par un trait de scie qui empêche de
bien juger de son état. - Le pli courbe présente également
des circonvolutions extrêmement grêles par places, puis ren-
flées entre ces étranglements. Le lobe occipital est petit; les
circonvolutions serrées et peu sinueuses. Les circonvolutions
temporales sont assez maigres; la 1° envoie un prolongement
épais au lobule de l'insula. «
Les sillons secondaires du lobe frontal sont très peu pro-
fonds ; ceux des lobes pariétal, temporal et occipital le sont
un peu plus. Les sillons de la face interne sont, eux aussi,
assez superficiels.
b) Face interne. Les circonvolutions sont bien développées.
sauf la circonvolution du corps calleux; le lobe paracentral
est creusé de sillons assez nombreux ; la scissure calcarine est
profondément ouverte. Le coin et l'avant-coin ne présentent
(1) On sait que la fontanelle médiane antérieure ou grande fon-
tanelle disparait de deux ans à deux ans et demi.
(2) Des adhérences semblables ont été notées dans plusieurs cas.
9u ' CLINIQUE.
rien de particulier. Il en est de même de la circonvolution de
la corne d'Ammon et de l'hippocampe. - Le ventricule latéral
n'est pas dilaté, sa surface est lisse; les noyaux paraissent
normaux.
2° Hémisphère gatcche. -a) Face convexe. - Cette face est
beaucoup moins lésée que la face correspondante de l'hémis-
phère opposé, au point de vue des adhérences. - La scissure
de Sylvius est aussi très largement ouverte et découvre l'in-
sula qui est volumineux et composé de 7 digitations prin-
cipales. FI est volumineuse et assez flexueuse. F;; très mai-
gre, a son extrémité antérieure peu sinueuse, s'insère sur
la frontale ascendante par deux replis très peu marqués. 1 : Ï ,
moyennement flexueuse, est maigre en avant. - La frontale
ascendante, très grosse, reliée à sa base à la pariétale ascen-
dante, ferme ainsi en bas le sillon de Rolando, qui est profond
et bien développé. - La pariétal ? ascendante est également
bien tracée et ne présente qu'un peu d'amaigrissement dans
son tiers inférieur. La 1re pariétale, assez maigre et peu
flexueuse, plonge brusquement dans l'extrémité postérieure
de la scissure de Sylvius ; il en résulte une dépression courbe
qui est inscrite dans le sillon du pli courbe. - La 2e pariétale
est, au contraire, très développée, ainsi que la 3e. - Le pli
courbe est bien formé. - Le lobe occipital est formé de cir-
convolutions peu sinueuses. - Les adhérences sur cette face
sont surtout marquées au niveau de la 1T frontale et sur la
pariétale ascendante.
b) Face internes La première circonvolution frontale et le
lobe paracentral sont bien développés jusqu'à la scissure cal-
carine. Les circonvolutions du lobe occipital présentent
beaucoup de points amaigris. La circonvolution du corps
calleux est beaucoup mieux développée que celle du côté op-
posé. Le lobe quadrilatère est volumineux; le coin est plus
large que d'habitude à son extrémité centrale. L'hippocampe
et la corne d'Ammon n'offrent rien de spécial. - Le ventri-
cule latéral, le corps strié et la couche optique semblent nor-
maux. Sur cet hémisphère, les sillons sont un peu plus pro-
fonds qu'à droite.
Les circonvolutions ne sont pas symétriques, surtout les
lobes quadrilatères et le coin. A droite, cette dernière circon-
volution a son extrémité interne déprimée et moitié moins
épaisse qu'à gauche.
Cervelet.- Les deux lobes latéraux sont symétriques, le lobe
moyen paraît petit; la protubérance, le bulbe et les olives sont
également symétriques et paraissent normaux.
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 97
Cou. Un examen attentif montre qu'il n'y a aucune trace
de la glande thyroïde. Le larynx et la trachée n'offrent rien
do particulier. On trouve des amas de graisse jaunes, humides,
brillants et de nombreux ganglions de 5 à 10 millimètres de
longueur sur les côtés du cou, surtout à gauche. Il en existe
également sous les aisselles, offrant le même aspect. La
langue est largo et très épaisse.
Thorax. - Pas de liquide dans les plèvres. - Il reste
quelques fragments du thymus. - Les poumons sont sains,
sauf un peu d'oedèmo à la base du poumon gauche. Plu-
sieurs ganglions bronchiques sont tout à fait caséeux. Les pou-
mons pèsent 225 grammes. Coeur, 78 grammes, pas de
surcharge graisseuse, ni de sérosité péricardique. Tissu ferme,
un peu pâle. Trou de Bolal oblitéré. Pas d'autres lésions.
Abdomen. - L'estomac, les intestins, la rate (40 gr.), le
pancréas (35 gr.), ne présentent aucune lésion. - Le foie
(495 gr.) est décoloré, jaune et d'aspect tout à fait graisseux
sur les coupes ; pas de calculs. Les reins pèsent 97 gr., se
décortiquent facilement, ne sont pas lobulés. A la coupe, ils
se montrent un peu anémiés, surtout les pyramides. Il y a
dans le rein droit un kyste de la grosseur d'une petite noi-
sette.- La vessie, un peu distendue par l'urine, a des parois
épaisses. L'utérus et ses annexes sont sains. Le poids du
corps est de 9,500 gr. à peine, ce qui fait une diminution de
plus de 600 gr. depuis le mois de mai.
Voici maintenant le résultat de l'exa nen histologique
pratiqué par notre ancien interne, M. I'irLtET :
Examen hz'sou' ? . 10 Perm du cou, région antérieure.
L'épiderme est mince, avec une forte couche cornée. Le plan
papillaire est peu épais, les glandes sébacées manquent et les
poils follets sont tout à fait rudimentaires, lés pelotons sudori-
pares sont peu développés. Les faisceaux connectifs du derme
et les cloisons qui circonscrivent le tissu adipeux sous-cutané
sont à peu près à l'état normal. La fibrillation des faisceaux
conjonctifs est seulement moins marquée dans les endroits où i
ces faisceaux sont épais, principalement autour des glandes su-
doripares, et les cellules sont en ces points plus étoilées qu'alen-
tour, mais on ne note nulle part l'aspect du tissu muqueux
vrai tel qu'il se trouve dans le cordon ombilical ; il n'existe
que des petits îlots péri-glandulaires. La graisse qui forme les
pelotons adipeux est très abondante et disposée d'une façon
qui rappelle tout à fait ce qu'on observe chez les nouveau-nés
130UIINEVILLE, Bicélre, 1889. 7
98 CLINIQUE.
très gras. - Le muscle sous-jacent est divisé par des travées
connectives assez fortes, riches en fibres élastiques.
Peau de la main. - Même aspect en général. Les glandes
sudoripares sont peu développées comme chez les nouveau-
nés et les très jeunes sujets. L'aspect myxoïde du tissu con-
jonctif est plus marqué dans les travées fibreuses du tissu
sous-cutané, surtout il leurs points d'entrecroisement.
Foie. - Il est uniformément gras commo un foie de poisson
ou d'animal engraissé, sans aucune systématisation, sans sclé-
rose de quelque nature que ce soit. Les cellules sont réguliè-
rement distendues par de grosses gouttelettes adipeuses.
Hein. - Il a l'aspect classique du rein d'enfant, avec les
lobules rénaux bien dessinés et la substance corticale très
développée ; on ne trouve pas de glomérules encore en voie de
formation sous la capsule. Il n'y a pas de lésions scléreuses,
mais toutes les cellules du parenchyme sont graisseuses, non
pas distendues comme celles du foie, mais infiltrées de fines
gouttes de graisse, et elles se colorent d'une façon intense par
la teinture d'orcanette.
Utérus et ovaire. - Comme il est habituel à cet âge, l'utérus
contient peu de fibres lisses, le col en est dépourvu. Les
ovules sont très peu abondants dans le stroma ovarien. A part
cette rareté des ovules, l'aspect et le volume des organes rap-
pellent ce qu'on constate chez les petites filles, de la naissance à
deux ans.
2° Cerveau. - L'examen a porté sur un fragment du cerveau
pris au milieu de la frontale ascendante droite et sur l'un des
lobes latéraux du cervelet, les coupes montrent un développe-
ment assez marqué des capillaires qui sont élargis ; les cellules
névrogliques sont relativement abondantes. La substance
blanche paraît parsemée de corps granuleux, mais cet aspect
est dû à ce que la myéline a été convulsionnée par suite du
long séjour de la pièce dans l'alcool. Le stroma névroglique
paraît nettement fibrillaire, surtout dans les portions les plus
superficielles de Fécorce. Les grandes cellules pyramidales et
les moyennes sont allongées ; beaucoup sont presque complè-
tement fusiformes, mais nulle part on ne constate de pigmen-
tation semblable à celle qu'a décrite M. Fletcher Beach, ni de
vacuolisation. Dans le cervelet la couche granuleuse est
extrêmement riche en cellules ; les grandes cellules de Pur-
kinje sont très nombreuses et ne paraissent pas non plus
altérées. En tout cas, elles ne sont pas pigmentées.
En résumé, il est difficile d'apprécier des altérations quan-
titatives des cellules pyramidales sur le cerveau d'un enfant
IDIOTIE llLYb01·;Ui : IIAT1;USU. 99
si jeune. Quant aux altérations qualitatives, elles sont très peu
marquéos. Les lésions des fibres à myéline dans la couche
corticale, dans les faisceaux descendants do la substance grise,
et dans la substance blanche, n'ont pu être étudiées à cause du
long séjour des pièces dans l'alcool.
Analyse d'une portion de la peau, faite par M. RÉQUIER,
pharmacien en chef de l'asile de Villejuif. Résultats pour
cent grammes de substance (1) :
100 CLINIQUE.
une arrière-grand'mère maternelle qui a succombé à un
cancer de la face ; une hémiplégie chez la grand'mère ;
la folie chez un arrière-grand-pèrc ; enfin la tuber-
culose chez le grand-père, un arrière-grand-père, un
oncle et une tante. Des deux côtés, le terrain était mau-
vais et tout pouvait faire prévoir un produit défectueux.
Les phénomènes de cachexie pachydermique : état
cireux de la peau, épaississement de la langue, des
mains et des pieds, et les caractères particuliers de la
voix ont été remarqués dès les premiers mois de
l'existence ; mais ce n'est qu'à huit mois, après des
convulsions, qu'on a noté la présence d'une hernie
ombilicale et le volume exagéré du ventre.
RESUME NOSOGR : 11'IIIQUE.
Synonymie. Idiotie crétinoïde. - Idiotie avec
cachexie pac/n/dernuque. Crétinisme sporadique.
- Pachydel'mie crétinoïde. - Idiotie myxoedé-
mateuse.
Causes. - L'idiotie myxccdémateuse est due à l'ab-
sence congénitale de la glande thyroïde. Parfois,
peut-être, est-elle aussi produite par des lésions pa-
thologiques de cette glande survenues durant les pre-
mières années de la vie. Quelles sont les circonstances
qui, dans les antécédents des parents, sont capables
d'expliquer ce vice de conformation ? C'est ce que nous
allons essayer de rechercher sans grand espoir d'arriver
à une solution précise. Malheureusement, en effet, la
tâche déjà ardue en elle-même est encore rendue plus
difficile par l'absence de renseignements suffisants dans
les observations de quelques-uns des auteurs.
La consanguinité n'a été relevée qu'une seule fois
et, dans ce cas, elle était compliquée d'alcoolisme chez
les deux grand'mères du malade, qui étaient soeurs.
Elle faisait défaut dans les 24 autres cas.
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 101
Les impressions vives, éprouvées par la mère durant
la grossesse et susceptibles de troubler la nutrition du
foetus, n'ont été consignées que dans 4 de nos 25 obser-
vations.
L'alcoolisme semble exercer une certaine influence.
M. Fletcher Beach l'a noté 2 fois sur 8. M. Langdon
Down attribue la maladie à l'intoxication alcoolique de
l'un ou des deux conjoints au moment de la procréation.
Nous ne l'avons trouvé mentionné que dans 3 de nos
observations et encore dans l'une d'elles il n'existait
pas chez les père et mère, mais chez les 2 grand'-
mères.
La tuberculose pulmonaire paraît jouer un rôle im-
portant. Nous l'avons rencontrée chez le père, la mère,
une soeur et une tante du malade de 1'OBSERVATION X
(le`' mémoire) ; - chez le père de deux autres (OBs. VI
et VII ci-dessus) ; - chez la mère d'un quatrième (O>3s. V
du 1 CI' mém.); chez une grand'mère et 8 oncles ma-
ternels (Cas. V ci-dessus) ; chez 1 bisaïeul, 1 grand-
père et plusieurs oncles ou tantes maternels (Of3s. VIII
ci-dessus). - Le cancer est cité chez les ascendants de 4
malades, etc. Les pères de 3 autres (OBS. IV, V et VIII
ci-dessus) ont été atteints de fièvres intermittentes.
Nous devons noter aussi l'existence d'une malformation
de l'un des bras chez le père du Pacha (Cas. VI du 1er mé-
moire) ; celle d'un éléphantiasis delà jambe chez le père
d'une autre malade(OBS. IV du2" mém.). Quant au goitre,
il n'est mentionné qu'une seule fois (OBS. VI, 1r mém.) et
encore s'agissait-il d'une cousine au quatrième degré. Nos
malades appartiennent tous à des pays où le goitre ne se
voit pas à l'état endémique. Enfin, dans les antécé-
dents de famille de la majorité des idiots myxoedéma-
teux sur lesquels nous possédons des renseignements
un peu détaillés, nous avons trouvé des névropathes en
grand nombre : aliénés, apoplectiques, hystériques,
migraineux, etc.
Sexe et nationalité. Des 25 malades dont nous
102 CLINIOUE.
avons l'observation, 10 appartiennent au sexe masculin
et 15 au sexe féminin. Sous le rapport de la nationa-
lité, ils se répartissent ainsi : 7 anglais, 1 belge.
2 espagnols, 14 français, 1 suédois.
Début. - D'une façon générale, il semble que tant
que dure l'alimentation lactée, les symptômes du
myxoedème échappent à l'attention des parents, soit
parce qu'ils sont absents, soit parce que, en réalité, ils
sont peu prononcés. Souvent, ils ne s'en aperçoivent
qu'après une fièvre éruptive, des convulsions ou un trau-
matisme. Mais, suivant nous, un ceil exercé peut les
constater dans le cours de la première année, sinon
dans les premiers mois de la vie.
Symptômes. - Un fait extrêmement frappant, c'est
que tous les malades atteints d'idiotie myxoedémateuse
ont entre eux la plus grande ressemblance : qui en a vu
un, les a vus tous. On est là, au moins jusqu'à présent,
en présence d'un ensemble de symptômes qui se montre
toujours identiquement le même.
Tous offrent un arrêt de développement intellectuel,
l'idiotie à des degrés divers, - et un arrêt de déve-
loppement physique, le nanisme avec des troubles
profonds de la nutrition.
La tête est en général volumineuse en arrière et
rétrécie en avant. Le front est bas, étroit et déprimé
latéralement. La fontanelle antérieure persiste, même
chez des sujets ayant dépassé la trentaine. Les cheveux
sont gros, rudes, semblables à des crins, d'une couleur
d'un brun ou d'un blond-roux, d'ordinaire abondants,
sauf en avant, au-dessus des tempes. Le cuir chevelu
est le siège d'une éruption eczémateuse qui résiste aux
soins de propreté les plus minutieux.
La physionomie exprime l'apathie, l'hébétude, la
laideur ; vue de profil, elle est encore plus hideuse, car
le prognathisme s'accuse davantage. Les paupières
bouffies, pâles, bleuâtres, cachant plus ou moins les
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 103
globes oculaires, sont atteintes de blépharite ciliaire.
Le nez est toujours camus, quelle que soit d'ailleurs la
forme du nez des parents. Les joues sont gonflées,
pendantes, comme tremblotantes. La bouche est grande,
Les lèvres, dont la portion cutanée est bleuâtre, sont
épaisses, l'inférieure souvent renversée. La langue,
augmentée dans toutes ses dimensions, se montre
presque toujours au dehors. Les dents, irrégulièrement
implantées, sont cariées ; la seconde dentition reste
incomplète ou ne s'opère qu'à un âge très avancé. Le
menton est petit, parfois même, on dirait qu'il a été
écrasé jusqu'au bord de lalèvre inférieure. Les oreilles
ne nous ont pas offert de malformations, mais elles sont
épaissies, d'une pâleur cireuse, d'aspect oedémateux,
sans conserver toutefois, ainsi que les paupières, les
mains, etc., l'empreinte du doigt qui les comprime.
Le cou est gros, court, et la tête semble s'enfoncer entre
les deux épaules. L'examen le plus attentif pratiqué sur
le vivant ne permet pas de découvrirla glande thyroïde.
Des masses pseuclo-liporzateuses, mal délimitées, par-
semées de ganglions légèrement hypertrophiés, s'ob-
servent constamment dans les creux sus-claviculaires,
dans les aisselles, quelquefois dans d'autres régions.
Le thorax offre d'ordinaire des déformations portant
sur les dernières côtes, déjetées en dehors, et la colonne
dorsale plus ou moins déviée. Le dos est voûté.
Le ventre, très gros, très large, rappelle l'aspect du
ventre des batraciens. Il existe à peu près toujours des
hernies soit ombilicales, soit inguinales. Le bassin est
rétréci.
Les organes génitaux sont, dans la plupart des cas,
sinon dans tous, arrêtés dans leur développement. Les
testicules paraissent descendre tardivement et restent
petits. Les grandes et les petites lèvres n'acquièrent
jamais les dimensions normales.
Les membres supérieurs et inférieurs sont gros,
courts et offrent d'habitude des incurvations rachU
104 CLINIQUE.
tiques. Leurs articulations sont parfois noueuses. Les
mains et les pieds sont souvent cyanosés, ramassés,
épais, présentent, en un mot, l'aspect pachydeT-
mique.
La peau, glabre, blanche, sèche, rugueuse, ichthyo-
sique par place, est chez tous le siège d'une éruption
eczémateuse assez étendue. A la face, elle est un peu
jaunâtre, cireuse, analogue, dans une certaine mesure,
à celle des cachectiques.
La digestion s'effectue d'une façon assez régulière.
Les troubles qu'on observe de ce côté, s'ils sont cons-
tants, sont d'ordinaire légers. L'appétit est très modéré ;
souvent ces malades ont de la répugnance pour la
viande. La mastication est insuffisante. Les selles sont
rares, la constipation habituelle, d'où la présence fré-
quente d'hémorrhoïdes.
La respiration chez beaucoup d'idiots myxoedé-
mateux est gênée. Ils s'essoufflent rapidement. L'haleine
est désagréable. Le pouls est petit, fréquent ; les ex-
trémités et les lèvres sont cyanosées. La température
centrale est;au-dessous du chiffre normal, d'où une vive
sensibilité au froid.
La sécrétion urinaire et la miction nous ont paru
normales. La sécrétion sudorale, au contraire, s'est
toujours montrée imparfaite. Jamais nous n'avons vu
nos malades suer, même au moment des plus fortes
chaleurs. Tous ont la voix rauque, aigre, stridente, en
quelque sorte pathognomonique-. Leur démarche est
pesante, accompagnée d'un balancement latéral, d'une
sorte de dandinement; ils ont la plus grande répu-
gnance au mouvement.
La puberté ne vient jamais. La barbe fait toujours
défaut ; il n'y a pas de poils sous les aisselles ni sur le
pénil. C'est tout au plus si on trouve, soit sur les grandes
lèvres, soit sur les côtés de la verge, un bouquet de
quelques poils. Les règles n'apparaissent pas ou se sus-
pendent après avoir paru une ou deux fois ; les seins
' IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 105
demeurent absolument rudimentaires ou sont peu volu-
mineux ; les appétits sexuels sont nuls ; l'onanisme, si
commun chez les idiots ordinaires, n'a été signalé chez
aucun de ces malades.
La sensibilité générale est normale. Il parait en
être de même de la sensibilité spéciale, autant du
moins que l'état intellectuel des malades permet d'en
juger. La parole est généralement très limitée. Un
seul de nos malades parle couramment.
Sous le rapport de l'intelligence, tous ces malades
relèvent de l'idiotie. Un seul pourrait être rangé parmi
les imbéciles (1). Chez aucun d'eux, toutefois, nous
n'avons observé les caractères de l'idiotie profonde, tels
qu'ils se rencontrent par exemple dans l'idiotie sympto-
matique de méningite, de sclérose ou d'un arrêt de dé-
veloppement congénital du cerveau. Ils n'ont pas de
tics, ne grimacent pas, ne se balancent pas, ne grincent
pas des dents, ne poussent pas de cris, n'ont pas de
salacité. Ils sont susceptibles d'attention, ils ont de la
mémoire à un certain degré ; ils deviennent propres,
apprennent à manger à peu près seuls, à s'habiller, se
laver. Leur caractère est doux ; ils semblent suscep-
tibles d'affection.
Maladies lrcltcul3r3rrl·Js.-Nous devons mentionner
les convulsions, l'érysipèle, la bronchite, les hémor-
1'houles et la chute du rectum. D'autres affections, qui
se montrent fréquemment chez les idiots myxoedémateux,
en constituent, à notre avis, plutôt des symptômes que
des complications ; telles sont les manifestations lym-
phatiques ou scrofuleuses (impétigo, eczéma, blépha-
rites, kératites, etc.), les déformations rachitiques, les
hernies, inguinales et surtout ombilicales.
(1) Il s'agit de Gr... (Emile), dont nous avons publié l'observa-
tion dans le compte rendu de Bicêtre pour 1886, p. 11 et dans les
Archives cle Neurologie 1886, tome XII, p. 145. Bien qu'âgé de
32 ans, la fontanelle antérieure persiste encore.
lOG CLINIQUE.
Maladies terminales. Les malades dont nous
avons réuni les observations ont succombé : 2 à des
érysipèles compliqués d'autres affections; 2 à des con-
vulsions; 4 à des congestions pulmonaires avec ou
sans bronchite ; 1 à une péricardile; 1 à une néphrite
interstitielle; 2 au marasme ( ? ). 1
Anatomie ET physiologie pathologiques. - Le fait
qui domine la situation c'est, à notre avis, l'absence
de glande thyroïde. C'est à lui que nous rattachons
non seulement l'idiotie, mais encore les modifications
de la voix, les manifestations scrofuleuses, les défor-
mations rachitiques, la persistance de la fontanelle
antérieure, le nanisme, etc. D'où il résulte que la glande
thyroïde exercerait une action très importante sur la
nutrition générale et en particulier sur 'celte du cer-
veau dont les circonvolutions ont un aspect gélatini-
forme rappelant celui du cerveau des nouveau-nés (1).
Le défaut d'action de la glande thyroïde se traduit
pour le système osseux parla persistance delà fontanelle
antérieure, le nanisme et les déformations rachitiques
(rachis, thorax, os des membres). En ce qui concerne la
peau et le tissu cellulo-adipeux, elle se manifeste par
des éruptions diverses, une coloration toute particulière,
le relâchement des anneaux ombilicaux et inguinaux,
une diminution de la fonction sudorale, un état de
mollesse spécial et une hypertrophie du tissu adipeux,
surtout dans certaines régions.
Le rôle capital que nous faisons jouer à l'absence de
la glande thyroïde trouve un appui dans la constatation,
à l'autopsie des adultes atteints de cachexie pachyder-
mique, de lésions sérieuses de la glande thyroïde et
dans l'apparition de tous les symptômes de la cachexie
pachydermique chez les sujets auxquels on a pratiqué
(1) Dans un certain nombre de cas d'idiotie, autres que l'idiotie
myxoedémateuse, nous n'avons pas trouvé d'autres lésions que cet
aspect foetal du cerveau.
IDIOTIE MYXOEDÉMATKUSE. ]07
la thyroïdectomie complète (myxoedème opéra-
toire) (1). Si dans le myxoedème des adultes et le
myxoedème opératoire, on n'observe pas des symptômes
physiques et intellectuels aussi accusés que ceux
qu'offrent les idiots myxcedémateux, c'est que la lésion
pathologique (cachexie pachydermique des adultes) ou
l'opération chirurgicale (myxoedème opératoire) inter-
viennent alors que le corps s'est développé, que les
circonvolutions cérébrales ont atteint leur volume nor-
mal et leur conformation régulière.
Enfin, la physiologie vient confirmer notre opinion
en montrant l'apparition de la cachexie pachydermique
chez les singes auxquels on enlève la glande thyroïde
(expériences de Horsley) et l'absence de cette maladie
chez les animaux auxquels on pratique la thyroïdectomie
en même temps qu'on greffe sous le péritoine des mêmes
animaux une glande thyroïde empruntée à des moutons
(expériences de Schiff) (2). w
En résumé, les faits fournis par la clinique médicale
et par la clinique chirurgicale, ainsi que les expériences
des physiologistes, nous paraissent confirmer la]3ai/io-
clénie que nous avons donné de l'idiotie myxoedématcuse.
Diagnostic. - L'idiotie est aisément reconnue et
ne peut être confondue avec aucune autre affection. La
lecture des observations que nous avons rapportées et
du résumé nosographique que nous avons tracé d'après
elles, montrent combien l'idiotie iii 9 xoedémiteuse
diffère des autres formes de l'idiotie : la présence chez
(1) Dans notre mémoire de 1886, nous avons consacré tout un
chapitre à la Cachexie pachydermique opératoire, et, les faits en
main, nous avons démontré que c'est à M..T. lteverdin, de
Genève, que revient le mérite de les avoir le premier signalés. Si
nous insistons sur ce fait, c'est parce que certains auteurs en attri-
buent la découverte à Kocher. Or, ce n'est que six mois après
M. Revcrdin (4 avril 1883) que ce dernier auteur a communiqué
son travail au Congres de chirurgie de Berlin.
(2) Nons avons donné un résumé des travaux de M. Horsley et
de M. Schiff, dans notre premier mémoire.
108 . CLINIQUE.
ces malades et leur absence chez les autres des symp-
tômes qui caractérisent la cachexie pachydermique
rend la tâche des plus faciles.
Mais où peuvent surgir les difficultés, c'est quand il
s'agit de distinguer les idiots myxoedémateux des cré-
tins. Personnellement, nous manquons d'expériences
sur ce point. Nos visites à l'asile de Saint-Robert, près
Grenoble, et à l'asile de Bassens, près Chambéry, ont
été infructueuses. Si nous y avons rencontré des idiots
et des imbéciles, nous n'y avons pas trouvé devrais
crétins. Nous sommes donc obligé de nous en rapporter
aux descriptions des auteurs et, dès le début, nous
sommes amené il constater que les éléments les plus
indispensables vont nous faire défaut. C'est qu'en effet
les auteurs sont loin de s'entendre sur ce qu'il faut en-
tendre par crétinisme et que, suivant la remarque de
l'un des savants qui ont le mieux étudié le crétinisme,
M. Baillarger, «l'examen microscopique, parait encore
entièrement à refaire (1) ».
La plupart des auteurs considèrent le crétinisme
comme une variété de l'idiotie (Pinel, Fodéré, Esquirol,
Georget, Rcesch, Massei, Stahl, etc.). D'autres, comme
Guggembuhl, Seguin, Ferrus, etc., regardent le créti-
nisme comme une maladie tout à fait différente de l'i.
diotie. « Au point de vue pathologique, écrit Ferrus,
les crétins sont tellement distincts des idiots qui se ren-
contrent au milieu des populations saines, qu'il est in-
dispensable de tracer entre eux une ligne de- démarca-
tion profonde et qu'il serait impossible de les confondre
dans une classification rigoureusement scientifique ».
Suivant lui, la principale différence consisterait en ce
que « il se développe chez les crétins une diatlzèse, une
cachexie, un état constitutionnel anormal, auxquels
toute l'économie participe, diathèse qui présente un
caractère si tranché et des traits tellement spéciaux
(1) Dict. encycl. des Sciences méd., art. Crétin, Crétinisme.
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 109
qu'il faut, de toute nécessité, la nommer Cl'ét111eüsC
pour atteindre et fixer la réalité (1) ».
Les crétins descendent toujours des goitreux; « la
très grande majorité d'entre eux ont un goitre très vo-
lumineux, qui, tantôt▶ est congénital, ◀tantôt▶ ne se déve-
loppe que plus tard et qui, en général, prend un accrois-
sement plus considérable à l'époque de la puberté; il
est très rare qu'on n'en trouve pas de trace ».
Les idiots 1nyxoeclémateux ne proviennent jamais
de goitreux, autant que nous sachions; ils n'ont pas de
glande thyroïde et partant point de goitre.
« Bien peu de crétins, d'après la Commission Sarde
(p. 48), présentent la dégénération du tissu osseux,
comme cela a lieu pour les rachitiques ». Cette dégéné-
ration, au contraire, nous a paru fréquente chez les
idiots myxccdémateux.
Le crétinisme se rattache suivant Ferrus à des dispo-
sitions'générales de l'économie. M. Baillarger exprime
la même idée lorsqu'il dit que l'arrêt de développement
porte simultanément sur le cerveau et sur l'ensemble
de l'organisme. L'idiotie, au contraire, est due à des
lésions ou à un arrêt de développement du cerveau. A
cet égard, les idiots myxccdémateux pourraient être
rapprochés des crétins, car, chez eux, l'organisme tout
entier est atteint. Au dire de Ferrus, le crétinisme peut
être avantageusement modifié par le changement de
lieu, de régime et d'habitudes. Ces influences sont sans
effet dans l'idiotie myxoedématcuse.
Les crétins atteignent rarement la cinquantaine et
on ne cite que des exemples tout à fait isolés de crétins
arrivés à soixante ans ou au delà. Sous ce rapport, les
idiots myxoedémateux paraissent ressembler aux cré-
tins ; mais il convient de faire remarquer que cette ré-
duction de la durée de la vie est à peu près la règle
chez tous les idiots.
(1) Ferrus. Mémoire sur le Goitre et le Crétinisme ; Paris,
1851, p. 59.
1110 CLINIQUE.
Los vagues notions d'anatomie pathologique que nous
possédons peuvent être ainsi résumées : Ossification
tardive des os du crâne, persistance des fontanelles;-
dure-mère épaisse, adhérente; - augmentation du li-
quide céphalo-rachidion, cerveau asymétrique; - cer-
velet très petit, irrégulier, asymétrique; présence
d'un goitre, articulations grosses, colonne vertébrale
et membres déviés. Dans cette énumération que nous
empruntons à M. Baillarger, nous trouvons des lésions
qui se rencontrent également dans l'idiotie myxoedéma-
teuse ; la persistance des fontanelles, l'épaississement
do la dure-mère et les déviations rachitiques du rachis
et des membres. Par contre, le liquide céphalo-rachi-
dien n'est pas augmenté; le cerveau est symétrique;
le cervelet a un volume normal. Nous avons essayé,
dans le tableau qui suit, de résumer comparativement
les symptômes du crétinisme et de l'idiotie myxoedé-
mateuse.
Crétinisme.
Tête écrasée d'avant en ar-
rière, large à la base, rétrécie
vers le sommet, souvent asymé-
trique, d'où l'aspect d'un cône
irrégulier (Baillarger,). Les cré-
tins ne présentent généralement
pas de protubérance occipitale.
(Commission Sarde).
Cheveux épais, très fournis,
courts, presque toujours d'un
châtain sale. La calvitie ne se
produit guère chez les crétins et
leurs cheveux ne blanchissent
amais.
Idiotie mycoclémateiese.
Tête longue, écrasée du front
au verlex, large à la base et
carrée, asymétrique ; protu-
bérance occipitale offrant un
développement à peu près
normal.
Cheveux gros, rudes, longs,
bruns ou blonds roux, calvitie
partielle.
Peau de la face et du corps glabre.
Aspect trapu, ramassé, massif, lourd et épais.
Tête penchée sur l'épaule ou Tête penchée.
la poitrine.
Physionomie stupide, bestiale. Phys. apathique, bestiale.
Paupières oedématiées. Faux oedème des paupières,
des joues, des oreilles.
IDIOTIE 'i1Y.OEDÉâIATEIJSE.
111
Crétinisme.
Idiotie tTH/xoeuë)na<euse.
Nez épaté, lèvres épaisses, bouche cntr'ouvcrte, dentition tardive,
langue très volumineuse.
Strabisme fréquent, insensi-
bilité rétinienne. B1éph. ciliaire.
Oreilles écartées et épaisses.
Lèvre inférieure pendante.
Bave.
Mâchoire inférieure débor-
dant la supérieure.
Mastication nulle.
Pas de pseudo-lipomes des
joues, des creux sus-clavicu-
]aires, des aisselles, etc. ; pas
de cachexie pachydermique.
Cou très gros et très court ;
goitre.
Pas de strabisme; sensibilité
rétinienne. Bléph. ciliaire.
Oreilles parfois écartées,
jaunâtres, comme oedémateuses.
Rarement.
Non.
Non.
Mastication régulière.
Pseudo-lipome des joues, des
creux sus-claviculaires, etc.
Cachexie pachydermique.
Cou très gros et très court,
pas de goitre.
Thorax déformé.
Seins petits (crétine), volum.
et pendants (semi-crétines).
Ventre très gros et ballonné.
Organes génitaux rudimen -
taires (crétin) ; ou d'un volume
énorme (semi-crétin).
Membres inférieurs et supé-
rieurs disproportionnés , ex-
trêmement courts ou très longs,
décharnés, par points enflés et
déformés au niveau des articul.
Mains larges, doigts courts et
épais, ongles rudimentaires.
Pieds volumineux, plats ;
orteils déformés chevauchants
les uns sur les autres.
Surdité.
Odorat obtus.
Goût dépravé.
Sensibilité générale obtuse.
Indifférence à la température.
35 à 36°. Voracité très pro-
noncée. Salacité. Selles quoti-
diennes ou diarrhées. Gâtisme.
Salives et larmes abondantes.
Sécrétions urinaires nor-
males.
Absence de désirs vénér. (cré-
tin) ; Exagération ; Onanisme;
Absence de pudeur (semi-crét.).
Seins nuls ou petits.
Ventre très gros et très large,
hernie ombilicale non inguinale.
Organes génitaux en général
atrophiés.
Pas de surdité.
Odorat paraissant normal.
Goût normal.
Sensibil. génér. conservée.
Vive sensibilité au froid.
36°,5, 37°. Appétit médiocre.
Choix des aliments. Constip.
Propre,susceptil)le de le devenir.
Non.
Sécrétions urinaires plutôt
diminuées.
Absence de désirs vénériens,
pas d'onanisme, pudeur.
112 CLINIQUE.
Crétinisme.
Idiotie m¡j.\ : oedumateusc.
Rachitisme et Scrofule.
Dysenterie, gastro-entérite,
méningite, hydrocéphalie, affec-
tions convul., surtout cpilep. ;
congest. et apopl. cérébr., tu-
herculoses et iliect. du coeur.
Inaptitude à la marche. Etal
semi-paralytique ou paralyl.
Absence de besoins.
Sentiments affectifs nuls.
Non.
Marche lourde. Mouvements
lents; possibilité d'une marche
même assez longue.
Conscience des besoins.
Conservés.
Mémoire relativement développée ; caractère en général doux.
Amour de la solitude. Accès
de stupeur. Mutisme ou voca-
bulaire très restreint. Voix,
rien d'indiqué.
Non. Non. Vocabulaire res-
treint ou parole assez libre.
Voix aigre, rauque, stridente.
Pronostic. - Des 25 malades dont nous avons rap-
porté l'observation, 12 sont morts : 2 clans la première
année, 2 à cinq ans, 1 à sept ans, 1 vers douze ans, 1 à
quinze ans, i à dix-sept ans, 1 à vingt-quatre ans, 1 à
trente et un ans, 1 à trente-deux ans, le dernier à trente-
quatre ans. Il semblerait en résulter que les idiots myx-
oedémateux ont en général une vie très courte. Ajoutons
qu'ils sont susceptibles d'être sennsiblement améliorés.
Traitement. - Il comprend les moyens médicaux
et pédagogiques. Parmi les premiers, nous citerons
l'usage des toniques (fer, quinquina), des antiscrofuleux
(sirop antiscorbutique, de raifort iodé, huile de foie de
morue, etc.), les bains salés, l'hydrothérapie, la gym-
nastique.
Quant aux moyens pédagogiques spéciaux, ils em-
brassent en quelque sorte tous ceux que nous employons
dans l'éducation des idiots, depuis les exercices destinés
à apprendre à se tenir debout et à marcher, jusqu'à l'en-
seignement primaire et professionnel.
ENCEPHALITES CHRONIQUES DE L'ENFANCE
II.
Contribution à l'étude des lésions histolo-
giques de la substance grise dans les
encéphalites chroniques de l'enfance ;
Par A. P1LCJBT,
Interne des Hôpitaux, aide-préparateur d'histologie à la Faculté de médecine.
L'histoire des lésions chroniques de l'encéphale a
été très longue à établir au point de vue histologique
à cause des difficultés de technique que l'ou rencon-
trait d'une part et surtout à cause de la difficulté de
rencontrer un assez grand nombre de pièces compa-
rables; les malades étant presque tous hospitalisés
dans des asiles spéciaux. Aussi avons-nous été heureux
de pouvoir passer une année comme interne dans le
service de M. le Dl' Bourneville à Bicêtre et de pou-
voir, grâce à son obligeance, mettre à profit sa col-
lection où tous les cerveaux sont gardés dans un état
suffisant de conservation. C'est une partie du résultat
des recherches ainsi faites, que nous apportons au-
jourd'hui.
Nous ne parlerons que des lésions de l'enfance, et
BOUII11EVILLE, Bicêtre, 1889. 8
'114 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
parmi celles-ci, des plus accentuées, telles que la
méningo-encéphalite ou l'atrophie des circonvolu-
tions. Et parmi celles-ci nous laisserons de côté les
scléroses lobaires, les scléroses tubéreuses, étudiées
dans ces derniers temps par Bourneville et Brissaud,
Jendrassick et Marie, Pozzi, Richardière. Nous nous
sommes en effet attaché aux lésions qui laissent en
place les circonvolutions, et se traduisent à l'oeil nu par
les adhérences méningées plus ou moins fortes; l'amai-
grissement des circonvolutions ; leur état chagriné et
ratatiné, marronné, même, la présence de petits
kystes à leur surface et dans leur épaisseur.
Ces lésions se traduisent cliniquement par l'idiotie,
le gâtisme, les tics, les convulsions dans les premières
années de la vie et, très souvent, l'épilepsie dès quatre
ou cinq ans. C'est à ce type que peuvent se rattacher
le plus grand nombre des malades de Bicêtre.
Aussi, renvoyant aux descriptions classiques de
Falret, Delasiauve, Bourneville, pour la partie cli-
nique, nous nous bornerons à indiquer sommairement
le diagnostic du malade et son âge. Les observations
conservées à Bicêtre seront facilement retrouvées
avec ces renseignements; nous nous bornerons ici à
l'anatomie pathologique. Quelques-uns des examens
qui suivent ont, d'ailleurs, été publiés à la suite des
observations cliniques correspondantes dans les Bul-
letins de la Société anatomique.
Nous n'avons pas fait non plus un travail de topo-
graphie cérébrale; et cela pour deux raisons ; la pre-
mière et la plus importante c'est que les lésions étant
absolument diffuses, comme dans les démences où la
paralysie générale a son terme, une telle recherche
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 115
serait impossible; la seconde, c'est que tous les cer-
veaux du service du D1' Bourneville sont fixés dans
l'alcool, ce qui présente de grands avantages au point
de vue de la longue conservation des pièces et de leur
reproduction photographiques. Mais dans ces pièces, les
fibres à myéline de la surface de l'écorce et celles de la
substance grise ne sont plus décelables par les réactifs
ordinaires, chlorure d'or, ou hématoxyline de Weigert,
on ne peut donc faire l'étude des filets nerveux ; on est
réduit à celle de la substance grise en général, que
l'alcool fixe assez bien. Nous nous sommes assuré, par
un certain nombre d'examens comparatifs, que les cer-
veaux traités par l'alcool, bien que ne valant pas ceux
qui sortent des bichromates alcalins, permettent cepen-
dant l'étude de l'écorce, à part quelques points sur
lesquels nous reviendrons. L'alcool, comme les autres
réactifs, détermine deux réactions distinctes dans les
cellules pyramidales de l'écorce; les unes s'entourent
d'un large cercle clair; les autres se resserrent et se
contractent. Le rapport de ces deux ordres d'éléments
est un peu différent dans le traitement par l'alcool que
dans le traitement par le bichromate, les cellules va-
cuolisées seraient un peu plus abondantes. Mais tous
les cerveaux que nous décrivons, étant traités de même,
sont comparables entre eux.
Il est donc bien entendu que nous parlerons seule-
ment des encéphalites chroniques à petits signes ma-
croscopiques, et que dans ces cas nous envisagerons,
sans nous occuper de topographie, les lésions de
l'écorce grise seulement; celles du moins que nous
pourrons apercevoir, étant donnés les réactifs employés.
Les différents procédés techniques auxquels nous avons
416 ENCEPHALITES CHRONIQUES.
eu recours ont été les plus simples possibles; ils seront
indiqués chacun à sa place;
. N'ayant pas fait d'étude clinique, et apportant sim-
plement quelques faits, nous n'avons pas cru devoir
allonger par un historique ce mémoire; nous indique-
rons seulement à sa suite une liste des principaux ou-
vrages d'anatomie normale et pathologique dont nous
avons eu à nous servir; ce sont surtout, en pathologie,
les mémoires ayant trait à la paralysie générale pro-
gressive qui nous ont servi, cette maladie étant ac-
tuellement la mieux étudiée au point de vue anatomo-
pathologique, de toutes les maladies de l'encéphale.
Il ne nous reste plus maintenant qu'à exposer com-
ment on arrive à lire une coupe de l'écorce grise, et
c'est là un point d'une extrême importance. En effet,
sans repères précis, il est impossible de reconnaître
une lésion diffuse même étendue; et, ces repères, il
les faut chercher dans la structure normale de l'écorce.
On n'en peut trouver de comparables à l'espace porte
pour le foie, à la bronche centrale d'un acinus pour
le poumon, mais pourtant il est possible de se retrou-
ver assez bien dans les différentes couches de la subs-
tance grise, surtout si l'on emploie dès le début les
faibles grossissements. Nous indiquons tous ces détails
parce qu'ils peuvent avoir leur importance dans la
constitution d'une méthode d'examen de l'écorce, ce
qui manque actuellement.
On peut considérer l'écorce grise sous deux plans :
le premier parallèle à la surface des cironvolutions,
le second perpendiculaire au premier. Dans le pre-
mier plan, les couches sont étagées au nombre de
cinq, d'après le schéma donné il y a dix-huit ans par
LÉSIONS HISLOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 41Î
Meynert dans le manuel de Stricker. Malgré les tra-
vaux de quelques auteurs qui battent en brèche ce
schéma (Luys, Golgi), nous l'adopterons comme le
plus commode et le plus universellement adopté
(Bevan Lewis, Ch. Bastian, H. Clarke, Ranvier).
On sait, et nous le résumons ici d'après la psychia-
trie de Meynert, que les cinq couches de l'écorce sont
les suivantes : la première, composée du tissu fonda-
mental névroglique, avec ses éléments cellulaires,
parsemé de petites cellules nerveuses peu abon-
dantes, présente par le procédé d'xner (acide os-
mique et ammoniaque) de très fines fibres à myéline,
sans étranglements annulaires, d'après Ranvier. Ce
réseau de fibres est altéré dans la paralysie générale,
au dire de Tuczek, confirmé par les recherches sui-
vantes, celles de L. Edinger entre autres. Nous n'avons
pu rechercher cette lésion qui pourtant existe presque
à coup sûr dans les cas de méningo-encéphatite avec
adhérences. Cette couche est, surtout chez les jeunes
sujets, séparée de la suivante par une ligne de dé-
marcation extrêmement nette; nous verrons qu'il n'en
est pas toujours de même dans les faits que nous avons
regardés. Celle-ci est la couche des petites cellules
pyramidales qui sont serrées, à pointe dirigée vers la
surface corticale.
Dans la couche suivante, les cellules pyramidales
sont moyennes (40;a) elles ne sont plus serrées, mais
orientées en colonne, les unes au-dessus des autres,
parce que les faisceaux de fibres de la couronne de
Reil qui vont jusqu'à la couche supérieure s'inter-
posent entre elles et les séparent. Ces éléments font
place aune couche distincte, celle des grandes cellules
118 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
pyramidales; visibles surtout dans les régions motrices
et dans la corne d'Ammon où elles sont énormes,
mais existant dans toute l'écorce. Meynert ne fait
qu'une même couche de la zone des cellules pyrami-
dales moyennes et de celle des grandes cellules;
pourtant nous les avons séparées dans les descriptions
qui suivent, à cause de la grande hauteur de la cou-
che des cellules moyennes, qui occupe près du tiers de
la substance grise, et s'accroît encore dans le lobe occi-
pital par l'interposition d'une couche de cellules.
Puis viennent les quatrième et cinquième couches
de Meynert que l'on peut facilement réunir en une;
c'est la zone de transition entre la substance grise
la substance blanche, assez difficile à débrouiller à
cause de l'épanouissement des faisceaux de fibres et
de la substance blanche, qui s'écartent les uns des
autres à ce niveau pour pénétrer dans la substance
grise. Elle renferme à sa partie supérieure de petites
cellules rondes qui n'ont pas encore été comme les
cellules correspondantes de la même couche du cer-
velet divisées en deux espèces, c'est la couche gra-
nuleuse ; à sa partie inférieure des éléments fusi-
formes.
Voici donc l'écorce étagée pour nous. Mais ce n'est
pas assez pour la topographie des lésions; et il faut
pouvoir donner ces cinq nappes superposées dans le
sens vertical, pour diviser l'écorce en autant de
petites cases qui fourniront des points de repère fixes.
Pour cela, nous n'avons qu'à profiter de la disposition
normale des faisceaux de fibres qui montent dans la
substance grise, et qui s'aperçoivent très suffisamment
sur les pièces traitées par l'alcool. Ces faisceaux se
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 1119
divisent, au niveau de la cinquième couche, comme
ceux d'un goupillon d'église, et montent en s'amincis-
sant jusqu'à la deuxième couche. Ils forment autant
de colonnes fibrillaires qui séparent les éléments de la
substance grise, qui, eux, s'organisent naturellement
dans les intervalles en colonne de cellules; en voyant
leurs fibres aux faisceaux qui leurs sont contigus.
Cette disposition est plus marquée naturellement dans
la profondeur de la substance grise, là où les faisceaux
sont plus gros, et c'est pourquoi les grandes cellules
pyramidales se présentent souvent, comme l'a vu Betz,
en îlots, ou nids séparés les uns des autres par les fais-
ceaux blancs. Mais dans le sens de la hauteur, ces îlots ne
sont que le terme d'une colonnette de cellules rangées-
les unes au-dessus des autres et se continuant jusqu'à
la couche des petites cellules pyramidales. Dans les
couches superficielles, les capillaires pénétrant per-
pendiculairement à la surface de l'écorce ne troublent
nullement cette sériation longitudinale, ils l'accen-
tuent même puisqu'ils lui sont parallèles. On comprend
d'après cet exposé, qu'après l'examen d'un très petit
nombre de coupes, à l'aide d'un faible grossissement
qui permette d'avoir sous l'oeil toute l'épaisseur de
la substance grise, on la verra décomposé en un véri-
table quadrillage, formée par les plans .des cinq cou-
ches dans le sens horizontale, par la sériation des
cellules et les travées des faisceaux dans le sens ver-
tical. Il sera donc presque aussi aisé de préciser une
lésion diffuse et vague, caractérisée seulement par un
changement de couleur ou d'opacité de la névroglie,
qui l'est d'indiquer la place d'un pâté d'encre fait sur
une table de Pythagore. De plus, la disparition de
120 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
cette sériation dans le sens longitudinal indiquera soit
une diminution des faisceaux blancs, soit un morcel-
lement des couches, par un développement exagéré
des capillaires par exemple. Aussi avons-nous tenu
grand compte de cet aspect, que l'on nous verra souvent
indiquer. La seule chose qui le puisse troubler c'est
la présence de faisceaux blancs coupés obliquement,
mais leurs surfaces de section étagées se reconnaissent
facilement, et présentent toujours la même image.
Les premières observations que nous rapportons
sont relatives à des idiots de quatre ou sept ans; avec
les lésions de méllingo-encéphalite plus ou moins pro-
noncées. Les suivantes portent sur les idiots plus âgés
atteints de plus d'épilepsie vraie, la coexistence des
deux états est d'ailleurs fréquente. Enfin nous l'ap-
porterons une observation de sclérose -CI petits foyers
miliaires, chez un épileptique dément, et une de
kystes celluleux avec épanchements sanguins chez
un idiot; car ces lésions peuvent servir à établir une
transition entre l'atrophie de la substance grise que
nous étudions et les états plus marqués de kystes, et
de sclérose lobaires, de porencéphalies que l'on voit
également dans la catégorie de malades que nous
avons en vue.
Observation I. - Reb.... 487r-48SG, est un enfant qui à l'âge
de dix ans ne pouvait ni marcher,, ni parler, poussait seulement
des cris inarticulés passait ses journées assis sur une chaise ou
couché, ne pouvait manger seul, était gâteux, il présentait des
convulsions allant jusqu'à un véritable état de mal. 11 mourut
dans un de ces états de mal ; de broncho-pneumonie comme la
plupart des épileptiques. La congestion pulmonaire intense, le
long coma pendant lequel les malades respirent la bouche
ouverte, dans un air nosocomial sont sans aucun doute la canse
de la fréquence de cette broncho-pnenmonie. qui chez un autre
de nos malades mort dans le même cas présentait le caractère
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 121
hémorrhagique, avec un petit foyer gangreneux au centre de
chaque tache sanguine péribronchique, nous signalons ce fait en
passant, parce qu'il est comparable aux lésions expérimentale
des poumons déterminées par Traube, Schiff, etc., par la lésion
du bulbe et des pédoncules cérébraux, et parce que, récemment,
MM. Bianchi et Armanni ont signalé la même broncho-pneu-
monie, coexistant avec des lésions du pneumogastrique chez les
paralytiques généraux déments. La décortication des deux hémis-
phères fut assez facile; il existait quelques taches laiteuses de la
pie-mère ; un grand nombre de circonvolutions étaient étroites
et amaigries.
L'examen histologique a été fait au laboratoire des travaux pra-
tiques de la Faculté. Le cerveau avait été durci par l'alcool, la
moelle par le liquide de Millier; des coupes ont été faites en diffé-
rentes régions, tant à gauche qu'à droite, sur chaque hémisphère.
On s'est trouvé bien de passer quelques fragments trop mous du
cerveau dans de la gomme glycérinée et de les durcir ensuite à
l'alcool.
La première frontale gauche, à sa naissance, montre un certain
nombre de corps granuleux répandus dans la substance blanche
et qni se colorent en noir sur une coupe exposée aux vapeurs
d'acide osmique. On voit aussi de fines gouttelettes graisseuses
exister dans la substance grise. Sur des coupes colorées, on cons-
tate que la vascularisation paraît normale ; les cellules nerveuses
sont nombreuses, disposées en séries; beaucoup ont leur forme
pyramidale et des prolongements nets. En somme, les cinq
couches de la substance grise ne présentent pas des lésions
nettes; la substance blanche offre des lésions de désintégration.
Sur le milieu de cette première frontale gauche, la substance
blanche a le même aspect; les corps granuleux y sont nombreux
le tissu est sillonné par des bandes fibrillaires nombreuses qui
rayonnent dans la substance grise. Du côté de celle-ci, les lésions
sont les mêmes pour les cinq couches; la vascularisation est exa-
gérée; les capillaires au lieu de s'enfoncer tout droit dans la
substance grise s'y ramifient, la morcellent; l'aspect normal des
cellules nerveuses placées bout à bout n'existe plus dans les
couches moyennes; les cellules nerveuses, surtout dans la couche
de petites cellules pyramidales (2e couche de Meynert), sont
devenues rares ; pourtant les grandes cellules existent encore,
mais nulle part elles ne sont groupées par nids comme on les
trouve à l'état normal dans les régions motrices, ainsi que l'a
indiqué Betz; elles sont, au contraire, assez clairsemées. D'autre
part, les cellules interstitielles il petits noyaux sphériques ne pa-
raissent pas multipliées dans la substance grise, mais le sont évi-
demment dans la substance blanche.
La coupe d'une circonvolution du lobe occipital gauche à la,.
'122 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
face externe de l'hémisphère montre la substance grise un peu
réduite d'épaisseur, mais avec ses couches reconnaissables. Il
existe un certain nombre de foyers de désintégration assez pauvres
en cellules, où presque toute la trame de l'écorce grise s'est en-
levée avec les méninges, ou est tombée. Le réseau fibrillaire de la
névroglie y est apparent mais les mailles très larges de la né-
vroglie circonscrivent un grand nombre de vacuoles, d'espaces
vides, qui constituent de véritables pertes de substance. Ces foyers
interrompant la disposition des fibres nerveuses qui gagnent la
subslance blanche, comprennent en général les trois premières
couches de l'écorce. On les trouve dans la plupart des cerveaux
d'idiots; ils paraissent un début microscopique, de ce qu'ont décrit
MM. Bizzozero et Golgi sous le nom de porose cérébrale. Dans la
substance blanche, il n'y a que peu ou pas de corps granuleux,
mais une quantité considérable de petites cellules interstitielles.
L'hippocampe du côté gauche a les mêmes lésions que la pre-
mière frontale. Il existe des foyers de désintégration dans la
substance grise, des amas considérables de corps granuleux dans
la blanche. Les cellules géantes de la région sont éparses au
milieu de la névroglie, leurs dimensions sont au-dessous de celles
qu'on s'attend à rencontrer là; la ligne de grandes cellules du
corps bordant ne paraît pas altérée.
La lèvre inférieure de là scissure de Sylvius droite a aussi une
vascularisation très prononcée, beaucoup plus accusée que partout
ailleurs; les cellules interstitielles paraissent abondantes ; à part
cela l'aspect est le même que dans les régions motrices gauches.
La première frontale et le lobe occipital droits sont à peu près
semblables aux parties gauches sur les points correspondants. Sur
le cervelet, examiné du côté gauche, on trouve une raréfaction des
éléments nerveux de la couche des myélocytes, et un certain degré
de fibrillation de la substance blanche, parsemée de corps gra-
nuleux. il est assez difficile sur nos pièces de faire la distinction
entre les deux espèces de cellules de la couche granuleuse.
La moelle cervicale a ses parties symétriques, mais il y a dispa-
rition il peu près complète des cellules motrices dans les deux
cornes antérieures. Il existe encore des cellules nerveuses en
assez grand nombre dans les cornes postérieures.
Les cordons blancs de la moelle lombaire et les cornes anté-
rieures, qui sont symétriques, contiennent un certain nombre de
grandes cellules, relativement très peu abondantes, se colorant
mal par le carmin. Il y en a beaucoup moins encore dans les
cornes postérieures.
Sur des fragments du biceps gauche, on voit de l'épaississe-
ment des grosses travées conjonctives qui cloisonnent le muscle,
les petites travées ne sont pas modifiées. Les faisceaux muscu-
laires eux-mêmes ne paraissent pas altérés.
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 123
Nous voyons donc que dans l'encéphale, il existe une inflamma-
tion chronique (encéphalite) à différents degrés; dansla moelle. ,e
même processus parait plus avancé encore, et l'atrophie des élé-
ments nerveux portée très loin. Ces lésions sont générales et dif-
fuses. Il n'y a nulle part cette dégénérescence pigmentaire que
l'on observe à la période de tuméfaction des cellules dans la para-
lysie générale.
L'atrophie des circonvolutions et de la moelle résulte donc de
la condensation de la névroglie et de l'atrophie des éléments
nerveux eux-mêmes et est masquée en partie à l'oeil nu par la
prolifération scléreuse. Ce processus paraît s'être fait d'une façon
chronique pour l'ensemble et subaiguë sur certains points diffus; ce
qui coïncide avec laprédoiiiidance de quelques symptômes il gauche,
Malgré l'atrophie plus marquée du côté gauche du corps, il n'y
a pas de lésions en foyers à droile, ceci n'est pas rare dans les
cas semblables. D'ailleurs les deux hémisphères étaient égaux en
poids. Les lésions assez légères d'ailleurs observées du côté des
méninges, les adhérences de la pie-mère, sont beaucoup trop
faibles pour pouvoir rendre compte des phénomènes observés et
sont évidemment consécutives aux désordres de la substance
grise. (Bourneville et Pilliet, Soc. anat., 18().)
Disons un mot des lésions de la névroglie, pour
n'avoir plus à y revenir, On sait que, beaucoup moins
fibrillaire dans le cerveau que dans la moelle, elle l'est
surtout extrêmement peu en apparence chez le nou-
veau-né, où elle a presque un aspect laiteux, et chez
l'enfant. Pourtant ce que nous observons ici, c'est un
aspect plus opaque de cette névroglie, aspect plus
marqué en certains points, à la surface de l'écorce;
puis sur d'autres points on y perçoit nettement des
fibrilles, quoique la pièce n'ait pas été traitée par les
chromates, et ces fibrilles, assez épaisses, s'aperçoivent
surtout parce qu'elles circonscrivent des vacuoles plus
claires et forment un feutrage bien visible. Nous
sommes conduits par analogie d'aspect à appeler sclé-
reux ces foyers, bien qu'il n'y ait pas de tissu con-
jonctif véritable.
L'état actuel de nos connaissances sur la névroglie
124 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
normale n'est pas assez avancé pour que nous tentions
d'interpréter ces états et de les rapporter à des modi-
fications des cellules de la névroglie, nous nous bor-
nons à les signaler.
Le rôle des vaisseaux dans ces lésions déjà anciennes
paraît peu considérable. Nous verrous chez des idiots
plus jeunes qu'il n'en est pas toujours ainsi et que les
lésions sont plus marquées toujours autour des capil-
laires de l'écorce, quand on a constaté des adhérences
assez nombreuses.
OnSERVATION II. - L'enfant Endei-1., 1881-1886 présentait ce fait
rare d'alcoolisme chez un sujet Je quatre ans. On pourra se
reporter aux détails de son observation clinique, qui a été publiée.
Il était atteint de convulsions et d'épilepsie a accès rapprochés,
après avoir été bien portant jusqu'à trois ans. 11 était gâteux et
avait des accès de colère. Mort de diphthérie. A l'autopsie mé-
ninges très adhérentes au cerveau.
Examen histologique. a.). Lobe frontal de l'hémisphère gauche. -
Les méninges sont restées adhérentes sur les coupes ; et on les
voit constituées surtout par des vaisseaux très dilatés et remplis
de sang; les veines sont particulièrement énormes ; les capillaires
qui plongent dans la substance cérébrale sont aussi très gonflés
et parfaitement visibles, quelques-uns sont rameux.
Dans la substance grise, la couche superficielle de névroglie a
son épaisseur normale, peut-être les noyaux des cellules sont-ils
un peu plus abondants que chez un enfant sain du mme âge. La
seconde couche, celle des petites cellules pyramidales, présente
des altérations dans le nombre de ces éléments qui est extrême-
ment diminué et dans leur disposition réciproque.
Au lieu de former un mur de cellules serrées, visibles au pre-
mier coup d'oeil, elles sont assez dispersées, par groupes, de trois
à cinq, en sorte qu'on ne retrouve pas à un faible grossissement
l'aspect connu de cette couche, et qu'il en faut chercher les élé-
ments. Dans les deux couches suivantes, couche des cellules pyra-
midales moyennes et couche des grosses cellules, on observe, vu la
grosseur des éléments, des lésions plus nettes. Les cellules sont t
diminuées de nombre; en revanche les noyaux petits et sphé-
riques qui révèlent les cellules névrogliques sont augmentés et
dispersés. Les cellules au lieu d'être disposées en série régulières,
bout à bout, limitées par les fibres d'origine de la substance
blanche, présente ces mêmes séries morcelées par disparition de
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. -125 5
cellules intercalaires; en sorte qu'on ne voit que des groupes con-
tinus de plusieurs cellules en nombre assez restreint, ressemblant
à des capsules allongées de cellules de cartilage. Les cellules
situées à la limite des deux couches intermédiaires, aux grandes
cellules pyramidales et aux moyennes, présentent à son maximum
une altération dont on retrouve des états différents sur toutes les
couches. Elles sont d'abord gonflées, hyalines, avec une accumu-
lation considérable de granules jaune d'ambre autour des
noyaux ; puis restant toujours hyalines, elles sont beaucoup plus
petites, ont une forme en fuseau, et n'offrent pas de prolonge-
ments distincts. Enfin, à un troisième état, on ne voit qu'un
noyau sphérique, avec un petit amas de granules réfringents
autour de lui. La plupart des cellules susmentionnées, présentent
les différents degrés de cette altération avec cette particularité que
beaucoup des cellules que l'on voit dans un même champ du mi-
croscope, sont à peu près au même état; tandis que, plus loin, on
rencontre des groupes de cellules à autre état. Les capillaires dans
ces deux couches sont ramifiés et dilatés, mais leur développe-
ment n'est pas excessif.
Dans la couche suivante de la substance grise et dans la subs-
tance blanche, ce qui domine c'est l'accumulation des noyaux des
cellules interstitielles. Il n'y a qu'un petit nombre de corps granu-
leux. En résumé, on constate la congestion vasculaire, la multi-
plication des cellules de la névroglie et la disparition des cellules
nerveuses, disparition qui nous est expliquée par les différents états
aboutissant à l'atrophie que l'on peut observer sur les coupes.
Sur une coupe du lobe pariétal, les lésions sont absolument du
même ordre, mais plus avancées, et paraissent avoir marché du
centre à la périphérie. En effet, si nous reprenons l'étude des
couches en sens inverse, nous voyons d'abord la substance blanche
très vascularisée et présentant les figures connues sous le nom
d'éléments araignées. La couche intermédiaire, couche des fibres
arquées, et la couche des grandes cellules pyramidales ne se com-
posent plus que de faisceaux fibrillaires descendants avec de
nombreuses cellules interstitielles, et c'est dans la couche des
cellules pyramidales moyennes que l'on retrouve l'évolution des
lésions cellulaires telles que nous venons de l'indiquer. Au-dessus,
la sériation des cellules a tout à fait disparu. La couche la plus
superficielle de la substance grise a été en partie enlevée avec les
méninges, surtout aux points de pénétration des capillaires.
Sur une coupe du lobe occipital, une portion assez considérable
de substance grise a été enlevée avec la pie-mère, ce qui en
reste présente une diminution portée à l'extrême des éléments
pyramidaux. A la limite de la substance blanche, l'accumulation
des noyaux petits et sphériques des cellules interstitielles est très
marquée. Dans les portions périphériques, au contraire, les élé-
126 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
ments cellulaires sont rares et dispersés au milieu d'un tissu
cellulaire abondant.
b). Cervelet, hémisphère droit, rien à noter. Les cellules de
Purkinje, sont admirablement conservées. En résumé, les lésions
paraissent plus marquées sur les régions postérieures de l'hémis-
phère et se composent toujours des deux mêmes éléments, sclérose
interstitielle et lésions des cellules pyramidales, évoluant parallèle-
ment.
c). Moelle cC1'Vico-dol'sale. - Les cordons blancs sont symétri-
ques ; dans la substance grise, tuméfaction hyaline assez peu
accentuée dans les cellules des cornes antérieures; les cornes sont
égales; le canal de l'épendyme est intact.
d). Moelle lombaire. - Même aspect, congestion intense des
méninges (Bourneville et Banmgarlen, Soc. anatomique, 1888).
Les lésions, dans ce cas, étaient bien celles de la
méningo-encéphalite; presque tout le,cerveau, après
décortication, présentait un aspect tomenteux et irré-
gulier ; une portion assez épaisse de la substance grise
avait été enlevée avec la pie-mère. Les lésions de
l'écorce étaient pourtant fort semblables à ce qu'on
voit avec une adhérence moins forte des méninges.
On est ainsi porté à croire que la pièce examinée pré-
sentait des accidents à leur début; ce qui concorde
avec l'observation clinique. On peut donc ainsi saisir
le stade de néoformation vasculaire, dont l'adhérence
méningée est la preuve. En effet, c'est, comme nous
l'avons vu, parce que les vaisseaux sont épaissis et
rameux qu'ils enlèvent avec eux des portions de
l'écorce. Ce malade était non seulement idiot, mais
épileptique, ce qui s'accorde encore avec une lésion
active, en pleine évolution, déterminant une irritation
assez forte.
On a dit que les vaisseaux paraissaient plus nom-
breux à cause de l'atrophie du cerveau. C'est pour la
paralysie générale que cette opinion a été émise,
quoique cette atrophie soit réelle; et il suffit de corn.
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. Il -) -i
parer le cône restreint de substance blanche qu'on
voit sur les coupes de la circonvolution dans ces cas
et dans les cas normaux pour la constater; le réseau
vasculaire tel que nous l'avons vu et fait dessiner
nous paraît en grande partie néoforme.
Observation III. - Voici maintenant un cas d'idiotie avec
induration du cerveau, dans lequel la mort a été précoce; il
n'y avait pas d'altération de la moelle.
Pruvo..., 1877-1885. Idiotie complète, excès de boisson du père,
mère nerveuse, quatre frères et soeurs mortes de convulsions.
Premières convulsions à six mois, secondes à neuf; puis con-
vulsions tous les mois jusqu'à quatre ans. Succion, gâtisme, etc.,
mort à huit ans; à l'autopsie, induration des hémisphères; les
lésions étant semblables, l'examen n'a porté que sur le côté droit.
Examen histologique. - Coupe d'une circonvolution prise dans le
lobe frontal. - La substance grise est très mince ; on n'y retrouve
qu'avec peine des traces de sériation des éléments soit parallèle,
soit perpendiculaire à la surface de l'hémisphère; quelques foyers
opaques, peu abondants dans les couches superficielles. Dans les
inférieures, rareté des grandes cellules, abondance d'éléments
sphériques de moyen volume, groupés par quatre ou six, nom-
breuses petites cellules dans la substance blanche; vascularisation
relativement peu développée.
On a peine à retrouver une cellule nettement triangulaire dans
n'importe laquelle des couches de la substance grise. - Coupe au
niveau du lobule paracentral. La vascularisation est plus marquée
et morcelle le tissu. La première et la seconde couche ne se peu-
vent distinguer, il n'y a pas de transition nette entre les deux. De
temps en temps existe un groupe de cellules rondes, peu nom-
breuses, sans épaississement de la névroglie, puis des amas plus
volumineux autour desquels le réseau devient opaque, et, par
places des foyers dans lesquels le centre se parsème de fines
vacuoles. L'infiltration de toute la substance grise par les élé-
ments sphériques est nettement accusée. Les cellules des couches
profondes sont groupées par petits îlots, comme dans le lobe
frontal ; même rareté des éléments pyramidaux ; cependant on en
retrouve quelques nids, mais elles sont petites et effilées.
La substance blanche est toute parsemée de corps granuleux;
les espaces périvasculaires très dilatés.
Dans une circonvolution prise sur le lobe occipital, les foyers de
désintégration à centre vacuolaire sont assez étendus pour
qu'on les distingue à l'oeil nu sur les coupes. Ils s'étendent jus-
qu'à la substance blanche. Le centre est occupé par un réseau
128 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
à mailles très lâches, à grands interstices. Ces petits points
apparaissent donc comme des taches sombres semblables aux glan-
des qu'on voit sur la coupe d'un zeste de citron ou d'orange, quand
on pratique une section nette de la circonvolution. Ils sont au
contraire réservés en blanc sur les pièces colorées. Autour d'eux,
la sériation longitudinale, est assez bien conservée; mais les
cellules du parenchyme sont très petites, d'ailleurs l'épaisseur du
revêtement gris est très faible.
La substance blanche offre l'aspect d'une véritable émulsion de
myéline. Cet état, dû à la macération de la pièce dans l'alcool
empêche qu'on juge des lésions qu'elle peut présenter, même sur
les pièces dégraissées aux essences et montées au baume de Canada.
Dans le cervelet, la couche névroglique est très aplatie, son
réseau se voit fort bien, les mailles en étant espacées par un infil-
trat qui devait être assez abondant, à en juger par les vacuoles que
présente cette couche. Les cellules de Purlunje sont rares et très
espacées les unes des autres. Les myélocites sont aussi très peu
serrés dans la couche suivante. 11 existe quelques corps granuleux
dans la substance blanche.
La moelle cervicale ne présente pas d'asymétrie ni de sclérose de
la substance blanche, les cornes prises sont régulières, leurs
colonnes cellulaires, surtout les antérieures et la colonne de Clarke
sont bien conservées et présentent des cellules nettes avec pro-
longements normaux. L'épendyme est régulier, son épithélium
est en place.
Dans la moelle dorso-lombaire, il n'y a non plus rien à noter;
l'épendyme est doublé d'une gaine de cellules polygonales; les
cellules sont normales et les tubes sont sains tant la moelle que
dans les racines coupées avec elle.
Ainsi, avec des lésions étendues de la convexité
des hémisphères, nous trouvons une moelle relative-
ment saine; donc on peut supposer que les lésions
diffuses, si avancées parfois, que l'on trouve dans la
moelle en d'autres cas, ne sont consécutives qu'à l'alté-
ration lente de l'encéphale. Les lésions de la convexité
sont ici très marquées, l'idiotie était profonde, et les
convulsions étaient précoces et fréquentes.
Notre maître, le Dr Bourneville, pense qu'il faut
faire jouer un grand rôle dans ces cas à l'asphyxie des
nouveau-nés, comme cause de l'idiotie. Nous ne dis-
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 129
cuterons point ici la pathogénie des lésions, mais le
nombre des apoplexies des nouveau-nés est si consi-
dérable dans les autopsies des maternités que cette
opinion nous paraît très plausible. On peut voir sur
ce sujet la thèse du Dl' Hutinel, élève cle Parrot, qui
plaide aussi en ce sens.
Observation IV. - Chez un autre idiot de cinq ans : Faur...
(t879-i884) atteint d'idiotie complète avec épilepsie, et fils d'un
alcoolique, on trouva de l'hydrocéphalie partielle. Les convulsions
avaient débuté à quatre mois, suivies d'un véritable état de mal
convulsif. On trouve de plus notés des cris, accès de colère, etc.
Examen histologique. Coupes du lobe paracentral droit. Les
couches de la substance grise ne sont pas distinctes les unes des
autres; elles ne sont pas encore dessinées, et, à ce point de vue
ce cerveau ressemble à celui d'un nouveau-né. Mais il en diffère
par la rareté des éléments cellulaires étoiles qui sont grêles
et allongés, alignés sur des files qui ne comprennent qu'un seul
rang de cellules mises bout bout, au lieu d'offrir des colonnettes
cellulaires où les éléments se trouvent abondants et côte à côte.
Il existe un certain nombre de foyers plus opaques, plus abon-
dants en noyaux, dans la première et la seconde couche. Sur
quelques-uns on voit nettement un vaisseau occuper le centre de
l'amas. Les dilatations vasculaires sont très nombreuses; les
petits amas de cellules rondes sont abondants entre la première
et la seconde couche, constituant le premier degré de l'altération
en foyer. Ils sont enveloppés d'une atmosphère névroglique plus
opaque, et paraissant plus épaisse que celle qui l'entoure dans
l'épaisseur des couches, on peut voir çà et là quelques rares cel-
lules à contour peu distinct, à noyaux multiples. La paroi des
vaisseaux parait sur certains points épaissie, mais il n'y a pas
d'accumulations de leucocytes dans les gaines. La substance
blanche présente un très grand nombre de corps polycycliques,
réfringents, ressemblant à des corps amyloïdes et qui paraissent
résulter de la fusion d'anciens corps granuleux.
Dans le lobe paracentral gauche, on constate des lésions exac-
tement semblables.
L'hippocampe gauche a été examiné aussi; il présente des
lésions beaucoup moins avancées que la convexité; les sériations
longitudinales s'y peuvent distinguer il existe seulement une
vascularisation rameuse assez développée; les grandes cellules
pyramidales de la région sont petites et entourées de myélocytes.
La moelle cervicale présente une disparition à peu près com-
l3ormevu.t.e, ¡¡idll'e, '188\1. y
130 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
plète des deux groupes latéraux de la corne antérieure. Le
groupe antérieur de cette corne ainsi que la colonne de Clarke
sont conservés. Cette lésion est symélriquc. La partie du faisceau
latéral comprise dans la concavité des cornes est légèrement
sclérosée, il n'y a rien de plus à noter dans la substance blanche
que des espaces étoilés dépourvus de tubes nerveux, assez nom-
breux dans les cordons postérieurs. Les cellules des cornes posté-
rieures sont très rares. Le canal de l'épendyme est rempli par une
substance grenue où se trouvent en assez grande abondance des
cellules rondes. Le revêtement épithélial est incomplet, ses cel-
lules sont aussi sphériques. Les deux vaisseaux qui accompagnent
le canal sont petits et entourés d'une gaine hyaline assez épaisse.
Les deux substances sont parsemées de corps granuleux. Sur un
fragment de muscle avec son nerf, pris à l'avant-bras, on constate
un fort épaississement du périnèvre; la gaine lamellaire et les
cylindres-axes sont nurmaux; il en est de même des faisceaux
musculaires, qui, sous les coupes transverses, sont serrés et sans
sclérose interstitielle. On note seulement une dillérence de
volume et de réfringence de leurs tubes semblable à celle qu'on
observe sur les jeunes sujets, dans la langue du nouveau-né, par
exemple. On observe en assez grand nombre les figures signalées
par M. Babinski en 1886 (Soc. biol.), des fibres musculaires jeunes
se montrent enveloppées d'une gaine lamellaire absolument sem-
blable à celle des nerfs. Il nous a même semblé en voir côte à
côte avec des tubes nerveux dans la même gaine ; mais nous ne
pouvons l'affirmer eu l'absence de préparations à l'acide osmique.
Nous trouvons donc toujours la même lésion de
l'écorce se produisant toujours au même point; de
plus, ici, les lésions delà moelle existent, portant sur
les cellules nerveuses elles-mêmes, avec très peu de
lésions de la conductibilité. Les symptômes d'idiotie
complète concordent avec les lésions diffuses de la
convexité, comme dans nos autres cas. Seulement ici,
l'examen comparatif de cerveaux de nouveau-nés
nous a été utile pour préciser les lésions, à cause de
l'âge peu avancé du sujet; de même que dans le
cas suivant :
Observation V. - Pauguu... (Charles), 1880-1883; grand-père
maternel alcoolique ; mère nerveuse; frères morts de convulsions;
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. '1 ;-11
convulsions à six semaines, rougeole, tubercules ; idiotie com-
plète.
A l'autopsie, un certain degré d'hydrocéphalie, épaississe-
ment et adhérences des méninges par places; état chagriné des
circonvolutions.
Examen histologique. Coupes faites a la convexité. L hémis-
phère droit était plus atrophié que le gauche. Du côté droit, vas-
cularisalion ramifiée assez marquée; les grandes cellules pyrami-
dales, peu nombreuses, sont à peu près les seuls éléments,
caractéristiques que l'on retrouve dans la hauteur des couches. La
substance blanche présente une grande quantité de corps amyloïdes
très volumineux, qui se colorent assez fortement par l'héma-
toxyline et restent entièrement incolores par le carmin.
L'aspect est à peu près semblable sur les coupes prises dans
l'hémisphère gauche, on ne voit que de l'atrophie simple, sans les
taches de désintégration que nous avons si souvent retrouvées.
C'est donc un exemple de l'atrophie simple, ou
plutôt du non-développement, sans taches de dégéné-
rescence ; soit qu'elles n'existent plus, soit que le
processus d'atrophie ait été différent, ce que nous ne
pouvons savoir à cause du très jeune âge du sujet.
Notons que chez les nouveau-nés, sur des coupes
faites pour pouvoir comparer les deux états, la limite
entre la première et la seconde couche de l'écorce est
toujours très marquée, celle-ci bien nette et riche en
cellules, ainsi que les suivantes, comme chez les ani-
maux jeunes, chien, chat, lapin, cobaye; les éléments
vont seulement diminuant de nombre vers la qua-
trième couche de cellules de l'écorce grise :
oI35t·.1r1' : \TIUN VI. - Assas..., 1870-1884. Idiotie congénitale
complète. Père alcoolique, balancement antéro-laléral, grince-
ments de dents fréquents, accès de colère, cris diurnes et noc-
turnes, parole nulle, gâtisme, diarrhée habituelle.
Examen msTOLOCI«E. - Coupe au niveau de la première fron-
tale droite. - Vascularisation rameuse très développée dans les
couches superficielles de la substance grise ; beaucoup de foyers
de désintégration assez étendus; quelques-uns sont même formés
le long des vaisseaux dans la partie profonde de l'écorce. Les
132 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
espaces péri-vasculaires sont dilatés; les gaines infiltrées de corpus-
cules de Glùge, surtout dans la substance blanche. Les cellules
pyramidales ne sont serrées que par place, elles sont peu nom-
breuses et de petit volume. La substance blanche est toute infiltrée
de petites cellules rondes, disposées par places en petits amas
miliaires assez bien circonscrits. Elle présente un grand nombre
de corpuscules de Gtuge et de corps amylacés, irréguliers, volu-
mineux. Les plus gros sont creusés d'une cavité remplie de
leucocytes.
Les coupes au niveau du lobule paracentral montrent les mêmes
lésions plus avancées, les foyers de désintégration forment des
taches grises occupant toute la hauteur de la substance grise
dans les intervalles qu'ils laissent entre eux, elle offre les mêmes
caractères que ci-dessus.
Dans le lobe occipilal, l'état est le même. Il existe autour de
beaucoup de vaisseaux des taches opaques formées d'amas de
cellules dont les noyaux sont très gros et dont les corps cellulaires
ne paraissent pas distincts les uns des autres.
La moelle cervicale examinée après coloration au picro-carmin
et montage au baume présente des lésions diffuses très mar-
quées dans la substance blanche. Il existe de véritables plaques à
contour irrégulier, foncées, formées de tissu scléreux, contenant
pourtant des tubes par endroits, ces plaques occupent tout le
cordon postérieur et toute la partie des cordons anléro-latéraux
comprise dans les concavités antérieure et latérale de la moelle
grise. Dans celle-ci, les îlots cellulaires sont isolés, peu nombreux
en avant, les cornes postérieures n'offrent qu'une très faible
quantité de cellules. Les parois vasculaires sont épaissies.
On voit que les cerveaux d'idiots donnent un cer-
tain nombre de résultats comparables. Mais ces résul-
tats ne sont pas spécifiques, car dans l'idiotie avec
l'épilepsie, ou dans la démence épileptique, nous les
retrouvons, coïncidant il est vrai, avec les mêmes
lésions d'atrophie et d'état chagriné à l'oeil nu.
L'atrophie et l'état chagriné des circonvolutions se
retrouvent dans l'observation suivante :
Observation VII. - Beno..., né le 3 mai 1873, mort le 12 février
1884. A quatre ans, premiers vertiges, accès d'épilepsie à cinq
ans, gâtisme à la même époque, déchéance intellectuelle à partir
de cinq ans et demi. Salacité, conjonctivite purulente, varioloïde
en 1881.
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 133
A l'autopsie, on constate que l'épilepsie est symptomatique
d'une atrophie considérable de l'hémisphère droit du cerveau et
de l'hémisphère cérébelleux gauche, atrophie caractérisée par un
amaigrissement profond des circonvolutions.
Examen histologique. Coupes du lobe frontal droit. La pre-
mière couche est très réduite, composée d'un réticulum fin où les
noyaux de cellules sont rares. Entre cette couche et la seconde
existe une bande sombre, régnant tout le long des circonvolutions
coupées et présentant çà et là des points plus épais, lesquels
déterminent de véritables taches grises, visibles à l'oeil nu par
transparence. Cette bande empièle sur la couche des petites cel-
lules pyramidales qu'elle remplace par endroits entièrement,
débordant sur la troisième couche de l'écorce. C'est une nappe
uniforme composée d'un tissu névroglique plus serré, à trame
plus fine, qu'au-dessus, les noyaux cellulaires petits et fixant éner-
giquement les colorants y sont abondants, dispersés par petits
groupes, mais toujours espacés les uns des autres. Les vaisseaux
sont dilatés. Cette bande tranche très visiblement sur les coupes.
Elle interrompt entièrement la sériation des cellules en colonnes
longitudinales. Cette sériation reparaît au-dessous. Les cellules
sont abondantes, surtout les éléments nucléaires et fusiformes; il
y a peu d'éléments pyramidaux. En beaucoup d'endroits, sous la
nappe de remaniement indiquée, les colonnes longitudinales ne
se reproduisent pas et l'on a des îlots irréguliers, circonscrits par
les vaisseaux dilatés et pauvres en cellules, jusqu'au contact de la
substance blanche, où les noyaux sont abondants.
Il existe des corps granuleux se colorant par ]'bématoxyline et
non par le carmin : tous les espaces périvasculaires sont très
marqués, et cette dilatation se retrouve sur les pièces montées à
la glycérine.
Coupes du lobe occipital gauche. - Il présente aussi de l'amai-
grissement des circonvolutions. La limite entre la première et la
seconde couche de l'écorce n'est pas nette; il existe là une bande
diffuse intermédiaire aux deux couches et riche en noyaux. Mais
elle est beaucoup moins marquée que dans les préparations précé-
dentes. Le ruban gris de Vicq-d'Azyr constitué par une accumu-
lation de petites cellules rondes dans les colonnettes cellulaires,
entre la couche des cellules moyenne^ et la couche des grandes
cellules, se voit nettement. Les cellules pyramidales sont fort dis-
tinctes, surtout dans les préparations colorées au picro-carmin et
au vert de méthyle. Il n'y a pas d'infiltration embryonnaire au-
tour des vaisseaux.
En somme, on voit que le tissu pathologique siège
entre la première et la troisième couche de l'écorce,
l : -3S \. ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
en général , qu'il débute entre la première et la se-
conde, qu'il est caractérisé par la dilatation des vais-
seaux, l'aspect plus serré et plus opaque que prend le
réseau névroglique, le plus grand nombre de petits
noyaux et la disparition des éléments parenchymateux
normaux. Il détruit l'harmonie des couches et les
atrophie d'une façon inégale, puisque ses prolonge-
ments vers la substance blanche sont irréguliers. De
là l'aspect chagriné du cerveau.
Observation VIII. - Schad..., 4864-1886, est un idiot épilcp-
tique, qui a eu une période d'amélioration, a appris à parler, puis
est tombé dans la démence la plus profonde à la suite d'accès
répétés, jusqu'à soixante par jour. Les lésions que présente ce
dément, fort jeune il est vrai, ne diffèrent pas sensiblement de
celles qu'on trouve chez les idiots ordinaires. Mort de broncho-
pneumonie gangreneuse diffuse, consécutive à un état de mal.
Examen HISTOLOGIQUE. - Hémisphère droit, coupe d'une cÍ1'con¡;o-
Il/lion frontale. - Toute la substance grise est prise en nappe,
toujours au même point, au niveau des trois premières couches et
présente à ce niveau trois ordres de lésions qui se succèdent irré-
gulièrement sur les coupes. Ce sont, d'abord, l'épaississement de
la névroglie et l'accumulation de cellules en îlots circonscrits au-
tour des vaisseaux ramifiés, ensuite l'aspect aréolaire de la névro-
glie, par minces bandes, puis la formation de foyers d'inégal
volume, ayant ce même aspect plus accusé encore. Les couches
suivantes sont infiltrées d'un grand nombre de petites cellule-,
mais les cellules pyramidales sont entièrement disparues. Les
vaisseaux présentent un epaississement parfois énorme de leur
tunique qui devient hyaline, réfringente et ne se colore que fai-
1>lement par les réactifs; ils sont entourés presque tous d'une
atmosphère de corps granuleux à partir d'un certain volume.
On retrouve les mêmes désordres dans les régions motrices, dans
le lobe occipital. Là toutefois, elles sont moins accentuées, et ce
qui se présente le plus souvent, ce sont les taches opaques, riches
eu noyaux sur le pourtour des vaisseaux. Nous avons fait dessiner
une des plus petites (fl ? 2) et un coup d'oeil sur la figure fera
mieux comprendre qu'une description le siège et l'aspect de cette
lésion.
Dans le cervelet, les éléments de Purliinjc sont assez nombreux,
il n'y a pas de corps granuleux.
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 135
Observation IX. - Le malade suivant nous présente la coexis-
tence de l'aspect dit foetal ou gélatiniforme, et de. l'aspect cha-
griné des circonvolutions. Vautr... 481-i883. Epilepsie avec tour-
noiements, vertiges, secousses, idiotie, parole presque nulle,
gâtisme; mort par obstruction du larynx par un morceau de
viande. A l'autopsie, aspect foetal du cerveau; arrêt de développe-
ment, atrophie et état chagriné de la partie postérieure de l'hé-
misphère droit.
Examen histologique. Coupes du lobe frontal droit, état géla-
tiniforme. Picro-carmin et bleu de méthyle. La vascularisation est
très développée, les cellules pyramidales globuleuses; autour d'elle
existe une largo zone claire, même sur les pièces qui, a dessein,
n'ont fias été montées dans le baume de Canada. Il n'y a pas
d'infiltration embryonnaire récente, mais seulement un grand
nombre de corpuscules amylacés.
Coupes du lobe occipital, atrophié. Même vascularisation ; l'espace
comprenant la deuxième et la troisième couche des cellules de la
substance grise présente de place en place des lâches grisesde névro-
glie aérolaire qui expliquent l'affaissement de la circonvolution
et l'état chagriné de la surface. Ces lésions sont à leur maximum
au sommet de la circonvolution. Sur une coupe comprenant deux
circonvolutions on voit, en effet, quelles sont très peu marquées
des deux côtés du sillon et dans son fond. Les vaisseaux dans leur
gaine et la substance blanche présentent l'infiltration de corps
granuleux que nous avons si souvent mentionnée.
Observation X. -Gouell..., dix-huit ans, mort en 1884, atteint
d'épilepsie vertigineuse et d'hémiplégie droite, présente à l'au-
topsie un arrêt de développement des deux lobes frontaux, et de
la méningo-cncéphalite chronique disséminée assez marquée pour
que la substance grise se décortique en totalité sur quelques
points, avec les méninges.
" EXAMEN histologique. - Sur les coupes prises au niveau d'une
circonvolution de l'hémisphère droit et traitées successivement
par le picro-carmin et le vert de méthyle, on voit une infiltration
lymphoïde marquée de la gaine des vaisseaux, chacun est entouré
d'un cordon de cellules à gros noyaux, fortement colorés en vert,
on voit autour de quelques-uns de ces vaisseaux des foyers de
désintégration, où la subslance grise, rendue plus fragile, est
tombée en partie sur les coupes. La limite des deux substances et
surtout la. substance blanche sont parsemées de corps amyloïdes.
L'infiltration de toutes les couches par de. petites cellules est assez
marquée. Les cellules pyramidales sont pourtant nombreuses.
Observation XI. - Le malade suivant était aussi un épileptique,
atteint d'atrophie cérébrale, mais celle atrophie n'était point la
136 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
grande sclérose lobaire, c'était une atrophie partielle et que l'on
peut, jusqu'à un certain point, regarder comme une forme de
transition entre les scléroses à grand foyer et les écroulements de
la substance grise avec épaississement névrogliques, comme nous
venons d'en voir quelques exemples. L'examen de la figure qui se
rapporte à ce cas montre la grande ressemblance qu'il présente
avec ceux de MM. Jendrassick et Marie et de M. Richardière. On
trouve, comme dans les trois faits auxquels nous venons de faire
allusion, une bande de sclérose fournie par du tissu conjonctif
rubané, émané des vaisseaux. Il n'y a donc plus là de simples
modifications névrogliques discutables et prêtant à différentes
interpellations. On sait que Batty Tuko ayant décrit une sclérose
miliaire de l'écorce chez les épileptiques, à la suite d'un grand
nombre d'autopsies ; on lui objecta, Plaxton entre autres, que cette
sclérose miliaire n'était qu'une apparence due à l'action de l'alcool
sur les pièces. Ici, rien de pareil, la lésion est évidente et comme
elle est encore petite nous pouvons voir le travail de vascularisation
qui l'accompagne.
Le nommé Maisonh., 1868-1885, hérédité alcoolique et nerveuse,
a eu ses premières convulsions à deux ans. Elles étaient limitées
au côté gauche. A douze ans, premières attaques d'épilepsie, elles
avaient ce caractère d'être précédées d'une courte période pen-
dant laquelle le malade courait droit devant lui (épilepsie pro-
cursive). Il existait un léger embarras de la parole, et de la débilité
mentale. A l'autopsie, sclérose cérébrale (les détails de l'obser-
vation ont été publiés par MM. Bourneville et Bricon, dans leur
travail sur l'épilepsie procursive).
Examen histologique. - Cerveau et bulbe durcis dans l'alcool.
- Moelle durcie dans le liquide de Muller.
Cerveau droit. - Portions atrophiées.
Substance grise. - Les membranes n'ont pas enlevé des portions
de substance cérébrale en se délachant; la première couche de la
substance grise est confondue avec la seconde; elle présente, comme
celle dernière, une néoformation considérable, les capillaires
apparaissent sur les coupes, étoilés, arqués, formant un réseau
serré. L'espace lymphatique est rempli de cellules rondes; autour
d'elles existe un espace clair dû au retrait qu'a subi la pièce dans
l'alcool. Sur des points où la lésion est plus avancée, il existe
autour de ce réseau vasculaire serré des fibrilles conjonctives en
plus ou moins grande épaisseur; plus loin, la lésion est plus avan-
cée encore. Ces fibrilles conjonctives forment un véritable tissu
fibroïde de sclérose qui tranche vivement par son aspect sur le
tissu névroglique ambiant. Ainsi sont constituées des bandes sclé-
reuses larges et plates, occupant et remplaçant la deuxième couche
de la substance grise, celle des petites cellules pyramidales. Ces
bandes ne sont pas pures, mais contiennent un certain nombre
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. '13ï
d'amas névrogliques et de cellules nerveuses arrondies, granuleuses
et pigmentées; elles empiètent sur la substance grise des deux
couches qui les contiennent par des bandes conjonctives qui suivent t
les trajets des vaisseaux; elles ont par conséquent un bord dentelé
et festonné. Au niveau de ces points, la première couche de subs-
tance grise est épaissie, fibrillaire et chargée de noyaux. La troi-
sième couche, celle des grandes cellules, ne présente que des séries
de cellules petites, à fins noyaux sphériques, noyés sans ordre
apparent dans une trame névroglique granuleuse.
Mais la vascularisation exagérée des couches corticales moyennes
et la formation de bandes de tissu scléreux par plaques dans la
même région ne sont que les deux premiers degrés de l'altération.
Sur d'autres (joints, entre les mailles du tissu conjonctif ainsi
formé, se créent des vides qui étaient remplis par un liquide à l'état
frais. On a sous les yeux des cavités aréolaires, irrégulières, cloi-
sonnées par des travées conjonctives épaisses et par de fines tra-
bécules, le long desquelles sont dispersées de grosses cellules
irrégulières à protoplasma granuleux. L'aspect ressemble beaucoup
sur les coupes à celui du grand épiploon réticulé de certains ron-
geurs. En même temps, la couche corticale qui recouvre ce tissu
aréolaire s'amincit et n'est plus qu'un simple feuillet, et les cavités
s'agrandissent au point de former un tissu aréolaire visible à l'oeil
nu. Ces lésions expliquent l'état chagriné qui résulte de l'effondre-
ment des couches moyennes de la substance grise et l'état kystique
aréolaire qu'on observe, beaucoup plus prononcé d'ailleurs dans
d'autres cas d'idiotie.
Au-dessous de ces points très lésés, il n'existe plus de grandes
cellules nerveuses, mais on en rencontre tout à côté par amas
abondants; elles sont seulement groupées sans ordre apparent, au
lieu d'être disposées en séries verticales comme à l'état normal.
Les couches suivantes de la substance grise et la substance
blanche sont chargées de petites cellules rondes. On y voit, en
grande abondance des blocs volumineux, réfringents, irréguliers,
comme formés de la fusion de plusieurs boules. Malgré le séjour
des pièces dans l'alcool, ces blocs se colorent en noir intense par
l'acide osmique sur les coupes laissées vingt-quatre heures dans
ce réactif. f.
Lobe occipital clroit en dehors de la lésion. Vaisseaux nombreux,
vascularisés, cavité large, avec infiltration des gaines. Pourtant
la sériation verlicale des éléments nerveux à laquelle nous atta-
chons une grande importance est conservée sur la plupart des
points. Si ce n'est dans la couche la plus profonde de la substance
grise où elle est morcelée par le vaisseau vasculaire. A ce point,
ainsi que dans la substance blanche, nombreux corps granuleux
et blocs graisseux semblables à ceux que nous venons d'indiquer.
Cervelet droit. - Cellules de Purkinje assez nombreuses. Couche
138 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
externe et couche des myélocytes normales. On retrouve un
certain nombre de gros blocs graisseux qui paraissent dus à
l'action de l'alcool sur la pièce.
Cerveau. Hémisphère gauche. - Il existe dans le lobe frontal une
vascularisation très développée avec diminution de nombre et de
volume des cellules nerveuses qui ont perdu leur sériation dans les
points examinés.
Nombreux corps granuleux dans la substance blanche. Dans le
lobe occipital, on retrouve, à côté de points normaux dans l'écorce,
des taches de désintégration au début. - Les coupes du cervelet
droit, examinées comparativement avec celles du côté gauche,
n'ont pas paru présenter de différence sensible. - Les coupes du
bulbe à la portion inférieure du quatrième ventricule, au-dessous
des olives, montrent d'abord des lésions péri-vasculaires très
marquées, surtout du côté gauche. Diminution comparative du
volume des noyaux. Du même côté, dans la moelle cervicale, les
cornes antérieures sont petites mais avec leurs cellules bien nettes.
de même les cordons antérieurs. Ilots de tissu scléreux de dégé-
nérescence descendante, en dehors de la corne supérieure du
côté gauche. Cette corne parait un peu plus volumineuse que
celle du côté opposé. Dans cet îlot à contours diffus, un certain
nombre de tubes nerveux persistent.
En résumé, les lésions du bulbe et de la moelle sont consécu-
tives, ainsi que celles de la couronne de Reil.
Les lésions de l'écorce sont surtout marquées au niveau de la
deuxième couche de la substance grise et on peut leur distinguer
trois étapes : 10 prolifération vasculaire; 2° sclérose et atrophie
des cellules nerveuses ; 3° formation des cavités.
Ces lésions forment aussi à la surface des hémisphères un certain
nombre de taches diffuses, semblables il celles qu'on trouve dans
la plupart des cerveaux d'idiots ' .
On voit que, dans ce cas, il existe de véritables
bandes de tissu iibrillaire ondulé, ressemblant au tissu
conjonctif ordinaire, dans la zone moyenne de l'écorce.
C'est là une altération fort rare, d'après tout ce que
nous avons regardé jusqu'ici. Résulte-t-elle des lésions
que nous venons cle passer en revue ? Est-elle le pre-
mier degré de lésions plus étendues, telle que la sclé-
1 bourneville et l3ricon ? Epilepsie ? rocacrsioef.lrchices de Nemofoic,
1888, 1. 26.
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. tu
rose lobaire de l'enfance ? Ce sont deux questions que
nous ne pouvons trancher. Les scléroses lobaires que
nous avons pu examiner à Bicêtre et que nous ne dé-
crirons pas ici pour ne pas nous écarter de notre su-
jet, étaient toutes trop anciennes et trop étendues pour
nous permettre de concevoir un rapport entre ces deux
ordres de faits. Il en était de même dans les faits rap-
portés par MM. Jendrassik et Marie et par M. Richar-
dière dans sa thèse. La question du rapport de ces
plaques cicatricielles avec l'épilepsie ne peut aussi
qu'être indiquée. En tout cas, nous possédons des pré-
parations de circonvolutions d'épileptiques où rien de
semblable n'existait.
Observations XII-XII ! . Les deux observations suivantes ont
trait à des épileptiques aliénés âgés, ayant tous deux dépassé la
quarantaine. Les lésions se rapprochent beaucoup, chez ces épilep-
tiques déments, de ce qu'on voit dans les autres formes de
démence. C'est, en effet, un aboutissant commun de lésions
différentes. Mais on retrouve un certain nombre des traits que
nous avons déjà mentionnés.
Examen histologique. Rente..., soixante-onze ans, épilepsie
tardive. Coupes du para, central gauche. - Les trois premières
couches de l'écorce sont partout envahies et modifiées, la dispo-
sition normale n'existe plus, on voit la névroglie épaissie former
des taches plus foncées que le tissu sain. En beaucoup de points,
ces amas foncés présentent à leur centre un écartement des
mailles du réseau névroglique et ii en résulte un aspect finement
vacuolaire du tissu, c'est au niveau de la seconde couche que cet
aspect est le plus marqué. Les trois couches ainsi envahies sont
parsemées de noyaux petits, très nombreux : la première, la plus
superficielle, ne se distingue plus. Au-dessous de celte bande, la
couche des grandes cellules pyramidales se retrouve, mais avec
une ordonnance très peu nette. Elle présente ses grosses cellules
abondantes encore. Elle est parsemée de curps granuleux ainsi
que la substance blanche. Vaisseaux moyennement abondants, un
peu rameux.
Bonn..., épileptique aliéné âgé. Coupe d'une des circonvolutions
frontales du côté gauche. Les lésions des premières couches de
l'écorce sont comparables, mais beaucoup moins avancées. Au lieu
1 H) ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
de former une bande continue, les points atteints ne se présentent
que sous forme de taches plus opaques, parsemées de noyaux plus
abondants, rompant l'ordonnance des séries longitudinales et
prenant les trois premières couches. Elles ne sont pas au contact
les unes des autres et se présentent au contraire comme une série
de points isolés, mais assez rapprochés. Les cellules pyramidales
bien nettes sont rares dans les plans sous-jacenls, la plupart des
grosses cellules sont globuleuses. On distingue entre elles des
taches étoilées fixant en particulier le carmin et rappelant la forme
des élémenls araignée et la paralysie générale. La substance
blanche est infiltrée d'un grand nombre de noyaux. Dans ces deux
cas, nous relevons l'absence d'accumulation de pigment dans les
grandes cellules de l'écorce. C'est un fait exceptionnel, surtout à
soixante-onze ans, et qui tendrait à établir que les fonctions de
ces éléments sont assez modifiées.
Les foyers de ramollissement, petits et multiples, peuvent se
présenter chez l'enfant. Dans le cas suivant, il s'agit d'un enfant
de trois ans, Porte ? atteint de premières convulsions à trois mois.
Parole et démarche nulles, gâtisme, grimaces, strabisme, balan-
cement, très multiples, etc. A l'autopsie, on trouve un grand
nombre de petits foyers de couleur ocreuse, recouverts par la
couche la plus superficielle du cerveau, sous la forme d'une mem-
brane mince et plissée.
Examen HISTOLOGIQUE.- L'hémisphère droit n'a pas été examiné,
les lésions étant d'apparence semblable des deux côtés. Les coupes
ont été colorées à l'hématoxyline et au carmin et montées soit au
baume de Canada, soit à la liqueur de Fartant, pour conserver
les corps granuleux. Sur la première frontale, à sa naissance, en
un point qui ne contient pas de foyer visible à l'oeil nu, il existe une
vascularisation anormale très prononcée dans toute la subslance
grise ; les vaisseaux sont ramifiés dans toutes les directions. Le
nombre des éléments parait sensiblement accru et il existe une série
de points ou taches de désintégration se touchant presque et for-
mant une vaste bande entre la première et la troisième couches
de la substance grise, et comprenant ainsi la moitié environ de la
hauteur de la substance grise. Ces foyers sont caractérisés par la
rareté des éléments à leur niveau, l'épaississement du tissu inters-
titiel qui se colore davantage parle carmin et sa friabilité ; car
il tombe assez souvent des portions de tissus sur les coupes, mal-
gré le soin apporté au montage. A un fort grossissement, on
constate que les capillaires sont très nombreux et dilatés, les
cellules nerveuses ne sont pas disposées en séries, mais dispersées
et globuleuses. Celles des couches profondes sont allongées, gra-
nuleuses et fortement colorées. La subslance blanche offre une
quantité considérable de petits noyaux sphériques appartenant
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. ,lit Il
aux cellules interstitielles. Sur certains points, il existe des corps
granuleux en assez grande quantité.
La deuxième frontale, à son insertion sur la frontale ascendante,
portaitsur sapartie moyenneun foyer ocreux, allongé, parfaitement
caractérisé. Sur une coupe à ce niveau, on constate une dépres-
sion en entonnoir de la substance grise, une perle de substance
qui s'étend jusqu'à la subslance blanche et est recouverte par une
paroi flottante, transformant ce foyer en un petit kyste. L'espace
libre est sillonné par des filaments fibrillaires allant de la paroi
superficielle à la substance grise restante. Cette paroi est composée
de dehors en dedans, de trois couches : la plus superficielle, mince
et homogène, formée de faisceaux parallèles de fibres fines, avec
de petits noyaux sphériques très peu abondants, s'amincit aux
poinls extrêmes de la lésion et disparait dans la couche superfi-
cielle de la substance grise normale. Au-dessous, apparaît une
couche de deux à trois fois plus épaisse. Cette couche est compo-
sée surtout de cellules rondes assez volumineuses, à noyau sphé-
rique, dont la plupart sont remplies de granulations jaunes de
pigment sanguin, à la manière des cellules interstitielles de l'ovaire.
Ce sont elles qui donnent au kyste sa couleur ocreuse ; elles sont
dispersées dans un tissu fibrillaire dont les fibrilles convergent en
bas par des faisceaux distincts. La troisième couche est occupée
par ces faisceaux et un certain nombre de cellules. Ces masses de
faisceaux fibrillaires accompagnent les vaisseaux et forment à la
face interne de la paroi du petit kyste, un certain nombre de
masses pédiculées, composées de ce tissu fibrillaire feutré, de
rares vaisseaux et contenant des cellules à noyaux ronds ou allon-
gés, dont quelques-unes sont encore chargées de granulations
jaunes.
Autour de certains capillaires, la gaine adventice se remplit de
ces cellules, de façon à former des renflements en massue libres
dans la cavité. Si l'on suit cette paroi, ainsi constituée sur les
parties latérales, on voit que les couches se perdent successive-
ment dans la couche externe névroglique de la substance grise;
c'est donc entre cette couche externe et la deuxième couche de
Meynert que s'est opérée la scissure qui a donné lieu à la cavité
que nous étudions. La substance grise qui forme les parois de
l'entonnoir est recouverte par une couche fibrillaire névroglique.
Au-dessous, elle se montre sous deux états différents : sur certains
points, la sériation longitudinale de la substance grise est encore
assez visible, mais ces séries sont occupées par des cellules inters-
titielles en très grande abondance. Sur d'autres points, beaucoup
plus nombreux, le processus estbeaucoup plus avancé; les cellules
ne sont plus disposées en séries, mais elles sont dispersées, raré-
fiées et isolées; elles sont petites, globuleuses; on ne peut suivre
leurs prolongements sous la surface libre. Autour de ce foyer, il
142 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
existe un certain nombre de taches ou points très clairs à un faible
grossissement et qui sont composés uniquement par un réseau
très fin d'une dentelle de fibrilles grêle, avec des cellules à
noyaux sphériques, corps cellulaires ramifiés aux points nodaux.
Les mailles de ce tissu sont occupées par une substance inter-
cellulaire qui a disparu des coupes. On n'y rencontre pas une seule
cellule nerveuse et cela dans plusieurs champs du microscope. A
la périphérie de ces points, on rencontre les corps granuleux,
principalement autour des vaisseaux. Ces vaisseaux sont très ra-
mifiés; l'espace périvasculaire est largement dilaté autour de la
plupart d'entre eux; ils morcellent la substance grise.
Lésions de la substance blanche. - Dans la substance blanche, il
existe une large traînée descendante, correspondant à la perte de
substance, de la substance grise, et dans laquelle les fibres n'existent t
pas; tout autour, ces fibres sont entourées d'une grande quantité
de petites cellules interstitielles, et sur les pièces traitées successi-
vement par l'acide osmique et la liqueur de Farrant, on voit que
la myéline émulsionnée forme un certain nombre de petites gout-
telettes noires et des amas plus gros ayant l'aspect connu des corps
granuleux.
Pariétale ascendante gauche. - Elle porte en son milieu un foyer
plus récent; on voit nettement que le centre de la dépression est
formé par un vaisseau ramifié; les parois sont constituées par les
mêmes tissus fibrillaires que dans la précédente; les lésions de la
substance grise au pourtour du foyer sont moins avancées, quoi-
que très étendues.
La première couche, couche névroglique de Meynert, est très
mince, avec de fins capillaires rameux assez nombreux et, de plus,
sur certains points, des taches grises où la névroglie s'est raréfiée,
qui forment autant d'espaces clairs.
Dans la deuxième couche, celle des petites cellules pyramidales,
on voit que presque toutes ces cellules sont petites et globuleuses,
et qu'elles ne sont plus placées bout à bout, mais dispersées; leurs
rapports normaux sont détruits et leur nombre diminué. Dans la
troisième couche, celle des cellules moyennes, on voit les colon-
nettes que forment ces cellules bout à bout, beaucoup plus dis-
tantes les unes des autres qu'à l'état normal et séparées par du
tissu névroglique, à peu près dépourvu d'éléments interstitiels.
Même vascularisation ramifiée. Les cellules nerveuses sont globu-
leuses, leur noyau volumineux, clair, nucléole, remplit presque
toute la cellule. Le prolongement inférieur est le plus distinct.
Dans la couche suivante des grandes cellules, les altérations
sont les mêmes pour les cellules nerveuses, dont le corps cyto-
plasmique est pâle et effacé, quelques-unes sont atrophiées, pour-
tant elles sont encore en nombre considérable.
Dans les espaces qui séparent ces rangées de cellules, espaces
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. '[/t3
par où descendent les fibrilles qui vont former la substance grise,
on voit, de plus que dans les couches précédentes, un assez grand
nombre de noyaux de cellules interstitielles, petits, sphériques et
fortement colorés. Dans la substance blanche, on voit les mêmes
lésions que dans les préparations précédentes; les vaisseaux sont
très dilatés, les corps granuleux sont très abondants.
Lobe occipital. - Les coupes du lobe occipital, au niveau d'un
foyer plus étendu que celui que nous avons décrit sur le frontal,
montrent des lésions absolument semblables, mais la traînée des-
cendante dans la substance blanche au-dessous du foyer, est très
large et remplie de globules sanguins avec un certain nombre de
leucocytes et de cellules t'usii*oriiie-s ; au pourtour de ces masses
un grand nombre de capillaires sont aussi remplis de globules
rouges ; il semble donc que l'on ait affaire à de véritables foyers
hémorrhagiques en ce point.
Les lésions d'encéphalite au voisinage présentent les mêmes
caractères que ci-dessus, elles sont seulement plus marquées, avec
des cellules interstitielles très abondantes et des capillaires dont
les plus volumineux sont entourés d'une paroi fibrillaire nette.
Mêmes lésions que plus haut dans la substance grise.
Cervelet. - Dans la substance grise, la couche de névroglie est
fibrillaire dans le sens longitudinal ; les cellules interstitielles y
sont très nombreuses, les cellules de Purkinje sont abondantes,
mais elles se colorent assez inégalement, surtout à l'hématoxyline ;
on peut pourtant suivre très loin les prolongements de la plupart.
La couche des cellules névrogliques n'offre rien de particulier.
Dans la substance blanche, corps granuleux nombreux, aspect
fibrillaire, grosses fibrilles anastomosées.
Moelle cervicale. - La substance grise à des altérations cellu-
laires importantes.
Dans les cornes antérieures, le tissu interstitiel forme des
faisceaux fibrillaires volumineux et entre-croisés autour des cel-
lules nerveuses. Celles-ci, nettement diminuées de nombre, se
colorent bien par le carmin sur certains points, mais beaucoup ne
se colorent que faiblement et présentent un reflet jaunâtre et
hyalin comparable à celui des cellules de la paralysie générale,
elles sont tuméfiées et leurs prolongements n'existent que peu ou
point. Par l'hématoxyline, ces cellules se colorent en gris de lin et
leur réfringence apparait beaucoup plus nettement. Même aspect
des cornes postérieures. Le canal de l'épendyme est conservé. Son
épithélium est intact ; on y distingue sur certains points les cils
des cellules. La trame conjonctive des cordons blancs est notable-
ment épaissie, le nombre des tubes diminué, mais la lésion est la
même sur tous les cordons. Il n'y a pas de systématisation. Les
vaisseaux sont dilatés.
Moelle dorsale. - L'aspect est le même de tout point.
t44 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
Moelle 10mbai1'c. - Les lésions sont les mêmes, la tuméfaction
des cellules et leur raréfaction sont encore plus visibles, à cause
du grand nombre des cellules motrices en ce point '. (Bourne-
ville et Pilliet, Soc. anat. 1886.)
Sur un homme de quarante ans, mort dans le ser-
vice du Dl' Besnier et atteint depuis longtemps d'hémi-
plégie, nous avons pu voir de petits foyers isolés
occupant tout un hémisphère et présentant comme
distribution, la plus grande analogie avec ceux du
malade précédent. Ils étaient seulement plus profonds
et plus accentués. Les lésions histologiques différaient
en un point de celles que nous venons de voir; c'est
dans les couches les plus profondes de la subslance
grise, et même au milieu de la substance blanche,
qu'on voyait la névroglie former des filaments nom-
breux et enchevêtrés, chargés de petites cellules rondes
et circonscrivant des aréoles qui étaient assez grandes
pour donner, en quelques points, l'aspect d'un tissu
finement celluleux.
Les plaques jaunes trouvées dans ces cas sont sans
doute des foyers de ramollissement, car a la coupe,
ils ont tous la forme d'un cône à base périphérique et
les parois ne sont pas dilacérées. Comme il n'existe
nulle part, dans les autres organes, de point de dé-
part d'embolies multiples, on est conduit à admettre
un ramollissement par thrombose artérielle, comme
celui qu'on peut voir chez certains vieillards déments.
Nous rapportons ces faits il cause de la coexistence de
taches grises d'encéphalite au voisinage des points les
1 Les autres organes, larynx, estomac, foie, rate, coeur, ont été exa-
minés sur des coupes et ne présentaient pas d'autres lésions que leur
état légèrement atrophique, semblable à celui qu'on trouve dans les lé-
sions de dénutrition.
LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE G1USE. '145
plus altérés, quoique nous ne puissions indiquer les
relations réciproques de ces deux lésions.
Conclusions. - On voit que les lésions qui ont été
décrites dans les observations qui précèdent portent
sur les vaisseaux, qui sont dilatés, multipliés, avec
gaines épaissies ou infiltrées de leucocytes et de gra-
nulations. Elles portent sur la névroglie qui est épaissie
à noyaux multipliés, opacifiée, puis fibrillaire, puis
enfin vacuolée, et ces lésions se présentent sous la
forme de points, puis de taches qui peuvent devenir
confluentes. Nous avons décrit, en regard de ces alté-
rations névrogliques, la formation de véritables bandes
cle sclérose, pour qu'il ne puisse y avoir aucune erreur
sur les faits exposés ; enfin les cellules pyramidales
présentent tous les degrés d'atrophie. Nous n'avons
pas insisté sur leur vacuolisation, qui dépend trop
souvent des réactifs pour qu'on puisse s'y arrêter. Du
côté de la substance blanche, il est facile de voir son
atrophie; la multiplication des noyaux des petites
cellules, l'abondance des corps granuleux, mais non
le reste. Les lésions diffuses que nous avons pu voir
dans la moelle, échappent à tout essai de systématisa-
tion. Ne pouvant rien dire de précis sur la pathogénie
de ces lésions, nous avons préféré n'en pas parler.
Par suite de l'emploi de l'alcool pour fixer les
pièces, il nous était impossible de rechercher les lé-
sions des fibres conductrices. Les fibres fines à myéline
delà couche superficielle des circonvolutions, les fibres
arquées qui relient chaque circonvolution en passant
sous le vallon intermédiaire, le réseau qui occupe la
couche la plus profonde de la substance grise, enfin
BOCH : OEVll.l.E, Bicêtre, 1889. 10
146 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.
les fibres descendantes de la substance blanche de-
vaient nous échapper. C'est là une grosse lacune, et
qui laisse fort incomplète cette étude. Il en est une
autre. Comme nous ne pouvions traiter par une série
de réactifs, les pièces que nous possédions, de façon
à débrouiller l'histoire naturelle de la production des
lésions, il s'ensuit que nous n'avons pu les rattacher,
surtout celles de la névroglie, à l'état normal, montrer
quels éléments s'hypertrophiaient, quels s'atrophiaient
et comment s'accomplissait cette évolution. Aussi,
nous sommes-nous bornés à un travail purement des-
criptif, à l'examen d'une série d'aspects. C'est tout ce
que nous a permis de faire la difficulté du sujet, et
ces faits bruts étaient trop incomplets pour que nous
puissions nous en servir pour échafauder les hypothèses
applicables à la clinique et entreprendre d'écrire l'his-
toire de l'anatomie pathologique des cerveaux d'idiots.
Cruveilhier disait, il y a déjà bien des années : « De
toutes les maladies dites mentales, il n'en est aucune
sur laquelle l'anatomie pathologique soit appelée à
jeter un plus grand jour que sur l'idiotie. » Le temps
où cette parole du grand anatomiste français se réali-
sera est peut-être encore lointain, nous nous estime-
rons heureux si nous avons contribué, pour la plus
faible part, à le rapprocher.
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On trouvera, en outre, un grand nombre de faits se rapportant
à l'encéphalite chronique dans l'Index des chirurgiens américains,
dans l'Index médicus ; l'excellent article du Dr Arnozan dans le
Dictionnaire encyclopédique, les congrès annuels des aliénisles
allemands et les journaux spéciaux, surtout les Archives de Neu-
rologie.
III. ,
Une famille d'hystériques
(jeunes garçons et JEUNES pilles)
Par 30LiR1VlE`CT17LL'IE et P. ? OLLIER
Bien que, aujourd'hui, il ait été publié un grand nombre
d'observations sur l'hystérie des enfants et que ce chapitre de
pathologie soit bien connu depuis les leçons de notre maître,
M. Charcot, nous croyons utile de rapporter les observations
suivantes, surtout parce que les malades appartiennent à la
môme famille et qu'ils ont pu être suivis durant plusieurs
années.
Observation I. Père nerveux, szijets à des névralgies de la face.
- Deux grands oncles paternels, excès de boisson. Mère,
nerveuse, irritable. - Grand-père paternel, excès de boisson. -
Grand'mère maternelle phthisique, nerveuse, migraineuse. Soeurs,
attaques de nerfs. - Frère, accès de somnambulisme. - Frère, con-
vulsions de l'enfance, blésité.
Accès de cris de un à cinq mois. - Convulsions internes à trois se-
maines. Premières dents à huit mois; marche à un an; blésité ;
fièvre typhoïde à onze ans avec accidents cérébraux. - Fugue ci
douze ans et demi, débutant après un étourdissement et accom-
paginée d'hallucinations de la vue. - Première attaque à quatorze
ans et demi. - Etoiii-dissements, vertiges, attaques fréquentes,
limitées à la phase épileptoide. - Stigmates hystériques.
Hypnotisme : - Description des attaques : Aura; attitude du
- Crucifcement; - arc de cercle; délire, hallucinations. - Coi2trac-
ture consécutive des doigts ; vertiges. Caractères du sommeil. -
Evasions de Bicêtre. - Fugue de la maison paternelle.
100 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.
Lav... (Eugène), né à Ivry, le 16 mai 1870, est entré à l'hospice
de Bicêtre (Service de M. BOUR;'OEVILLE), le 21 avril 1885.
Renseignements fournis par sa ? KCt'e. FcM, cinquante-trois ans,
bandagiste, assez fort, marié à vingt-quatre ans, n'a jamais fait
de maladies depuis, n'a que des « douleurs névralgiques dans la
tête », sans vomissements, limitées au côté droit, revenant autre-
fois tous les mois, aujourd'hui tous les deux ou trois mois. Assez
nerveux ; bon caractère... Enfant naturel. Pas de maladie de peau,
pas de trace de syphilis ; pas d'attaques de nerfs. On ne sait s'il a
eu des convulsions dans l'enfance. Jamais d'excès de boisson, ne
fume pas. [Père, rentier, sobre, mort vers soixante-dix ans, on ne
sait de quoi. - Mère, morte vers soixante-cinq ans, domeslique
dans un château. A eu son enfant vers trente ans alors que son
maître, le père, en avait cinquante-cinq. On ne sait de quoi elle
est morte. - Ni frères, ni soeurs. - Deux oncles maternels faisant
des excès de boisson. - Grands parents paternels et maternels, pas
de détails. - Pas d'aliénés, d'épileptiques, de suicidés, etc., etc.]
Mère, quarante-huit ans, couturière, petite, brune, n'aurait pas
eu de convulsions dans l'enfance, pas de migraines ni de névral-
gies. Très nerveuse, très impressionnable, ainsi qu'elle en a donné
la preuve ici même, comme nous le verrons plus loin. Elle assure
n'avoir jamais eu d'attaques. Mariée à dix-huit ans. Aucune mala-
die, sauf des accidents suite de fausses couches. [Père, disparu eu
1870, boulanger ; nombreux excès de boisson, mais surtout après
la naissance de sa fille. - Mère, morte de phthisje galopante à
cinquante-sept ans ; nerveuse, mais sans attaques de nerfs, sujette
à des migraines avec vomissements. Grand-père paternel, mort
très âgé, on ne sait de quoi. - Grand'mère paternelle, morte très
âgée, pas de détails. - Grands parents maternels, morts à soixante-
dix et soixante-dix-sept ans, on ne sait de quoi. - Soeur morte du
croup, à dix-huit mois. - Pas de frère. - Pas d'aliénés, d'épilep-
tiques, etc., dans la famille. - Pas de consanguinité. - Inéga-
lité d'âge de 5 ans.]
Douze enfants : 1° Garçon de vingt-huit ans; pas de convulsions,
intelligent ; géologue. Marié, pas d'enfants; très rangé; -2° Fille,
vingt-cinq ans, pas de convulsions ; à dix-huit ans, peur, suspen-
sion des règles, petites attaques de nerfs; blanchisseuse, pas d'en-
fants; - 3" Garçon, mort à sept ou huit mois 4° Garçon,
vingt-quatre ans ; pas de convulsions. Accès de somnambulisme la
nuit, de dix à vingt-deux ans; le dernier il y a deux ans; le matin
il s'est trouvé couché par terre, la fête penchée en arrière, dans
une malle ouverte, un matelas par-dessus lui; sa chambre en
désordre, son argent disséminé dans la chambre. Il n'avait pas
bu, il ne boit jamais ; 5" Fille, morte d'une angine couenneuse( ? ),
111 STÎ : ftO-PILEPIC. C. 151
à quatre mois. Pas de convulsions ; - 6° Fille, vingt ans ; pas de
convulsions, pas d'attaques de nerfs ni de migraines; intelligente;
- il' Fille, morte il vingt et un mois, aux Enfants assistés ; z
8° Notre malade ; 9° Fille, douze ans ; pas de convulsions, intel-
liâenle' ; 10° Garçon, dix ans, aurait eu des convulsions à six
semaines et en aurait eu à diverses reprises jusqu'à sept ou huit
mois ; intelligent, mais il « zozotte un peu en parlant » ; -
11° Garçon, huit ans et demi ; pas de convulsions, bien portant,
intelligent; - 12° Fille,morte d'une variole noire en 1880, à un an.
Notre malade. - Au moment de la conception, les parents étaient
bien portants. Grossesse bonne, ni traumatisme, ni alcoolisme, etc.
- Accouchement à terme, naturel, sans chloroforme. A la naissance,
bel enfant, pas d'asphyxie. Elevé au sein par sa mère, sevré à
treize mois. D'un à cinq mois, accès de cris attribués par le méde-
cin aux coliques. A trois semaines, petites convulsions internes :
immobilité, occlusion des yeux, pâleur de la face, durée de trois
quarts d'heure. Puis cinq ou six petites crises à partir de là jusqu'à
quatre mois, mais beaucoup plus courtes, de dix à quinze minutes
au plus. Jamais d'autres convulsions. Première dent vers sept ou
huit mois, puis elles ont poussé vite et il les avait toutes à dix-
huit mois ; marché à un an ; a commencé à parler vers un an ; il
a « zozoté » toujours un peu et encore maintenant. Sa mère nous
dit qu'elle faisait de même, étant jeune. Propre à un au. Envoyé
à l'école à quatre ans, apprenait bien.' Fièvre typhoïde à onze ans,
avec accidents cérébraux. l'as de troubles intellectuels consécutifs.
Dans son délire, il voyait toujours des hommes avec des fusils qui
voulaient le tuer. Après la fièvre typhoïde, il a grandi beaucoup et
était un peu nerveux. Placé comme apprenti imprimeur vers douze
ans et demi, on était content de lui. Il était régulier. Le 6 jan-
vier -18811, alors qu'il était employé depuis près de six mois, il est
parti comme d'habitude sans présenter rien de particulier. Le
soir, ne le voyant pas rentrer, son père va à l'atelier. On ne l'y
avait pas vu. On fait des démarches à la préfecture, chez les com-
missaires de police, mais il revient spontanément le 13 janvier
seulement, sept jours après son départ. Le sixième jour, il s'était
rendu à Argenteuil en face de la gendarmerie. 11 a demandé où
il était, et il s'imaginait être parti le matin à son travail. Il n'a-
vait pas ou peu mangé, car une partie des aliments qu'il avait
emportés de la maison pour l'atelier était encore intacte.
Il a couché à la gendarmerie et, le lendemain, après l'avoir fait
manger un peu, on l'a renvoyé. Il est rentré chez lui méconnais-
sable, les yeux hagards, le visage décomposé, rompu de fatigue.
' Elle a eu depuis ces renseignements des attaques d'hystérie. Nous
y reviendrons plus loin.
152 UNE FAMILLE I)'II'ISTI'sR1(UES.
Il disait que tout le temps, il voyait quatre pattes de chien et un
grand mur blanc. Place Notre-Damc, il aurait eu comme un étour-
dissoment et, à partir de là, il aurait eu cette vision d'un mur
blanc. Dans sa course, il se rappelle avoir Lu souvent de l'eau.
Rentré à la maison, il voyait encore des pâlies de chien sur ses
draps. Il est revenu complètement à lui au bout de trois ou quatre
jours. Il retravailla à l'imprimerie jusqu'en mars ; puis eut une
bronchite. Auparavant, il n'avait pas de céphalalgies, pas de
secousses. Parfois il avait des cauchemars la nuit, criait, voyait
quelqu'un qui voulait le tuer. Pas de terreurs, pas d'étourdisse-
ments. Il n'avait jamais fait l'école buissonnière et n'avait pas de
raison de s'en aller. Après sa bronchite, il a décidé qu'il serait
marin. 11 est parti le 5 octobre pour Brest, très bien portant,
n'ayant pas eu de nouveaux accidents.
Il était mousse sur le vaisseau-école J'Auslcrlil : , à Brest, quand,
à la suite d'une grande colère, causée par les taquineries d'un de
ses camarades, et dans laquelle il s'élait jeté sur lui et l'avait
battu, il fut pris un quart d'heure après d'une première attaque.
C'était vers le 15 décembre 1884. La seconde attaque eut lieu
quinze jours plus tard. Le médecin de marine aurait alors déclaré
qu'il était atteint d'hystéro-épilt : psic, et il fut renvoyé le 4 jan-
vier 1885. Depuis cette époque, il a eu une attaque le 9 janvier, puis
de quinze en quinze jours, la dernière le 15 mars. 11 entra à
Sainte-Anne le 14 avril, et le 16, le 17, le 18 et le 19 avril il eut
une attaque chaque jour ; le 20 il en eut deux.
23 avril. - Le 21, à son entrée, on lui a retiré du tabac, une
pipe et un couteau qu'il avait dans ses poches, ce dont il fut très
mécontent, prétendant qu'à Sainte-Anne on le laissait fumer et
qu'il n'était pas à Bicêtre dans une prison. Dès son arrivée, il
s'e.'t mis en rapport avec les plus indociles de ses camarades, B...
et A... ; B... lui a indiqué les endroits par où il pourrait se sauver.
Ils devaient, avant de s'évader flanquer une trempe au garçon ».
Ce complot a été révélé le matin par des camarades. Alors qu'il
était au parloir de la section, et pendant qu'il était en conversa-
tion avec sa mère, il désigna du doigt le garçon S..., en disant de
lui : « C'est une vache, une canaille, etc., etc. Puis il tomba
immédiatement et eut une attaque qui dura trente secondes.
Après cette attaque, il apostropha de nouveau le garçon et essaya
de se livrer sur lui à des actes de violence qu'on eut quelque peine
à empêcher. La mère et ses deux autres enfants âgés de treize et
dix ans ont prêté secours au malade en se jetant sur les gens de
service et en les frappant à coups de parapluie. La mère expulsée
du quartier est revenue aussitôt après plus excitée, et, repousséc
de nouveau, a causé du scandale dans la cour de l'administration
en vociférant des injures, se traînant par terre, etc., etc. Lav... a
III STI.RO-)JPILPPSII;. 153
été camisole ' et emporté à l'infirmerie dans un état de grande
surexcitation. On a dû l'attacher une partie de la journée. Vers
deux ou trois heures de l'après-midi, il est devenu raisonnable et
fut maintenu, pour plus de précaution, à l'infirmerie.
Etal actuel. Mai 1S83. Tête arrondie. Pas de saillies exagérées
des bosses occipitales ni pariétales. Front peu élevé et peu large,
sans saillies frontales. Arcades sourcilières assez saillantes. Yeux
bleus. Ne : aquilin. Bouche petite, lèvres épaisses. Menton légère-
ment pointu. Visage ovale. Pas d'asymétrie faciale. Oreilles un
peu écartées, bien ourlées, lobule adhérent.
134 UNE FAMILLE D'HYSTERIQUES.
vers le front; une pression plus forte détermine des étourdisse-
ments; 3° légère rachialgie au niveau de l'apophyse épineuse
de la troisième dorsale ; parfois douleurs spontanées après les
attaques : par la pression picotements sans irradiations. La sensi-
bilité est conservée; - 4° au niveau de la onzième dorsale point
douloureux. Sensibilité conservée. Après les attaques il dit avoir
une douleur tout le long de la colonne vertébrale.
En avant on trouve : 1° un point sensible au-dessous du point
d'union des deux tiers internes avec le tiers externe de la clavi-
cule ; - 2° un autre point au niveau du sixième espace intercostal
des deux côtés près du sternum ;-3° un autre point des deux côtés
au niveau des flancs. La pression serait plus douloureuse à droite
et déterminerait une sensation d'oppression avec irradiation vers
la base du cou ; 4° point douloureux dans la région correspon-
dant aux ovaires chez la femme ; la pression détermine une dou-
leur irradiée vers l'épigastre en déterminant une sensation d'op-
pression. Le point abdominal est plus douloureux à droite.
La pression des testicules détermine des irradiations doulou-
reuses au niveau des points abdominaux et de l'épigastre.
Sur tous les points hystérogènes, la sensibilité est la même que
sur les régions voisines, sauf au niveau des points iliaques où elle
est un peu moins nette que sur les parties voisines.
Sensibilité spéciale. - Vision : Il distingue nettement toutes les
couleurs des deux yeux. Quand il fixe des objets un peu éloignés,
sa vue se trouble et plus vite à gauche qu'à droite, puis peu après
il voit double. Pupilles égales, normales. Pas de phosphènes. -
Ouie conservée et égale des deux côtés. - Odorat conservé aussi
des deux côtés. - Le goût est égal des deux côtés. Pas d'halluci-
nations des divers sens.
A : o'<f. Une minute avant les attaques, il se sent mal à l'aise.
Il me prend un vertige, je ne sais plus où je suis, il me semble
que tout tourne, la vue se brouille, surtout à gauche. » Sifflements
dans les oreilles, surtout à gauche aussi. Puis il éprouve une sen-
sation de constriction à l'estomac, puis à la base du cou. Il pré-
tend que durant cette phase, les phénomènes céphaliques ne sont pas
plus accusés. En même temps, les points douloureux sous-mam-
maires et le clou hystérique sont plus marqués. Il pousse alors un
cri qu'il entend, puis il tombe, sans avoir, d'après lui, le temps
d'avertir.
5 mai. - Le malade a été pris à 10 heures d'une attaque, sans
avoir prévenu, sans pousser de cri. Il est tombé comme une
masse. Rigidité générale, les jambes allongées et écartées et les
bras en croix, la tête dans l'extension. Puis à six reprises dill'e-
rentes il s'est mis en arc de cercle. Nous le vovons à 10 h. 5.
HYSTÉRO-ÉPILEPSIE. 155
Il est étendu sur le sol dans la situation indiquée plus haut ; puis
ares de cercle complets durant vingt secondes. Repos. - A 10 h. 6,
nouvel arc de cercle, après lequel il retombe. Flexion violente,
puis mouvements désordonnés des jambes, en même temps qu'il
se gratte la poitrine. - A 10 h. 7, repos en extension, les membres
inférieurs rigides. Bras rapprochés sur la poitrine. Ecume. Nouvel
are de cercle durant sept à huit secondes. Il retombe. Corps en
extension, pieds un peu écartés, bras étendus en croix. Cou et
tête en extension, yeux fermés, face colorée, poings fermés. -
A 10 h. 8, arc de cercle passager. Retombe étendu avec même
attitude des. bras et des jambes que tout à l'heure. - A 10 h. 9,
tortillements sur place d'abord, puis avec déplacement. - A
10 h. 10, le malade revient à lui subitement, ouvre les yeux qui
jusqu'alors étaient constamment fermés. Il demande un 'mouchoir
pour essuyer l'écume qui est abondante. Lucidité complète. La
face, qui était rouge reprend sa coloration habituelle. Les pupil-
les qui étaient moyennement dilatées diminuent à peu près de
moitié. Il se plaint de céphalalgie et de douleurs dans les reins,
La température rectale prise cinq minutes après l'attaque est
de 380,5. (Fig. 17 et 18.)
11 mai.- (10 h. 5). Attaque commencée depuis deux ou trois
minutes, précédée cette fois d'un étourdissement très court de
deux à trois secondes (impression recueillie après l'attaque). Il a
poussé une courte exclamation « Ah ! » et est tombé sur le dos.
Fig. 17. - Attitude du crucifiement.
l'ig. 15. - Arc de cercle. ,
156 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.
Extension, les jambes écartées. Ecume abondante. Sitôt qu'on lui
laisse les bras libres, il déchire sa veste. Arcs de cercle passagers
répétés à deux ou trois reprises. Résolution musculaire. Rigidité
avec légers mouvements convulsifs des mains et des pieds qui
frappent le sol en produisant un bruit assez régulier. Il se soulève
en arc reposant sur les talons et sur la tête, puis sur le genou
gauche, la jambe droite étant étendue et la tête soulevée avec le
tronc en extension. 11 retombe du reste presque aussitôt en exten-
sion sur le dos. Mâchonnement.
10 h. 15. - Arc de cercle, puis rotation du tronc du côté gau-
che. Face congestionnée, mains fermées, le pouce replié sur la
face dorsale des autres doigts. Ecume abondante. Repos. Arc de
cercle transitoire. Extension, les jambes écartées, les bras eu
croix. Yeux légèrement convulsés en haut et en dehors. Difficulté
d'écarter les paupières. Rigidité. Légère plainte ; il se soulève sur
les pieds, puis retombe lourdement en arrière. Extension puis repos.
10 h. 17. - Légers mouvements convulsifs des mains et des
pieds. Quelques arcs de cercle.
10 h. 20. - Il se lève seul assez rapidement et répare le désor-
dre de ses vêtements. 11 se plaint de douleurs à la tête et aux
reins. Pupilles un peu dilatées, mais égales. Connaissance par-
faite. Pas de morsure de la langue. Pas d'évacuation involontaire.
Il prétend qu'il se mord quelquefois la langue. T. Il. après
l'attaque, 37°,Ir.
15 mai. - Pris d'une attaque à 9 h. 38. A 9 h. 40, on le trouve
couché sur le parquet, étendu, les jambes allongées et légèrement
écartées. Bras étendus obliquement en haut. Tête dans l'extension.
Mains fermées, les pouces en dessus. Ecume mousseuse, abon-
dante, face légèrement colorée. Paupières closes. Arc de cercle.
Tortillement avec mouvements de translation qui le porleut à 2
ou 3 mètres plus loin. 11 se remet en X. Bruits buccauxsuivis d'arc
de cercle. Se remet en X; écume abondante ; moiteur froide de la
face. Paupières fermées. Il tapote le parquet avec les mains et
les pieds. Nouvel arc de cercle. Se remet en X. Repos. Il tapote
avec les pieds et les mains, cherche à se déchirer le cou et la partie
supérieure de la poitrine. Repos. Les épaules sont rapprochées.
Nouvel arc de cercle. Agitation. Repos. Bras et jambes écartées
en X. Pupilles dilatées, égales (9 h. 48. 11 se relève à 9 h. 49, sans
rien dire, répare le désordre de ses vêtements. La face qui était
légèrement colorée reprend sa coloration naturelle. A 9 h. ? 0, les
pupilles ont diminué. Il se plaint de douleur à la tête et aux reins.
'l'. H. 38»,2.
20 août. - La veille, il a eu une série d'attaques de 8 à 9 heures
du soir. Dans le délire terminal, il ne parlait que de bâtiments de
guerre et de marine; il commandait en chef; il était continuel-
FIYSTIRO-RPI1.I : PSIE. 157 I
lement il son poste ; il fallait sabrer et tuer tout ce qui se trouvait
sur son passage. Il paraît qu'il voyait un chien rouge.
21 août. - Il se couche à 6 heures et demie ou 7 heures. Le plus
souvent, il s'endort très lentement, à 11 heures, 11 heures et
demie ; pas d'hallucinations hypnagogiques. Une fois endormi, il
rêve beaucoup. Ainsi, avant-hier, après son attaque, il voyait le
veilleur se promenant sur les toits, sautant d'un toit sur l'autre.
Une fois, il a rêvé qu'il était poursuivi par des sauvages munis de
fusils, tandis qu'il n'avait qu'une arbalète, mais il leur disait que
son arbalète portait plus loin que leurs fusils. En général, pas de,
cauchemars. Dans la nuit, son sommeil est profond, mais à
partir de 4 heures du matin, « le moindre bruit le réveille ». S'il
ne se lève pas, il se rendort très vite. Parfois, dans la journée,
il a la tête lourde, et a des envies de dormir. Cela lui arrive, sur-
tout quand il a eu beaucoup de vertiges.
Ces vertiges sont revenus depuis le mois de février, mais il en
avait en déjà il y a 2 ans environ. La tête lui tourne, et il lâche
ce qu'il a dans les mains. Parfois, il voit noir avec des petits
points rouges et bleus, d'autres couleurs, ou bien des elJipsesrégu-
lières. Il voit des cercles colorés qui arrivent du côté gauche et
qui, une fois au-devant de l'oeil droit, remontent et disparaissent.
Il ne tombe pas, et reste debout. Il assure ne pas perdre connais-
sance et entendre tout ce qui se dit autour de lui. Il prétend que
parfois il lui arrive de continuer ce qu'il était en train de faire,
mais alors que ce qu'il fait est mal fait. C'est ainsi qu'un jour, il
l'atelier, pris d'un vertige au moment où il taillait un talon, il a
continué à le tailler, mais l'a fait pointu.
Parfois, il aurait une dizainede vertiges dans une journée, d'au-
tres fois.il n'en a pas du tout. C'est surtout avant et après ses atta-
ques qu'il en a le plus.
On essaie d'endormir le malade par le regard. Il est assis; au
bout d'une à deux minutes les yeux commencent à s'humecter, il
y a quelques palpitations des paupières et il lâche les pouces de
l'expérimentateur qu'il tenait serrés. Les paupières s'abaissent t
légèrement, mais il paraît se réveiller. 11 semble imiter les yeux
de l'expérimentateur. Celui-ci, à un moment donné, ayant ouvert
plus largement les yeux, il le fait lui-même aussitôt. Bientôt les
yeux se portent à différentes reprises en haut et en dedans et les
paupières s'abaissent. Il a quelques mouvements de déglutition.
Pas de stertor. La tête elle-même n'est pas tombée. L'excitation
du stcrno-masloïdien ou des muscles de l'avant-bras ne déter-
mine pas de contracture. On cherche à ouvrir l'oeil gauche, mais
il ne reste pas ouvert. On commande au malade de se lever, ce
qu'il fait. Il suit d'abord assez bien, puis s'arrête un moment. On
lui commande de nouveau, il vient, mais lourdement. On le fait
158 UNE FAMILLE D'IIYSTÉRIQUE5.
asseoir et on lui dit de compter ; mais le plus souvent il ne conti-
nue pas spontanément.
Les paupières étant fermées, on soulève le hras droit qui con-
serve l'attitude qu'on lui donne. Le bras gauche soulevé se main-
tient aussi. Au bout d'une minute, ou voit le malade se pencher
sur le côté droit et devenir tout raide. Il était pris d'attaque. Il
n'a pas poussé de cris. Tout le corps est rigide. On le couche sur
le parquet et presque aussitôt, sans avoir eu de secousses cloni-
ques, il fait l'arc de cercle. Il est alors 10 h. 7. Il est ensuite éten-
du, les bras au-dessus de la tête, les jambes allongées, les pieds
écartés. Il est alors immobile, la face rouge, les paupières closes,
les pupilles dilatées. Ecume. Deuxième arc de cercle, puis repos.
Troisième arc de cercle, même repos, même attitude, les poings
fermés. Ce repos est plus long, la tête est droite, les doigts fer-
més, le pouce par-dessus; les quatre membres sont raides, les
jambes écartées. Nouvel arc de cercle, après lequel i ! retombe.
Il fait des grimaces, ouvre largement la bouche, crispe les mains,
se tortille, et se déplace. Il tourne la tête, ouvre et ferme les
mains, cherche à prendre le parquet, qu'il frappe avec le bras.
Quelques secousses des membres inférieurs qui se replient, s'allon-
gent, se soulèvent. Il reprend l'attitude en X, puis reste un peu
immobile. Puis, il ouvre les yeux, regarde d'un air étonné, mâ-
chonne. Interrogé, il dit qu'il a mal à la tête. Les pupilles ont
repris leurs dimensions normales. La durée a été de sept minutes.
21 août. - On l'endort par le regard à 10 h. 37 et on lui fait
exécuter un certain nombre d'ordres les yeux fermés. Par la per-
cussion longtemps répétée des muscles de l'avant-bras, on obtient
une contracture très prononcée des doigts. Il se réveille sponta-
nément, sans mouvements spasmodiques, sans attaque à 10 h. 50
et parait étonné.
27 août. - A 9 h. 21 l'enfant, qui était assis, se lève et tombe
la face contre terre. Ecume dès le début. Il reste immobile, raide,
puis fait l'arc de cercle. Il retombe, se place sur le côté gauche,
puis sur le dos, raide, les bras en croix. Arc de cercle, puis attitude
de crucifiement sans raideur des bras, mais avec raideur des jam-
bes et de la tête qui est tournée à gauche. Puis il frappe le sol de
ses deux poings fermés, le pouce en dehors (9 h. 29). Il déboutonne
sa chemise et se gratte le devant de la poitrine. La tête et les
jambes sont raides; la face est tournée à droite, puis à gauche.
Arc de cercle après lequel il retombe et prend l'attitude du cruci-
fiement, les poings fermés. Raideur générale, tête à droite, pieds
il gauche. Il se relève à 9 h. 36. La durée a été d'un quart d'heure.
Ecume pendant toute l'attaque.
A 10 h. 13, il s'endort au bout de trois minutes par le regard.
On lui ordonne de se lever ; il se lève et suit l'expérimentateur
autour d'obstacles divers (chaises et personnes). On lui trace sur
HYSTÉRO-ÉPILEPSIE, 159
l'avant-bras droit, en avant, un N avec un crayon. On lui dit qu'il
a cette lettre sur le bras et qu'elle doit saigner demain à 9 heures.
On le réveille en lui soufflant sur les yeux.
28 août. - Hier il a eu deux attaques. Après ces attaques, puis
ce matin encore, il se serait plaint de ressentir une brûlure sur
presque toute la face antérieure de l'avant-bras droit, ce qu'il
explique par une fausse position qu'il aurait prise. Il dit n'avoir
rien ressenti à gauche. Il a eu ce matin une attaque depuis 8 h. 25
jusqu'à 9 h. 20. A 9 heures ni plus tard on ne voit pas trace de
la lettre N sur le bras.
30 août. - Congé jusqu'au 3 septembre. A partir du 4 septembre,
douches deux fois par jour.
8 décembre. - A eu deux attaques à la Sûreté où il avait été
envoyé pour sa mauvaise conduite.
1886. 18 janvia. - Etant en congé depuis le 27 décembre, il
aurait eu deux attaques très courtes.
11 février. Il a eu trois attaques depuis le 28 janvier : le 1er,
le 2 et le 10 février, qui n'ont pas duré plus de deux à trois minutes.
Il travaille chez un cordonnier et sa mère assure qu'on est content
de lui. Il a suspendu ses douches depuis cinq jours à cause du froid.
25 février. - Puberté : Visage glabre. Poils châtains, assez
abondants à la partie inférieure du pénil et à la racine des bourses
dont le reste est glabre. Testicules égaux, de la grosseur d'un oeuf
de pigeon. Verge bien développée. Gland en partie découvrable,
méat normal. Quelques poils à l'anus et aux aisselles. Sensibilité
au contact, à la douleur, à la température, moins vive à gauche
qu'à droite. A eu une attaque le 24 février. Ne travaille plus à l'ate-
lier faute de cordonnerie, parce qu'on manque de cuir.
5 mars. - Il n'avait pas eu d'attaques depuis le 24 février et
n'avait ou que très peu d'étourdissements. quand, ce matin, il
a eu plusieurs vertiges, dont l'un a été très prolongé. Il voyait
tout trouble : « C'est à peine si j'y voyais assez pour me diriger. »
Après sa douche la faiblesse des jambes et les éblouissements ont
disparu. Mais au bout d'une demi-heure il a été pris d'une grande
attaque qui a duré environ cinq minutes. Traitement : douches,
tisane de valériane, bromure de camphre.
Etourdissements : La vue devient trouble, tous les objets tournent
sur eux-mêmes, ◀tantôt▶ dans un sens, ◀tantôt dans l'autre. Il voit
des cercles ou des ellipses, verts, bleus, jaunes, qui restent fixes.
Pas de bourdonnements d'oreilles. Faiblesse des jambes. Il laisse
tomber les objets qu'il tient, mais continue à marcher machinale-
ment. Durée de moins d'une minute. Il a de un à trois vertiges par
jour, surtout le matin au réveil. Un jour, il en a eu une trentaine.
160 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.
leur avril. - Depuis la semaine dernière, trois où quatre vertiges
au plus. Pas d'attaques. Il se sent bien. Même traitement.
15 avril. A eu une attaque hier, qui a duré dix minutes. Il
est en ce moment placé dans une autre maison.
20 mai. - A eu des crises le 28 et le 30 avril et le 3 mai. L'une
d'elles l'a pris dans la rue. Il n'a pas eu d'aura. Il ne se serait pas
débattu, et elle n'aurait duré que quelques minutes. Les autres
n'auraient pas duré davantage. Il est tranquille et sa mère est
contente de lui. Hier il s'est senti fatigue tout d'un coup en faisant
les courses, s'est assis sur un banc et s'est endormi « d'un coup ».
Il aurait dormi de 10 heures du matin à 11 heures et quart.
18 décembrc. - Depuis le mois de juillet, il n'aurait eu que deux
crises. Après avoir travaillé dans une corroirie, qu'il a quittée
parce que le travail était trop dur, il est resté quelque temps sans
place. Ensuite il s'est mis, pour le compte d'un camarade, ven-
deur de « pronostics ». Il n'aurait pas fait d'excès, ni de boisson, ni
de femmes. Il partit avec son ami pour Dieppe, où ils restèrent
trois jours, puis, s'étant trouvés sans argent, ils sontallés àRouen.
Là, L... écrivit à ses parents qu'il était sans ressources et qu'il les
attendait pour le venir chercher. Ramené par son frère, il resta
trois jours chez ses parents qui le conduisirent à Sainte-Anne.
Pendant son voyage il eut trois attaques.
1887. 3 janvier. - A repris son travail ici et s'est remis aux
douches.
12 avril. - Hier, en sortant du réfectoire, pendant que l'infir-
mier M... était en train de soigner un malade en accès, L... s'est
précipité sur lui et lui a donné de violents coups de poing sur la
figure.
8 août. - A eu une attaque ce matin. Il se plaint d'avoir les
mains fermées à la suite de ses accès et ne plus pouvoir les rou-
vrir. Souvent ses doigts se fléchissent malgré lui et il a de la peine
à les étendre.
13 octobre. - llcfus d'obéissance. Menaces aux infirmiers. Eva-
sion le soir.
20 octobre. - Réintégré à Bicêtre, promet de ne plus chercher
à s'évader.
4888. 2 janvier. - Il prétend qu'à la suite de ses attaques, ses
testicules diminuent un peu.
13 janvier. - Parti en congé le 8 janvier, il devait rentrer le 12.
Le 9, toute la journée, il est resté chez lui avec un de ses camara-
des qu'il est allé reconduire le soir à six] heures. Il n'est pas rentré
pour dîner et sa mère étant allée chez son camarade pour savoir
ce qui était arrivé, apprit qu'ils étaient partis ensemble. Le 10, il
écrivit à sa mère qu'il l'avait quittée pour ne pas lui être à sa
charge et lui demandant pardon.
HYST;RO-EPILEPsm.
161
1888. Janvier. - En quittant sa mère, le 9, il est allé à Arpajon,
sous prétexte de trouver de l'ouvrage, avec Ber... et Leco... Revenu
à Paris, il a été arrêté à la gare d'Orléans et conduit au Dépôt de
la Préfecture de police. Au bout de deux jours, ayant déclaré qu'il
avait été malade à Bicêtre, on l'a envoyé à l'infirmerie de la pré-
fecture de police où il est resté une demi-journée. De là, il a été
expédié au bureau d'admission de l'Asile clinique, puis à Bicêtre.
Envoyé en congèle 1er juillet, il n'est pas rentré. Dans la pre-
mière quinzaine de ce mois, il a eu un jour un vertige et le lende-
main une attaque. Il est resté jusqu'en septembreavecses parents,
s'occupant des soins du ménage. Alors il a travaillé chez un fabri-
cant de boutons. 11 a eu trois attaques en trois jours, et, dans la
crainte d'être renvoyé, il n'est plus retourné àson atelier. A partir
du 26 avril 1889, jusqu'au commencement d'août, il a travaillé
chez lui, à faire des racomm'odages de chaussures, c'est-à-dire
exerçant le métier qu'il a appris à Bicêtre. Il a été ensuite homme
de peine pendant deux mois et demi à l'usine à gaz située près de
son domicile, puis il a été employé pendant trois semaines à
l'abattoir de la Villette. Il a recommencé à faire de la cordonnerie
et, depuis le 25 décembre dernier, il est rentré à l'usine à gaz.
Si nous donnons ces détails, c'est pour montrer combien les ma-
lades comme lui ont de la peine à se fixer.
Voici le tableau des attaques durant son séjour à Bicêtre :
'J6 : ! UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.
ments sur leur famille sont bien vagues et les graves accidents
observés chez la plupart de leurs enfants autorisent à penser
qu'il doity avoir eu, au contraire, des tares profondes. En effet,
seule l'ainée des huit enfants survivants n'aurait pas eu de
manifestations nerveuses. La plus âgée des filles semble avoir
eu des crises hystériques. Un garçon présentait des phéno-
mènes de somnambulisme. Les autres enfants auxquels nous
avons eu l'occasion de donner des soins ont tous présenté des
phénomènes qui relèvent de l'hystérie et dont nous allons
donner une brève description.
N° 2. Lav... (Henriette), 25 ans, bandagiste.
1885. 14 août. - Depuis cinq ou six mois, elle a des points de
côté variable, et des douleurs dans la tête, surtout au niveau des
tempes. Pas de convulsions. Nerveuse, mais jamais d'attaques.
Appétit médiocre. Tympanite passagère. Pas de point ovarien.
Réglée à treize ans et demi, facilement et régulièrement depuis.
Sommeil bon; parfois rêves et cauchemars. A maigri depuis trois
ans. Travaille beaucoup et veille. Ne tousse pas. Sous l'influence
d'un traitement tonique (Fer, gentiane, bains), elle s'est remise
promptement.
Les accidents névropathiques, en somme très légers chez
cette jeune fille, ont été, au contraire, très accentués chez la
suivante.
NI, 3. Lav... (Marie), 13 ans, en 1885; bandagiste..
1885. 23 juillet. - Rien de particulier jusqu'à l'âge de six ans,
époque où elle a maigri sans raison. Il y a deux ans, en avril 1883,
elle a élé soignée pour des douleurs dans le ventre et à la tête.
A toujours été très nerveuse. Fréquents accès de colère. Pleure
facilement et cesse non moins rapidement. Le 9 juillet en ren-
trant de l'école pour déjeuner, elle a été prise à la fin du repas
de « tournoiements de tête » qui auraient duré trois ou quatre
minutes. La vue était brouillée. Elle a senti qu'elle tombait en
arrière et a appelé sa mère qui l'a trouvée renversée sur sa chaise,
les yeux grands ouverts, la bouche béante. Flacidilé générale.
On l'a couchée. Au bout de quelques instants elle a regardé et
repoussé les personnes qui l'entouraient et qu'elle ne semblait
pas reconnaitre. Puis elle est revenue à elle, a reconnu sa mère,
l'a embrassée et s'est mise à pleurer. Aussitôt après, elle est retom-
bée sans connaissance et a été prise d'une nouvelle crise. catalep-
tiforme. Elle aurait eu'cinq crises semblables dans un espace de
quarante minutes. Dans l'intervalle des crises, elle avait les yeux
hagards ; elle voyait les gens et ne les reconnaissait pas.
Elle sent des deux côtés le pincement et le chatouillement, mais
beaucoup mieux à gauche qu'à droite.
HYSTÉR0-ÉP1LEPSIE. 163
Le 12 juillet, nouvelle crise ; le 15 et le 19, nouvelles crises d'une
demi-heure environ. Pas de cris, pas de rigidité. Hallucinations.
6 ao2ît.- Depuis quelques jours, elle se débat violemment dans
ses attaques qui sont devenues plus fréquentes. Elle en a deux
par jour de trente à quarante-cinq minutes. Voici le tableau des
crises :
164 UNIT FAMILLE D'il YSTKRlQUliS.
elle cherche à saisir les objets brillants pour les porter à sa bouche
(durée de quatre à cinq minutes). Elle se donne des coups de poing
sur la poitrine, se serre le cou. Puis les mouvements cessent et elle
est prise de délire. « Ah ! le coquin, je l'attrapperai et le ferai
guillotiner. » Elle voit brûler les jambes de son frère. « Eteins-
donc le feu, maman, on brûle ! » Elle se plaignait ensuite de brûler ^
elle-même. Hier elle a vu une puce sur le nez de sa soeur et lui a
donné un coup de poing. Elle commande à sa soeur d'aller lui
chercher un singe et une tortue d'Amérique. La nature du délire
est ordinairement triste (durée de quatre à cinq minutes). Elle
revient à elle tout d'un coup et demande à manger. Pas de pleurs
ni de rires exagérés. Pas de miction abondante. La sensibilité est
conservée à gauche et très notablement diminuée à droite. Le
ventre présente un peu de tympanisme.
4 août. - Les il, 12 et 13 août, elle a eu 152, 249 et 198 crises,
dont un certain nombre avec grands mouvements d'are de cercle.
Mouvements de rotation sur l'axe, se tournant brusquement
du dos sur le ventre. Elle a perdu connaissance dans toutes les
attaques. - Points hystérogènes : douleur au niveau de l'apo-
physe épineuse de la deuxième vertèbre dorsale, s'irradiant lelong
de la colonne vertébrale, qui présente de la scoliose. Points dou-
loureux au-dessous de chaque clavicule : en comprimant un peu
fortement, elle étouffe. Point mammaire de chaque côté. La pres-
sion de ces divers points ne donne pas la sensation de boule, mais
provoque « comme des coups de marteau n. Elle distingue bien les
couleurs des deux côtés. Ouïe moins bonne à droite. Odorat et
goût, normaux des deux côtés.
26. - La pression sur la région ovarienne droite détermine une
sensation de boule remontant au larynx.
Essais d'hypnotisme par la fixation du regard. Très grande
résistance. Palpitations des paupières; les narines se dilatent;
mouvements de déglutition, mais pas de sommeil.
1er septembre. - Les douches ont été prises régulièrement,
depuis le 15 août. Les crises ont eu la marche suivante :
HYSTEIiO-EPILT.PSIE. 165
166 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.
entendit qu'elle respirait bruyamment « en raclant». S'étant levée
elle la trouva sans connaissance, la face rouge violacée, les yeux
grands ouverts, fixes, la tête immobile, les membres flasques, la
respiration très gênée. On lui a fait respirer de l'éther et elle n'est
revenue complètement à elle qu'à deux heures et demie du matin.
Depuis cette attaque, l'enfant a de la tendanceà dormir après ses
attaques ordinaires.
' HYSTÉRO-ÉPILEPSIE. 167
Elle ne s'est pas débattue. Elles ont été très courtes. Pas de pleurs
après l'attaque, ni de délire.
11 juillet. - Légère attaque le 2 juillet, une autre le 13. Ces
deux crises ont été très légères. Elle dit a Ah ! », se laisse aller,
s'affaisse, perd connaissance. A la fin, nausées. Puis elle s'endort.
Les règles ont reparu le 3 juillet. Elles ont duré six jours. Elle
continue ses douches, les dragées de protochorure de fer (Rabu-
teau), le houblon.
26 août. - Une attaque le 30 juillet chez sa patronne, blanchis-
seuse, à la suite d'une émotion causée par l'épandage d'une
bassine d'eau froide qu'elle mettait sur le fourneau et qui, en tom-
bant sur une surface chaude, répandit une grande fumée. Sa
patronne l'a remerciée de crainte que sa fille, âgée de cinq ans,
n'en eût peur 1. - Le 9 août, trois petites attaques sans cause
appréciable. - Pas de règles en août. Anémie légère. Picotements
dans les seins et les flancs. Sensation de brûlure autour de
l'oreille.
30 septembre. - L'étal reste le même. Dynamomètre Collin :
D. 38. - G. 25. Après des mouvements passifs le côté gauche
amène 28. Après avoir regardé à travers un verre rouge la main
droite donne 26, la gauche 31 ; et après avoir regardé à travers un
verre violet on a à gauche 33, et à droite 34. - A la fin de la
séance la main droite seule donne 29. Elle a eu des attaques le
20 août, les 1er, 28 et 30 septembre et le 6 octobre.
14 octobre. - Une attaque de cinq minutes. Pas de sommeil à
la suite.
2. novembre. - Pas d'attaques nouvelles. Elle est retournée à
l'école, ne prend plus ses douches depuis un mois. - Règles
régulières.
20 décembre. - Une attaque sans cause.
1887. 10 janvier. - Une attaque le 25 décembre et le 3 janvier;
deux, le 4 janvier; trois, le 5; quatre, le 6; trois, le 7; deux, le 8;
une, le 9. Elle prétend n'avoir aucune cause expliquant cette re-
chute. Tristesse de temps en temps, craignant qu'on ne la place à
la Salpêtrière. Sensibilité conservée, normale. Pas de zone hystéro-
gène. Les attaques surviennent toujours brusquement, sans
cause. Elles durent au maximum vingt, au minimum dix minutes.
A la fin des attaques, elle reste le regard fixe et sans voir, dit-on,
pendant environ dix minutes. Mais, si on lui passe la main devant
les yeux, elle a une sorte de soubresaut. L'appétit a diminué. Selles
1 Comme on le voit par l'histoire de Lav. E, et par celle de sa soeur
Marie, on les renvoie dos ateliers, ainsi qu'on les congédie de l'école;
d'où, nous le répétons, la nécessité de l'hospitalisation.
168 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.
régulières. Parfois tympanite. Pas de trouble de la miction. Les
règles sont venues le 22 décembre avec huit jours de retard. Elles
ont été très peu abondantes et ont duré quatre jours.
27. - Une attaque les 10, il et 18 janvier. Rien depuis le 19. La
malade a pâli ; elle perd beaucoup de ses forces. Les muqueuses
sont un peu pâles. Elle recommence à voir devant l'oeil gauche
des cheveux qui passent. Sa vue se brouille. Les règles n'ont pas
paru le 22. Sommeil prolongé et lourd, sans cauchemars.
3 mars. - Nouvelles attaques le 3, le 4, le 5 et le 10 février.
5 août. -Marie n'a pas eu d'attaques depuis le 10 février. Réglée
périodiquement. Appétit régulier. Travaille bien. Zone hystérogène
dans la région ovarienne droite. La sensibilité parait normale des
deux côtés. Rachialgie légère au niveau de la cinquième côte dor-
sale avec irradiation dans l'épaule gauche. Envies de pleurer assez
fréquentes. Exigeante. Continue les douches.
22. - Pas d'attaques. Le 17 août, engourdissement de la main
gauche et du poignet qui a disparu au bout d'un quart d'heure
après des frictions. Les engourdissements sont revenus tous les
jours durant quelques minutes. Pas de contractures.
1889. Décembre. - Depuis le mois d'août 1887, jusqu'à la fin de
l'année, il lui est arrivé deux ou trois fois de se trouver mal sans
avoir de grandes attaques. En 1888, elle n'a eu ni crises, ni ver-
tiges, ni syncopes, mais elle était nerveuse et colère. Elle s'est
mariée le 12 février 1889 et est accouchée d'une fille vers le milieu
du mois de décembre. Elle n'a pas eu d'attaques. Durant cette
période elle a travaillé d'abord chez un bandagiste avec sa soeur,
puis a été trois semaines blanchisseuse. Ce métier étant trop
fatigant, elle s'est remise aux bandages. Actuellement elle tient un
hôtel meublé à Saint-Etienne.
Nous nous bornerons à mentionner : les mouvements de
rotation sur l'axe du corps, l'hémianesthésie gauche, la pré-
dominance des phénomènes de l'aura du même côté, les atta-
ques syncopales, l'arc cercle, les hallucinations, le délire de
parole, les tentatives pour mordre les personnes qui l'entou-
rent, ou pour se frapper elle-même. Disons enfin, que c'est aux
douches et aux toniques que nous avons dû la disparition des
crises nerveuses. ? 4. Lav... (Joseph), onze ans, en 1886; lablettier.
1886. 8 mars. L'enfant qui d'habitude n'est pas peureux, et
dort bien, a été pris, au moment d'aller à l'école, où il va volon-
tiers, d'un malaise, puis il s'est mis à sauter comme s'il avait des
secousses dans les épaules. Il faiblissait sur ses jambes. Le soir, il
HYTÉR-LO -ÉpiirpslE. 169
tremblait encore. Tout lui faisait peur, il ne voulait pas rester seul
dans sa chambre. Il se plaignait que, en marchant, ses doigts de
pieds restaient raides dans ses souliers. Le visage était altéré, les
yeux hagards, le son de voix changé. Il a mangé un peu. Il a uriné
dans son pantalon sans s'en apercevoir. Une fois couché avec son
petit frère, il voyait des gendarmes qui emportaient des femmes
mortes, un homme qui emportait sa soeur Marie. Pendant la nuit,
en dormant, il a encore eu des secousses. Le 9 mars, il n'a pas eu
de secousses, mais la figure était encore un peu égarée. Le 10, il
aurait eu quelques secousses, mais très faibles. - Traitement :
bains alcalins, tisane de houblon et de valériane, bains de pieds
tous les soirs.
25. - Pendant huit jours, les peurs et les secousses ont à peu
près complètement disparu. Depuis cinq ou six jours, il est rede-
venu très peureux. Les mouvements sontbrusques. Sommeil agité,
remue beaucoup. Urine parfois au lit (7 à 8 fois depuis le le, jan-
vier).
ler avril. - Il est tranquille dans le jour. Le soir, ses peurs aug-
mentent. S'il est assis, par exemple, en train de travailler, et que
quelqu'un ouvre la porte, il est aussitôt pris de peur, s'empare du
premier objet de défense qui lui tombe sous la main, et se préci-
pite vers la personne qui vient d'entrer. Il la saisit par le bras et
la menace en poussant une sorte de gémissement menaçant. Aus-
sitôt que la personne lui a parlé, sapeur cesse. Il se met à pleurer
en disant qu'il a fait du mal. S'il rentrait dix personnes de suite,
il avait dix fois les mêmes crises. La nuit, sommeil agité, rêves,
mais non cauchemars. Fonctions digestives régulières. Légère
céphalalgie frontale droite. Il a pâli un peu, les yeux sont souvent
cernés. Pas d'onanisme. Pas de vers. Il n'a pas d'accès de colère,
n'est pas méchant. Il continue à aimer jouer et n'est pas devenu
plus irritable. - Traitement : bromure de camphre, tisane de
valériane, bains de pieds, bains alcalins.
15. - Amélioration notable. N'a plus de peurs. Retourne à
l'école. Il est un peu plus irascible qu'autrefois. Lui qui était très
doux, il a des tendances à devenir méchant.
1889. Décembre. -II Il n'est plus peureux, mais il est toujourssujet
à se mettre en colère. Parfois il rêve et cause tout haut, mais n'a
plus de cauchemars. Développement physique un peu arrêté.
N° 5. Lav... (Paul), neuf ans.
1885. fer octobre. - Le soir en mangeant il a perdu complète-
ment connaissance. On l'a porté sur un lit et il a eu huit crises ce
jour-là, de cinq heures et demie à huit heures et demie, sans
cause appréciable. Pas de cri initial. Il cherche dans ses crises il
marcher sur les mains et sur les pieds, les appuie contre le mur,
cherche à mordre. Revenu à lui, il s'est souvenu de ce qui s'était
170 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.
passé, disantà sa mère qu'il avait dû lui faire mal, et qu'il l'avait
mordue. C'est la première fois qu'il aurait été malade. Il n'a
jamais eu aucune affection dans son enfance. Il n'est pas peureux.
Traitement : tisane de valériane, bains.
17 décembre. - Depuis la dernière visite il a eu trois crises le
trente novembre. Elles auraient été très légères. Depuis le débulde
ses accidents nerveux, il travaille moins bien. La sensibilité parait
égale des deux côtés. Pas de point hystérogène, pas de rachialgie.
11 est devenu peureux depuis ses crises. Par moments, il a de la
boulimie; d'autres fois, on ne peut lui faire manger quoique ce soit.
1886. il février. Il se plaint d'un point douloureux entre
l'ombilic et les fausses côtes gauches.
26. - Il n'a pas eu de crises. Persistance du point douloureux
dans le flanc gauche, assez peu intense du reste. Appétit irré-
gulier.
1887. 4 avril. - Depuis cinq mois l'enfant a, la nuit, des tres-
saillements. D'autres fois, il a des soubresauts, mais moins
fréquents. Ces tressaillements dureraient presque toute la nuit,
passant d'unerégion aune autre. Pas depeurs,pas de cauchemars,
pas de céphalalgies, pas de nouvelles attaques. Sujet à se mettre
en colère. -Traitement : bromure de camphre (Dr Clin) et tisane
de valériane.
5 août. - Les tressaillements ont diminué au bout de cinq jours
et ont disparu complètement au bout de dixjours. Il boit et mange
bien. Grande irascibilité.
1889. Décembres Il n'a plus eu aucun accident nerveux. Il est
resté un peu irascible. Il est obéissant et affectueux. Il est plus
grand que son frère. 1
Les accidents observés chez ces deux jeunes garçons sont
incontestablement de nature hystérique, comme ceux que nous
avons relevés chez Eugène et chez Marie. On retrouve chez le
dernier un certain nombre des phénomènes bizarres signalés
dans les épidémies de possession démoniaque. Revenons main-
tenant à notre principal malade.
II. Dans ses antécédents personnels, nous relevons : des
convulsions internes se manifestant à six reprises de l'âge de
trois semaines à quatre mois ; des accès de cris nocturnes d'un
à cinq mois ; à onze ans, une fièvre typhoïde compliquée de
délire et le laissant plus nerveux qu'auparavant ; à douze ans
et demi, il est pris d'un étourdissement avec hallucinations,
suivi d'une fugue inconsciente; enfin, à quatorze ans, à la
HYSTÉRO-ÉPILEPSIE. 1 -Il 1
suite d'une colère vive, se manifesta la première attaque d'hys-
téro-épilepsie.
III. Ce malade présentait une hémianesthésie incomplète
à gauche et des zones hystérogënes les phénomènes de l'aura
se manifestaient du même côté; il était sujet à des attaques et
à des vertiges. Ceux-ci, quelquefois très nombreux, se mon-
traient surtout avant et après les attaques. Nous en avons
donné la description. Contrairement aux vertiges épileptiques,
ils n'exerçaient aucune influence sur les facultés intellectuelles.
Dans les attaques, nous relevons seulement le cercle, l'attitude
du crucifiement et les tentatives que le malade faisait pour se
déchirer avec ses dents. Les essais d'hypnotisation n'ont donné
que des résultats partiels.
IV. - Le traitement que nous avons employé chez lui a
consisté, ainsi que chez les malades dont nous avons rapporté
l'histoire antérieurement, en des exercices de gymnastique et
des douches.
IV.
Nouvelle observation d'idiotie
myxoedémateuse
(CACHEXIE P : 1CII1'DEItItIQUH ?
I'ar$OLJRP1TTVILLIE
Depuis les dernières observations que nous avons insérées,
dans les Archives de Neurologie (1886, t. XII, p. 137; 1888,
t. XVI, p. 431 ; 1889, t. XVII, p. z 1), nous avons communiqué
à la section de médecine de l'Association française pour l'avan-
cement des sciences (séance du lli,aoùt 1889), un mémoire relatif
à trois cas empruntés à MM. Gimeno, Ernest Holt et Suckling et
à cinq autres cas recueillis par nous 2. Ces huit cas, additionnés
avec les dix-sept que nous avions rassemblés précédemment,
forment un total de vingt-cinq cas auxquels nous allons ajouter
le suivant qui, par ses caractères tout à fait typiques, mérite
d'attirer sérieusement l'attention de nos lecteurs.
Observation. - Père tuberculeux ( ? ). - Oncle maternel paralysé,
aliéné et sujet probablement à des accès d'épilep.sie. Frère et
soeur morts tuberculeux. - Scieur slz·ccbiqzvc à la suite de convul-
sions de l'enfance; morte tuberculeuse.
Renseignements incomplets sur les antécédents du malade. - Marche
à dix-huit mois. - Propre de bonne heure. - A1Têt de déuclop-
piment, bouffissure et épaississement â paz·tir de trois ans. Etat
du malade au 1er février 1890. - Lésions scrofuleuses et rachi-'
' Voir aussi le Compte rendu du service de la section des enfants de
Bicêtre, pour 1886, p. 1 à 104, et pour '1888, p. 1 à 16.
°- Compte rendu de la 18" Session, I·" partie, p. 3665 et Progrès Midi-
cal, 1889, 17 août, p. HU. C'est ce travail qui est reproduit à la page 59.
. cachexie pachydermique. 173
tiques. - Absence de la (}lande. thyroïde, symptômes classiques de
l'idiotie myxcedézzzateuse : pseudo-lipomes ; persistance de la fonta-
nelle antérieure ; hernie ombilicale; eczéma ; arrêt de développement
physique et intellectuel ; parole, voix, etc.
Debar... (Jules), né à la Ventie (Pas-de-Calais), le 6 octobre
1865, est entré le 23 février dans mon service, à Bicêtre. Ce malade
nous a été envoyé par M. le D'' lloizard, médecin de l'hôpital Tenon,
qui l'avait reçu dans ses salles en même temps que sa soeur,
atteinte d'une pleurésie. C'est elle qui a fourni à notre ancien
interne, M. Camescasse, les renseignements suivants sur sa
famille.
Antécédents. - Père, ouvrier dans une fabrique de toile, sujet à
des hémoptysies ; grand, fort, brun, sobre, d'un caractère doux,
n'ayant pas d'accidents nerveux. Il est mort en 1873, à l'âge de
quarante-cinq ans, d'une hémorrhagie (probablement une hémop-
tysie), en deux heures. [Père mort vers quatre-vingts ans. -
Mère, pas de renseignements. Deux soeurs seulement, bien
portantes ainsi que leurs enfants (un garçon et trois filles).]
Mère, morte en 1877, à quarante-quatre ans, d'une maladie d'in-
testins, journalière à la campagne, sobre, sujette à des maux de
tête. Elle était d'une taille moyenne, forte, brune et d'un carac-
tère très doux. [Père et mère, aucun renseignement. Un frère,
mort à soixante-six ans, était paralysé. Il avait une bosse dans le
dos, consécutive à un effort et serait resté alité pendant douze ans,
de quarante-six à cinquante-huit; puis il a pu marcher jusqu'à sa
mort. Il avait des idées tristes, croyait toujours qu'il allait mourir, il
était sujet à des attaques de nerfs avec chute, dans lesquelles il se
raidissait, se débattait, et suivies d'un moment d'hébétude. Parfois,
il avait une mousse blanche à la bouche. Il s'était marié avec une
femme plus âgée que lui de vingt-neuf ans, dont il n'a pas eu
d'enfants. - Pas de soeur. - Aucun autre détail.]
Pas de consanguinité (père du Pas-de-Calais, mère de la
.Manche). Inégalité d'âge d'environ deux ans.
Cinq enfants : 1° Garçon, grand, fort, intelligent, mort à vingt-
sept ans d'une affection pulmonaire aiguë, probablement de nature
tuberculeuse. Il s'était marié et avait eu un enfant mort à deux
ou trois mois ;
2° Fille morte à dix ans, après quinze jours de maladie consé-
cutive à une peur occasionnée par la vue de la chute de sa soeur
dans l'eau. Elle était grande et bien constituée pour son âge;
3° Fille, - celle qui nous renseigne - âgée de trente-sept ans,
d'une taille au-dessus de la moyenne (1 m. 70), paraissant assez
forte, d'une physionomie régulière, plutôt agréable. Elle a eu dans
son enfance des convulsions qui ont laissé un léger strabisme. Elle
174
IDIOTIE MTXOEDEMATEDSE.
a eu une fièvre typhoïde à-deux ans, en même temps que son. père
et trois de ses frères ou soeurs. Jusqu'à vingt-huit ans, elle a. tra-
vaillé dans les champs, puis, pendant trois ou quatre mois, elle a
promené son frère dans les foires avec des saltimbanques. Durant
ces pérégrinations, elle a contracté un rhumatisme articulaire pour
lequel. elle a été soignée à l'hôpital de Lille. Ensuité, elle s'est
placée comme servante dans la même ville jusqu'en 1888, époque
où elle a recommencée exhiber son frère dans les marchés et les
foires, sous le titre de Roi des Esquimaux. Vers le milieu de janvier
1890, elle est tombée malade, est entrée à Tenon à la fin de ce
mois pour une pleurésie avec tuberculose du poumon gauche. Elle
a succombé le 13 février'; -
1 Nous aurions voulu avoir des renseignements plus détaillés,. mais elle
ne. paraît pas avoir de parents à Paris, car. son corps n'a pas été réclamé.
Fig. 19 - Deb... avec sa pipe et sa canne.
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 175
0,
4° Fille morte à cinq ans, au bout de quinze jours, d'un refroi-
dissement. Elle était grande, forte et intelligente.
5° Notre malade. Les renseignements que nous possédons sont
très vagues. Il a été élevé par sa mère, a marché à dix-huit mois,
a été propre de bonne heure et n'aurait rien présenté de particu-
lier jusqu'à l'âge de trois ans. Il causaitet jouait comme les autres
enfants, dit-on. C'est à partir de trois ans qu'il s'est arrêté dans
son développement et qu'il est devenu gros et bouffi. Il mange
presque seul, à condition qu'on lui coupe sa viande. Il a toujours été
sujet à la constipation et reste quelquefois six semaines sans aller
à la selle. On n'a jamais essayé de lui apprendre à lire. La parole
est assez limitée comme nous le verrons tout à l'heure, ce que sa
soeur attribuait à ce qu'il sait qu'il prononce mal les mots. Il
coud avec une certaine habileté. Il fume la pipe et la cigarette.
État actuel (février 1890). - L'aspect général et la physionomie de
ce malade rappellent de la façon la plus complète ceux de tous les
autres malades dont nous avons publié l'histoire (Fig. 19, 20, 21,22).
Taille, 0m,915; poids, 24 kil. 800.
Tête. - Elle est ovoïde avec prédominance très accusée de la
région occipitale, saillie prononcée des bosses pariétales et rétré-
cissement du front. La fontanelle antérieure n'est pas entièrement
ossifiée; on sent très bien à son niveau une dépression de deux à
trois centimètres de longueur et d'environ un centimètre de lar-
geur. - Les cheveux sont d'un brun tirant sur le roux, longs,
gros, rudes, semblables à une crinière. Ils sont abondants en
arrière et au niveau des pariétaux, au contraire rares au-dessus
des bosses frontales. Entre les places presque dénudées, il y a un
toupet assez fourni. Un peu à droite du vertex, les cheveux sont
plus clairsemés. Le cuir chevelu est le siège d'une éruption eczé-
mateuse (petites croûtes jaunâtres, squames, etc.).
476
IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
cinq millimètres il droite, un peu moindre à gauche. Les cils
sont longs et assez nombreux aux paupières inférieures. Il
existe des deux côtés un peu de blépharite ciliaire. Les conjonc-
tives sont saines; les cornées présentent toutes deux une petite
taie. Les iris sont bleus.
Le nez est camus, très court et large (25 millim. de longueur et
4, cent, de largeur) ; la racine est écrasée; les narines sont un peu
relevées et triangulaires.
Les régions malaires sont saillantes. Les joues sont volumineuses,
gonflées, lipomateuses, ballottantes.
La bouche est assez large (5 cent.). Les lèvres sont très sail-
lantes, ce qui tient à un prognathisme très accusé. Elles sont bleuâ-
tres, très épaisses, l'inférieure plus que l'autre (15 millim.); celle-
Fig. 20.
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 177
ci est en outre un peu renversée. Le menton n'existe pour ainsi
dire pas; il est tout à fait déprimé, comme s'il avait été aplati
horizontalement au niveau du bord cutané de la lèvre inférieure.
Dans son ensemble, la face est carrée ; la moitié droite semble
un peu plus développée que la gauche; mais l'asymétrie, en tous
cas, est peu prononcée.
Les oreilles sont pâles, assez bien ourlées et le lobule est dis-
linct ; hauteur, 55 millimètres; largeur, 35 millimètres. Elles sont
en outre épaisses, translucides, comme si elles étaient infiltrées. Il
s'agit là, comme toujours, d'un faux oedème.
Système dentaire. - Mâchoires normalement développées;
denture irrégulière, offrant la réunion de presque toutes les ano-
malies.
Mâchoire supérieure. - Côté gauche. Incisive centrale perma-
nente, large et complètement évoluée. - Incisive latérale, de vo-
lume ordinaire, déviée par une rotation sur l'axe, de dedans en
dehors et d'arrière en avant, d'environ 45 degrés. Canine de lait.
Prémolaire permanente normale, à pointes très aiguës. Pne-
mière grosse molaire en cours d'évolution. Un tiers environ de la
hauteur normale de la couronne apparaît hors de la gencive.
Côté gauche. L'incisive centrale est placée sur un plan légère-
ment antérieur par rapport à la dent correspondante du côté z
gauche, elle est large et a atteint à peu près sa longueur normale :
malgré cela, elle est entièrement recouverte par la muqueuse dis-
tendue et laisse voir la dent par transparence, comme à travers
une membrane mince de caoutchouc fortement étirée et près de
se rompre. Cette disposition ne parait s'accompagner d'aucune
douleur (spontanée ou provoquée). L'incisive latérale a subi une
déviation égale et symétrique par rapport à la dent correspon-
dante du côté gauche (rotation sur l'axe de 45 degrés de dedans
en dehors et d'arrière en avant). - Canine de lait. - Deux pré-
molaires comme du côté gauche. Pas de grosse molaire.
Mâchoire inférieure. - Dents antérieures très écartées, projetées
en avant et divergeant en éventail. Les quatre incisives appartien-
nent à la deuxième dentition; leur volume est normal. - Canines
de lait. - A droite et à gauche, après la canine, est un espace
vide. Après cet espace vide, se trouve un tubercule à sommet
mousse, d'un jaune sale, fortement et profondément érodé, haut
d'un demi centimètre environ, d'une largeur à peu près égale au
collel et affeclant très grossièrement la forme conique. Après cet
organe un nouvel espace libre qui correspond il l'emplacement de
la première grosse molaire permanente. La seule grosse molaire
Bourneville, Bicêtre, 1889. 12
178
IDIOTIE MYXOEDEMATEUSE.
que l'on trouve la mâchoire inférieure est située très en arrière-
et occupe la place de la grosse molaire de 13 aus'.
Articulation. - Prognathisme inférieur.
Le cou est extrêmement court et gros (0,565mm). En avant, sous
lé doigt, on sent très nettement les cartilages du larynx et de la
trachée : il ne parait pas y avoir de glande thyroïde. Des deux côtés
du cou existent deux masses lipomateuses, tremblotantes, qui ne
1 Il a été impossible, par suite de la résistance du malade, d'exa-
miner la disposition des tubercules de la face triturante de cette grosse
molaire. Cet examen, en admettant que la conformation de la dont fût nor-
male, aurait indiqué si on avait affaire à la première ou à la deuxième
grosse molaire permanente.
F¡,g. 2 ! . 1.
F,1. 22.
CACHEXIE PACHYDE10nQUE. J : 8 â)
laisse pas d'empreinte, de la dimension d'un oeuf de poule, s'apla-
tissanl par la pression et contribuant encore à faire paraître le cou
plus court. On dirait que la tête s'enfonce dans le thorax.
Thorax. - La partie antérieure est proéminente, le sternum
faisant un angle aigu de 25 degrés environ avec la verticale. Les
eûtes sont saillantes, la base de la poitrine est élargie au niveau
des fausses côtes qui sont rejetées assez fortement en dehors. En
arrière, la partie supérieure du thorax forme une convexité très
accusée, surtout au voisinage de la colonne dorsale. La colonne
vertébrale est sinueuse, la portion dorsale forme une convexité
beaucoup plus prononcée que d'habitude, principalement au niveau
des deux tiers supérieurs du thorax. Au-dessous de celte convexité
on note une ensellure très marquée. De plus, la colonne dorsale
décrit une légère convexité à gauche.
Il existe des masses lipomateuses sur les parties latérales et
inférieures du tronc, ainsi que dans le creux axillaire.
180 IDIOTIE \II\Q : UGnI1'PEC'SE.
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 181
fluence de la constipation, il s'est produit des hémorrhoïdes de la
dimension d'une petite noisette. D... n'est pas vorace; il est très
difficile pour la nourriture. Il est friand de poulet, de pruneaux et
d'oeufs durs.
La respiration, à 80, est un peu gênée et accompagnée d'un
petit ronflement nasal. Les battements du coeur sont réguliers,
un peu lents et sourds; le pouls radial est petit, très difficile à
sentir.
Les urines ont été examinées à plusieurs reprises; leur densité
est de 1018, leur réaction faiblement acide; elles ne renferment
ni sucre, ni albumine.
La sensibilité générale est normale. Deb... est très sensible au
froid. - Sa température rectale a été prise du 12 au 21. Voici les
chiffres :
182 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
sa journée et son point est régulier. Il n'aide en rien pour sa toi-
lette. 11 sait le nom de la plupart des objets qui l'environne. Il ne
connaît aucune lettre; fait sur l'ardoise des 11, des o, des Il et des
chiffres. Il distingue le rouge, le bleu, le blanc et le noir.
Si on lui donne un objet qui lui fasse plaisir, par exemple une
cigarette, il sourit; sur invitation, il fait une révérence en souriant.
Sa physionomie hideuse exprime d'ordinaire l'indifférence, même
l'hébétude (fig. 22, 23, 24.) La laideur parait encore plus grande lors-
qu'on l'examine de profil (fig. 24); son profil rappelé le groin du
cochon. D... reste toute la journée assis sur une chaise auprès du
feu, jamais il ne demande à se promener. Parfois il réclame du
tabac et fait signe qu'on lui bourre sa pipe. Son appétence pour le
tabac est d'ailleurs modérée. Questionné sur ce qu'il faisait avant
son entrée à l'hospice, il a eu un mouvement d'impatience, a levé
les épaules et tourné le dos. De temps en temps, il regarde ce qui
se fait autour de lui, mais le plus souvent ne s'en préoccupe pas.
Son attention est facile à fixer; il parait assez affectueux. Il s'est
choisi un autre enfant comme camarade et n'aime pas que les
autresenfants viennent autour de lui. Dès qu'il est habillé, il prend
sa chaise et la glisse près du feu; il en prend une seconde qu'il
place devant lui et sur laquelle il pose son ardoise et ses pipes.
Réflexions. I. Les renseignements très incomplets que
nous possédons sur la famille et sur les antécédents person-
nels du malade, ne nous éclairent nullement sur l'élrologie.
Rappelons seulement l'existence de la tuberculose chez le père
de Deb., un frère et une soeur.
II. Dans ce cas, de même que dans quelques autres, les pre-
miers symptômes, de la cachexie pachydermique, due et l'ab-
sence congénitale de la glande thyroïde, auraient été constatés
vers trois ans; auparavant l'enfantparaisaait avoir un dévelop-
pement normal. Peut-être serait-il possible d'en induire que
l'apparition de la cachexie pachydermique est retardée par
l'alimentation lactée et qu'elle se manifeste au sur et à mesure
que l'enfant est soumis à l'alimentation ordinaire.
Une connaissance précise de l'action physiologique de la
glande thyroïde est seule capable de trancher la question.
III. Nous croyons superflu de relever chacun des symptômes
du myxoedème. Ils se rencontrent tous ici : aspect général,
conformation de la tête, état du cuir chevelu (cheveux-crins.
brun-roux, eczéma, persistance de la fontanelle, etc.; bouf-
fissure et faux oedème des paupières, des joues, des mains, des
pieds, etc.; présence des pseudo-lipomes, absence de la glande
CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 183
thyroïde; volume exagéré du ventre, hernie ombilicale; ab-
sence des appétits sexuels, démarche lourde, pesante, physio-
nomie spéciale, voix rauque, aigre, désagréable, constipation
opiniâtre, arrêt de développement des organes génitaux, etc.
IV. Relevons cependant d'une façon particulière, l'existence
chez B..., comme chez la plupart de nos autres malades,
de lésions scrofuleuses et de déformations rachitiques, inté-
ressant surtout la colonne vertébrale, et les membres,
complications qui montrent combien est profonde l'atteinte
portée à la nutrition par l'absence de la glande thyroïde.
V. Tous les idiots myxoedémateux que nous avons observés
présentent la même physionomie hébétée, lourde, sans expres-
sion. Ce ne sont pas des idiots complets. La parole, toujours
plus ou moins imparfaite, existe à des degrés divers. Il en est
de même de lamémoi1'e. L'attention, elle aussi, peut être fixée.
La compréhension est lente, mais non absente. Aussi ces ma-
lades sont-ils susceptibles d'une certaine éducation : tous de-
viennent propres, parviennent à manger seuls, quelques-uns
même à se laver, s'habiller, coudre (exemples Graf.. et Deb..),
à aider aux soins du ménage. Aucun d'eux n'offre les tics si
fréquents et si multiples chez les idiots par méningite, sclé-
rose, arrêt de développement des circonvolutions, etc.
VI. Le traitement que nous avons institué dans les cas de ce
genre consiste, au point de vue pédagogique, en l'application
des méthodes spéciales d'éducation pour les enfants arriérés
et au point de vue médical en toniques, antiscrofuleux, bains
salés, douches et gymnastique.
A la suite de notre communication à l'Association française
pour l'avancement des sciences, nous avons reçu le 15 août, de
M. le Dl' Arnaud (de Saint-Gilles), qui avait assisté à la séance,
une lettre dans laquelle il soumet à notre appréciation un
mode particulier de traitement qu'il est bon de signaler :
« M. Brown-Sequard, dit-il, pense, non sans raison peut-être, que
les glandes ou du moins quelques-unes d'entre elles, ont une ac-
tion encore inconnue sur la- nutrition, par suite de certains prin-
cipes qu'elles verseraient incessamment daus la circulation. N'en
serait-il pas de même du corps thyroïde ? Dès lors on s'explique-
rait facilement la cachexie consécutive - à l'absence de cette
glande.
« En outre, cette théorie pourrait conduire à un traitement ra-
'184 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.
tionnel de la cachexie pachydermique, le traitement par les injec-
tions sous-cutanées (ou même peut-être par l'absorption intesti-
nale) de certains principes empruntés à la glande thyroïde. »
Nous n'avons pu essayer ce mode de traitement, n'ayant
plus dans notre service, avant l'admission de Deb..., qu'un
imbécile myxoedémateux, Gra..., âgé de 33 ans. C'est peut-
être il tenter. Nous rappellerons à ce propos que, d'après
Schifr, la greffe péritonéale de la thyroïde procurerait aux
chiens une immunité presque complète contre les suites de la
thyroïdectomie totale'. Ses expériences ont été répétées toutré-
cemment par MM. Anton von Eiselshern et Horsley. Il en
résulte encore un nouveau mode de traitement àexpérimenter,
mais de préférence, suivant nous, chez des malades encore
jeunes2.
. Schiff (.\1.). Résumé d'une série d'expériences sur les effets de
l'ablation des corps thyroïdes (Rev. méd. de la Suisse romande, lév. et
août 1884).
Bien que ce travail ait paru dans le na des Archives de Neurologie du
1" février 1890, nous avons cru utile de l'insérer dans le Compte rendu
de 1889, afin de le rapprocher du mémoire sur le même sujet qui figure
dans ce volume.
1 Archives de Neurologie T XVIII PL 1
A A
Leuba hth
Imp Becquet fr Paris
EXPLICATION DE LA PLANCHE.
1° Circonvolution vascularisée anormalement (Enderl.).
Les capillaires, au lieu d'être perpendiculaires à la surface (A)
de la ciconvolution, sont rameux, anastomosés, et remanient
complètement le plan des trois premières couches de l'écorce,
qui ne sont plus reconnaissables (B). Plus bas (C.), la sécrétion
longitudinale commence à reprendre (baume).
2° Lobe occipital (Schad.). - De la pie-mère (A) partent des
vaisseaux qu'on voit entourés de masses opaques, contenant
beaucoup de noyaux constituant le premier degré d'une tache
de désintégration (B). La limite entre la première et la seconde
couche de l'écorce, très nette d'ordinaire, est ici confuse
(picro-carmin, haume).
3° Petit foyer scléreux, irrégulier, comprenant la seconde et
la troisième couche de la substance grissc (A) et donnant à la
surface de l'encéphale un aspect froncé (\iaisonhautc. Tout t
autour, les vaisseaux sont dilatés et la sériation des couches
est troublée et méconnaissable (picrocarmin, glycérine).
i° Coupe du lobule paracentral (Robèch...) au niveau de
l'union de la substance grise et de la substance blanche, pour
montrer la rareté des cellules pyramidales à leur lieu d'élec-
tion (A) et la vascularisation développée jusqu'au niveau de ces
couches (hématoxyline. baume de Canada).
ERRATUM.
A la page 49 au lieu de Deuxième partie, il faut lire troi-
sième partie.
TABLE DES MATIERES
PREMIERE PARTIE -
HISTOIRE DU SERVICE PENDANT L'ANNEE 1889
1. Sit2cdti011 du seruice, enseiglle)2ent prilnaire... III
Enfants idiots, gâteux, épileptiques, invalides.. III
Enfants gâteux, idiots, valides. Petite école.. IV
Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,
etc. Grande école ........................... v
Promenades et distractions .................. VI
Visites, permissions de sorties, congés....... vin
Vaccinations et revaccinations ............... VIII
Service 'dentaire ............................ VIII
Bains et hydrothérapie ...................... lx
Améliorations diverses ...................... lx
Visites du service ........................... x
Maladies épidémiques ....................... m
Influenza ................................... XIII
Musée pathologique ......................... XIII
11..Enseignement professionnel .................. xv
Evaluation du travail ........................ XVII
Progression du travail....................... xix
In. Statistique - Mouvement de la population.... xix
Décès....................................... xx
Sorties, Evasions, Population au 31 décembre
1889 ......................................... xx
Personnel du service en lSS9 ................. w
IV. La nouvelle section. - Construction des trois
deniers pavillons.......................... xxx
v. Consultation externe. - Placement de ? enfants
Tmnsfe1'ts et rappel d'une ancienne délibéra-
tion du Conseil général ...................... XI
Mort de JI. Gallois.......................... xi
vi. Aliénés mi1ww's et enfants idiots.............. XV
vu. De l'Assistance des enfants idiots il. l'étralzgei ? XLVI
vm. M01't et obsèques du Dr B1'icon ................ L
Thèses de 1889 .............................. LVI
188 TABLE DES MATIÈRES.
DEUXIÈME PARTIE
1 . THÉRAPEUTIQUE.
1. Bromure d'or ................................. 3
IL Bromure de camphre. , .. , .. , . , ... , , . , .. ; .... , . 27
ni. Picrotoxine.................................... 33
TROISIÈME PARTIE
CLINIQUE ET ANATOMIE PATHOLOGIQUE.
1. De t'idiotie )TH/A'oedë))).ate(.Me.................. ? )t \
Des différentes formes de l'idiotie ............ 1
Cas anciens d'idiotie myxoedonateusc........ : riz
Cas nouveaux........ , ........ , ... -' ... , ..... ;)'1 !
Résume nosograpliiquc...................... 100
Synonymie... ? .................. ? ........ ! (1(t
Causes............ ? ... ? ... ? .......... 100 ? 8exeetnationalité....,... ? ...-............ I lli
w Début.................. ? ... ? ............ 1 O. ! ,
Symptômes............ ? .................. 10 ? 2
Maladies intercurrentes ..................... 1 O r
Maladies terminales ......................... 1 Or. "
' Anatomie et physiologie pathologiques....... 1()6
Diagnostic....... ; .... ; ............ , - ....... 107
Traitement.................................. 11` ?
o, Contribtttion t'étude des lésions histologiques
- de la substance grise dans les encéphalites
chroniques de l'enfance, par PiLDET ......... 113
m. Une famille d'/n/sfërtques (jeunes garçons et jeu-
nes filles), par BOURNEVILLE et P. SOLLIER.... il,,
1\'. Nouvelle observation d'idiotie myxoedémateuse,
par BOUHNEVILLE ? ............ ? 172 -2
Explication de la planche.................... t85
paris. - IMP. V GOUPY et jouhdan, nou de rennes, 71.