(1890) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des enfants idiots, épileptiques et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1889
/ 187
(1890) Recherches cliniques et thérapeutiques sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie : Compte-rendu du service des enfants idiots, épileptiques et arriérés de Bicêtre pendant l'année 1889

RECHERCHES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET .

L'IDIOTIE

RECHERCHES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

ET

L'IDIOTIE

PUBLICATIONS DU PROGRÈS MÉDICAL'

RECHERCHES

CLINIQUES ET THÉRAPEUTIQUES

SUR

L'ÉPILEPSIE, L'HYSTÉRIE

1 ET

L'IDIOTIE

COMPTE RENDU DU SERVICE

DES ENFANTS IDIOTS, ÉPILEPTIQUES ET ARRIÉRÉS DE BICÊTRE

PENDANT L'ANNÉE 1889

PAR

BOURNEVILLE

MÉDECIN DE nrclhRE

SOLLIER

CONSERVATEUR DU MUSÉE DE BICËTRE.

N ."

1 A. PILLAT

1 ANCIEN INTERNE DU

1 ? .... ?

Volume X

avec 22 figures dans le texte et une planche chromo-lithographique.

. PARIS

AUX BUREAUX DU

PROGRÈS MÉDICAL

14, rue des Carmes, 14.

1 LECROSNIER ET BABÉ

ÉDITEURS

Place de l'Ecole de Médecine.

1890

PREMIÈRE PARTIE

Histoire du service pendant l'année 1889.

BOURNEVILLE,, Bicêtre, 1889.

PREMIÈRE PARTIE

Histoire du service pendant l'année 1888.

Pavillon des cellules. Construction des trois

derniers pavillons de dortoirs.

I.

Situation DU service. Enseignement primaire.

Pour rendre plus facile la compréhension de ce qui

va suivre, nous rappellerons que la section comprend

trois groupes : 1° les Enfants idiots, gâteux, éile2-

tiques ou non, mais invalides ; - 20 les Enfants idiots

gâteux ou non gâteux, épileptiques ou non, mais

valides; -3° les Enfants propres, valides, imbéciles,

arriérés, épileptiques et hystériques ou non.

1. Enfants idiots, gâteux, épileptiques ounon, mais

invalides. - Ils se subdivisent en 2 catégories : lapre

mière est composée d'idiots gâteux ne parlant, ni ne mar-

chant et souvent incapables de se tenir debout, mais la

plupart susceptibles d'amélioration; la seconde, d'idiots

tout à fait incurables ou d'enfants atteints d'épilepsie

IV PETITE ECOLE.

ou de méningo-encéphalite devenus gâteux sous l'in-

fluence des accès ou des poussées congestives qui les

compliquent. Ceux-ci ne sont plus que l'objet de soins

hygiéniques. Ceux-là, au contraire, sont soumis à un

certain nombre d'exercices que nous avons décrits

précédemment et sur lesquels il est .superflu de revenir.

Disons seulement que dès qu'ils sont capables de mar-

cher, ils sont envoyés à la petite école d'abord le matin

pendant quelque temps, puis toute la journée aussitôt

que leur forces le permettent.

II. Enfants idiots, gâteux ou non gâteux, épilep-

tiques ou non, mais valides. Ces enfants fréquen-

tent la petite école confiée exclusivement à des

femmes. 222 enfants y ont été inscrits dans l'année.

Sur ce nombre, huit sont décédés, 6 sont sortis

définitivement ; 1 est passé à la grande école. Sur

les 207 enfants qui restaient au 31 décembre 1889, 58

se servent de la cuiller seulement, 99 de la cuiller et

de la fourchette, 50 de la cuiller, de la fourchette

et du couteau. 11 enfants gâteux sont devenus pro-

pres (1). Tous les enfants vont à la petite gymnastique

(système Pichery), à l'exception de sept qui ne viennent

à l'école que le matin. 5, plus avancés, ont pris part

aux exercices de la grande gymnastique. 35 enfants

ont travaillé comme apprentis; ils se répartissent

ainsi : 1 menuisier, 4 cordonniers, 3 rempailleurs,

5 vanniers, 22 tailleurs. Les [leçons de toilette

(lavage de la figure, des mains, propreté de la cheve-

lure, cirage des souliers, etc.), les exercices des

mains (fermer, ouvrir les mains, agiter les doigts,

les allonger, les étendre et les plier isolément, etc.),

les leçons de choses, les promenades avec interro-

(1) Ce sont les enfants Barb..., Cleme..., Couta..., Corb..., Feut..., I ? ntai...,

Gir..., Guy... (L.J.), Han..., Ler...(A.), Mol...

GRANDE ECOLE. V

gâtions, l'éducation des sens et de la parole consti-

tuent, comme toujours, la base de l'enseignement.

III. Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,

instables, épileptiques et hystériques ou non. Grande

école. La population de cette école était le 1er Jan-

vier 1889 de 168 et le 31 Décembre de 164. Après de

nouvelles instances pour avoir un troisième institu-

teur, nous avons eu enfin satisfaction. ,Un troisième

instituteur, M. Mesnard, nous a été donné par un ar-

rêté en date du 6 mars. Le maître de danse ayant

donné sa démission, l'enseignement a été fait par l'un

des instituteurs, M. BOYER. Après une suspension de

quelques mois, les exercices d'escrime ont été repris

sous la direction du Prévôt d'armes du fort de Bicê-

tro. Avec le concours d'un de leurs maîtres, M. Broyer,

les enfants ont organisé, en 1888, un orphéon et une

fanfare qui se sont développés sérieusement en 1889.

Ils se composaient à la fin de l'année de 47 exécu-

tants.

Le 15 avril, un certain nombre d'enfants ont concouru

pour le certificat d'études qui a été attribué à 8 d'en-

tr'eux : Chiquel, Verrien, Silly, Colombié (L.), l3rucl : ,

Gueny, Carton et Othe. Ces résultats font honneur à

nos maîtres et en particulier au premier instituteur,

M. BOUTILLIER (1).

Nous avons multiplié le plus possible les leçons de

choses, non seulement à la classe, mais encore dans

les jardins de la section, organisés, comme nous

l'avons dit dans les précédents Comptes-rendus, en

vue de l'enseignement. Pour rendre ces leçons cle cho-

(1) Le certificat d'études a été également accordé le même jour à 6 infir-

miers et Il 6 infirmières.

VI GRANDE ÉCOLE.

ses plus productives, et aussi pour utiliser des ma-

lades qui ne prennent pas goût au travail des ateliers,

nous avons réclamé de nouveau un maître jardinier.

Jusqu'ici, cette réclamation est restée sans effet.

Nous avons insisté l'an dernier sur les exercices relatifs

à l'enseignement, - 11) i,),n Ip, chez les idiots. Dans le but

de mieux faire comprendre aux maîtres la possibilité

de cet enseignement, nous avons obtenu de M. Javal,

directeur de l'Institution nationale des sourds-muets,

l'autorisation d'envoyer notre personnel enseignant

suivre pendant quelques semaines les classes de cette

institution. Ces visites répétées ont été fructueuses

et aujourd'hui maîtres et maîtresses mettent plus d'ar-

deur à apprendre à parler aux enfants idiots et à

appliquer les idées que nous avions cherché à leur

inculquer.

Parmi les améliorations de détail, nous citerons l'in-

troduction de la grammaire de Da Costa et l'emploi de

cubes en bois destinés à apprendre aux enfants à faire,

à l'exemple du maître, de petites constructions de mo-

dèles divers.

Les projections à la lumière oxhydrique ont été

mises plus souvent à contribution, au point de vue de

l'instruction des enfants. On a fait passer à diverses

reprises sous leurs yeux des sujets d'histoire naturelle,

des vues de l'Exposition et des grandes journées de

la Révolution, dont les clichés ont été mis gracieuse-

ment à notre disposition par M. Jean Macé, directeur

de la Ligne de l'Enseignement.

Promenades et distractions. Les enfants de la

grande école et ceux de la petite école qui sont pro-

pres ont continué à faire, sous la conduite de leurs

PROMENADES ET DISTRACTIONS. VU

maîtres et de leurs maîtresses, de nombreuses prome-

nades, soit dans les environs de l'hospice ou à Paris

même : Boulevard St Marcel, caveaux du Panthéon,

quai de Bercy, Observatoire, Jardin du Luxembourg,

Jardin des plantes, parc de Montsouris, Villejuif, bords

de la Seine, Fêtes du trône, de Bicêtre, du XIII" arron-

dissement, du Panthéon, de Gentilly; promenades au

parc de Vitry, à Chevilly, à l'Haï, Vincennes, Bourg

la Reine, Port à l'Anglais, etc.

Jamais ces promenades, même dans des lieux très fré-

queutés, n'ont donné lieu à des accidents capables d'at-

tirer l'attention et de troubler la tranquillité publique.

Mentionnons enfin les distractions diverses, com-

munes a tous les enfants valides : 1er janvier, distri-

bution de jouets et de bonbons ; 7 janvier, distribution

de jouets par M. Mayer, rédacteur en chef de la

Lanterne ; 14 janvier, séance de pupazzi; fêtes du

mardi gras et de la mi-carême, distribution de beignets

et de gâteaux, déguisements ; avril, les instituteurs'

apprennent le jeu de paume aux enfants ; 2 juin, in*i»3

tiné.e dramatique organisée par l'Orphéon-Fanfare ide

l'école, au profit de la caisse de la société ; séances h.0

lanterne magique ; 7 juillet, représentation dramatique;

au profit de la caisse de la Fanfare ; 13 juillet, retraite-

aux flambeaux dans le quartier du Kremlin par la'

Fanfare ; 14 juillet, les enfants assistent au défilé du

bataillon scolaire de la commune ; 15 juillet, les en-

fants de la grande école assistent à la course en sac

organisée par la commune ; juillet, concert des frères

Lionnct ; novembre, matinée dramatique, séance de

lanterne magique a la petite école, etc. Ces prome-

nades et ces distractions, outre qu'elles font plaisir aux

enfants, contribuent à leur bien-être physique ser-

vent à leur instruction. Les en priver constitue une

punition auxquels ils sont très sensibles.

VIII VISITES ET CONGES.

Visites, permissions de sortie et congés. - Les

enfants ont reçu 7.892 visites ; les visiteurs ont été

au nombre de 10.889. Voici la statistique des per-

missions de sortie et des congés :

BAINS ET HYDROTHÉRAPIE. IX

Bains et hydrothérapie. - Les bains et les dou-

ches, joints à la gymnastique et à l'emploi des bro-

mures, surtout de l'élixir polybromuré de Yvon et du

bromure de camphre du Dr Clin (1) et aux médicaments

anti-scrofuleux ont continué à être la base du traite-

ment pendant l'année 1889. Ainsi qu'on le verra plus

loin, nous avons également employé le bromure d'or

et la picrotoxine.

X VISITEURS DU SERVICE.

fréquentes destructions de ces toiles par les enfants,

nous aurions préféré des tables de marbre, qui, en outre,

sont plus faciles à entretenir dans un état constant de

propreté. L'an dernier, nous avons obtenu deux tables

de marbre à titre d'essai. Contrairement à ce que l'on

craignait, les enfants n'ont pas cassé plus de vaisselle

qu'avec les tables en bois. L'expérimentation ayant

été reconnue bonne, le directeur de Bicêtre a fait

acheter quatre nouvelles tables de marbre.

Nous avons continué, l'emploi de la laine de tourbe,

de la tannée, du varech et de la paille pour les lits

des gâteux. L'expérience nous a montré les avantages

incontestables des matelas de laine de tourbe.

On se rappelle que par suite de la disposition incli-

née du terrain sur lequel s'élèvent les pavillons,

ceux-ci, à leur extrémité nord, ont des sous-sols éle-

vés nous avons fait agrandir les petites fenêtres du

sous-sol de l'un des pavillons et nous y avons fait ins-

taller un magasin pour les chaussures et une salle de

cirage. On apprend aux enfants à nettoyer réciproque-

mont leurs souliers. Ce travail avait lieu autrefois sans

aménagement spécial dans le gymnase, ce qui offrait

de nombreux inconvénients. y

Visites du service. - 1\1. M. AnLonoiT, médecin en

chef de l'hôpital de Tirnowa ; Bourde, rédacteur au

Temps, Dr Briboll (Christiania), Dr Botto (de Rio Ja-

neiro), Dr Comby, D1' Chaumier (de Tours), Dr L. M.

Clarke, D'' Combe (de Lausanne), Dr Dubrisay, D'' Du

Mesnil, Dr Durbay (Liège), D'' Duquay, D1' Dind (Lau-

sanne), Dr Danitch, Dr Flechter Beach, Dr J. F. Tuttle,

D1' Fischer, D1' Figerio, médecin directeur du mani-

come d'Alexandrie, M. Louis Gallet, directeur de

l'hôpital de Lariboisière, M. Godard, directeur de

l'asile de l'enfance à Saint-Cyr, Dr Getscheff, direc-

teur du service sanitaire de Bulgarie, Dr Hart, clirec-

YISITEUns DU SERVICE. XI

teur du 1»i-l"18lt médical, D1' lIuffenhcim, conseiller

général de Seine-et-Oise, Dr Hirschfelder (de San

Francisco), Milo Hulda Hanson, professeur des enfants

anomaux à Copenhague, M. Izos, architecte (Lau-

sanne), Dr Ireland, Dr Janvier, D1' Jossy, Dr Lelan-

dais, D'' Morst (Christiania), D'' Maroll Francisco , Dl'

Dol' Muller (Graz), Dr de Musgrave Claye,.

D'' Narich, Dr Pachoud, médecin directeur de l'asile

d'aliénés de Bois de Céry (Suisse), Dr Palido

Fernandez, rédacteur au Siglo medico, D1' Peltier

(de Sedan), Dr Peyron, directeur de l'Assistance publi-

que, M. Pigeonneau, professeur à la Faculté des let-

tres, Dr Pons, médecin en chef de l'asile d'aliénés de

Bordeaux, D'' E. A. Pokrowsky (Malte), le professeur

Rossolino, D'' Sellier, Dr Salgo, médecin en chef de

l'asile d'aliénés de Buda-Pesth, M. Schrceder, rédac-

teur à l'Europe artiste, D'' Sikorsky IÜcw-), M. Thuil-

lier, membre du Conseil de surveillance de l'Assistance

publique, Mlle Taunis, institutrice à Christiania, Pro-

fesseur Taverni(Catane), l'dme le Docteur Katcheff, M.

L. Todesco, correspondant du Dio-itto de Rome, D''

Tozo, Dr Wallaert (de Courtrai), Dr Vallée, médecin de

l'asile d'aliénés de Longue-Pointe (Canada), Dr Wa-

ren-Lombart, Dr Wilhem.

Nous devons signaler enfin les visites des membres

du Congrès d'Assistance publique au nombre de 100,

le 2 août, et celle des membres du Congrès interna-

tional de médecine mentale au nombre de 80, le 9 août.

Maladies épidémiques. Dans le cours de l'an-

née nous avons eu deux enfants atteints de diphtérie.

L'unl'avait contractée avant son admission. Cet enfant,

nommé Clut ? a succombé. C'était un bel exemple

d'idiotie microcéphalique. Son observation figure

in extenso dans le mémoire que nous avons commu-

niquée, avec notre interne M. Camescasse, au Congrès

XII

MALADIES ÉPIDÉMIQUES.

international de médecine mentale. L'autre enfant

a également succombé.

Une petite épidémie de rougeole a éclaté le 23

octobre. 22'enfants (3 décès), un infirmier et une infir-

mière en ont été atteints. Voici le tableau des cas :

MALADIES ÉPIDÉMIQUES. XIII

Dans le précédent Compte-rendu, nous sommes

entrés dans des détails au sujet de l'existence de la

teigne parmi les enfants pour ainsi dire depuis que

Bicêtre existe. Nous avons également indiqué les

mesures d'isolement qu'il nous avait été enfin possible

de prendre, grâce à la bienveillante autorisation de

M. Peyron. Ces mesures ont porté leurs fruits et,

malgré un certain nombre de récidives, nous n'avions

plus que 25 enfants teigneux en voie d'améloration, il

la fin de 1889.

Influenza. L'épidémie de grippe a débuté dans

le service le 21 décembre ; elle a fini le 21 janvier 1890.

53 enfants en ont été atteints. Elle a d'ailleurs été bé-

nigne. Nous n'avons enregistré aucun décès. 2 infir-

miers et 3 infirmières en ont été également atteints.

Nous aurons peut-être l'occasion de résumer les prin-

cipaux traits de cette épidémie dans le prochain

Compte-rendu.

Nous n'avous eu qu'un seul cas de lièci-e (n/1>hoicl.e.

2 enfants ont eu des affections, d'ailleurs légères,

des yeux.

Musée pathologique. Le Musée placé sous la di-

rection de notre ami le D'' P. Brion j'usqu'à sa mort

le 7 avril, a été confié à partir du le" juin à l'un

de nos anciens internes, M. Paul SOLLIER. Le Musée

s'est augmenté sensiblement en 1889, ainsi que le

montre le tableau comparatif ci-après : .

XIV MUSÉE PATHOLOGIQUE. ,

Nous avons continué à reprendre, lors du relève-

ment, dans le cimetière de la commune (Gentilly), des

corps de 12 malades décédés il y a plus de 5 ans, les

crânes et les squelettes entiers quand il s'agit d'hémi-

plégiques. C'est cette pratique qui explique l'enrichis-

sement rapide du Musée dans les 2 dernières années.

Au point de vue des photographies, comme par le

passé, nous faisons prendre les photographies de tous

les malades à l'entrée, puis celles des malades qui

offrent des changements notables en bien ou en mal.

Quand un malade meurt, toutes ses photographies

sont déposées au Musée. A la fin de l'année, les obser-

vation des malades décédés sont réunies en volumes.

Il en résulte que toutes les pièces pathalogiques, bus-

tes, crânes, etc., ont leur histoire complète et peu-

vent servir à des études sérieuses. Elles ne sont pas

là seulement à titre d'objets curieux. Nous ajouterons

aussi que les photographies des cerveaux forment au-

jourd'hui 5 volumineux Albums (1).

L'installation actuelle du Musée est encore suffi-

sante. L'an prochain, il sera transporté dans l'un des

pavillons en construction, dont nous parlerons plus

loin. Une fois qu'elle sera effectuée, le temps sera venu

d'organiser un service scientifique convenable à l'hos-

pice de Bicêtre. A ce propos, nous ne pouvons que ré-

péter ce que nous écrivions dès 1885 : « Nous pensons

qu'il conviendrait de choisir un emplacement peu

éloigné de l'infirmerie générale et de la division des

aliénés, et d'y construire le service des morts et des

autopsies, le musée, les laboratoires, l'atelier de pho-

tographie et celui de moulage... »

(1) Nous profitons de l'occasion pour remercier de nouveau nos collabora-

teurs, MM. Hubert et Hurel, qui apportent le plus grand zèle à l'exécution

des phofofl1'ap}¡ie. et des 111 (JH111(fes.

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL. XV

II.

ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

Cet enseignement a été dirigé en 1889 par MM. Le-

roy, pour la menuiserie; - Alêne, pour la couture.

- Bénard, pour la serrurerie; - Dumoulin pour la

cordonnerie ; Morin pour la vannerie et le rem-

paillage des chaises; Mercier, pour la brosserie\

Le maître vannier, qui enseigne en même temps le

rempaillage des chaises, a eu l'heureuse idée d'appren-

dre le canage des chaises ce qui lui permet d'ensei-

gner aux enfants un nouveau métier.

Dans nos plans primitifs nous avions toujours compris

l'installation d'un atelier d'impri1nerie. Avant d'en

réclamer l'ouverture, nous avons voulu démontrer la

possibilité d'apprendre des métiers aux malades de

notre service et d'arriver à en tirer parti au point de

vue de la société et de l'Assistance. Cette preuve étant

faite depuis plusieurs années, nous avons réclamé

un maître typographe et imprimeur. Nous avons fini

par avoir gain de cause. M. Peyron a soumis le projet

au Conseil de surveillance de son administration, qui,

dans sa séance du 16 mai, sur le rapport verbal de

M. V. Goupy, a émis l'avis suivant.

Le Conseil, Vu le Mémoire par lequel M. le Directeur

propose de créer à l'hospice de Bicôtre, pour les enfants épi-

leptiques, un atelier d'imprimerie qui serait installé dans les

localités disponibles du bâtiment des ateliers; considérant

qu'en dehors des raisons d'ordre médical qu'a pu faire valoir

M. le Chef du service, l'ouverture de cet atelier permettra de

donner aux enfants les mieux doués sous le rapport intellec-

tuel un enseignement professionnel qui leur permettra plus

XVI ATELIER D IMPRIMERIE.

tard, lorsqu'ils auront quitté l'hospice, de suffire aux besoins

de leur existence ;

Emet l'avis : 1° Qu'il y a lieu de créer un atelier d'imprimerie

à l'hospice de Bicêtre pour les enfants épileptiques, et de

placer à la tête de cet atelier un chef ouvrier payé à raison

de 6fr. 50 par jour.

2° D'imputer la dépense résultant de l'achat et de l'installa-

tion du matériel sur le crédit inscrit au Sous-chapitre XV du

Budget hospitalier, art. 3 : Fond commun de réserve, et la

dépense résultant de la création d'un emploi de chef d'atelier

sur le crédit du Sous-chapitre XIX : Frais des diverses exploi-

tations (1).

L'imprimeur du Progrès 'médical, M. Goupy, qui

avait plaidé notre cause au Conseil de surveillance où

il représente le conseil des prud'hommes, a bien voulu

mettre à notre disposition ses connaissances et ses

relations professionnelles. C'est à lui que nous devons

la bonne installation de l'atelier d'imprimerie qui

fonctionne depuis le 8 Juin, et dont tous les meubles et

les casses ont été fabriqués par les apprentis menui-

siers ; c'est à lui aussi que nous devons l'excellent mai-

tre qui est à la tête de cet atelier. Nous sommes heu-

reux de pouvoir le remercier publiquement de son

concours empressé.

Nous n'avons eu qu'à nous féliciter du zèle que tous

les maîtres de l'enseignement professionnel apportent

dans leurs fonctions. Aussi serions-nous heureux de

voir l'Administration les en récompenser en accueil-

lant la demande que nous lui avons adressée de les ad-

mettre successivement à jouir de la pension de repos

qu'elle accorde aux sous-employés et aux infirmiers.

Le tableau suivant met en évidence les résultats

obtenus :

(1) Procès verbaux du Conseil de surveillance, 1â88-89, p. 531.

FONCTIONNEMENT DES ATELIERS.

XVII

XVIII ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL.

vices d'un ordre bien autrement supérieur. Il permet

de donner à un certain nombre d'enfants un métier

qui, à leur sortie, les mettra en mesure de gagner

leur vie. Quelques-uns ont déjà quitté l'hospice

et sont placés ; d'autres le seront aussitôt que

les circonstances le permettront. Il nous aide à don-

ner à un plus grand nombre d'enfants le moyen

d'atténuer, dans une proportion variable, les sacrifices

que la Société s'impose pour eux. Précisons par un

exemple : Nous avons à l'atelier de couture 24 hémi-

plégiques, c'est-à-dire des malheureux condamnés

presque certainement à passer toute leur existence à

l'hospice, 5 sont déjà de bons tailleurs, la plupart des

autres le deviendront. Autrefois, ils ne savaient rien

faire ; maintenant, grâce à l'enseignement qu'ils reçoi-

vent une fois passés aux épileptiques adultes, s'ils ont

encore des accès, ou passés dans les divisions de l'hos-

pice, s'ils n'en ont plus, ils pourront travailler à l'atelier

commun de la maison et leur travail compensera en

partie, et pendant de longues années, les dépenses de

leur entretien, en même temps qu'il leur fournira quel-

ques ressources personnelles.

Six apprentis, sachant leur métier, sont sortis dans

le courant de l'année : Guen.. (A.), menuisier; z

Eym.. (P.), vannier; - Oth. (Ph.), cordonnier ; -

Chiq.. (G.), tailleur; - Bonvar.. (A.), menuisier;

Comm.. (M.), tailleur.

Chaque année, l'habillement et la chaussure des

enfants sont notablement améliorés et l'amélioration

sera encore plus grande, car nous avons enfin obtenu

que le maître tailleur fut autorisé à faire la coupe des

effets d'habillement. Nous espérons arriver un jour à

faire que chaque enfant ait son trousseau numéroté.

STATISTIQUE. XIX

Le tableau suivant fait voir que les enfants qui

profitent de l'enseignement professionnel est allé en

augmentant. Cette progression s'arrêtera bientôt,

quand nous aurons la population entière que doit

contenir la section.

XX

MOUVEMENT DE LA POPULATION.

enfants se décomposant ainsi : 354 enfants idiots, im-

béciles, épileptiques etc., aliénés; 24 enfants idiots,

épileptiques, etc., réputés non aliénés. On sait qu'il

ne s'agit là que d'une division purement administra-

tive. Voici le mouvement de la population en 1889.

PERSONNEL DU SERVICE. XXI

bre, il restait dans le service 393 enfants se décom-

posant ainsi : 369 enfants idiots, imbéciles ou épilep-

tiques, dits aliénés, et 24 réputés non aliénés. Sur ce

chiffre, 15 enfants sont atteints de surdi-mutité et 6

sont aveugles.

Personnel du service en 1889. - Le personnel était t

ainsi composé : 1° pour le service médical : d'un in-

terne titulaire, M. Camescasse, et d'un interne provi-

soire, M. Sorcl ; de M. le D'' Bricon, puis de M. P.

Sollier, conservateur du Musée pathologique ; - 2°

pour le service scolaire : a) grande école : d'un insti-

tuteur M. Boutillier et de deux instituteurs adjoints,

MM. Boyer et Mesnard ; d'un professeur de chant,

M. Pény; d'un professeur de gymnastique, Gon,

de 2 moniteurs, administrés de l'hospice ; d'un maître

d'escrime, M. Caudroy; d'un suppléant M. Joly et de 3

infirmiers, garçons de classe ; - L) Petite école : de

11 ? Blanclie AIIUS, aurveillante ; de Melles Berthe Lan-

glet et Amandinc Bohain, sous-surveillantes ; de Mulle

Ferret, suppléante et de 1 infirmière; - 3° pour l'en-

seignement professionnel, de 7 maîtres dont nous avons

cité lesnomsplus haut; - 4"pourle service hospitalier

de M. Agnus, surveillant; de M. Siégcl, sous-surveil-

lant, de M"10 Jolliot, sous-surveillante, chargée de la

surveillance du bâtiment des gâteux invalides et du

pavillon des maladies contagieuses ; de Mollo Athénaïs

Bohain, suppléante, chargée de l'infirmerie ; de 28 in-

firmiers de jour ou de nuit ; de 29 infirmières de jour

ou de nuit; d'un baigneur (suppléant) ; d'un perruquier

et d'un portier. Total du personnel secondaire : 69.

XXII DÉCÈS.

DÉCÈS. XXIII

IYIV DÉCÈS.

DÉCÈS. XXV

XXVI DÉCÈS.

DÉCÈS.

XXVII

r

c

- ri ? ¡

>

0

sa

a

c :

c

M

en

C/3

0

ta

13

7

C/2

41

>

x

r

R

>>

Cl

a

t7

en

m

o

9

5

ri

3

X

·r.

r.

>

p

M

a

ti

M

m

ce

0

w

t7

M

RAPPORT DE M. THUILLIER. XXXI

IV.

La NOUVELLE section. - Construction DES trois

derniers pavillons.

Nous avons donné l'an dernier la description du pa-

nillon des cellules qui nous rend de très grands ser-

vices en nous fournissant le moyen d'isoler momen-

ttll('111CT1t, iL l'abri de toute promiscuité fâcheuse et

sous une surveillance efficace, les malades indisciplinés,

violents ou atteints d'excitation maniaque. Nous avons

également inséré a la fin du Compte rendu de 1888

deux figures qui représentent ce pavillon.

Nous terminions le chapitre relatif aux travaux exé-

cutés en 1888, en annonçant que M,. Peyron, appré-

ciant les raisons sérieuses que nous lui avions données,

avait fait préparer les devis des travaux restant à faire

pour compléter la section et qu'il nous avait promis de

soumettre le projet au Conseil de surveillance dans le

cours du mois de janvier 1889 : c'est ce qu'il a fait. Et

dans la séance du 7 février, M. Thuillier, chargé de

rapporter cette affaire, a lu le mémoire suivant pré-

senté par l'Administration :

Messieurs,

J'ai l'honneur de soumettre à votre examen un Projet de

travaux pour l'achèvement du quartier des Enfants idiots et

épileptiques à Bicètre. Le Conseil sait que le programme ou

plan d'ensemble, qui a été adopté pour la création de ce

quartier destiné à recevoir une population de 400 enfants,

comportait l'organisation et les constructions suivantes :

Serutce de joUI' ........

Réfectoires.

Ecoles ou Classes.

Ateliers.

Préaux couverts.

XXXII RAPPORT DE M. THUILLIER.

Hôpital proprement dit.

Service de nuit

Infirmerie.

Pavillon d'isolement pour les mala-

dies contagieuses.

Pavillon disposé en cellules pour

les malades agités ou indiscipli-

nés.

Service des gâteux (1 pavillon).

Huit pavillons pour dortoirs.

En 1882, on a détaché du plan d'ensemble le bâtiment à

usage d'ateliers ; cette construction a coûté 16 ? .690 fr. 67. -

En 1883, il a été affecté à la réalisation partielle du programme,

un crédit de 1.560.261 fr. 91 fourni pour 960.261 fr. 91 par un

prélèvement sur la subvention extraordinaire de 3 millions

allouée en 1883 à l'Administration, et, pour 600.000 francs, par "

une subvention municipale complémentaire allouée la même

année. Ce crédit avait été calculé en vue de la construction

des réfectoires, des classes, de deux pavillons pour dortoirs,

du pavillon pour les gâteux, de l'infirmerie; mais en utilisant

les bonis produits par les rabais d'adjudication, il a été pos-

sible de construire en plus 2 pavillons pour dortoirs d'isole-

ment.

En 1887 un prélèvement de 318.533 fr. 81 a été autorisé sur

la subvention extraordinaire de 1. 500.000 fr. pour la conti-

nuation des travaux, et en vue spécialement de la construc-

tion d'un cinquième pavillon à l'usage de dortoirs, du pavillon

des cellules et des préaux couverts. Il ne reste donc aujour-

d'hui à faire que trois pavillons pour dortoirs.

Le Projet qui vous est soumis comprend la construction de

ces trois derniers pavillons, qui, à 40 lits chacun, fourniraient

120 lits nouveaux, et compléteraient a 400, chiffre du pro-

gramme, le total des lits du quartier, non compris les lits de

rechange du pavillon des gâteux et ceux de l'infirmerie, du

pavillon de l'isolement et du pavillon des cellules.

En ce moment 60 enfants occupent encore des lits dans la

section des épileptiques adultes ; 30 couchent au quartier

dans des lits supplémentaires, et un certain nombre attendent

à l'asile Sainte-Anne leur translation a Bicêtre.

Les 120 lits nouveaux permettraient donc à l'Administration

de remédier à l'état d'encombrement actuel et de restituer il,

la section des épileptiques adultes son nombre de lits normal.

Les trois pavillons à construire sont figurés, comme empla-

cement, au plan d'ensemble du quartier ; des plans de détail,

RAPPORT DE M. THUILLIER. XXXIII

avec coupes et élévations, en montrent la disposition exté-

rieure et intérieure, la distribution, l'aménagement, etc.

Deux de ces pavillons sont en tout semblables à celui qui

vient d'être construit à gauche du pavillon des gâteux, et

sont disposés en échelons à sa suite ; ils se composent d'un

rez-de-chaussée élevé sur sous-sol et renferment l'un et

l'autre :

Au rez-de-chaussée, deux dortoirs de 20 lits chacun avec

services généraux au milieu et chambres de surveillants aux

extrémités; - En sous-sol, dans la partie nord du pavillon,

qui se trouve sur une déclivité de terrain, des chambres pour

le logement des serviteurs.

Le troisième pavillon, placé en échelon, à la suite des deux

précédents, rappelle par sa disposition extérieure le pavillon

des gâteux. Il est élevé sur sous-sol d'un rez-de-chaussée et

d'un premier étage qui formera le prolongement du bâtiment

des classes. Le rez-de-chaussée renfermera deux dortoirs de

po lits chacun avec leurs annexes ordinaires, comme dans les

autres pavillons, plus un logement de surveillant qui sera

aménagé à l'extrémité nord. Le premier étage sera utilisé

pour agrandir les locaux destinés à l'enseignement et instal-

ler un musée pédagogique (1).

Le projet comprend aussi la construction d'un groupe de

cabinets d'aisances el, d'urinoirs dans la cour de récréation

des enfants, et l'établissement d'urinoirs dans la cour du

parloir.

Il prévoit, enfin, les travaux d'assainissement et d'adduction

d'eau et de gaz dans les cours et chemins, et les travaux de

viabilité nécessaires pour mettre en communication facile les

nouveaux bâtiments projetés et ceux déjà construits. Un petit

chemin de fer, système Decauville, serait établi le long de la

clôture grillagée du côté du marais, avec une plaque tournante

au droit de chaque pavillon.

Les divers travaux à exécuter pour la réalisation de ce pro-

jet sont décrits et estimés dans les deux devis joints au dos-

sier. La dépense est évaluée, au devis estimatif, à la somme

totale de 736.480 francs, en y comprenant un dixième d'im-

prévu et un vingtième pour frais de direction et d'agence.

En voici le détail par nature d'ouvrage :

(1) Une moitié de cet étage sera affectée au Musée anatomo-patholo-

f¡i'1ue (I3.).

XXXIV ACHEVEMENT DE LA SECTION.

RAPPORT DE M. THUILLIER. XXXV

L'Administration ne recouvrera, il est vrai, la disponibilité

de ces crédits pour les affectera de nouveaux travaux qu'après

la clôture de l'Exercice 1888 et l'approbation des Chapitres ad-

ditionnels de 1889; cependant, si besoin, un arrêté préfectoral

pourrait, après avis favorable du Conseil, en autoriser l'ouver-

ture d'urgence à l'Exercice 1889. En utilisant cette première

XXXVI RÉSISTANCE AU CONSEIL DE SURVEILLANCE.

des parties successives de ce travail. II était donc naturel que

M. le Rapporteur, nouveau venu dans le Conseil, pensât que

ses collègues, plus anciens que lui, eussent tous leur opinion

faite sur un projet qui était parfaitement connu.

M. le Rapporteur pense inutile de donner des détails sur

les travaux qui sont proposés aujourd'hui, puisque le mémoire,

présenté par l'Administration sur cette affaire, a été inséré

in extenso au procès-verbal de la dernière séance, dont tous

les membres du Conseil ont reçu une épreuve.

Au nom de la commission M. le Rapporteur propose d'é-

mettre un avis favorable à l'exécution des travaux pour l'achè-

vement de la section des enfants idiots et épileptiques à Bicêtre.

Toutefois, il ne se prononce pas sur l'intérêt qu'il pourrait y y

avoir à construire le musée pédagogique prévu au projet.

M. DE Salvehte demande quel est le chiffre de la dépense

prévue.

M. le Rapporteur. La dépense avant rabais est évaluée à

700,000 fr. en chiffres ronds. Mais on peut compter sur un rabais

de 330/0 en moyenne. C'est donc en réalité une dépense ap-

proximative de 500,000 fr.

M. RoCaAItD. - C'est là une somme importante. Ne pour-

rait-elle pas être employée à des travaux d'une utilité plus

grande, qui donneraient satisfaction à des besoins plus urgents ?

M. LE Directeur fait observer que les services à créer pour

l'isolement des maladies contagieuses, les chroniques et les

infirmes, ne seront ni plus ni moins vite édifiés si l'on ne

dépense pas cette somme de 500,000 fr. pour l'achèvement

du quartier des enfants idiots. Cette assertion peut paraître

au premier abord paradoxale, et pourtant elle est exacte.

En effet, ce qui empêche l'Administration de créer avec

toute la rapidité qu'elle désirerait ces nouveaux services, c'est,

pour les hôpitaux d'isolement, l'opposition des Maires des

communes suburbaines, et pour les chroniques et les in-

firmes, ce n'est point le manque de ressources pour cons-

truire les édifices et faire les frais de premier établisse-

ment, c'est l'incertitude où elle se trouve de pouvoir compter

sur les ressources annuelles nécessaires au fonctionnement

de ces nouveaux services, et que peut seule procurer une aug-

mentation de la subvention municipale.

Une somme de dix millions a été réservée il l'Assistance

publique sur le dernier emprunt de la Ville pour grands tra-

vaux, et l'Administration n'a encore engagé de dépenses sur

cette somme que pour 2,500,000 francs. Par conséquent, elle

peut achever le quartier des enfants idiots sans diminuer

RESISTANCE AU CONSEIL DE SURVEILLANCE. XXXVII

l'importance des hôpitaux projetés, et dont la construction a

été retardée, non pour des motifs financiers, mais par suite

de l'opposition des autorités municipales où ces établissements

doivent être créés ou l'insuffisance des ressources annuelles

d'entretien.

M. ROCHARD reconnaît sans doute qu'il est bon de donner

des soins à ces enfants idiots et épileptiques ; mais, en se

plaçant au point de vue social, il lui semble plus urgent de

venir en aide à ces malades qui ne peuvent trouver place

dans nos hôpitaux, et qui, guéris, constituent une force

sociale que le devoir, aussi bien que l'intérêt, commande de

sauver.

M. Thomas pense que précisément l'achèvement du quartier

des enfants idiots à Bicétre permettra indirectement de recueil-

lir des adultes que la société a un intérêt tout particulier à se-

courir. En effet, dans les nouvelles constructions, on installera

les 60 enfants idiots qui se trouvent actuellement dans la sec-

tion des épileptiques adultes.

C'est donc 60 nouvelles places que l'on pourra donner des

adultes qui ne peuvent être abandonnés à eux-mêmes, qu'il est

même nécessaire de ne pas laisser dans leurs familles, car ils

sont plus encombrants que des vieillards, et constituent un dan-

ger et pour eux-mêmes et pour les autres. Donc, en se plaçant au

point de vue indiqué par l'honorable M. Ilochard, on doit re-

connaître que le projet proposé présente un sérieux et réel

intérêt social.

M. Fehiiy rappelle que c'est lui qui a été rapporteur de la

Commission chargée de l'examen du plan d'ensemble. On avait

dit avec raison, et lui-même était de cet avis, que la dépense

engagée par ce projet était excessive en raison du but qui se-

rait atteint. Mais enfin le principe fut voté ; successivement

on vota aussi diverses parties du projet. Aujourd'hui, il s'agit

de terminer l'opération.

Il ne reste plus que trois pavillons à construire. Il n'est

plus possible de reculer et de laisser inachevé un service pour

lequel on a déjà fait tant de sacrifices. M. Ferry votera donc

l'achèvement du quartier des idiots il Bicètre, non point avec

enthousiasme, mais parce qu'il y a une nécessité devant la-

quelle il faut s'incliner.

M. HOCHAHD persiste à croire que cette somme de 500,000 fr.

pourrait être employée plus utilement. M. le Directeur craint

de manquer de ressources pour l'entretien de nouveaux ser-

vices destinés aux malades ou aux infirmes, mais il peut tou-

jours formuler ses propositions. Le Conseil de surveillance

XXXVII ! vote du projet d'achèvement.

émettra son avis, et l'Administration aura ainsi mis sa respon-

sabilité à couvert.

M. LE Directeur déclare qu'à bref délai il fera des propo-

sitions pour la construction de nouveaux services destinés aux

malades et aux infirmes; mais, même si ces projets sont adop-

tés par le Conseil municipal, ils ne pourront être terminés que

dans un certain laps de temps.

Au contraire, le projet en ce moment en discussion est d'une

réalisation immédiate. Il y a donc un intérêt véritable à ne

point le repousser.

M. de SALVERTE combat le projet par des motifs d'économie,

et demande, à titre d'amendement, que la somme prévue pour

l'achèvement du quartier des enfants idiots soit affectée a une

destination autre qui sera ultérieurement déterminée.

L'amendement de M. de Salverte, mis aux voix, est rejeté.

M. THUILLIER demande la permission de présenter une

observation avant que le Conseil passe au vote des conclu-

sions de la Commission. Le devis prévoit 5 o/o pour frais

d'agence, indemmités et honoraires. La Commission demande

que ce chiffre soit réduit à 3 o/o. Le montant total du devis

serait ainsi réduit de 736,480 francs à 722,451 fr. 82.

M. le Président met aux voix les conclusions de la Com-

mission, le montant du devis étant fixé à 722,451 fr. 82. Les

conclusions de la Commission sont adoptées. En conséquence

le Conseil émet l'avis suivant :

Le Conseil, vu le Mémoire par lequel M. le Directeur sou-

met à son examen un projet de travaux pour l'achèvement du

quartier des enfants idiots et épileptiques, a Bicêtre, et pro-

pose de subvenir à la dépense de la manière suivante, savoir :

1° Jusqu'à concurrence de 179,117 francs 67. sur boni de pa-

reille somme réalisé dans la partie de l'opération autorisée en

1883 et dont le compte vient d'être apuré ; 2° Pour le surplus,

sur la subvention extraordinaire de 1,500,000 fr. allouée en 1889

à l'administration pour grosses réparations et grands travaux

(4° annuité de l'emprunt municipal de 2.')U millions);

Vu les plans,-vu le devis estimatif des travaux s'élevant

avant rabais, y compris l'imprévu et les frais de direction, à

la somme de 73G,4g0 francs ;

Emet l'avis : 1" Qu'il y a lieu d'approuver les plans et devis

sus-visés, ayant pour objet l'achèvement du quartier des en-

fants idiots et épileptiques à Bicètre; 2" D'imputer la dépense

évaluée avant rabais, imprévus et frais de direction compris,

il la somme de 722,451 fr. 82 ;

NOUVEAUX PAVILLONS. XXXIX

D'abord et jusqu'à concurrence de 179,477 fr. 67. sur le boni

de pareille somme réalisé clans l'exécution de la partie de

l'opération autorisée en 1883, et qui figurera dans les crédits

a ouvrir aux chapitres additionnels du Budget de 1889, cha-

pitre III, section 2, ? . : Fonds spéciaux périmés à faire re-

vivre. Dépenses subventionnées, et, pour le surplus, sur la

subvention extraordinaire de 1,500,000 fr. allouée en IS89 à

l'Administration pour grosses réparations et grands travaux

(4« annuité de l'emprunt municipal de 250 millions) ;

3° De mettre en adjudication publique, aux clauses et con-

ditions des cahiers des charges ordinaires de l'Administration,

et par nature d'ouvrage, les travaux de diverse nature prévus

au devis de l'opération, à l'exception des travaux de plomberie

pour gaz, qui, en raison de leur peu d'importance, seront con-

fiés à l'entrepreneur de l'entretien, et des travaux de dallage

en grès cérame et d'établissement d'un petit chemin de fer

système Decauville, qui, eu égard il leur spécialité, feront

l'objet de marchés de gré à gré.

Cette discussion témoigne de la persistance de

l'hostilité d'une partie des membres du Conseil de

surveillance contre la réforme que nous avons essayé

de réaliser à Bicêtre avec l'appui constant du Conseil

municipal. Certains de nos adversaires, n'ayant jamais

vu le « dépotoir» où séjournaientautrefoislesenfants et

n'ayant jamais visité la nouvelle section, ne compren-

nent pas encore la nécessité de l'Assistance des enfants

idiots et épileptiques. D'autres qui l'ont visité ne

veulent pas reconnaître leur erreur et, forcés et con-

traints, s'inclinent de mauvaise grâce devant la néces-

sité. Aussi peut-on dire que la section des enfants

de Bicêtre est l'oeuvre du Conseil municipal et faite

avec les subventions municipales.

Le dossier a été envoyé quelques jours après le vote

a la Ville pour être introduit au Conseil municipal.

Celui-ci l'a adopté dans sa séance du 29 mars, sur le

rapport de notre ami P. Strauss. Cette fois-ci, M. A.

Després n'a pas cru utile de reproduire ses accusations

XL

NOUVEAUX PAVILLONS.

et ses erreurs. M. Poubelle, préfet de la Seine, a eu

l'obligeance de signer promptement l'arrêté de mise

en adjudication. Celle-ci a eu lieu le 24 mai et a donné

des rabais considérables que fait ressortir le tableau

suivant :

Adjudication du v4 mai 118.'l.

MORT DE M. GALLOIS. XLI

M. Gallois (M.-P.), architecte de l'administration générale

de l'Assistance publique et de celle du Mont-de-Pitié, est mort

à Paris, le 6 mars, à de Go ! ans. C'est une véritable perte

pour ces deux administrations. Personnellement, nous regret-

tons très vivement la mort prématurée de M. Gallois. Nous

n'oublierons jamais que, abandonnant les plans et devis primitifs

de la section des enfants de Bicêtre, qu'il avait préparés con-

formément au programme administratif, il a accepté le plan

général que nous avions conçu : choix de l'emplacement;

pavillons iL rez-de-chaussée, en fer et briques; disposition

des pavillons (ateliers, réfectoires, écoles, etc.); installation

des idiots invalides, des malades, des contagieux, des agités,

dans autant de pavillons distincts et suffisamment isolés.

Nous garderons toujours le souvenir du talent incontestable,

de l'habileté consommée et de l'activité continue qu'il a

mis il l'exécution de cette oeuvre. Nous avions pu obtenir pour

lui, il force de persistance, l'honneur auquel il attachait le plus

grand prix. Malheureusement, une mort prématurée l'a empê-

ché d'en jouir longtemps et de présider à l'achèvement inté-

gral de la section des enfants.

V.

Consultation exthrne. Placement des enfants.

Transferts et rappel d'une ancienne

délibération du conseil général.

Depuis notre arrivée à Bicêtre en 1879, nous avons

consacré la matinée du jeudi à recevoir les malades du

dehors. Peu à peu, notre clientèle ordinaire s'est

accrue d'une clientèle d'un genre particulier, celle

des familles qui ont un enfant épileptique ou aliéné

à placer, et celle des vieillards et des infirmes qui

sollicitent leur admission dans un hospice.

Les enfants nous sont envoyés par des parents de

XLII PRATIQUES DEFECTUEUSES DE L ASSISTANCE.

nos malades, par des médecins de la ville et des hôpi-

taux. Le premier mode d'envoi se comprend sans

peine, mais il n'en est pas de môme du second. En effet,

les médecins et l'Administration devraient éviter un

déplacement long, pénible surtout l'hiver, coûteux, inu-

tile aux familles et à leurs enfants, aux vieillards et

aux infirmes. Les médecins delà ville et plus encore

ceux des hôpitaux devraient connaître les formalités

à remplir. En 1889, soixante-douze familles sont ve-

nues de tous les quartiers de Paris ou de diverses com-

munes du département de la Seine s'adresser à nous

pour leurs enfants. Voici la note, imprimée dans la

section, que nous leur remettons :

Placement DES Enfants.

« 1° 0 Certificat médical constatant l'état intellec-

tuel et les accès de l'enfant, et concluant Ù la néces-

sité de son placement dans un établissement spécial

au point de vue de la sécurité publique ;

« 2° Faire légaliser la signature du médecin par le

commissaire de police de son quartier ;

« 3" Copie ou extrait de l'acte de naissance de l'en-

fant ; .

« 4° Conduire le malade, avec ces pièces, à l'Asile

clinique (Sainte-Annel, rue Cahanis, n" 1, le matin de

9 heures à il heures. »

Comme on le voit, rien n'est plus simple (1). Fai-

sons remarquer qu'il n'est nul besoin de l'interven-

tion du commissaire de police, ni du passage par le

dépôt de la préfecture de police où trop de médecins

envoient encore les malades et même les enfants,

(1) Les formalités sont exactement les mêmes pour les aliénés adultes.

PLACEMENT DES ENFANTS. XLI Il

mais qu'on peut placer directement les aliénés,

adultes ou enfants, à l'Asile clinique.

Mais c'est surtout l'Administration qui est coupable.

N'est-ce pas elle qui devrait fournir tous ces rensei-

gnements ? Est-ce que toute personne qui en a besoin

ne devrait pas trouver au chef-lieu, dans les hôpitaux,

dans les mairies et les bureaux de bienfaisance, des

feuilles imprimées contenant l'indication des formalités

ou des conditions il remplir pour l'inscription au bureau

de bienfaisance, l'obtention des secours pour les

enfants nouveau-nés, les secours de nourrice ; pour

le placement dans les fondations, les maisons de

retraite, les hospices, les orphelinats, etc. Et ces

renseignements devraient être donnés libéralement,

avec la plus grande bienveillance. C'est dans les bu-

reaux où viennent les souffrants, les déshérités, qu'on

devrait rencontrer le plus de complaisance et de bonté.

Malheureusement, loin d'aller au-devant des misères,

de faciliter l'accession aux secours, le placement dans

les établissements hospitaliers, on semble éviter, au

contraire, de donner les renseignements, chercher à

décourager les pauvres gens afin d'éloigner le moment

où on ne pourra pas éviter les secours, et écarter le

plus possible de malheureux de la liste des secourus

ou des hospitalisés. On prend en un mot plus de souci

de la caisse que des souffrances et des misères.

L'Administration de l'Assistance publique est encore

empreinte des traditions catholiques et monarchiques :

faire des aumônes ; elle n'est pas encore républicaine,

c'est-à-dire fraternelle, humaine. Le droit du mal-

heureux il l'assistance n'est pas encore reconnu inti-

mement par elle ; c'est trop souvent une faveur qu'elle

accorde, une aumône qu'elle donne.

Nous avons parlé bien des fois dans les Comptes

rendus antérieurs des demandes de transfert qui sont

XHV TRANSFERTS DES ENFANTS.

adressées par les préfets des départements au sujet

des enfants de notre service nés dans ces départements,

mais dont les familles habitent le département de la

Seine. Nous avons indique aussi la délibération prise

par le Conseil général de la Seine, en vue de faire

cesser cette mesure barbare, puisqu'elle éloigne ces

malheureux malades de leur famille.

Dans la séance du 7 février 1889 de la Commisson

de surveillance des asiles, nous sommes revenu sur

l'application de cette délibération. Voici l'extrait du

procès-verbal : .

Maintien dans les asiles de la Seine des enfants aliénés : îrW cle moins de deux arts et ayant conservé leur domicile de

secours en province. M. le Dr Bourneville appelle la bien-

veillante attention de l'Administration sur les dispositions de

la délibération du Conseil général cle la Seine, en date du ! I

mai 1881, prise en vue du maintien dans les asile-; de la Seine,

aux prix de la journée des asiles de province, des enfants

aliénés, âgés de moins de dix-huit ans, qui, par leur domicile de

secours, appartiennent à des départements étrangers, mais

dont la famille habite Paris depuis deux ans au moins. A cette

occasion, M. le Dp Bourneville donne lecture d'une lettre

écrite aux parents d'un malade traité à Bicêtre, lettre par

laquelle M. le Préfet de la regrette de ne pouvoir

maintenir cet enfant dans ce quartier d'hospice où il sérail

obligé de payer un prix de journée supérieur à celui de l'asile

de La floche-Gant/on. M. Bourneville demande à celle occa-

sion que les dispositions humanitaires de la délibération pré-

citée soient portées à la connaissance des préfets des autres

départements. Il ajoute qu'il ne cesse, en ce qui le concerne,

de rappeler cette délibération sur tous les certificats qui lui

sont demandés pour transfert d'enfants.

M. Roux, directeur des affaires départementales, répond

que, chaque fois que les familles le sollicitent, le maintien

dans les asiles de la Seine de cette catégorie de malades est

autorisé, mais que l'Administration, vu l'encombrement des

sections d'enfants, n'a pas cru prudent de notifier la délibé-

ration précitée aux préfets des départements. M. Roux ajoute

qu'en ce qui concerne le cas signalé par M. le 1)'' Bourneville

il s'empressera de proposer, à M. le Préfet de la Mayenne, le

'I'It : 1\jI'I : It'l'v U13S I : \1·' : 1\'l'S. XLV

maintien à Bicêtre du malade //... au prix de journée de l'asile

de La Roche-Gandon.

M. le Président déclare l'incident clos.

Ce que le Conseil général a voulu c'est une règle

générale, égale pour tous et non pas donner à l'Admi-

nistration l'occasion d'accorder des faveurs. Pour cela

il n'était pas besoin d'une délibération ; cette faculté

existait.

Nous rappellerons enfin que le département de la

Seine ne réclame aux autres départements que le prix de

revient que ces départements paient dans leurs asiles,

mettant à sa charge le surplus du prix de journée payé

dans les asiles de la Seine.

VI.

Aliénés mineurs ET enfants IDIOTS.

Dans la séance du jeudi 29 août 1889 du Conseil général de

la Loire-Inférieure a eu lieu la discussion suivante :

M. Vivier présente le rapport sur les aliénés. Le crédit de

291.000 fr. nécessité par ce service est adopté. Le rapport examine

deux voeux formulés par M. Biaute, médecin en chef de ce service.

L'un de ces voeux concerne les aliénés mineurs étrangers à la

Loire-Inférieure, mais dont les familles demeurent dans le départe-

ment. Leur entretien est à la charge de leur déparlement d'origine.

Or, pour une minime différence de tarif, ces communes font entre-

tenir ces mineurs dans les asiles de leurs départements respectifs,

éloignant ainsi les enfants de leur famille. Le département pourrait

accepter la petite charge qui résulterait pour lui de la réduction

du tarif au même prix que celui des asiles rivaux. Le rapport est

accepté. L'autre demande du médecin en chef est plus importante.

Il s'agit des enfants idiots que, dans l'état actuel de la science, on

peut ramener par des soins à l'état presque intelligent. M. Biaute

XLVI ASSISTANCE DES ENFANTS IDIOTS.

demande la création d'un service spécial à ces déshérités. Le rapport

rejette cette demande en raison des frais qu'elle nécessiterait.

M. SmILLE se prononce en faveur des deux demandes de

M. Biaute. Sur le premier point, il y aurait de la cruauté à main-

tenir, pour une minime différences de frais, un état de choses qui

éloigne de leur famille les enfants malades, le domicile de secours

étant fixé au département d'origine. Cette situation est déplorable.

M. Vivier. - Nous sommes parfaitement d'accord.

Le Conseil adopte les modifications proposées.

M. SIBILLE, parlant des idiots, fait observer que l'asile Saint-

Jacques ne pouvant conserver ces sujets, on les renvoie, après un

court séjour, à leurs parents. Il demande la création d'un service

pour les soins à donner aux idiots à St-Jacques, mais il convient

auparavant de faire une enquête et d'établir les frais d'établisse-

ment du pavillon spécial destiné à ce genre de pensionnaires.

Diverses opinions sont émises. Aucune ne conteste l'utilité de la

création d'un service des enfants idiols, mais le Conseil recule

devant les travaux matériels que cette création nécessiterait à

Saint-Jacques, hospice qui n'a qu'un caractère provisoire et devra

forcément être reconstruit avant peu.

M. DE la FERRONNAYS verrait avec regret le Conseil entrer

dans la voie de constructions nouvelles à Saint-Jacques, la situation

des finances ne le permettant pas.

M. ViviER. - Le rapport ne parle de constructions nouvelles

qu'incidemment; il propose l'ajournement de cette question.

Le rapport est adopté.

Il Proposition adoptée. Les mineurs, nés en départements

étrangers, dont les parents habitent la Loire-Inférieure depuis

deux ans au moins, seront conservés en traitement à l'asile de

Nantes, avec l'autorisation du département d'origine qui paiera

leur entretien au prix de journée de son asile, le département de la

Loire-Inférieure supportant ce surplus s'il y a lieu. z

2° Proposition ajournée. - Construction d'un pavillon spécial

pour les jeunes idiots, imbéciles, arriérés, pour leur traitement et

leur éducation, selon les méthodes suivies à Bicêtre.

VII.

DE l'assistance des enfants idiots A l'étranger.

Ainsi que nous l'avons dit souvent, l'assistance, le traite-

ment et l'éducation des enfants idiots et arriérés sont en voie

de grands progrès dans presque tous les pays, sauf en France

ASSISTANCE DES ENFANTS IDIOTS. XLVII

où, jusqu'ici, on ne paraît pas se rendre compte de l'urgence

de ces réformes et des résultats qu'elles peuvent donner. C'est

pour cela que nous allons donner de nouveaux renseigne-

ments susceptibles d'apporter la conviction dans les esprits

qui n'ont d'autre souci que le bien public et l'intérêt des

malheureux.

D'après les documents communiqués à la 5c session de la

Conférence allemande relative à l'assistance des idiots, il exis-

tait en Allemagne 36 établissements donnant l'assistance et

l'éducation à 4.247 idiots. Nous devons signaler aussi l'exis-

tence, dans un certain nombre de villes, de classes destinées

aux arriérés. Ces enfants qui, dans les écoles ordinaires,étaient

laissés de côté, tournés en dérision, ne faisaient aucun progrès,

parce qu'on ne s'occupait pas d'eux,et,finalement, devenaient des

non-valeurs, se trouvent très bien de ces classes à part et

tirent un grand profit de l'enseignement spécial qui leur est

donné.

Tous les ans, dans les pays scandinaves, il y a un congrès

où l'on discute toutes les questions relatives à l'assistance et

au traitement de ces malheureux. D'après le compte rendu du

Congrès du 18 mars 1887, on a fondé deux nouveaux asiles

d'idiots à Hessieholm et à Karbshanm, et un autre était projeté

à Falun.

En 1886, on a ouvert un asile d'idiots incurables épileptiques

âgés, à Sceckerstad. - La Société pour les enfants de

Stockholm estime que les grands établissements conviennent

aux idiots et arriérés d'un certain âge et que les petits établis-

sements sont plus convenables pour les jeunes idiots. Eu

Suède, il existe des asiles-écoles pour les idiots : à Stockholm

(35 places), dans l'arrondissement de Stockholm (22); à Upsala

(1G); dans le Soedermanland (8); dans l'OEstergcetland (24); dans

le Smalund (24) ; dans le Blekinge (12); à Khristianstad (36) ;

à Malmoehut (45) ; à Johannesberg (40) ; à OErebro (20) ; à

Gelle (20).

A Copenhague, l'institution fondée par J. Keller en 1865 a

reçu 459 enfants idiots, faibles d'esprit ou épileptiques durant t

l'année 1887.

D'après Mme Matrat, inspectrice générale des écoles mater-

nelles, qui a visité les pays scandinaves en 1888, il y aurait ac-

tuellement, en Suède, 17 établissements pour l'éducation des

idiots. Tous, sauf un, sont dirigés par des femmes.

En Norwège, la loi de 1881 rend obligatoire l'enseignement t

pour ceux des idiots de sept à vingt ans qui sont aptes à le

recevoir. MmJ Matrat cite l'Ecole des filles idiotes iL Thorsangj

XLVIII ASSISTANCE DES ENFANTS IDIO'l'S.

faubourg de Christiania, fondée en 1876 et qui compte

135 élèves. Elle ajoute que « la Norwège a une écolo semblable

pourles garçons et un autre grand établissement à Trondghen;

la quatrième et dernière école sera ouverte dans un an » (1).

Au dernier Congrès des médecins aliénistes russes, qui

s'est tenu à Moscou, M. Maliarewski a fait une communication

sur l'éducation et la protection des enfants arriérés ; il montre

que pour remédier aux dégénérescences dont sont atteints ces

malades, il était nécessaire d'instituer des maisons médico-

pédagogiques spéciales. Il a rappelé que, le premier en Russie,

il avait fondé un établissement de ce genre, il y a quelques

années, à Saint-Pétersbourg (2).

Nous avons donné autrefois les renseignements sur les nom-

breux asiles pour les idiots et les faibles d'esprit qui existent

en Angleterre et aux Etats-Unis. En ce qui concerne ce dernier

pays les Proceedings of lite Association of médical O ? icers o/'

,il Institutions four 1 clioUe (Incl feeble-miided Persons

(1876-1886) renferment des plans, des mémoires et des docu-

ments de toutes sortes qui devraient être connus de tous ceux

qui s'occupent d'Assistance publique. D'autre part, l'Annuaire

Médical des Etats-Unis renferme les indications suivantes

sur les établissements des enfants idiots et faibles d'esprit aux

Etats-Unis :

Californie : Institution privée sous le patronage de l'Etat,

25 lits, fondée en 1884 à Vallejo ; - Connecticut : Institution

privée sous le patronage de l'Etat, 10 ? lits, fondée en 1858, à

Lalr,euille; - Autre institution fondée en 1881, à DZcriden ; -

Illizois : Institution d'Etat, 300 lits, fondée en 1865, à Lin-

coln : Inclina : Institution d'Etat, 82 lits, fondée en 1878, à

Knighstown ; lo·tva : Asile d'Etat, '21) lits, fondé en 1870, à

Gleenwood. - Kansas : Asile d'Etat, 160 lits, fondé en 1860 à

1·'ranlcfort.-Dlassasu.clcetls : Institution privée, fondée en regs

à layville ; - Asile d'Etat, HO lits, fondé en 1818 à South-

Boston ; Mtc/ucUt : Institution privée fondée en 1884 avala-

mazoo. -Dlin2esula : Institution d'Etat fondée en 1879 à Fari-

bault. -New-York (Etat de) : Asile d'Etat fondé à Giddes;

Autre asile d'Etat fondé en 1878 àNw.u'k; Hôpital pour

les idiots et les épileptiques à New-York; Autre institution,

(t) Voir L'éducation des enfants anormaux dans les pays

Scandinaves, par Mme Matrat (Uevue pédagogique, nov. 1888,

p. 425).

(2) Arch. de Neurologie, 1887, tome XIV, p. 302.

ASSISTANCE DES ENFANTS IDIOTS. XLIX

200 lits, fondée en 1860 à New-York. - Institution privée du

Dr Seguin, 11 lits, fondée en 1880, à New-York. - Ohio : Asile

d'Etat, 560 lits, fondée en 1857 auprès de Collimbus. - Pen-

sylvanie : Institution privée, 405 lits, fondée en 1863, à Elwyn.

En Ecosse, il existe trois institutions pour les enfants imbé-

ciles, l'une à Baldovan, l'autre à Larbert, la dernière à Colum-

bia-Lodge, près d'Edimbourg. Nous citerons, en Irlande, la

Stewart Institution; en Angleterre et dans le pays de Galles, il

existe une dizaine d'établissements parmi lesquels nous cite-

rons l'asile modèle de Earslwood qui renferme 594 enfants des

deux sexes.

Si l'on compare la situation de notre pays à celle des pays

scandinaves, de l'Angleterre, des Etats-Unis, de l'Allemagne,

on est obligé de reconnaître que la France est demeurée bien

en arrière de tous ces pays, et cependant c'est à un Français,

à Edouard Seguin, que revient l'honneur d'avoir organisé le

traitement et l'éducation des enfants idiots et arriérés, et c'est

lui qui est le véritable promoteur de cette grande réforme. Le

département de la Seine est à peu près le seul qui ait com-

mencé à organiser les services spéciaux pour les enfants idiots.

L'un d'eux relève directement de la Préfecture de la Seine ; les

deux autres de l'Assistance publique. Ce serait un honneur pour

cette dernière administration, si, en attendant la transforma-

tion et l'agrandissement de la section des petites filles de la

Salpêtrière, elle hâtait l'achèvement de la section des enfants

de Bicêtre, et la montrait en plein fonctionnement au moment

du Congrès international d'Assistance publique qui doit avoir

lieu au mois d'août prochain à l'occasion de l'Exposition uni-

verselle. (Progrès médical, 15 février 1889, p. 132). B.

L MORT DE P. BRICON.

VIII.

Mort du Dr Paul BRICON.

Notre ami, le Dr BRICON, ancien secrétaire do la

rédaction du Progrès médical et l'un de nos plus

fidèles collaborateurs depuis 1882, a succombé

dimanche dernier à la suite des accidents qui

viennent si souvent compliquer les affections car-

diaques anciennes.

Toute la rédaction du Progrès médical ot tous

nos lecteurs, qui ont pu apprécier son dévouement

à la science, joindront leurs regrets à ceux des

nombreux amis de Bricon et aux nôtres. Ils conser-

veront de Bricon le souvenir d'un vaillant mort à

la tâche, et son nom, de même que celui d'Amédée

Blondeau, son regretté prédécesseur, restera dans

leur mémoire, comme celui d'un homme dont la

vie entière a été consacrée à la science et à toutes

les idées généreuses. Fidèle aux principes do toute

sa vie, Bricon a voulu que ses obsèques fussent ci-

viles et que son corps fût soumis à l'incinération.

Nous nous faisons un devoir de publier plus

loin la relation de ses obsèques.

Obsèques du D' BRICON.

. Mercredi, 10 avril, ont eu lieu les obsèques de notre re-

gretté collaborateur, le Dr Paul BRICON. Ses nombreux amis

se sont réunis à la maison mortuaire et ont accompagné

son corps jusqu'au cimetière du Père-Lachaise, où a eu

lieu l'incinération.

Le deuil était conduit par les deux exécuteurs testamen-

OBSÈQUES DU Dr P. BRICON. LI

taires : M. Perrier, l'un de ses plus anciens amis, et

M. Bourneville.

Parmi les personnes présentes à la cérémonie, nous

avons distingué : M. et Mme Déjerine, les Dru Bouchereau,

Capitan, Poirier, Josias, Dagonet, Quesneville, Ch. II.

Petit-Vendol, Taule, etc., etc.; MM. Imard, inspecteur de

l'Assistance publique; Goupy, membre du Conseil de sur-

veillance de l'Assistance publique ; Leroux, chef de divi-

sion à la Préfecture de la Seine ; Ventujol, directeur de

Bicêtre,; Baron, économe, une délégation des infirmiers et

des infirmières de l'Ecole municipale d'infirmiers et infir-

mières du môme hospice, ayant à leur tête deux des ins-

tituteurs : MM. Boutillier et Boyer. On remarquait égale-

ment MM. Cluseret, Douville-Maillefeu, D Jules Carrette,

députés ; Vaillant, Humhert et Guichard, conseillers muni-

cipaux ; MM. Desesquelle, Jaclard, Protot, Verchère,

Vuillaume, Rogeard, Charlier ; la plupart des rédacteurs

du Progrès médical : MM. Marcel Baudouin, secrétaire de

la rédaction ; Dr Paul Loye, P. Sollier, etc., etc.; M. Durand,

administrateur, et les employés du Progrès médical. *

Arrivé au crématoire du Père-Lachaise, le corps a été

déposé dans la salle d'attente où ont été prononcés les dis-

cours suivants. Notre rédacteur en chef s'est exprimé ainsi :

Mesdames, Messieurs,

D'autres amis vous diront tout à l'heure le rôle politique de

Paul Bricon. A nous, incombe seulement le pénible devoir de

rappeler la vie scientifique de notre malheureux ami.

Bricon est né à Paris, le 1 ? août 1848. Son père, n'écoutant

que ses propres préférences, voulut qu'il commençât ses

études de droit et le plaça dans une étude d'avoué, profession

qu'il désirait luivoir embrasser. Bricon céda momentanément.

Peu après éclata la guerre de 1870. Il fut envoyé comme mo-

bile au camp de Châlons, puis au fort de Saint-Denis; c'est là

que, à la suite d'une sortie, il eut sa première attaque de rhu-

matisme articulaire aigu.

Exilé après les événements politiques de 1871, Bricon se ré-

fugia en Belgique où il subit une seconde attaque de rhuma-

tisme articulaire aigu à laquelle il faillit succomber. Le 3 dé-

cembre 1871, ne voulant pas abandonner son ami Desesquelle,

LII OBSÈQUES DU Dr P. BRICON.

proscrit aussi, et que le gouvernement belge expulsait, il

partit avec lui pour Berne. Quelques mois après, obéissant à

ses goûts et non à ceux d'autrui, il prit sa première inscription

à la Faculté de médecine de Berne. En 1874, il passa six mois à

la Faculté de Wurtzbourg. Il eut dans cette ville une troisième

attaque de rhumatisme non moins grave que les précédentes.

Une fois remis, il se rendit à la Faculté de Strasbourg, où il

prit ses grades et se fit recevoir docteur avec une thèse très

intéressante, intitulée : Nouvelles recherches physiologiques

sur les nerfs vaso-moteurs. Il vint ensuite à Genève, où

son assiduité au travail, le fit choisir comme assistant par le

professeur d'anatomie pathologique, M. le D" Zahn, poste qu'il

occupa jusqu'en 1879. lise fit également recevoir docteur de

la Faculté de Genève. Dans l'intervalle, en raison de sa santé,

il alla passer 7 ou 8 mois à Lisbonne.

Bricon profita de son séjour dans ces différentes Facultés non

seulement pour y faire de solides études, mais encore pour se

rendre un compte exact de l'organisation scientifique de la

Suisse, de l'Allemagne et du Portugal. Partout il se créa des

relations sérieuses et laissa de solides amitiés. -

L'amnistie de 1879 permit à Bricon de rentrer en France.

C'est peu après qu'il nous fut présenté par un ami commun,

M. Maillard, alors notre collègue au Conseil municipal. Bricon

avait formé le dessein de prendre ses grades à la Faculté de

médecine de Paris, et c'était dans le but de préparer une nou-

velle thèse qu'il avait cherché à être mis en rapport avec nous.

A partir de là, Bricon suivit très régulièrement notre ser-

vice à l'hospice de Bicêtre et bientôt, grâce à une commu-

nauté d'idées politiques et scientifiques, des liens d'amitié

nous unirent étroitement.

En assistant, en quelque sorte jour par jour, à l'élaboration

de sa thèse : Du traitement de l'épilepsie, qu'il subit en

juin 1882 et qui lui valut une honorable récompense de la

Faculté de médecine, nous avons pu constater les qualités so-

lides qui le caractérisaient : rectitude d'observation, esprit cri-

tique éclairé, scrupuleuse exactitude dans les détails même les

plus minutieux, connaissances bibliographiques très étendues

et très sûres, désir ardent de ne rien omettre et de rendre justice

à tous, en un mot l'honnêteté scientifique la plus absolue.

Bricon devenu, à dater de cette époque, l'un de nos collabo-

rateurs les plus actifs et les plus dévoués, publia dans le

Progrès médical - dont il fut secrétaire de la rédaction de

1882 à 1886 - et dans les Archives de Neurologie, soit seul,

soit avec quelques-uns de nos élèves, soit avec nous-même,de

OBSÈQUES DU Dr P. BRICON. LUI

nombreux travaux qui furent souvent analysés ou reproduits

avec éloges par la presse spéciale.

Les uns, relatifs à la thérapeutique, étaient le complément

des recherches consignées dans sa thèse ou portaient sur des

médicaments nouveaux. Le plus important, dans ce genre de

recherches, est le Manuel des injections sous-cutanées (fait

en commun), ouvrage qui a eu déjà l'honneur d'une seconde

édition et d'être traduit successivement en anglais, en espagnol

et en italien.

D'autres travaux scientifiques de Bricon, qui remontent à

18882 et 1883, concernent la microbiologie, science alors peu

cultivée chez nous, mais qui avait été l'objet de beaucoup de

mémoires et de multiples recherches à l'étranger, surtout en

Allemagne; ses revues critiques et bibliographiques sur les

bacilles de la tuberculose, de la fièvre typhoïde, de la diphtérie,

du choléra, de la pneumonie, de la syphilis, de la blennorrha-

gie, sur l'actinomycose, etc., etc., sont des plus remarquables

et ont certainement contribué au développement qu'ont pris les

études microbiologiques dans ces dernières années.

L'un des maîtres de la science française, dont la compétence

dans cette branche des sciences médicales est reconnue de

tout le monde, notre ami le professeur Cornil, nous faisait, il

y a quelques jours, l'appréciation la plus flatteuse de ces tra-

vaux et nous rappelait qu'il les avait lui-même largement mis

il contribution.

Citons encore, comme relevant plus particulièrement de la

clinique, les mémoires que nous avons faits ensemble : De

la Rubéole ou roséole idiopathique; - De l'Idiotie c1'éti-

noïde (avec cachexie })achyde1'lnique) ; - De l'Epilepsie }))'o-

cursive, et de nombreuses observations.

Mais les préférences de notre ami se dirigeaient plus spé-

cialement vers les recherches anatomo-pathologiques qui lui

avaient valu son titre d'assistant à la Faculté de Genève. Aussi,

accepta-t-il avec empressement notre proposition de pratiquer

avec nous toutes les autopsies des malades qui mouraient dans

notreservice. De làaussi la publication du Manuel de technique

des autopsies. C'est en nous appuyant sur ses travaux spé-

ciaux que nous avons demandé, au début de l'année 1885, à

M. le Directeur de l'Assistance publique, qui nous l'a aussitôt

accordé avec empressement (16 mars 1885), de confier à

Bricon les modestes fonctions de conservateur du musée ana-

tomo-pathologique que nous avions commencé à la fin de 1879

et qui, grâce à son précieux concours, est, à l'heure actuelle,

parfaitement ordonné.

Nous avons encore eu en Bricon un collaborateur empressé

LIV OBSÈQUES DU Dr P. BRICON.

pour une réforme d'une importance scientifique et sociale in-

contestable, et qui sera de mieux en mieux appréciée au sur

et à mesure qu'elle sera plus directement connue : l'enseigne-

ment professionnel des infirmiers et des infirmières des hôpi-

taux. Bien des fois, nous avons fait appel à son dévouement,

d'abord pour nous aider à faire passer des examens à l'Ecole

municipale de Bicêtre, puis pour y enseigner l'hygiène hospi-

talière, enseignement qu'il a fait pendant trois années (1).

Bricon était tout dévoué à la science. Il n'a jamais voulu

faire de clientèle; cependant il était toujours prêta mettre son

expérience et ses connaissances indiscutables au service des

malheureux et de ses anciens compagnons d'exil. En cela, il a

été fidèle à ses opinions socialistes. Libre-penseur, il a voulu

que ses obsèques fussent civiles. Partisan du progrès, en hy-

giène, comme en tout, il s'était fait inscrire parmi les membres

de la Société pour la propagation de la. crémation et il a de-

mandé que son corps fut soumis à l'incinération.

C'était un devoir pour moi, mon ami, de rendre ici, un hom-

mage public à ton existence toute de travail, de probité, de

dévouement, à toi qui, jusqu'au-delà de la mort, as su rester

fidèle à tes principes.

Mon cher Bricon, adieu !

Puis, M. DESESQUELLE,, a prononcé l'allocution ci-après :

« Au nom des amis les plus anciens et les plus intimes du

mort que nous pleurons, je vous remercie tous, corréligion-

naires politiques, savants, collègues ou amis, d'avoir bien

voulu lui donner ce dernier gage d'affection de l'accompagner

jusqu'au bord de l'éternel néant.

« D'autres voix, plus autorisées que la mienne, auraient pu

vous adresser ce témoignage de gratitude, mais j'ai été si inti-

mement et depuis si longtemps mêlé à la vie de notre mort

que je me crois, jusqu'à un certain point, le droit de me con-

sidérer un peu de la famille.

« Si cette dernière n'a pas de représentant plus autorisé à cette

manifestation de l'expresse et extrême volonté de notre ami,

nous n'avons du reste pas le droit de lui en vouloir.

« Pour vous tous, en effet, qui connaissez les lois si pondérées

et partant si lentes à s'accomplir de l'évolution scientifique,

vous admettrez bien que des ancêtres comme le sont les plus

(t) 1er Août 1884-31 décembre 1886.

OBSÈQUES DU D1' P. BRICON. LV

proches parents de notre ami aient eu quelque scrupule devant

l'essai à tenter, sur un être qui leur était si cher, de théories

encore si nouvelles.

« Mais, et j'en suis certain, ils aimaient trop leur enfant pour

lorsqu'ils les connaîtront et les jugeront sainement ne pas

être profondément touchés des preuves multiples d'affection

que votre présence vient ajouter aux preuves passées de leur

amour paternel. -

« A peine à la moitié de la vie et encore peu soucieux, par

conséquent, des préoccupations du lendemain ; attaché comme

il l'était à toutes les choses du progrès, à toutes les idées géné-

reuses, et travaillant peu pour lui pour avoir plus le temps de

travailler pour autrui, notre ami est mort pauvre.

« C'est lelot de ceux qui meurent jeunes, surtout de ceux qui

se dévouent.

« Si nous avons pu, pour un acte intime de fraternité sur la

réalisation duquel notre ami n'avait, du reste, aucune inquié-

tude, aider à exécuter une partie des volontés qu'il nous avait

confiées, il nous laisse encore; une dette à payer au dévoue-

ment inaltérable^ à l'affection désintéressée qui, née à l'exil, l'a

accompagné jusqu'à la tombe.

« Pour l'acquit de cette dette sacrée, laissez-nous espérer,

vous tous qui aimiez notre ami, que nous ne ferons pas en vain

- quand le moment en sera venu - appel à l'esprit de soli-

darité républicaine qui vous anime.

« Encore une fois merci à tous, et à toi, notre cher mort,

un dernier adieu ! »

Les discours terminés, le corps, renfermé dans un cer-

cueil en pichpin, a été transporté dans la salle de l'inci-

nération et déposé sur une sole en fonte, recouverte d'un

voile d'amiante qui, à l'aide d'un mécanisme spécial, a été

introduite à 11 heures 20 m. dans le four recouvert de ten-

tures de deuil frangées d'argent et formant, au milieu de

la salle, également tendue de draperies noires, un cata-

falque au chiffre du défunt. Ce n'est qu'à 1 h. 35 que le

four a été ouvert pour retirer la sole contenant les cendres

de notre malheureux ami.

Les débris furent ensuite recueillis sur une pelle d'ar-

gent et déposés dans une urne funéraire en terre, et de là

dans un petit cercueil de chêne, qui a été descendu dans

le dépositoire de la Ville, à côté des restes précédemment

incinérés du fils du Dr Jacoby et de 111 ? Benon.

A. ROUSSELET.

LVI thèses DE 1889.

THÈSES DE 1889.

CORNET .(Paul.) . - Traitement de l'épilepsie.

GOTTSCHALK (A.). - Valeur de l'influence de la consan-

guinité sur la production de l'idiotie et de l'épilepsie.

DEUXIÈME PARTIE

Thérapeutique.

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1889.

1.

Bromure d'or.

Notre interne en pharmacie, M. Cornet, qui faisait en

même tempsses études de médecine, nous ayant demandé

de lui donner un sujet de thèse, nous l'avons engagé à

choisir un sujet de thérapeutique et nous lui avons pro-

posé, ce qu'il a accepté, de suivre avec nous les malades

que nous avions mis en traitement par le bromure d'or, le

bromure de camphre et la picrol,oxine. Il a passé sa thèse

le 16 mai de cette année (1889). Dans son travail, il a

donné sur chacun de ces médicaments un résumé de

leurs propriétés chimiques et physiologiques; il a étudié

leur mode d'élimination, leur action toxicologique,puis

a tracé un aperçu historique de leur emploi en théra-

peutique et terminé par l'exposé des résultats obtenus

jusqu'à J'époque de la soutenance de sa thèse. Nous

avons prolongé ces expériences thérapeutiques durant

plusieurs mois, afin d'avoir une idée encore plus exacte

de leur action sur la marche de l'épilepsie.

Nous avons employé le bromure d'orpour la première

fois en 1882 (4), et nous terminions la courte note con-

sacrée à ce sujet en déclarant que « le bromure d'or était

1. Bourneville. - Recherches cliniques el thérapeutiques sur l'épilepsie.

compte rendu du service pendant l'année 1882, p. 1

4 l'il eit.-ipr17,PI QUE.

absolument inefficace contre l'épilepsie, au moins à la

dose de 10 centigrammes. » M. le Dr E. Goubert ayant

publié en 1888 une note sur le bromure d'or dans la-

quelle il attribue à ce médicament une « activité

remarquable et constante dans tous les cas d'épilepsie »,

nous avons cru devoir l'expérimenter de nouveau.

Nous avons administré le bromure d'or à dose massive,

en une fois avant le coucher, en commençant par la

dose de 5 milligr. pour arriver progressivement jusqu'à

3 centigr. Nous avons adopté le mode d'administration

suivant :

BROMURE D OR. 5

55 ans, employé à la Ville, bien portant, sobre, pas d'acci-

dents nerveux, aucune maladie. Son père, mort subitement

d'une hernie étranglée à 84 ans, était sobre. Sa mère est

morte à 35 ans, à la suite de couches. Aucune trace d'acci-

dents nerveux clans le reste de la famille.

Mère, 54 ans, ménagère, santé délicate ; très faible, mais

pas de maladie, pas de convulsions de l'enfance, pas d'atta-

ques de nerfs. Très impressionnable et sujette à se trouver

mal, depuis son enfance. Pas de migraines, mais douleurs de

tête jusqu'à la ménopause (32 ans). - Père mort d'apoplexie

à 52 ans. Mère morte d'une fluxion de poitrine à 66 ans.

Grand'mère maternelle morte après avoir été paralysée pen-

dant douze à quinze mois.

l'as de consanguinité. - Inégalité d'âge d'un an.

Huit enfants, dont un garçon bien portant, qui aurait eu

des convulsions jusqu'à 2 ans 1/2 ; deux jumelles (1) mortes à

15 jours, et deux filles dont l'une est morte de convulsions à

9 mois, et l'autre bien portante (20 ans) qui a eu un enfant

mort également de convulsions. Notre malade est le septième

enfant.

Notre malade. - Rien à la conception, né à terme, facile-

ment, sans asphyxie, après une grossesse normale. Elevé en

nourrice au biberon ; repris à 2 ans 1/2, àge auquel il par-

lait, mais mal, et marchait, mais avec beaucoup de faiblesse

dans les jambes. Propre à trois ans. Pas de renseignements

sur la dentition.

Début de la maladie. - A 2 ans i/2, le jour de sa rentrée

de nourrice, convulsions ou mieux un accès de deux ou trois

minutes, après lequel il ne pouvait se tenir debout. La

nourrice n'a donné aucun renseignement sur le début et la

cause des crises. A partir de là, il a eu des accès diurnes et

nocturnes tous les jours.

De 6 il 7 ans, rémission complète. A partir de 7 ans 1/2,

retour des accès ; il tombait comme une masse, tous les

jours, et jusqu'à quinze fois dans une nuit.

De 10 à 11 ans, rémission de six mois, puis retour des accès,

mais moins souvent qu'auparavant. Depuis octobre 1881,

1. Il n'y a pas de jumeaux du côté maternel, mais une cousine germaine

du père du malade a eu deux jumeaux.

(i l'HI : R : 1 f'l' : 1"l'IQI,'1 ?

les accès sont devenus quotidiens ; le maximum a été de

20 en un jour.

D'après la mère, l'enfant ne prévient jamais; il pousse par-

fois un cri sourd ; la rigidité et les secousses cloniqucs

seraient égales des deux côtés. Cyanose, puis pâleur comme

s'il était mort. Pas de ronflement, ni d'écume, mais de la

salivation. Se mord la langue ; urine rarement sous lui.

N'aurait jamais eu de folie; mais il serait devenu voleur et il

demande des sous à tout le monde.-Les accès se sont com-

pliqués de vertiges.

On a dû le retirer de l'école parce que les enfants se mo-

quaient de lui, l'appelaient fou, toqué, et le battaient. 11 est

devenu peureux depuis il mois, et, depuis la même époque,

la mémoire a diminué. Le raisonnement a toujours été

puéril. Il n'est pas méchant mais très sujet à se mettre en

colère. -Pas d'onanisme. - Il eu des oxyures et a rendu

un ascaride lombricoïde. Aucune manifestation scrofuleuse.

Eta.lcccturl(1'J,juillet 18884). - Crâne rond, régulier, bien

conformé. Bosses assez saillantes il la partie supérieure de

la portion écailleuse du temporal. Front assez élevé ;

dépressions latérales assez prononcées ; bosses frontales peu

marquées. Nez droit régulier. Face ronde ; joue droite plus

pendante que la joue gauche. Lèvres épaisses ; commis-

sure gauche plus élevée que la droite surtout pendant le

rire. Maxillaires réguliers : gencives assez régulières, mais il

manque des dents. Voûte palatine très profonde, ogivale,

symétrique. Les membres, le thorax, l'abdomen et le bassin

sont bien conformés.

Organes génitaux. - Pénil complètement glabre ; testi-

cules égaux, de la grosseur d'une petite olive ; verge peu

développée; gland découvrable.

Parole un peu traînante; mémoire assez bonne; C... est

assez intelligent, affectueux et courageux ; sa tenue est

bonne ; il a fait quelques progrès depuis son entrée ; met de

la bonne volonté au travail.

Les différentes fonctions n'offrent aucun trouble.

Sensibilités générale et spéciale : normales.

Traitement . - Antérieurement il son entrée il Bicêtre : bro-

mure de potassium, dragées de Gélineau, chloral.

It130\fS'ISI; 1) OR. 7

1884. Hydrothérapie du l" juillet au 15 octobre. Ainsi

qu'on le voit par le tableau général des accès, il y a

eu, sous l'influence de l'hydrothérapie, une amélioration

sérieuse qui s'est traduite d'abord par une diminution, puis

par une suspension des accès pendant trois mois. Tandis

que du 1 ? juin au 31 octobre 1883 on avait compté trois

cent trente accès, durant la période correspondante de 1884

on en a noté seulement trente-quatre.

1885. Du 1 ? février à la fin de mars, Car.... a pris du bro-

mure de potassium, en commençant par deux grammes, en

augmentant d'un gramme par semaine jusqu'à huit grammes-

Pas d'amélioration appréciable. Du 10 juin au 1er novembre

hydrothérapie, sans diminution des accès comme l'année

précédente.

1886. Elixir polybromuré d'Y von.

le, avril : Suspension de l'élixir. Hydrothérapie. Reprise

de l'élixir.

1887. 7 mars. Accès fréquentslanuit, avec chute sur le lit.

Sirop polybromuré.

1888. Nouvelles séries d'accès, lesquels, au dire du père

seraient ramenés par les douches.

1889. janvier. Puberté. Léger duvet commençant à ombrer

la lèvre supérieure. Le reste du visage et les aisselles sont

glabres. - Quelques poils d'un brun foncé sur le pénil et

autour de la racine de la verge. Bourses pendantes; testi-

cules égaux, du volume d'un oeuf de pigeon, tous les deux

descendus au fond des bourses. Longueur de la verge :

9 centimètres ; circonférence : 7 centimètres. Gland clécou-

vrable.

21 janvier. Bromure d'or : 0 gr. 005 millig. en une fois.

6 février. 0 gr. 01 centig. de bromnre d'or.

THÉRAPEUTIQUE.

Tableau général des accès et des vertiges (1).

BROMURE (l'OR. 9

ler avril. 0 gr. 03 centig.

7 mai. Le bromure d'or a été suspendu le 30 avril. Il est

repris aujourd'hui à la dose de 0 gr. 03 centig.

24 juin. L'enfant qui semblait se remonter intellectuelle-

ment baisse de nouveau. Il n'avait que des accès nocturnes.

Depuis 8 jours, on a noté 3 accès de jour. Bromure d'or,

Ogr. 02 centig.

17 août. 0 gr. 03 centig. de bromure d'or.

25 août. 0 gr. 04 centig., jusqu'au 31 août. - A partir

du le, septembre, le malade a été mis à l'hydrothérapie.

Tableau des accès et des vertiges durant la période

de traitement et les périodes correspondantes des années

précédentes.

)0 o THÉRAPEUTIQUE.

Durant les quatre premiers mois du traitement, nous

avions noté une diminution sensible des accès par rap-

port aux périodes correspondantes des années précé-

dentes (47 accès aulieu de 228 en 1887) ; mais, en revan-

che, les vertiges qui avaient disparu presque complète-,

ment depuis trois ans, étaient revenu de nouveau. Cette

amélioration, relative d'ailleurs, ne s'est pas maintenue

et la comparaison des totaux du tableau le montre

d'une manière évidente.

Nous avons l'habitude de prendre deux fois par an le

poids et la taille de nos malades, espérant plus tard nous

en servir pour une étude du développement physique

des enfants (I). Dans le cas particulier, nous avons, de

plus, noté le poids du malade, tous les mois, pendant

qu'il était en traitement par le bromure d'or. Du mois - "

de janvier au mois de mars, nous avons une augmenta-

tion de 100 grammes puis un abaissement de 300 gram-

mes, et à la fin du traitement, une augmentation de

300 grammes.

I\IIQ)II'RI, D OR.

OBSERVATION Il

Epilepsie qui ri commencé de 8 à 10 ans. - Pas d'antécédents

héréditaires. - Accès d'abord rares au début, puis de plus

en plus lIomh1'ell.r : . - Amélioration.

Mor... Lucien, 17 ans, est entré à Bicêtre (service de

\Ll3ouur,vr.r.i;) le 23 juillet 1884.

1889. Traitement par le bromure d'or :

Tableau des accès et des vertiges.

12 2 THÉRAPEUTIQUE.

21 janvier, 5 milligr. - 6 février, 1 centigr. z6 février,

0 gr. 025 millig. - 1" avril 0 gr.03 cent. - Suspension du

bromure d'or du Il, au 6 mai.- 7 mai, 0 gr. 035milligr.. -

20 mai, 0 gr. centig.- 6 août, Ogr. 03centigr. - 15 août,

0 gr. 02 centigr. - 20 août,0 gr.01 centigr. - Suppression

du traitement le Il, septembre.

En 1885, mot... a eu 12 accès; - en 4886, -16; - en

1887, 21; - en 1888, 27; on 1889, 34. Si l'on

compare le nombre des accès durant les huit premiers

mois de cette année, correspondant au traitement, on

voit qu'il n'y a eu qu'une diminution de i accès par

rapporta la période correspondante de 1888. - Voici

maintenant le tableau du poids et de la taille.

BROMURE D'OR. 13

lytique. Un cousin (côté paternel), idiot. -- Début, il y

a 2 ans, un premier accès la nuit, un autre accès 5 jours

après, puis toutes les semaines . - Légère amélioration.

Gil... Félix Jean, 18 ans, entré à Bicêtre (service deid.BoiiR-

NE, -VILLE) le 4 mai 1888.

Traitement par le bromure d'or : mêmes doses progressives

que dans les observations précédentes.

Nous ne pouvons ici établir une comparaison entre la pé-

riode du traitement, et les années précédentes; le malade

n'étant il Bicêtre que depuis trop peu de temps.- De mai à

décembre 1888. G... a eu 159 accès et 1 vertige.

1 4

THÉRAPEUTIQUE.

Géra... Gustave, 17 ans, entré à Bicêtre (service de

M. Bourneville) le 14 juillet 1884.

1889. 21 janvier. - Traitement par le bromure d'or :

mêmes doses.

21 janvier, 5 mgr. - 5 février, 1 centig. - 12 février,

1 centig. 1 ? - ° ? 0 février, 2 centig. 21 février, 2 cent. 1/2

lor avril, 3 centig. Suspension du le, au 6 mai ; 7 mai,

3 centg. 1/2. - 21 juin, 2 centig. - Suppression le -1"" sep-

tembre.

Tableau des accès et des vertiges.

BROMURE D OR. 15

Il) si THÉRAPEUTIQUE.

Tableau des accès et des vertiges.

BROMURE D'OR.

17

OBSERVATION VI

Epilepsie partielle gauche. - Père, sciatique : excès de bois-

son avec crises nerveuses. - Tante et oncle : excès de bois-

son. - Premier accès à 8 ans suivi d'hémiplégie gauche. -

Peu d'amélioration.

Duf... Joseph, 9 ans, entré à Bicêtre (service de M. BOUR-

rrmLLC) le 28 juillet 1884.

1889. 21janvier.-Traitement par le bromure d'or : mêmes

doses. Suppression le 31 août.

Tableau des accès et des vertiges.

18 8 THÉRAPEUTIQUE.

En 1888, Duf.· a eu 246 accès, et un vertige, soit une

moyenne mensuelle de 20 accès ;. durant les huit pre-

miers mois de 1889, la moyenne a été de 18,7. L'amélio-

ration a donc été à peu près insignifiante. La tem-

pérature a été prise du 29 au 31 mai. Elle paraît avoir

subi un abaissement assez marqué sous l'influence du

traitement.

EMMURE D'OR.

tu 9

OBSERVATION VII

Epilepsie. Pas d'antécédents névropathiques. - Pas de

convulsions dans l'enfance. - Premier accès à 7 ans. -

Amélioration légère.

Bertr... Christian, 17 ans, entré à Bicêtre (service de

M. BOURNEVILLE) le 11 août 1887.

1889. 21 janvier. - Traitement par le bromure d'or :

mêmes doses.

Tableau des accès et des vertiges.

g 0 THÉRAPEUTIQUE.

La température n'a pas subi de modification appré-

ciable.

BROMURE D'OR.

21

Tableau des accès et des vertiges.

9 2 - THÉRAPEUTIQUE.

MATIN SOIR

BROMURE D'OR. 23

OBSERVATION IX

Pas d'antécédents névropathiqzzes. - Une soeur morte de mé-

ningite. - Premières convulsions à 8 mois à la suite d'une

maladie ( ? ), avec convulsions dans la face et le membre du

côté gauche. - Amélioration.

Messag... Ernest, 15 ans, entré à Bicêtre (service de

M. BOURNEVILLE) le 29 septembre 1888.

1889. 21 janvier. - Traitement par le bromure d'or :

mêmes doses.

Les accès ont beaucoup diminué du commencement à la

fin du traitement, si l'on en juge par l'aperçu suivant :

4 THÉRAPEUTIQUE.

BROMURE D OR.

25

OBSERVATION X

Premier accès à 7 ans. - Vertiges peu fréquents. - Amé-

lioration.

Doist... Albert,14 ans, entré à Bicêtre (service de M. Boun-

nEVILLE) le 13 octobre 1887.

1889. 21 janvier. Traitement par le bromure d'or :

mêmes doses.

Tableau des accès et des vertiges.

26 6 THÉRAPEUTIQUE.

La température rectale n'a pas subi d'abaissement

appréciable.

BROMURE DE CAMPHRE. 27 7

II.

Bromure de camphre

A maintes reprises, nous avons démontré l'action de

ce médicament sur les vertiges épileptiques. Nous ne

reviendrons pas sur l'exposé, déjà fait dans nos précé-

dentes publications, des propriétés chimiques et phy-

siologiques du bromure de camphre, ni sur l'élimina-

tion du médicament, ni sur ses usages en thérapeutique,

que M. Cornet a complétés ; nous nous bornerons à re-

produire l'observation suivante, qui confirme très nette

ment nos conclusions antérieures.

OBSERVATION XI

Epilepsie et imbécillité prononcée, symptomatiques. - Père

peu intelligent, alcoolique, violent; attaques de folie ?

Oncle paternel paralysé du bras. - Grand-père maternel,

troubles intellectuels passagers. - Grand'mère maternelle

hémiplégique. - Deux tantes maternelles probablement

hystériques. -Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de

9 ans. - Mère et 9oe/lr, convulsions de l'enfance.

Plusieurs convulsions à 4 4 mois. - Convulsions Iréqueil-

tes pendant un an, puis plus rares, jusqu'à quatre ou cinq

ans. - Accès véritables à 4, 5 ans. - Absences à 7 ans 1/2.

2 8 THÉRAPEUTIQUE.

- Parésie des membres inférieurs après les accès. - 1885,

Elixir polybromuré. - 1886, Erythème noueux. - Bro-

mure de camphre : .' diminution des vertiges. - Suspen-

sion du médicament : retour des vertiges. - 1887, Reprise

du bromure de camphre, diminution puis disparition

des vertiges. - Rougeole. - Suspension du bromure de

camphre : retour des vertiges. - 1888, Nouvelle administra-

tion du bromure de camphre : diminution des vertiges.

Suspension du médicament : Rechute. 1889, Nouveau

traitement par le bromure de camphre, nouvelle améliora-

tion.

Lel... Antoine, 12 ans, est entré à Bicêtre (service de

M. Bourneville) le 21 août 1885.

Renseignements fournis par sa mère et sa tante, le 23 sep-

tembre 1883. -Père, 40 ans, scieur delong, d'une intelligence

au-dessous de la moyenne ; pas de convulsions de l'enfance ;

fièvre typhoïde à 8 ans. Il y a 10 ans, chute d'un peuplier

sur la tête; d'où 6 mois d'aliénation. Excès de boissons

habituels. Colères violentes. - Père, boulanger, bien por-

tant, 72 ans. - [Mère morte subitement en apprenant àl'im-

proviste les infidélités de son mari avec sa servante. - Pas

de renseignements sur les grands parents. - Un oncle

paternel aurait une paralysie du bras. - Pas d'aliénés, pas

d'épileptiques, pas de difformes, etc., dans la famille.]

lllère, 31 ans, blanchisseuse, bien portante, sans aucun

accident nerveux. Réglée à sept ans pendant un an puis

réglée définitivement à 12 ans. - [Père, entrepreneur, puis

homme de peine, sobre, mort d'une hernie étranglée. Il

aurait eu la tête dérangée pendant quelque temps, après

une perte d'argent. - Mère morte à 74 ans, après avoir été,

durant 6 mois, paralysée de la langue et du côté droit. Une

tante maternelle de l'enfant a eu plusieurs crises nerveuses ;

une autre a eu des attaques nerveuses très fréquentes durant

sa jeunesse, qui reviennent encore, mais à de longs inter-

valles. - Pas d'aliénés, etc., dans le reste de la famille.

Pas de consanguinité. - Inégalité d'âge de 9 ans.

Trois enfants : 1° notre malade ; 2° une fille âgée de

7 ans, chétive, convulsions dans la première enfance; -

BROMURE DE CAMPHRE. 29 9

3° garçon, 4 ans, intelligent, convulsions à l'âge de 4 ou

5 mois.

Notre malade.-La conception a eu lieu dans de mauvaises

conditions. Son mari, souvent ivre, frappait sa femme, ce

qu'il avait commencé de faire huit jours après le mariage.

Grossesse dans de fâcheuses conditions : mauvais traite-

ments et misère. Accouchement naturel, à terme, sans chlo-

roforme. A la naissance, enfant bien développé, pas d'as-

phyxie, nide circulaires du cordon. Nourri au sein par sa

mère.

Premières convulsions à 4 mois, générales, avec déviation

des yeux, cyanose, d'une durée de 4 à 5 minutes. Pendant

un an, elles se sont reproduites très fréquemment, puis à des

intervalles variés jusqu'à l'âge de 4 ou 5 ans, ensuite elles

ont revêtu le caractère des accès. Consécutivement, on n'a pas

noté de paralysie, mais une parésie des membres inférieurs.

Vers 7 ans 1/2, apparition des vertiges ou mieux des absen-

ces : l'enfant s'arrête toutà coup de causer, devient immobile,

et, au bout de quelques secondes,il revient à lui tout étonné.

Il en aurait eu jusqu'à 30 par jour.

Pas de manifestations scrofuleuses, aucune fièvre érup-

tive. Lel... aurait eu beaucoup de vers. Il a commencé à

prononcer quelques mots vers 15 ou 16 mois, et a marché

très difficilement vers 17 mois.- Pas de renseignements sur

la dentition. - Caractère violent : si on le contrarie, il crie,

il pleure, il se griffe. - Pas de mauvais instincts.

Durant les derniers mois de l'année 1885 jusqu'au com-

mencement d'avril, l'enfant a pris de l'élixir polybromuré.

1886. 7 avril. - Erythème noueux sur les deux jambes.

23 avril. -- Traitement : deux capsules de bromure de

camphre du Dr Clin (chaque capsule contient 0 gr. 20) pen-

dant une semaine; trois pendant une semaine; quatre pen-

dant une semaine.

15 juin. - Les capsules ont été suspendues le 7 juin. On

peut voir par le tableau que les vertiges ont diminué consi-

dérablement. Il n'en n'a pas eu depuis le 1er du mois. Nous

devons signaler, en revanche, de nombreux accèsen mai. On

maintient la suspension du bromure de camphre, à seule

3 0 THÉRAPEUTIQUE.

fin de voir si l'amélioration persisterait, et si elle est bien

due au médicament. - Sirop d'iodure de fer. Deux bains

salés.

10 juillet. - L'enfant n'a eu ni accès ni vertiges depuis le

le, juin. Hydrothérapie.

1887. 12 janvier. - L'hydrothérapie, a été suspendue le

31 octobre. - Les vertiges ont reparu et ont augmenté con-

sidérablement : nouveau traitement par le bromure de cam-

phre : 2 capsules du 15 au 20 janvier ; 3 du 21 au 31, sus-

pendre une semaine et recommencer. A partir du mois de

février, les vertiges ont diminué et ont été suspendus com-

plètement durant 4 mois. En août l'enfant a eu la rubéole,

et le traitement n'a pas été repris.

1888. 1er avril. Hydrothérapie.

1 cr juillet. - Les vertiges après avoir été rares d'octobre

1887 au 31 mars 1888 ont augmenté considérablement. On

reprend le bromure de camphre, et on continue les douches.

30 juillet. - L'enfant n'a pris que 2 capsules de bromure

de camphre : à partir d'aujourd'hui, 3 pendant une semaine,

4 pendant une semaine, 5 pendant une semaine. Suspendre.

1889. ` ? 9janvier.-L'enfantacontinuélesdouches jusqu'au

31 décembre. Les vertiges ont augmenté depuis la suspen-

sion du bromure de camphre. On reprend ce médicament :

1 capsule (0 gr. 20 centig. form. du Déclin) pendant 2 jours;

2 du 1er au 5 février; 2 du 1" au 11 ; 3 du 11 au 5 mars ;

4 du 5 au 23 mars; 6 durant 3 jours, puis 7 jusqu'au

31 mars.

On continue jusqu'à la fin de juillet en avril les mêmes

séries de doses progressives, entre lesquelles on laisse des

suspensions de 8 jours. L'action du médicament se manifeste

promptement par une diminution des vertiges.

BROMURE DE CAMPHRE.

31 1

Tableau des accès et des vertiges (1).

3 2 THÉRAPEUTIQUE.

médicament a été administré, nous voyons les vertiges

diminuer, puis disparaître pendant une période plus ou

moins longue. Chaque fois aussi qu'il est supprimé nous

voyons rapidement reparaître les accidents.

Pour qu'il n'y eut pas de doute nous avons suspendu

de nouveau le médicament à la fin de juillet. A partir

de septembre et d'octobre les vertiges deviennent de

plus en plus nombreux jusqu'à la fin de l'année.

PICROTOXINE., 3 3

III.

Picrotoxine (1).

Nous avons employé la picrotoxine cristallisée, en la

faisant dissoudre avec soin, en potion, selon la formule

suivante : -.

3 4 THÉRAPEUTIQUE.

Frayeur occasionnée par son père qui le battait. Premiers

accès à 10 ans à la la suite de coups. Aggravation des accès.

Elixir polybromuré : Rémission de 18 mois. - Troubles in-

tellectuels consécutifs à un accès. -- Fugues. - Idées de

suicide. -Etat du malade en 1887. - Température durant

les accès. - Poids, taille et puberté. - Modification défa-

vorable du caractère, diminution de la mémoire. - Hydre-

thérapie. Picrotoxine.

Ram... Gabriel, 18 ans, est entré à Bicêtre (service de

M. BOURNEVILLE le 11 août 1887.

Renseignements fournis par la mère (24 septembre 1887). -

Père mort à 38 ans de tuberculose pulmonaire ; employé de

la Ville. Pas de renseignements sur son enfance et sa jeu-

nesse. Engagé volontaire, il prit l'habitude de boire (alcool,

absinthe, bitter). Marié à 25 ans, il continua à faire les

mêmes excès et rentrait gris presque tous les jours ; il était

très violent, très brutal, et par moments « on voyait qu'il

n'avait plus la tête à lui et qu'il lui prenait comme des mo-

ments de folie ». En dehors de ces excès il était d'un carac-

tère doux. Il était très nerveux sans jamais avoir d'attaques

et avait la tête exaltée. Il n'a pas fait d'autres maladies que

la tuberculose qui l'a emporté en un an. - mort à

75 ans, on ne sait de quoi ; il s'adonnait à la boisson. -

Mère morte à 65 ans, probablement de congestion pulmo-

naire. - Pas de renseignements sur les grands-parents ni

sur les oncles et tantes. - Pas d'aliénés, ni d'épileptiques,

ni de suicidés, etc., dans la famille.]

Mère, 42 ans, couturière, bien portante, n'a jamais eu

d'accidents nerveux, ni de rhumatisme, ni de maladie de

peau. - [Père, 73 ans, a eu dernièrement une attaque de

paralysie. Mère bien portante. Pas d'aliénés, ni de ner-

veux, etc., dans tout le reste de la famille.]

Pas de consanguinité ; inégalité d'âge d'un an.

Un seul enfant, notre malade. - La conception ne paraît

pas avoir eu lieu pendant l'ivresse. « Mon mari, dit-elle,

n'était pas porté aux rapports quand il avait bu. »-Grossesse

bonne. - Accouchement normal, à terme. - : 1 La naissance,

PICnOTOxI1'OE. 3 t

l'enfant était tout petit, très vif, sans asphyxie. -On ne sait

à quelle époque il a été propre et a eu sa première dent.

Il a parlé et marché vers 15 mois. -Il n'a jamais eu de con-

vulsions, ni de vers intestinaux, ni de manifestations scrofu-

leuscs.

Bien venant jusqu'à deux ans et demi, époque où on l'a

retiré de nourrice. De là on l'a mis chez ses grands-parents

jusqu'à 8 ans. Durant cette période, on a remarqué qu'il se

mettait souvent dans de fortes colères.

A 8 ans il allaita l'école, était intelligent, apprenait bien.

A la maison, lorsque son père avait bu, il le battait beaucoup

et l'enfant avait de lui « une grande terreur ». C'est peu

après, vers 9 ans, qu'on nota les premiers accidents épilepti-

ques : il commença à grimacer (face, bouche et nez) et à

avoir des mouvements automatiques des mains. Le premier

accès s'est montré à 10 ans, un soir, après avoir été battu

par son père. A l'origine, il ne perdait pas tout à fait con-

naissance durant ses crises : il sautait en l'air, frappait la

table à coups de poing. Peu à peu les accès ont augmenté

d'intensité et se sont accompagnés de perte de connaissance.

Pas d'aura, pas de cris; grimaces de la face, prédominance

des convulsions dans le côté gauche ; bave mais pas de mic-

tion involontaire, durée de 4 à 5 minutes; sommeil consé-

cutif. Quelquefois, les accès le prenaient au moment d'aller

au cabinet, au moment d'uriner. Ils étaient nocturnes, et

surtout diurnes, de préférence le matin au réveil. Pas d'é-

tourdissements. Maximum des accès en 24 heures : 3. Il

y avait quelquefois des rémissions de 8 et 15 jours. A la

suite d'un traitement par l'élixir polybromuré, prescrit

par M. Charcot, il est resté 18 mois sans accès. Ils reparu-

rent en 1883 à la mort de son père, dont il fut témoin et

qui l'impressionna vivement. Il a continué à aller à l'école ;

on était content de lui, mais, ses accès augmentant, on dut

le renvoyer. Suivant sa mère, l'intelligence n'aurait pas di-

minué. 11 disait quelquefois qu'il voulait se suicider à cause

de sa maladie ; mais il n'a fait aucune tentative. Quelquefois

après ses accès il se sauvait sans savoir où il allait. Il

n'avait pas de mauvais instincts, on pense qu'il se touchait

depuis assez longtemps.

36 6 THÉRAPEUTIQUE.

Etat actuel. - Tête asymétrique : la partie postérieure

droite est un plus saillante que la partie gauche. L'occipital

est très développé. La bosse frontale droite est un peu plus

saillante que la gauche. Yeux grands, pupilles égales ; R...

distingue bien les couleurs. Nez aquilin, un peu obliqué à

droite. Dents bien plantées; articulation normale ; gencives

en bon état. Oreilles symétriques, bien ourlées; lobule

adhérent.

Membres supérieurs et inférieurs bien conformés, ainsi

que le tronc et le rachis.

Sensibilité générale et spéciale, parole, fonctions digestives,

respiratoire, etc.,normales.

Puberté. - Fines moustaches commençant à ombrer la

lèvre supérieure. Poils assez abondants en avant des oreilles

et sous le menton, formant collier. Ils sont également assez

nombreux dans les aisselles, mais il n'y en a pas sur le

tronc. Poils longs, frisés, très abondants sur tout le pénil,

envahissant les aines, et envoyant une traînée jusqu'à l'om-

bilic. - Bourses rétractées, parsemées de poils. - Testi-

cules du volume d'une olive. Gland découvert; méat

normal, légèrement en épispadias. - Verge : circonférence,

9 centim. ; longueur : 8 1/2. - Poils nombreux à l'anus, pas

d'onanisme avoué.

Les facultés intellectuelles paraissent assez développées;

toutefois la mémoire semble un peu faible. La tenue est

bonne, le caractère docile.

19 octobre 1887. - Il a essayé de se sauver par le Gym-

nase. Il dit que depuis une douzaine de jours il s'ennuie;

que l'ennui l'empêche de dormir et qu'il ne veut pas rester

à Bicêtre. - 1 novembre. - Angine légère.

13 décembre. Revacciné sans succès.

1888. 4 jazzvie7·.- Bronchite légère.

28 février. - Le malade paraît devenir violent. Il riposte

par des coups de poings a de petites taquineries.

24 avril. - Angine pultacée.

15-16 juin. - Série de 13 accès.

18 août. -- Fumeur, joueur, cache dans ses bas l'argent

PICROTOXINE.

37

que ses parents lui donnent, malgré la défense qui leur

en est faite. Traitement : Hydrothérapie.

8 décembre. - Hier, il a donné un coup de poing sur

l'oeil d'un de ses camarades ; et, à la promenade, il a essayé

de s'étrangler avec sa cravate. On a remarqué que son

caractère devient de moins en moins sociable.

Du 11 août au 31 décembre 27 accès et 7 vertiges. - En

1888 : 106 accès et 36 vertiges.

1889. 25 mars. - Puberté. Moustache assez bien fournie.

Petite mouche à la lèvre inférieure. Poils assez abondants à

la région intermammaire du sternum. Poils abondants sur

le ventre et à la partie supérieure et antérieure des cuisses,

Testicules gros comme un oeuf de pigeon.

Température pendant et après les accès :

3 8 THÉRAPEUTIQUE.

Tableau des accès et des vertiges.

PICROTOXINE.

39

Grand-père paternel : excès de boissons. - Grand-père

maternel : pied bot consécutif ri. des convulsions. - Cousinf)

germaine morte de méningite . - Picrotoxine.

Kl... Charles, 8 ans, entré à Bicêtre (service de M. BOURNE-

ville) le 24 décembre 1887.

En raison du jeune Age, nous nous sommes arrêté à la

dose maximum de 1 mill. 1/2 par jour. Traitement, du

1" février 1889, au 31 décembre 1889.

Tableau des accès et des vertiges.

4 0 THÉRAPEUTIQUE.

OBSERVATION XIV

Epilepsie. - Accès et vertiges. Traitement par la picro-

toxine.

Vulc. Joseph, 15 ans, entré à Bicêtre (service de 1\1. BOUR-

NEVILLE) le 24 décembre 1886.

4S89.4éirie ? Traitement par la picrotoxine : mêmes

doses. - Du 19 au 31 août, trois millig. - Suppression le

1°r septembre.

Tableau des accès et des vertiges.

PICROTOXINE. & 9

En 1887, l'enfant a eu 4-7 accès; - en 1888, 28 accès et

7 vertiges. Il ressort du tableau qu'il n'y a eu une

amélioration assez sensible. Toutefois déjà en 1888, les

accès avaient baissés par rapport à 1887.

OBSERVATION XV

Epilepsie idiopathique. Père : excès de boisson. - Grand-

père maternel mort de délire aigu.- Grand'mère maternelle

apoplectique. - Deux tantes : nombreux excès de boisson.

Une tante choréique à 14 ans. Picrotoxine. -

Rouss.. Jules, 10 ans, entré à Bicêtre (service de M. BouR-

neville) le 12 mars 1888.

L'enfant a été soumis à la picrotoxine pendant 11 mois,

de février, à décembre : 1 milligr. du 4 fév. au 25 mars.

puis 2 jusqu'au 31 décembre. - Voici ce que l'on a observé :

19 2

THÉRAPEUTIQUE.

OBSERVATION XVI

Pas d'antécédents névropathiques. - De 5 à G arls, tics, gri-

maces, clignements des yeux. - Crises épileptiques en 1885.

Traitement par la picrotoxine.

Joucl.... Aime, 11 ans, entré à Bicêtre (service de

M. BOURNEVILLE) le 21 mars 1888.

1889. 1 cr février. -- Traitement par la picrotoxine : mêmes

doses que dans la première observation. (Un demi-milli-

gramme jusqu'au le, mars, 1 milligramme jusqu'au 11 mars,

1 milligramme et demi jusqu'au 25 mars, 2 milligrammes

jusqu'au 31 décembre.)

Tableau des accès et des vertiges.

PICROTOXINE.

43

Du 21 mars à décembre 1888, l'enfant a eu 43 accès

et 16 vertiges. Moyenne mensuelle : 4 accès, 3; tandis

que dans la période de traitement la moyenne a été de

près de 10 accès.

OBSERVATION XVII

Rien dans les' antécédents. -Asphyxie à la naissance. - Elevé

au biberon. Muguet à 1 mois. - Coqueluche à18 mois. -Pre-

mières convulsions à 2 ans. - Accès. - -7'2,ciiie ? ? tent par la

picrotoxine.

Même dose. (2 milligrammes du 25 mars au 31 décembre).

Aub....Jean, 17 ans, entré à Bicêtre (service de nl. Boun-

nEVrLr.) le 24 décembre 1888.

Cet enfanta eu :

44

THÉRAPEUTIQUE.

OBSERVATION XVIII

Pas d'antécédents névropathiqices. - Asphyxie à la naissance.

- Convulsions à 3 mois. - Picrotoxine.

Brouck... Charles, 18 ans, entré à Bicêtre (service de

M. Bourneville) le 21 mai 1885.

1889. 1er février. - Traitement par la picrotoxine. Un

demi-milligr., un milligr., un milligr. et demi, puis deux

milligr. du 25 mars au 31 décembre.

Tableau des accès et des vertiges.

PICROTOXINE. 4 5

Du21 mai au 31 décembre 1885, on a compté 17 accès ;

- en 1886, 18 accès et 3 vertiges; - en 1887, 97 accès

et 5 vertiges; -en 1888, 62 accès et 10 vertiges. Le

tableau ci-dessus montre qu'il y a eu une augmentation

du nombre des accès.

OBSERVATION XIX

Epilepsie idiopathique. - Mère migraineuse. - Grand'mère

1 maternelle morte d'une fièvre cérébrale. - Grand-père

maternel mort paralytique. - Premières convulsions à

15 mois. - Accès à 5 ans. - Picrotoxine.

Lavern... Georges, 19 ans, entré à Bicêtre (service de

M. BOURiVVILLE le 16 octobre 1885.

1889. 1er février. -Traitement par la picrotoxine : mêmes

doses. (Un demi-milligramme... deux milligr. du 25 mars an

19 août.)

THÉRAPEUTIQUE.

Tableau des accès et des vertiges.

iCOT0g11V.

OBSERVATION XX

47 i

Bien dans la famille. Cousin germain hystérique.

Première crise à 8 ans, puis 2 ou 3 accès par mois, puis

jusqu'à 10 en une nuit. Traitement par la picrotoxine.

Marce... Maximilien, 9 ans, entré à Bicêtre (service de

M. BOURNEVILLE) le 21 avril 1888... ·

1889. 1 cr février. Traitement par la picrotoxine. Mêmes

doses à suppression le 31 décembre.

Tableau des accès et des vertiges.

48

THÉRAPEUTIQUE. '

Si on compare le nombre des accès des mois d'avril

à décembre en 1888 et 1889, on voit qu'il y a une

diminution assez considérable, et partant, une améliora-

tion relative.

OBSERVATION XXI

Epilepsie idiopathique. - Grand'mère paralytique. -

Grand-père paternel et père suicidés. Oncle paternel

aliéné. - Cousine paternelle épileptique. - Cousine morte

de méningite. - Soeur morte de convulsions. Premières

convulsions à 11 mois. - Picrotoxine.

Vitr... Louis, 11 ans, entré à Bicêtre (service de M. BOURNE-

ville) le 11 octobre 1888, sorti le ter mai.

Tableau des accès et des vertiges

DEUXIEME PARTIE

Clinique et Anatomie pathologique.

Bourneville, Bicêtre, 1889. 4

I.

De l'idiotie avec cachexie pachydermique

[Idiotie z.wclén2ateec.sel ;

Par bouiixe ville,

Les travaux que nous avons poursuivis depuis une

quinzaine d'années soit à la Salpêtrière, soit à Bicêtre,

et les notes assez rares d'ailleurs qui ont été publiées

durant la même période sur l'idiotie, nous ont amené à

distinguer, quant à présent, au point de vue anatomo-

pathologique, les formes suivantes :

1° Idiotie symptomatique de l'hydrocéphalie (idiotie

7zclooeéZ)zaliclzee) ; 2° Idiotie symptomatique de

microcéphalie (idiotie microcéphalique) ; 3° Idiotie

symptomatique d'un arrêt de développement des cir-

convolutions ; - 4° Idiotie symptomatique d'une mal-

formation congénitale du cerveau (J01'e72CZJ17,a12e,

absence du corps calleux, etc.) ; 5° Idiotie sympto-

matique de sclérose hypertrophique ou tubéreuse ;

6° Idiotie symptomatique de sclérose atl'ophique :

a) Sclérose d'un hémisphère ou des deux hémisphères ;

b) Sclérose d'un lobe du cerveau ; c) Sclérose des cir-

convolutions isolées ; d) Sclérose chagrinée du cer-

veau ( ? ) ; 7° Idiotie symptomatique de méningite ou

52 CLINIQUE.

de méningo-encéphalite chronique (idiotie méninge-

tique) ; - 8° Idiotie avec cachexie pachydermique ou

idiotie myxoedémateuse liée à l'absence de la glande

thyroïde.

Notre but, dans cette communication (1), c'est de faire

connaître l'idiotie myxoedémateuse qui constitue un

chapitre important de l'histoire d'une maladie dont la

connaissance récente est due d'une part à M. Charcot,

à ses élèves (2) et au Dr Morvan (3) et, d'autre part, aux

auteurs anglais, en tête desquels il convient de placer

MM. Gull, Ord, Hadden, etc. ; nous voulons parler de

la cachexie pachydermique ou myxoedème.

C'est en 1880 que nous avons publié la première

observation d'idiotie avec cachexie pachydermique.

Depuis lors, nous n'avons cessé de nous occuper de

cette question. Une partie des matériaux que nous

avions recueillis a été utilisée par l'un' de nos élèves, le

Dr Bricon, pour un mémoire couronné par la Société

médico-psychologique (concours Belhomme, 1885).

Nous avons complété ces documents et publié avec lui,

en 1886 (4) un mémoire reposant sur 13 observations,

puis en 1888 (5), nous avons donné la relation de nou-

velles observations personnelles ou empruntées à d'au-

tres auteurs. Avant d'aborder l'exposé des documents

inédits que nous avons rassemblés, nous croyons utile

(1) Ce travail a été communiqué à la section de médecine de

l'Association française pour l'avancement des sciences (séance

du 14 août 1889).

(2) G. Ballet iProg. méd.. 1880, n» 30) : Hadden (Il : icl.,n°8 30 et 31);

Bourneville et d'Olier (Ibid, n° 35) ; Thaon (Revue cle med. et de

cn'urg.), août 1880) ; Ridel-Saillard (Thèse de Paris, 188 ! ), etc.

(3) Voir Gaz. hebcl. de mécl. et de chirurg.. 1881, p. 542, 5)7,

573, 590.

(4) Arch. de Neurologie, Tome XII, p. 43î, 99.

(5) Arch. de Neurologie, Tome XVI, p. 431 ; Tome XVII,

p. 85, 90, 4î9.

IDIOTIE N'iSOEDÉ\I3TEUSE.

53

de résumer, dans un tableau, les observations qui ont

servi de base à nos premiers travaux :

54 clinique.

dans trois autres cas, l'autopsie du cou n'a pas été pra-

tiquée. Chez les autres malades vivants, l'examen

attentif de la région cervicale n'a pu faire découvrir de

glande thyroïde.

Nous arrivons maintenant aux cas nouveaux, au nom-

bre de huit, dont trois ont été empruntés aux journaux

spéciaux et dont les cinq autres ont été recueillis par

nous. Nous allons donner une rapide analyse des pre-

miers.

Observation I. - Il s'agit d'un pauvre homme, quasi men-

diant, qui excitait la charité des voyageurs à la station do

Sagunto, en Espagne. Tout le monde le connaissait sous le so-

briquet de Quiquorum auquel ses innocentes bouffonneries

avaient donné origine. Son type rappelait celui d'un crétin.

C'est à ce titre qu'il avait attiré l'attention de quelques mé-

decins et entre autres du Dr Gimeno. Ce médecin, ayant eu

l'occasion do lire les travaux de M. Charcot et de ses élèves, en

particulier, l'observation du Pacha et les mémoires des au-

teurs anglais, fut amené à examiner plus attentivement le

prétendu crétin de Sagunto et le fit venir à Valence. Il en

prit plusieurs photographies. « Le dessin qui accompagne

cette note, dit-il, est la copie de l'une d'elles. On y voit,moins

bien pourtant que sur la photographie, les mains, la jambe et

le pied gauches notablement augmentés de volume, avec tous

les caractères assignés par les cliniciens étrangers au my-

xoedème de Ord, ou à la cachexie pachydermique de Charcot.

Néanmoins, en raison de la limitation du gonflement, qui ne

s'étendait pas aux autres parties du corps et que l'on pouvait

à peine retrouver à la face, je ne me hasardai pas, bien que

j'admisse dès à présent l'analogie entre mon malade et ceux

qui ont été observés en Angleterre et en France, à assurer

que l'affection fut identique ; et c'est à cause de cela, comme

aussi à cause de l'existence du crétinisme, que j'appelai pachy-

dermie crélinoïde l'altération pathologique dont je m'occupe.

« Quelque temps après, dans les Archives de Neurologie,

fut publié, par MM. Bourneville et Bricon, un remarquablo

travail sur la cachexie pachvdermique, travail dans lequel,

après avoir passé en revue tous les malades cités par les diffé-

rents auteurs, ils disaient que Charcot, dans ses voyages,

avait vu deux cas de la même maladie, l'un on Vénétie et

idiotie MYXOEDÉMATEUSE. 55

l'autre sur le trottoir de la station de Sagunto en Espagne,

ce qui donnait à mon opinion une flatteuse confirmation (1). »

Observation II. - X..., âgé de 4 ans. Parents suédois, en

bonne santé, intelligents et bien développés. Aucun exemple

d'une semblable maladie dans la famille, de l'un et l'autre

côté. Le père est un artisan dans une situation confortable.

Deux autres enfants, l'un plus vieux, l'autre plus jeune que le

malade sont normaux.

Le malade est très petit (77 cent. 1/2). Sa tête est large, les

fontanelles sont ouvertes, le nez est aplati, les lèvres sont

épaisses et la bouche reste ouverte. Dans la première enfance,

les cheveux étaient noirs et frisés. Ils sont devenus graduelle-

ment blonds, raides et assez épais. Au-des3us de la clavicule,

en dehors du bord externe des muscles sterno-cléido-mastoï-

diens, existent des tumeurs graisseuses caractéristiques ;

elles sont presque du volume d'un oeuf de poule. Des tumeurs

graisseuses analogues, mais moins volumineuses, existent dans

les aisselles, au niveau des mollets ( ? ). Le ventre est pendant,

les côtes légèrement écartées ( ? ). Les épiphyses des différents

os n'ont pas un volume exagéré. Les membres supérieurs et

inférieurs sont très courts, les doigts et les orteils sont épais.

On ne peut sentir la glande thyroïde. L'enfant peut se tenir

debout, mais avec un aide ; il n'a jamais marché. Lorsqu'on

l'excite, il fait entendre un bruit particulier de croassement

ressemblant quelque peu à celui que l'on entend dans la la-

ryngite striduleuse, mais sans dyspnée. Son caractère est

doux, son développement mental est très arriéré : c'est un im-

bécile. Digestion bonne ; constipation habituelle ; il n'a jamais

eu de maladie pouvant expliquer le développement du myxoe-

dème, La première dent a paru vers le 6e mois ; les pre-

mières tumeurs du cou se sont montrées vers le 7° mois et

celles do l'aisselle peu après ('2).

Observation III. Le D1' Suckling a montré à la Midland

médical Society une petite fille âgée de 4 ans, atteinte de cré-

tinismo sporadique, née à Birmingham. Son père, homme

rangé, est mort d'une inflammation des poumons. Un demi-

frère ( ? ) paternel a un enfant idiot. Uno tante paternelle

(1) Gimeno (Amalio). -La paquicierma cretizzoïdes (La medi-

cina praclica, 3 avril 1889, p. 437. Nous devons la traduction de

l'article, dont nous extrayons cette note, à notre ami Cli.-II. Petit-

Vendol.

(2) Emmet Holt. - L'indication a été égarée. '

5G clinique.

ivrognesse consommée est en traitement pour une paralysie

alcoolique. Un frère, mort dans les convulsions, à la suite

d'une coqueluche, était bien conformé. «

Dès les premiers temps de la vie, la mère de la petite ma-

lade a remarqué que la langue était pendante, puis, que la

voix avait quelque chose de particulier.

L'état actuel de l'enfant rappelle tout à fait le type du myxoe-

dème : Peau de la face pâle et translucide ; faux oedème des

paupières supérieures et inférieures; nez large et aplati; lèvre

inférieure large, légèrement cyanosée et pendante.

Langue très grosse, ordinairement sortie de la bouche ; pa-

pilles hypertrophiées. Peau généralement très rude, surtout

aux mains et aux pieds qui sont gonflés, parfois cyanoses.

Taille, 65 centimètres (1). Poids : 10 kit. 885.

Circonférence de la .tête, 46 centimètres. Le front n'est

pas très fuyant, l'occiput est un peu proéminent, le sommet

de la tête est aplati. Les fontanelles sont fermées ( ? ),.les che-

veux sont peu abondants, les dents sont toutes détériorées. Les

bras et les jambes sont courts, le ventre n'est pas très gonflé.

Caractère placide. Parole limitée à quelques mots. Station de-

bout impossible. Aucune trace de la glande thyroïde. Cou

court et épais. Pas de tumeurs graisseuses dans les triangles

postérieurs. Température au-dessous de la normale. Urine

exempte d'albumine. L'état de l'enfant n'était pas la consé-

quence d'une autre maladie (2).

Cette observation, de même que la précédente,

telles que nous les rapportent les recueils auxquels

nous les avons empruntées sont très incomplètes et les

malades ne semblent pas avoir été étudiés avec beau-

coup de soin. Le D' Suchling écrit par exemple que chez

sa malade, âgée seulement de 4 ans, les fontanelles

étaient fermées. On peut en douter, car, ainsi que nous

le verrons plus loin, même chez des malades âgés de

25 ou 30 ans, on constate encore leur persistance.

Les nouvelles observations qui nous sont person-

nelles sont au nombre de cinq. La première concerne

(1) L'auteur fait remarquer qu'à cet âge, la (aille est en

moyenne de 90 centimètres.

(2) The Lancet, 1889, Tome I, p. 895.

idiotie myxoedémateuse. 57

une petite fille de 14 ans que nous avons montrée aux

membres de la section médicale de l'Association fran-

çaise pour l'avancement des sciences.

Observation IV. - Père, fièvres intermittentes. - Grand-

père paternel apoplectique. - Grand'mère maternelle, excès

de boisson. - Cousine germaine, paralysie consécutive à

des convulsions ; cousine germaine sujette à des attaques. -

Grand-père maternel apoplectique, - Grand'mère mater-

nelle, excès de boisson. - Oncle maternel probablement

apoplectique ; tante maternelle aliénée. - Consanguinité.-

Un frère mort de convulsions, un autre idiot et épilepiique;

un troisième a eu des convulsions.

Accouchement à 10 mois ( ? ). -fl la naissance, fontanelle

antérieure très large. - Hernie ombilicale. - Premières

dénis il sept mots/1. deux ans chute sur la face, écrase-

ment du nez et fracture du maxillaire inférieur. Ozène

consécutive. - Développement de la cachexie pachyderlni-

que. - Rachitisme. - Description de la malade. - Absence

probable de la glande thyroïde. - Malformation de l'un des

orteils. - Dentition.

Wat.... Augustine est née à Paris le 16 décembre 1875.

Renseignements fournis par sa mère. (Juin 1887.) -

Père de 52 ans, menuisier ébéniste, assez grand et fort,

cheveux bruns, nez aquilin, fume peu et ne fait pas d'excès

de boisson; il n'a eu aucun accident nerveux, mais a contracté

en Afrique, étant soldat dans l'artillerie, des fièvres interdit-

tentes dont il a souffert jusqu'à 50 ans. Il est mort en 1888 d'un

cancer du larynx. [Père, fossoyeur, sobre, mort d'une atta-

que d'apoplexie il. 75 ans. - llère, blanchisseuse, morte,

on ne sait de quoi, à 72ans ; elle était affaiblie, gâteuse, mais

ne déraisonnait pas; elle a fait de nombreux excès de boisson,

surtout d'eau-de-vie. - Aucun renseignement sur ses grands

parents des deux côtés. - 4 frères, bien portants ainsi que

leurs enfants, sauf une fille qui a une paralysie d'un bras

consécutive à des convulsions. - 2 soeurs, mortes l'une « à son

retour d'âge u , l'autre après trois mois de maladie, à 50 ans ;

leurs enfants jouissent d'une bonne santé, excepté une fille

d'une quarantaine d'années « qui tombe dans des attaques».

Celles-ci se sont montrées il y a environ dix ans, à la suite

d'une peur. - Pas d'aliénés, pas d'épileptiques, pas d'autres

paralytiques, pas de difformes, ni de suicidés, ni de criminels

dans la famille.]

Mère, 51 ans, passementière, assez grande, sobre, intelii-

5S . clinique.

gence moyenne, caractère doux, aucun accident nerveux, che-

veux blonds un peu roux, nez aquilin. [Père, couvreur, sobre,

mort d'une attaque d'apoplexie à 65 ans. - Mère, femme de

ménage, fréquents excès de boisson, d'eau-de-vie surtout,

morte à 60 ans en 2'i heures : « on la croyait endormie». -

Nul détail sur ses grands parents. Une tante paternelle bossue,

morte on ne sait de quoi. Deux tantes maternelles mortes ;

l'une était la mère du père de la malade. - 3 frères, deux

sont morts jeunes, l'un de cause inconnue, l'autre tué par un

autre enfant, de coups de pieds dans le ventre, pour une querelle

à propos de billes. Le dernier est mort à 40 ans d'une attaque

subite dans l'exercice de sa profession, il la gare de Rumilly.

5 soeurs : deux sont mortes, l'une d'une «maladie de matrice»,

l'autre, on ne sait de quelle maladie. Une troisième est dans

une maison de santé comme aliénée, elle a eu des convulsions

dans l'enfance. Les deux autres se portent bien ; il en est de

même de leurs enfants. Pas d'autres aliénés, etc., dans la

famille.]

Consanguinité : La mère du père et celle de la mère de la

malade étaient les deux soeurs et toutes les deux alcooliques.

- Inégalité d'âge d'un an. - Tous deux sont nés à Metz.

Sept enfants : 1° garçon, mort de convulsions à dix mois ;-

2° garçon, 23 ans; 3° garçon, 21 ans, bien portants, intelli-

gents, pas de convulsions ; 4° garçon, 19 ans, a eu, à deux

reprises, des convulsions attribuées aux vers; 5° fille, intel-

ligente, grande, forte, pas do convulsions ; 6,1 garçon, at-

teint d'idiotie à un degré prononcé et d'épilersie. Il n'aurait

jamais eu de convulsions. Il est dans notre service et c'est en

interrogeant sa mère sur sa famille que nous avons eu l'occasion

d'examiner sa soeur. ·

7° Notre malade. Rien de particulier à la conception qui a

eu lieu à une époque assez éloignée d'un accès de fièvre inter-

mittente du père. - Grossesse bonne, sauf une chute avec

contusion de la vulve, quinze jours avant l'accouchement.

Celui-ci aurait eu lieu plus d'un mois après terme, assure-t-

on. Durant les quinze derniers jours qui ont suivi la chute,

elle aurait eu de fortes douleurs et perdu de l'eau. L'enfant

serait venue tout d'un coup, sans évacuation d'eau, contraire-

ment à ce qu'elle observait à ses autros accouchements.

A la naissance, l'enfant n'était pas asphyxiée ; elle a crié de

suite. Elle avait des cheveux et des cils longs et abondants,

des poils sur le front et de grands ongles. Elle était petite :

à on aurait dit une poupée » ; elle avait la \ fontanelle

idiotie MYXOEDËMATEUSE. 59

antérieure « très creuse et occupant tout le travers

de la tête. - Elevée au sein par sa mère jusqu'à 10 mois;

puis avec de la soupe, du lait de vache et de l'eau rougie.

Elle a commencé à marcher à huit mois et à prononcer quel-

ques mots vers un an : « Tous mes enfants, dit la mère, ont

marché de bonne heure, sauf le quatrième, mais parlé assez

tard». Première dent à sept mois, la deuxième à huit mois.

On ne sait à quel âge sa première dentition a été complète.

L'enfant a été propre vers un an; elle n'a jamais eu de con-

vulsions On prétend qu'elle ressemblait aux autres en-

fants jusqu'à deux ans, époque où elle a fait une chute sur la

face. Son frère, l'idiot, qui la portait, ayant glissé sur nne

pelure d'orange, l'enfant a été projetée sur le trottoir ; elle

n'a eu ni perte de connaissance ni hémorrhagie ce jour-là. Six

semaines après, elle a rendu beaucoup de sang infect par le

nez. Sa mère l'a conduite à la consultation de l'hôpital Trous-

seau où on lui a enlevé les quatre incisives de la mâchoire

supérieure qui ne tenaient plus. C'est à partir de la chute

qu'on a remarqué l'épaississement des joues et l'augmentation

de volume du ventre ; la hernie ombilicale date de la nais-

sance. Les masses graisseuses du cou n'auraient été consta-

tatées que vers 5 ans. Le gonflement des paupières serait

venu progressivement. On ne peut dire à quelle époque les

pieds et les mains se sont épaissis. Avant la chute, les che-

veux étaient fins, ils sont devenus ensuite gros et durs comme

des crins, en même temps que les croûtes du cuir chevelu

ont paru. La coloration jaune de la peau de la face se serait

montrée à 5 ans, peu après la blépharite ciliaire. L'enfant a

bavé jusqu'à 10 ans. Les os des jambes se sont recourbés à 12

ans et sont devenus noueux. La voix, qui, avant le trauma-

tisme, était normale, affirme-t-on, s'est ensuite modifiée.

L'enfant s'occupe à faire un peu de crochet, à coudre ou à

faire des bâtons sur le papier, à laver et essuyer la vaisselle,

à balayer. Elle peut descendre et monter les escaliers. Elle

s'habille à peu près seule, se boutonne, lace ses souliers, met

ses jarretières. Tout ce qu'elle fait, elle l'exécute avec une

très grande lenteur. Elle reconnaît tout le monde, est très pu-

dique, paraît affectueuse. Elle n'est pas jalouse. Elle est très

sensible au froid, ne pleure ni ne rit, n'est pas coléreuse. Elle

répète tous les mots, dit le nom des objets, fait avec peine

quelques petites phrases. Elle reste parfois deux ou trois jours

sans causer. On l'a envoyée à l'asile où elle n'a rien appris.

Elle marche assez bien et longtemps, mais très doucement :

elle peut faire plus d'une lieue à pied.

Elle n'a jamais eu de tics ni d'onanisme, ni de vers, ni de

co

CLINIQUE.

gourme. Quelque temps après sa chute, elle aurait eu un

abcès de la jambe droite; l'enfant n'a jamais eu de fièvres

éruptives.

1882 : 29 juin. - Taille, 77 cent. ; Poids, 12 kilogr. 500.

1887 : 15 juin. - Taille, 82 cent. 1/2; Poids, 13 kilogr. 300.

- Cette enfant présente l'ensemble complet des phénomènes

qui caractérisent l'icliotie myxxdèmateuse. (Fig. 1).

Tète longue, avec une proéminence assez prononcée de

l'occipital, surmontée d'un méplat. Les bosses pariétales, assez

volumineuses, paraissent égales. Le front est un peu carré,

étroit ; il a 4 centimètres de hauteur, Les bosses frontales sont

1\ peine accusées, la gauche peut-être moins que la droite. Les

arcades sourcillières, légèrement saillantes, vont en s'effaçant

Fig. 1. - Wa... en 1887 (11 ans et demi).

IDIOTIE MYXUËDËMATEUSE. GL l

en dehors, surtout à gauche. Les 'paupières sont gonflées,

comme oedémateuses, sans que la pression du doigt y laisse

d'empreinte; elles sont très fendues. Les cils, très longs et

abondants aux paupières supérieures, sont beaucoup pluscourts

et rares aux paupières inférieures; elles [sont le siège d'une

blépharite ciliaire chronique. Les conjonctives palpébrales

sont un peu pâles; les oculaires sont nettes; les iris sont gris,

les pupilles égales. - Le nez est complètement aplati ; les

narines regardent en haut. L'aplatissement du nez est consécutif

au traumatisme survenu à l'âge de deux ans. Depuis cette

époque, il existe une rhinite chronique purulente (ozène) des

deux côtés ; l'écoulement purulo-sanguin exhale une odeur

nauséabonde, malgré les injections désinfectantes. Les joues

sont bouffies, gonflées; « elles enflent à chaque instant », dit

la mère. La lèvre supérieure est aplatie. Dans la chute, les

incisives médianes supérieures ont été cassées et probablement

le bord alvéolaire de la mâchoire supérieure a été fracturé,

d'où une perte de substance. La bouche mesure quatre centi-

mètres. Le bord libre de la lèvre supérieure est moyennement

prononcé. La lèvre inférieure est plus grosse et un peu ren-

versée en dehors. La langue est assez épaisso et la malade la

tient toujours sur le bord des lèvres, le menton est court. -

Les oreilles, convenablement ourlées, sont appliquées contre la

tête et ont leur lobule adhérent. - Face carrée.

Le cou est très court (24 cent. 1/2 de circonférence) et le

semble encore davantage, par suite do l'inclinaison habituelle

de la tête en avant.

L'examen minutieux de la région antérieure du cou ne per-

met pas cle découvrir la glande thyroïde. On sent les anneaux

de la trachée et le cartilage thyroïde comme s'ils étaient sous

la peau, sans aucune interposition. - Il existe, dans les creux

sus-claviculaires, des tumeurs pseudo-liponateuses qui,

d'après la mère, seraient parfois encore plus prononcées. « Je

pense, dit-elle, que c'est du vent. » Elle prétend que lorsque

ces tumeurs ont leur maximum de développement, et qu'elle

les frotte en débarbouillant son enfant, celle-ci vomit aussitôt

que l'eau froide touche les grosseurs.

La région pectorale offre un développement assez accentué,

avec un lacis veineux à mailles assez petites, qui se continue

avec un lacis veineux à mailles très longues sur le ventre. On

trouve aussi des dilatations veineuses sur les épaules, mais

moins apparentes.

Circonférence sous les aisselles (expiration).. 53 cent. 05.

Circonférence au niveau de l'appendice

typhoïde 52 cent. 05.

gaz CLINIQUE.

L'épaule gauche est un peu plus saillante et plus élevée que

la droite. La poitrine est courte; le dos est bombé, les reins

excavés.

Le ventre est très gros et l'ombilic présente une petite hernie

de 12 à 15 millimètres de hauteur. Les fesses sont arrondies.

Organes génitaux. - Le mont de Vénus est légèrement

saillant, glabre. Les grandes lèvres sont assez développées,

les petites lèvres réduites à un petit rebord de 2 millimètres de

hauteur. Pas d'onanisme.

Membres. - Les bras sont courts, l'articulation du coude un

peu grosse, les avant-bras légèrement déformés, les apophyses

styloîdes développées, les mains sont plutôt potelées ; les carac-

tères pachydermiques sont relativement peu accusés. - Les

cuisses sont courtes ainsi que les jambes; les fémurs sont

arqués, le gauche plus que le droit; les genoux sont noueux;

les jambes aussi sont courtes et offrent des déformations rachi-

tiques très prononcées. Les pieds sont plats et légèrement

bouffis. « Par moments, dit la mère, ils sont très gonflés, sur-

tout au niveau des cous-de-pied. » L'orteil médius, de chaque

côté, est plus court que les orteils voisins.

La 'peau de la face est d'une blancheur cireuse. Elle est

blanche et assez fine. Au niveau du dos, il y a une desquamation

furfuracée, qui, suivant la mère, est constante et souvent beau-

coup plus prononcée. On la retrouve également au niveau du

front. - Les cheveux, secs et gros, sont châtains roux, assez

abondants, excepté au niveau de la partie antérieure des régions

pariétales, où ils sont beaucoup plus rares. Le cuir chevelu

est rugueux, couvert de petites écailles et de petites croûtes qui

lui donnent un aspect jaunâtre. Ces croûtes se reproduisent

sans cesse, malgré les soins de propreté. Les sourcils sont fins

et moyennement fournis. Le reste du corps est glabre. Sous

les aisselles, on trouve de petites glandes disséminées dans

des bourrelets de graisse, d'où la sensation d'un empâtement

graisseux. Petites adénites sous-maxillaires et de chaque côté

du cou (du volume d'un pois). On ne sent pas de glandes

mammaires. Le mamelon a environ 2 à 3 millimètres de dia-

mètre et il fait une saillie de 1 millimètre. L'aréole très pro-

noncée mesure 5 millimètres de diamètre

La dentition mérite de nous arrêter. Les premières dents

(incisives médianes supérieures) ont poussé iL huit mois. La

première dentition, assure la mère, était complète à un an.

Mâchoire supérieure : Les incisives médianes ont com-

plètement disparu ; l'incisive latérale gauche ébranlée présente

depuis le collet, jusqu'à une petite distance du bord tranchant,

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 63

une couleur noirâtre due iL la mortification de la pulpe, consé-

cutive probablement à l'ancienne fracture ; canine gauche

très pointue ; une prémolaire et une grosse molaire de lait,

avec cinq tubercules. A droite, l'incisive latérale manque, la

canine est conoidc et excessivement pointue, une prémolaire,

une grosse molaire permanente et une en voie d'éruption. -

Toutes les dents de la mâchoire supérieure sont recouvertes,

autour du collet, d'une couche de tartre jaune verdàtre.

Mâchoire inférieure : Deux incisives médianes en voie

d'éruption ; leur bord tranchant est dentelé en scie. Leur face

antérieure présente la trace de trois sillons verticaux aboutissant

au petit tubercule du bord tranchant. En avant de ces deux

incisives, on trouve une incisive de lait tout à fait projetée hors

de l'arcade dentaire et on demi-rotation externe sur son axe.

- A gauche, une incisive latérale, une canine et deux molaires

de lait complètement détruites par une carie du troisième

degré. - A droite, une incisive latérale, une canine, une pré-

molaire réduite à la couronne, deux grosses molaires, une de

lait et une permanente en voie d'éruption. Toutes ces dents ont

une coloration jaune verdàtre due au limon qui les recouvre

autour du collet.

L'articulation est défectueuse : les dents do la mâchoire

inférieure ne se croisent pas avec celles de la supérieure.

Elles sont distantes d'un centimètre à peu près ; la langue de

l'enfant est toujours entre les deux arcades dentaires. Les

gencives sont rosées, très basses. La salive n'est ni visqueuse,

ni filante. La voûte palatine est large et très plate. Les impres-

sions digitales sont bien marquées.

La seconde dentition, comme on le voit, est très en retard.

A dix ans, éruption do deux grosses molaires permanentes de

la mâchoire supérieure, l'une iL droite, l'autre à gauche. A

onze ans, éruption des deux incisives médianes de la mâchoire

inférieuro qui sont en évolution au moment do l'examen.

Début d'éruption d'une grosse molaire permanente en bas et

il. droite.

La sensibilité générale parait normale. W... pleure quand

elle se cogne. Elle est assez chatouilleuse et très sensible au

froid. La vue est bonne ; sa mère dit qu'elle distingue plu-

sieurs couleurs. L'ouïe est normale ; pourtant l'enfant prétend

qu'elle n'entend pas le tic-tac de la montre appliquée sur son

oreille ( ? ). L'odorat semble un peu obtus, Passa faetida ne

détermine pas de grimace bien accusée. Lo goût serait normal,

l'enfant aime les choses salées. La respiration et la circu-

lalion n'offrent rien de particulier. Pouls petit, régulier à 72.

64 CLINIQUE.

Digestion. - W... mange seule, se sert de la fourchette et

même du couteau; loin d'être vorace, elle a l'appétit médiocre.

Sa nourriture favorite est la soupe, le pain, les pommes de

terre frites (elle préfère celles de la rue à celles que prépare

sa mère). Elle ne mange presque pas de viande ; elle n'aime

pas le lait, ni le sucre, ni les gâteaux. Le vin lui fait plaisir,

mais elle boit peu; elle ne vomit jamais ; les selles sont quoti-

diennes ; pas de vers, pas d'hémorrhoïdes. La mastication s'o-

père convenablement...

1888, 20 août L'état général est le même. Le cuir chevelu

est toujours envahi par une éruption eczémateuse. Le ne :

paraît encore plus écrasé, les paupières, les joues, les masses

lipomateuses sus-claviculaires plus volumineuses. Les seins

ne sont pas développés ; les grandes lèvres seraient un peu

plus saillantes. La voix est aigre, rauquo ; la parole, d'après

la mère de l'enfant, serait assez développée. Il y aurait depuis

un an un progrès à cet égard. W... est entêtée. Dès qu'il y a

quelqu'un, elle refuse de parler. On l'envoie à l'asile où elle

reste immobile sur sa chaise; elle n'aime pas jouer avec les

autres enfants, qui, d'ailleurs, se moquent d'elle, et lui re-

prochent de sentir mauvais (ozène).

1V... s'habille seule, sait lacer, attacher les cordons de ses

souliers et faire du crochet. Elle a un sentiment très prononcé

de la pudeur. Nous avons beaucoup de peine à la mettre toute

nue pour l'examiner. A la maison, elle prend des précautions

infinies pour changer do chemise, même devant sa soeur.

La fontanelle antérieure persiste dans une hauteur de

15 millim. et une largeur de 4 à 5 cent.

1889, 10 mai. - Taille, 0 m. 835. Poids, 14 k. 800. Comme

on le voit, en deux ans, elle n'a grandi que d'un centimètre.

Son poids a augmenté de 1 k. 500. L'enfant a eu les oreillons

il y a environ un mois. Les cheveux sont longs, gros, raides,

très secs, noirs en arrière, châtain-uoux en avant. Ils sont

abondants presque partout, sauf au-dessus des deux côtés du

front, où ils sont rares. Dans ces derniers temps les cheveux

sont tombés par plaques de 1 ou 2 centimètres ; ils repoussent

très vite. La fontanelle antérieure persiste, ainsi que l'érup-

tion eczémateuse. Le front a 3 centimètres. Les paupières sont

toujours bouffies, bleuâtres. Les cils des paupières inférieures

sont longs, tombent et repoussent. La blépharite ciliaire n'a

pas diminué. L'écoulement nasal n'a pas cessé, mais exhale

une odeur moins infecte, bien que, faute de ressources, la

IDIOTIE 1111b0EDGl11 : ITb : LTSC.

65

mère ne puisse faire régulièrement les injections anti-

septiques.

La langue est très épaisse, saillante, il n'y a pas de bave.

Les oreilles sont pâles, un peu bouffies. Les masses lipoma-

teuses des joues, des creux sus-claviculaires n'ont pas dimi-

nué. Il n'y a rien de changé en ce qui concerne l'appétit, les

aliments, la digestion. L'aspect du ventre, le volume de la

hernie ombilicale (circonf. à la base 5 cent., haut. 15 millim.)

n'ont pas changé. Les seins sont nuls ; les grandes lèvres

BOURIEVILLE, Bicêtre., 18S9. 5

Fig. 2. - W..., à 14 ans (mai 1839).

G6

CLINIQUE.

n'ont pas grossi; le pénil est glabre, ainsi que les aisselles et

toute la peau, jamais de sueurs. (Fig. 2, 3 et 4).

W... fait de petites commissions, une à la fois, parle assez

bien et fait de petites phrases, au dire de sa mère. La voix est

toujours aigre, rauque, un peu nasonnée. Le sommeil est bon,

assez long. La sensibilité au froid est toujours asssez pro-

noncée. Il en est de même de la répugnance à tout mouve-

ment.

14 août. - La malade, ainsi que les membres de la section

ont pu le constater eux-mêmes, présente toujours le même

Fig. 3. - \V..., à 14 ans (mai 1889).

IDIOTIE myxoedémateuse.

67

aspect et les mêmes symptômes. Voici les dimensions de la

tête et des membres prises en 1887 et 1889. '

68 CLINIQUE.

IDIOTIE myxoedémateuse. 69

te1'lwlle morte aliénée. Mère nerveuse. Grand'mère

maternelle morte de phtisie, ainsi que huit grands oncles

maternels.

Accouchement à 10 mois ( ? ).- Persistance de la fontanelle

antérieure à 5 ans. - Symptômes caractéristiques de l'idiotie

myxoedémateuse.

Y... X...'de B... (Espagne), est âgée de ans. - Père, 33 ans,

négociant, assez grand, jouit d'une bonne santé, est très

intelligent, bien que son crâne soit peu développé (microcé-

phalie légère) et que le front soit étroit et bas; le visage est très

allongé, le nez aquilin. Il est plutôt sanguin que nerveux, pas

de diathèse, aucun accident nerveux; il a eu à 18 ans des fine-

vres intermittentes qui ont duré'cinq jours. [Père, 70 ans, opéré

autrefois par Ricord d'un calcul de la vessie, bien portant. -

Mère, morte d'un cancer de l'utérus. - Grand-père paternel

mort de la goutte.- Grand'mère paternelle morte agence.

Grand-père maternel, pas de détails. Grand'mère mater-

nelle morte à 80 ans. - Deux frères et deux soew's bien por-

tants, sans accidents nerveux, ainsi que leurs enfants. - l'as

d'aliénés, etc., dans la famille.]

Mère, 32 ans, lymphatique, nerveuse, ni migraines, ni con-

vulsions, de taille plutôt petite, est ordinairement en bonne

santé, quoique anémique. [Père, grand, bien constitué, lym-

phatique. Mère, morte phtisique, ainsi que ses huit frères.

- Grands parents, pas de détails. - Une soeur en bonne

santé; pas d'enfants. Pas d'aliénés, etc.]

Pas de consanguinité. Inégalité d'âge d'un an. Trois enfants :

1° notre malade; - 2° garçon, 4 ans, bien portant, intelligent,

pas do convulsions; - 3° fille, 3 ans, en bonne santé, sans ac-

cidents convulsifs : tous deux diffèrent complètement du

malade.

Noire malade. Grossesse bonne. - Accouchement très

laborieux, prolongé (3 jours) « avec un retard indubitable

d'un mois, assure-t-on ». - .1 la naissance,* l'enfant avait

beaucoup de cheveux et les ongles très longs. Pendant les six

premiers mois, elle ressemblait à tous les autres enfants. A

partir de là, ses mouvements ont diminué jusqu'à arriver à la

presque immobilité des membres. La physionomie qui expri-

mait la vivacité et les autres caractères communs aux enfants

de cet âge changea. Elle prit un air d'imbécillité qu'elle con-

serve encore, quoique à un moindre degré.

Pendant les deux premières années, la tête penchait en

divers sens, mais aujourd'hui, elle se tient assez bien. Durant

70 clinique.' *

les premières années, la tête et la langue s'étaient développées

d'une façon disproportionnée, mais depuis deux ans, elles

n'augmentent pas sensiblement de volume. La partie supé-

rieure du crâne est souple, comme si l'enfant avait un an. La

fontanelle antérieure n'est pas ossifiée dans un espace de

trois centimètres d'avant en arrière et de deux centimètres

transversalement. La région frontale est aplatie; la suture

interfrontale n'est pas fermée; elle est même large. On note

une déclivité très prononcée du vertex à la racine du nez et,

en revanche, une saillie notable de la partie postérieure du

crâne. - Les cheveux sont peu abondants et courts à la

Fig. 5. Y... X..., en 1889.

IDIOTIE MYXOEDEMATEUSE.

71

région antérieure et moyenne. Le cuir chevelu est le Siège de

petites croûtes qui se reproduisent sans cesse.

La physionomie est sans expression. (Fig. 5, 6 et 7).

Les paupières, boursouflées, sont le siège d'une blépharite

ciliaire chronique. - Les globes oculaires sont normaux.

Le ne-, est court et camus. - Les joues sont très deve-

loppées. - La bouche est large; les lèV1'es sont épaisses, gon-

flées ; la langue est volumineuse et sort habituellement; il n'y

a pas de bave. A mesure qu'elles ont poussé, les dents se sont

cariées et sont tombées, de sorte qu'il n'en reste, pour la plu-

part, que des racines. La première dent serait sortie vers

vingt mois.

Fig. G. - ... ..., en 1889.

72

CLINIQUE.

Le cou est gros et court. - Le tronc serait assez régulier,

mais il existe un peu d'enfoncement de la colonne vertébrale.

- Le ventre, très gros, mesure 56 centimètres au niveau de

l'ombilic qui est lo siège d'une hernie de 3 centimètres de

longueur et d'un à deux centimètres de diamètre. Elle aurait

été plus volumineuse.

Les divers segments des membres sont gros, trapus; les

os des jambes sont incurvés. Les pieds et les mains sont

gonflés, épais, courts ainsi que les doigts et les orteils.

L'enfant, malgré la température toujours assez élevée de son

pays, est sensible au froid; elle ne marche pas, elle se tient

seulement debout, et encore sans équilibre. L'intelligence ne

1,'ig. 7. - Y... X..., on 1$S',i.

IDIOTIE myxoedémateuse. 73

s'est pas développée; cependant Y... comprend différentes

choses, reconnaît toutes les personnes de son entourage et

leur témoigne même un peu d'affection. Elle ne supporte pas

la contradiction; elle s'emporte facilement et alors fait de

grands efforts et veut se jeter par terre. - La voix est rauque,

criarde. - La parole est limitée à pa pour papa et à telta, mot

qui désigne sa gouvernante.

Jusqu'à dix-huit mois elle fut allaitée par des nourrices;

jusqu'à quatre ans, elle fut alimentée avec du lait concentré et

des jaunes d'oeuf. Depuis lors, elle se nourrit de lait de

chèvre, d'oeufs, de cerveaux, de poulet et de viande triturée.

Elle n'a jamais voulu boire d'eau si ce n'est dans le cours d'une

maladie fébrile.

La déglutition serait un peu gênée. Y..... n'est pas sujette

à vomir. Elle est gâteuse, a des selles quotidiennes et n'aurait

pas eu de chute du rectum.

Comme maladies ordinaires nous n'avons à relever unique-

ment que des bronchites, une otite double, qui a disparu en

huit jours, et une angine simple.

Cette observation a été rédigée d'après les notes très

bien prises que nous a remises son père et d'après les

renseignements complémentaires qu'il nous a donnés

en venant nous consulter. Cette enfant, ainsi qu'il est

facile de le constater en examinant les figures 4, 5 et 6

faites sur des photographies, offre tous les principaux

symptômes qui caractérisent l'idiotie myxoeclémateuse.

Observation VI. - Père mort tuberculeux. Grand-père

paternel excès de boisson. - Grand'mère paternelle morte

d'un cancer de l'utérus. - Oncle paternel, excès de boisson.

- Tante paternelle, migraineuse. - Deux cousins issus

de germains, idiots. - Mère sujette à des douleurs névralgi-

ques, très nerveuse. Grand-père maternel, excès de boisson.

- Grand'mère maternelle, hystérique. - Arrière grand-père

maternel, excès de boisson, mort d'une attaque de paralysie.

- Grand'oncle maternel, excès de boisson.

Grossesse mauvaise : envie insurmontable de dormir,

chute. - Asphyxie à ta naissance. - Premières convulsions

a 14 mois. - Refroidissement et cyanose de la moitié infe-

rieure du corps. Jeûne. - Pertes de connaissance à

partir de 3 a2s. - Caractères complets de la cachexie pachy-

dermiqcce : physionomie typique, cheveux brun-roux; per-

74 CLINIQUE.

sistance cle la fontanelle antérieure ; gonflements lipomateux

des joues, des creux sus-claviculaires, des aisselles ; peau

cireuse, eczémateuse ; état pachydermique des pieds et des

mains ; hernie ombilicale ; rachitisme; absence de la glande

thyroïde, etc. - Congestion pulmonaire intense, mort en

syncope.

Autopsie : Absence complète de la glande thyroïde.

Persistance de la fontanelle antérieure. - Aspect gélalitti-

forme des circonvolutions cérébrales.

Bourg... Fernand-Auguste, né à Paris le 'le juillet 1883, est

entré dans notre service à Bicêtre le 6 décembre 1887.

Renseignements fournis par sa mère (16 décembre z

Père, 32 ans, garçon de café depuis l'âge de 13 ans. n'a pas eu

de convulsions de l'enfance, laborieux, sobre, d'une conduite

régulière, sujet à des douleurs de tête et à des étourdissements,

fume très peu, caractère doux, aucun indice de syphilis; ni

rhumatisme, ni maladies de peau. Il est actuellement soigné à

l'hôpital Lariboisière pour une bronchite tuberculeuse p).

[Père, cultivateur, mort étouffé sous un sac de blé, étant

ivre ; il faisait de nombreux excès alcooliques et vénériens.

Mère très nerveuse, sobre, morte à 55 ans, probablement d'un

cancer de l'utérus. - Grands parents paternels et maternels,

pas de renseignements. - Un frère, en bonne santé, mais

commettant de très fréquents excès de boisson qui ont amené

une séparation entre lui et sa femme. - Deux soeurs, dont

l'une est sujette à des migraines ; leurs enfants n'ont pas eu

de convulsions.- Deux cousins germains, âgés l'un de 39 ans,

l'autre de 22 ans, sont devenus tout à fait idiots à la suite de

convulsions de l'enfance. - Ni aliénés, ni épileptiques, ni

myxoedémateux, ni goitreux, ni difformes, etc., dans la famille.

Mère, 24 ans, couturière, bien portante, brune, physionomie

régulière ne rappelant aucunement celle du malade, sobre,

bonne tenue, pas de convulsions de l'enfance. Elle a des dou-

leurs névralgiques occupant la moitié antérieure du crâne ;

deux fois elle a eu des crises nerveuses consécutives à une

peur et à une contrariété. Tempérament très nerveux, caractère

changeant. - [Père, charron, excès de boisson, mort en 1870,

à 43 ans, d'une variole hémorrhagique. - Mère, 50 ans, bro-

canteuse, sobre, a eu de fréquentes attaques de nerfs jusqu'à

47 ans. - Grands parents paternels, pas de détails. - Grand-

père maternel, mort à 65 ans d'une paralysie du côté droit en

(1) Il est mort le 14 mai 1888.

idiotie MYXOEDÉMATEUSE. 75

trois jours; il avait fait beaucoup d'excès de boisson . Grand'

mère maternelle, 70 ans, sobre, bien portante.-Pas de frères.

- Deux soeurs jouissant d'une bonne santé et n'ayant pas

d'accidents nerveux. - Deux oncles paternels, rien de parti-

culier. - Un oncle maternel bien portant, adonné à la boisson.

- Pas d'aliénés, etc., dans la famille.

Pas de consanguinité (Père de l'Oise, mère de Romorantin :

dans ce pays, il y a des gens qui sont goitreux, mais il n'y en

a pas d'exemple dans la famille).- Inégalité d'âge de neuf ans.

Deux enfants et une grossesse presque à terme (il s'agit de

l'enfant Suzanne dont nous rapportons l'histoire plus loin) :

1° Fernand; - ° Garçon, 32 mois, bien portant, intelligent; il

a marché à 10 mois, a été propre à 14; il parle couramment.

Notre malade. - A la conception, qui a eu lieu un mois

après le mariage, ils étaient bien portants tous les deux.

Grossesse assez mauvaise : anorexie et vomissements ; à partir

de la quatrième semaine, jusqu'à la fin du 6e mois, elle a été

sujette à des envies de dormir auxquelles il lui était impossible

de résister. Au cinquième mois, elle a fait une chute qui a

failli provoquer l'avortement et l'a forcée de garder le lit pen-

dant plusieurs semaines. « L'enfant, dit-elle, était descendu. »

Pas de syncopes, pas d'oedème des pieds, etc. - Accouchement

à terme, naturel, en vingt-six heures. - L1 la naissance, l'en-

fant était tout noir; on a dû le frictionner énergiquement; il

n'a crié qu'au bout de sept ou huit minutes; la tête était très

grosse, déformée; la sage-femme l'aurait pétrie pour lui donner

une forme naturelle. - Elevé au sein par sa mère, jusqu'à huit

mois; ensuite au biberon (lait de vache). Sa mère prétend que,

depuis le premier mois, l'enfant a toujours eu le même aspect,

c'est-à-dire le teint cireux, les joues et les lèvres épaisses, les

mains et les pieds gonflés, et qu'il a toujours eu des croûtes

du cuir chevelu, à partir de la cinquième semaine, tandis que

le second enfant n'en a jamais présenté. Première dent à 13 mois.

11 aurait été bien portant jusqu'à 14 mois (Fig. 8), époque où

il aurait eu des convulsions qui ont duré dix minutes : les

membres étaient raides, les paupières closes, les yeux retour-

nés ; tout le corps au-dessous de la ceinture était froid; ni

secousses, ni écume. Durant les six mois qui ont suivi, les

membres inférieurs restèrent froids et bleuâtres. On était obligé

de les envelopper dans de l'ouate. Après les convulsions, pen-

dant six semaines, il aurait eu de la congestion pulmonaire.

Puis sa santé redevint assez bonne. Cependant, il lui est arrivé

plusieurs fois de rester deux ou trois jours sans rien prendre,

ni aliments, ni eau, ni lait (jeûnes). Si on le faisait boire de

76

CLINIQUE.

force, il vomissait. - Il a bavé jusqu'à 18 mois, il n'a jamais

été propre. Il a été mis en garde chez une parente, à la cam-

pagne, à 25 mois. Quand sa mère l'a repris, à trois ans, elle a

constaté des pertes de connaissance qui n'existaient pas aupa-

ravant : il pleurait, ses yeux se fermaient, la tête tombait; il

restait inconscient pendant quelques minutes, puis rouvrait

les yeux. Ces accidents réviennent environ deux fois par

semaine; il lui est arrivé d'être un mois sans en avoir.

Depuis un an, il commence à se tenir le long des chaises; il

n'a jamais marché seul. - La parole est à peu près nulle. Il

paraît comprendre assez bien ce qu'on lui dit, semble affec-

tueux avec ses parents : nous le faisons venir auprès de sa

mère; en la voyant, il pleure d'une manière stridente, comme

Fig. 8. - Bour ? 1 ? à 14 mois.

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

77

pleurait Then... dit le Pacha. Il approche sa tête, mais n'em-

brasse pas et caresse avec sa main. Il entre parfois en colère

quand on ne fait pas ce qu'il veut. Il sait se servir un peu de la

cuiller et de la fourchette, mais il est incapable de boire seul.

Il aurait eu beaucoup de gourme dans la tête. Pas d'adénite,

ni d'abcès, ni de fièvres éruptives. Il a rendu une fois des lom-

brics. Pas d'onanisme. Plusieurs médecins consultés ont déclaré

qu'il n'y avait rien à faire.

État actuel (15 janvier 1888). Tête symétrique, un peu carrée.

La région occipitale est assez volumineuse; les bosses parié-

tales peu proéminentes. Les cheveux sont peu abondants,

d'une couleur brune tirant sur le roux. Le cuir chevelu est

couvert de petites croûtes et de squames. - Le front a 4 cen-

Fig. 9. - l3our..., F., il ans et demi.

78 CLINIQUE.

timètres à peine de hauteur; il est étroit, déprimé latéralement.

Les sources sont bien marqués et assez fournis. Les paupières

supérieures sont notablement bouffies et recouvrent en partie

les globes oculaires. Les cils sont longs et collés (blépharite

ciliaire). - Les yeux sont petits, les iris d'un bleu clair; le

gauche semble un peu plus foncé que le droit. - Les joues

sont très grosses, gonflées. Le nez est petit; sa racine est

aplatie, les narines sont larges. La bouche est continuellement

ouverte; les lèvres sont volumineuses, l'inférieure esten partie

renversée. Le menton est petit, rond, presque caché par le

renversement de la lèvre inférieure. - Les oreilles sont nor-

males, bien ourlées et leur lobule est distinct (Fia. 9).

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

79

trouve des masses lipomateuses au niveau de la hanche et

de la partie supérieure de la face interne des cuisses. Les ré-

flexes rotuliens sont très marqués.

Organes génitaux : Pénil très développé, bourses rétrac-

tées, raphé médian très prononcé ; testicules non descendus.

Phymosis complet. ,La verge a 4 centimètres de longueur et

5 centimètres de circonférence.

La peau est glabre, rugueuse, sèche, bouffie, jaunâtre, sauf

au niveau- des pieds et des mains où elle est rosée. Légère

desquamation furfuracée au niveau des avant-bras et des

jambes. Quatra cicatrices de vaccin sur le haut des bras.

La sensibilité générale paraît être conservée dans ses dif-

férents modes. Il en est de même de la sensibilité spéciale,

autant que l'état intellectuel de l'enfant permet d'en juger :

l'assa-foetida placée sous ses narines, la coloquinte déposée

sur sa langue le font crier et faire des grimaces. La circula-

tion et la respiration n'offrent rien de particulier.

Fig. 10. - 13our..., F., à 4 ans et demi.

80 CLINIQUE.

Il tient bien la cuiller et la fourchette, mais ne peut s'en

servir. Il n'est ni gourmand, ni salace, ni vorace. La masti-

cation est très défectueuse ; il suce en mangeant ; il n'aime

pas la viande; si on lui en introduit des morceaux dans la

bouche, il les rejette ; pas de rumination, pas de vomissements,

selles quotidiennes, gâtisme.

L'enfant ne marche qu'étant soutenu sous les bras, très

lourdement ; il se tient assez bien aux chaises ou au lit ; lors-

qu'on le met dans le chariot, il s'y tient convenablement et le

fait avancer seul.

La préhension s'accomplit normalement, l'enfant saisit tous

les objets qu'on lui présente, porte son pain à la bouche et le

mange seul. - Le sommeil est bon. - Pas de tics.

L'attention est facile à fixer; le caractère est doux et affec-

tueux. Fernand comprend ce qu'on lui dit, mais ne prononce

aucun mot. La voix est aigre, rauque, gutturale.

Taille : 0m, 72 cent. - Poids : 11 kilogrammes.

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 81

tique la respiration artificielle, on fait des frictions stimulantes,

mais en vain. - Un quart d'heure après la mort, 31o,8 ; une

heure après, 3S ? ? ; deux heures après, 37°.

Autopsie le 1.juin. - Tète. - Le cuir chevelu, d'une épais-

seur normale, est pâle, humide, comme lavé. - Le crâne est

peu épais et normal. La fontanelle antérieure persiste, elle

mesure 6 centimètres d'avant en arrière et 4 centimètres trans-

versalement. - La dure-mère est très adhérente au crâne,

principalement au niveau de la grande scissure. L'enlèvement

de l'encéphale est très difficile. - Le cerceau est très mou ;

les circonvolutions sont molles, gélatiniformes, comme foc-

tales. L'examen immédiat étant impossible, on met le cerveau

dans l'alcool, afin de le faire durcir (I).

Cou.- Les glandes sous-maxillaires et linguales paraissent

normales. Elles Mont entourées de petites boules graisseuses,

d'aspect humide. - Un examen attentif ne fait découvrir

aucune TRAC¡;; DE la glande thyroïde. Le thymus persiste;

il recouvre en partie le péricarde et est enveloppé par un

tissu graisseux assez abondant. - Les pseudo-lipomes sus-

claviculaires sont composés de petites boules graisseuses

humides, sans limitation bien nette.

Thorax. - Le tissu adipeux sous-cutané est peu développé;

on dirait qu'il a été lavé, ainsi que les muscles du thorax, qui

sont très pâles. Le tissu conjonctif, situé au-dessous du ster-

num et qui rejoint le péricarde, a un aspect oedémateux. Dans

la cauité pleurale gauche, on trouve environ un verre de

liquide. - Poumon gauche, 120 gr. ; ecchymoses ponctuée ? ,

principalement sur le lobe supérieur ; oedème et congestion

du lobe inférieur.- Poumon droit, 240 gr. ; oedème très pro-

noncé de tout le poumon. Pas d'hépatisation. - Le péricarde

contient un demi-verre de sérosité. Coeur, 70 gr.. en systole,

pointe formée surtout par le ventricule gauche. Caillots blancs

dans l'oreillette droite. Imbibition do l'endocarde. Plaque

athéromateuse sous-aortique. Trou de total oblitéré.

Abdomen très ballonné. L'intestin et l'estomac sont forte-

ment dilatés par les gaz. - L'estomac, le foie (570 gr.), la

rate (40 gr.), le rein gauche (40 gr.), le rein droit (45 gr.) ne

présentent aucune lésion.

Le grand sympathique parait normal des deux côtés.

(1) Ce cerveau a été égaré ou jeté par l'ancien gardien du musée,

de sorte que nous sommes obligé de nous borner à cette simple

indication.

BOURNEVILLE, Bicêtre, 1889. 6

82 CLINIQUE.

Voici maintenant l'histoire de la soeur de cet enfant,

atteinte, elle aussi, d'idiotie myxoedémateuse.

Observation VII. - Père tuberculeux au moment de la

conception. - Pertes abondantes au troisième mois de la

grossesse ; fausses douleurs durant le dernier mois. -

Asphyxie et gonflement de toute la moitié droite du corps

à la naissance. - Influence du lait morphine. Premières

convulsions internes à 5 mois, suivies de 12 à 15 crises jus-

qu'à 6 mois. - Symptômes classiques de la cachexie pachy-

denmique. - 1\lCT',UtIS. - Nouveau gonflement de la moitié

gauche du corps à 9 mois. - Morle de convulsions il 1 mois.

- Autopsie : absence de la glande thyroïde.

Bourg... Suzanne, est née à Paris le 18 janvier 1888.

Cette enfant est la soeur du malade précédent. A l'époque

de la conception, le père était déjà sous le coup de la tuber-

culose pulmonaire à laquelle il a succombé, le 14 mai 1888, et

la mère était un peu affaiblie et fatiguée. Ils vivaient d'accord

et rien n'autorise à songer à une interposition. - Grossesse : .'

son état de fatigue a continué durant les trois premiers mois ;

de temps en temps, douleurs de tête avec nausées, quelquefois

vomissements, accidents qui se sont présentés au début de la

première grossesse (OBSERV. VI). A la fin du troisième mois,

perte abondante pendant trois heures et qui a nécessité un

repos au lit de huit jours. Ni traumatisme, ni émotions, ni

envies de boire, ni syncopes, ni attaques de nerfs, ni oedème

des pieds. Le dernier mois, elle est allée trois fois à l'hôpital

Saint-Antoine, ayant des douleurs lui faisant croire qu'elle

allait accoucher : le lendemain matin, les douleurs disparais-

saient et elle retournait chez elle. - Accouchement à terme,

sans chloroforme, naturel, en cinq heures. La mère de l'en-

fant raconte qu'elle a rendu peu de sang et beaucoup d'eau

après la délivrance qui a été normale, « au moins plein un

petit vase de nuit », particularité absente aux précédents

accouchements, qui se sont accompagnés, au contraire, d'un

flux sanguin assez abondant.

A la naissance, tout le corps de l'enfant était violet, bien

que la tète ne fut pas demeurée longtemps au passage ; néan-

moins, l'enfant a crié tout de suite et on n'a pas été obligé de

la frictionner; elle était grosse, pesait 4.060 gr. La face tout

entière était bouffie; foute ta moitié droite du corps était

enflée ; la main et le pied de ce côté avaient un volume double

de la main et du pied sains. -

Elevée au sein par sa mère, Suzanne a tété assez mal la pre-

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 83

mière semaine, puis elle a bien pris le sein. Au bout d'un mois,

sa mère est devenue malade (périmétrite) et a dû rentrer à

l'hôpital (février 1888). Alors l'enfant avait peu augmenté,

car elle ne pesait que 4.400 gr. Durant le séjour à l'hôpital,

elle eut une bronchite légère du côté droit et maigrit notable-

ment, de telle sorte que, à la sortie, le 7 mai, elle ne pesait plus

que 3.900 gr. Signalons que, pendant près d'un mois, la mère a

pris tous les jours du sirop de morphine auquel elle attribue

une certaine influence sur la situation de son enfant qui était

exclusivement nourrie au sein.

Nous avons dit que l'enfant était violette à la naissance; cette

coloration aurait été remplacée, le second jour, par une colo-

ration rouge-orange qui se serait maintenue jusqu'au com-

mencement du mois de mai, époque où la peau a blanchi. La

mère pense que cette modification est due au calomel qui a

été donné à l'enfant.

Après sa sortie de l'hôpital, « Suzanne a repris de la figure

et du corps. ); Vers la fin du mois de mai, elle a eu, pour la

première fois, des convulsions internes : elle se réveillait en

frayeur, faisait un petit saut, tournait ses yeux, plissait le front.

La bouche n'était pas tirée, les membres, croit-on, ne devenaient

pas rigides. - Depuis lors, jusqu'à ce jour (11 juin), Suzanne

a eu l' ou 15 crises semblables. Leur durée a varié de à à

15 minutes. On n'a pas remarqué de secousses cloniques pen-

dant les crises, ni de paralysie consécutive. - Parfois le

sommeil est interrompu par une sorte de peur avec suffocation.

Ces accidents se montreraient aussi, quelquefois, lorsque l'en-

fant est éveillée.

Etat actuel (11 juin 1888). - Tête ovoïde, l'occipital for-

mant une saillie assez prononcée et le front étant au contraire

étroit. La fcntanello antérieure a G centimètres de long sur 4

de large. La fontanelle postérieure persiste ; les pariétaux

sont écartés dans leur tiers postérieur. Les sutures temporo-

frontales sont fermées ; les sutures pariéto-occipitales sont

ouvertes. Les cheveux, blonds, sont très rares au niveau du

vertex, assez abondants sur le reste de la tète, un peu plus à

gauche qu'à droite. Tout le cuir chevelu est envahi par des

petites croûtes qui reviennent sans cesse, malgré les savon-

nages. Sur la tempe gauche, au-dessus de l'oreille, iloevtis

congénital, un peu saillant, d'un centimètre de diamètre.

84

CLINIQUE.

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

85

Le dos et le ventre ressemblent à ceux de Fernand. La cou-

che graisseuse des creux sus-claviculaires est plus prononcée

que chez les autres enfants de cet âge. Le thorax mesure

36,5 au niveau des ;seins ; le ventre, 40*= à deux centimètres

au-dessus du nombril qui est un peu saillant. Tandis que le

dos et la région lombaire sont larges, le bassin paraît rétréci.

La fossette coccygienne est couverte de poils nombreux.

. Le mont de Vénus est proéminent ; les grandes Mures

sont très saillantes, bouffies ; la muqueuse de la vulve est

humide.

Les bras sont gros et courts. La circonférence est de 13e au

niveau des plis du coude et 9<,5' au niveau des poignets. Les

mains sont bouffies ; les doigts un peu violacés et froids. (A

la naissance, les ongles étaient, dit la mère, cachés par la chair

du bout des doigts.) Les cuisses et les jambes sont également

courtes. On trouve 21e au niveau des plis de l'aine et 15e au

niveau des mollets. Les pieds sont épais, cyanosés ; les orteils

normaux, mais les ongles sont à peine formés. (Ils ne se voyaient

pas à la naissance). (Fig. 11 et 12).

Fig. 12. - Bour..., 5..., à six mois.

86 CLINIQUE.

L'enfant tette bien, ne vomit pas, est sujette à la constipation.

Sa mère a fait déjà la remarque que sa fille ressemble à son

petit garçon et qu'elle se présente tout à fait sous le même

aspect que lui au même âge. - Taille : 56 cm. ; poids :

4 kil. 800.

31 juillet. - L'enfant paraît venir assez bien. La peau est

sèche et a, partout, un teint cireux. Les cheveux sont rares.

Le cuir chevelu est parsemé de croûtes et de pellicules. La

fontanelle antérieure a 6e d'avant en arrière sur gaz transver-

salement. La fontanelle postérieure a 4e d'avant en arrière

sur le de largeur. La bosse frontale droite et la bosse occipi-

tale gauche sont plus saillantes que leurs congénères. Les cils

sont longs et fournis. L'enfant regarde et sourit. Les joues

sont pendantes. La langue est très épaisse, la salivation abon-

dante. Il n'y a pas de dents.

Un nouvel examen de la région antérieure du cou no fait

que confirmer ce que nous avons dit sur l'absence probable

de la glande thyroïde. - La mère déclare que l'enfant a la

tète très lourde et qu'elle entraîne le corps.

25 octobre. - Suzanne a eu une bronchite à la fin du mois

d'août. Elle a guéri en 15 jours. Il y a deux semaines, elle

aurait eu, pendant quatre jours, toute la moitié gauche du

corps enflée. « Ses yeux n'ont pas grande signification, dit sa

mère; elle ne sourit pas. » La semaine dernière, sans motif,

elle a ri aux éclats. Elle ne se sert pas du tout de ses mains

et ne se tient pas sur les jambes. Son sommeil est prolongé.

Elle paraît très sensible au froid.

Les cheveux sont secs, chatain-roux, peu abondants sur

les tempes et sur le vertex (1) ; les croûtes persistent. Même

état des fontanelles.

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 87

le nez long et pointu). La poitrine est plus bombée ; le ventre

toujours gros avec une petite hernie ombilicale. Les pseudo-

lipomes des creux sus-claviculaires sont plus apparents. -

Les pieds et les mains sont gonflés, froids, cyanosés. La teinte

jaunâtre et cireuse de la peau, surtout à la face, est plus pro-

noncée. La voix est criarde comme celle de son frère.

1er décembre. - L'enfant est devenue souffrante le 15 nov.

et a maigri progressivement. Le 29, elle a été prise de convul-

sions vers 4 heures du soir : rigidité, puis secousses générales,

écume; durée 4 à 5 minutes. - Nouvelles convulsions vers

11 heures du soir, puis, le 30 novembre, à 2 heures du matin,

qui se sont terminées par la mort.

AUTOPSIE. - L'enfant étant morte chez sa mère, en ville, il

ne nous a pas été possible de faire l'examen du cou. Nous

avons enlevé le larynx, la trachée et les muscles, et un examen

attentif nous a permis de constater l'absence complète de la

glande thyroïde.

Ces deux cas, observés dans la même famille, sont

tout à fait typiques. Relevons en passant deux particu-

larités curieuses, présentes également dans tous les cas

qui nous sont personnels : 1° la forme spéciale du nez

des malades - nez camus - alors que leurs parents

ont le nez aquilin ou différent; la couleur rousse des

cheveux, tandis que les parents ont les cheveux bruns

ou blonds.

Observation VIII. - Père, fièvres intermittentes, paraly-

tique général. - Arrière-grand-père paternel apoplectique.

- Oncle paternel migraineux ; mère nerveuse. - Grand-

père paternel mort de tuberculose. - Grand'mère maternelle

paralysée. - Arrière grand-père maternel aliéné. - Oncle

maternel migraineux. - Mère nerveuse, un peu micro-

céphalique. - Grand-père maternel mort tuberculeux. -

Grand'mère maternelle hémiplégique. - Arrière-grand-père

maternel aliéné.

Père au début de sa paralysie générale à l'époque de la-

conception. - Premières convulsions à huit mois. - Bron-

chite. - Symptômes classiques du myxoedème. - Morte a

l'âge de 7 ans. -

Autopsie : Persistance de la fontanelle antérieure. -

Absence complète de glande thyroïde. - Persistance du

thymus. '

i CLINIQUE.

Cab... Marie-Pauline, néeà Sedan, le 29 juillet 1882, est entrée

à l'asile do Villejuif dans le service de M. le Dr BRIAND, le

29 avril 1889 (24 mars 1889) (1).

Renseignements fournis par sa mère. - Père, 44 ans, ser-

gent de ville, est depuis trois mois à l'asile d'aliénés de Ville-

Evrard pour une paralysie générale. Depuis sept ans, il était

sujet à des accès de colère et battait sa femme; depuis long-

temps, mais davantage depuis un an, il s'adonnait à la boisson;

il a été sujet à des accès mensuels de fièvre intermittente bien

caractérisés depuis son mariage jusque dans ces dernières

années. - [Père, sobre, mort d'une attaque d'apoplexie, en

8 jours ; il a été sujet à des accès mensuels de fièvres inter-

mittentes bien caractérisées depuis son mariage jusque dans

ces derniers temps. - Mère, très nerveuse, bien portante, pas

d'excès de boisson. - Grands-parents paternels et maternels,

pas de détails. - Un oncle maternel est mort aliéné. Frère

migraineux. - Soeur nerveuse et d'un caractère violent ; elle a

deux enfants bien portants ; sans convulsions. - Pas d'autres

aliénés, pas d'épileptiques, pas d'autres paralytiques, pas d'en-

fants semblables à la malade].

Mère, 33 ans, nerveuse, migraineuse, brune, intelligente,

d'une physionomie toute différente de celle de sa fille.- Léger

prognathisme de la mâchoire supérieure. Dents mal implantées ;

oreilles mal ourlées. - [Père, sobre, mort à 27 ans de tuber-

culose. - Mère irritable, paralysée du côté gauche depuis

quatre ans. - Grand-père paternel mort à 66 ans, de bronchite

chronique, laboureur, sobre. - Grand'mère paternelle, mi-

graineuse, morte à 81 ans, d'un cancer de la face. - Grand-

père maternel mort aliéné à 72 ans. - Grand' mère maternelle

morte à 84 ans. - Un oncle et une tante paternels sont morts

tuberculeux ; un autre oncle est en bonne santé. Il en est de

même de 2 oncles et d'une tante maternels ainsi que de leurs

enfants. - Ni frère, ni soeur. Pas d'autres aliénés, pas de

goitreux, bien qu'il y en ait dans son pays, etc.]

Pas de consanguinité. - Père de Mirecourt; mère de Sedan.

Inégalité d'âge de 11 ans.

Quatre enfants : 10 Fille, dix ans, intelligente, nerveuse;

jamais de convulsions; - 2° Fille morte de méningite à

2 ans; - 3° Fille morte à 3 ans d'une fluxion de poitrine;

pas de convulsions ; 4° Pauline.

(1) Les renseignements que nous avons donnés dans notre com-

munication à l'Association française étaient incomplets. Nous

avons pu retrouver la mère et avoir d'elle, nous-même, des ren-

seignements précis.

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 89

Notre malade. - A l'époque de la conception, le père, as-

sure-t-on, ne présentait aucun indice de trouble mental, n'était

pas violent; ils vivaient en bonne intelligence; mais depuis

quelque temps déjà, il s'était mis à la boisson et, je pense, dit

la mère, que la petite a « été faite quand il avait bu. » -

Grossesse, assez mauvaise : « J'ai vomi depuis le premier jour

jusqu'au dernier»; pas de coups, de chutes, pas d'émotions,

pas d'alcool ni d'opium; à 7 mois, sans cause connue, est sur-

venu un commencement de travail : « La matrice restait

ouverte » au dire de la sage-femme. Pas de métrorrha-

gie. Pendant les deux derniers mois, douleur3 tous les huit

jours. - Accouchement à terme naturel, sans chloroforme,

en 15 heures. Les autres accouchements ont été plus rapides.

A la naissance pas d'asphyxie, bien que l'enfant eut deux

circulaires du cordon autour du cou; elle a crié de suite. La

tête était grosse, non déformée; les ongles étaient réguliers;

il n'y avait pas de développement exagéré du système pileux.

- Elevée au sein par sa mère jusqu'à cinq mois, puis au bi-

beron avec du lait de vache. Jusqu'à huit mois bien venante,

mais elle avait la langue, les pieds et les mains épais et la

peau cireuse, et, dès la naissance, on avait remarqué qu'elle

avait une voix différente de celle des autres enfants.

A huit mois, dans le cours de sa première bronchite, au

bout de deux semaines, elle a eu pendant trois jours et chaque

jour à diverses reprises, des convulsions qui ont duré chaque

fois dix minutes; elle devenait roide, toute bleue, avait des

secousses dans les quatre membres, égales des deux côtés.

- A partir de ces convulsions, l'enfant « n'a plus poussé du

tout », dit la mère. Elle grossissait mais ne grandissait pas et

son ventre devenait plus volumineux. C'est alors seulement

qu'on a noté l'existence de la hernie ombilicale.

Première dent à 17 mois; elle n'avait pas ses 20 dents à son

entrée à Villejuif. « Elle n'a eu ses oeillères qu'à 4 ans. » A la

maison, elle restait assise presque tout le temps, s'amusant

avec une poupée, avec des jouets, soit seule, soit avec sa soeur,

qu'elle aimait beaucoup ainsi que sa mère. Elle reconnaissait

tous ses parents. Son caractère était sauvage; elle n'aimait pas

voir des étrangers. Très coléreuse, elle se raidissait, se renver-

sait sur sa chaise et se frappait la tête avec ses poings. - Aucun

tic. Pas d'onanisme. Pas de vers.

Pas de rougeole, pas de varioloïde, etc. - Pas de coque-

luche, ni d'angine. Elle aurait toujours bavé et la langue restait

hors de la bouche. Coryzas fréquents.

Première ophtalmie à 4 mois; depuis, elle en a eu souvent ; les

paupières restaient constamment collées. ,- Elle a eu quelques

90

CLINIQUE.

croûtes d'impétigo sur les tempes, de l'eczéma des oreilles; -

des adénites autour du menton; - pas d'otite; - plusieurs fois

des furoncles un peu partout (Fig. 13). -

Mat. - M. le D1- Briand, ayant eu l'obligeance de nous

envoyer la malade à Bicêtre, pour la faire photographier, nous

en avons profité pour recueillir les notes sommaires ci-après :

Tête volumineuse, se rétrécissant en avant, surtout dans la

moitié postérieure; front assez haut, mais très étroit.

Persistance de la fontanelle médiane antérieure. Cheveux

gros, rudes, noirs et assez abondants sur les côtés et en arrière ;

d'un noir tirant sur le roux et peu abondants sur la partie

moyenne des pariétaux et du frontal. Nombreuses crasses du

cuir chevelu, se desquamant et se reproduisant. Sourcils clairs.

Fig. 13. - Cab..., à G ans et 10 mois..

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

91

Les paupières sont bouffies, ont une pâleur bleuâtre et sont le

siège d'une blépharite chronique. Les cils sont très longs et

assez fournis aux paupières supérieures et très rares aux infé-

rieures. Il existe un léger degré d'entropion à la paupière

inférieure gauche. Iris bleus. Pas de lésions des globes ocu-

laires. Nez camus (1), épaté. Joues épaisses, surtout dans leur

partie postérieure, ballottantes, gélatiniformes. Erythème de la

joue gauche. Lèvres très grosses, bouche assez large, langue

très épaisse, que la malade laisse voir entre les arcades den-

(1) Le père a le nez aquilin et les cheveux très bruns et très

fins ; la mère a le nez allongé et un peu relevé à la pointe, les

cheveux bruns et fins.

Fig. 14. - Cab..., à 6 ans et 10 mois.

92

CLINIQUE.

taires, qui sont comme aplaties en avant. En haut, quelques-

unes des dents sont usées; la voûte palatine est large et plate.

Le menton est comme doublé. Ganglions sous-maxillaires assez

volumineux. Les oreilles sont bien ourlées, les lobules sont

adhérents et un peu relevés. Le visage est plutôt rond, la phy-

sionomie offre l'aspect dit crétinoïde que nous avons signalé

chez les autres malades. Le regard est vague, mais peut être

fixé (Fig. 14, 15 et 16).

ILIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

93

Le cou est très court; sa circonférence est de 30 centimètres.

On sent très bien es cartilages de la trachée, mais ni nous, ni

nos internes, n'avons pu percevoir la glande thyroïde. On

trouve des masses pseudo -lipomateuses très prononcées,

tremblotantes, dans les creux sus-ctaviculaires et sous les ais-

selles. Le tronc est ramassé, le ventre large et volumineux,

surtout dans sa moitié supérieure ou sus-ombilicale, avec

une pointe de hernie ombilicale; les grandes lèvres sont assez*

saillantes. La colonne vertébrale est régulière. Le bassin et les

fesses sont étroits par rapport à la partie supérieure du thorax.

Circonférence du thorax au niveau des aisselles. 50 cent.

- . - des mamelons. 53 cent.

- - do l'ombilic . 16 cent.

Fi[j. 16. - Cab..., à 6 ans et lU mois.

94 CLINIQUE.

Les membres supérieurs sont gros et courts; les mains volu-

mineuses, épaisses, rouges et froides. - Les membres inférieurs

présentent absolument les mêmes caractères. La peau a une

teinte mate, d'aspect cireux et est rugueuse.

IDIOTIE myxoedémateuse. 95

.est très réduite. Les os peu épais sont durs. La fontanelle

antérieure persiste ; elle mesure 3 cm. 1/2. d'avant en arrière

et 3 cm. transversalement (1). Les sutures sont ossifiées en

très grande partie, mais transparentes dans certaines parties

de leur étendue. Il existe des adhérences nombreuses entre

la voûte du crâne et la dure-mère, qu'il a fallu en quelque

sorte décoller de la voûte du crâne (2). - La quantité de

liquide céphalo-rachidien ne paraît ni augmentée, ni dimi-

nuée. La pie-mère n'offre qu'une très légère vascularisation.

Les artères, les nerfs et les différentes parties de la base de

l'encéphale sont normaux.

Cerveau.- Hémisphère droit.-a) Face externe. - La plus

grande partie des circonvolutions de cet hémisphère ont laissé,

par places, après la pie-mère une très lègère couche de subs-

tance grise. La scissure de Sylvius est large, profonde, et

montre la moitié environ de la circonvolution de l'insula.

qui est formée de cinq digitations bien développées, dont deux

sont bifurquées. La scissure de Rolando est profonde. Fi, volu-

mineuse, très flexueuse, s'anastomose vers son milieu avec Po ! ,

par deux plis très voisins l'un de l'autre. P.= est également très

développée, très sinueuse; elle dessine un véritable gyrus sur

le milieu de son trajet. F : j, bien développée, très flexueuse,

envoie des replis dans les sillons de la 2° frontale. - F. A.

est petite et s'anastomose à son pied avec la pariétale ascen-

dante, interrompant la scissure de Rolando. - Les 1 rc, 2e et

3e circonvolutions pariétales sont maigres, surtout la première;

la deuxième a été entamée par un trait de scie qui empêche de

bien juger de son état. - Le pli courbe présente également

des circonvolutions extrêmement grêles par places, puis ren-

flées entre ces étranglements. Le lobe occipital est petit; les

circonvolutions serrées et peu sinueuses. Les circonvolutions

temporales sont assez maigres; la 1° envoie un prolongement

épais au lobule de l'insula. «

Les sillons secondaires du lobe frontal sont très peu pro-

fonds ; ceux des lobes pariétal, temporal et occipital le sont

un peu plus. Les sillons de la face interne sont, eux aussi,

assez superficiels.

b) Face interne. Les circonvolutions sont bien développées.

sauf la circonvolution du corps calleux; le lobe paracentral

est creusé de sillons assez nombreux ; la scissure calcarine est

profondément ouverte. Le coin et l'avant-coin ne présentent

(1) On sait que la fontanelle médiane antérieure ou grande fon-

tanelle disparait de deux ans à deux ans et demi.

(2) Des adhérences semblables ont été notées dans plusieurs cas.

9u ' CLINIQUE.

rien de particulier. Il en est de même de la circonvolution de

la corne d'Ammon et de l'hippocampe. - Le ventricule latéral

n'est pas dilaté, sa surface est lisse; les noyaux paraissent

normaux.

2° Hémisphère gatcche. -a) Face convexe. - Cette face est

beaucoup moins lésée que la face correspondante de l'hémis-

phère opposé, au point de vue des adhérences. - La scissure

de Sylvius est aussi très largement ouverte et découvre l'in-

sula qui est volumineux et composé de 7 digitations prin-

cipales. FI est volumineuse et assez flexueuse. F;; très mai-

gre, a son extrémité antérieure peu sinueuse, s'insère sur

la frontale ascendante par deux replis très peu marqués. 1 : Ï ,

moyennement flexueuse, est maigre en avant. - La frontale

ascendante, très grosse, reliée à sa base à la pariétale ascen-

dante, ferme ainsi en bas le sillon de Rolando, qui est profond

et bien développé. - La pariétal ? ascendante est également

bien tracée et ne présente qu'un peu d'amaigrissement dans

son tiers inférieur. La 1re pariétale, assez maigre et peu

flexueuse, plonge brusquement dans l'extrémité postérieure

de la scissure de Sylvius ; il en résulte une dépression courbe

qui est inscrite dans le sillon du pli courbe. - La 2e pariétale

est, au contraire, très développée, ainsi que la 3e. - Le pli

courbe est bien formé. - Le lobe occipital est formé de cir-

convolutions peu sinueuses. - Les adhérences sur cette face

sont surtout marquées au niveau de la 1T frontale et sur la

pariétale ascendante.

b) Face internes La première circonvolution frontale et le

lobe paracentral sont bien développés jusqu'à la scissure cal-

carine. Les circonvolutions du lobe occipital présentent

beaucoup de points amaigris. La circonvolution du corps

calleux est beaucoup mieux développée que celle du côté op-

posé. Le lobe quadrilatère est volumineux; le coin est plus

large que d'habitude à son extrémité centrale. L'hippocampe

et la corne d'Ammon n'offrent rien de spécial. - Le ventri-

cule latéral, le corps strié et la couche optique semblent nor-

maux. Sur cet hémisphère, les sillons sont un peu plus pro-

fonds qu'à droite.

Les circonvolutions ne sont pas symétriques, surtout les

lobes quadrilatères et le coin. A droite, cette dernière circon-

volution a son extrémité interne déprimée et moitié moins

épaisse qu'à gauche.

Cervelet.- Les deux lobes latéraux sont symétriques, le lobe

moyen paraît petit; la protubérance, le bulbe et les olives sont

également symétriques et paraissent normaux.

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 97

Cou. Un examen attentif montre qu'il n'y a aucune trace

de la glande thyroïde. Le larynx et la trachée n'offrent rien

do particulier. On trouve des amas de graisse jaunes, humides,

brillants et de nombreux ganglions de 5 à 10 millimètres de

longueur sur les côtés du cou, surtout à gauche. Il en existe

également sous les aisselles, offrant le même aspect. La

langue est largo et très épaisse.

Thorax. - Pas de liquide dans les plèvres. - Il reste

quelques fragments du thymus. - Les poumons sont sains,

sauf un peu d'oedèmo à la base du poumon gauche. Plu-

sieurs ganglions bronchiques sont tout à fait caséeux. Les pou-

mons pèsent 225 grammes. Coeur, 78 grammes, pas de

surcharge graisseuse, ni de sérosité péricardique. Tissu ferme,

un peu pâle. Trou de Bolal oblitéré. Pas d'autres lésions.

Abdomen. - L'estomac, les intestins, la rate (40 gr.), le

pancréas (35 gr.), ne présentent aucune lésion. - Le foie

(495 gr.) est décoloré, jaune et d'aspect tout à fait graisseux

sur les coupes ; pas de calculs. Les reins pèsent 97 gr., se

décortiquent facilement, ne sont pas lobulés. A la coupe, ils

se montrent un peu anémiés, surtout les pyramides. Il y a

dans le rein droit un kyste de la grosseur d'une petite noi-

sette.- La vessie, un peu distendue par l'urine, a des parois

épaisses. L'utérus et ses annexes sont sains. Le poids du

corps est de 9,500 gr. à peine, ce qui fait une diminution de

plus de 600 gr. depuis le mois de mai.

Voici maintenant le résultat de l'exa nen histologique

pratiqué par notre ancien interne, M. I'irLtET :

Examen hz'sou' ? . 10 Perm du cou, région antérieure.

L'épiderme est mince, avec une forte couche cornée. Le plan

papillaire est peu épais, les glandes sébacées manquent et les

poils follets sont tout à fait rudimentaires, lés pelotons sudori-

pares sont peu développés. Les faisceaux connectifs du derme

et les cloisons qui circonscrivent le tissu adipeux sous-cutané

sont à peu près à l'état normal. La fibrillation des faisceaux

conjonctifs est seulement moins marquée dans les endroits où i

ces faisceaux sont épais, principalement autour des glandes su-

doripares, et les cellules sont en ces points plus étoilées qu'alen-

tour, mais on ne note nulle part l'aspect du tissu muqueux

vrai tel qu'il se trouve dans le cordon ombilical ; il n'existe

que des petits îlots péri-glandulaires. La graisse qui forme les

pelotons adipeux est très abondante et disposée d'une façon

qui rappelle tout à fait ce qu'on observe chez les nouveau-nés

130UIINEVILLE, Bicélre, 1889. 7

98 CLINIQUE.

très gras. - Le muscle sous-jacent est divisé par des travées

connectives assez fortes, riches en fibres élastiques.

Peau de la main. - Même aspect en général. Les glandes

sudoripares sont peu développées comme chez les nouveau-

nés et les très jeunes sujets. L'aspect myxoïde du tissu con-

jonctif est plus marqué dans les travées fibreuses du tissu

sous-cutané, surtout il leurs points d'entrecroisement.

Foie. - Il est uniformément gras commo un foie de poisson

ou d'animal engraissé, sans aucune systématisation, sans sclé-

rose de quelque nature que ce soit. Les cellules sont réguliè-

rement distendues par de grosses gouttelettes adipeuses.

Hein. - Il a l'aspect classique du rein d'enfant, avec les

lobules rénaux bien dessinés et la substance corticale très

développée ; on ne trouve pas de glomérules encore en voie de

formation sous la capsule. Il n'y a pas de lésions scléreuses,

mais toutes les cellules du parenchyme sont graisseuses, non

pas distendues comme celles du foie, mais infiltrées de fines

gouttes de graisse, et elles se colorent d'une façon intense par

la teinture d'orcanette.

Utérus et ovaire. - Comme il est habituel à cet âge, l'utérus

contient peu de fibres lisses, le col en est dépourvu. Les

ovules sont très peu abondants dans le stroma ovarien. A part

cette rareté des ovules, l'aspect et le volume des organes rap-

pellent ce qu'on constate chez les petites filles, de la naissance à

deux ans.

2° Cerveau. - L'examen a porté sur un fragment du cerveau

pris au milieu de la frontale ascendante droite et sur l'un des

lobes latéraux du cervelet, les coupes montrent un développe-

ment assez marqué des capillaires qui sont élargis ; les cellules

névrogliques sont relativement abondantes. La substance

blanche paraît parsemée de corps granuleux, mais cet aspect

est dû à ce que la myéline a été convulsionnée par suite du

long séjour de la pièce dans l'alcool. Le stroma névroglique

paraît nettement fibrillaire, surtout dans les portions les plus

superficielles de Fécorce. Les grandes cellules pyramidales et

les moyennes sont allongées ; beaucoup sont presque complè-

tement fusiformes, mais nulle part on ne constate de pigmen-

tation semblable à celle qu'a décrite M. Fletcher Beach, ni de

vacuolisation. Dans le cervelet la couche granuleuse est

extrêmement riche en cellules ; les grandes cellules de Pur-

kinje sont très nombreuses et ne paraissent pas non plus

altérées. En tout cas, elles ne sont pas pigmentées.

En résumé, il est difficile d'apprécier des altérations quan-

titatives des cellules pyramidales sur le cerveau d'un enfant

IDIOTIE llLYb01·;Ui : IIAT1;USU. 99

si jeune. Quant aux altérations qualitatives, elles sont très peu

marquéos. Les lésions des fibres à myéline dans la couche

corticale, dans les faisceaux descendants do la substance grise,

et dans la substance blanche, n'ont pu être étudiées à cause du

long séjour des pièces dans l'alcool.

Analyse d'une portion de la peau, faite par M. RÉQUIER,

pharmacien en chef de l'asile de Villejuif. Résultats pour

cent grammes de substance (1) :

100 CLINIQUE.

une arrière-grand'mère maternelle qui a succombé à un

cancer de la face ; une hémiplégie chez la grand'mère ;

la folie chez un arrière-grand-pèrc ; enfin la tuber-

culose chez le grand-père, un arrière-grand-père, un

oncle et une tante. Des deux côtés, le terrain était mau-

vais et tout pouvait faire prévoir un produit défectueux.

Les phénomènes de cachexie pachydermique : état

cireux de la peau, épaississement de la langue, des

mains et des pieds, et les caractères particuliers de la

voix ont été remarqués dès les premiers mois de

l'existence ; mais ce n'est qu'à huit mois, après des

convulsions, qu'on a noté la présence d'une hernie

ombilicale et le volume exagéré du ventre.

RESUME NOSOGR : 11'IIIQUE.

Synonymie. Idiotie crétinoïde. - Idiotie avec

cachexie pac/n/dernuque. Crétinisme sporadique.

- Pachydel'mie crétinoïde. - Idiotie myxoedé-

mateuse.

Causes. - L'idiotie myxccdémateuse est due à l'ab-

sence congénitale de la glande thyroïde. Parfois,

peut-être, est-elle aussi produite par des lésions pa-

thologiques de cette glande survenues durant les pre-

mières années de la vie. Quelles sont les circonstances

qui, dans les antécédents des parents, sont capables

d'expliquer ce vice de conformation ? C'est ce que nous

allons essayer de rechercher sans grand espoir d'arriver

à une solution précise. Malheureusement, en effet, la

tâche déjà ardue en elle-même est encore rendue plus

difficile par l'absence de renseignements suffisants dans

les observations de quelques-uns des auteurs.

La consanguinité n'a été relevée qu'une seule fois

et, dans ce cas, elle était compliquée d'alcoolisme chez

les deux grand'mères du malade, qui étaient soeurs.

Elle faisait défaut dans les 24 autres cas.

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 101

Les impressions vives, éprouvées par la mère durant

la grossesse et susceptibles de troubler la nutrition du

foetus, n'ont été consignées que dans 4 de nos 25 obser-

vations.

L'alcoolisme semble exercer une certaine influence.

M. Fletcher Beach l'a noté 2 fois sur 8. M. Langdon

Down attribue la maladie à l'intoxication alcoolique de

l'un ou des deux conjoints au moment de la procréation.

Nous ne l'avons trouvé mentionné que dans 3 de nos

observations et encore dans l'une d'elles il n'existait

pas chez les père et mère, mais chez les 2 grand'-

mères.

La tuberculose pulmonaire paraît jouer un rôle im-

portant. Nous l'avons rencontrée chez le père, la mère,

une soeur et une tante du malade de 1'OBSERVATION X

(le`' mémoire) ; - chez le père de deux autres (OBs. VI

et VII ci-dessus) ; - chez la mère d'un quatrième (O>3s. V

du 1 CI' mém.); chez une grand'mère et 8 oncles ma-

ternels (Cas. V ci-dessus) ; chez 1 bisaïeul, 1 grand-

père et plusieurs oncles ou tantes maternels (Of3s. VIII

ci-dessus). - Le cancer est cité chez les ascendants de 4

malades, etc. Les pères de 3 autres (OBS. IV, V et VIII

ci-dessus) ont été atteints de fièvres intermittentes.

Nous devons noter aussi l'existence d'une malformation

de l'un des bras chez le père du Pacha (Cas. VI du 1er mé-

moire) ; celle d'un éléphantiasis delà jambe chez le père

d'une autre malade(OBS. IV du2" mém.). Quant au goitre,

il n'est mentionné qu'une seule fois (OBS. VI, 1r mém.) et

encore s'agissait-il d'une cousine au quatrième degré. Nos

malades appartiennent tous à des pays où le goitre ne se

voit pas à l'état endémique. Enfin, dans les antécé-

dents de famille de la majorité des idiots myxoedéma-

teux sur lesquels nous possédons des renseignements

un peu détaillés, nous avons trouvé des névropathes en

grand nombre : aliénés, apoplectiques, hystériques,

migraineux, etc.

Sexe et nationalité. Des 25 malades dont nous

102 CLINIOUE.

avons l'observation, 10 appartiennent au sexe masculin

et 15 au sexe féminin. Sous le rapport de la nationa-

lité, ils se répartissent ainsi : 7 anglais, 1 belge.

2 espagnols, 14 français, 1 suédois.

Début. - D'une façon générale, il semble que tant

que dure l'alimentation lactée, les symptômes du

myxoedème échappent à l'attention des parents, soit

parce qu'ils sont absents, soit parce que, en réalité, ils

sont peu prononcés. Souvent, ils ne s'en aperçoivent

qu'après une fièvre éruptive, des convulsions ou un trau-

matisme. Mais, suivant nous, un ceil exercé peut les

constater dans le cours de la première année, sinon

dans les premiers mois de la vie.

Symptômes. - Un fait extrêmement frappant, c'est

que tous les malades atteints d'idiotie myxoedémateuse

ont entre eux la plus grande ressemblance : qui en a vu

un, les a vus tous. On est là, au moins jusqu'à présent,

en présence d'un ensemble de symptômes qui se montre

toujours identiquement le même.

Tous offrent un arrêt de développement intellectuel,

l'idiotie à des degrés divers, - et un arrêt de déve-

loppement physique, le nanisme avec des troubles

profonds de la nutrition.

La tête est en général volumineuse en arrière et

rétrécie en avant. Le front est bas, étroit et déprimé

latéralement. La fontanelle antérieure persiste, même

chez des sujets ayant dépassé la trentaine. Les cheveux

sont gros, rudes, semblables à des crins, d'une couleur

d'un brun ou d'un blond-roux, d'ordinaire abondants,

sauf en avant, au-dessus des tempes. Le cuir chevelu

est le siège d'une éruption eczémateuse qui résiste aux

soins de propreté les plus minutieux.

La physionomie exprime l'apathie, l'hébétude, la

laideur ; vue de profil, elle est encore plus hideuse, car

le prognathisme s'accuse davantage. Les paupières

bouffies, pâles, bleuâtres, cachant plus ou moins les

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 103

globes oculaires, sont atteintes de blépharite ciliaire.

Le nez est toujours camus, quelle que soit d'ailleurs la

forme du nez des parents. Les joues sont gonflées,

pendantes, comme tremblotantes. La bouche est grande,

Les lèvres, dont la portion cutanée est bleuâtre, sont

épaisses, l'inférieure souvent renversée. La langue,

augmentée dans toutes ses dimensions, se montre

presque toujours au dehors. Les dents, irrégulièrement

implantées, sont cariées ; la seconde dentition reste

incomplète ou ne s'opère qu'à un âge très avancé. Le

menton est petit, parfois même, on dirait qu'il a été

écrasé jusqu'au bord de lalèvre inférieure. Les oreilles

ne nous ont pas offert de malformations, mais elles sont

épaissies, d'une pâleur cireuse, d'aspect oedémateux,

sans conserver toutefois, ainsi que les paupières, les

mains, etc., l'empreinte du doigt qui les comprime.

Le cou est gros, court, et la tête semble s'enfoncer entre

les deux épaules. L'examen le plus attentif pratiqué sur

le vivant ne permet pas de découvrirla glande thyroïde.

Des masses pseuclo-liporzateuses, mal délimitées, par-

semées de ganglions légèrement hypertrophiés, s'ob-

servent constamment dans les creux sus-claviculaires,

dans les aisselles, quelquefois dans d'autres régions.

Le thorax offre d'ordinaire des déformations portant

sur les dernières côtes, déjetées en dehors, et la colonne

dorsale plus ou moins déviée. Le dos est voûté.

Le ventre, très gros, très large, rappelle l'aspect du

ventre des batraciens. Il existe à peu près toujours des

hernies soit ombilicales, soit inguinales. Le bassin est

rétréci.

Les organes génitaux sont, dans la plupart des cas,

sinon dans tous, arrêtés dans leur développement. Les

testicules paraissent descendre tardivement et restent

petits. Les grandes et les petites lèvres n'acquièrent

jamais les dimensions normales.

Les membres supérieurs et inférieurs sont gros,

courts et offrent d'habitude des incurvations rachU

104 CLINIQUE.

tiques. Leurs articulations sont parfois noueuses. Les

mains et les pieds sont souvent cyanosés, ramassés,

épais, présentent, en un mot, l'aspect pachydeT-

mique.

La peau, glabre, blanche, sèche, rugueuse, ichthyo-

sique par place, est chez tous le siège d'une éruption

eczémateuse assez étendue. A la face, elle est un peu

jaunâtre, cireuse, analogue, dans une certaine mesure,

à celle des cachectiques.

La digestion s'effectue d'une façon assez régulière.

Les troubles qu'on observe de ce côté, s'ils sont cons-

tants, sont d'ordinaire légers. L'appétit est très modéré ;

souvent ces malades ont de la répugnance pour la

viande. La mastication est insuffisante. Les selles sont

rares, la constipation habituelle, d'où la présence fré-

quente d'hémorrhoïdes.

La respiration chez beaucoup d'idiots myxoedé-

mateux est gênée. Ils s'essoufflent rapidement. L'haleine

est désagréable. Le pouls est petit, fréquent ; les ex-

trémités et les lèvres sont cyanosées. La température

centrale est;au-dessous du chiffre normal, d'où une vive

sensibilité au froid.

La sécrétion urinaire et la miction nous ont paru

normales. La sécrétion sudorale, au contraire, s'est

toujours montrée imparfaite. Jamais nous n'avons vu

nos malades suer, même au moment des plus fortes

chaleurs. Tous ont la voix rauque, aigre, stridente, en

quelque sorte pathognomonique-. Leur démarche est

pesante, accompagnée d'un balancement latéral, d'une

sorte de dandinement; ils ont la plus grande répu-

gnance au mouvement.

La puberté ne vient jamais. La barbe fait toujours

défaut ; il n'y a pas de poils sous les aisselles ni sur le

pénil. C'est tout au plus si on trouve, soit sur les grandes

lèvres, soit sur les côtés de la verge, un bouquet de

quelques poils. Les règles n'apparaissent pas ou se sus-

pendent après avoir paru une ou deux fois ; les seins

' IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 105

demeurent absolument rudimentaires ou sont peu volu-

mineux ; les appétits sexuels sont nuls ; l'onanisme, si

commun chez les idiots ordinaires, n'a été signalé chez

aucun de ces malades.

La sensibilité générale est normale. Il parait en

être de même de la sensibilité spéciale, autant du

moins que l'état intellectuel des malades permet d'en

juger. La parole est généralement très limitée. Un

seul de nos malades parle couramment.

Sous le rapport de l'intelligence, tous ces malades

relèvent de l'idiotie. Un seul pourrait être rangé parmi

les imbéciles (1). Chez aucun d'eux, toutefois, nous

n'avons observé les caractères de l'idiotie profonde, tels

qu'ils se rencontrent par exemple dans l'idiotie sympto-

matique de méningite, de sclérose ou d'un arrêt de dé-

veloppement congénital du cerveau. Ils n'ont pas de

tics, ne grimacent pas, ne se balancent pas, ne grincent

pas des dents, ne poussent pas de cris, n'ont pas de

salacité. Ils sont susceptibles d'attention, ils ont de la

mémoire à un certain degré ; ils deviennent propres,

apprennent à manger à peu près seuls, à s'habiller, se

laver. Leur caractère est doux ; ils semblent suscep-

tibles d'affection.

Maladies lrcltcul3r3rrl·Js.-Nous devons mentionner

les convulsions, l'érysipèle, la bronchite, les hémor-

1'houles et la chute du rectum. D'autres affections, qui

se montrent fréquemment chez les idiots myxoedémateux,

en constituent, à notre avis, plutôt des symptômes que

des complications ; telles sont les manifestations lym-

phatiques ou scrofuleuses (impétigo, eczéma, blépha-

rites, kératites, etc.), les déformations rachitiques, les

hernies, inguinales et surtout ombilicales.

(1) Il s'agit de Gr... (Emile), dont nous avons publié l'observa-

tion dans le compte rendu de Bicêtre pour 1886, p. 11 et dans les

Archives cle Neurologie 1886, tome XII, p. 145. Bien qu'âgé de

32 ans, la fontanelle antérieure persiste encore.

lOG CLINIQUE.

Maladies terminales. Les malades dont nous

avons réuni les observations ont succombé : 2 à des

érysipèles compliqués d'autres affections; 2 à des con-

vulsions; 4 à des congestions pulmonaires avec ou

sans bronchite ; 1 à une péricardile; 1 à une néphrite

interstitielle; 2 au marasme ( ? ). 1

Anatomie ET physiologie pathologiques. - Le fait

qui domine la situation c'est, à notre avis, l'absence

de glande thyroïde. C'est à lui que nous rattachons

non seulement l'idiotie, mais encore les modifications

de la voix, les manifestations scrofuleuses, les défor-

mations rachitiques, la persistance de la fontanelle

antérieure, le nanisme, etc. D'où il résulte que la glande

thyroïde exercerait une action très importante sur la

nutrition générale et en particulier sur 'celte du cer-

veau dont les circonvolutions ont un aspect gélatini-

forme rappelant celui du cerveau des nouveau-nés (1).

Le défaut d'action de la glande thyroïde se traduit

pour le système osseux parla persistance delà fontanelle

antérieure, le nanisme et les déformations rachitiques

(rachis, thorax, os des membres). En ce qui concerne la

peau et le tissu cellulo-adipeux, elle se manifeste par

des éruptions diverses, une coloration toute particulière,

le relâchement des anneaux ombilicaux et inguinaux,

une diminution de la fonction sudorale, un état de

mollesse spécial et une hypertrophie du tissu adipeux,

surtout dans certaines régions.

Le rôle capital que nous faisons jouer à l'absence de

la glande thyroïde trouve un appui dans la constatation,

à l'autopsie des adultes atteints de cachexie pachyder-

mique, de lésions sérieuses de la glande thyroïde et

dans l'apparition de tous les symptômes de la cachexie

pachydermique chez les sujets auxquels on a pratiqué

(1) Dans un certain nombre de cas d'idiotie, autres que l'idiotie

myxoedémateuse, nous n'avons pas trouvé d'autres lésions que cet

aspect foetal du cerveau.

IDIOTIE MYXOEDÉMATKUSE. ]07

la thyroïdectomie complète (myxoedème opéra-

toire) (1). Si dans le myxoedème des adultes et le

myxoedème opératoire, on n'observe pas des symptômes

physiques et intellectuels aussi accusés que ceux

qu'offrent les idiots myxcedémateux, c'est que la lésion

pathologique (cachexie pachydermique des adultes) ou

l'opération chirurgicale (myxoedème opératoire) inter-

viennent alors que le corps s'est développé, que les

circonvolutions cérébrales ont atteint leur volume nor-

mal et leur conformation régulière.

Enfin, la physiologie vient confirmer notre opinion

en montrant l'apparition de la cachexie pachydermique

chez les singes auxquels on enlève la glande thyroïde

(expériences de Horsley) et l'absence de cette maladie

chez les animaux auxquels on pratique la thyroïdectomie

en même temps qu'on greffe sous le péritoine des mêmes

animaux une glande thyroïde empruntée à des moutons

(expériences de Schiff) (2). w

En résumé, les faits fournis par la clinique médicale

et par la clinique chirurgicale, ainsi que les expériences

des physiologistes, nous paraissent confirmer la]3ai/io-

clénie que nous avons donné de l'idiotie myxoedématcuse.

Diagnostic. - L'idiotie est aisément reconnue et

ne peut être confondue avec aucune autre affection. La

lecture des observations que nous avons rapportées et

du résumé nosographique que nous avons tracé d'après

elles, montrent combien l'idiotie iii 9 xoedémiteuse

diffère des autres formes de l'idiotie : la présence chez

(1) Dans notre mémoire de 1886, nous avons consacré tout un

chapitre à la Cachexie pachydermique opératoire, et, les faits en

main, nous avons démontré que c'est à M..T. lteverdin, de

Genève, que revient le mérite de les avoir le premier signalés. Si

nous insistons sur ce fait, c'est parce que certains auteurs en attri-

buent la découverte à Kocher. Or, ce n'est que six mois après

M. Revcrdin (4 avril 1883) que ce dernier auteur a communiqué

son travail au Congres de chirurgie de Berlin.

(2) Nons avons donné un résumé des travaux de M. Horsley et

de M. Schiff, dans notre premier mémoire.

108 . CLINIQUE.

ces malades et leur absence chez les autres des symp-

tômes qui caractérisent la cachexie pachydermique

rend la tâche des plus faciles.

Mais où peuvent surgir les difficultés, c'est quand il

s'agit de distinguer les idiots myxoedémateux des cré-

tins. Personnellement, nous manquons d'expériences

sur ce point. Nos visites à l'asile de Saint-Robert, près

Grenoble, et à l'asile de Bassens, près Chambéry, ont

été infructueuses. Si nous y avons rencontré des idiots

et des imbéciles, nous n'y avons pas trouvé devrais

crétins. Nous sommes donc obligé de nous en rapporter

aux descriptions des auteurs et, dès le début, nous

sommes amené il constater que les éléments les plus

indispensables vont nous faire défaut. C'est qu'en effet

les auteurs sont loin de s'entendre sur ce qu'il faut en-

tendre par crétinisme et que, suivant la remarque de

l'un des savants qui ont le mieux étudié le crétinisme,

M. Baillarger, «l'examen microscopique, parait encore

entièrement à refaire (1) ».

La plupart des auteurs considèrent le crétinisme

comme une variété de l'idiotie (Pinel, Fodéré, Esquirol,

Georget, Rcesch, Massei, Stahl, etc.). D'autres, comme

Guggembuhl, Seguin, Ferrus, etc., regardent le créti-

nisme comme une maladie tout à fait différente de l'i.

diotie. « Au point de vue pathologique, écrit Ferrus,

les crétins sont tellement distincts des idiots qui se ren-

contrent au milieu des populations saines, qu'il est in-

dispensable de tracer entre eux une ligne de- démarca-

tion profonde et qu'il serait impossible de les confondre

dans une classification rigoureusement scientifique ».

Suivant lui, la principale différence consisterait en ce

que « il se développe chez les crétins une diatlzèse, une

cachexie, un état constitutionnel anormal, auxquels

toute l'économie participe, diathèse qui présente un

caractère si tranché et des traits tellement spéciaux

(1) Dict. encycl. des Sciences méd., art. Crétin, Crétinisme.

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE. 109

qu'il faut, de toute nécessité, la nommer Cl'ét111eüsC

pour atteindre et fixer la réalité (1) ».

Les crétins descendent toujours des goitreux; « la

très grande majorité d'entre eux ont un goitre très vo-

lumineux, qui, tantôt est congénital, tantôt ne se déve-

loppe que plus tard et qui, en général, prend un accrois-

sement plus considérable à l'époque de la puberté; il

est très rare qu'on n'en trouve pas de trace ».

Les idiots 1nyxoeclémateux ne proviennent jamais

de goitreux, autant que nous sachions; ils n'ont pas de

glande thyroïde et partant point de goitre.

« Bien peu de crétins, d'après la Commission Sarde

(p. 48), présentent la dégénération du tissu osseux,

comme cela a lieu pour les rachitiques ». Cette dégéné-

ration, au contraire, nous a paru fréquente chez les

idiots myxccdémateux.

Le crétinisme se rattache suivant Ferrus à des dispo-

sitions'générales de l'économie. M. Baillarger exprime

la même idée lorsqu'il dit que l'arrêt de développement

porte simultanément sur le cerveau et sur l'ensemble

de l'organisme. L'idiotie, au contraire, est due à des

lésions ou à un arrêt de développement du cerveau. A

cet égard, les idiots myxccdémateux pourraient être

rapprochés des crétins, car, chez eux, l'organisme tout

entier est atteint. Au dire de Ferrus, le crétinisme peut

être avantageusement modifié par le changement de

lieu, de régime et d'habitudes. Ces influences sont sans

effet dans l'idiotie myxoedématcuse.

Les crétins atteignent rarement la cinquantaine et

on ne cite que des exemples tout à fait isolés de crétins

arrivés à soixante ans ou au delà. Sous ce rapport, les

idiots myxoedémateux paraissent ressembler aux cré-

tins ; mais il convient de faire remarquer que cette ré-

duction de la durée de la vie est à peu près la règle

chez tous les idiots.

(1) Ferrus. Mémoire sur le Goitre et le Crétinisme ; Paris,

1851, p. 59.

1110 CLINIQUE.

Los vagues notions d'anatomie pathologique que nous

possédons peuvent être ainsi résumées : Ossification

tardive des os du crâne, persistance des fontanelles;-

dure-mère épaisse, adhérente; - augmentation du li-

quide céphalo-rachidion, cerveau asymétrique; - cer-

velet très petit, irrégulier, asymétrique; présence

d'un goitre, articulations grosses, colonne vertébrale

et membres déviés. Dans cette énumération que nous

empruntons à M. Baillarger, nous trouvons des lésions

qui se rencontrent également dans l'idiotie myxoedéma-

teuse ; la persistance des fontanelles, l'épaississement

do la dure-mère et les déviations rachitiques du rachis

et des membres. Par contre, le liquide céphalo-rachi-

dien n'est pas augmenté; le cerveau est symétrique;

le cervelet a un volume normal. Nous avons essayé,

dans le tableau qui suit, de résumer comparativement

les symptômes du crétinisme et de l'idiotie myxoedé-

mateuse.

Crétinisme.

Tête écrasée d'avant en ar-

rière, large à la base, rétrécie

vers le sommet, souvent asymé-

trique, d'où l'aspect d'un cône

irrégulier (Baillarger,). Les cré-

tins ne présentent généralement

pas de protubérance occipitale.

(Commission Sarde).

Cheveux épais, très fournis,

courts, presque toujours d'un

châtain sale. La calvitie ne se

produit guère chez les crétins et

leurs cheveux ne blanchissent

amais.

Idiotie mycoclémateiese.

Tête longue, écrasée du front

au verlex, large à la base et

carrée, asymétrique ; protu-

bérance occipitale offrant un

développement à peu près

normal.

Cheveux gros, rudes, longs,

bruns ou blonds roux, calvitie

partielle.

Peau de la face et du corps glabre.

Aspect trapu, ramassé, massif, lourd et épais.

Tête penchée sur l'épaule ou Tête penchée.

la poitrine.

Physionomie stupide, bestiale. Phys. apathique, bestiale.

Paupières oedématiées. Faux oedème des paupières,

des joues, des oreilles.

IDIOTIE 'i1Y.OEDÉâIATEIJSE.

111

Crétinisme.

Idiotie tTH/xoeuë)na<euse.

Nez épaté, lèvres épaisses, bouche cntr'ouvcrte, dentition tardive,

langue très volumineuse.

Strabisme fréquent, insensi-

bilité rétinienne. B1éph. ciliaire.

Oreilles écartées et épaisses.

Lèvre inférieure pendante.

Bave.

Mâchoire inférieure débor-

dant la supérieure.

Mastication nulle.

Pas de pseudo-lipomes des

joues, des creux sus-clavicu-

]aires, des aisselles, etc. ; pas

de cachexie pachydermique.

Cou très gros et très court ;

goitre.

Pas de strabisme; sensibilité

rétinienne. Bléph. ciliaire.

Oreilles parfois écartées,

jaunâtres, comme oedémateuses.

Rarement.

Non.

Non.

Mastication régulière.

Pseudo-lipome des joues, des

creux sus-claviculaires, etc.

Cachexie pachydermique.

Cou très gros et très court,

pas de goitre.

Thorax déformé.

Seins petits (crétine), volum.

et pendants (semi-crétines).

Ventre très gros et ballonné.

Organes génitaux rudimen -

taires (crétin) ; ou d'un volume

énorme (semi-crétin).

Membres inférieurs et supé-

rieurs disproportionnés , ex-

trêmement courts ou très longs,

décharnés, par points enflés et

déformés au niveau des articul.

Mains larges, doigts courts et

épais, ongles rudimentaires.

Pieds volumineux, plats ;

orteils déformés chevauchants

les uns sur les autres.

Surdité.

Odorat obtus.

Goût dépravé.

Sensibilité générale obtuse.

Indifférence à la température.

35 à 36°. Voracité très pro-

noncée. Salacité. Selles quoti-

diennes ou diarrhées. Gâtisme.

Salives et larmes abondantes.

Sécrétions urinaires nor-

males.

Absence de désirs vénér. (cré-

tin) ; Exagération ; Onanisme;

Absence de pudeur (semi-crét.).

Seins nuls ou petits.

Ventre très gros et très large,

hernie ombilicale non inguinale.

Organes génitaux en général

atrophiés.

Pas de surdité.

Odorat paraissant normal.

Goût normal.

Sensibil. génér. conservée.

Vive sensibilité au froid.

36°,5, 37°. Appétit médiocre.

Choix des aliments. Constip.

Propre,susceptil)le de le devenir.

Non.

Sécrétions urinaires plutôt

diminuées.

Absence de désirs vénériens,

pas d'onanisme, pudeur.

112 CLINIQUE.

Crétinisme.

Idiotie m¡j.\ : oedumateusc.

Rachitisme et Scrofule.

Dysenterie, gastro-entérite,

méningite, hydrocéphalie, affec-

tions convul., surtout cpilep. ;

congest. et apopl. cérébr., tu-

herculoses et iliect. du coeur.

Inaptitude à la marche. Etal

semi-paralytique ou paralyl.

Absence de besoins.

Sentiments affectifs nuls.

Non.

Marche lourde. Mouvements

lents; possibilité d'une marche

même assez longue.

Conscience des besoins.

Conservés.

Mémoire relativement développée ; caractère en général doux.

Amour de la solitude. Accès

de stupeur. Mutisme ou voca-

bulaire très restreint. Voix,

rien d'indiqué.

Non. Non. Vocabulaire res-

treint ou parole assez libre.

Voix aigre, rauque, stridente.

Pronostic. - Des 25 malades dont nous avons rap-

porté l'observation, 12 sont morts : 2 clans la première

année, 2 à cinq ans, 1 à sept ans, 1 vers douze ans, 1 à

quinze ans, i à dix-sept ans, 1 à vingt-quatre ans, 1 à

trente et un ans, 1 à trente-deux ans, le dernier à trente-

quatre ans. Il semblerait en résulter que les idiots myx-

oedémateux ont en général une vie très courte. Ajoutons

qu'ils sont susceptibles d'être sennsiblement améliorés.

Traitement. - Il comprend les moyens médicaux

et pédagogiques. Parmi les premiers, nous citerons

l'usage des toniques (fer, quinquina), des antiscrofuleux

(sirop antiscorbutique, de raifort iodé, huile de foie de

morue, etc.), les bains salés, l'hydrothérapie, la gym-

nastique.

Quant aux moyens pédagogiques spéciaux, ils em-

brassent en quelque sorte tous ceux que nous employons

dans l'éducation des idiots, depuis les exercices destinés

à apprendre à se tenir debout et à marcher, jusqu'à l'en-

seignement primaire et professionnel.

ENCEPHALITES CHRONIQUES DE L'ENFANCE

II.

Contribution à l'étude des lésions histolo-

giques de la substance grise dans les

encéphalites chroniques de l'enfance ;

Par A. P1LCJBT,

Interne des Hôpitaux, aide-préparateur d'histologie à la Faculté de médecine.

L'histoire des lésions chroniques de l'encéphale a

été très longue à établir au point de vue histologique

à cause des difficultés de technique que l'ou rencon-

trait d'une part et surtout à cause de la difficulté de

rencontrer un assez grand nombre de pièces compa-

rables; les malades étant presque tous hospitalisés

dans des asiles spéciaux. Aussi avons-nous été heureux

de pouvoir passer une année comme interne dans le

service de M. le Dl' Bourneville à Bicêtre et de pou-

voir, grâce à son obligeance, mettre à profit sa col-

lection où tous les cerveaux sont gardés dans un état

suffisant de conservation. C'est une partie du résultat

des recherches ainsi faites, que nous apportons au-

jourd'hui.

Nous ne parlerons que des lésions de l'enfance, et

BOUII11EVILLE, Bicêtre, 1889. 8

'114 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

parmi celles-ci, des plus accentuées, telles que la

méningo-encéphalite ou l'atrophie des circonvolu-

tions. Et parmi celles-ci nous laisserons de côté les

scléroses lobaires, les scléroses tubéreuses, étudiées

dans ces derniers temps par Bourneville et Brissaud,

Jendrassick et Marie, Pozzi, Richardière. Nous nous

sommes en effet attaché aux lésions qui laissent en

place les circonvolutions, et se traduisent à l'oeil nu par

les adhérences méningées plus ou moins fortes; l'amai-

grissement des circonvolutions ; leur état chagriné et

ratatiné, marronné, même, la présence de petits

kystes à leur surface et dans leur épaisseur.

Ces lésions se traduisent cliniquement par l'idiotie,

le gâtisme, les tics, les convulsions dans les premières

années de la vie et, très souvent, l'épilepsie dès quatre

ou cinq ans. C'est à ce type que peuvent se rattacher

le plus grand nombre des malades de Bicêtre.

Aussi, renvoyant aux descriptions classiques de

Falret, Delasiauve, Bourneville, pour la partie cli-

nique, nous nous bornerons à indiquer sommairement

le diagnostic du malade et son âge. Les observations

conservées à Bicêtre seront facilement retrouvées

avec ces renseignements; nous nous bornerons ici à

l'anatomie pathologique. Quelques-uns des examens

qui suivent ont, d'ailleurs, été publiés à la suite des

observations cliniques correspondantes dans les Bul-

letins de la Société anatomique.

Nous n'avons pas fait non plus un travail de topo-

graphie cérébrale; et cela pour deux raisons ; la pre-

mière et la plus importante c'est que les lésions étant

absolument diffuses, comme dans les démences où la

paralysie générale a son terme, une telle recherche

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 115

serait impossible; la seconde, c'est que tous les cer-

veaux du service du D1' Bourneville sont fixés dans

l'alcool, ce qui présente de grands avantages au point

de vue de la longue conservation des pièces et de leur

reproduction photographiques. Mais dans ces pièces, les

fibres à myéline de la surface de l'écorce et celles de la

substance grise ne sont plus décelables par les réactifs

ordinaires, chlorure d'or, ou hématoxyline de Weigert,

on ne peut donc faire l'étude des filets nerveux ; on est

réduit à celle de la substance grise en général, que

l'alcool fixe assez bien. Nous nous sommes assuré, par

un certain nombre d'examens comparatifs, que les cer-

veaux traités par l'alcool, bien que ne valant pas ceux

qui sortent des bichromates alcalins, permettent cepen-

dant l'étude de l'écorce, à part quelques points sur

lesquels nous reviendrons. L'alcool, comme les autres

réactifs, détermine deux réactions distinctes dans les

cellules pyramidales de l'écorce; les unes s'entourent

d'un large cercle clair; les autres se resserrent et se

contractent. Le rapport de ces deux ordres d'éléments

est un peu différent dans le traitement par l'alcool que

dans le traitement par le bichromate, les cellules va-

cuolisées seraient un peu plus abondantes. Mais tous

les cerveaux que nous décrivons, étant traités de même,

sont comparables entre eux.

Il est donc bien entendu que nous parlerons seule-

ment des encéphalites chroniques à petits signes ma-

croscopiques, et que dans ces cas nous envisagerons,

sans nous occuper de topographie, les lésions de

l'écorce grise seulement; celles du moins que nous

pourrons apercevoir, étant donnés les réactifs employés.

Les différents procédés techniques auxquels nous avons

416 ENCEPHALITES CHRONIQUES.

eu recours ont été les plus simples possibles; ils seront

indiqués chacun à sa place;

. N'ayant pas fait d'étude clinique, et apportant sim-

plement quelques faits, nous n'avons pas cru devoir

allonger par un historique ce mémoire; nous indique-

rons seulement à sa suite une liste des principaux ou-

vrages d'anatomie normale et pathologique dont nous

avons eu à nous servir; ce sont surtout, en pathologie,

les mémoires ayant trait à la paralysie générale pro-

gressive qui nous ont servi, cette maladie étant ac-

tuellement la mieux étudiée au point de vue anatomo-

pathologique, de toutes les maladies de l'encéphale.

Il ne nous reste plus maintenant qu'à exposer com-

ment on arrive à lire une coupe de l'écorce grise, et

c'est là un point d'une extrême importance. En effet,

sans repères précis, il est impossible de reconnaître

une lésion diffuse même étendue; et, ces repères, il

les faut chercher dans la structure normale de l'écorce.

On n'en peut trouver de comparables à l'espace porte

pour le foie, à la bronche centrale d'un acinus pour

le poumon, mais pourtant il est possible de se retrou-

ver assez bien dans les différentes couches de la subs-

tance grise, surtout si l'on emploie dès le début les

faibles grossissements. Nous indiquons tous ces détails

parce qu'ils peuvent avoir leur importance dans la

constitution d'une méthode d'examen de l'écorce, ce

qui manque actuellement.

On peut considérer l'écorce grise sous deux plans :

le premier parallèle à la surface des cironvolutions,

le second perpendiculaire au premier. Dans le pre-

mier plan, les couches sont étagées au nombre de

cinq, d'après le schéma donné il y a dix-huit ans par

LÉSIONS HISLOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 41Î

Meynert dans le manuel de Stricker. Malgré les tra-

vaux de quelques auteurs qui battent en brèche ce

schéma (Luys, Golgi), nous l'adopterons comme le

plus commode et le plus universellement adopté

(Bevan Lewis, Ch. Bastian, H. Clarke, Ranvier).

On sait, et nous le résumons ici d'après la psychia-

trie de Meynert, que les cinq couches de l'écorce sont

les suivantes : la première, composée du tissu fonda-

mental névroglique, avec ses éléments cellulaires,

parsemé de petites cellules nerveuses peu abon-

dantes, présente par le procédé d'xner (acide os-

mique et ammoniaque) de très fines fibres à myéline,

sans étranglements annulaires, d'après Ranvier. Ce

réseau de fibres est altéré dans la paralysie générale,

au dire de Tuczek, confirmé par les recherches sui-

vantes, celles de L. Edinger entre autres. Nous n'avons

pu rechercher cette lésion qui pourtant existe presque

à coup sûr dans les cas de méningo-encéphatite avec

adhérences. Cette couche est, surtout chez les jeunes

sujets, séparée de la suivante par une ligne de dé-

marcation extrêmement nette; nous verrons qu'il n'en

est pas toujours de même dans les faits que nous avons

regardés. Celle-ci est la couche des petites cellules

pyramidales qui sont serrées, à pointe dirigée vers la

surface corticale.

Dans la couche suivante, les cellules pyramidales

sont moyennes (40;a) elles ne sont plus serrées, mais

orientées en colonne, les unes au-dessus des autres,

parce que les faisceaux de fibres de la couronne de

Reil qui vont jusqu'à la couche supérieure s'inter-

posent entre elles et les séparent. Ces éléments font

place aune couche distincte, celle des grandes cellules

118 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

pyramidales; visibles surtout dans les régions motrices

et dans la corne d'Ammon où elles sont énormes,

mais existant dans toute l'écorce. Meynert ne fait

qu'une même couche de la zone des cellules pyrami-

dales moyennes et de celle des grandes cellules;

pourtant nous les avons séparées dans les descriptions

qui suivent, à cause de la grande hauteur de la cou-

che des cellules moyennes, qui occupe près du tiers de

la substance grise, et s'accroît encore dans le lobe occi-

pital par l'interposition d'une couche de cellules.

Puis viennent les quatrième et cinquième couches

de Meynert que l'on peut facilement réunir en une;

c'est la zone de transition entre la substance grise

la substance blanche, assez difficile à débrouiller à

cause de l'épanouissement des faisceaux de fibres et

de la substance blanche, qui s'écartent les uns des

autres à ce niveau pour pénétrer dans la substance

grise. Elle renferme à sa partie supérieure de petites

cellules rondes qui n'ont pas encore été comme les

cellules correspondantes de la même couche du cer-

velet divisées en deux espèces, c'est la couche gra-

nuleuse ; à sa partie inférieure des éléments fusi-

formes.

Voici donc l'écorce étagée pour nous. Mais ce n'est

pas assez pour la topographie des lésions; et il faut

pouvoir donner ces cinq nappes superposées dans le

sens vertical, pour diviser l'écorce en autant de

petites cases qui fourniront des points de repère fixes.

Pour cela, nous n'avons qu'à profiter de la disposition

normale des faisceaux de fibres qui montent dans la

substance grise, et qui s'aperçoivent très suffisamment

sur les pièces traitées par l'alcool. Ces faisceaux se

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 1119

divisent, au niveau de la cinquième couche, comme

ceux d'un goupillon d'église, et montent en s'amincis-

sant jusqu'à la deuxième couche. Ils forment autant

de colonnes fibrillaires qui séparent les éléments de la

substance grise, qui, eux, s'organisent naturellement

dans les intervalles en colonne de cellules; en voyant

leurs fibres aux faisceaux qui leurs sont contigus.

Cette disposition est plus marquée naturellement dans

la profondeur de la substance grise, là où les faisceaux

sont plus gros, et c'est pourquoi les grandes cellules

pyramidales se présentent souvent, comme l'a vu Betz,

en îlots, ou nids séparés les uns des autres par les fais-

ceaux blancs. Mais dans le sens de la hauteur, ces îlots ne

sont que le terme d'une colonnette de cellules rangées-

les unes au-dessus des autres et se continuant jusqu'à

la couche des petites cellules pyramidales. Dans les

couches superficielles, les capillaires pénétrant per-

pendiculairement à la surface de l'écorce ne troublent

nullement cette sériation longitudinale, ils l'accen-

tuent même puisqu'ils lui sont parallèles. On comprend

d'après cet exposé, qu'après l'examen d'un très petit

nombre de coupes, à l'aide d'un faible grossissement

qui permette d'avoir sous l'oeil toute l'épaisseur de

la substance grise, on la verra décomposé en un véri-

table quadrillage, formée par les plans .des cinq cou-

ches dans le sens horizontale, par la sériation des

cellules et les travées des faisceaux dans le sens ver-

tical. Il sera donc presque aussi aisé de préciser une

lésion diffuse et vague, caractérisée seulement par un

changement de couleur ou d'opacité de la névroglie,

qui l'est d'indiquer la place d'un pâté d'encre fait sur

une table de Pythagore. De plus, la disparition de

120 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

cette sériation dans le sens longitudinal indiquera soit

une diminution des faisceaux blancs, soit un morcel-

lement des couches, par un développement exagéré

des capillaires par exemple. Aussi avons-nous tenu

grand compte de cet aspect, que l'on nous verra souvent

indiquer. La seule chose qui le puisse troubler c'est

la présence de faisceaux blancs coupés obliquement,

mais leurs surfaces de section étagées se reconnaissent

facilement, et présentent toujours la même image.

Les premières observations que nous rapportons

sont relatives à des idiots de quatre ou sept ans; avec

les lésions de méllingo-encéphalite plus ou moins pro-

noncées. Les suivantes portent sur les idiots plus âgés

atteints de plus d'épilepsie vraie, la coexistence des

deux états est d'ailleurs fréquente. Enfin nous l'ap-

porterons une observation de sclérose -CI petits foyers

miliaires, chez un épileptique dément, et une de

kystes celluleux avec épanchements sanguins chez

un idiot; car ces lésions peuvent servir à établir une

transition entre l'atrophie de la substance grise que

nous étudions et les états plus marqués de kystes, et

de sclérose lobaires, de porencéphalies que l'on voit

également dans la catégorie de malades que nous

avons en vue.

Observation I. - Reb.... 487r-48SG, est un enfant qui à l'âge

de dix ans ne pouvait ni marcher,, ni parler, poussait seulement

des cris inarticulés passait ses journées assis sur une chaise ou

couché, ne pouvait manger seul, était gâteux, il présentait des

convulsions allant jusqu'à un véritable état de mal. 11 mourut

dans un de ces états de mal ; de broncho-pneumonie comme la

plupart des épileptiques. La congestion pulmonaire intense, le

long coma pendant lequel les malades respirent la bouche

ouverte, dans un air nosocomial sont sans aucun doute la canse

de la fréquence de cette broncho-pnenmonie. qui chez un autre

de nos malades mort dans le même cas présentait le caractère

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 121

hémorrhagique, avec un petit foyer gangreneux au centre de

chaque tache sanguine péribronchique, nous signalons ce fait en

passant, parce qu'il est comparable aux lésions expérimentale

des poumons déterminées par Traube, Schiff, etc., par la lésion

du bulbe et des pédoncules cérébraux, et parce que, récemment,

MM. Bianchi et Armanni ont signalé la même broncho-pneu-

monie, coexistant avec des lésions du pneumogastrique chez les

paralytiques généraux déments. La décortication des deux hémis-

phères fut assez facile; il existait quelques taches laiteuses de la

pie-mère ; un grand nombre de circonvolutions étaient étroites

et amaigries.

L'examen histologique a été fait au laboratoire des travaux pra-

tiques de la Faculté. Le cerveau avait été durci par l'alcool, la

moelle par le liquide de Millier; des coupes ont été faites en diffé-

rentes régions, tant à gauche qu'à droite, sur chaque hémisphère.

On s'est trouvé bien de passer quelques fragments trop mous du

cerveau dans de la gomme glycérinée et de les durcir ensuite à

l'alcool.

La première frontale gauche, à sa naissance, montre un certain

nombre de corps granuleux répandus dans la substance blanche

et qni se colorent en noir sur une coupe exposée aux vapeurs

d'acide osmique. On voit aussi de fines gouttelettes graisseuses

exister dans la substance grise. Sur des coupes colorées, on cons-

tate que la vascularisation paraît normale ; les cellules nerveuses

sont nombreuses, disposées en séries; beaucoup ont leur forme

pyramidale et des prolongements nets. En somme, les cinq

couches de la substance grise ne présentent pas des lésions

nettes; la substance blanche offre des lésions de désintégration.

Sur le milieu de cette première frontale gauche, la substance

blanche a le même aspect; les corps granuleux y sont nombreux

le tissu est sillonné par des bandes fibrillaires nombreuses qui

rayonnent dans la substance grise. Du côté de celle-ci, les lésions

sont les mêmes pour les cinq couches; la vascularisation est exa-

gérée; les capillaires au lieu de s'enfoncer tout droit dans la

substance grise s'y ramifient, la morcellent; l'aspect normal des

cellules nerveuses placées bout à bout n'existe plus dans les

couches moyennes; les cellules nerveuses, surtout dans la couche

de petites cellules pyramidales (2e couche de Meynert), sont

devenues rares ; pourtant les grandes cellules existent encore,

mais nulle part elles ne sont groupées par nids comme on les

trouve à l'état normal dans les régions motrices, ainsi que l'a

indiqué Betz; elles sont, au contraire, assez clairsemées. D'autre

part, les cellules interstitielles il petits noyaux sphériques ne pa-

raissent pas multipliées dans la substance grise, mais le sont évi-

demment dans la substance blanche.

La coupe d'une circonvolution du lobe occipital gauche à la,.

'122 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

face externe de l'hémisphère montre la substance grise un peu

réduite d'épaisseur, mais avec ses couches reconnaissables. Il

existe un certain nombre de foyers de désintégration assez pauvres

en cellules, où presque toute la trame de l'écorce grise s'est en-

levée avec les méninges, ou est tombée. Le réseau fibrillaire de la

névroglie y est apparent mais les mailles très larges de la né-

vroglie circonscrivent un grand nombre de vacuoles, d'espaces

vides, qui constituent de véritables pertes de substance. Ces foyers

interrompant la disposition des fibres nerveuses qui gagnent la

subslance blanche, comprennent en général les trois premières

couches de l'écorce. On les trouve dans la plupart des cerveaux

d'idiots; ils paraissent un début microscopique, de ce qu'ont décrit

MM. Bizzozero et Golgi sous le nom de porose cérébrale. Dans la

substance blanche, il n'y a que peu ou pas de corps granuleux,

mais une quantité considérable de petites cellules interstitielles.

L'hippocampe du côté gauche a les mêmes lésions que la pre-

mière frontale. Il existe des foyers de désintégration dans la

substance grise, des amas considérables de corps granuleux dans

la blanche. Les cellules géantes de la région sont éparses au

milieu de la névroglie, leurs dimensions sont au-dessous de celles

qu'on s'attend à rencontrer là; la ligne de grandes cellules du

corps bordant ne paraît pas altérée.

La lèvre inférieure de là scissure de Sylvius droite a aussi une

vascularisation très prononcée, beaucoup plus accusée que partout

ailleurs; les cellules interstitielles paraissent abondantes ; à part

cela l'aspect est le même que dans les régions motrices gauches.

La première frontale et le lobe occipital droits sont à peu près

semblables aux parties gauches sur les points correspondants. Sur

le cervelet, examiné du côté gauche, on trouve une raréfaction des

éléments nerveux de la couche des myélocytes, et un certain degré

de fibrillation de la substance blanche, parsemée de corps gra-

nuleux. il est assez difficile sur nos pièces de faire la distinction

entre les deux espèces de cellules de la couche granuleuse.

La moelle cervicale a ses parties symétriques, mais il y a dispa-

rition il peu près complète des cellules motrices dans les deux

cornes antérieures. Il existe encore des cellules nerveuses en

assez grand nombre dans les cornes postérieures.

Les cordons blancs de la moelle lombaire et les cornes anté-

rieures, qui sont symétriques, contiennent un certain nombre de

grandes cellules, relativement très peu abondantes, se colorant

mal par le carmin. Il y en a beaucoup moins encore dans les

cornes postérieures.

Sur des fragments du biceps gauche, on voit de l'épaississe-

ment des grosses travées conjonctives qui cloisonnent le muscle,

les petites travées ne sont pas modifiées. Les faisceaux muscu-

laires eux-mêmes ne paraissent pas altérés.

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 123

Nous voyons donc que dans l'encéphale, il existe une inflamma-

tion chronique (encéphalite) à différents degrés; dansla moelle. ,e

même processus parait plus avancé encore, et l'atrophie des élé-

ments nerveux portée très loin. Ces lésions sont générales et dif-

fuses. Il n'y a nulle part cette dégénérescence pigmentaire que

l'on observe à la période de tuméfaction des cellules dans la para-

lysie générale.

L'atrophie des circonvolutions et de la moelle résulte donc de

la condensation de la névroglie et de l'atrophie des éléments

nerveux eux-mêmes et est masquée en partie à l'oeil nu par la

prolifération scléreuse. Ce processus paraît s'être fait d'une façon

chronique pour l'ensemble et subaiguë sur certains points diffus; ce

qui coïncide avec laprédoiiiidance de quelques symptômes il gauche,

Malgré l'atrophie plus marquée du côté gauche du corps, il n'y

a pas de lésions en foyers à droile, ceci n'est pas rare dans les

cas semblables. D'ailleurs les deux hémisphères étaient égaux en

poids. Les lésions assez légères d'ailleurs observées du côté des

méninges, les adhérences de la pie-mère, sont beaucoup trop

faibles pour pouvoir rendre compte des phénomènes observés et

sont évidemment consécutives aux désordres de la substance

grise. (Bourneville et Pilliet, Soc. anat., 18().)

Disons un mot des lésions de la névroglie, pour

n'avoir plus à y revenir, On sait que, beaucoup moins

fibrillaire dans le cerveau que dans la moelle, elle l'est

surtout extrêmement peu en apparence chez le nou-

veau-né, où elle a presque un aspect laiteux, et chez

l'enfant. Pourtant ce que nous observons ici, c'est un

aspect plus opaque de cette névroglie, aspect plus

marqué en certains points, à la surface de l'écorce;

puis sur d'autres points on y perçoit nettement des

fibrilles, quoique la pièce n'ait pas été traitée par les

chromates, et ces fibrilles, assez épaisses, s'aperçoivent

surtout parce qu'elles circonscrivent des vacuoles plus

claires et forment un feutrage bien visible. Nous

sommes conduits par analogie d'aspect à appeler sclé-

reux ces foyers, bien qu'il n'y ait pas de tissu con-

jonctif véritable.

L'état actuel de nos connaissances sur la névroglie

124 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

normale n'est pas assez avancé pour que nous tentions

d'interpréter ces états et de les rapporter à des modi-

fications des cellules de la névroglie, nous nous bor-

nons à les signaler.

Le rôle des vaisseaux dans ces lésions déjà anciennes

paraît peu considérable. Nous verrous chez des idiots

plus jeunes qu'il n'en est pas toujours ainsi et que les

lésions sont plus marquées toujours autour des capil-

laires de l'écorce, quand on a constaté des adhérences

assez nombreuses.

OnSERVATION II. - L'enfant Endei-1., 1881-1886 présentait ce fait

rare d'alcoolisme chez un sujet Je quatre ans. On pourra se

reporter aux détails de son observation clinique, qui a été publiée.

Il était atteint de convulsions et d'épilepsie a accès rapprochés,

après avoir été bien portant jusqu'à trois ans. 11 était gâteux et

avait des accès de colère. Mort de diphthérie. A l'autopsie mé-

ninges très adhérentes au cerveau.

Examen histologique. a.). Lobe frontal de l'hémisphère gauche. -

Les méninges sont restées adhérentes sur les coupes ; et on les

voit constituées surtout par des vaisseaux très dilatés et remplis

de sang; les veines sont particulièrement énormes ; les capillaires

qui plongent dans la substance cérébrale sont aussi très gonflés

et parfaitement visibles, quelques-uns sont rameux.

Dans la substance grise, la couche superficielle de névroglie a

son épaisseur normale, peut-être les noyaux des cellules sont-ils

un peu plus abondants que chez un enfant sain du mme âge. La

seconde couche, celle des petites cellules pyramidales, présente

des altérations dans le nombre de ces éléments qui est extrême-

ment diminué et dans leur disposition réciproque.

Au lieu de former un mur de cellules serrées, visibles au pre-

mier coup d'oeil, elles sont assez dispersées, par groupes, de trois

à cinq, en sorte qu'on ne retrouve pas à un faible grossissement

l'aspect connu de cette couche, et qu'il en faut chercher les élé-

ments. Dans les deux couches suivantes, couche des cellules pyra-

midales moyennes et couche des grosses cellules, on observe, vu la

grosseur des éléments, des lésions plus nettes. Les cellules sont t

diminuées de nombre; en revanche les noyaux petits et sphé-

riques qui révèlent les cellules névrogliques sont augmentés et

dispersés. Les cellules au lieu d'être disposées en série régulières,

bout à bout, limitées par les fibres d'origine de la substance

blanche, présente ces mêmes séries morcelées par disparition de

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. -125 5

cellules intercalaires; en sorte qu'on ne voit que des groupes con-

tinus de plusieurs cellules en nombre assez restreint, ressemblant

à des capsules allongées de cellules de cartilage. Les cellules

situées à la limite des deux couches intermédiaires, aux grandes

cellules pyramidales et aux moyennes, présentent à son maximum

une altération dont on retrouve des états différents sur toutes les

couches. Elles sont d'abord gonflées, hyalines, avec une accumu-

lation considérable de granules jaune d'ambre autour des

noyaux ; puis restant toujours hyalines, elles sont beaucoup plus

petites, ont une forme en fuseau, et n'offrent pas de prolonge-

ments distincts. Enfin, à un troisième état, on ne voit qu'un

noyau sphérique, avec un petit amas de granules réfringents

autour de lui. La plupart des cellules susmentionnées, présentent

les différents degrés de cette altération avec cette particularité que

beaucoup des cellules que l'on voit dans un même champ du mi-

croscope, sont à peu près au même état; tandis que, plus loin, on

rencontre des groupes de cellules à autre état. Les capillaires dans

ces deux couches sont ramifiés et dilatés, mais leur développe-

ment n'est pas excessif.

Dans la couche suivante de la substance grise et dans la subs-

tance blanche, ce qui domine c'est l'accumulation des noyaux des

cellules interstitielles. Il n'y a qu'un petit nombre de corps granu-

leux. En résumé, on constate la congestion vasculaire, la multi-

plication des cellules de la névroglie et la disparition des cellules

nerveuses, disparition qui nous est expliquée par les différents états

aboutissant à l'atrophie que l'on peut observer sur les coupes.

Sur une coupe du lobe pariétal, les lésions sont absolument du

même ordre, mais plus avancées, et paraissent avoir marché du

centre à la périphérie. En effet, si nous reprenons l'étude des

couches en sens inverse, nous voyons d'abord la substance blanche

très vascularisée et présentant les figures connues sous le nom

d'éléments araignées. La couche intermédiaire, couche des fibres

arquées, et la couche des grandes cellules pyramidales ne se com-

posent plus que de faisceaux fibrillaires descendants avec de

nombreuses cellules interstitielles, et c'est dans la couche des

cellules pyramidales moyennes que l'on retrouve l'évolution des

lésions cellulaires telles que nous venons de l'indiquer. Au-dessus,

la sériation des cellules a tout à fait disparu. La couche la plus

superficielle de la substance grise a été en partie enlevée avec les

méninges, surtout aux points de pénétration des capillaires.

Sur une coupe du lobe occipital, une portion assez considérable

de substance grise a été enlevée avec la pie-mère, ce qui en

reste présente une diminution portée à l'extrême des éléments

pyramidaux. A la limite de la substance blanche, l'accumulation

des noyaux petits et sphériques des cellules interstitielles est très

marquée. Dans les portions périphériques, au contraire, les élé-

126 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

ments cellulaires sont rares et dispersés au milieu d'un tissu

cellulaire abondant.

b). Cervelet, hémisphère droit, rien à noter. Les cellules de

Purkinje, sont admirablement conservées. En résumé, les lésions

paraissent plus marquées sur les régions postérieures de l'hémis-

phère et se composent toujours des deux mêmes éléments, sclérose

interstitielle et lésions des cellules pyramidales, évoluant parallèle-

ment.

c). Moelle cC1'Vico-dol'sale. - Les cordons blancs sont symétri-

ques ; dans la substance grise, tuméfaction hyaline assez peu

accentuée dans les cellules des cornes antérieures; les cornes sont

égales; le canal de l'épendyme est intact.

d). Moelle lombaire. - Même aspect, congestion intense des

méninges (Bourneville et Banmgarlen, Soc. anatomique, 1888).

Les lésions, dans ce cas, étaient bien celles de la

méningo-encéphalite; presque tout le,cerveau, après

décortication, présentait un aspect tomenteux et irré-

gulier ; une portion assez épaisse de la substance grise

avait été enlevée avec la pie-mère. Les lésions de

l'écorce étaient pourtant fort semblables à ce qu'on

voit avec une adhérence moins forte des méninges.

On est ainsi porté à croire que la pièce examinée pré-

sentait des accidents à leur début; ce qui concorde

avec l'observation clinique. On peut donc ainsi saisir

le stade de néoformation vasculaire, dont l'adhérence

méningée est la preuve. En effet, c'est, comme nous

l'avons vu, parce que les vaisseaux sont épaissis et

rameux qu'ils enlèvent avec eux des portions de

l'écorce. Ce malade était non seulement idiot, mais

épileptique, ce qui s'accorde encore avec une lésion

active, en pleine évolution, déterminant une irritation

assez forte.

On a dit que les vaisseaux paraissaient plus nom-

breux à cause de l'atrophie du cerveau. C'est pour la

paralysie générale que cette opinion a été émise,

quoique cette atrophie soit réelle; et il suffit de corn.

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. Il -) -i

parer le cône restreint de substance blanche qu'on

voit sur les coupes de la circonvolution dans ces cas

et dans les cas normaux pour la constater; le réseau

vasculaire tel que nous l'avons vu et fait dessiner

nous paraît en grande partie néoforme.

Observation III. - Voici maintenant un cas d'idiotie avec

induration du cerveau, dans lequel la mort a été précoce; il

n'y avait pas d'altération de la moelle.

Pruvo..., 1877-1885. Idiotie complète, excès de boisson du père,

mère nerveuse, quatre frères et soeurs mortes de convulsions.

Premières convulsions à six mois, secondes à neuf; puis con-

vulsions tous les mois jusqu'à quatre ans. Succion, gâtisme, etc.,

mort à huit ans; à l'autopsie, induration des hémisphères; les

lésions étant semblables, l'examen n'a porté que sur le côté droit.

Examen histologique. - Coupe d'une circonvolution prise dans le

lobe frontal. - La substance grise est très mince ; on n'y retrouve

qu'avec peine des traces de sériation des éléments soit parallèle,

soit perpendiculaire à la surface de l'hémisphère; quelques foyers

opaques, peu abondants dans les couches superficielles. Dans les

inférieures, rareté des grandes cellules, abondance d'éléments

sphériques de moyen volume, groupés par quatre ou six, nom-

breuses petites cellules dans la substance blanche; vascularisation

relativement peu développée.

On a peine à retrouver une cellule nettement triangulaire dans

n'importe laquelle des couches de la substance grise. - Coupe au

niveau du lobule paracentral. La vascularisation est plus marquée

et morcelle le tissu. La première et la seconde couche ne se peu-

vent distinguer, il n'y a pas de transition nette entre les deux. De

temps en temps existe un groupe de cellules rondes, peu nom-

breuses, sans épaississement de la névroglie, puis des amas plus

volumineux autour desquels le réseau devient opaque, et, par

places des foyers dans lesquels le centre se parsème de fines

vacuoles. L'infiltration de toute la substance grise par les élé-

ments sphériques est nettement accusée. Les cellules des couches

profondes sont groupées par petits îlots, comme dans le lobe

frontal ; même rareté des éléments pyramidaux ; cependant on en

retrouve quelques nids, mais elles sont petites et effilées.

La substance blanche est toute parsemée de corps granuleux;

les espaces périvasculaires très dilatés.

Dans une circonvolution prise sur le lobe occipital, les foyers de

désintégration à centre vacuolaire sont assez étendus pour

qu'on les distingue à l'oeil nu sur les coupes. Ils s'étendent jus-

qu'à la substance blanche. Le centre est occupé par un réseau

128 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

à mailles très lâches, à grands interstices. Ces petits points

apparaissent donc comme des taches sombres semblables aux glan-

des qu'on voit sur la coupe d'un zeste de citron ou d'orange, quand

on pratique une section nette de la circonvolution. Ils sont au

contraire réservés en blanc sur les pièces colorées. Autour d'eux,

la sériation longitudinale, est assez bien conservée; mais les

cellules du parenchyme sont très petites, d'ailleurs l'épaisseur du

revêtement gris est très faible.

La substance blanche offre l'aspect d'une véritable émulsion de

myéline. Cet état, dû à la macération de la pièce dans l'alcool

empêche qu'on juge des lésions qu'elle peut présenter, même sur

les pièces dégraissées aux essences et montées au baume de Canada.

Dans le cervelet, la couche névroglique est très aplatie, son

réseau se voit fort bien, les mailles en étant espacées par un infil-

trat qui devait être assez abondant, à en juger par les vacuoles que

présente cette couche. Les cellules de Purlunje sont rares et très

espacées les unes des autres. Les myélocites sont aussi très peu

serrés dans la couche suivante. 11 existe quelques corps granuleux

dans la substance blanche.

La moelle cervicale ne présente pas d'asymétrie ni de sclérose de

la substance blanche, les cornes prises sont régulières, leurs

colonnes cellulaires, surtout les antérieures et la colonne de Clarke

sont bien conservées et présentent des cellules nettes avec pro-

longements normaux. L'épendyme est régulier, son épithélium

est en place.

Dans la moelle dorso-lombaire, il n'y a non plus rien à noter;

l'épendyme est doublé d'une gaine de cellules polygonales; les

cellules sont normales et les tubes sont sains tant la moelle que

dans les racines coupées avec elle.

Ainsi, avec des lésions étendues de la convexité

des hémisphères, nous trouvons une moelle relative-

ment saine; donc on peut supposer que les lésions

diffuses, si avancées parfois, que l'on trouve dans la

moelle en d'autres cas, ne sont consécutives qu'à l'alté-

ration lente de l'encéphale. Les lésions de la convexité

sont ici très marquées, l'idiotie était profonde, et les

convulsions étaient précoces et fréquentes.

Notre maître, le Dr Bourneville, pense qu'il faut

faire jouer un grand rôle dans ces cas à l'asphyxie des

nouveau-nés, comme cause de l'idiotie. Nous ne dis-

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 129

cuterons point ici la pathogénie des lésions, mais le

nombre des apoplexies des nouveau-nés est si consi-

dérable dans les autopsies des maternités que cette

opinion nous paraît très plausible. On peut voir sur

ce sujet la thèse du Dl' Hutinel, élève cle Parrot, qui

plaide aussi en ce sens.

Observation IV. - Chez un autre idiot de cinq ans : Faur...

(t879-i884) atteint d'idiotie complète avec épilepsie, et fils d'un

alcoolique, on trouva de l'hydrocéphalie partielle. Les convulsions

avaient débuté à quatre mois, suivies d'un véritable état de mal

convulsif. On trouve de plus notés des cris, accès de colère, etc.

Examen histologique. Coupes du lobe paracentral droit. Les

couches de la substance grise ne sont pas distinctes les unes des

autres; elles ne sont pas encore dessinées, et, à ce point de vue

ce cerveau ressemble à celui d'un nouveau-né. Mais il en diffère

par la rareté des éléments cellulaires étoiles qui sont grêles

et allongés, alignés sur des files qui ne comprennent qu'un seul

rang de cellules mises bout bout, au lieu d'offrir des colonnettes

cellulaires où les éléments se trouvent abondants et côte à côte.

Il existe un certain nombre de foyers plus opaques, plus abon-

dants en noyaux, dans la première et la seconde couche. Sur

quelques-uns on voit nettement un vaisseau occuper le centre de

l'amas. Les dilatations vasculaires sont très nombreuses; les

petits amas de cellules rondes sont abondants entre la première

et la seconde couche, constituant le premier degré de l'altération

en foyer. Ils sont enveloppés d'une atmosphère névroglique plus

opaque, et paraissant plus épaisse que celle qui l'entoure dans

l'épaisseur des couches, on peut voir çà et là quelques rares cel-

lules à contour peu distinct, à noyaux multiples. La paroi des

vaisseaux parait sur certains points épaissie, mais il n'y a pas

d'accumulations de leucocytes dans les gaines. La substance

blanche présente un très grand nombre de corps polycycliques,

réfringents, ressemblant à des corps amyloïdes et qui paraissent

résulter de la fusion d'anciens corps granuleux.

Dans le lobe paracentral gauche, on constate des lésions exac-

tement semblables.

L'hippocampe gauche a été examiné aussi; il présente des

lésions beaucoup moins avancées que la convexité; les sériations

longitudinales s'y peuvent distinguer il existe seulement une

vascularisation rameuse assez développée; les grandes cellules

pyramidales de la région sont petites et entourées de myélocytes.

La moelle cervicale présente une disparition à peu près com-

l3ormevu.t.e, ¡¡idll'e, '188\1. y

130 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

plète des deux groupes latéraux de la corne antérieure. Le

groupe antérieur de cette corne ainsi que la colonne de Clarke

sont conservés. Cette lésion est symélriquc. La partie du faisceau

latéral comprise dans la concavité des cornes est légèrement

sclérosée, il n'y a rien de plus à noter dans la substance blanche

que des espaces étoilés dépourvus de tubes nerveux, assez nom-

breux dans les cordons postérieurs. Les cellules des cornes posté-

rieures sont très rares. Le canal de l'épendyme est rempli par une

substance grenue où se trouvent en assez grande abondance des

cellules rondes. Le revêtement épithélial est incomplet, ses cel-

lules sont aussi sphériques. Les deux vaisseaux qui accompagnent

le canal sont petits et entourés d'une gaine hyaline assez épaisse.

Les deux substances sont parsemées de corps granuleux. Sur un

fragment de muscle avec son nerf, pris à l'avant-bras, on constate

un fort épaississement du périnèvre; la gaine lamellaire et les

cylindres-axes sont nurmaux; il en est de même des faisceaux

musculaires, qui, sous les coupes transverses, sont serrés et sans

sclérose interstitielle. On note seulement une dillérence de

volume et de réfringence de leurs tubes semblable à celle qu'on

observe sur les jeunes sujets, dans la langue du nouveau-né, par

exemple. On observe en assez grand nombre les figures signalées

par M. Babinski en 1886 (Soc. biol.), des fibres musculaires jeunes

se montrent enveloppées d'une gaine lamellaire absolument sem-

blable à celle des nerfs. Il nous a même semblé en voir côte à

côte avec des tubes nerveux dans la même gaine ; mais nous ne

pouvons l'affirmer eu l'absence de préparations à l'acide osmique.

Nous trouvons donc toujours la même lésion de

l'écorce se produisant toujours au même point; de

plus, ici, les lésions delà moelle existent, portant sur

les cellules nerveuses elles-mêmes, avec très peu de

lésions de la conductibilité. Les symptômes d'idiotie

complète concordent avec les lésions diffuses de la

convexité, comme dans nos autres cas. Seulement ici,

l'examen comparatif de cerveaux de nouveau-nés

nous a été utile pour préciser les lésions, à cause de

l'âge peu avancé du sujet; de même que dans le

cas suivant :

Observation V. - Pauguu... (Charles), 1880-1883; grand-père

maternel alcoolique ; mère nerveuse; frères morts de convulsions;

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. '1 ;-11

convulsions à six semaines, rougeole, tubercules ; idiotie com-

plète.

A l'autopsie, un certain degré d'hydrocéphalie, épaississe-

ment et adhérences des méninges par places; état chagriné des

circonvolutions.

Examen histologique. Coupes faites a la convexité. L hémis-

phère droit était plus atrophié que le gauche. Du côté droit, vas-

cularisalion ramifiée assez marquée; les grandes cellules pyrami-

dales, peu nombreuses, sont à peu près les seuls éléments,

caractéristiques que l'on retrouve dans la hauteur des couches. La

substance blanche présente une grande quantité de corps amyloïdes

très volumineux, qui se colorent assez fortement par l'héma-

toxyline et restent entièrement incolores par le carmin.

L'aspect est à peu près semblable sur les coupes prises dans

l'hémisphère gauche, on ne voit que de l'atrophie simple, sans les

taches de désintégration que nous avons si souvent retrouvées.

C'est donc un exemple de l'atrophie simple, ou

plutôt du non-développement, sans taches de dégéné-

rescence ; soit qu'elles n'existent plus, soit que le

processus d'atrophie ait été différent, ce que nous ne

pouvons savoir à cause du très jeune âge du sujet.

Notons que chez les nouveau-nés, sur des coupes

faites pour pouvoir comparer les deux états, la limite

entre la première et la seconde couche de l'écorce est

toujours très marquée, celle-ci bien nette et riche en

cellules, ainsi que les suivantes, comme chez les ani-

maux jeunes, chien, chat, lapin, cobaye; les éléments

vont seulement diminuant de nombre vers la qua-

trième couche de cellules de l'écorce grise :

oI35t·.1r1' : \TIUN VI. - Assas..., 1870-1884. Idiotie congénitale

complète. Père alcoolique, balancement antéro-laléral, grince-

ments de dents fréquents, accès de colère, cris diurnes et noc-

turnes, parole nulle, gâtisme, diarrhée habituelle.

Examen msTOLOCI«E. - Coupe au niveau de la première fron-

tale droite. - Vascularisation rameuse très développée dans les

couches superficielles de la substance grise ; beaucoup de foyers

de désintégration assez étendus; quelques-uns sont même formés

le long des vaisseaux dans la partie profonde de l'écorce. Les

132 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

espaces péri-vasculaires sont dilatés; les gaines infiltrées de corpus-

cules de Glùge, surtout dans la substance blanche. Les cellules

pyramidales ne sont serrées que par place, elles sont peu nom-

breuses et de petit volume. La substance blanche est toute infiltrée

de petites cellules rondes, disposées par places en petits amas

miliaires assez bien circonscrits. Elle présente un grand nombre

de corpuscules de Gtuge et de corps amylacés, irréguliers, volu-

mineux. Les plus gros sont creusés d'une cavité remplie de

leucocytes.

Les coupes au niveau du lobule paracentral montrent les mêmes

lésions plus avancées, les foyers de désintégration forment des

taches grises occupant toute la hauteur de la substance grise

dans les intervalles qu'ils laissent entre eux, elle offre les mêmes

caractères que ci-dessus.

Dans le lobe occipilal, l'état est le même. Il existe autour de

beaucoup de vaisseaux des taches opaques formées d'amas de

cellules dont les noyaux sont très gros et dont les corps cellulaires

ne paraissent pas distincts les uns des autres.

La moelle cervicale examinée après coloration au picro-carmin

et montage au baume présente des lésions diffuses très mar-

quées dans la substance blanche. Il existe de véritables plaques à

contour irrégulier, foncées, formées de tissu scléreux, contenant

pourtant des tubes par endroits, ces plaques occupent tout le

cordon postérieur et toute la partie des cordons anléro-latéraux

comprise dans les concavités antérieure et latérale de la moelle

grise. Dans celle-ci, les îlots cellulaires sont isolés, peu nombreux

en avant, les cornes postérieures n'offrent qu'une très faible

quantité de cellules. Les parois vasculaires sont épaissies.

On voit que les cerveaux d'idiots donnent un cer-

tain nombre de résultats comparables. Mais ces résul-

tats ne sont pas spécifiques, car dans l'idiotie avec

l'épilepsie, ou dans la démence épileptique, nous les

retrouvons, coïncidant il est vrai, avec les mêmes

lésions d'atrophie et d'état chagriné à l'oeil nu.

L'atrophie et l'état chagriné des circonvolutions se

retrouvent dans l'observation suivante :

Observation VII. - Beno..., né le 3 mai 1873, mort le 12 février

1884. A quatre ans, premiers vertiges, accès d'épilepsie à cinq

ans, gâtisme à la même époque, déchéance intellectuelle à partir

de cinq ans et demi. Salacité, conjonctivite purulente, varioloïde

en 1881.

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 133

A l'autopsie, on constate que l'épilepsie est symptomatique

d'une atrophie considérable de l'hémisphère droit du cerveau et

de l'hémisphère cérébelleux gauche, atrophie caractérisée par un

amaigrissement profond des circonvolutions.

Examen histologique. Coupes du lobe frontal droit. La pre-

mière couche est très réduite, composée d'un réticulum fin où les

noyaux de cellules sont rares. Entre cette couche et la seconde

existe une bande sombre, régnant tout le long des circonvolutions

coupées et présentant çà et là des points plus épais, lesquels

déterminent de véritables taches grises, visibles à l'oeil nu par

transparence. Cette bande empièle sur la couche des petites cel-

lules pyramidales qu'elle remplace par endroits entièrement,

débordant sur la troisième couche de l'écorce. C'est une nappe

uniforme composée d'un tissu névroglique plus serré, à trame

plus fine, qu'au-dessus, les noyaux cellulaires petits et fixant éner-

giquement les colorants y sont abondants, dispersés par petits

groupes, mais toujours espacés les uns des autres. Les vaisseaux

sont dilatés. Cette bande tranche très visiblement sur les coupes.

Elle interrompt entièrement la sériation des cellules en colonnes

longitudinales. Cette sériation reparaît au-dessous. Les cellules

sont abondantes, surtout les éléments nucléaires et fusiformes; il

y a peu d'éléments pyramidaux. En beaucoup d'endroits, sous la

nappe de remaniement indiquée, les colonnes longitudinales ne

se reproduisent pas et l'on a des îlots irréguliers, circonscrits par

les vaisseaux dilatés et pauvres en cellules, jusqu'au contact de la

substance blanche, où les noyaux sont abondants.

Il existe des corps granuleux se colorant par ]'bématoxyline et

non par le carmin : tous les espaces périvasculaires sont très

marqués, et cette dilatation se retrouve sur les pièces montées à

la glycérine.

Coupes du lobe occipital gauche. - Il présente aussi de l'amai-

grissement des circonvolutions. La limite entre la première et la

seconde couche de l'écorce n'est pas nette; il existe là une bande

diffuse intermédiaire aux deux couches et riche en noyaux. Mais

elle est beaucoup moins marquée que dans les préparations précé-

dentes. Le ruban gris de Vicq-d'Azyr constitué par une accumu-

lation de petites cellules rondes dans les colonnettes cellulaires,

entre la couche des cellules moyenne^ et la couche des grandes

cellules, se voit nettement. Les cellules pyramidales sont fort dis-

tinctes, surtout dans les préparations colorées au picro-carmin et

au vert de méthyle. Il n'y a pas d'infiltration embryonnaire au-

tour des vaisseaux.

En somme, on voit que le tissu pathologique siège

entre la première et la troisième couche de l'écorce,

l : -3S \. ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

en général , qu'il débute entre la première et la se-

conde, qu'il est caractérisé par la dilatation des vais-

seaux, l'aspect plus serré et plus opaque que prend le

réseau névroglique, le plus grand nombre de petits

noyaux et la disparition des éléments parenchymateux

normaux. Il détruit l'harmonie des couches et les

atrophie d'une façon inégale, puisque ses prolonge-

ments vers la substance blanche sont irréguliers. De

là l'aspect chagriné du cerveau.

Observation VIII. - Schad..., 4864-1886, est un idiot épilcp-

tique, qui a eu une période d'amélioration, a appris à parler, puis

est tombé dans la démence la plus profonde à la suite d'accès

répétés, jusqu'à soixante par jour. Les lésions que présente ce

dément, fort jeune il est vrai, ne diffèrent pas sensiblement de

celles qu'on trouve chez les idiots ordinaires. Mort de broncho-

pneumonie gangreneuse diffuse, consécutive à un état de mal.

Examen HISTOLOGIQUE. - Hémisphère droit, coupe d'une cÍ1'con¡;o-

Il/lion frontale. - Toute la substance grise est prise en nappe,

toujours au même point, au niveau des trois premières couches et

présente à ce niveau trois ordres de lésions qui se succèdent irré-

gulièrement sur les coupes. Ce sont, d'abord, l'épaississement de

la névroglie et l'accumulation de cellules en îlots circonscrits au-

tour des vaisseaux ramifiés, ensuite l'aspect aréolaire de la névro-

glie, par minces bandes, puis la formation de foyers d'inégal

volume, ayant ce même aspect plus accusé encore. Les couches

suivantes sont infiltrées d'un grand nombre de petites cellule-,

mais les cellules pyramidales sont entièrement disparues. Les

vaisseaux présentent un epaississement parfois énorme de leur

tunique qui devient hyaline, réfringente et ne se colore que fai-

1>lement par les réactifs; ils sont entourés presque tous d'une

atmosphère de corps granuleux à partir d'un certain volume.

On retrouve les mêmes désordres dans les régions motrices, dans

le lobe occipital. Là toutefois, elles sont moins accentuées, et ce

qui se présente le plus souvent, ce sont les taches opaques, riches

eu noyaux sur le pourtour des vaisseaux. Nous avons fait dessiner

une des plus petites (fl ? 2) et un coup d'oeil sur la figure fera

mieux comprendre qu'une description le siège et l'aspect de cette

lésion.

Dans le cervelet, les éléments de Purliinjc sont assez nombreux,

il n'y a pas de corps granuleux.

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. 135

Observation IX. - Le malade suivant nous présente la coexis-

tence de l'aspect dit foetal ou gélatiniforme, et de. l'aspect cha-

griné des circonvolutions. Vautr... 481-i883. Epilepsie avec tour-

noiements, vertiges, secousses, idiotie, parole presque nulle,

gâtisme; mort par obstruction du larynx par un morceau de

viande. A l'autopsie, aspect foetal du cerveau; arrêt de développe-

ment, atrophie et état chagriné de la partie postérieure de l'hé-

misphère droit.

Examen histologique. Coupes du lobe frontal droit, état géla-

tiniforme. Picro-carmin et bleu de méthyle. La vascularisation est

très développée, les cellules pyramidales globuleuses; autour d'elle

existe une largo zone claire, même sur les pièces qui, a dessein,

n'ont fias été montées dans le baume de Canada. Il n'y a pas

d'infiltration embryonnaire récente, mais seulement un grand

nombre de corpuscules amylacés.

Coupes du lobe occipital, atrophié. Même vascularisation ; l'espace

comprenant la deuxième et la troisième couche des cellules de la

substance grise présente de place en place des lâches grisesde névro-

glie aérolaire qui expliquent l'affaissement de la circonvolution

et l'état chagriné de la surface. Ces lésions sont à leur maximum

au sommet de la circonvolution. Sur une coupe comprenant deux

circonvolutions on voit, en effet, quelles sont très peu marquées

des deux côtés du sillon et dans son fond. Les vaisseaux dans leur

gaine et la substance blanche présentent l'infiltration de corps

granuleux que nous avons si souvent mentionnée.

Observation X. -Gouell..., dix-huit ans, mort en 1884, atteint

d'épilepsie vertigineuse et d'hémiplégie droite, présente à l'au-

topsie un arrêt de développement des deux lobes frontaux, et de

la méningo-cncéphalite chronique disséminée assez marquée pour

que la substance grise se décortique en totalité sur quelques

points, avec les méninges.

" EXAMEN histologique. - Sur les coupes prises au niveau d'une

circonvolution de l'hémisphère droit et traitées successivement

par le picro-carmin et le vert de méthyle, on voit une infiltration

lymphoïde marquée de la gaine des vaisseaux, chacun est entouré

d'un cordon de cellules à gros noyaux, fortement colorés en vert,

on voit autour de quelques-uns de ces vaisseaux des foyers de

désintégration, où la subslance grise, rendue plus fragile, est

tombée en partie sur les coupes. La limite des deux substances et

surtout la. substance blanche sont parsemées de corps amyloïdes.

L'infiltration de toutes les couches par de. petites cellules est assez

marquée. Les cellules pyramidales sont pourtant nombreuses.

Observation XI. - Le malade suivant était aussi un épileptique,

atteint d'atrophie cérébrale, mais celle atrophie n'était point la

136 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

grande sclérose lobaire, c'était une atrophie partielle et que l'on

peut, jusqu'à un certain point, regarder comme une forme de

transition entre les scléroses à grand foyer et les écroulements de

la substance grise avec épaississement névrogliques, comme nous

venons d'en voir quelques exemples. L'examen de la figure qui se

rapporte à ce cas montre la grande ressemblance qu'il présente

avec ceux de MM. Jendrassick et Marie et de M. Richardière. On

trouve, comme dans les trois faits auxquels nous venons de faire

allusion, une bande de sclérose fournie par du tissu conjonctif

rubané, émané des vaisseaux. Il n'y a donc plus là de simples

modifications névrogliques discutables et prêtant à différentes

interpellations. On sait que Batty Tuko ayant décrit une sclérose

miliaire de l'écorce chez les épileptiques, à la suite d'un grand

nombre d'autopsies ; on lui objecta, Plaxton entre autres, que cette

sclérose miliaire n'était qu'une apparence due à l'action de l'alcool

sur les pièces. Ici, rien de pareil, la lésion est évidente et comme

elle est encore petite nous pouvons voir le travail de vascularisation

qui l'accompagne.

Le nommé Maisonh., 1868-1885, hérédité alcoolique et nerveuse,

a eu ses premières convulsions à deux ans. Elles étaient limitées

au côté gauche. A douze ans, premières attaques d'épilepsie, elles

avaient ce caractère d'être précédées d'une courte période pen-

dant laquelle le malade courait droit devant lui (épilepsie pro-

cursive). Il existait un léger embarras de la parole, et de la débilité

mentale. A l'autopsie, sclérose cérébrale (les détails de l'obser-

vation ont été publiés par MM. Bourneville et Bricon, dans leur

travail sur l'épilepsie procursive).

Examen histologique. - Cerveau et bulbe durcis dans l'alcool.

- Moelle durcie dans le liquide de Muller.

Cerveau droit. - Portions atrophiées.

Substance grise. - Les membranes n'ont pas enlevé des portions

de substance cérébrale en se délachant; la première couche de la

substance grise est confondue avec la seconde; elle présente, comme

celle dernière, une néoformation considérable, les capillaires

apparaissent sur les coupes, étoilés, arqués, formant un réseau

serré. L'espace lymphatique est rempli de cellules rondes; autour

d'elles existe un espace clair dû au retrait qu'a subi la pièce dans

l'alcool. Sur des points où la lésion est plus avancée, il existe

autour de ce réseau vasculaire serré des fibrilles conjonctives en

plus ou moins grande épaisseur; plus loin, la lésion est plus avan-

cée encore. Ces fibrilles conjonctives forment un véritable tissu

fibroïde de sclérose qui tranche vivement par son aspect sur le

tissu névroglique ambiant. Ainsi sont constituées des bandes sclé-

reuses larges et plates, occupant et remplaçant la deuxième couche

de la substance grise, celle des petites cellules pyramidales. Ces

bandes ne sont pas pures, mais contiennent un certain nombre

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. '13ï

d'amas névrogliques et de cellules nerveuses arrondies, granuleuses

et pigmentées; elles empiètent sur la substance grise des deux

couches qui les contiennent par des bandes conjonctives qui suivent t

les trajets des vaisseaux; elles ont par conséquent un bord dentelé

et festonné. Au niveau de ces points, la première couche de subs-

tance grise est épaissie, fibrillaire et chargée de noyaux. La troi-

sième couche, celle des grandes cellules, ne présente que des séries

de cellules petites, à fins noyaux sphériques, noyés sans ordre

apparent dans une trame névroglique granuleuse.

Mais la vascularisation exagérée des couches corticales moyennes

et la formation de bandes de tissu scléreux par plaques dans la

même région ne sont que les deux premiers degrés de l'altération.

Sur d'autres (joints, entre les mailles du tissu conjonctif ainsi

formé, se créent des vides qui étaient remplis par un liquide à l'état

frais. On a sous les yeux des cavités aréolaires, irrégulières, cloi-

sonnées par des travées conjonctives épaisses et par de fines tra-

bécules, le long desquelles sont dispersées de grosses cellules

irrégulières à protoplasma granuleux. L'aspect ressemble beaucoup

sur les coupes à celui du grand épiploon réticulé de certains ron-

geurs. En même temps, la couche corticale qui recouvre ce tissu

aréolaire s'amincit et n'est plus qu'un simple feuillet, et les cavités

s'agrandissent au point de former un tissu aréolaire visible à l'oeil

nu. Ces lésions expliquent l'état chagriné qui résulte de l'effondre-

ment des couches moyennes de la substance grise et l'état kystique

aréolaire qu'on observe, beaucoup plus prononcé d'ailleurs dans

d'autres cas d'idiotie.

Au-dessous de ces points très lésés, il n'existe plus de grandes

cellules nerveuses, mais on en rencontre tout à côté par amas

abondants; elles sont seulement groupées sans ordre apparent, au

lieu d'être disposées en séries verticales comme à l'état normal.

Les couches suivantes de la substance grise et la substance

blanche sont chargées de petites cellules rondes. On y voit, en

grande abondance des blocs volumineux, réfringents, irréguliers,

comme formés de la fusion de plusieurs boules. Malgré le séjour

des pièces dans l'alcool, ces blocs se colorent en noir intense par

l'acide osmique sur les coupes laissées vingt-quatre heures dans

ce réactif. f.

Lobe occipital clroit en dehors de la lésion. Vaisseaux nombreux,

vascularisés, cavité large, avec infiltration des gaines. Pourtant

la sériation verlicale des éléments nerveux à laquelle nous atta-

chons une grande importance est conservée sur la plupart des

points. Si ce n'est dans la couche la plus profonde de la substance

grise où elle est morcelée par le vaisseau vasculaire. A ce point,

ainsi que dans la substance blanche, nombreux corps granuleux

et blocs graisseux semblables à ceux que nous venons d'indiquer.

Cervelet droit. - Cellules de Purkinje assez nombreuses. Couche

138 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

externe et couche des myélocytes normales. On retrouve un

certain nombre de gros blocs graisseux qui paraissent dus à

l'action de l'alcool sur la pièce.

Cerveau. Hémisphère gauche. - Il existe dans le lobe frontal une

vascularisation très développée avec diminution de nombre et de

volume des cellules nerveuses qui ont perdu leur sériation dans les

points examinés.

Nombreux corps granuleux dans la substance blanche. Dans le

lobe occipital, on retrouve, à côté de points normaux dans l'écorce,

des taches de désintégration au début. - Les coupes du cervelet

droit, examinées comparativement avec celles du côté gauche,

n'ont pas paru présenter de différence sensible. - Les coupes du

bulbe à la portion inférieure du quatrième ventricule, au-dessous

des olives, montrent d'abord des lésions péri-vasculaires très

marquées, surtout du côté gauche. Diminution comparative du

volume des noyaux. Du même côté, dans la moelle cervicale, les

cornes antérieures sont petites mais avec leurs cellules bien nettes.

de même les cordons antérieurs. Ilots de tissu scléreux de dégé-

nérescence descendante, en dehors de la corne supérieure du

côté gauche. Cette corne parait un peu plus volumineuse que

celle du côté opposé. Dans cet îlot à contours diffus, un certain

nombre de tubes nerveux persistent.

En résumé, les lésions du bulbe et de la moelle sont consécu-

tives, ainsi que celles de la couronne de Reil.

Les lésions de l'écorce sont surtout marquées au niveau de la

deuxième couche de la substance grise et on peut leur distinguer

trois étapes : 10 prolifération vasculaire; 2° sclérose et atrophie

des cellules nerveuses ; 3° formation des cavités.

Ces lésions forment aussi à la surface des hémisphères un certain

nombre de taches diffuses, semblables il celles qu'on trouve dans

la plupart des cerveaux d'idiots ' .

On voit que, dans ce cas, il existe de véritables

bandes de tissu iibrillaire ondulé, ressemblant au tissu

conjonctif ordinaire, dans la zone moyenne de l'écorce.

C'est là une altération fort rare, d'après tout ce que

nous avons regardé jusqu'ici. Résulte-t-elle des lésions

que nous venons cle passer en revue ? Est-elle le pre-

mier degré de lésions plus étendues, telle que la sclé-

1 bourneville et l3ricon ? Epilepsie ? rocacrsioef.lrchices de Nemofoic,

1888, 1. 26.

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. tu

rose lobaire de l'enfance ? Ce sont deux questions que

nous ne pouvons trancher. Les scléroses lobaires que

nous avons pu examiner à Bicêtre et que nous ne dé-

crirons pas ici pour ne pas nous écarter de notre su-

jet, étaient toutes trop anciennes et trop étendues pour

nous permettre de concevoir un rapport entre ces deux

ordres de faits. Il en était de même dans les faits rap-

portés par MM. Jendrassik et Marie et par M. Richar-

dière dans sa thèse. La question du rapport de ces

plaques cicatricielles avec l'épilepsie ne peut aussi

qu'être indiquée. En tout cas, nous possédons des pré-

parations de circonvolutions d'épileptiques où rien de

semblable n'existait.

Observations XII-XII ! . Les deux observations suivantes ont

trait à des épileptiques aliénés âgés, ayant tous deux dépassé la

quarantaine. Les lésions se rapprochent beaucoup, chez ces épilep-

tiques déments, de ce qu'on voit dans les autres formes de

démence. C'est, en effet, un aboutissant commun de lésions

différentes. Mais on retrouve un certain nombre des traits que

nous avons déjà mentionnés.

Examen histologique. Rente..., soixante-onze ans, épilepsie

tardive. Coupes du para, central gauche. - Les trois premières

couches de l'écorce sont partout envahies et modifiées, la dispo-

sition normale n'existe plus, on voit la névroglie épaissie former

des taches plus foncées que le tissu sain. En beaucoup de points,

ces amas foncés présentent à leur centre un écartement des

mailles du réseau névroglique et ii en résulte un aspect finement

vacuolaire du tissu, c'est au niveau de la seconde couche que cet

aspect est le plus marqué. Les trois couches ainsi envahies sont

parsemées de noyaux petits, très nombreux : la première, la plus

superficielle, ne se distingue plus. Au-dessous de celte bande, la

couche des grandes cellules pyramidales se retrouve, mais avec

une ordonnance très peu nette. Elle présente ses grosses cellules

abondantes encore. Elle est parsemée de curps granuleux ainsi

que la substance blanche. Vaisseaux moyennement abondants, un

peu rameux.

Bonn..., épileptique aliéné âgé. Coupe d'une des circonvolutions

frontales du côté gauche. Les lésions des premières couches de

l'écorce sont comparables, mais beaucoup moins avancées. Au lieu

1 H) ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

de former une bande continue, les points atteints ne se présentent

que sous forme de taches plus opaques, parsemées de noyaux plus

abondants, rompant l'ordonnance des séries longitudinales et

prenant les trois premières couches. Elles ne sont pas au contact

les unes des autres et se présentent au contraire comme une série

de points isolés, mais assez rapprochés. Les cellules pyramidales

bien nettes sont rares dans les plans sous-jacenls, la plupart des

grosses cellules sont globuleuses. On distingue entre elles des

taches étoilées fixant en particulier le carmin et rappelant la forme

des élémenls araignée et la paralysie générale. La substance

blanche est infiltrée d'un grand nombre de noyaux. Dans ces deux

cas, nous relevons l'absence d'accumulation de pigment dans les

grandes cellules de l'écorce. C'est un fait exceptionnel, surtout à

soixante-onze ans, et qui tendrait à établir que les fonctions de

ces éléments sont assez modifiées.

Les foyers de ramollissement, petits et multiples, peuvent se

présenter chez l'enfant. Dans le cas suivant, il s'agit d'un enfant

de trois ans, Porte ? atteint de premières convulsions à trois mois.

Parole et démarche nulles, gâtisme, grimaces, strabisme, balan-

cement, très multiples, etc. A l'autopsie, on trouve un grand

nombre de petits foyers de couleur ocreuse, recouverts par la

couche la plus superficielle du cerveau, sous la forme d'une mem-

brane mince et plissée.

Examen HISTOLOGIQUE.- L'hémisphère droit n'a pas été examiné,

les lésions étant d'apparence semblable des deux côtés. Les coupes

ont été colorées à l'hématoxyline et au carmin et montées soit au

baume de Canada, soit à la liqueur de Fartant, pour conserver

les corps granuleux. Sur la première frontale, à sa naissance, en

un point qui ne contient pas de foyer visible à l'oeil nu, il existe une

vascularisation anormale très prononcée dans toute la subslance

grise ; les vaisseaux sont ramifiés dans toutes les directions. Le

nombre des éléments parait sensiblement accru et il existe une série

de points ou taches de désintégration se touchant presque et for-

mant une vaste bande entre la première et la troisième couches

de la substance grise, et comprenant ainsi la moitié environ de la

hauteur de la substance grise. Ces foyers sont caractérisés par la

rareté des éléments à leur niveau, l'épaississement du tissu inters-

titiel qui se colore davantage parle carmin et sa friabilité ; car

il tombe assez souvent des portions de tissus sur les coupes, mal-

gré le soin apporté au montage. A un fort grossissement, on

constate que les capillaires sont très nombreux et dilatés, les

cellules nerveuses ne sont pas disposées en séries, mais dispersées

et globuleuses. Celles des couches profondes sont allongées, gra-

nuleuses et fortement colorées. La subslance blanche offre une

quantité considérable de petits noyaux sphériques appartenant

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. ,lit Il

aux cellules interstitielles. Sur certains points, il existe des corps

granuleux en assez grande quantité.

La deuxième frontale, à son insertion sur la frontale ascendante,

portaitsur sapartie moyenneun foyer ocreux, allongé, parfaitement

caractérisé. Sur une coupe à ce niveau, on constate une dépres-

sion en entonnoir de la substance grise, une perle de substance

qui s'étend jusqu'à la subslance blanche et est recouverte par une

paroi flottante, transformant ce foyer en un petit kyste. L'espace

libre est sillonné par des filaments fibrillaires allant de la paroi

superficielle à la substance grise restante. Cette paroi est composée

de dehors en dedans, de trois couches : la plus superficielle, mince

et homogène, formée de faisceaux parallèles de fibres fines, avec

de petits noyaux sphériques très peu abondants, s'amincit aux

poinls extrêmes de la lésion et disparait dans la couche superfi-

cielle de la substance grise normale. Au-dessous, apparaît une

couche de deux à trois fois plus épaisse. Cette couche est compo-

sée surtout de cellules rondes assez volumineuses, à noyau sphé-

rique, dont la plupart sont remplies de granulations jaunes de

pigment sanguin, à la manière des cellules interstitielles de l'ovaire.

Ce sont elles qui donnent au kyste sa couleur ocreuse ; elles sont

dispersées dans un tissu fibrillaire dont les fibrilles convergent en

bas par des faisceaux distincts. La troisième couche est occupée

par ces faisceaux et un certain nombre de cellules. Ces masses de

faisceaux fibrillaires accompagnent les vaisseaux et forment à la

face interne de la paroi du petit kyste, un certain nombre de

masses pédiculées, composées de ce tissu fibrillaire feutré, de

rares vaisseaux et contenant des cellules à noyaux ronds ou allon-

gés, dont quelques-unes sont encore chargées de granulations

jaunes.

Autour de certains capillaires, la gaine adventice se remplit de

ces cellules, de façon à former des renflements en massue libres

dans la cavité. Si l'on suit cette paroi, ainsi constituée sur les

parties latérales, on voit que les couches se perdent successive-

ment dans la couche externe névroglique de la substance grise;

c'est donc entre cette couche externe et la deuxième couche de

Meynert que s'est opérée la scissure qui a donné lieu à la cavité

que nous étudions. La substance grise qui forme les parois de

l'entonnoir est recouverte par une couche fibrillaire névroglique.

Au-dessous, elle se montre sous deux états différents : sur certains

points, la sériation longitudinale de la substance grise est encore

assez visible, mais ces séries sont occupées par des cellules inters-

titielles en très grande abondance. Sur d'autres points, beaucoup

plus nombreux, le processus estbeaucoup plus avancé; les cellules

ne sont plus disposées en séries, mais elles sont dispersées, raré-

fiées et isolées; elles sont petites, globuleuses; on ne peut suivre

leurs prolongements sous la surface libre. Autour de ce foyer, il

142 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

existe un certain nombre de taches ou points très clairs à un faible

grossissement et qui sont composés uniquement par un réseau

très fin d'une dentelle de fibrilles grêle, avec des cellules à

noyaux sphériques, corps cellulaires ramifiés aux points nodaux.

Les mailles de ce tissu sont occupées par une substance inter-

cellulaire qui a disparu des coupes. On n'y rencontre pas une seule

cellule nerveuse et cela dans plusieurs champs du microscope. A

la périphérie de ces points, on rencontre les corps granuleux,

principalement autour des vaisseaux. Ces vaisseaux sont très ra-

mifiés; l'espace périvasculaire est largement dilaté autour de la

plupart d'entre eux; ils morcellent la substance grise.

Lésions de la substance blanche. - Dans la substance blanche, il

existe une large traînée descendante, correspondant à la perte de

substance, de la substance grise, et dans laquelle les fibres n'existent t

pas; tout autour, ces fibres sont entourées d'une grande quantité

de petites cellules interstitielles, et sur les pièces traitées successi-

vement par l'acide osmique et la liqueur de Farrant, on voit que

la myéline émulsionnée forme un certain nombre de petites gout-

telettes noires et des amas plus gros ayant l'aspect connu des corps

granuleux.

Pariétale ascendante gauche. - Elle porte en son milieu un foyer

plus récent; on voit nettement que le centre de la dépression est

formé par un vaisseau ramifié; les parois sont constituées par les

mêmes tissus fibrillaires que dans la précédente; les lésions de la

substance grise au pourtour du foyer sont moins avancées, quoi-

que très étendues.

La première couche, couche névroglique de Meynert, est très

mince, avec de fins capillaires rameux assez nombreux et, de plus,

sur certains points, des taches grises où la névroglie s'est raréfiée,

qui forment autant d'espaces clairs.

Dans la deuxième couche, celle des petites cellules pyramidales,

on voit que presque toutes ces cellules sont petites et globuleuses,

et qu'elles ne sont plus placées bout à bout, mais dispersées; leurs

rapports normaux sont détruits et leur nombre diminué. Dans la

troisième couche, celle des cellules moyennes, on voit les colon-

nettes que forment ces cellules bout à bout, beaucoup plus dis-

tantes les unes des autres qu'à l'état normal et séparées par du

tissu névroglique, à peu près dépourvu d'éléments interstitiels.

Même vascularisation ramifiée. Les cellules nerveuses sont globu-

leuses, leur noyau volumineux, clair, nucléole, remplit presque

toute la cellule. Le prolongement inférieur est le plus distinct.

Dans la couche suivante des grandes cellules, les altérations

sont les mêmes pour les cellules nerveuses, dont le corps cyto-

plasmique est pâle et effacé, quelques-unes sont atrophiées, pour-

tant elles sont encore en nombre considérable.

Dans les espaces qui séparent ces rangées de cellules, espaces

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE GRISE. '[/t3

par où descendent les fibrilles qui vont former la substance grise,

on voit, de plus que dans les couches précédentes, un assez grand

nombre de noyaux de cellules interstitielles, petits, sphériques et

fortement colorés. Dans la substance blanche, on voit les mêmes

lésions que dans les préparations précédentes; les vaisseaux sont

très dilatés, les corps granuleux sont très abondants.

Lobe occipital. - Les coupes du lobe occipital, au niveau d'un

foyer plus étendu que celui que nous avons décrit sur le frontal,

montrent des lésions absolument semblables, mais la traînée des-

cendante dans la substance blanche au-dessous du foyer, est très

large et remplie de globules sanguins avec un certain nombre de

leucocytes et de cellules t'usii*oriiie-s ; au pourtour de ces masses

un grand nombre de capillaires sont aussi remplis de globules

rouges ; il semble donc que l'on ait affaire à de véritables foyers

hémorrhagiques en ce point.

Les lésions d'encéphalite au voisinage présentent les mêmes

caractères que ci-dessus, elles sont seulement plus marquées, avec

des cellules interstitielles très abondantes et des capillaires dont

les plus volumineux sont entourés d'une paroi fibrillaire nette.

Mêmes lésions que plus haut dans la substance grise.

Cervelet. - Dans la substance grise, la couche de névroglie est

fibrillaire dans le sens longitudinal ; les cellules interstitielles y

sont très nombreuses, les cellules de Purkinje sont abondantes,

mais elles se colorent assez inégalement, surtout à l'hématoxyline ;

on peut pourtant suivre très loin les prolongements de la plupart.

La couche des cellules névrogliques n'offre rien de particulier.

Dans la substance blanche, corps granuleux nombreux, aspect

fibrillaire, grosses fibrilles anastomosées.

Moelle cervicale. - La substance grise à des altérations cellu-

laires importantes.

Dans les cornes antérieures, le tissu interstitiel forme des

faisceaux fibrillaires volumineux et entre-croisés autour des cel-

lules nerveuses. Celles-ci, nettement diminuées de nombre, se

colorent bien par le carmin sur certains points, mais beaucoup ne

se colorent que faiblement et présentent un reflet jaunâtre et

hyalin comparable à celui des cellules de la paralysie générale,

elles sont tuméfiées et leurs prolongements n'existent que peu ou

point. Par l'hématoxyline, ces cellules se colorent en gris de lin et

leur réfringence apparait beaucoup plus nettement. Même aspect

des cornes postérieures. Le canal de l'épendyme est conservé. Son

épithélium est intact ; on y distingue sur certains points les cils

des cellules. La trame conjonctive des cordons blancs est notable-

ment épaissie, le nombre des tubes diminué, mais la lésion est la

même sur tous les cordons. Il n'y a pas de systématisation. Les

vaisseaux sont dilatés.

Moelle dorsale. - L'aspect est le même de tout point.

t44 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

Moelle 10mbai1'c. - Les lésions sont les mêmes, la tuméfaction

des cellules et leur raréfaction sont encore plus visibles, à cause

du grand nombre des cellules motrices en ce point '. (Bourne-

ville et Pilliet, Soc. anat. 1886.)

Sur un homme de quarante ans, mort dans le ser-

vice du Dl' Besnier et atteint depuis longtemps d'hémi-

plégie, nous avons pu voir de petits foyers isolés

occupant tout un hémisphère et présentant comme

distribution, la plus grande analogie avec ceux du

malade précédent. Ils étaient seulement plus profonds

et plus accentués. Les lésions histologiques différaient

en un point de celles que nous venons de voir; c'est

dans les couches les plus profondes de la subslance

grise, et même au milieu de la substance blanche,

qu'on voyait la névroglie former des filaments nom-

breux et enchevêtrés, chargés de petites cellules rondes

et circonscrivant des aréoles qui étaient assez grandes

pour donner, en quelques points, l'aspect d'un tissu

finement celluleux.

Les plaques jaunes trouvées dans ces cas sont sans

doute des foyers de ramollissement, car a la coupe,

ils ont tous la forme d'un cône à base périphérique et

les parois ne sont pas dilacérées. Comme il n'existe

nulle part, dans les autres organes, de point de dé-

part d'embolies multiples, on est conduit à admettre

un ramollissement par thrombose artérielle, comme

celui qu'on peut voir chez certains vieillards déments.

Nous rapportons ces faits il cause de la coexistence de

taches grises d'encéphalite au voisinage des points les

1 Les autres organes, larynx, estomac, foie, rate, coeur, ont été exa-

minés sur des coupes et ne présentaient pas d'autres lésions que leur

état légèrement atrophique, semblable à celui qu'on trouve dans les lé-

sions de dénutrition.

LÉSIONS HISTOLOGIQUES DE LA SUBSTANCE G1USE. '145

plus altérés, quoique nous ne puissions indiquer les

relations réciproques de ces deux lésions.

Conclusions. - On voit que les lésions qui ont été

décrites dans les observations qui précèdent portent

sur les vaisseaux, qui sont dilatés, multipliés, avec

gaines épaissies ou infiltrées de leucocytes et de gra-

nulations. Elles portent sur la névroglie qui est épaissie

à noyaux multipliés, opacifiée, puis fibrillaire, puis

enfin vacuolée, et ces lésions se présentent sous la

forme de points, puis de taches qui peuvent devenir

confluentes. Nous avons décrit, en regard de ces alté-

rations névrogliques, la formation de véritables bandes

cle sclérose, pour qu'il ne puisse y avoir aucune erreur

sur les faits exposés ; enfin les cellules pyramidales

présentent tous les degrés d'atrophie. Nous n'avons

pas insisté sur leur vacuolisation, qui dépend trop

souvent des réactifs pour qu'on puisse s'y arrêter. Du

côté de la substance blanche, il est facile de voir son

atrophie; la multiplication des noyaux des petites

cellules, l'abondance des corps granuleux, mais non

le reste. Les lésions diffuses que nous avons pu voir

dans la moelle, échappent à tout essai de systématisa-

tion. Ne pouvant rien dire de précis sur la pathogénie

de ces lésions, nous avons préféré n'en pas parler.

Par suite de l'emploi de l'alcool pour fixer les

pièces, il nous était impossible de rechercher les lé-

sions des fibres conductrices. Les fibres fines à myéline

delà couche superficielle des circonvolutions, les fibres

arquées qui relient chaque circonvolution en passant

sous le vallon intermédiaire, le réseau qui occupe la

couche la plus profonde de la substance grise, enfin

BOCH : OEVll.l.E, Bicêtre, 1889. 10

146 ENCÉPHALITES CHRONIQUES.

les fibres descendantes de la substance blanche de-

vaient nous échapper. C'est là une grosse lacune, et

qui laisse fort incomplète cette étude. Il en est une

autre. Comme nous ne pouvions traiter par une série

de réactifs, les pièces que nous possédions, de façon

à débrouiller l'histoire naturelle de la production des

lésions, il s'ensuit que nous n'avons pu les rattacher,

surtout celles de la névroglie, à l'état normal, montrer

quels éléments s'hypertrophiaient, quels s'atrophiaient

et comment s'accomplissait cette évolution. Aussi,

nous sommes-nous bornés à un travail purement des-

criptif, à l'examen d'une série d'aspects. C'est tout ce

que nous a permis de faire la difficulté du sujet, et

ces faits bruts étaient trop incomplets pour que nous

puissions nous en servir pour échafauder les hypothèses

applicables à la clinique et entreprendre d'écrire l'his-

toire de l'anatomie pathologique des cerveaux d'idiots.

Cruveilhier disait, il y a déjà bien des années : « De

toutes les maladies dites mentales, il n'en est aucune

sur laquelle l'anatomie pathologique soit appelée à

jeter un plus grand jour que sur l'idiotie. » Le temps

où cette parole du grand anatomiste français se réali-

sera est peut-être encore lointain, nous nous estime-

rons heureux si nous avons contribué, pour la plus

faible part, à le rapprocher.

BIBLIOGRAPHIE

Cruveilhier. - Traité d'anatomie pathologique, t. III, p. 162, 1843.

id. Allas, livre XX, pi. lIt, livraison v°.

Isambert et Robin. - Cas de sclérose du cerveau dans l'idiotie. -

Soc. biologie, 18os.

Griésinger. - Traité des maladies mentales, édition française,

p. 449, 1868.

BIBLIOGRAPHIE 147 ï

Thèse, p. 323, dBGG.

Cotard. - Atrophie partielle du cerveau. Thèse, <86S.

Ilayem. - Diverses formes d'encéphalites, p. 133, 1868.

Lépiue. - Archives de Physiologie, p. 439, 1869.

Herberl Mayor. - Lésions hislologiques de la substance grise, chez

déments, etc. - West riding latizcctir asylwn reports, an-.

nées 1872, 1873, 1874, 1875.

Parrot. - Ramollissement encéphalique chez les enfants. - Ar-

chives de Physiologie, 1873.

Hutinel. Troublps de la circulation veineuse chez les nouveau-

nés. Thèse, p. 25, 1877.

Mierzejewski. Considérations anatomiques sur les cerveaux

d'idiots. - Congrès international des sciences médi-

cales, 1878.

Hammond. Maladies du système nerveux, p. 822, 1879.

Leyden. - Maladies de la moelle, p. 56, 1879.

Magnan. - Idiotie, mutisme, atrophie scléreuse gauche. - Soc.

biologie, 1881.

Bourneville, d'Ollier, Brissaud. - Archives de Neurologie, p. 213,

1880.

- et Brissaud. Archives de Neurologie, p. 391, 1880.

Bail. Maladies mentales, p. 823, 1880-83.

Cornil et Ranvier. - Histologie pathologique, édition 2, t. 1,

p. 700, 1881.

13enaul. - Recherches sur les centres nerveux amyéliniques.

Archives de Physiologie, p. 593, 1882.

Bcwan-Lewis. Structure comparée de l'écorce. - Proced. of

royal Society, p. 23r, 1879.

Charton-Bastian. - Le cerveau et la pensée, t. Il, p. 90, 1882.

Plaxton. - Journal of mental Science, p. 27, 1883.

Herbert Mayor. - Journal of mental Science, p. 532, 1883.

Luys. - Structure delà substance grise. - L'Encéphale, p. 149,

1883.

Ranvier. - Névroglie, Archives de Physiologie, p. 179, 1883.

Pozzi. - Cirrhose atrophique granuleuse disséminée. - L'Encé-

phale, p. 155, 1883.

Uanillo. Encéphalite parenchymateuse avec atrophie partielle.

- Archives de Neurologie , t. Il, p. 217, 1883.

Witkousky. Archives sur Psychiatrie, d883.-It revue dellayem,

p. 5Í, 1885.

Tuczek. Congrès annuel des aliénistes allemands. - Archives

de Neurologie, p. 365, 1884.

Slrumpell. - Dculsch médite. lVochcnsch., 44, p. 714, 1884.

148 ENCÉPHALITES CHRONIQUES : BIBLIOGRAPHIE.

Jendrassick et Marie. - Sclérose infantile, Arch. Physiologie,

p. 53, 1885.

Richardière. - Sclérose de l'encéphale chez les enfants. Thèse Paris,

1885. -

Marie. Sclérose infantile. Progrès médical, 1885.

Obersteiner. - Voies sanguines du cerveau ci l'état normal et

pathologique. Anal, in Annales médico-psychologiques,

mai 1885.

Déjerine. - Hérédité dans les maladies nerveuses, Thèse agrég.,

1886.

Adamkiewicz. - Histogenèse de la sclérose. - 59° congrès natu-

raliste des médecins allemands, septembre 1886.

Féré. - Anatomie médicale du système nerveux, p; 238, 1886.

Raymond. - Anatomie pathologique du système nerveux, p. 168,

886.

Fuerstner et Stuehlinger. - Hyperplasie de la névroglie et for-

mation de cavités dans l'écorce, Arch. f. Psychiatrie, XVIII,

p. 17, analyse in Arch. Neurologie, p. 39, 1887.

Duval et liahoadeau. - Groupement des cellules pyramidales.

Soc. anthropologiq. Juillet 1888, p. 380.

Rindfleisch. - Traité d'histologie pathologique, traduction fran-

çaise, p. 732, 1888.

Audry. -Porencéphalies, Revue de médecine, p. 462, 888.

Lemoine. - Pathogénie de l'épilepsie. Progrès médical, 1888.

Meynert. - Psychiatrie, traduction Convot, p. 58 et suivantes,

1888.

Ranvier. - Traité. technique, édition 2, p. 83 : 1, 1888.

Edinger(L.). - Traduction Suraud; Anatomie des centres ner-

veux, p. 54, 1889.

W. Vignal. - Développement des éléments du système neveux

cérébro-spinal, p. 169, 1889.

Lancereaux. Traité d'anatomie 1)(tt/t., t. III, fasc. 2, p. 527, 1889.

On trouvera, en outre, un grand nombre de faits se rapportant

à l'encéphalite chronique dans l'Index des chirurgiens américains,

dans l'Index médicus ; l'excellent article du Dr Arnozan dans le

Dictionnaire encyclopédique, les congrès annuels des aliénisles

allemands et les journaux spéciaux, surtout les Archives de Neu-

rologie.

III. ,

Une famille d'hystériques

(jeunes garçons et JEUNES pilles)

Par 30LiR1VlE`CT17LL'IE et P. ? OLLIER

Bien que, aujourd'hui, il ait été publié un grand nombre

d'observations sur l'hystérie des enfants et que ce chapitre de

pathologie soit bien connu depuis les leçons de notre maître,

M. Charcot, nous croyons utile de rapporter les observations

suivantes, surtout parce que les malades appartiennent à la

môme famille et qu'ils ont pu être suivis durant plusieurs

années.

Observation I. Père nerveux, szijets à des névralgies de la face.

- Deux grands oncles paternels, excès de boisson. Mère,

nerveuse, irritable. - Grand-père paternel, excès de boisson. -

Grand'mère maternelle phthisique, nerveuse, migraineuse. Soeurs,

attaques de nerfs. - Frère, accès de somnambulisme. - Frère, con-

vulsions de l'enfance, blésité.

Accès de cris de un à cinq mois. - Convulsions internes à trois se-

maines. Premières dents à huit mois; marche à un an; blésité ;

fièvre typhoïde à onze ans avec accidents cérébraux. - Fugue ci

douze ans et demi, débutant après un étourdissement et accom-

paginée d'hallucinations de la vue. - Première attaque à quatorze

ans et demi. - Etoiii-dissements, vertiges, attaques fréquentes,

limitées à la phase épileptoide. - Stigmates hystériques.

Hypnotisme : - Description des attaques : Aura; attitude du

- Crucifcement; - arc de cercle; délire, hallucinations. - Coi2trac-

ture consécutive des doigts ; vertiges. Caractères du sommeil. -

Evasions de Bicêtre. - Fugue de la maison paternelle.

100 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.

Lav... (Eugène), né à Ivry, le 16 mai 1870, est entré à l'hospice

de Bicêtre (Service de M. BOUR;'OEVILLE), le 21 avril 1885.

Renseignements fournis par sa ? KCt'e. FcM, cinquante-trois ans,

bandagiste, assez fort, marié à vingt-quatre ans, n'a jamais fait

de maladies depuis, n'a que des « douleurs névralgiques dans la

tête », sans vomissements, limitées au côté droit, revenant autre-

fois tous les mois, aujourd'hui tous les deux ou trois mois. Assez

nerveux ; bon caractère... Enfant naturel. Pas de maladie de peau,

pas de trace de syphilis ; pas d'attaques de nerfs. On ne sait s'il a

eu des convulsions dans l'enfance. Jamais d'excès de boisson, ne

fume pas. [Père, rentier, sobre, mort vers soixante-dix ans, on ne

sait de quoi. - Mère, morte vers soixante-cinq ans, domeslique

dans un château. A eu son enfant vers trente ans alors que son

maître, le père, en avait cinquante-cinq. On ne sait de quoi elle

est morte. - Ni frères, ni soeurs. - Deux oncles maternels faisant

des excès de boisson. - Grands parents paternels et maternels, pas

de détails. - Pas d'aliénés, d'épileptiques, de suicidés, etc., etc.]

Mère, quarante-huit ans, couturière, petite, brune, n'aurait pas

eu de convulsions dans l'enfance, pas de migraines ni de névral-

gies. Très nerveuse, très impressionnable, ainsi qu'elle en a donné

la preuve ici même, comme nous le verrons plus loin. Elle assure

n'avoir jamais eu d'attaques. Mariée à dix-huit ans. Aucune mala-

die, sauf des accidents suite de fausses couches. [Père, disparu eu

1870, boulanger ; nombreux excès de boisson, mais surtout après

la naissance de sa fille. - Mère, morte de phthisje galopante à

cinquante-sept ans ; nerveuse, mais sans attaques de nerfs, sujette

à des migraines avec vomissements. Grand-père paternel, mort

très âgé, on ne sait de quoi. - Grand'mère paternelle, morte très

âgée, pas de détails. - Grands parents maternels, morts à soixante-

dix et soixante-dix-sept ans, on ne sait de quoi. - Soeur morte du

croup, à dix-huit mois. - Pas de frère. - Pas d'aliénés, d'épilep-

tiques, etc., dans la famille. - Pas de consanguinité. - Inéga-

lité d'âge de 5 ans.]

Douze enfants : 1° Garçon de vingt-huit ans; pas de convulsions,

intelligent ; géologue. Marié, pas d'enfants; très rangé; -2° Fille,

vingt-cinq ans, pas de convulsions ; à dix-huit ans, peur, suspen-

sion des règles, petites attaques de nerfs; blanchisseuse, pas d'en-

fants; - 3" Garçon, mort à sept ou huit mois 4° Garçon,

vingt-quatre ans ; pas de convulsions. Accès de somnambulisme la

nuit, de dix à vingt-deux ans; le dernier il y a deux ans; le matin

il s'est trouvé couché par terre, la fête penchée en arrière, dans

une malle ouverte, un matelas par-dessus lui; sa chambre en

désordre, son argent disséminé dans la chambre. Il n'avait pas

bu, il ne boit jamais ; 5" Fille, morte d'une angine couenneuse( ? ),

111 STÎ : ftO-PILEPIC. C. 151

à quatre mois. Pas de convulsions ; - 6° Fille, vingt ans ; pas de

convulsions, pas d'attaques de nerfs ni de migraines; intelligente;

- il' Fille, morte il vingt et un mois, aux Enfants assistés ; z

8° Notre malade ; 9° Fille, douze ans ; pas de convulsions, intel-

liâenle' ; 10° Garçon, dix ans, aurait eu des convulsions à six

semaines et en aurait eu à diverses reprises jusqu'à sept ou huit

mois ; intelligent, mais il « zozotte un peu en parlant » ; -

11° Garçon, huit ans et demi ; pas de convulsions, bien portant,

intelligent; - 12° Fille,morte d'une variole noire en 1880, à un an.

Notre malade. - Au moment de la conception, les parents étaient

bien portants. Grossesse bonne, ni traumatisme, ni alcoolisme, etc.

- Accouchement à terme, naturel, sans chloroforme. A la naissance,

bel enfant, pas d'asphyxie. Elevé au sein par sa mère, sevré à

treize mois. D'un à cinq mois, accès de cris attribués par le méde-

cin aux coliques. A trois semaines, petites convulsions internes :

immobilité, occlusion des yeux, pâleur de la face, durée de trois

quarts d'heure. Puis cinq ou six petites crises à partir de là jusqu'à

quatre mois, mais beaucoup plus courtes, de dix à quinze minutes

au plus. Jamais d'autres convulsions. Première dent vers sept ou

huit mois, puis elles ont poussé vite et il les avait toutes à dix-

huit mois ; marché à un an ; a commencé à parler vers un an ; il

a « zozoté » toujours un peu et encore maintenant. Sa mère nous

dit qu'elle faisait de même, étant jeune. Propre à un au. Envoyé

à l'école à quatre ans, apprenait bien.' Fièvre typhoïde à onze ans,

avec accidents cérébraux. l'as de troubles intellectuels consécutifs.

Dans son délire, il voyait toujours des hommes avec des fusils qui

voulaient le tuer. Après la fièvre typhoïde, il a grandi beaucoup et

était un peu nerveux. Placé comme apprenti imprimeur vers douze

ans et demi, on était content de lui. Il était régulier. Le 6 jan-

vier -18811, alors qu'il était employé depuis près de six mois, il est

parti comme d'habitude sans présenter rien de particulier. Le

soir, ne le voyant pas rentrer, son père va à l'atelier. On ne l'y

avait pas vu. On fait des démarches à la préfecture, chez les com-

missaires de police, mais il revient spontanément le 13 janvier

seulement, sept jours après son départ. Le sixième jour, il s'était

rendu à Argenteuil en face de la gendarmerie. 11 a demandé où

il était, et il s'imaginait être parti le matin à son travail. Il n'a-

vait pas ou peu mangé, car une partie des aliments qu'il avait

emportés de la maison pour l'atelier était encore intacte.

Il a couché à la gendarmerie et, le lendemain, après l'avoir fait

manger un peu, on l'a renvoyé. Il est rentré chez lui méconnais-

sable, les yeux hagards, le visage décomposé, rompu de fatigue.

' Elle a eu depuis ces renseignements des attaques d'hystérie. Nous

y reviendrons plus loin.

152 UNE FAMILLE I)'II'ISTI'sR1(UES.

Il disait que tout le temps, il voyait quatre pattes de chien et un

grand mur blanc. Place Notre-Damc, il aurait eu comme un étour-

dissoment et, à partir de là, il aurait eu cette vision d'un mur

blanc. Dans sa course, il se rappelle avoir Lu souvent de l'eau.

Rentré à la maison, il voyait encore des pâlies de chien sur ses

draps. Il est revenu complètement à lui au bout de trois ou quatre

jours. Il retravailla à l'imprimerie jusqu'en mars ; puis eut une

bronchite. Auparavant, il n'avait pas de céphalalgies, pas de

secousses. Parfois il avait des cauchemars la nuit, criait, voyait

quelqu'un qui voulait le tuer. Pas de terreurs, pas d'étourdisse-

ments. Il n'avait jamais fait l'école buissonnière et n'avait pas de

raison de s'en aller. Après sa bronchite, il a décidé qu'il serait

marin. 11 est parti le 5 octobre pour Brest, très bien portant,

n'ayant pas eu de nouveaux accidents.

Il était mousse sur le vaisseau-école J'Auslcrlil : , à Brest, quand,

à la suite d'une grande colère, causée par les taquineries d'un de

ses camarades, et dans laquelle il s'élait jeté sur lui et l'avait

battu, il fut pris un quart d'heure après d'une première attaque.

C'était vers le 15 décembre 1884. La seconde attaque eut lieu

quinze jours plus tard. Le médecin de marine aurait alors déclaré

qu'il était atteint d'hystéro-épilt : psic, et il fut renvoyé le 4 jan-

vier 1885. Depuis cette époque, il a eu une attaque le 9 janvier, puis

de quinze en quinze jours, la dernière le 15 mars. 11 entra à

Sainte-Anne le 14 avril, et le 16, le 17, le 18 et le 19 avril il eut

une attaque chaque jour ; le 20 il en eut deux.

23 avril. - Le 21, à son entrée, on lui a retiré du tabac, une

pipe et un couteau qu'il avait dans ses poches, ce dont il fut très

mécontent, prétendant qu'à Sainte-Anne on le laissait fumer et

qu'il n'était pas à Bicêtre dans une prison. Dès son arrivée, il

s'e.'t mis en rapport avec les plus indociles de ses camarades, B...

et A... ; B... lui a indiqué les endroits par où il pourrait se sauver.

Ils devaient, avant de s'évader flanquer une trempe au garçon ».

Ce complot a été révélé le matin par des camarades. Alors qu'il

était au parloir de la section, et pendant qu'il était en conversa-

tion avec sa mère, il désigna du doigt le garçon S..., en disant de

lui : « C'est une vache, une canaille, etc., etc. Puis il tomba

immédiatement et eut une attaque qui dura trente secondes.

Après cette attaque, il apostropha de nouveau le garçon et essaya

de se livrer sur lui à des actes de violence qu'on eut quelque peine

à empêcher. La mère et ses deux autres enfants âgés de treize et

dix ans ont prêté secours au malade en se jetant sur les gens de

service et en les frappant à coups de parapluie. La mère expulsée

du quartier est revenue aussitôt après plus excitée, et, repousséc

de nouveau, a causé du scandale dans la cour de l'administration

en vociférant des injures, se traînant par terre, etc., etc. Lav... a

III STI.RO-)JPILPPSII;. 153

été camisole ' et emporté à l'infirmerie dans un état de grande

surexcitation. On a dû l'attacher une partie de la journée. Vers

deux ou trois heures de l'après-midi, il est devenu raisonnable et

fut maintenu, pour plus de précaution, à l'infirmerie.

Etal actuel. Mai 1S83. Tête arrondie. Pas de saillies exagérées

des bosses occipitales ni pariétales. Front peu élevé et peu large,

sans saillies frontales. Arcades sourcilières assez saillantes. Yeux

bleus. Ne : aquilin. Bouche petite, lèvres épaisses. Menton légère-

ment pointu. Visage ovale. Pas d'asymétrie faciale. Oreilles un

peu écartées, bien ourlées, lobule adhérent.

134 UNE FAMILLE D'HYSTERIQUES.

vers le front; une pression plus forte détermine des étourdisse-

ments; 3° légère rachialgie au niveau de l'apophyse épineuse

de la troisième dorsale ; parfois douleurs spontanées après les

attaques : par la pression picotements sans irradiations. La sensi-

bilité est conservée; - 4° au niveau de la onzième dorsale point

douloureux. Sensibilité conservée. Après les attaques il dit avoir

une douleur tout le long de la colonne vertébrale.

En avant on trouve : 1° un point sensible au-dessous du point

d'union des deux tiers internes avec le tiers externe de la clavi-

cule ; - 2° un autre point au niveau du sixième espace intercostal

des deux côtés près du sternum ;-3° un autre point des deux côtés

au niveau des flancs. La pression serait plus douloureuse à droite

et déterminerait une sensation d'oppression avec irradiation vers

la base du cou ; 4° point douloureux dans la région correspon-

dant aux ovaires chez la femme ; la pression détermine une dou-

leur irradiée vers l'épigastre en déterminant une sensation d'op-

pression. Le point abdominal est plus douloureux à droite.

La pression des testicules détermine des irradiations doulou-

reuses au niveau des points abdominaux et de l'épigastre.

Sur tous les points hystérogènes, la sensibilité est la même que

sur les régions voisines, sauf au niveau des points iliaques où elle

est un peu moins nette que sur les parties voisines.

Sensibilité spéciale. - Vision : Il distingue nettement toutes les

couleurs des deux yeux. Quand il fixe des objets un peu éloignés,

sa vue se trouble et plus vite à gauche qu'à droite, puis peu après

il voit double. Pupilles égales, normales. Pas de phosphènes. -

Ouie conservée et égale des deux côtés. - Odorat conservé aussi

des deux côtés. - Le goût est égal des deux côtés. Pas d'halluci-

nations des divers sens.

A : o'<f. Une minute avant les attaques, il se sent mal à l'aise.

Il me prend un vertige, je ne sais plus où je suis, il me semble

que tout tourne, la vue se brouille, surtout à gauche. » Sifflements

dans les oreilles, surtout à gauche aussi. Puis il éprouve une sen-

sation de constriction à l'estomac, puis à la base du cou. Il pré-

tend que durant cette phase, les phénomènes céphaliques ne sont pas

plus accusés. En même temps, les points douloureux sous-mam-

maires et le clou hystérique sont plus marqués. Il pousse alors un

cri qu'il entend, puis il tombe, sans avoir, d'après lui, le temps

d'avertir.

5 mai. - Le malade a été pris à 10 heures d'une attaque, sans

avoir prévenu, sans pousser de cri. Il est tombé comme une

masse. Rigidité générale, les jambes allongées et écartées et les

bras en croix, la tête dans l'extension. Puis à six reprises dill'e-

rentes il s'est mis en arc de cercle. Nous le vovons à 10 h. 5.

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE. 155

Il est étendu sur le sol dans la situation indiquée plus haut ; puis

ares de cercle complets durant vingt secondes. Repos. - A 10 h. 6,

nouvel arc de cercle, après lequel il retombe. Flexion violente,

puis mouvements désordonnés des jambes, en même temps qu'il

se gratte la poitrine. - A 10 h. 7, repos en extension, les membres

inférieurs rigides. Bras rapprochés sur la poitrine. Ecume. Nouvel

are de cercle durant sept à huit secondes. Il retombe. Corps en

extension, pieds un peu écartés, bras étendus en croix. Cou et

tête en extension, yeux fermés, face colorée, poings fermés. -

A 10 h. 8, arc de cercle passager. Retombe étendu avec même

attitude des. bras et des jambes que tout à l'heure. - A 10 h. 9,

tortillements sur place d'abord, puis avec déplacement. - A

10 h. 10, le malade revient à lui subitement, ouvre les yeux qui

jusqu'alors étaient constamment fermés. Il demande un 'mouchoir

pour essuyer l'écume qui est abondante. Lucidité complète. La

face, qui était rouge reprend sa coloration habituelle. Les pupil-

les qui étaient moyennement dilatées diminuent à peu près de

moitié. Il se plaint de céphalalgie et de douleurs dans les reins,

La température rectale prise cinq minutes après l'attaque est

de 380,5. (Fig. 17 et 18.)

11 mai.- (10 h. 5). Attaque commencée depuis deux ou trois

minutes, précédée cette fois d'un étourdissement très court de

deux à trois secondes (impression recueillie après l'attaque). Il a

poussé une courte exclamation « Ah ! » et est tombé sur le dos.

Fig. 17. - Attitude du crucifiement.

l'ig. 15. - Arc de cercle. ,

156 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.

Extension, les jambes écartées. Ecume abondante. Sitôt qu'on lui

laisse les bras libres, il déchire sa veste. Arcs de cercle passagers

répétés à deux ou trois reprises. Résolution musculaire. Rigidité

avec légers mouvements convulsifs des mains et des pieds qui

frappent le sol en produisant un bruit assez régulier. Il se soulève

en arc reposant sur les talons et sur la tête, puis sur le genou

gauche, la jambe droite étant étendue et la tête soulevée avec le

tronc en extension. 11 retombe du reste presque aussitôt en exten-

sion sur le dos. Mâchonnement.

10 h. 15. - Arc de cercle, puis rotation du tronc du côté gau-

che. Face congestionnée, mains fermées, le pouce replié sur la

face dorsale des autres doigts. Ecume abondante. Repos. Arc de

cercle transitoire. Extension, les jambes écartées, les bras eu

croix. Yeux légèrement convulsés en haut et en dehors. Difficulté

d'écarter les paupières. Rigidité. Légère plainte ; il se soulève sur

les pieds, puis retombe lourdement en arrière. Extension puis repos.

10 h. 17. - Légers mouvements convulsifs des mains et des

pieds. Quelques arcs de cercle.

10 h. 20. - Il se lève seul assez rapidement et répare le désor-

dre de ses vêtements. 11 se plaint de douleurs à la tête et aux

reins. Pupilles un peu dilatées, mais égales. Connaissance par-

faite. Pas de morsure de la langue. Pas d'évacuation involontaire.

Il prétend qu'il se mord quelquefois la langue. T. Il. après

l'attaque, 37°,Ir.

15 mai. - Pris d'une attaque à 9 h. 38. A 9 h. 40, on le trouve

couché sur le parquet, étendu, les jambes allongées et légèrement

écartées. Bras étendus obliquement en haut. Tête dans l'extension.

Mains fermées, les pouces en dessus. Ecume mousseuse, abon-

dante, face légèrement colorée. Paupières closes. Arc de cercle.

Tortillement avec mouvements de translation qui le porleut à 2

ou 3 mètres plus loin. 11 se remet en X. Bruits buccauxsuivis d'arc

de cercle. Se remet en X; écume abondante ; moiteur froide de la

face. Paupières fermées. Il tapote le parquet avec les mains et

les pieds. Nouvel arc de cercle. Se remet en X. Repos. Il tapote

avec les pieds et les mains, cherche à se déchirer le cou et la partie

supérieure de la poitrine. Repos. Les épaules sont rapprochées.

Nouvel arc de cercle. Agitation. Repos. Bras et jambes écartées

en X. Pupilles dilatées, égales (9 h. 48. 11 se relève à 9 h. 49, sans

rien dire, répare le désordre de ses vêtements. La face qui était

légèrement colorée reprend sa coloration naturelle. A 9 h. ? 0, les

pupilles ont diminué. Il se plaint de douleur à la tête et aux reins.

'l'. H. 38»,2.

20 août. - La veille, il a eu une série d'attaques de 8 à 9 heures

du soir. Dans le délire terminal, il ne parlait que de bâtiments de

guerre et de marine; il commandait en chef; il était continuel-

FIYSTIRO-RPI1.I : PSIE. 157 I

lement il son poste ; il fallait sabrer et tuer tout ce qui se trouvait

sur son passage. Il paraît qu'il voyait un chien rouge.

21 août. - Il se couche à 6 heures et demie ou 7 heures. Le plus

souvent, il s'endort très lentement, à 11 heures, 11 heures et

demie ; pas d'hallucinations hypnagogiques. Une fois endormi, il

rêve beaucoup. Ainsi, avant-hier, après son attaque, il voyait le

veilleur se promenant sur les toits, sautant d'un toit sur l'autre.

Une fois, il a rêvé qu'il était poursuivi par des sauvages munis de

fusils, tandis qu'il n'avait qu'une arbalète, mais il leur disait que

son arbalète portait plus loin que leurs fusils. En général, pas de,

cauchemars. Dans la nuit, son sommeil est profond, mais à

partir de 4 heures du matin, « le moindre bruit le réveille ». S'il

ne se lève pas, il se rendort très vite. Parfois, dans la journée,

il a la tête lourde, et a des envies de dormir. Cela lui arrive, sur-

tout quand il a eu beaucoup de vertiges.

Ces vertiges sont revenus depuis le mois de février, mais il en

avait en déjà il y a 2 ans environ. La tête lui tourne, et il lâche

ce qu'il a dans les mains. Parfois, il voit noir avec des petits

points rouges et bleus, d'autres couleurs, ou bien des elJipsesrégu-

lières. Il voit des cercles colorés qui arrivent du côté gauche et

qui, une fois au-devant de l'oeil droit, remontent et disparaissent.

Il ne tombe pas, et reste debout. Il assure ne pas perdre connais-

sance et entendre tout ce qui se dit autour de lui. Il prétend que

parfois il lui arrive de continuer ce qu'il était en train de faire,

mais alors que ce qu'il fait est mal fait. C'est ainsi qu'un jour, il

l'atelier, pris d'un vertige au moment où il taillait un talon, il a

continué à le tailler, mais l'a fait pointu.

Parfois, il aurait une dizainede vertiges dans une journée, d'au-

tres fois.il n'en a pas du tout. C'est surtout avant et après ses atta-

ques qu'il en a le plus.

On essaie d'endormir le malade par le regard. Il est assis; au

bout d'une à deux minutes les yeux commencent à s'humecter, il

y a quelques palpitations des paupières et il lâche les pouces de

l'expérimentateur qu'il tenait serrés. Les paupières s'abaissent t

légèrement, mais il paraît se réveiller. 11 semble imiter les yeux

de l'expérimentateur. Celui-ci, à un moment donné, ayant ouvert

plus largement les yeux, il le fait lui-même aussitôt. Bientôt les

yeux se portent à différentes reprises en haut et en dedans et les

paupières s'abaissent. Il a quelques mouvements de déglutition.

Pas de stertor. La tête elle-même n'est pas tombée. L'excitation

du stcrno-masloïdien ou des muscles de l'avant-bras ne déter-

mine pas de contracture. On cherche à ouvrir l'oeil gauche, mais

il ne reste pas ouvert. On commande au malade de se lever, ce

qu'il fait. Il suit d'abord assez bien, puis s'arrête un moment. On

lui commande de nouveau, il vient, mais lourdement. On le fait

158 UNE FAMILLE D'IIYSTÉRIQUE5.

asseoir et on lui dit de compter ; mais le plus souvent il ne conti-

nue pas spontanément.

Les paupières étant fermées, on soulève le hras droit qui con-

serve l'attitude qu'on lui donne. Le bras gauche soulevé se main-

tient aussi. Au bout d'une minute, ou voit le malade se pencher

sur le côté droit et devenir tout raide. Il était pris d'attaque. Il

n'a pas poussé de cris. Tout le corps est rigide. On le couche sur

le parquet et presque aussitôt, sans avoir eu de secousses cloni-

ques, il fait l'arc de cercle. Il est alors 10 h. 7. Il est ensuite éten-

du, les bras au-dessus de la tête, les jambes allongées, les pieds

écartés. Il est alors immobile, la face rouge, les paupières closes,

les pupilles dilatées. Ecume. Deuxième arc de cercle, puis repos.

Troisième arc de cercle, même repos, même attitude, les poings

fermés. Ce repos est plus long, la tête est droite, les doigts fer-

més, le pouce par-dessus; les quatre membres sont raides, les

jambes écartées. Nouvel arc de cercle, après lequel i ! retombe.

Il fait des grimaces, ouvre largement la bouche, crispe les mains,

se tortille, et se déplace. Il tourne la tête, ouvre et ferme les

mains, cherche à prendre le parquet, qu'il frappe avec le bras.

Quelques secousses des membres inférieurs qui se replient, s'allon-

gent, se soulèvent. Il reprend l'attitude en X, puis reste un peu

immobile. Puis, il ouvre les yeux, regarde d'un air étonné, mâ-

chonne. Interrogé, il dit qu'il a mal à la tête. Les pupilles ont

repris leurs dimensions normales. La durée a été de sept minutes.

21 août. - On l'endort par le regard à 10 h. 37 et on lui fait

exécuter un certain nombre d'ordres les yeux fermés. Par la per-

cussion longtemps répétée des muscles de l'avant-bras, on obtient

une contracture très prononcée des doigts. Il se réveille sponta-

nément, sans mouvements spasmodiques, sans attaque à 10 h. 50

et parait étonné.

27 août. - A 9 h. 21 l'enfant, qui était assis, se lève et tombe

la face contre terre. Ecume dès le début. Il reste immobile, raide,

puis fait l'arc de cercle. Il retombe, se place sur le côté gauche,

puis sur le dos, raide, les bras en croix. Arc de cercle, puis attitude

de crucifiement sans raideur des bras, mais avec raideur des jam-

bes et de la tête qui est tournée à gauche. Puis il frappe le sol de

ses deux poings fermés, le pouce en dehors (9 h. 29). Il déboutonne

sa chemise et se gratte le devant de la poitrine. La tête et les

jambes sont raides; la face est tournée à droite, puis à gauche.

Arc de cercle après lequel il retombe et prend l'attitude du cruci-

fiement, les poings fermés. Raideur générale, tête à droite, pieds

il gauche. Il se relève à 9 h. 36. La durée a été d'un quart d'heure.

Ecume pendant toute l'attaque.

A 10 h. 13, il s'endort au bout de trois minutes par le regard.

On lui ordonne de se lever ; il se lève et suit l'expérimentateur

autour d'obstacles divers (chaises et personnes). On lui trace sur

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE, 159

l'avant-bras droit, en avant, un N avec un crayon. On lui dit qu'il

a cette lettre sur le bras et qu'elle doit saigner demain à 9 heures.

On le réveille en lui soufflant sur les yeux.

28 août. - Hier il a eu deux attaques. Après ces attaques, puis

ce matin encore, il se serait plaint de ressentir une brûlure sur

presque toute la face antérieure de l'avant-bras droit, ce qu'il

explique par une fausse position qu'il aurait prise. Il dit n'avoir

rien ressenti à gauche. Il a eu ce matin une attaque depuis 8 h. 25

jusqu'à 9 h. 20. A 9 heures ni plus tard on ne voit pas trace de

la lettre N sur le bras.

30 août. - Congé jusqu'au 3 septembre. A partir du 4 septembre,

douches deux fois par jour.

8 décembre. - A eu deux attaques à la Sûreté où il avait été

envoyé pour sa mauvaise conduite.

1886. 18 janvia. - Etant en congé depuis le 27 décembre, il

aurait eu deux attaques très courtes.

11 février. Il a eu trois attaques depuis le 28 janvier : le 1er,

le 2 et le 10 février, qui n'ont pas duré plus de deux à trois minutes.

Il travaille chez un cordonnier et sa mère assure qu'on est content

de lui. Il a suspendu ses douches depuis cinq jours à cause du froid.

25 février. - Puberté : Visage glabre. Poils châtains, assez

abondants à la partie inférieure du pénil et à la racine des bourses

dont le reste est glabre. Testicules égaux, de la grosseur d'un oeuf

de pigeon. Verge bien développée. Gland en partie découvrable,

méat normal. Quelques poils à l'anus et aux aisselles. Sensibilité

au contact, à la douleur, à la température, moins vive à gauche

qu'à droite. A eu une attaque le 24 février. Ne travaille plus à l'ate-

lier faute de cordonnerie, parce qu'on manque de cuir.

5 mars. - Il n'avait pas eu d'attaques depuis le 24 février et

n'avait ou que très peu d'étourdissements. quand, ce matin, il

a eu plusieurs vertiges, dont l'un a été très prolongé. Il voyait

tout trouble : « C'est à peine si j'y voyais assez pour me diriger. »

Après sa douche la faiblesse des jambes et les éblouissements ont

disparu. Mais au bout d'une demi-heure il a été pris d'une grande

attaque qui a duré environ cinq minutes. Traitement : douches,

tisane de valériane, bromure de camphre.

Etourdissements : La vue devient trouble, tous les objets tournent

sur eux-mêmes, tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre. Il voit

des cercles ou des ellipses, verts, bleus, jaunes, qui restent fixes.

Pas de bourdonnements d'oreilles. Faiblesse des jambes. Il laisse

tomber les objets qu'il tient, mais continue à marcher machinale-

ment. Durée de moins d'une minute. Il a de un à trois vertiges par

jour, surtout le matin au réveil. Un jour, il en a eu une trentaine.

160 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.

leur avril. - Depuis la semaine dernière, trois où quatre vertiges

au plus. Pas d'attaques. Il se sent bien. Même traitement.

15 avril. A eu une attaque hier, qui a duré dix minutes. Il

est en ce moment placé dans une autre maison.

20 mai. - A eu des crises le 28 et le 30 avril et le 3 mai. L'une

d'elles l'a pris dans la rue. Il n'a pas eu d'aura. Il ne se serait pas

débattu, et elle n'aurait duré que quelques minutes. Les autres

n'auraient pas duré davantage. Il est tranquille et sa mère est

contente de lui. Hier il s'est senti fatigue tout d'un coup en faisant

les courses, s'est assis sur un banc et s'est endormi « d'un coup ».

Il aurait dormi de 10 heures du matin à 11 heures et quart.

18 décembrc. - Depuis le mois de juillet, il n'aurait eu que deux

crises. Après avoir travaillé dans une corroirie, qu'il a quittée

parce que le travail était trop dur, il est resté quelque temps sans

place. Ensuite il s'est mis, pour le compte d'un camarade, ven-

deur de « pronostics ». Il n'aurait pas fait d'excès, ni de boisson, ni

de femmes. Il partit avec son ami pour Dieppe, où ils restèrent

trois jours, puis, s'étant trouvés sans argent, ils sontallés àRouen.

Là, L... écrivit à ses parents qu'il était sans ressources et qu'il les

attendait pour le venir chercher. Ramené par son frère, il resta

trois jours chez ses parents qui le conduisirent à Sainte-Anne.

Pendant son voyage il eut trois attaques.

1887. 3 janvier. - A repris son travail ici et s'est remis aux

douches.

12 avril. - Hier, en sortant du réfectoire, pendant que l'infir-

mier M... était en train de soigner un malade en accès, L... s'est

précipité sur lui et lui a donné de violents coups de poing sur la

figure.

8 août. - A eu une attaque ce matin. Il se plaint d'avoir les

mains fermées à la suite de ses accès et ne plus pouvoir les rou-

vrir. Souvent ses doigts se fléchissent malgré lui et il a de la peine

à les étendre.

13 octobre. - llcfus d'obéissance. Menaces aux infirmiers. Eva-

sion le soir.

20 octobre. - Réintégré à Bicêtre, promet de ne plus chercher

à s'évader.

4888. 2 janvier. - Il prétend qu'à la suite de ses attaques, ses

testicules diminuent un peu.

13 janvier. - Parti en congé le 8 janvier, il devait rentrer le 12.

Le 9, toute la journée, il est resté chez lui avec un de ses camara-

des qu'il est allé reconduire le soir à six] heures. Il n'est pas rentré

pour dîner et sa mère étant allée chez son camarade pour savoir

ce qui était arrivé, apprit qu'ils étaient partis ensemble. Le 10, il

écrivit à sa mère qu'il l'avait quittée pour ne pas lui être à sa

charge et lui demandant pardon.

HYST;RO-EPILEPsm.

161

1888. Janvier. - En quittant sa mère, le 9, il est allé à Arpajon,

sous prétexte de trouver de l'ouvrage, avec Ber... et Leco... Revenu

à Paris, il a été arrêté à la gare d'Orléans et conduit au Dépôt de

la Préfecture de police. Au bout de deux jours, ayant déclaré qu'il

avait été malade à Bicêtre, on l'a envoyé à l'infirmerie de la pré-

fecture de police où il est resté une demi-journée. De là, il a été

expédié au bureau d'admission de l'Asile clinique, puis à Bicêtre.

Envoyé en congèle 1er juillet, il n'est pas rentré. Dans la pre-

mière quinzaine de ce mois, il a eu un jour un vertige et le lende-

main une attaque. Il est resté jusqu'en septembreavecses parents,

s'occupant des soins du ménage. Alors il a travaillé chez un fabri-

cant de boutons. 11 a eu trois attaques en trois jours, et, dans la

crainte d'être renvoyé, il n'est plus retourné àson atelier. A partir

du 26 avril 1889, jusqu'au commencement d'août, il a travaillé

chez lui, à faire des racomm'odages de chaussures, c'est-à-dire

exerçant le métier qu'il a appris à Bicêtre. Il a été ensuite homme

de peine pendant deux mois et demi à l'usine à gaz située près de

son domicile, puis il a été employé pendant trois semaines à

l'abattoir de la Villette. Il a recommencé à faire de la cordonnerie

et, depuis le 25 décembre dernier, il est rentré à l'usine à gaz.

Si nous donnons ces détails, c'est pour montrer combien les ma-

lades comme lui ont de la peine à se fixer.

Voici le tableau des attaques durant son séjour à Bicêtre :

'J6 : ! UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.

ments sur leur famille sont bien vagues et les graves accidents

observés chez la plupart de leurs enfants autorisent à penser

qu'il doity avoir eu, au contraire, des tares profondes. En effet,

seule l'ainée des huit enfants survivants n'aurait pas eu de

manifestations nerveuses. La plus âgée des filles semble avoir

eu des crises hystériques. Un garçon présentait des phéno-

mènes de somnambulisme. Les autres enfants auxquels nous

avons eu l'occasion de donner des soins ont tous présenté des

phénomènes qui relèvent de l'hystérie et dont nous allons

donner une brève description.

N° 2. Lav... (Henriette), 25 ans, bandagiste.

1885. 14 août. - Depuis cinq ou six mois, elle a des points de

côté variable, et des douleurs dans la tête, surtout au niveau des

tempes. Pas de convulsions. Nerveuse, mais jamais d'attaques.

Appétit médiocre. Tympanite passagère. Pas de point ovarien.

Réglée à treize ans et demi, facilement et régulièrement depuis.

Sommeil bon; parfois rêves et cauchemars. A maigri depuis trois

ans. Travaille beaucoup et veille. Ne tousse pas. Sous l'influence

d'un traitement tonique (Fer, gentiane, bains), elle s'est remise

promptement.

Les accidents névropathiques, en somme très légers chez

cette jeune fille, ont été, au contraire, très accentués chez la

suivante.

NI, 3. Lav... (Marie), 13 ans, en 1885; bandagiste..

1885. 23 juillet. - Rien de particulier jusqu'à l'âge de six ans,

époque où elle a maigri sans raison. Il y a deux ans, en avril 1883,

elle a élé soignée pour des douleurs dans le ventre et à la tête.

A toujours été très nerveuse. Fréquents accès de colère. Pleure

facilement et cesse non moins rapidement. Le 9 juillet en ren-

trant de l'école pour déjeuner, elle a été prise à la fin du repas

de « tournoiements de tête » qui auraient duré trois ou quatre

minutes. La vue était brouillée. Elle a senti qu'elle tombait en

arrière et a appelé sa mère qui l'a trouvée renversée sur sa chaise,

les yeux grands ouverts, la bouche béante. Flacidilé générale.

On l'a couchée. Au bout de quelques instants elle a regardé et

repoussé les personnes qui l'entouraient et qu'elle ne semblait

pas reconnaitre. Puis elle est revenue à elle, a reconnu sa mère,

l'a embrassée et s'est mise à pleurer. Aussitôt après, elle est retom-

bée sans connaissance et a été prise d'une nouvelle crise. catalep-

tiforme. Elle aurait eu'cinq crises semblables dans un espace de

quarante minutes. Dans l'intervalle des crises, elle avait les yeux

hagards ; elle voyait les gens et ne les reconnaissait pas.

Elle sent des deux côtés le pincement et le chatouillement, mais

beaucoup mieux à gauche qu'à droite.

HYSTÉR0-ÉP1LEPSIE. 163

Le 12 juillet, nouvelle crise ; le 15 et le 19, nouvelles crises d'une

demi-heure environ. Pas de cris, pas de rigidité. Hallucinations.

6 ao2ît.- Depuis quelques jours, elle se débat violemment dans

ses attaques qui sont devenues plus fréquentes. Elle en a deux

par jour de trente à quarante-cinq minutes. Voici le tableau des

crises :

164 UNIT FAMILLE D'il YSTKRlQUliS.

elle cherche à saisir les objets brillants pour les porter à sa bouche

(durée de quatre à cinq minutes). Elle se donne des coups de poing

sur la poitrine, se serre le cou. Puis les mouvements cessent et elle

est prise de délire. « Ah ! le coquin, je l'attrapperai et le ferai

guillotiner. » Elle voit brûler les jambes de son frère. « Eteins-

donc le feu, maman, on brûle ! » Elle se plaignait ensuite de brûler ^

elle-même. Hier elle a vu une puce sur le nez de sa soeur et lui a

donné un coup de poing. Elle commande à sa soeur d'aller lui

chercher un singe et une tortue d'Amérique. La nature du délire

est ordinairement triste (durée de quatre à cinq minutes). Elle

revient à elle tout d'un coup et demande à manger. Pas de pleurs

ni de rires exagérés. Pas de miction abondante. La sensibilité est

conservée à gauche et très notablement diminuée à droite. Le

ventre présente un peu de tympanisme.

4 août. - Les il, 12 et 13 août, elle a eu 152, 249 et 198 crises,

dont un certain nombre avec grands mouvements d'are de cercle.

Mouvements de rotation sur l'axe, se tournant brusquement

du dos sur le ventre. Elle a perdu connaissance dans toutes les

attaques. - Points hystérogènes : douleur au niveau de l'apo-

physe épineuse de la deuxième vertèbre dorsale, s'irradiant lelong

de la colonne vertébrale, qui présente de la scoliose. Points dou-

loureux au-dessous de chaque clavicule : en comprimant un peu

fortement, elle étouffe. Point mammaire de chaque côté. La pres-

sion de ces divers points ne donne pas la sensation de boule, mais

provoque « comme des coups de marteau n. Elle distingue bien les

couleurs des deux côtés. Ouïe moins bonne à droite. Odorat et

goût, normaux des deux côtés.

26. - La pression sur la région ovarienne droite détermine une

sensation de boule remontant au larynx.

Essais d'hypnotisme par la fixation du regard. Très grande

résistance. Palpitations des paupières; les narines se dilatent;

mouvements de déglutition, mais pas de sommeil.

1er septembre. - Les douches ont été prises régulièrement,

depuis le 15 août. Les crises ont eu la marche suivante :

HYSTEIiO-EPILT.PSIE. 165

166 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.

entendit qu'elle respirait bruyamment « en raclant». S'étant levée

elle la trouva sans connaissance, la face rouge violacée, les yeux

grands ouverts, fixes, la tête immobile, les membres flasques, la

respiration très gênée. On lui a fait respirer de l'éther et elle n'est

revenue complètement à elle qu'à deux heures et demie du matin.

Depuis cette attaque, l'enfant a de la tendanceà dormir après ses

attaques ordinaires.

' HYSTÉRO-ÉPILEPSIE. 167

Elle ne s'est pas débattue. Elles ont été très courtes. Pas de pleurs

après l'attaque, ni de délire.

11 juillet. - Légère attaque le 2 juillet, une autre le 13. Ces

deux crises ont été très légères. Elle dit a Ah ! », se laisse aller,

s'affaisse, perd connaissance. A la fin, nausées. Puis elle s'endort.

Les règles ont reparu le 3 juillet. Elles ont duré six jours. Elle

continue ses douches, les dragées de protochorure de fer (Rabu-

teau), le houblon.

26 août. - Une attaque le 30 juillet chez sa patronne, blanchis-

seuse, à la suite d'une émotion causée par l'épandage d'une

bassine d'eau froide qu'elle mettait sur le fourneau et qui, en tom-

bant sur une surface chaude, répandit une grande fumée. Sa

patronne l'a remerciée de crainte que sa fille, âgée de cinq ans,

n'en eût peur 1. - Le 9 août, trois petites attaques sans cause

appréciable. - Pas de règles en août. Anémie légère. Picotements

dans les seins et les flancs. Sensation de brûlure autour de

l'oreille.

30 septembre. - L'étal reste le même. Dynamomètre Collin :

D. 38. - G. 25. Après des mouvements passifs le côté gauche

amène 28. Après avoir regardé à travers un verre rouge la main

droite donne 26, la gauche 31 ; et après avoir regardé à travers un

verre violet on a à gauche 33, et à droite 34. - A la fin de la

séance la main droite seule donne 29. Elle a eu des attaques le

20 août, les 1er, 28 et 30 septembre et le 6 octobre.

14 octobre. - Une attaque de cinq minutes. Pas de sommeil à

la suite.

2. novembre. - Pas d'attaques nouvelles. Elle est retournée à

l'école, ne prend plus ses douches depuis un mois. - Règles

régulières.

20 décembre. - Une attaque sans cause.

1887. 10 janvier. - Une attaque le 25 décembre et le 3 janvier;

deux, le 4 janvier; trois, le 5; quatre, le 6; trois, le 7; deux, le 8;

une, le 9. Elle prétend n'avoir aucune cause expliquant cette re-

chute. Tristesse de temps en temps, craignant qu'on ne la place à

la Salpêtrière. Sensibilité conservée, normale. Pas de zone hystéro-

gène. Les attaques surviennent toujours brusquement, sans

cause. Elles durent au maximum vingt, au minimum dix minutes.

A la fin des attaques, elle reste le regard fixe et sans voir, dit-on,

pendant environ dix minutes. Mais, si on lui passe la main devant

les yeux, elle a une sorte de soubresaut. L'appétit a diminué. Selles

1 Comme on le voit par l'histoire de Lav. E, et par celle de sa soeur

Marie, on les renvoie dos ateliers, ainsi qu'on les congédie de l'école;

d'où, nous le répétons, la nécessité de l'hospitalisation.

168 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.

régulières. Parfois tympanite. Pas de trouble de la miction. Les

règles sont venues le 22 décembre avec huit jours de retard. Elles

ont été très peu abondantes et ont duré quatre jours.

27. - Une attaque les 10, il et 18 janvier. Rien depuis le 19. La

malade a pâli ; elle perd beaucoup de ses forces. Les muqueuses

sont un peu pâles. Elle recommence à voir devant l'oeil gauche

des cheveux qui passent. Sa vue se brouille. Les règles n'ont pas

paru le 22. Sommeil prolongé et lourd, sans cauchemars.

3 mars. - Nouvelles attaques le 3, le 4, le 5 et le 10 février.

5 août. -Marie n'a pas eu d'attaques depuis le 10 février. Réglée

périodiquement. Appétit régulier. Travaille bien. Zone hystérogène

dans la région ovarienne droite. La sensibilité parait normale des

deux côtés. Rachialgie légère au niveau de la cinquième côte dor-

sale avec irradiation dans l'épaule gauche. Envies de pleurer assez

fréquentes. Exigeante. Continue les douches.

22. - Pas d'attaques. Le 17 août, engourdissement de la main

gauche et du poignet qui a disparu au bout d'un quart d'heure

après des frictions. Les engourdissements sont revenus tous les

jours durant quelques minutes. Pas de contractures.

1889. Décembre. - Depuis le mois d'août 1887, jusqu'à la fin de

l'année, il lui est arrivé deux ou trois fois de se trouver mal sans

avoir de grandes attaques. En 1888, elle n'a eu ni crises, ni ver-

tiges, ni syncopes, mais elle était nerveuse et colère. Elle s'est

mariée le 12 février 1889 et est accouchée d'une fille vers le milieu

du mois de décembre. Elle n'a pas eu d'attaques. Durant cette

période elle a travaillé d'abord chez un bandagiste avec sa soeur,

puis a été trois semaines blanchisseuse. Ce métier étant trop

fatigant, elle s'est remise aux bandages. Actuellement elle tient un

hôtel meublé à Saint-Etienne.

Nous nous bornerons à mentionner : les mouvements de

rotation sur l'axe du corps, l'hémianesthésie gauche, la pré-

dominance des phénomènes de l'aura du même côté, les atta-

ques syncopales, l'arc cercle, les hallucinations, le délire de

parole, les tentatives pour mordre les personnes qui l'entou-

rent, ou pour se frapper elle-même. Disons enfin, que c'est aux

douches et aux toniques que nous avons dû la disparition des

crises nerveuses. ? 4. Lav... (Joseph), onze ans, en 1886; lablettier.

1886. 8 mars. L'enfant qui d'habitude n'est pas peureux, et

dort bien, a été pris, au moment d'aller à l'école, où il va volon-

tiers, d'un malaise, puis il s'est mis à sauter comme s'il avait des

secousses dans les épaules. Il faiblissait sur ses jambes. Le soir, il

HYTÉR-LO -ÉpiirpslE. 169

tremblait encore. Tout lui faisait peur, il ne voulait pas rester seul

dans sa chambre. Il se plaignait que, en marchant, ses doigts de

pieds restaient raides dans ses souliers. Le visage était altéré, les

yeux hagards, le son de voix changé. Il a mangé un peu. Il a uriné

dans son pantalon sans s'en apercevoir. Une fois couché avec son

petit frère, il voyait des gendarmes qui emportaient des femmes

mortes, un homme qui emportait sa soeur Marie. Pendant la nuit,

en dormant, il a encore eu des secousses. Le 9 mars, il n'a pas eu

de secousses, mais la figure était encore un peu égarée. Le 10, il

aurait eu quelques secousses, mais très faibles. - Traitement :

bains alcalins, tisane de houblon et de valériane, bains de pieds

tous les soirs.

25. - Pendant huit jours, les peurs et les secousses ont à peu

près complètement disparu. Depuis cinq ou six jours, il est rede-

venu très peureux. Les mouvements sontbrusques. Sommeil agité,

remue beaucoup. Urine parfois au lit (7 à 8 fois depuis le le, jan-

vier).

ler avril. - Il est tranquille dans le jour. Le soir, ses peurs aug-

mentent. S'il est assis, par exemple, en train de travailler, et que

quelqu'un ouvre la porte, il est aussitôt pris de peur, s'empare du

premier objet de défense qui lui tombe sous la main, et se préci-

pite vers la personne qui vient d'entrer. Il la saisit par le bras et

la menace en poussant une sorte de gémissement menaçant. Aus-

sitôt que la personne lui a parlé, sapeur cesse. Il se met à pleurer

en disant qu'il a fait du mal. S'il rentrait dix personnes de suite,

il avait dix fois les mêmes crises. La nuit, sommeil agité, rêves,

mais non cauchemars. Fonctions digestives régulières. Légère

céphalalgie frontale droite. Il a pâli un peu, les yeux sont souvent

cernés. Pas d'onanisme. Pas de vers. Il n'a pas d'accès de colère,

n'est pas méchant. Il continue à aimer jouer et n'est pas devenu

plus irritable. - Traitement : bromure de camphre, tisane de

valériane, bains de pieds, bains alcalins.

15. - Amélioration notable. N'a plus de peurs. Retourne à

l'école. Il est un peu plus irascible qu'autrefois. Lui qui était très

doux, il a des tendances à devenir méchant.

1889. Décembre. -II Il n'est plus peureux, mais il est toujourssujet

à se mettre en colère. Parfois il rêve et cause tout haut, mais n'a

plus de cauchemars. Développement physique un peu arrêté.

N° 5. Lav... (Paul), neuf ans.

1885. fer octobre. - Le soir en mangeant il a perdu complète-

ment connaissance. On l'a porté sur un lit et il a eu huit crises ce

jour-là, de cinq heures et demie à huit heures et demie, sans

cause appréciable. Pas de cri initial. Il cherche dans ses crises il

marcher sur les mains et sur les pieds, les appuie contre le mur,

cherche à mordre. Revenu à lui, il s'est souvenu de ce qui s'était

170 UNE FAMILLE D'HYSTÉRIQUES.

passé, disantà sa mère qu'il avait dû lui faire mal, et qu'il l'avait

mordue. C'est la première fois qu'il aurait été malade. Il n'a

jamais eu aucune affection dans son enfance. Il n'est pas peureux.

Traitement : tisane de valériane, bains.

17 décembre. - Depuis la dernière visite il a eu trois crises le

trente novembre. Elles auraient été très légères. Depuis le débulde

ses accidents nerveux, il travaille moins bien. La sensibilité parait

égale des deux côtés. Pas de point hystérogène, pas de rachialgie.

11 est devenu peureux depuis ses crises. Par moments, il a de la

boulimie; d'autres fois, on ne peut lui faire manger quoique ce soit.

1886. il février. Il se plaint d'un point douloureux entre

l'ombilic et les fausses côtes gauches.

26. - Il n'a pas eu de crises. Persistance du point douloureux

dans le flanc gauche, assez peu intense du reste. Appétit irré-

gulier.

1887. 4 avril. - Depuis cinq mois l'enfant a, la nuit, des tres-

saillements. D'autres fois, il a des soubresauts, mais moins

fréquents. Ces tressaillements dureraient presque toute la nuit,

passant d'unerégion aune autre. Pas depeurs,pas de cauchemars,

pas de céphalalgies, pas de nouvelles attaques. Sujet à se mettre

en colère. -Traitement : bromure de camphre (Dr Clin) et tisane

de valériane.

5 août. - Les tressaillements ont diminué au bout de cinq jours

et ont disparu complètement au bout de dixjours. Il boit et mange

bien. Grande irascibilité.

1889. Décembres Il n'a plus eu aucun accident nerveux. Il est

resté un peu irascible. Il est obéissant et affectueux. Il est plus

grand que son frère. 1

Les accidents observés chez ces deux jeunes garçons sont

incontestablement de nature hystérique, comme ceux que nous

avons relevés chez Eugène et chez Marie. On retrouve chez le

dernier un certain nombre des phénomènes bizarres signalés

dans les épidémies de possession démoniaque. Revenons main-

tenant à notre principal malade.

II. Dans ses antécédents personnels, nous relevons : des

convulsions internes se manifestant à six reprises de l'âge de

trois semaines à quatre mois ; des accès de cris nocturnes d'un

à cinq mois ; à onze ans, une fièvre typhoïde compliquée de

délire et le laissant plus nerveux qu'auparavant ; à douze ans

et demi, il est pris d'un étourdissement avec hallucinations,

suivi d'une fugue inconsciente; enfin, à quatorze ans, à la

HYSTÉRO-ÉPILEPSIE. 1 -Il 1

suite d'une colère vive, se manifesta la première attaque d'hys-

téro-épilepsie.

III. Ce malade présentait une hémianesthésie incomplète

à gauche et des zones hystérogënes les phénomènes de l'aura

se manifestaient du même côté; il était sujet à des attaques et

à des vertiges. Ceux-ci, quelquefois très nombreux, se mon-

traient surtout avant et après les attaques. Nous en avons

donné la description. Contrairement aux vertiges épileptiques,

ils n'exerçaient aucune influence sur les facultés intellectuelles.

Dans les attaques, nous relevons seulement le cercle, l'attitude

du crucifiement et les tentatives que le malade faisait pour se

déchirer avec ses dents. Les essais d'hypnotisation n'ont donné

que des résultats partiels.

IV. - Le traitement que nous avons employé chez lui a

consisté, ainsi que chez les malades dont nous avons rapporté

l'histoire antérieurement, en des exercices de gymnastique et

des douches.

IV.

Nouvelle observation d'idiotie

myxoedémateuse

(CACHEXIE P : 1CII1'DEItItIQUH ?

I'ar$OLJRP1TTVILLIE

Depuis les dernières observations que nous avons insérées,

dans les Archives de Neurologie (1886, t. XII, p. 137; 1888,

t. XVI, p. 431 ; 1889, t. XVII, p. z 1), nous avons communiqué

à la section de médecine de l'Association française pour l'avan-

cement des sciences (séance du lli,aoùt 1889), un mémoire relatif

à trois cas empruntés à MM. Gimeno, Ernest Holt et Suckling et

à cinq autres cas recueillis par nous 2. Ces huit cas, additionnés

avec les dix-sept que nous avions rassemblés précédemment,

forment un total de vingt-cinq cas auxquels nous allons ajouter

le suivant qui, par ses caractères tout à fait typiques, mérite

d'attirer sérieusement l'attention de nos lecteurs.

Observation. - Père tuberculeux ( ? ). - Oncle maternel paralysé,

aliéné et sujet probablement à des accès d'épilep.sie. Frère et

soeur morts tuberculeux. - Scieur slz·ccbiqzvc à la suite de convul-

sions de l'enfance; morte tuberculeuse.

Renseignements incomplets sur les antécédents du malade. - Marche

à dix-huit mois. - Propre de bonne heure. - A1Têt de déuclop-

piment, bouffissure et épaississement â paz·tir de trois ans. Etat

du malade au 1er février 1890. - Lésions scrofuleuses et rachi-'

' Voir aussi le Compte rendu du service de la section des enfants de

Bicêtre, pour 1886, p. 1 à 104, et pour '1888, p. 1 à 16.

°- Compte rendu de la 18" Session, I·" partie, p. 3665 et Progrès Midi-

cal, 1889, 17 août, p. HU. C'est ce travail qui est reproduit à la page 59.

. cachexie pachydermique. 173

tiques. - Absence de la (}lande. thyroïde, symptômes classiques de

l'idiotie myxcedézzzateuse : pseudo-lipomes ; persistance de la fonta-

nelle antérieure ; hernie ombilicale; eczéma ; arrêt de développement

physique et intellectuel ; parole, voix, etc.

Debar... (Jules), né à la Ventie (Pas-de-Calais), le 6 octobre

1865, est entré le 23 février dans mon service, à Bicêtre. Ce malade

nous a été envoyé par M. le D'' lloizard, médecin de l'hôpital Tenon,

qui l'avait reçu dans ses salles en même temps que sa soeur,

atteinte d'une pleurésie. C'est elle qui a fourni à notre ancien

interne, M. Camescasse, les renseignements suivants sur sa

famille.

Antécédents. - Père, ouvrier dans une fabrique de toile, sujet à

des hémoptysies ; grand, fort, brun, sobre, d'un caractère doux,

n'ayant pas d'accidents nerveux. Il est mort en 1873, à l'âge de

quarante-cinq ans, d'une hémorrhagie (probablement une hémop-

tysie), en deux heures. [Père mort vers quatre-vingts ans. -

Mère, pas de renseignements. Deux soeurs seulement, bien

portantes ainsi que leurs enfants (un garçon et trois filles).]

Mère, morte en 1877, à quarante-quatre ans, d'une maladie d'in-

testins, journalière à la campagne, sobre, sujette à des maux de

tête. Elle était d'une taille moyenne, forte, brune et d'un carac-

tère très doux. [Père et mère, aucun renseignement. Un frère,

mort à soixante-six ans, était paralysé. Il avait une bosse dans le

dos, consécutive à un effort et serait resté alité pendant douze ans,

de quarante-six à cinquante-huit; puis il a pu marcher jusqu'à sa

mort. Il avait des idées tristes, croyait toujours qu'il allait mourir, il

était sujet à des attaques de nerfs avec chute, dans lesquelles il se

raidissait, se débattait, et suivies d'un moment d'hébétude. Parfois,

il avait une mousse blanche à la bouche. Il s'était marié avec une

femme plus âgée que lui de vingt-neuf ans, dont il n'a pas eu

d'enfants. - Pas de soeur. - Aucun autre détail.]

Pas de consanguinité (père du Pas-de-Calais, mère de la

.Manche). Inégalité d'âge d'environ deux ans.

Cinq enfants : 1° Garçon, grand, fort, intelligent, mort à vingt-

sept ans d'une affection pulmonaire aiguë, probablement de nature

tuberculeuse. Il s'était marié et avait eu un enfant mort à deux

ou trois mois ;

2° Fille morte à dix ans, après quinze jours de maladie consé-

cutive à une peur occasionnée par la vue de la chute de sa soeur

dans l'eau. Elle était grande et bien constituée pour son âge;

3° Fille, - celle qui nous renseigne - âgée de trente-sept ans,

d'une taille au-dessus de la moyenne (1 m. 70), paraissant assez

forte, d'une physionomie régulière, plutôt agréable. Elle a eu dans

son enfance des convulsions qui ont laissé un léger strabisme. Elle

174

IDIOTIE MTXOEDEMATEDSE.

a eu une fièvre typhoïde à-deux ans, en même temps que son. père

et trois de ses frères ou soeurs. Jusqu'à vingt-huit ans, elle a. tra-

vaillé dans les champs, puis, pendant trois ou quatre mois, elle a

promené son frère dans les foires avec des saltimbanques. Durant

ces pérégrinations, elle a contracté un rhumatisme articulaire pour

lequel. elle a été soignée à l'hôpital de Lille. Ensuité, elle s'est

placée comme servante dans la même ville jusqu'en 1888, époque

où elle a recommencée exhiber son frère dans les marchés et les

foires, sous le titre de Roi des Esquimaux. Vers le milieu de janvier

1890, elle est tombée malade, est entrée à Tenon à la fin de ce

mois pour une pleurésie avec tuberculose du poumon gauche. Elle

a succombé le 13 février'; -

1 Nous aurions voulu avoir des renseignements plus détaillés,. mais elle

ne. paraît pas avoir de parents à Paris, car. son corps n'a pas été réclamé.

Fig. 19 - Deb... avec sa pipe et sa canne.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 175

0,

4° Fille morte à cinq ans, au bout de quinze jours, d'un refroi-

dissement. Elle était grande, forte et intelligente.

5° Notre malade. Les renseignements que nous possédons sont

très vagues. Il a été élevé par sa mère, a marché à dix-huit mois,

a été propre de bonne heure et n'aurait rien présenté de particu-

lier jusqu'à l'âge de trois ans. Il causaitet jouait comme les autres

enfants, dit-on. C'est à partir de trois ans qu'il s'est arrêté dans

son développement et qu'il est devenu gros et bouffi. Il mange

presque seul, à condition qu'on lui coupe sa viande. Il a toujours été

sujet à la constipation et reste quelquefois six semaines sans aller

à la selle. On n'a jamais essayé de lui apprendre à lire. La parole

est assez limitée comme nous le verrons tout à l'heure, ce que sa

soeur attribuait à ce qu'il sait qu'il prononce mal les mots. Il

coud avec une certaine habileté. Il fume la pipe et la cigarette.

État actuel (février 1890). - L'aspect général et la physionomie de

ce malade rappellent de la façon la plus complète ceux de tous les

autres malades dont nous avons publié l'histoire (Fig. 19, 20, 21,22).

Taille, 0m,915; poids, 24 kil. 800.

Tête. - Elle est ovoïde avec prédominance très accusée de la

région occipitale, saillie prononcée des bosses pariétales et rétré-

cissement du front. La fontanelle antérieure n'est pas entièrement

ossifiée; on sent très bien à son niveau une dépression de deux à

trois centimètres de longueur et d'environ un centimètre de lar-

geur. - Les cheveux sont d'un brun tirant sur le roux, longs,

gros, rudes, semblables à une crinière. Ils sont abondants en

arrière et au niveau des pariétaux, au contraire rares au-dessus

des bosses frontales. Entre les places presque dénudées, il y a un

toupet assez fourni. Un peu à droite du vertex, les cheveux sont

plus clairsemés. Le cuir chevelu est le siège d'une éruption eczé-

mateuse (petites croûtes jaunâtres, squames, etc.).

476

IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

cinq millimètres il droite, un peu moindre à gauche. Les cils

sont longs et assez nombreux aux paupières inférieures. Il

existe des deux côtés un peu de blépharite ciliaire. Les conjonc-

tives sont saines; les cornées présentent toutes deux une petite

taie. Les iris sont bleus.

Le nez est camus, très court et large (25 millim. de longueur et

4, cent, de largeur) ; la racine est écrasée; les narines sont un peu

relevées et triangulaires.

Les régions malaires sont saillantes. Les joues sont volumineuses,

gonflées, lipomateuses, ballottantes.

La bouche est assez large (5 cent.). Les lèvres sont très sail-

lantes, ce qui tient à un prognathisme très accusé. Elles sont bleuâ-

tres, très épaisses, l'inférieure plus que l'autre (15 millim.); celle-

Fig. 20.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 177

ci est en outre un peu renversée. Le menton n'existe pour ainsi

dire pas; il est tout à fait déprimé, comme s'il avait été aplati

horizontalement au niveau du bord cutané de la lèvre inférieure.

Dans son ensemble, la face est carrée ; la moitié droite semble

un peu plus développée que la gauche; mais l'asymétrie, en tous

cas, est peu prononcée.

Les oreilles sont pâles, assez bien ourlées et le lobule est dis-

linct ; hauteur, 55 millimètres; largeur, 35 millimètres. Elles sont

en outre épaisses, translucides, comme si elles étaient infiltrées. Il

s'agit là, comme toujours, d'un faux oedème.

Système dentaire. - Mâchoires normalement développées;

denture irrégulière, offrant la réunion de presque toutes les ano-

malies.

Mâchoire supérieure. - Côté gauche. Incisive centrale perma-

nente, large et complètement évoluée. - Incisive latérale, de vo-

lume ordinaire, déviée par une rotation sur l'axe, de dedans en

dehors et d'arrière en avant, d'environ 45 degrés. Canine de lait.

Prémolaire permanente normale, à pointes très aiguës. Pne-

mière grosse molaire en cours d'évolution. Un tiers environ de la

hauteur normale de la couronne apparaît hors de la gencive.

Côté gauche. L'incisive centrale est placée sur un plan légère-

ment antérieur par rapport à la dent correspondante du côté z

gauche, elle est large et a atteint à peu près sa longueur normale :

malgré cela, elle est entièrement recouverte par la muqueuse dis-

tendue et laisse voir la dent par transparence, comme à travers

une membrane mince de caoutchouc fortement étirée et près de

se rompre. Cette disposition ne parait s'accompagner d'aucune

douleur (spontanée ou provoquée). L'incisive latérale a subi une

déviation égale et symétrique par rapport à la dent correspon-

dante du côté gauche (rotation sur l'axe de 45 degrés de dedans

en dehors et d'arrière en avant). - Canine de lait. - Deux pré-

molaires comme du côté gauche. Pas de grosse molaire.

Mâchoire inférieure. - Dents antérieures très écartées, projetées

en avant et divergeant en éventail. Les quatre incisives appartien-

nent à la deuxième dentition; leur volume est normal. - Canines

de lait. - A droite et à gauche, après la canine, est un espace

vide. Après cet espace vide, se trouve un tubercule à sommet

mousse, d'un jaune sale, fortement et profondément érodé, haut

d'un demi centimètre environ, d'une largeur à peu près égale au

collel et affeclant très grossièrement la forme conique. Après cet

organe un nouvel espace libre qui correspond il l'emplacement de

la première grosse molaire permanente. La seule grosse molaire

Bourneville, Bicêtre, 1889. 12

178

IDIOTIE MYXOEDEMATEUSE.

que l'on trouve la mâchoire inférieure est située très en arrière-

et occupe la place de la grosse molaire de 13 aus'.

Articulation. - Prognathisme inférieur.

Le cou est extrêmement court et gros (0,565mm). En avant, sous

lé doigt, on sent très nettement les cartilages du larynx et de la

trachée : il ne parait pas y avoir de glande thyroïde. Des deux côtés

du cou existent deux masses lipomateuses, tremblotantes, qui ne

1 Il a été impossible, par suite de la résistance du malade, d'exa-

miner la disposition des tubercules de la face triturante de cette grosse

molaire. Cet examen, en admettant que la conformation de la dont fût nor-

male, aurait indiqué si on avait affaire à la première ou à la deuxième

grosse molaire permanente.

F¡,g. 2 ! . 1.

F,1. 22.

CACHEXIE PACHYDE10nQUE. J : 8 â)

laisse pas d'empreinte, de la dimension d'un oeuf de poule, s'apla-

tissanl par la pression et contribuant encore à faire paraître le cou

plus court. On dirait que la tête s'enfonce dans le thorax.

Thorax. - La partie antérieure est proéminente, le sternum

faisant un angle aigu de 25 degrés environ avec la verticale. Les

eûtes sont saillantes, la base de la poitrine est élargie au niveau

des fausses côtes qui sont rejetées assez fortement en dehors. En

arrière, la partie supérieure du thorax forme une convexité très

accusée, surtout au voisinage de la colonne dorsale. La colonne

vertébrale est sinueuse, la portion dorsale forme une convexité

beaucoup plus prononcée que d'habitude, principalement au niveau

des deux tiers supérieurs du thorax. Au-dessous de celte convexité

on note une ensellure très marquée. De plus, la colonne dorsale

décrit une légère convexité à gauche.

Il existe des masses lipomateuses sur les parties latérales et

inférieures du tronc, ainsi que dans le creux axillaire.

180 IDIOTIE \II\Q : UGnI1'PEC'SE.

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 181

fluence de la constipation, il s'est produit des hémorrhoïdes de la

dimension d'une petite noisette. D... n'est pas vorace; il est très

difficile pour la nourriture. Il est friand de poulet, de pruneaux et

d'oeufs durs.

La respiration, à 80, est un peu gênée et accompagnée d'un

petit ronflement nasal. Les battements du coeur sont réguliers,

un peu lents et sourds; le pouls radial est petit, très difficile à

sentir.

Les urines ont été examinées à plusieurs reprises; leur densité

est de 1018, leur réaction faiblement acide; elles ne renferment

ni sucre, ni albumine.

La sensibilité générale est normale. Deb... est très sensible au

froid. - Sa température rectale a été prise du 12 au 21. Voici les

chiffres :

182 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

sa journée et son point est régulier. Il n'aide en rien pour sa toi-

lette. 11 sait le nom de la plupart des objets qui l'environne. Il ne

connaît aucune lettre; fait sur l'ardoise des 11, des o, des Il et des

chiffres. Il distingue le rouge, le bleu, le blanc et le noir.

Si on lui donne un objet qui lui fasse plaisir, par exemple une

cigarette, il sourit; sur invitation, il fait une révérence en souriant.

Sa physionomie hideuse exprime d'ordinaire l'indifférence, même

l'hébétude (fig. 22, 23, 24.) La laideur parait encore plus grande lors-

qu'on l'examine de profil (fig. 24); son profil rappelé le groin du

cochon. D... reste toute la journée assis sur une chaise auprès du

feu, jamais il ne demande à se promener. Parfois il réclame du

tabac et fait signe qu'on lui bourre sa pipe. Son appétence pour le

tabac est d'ailleurs modérée. Questionné sur ce qu'il faisait avant

son entrée à l'hospice, il a eu un mouvement d'impatience, a levé

les épaules et tourné le dos. De temps en temps, il regarde ce qui

se fait autour de lui, mais le plus souvent ne s'en préoccupe pas.

Son attention est facile à fixer; il parait assez affectueux. Il s'est

choisi un autre enfant comme camarade et n'aime pas que les

autresenfants viennent autour de lui. Dès qu'il est habillé, il prend

sa chaise et la glisse près du feu; il en prend une seconde qu'il

place devant lui et sur laquelle il pose son ardoise et ses pipes.

Réflexions. I. Les renseignements très incomplets que

nous possédons sur la famille et sur les antécédents person-

nels du malade, ne nous éclairent nullement sur l'élrologie.

Rappelons seulement l'existence de la tuberculose chez le père

de Deb., un frère et une soeur.

II. Dans ce cas, de même que dans quelques autres, les pre-

miers symptômes, de la cachexie pachydermique, due et l'ab-

sence congénitale de la glande thyroïde, auraient été constatés

vers trois ans; auparavant l'enfantparaisaait avoir un dévelop-

pement normal. Peut-être serait-il possible d'en induire que

l'apparition de la cachexie pachydermique est retardée par

l'alimentation lactée et qu'elle se manifeste au sur et à mesure

que l'enfant est soumis à l'alimentation ordinaire.

Une connaissance précise de l'action physiologique de la

glande thyroïde est seule capable de trancher la question.

III. Nous croyons superflu de relever chacun des symptômes

du myxoedème. Ils se rencontrent tous ici : aspect général,

conformation de la tête, état du cuir chevelu (cheveux-crins.

brun-roux, eczéma, persistance de la fontanelle, etc.; bouf-

fissure et faux oedème des paupières, des joues, des mains, des

pieds, etc.; présence des pseudo-lipomes, absence de la glande

CACHEXIE PACHYDERMIQUE. 183

thyroïde; volume exagéré du ventre, hernie ombilicale; ab-

sence des appétits sexuels, démarche lourde, pesante, physio-

nomie spéciale, voix rauque, aigre, désagréable, constipation

opiniâtre, arrêt de développement des organes génitaux, etc.

IV. Relevons cependant d'une façon particulière, l'existence

chez B..., comme chez la plupart de nos autres malades,

de lésions scrofuleuses et de déformations rachitiques, inté-

ressant surtout la colonne vertébrale, et les membres,

complications qui montrent combien est profonde l'atteinte

portée à la nutrition par l'absence de la glande thyroïde.

V. Tous les idiots myxoedémateux que nous avons observés

présentent la même physionomie hébétée, lourde, sans expres-

sion. Ce ne sont pas des idiots complets. La parole, toujours

plus ou moins imparfaite, existe à des degrés divers. Il en est

de même de lamémoi1'e. L'attention, elle aussi, peut être fixée.

La compréhension est lente, mais non absente. Aussi ces ma-

lades sont-ils susceptibles d'une certaine éducation : tous de-

viennent propres, parviennent à manger seuls, quelques-uns

même à se laver, s'habiller, coudre (exemples Graf.. et Deb..),

à aider aux soins du ménage. Aucun d'eux n'offre les tics si

fréquents et si multiples chez les idiots par méningite, sclé-

rose, arrêt de développement des circonvolutions, etc.

VI. Le traitement que nous avons institué dans les cas de ce

genre consiste, au point de vue pédagogique, en l'application

des méthodes spéciales d'éducation pour les enfants arriérés

et au point de vue médical en toniques, antiscrofuleux, bains

salés, douches et gymnastique.

A la suite de notre communication à l'Association française

pour l'avancement des sciences, nous avons reçu le 15 août, de

M. le Dl' Arnaud (de Saint-Gilles), qui avait assisté à la séance,

une lettre dans laquelle il soumet à notre appréciation un

mode particulier de traitement qu'il est bon de signaler :

« M. Brown-Sequard, dit-il, pense, non sans raison peut-être, que

les glandes ou du moins quelques-unes d'entre elles, ont une ac-

tion encore inconnue sur la- nutrition, par suite de certains prin-

cipes qu'elles verseraient incessamment daus la circulation. N'en

serait-il pas de même du corps thyroïde ? Dès lors on s'explique-

rait facilement la cachexie consécutive - à l'absence de cette

glande.

« En outre, cette théorie pourrait conduire à un traitement ra-

'184 IDIOTIE MYXOEDÉMATEUSE.

tionnel de la cachexie pachydermique, le traitement par les injec-

tions sous-cutanées (ou même peut-être par l'absorption intesti-

nale) de certains principes empruntés à la glande thyroïde. »

Nous n'avons pu essayer ce mode de traitement, n'ayant

plus dans notre service, avant l'admission de Deb..., qu'un

imbécile myxoedémateux, Gra..., âgé de 33 ans. C'est peut-

être il tenter. Nous rappellerons à ce propos que, d'après

Schifr, la greffe péritonéale de la thyroïde procurerait aux

chiens une immunité presque complète contre les suites de la

thyroïdectomie totale'. Ses expériences ont été répétées toutré-

cemment par MM. Anton von Eiselshern et Horsley. Il en

résulte encore un nouveau mode de traitement àexpérimenter,

mais de préférence, suivant nous, chez des malades encore

jeunes2.

. Schiff (.\1.). Résumé d'une série d'expériences sur les effets de

l'ablation des corps thyroïdes (Rev. méd. de la Suisse romande, lév. et

août 1884).

Bien que ce travail ait paru dans le na des Archives de Neurologie du

1" février 1890, nous avons cru utile de l'insérer dans le Compte rendu

de 1889, afin de le rapprocher du mémoire sur le même sujet qui figure

dans ce volume.

1 Archives de Neurologie T XVIII PL 1

A A

Leuba hth

Imp Becquet fr Paris

EXPLICATION DE LA PLANCHE.

1° Circonvolution vascularisée anormalement (Enderl.).

Les capillaires, au lieu d'être perpendiculaires à la surface (A)

de la ciconvolution, sont rameux, anastomosés, et remanient

complètement le plan des trois premières couches de l'écorce,

qui ne sont plus reconnaissables (B). Plus bas (C.), la sécrétion

longitudinale commence à reprendre (baume).

2° Lobe occipital (Schad.). - De la pie-mère (A) partent des

vaisseaux qu'on voit entourés de masses opaques, contenant

beaucoup de noyaux constituant le premier degré d'une tache

de désintégration (B). La limite entre la première et la seconde

couche de l'écorce, très nette d'ordinaire, est ici confuse

(picro-carmin, haume).

3° Petit foyer scléreux, irrégulier, comprenant la seconde et

la troisième couche de la substance grissc (A) et donnant à la

surface de l'encéphale un aspect froncé (\iaisonhautc. Tout t

autour, les vaisseaux sont dilatés et la sériation des couches

est troublée et méconnaissable (picrocarmin, glycérine).

i° Coupe du lobule paracentral (Robèch...) au niveau de

l'union de la substance grise et de la substance blanche, pour

montrer la rareté des cellules pyramidales à leur lieu d'élec-

tion (A) et la vascularisation développée jusqu'au niveau de ces

couches (hématoxyline. baume de Canada).

ERRATUM.

A la page 49 au lieu de Deuxième partie, il faut lire troi-

sième partie.

TABLE DES MATIERES

PREMIERE PARTIE -

HISTOIRE DU SERVICE PENDANT L'ANNEE 1889

1. Sit2cdti011 du seruice, enseiglle)2ent prilnaire... III

Enfants idiots, gâteux, épileptiques, invalides.. III

Enfants gâteux, idiots, valides. Petite école.. IV

Enfants propres et valides, imbéciles, arriérés,

etc. Grande école ........................... v

Promenades et distractions .................. VI

Visites, permissions de sorties, congés....... vin

Vaccinations et revaccinations ............... VIII

Service 'dentaire ............................ VIII

Bains et hydrothérapie ...................... lx

Améliorations diverses ...................... lx

Visites du service ........................... x

Maladies épidémiques ....................... m

Influenza ................................... XIII

Musée pathologique ......................... XIII

11..Enseignement professionnel .................. xv

Evaluation du travail ........................ XVII

Progression du travail....................... xix

In. Statistique - Mouvement de la population.... xix

Décès....................................... xx

Sorties, Evasions, Population au 31 décembre

1889 ......................................... xx

Personnel du service en lSS9 ................. w

IV. La nouvelle section. - Construction des trois

deniers pavillons.......................... xxx

v. Consultation externe. - Placement de ? enfants

Tmnsfe1'ts et rappel d'une ancienne délibéra-

tion du Conseil général ...................... XI

Mort de JI. Gallois.......................... xi

vi. Aliénés mi1ww's et enfants idiots.............. XV

vu. De l'Assistance des enfants idiots il. l'étralzgei ? XLVI

vm. M01't et obsèques du Dr B1'icon ................ L

Thèses de 1889 .............................. LVI

188 TABLE DES MATIÈRES.

DEUXIÈME PARTIE

1 . THÉRAPEUTIQUE.

1. Bromure d'or ................................. 3

IL Bromure de camphre. , .. , .. , . , ... , , . , .. ; .... , . 27

ni. Picrotoxine.................................... 33

TROISIÈME PARTIE

CLINIQUE ET ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

1. De t'idiotie )TH/A'oedë))).ate(.Me.................. ? )t \

Des différentes formes de l'idiotie ............ 1

Cas anciens d'idiotie myxoedonateusc........ : riz

Cas nouveaux........ , ........ , ... -' ... , ..... ;)'1 !

Résume nosograpliiquc...................... 100

Synonymie... ? .................. ? ........ ! (1(t

Causes............ ? ... ? ... ? .......... 100 ? 8exeetnationalité....,... ? ...-............ I lli

w Début.................. ? ... ? ............ 1 O. ! ,

Symptômes............ ? .................. 10 ? 2

Maladies intercurrentes ..................... 1 O r

Maladies terminales ......................... 1 Or. "

' Anatomie et physiologie pathologiques....... 1()6

Diagnostic....... ; .... ; ............ , - ....... 107

Traitement.................................. 11` ?

o, Contribtttion t'étude des lésions histologiques

- de la substance grise dans les encéphalites

chroniques de l'enfance, par PiLDET ......... 113

m. Une famille d'/n/sfërtques (jeunes garçons et jeu-

nes filles), par BOURNEVILLE et P. SOLLIER.... il,,

1\'. Nouvelle observation d'idiotie myxoedémateuse,

par BOUHNEVILLE ? ............ ? 172 -2

Explication de la planche.................... t85

paris. - IMP. V GOUPY et jouhdan, nou de rennes, 71.