(1904) Archives de neurologie [2ème série, tome 18, n° 103-108] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales
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(1904) Archives de neurologie [2ème série, tome 18, n° 103-108] : revue mensuelle des maladies nerveuses et mentales

ARCHIVES

DE E

NEUROLOGIE

ARCHIVES .

D It

NEUROLOGIE

, REVUE MENSUELLE .

DES MALADES NERVEUSES ET MENTALES

FOND Itl PAR J.-lI. CIIARCOT

1`UISLIIsN SOUS LA DIfIF : C'l'ION DR 1111.

A. JOFFROY

Piolesscur de clinique

des

ma1nùles mentales

à la (-'acuité de médecine

'ie Pm is

V. MAGNAN

Membre de l'Académie

de médecine

Médecin de l'Asile clinique

(Sle-Allllc).

F. RAYMOND

Professeur de clinique

des maladies

du système nerveux

à la Faculté de médecine

de Paris.

COI.LABORITHUI1S PRINCIPAUX

us1 .aan : E(J.), 4RNAUD, BA U1NSKI, BALLET, BLANCHA 1\lJ (II.). BLIN, BOISSIEIl (1".),

310NCOl;n (P.), BOYER (J.), BU1AND (N.), 13111SSAtID (E.), Bli0llAltUEL ('.),

CARRIER (G.), CAUURON, CESTAN, CHARON, CHARPENTIER, ClII\1STlAN,

LULLEHIIE, D.1\JE.1\, OEBOYE (M.), UENY, DUVAL (Mm ? ), FfllÉ (Cn.),

rENAYHtIU, FEltIilElt, FItANCOTTE, GARN1ER (S.), GOMIIAULT, GRASSET, GUURD,

liEI\AYAL, l0[)INDJY, LADAME, LANUOUZY, LEGIIAIN, LEIIOY, L"'OFF,

HABILLE, MAUANDON UE MONTYEL, MARIE (A.), MASSELON, NACGERET (R.),

IIEItIiLEN, M1ERZEJEWSKI, M1RALLIÉ, 31Ol;ItATOFF (W. A.),

IUSGÜaI'E-t : LA1', l'APADAKI, PARIS (A.), PASTUREL, DE PERRY, P1CQIÉ,

PIEII1\ET. PITIIES, RAVIAltT, HAYNEAU, RÉGIS, m : RNA)U) (P.), H £ GNIEII (P.),

111G11FIUP.), HOTH (W.), HOY, SÉGLAS,SGItIEt ! X, SOLLIEII, SOLKHAKOFF.

SOIQUES, TEIULIÉ (11.), l : RHlOLA, VACIIIDE, VALLON, 'IGOliItOUS, V1LLARD,

VOISIN (J.), VURPAS, SV'0`7 (P.).

Rédacteur en chef : BOURNEVILLE

Secrétaires de la rédaction : J.-B. CHARCOT et J. NOIR

Deuxième série, tome XVIII. - 1904.

A\eci7 ligures dans le texte et 11 planches.

PARIS -

BUREAUX DU PROGRÈS MÉDICAL

14, rue des Carmes.

1904 II,

Vol. XVIII. Juillet 1904. N° 103.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE MENTALE,

, .' Médiumnité délirante; i.

1 .

PAR - 1

PAUL SOLLIER, Français BOISSIER,

Médecin du Sanatorium de Bou- Médecin adjoint du Sanatorium ; ''

logne-sur-Seine. ' de Boulogne-sur-Seine.

Au moment où MM. Gilbert Ballet, Dheur et Monnier-Vi-

nard, apportaient leurs observations à la Société médico-

psychologique, nous suivions des cas analogues dont nous

nous proposions aussi de faire l'objet d'une communication.

Il n'y a pas à revenir sur la théorie physiologique du spi-

rilisme 1, mais il faut en compléter le cadre pathologique.

La clinique permet toujours de relever des détails restés

dans l'ombre ou de contrôler au moins les données antérieu-

rement acquises. Depuis les' formes légères du petit som-

nambulisme, ce cadre pathologique comprenait déjà tous les

degrés jusqu'aux plus amples manifestations de la grande

hystérie; mais il faut en élargir les limites et les étendre

du champ de la névrose à celui de la vésanie délirante. ,

L'occultisme sous toutes ses formes est de nos jours plus

en faveur que jamais' au détriment de la santé morale de

ceux qui s'y adonnent avec quelque conviction; aussi

l'hygiène elle-même doit-elle tirer profit des acquisitions de

celte pathologie spéciale. Celle-ci devrait mettre à contribu-

tion l'étude exacte des médiums les plus célèbres et l'expli-

1 Réservant aussi cette question, MM. Ballet et Dheur renvoient le lec-

leur aux chapitres spéciaux de MM. Ch. Richet, Myers et P. Janet. aux-

quels s'est ajouté depuis M. Grasset dans le Spiritisme devant la

Science.

Archives, 2' série, t. XVIII. 1

2 CLINIQUE mentale.

cation rationnelle et critique de leurs exploits. M. Flournoy

a donné le modèle du genre dans Des Indes à la Planète

Mars suivi de Nouvelles observations sur un cas de som-

nambulisme avec glossolalie. Malgré l'apparence étrange-

ment mystérieuse et déconcertante des phénomènes présen-

tés par Mlle Smith, l'auteur est toujours parvenu à en sur-

prendre le point de départ, à en dépister la genèse intime et

le mécanisme naturel, même quand il a dû, pour y réussir,

avoir recours à l'expertise des philologues. S'il a pu ainsi

démontrer l'appareil compliqué des facultés dites supranor-

males de son curieux sujet et en cataloguer les éléments

maladifs, combien serait-il plus facile d'établir le bilan

pathogénique des médiums plus modestes qui se rencontrent

presque partout. La supercherie que l'on reproche si souvent

à ces derniers est elle-même symptomatique, déduction faite

des jongleries de quelques professionnels. Ainsi faudrait-il

éventer le plus possible ces trucs inconscients et parfois si

puérils dont les auteurs eux-mêmes sont les premières

dupes, comme l'a très heureusement entrepris M. P. Janet à

la Société de psychologie en 1902 à propos d'un cas de Plié-

nornènes d'apport.

Au bénéfice de la même prophylaxie il y aurait lieu de

divulguer les accidents causés par la fréquentation des

séances de spiritisme. Charcot, Forel, Vigouroux, Henné-

berg, Donath et Goscheit en ont publié des exemples dans

lesquels il s'agit de personnes, surtout des jeunes filles,

antérieurement saines, devenues hystéro-épileptiques à la

suite de leur participation à des scènes d'évocation d'esprits.

C'est la conséquence forcée de ces pratiques qui constituent

un dressage intensif de l'automatisme, une entraînement

méthodique au dédoublement et à la désagrégation de la

personnalité. Ici elles font éclore ou aggravent la névrose,

ailleurs elles réveillent et systématisent un tendance à la

vésanie qu'une vie régulière et bien dirigée aurait réduite

au silence ou à de favorables proportions. Tels sont les dan-

gers à faire connaître à ceux même, qui, sans autre convic-

tion, ne voient dans ces opérations qu'un innocent jeu de

société.

Pour en revenir aux rapports du spiritisme avec les trou-

bles mentaux, dans la voie ouverte à la Société médico-psy-

chologique en avril 1J03; il serait utile de rechercher les cas

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 3

de délire à forme médianimique et les cas d'aliénation sur-

venant chez les médiums pour voir s'il n'y a pas dans ces

faits un aspect particulier de ce que Flournoy appelle « le

tempérament médiumnique » ? Quoi qu'il en soit, il semble

pour l'instant, que ces troubles mentaux se présentent sous

trois modalités différentes : n

1° Le délire vésanique revêt la forme médianimique, il

constitue sous cette forme toute la maladie dont les éléments

symptomatiques sont représentés par ceux de la médiumnité

elle-même. A quelque groupe nosologique que se rattache

cette maladie mentale, elle se renferme dans les limites de

ce délire, débutant et finissant avec lui. Dans ce cas, le

trouble mental ne diffère de la médiumnité commune que

par l'état d'esprit persistant et par la mauvaise influence

qu'il imprime à la vie sociale du sujet en raison des actes

extravagants auxquels celui-ci peut être entraîné par l'obéis-

sance à ses hallucinations. Dans cette catégorie peuvent se

placer le malade de MM. Ballet et Dheur et notre première

malade.

2° Le délire médianimique n'est que le début, la première

étape plus ou moins courte d'une psychose grave qui dans

la suite revêtira une forme différente. Il peut être soit un

épisode dans l'évolution d'une vésanie, soit une phase tran-

sitoire entre un étal névropatique prodromique et une ma-

ladie mentale confirmée ; ce dont notre second malade serait

un exemple.

3° Un délire vésanique de forme quelconque peut venir

compliquer un cas de médiumnité ordinaire durant depuis un

temps plus ou moins long. Ce délire marque alors un pro-

grès nouveau accompli pour la désorganisation psychique

du sujet. Il peut même constituer le mode de terminaison

naturelle de certaines médiumnités. Cela pourrait être le cas

du malade de MM. Ballet et Monnier-Vinard, comme ce fut

celui de plus d'une célébrité du spiritisme 1..

Il est d'ailleurs curieux de constater que le délire de mé-

diumnité peut naître spontanément, ou si l'on préfère, que

les éléments d'un délire peuvent revêtir d'eux-mêmes la

forme médianimique sans initiation spéciale et surtout sans

Home et ceux que cite sans les nommer Allan Kardec dans le livie e

des médiums, p. 310. ,

4 CLINIQUE MENTALE.

entraînement spirite préalable du sujet. Une seule séance de

table tournante suffit pour mettre le malade de MM. Ballet

et Dheur surla voie rapidement parcourue dans la suite de

la désagrégation mentale. Notre première malade n'avait ja-

mais pris part à aucune pratique spirite avant l'éclosion de

son délire, elle n'en a pas moins. appliqué à tous ses phéno-

mènes hallucinatoires le mécanisme des divers modes de

communication avec « l'au-delà » qui contituent le rituel

classique du spiritisme.

- Observation. I. - Phénomènes hallucinatoires verbaux, psychomo-

teurs, typtologiques et g1'aphomoteurs, Spécialités médianénémi-

ques diverses. Tables tournantes, typtolologie mentale intérieure,

messages écrits et parlés, dessins, révélations inspirées, adup-

taon d'un esprit téléologique. Apostolat et mission morale réfor-

matrice. Tendances mystiques avec érotisme, théomanie raison-

nante. -

L'histoire de la malade peut se diviser en deux phases princi-

pales : l'une comprenant la période antérieure à son entrée en

traitement et son premier séjour au sanatorium de Boulogne;

l'autre correspondant au temps écoulé après sa sortie et à son

second séjour dans l'établissement. Elaboré dans la première

phase le système délirant s'est développé et précisé dans la seconde

pour s'atténuer dans la suite. '

1° Phase. - Rêverie et distraction. - 111 ? Cam... Schtein (nom

que nous lui supposerons pour la commodité de l'exposition), est

âgée de trente-six ans, son intelligence générale paraît brillante au

premier abord quoique plutôt médiocre en réalité. Sa famille

appartient à l'orthodoxie israélite, la religion n'a cependant

occupé qu'une place minime, négligeable même dans son éduca-

tion. Son enfance se serait passée grise et peu caressée auprès d'un

père aimant le faste et le luxe, nerveux, qu'elle a à peine connu;

de soeurs plus âgées qu'elle, mariées longtemps avant elle et d'une

mère au caractère sec avec qui elle ne sympathisait pas. Le natu-

rel terne et positif de cet entourage choquait ses aspirations vers

un idéal encore vague. Pour échapper à cette ambiance qu'elle

jugeait indigne d'elle, Cam... prenait l'habitude de se bercer dans

des romans éthérés dont elle était naturellement le principal per-

sonnage. Absorbée dans ces lointaines rêveries elle préparait son

cerveau graduellement au travail automatique et aux fantaisies

délirantes qui caractérisent son état physique actuel. Sa pensée

était toujours absente, elle était selon sa propre expression « folle-

ment distraite » ce dont on la plaisantait en disant : « Mademoi-

selle Cam... est sortie ».

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 5

A cette époque de sa vie elle entendit parler de spiritisme

par un sien oncle, adepte convaincu. Ces propos l'intéressèrent,

mais elle n'assista jamais à aucune séance, son oncle mourut et

elle ne revint pas de longtemps sur ce sujet.

Toujours lasse de son milieu et toujours plus sentimentale,

Cam... crut réaliser ces rêves en acceptant un mari qu'elle revêtait

d'avance de tous les attributs poétiques et chevaleresque qu'elle

désirait lui voir. Mais plus occupé de ses affaires que d'idéal,

celui-ci lui parut bientôt lamentablement terre à terre. Elle se

trouva la plus incomprise, la plus isolée, la plus malheureuse des

créatures ! Elle prit une grande pitié pour elle-même. Roulant ses

déceptions dans sa pensée,elle commença à orienter ses intermina-

bles méditations vers l'espoir d'un monde meilleur dans une vie

future et s'abima dans des préoccupations d'ordre métaphysique.

Associant à sa propre souffrance celle de l'humanité, elle donna

aussi une couleur philanthropique aux songes dans lesquels elle

se réfugiait à la fois contre de vifs besoins sexuels insuffisamment

satisfaits et contre la « vulgarité d'un époux incapable, croyait-

elle, de partager l'élévation de son âme et de sa tendresse. »

Elle songea à la religion qu'elle connaissait mal et essaya de prier.

Premières hallucinations. Audition d'esprits. - Ainsi confinée

en elle-même, au plus fort de son amertume, Cam... commença à

entendre « une voix très douce qui partait de sa poitrine » vers le

creux épigastrique. Elle l'entendit pour la première fois un jour

qu'elle était restée toute troublée après une altercation avec son

mari. C'était une voix très tendrement encourageante, qui lui

promettait des compensations et des satisfactions dans la suite des

temps. « J'ai tout de suite senti, dit-elle, que ce n'était pas la voix

de ma conscience, c'était bien quelque chose de tout à fait étran-

ger à moi ». Plus les rapports du ménage devenaient difficiles,

plus la voix devenait pressante et nette; mais Cam... ne savait

à qui l'attribuer, quand un nouveau sujet de rancoeur lui vint.

M. Schtein, névropathe lui aussi, surmené par des soucis de

négoce et très déprimé, dut se condamner à une continence abso-

lue, ce qui accrut violemment les griefs de la malade toujours

tourmentée par les exigences de ses sens. La voix plus affectueuse

encore lui devint précieuse. Une saison à Royat mit alors Cam...

en relations avec une dame qui avait fait tourner des tables et qui

l'entretint de ce sujet. L'envie la prit aussitôt d'essayer toute seule

de ce passe-temps ; un guéridon épela sous sa main le nom de son

père. « Elle avait, dit-elle, toujours cru à l'occultisme » sa convic-

tion se fortifia de cet événement, qui lui donna fort à penser sur

1 origine de sa voix, sans qu'elle la reconnût pourtant comme celle

de son père et qui eut une grande influence sur la marche de ses

Phénomènes dans la suite. 0

6 CLINIQUE MENTALE. '-

Au printemps 1901, l'état nerveux du ménage était précaire,

celui de M. Schtein surtout nécessita un séjour en Suisse. Cam...

prodigua pour le soigner un zèle excessif, elle s'épuisa à son che-

vet en veilles superflues. La voix de l'esprit familier l'y suivit, elle

la recherchait d'ailleurs ; la voix louait son abnégation en faveur

d'un homme si peu méritant et approuvait les méditations d'ordre

humanitaire et philosophique encore planes mais tenaces qui l'oc-

cupaient. Cam... commençait déjà à noter « un recueil de ses

pensées », c'étaient des aphorismes sur' la morale de l'amour et

des sentiments en général ; elle songeait aussi à la possibilité

d'améliorer la vie en luttant contre l'égoïsme et la méchanceté des

hommes par la « fondation d'une religion basée sur la bonté »,

elle pensait à cela sans exaltation, seulement en femme qui a

d'elle-même une haute opinion.

Confirmation du médianimisme. Médiumnité parlante. L'occa-

sion se présenta à Cam... de révéler à son mari l'existence de cette

voix dont elle n'avait jamais rien osé dire à personne ; celui-ci

n'hésita pas à lui donner l'assurance que c'était bien réellement

un esprit. Tandis qu'il allait s'améliorant, sa femme, au contraire,

déclinait, elle fut prise de fatigue douloureuse avec insomnie, agi-

tation, chaleur à la tête, angoisse et rêvasseries. Elle dut s'aliter.

M. Schtein veilla il son tour sur elle. Un soir elle se leva en toilette

de nuit, se dressa solennellement devant lui et le fit mettre à

genoux. Elle lui imposa les mains et lui annonça qu'elle sentait

que la voix allait parler. En effet, sans qu'elle sût d'avance ce

qu'elle allait dire, « la voix parla par sa bouche a elle ». Ce fut une

diatribe assez longue contre le pauvre homme qui fut accablé de

reproches : « Je t'ai, dit la voix, donné cette femme si pure et si

bonne, et tu n'as pus su lui donner le bonheur, tu ne l'as jamais

comprise, tu n'es qu'une brute, c'est une mésalliance pour elle,

etc. ». Bref ce fut l'écho de toutes les récriminations que la malade

elle-même ruminait contre lui intérieurement. M. Schtein écouta

religieusement, déjà certain de l'essence supranormale de la vois,

en qui cette fois, à certains détails, il reconnut formellement celle

de sa mère à lui, morte depuis quelques années. Ce fut un nou-

veau trait de lumière pour Cam..., elle avait connu sa belle-mère

quelques mois seulement, mais elle l'admirait beaucoup et gardait

d'elle une grande impression.

Adoption d'un esprit c'/ëo/otMe.La malade était donc fixée

enfin sur l'identité de son consolateur. Ce guide tutélaire qui pre-

nait si bien sa défense était l'esprit de sa belle-mère. Dans l'état

d'éréthisme nerveux où elle était,elle la sentait toujours présente,

il lui suffisait de la désirer pour l'évoquer. Elle le faisait d'ailleurs

à chaque instant à l'instigation même de son mari, qui lui repro-

MEDIUMNITE DELIRANTE. 7

i

cliait à l'occasion de manquer de foi, s'il croyait surprendre quel-

que tiédeur dans sa conviction, et qui se plaisait à consulter aussi

l'esprit de sa mère. Cette hallucination était calmante, modéra-

trice, appaisante, elle se manifestait dans les mauvais moments

auxquels ses promesses semblaient apporter un baume, elle

était de bon conseil et recommandait la femme à l'affection

du mari. Elle constitua le premier personnage téléologique auquel

un autre esprit-guide s'ajoutera bientôt, sans cependant que la

belle-mère passée au second plan disparaisse jamais tout à fait.

Vision.- L'état nerveux de Cam... s'aggrava encore, elle devint

plus agitée, plus absorbée ; un soir, elle sentit un trouble plus pro-

fond et vit une grande lumière se faire devant elle. Dans cette lueur

Dieu lui apparut très nettement entouré de divers personnages

d'essence divine qui semblaient réunis en conseil. Dieu lui adressa

la parole en un langage amical' et lui dit qu'il s'appellerait pour

elle Rarahu. A ce moment elle sentit s'accentuer un sentiment de

défaillance, il lui sembla que sa vie s'en allait; qu'elle s'éteignait

complètement dans un immense désir de mourir, mais Rarahu

lui ordonna de vivre, il lui déclara qu'il pouvait l'emmener avec

lui dans l'Olympe, mais qu'il voulait la laisser sur la terre pour y

accomplir sa mission en propageant la charité et la bonté ». L'ap-

parition s'évanouit, la malade éprouva alors la sensation d'une

« violente déchirure dans le front ». Ce fut si douloureux qu'elle

craignit pendant plusieurs jours d'avoir une lésion au cerveau.

Elle demeura quelque temps abattue, et n'eut jamais d'autres hal-

lucinations de la vue. mais la voix de Rarahu persista, tendant à

se produire plus spontanément que celle de la belle-mère qui était

pourtant souvent évoquée, le mari aidant. Quelques autres voix

s'étaient manifestées à la suite de la vision mais elles avaient vite

disparu ; d'ailleurs une amélioration générale se dessinait, les

deux voix principales elles-mêmes devenaient plus discrètes. Il

fallut bientôt un appel recueilli pour les avoir. Le calme augmenta

de jonr en jour. L'ensemble de ces accidents aigus et de leur con-

valescence avait duré quarante jours, le ménage Schtein revint à

Paiis et Cam... demanda pour achever sa guérison à entrer au

sanatorium où elle arriva le 2 juillet 1901.

Amélioration et dissimulation des phénomènes délirants. Ambi-

tions philanthropiques et littéraires. Préoccupations erotiques. A

ce moment là, Cam... se présente comme une malade en pleine

dépression neurasthénique avec angoisse et malaise nerveux, sans

que rien puisse faire supposer autre chose chez elle. Elle dissimule

en effet avec une persévérance et un succès complets tout ce qui

reste de sou délire et tout ce qui l'aconstituéjusqu'alors. Elle a de

la céphalée, des crises de larmes, une fatigue précoce et doulou-

8 CLINIQUE MENTALE.

reuse au moindre effort, des troubles vasomoteurs, de la tachycar-

die, de l'insomnie et un éréthisme génital qui la gène beaucoup.

Elle est triste et découragée. L'isolement, le repos au lit avec l'ap-

pui d'un traitement moral soutenu la relèvent peu à peu, cette

amélioration se fait par oscillations successives. Elle parle abon-

damment de ses projets d'avenir et se laisse aller librement aux

fantaisies de son imagination dont l'amour et la piété constituent

les matériaux. Elle voudrait trouver un homme qui sût l'aimer

selon ses sentiments à elle, mais cet amour terrestre l'effraie car

elle ne peut pas le concilier avec « la pureté » qui doit rester son

apanage et qui est la condition de sa mission. D'autre part, grâce

à l'instabilité psychasthénique de sa mémoire, l'image mentale de

son mari s'est effacée, elle la reconstitue conforme à ses rêves,

elle lui écrit pour le dresser selon son modèle. Mais les réponses

ont beau être empreintes de toute la tendresse exigée, la seule vue

de l'écriture de M. Schtein comme ses premières visites suffisent

à ramener tous les malaises momentanément, les indécisions

recommencent entre l'amour et la, pureté sacrée. Les choses s'ar-

rangent enfin, les visites du mari sont bien supportées et même

désirées. Les perplexités érotiques font place à de longues disser-

tations sur l'amour. Cam... espère se créer une existence de ten-

dresse^ amoureuse au sein d'un milieu littéraire qu'elle veut grou-

per autour d'elle, tout en exerçant son prosélytisme religieux. Elle

a repris le manuscrit déjà assez touffu de ses pensées et elle y

ajoute de nouvelles maximes. Elle n'aime pas qu'on traite de

.simple passe-temps cette occupation, elle a la prétention de faire

ainsi une oeuvre importante dont le public devra s'émouvoir et qui

lui fera une place dans les belles-lettres. -

Elle discute la valeur des religions, repousse le judaïsme qui ne

répond plus aux élans charitables et mystiques de son âme, elle

veut même améliorer le christianisme. Elle jette sur le papier les

premières bases de la religion de la bonté, elle en compose un

article qu'elle voudrait faire insérer plus tard dans un grand jour-

nal quotidien. Elle est très préoccupée de sa beauté qu'elle sup-

pose très imposante; elle drape sa robe, met une fleur dans ses

cheveux, prend avec les autres malades une attitude pleine de

dignité grave, un peu hautaine même, mais courtoise. Seule dans

sa chambre elle lit des romans et prie longuement. Sauf quelques

inégalités de caractère assez légères, elle fait l'impression d'une

personne tout à fait normale et reprend peu à peu la vie ordinaire.

Elle se prépare à quitter le sanatorium au mois de septembre.

Pendant ces deux mois Cam... n'a jamais'paiié à qui que ce soit

de ses communications avec des esprits dont nous n'étions encore

nullement avertis. Une ou deux fois seulement au cours de nos

causeries, elle avait demandé si nous ne savions rien de l'existence

de « consciences parlantes » et si la conscience au sens religieux

. MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 9

du mot ne pouvait revêtir la forme concrète d'une voix. Soupçon-

nant l'éventualité de quelque hallucination, nous avions alors

cherché, mais en vain, à provoquer des aveux dans ce sens. Elle

disait qu'elle posait simplement cette question pour s'instruire, ce

qui paraissait plus que vraisemblable,étant donnée l'allure toujours

transcendantale de ses sujets de conversation habituels. En par-

lant de son séjour en Suisse, elle mentionnait souvent l'état nerveux

grave pendant lequel elle disait avoir eu du délire et beaucoup

souffert et qu'elle appelait sa fièvre cérébrale. C'est bien plus tard

seulement et par le récit qu'elle nous en fit que nous avons appris

ce qui s'était passé en réalité dans cette période, et su qu'elle avait

encore au sanatorium entendu spontanément d'abord, puis évoqué

en cachette sa belle-mère et Rarahu.

En somme, pendant cette première phase, elle avait sans influence '

extérieure spéciale évolué vers une religiosité extrême et fait ses

premiers pas sans initiation véritable dans le spiritisme actif; elle

a fait parler des tables comme médium typteur; elle a été médium

auditif, parlant et voyant.' Comme tous les médiums, comme

Home, comme lIi°5 Smith entre autres, elle s'impose un apostolat

moralisateur et bienfaisant ; comme eux, elle a ses esprits-guides

et protecteurs : sa belle-mère et Rarahu, qui bientôt s'appellera

Deus. Mais retenons pour l'instant ce nom de Rarahu. Rappelons-

nous que le mysticisme de Cam... est, selon la règle, fortement

empreint d'érotisme à tendance lascive et tendre. Or l'esprit de

Rarahu lui a déjà « promis de devenir son amant céleste » sa

voix est caressante à l'extrême, elle sent qu'elle le chérit passion-

nément.

N'est-il pas naturel qu'il ait pris « pour s'adresser à elle seule »,

il l'a dit, le nom du personnage le plus suave d'une amoureuse

et charmante idylle du roman contemporain, du Mariage de Lotit

Cam... est pourtant sincèrement convaincue qu'elle n'a jamais

entendu ni lu ce nom antérieurement. Mais nous savons qu'elle a

lu les oeuvres de Loti ; ce mot est resté déposé, avec bien d'autres

matériaux analogues, dans le domaine des souvenirs subsconscients

où sa mémoire de névropathe laisse tomber tant de faits et où il a

servi à l'élaboration du roman subliminal que lui racontent ses

hallucinations. Nous avons pu, d'ailleurs, pendant ce premier séjour

constater l'acquisition de notions que plus tard nous avons retrou-

vées complètement oubliées par la mémoire consciente et édifiées

en révélations spirites diverses dont nous pouvions ainsi recon-

naitre l'origine ignorée par la malade.. ? PHASE. - Reprise des phénomènes spirites. Tables tournantes,

auditions, révélations diverses. - Arrivée dans le Sud-Ouest au

commencement de septembre 1904, après quelques jours d'équi-

libre apparent pendant lesquels tout allait si bien qu'elle put faire

10 CLINIQUE MENTALE.

venir sa fille auprès d'elle, Cam..., privée d'une direction suffi-

sante et livrée à la crédulité complaisante de son mari se laissa

peu à peu glisser sur la pente où elle devait reprendre ses

diverses « spécialités médianimiques ». M. Schtein ne demandait

qu'à consulter sa mère, Cam... aimait entendre celle-ci louer sa

« haute pureté » et blâmer la froideur de son fils ; elle regrettait

aussi la voix de Barahu et de temps en temps elle se recueillait et

s'efforçait de l'évoquer pour voir s'il était encore à la portée de son

appel. Si la voix ne répondait pas, elle savait que la table parle-

rait et elle avait des envies terribles de faire tourner son guéridon.

Elle céda.

Très versée à ce moment-là dans ses idées philanthropiques,

rêvant de pacification universelle, elle appelait dans le guéridon

les esprits des hommes qui se sont illustrés dans cet ordre d'acti-

vité. Elle réussit même à désincarner le tsar Nicolas II qui vint

dans le pied du meuble approuver les projets de Cam..., Jésus-

Christ y vint aussi. Ce retour d'entraînement de l'automatisme

ne tarda pas à remettre en action la « spécialité auditive » qai ren-

dit la table moins nécessaire. M. Schtein saluait et prodiguait les

marques de respect quand un esprit se manifestait. Le ménage

s'isolait en de. longues séances pour s'entretenir avec les person-

nages évoqués, Cam... se rappelant plus tard l'étrangeté de ces

aparté en disait « nous avions l'air de deux cabanons ». Malheu-

reusement son exaltation s'en augmenta rapidement, l'insomnie

reparut, ses nuits se passaient à méditer et à enregistrer les pro-

pos des esprits, elle essayait de les écrire, mais ils étaient quel-

quefois dictées avec une telle vélocité que sa main n'arrivait pas à

les tracer en entier; elle appelait son mari qui s'installait à son

chevet pour écouter, il écrivait lui-même sous la dictée des

désincarnés. La voix de Rarahu arrivait de nouveau spontanément,

il était presque toujours là maintenant, se faisant l'interlocuteur

principal, le guide attitré, mais il prenait son vrai nom Deus,

dont il signait tous ses entretiens.

Révélation d'un système théologique. Révélations de mystères scieii-

tifiques. - Pendant ce nouvel intervalle d'activité cérébrale automa-

tique, Cam... reçoit de Deus des quantités de révélations, toutes

en rapport naturellement avec les tendances et l'état d'esprit actuel

de la malade préoccupée de connaître « l'au-delà » de forcer l'ad-

miration respectueuse du monde par l'élévation éthérée de sa per-

sonnalité, de le régénérer par la vulgarisation des principes de

charité. Tandis que les autres esprits parlent surtout au moyen de

la table, Deus plus assidu se manifeste plutôt en auditions ver-

bales psychiques et psychomotrices ou même graphomotrices

« semi-mécaniques ». 11 enseigne ainsi : « Qu'il y a un Dieu pour

chaque système solaire ; le nôtre est régi par Neptune. Neptune se

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 11

manifeste quelquefois à Cam..., une voix sèche et brutale le carac-

térise. A un autre système solaire préside le dieu I ou Zëus, c'est

un dieu sévère, austère et ascétique, il intime quelquefois à

Champs... des injonctions dures au sujet de ses devoirs et des sacri-

fices qu'elle doit consentir. Au-dessus de tous les Dieux plane et

domine Deus, dieu du système solaire de Céphée, le plus grand, le

plus noble, le plus parfait. Son nom signifie Idéal car Deus dérive

de Ideus qui veut dire Idée et idée équivaut à « Bonté-Charité » ; il

a pris intimement pour elle seule le nom de Rarahu dont il ne se

sert presque plus maintenant. Ces diverses divinités étaient celles

qui entouraient le Deus pendant l'apparition en Suisse. Elles

ont toutes compris les souffrances cruelles que Cam... éprouvait

dans son coeur, elles ont compati au défaut d'amour vrai au besoin

immense de tendresse qui la torturait. Saturne s'est offert à l'ai-

mer, mais il exprimait son sentiment matériellement comme un

homme, en lui disant que l'amour est fugace et qu'il faut saisir le

moment qui passe; elle l'a accepté sans sympathie et ne l'a pas

recherché. Deus au contraire l'a conquise par un charme inexpri-

mable, il lui a tenu des propos enivrants en lui promettant d'être à

jamais l'amant spirituel qui lui manque, et de lui révéler des

choses surprenantes. ».

Elle écrit en effet en médium semi-mécanique des communica-

tions ou des prédictions de découvertes astronomiques, physiologi-

ques et médicales ; son mari les admire, il croit fermement à leur

origine surnaturelle et en conserve précieusement les manuscrits.

C'est un fatras mal compris et mal assemblé, résultat de l'élabora-

tion sub-consciente des lectures que nous lui avons vu faire pen-

dant son premier séjour au sanatorium. On y retrouve des rémi-

niscences d'Uranie de Flammarion, de divers feuilletons scientifi-

ques de journaux politiques et de conversations avec d'autres

malades. M. Schtein qui n'a pas vu ces livres ou articles entre les

mains de sa femme, n'admet pas que ce soit des souvenirs non

reconnus par elle, et il s'émerveille de ces facultés divinatoires.

Cam... nie sincèrement avoir rien su antérieurement de tout cela,

ce qui est fortnaturel, car, au moment de ces acquisitions, elle était

en plein état de psychasthénie et dans des conditions excellentes

pour le passage de ses impressions dans la sphère subliminale avec

le minimum de réceptivité de sa mémoire normale. Deus dicte

littéralement.

«Planètes. - Elles sont habitées. Les lois de l'attraction univer-

« selle qui s'applique aux planètes ne s'applique (sic) pas à d'autres

« corps célestes.

" JI01écilles. - Les molécules du corps humain sont toutes dif-

«féretites les unes des autres. Chacune d'elles forme un être

« animé et ils sont tous pareils (sic). Les êtres animés peuvent

12 Z CLINIQUE MENTALE.

« être engendrés par des réactions chimiques d'une façon gêné-

« raie. L'accouchement sera supprimé. Dans une réaction chi-

a mique quandune couleur se produit, elle se forme par la

« création de petits êtres infiniment petits ayant cette couleur.

« Tous les êtres animés peuvent être créés par des réactions chi.

« miques successives, ainsi naissent les spermatozoïdes; l'amour

« physique sera supprimé... La vie existe dans tous les règnes

« de la nature, quand on sort l'écorce d'un arbre il souffre, quand

« un cristal est brisé il se clive et se régénère, il vit ; la sensibilité

« est proportionnelle à l'intelligence de chaque être

« (EU. Dans l'opération de la cataracte, on a actuellement

« tort d'enlever le cristallin, il suffit 3e couper un petit nerf qui y

« aboutit; la substance maladive devenue opaque du cristallin

« cesse ainsi d'y arriver; le cristallin redevient transparent. Il y a

« pour faire cette opération à construire un petit instrument-

« établir - terminé en forme de fourche

z, Râle de l'iris. - L'oeil ne voit pas seulement par la réfraction

« opérée sur le rayon lumineux par le cristallin, l'iris contient

« une foule de petits éléments opérant comme des miroirs. Il y a

« un jeu de réflexion de l'iris à la cornée transparente; un nerf

« optique s'épanouit dans cette partie, et du jeu contradictoire

« des rayons lumineux réfléchis se produit l'impression lumi-

« neuse.

« Oreille. - Le tympan a, à sa partie inférieure, un petit trou

« presque imperceptible, perméable à l'eau et qui joue un grand

« rôle dans l'audition. Si à la naissance de certains enfants

« entendant mal on débouchait ce trou, ou si on en perçait un

« autre à côté, ils entendraient bien. Ce trou n'est pas dans le

« champ visible à l'oeil dans les conditions actuelles; il y aura à

« composer un instrument pour le voir. Le rôle de l'oreille est

« analogue à un instrument de musique. L'oreille a une partie

« insensible dans le lobe (vers l'extérieur de l'oreille). Cela est dû

« à ce que dans cette partie il n'y a pas de mélange de nerfs et

« des muscles ; le nerf cesse là. Il y a plusieurs parties du corps

« où se produit ce même phénomène. Dans la paume de la main

« cette même disposition existe et c'est ainsi que sous Louis XIV

« certaines personnes se- faisaient percer la paume de la main et

« ne souffraient pas au diaphragme, l'insensibilité est presque com-

« plète en certains points, etc »

Une quantité de confidences de cette espèce lui sont faites par

Deus. Il lui donne, entre autres, par psychographie le moyen

d'établir un télescope à un millimètre près et lui en expose la dispo-

sion des lentilles. Elle en reparle souvent en le désignant du nom

de « mon télescope ». Le mari admire toujours.

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. '13 3

Mysticisme. Mission liantienne. Erotisme. - Dans ses entretiens

avec les esprits, il est souvent question aussi de ses souffrances

toujours les mêmes. L'esprit de Jésus-Christ lui cite son propre

exemple et l'exhorte à les supporter, il l'assure que ces tortures

sont purificatrices et la préparent à son apostolat. Elle pense en

effet plus que jamais à répandre sa nouvelle religion. Son oncle

l'ancien spirite, l'y encourage par le pied de la table. Deus par un

message graphomoteur lui prescrit de désigner cette religion par

son prénom en prenant seulement la première syllabe, ce sera la

religion Kamienne. Deus l'écrit par un K, c'est plus solennel que

le simple C de son nom. Elle sera donc l'initiatrice du Kamia-

nisme. Les Kamiens seront pris dans toutes les confessions épu-

rées pour la circonstance de tous les dogmes qui ne concourent

pas à la seule bonté. Pendant le mois d'octobre Cam... s'exalte

beaucoup en en parlant. Très peu d'hommes actuellement adultes

seront dignes de devenir de vrais Kamiens, ils sont trop brutaux

et trop égoïstes, seuls les enfants que l'on va pouvoir élever selon

les principes de la charité intégrale deviendront les vrais fidèles.

La malade se recueille et prie longuement, elle recherche les

gens pieux qui peuvent l'entourer et exhale des malédictions contre

les juifs et les protestants qui ne comprendront pas sa religion.

Elle tient des propos édifiants à une dame et à une jeune fille

dévotes et se sent poussée à leur dire « qu'elle a Dieu en elle » et

que Jésus lui parle, mais elle n'ose pas; elle consulte Deus en

elle-même pour savoir ce qu'elle doit faire. C'est le Dieu ascétique

qui répond très courroucé : « Tu dois le dire, dis-le ». Elle raconte

alors ce qui lui arrive à ces deux personnes qui s'extasient et lui

affirment qu'elle est en état de grâce, qu'elle devrait se faire bap-

tiser. Un prêtre dont elle aime la conversation lui donne le même

conseil et lui propose ses bons offices à cet effet. Elle sort très peu

et lit beaucoup. Un jour qu'elle se repose avec plusieurs personnes

devant l'hôtel où elle loge, un garçon éconduit un vagabond

quémandeur, elle s'indigne, rappelle le mendiant, lui fait l'au-

mône et fait à l'assistance l'apologie de la bonté.

Toute cette exaltation n'allait pas sans augmentation des

malaises nerveux, l'éréthisme génital redevenait particulière-

ment lancinant. Cam... reprenait son mari en grippe, elle lui

reprochait d'être indifférent, impuissant même. Elle se plaignait

de mourir d'amour inassouvi. Sa femme de chambre la surprit

un jour sur son lit, elle était nue et se livrant à l'onanisme; elle

gémissait, elle disait en pleurant « qu'elle succombait, que la

continence la tuait, qu'elle devait être hystérique et qu'on ne la

soignait pas, qu'elle avait peur d'avoir une maladie de la

matrice. »

Elle dut s'aliter encore, on fit venir sa belle-soeur de Paris pour

la soigner. Mais à l'arrivée de cette parente et avant de l'avoir

14 Il CLINIQUE MENTALE.

vue, Cam... prétendit qu'elle avait vu la nuit par clairvoyance

télépathique une lettre que celle-ci écrivait à M. Schtein, cette

lettre était défavorable à la malade et la dénigrait auprès de son

mari. Deus s'en mêlait et lui disait : « Chasse ta belle-soeur, elle

plaint ton mari, elle écrit que tu n'es pas pure ! » et elle mit la

belle-soeur à la porte de sa chambre. La nuit suivante elle divagua

et délira tout haut, mais elle ne se rappelle pas avoir eu aucune

vision, elle eut encore comme en Suisse et comme à chacun de

ses paroxysmes le sentiment de quitter la terre, de sortir de la

vie « dans une agonie très douce ». En même temps elle entendait

la voix caressante de Deus qui l'appelait et voulait l'emmener

dans les régions célestes, elle aurait voulu se laisser aller mais le

Dieu ascétique lui rappelait la mission Kamienne qui exigeait

qu'elle vécut. Un jour pourtant elle crut devoir faire son tesla-

meut.

M. Schtein parti, elle commença à aller mieux, elle accepta les

soins de sa belle-soeur. On profita d'une sérieuse amélioration

pour la ramener à Paris et elle entra de nouveau au sanatorium

le 31 octobre 1901.

i

Second séjour. Etat physique. - A ce moment Cam... est

amaigrie, son teint est mat, pâle, un peu jaune, les traits sont

tirés. Elle garde dans son lit une attitude hiératique, les cheveux

étalés soigneusement sur son oreiller, les yeux brillants, l'air

inspiré, le ton prédicant, elle incarne son rôle d'apôtre. Elle est

constamment en communication avec les esprits, et met autant

d'insistance à nous faire part de ces phénomènes, qu'elle avait

mis de soin à nous les cacher la première fois. Son état physique

est mauvais, elle ne dort pas, l'appétit est nul, elle alterne entre

la prostration et l'excitation avec angoisse et pleurs. Une contra-

riété légère, une lettre, une visite, ou même la représentation

exacte de son mari en pensée seulement augmentent ce malaise

nerveux. Elle éprouve alors une céphalée frontale pénible, avec

serrement dans la poitrine, chaleur et sécheresse de la peau,

pouls contracté, tachicardie, troubles vasomoteurs, bouffées con-

gestives avec picottement au visage surtout aux joues; douleurs

dans les jambes « comme si un fluide acre envahissait les mus-

cles, fourmillements dans les mains, excitation sexuelle avec

contractions saccadées de la vulve et quelquefois spasme vénérien

spontané jusqu'à neuf fois dans la nuit. Cet inconvénient lui est

particulièrement pénible et elle demande du bromure de cam-

phre pour y remédier. Détail à noter, chaque contrariété est

suivie de coliques avec diarrhée. Il suffit qu'elle pense à son mari

pour éprouver de vives douleurs dans les jambes, correspondant

à une douleur pareille dans les joues. Si on lui frotte les jambes

dans ces circonstances, elle a aussitôt mal aux joues, et d'autant

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. '15

plus fort que la friction des jambes est plus énergique. Elle sent

mal ses membres quand elle ne les voit pas. Ils lui font quelque-

fois l'impression d'avoir changé de volume. La sensibilité cutanée

est diminuée par places, cette hypoesthésie est irrégulièrement

distribuée et varie souvent. Le sens stéréognostique est très

altéré. L'automatisme bat son plein sous toutes ses formes. La

mémoire des faits actuels est fugace, le souvenir des phénomènes

hallucinatoires éprouvés dans des périodes semblables est au

contraire très net.

L'ensemble du malaise, - même les douleurs des membres,

s'amende facilement quand on tient à la malade des propos

consolateurs et fermement encourageants, elle est d'ailleurs très

accessible à tout traitement moral efficacement dirigé. Dans ces

mauvais intervalles les paroxysmes sont généralement marqués

par la présence de ce qu'elle applele ses voix stridentes, des voix

de mauvais esprits, elles. durent heureusement peu et s'effacent

dès que l'anxiété diminue. Toutes les autres voix viennent aussi

l'obséder à la fois, elle prévoit leur arrivée, elle les sent « qui font

pression » dans sa tête avant d'éclater. Elle s'efforce de les

chasser et la lutte est pénible. La fin du malaise et le prélude

d'un calme au moins relatif sont marqués par le retour de la voix

tutélaire de Deus ou par celle de la belle-mère qui reprennent

peu à peu le dessus. Aussi sont-elles, surtout celle de Deus,

appelées avec une ardente ferveur. Dans ces périodes de grande

activité symptomatique, les voix inconnues, passagères et les

a voix stridentes » revêtent la forme d'hallucinations auditives

ordinaires, les voix familières conservent plutôt leur caractère

psychique ou psychomoteur; en aucun cas elles ne proviennent

du dehors, d'un point quelconque de l'espace extérieur. C'est

dans la tête ou dans la poitrine qu'elles se font entendre. L'ob-

session des voix diminue progressivement avec la production de

l'affaissement. Aux heures tranquilles, elles sont presque difficiles

à obtenir volontairement, il faut un certain effort de concentration

cérébrale, le secours de la table est dans ce cas même quelquefois

necessaire.

Dessins médianimiques et messages psychographiques mécaniques et

semi-mécaniques. - Au commencement de novembre 1901, après

quelques jours de traitement et de repos complet, les grands

malaises étaient suffisamment amendés, mais l'automatisme per-

sistait. Cam... a une envie pressante de prendre un guéridon pour

causer avec ses esprits, mais elle est maintenue au lit et sait qu'on

ne lui permet pas cette pratique. C'est avec son crayon qui ne

la quitte pas qu'elle s'entretient avec l'au-delà, en écrivant et en

dessinant. Elle a déjà dans le midi, au mois d'octobre, obtenu

un dessin médianimique accompagné d'un message. Ce graphique

16 CLINIQUE MENTALE.

est constitué par un point noir, arrondi, très appuyé, duquel

partent au hasard, de gauche à droite, des lignes sinueuses dont

l'une, au milieu des autres, figure grossièrement un profil de

tête d'homme. Elle- l'a tracé les yeux fermés, machinalement,

sans diriger sa main elle-même, son poignet marchait tout seul;

après l'avoir vu, elle a écrit sous la dictée psychomotrice, en mes-

sage semi-mécanique et sur la même feuille, ce que ces traits

représentaient. C'est Deus lui-même son divin guide. Elle ne veut

pas se séparer de ce dessin, elle le conserve sur elle comme un

précieux talisman, mais elle nous a permis d'en prendre un

calque (/ ! gr. 1). Elle vit maintenant le crayon à la main et au

milieu des conversations de tout ordre que nous avons avec elle,

Cam... s'interrompt souvent, sa main exige qu'elle exécute des

graphiques du même genre, presque tous accompagnés ou suivis

d'une explication écrite. Ces figures et messages sont en rapport

avec ses méditations sur les problèmes théologiques, astiono-

miques et mystiques. Ce sont des représentations hyéroglyplll-

ques et vagues de divinités et de constellations encore inconnues

des hommes, ce sont encore des révélations sur l'élévation de

son origine à elle, sur l'importance de sa mission, sur l'admira-

tion et la tendresse incomparable qu'elle inspire à son protecteur

céleste.

Fig. 1. - Premier dessin médianimique exécuté les yeux fermés

par Cam...

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 17

1

Pour le dessin n° 2 par exemple, après une conversation banale,

Cam... entre en état d'inspiration, elle ferme les yeux. Son crayon

s'applique sur le papier très fortement et y trace sans s'en déta-

cher un ensemble de lignes courbes et de lignes droites; sans

avoir ouvert les yeux elle ajoute des points et une barre intérieure

(fiq.2) qui forment très imparfaitement une figure humaine. Les

yeux toujours fermés, mais après avoir regardé elle écrit mécanique-

ment : « Dessin rare en sa netteté, figure de Dieu antique païen,

xvo siècle avant J.-C. » L'écriture de' ce message est beaucoup

plus régulière, plus vigoureuse, plus large et plus anguleuse que

son écriture habituelle ; elle l'a tracé avec une extrême rapidité

et, l'inspiration continuant, elle ferme aussitôt pour la troisième

fois les yeux et écrit précipitamment sur la même feuille : « Donné

et fait pour le D' Boissier par la future déesse Cam... » Elleregarde

et lit. Le mot « future déesse » l'étonne ; son ambition mystique

ne va pas jusqu'à admettre cette qualification comme une vérité,

elle veut effacer, elle biffe future déesse, mais elle n'ose pas le

supprimer et réécrit déesse.

Archives, 2' série, t. XVIII. 2

l'ig. - Dessin médianimique (novembre 1901).

,1,8 » CLINIQUE MENTALE.

Tous les dessins de cette époque, combinaisons de lignes, où

dominent les courbes sinueuses rehaussées de points sont exécutés

de la même manière, les,points étant ajoutés les yeux fermés.

Chacun d'eux reçoit. son explication sous forme de message méca-

niquement écrit. Tous représentent des constellations, des sym-

boles divins, ou des objets trouvés dans des astres. Un seul, tout

en ét ant constitué des mêmes éléments linéaires est interprété

différemment. Il est inspiré et fait devant l'un de nous que la

malade considère comme sceptique et qui par conséquent est

exposé à la mauvaise humeur de Deus ou à ses sarcasmes ; aussi

l'explication est-elle la suivante : « Un oeuf de poule pondu dans

de la m...de ». L'esprit est bien discourtois; un médium plus

expérimenté aurait attribué cette réponse aux esprits mystifica-

teurs, Mme C... M... se tirera de la même manière de ces mauvais

pas quand elle sera mieux entraînée, pour le moment. Elle

disculpe son protecteur en disant qu'il a voulu simplement se

moquer de notre incrédulité (fig. 3, dessin a). Un autre graphique

analogue (fig. 3, dessin b) se complète du message que voici :

« c'est une constellation. près de Saturne, plutôt au Nord qu'au

Fig. 3 a. - Dessin médianimique exécuté les yeux fermés.

Nous demandons ce qu'il représente :

C... attend la réponse de Dieu (Deus) qui lui dicte :

« Un oeuf de poule pondu dans de la 111... e »

C'est pour se moquer de nous que Deus a fait celte réponse triviale.

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 19

« Sud et qu'on découvrira bientôt au moyen de ton télescope

« celui qu'elle a inventé dans le Midi), on ne la voit pas de la

a terre, elle est superbe d'éclat a. D'autres sinuosités rehaussées

de points (fig. 4, a et b) sont définies l'une, a : « constellation

d'Astor, invisible de la terre », l'autre, b : « épaves d'ossements

de troglodytes trouvées dans Céphée ». La même figure en c nous

montre une élucubration plus compliquée avec cette légende

dictée en style télégraphique : « Constellation derrière Orion,

« habitants doués d'une perspicacité extraordinaire, n'ont qu'un

« sens général : l'entendement, les petits traits fins sont canaux

« inégaux filtrant l'eau au passage et reliant une étoile à l'autre

« sera découverte dans vingt ans au moins - chaque étoile est

« monde perfectionné, astronome qui le découvrira descendra

« de Leveyrier ». Plus enchevêtrée la figure 5 nous est expliquée

Fig. 3 b. Dessin médianimique exécuté les yeux fermés, les points ont

été mis après, mais avant d'avoir rouverl les yeux.

« C'est, dit Deus à Cam, une constellation près de Saturne, plutôt au Nord qu'au

Sud et qu'on découvrira bientôt au moyen de ton telescope (celui qu'elle a inventé),

on ne la voit pas de la terre, elle est superbe d'éclat »

20 CLINIQUE MENTALE.

par quelques mots seulement : « Fouet du gardien de l'Ereb », et

une annotation ajoute : « A manche du fouet ».

La figure 6 nous ramène parmi les divinités en a c'est «, Boutara

« le dieu issu du-soleil et de la terre et régissant le monde

« terrestre sous les ordres de Neptune. Au-dessous de sa tête sont

« diverses régions inexplorées de la terre dont on connaîtra par

«-Cam... un jour les richesses minières multiples contre Afrique

« pays de neige - pays bleu - » Les points qui forment les yeux

et le nez ont été ajoutés, les yeux toujours clos, ainsi que labarre

de la bouche, celle-ci qui a été tracée plus lentement et plus pru-

demment est tremblée. En b nous trouvons un graphique du

même genre toujours des lignes droites surmontées ou entourées

de courbes mais sans addition de points, légendé médianimique :

4 4 « et L.

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 21 1

« C'est Cam... et Deus dans les bras l'un de l'autre priant Dieu le

« Père de bénir leur union » .

Un moment après avoir terminé le dessin de la figure 8, Cam...

écrit de nouveau les yeux ouverts : « Explication du dessin b

donnée correctement par Deus il déesse Cam... sur le devant du

« dessin complémentaire sont indiqués nettement les contours du

« rond du haut du dessin qui implique la contexture d'un banc

« d'huîtres où vont les déesses amoureuses le soir sous la voûte des

« cieux étoilés, .priant Dieu le père, de leur donner des bénédic-

" tt0)is pour la création future d'être divins, dignes de peupler les

« cieux. Deus semble prendre Cam... dans les bras sans la toucher

« pour ne pas froisser son âme pure. Le don des Ames provenant

« du respect mutuel des êtres contrairement aux idées des

11 hommes qui désirent et prennent la chair, puis négligent l'âme ;

« le signe de la décadence d'un peuple provient de la direction

« donnée à la chair périssable par l'âme impérissable. Perfection-

% 4. Dessins exécutés les yeux fermés ; légendes dictées par Deus

après avoir regardé.

Fig. 5. Fouet du gardien de l'Erèb.

A, manche du fnuel.

Fig. G. Dessins médianimiques exécutés les yeux fermés. Deus a dicté

les explications immédiatement après.

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 23

Fig. 7.

24 CLINIQUE MENTALE.

« nement dans l'amonr appelé perfectionnement dans les races.

« Les hommes sont bestials (sic) en amour et leur planète ne se

« perfectionnera que s'ils deviennent meilleurs et prient les dieux

« de les éclairer sur ce point et sur tant d'autres ».

C'est à ce moment que fut tentée une expérience particulière.

Profitant de l'activité actuelle de l'automatisme de Cam.... l'un

de nous lui demanda de tracer, les yeux clos, une ligne longue

et repliée sur elle-même en sinuosités compliquées, et, sans

ouvrir les yeux, de revenir du point terminal de la ligne au point

initial en suivant les mêmes sinuosités. Le résultat fut obtenu

presque exactement sans la moindre difficulté. La seconde partie

de l'expérience devait avoir lieu assez longtemps après, alors que

l'automatisme serait fortement diminué. Le résultat en fut en

effet tout différent, la malade ne put jamais, les yeux fermés,

revenir sur les méandres d'une ligne qu'elle venait de tracer ' (fig. 7).

Ces dessins cessèrent presque complètement de se produire

vers la seconde semaine de novembre. L'état d'esprit toujours

mystique et ambitieux n'est. pourtant pas aussi mégalomane que

ces légendes et explications pourraient le faire croire, ce sont les

esprits qui parlent; Cam... cause de toute chose plus naturellement,

bien qu'elle ajoute foi à toutes ces révélations et à la réalité de

leur provenance surnaturelle. En l'absence des dessins, elle reçoit

encore des communications psychographiques telles que celle-ci :

« C'est toi, m'a dit Dieu pendant mon délire (conscient), qui

« dictera aux hommes leur future conduite; voici pourquoi :

« Ton coeur est infiniment pur, ton âme belle dans toute l'ac-

a ception du mot, car elle est dénuée de tout sot orgueil ; mieux

« qu'aucun être, tu vois que le corps, en tant qu'enveloppe de

« l'âme, est périssable, donc méprisable aux yeux de Dieu, dont

« tu seras le porte-parole devant les hommes.

« La nouveauté dans l'idée à faire vivre c'est la combinaison

« du Moi et de la Vérité - apporte à la Vérité soit la Bonté

« par la vraie Charité, et fais-là connaître aux hommes qui ne la

« pratiquent pas comme il faut, s'ils t'écoutent, tu seras auprès

« d'eux mon intermédiaire; va, fais d'abord des jeunes élèves, je

« te dicterai mes lois au sur et à mesure.

« Ecris plus encore que tu ne parles scripla manient. »

Quelques jours après, elle écrit devant nous, toujours avec une

rapidité vertigineuse, cette page intitulée Naissance (sa naissance

à elle) :

« Delos est une déesse chargée d'envoyer l'étincelle divine dans

« chaque âme; elle prit par erreur l'âme d'une étoile morte,

« nommée depuis Siloë, fille de la beauté et de l'amour ou de

' Sollier. Du sens de la direction dans ses rapports avec l'autonia- ! isme (Bulletin 'de l'Institul géné1'(t1 de psychologie, p. 506). ,

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 25

« céphée et de Dieu. Cette étincelle divine, jetée dans une âme

« humaine, devait jeter la perturbation dans cette âme même par

« la lutte de la matière et de l'essence divine. Kam souffrit toute

« sa vie : enfance, jeunesse, mariage. Le monde, l'argent,

«l'égoïsme, le désir brutal et jamais l'amour. L'enfant voulut

« sortir de son enveloppe mortelle il y a quatre mois (allusion à

« ses sensations de mort éprouvées en Suisse et dans le Midi, à

« l'oppantion de Deus et à sa mission), nous l'en empêchons pour

« qu'elle crée la religion de la Bonté chargée de régénérer le

« monde en perfectionnant le christianisme continué dans le

« Kamianisme. Celle-ci sera (saura pas aujourd'hui - inutile). »

Elle s'est brusquement arrêtée d'écrire, et cette parenthèse indique

assez que Deus se refuse de rien dicter de plus, il ne veut pas que

nous en sachions plus long. Nous insistons pour qu'elle obtienne

la suite, mais elle refuse énergiquement : Non, dit-elle, il est

« terrible, je sens qu'il est en colère. »

Mais, plus tard, elle reprend le crayon et termine : « Sera une

« religion de transition, base de la tolérance. ') Elle ajoute alors

quelques explications orales : « Les enfants seuls seront réelle-

« ment Ifamiens; le tsar (dont elle a évoqué typtologiquement

« l'esprit dans le Midi), sera fou des idées que j'aurai, il m'a pro-

« mis il' ma mort de recueillir mes cendres dans un sarcophage

« d'or ciselé à l'ile Borromée. Les juifs et les protestants réfrac-

« taires seront déportés à Silo qui s'abimera dans les flots. »

Au milieu d'une causerie où nous discutons théologie, elle sent

quel'inspiration va venir; elle prend le crayon et sa main écrit :

« Vous êtes déiste, c'est-à-dire croyez à tous les dieux; or,

«demandez qu'on vous démontre Dieu; or, l'Infini n'est pas

« démontrable, puisque démontrer c'est réduire un fait à des

« faits tangibles et l'infini est intangible. Démontrer quel Dieu' ? Il

« y a : .10 Dieu Infini; 2° Dieu de notre système solaire : Neptune;

3° Dieu du système solaire de Cépliée : Deus. 4° Dieu du sytème

solaire de... »; ici, de nouveau, la communication s'arrête. Deus

refuse de rien dicter de plus. L'écriture de ce message n'est ni

l'écriture ordinaire de Cam... ni celle des révélations qui accompa-

gnent les dessins, surtout les premiers; cette fois, c'est une écri-

ture très verticale, tantôt ramassée, tantôt lâche, avec jambages

allongés.

L'inspiration cesse, elle revient à son état ordinaire et continue

la conversation; il s'agit maintenant de son recueil de pensées,

elle discute un aphorisme à y incorporer et le note, mais avec sa

conscience et sa volonté à elle et de son écriture habituelle sur la

feuille même où elle vient d'enregistrer le message : « Le respect

« est aux coeurs purs ce qu'est l'oxygène aux corps sains, » et,

plus bas, celui-ci : « L'âme est'tout étant essence divine, et c'est

" aux âmes qu'on juge les hommes, non aux corps, seuls signes

26 CLINIQUE MENTALE.

« distinctifs des races, les questions de races sont stupides. » Et

cet autre enfin : « La peine de mort est une oeuvre digne des

« hommes, elle prouve à quel point l'esprit mortel est éloigné de

« l'esprit de Dieu; qui est toute Miséricorde, toute Bonté envers

« les humains; mais ceux-ci se dévoreront entre eux jusqu'à ce

« qu'ils crèvent d'orgueil, tout comme la grenouille se croyant

« le boeuf ! » " . : .. z

La forme et le fond, comme l'écriture de ces pensées cons-

cientes, diffèrent sensiblement de ceux des messages mécaniques

et semi-mécaniques. Cam... considère ces pensées comme des

ébauches qu'elle retouche et ciselle; tandis que. les messages,

malgré, leur, style incomplet et leur extravagance, lui paraissent

des choses sacrées auxquelles elle ne doit rien modifier.

Un autre jour, au cours d'une conversation quelconque, l'esprit

de Deus se manifeste tout à coup, le crayon que Cam... tient tou-

jours « entraîne sa main » et elle écrit très rapidement :

« Dirai docteur secret médecine et bonheur humanité, sur ma-

« ladie contagieuse avec permission de Cam... Cam... permettra

« docteur faire connaître secret sur. fièvre typhoïde, façon isoler

« les malades dans grande cloche de verre. Dirai secret d'Uranie

« pour guérir radicalement fièvre typhoïde comme l'ai révèle à

« celui qui te fit tant souffrir. » Celui qui la fit tant souffrir, c'est

son mari. Celui-ci, en effet, quand il se servait d'elle comme de

son médium ordinaire, avait, par son intermédiaire, consulté

Deus pour guérir la surdité incurable d'un de ses amis.

Deus avait prescrit par la table cinquante centigrammes de

quinine. M. Schtein, qui avait entendu dire qu'on donnait du

sulfate de quinine pour certaines affections de l'oreille (vertige

auriculaire), fut frappé d'admiration; mais, à la même époque,

l'esprit avait ordonné contre la diarrhée d'un autre ami un lave-

ment d'eàu de Cologne qui heureusement ne fut pas administré.

Typtologie mentale. Plusieurs des messages qui précèdent et

notamment le dernier, sont en style télégraphique, c'est la carac-

téristique des messages de certains jours. Cette forme parait être

le mode intermédiaire entre les communications auditives ou

graphiques en langage complet et les communications typtolo-

giques ; ces dernières étant forcément un peu longues à recueillir

exercent la patience de la malade et sont généralement aussi

composées en style incomplet. Comme la plupart des médiums,

Cam... a commencé par la typtologique à bascule, c'est-à-dire par

la table. Aujourd'hui encore, elle aurait volontiers recours à ce

moyen, surtout quand par les autres voies l'esprit fait attendre ses

avis.

Mais, comme ce procédé lui est actuellement interdit et comme

l'activité momentanée de ses centres automatiques en mettent

d'autres à sa disposition, la typtologie s'établit par son fidèle

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 27

crayon. Celui-ci, quand il n'écrit pas, frappe les coups des let-

tres sur la table de chevet ou sur n'importe quoi. Un matin, pen-

dant notre visite, Deus épèle par les frappements du crayon. Il

déclare que l'un de nous a fait, il y a quelques années, partie d'un

comité consistorial à Paris et possède l'âme plusieurs fois

réincarnée d'un ancien prêtre. Le premier fait étant exact, Cam...

triomphe, car, dit-elle, elle l'ignorait absolument, la vérite du

premier fait doit entraîner celle du second. Elle oublie que nous

lui avons parlé de. ce comité lors de son premier séjour; notre

incrédulité la déconcerte et semble irriter Deus.

Le crayon frappe, en effet, avec une certaine violence, il épèle

de nouveau : « Dis à Monsieur... » et s'arrête brutalement, puis il

reprend en coups secs : « Cam... repose-toi. » Déus ne dira plus

rien de la matinée. Les mécréants lui déplaisent, il profère même

plusieurs fois le mot de Cambronne pour l'un de nous qui plai-

santait à son sujet. Ces grossièretés sont monnaie courante en

matière de spiritisme, on les met à l'actif des esprits trompeurs et

des esprits légers. Cam... n'ayant jamais fréquenté les milieux

spirites, bien que ces trivialités soient tout à fait contraires à son

tempérament, excuse Deus et cherche à justifier l'expression de sa

colère. .

Le crayon n'est bientôt plus nécessaire pour frapper les lettres,

un doigt y suffit et enfin,. chose plus intéressante, la typtologie

devient purement mentale. C'est dans la tête, « dans la pensée »,

que les coups des lettres se succèdent sans aucun mouvement

externe. C'est le moyen de communication qui a prévalu pendant

presque tout le mois de décembre. Les lettres sont battues très

vite, le médium a hâte de découvrir le sens de la phrase dictée et

cherche à deviner les mots bien avant qu'ils soient achevés.

Un jour entre autres, pendant ce même mois de décembre 1901,

nous trouvons Cam... de mauvaise humeur; à' la suite - d'une

visite de son mari, elle a mal dormi, elle est énervée, elle a eu

mal aux jambes et de la diarrhée. Toute la matinée, la typtologie

mentale a été très active sans qu'elle ait eu à se recueillir pour

la provoqucr. Le phénomène reprend devant nous. Les lettres suc-

cessivement se confondent dans sa tête : « A, b, c, d, e, f. Elle

poursuit : a, sans laisser continuer, elle cherche à deviner le mot

commençant par fd, cela doit être fais, un sentiment intérieur

d'affirmation lui exprime que c'est bien le mot voulu.

Elle laisse continuer : « a encore, puis a, b, c, d, e, f, h, i, j, le,

1, m, n, o, p, q. r, s, t. Elle s'arrête et pense attentat ? sensation

intérieure de négation, elle pense alors attention ? sensation inlé-

rieure d'affirmation. Elle poursuit alors le mot suivant, toujours

impatiente de devancer la marche du procédé.

La phrase constituée est la suivante : « Fais attention à la clef à

cause de la garde-malade. » Cette fois, cet avis de défiance à

2 ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

l'égard d'une garde qu'elle estime et dont elle est très sûre

révolte sa justice, aussi affirme-t-elle que ce n'est pas Deus qui

parle, ce ne peut-être la voix de personne assure-t-elle, et la

voilà sur le chemin d'attribuer les vains propos aux esprits mysti-

ficateurs, comme les vétérans des évocations.

Cette typtologie intérieure va durer pendant des mois, se répé-

tant presque tous les jours à certaines périodes. « Cela m'agace

quelquefois, dit Cam..., alors je fais les mots moi-même, mais je

me trompe, alors Deus recommence lentement, en appuyant les

lettres, et en formant des mots auxquels je ne m'attends pas du

tout. » (A suivre).

ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

Sur les modifications craniennes consécutives aux

atrophies cérébrales unilatérales (hémiplégie infan-

tile).

PAR G. PAUL-BONCOUR.

Dans les encéphalopathies infantiles, l'état du crâne né

doit pas rester inaperçu : il n'est jamais indifférent d'essayer

d'établir les rapports qui existent entre le crâne et le cerveau

et de déterminer l'influence que le contenant peut exercer

sur le contenu ou réciproquement.

Personne ne met en doute que ces rapports ne soient

étroits, mais quelle en est la nature ? Quel en est le degré ?

Quelle est celle des deux parties dont l'action est prépondé-

rante ? Autant de questions, dont on se préoccupe rarement :

peut-être en raison de leur aridité ou de leur complexité,

peut-être aussi parce que leur utilité est ignorée.

Il est un fait que l'étude de la craniolbgie a mis en évi-

dence : la boîte cranienne à l'état normal permet au cerveau

de prendre le développement dont il a besoin. On doit

même ajouter que le contenu peut prendre un développement

exagéré (par exemple dans l'hydrocéphalie,) sans que

le contenant, c'est-à-dire l'enveloppe osseuse, ne cesse de

s'adapter à cette pression intra-cranienne anormale. D'ail-

leurs, sans avoir recours à des exemples pathologiques,

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 29

n'est-il pas prouvé que la persistance de la suture métopique

est en relation avec une augmentation normale du volume

cérébral '. Le crâne par cette anomalie continue à remplir

son rôle protecteur sans apporter aucune entrave à la crois-

sance des centres nerveux. Que devient cette loi dans les

cas pathologiques ?

Si une suture prématurément synostosée s'oppose à la

croissance d'un cerveau sain, ce dernier éprouvera quelque

gêne, mais malgré tout, à moins .que toutes les sutures ne

soient synostosées, le cerveau pourra acquérir un développe-

ment normal. Les circonvolutions seront tassées les unes

contre les autres, l'endocrâne en présentera les traces, mais

grâce à une dilatation compensatrice,le développement encé-

phalique se fera dans une direction opposée et le résultat

sera une déformation crânienne ; mais remarquons-le, cette

déformation est la preuve de l'adaptation de la boite cra-

nienne à la pression interne. Nous jugeons inutile d'entrer

dans de longues explications concernant le mécanisme des

déformations consécutives à la synostose prématurée d'une

ou plusieurs sutures, nous renvoyons à une communication

que nous avons faite récemment à la Société d'Anthropo-

logie « sur la morphologie crânienne dans ses rapports avec

les états pathologiques du cerveau ». Nous avons présenté

des pièces et démontré le soin avec lequel il est nécessaire

et d'étudier et d'interpréter les faits.

Ce qu'il importe de savoir c'est que seul un cas de synos-

tose complète et prématurée du crâne est de nature à s'oppo-

ser au développement d'un cerveau sain. Le cas doit être

rare, car ainsi que nous le faisions remarquer antérieure-

ment dans un mémoire sur Le crâne dans les idioties », sur

625 crânes recueillis au musée de Bicêtre, nous n'avons

relevé qu'un seul cas de synostose complète et encore le cer-

veau qui y était renfermé présentait des lésions qui s'oppo-

saient à son développement tout autant que l'inextensibilité

de la boite osseuse.

' Papillault. Salure métopique (Mémoires de la Société d'Auth¡'opo-

logie, 1890).

, Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, 1902,

page 35.

1 liourneville. Recherches sur l'épilepsie, l'hystérie et l'idiotie,

compte rendu de Bicêtre pour 1901, page 193.

30 ' ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

Si au contraire les sutures restant libres, il existe un cer-

veau qui ne se développe pas,- qu'adviendra-t-il ? Ce n'est

pas une hypothèse, et le fait se présente constamment : un

petit cerveau s'accompagne d"un petit crâne; tous les cas de

microcéphalie en sont la démonstration.

Quelle que soit la causé première de l'arrêt de développe-

ment des centres nerveux, le forme cranienne n'est-elle

même que l'expression de cet arrêt de développement. C'est

la persistance d'un état cranien infantile, dont l'étrangeté

tient souvent au défaut de proportion qui existe entre le

corps et la tête. La microcéphalie peut s'accompagner d'un

arrêt général de la croissance, constituant alors une va-

riété de nanisme, mais elle peut aussi surmonter un corps

relativement développé et, dans tous les cas, l'étude du crâne

qui en a été faite est démonstrative : la forme, la disposition

des parties osseuses, la valeur des angles pétro-clivien,

inioclivien, clivo-horizontal, basilaire, indiquant l'inclinai-

son de certaines portions craniennes par rapport à l'horizon-

tale, traduisent mathématiquement un retard de crois-

sance.

On nous objectera peut-être que certains caractères ne sont

pas le fait de la persistance d'un état infantile : l'épaisseur

des parois craniennes, par exemple, si remarquable chez

certains microcéphales ! ! C'est une preuve, au contraire, et

une preuve éclatante de l'origine centrale de la microcé-

phalie.

Le cerveau atrophié ne se dilate pas et par suite ne dilate

pas la cavité cranienne, mais en même temps il n'exerce

aucune pression sur l'endocrâne ; aussi le tissu osseux par-

faitement sain continue à s'accroître. La croissance intersti-

tielle des parois craniennes n'est pas limitée par la pression

intra-cranienne, de là son épaisseur parfois inusitée. Ainsi

que nous l'avons écrit antérieurement et ainsi que M. Bour-

neville en a relaté de nombreux exemples, dans tous les cas

où un hémisphère est atrophié, la paroi correspondante est

augmentée d'épaisseur 2. Cette particularité est en relation

1 M. Manouvrier a donné des explications anthropologiques au sujet de

la microcéphalie accompagnée ou non de nanisme que nous conseillons

de consulter pour comprendre tous ces rapports. Nanisme in Société

d'Anthropologie, 16 avril 1896.

' Le crâne dans les idioties.

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 31

avec cette loi que partout où la pression est augmentée, l'os

tend à s'amincir (et dans l'hydrocéphalie où elle est à son

maximum on a, en effet, des parois extrêmement minces) et

que là où la pression diminue la paroi s'épaissit. <

La figure 8 et les PL. 1 et II donnent un exemple frappant

de cette modification de la pression intracrânienne au niveau

de la loge frontale.' Le cerveau de Vey... avait une atrophie

double de la partie antérieure des loles frontaux : il en était

donc résulté une diminution de pression dans la loge anté-

rieure et conformément à la loi sus-énoncée, l'os frontal

s'est épaissi ainsi que l'indique la figure 8, où l'on voit la

coupe de cet os.

Dans la microcéphalie où la pression est extrêmement

faible, puisque la masse entière est frappée d'un arrêt de

croissance, l'épaisseur des parois peut être considérable.

L'ossification ayant lieu librement, il en résulte un envahis-

sement des sutures d'autant plus aisé que l'expansion céré-

brale absente ne s'oppose pas à leur occlusion. Dans ces cas

la synostose totale ou très avancée, d'ailleurs extrêmement

rare, n'est donc que secondaire et nullement la cause de l'atro-

phie cérébrale.

Ce qui est vrai pour les cas de microcéphalie l'est égale-

ment pour les cas où le cerveau est atteint d'un retard peu

prononcé de développement.

Si on compare les crânes des idiots à des crânes de sujets

normaux, on constate une diminution des diamètres cra-

niens, mais de plus on remarque, et c'est là un fait encore

plus intéressant car il en donne la raison, un certain nombre

de caractères en rapport avec un stade du développement

cranien nullement approprié à l'âge et à la taille du sujet'.

On dit que le crâne présente quelques caractères infantiles,

c'est très juste car tout n'est pas enfantin, la croissance géné-

rale ayant continué et atténué certains de ces caractères.

L'épaisseur des parois, par exemple, ou encore l'ossifica-

tion de certaines sutures sont la preuve de la dysharmonie

que nous signalons.

Nous avons insisté dans notre mémoire Le Crâne dans les Idioties,

sur le défaut d'expansion cérébrale en vertu duquel les déformations

sont peu accentuées chez les idiots en comparaison de leur nombre. C'est

oujours la même cause qui est en jeu (comme pour la diminution des

diamètres) : le retard de développement.

32 ' ANATOMIE PATHOLOGIQUE. '

Nous pensons que ces explications donnent entière satisfac-

tion, mais en cas qu'il y ait malgré tout des incrédules, nous

allons ajouter les observations suivantes qui sont encore

plus démonstratives car elles reposent sur des cas ayant la

valeur de véritables expériences réalisées par un processus

morbide. '

Nos observations portent sur les crânes de sujets porteurs

d'hémisphères de poids et de volumes différents par suite de

la sclérose atrophique de l'un d'eux.

^ Leur juxtaposition a amené dans la partie du crâne corres-

pondant à chacun d'eux des différences bien accusées : d'une

part un hémicrâne normal, de l'autre un hémicrâne moins

développé, autant de variations qui démontrent que le crâne

s'est adapté de part et d'autre à sa fonction.

Toutes les parties de la boîte crânienne sont loin d'être

également influencées. La surface extérieure ne présente

souvent rien de remarquable, tandis que l'endocrâne subit

des modifications fort appréciables. Mais sur ce dernier

encore, l'influence cérébrale s'exerce inégalement : alors que

la base cranienne subit des transformations accentuées, le

reste de la surface est peu modifié. *

Cela s'explique aisément : plongé dans le liquide céphalo-

rachidien le cerveau en raison' de son poids exerce une action

directe sur la surface inférieure de l'enveloppe cranienne;

que ce poids subisse des variations, la base cranienne pré-

sentera des variations parallèles. -

Nous sommes informés, grâce à des recherches craniolo-

giques patientes, qu'au cours de la croissance, la tête subit

de.nombreuses transformations. Les caractères morpholo-

giques d'un crâne de foetus différent essentiellement de ceux

d'un crâne adulte ; ils sont cependant reliés les uns aux au-

tres et leur apparition n'est pas spontanée mais le résultat

d'une multitude de phénomènes mécaniques, chimiques et

même pathologiques. Comme l'a écrit le Dr Papillault, un

caractère morphologique porte l'empreinte de chacun de ces

phénomènes, même des plus fugitifs 1.

Mais il est non moins évident que cette trace sera d'autant

plus profonde que le phénomène aura agi plus longtemps et

' Etude morphologique de la base du crâne (-1898), Société d'Anthro-

pologie. ,

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 33

plus fortement. La portion cranienne répondant à 1'liémi-

sphère malade présentera donc un retard si on le compare

àla partie adjacente donnant asile à un hémisphère sain.

L'une comme l'autre n'auront fait que s'adapter au poids et

au volume de la masse encéphalique qu'ils supportent.

Il est facile d'apprécier par une simple inspection le moin-

dre développement de certaines parties osseuses du côté

malade (diminution de la fosse cérébrale moyenne par

exemple), l'asymétrie de la base crânienne, la scoliose de la

partie médiane de la base, mais cela ne donne aucune notion

précise de l'affaissement en masse de la base (effet direct du

poids cérébral) et de ses différences.

Pour les mettre en évidence, nous avons agi avec nos

crânes comme nous l'avions fait avec un crâne de myxoedé-

mateux au sujet duquel nous avons publié récemment quel-

ques réflexions concernant les déformations de la base dans

les Archives de Neurologie Les crânes ont été dessinés au

stéréographe, puis dans le but de connaître la différence des

angles faits par chacune des voûtes orbitaires et chacun des

rochers avec une ligne commune et nullement influencée par

les variations du poids encéphalique. Nous avons :

1° Mesuré l'angle formé par la rencontre de la ligne suivant

la direction de la voûte orbitaire avec le plan horizontal de la

têle établi par Broca, plan passant par le centre des orbites

et le trou optique.

2° Mesuré l'angle existant entre la ligne suivant la crête

de la pyramide pétreuse du rocher et le clivus (plan de la

face supérieure de l'apophyse basilaire).

Voici les valeurs de l'angle orbito-horizontal :

34 . ' ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

peu accentuée d'autre part ceux qui appartenaient à des

sujets peu avancés en âge. Dans le premier cas la base cra-

nienne a été insuffisamment impressionnée et les'mensura-

tions ne sauraient traduire un arrêt de développement

minime.

Dans le second cas, les inclinaisons diffèrent trop peu

pour avoir une valeur réelle ; mais alors ce n'est pas l'insi-

gnifiance de l'arrêt de développement qui est en cause, c'est

le stade peu avancé de la croissance de l'hémisphère sain

qui rétablit l'égalité. Si l'enfant eût survécu, les différences

d'inclinaison se fussent accusées au fureta mesure de l'aug-

mentation de poids.

L'inclinaison du rocher est indiquée dans le tableau sui-

vant aui donne l'angle nétroclivien.

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 35

tissu osseux 1 ; c'était un myxoedémateux, chez lequel l'ori-

fice externe du conduit auditif et le basion (bord antérieur

du trou occipital) normalement à un niveau différent se 1

trouvaient sur un même plan.

Nous allons maintenant signaler quelques variations

morphologiques résultant de l'inégalité de volume des hémi-

sphères. Une première modification qui apparaît, consiste dans

la déviation, la scoliose de la partie médiane de la base cra-

nienne depuis le corps du sphénoïde jusques et y compris

la crête endofrontale. L'apophyse crista-galli est plus ou

moins déviée vers le côté malade. Dans notre mémoire « Le

Crâne dans les Idioties », nous avons déjà attiré l'attention

sur celte anomalie en faisant remarquer d'ailleurs que depuis

de longues années M. Bourneville l'avait notée dans toutes

les descriptions relatives aux nécropsies s'accompagnant

d'hémiatrophies cérébrales.

Sa genèse est simple : lorsque les deux hémisphères se

développent également et simultanément, la pression sup-

portée par l'apophyse crista galli sur ses deux faces est iden-

tique. Qu'un des hémisphères s'atrophie et cesse de se déve-

lopper, qu'arrive-t-il ? Le demi-cerveau sain exerce sa

pression d'une part sur la paroi résistante de la voûte cra-

nienne correspondant à sa face externe, d'autre part, sur

la paroi dépressible formée par la faux du cerveau et la lame

mince recouvrant le tissu spongieux de l'apophyse crista-

galli. Mais toute cette paroi interne se laisse déprimer parla

' pression normale de l'hémisphère sain, qui n'est pas contre-

balancée par une pression en sens contraire. L'hémisphère

au cours de sa naissance agrandit donc sa loge aux dépens de

la loge de l'hémisphère opposé. '

Les déformations de l'apophyse sont les suivantes : elle est

plus ou moins renversée. La face répondant au côté sain est

aplatie et lisse, la face opposée est bombée et renflée; ces

aspects sont à rapprocher de ceux qui se retrouvent sur les

' Archives de Neurologie, 1903 et Comptes rendus de Bicêtre, J903 ;

Paiii-Boi,couit : Mécanisme de quelques déformations crâniennes dans le

myæ'rdème [Société d'Anthropologie, 18 juin 1903).

M. Rt,gnatilt (Compte rendu de l'Association des anatomistes, 1901-

et )1. Ledouble (Traité des variations des os du crâné), rattachent égale)

ment la déviation de l'apophyse à l'inégalité de volume des hémisphères.

36 ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

crânes normaux à différents âges : sur un crâne d'adulte

l'apophyse crista-galli est généralement mince et aplatie sur

ses deux faces : .sur un crâne de foetus, elle est, la plupart

du temps, plus ou moins renflée. ,

Dans nos cas, un côté rappelle donc l'aspect normal, tan-

dis que sur le côté opposé on constate la persistance de la

forme foetale. Le renversement parfois complet est l'exagé-

ration d'un mécanisme normal, due à une inégalité de pres-

sion pathologique.

Ajoutons pour aider à la compréhension de ces formes :

1° Que sur un certain nombre de crânes ayant appartenu

à des microcéphales, nous avons constaté l'aspect renflé en

totalité, ce qui n'a rien d'étonnant puisque l'absence de

pression est générale'. 1,

2° Que les hémiplégiques, décédés en bas âge, ne présen-

tent pas de déviation de l'apophyse, ou ils n'en présentent

qu'une très minime puisque l'hémisphère sain n'a pas eu le

temps ou mieux le besoin d'agrandir sa loge.

Une autre conséquence de la déviation de l'apophyse

crista-galli est la diminution de largeur de la fosse ethmoï-

dale répondant au côté malade. En même temps que l'apo-

physe est repoussée, la partie sous-jacente, la lame perpen-

diculaire de l'ethmoïde, dont elle n'est que le prolongement

la suit dans ce mouvement d'où la déviation de cette por-

tion facile à voir lorsqu'on regarde par l'ouverture antérieure

des fosses nasales ; d'où aussi le rétrécissement de la fosse

ethmoïdale.

Enfin, à la partie antérieure, la crête endofrontale est

repoussée du côté malade, si bien que la partie médiane de

l'os frontal considéré par la face externe ne répond en rienà à

la saillie de cette crête osseuse interne.

La différence de pression a amené également une asymé-

tre du corps du sphénoïde. Les deux versants latéraux qui

se continuent avec la face supérieure des grandes ailes ont des

inclinaisons différentes; le versant contribuant à former la

loge de l'hémisphère sain est beaucoup plus oblique que celui

du côté opposé : il tend à la verticalité. La pression plus forte

a modifié aisément le corps de l'os creusé de sinus et amené

' Nous l'avons aussi constaté sur les crânes ayant donné asile â une

porencéphalie double. '

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 37

un aspect normal, tandis que du côté répondant à une

moindre pression on a un aspect qui serait normal si le sujet

était encore en bas âge. Par suite de cet aplatissement le

niveau de la naissance de la grande aile, est plus inférieur.

Nous connaissons déjà un certain nombre des phéno-

mènes au moyen desquels la partie saine du -cerveau a

agrandi sa loge et rendu apparent l'arrêt de développement

de la portion osseuse renfermant l'hémisphère malade.

En voici quelques autres : l'expansion cérébrale s'étant

faite dans tous les sens au niveau de la loge moyenne, la

partie antérieure du lobe temporal qui s'introduit sous la

petite aile du sphénoïde, a légèrement repoussé en avant

la grande aile : aussi l'excavation destinée à recevoir le bec

de cette circonvolution a un développement notablement

supérieur du côté sain ; il est parfaitement appréciable à la

vue. -

En arrière la pression cérébrale a produit un véritable

renversement du bord supérieur du rocher en même temps

qu'un léger tassement de cet os : (nous parlons toujours par

comparaison avec le côté malade). Sur certains crânes même,

l'orifice interne du conduit auditif n'est pas aussi régulière-

ment arrondi du côté sain. Nous avons d'ailleurs noté le

fait pour certains trous optiques.

Si on calcule l'angle que fait la ligne du rocher avec la

ligue médiane horizontale, on constate qu'il est plus petit

du côté sain, l'os ayant été été repoussé vers la partie pos-

térieure par suite de l'expansion du cerveau. Voici les angles

obtenus :

38 ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

cérébelleux atrophié : les rapports de ce dernier avec la face

postérieure du rocher indiquent donc bien que la résistance

a été minime'.

Les moyens d'agrandissement de la loge antérieure nous

sont connus : inclinaison de la voûte orbitaire, déviation de

l'apophyse crista galli et rétrécissement de la fosse ethmoi-

dale, déviation de la crête endofrontale.

, Au niveau de la voûte orbitaire on observe une autre diffé-

rence entre les deux côtés. Tandis que du côté sain il y a

des impressions digitales profondes et des éminences papil-

laires élevées, du côté malade l'aspect est plus lisse. C'est un

effet de cette lui que' nous avons signalée plus haut, que

partout où la pression diminue la paroi s'épaissit là où elle

est augmentée l'os s'amincit.

Aux circonvolutions les plus pesantes, correspondent des

cavités plus profondes, mais au niveau des sillons qui les

séparent, la pression est nulle et la prolifération osseuse

se faisant librement vient combler le vide qui en résulte. Du

côté malade le cerveau appuie moins sur la voûte orbitaire, et

de plus en raison de la sclérose qui l'atteint et qui ratatine

les circonvolutions, en raison des épaississements méningés

qui sont fréquents, il n'y a pas des intervalles aussi accen-

tuées et les crêtes osseuses n'ont pu s'y insinuer.

Ce n'est donc pas, comme certains cliniciens l'ont dit sans

réflexion, parce que le cerveau exerce une action trophique

directe sur l'os qui le recouvre (ce qui dans le cas d'atrophie

de" cet organe, entraînerait une atrophie des crêtes

osseuses observées normalement) que l'on observe les varia-

tions précédentes. -

Si on considère la voûte crânienne, on s'aperçoit du reste

1 L'inégalité croisée n'est pas absolue, quelquefois les hémisphères

cérébelleux sont égaux; d'autres fois, plus rares, l'atrophie cérébelleuse

existe du même côté que l'atrophie cérébrale. Enfin, souvent, tandis que

les hémisphères cérébraux sont inégaux, les hémisphères cérébelleux

sont égaux. C'est, au moins, ce qui ressort du tableau sur l'Inégalité des

hémisphères cérébraux et cérébelleux, comprenant 90 cas que nous

avons publiés dans notre Compte rendu de 1902 (p. 265-273). Voici

d'ailleurs les chiffres : Inégalité croisée, 37; - inégalité du même côté,

7 ; égalité (des hémisphères cérébelleux) 15. Nous profitons de l'oc-

casion pour signaler une erreur typographique : à la page 27, il faut inter-

vertir les lettres G et D. BouRNEviLLE.

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 39

que l'épaisseur de la paroi est plus grande du côté malade.

Pourquoi cet aspect ?

Parce que, comme nous l'avons dit, la pression à ce niveau

est moindre. Toutefois, remarquons-le, la différence d'épais-

seur est peu marquée dans certains cas et nullement compa-

rable à celle qui accompagne les scléroses totales de l'encé-

phale (microcéphalie). Il y a une dernière cause qui doit

entrer en ligne décompte : l'inflammation méningée.

Etant donnés les rapports des membranes avec l'endocrâne

lig. 8. - Coupe de crâne de Vey... (hauteur réelle 14 ; largeur 13).

40 ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

cela n'a rien d'étonnant. Mais dans quelle mesure cette

inflammation exerce-t-elle son action sur la croissance de

l'os ? Ce sontlàdes phénomènes complexes sur lesquels nous

ne voulons pas nous'prononcer définitivement. En effet, si

nous avons des crânes où l'inflammation ne parait pas avoir

Fig. 9.

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 41

influencé, l'augmentation d'épaisseur (le processus inflam-

matoire ayant été localisé à la partie postérieure du cerveau

et la région frontale ayant néanmoins un épaississement

notable), nous avons aussi d'autres cas où la réalité de cette,

action est hors de doute, par exemple le cas de R ? chez

.lequel l'atrophie des lobes frontaux a laissé un large

Fig. 10.

42 ' ANATOMIE PATHOLOGIQUE. 1,

.espace retro-frontal où des proliférations osseuses en forme

de lamelles constituaient une croissance osseuse anormale et

nettement d'origine inflammatoire.

Sur les fig, 8, 9 et 10, on voit l'atrophie de la partie antérieure

du cerveau; sur la fig. Il où est représentée la coupe du crâne, on

remarquera les saillies placées à la face interne du frontal, qui

sont en forme de lamelles ayant jusqu'à 2 centimètres de hauteur.

Sur la fig. 12, on voit une anomalie assez curieuse, l'agrandisse-

Fig. 11.

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 43

ment des trous pariétaux. Nous la signalons non seulement en

raison de sa rareté, mais aussi parce que nous pensons qu'elle est,

comme les proliférations osseuses endofrontales le résultat de

troubles inflammatoires intracrâniens, ayant exagéré la circula-

tion et modifié le cours du sang, de telle sorte que la séance des

trous a été rendue nécessaire. On trouvera des explications très

complètes au sujet de ce cas dans les Bulletins de la Société d'An-

thropologie janvier 1902)......... 1

Fig. 12.

44 ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

Ces faits méritent donc d'attirer l'attention et nous espé-

pérons que l'étude d'une série de crânes ayant recouvert des

cerveaux atteints de porencéphalie, pourra apporter quelque

clarté. Là, les faits sont discordants : augmentation d'épais-

seur dans certains cas, aucune modification dans d'autres

.ou même amincissement (du côté atteint), mais comme le

mécanisme qui préside à la porencéphalie est loin d'être élu-

cidé puisqu'on invoque tour à tour des hémorrhagies, des

oblitérations artérielles, de l'hydrocéphalie interne, des

processus inflammatoires, des traumatismes, des arrêts de

l'ig. 13. - Cane de Perr...

ATROPHIES CÉRÉBRALES UNILATÉRALES. 45

développement limités à une zone cranio-cérébrale, des

malformations osseuses, etc., etc., il semble que la diversité

des causes permettra d'expliquer celle des aspects et de fixer

ce point intéressant de la morphologie cranienne.

En résumé, nous avons trouvé au cours de nos recherches

les preuves d'un retard de développement hémi-cranien, lié

au retard de l'expansion hémi-cérébrale. Dans une moitié du

crâne nous avons constaté des caractères analogues à ceux

que nous avons rencontrés chez les microcéphales et les sujets

ayant un faible volume encéphalique. Il y a des modifica-

tions spéciales engendrées par la juxtaposition de deux

hémisphères inégaux, mais le mécanisme est un mécanisme

normal et nullement un effet direct du processus pathologi-

que. ' .

Sur la moitié du crâne insuffisamment développé on

trouve également les troubles d'ossification (épaisseur plus

grande) rencontrés chez les microcéphales, on y trouve

même au niveau de certaines sutures, une synostose plus

avancée en raison de l'arrêt de développement cérébral qui

ne s'oppose pas à leur envahissement par le tissu osseux.

Sur quelques crânes notamment, il est curieux de voir au

fond de la fosse cérébrale moyenne d'un côté une suture

sphéno-temporale dentelée et témoignant de l'activité de

l'accroissement nécessité par un hémisphère sain, de l'autre,

une suture sans dentelures, à demi-synostosée, dont l'obli-

tération traduit l'arrêt de développement de l'hémisphère 1

correspondant. Comme sur nos crânes d'idiots les caractères !

d'infantilisme sont compliqués de caractères d'ossification \

active.

Il nous resterait un long chapitre à écrire sur les modifi-

cations de la surface externe du crâne et de la forme géné-

rale. Nous la ferons ultérieurement et dans un mémoire

spécial, car les modifications relevées sont surtout d'origine

musculaire et analogues à celles que nous avons exposées à

propos des os des membres'. '.

La forme générale est peu transformée en raison des fai-

bles variations de la pression interne et de l'épaississement

des parois. On pourrait s'en étonner eu égard à l'intensité

, Comptes rendus de l31eélre et Bulletin de la Société d'Anthropologie e

1900 et 1901. '

pu. III. Encéphale de Perr... (Voir obs. complète dans le Compte rendu de 1900, P- 61 1

r PL. IV. Encéphale de Perr...

1. ¡ i ARcmvEs, 2' sél'ie, PL. t. XVIII. IV. - Encéphale de PCI'I'... ' 4

50 ' ANATOMIE PATHOLOGIQUE.

des lésions cérébrales et à la diversité des troubles patholo-

giques. Mais qu'on se rappelle ce que nous écrivions anté-

rieurement à cesujeti : «Il est nécessaire de dire, si l'on veut

bien définir la loi qui règle les rapports du contenant et du

contenu, que le crâne est en rapport non pas avec le cer-

veau mais avec la pression intra-crânienne », et nous en

donnions des exemples. -

La figure 13 et les planches III et IV reproduisent un cas caracté-

ristique. Bien que relativement petit, le crâne de Perre... avait

des dimensions qui faisaient croire à un poids encéphalique beau-

coup plus élevé. Or, il n'atteignait que grammes, mais l'espace

laissé libre entre l'encéphale et les parois crâniennes était occupé

par une quantité considérable de liquide dont la présence suffisait

à maintenir la pression intracrànienne. Les ventricules cérébraux

(voir les Planches qui les représentent dans le n° 64 des Archives de

Neurologie de 1901, où l'observation complète a été publiée, avec

portrait de l'enfant) étaient eux-mêmes distendus par du liquide.

On voit sur les Planches VIII et IX les hémisphères à l'état naturel'

et après leur incision. Le crâne (fig. 13) a une forme régulière.

En général, ceux qui mesurent les anormaux paraissent

oublier .cette loi : ils constatent des modifications dans les

diamètres craniens et immédiatement il en déduisent que le

cerveau est parallèlement modifié. C'est une faute qui devient

grosse de conséquences aussitôt qu'on applique cette façon

d'interpréter les faits. des anormaux d'un degré supérieur.

Avant de terminer, signalons une modification assez fré-

quente, mais non constante : c'est le moindre développement

d'un des côtés du crâne. L'asymétrie est nette et néanmoins

beaucoup de ces crânes avaient été étiquetés plagiocéphales,

ce qui est une erreur, la plagiocéphalie ne s'accompagnant

pas d'un arrêt de développement de l'un des hémisphères.

En tout cas, si l'on conserve à cette forme le nom de plagio-

céphalie, il faut, pour éviter toute confusion, la distinguer

nettement de la plagiocéphalie ordinaire. (Ce mémoire a été

fait avec les crânes recueillis par notre ancien maître,

M. Bourneville, crânes qui sont déposés dans son Musée de

Bicêtre).

' Le crâne dans les idioties, loc. cit.

2 On trouvera un excellent mémoire de M. Manouvrier sur cette ques-

tion dans les Bulletins de la Société d'Anthropologie de l'année 1883

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

1. Spasme essentiel ou idiopathique ; par William Clahencb

Fiske. (The New-York Médical Journal and Philadelphia Médical

Journal, 3 octobre 1903).

Cette névrose, désignée quelquefois sous le nom de tétanie in-

termittente ne se rencontre pas communément chez un sujet tel

que celui dont il s'agit. C'est un jeune homme grand et vigoureux

ayant présenté depuis son enfance des attaques ressemblant à

celles du petit mal. Il fut pris subitement de convulsions intermit-

tentes limitées aux jambes, aux bras et à l'abdomen, et qui d'abord

bilatérales devinrent unilatérales.

Toutes les médications avaient échoué lorque l'auteur eut l'idée

de recourir à la jusquiame, qu'il administra sous la forme de

bromhydrate d'hyoscine en injection sous-cutanée. Le résultat ne

se fit pas attendre et fut très satisfaisant.

L'auteur ne se déclare nullement certain que la guérison soi

définitive ; mais en tout cas le médicament parait être celui qu'il

convient de choisir. R. de IilUSGnAVE-CLAY.

II. L'épilepsie ne peut pas être causée par des états toxémiques ;

par W. HAMILTON Hall. (The Journal of Mental Science. Octobre

1903.)

L'auteur soutient énergiquement la thèse indiquée par le titre

de son mémoire, en se basant principalement sur la banalité

d'une pareille étiologie, et sur les modes de production de l'épilep-

sie dans lesquelles elle ne saurait être invoquée.

. H. DE V1USGItdVE-CL : 1Y.

111. Remarques sur la pathologie des acroparesthésies ; par le prof.

Pick (de Prague).

11 semble souvent que l'irrégularité de distribution des phéno-

mènes sensitifs ne soit qu'apparente ; aussi peut-on se demander

s'il n'existerait pas une certaine constance dans'l'ordre des causes

de cette affection nerveuse. C'est ainsi que dans un cas très signi-

ficatif d'acropareslhésie, l'auteur a prouvé pour ce syndrome une

localisation déterminée : les remarques jointes à l'observation

démontrent qu'on peut à juste titre généraliser les conclusions

tirées de ce cas. Il faut probablement placer le siège des troubles

52 ) REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

donnant lieu aux paresthésies dans la moelle épinière et principa-

lement dans la moitié inférieure de la partie cervicale. (Revue 11eu-

rologique, janvier 1903). E. B.

IV. Sur un cas remarquable de contracture post-hémiplégique;

par les Dr. DEVIC et Gallavardia.

A propos de cetteobservation, les auteurs émettent les réflexions

suivantes : 1° Outre les convulsions précoces qui accompagnent

parfois les hémiplégies avec ictus et les contractures tardives, il

peut se manifester moins de 24 heures après le début d'une hémi-

plégie, une contracture hâtive persistante. 2° Cette contracture

peut envahir un membre, alors que l'autre reste flasque. 3° Dans

l'observation rapportée, la contracture, localisée au membre infé-

rieur était en flexion. 4° La lésion causale consistait en un ramol-

lissement très limité de la capsule interne avec dégénérescence

pyramidale. (Revue neurologique, janvier 1903). E. B.

V. Mydriase unilatérale et corps étranger (épillets d'hordeum

murinum) du conduit auditif externe ; par J. SABRAZLS.

Observation d'un homme de 47 ans dans l'oreille duquel s'insi-

nua un fragment d'épi de graminée pendant qu'il dormait dans

un champ. A la suite de cet accident, cet homme présenta une

mydriase spasmodique unilatérale avec affaiblissement, mais per-

sistance des réflexes pupillaires. 111., Sabrazès pense que celle

mydriase ressortit au réflexe pupillaire sensitif; l'excitation des

terminaisons nerveuses sensitives du conduit par le corps étranger

avec le cortège des sensations désagréables qui l'accompagne esl

le primum movens du réflexe dilatateur de la pupille du côté cor-

respondant. (Revue neurologique). E. B.

VI. Catalepsie symptomatique et rythme de Cheyne-Stokes ; par

A. l3aun.

M. Bauer relate les observations de quatre malades entrés à l'hô-

pital pour : méningite tuberculeuse; cancer de l'oesophage, urémie

lente, hémorrhagie cérébrale au cours d'une néphrite chronique.

Ces malades ont présenté des attitudes cataleptoïdes et la respi-

ration de Cheyne-Stokes. Une inhibition cérébrale profonde semble £ '

être la raison fondamentale de ces deux phénomènes. Ils seraient

des manifestations de l'insuffisance corticale. (Revue neurologique,

mars 1903. % E. B.

VII. Ophtalmoplégie et artério-sclérose; par A. Péchin et M. Rollik.

Observation d'un homme de 64 ans, tabétique, qui présente une

ophtalmoplégie extrinsèque totale et complète à gauche avec abais-

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 53

sèment considérable de la vision du même côté par atrophie opti-

que, et à droite ptosis incomplet avec paralysie du droit supérieur.

On attribua pendant la vie, ces troubles au tabes. L'autopsie dé-

montra qu'ils étaient dus à une compression parlacarotide gauche

athéromateuse et très dilatée, du moteur oculaire externe et des

autres nerfs du sinus caverneux. L'artère ophtalmique gauche,

ectasiée elle aussi, comprimait le nerf optique. (Revue neurologique,

mars, 1903). 1 : . B.

VIII. A propos du cytodiagnostic du tabès ; par MM. VIDaL, SICARD,

et BAVAIT.

La lymphocytose est une loi au cours du tabes. Le lymphocyte

est le témoin d'un simple processus d'irritation. Le polynucléaire

seul, traduit par sa présence un état congestif ou inflammatoire,

car il ne peut venir par diapédèse que des vaisseaux sanguins. Les

auteurs ne s'expliquent les résultats opposés obtenus par MM.

Armand-Delille et Camus dans le tabes que par une différence de

technique. (Revue neurologique, mars 1903). E. B.

IX. L'Astasie-abasie labyrinthique ; par Pierre Bonnier.

'L'auteur étudie le cas d'un jeune malade de 11 ans présenté par

Déjerine et A. Thomas à la Société de neurologie comme atteint de

troubles de l'équilibre et qui, selon lui, serait atteint d'astasie-

abasie labyrinthique. M. Bonnier est d'avis que le phénomène pré-

senté par ce malade est de nature purement hystérique, alors que

pour Déjerine et Thomas il y aurait lésion organique sous-corlicale

dont la nature est indéterminée. (Revue neurologique, avril 1903).

E. B.

X. Hémiataxie post-hémiplégique et coordination sous-corticale;

par Ed. CLAP.1RÈE.

Observation d'une malade de 6 ans, hémiplégique gauche, pré-

sentant une hémiataxie assez notable, malgré l'intégrité presque

complète des sensibilités périphériques. Pour l'auteur, il s'agirait

d'une lésion des neurones coordinateurs des noyaux gris sous-cor-

licaux, lésion intéressant les fibres centripètes de la sensibilité non

consciente, et respectant les neurones thalamo-corticaux.

XI. La neurofibrosarcomatose; par le Dr R. CESTAN.

C'est la deuxième observation de tumeur de ce genre rapportée

par M. Cestan. 11 fait, dans ce travail, une étude indiquant la phy-

sionomie clinique, la place en histologie pathologique et la parenté

avec la maladie de Recklinghausen de cette variété de néoplasie. On

peut admettre une transformation maligne primitive des éléments

51 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

du système nerveux d'origine mésodermique, une sarcomatose

primitive et généralisée d'emblée.Mais, les éléments nerveux pro-

prement dits, cellules nerveuses et cylindraxes résistent longtemps

au processus malin. (Revue neurologique, août 1903.) E. B.

XII. Contribution à l'étude de l'anatomie pathologique et de la

pathogénie de la chorée; par St. Kopczynski.

L'auteur rapporte l'observation complète, suivie d'autopsie et

d'examen histologique, d'ailleurs négatif, d'un cas de chorée

mineure de Sydenham chez une jeune fille de dix-sept ans. A pro-

pos de ce cas, l'auteur fait un historique de la maladie et expose

les théories actuellement en présence. (Revue neurologique, août

1903.) E. B.

XIII. Note sur un réflexe adducteur du pied ;

par le De R. H1RSCHBERG.

Le réflexe adducteur du pied consiste dans un mouvement d'ad-

duction de tout le pied et parfois aussi de la cuisse, sans mouve-

ment des orteils, sous l'influence de la friction avec l'ongle du bord

interne du pied. Pour l'auteur, celui-ci serait pathologique et se

rencontrerait dans tous les cas où l'on constate le réflexe de

Babinski. (Revue neurologique, août 1903). E. B.

XIV. Le spasme facial ; ses caractères cliniques distinctifs ;

par Henry Meige.

Ce travail relate dix observations de spasme facial et établit la

physionomie spéciale du spasme et du tic. L'auteur examine

ensuite les opinions de quelques neurologistes français et étran-

gers sur le spasme facial, puis il discute les rapports de cette affec-

tion avec l'hystérie : « Il est peu vraisemblable que le vrai spasme

facial, avec toutes les particularités qui le caractérisent, fasse par-

tie du répertoire de l'hystérie. Elle n'en peut fabriquer que des

contrefaçons mauvaises. Mais qu'un sujet, déjà hystérique, puisse

être par surcroît atteint d'un spasme de la face, voilà une éven-

tualité qu'on doit aussi envisager. » (Revue neurologique, octobre

1903.) E. B.

XV. De la contracture secondaire du releveur de la paupière supé-

rieure dans le cours de la paralysie faciale ; par MM. E. Berger

et R. Loewy.

Dans une publication antérieure (comptes rendus de la Société

de Biologie, 30 mai 1903) les auteurs ont exposé l'importance de

la contracture secondaire du releveur palpébral dans le cours de la

paralysie faciale.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 55

Deux nouveaux cas leur permettent de revenir sur ce symptôme

dont ils exposent la symptomatologie, la physiologie pathologique

et le diagnostic différentiel.

La présence d'une contracture secondaire survenue dans le cours

d'une paralysie faciale aggrave toujours le pronostic à cause de la

prolongation de la durée du lagophtalmos et du danger de com-

plication (kératite xérotique). (Revue neurologique, décembre 1903.)

. E. B.

XVI. Sur la diplégie faciale périphérique ; par le Dr PANEGROSSI,

(Riv. Sp. difren. 1903, fasc. 1, t. II).

Observations cliniques et étude d'ensemble constituant une

véritable monographie de la question. J. S.

XVII. L'acrocianose chronique hypertrophiante ; par M. PLao.

(Nouv. Iconog. de la Salpêtrière, n° 1, 1903.)

Les nombreuses observations cliniques qui constituent à l'heure

actuelle le domaine de l' « acropathologie » peuvent se ramener

à troisformespriucipales : 1° Celle avec prédominance de troubles

sensitifs (acrocyanose chronique à forme sensitive).- -20 La moda-

lité avec atrophie (acrocyanose à forme atrophique). 3° L'acro-

cyanose avec augmentation de volume des parties molles. L'au-

teur présente, avec le résumé des cas publiés antérieurement, une

observation personnelle détaillée d'un cas se rapportant à cette

dernière forme. R. C.

XVIII. Un cas d'hémiatrophie faciale progressive; par CALMETTE et

Pages. (Nouv. Iconog. de la Salpêtriin'c, no 1, 1903.)

Jeune fille de quinze ans atteinte depuis plusieurs années d'une

atrophie progressive de,tous les muscles du côté gauche de la face.

L'examen minutieux permet de constater que la motilité, la sensi-

bilité, les sécrétions, la vasomotricité sont absolument intactes,

et que la trophicité seule est altérée. Ce syndrome clinique per-

met d'éliminer, dans la recherche de la cause de l'affection, aussi

bien la théorie de l'aplasie lamineuse que celle de la lésion ner-

veuse périphérique (facial, sympathique, trijumeau) et d'ad-

mettre que la lésion est nerveuse et qu'elle siège dans les centres

sans qu'il soit encore possible de la localiser plus exactement.

XIX. Trophoedème chronique acquis et progressif; par Smicard et

LAIGNEL-L4.VASTINE, (Nouv. Iconog. de la Salpêtrière, n° 1, 1903.)

Les auteurs pensent qu'il y a lieu de distinguer dans l'affection

décrite par Brissaud et Meige, deux variétés : congénitale, la plus

stable s'installant chronique d'emblée, restant à peu près immo-

56 .REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

bile, type essentiellement héréditaire ou familial; acquise, à symp-

tômes plus variés, à marche susceptible de progression, d'arrêt,

de rétrocession, à genèse apparente (traumatisme ou ^infection).

C'est un cas de cette dernière variété qui est rapporté dans ce

travail. -

XX. Un fait de macrodactylie, par Félix 1,jars. (Nouv. Iconog. de

la Salpêti,ièi-e, n° 1, 1903.)

Jeune fille de treize ans. Aucune hérédité. A la naissance on cons-

tate à la main gauche un médius plus long et plus gros que le

droit. Ces différences de mesure ont été constamment en s'accroîs-

sant : le doigt mesure 15 centimètres de longueur et 12 centimètres

de circonférence, gênant considérablement les mouvements de la

main et n'étant plus justiciable que de l'amputation. Celle-ci est

pratiquée dans la continuité du métacarpien. c'est-à-dire qu'après

désarticulation métacarpo-phalangienne, on procède à la résec-

tion de la tête du métacarpien. Ce procédé déjà préconisé pour

toute élimination de doigtsen général, estparticuliènimentindiqué

dans les cas de gigantisme pour prévenir les déformations ulté-

rieures du moignon qui seraient la conséquence de l'activité de

production du cartilage conjugal de la tête métacarpienne.

XXI. Macrodactylie; par Cailla. (JVouu. Iconog. de Salpêtrière, n° 1. : 1903). -

Chez un garçon de dix-sept ans, hypertrophie constatée à la nais-

sance et qui a toujours suivi une marche progressive. Cette hyper-

ti-opliie intéresse tous les segments du membre supérieur droit avec

maximum aux trois doigts externes et coïncide avec un ensemble

de stigmates de dégénérescence (asymétrie faciale, voûte palatine

ogivale, strabisme). *

XXII. Syringomyélie, arthropathie de l'épaule; par ilRISSAUIJ et URU'

AUDET (Nouv. Iconogr. de la Salpètrière, n° 2, 1903).

Un homme de quarante-neuf ans entre à l'hôpital pour tuberculose

abdominale; outre lessignes de tuberculose pulmonaire on constate

chez lui une arthropathie monstrueuse et indolente de l'épaule

gauche, de l'atrophie musculaire progressive du même memhre et

de la dissociation de la sensibilité aux extrémités des deux mem-

bres supérieurs. Diagnostic de syringomyélie. Mort par tubercu-

lose pulmonaire. Diagnostic vérifié à l'autopsie par la constatation

de lésions de l'articulation scapulo-humérale (énormes végétations

fibro-cartilagineuses) et de la moelle (atrophie des cornes anté-

rieures, foyers lacunaires des deux côtés). R. C.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 57

Un cas de syphilis héréditaire tardive à forme cérébro-

spinale ; par BICHON. (NOllV. Iconogl'. de la Sa/piJI/'iè1'e), n02, 1903),

Un enfant de onze ans, sans antécédents héréditaires connus, bien

portant jusqu'alors, est à la suite d'un traumatisme, atteint de

suppuration osseuse avec fistule de la région pariétale gauche.

Epilepsie jacksonnienne à droite. Trépanation sans amélioration.

Déchéance physique et intellectuelle progressive. Tuberculose

pulmonaire. Mort trois ans après le début de la maladie. L'autopsie

montre une malformation de l'hémisphère cérébral gauche, et des

lésions de méningo-encéphalite s'étendant à presque toute la

région psycho-motrice du même côté. A la face inférieure du

cervelet, de la protubérance et du bulbe, des lésions de méningo-

myélite disséminées sur toute la hauteur de la moelle. L'examen

histologique de ces différentes lésions permet de déterminer leur

nature spécifique. R. C.

XXIV. Un cas de myopathie atrophique progressive avec trou-

bles de la sensibilité; par Lamiom et Porot. (Nouv. ]conogl', de

la Sl1lpêll'iè/'e, n° 2, 1903).

Myopathique typique par son histoire et l'ensemble des carac-

tères cliniques : absence de caractère familial, mais hérédité ner-

veuse, traumatisme à sept ans, début à dix ans par de la parésie et

des douleurs lancinantes, évolution lente, atrophie musculaire

étendue aux quatre membres, fausse bypertrohie des membres

inférieurs, rétractions tendineuses, aboli'.ion des réllexes tendi-

neux et de l'excitabilité électrique. Ce cas présente en outre un

phénomène rarement signalé, des troubles de la sensibilité objec-

tive et subjective, douleurs lancinantes et hypoesthésie cutanée,

phénomène qui permet de le ranger dans la série des cas mixtes

où le système nerveux doit sûrement intervenir. R. C.

XXV. Monstrueuse déformation du tibia droit en fourreau de

sabre chez un tabétique ; par SABmxÈs. (Nouv. Iconogr. de la

Salpêtrière.)

Observation d'un cas de Labes par hérédo-syphilis, présentant

une déformation du tibia dite en fourreau de sabre, rare par son

enormité et qui n'avait pas encore été signalée dans le tabès hérédo-

syphilitique. IL C.

XXVI. Paralysie radiculaire totale du plexus brachial avec hémia-

trophie et parésie de la face. Réflexions sur l'étendue des

anesthésies et sur les troubles trophiques et moteurs de la face

d'origine sympathique) ; par M. P. Courront. (Société médicale

des hôpitaux de Lyon, 20 janvier 1903.) ..

5b REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

L'observation que rapporte l'auteur l'a conduit à étudier la

question des troubles sensitifs et de l'hémiatrophie faciale, d'ori-

gine sympathique,dans certaines paralysies radiculaires.

Il s'agit d'un homme âgé de vingt-cinq ans présentant dans ses

antécédents du rhumatisme avec insuffisance aortique et rétrécis-

sement milral probable par endocardite, qui à la suite d'un violent

traumatisme eut une paralysie radiculaire totale du plexus bra-

chial droit. Elle s'accompagnait d'atrophie des muscles du bras et

de l'épaule avec réaction de dégénérescence, de troubles trophiques

de la peau de la main. Il présentait en outre une anesthésie com-

plète de la main et de l'avant-bras et d'un petit territoire de la

face externe du bras; la sensibilité était conservée à l'épaule et

dans presque tout le bras, les troubles sensitifs n'étaient pas

superposables aux troubles moteurs et trophiques. Il y avait enfin

du myosis droit avec rétraction de la fente palpébrale; une

atrophie considérable de la joue droite avec aplatissement

marqué et asymétrie faciale; une parésie avec diminution de la

contractilité faradique de certains muscles de la face.

Des différents faits mis en évidence dans cette observation l'au-

teur conclut que dans la paralysie radiculaire totale traumatique

du plexux brachial, l'explication de la répartition des troubles

sensitifs doit être cherchée dans des anastomoses et des sup-

pléances, soit à la périphérie (nerfs intercostaux, nerfs du plexus

cervical), soit au niveau de l'origine du plexus; dans cette dernière

hypothèse, l'innervation sensitive de l'épaule et d'une partie du

bras, prendrait son origine plus haut dans la moelle que les-

racines du plexus brachial.

L'hémiatrophie faciale rapide et très accusée s'explique par la

lésion des filets sympathiques des racines du plexus brachial

(dernières paires cervicales et première dorsale.) Le sympathique

a une action trophique sur la face; le centre médullaire etle trajet

des filets qui ont cette fonction, sont très rapprochés de ceux des

filets irrido-moteurs et peut-être identiques à eux.

L'explication la plus vraisemblable de la parésie et de la dimi-

nution de la contractilité faradique de certains muscles de la face,

et de la langue, qui peuvent accompagner cette hémiatrophie,

est celle d'une atrophie de rameaux nerveux moteurs de certains

nerfs craniens sous la dépendance des lésions du sympathique.

G. C.

XXVII. Accidents pseudo-méningitiques à répétition au cours de

l'évolution d'une chorée de Sydenham chez une hystérique; par

M. Barjon. (Lyon médical, 2a janvier 1903, n° 4.)

M. Barjon publie l'observation d'une malade qui, à l'âge de huit

ans et demi, puis à l'âge de dix-sept ans, présenta des accidents

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 59

cérébraux graves qui en imposèrent pour une méningite au cours de

l'évolution d'une chorée de Sydenham.

Ce qui fait l'intérêt de cette observation, c'est d'abord la répéti-

tion des accidents pseudo-méningitiques à grande distance,

puisque huit années séparent les premiers phénomènes des

seconds; ensuite la répétition de ces derniers à trois reprises

différentes à intervalles très rapprochés (deux ou trois jours)...

A chaque poussée pseudo-méningitique les symptômes peuvent

en imposer pour une méningite vraie. Certains indices font cepen-

dant soupçonner la vérité.

Le début brusque, la malade présentait au troisième jour l'aspect

d'une méningite tuberculeuse à la troisième, semaine. L'évolution

rapide, la guérison complète obtenue en quelques jours pour

ainsi dire sans convalescence.

Cette observation présente aussi un autre intérêt, c'est que la

malade réunit à elle seule la plupart des causes prédisposantes et

déterminantes signalées dans des cas analogues. Comme causes

prédisposantes ce sont l'hystérie, la chorée, les manifestations

antérieures du côte des méninges, les causes occasionnelles sont

l'apparition des premières règles et une émotion morale intense,

toutes causes que l'on retrouve dans l'observation publiée par

l'auteur. G. C.

\\VIII. Des formes anormales de la maladie de Parkinson; par

M. Collet (Lyon médical, 1er février 1903, n° 5.

Sans étudier toutes les formes anormales de la maladie de

Parkinson, M. Collet envisage celles qui se distinguent par des

anomalies du tremblement. C'est ainsi que l'auteur distingue les

foi mes suivantes : 1° Maladie de Parkinson sans tremblement, forme

la plus connue de toutes, où les syptômes cardinaux de la maladie

existent bien caractérisés, et où le tremblement seul fait défaut.

` ? ° Maladie de Parkinson à 17-einble ? ? îe ? 2t anormalement étendu.

C'est ainsi que le tremblement peut envahir la tête, le cou,

la mâchoire, les muscles de la face, du pharynx, 'du larynx con-

trairement à ce que prétendent la plupart des auteurs classiques.

3° Maladie de Parkinson a tremblement unilatéral; dans cette

forme le tremblement reste indéfiniment unilatéral. Ce sont ces

cas seulement, dit l'auteur, qu'il faut décrire comme forme anor-

male, car parfois le tremblement peut rester unilatéral, pendant

une et même plusieurs années et se généraliser par la suite. Ces

formes unilatérales à généralisation tardive sont relativement

fréquentes. 4° Maladie de Parkinson à tremblement secondaire

unilalérul. Dans cette forme le tremblement après avoir été géné-

ralisé, se limite brusquement à un côté du corps. M. Collet insiste

sur les trois points suivants : 1° la généralisation souvent très

60 - REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

tardive du tremblement dans la plupart des cas de maladie de

Parkinson à tremblement hémiplégique; 3 la dispartion brusque

et tardive du tremblement dans une moitié du corps, aboutissant

à une forme secondairement unilatérale; 3° l'extension possible du

tremblement à la face, à la langue, à la mâchoire. G. Carrier.

XXIX. Du cas d'hystérie à grandes manifestations. Fièvre hysté-

rique ; par MM. Lannois et Porot. (Lyon médical, 2G juillet 1903.)

MM. Lannois et Porot présentent à titre documentaire l'obser-

vation d'une hystérique qui garda, près d'un an, une fièvre con-

tinue dépassant parfois 41°, des vomissements incoercibles et

quotidiens, présenta du sang et de l'albumine dans les urines et

qui malgré cela, vit son poids augmenter progressivement de

10 kilog.

L'observation publiée par les auteurs est intéressante à cause

de la grande richesse symptomatique du cas (asthénie, vomisse-

ment incoercibles; accès de grande tétanie; troubles nrinaires

fort variés : polyurie ou anurie, albuminurie, hématuries; crises

sudorales en rapport avec l'anurie; fièvre continue); de la longue

durée des symptômes fébriles; de la curieuse suppléance du rein

par la peau; enfin par la conservation paradoxale du poids et de

la santé générale. G. C.

XXX. Contribution à la question de la macro-esthésie, par N.-N.

Iwans\\'. (Obo : .¡'éllié psicleiolrü. VII. 1902.)

11 s'agit de cette erreur d'appréciation du toucher en vertu de

laquelle les objets semblent au malade plus grands et plus gros

qu'ils ne le sont en réalité. (Archives de médecine expéri-

mentale et d'anat. patholog. 1895. 5.) L'auteur en fournit deux

nouvelles observations. Dans les deux cas, la macro-esthésie sur-

vint à la suite de névrite du médian, à la phase de la régénéres-

cence. Il est probable, ajoute M. Iwanow, que les extrémités ner-

veuses qui viennent de se refaire, manquent au début de leur

fonctionnement, de l'exercice pratique qui leur est indispensable

pour leur apprentissage d'adaptation aux conditions ambiantes.

De là des illusions en rapport également avec la répartition diffé-

rente des éléments tactiles néoformés. L'appareil psychique rece-

vant des impressions inusitées, ne parvient pas au premier mo-

ment à les corriger et, par suite, se trompe dans l'évaluation des

dimensions, car plus grand est le nombre des points de contact de

l'objet avec la peau, plus cet objet semble grand.

P. KERAVAL.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIQUES.

l. Névrite radiculaire subaiguë. Dégénérescences consécutives

dans la moëlle (racines postérieures) et dans les nerfs périphé-

riques (racines antérieures) ; par J. NAGEOTTE.

Une lésion inflammatoire subaiguë des nerfs radiculaires peut t

être le point de départ d'altérations parenchymateuses des racines

postérieures et antérieures et entraîner à sa suite une dégénéres-

cence systématisée des cordons postérieurs et une névrite périphé-

rique motrice. C'est ce que montre l'intéressante observation rap-

portée par M. Nageotte. Une infection portant sur le système ner-

veux central a produit deux foyers dans l'axe cérébro-spinal et en

outre des lésions inflammatoires multiples au niveau de plusieurs

nerfs radiculaires lombo-sacrés. Il existe également une dégéné-

rescence de plusieurs racines sacro-lombaires d'où il résulte : 1° Une

lésion systématisée des cordons postérieurs au-dessous du foyer

de myélite transverse, qui constitue, avec la dégénérescence du

faisceau pyramidal consécutive à la myélite, une sclérose combinée

de la région sacro-lombaire ; 2° Une névrite périphérique. (Revue

neurologique, janvier 1903). E. B.

II. Quelques nouvelles données sur la physiologie des réflexes ten-

dineux ; par le professeur Stciierback.

Inspiré par les travaux dé Max Egger sur la sensibilité osseuse,

le professeur Stcherback a constaté que les vibrations constituent

un excédent spécifique des profondes terminaisons des nerfs mises

en jeu pendant l'acte du réflexe rotulien. En même temps, les

expériences citées semblent prouver qu'à l'aide de vibrations nous

pouvons artificiellement, pour ainsi dire, charger les appareils ré-

flexes de l'énergie nerveuse et de même les décharger artificielle-

ment par des mouvements passifs. (Revue neurologique, janvier

1903). E. B.

111. Du parasite trouvé dans le sang des épileptiques. Son aggluti-

nation par le sérum des animaux infectés et par le sérum des

épileptiques; par M. l3na.

Voici les conclusions de ce travail : Nous sommes autorisés a

dire que l'épilepsie créé le pouvoir agglutinant et qu'il y a un séro-

diagnostic du mal comitial. 0

G2 REVUE d'anatomie ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

Nous sommes désormais en possession de trois procédés pouvant

servir au diagnostic de l'épilepsie : 4° La recherche directe du

parasite dans le sang. 2° Le procédé des cultures (ensemencements

de 1 cent. de sang dans 10 cent, de bouillon). 3° La séro-réaction.

(Revue neurologique, janvier 1903). E. B.

IV. Les lésions du système lymphatique postérieur de la moelle

sont l'origine du processus anatomo-pathologique dutabes; par

MM. P. Marie et G. GUILLAIN.

Intéressant travail montrant que ce qui crée le tabes, ce n'est

pas seulement la névrite, c'est-à-dire la lésion de la racine à sa tra-

versée de la méninge, c'est la lésion de tout le système lympha-

tique postérieur de la moelle, système constitué par la racine pos-

térieure, la pie-mère et le cordon postérieur. En somme, la lésion

initiale du tabès ne serait autre chose qu'une lésion syphilitique

du système lymphatique postérieur de la moelle. Nous savons, en

effet, avec quelle fréquence et quelle prédilection la syphilis crée

des lésions dans les lymphatiques. (Revue neurologique, janvier

1903). E. B.

V. Pression intraartérielle dans la névrose traumatique; par

Lad. Hoskorec (de Prague).

Après avoir exposé les résultats de ses recherches, l'auteur con-

clue que le degré de hauteur de la pression du sang et ses change-

ments éventuels n'ont pas, jusqu'à présent, dans la névrose trau-

matique, l'importance et la valeur que veut leur accorder Strauss.

L'intérêt serait plus grand si nous connaissions la pression du

sang avant le traumatisme et si nous pouvions le poursuivre en

divers temps après le traumatisme. (Revue neurologique, janvier

1903). - E. B.

VI. Atrophie du cervelet et sclérose en plaques; par André Thomas,

M. Thomas a pratiqué l'examen histologique du névraxe d'une

malade ayant présenté une symptomatologie très analogue à celle

de la sclérose en plaques et à l'autopsie de laquelle on avait cru

trouver un ramollissement de la face inférieure du cervelet. L'exa-

men histologique a révélé des lésions très semblables à celles de

l'atrophie olivo ? oizio-cé ? -ébelleuse, mais cependant un peu plus

complexes. (Revue neurologique, février 1903). E. B,

VII. Contribution à l'origine corticale des tremblements; parR.

AIASSALONGO.

M. Massalongo expose ses opinions sur l'origine corticale des

tremblements et des spasmes. Il rapporte l'observation d'uu

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 63

malade chez qui ces phénomènes ont persisté pendant les trois

journées et les trois nuits qui précédèrent la mort. L'examen né-

cropsique montra qu'il s'agissait d'une méningo-encéphalite tuber-

culeuse localisée symétriquement aux circonvolutions fronto-parié-

tales. Cette observation montre donc que des contractions fibril-

laires unilatérales et bilatérales peuvent dépendre exclusivement

de l'excitation des cellules grises de la zone rolandique. (Revue

neurologique, mai 1903). E. B.

VIII. Contribution à l'étude des localisations dans le noyau de l'hy-

poglosse ; par M. et 11m PAR liON (de Bucliarest).

Ces auteurs ont eu l'occasion d'examiner le bulbe d'un malade

mort d'un cancer de la langue ayant détruit une grande partie des

muscles palato-glosse, pharyngo-glosse et amycalo-glosse. Le génio-

glosse, fhyoglosse,le tranverseet le lingual inférieur étaient épar-

gnés. Les auteurs, ayant étudié le noyau de l'hypoglosse chez ce

malade, décrivent, dans le présent article, les altérations qu'ils

y ont constatées. (Revue neurologique, mai 1903). E. B.

IX. Etude sur le phénomène des orteils ; par G. l\IARINESCO.

Cette étude a pour but de donner une explication au phénomène

de Babinski. D'après Marinesco, il faudrait admettre une double

innervavation des muscles, corticale et sous-corticale ; mais tandis

que pour le membre supérieur l'innervation corticale des exten-

seurs serait prédominante, pour le membre inférieur, ce serait celle

des fléchisseurs, et vice-versa. Pour le membre supérieur, l'inner-

vation sous-corticale des fléchisseurs serait plus forte que celle des

extenseurs. Il existerait donc un antagonisme entre l'innervation

corticale et sous-corticale des extenseurs et des fléchisseurs. On

s'expliquerait ainsi pourquoi la plupart des réflexes des membres

inférieurs se passent dans le domaine des extenseurs et pourquoi

dans la paraplégie, l'hypertonie porte souvent sur les muscles

extenseurs du membre inférieur. (Revue neurologique, mai 1903.)

E. B.

X. Fracture de la colonne vertébrale. Lésion spinale limitée à

une minime partie d'étage radiculaire ; par BRISSAUD et BRECY.

Il s'agit d'une observation de fracture de la colonne vertébrale

ayant altéré profondément un étage du cordon spinal, mais limitée

exclusivement à un étage de quelques millimètres d'épaisseur. La

destruction des cellules des cornes antérieures sur une étendue

très limitée avait produit une dégénération également très limitée

dans les racines antérieures correspondantes. Pas de zone d'anes-

thésie : les troubles de sensibilité consistaient uniquement en

64 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

élancements douloureux surtout marqués le long de la face posté-

rieure des avant-bras. (Revue neurologique, juin 1903). E. B.

XI. Lésions de syringomyélie trouvées à l'autopsie d'un paralytique

général; par MM. Joffroy et Gombault.

Etude clinique et anatomopathologique des plus intéressantes

d'un malade âgé de trente-six ans. C'est un cas rare de paralysie

générale développée chez un individu atteint de syringomyélie.

Cette constatation est en faveur de la théorie de Joffroy, d'après

laquelle les diverses causes - parmi lesquelles la syphilis - qui

déterminent la paralysie générale, n'agissent d'une façon efficace

que lorsqu'elles exercent leur action sur un système nerveux pré-

disposé. Dans l'observation relatée par les auteurs, le vice de déve-

loppement s'est traduit par la malformation de l'épendyme mé-

dullaire. (Revue neurologique, septembre 1903.) E. B.

XII. Les manifestations des tumeurs du cervelet; par II. DURHT.

Les conclusions de ce travail sont les suivantes :

1° Dans les tumeurs cérébelleuses, on peut observer : des trou-

bles de l'équilibre (titubation) et du tonus (asthénie, atonie), de

l'incoordination des membres supérieurs, de l'asynergie cérébel-

leuse et de l'exagération des réflexes tendineux. Il s'y joint : une

céphalée occipitale assez caractéristique, de la raideur de la nuque

avec opisthotonos, et, dans quelques cas, des attaques épilepti-

formes, des ictus cérébelleux, des paralysies et contractures. L'in-

tégrité de la sensibilité générale est constante, pathognomonique.

Les troubles intellectuels, s'ils existent, sont consécutifs.

z Il est indispensable au chirurgien, d'établir en outre, le dia-

gnostic cantonal du néoplasme, afin de diriger ses recherches plus

sûrement de ce côté.

Bien que le cervelet semble, d'après les physiologistes contem-

porains, être un organe homogène au point de vue fonctionnel, il

existe cependant quelques symptômes de localisation, selon quela

tumeur occupe le lobe médian, les lobes latéraux, les pédoncules

cérébelleux moyens, ou qu'elle siège vers la partie antérieure de

l'équateur cérébelleux, au voisinage du bulbe. Dans ce dernier cas,

l'analyse des effets de la compression des paires bulbaires, aide le

diagnostic topographique.

11 importe surtout, pour le choix du lieu de l'opération, d'être

fixé sur le côté de la lésion néoplasique. On y parvient en tenant

compte des faits suivants : les effets des lésions cérébelleuses uni-

latérales sont directs et non croisés, comme pour celles des hémis-

phères cérébraux ; les troubles dits cérébelleux (perturbation de

l'équilibre, asynergie, atonie pour les membres inférieurs, ataxie

pour les supérieurs), occupent le côté du corps homonyme à celui

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 65

de la tumeur, ou, en tous cas, y sont prédominants. La chute se

fait le plus souvent du côté de la tumeur. Les phénomènes de

compression suivent la même loi : pour les tumeurs du lobe mé-

dian et du vermis, les troubles occupent les deux côtés du corps.

(Revue neurologique, octobre 1903.) E. B. '

XIII. Note sur un cas de ramollissement du cervelet avec

étude des dégénérescences secondaires; par V. 1\écEL et A.

THéoHant.

Etude d'un malade ayant présenté d'abord un syndrome céré

belleux à l'état de pureté, puis devenu plus complexe par suite de

la production d'autres foyers de ramollissement au niveau du sys-

tème nerveux central. Le malade ayant succombé, l'étude métho-

dique de son système nerveux central fut faite par la méthode de

Marchi. o-

Il s'agit d'un ramollissement surtout central de l'hémisphère

cérébelleux gauche, capable par conséquent de se traduire par

une symptomatologié et des dégénérations nettes. La rareté de

semblables lésions, avec survie suffisante pour la production de

dégénérations secondaires a engagé les auteurs à publier leur cas.

Les coupes en série n'ont révélé que quelques fibres dégénérées

dans le corps restiforme et la dégénérescence d'un certain nombre

de fibres arciformes internes allant aux olives. (Revue neurologique,

octobre 1903.) E. B.

XIV. Note sur l'anatomie pathologique de la myélite aiguë diffuse ;

par MM. E. \VEtLt et L. GALLA YHDIN.

Examen histologique d'un cas de myélite aiguë diffuse avec

maximum au niveau des cordons postérieurs et formation d'une

cavité centrale. Présence au niveau de'ces cordons postérieurs,

dans l'intérieur de la cavité ou ses parois, de très nombreuses cel-

lules d'aspect épithélioïde. Ces cellules sont très volumineuses,

' polyédriques ou arrondies; leur protoplasme est clair, translucide

ou très légèrement granuleux; le noyau, souvent double, est très

petit, arrondi. Ces cellules paraissent tout d'abord s'accumuler

dans la gaine des vaisseaux, puis infiltrent d'une façon diffuse le

tissu nerveux et enfin tombent dans la cavité centrale..

Pour les auteurs, ces cellules épithélioïdes ont la même signifi-

cation et la même origine que celles que l'on trouve dans les dif-

férents processus inflammatoires du système- nerveux. Peut-être

cette transformation des cellules inflammatoires en cellules épi-

thélioïdes se produit-elle surtout dans les cas à évolution subai-

guë, de préférence ceux à allure aiguë ou torpide. (Revue neurolo-

gue, octobre 1903.) E. B.

AMENES, 2' série, t. XVIII. 5

66 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

XV. Sur les manifestations des tumeurs du lobe occipital et du

. lobe temporo-sphénoidal ; par H. Duret.

.M. Duret étudie la manifestation la plus caractéristique des

tumeurs du lobe occipital, Y hémianopsie latérale homonyme. Ce

phénomène se présente rarement à l'état isolé, comme dans les

hémorrhagies et les ramollissements emboliques ; elle est, le plus

souvent, associée à des troubles aphasiques, à la cécité verbale,

ou à des hémiplégies et des hémianesthésies.

Quant aux tumeurs du lobe temporo-sphénoïdal, elles peuvent

produire de la surdité physique ou de la surdité verbale, ou encore

des troubles d'aphasie sensorielle ; dans d'autres cas enfin, des

symptômes de compression des nerfs de la base, des hémiplégies

ou des hémianesthésies. (Revue neurologique, novembre 1903.)

- E. B.

XVI. Tumeur (des plexus choroïdes) du quatrième ventricule avec

vomissements incoercibles et fécaloïdes ; par le Dr J. PAVIOT.

C'est là un symptôme nouveau, non encore signalé. Les vomis-

sements fécaloïdes avaient déjà été observés dans l'hystérie. Le

sujet étudié dans ce travail est un homme de quarante-cinq ans,

dont les vomissements présentaient le caractère « cérébral », c'est-

à-dire s'effectuaient sans effort, comme une sorte de régurgita-

tion, et alternaient avec des hoquets incessants. Ce n'est pas la

violence, mais plutôt la durée des vomissements, qui semble en

cause, pour qu'ils aient fini par être fécaloïdes. Ces vomissements

paraissent avoir été la manifestation grave et unique de la com-

pression des noyaux du pneumogastrique. (Revue neurologique,

novembre 1903). E. B.

XVII. Deux cas de tumeur du nerf auditif; par M. J. LéPIYE.

Le hasard a permis à l'auteur d'observer, à quelques mois de

distance, deux cas de tumeur du nerf auditif, dans le service du

professeur Lépine, et d'en faire l'examen histologique; il s'agis-

sait de deux fibromes. La symptomatologie de ces tumeurs a été

dans les deux observations, à. très peu près, celle d'une lésion

cérébelleuse.

Les tumeurs du nerf auditif sont eucore assez mal connues ; leur

siège ordinaire est dans la fosse cérébelleuse, contre la paroi du

rocher, où le néoplasme s'attache d'ordinaire au niveau du trou

auditif interne. Au point de vue clinique, le principal élément de

diagnostic, celui qui peut les faire distinguer d'un néoplasme céré-

belleux, est l'existence primitive d'une surdité complete, de nature

nerveuse, avec paralysie faciale, suivie à bref délai de symptômes

de tumeur encéphahque. (Revue neurologique, novembre 1903.)

E. B.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 67

XVIII. Méningite terminée par la mort, dans laquelle le myosis

et la suppression de la salive ont été les seuls symptômes.

Autopsie. - Etude de diagnostic par exclusion; par H. ALTS-

CIIUL. (771e Ne w- York Medical Journal, 25 avril 1903.)

Cette intéressante observation, suivie d'une autopsie très

détaillée, se termine par les conclusions suivantes :

1° Une méningite étendue peut exister sans présenter les symp-

tômes ordinaires et caractéristiques de la maladie;

2° La sepsie ne donne pas toujours lieu à des modifications du

pouls et de la température, dont le caractère normal ne suffit pas

pour conclure à l'absence de phénomènes septiques;

3° Une occlusion spasmodique complète de l'uretère, nullement

due à l'engagement de calculs rénaux, peut durer un certain

temps et masquer ainsi l'existence d'une pyonéphrose étendue;

4° Le myosis et la suppression de la salive peuvent être les

premiers symptômes d'une méningite ou d'une myélite;

5° Le raisonnement par exclusion peut nous conduire à des

diagnostics qu'il serait impossible d'établir autrement.

R. DE jIUSGRAVE-CLAY.

six. A propos du soi-disant « Sens des attitudes » ; par CLAPARÈDE.

(Nouv. Iconog.. de la Salpètrière, n° 2, 1903.

Continuation d'une discussion dialectique ouverte entre

MM. Bonnier et Claparède, et dont l'intérêt n'est pas d'ordre

médical.

XX. Lésion ancienne du noyau rouge. Dégénérations secondaires,

par Pierre Marie et G. GUILL.11N ; (Nouv. Iconog. de la Salpêtrière.

n°2, 1903).

Hémiplégie cérébrale infantile, arrêt de développement de tout

le côté gauche. Abolition de l'ouïe, de l'odorat et du goûta droite.

Diminution de l'acuité visuelle du mêmecôté. Mort àcinquanteans

dansle gâtisme après tentatives de suicide. A l'autopsie on neconstate

aucune lésion du cortex ni des méninges, mais une lésion pédon-

culaire intéressant nettement tout le noyau rouge du coté droit,

«véritable destruction expérimentale ». Les coupes sous-jacentes

dénotent une dégénération nettement localisée au pédoncule céré-

belleux, au faisceau central de la calotte et au faisceau longitudi-

nal postérieur. Les lésions médullaires ne paraissent avoir aucun

rapport avec l'hémiplégie infantile, mais dépendre de la syphilis

acquise. L'absence de toute lésion de la voie pyramidale permet-

trait de supposer que l'hémiplégie infantile résulte de la lésion

du noyau rouge et des voies motrices de la calotte. R. C.

68 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

XXI. Un cas de sclérose symétrique des lobes occipitaux; par

Marchand. (IVO2GU. ICO)20g7'. de la S'LlI)Ei9'iP.l'C, n° z, 1903).

Femme épileptique internée depuis vingt-deux ans pour débilité

mentale, mauvais penchants et impulsions violentes. Depuis cinq ans,

augmentation progressive des accès convulsifs, bégaiement et affai-

blissement de la vue réduits à la fin à la vision centrale correspon-

dante au champ des macula, perte de l'orientation. Mort dans le

coma à la suite d'attaques nombreuses. A l'autopsie on constate une

sclérose de toute l'étendue des lobes occipitaux avec maximum

au niveau des scissures calcarines : à l'examen histologique on

distingue seulement quelques tractus fibreux sains qui paraissaient

correspondre aux radiations optiques. Cette observation confir-

merait l'hypothèse de Von Monakow, qui explique la conservation

de la vision centrale dans les cas de lésions des sphères visuelles

parce fait que les fibres correspondant à la macula se dispersent

dans toute l'étendue du territoire cortical de la vision.

Il. CHAHOK.

XXII. Un cas de phocomélie et hémimélie ; par HALBRON. (Nouv.

Icônes', de la Salpélrière, n° 2, 1903).

Malformations nombreuses et très accentuées des différentes

régions osseuses du bassin et des membres inférieurs : à gauche

phocomiélie et hémimélie, adroite hémimélie. H. C.

XXIII. Recherche des microbes de Winogradsky dans un cas

d'ostéomalacie sénile ; par L. Lacomme. (Laboratoire de M. le

Profes. J. Courmont) Société médicale des hôpitaux de Lyon;

2 juin 1903.

M. Lacomme a recherché dans plusieurs observations, entre

autres daus un cas d'ostéomalacie sénile, la véracité des arguments

mis en avant par Pétrone, pour édifier sa théorie pathogène de

l'ostéomalacie. Cet auteur considère comme agents pathogènes,

les ferments nitrificateurs de Winogradsky. Ceux-ci produiraient

dans l'organisme de l'acide nitrique qui par son accumulation

dans le tissu osseux, dissoudrait les sels minéraux, ramollirait les

os et constituerait ainsi les lésions de l'ostéomalacie.

Des recherches auxquelles s'est livré M. Lacomme sur un cas

d'ostéomalacie sénile, il résulte que l'analyse chimique des os lui

a montré qu'ils étaient en grande partie décalcifiés et que leur

teneur en phosphates avait beaucoup diminué. Les urines étaient

moins riches eii phosphates, la maladie touchant à sa fin.

La recherche de l'acide nitrique et de l'acide nitreux daus les

urines et dans les os a été négative. L'analybe bactériologique ne

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 69

lui a donné aucun résultat, il n'a jamais constaté la présence d'un

micro-organisme rappelant les ferments nitrificateurs.

Dans deux autres cas d'ostéomalacie les recherches de l'auteur

ont été négatives.

De ces recherches, M. Lacomme conclut que la théorie présen-

tée par Pétrone quoique fort séduisante manque de bases solides

sur lesquelles elle puisse se fonder; il pense qu'il est plus vrai de

considérer l'ostéomalacie comme un syndrome que comme une

affection indépendante. G. C.

XXIV. Du crâne ostéomalacique; par MM. PAmor et Mauriquand

(Société médicale des hôpitaux de Lyon. 30 juin 1903.)

MM. Paviot et Mauriquand relatent l'histoire d'une malade âgée

de 81 ans chez laquelle ils trouvèrent, outre les signes d'ostéoma-

lacie des côtes, du sternum et de la colonne, des altérations du

crâne.

Le crâne ostéomalacique ne répond pas à un type anatomique

unique. Ses altérations peuvent être ramenées à trois types princi-

cipaux : 1° Dans le premier type, le crâne conserve son aspect,

mais présente une certaine rotondité; les os sont ramollis,

épaissis, il y a un état spongieux vasculaire du diploë, les sutures

disparaissent; les os ont la consistance du carton mouillé. Les sinus

frontaux sont très petits, les sinus sphénoïdaux effacés. 2° Dans le

deuxième type décrit par Hermann Proesch les sutures du crâne sont

ossifiées; les os de la région temporale sont très minces et trans-

parents ; l'artère méningée est logée dans des sillons profonds, mais

la lame osseuse qui la recouvre n'est dans certains endroits pas

plus épaisse qu'une feuille de papier. Ce type serait superposable

au cas publié par les auteurs. 3° Dans le troisième type le crâne

présente une série de bosselures et de dépressions; au palper on a

une sensation de résistance au niveau des bosselures et une sensa-

tion de fontanelles dépressibles. de mastic mou au niveau des

dépressions.

Les altérations du crâne dans l'ostéomalacie sont en général,

rares, cela tient non pas à la rareté de l'ostéomalacie, mais à ce que

la malacie osseuse touche rarement le crâne du moins dans la

forme que l'on observe chez le vieillard.

Les auteurs insistent sur un signe que présenta leur malade,

signe sur lequel a insisté M. Latzko et auquel il attribue une

grande valeur diagnostique : « la contracture des muscles adduc-

teurs avec impossibilité de placer les cuisses en abduction sans

provoquer une crise douloureuse.» MM. Paviot et Mauriquand

pensent qu'il s'agit là d'un phénomène de contraction de défense,

le mouvement imprimé ou commandé déterminant une douleur

du côté des os du bassin, plutôt que d'une contracture des

adducteurs. G. C.

70 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

XXV1» Le liquide céphalo-rachidien dans les processus méningés

subaigus d'origine rhumatismale; par M. Jean LEPINE. (Lyon

médical, 23 août 1903, p. 298.)

Ponction rachidienne chez un malade ayant présenté un acci-

dent rhumatismal, épargnant les articulations lombaires mais

ayant porté son action sur les méninges.

Le liquide était très abondant, sous forte pression, clair; l'aspect

cytologique était normal, la lymphocitose légère, mais il y avait

une quantité tout à fait exceptionnelle de fibrine.

L'auteur insiste sur la proportion insolite de fibrine trouvée

dans le liquide et pense que c'est un point à étudier à l'avenir.

L'abondance de la fibrine dans le liquide céphalo-rachiden qui

n'en contient pas normalement, lui donne à elle seule un carac-

tère phlegmasique qui le différencie du liquide qui accompagne les

processus chroniques.. , G. Carrier.

XXVI. Spondylose rhyzomélique et tuberculose; par MM. Pic et

- BOMBES de Villiers. (Lyon médical, 4 octobre 1903, n° 40.)

MM. Pic et Bombes de Villiers publient les observations de deux

hommes atteints de spondylose rhyzomélique typique, tant au

point de vue clinique qu'anatomique. Ils présentaient en outre

des lésions tuberculeuses multiples, les unes très anciennes, les

autres récentes, toutes d'ailleurs de nature bacillaire incon-

testable.

De ces deux observations, les auteurs pensent pouvoir conclure,

se basant sur les recherches de M. le Prof. Poncet, que les anky-

loses articulaires multiples apparaissent chez ces deux malades,

comme étant très probablement fonction de l'évolution fibro-

formative d'une tuberculose chronique, au même titre que les

scléroses pulmonaires, les symphyses pleurales ou les myocardites

notées d'autre part.

Les deux observations de MM. Pic et Bombes de Villiers sont à

réunir à celle de M. Poncet; elles tendent à démontrer que la

spondylose ryzomélique de Marie peut être de nature tubercu-

leuse. D'autres alfections telles que le rhumatisme vrai, ou de-

rhumatismes infectieux, peuvent très probablement la produire.

mais parmi les affections susceptibles de produire cette polyar-

thrite arikylosante, les auteurs affirment, de par les faits qu'ils

relatent, que la tuberculose joue un rôle. G. C.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

I. Pathologie et traitement de l'épilepsie; par William-H. Thom-

son (The New-York Médical Journal, 8 et 15 novembre 1902.)

Plus on approfondit les caractères essentiels de l'épilepsie, plus

on demeure convaincu qu'elle occupe une place à part parmi les

maladies nerveuses, et que ses facteurs principaux ne lui sont

communs avec aucune d'elles.

La première question à se poser est la suivante :

Qu'est-ce qui constitue l'épilepsie ? ou en d'autres termes, quel

est l'élément invariable dont l'absence peut, en dépit d'analogies

plus ou moins importantes, faire affirmer qu'il ne s'agit pas de

l'épilepsie. Il faut se garder de définir l'épilepsie par les mots

« névrose convulsive » car une définition ne doit contenir que ce

qui est constant dans l'objet défini, et si les convulsions sont fré-

quentes dans l'épilepsie elles ne sont pas nécessaires. Il ne faut pas

non plus parler de « grand mal » ou de « petit mal » non plus

que d'attaques légères ou graves. Dans un cas comme dans l'autre

le malade est épileptique et il n'existe pas d'épilepsie incomplète.

L'idée d'une « décharge » de force nerveuse n'est pas davantage

admissible.

L'auteur, en effet', se propose de montrer que si les phénomènes

convulsifs, dits de décharge, dominent la scène en apparence au

début de l'attaque, ils n'en constituent pas le phénomène initial.

Il faut chercher plus loin que parmi les symptômes variables ; or

il y a un élément qui ne varie jamais dans l'épilepsie vraie, c'est

la soudaineté; d'autres maladies peuvent avoir un début rapide :

seule l'épilepsie est soudaine.

L'auteur est amené ainsi à considérer certains faits fondamen-

taux de la physiologie du système nerveux, car, après tout, la

pathologie n'est pas autre chose qu'une physiologie qui s'accom-

plit dans des circonstances difficiles. Or, la première chose que

cette physiologie nous apprend c'est que, à l'origine de toute

activité nerveuse, on trouve une action afférente, et qu'une acti-

vité spontanée du tissu nerveux est un phénomène inconnu en

physiologie.

Mais cette activité nerveuse d'origine afférente est soumise à

]'inhibition ; mais l'auteur explique que, dans ce travail, il entend

désigner uniquement par le mot inhibition la résistance engen-

drée par l'habitude dans les centres nerveux, à l'égard de toute

réponse efférente Ï1'l'égulièr, en raison de ce fait qu'ils se sont

72 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. -

organisés par l'habitude de manière à réagir vis-à-vis d'une exci-

tation afférente d'une manière unique et bien définie. Toute stimu-

lation afférente rencontre donc immédiatement une inhibition

devenue normale par l'habitude, qui empêche l'excitation indéfinie

de la réponse efférente, laquelle, à l'état normal, ne se fera que de

la manière habituelle. Sans cette inhibition mutuelle, il n'y aurait

ni coordination ni fraction spécifique. Dans ces conditions, ce sont

les fonctions -cérébrales les plus anciennes qui sont aussi le plus

organisées et qui paraissent agir automatiquement.

D'autre part, l'inhibition implique l'existence et l'accumulalion

d'une force nerveuse sur laquelle elle puisse s'exercer. La physio-

logie se charge de nous montrer comment une excitatiqn afférente

unique et en apparence insignifiante peut déterminer une convul-

sion épileptique généralisée ; il suffit de se souvenir du mécanisme

de l'éternuement.

D'ailleurs les réflexes en série qui répondent aux excitations

afférentes s'observent aussi dans les phénomènes mentaux (souve-

nirs éveillés par associations d'idées) et une excitation afférente

purement mentale peut provoquer une attaque d'épilepsie. L'au-

teur estime que les troubles qui accompagnent le début de la

crise épileptique révèlent .une altération de l'inhibition normale,

altération dont l'effet est instantané ; ils ont pour cause une exci-

tation afférente soudaine, anormale parce qu'elle est entièrement

nouvelle ; car seule une excitation de cet ordre peut déranger l'in-

hibition normale. L'auteur est amené à donner de l'épilepsie la

définition suivante :

L'épilepsie est une maladie caractérisée par un trouble brusque de

l'inhibition régulatrice normale qui s'exerce entre les centres nerveux

corticaux, trouble qui est originairement provoqué par une excitation

afférente anormale.

Il montre ensuite que cette théorie n'est contredite par aucun

des faits observés.

Il va sans dire que, au point de vue du traitement, cette théorie

conduit à examiner les malades avec le soin le plus méticuleux

afin de constater, et de supprimer s'il se peut, toutes les causes

d'excitations anormales afférentes. Au point de vue de la thérapeu-

tique pharmaceutique, M. Thomson conseille de retarder le plus

possible l'emploi des bromures dont les effets généraux sont

fâcheux. On pourra renforcer l'action des bromures, et par consé-

quent en diminuer les doses, en ayant recours simultanément à

l'antipyrine.

Le chloral est aussi un adjuvant utile. Mais la médication par

excellence, c'est la vie au grand air.

L'épilepsie est toujours une maladie grave; mais après trente

ans d'expérience, .l'auteur estime que, pour des cas moyens, et

pour des malades qui consentent à persévérer pendant assez long-

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 73

temps dans le traitement, la proportion des.guérisons radicales

n'est pas inférieure à 70 p. 100. R. de lIIUSGR1VE-CLAY.

11. Les résultats de la chirurgie cérébrale dans l'épilepsie et dans

les défectuosités mentales congénitales; par William-D. Sprat-

LING. (Tlae New-Yorlc and Philadelphia Médical Journal, 19 sep-

tembre 1903.) 1

Sur 33 cas d'épilepsie les résultats ont été les suivants : dans

21 cas, aucune amélioration, ni passagère ni permanente; dans

8 cas les attaques ont diminué de fréquence et de gravité, mais

l'intervention chirurgicale n'a constitué qu'une partie du traite-

ment ; dans 3 cas, l'aggravation a été manifeste ; dans 1 cas il y a

eu guérison apparente, mais cette guérison doit légitimement être

attribuée à une autre cause.

Si le tableau des succès chirurgicaux dans l'épilepsie n'est pas

brillant, il est plus sombre encore quand il s'agit des idiots et des

imbéciles.

La statistique donnée par l'auteur porte sur 194 cas, divisés en

deux groupes : le premier groupe (111 cas) donne les résultats

les plus immédiats : le second (83 cas) donne les résultats plus

permanents.

Premier groupe de 111 opérations : 19 morts (17 p. 100) par

suite de l'opération ou peu de temps après elle. - 25 (22,5 p. 100)

résultat nul. - 10 (9 p. 100), résultat insignifiant, non satisfai-

sant, 24 (21,5 p. 100), amélioration (dont la nature est indiquée

dans ce mémoire à propos de chaque cas). 30 (27 p. 100),amé-

lioration de nature non indiquée. 3 (3 p. 100), pas de renseigne-

ments.

Deuxième groupe de 83 opérations : 20 (25 p. 100), morts.

54 (65 p. 100), pas d'amélioration. 9 (10,5 p. 100), amélioration.

L'auteur conclut en disant qu'on ne connaît pas un seul cas de

défectuosité mentale congénitale où l'intervention chirurgicale ait

rétabli un état mental normal. D'ailleurs l'inutilité de ces opéra-

tions est démontrée par leur rareté à l'époque actuelle comparée

avec leur fréquence il y a dix ans. Il faut donc conclure avec

Bourneville que c'est vers le traitement médico-pédagogique qu'il

faut se tourner et que c'est sur lui qu'il faut compter. 0

R. DE Musgrave-Clay.

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE

Séance du juin 190.j" Présidence de M. Déjerine.

M. LE Président prononce l'éloge funèbre de M. Gilles de La

Tourette.

M. Marie. A propos du procès-verbal. Chez un sujet atteint du

syndrome que dans leur dernière communication MM. Déjerine,

Thomas et Chiroy ont considéré comme rattaché à une lésion

thalamique, M. Marie n'a trouvé à l'autopsie aucune altération de

la couche optique. 1 ,

M. Déjerine a cependant depuis cette communication autopsié

deux sujets atteints de ce syndrome et trouvé des lésions thala-

miques chez les deux..

Accidents bulbaires d'origine auriculaire.

M. Bonnier présente deux malades atteints de troubles bulbaires

d'origine optique. Dans l'un des cas, le bulbe droit étant intéressé

il y a eu. des phénomènes généraux, dans l'autre c'était le bulbe

gauche et il n'y a eu aucun phénomène d'ordre général. M. Bon-

nier a souvent remarqué que les accidents généraux'accompagnent

surtout les lésions droites du bulbe et non les gauches.

Cécité verbale avec agraphie,

M. Thomas. Chez un malade dont le pli courbe est resté intact

et dont les lésions occupaient une faible portion de la P3 et une

vaste portion de la face interne de la région occipitale (cuneus,

lobule lingual, lobule fusiforme) il y a eu cécité verbale avec

agraphie, mais avec conservation du langage intérieur et possibi-

lité d'épeler le nom d'un objet désigné.

Un cas d'adipose douloureuse.

MM. RAYMOND et.GuiLLAIi présentent une femme de cinquante-

sept ans atteinte d'une hémiplégie droite et d'adipose douloureuse.

L'hémiplégie s'est manifestée il y a un an, l'adipose et les douleurs

ont commencé il y a dix ans. L'adipose est localisée presque

exclusivement à la racine des membres dont le segment ectrome-

lique a conservé son apparence normale ; elle se présente sous

' SOCIÉTÉS SAVANTES. 75

l'aspect de lipomes et d'infiltration graisseuse diffuse. Toutes les

masses adipeuses sont très douloureuses à la pression. Des trou-

bles psychiques existent chez la malade (amnésie, dépression

mélancolique, tentative de suicide, etc.) Le corps thyroïde est

légèrement hypertrophié. Les auteurs pensent que, malgré les

incertitudes de la pathogénie, l'adipose douloureuse doit être

couservée en nosographie. Ce syndrome clinique a peut-être des

rapports avec les lipomes symétriques douloureux, avec certains

oedèmes et pseudo-lipomes d'origine nerveuse. Toutefois ils pensent

que cette association morbide lipomatose localisée surtout à la

racine des membres accompagnée de douleurs et de troubles

psychiques suffit à justifier l'autonomie d'un syndrome rencontré

dans un certain nombre d'observations.

Sciatique d'origine spécifique.

VIJI. Gaocar.Fa et Roussy présentent un malade atteint de scia-

tique qui serait tout à fait banale si elle ne s'accompagnait de

troubles de la sensibilité à topographie radiculaire. L'existence ,

de ces troubles de la sensibilité jointe à la présence d'une lympho-

cytose légère du liquide céphalorachidien et de ce fait que le

malade a eu la syphilis font penser qu'il s'agit là d'une méningite

radiculaire spécifique. ,

Intoxication saturnine avec polynévrite chez un électricien employé

dans une fabrique d'accumulateurs.

GORGES GUILLAIN et LUERMITTE présentent un malade, em-

ployé dans une fabrique d'accumulateurs, qui, peu de temps après

le début de sa profession a présenté des signes multiples de l'in-

toxication saturnine : colique de plomb, néphropathie, accidents

nerveux. La paralysie saturnine a pris une extension grande puis-

que on constate chez cet homme, non seulement l'atteinte des

muscles extenseurs, mais encore la participation du groupe radi-

culaire supérieur aux deux bras. Ces paralysies s'accompagnent

d'amyotrophie et la réaction de dégénérescence est constatée.

Quelques observations de paralysies saturnine chez des ouvriers

employés dans des fabriques d'accumulateurs ont été récemment

signalés par MM. Proust et Debori, Labbé et Ferraud, mais elles

sont encore très rares. Il y a lieu d'insister sur l'application trop

souvent négligée des règlements d'hygiène dans les fabriques.

Paralysie hérèdo-syphilitiquc.

M. F. Rose présente un malade atteint de paralysie sensitivo-

motrice intéressant la plus grande partie des nerfs crâniens du

côté droit et présentant des déformations osseuses multiples.

t6 6 .SOCIÉTÉS SAVANTES.

Ces déformations, remontant en partie à l'enfance, sontsurvenues

à l'occasion de traumatismes insignifiants, soit spontanément et

relèvent ainsi que le montrent les radiographies, d'exostoses et

d'ostéites raréfiantes. Les lésions semblent devoir être rapportées

à la syphylis héréditaire (Exostoses craniennes et générales). A

signaler la localisation rare de l'ostéopathie spécifique aux os de

la main.

Un cas de kyste derrnoïde dus centres nerveux.

MM. RAYMOND et COURTELLEtONT. Un peintre en bâtiments,

bien portant jusqu'à trente-deux ans, fut à partir de cette époque,

pris de céphalie diffuse avec paroxysmes parfois terminés par des

vomissements, d'insomnie avec agitation et de vertiges. A plusieurs

reprises, il eut des étourdissements, avec perte de l'usage des

jambes pendaut une vingtaine de minutes, et de crises épilepti-

formes. L'examen montra une certaine spasmodicité des membres

inférieurs avec démarche spasmodique, et de plus, un peu titu-

bante, un tremblement léger intentionnel, surtout net aux mem-

bres supérieurs, contractions vermiculaires de la langue, parésie

du facial inférieur droit. Tous les réflexes tendineux étaient exa-

gérés, sans clonus net, avec orteil en flexion. Aucun trouble

sensitif vaso-moteur ou trophique. La vue a notablement baissé,

ce qui est dû à une névrite optique par stase papillaire. Pas d'autre

trouble psychique qu'une diminution considérable de la mémoire.

Mort deux ans ans après le début des accidents, après une crise

de céphalée avec vomissements et photophobie. A l'autopsie, kyste

dermoïde volumineux du lobe frontal droit, nodules analogues des

méninges molles cérébro-spinales avec, dans les espaces sous-

arachnoïdiens, des masses de la substance qui remplisssait le kyste.

La ponction lombaire, pratiquée pendant les derniers jours de la

vie, avait montré la présence de cette substance dans le liquide

céphalo-rachidien.

- Spasme professionnel.

MM. GILBERT Ballet, 1. Rose présentant un malade, ciseleur de

son métier, atteint de spasme fonctionnel professionnel se manifes-

tant surtout dans les mouvements exigeant une attention soute-

nue, et cela de deux façons : d'une part lorsque la main droite

tenant le marteau est mise dans l'extension, l'annulaire et le

médius se fléchissent sur le manche de l'instrument, tandis que

l'index en s'étendant s'en écarte; d'autre part, le malade ne peut pas

arrêter les mouvements de cette main quand il veut. Les spasmes

et ces mouvements involontaires n'existent que dans l'acte de

ciseler. -

SOCIETES SAVANTES. 77 ï

Étude de la rétine dans l'amaurose tabétique.

llli. P. Marie et A. LERI. Certains auteurs (Vulpian, Charcot,

Virchow, Ordenëz, Schlaagenhaufer, etc.) placent dans le nerf

optique l'origine de l'atrophie optique tabétique, d'autres (Pofoff,

Moxter, Von Michel, de Grosz, etc.) croient que la lésion primitive

siège dans la rétine et qu'elle consiste dans l'atrophie des cellules

multipolaires ou ganglionnaires, cellules d'origine des libres

optiques. Nous avons coupé les yeux de 11 tabétiques amauroti-

ques et dans tous les cas nous avons trouvé un nombre encore

considérable de cellules ganglionnaires, nombre souvent très

comparable au nombre habituel de ces éléments bien que dans

quatre au moins de ces cas nous n'ayons trouvé dans le nerf

correspondant aucune libre nerveuse et que dans la plupart des

autres le nombre des fibres restantes ait été très minime. La

couche des fibres optiques'de la rétine était dans tous ces cas très

diminuée d'épaisseur, mais nullement proportionnellement ni au

nombre des fibres conservées dans le nerf, ni au nombre des cellules

multipolaires. -

Les autres couches de neurones de la rétine nous ont paru

présenter également le plus souvent des altérations ; en particulier

il existait une diminution du nombre des éléments, mais toutes

ces altérations n'étaient pas plus prononcées que celles qui se'

produisent à la suite de lésions quelconques du nerf optique ou

des extrémités terminales de ses fibres, à la suite d'une lésion du

corps genouillé par exemple. En somme, ces recherches nous

permettent de conclure nettement que l'atrophie optique tabétique

ne commence pas par la rétine.

Elude du nerf optique dans l'amaurose tabétique.

MM. P. Marie et A. UHI, Certains auteurs rapportent cette

amaurose à une altération primitivement parenchymateuse,

d'autres à une névrite interstitielle. Nous avons étudié vingt et un

tabétiques umaurotiques en comparant leurs lésoius à celles de

trois P. G. avec cécité, de deux tabétiques au début, avec cécité

incomplète, de seize tabétiques et dix-huit P. G. sans cécité et

sept syphilitiques sans signes de tabes mais avec ou sans troubles

visuels. Nous avons trouvé dans la plupart des cas un gros épais-

sissement des gaines méningées arachnoïdienne et pie-mérienne

qui recouvrent les voies optiques, épaississement similaire à celui

de la méninge postérieure spinale des tabétiques. Au microscope

les graines méningées nous ont paru infiltrées abondamment de

lymphocytes, non seulement au devant de la portion crânienne des

nerfs, mais également au pourtour de la portion orbitaire. A l'exa-

men des nerfs eux-mêmes, nous avons été frappés de la dispro-

78 SOCIÉTÉS SAVANTES.

portion manifeste de leur volume : certains nerfs qui ne conte-

naient presque plus de fibres avaient conservé un volume égal au

moins à celui d'un nerf normal, alors que les nerfs qui contenaient

encore un nombre relativement considérable de fibres étaient déjà

très réduits et que d'autres nerfs très atrophiés n'avaient plus

que la moitié ou le tiers d'un nerf normal : cette constatation

laissait supposer qu'il devait exister une autre lésion qu'une simple

atrophie sur place des fibres nerveuses. Cette disproportion nous

a été expliquée par l'examen microscopique. Les nerfs volumineux

présentaient une hypertrophie considérable des travées vasculo-

conjonctives que l'on trouve à l'état normal entre les faisceaux

nerveux. Les nerfs de volume très réduit ne présentaient plus au

contraire qu'un semis de nodules fibreux extrêmement nombreux

disséminés sur un fond uniforme, parsemé de cellules névrogliques.

L'examen de cas plus récents nous a montré que ces nodules

représentent autant de vaisseaux oblitérés. Mais le nombre de ces

nodules est hors de proportion avec le nombre des vaisseaux

contenus normalement dans le nerf optique et nous fait penser

qu'une première phase de l'amaurose tabétique est une phase

d'irritation caractérisée par une néoformation vasculaire intense.

A cette phase succède une phase d'oblitération des vaisseaux pré-

existants et néoformés essentiellement chronique ; les fibres

nerveuses disparaissent alors faute d'irrigation sanguine ; à cette

même période des lésions, on voit disparaître les travées conjonc-

tives qui unissaient les modules vasculaires. Cette succession des

lésions est très nette quand on examine des nerfs à des degrés

d'atrophie différents 'ou même quand on examine des portions

différemment altérées d'un même nerf. Elles expliquent que,

comme nous l'avons indiqué, l'amaurose tabétique évolue, suivant

deux périodes consécutives, la première, d'évolution aiguë, géné-

ralement accompagnée de céphalées frontales et de signes d'irrita-

tion du nerf optique, de phosphènes qui peuvent être le point de

départ de troubles mentaux, pendant laquelle le malade perd

toute vision distincte, l'autre, essentiellement chronique, pendant

laquelle les phénomènes aigus ayant disparu, le malade conserve

durant un temps très long des sensations lumineuses. Ces lésions

n'ont rien de spécial à l'atrophie tabétique, ce sont des lésions de

péri et d'endophlébite, de péri et d'endartérite oblitérantes qui

paraissent être la caractéristique de la plupart des affections

syphilitiques tertiaires, de toutes les cirrhoses syphilitiques :

Leur origine vasculaire fait qu'elles sont le plus souvent nette-

ment prédominantes au début au niveau du réseau pie-mérien et

immédiatement au-dessous de la pie-mère, à la périphérie du

nerf. Le passage dp faisceau maculaire, faisceau de la vision

distincte, à la périphérie du nerf dans sa partie rétro-oculaire

explique que toute vision distincte disparaisse rapidement dès le

SOCIÉTÉS SAVANTES. 70

début de l'amaurose. Nous avons retrouvé ces mêmes lésions vas-

culaires prédominantes au pourtour du nerf dans des cas d'altéra-

tions syphilitiques diverses du système nerveux, paralysie générale,

paraplégie spasmodique, etc.

A propos de la théorie du neurone.

M. Durante : - L'auteur reprend avec plus de détails les princi-

paux arguments avancés par les partisans du neurone en faveur

de cette théorie.

La terminaison libre des fibrilles dans les centres, constatée par

R. Y Cajal avec l'aspect ne saurait infirmer les résultats de Agathe

et Bethe par les couleurs d'aniline. Ces techniques sont trop peu

comparables. En tout cas, si un réseau central infirme le neurome,

l'absence de ce réseau ne saurait infirmer la conception du lobule

nerveux polycellulaire. La limitation des dégénérescences secon-

daires n'est pas exacte. Il y a presque toujours altération des neu-

rones voisins (Mobius, Monakow, Piloez, Klippel, Marinesco, Schaf-

fer, Br¡¡unig). Il est vrai que les dégénérescences groupées affec-

tent généralement la forme atrophique. Mais le sens propagateur

des altérations à type Wallérien indique simplement une unité

fonctionnelle que personne ne refuse au lobule nerveux.

La dégénérescence Wallérienne ne prouve pas plus que le neu-

ione est une unité cellulaire, que les indications du bout périphé-

rique d'une artère liée ne signifie que ce vaisseau est constitué par

une seule immense cellule tubulaire. La dégénération autogène n'est

plus une impossibilité depuis que les travaux modernes ont montré

la régénération normalement segmentaire des nerfs après réunion.

Dans cette régénération, la différenciation des neuroblastes

est fonction de l'activité physiologique. Dans la génération auto-

gène le bout périphérique doit se mettre en rapport avec l'influx

nerveux. Par exclusion, ce rapport ne parait pouvoir s'effectuer

que par la périphérie par les anastomoses vraies d'Apathey. La

question de suppléances nerveuses ne saurait être invoquée et ne

cadre pas avec le neurone. Un seul gros tronc du membre ayant

parfois suppléé à toute la sensibilité du membre,il faudrait admet-

treque chaque tronc peut assurer à lui seul toute l'innervation d'un

membre. Ici encore les anastomoses périphériques expliquent seuls

ce phénomène.

Enfin l'étude des dégénérescences et de la dégénération permet

de se demander si le cylindre-axe a vraiment la valeur d'un

conducteur comme un fil de cuivre. La conductibilité du nerf est

une transmission active s'effectuant comme dans une série de

petites piles. Elle peut exister en dehors du cylindre-axe (dégéné-

rions, certaines névrites), par contre la persistance du cylindre-

axe ne comporte pas toujours une intégrité de la conduction

(névrite périaxile, sclérose en plaques). Il y a donc de ce côté à

80 SOCIÉTÉS SAVANTES.

reprendre les recherches. En fait le neurone continue à ne pas être

démontré et les objections ne contredisent en rien la conception

du lobule primitif nerveux ou neurule qui fait rentrer le système

nerveux dans le plan des autres organes et permet d'expliquer les

faits queleneurone laissait inexplicables. Comme dans tout lobule,

les éléments du neurule présentent une dépendance fonctionnelle

absolue (dégén. Wallérienne), mais au contraire une indépendance

très nette vis-à-vis des agents généraux (toxique ou infectieux).

Lésions corticales et sous-corticales minimes avec lésion sotis-épei-

dy maire très prononcée chez deux aphasiques.

MM. P. Marie et LÈR[ présentent les cerveaux de deux aphasi-

ques, l'un moteur, l'autre sensoriel, cliniquement typiques. Chez

l'un d'eux : aucune lésion corticale et seulement une petite lésion

linéaire séparant la couche sous-épendymaire de la substance

blanche d'une partie des circonvolutions rolandiques. Chez l'autre,

ramollissement linéaire très limité de la lèvre supérieure de la'

scissure pariéto-occipitale. Mais dans les deux cas on a constaté

une dilatation considérable du ventricule latéral gauche avec atro-

phie très marquée de la substance blanche de toutes les circonvo-

lutions : dans l'un de ces cas on a constaté de plus l'existence

dans la corne occipitale du ventricule de fausses membranes

réunissant par un pont les parois de ce ventricule et dénotant

l'existence d'un processus épendymaire ou sous-épendymaire.

Ces cas ne sont pas les seuls dans lesquels nous ayons trouvé

une lésion épendymaire manifeste. Il existe une pathologie de

l'épendyme peut-être comparable pour le système nerveux, abstrac-

tion faite de la nature et de la cause des lésions, à ce qu'est la pa-

thologie de l'endocarde pour le coeur.

M. BRISSAUD montre un zona à déposition métamérique typique.

M. GRENET présente un hysléro-lraumatique qui présente une

forme de tremblement hystérique simulant le clonus du pied.

'M. CANTONNENT présente deux cas de goitre exophtalmique avec

torticolis mental et psychasthénie. F. Baissier.

SOCIÉTÉ D'HYPNOLOGIE ET DE PSYCHOLOGIE

Séance du mardi 17 mai 1904. - Présidence DE M. Voisin.

Attaques de pseudo-épilepsie guéries par la suggestion hypnotique.

M. VIAZEMSKY (de Saratow). - Une femme âgée de vingt et un

ans a de fréquentes attaques convulsives. Son pariétal droit pre-

SOCIÉTÉS. SAVANTES. 81

sente, sur une étendue de 4 centimètres de long sur 1 centimètre

de large, une dépression consécutive à un coup de levier reçu il y

a quinze ans. Cette région est douloureuse au toucher. On a porté

le diagnostic d'épilepsie jacksonienne. J'ai pu. grâce à la sugges-

tion hypnotique, faire cesser complètement ces attaques; celles-ci

étaient donc de nature hystérique et non point épileptique. Cette

femme souffrait, en outre, de divers phénomènes pathologiques,

tels que angoisse, affaiblissement de la mémoire, fatigue céré-

brale, insomnie, anorexie, phobies diverses ; tous ces symptômes

ont été supprimés par un traitement hypnotique méthodique et

prolongé.' Chez cette même personne, j'ai pu, par suggestion pen-

dant l'hypnose, produire, à échéance fixe, une anesthésie complète,

à la faveur de laquelle une dent fut extraite sans douleur. A cette

malade, ainsi qu'à quatre autres, j'ai remis mon portrait, et, selon

la suggestion que je leur en ai faite, dès qu'elles souffrent de

quelque malaise nerveux, il leur suffit, pour s'en débarrasser, de

fixer mon portrait pendant trente secondes. Une autre femme.

également hystérique, souffrait d'une douleur permanente à

l'épaule et chacune de ses attaques convulsives était précédée de

l'exaspération de cette douleur. J'ai supprimé cette dernière par

suggestion et, dès lors, les attaques ont complètement disparu. ,

M. Voisin. - Je soigne en ce moment une femme, hystérique.

qui présentait des phobies analogues à celles de la première

malade de M. Viazemsky; dès la troisième séance d'hypnotisme, je

l'ai presque complètement débarrassée d'une phobie de la mort

qui la torturait. `

Un cas particulier d'abasie guéri par la suggestion.

M. Stembo (de Vilna). - Il s'agit d'une enfant de dix ans. A six

ans elle a une affection fébrile qui dura huit jours. Aussitôt après,

elle peut remuer les jambes et marcher sur son lit, sur les bancs,

sur les tables, mais absolument pas, lorsqu'elle est à terre. Quel-

ques mois après, ayant eu la rougeole, elle peut marcher lors-

quelle est terre, mais seulement si quelqu'un lui tient la main,

livrée à elle-même elle ne peut pas faire un pas. Hypnotisée et

suggestionnée elle redevient vite capable de marcher toute seule,

sans aucun appui. Il est probable que cet enfant présentait un

trouble fonctionnel des centres associés et que la suggestion hyp-

notique a ravivé le souvenir du mécanisme de la marche.

D.ux cas de névralgie guéris par la suggestion hypnotique.

M. DAMOGLOU (du Caire). - Un homme de ving-quatre ans

souffre de névralgie temporale droite depuis deux mois ; l'appa-

reil dentaire est indemne ; aucun médicament n'a pu procurer

quelque soulagement; deux séances d'hypnotisme suffisent à faire

Archives, 2" série, t. XVIII. 6

82 SOCIÉTÉS SAVANTES.

disparaître cette névralgie. Une femme de vingt-six ans est retenue

au lit depuis vingt-cinq jours par une sciatique que n'ont pu

modifier ni les médicaments ni les frictions, ni les cautérisations-

après la seconde séance d'hypnotisme, cette malade peut se lever

et marcher; après la troisième, la douleur a disparu.

- Le mal de mer et la suggestion.

M. Bonnet (d'Oran) étudie les influences mécaniques, physiques,

physiologiques et psychologiques qui produisent ou exaspèrent le

mal de mer. S'il est très difficile de s'en préserver totalement, au

moins peut-on l'atténuer ou s'en défendre, dans une certaine me-

sure, par diverses précautions hygiéniques portant principalement

sur la suppression des sensations visuelles et olfactives, la position

horizontale, etc. La crainte du mal de mer, la conviction qu'on

l'aura, l'initiation suggestive inconsciente ont une large part

dans l'étiologie de ce malaise. Contre ces facteurs psychologiques,

la suggestion est tout à fait indiquée. Il est bon de faire les séan-

ces de suggestion à terre pendant les jours qui précèdent l'embar-

quement ou à bord dès le départ. La suggestion a surtout pour

effet de diminuer la sensibilité olfactive et visuelle, ainsi que

d'exalter la résistance physique et morale du sujet.

M. Paul Fartez. - De nombreuses observations classiques mon-

trent que si le mal de mer peut être provoqué par des causes

morales, il peut aussi, une fois installé, être instantanément jugulé

par une émotion quelconque. De même, la ferme croyance qu'on

est immunisé suffit à rendre réfractaire au mal de mer. Je l'ai

expérimenté tout récemment. Il s'agit d'un homme de vingt-cinq

ans. Je l'endors profondément, mais j'évite à dessein de le sug-

gestionner. Convaincu que je lui ai réellement fait les suggestions

qui doivent le préserver du mal de mer, il fait, sans éprouver

aucun malaise, une traversée qui, les fois précédentes, le rendait

extrêmement malade.

Action des excitations mécaniques faibles et répétées

sur l'anesthésie hystérique.

M. Paul 1l.cw. - Chez les hystériques, des excitations faibles,

intermittentes et prolongées produisent, par elles-mêmes et en

dehors de toute suggestion, en vertu d'un phénomène de « som-

mation » ou d'« addition latente », non seulement des contrac-

tures, mais des effets esthésiogènes portant aussi bien sur la sensi-

bilité spéciale que sur la sensibilité générale. Qu'il y ait ou non

transfert, la restauration de l'une des sensibilités taetile, algique

ou theimique entraine celui de la sensibilité spéciale et récipro-

quement. Pour ce qui concerne la sensibilité spéciale, je l'ai sur-

tout étudiée chez les achromatopsiques et les dyschromatopsiques. En

SOCIÉTÉS SAVANTES. 83

général, l'excitation de l'oeil par les couleurs centrales entraine le re-

tour de la vision non seulement pour ces couleurs, mais aussi pour les

couleurs périphériques, tandis que l'excitation pourlescouleurs péri-

phériques ramène la vision pour la couleur employée, quelquefois

aussi pour la couleur complémentaire. Avec tous les excitants

employés j'ai observé les phénomènes décrits à propos de l'action

esthésiogène des métaux, à savoir l'anesthésie de retour, l'anesthésie

post-métallique et les oscillations consécutives. On peut, au moyen

d'excitations faibles et répétées, endormir des malades hémianes-

thésiques en s'adressant à leur côté anesthésique aussi bien qu'à

leur côté sensible ; danF ce cas, le retour de la sensibilité précède

toujours l'invasion du sommeil.

M. BÉRILLON. Ces considérations mettent de nouveau à l'ordre

du jour la très importante question du rôle des agents physiques

dans la production de l'hypnose. Pour alléger notre peine, ren-

forcer notre action et diminuer la résistance du sujet, nous

devrons, de plus en plus, posséder tout un outillage d'appareils et

d'instruments capables d'impressionner les divers sens, tels que

miroirs, interrupteurs, vibrateurs, etc. L'action des bruits faibles,

discontinus et rythmés a d'ailleurs été, de tous temps, utilisé par

les Aïssaouas ou les Derviches. 1

M. Paul FARTEZ. - C'est, en effet, une loi bien connue des psy-

chologues et applicable, non seulement aux hystériques, mais à

tous les individus, en général, à savoir que toute sensation, pourvu

qu'elle soit homogène, uniforme, continue, exclusive et prolongée,

finit par supprimer dans la conscience la perception d'une diffé-

rence et par produire ainsi l'anidéisme, c'est-à-dire un état psy-

chologique très favorable à l'invasion de la suggestion. Dans la

pratique, pour provoquer cet état de suggestionnabilité, je me sers

d'un métronome dissimulé très loin derrière une tenture, ce qui

en assourdit le bruit ; en outre, les battements du métronome ne

sont point séparés par des intervalles isochrones, mais synchrones

au rythme respiratoire du sujet.

M. Paul MAGNIN. Il y a quelques jours, un malade tombait en

état d'hypnose, dans mon cabinet, sous l'influence du bruit inter-

mittent et rythmé que faisaient les bulles d'air enfermées par acci-

dent dans une conduite.

La suggestion impérative.

BRILLON. - Le défaut ou la diminution de la suggestibilité

lient à deux causes. La première est organique et résulte d'un

manque d'aptitude lié à une disposition défectueuse du système

nerveux ; elle se constate chez les idiots, les imbéciles, les sujets

atteints de débilité mentale accentuée ou d'aliénation. La seconde

est d'ordre psychologique et même sociologique; elle se rencontre

Si 1 SOCIÉTÉS SAVANTES.

surtout chez les sujets dont l'intellectualité est très développée.

Ceux-ci réfléchissent, raisonnent, analysent, discutent ; cela leur

donne l'illusion de toutes les compétences ; ils sont pétris d'opi-

nions préconçues et de partis pris. Or, quiconque est la proie

d'une opinion préconçue ressemble psychologiquement au malade

dont le délire est systématisé ; aucun fait, aucun argument,

aucune démonstration ne sont capables de modifier son système ;

et c'est à cette forme de monodéïsme que vient de se heurter la

suggestion persuasive, insinuante et demonstrative. Avec ces

malades, il ne faut ni expliquer, ni justifier le contenu de la

suggestion; il ne faut ni discuter avec eux ni s'acharner à les

convaincre ; la suggestion ne devra tenir aucun compte de leurs

raisons, se faire impérative, autoritaire et imposer l'obéissance

complète, sans conditions.

M. LIO1VFL Dauriac. - C'est ce qu'ont bien compris les différentes

morales. Pour elles, le devoir se présente sous une formule caté-

gorique et brève qui s'impose, avant toute réflexion, par la seule

vertu de sa force impérative.

SOCIETE DE NEUROPATHOLOGIE ET DE PSYCHIATRIE

DE MOSCOU.

Séance du 17 Janvier 1903 (en mémoire de S. S. KoRSAMrr).

Contribution à l'étude de la psychose de Ia;onsalsoJ'.

S,-A. Soukhanoff et A. BOUTECIIO. - Les rapporteurs ont pré-

senté une revue historique très détaillée de la littérature concer-

nant la psychose polynévrilique, et ont cité un cas personnel de la

psychose de KOHSAKOFF. Malade de quarante-trois ans, coiffeur,

alcoolique, prend le vin depuis longtemps; les dernières années il

le prend quotidiennement et en dosses assez grandes. La syphilis

est réfutée. Au commencement de l'année 1902, pendant une mala-

die fébrile, on observa chez lui des phénomènes de délire alcoolique,

en septembre des accès de vertige ; le 27 septembre un accès épi-

leptique, ensuite de la faiblesse et une certaine élévation de tem-

pérature. Le malade commençait déjà à se rétablir, lorsque subi-

tement, le J 1 octobre, survinrent deux nouveaux accès épilep-

tiques ; le malade était dans un état très lourd; la température

était un peu plus haute que la norme. Lorsque le malade com-

mença il. se rétablir, il se manifesta chez lui un oubli très marque

et, en outre, il commença à raconter des choses qui n'ont pas été.

Le 12 novembre de 1902 on constata du côté du système nerveux

SOCIÉTÉS SAVANTES. 85

des phénomènes de lésion des nerfs périphériques (manque de

réflexes patellaires, douleur à la pression de certains troncs céré-

braux, démarche mal assurée, amaigrissement des extrémités in-

férieures) ; du côté psychique, on remarqua une amnésie très

accusée relativement aux faits courants et récents et des fausses

réminiscences; en même temps sautait aux yeux une certaine

vivacité de la psychique, une expression vive des yeux et de la

face. Dans le cours ultérieur, l'état du malade s'améliora ; les phé-

nomènes névritiques commencèrent à s'affaiblir graduellement,

mais la mémoire restait toujours mauvaise; le malade était oublieux;

racontait des confabulations, quoique moins fantastiques qu'au

commencement. Les rapporteurs considèrent leur cas comme un

cas le plus typique de la psychose de KORSAEOFF. Ensuite, ils ont

fait la revue, autant que possible détaillée, du matériel concernant

la psychose de KoasAorF; ayant basé leurs conclusions sur 200

cas à peu près de la maladie en question, décrits par différents

auteurs, les rapporteurs ont trouvé que, chez les hommes, la psy-

chosedeKoRSAKOFF serencontre approximativement pourunefois et

demie plus souvent que chez les femmes; surtout saute aux yeux ce

fait que la plus grande majorité des cas de psychose de Korsakoff

sont d'origine alcoolique. Dans les trois quart de tous les cas de

la maladie de KORSAKOFF, c'est l'alcool qui doit être envisagé

comme cause principale; si on prend seulement les hommes,

alors on verra que parmi eux le nombre de cas de psychose de

IORS.fEOFF,d'originealcoolique, sera quatre foiset demie plus grand

que le nombre de cette même maladie d'une autre origine ; outre

l'alcoolisme, la psychose de KOHSAKOFF peut être provoquée encore

par la fièvre typhoïde, par l'ictère, par des troubles gastro-intes-

tinaux, par des tumeurs malignes, etc. Concernant l'àge, la psy-

chose de Korsakoff chez les hommes se développe le plus souvent

à l'âge de quarante et un,-quarante-cinq et quarante-six,-ciaquante

ans, et chez les femmes à trente-six,-quarante ans. Certains auteurs

(SCHULTZE, Monkemoller, R911ANN, LuCrERATH) décrivent des cas

de psychose de KOHSAKOFF sans phénomènes cliniques neuritiques,

mais il faut remarquer que dans pas un des cas de ce genre il n'y

avait eu d'examen microscopique des nerfs; ces cas ne sont pas

nombreux et tous ils appartiennent aux hommes. La psychose de

Korsakotf, le plus souvent, laisse des défauts dans l'état psychique

des malades, qui concernent principalement la mémoire. Souvent

dans la maladie de KORSAKOFF on constate la tuberculose, qui mène

le malade à l'issue léthale. La guérison complète est très rare chez

les alcooliques ; elle est même très douteuse. Dans certains cas, on

observe la combinaison de la psychose de Korsakoff avec la polio-

encéphalite de 'VEHNrcEE; dans des cas rares la psychose de Iion-

sakoff peut se compliquer, dans son cours iltérieur, par de vastes

ramollissements dans la région des hémisphères cérébrales, ce qui

86 - SOCIÉTÉS SAVANTES.

n'exclut pas le diagnostic de la psychose de KORSAKOFF. Pour con-

clusion, les rapporteurs ont cité un cas de ce genre, observé à la

Clinique Psychiatrique de Moscou, où il y avait un tableau très

typique de la psychose de Korsakoff (chez un alcoolique d'âge

moyen) ; à la psychose s'est associé un vaste ramollissement dans

les hémisphères cérébraux ; à l'examen microscopique furent cons^

tatés des phénomènes névritiques.

W.-A, ! \1ouRATOFI' voit le principal centre dans la résolution de z

cette question, dans l'autonomie de la psychose de KOHSAKOFF ou

seulement dans l'existence du symptômo-complexus de Korsakoff.

C'est pourquoi il regarde comme thème essentiel la définition des

symptômes différentiels de cette maladie, puisque des troubles de

mémoire analogues peuvent s'observer aussi dans diverses lésions

anatomiques du cerveau, preuve de quoi peut servir le casde S.-A.

SOUKIIA1VOFF, où à l'autopsie furent trouvés de vastes foyers apoplec-

tiques.

BECHTEREFF. Le terme maladie de Eoi,s«koff doit être appliqué,

vu la première description de l'auteur, seulement à la psychose

polinévritique. V.-W. VOROBIEFF indique sur cela qu'il peut exister

trois genres de cas : 4° Lorsque la psychose de Korsakoff apparait

comme entité nosologique pure ; 2° lorsqu'un processus a : .a-

logue est observé dans les lésions organiques du cerveau et 3°

lorsque la maladie de Korsakoff typique est compliquée par des

lésions cérébrales organiques et non provoquées par elles.

W.-P. SEHBSKY remarqua que le cas, sur lequel insiste W.-A.

nIOURATOFG', est peu démonstratif, car, autant qu'on peut le juger

parla brève communication de ce cas, les nerfs périphériques

n'ont pas été examinés. Quant à l'existence des vastes modifica-

tions anatomiques dans le cerveau, cela ne contredit nullement au

diagnostic de la psychose de Ionsaaorr.

M. SEHBSKY envisage la maladie de KOHSAKOFF comme une telle

forme qui, comme, par exemple, la paralysie générale est une asso-

ciation d'un trouble psychique avec des modifications organiques

du système nerveux, Comme endroit de la plus grande concentra-

tion de la lésion dans cette maladie apparaissent les nerfs péri-

phériques, mais cela n'exclut nullement, comme en général dans

les polinévrites, la possibilité des modifications ni du côté de la

moelle épinière, ni du côté du cerveau. Et S.-S. Korsakoff cher-

chait toujours, lui-même, et attirait l'attention des autres, en

examinant la maladie donnée, non seulement surles modifications

dans le système nerveux périphérique, mais aussi dans le système

central et dans le cerveau en particulier. -K. ROTII, A--A- KOR-

Furent faites encore des remarques par W.-K. Roin, A. -A. [OR-

NILOFF, N.-N. BAGENOFF et B'-J. SGÙ11DALOPf. '

SOCIÉTÉS SAVANTES. 87;

Contribution à l'étude de la poliomyélite aiguë (avec présentation]

des préparations).

P.-A. Préobragensky. Malade de vingt-trois ans, sans occupa-

tions définies, alcoolique ; deux mois de cela, a été mordu par un

chien enragé; il subit un cours de traitement des vaccinations

antirabiques ; cinq jours avant l'entrée à l'hôpital, le malade sentit

une faiblesse du membre supérieur droit et puis une gêne de

la respiration. Etat présent : une excitation très vive ; le malade

parle beaucoup. Une paralysie complète avec affaiblissement de

tous les muscles de l'extrémité supérieure droite. Cyanose des, 1

extrémités. Lorsque le malade veut se tenir debout, ses jambes

fléchissent tout de suite et il tombe. Point de réflexes pateliaires.

Une dyspnée. Une salivation exagérée. Issue léthale le même jour, : ¡

A l'autopsie on constata : une myélite aiguë de la région cervi-

cale. Les organes internes étaient normaux. L'examen microsco-

pique démontra dans la région de la corne antérieure droite, au.

niveau des segments cervicaux V.-VIII, une poliomyélite hémor-

rhagique aiguë (d'énormes hémorrhagies, un élargissement des.

vaisseaux, une accumulation des leucocytes, une multiplication

des cellules de la névroglie, son oedème, la dégénérescence des

cellules nerveuses, etc.). Le processus morbide s'était exprimé.

préférenciellement dans la région de l'artère latérale antérieure.

Dans beaucoup d'endroits de la moelle épinière et du tronc céré-

bral on remarquait une grande accumulation de leucocytes (tuber-

cula rabica de l3abès). Dans les ganglions spinaux l'accumulation

des leucocytes, la multiplication des cellules endothéliales, la neu-

ronophagie. L'étude anatomique du cas donné démontre que,

entre ce cas de poliomyélite et les myélites aiguës, il n'y a aucune

différence bien essentielle. Toutes les classifications des myé-

lites ue sont pas sans défauts, car dans la pratique on rencontre

toujours des formes complexes (altération des vaisseaux et des

éléments nerveux). Mais dans une seule et même infection on peut

rencontrer des modifications parenchymateuses et interstitielles les,

plus variables, comme preuve de quoi ont été présentées des pré-

parations d'un autre cas d'hydrophobie : un garçon de quatorze

ans, dix mois de cela, a été mordu par un loup enragé ; le malade

a aussi été soumis au traitement par les injections antirabiques,

il a été amené à l'hôpital le 1. or mars de 1901 en état d'excitation

très marquée, et mourut quelques heures après son entrée à l'hô-

pital. A l'examen microscopique, on constata dans le système ner-

veux central un grand nombre de tubercules rabiques et des mo-

difications interstitielles, insignifiantes. De telle manière donc,

dans une seule et même infection peut s'altérer le tissu intersti-

tiel et le tissu parenchymateux en degrés différents (locus minons,

resistentix). Concernant le caractère spécifique des modifications^

88 BIBLIOGRAPHIE.

dans la- lyssa, on peut, dans ce cas, s'associer à l'opinion de

M. Crocy qui n'envisage pas toutes ces modifications comme spé-

cifiques, contrairement à l'opinion de BABES, de Van-Gehuchten et

d'autres. --

L.-S. Vlli\on n'envisage pas le cas du rapporteur comme polio-

myélite typique, mais plutôt comme un cas de lyssa avec localisa-

tion du processus, entre autres, dans les cornes antérieures

aussi.

A.-A. Korniloff est d'avis que dans le cas du rapporteur existe

une infection générale qui peut donner, et à la méningite et à la

myélite, mais pas à la poliomyélite comme maladie particulière,

comme nous nous la représentons. Pour la poliomyélite est néces-

saire le tableau clinique ainsi que le tableau anatomique, et dans

le cas donné il n'y a rien de caractéristique pour'la poliomyélite.

- W.-A. MooInTOra s'associe à l'opinion de MM. MINOH et Korniloit,

et cite, en abrégé, deux cas de poliomyélite, où il avait trouvé des

modifications tout à fait identiques à celles qui sont observées

dans les encéphalites. G.-J. ROSSOLIMO est d'accord avec l'opinion

du rapporteur. Comme différentes causes peuvent provoquer des

névrites avec certaines particularités, ainsi les diverses infections

peuvent provoquer la poliomyélite, qui peut présenter aussi de

certaines particularités. '

BIBLIOGRAPHIE.

1. Les glandes parathyroïdes. - Etude anatomique et expérimen-

tale ; par M. A. JOUTY (th. Lyon, 1903).

Le but du travail de M. Jouty a été de montrer toute l'impor-

tance fonctionnelle des glandes parathyroïdes, sans préjuger

cependant du rôle qu'elles doivent jouer dans l'économie, et de

donner sur elles tous les renseignements que la physiologie a

fournis. Dans son historique, il montre l'évolution qu'a suivi l'étude

des glandes thyroïdes et parathyroïdes, depuis les recherches clini-

ques de Reverdin (1882) et de Kocher, jusqu'aux travaux de Gley

en 1891.

Les physiologistes avaient été frappés en effet par ce fait que

chez le lapin la thyroïdectomie totale de la glande principale

n'était pas suivie des mêmes accidents que chez d'autres animaux

(chiens, chats, etc.) C'est alors que Gley, en 1891, démontra chez

le lapin la présence de parathyroïdes situées à un centimètre au-

dessous de la glande principale. En enlevant ces glandules en

même temps que la. glande principale, il montra que le lapin,

, BIBLIOGRAPHIE. 89

comme le chien, le chat, etc., meurt après'avoir présenté des

accidents analogues.

A partir de la découverte de Gley, les travaux se multiplient sur

la question des glandules parathyroïdes, entre autres ceux de

Gley, de Moressu, de Vassale et de Generali. Par ces nombreuses

recherches, on est arrivé à démontrer que ces glandules sont

embryologiquement, histologiquementet physiologiquement diffé-

rentes de la glande thyroïde.

Au point de vue embryologique, comme le corps du thymus et

les thyroïdes médianes et latérales, les parathyroïdes sont des

dérivés branchiaux. -

La parathyroïde externe naît par un bourgeon épithélial qui

apparait sur la région dorsale de la troisième fente branchiale. La

parathyroïde interne se développe aux dépens de la région dor-

sale de la quatrième fente branchiale.

Sont annexés aux parathyroïdes, rarement chez l'homme, mais

d'une façon constante chez les animaux : a) des produits thymi-

ques, des grains ou nodules thymiques, il existe un nodule thymi-

que pour chaque glandule parathyroïdienne ; b), les vésicules

ciliées, formations kystiques rencontrées près de la parathyroïde

interne ou au voisinage de son nodule thymique. -

Pendant longtemps, à la suite de la découverte de Sandstrôm

(1880) les histologistes, Bozzi, Schmid, Schafer, etc., ont soutenu

que les parathyroïdes n'étaient que des portions du tissu thyroï-

dien incomplètement développées, mais susceptibles de remplacer

physiologiquement la glande principale. -

Cette théorie de la parenté histologique ne tint pas devant les

recherches de Hofmeister, de Gley, Nicolas, Jacoby, Kohn, etc.,

qui ont montré que le tissu des parathyroïdes une fois formé,

restait toujours le même et ne pouvait se transformer en tissu

thyroïdien.

Leur structure histologique comprend : des cellules polymor-

phes avec grand noyau et protoplasma clair, serrées les unes contre

les autres et formant dans leur ensemble des boyaux pleins, sépa-

rés les uns des autres par du tissu conjonctif servant de support

aux artères et aux veines mais qui est moins abondant que dans

la thyroïde principale.

Les parathyroïdes externes sont entourées d'un tissu conjonctif

qui les isole des tissus avoisinants. Pour la thyroïde interne la

séparation d'avec le tissu thyroïdien est incomplète.

Chez l'homme, la parathyroïde interne est enchassée dans la

glande thyroïde elle-même, le plus souvent près de la surface

interne, elle en est séparée cependant par une gaine conjonctive.

Les parathyroïdes externes pour certains anatomistes (Sands-

trôsem) se trouvent sur la face postérieure, au niveau de la partie

moyenne de la glande thyroïde. , ,

90 BIBLIOGRAPHIE.

Chantemesse et Marie en décrivent deux groupes en' rapport

avec les deux artères thyroïdiennes supérieure et inférieure. En

général, elles ont une coloration brun rougeâtre, légèrement

jaunâtre qui les fait confondre avecle tissu adipeux voisin.

Chez les animaux, M. Jouty n'a fait que reproduire les données

anatomiques déjà connues chez le chien, le chat, le lapin, le mou-

ton, la chèvre, le rat, le cobaye, le cheval, le porc, le singe. Ses

recherches personnelles ont surtout porté sur les oiseaux. Le ré-

sultat de ses dissections (poulet) concorde avec la description que

donne Verdun des parathyroïdes chez les oiseaux, qui possèdent

quatre parathyroïdes, deux de chaque côté.

En général, la situation des parathyroïdes est variable pour

chaque espèce animale, mais affecte pour une espèce donnée un

type presque toujours le même.

Au point de vue expérimentale, les recherches de M. Jouty on !

été faites sur les oiseaux. L'expérimentation chez ces animaux

donne des résultats insconstants à cause de la situation anatomi-

que des parathyroïdes internes qu'on ne peut atteindre parfois.

L'étude expérimentale montre que la parathyroïdectomie totale

est suivie de mort constante après quelques jours, en général

avec des accidents aigus paralytiques (paralysie surtout) ou con-

vulsifs (tétanie, contractures permanentes, accès épileptiques gé-

néralisés). La thyroïdectomie avec parathyroïdectomie est tou-

jours suivie de mort. ' *

Dans les cas de parathyroïdectomie la survie ne peut s'expli-

quer que par le fait d'une.opération incomplète. En effet la per-

sistance d'une seule des glandules peut assurer la survie de l'ani-

mal.

Certaines conditions peuvent modifier l'évolution des accidents

consécutifs à la parathyroïdectomie, en particulier l'age ; chez

les jeunes animaux, les accidents sont beaucoup plus rapides et

plus aigus. :

La transfusion, la saignée et les injections de sérum artificiel,

les médicaments antispasmodiques ont une action palliative. Les

greffes parathyroïdiennes (Cristianni) les injections de suc de pa-

rathyroïdes produisent une action préservatrice ou sédative.

L'auteur a rechercha en outre les modifications observées dans

l'organisme. Il n'y a pas de lésions spécifiques ni des centres ner-

veux, ni des viscères; on y rencontre de l'hypérémie et des hémor-

rhagies plus ou moins étendues. Dans le sang on trouve de la

leucocytose, une anémie légère, une diminution de la résistance

globulaire et de la quantité d'oxygénioglobine. La toxine urinaire

est modifiée d'après Masoin, elle s'élève après la thyroïdectomie;

la courbe de toxicité suit celle des accidents ; enfin la toxicité

s'élève considérablement aux moments des attaques épileptiques et

des accès de polypuée.. z

BIBLIOGRAPHIE. 91

Comparant les troubles consécutifs à la parathyroïdectomie

chez les animaux avec ceux produits par l'ablation de la thyroïde

M. Jouty montre la différence qu'il y a entre eux. Dans la thyroï-

dectomie on a des troubles trophiques affectant une marche chro-

nique, tandis que la parathyroïdectomie est suivie d'un syndrome '

toxique à grand tapage survenant en général en quelques jours

(deux à huit) après l'opération et se traduisant par des symptô-

mes digestif (vomissements, diarrhée) des troubles nerveux : con-

tractures, convulsions épileptiformes, tétanie, par la toxicité du

sérum et l'hypertoxicité des urines. ,

L'auteur termine son intéressant travail par l'étude des trou-

bles consécutifs à l'insuffisance de la fonction parathyroïdienne e

chez l'homme. C'est l'insuffisance parathyroïdienne consécutive

aux opérations de thyroïdectomie.

Ce sont enfin les faits d'insuffisance parathyroïdienne spontanée

recherchés par certains auteurs et dont certains phénomènes con-

vulsifs de l'enfance et certains cas d'éclampsie puerpuérale parais-

sent être la conséquence ." ' G. C..

II. Contribution ci l'étude des échanges nutritifs dans l'acromégalie.

(Contributione la studial schimibiolo nutritive in acromegalie) ;

par A.-C. PAniioN. 50 pages. Bucarest Editiera 1121nerva, 1903.

Voici les conclusions de ce travail :

On trouve constamment dans l'acromégalie des troubles des

échanges nutritifs, Ces troubles sont représentés par une rétention

marquée de certains éléments, savoir :

Il existe une rétention constante et généralement assez impor-

tante du phosphore. Ce même phénomène existe pour le calcium

mais sur ce point de nouvelles recherches sont nécessaires, celles

dejusqu'à présent étant trop peu nombreuses. L'urée est parfois

diminuée, d'autrefois elle oscille autour de la normale. Ce même

fait s'observe pour les clonus, mais ici on trouve aussi le con,

traire, ces sels semblent souvent s'éliminer dans une quantité

dépassant la normale. ,

L'étude des analyses quantitatives des urines nous est d'une

réelle utilité pour connaître l'état du métabolisme dans l'acromé-

galie ; pourtant les résultats qu'il nous donne ne sont qu'approxi-

matifs. Pour avoir des données précises il est nécessaire d'étudier

comparativement les ingesta et les excréta et d'établir le bilan

nutritif. Les recherches faites de cette façon sont jusqu'à présent

peu nombreuses. En ce qui concerne la pathogénie del'acromégalie,

l'étude des échanges nutritifs comme celui de la physiologie de la

glande pituitaire font plus probable la théorie qui soutient que

cette, maladie est due à une exagération de la fonction de cet

organe que celle'd'après laquelle elle serait l'expression des phé-

92 z1) VARIA.

nomènes de déficit. Pourtant cette théorie ne peut être admise

sans réserves.

, L'étude des échanges nutritifs doit nous conduire dans la théra-

peutique de l'acrômégalie, ce traitement devant avoir pour but

de ramener le métabolisme à l'état normal. L'opothérapie thyroï-

dienne ou pituitaire nous semblent contre-indiquée quand il existe

dans l'organisme une rétention du calcium.

Dans les cas avancés l'acromégalie où le calcium a la tendance

de s'éliminer dans une quantité qui dépasse celle ingérée (Fauszk

et Vas) le traitement thyroïdien serait indiqué.

L'apothérapie pituitaire serait indiquée d'une façon rationelle

dans les cas où une tendance à l'élimination exagérée du calcium

et du phosphore coexisterait avec une diminution de l'excrétion

du chlore et de l'azote; mais jusqu'à présent cette modalité de

perturbation du métabolisme cellulaire n'a pas été signalé, il est

pourtant possible qu'elle existe dans les cas avancés d'acromégalie,

L'opothérapie ovarienne semble généralement indiquée et mériterait

d'être essayée.

Les médicaments qui influencent plus énergiquement les échan-

ges nutritif etquitendentàles rameneràlanormale sont l'oxygène,

le nitrate'd'argent et surtout le phosphore. (Moraczewski.) L'étude

des éliminations et surtout le bilan nutritif sont les seuls critériums

certains qui nous indiquent l'action des médicaments.

A. 13EnSTEIN, M. Moltguanoff, S. Soukiianoff.

VARIA.

Traitement DE l'épilepsie par la diète; par Schnitzer.

L'auteur prône la modification apportée par Balint à la diète

oligochlorurique dettichet et Toulouse. Cette modification con-

siste à ne pas dépasser 2 grammes de chlorure de sodium en

vingt-quatre heures et, d'autre part, à donner un pain contenant,

au lieu de sel de cuisine, du bromure de sodium en quantité suffi-

sante pour que sous cette forme le malade prenne 3 grammes de

bromure par vingt-quatre heures, à savoir 400 grammes de pain.

En outre, un litre et demi de lait, 50 grammes de beurre, 3 oeufs

non salés. -

Pareil régime est assez bien supporté pendant six ou huit

semaines et le plus ordinairement le malade est amélioré. Néan-

moins, l'on est obligé d'interrompre quelque temps par suite d'une

répulsion par trop grande. Le plus ordinairement il y a augmen-

tation de poids ; ce régime est recommandable. (Journal de Méde-

cine de Paris, 17 janvier 1904). .

.VARIA. 93

UN CAS DE LÉTHARGIE.

Un cas de léthargie des plus intéressants vient de se présenter

à Harvengt, près de Mons : une jeune fille de 24 ans, Léa Cornu,

est restée endormie pendant trente-sept jours. La jeune fille était

servante, et, à la suite d'une vne émotion, était tombée gravement

malade.Un beau matin, ses parents ne parvinrent point à l'éveiller.

Le médecin constata qu'elle était dans un état cataleptique com-

plet. Tous les moyens' employés n'ont pu la faire sortir de sa

léthargie. Seule une respiration à peu près imperceptible et les

battements du coeur témoignaient que la vie n'avait pas abandonné

le corps. La jeune fille a été nourrie artificiellement au moyen de

lait et d'oeufs. Elle s'est éveillée samedi dernier, sans secousse

aucune. Elle est actuellement très affaiblie et ne se souvient de

rien. (Semeur de l'Oise, 17 avril).

. LES ALIÉNÉS EN LIBERTÉ.

Suicide. - Le 30 avril, vers 7 heures, le cadavre de M. Cessot-

Chadeville, 52 ans, habitant Ecuelle, a été trouvé sur la voie du

chemin de fer, entre Ecuelle et Bragny-sur-Saône, sur le territoire

de Bragny. M. Cessot avait travaillé toute la journée de vendredi

et n'avait pas rentré le soir. Sa femme, prise d'inquiétude, se mit

à sa recherche, aidée de quelques amis, et ce n'est que hier matin

que l'on a découvert le cadavre, dont la tête était reduite en

bouillie. Depuis quelque temps M. Cessot paraissait ne pas jouir de

la plénitude de ses facultés. (Progrès de Lyon, 2 mai.)

- On vient de découvrir à Charmoy-le-Grenant(Côte-d'Or) dit le

Progrès de Lyon du 14 mai, pendu dans une grange, le nommé

Noirot, domestique de ferme. Il a été reconnu que ce malheureux

ne jouissait pas de la plénitude de ses facultés mentales. ,

D'où la nécessité d'hospitaliser tous les aliénés dès le

début, de faciliter cette hospitalisation en assimilant de plus

en plus les asiles à des hôpitaux, quitte à faire venir le

magistrat, le lendemain de l'admission. Ce n'est que dans

ces conditions que l'intervention du pouvoir judiciaire

sera sans, inconvénient. Si, au contraire, elle doit retarder le

placement, elle sera nuisible.

Le crime d'une folle. - Un drame occasionné par la folie s'est

déroulé hier matin, 14, boulevard de la Chapelle. A cette adresse,

habitaient depuis environ six ans les époux Robert. La femme,

née Renard, âgée de cinquante ans, donnait depuis quelque temps

des signes de dérangement cérébral. Hier, vers six heures du

matin, alors que son mari dormait, l'inconsciente se leva douce-

ment, alla dans sa cuisine où elle emplit d'acide sulfurique une

94 VARIA.

soupière du contenu d'un litre, puis, revenant dans la chambre à

coucher, elle versa la soupière sur le visage de son mari. Aux cris

effroyables que poussa M. Robert, des voisins accoururent, et

pendant que les uns s'emparaient de la femme Robert les autres

conduisaient la victime à l'hôpital Lariboisière. M. Robert, a la

tête affreusement brûlée et son état laisse peu d'espoir. (Radical

24 mai). '

Le crime d'une folle. Les époux Justier, domiciliés rue de

Belleville, eussent été très heureux, si Mmo Gabrielle Justier, âgée

de quarante et un ans, eût joui de la plénitude de ses facultés.

Malheureusement, la pauvre femme était faible d'esprit et son

mari, qui exerce la profession de tourneur sur bois et travaille au

dehors, avait dernièrement commencé des démarches pour

obtenir son internement dans une asile d'aliénés. Il craignait, en

effet, qu'en son absence, sa malheureuse compagne, qui se ren-

dait compte de son état, n'attentât à ses jours.

. Comment Mme Justier apprit-elle que son mari avait l'intention

de la faire interner ? On l'ignore. Toujours est-il que mardi soir

elle lui dit à brûle-pourpoint : - Alors, je suis folle ? ... - Mais

non, mais non, chère amie, répondit l'ouvrier. - Si, je le sais,

ne mens pas, s'écria alors Mme Justier. Je suis même une folle

dangereuse, tu vas le voir ! ...

Tout en disant ces mots, elle sortit de son corsage un petit

revolver et, à trois reprises, fit feu sur son mari. Atteint à la tète,

M. Justier s'enfuit en appelant au secours 1... Mais quand les voi-

sins accoururent, la pauvre insensée avait disparu. Le blessé fut

conduit à l'hôpital Saint-Louis où les projectiles purent être

extraits. Prévenu de ce drame, M. Girard, commissaire de police,

ouvrit aussitôt une enquête, mais jusqu'ici le magistrat n'a pu

retrouver la folle. On craint que celle-ci ne se soit suicidée. (Le

Petit Puritien, 24 mars 1904).

La victime avait fait des démarches pour faire interner sa

femme, aliénée. Il serait curieux de savoir si ce n'est pas,

auprès du même commissaire de police qui n'aurait pas

voulu intervenir tant qu'il n'y avait pas eu un acte criminel.

Pour éviter de tels malheurs, il faut faciliter l'admission des

malades dans les asiles, la rendre aussi facile que l'admis-

sion dans les hôpitaux et faire l'enquête administrative ou

judiciaire aussitôt après l'hospitalisation.

Assommé à coups de bâton. - La nuit dernière, 17 septembre,

une fatale méprise fut la cause d'un drame à Lucé, près de

Chartres. Vers deux heures du matin, les époux Matevitie (le mari

jardinier) qui habitent une petite maison, ayant entendu du

bruit, le mari se leva, armé d'un bâton, et sortit sans bruit.

FAITS DIVERS. 95

Ayant trouvé un individu qui tentait d'ouvrir une fenêtre, il lui

asséna sur la tête un formidable coup de bâton qui étendit à

terre l'individu qui perdit son sang ; comme il essayait de se

relever, Maleville continua à le frapper. Aux appels de Mme Male-

ville, du secours vint et on s'aperçut qu'on était en présence d'un

malheureux (ou, nommé Claudius Lhévenin, régisseur du cirque

Amato, installé à Chartres, et qui était sujet à des hallucinations.

Il fut transporté à l'hôpital dans un état désespéré. (Le Matin,

18 septembre).

Sous ce titre : Une désespérée, le Semeur de l'Oise du 20 mars

publie le fait ci-après : t

« Le 13 courant, une femme a été repêchée dans la Seine,

quartier de la Muette, à Paris. Son corps a été déposé à la Morgue

où il vient d'être reconnu comme étant celui de la nommée Gau-

tier Augustine, âgée de vingt-quatre ans, domestique, 3, rue Nicolo,

à Paris. La désespérée était sortie de l'Asile d'aliénés de Clermont le

9 avril dernier, en exécution d'un arrêté de M. le Préfet de Seine-

et-Oise. Elle était à cette époque guérie de la maladie mentale

pour laquelle elle avait été traitée et rien dans ses actes, ses

écrits, ses paroles ne pouvait faire supposer une pareille fin. En

quittant Clermont; la malheureuse s'était rendue chez les soeurs

de Grenelle, 52, rue du Théâtre. »

Ce fait montre combien est délicate la mission des méde-

cins des asiles et explique pourquoi, souvent. ils hésitent à

signer la sortie des malades.

FAITS DIVERS.

Asile de BRON. - Condamnation d'un infirmier. - L'infirmier

de l'asile de Bron, dont nous avons parlé dans notre dernier

numéro, reconnu coupable de coups et blessures sur un fou,

pensionnaire de l'établissement, a été condamné par le tribuual

correctionnel de Lyon, à quatre mois de prison, avec application

de sursis.

Suicide d'un rOU. - Nancy. - Dimanche matin, vers onze heures,

le nommé Antony Gratius, âgé de trente-huit ans, imprimeur,

demeurant rue du Ruisseau, à Nancy, qui ne jouissait plus de ses

facultés mentales, a tenté de tuer sa femme en lui portant un

coup de rasoir au cou. La malheureuse s'échappa et appela à

l'aide. Deux passants accoururent, pénétrèrent dans le logement

et virent Gratius qui se tailladait la gorge. Ce dernier tenta une

96 AVIS A NOS ABONNÉS.

seconde fois de frapper sa femme, mais il en fut empêché à nou-

veau. 11 se porta un second coup.de rasoir puis tomba. Il mourut

peu après. (L'Aurore, 7 juin 1904.)

, Hospice de Bicêtre. M. BOURNEVILLE. Visite et présentation de

malades, le samedi à 9 heures et demie très précises.

- XIV° CONGRÈS DES Médecins aliénistes ET neurologistes DE FRANCE

ET DES pays de langue FRANÇAISE Pau'lm'-7 août 1904). - Le XIV8

Congrès des médecins aliénistes et neurologistes de France et des

pays de langue française se tiendra cette année à Pau du 1er au

7 août sous la présidence de M. le professeur Brissaud.

Adresser les adhésions et communications à M. le Dr Girma

secrétaire général du Congrès, médecin-directeur de l'Asile public

des aliénés de Pau.

Nous prions, dès maintenant, les auteurs de ce Congrès,

de bien vouloir nous envoyer pour le 25 juillet, un résumé

de leurs communications.

AVIS A NOS ABONNÉS. L'échéance du 1 ? JUlLLLT

étant l'une des plus importantes de l'année, nous prions

instamment nos souscripteurs dont l'abonnement cesse à

cette date, de nous envoyer le plus tôt possible le montant

de leur renouvellement. Ils pourront nous adresser ce

montant par l'intermédiaire du bureau de poste de leur

localité, qui leur remettra un reçu de la somme versée :

Nous prenons à notre charge les frais de 3 p. 100 prélevés

par la poste, et nos abonnés n'ont rien à payer en sus du

prix de leur renouvellement.

Nous leur rappelons que, à moins d'avis contraire, la

quittance de réabonnement leur sera présentée, aug-

mentée des frais de recouvrement, et partir du

15 Juillet. Nous les engageons donc à, nous envoyer DE

SUITE leur renouvellement par un mandat-poste.

Afin d'éviter toute erreur, nous prions également nos

abonnés defoind1'e à leur lettre de réabonnement et à toutes

leurs réclamations la BANDE de leur journal.

- Nous 1'appelons à nos lecteurs que l'abonnement collec-

tif des Archives de Neurologie et du Progrès Médical

est réduit à 28 francs pour la France et 30 francs pour

l'Étranger. l '

Le rédacteur-gérant : BOURNEVILLE.

Evreux, Ch. HtB'...v, imp. - 6-1904.

Vol. XVIII. Août 1904. N° 104.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE NERVEUSE.

CLINIQUE DES MALADIES NEUVE USES. - LA SALP1 : TIIIGItE

Deux cas de lèpre nerveuse 1.

Par le professeur RAYMOND

Messieurs,

Je puis, dans ma leçon d'aujourd'hui, grâce à l'obligeance

de mon collègue, M. le professeur agrégé Jeanselme, mettre

sous vos yeux un malade atteint d'une affection relativement

rare dans nos climats, mais qui pourtant, depuis un certain

nombre d'années, depuis surtout que l'expansion coloniale

de la France conduit nombre de nos compatriotes à vivre

dans les pays où la maladie est demeurée endémique, tend à

devenir de plus en plus fréquente. Cette affection, il importe

de la bien connaître parce qu'elle peut se présenter sous des

dehors tels qu'il serait possible de la confondre, au premier

abord, avec des maladies communes du système nerveux

telles que nous en voyons dans cet hospice : on pourrait

donc, si l'on n'était bien au courant de la question, commettre

facilement une erreur de diagnostic très grave dans ses con-

séquences. C'est qu'en effet l'affection que je vise en ce

moment est contagieuse, transmissible du malade à l'homme

sain; elle est redoutable en raison de sa marche presque

fatalement progressive, en raison des altérations profondes

et multiples qu'elle peut produire dans l'organisme; elle a

' Leçon faite à la Salpêtrière le 20 mai 1901, recueillie et publiée par le

"' COi7S1'EMSOUX, chef de clinique adjoint.

Archives, 21 série, t. XVIII. 7

98 clinique nerveuse.

été, au moyen âge, dans notre pays, un objet d'horreur, et.

dans l'imagination populaire son souvenir; son nom seul .1

provoquent encore l'effroi. Pont tant aujourd'hui, je me hâte

de vous le dire, on peut parfois arriver à la guérir presque

complètement. Dans tous les cas/sa pathogénie a été singu-

lièrement éclairée le jour où il a été démontré qu'elie est

engendrée par un microbe lequel, suivant ses lieux d'habitat

et les réactions qu'il provoque dans les tissus donne au

tableau clinique telle physionomie particulière; du même

coup on a compris ce qu'il convenait de faire au point de

vue de la prophylaxie, sans compter que depuis lors la thé-

rapeutique a été orientée dans une voie nouvelle et déjà fruc-

tueuse.

C'est donc; Messieurs, un des syndromes nerveux d'une

affection bacillaire pouvant être beaucoup plus généralisée.

pouvant intéresser d'autres tissus que le tissu nerveux, que

vous allez voir chez le malade que je vais placer sous vos

yeux. Il y a quelques années, j'ai déjà eu l'occasion d'étu-

dier avec vous une autre malade atteinte de la même affec-

tion ; je vous rappellerai également son histoire, et l'examen

de ces deux cas me permettra de vous faire connaître les

aspects principaux sous lesquels-peut se montrer la maladie.

Je vais donc tout d'abord vous dire comment celle-ci a évo-

lué dans les deux cas qui nous occupenl. '

Le malade que je vous présente est un nommé X..., âgé

de cinquante-deux ans. Il a habité pendant de longues

années la Nouvelle-Calédonie où il travaillait dans les mines

de nickel. Ses antécédents héréditaires ne présentent rien

d'intéressant à signaler. Ses parents ont succombé à un âge

avancé; des quinze enfants du ménage, neuf sont morts de

fièvre typhoïde ou d'affections indéterminées; des six vivants

actuellement, cinq sont bien portants, le sixième est notre

malade. ,

Il ne peut pas nous fournir de renseignements sur sa pre-

mière enfance. Deux fièvres typhoïdes, une il vingt et un ans.

l'autre à trente et un ans et une pleurésie survenue à l'âge

de quarante-six ans constitueraient ses seuls antécédents

pathologiques personnels. Il n'a jamais eu de syphilis, de

paludisme ni de dysenterie.

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 99

Les premiers symptômes qu'il ait constatés ont consisté

en une démangeaison permanente, désagréable mais non

douloureuse, occupant les fosses nasales mais ne s'accompa-

gnant ni d'écoulement, ni de mauvaise odeur, ni d'aucune

déformation; elle persista de 1900 à 1902. En 190` apparu-

rent les premiers accidents sérieux; ils siégeaient à la main

gauche et consistaient en engourdissements suivis bientôt

d'affaiblissement. Limités d'abord au médius et à l'index,

ces symptômes atteignirent ensuite le pouce ; les deux der-

niers doigts ne se prirent que plus tard, ils ne se paralysè-

rent qu'au moment du retour en France, c'est-à-dire en

juin 1903.

A peu près en même temps que ces phénomènes, le malade

voyait les muscles de la main et de l'avant-bras diminuer de

volume et les téguments correspondants prendre une colora-

tion rouge brunâtre.

En février 1903 s'est produite une seconde localisation de

la maladie qui désormais intéresse la face : de violentes dou-

leurs se font sentir du côté droit du cou, du crâne et de la

l'ace; le simple effleurement de ces régions provoque des

crises très pénibles.

Vers la même époque apparut une paralysie faciale inté-

ressant également le côté droit et une éruption occupant la

même région et dont on voit encore quelques traces, bien

qu'elle ait en grande partie rétrocédé. Cette éruption était

érythémato-papuleuse, prédominait du côté droit et intéres-

sait surtout le nez dont le volume avait notablement aug-

menté. Une biopsie faite à Nouméa montra la présence de

nombreux bacilles de Ilansen dans la peau.

C'est alors que le malade s'est décidé à venir en France où

il fut soigné à l'Institut Pasteur, puis par MM. Jeanselme et

Iluet. Les différents traitements auxquels il a été soumis,

l'emploi notamment du collargol. de l'huile de Chaulmoogra,

de l'icthyol et de l'électricité, lui ont procuré une améliora-

tion manifeste et progressive : l'éruption de la face a pâli,

l'oeil droit se ferme mieux, l'anesthésie a diminué, la pres-

sion des nerfs n'est plus douloureuse, les mouvements sont

redevenus normaux à l'épaule, au bras et à l'avant-bras, ce

n'est qu'à la main que l'état est demeuré à peu près iden-

tique.

Procédons maintenant à l'examen des symptômes que

100 CLINIQUE NERVEUSE.

nous observons au membre supérieur gauche d'une part et

à la face d'autre part. '

Le membre supérieur gauche est le siège d'une paralysie

à peu près complète portant sur la main et les muscles de

l'avant-bras; le bras et la ceinture scapulaire sont, au con-

traire, respectés. Aussi le malade se présente-t-il l'avant-bras

gauche fléchi spontanément, mais la main tombante, les

cinq métacarpiens ainsi que les doigts sur le même plan

transversal.

Au repos, les doigts sont allongés, la première phalange

en extension complète, les deux dernières en flexion légère.

Le malade ne peut relever spontanément ni la main ni les

doigts; l'impotence de ces derniers est presque absolue :

l'extension et l'opposition sont tout à fait impossibles, l'ab-

duction, impossible pour les quatre premiers doigta est

vaguement esquissée par l'auriculaire, le mouvement d'ad-

duction n'est qu'ébauché par le pouce. Les mouvements

passifs sont possibles au niveau des doigts sauf la flexion et

l'extension de la première phalange limitées par une raideur

articulaire.

Au niveau du poignet, le seul mouvement que le malade

puisse exécuter spontanément est la flexion de la main sur

l'avant-bras; il y déploie même une certaine force et parfois

la flexion s'accompagne d'une légère adduction : les autres

mouvements font absolument défaut.

Les mouvements de l'avant-bras sur le bras sont possibles,

mais la force musculaire est inférieure à la normale; n'ou-

blions pas d'ailleurs que ces mouvements ont beaucoup

gagné dans ces derniers mois. Il en est de même pour les

muscles de l'épaule et de la ceinture scapulaire : à ce niveau

nous ne constatons aujourd'hui plus rien d'anormal, mais le

malade déclare qu'à sa sortie de l'hôpital Pasteur, il était

incapable de mettre la main derrière le dos.

Un second symptôme attire immédiatement l'attention,

c'est l'atrophie musculaire coexistant avec l'impotence, elle

occupe surtout la main et l'avant-bras. L'aspect de la main

est l'aspect classique de la main simienne avec le pouce sur

le même plan que les autres doigts, la disparition des émi-

nences thénar et hypothénar et l'effacement du creux de la

main.-

A l'avant-bras, cette atrophie n'est pas moins évidente, la

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 101

t

mensuration montre, entre le côté gauche et le côté droit,une

différence de 3 centimètres 1/2. Au bras la différence est

moins accusée, elle n'est que de 1 centimètre 1/2, mais elle

apparaît à la seule inspection.

Les réflexes sont diminués ou abolis au prorata de l'atro-

phie musculaire : les seuls qui, au niveau du poignet, ne

soient pas complètement perdus sont ceux des fléchisseurs

des doigts et du long extenseur du pouce; encore sont-ils

très faibles.

L'examen de la sensibilité fait constater de gros troubles

objectifs occupant la main et l'avant-bras ; ceux-ci diminuent

de bas en haut. Ils intéressent les trois modes de la sensibi-

lité et affectent, d'une façon générale, une disposition péri-

phérique : la bande moyenne est d'ordinaire la plus atteinte,

c'est là que l'anesthésie prédomine, la bande interne est la

moins touchée des trois. Ces troubles consistent en anes-

thésies et portent surtout sur la sensibilité thermique, la

sensibilité tactile est la mieux conservée. Enfin, la' limite

supérieure des zones anesthésiques est insensible.

Vous pourrez facilement, en jetant un coup d'oeil sur les

schémas que je place sous vos yeux, vous rendre compte de

la disposition de ces troubles de la sensibilité objective.

J'ajoute qu'au niveau de la main, le sens stéréognostique

est très troublé, mais que le sens des attitudes segmen-

taires est conservé. Actuellement, le membre n'est le siège

d'aucune douleur spontanée. Il n'existe pas non plus de

douleur à la pression, contrairement à ce qui se passait

avant le traitement suivi en France; la pression des nerfs,

.leur simple effleurement éveillaient, à ce moment, des dou-

leurs extrêmement vives; aujourd'hui l'indolence est telle

que les nerfs n'ont certainement plus leur sensibilité nor-

male. . "

Mais il est un autre symptôme essentiel que révèle la pal-

pation de la région malade, je veux parler des altérations

objectives dont sont le siège les troncs et les filets nerveux;

l'exploration montre, en effet, qu'ils sont notablement aug-

mentés de volume ; il est aisé de les sentir sous forme de

gros cordons roulant sous le doigt, mais loin que leur

volume soit régulier, ils présentent une série de nouures

irrégulièrement réparties et qui leur donnent une apparence

moniliforme. Ces altérations sont particulièrement accen-

102 CLINIQUE NERVEUSE.

tuées au niveau du cubital et du médian, que l'on peut sentir

dans toute la hauteur du bras; vous sentirez aisément aussi

plusieurs des filets sous-cutanés.

Fig. Il*. Les parties rayées d'un trait vertical correspondent à une

hypoesthésie légère ; - les parties rayées verticalement et obliquement

à une hypoesthésie très accentuée; - les parties noires à une anesthésie

complète; - les parties pointillées à une hyperesthésie. Ces explications

s'appliquent à toutes les figures. "

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 103

Enfin, Messieurs, les réactions électriques de ces nerfs et

de ces muscles atrophiés sont, vous pouviez le prévoir, pro-

fondément modifiées.

Si maintenant nous passons à l'examen de la face et du

cou, nous relevons encore, de ce côté, nombre de symptômes

Fig 15.

104 , CLINIQUE NERVEUSE.

importants, intéressant à la fois la peau et le système ner-

veux.

Dès l'abord, on est frappé par la pigmentation de la partie

inférieure de la face et du cou. Quant à la partie supérieure

de la face, à peu près normale à gauche, elle est dans sa

partie droite et sur le nez le siège d'un érythème spécial : il

Fir¡. 1 il.

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 105

est surtout marqué autour de l'oeil et sur le nez et, en ces

deux points il s'accompagne d'une infiltration des tégu-

ments de la région. Le nez est volumineux; on pourrait, à

un examen superficiel, le croire atteint d'acné hypertro-

phique, si la coloration rouge vif de cette affection ne faisait

ici défaut. 1 1

Fig. 17.

tUb CLINIQUE NERVEUSE.

La région sus-orbitaire droite, au niveau de l'émergence du

nerf du même nom, présente une plaque érythémateuse

infiltrante sur les bords de laquelle on remarque encore

plusieurs tubercules. Une autre plaque érythémateuse se

voit à la région sus-orbitaire gauche, elle est séparée de la

Fi-7. 18.

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 107.

précédente par une bande de peau saine.. La région sous-

orbitaire droite est rouge également.

La paupière inférieure gauche est un peu infiltrée, mais

cette infiltration est beaucoup plus marquée à droite où elle

intéresse aussi la paupière supérieure : cette infiltration est

Fig 1 ! 1.

108 . CLINIQUE NERVEUSE.

assez accentuée pour empêcher l'occlusion complète des

paupières à droite.

A la face, on trouvait, au mois de janvier dernier, une

diminution des réactions faradiques et galvaniques portant

sur les rameaux moyens du nerf facial, l'excitabilité fara-

dique était même abolie pour les rameaux palpébraux et

frontaux. Depuis lors, les modifications qu'ont présentées

ces réactions ont montré que nous assistions à la phase de

réparation d'une DR, laquelle avait été plus prononcée

pour les rameaux supérieurs que pour les moyens.

Au membre supérieur gauche, on constate de la DR très

prononcée dans tout le domaine du nerf cubital et du nerf

médian à la main; dans le domaine antibrachial de ces

nerfs il n'existe que de la DR partielle sur le fléchisseur

commun des doigts. Pour le nerf radial, la DR n'existe que

dans le domaine antibrachial et fait défaut au niveau du

bras. Enfin, les réactions électriques des nerfs musculo-

cutané et circonflexe sont normales.

A part cette inocclusion de cause purement mécanique,

la face n'est plus aujourd'hui le iiège d'aucun trouble mo-

teur : le malade peut siffler, souffler, rire, découvrir ses

dents de façon normale, mais je vous rappelle qu'il n'eu a

pas toujours été ainsi et qu'il a existé une paralysie faciale

droite jusqu'en novembre 1903.

Au point de vue de la sensibilité, l'examen de la face

comme celui du membre supérieur gauche révèlent des trou-

bles profonds. Ceux-ci occupent, d'une façon générale, la

moitié droite de la face dans sa partie supérieure, la moitié

correspondante du cuir chevelu dans son segment antérieur.

Cette zone répond au territoire de distribution des deux

branches supérieures du trijumeau et du nerf auriculo-tem-

poral ; toutefois, elle empiète sur le côté gauche. Ici encore

l'anesthésie porte sur les trois modes de la sensibilité, elle

est moins marquée pour la sensibilité tactile que pour les

deux autres; elle predomine au nez, autour de l'oeil droit et

à l'oreille droite.

La palpation, pratiquée au niveau de la face, n'éveille plus

maintenant aucune sensation douloureuse, mais, comme au

niveau du bras, elle révèle l'augmentation de volume et

l'aspect moniliforme des nerfs périphériques. Cette augmen-

tation de volume ne se rencontre qu'à droite. Elle intéresse

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 109

notamment les deux branches supérieures du plexus cer-

vical superficiel qui offrent la dimension d'une plume

d'oie et une consistance telle qu'au premier abord on pour-

rait hésiter à reconnaître des filets nerveux; avec un peu

d'attention, on peut encore sentir d'autres rameaux, mais

m'oins volumineux.

L'examen minutieux- du malade ne permet pas de décou-

vrir aucun autre symptôme digne d'être mentionné; les

autres parties du système nerveux aussi bien que tous les

viscères ne présentent rien d'anormal.

Je veux maintenant mettre en parallèle, avec le malade

que je viens de vous présenter, l'observation d'une autre ma-

lade que nous avons eue ici en traitement dans le service

voici quelques années :

Il s'agissait d'une jeune femme de vingt-sept ans, mariée

à un officier colonial et venue à Paris, du Tonkin, pour se

soigner. Elle était entrée à la Salpêtrière le 18 juin 1897. Ses

antécédents héréditaires ne présentaient rien à signaler.

Quant à elle, elle était née à Saïgon et avait été élevée,

depuis l'âge de deux ans, par des religieuses possédant

auprès de Saïgon, à Tiughé. une léproserie entourée d'un

grand parc dans lequel les enfants venaient jouer, risquant

ainsi, malgré une surveillance attentive, de se mettre en

contact avec les lépreux. Mue S... s'est mariée à l'âge de

vingt ans, sans avoir jusqu'alors fait aucune maladie, elle

se fixa alors à Ilanoï. En 1891, survient une première gros-

sesse qui évolue et se termine sans incident. En 1892, au

cours d'une deuxième grossesse, un jour que cette femme

sortait du bain, elle remarqua au niveau des jambes l'exis-

tence de plaques violacées, et rapprocha cette constatation

de ce fait que depuis quelque temps les jambes étaient

quelque peu engourdies; l'éruption n'avait d'ailleurs été

précédée d'aucun phénomène fébrile pas plus que'de dou-

leurs ni de saignements de nez. La grossesse continue et

prend fin de façon normale, mais, six semaines après l'ac-

couchement, la malade devient pâle, anémique, elle se

fatigue très facilement, commence à être mal réglée et à

souffrir du bas-ventre, en même temps que de nouvelles

110 CLINIQUE NERVEUSE.

plaques apparaissent au niveau des bras puis sur la joue

gauche. Les médecins consultés portent le diagnostic

d'eczéma circiné et instituent un traitement ioduré à la suite

duquel les plaques se décolorent, desquament et dispa-

raissent. Mais, les douleurs abdominales augmentant, la

malade vient en Europe : à Marseille, on lui fait d'abord

subir un curetage, de là elle se rend en Suisse pour soigner

son anémie. Les plaques reparaissent et, à Genève, les mé-

decins portent une seconde fois le diagnostic d'eczéma cir-

ciné et de nouveau prescrivent l'iodure de potassium avec le

même succès que la première fois.

En 1893, M,nL, S... retourne à Saïgon, y redevient enceinte

et accouche en 189-4. Aussitôt après, de nouvelles plaques

violacées, siégeant aux membres inférieurs, aux bras et à

la joue gauche font leur apparition, mais cette fois l'éruption

s'accompagne de douleurs dans les jambes, celles-ci consis-

tent en élancements qui des pieds remontent dans les mollets;

de plus, les mains au niveau des éminences thénaret hypothé-

nar, les avant-bras et les jambes sont le siège d'un amaigrisse-

ment manifeste. Au bout de trois mois de traitement par

l'iodure de potassium, la liqueurde Fowler et l'électrisation,

les taches pâlissent et disparaissent. -

En 1895 après une nouvelle grossesse et un nouvel accou-

chement survenu à huit mois, une nouvelle éruption se

montre, plus étendue et plus confluente que les précédentes ;

pour la première fois la malade constate l'anesthésie de cer-

tains territoires cutanés. Le G janvier1896,1V1 ? 5 ? souffrant

de douleurs avec sensations d'engourdissement dans les

pieds et les mains, entre à l'hôpital d'Hanoi où l'on porte le

diagnostic de lèpre anesthésique. La' thermoanesthésie était

dès ce moment assez accentuée pour que la malade ait pu

se faire, sans le sentir, des brûlures assez profondes. Enfin

une cinquième grossesse terminée par un accouchement

normal, le 28 décembre 1896, est suivie d'une nouvelle

poussée des symptômes éruptifs, douloureux, anesthésiques

et aussi' de l'amyotrophie. ,

La situation ne faisait donc que s'aggraver, aussi la malade

se décida-t-elle à revenir en Europe ; le 18 juin elle entrait

à la Salpêtrière. Voici ce que montrait alors l'examen.

Ce qui frappait tout d'abord c'était l'état d'amaigrissement

surtout prononcé au niveau des deux mains. Celles-ci, en un

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. l'il 1

mot, présentaient tous les caractères classiques de la main

simienne avec forme en griffe, disposition des cinq doigts

sur le même plan, disparition des éminences thénar et hypo-

thénar et du creux de la main, gouttières séparant les méta-

carpiens à la face dorsale. Aux avant-bras, l'atrophie portait t

de façon prépondérante sur les extenseurs, en sorte que la

face dorsale de ces segments de membres était tout à fait

plate. Aux membres inférieurs, elle intéressait surtout les

muscles des pieds et les muscles antéro-externes des jambes,

principalement du côté droit, tandis que les mollets et les

muscles des cuisses étaient à peu près respectés. A la face,

l'amaigrissement, peu visible à l'inspection, se traduisait

néanmoins par la difficulté qu'éprouvair la malade à rappro-

cher les sourcils et à fermer l'oeil gauche : celui-ci présentait

en outre de l'épiphora.

Je note en passant qu'il n'existait aucune déformation de

la colonne vertébrale. Quant aux phénomènes parétiques,

ceux-ci rigoureusemt adéquates à l'atrophie musculaire se

manifestaient par une diminution notable de la force mus-

culaire dans les mouvements de flexion des pieds sur les

jambes, d'extension des mains et des doigts, par l'abolition

des mouvements d'opposition, d'adduction et d'abduction

des doigts, d'extension des orteils.

Dans la marche, on remarquait une certaine instabilité,

en même temps que les pieds ne portaient sur le sol que par

le bord externe et la pointe, comme il arrive dans le

steppage.

L'examen des réactions électriques, corroborant les résul-

tats de la clinique, accusait une diminution de l'excitabilité

l'aradique et galvanique dans le domaine du nerf cubital,

surtout au niveau du coude, et de la réaction partielle de

dégénérescence dans les muscles des éminences thénar et

hypothénar, dans les muscles de la région profonde du

mollet, ainsi que dans les muscles innervés par les sciatiques

poplités externes. '

Les réflexes rotuliens présentaient une légère exagération,

variable d'ailleurs suivant les moments, mais on ne trouvait

pas trace de trépidation spinale.

L'inspection de la peau révélait encore la présence de plu-

sieurs symptômes intéressants. C'étaient : à la face antéro-

interne du bras droit, une large macule brunâtre que nous

ll . CLINIQUE NERVEUSE. ,

avons vue depuis desquamer et pâlir jusqu'à présenter la

teinte café au lait très clair - je remarque qu'il n'existait

à ce niveau aucun trouble de sensibilité -; à la face posté-

rieure du coude droit une cicatrice blanchâtre, consécutive

à l'ouverture d'un abcès et datant de cinq à six ans ; à la face

Fis. 20.

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 113

dorsale du pied gauche un oedème dur et élastique ; au niveau

des deux jambes la peau avait perdu sa souplesse et se montrait

l'eutrée etsèclie, surtout si on la comparait à celle des membres

supérieurs ; enfin, aux pieds, on remarquait de nombreuses

cicatrices de brûlures, surtout au voisinage des malléoles.

Archives, 2- série, t. XVIII. 8

. li. '1

114 CLINIQUE NERVEUSE. i

L'étude de la sensibilité n'était pas moins instructive : les

troubles constatés intéressaient* les trois modes de la sensi-

bilité mais de façon inégale; les schémas que je vous présente

vous permettront de vous rendre aisément compte de leur

répartition, et vous verrez tout à l'heure quelle est l'impor-

tance de ces troubles.

Fig, 22,

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 115'

J'ajoute enfin, 'Messieurs, que la santé générale était

bonne, que le sommeil et l'appétit étaient normaux et qu'à

part les symptômes spéciaux que je viens d'énumérer, '

l'examen des divers appareils ne présentait rien de parlipu-

lier signaler.. ; i 1 .. ,

L'ir. ? *

I LG CLINIQUE NERVEUSE.

Tel était l'état de la malade lors de son entrée à l'hôpital,

cet état s'est peu modifié pendant son séjour. Je dois pour-

tant mentionner qu'après deux jours d'administration de

liqueur de Fowler nous avons assisté à l'apparition, au niveau

des jambes et des cuisses, d'une éruption formée d'éléments

isolés d'un rouge vineux; celle-ci a persisté pendant une

F ig. 21. i.

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 11-7

quinzaine de jours, puis a disparu progressivement après

desquamation. A la même époque, le quatrième orteil du

pied gauche est devenu rouge, oedémateux, puis une bulle

5 est formée, remplie d'une sérosité claire, enfin la bulle

s'est ouverte laissant à sa suite une ulcération cratériforme,

1'ér. 25.

lui[8 m CLINIQUE NERVEUSE., 1

laquelle a persisté. Ces symptômes ont été les seuls qui

.soient venus modifier l'état clinique de notre malade.

Si vous comparez entre elles les deux observations que je

viens de rapporter, vous voyez aisément, Messieurs, que de

nombreuses analogies permettent de les rapprocher l'une de

l'autre. Si les localisations sont différentes, nous retrouvons

dans les deux cas le même début insidieux, la même évolu-

tion lente avec tendance à l'extension pour les symptômes

locaux et avec retentissement sur l'état général : quant aux

symptômes cliniques eux-mêmes, ils sont remarquablement

identiques chez le malade que je viens d'examiner sous vos

yeux et chez la femme dont je vous ai résumé l'histoire

Chez l'un comme chez l'autre, ils consistent essentiellement

en troubles moteurs paralytiques débutant par la périphérie

des membres pour remonter peu à peu vers leur racine et

réalisant au niveau des membres supérieurs l'aspect' clas-

sique de la main simienne, en une atrophie musculaire

superposable à la paralysie, en une abolition des réflexes

tendineux en rapport avec l'amyotrophie, dans l'existence

des troubles sensitifs à la fois subjectifs et objectifs, ces

derniers intéressant inégalement les divers modes, de façon

à reproduire une véritable dissociation de la sensibilité, en

troubles trophiques ponvant aller jusqu'à l'ulcération, enfin

en une altération spéciale des nerfs périphériques modifiés

dans leur volume et leur consistance. C'est que ces deux cas

relèvent en réalité d'une seule et même affection, dont je veux

devant vous déterminer la nature ; mais la solution de cette

question ne laisse pas que d'être délicate et nous devrons

analyser de près chacun des éléments que nous fournit la

clinique afin d'y pouvoir répondre de façon affirmative :

aussi dois-je consacrer quelques développements à l'examen

de ce problème du diagnostic de l'affection causale en pré-

sence de laquelle nous nous trouvons.. -

Un des symptômes les plus frappants, dès l'abord, chez nos

deux malades est certainement l'atrophie musculaire, si

accentuée dans les deux cas, et qui mérite de retenir notre

DEUX CAS. DE LÈPRE NERVEUSE. 119

attention. Chez notre femme, elle occupait les membres

supérieurs et les inférieurs, chez cet homme, elle ne porte que

sur le membre supérieur gauche, mais chez l'un comme chez

l'autre, elle donne à la main un aspect caractéristique et que

vous n'ignorez certainement pas, c'est la main en griffe, et

cette apparence évoque immédiatement dans l'esprit l'idée

d'atrophie musculaire myélopathique, d'atrophie du type

Aran-Duchenne. Je place à dessein, sous vos yeux, cette autre

malade atteinte en effet de cette dernière affection : chez

elle comme chez les deux précédents nous avons les mêmes

caractères cliniques objectifs, les mêmes troubles des réac-

tions électriques : vous retrouvez donc ici et là des analogies

frappantes, mais : ce : ne sont pourtant ¡que des analogies et ce

serait une erreur grossière que de porter dans les cas qui

nous occupent le diagnostic d'atrophie musculaire du type

Arau-Duchenne.

Tout d'abord, l'atrophie musculaire myélopathique est

symétrique,, tandis que chez cet homme la main droite est

indemne, mais surtout nous avons relevé chez nos malades

des troubles très marqués de la sensibilité : anesthésies,

hypoesthésies aux divers modes, élancements douloureux,

cuissons, c'est-à-dire autant de phénomènes qui sont étran-

gens à la symptomatologie de l'atrophie musculaire progres-

sive type. Laissez-moi, Messieurs, vous rappeler à ce propos

un passage de mes leçons de 1887 sur les atrophies muscu-

laires. « Je dois ajouter, disais-je, que les premières des-

criptions de l'atrophie musculaires, dans lesquelles on notait

expressément que les troubles de la sensibilité faisaient

défaut, répondent à la réalité des choses. Si, plus tard,

Duchenne (de Boulogne) et d'autres auteurs ont modifié

leur opinion à cet égard, c'est qu'ils ont observé des cas qui

n'étaient plus l'atrophie musculaire type. Je vous ferai

remarquer d'ailleurs : 1° qu'à cette époque les formes fami-

liales n'étaient point encore décrites ; 2° que les caractères

cliniques de l'hystérie, surtout .pour ce qui concerne les

anesthésies, n'étaient pas étudiés; 3° qu'enfin on ne connais-

sait pas la syringomyélie. » Or, toutes les études ultérieures

ont amplement démontré le bien fondé de cette manièire de

voir. Du moment que des troubles de sensibilité un peu

importants sont superposés à l'atrophie musculaire, ce n'est

plus en présence de la maladie type de Duchenne, que vous

120 CLINIQUE NERVEUSE.

vous trouvez. Ici nous n'avons pas à songer à l'adjonction

d'anesthésie '^hystérique, car les anesthésies que nous ren-

controns n'en ont pas les caractères, et nos malades ne pré-

' sentent aucun stigmate d'hystérie. Le diagnostic d'atrophie

musculaire par poliomyélite est donc à rejeter.

Mais il est une autre affection qui se rapproche assez du

l'atrophie musculaire progressive pour que, jusqu'en 1882.

tout au moins sur le terrain clinique, on l'ait confondue avec

cette dernière : je veux parler de la syringomyélie. Vous

n'ignorez pas, Messieurs, de combien d'études cette maladie

a fait l'objet dans ces dernières années et combien variés

sont aujourd'hui les types cliniques décrits par les auteurs.

Il en est un que je veux d'abord retenir, la syringomyélie à

forme d'atrophie musculaire : ici la symptomatologie se

caractérise essentiellement par une atrophie débutant par

les petits muscles des mains et s'accompagnant de troubles

profonds de la sensibilité; or ces signes sont bien ceux que

nous avons rencontrés chez nos malades et la question se

pose par conséquent de savoir si nous n'avons pas affaire à

la syringomyélie.

A vrai dire, la présence et les caractères de l'atrophie mus-

culaire, les troubles des réactions électriques, l'existence de

troubles de la sensibilité objective, leur nature et leurs loca-

lisations sont autant d'éléments qui pourraient au premier

abord faire admettre le diagnostic de syringomyélie : vous

n'ignorez pas en effet que si naguère encore il était classi-

que de croire à la disposition segmentaire des anesthésies

syringomyéliques, des examens ultérieurs ont bien démon-

tré que ces troubles affectent en réalité une répartition radi-

culaire ; d'autre part, bien que chez nos deux malades la

sensibilité tactile soit nettement diminuée, il n'existe pas

moins une véritable dissociation telle que nous en observons

dans bien des cas de cavités médullaires. Mais un pareil dia-

gnostic ne saurait être maintenu si on veut tenir compte de<

autres symptômes que je vous ai mentionnés : en cas de

syringomyélie en effet la symétrie de l'atrophie musculaire

et des anesthésies est de règle, tandis que chez notre homme

la main et l'avant-bras droits sont complètement respectés :

de plus vous avez pu constater chez les deux malades l'ab-

sence de toute déviation rachidienne, c'est-à-dire d'un signe

que nous considérons à bon droit comme constant en cas

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 121

de syringomyélie; la déformation des mains n'est pas non

plus tout à fait celle que réalise cette dernière affection; du

côté des membres inférieurs, nous n'avons pas constaté

d'exagération des réflexes tendineux, pas plus qu'aucun signe

despasmodicité : bien au contraire, je vous ai, dans la seconde

observation, signalé un steppage en rapport avec la paralysie

des muscles antéro-externes des jambes; j'ajoute que quand

la paralysie faciale s'observe au cours de la syringomyélie

elle respecte le facial supérieur; enfin, Messieurs, je vous

rappellerai l'hypertrophie considérable que nous avons rele-

vée en palpant les nerfs périphériques et qui présente au

point de vue du diagnostic une importance essentielle.

Pour toutes ces raisons nous ne pouvons donc pas nous

arrêtera l'idée de syringomyélie à forme atrophique, mi

il nous reste encore à compter avec les formes anormales;

cette même maladie et ceci m'amène à vous parler de

affection qui a donné lieu à de longues discussions, je va

dire la maladie de Morvan.

Jen'insisterai pas sur la description de l'affection décri le po

la première fois par Morvan sous le nom de paréso-analgésie d

extrémités supérieures. L'association clinique de la paralys

des analgésies et des troubles trophiques pouvant aller jus-

qu'à la chute des phalanges, se montre dans nombre de cas

trop nette pour prêter à la moindre discussion, elle est évi-

dente chez les malades qui font l'objet de cette leçon et nous

pourrions par conséquent prononcer le nom de maladie de

Morvan; mais la question se complique si l'on veut aller

plus loin, préciser la nature et la pathogénie de semblables

symptômes et notamment déterminer leurs rapports avec la

syringomyélie et avec la lèpre. '

Il n'est pas douteux qu'un certain nombre de syringomyé-

lies avérées peuvent réaliser du côté des membres supérieurs

un tableau clinique rappelant de tous points la maladie de

Morvan, aussi quelques auteurs, notamment MM. Joffroy et

Achard ont-ils voulu identifier les deux affections, et ratta-

cher la maladie de Morvan à la syringomyélie, on a même

décrit un type de syringomyélie à forme de maladie de Mor-

van. D'autre part, un médecin fort distingué, M. Zambaco a

défendu celte idée que les malades qui, en Bretagne, avaient

servi à la description de Morvan étaient en réalité des

lépreux, la lèpre affectant dans cette région une forme lar-

122 CLINIQUE NERVEUSE.

vée spéciale, mais demeurant par sa nature et son agent

pathogène identique à l'affection que l'on désigne sous ce

même nom dans d'autres pays. Le même auteur a été plus

loin encore, contestant l'existence de la syringomyélie en

tant que maladie autonome et voulant ne voir dans les cas

de cavités médullaires que la destruction de la substance

grise envahie parle bacille lépreux. Cette dernière opinion,

à vrai dire, n'a pas été généralement admise et les cas rares

dans lesquels le bacille lépreux a été trouvé dans la cavité

syringomyélique sont considérés par la majorité des neuro-

logistes comme de simples et exceptionnelles coïncidences

Après toutes ces discussions, que reste-il alors de la mala-

die de Morvan ? Pour moi, Messieurs, mon opinion aujour-

d'hui bien arrêtée et basée sur l'analyse de nombreuses

observations est qu'il convient de considérer la maladie de

Morvan comme un syndrome pouvant ressortir à des mala-

dies différentes : or je vous ai dit tout à l'heure pourquoi

chez nos malades je repousse l'idée de syringomyélie.

Parmi les symptômes que nous a révélés l'examen de ces

malades il en est un qui certainement a dû frapper votre

attention, à savoir l'hypertrophie des nerfs périphériques; or

nous connaissons une forme de polynévrite qui réalise une

semblable augmentation du volume des troncs nerveux :

devons-nous donc conclure dans le cas présent à l'existence

de la névrite interstitielle hypertrophique ? Je place sous

vos yeux une de nos malades du service atteinte de cette der-

nière affection et que je vous ai présentée dans une de mes

leçons antérieures. Chez elle aussi nous avons des paraly-

sies, des atrophies musculaires, des troubles sensitifs, l'hy-

pertrophie des cordons nerveux et par ces caractères elle se

rapproche des malades qui nous occupent, mais bien des

différences aussi l'en séparent : à la paralysie se joint l'in-

coordination motrice, nous avons des troubles oculaires et

notamment un ptosis accentué; du côté de la colonne verté-

brale nous rencontrons une cypho-scoliose extrêmement

accusée, de plus, cette affection est une maladie familiale :

voilà donc autant de raisons d'éliminer, dans le cas présent,

le diagnostic de névrite interstitielle hypertrophique.

Pourrait-on enfin admettre l'existence d'une névrite toxi-

que ? A cette question je n'hésite pas à répondre par la néga-

tive : la polynévrite saturnine seule présenterait des locali-

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. li3

sations rappelant celles que je vous ai indiquées, mais déjà

à ce point de vue nous constatons des différences; de plus les

polynévrites ne réaliseraient pas une semblable dissociation

de la sensibilité ; enfin nous ne relevons dans les antécédents

de nos malades aucune cause d'intoxication par le plomb

pas plus que par l'alcool.

En présence de quelle affection nous trouvons-nous donc ?

Vous ferez de vous-même, Messieurs, maintenant facilement

la réponse si vous vous souvenez de ce que je vous ai dit à

propos des antécédents de ces malades, à propos aussi de la

signification du syndrome de Morvan. En face d'un tableau

clinique caractérisé par des paralysies-et des atrophies mus-

culaires ayant débuté au niveau des membres par les extré-

mités, par dés troubles de la sensibilité objective intéressant

inégalement les trois modes, et à disposition périphérique,

par des douleurs, par des éruptions et des troubles trophi-

ques du côté de la peau, enfin par l'hypertrophie des troncs

nerveux périphériques, le tout survenant chez un sujet ayant

séjourné dans un pays où la lèpre est endémique , vous

avez assez d'éléments pour affirmer sans crainte d'erreur

que vous avez affaire à un cas de lèpre. '

Mais ce n'est pas assez que d'avoir déterminé la nature de

l'affection en cause dans le cas présent et le diagnostic serait

incomplet si nous ne cherchions à préciser le siège, l'origine

et les conséquences des altérations organiques qui tiennent

sous leur dépendance les divers symptômes que nous a

présentés ce malade. Cette étude me fournira l'occasion

d'insister sur certains points de pathogénie, d'anatomie et

'le physiologie pathologique lesquels ont été élucidés dans

ces dernières années et d'où l'on a pu tirer des déductions

pratiques intéressantes au point de vue de la prophylaxie de

la lèpre.

L'histoire de la lèpre, Messieurs, est fort ancienne, puisque

déjà dans les écrits de Celse on en trouve des descriptions non

douteuses. Importée de l'Inde par l'Egypte en Europe, elle se

répandit pendant les premiers siècles de l'ère chrétienne

dans les diverses parties de l'Empire romain. Plus tard, elle

devint assez commune pour que Charlemagne dût édicter des

lois relatives au mariage des lépreux. Mais c'est sans contre-

124 CLINIQUE NERVEUSE.

dit au moyen âge, à l'époque des croisades, qu'elle présenta

en Europe son maximum de développement. A cette époque

l'idée de contagiosité de la maladie était déjà admise sans

conteste et maints édits du temps concernent l'organisa-

tion des léproseries ; celles-ci représsntaient de véritables

cités : qu'il me suffise de vous rappeler qu'on ne comptait

pas moins de 2.000 lépreux en France et de 19.000 en

Europe. Depuis lors et grâce sans doute à ce sévère isole-

ment, la fréquence de la maladie décrut de façon manifeste,

et dans les siècles suivants on n'en signale plus que des cas

isolés. Pourtant, on s'est demandé si cette disparition n'était

pas plus apparente que réelle, et si la lèpre, au moins dans

ses formes larvées, n'était pas demeurée endémique en cer-

taines régions. Cette opinion, je vous l'ai dit, a été soutenue

notamment par M. Zambaco qui, pour ne parler que de la

France, a affirmé l'existence de certains foyers permanents.

entre autres en Bretagne et aussi en Provence.

Quoi qu'il convienne de penser de cette opinion, l'existence

de la lèpre à l'état endémique dans nombre de régions de

l'Afrique, de l'Asie et de l'Amérique est bien démontrée, je

vous citerai notamment l'Inde, l'Indo-Chine, le Tonkin, l'An-

nam, la Chine, le Japon, la côte ouest de l'Afrique, le

Mexique, la Nouvelle-Calédonie; or, depuis que les relations

avec ces divers pays sont devenues plus fréquentes, il n'est

pas douteux que la lèpre a présenté dans les régions euro-

péennes une recrudescence manifeste : à Paris nous en

observons régulièrement tous les ans quelques cas dans les

hôpitaux spéciaux Aussi l'étude de la maladie a-t-elle été

reprise simultanément par les médecins des divers états

européens justement désireux de prévenir le retour possible

d'un semblable fléau. .

Il est aujourd'hui bien démontré que la lèpre doit être con-

sidérée comme une maladie à évolution lente mais paroxys-

tique, causée par la pénétration dans l'organisme d'un agent

figuré spécifique, le bacille de Hansen. Au point de vue cli-

nique on distingue deux formes, la forme tégumentaire ou

tuberculeuse et la forme nerveuse, mais il convient encore

de compter avec une forme mixte, laquelle est en réalité la

plus fréquente, c'est celle aussi que je viens de mettre sous

vos yeux.

La nature et la répartition des troubles trophiques que

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. t25

l'on rencontre chez les'lépreux nous sont expliquées par les

localisations du bacille. Celui-ci a-t-il limité son invasion à

la peau, déjà l'on peut observer les lésions dermatologiques

les plus variées, la desquamation, l'ichtyose avec état cyano-

tique, la pigmentation dont la- valeur diagnostique est bien

connue, les troubles de la sécrétion sudorale, l'hypersécré-

tion sébacée à laquelle les anciens médecins savaient déjà

reconnaître la plus grande importance, enfin les altérations

du système pileux, la chute des sourcils par exemple,

laquelle ne fait pas défaut chez notre malade. Dans ces cas,

de même que dans la rhinite ou l'orchite lépreuse, les lésions

sont directement imputables au développement local du

bacille lépreux amenant une réaction de voisinage et trou-

blant en même temps la circulation et la nutrition des tissus

intéressés. Mais il est un autre groupe de troubles trophiques

qui ne relèvent qu'indirectement du bacille de la lèpre et ne

s'expliquent que par les troubles de l'innervation en rapport

avec l'invasion des nerfs périphériques : c'est alors que l'on

assiste à l'apparition de maux perforants, de gangrène sèche

avec résorption des phalanges, de lésions articulaires et

d'atrophies musculaires. Faut-il ajouter que les deux ordres

de troubles trophiques s'associent fréquemment entre eux,

réalisant des déformations et des mutilations variées ; je

vous citerai notamment celles qui portent sur la face et qui

peuvent constituer un masque assez caractéristique pour

permettre de faire le diagnostic à distance.

Quant aux troubles trophiques qui ont été observés chez

les descendants des lépreux, parlois ils sont dus à une con-

tagion directe de la maladie contractée plus ou moins long-

temps après la naissance ; souvent aussi on ne peut les inler- ·

préter que comme des tares dégénératives causées par les

toxines microbiennes ayant influencé ou les générateurs ou

le produit lui-même pendant la gestation, mais rien jusqu'ici

ne nous autorise à admettre la contagion de l'affection elle-

même durant la vie intra-utérine.

Comment maintenant se fait l'apport du bacille chez les

sujets qui prennent la maladie ? Tout fait penser que les

bacilles sont répandus au dehors par les plaies ouvertes et

suintantes que portent les malades infectés, de là ils seraient

transportés accidentellement sur l'épiderme des sujets sains

et pénétreraient dans l'épaisseur de la peau à la laveur des

126 CLINIQUE NERVEUSE. ,\

moindres érosions : je vous signale aussi l'opinion de

M. Sabrazès, lequel a attribué aux moustiques un rôle

important dans la contagion de la lèpre. '

L'agent spécifique de la lèpre est représenté par un ba-

cille long de 5 à 6 ? découvert par Hansen en 1871, et que

ses caractères morphologiques rapprochent du bacille de la

tuberculose. Comme ce dernier, il est entouré d'une couche

de matière grasse qui lui constitue une enveloppe résistante;

ses extrémités sont un peu plus effilées que celles du bacille

de Koch ; il se colore uniformément quand il' est jeune, mais

perd son homogénéité en vieillissant ; une matièremuqueuse,

la glée, réunit un grand nombre de bacilles en une' masse

zoogléique ; les réactions microchimiques sont les mêmes

que celles du bacille de Koch. Toutefois, il diffère de celui-ci

par son extrême abondance, parce qu'aucun microbiologiste

n'a encore réussi à l'inoculer ni aie cultiver, enfin parce que

nous ignorons son habitat en dehors de l'organisme.

Entraîné par le courant sanguin, le bacille qui a pénétré

dans la peau s'arrête au niveau de l'espace lymphatique et y

colonise ; la défense des tissus environnants se traduit par

une prolifération des cellules fixes et un apport de cellules

migratrices, et c'est le groupement de .ces divers éléments

qui constitue le léprome ou nodule lépreux. Ici encore l'ana-

logie avec le tubercule s'impose : au microscope, vous ren-

contrerez d'abord des lymphocytes et des leucocytes poly ou

surtout mononucléaires, mais l'élément caractéristique est

représenté par la cellule lépreuse ou lepraze'llen : - celle-ci,

quatre à cinq fois plus grande que les leucocytes ordinaires,

possède un ou plusieurs noyaux et un protoplasma creusé

de vacuoles dans l'intervalle desquelles apparaissent de véri-

tables amas bacillaires. Les cellules géantes sont remar-

quables par leur volume. Du côté de la paroi vasculaire,

vous ne constaterez que peu de lésions, mais tout autour des

vaisseaux cutanés existe un véritable manchon périvasculaire

correspondant à une des macules de la peau ; enfin, quand les

lésions sont plus confluentes, elles donnent naissance au

tubercule lépreux.

Je viens de/ vous dire, Messieurs, ce qu'est le bacille de

lIaris'en et quelles réactions histologiques 'sa ' présence pro-

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 127

voque dans les tissus en général et en particulier dans la

peau, laquelle marque le premier stade de l'invasion. Je

veux vous montrer maintenant comment se fait l'infection

du système nerveux. 1 -

Les travaux de tous les auteurs qui ont étudié l'anatomie

pathologique de la lèpre ont démontré que lalésionnerveuse

constante est celle d'une névrite périphérique, laquelle tient

sous sa dépendance la plupart des troubles trophiques mus-

culaires. cutanés, osseux même, ainsi que les troubles sen-

sitifs ; mais par quelle voie se fait l'arrivée du bacille dans

l'épaisseur des cordons nerveux ? On peut bien admettre,

pour certains cas, l'arrivée du bacille par embolies, suivant

les vasa nervorum, mais le plus souvent il s'agit d'une véri-

table névrite ascendante reconnaissant comme point de

départ une macule cutanée et suivant les filets nerveux eux-

mêmes : ainsi se crée une névrite bactérienne. On connaît, à

vrai dire, d'autres névrites bactériennes; llomen en a déter-

miné expérimentalement au moyen du streptocoque et du

pneumocoque ; cliniquement, on a vu chez l'homme l'infec-

tion gagner les nerfs par contact immédiat à la suite de

phlegmons par exemple, mais la névrite lépreuse reste

néanmoins le type le plus parfait de la névrite bactérienne,

les autres névrites étant le plus souvent des névrites

toxiques.

Non seulement par sa nature, mais aussi par son histolo-

gie, la lésion sera bien réellement lépreuse, je veux dire qu'on

y retrouve les réactions histologiques du léprome avec la

cellule lépreuse (leprazellen), la cellule géante et les amas

énormes de bacilles caractéristiques. J'ajoute qu'il s'agit

d'une névrite essentiellement interstitielle. Je vous rappelle

seulement la disposition normale du tissu conjonctif au

niveau des nerfs, l'épinèvre qui entoure le cordon tout entier,

le périnèvre ou tissu périfasciculaire qui enveloppe les fais-

ceaux de fibres et dans lequel cheminent les vaisseaux, enfin

l'endonèvre ou tissu intrafasciculaire pénétrant entre les

fibres nerveuses. Eh bien ! la lésion lépreuse se rencontre en

deux endroits à la fois, dans le tissu périfasciculaire et dans

le tissu intrafasciculaire, c'est vous dire qu'en ce dernier

point elle arrive au voisinage immédiat des tubes nerveux.

On comprend bien alors les conséquences qu'entraînent de

semblables lésions au point de vue de la structure et. du

128 CLINIQUE NERVEUSE.

fonctionnement des tubes nerveux. Agissant à la fois par

compression et aussi par l'action toxique locale des subs-

tances secrétées parle bacille, elles détermineront, selon l'in-

tensité et la rapidité du processus, soit une atrophie de la

fibre nerveuse qui devient plus grêle dans ses éléments, soit

une vraie dégénérescence wallérienne d'un nombre plus ou

moins grand de cylindraxes.

La question se pose enfin, Messieurs, de savoir jusqu'où

peut remonter l'infection spécifique du système nerveux :

peut-elle dépasser les nerfs périphériques et gagner les

centres médullaires ? A cette question plusieurs auteurs ont

répondu affirmativement : voyons sur quels arguments se

fonde cette opinion. Tout d'abord l'idée d'infection médul-

laire consécutive à une névrite périphérique n'est pas inad-

missible : celle-ci aurait été réalisée par Homen avec le pneu-

mocoque. Pour la lèpre, en particulier, certains médecins,

parmi lesquels Babes, Marinesco ont trouvé des bacilles dans

les cellules motrices et dans les cellules sensitives. De plus,

Looft, MM. Jeanselme, Marie ont décrit chez des lépreux une

sclérose des cordons postérieurs dans la région dite endo-

gène. Mais à de pareils arguments on peut faire diverses

objections. Ainsi la présence de bacilles au niveau de la

moelle ne prouve pas leur origine névritique, on peut penser

qu'ils y ont été apportés par la voie sanguine : c'est même

pourquoi les faits de Souza Martins, Camara, Pertona et

Bettencourt, dans lesquels ces auteurs ont rencontré des ba-

cilles de la lèpre dans des moelles de syringomyéliques sont

généralement considérés comme insuffisants pour permettre

d'identifier les deux affections. En outre, les lésions de sclé-

rose décrites au niveau des cordons postérieurs sont trop

analogues à celles que l'on observe dans tous les états ca-

chectiques, ainsi que mon collègue Déjerine l'a fait remar-

quer. Enfin le tissu nerveux ne se refuse pas à faire des

lésions histologiquement spécifiques le tubercule, la

gomme en sont des exemples -- or jamais dans la moelle on

n'a encore rencontré le léprome.

Si pourtant on admet l'infection médullaire consécutive à

la névrite il reste à se demander comment se propage cette

infection. On peut penser d'abord qu'elle gagne l'espace

sous-arachnoïdien et ensuite la moelle, mais mes élèves,

MM. Sicard et Cestan, ont repris les expériences d'infections

DEUX CAS DE LÈPRE NERVEUSE. 129

expérimentales de. poudres inertes, soit dans les espaces

péri-médullaires, soit dans les espaces des' nerfs périphé-

riques,etces expériences semblent démontrer l'indépendance,

à l'état normal, de ces deux groupes d'espaces ; toutefois on

ne saurait assimiler l'envahissement microbien à une infec-

tion de poudres inertes car un bacille peut être capable de

détruire une barrière naturelle qui aurait arrêté les poudres

inertes. On peut admettre aussi la possibilité d'une autre

voie de communication, l'infection gagnant directement la

moelle en épargnant l'espace sous-arachnoïdien. Nous savons

que, dans le tétanos, la toxine remonte de la plaie cutanée

vers les centres nerveux en suivant le nerf et très vaisembla-

blement en remontant dans la gaine de Schwann ; or, dans

la lèpre, on a trouvé des bacilles dans la gaîne de Schwann

et dans les cellules des cornes antérieures ; ne peut-on dès

lors émettre l'hypothèse qu'ils peuvent suivre cette voie que

prend la toxine tétanique. De cette discussion, il faut donc

conclure qu'il convient encore d'attendre et que, tant que

nous ne saurons pas cultiver le bacille de Hansen, tant que

nous ne disposerons pas d'un animal d'expérience, la solu-

tion de ce problème demeurera douteuse. ,

J'en ai fini, Messieurs, avec les considérations relatives à

l'anatomie et à la physiologie pathologiques de la lèpre et

je veux, en terminant, revenir au malade qui fait l'objet de

celte leçon. Connaissant bien maintenant l'affection dont il

est atteint, quel pronostic convient-il de porter dans le cas

présent ? D'une façon générale, vous n'ignorez pas combien

est grave le pronostic de la lèpre. Malgré la lente évolution

de la maladie, bien que celle-ci puisse présenter entre les

poussées paroxystiques de longues périodes d'accalmie, le

plus souvent les lésions et leurs symptômes ont une tendance

redoutable à l'extension et à l'aggravation : aux anesthésies

succèdent les troubles trophiques, les paralysies, les ulcé-

rations et mutilations diverses ; enfin, après de longues

années- la forme nerveuse peut durer vingt, trente et

même quarante ans la maladie aboutit alors à la cachexie

et à la mort.

Heureusement cette évolution progressive n'est pas fatale,

et je vous ai dit l'amélioration importante et régulière dont t

Archives, 2' série, t. xV111. 9

130 CLINIQUE MENTALE.

a bénéficié notre malade dans ces derniers mois. J'ajoute

que cette amélioration, nous sommes en droit d'en attribuer

le mérite aux divers moyens thérapeutiques employés :

l'huile de Chaülmoogra, l'ichtyol, le salicylate de soude ont

donné dans plusieurs cas des succès; ici le collargol a rendu

les plus grands services : nous pouvons espérer enrayer

l'évolution de la maladie chez cet homme et limiter beaucoup

le reliquat des symptômes définifs.

C'est vous dire qu'il convient de lutter avec énergie, puisque

nous disposons de moyens curatifs efficaces, en même temps

que par une prophylaxie sévère nous pouvons prétendre

empêcher la diffusion d'une maladie contagieuse et par

conséquent évitable.

CLINIQUE MENTALE.

Médiumnité délirante 1 ;

r

PAR R

PAUL SOLLIEK, FI(ARÇÇOIS BOISSIER,

Médecin du Sanatorium de Bon- Médecin adjoint du Sanatorium

logne-sur-Seine. de Boulogne-sur-Seine.

Distribution des diverses formes d'automatisme verbal. Rithme ci

versification. - Telles sont les diverses modalités des communica-

tions verbales de Cam... avec les esprits. Elles se succèdent les

unes aux autres, certaines se produisant plus spécialement selon

les états d'esprit ou les états de calme et d'éréthisme nerveux par

lesquels passe la malade. Elles peuvent se mêler et te combiner

les unes aux autres, selon l'identité de l'esprit qui parle et selon Il

les circonstances. Quand plusieurs esprits se suivent, ou quand

un esprit interrompt le discours d'un autre, les derniers usent

généralement d'un mode de communication différent de celui

employé par le premier. Deus, par exemple, appuyant une com-

munication typtologique de Nicolas II emploiera la variété psycho-

motrice verbale. Un même esprit pourra s'interrompre lui-même

sous une forme différente de celle par laquelle il a commence.

1 Archives de ifeceroluyie. Il'' 102.

MEDIUlIINITIi : DÉLIRANTE. 131

Deus encore, faisant une révélation psychographique mécanique

sur un sujet d'ordre général s'interrompra lui-même pour

adresser directement à Cam... une observation psychomotrice

verbale pour un fait d'ordre prive selon cette dernière variété.

Pendant l'amélioration progressive des symptômes, il arrêtera

ainsi lui-même ses propres discours typtologiques mentaux par

des injonctions psychomotrices.

Plusieurs interlocuteurs peuvent pourtant se succéder sans tran-

sition selon le même processus; Jésus-Christ y prenant part un

jour et compatissant affectueusement aux peines de Cam... lui

parle en hallucinations psychiques et Dieu le père prend immé-

diatement après lui la parole de la même manière pour s'excuser

d'avoir 11 la laisser souffrir ainsi. Enfin, la localisation de la voix

varie selon le sentiment qu'elle exprime : « Ces voix, dit la ma-

lade, sont comme une émanation intérieure; elles parlent dans

ma tète quand c'est mon esprit qui travaille, et dans ma poitrine

quand c'est mon coeur. »

L'automatisme verbal peut encore, chez Cam..., sans changer

de modalité physiologique, cesser d'avoir pour elle une signifi-

cation de nature délirante. Pendant les grands malaises paroxys-

tiques, il lui arrive, en effet, d'être intoxiquée par un nom qui se

répète à satiété dans sa tête irrésistiblement. C'est comme un

appel mental qui l'obsède et se fait malgré elle vers quelqu'un

qu'elle désire ou dont elle attend le secours. Une des premières

visites de sa fille l'a laissée très énervée; le nom de cette

enfant s'impose à elle la nuit suivante pendant des heures :

n Estelle, Estelle, Estelle, Estelle... ! » et ce nom se scande vio-

lemment, en syllabes appuyées rythmiquement comme un batte-

ment d'horloge.

Un autre jour, dans des circonstances analogues, c'est le nom

de son beau-frère : « Hoffmann, Hoffmann, Hoffmann ! ... » ou

celui de l'un de nous, ou même celui de son protecteur imagi-

naire : « Deus, Deus, Deus, Deus ! ... » Elle n'attribue celte obses-

sion verbale à aucune personnalité étrangère, elle la sent se faire

dans sa tête et est forcée de la laisser aller, aucun effort de

volonté ne pouvant l'arrêter.

A partir du mois de janvier, d'ailleurs, le rythme et la cadence

qui parfois déjà ont caractérisé certaines de ses auditions,

deviennent une des qualités très fréquentes de ses créations subli-

minales. Assez souvent, nous avons noté dans les révélations

recueillies antérieurement des mots associés par assonnance

comme dans « idéal, Deus, ideus, idée ». A partir du mois de

janvier, les esprits s'essaient à parler en vers, et Gain... elle-même

dans ses écrits conscients est de plus en plus poussée à versifier.

Elle cherche à exprimer en vers tous les sentiments et toules les

idées que naguère elle condensait en style sentencieux pour com-

/'

132 CLINIQUE MENTALE.

poser son recueil de pensées. Ce manuscrit est délaissé pour la

poésie. Son vers est médiocre, comme la plupart des vers spi-

rites. La correction de la mesure n'y est qu'apparente et ne

souffre pas d'examen. Le vers, en effet, vient en quelque sorte

tout seul, sans aucun effort, la rime arrive automatiquement.

Mais l'accent parisien de la malade, avec ses élisions et ses liai-

sons supprimées, lui fait constamment ajouter ou supprimer

un ou plusieurs pieds par alexandrin. En se relisant elle-même,

la cadence brute paraissant juste, elle ne corrige rien. D'autres

malades la secondent pour les corrections. Cette versification

intensive favorise la marche de son automatisme, aussi cherchons-

nous à l'enrayer; mais elle est irrésistiblement attirée et continue

en cachette, malgré tout, à aligner des strophes. Elle en arrive à

une ambition poétique qui s'ajoute à son ambition apostolique,

l'aisance toute machinale avec laquelle elle trouve la métrique et

la consonnance l'enthousiasme et l'exalte. Elle met eu stances

ses états d'âme et ses impressions. Voici, par exemple, une pièce

très intéressante, en ceci qu'elle y parle de « sa voix », sa chère

voix aimante et protectrice, et qu'elle y rend parfaitement le

dédoublement de sa personnalité :

La voix

"écoute .m fond de toi cet esprit qui te charme

. Et qui, du coeur aux yeux fait monter une larme

Sans que sa voix résonne il te parle tout bas

Il t'emmène fort loin des choses d'ici-bas.

- Oui c'est l'esprit divin et non la conscience

Il est distinct de toi, par lui, ta prescience

Semble surnisuiisée et l'esprit éclairé

Sur son aile t'emporte en un monde éthété

Poète, enivre-toi de cette voix si douce

. Vers, un monde inconnu tu sens qu'elle te pousse

Quand on l'entend parler, dans le jour qui décroît

A jamais l'on espère et à jamais l'on croit.

Sceptique méprisant, souris de la faiblesse

De ce coeur de poète amoureux de noblesse

1 D'un monde perverti, sublime paria

Il exhale son àme en un alleluia !

On ne peut mieux décrire en vers une hallucination psychomo-

trice et l'étal d'esprit qui la comporte et qu'elle détermine. Celle

pièce vaut bien d'ailleurs celles que tant de médiums ont

écrites sous la dictée de Victor Hugo ou de Lamartine désin-

carnés, on celles par lesquelles M110 Smith et d'autres exhortaient

leurs auditoires à la vertu ou à la dévotion.

tlédhtmnilé à phénomènes psychiques. Il est enfin une autre

spécialité medianimique à laquelle Cam... n'a pas échappé, c'est

MÉDIUMN1TÉ DÉLIRANTE. 133

celle qui consiste à entrer en contact matériel (matérialisé pour

parler le langage spirite) avec les esprits. C'cst une main légère

qui vient amicalement frôler sa joue; plus fréquemment, elle sent

très distinctement la pression de lèvres sur ses mains et sur sa

bouche. Ce sont les lèvres de Deus. Ces sensations on;. lieu aussi

bien pendant les périodes d'exaltation que dans des intervalles de

calme, elles n'ont disparu que quand l'amélioration a été très pro-

noncée. Elles étaient d'ailleurs très agréablement accueillies.

Manifestations génésiques. Sensations de lévitation. E1'otisme

mystique. - Les troubles de la sensibilité générale revetent aussi

des formes plus spéciales. Les caresses se localisent aussi à la

sphère génitale en sensations voluptueuses qui remontent le long

de son corps et vont souvent jusqu'à l'orgasme vénérien complet.

Elle les décrit : « Deus s'annonce par un état de bien-être particu-

« lier et lui fait ce qu'elle appelle des déclarations enivrantes; tu

« vas, lui dit-il, connaître la caresse divine. Elle éprouve alors un

« frisson divin qui monte de son sexe à sa gorge, elle a des sensa-

« tions de caresses intimes dont-elle reste épuisée. Elle cherche à

« s'isoler et à se recueillir en elle-même pour le rappeler en lui

« adressant les prières tendres à la suite desquelles elle peut le

« posséder ainsi physiquement. Deus touché de sa fidélité la

« possède elle spirituellement. Cette possession est étrange,

« ajoute-t-elle, c'est une immense quiétude qui m'envahit. »

Un autre phénomène se produit aussi assez souvent vers le

déclin des paroxysmes anxieux alors que sa sensibilité interne

est encore altérée, c'est un trouble coenesthesique qui lui donne

l'illusion de la lévitation assez commune d'ailleurs chez les spirites

et les mystiques extatiques. 11 lui semble alors que « sa vie s'en

va », mais sans avoir le sentiment de perdre connaissance ; elle

sent son corps allégé comme s'il ne touchait plus à rien, comme si

elle ne l'avait plus. Elle est enlevée dans l'espace et s'entend géné-

ralement appeler par Deus dans ces moments-là. Elle compare cet

état à l'attente d'une mort imminente et désirée, la mort mystique

qu'elle rêve, c'est comme un enlèvement dans les lymbes. Cette

situation ne dure pas assez longtemps à son gré, tant elle y trouve

de charme, et comme nous l'avons vu plus haut, elle est ramenée

à la realité par la voix de Zeus ou de Deus lui-même qui exige

qu'elle reste sur la terre pour accomplir sa mission.

Cam... s'est l'ait d'autre part une représentation mentale très

nette de Deus : « Je me le figure, raconte-t-elle, comme un être

« grand'et noble, un corps fluide comme la rosée solidifiée,

« une vapeur vivante et une tête dominante; des yeux bleus vert

« clair; une barbe de Dieu assyrien blond roux avec des fils d'ar-

« gent ; une noblesse d'àme d'homme qui s'efface, qui s'oublie

" soi-même sans attendre seulement ma venue, car je demeure

134 CLINIQUE MENTALE. "

« ici pour semer nos idées. Il me dit lui-même de former des

« élèves, car l'ignorance divine des hommes vient de leur manque

» de bonté et de ce qui tue le monde, de : .

« L'argent qui d'un moyen est devenu un but ! Il

Elle ne peut s'empêcher de terminer par un vers, toujours obsé-

dée par une métro manie qui ne cède pas.

Cette figuration de Deus, lui conférant la fluidité vaporeuse d'un

corps céleste, correspond naturellement aux rêves d'amour supra-

terrestres dans lesquelles elle vit dans le moment et laisse voir

aussi par quelques détails de couleur, de teint et de l'orme que les

amours profanes qui l'occupent beaucoup ont fourni une partie

des éléments de ce tableau à son imagination subsconsciente. Le

monde reel renferme en effet deux hommes possesseurs de toutes

les vertus chères à son goût, deux hommes dont elle ne peut déta-

cher sa pensée. Elle entretient même avec l'un d'eux, particulière-

ment complaisant, une correspondance dont elle fait d'ailleurs

presque tous les frais, d'une sentimentalité quintescenciée. L'idée

de ces deux amis charme son coeur, mais la tourmente aussi cruel-

lement en raison des obstacles insurmontables que niellent entre

elle et eux les circonstances et « la pureté sacrée » qui doit élever

sa personnalité au-dessus du commun de l'humanité, cette pureté

dont elle parle toujours comme d'un caractère de sainteté et de

grandeur, mais qui lui cause tant d'indécisions douloureuses pour

la réalisation de ses désirs et qui est plus faite d'appréhension

peut-être et d'impossibilité que de volonté. La pensée de son mari

vient ausi à la traverse de ces sentiments, balottée par de cons-

tantes tergiversations. Tantôt M. Schtein est revêtu de toutes

les qualités imaginaires dont elle pare le modèle de l'amant; tantôt

elle le revoit selon la réalité qu'elle a prise en grippe, et déses-

pérée, elle ne parle plus que de divorcer pour attendre de pouvoir

convoler avec un des deux amis qu'elle convoite, et elle reste

cruellement irrésolue entre le désir obsédant de ce divorce et de

ses suites, et l'amour possible et heureux avec son mari.

Deus, au milieu de la perplexité de ces affections, n'est point

jaloux, il garde une sérénité surhumaine tonjours consolatrice et

prometteuse de compensations : « Quelqu'un t'adore qui t'épousera,

c'est Dieu, Deus qui te parle ». D'autres fois même il lui dit qu'il

s'incarnera pour elle en un amour terrestre : « Tu seras heureuse

dans deux mois, lui dit-il un jour où l'idée de divorce la hante, tu

m'aimeras dans la personne de celui que je l'envoie.» Deus arrive

ainsi à se confondre auec ses affections profanes et pas plus qu'elle

il n'y voit une infidélité à son égard, il encourage au contraire ces

sentiments et lui dit une fois en se nommant à la troisième et

impersonnelle personne : « Si Cam... est fidèle à Deus, il la rendra

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 135

« la plus heureuse de toutes les femmes ; il lui laissera sa beauté et

« lui permettra de faire des élèves en semant la vérité. » Cam...

tient en effet énormément à sa beauté qu'elle croit très grande et

très prestigieuse; cependant des doutes cuisants, trop justifiés par

Page d'ailleurs, lui viennentquelquefois à cet égard. Elle les chasse

de son mieux et compte sur cette beauté autant pour l'avenir de

ses amours que pour celui du kamianisme; ce sera une influence

de plus qu'elle prendra sur les masses quand elle ira, comme les

esprits le luicommanùent, « prêcher la charité ct blâmer les vices des

femmes du monde dans des conférences publiques » pour lesquelles

la voix de sa belle-mère vient encore quelquefois lui donner des

encouragements. Elle s'y prépare toujours en se livrant, selon son

expression, à des invocations infinies, heures de solitude et d'orai-

sons en demi extase à la suite desquelles elle versifie plus que

jamais. Elle compose ainsi une prière en vers dont nous n'avons

pas pu obtenir la copie et qui retrace avec beaucoup de vérité le

caractère de son état psychique dans ces moments-là. Assez long-

temps après, elle nous a communiqué sous le même titre une autre

poésie, que nous transcrivons ici pour donner un échantillon de

son étrange fécondité lyrique, et de ses tendances pieuses, bien

(pie ce morceau ne rende pas comme l'autre une situation anor-

male de sa conscience :

La prière

Prier c'est entr'ouvrir son âme

D'où jaillit une pure flamme

Vers celui qu'on ne voit pas

Et qui, seul, sait guider nos pas.

Maître du Monde et de l'Atome,

Au coeur des fleurs voit-on l'arôme ?

Peut-on voir la brise ou l'éther,

L'un dans l'azur, l'autre sur mer ?

Bien qu'invisible on sent l'âme de toute chose

Jouissom donc' des effets sans connaître la cause

Quand nous prions le coeur sur l'infini penché '

Dieu pénètre en nos coeurs et reste aux yeux caché,

L'on sent que sa bonté vous calme et vous console

Préférons le silence à la vaine parole

Au soir, lorsque le jour a fui

Pour mieux s'élever jusqu'à lui.

Deus qui revendique tout ce que Cam... fait de bien et tout ce

qui lui arrive d'agréable, lui affirme que c'est lui qui l'inspire dans

' Ce vers compte un pied de trop « donc » ajouté comme une cheville.

Cela tient à la facilité automatique avec laquelle Cam... versifie. Dans

jouissons, elle prononce joui, comme une seule syllabe, ce qui établit la

cadence. Sa poésie fourmille de fautes semblables.

136 CLINIQUE MENTALE.

ses travaux poétiques, elle l'appelle « sa muse ». Pendant de longs

mois d'ailleurs et même quand la voix se fait plus rare et reste

plus longtemps silencieuse, elle le sent toujours plus ou moins

prêt à se manifester, ce qu'elle exprime en disant : « Je sens lou-

jours que jn suis deux. » Ce sentiment de dédoublement a été très

long à s'effacer.

Evolution. Lutte contre l'automatisme. Amélioration. En somme,

la malade nerveuse, distraite et rèveuse, aigiie de ne pouvoir

autourd'elle laire partager ses enthousiasmes, sa sentimentalité,

et son besoin d'amour physique, se réfugie dans la foi religieuse

sans connaître la religion; elle ébauche un délire d'abord discret

bientôt développé, caractérisé et activé par des essais solitaires de *e

spiritisme auxquels elle se livre spontanément sans rien savoir sur

ce sujet don telle a seulement eu fendu quelquefois pai 1er. lien résulte

une poussée délirante grave. Elle se soigne, entre en convalescence,

guérit grâce à l'isolement et la privation de toute pratique spirite.

Ayant repris sa vie, elle cède de nouveau à l'envie de faire tourner

des tables, son mari approuve ses pratiques, partage ses convic-

tions erronées, ce qui les fortifie. Elle s'exalte Je nouveau, et très

rapidement, par l'entrainement intensif et voulu de ses l'aculiés

médiumniques qui la font retomber dans le même délire plus

étendu encore et plus systématisé que la première fois. Remise en

traitement les gros symptômes se dissipent vite, mais la guérison

avance lentement, progressivement, balottée par des oscillations

entre des intervalles plus ou moins longs de saute apparente et de

courtes rechutes paroxystiques de malaise anxieux à chacun des-

' quels les hallucinations redevenaient actives et nombreuses, et

l'éréthisme sexuel obsédant et douloureux. En dehors des grandes

conceptions délirantes qui n'ont duré que le temps des deux

grandes crises aiguës, les phénomènes hallucinatoires à forme

spirite que nous avons passés en revue au long de cette observa-

tion ont duré pendant toute la marche décroissante de cet état

vésanique. Cette évolution a été complètement remplie par la

lutte que nous avons fait soutenir à Cam ? contre l'automatisme

et le dédoublement de conscience qu'elle subissait. L'attrait

énorme qu'avaient pour elle les communications avec les esprits

ont souvent rendu cette lutte difficile. Comme tous les médiums

elle tient énormément à ses pouvoirs évocateurs, elle y tient d'au-

tant plus que ses esprits familiers, échos des récriminations long-

temps muettes et longuement accumulées dans son travail subli-

minal, ne font que justifier ses plaintes, louer ses aspirations,

satisfaire ses tendances érotiques, approuver ses projets; et que

plusieurs d'entre eux, personnages téléologiques sous la forme

d'hallucinations profitables, s'attribuent même l'amélioration de

ses malaises. Ce fait n'a rien de surprenant, ces hallucinations

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 137

spéciales étant l'expression de l'état de ses centres automatiques

au moment où renaît dans son système nerveux le calme dont elles

soulignent l'apparition. Sur nos instances, tout en croyant ferme-

ment à l'essence surnaturelle de ses interlocuteurs, Cam... reconnait

bientôt le caractère morbide de ce ! tailles de ses conceptions et de

quelques-uns des phénomènes dont elle est le sujet; elle comprend

le danger qui la menace et accepte docilement de s'efforcer de

repousser les voix et de se priver de faire parler son guéridon.

« Elle a peur, dit-elle, des hallucinations qui lui ont donné des

« idées de grandeur et qui l'ont rendue méchante ave

« soeur, mais elle regretterait les autres si elles cessa;

fait. » A mesure que le temps passe elle veut plus fermei

rir et y travaille sincèrement. Elle ne peut pas toujours r

voix par la seule concentration de sa volonté, dans ce (

tout haut pour les clouer ; elle éprouve alors une « pre

« la tête, comme si quelque chose s'y comprimait poui

« et yétait retenu. » Elle finit généralement par triomp

elle en reste abattue avec une forte céphalée. D'autre

cherche « à les concentrer en une seule, celle de Dieu », nom

qu'elle substitue à celui de Deus à mesure qu'elle s'améliore. Les

communications des esprits deviennent ainsi d'abord iutermittentes

et arrivent à demeurer longtemps silencieuses, mais il faut une

surveillance assidue et beaucoup d'encouragements, car la patiente

les regrette vivement. Elle avoue que, livrée à elle-même, elle se

jetterait sur un guéridon avec avidité. Au mois de janvier elle

parle de spiritisme avec plusieurs personnes avec une passion

évidente et leur dit que son désir d'interroger une table est « im-

« périeux comme une morphine ». Le mois de février et de mars

se passent dans les mêmes conditions avec des retours d'halluci-

nations spontanées. L'esprit de l'oncle reparait lui-même. Cam...

nous parle un jour de lui et rappelle que de son vivant il disait que

le spiritisme était une chose sérieuse « et je le dis encore » appuie la

voix psychomotrice de l'oncle dans la tête de sa nièce. Deus surtout t

ne se laisse pas oublier, procédant par typtologie mentale quand il

ne se manifeste pas autrement. Après une crise d'angoisse, sa

voix intervient un jour réconfortante comme d'habitude, sur notre

demande expresse elle la repousse pour nous obéir, mais Deus

s'irrite, et Cam... « ressent un sanglot intérieur, c'est Deus qui

pleure en elle; pourquoi le chasser, implore-t-elle, il est si déli-

cieux, il me calme, nie charme, m'endort, j'embrasse Deus ». Elle

promet néanmoins de ne plus l'appeler, mais elle l'évoque quand

même en cachette et le consulte même quelquefois pour savoir s'il

l'autorise à nous faire certaines confidences. Deus est d'autant

plus difficile à déraciner, qu'il pousse son rôle d'avertisseur tuté-

laire jusqu'à participer au traitement psychique que nous entre-

prenons en employant même les termes et les menaces qui sont

138 CLINIQUE MENTALE.

les nôtres. Au mois de janvier, par exemple, Cam... écoute une

manifestation en typtologie mentale de Deus ; et Deus lui-même

tout à coup interrompt la communication en disant « défendu,

c'est la folie ! » de sa voix psychomotrice. Au mois de février,

dans des circonstances identiques, il dit : « Non, assez, pas d'au-

tomatisme contrôle, toi ! » Comment chasser un esprit qui pousse

le zèle jusque-là ? Il est vrai qu'il s'arrange quelquefois pour faire

tourner ces sages avis en sa faveur, et c'est toujours après quelques

jours de raisonnement particulièrement assidu et ferme de notre

part et après un travail de préparation inconsciente consécutive-

ment mûri que l'hallucination téléologique prend cette attitude

spéciale. Au mois de mars, pour se faire écouter sans éveiller de

scrupules, il se sert de cette introduction : « C'est à travers ton

contrôle que je te parle, ma fille » et un peu plus tard, après une

assez longue période de silence, il s'explique : « Je suis toujours

« là, quand je fais le mort c'est pour que tu ne sois pas effrayée

« et pour passer par ton contrôle, mais je ne suis pas ton incons-

cient », et plus tard encore : « Pour que tu ne t'inquiètes pas de ta

« tête, je passe par ton contrôle, mais je ne suis pas ton incons-

oient ». Deus défend ainsi son identité contre nos arguments. Nous

avons en effet fait comprendre à Cam..., pour contribuer à lui

faire reprendre sa cohésion mentale, que cette voix conseillère

était, en lui tenant ces derniers propos, le produit du travail de

.rétablissement de son contrôle, travail encore inachevé dont l'ex-

pression subliminale arrivait ainsi jusqu'à sa conscience. Il y a

donc encore une certaine révolte de la tendance à l'automatisme

qui se fait jour de cette manière. Cam..., d'ailleurs, se dit encore

trop croyante pour ne pas admettre que cette voix si claire ne

soit pas différente d'elle-même, elle veut garder cette conviction,

même en cherchant à éviter la voix, car elle comprend le danger

qu'il y a pour sa mentalité à en conserver la manifestation. Elle

croit aussi qu'elle l'aura toujours au moins en l'évocant fortement

si elle le désirait absolument, en cela même elle se trompe, car

à partir du mois de juillet, elle n'en parle plus. Pour le moment.

il faut cette évocation spéciale ou l'appoint d'une forte contrariété

pour qu'il prenne la parole, et ces petits incidents suffisentà main-

tenir la foi de la malade. Un jour, par exemple, elle écrit deux

lettres, les met machinalement sous enveloppe, inscrit les adresses

sans vérifier et les jette à la poste. Elle revient très perplexe, con-

vaincue qu'elle a interverti les adresses des destinataires, ce que

le contenu des missives rend particulièrement fâcheux et délicat.

Elle n'en dort pas, mais Deus la rassure et lui affirme qu'elle a

correctement mis chaque lettre dans l'enveloppe et sous l'adresse

qui convenait. Cela la tranquilise, et l'événement, en donnant rai-

son à Deus, fortifie la confiance de Cam... L'état d'esprit de cette

dernière continue à se modifier, elle ne dit plus jamais Deus, elle

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 139

comprend qu'il y a quelque chose d'absurde dans cette dénomi-

nation antique et elle se met à dire Dieu, plus tard même,

elle abandonne cette désignation et ne dit plus que « la voix ».

Ue même, elle ne parle plus de Kamianisme. Elle garde seulement

l'intention de travailler dans sa sphère et dans la littérature, il

propager la bontéet à faireaimer la charité, sa piété reste toujours

aussi fervente, mais plus normale. Depuis le milieu de décembre,

d'ailleurs, son attitude au milieu des autres malaldes est celle

d'une personne parfaitement saine, elle lit, s'occupe de tout, cause

avec chacun de choses indifférentes, d'art, de littérature, quelques

malades plus sympathiques reçoivent seulement quelques confi-

dences au sujet de ses pouvoirs de médium et prennent connais-

sance de ses poésies. Nous seuls sommes dans le secret de ses

anciennes conceptions et de ce qui reste de ses croyances. A partir

du mois d'avril jusqu'au mois de. juillet l'amélioration générale a

progressé sans arrêt. M. Schtein est complètement rentré en grâce

auprès de la malade, celle-ci a passé en Suisse l'été de 1902,

sous la surveillance d'un médecin qui n'a noté aucun phénomène

délirant et s'est seulement occupé de maintenir ses bonnes dispo-

sitions à l'encontre des essais de manoeuvres spirites. .

Pendant toute cette évolution, la mémoire a suivi les fluctua-

tions de l'état mental lui-même. Les souvenirs de tout ce qui

s'était passé pendant la première crise délirante en Suisse, les

souvenirs de tout ce qu'elle avait dit, vu et entendu dans cette

période avaient paru s'effacer pendant l'intervalle relativement sain

de son premier séjour au Sanatorium, duraut lequel elle n'avait,

en tous cas, parlé de rien que de sa très vague fièvre cérébrale.

Tous ces souvenirs se sont, au contraire, réveillés très fidèles et

très précis dans tous leurs détails pendant la seconde bouffée déli-

rante. Cam... a pu, à ce moment, nous décrire sa vision et tout ce

qui l'avait suivie. A son second séjour elle se rappelait en loute

netteté tout ce qui lui était arrivé dans le Midi, ses évocations avec

son mari, son système theologique, ses différends avec sa belle-

soeur. A mesure que son amélioration s'accentuait, tous ces souve-

nirs s'effaçaient pour ne reparaître que dans les périodes paroxys-

tiques qui ravivaient l'activité spirite. On voyait ainsi reparaître et

disparaître ces groupes de souvenirs un peu comme l'auraient fait

ceux.d'un état second, mais avec moins-de netteté et moins brus-

quement. Il y avait chaque fois une transition, une période d'effa-

cement graduel avant la disparition totale. Au moment où ce

changement se produisait on voyait les manifestations délirantes

disparaître de la vie à l'état de veille et alimenter les rêves du

sommeil normal de la nuit; Cam... rêvait de sa belle-mère, de son

oncle, soulignant ainsi la transition entre l'inconscience spirite et

'inconscience normale onirique.

Actuellement tout reste dans l'ordre depuis juillet 1902. Cam...

140 CLINIQUE MENTALE.

ne parle plus de faire tourner des tables, elle n'a plus d'hallucina-

tions, elle a repris une affection normale et vive pour son mari.

Elle cultive la poésie et a fait dans cette voie des progrès sensibles

ses poèmes ne révèlent plus aucune désorganisation psychique, ils

chantent les beautés et la contemplation de la nature, la resigna-

tion à la souffrance, l'édification des âmes et surtout les bienfaits

de la paix. L malade est en effet devenue une ardente adepte des

doctrines de Frédéric l'assy. Elle espère en favoriser la vulgarisa-

tion et c'est dans cette oeuvre que se donne carrrière son ancienne

tendance ù l'apostolat. Elle est d'une piété chrétienne pleine de fer-

veur, de confiance et d'enthousiasme, et a repris tout son goût

pour la vie de famille.

Remarques. Cette observation suggère un certain nom-

bre de considérations intéressantes aux trois points de vue

du spiritisme, du mysticisme et de la psycliiatrie.

Spiritisme. - Si l'on peut appeler « tempérament média-

nimique » l'état psychique qui consiste en la tendance au

dédoublement de la conscience avec activité automatique

indépendante, on peut dire que notre malade l'avait créé et

entretenu prêt à fonctionner par sa manière de vivre et de

penser avant l'explosion absolument spontanée des

phénomènes spirites chez elle. La première voix psychomo-

trice dont elle ignorait au début l'idendité a constitué le

premier fait de celte médiumnité spontanée à la suite de

laquelle se sont succédées dans son cas la plupart des

spécialités médianimiques que tous les sujets spirites ne

possèdent pas toujours en aussi grand nombre. Elle a été

sujet auditif, parlant, voyant, sensitif, psychographe méca-

nique et semi-mécanique, typteur à bascule et typteur

mental. Elle a reçu des messages d'ordre privé, des révéla-

tions scientifiques, médicales et théologiques. Elle a évoqué

des esprits de personnages défunts et de personnages

vivants. Elle a comme les grands médiums interprété ces

pouvoirs dans le sens - de la religion et s'est comme eux

imposé le devoir de répandre la piété et la moralisation selon

le principe du spiritisme officiel qui met en tête des vrais

médiums les médiums chrétiens. Un point que l'on pourrait

mettre en litige, c'est que son esprit guide est un personnage

divin.

Les spirites ont beaucoup discuté la valeur des communi-

cations diverses que beaucoup de sujets des séances courantes

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 14't

ont obtenues. Dieu et Jésus se manifestent souvent dans ces

réunions, mais la question a été tranchée par les orthodoxes

du « spiritualisme ». Ce sont des esprits trompeurs ou des

esprits exaltés qui se donnent comme Dieu ou le Christ à

ces médiums pour les abuser et leur en imposer d'avantage.

Cam... qui n'avait aucune notion de ces doctrines a accepté

sans aucune objection la divinité de plusieurs de ses inter-

locuteurs et surtout celle de son esprit guide.

Les saints occupent souvent aussi la table, le crayon ou la

parole des médiums initiés et sont admis pour eux-mêmes

avec leur propre identité à prodiguer leurs communications

aux spirites réguliers, les anges par contre sont aussi exclus

etleurs manifestations et sont le résultat des mystifications ou

des usurpations de titres d'esprits trompeurs; ceux qui en

sont les interprètes n'en demeurent pas moins des médiums

quoique médiums imparfaits qui se laissent duper par les

désincarnés. Les voyants comme Allyle Couédon qui au point

de vue psychopathologique sont identiques aux médiums,

mais qui sont reniés par les spirites, peuvent avoir comme

personnages téléologiques et esprits protecteurs, des anges,

c'était l'ange Gabriel pour 111"° Couédon. Cette dernière peut

se rapprocher encore des médiums par cette autre particu-

larité que son langage automatique attribué à l'ange Gabriel

se déroulait généralement en vers. Nous avons vu que le lan-

gage automatique de notre malade revêtait souvent cette

forme-là et qu'elle gardait une tendance irrésistible à versifier

et à rimer machinalement. La forme rythmique est donc une

des modalités naturelles du langage automatique. Beaucoup

de voyants se sont exprimés et s'expriment ainsi ; les oracles

de l'antiquité se sont partagés cette habitude avec les devins

du moyen âge, le mot vates ne signifiait-il pas à la fois

poète et devin. Rabelais lui-même n'a-t-il pas fait rendre en

strophes bien cadencées les réponses demandées par

Panurge à la Sibylle de Pauzoust et à Bacbuc.

Si Cam... a accepté comme vrai le fait d'être en communi-

cation avec Dieu, elle a aussi reçu la révélation de tout un

système théologique polythéïste, fantaisiste et de forme à

demi païenne; mais ici il faut faire appel pour l'interprétation

de ces faits à l'élément vésanique. Elle était à ce moment en

plein délire, et le souvenir de ces conceptions ne l'a même

pas suivi dans sa longue convalescence, pendant laquelle se

142 CLINIQUE MENTALE.

sont continuées ses manifestations médiumniques. Celles-ci

ont, il est vrai, persisté à entretenir chez elle des tendances

mystiques et apostoliques plus accentuées peut-être que

chez le commun des médiums et qui confinent à la théoso-

- phie ou mieux à la théomanie, ce qui nous amène à la

deuxième série de nos remarques.

Mysticisme. - Cam... était au moins aussi ignorante en

matière religieuse qu'en matière spirite quand ses premières

tendances se sont organisées en hallucinations et en systèmes

théologiques. Elle ne possédait aucun élément pour discuter

la valeur des messages qu'elle attribuait à Dieu. Ses élucu-

brations subliminales servaient à sa personnalité normale des

chapitres tout faits qu'elle n'a commencé à commenter en

elle-même pour les accorder avec la réalité que, quand

la première exaltation vésanique a pu se dissiper, encore les

souvenirs n'en restaient-ils qu'assez peu précis pour lui

laisser le champ libre de les réduire à des fantaisies supra-

normales, mais dont les contradictions ou les absurdités

tropchoquantes étaient petità petit soigneusementéliminées.

Son ignorance religieuse se montre même dans le choix des

expressions et des éléments acquis et tombés dans le monde

inconscient dont elle désigne et construit les données de son

système théologique pagano-chrétien à base astronomique.

C'est ainsi qu'elle parle sans cesse de former des élèves,

alors qu'un peu plus d'instruction religieuse courante lui

aurait fait choisir le mot disciples dont se servent toujours

les auteurs ecclésiastiques. Elle croit n'avoir jamais entendu

prononcer le nom de Zeiis donné par ses messages à l'une

des divinités de son système. Elle a oublié que c'est le nom

grec de Jupiter qu'elle a lu dans Uranie. Elle se trompe

encore pour Silo dont elle fait une île et où par une associa-

tion verbale inconsciente d'idées elle fait déporter les juifs et

les protestants (une réminiscence des silos où l'on dépose

les disciplinaires rebelles) faisant donner à Silo cette desti-

nation pénitentiaire par son activité subliminale.

C'est après la première atteinte délirante qu'elle a surtout

commencé à s'initier aux notions religieuses courantes et

qu'elle a le plus acquis par ses lectures, c'est aussi à partir

de ce moment-là que son mysticisme mieux éclairé a pris

une forme plus réellement chrétienne et théosophique.

Elle est devenue théosophe sans rien savoir non plus de la

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 143

théosophie cette forme de spiritisme rejetée par le spiritisme

officiel dont elle constitue une sorte de schisme quoiqu'elle

lui soit identique dans son essence.

Lemysticisme deCam... est avant tout un mysticisme théo-

mane. Bien que chez elle l'élément affectif rapproche

son état mental de celui des mystiques purs, elle est aussi

près que possible du cas de Swedenhorg. Ce dernier comme

elle, était tombé dans le délire hallucinatoire après une

longue période de rêveries religieuses, il s'est comme elle

entretenu avec des morts a eu des communications avec les

astres, a causé avec Dieu après une seule hallucination de la

vue; comme elle il a en une mission réformatrice à remplir,

comme elle encore il a profondément regretté ses halluci-

nations quand elles l'ont abandonné à la fin de sa vie. Ils

n'ont différé que sur deux points. C'est d'abord la forme

spirite des communications de Cam..., le mot et le rite du

spiritisme n'existait pas encore du temps de Swedenhorg,

qui aurait pu en être le créateur si les circonstances ambian-

tes avaient dirigé dans cette forme le processus de ses

éléments délirants. L'autre différence réside dans l'érotisme

intense de Cam... auquel Swedenhorg semble avoiréchappéet

qui rapproche Cam... des mystiques purs chez lesquels

l'érotisme est la règle constante. Une troisième différence

d'ordre tout à fait secondaire et qui n'a rien à voir avec la

classification de ces cas consiste dans la diversité du niveau

intellectuel si haut chez le prophète suédois, si moyen chez

Cam... Cette dernière peut se rapprocher aussi de 111"e Smith,

spirite avant tout, mais mystique aussi, pourvue d'un guide

téléologique et animée d'une tendance apostolique active.

En un mot, des cas semblables représentent le point de

jonction du spiritisme pur avec le mysticisme et la théoma-

nie raisonnante. Tous les sujets atteints de semblable état

ayant pu vivre de la vie extérieure normale dans laquelle

ils ont en paix promené leur délire tant que la forme vésa-

nique n'a pas entraîné de leur part soit des actes extrava-

gants ou dangereux, soit une propagande réformatrice ou

prophétique qui les ait rendus trop gênants, Socrate, Car-

dan, Bodin et bien d'autres personnages historiques ont eu

eux aussi une voix téléologique qui eût permis de les com-

parer à ces théomanes. Le nombre de personnes présentant

des prédispositions à ces délires est étonnant quand on y

144 Il CLINIQUE MENTALE.

regarde de près, beaucoup n'y glissent pas, car il faut assez

peu de choses pour les maintenir dans leur équilibre ins-

table et ils sont très accessibles à un traitement moral bien

dirigé. La désagrégation mentale est assez facilement com-

battue par une vie régulière qui favorise la tendance à l'uni-

fication à condition que des pratiques spirites ne viennent

pas la détruire. C'est ainsi que nous avons vu deux fois chez

Cam... la désagrégation'se produire une première fois par

le spiritisme, se réduire, puis se régénérer une seconde fois

par le spiritisme encore et céder enfin sous la privation

continue des pratiques médianimiques.

Flournoy a pu dire : « Prenez un individu ayant dans

sa subconscience des souvenirs, des scrupules, des ten-

dances affectives, des idées à coefficient émotionnel pins ou

moins intense ; mettez-lui en tête, je ne dis pas des convic-

tions, mais simplement des préoccupations spirites, puis

attelez-le à une table ou à un crayon. Pour peu qu'il soit du

tempérament impressionnable, suggestible, désagréable, que

le public appelle la faculté médianimique, il ne se passera

pas. longtemps avant que ses éléments sublimînaux se grou-

pent, s'ordonnent, se compénètrent suivant la forme « per-

sonnelle » à laquelle tend toute conscience, et se traduisent

au dehors en communications qui ont l'air de venir directe-

ment de désincarnés ».

Remarques psychiatriques. Flournoy aurait pu ajouter

aussi : « pour que cette désorganisation atteigne le taux du

délire et arrive presqu'à la vésanie caractérisée avec toutes

ses conséquences et tous ses dangers ». Il est frappant de voir

combien de tels malades entraînent autour d'eux de person-

nes dans leurs erreurs. Les simples spirites ont toujours une

chapelle de spectateurs plus convaincus qu'eux-mêmes, les

théomanes raisonnants comme Swedenborg et tant de pro-

phètes obscurs ou célèbres ont laissé même après leur mort

des foules de disciples qui continuent leur doctrine.

En général ce genre de délire entraîne autour de lui la

folie multiple. Cam... a persuadé son mari, qui homme

relativement instruit, ingénieur ayant des notions de méthode

scientifique, a pendant longtemps partagé toutes ses convic-

tions et assisté en disciple respectueux et ému à la plupart

de ses évocations pendant toute une assez longue période.

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 145

Guérie, Cam... avoue qu'elle et lui avaient l'air de deux illu-

minés et reconnaît que leur attitude était absurde. Il y a là

comme un cas de « folie à deux» dont elle était l'élément

actif et M. Schtein l'élément passif. N'avait-elle pas con-

vaincu aussi des dames et un prêtre qui voulaient la faire

baptiser ? `t

L'observation suivante plus fruste, nous fera mieux voir

encore le danger du spiritisme et des délires consécutifs à

ces exercices d'occultisme dans leurs rapports avec le suicide

et même l'homicide.

OnSOERVATION II. - Hérédité névroputhique. Délire à forme spirite

lions de métaphysique, de réformes sociales, de magie.

Mysticisme, érotisme, auditions d'esprits, visions, migration de

1'tlriie. Dédoublement et perte du moi. Obéissance à des hallucina-

tions théomaniaques impéralives. Tentatives de suicide.

Henri B... étudiant en médecine, marié, père d'une enfant bien

portante, a une hérédité chargée. Son père fort, intelligent mais

nerveux, est mort depuis longtemps. La famille de sa mère compte

plusieurs aliénés. Ses soeurs sont très nerveuses, l'une d'elles est

une giande obsédée phobique.

Dans son enfance, le malade habitué à faire toutes ses volontés,

gàlé et capricieux, a eu des tics, était onycophage et onaniste.

émotif et peu travailleur. 11 n'a reçu qu'une instruction religieuse

insignifiante et jusqu'à vingt-quatre ans est resté matérialiste et

éloigné de toute idée et de toute pratique de piété. A dix-sept ans,

à la chasse, il a eu un violent étourdissement attribué à une inso-

lation, à la suite duquel il a dû s'aliter et dormir longtemps, il a

été à partir de ce jour sujet à des phobies incessantes et surtout

à une agoraphobie d'une rare intensité. Peu causeur, concentré

mais sans rêver, sujet à des superstitions de joueur, sa conduite a

donné lieu à de nombreux écarts, il se sent instable depuis son

étourdissement à la chasse.

En juin 1902, il contracte une dyphtérie grave suivie de para-

lysie et sa névrose s'aggrave ; il prend de l'absinthe pour se don-

ner du courage, abandonne la médecine, compose des vers et des

chansons, fait de la musique, ne veut plus s'occuper que d'art et

ne parle plus que de religion et des problèmes de la survivance de

fâme. En 1898, il avait entendu parler de spiritisme, un peu plus

tard, il avait fait avec ses soeurs des essais de transmission de la

pensée, l'une d'elles ayant pris à cette occasion des crises de nerfs

ils avaient cessé, mais il avait essayé tout seul de faire tourner

une table et y avait réussi sans s'y adonner avec suite. Depuis sa

dyphtérie, il se sentait encore plus changé qu'après son coup de

AncmvLS, 2« série, t. XVIII. 10

146 . CLINIQUE MENTALE.

soleil, il devenait de plus en plus irrégulier dans sa vi , et de plus

en plus désoeuvré, passant des nuits entières àcauser de théosophie

et de réformes morales de la société, avec quelques amis qui n'en

savaient guère plus que lui et mélangeaient dans leurs théories le

spiritisme, la franc-maçonnerie et la magie noire. Les rêves

d'amélioration sociale hantaient surtout le malade à ce moment-là,

il concevait des théories sociales dans lesquelles il représentait

l'humanité par un' triangle, mettant les hommes de génie au som-

met et les inintelligents à la base, il voulait appliquer ce système

de triangulation à la sagesse, à la vertu, à la richesse, à la

piété. 11 lisait des livres religieux, entrait dans les églises et

priait.

En même temps il sentait augmenter ses appétits sexuels qu'il

avait toujours eu très prononcés et qu'il avait toujours largement

satisfaits. Il avait alors plusieurs mailresses, les associait à ses

élucubrations mystiques et sociales. Il voyait des symboles partout

et commençait à s'absorber dans des rêvasseries demi conscientes

d'où il sortait troublé et angoissé comme s'il eut des doutes

sur son existence réelle et comme si son moi devenait incertain.

Il avaità ce moment deux amis, J. L... etA. D... qui jouissaient

de toute sa confiance, mais qu'il ne voyait pas autant que ce qu'il

avait voulu. Il se concentrait pour penser à eux et causer avec eux

en pensée à distance; dans ces absorptions extatiques il les enten-

dit nettement. C'étaient leurs esprits qui se désiucarnaieut à sa

volonté pour lui répondre ou qui lui parlaient spontanément. Cela

ne l'étonnait nullement, c'était la même chose que ce qu'il avait

obtenu antérieurement quand il avait fait tourner des tables.

En mars 1903, il donne des inquiétudes aux siens. Son érotisme

augmente, il est constamment préoccupé et distrait, écoutant les

voix des esprits de ses amis, non content de ses excès sexuels

avec des femmes il aurait été entraîné à des tentatives de pédéras-

tie ; il vit d'ailleurs comme dans un rêve et on commence à le

surveiller.

Les esprits désincarnés de L... et D... deviennent ses conseillers

habituels et lui donnent des explications à son sujet. La vie désor-

donnée qu'il mène afflige les siens, il est pris de remords. L .. et

D... lui reprochent en effet ses débauches et lui disent d'expier ses

fautes par des, pratiques religieuses assidues. L'état d'incertitude

sur sa personnalité qu'il ressent, l'angoisse, L... et D... lui expli-

quent « que son corps n'est qu'une méprisable guenille dont son

esprit doit s'évader. Tu as une sale guenille, ce n'est pas toi-même,

tu verras comme le vrai Henri 13... est beau». Il se demande com-

ment il sortira de sa guenille et rentré chez lui l'envie le prend

brutalement de se jeter par sa fenêtre, il hésite et consulte ses

esprits qui lui disent impérieusement « non ! ». 11 veut s'assurer

que ce n'est pas lui-même qui a dit non et demande à l'esprit z

111EDIU11111TÉ DÉLIRANTE. '147

« est-ce ma guenille ou l'esprit qui dit non ? », réponse : c'est

l'esprit de D... ». Henri est satisfait et s'éloigne de la fenêtre. ' »

La nuit suivante, pendant son insomnie, il voit des phénomènes

lumineux se produire sur les murs de sa chambre, une tête de

chérubin en ivoire, fixée au bas d'un crucifix se détache et s'envole

dans un rayon de lumière, il se met à prier. Le lendemain l'esprit

de D... lui parle dans la tête en hallucinations psychomotrices

comme d'habitude et lui fait des recommandations morales en

l'exhortant à la foi « il faut qu'il fasse un serment à Dieu, les deux

espiits qui l'entretiennent sont les messagers de Dieu, il doit leur

obéir. - Mais, répond-il, j'ai cru jusqu'ici que Dieu n'existait pas.

- Dieu existe, reprend D..., et tu dois faire ce que ta conscience

te commande ». A partir de ce jour il obéit passivement aux

deux esprits.

Il faut qu'il expie ses péchés; un jour, une force mystérieuse

le pousse hors de chez lui, il consulte l'esprit de D... qui lui

dit : Vas au temple maçonnique de la rue Froidevaux accom-

plir ton serment, ne t'inquiète pas, tu vas te tuer pour expier. »

Il va frapper à la porte de la maison désignée, on n'ouvre pas.

Il reste perplexe, l'esprit lui dit de marcher, il repart et sort de

Paris; à la barrière, il hésite; la voix lui dit « à gauche ! » II mar-

che et se trouve devant le mur d'un jardin maraîcher, il y voit

une porte, l'esprit lui dit « entre ». 11 frappe, on ouvre, il demande

à entrer, les jardiniers le prennent pour un employé de la ville

visitant les terrains il vendre de la zône des fortifications et lui

proposent un mètre pour prendre ses mesures, il refuse en

remerciant. on le laisse faire silencieux le tour de l'enclos et il

ressort.

Il rentre dans Paris par une autre porte et revient à la rue Froi-

devaux. Comme il voit des symboles partout, il s'aperçoit que le

trajet accompli forme un triangle et cela doit avoir une significa-

tion mystérieuse. Hue Froidevaux, il frappe de nouveau à la porte

du temple maçonnique, une femme ouvre, il insiste pour entrer,

disant qu'il a un serment à accomplir et veut forcer la consigne,

la concierge le menace de la police, il s'en retourne et les esprits

lui disent qu'ils l'ont empêché de se tuer pour lui donner le temps

de se confesser.

Ils lui reprochent toujours « de tenir à sa vieille guenille ». Dans

la nuit suivante, les esprits, dit-il, ont éteint et rallumé sa veil-

leuse, ce qui le frappe beaucoup ; il lit longuement son livre d'heures

et s'absorbe en oraisons mentales. Le lendemain il court plusieurs

églises à la recherche d'un confesseur, il en trouve un qui lui con-.

seille de faire une retraite dans une trappe. Mais à la fin de sa

confession il voit le prêtre se transfigurer en pape et il voit dis-

tiuctement une étincelle lumineuse frapper son Iront. Il se

demande si c'est la mort qui va l'atteindre. Dans la uuit l'esprit.

148 CLINIQUE MENTALE.

de D... se manifeste et lui dit : «Laisse la la sale guenille dans ton

lit et viens, Henri B... est mort », il sent son âme quitter son corps

mais il la sent égarée.

Il n'a plus la notion de rien et demande où il est. D... répond :

« dans un cadavre de l'hôpital Laënnec ». Il Unit par dormir.

Le lendemain matin, il se réveille au petit jour et l'esprit de sou

père lui apparait sous la lorme d'une trainée lumineuse.

Dans la matinée, il va se promener, une voix, qui n'est plus celle

des deux esprits habituels, lui ordonne d'aller au café prendre une

absinthe pure pour se tuer. H demande quelle est cette voix, l'esprit

de D... répond que c'est Dieu. Henri B... obéit, l'absinthe ne le

tue pas, il se donne alors un violent coup de poing dans la poi-

trine qui l'impressionne comme un coup de poignard, il s'allonge

sur la banquette, mais la mort ne venant pas, il rentre chez lui,la

voix de D... lui tlit : « ne t'inquiète de rien, je m'occuperai de toi. »

On lui fait comprendre la nature maladive de ce qu'il éprouve et

il arrive au sanatorium le 8 avril.

Il s'y montre très inquiet de son état, il a peur de devenir fou et

supplie qu'on le rassure; le matin, il cause normalement, dans

l'après-midi, il êvassa et reste très absorbé. Il se plaint de ne pas

se sentir vivre comme autrefois, il ne se sent plus lui-même. Il ne

sent ni sa tête, ni son corps, ni ses membres. Dans la nuit, il en-

tend l'esprit de D... lui dire « de vider sa guenille », dans le jour,

il est mieux, mais il reste anxieux, il prie, il veut lire des livres

saints, il consulte ses esprits et nous raconte tout ce qui précède.

Bientôt il s'améliore et à mesure que son état se rapproche de la

normale, il oublie son ancien délire et les actes qu'il a accomplis

sous cette influence. Il va et vient, cause et sort avec les autres

malades, fait de la musique et reprend courage.

Au commencement de mai, il redevient absorbé et préoccupé de

métaphysique. 11 a des troubles anesthésiques bizarres, tantôt il

il ne sent pas son corps, tantôt il s'étire et en même temps il sent

et voit ses membres s'allonger comme du caoutchouc. Ce qui l'au-

goisse le plus « c'est lé départ de son âme », cela ne l'étonné pas,

car dit-il, d'après la théorie spirite « il se quitte lui-même pour

aller animer un autre homme », mais cela le fait souffrir, parce

que ce qui reste de lui n'est pas lui-même. Son esprit parti s'en-

vole et flotte dans l'espace; il l'y sent très distinctement. Quelque-

fois son esprit n'est môme pas très loin de lui, il le sent suspendu

à quelques centimètres de sa tête. Il n'a plus de lui-même que son

affection pour les siens; son moi qui l'a fui n'habite plus en lui-

même, il n'y reste que son coeur.

Il parle pour un autre, il est une pure machine à parler, son

cerveau n'est qu'un réflecteur, il est un mannequin animé par un

esprit qui n'est pas la sien, alors que son âme est toujours suspen-

due dans l'espace au-dessus de lui. A l'époque des débauches qui

MÉDIUMNITÉ DÉLIRANTE. 149

lui causent tant de remords, il avait pour signer ses vers et ses

chansons, pris le pseudonyme d'Henri L..., anagramme de son

nom. Actuellement il érige cet Henri L... en personnage distinct

qui est son double, son double exécré et maudit et c'est cet Henri

I ? qui anime son corps ; il voudrait redevenir Henri B... Il le

redevient de temps en temps et se sent beaucoup mieux à ces

moments-là. Il revoit sa vie d'enfant comme celle d'un autre

qu'il aurait beaucoup connu, cette dépersonnalisation le fait

cruellement souffrir. Il ne peut pas rallier son moi d'avant le

coup de soleil ni surtout.son moi d'avant la dyphtérie à son moi

actuel. Le plus douloureux c'est de suivre la migration de. son

moi dans l'espace, il trace même la trajectoire de cette migra-

lion dans un graphique où on voit un point resté au-dessus d'une

ligne normale, c'est Henri B... qui est suspendu dans l'espace

au-dessus de la ligne normale des individualités vivantes et qui

ne peut plus repénétrer en lui-même. Il arrive quelquefois il se

réincarner, mais il a de la peine à reprendre tout à l'ait son âme

qui tend à repartir en arrière quand il est couché sur le dos;

penche la tête en avant pour ramener son moi dans la région

frontale. ,

Il a peur de ne pas reconnaître sa famille quand il la verra.

Après une nouvelle amélioration il reprend ses promenades et cause

volontiers, mais les hallucinations reviennent bientôt. Il monte

dans sa chambre pour mieux écouter les esprits; mais celui de

D... lui interdit de ne nous rien révéler dece que les désincarnés lui

disent. Il revoit un matin l'esprit de son père. Il l'entend quelque-

fois. Il retombe dans ses prières et dans ses extases. Il a un matin

la vision du Christ dans un rayon lumineux au dehors, il

reçoit de lui l'ordre de se jeter par la fenêtre, on doit le retenir et

le surveiller de près. Il devient de plus en plus absorbé et agité. Le

23 mai, sur l'ordre des esprits, il refuse de manger, dans l'après-

midi, Dieu lui parle et lui ordonne de se tuer. Il quitte sa chambre

et essaie de se jeter dans la cage de l'escalier. Ramené dans sa

chambre, il essaie, par mortification et sur l'ordre des esprits, de

boire de son urine et de manger de ses excréments, on l'en empêche.

« C'est Jésus, nous dit-il. qui était en moi et qui m'a dit de me

tuer pour me sacrifiera ma famille que j'ai déshonorée » ; à ce

moment la voix de Dieu lui enjoint de se taire et il refuse de rien

dire de plus. On le transfère le soir même dans une maison

d'aliénés. Il y est devenu de plus en plus délirant. Nous avons su

qn'il avait été excessivement violent et avait tenté d'étrangler un

Sarde-malade. ZD

Chez lui le délire spirite n'a été qu'un épisode établissant

la transition entre son état de névrose antérieur, caractérisé

ho CLINIQUE MENTALE.

par ses grandes phobies ' et son délire vésanique actuel qui

le porte constamment à des tentatives de suicide ou même

à des impulsions homicides quand il obéit à ses hallucina-

tions.

Un des dangers du spiritisme réside précisément dans

cette haine de son corps assez commune aussi chez les mys-

tiques ordinaires, haine de soi qui conduit les malades à la

mutilation volontaire et au suicide, quand ils n'y sont pas

amenés par les simples injonctions de leurs voix°.

Quelle que soit leur marche, ces délires médianimiques

sont toujours caractérisés par un dédoublement bien net de

la personnelité que les malades traduisent par des idées et

des mots très expressifs. Ces malades ne constituent évidem-

ment pas un groupe distinct à classer à part. Dans la discus-

sion du mois d'avril 1903 à la Société Médico-Psychologique,

M. Christian les avait, si nous ne nous trompons pas, incor-

porés parmi les démonomanes. '

Ils ne nous paraissent pourtant pas être des démonomanes.

Les démonomanes, en effet, n'appartiennent pas tous à la

même famille, il est parmi eux des possédés qui sont les uns

des mélancoliques, les autres des persécutés chroniques ; il

est aussi, parmi ces malades, des obsédés et enfin des mys-

ques. Les spirites sont caractérisés surtout par la forme

spéciale de leurs éléments délirants; ils ont au moins ce dé-

tail symptomatique en plus et l'aspect de leurs conceptions

diffère plus ou moins dans sa teneur.

Ils sont en tout cas à rapprocher des démonomanes et font

partie avec les démonomanes et les théomanes raisonnants

de la famille des délirants mystiques.

' Pendant sa longue période de névrose phobique, le malade avait

précisément eu souvent la crainte de se jeter du haut des fenêtres ou

des ponts. Cette image du suicide jadis redouté a pu se fixer dans son

travail subconscient où elle se traduit aujourd'hui par des impulsions à

ces mêmes actes.

* Le danger d'homicide doit aussi entrer en ligne de compte. Récem-

ment les journaux mentionnaient une tentative d'homicide commise sur

sa femme par un spirite qui un esprit avait dit que cette dernière le

trompait. 1 '

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIQUES.

XXVII. Vomissements incoercibles et fécaloïdes au cours d'une

tumeur des plexus choroïdes duIV° ventricule; par M. J. Paviot

(Société médicale des hôpitaux de Lyon, 13 octobre 1903. .

M Paviot rapporte l'observation d'un malade ayant présenté

comme manifestation rare de tumeur cérébrale des vomissements

poussés jusqu'à l'incoercibilité et au caractère fécaloïde. A l'au-

topsie, on trouva dans le quatrième ventricule, une tumeur

bilobée, avec petite grappe'muriforme en haut. Elle n'avait avec

la substance du plancher ou celle du cervelet, que des rapports

de coutiguité ; elle répondait en somme à une production des

plexus choroïdes, dite « psammome ».

Cette tumeur avait étalé le 4° ventricule, comprimé et diminué

dans le sens antero-postérieur, l'épaisseur du bulbe et de la protu-

bérance, mais nulle part, elle n'avait envahi ou détruit la sub-

stance nerveuse.

L'auteur pense qu'on peut expliquer les vomissements incoer-

cibles par la persistance de l'antipéristaltisme et ce dernier par

l'irritation du noyau des pneumogastriques comprimés dans le

plancher du quatrième ventricule. G. C.RnIE11.

XXVIII. Autocytotoxine spécifique et anti-autocytotoxine dans le

sang des épileptiques ; par C. CirNi. Contribution à la patho-

logie des affections cérebrales toxiques ; pal' W. 1 LTEIt. - Contri-

bution à la question de quelques propriétés soi-disant toxiques

et thérapeutiques du sérum du sang des épileptiques ; par G.

Sala et T. Rossi. - (Nell1'oloyisches Cenlrnlblalt. XXII 1903,

ilos 8, 11, 18, 1903).

M. Ceni a entrepris sur des lapins des expériences ayant pour

but de déterminer si le sérum sanguin des épileptiques est capable

d'engendrer dans l'organisme animal des produits d'un activité assi-

milable à celle d'un des deux principes toxiques ou thérapeutiques

précédemment mis en lumière (Archives de Neurologie, 1903.

I. XVI p. 148). Pour lui, les phénomènes d'intoxication aiguë obser-

vés chez les épileptiques traités par le sérum d'animaux inoculés

au sérum d'épileptiques, ces phénomènes sont à peu près les

152 REVUE D'ANATOMUS ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

mêmes que ceux qu'il a vus quelquefois se produire chez les épilep-

tiques auxquels avait été injecté du sérum d'autres épileptiques.

Sans doute le sérum de lapins inoculés avec du sérum du sans

d'hommes normaux possède certaines propriétés toxiques, qui, en

somme, se trouvent dans le sérum cytotoxique ordinaire; mais si

l'on compare les symptômes toxiques de cette série avec ceux des

cas dans lesquels on'avait l'ait agir du sérum de lapins inoculés au

sérum d'épileptiques, on voit qu'il s'agit d'une pure réaction locale,

bien moins intense que dans les cas précédents. A la suite de l'exa-

men des multiples conditions expérimentales mises en vedette

dans le mémoire. M. Ceni conclut :

Les phénomènes d'intoxication spécifique observés chez les épilepti-

ques à la suite de l'injection de séiuni, tant d'autres épileptiques que

d'animaux inoculés au sérum d'épileptiques, ces phénomènes toxiques

ne doivent point être attribués à une nouvelle quantité de cytotoxine

que l'on aurait introduite dans l'organisme ; il faut les rattachfr a la

substance sensibilisatrice de la cytotoxine qui rend les éléments t'pitep-

togènes plus sensibles à l'égard de l'alexine circulant déjà chez l'épilep-

tique. - Dans le sang des épileptiques circule en même temps, qu'une

autocytotoxme spécifique une antiautocytotoxine. Ce principe antitoxique

n'est cependant point en solution dans le plasma vivant; il existe dans

le sang à l'état latent; il adhère aux éléments cellulaires du sang dont

il est détaché par un processus phagolytique ainsi que l'auteur l'a déjà

prétendu, quant au principe thérapeutique du sérum des épileptiques.

De ces recherches, M. ALTER déduit que certaines maladies du

système nerveux central, au premier rang la paralysie générale et

l'épilepsie, tiennent à ce que sur les substances prél'ormées du sys-

tème nerveux s'accrochent des toxines spécifiques dont l'origine

de fabrication est inconnue, mais qui n'en sont pas moins versées

dans le sang du malade.

Genèse de la paralysie générale. -1 a-t-il production continuedu

poison, celui-ci se combine continuellement au corps même delà

cellule qui s'épuise, subit l'altération régressive, la dégénérescence

progressive. La paralysie générale procède-t-elle par poussées,

c'est que, grâce à des conditions constitutionnelles et cytogéniques

individuelles, il se produit des composés chimiques secondaires

qui sont versés dans la circulation et sont aptes à paralyser pen-

dant assez longtemps la toxine qui y afflue. Cette antitoxine vient-

elle à prédominer; on assiste à une rémission de la paralysie

générale. - Malheureusement il ne s'en produit généralement

qu'une très faible quantité, la cellule n'est que soulagée, elle n'est

pas débarrassée de l'étreinte toxique ; le processus anatomo-patho-

logique reprend, les altérations régressives progressent sans s ar-

rêter, d'où le caractère progressif de la destruction générale.

REVUE D'ANA1'( 'AT110L0GIQUES. 153

Genèse de l'épilepsie. - L'attaque est l'expression directe de l'an-

crage de la toxine dans la cellule nerveuse des divers territoires,

d'où la physionomie multiple des manifestations. Mais, c'est surtout

ici que se forment ces composés antitoxiques secondaires. C'est

ici surtout que cette antitoxine combat victorieusement le composé

toxique du courant sanguin. Quand, pour des raisons individuelles

la formation d'antitoxine et son introduction dans le sang sont de

faible quantité, on a l'état de mal épileptique et les attaques d'épi-

lepsie sllbintmntes; l'épuisement des cellules nerveuses, les dégé-

nérescences de ces cellules. Généralement, par contre, il se produit

assez d'antitoxine pour qu'il s'effctue réparation complète, bien

que passagère, de la vitalité de la cellule.

Cette hypothèse s'appliquerait fort bien à d'autres psychoses

chroniques ou transitoires, à l'hystérie notamment. Elle ouvre la

voie à une thérapeutique spécifique de certaines affections men-

tales. On peut s'efforcer de pousser à la formation de l'antitoxine

endogène, ou d'introduire dans l'organisme des substances exo-

gènes équivalentes. M. ALTER a commencé l'étude chez l'animal,

chez le paralytique, chez le non paralytique, d'infusions, de bouil-

lons cérébraux de concentrationsetde valeursprécises. Ces infusions

produiraient des effets spéciaux bien caractéristiques, des réactions

toutes différentes de celles des solutions chlorosodiques, notam-

ment sur le système nerveux central du paralytique général.

M. ALTEU attendrait également beaucoup des sérums empruntés

àdes animaux infectés par des inoculations progressives de sang

de paralytiques généraux, d'épileptiques, et de l'utilisation du cer-

veau de ces individus dans le même sens.

ml. SALA et Ilossi ont contrôlé les asssertions de M. Ceni de la

façon suivante : Choix préalable de cinq épileptiques sevrés de tout

traitement, soumis à un régime et à un mode d'existence uni-

formes, soit pendant cette période d'observation, soit pendant la

période d'essai sérothérapique, et pesés régulièrement ; contrôle

simultané de leur nourriture et des produits de leur nutrition, et

pendant qn'on faisait agir le sérum et tandis qu'on en suspendait

l'injection. D'autre part saignée aseptique d'autres patients égale-

ment sevrés de tout traitement anti épileptique; c'est à ce sang

qu'était emprunté le sérum soigneusement recueilli et conservé

dans un endroit frais, avec l'aide des méthodes de stérilisation

habituelles (addition d'un peu de camphre). Les injections de sérum

ont été faites aux cinq épileptiques sus-désignés, avec toutes les

précautions aseptiques de rigueur.

Conclusions. 1° Les injections de sérum sanguin provenant d'épi-

leptiques n'ont exercé aucune action bienfaisante sur la marche de l'épi-

lepsie des cinq épileptiques. -2° Elles n'ont jamais déterminé de phé-

nomènes toxiques ni passagers, ni durables ; elles sont demeurées

1S4 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

anodines. - 3° Les mêmes malades soumis au traitement bromuié et à

l'électrisation galvanique (méthode de Mondino) en ont éprouvé des effets

favorables. , P. Kehaval.

XXIX. L'état actuel de l'anatomie pathologique du système

nerveux central, par 1VISSL. (Centmlblatt sur Ne2ueizheill,rtzde.

XXVI. N. F. XIV. 1903).

L'anatomie pathologique des organes centraux s'est, jusque dans

les temps les plus récents, efforcé de déterminer les altérations

des cellules nerveuses et des fibres en insistant surtout sur la loca-

lisation du territoire dans l'enceinte duquel on constatait l'exis-

tence des cellules et fibres nerveuses altérées. Par contre, on ne

s'est préocccupé qu'en seconde ligne de comprendre les processus

histologiques sous-jacents. Or, la revue des travaux de Max Schultze,

Deiters, Gerlach, Meynert, Weigert, Flechsig, Golgi, llissl, dé-

montre pour l'auteur la nécessité de se préoccuper davantage des

problèmes d'histologie pure. Pour arriver à rattacher la modalité

clinique à la lésion, il faut, avant tout, interpréter correctement

tous les éléments histologiques de cette lésion.

Expérimentons. L'expérimentation nous permettra d'observer

les organites histologiques en voie de transformations patholo-

giques, de suivre la genèse,- la décadence, la disparition des cel-

lules et de leurs produits, de rattacher chacun de ces détails

évolutifs aux symptômes cliniques. L'expérimentation n'a-t-elle

pas éclairé les inflammations aiguës, les processus consécutifs au

traumatisme, les phénomènes de réparation des tissus nerveux

détruits. Il nous reste à pénétrer le mécanisme des nombreux pro-

cessus morbides indemmes de toute altération inllammatoire appa-

rente de l'appareil vasculaire, tels que la sclérose en plaques, les

dégénérescences primitives des cordons de la moelle, les altérations

corticales de la démence précoce. De grosses réformes devront

être introduites dans la nomenclature anatomo pathologique.

Les lésions régressives admises, jusqu'ici nous offrent peu d'élé-

ments utilisables. On ne saurait admettre l'existence de l'atrophie

simple ; on ne connaît pas de dégénérescence graisseuse de la cel-

lule nerveuse. Les états dits de tuméfaction trouble ne se voient

ni dans les composants nerveux, ni dans les composants d'autre

nature des organes centraux. Les au très formes d'altérations régres-

sives représentent des modalités terminales de divers processus

pathologiques. ,

Les critiques précédentes s'appliquent mieux encore à la notion

dp-l'inflam1Jlation. Si nous désignons ainsi une lésion du tissu

nerveux s'accompagnant de prolification des ingrédients histolo-

giques non nerveux et de réaction de l'appareil vasculaire sanguin

et lymphatique sous forme d'exsudations, nous n'avons que très

peu de processus morbides à ranger sous cette bannière. Il n'y a, .

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 185

en ce qui concerne les centres nerveux, aucune raison de conserver

l'étiquette d'inflammation interstitielle dans laquelle les vaisseaux

sanguins n'interviendraient pas pour engendrer des processus

exsudatifs.

C'est la technique qui, pendant les dix dernières années, a fait

faire de prodigieux progrès à l'histologie pathologique des centres

nerveux. Mais, le problème le plus important, celui des relations

des cellules, des fibres et de la substance grise, attend encore sa

solution. Nous connaissons bien peu de chose sur l'appareil vas-

culaire et lymphatique.

Le but à atteindre actuellement consiste, non pas à délimiter

rigoureusement, à localiser les éléments nerveux affectés, non

pas à rattacher les signes cliniques à la lésion anatomique, mais

bien à rechercher méthodiquement la nature des processus histolo-

tiques sous-jacents au tableau morbide à différencier les uns des

autres aussi nettement que possible les divers processus d'altéra-

tions histologiques. P. Ji : EHAVAL.

XXX. De la quotité des fibres à myéline d'un cerveau normal et

d'un cerveau paralytique; parK. SCII,\FFEH. (Neurologisch. Central-

glatit, 1\in, 1903).

L'auteur montre, avec de nombreuses figures à l'appui, qu'il y a

des cas de paralysie générale dans lesquels la déchéance des fibres

blanches, ne se propageant pas à l'hémisphère entier, porte sur-

tout sur certaines régions, et en laisse d'autres intactes. Dans

l'espèce, outre les circonvolutions frontales de la base, les circon-

volutions pariétales et temporales (sauf les temporales profondes),

et une partie de l'insula sont particulièrement affectées. Par contre,

les ascendantes, les frontales de la convexité, le lobe occipital, le

coin. la corne d'Ammon, une partie de l'insula sont indemnes de

l'atrophie des fibres. Le processus dégénératif épargne tout à fait

ou relativement les centres sensoriels; les territoires le. plus fré-

quemment et le plus fortement altérés sont ceux que Flechsig

désine sous le nom de centres d'association. L'observation pré-

sente est un exemple de dégénérescence circonscrite localisée des

fibres blanches '.

M. Schalferen possède actuellement une autre de paralysie géné-

rale à la dernière période, où l'hémisphère entier trahit l'atrophie

des fibres. la plus grande qui sepuisse imaginer. Partout les fibres

blanches de l'écorce ont totalement disparu; seule la frontale

ascendante présente en son tiers moyen des fibres myéliniques ru-

dimentaires, mais elle est elle-même excessivement dégénérée. On

peut néanmoins se demander si certains cas d'atrophie diffuse ne

' Voy. Archives de Xenrologie, t. XIV, 1902. p. b7.

156 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

seraient pas au début localisés. La lésion qui semble sous le

microscope la plus diffuse ne pourrait-elle avoir deux modes de

développement ? Un mécanisme au début localisé ? lin mécanisme

dès le début diffus ? Pour résoudre la question, il n'y a qu'à exa-

miner des cas tout à fait récents ou relativement récents.

P. KEHAVAL.

XXXI. Des centres corticaux de l'accommodation ; pari. I. 131ELr1z6Y.

(Oborétié psichialrü, VII, 1902.)

Ingénieuses expériences sur des chiens et des singes, dont nous

ne pouvons qu'indiquer l'idée générale. Après avoir lixé l'oeil, on

enfonce, soit obliquement à travers la cornée, soit dans le plan de

l'équateur, une aiguille assez mince dont le bout doit toucher la

face antérieure du cristallin ou la couronne ciliaire ; son extrémité

extérieure se déplace en sens inverse des changements de volume

du cristallin ; elle est allongée d'un petit chalumeau de 10 centi-

mètres. On excite l'écorce du cerveau.

Quatre zones produiraient un effort de l'accommodation, tdntde

l'oeil du même côté que de l'oeil du côté opposé à l'excitation. L'une

occupe une surface de 1 centimètre 1/2 à 2 centimètres de diamè-

tre dans le tiers postérieur des 2e et 3° pariétales et empiète sur la

région occipitale antérieure (chien et singe). Une petite zone est

située sur le gyrus angulaire (pli courbe), chez le singe seulement.

Une troisième, exclusive aussi au singe, existe à la face interne

de l'hémisphère immédiatement en avant du tiers supérieur de la

fissure calcarone. La quatrième, commune à ces deux animaux,

fort limitée, se trouve dans la circonvolution centrale antérieure

(frontale ascendante) au niveau de l'extrémité du sillon crucial.

Des variétés des conditions expérimentales, il résulte que les

zones occipito-pariétates joueraient très probablement le rôle de

centres réflexes contrairement à la zone de la région motrice-

D'ailleurs l'effort accommodateurpeut êtreégatementprovoqnepar

l'excitation du tubercule quadrijumeau antérieur en un point fort

limité qui occupe la limite de l'acqueduc de Sylvius et du 3° ven-

tricule. Enfin la contraction et la détente du muscle ciliaire

s'effectuent lentement comme il arrive pour les fibres musculaires

lisses. Impossible de noter de relations constantes entre l'excitation

des zones corticales quelconques sus-énoncées et le resserrement

ou la dilatation de la pupille. P. KERAVAL.

(

XXXII. Nouveaux éléments relatifs à la physiologie des réflexes

profonds; par A.-K. Sciitsciiemiak. (Obozrénié psirhialtii, VII,

1902.) Nouvelles contributions à la physiologie des réflexes ten-

dieux : par le même. (Neurolog. Centrulb. XXII, 1903.)

Même article en russe et en allemand. Etude de l'action des

REVUE D'ANA'l'OJIIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 157

vibrations du diapason sur le réflexe du genou chez 4fi lapins.

L'application locale des vibrations à la région de l'articulation du

genou produit des phénomènes spasmodiques marqués qui, pour

une force et une durée données, se peuvent strictement limiter à

l'extrémité en question. On obtient une exagération unilatérale du

réflexe du genou, du clonus de cette articulation, à la percussion

et aux mouvements passifs du genou, du tremblement spasmodi-

que ; tous ces phénomènes se peuvent produire aussi quand on

excite l'autre patte (llyperréllexe croisé). Le clonus du genou en

maints cas atteint les degrés les plus extrêmes et dure pas mal de

minutes ; il apparaît parfois spontanément.

Les vibrations semblent être en réalité les excitants spécifiques

des terminaisons nerveuses profondes qui sont mises en action

pendant les réflexes. Les expériences sont en faveur de l'opinion

que les vibrations chargeraient artificiellement de l'énergie ner-

veuse les appareils réflexes et que la décharge dont elles sont

également l'auteur serait précipitée par les mouvements passifs ou

au moyen de l'immobilité permanente de l'animal.

Si l'un sectionne la moelle à la partie dorsale moyenne, et que

l'on fasse agir les vibrations locales, on obtient l'exagération

unilatérale permanente du réflexe du genou, mais non le clonus

ni le tremblement spasmodique en dépit de plusieurs centaines de

mouvements passifs.

Les expériences de contrôle par l'application des* vibrations sur

les os de la jambe, du bassin, les parties molles de la cuisse, le

crural, fournissent des résultats absolument négatifs ou des phé-

nomènes spasmodiques faibles ; ces derniers seulement dans le

cas où les vibrations sont appliquées près de l'articulation du

genou et s'y peuvent propager, par exemple à la moitié supérieure

de la jambe.

L'immobilité permanente de l'animal normal, qui n'a pas subi

les vibration*, ne produit, durât-elle deux ou trois heures,

aucun effet, tandis qu'un lapin qui les a subies est au bout de

trente à quarante-cinq minutes pris de spasmes. Une immobilité de

six heures produit des symptômes tout à fait analogues à ceux

qui suivent les vibrations mais bien plus faibles.

La mise en charge de l'animal par les vibrations n'exerce pas

d'influence essentielle sur son état général, ni sur le tonus muscu-

laiie. Malgré l'exagération évidente des réflexes tendineux, le clo-

nus du genou, la tonicité des muscles correspondants demeure

assez, souvent invariable ; elle-peut au contraire être affaiblie.

L'application des vibrations à la colonne vertébrale (régions

dorsale inférieure, cervicale, sacrée), entraîne le spasme de tous

les muscles des deux pattes postérieures, surtout accusé quand

1 excitation est localisée à la région dorsale inférieure. Assez sou-

vent la charge demeure en l'espèce très latente : quelques jours

158 REVUE L'ANA'l'0lilE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

par exemple après l'expérience, il faut pratiquer 1.000 à 1.500

mouvements passifs pour dégager le clonus du genou et les trem-

blements spasmodiques. Les vibrations sur la colonne vertébrale

provoquent aussi'du clonus de l'articulation coxo-fémorale.

P. Keraval.

l\I11. Un noyau spécial de la formation réticulée dans la région

supérieure de la protubérance; parW. de l3ECn'rEnw. (Ncvr'olog,

Centrcclbl, XXI, 1902.)

On connaît jusqu'ici le noyau du cordon antérieur ou respi-

ratoire de ulisslawsl;y, le noyau central inférieur de Rolier,. le

noyau réticulaire du tegmentum pontis de Hechterew, le noyau

central supérieur ou médian de ]3eclitei-ev, le noyau inomiaé de

Hechterew, le noyau du faisceau pédonculaire- transverse de Becll-

terew et Kirilzen. En voici un septième, situé au niveau de la pro-

tubérance en arrière du tubercule quadrijumeau postérieur dans

les parties profondes de l'étage supérieur des pédoncules céré-

braux. Le picrocarmin montre que chez le chat il se compose de

grosses cellules multipolaires déjà visibles à l'oeil nu, souvent plus

volumineuses que les cellules motrices des cornes antérieures de

la moelle. 11 occupe les mêmes portions de la formation réticulée

que le noyau central inférieur, c'est-à-dire celles qui représen-

tent les prolongements des faisceaux essentiels du cordon latéral

de la moelle. Aussi peut-on le nommer noyau centrai supérieur

latéral, ou tout court, noyau central supérieur, média), ou mieux

médian. On le trouve également chez le chien et l'homme, mais

chez l'homme les cellules en sont moins grosses et il est moins

prononcé. P. Keraval.

XXXIV. De l'origine et de la nature de la narcose nerveuse;

N. E. WEDEN5KY. 0&o. : )'eHt'e psichiatrü. VII, 1902, 2, 3, Il.

Chaque fibre nerveuse possède deux propriétés fondamentales;

l'excitabilité et la conductibilité. Schiff avait émis la doctrine

qu'elles étaient distinctes de leur nature, car en certaines conditions

on pouvait les désunir, les isoler l'une de l'autre. Gruenhagen dit

l'avoir démontré par l'expérience du nerf dont une partie est

enfermée dans un tube et soumise à un courant de gaz carbonique.

Cette paitie perd son excitabilité, tandis que l'excitation du même

nerf au-dessus du tube transmet le mouvementà travers sa portion

inexcitable, comme si de rien n'était. L'emploi de l'éther, du chlo-

roforme, de l'alcool, etc., a donné le même résultat. Cependant,

si l'expérience est trop prolongée, la conductibilité après avoir

résiste longtemps, disparaît soudain; à ce moment, l'excitabilité de

la portion intoxiquée conserve encore quelque vigueur, bien qu'affai-

blie, pour ensuite disparaître. Si cette situation n'est pas maintenue

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 15u

longtemps, la cessation de l'action toxique permet au nerfderécupé-

rer toutes ses fonctions normales. C'est donc une vraie narcose.

Spillmann, Luchsinger, Efronn, Gad, Sawyer, Potrowsky. Pour

Ilerzen, le nerf possède, indépendamment de son activité fonction-

nelle, une activité électrique propre ; il les aurait désunies.

La prétention d'Herzen est fausse : une méthode exacte, une

règle de comparaison judicieuse le démontrent. Les faits de Gruen-

hagen et autres sont vrais, mais l'interprétation en est vicieuse.

Voici, d'après l'auteur, ce qu'il faut penser.

1° Il convient de cesser d'expliquer par la désunion des deux

(onctions fondamentales du nerf, l'excitabilité et la conductibilité,

les phénomènes observés sous l'influence d'un procédé narcotique

ou autre. 2° Les agents chimiques les plus divers, tout autant que

différents agents physiques, appliqués à un nerf, à une intensité

et pendant un temps connus, provoquent en lui un tableau de

modifications tout à fait analogue à celui qui se développe sous

l'action des substances narcotiques typiques. Par conséquent la

modification du nerf analogue à la narcose doit être appelée d'un

nom pins général, de celui de parabiose, et peut être considérée

comme sa réaction universelle aux opérations les plus diverses.

3" La parabiose, ou narcose, au sens étendu de ce mot, peut être

regardée comme un état d'éréthisme original, persévérant et sta-

hle, et, par suite se localisant à l'endroit où il a pris naissance.

4°. On peut considérer l'inhibition comme une parabiose tempo-

raire provoquée par des éréthismes d'autre source, tandis que la

parabiose serait un état plus ou moins durable d'inhibition qui

possède sacause locale. Au fond ces deux phénomènes pourraient.

bien être de même ordre, tenir à une seule et même modification

des éléments nerveux, aune transformation de l'éréthisme devenu

continu et ferme. P. KERAVAL.

XXXV. Du réflexe sous-épineux, réflexe de l'extrémité supérieure

de l'homme, inconnu jusqu'ici; par Steiner. Du réflexe sous-épi-

neux, par W. Pickett. Réplique à W. Pickett; par Steiner. (Neu-

1'olog, Cenlralblalt. 18. 24. XXI. 1902.) Des réflexes sous-scapu-

laire et pectoral; par \\ ? \1. Bechterew. (Obozrénié psichiatrii.

Yll. 1902.) .

Si l'on frappe un endroit précis de l'omoplate tandis que le bras

pend librement et naturellement le long du tronc en pronation

légère, celui-ci fait un léger mouvement de rotation en dehors,

accompagné d'extension, de l'avant-bras (coaction du triceps bra-

chial). Tel est le réflexe du muscle sous-épineux. Il faut frapper non

où les faisceaux musculaires convergent vers la tête de l'humérus,

mais à 2 ou 3 centimètres de l'angle formé par l'épine de l'omo-

plate et le bord interne de l'omoplate, en se portant diagona-

160 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

lement au bord opposé de cet os : la zone sensible forme un cercle

irrégulier du diamètre d'une pièce de 5 marks. La description pré-

cédente indique que c'est un réflexe d'autant qu'il est exagéré d'un

seul côté dans les cas de lésions anatomiques cérébrales et spino-

cervicales. Ce n'est pas un réflexe mécanique. Il existe constant.

ment à l'état normal et échappe à l'influence mentale du sujet.

L'os n'a rien à voir en l'espèce puisqu'on peut percuter tous les

autres points de l'omoplate en vain. Des expériences à l'aide de la

cocaïne prouvent que la voie centripète est le nerf musculaire sen-

sible, que le réflexe est musculaire. Les aponévroses n'y sont pour

rien, Sternberg ayant démontré l'origine osseuse de tous les phé-

nomènes aponévrotiques, périostiques, articulaires. Chez 10 tabé-

tiques dorsolombaires banaux, malades depuis 8 ans au maximum,

il ne manquait jamais. 11 faut en distinguer le réflexe deltoïdien

produit par la percussion des parties postérieures du deltoide : le

bras s'éloigne du tronc ou s'élève. ,

William Pickett revendique la paternité du réflexe sous-epiueux.

(voy. On the scapulo-humeral reflexe of Bechterew il ! Journal of

nerv. and mental disease mai 1901.) 111. Steiner répond : Vous

avez vu l'effet moteur du sous-épineux, mais vous n'avez pas dé-

celé le réflexe clinique dont la nature a été élucidée par mes

expériences à la cocaïne. °

M. Bechterew indique que dans ses recherches sur le réflexe sca-

pulo-huméral il a attiré l'attention sur la contraction réflexe du

sous-épineux, etc.,etc. Est-ce un réflexe semblable aux autres réflexes

cérébro-spinaux ? La contraction dépend-elle de l'excitation méca-

nique du muscle ? Il faut pour en décider un nombre suffisant

d'observations pathologiques. Sa recherche peut être utile clini-

quement.

Un autre réflexe très important est celui du tendon du grand

pectoral à l'épine de la grande tubérosité de l'humérus. La percus-

sion de l'extrémité de ce tendon fait contracter tout le muscle et

produit l'adduction du membre au torse. Comme il est en partie

recouvert des libres antérieures du deltoïde, qui s'insèrent tout

près de la tubérosité numérale, le même coup de marteau pro-

voque la contraction de lapo1'lion intérieure du deltoide. Le réflexe

du pectoral, fort constant chez les gens bien portants, s'exagère de

concert avec les autres réflexes dans toutes les affections cérébrales

et dans les affections cérébrospinales siégeant au-dessus du ren-

flement cervical. Exagéré dans la paralysie spasmodique et dans

la sclérose latérale amyotrophique, il disparaît dans certains cas

de poliomyélite où la ceinture scapulaire est atteinte.

Lorsqu'il est exagéré, souvent la contraction du grand pectoral

s'accompagne non seulement de celle des faisceaux antérieurs du

deltoïde, mais parfois même de; celle du biceps dont la longue

portion au moment où elle se transforme en tendon passe sous

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 161

l'insertion du pectoral à l'humérus : il y a excitation mécanique de

ce tendon; en un cas par le même mécanisme les segments

antérieurs du trapèze se sont contractés. La position anatomique

du noyau du pectoral indique la localisation de ce réflexe dans la

région des segments cervicaux 4-7. P. KIRAVAL.

XXXVI. La réaction paradoxale des pupilles, avec observation

personnelle de rétrécissement des pupilles sous l'influence de

l'ombre; par J. PILTZ. (Neurolog. Ceatral6. YYI. 1902.) '

Long mémoire dont voici les conclusions :

Io Il existe diverses formes de réaction paradoxale des pu-

pilles. Ce sont : a. La réaction paradoxale des pupilles à l'accommo-

dation. Les pupilles se rétrécissent pour la vision de loin, et se

dilatentpourla fixationd'un objet rapproché, les conditions d'éclai-

rage restant les mêmes. Vysin qui l'a observée l'appelle perversion

de la réaction pupillaire. b. La réaction paradoxale apparente des

pupilles à la lumière. A la suite d'une lésion de l'iris, la contraction

du sphincter irien d'abord déterminée par l'agent lumineux est

suivie d'une dilatation de la pupille ou du coloboma, qui en impose

pour une dilatation d'emblée, par conséquent paradoxale, à la

lumière (Burchard). c. La réaction paradoxale vraie des pupilles à

la lumière. Dilatation des pupilles à la lumière et contraction des

pupilles dans l'ombre. Elle comporte trois espèces : 1° La dilata-

tion à la lumière sans contraction préalable (Morselli, Leitz, Silex);

2° La dilatation à la lumière précédée immédiatement de contrac-

tion (de Bechterew) ; 3° Le rétrécissement de la pupille dans l'om-

bre sans dilatation préalable (Piltz). II. La réaction paradoxale à

l'accommodation n'a jusqu'ici été vue que dans les maladies fonc-

tionnelles du système nerveux central ; la réaction paradoxale

apparente à la lumière n'a été observée qu'en un cas diridectomie ;

la vraie réaction paradoxale à la lumière est un phénomène très

rare qui peut être simulé par la réaction à la convergence, à la

divergence, à l'accomodation, par l'hippus des pupilles, par la

réaction à la chaleur ou réaction sympathique des pupilles, par

la réaction des pupilles sous l'influence de la contraction de l'or-

biculaire. III. Toutes les causes d'erreur étant éliminées, il ne reste

que cinq observations inattaquables de réaction paradoxale des

pupilles à la lumière : celle de Morselli dans la démence paraly-

tique, de Bechterew dans la syphilis cérébrale, de Leitz dans là

méningite tuberculeuse, de Silex dans l'épuisement avec agitation

d'origine traumatique, la mienne dans l'atrophie des nerfs opti-

ques syphilitique. IV. La vraie réactioa paradoxale des pupilles à

lalumièreest un symptôme extrêmement rare qui jusqu'à ce jour

a été observée presque exceptionnellement dans les affections

organiques graves du système nerveux. P. IiEnAVAL. z

Archives, 2- série, t. XVIII. 11

162 SOCIÉTÉS SAVANTES.

XXXVII. La circulation cérébrale pendant le coït; par L.-M. Poos-

SEPE. (06o,M ? cpSte/tM'n. VII. 1902.)

Trois expériences sur des chiennes soumises au mâle avec

tableaux. On lie toutes les branches d'une des carotides sauf la

carotide interne. On prend ensuite la pression du bout central et

du bout périphérique de la carotide à l'aide du kymographe enre-

gistreur, de Ludwig. La pression du bout périphérique n'est autre

que celle des vaisseaux du cercle artériel de Willis; celle du bout

central est la pression de la partie ascendante de l'aorte. Ces deux

pressions se trouvent inscrites sur le ruban sans fin de l'appareil à

l'état de courbes dont l'examen et la comparaison fournissent la

condition des vaisseaux du cerveau. :

Conclusions. - 1° Pendant la copulation, on observe une élé-

vation marquée de la pression générale du sang. 2° On observe

une hyperémie marquée du cerveau. 3° L'acte sexuel total est

caractérisé par une rapide alternance de contractions et de dila-

tations des vaisseaux du cerveau avec chute et élévation de la

pression générale du sang, qui dépendent des divers moments de

cet acte. 4° C'est immédiatement après l'introduction du pénis que

l'on observe le maximum de dilatation des vaisseaux du cerveau

et le maximum d'hyperémie de cet organe. 5° Après la fin du coït,

la pression du sang générale tombe notablement, l'animal est

moins vivant. l'hyperémie cérébrale est moins accentuée.

P. KERAVAL.

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE

Séance de juillet 1904. - PRÉSIDENCE DE M. Dêjerine.

Lésions des neurofibrilles dans la paralysie générale.

MM. GILBERT Ballet et LAIGNEL-L,1VASTINE présentent, traitées

par la nouvelle méthode de Cajal, des coupes d'écorces cérébrales

de paralytique général et de tuberculeux pris comme témoin. La

comparaison montre des lésions des neurofibrilles dans les cellules

nerveuses du paralytique, au maximum dans les petites et moyennes

pyramidales. Dans les grandes pyramidales n'existe souvent que

la raréfaction fibrillaire péri-nucléaire. En outre, le feutrage fibril-

laire péricellulaire est moins riche que chez les témoins. En somme,

1 sociétés savantes. 163

le processus de l'encéphalite diffuse lèse la substance achromatique

comme la chromatique.

déviation conjuguée des yeux avec rotation en sens opposé de la tête.

MM. Roussy et GAUCKLER présentent un cas suivi d'autopsie où

on trouva dans l'hémisphère gauche un foyer hémorragique inté-

ressant le tiers externe du thalamus, le segment postérieur de la

capsule interne et empiétant sur le noyau lenticulaire. Dans le

cerveau droit un foyer de dégénérescence secondaire dans la cap-

sule interne (lésion ancienne). Ce cas (sauf pour cette lésion

ancienne) est en tout semblable à celui de Grasset. Ces faits peu .

connus de déviation opposée méritent l'attention. On ne saurait

en effet leur appliquer la théorie récemment émise par le profes-

seur Bard qui n'explique pas tout le phénomène.

Accidents nerveux tardifs du rhumatisme articulaire franc.

M. LHERMITTE présente un malade qui, à la suite d'une polyar-

thrite rhumatismale aiguë, offre divers accidents nerveux : amyo-

trophie des mains, de l'avant-bras, du bras et du quadriceps

fémoral gauche, anesthésie cutanée segmentaire du bras droit et

de la jambe gauche, exagération des réflexes tendineux, et signe

de Babinski à gauche, ongles en verre de montre. Les anesthésies

peuvent être rapportées à l'hystérie ; les amyotrophies peuvent se

classer parmi les atrophies réflexes par lésion articulaire.

Sclérose en plaques chez un infantile myxoedémateux.

MM. HAYMOND et GUILLAIN présentent un jeune infantile myxoedé-

mateux de dix-huit ans porteur de signes évidents de sclérose en

plaques (tremblement intentionnel, parole lente et scandée, nys-

tagmus) et de débilité mentale. La sclérose en plaques est très

rare chez les enfants.

Syringomyélie avec chei1'ornégalie.

MM. RAYNOND et GUILLAIN présentent un syringomyélique ayant

une main hypertrophiée d'aspect pseudo-acromégale. Ces hyper-

trophies pseudo-acromégaliques signalées par Charcot, Brissaud,

Marie, dans la syringomyélie sont rares. L'hypertrophie dans ces

cas peut porter soit sur les os, soit sur les parties molles. La radio-

graphie a montré que dans le cas présenté l'hypertrophie porte

sur les parties molles. Il n'y a pas d'arthropathie en évolution.

Ces hypertrophies peuvent se montrer au début ou tardivement.

Surdité et cécité verbales, aphasie totale, autopsie.

MM. Déjerine et Thomas présentent les pièces d'une malade com-

plètement aphasique avec mutisme opiniâtre, absence absolue de

164 sociétés savantes.

la jargonaphasie des sourds verbaux. Or, le cerveau frontal est

absolument sain. La première et la deuxième temporales étaient

histologiquement altérées, enfin il y avait une grosse lésion du pli

courbe. C'est aux dégénérations secondaires dans les faisceaux

d'association que les auteurs attribuent l'aphasie motrice, consé-

quence indirecte des aphasies sensorielles.

Ncevus avec varices et hypertrophie osseuse.

' MM. GUILLAIN et COURTELLEMONT présentent un sujet atteint d'un

noevus variqueux ostéo-hypertrophique, occupant le membre supé-

rieur droit avec le moignon de l'épaule, la base du cou et le som-

met du thorax, -laissant indemne le creux axillaire. Il semble que

la malformation cutanée occupe toute la zone radiculaire du mem-

bre à l'exception- de la bande correspondant à la septième cervi-

cale. Tous les noevi n'occupent pas une disposition radiculaire;

certains, en effet, ont une topographie périphérique et' d'autres

métamérique.

Troubles auditifs dans les tumeurs cérébrales.

M. Souques, chez un homme atteint de tumeur cérébrale, une

surdité complète et bilatérale, ayant évolué en quelques mois avec

des phénomènes d'irritation unilatérale du trijumeau, avait fait

diagnostiquer une localisation basilaire. A l'autopsie, on ne trouva

qu'une tumeur volumineuse au lobe préfrontal gauche. L'augmen-

tation de pression céphalorachidienne est-elle capable d'abolir

l'audition comme la vision et par quel mécanisme ? 2

Les dégél1émtions du cordon antérieur de la moelle.

MM. P. Marie et GUILLAIN défendent contre une précédente com-

munication de mye Déjerine leurs conclusions premières sur les

dégénérations du cordon antérieur. Consécutivement aux lésious

cérébrales très vastes le tractus de sclérose du faisceau pyramidal

direct, non seulement n'occupe pas la moitié interne du cordon

antérieur; mais il est souvent très minime et fait quelquefois

défaut. Les dégénérations de ce cordon par lésions cérébrales sont

l'exception. Ces dégénérations consécutives aux lésions du mésen-

céphale, du métencéphale, du myélencéphale, déterminent dans

le cordon antérieur une dégénérescence plus volumineuse et plus

étendue pouvant prendre la forme d'un croissant. En effet, dans

ce cordon descendent des fibres « parapyramidales » qui n'appar-

tiennent pas au faisceau pyramidal d'origine corticale bien qu'elles

occupent dans la moelle une situation adjacente.

, F. BOISSIEft.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 165

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 28 mars. - Présidence DE M. BRDNET.

Le décubitus aigu dans la paralysie générale.

M. VIGOUROUX : fait une étude rapide de l'escarre qu'on a consi-

dérée longtemps comme une complication obligatoire de la période

terminale de la paralysie générale. Une opinion très courante et

partagée par de nombreux aliénistes est que l'escarre est évitable

par des soins de propreté et d'hygiène. Mais il en est un certain

nombre que n'empêcheront point des soins minutieux : celles d'o-

rigine cérébrale, médullaire, névritique. L'auteur apporte deux

observations de ces escarres survenues à la suite d'ictus chez des

paralytiques généraux, dont l'un n'est resté alité que trois jours et

l'autre était atteint de rétention d'urine : le décubitus prolongé

dans le premier cas, la macération dans le second ne peuvent donc

être invoqués comme facteurs étiologiques. L'évolution de ces

escarres a été la suivante : d'abord congestion de la région fessière

et production d'une plaque d'érythème qui s'est couverte de phlyc-

tères ; formation d'une croule épidermique recouvrant des tissus

mortifiés ; élimination de ceux-ci, d'où une ulcération anfractueuse

ne suppurant pas; enfin période de réparation rapide. Le pronostic

de ces complications n'est donc pas défavorable. La pathogénie en

a été très discutée : l'auteur pense, avec M. Durante, qu'elles sont

le produit de poussées congestives avec rupture vasculaire dans le

tissu cellulaire sous-cutané, comme il s'en forme dans un peu tous

les organes du paralytique général.

M. Anrraon est de l'avis de M. Vigouroux ; s'il a publié autrefois

que les escarres ne tiennent pas à la maladie mais aux soins que

l'on donne, il s'est aperçu depuis qu'en dehors de la compression

et de la macération on pouvait en observer qui relèvent de troubles

trophiques consécutifs en particulier aux ictus.

M. BRIAND attache une grande importance aux soins de l'infir-

mier dans les variations du nombre des escarres qu'il a pu constater

depuis vingt ans dans son service ; toutefois il ne nie point le rôle

du trouble trophique. '

La prétendue bienveillance des paralytiques généraux.

M. PACTET expose les conditions du meurtre d'un infirmier de

son service par un malade très probablement paralytique général :

la victime avait été saisie par le cou et, en une minute, avait cessé

de vivre : tous les secours et soins médicaux, malgré leur rapidité,

166 SOCIÉTÉS savantes.

furent inutiles. L'autopsie, pratiquée par MM. Brouardel et Soc-

quet, fit admettre la mort par inhibition : il n'y avait en fait de

lésion qu'un certain degré de congestion pulmonaire. A ce propos,

M. Pactet s'élève contre la réputation de bienveillance que l'on

attribue généralement à tort aux paralytiques généraux : ce sont,

au contraire, des êtres très dangereux en raison de leur affaiblis-

sement intellectuel et de leur automatisme impulsif.

MM. BRIAND, CHRISTIAN, Marie sont d'accord avec M. PACTET pour

affirmer que les paralytiques généraux sont souvent des malades

dangereux qu'il faut surveiller spécialement à cet é2ard.

, Du rôle de l'imitation dans la formation d'un délire.

r 11111. VuRpAs et DUPR.1T étudient la formation d'un délire de per-

sécution, à : base religieuse : la malade, une dégénérée, à la suite

de la lecture d'une vie de sainte, se crée de cette sainte un modèle

que tous ses efforts vont tendre à imiter. La conception de cet

idéal a si bien coloré et transformé la mentalité et la vie de la

malade que celle-ci se croit appelée aux mêmes destinées que la

sainte : elle se révèle à plusieurs personnes, les harcèle de ses pro-

jets, les supplie d'obtempérer aux ordres que Dieu leur transmet

par elle. La résistance et le dédain que partout elle trouve la con-

firment dans l'idée d'une persécution diabolique, qui est le point

de départ d'un délire vrai de persécution. Des excentricités com-

mises dans une église la font interner, et l'asile devient un nouvel

aliment à ses théories délirantes.

. Les auteurs montrent comment, chez cette femme impression-

nable, l'intensité des images mentales, la faiblesse des facultés de

critique et d'abstraction ont laissé se créer une émotion intense

qui a polarisé sa vie psychique dans un sens net et défini, com-

ment sa vie s'oriente dès lors autour de ce système, constituant le

délire par imitation. Ce délire est bien différent du délire par con-

tagion où l'imitateur est passif; la malade des auteurs, au con-

traire, est active, originale, dans la création de son modèle.

Trois cas de fragilité des os chez des aliénés.

, MM. MARiEet VIOLLI;T, d'une étude qu'ils ont faite sur les frac-

tures spontanées dans trois cas de psychose organique, tirent les

conclusions suivantes : la fragilité des os peut s'observer chez les

aliénés comme le rachitisme. Elle se manifeste à l'occasion d'actions

musculaires ou de chocs minimes occasionnels. Des fractures par

action musculaire, combinée avec la fragilité des os, peuvent s'ob-

server dans l'épilepsie avec ou sans idiotie. Dans ces cas, les frac-

tures peuvent se produire au lit, au cours de crises convulsives,

sans choc; elles siègent principalement sur les os des membres

nférieurs (tibia, fémur). Dans la paralysie générale, des fractures

SOCIÉTÉS SAVANTES. 167

spontanées peuvent aussi s'observer; l'examen des os montre par-

fois une altération dystrophique générale qui les explique. Ces di-

verses fractures guérissent bien le plus souvent. La radiographie

peut aider beaucoup à leur diagnostic. Leurs causes restent à pré-

ciser ; elles peuvent relever d'altérations locales du squelette

(gommes), de lésions des centres trophiques ou bien de dystrophies

générales diathésiques (syphilis acquise ou héréditaire).

M. CHRISTIAN. - Les fractures spontanées ne sont pas rares au

cours des attaques épileptiques, non plus que les fractures par

action musculaire vive chez des individus normaux. Mais je n'ai

pas vu un seul cas de fracture spontanée chez les nombreux para-

lytiques généraux que j'ai vus passer pendant vingt-cinq ans à Cha-

renton. Les recherches faites avec M. Mabille n'ont montré aucune

altération du système osseux chez de nombreux paralytiques morts

à l'asile de Maréville.

M. Marie. - Des fractures spontanées ont été observées par

plusieurs auteurs chez les paralytiques généraux, par M. Régis

entre autres, qui en a rapporté d'intéressants exemples. M. B.

Séance dit-25 avril. - Présidence de M. Brunet. ,

Aperçu médico-légal sur les troubles mentaux ]Jost-tmumatiques.

MM. Marie et VIOLET, à la suite d'une enquête auprès de leurs

collègues des asiles, ont recueilli une centaine de cas de trauma-

tismes crâniens suivis de troubles mentaux.

Ils en tirent l'aperçu médico-légal suivant : '

1° Par suite des applications de plus en plus fréquentes et éten-

dues de la nouvelle loi sur les accidents du travail, les experts

seront plus souvent appelés à enquêter au sujet de troubles men-

taux ayant suivi immédiatement, ou à longue échéance, des trau-

matismes crâniens. '

2e Au cours des enquêtes, on a pour base d'appréciation les élé-

ments suivants : Nature du traumatisme et ses conditions de réa-

lisation. Caractères de la psychose surajoutée. Date d'apparition

de la psychose par rapport au traumatisme initial. Examen du

sujet au point de vue des stigmates dégénératifs persistants. Etude

des antécédents personnels et surtout héréditaires. Appréciation

des causes de folie de toute nature (chagrins, fatigues, préoccupa-

tions, excès), survenues entre le traumatisme et l'apparition de la

folie. '

3° Parmi les cas où il peut y avoir lieu à expertiser. on peut

citer : les questions d'assurances sur la vie, les traumatismes crâ-

niens survenus chez des soldats en service commandé, la respon-

sabilité des bureaux de placement et des patronages concernant

168 SOCIÉTÉS SAVANTES.

les aliénés sortis guéris des asiles au cas d'accidents survenus chez

l'employeur, coïncidant avec une rechute de folie. Les crimes et

délits commis pendant l'automatisme transitoire qu'on observe

parfois immédiatement après le traumatisme. Les attentats à la pu-

deur, délits d'ivresse, de vagabondage, etc., commis sous l'influence

d'impulsions érotiques, dipsomaniaques, etc., consécutives à un

traumatisme crânien. Enfin les indemnités à accorder à une vic-

time d'accident ordinaire en dehors du travail.

4° Les questions les plus délicates et les plus nouvelles auxquelles

on peut avoir à répondre ont trait aux articles de la loi de 1898

sur les accidents du travail. Outre les questions d'incapacité de

travail actuellement posées, il est à prévoir que dans un avenir

proche, les familles de traumatisés aliénés ' demanderont des

indemnités au sujet des troubles mentaux consécutifs. Ces trou-

bles peuvent être classés sous les titres suivants de la loi.

Incapacité immédiate et passagère de travail par trouble mental

suivi de guérison. Incapacité passagère de travail par trouble men-

tal non suivi de récupération totale des facultés psychiques, d'où

impossibilité d'un travail aussi complexe qu'auparavant. Incapa-

cité immédiate et permanente de travail par psychose incurable.

Incapacité éloignée et permanente de travail par psychose tardive

et incurable. Il importe de s'habituer dès maintenant à envisager

ces questions. - 1. 1

M. Marie fait remarquer combien il est difficile de déterminer

les conséquences psychiques d'un traumatisme crânien. La pré-

disposition, quand elle existe, ne dégage pas toute responsabilité.

M. BRIAND. Il est très difficile, et cependant important pour

l'expert, de connaître l'état psychique antérieur du blessé, les fa-

milles intéressées cachant quelquefois la vérité.

M. V1GOUROUIi. - Les relations pathogéniques d'un trauma-

tisme avec les troubles psychiquessont bien difficiles àétablir; dans

plusieurs cas, l'autopsie n'a révélé aucune lésion attribuable au

traumatisme.

M. BRIAND. J'ai connu un hypochondriaque dont les préoc-

cupations disparurent après qu'il se fût logé une balle dans la tête.

M. Marie. Il y a des cas d'une- extrême difficulté d'interpréta-

tion, ceux par exemple, dans lesquels il s'agit de déterminer dans

quelle mesure un traumatisme a déterminé ou hâté l'apparition ,

des troubles mentaux, et dans la pratique, ce problème se pose

quelquefois.

Un cas de folie ci deux avec infériorité relative de l'organe actif.

MM. Daovnnn et LEvAssoRT communiquent une observation de

folie en partie double évoluant simultanément chez la mère et la

fille. Il s'agit d'un délire polymorphe avec prédominance d'idées

SOCIÉTÉS SAVANTES. 1 69

mystiques et de persécution, développé chez la fille puis adopté

par la mère.

Le cas est intéressant par l'absence des éléments que Lasègue

et Fabret considèrent comme classiques, et sur lesquels ils s'ap-

puient pour faire de la folie à deux une folie communiquée :

a) Relativement à la différence intellectuelle des deux sujets, la

fille, organe actif, est inférieure à la mère, organe passif; outre

qu'elle est plus chargée héréditairement et qu'elle présente des

stigmates plus nets de dégénérescence, son délire est remarqua-

blement empreint de débilité, contrairement à celui de la mère

dont la coordination et l'enchaînement ne laissent rien à désirer.'

b) En ce qui concerne la préexistence du délire chez l'actif, le

cas n'est pas davantage en faveur de la théorie classique, car le

passif manifeste déjà des tendances délirantes évidentes au moment

où se développe le thème délirant commun.

c. Quant à la prééminence du délire de l'actif sur celui du

passif, elle est encore contestable, car la systématisation des idées

délirantes chez l'organe passif donne à son délire une intensité

très marquée.

En réalité, il ne s'agit pas d'une folie communiquée par un actif

à un passif, mais bien d'une folie simultanée avec orientation par

un organe et coordination par l'autre, ces considérations militent

en faveur de la théorie de M. Régis.

Etat obsédant point de départ d'une déformation de l'épaule et suivi

du délire des négations.

M. Privât de FORTUNIÉ rapporte l'observation d'une malade qui,

sous l'influence d'un état hypocondriaque et à l'occasion de trou-

bles de coenesthésie, a pris l'habitude d'exercer des tractions sur

son omoplate. Consécutivement, cette habitude s'est transformée

en besoin, et finalement en obsession continuelle. Une série de

mouvements analogues et également obsédants sont exécutés par

la malade : traction sur le cou, sur les clavicules, compressions

du larynx, des seins, coups donnés à la poitrine, sous le menton,

sur la tête.

Par suite de la répétition des mêmes mouvements, il s'est pro-

duit un relàchement des muscles fixateurs de l'omoplate qui per-

met à la malade de saisir cet os à pleine main. L'omoplate se

déplace avec une très grande facilité et fait saillie sous la peau

comme si elle était libre d'adhérences ; on constate à ce niveau la

présence d'une vaste bourse séreuse.

La mobilité exagérée de l'omoplate jointe à la saillie de son bord

spinal au repos et dans une position des bras intermédiaire aux

positions horizontale et verticale pouvait faire penser tout d'abord

a une paralysie du muscle grand dentelé, mais l'examen électrique

a démontré l'intégrité de la musculature de l'omoplate.

170 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Au point de vue mental et comme, conséquence de la préoccu-

pation continuelle qu'éprouve la malade au sujet de son état phy-

sique, ces mouvements par obsession ont un certain retentissement

en exagérant les troubles de la sensibilité et l'état hypocondriaque.

Ainsi sont nées des idées de suicide et progressivement la malade

est arrivée au délire des négations.

Dans cette observation plusieurs points sont à noter :

1° La genèse de l'état obsédant : dans ce cas il s'agit d'une

obsession acquise ; la malade n'a présenté auparavant aucun

trouble analogue et on ne rencontre chez elle aucun stigmate

d'hystérie. Plus exactement, il s'agit d'une habitude devenue

une obsession. Cette dernière est née à l'occasion de troubles

de la cénesthésie et, à ce point de vue, elle est à rapprocher

des hallucinations devenues obsédantes. De plus l'obsession s'est

présentée sous une forme continue, traduisant un état aboulique

très prononcé. Partant, cet état ne paraît pas susceptible de rétro-

céder ; ,

2° L'influence exercée par l'obsession sur l'état mental : l'idée

de suicide et les idées de négation se sont développées consécu-

tivement aux transformations éprouvées par la malade dans son

organisme. Dans l'espèce on peut dire que s'il ne s'agit pas de la

transformation d'une obsession en délire, néanmoins l'obsession

paraît avoir eu sur l'évolution de ce. dernier une influence déci-

sive ;

3° La tendance même de l'obsession (besoin de tirer), de com-

primer, de cogner les diverses parties de son corps), enfin la

déformation particulière de l'épaule susceptible de simuler une

paralysie du muscle grand dentelé. M. B.

SOCIÉTÉ DE NEUROPATHOLOGIE ET DE PSYCHIATRIE

DE MOSCOU

- . SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1903

' Un cas de myolrynie dans la polioence phalo-rnéningite aiguë,

S.-N. DEIÆKTORSKY, - Le malade, de quinze ans, s'adressa à la

Clinique des maladies nerveuses le 11 janvier 1903, se plaignant

sur la faiblesse des muscles du cou et du membre supérieur droit;

en mars de 1902 il avait eu un abcès sur la cuisse gauche. La ma-

ladie actuelle a débuté en juin de 1902. La température a été éle-

vée pendant plusieurs jours. Au commencement ont été paralysées

toutes les quatre extrémités ; ensuite, . les mouvements commen-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 171

cèrent à se restituer graduellement, mais dans la partie supérieure

du tronc des deux côtés et dans le bras droit resta la paralysie

atrophique ; dans la période de l'amélioration des mouvements,

apparurent des tiraillements involontaires des faisceaux muscu-

laires, de la parésie du nerf facial droit dans ses ramifications infé-

rieures et médianes. Des mouvements involontaires dans les

muscles mimiques de la face. L'abaissement de l'ouïe et de la sen-

sibilité osseuse du côté droit. Des mouvements involontaires de la

langue. De la paralysie atrophique des muscles de la partie supé-

rieure du tronc des deux côtés, plus accentuée du côté droit ; de la

paralysie' atrophique du bras droit. L'exagération de l'excitation

mécanique des muscles, qui n'ont pas été soumis à la dégénéres-

cence complète. L'exagération des' réflexes tendineux, du triceps

et du biceps du côté gauche. Une réaction de dégénérescence

complète dans les muscles biceps, deltoïdes scapularis et cucullaris

du côté droit. Dans les autres muscles atrophiés on observe une

diminution très marquée de l'excitabilité électrique galvanique et

faradique. Les mouvements des membres inférieurs sont normaux

et la nutrition suffisante. Les réflexes patillaires et ceux du tendon

d'Achille sont très exagérés des deux côtés. Point de clonus. La

sensibilité n'est pas troublée. Les réflexes cutanés sont assex vifs

et égaux des deux côtés. Dans les muscles de la face, du cou, du

tronc, des membres supérieurs et', en partie, des membres infé-

rieures, on remarque des tiraillements particuliers ; dans certains

muscles, surtout de la face et du cou, on voit un jeu incessant

d'un tempo très accéléré, sur le fond duquel apparaissent de temps

en temps des contractions tétaniques des faisceaux musculaires

isolés, de la durée de quelques -secondes ; dans les autres muscles

on observe préférenciellement des contractions plus lentes, se pro-

pageant d'un faisceau musculaire à l'autre, et envahissant tout le

muscle ; assez souvent on peut voir aussi sur les cuisses des tirail-

lements fibrillaires ordinaires. Pendant le sommeil, les mouve-

ments ne cessent point. Le début aigu de la maladie, son évolution,

l'état du malade, tout cela ne laisse aucun doute que nous avons

affaire ici à une poliomyélite ; puisque ce sont les nerfs bulbaires

qui sont altérés (les nerfs facial, auditif, pneumo-gastrique et, en

partie, le nerf lingual), il faut croire que c'est une polioence phalo-

myélite aiguë. Pourtant, vu cela que la maladie progresse, quoique

lentement, on peut présupposer le commencement d'un processus

chronique. La particularité du cas donné consiste dans cela que

les contractions variables involontaires des faisceaux musculaires

ne sont pas les tiraillements « fibrillaires », mais présentent le

tableau clinique décrit par SCHULTT,E sous le nom de myokymie. Le

rapporteur pense que les phénomènes dé myokymie peuvent

dépendre de l'irritation des cellules nerveuses des cornes anté-

rieures.

H2 Z . SOCIÉTÉS SAVANTES.

Un cas de psychose de Korsakoff.

B.-A. GuiLiAnovsKY. Malade de cinquante trois ans, marié. La

syphilis est réfutée ; le malade buvait quotidiennement environ

une bouteille d'eau-de-vie. Les deux dernières années il se plai-

gnait parfois sur des élancements dans les membres inférieurs

et un sentiment de pince dans les plantes des pieds ; en ce temps

il souffrait aussi du vertige pendant la marche. En été de 1902 et

en automne, la faiblesse des extrémités inférieures s'augmenta

pour autant, qu'il ne pouvait marcher qu'avec l'aide d'nn bâton.

Dans l'état psychique du malade on ne remarquait aucun change-

ment jusqu'au dernier temps, c'est-à-dire jusqu'au 10 janvier de

1903. La veille de ce jour le malade avait bu, mais pas plus qu'à

l'ordinaire; le lendemain matin, lorsque le malade ne s'était pas

encore réveillé, on remarqua chez lui une respiration avec ràle-

ments, un grincement de dents et un tremblement'des membres

supérieurs de courte durée ; le malade était gateux en ce temps;

la face était rouge; trois heures après la conscience éclaircit :

durant un quart d'heure il ne pouvait point parler, quoiqu'il

comprenait tout; ensuite, il commença à parler, mais d'une voix

'nasillarde. Il ressentait une faiblesse générale et particulière

dans les extrémités inférieures. Pendant quatre jours le malade

devait garder son lit; depuis lors on constata chez lui un affaiblis-

sement de mémoire très accentué et une certaine agitation; les

premiers jours il avait des hallucinations auditives; une semaine

plus tard, le malade commença à parler mieux, mais l'affaiblis-

sement de mémoire restait au même degré. Une artériosclérose

pas très accentuée. Le discours un peu intelligible Un affaiblisse-

ment général des muscles de tout le corps. Une faiblesse des deux

membres inférieurs, surtout plus accusée dans le membre gauche

et dans les articulations centrales. Une faiblesse, peu signifiante,

des membres supérieurs. Les réflexes tendineux sont exagérés,

les réflexes plantaires vifs. La conscience de la personnalité est

bien conservée. Le malade ne peut pas bien s'orienter dans son

entourage ; ordinairement, il dit qu'il se trouve dans une maison

appartenant à la couronne, qu'il est arrêté; tantôt il croit se

trouver à la gare ; parfois pense qu'il est à l'hôpital, mais il n'en

est pas sûr. Un affaiblissement très accentué de mémoire, surtout

concernant les événements récents ; constamment le malade

demande les noms des personnes avec lesquelles il parle, mais il

les oublie aussitôt. Sa mémoire concernant les événements des

dix années précédentes est aussi affaiblie, quoique à un degré

moins grand. Il existe chez le malade des fausses réminiscences.

Une certaine faiblesse et lenteur de combinaison.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 173

Sur la question du diagnostic de la psychose de K01'sakotf. '

S.-A. SOUKHAXOFF et A.-A. Boorcrrro. - La psychose polynévri-

tique, d'après l'opinion des rapporteurs,' est une forme morbide

autonome, où les accès psychiques se combinent avec les phéno-

mènes polynévritiques ; ces derniers peuvent être faiblement ex-

primés quelquefois. La psychose de 110RSA60rF le plus souvent est

provoquée par l'alcool ; mais dans ces cas la période initiale de la

maladie n'est pas si accentuée que dans les cas où la psychose de

KORSAKOFF est provoquée par l'ictère, la fièvre typhoïde, la pyohé-

mie, etc., et au début de la maladie on observe un état de con-

fusion mentale. Un état stable et uniforme avec oubli et fausses

réminiscences ou sans ces dernières peut durer des mois et des

années, s'améliorant lentement, même à desconditions favorables :

dans ces cas la personnalité du malade est conservée et sa con-

duite reste plus ou moins régulière. Dans les formes plus graves

et les états plus lourds les fausses réminiscences portent parfois

un caractère fantastique.' La restitutio ad integrum, dans cette

maladie, si même elle est possible, est très rare. La psychose de

KORSAKOFF apparaît comme une réaction du côté du système ner-

veux sur la saturation outre mesure de l'organisme par le poison.

Les toxines terminales, précédant il la manifestation delà psychose

polynévritique et se trouvant en connexion immédiate avec cette

dernière, doivent être identiques en commun, ce qui donne tou-

jours un seul et même tableau fondamental de, maladie. Il faut

différer la perte de mémoire alcoolique de la perte de mémoire

polynévritique ; dans le premier, car l'amnésie se développe graduel -

lement et s'accompagne par la modification correspondante de la

personnalité et des qualités morales. L'existence dans la psychose

de MoxsAorl7 des accès, ressemblant à la confusion mentale pri-

maire, ne contredit nullement l'indépendance de la psychose de

110RSAEOFF et on ne peut pas être d'accord avec l'opinion, par

exemple, de M. Séglas, que la psychose palynévritique appartient t

au groupe d'amentia de Meynert. Dans l'artériosclérose, le trouble

de mémoire porte un caractèré progressif, est accompagné d'une

déchéance très marquée des facultés mentales. Un tableau d'accès

ressemblant, mais pas identique, à la psychose de KORSAKOFF, peut

aussi se développer après l'apoplexie, dans les ambolies cérébrales,

etc. Dans la démence sénile peut aussi être observé un tableau,

ressemblant au tableau de la maladie donnée, mais le diagnostic

différentiel est comparativement facile dans ces cas, vu les phé-

nomènes accessoires (la modification déjà ancienne de la person-

nalité, l'affaiblissement du sens moral, le manque des accès poly-

névritiques, etc.). L'amnésie, parfois avec pgeudoréminiscences.

peut aussi s'observer dans les tumeurs cérébrales ; les rapporteurs

ne réfutent point la .possibilité de l'existence dans certains cas.

174 4 SOCIÉTÉS SAVANTES.

rares il est vrai, de la combinaison de la tumeur cérébrale avec la

psychose de EORSAEOFF (cas de MEYER, MONKE : .IOLLER et KAPLAN); z

ici se rapportent aussi les cas de syphilis cérébrale, où, d'après

l'avis de M. Mouravieff, les fausses réminiscencences portent un

caractère plus lent. Une coexistence, semblable d'accès, peutavoir

lieu aussi dans la paralysie générale. Souvent la psychose de Kaon-

SAKOFF se combine aussi avec la palio-encéphalite hémorrhagique

supérieure (de WERNtCKE) ; en outre, pendant le cours de la mala-

die en question, peuvent s'associer des vastes ramollissements

cérébraux. Les cas de la psychose de KonsAKOFF, sans polynévrites

(SCHULTZE, Luckerata, 1\10NKEMoLLER, Liepmann) ne sont pas démons-

tratifs, car les nerfs périphériques n'ont pas été examinés dans

ces cas. Il existe des troubles psychiques, où il n'y a point de

maladie de KoRsAKoFF, mais où il y a des modifications dans les

nerfs périphériques (ANGLADE, CRISTlANl). Pour la psychose de

IORSAKOFF est absolument nécessaire la coexistence d'un état psy-

chique particulier (amnésie avec fausses réminiscences ou sans ces

dernières, un état psychique comparativement vif) avec des phéno-

mènes polynévritiques.

N.-P. POSTOVSKY indique sur cela que la question sur le rapport

de l'amena de Oleyncrt à la polynévrite est seulement tracée dans

l'étude de la psychose de KonsaxoFxetdoit encore être bien étudiée.

Comment faut-il traiter le cas, où l'amentia apparait non comme

accès temporaire, mais comme phénomène stable ? Ne faut-il pas

l'examiner comme un type II de la psychose de Korsakoff ?

W.-A. u'IOURATOFF démontre sur cela qu'il existe des cas de dé-

mence appoplectique, sans névrites, répétant du côté psychique le

tableau de la maladie de KoRSAKOFF. L'un des phénomènes de cette

forme serties confabulations, et c'est déjà un phénomène de délire

avec coloration de démence. Par conséquent, on ne peut pas affir-

mer qu'il n'y a point de démence dans les psychoses polynévri-

tiques. M. MouRATOFF est porté à limiter les maladies de KopSAMFF ' >

seulement par le cas typique de psychose dans les polynévrites.

W.-P. SERBSKY trouve que dans le cas, dont parle W.-A. 31ouR.&-

TOFF, il y avait une psychose polynévritique très typique, ce qui a

été confirmé par l'examen microscopique des nerfs périphériques,

et le ramollissement du cerveau s'est associé après. Cela donne à

penser que dans le cas de la clinique du professeur BECHTEREFF, où

les nerfs périphériques n'ont pas été examinés, les ramollissements z

ont pu s'associer à la psychose polynévritique. Quant aux fausses

réminiscences, elles ne peuvent pas être envisagées comme délire

absurde.

Un cas de carcomatose de la moelle épinière.

P.-A. PRÉOBRAGENSâY. - La malade, de quatorze ans, entra à

l'hôpital le 5 mars 1901. D'il y a un mois, elle tomba et depuis lors

SOCIÉTÉS SAVANTES. 175 j

commença à se plaindre de sa main droite, quoique tout le temps

elle pouvait travailler. Cinq jours avant l'entrée à l'hôpital, elle

sentit des élancements dans l'omoplate droite ; ensuite, le mem-

bre supérieur droit fut paralysé et la veille de l'entrée à l'hôpital se

développa la paralysie de toutes les extrémités. Une paralysie com-

plète des membres supérieurs et inférieurs ; une anesthésie com-

plete inférieure jusqu'à'la région de la clavicule; manque de

réflexes superficiels et des réflexes profonds dans tous les mem-

bres. Affaiblissement de tous les muscles. Les nerfs crâniens

sont en ordre. Douze heures après son entrée, la malade

mourut. A l'autopsie on constata : une hématomyélie et un ramol-

lissement de la partie cervicale de la moelle épinière. L'examen

microscopique démontra un anguio-saicome, commençant du

fond du quatrième ventricule et se diminuant en direction infé-

rieure ; ayant atteint l'entrecroisement des pyramides, il devient

presque imperceptible : dans le centre de la moelle épinière il

avait l'aspect d'une petite raie : plus loin, la tumeur s'augmentait

beaucoup et envahissait la moitié droite et. en partie, la moitié

gauche de la région cervicale de la moelle épinière : en appro-

chant de la partie inférieure cervicale la néoformation diminue de

nouveau et n'occupe qu'une petite portion dans le centre de la

substance grise et la corne postérieure droite, et en tel aspect elle

va jusqu'à la région dorsale médiane, où s'augmente de nouveau à

l'étendue des deux segments ; puis jusqu'à la région lombaire elle

va en aspect d'une assez petite raie par le long de la corne posté-

rieure droite, où elle disparait progressivement; en outre le° sar-

come occupait encore la pie-mère, principalement dans la région

dorsale médiane. On rencontrait dans la néoformation une quan-

tité considérable de vaisseaux de diverse dimension, en commençant

prr des capillaires et en finissant par des vaisseaux et des cavités

excessivement élargis et remplis de sang ; une quantité de foyers

hémorrhagiques se trouvaient dans la tumeur et aussi au milieu

de la substance nerveuse. On apercevait encore beaucoup de

petites cellules et de fibres, se trouvant dans différents stades de

dégénérescence. La tumeur commençait de la pie-mére. ,

L.-S. MIN OR trouve très intéressant celait que les hémorrhagies

se disposaient dans la moelle épinière en aspect d'îlots; évidem-

ment, une cause quelconque a influé, d'une manière identique,

sur les endroits analogues de la moelle épinière dans différents

niveaux. '

G.-J. PRIBYTKOFF compte très grave la disposition de la tumeur

dans le centre de la moelle épinière, presque partoutsonlong;cela

rappelle une telle dispositiond ans-d'autres processus pathologiques

(la myélite centrale, la myélite infectieuse avec abcès, les hémor-

rhagies indépendantes). '

A.-A. Iioaw.or.orr doute, si l'on peut dire, que les hémor-

176 SOCIÉTÉS SAVANTES.

rhagies en forme d'îlots disséminés, se soient développés simulta-

nément.

M. MOLTCIIANCFP, A. BERNSTEIN, S. SoUKHANOFF.

TREIZIEME SESSION ANNUELLE DE LA'SOCIÉTÉ

D'HYPNOLOGIE ET DE PSYCIIOLOGIE.

Mardi 21 juin 1904. - PRÉSIDENCE DE M. LE Professeur BEAUN[5

(DE NANCY).

Eloge de Liébeault,

M. VAN RENTERCHEM, fondateur et directeur de l'institut psycho-

thérapeutique Liébeault, à Amsterdam, prononce l'éloge de

Liébeault mort récemment ; il retrace sa vie, ses travaux, son

influence sur le monde médical de i'ancien et du nouveau conti-

nent ; son nom passera à la postérité comme celui d'un homme

ayant bien mérité de l'humanité.

Prias Liébeault.

M. Paul PAREZ présente, au nom du Bureau de la Société, un

rapport sur l'attribution du prix Liébeault. Ce prix est attribué

à M. le Dr .TOURDAN (de Marseille) pour sa thèse : « De l'influence

du rêve sur le délire (essai de psycho-physiologie). »

, Liébeault et l'Ecole de Nancy.

M. BEAuNis expose les conditions dans lesquelles BEnhnEm,

Liégeois et lui-même sont entrés en relations avec Liébeault et

sont devenus ses élèves ; il insiste sur quelques points spéciaux

de l'enseignement de Liébeault, à savoir sur les applications non

seulement thérapeutiques, mais physiologiques et psychologiques

de la suggestion hypnotique.

La suggeslibilité des alcooliques.

M. Bérillon. Les buveurs présentent une suggestibilité

extrême. Cependant, au cours du traitement hypnotique, un

alcoolique cesse d'être hypnotisable ; c'est que, ce jour-là, il

n'était pas à jeun. Dans la pratique, je remets au lendemain ma

séance d'hypnotisme, si l'alcoolique a été intempérant pendant la

demi-journée qui précède sa venue chez moi. Chez les alcooliques,

comme chez les autres malades, j'ai remarqué que la suggestion-

nabilité était en raison directe de la sociabilité.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 177

La cure actuelle de l'alcoolisme.

M. LEGRAIN. - Il m'arrive de Russie des renseignements très

intéressants sur le traitement des alcooliques par l'hypnotisme.

Dans les villes de Saint-Pétersbourg, Moscou, Yaroslavl, Kiev,

Saratoff, Ekatorinoslav, Astrakhan, ont été créés, depuis quelques

années, sous les auspices du gouvernement, des dispensaires ou

curatelles où affluent les malades par centaines, où les soins sont

gratuits et où l'hypnotisme est, sinon le seul, au moins le principal

agent thérapeutique. On exige des alcooliques qu'ils désirent sin-

cèrement être guéris et qu'ils s'abstiennent de tout spiritueux

pendant la durée du traitement. C'est peut-être leur demander un

effort colossal, puisque, le plus souvent, leur volonté est presque

anéantie. Il est vrai qu'on les oblige aussi à accepter une surveil-

lance continuelle. Néanmoins, l'hypnotisme reste un moyen extrê-

mement précieux et efficace dans la cure de l'alcoolisme il donne,

avec une bonne direction mentale, la vigueur nécessaire au main-

tien de la bonne résolution de ne plus boire. Pour empêcher les

rechutes, il faut, bien entendu, les encadrer, dans des Sociétés

d'abstinence ou de tempérance afin qu'ils subissent à l'état de

veille et d'une manière continue, l'influence heureuse d'un bon

milieu.

M. BÉRILLON. - Avec M. MARNAY, j'ai déjà opposé à la docilité

des buveurs russes l'indocilité des buveurs français. En France, la

cure des alcooliques est beaucoup plus difficile et beaucoup moins

durable qu'en Russie; c'est que, chez nous, l'alcoolique s'intoxique

avec des essences aussi variées que néfastes ; en outre, il accepte

rarement de se laisser soigner aussi longtemps qu'il le faudrait

pour arriver à une guérison durable.

L'alcoolisme et son traitement par la suggestion hypnotique.

M. Wiazemsky (de Saratow). - L'alcoolisme a presque toujours

une origine psychique ; aussi convient-il d'étudier avec soin l'état

psychique de chaque malade, pour combattre efficacement le

mal. Le traitement de l'alcoolisme par la suggestion doit être

long ; s'il est maintenu pendant un'an, il donne 92 guérisons p. 100.

Si le traitement dure peu, il donne quelquefois des guérisons

complètes ; mais, le plus souvent, les récidives surviennent. Les

alcooliques sont très suggestionnables et leur guérison est d'au-

tant plus facile qu'ils désirent vivement renoncer à leur funeste

habitude. La suggestion est le seul moyen thérapeutique efficace

contre l'alcoolisme ; aussi convient-il d'en propager l'application.

L'auteur expose ensuite les résultats très satisfaisants qu'il a

obtenus depuis quatre ans,et qui portent sur 319 malades.

Archives, 2. série, t. XVIII. 12

178 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Alcoolique traité avec succès, contre son gré et à son insu, par

suggestion pendant le sommeil naturel.

M. Paul FaREZ. - Un homme de vingt-cinq ans, marié, père de

famille, boit chaque jour un litre de vin, plusieurs bocks de bière,

du rhum, de l'amer, du vermouth et de l'absinthe. Il est ivre plu-

sieurs fois par semaine. D'ordinaire, son ivresse est calme; mais,

quand il a bu plus d'absinthe que de coutume, il se livre à des

scènes violentes : il brise des meubles ou des objets de ménage;

il sort le linge des armoires et le piétine ; il injurie grossièrement

sa femme, la bat et lui fait faire quelques chutes graves ; l'une

d'elles est même suivie d'accouchement prématuré. Son intempé-

rance lui a fait perdre un emploi lucratif; il est devenu incapable

de tout travail et passe ses journées au café. Il refuse de se laisser

soigner d'aucune manière. La suggestion pendant le sommeil

naturel est instituée à son insu. Les scènes violentes cessent au

bout de quelques semaines et l'amélioration s'accentue de mois

en mois. Le traitement est long, comme il doit l'être dans tous

les cas d'alcoolisme ; car la cure ne peut être définitive que si l'on

prend le temps de restaurer la volonté. Au bout de dix-huit mois,

notre homme est tout à fait guéri ; il ne va plus jamais au café et

boit au repas de la bière légère du Nord; il est bon, doux, affec-

tueux et travaille avec zèle. Cette guérison persiste depuis trois

ans et demi. '

En outre de certains alcooliques, il est des obsédés ou des déli-

rants qui, ou bien ne sont pas hypnotisables, ou bien refusent de

se laisser soigner. Grâce à la suggestion pendant le sommeil

naturel, ils peuvent, les uns et les autres, être traités malgié eux

et à leur insu, sans qu'ils résistent en aucune façon. Formulée

pendant cet élat d'hypotaxie physiologique périodique qu'est le

sommeil naturel, la suggestion se montre aussi efficace que si

elle s'adressait à un individu profondément hypnotisé.

Suggestion à l'état de veille et suggestion hypnotique.

M. BOURDON (de Méru). - Si la suggestion à l'état de veille est

efficace, il n'en résulte pas que « tout, comme on l'a dit, est dans

la suggestion » ; il y a influence hypnotique, hypnose sans som-

meil, hypnose fortuite, autohypnotisme spontané, suivant les

diverses expressions proposées par les auteurs. La mise en scène

volontaire ou involontaire provoque l'expectant attention; et la

production préalable de l'influence hypnotique a devancé la sug-

gestion. Toutefois, dans les cas graves, il est indispensable d'ob-

tenir le sommeil non seulement profond, mais prolongé, témoins

les observations rapportées par M. Bourdon : crises somnambu-

liques consécutives à une peur, obsessions, idées fixes, neuras-

thénie et faits de pédagogie suggestive.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 179

Le prophète Samuel.

M. Charles BiNET-SANGLE. - Né dans un pays de vignobles, fils

d'une dévote surémotive qui avait été longtemps stérile, Samuel,

enfant silencieux, hyper-suggestionnable, en proie à des halluci-

nations verbales, est bientôt pénétré de l'idée que le Dieu Iahvé

lui parle et qu'il est son ministre sur la terre ; orgueilleux, sujet

à de violentes colères et à des impulsione morbides, il se rend

coupable d'homicide et engendre deux prévaricateurs. Samuel fut

un dégénéré dont la formule mentale peut se résumer ainsi :

Hypersuggestibilité, verbalisme pathologique, théomégalomanie,

impulsivité. '

Présentation du sthénomèt·e.

M. Paul JOIRE (de Lille) présente un nouvel appareil qui enre-

gistre la force spéciale qui émane de l'organisme vivant, se trans-

met à distance et paraît dépendre du système nerveux. Cette force

varie suivant que l'organisme est sain ou malade et, dans ce der-

nier cas, suivant que la maladie est à son début, à son apogée ou

à son déclin. Ce sthénomètre donnera d'utiles renseignements

dans les divers états morbides et il guidera le praticien dans ses

prescriptions thérapeutiques.

La remémoration périodique des souvenirs musicaux.

M. SwoBODA (de Vienne). - De nombreuses observations m'ont

amené à formuler les lois de la remémoration auditive musicale.

En particulier, cette remémoration est périodique; elle survient,

chez les hommes, au bout de vingt-trois heures ou un multiple de .

vingt-trois et, chez les femmes, au bout de vingt-huit heures ou

un multiple de vingt-huit.

M. Lionel DAURIAC, C'est en vain que j'ai cherché la raison

psychologique des obsessions musicales ; j'incline à croire qu'elles

dépendent d'un rythme physiologique plus ou moins confusément

perdu par la subconscience.

M. BEAUNis. - Je suis tout à fait d'avis que les manifestations

du rythme mental dépendent de phénomènes organiques périodi-

ques ; les uns et les autres, présentent des oscillations soli-

daires. ,

M. BÉRILLON appuie ces observations en invoquant la périodicité

de certains troubles délirants.

Un cas grave d'hystérie.

11. BÉniyLON présente une jeune fille hystérique qui, depuis cinq

ans, avait chaque jour, pendant une quinzaine d'heures, des atta-

ques hystériques d'une gravité et d'une intensité extrêmes, avec

'180 SOCIÉTÉS SAVANTES.

contractures généralisées. Quand l'hystérie atteint de telles pro-

portions, l'hypnotisme, dit-on, ne peut les guérir. Or je suis

parvenu à la. débarrasser de ses crises, à rendre sa sensibilité

normale, à - corriger ses désordres mentaux ; par surcroit, je

m'applique à restaurer sa volonté et à faire oeuvre d'orthopédie

suggestive.

L'hypnotisme et la suggestion à l'état de veille.

. M. Paul Magniez Les fanatiques de la suggestion à l'état de

veille proclament la supériorité de cette dernière, parce qu'elle

s'adresse à la raison, fait appel au contrôle du malade et agit par

persuasion ; ils reprochent à l'hypnotisme de faire 'des sugges-

tions, qui peuvent- être bonnes, mais aussi mauvaises, et d'en-

lever aux malades leur volonté. D'abord, la plupart de ces

malades n'ont plus de volonté; nous ne leur enlevons donc pas ce

qu'il leur manque. En outre, nos suggestions ne sont point subies

passivement mais acceptées à l'état de veille, préalablement à

toute manoeuvre hypnogénique. Reste le contrôle ? mais c'est le

plus souvent ce contrôle persistant qui met obstacle à la guérison

du malade. Si à l'état normal l'impressionnabilité (ou suggestion-

nabilité) est représentée par 1 et la résistance par 2, dans cer-

tains états pathologiques l'impressionnabilité tend vers zéro et

la résistance vers l'infini. Dans ces conditions, les malades sont

dépourvus de suggestibilité ; et aucun isolement, aucune psycho-

thérapie à l'état de veille ne sauraient influencer le malade. Mais,

précisément, l'hypnotisme éteint, non pas la volonté, mais cette

résistance maladive; il enlève ce qui fait obstacle à la suggestion;

, il rend éminemment suggestionnable. C'est ce que comprennent

bien les malades qui ont erré en vain de maison en maison et

n'ont retiré de l'isolement que, quelquefois, l'aggravation de leur

état. Ils viennent nous trouver pour être hypnotisés à fond; et ils

guérissent, précisément, parce que hypnotisés, ils ne peuvent ni

raisonner la suggestion, ni la discuter, ni s'y opposer. C'est alors

le triomphe de la suggestion impérative. D'ailleurs, le sommeil

provoqué, à lui seul, sans aucune suggestion, est un agent a la

fois sédatif et réparateur. Quant à ceux qui prônent les résultats

qu'ils ont obtenus à l'état de veille, ils ont fait de l'hypnotisme

sans le savoir, et sans s'en douter.

Les neurasthéniques dans l'armée.

M. Lux. - A l'occasion des causes les plus diverses, les psychas-

thénies et les dégénérescences latentes se révèlent, témoins de

très nombreuses observations faites par l'auteur au cours de sa

longue carrière, intéressant les gradés ainsi que les non gradés,

et portant sur des cas de : phobies diverses, anxiété, anesthésies,

SOCIÉTÉS SAVANTES. 181

distractions, amnésies transitoires ou durables, erreurs de sensa-

tions, actes subsconscients. idées fixes, aboulie, entêtement. Ces

troubles neurasthéniques nécessitent souvent des passages de la

cavalerie dans l'infanterie, des congés plus ou moins prolongés,

parfois même des réformes ou des démissions définitives.

' Hypnose et sorcellerie.

M. DEHONCHY. - Les malades qui guérissent parce que leur

médecin leur a prédit ou ordonné, ceux aussi qui guérissent dans

nos campagnes parce qu'un sorcier leur a fait quelque massage

ou quelque bizarre prescription guérissent par auto-suggestion

en vertu de l'état d'attente et de croyance, de la faith healing, en

un mot. Ces malades ne sont pas dans la pleine veille : leur

volonté a abdiqué, leur résistance est suspendue et leur sugges-

tibilité exaltée, ainsi qu'il résulte de plusieurs observations rap-

portées par l'auteur.

Maladie du demi-sommeil.

M. LE Menant des CHESNAIS Une femme de trente ans, neu-

rasthénique et dyspeptique, dort, la nuit, d'un sommeil léger et

particulier. Tandis que son corps repose, son esprit reste constam-

ment éveillé; si elle rêve, elle a conscience qu'elle fait un rêve;

elle s'y complaît et le maintient. Le jour au contraire, elle est

étrangère à tout ce qui l'entoure et vit perpétuellement comme

dans un rêve. Elle présente à la nuque un point hypnogène grâce

auquel elle a été très facilement endormie et rapidement guérie.

Délire hystérique traité par la suggestion hypnotique.

nielle de VAJEWSHA. - Une jeune fille de seize ans et demi va

pour la première fois au théâtre et voit jouer Faust. A la suite de

cela, elle présente des séries d'attaques hystériques avec délire

hallucinatoire en rapport avec la pièce qui l'a impressionnée :

elle est au théâtre, cause avec Dieu, chante et danse pour lui, etc.

Elle devient tellement agitée qu'on doit lui mettre la camisole de

force qu'elle déchire d'ailleurs. Elle laisse aller les matières sous

elle, elle a été, en quelques semaines, complètement guérie par

la suggestion hypnotique. ,

L'ectoscopie et l'ectothérapie cérébrales.

M. Biafciii. L'ectothérapie, en général, repose sur le coeffi-

cient de dilatation que présente chacun de nos organes lorsqu'on

applique pendant quelques secondes de la chaleur, sur la région

cutanée qui le recouvre. Ces modifications de volume et d'éloi-

gnement sont très nettement perçues, surtout pour ce qui con-

cerne le cerveau ; elles sont très utiles au diagnostic et donnent

182 asiles- d'aliénés.

des lumières sur la marche de certaines maladies .cérébrales.

Déjà vérifiée par la phonendoscopie et les rayons Roentgen, cette

ectoscopie vient d'être vérifiée par les rayons Charpentier.

. .. Présentation de malade.

M. Maurice BLOGLI présente une malade atteinte d'épilepsie

unilatérale gauche et qu'il a traitée, en raison de son origine

tuberculeuse probable, par la transfusion capillaire. '

ASILES D'ALIÉNÉS.

ASILES PUBLICS D'ALIÉNÉS 1

ASILES PRIVÉS FAISANT FONCTIONS D'ASILES PUBLICS, QUARTIERS D'HOSPICE

ET MAISONS PARTICULIÈRES

AVEC LES NOMS DES MEDECINS EN CHEF ET MÉDECINS-ADJOINTS

ET LE NOMBRE DES INTERNES.

asiles d'aliénés. 183

184 asiles d'aliénés.

asiles d'aliénés. 185

186 asiles d'aliénés.

asiles d'aliénés. 187 Î

188 asiles d'aliénés.

- asiles d'aliénés. 189

190 asiles d'aliénés.

VARIA. 191

192 VARIA.

Mercredi 3 août, 9 heures du matin : Visite de l'asile des aliénés

de Pau. - Midi : Déjeuner des congressistes offert à l'Asile par

le Conseil général des Basses-Pyrénées. - 3 heures du soir : séance

à l'Asile. - Communications diverses.

Jeudi 4 août : Excursion à Lourdes et au Pic du Grand Ger. -

Départ de la gare de Pau à 8 h. 50 du matin ; arrivée à Lourdes

à 9 h. 55. - Visite de Lourdes. - 11 h. 30 du matin : Ascension

du Pic du Grand Ger (1000 m. d'altitude) en funiculaire. Rendez-

vous à la gare du funiculaire : pour la première montée, à

11 heures; pour la dernière, , avant le déjeuner, à il h. 30.

Midi : Déjeuner organisé pour les Congressistes au Restaurant du

sommet du Pic du Grand Ger. (Prix : 6 francs pour le déjeuner et

l'aller et retour en funiculaire. Les Congressistes munis de la carte

du Congrès n'auront rien à débourser aux guichets du funiculaire.)

2 1e..30 de l'après-midi : Séance au Pic du Grand Ger. - Com-

munications diverses. - Départ de Lourdes à 5 h. 30 et 8 h. 48

du soir.

Vendredi 5 août, 9 heures du matin : (Salle des Fêtes du Palais

d'Hiver). - 3° question (Assistance). - Des mesures à prendre

contre les aliénés criminels. Rapporteur : M. le Dr KERA VAL, médecin

en chef des Asiles de la Seine. - Discussion. - 2 heures de l'après-

midi : Communications diverses. - 8 h. 30 du soir : Séance de

projections. - 10 heures du soir : Réception au Palais d'Hiver par

la Société de Médecine de Pau.

Samedi 6 août : Excursion à Izeste, Eaux-Chaudes et Eaux-

Bonnes. - Départ de la gare de Pau à 9 h. 3 du matin; arrivée à

Izeste à 10 heures. =,40 h. 30 du matin : Séance de Communica-

tions diverses à l'Hôtel de Ville de Louvie. Midi : Déjeuner offert

aux Congressistes à l'Hôtel des Pyrénées, à Izeste, par M. le Pré-

sident du Congrès. - 1 A. 43 de l'après-midi : Départ de la gare

d'Izeste. 1 h. 58 de l'après-midi : Arrivée à Laruns. De Laruns

des voitures conduiront les Congressistes à Eaux-Chaudes par la

gorge du Hourat et de là à Eaux-Bonnes. (Prix : 2 fr. 50.) Arri-

vée à Eaux-Bonnes vers 6 heures. - Fête de nuit; Réception au

Casino d'Eaux-Bonnes à 8 heures du soir.

Dimanche 7 août : D'Eaux-Bonnes à Argelès par le Col d'Au-

bisque. - Départ d'Eaux-Bonnes vers 5 heures' du matin. Tra-

versée du Col d'Aubisque (altitude : 1800 mètres) en automobiles

et voitures diverses. (Prix : 20 francs par personne.) - Longueur

du parcours : 41 kilomètres, en traversant les plus beaux sites

des Pyrénées. - Arrivée à Argelès entre midi et une heure.

Déjeuner offert aux Congressistes par l'Institut physicolhérapique

d'Argelès, servi au Casino par l'Hôtel du Parc. Après le déjeuner,

visite d'Argelès. Dislocation du Congrès a

· - Le rédacteur-gérant : BOURNEVILLE.

Evreux, Ch. HtBI8SEY, imp. - 7 -19011'.

Vol. XVIII. Septembre 1904. N° 105.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

PATHOLOGIE.

Note sur la fréquence et sur la distribution des

nsevi chez les aliénés.

PAR

V M, Cil. FÉRÉ, et MIlo A. MOUROUX, ,

Médecin de Bicêtre.- Interne des Hôpitaux de Paris.

On a beaucoup discuté sur l'existence des naevi acquis.

On admet que les hémataugiomes, ou naevi sanguins, sont

constitués par une vascularisation anormale du tégument

limitée en un point du corps, et que cette vascularisation

est congénitale ou développée pendant les premiers mois de

la vie. Cependant l'apparition spontanée de nævi, dans la

seconde moitié de la vie, avait été signalée et l'existence

secondaire de ces noevi discutée. L'étude de 349 sujets obser-

vés de 1898 à t904, dans la première section de la cinquième

division de l'hospice de Bicêtre nous a montré que, chez

les aliénés tout au moins, on observe très fréquemment des

noevi acquis puisque, sur ces 349 sujets dont les plus jeunes

ont au moins'dix-huit ans, nous avons constaté, 279 fois, de

nouvelles productions cutanées. Il s'agissait, le plus souvent,

de taches erectiles, de taches pigmentaires et enfin de mol-

luscums de nouvelle formation.

MM. Gaucher et Barbe 1 ont établi, dans leur article du

Traité de Brouardel et Gilbert : qu'il n'est pas rare de voir,

chez les individus arrivés à la seconde moitié de la vie, de

petits noevi, d'abord punctiformes, qui deviennent peu à peu

lenticulaires et s'accroissent graduellement. Situés, le plus

' Traité de Médecine, de Brouardel et Gilbert, tome III, p. 840.

Archives, 2- série, t. XVIII. 13

194 PATHOLOGIE.

souvent, sur le tronc, ils sont légèrement saillants et présen-

tent une couleur d'un rouge vif ; ils n'ont pas débuté dans

l'enfance, ce sont des naevi acquis.

M. Fournier 1 donne à ces naevi le nom de naevi tardifs ; ce

sont ces productions dont P. Broca 2 admettait déjà l'exis-

tence, chez les gens âgés, dans son Traité des Tumeurs.

Mais, à cette affirmation de l'existence des naevi acquis, on

pouvait opposer l'opinion de Hébra3, cet auteur convient

qu'il est possible que des angiomes surviennent spontané-

ment chez les adultes sans avoir'été précédés d'un noevus

cutané ou sous-cutané. Il conclut, toutefois, que l'élude

des cas observés, jusqu'à présent, démontre que ces faits

doivent être considérés comme extrêmement rares.

M. Delbet '' se range à la même opinion ; pour lui, un fait

domine dans l'étiologie des angiomes : leur congénitalité;

les angiomes secondaires sont, en dehors des angiomes

traumatiques, le plus souvent de petits angiomes sous-

cutanés inaperçus dans l'enfance et qui tendent à s'accroître

chez l'adulte.

On peut objecter, à cette théorie des noevi sous-cutanés

primitifs, que les taches érectiles sont tout à fait superficiel-

les, sans relation, semble-t-il dans les autopsies, avec le tissu

cellulaire sous-cutané. Quanta la fréquence des noevi acquis.

elle est évidente chez les aliénés. Ses modifications de colo-

ration congénitale de la peau : mélanisme, vitiligo, taches

pigmentaires et les difformités de la peau : naevi pigmentai-

res vasculaires, molluscums avaient déjà été signalées plu-

sieurs fois comme plus fréquentes chez les dégénérés. Ces

modifications seraient en rapport avec des troubles d'évolu-

tion du système nerveux. Les naevi acquis ne sont pas moins

fréquents chez ces malades. ,

' Loc. cil. in Traité de Médecine, de Brouardel et Gilbert, p. 8ÍO,

2 P. Broca : Traité des Tumeurs, t. II, p. 207.

3 Hébra : ? Maladies de la Peau, t. II.

`.Traité de Chirurgie, de Le Dentu et Delbet, tome 1, p. li-49.

"· rilandeau : Elude sur les nævi, th. Paris, 1893. - Ch. Féré : -.Etude

sur la fréquence et sur la distribution de quelques difformités de In

peau chez les épileptiques (C. R de la société de biologie, 1893, p 57).-

La famille névropccllciy2ve, théorie lé1'alolo,gique de l'hérédité et de lu

^prédisposition morbides et de la dégénérescence, 2' éd" 1898, p. 306-

DISTRIBUTION DES NÆVI CHEZ LES ALIÉNÉS. 195

Dans un travail précédent, il a été démontré que sur 167 î

épileptiques, il y en avait 142 atteints de lésions cutanées :

196 PATHOLOGIE.

indemmes de troubles mentaux, n'en a trouvé que 34 atteints

de noevi. Le siège des lésions cutanées serait par ordre de

fréquence : -

Tronc.

Membres supérieurs.

Abdomen.

Tète.

Très rarement : Membres supérieurs.

Siège le plus rare : Jambe.

M. Gaucher admet que les nævi existent sur tout le corps

mais, de préférence, sur le tronc ; pour M. Delbet on les

observerait plus fréquemment à la tête. Nos observations

nous ont montré que ces lésions siègent au tronc puis aux

membres supérieurs, contrairement à l'opinion de M. Le

Guiner (thèse de Bordeaux, 9 janvier ! 903), pour cet auteur

les naevi occuperaient : '

Dos.

Poitrine.

Abdomen.

Avec une fréquence à peu près égale, puis, en second

ordre : Membres : faces internes des bras, des cuisses. Dans

aucun cas nous n'avons vu les lésions se localiser à un tra-

jet nerveux. Un fait, déjà signalé par Hébra, est la rareté des

productions cutanées au niveau des membres inférieurs.

Cette rareté existe surtout pour les noevi ; sur les 349 mala-

des observés, il n'y en avait que 47 porteurs de noevi aux

membres inférieurs ainsi répartis :

DISTRIBUTION DES NJEVI CHEZ LES ALIÉNÉS. 197

198 . PATHOLOGIE.

rante à cinquante ans. Le plus. jeune a vingt-huit ans ; le

plus âgé a cinquante-huit ans. Ces malades sont au nombre

de 58. " 1

Résultats totaux : · · · ,

DISTRIBUTION DES NÆVI CHEZ LES ALIÉNÉS. 199

Répartition des molluscums au niveau des membres

inférieurs :

200 PATHOLOGIE.

On peut conclure que, chez les déments séniles, on

rencontre des productions cutanées au niveau des membres

inférieurs dans le rapport de 46, 'la p. 100.

DISTRIBUTION DES NJEVI CHEZ LES ALIÉNÉS. 201

mation s'était faite lentement, en cinq ans. Les deux malades

n'ont eu ni cancer viscéral concommittant, ni transformation

de la tumeur érectile en tumeur maligne.

Ces diverses constatations nous amènent à penser que

l'apparition, même nombreuse, de noevi acquis n'a pas

d'importance pour le diagnostic des tumeurs malignes

comme le voulait Trélat. M. Le Guiner a montré, récem-

ment, que la plupart des micro-hémangiomes apparaissent

tardivement; on les trouve chez des individus ayant dépassé

quarante ans. C'est en effet de quarante à soixante ans que

les noevi et que les taches pigmentaires augmentent de

nombre chez le même malade. La proportion serait, par

malade : .

202 CLINIQUE MENTALE.

il concluait que la pathogénie de ces angiomes était mal

connue, mais que leur développement était observé d'autant

plus rapide que la maladie du foie progressait plus vite.

Nous n'avons pas rencontré d'affection hépatique dans les

cas de naevi multiples, et nous n'avons pas vu que le déve-

loppement des noevi fut plus rapide, ni leur nombre aug-

menté dans les cas de maladie du foie.

CLINIQUE MENTALE,

La phobie du regard ;

Par le Dr P. HARTENBERG

Un des éléments essentiels de la timidité consiste, on le

sait 1, dans le souci qu'ont les sujets du jugement d'autrui

sur leur apparence visible et dans .l'appréhension que ce

jugement ne leur soit défavorable. Aussi les regards. d'autrui

portés sur leur personne leur procurent-ils un sentiment

pénible d'angoisse, d'appréhension et de gêne. Pour les

éviter, ils suivent une tendance naturelle à fuir tout contact

avec leurs semblables, écartent toutes les circonstances qui

pourraient les mettre en vedette, toutes les occasions de se

faire remarquer. C'est là la conduite habituelle des timides.

Ce malaise de se sentir regardé, cette crainte d'affronter

les regards et cette tendance à les fuir peuvent s'exagérer,

dans certains cas, jusqu'à prendre les proportions d'une peur

obsédante, d'une véritable phobie. Ainsi se constitue la

phobie du regard.

Voici, d'après les exemples que j'ai observés, les princi-

pales caractéristiques de la phobie du regard.

Le malade redoute essentiellement d'exposer sa personne

aux regards étrangers. Chaque fois qu'il doit paraître £ ,

' V. Les Timides et la Timidité, par P. Hartenberg. 1 vol. Paris,

Félix Alcan.

LA PHOBIE DU REGARD. 203

en public, affronter la vue de plusieurs ou même d'un seul

de ses semblables, il éprouve un sentiment pénible de

malaise et de gêne. Son coeur bat rapidement, la sueur

froide couvre son corps, ses extrémités se glacent, ses mem-

bres tremblent, son esprit se trouble, ses pensées se brouil-

lent, sa conscience se voile.

Mais il est une partie du corps, dont l'exposition lui est

particulièrement pénible : c'est la face. Les regards fixés sur

sa face lui sont insupportables : ils lui procurent une an-

goisse violente et une souffrance vive.

Enfin, dans sa face même, il est une région infiniment

sensible : ce sont les yeux. Les regards fixés sur ses yeux et

rencontrant ses propres regards le mettent dans un état de

trouble intense. -

La conséquence naturelle de ce malaise et de cette peur,

est que le sujet s'efforcera de se soustraire le plus souvent

à la vue des autres. D'abord, il évitera toutes les occasions

de se montrer, de paraître en public/ Puis, quand il devra

malgré tout payer de sa personne, il fera appel à tous les

moyens pour se dissimuler le plus possible, se soustraire

aux regards. Pour entrer dans un lieu fermé, il ne passera

jamais le premier, mais s'avancera toujours derrière un

autre visiteur. Dans un salon, il se placera de préférence à

contre-jour, dans un coin mal éclairé, à l'abri d'un meuble.

Pour cacher son visage, dont la nudité le fait tant souffrir,

il emploiera une foule de petits artifices. Si c'est un homme,

il se protégera en omnibus, en chemin de fer, par un jour-

nal déployé. Une femme au théâtre ouvrira son éventail,

dans la rue portera une voilette épaisse. Certains se bornent

à tenir la main devant une joue, devant la bouche et le

menton. D'autres encore cherchent à rendre leur visage

immobile, inexpressif comme un masque inanimé. D'autres,

au contraire, affecteront des tics, des expressions artificielles

décontenance. Enfin, pour voiler les yeux, le moyen le plus

simple est de baisser les paupières : ce que les sujets font le

plus souvent. Mais lorsqu'ils sont obligés de regarder un

interlocuteur en face, ils ne le peuvent jamais d'une façon

soutenue, s'en tiennent à lui lancer un coup d'oeil furtif de

temps en temps, avec l'esquivement du regard. Quelques-uns

ne reculent pas de porter des verres bleus ou fumés pour

Protéger leurs prunelles contre les regards d'autrui. ,

204 CLINIQUE MENTALE.

Tel est à peu près, à son degré d'intensité moyenne, la

phobie du regard. Elle peut être moins marquée, et ne se

manifester que par un malaise léger et une angoisse passa-

gère. Mais parfois, elle s'installe à demeure dans la cons-

cience du sujet comme une véritable obsession. Chez l'un

d'eux j'ai même observé un complément hallucinatoire : il

croyait voir toujours devant lui, même quand il fermait ses

paupières, un oeil fixe qui le regardait, semblable à l'oeil de

la conscience dans la légende de Caïn. Parfois aussi elle

s'aggrave en se compliquant d'autres troubles psychiques :

l'anthropophobie, la « Beachtungswahn » ou manie de se

croire observé, des idées de persécution. Dans tous les cas,

la phobie du regard repose sur un fond de timidité : et les

sujets présentent les grands symptômes ordinaires de cette

infirmité sociale.

Cette phobie du regard provient, d'après l'aveu des sujets,

d'une étiologie assez complexe. En ce qui concerne l'ensem-

ble de leur personne, c'est à la honte du corps, à la dysmor-

phophobie 1, à l'appréhension d'être trouvés mal faits ou

ridicules, qu'on peut attribuer leur phobie des regards

étrangers.

Pour le visage et les yeux l'explication est un peu diffé-

rente. Il semble à ces malades qu'exposer ainsi à la vue des

profanes leur visage nu et leurs yeux où se réflète leur pensée

intime et qui trahissent leurs émotions profondes, constitue

une sorte de violation de leur conscience, une sorte de pro-

fanation de leur « moi ». C'est une véritable « pudeur du vi-

sage » qui les pousse à cacher aux regards ce « miroir de

l'âme » qu'est la face.

Ce mécanisme étiologique marque bien la différence qui

sépare la phobie du regard de la phobie de la rougeur. Les

sujets atteints d'éreuthophobie se cachent et souffrent parce

qu'ils rougissent; s'ils ne rougissaient pas, ils ne songeraient

nullement à se dissimuler.

Au contraire, les phobiques du regard, du moins ceux que

j'ai observés, ne rougissaient pas, ou s'ils rougissent, ils ne

se préoccupent nullement de leur rougeur. C'est uniquement

l'exposition de leur face nue et de leurs. prunelles à la vue

d'autrui qui fait l'objet de leur inquiétude. Phobie du regard

1 V. Janet. Les Obsessions et la Psychasthénie. Paris, Alcan, 1903.

LA PHOBIE DU REGARD. 205

et phobie de la rougeur sont donc deux accidents psycho-

émotifs bien distincts. Toutefois, il est possible qu'ils

s'associent dans certains cas pour constituer une forme

mixte. Citons maintenant des exemples.

Observation I. M. II. B..., trente ans, étudiant en pharmacie.

Timide, né de parents timides.

« Mon frère et ma soeur, m'écrit-il, sont des timides. Ma soeur

l'est, je crois, moins que nous, parce qu'elle vit à la campagne, au

milieu de gens simples et parce qu'elle travaille beaucoup. J'ai

perdu mon père et ma mère de bonne heure; je me suis aperçu

qu'ils étaient timides. Ma tante, soeur de notre père, entre les mains

de qui nous tombâmes, était une timide. Ma timidité est donc

bien une affection héréditaire.

« Développement de la timidité. L'éducation aurait pu corri-

ger ma timidité native : celle que j'ai reçue a tout fait pour l'aggra-

ver. Notre tante était pauvre et dévote ; elle nous mit dans une

maison d'éducation tenue par des Assomptionnistes. Le supérieur

était un homme de bien pour qui j'ai conservé une certaine estime.

Mais dans son établissement tout était abject : le logement, la

nourriture, les vêtements, les maîtres, les élèves. J'y reçus une

éducation grossière et j'y contractai des habitudes vicieuses.

« J'étais très intelligent. Le hasard fir que je pus entrer comme

externe dans un collège libre où étudiaient des jeunes gens de

bonnes familles. Je suivais les classes de ce collège et je venais

manger et coucher chez les Assomptionnistes.

c Je devins un brillant élève et l'on me remarqua : J'étais petit,

malingre, mal habillé, sans argent de poche : je souffrais de ces

imperfections. Mais bientôt on sût dans tout le collège que j'appar-

tenais à cette maison mal famée que les Assomptionnistes tenaient

en ville. Je fus couvert de honte et une timidité de plus en plus

angoissante s'empara de moi. Dans le pays, avoir été dans cette

maison constituait une tare indélébile. C'était un repaire de misère

et de honte. Les parents pauvres de la ville et de la campagne y

jetaient leurs enfants ; au bout de peu de temps, les petits s'étio-

laient et mouraient d'épuisement. Ceux qui en sortaient, portaient

sur eux des stigmates de faiblesse et d'infériorité qui les prépa-

raient au malheur. '

Heureusement, un curé qui me connut par la suite me (it entrer

au séminaire où je restai pendant deux ans. Je pris les soins les

plus grands pour cacher mon origine ; mais ce fut en vain : on

'apprit et pour que nul ne l'ignorât, un beau jour, le supérieur

de ce séminaire, une brute qui est aujourd'hui évêque, me le jeta

àla face, en pleine salle d'étude, au milieu de deux cents élèves. Je

crus mourir de honte. Que n'avais-je lu alors le « Rouge et le

206 CLINIQUE MENTALE.

Noir ». J'étais dans le même milieu que Julien Sorel; j'aurais peut-

être acquis sa force de dissimulation et de mépris. Mon caractère

se serait trempé et je serais arrivé à me dompter et à me domp-

ter les autres.

« Phobie du regard. - Mais, à ce moment, j'étais atteint déjà

d'un accident particulier, la peur du regard. J'ai souffert de la

timidité de toutes les façons; j'ai rougi, pleuré, même sans motifs;

j'ai craint de traverser un salon pour saluer la maîtresse de mai.

son, pour inviter une jeune fille à danser ; je n'ose parler haut

dans un restaurant. Mais cela ne m'a/Fecte que peu ; je peux suppri-

mer l'effet en supprimant la cause ; et puis beaucoup ont de ces

transes et ne sont pas malheureux dans l'intimité. Tandis que la

peur du regard, c'est un mal que je porte avec moi, que j'ai tou-

jours là, dans les yeux. Je ne puis supporter qu'on me regarde, et

le regard qui se fixe sur moi je ne puis le soutenir. A sentir les

yeux de quelqu'un qui se posent sur moi, sur mon corps, sur

mon visage, je me trouble et je perds toute pensée. Ce regard

étranger, je le fuis, je l'évite, je le redoute comme une calamité,

comme une arme empoisonnée. Que je sois avec une personne ou

avec plusieurs, avec un ami ou un inconnu, je ne puis supporter

son regard. Je suis incapable de regarder quelqu'un en face, pas

même un enfant, pas même un chien. Dans une conversation, si

c'est moi qui parle, je regarde successivement les yeux, le nez, la

bouche de mon « adversaire », puis je porte les yeux sur un objet

voisin. Tout en discourant, je pense à mon mal et perds le fil de

mes idées. C'est pis lorsqu'on me parle ! Je sais qu'un regard me

couve et que je ne puis soutenir ce regard. Pourtant, je dois

regarder mon interlocuteur, surtout s'il est placé en face de moi,

sinon j'aurais l'air de ne pas l'écouter. Alors, je fixe sa pupille, le

blanc de l'oeil, j'essaie de suivre le mouvement des paupières.

Pendant ce temps, je n'entends rien de ce que l'on me dit. Je suis

forcé de détourner la vue : j'en profite pour me ressaisir et je fais

effort pour comprendre quelques mots. Quand j'ai compris ce que

l'on me veut, je suis un peu distrait de mon obsession : je puis

alors regarder de nouveau, mais aussitôt que je regarde, mon

trouble s'exagère. Mon interlocuteur s'aperçoit bientôt que j'ai

quelque chose qui n'est pas naturel; souvent il perd lui-même

contenance en me regardant. Il m'est arrivé quelquefois de le voir

clignoter des paupières comme pour dissiper un malaise. Cela me

met à la torture : il me semble que je commets une mauvaise

action. Alors, la honte m'envahit, le sang reflue vers le coeuret et

un grand froid me fait frissonner des pieds à la tête. ,

« Cette phobie a été le tourment de ma vie depuis l'heure où

elle a débuté. Elle m'a pris à un moment précis, dans les circons-

tances suivantes : J'avais quatorze ou quinze ans. Je vous ai dit

comment je me trouvais alors, moi, jeune homme pauvre, au

LA PHOBIE DU REGARD. 207

milieu de jeunes gens riches. J'étais très studieux. Le professeur

de science m'aimait beaucoup. Il me prit un jour à part pour me

donner une explication. J'étais placé à sa droite; il portait des

lunettes. A un moment donné, je soulevai une objection. Pour

suivre ce que je lui disais, il me regarda de côté, sans remuer la

tète, en tournant les yeux. Ce regard de travers me troubla; il

produisit dans tout mon être une sensation étrange de stupeur

que je n'avais jamais ressentie. Je continuai mon explication tant

bien que mal ; mais dès cet instant, j'étais pris. La fatalité s'était

abattue sur moi. Du coup, elle avait broyé mon orgueil, détruit

mes illusions, mes rêves d'avenir : elle avait anéanti en moi toute

familiarité, toute amitié, tout abandon. Je devins un malheureux,

souffrant partout, fuyant tout le monde, évitant mes amis, ne

sachant pas m'en faire de nouveaux, désobligeant- les personnes

après me les être conciliées.

remonter tous mes ennuis. Avant cet instant, j'étais timide,- mais

je n'avais pas conscience de ma timidité; j'étais pauvre, mais je

comptais devenir riche; j'étais confiant, j'avais la sourire bon,

facile, j'étais gracieux, je me laissais aimer et j'aimais. Depuis, la

pensée qu'on me regardait et que je ne pouvais regarder en face,

m'a rongé le coeur. Je n'ai plus été capable d'un sentiment tendre,

d'un élan sincère ; j'ai subi toutes les tortures et toutes les humi-

liations ; j'ai souffert à toute heure du jour, j'ai versé la nuit des

larmes de sang, j'ai désespéré de tout. Et voilà quinze ans que cela

dure ! »

Observation II. NI-0 F..., trente-deux ans, nerveuse et impres-

sionnable, grande timidité.

La malade raconte qn'elle souffre depuis l'époque de la puberté

d'une singulière émotion : la peur de paraitre en public et d'être

regardée, Cette peur, grandissant avec les années, est devenue à

l'heure actuelle une véritable torture. Comme elle est tenue, par

la position de son mari, à occuper une situation mondaine, à rem-

plir des devoirs de maîtresse de maison, à recevoir et à faire des

visites, son existence n'est qu'une suite de souffrances sans

nombre.

Lorsqu'elle doit recevoir ou sortir, elle est prise à l'avance d'une

inquiétude anxieuse, tout à fait comparable à celle qui saisit un

artiste, un mal de « trac » dans la journée qui précède une pre-

mière représentation. Puis, le moment venu, où elle se trouve en

présence des personnes, elle ressent une angoisse violente, un

malaise pénible, des palpitations, de la sueur froide, de l'em-

barras de la pensée et de la parole, une envie de fuir et de se

cacher à tous les yeux. '

Ce sont les regards fixés sur son visage qui lui sont les plus

208 CLINIQUE MENTALE.

pénibles. Afin d'être moins aperçue, elle se place toujours à contre-

jour, cache le plus souvent le bas de sa figure dans sa main. Le

plus souvent possible aussi elle se sert de son éventail comme écran,

et pour sortir en dehors, elle porte toujours une voilette épaisse.

Quant à soutenir les regards, elle ne le peut point. Lorsqu'elle

essaye seulement de diriger ses yeux vers ceux de ses interlocu-

teurs, aussitôt ses paupières battent, sa vision se voile et se

trouble, son angoisse redouble. Alors, elle baisse ses paupières et

dissimule son embarras en jouant machinalement avec un objet à

sa portée.

Ce n'est qu'en présence de quelques personnes de son entourage'

qu'elle se sent en confiance et reprend un peu de quiétude. .

La cause de cette phobie du regard, elle l'attribue à sa grande

taille, qui la rend, croit-elle, ridicule. Elle s'imagine aussi qu'on se

moque d'elle par derrière et que toutes les personnes qui la consi-

dèrent l'étudient avec une intention malveillante.

;)Imq F... ne sait pas si elle rougit sensiblement au moment de

son trouble ; en tous cas, elle ne s'est jamais inquiétée de cette

rougeur : toute son émotion provient de se sentir regardée.

A ces deux observations, on pourrait en ajouter une troisième,

possédant ce privilège qu'elle est impériale. Il s'agit en effet

d'Elisabeth de Bavière, impératrice d'Autriche. On sait que l'infor-

tunée souveraine qui devait trouver, à Genève, sous l'arme d'un

assassin, une fin si tragique, présentait à côté d'autres symptômes

psychopathiques dont l'héridité des Vittelsbach justifie suffisamment

l'origine, cette(même phobie du regard jointe à la pudeur du visage

qui la poussait à dissimnler sa face derrière un éventail ou une

ombrelle. Cette impératrice de la solitude, qui rêvait d' « arriver

à faire de soi une île », interposait constamment entre son visage

et les regards « le fameux éventail noir, la trop connue ombrelle,

fidèles compagnons de son existence extérieure, devenus presque

des éléments constitutifs de son apparence corporelle. En ses mains,

ils ne sont pas seulement ce qu'ils sont pour les autres femmes,

mais plutôt de purs emblèmes, armes et boucliers au service de

son véritable « moi ». Qnand elle se trouve très haut, sur le

sommet d'une montagne, baignée de suave solitude et de langueur,

en l'embrassement du soleil, tandis que le grand midi roule sur les

roches, alors seulement elle ferme l'ombrelle qui cache sa tête de

tous côtés, alors seulement de la pâleur de son visage elle abaisse

l'éventail noir. Elle s'exprima là-dessus, une fois, à Lainz. Elle

veut uniquement écarter d'elle la vie extérieure des hommes ?

elle veut préserver son intérieur silence de toute profanation'...

' Elisabeth de Bavière, impératrice d'Aulrielhe; par Constantin Chris-

tomanos. Edition du Mercure de France. 1 voler Paris 1900.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 209

Ces exemples suffisent à bien préciser la physionomie cli-

nique de la phobie du regard. Celle-ci représente, en somme,

une peur morbide, greffée sur un état mental de timidité, à

la façon de la phobie de la rougeur, mais entièrement dis-

tincte de cette dernière, puisque les phobiques du regard ne

craignent point de rougir. C'est une forme particulière de la

classe des phobies sociales ; et comme telle, elle mérite d'être

décrite à part.

SOCIÉTÉS SAVANTES.

VIVE CONGRES

DES MÉDECINS ALIÉNISTES ET NEUROLOGISTES DE FRANCE

ET DES PAYS DE LANGUE FRANÇAISE

. (Paît, l"-7 août 1904).

Séance du 1er août (matin).

Le XIV° Congrès des médecins aliénistes et neurologistes

s'est ouvert, le lundi 1 cr août, à 9 heures dans la Salle des

Concerts du Palais d'Hiver, à Pau, sous la présidence de M.

Faisans, maire de la ville, assisté de M. Guibert, préfet des

Basses-Pyrénées, Dr Drouineau, délégué du ministre de l'In-

térieur, M. Pelletier, délégué du préfet de la Seine, et des

représentants des autorités locales. De nombreux médecins

se trouvaient, réunis, attirés par l'intérêt des questions

mises au rapport, et aussi, il faut bien le dire, par le char-

me du pays et des excursions organisées aux environs. L'ac-

cueil qui leur était réservé en ce beau pays de Navarre a été

particulièrement chaleureux. C'est M. Faisans, le maire de

Pau, qui, en ouvrant la séance, a souhaité bon accueil à tous,

et dit l'intérêt qui s'attachait aux travaux du Congrès, même

pour les plus profanes des administrateurs, et a remercié le

bureau d'avoir choisi Pau pour la tenue de ses travaux.

Le. Professeur Bnrssnun, président du Congrès, a remercié

le maire de Pau de ses souhaits et de son bon accueil, affir-

mant ses sympathies pour le Béarn, qui est devenu son pays

d'adoption, et pour le maire de sa capitale, auquel, person-

Archives, 2' série, t. XVIII. 9 4

210 SOCIÉTÉS SAVANTES.

nellement, il est très attaché. M. Brissaud n'a pas manqué

de faire l'éloge du frère du maire de Pau, le Dr Faisans, mé-

decin des hôpitaux de Paris, qui a conquis auprès de tous

ses confrères de la Société médicale des hôpitaux de Paris

une telle situation que cette Société l'a désigné comme son

représentant devant le Conseil de surveillance de l'Assistance

publique. Le Président remercie ensuite le Préfet pour la

subvention qu'il a inscrite au budget départemental en fa-

veur de l'organisation du Congrès. Il remercie aussi le Dr

Drouineau, délégué du ministre de l'Intérieur, et propose

d'envoyer une adresse de remerciements au Président du

Conseil des ministres, M. Combes, ainsi qu'un salut cordial

au président du ME Congrès des aliénistes et neurologistes,

M. le Professeur Francotte (de Liège), retenu par la maladie

d'un des siens. En terminant, M. Brissaud fait des voeux

pour le succès du Congrès et remercie toutes les personnes

étrangères et les dames qui ont bien voulu honorer de leur

présence gracieuse la séance d'inauguration.

M. le Dr Drouineau prend ensuite la parole pour faire l'éloge

de M. Brissaud et se louer, en tant que représentant du mi-

nistre de l'Intérieur, de cette heureuse circonstance qui lui

permet de saluer dans le président du Congrès des aliénistes

un membre récemment élu du Conseil général des Basses-

Pyrénées. Les Conseils généraux sont les grands maîtres en

aliénation mentale, au point de vue de l'organisation et de

l'installation des asiles, au point de vue des réformes si nom-

breuses et si indispensables que réclame l'assistance des

aliénés. A ce Congrès doit être discutée la très intéressante

question des mesures à prendre à l'égard des aliénés crimi-

nels, dont M. Keraval a présenté le rapport très complet. On

voit, par cet exemple, combien l'alliance intime entre les

médecins aliénistes et les Conseils généraux peut être fécon-

de et combien il serait souhaitable de voir suivre l'exemple

fourui par M. Brissaud, dont les sages conseils et les avis

éclairés seront utiles à ses collègues du Conseil général.

; M. le professeur BRISSAUD prend la parole.

Il parle de M. Théophile de Bordeu, médecin béarnais né à

Izeste. Dans un style où la pureté de la forme le dispute à la

profondeur des idées et une haute science historique et phi-

losophique, M. Brissaud retrace la vie de Bordeu, qui fut.un

précurseur, il inspira Bichat et Pinel. Dès 17 ! f, il annonçait

SOCIÉTÉS SAVANTES. 211

des choses que Claude Bernard et Brown-Séquard contrôlè-

rent cent ans plus tard. Bordeu fut un des encyclopédistes

avec Diderot, d'Alembert, etc., il n'admit jamais le principe

d'autorité dans la foi scientifique, il contrôla, toujours aidé

en cela par une instruction très forte et une connaissance

des philosophes anglais et français. Bordeu a deviné les lo-

calisations cérébrales, que découvrirent à la fin du XIXe siè-

cle, Charcot et Pitres. Il parla même d'ondulations et d'oscil-

lations, c'est-à-dire de la théorie actuelle sur les vibrations.

Il reconnut le rôle trophique des nerfs, dans la vie des

glandes. Claude Bernard et Ludwig n'ont fait que réaliser les

aphorismes de Bordeu dont l'horizon atteint les extrêmes

limites de la neurologie actuelle, M. Brissaud a voulu faire

revivre en Béarn une figure béarnaise. Bordeu fut un pré-

curseur. Les précurseurs ont toujours tort. M. Brissaud a

voulu lui donner la place qu'il doit occuper dans l'histoire

médicale de la France. De longs applaudissements ont salué

la péroraison de ce magnifique discours.

A la suite de ce beau discours, plein d'humour, de verve

et d'exacte documentation, la séance d'inauguration est levée

et rendez-vous est pris pour 11 heures au château de Pau.

Là tous les congressistes et les dames ont pu admirer les z

merveilleuses tapisseries des Gobelins et la fameuse écaille

de tortue qui servit de berceau à Henri IV; du haut de

la tour, un ciel assez clair laissait deviner au loin le magnifi-

que panorama des cimes neigeuses de la chaîne pyrénéenne.

Le soir, une brillante réception au palais d'hiver, par

M. Faisans, maire de Pau, et Mme Faisans, réunissait tous les

congressistes, qui purent admirer les projections photogra-

phiques des plus beaux sites environnants et entendre une

fort belle partie de concert. Pierre Roy.

Séance du 1 ? août (soir). ,

Les démences vésaniques.

M. DENY (de Paris), rapporteur. - Sous le nom de démences

vésaniques, on désigne généralement les états d'affaiblissement

permanent, progressif et définitif des facultés intellectuelles,

morales et affectives, consécutifs aux psychoses. Les démences

vésaniques sont donc des affections essentiellement secondaires, et

212 SOCIÉTÉS SAVANTES.

il semblerait, d'après cette définition, qu'on dût en décrire autant

de types qu'il y a de psychoses pouvant les précéder.

Théoriquement vraie, cette proposition ne l'est plus pratique-

ment, parce que les démences consécutives ou secondaires finissent

toutes à un moment donné par se ressembler et se confondre, au

point qu'il devient très rapidement impossible de reconnaître

l'affection initiale dont elles dérivent. Aussi se borne-t-on, en géné-

ral, à étudier en bloc toutes les démences vésaniques, qu'elles

soient secondaires à la manie, à la mélancolie, aux psychoses dégé-

né2,alives, etc., de même que, sous le nom de démences névro-

siques, on réunit les états démentiels qui succèdent à l'épilepsie, à

la chorée, etc., etc.

Dans le récent traité de pathologie mentale de M. Gilbert-Ballet,

M. Arnaud distingue seulement, suivant la période de la vie à

laquelle elles apparaissent, deux formes, l'une tardive et l'autre

vrécoce, de démence vésanique.

Si séduisante que soit cette conception qui, de l'ancienne entité

morbide de Pinel et d'Esquirol, ne fait plus qu'un simple stade

terminal des psychoses de l'âge mûr ou de la vieillesse (démence

vésanique tardive), de l'adolescence ou de la jeunesse (démence

vésanique précoce), nous ne croyons pas qu'elle corresponde à la

réalité des faits et qu'elle puisse se concilier avec les idées nou-

velles en psychiatrie.

Nous exposerons d'abord les raisons cliniques, anatomiques et

étiologiques qui empêchent de considérer l'affection étudiée, sur-

tout en Allemagne, depuis une dizaine d'années, et aujourd'hui

universellement connue sous le nom de démence précoce -comme

une simple démence vésanique rapide (G. Ballet), consécutive aux

psychoses de l'adolescence; nous examinerons ensuite si la théo-

rie de la démence vésanique tardive est plus justifiée, et s'il n'y

aurait pas lieu, au contraire, de rayer définitivement du cadre des

maladies mentales l'ancien groupe disparate et hétérogène des

démences dites vésaniques ou secondaires.

Française par ses origines, mais incontestablement allemande

par- les développements scientifiques qu'elle a reçus outre-Rhin

depuis une dizaine d'années, la démence précoce est essentielle-

ment caractérisée par un affaiblissement spécial et rapidement

progressif de l'ensemble des facultés intellectuelles, qui atteint de

préférence les jeunes sujets, s'accompagne presque toujours de

troubles psychiques variés et se termine dans l'immense majorité

des cas par la perte complète de la raison.

Le début de l'affection est habituellement marqué par des trou-

bles névropathiques protéiformes (céphalée, neurasthénie, crises

convulsives,' etc.), suivis d'accidents délirants polymorphes, mais

offrant néanmoins certains caractères particuliers. A sa période

d'état, la maladie s'affirme par un affaiblissement caractéristique

SOCIÉTÉS SAVANTES. 2 lu là

des facultés intellectuelles , auquel se surajoutent , dans la

grande majorité des cas, des états de dépression, d'excitation, de

confusion, de stupeur, des conceptions délirantes ou des troubles

sensoriels. L'affaiblissement des facultés qui constitue le symp-

tôme fondamental de la démence précoce, quelle que soit sa

forme, présente des caractères spéciaux qui le différencient nette-

ment des autres états démentiels. Le premier de ces caractères

est d'être primitif, c'est-à-dire qu'il entre le premier en scène et

précède, pour un observateur attentif, toutes les autres manifesta-

tions de la maladie. En second lieu, cet affaiblissement est global,

car il se montre d'emblée diffus et généralisé aux trois grandes

facultés psychiques (sensibilité, intelligence et volonté); mais et

c'est là ce qui lui confère une véritable spécificité, il est électif,

parce que, tout en intéressant l'ensemble des processus psychi-

ques, il ne les atteint ni de la même manière, ni au même degré.

Le déficit intellectuel des déments précoces, en effet, incomplet,

quoique global, au point de vue de l'affection, se manifeste

d'abord dans la sphère des sentiments affectifs et moraux et ne

s'étend que plus tardivement à celle de l'activité volontaire et à

celle des facultés intellectuelles proprement dites, pour devenir

total, lorsque, par les progrès de la maladie, toutes les facultés

sont anéanties.

Cette action élective assigne à la démence précoce une place

distincte à côté des deux autres grandes démences, la paralysie

générule et la démence sénile, puisque, primitives et globales toutes

les trois, elles diffèrent cependant foncièrement en ce que les

facultés sont lésées d'une façon prépondérante dans la démence

précoce, les facultés intellectuelles proprement dites dans la para-

lysie générale, et la volonté dans la démence sénile.

Les troubles de la sphère affective et morale des déments pré-

coces se traduisent par une apathie et une indifférence émotionnelle

absolues. Cette indifférence s'étend à tout et à tous : il n'y a plus

pour de tels malades, ni joie, ni tristesse, ni désir, ni crainte.

Jamais ils ne réclament leur sortie de l'asile où ils sont internés,

ni la visite de leurs parents; ils restent complètement étrangers à

tout ce qui se passe autour d'eux, n'ont plus aucune espèce de

notion des convenances et n'hésitent pas à commettre en public

les actes les plus dégradants.

A ces troubles de la vie affective, qui dénotent une disparition

complète de la sensibilité morale, liée elle-même, bien entendu, à

un affaiblissement déjà notable de l'intelligence, viennent bientôt

s'ajouter des désordres de l'activité motrice et volontaire qui rendent

le tableau de la maladie encore plus saisissant.

Naturellement, c'est par défaut que l'activité volontaire est

troublée, mais la volonté n'est pas seulement lésée comme faculté

de se décider à une action, elle est encore perdue comme pouvoir

214 SOCIÉTÉS SAVANTES.

d'arrêt des mouvements automatiques qui sont presque toujours

conservés et surtout exagérés.

C'est à la réunion de ces troubles de l'activité volontaire et auto-

matique que l'on a donné le nom de syndrome cataconique. Les

principaux éléments de ce syndrome sont des phénomènes d'op-

position plus connus aujourd'hui sous le nom de négativisme; des

phénomènes de docilité auxquels s'applique le terme de suggesti-

bilité, et enfin des stéréotypies. Le négativisme, se caractérise à

son degré le plus léger par sa lenteur, la contrainte et l'hésitation

des mouvements commandés, et plus tard par une inertie et une

inaction complètes. Plongés dans la stupeur, les malades restent

immobiles et comme figés durant des journées entières et dans la

même position et opposent à tous les actes qu'on veut leur faire

exécuter une résistance invincible, conséquence de leur activité

négative. Les manifestations de la suggestibilité consistent tantôt.

dans une simple docilité ou une sorte d'activité imilative des

sujets, qui exécutent les actes les plus baroques qu'on leur ordonne,

copient mutuellement leurs poses et leurs attitudes, conservent les

positions qu'on imprime à leurs membres (catalepsie), répètent les

mots prononcés devant eux (écholalie), reproduisent les gestes

qu'ils voient faire (échomimie, éclcopouxie), etc.

L'affinité de ces deux groupes symptomatiques n'est pas contes-

table, car on les voit souvent alterner ou coexister chez les mêmes

malades; tous deux du reste, peuvent être rapportés à un même

processus psycho-pathologique fondamental, la perte de l'activité

volontaire en même temps que la persistance d'une certaine acti-

vité automatique, irraisonnée et inconsciente. La désagrégation

psychique de ces sujets s'accuse encore par l'apparition des phé-

nomènes de stéréotypie qui consistent, comme on sait, dans la

répétition incessante et indéfinie des mêmes gestes, des mêmes

mots, qui s'intercalent dans toutes les phrases, des mêmes gri-

maces et des mêmes tics, des mêmes façons bizarres, affectées ou

maniérées, de parler, de marcher, de s'asseoir, de manger, etc. A

côté des stéréotypies, et comme autres manifestations de l'exagé-

ration de l'automatisme chez les déments précoces, il nous faut

encore signaler leur besoin continuel de mouvements, leurs gesti-

culations désordonnées, sans but, sans troubles émotionnels adé-

quats ; leur impulsivité, leurs fugues irrésistibles, leurs explosions

de rires et de pleurs, etc. Quant aux modifications de la sphère

intellectuelle proprement dite, elles se manifestent par des trou-

bles de l'attention, de la mémoire, de la réflexion, du jugement,

de l'association des idées, etc. ,

Les malades sont incapables de s'appliquer à aucun travail, de

'lire, de fixer leur esprit sur un objet. S'ils conservent en général

assez bien le souvenir des faits anciens, ils ont complètement

perdu la faculté de fixer de nouvelles images, ainsi que cela appa-

SOCIÉTÉS SAVANTES. ' I'J

rait clairement dans leur verbigération écrite ou parlée, leur jar-

gonaphasie, leurs néologismes, etc. La plupart des déments pré-

coces (les déments paranoïdes exceptés) n'ont aucune notion du

temps; ils ne savent ni leur âge, ni le millésime de l'année; leur

langage en outre est d'une incohérence déconcertante qui prouve

que Uassociation, l'enchaînement normal des idées, n'ont plus lieu

que par assonance de certains mots, par des rimes, des synonymes,

et aussi par antithèse, par opposition, l'émission de certains mots

évoquant immédiatement un mot de signification contraire.

Tels sont les principaux aspects sous lesquels peut se présenter

l'affaiblissement des facultés psychiques chez les déments pré-

coces. Cet affaiblissement constitue, ainsi que nous l'avons déjà

signalé, le fondement même de la maladie, ce qui veut dire qu'il

en est à lui seul la condition nécessaire et suffisante.

Lorsqu'il existe à l'état isolé pendant tout le cours de l'affection,

sans conceptions délirantes, sans hallucinations, sans excitation ni

dépression, on se trouve en présence d'une forme atténuée ou

fruste de la maladie (forme simple de M. Sérieux, hébéphrénie miti-

gée de M. Christian). Les autres variétés aujourd'hui classiques de

la maladie, l'hébéph¡'él11e, la catatonie et la démence paranoïde em-

pruntent leur dénomination à la superposition, à cet affaiblisse-

ment intellectuel, de troubles psychiques variés : conceptions

délirantes, hallucinations, états d'excitation, de dépression et de

stupeur que nous allons rapidement passer en revue.

C'est surtout dans l'hébéphrénie et dans la démence paranoïde

de Kraepelin que s'observent des troubles sensoriels et des concep-

tions délirantes. '

Ces conceptions délirantes ne présentent rien de spécial en ce

qui concerne leur contenu : les plus fréquentes sont des idées de

richesse, de grandeur ou de persécution, parfois aussi des idées

hypocondriaques, mystiques, érotiques, etc.; elles sont foncière-

ment polymorphes et asystématiques, au moins dans l'hébéphré-

nie, et la première variété de la démence paranoïde (démence

paranoïde simple), qui comprend les formes décrites en France

sous le nom de délire polymorphe des dégénérés, de délire d'emblée,

etc., en Allemagne sous celui de paranoïa aiguë. Par contre, dans

la deuxième variété de démence paranoïde, forme dans laquelle

Kroepeiin a fait rentrer tous les délires systématisés hallucinatoires,

y compris le délire chronique de Magnan, ces idées délirantes

sont un peu moins mobiles, plus adhérentes et peuvent même

offrir un certain degré de systématisation.

Les réactions psycho-motrices les plus variées (excitation, dé-

pression, stupeur) peuvent s'observer dans toutes les formes de

démence précoce, mais c'est dans la variété catatonique qu'elles

jouent un rôle tout à fait prépondérant.

- Ordinairement passagers, transitoires et éphémères dans l'hébé-

216 SOCIÉTÉS SAVANTES.

phrénie et surtout dans la démence paranoïde, les états d'excita-

tion, de dépression ou de stupeur peuvent, au contraire, persister

sans la moindre modification pendant des semaines, des mois et

des années, dans la catatonie.

L'excitation se traduit par un verbiage incohérent, dans lequel

les mots s'accolent les uns aux autres sans aucune suite (salade de

mots), dont certains sont employés à contre-sens, d'autres déformés

(jargonaphasie), forgés de toutes pièces (néologismes) ou répétés à

satiété (verbigércation). Le désordre qu'on observe dans les discours

des déments précoces excités se retrouve dans leurs attitudes,

leurs actes et toute leur manière d'être. Outre leur physionomie

mobile, leurs cheveux en désordre, les femmes (visées surtout

dans cette description) affectent de se montrer complètement nues,

ou se drapent à l'antique dans leurs couvertures, prennent des

attitudes de sphinx, de prédicateur, d'athlète, etc.

Lorsque à cette agitation motrice fait place une période de

calme et de répit, les malades se dissimulent complètement sous

leurs draps, le tronc et les membres repliés sur eux-mêmes, les

genoux touchant souvent le menton, la tête toujours enfouie au

milieu du lit.

Malgré leur calme apparent, ces malades diffèrent totalement de

celles qui sont réellement en état de dépression ou de stupeur,

parce que, à l'encontre de celles-ci, brusquement, instantanément,

elles s'élancent hors deleur lit et recommencent la série des extra-

vagances signalées plus haut.

Leurs compagnes en état de stupeur, gardent, au contraire,

invariablement la même position : levées ou couchées elles restent

durant tout le jour immobiles, raidies, figées, le plus souvent dans

des attitudes pénibles ou fatigantes, la physionomie inerte, le

regard vague, la tête légèrement inclinée, les bras ramenés le long

du tronc,' les membres tantôt résistants, impossibles à déplacer,

tantôt mous, flasques et conservant les attitudes qu'on leur donne.

Insensibles à toutes les excitations extérieures, les malades en

état de stupeur voient, entendent, comprennent, et cependant elles

ne répondent pas aux questions et se montrent incapables d'ouvrir

la bouche, de tirer la langue, de donner la main. Place-t-on entre

les mains d'uue semblable patiente un crayon, un objet quelcon-

que, elle le laisse échapper ou le tient machinalement sans cher-

cher à se rendre compte de son usage, comme dans les cas d'abo-

lition du sens stéréognostique. Cet état d'indifférence et d'incurio-

sité de la main négativiste est une confirmation de la loi de M1L

Brissaud et P. Marie : il prouve que l'appétit de la fonction est

étroitement lié à l'intégrité de son exercice et que, au moins dans

le domaine de l'activité psychique supérieure, la perte des moyens

d'exécution peut entraîner l'oubli même de la fonction paralysée.

- Dans les cas de stupeur complète, les injonctions, les sollicita-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 217

tions les plus pressantes, ne sont suivies d'aucune réaction mo-

trice ou vaso-motrice. On peut alors diriger contre les malades la

pointe d'un instrument tranchant, toucher leurs globes oculaires

ou la pointe de leur langue avec l'extrémité d'une aiguille sans

qu'ils donnent le moindre signe de frayeur. Seule, la réflectivité

automatique persiste, la psyt : ho-7-éflectitité est absente.

Ces états de stupeur, comme ceux d'excitation décrits plus haut,

peuvent s'observer en dehors de la démence précoce, mais c'est

seulement dans cette affection qu'ils se présentent sans relation

avec des idées délirantes ou des hallucinations et indépendamment

de troubles émotionnels.

Quand on interroge, en effet, les malades, dans leur période de

rémission ou dans leurs intervalles lucides, sur la raison des bi-

zarreries de leur conduite et de leurs attitudes, ou bien ils balbu-

tient des raisons insignifiantes, ou bien ils déclarent qu'il leur

était impossible d'agir autrement; mais ce qu'ils n'avouent pas,

parce qu'ils ne s'en rendent pas compte, c'est qu'ils n'en avaient

ni le désir, ni la volonté. Ce qui justifie encore une fois l'opinion

de M. Séglas, que la seule explication plausible des symptômes

catatoniques ne doit pas être cherchée ailleurs que dans le fonds

mental sur lequel ils reposent : fond commun à toutes les variétés

de la maladie et caractérisé surtout par la passivité de l'esprit, la

perte de l'activité intellectuelle, la lenteurdes processus psychiques

et l'affaiblissement progressif de la synthèse mentale.

Il me resterait maintenant, pour compléter le tableau sympto-

matique de la démence précoce, à passer en revue les signes phy-

siques de cette affection, mais comme ils n'ont pas encore acquis

une réelle valeur sémiologique, je me bornerai à signaler les

plus fréquents. Presque tous les auteurs ont constaté une exagé-

ration des réflexes tendineux chez les sujets en état de stupeur ou

de demi-stupeur. Par contre, les réflexes cutanés ont été trouvés

faibles ou abolis dans la moitié environ des cas. Il en est de même

des réflexes lumineux et accommodateurs de la pupille. La pupille

elle-même offre des dimensions variables ; dans un peu plus des

deux tiers des cas le diamètre serait exagéré.

En outre de ces modifications de la réflectivité, on observe,

chez un grand nombre de déments précoces, de la cyanose et du

refroidissement des extrémités, des oedèmes localisés, des infiltra-

tions particulières du tissu cellulaire des extrémités (pseudo-oedè-

mes de Dide), des alternatives d'engraissement et d'amaigrisse-

ment rapides survenant sans cause appréciable (Séglas), du der-

mographisme, des troubles de la menstruation, etc., etc.

Le liquide céphalo-rachidien, contrairement à ce qui se passe

dans la paralysie généaale, ne contient pas d'éléments figurés :

dans quelque cas cependant on a noté l'existence d'une lymphocy-

tose modérée (Camus et Lhermitte). Quant aux urines, elles sont

218 SOCIÉTÉS SAVANTES.

généralement diminuées de volume et présentent presque toujours

une diminution de leur teneur en urée, en phosphates et en chlo-

rures. Plusieurs auteurs ont en outre constaté un retard dans

l'élimination du bleu de méthylène, ce qui semble indiquer une

diminution de la perméabilité rénale.

Les signes physiques que nous venons de passer en revue sont

notablement plus fréquents et plus accusés dans les formes catato-

niques et hébéphrcniques de la démence précoce que dans la forme

paranoïde. Ils appartiennent surtout à la période d'état de la mala-

die et diminuent en nombre et en intensité à la période terminale.

Leur valeur sémiologique est encore actuellement difficile à

préciser; il semble bien, cependant, d'après l'étude comparative

qui a été faite de ces mêmes signes dans quelques autres formes

d'aliénation mentale, qu'ils sont plus nombreux et plus accusés

dans la démence précoce que dans les autres psychoses; mais il

faut reconnaître qu'aucun d'eux, pris isolément, ne saurait être

considéré comme pathognomonique, et que c'est seulement par

leur réunion et leur permanence qu'ils peuvent apporter une utile

contribution au diagnostic.

Quoi qu'il en soit, la symptomatologie de la démence précoce,

telle que nous venons de l'exposer brièvement, est fondée actuel-

lement sur un nombre trop imposant de faits empruntés aux ob-

servateurs de tous les pays, pour que le plus léger doute puisse

s'élever sur la réalité de cette entité morbide. Aussi bien n'est-ce

pas la valeur nosographique de cette affection qui est aujourd'hui

en discussion, mais uniquement son autonomie nosologique.

Beaucoup d'aliénistes, en effet, tout en reconnaissant que la

démence précoce ne laisse rien à désirer au point de vue sympto-

matique, se refusent à la considérer comme une maladie autonome

et tendent à la faire rentrer dans le groupe des folies dégénératives

ou héréditaires, parce qu'elle n'a pas encore pour critérium des

lésions anatomiques indiscutables ou une étiologie spéciale.

« Le problème étiologique, dit M. Gilbert Ballet, me parait, à

l'heure actuelle, le problème capital; la démence précoce est-elle

une psychose accidentelle ou une psychose constitutionnelle ? Voilà

le point vif de la question. Suivant la solution qui interviendra, on

pourra décider si la description de la démence précoce n'est

qu'une amplification nosographiquement plus détaillée de celle

déjà donnée par Morel, ou si, au contraire, l'affection doit être

élevée au rang d'entité nosologique nouvelle. »

On ne saurait nier que, de l'enquête étiologique faite par diffé-

rents auteurs, il est encore bien difficile de tirer des indications

positives sur la pathogénie de la démence précoce ; il nous semble

cependant que parmi les différents facteurs étiologiques le plus

souvent invoqués, il en est deux, au moins, qui méritent de retenir

l'attention. ,

SOCIÉTÉS SAVANTES. 219

Le premier, c'est que chez un assez grand nombre de déments

précoces, il existe des antécédents héréditaires névropsychopathiques

non douteux; le second, que les causes accidentelles qu'on fait le

plus volontiers intervenir, sont toutes réductibles à un processus

d'auto-intoxication, dont le déterminisme, à la vérité, n'a pu être

encore précisé, mais que l'âge auquel la maladie se développe le

plus souvent permet de rattacher vraisemblablement à un trouble

de la sécrétion des glandes sexuelles (testicules, ovaires), pour un

certain nombre de cas (la grande majorité) et, pour les autres, à

une insuffisance fonctionnelle des glandes hépatiques, rénales,

surrénales, thyroïde, etc.

De ces deux constatations, la première, à nos yeux, signifie

simplement qu'une prédisposition est indispersable au développe-

ment de la démence précoce. A vrai dire, cette prédisposition

aurait pu être admise a priori, personne aujourd'hui ne mettant

en doute qu'une sorte de consentement de l'organisme est néces-

saire pour qu'une maladie s'installe et persiste.

On peut donc considérer comme un fait acquis que si la démence

précoce se montre chez les dégénérés, c'est seulement dans un

petit nombre de cas. Cette constatation ne porte nullement atteinte

à la théorie de l'auto-intoxication ; les tares dégénératives bien

qu'on ait soutenu le contraire s'observent aussi quelquefois

dans la paralysie générale et, cependant, l'origine accidentelle de

cette affection n'en est pas moins proclamée par la grande majorité

des auteurs. La paralysie générale, a déclaré M. Magnan, est la .

plus individuelle des maladies mentales.

Nous avons dit, d'autre part, que, de notre enquête étiologique,

résultait la notion que la prédisposition, héréditaire ou acquise,

avait besoin d'être actionnée par des causes accidentelles pour

réaliser le syndrome clinique de la démence précoce et nous avons

émis l'hypothèse que, sous le couvert de masques divers (excès,

surmenages, traumatismes, chocs moraux, épuisement, etc.), ces

diverses causes, en apparence complexes, formaient un seul fais-

ceaux étiologique dont tous les éléments étaient sous la dépendance

d'un même processus pathogénique. L'étiologie [est, à vrai dire,

impuissante à nous renseigner sur la nature de ce processus mais

peut-être nous sera-t-il possible, en faisant appel à l'ana-

tomie pathologique, de soulever un coin du voile qui le recouvre.

Un point qui semble actuellement à l'abri de toute contestation,

c'est l'existence d'une profonde altération de la cellule nerveuse et

de ses prolongements dans tous les cas de démence précoce (slip-

pel et Lhermitte). On ne manquera pas de nous objecter que la

lésion exclusive du neurone n'a pas, par elle même, une significa-

tion absolue, qu'on l'observe dans tous les états démentiels et

même dans beaucoup de psychoses.

A cette objection, nous répondrons que si la cellule nerveuse est

220 SOCIÉTÉS SAVANTES.

lésée isolément, c'est qu'elle est le terrain par excellence des réac-

tions les plus délicates et les plus -précoces aux imprégnations

toxiques (Dupré) et, d'autre part, qu'il n'est pas absolument dé-

montré que les réactions défensives de l'organisme, qu'on a l'ha-

bitude d'observer dans tous les processus toxi-infectieux aboutissent

à la mort de la- cellule, fassent complètement défaut dans la

démence précoce. 1

MM. Alzheimer, Nissl, Bridier et quelques autres auteurs ont

noté expressément l'existence de lésions vasculaires, et aussi,

d'une infiltration de l'écorce par des corpuscules ronds de dimen-

sions variables, de nature névroglique ou leucocytaire, qui

semblent jouer le rôle de neuronophages vis-a-vis de la cellule

nerveuse.

Cette prolifération de la névroglie n'est, du reste, pas niée par

MM. Klippel et Lhermitte, mais ils la relèguent au second plan,

parce qu'elle était circonscrite et limitée dans les cas qu'ils ont

examinés : mais si cette prolifération n'était pas plus abondante, il

faut peut-être en chercher la cause dans la brusque interruption de

l'affection par une maladie intercurrente, ainsi que le fait s'est

produit chez 3 sur 4 des malades dont ils ont examiné les centres

nerveux.

Après les réserves cliniques que nous venons de faire, il est peut-

être un peu téméraire d'affirmer, avec ces auteurs, que, dans la

démence précoce, la lésion localisée à l'un des tissus de l'encéphale

demeure comme un fait indiscutable... et qu'il y a là une lésion

qui appartient à la démence précoce et non à certaines autres

démences ». Dans l'état actuel de la question nous croyons inutile

d'insister davantage sur l'interprétation que sont susceptibles de

recevoir des altérations dont le siège, la nature et l'étendue prêtent

encore à discussion. Ce qu'il nous est seulement permis de retenir

en nous en tenant aux constatations les plus récentes, c'est l'ana-

logie, pour ne pas dire la complète identité, de ces lésions avec

celles de psychoses dont l'origine toxi-infectieuse ne fait plus de

doute pour personne, comme la confusion mentale et la psychose

polynévritique (G. Ballet). Dans ces deux ordres de faits (psychose

polynévritique et confusion mentale d'une part, démence précoce

del'autre), on note la même intégrité des méninges et des vais-

seaux, la même absence de lésions notables de la névroglie, la

même localisation du processus à la cellule nerveuse dont les angles

sont arrondis, les prolongements plus grêles, le protoplasma gra-

nuleux, le noyau excentriquement déplacé, etc. Il semble donc que,

d'ores et déjà, on soit en droit, au nom de l'anatomie patholo-

gique, de distinguer la démence précoce des folies dites dégénéra-

tives et de les rattacher avec Kroepeliu au groupe des maladies

mentales dues à une auto-intoxication.

Après les considérations qui précèdent, on me pardonnera

SOCIÉTÉS SAVANTES. 221

d'être bref sur les arguments cliniques qui peuvent être invoqués

à l'appui de l'origine auto-toxique de la démence précoce. A con-

sidérer seulement la lente évolution de la maladie, qui n'aboutit

xà la perte complète des facultés qu'après une série de crises

paroxystiques et de rémissions, on ne peut se défendre de penser

à l'intervention d'un processus toxique qui procède par poussées

et n'envahit que progressivement, d'une façon inégale et inter-

mittente, l'ensemble des territoires psychiques. En faveur de

cette hypothèse, militent encore les accès fébriles, les crises con-

vulsives, les états cataleptoïdes, etc., et, dans le même ordre

d'idées, les états de confusion, d'engourdissement, de torpeur,

d'onirisme et de puérilisme qui donnent à la maladie un cachet

si spécial. Mais comme il n'y a là, en réalité, que des présomp-

tions, mieux vaut se cantonner sur le terrain anatomique.'Or,

l'histopathologie actuelle de la démence précoce, même réduite

aux constatations de MM. Klippel et Lhermitte, tend à faire

admettre l'existence d'une altération de la substance grise du cer-

veau, et principalement des zones d'association, par des poisons

vraisemblablement d'origine glandulaire. -"

Nous conclurons donc en disant que la démence précoce, tout

en restant soumise, dans les mêmes limites que la paralysie

générale, à l'inéluctable loi de la prédisposition héréditaire et

acquise, est, au même titre et dans la même mesure que cette

dernière affection, une maladie fortuite et accidentelle .

Après l'exposé qui vient d'être fait des raisons qui nous empê-

chent d'envisager la démence précoce comme une affection secon-

daire ou consécutive à certaines psychoses, ilt-ce même à la

confusion mentale (Régis), et par conséquent d'admettre la

théorie de la démence vésanique rapide, il nous reste à examiner

si la conception de la démence vésanique tardive est plus justifiée.

Pour cela, nous examinerons séparément les trois grands

groupes d'états démentiels consécutifs : 1° aux folies généralisées

(manie, mélancolie, etc.) ; 2° aux psychoses dites des dégénérés

(délire d'emblée, délire polymorphe, paranoïa aigus, etc.); 3° aux

folies systématisées chroniques.

Tous les auteurs sont aujourd'hui d'accord pour reconnaitre

que la manie et la mélancolie dites essentielles ne peuvent plus

être considérées comme des entités morbides et que, par ces

mots, on désigne de simples états syndromiques pouvant tou-

jours être rattachés à la folie maniaque dépressive, à la paralysie

générale, aux folies toxiques, à la demence précoce, à la confu-

sion mentale, etc, Sur 1.000 maniaques suivis pendant de longues

années, dit Krsepelin, je n'en ai observé qu'un seul qui n'ait pas

eu de récidives. Le même auteur et, après lui, M. Sérieux,

M. Capgras, etc., ont également établi que la mélancolie n'exis-

tait, en tant qu'affection autonome, que comme manifestation

222 SOCIÉTÉS SAVANTES.

des processus organiques d'involution sénile et que les états mé-

lancoliques observés pendant la jeunesse ou l'âge adulte, étaient

tous justiciables de la folie maniaque dépressive ou de la démence

précoce, quand ils n'étaient pas liés à la paralysie générale ou

aux folies toxi-infectieuses. La manie et la mélancolie perdant

ainsi toute valeur en tant que types nosologiques, on voudra bien

reconnaître qu'il ne saurait y avoir à proprement parler de

démences post-maniaques ou post-mélancoliques.

Y a-t-il lieu de conserver les démences consécutives aux états

dits dégénératifs décrits sous le nom de délires d'emblée ou

polymorphes, de paranoïa aiguë, etc. ? De l'avis de tous les

auteurs, la terminaison habituelle de ces états serait la guérison.

Nous n'y contredirons pas, mais il faut avouer que ces préten-

dués guérisons ne visent que l'épisode délirant et les troubles

sensoriels qui l'accompagnent. Le plus souvent, les malades sor-

tent de leurs accès délirants, diminués intellectuellement.

Mais comme leur niveau mental, déjà faible congénitalement.

était inconnu du médecin qui les traite, ce déficit passe inaperçu,

et alors deux éventnalités peuvent se produire : ou les malades

quittent l'asile pour y rentrer bientôt avec des accidents analo-

. gués qui, eux-mêmes, disparaissent à leur tour, et ce n'est sou-

vent qu'après trois ou quatre paroxysmes délirants - dont on

méconnaît ordinairement, du reste, les liens de parenté que

l'état démentiel éclate à tous les yeux; ou bien les accalmies ne

sont pas assez franches pour que le malade quitte l'asile, et au

bout de quelques semaines et de quelques mois les manifestations

délirantes se reproduisent et évoluent pour ainsi dire d'une seule

traite vers la démence définitive et incurable. Dans les deux cas,

il ne s'agit donc pas réellement d'une démence secondaire ou ter-

minale, mais d'une démence primaire, - protopathique, précoce,

momentanément masquée par des phénomènes délirants; ceux-ci

sont sujets à des rémissions et peuvent même disparaître tout

comme dans la paralysie générale, mais le. déficit mental sur

lequel ils sont greffés est permanent et s'accentue progressive-

ment pour aboutir au bout de plusieurs années à la perte com-

plète de l'intelligence. Parfois, du reste, les caractères cliniques

de ce déficit intellectuel, qui s'affirme encore par des actes baro-

ques, des tics, des stéréotypies, du négativisme, du collectio-

nisme; des soliloques, de la verbigération, etc., ne laissent aucun

doute sur son origine démentielle.

- Réstent les délires systématisés chroniques. Beaucoup d'auteurs

estimaient autrefois que ces psychoses ne se terminaient jamais

par la démence. On se rappelle l'opposition qu'a rencontrée

M. Magnan pour faire accepter la période démentielle de son délire

chronique à évolution systématique. L'effacement du délire, sa

cristallisation, l'indifférence des malades étaient mis sur le

SOCIÉTÉS SAVANTES. 223

compte de leur long internement et de l'inutilité reconnue par

eux de leurs affirmations délirantes.

Ces faits ne sont plus aujourd'hui envisagés de la même façon :

il est nombre de cas, dit M. Séglas, en parlant des délires systé-

matisés, surtout des variétés dites hallucinatoires, qui arrivent à

une démence véritable, bien qu'incomplète et de caractères parti-

culiers. MM. Sérieux et Masselon admettent également les délires

sysmatisés hallucinatoires aboutissent plus ou moins tardivement

à l'affaiblissement intellectuel; mais sans se prononcer d'une

façon catégorique, ces auteurs hésitent cependant à faire rentrer

les états d'affaiblissement intellectuel consécutifs aux délires sys-

tématisés hallucinatoires dans la variété paranoïde de la démence

précoce. Pour eux, il s'agirait bien là d'une démence secondaire

méta ou post-vésanique. Voilà en somme à quoi se réduirait le

vaste groupe des démences vésaniques que tous les auteurs font

encore figurer dans leurs classifications. Faut-il se ranger à l'opi-

nion de M. Séglas et de M. Sérieux, ou adopter celle de Kroe-

pelin qui soutient que toutes les variétés hallucinatoires de la

paranoïa, y compris le délire chronique de Magnan, doivent être

considérés, au moins à titre provisoire, comme appartenant à la

démence précoce ? En ce qui nous concerne, nous nous sommes

déjà expliqué ailleurs sur cette question, nous n'y insisterons

donc pas. Voici cependant quelques-uns des arguments qui peu-

vent être invoqués en faveur de la théorie de Kroepelin.

Pour juger du niveau intellectuel des malades atteints de délires

systématisés chroniques, il faut étudier le contenu de ces délires

qui, comme on le sait, est presque toujours à bases d'idées hypo-

condriaques, de persécution ou de grandeur. Or, de l'avis de tous

les auteurs, de semblables idées ne peuvent se développer qu'à la

faveur d'un affaiblissement congénital ou acquis, temporaire ou

permanent, des facultés : leur fréquence, en dehors de la folie

systématisée, chez les imbéciles, les débiles et les déments de

toute espèce, le prouve suffisamment pour que nous n'ayons pas

besoin de nous arrêter sur ce point. Il est vrai que les mêmes

auteurs insistent à l'envi sur les caractères différents que présen-

tent ces idées dans les affections que nous venons de citer (imbé-

cillité, débilité mentale, paralysie générale, etc.) et dans la

paranoïa.

Pour démontrer la conservation relative de l'activité intellec-

tuelle chez les paranoïaques, on invoque surtout la systématisa-

tion de leurs délires; leurs conceptions fausses, dit-on, s'enchaî-

nent et se relient les unes aux autres; seul, le point de départ de

ces conceptions repose sur une fiction, mais celles-ci sont logique-

ment déduites les unes des autres et on en conclut à l'intégrité

des facultés syllogistiques de ces malades. 0

En réalité, la systématisation des idées chez ces sujets est loin

224 SOCIÉTÉS SAVANTES.

d'être aussi inattaquable qu'on l'admet généralement (je rappelle

qu'il ne s'agit ici que des variétés hallucinatoires de la paranoïa);

l'échafaudage en est le plus souvent fragile et chancelant; mais,

en admettant-même le parfait agencement de ces échafaudages

délirants, il est bien évident qu'ils ne peuvent s'édifier qu'à la

faveur d'une crédulité et d'une perte complète de la faculté auto-

critique, qui sont les témoins irrécusables d'un affaiblissement

préalable des facultés. Cet affaiblissement, dira-t-on, est congé-

nital, il n'est pas acquis, il n'est donc pas démentiel. Il est pro-

bable qu'en réalité, il est l'un et l'autre. En tout cas, M. Magnan a

signalé l'existence de délires systématisés, en apparence purs de

tout mélange, chez des paralytiques généraux. Son élève,

M. Pécharman, a également relevé plusieurs cas de délire systé-

matisé chez des vieillards, c'est-à-dire chez des sujets dont le cer-

veau est en voie de régression athéromateuse. Délire systématisé

et démence ne peuvent donc pas être considérés comme deux

termes ennemis, contradictoires. D'autre part, la superposition si

fréquente des idées de grandeur aux idées de persécution chez les

paranoïaques n'est-elle pas la preuve irrésusable des progrès de

leur amoindrissement intellectuel ? Et la cristallisation elle-même

de leurs conceptions délirantes, qui tournent dans un cercle de

jour en jour plus étroit, se reproduisent, constamment identiques

à elles-mêmes, qui sont stéréotypées comme on disait autrefois,

ne constitue-t-elle pas un nouvel argument à l'appui de la thèse

que nous défendons ? La stéréotypie délirante des délirants chro-

niques est évidemment un phénomène du même ordre que la sté-

réotypie verbale des déments précoces ; cette répétition monotone

des mêmes mots dans un cas, des mêmes idées dans l'autre,

ne peut être que le fait d'un effacement progressif des images

mentales et de la fixation isolée, automatique, de quelques-unes

seulement d'entre elles dans le champ de la conscience (Masselon),

ce qui revient à dire que la démence est le substratum de ces sté-

réotypies.

Telles sont les principales raisons qui nous semblent justifier

l'introduction dans le cadre de la démence précoce de la plupait

des délires systématisés hallucinatoires chroniques.

Ajoutons, enfin, que la terminaison constante de ces délires par

démence totale, peut encore être invoquée en faveur de la doc-

trine de Kroepelin. Si celle-ci rencontre encore une si grande

opposition,' c'est qu'au dire de certains auteurs il s'écoulerait un

temps parfois considérable entre le début du délire systématisé et

le moment où la démence fait son apparition; il y a là une équi-

voque qui disparaitrait, si tout le monde s'accordait pour donner

au terme de démence la même valeur.

Après Claus, je rappellerai que le mot dementia, en allemand, a

une signification moins absolue que celle qu'on lui attribue en

SOCIÉTÉS SAVANTES. 225

France, « que dans la sixième édition du traité de Kroepelin, le

terme de « démence» est remplacé par celui de « Schwachsinn »

qui signifie simplement : faiblesse d'esprit. En médecine mentale,

plus peut-être encore que dans les autres branches de la méde-

cine, il est nécessaire de définir exactement les termes que l'on

emploie. Comme tous les processus, celui de la démence a un

commencement, un milieu et une fin. En France, on a pris à peu

près l'habitude deréserver le mot « démence » pour désigner exclu-

sivement la phase ultime des déficits intellectuels. En bonne

logique, ce terme doit s'appliquer également aux phases initiales

de ces déficits, lacunaires ou globaux, permanents ou progressifs,

quelle que soit par ailleurs la subtilité que réclame leur consta-

tation ; et cela, jusqu'au jour où les progrès de l'anatomie patho-

logique nous permettront de faire, pour le syndrome clinique de

la démence, ce qui a été si heureusement réalisé par les remar-

quables travaux de Bourneville et de ses élèves, pour le syndrome

clinique de l'idiotie.

En s'appuyant sur ces considérations purement cliniques, on

serait donc en droit de nier aujonrd'hui l'existence des démences

dites vésaniques ou secondaires; mais d'autres raisons peuvent

encore être invoquées en faveur de cette thèse.

.Depuis longtemps, l'anatomie pathologique avait devancé sur

ce point la clinique, en établissant l'existence, dans tous les cas

de démence chronique, de lésions matérielles de la corticalité

cérébrale, et en montrant que l'intensité de ces lésions était tou-

jours en rapport avec la gravité des symptômes : il est donc

bien difficile, pour tout esprit non prévenu, de ne pas admettre

un rapport de causalité entre ces lésions et le tableau symptoma-

tique de la démence. M. Pierret, le premier en France, a soutenu

cette doctrine, qui a été confirmée depuis par un grand nombre

d'observateurs. '

La démence, quelle que soit son origine, dit M. Nissl, a toujours

un substratum anatomique objectivement démontrable : toutes

les démences sont donc foncièrement organiques et diffèrent seu-

lement entre elles par le degré d'intensité du processus de destruc-

tion cellulaire du cortex. A la vérité, MM. Klippel et Lhermitte

ont essayé récemment d'établir une ligne de démarcation entre

les démences vésaniques, en se fondant sur la différence de loca-

lisation des lésions respectives de ces deux groupes d'états démen-

tiels.

D'après cette théorie, « les délires et les démences dites organi-

ques auraient pour caractère anatomique d'atteindre l'ensemble

des tissus qui composent l'encéphale et à côté des lésions du neu-

rone, et de la névroglie (tissu neuro-épithélial) d'entraîner celles

des éléments vasculo-conjonctifs (leucocytes, endothéliums vascu-

laires, cellules conjonctives). « Les délires et les démences vésa-

AMtnvM, 2' série, t. XV111. 15

226 SOCIÉTÉS SAVANTES.

niques seraient liés aux lésions dites fonctionnelles et à l'atrophie

du neurone, tandis que les autres tissus de l'encéphale, à part

parfois la névroglie, ne participeraient pas aux lésions. »

On remarquera qu'à cette différence de siège des altérations ne

correspond aucune différence de nature. Il s'agit toujours de

lésions destructives avec désintégration plus ou moins complète

de la cellule, mais tandis que l'élément noble est seul intéressé

dans un cas. dans l'autre sa gangue vasculo-conjonctive participe

au processus. 1

Dans ces conditions, est-on réellement fondé à séparer aussi

nettement des affections qui reconnaissant un même substratum,

ne différant que par son étendue ? D'autres répondront et, pour

commencer, voici déjà l'opinion de M. Pierret sur la question :

« De toutes les lésions observées au cours des démences, écrit son

élève, M. Bridier, la plus constante est celle de la cellule corticale.

Il ne s'agit pas seulement d'une lésion banale telle que la chroma-

tolyse, mais de la destruction de l'élément et de son remplace-

ment par des amas de noyaux ou tout au moins par une dégéné-

rescence granulo-pigmentaire, » et plus loin : « Au point de vue

'anatomo-pathologique, on ne peut faire de distinction entre les

démences organiques et les démences vésaniques. »

La clinique nous ayant déjà fourni la même réponse, c'est à

cette conclusion que nous nous rallierons, d'autant plus qu'elle

est basée non pas sur l'examen de quelques cas de démence pré-

coce, comme celle de MM. Klippel et Lhermitte, mais sur un

ensemble de faits comprenant les principaux types de démences

classiques, y compris les anciennes démences aiguës curables

d'Esquirol (confusion mentale, stupidité, etc., que nous n'avons

pu étudier ici sous peine de passer en revue toute la pathologie

mentale.

Abstraction faite de ces démences aiguës, nous avons essayé

d'établir que l'ancien groupe disparate et hétérogène des

démences dites vésaniques ou secondaires ne pouvait plus être

maintenu dans les classifications psychiatriques; parmi ces

démences, il en est d'abord plusieurs qui doivent forcément dis-

paraitre, puisque les psychoses dont elles constituaient le stade

terminal ont perdu leur àutonomie; telles sont les démences con-

sécutives aux folies simples, la démence maniaque, la démence

mélancolique, etc. Quant aux deux autres groupes de demences

vésaniques, celles qui sont consécutives aux prétendues psychoses

dégénératives, aux délires systématisés aigus ou chroniques

(variétés hallucinatoires), etc., elles ressortissent toutes aux diffé-

rentes formes de la démence précoce, et par conséquent, appar-

tiennent à la catégorie des démences primitives.

Défalcation faite des démences toxiques et des démences névro-

siques, qui ne rentrent pas dans le cadre de ce travail, on pour-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 227 7

rait, en s'appuyant sur ces données, essayer de grouper au

moins provisoirement les démences organiques (y compris les

anciennes démences vésaniques) en deux grandes classes : celles

qui sont dues à des lésions circonscrites, solitaires ou multiples, et

celles qui reconnaissent pour cause des lésions diffuses et généra-

lisées d'emblée; cette seconde classe paurrait elle-même être sub-

divisée en deux groupes, à la vérité artificiellement séparés, sui-

vant qu'il s'agit des lésions aiguës ou chroniques, réparables ou

destructives.

Ce classement permettrait de réserver une place aux anciennes

démences aiguës curables, qui, nées dans notre pays, ont au

moins autant de peine aujourd'hui à s'y acclimater que la

démence précoce.

M. Parant (de Toulouse). Le rapport de M. Deny, qui devait

traiter' des démences vésaniques en général, est en réalité consacré

presque exclusivement à une forme psychopathique nouvelle,

décrite récemment nous le nom de démence précoce, par la psy-

chiatrie allemande, et que celle-ci prétend devoir être substituée

aux anciennes psychoses.

Cette démence précoce serait caractérisée par un affaiblissement

primitif de l'ensemble des facultés psychiques, indépendamment

de toute autre manifestation morbide. Ces affections mentales,

que l'on appelait jusqu'ici manie, mélancolie, stupeur, confusion

mentale, voire même délire systématisé chronique, etc., bien qu'elles

puissent marquer le début de la maladie et lui imprimer des allu-

res spéciales, ne seraient que des accidents accessoires, épisodi-

ques ; elles ne constitueraient nullement la cause de la démence.

Cette conception ne me parait pas fondée, et pour les raisons

suivantes : elle manque de preuves, et ne repose guère que sur des

affirmations; son étiologie est incertaine, sa pathogénie difficile à

établir; son exposé clinique enfin n'est que partiellement exact.

Il est certain qu'on voit souvent des jeunes gens qui, pour des

causes diverses, indépendantes même de toute influence hérédi-

taire, deviennent aliénés et tombent rapidement dans la démence;

on peut concéder que dans quelques cas, rares, du reste, cette

démence est vraiment primitive ; mais, pour la généralité des faits

rien ne prouve qu'elle soit telle et il y a au contraire de bonnes rai-

sons de soutenir que les manifestations délirantes qui marquent le

début de la maladie et occupent le premier plan de la scène mor-

bide, loin d'être des accidents accessoires, sont des éléments fon-

damentaux et le point de départ de la démence.

La. preuve qu'il en est bien ainsi, c'est que ces manifestations

aboutissent souvent non à la démence, mais à des délires systéma-

tisés chroniques, où l'affaiblissement des facultés n'apparaît que

tardivement; voire même que, dans certains cas, elles se termi-

nent par des guérisons solides et durables. Or, si la démence ne

228 SOCIÉTÉS SAVANTES.

survient qu'après un délire à longue évolution, ce n'est plus de la

démence précoce, et si la guérison se produit sans que les facultés

mentales aient été amoindries, ce n'est même plus de la démence.

M. DIDE (de Rennes). - La démence précoce a actuellement con-

quis droit de cité en pathologie mentale, et la discussion ne parait

porter que sur les limites à assigner à cette affection. Pour ma

part, je pense qu'il y a lieu de réserver l'appellation de démence

précoce à des cas survenant avant l'achèvement du développement

complet de l'individu et caractérisés, au point de vue mental, par

des alternatives d'excitation maniaque et de dépression avec inhi-

bition, ces alternatives étant le plus souvent commandées par des

hallucinations, les unes psychomotrices (excitation), les autres

psycho-inhibitrices (dépression). La maladie évolue rapidement

vers un affaiblissement intellectuel où l'attention et les sentiments

affectifs sont altérés d'une façon précoce.

Il existe, en outre, des formes anormales résultant de l'exagéra-

tion d'un symptôme : les formes catatonique, agitée ou stupide,

en sont les exemples les plus simples. Dans la forme paranoïde,

il existe une période délirante qui peut être la première en date.

Enfin, la démence précoce, simple, non délirante, est une forme

fruste où les états obsédants et impulsifs semblent remplacer les

hallucinations.

Ainsi limitée dans ses grandes lignes, la démence précoce parait

devoir comporter, comme la paralysie générale, des signes physi-

ques dont aucun, considéré isolément, n'est pathognomonique.

mais dont le groupement offre une certaine valeur. Les signes

vasomoteurs sont à citer en première ligne : ce sont le dermogra-

phisme, le pseudo-oedème, le purpura, l'érythème multiforme,

les alternatives de cengestion et d'anémie de la papille. Puis vien-

nent les troubles réflexes : exagération des réflexes tendineux,

diminution de réflexes cutanés, variabilité de l'état moyen de la

pupille. Il faut mentionner encore les troubles génito-urinaires

(troubles de la fonction génitale, modifications de la formule uri-

naire avec oligurie, augmentation de la densité, diminution nota-

ble de l'urée). On peut noter enfin des modifications de la formule

hématologique, aveclégère lymphocytose et augmentation du taux

des éosinophiles.

Au point de vue pathogénique, il semble bien que la démence

précoce soit liée à des phénomènes auto-toxiques, mais certaine-

ment très différents des auto-intoxications hépato-rénales, car le

régime lacté intégral, appliqué à 12 malades pendant cinq mois,

n'a apporté que d'insignifiantes modifications a l'état mental.

Les guérisons signalées résultent probablement, en majeure par-

tie d'erreurs de diagnostic ou doivent être considérées comme des

rémissions, du moins dans la plupart des cas.

M. Duphé (de Paris). - J'ai observé, pour ma part, 2 cas de

- SOCIÉTÉS SAVANTES. 229

de démence précoce à forme catatoniqne, terminés par la guéri-

son. Il s'agit de deux jeunes filles, âgées respectivement de dix-huit

et de vingt-trois ans, qui, après avoir présenté pendant plusieurs

mois le syndrome le plus net et le plus complet de. la catatonie

(raideur, stéréotypie des attitudes et du langage, négativisme, im-

pulsions, etc.), ont absolument guéri sans diminution ultérieure

saisissable de' l'intelligence; la guériaon dure chez l'une depuis un

an et demi, chez l'autre depuis huit mois. L'avenir décidera s'il

s'agit dans ces deux cas de rémission ou de véritable guérison; la

cessation des accidents est en tout cas complète.

Ces faits sont analogues à ceux qu'ont déjà publiés les anciens

aliénistes, et à ceux auxquels faisait allusion tout à l'heure

M. Parant; ils rentrent dans la seconde classe des pseudo-démences

précoces de Régis, celle des psychoses toxiques subaiguës qui attei-

gnent les prédisposés sous des influences encore mal connues. ,

M. Lhermitte (de Paris).- Nous avons examiné, avec lf. Camus

le sang de 30 malades atteints de démence précoce à différentes

périodes de l'affection. Nous avons pu constater, au début de la

maladie, une très légère anémie. En outre, dans la majorité des

cas, on trouve, aux divers stades de l'affection, une leucocytose

très modérée, portant de préférence sur les éléments mononu-

cléés du type moyen.

Nous avons examiné, d'autre part, le liquide céphalo-rachidien

de 20 déments précoces, chez lesquels il n'existait aucun antécé-

dent syphilitique ni aucune cause appréciable d'irritation ménin-

gée. Dans 6 cas, nous avons cependant réncontré une lymphocy-

tose modérée, surtout chez les malades arrivés à la phase de

démence terminale. L'opinion des auteurs qui nient la lymphocy-

tose dans les démences vésaniques nous parait donc trop exclusive

car il y a des faits indiscutables peu nombreux, il est vrai où

la constatation de ce signe, bien qu'encore inexpliquée, ne doit

pas infirmerie diagnostic.

M. Régis (de Bordeaux). J'estime, contrairement à M. Deny

qu'il faut conserver dans les cadres psychiatriques les démences

vésaniques ou secondaires, consécutives aux diverses psychoses

(manie, mélancolie, psychose des dégénérés, etc.). Qu'elles soient

symptomatiques ou non, ces affections sont trop solidement éta-

blies par la tradition pour qu'on puisse mettre leur existence en

doute. Quant à la démence précoce au sens que M. Krâpelin

attache à ce terme, avant de se demander si elle est d'origine

constitutionnelle ou accidentelle, il aurait fallu, à mon avis, démon-

trer la réalité de son existence. Or, parmi les observations qui

ont été publiées sous ce nom, il y a lieu de distinguer deux ordres

de faits : les uns concernent des adolescents plus ou moins tarés

antérieurement qui, parvenus à l'age critique de. la puberté, voient

peu à peu leurs facultés intellectuelles disparaître; c'est la

230 SOCIÉTÉS SAVANTES.

démence précoce, type More) ; les autres ont trait aux déments

catatoniques et paranoides des auteurs allemands, et doivent être

rattachés à la confusion mentale, car, le plus souvent ces préten-

dues formes de la démence précoce se terminent par la guérison.

M. Ballet (de Paris). Au point de vue nosographique et clini-

que, je me rallie à peu près complètement aux conclusions du rap-

porteur ; je repousse donc les critiques que lui a adressées MM. Pa-

rant et Hégis, et loin de nier l'existence de la démence précoce, dont

l'étude, il faui bien le reconnaître, a été complètement négligée en

France pendant de longues années, je déclare au contraire, que

cette affection est extrêmement fréquente. Toutefois, les arguments

invoqués par M. Deny pour démontrer l'origine accidentelle de la

démence précoce ne me semblent pas devoir entrainer la conviction

contre cette théorie, on peut, je crois, faire appel à deux ordres de

raisons, les unes anatomo-pathologiques, les autres étiologiques.

Au point de vue anatomo- pathologique, il y a une grande diffé-

rence entre les lésions trouvées par MM. Klippel et Lhermitte dans

4 cas de démence précoce (diminution du nombre des cellules py-

ramidales, en dehors des zones psychomotrices, sans modification

delà forme cellulaire, avec chromatolyse légère) et les lésions que

j'ai décrites dans la confusion mentale (tuméfaction, gonflement,

modifications de la forme cellulaire des cellules géantes de la

rolandique, avec chromatolyse intense). En vain, M. Deny a tenté

d'identifier des lésions de caractères aussi différents et de se baser

sur cette prétendue analogie histo-pathologiqne de la démence

précoce avec la confusion mentale pour en déduire l'origine toxé-

mique de la première de ces affections. Fussent-elles même com-

parables à celles de la confusion mentale, les lésions signalées par

MM. Klippelet Lhermitte pourraient être encore attribuées à une

intoxication secondaire, tout à fait en dehors de l'affection céré-

brale et sous la dépendance de la stéatose hépatique ou de la

tuberculose pulmonaire notées à l'autopsie, bien plutôt qu'à une

lésion toxique. La diminution du nombre des cellules pyramidales

(Klippel et Lhermitte) semble indiquer une lésion morphologique

congénitale, c'est-à-dire constitutionnelle.

Au point de vue étiologique, M. Deny a bien reconnu l'existence

de l'hérédité névro-psychopathique dans la démence précoce, mais

il en a singulièrement diminué l'importance pathogénique au pro-

fit de l'auto-intoxication. Dans 17 cas de démence précoce, j'ai

trouvé des antécédents héréditaires ou personnels. En dehors de

cet argument statistique, j'ai été surtout impressionné par quel-

ques faits particulièrement éloquents : ce sont deux frères qui ne

vivent pas ensemble, qui ont des professions différentes et qui

deviennent presque en même temps déments précoces, l'un à

vingt-six ans, l'autre à vingt-huit; j'avais déjà cité cet exemple

l'an dernier (Voir Semaine médicale, 1903, p. 255), mais depuis

SOCIÉTÉS SAVANTES. 231

j'ai encore appris qu'un cousin de la même famille avait également

sombré dans la démence précoce. C'est une femme qui, à vingt

ans, est atteinte de la même maladie après une existence invrai-

semblablement orageuse (violée à quatorze ans, mariée, divorcée,

morphinomane, prostituée, etc.), son père, au moment où elle est

née, était en pleine paralysie .générale. C'est un jeune homme,

dément paranoïde de vingt-six ans, dont le frère jumeau, la soeur

ainée, ainsi que le fils de celle-ci, sont également déments pré-

coces.

On répond que la prédisposition héréditaire joue dans la démence

précoce un rôle équivalent à celui que tous les aliénistes lui recon-

naissent dans la paralysie générale; mais qu'on cherche chez les

paralytiques généraux des exemples aussi impressionnants que

ceux que je viens de citer ! Et d'ailleurs, a-t-on pour la démence

précoce un facteur occasionnel aussi fréquent et incontestable que

l'est l'intoxication syphilitique pour la paralysie générale ? Je suis

dégagé de tout préjugé au sujet de la doctrine assurément trop am-

plifiée de la dégénérescence mentale. Je suis donc tout prêt à lui

enlever encore la démence précoce; mais, pour établir que cette

affection est une psychose accidentelle et non constitutionnelle,

nous n'avons jusqu'ici qu'une hypothèse, celle de l'auto-intoxica-

tion. Cette hypothèse répond peut-être à la réalité des faits; toute-

fois, jusqu'ici, on n'a pas fourni, à mon avis, de preuves suffisam-

ment convaincantes de sa légitimité.

De certains caractères psychologiques de la Démence précoce et des

. limites de celte affection .

Le or René 11ASSELON (de Pau). Les caractères psycholo-

giques de la démence précoce permettent de la différencier de

certaines autres formes d'affaiblissement intellectuel primitif à

côté desquels elle vient prendre place pour former le groupe des

démences primitives.

La suggestibilité, I'écliomimie, l'échopraxie, les stéréotypies, la

conservation des attitudes, le négativisme... etc., ne sont que des

symptômes secondaires de cette affection : ils ne sont que les

manifestations de l'affaiblissement intellectuel particulier. Cet

affaiblissement est primitif et consiste en une incoordination intra-

psychique (Stransky) primitive, une désagrégation totale des élé-

ments de l'esprit avec vie autonome de ces éléments. Les états de

confusion que l'on voit survenir au cours de la maladie sont épi-

sodiques ; l'affaiblissement psychique leur est antérieur : aussi ne

peut-on englober la démence précoce dans le groupe des confu-

sions mentales.

Les délires systématisés chroniques hallucinatoires évoluant

vers la démence bien qu'ayant une terminaison identique, ont

232 SOCIÉTÉS SAVANTES.

des caractères psychologiques différents de ceux des déments

précoces : ces délires, y compris le délire chronique de Magnan,

forment le groupe de la démence paranoïde ou paranoïaque,

démence primitive, qui vient se placer à côté de la démence pré-

coce, mais qui est distincte d'elle. Certains débiles qui, sous des

causes banales, tombent dans la démence, présentent des carac-

tères qui ressemblent à ceux des déments précoces : ces malades

rentrent dans la conception de Morel et doivent être exclus du ca-

dre de la démence précoce, psychose accidentelle.

Démences de la puberté.

M. Marie. Parmi les démences de l'adolescence il semble qu'il

y en ait une bien nettement reliée à la puberté, sorte d'avorte-

ment de ce dernier stade de l'évolution individuelle. Cet arrêt

d'évolution éclot sur un terrain souvent prédisposé à l'occasion

d'un processus infectieux incident. Il peut être opposé aux syn-

dromes dégénératifs curables d'une part et aux démences plus

tardives ou secondaires à des altérations psychiques autres.

Il est caractérisé par des anomalies régressives de la sphère

sexuelle.

Sur la démence organique secondaire à quelques délires chroniques

hallucinatoires.

MM. le Dr Marie (de Ville,juif) et Marcel VIOLLET, interne des

asiles de la Seine. Les hallucinations observées chez les déli-

rants chroniques sont parfois unilatérales (perçues par une seule

oreille), ou bien elles paraissent provenir toujours d'une même

direction. Si ces malades présentent plus tard des troubles mo-

teurs et sensitifs post-apoplectiques du même côté que celui où se

produisent les hallucinations, on peut être amené à ne pas consi-

dérer ces faits successifs comme des coïncidences. Nous pensons

que les hallucinations sont, dans ces cas, le produit de l'éréthisme

vasculaire chez des prédisposés, éréthisme précédant et motivant

la lésion circonscrite ultérieure. A l'appui de nos opinions, nous

apportons cinq observations tirées des auteurs et de notre prati-

que personnelle.

Un cas de démence précoce avec autopsie.

MM. Raoul LEROY et LAIGNEL-LA VASTINE présentent les coupes

de l'encéphale et des viscères d'une femme de vingt-trois ans

morte tuberculeuse chronique à l'asile des aliénés d'Evreux en

octobre 1903 et observée dans cet asile depuis juillet 1899. Née

d'un père alcoolique, délirant intermittant, soeur d'une paraly-

tique infantile, réglée à quinze ans, douée d'une intelligence suffi-

sante pour être restée neuf ans domestique dans la même maison,

SOCIÉTÉS SAVANTES. 233

la malade entre à l'asile avec le diagnostic de « mélancolie avec

hallucinations de la vue ». Négligeante, paresseuse, irritable, écla-

tant de rire et fondant en larmes à chaque instant sans motif, elle

manifeste des idées de grandeur, des idées érotiques et des idées

de persécution. Successivement on note du négativisme, de la cata-

tomie, une rémission de trois mois. puis une obésité énorme en

quelques semaines, un négativisme et une stupeur obsolus, puis

une nouvelle rémission de mai à novembre 1902 et enfin une der-

nière période de stupeur avec accès d'excitation cacatonique. A

l'autopsie, aucune lésion macroscopique en dehors des tubercu-

leuses. Au microscope, on ne voit dans l'écorce cérébrale aucune

lésion des méninges ni des vaisseaux ; il n'existe pas d'inflamma-

tion : les pyramidales géantes sont normales, mais peu nom-

breuses, les grandes pyramidales sont de forme normale avec

chromatolyse centrale ou totale en sont neuronophagées surtout

au niveau du lobule paracentral; à ce niveau seulement les

petites pyramidales sont un peu atteintes ; les autres variétés de

cellules sont normales. Cervelet, protubérance et bulbe paraissent

normaux.

Le foie graisseux, la thyroïde un peu scléreuse, les reins ont les

caractères habituels des viscères trouvés à l'autopsie d'un phthi-

sique. L'écorce cérébrale, comparée à celle d'un phthisique de

même âge parait en différer par deux points : les grandes pyra-

midales sont les plus touchées ; les pyramidales géantes du lobule

paracentral sont plus rares 1.

Séance du 2 août (matin.)

Dès le matin, les Congressistes sont au travail dans la belle salle

du Palais d'Hiver. Et c'est la discussion du rapport du Dr Deny sur

les Démences vésaniques qui se poursuit avec un bel acharnement.

Au seul nombre des orateurs inscrits, on devine l'intérêt de la

question débattue et l'espèce de bravoure qu'il a fallu au rappor-

teur pour attaquer de front les théories régnantes. MM. Doutre-

bente (de Blois), Vallon (de Paris) protestent avec énergie contre

l'importance donnée il la démence précoce ; c'est un nouveau

dogme qui a déjà tous les défauts de celui de la dégénérescence

mentale, qu'il attaque. MM. Colin, Pactet (de Villejuif) sont bien

partisans d'une démence précoce, mais veulent qu'elle soit tou-

jours incurable et n'apparaisse jamais après trente ans. MM. Dide

(de Rennes) Masselon (de Pau) admettent, au contraire, la doc-

trine de Iiraepelin intégralement : le premier insiste sur les signes

physiques de la démence précoce, si utiles pour un prompt dia-

' Travail du laboratoire de M. Gilbert Ballet, à l'Hôtel-Dieu.

234 -il SOCIÉTÉS SAVANTES.

gnostic; le second a voulu démêler les limites psychologiques de

cette affection. Mais avec M. Paul Garnier (de Paris), dont le

secrétaire général lit la déclaration, nous retrouvons toutes les

protestations des classiques et des irréductibles : la démence pré-

coce ne serait plus qu'une sorte d'idiotie retardante.

La discussion est close. Le rapporteur a la parole pour répondre

aux objections : M. Deny s'élève d'abord avec force contre les accu-

sations peu scientifiques qui lui ont été adressées en prétendant

qu'il a voulu détruire, au profit des doctrines allemandes, toute

l'oeuvre de la grande école psychiatrique française. Puis, finement,

spirituellement, avec une grande bonne humeur aimable, le rap-

porteur passe en revue toutes les objections étiologiques, anatomo-

pathologiques sur l'évolution de la démence précoce ; il maintient

énergiquement les conclusions de son rapport sur l'origine acci-

dentelle de la démence précoce, tout en reconnaissant que ce sont

surtout des faits cliniques qu'il a observés, et bien observés, mais

que leur interprétation reste encore hypothétique.

A la séance de l'après-midi, le Président Brissaud tente de ré-

pondre à la demande d'un congressiste qui avait souhaité voir

sanctionner d'un vote définitif l'opinion du Congrès sur la démence

précoce : une telle sanction est impossible et serait peu scientifi-

que ; mais ceux qui ont suivi l'exposé du rapporteur et la dis-

cussion qui a suivi ont certainement gardé, en dehors de leur

opinion antérieure, l'intérêt des observations d'autrui, et le pro-

fesseur Brissaud expose les faits qui lui paraissent définitivement

acquis. -

La parole est donnée à M. le Dr Sano (d'Anvers), rapporteur de

la seconde question sur les localisations des fonctions motrices dans

la moelle : rapport consciencieux, où sont exposés avec précision

tous les faits expérimentaux et cliniques apportés par les diffé-

rents auteurs et par le rapporteur lui-même. C'est là une question

qui passionne vivement tous les neurologistes : MM. Brissaud,

Parhon (de Bucarest), Grasset (de Montpellier), viennent tour à

tour montrer l'intérêt des localisations médullaires et les consé-

quences qui en découleront; tous souhaitent le schéma clair et

précis qui viendra éclairer les divers types de troubles périphéri-

ques à distribution segmentaire, radiculaire, ou à localisation

musculaire individuelle.

Le soir, un grand banquet réunissait près de cent congressistes.

dont un assez grand nombre étaient accompagnés de;leurs dames

et d'autres membres de leurs familles. ·

M. le professeur Brissaud, M. l'inspecteur Drouineau, représen-

tant du ministre de l'Intérieur, M. le Dr Crocq (de Bruxelles), dé-

légué officiel du gouvernement belge, M. Régis (de Bordeaux), tour

à tour, portent des toasts applaudis. Pierre Roy.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 235

Séance du 2 août (soir.)

La localisation des fonctions motrices de la moelle épinière.

M. SAno, rapporteur, rappelle que les localisations motrices dans

le système nerveux ont été étudiées en France par Vulpian et

Hayem, pour la moelle épinière. Depuis, les progrès de technique

ont donné les meilleurs résultats.

Avant 1890, diverses méthodes ont précédé la méthode de

Nissl, telles la méthode de l'anatomie normale et de la dissec-

tion (Féré, Herringham), celles de l'anatomie comparée (Kaiser),

de la physiologie (Ferrier et Yeo, Paul Bert, Marcacci), la mé-

thode anatomo-ctinique (David et Prévost, Hayem et Gilbert).

Mais la méthode expérimentale, seule donne des résultats cer-

tains.

)1. le professeur Nissl (d'Heidelberg), qui a réglementé cette

méthode, cherche à produire une lésion périphérique dans un nerf,

dans un muscle et recherche, après une quinzaine de jours, dans

les cellules des cornes antérieures de la moelle épinière, la « réac-

tion à distance » qui peut s'y être produite ; il décèle cette réac-

tion par la coloration au bleu de méthylène, dite coloration de

Nissl. Cette méthode est « spécifique pour la recherche des loca-

lisations : enlever un muscle et trouver dans la moelle un groupe

de cellules nerveuses en réaction à distance, c'est prouver la rela-

tion fonctionnelle qui unit ce groupement cellulaire à l'innervation

du muscle.

Des erreurs personnelles que chacun peut commettre ne doivent

pas entacher la valeur de la méthode ni faire croire qu'il existe

des contradictions irréductibles entre les résultats obtenus par les

divers expérimentateurs. Rien que le simple numérotage des

racines médullaires peut être une cause d'erreur, étant donné que '

le nombre des racines peut varier de 30 à 37 suivant l'espèce ani-

male et, en particulier, chez les divers animaux de laboratoire

(30 chez le cobaye, 34 chez le lapin, 37 chez le chien, etc.). Des

erreurs nombreuses ont été commises, résultant soit de simples

fautes d'impression, de reproduction défectueuse des figures, soit

de ce que les auteurs de ces recherches délicates, aient, comme

plusieurs l'ont reconnu, péché par inattention.

Les recherches expérimentales, faites dans ces dernières années

avec l'aide de la méthode de Nissl sont nombreuses. Dans une pre-

mière période, les auteurs se sont contentés des sections nerveuses.

Marinesco a aussi démontré que chaque nerf rachidien possède en

général dans la corne antérieure de la moelle épinière, un noyau

principal et des noyaux accessoires; le noyau principal constitue

une masse bien circonscrite excepté pour le médian et le cubital,

236 ' SOCIÉTÉS SAVANTES.

qui ont un noyau principal commun ; chaque nerf spinal tire ses

origines de plusieurs segments médullaires, deux, trois, et même

davantage ; le noyau médian a des fonctions motrices étroitement

liées à l'innervation des territoires dépendant des rameaux posté-

rieurs des nerfs rachidiens, des muscles du dos en particulier.

Knape prétend qu'il n'existe pas dans la moelle, des noyaux

nettement circonscrits, d'où les nerfs des membres tireraient

leur origine, mais différents groupes à fonctions différentes, la

flexion serait localisée aux noyaux latéraux, l'extension aux noyaux

centraux.

Dans une seconde période, on a enlevé les muscles et les résul-

tats furent plus précis ; on découvrit à chaque muscle dans la

moelle un noyau d'innervation déterminé (Parhon, Goldstein,

Sano, Popesco, 111mc Parhon). Van Gehuchten et de Neef amputè-

rent des segments de membres, et découvrirent des localisations

nettes dans la moelle, résultats concordant avec les recherches de

Brissaud, sur la métamérie spinale. L'étude des rapports topo-

graphiques de ces noyaux entre eux dans la moelle fut faite. Ces

multiples découvertes ne se contredisent pas, mais se complètent,

au contraire.

La différenciation profonde du système musculaire trouve son

image dans la différenciation des noyaux médullaires; à chaque

muscle répond un noyau, à chaque groupement fonctionnel muscu-

laire répond un groupement de noyaux, au segment d'un membre

correspond, dans la moelle, une zone qui comprend les noyaux

fonctionnels précédents. Le renflement cervical, par exemple, com-

prend trois zones d'innervation segmentaires répondant aux trois

segments du membre supérieur, bras, avant-bras et main; chacune

de ces zones est subdivisible en groupements nucléaires fonction-

nels répondant les uns à l'extension, les autres à la flexion ; dans

chacun de ces groupements, on peut, enfin, reconnaître l'existence

de noyaux musculaires individuels, répondant chacun à un muscle

isolé et même, pour chacun des muscles complexes, comme le

sterno-cléido-mastoïdien, le quadriceps fémoral, etc., on peut

trouver dans la moelle des noyaux répondant à chacun des grands

faisceaux du muscle.

Il est remarquable de voir que la disposition des noyaux dans

la moelle reproduit la topographie des muscles dans les membres;

c'est ainsi que le noyau du deltoïde entoure le noyau du biceps

dans sa partie supérieure, comme le muscle deltoïde lui-même

enveloppe la partie supérieure du muscle biceps ; de même, le

noyau des adducteurs se trouve en dedans et en arrière du

noyau du quadriceps fémoral, comme les muscles adducteurs

se trouvent eux-mêmes en dehors et en arrière du muscle quadri-

ceps.

Les recherches anatomo-cliniques ont démontré que, chez

SOCIÉTÉS SAVANTES. 237

l'homme, comme chez tous les autres vertébrés, ce plan général

trouve son application. Mais il faut accepter avec réserves les dé-

couvertes anatamo-cliniques : elles ne doivent être admises qu'à

la condition qu'elles concordent avec les données expérimentales.

Il faut, en effet, tenir compte, dans l'anatomie pathologique de la

moelle humaine, des affections qui ont nécessité l'intervention

opératoire, l'amputation d'un membre, par exemple, ainsi que

des affections ou infections associées diverses, intercurrentes ou

terminales.

De plus, les lésions anciennes qui se sont compliquées d'atro-

phie ou de sclérose médullaire, et les lésions destructives de la

substance médullaire (tumeurs, syringomyélies, etc.), ne peuvent

servir de documents pour établir la théorie des localisations : ces

lésions ont, en effet, suffi à elles seules à produire un bouleverse-

ment de la topographie médullaire et à empêcher de faire la part

exacte et à délimiter la situation des altérations secondaires aux

lésions périphériques. Ces cas servent, cependant, à démontrer la

valeur pratique de la théorie des localisations pour l'interprétation

des symptômes morbides. En somme, les cas favorables sont peu

nombreux, et parmi eux un petit nombre seulement ont été étu-

diés, par la méthode de Nissl, dans le but spécial de rechercher

les localisations des fonctions motrices dans la moelle ; aussi -

n'est-il pas possible encore de donner avec certitude, chez l'homme,

la fonction de chacun des noyaux.

Ce que l'on sait, c'est que les noyaux cellulaires sont infiniment

plus nombreux que ceux que l'on décrivait autrefois, c'est-à-dire

les quatre groupes antéro et postéio-interne et postéro-externes

décrits par Waldeyer, et que chaque noyau, loin d'être constitué

par une colonne de cellules ininterrompue et verticale, est consti-

tué par une masse de forme et de situation essentiellement varia-

bles, suivant les niveaux : aussi ces groupements cellulaires ne

peuvent-ils être soigneusement étudiés que sur des coupes sériées,

ce qui nécessite une modification à la méthode, préconisée par

Nissl, l'inclusion préalable des fragments de moelle.

Telle est l'idée qu'une comparaison impartiale des différentes

théories soigneusement exposées permet de se faire. Chacune est

appuyée sur des faits positifs, mais aucune opposition essentielle

n'existe entre elles et il est facile de les coordonner.

M. Grasset (Montpellier) remarque aussi que la question des

localisations motrices chez l'homme n'est pas totalement explorée

et que les théories sont souvent trop exclusives. Trois types de

localisation médullaire sont bien établis : 1° le type à distribution

segmentaire (Brissaud, Van Gehuchten, etc.), dans lequel les trou-

bles périphériques résultant de la lésion médullaire occupent des

zones limitées par des lignes perpendiculaires à l'axe des mem-

bres ; 2° le type à distribution radiculaire (Déjerine) où les troubles

238 SOCIÉTÉS SAVANTES.

occupent des zones limitées par des lignes parallèles à l'axe des

membres ; 3° le type à distribution individuelle musculaire (Sano).

Il n'en résulte pas l'existence des centres contradictoires, mais

bien superposés. C'est l'application à la moelle d'une loi générale

dont on trouve des exemples dans les centres bulbaires et méson

céphaliques : le nerf moteur oculaire commun, par exemple, est

l'analogue d'une racine motrice antérieure de la moelle, et a trois

groupes de centres dont la lésion produit trois types de troubles

périphériques. Le noyau, ou origine réelle du nerf, représente le

centre radiculaire.

Les noyaux qui fragmentent la colonne principale du IIIe ventri-

cule représentent les centres / individuels musculaires, et enfin, les

centres supérieurs, supra-nucléaires (Parinaud) dont la lésion pro-

duit des paralysies associées, bilatérales, lévogyres ou dextro-

gyres des deux yeux, frappant du même coup le droit interne du

côté gauche et le droit externe du côté droit. Ces centres sont ana-

logues aux centres segmenlaires de la moelle. Ainsi le nerf de la

troisième paire a trois ordres de .centres superposés. De même,

dans la moelle, la distribution des troubles périphériques des lé-

sions médullaires à ses centres supra-nucléaires.

M. Parhon (Bucarest) se déclare partisan des idées de M. Sano

et insiste sur la technique indispensable pour bien interpréter ces

faits délicats.

M. BRISS1UD, tout en trouvant' le schéma de M. Grasset ingé-

nieux et clair, pense que dans la comparaison des centres médul-

laires avec les différents centres du nerf moteur oculaire com-

mun, on pourrait, supprimer la chiasmatisation qui le complique

un peu.

M. GILBERT-BALLET lit, au nom de M. Laignel-Lavastine, une com-

munication sur les expériences entreprises pour la localisation mé-

dullaire du grand sympathique. -

Note sur quelques centres sympathiques de la moelle épinière.

M. LAIGNEL-LAVASTING montre le corps d'un chien à qui il enleva

le sympathique thoracique gauche du 30 au 10e communicant. Les

lésions, maxima dans Du', sont comprises entre Uvti et Cvti. Dans

D'I, la corne latérale gauche ne fait plus de saillie; elle ne con-

tient plus que trois cellules en voie de destruction, tandis que la

corne latérale droite contient douze cellules normales. Dans Dv, on

compte pour dix cellules normales dans GLU (corne latérale

droite), seulement cinq cellules altérées dans C L G. Même aspect

dans 1 ?

Dans CVIII la corne antérieure G, beaucoup moins volumineuse

que le D, est comme affaissée sur sa base. Ce qui reste deb C L

contient, par coupe, à A seulement quatre cellules, et dix cellules

SOCIÉTÉS SAVANTES. 239

à D. A la partie externe de la base des C A reste un petit noyau de

cellules fusiformes semblables aux cellules de la C L. Ce noyau, à

G, ne contient, par coupe, que trois cellules, et elles sont presque

complètement détruites, en neuronophagie intense, le noyau homo-

logue D contient au contraire dix cellules normales.

En conclusion : .' '

1° Des neurones de la chaîne sympathique thoracique ont leurs cen-

tres trophiques dans la corne latérale de la moelle dorsale et dans un

noyau latéro-exteme de la corne antérieure de la moelle cervicale

inférieure ;

1° Ce noyau laléro-externe de la base de la corne antérieure de la

moelle cervicale est distinct du noyau postél'O-exte1'ne de la corne

antérieure, dont les cellules sont étoilées '.

Schéma bulbaire.

Le Dr Pierre BONNIER (de Paris). Dans ce schéma sont défini,

topographiquement les principaux offices fonctionnels du bulbe

indépendamment de leur représentation consciente, cérébrale,

avec laquelle on les confond si souvent. Il a été nécessaire de

créer des termes pour ces offices bulbaires, dont la clinique ne note

.que les défaillances, les variations négatives, pour lesquelles seules

existe une terminologie. ,

Ces centres fonctionnels sont : les centres scopostheniques chargés

de la régie du regard, avec toutes ses accommodations ; les cen-

tres statisllcéniques, qui régissent les attitudes de sustentation ; les

centres hypniques et tonostatiques régulateurs de l'état du som-

meil, de la tonicité générale et des réflexes; les centres myosthé-

niques, angiosthéniques, cardiosthérziques, pneumosthéniques, gas-

Iroslhéniques, entérosthéniques .

Les centres manostatiques, hygrostatiques, thermostatiques main-

tiennent le niveau de la pression, de l'hydratation, de la

température intérieures. Les centres encratiques commandent les

sécrétions internes qui, brassées par la circulation, maintiennent

le taux de l'alimentation et de la purgation cellulaires. Les cen-

tres enthimiques entretiennent le bien-être organique ; leurs défail-

lances sont les diverses affres viscérales, celles de la fatigue,

l'anxiété générale. Les centres diacritiques internes commandent

les sécrétions muqueuses, lymphatiques ; et les centres diacriti-

ques externes, le drainage sudoral, urinaire, etc.

' Travail du laboratoire de M. Gilbert Ballet, à 1'llôtel-Dieti.

40 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Séance du mercredi 3 août.

Le mercredi 3 août, les Congressistes ont visité l'Asile Saint-

Luc qui est l'asile départemental des aliénés pour les Basses-

Pyrénées. Cet asile est situé environ à 3 kilomètres de Pau sur

la grande route de Tarbes : il est vaste, bien entouré de prairies

et de champs de culture. L'asile est fort bien entretenu et mis au

courant des acquisitions les plus récentes en matière d'hygiène,

l'infirmerie surtout avec ses salles claires, dallées, aux peintures

lavables, avec ses salles de bains, etc., a valu au De Girma,

médecin-directeur de Saint-Luc toutes les félicitations des visi-

teurs.

Ces félicitations se sont justement renouvelées au moment des

toasts qui terminèrent le banquet offert aux congressistes par le

Conseil général des Basses-Pyrénées. D'abord le préfet, M. Gil-

bert, souhaite la bienvenue à tous les congressistes français et

étrangers; le Dr Valéry-Meunier, président de la commission de

surveillance de l'asile Saint-Luc, insiste à bon droit sur la pros-

périté de l'asile d'aliénés du département des Basses-Pyrénées :

900 malades sont entretenus et soignés dans les meilleures condi-

tions hygiéniques; le chiffre de la mortalité y est extrêmement

réduit et celui des guérisons se montre assez considérable. Tous

ces résultats, l'asile les a obtenus avec ses seules ressources,

grâce à la bonne administration de son directeur-médecin, le

D1' Girma : fondé avec un capital de 300.000 francs, l'asile repré-

sente maintenant une valeur de 2 millions : l'inspecteur général

des asiles, D1' Drouineau, délégué du ministre de l'Intérieur,

insiste à nouveau sur l'oeuvre féconde qui peut résulter de l'union

entre les conseils généraux et l'administration des asiles publics

d'aliénés. M. Brissaud, président du Congrès, montre le progrès

accompli en matière d'assistance des aliénés ; à la fin du

xviii0 siècle, il était de bon ton, parmi les élégantes pari-

siennes, d'aller voir les folles de la Salpêtrière. Aujourd'hui aussi

des dames sont venues dans la demeure des aliénés, mais elles

n'ont fait qu'y accompagner ceux des leurs qui venaient y tra-

vailler à l'amélioration du sort des malades; d'ailleurs elles n'au-

raient pu voir à Saint-Luc aucun de ces instruments de torture,

de ces barreaux, de ces chaînes qui faisaient l'odieux pittoresque

d'une visite à la Salpêtrière il y a plus d'un siècle; à Saint-Luc,

il reste encore une camisole de force, mais c'est le D1' Girma qui

la garde dans son bureau, comme souvenir anachronique et inu-

tilisé. MM. Crocq, Giraud, Doutrebente, portent également de»

toasts applaudis.

Puis, après la photographie d'ensemble des membres du Con-

grès, on se rend au travail au milieu de la prairie ombragée qui

SOCIÉTÉS SAVANTES. 241 t

borde l'asile, fuyant la chaleur de la salle préparée pour la

séance d'après-midi. Seuls, les membres du bureau et quelques

membres de la presse ont une table et des chaises; la majorité

des congressistes s'assied sans façon dans l'herbe. Mais, en ce

cadre inattendu et pittoresque sous le beau ciel du Midi, avec au

loin le clair profil estompé et bleuâtre des Pyrénées lointaines,

le travail apparaît engageant et facile : les communications sont

écoutées attentivement et très sérieusement discutées. Avec les

intéressantes observations présentées par MM. Doutrebente et

Marchand (de Blois), Taty et Giraud (de Lyon), une première dis-

cussion s'engage sur l'étiologie de la paralysie générale, à l'occa-

sion de la statistique de M. Coulonjou (d'Alençon); le sujet n'est

pas nouveau, mais les partisans de la civilisation ou de la syphi-

lisation viennent affirmer leur foi adverse. Puis voici que M. Cru-

chet (de Bordeaux) vient remettre en question toute la théorie

des tics, si nettement établie par Brissaud et Meige, au Congrès de

Grenoble en 1902. En l'absence de son maitre, M. Pitres, M. Cru-

chet se trouve écrasé non pas tant par le nombre de ses contra-

dicteurs que par la valeur des arguments opposés; tour à tour

MM. Meige et Brissaud disent la distinction fondamentale entre le

tic, phénomène psychique, cortical, aux caractères cliniques si

particuliers et le spasme, phénomène organique, si différent

d'allures.

C'est le propre de la science de restreindre progressivement le

sens des mots qu'elle emploie : M. Brissaud adjure éloquemment

ses adversaires d'accepter le progrès réalisé sur cette question

très limitée des tics. Enfin M. Cullerre (de la Roche-sur-Yon)

vient rapporter des observations très détaillées concernant les

troubles moteurs (rétractions, amyotrophies, contractures, etc.)

qui surviennent au cours de psychoses. Ces observations font

tout de suite penser à la forme catatonique de la démence pré-

coce, où ces troubles musculaires s'observent avec une fréquence

tout à fait caractéristique. M. Deny, le rapporteur des démences

vésaniques et le champion déclaré de la démence précoce, ne

manque pas de venir rappeler ces faits, décrits par If,ohlbmanu

dès 1874, comme des symptômes d'ordre exclusivement muscu-

laire, mais justement considérés par Kroepelin comme des phé-

nomènes corticaux. Les faits observés par M. Cullerre confirment

très heureusement la conception de Kroepelin.

Deux cas de délire aigu traités avec succès

par les bains frais.

MM. DOUTREBENTE et Marchand (de l'asile de Blois). Les mala-

des ayant présenté, au cours du délire aigu pyrétique, des troubles

gastro-intestinaux analogues à ceux de la fièvre typhoïde, MM. Dou-

ARCIIIVES, 2' série, t. XVIU. 16

242 SOCIÉTÉS SAVANTES.

trebente et Marchand ont eu l'idée de faire l'application du traite.

ment de la fièvre typhoïde en donnant à leurs malades des bains

de 28° pendant un quart d'heure, au nombre de 6 par jour ; ils

ontadopté le régime lacté absolu et purgatifs salins répétés à petites

doses. Le résultat très favorable obtenu par ce mode de traite-

ment a engagé ces auteurs à en faire la publication.

Lésions de l'écorce cérébrale et cérébelleuse chez une idiote

aveugle-née.

MM. TATY et Giraud présentent les résultats de l'examen fait au

laboratoire du professeur Pierret du cerveau et du cervelet d'une

jeune idiote de quatorze ans, aveugle par suite d'ophtalmie puru-

lente des nonveau-nés, avec lésions plus graves de l'oeil gauche et

des voies optiques gauches, morte de tuberculose dans le service

du Dr Viallon.

L'examen nécropsique des yeux, fait par M. le Dr Louis Dor, a

montré l'existence d'un double leucôme avec disparition de la

rétite et du cristallin à gauche. Dans le cerveau, les lésions cellu-

laires (disparition d'un très grand nombre d'éléments, avec atro-

phie des éléments survivants) sont étendues aux deux hémisphères,

avec un maximum dans les lobes occipitaux et le pôle frontal.

Elles vont en décroissant dans le pli courbe, les circonvolutions

rolandiques et les lobes temporaux. La destruction des éléments

cellulaires est totale dans les scissures calcarines et les deux lèvres

de ces scissures. La vérification des opinions de Herschen est donc

possible même dans des cerveaux atteints d'une lésion généra-

lisée.

Le cervelet est également atteint dans toutes ses parties. Les

lésions y ont le même caractère (destruction d'un très grand nom-

bre d'éléments, atrophie des survivants). Il a semblé aux auteurs

que ces altérations sont prédominantes dans le flocculus gauche,

fait en rapport avec les constatations du D1' L. Dor sur l'atrophie

des flocculus chez les lapins qui ont subi une énucléation.

Quelques réflexions sur l'étiologie de la paralysie générale

dans le département de l'Orne.

M. le Dr COULONJOU. Rappel des constatations antérieures de

divers auteurs, qui tendent à faire de la paralysie une maladie des

peuples civilisés, Statistique des paralysies générales de l'asile

d'Alençon comparée aux statistiques de la plupart des asiles fran-

çais (2 p. 100 au lieu de 15 à 30 p. 100). Examen des causes les

plus fréquemment admises (syphilis et alcoolisme). Or, ces deux

causes existent dans l'Orne, au même degré que partout ail-

leurs. Au contraire, il est un fait bien établi, c'est que dans la

SOCIÉTÉS SAVANTES. 243

Basse Normandie, la culture intellectuelle est fort en retard, si on

la compare aux autres régions. Ce fait semble venir confirmer la

théorie si rationnelle, qui fait de la paralysie générale une affection

due surtout à l'usure cérébrale, les autres causes étant seulement

occasionnelles. - Réflexions.

Un cas de maladie de Raynaud, suivi de mort, chez une jeune fille

hystérique et tuberculeuse ; examen analomo-pathologique.

M. le Dr COULONJOU. Observation : Jeune fille de dix-sept ans,

enfant assistée, conduite à l'asile d'aliénés pour troubles mentaux,

caractérisés par du mutisme, de la sitiophobie. des tendances à

des actes nuisibles et impulsifs. A son entrée, on constate une

gangrène symétrique des orteils des deux pieds, affectant seule-

ment les phalangettes des trois derniers orteils ; les os sont dénu-

dés et noirs, les tendons ramollis, les parties molles nécrosées.

En outre, signes de tuberculose pulmonaire à la 2e période. Mai-

greur extrême, sitiophobie, ptyalisme, abcès de diverses région-

faisselle, parotide). Thérapeutique reconstituante, gavages, lave-

ments alimentaires. Fièvre vespérale, traitée avec succès par

des lavements de quinine. La parole revient, ainsi que l'appétit; la

gangrène des pieds s'arrête, les pieds bourgeonnent. Mais les

abcès des régions ganglionnaires se multiplient, et la malade

meurt de cachexie septicémique. °

Autopsie : Tuberculose pulmonaire (cavernules des sommets).

Rien d'apparent ailleurs ? Anatomie pathologique : Examen d'un

fragment de sciatique et de poplité externe, et de deux artères (fé-

morale et tibiale postérieure). Résultat négatif. Réflexions :

Hystérie (troubles trophiques) ou tuberculose (intoxication des

centres trophiques par les produits microbiens).

Potiencéphalite supérieure aiguë Itéinoi,2,hagiqzie.

MM. Brissaud et BRÉCY (de Paris). Observation d'une femme

de trente-six ans avec double ptosis, myosis, état somnolent parti-

culier. Le neuvième jour, accélération du pouls et élévation de la

température. Mort subite le lendemain.

Autopsie : Lésions inflammatoires avec hémorrhagies criblant

les parois de l'aqueduc de Sylvius, notamment au niveau des

noyaux de la 3° paire, les tubercules quadrijumeaux, la partie

supérieure de la protubérance. Cette observation est à rapprocher

de celle publiée par Gayet en 1875 et des cas décrits depuis le tra-

vail de Wernicke sou,s le nom de poliencéphalite supérieure aiguë

hémorrhagique. Il s'agirait de lésions assez diffuses avec prédomir

nance au voisinage 'de l'aqueduc, plutôt que d'une maladie réelle-

ment systématisée..... - i, 1 : :

244 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Des rétractions musculaires et de l'amyotrophie consécutives aux

. contractures et aux attitudes stéréotypées dans les Psychoses.

Le Dr A. CULLERItE. Résumé. - Dans les psychoses confu-

sionnelles et stuporeuses, on observe couramment des phénomènes

musculaires spasmodiques, raideurs, contractures, attitudes sté-

réotypées qui, dans un petit nombre de cas peuvent, à la longue,

entraîner dans les muscles intéressés des troubles trophiques plus

ou moins graves, rétractions tendineuses et atrophies musculaires.

Quatre observations détaillées en fournissent des exemples variés.

Ces contractures et ces atrophies musculaires, chez les stupides

et les déments, habituellement curables, mais pouvant, dans quel-

ques cas, devenirdéfinitives, rappellent l'atrophie musculaire des

paralysies hystériques (Charcot, Babinski) et peut-être plus

encore celle que l'on observe à la suite de certains spasmes profes-

sionnels, où l'on voit certains muscles inutilisés pour le travail à

accomplir, mais néanmoins maintenus fortement fléchis en per-

manence, devenir peu à peu le siège d'atrophie et d'une rétraction

définitive (Brissaud). Il s'agit en somme, dans ces cas divers, mais

analogues, d'une véritable maladie de Dupuytren dont la cause,au

lieu d'être la conséquence d'une sorte de traumatisme externe,

est constituée par une irritation permanente exclusivement

intérieure.

'Apropos des modifications de la moelle consécutives aux amputations

de membres chez le Têtard.

. Ji31. BRISSAUD, et BAUER. Lorsque l'on compare la moelle de deux

têtards de même âge ayant subi le même jour la même amputa-

tion, l'un des têtards n'ayant pas régénéré, l'autre régénérant ou

ayant régénéré, on constate une différence manifeste entre les deux

renflements lombaires. 1° Les lésions sont beaucoup plus accen-

tuées et plus nettement délimitées chez le têtard qui ne régénère

pas que ehez le têtard qui régénère ;

2° L'examen du renflement lombaire de têtards qui, amputés des

mêmes segments et en voie de régénération, ont été sacrifiés un

temps plus ou moins long après l'opération permet d'observer la

réparation progressive des régions médullaires causées par l'am-

putation ; .

3° Les amputations de régénérations influent, mais influent peu

sur l'état de la moelle ; elles n'arrêtent guère la réparation des

altérations déterminées par la première amputation. Le nombre

de ces amputations n'a aussi que fort peu d'importance à cet

égard ;

- 44° Cette restauration des lésions de la moelle n'est jamais par-

faite. Il ne s'agit pas ici comme au niveau des membres d'une

SOCIÉTÉS SAVANTES. 245

régénération. Les cellules qui ont été très vivement lésées tendent t

à disparaître grâce à l'intervention de macrophages ; il semble

que ces cellules sont remplacées par des cellules nerveuses sim-

ples, voisines du groupe moteur, qui s'adaptent à de nouvelles

fonctions. On n'observe pas de figures de cariocinèse.

Séance du jeudi 4 août.

Le jeudi 4 août 1904, le Congrès des médecins aliénistes et neu-

rologistes a tenu séance à Lourdes. Sans insister sur l'opportunité

du lieu choisi, étant donnée la spécialisation des congressistes, il

faut bien faire remarquer qu'il s'agissait là surtout d'une superbe

excursion en un très beau pays. Ceci ne veut pas dire qu'il n'y

aurait pas grand intérêt à mener sur lieu l'étude psycho-névropa-

thique de tous les difformes et débiles qui sollicitaient le flair cli-

nique de chaque congressiste, au coin des places ou des rues de

cet immense caravansérail des candidats au miracle. Mais les con-

ditions nécessaires à cette étude seraient bien difficiles à réunir ;

et c'est en simples curieux que ces médecins aliénistes et neuro-

logistes virent, le soir venu, s'égrener avec art, par les pelouses

et escaliers de la basilique, la longue théorie lumineuse des pèle-

rins du diocèse de Limoges. Au sommet du pic du Grand Jer

(1.000 mètres environ), dont l'ascension est singulièrement faci-

litée par un funiculaire, un déjeuner champêtre précède les com-

munications consacrées à la neurologie : M. Claparède (de Genève),

puis M. Schnyder (de Berne), nous entretiennent tour à tour du

sens musculaire et de la suggestibilité des neurasthéniques.

M. Crocq dit l'intérêt qu'il y a à étudier tous ces phénomènes d'ha-

bitude sur lesquels M. Brissaud, l'an dernier, appela l'attention à

Bruxelles. Puis le même auteur vient affirmer le contrôle positif

qu'il a pratiqué de l'étonnant procédé de Mac Conaghey, d'Edim-

bourg : pour faire cesser la crise d'un épileptique, il suffirait de

le coucher sur le côté gauche ! L'essai assurément n'en coûte rien.

M. Foveau de Courmelles dit les mérites du radium en thérapeuti-

que nerveuse.

Sur l'exploration clinique du sens musculaire.

M. le Dr En. Claparède. (de Genève). L'exploration du sens

musculaire participe aux difficultés inhérentes à toutes les déter-

minations de sensibilité : les sujets hésitent, se contredisent et il z

est le plus souvent impossible d'apprécier par un chiffre le degré

d'acuité sensible. Pour mesurer l'état de la sensibilité profonde, il

est le plus simple en clinique, de faire comparer des poids; on peut

aussi faire comparer les volumes de petits cubes de bois de 20 à

246 SOCIÉTÉS SAVANTES.

30 millimètres décote. J'ai remarqué que les malades donnaient

des réponses beaucoup plus précises lorsque, au lieu de leur faire

apprécier successivement avec la même main, deux poids, ou deux

volumes, en permettait une comparaison immédiate en plaçant

simultanément dans chaque main un des poids ou un . des cubes à

apprécier. Dans ce cas il arrive que les malades atteints de

troubles de la sensibilité ou de la motilité trouvent l'un des poids

ou l'un des volumes plus grand que l'autre, même si ces objets

sont égaux. Mais, chose curieuse, un certain nombre d'expériences

nous ont montré qu'il n'y avait aucun parrallélisme entre la force

motrice et la sensibilité du membre, et le sens de l'estimation du

poids ou du volume perçu par ce membre; c'est-à-dire que cer-

tains malades surestiment les poids avec leur bras parétique ou

hypoesthérique, tandis que d'autres le surestiment avec leur bras

sain. Même fait s'observe pour la surestimation du volume. Il

n'y a pas davantage parrallélisme régulier entre la surestimation

du poids et du volume; toutes les combinaisons se sont offertes;

quelques malades surestiment et les poids. et les volumes avec le

bras sain ; d'autres, idem avec le bras malade; d'autres encore

surestiment les cubes et sousestiment les poids avec le bras ma-

lade, etc.

Ces expériences, qui demandent à être continuées et approfon-

dies,, montrent que la complexité des diverses modalités du sens

musculaire est probablement encore plus grande qu'on ne l'a

cru. Un très grand nombre de facteurs sensibles, moteurs, céré-

braux interviennent dans les perceptions de poids, de volume, de

forme, de position. Il est indispensable de connaître leur rôle si

l'on veut arriver à interpréter les résultats fournis par les procédés

usuels d'exploration du sens musculaire.

Examen de la suggestibilité chez les nerveux.

Le Dr SCHNYDER (de Berne). - L'auteur a examiné la suggestibi-

lité chez les nerveux soignés à la clinique du Professeur Dubois, de

Berne, en les soumettant à une électrisation simulée pendant cinq

minutes et en les interrogeant sur leurs sensations. Sur 203 sujets

examinés (t 11 femmes et 192 hommes), la proportion des résul-

tats positifs a été de 54 p. 100. '

L'auteur a rencontré le plus de résultats positifs chez les neu-

rasthémiques, soit 77 p. 100 chez les femmes et 61 p. 100 chez les

hommes. Chez les sujets hystériques, au contraire, les phéno-

mènes de suggestion sont moins fréquents, surtout dans les cas

d'hystérie à symptômes classiques (anesthésie cutanée, conlrac-

Lure, astasie-abasie) : 40 p. 100 de résultats positifs. L'auteur

explique cette particularité par le fait du rétrécissement du champ

des hystériqdes qui les rend réfractaires à des suggestions nou-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 247 l

velles en dehors du système fixe de leurs auto-suggestions

préexistantes.

Le radium en thérapeutique nerveuse.

M. le Dr Foveau de CouauttES, de Paris. Le radium comme

les rayons X et ultra-violets est un analgésique puissant. Depuis

deux ans avec des activités de 140 et 10 000, en application conti-

nue ou fragmentée, l'auteur a constaté l'action sédative sur la

douleur, organique ou cancéreuse, nerveuse ou névralgique. La

suggestion a été diminuée ou supprimée le plus possible, rien

n'étant annoncé aux malades, et l'application du radium succé-

dant toujours à d'autres agents médicamenteux ou physiques qui

s'étaient montrés impuissants.

Certaines névralgies faciales bien étudiées, examinées électri-

quement, anciennes, ont cédé plus ou moins rapidement; certaines

avaient déjà été opérées (élongation ou section des nerfs) sans

succès ; de même une névralgie sciatique. Les douleurs en ceinture

de deux ataxiques ont cédé pour un malade aux, rayons X, pour

l'autre au radium.

Les applications, avec de faibles radio-activités du radium, en

tubes, pommades, certaines argiles naturelles, etc., étant pratiques

et peu coûteuses il y a là un' puissant analgésique à appliquer

couramment en neurologie. -

Les phénomènes morbides d'habitude.

M. CRocQ, de Bruxelles. Les phénomènes d'habitude extrê-

mement fréquents à l'état physiologique le sont plus encore à

l'état pathologique. Si le système nerveux normal se laisse pétrir

par des circonstances extérieures, le système nerveux anormal,

plus suggestible, plus automatique, moins réfréné par le moi cons-

cient, devient l'esclave de l'habitude ; son fonctionnement psychi-

que supérieur se trouve tout entier sous la domination du système

psychique inférieur.

A côté de la douleur d'habitude, décrite par Brissaud, des tics

d'habitude de Meige et Feindel, il y a les phobies d'habitude, les

obsessions d'habitude et aussi les insomnies et les attaques d'habitude.

Les insomnies d'habitude sont très fréquentes ; elles constituent

le reliquat, sur un système nerveux spécial, des iusomnies quel-

conques, que celles-ci soient nerveuses, circulatoires ou toxi-infec-

tieuses. Elles cèdent généralement vite à l'administration des

hypnotiques qui régularisent les fonctions nerveuses en rendant

l'habitude de dormir.

Les attaques d'habitude se rencontrent très fréquemment aussi;

elles sont hystériques ou épileptiques et constituent, comme tous

les phénomènes morbides d'habitude, le reliquat, sur un système

248 SOCIÉTÉS SAVANTES.

nerveux prédisposé, du même phénomène (qui est ici l'attaque)

provoqué une première fois par une cause tangible et qui se repro-

duit ensuite, sans raison autre que l'habitude. Ici encore, il suffit

souvent de combattre la production du phénomène d'habitude

pour obtenir une guérison définitive. L'auteur rapporte des cas

d'insomnie et d'attaques d'habitude.

Un moyen épilepto-fréazateur héroïque.

M. CaocQ. - Autant il est unanimement reconnu que les attaques

d'épilepsie précédées d'aura peuvent être quelquefois empêchées

par des moyens que les malades mettent du reste eux-mêmes en

usage, tels que la constriction d'un membre; autant on s'incline

devant l'impossibilité d'arrêter un accès lorsqu'il est commencé.

Jusqu'à présent, nous ne pouvions rien en présence d'un malade

en proie à un accès épileptique.

Cette situation est heureusement changée actuellement; il suffit

en effet de placer le malade sur le côté gauche, pendant la période

tonique, pour supprimer la période clonique et voir le patient

revenir bientôt à lui. Ce procédé indiqué succinctement par

Mac Conaghey, d'Edimbourg, constitue un moyen réellement

héroïque d'arrêter les accès. Dans tous les cas, où M. Crocq et son

assistant, M. Marlow, ont eu l'occasion de l'employer, le succès a

été complet.

Ce procédé, d'une simplicité et d'une valeur remarquables, au-

quel M. Crocq donne le nom de laléro-station gauche, paraît capable

non seulement d'arrêter les attaques. mais encore d'en diminuer

la fréquence et l'intensité. On pourrait croire qu'en plaçant le

malade sur le côté droit le résultat sera le même ; il n'en est rien,

la latéro-station droite n'a donné que des insuccès.

Relations cliniques de la cécité avec la paralysie générale

et le tabès.

André LERI (de Paris). La cécité est généralement considérée

comme fréquente dans le tabes et rare dans la paralysie générale.

D'autre part, on admet que les cas de tabes avec cécité sont pres-

que toujours des cas de tabes essentiellement bénin, dans lesquels

les manifestations tabétiques ordinaires sont tout à fait minimes.

Nos recherches dans la littérature et nos observations person-

nelles nous ont convaincu que :

A) Pour ce qui concerne la paralysie générale : 1° la cécité est

rare dans la paralysie générale confirmée avec troubles mentaux

marqués, mais les troubles légers de la vision n'y sont pas rares;

2° la cécité a été assez fréquemment signalée avant l'apparition

des troubles mentaux de la paralysie générale progressive.

B) Pour ce qui concerne le tabes : 1° la cécité est rare dans le

SOCIÉTÉS SAVANTES. ' 249

tabes confirmé, avec grands symptômes; elle n'est fréquente que

dans le tabes avec symptômes minimes de lésion des cordons pos-

térieurs ; 2° quand la cécité doit survenir, elle survient générale-

ment avant la plupart des symptômes du tabes ; 3° l'affection à

laquelle on donne le nom de « tabes avec cécité » est caractérisée

par une atrophie papillaire assez rapidement complète, accompa-

gnée non seulement de troubles tabétiques minimes, mais très

fréquemment aussi de troubles mentaux minimes tout à fait ana-

logues à ceux du début de la paralysie générale.

En somme, le plus souvent la cécité dite « tabétique » pourrait

être aussi bien considérée comme une cécité « paralytique » si les

troubles mentaux minimes de la méningo-encéphalite diffuse

légère avaient dans la nosographie la même importance que les

troubles physiques et fonctionnels minimes de la méningo-myé-

lite spinale postérieure légère. Le tabes, la paralysie générale et

l'amaurose dite « tabétique » représentent simplement trois loca-

lisations d'un même processus, probablement d'ordinaire syphili-

tique tertiaire, qui peuvent soit s'associer, soit rester plus ou

moins complètement isolées Anatomiquement d'ailleurs l'atrophie

optique du tabes est semblable à celle de la paralysie générale ; il

s'agit, ce semble, d'atrophie secondaire à des lésions de méningite

et de névrite interstitielle à point de départ vasculaire (endo et

péri-artérite et phlébite).

Recherches sur la sensibilité normale de la cornée et de la

. conjonctive.

MM. les D'S C \BANNES et II. ROBll'iEAU 1. Nous avons utilisé

pour l'étude de la sensibilité conjonctivo-cornéenne à la piqûre

des crins de Florence n° 3, coupés en fragments de 8 centimètres

de longueur environ; ces fragments étaient placés dans un tube

stérilisé contenant une solution de cyanure de mercure et ils ne

servaient qu'à une seule personne à la fois. Cet esthésiomètre est

appliqué perpendiculairement sur les membranes précédentes; sa

surface de section, restreinte mais non pointue, déprime mais ne

pénètre pas. Il n'a donc pas les inconvénients de l'aiguille ou de

l'épingle. La sensation ressentie en appliquant l'extrémité du crin

est celle d'une piqûre. Si on incurve le crin en anse, et que l'on

applique cette anse sur l'oeil, on peut étudier la sensation de con-

tact. Pour l'appréciation de la sensibilité thermique, nous nous

sommes servis d'eau chaude ou d'eau froide instillée dans l'oeil au

moyen d'un compte-gouttes à extrémité capillaire. On ne doit

appliquer 'ni le froid intense ni une température supérieure à

60°, on provoquerait une douleur vive, une vraie brûlure.

- 1. Voir thèse de H. Robinevu : Valeur séméiologique de l'anesthésie-

conjonctivale et cornéenne dans '7<er<e. Th. de Bordeaux, 1904.

250 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Voici en quelques mots les résultats de nos recherches, prati.

quées sur près de 80 sujets normaux.

La piqûre de.la cornée est ressentie, en tant que piqûre (ce qui

constitue l'état normal) dans 75 à 80 p. 100 des cas. Dans d'autres

cas (20 à 25 p. 100) la piqûre de la cornée n'est pas nettement

perçue (hypoesthénie) ou bien elle l'est d'une façon anormale,

comme un' contact. Ces anomalies dans l'appréciation exacte de la

piqûre se montrent surtout chez les gens ayant dépassé la qua-

rantaine ou chez des personnes âgées. La sensibilité à la

piqûre de la conjonctive bulbaire reste normale dans des propor-

tions à peu près identiques; elle est cependant moins vive que

celle de la cornée ; de plus, elle possède deux particularités que

l'on ne retrouve pas dans l'étude de la sensibilité cornéenne : a)

elle est plus vive dans la moitié temporale que dans la moitié

nasale ; 6) à côté de points parfaitement sensibles à la piqûre, la

conjonctive possède des points insensibles, dernier fait déjà mis en

lumière par Nagel.

La perception du contact est beaucoup plus obtuse pour la cor-

née que pour la conjonctive. La conjonctive bulbairepercoit mieux

les impressions de contact que ne le fait la cornée, mais cette

dernière apprécie plus vivement la piqûre.

La cornée perçoit moins bien que la conjonctive le froid ou la

chaleur. Nous pouvons même affirmer que la sensibilité ther-

mique de cette dernière membrane est rarement atteinte, à l'in-

verse de ce qu'a avancé Nagel qui refusait à la conjonctive toute

perception thermique.

Ces diverses sensations éprouvées par les malades à la piqûre

au contact, à la température, sont accompagnées de réflexes dont

le plus fréquent (75 à 78 p. 100 des cas) est le clignement réflexe,

puis viennent le larmoiement réflexe (47 p. 100) et l'injection blé-

pharo conjonctivale (20 à 25 p. 100). ,

La cornée est en somme douée d'une sensibilité douloureuse

exquise. Toutes les impressions un peu fortes (contact, tempéra-

ture, etc.), faites à son niveau amènent la douleur, une douleur

vive, très spéciale, rapidement accompagnée de tous les réflexes

de défense (clignement, larmoiement, etc.). Mais elle apprécie mal

les nuances. Sous ce rapport, la conjonctive a plus de discerne-

ment, elle se rapproche davantage de la peau et des autres mu-

queuses. Ce qui montre encore le peu de tendance de la cornée à

la différenciation des diverses impressions, c'est l'expérience sui-

vante que nous avons faite : les deux extrémités libres du crin de

Florence sont placées sur la cornée, à des distances variables, la

cornée n'arrive à percevoir deux sensations et encore d'une façon

restreinte (25 p. 100 des cas environ) que lorque l'écartement très

grand atteint deux points opposés de la périphérie cornéenne.

Cette expérience, qui est l'analogue de celle du compas de Weber

SOCIÉTÉS SAVANTES. 25L

pour la peau, montre encore combien est spéciale, dans ses qua-

lités, la sensibilité de la cornée.

Le climat de Pau et les nerveux.

M. le Dr CROUZET traite de l'action sédative du climat de Pau, et

montre que cette action est bienfaisante non seulement dans les

formes congestives de la tuberculose pulmonaire, mais encore

dans les accidents nerveux qui peuvent survenir au début de cette

maladie. D'autre part cette influence sédative facilite de beaucoup

le traitement des formes ordinaires de la neurasthénie ; enfin elle

est un puissant calmant dans un certain nombre d'autres affec-

tions nerveuses.

Séance du vendredi 5 août.

La question d'assistance, dont M. Keraval était le rapporteur,

présentait un intérêt tout particulier, qui justifiait la présence,

parmi les congressistes, de MM. Drouineau et Pelletier, représen-

tants du ministre de l'Intérieur'et du préfet de la Seine, et venus

pour entendre la discussion sur les mesures à prendre à l'égard des

aliénés criminels. Le rapporteur avait déjà consciencieusement ex-

posé les différentes doctrines, mais leurs représentants ont tenu à

dire eux-mêmes leurs convictions adverses, et nous avons retrouvé

les deux opinions déjà tant de fois exprimées : les uns, MM. Colin,

Pactet, etc., veulent qu'on écarte toute sentimentalité de la ques-

tion des aliénés criminels; une seule chose est à considérer; ce

sont les actes commis et ceux qui peuvent l'être par la suite;

la société a le devoir de se défendre par des mesures toutes

particulières contre des aliénés très différents des autres; il faut t

construire un Asile spécial. D'autres, au contraire, MM. Doutre-

bente, Rey, Parant, etc., disent le danger et les inconvénients de

ces mesures spéciales ; ils se rallient à l'opinion de M. Keraval,

demandant qu'on utilise d'abord toutes les ressources de la loi de

1838 et qu'avant de prendre quelque mesure hâtive, on expéri-

mente ce qu'on a déjà, à savoir l'établissement de Gaillon. On vote;

la majorité est en faveur de l'intervention du pouvoir judiciaire;

l'unanimité ne se retrouve que pour demander le désencombre-

ment des asiles, l'augmentation du personnel médical et infir-

mier, etc. 0

Cette longue et laborieuse discussion du rapport Keraval a

empiété sur la séance de l'après-midi, terminée par d'inté-

ressantes communications, consacrées à la neurologie, de MM.

Brissaud et Brécy, André Léri, Oberthur et Sicard, Cabannes,

Mirallié. etc.

252 SOCIÉTÉS SAVANTES.

La soirée de ce même jour comportait la réception des congres-

sistes au Palais d'Hiver par la Société de médecine de Pau, dont

le président Brissaud est depuis longtemps le membre associé.

Auparavant, M. Sano projeta des schémas et coupes fort intéres-

santes extraites de son rapport sur les localisations médullaires;

M. Deny fit défiler les poses et attitudes stéréotypées les plus

curieuses de ses démentes précoces ; M. Henry Meige nous retraça la

longue histoire artistique des Pierres de tête ; 111111. Ph. Tissié et

Bérillon nous vantèrent les résultats de l'éducation physique et de

la méthode hypnagogique.

' Des mesures à prendre à l'égard des aliénés criminels.

Par le Dr P. KERAVAL,

Médecin en chef de l'asile de Ville-Evrard.

Ce rapport se compose de deux parties. C'est un travail dans

lequel tous les mots portent.

La première partie est consacrée à l'ETUDE HISTORIQUE de la ques-

tion. Il s'agit non d'une sèche énumération'des principauxodocu-

ments, mais d'une étude analytique des opinions des auteurs et

des raisons sur lesquelles chacun d'eux fonde sa manière de voir.

Le procédé d'exhibition des archives examinées trace en même

temps l'évolution des idées; la forme de l'exposition montre

l'origine ainsi que la modalité des décisions adoptées à l'étranger.

Dans la seconde partie l'auteur traite des problèmes A RÉSOUDRE.

On ne peut lire aucun mémoire de ce genre sans se heurter à la

préoccupation invincible et simultanée des aliénés criminels, des

criminels aliénés, des aliénés dangereux, difficiles, vicieux, dé-

pravés.

I. L'aliéné criminel est pour tout le monde un aliéné qui a com-

mis un crime ou un délit sous l'influence de son état mental et

qui, pour ce motif, a été reconnu irresponsable.

II. Le criminel aliéné est par contre, un aliéné qui, devenu

aligné après son crime reste-, par suite, avant tout un criminel.

III. L'aliéné dangereux difficile, vicieux, dépravé, est un aliéné

dont l'état mental fait courir aux aliénés avec lesquels il est

en contact dans l'établissement, des risques, paraît-il, redoutables.

A chacune de ces espèces on tendrait, à l'extrême, à appliquer des

dispositions judiciaires et des dispositions médico-administratives

exceptionnelles.

I. On voudrait notamment que l'aliéné criminel demeurât entre

les mains de l'autorité judiciaire pendant toute sa vie. Séquestré

de piano par elle, il devrait être maintenu tant que le médecin

n'aurait' pas délivré à fin de sa sortie un certificat de guérison

complété par la formule non suspect de rechute.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 253

L'administration préfectorale deviendrait alors une sorte d'ad-

ministration pénitentiaire, elle n'aurait plus qu'une fonction pure-

ment exécutive. Aussi songe-t-on à créer pour l'aliéné criminel un

ou plusieurs asiles régionaux spéciaux, dits asiles d'aliénés crimi-

nels, soumis à un régime particulier, sous la dépendance exclusive

de l'Etat.

M. Keraval fait toucher du doigt les inconvénients de ce système,

à l'aide des mémoires mêmes des auteurs et du texte des argu-

ments les plus intransigeants.

Tous les aliénés criminels ne sont pas dangereux, il s'en faut

de beaucoup. La question se réduit donc à l'examen de chaque cas

particulier par le médecin traitant. Placez si vous voulez les

aliénés criminels sous la domination de l'autorité judiciaire mais

en adoptant le correctif de F. Dubief et Alombert-Coget, c'est-à-

dire l'intervention, pour le placement, la maintenue, et la sortie,

du préaident du tribunal civil jugeant en chambre de Conseil.

Quant à créer pour eux un asile spécial, dit des aliénés crimi-

nels, ce serait inutile et inhumain. Toutefois, comme aux termes

d'une délibération de la Chambre des députés, nous avons à notre

disposition Caillou, comme aussi, il semble que l'étendue et la

gravité des dangers en rapport avec l'internement de ces aliénés

dans les asiles ordinaires varient selon les départements, on pour-

rait, en conservant la loi de 1838, se servir, à titre d'expérience,

de Gaillon, et y étudier pratiquement la valeur des craintes for-

mulées par certains auteurs et par un nombre sérieux de chefs de

service actuellement en fonctions.

M. Keraval a eu l'excellente idée de demander au docteur Raoul

Leroy, le médecin en chef de Gaillon, un mémoire sur l'état pré-

sent de Gaillon et sur son utilisation éventuelle. 11 a fait aussi une

enquête dans les asiles français.

II. Le criminel aliéné exi>te-t-il réellement ? Le criminel aliéné

n'était-il pas déjà aliéné au moment où il a été condamné ? Les

travaux de Colin, Pactet, Taty, P. Garnier, Monod, montrent

qu'on a condamné à tort bien des gens qui s'ils eussent été sou-

mis à un examen médico-légal, eussent été reconnus aliénés, et,

par suite, n'auraient pas été condamnés.

Afin d'éviler des erreurs, il serait grand temps d'appliquer la

réforme Cruppi sur l'instruction et l'expertise obligatoire et con-

tradictoire. Par cette pratique, on criblerait pour ainsi dire les

criminels aliénés; on en déterminerait exactement le quantum. Il,

va de soi qu'en dehors de la question de la nature de la crimina-

lité en général, question réservée, un criminel, sain d'esprit au

moment où il a commis l'acte qui lui est reproché, puisse, comme

n'importe qui, plus tard devenir aliéné, et qu'en ce cas sa qualité

de criminel dominerait sa qualité d'aliéné. Il semble y avoir

accord unanime pour laisser le criminel aliéné à la disposition du

254 SOCIÉTÉS SAVANTES.

pouvoir judiciaire et pour l'interner, comme cela se fait, à Gaillon,

mais jusqu'à sa guérison ou sa déchéance intellectuelle. Gaillon se

composerait, dans ces conditions, de deux parties : 1° une partie

consacrée, comme maintenant, aux criminels aliénés ; 2° une sec-

tion spéciale recevant à titre d'études les aliénés criminels parti-

culièrement difficiles.

III. Il nous reste maintenant' à examiner le sort des aliénés qui,

dans les asiles où ils sont internés, présentent pour les autres

malades un danger à cause de leur attitude ou de leur caractère,

aliénés désignés sous les noms d'aliénés dangereux, difficiles,

vicieux, dépravés. Ceux-là n'ont pas encore eu maille à partir

avec la justice. Au cas même où, dans l'asile, ils se seraient

rendus coupables d'attentats quelconques, leur qualité d'aliénés

ne les fait pas rentrer dans la catégorie des criminels aliénés qui,

au dehors, avant leur internement, ont exécuté crimes et délits.

Et cependant il est une certaine école qui prétend les signaler à

l'autorité judiciaire afin de les cataloguer comme tels et de les

faire bénéficier désormais de la surveillance, judiciaire; il est une

autre école qui, ralliée ou non à la première, voudrait qu'on les

reléguât à l'asile des aliénés criminels.

M. Keraval est opposé à ces deux mesures. Les aliénés internés,

qu'ils soient dangereux ou non, sont des aliénés tout court. Le

mal vient surtout d'un défaut d'organisation des asiles publics. Ils

sont encombrés et manquent souvent de quartiers propres à l'in-

dividualisation du traitement des modalités morbides ; les malades

y sont trop les uns sur les autres. Il faudrait les désencombrer et

pouvoir traiter chacun des caractères pathologiques pour ainsi

dire un à un. A quoi bon expulser dans un asile dit de désinfec-

tion, lieu de douleur et d'incurabilité, selon l'expression de Maran-

don de Montvel, ces malheureux ? Ce qu'il faut principalement,

c'est réformer l'outillage des asiles d'aliénés. En attendant, dans

les cas urgents, on pourrait, sur rapport spécial du médecin,

envoyer à Gaillon quelques types particulièrement dangereux.

Mais le petit asile à proximité du grand, demandé par H. Colin

pour certaines catégories (aliénés vicieux) est préférable. Ce qui

serait encore meilleur, ce serait d'installer dans un asile désen-

combré, mais dilaté, ne contenant pas,plus de cinq cents malades,

la disposition U'Alt-Scherloz, de.Novo Snamensky, de la maison

de santé de l'empereur 11t·.xandre,Ill. En tous cas, la justice n'a

rieu à, voir en cette affaire. .

Mais allons plus loin. N'existerait-il pas des moyens prophylacti-

ques capables d'enrayer la criminalité des aliénés' ? M. Keraval fait

remarquer que si les aliénés étaient plus surveillés au dehors, si

on avait soin de les hospitaliser dès le début de leur affection menr

tale, on les, empêcherait dans l'immense majorité des cas de

devenir, criminels, ou délictueux. Et il passe en revue toute une

SOCIÉTÉS SAVANTES. ' 255

série de procédés efficaces. Pour prévenir les crimes des aliénés à

l'intérieur des asiles, il suffit de transformer les locaux et d'orga-

niser une surveillance plus radicale, en un mot d'organiser diffé.

remment l'assistance et le traitement des malades dans les hôpi-

taux d'aliénés, de perfectionner. Voici au surplus les conclusions

du rapport.

I. Il faut en première ligne prévenir les crimes et délits des

aliénés avant leur internement.

Pour cela, il convient de prendre toutes les précautions néces-

saires à la séquestration rapide des aliénés. On usera des moyens

de propagande utiles pour dissiper dans le public les préjugés qui

éloignent les malades de nos asiles, et pour mettre en garde contre

les dangers auxquels exposent les aliénés en liberté, en insistant

sur les avantages d'un traitement rapide. On simplifiera les for-

malités de l'admission : le dégrèvement des communes, les admis-

sions provisoires et les placements volontaires gratuits constituent

d'excellentes mesures. On pourrait, au besoin, mettre les familles

et les médecins dans l'obligation de déclarer à l'autorité, avec

certificats à l'appui, les aliénés traités momentanément à domi-

cile ; l'autorité avertie surveillerait les malades.

II. Il est parfaitement possible de prévenir les crimes et délits

des aliénés sortis des asiles par guérison ou par amélioration.

Contre la sortie prématurée, on possède l'open-door, la coloni-

sation familiale, les sorties sous garanties.

La surveillance de l'aliéné en liberté se peut continuer par l'in-

termédiaire des Sociétés de patronage.

La réintégration rapide en cas de rechute est assurée et par cette

surveillance et par les procédés qui viennent d'être énumérés plus

haut.

111. Dispositions judiciaires. Personnellement, nous n'avons

jamais vu de dispositions légales de cette sorte.

a. Nous n'osons cependant point aller à l'encontre de l'interven-

tion du tribunal civil si demandée pour les aliénés criminels depuis

leur crime ou délit jusqu'après leur sortie. Cette intervention n'est,

au demeurant, que la généralisation de l'article 29 de la loi de

1838 (projet Dubief, projet Alombert-Coget, projet M. Olivier,

projet Vallon) ; elle a pour base des expertises médico-légales.

b. En ce qui concerne le criminel aliéné, la réforme de l'expertise

appliquée à tout accusé ou inculpé en précisera la qualité (projet

Cruppi, projet Dubief, projet Alombert-Coget). Le criminel aliéné

étant alors un criminel par dessus tout, qu'il reste sous la surveil-

lance de l'autorité judiciaire, conformément au projet Dubief, aux

propositions Henri Colin, et Alombert-Coget. La sortie de ce genre

de malades demeure, conformément à l'article 29 de la loi de

1838 à la disposition du tribunal civil.

c. Les aliénés dangereux, vicieux, dépravés de nos asiles ne méri-

256 SOCIÉTÉS SAVANTES.

tent, à notre avis, aucune intervention de la magistrature. Le

médecin traitant n'a, s'il le juge convenable, quand ils demandent

leur sortie, qu'à appliquer l'article 29 de la loi de 1838. Pourquoi

mettre ces aliénés dans la même situation que les aliénés qui ont

commis des crimes ou des délits au dehors, alors que, par le

désencombrement des asiles, on a le moyen de s'en tenir à sa

fonction' purement médicale ? -

IV. Dispositions médico-administratives. a. Ne faisons pas

d'asile spécial pour les aliénés criminels ; leur envoi dans cet asile

infligerait aux malades et à leurs familles un déshonneur immé-

rité. Ils sont si peu nombreux et si peu dangereux que tout le

monde réclame la sélection préalable.

Seulement, comme à raison de la désaffectation votée par la

Chambre des députés (1901), Gaillon se trouve à notre disposition.

il est loisible à certains médecins d'expérimenter cet établisse-

ment pour quelques-uns de leurs aliénés criminels particulière-

ment difficiles. Il y a des situations locales à envisager. Mais point

n'est besoin de se lancer systématiquement dans les procédés

d'ordre. pénitentiaire.

6. Si après la réforme de l'expertise, il est démontré qu'il existe

des criminels aliénés, Gaillon est tout indiqué. C'est à cet asile

qu'il appartient de recevoir les criminels aliénés. Propositions

Dubief, Alombert-Coget, Bourneville, Ch. Vallon. Gaillon pourrait

aussi servir à l'examen des inculpés en observation.

- c. Etant donné les imperfections de pas mal d'asiles départe-

mentaux, un devoir étroit s'impose. C'est la réforme complète de

ceux de ces établissements, encombrés, mal distribués qui ressem-

blent plutôt à des prisons qu'à des hôpitaux d'aliénés. Ne faites

donc pas, avant d'avoir pratiqué cette réforme, d'asiles pour les

aliénés dangereux, vicieux, dépravés de nos asiles, d'asile de sûreté

pour les déchets amoraux. Si, quand vous aurez amélioré les asiles

existants, et par là empêché les conflits, crimes, attentats à l'inté-

rieur, par là aussi modifié les sujets difficiles, vous vous trouvez

cependant en présence d'individus réfractaires (cela peut arriver

en certains endroits), vous aurez alors le droit d'envoyer ces indi-

vidus. malfaisants à Gaillon, administrativement, . sans'autre

recours, conformément aux conclusions d'un rapport adminis-

tratifs. Restez médecins.

A Armentières, nous n'avons jamais eu besoin non plus d'au-

cune de ces dispositions médico-administratives.

. M. Pactet (de Villejuif). Je ne saurais me rallier aux conclu-

sions du rapport de M. Keraval. Je suis, en effet, convaincu de

l'utilité d'un établissement spécial, pour les aliénés criminels :

subordonner sa création à un essai préalable dans les asiles réor-

ganisés équivaudrait, selon moi, à un ajournement indéfini de la

réforme. Je ne crois pas davantage que, grâce à la réforme de

SOCIÉTÉS SAVANTES. 257

l'expertise, aucun aliéné ne soit plus jamais envoyé dans les éta-

blissements pénitentiaires. Ce que je désirerais surtout voir recon-

naître d'une façon définitive, c'est la réelle différence qui existe

entre les aliénés criminels et les autres aliénés. Cette différence

réside, selon moi, dans le caractère même de l'acte accompli par

les aliénés de cette catégorie ; cet acte est l'expression de tendances

particulières, inhérentes à la nature de ces sujets, tendances qui

se manifestent à l'occasion de la maladie mentale. Cette concep-

tion est d'ailleurs en tous points conforme à la loi générale de

biologie, qui n'accorde à la maladie que le pouvoir de perturber le

dynamisme des phénomènes existant normalement sans créer

d'éléments nouveaux.

Il n'est pas rare, en effet, de voir deux aliénés présentant les

mêmes conceptions délirantes, les mêmes troubles sensoriels, etc.,

réagir d'une façon différente : l'un pourra se livrer à des homicides,

et faut; n'avoir jamais recours à la violence; celui-ci sera un pas-

sif et celui-là un actif. C'est donc ailleurs que dans les caractères

du délire qu'il faut chercher la cause de ces différences réaction-

nelles. Cette cause réside dans le tempérament, la constitution de

ces sujets. Cela étant, il est légitime d'avoir recours pour ces alié-

nés actifs, violents, à tendances homicides, à un mode particulier

d'assistance, que seul pourra réaliser la création d'un asile spécial

pour les aliénés criminels.

M. Colin (de Villejuif). Je crois également que, même en se

plaçant à un point de vue exclusivement médical, le terme d'alié-

nés criminels doit être conservé, car on peut et on doit admettre

que les deux cas coexistent, la folie d'une part, les tendances cri-

minelles de l'autre (persécutés homicides, faibles d'esprit, incen-

diaires, violateurs, pervertis sexuels, etc., etc.). A côté de ces su-

jets chez lesquels il y a superposition pour ainsi dire de deux états,

l'un morbide, l'autre criminel, il existe une autre catégorie com-

posée de sujets qui sont uniquement des malades, mais qui réa-

gissent à la façon des criminels soit sous l'influence de leurs idées

délirantes, soit à la suite d'une abolition temporaire ou perma-

nente de ? facultés intellectuelles (persécutés, épileptiques, paraly-

tiques généraux, etc.). Pour l'ensemble de ces individus, qui tous

sont à un degré quelconque des malades, mais des malades tou-

jours dangereux et souvent criminels, l'asile spécial s'impose.

Par contre, on ne saurait assimiler aux criminels vrais, ni con-

sidérer comme des aliénés criminels, les aliénés simplement vi-

cieux, paresseux, ivrognes, habitués ou exploiteurs des asiles, si

nombreux dans les grands centres urbains. Pour ces différentes

catégories de malades, je suis partisan de la création de quartiers

spéciaux annexés aux asiles.

C'est dans l'intérêt même des aliénés criminels que doivent être

piises les mesures que je réclame. Actuellement, ces individus sont

Archives, z série, t. XVIII. 17

258 SOCIÉTÉS SAVANTES.

maintenus dans des cellules ou dans des quartiers de force (sûreté

de Bicêtre) ; lorsqu'ils parviennent à reconquérir leur liberté, ils

récidivent et sont réintégrés tantôt dans des asiles, tantôt dans

des prisons, quand on ne les guillottine pas comme Vacher, lequel

a été interné dans différents asiles à la suite d'une première tenta-

tive d'assassinat et de suicide, et qui fit ensuite un nombre consi-

dérable de victimes.

En matière d'assistance des aliénés criminels, il faut renoncer

d'une façon complète au statu quo : le système des quartiers anne-

xés aux prisons, comme en Allemagne, des asiles-prisons, comme

en Italie, des quartiers spéciaux annexés aux asiles, comme en

France, doit être abandonné. Il faut limiter le seul mode rationnel

d'assistance qui ait fait ses preuves, celui de Droadmoor en Angle-

terre ou de Matteawan et Dannemora dans l'Etat de New-York.

En même temps que la création d'un asile central d'Etat ou

d'asiles régionaux, je réclame l'intervention de la magistrature

pour le placement et la sortie des aliénés criminels. A mon sens,

il est absolument indispensable de placer dans cet asile tous les

aliénés ayant commis un crime avant ou après l'apparition de leurs

troubles mentaux.

La question de la mise en liberté de ces malades pourrait être

résolue comme à Broadmoor et à Matteawan, dont les pension-

naires, lorsqu'ils sont mis en liberté après avis du médecin, res-

tent néanmoins soumis à la surveillance de l'Etat.

M. Doutrebente (de Blois). Les mesures à prendre contre les

aliénés criminels sont urgentes si elles concernent les aliénés en

liberté; elles sont déjà prises, et suffisantes, à l'égard des aliénés

criminels hospitalisés dans les asiles publics d'aliénés ordinaires.

Les aliénés, dits criminels, passent inaperçus au milieu des au-

tres aliénés ; rien dans leur manière d'être ou de se conduire n'at-

tire particulièrement l'attention sur eux. Ils sont, en général,

dociles, faciles à diriger et à surveiller. J'ajoute que je n'ai jamais

entendu dire par les autres malades, que lé contact avec les aliénés

criminels leur fût désagréable ou pénible. Cette promiscuité entre

aliénés criminels et aliénés non criminels a paru regrettable à un

certain nombre d'auteurs, partisans des asiles spéciaux pour alié-

nés criminels ; c'est là la manifestation d'une idée propre à ces

auteurs ; mais ce n'est pas le résultat d'une enquête faite auprès

des aliénés non criminels, les seuls intéressés dans la question.

Du reste, ne craignons pas de le dire, l'asile spécial où seraient

accumulés et réunis tous les éléments de désordre et de dangers

ne pourrait être qu'une prison, où on ne tarderait pas à envoyer,

avec les aliénés criminels, tous ceux qui, à l'asile commettraient

.l'acte qualifié d'homicide ou tentative d'homicide. Ce serait une

reculade, un retour aux temps passés, aux anciennes maisons de

force.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 259

Je ne parle pas, avec intention, des criminels devenus aliénés

après condamnation, parce que j'estime que, dans nombre de cas,

il s'agit d'aliénés méconnus, qui n'ont pas fait l'objet d'un examen

médico-légal avant leur comparution en justice. Pour eux comme

pour les autres, l'asile ordinaire suffit, l'asile spécial est inutile.

Reste la question de la responsabilité qui nous incombe quand

nous avons à prendre une décision pour la sortie ou le maintien

d'un aliéné criminel amélioré ou guéri qui demande son exeat. En

pareil cas, il me parait nécessaire de réclamer l'intervention de

l'autorité judiciaire, les magistrats ayant seuls qualité, à mon avis,

pour rendre définitives les mesures d'entrée et de sortie des alié-

nés, quels qu'il soient.

M. Parant (de Toulouse). - La dénomination d'aliénés criminels

est des plus déplorables. Elle assemble deux mots qui ne devaient

pas se trouver réunis, et elle est de nature à entretenir les opi-

nions fausses qui ont cours sur l'internement des aliénés, que la

plupart des gens, au lieu d'y voir une simple hospitalisation, sont

portés plutôt à considérer comme un emprisonnement. Les alié-

nistes devraient éviter avec soin de réunir ces deux mots

ensemble.

Il est inutile, préjudiciable même au bien moral des aliénés, de

créer des asiles spéciaux pour ceux qui ont pu commettre des

actes réputés crimes ou délits. Pour les déments de toute caté-

gorie, cela est absolument inutile ; pour les autres, et comme

corollaire des considérations énoncées à propos de la dénomina-

tion d'aliénés criminels, on les expose à être considérés comme

des prisonniers de droit commun, ce qui sera pour eux une

flétrissure injuste, et l'on en viendra peut-être à dire ainsi d'un

aliéné qu'il a été condamné à la détention dans un asile. Il suffi-

rait, pour les plus difficiles de ces aliénés, aussi bien que pour

certains aliénés persécuteurs, raisonnants, impulsifs, imbéciles,

qui sont supceptibles de troubler le bon ordre d'un asile et d'être

fort désagréables aux autres malades, de créer pour eux des

quartiers tout spéciaux, dut-on même les isoler entièrement.

L'intervention de l'autorité judiciaire dans le placement et la

maintenue des aliénés n'est point désirable. Non seulement elle

n'augmentera pas les garanties que présente l'intervention de

l'autorité administrative, mais plutôt elle contribuera, comme les

mesures précédentes, à assimiler les aliénés à des délinquants,

à des criminels, ce qui sera souverainement déplorable.

M. REY (de Marseille). La dénomination d'aliénés criminels

est sans valeur, puisqu'il n'y a que l'intervention judiciaire, sou-

vent due au hasard, qui puisse faire distinguer cette catégorie

d'aliénés des aliénés simplement dangereux ; seule l'appellation de

criminels aliénés, malgré les erreurs possibles, a une signification.

Quoi qu'il en soit, les uns et les autres peuvent être traités sans

260 SOCIÉTÉS SAVANTES.

inconvénient dans un asile ordinaire. L'internement dans un asile

spécial ne serait justifié, à mes yeux, que pour quelques dégénérés

doués de mauvais instincts, dangereux et absolument irréducti-

bles. -

M. Durai : . J'estime que, pour tous les sujets à criminalité

pathologique, aliénés non délirants, mais dégénérés récidivistes

de l'alcool et de l'homicide, êtres dangereux et antisociaux, la

création d'asiles de sûreté intermédiaires à l'asile ordinaire et à la

prison s'impose.

M. Gnm,\L (de Prémontré). Pour'ma part, je suis partisan de

la création d'un asile spécial destiné non seulement aux aliénés

criminels, mais encore à tous les aliénés reconnus dangereux : le

placement dans cet asile spécial et la mise en liberté de ces ma-

lades seraient ordonnés par l'autorité judiciaire, après avis consul-

tatif du médecin.

M. LE Président met aux voix le voeu suivant :

« 1° Qu'il soit créé d'urgence des asiles spéciaux pour le traite-

ment des aliénés particulièrement dangereux;

» 2° Que l'établissement de Gaillon soit immédiatement utilisé.

sous le simple couvert de la loi de 1838, pour les aliénés dange-

reux dans les asiles, ainsi que pour les aliénés criminels;

» 3° Que l'autorité judiciaire intervienne dans l'internement, le

maintien et la sortie des aliénés criminels ;

* 4° Qu'il soit procédé à la réforme de l'outillage hospitalier des

aliénés, comprenant le désencombrement des asiles, le système

des bâtiments dispersés, la réduction du nombre des malades,

l'élévation de la proportion du personnel des infirmiers et des mé-

decins. » (Adopté.)

Traumatisme et délire alcoolique.

M. MABILLR, rappelant les travaux antérieurs de Dupuytren,

de Leveillé, Lassègue, Mesnet, Voisin, Magnan. Motet, Peronne,

Respaut et Gabriel, relate trois cas de réveil de délire alcoolique,

deux dus à un choc traumatique physique, l'autre attribué a un

choc moral.

Chez les trois malades le délire alcoolique ne s'est développé

que plusieurs jours après le trauma et la privation de tout hquide

alcoolique. Le troisième cas tout particulièrement s'est produit a

la prison de La Rochelle chez un buveur de profession six jours

après l'incarcération.

Tout en admettant que l'organisme s'accommode à l'agent

toxique et que cette accommodation puisse être troublée par une

cause physique ou morale qui vient rompre l'équilibre physiolo-

gique du buveur toujours en puissance d'a'oome, M. Mabille

estime qu'il faut tenir compte plus qu'on ne le fait d'habitude de

SOCIÉTÉS SAVANTES. 261

la suppression brusque des boissons alcooliques chez les buveurs

de profession.

Il se produirait dans ce cas un phénomène analogue à celui

qu'on observe à la suite de la privation brusque de la morphine,

chez les morphinomanes, parfois même du chloral chez ceux qui

en font l'abus. M. Mabille croit qu'il conviendrait, en aliénation

mentale, de ne pas trop négliger ce facteur étiologique tant au

point de vue pathogénique qu'au point de vue thérapeutique>

Le phénomène plantaire combiné. Etude de la réflectivité dans

l'hystérie.

M. CROCQ (de Bruxelles). L'examen des réflexes est considéré

comme peu important dans le diagnostic de l'hystérie ; l'aboli-

tion du réflexe pharyngien, que l'on considérait comme presque

pathognornonique de cette névrose, est actuellement considéré

comme un facteur banal.

Après avoir rappelé l'état de nos connaissances actuelles sur les

réflexes plantaires normaux (réflexes en flexion ou réflexe plan-

taire cortical ; réflexe du fascia lala (BRISSAUD) ou réflexe plan-

taire médullaire ; réflexe plantaire défensif) et les réflexes plantaires

pathologiques (phénomènes des orteils de Babinski ; abduction des

orteils ou signe de l'éventail) l'auteur arrive aux conclusions sui-

vantes, basées sur l'examen minutieux de 100 cas d'hystérie,

choisis parmi les plus typiques.

1° L'abolition du réflexe pharyngien est fréquente dans l'hystérie

(73 p. 100); surtout fréquente dans les formes accompagnées

d'anesthésies (81,81 p. 100), elle se' montre un peu moins souvent

dans les formes à accès (74,60 p. 100), moins encore dans les

paralysies et contractures (65,38 p. 100).

Ce phénomène, se rencontrant dans un grand nombre d'autres

affections et même à l'état normal, constitue un facteur banal peu

propre à établir le diagnostic d'hystérie ;

2° L'exagération des réflexes tendineux (79 p. 100), plus fré-

quente que l'abolition du réflexe pharyngien, constitue un signe

au moins aussi précieux que ce dernier pour établir le diagnostic.

Très fréquente dans les formes à accès (84,12 p. 100) elle est

moins constante que dans les paralysies et contractures (73,07

p. 100), moins encore dans les anesthésies (63,63 p. 100) ;

Son existence dans un grand nombre d'affections toxiques

infectieuses et même à l'état normal ne lui permet cependant pas

d'avoir une valeur pathognomonique ;

3° L'abolition de la sensibilité plantaire est fréquente dans l'hys-

térie 42 p. 100 ; on la rencontre surtout dans les formes accompa-

gnées d'anesthésie (63,63 p. 100), puis viennent les paralysies et

contractures (61,53 p. 100) et enfin les accès (31,74 p. 100).

262 SOCIÉTÉS SAVANTES.

L'anesthésie plantaire, rare dans les autres névroses, constitue

un symptôme digne de remarque ; .

4° L'abolition simultanée du réflexe plantaire cortical ou réflexe

en flexion et du réflexe plantaire médullaire ou réflexe du fascia

lata est très fréquente (59 p. 100) : surtout marquée dans les

formes avec anesthésie (72,72 p. 100) elle se rencontre à peu près

aussi souvent dans les paralysies et contractures (53,73 p. 100), et

dans lés accès (57,14 p. 100) ;

Nous donnons à l'abolition simultanée de ces deux réflexes le

nom de phénomène plantaire combiné.

Ces réflexes étant d'une constance remarquable à l'état normal

leur abolition présente une importance très grande dans le dia-

gnostic de l'hystérie. Aussi croyons-nous pouvoir considérer le

phénomène plantaire combiné comme un signe spécial à l'hys-

térie ;

5° L'anesthésie plantaire n'est pas une condition sine qua non à

l'existence du phénomène plantaire combiné; elle existe souvent

(57,72 p. 100) en même temps que ce phénomène, mais ce der-

nier peut se montrer sans altération de la sensibilité (20,35 p. l00)

de même que l'anesthésie plantaire peut exister sans altération des

réflexes (35,56 p. 100) ; -

6° Le réflexe plantaire profond est souvent exagéré dans l'hys-

térie (50 p. 100) ; quelquefois il est normal (24 p. 100), affaibli

(16 p. 100) ou même aboli (10 p. 100) ;

Ses modifications ne sont pas parallèles à celles des deux autres

réflexes plantaires normaux : si, en effet, son abolition s'accom-

pagne toujours de celle des deux autres, le phénomène plantaire

combiné s'est montré assez souvent avec la conservation (33,90

p. 100) ou même, avec l'exagération (22,03 p. 100) du réflexe

plantaire profond ;

7° Le réflexe abdominal présente des variations inconstantes :

le plus souvent normal (42 p. 100), il peut être aboli (24 p. 100),

exagéré (20 p. 100), ou affaibli (14 p. 100) ;

8° Le clonus du pied n'est pas très rare dans l'hystérie (10 p.

100); celui de la rotule est moins fréquent (5 p. 100); celui du

poignet n'a jamais existé dans nos cas. Surtout fréquent dans les

formes accompagnées de paralysies et contractures (11,53 p. 100),

le clonus du pied est un peu moins commun dans les anesthésies

(9,99 p. 100) et dans les accès (9,52 p. 100) ; tandis que celui de la

. rotule, également le plus fréquent dans les paralysies et contrac-

tures (11,53 p. 100) est assez rare dans les accès (3,17 p. 100) et

nul dans les anesthésies ;

9° Nous n'avons jamais observé le vrai réflexe de Babinski en

extension dans nos cas typiques d'hystéries ; au contraire nous

avons noté dans 8 cas, soit 8 p. 100, le signe de l'éventail. Nous,

croyons donc que ce dernier signe n'a pas une valeur clinique

\ 0

SOCIÉTÉS SAVANTES. 263

aussi importante que celle que l'on doit attribuer au réflexe des

orteils en extension.

L'7 ? t<Mca<t'( ? t physique appliquée au traitement des maladies

mentales.

Le Dr PHILIPPE Tissié. - Après avoir obtenu des résultats heureux

dans le traitement des tics d'origine psycho-motrice et dans celui

d'enfants arriérés par une éducation physique thérapeutiquement

appliquée ; après avoir observé les écoliers dans leurs manifesta-

tions physiques, dans les jeux au plein air et dans leurs manifes-

tations intellectuelles, au cours de leurs études, M. Tissié a été

amené à se demander si l'application des mouvements physiques

d'après la nouvelle méthode psycho-dynamique ne pourrait pas

rendre des services dans le traitement de quelques maladies

mentales surtout chez les adolescents.

M. Tissié s'appuie sur les données suivantes : 1° la gymnastique

doit être respiratoire ; 2° Le mouvement est de la pensée en

action, la pensée est du mouvement en puissance ; 3° le feuillet

externe constitue les centres nerveux : cerveau et moelle épinière ;

les organes sensoriels et la peau ; et par un repli, les poumons ;

4° il existe un antagonisme absolu entre l'attention et la respira-

tion forcées ; il faut en rechercher la cause dans la même origine

du poumon et du cerveau : le feuillet externe; 5° Chaque sujet nait

avec un potentiel nerveux ; il peut l'élever par l'éducation ; ce

potentiel va à la cellule nerveuse, pour la cërébration ; à la cellule

musculaire, pour la musculation ;

G° La fatigue est en raison de l'abaissement du potenliel par

l'acte accompli musculaire, intellectuel ou émotif. La fatigue par

célébration et la fatigue par musculation s'additionnent, elles ne se

soustraient pas mutuellement.

7° La volonté étant le passage du jugement à l'acte, et le juge-

ment ne pouvant s'établir que par l'apport des mémoires-témoins,

la valeur éducative d'un mouvement est en raison directe de celle

des témoignages, c'est-à-dire des représentations psycho-motrices

dont' ce mouvement fixe l'empreinte dans les centres psychiques,

d'où la nécessité de bien connaître la valeur de chaque groupe de

mouvements physiques par rapport à ses fonctions thérapeutiques

et à ses représentations motrices ;

8° Toute animalité qui se développe en vie foetale dans un

milieu resserré : utérus, coque d'oeuf, extériorise la force par

l'affirmation du moi dans le geste en extension, et la fatigue,

par l'abaissement du moi dans le geste en flexion. La raison de

ces deux grands gestes est dans le développement du foetus en

flexion. Cette flexion impose une « gêne » musculaire au foetus. La

détente de ses articulations constitue une impression opposée de,

264 SOCIÉTÉS SAVANTES.

« bien-être », d'où formation, dès la vie intra-utérine, de deux

territoires psycho-moteurs de « gêne)1 et de « bien-être ». Toutes

les impressions de même nature se dirigeront ensuite, automati-

quement, dans-le cours de la vie, vers chaque territoire qui leur

est propre pour constituer les représentations « douleur » (fatigue)

et plaisir (force). L'attitude foetale est prise automatiquement en

flexion dans la douleur, et en extension dans le plaisir. La pre-

mière pensée de l'enfant est son premier mouvement :

9° L'art de tous les pays et de tous les temps a représenté la

douleur en flexion et le plaisir en extension (voir le monument

Aux Morts de Bartholomé ; la femme, en attitude foetale du

premier plan est au maximum de la douleur) : 10° Le retour à

l'attitude foetale en flexion est en raison directe : 1° du degré

de civilisation ; 2° de l'âge ; 3° de l'émotivité, etc., et en raison

inverse du pouvoir d'inhibition acquis par l'éducation. 11° La

société doit protéger la mère depuis le moment de la fécondation

jusqu'à celui de la délivrance.

Forme clinique des tics unilatéraux de la face.

M. CROCHET (de Bordeaux). - Les tics unilatéraux de la face peu-

vent se grouper sous trois grands ordres étiologiques principaux

suivant qu'ils sont : A) D'ordre réflexe douloureux ou non doulou-

l'eux; B) D'ordre organique paralytique ou non paralytique ;

C) D'ordre professionnel. L'auteur'étudie successivement les cinq

formes cliniques de ces tics unilatéraux et montre qu'à chacune

d'elles correspondent des signes particuliers qui permettent d'en

faire le diagnostic.

Le Dispensaire anti-alcoolique de Paris et le traitement

des buveurs d'habitude.

Le Dr Bérillon (de Paris). -Depuis quelques mois le traitement

des alcooliques est entré dans une phase nouvelle. En Russie, les

pouvoirs publics donnant au traitement par la suggestion hypno-

tique une consécration officielle ont provoqué sous le nom d'am-

bulances anti-alcooliques, des consultations où les sujets sont

traités par l'hypnotisme. Ces consultations existent déjà à St-

Péterbourg, à Moscou, Ekaterinoslaw et dans plusieurs autres

villes. Les municipalités ayant fait connaître par voie d'affiches

officielles l'efficacité du traitement par la suggestion hypnotique,

les consultations ont été immédiatement fréquentées par un grand

nombre d'intéressés. -

Il convient de rappeler que c'est en France que ce mouvement à

pris naissance. Personnellement, dans des communications anté-

rieures aux Congrès de Nancy (1896) Grenoble (1902) nous avons

démontré que le traitement le plus efficace des habitudes d'alcoo-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 265

lisme consiste dans la rééducation de la volonté réalisée par un

traitement psychologique.

Les causes qui provoquent l'habitude de boire sont très variées et

la résistance des sujets à l'impulsion est très différente ; la cure

du buveur doit donc reposer, avant tout, sur une étude de psy-

chologie individuelle. Cette étude nécessite de la part du médecin

traitant non seulement des connaissances psychologiques approfon-

dies, mais aussi une compétence spéciale dans l'application de

l'hypnotisme et de la suggestion.

Jusqu'à ce jour, il était presque impossible à un buveur d'habi-

tude de trouver en dehors de l'Asile d'aliénés les divers traite-

ments et la direction morale nécessaires pour arriver à la guérison.

Il en résultait que beaucoup de sujets bien iutentionnés, ne

pouvant interrompre leurs occupations professionnelles sans com-

promettre leur situation et celle de leur famille, renonçaient à

toute tentative de traitement.

C'est pour faciliter le traitement à une nombreuse catégorie de

malades d'autant plus intéressants qu'ils sont conscients de la

gravité de leur état et aussi qu'ils ne présentent pas encore de

troubles mentaux accentués que le dispensaire anti-llcoolique de

Paris a été créé.

Bien qu'il existât depuis plusieurs années, l'inauguration en

a été faite il y a quelques mois sous la présidence de M. Voisin,

médecin à la Salpêtrière, assisté de MM. les Docteurs Legrain,

médecin de Ville-Evrard, et Félix Regnaud, professeur à l'Ecole de

psychologie.

Le traitement appliqué au dispensaire anti-alcoolique est à la

fois psychologique et symptomatique. Il repose sur l'association

de la suggestion hypnotique avec les divers procédés les plus

capables de soutenir l'énergie du malade, de neutraliser les

troubles fonctionnels et d'arriver à la rééducation de sa volonté.

Des stigmates anatomiqucs, physiologiques et psychiques de la dégé-

nérescence chez l'animal, en particulier chez le cheval (étude

clinique.) ,

MM. Fernand RUDLER et C. CHOMEL. La dégénérescence est

caractérisée chez l'animal comme chez l'homme, par un ensemble

de stigmates anatomiques, physiologiques et psychiques qui con-

sistent dans des malformations, des troubles intellectuels, un état

de déséquilibration particulier.

Stigmates physiques ou anatomiques. Anomalies de volume et

de forme du crâne et de la face ; signes fournis par les organes

des sens, la bouche (asymétries dentaires), le tronc et les mem-

bres.

Stigmates physiologiques. 1° Système nerveux, troubles de la

266 SOCIÉTÉS SAVANTES.

motilité, de l'activité réflexe, de la sensibilité, troubles trophi-

ques et vaso-moteurs ; 2° Troubles des fonctions génésiques ;

3° Troubles digestifs, aérophagie, météorisme, perversions diges-

tives. -0 . . .

Stigmates psychiques se rapportant : 1° Aux troubles de la mi-

mique ; 2° Aux actes impulsifs ; 3° A une hérédité nerveuse capi-

talisée ; 4° Aux troubles de la volonté et du caractère ; 5° Aux

phobies et hallucinations.

Cette énumération clinique suffit à établir l'identité entre les

stigmates de dégénérescence du cheval -et ceux que Morel et

Magnan ont décrit chez l'homme. Ces signes n'acquièrent, chez le

cheval comme chez l'homme leur signification que par leur

accumulation. Ils ont la même portée diagnostique et pronostique.

Ils témoignent d'une infériorité individuelle de l'animal considéré

en soi et au point de vue de la reproduction.

La méthode lcypno-pédagogiqzee. '

Ses applications au traitement des habitudes vicieuses chez les ej'(llnts.

Le Dr BÉMLLON. La tendance aux impulsions vicieuses, anti-

sociales, correspond chez l'enfant à l'absence du pouvoir modéra-

teur désigné sous le nom de volonté d'arrêt. En général, l'éduca-

tion normale suffit pour créer la volonté d'arrêt. Mais il se présente

des cas où les procédés habituels d'éducation se montrent insuffi-

sants à réprimer les tendances impulsives. De là la nécessité de

recourir à des procédés spéciaux de dressage. Nos recherches sur

cette question nous ont amené à considérer la suggestion hypno-

tique comme la méthode la plus efficace pour réaliser la rééduca-

tion systématique de la volonté.

Nous avons donné à notre méthode le nom de Méthode hypno-

pédagogique, parce que l'emploi de l'hypnotisme en constitue

l'élément fondamental. Il est, en effet, très intéressant de

constater que les enfants indociles et insociables à l'état de

veille, deviennent immédiatement malléables et éducables, dès

qu'ils sont plongés dans l'état d'hypnotisme.

Pour Magnan, les impulsions irrésistibles ont leur cause dans

un état de déséquilibration de l'axe encéphalo-médullaire. Or,

dans le sommeil normal, et encore plus dans le sommeil provoqué

l'équilibre des fonctions nerveuses tend à se rétablir. C'est proba-

blement par cette action physiologique du sommeil qu'on peut

expliquer l'influence curative de l'hypnotisme.

L'emploi de la méthode hypno-pédagogique repose sur les cinq

principes suivants : 1° Etudier préalablement la suggestibilité

naturelle du sujet, en un mot, faire le diagnostic de la suggestibi-

lité ; 2° Provoquer l'état d'hypnotisme, ou tout au moins un état

de passivité qui s'en rapproche ; 3° Le sujet étant dans l'état d'hyp-

. SOCIÉTÉS SAVANTES. 267

nose, lui imposer une direction morale par des suggestions impé-

ratives; 4° Renforcer la suggestion verbale par des actions

mécaniques, c'est-à-dire par une gymnastique spéciale destinée à

contrarier les mouvements impulsifs. Les détails de la technique

varient nécessairement selon la nature des impulsions ; 5° Après

l'opération, procéder au réveil complet du sujet.

Les impulsions irrésistibles ou les habitudes vicieuses contre

lesquelles l'emploi de la méthode hypno-pédagogique est indiqué

sont : 1° La kleptomanie ; 2° L'onanisme ; 3° Les aberrations et

les perversions sexuelles ; 4° L'onychophagie ; 5° Le mensonge :

6° La paresse ; 7° Les fugues et les impulsions au vagabondage ;

8° L'incontinence d'urine.

La méthode ne donne de bons résultats que chez les sujets doués

d'un certain développement intellectuel. Elle n'est pas applicable

aux idiots ni aux enfants atteints de débilité mentale accentuée.

Nous considérons que dans l'application de la méthode hypno-

pédagogique ce n'est pas la suggestion, mais l'hypnotisme qui

joue le rôle prépondérant. Les guérisons obtenues par cette mé-

thode sont durables. Nous devons ajouter que la méthode hypno-

pédagogique, utilisée par des médecins compétents, est d'une

innocuité absolue et ne comporte aucun inconvénient pour le

sujet soumis au traitement.

Documents figurés représentant d'anciennes pratiques chirurgicales

contre les psychoses.

M. Henry Meige. Communication avec projections. Un assez

grand nombre de figurations artistiques, notamment dans les

écoles flamandes et hollandaises, représentent des opérations chi-

rurgicales sur la tète. M. Henry Meige a recueilli dans les diffé-

rentes collections privées et publiques de l'Europe une trentaine

d'images de ce genre dont il projette les reproductions.

Parfois, il s'agit d'opérations simples, telles que des saignées,

des applications d'emplâtres, destinées à soulager des migraineux,

des neurasthéniques, etc., conformément à la thérapeutique de

l'époque. Mais le plus souvent, il s'agit d'une jonglerie opératoire

pratiquée, par des chirurgiens ambulants et connue sous le nom

^opération des pierres de tête. La croyance populaire attribuait

volontiers les désordres de l'esprit à la présence d'un corps étran-

ger dans le crâne. Tantôt on accusait une guêpe, un taon, un rat

(on parle encore aujourd'hui d'araignée, de hanneton ) Dans les

Pays-Bas, on croyait surtout à la pierre de tête. Des prestidigita-

teurs chirurgicaux ont exploité cette croyance : ils faisaient sur le

iront une légère entaille, tandis qu'ils mettaient sous les yeux du

patient, au bout d'une énorme pince, une pierre préalablement

dissimulée dans le creux de leur main, et qu'ils étaient censés

avoir retirée du crâne.

268 SOCIÉTÉS SAVANTES.

De nos jours encore, nombre d'obsédés décrivent avec un grand

luxe de détails des sensations de corps étrangers (pierres ou

bêles), dans leur tête. Les médecins d'autrefois n'étaient pas éloi-

gnés de croire à la réalité de ces descriptions psychopatiques.

C'était l'époque où les humeurs peccantes refluaient volontiers vers

le cerveau et s'y conglutinaient, pour engendrer toutes les mani-

festations vésaniques. La médecine elle-même contribua donc à

accréditer la croyance aux pierres de tête. Les artistes, Van Bosch,

Van Hemessen, P. Bruegel, de Bry, Brouwer, Teniers, A. Both,

N. Weydmans, Frans Hals le Jeune, etc., et surtout Jean Steen,

qui nous ont laissé des témoignages figurés de ces anciennes pra-

tiques, ont d'ailleurs finement raillé dans leurs oeuvres à la fois

l'excessive crédulité des opérés et l'audacieuse fourberie des opé-

rateurs. '

Névrite et atrophie optique dans l'erysipèle facial1.

Le Dr CABANNES (de Bordeaux). L'érysipèle de la face peut,

dans quelques cas exceptionnels, s'accompagner de lésions du nerf

optique. Nous avons eu l'occasion d'observer récemment un cas

de névrite optique post-érysipélateuse qui s'accompagna très rapi-

dement d'atrophie avec perte absolue de la vision du côté corres-

pondant. Un certain nombre de faits de ce genre ont été publiés

par les auteurs Despagnet, Galezowski, Knaff, Nettleship, Pari-

naud, Pagenstecher, Ramirez, Ripault, etc.

La réalité clinique de la lésion optique (névrite ou atrophie) au

cours de l'érysipèle facial est actuellement sans contestation. Le

mécanisme pathogénique de cette complication est encore l'objet

de quelques controverses : les uns, à l'exemple de Carl, pensent

qu'il y a toujours atrophie directe de la papille sans névrite anté-

cédente : les autres, plus nombreux, incriminent, dans la genèse

des lésions, l'atrophie post-névritique. Nous nous rangeons à cette

dernière interprétation. Voici la façon dont on peut, d'après nous,

expliquer tous les faits. L'érysipèle facial agit sur le nerf optique,

en raison de sa proximité, par la propagation de son inflammation

au tissu cellulaire orbitaire dont les lésions (cellulite orbitaire)

s'étendent consécutivement à la périphérie du nerf optique. Cette

cellulite, qui peut dans des cas très rares amener un véritable

phlegmon suppuré de l'orbite, reste le plus souvent à l'état d'in-

flammation plastique, cliniquement caractérisée par un léger

exorbitisme. Elle agit surtout par compression sur le contenu de

l'orbite et en particulier sur le nerf optique.

Nous pensons que cette compression du nerf, à laquelle s'ajou-

' Voir aussi la thèse d'un de nos élèves, M. FIUVEAU Névrites el

atrophies optiques dans l'éysipèle facial, Bordeaux, 190f.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 269

tent nécessairement des phénomènes inflammatoires par propa-

gation, explique toutes les formes cliniques, suivant que les

lésions mécaniques et inflammatoires prédominent dans l'un

quelconque des deux points faibles du trajet du nerf : a) son

entrée dans l'oeil, où il est resserré dans la gaine scléroticale ;

b) son émergence du trou optique où il est engainé dans un anneau

osseux.

ci) Dans le premier cas, il existe des phénomènes cliniques très

nets : papillite avec ou sans oedème, veines congestionnées tor-

. tueuses, quelquefois trombosées, artères filiformes, quelquefois

suffisions hémorrhagiques de la rétine voisine (le long des veines).

Ultérieurement signes de l'atrophie post-névritique avec ses carac-

tères connus. Dans cette forme, la cécité survient très vite et reste

le plus souvent irrémédiable..

b) Dans le second cas, il survient de l'atrophie optique sans

névrite ni papillite évidente. Le nerf optique blanchit, s'excave, les

vaisseaux papillaires ou rétiniens n'offrent aucune altération ; en

réalité la névrite existe, mais elle est au trou optique et ce qui

domine ici ce sont les phénomènes de compression des fibres

nerveuses qui prennent le pas sur les troubles inflammatoires.

Cliniquement, on trouve ou bien un rétrécissement plus ou

moins concentrique du champ visuel, ou un scotome central des

plus évidents, et tous les signes ordinaires de la névrite rétro-bul-

baire.

Les théories classiques, anciennes et modernes, peuvent donc

malgré leur divergence apparente, être ramenées à la même

explication pathogénique. L'apparence ophtalmoscopique de la

papille dépend uniquement du point du trajet du nerf optique,

plus spécialement atteint (entrée oculaire, passage au trou

optique).

Douleur épigastrique suraiguë dans la neurasthénie.

Le D1' Maurice Page, de Bellevue (Seine-et-Oise). Nous pré-

sentons au Congrès cinq observations de neurasthéniques, chez

lesquels le symptôme dominant est une douleur épigastrique, sur-

venant par crises pour des motifs très divers (émotion, alimenta-

tion, règles, etc.). Cette douleur est ici extrêmement violente,

suraiguë, faisant que les malades se roulent en poussant des cris;

elle a deux sièges principaux et constants, en avant au creux épi-

gastrique, à trois travers de doigt de l'appendice xiphoïde, en

arrière sur la colonne vertébrale au niveau de la 8e dorsale. Ce

syndrome fréquent dans l'ulcus simplex (douleur en coup d'épée)

et qui s'explique par l'érosion des parois stomacales permettant à

l'acide gastrique d'irriter violemment les filets nerveux, nous le

trouvons ici à l'état de phénomène saillant, chez des neurasthé-

270 SOCIÉTÉS SAVANTES.

niques, sans aucune lésion stomacale par conséquent. De l'étude

de ces observations nous croyons pouvoir tirer l'enseignement sui-

vant : '

1° Cette douleur avec ses deux points xiphoïdien et vertébral

caractéristiques, avec son intensité excessive, arrachant des cris

aux malades, accompagnée ou non de vomissements, nous croyons

pouvoir en faire une névralgie du plexus solaire;

2° En présence d'un tel syndrome il importe d'examiner tous les

organes innervés par le plexus solaire et en particulier les organes

génitaux, car une maladie d'un territoire quelconque du solaire

(métrite, rein flottant, antéversion utérine) peut être la cause du'

syndrome. Du moins nous verrons qu'en guérissant ces affections

nous supprimerons du même coup la douleur épigastrique;

3° Il existe des cas où on ne trouve aucune lésion pouvant reten-

tir sur le plexus solaire et où une névrose seule de ce plexus

explique le syndrome névralgique;

4° Contre les crises douloureuses, le traitement général de la

neurasthénie étant institué et les affections concomitantes soignées,

s'il y a lieu, le seul remède qui nous ait donné des résultats satis-

faisants est la faradisation quotidienne, loco dolenti, avec bobine

à gros fil et à faible intensité.

Un cas de polynévrite éthylique ayant évolué sous la fonn3 de

paralysie ascendante. ' "

11\i. OBERT3SUR et ROGER (de Paris). Il s'agit d'une dame âgée

de trente-six ans, vivant dans un milieu d'alcooliques et de dypso-

manes et ayant contracté la passion de l'alcool depuis l'âge de

treize ans. Peu de temps avant de s'aliter elle buvait tous les jours

une bouteille entière de cognac, sans compter le reste. Elle entre

en traitement pour des phénomènes d'amnésie et de confusion. On

constate à ce moment qu'elle a peine à marcher, qu'elle steppe, son

pouls est fréquent, ses réflexes abolis, la pression des masses mus-

culaires n'était pas douloureuse. Le lendemain les membres infé-

rieurs étaient totalement paralysés, les sphincters relâchés, le

pouls très rapide. Très peu de temps après, anurie presque com-

plète ; la température s'élève, les membres supérieurs, le tronc se

prennent à leur tour, et tellement complètement, qu'aucun mou-

vement spontané n'est possible. La respiration est atteinte, les

nerfs mixtes sont absolument paralysés alors que les autres nerfs

bulbaires restent indemnes. Après des alternatives d'aggravation

et d'espoir la malade succombe dans une syncope.

Il s'est agi là, bien qu'il n'y ait pas eu de contrôle anatomique

d'une' polynévrite indiscutable à marche absolument ascendante

extenso-progressive presque entièrement superposable aux cas

princeps de Landry, de Leudet, de Labadie-Lagrave, etc.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 271

Malformations crâniennes et syndrome bulbaire. Enclavement

du bulbe (pièces et photographies).

MM. SMICARD et OBERTIIUR. Le malade qui fait l'objet de cette

communication était un infantile avec malformation crânienne et

aplatissement de la base du crâne, chez lequel se sont développés

sous des influences multiples (troubles de nutrition, hypothyroïdi-

sation, etc.) des phénomènes d'encéphalite chronique avec aug-

mentation de la tension intracrânienne, entraînant une compres-

sion du bulbe et des nerfs bulbaires. De plus, on a trouvé chez lui

une syringomyélie occupant une partie de la moelle cervicale et la

portion supérieure de la moelle dorsale. Peu de temps avant son

entrée à l'hôpital il avait eu une angine probablement diphtérique

à la suite de laquelle, sans doute par polynévrite, les phénomènes

du côté des nerfs crâniens s'étaient singulièrement aggravés.

N'étaient quelques vertiges, quelques vomissements et des cépha-

lées, on aurait pu porter le diagnostic de sclérose latérale amyotro-

puisque avec troubles bulbaires. Le malade ne présentait d'ailleurs

aucun trouble trophique ou sensitif faisant penser à la syringo-

myélie. Le malade mourut subitement quelques jours après son

entrée. Les particularités intéressantes à relever dans ce cas sont

les suivantes : '

1° La longue période pendant laquelle l'encéphale a pu s'adap-

teravec la malformation crânienne puis sous uue influence toxique

ou auLotoxique réagir et provoquer par l'hydrocéphalie un véri-

table étranglement bulbaire dans une gouttière basilaire et un trou

occipital malformé; 2° La polynévrite diphtéritique venant compli-

quer le tableau morbide; 3e L'existence d'une syringomyélie abso-

lument indépendante de l'hydrocéphalie dont la pathogénie peut

s'expliquer soit par un vice de développement soit par une réac-

tion spéciale de la névroglie dans un névraxe prédisposé ; 4° L'en-

clavement du bulbe ayant causé la mort subite, ses rapports

avec l'engagement du cervelet et son mécanisme un peu spé-

cial.

Psyclvasténie et diabète.

MM. OBERTHUR et CHENAIS (de Paris). Comme contribution à

l'étude des rapports du diabète avec les troubles mentaux, les

auteurs insistent sur l'importance de la recherche des signes du

diabète chez toutes les névroses ou les psychonévroses, surtout

lorsqu'il s'agit de malades de souche arthritique. Chez un assez

grand nombre de malades atteints de psychoses dépressives ou

d'états délirants ou confus, ils ont constaté la présence de sucre

en quantité notable. Dans presque tous les cas un régime alimen-

taire sévère joint à la médication appropriée a mené très rapide-

ment la sédation et la disparition des troubles psychiques.

272 sociétés savantes.

De quelques considérations sur les psychoses puerpérales.

M. LE Dr LUCIGIV Picqué (de Paris). Si l'on veut aboutir à des

résultats précis au point de vue de la pathogénie des psychoses

puerpérales, il faut renoncer à en grouper ensemble toutes les

variétés. Lorsqu'on en a distrait les délires tenant à des infections

médicales concomitantes et les délires par intoxication, on se

trouve en présence de deux variétés de délire post-partum vrai :

le délire fébrile et le délire apyrétique.

Aujourd'hui la nature infectieuse de ces délires est parfaite-

ment établie ; comme dans les psychoses post-opératoires fébriles,

l'état infectieux grave constitue la vraie maladie ; le délire n'est

qu'un élément secondaire et surajouté qui ne peut se produire

d'ailleurs que grâce à une prédisposition délirante (dégénéres-

cence mentale).

Le point de départ de l'infection est naturellement l'utérus.

Depuis longtemps M. Picqué pratique l'examen systématique des

organes génitaux de la femme. Par l'intervention il a obtenu

4 guérisons sur 4 (voir thèse Privât). L'utérus n'est pas toujours

le siège de l'affection ; il existe parfois des foyers secondaires :

articulation tibio-tarsienne (Picqué), rein (Evrot), oreille (Idanoff),

méninges (Picqué).

L'étude des psychoses puerpérales fébriles est intéressante au

point de vue thérapeutique et social. Les malades qui en sont 't

atteints ne sont pas des aliénés. Il est incontestable que les malades

ne doivent venir à l'asile que si elles peuvent, comme dans les

asiles de la Seine, y trouver les ressources chirurgicales. L'expé-

rience du Pavillon de chirurgie prouve qu'elles peuvent y guérir

à la fois de l'infection et du délire qui l'accompagne.

Délire de possession par les reptiles, délire de grossesse et entéro-

colite muco-membraneuse.

M. Cb. Mirallié (de Nantes). -L'auteur publie : 1° Une obser-

vation de délire de grossesse. suivie de délire de zoopathie interne.

associée à l'entéro-colite muco-membraneuse, chez une mère de

famille de cinquante-trois ans ; chaque période d'amélioration de

l'entéro-colite amenait une atténuation des idées délirantes ; -

2° Deux observations de délire de grossesse chez des malades pré-

sentant de l'entéro-colite muco-membraneuse.

Rapprochant ses observations de celles de Bechterew (délire de

possession par les reptiles), de Dupré et L. Léri (délire de zoopa-

thie interne), M. Mirallié insiste sur l'importance de l'entéro-colite

muco-membraneuse comme point du départ du délire de posses-

sion. Les sensations subjectives exactes perçues sont interprétées

d'une façon délirante et absurde par une prédisposée. Les mêmes

-SOCIÉTÉS SAVANTES. 273

sensations peuvent donner lieu au délire de grossesse. Enfin il

existe une relation étiologique intime entre ces deux délires qui

peuvent avoir la même origine et même se succéder l'un l'autre.

Bien entendu ces délires de possession et de grossesse n'appa-

raissent que chez les prédisposées. D'autre part, il est probable

que d'autres affections abdominales (utérines, ovariques, etc.)

pourraient, chez des prédisposées, donner lieu aux mêmes

délires.

Séance du samedi 6 août.

Dans la petite salle de l'humble hôtel de ville de Lonvie se tint,

le samedi 6 août, la dernière séance du Congrès : MM. Lannois,

H. Meige, Dupré, Royet, etc., dirent leurs observations. Puis, au

bord du Gave d'Ossau, dans les arbres, le Président Brissaud groupa

sympathiquement par petites tables tous les congressistes conviés

par lui en un charmant déjeuner champêtre. D'Iseste, lieu du

déjeuner, à Eaux-ChaudesetàEaux-Bonnes; d'Eaux-Bonnes àArge-

lès, par le col d'Anbisque, telles furent les dernières et merveil-

leuses étapes du Congrès, officiellement terminé au déjeuner

qu'offrait le dimanche l'Institut physico-thérapeutique d'Argelès,

mais officieusement poursuivi par petits groupes vers Cauterets

ou Gavarnie, vers Bayonne et la côte basque. Pierre Roy.

1rfyotonie avec atrophie musculaire.

M. LANNOIS (de Lyon). Présentation des photographies d'un

malade dont l'observation pourrait aussi bien être intitulée Dlyo-

pathie progressive avec hypertonie que Maladie de Thomsen ruste

avec atrophie musculaire.

Il s'agit d'un malade ayant, depuis quatre ans, de l'atrophie

musculaire à forme segmentaire (avant-bras et jambes) avec parésie

marquée et steppage. Il a de l'abolition des réflexes rotuliens et

une série de phénomènes qui font penser à une maladie de

Thomsen limitée. S'il serre la main, il ne peut plus ouvrir les doigts

qu'avec lenteur; il a la même peine à lâcher son verre, son

couteau. Quand il descend de son lit, il a une contraction dans les

fesses et les muscles postérieurs de la cuisse qui l'obligent à

s'asseoir sous peine de tomber accroupi. Il a de la raideur pour les

premiers mouvements de mastication, de la'gêne pour la première

sécrétion matinale. La réaction myotonique existe chez lui et

l'examen biopsique d'un fragment de muscle montre les lésions

typiques de l'atrophie musculaire.

Des faits de ce genre ont été signalés par Hoffmann, Dana,

Pelitzans, Kornhold, Bernardt, Noguès et Sirol, Rossolimo. Ils

Archives. 2' série, t. XVIII. 18

274 -il SOCIÉTÉS SAVANTES.

sont intéressants en raison de leur rareté et parcequ'ils établissent

un lien entre les myopathies primitives et la maladie de Thomsen

et constituent un bon argument en faveur de la nature myopa-

thique de cette dernière.

Remarques cliniques et thérapeutiques sur quelques tics de l'enfance.

MM. Henry MEME et FEINDEL (de Paris). A l'occasion de plu-

sieurs cas de tics observés chez de jeunes sujets venus à la consul-

tation de M. le professeur Brissaud, à l'Hôtel-Dieu, les auteurs

font un certain nombre de remarques relatives àla symptomologie,

à la pathogénie et au traitement des tics.

1° La précipitation de la parole est très fréquente chez les

tiqueurs ; on observe chez eux tantôt le bredouillemcnt, tantôt

des arrêts brusques. La parenté des tics et des troubles'du langage,

tels que le bégaiement, n'est pas douteuse ; elle a sa raison d'être

dans un même état mental ; les mêmes principes de discipline

psycho-motrice sont applicables à ces différents troubles fonction-

nels ;

3° Il y a lieu de distinguer parmi les troubles respiratoires

observés chez les tiqueurs ceux qui sont primitifs et ceux qui sont

secondaires. Certains actes respirateurs brusques sont consécutifs

aux tics des membres supérieurs et du tronc ;

3° Les tics de frappement (coups de poing ou coups de pied que le

sujet se donne à lui-même) sont des phénomènes de même ordre

que les actes de grattage, de morsure (onychophagie, clveiloplcagie);

ils ont pour point de départ une sensation anormale (démangeai-

son, petite douleur) que le sujet cherche à atténuer. L'acte moteur

passe, par répétition, à l'état d'habitude, et continue à se produire,

alors même que la sensation initiale n'existe plus. Les tics de ce

genre peuventètre à leur tour, l'origine de douleurs locales résultant

des chocs réitérés. Bien que ces nouvelles sensations soient la

conséquence même des mouvements nerveux, les sujets ont tou-

jours tendance à croire l'inverse. Il importe de leur démontrer leur

erreur ;

4° Contre la cheilopiaagie et contre l'onychophagie, on peut

recommander l'emploi de la vaseline quininée,. dont l'amertume

est un excellent rappel à l'ordre;

5° Il est notoire que la plupart des petits tics de l'enfance

peuvent être corrigés par une surveillance attentive des parents.

Mais la trop grande faiblesse de l'un ou de l'autre des parents rend

souvent cette correction très difficile ; dans ces cas l'éloignement

familial devient une nécessité absolue ; de même si le tiqueur est

particulièrement rétif aux observations ;

6° Les tiqueurs ne sont pas seulemeni exposés à des troubles de

la fonction motrice. On observe chez eux des troubles fonctionnels

SOCIÉTÉS SAVANTES. 275

viscéraux. Chez les jeunes sujets, une surveillance attentive des

fonctions viscérales s'impose. On arrive à corriger des troubles des

fonctions digestive, sécrétoire, vaso-motrice en faisant fréquem-

ment appel aux interventions du contrôle cortical. C'est par une

éducation bien dirigée que se règle le sommeil, la faim, la miction,

la défécation, etc.. non seulement chez les nouveau-nés, mais

chez les enfants, les adolescents, et même les adultes.

On doit donc envisager une discipline psycho-motrice des muscles

de la vie végétative, et même une discipline psycho-secrétoire.

Migraine ophtalmique avec hémianopsie et aphasie transitoires,.

Hémi'ace succulente. Photophobie et tic de clignement.

M. Henry Meige. Observation d'une malade de soixante-treize

ans atteinte depuis la ménopause d'une migraine accompagnée :

scotome scintillant, céphalalgie, sensations vertigineuses et nau-

séeuses. Les crises s'accompagnent d'hémianopsie et d'aphasie tran-

sitoires, ainsi que de parésie faciale droite et d'engourdissement du

bras droit. A la fin de la crise, somnolence. A la suite d'une série

de ces crises, il reste une légère parésie de la moitié droite de la

face accompagnée d'un certain degré d'oedème (hémiface succulente) .

Enfin, la malade est atteinte d'un clignement des deux yeux, qui

semble avoir eu pour point de départ la photophobie migraineuse,

qui actuellement persiste en dehors des accès, et qui a pris, lui-

même, un caractère obsédant.

M. Henry Meige passe en revue les différentes manifestations

du syndrome de la migraine accompagnée. Tous ces phénomènes

peuvent être attribués à un trouble vasculaire transitoire dont la

localisation doit être discutée. Un angiospasme des ramifications

artérielles de la Sylvienne peut expliquer les troubles de la parole,

la parésie faciale, la sensation d'engourdissement du bras. Mais

pour le scotome, l'hémianopsie, les sensations vertigineuses con-

comitantes, il faut admettre une plus grande extension de l'an-

giospasme. '

D'autre part, la succulence faciale est l'indice d'une participation

des centres vaso-moteurs. Il s'agit d'un ft'op/ioedèmesymptomatique

qu'on peut rattacher à une action des centres sympathiques. On

peut songer aussi à un angiospasme bulbaire, l'accès migraineux

s'accompagnant de phénomènes angoissants. ' .

Il est intéressant de remarquer qu'à de certains moments,

même en dehors des crises migraineuses, la malade, par son facies,

ses attitudes, son langage, sa marche, présente des ressem-

blances cliniques frappantes avec les sujets atteints d'hémiplégie

progressive. i

Le phénomène convulsif palpébral n'est pas un spasme vrai; les

clignements, en effet, peuvent être suspendus' par un effort de

276 SOCIÉTÉS SAVANTES.

volonté et d'attention. Leur éclosion et leur exagération sont en

rapport direct avec la préoccupation photophobique. Ces particu-

larités plaident en faveur du tic; mais il s'agit ici du lie sénile, qui

offre plus de ressemblance avec les spasmes vrais que les tics du

jeune âge, ce qui s'explique par l'infériorité organique des centres

et des conducteurs nerveux chez les vieillards.

Les habitués des Asiles.

Le Dr Marie (de Villejuif, Seine). Les efforts des médecins

aliénistes depuis un siècle ont arraché progressivement à la répres-

sion des catégories nombreuses d'individus désormais considérés

comme malades, et partant irresponsables : des persécutés, des

persécuteurs, des dégénérés, des raisonnants, des processifs, des

paralytiques, etc., diagnostiqués à temps, ont ainsi pris la route

de l'Asile sans passer par le stigmate du jugement et de la con-

damnation consécutive.

La statistique du nombre des aliénés reflète pour une part ces

progrès de la science mentale, qui ne sont pas étrangers à l'aug-

mentation progressive du contingent des asiles. Cependant, un cer-

tain nombre d'individus encore incarcérés pourraient peut-être

bénéficier de mesures les faisant passer des prisons aux asiles, si

un examen psychique méthodique était pratiqué dans ces milieux.

Quoi qu'il en soit, nous voyons ainsi, au cours du siècle, des

catégories importantes d'individus passer de la prison à l'asile :

a) les uns avant jugement lorsqu'un examen médico-légal a per-

mis de faire un diagnostic à temps; les autres, après jugement et

incarcération, la folie étant reconnue après coup ; b) une deuxième

catégorie comprendrait les individus sains au moment de la con-

, damnation, mais atteints de folie plus tard, alors que les précé-

dents étaient des aliénés condamnés parce que méconnus parles

tribunaux; c) une troisième catégorie de cas pourrait être ajou-

tée aux précédentes, c'est celle de ces individus qui, placés une

première fois à l'asile en dehors de tout démêlé avec la justice, y

prennent goût, en quelque sorte, à l'Assistance dont ils deviennent

parasites inoffensifs parfois, ou le plus souvent corrompus au con-

tact dès délinquants classés irresponsables, de qui ils apprennent

l'immunité particulière à laquelle ils peuvent prétendre désormais

et dont ils peuvent ensuite abuser.

, Au point de vue des établissements normaux d'assistance, le mé-

lange de ces diverses catégories nouvelles d'assistés avec le contin-

gent en vue duquel ils sont fondés, menace de les dénaturer dans

leur but d'instruments thérapeutiques et d'hôpitaux de traitement

de plus en plus ouverts. c'est pourquoi il y a lieu d'établir un asile

spécial.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 277

, Les formes fébriles du tabès.

Maurie FAURE (de Lamalou). Il y a des accidents fébriles au

cours du tabes, et des formes fébriles du tabes.

1. Les accidents fébriles du tabes sont en relation avec l'in-

fection des cavités, principalement de la vessie, quelquefois aussi

de l'intestin ou de l'arbre broncho-pulmonaire. Ces accidents sont

surtout fréquents dans les cas de tabes avancés, quoique pouvant

apparaître parfois dans les premières périodes. La cause de l'in-

fection est la stase qui résulte de l'atonie musculaire des parois

abdominales, thoraciques,vésicales, intestinales et bronchiques. Les

soins consistant en : 1° désinfection de la cavité infectée ; 2° réta-

blissement de la tonicité des parois font disparaître ces accidents.

II. Il existe des formes fébriles du tabes, rares et d'allures

variées, mais qu'on pnut ramener à deux types schématiques :

1° Dans le premier type, les poussées d'accidents tabétiques sont

nettement accompagnées de fièvre, et, dans l'intervalle de ces

poussées, la température tend à se rapprocher de la normale.

L'évolution est souvent grave, le malade pouvant mourir, en deux

années environ, d'une sorte de tabes aigu : parfois il s'agit d'un

stade fébrile de début, le malade devenant ensuite semblable au

tabétique ordinaire ; 2° Dans le second cas, il n'y a plus d'accès

fébrile véritable, mais la température est toujours de quelques

dixièmes de degré (37 à 38°) au-dessus de la normale ; cette tem-

pérature s'élève au moindre effort.

Les tabétiques fébriles doivent être soumis au repos absolu, à

l'aération continue, à une alimentation spéciale et à l'hydrothé-

rapie tempérée. Nous ne savons pas si ces formes sont liées à

l'évolution fébrile de la lésion tabétique elle-même ou bien si, plus

probablement, la lésion tabétique et les accidents qu'elle entraine

sont, comme la fièvre, des conséquences parallèles d'un état géné-

ral infectieux dont il faudra préciser, ultérieurement, la nature et

l'origine.

Contribution à l'étude de l'état du fond de l'oeil dans la paralysie

générale. (Résultat de l'examen des paralytiques générales de

l'asile de Saint-Venant.)

MM. 13RlCIIE, PAVIART et Chaudron. - Conclusion : On a trouvé

des lésions du fond de l'oeil chez les paralytiques générales dans

une proportion de 78 p. 100. La majorité de nos malades était

arrivée à un stade déjà avancé de leur affection, ce qui explique

ce pourcentage de beaucoup supérieur à celui trouvé chez les

paralytiques généraux à la 1° période.

278 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Rôle des muscles spinaux dans la marche normale chez l'homme.

Henry LAMY (de Paris). Les muscles spinaux participent à la

marche d'une façon très active. Le fait est signalé par quelques

auteurs (Gerdy, P. Richer) d'une façon sommaire. Je me suis

efforcé de déterminer : 10 A quel moment précis les spinaux

entrent en contraction dans le pas; 2° quels rôles -ils sont appelés

à remplir dans la marche; 3° quel changement d'aspect dans les

reliefs de la musculature du dos correspondent à leur contrac-

tion.

lo Au moment précis où le talon touche le sol, les spinaux du

côté opposé se contractent d'une façon soudaine et énergique.

Cette contraction se maintient du côté oscillant tout le temps de

l'oscillation du membre. Elle cesse au moment où celui-ci touchant

le sol par son talon devient portant à son tour, pour passer du

côté opposé, et ainsi de suite; ,

2° Leur rôle est d'assurer l'équilibration latérale du tronc, de

s'opposer à l'inflexion latérale du rachis vers le côté portant et de

maintenir la verticale passant par le centre de gravité du corps en

dedans du pied de ce côté;

3° La contraction mi-latérale des spinaux s'accuse par un chan-

gement d'aspect dans les reliefs musculaires du dos, assez carac-

téristique pour qu'à la simple inspection de cette région, ainsi que

le montrent les photographies que je vous présente, on puisse

reconnaître quel est le côté portant, quel est le côté oscillant, à

condition qu'on ait affaire à un sujet maigre et musclé.

Contribution à la thérapeutique du Tabes. Le nitrite de soude.

MM. OBERTlIÜR et BOUSQUET (de Paris). Le nitrite de soude qui

a été employé en Italie par Pétrone, en Autriche par Winternitz

et Pal, lesquels ont donné l'an dernier une brillante statistique,

vient d'être essayé par les auteurs d'une manière systématique et

continue. Il semble vraiment qu'il s'agisse là d'un médicament de

choix, agissaut sur les phénomènes douloureux d'une manière

très efficace ; il a été le seul qui puisse arriver à calmer les cas

dans lesquels les douleurs sont particulièrement continues et

rebelles et où toutes les autres thérapeutiques échouent.

De plus le nitrite semble combattre très heureusement les phé-

nomènes d'incoordination ; les cas soumis au traitement par le

nitrite de soude qui ont été rééduqués ont tous fait des progrès

beaucoup plus rapides que les malades non soumis à cette médica-

tion. Le traitement par les piqûres semble supérieur à celui

par ingestion.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 279

Caisse des Retraites.

M. LE Dr DU13OURDIEU (de Lesvellec. Morbihan). Pas n'est

besoin d'être depuis longtemps dans les Asiles pour savoir à quoi

s'en tenir sur le sort fait aux Médecins aliénistes de ces établisse-

ments en ce qui concerne les retraites. Dans un précédent Congrès,

on s'est déjà occupé de cette question et malheureusement

aucune solution favorable n'est intervenue soit à cause de notre

petit nombre, soit par apathie ou indifférence des intéressés, soit

parce qu'elle fut exposée devant une majorité de congressistes

n'ayant nul intérêt à la faire aboutir.

Aujourd'hui que la loi sur les aliénés est près de venir en

discussion et même en attendant qu'elle y vienne, il serait peut-

être bon de reprendre à nouveau ce sujet et de chercher à le solu-

tionner d'une façon pratique. Ce faisant nous revendiquerons

simplement le droit qu'a tout fonctionnaire d'avoir une retraite

assurée pour ses vieux jours et non plus comme actuellement d'être

soumis à des statuts de caisse de retraite où tout n'est qu'aléa,

arbitraire et souvent duperie ; de sorte qu'on est jamais sûr en

entrant dans la carrière de jouir en paix plus tard du fruit de son

travail et de recevoir la récompense des services si chèrement

rendus parfois à la cause de l'humanité et de son pays.

Etude anatomo-pathologique d'un cas de paralysie infantile au point

de vue de la topographie des muscles atrophiés et des localisations

médullaires.

MM. C. PARHON et J. ParInIAi\ (de Bucarest). Nous avons pra-

tiqué l'examen anatomo-pathologique d'un cas de paralysie infan-

tile, quatre-vingts ans après le début de la maladie. Tous les

muscles de la jambe et du pied ainsi que le troisième adducteur,

le biceps crural et la plus grande partie du quadriceps étaient

réduits, microscopiquement au moins, à des masses adipeuses.

Au point de vue de la topographie des atrophies on pourrait

parler dans ce cas d'une topographie segmentaire complète pour

la jambe et le pied, incomplète pour la cuisse. On pourrait de

même soutenir qu'il s'agit d'une topographie nerveuse incomplète

ou d'une topographie radiculaire avec le même caractère. Nous'

ne voulons défendre aucune de ces théories. Nous estimons que la

dernière ne peut être généralisée pour les raisons suivantes :

Il Parce que la paralysie n'intéresse pas toujours tous les muscles

d'un territoire radiculaire; 2° Parce qu'elle envahit souvent des

territoires voisins; 3° Parce que, ainsi que M. lIfARINESCO, l'a mon-

tré récemment, les notions de racine et de segment ne sont pas

exactement superposables. A notre avis on exprime mieux la vérité

et sans rien préjuger en disant que dans la poliomyélite antérieure

280 SOCIÉTÉS SAVANTES.

aiguë on rencontre une topographie spinale des muscles atrophiés.

En mettant en parallèle les muscles malades avec les groupements

cellulaires absents et tenant compte des recherches antérieures

nous concluons que : les groupements postéro-latéral et post-pos-

téro-laléral de la moelle lombo-sacrée sont en rapport avec les

muscles de la jambe et du .pied. Dans les premier et deuxième

segments sacrés les deux groupements centraux innervent les

deux chefs du biceps crural. Dans le cinquième segment lom-

baire, le groupement central innerve le demi-membraneux et pro-

bablement aussi le demi-tendineux. Le quatrième segment, le grou-

pement central est en rapport avec le grand adducteur, le groupe-

ment externe avec le quadriceps.

Contribution à l'étude des représentations motrices du membre in/ë-

rieur dans la moelle épinière de l'homme.

MM. PARHON et GOLDSTEIN. Nous avons étudié la moelle

lombo-sacrée de deux malades dont le premieravait subi la désar-

ticulation de la jambe d'un côté et l'amputation de la cuisse vers

son milieu du côté opposé. Le second avait subi d'un seul côté

cette dernière opération. Le résultat de cette étude confirme d'une

façon générale ceux auxquels sont arrivés Sano, Van Gehuchten,

de Buck, Nelis, De Neef, Bruce, Marinesco, pour la localisation

globale de la jambe et du pied. Dans le groupement postéro-

latéral et post-postéro-latéral on distingue facilement des grou-

pements secondaires représentant, anisi que M. et Mme Parhon

l'ont montré expérimentalement pour la jambe, chez le chien, des

véritables centres musculaires. Pour la cuisse, les lésions sont

minimes dans nos deux cas. Elles correspondent néanmoins aux

groupements où Van Gehuchten et De Neef, chez l'homme, Mari-

nesco, M. et Mme Parhon et nous-même, chez les animaux, plaçons

la localisation des muscles de ce segment. Si l'on tient compte de

ces recherches on doit admettre que : les centres des muscles de

la face postérieure de la jambe sont placés en dedans de ceux de

la région antéro-externe. Le centre du jambier antérieur est le

plus haut situé de tous les centres des muscles de la jambe. Celui

des deux jumeaux est, par contre, celui qui descend le plus bas.

Il est situé en avant de celui du plantaire grêle, du jambier

postérieur et des fléchisseurs. Les centres des premiers sont

placés plus bas que ceux du jambier antérieur et des extenseurs

des orteils. Pour la cuisse, le centre du quadriceps occupe le grou-

pement externe du troisième et du quatrième segment lombaire,

celui du couturier, le groupement antéro-externe du premier de

ces segments. Le centre du grand adducteur occupe le groupement

central du quatrième segment. Dans la partie centrale du troi-

sième se trouvent les centres des deux premiers adducteurs et du

SOCIÉTÉS SAVANTES. 281

droit interne. Dans le cinquième segment, le groupement central

innerve le demi-membraneux et probablement le demi-tendineux.

Dans les deux premiers segments sacrés, il est en rapport avec le

biceps crural (P : 1RIION 8t PAPINIAN). A ce niveau, le groupement

antéro-externe est en rapport avec les muscles fessiers.

Contribution à l'étude du diagnostic et du traitement de quelques

états vertigineux.

Le Dr RoYET. Le diagnostic de la cause des états vertigineux

et de certains troubles de l'équilibre est assez difficile et parfois

impossible. Je crois donc utile de signaler un moyen d'en isoler un

groupe important, surtout que de ce moyen résulte un procédé

pratique de traitement.

Les états vertigineux qui proviennent de troubles de'l'oreille ne

sont pas toujours d'un diagnostic facile d'avec ceux dont l'origine

est dans les centres nerveux; d'autant moins qu'ils peuvent

exister en dehors de diminutions ou de perversions manifestes de

fonctions auditives. Cette absence absolue ou relative de troubles

auditifs peut se trouver en particulier dans les cas qui font l'objet

de cette communication.

Les lésions les plus variées de l'oreille ou de ses annexes

peuvent déterminer des phénomènes de vertige. Contrairement à

ce qu'on pourrait croire, la plupart du temps elles ne siègent pas

dans l'oreille interne.

A la suite de nombreuses recherches anatomiques et cliniques

j'ai reconnu que, très souvent, les états vertigineux sont sous la

dépendance d'une lésion passée inaperçue jusqu'ici; la soudure de

la trompe d'Eustache à la paroi postérieure du naso-pharynx. J'ai.

observé aussi que la destruction de ces lésions amène la dispari-

tion, en général immédiate, de l'état vertigineux.

Il y a donc là un moyen précieux de diagnostic et de traitement

d'une catégorie importante d'états vertigineux.

D'autre part, dans plusieurs cas, j'ai rencontré une association

de cette maladie particulière à d'autres affections du système

nerveux (ictus cérébral, etc.) dont la symptomatologie moins

bruyante se trouvait par le fait masquée et dénaturée. Par le trai-

tement des symphyses salpyngo-pharyngiennes j'ai pu faire dispa-

raitre tout un ensemble de phénomènes surajoutés et rendre pos-

sible un diagnostic exact.

Etant donné cette notion nouvelle, je crois qu'on ne peut juger

avec certitude de l'origine réelle d'un état vertigineux et de sa

signification sans tenir compte de la possibilité de cette cause

particulière et sans l'éliminer d'abord par un traitement ap-

proprié.

282 SOCIÉTÉS SAVANTES.

Euphorie délirante des Phtisiques. Elude analomo-clinique.

M. E. DUPRÉ. (de Paris). L'état mental des tuberculeux

a déjà fait l'objet d'études nombreuses, mais presque uniquement

cliniques. J'apporte au Congrès l'histoire d'un cas dans lequel

l'observation- clinique de l'état mental ayant été suivie de l'étude

histologique de l'écorce, les relations anatomo-cliniques les plus

directes ont pu être établies entre les symptômes et les lésions.

Il s'agit, en résumé, d'un tuberculeux de trente-trois ans, atteint

de phtisie subaiguë, fébrile, avec infiltration bilatérale étendue,

et cavernulation rapide des sommets, lésions laryngées, cachexie

rapide, etc., mort trois mois après le début des accidents. Durant

touté l'évolution de sa maladie, le sujet, homme d'ailleurs cultivé

et assez intelligent, a présenté, constamment, et à un degré

extrême, les caractères d'ailleurs classiques de la mentalité des

phtisiques subaigus : euphorie, optimisme, inconscience de la

gravité de sa situation, illusions, projets, espoir ferme d'un avenir

facile et heureux, acceptation d'emblée des suggestions rassurantes

et des explications quelconques relatives à ses malaises, etc. Cet

état d'illusionisme euphorique se marque, comme on le sait, chez

ces malades, par le caractère souriant et parfois joyeux de la con-

versation, par l'éclat du regard, par une expression particulière de

béatitude répandue sur le visage, et l'on a souventinsisté sur le péni-

ble contraste qui existe entre les manifestations de cet état mental

et la douloureuse réalité des choses. Le malade meurt dans un

coma asphyxique graduel et rapide. Nécropsie : lésions pulmo-

naires d'infiltration caséeuse classiques. 'Foie et reins gras.

Rate énorme. Coeur mou et petit. Cerveau 1.220 grammes. Aucune

trace de tuberculose méningo-encéphalique.

Léger élargissement des sillons; ventricules un peu dilatés.

Les méninges molles sont manifestement épaissies au niveau des

lobes frontaux, sans adhérences, sans lésions tuberculeuses :

l'épaississement prédomine en certains îlots, d'aspect blanchâtre.

L'examen histologique, pratiqué par le professeur Nissl lui-

même, révèle les altérations suivantes : Méningite hyperplastique,

collogène, simple, ni exsudative, ni inflammatoire, ni spécifique :

aucune diapédèse, à peine quelques rares macrophages clairsemés,

au milieu de la stratification ondulée des fibrilles pie-mériennes.

Légère prolifération de l'endothélium vasculaire, avec pigmenta-

tion jaune disséminée autour de certaines cellules de cet endothe-

lium : quelques cellules en bâtonnet (Stâbchenzellen) au voisinage

immédiat des capillaires. Prolifération à peine marquée de la

névroglie. Lésions profondes et diffuses des cellules nerveuses

frontales : disparition du protaplasme avec dégénérescence en

anneaux épineux, à la périphérie du corps cellulaire : excen-

. BIBLIOGRAPHIE. 283

tricité du noyau, déformation du nucléole, qui se rapetisse et dont

la membrane est plissée. Vacuolisation de certaines cellules pyra-

midales. Dégénération hyaline de la plupart des capillaires. Dans

la substance blanche, lésions de début de putréfaction : lacunes

avec dissolution de la substance médullaire, quelques traînées de

streptobacilles le long de certains vaisseaux. Les mêmes lésions,

mais beaucoup plus discrètes et moins avancées, s'observent dans

les régions moyennes et postérieures du cortex. A ce niveau

simple vascularisation de la pie-mère.

Ces lésions, d'ordre toxique, de date récente, nullement subor-

données d'ailleurs, aux altérations vasculaires, qui sont minimes,

ni aux lésions méningées, qui sont plus anciennes et d'une autre

nature, doivent être dans leur siège cellulaire et leur localisation

frontale, rapprochées du syndrome psychopatique offert par le

malade et invoquées pour l'expliquer. Elles n'existent pas à ce

degré et sous cette forme chez les tuberculeux qui n'ont pas pré-

senté d'état mental particulier (Nissl.)

Cet état mental, d'ordre démentiel, se rapproche par ses carac-

tères des manifestations psychiques des cancéreux morphinisés.

chez lesquels on peut observer la même euphorie optimiste, le

même illusionisme délirant, grâce aux doses élevées et rapidement

croissantes du poison. Cette analogie, entre ces deux états psycho-

pathiques démentiels subaigus chez des cachectiques, est un argu-

ment de plus pour rapporter à une intoxication l'euphorie déli-

rante des phtisiques. Cette intoxication a ses facteurs dans les

poisons bacillaires, l'insuffisance hépatorénale et l'anoxhémie

subaiguë.

Cette observation est intéressante parce qu'elle établit claire-

ment le substratum anatomique de l'état mental si spécial de cer-

tains phtisiques dans les lésions destructives des cellules du lobe

frontal, et parce qu'elle permet de rapporter ces lésions aux pro-

cessus de l'intoxication complexe dont l'organisme est le siège

dans la phtisie pulmonaire subaiguë.

En terminant ses travaux, le Congrès des médecins neu-

rologistes et aliénistes qui s'est tenu à Pau du ter au 7 août,

a décidé que le XV. Congrès se tiendrait en 1905 à Rennes,

sous la présidence du Dr Giraud (de Rouen).

Les questions choisies pour être l'objet de rapports sont

les suivantes : 1° De l'hypochondrie. Rapporteur : Pierre

Roy (de Paris) 2° Les névrites ascendantes. Rapporteur :

Sicard (de Paris) ; La úalnéothémpie dans les maladies

mentales. Rapporteur : Paiuias (d'Albi). ,

BIBLIOGRAPHIE.

I. L'Année psychologique, t. X, 1 vol. in-8° de 680 pages, 48 figures,

Paris, Masson, 1904.

Le tome X de l'Année psychologique vient de paraître à la librai-

rie Masson. Cette publication, bien connue en France et à l'étran-

ger, a été fondée par MM. Beaunis et Binet en 1894. C'est M. Binet,

le directeur du laboratoire de psychologie physiologique de la Sor-

bonne, qui en assume seul, depuis plusieurs années, la charge.

Les dix volumes parus représentent un vaste répertoire de tout ce

qui a été publié de bon et d'utile en psychologie.

On y trouve trois ordres de travaux : 1° des recherches origi-

nales sur la psychologie normale et pathologique ; 2° des comptes

rendus, analyses critiques et approfondies, des recherches les plus

importantes parues en tous pays ; 3° des tables bibliographiques

annuelles, dont chacune comprend environ 2.500 numéros, et in-

diquent tous les ouvrages intéressant non seulement la psycholo-

gie, mais l'anatomie, la psychologie du système nerveux, la patho-

logie nerveuse et mentale.

La composition de ces tables bibliographiques, qui sont admi-

rables de précision, et paraissent trois mois après l'année dont

elles rendent compte, est le résultat d'une collaboration interna-

tionale, dans laquelle l'Année psychologique représente la part de

la France. 1

Le nouveau volume de l'Année psychologique contient comme

mémoires originaux des études de Binet sur Paul Hervieu et sur

le contrôle de la graphologie, une curieuse série d'observations de

Lécaillon sur le sens maternel de l'araignée, une étude toute nou-

velle de Bourdon et Dide sur un cas d'amnésie continue, conte-

nant l'indication de' méthodes utiles pour la pathologie mentale,

et des articles de Larguier sur la mémoire, de Zwaardemaker sur

la sensibilité de l'oreille, de Michel sur Spencer et Renouvier.

Les rédacteurs de l'Année ont introduit dans ce même tome X

une innovation qui sera très goûtée ; c'est une série de revues an-

nuelles, sur des sciences voisines de la psychologie ; revues conte-

nant l'indication détaillée, avec figures, de tout ce qui a paru de

nouveau en 1904. L'histologie a été confiée à F. Henneguy, l'ana-

tomie des centres nerveux à Van Gehuchten, la physiologie du

système nerveux à Fredericq, la pathologie nerveuse et mentale

à Grasset, Pitres, Simon, l'anthropologie 3 Dénicher, la pédago-

gie à Demoor, la criminologie à Lacassagne, etc. Ces revues ont

chacune une moyenne de vingt pages, les noms des signataires

BIBLIOGRAPHIE. 285

répondent de leur valeur. Elles constituent une nouveauté biblio-

graphique, destinée à rendre les plus grands services aux méde-

cins. J. D.

IL Les enfants anormaux au point de vue mental ; leur traitement

et leur éducation ; par G. E. Shuttleworth, M. D. ; deuxième

édition, traduite par le Dr LEY, d'Anvers, vol. in-12 de 170 p.

Bruxelles, J. Lebègue et Cire, 1904.

Dans ce petit volume, le Dr G. E. Shuttleworth, le savant spé-

cialiste qui s'est fait en Angleterre l'avocat infatigable des enfants

anormaux, a résumé tout ce qui avait été tenté jusqu'ici pour

arriver à faire profiter les faibles d'esprit des progrès de la science

moderne. Après avoir rendu hommage aux premiers créateurs de

la méthode médico-pédagogique, aux Séguin, aux Saegert, aux

Güggenbuhl, il étudie rapidement l'organisation des établisse-

ments institués pour les enfants anormaux dans le Royaume-Uni,

les Etats-Unis et plusieurs pays européens.

Il tient à nous mettre en garde contre la confusion que fait

naître le terme de feeble-minded, indiquant en Amérique les idiots

de tous degrés, et ne désignant en Angleterre que les arriérés-

simples. L'auteur nous fait part des nouvelles créations organi-

sées à Londres pour cette dernière catégorie d'enfants, créations

qui ne sont encore en France qu'à l'état de projet lointain, malgré

la vigoureuse campagne menée par M. Bourneville depuis une

quinzaine d'années. x

Suit la classification pathologique des diverses formes de défec-

tuosité mentale, qui nous conduit à l'étiologie, au diagnostic et au

pronostic des divers cas d'idiotie et d'imbécillité.

Après avoir passé en revue les principales indications des traite-

ments général, médical et chirugical, nous arrivons au traitement

éducatif, que nous aurions voulu plus détaillé. Nous retrouvons

dans ce chapitre les mêmes principes, qui ont guidé Séguin pour

l'institution de son éducation physiologique et les mêmes procédés

employés dans le service du Dr Bourneville. Comme tous ceux qui

ont une réelle expérience des enfants idiots, le Dr Shuttleworth,

attribue à l'éducation manuelle et aux jeux une grande importance,

et dans ce chapitre, comme dans le suivant sur l'éducation morale,

tout décèle l'expérience éclairée d'un homme à qui une observation

constante et une pratique journalière ont permis de connaître à

fond les idiots.

Les dernières pages nous entretiennent des résultats et des

conclusions. Là sont effleurées d'importantes questions, telles que

le mariage et la séquestration permanente. L'auteur termine en

montrant la nécessité de suivre toute leur vie les anormaux qui

ont bénéficié du traitement éducatif, et l'obligation qui'incombe

286 BIBLIOGRAPHIE.

aux pouvoirs publics de prendre des dispositions en vue d'éduquer

les imbéciles de la classe pauvre.

C'est grâce au Dl' Ley (d'Anvers) que la 2e édition de l'oeuvre de

Shuttleworth pourra être connue en France. Peut-être qu'en lisant

cette consciencieuse traduction, les incrédules, qui refusent encore

leur confiance à la méthode médico-pédagogique, finiront par en

reconnaître la valeur, puisqu'elle est recommandée par un étran-

ger. J. BOYER.

VARIA.

-* Les Aliénés en LIBERTÉ.

Un fou furieux. Un Allemand du nom de Hermann Kremer

est devenu subitement fou sur un bateau parisien allant à Auteuil.

A un ponton, on voulut le faire descendre, mais il se mit à bous-

culer ceux qui l'entouraient et se jeta dans la Seine. Deux agents

de la brigade fluviale plongèrent aussitôt, et, après quelques

minutes de recherches, ils ramenaient sur la berge, à demi-

asphyxié, l'étranger, qu'ils transportèrent au poste de secours aux

noyés le plus proche ; là on parvint à le rappeler à la vite. - z

Kremer fut ensuite conduit au poste du quartier Saint-Merri, où

M. Lespine, commissaire de police, donna des ordres pour l'en-

voyer à l'infirmerie du Dépôt. Profitant d'un moment d'inattention

de ses gardiens, Kremer s'empara du sabre-baïonnette d'un agent

et attaqua furieusement les gardiens de la paix de service dans le

poste. Deux d'entre eux furent blessés grièvement par le fou

furieux, qu'on ne réussit à désarmer qu'avec peine.

Enfin, à onze heures et demie, six agents le conduisaient au

Dépôt. Près de la grille du Palais de Justice, Kremer, qui depuis

un moment paraissait calme, fut repris d'un accès de fureur. Il

terrassa les gardiens qui l'escortaient, sauta en bas du fiacre,

s'enfuit dans la direction de la Tour Saint-Jacques, renversant sur

son passage tous ceux qui tentaient de l'arrêter. Deux gardiens

de la paix de service rue de Rivoli réussirent à lui barrer le pas-

sage ; le dément changea alors de direction et alla se jeter, en

face du n° 1, rue Saint-Martin, sous les roués d'un omnibus qui

lui broyèrent la poitrine. Hermann Kremer a été transporté à

l'Hôtel-Dieu dans un élat désespéré. (L'Aurore, 26 juillet 1904).

On ne saurait trop recommander aux agents ou aux per-

sonnes intervenantes, en pareil cas, de ne pas avoir de

moments d'inattention, mais de ne pas perdre de vue, un

instant, le malade.

faits DIVERS. 287

Terrible LUTTE avec un FOU.

Le D Rorke, de Long-Island, un homme petit et mince, a été

affreusement maltraité par un forgeron devenu fou. Il s'était rendu

auprès de l'aliéné en compagnie du Dl' Mitchell. Celui-ci fut empoi-

gné par le fou et jeté dans la rue comme une balle. Le Dr liorlce,

malgré son infériorité physique, fit face au forgeron, qui avait

saisi un marteau, puis s'en était dessaisi. Mais le forcené se jeta

sur le médecin avec une violence inouïe et lui martela le visage à

coups de poing. Tandis que le Dr Rorke, subissait ce joli traite-

ment avec un sang-froid admirable, il parvint à tirer de sa poche

une seringue de Pravaz et en injecter le contenu de morphine sous

la peau du fou. L'effet désiré fut obtenu et l'aliéné se laissa

emmener sans résistance à l'asile. La conduite du Dr Rorke n'est-

elle pas admirable, réellement héroïque ? (Journal d'accouchement

du 7 août 1904.)

FAITS DIVERS-

Nécrologie. - M.' le De Ambroise-Eusèbe MORDRE, ex-médecin

en chef de l'asile des aliénés de la Sarthe, membre correspondant

de l'Académie de médecine depuis 1888, des Sociétés de Chirurgie,

médico-psychologique, etc., vient de mourir au Mans.

M. le Dur Mordret avait été reçu docteur en médecine en 1847 7

[Thèse : des hémorragies des fosses nasales, Paris, n° 161]. On con-

nait de lui un Traité pratique des affections nerveuses et anémiques

considérées dans les rapports qu'elles ont entre elles. Paris, 1861,

488 p. ; un rapport sur le service de santé dans la ville du Mans du

19 août 1870 au 20 avril 1871, adressé au ministre de la Guerre.

Le Mans, 1871, 81, 51 p., Monnoyer ; des considérations sur la seit-

sibilité dans ses rapports avec les phénomènes psychiques. (Fragment

d'une élude sur la folie). Paris, 1879, 64 p. ; un mémoire récom-

pensé par l'Académie de Médecine : De la folie à double forme.

Circulaire alterne. Paris, 1883, 225 p.,· etc., etc. 11 laisse un fils,

médecin au Mans, ancien interne des hôpitaux de Paris. (Gazette

Médicale de Paris, 25 juin 1904.)

Asiles d'aliénés. - Mouvements de mai, juin et juillet 1904. -

M. le Dr Boiteux, médecin en chef à l'asile de Clermont (Oise),

promu à la classe exceptionnelle du cadre. M. GEX, directeur

à Saint-Robert (Isère), promu à la classe exceptionnelle du cadre,

- 11. le Dr RAVIAriT, médecin adjoint à Armentières (Nord), promu

à la classe exceptionnelle. M. le De DIDE, médecin adjoint à

Rennes, promu à la classe exceptionnelle du cadre. M. le Dr

z88 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

MASSELON, médecin adjoint à Pau, nommé médecin adjoint à Cler-

mont (Oise), en remplacement de M. le Dr Coupon, mis en dispo-

nibilité sur sa demande. - M. le Dr Truelle, médecin adjoint à

Dun-sur-Auron (Cher), promu à la classe exceptionnelle du cadre.

M. le Dr AuELInE, médecin adjoint à Dun-sur-Auron (Cher),

promu à la 1 re classe du cadre. M. le Dr LcIIIrFE, médecin ad-

joint à Quimper, nommé à Pau. M. le Dr Becte, médecin ad-

joint à Bailleul, promu à la classe exceptionnelle du cadre. M.

le Dr Trénel, médecin adjoint, nommé médecin en chef de la

Colonie familiale d'Ainay-le-Château (Allier). M. le D LwoFe,

médecin en chef à Ainay-Ie-Château, nommé directeur médecin de

l'asile d'aliénés de Moisselles (Seine-et-Oise).

Tentative DE SUICIDE d'un adolescent. Un désespéré de qua-

torze a ? M.Le jeune de quatorze ans, demeurant chez ses

parents, boulevard de la Liberté, à la suite d'une réprimande a

tenté de se suicider. Sa mère s'étant aperçue de sa disparition,

monta au grenier, où elle trouva son fils qui venait de se pendre.

Elle arriva heureusement assez tôt pour couper la corde. L'enfant

a été rappelé à la vie. (Progrès de Lyon, 31 juillet 1904).

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

ANGLADE et Jacquin. Rapport médical de l'asile public d'aliénés de

Bordeaux pour l'année 1903. 1 vol. iii-8- de 64 pages. Imp. Gounouilhou.

Bordeaux, 1904.

8B[NET (A.). - L'Année psychologique : 100 année, 1904. 1 vol iii-8- de

680 pages, avec figures dans le texte. Prix : 15 francs. Masson, éditeur,

120, boulevard Samt-Germain.

. 110LLARITS (J.). Clironischer Gelenksrleeumatismus und spondylose

-rlzizomélique. In-8o de 28 pages. lilinische therapeut. Wochenschrift.

Ween.

' MULLER (Edouard). Die multiple sidérose des Gehirns Rucken,

marks. 1 vol. grand in-8, de 394 pages, avec 5 planches hors texte.

Gustav-Fischer, Verlagsbuchhandtung Jena. Prix : 10 marks.

Movimiento de la casa de orales de Santiago en el âno 1903. 1 vol.

in-8- de 286 pages. Imprenta Universitaria, à Santiago. 1904.

Dr ROUSSEL (Albéric). - La Frazzlclinisalion' réhabilitée, 1 volume

- in-18 jésus de 310 pages, avec 12 figures intercalées dans le texte.

Prix : 4 francs. 0. Doin, éditeur.

UGOLOTTI (Ferdinando). Sclerosi cérébrale tuberosa associl1¡la aspe-

ciali attemzio1l'Î di allri organi. In-8° de 30 pages. Riv. di pathologia

nervosa.

Le rédacteur-gérant : Bourneville.

Evreux, Ch. Hh'B8EY, imp. - 8-1904.

Vol. XVIII..Octobre 1904. N° 106.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

CLINIQUE MENTALE.

Obsessions et vie sexuelle;

P\n LE D' E. MARANDON DE MONTYEL,

Médecin en chef de Ville-Evrard.

M. Freud, dans deux mémoires, s'est efforcé de donner à

l'obsession une étiologie toute spéciale. D'après lui, elle

aurait pour cause principale l'accumulation incomplète-

ment satisfaite de l'excitation génésique, tels que le coït

réservé des ménages désireux de ne pas augmenter le

nombre de leurs enfants ou de n'en pas avoir; les caresses

frustes des fiancés : l'impuissance relative des maris dont les

érections insuffisantes ou les éjaculations trop rapides ne

permettent pas à la femme d'aboutir au spasme voluptueux;

l'abstinence provoquée par le veuvage; la suppression

brusque d'habitudes anciennes de masturbation. Il conclut

de ses observations que la 'névrose anxieuse est d'origine

sexuelle et que son étiologie spécifique est l'accumulation

de la tension génésique provoquée par l'abstinence ou l'irri-

tation génésique fruste.

Deux ouvrages viennent de paraître chez nous sur les

obsessions, écrits par des hommes éminents et très au cou-

rant de la question; l'un est signé de MM. Pitres et Régis,

l'autre de M. Pierre Janet. En outre, M. IIartemberg et

M. Gilbert Ballet, au Congrès de Grenoble, ont donné leur avis

sur la doctrine de M. Freud. M. Arnaud n'en parle pas

dans l'intéressant chapitre qu'il a écrit pour le Traité de

pathologie mentale de M. Gilbert Ballet. Il m'a semblé

qu'il ne serait peut-être pas dépourvu d'intérêt de rapporter

ce que ces distingués observateurs ont constaté dans notre

Archives, 2' série, t. XVIII. 19

290 . CLINIQUE mentale.

pays, et de faire connaître ce 'que nous-même nous avons vu

durant une longue pratique de bientôt vingt-neuf ans.

MM. Pitres et Régis ne croient pas à cette origine exclusi-

vement sexuelle des états obsédants. D'ailleurs, les faits par

eux observés leur ont démontré que les obsessions débutent

dans plus de la moitié des cas dès l'enfance ou à l'adoles-

cence, avant la fin de la quinzième année, à un âge par con-

séquent où les pratiques signalées par M. Freud comme la

cause spécifique du mal ne sauraient être incriminées.

D'après M. Pierre Janet, une observation désintéressée

montre que la proposition de M. Freud, qui parait au pre-

mier abord singulière, contient certainement une part de

vérité; car si on peut avoir des renseignements, des aveux

sur la vie sexuelle des malades, on voit qu'elle est presque

toujours troublée, et qu'elle est bien troublée, en effet,

dans le sens qu'indique l'auteur. Il admet donc les faits

signalés par M. Freud, mais il est disposé à les interpréter

de toute autre façon. Les constatations ne lui ont pas

montré que les circonstances extérieures aient toujours

déterminé chez ses malades cette insuffisance du coït au

moment de leurs accès; bien plus, il a eu des aveux signifi-

catifs lui démontrant qu'ils avaient à leur disposition les

moyens d'une satisfaction largement suffisante. Il croit que

ces insuffisances de l'émotion sexuelle ne sont qu'une mani-

festation, un cas particulier de leur insuffisance psycholo-

gique. C'est parce que ces personnes, dit-il, deviennent de

plus en plus incapables de pousser un phénomène psycho-

logique jusqu'à son terme, qu'elles s'arrêtent à moitié

chemin dans cette émotion comme dans les autres. En con-

séquence, il ne croit pas qu'il y ait lieu de faire jouer dans

cette maladie, un rôle spécial aux phénomènes sexuels qui

n'auraient qu'une influence déprimante s'ajoutant simple-

ment aux autres.

Disons aussi qu'au Congrès de Grenoble de 1902, M. Freud

a trouvé deux contradicteurs et pas un défenseur. M. Har-

temberg, qui accepte pourtant la névrose d'angoisse de ce

médecin et juge sa thèse parfaitement légitime, a ajouté

qu'en revanche, il ne pouvait pas accepter avec lui l'étiologie

exclusivement sexuelle de celle-ci et la considérer comme

provoquée toujours^par une détente insuffisante de l'exci-

tation génitale, car, malgré les interrogatoires les plus

OBSESSIONS ET VIE SEXUELLE. 291

insistants, il n'a pas réussi à découvrir toujours chez ses

malades cette cause étiologique qu'il reconnaît n'être pas

rare, mais qui est loin d'être constante. Egalement, M. Gil-

bert Ballet a déclaré qu'il ne pouvait s'associer à la ma-

nière de voir de M. Freud, relativement au rôle que jouerait

la privation des satisfactions sexuelles dans la genèse du

syndrome. Pour son compte du moins, il n'a jamais relevé

une semblable étiologie. , .

Ce que j'ai constaté ne me permet pas non plus d'ac-

cepter l'opinion de M. Freud, pas même appliquée aux seuls

dégénérés, car j'ai connu de nombreux obsédés qui, à

aucun moment, ni avant, ni durant leur maladie, n'avaient

souffert d'une accumulation incomplètement satisfaite de

l'excitation génésique. Par les confidences de leurs femmes

ou de leurs maîtresses, aussi bien que par les leurs qu'elles

confirmaient d'ailleurs, j'ai su qu'ils coïtaient plutôt trop

souvent, que le coït était complet, exécuté sans précaution

pour entraver la fécondation; n'empêche qu'ils étaient bel

et bien obsédés. Par contre, je me suis assuré que la copu-

lation même fréquente et complète, mais anormalement

pratiquée, ou bien le spasme voluptueux obtenu à l'aide de

manoeuvres anormales, avaient une influence considérable.

Parmi les faits que j'ai observés, il en est trois surtout qui

établissent sans conteste que ces pratiques que j'indique ne

sont pas seulement capables d'aggraver le mal existant,

mais de faire apparaître, à un âge déjà avancé, chez des

prédisposés héréditaires, -des obsessions qui jusqu'alors

n'avaient jamais existé. Ces trois observations méritent

d'être rapportées, car elles sont instructives; la mère n'en

conseillera certes pas la lecture à sa fille, je le reconnais et

je ne la lui conseillerai pas à elle-même, mais n'a-t-on pas

dit que la science comme le feu purifiait ce qu'elle touchait,

et puis, j'écris dans un journal scientifique et mon mémoire

n'est destiné ni à corrompre la jeunesse ni à chatouiller les

vieux marcheurs. Honni soit donc qui mal y pense.

OBSERVATION I. - M. X.... quarante-quatre ans, célibataire,

docteur en droit, hérédité maternelle. Développement normal,

rougeole comme seule maladie infectieuse ; de brillantes facultés

intellectuelles. Le début de l'excitation génitale a été précoce.

L'enfant fut placé à onze ans dans une institution de prêtres où

les punitions corporelles étaient en honneur, mais son père avait

292 CLINIQUE mentale.

défendu de les lui appliquer. Au premier camarade fouetté en sa

présence, il éprouva un plaisir jusqu'alors inconnu, sentit sa verge

se raidir et regretta vivement de n'être pas à la place de la vic-

time.'Rentré chez lui, il organisa avec ses soeurs un jeu d'école où

le martinet jouait un grand rôle. Il faisait un élève coupable que

l'ainée, feignait de fouetter en sa qualité de maîtresse de la pen-

sion. L'érection se reproduisit immédiatement, mais l'enfant était

si inconscient de sa signification qu'il se déboutonna, aussitôt la

mère mit fin au jeu et défendit de le recommencer.

. Toujours hanté de son désir d'être frappé sur les fesses, X...

trouva autre chose. Il proposa à plusieurs de ses petits camarades

de se poursuivre et celui qui se laissait prendre, recevait de vigou-

reuses tapes sur le derrière. Il s'arrangeait toujours pour être pris,

car s'il avait plaisir à recevoir des fessées, il n'en avait pas à en

donner. Tous les jours ou à peu près, il se livra à ce plaisir. Au

bout de quelque temps, il n'eut plus besoin de ces artifices pour

amener l'érection ; il lui suffisait de se figurer qu'il était fouetté

pour la produire. ,

Son désir de l'être s'accrut encore, et il commit exprès de graves

manquements à la discipline dans l'espoir qu'on passerait outre à

la défense de son père et qu'on lui administrerait la punition cor-

porelle tant souhaitée. Il n'en fut rien et il s'en désola. Pour se

consoler, il prenait un vif plaisir à toucher le martinet, surtout

quand il venait d'être utilisé. En caresser les tranches lui faisaient

alors passer des frissons dans le corps.

Durant deux ans, la situation resta telle, sans qu'aucun élément

sexuel intervint. Seulement, à treize ans, l'attrait de l'autre sexe

débuta, et X... se sentit attiré vers une jeune femme, aide-cuisi-

nière de la pension, qui avait un enfant de six ans qu'elle corri-

geait assez souvent. Il sembla à X... qu'être fouetté ainsi par elle

serait le suprême bonheur. Il se mit alors à lui faire mille niches

dans l'espoir de la pousser à bout et de recevoir d'elle une correc-

tion, il arriva à ses fins; un jour, elle perdit, en effet, patience,

saisit l'enfant qui s'empressa de n'opposer aucune résistance, et

lui administra deux coups de martinet. Mais elle s'arrêta, car au

lieu des cris qu'elle attendait, elle ne fut pas peu surprise de sentir

le petit lui passer les bras autour de la taille et se pâmer. Il avait

eu son premier spasme voluptueux.

Peu après, X... fut changé de collège et placé comme pension-

naire dans une autre institution où les punitions corporelles étaient

absolument interdites. Là un camarade l'initia à l'onanisme. Il

venait d'avoir quatorze ans. Cette pratique et surtout je crois,

l'absence de tout spectacle de fustigation, modifièrent ses disposi-

tions ; il ne pensa plus qu'à de rares intervalles à être fustigé.

Mais il prit goût par contre à la masturbation.

X... avons-nous dit, était doué d'une intelligence supérieure.

OBSESSIONS ET VIE SEXUELLE. 293

Toutefois, à côté de ses brillantes facultés intellectuelles, existait

une émotivité anormale. Il était très timide et très superstitieux;

puis hyant ouï parler des maladies vénériennes, il en eut une vraie

phobie. Celle-ci, jointe à sa timidité, furent cause qu'il continua

à se masturber encore assez .souvent.'durant ses années d'études

à la faculté, d'autant plus que doué d'un appétit génital notable,

il était pauvre et n'avait guère d'argent pour ses menus plaisirs. Il

pensait de moins en moins au plaisir d'être fouetté.

Reçu docteur en droit, il acquit vite une bonne situation, put

s'offiir des maîtresses et cessa de se masturber ; l'attrait de la fus-

tigation avait disparu. A vingt-sept ans, il contracta une blennor-

rhagie, qui fut bien douloureuse et se compliqua d'une cystite du

col. Il en fut très affecté, et repris de sa phobie des maladies véné-

riennes. Il resta près d'un an avant de trouver une femme qui lui

parut offrir toutes garanties, et pendant ce temps, il retomba dans

la masturbation. Quand il se décida à coïter, à son grand étonne-

ment, il se trouva impuissant. Il fut navré et convaincu qu'il res-

terait toujours tel. A la deuxième tentative avec la même femme,

la même impuissance se reproduisit tout d'abord, mais toutefois

elle ne persista pas, et il retrouva assez vite, toute son ardeur

habituelle. Il attribua, avec raison à l'onanisme sa déconfiture et

s'en abstint désormais. Il s'en trouva bien, car dans ses rappro-

chements consécutifs avec sa maitresse, il n'eut plus aucune dé-

faillance. Il avait recouvré toute sa confiance et toute sa vigueur.

Néanmoins, il souffrait, car il ne pouvait posséder celle-ci qu'à des

intervalles assez espacés et il était obligé de lutter pour ne pas .

retomber dans ses mauvaises habitudes. Il résolut alors d'avoir

une seconde maîtresse, de possession plus facile et finit par la

trouver ; mais quand il la posséda pour la première fois, il eut

une vive appréhension et de nouveau fut impuissant,. cependant

comme avec l'autre, l'habitude ramena la virilité.

Néanmoins, à partir de ce moment, X... perdit toute confiance

et eut une obsession génitale avec angoisse. Ses relations sexuelles

furent empoisonnées. En allant au rendez-vous, il était anxieux,

son coeur battait et il avait des tremblements. Il redoutait d'être

impuissant; l'érection se produisait-elle, il craignait de la perdre

et s'empressait d'en profiter; même durant le coït, tourmenté de

la crainte de ne pas achever, il avait hâte d'arriver au but. Inutile

, de dire que plus d'une fois, ce qu'il redoutait survenait et qu'il en

résultait une aggravation de son obsession.

X... se résigna à rester fidèle, n'osant risquer de nouvelles

mésaventures, d'autant plus qu'avec le temps, il reprit peu à peu

confiance et son obsession s'atténua au point de ne plus guère le

tourmenter. Son appétit génital était amplement satisfait ; il ne se

masturbait plus et ne pensait plus du tout au martinet.

Il en fut ainsi pendant cinq ans. A trente-deux ans, X... dut

294 , CLINIQUE mentale. -

changer de résidence, et se séparer de ses deux maîtresses dont

aucune ne voulut le suivre. Il se trouva donc dans l'obligation,

pour ne pas retomber dans l'onanisme, de nouer des relations

avec une femme nouvelle. L'obsession revint dans toute son in-

tensité avec son cortège d'angoisses, de palpitations cardiaques,

de tremblements et de sueurs froides. Durant toute la première

nuit, le malheureux fut complètement impuissant, mais comme

précédemment, la virilité revint avec l'habitude, toutefois l'idée

obsédante persista à un degré encore plus accusé qu'avec les deux

précédentes maîtresses. X... était, avons-nous dit, superstitieux

dès son enfance : il eut alors la hantise de certaines circonstances

qui lui portaient malheur dans ses relations sexuelles, tels le ven-

dredi et le 13 du mois, d'autres au contraire, heureuses, comme

de prendre par la droite pour se rendre chez son amie et d'entrer

chez elle du pied droit. Néanmoins, il fut plus souvent heureux

que malheureux dans ses rapprochements avec celle-ci, surtout

après un certain temps.

Il lui resta fidèle sept ans, après lesquels nouveau changement

de résidence, encore avec refus de le suivre et nouvelle obligation

d'une autre liaison. Le malheureux X... repassa par les mêmes

transes et les mêmes angoisses, et l'obsession persista encore plus

accusée qu'avec la précédente maîtresse, en outre, ses supersti-

tions s'accrurent en nombre et en intensité. -

Quoi qu'il en soit, il cultivait cette nouvelle liaison depuis cinq

ans et s'en était encore assez bien habitué, quand sa maîtresse

contracta une bionchite qui l'obligea à aller passer l'hiver dans sa

famille à Montpellier. X... resté seul ne se sentit pas le courage

de connaître une autre femme ; il préféra attendre le retour de sa

maîtresse, mais il avait trop compté sur ses forces et il se remit à

se toucher. A la réception de la lettre qui lui annonçait en mai le

retour de son amie, complètement rétablie, il fut saisi d'angoisse,

de palpitations de coeur, et de tremblements, et se sentit repris de

son obsession génitale. Il eut la conviction que c'était fini et que

jamais plus, il ne serait capable de coïter. En effet, c'est ce qui

arriva, et en outre, l'impuissance fut radicale, car maintenant,

quand il essayait de se livrer au plaisir solitaire, le librido étant

demeuré chez lui très ardent, l'obsession survenait et l'érection ne

se produisait pas davantage.

Ce ne fut pas tout. Lui racontant les incidents de son séjour

dans le Midi, sa maitresse lui narra qu'elle avait retrouvée bien

vieillie, mais toujours verte, l'institutrice chez laquelle elle avait

été placée en pension, et à qui sa mère bien à tort avait donné

plein pouvoir sur elle, car elle en avait bien abusé et elle lui fit

une description détaillée des corrections que celle-ci lui adminis-

trait pour la moindre peccadille, avec une serviette mouillée qu'elle

roulait et qu'elle transformait de cette façon en lanière. Ce malen-

OBSESSIONS ET VIE SEXUELLE. 295

contreux récit produisit sur l'infortuné X... une impression pro-

fonde et réveilla en lui plus violent encore qu'autrefois, son désir

éteint depuis si longtemps d'être fouetté, et il prit un plaisir infini

à faire répéter à son amie, les moindres détails des fessées reçues.

Un nouveau supplice commença pour X... Nuit et jour, il fut

obsédé du besoin de se faire fouetter par sa maitresse, mais près

d'elle, pris de honte, il n'osait le demander. Cette lutte angois-

sante, durait depuis quelques jours quand il aperçut un après-

midi dans le couloir qui conduisait aux water-closets de son

appartement, un martinet dont se servait son valet de chambre

pour battre les habits et qu'il avait suspendu à un clou. Il ne fut

plus maître de lui, et certainement, si sa maîtresse avait été là, il

n'aurait plus hésité à solliciter d'elle la fustigation. Il s'empara du

martinet et le porta dans sa chambre, mais il n'eut pas cette fois

le plaisir de se fouetter, car il lui suffit de se toucher les fesses avec

les branches de l'instrument pour amener éjaculation et spasme

voluptueux toujours sans érection.

Il remit le martinet en place et résolut de ne plus s'en servir. Le

lendemain, il recourut au procédé de la serviette mouillée, décrit

par sa maîtresse, car l'obsession de la fustigation était devenue

irrésistible. Ce fut pour lui une volupté de plonger celle-la dans

l'eau, de la tordre et de la rouler en lanière. Plus heureux que la

veille, il réussit ainsi à s'administrer une bonne fessée avant

d'amener l'éjaculation. Le plaisir goûté fut si vif qu'il ne put s'em-

pêcher de le rechercher par la suite deux ou trois fois par semaine

au moins.

Depuis deux mois, X... se livrait à cette flagellation voluptueuse,

quand un accident banal fit éclore une nouvelle obsession plus

gênante. Son habitation était située à l'extrémité d'une très longue

et très étroite avenue. Rentrant chez lui pour dîner, il fut effrayé

par un ivrogne qui tomba sur lui et le renversa à moitié. Il en fut

tout ému. Après son repas, il sortit de chez lui comme d'habitude;

à la perspective de l'avenue, il fut à son grand étonnement

angoissé, eut des tremblements dans les jambes et serait tombé

sans l'appui de sa canne. En longeant les grilles des villas, il se

sentit plus rassuré et put gagner la grande place qu'il traversa

sans la moindre hésitation, mais à l'entrée de la grande rue, très

longue et assez étroite, la même obsession le reprit, plus violente

encore avec en outre des palpitations cardiaques et de l'oppression

respiratoire. Il dut presque s'appuyer aux maisons pour arriver

jusqu'à son cercle. Il prit une voiture pour rentrer.

Le lendemain et les jours suivants, la même phobie angoissante

de toute voie droite et longue se reproduisit et cessait immédiate-

ment, si l'obsédé avait à côté de lui quelqu'un sur qui il pût

compter. Il dut se condamner à ne plus sortir seul. C'est alors que

je le vis et qu'avec une entière franchise sur mes questions, il me

296 CLINIQUE mentale.

fournit tous les détails que j'ai rapportés. Sachant qu'il y avait eu

des aliénés dans sa famille, il était alors obsédé par l'idée qu'il

devenait fou. Je le rassurai, et j'attribuai tous les phénomènes

présentés à l'usage qu'il faisait de la serviette mouillée. Je lui con-

seillai l'hydrothérapie, les exercices physiques, le bromure de

potassium et surtout une chasteté absolue.

Quinze jours de ce traitement suffirent à enrayer presque com-

plètement la phobie, mais si le libido était moins marqué, l'obses-

sion de la flagellation était aussi vive. Au bout d'un mois, dispari-

tion complète de la phobie, toutefois pas grande diminution de

l'obsession de la serviette mouillée; aussi la résistance devenait de

plus en plus pénible et partant de plus en plus difficile. Je restai

trois semaines sans revoir le malade. Quand il revint, il était dans

la prostration, il avait succombé et immédiatement la phobie était

revenue. Une action psychique avait aussi exercé sou influence,

car avant de sortir, il était convaincu qu'il ne pourrait pas des-

cendre seul l'avenue. Je constatai pour la première fois un profond

dégoût de la vie et quelques idées de suicide, n'ayant elles rien

d'impulsif, et inspirées par les tristesses d'une telle existence.

Pour les chasser, je promis une guérison complète. Je n'ai plus

revu X..., mais j'ai su quelques mois après qu'il s'était tué.

Voilà donc un cas où, à aucun moment avant le mal, le

sujet n'a souffert d'une accumulation incomplètement satis-

faite de l'excitation génésique. L'onanisme engendra l'im-

puissance par inhibition avec obsession génitale, puis la

flagellation voluptueuse, la phobie des voies longues et

droites. Bien plus, celle-ci au contraire disparut quand, sur

mes conseils, le sujet resta un certain temps continent, et

c'est alors qu'il souflrît seulement de la cause indiquée par

M. Freud, puisqu'il était obligé de lutter pour résister à son

besoin ardent de volupté, et il lui suffit de satisfaire ce

besoin par la flagellation pour ramener la phobie. Là, on

est plus en droit d'invoquer un excès qu'un manque de

satisfaction.

Observation II. M. Z..., trente-six ans, célibataire, fouction-

naire de l'Etat, est également un héréditaire vésanique. Son père

s'est suicidé sans motif connu, probablement sous l'influence d'une

obsession; une soeur a eu une folie puerpérale dont elle a guéri;

un frère est assez faible d'esprit. Développement régulier, fièvre

typhoïde à douze ans, sans accidents cérébraux bien graves. Intel-

ligence ordinaire; L... a été reçu bachelier à dix-neuf ans, après

deux échecs. Il se touchait au collège, comme les camarades, dit-

il, mais depuis son baccalauréat,,il s'en est complètement abs-

OBSESSIONS ET VIE SEXUELLE. 297

tenu; il avait d'ailleurs une situation de fortune qui lui permettait

d'avoir des maîtresses et d'en changer souvent. Heureusement

pour lui, car il était atteint d'une anomalie génitale par laquelle,

bien que très porté aux plaisirs de l'amour, il était dans l'impossi-

bilité presque absolue d'avoir, même à plusieurs jours d'intervalle,

des rapports avec la même femme.

Au point de vue émotif, L... a été de tout temps un scrupuleux,

craignant toujours de n'avoir pas assez bien fait; recommençant

plusieurs fois les mêmes choses dans la crainte de s'attirer des

reproches. Si par hasard, il avait fauté sans le vouloir, il passait

par des désespoirs angoissants. Après son baccalauréat, il entra

dans une grande administration publique et sa manie des scru-

pules s'accrut encore. Il s'exagéra la responsabilité qui pesait sur

lui.

Dans la vie ordinaire, par un singulier contraste, il était noceur

et gai compagnon de plaisir. Ses scrupules ne le tourmentaient

guère qu'à son bureau. Il aimait aussi les plaisanteries elles bons

mots, et il crut en faire un qui lui suscita des ennuis et ne fut sans

doute pas sans influence sur les troubles psychiques, dont il souf-

frit par la suite. Parmi ses collègues d'administration, il s'en trou-

vait un qui avait le fétichisme des «grosses fesses de femmes et qui

ne s'en cachait pas. Il riait même des plaisanteries des camarades

qui prétendaient que sur les promenades, il prenait mesure de

celles-ci avec sa canne, et choisissait celle qui les avait les plus

fortes. Z... crut être spirituel en le dotant du sobriquet de métro-

cul, qui malheureusement eut un grand succès, car l'autre le prit

très mal. Il fit à Z... des scènes violentes, et sans l'intervention

de leurs amis communs, il l'aurait souffleté. Le scrupuleux Z... en

fut angoissé. Il ne se rencontrait pas avec ce collègue sans avoir

de la suffocation, des palpitations de coeur et des tremblements,

d'autant plus que l'offensé, malgré ses avances et ses excuses, lui

témoignait le plus profond mépris. Aussi fut-il heureux d'appren-

dre qu'un ami influent de sa famille, avait obtenu pour lui une

place à l'administration centrale, à Paris.

Z... était encore tourmenté des ennuis que lui avait suscités le

fétichisme de son camarade, quand il arriva dans la capitale qu'il

ne connaissait pas. Son protecteur le promena par la ville et le

conduisit au Salon qui venait d'ouvrir. A la sculpture il fut ébloui

des nudités qui s'offrirent à ses regards; il ne s'etait jamais occupé

d'art et de sa vie, n'avait mis les pieds dans un musée. La vue de

toutes ces statues de femmes nues, en très grand nombre cette

année-là, le fascina. Jusqu'alors, le visage chez celles-ci avait été

tout pour lui, jamais il n'avait prêté la moindre attention aux

formes du corps. Il découvrait comme un monde nouveau. Sa

curiosité fut plus particulièrement attirée sur la partie, objet de

la prédilection de son collègue dont le souvenir ne l'avait pas

298 CLINIQUE MENTALE.

quitté, et il comprit qu'il avait eu tort ; à son tour, il fut séduit,

Le lendemain et les jours suivants, il revint au Salon, entraîné

comme malgré lui à se repaître du même spectacle. Quand son

congé terminé, il dut rentrer dans son administration, ce fut toute

la journée une souffrance angoissante, jusqu'à l'heure où il put

aller passer quelques instants à la sculpture. Lui aussi désormais

avait le fétichisme des fesses. Il fit alors la connaissance d'une

femme qui mit à sa portée, la partie de son corps, objet de son

fétichisme ; et se livra à la succion buccale avec chatouillement

digital de l'anus et des bourses. Il prit un goût excessif aux ma-

noeuvres de sa aouvelle amie et contrairement à ce qui s'était tou-

jours produit jusqu'alors, au lieu de perdre son ardeur, celle-ci

s'accrut au contraire par la fréquentation. Il fit en conséquence

d'assez nombreux excès sans jamais varier le procédé.

Vite, son état nerveux habituel s'accrut dans de grandes pro-

portions. Son appétit diminua; il eut des maux de tête et des in-

somnies ; ses scrupules fonctionnels devinrent tels, qu'il n'arrivait

à terminer aucun travail. Il s'attira de ses chefs des reproches qui

achevèrent de l'angoisser, d'autant plus qu'ils lui conseillèrent, s'il

se sentait fatigué, de prendre un congé pour se reposer. Le soir

du jour où il reçut ce conseil de ses chefs, il lut dans les journaux,

le dramatique suicide d'une mère qui s'était asphyxiée avec ses

trois enfants. Bien souvent, auparavant, il avait eu occasion de

lire parmi les faits divers des gazettes, des accidents de ce genre,

sans en avoir été jamais ému. Il n'en fut pas de même cette fois.

La mort mystérieuse de son père lui revint en mémoire et pour la

première fois, il se sentit attiré vers le suicide. La nuit, il ne dor-

mait pas, obsédé et angoissé par cette idée contre laquelle il luttait ' ''

avec force, car en somme, il était du nombre des heureux.

Cette obsession eut du moins l'avantage de calmer ses scrupules.

Pour la chasser, il se mit avec ardeur au travail, dès son arrivée

au bureau et n'eut presqu'aucune hésitation. La journée se passa

relativement bien. Ses occupations, la présence des gens, firent

trêve à son mal. Mais le soir, quand il fut seul chez lui, l'obsession

revint aiguë et il passa encore presque toute la nuit à lutter ; seu-

lement sur le matin, épuisé, il s'endormit. Comme la précédente,

la journée ne fut pas mauvaise et il constata plus accusée encore

que la veille. la disparition de ses scrupules et de ses hésitations

au bureau. Redoutant de rester seul, il prit le regrettable parti de

coucher désormais tous les soirs chez sa maitresse, sans lui en

fournir le véritable motif.

Il en résulta, forcément une augmentation des excès sexuels

contre nature. L'obsession s'accentua davantage. Dans la rue, L...

se sentit entraîné à se jeter sous les pas des chevaux ou sous les

roues des tramways; ou dans la Seine en traversant les ponts;

quand il passait devant un armurier ou devant un coutellier, il

OBSESSIONS ET VIE SEXUELLE. 299

avait peine à s'empêcher d'entrer pour acheter une arme et s'en

servir contre lui-même. Il n'osa plus sortir seul, sentant faiblir de

plus en plus sa force de résistance, et prit le parti de se faire

accompagner partout par son valet de chambre en lui prétextant

que depuis quelques jours, il avait des vertiges et craignait de

tomber.

C'est alors que je le vis et qu'il me raconta en détails sa vie.

Comme pour le précédent malade, je tàchai de le rassurer en

mettant tout sur le compte de ses excès génitaux contre nature,

et en lui donnant l'assurance formelle qu'en y renonçant complè-

tement, la guérison était certaine et serait assez proche. Je l'enga-

geai en outre à faire lui aussi de l'hydrothérapie, des exercices

physiques et à prendre du bromure de potassium, car j'ai eu

l'occasion assez souvent, de constater une action favorable de ce

traitement sur les obsédés.

En quelques semaines, une amélioration considérable avait été

obtenue. L... m'apprit alors qu'il quittait Paris. Il en avait assez

de la capitale. Il avait sollicité et obtenu du Ministère, l'autorisa-

tion de permuter avec un collègue de province. Deux mois après,

il m'écrivit pour m'apprendre son complet rétablissement. Je n'ai

'plus eu de ses nouvelles.

De même que X..., à aucun moment, Z... n'a souffert

d'une accumulation incomplètement satisfaite de l'excita-

tion génésique. Mais, dans ce cas, nous voyons une obses-

sion apparaître peu après des habitudes sexuelles contre

nature, s'aggraver avec celles-ci et disparaître par leur ces-

sation.

Observation 111. - Le troisième malade, de nationalité étrangère.

Y..., trente-trois ans, docteur en médecine, célibataire, est comme

les deux autres, un héréditaire vésanique. Il'est fils unique d'une

mère aliénée. Développement normal, toutefois incontinence noc-

turne d'urine jusqu'à treize ans. Comme maladies infectieuses, la

rougeole, les oreillons et la varicelle sans accidents cérébraux.

Très brillantes facultés intellectuelles. Au point de vue émotif, de

tout temps, hypochondrie et sensiblerie excessive. De très bonne

heure, Y... a été porté à observer ses sensations coenesthésiques. à

epier le fonctionnement de ses organes et à s'exagérer ses

moindres indispositions. C'est même cette tendance de son esprit

qui le porta vers les études médicales ; il était entrainé vers ce qui

l'effrayait. Enfin jeune encore, il donna des preuves d'une sensible-

rie excessive qu'il n'a jamais perdue, il dit lui-même en riant,

qu'il a toujours la larme à l'oeil.

De treize à dix-sept ans, il a habité avec son père, fonctionnaire

de la Marine, une colonie intertropicale. Dès son arrivée sous les

300 CLINIQUE MENTALE.

tropiques, son incontinence nocturne d'urine cessa du jour au

lendemain, sous l'influence de la honte. Se trouvant en pays

inconnu, il rougit d'une telle infirmité à son âge ; mais assez

rapidement apparut un autre trouble urinaire qui vite, prit un

grand développement et qui avec l'âge s'est plutôt accru. Y... a

l'urèthre pudique ; non seulement, il ne peut pas uriner dans un

endroit public, mais même dans un cabinet, la porte fermée, la

miction est impossible s'il sait que quelqu'un attend qu'il ait fini

pour prendre sa place. Cette fonction a donc été toujours pour lui

un tourment et une grande gêne. J'appelle l'attention sur ce trouble

physiologique, car on verra plus loin, le rôle considérable qu'il a

joué dans la genèse de l'obsession. r

Sous les tropiques, toutes les femmes du peuple, négresses, mu-

lâtresses, cabresses, marchent pieds nus et en jupes courtes. C'est

dans ce pays et avec sous les yeux cette pittoresque nudité, que la

puberté évolua chez Y... A mesure que celle-ci s'accentuait, il

prenait un plaisir plus vif à ce spectacle; ses premières vagues

aspirations sexuelles s'y associèrent ; aussi à quatorze ans, il

avait contracté pour le garder toujours, le fétichisme des pieds

nus de femmes. Tous ceux que du matin au soir, il avait l'occa-

sion de rencontrer par les rues, ne produisaient pas sur lui la

même impression; les petits et mignons, les maigres et effilés,

n'avaient pour lui. aucun attrait, ceux qu'il aurait voulu prendre

dans ses mains pour les caresser et porter à ses lèvres pour les

couvrir de baisers, étaient les pieds un peu forts, gras, bien cam-

brés, à peau mince et lisse, avec les orteils un peu gros, trapus et

très réguliers; la moindre déviation le dégoûtait. Ce sont encore

ces pieds-là qui seuls le fascinent.

Quand sur son chemin, il rencontrait une femme avec des pieds

répondant à son idéal, il la suivait, s'informait d'elle et l'inscrivait

sur un carnet afin de pouvoir la retrouver et goûter le plaisir de

contempler ceux-ci. Il avait quinze ans depuis un mois, lorsqu'il fit

ses premières armes avec la femme de chambre de sa famille ;

jeune fille de couleur dont les pieds réunissaient toutes les qualités

demandées par lui. Y... renonça de ce jour à l'onanisme, auquel

il s'était livré quelques fois en pensant à l'objet de son fétichisme,

et jamais depuis, il ne s'est touché.

La première fois qu'il partagea la couche de la jeune servante,

il désirait surtout ses pieds, qu'il trouvait adorables, mais igno-

rant la passion de son amant, elle offrit tout d'elle excepté ceux-

ci, et au dernier moment un sentiment de honte retint Y... 11 se

rendit compte que la jeune fille ne comprendrait rien à cette pré-

férence et rirait certainement de lui. Il s'abstint et se contenta en

la possédant, d'avoir présent à l'esprit, l'image de ses pieds.

Par la suite, il en fut toujours de même, non seulement avec

elle, mais encore avec toutes les autres. Le fait est intéressant à

OBSESSIONS ET VIE SEXUELLE. 301 L

signaler, car d'ordinaire, le fétichiste pour obtenir l'érection et le

spasme voluptueux, est obligé d'utiliser l'objet de son fétichisme.

Chez Y..., retenu par la honte, l'image mentale a toujours suffi ;

cependant il faut ajouter que s'il n'osait pas, de peur de prêter à

rire à ses maîtresses, prendre leurs pieds dans ses mains et à plus

forte raison les porter a ses lèvres, au lit, avec les siens, il les

caressait sans cesse de façon à en avoir au moins le contact. Même

pendant le coït, il les cherchait et s'efforçait de les toucher, afin

de faciliter l'éjaculation qui sans cela était très longue à se pro-

duire, longue au point de fatiguer la femme. En outre de son

fétichisme, Y... a, en effet, un retard considérable de l'éjaculation

qui était gênant, avant qu'il eût constaté l'action favorable du

contact des pieds de la femme.

Rentré dans son pays à dix-sept ans, Y... passa ses examens

probatoires avec mention et fit de brillantes études médicales. Il

n'ent plus le plaisir de contempler par les rues des pieds nus de

femmes, et il ignorait complètement comment les avait celles qu'il

choisissait. Ce fut un grand ennui, mais son fétichisme loin de

diminuer, s'accrut; toutefois, il eut de dures déceptions, car il fut

navré de constater qu'en Europe, presque toutes les femmes

avaient les pieds plus ou moins déformés par la chaussure. Il en

changea souvent dans l'espoir de trouver, et n'en rencontra que

peu répondant à peu près à l'idéal qu'il s'était formé sous les tro-

piques. Il eut la chance d'échapper à la syphilis, mais il contracta

quatre blennorrhagies qui, comme on le verra bientôt, ont pris

une part considérable dans la genèse de l'obsession.

Il en fut ainsi jusqu'à trente-trois ans. Il fit alors la connais-

sance d'une fille chez laquelle il eut pour la première fois, le

bonheur depuis son retour dans son pays de trouver des pieds

répondant complètement à son idéal. Celle-ci très intelligente, ne

tarda pas à s'apercevoir de l'étrange fascination qu'exerçaient ceux-

ci sur son amant, et à apprécier tous ses efforts pour y résister.

Elle fit d'abord exprès de multiplier les occasions de les placer

sous ses yeux et quand elle jugea le moment venu, elle demanda

un soir à Y... de lui enlever ses bottines et ses bas, puis comme

c'était en hiver, elle prétendit avoir froid aux pieds et le pria de

les prendre dans ses mains pour les réchauffer. Enfin tandis qu'il

se pâmait à leur contact, elle les porta à ses lèvres, Y... les couvrit

de baisers et immédiatement l'éjaculation se produisit. La honte

qui jusqu'alors l'avait retenu avec toutes les femmes, disparut ; à

partir de ce moment, il ne rougit plus de caresser, d'embrasser et

de lécher les pieds de sa maîtresse. A noter que l'éjaculation spon-

tanée du premier soir ne se reproduisit plus.

Mais la maîtresse de Y... chercha et trouva une position, qui

permettait à son amant de coïter tandis qu'elle lui chatouillait les

bourses et qu'il couvrait de baisers et léchait un de ses pieds. Y...

302 CLINIQUE MENTALE.

ne songea plus à changer, et durant trois mois, il n'eut de rela-

tions sexuelles que de cette façon. A partir du second mois, il

constata une aggravation de ses troubles nerveux. Il fut plus

enclin à se croire sous le coup de quelque grave maladie ; sa sen-

siblerie déjà grande s'accrut encore ainsi que la pudicité de son

urèthre, mais il n'y prêta pas trop grande attention. Vers la lin du

troisième mois, il se rencontra un soir au café avec un officier de

ses amis qu'il était très étonné de ne plus y trouver depuis déjà

un certain temps. Celui-ci lui raconta qu'une unique blennorrhagie

contractée en Algérie, lui avait laissé un rétrécissement qui avait

fini par nécessiter une opération dont il avait failli mourir.

Y... ne put s'empêcher de penser que ses quatre blennorrhagies

seraient bien capables de lui occasionner le mal pour lequel une

seule avait suffi, et il en fut d'autant plus frappé que depuis un

mois, avons-nous dit,- la pudicité de son urèthre, avait encore

augmenté ; toutefois, chez lui, seul, il n'avait jamais éprouve la

moindre gêne et son jet était d'un volume absolument normal. La

nuit, il eut un cauchemar dans lequel atteint d'un rétrécissement

excessif et opéré, il succombait à des complications urémiques et,

angoissé, il se réveilla en sursaut, inondé de sueurs, au moment

même où il allait mourir ; sans y attacher d'importance il se ren-

dormit.

Le lendemain, au réveil, il eut un retard insignifiant de la mic-

tion ; immédiatement il fut pris d'angoisse avec palpitations de

coeur et tremblements, et l'idée s'implanta, obsédante, dans son

esprit qu'il avait un rétrécissement et qu'il ne parviendrait pas à

uriner. Médecin, il apprécia toute l'absurdité d'une telle obsession,

mais il ne réussit pas à chasser l'anxiété ; néanmoins, presque

tout de suite, la miction s'effectua et fut normale. Un immense

soulagement avec sentiment de bien-être s'en suivit.

Y... rattacha ces phénomènes à son cauchemar de la nuit et

crut tout d'abord en être quitte. Pas du tout, l'obsession resta

implantée dans son cerveau et à mesure que s'écoulaient les heu-

res, et qu'approchait le moment d'une nouvelle miction, il se

sentait devenir de plus en plus inquiet et quand il fallut satisfaire

l'envie, la même angoisse obsédante reparut avec soulagement et

bien-être consécutifs comme le matin. L'après-midi et le soir

mêmes manifestations. Toujours il avait l'habitude d'uriner en se

couchant et seulement le matin au réveil ; cette nuit-là, il fut forcé

de se lever vers trois heures, obsédé et angoissé par l'idée que

s'il attendait jusqu'au lendemain matin, il n'urinerait certaine-

ment pas. Et il en fut toujours ainsi depuis.

Dans la matinée, il prit un grand bain tiède de deux heures.

dans l'espoir de calmer cet éréthisme et il n'en retira aucun béné-

fice. Bien qu'il fut certain qu'il ne pouvait pas avoir acquis en

quelques heures un rétrécissement blennorrhagique capable de

OBSESSIONS ET VIE SEXUELLE. 303

gêner sa miction et que d'un autre côté, l'obsession vaincue par la

force du besoin, il urinait normalement, il voulut se fournir à lui-

même la preuve matérielle de la liberté de son canal. Il alla sous

un prétexte quelconque se faire sonder par son collègue de la

clinique chirurgicale qui lui passa la plus grosse sonde sans diffi-

culté.

De cette consultation, résulta une aggravation. L'obsession du

rétrécissement disparut, mais elle fut remplacée par l'obsession

d'un spasme nerveux qui angoissa davantage le malade. Un rétré-

cissement s'opère, se dit-il, mais un spasme nerveux résiste sou-

vent à toute médication, aboutit parfois à la rétention complète et

peut même ne pas laisser passer la sondé, nécessitant ainsi la

ponction de la vessie. Il eut alors une nouvelle obsession, celle de

la lolie de sa mère, car il appréciait à leur juste valeur, toutes les

conjectures extravagantes de son cerveau malade. L'angoisse

devint excessive. La miction s'en ressentit; il survint du bégaie-

ment uréthral ; Y... s'arrêtait plusieurs fois en urinant et le jet

finit par devenir filiforme ; il mit un temps assez considérable à

vider sa vessie. La situation fut dès lors gênante et pénible.

Il se décida à venir à Paris avec sa maîtresse car son obsession

n'avait porté aucune atteinte à sa virilité et il me fut adressé par

un ami commun établi dans sa ville. Parlant très correctement le

français, il me raconta toute sa vie. Comme il me parut très

tourmenté par l'obsession de la folie de sa mère, je commençai

par lui mettre sous les yeux, l'opinion de M. Magnan, que l'obses-

sion n'évolue pas, ne se transforme pas, n'aboutit jamais au délire

proprement dit. En outre, je lui affirmai que jamais l'obsession

uréthrale n'entraine la rétention même imcomplète et que, tou-

jours, plus ou moins lentement, la vessie se vide tout à fait. Il en

éprouva un grand soulagement ; car ses deux plus grandes inquié-

tudes étaient détruites.

En outre, je ne lui cachai pas qu'à mon avis, sa façon de coiter

depuis trois mois était, la cause principale de l'obsession, laquelle

avait pris la forme uréthraie, à cause de son urètthre pudique

depuis la puberté, et avait engendré de si grandes inquiétudes s

par suite de son tempérament de tout temps hypochondriaque.

Hydrothérapie et coit normal modéré, voilà, lui dis-je, toute ma

prescription. Y... fut désolé et après quelques minutes de réfle-

xion, il me déclara franchement que puisqu'il était maintenant

certain de. ne jamais devenir fou et de ne jamais avoir besoin de

se faire ponctionner la vessie, il aimait encore mieux garder son

obsession uréthrale que de se priver des pieds de sa maîtresse. Je

lui proposai alors de venir voir avec moi un des grands spécialistes

de Paris, à son choix, il refusa, me disant que bien que peu versé

dans la connaissance des maladies mentales et nerveuses, qu'il

ne pratiquait pas, sa clientèle étant exclusivement de Médecine

304 CLINIQUE MENTALE.

ordinaire, il avait compris mes raisons, qu'il réfléchirait et qu'il

reviendrait me voir sous peu.

Il revint, en effet, deux semaines après et il était tout joyeux. Il

m'apprit que l'hydrothérapie, la double assurance que je lui avais

donnée et aussi la vie agréable de Paris, avaient amélioré son

obsession au point qu'elle était supportable et qu'il croyait

n'avoir pas besoin de se priver complètement des pieds de sa mai-

tresse. Je me suis habitué, conclut-il, en souriant, à ne pas pou-

voir pisser du tout dehors, j'espère m'habituer aussi à mal pisser

dedans. Je crus devoir le mettre en garde contre la possibilité d'un

retour offensif du mal, et d'une aggravation s'il continuait le

même coït.

Mais, j'acquis une fois de plus la preuve qu'il n'y a rien à obte-

nir des fétichistes. Cinq jours après il retourna dans son pays avec

sa maitresse, me promettant de correspondre avec moi.

Après trois mois, n'ayant pas reçu de nouvelles, j'écrivis à l'ami

commun pour en avoir, dans Je désir bien naturel de suivre un

cas si intéressant. Y... se décida alors à m'annoncer qu'il allait

de mieux en mieux et- qu'il espérait bientôt être complètement

guéri ; ajoutant qu'il avait été contraint par force majeure d'ap-

pliquer toute ma prescription, car peu après le retour, il avait été

abandonné par sa maîtresse que Paris avait séduite.

Voilà, par conséquent, un troisième cas où, à aucun

moment, le sujet n'a souffert de la cause indiquée par

M. Freud. Dans les deux précédents, l'éjaculation était

obtenue par des manoeuvres complètement anormales; la

flagellation fessière à l'aide de la serviette mouillée et la

succion buccale avec chatouillement de l'anus et des

bourses. Là, le coït était naturel, car il y avait pénétration

complète de la verge dans le vagin et émission du sperme

dans cette cavité, seulement il se compliquait d'une position

anormale permettant le chatouillement des bourses et la

satisfaction d'un fétichisme du pied nu. Cette fois encore, le

rapport de cause à effet semble établi par l'apparition de

l'obsession, consécutivement à ce coït bizarre et par sa dis-

parition presque complète après cessation de celui-ci.

M. Freud a, par conséquent, raison d'insister comme il le

fait sur la part considérable qui revient à la vie sexuelle

dans la genèse de l'obsession. Sa double erreur est de sou-

tenir que cette part est entière et'ensuite que c'est seule-

ment l'accumulation incomplètement satisfaite de l'excita-

tion génésique qui produit le mal. Nos trois observations

ASSOCIATIONS PSYCHIQUES ET ÉTATS MÉLANCOLIQUES. 305

démontrent que cette dernière assertion est contredite par

les faits. La première n'est pas moins erronée, et qui n'est

pas un prédisposé vésanique héréditaire, peut rester conti-

nent même en luttant contre Vénus toute entière, à sa proie

attachée, ou au contraire satisfaire largement ses-ardeurs

par les procédés les plus anormaux, s'il devient aliéné, il ne

sera pas un obsédé; il a, au contraire, les plus grandes

chances de le devenir, aussi bien et peut-être plus encore

dans le second cas que dans le premier, s'il a une tare fami-

liale.

La connaissance de la vie sexuelle de l'obsédé n'est donc

pas la satisfaction seulement d'une curiosité scientifique. Il

y a là une indication thérapeutique de tout premier ordre.

J'estime, en effet, que la connaissance complète de cette vie

est indispensable pour la rectifier si elle est anormale, et elle

l'est presque toujours d'une façon ou d'une autre, car il est

exceptionnel qu'elle soit normale chez le dégénéré. On

arrive vite d'ailleurs à en faire comprendre toute l'impor-

tance aux obsédés d'abord dont le trouble intellectuel est

conscient et ensuite à leurs compagnes, et ils ne cachent

rien.

PATHOLOGIE MENTALE

CLINIQUE PSYCHIATRIQUE DE l'Université DE MOSCOU.

Sur les associations psychiques obsédantes de

contraste dans les états mélancoliques.

Par le D' SERGE SOUKHANOFF,

Privat-docent de l'Université de Moscou.

L'organisation neuro-psychique particulière, s'exprimant

par l'apparition chez un individu donné de différents états

psychiques obsédants (idées, représentations, désirs, mou-

vements obsédants, etc.), peut se manifester d'une manière

différente; cela dépend, premièrement, du contenu des pro-

Archives, 2' série, t. XVIII. 20

306 . CLINIQUE MENTALE.

cessus obsédants; secondement, cela dépend aussi de la

profondeur de l'anomalie, dont il est question ici. Comme

nous avons déjà eu l'occasion de le dire plus d'une fois, les

cas les plus légers de la constitution idéo-obsessive s'expri-

ment dans l'existence d'un caractère scz·upulo-izzquiet. L'indi-

vidu possédant un tel caractère est très porté à s'inquiéter à

propos de bagatelles mêmes, peut longtemps penser à ces

dernières; en outre, un tel individu se diffère par un scru-

pule exagéré et une indécision relativement à ses actions et

à ses affaires; il n'est jamais sûr de ses forces, ni de la

régularité de ses décisions ; il est porté souvent à des

doutes, mais, en même temps, généralement il possède un

sens moral plus ou moins développé. C'est justement ce

caractère scrupulo-inquiet qui sert de base indispensable

pour les processus psychiques obsédants exprimés d'une

manière plus accusée, où se rapportent la psychopathie

idéo-obsessive et la psychose idéo-obsessive. Lorsque l'on

observe chez le malade une aggravation des états psychi-

ques obsédants, lorsqu'ils sont abondants et intenses, lors-

qu'ils rendent la conduite du malade irrégulière et le pri-

vent de la possibilité de s'occuper de quelque chose, alors

nous aurons devant nous un cas de psychose, où les états

psychiques obsédants font l'essentiel de la maladie, où ils

sont prédominants et où on ne peut parler d'aucun autre

trouble mental. Outre les états obsédants essentiels, exis-

tent des idées et des représentations obsédantes symptoma-,

tiques, accompagnant une autre organisation neuro-psychi-

que quelconque : par exemple, hystérique ou épileptique,

ou servant d'un des phénomènes accessoires de quelque

psychose (démence précoce, paralysie générale, etc.). La

constitution idéo-obsessive est très portée à se combiner

avec certains états psychopathiques ou nombreux, il est

vrai; chez les personnes souffrant d'états psychopathiques

obsédants se rencontre souvent une inclination à des accès

mélancoliques temporaires. L'évolution de la mélancolie

sur le terrain de la constitution idéo-obsessive donne un

tableau clinique particulier de mélancolie avec idées obses-

sives ; en ayant affaire à de pareils cas, nous avons pu

constater, en questionnant les malades eux-mêmes, qu'ils

avaient eu, encore auparavant, des idées obsessives; dans

certains cas de ce génie, c'est-à-dire dans la mélancolie

ASSOCIATIONS PSYCHIQUES ET ÉTATS MÉLANCOLIQUES. 307

avec états psychiques obsessifs, on pouvait noter dans

l'anamnèse des malades l'existence d'un caractère scrupulo-

inquiet et indécis, servant de manifestation la plus faible

de la constitution idéo-obsessive. La mélancolie s'étant

développée sur le terrain de la constitution que nous avons

en vue, favorise la manifestation plus marquée des états

psychiques obsédants ; parfois il arrive d'observer une com-

binaison particulière de l'état mélancolique très accusé

avec la constitution idéo-obsessive, lorsque chez le malade

prédominent les associations psychiques obsédantes de

contraste. Pour l'explication de notre manière de voir, nous

nous permettons de citer ici un cas s'y rapportant, où

encore avant l'apparition de la maladie on observait chez le

malade un caractère scrupulo-inquiet; les associations

pénibles obsédantes de contraste se sont manifestées chez un

jeune homme dans une des phases mélancoliques de la

psychose circulaire.

Malade, jeune homme, âgé de vingt-six-vingt-sept ans, souffre

d'une psychose circulaire; il a supporté plusieurs accès de manie,

parfois avec un haut degré d'excitation, avec délire et hallucina-

tions ; les accès duraient tantôt plusieurs mois, tantôt ils étaient

plus courts. Dans les intervalles entre les périodes de l'état

maniaque, parfois d'assez longue durée, le malade se trouvait dans

un état de légère dépression. Il se plaignait ordinairement d'une

excitation sexuelle et parfois de pollutions fréquentes. L'une des

périodes de l'état dépressif s'était manifestée dans une forme très

accentuée; un temps il y avait même trouble de conscience ; le

malade se trouvait dans un état de peur et d'inquiétude. Lorsque

la conscience s'éclaircit, se manifesta alors chez le malade un

symptomocomplexus psychique particulier, sur lequel nous nous

permettrons d'attirer l'attention ici. Le malade commence à dire

qu'il entend des paroles et des phrases d'un contenu obscène et

cynique; il les entend dans les bruits qui l'entourent, dans le bruit

des arbres et celui du vent; parfois il entend clairement les paroles

suivantes « Tu es un criminel », quelqu'un dit ces mots d'une voix

nasillarde; d'autres fois, il lui semblait entendre des fragments

de vers, dont le contenu ne le regardait pas et lui était indifférent.

Tantôt il eprouvait une sensation comme si sa langue, contre

sa volonté et son désir, prononçait des paroles et des phrases gros-

sières et indécentes; le malade s'inquiétait aussi beaucoup à propos

des idées sacrilèges, exprimées chez lui d'une manière très marquée*.

11 se plaignait de cela qu'il ne voulait nullement prononcer de telles,

paroles et de telles phrases qui contredisaient tout à. fait, sa.

308 CLINIQUE MENTALE.

manière de voir. Les idées obsessives sacrilèges et cyniques le

dominaient surtout pendant la prière. Assez souvent le malade

remarquait un désir obsédant de prononcer (pas haut, il est vrai),

des invectives et de gros mots contre ses parents et contre le méde-

cin qu'il connaissait déjà depuis longtemps; il comprenait très

bien lui-même que ces mots étaient très grossiers et très cyniques.

Le malade insistait sur ce que le désir obsédant de prononcer

ces paroles à l'adresse de ses parents ou des personnes qu'il esti-

mait, était exprimé d'une manière plus accentuée pendantles mou-

vements rapides ou pendant la promenade, lorsqu'il marchait

vite ; au contraire, les mouvements lents aidaient à l'affaiblisse-

ment de ce désir obsédant et de ces représentations obsédantes.

Si le malade, à l'aide de la prière, voulait chasser les pensées obs-

cènes et sacrilèges, alors parfois, en ce temps, il entendait comme

si quelqu'un lui disait : « Prie pour l'assassinat des étudiants, »

ou « Prie pour l'inceste », ou encore quelque chose dans ce genre.

Quelquefois le malade, à l'apparition de telles pensées ou de telles

hallucinations auditives, tâchait de se défendre, en ripostant par

les paroles suivantes : « Ce sont des bêtises, je ne le veux pas. »

Tantôt il s'imaginait qu'il avait violé une petite fille et que la police

venait pour le questionner, etc. : mais le malade ajoutait tout de

suite qu'il sait et qu'il comprend bien que cela n'a jamais été. En

général, il faut remarquer que le malade se rapporte d'une ma-

nière critique et qu'il a conscience des fausses sensations auditives

et dee idées obsédantes obscènes et sacrilèges qui ont été citées

plus haut. En outre, le malade se plaint que des illusions

visuelles l'inquiètent beaucoup; il en avait en quantité assez con-

sidérable, et ces illusions étaient parfois très nettes et distinctes,

mais, ordinairement, ces fausses représentations visuelles n'étaient

pas très nettes, le malade croyait voir les têtes, les parties du

corps, les yeux de quelqu'un de ses proches parents, par exemple de

la mère ou des frères, tantôt il lui semblait qu'il voyait le portrait

de son père défunt, en aspect d'un crâne avec des yeux; ces fausses

représentations visuelles pour la plupart étaient passagères, suc-

cédant l'une l'autre. Pendantle dîner, se représentaient au malade

les organes génitaux de ses parents; quelquefois il lui semblait

lorsqu'il prenait le pain dans la bouche, que ce n'était pas du

pain, mais, par exemple, l'oeil de sa mère ou de son frère ; et il se

sentait tellement, parfois, comme s'il mangeait effectivement les

yeux ou les organes génitaux de ses parents; pourtant, tout le

temps il comprenait qu'il n'y avait rien de tout cela en réalité et

que tout cela lui parait à cause de sa maladie. Parfois il voyait

d'une manière obsédante l'acte du coit; d'autres fois, il lui parais-

sait qu'il s'évacuait sur la tête de ses parents ou sur quelque chose

de saint, par exemple sur l'image d'une croix; tout cela le tour-

mentait beaucoup et souvent il tâchait de retenir ses excréments,

ASSOCIATIONS PSYCHIQUES ET ÉTATS MÉLANCOLIQUES. 309

quoi qu'il comprenait que tout cela lui semble à cause de sa ma-

ladie.

Le cas suscité présente un grand intérêt, selon notre avis.

Premièrement, chez notre malade on doit noter l'existence

d'un état de dépression, se combinant avec une masse de

représentations obsédantes et d'idées obsessives les plus

variables. La nomination de ces représentations et de ces

idées « obsédantes » est parfaitement juste et légitime ici,

car le malade comprenait très bien, du moins lorsque le

trouble de conscience temporaire s'était dissipé, toute l'ab-

surdité, toute l'ineptie de telles pensées et de telles repré-

sentations ; il savait qu'il est malade, priait de lui aider et

disait que tous ces mots obsédants, grossiers et obscènes le

vexaient, l'opprimaient, l'agitaient, contredisaient à sa

moralité et apparaissaient pour lui comme quelque chose

d'étranger, ne lui appartenant pas. Par conséquent, il y

avait ici de vraies idées et de vraies représentations obsé-

dantes. Secondement, par leur caractère les unes et les

autres étaient cyniques, obscènes, sacrilèges et grossières ;

dans le cas donné sautent aux yeux les associations obsé-

dantes des idées et des représentations de contraste ;

comme nous l'avons déjà vu plus haut, le malade lui-même

disait que pendant la prière les idées obscènes et indécentes

étaient plus nombreuses ; il remarquait lui-même que les

idées cyniques et obscènes se combinaient dans son esprit,

préférenciellement, avec les parents qu'il- aimait. Troisiè-

mement, il est intéressant de noter encore dans le cas

donné ce fait que les idées obsessives et les représentations

obsédantes s'entremêlaient avec les fausses perceptions des

organes sensoriels ; le malade avait encore en liaison avec

les idées et les représentations obsédantes des illusions et

des hallucinations visuelles et auditives ; c'est curieux de

noter que les illusions et les hallucinations du côté des

organes visuel et auditif se distinguaient aussi par un carac-

tère indécent, obscène et cynique. Ici on pouvait parler

quelquefois de cela que le malade avait des représentations

( obsédantes tellement nettes et intenses qu'elles se transfor-

maient en images hallucinatoires et illusoires, c'est-à-dire

qu'elles revêtaient un caractère sensoriel et se reproduisaient

extérieurement. Dans le cas donné, nous avons l'exemple

d'une forme hallucinatoire des obsessions morbides ; mais il

310 CLINIQUE MENTALE.

n'y avait point ici d'illusions ou d'hallucinations obsédantes;

que notre opinion n'est pas sans fondement, cela se voit,

entre autres, de ce fait que les représentations obsédantes

chez notre malade étaient très nettes et très intenses, et les

images illusoires et hallucinatoires, surtout les images

visuelles, ne l'étaient pas parfois ; le malade avait encore,

certes, de telles hallucinations, par exemple auditives qui

étaient en liaison avec son état mélancolique. Si dans ce cas

il aurait eu des hallucinations obsédante's, alors elles se

seraient distinguées par une plus grande netteté, par une

plus grande intensité que cela a eu lieu chez le malade

donné. Quatrièmement, il est indispensable d'examiner

encore le terrain sur lequel se sont manifestées ces associa-

tions psychiques obsédantes ; d'après notre avis, les états

psychiques obsédants se développent sur le terrain d'une

organisation neuro-psychique congénitale particulière,

lorsque existe la constitution idéo-obsessive. En question-

nant d'une manière plus détaillée le malade lui-même, nous

avons pu nous convaincre dans cela que son caractère se

différait par certaines particularités ; le malade, en somme,

était scrupuleux, indécis, enclin à des inquiétudes ; il n'était

pas toujours sûr de ses actions; il était timide, c'est-à-dire

qu'il possédait le caractère scrupulo-inquiet, que nous

envisageons comme forme la plus faible de la constitution

idéo-obsessive ; c'est donc justement cette organisation

fondamentale qui a servi de base et de terrain pour la mani-

festation des processus psychiques obsédants ; ces derniers

ont surnagé et se sont développés sous l'influence de l'état

mélancolique, qui, relativement à ces processus psychiques

obsédants, apparaît comme moment provocateur. Il est

intéressant que dans les états maniaques que le malade a

supporté il n'y avait point ni d'idées obsessives, ni des

représentations obsédantes; évidemment, l'état d'excitation

avec le cours exagéré des idées influait sur les états obsé-

dants d'une manière dépressive.

Dans le cas sus-cité le malade parle volontiers avec le

médecin de son humeur, de ses associations obsédantes de

contraste, des fausses perceptions du côté de ses organes des

sens; et comme, en outre, le malade était un homme intel-

ligent, habitué à l'auto-observation et à l'auto-analyse, cette

observation apparaît très instructive pour l'investigation de

ASSOCIATIONS PSYCHIQUES ET ÉTATS MÉLANCOLIQUES. 311

la question abordée par nous, à savoir, des associations

psychiques obsédantes de contraste dans les états mélanco-

liques. Bien des malades, chez qui on rencontre les symp-

tômes psychiques cliniques analogues, sont loin de vouloir

parler de si bonne volonté de leurs sensations morbides,

comme le faisait notre malade ; d'autres se gênent d'en parler,

car souvent les associations obsédantes de contraste sont

d'un contenu obscène, indécent et cynique. 1

Dans un cas,* observé à la clinique psychiatrique de

Moscou, les associations obsédantes de contraste, dont nous

parlons, se sont développées chez un malade, de quarante

ans, abusant des boissons fortes ; dans ce cas, après l'abus

de l'alcool, se développa d'une manière aiguë la psychose

mélancolique, en forme' de mélancolie alcoolique, qui,

comme ordinairement, dans, ce cas aussi, était accompa-

gnée d'hallucinations auditives d'un contenu désagréable;

pourtant, bientôt après le début de cette maladie appa-

rurent chez ce malade des idées d'un contenu obscène et

aussi d'autres associations de contraste, liées avec la repré-

sentation des aliments; la conscience du malade était bien

conservée, mais il ne parlait pas volontiers de ses idées

obscènes et indécentes. En questionnant le malade sur son

caractère d'avant, nous apprimes que dans ce cas de psy-

chose alcoolique, c'est-à-dire, de mélancolie alcoolique, le

malade avait aussi un caractère scrupulo-inquiet; il avait,

d'après notre avis, la forme légère de la constitution idéo-

obsessive, qui a servi de terrain pour la manifestation des

associations obsédantes (de contraste) dans l'état mélanco-

lique.

Et dans d'autres cas, s'y rapportant, c'est-à-dire, là, où

nous constatons dans l'état mélancolique des associations

psychiques obsédantes de contraste (des idées et des repré-

sentations obscènes etcyniqûes), en questionnant les malades

eux-mêmes, on parvient à trouver la confirmation de notre

supposition que- de pareilles associations obsédantes ont

leurs racines dans l'existence chez les malades de ce genre

d'un caractère scrupulo-inquiet, c'est-à-dire, dans l'existence

chez eux des états obsédants rudimentaires. Sans doute,

chez les malades de cette catégorie, encore avant la manifes-

tation d'une psychose définie, sont possibles aussi des repré-

sentations, des idées et des peurs obsédantes, exprimées

312 RECUEIL DE FAITS.

d'une manière plus ou moins accentuée, et non seulement le

seul caractère scrupulo-inquiet.

Nous nous permettons de faire les conclusions suivantes :

1. Dans certains cas d'états mélancoliques on observe des

associations obsédantes psychiques de contraste, exprimées

d'une manière très marquée; une telle connexion des symp-

tômes psychiques peut être rencontrée dans le cours de la

période mélancolique de la psychose circulaire, de même

que dans la mélancolie alcoolique; le plus souvent ce symp-

tôme complexus s'observe dans la mélancolie récidivante

avec états psychiques obsédants.

2. Dans les cas où existe la combinaison sus-indiquée des

phénomènes psychiques, on parvient à constater dans

l'anamnèse des malades la présence d'un caractère congéni-

tal scrupulo-inquiet, comme l'une des formes (la plus

légère) de la constitution idéo-obsessive.

3. Parfois dans la coexistence de l'état mélancolique et

des associations psychiques obsédantes de contraste la net-

teté et l'intensité des représentations obsédantes peut

atteindre à un tel degré, que ces dernières revêtent déjà une

coloration sensorielle et mènent à la formation d'une forme

hallucinatoire et illusoire des représentations obsédantes.

RECUEIL DE FAITS.

Des rapports de l'anesthésie avec les rêves et les

cauchemars chez une hystérique ; ;-

Par le Dr Etienne JOURDAN.

Marie-Louise P..., vingt ans, est une hystérique anesthésique

totale. Cette anesthésie a déterminé un accident qui attire immé-

diatement l'attention : ce sont des borborygmes qui se produisent

surtout dans les stations assise et debout, et pour lesquels la

famille, justement émue, s'est décidée à consulter. Mais il est un

autre phénomène qui bien que moins apparent présente cepen-

dant un grand intérêt, ce sont les troubles du sommeil. La nuit,

dès que la malade ferme les yeux, se produisent des rêves et des

L'ANESTHÉSIE AVEC LES RÊVES ET LES CAUCHEMARS. 313

cauchemars très pénibles. Ces rêves gravitent autour de la même

idée : peur de tomber, de s'étouffer. La malade se croit au bord

d'un précipice dans lequel e : le tombe ; elle marche dans un sen-

tier étroit bordé de grands murs qui vont en se resserrant et

l'étouffent ; elle est au bord de la mer et a peur de se noyer ; elle

est couchée et des fantômes se précipitent sur elle et l'étranglent.

Dans cet état, la malade gémit, pousse des cris d'effroi, se soulève

sur son lit, gesticule, s'agite jusqu'au moment où elle se réveille

ou plus exactement, ouvre les yeux ; alors tout disparait.

Ces cauchemars sont, pour ainsi dire, stéréotypés ; ils se produi-

sent dès que les yeux sont fermés et ne disparaissent que lorsque

les yeux se rouvrent. Mais il lui est impossible d'ouvrir elle-même

les yeux ce qu'elle traduit en disant qu'il faut qu'on la

réveille, qu;elle ne peut pas s'éveiller toute seule à moins que la

terreur trop forte ne lui fasse pousser de tels cris que ceux-ci la

réveillent. Une fois réveillée elle garde le souvenir de ses cauche-

mars, mais il est une chose dont elle ne peut se rendre compte, ce

sont les mouvements qu'elle fait. « Je suis horriblement mal dans

mes rêves et je suis d'autant plus effrayée que je ne puis me

réveiller parce que je ne puis faire un mouvement, je ne sens plus

mon corps, on dirait que je suis paralysée. »

Ces rêves ont ceci de caractéristique, c'est que la malade ne peut

d'elle-même ouvrir les yeux; elle sent qu'elle est réveillée, mais

elle ne sait pas où elle est; incapable d'un effort conscient elle

appelle à son aide et demande qu'on lui fasse ouvrir les yeux.

« Dès que mes yeux sont ouverts, je sais où je suis et alors je suis

bien. » Pour la réveiller, il faut agir d'une certaine manière : si on

s'approche d'elle brusquement, si on l'appelle un peu fort on ne z

fait qu'exagérer sa terreur, il faut l'appeler doucement et encore

mieux souffler sur ses yeux, elle les ouvre et tout est fini.

En présence de ces phénomènes et étant donné le diagnos-

tic, jepensais qu'il s'agissait là de somnambulisme spon'ané

comme on en rencontre assez souvent chez les hystériques.

Voulant m'en rendre compte je devais, en provoquant l'hyp-

nose, obtenir les mêmes phénomènes. Voici comment je pro-

cède : je ferme les yeux à la malade (ce qui m'est difficile

les paupières étant maintenues ouvertes par un véritable

spasme; dès que celui-ci est vaincu l'occlusion se maintient) s.

et lui ordonne de dormir. Elle me répond « je ne puis pas,

j'ai peur, je vais tomber, je m'étouffe, je suis mal » et tous

les phénomènes qui caractérisent son sommeil ordinaire,

et que j'ai décrits, se reproduisent. Il est impossible, dans

cet état, de faire une suggestion quelconque à la malade :

314 RECUEIL DE FAITS.

elle s'irrite, se débat, gémit, pousse des cris, se plaint jus',

qu'à ce que, cédant à sa prière, on lui fait ouvrir les yeux,

alors elle est bien et tout disparaît. On peut répéter la chose

à l'infini : les yeux fermés, les cauchemars apparaissent,

pour ainsi dire instantanément, les yeux ouverts ils dispa-

raissent. Demandez à la malade si réellement elle dort : «Je

ne sais pas, mais dès que j'ai les yeux fermés j'étouffe et

j'ai peur ». Ces deux sensations d'étouffement et de terreur,

sont typiques, elles forment, à elles seules, la base du cau-

chemar.

Est-ce bien là du somnambulisme ? Nous ne le croyons pas

et cela pour deux raisons : .

1° Cette malade, dès que ses yeux sont fermés, perd abso-

lument la notion de temps et d'espace : elle ne sait plus où

elle est, elle ne sait plus son âge, elle n'a plus aucune notion

sur son corps, elle ne sait plus où sont ses bras et ses jam-

bes, si elle est debout, assise ou couchée, elle est incapable

d'un effort physique ou intellectuel ; elle croit tout ce qu'on

lui dit parce que « ce doit être puisque vous le dites.... mais

faites-moi ouvrir les yeux et alors je saurais ». Demandez

lui si elle dort « je suis éveillée, mais je suis mal parce que

je n'y vois pas ». Faites-là marcher et fermez-lui les yeux ou

plus simplement empèchez-là de voir ses jambes, elle s'ar-

rête et ne peut tenir debout. Demandez-lui où elle est et fer-

mez-lui les yeux elle ne saura plus. En sorte que par cet acte

simple, l'occlusion des yeux, on arrête sa vie tant physique

que psychique. Dans cet état elle n'obéit à aucune sugges-

tion, ou, si elle y obéit, c'est que « je suis forcé de croire

ce que vous me dites parce que je n'y vois pas ; faites-moi

ouvrir les yeux et alors je me rendrais compte ».

2° Si on détermine l'hypnose par fixation du regard, ce

qui est facile, on obtient alors toutes les réactions qu'on

obtient dans cet état, mais il est un point très important

pour ce qui nous occupe, c'est que, dans ce somnambulisme

provoqué, bien que les yeux soient fermés, la malade ne pré-

sente pas ces frayeurs et ces angoisses qui apparaissent lors-

qu'on se borne simplement à faire l'occlusion des yeux. Dans

ce dernier cas le sujet est absolument rebelle, il se débat,

crie, se plaint, demande instamment à ce qu'on lui ouvre les

yeux. Dans le premier cas, au contraire, il est calme, obéit

passivement aux suggestions qu'on lui fait et ne demande

L'ANESTllESOE AVEC LES RÊVES ET LES CAUCHEMARS. 315 â

pas à ouvrir les yeux ; si on les lui fait ouvrir il ne se rend

pas compte du lieu où il se trouve, ne reconnaît pas les per-

sonnes qui l'entourent, continue à obéir aux suggestions ;

il ne retourne à son état normal que si on le réveille et

alors il ne garde aucun souvenir de ce qui s'est passé.

Les rêves que nous avons décrits ne sont donc le fait ni

du sommeil normal ni du sommeil hypnotique, ils sont étroi-

tement liés à l'anesthésie. En effet, nous l'avons dit, cette

malade est anesthésique totale, elle n'a conservé aucun mode

de sa sensibilité tant externe qu'interne, une seule fonction

lui reste à peu près normale, la vue. Elle n'a de notion de

temps et d'espace que parce qu'elle y voit : elle ne vit que

par un sens, la vue ; celle-ci disparue elle perd toute notion

et croit qu'elle va mourir parce que « je n'y vois plus, je ne

saispas où je suis, je ne sens plus rien, je tombe, je m'étouffe,

je vais mourir ». Lés yeux fermés elle est incapable d'une

pensée, d'un mouvement conscient : elle peut étendre ou plier

un membre, elle peut se soulever sur son lit mais sans s'en

rendre compte, sans le savoir ; on dirait que les connexions

cérébro-bulbaires et cérébro-spinales sont abolies, elle en est

réduite aux réflexes élémentaires. Et c'est parcequ'elle n'a

plus aucune perception consciente tant externe qu'interne

qu'elle ne sait plus ce qu'elle fait, qu'elle croit ne plus exis-

ter. Les rêves ne sont que le résultat de cette, absence de

perception. A l'état normal, la sensation de bien-être est

déterminée par l'équilibre, l'harmonie des fondions organi-

ques ; que cet équilibre soit détruit et deux cas se présen-

tent : ou bien le sujet est éveillé et alors il à la perception

nette, consciente de l'anomalie d'une fonction, il souffre et

peut localiser sa souffrance ; ou bien il dort et alors il ne

peut avoir qu'une perception obscure, subconsciente de sa

souffrance ; des associations plus ou moins bizarres se for-

ment et le résultat en est un cauchemar plus ou moins vio-

lent. Tout le monde connaît les cauchemars liés aux troubles

de la digestion, aux troubles cardiaques, aux troubles intes-

tinaux... chez notre malade il ne se passe pas autre chose

avec cette différence cependant qu'elle ne dort pas.. Il n'y a

qu'une chose qui différencie son état de pseudo-veille de son

pseudo-sommeil c'est, dans' un cas, les yeux ouverts, dans

l'autre, les yeux fermés ; mais dans ces deux états les trou-

bles qu'elle présente sont identiques c'est-à-dire qu'elle est

316 RECUEIL DE FAITS.

toujours anesthésique et que pas plus dans un cas que dans

l'autre elle n'a de perceptions nettes des fonctions qui s'ac-

complissent. Ce qui, à première vue, peut tromper c'est que,

lorsqu'elle* a les yeux ouverts, grâce aux points de repère

qu'elle peut établir, elle semble avoir conscience de ses actes

et partant de vivre ; que la vue vienne à lui manquer, les

points de repère disparaissant de ce fait, elle perd conscience,

elle ne sait plus si elle vit; chez elle tout ce réduit donc à un

sens, à une perception unique, la perception visuelle. Il n'y

a donc pas, à proprement parler, veille ou sommeil, il y a un

engourdissement des centres corticaux et c'est à cet état que

il. Sollier a donné le nom de vigilambulisme, le différenciant

ainsi et du sommeil normal et du sommeil hypnotique.

Ceci étant, comment interpréter les cauchemars que notre

malade présente dès que ses yeux sont fermés ? Par l'anes-

thésie. Nous avons dit que ces cauchemars étaient constitués

par un même sentiment, la peur de tomber, la crainte d'é-

touffer. Or cette malade a perdu sa sensibilité cutanée, mus-

culaire, osseuse de sorte qu'elle n'a plus aucune perception

périphérique : ne sentant plus son corps elle éprouve cette

sensation de chute que chacun a éprouvé au moins une fois

dans la période hypnagogique. N'ayant plus aucune percep-

tion de ses poumons puisqu'elle ne sent pas l'air y pénétrer

« ça s'arrête au fond de la gorge et il ne peut plus descendre.

on dirait que c'est bouché » elle croit s'étouffer. Et comme

on ne tombe et on ne s'étouffe pas sans raison, elle associe

-ses sensations qui ne sont pas, à proprement dit, des sensa-

tions, mais l'interprétation de sensations absentes qui de-

vraient normalement exister, aux causes ordinaires de la

chute ou de l'étouffement d'où les précipices, les murs qui

l'écrasent, les fantômes qui l'étranglent, l'eau qui la noie. Et

- ces phénomènes entrainent avec eux les réactions ordinaires

qui sont la terreur, ici rendue plus intense par ce fait que la

malade, du fait de son anesthésie générale, est incapable,

consciemment, de faire un effort pour se soustraire à ces cau-

ses de mort. Elle ne peut sortir de cet état qu'en ouvrantles

yeux, elle a alors la preuve visuelle qu'elle n'était que le

jouet d'un rêve; mais, pour cela, elle ne sent pas mieux,

elle constate simplement, de visu, l'absence des causes qui

l'effrayaient et avec elles disparaissent toutes les conceptions

subjectives auxquelles elles avaient donné lieu.

L'ANESTHÉSIE AVEC LES RÊVES ET LES CAUCHEMARS. 317

Reste à expliquer un fait qui pourrait militer en faveur

d'un sommeil hypnotique : l'impossibilité de la malade à

ouvrir spontanément ses yeux. Ici encore c'est l'anesthésie

qui nous donnera la clef du phénomène. De par la perte du

sens musculaire, le tonus est modifié, il y a hypotonicité

musculaire. Si on dit à la malade de raidir un bras ou

une jambe, le temps mis à l'exécution de ce mouvement est

beaucoup plus long qu'à l'état normal. De plus ce membre

se raidit d'une façon spasmodique s'accompagnant d'un cer-

tain degré de contracture qu'il est difficile de vaincre, ce qui

étonne étant donné le peu de résistance ordinaire de la malade.

De même lorsque le membre fléchit ou mieux revient à son

état de repos, la flaccidité musculaire est exagérée et rappelle

la paralysie. Il ne se passe pas autre chose pour les paupières.

Ouvertes elles sont maintenues dans cet état par un vérita-

ble spasme au point que la malade elle-même lorsqu'elle

veut dormir, ce qui pour elle revient à fermer les yeux, est

obligée de mettre sa tête basse, de se couvrir de couvertures

et elle n'arrive à les maintenir fermées qu'après plusieurs

essais. Il en est de même lorsqu'on veut baisser les paupières

de la malade ; si on ne les maintient pas fermés quelques

instants, elles se relèvent immédiatement d'un mouvement

automatique ; de même lorsque les paupières sont baissées

il faut les maintenir ouvertes quelques instants si on ne veut

pas les voir se baisser aussitôt. C'est bien là un phénomène

qui tient bien plutôt à la modification du tonus qu'à un état

psychique spécial caractéristique du somnambulisme.

Nous voyons donc que chez le malade dont nous donnons

l'observation, les phénomènes nocturnes que l'on observe

peuvent en imposer, au premier abord, pour du somnambu-

lisme spontané : mais si on les analyse bien on voit que ceux-

ci sont sous la dépendance la plus étroite des troubles de la

sensibilité, troubles qui déterminent un état spécial, état de

défiscience psychique et somatique qui ne peut être rattaché

ni au sommeil normal ni au sommeil hypnotique et que

M. Sollier a différencié en lui donnant le nom de vigilambu-

lisme. Il est un phénomène primordial dans l'hystérie, c'est

l'anesthésie : . c'est elle qui domine tous les phénomènes

observés dans cette névrose et qui les détermine. Le somnam-

bulisme peut s'observer dans l'hystérie, il peut être provo-

qué plus facilement que dans d'autres états par suite de l'ins-

318 ' RECUEIL D'E FAITS.

tabilité psychique de ces malades, mais il n'en est pas moins

un état différent de l'hystérie, et n'a avec elle aucune rela-

tion de cause à effet. L'hystérie est un terrain admirablement

préparé pour l'hypnose, ce qui ne veut pas dire qu'hystérie

et somnambulisme sont des manifestations identiques d'un

même trouble des centres nerveux : tous les somnambules

ne sont pas des hystériques et tous les hystériques ne sont

pas somnambules. C'est là d'ailleurs une question sur laquelle

nous ne voulons pas nous appesantir; tout ce que nous ten-

dons à faire c'est de justifier notre conception des rapports

de l'anesthésie avec les cauchemars que nous avons obser-

vés. Et ce qui nous prouve, et cela il nous semble, d'une

façon décisive, l'exactitude de ce que nous avançons, c'est

que l'intencité de ces cauchemars varie avec l'anesthésie. En

effet, resensibilisant notre malade par la méthode de M. Sol-

lier, la sensibilité tend à reparaître mais d'une façon encore

très instable. Je fais mes séances le soir, or, depuis quelques

jours, les cauchemars qui se produisent invariablement

toutes les nuits diminuent d'intensité et même disparaissent.

Mais l'anesthésie revient rapidement de sorte que si une

séance ne peut avoir lieu, la nuit suivante est agitée par les

cauchemars que j'ai signalés. Et, je tiens à le dire, je ne fais

aucune suggestion à la malade. C'est donc bien l'anesthésie

qui. par ses variations détermine et règle les rêves que j'ai

décrits 1.

De sorte que, en résumé, nous croyons avoir le droit de

dire que les phénomènes psychiques observés chez notre

malade, ne sont ni des manifestations somnambuliques ni

des rêves liés au sommeil normal, mais des manifestations

d'un état psychique spécial créé de toute pièce par l'anes-

thésie.

' Actuellement cette malade est très améliorée : la sensibilité. sauf

quelques points hyperesthésiques est normale. Elle n'en reste pas moins

hypnotisable et depuis le retour de la sensibilité je n'ai plus observé ni

dans le sommeil normal ni dans- le sommeil hypnotique les rêves que

j'ai signalés.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIQUES.

XXXVIII. Remarques critiques relatives au mémoire de Biels-

chowsky intitulé : Diplopie monoculaire sans causes physiques,

et considérations sur la vision des strabiques ; par E. STOncH.

(Ceatral-Llatt f. Nervenheilh. XXIV. N. F. XII. 1901.)

L'auteur reprend l'observation parue dans les A l'chiv f.Ophthalmo-

log. 1. XLVI, p. 143. Il s'agit d'un jeune homme de dix-huit ans qui

louchait depuis son jeune âge de l'oeil gauche, astliénopique,. en

dedans, mais possédait une vision binoculaire passable. On est

obligé de lui énucléer. l'oeil droit. Quand dix-huit jours aptes l'opé-

ration, on l'examine, il dit voir double de l'oeil gauche qui lui

reste : à gauche et un peu au-dessous de l'objet qu'il fixe, il voit

un fantôme moins net. Pour fixer ce fantôme, son oeil exécute un

déplacement de 5° environ, et à ce moment l'objet vu gagne en net-

teté. Lui fait-on fixer l'image de la flamme dans l'opbthalmoscope,

on constate, au moment où on l'invite à regarder le fantôme de

cette flamme, que la macula' se place du côté de la tempe. Hering

a établi qu'il n'y avait pas, en l'espèce, de cause matérielle à la

genèse de deux images rétiniennes, que la diplopie tenait à un

dédoublement de la pupille ou à une modification saccadée des

coefficients de réfrangibilité des milieux de l'oeil.

M. Storch pense qu'on est obligé d'admettre que l'élément de la

vision en perspective ne se confond pas avec l'élément sentant de

la rétine, qu'il a encore un autre facteur. L'oeil qui louche a une

macula physiologique à lui adaptée à l'appréciation de la pers-

pective sous la direction de la macula de l'oeil sain. Il a pour ainsi

dire deux centres de perception de l'espace : .le sien, celui des

adaptations originelles, et celui que lui a imposé l'oeil normal.

Tant que ce dernier lui imposait de faire attention à ses propres

images, et lui apprenait d'autres rapports, les adaptations origi-

nelles demeuraient inconscientes. Le jour où l'oeil normal a été

enlevé, celles-ci ont repris leur empire..

Il reste à expliquer comment chaque valeur de perspective pou-

vait être associée à une sensation lumineuse. L'histologie moderne

nous a appris que l'excitation la plus limitée de la rétine, se trans-

mettant jusqu'à l'écorce du lobe occipital, doit se diffuser sur un

grand espace, peut-être même se répandre à tout le compartiment

cortical. On ne peut guère ad1lJ.e.ttr¡¡ que l'hypothèse d'une cime

320 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

d'ondes en un point déterminé de l'écorce. Il est évident que cette

cime doit être aiguë quand elle émane de l'excitation de la macula

anatomique, mousse quand elle émane de l'excitation de la macula

physiologique, acquise. On peut ainsi concevoir que, au moment

où la région de l'écorce pseudomaculaire est excitée, la région

corticale de l'endroit de la rétine qui préside à la perspective de

l'image-fantôme, possède aussi assez d'énergie pour animer d'une

sensation lumineuse cette perspective dépourvue de vie par elle-

même. L'endroit de la rétine en rapport avec la pseudomacula est

symétrique à la macula anatomique.

Ce qui donne à cette explication une grande valeur, c'est que

l'image naturelle, émanant de l'image dioptrique sur la rétine,

présentait les phénomènes du' contraste simultané des couleurs;

l'image-fantôme ne les présentait pas, mais elle était comme tra-

versée par la couleur du voisinage. Or, le contraste en question

est l'oeuvre de la rétine. La sensation lumineuse appartenant à

l'image-fantôme est d'origine purement cérébrale et, par suite,

s'ajoute à la sensation colorée du voisinage émanée de l'excitation

rétinienne. P. KEIIA VAL.

XXXIX. Remarques critiques sur le livre de P.-J. Moebius, intitulé :

La bosse des mathématiques ; par W. AHRENS. (Centrulbl, f. A'er-

venheilk. XXIV. N. F. XII, 1901.)

Quelque intéressante que soit cette étude critique, elle doit à

notre avis, céder la place à l'examen ultérieur des faits réclamé

par M. Moebius, ainsi que nous l'avons dit dans notre analyse

de son livre dans le Progrès médical en 1900 ou 1901.

. P. KERAVAL.

XL. Courte communication sur une nouvelle méthode de colora-

tion du système nerveux central; par H.-v. SCHROETTER. (ACli-0-

log. Centralb. XXI. 1902).

Il s'agit de la moelle.

I. - Prenez une solution à 1 ou 2 p. 100 de sulfonalizarinate de

sodium bien conservée. Plongez-y les coupes vingt-quatre heures

si vous voulez. Cette solution vulgairement appelée d'alizarine est

d'un brun qui tire sur le vert. On différencie pendant une demie ou

une minute avec l'eau de source jusqu'à ce que la coupe prenne

une coloration rougeàtre. Mettre alors dans l'alcool absolu,

éclaircir avec n'importe quel agent. La substance grise est brun-

violet, la substance blanche, brun jaune. L'alizarine colore proto-

plasma, noyaux, fibres nerveuses, névroglie.La structure du noyau

et les grains de Nissl de la cellule sont très nets : nets aussi les

mailles et le réseau de la névroglie. La coloration des éléments

conjonctifs va du violet brun au violet; celle de la myéline, du

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 321

jaune à l'orange; les noyaux sont bruns ou violet brun. Les par-

ties dégénérées tranchent, même macroscopiquement, sur les

cordons intacts.

II. Coloration éleétive des manchons de myéline. A une so-

lution de sulfonalizarinate de sodium à 5 p. 100, ajoutez quelques

gouttes d'une solution à 5 p. 100 d'acide oxalique jusqu'à ce que

le liquide devienne jaune-orange. Plongez-y les coupes non trai-

tées, deux ou trois heures. Lavez à l'eau distillée. Placez dans une

solution sodique à 3 p. 1000. Vous obtenez une magnifique teinte

violet rouge : laissez dans ce liquide jusqu'à ce qu'il ne se déta-

che plus de matière colorante. Mettez dans l'alcool absolu. Eclair-

cissez n'importe comment. Les gaines de myéline sont d'un rouge

éclatant ; le reste du tissu est incolore. Seulement la différencia-

tion n'apparaît pas aussi nette à la lumière artificielle qu'à la

lumière du jour. P. KERAVAL.

XLI. Le parallélisme moderne; par G. Moskiewicz. (Centralbl. f.

. JVet'MH/tcA ? XXIV, N. F. XII, 1901.)

Etude très détaillée de la théorie du parallélisme moderne,

c'est-à-dire de la théorie qui dit que l'état physique n'est qu'une

manifestation de l'état psychique, que ce dernier seul possède les

caractères de la réalité (Paulsen, Ebbinghaus, Heymans). L'esprit

et la matière ne sont pas au fond différents l'un de l'autre : ce

que nous appelons le monde extérieur est aussi de nature psy-

chique ; tout ce qui est matériel n'est que le contenu de notre

conscience. Le monde extérieur n'est pour nous qu'une série de

sensations des sens, cela veut dire qu'il émane de l'action sur

notre conscience de phénomènes réels qui nous sont inconnus, et

ces phénomènes réels marchent parallèlement aux effets qu'ils

font sur notre conscience. Une partie de ces phénomènes réels,

nous la trouvons dans les phénomènes psychiques de notre indi-

vidu, puisqu'il nous faut admettre que ces derniers sont la cause

des perceptions enchaînées du cerveau qui évoluent parallèlement

à eux, qu'en un mot les phénomènes psychiques sont identiques

aux processus réels sous-jacents. Il y a. alors parallélisme entre

nos phénomènes psychiques et le décours des perceptions céré-

brales, mais sous la réserve que les premiers sont la cause des

secondes.

Voici dans ces conditions l'image du monde. Nous l'expliquons

par analogie avec ce qui se passe dans notre intimité, parce que

c'est notre intimité que nous connaissons seule. Le monde con-

tient, comme notre propre conscience, une série de processus

psychiques, exerçant les uns sur les autres la plus intime action

réciproque, qui sont analogues à ceux de notre propre conscience.

De même que celle-ci possède des groupes d'idées déterminées

Archives, 2- série, t. XVIII. 21

322 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

- si étroitement unis les uns aux autres qu'ils ne s'associent jamais

à d'autres, de même la conscience universelle contient une série

de membres complets, ayant une existence autonome ; ce sont les

individualités psychiques particulières. Ce détachement de

groupes particuliers de la conscience universelle implique que

chaque individu ne participe plus au mécanisme des phénomènes

de la conscience universelle, qu'il est simplement soumis aux

phénomènes de sa conscience individuelle.

M. Moskiewicz pense que cette théorie a l'avantage de corres-

pondre à l'esprit des sciences naturelles et à l'esprit de la philoso-

phie. Elle correspond à l'esprit des sciences naturelles parce

qu'elle laisse intégralement à celles-ci le droit de tout expliquer

mécaniquement, en faisant intervenir le principe de l'énergie.

Elle correspond à l'esprit de la philosophie parce qu'elle fait droit

aux considérations de la cognition qui doivent former la base de

toute philosophie et qu'elle contente toutes les aspirations de la

philosophie qui tend à la conception unitaire du monde.

P. IiERaI-.1L.

XLII. Observation de thrombose autochtone des sinus; par COOD.

('easrolog. Centrulbl., XXI, 1902.)

Une demoiselle de quarante-trois ans, débile mentale, mais

jusque-là vigoureuse et bien portante, est tout à coup prise

d'attaques épileptiformes, de vertiges, nausées, vomissements et

d'amaurose totale. La tète est très rouge, il existe de la cépha-

lalgie. Absence de raideur de la nuque, de paralysies, de sueurs

hémilatérales, de fièvre. Le second jour, 3 attaques. Le troi-

sième, 23 attaques, obtusion croissante, déviation alternative des

yeux, veines rétiniennes turgescentes, hémiparésie gauche, para-

phasie : rien du côté de la sensibilité, pouls régulier sans len-

teur. Le quatrième, coma : elle ne peut déglutir; parésie du

facial droit, accès subintrants, cyanose faciale et cervicale, sueurs

profuses, fièvre, pouls faible ; elle succombe le lendemain matin.

Le diagnostic hésite entre : hémorrhagies d'une tumeur de la

base jusqu'alors latente au niveau du chiasma, et une thrombose

du sinus longitudinal supérieur. L'autopsie révèle : de l'adipose

généralisée, une thrombose du sinus longitudinal supérieur et des

sinus tranverses, des hémorrhagies dans l'espace sous-araclinoi-

dien, de la pachyméningite hémorrhagique, des apoplexies cipal-

laires de l'écorce et de la substance blanche du cerveau, de l'hy-

drocéphalie interne, un coeur gras, une embolie du lobe inférieur

du poumon droit, la dégénérescence graisseuse des reins et du

foie. Au microscope, on constate des apoplexies capillaires très

pressées dans le lobe occipital, isolées dans le lobe frontal. Dilata-

tion extrême dans le lobe frontal des espaces lymphatiques péri-

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 323

vasculaires et péricellulaires. Rien dans les cylindraxes, ni dans

les gaines de myéline. Les tuniques adventices ne sont pas le

sièg; de proliférations des noyaux; pas de prolifération névro-

glique. Fibres des nerfs optiques indemnes. Les cellules nerveuses

offrent tous les stades de la déchéance, en marche décroissante

d'arrière en avant. Mais il n'existe aucun foyer, aucun ramollisse-

ment dans l'écorce ou la substance blanche du cerveau ; nul

signe de processus infectieux; base du cerveau normale... .

P. KERAVAL..

XLIII.1es anomalies de formation du cercle artériel de Willis, leur

fréquence et leur signification chez les aliénés, par N.-A.

\V·souaow. (Obo1'énié psichiatrii, VI, 1901.).

Long travail dans lequel l'auteur étudie successivement l'état

normal et les affections dans lesquelles on rencontre des anoma-

lies de ce genre ainsi que ces anomalies elles-mêmes. Sur 112 affec-

tions mentales diverses on en a rencontré 85. Voir le tableau

détaillé.

Conclusions. 1. Les vaisseaux de la base du cerveau for-

ment deux systèmes, un système antérieur et un système posté-

rieur dont le développement se conforme au développement

embryonnaire du cerveau. Les hémisphères cérébraux avec les

ganglions sous-corticaux procèdent de la vésicule cérébrale pri-

mitive antérieure : ils sont principalement irrigues par le système

antérieur, c'est-à-dire par les branches de la carotide interne ;

seul leur segment postérieur (régions occipitales et une partie des

régions temporales) reçoit le sang du système artériel postérieur

par l'entremise de la cérébrale postérieure. Les dérivés des deux

vésicules primitives postérieures, tubercules quadrijumeaux avec

les pédoncules cérébraux, cervelet et bulbe avec la protubérance,

reçoivent leur sang exclusivement du système postérieur (artères

basilaires, vertébrales, cérébelleuses) abondamment pourvu en

toute cette région d'anastomoses. 2. Chaque artère corticale

constitue une région individualisée parce qu'elle ne possède pas

d'anastomoses suffisamment importantes : il s'en suit qu'une

anomalie de formation d'une artère cérébrale ne peut être équi-

librée par la compensation d'artères voisines. 3. On peu

diviser en deux groupes les anomalies de formation des artères

qui nourrissent les hémisphères cérébraux avec les ganglions

sous-corticaux et qui forment à la base du cerveau le cercle de

Willis ou, plus exactement, l'hexagone. Ce sont des modes de

formation anormaux (anomalies proprement dites) des vaisseaux,

ou des variétés dans le calibre des vaisseaux. 4. On rencontre

bien plus souvent chez les aliénés que chez les gens sains d'esprit

des anomalies de formation du cercle de Willis. Windle a indiqué

324 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

la proportion de 33,5 p. 100 pour les derniers, et de 51,8 p. 100

pour les aliénés. On est autorisé à mettre les anomalies du cercle

de Willis sous le même niveau que les autres signes physiques de

dégénérescence que l'on rencontre chez les aliénés. 5. Ces ano-

malies s'observent au premier chef dans la région de l'artère

cérébrale antérieure qui irrigue la province si importante des

lobes frontaux : proportion : 22,3 p. 100. Elles sont 'donc un peu

plus rares dans le système de la cérébrale postérieure : 17,8

p. 100. 0. Elles sont incomparablement plus fréquentes du

côté gauche : 24,9. 7. Les anomalies particulières à chaque

artère se peuvent résumer ainsi. A. Les cérébrales antérieures

peuvent provenir d'un tronc commun issu d'une des carotides

internes, toujours de la gauche : on observe également des stades

intermédiaires caractérisés par la division prématurée, l'anasto-

mose de l'artère du côté opposé. B. Une des cérébrales antérieures,

presque toujours la gauche, fournit par sa face interne une

branche mince qui graduellement prend un fort développement et

se transforme en l'artere du corps calleux : un degré de plus, et

.celle-ci provient de la communicante antérieure. C. La seule

anomalie constatée sur la communicante antérieure est sa dupli-

cité : cette seconde petite branche se forme au-dessus ou au

dessous de la branche normale. D. La principale anomalie de la

cérébrale postérieure consiste en ce qu'elle provienne, non de la

basilaire, mais de la carotide interne : dans ces conditions un

des hémisphères cérébraux, car il est extrêmement rare que

l'anomalie soit bilatérale, est irrigué par le système artériel anté-

rieur exclusivement. Elle peut encore provenir de tous les points

du côté de l'hexagone compris entre la basilaire et la carotide

interne. 8. Il est rare qu'en l'absence d'anomalies de formation

on rencontre des variétés de calibre des vaisseaux : on n'en a

noté que dans 23,2 p. 100 des cas. Il n'existe pas de différences

essentielles entre le côté droit et le côté gauche. 9. Les artères

du système postérieur, artères basilaire, vertébrales, cérébelleuses,

présentent les modifications .suivantes. A. La vertébrale est un

peu plus souvent plus large à gauche qu'à droite. B. Ce sont les

artères cérébelleuses, notamment les artères cérébelleuses moyenne

et postérieure, qui sont le plus sujettes aux anomalies ; propor-

tion : 52,6 p. 100. La' cérébelleuse supérieure se distingue par une

grande constance mais souvent elle se résout prématurément en

deux branches de l'un ou des deux côtés (22,3 p. 100). L'existence

d'anastomoses abondantes de ce système ne peut guère avoir

d'importance. 10. Quand on lie la carotide interne, il importe

de savoir que la cérébrale postérieure peut émaner de la carotide

interne, à cause des conditions défavorables créées de ce fait an

rétablissement de la circulation du cerveau.- 41. Les anomalies de

vaisseaux du cerveau sont si intimement liées à la question des

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 325

troubles de la circulation et des fonctions de cet organe qu'il faut

faire sur ce sujet de nouvelles recherches, non seulement d'ana-

tomie pathologique et d'anatomie comparée, mais aussi d'embryo-

génie sur le système vasculaire intra-cranien. P. Keraval.

XL1V. De l'excitabilité de la région corticale motrice du cerveau

à la suite de l'attaque d'épilepsie ; par \ ? P. Ussrovr et E.-S.

BORISCHPOLSKY. (Obozréniè psichiati-ii, VI, 1901.)

s

Treize expériences desquelles il résulte ce qui suit :

1° Dans l'immense majorité des cas, il y a hyperexcitabilité.

2° Immédiatement après l'attaque, la région en question est un

peu plus excitable et cette hyperexcitabilité continue à augmenter

pendant quinze à soixante-quinze minutes, puis l'excitabilité tombe

graduellement en quinze ou deux cent dix minutes. - 3° La

chute de l'excitabilité s'effectue d'ordinaire plus lentement que

son exagération. Généralement, l'hyperexcitabilité qui succède à

l'attaque se continue pendant soixante-dix à deux cent cinquante-

cinq minutes : il est plus rare de la voir durer vingt, vingt-cinq,

trente minutes. 4° C'est surtout à la suite d'une seconde atta-

que d'épilepsie chez le même animal que l'on voit baisser l'excita-

bilité de l'écorce; parfois l'excitabilité demeure pendant les pre-

mières minutes ce qu'elle était avant, plus rarement elle s'accroît '

mais alors moins notablement qu'après la première attaque et

pour peu de temps. 5° Parfois, après la diminution de l'excita-

bilité, s'observe une nouvelle hyperexcitabilité suivie à son tour

d'une chute graduelle. 6° L'hyperexcitabilité de la région corti-

cale motrice ne saurait être attribuée à l'hyperexcitabilité des

nerfs périphériques. 7° Elle ne correspond pas rigoureusement

à l'hyperémie corticale : à la suite de l'attaque, la pression du

sang tombe dans le cerveau, celui-ci est en état d'anémie tandis

que l'excitabilité de l'écorce augmente. 8° Il convient de distin-

guer l'excitabilité du nerf de sa conductibilité. Ainsi, pour provo-

quer le mouvement d'une extrémité par le centre psychomoteur,

après l'attaque d'épilepsie, on a besoin de moins rapprocher les

bobines de l'appareil à chariot au moment où l'excitabilité du

nerf périphérique a diminué. P. Keraval.

XLV. Note relative à la question des modifications du caractère à

la suite des lésions du cerveau; par M. Friedmann. {Neurolog.

Centralblalt , XXI, HJ02.;

Parmi un nombre marquant de lapins et de moineaux chez

lesquels l'auteur avait pratiqué piqûres et exérèses du cerveau, il

s'en est trouvé deux qui, à la suite d'une lésion très légère et fort

petite, ont trois semaines après l'intervention, et pendant un

mois, fait preuve d'un caractère indomptable spécial. Ce lapin et

326 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

ce moineau, au lieu d'être intimidés, quasi anxieux, comme leurs

compagnons, étaient positivement furibonds, enragés, agités,

brusques, impétueux, ils troublaient par leurs incessants déplace-

ments, les animaux de leur cage. Sauvages et agressifs pour qui

s'approchait d'eux, ils conservaient la même animosité lorsqu'ils

étaient rassasiés. On les tua sous le chloroforme sept semaines

après l'opération. On trouva une rougeur diffuse de la pie-mère,

mais sans exsudat, et, à la surface du cerveau, une petite cica-

trice plate d'une plaie aseptique. Mais le* cerveau entier était le

siège d'une infiltration lymphoïde de tout le système lymphatique

périvasculaire et péricellulaire, témoignant d'une irritation chro-

nique comparable à ce que l'on voit dans les cas de troubles ner-

veux graves et chroniques consécutifs à la commotion cérébrale.

. P. KERAVAL.

XLVI. Des convulsions rhythmiques et des mouvements automati-

ques chez les hystériques; par W.-M. ËECHTEREW. {Obozréniè

psichiatl'ii, VI, 1901.)

Ces phénomènes constituent des signes "plus ou moins perma-

nents de l'hystérie. La chorée malléatoire de Charcot rentre

moins dans le cadre des mouvements convulsifs plus ou moins

permanents que dans celui des états paroxystiques de nature hys-

térique, qui sont parfois même intimement liés aux attaques

d'hystérie habituelles.

Il est des cas où l'on observe des convulsions rhythmiques pres-

que isolées dont le décours est plus ou moins lent, dont le carac-

tère est permanent, qui, sans interruption, durent des semaines,

des mois, des années, sauf pendant le sommeil où elles cessent

généralement. Il en est d'autres où les mouvements convulsifs

rhythmiques s'interrompent périodiquement pour recommencer

périodiquement et durent ainsi des années.

L'auteur énumère 17 combinaisons différentes de flexions du

tronc en tous sens, de moulinets des bras et des jambes, de mou-

vements continus de la langue, de contraction des sourcils, des

oreilles, des téguments de la tête, de crachement de mots incon-

venants, de tics convulsifs cervico-brachiaux, de hochements

de la tête affirmatifs, négatifs, pendulaires, de soupirs diaphrag-

matiques, de hoquets, renvois, crampes abdominales et pharyn-

gées spasmodiques, de cris monosyllabiques invariables, de con-

vulsions rythmées du plancher de la bouche.

, Chez une jeune fille de dix-huit ans se produisaient des mouve-

ments alternatifs d'élévation de l'une ou de l'autre épaule. Déjà «

à douze ans elle avait été affectée d'un clignotement convulsif des

yeux qui en deux mois avait cédé au K. Br. et aux bains. Cela

commence par la sensation d'un choc dans les épaules et aussitôt

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 327 l

après celles-ci se mettent à se soulever à tour de rôle. Agitation,

pleurs fréquents, sommeil troublé; il arrive même que pendant le'

sommeil la patiente rie aux éclats, pleure; elle a eu aussi une

violente attaque d'hystérie en dormant. Règles très irrégulières;

à ce moment le spasme des épaules augmente; il augmente du

reste avec le temps. Il consiste en l'élévation alternative d'une

omoplate ou de l'autre : ces mouvements de balancier en haut

sont en rapport avec la contraction rythmique du trapèze et du

rhomboïde d'un côté ou de l'autre. Ils n'entravent pas l'action des

mains; ils se calment plutôt pour permettre à celles-ci d'exécuter

un ouvrage compliqué, mais pour récupérer ensuite leur inten-

sité première. L'émotion les exagère toujours ; ils s'affaiblissent

un peu quand on distrait l'attention de la jeune fille. Quelque

hyperesthésie du sein gauche. Champ visuel un peu rétréci des

deux côtés; légère dyschromatopsie surtout à gauche. De même

qu'en d'autres cas les symptômes permanents de l'hystérie sont

peu marqués. Assez souvent le diagnostic de l'hystérie ne se fait

que par l'existence d'attaques antérieures, de syndromes convul-

sifs antécédents du même genre dont la manifestation rapide ou

instantanée contraste avec une cause occasionnelle insignifiante,

voire nulle.

Conclusions. 1° Ces mouvements convulsifs et automatiques

ont une importance aussi grande pour le diagnostic que les con-

vulsions toniques, les contractures hystériques. - 2° Parfois plus

complexes, ils rentrent dans le domaine de la chorée rhythmique

de Charcot. 3° En d'autres cas, ils traduisent des contractions

rhythmiques séparées d'un groupe de muscles déterminés; mouve-

ments automatiques plus simples. 4° D'ordinaire inopinés, ils

succèdent le plus souvent à une attaque d'hystérie, à un choc

psychique; ils surviennent parfois en l'absence de cause occasion-

nelle extérieure. 5° Durée variable : généralement ils durent

sans intcrruption ou avec quelques interruptions des semaines,

des mois, des années et constituent non seulement des signes

paroxystiques, mais des signes plus ou moins permanents de

l'hystérie. G° Ils disparaissent d'habitude plus ou moins rapi-

dement, parfois instantanément, sous une influence psychique et

sous l'action de la suggestion hypnotique qui est un des meilleurs -

moyens de traitement. 7° On les observe de loin en loin dans

les affections organiques du cerveau. Quand il n'existe pas de

signes de ces dernières on doit toujours penser à l'hystérie. Il

faut, par suite, toujours rechercher, en pareils cas, l'état de la

sensibilité, des organes des sens, des réflexes, qui parfois permet

de découvrir l'hystérie. 8° Ces mouvements ont les caractères

suivants : début rapide ou soudain, parfois consécutif à tels ou

tels états hystériques, ou émotifs; invariabilité du type; renforcés

par les émotions morales, affaiblis par la distraction de l'atten- .

328 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

tion, ils cessent ou diminuent au moment où l'on fait exécuter

aux patients des mouvements volontaires pour reparaître avec

leur intensité première quand cessent les mouvements volon-

taires. - P. KERAVAL..

XLVII. Leçons de choses sur la physiologie de la vision corticale;

par H. HITZIG. (Neurolog. Cent1'albl., XXI, 1902.)

Animaux ayant subi des lésions expérimentales de la sphère

visuelle occipitale de Munk.

I. Lésions unilatérales. 1° Le trouble visuel disparaît totale-

ment plus ou moins vite. 2° Toujours le trouble de la vue dis-

paraît d'abord sur la ligne médiane et en bas, de sorte que finale-

ment il ne reste qu'un endroit amblyopique en haut et en dehors.

II. Lésions bilatérales. Ces chiens ont préalablement subi une

première expérience unilatérale; ce n'est que lorsque le trouble

visuel a complètement disparu qu'on a exécuté une seconde opé-

ration partielle sur l'autre hémisphère. 1° Cette seconde opé-

ration fait invariablement reparaître le trouble de la vue de l'oeil

qui a été le premier endommagé. 2° Ce trouble visuel est sou-

vent tout aussi accusé et même plus marqué que celui de l'oeil

qui est à son tour endommagé par la seconde opération. 3° On

observe parfois que le trouble visuel de l'oeil qui correspond au

côté opéré en dernier subit une aggravation ultérieure; il est plus

prononcé le troisième jour et les jours suivants que le second

jour qui suit l'intervention. 4° On n'observe pas les scotomes

circonscrits annoncés par la théorie de Munk : c'est de l'hémio-

pie. 5° Les troubles visuels consécutifs aux extirpations corti-

cales doubles disparaissent eux aussi avec le temps.

Conclusions. La théorie de Munk d'après laquelle tout élé-

ment de la rétine est directement uni à un élément de l'écorce, et

devrait par suite cesser à jamais de fonctionner quand on a sup-

primé l'élément cortical qui lui commande, cette théorie est

fausse. L'absence de scotomes circonscrits indélébiles, et même

de troubles visuels permanents y contredit également.

P. KERAVAL.

XLVIII. Nouvelles communications sur les troubles de perception

des distances en profondeur; par A. PicK. (Neurolog. Centrulbl.,

XX, 1901.)

Une très belle observation montre qu'à la suite d'attaques con-

gestives le paralytique général peut perdre la notion des dis-

tances. Lui présente-t-on, par exemple, une montre, il la voit

bien, mais pour la prendre il étend la main plus loin qu'elle n'est,

en arrière de l'objet et, pour la saisir il est obligé de revenir d'ar-

rière en avant et un peu en dehors. L'objet est-il plus éloigné

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 329

c'est en dedans et en avant de lui qu'il porte la main et recule

successivement d'avant en arrière pour aller à la rencontre de la

montre. Il existait en l'espèce une hémianopsie latérale homo-

nyme qui n'a rien à voir avec le trouble en question et qui peut

exister sans ce trouble.

Les faits montrent encore que l'anomalie de perception des dis-

tances en profondeur est indépendante du trouble de la conscience

consécutif à l'attaque congestive et de l'affaiblissement mental.

Elle doit tenir aux lésions du lobe pariétal, car les singes

auxquels Munk et Schaefer excisent de ce lobe offrent exactement

le même syndrome. Ils voient bien mais ne reconnaissent plus la

position de l'objet dans la profondeur du champ visuel. Observa-

tion identique sur les chiens : Jean Demoor. (Voy. Silziti7gsbeî,.

d. kgl. ]J1'ellss. Acad. d. Wissensch. s. Berlin. Sil2z2g d. phys.

mccthénzat., 14 déc. 1899.) P. KERAVAL.

XLIX. Contribution à l'étude de l'aphasie sensorielle optique; par

M. IIOSENFELD. [Neurolog. Centmlbl., XX, 1901.)

Excellente observation bien analysée. Pas d'aphasie motrice.

Trouble sensoriel acoustique simplement indiqué, notamment

immédiatement après le traumatisme, à la suite d'un vigoureux

coup porté contre la moitié gauche du crâne, qui a laissé le sujet

sans connaissance pendant quelques heures. Aphasie sensorielle

optique. Aphasie tactile. Pas de cécité psychique. Pas d'hémia-

nopsie. Alexie. Agraphie. L'auteur insiste sur ce qui suit.

Dans les cas purs d'aphasie sensorielle optique, il peut aussi

exister de l'aphasie tactile. Alors toutes les notions concrètes qui

sont surtout identifiées par les images commémoratives d'ordre

optique, qui s'apprennent surtout par l'image optique, restent

mortes malgré l'aide du sens du toucher. Impossible d'ailleurs de

dire si c'est la règle parce que les observations ne contiennent pas

assez de détails sur ce point.

Quand on examine le toucher des aphasiques sensoriels opti-

ques, il faut s'attacher principalement à déterminer si les qua-

lités simples du toucher suffisent à l'identification des divers

objets, ou si le tact n'éveille pas des idées relatives à l'espace et à

la vue, et si, alors, ce ne seraient pas ces idées qui aboutiraient à

l'identification de l'objet, à la trouvaille de l'image verbale.

P. KERAVAL.

L. Des terminaisons et connexions centrales des septième et

huitième paires crâniennes ; par N. Wynoui3ow. [Neurolog. Cen-

lralbl. XX. 1 goy..)

Pièces empruntées à un sujet, mort de tuberculose pulmonaire,

ayant, par suite d'une carie du temporal, été, un mois avant sa

330 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

mort, affecté de paralysie périphérique complète des deux branches

du facial droit. Examen des corps optostriés par la méthode de

Marchi, et, par la méthode de Nissl, du territoire qui contient le

noyau de l'ôculomoteur externe ainsi que la portion supérieure du

noyau du facial. Dégénérescence : des branches du facial ; lésions des

deux branches de l'auditif. Voici le résumé des résultats (figures).

I. Dégénérescences intl'acél-éb1'Ules. 1. Celle des racines du

facial peut être suivie jusque dans le noyau du côté correspondant

à la lésion; il existe une faible dégénérescence des fibres qui,

originaires du côté opposé, s'entrecroisent sous le plancher du

quatrième ventricule et rejoignent le genou de la racine du facial

qui correspond au côté lésé. 2. Les cellules du noyau du facial

lésé présentent l'altération secondaire de Nissl et Marinesco.

Aucune altération des noyaux moteurs voisins du trijumeau et de

l'oculomoteur externe. 3. Les mêmes altérations se voient dans

les cellules des portions médiales du noyau du facial du côté

opposé. 4. L'altération secondaire occupe en outre un noyau

autonome non encore décrit. Ce noyau existe au niveau du noyau

réticulaire de la protubérance et des zones internes du noyau du

facial; il est situé en dehors et en avant du noyau de l'oculomoteur

externe et en dedans de la racine du facial, au point où cette racine,

traçant un arc de cercle à convexité externe autour du noyau de

l'oculomoteur externe, quitte le cerveau en décrivant une courbe

convexe en arrière et en dehors. Ce noyau se compose de cellules

motrices tout à fait semblables à celles du noyau classique du

facial. Il me paraît, dit l'auteur, hors de doute qu'il appartienne au

facial. Pour le distinguer du noyau principal ou inférieur au facial,

depuis longtemps connu, on pourrait l'appeler : noyau accessoire ou

supérieur du facial.

II. Connexions de l'auditif. 1. Immédiatement après être

entrées dans le cerveau, les fibres du nerf cochléaire se rendent au

noyau antérieur, au tubercule acoustique, contournent en dehors

et en arrière le corps restiforme, et envoient des fibrilles au noyau

de Deiters ainsi qu'à la racine descendante de l'auditif. Une partie

des fibres s'en va dans le corps trapézoïde où on peut les suivre

jusqu'au niveau du noyau principal ou inférieur du facial et de

l'olive supérieure du côté correspondant. Là, les unes affectent une

direction longitudinale; les autres dépassent le raphé et s'en vont

de l'autre côté. 2. Les fibres du nerf vestibulaire 'dégénérées

sont, du côté lésé, en dedans du corps restiforme; situées entre

celui-ci et la racine descendante du trijumeau, elles arrivent au

noyau de Deiters et à.celui de Bechterew, pour pénétrer, de là, dans

le noyau interne ou postérieur de l'auditif, où les unes sont inter-

rompues, tandis que les autres forment un trousseau distinct qui

dépasse le raphé sous le plancher du quatrième ventricule el serenduu

noyau interne ou postérieur de l'auditif du côté opposé : la plus

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. cL L

grosse partie de ce trousseau parvient ensuite au noyau de Bechterew,

le reste au noyau de Deiters. 3. La grosse olive du côté opposé à

la lésion contient plus de fibres dégénérées que celle du même côté.

4. La dégénérescence descendante des fibres de l'auditif s'étend

à la racine descendante de l'auditif du même côté que la lésion,

ainsi qu'à la substance réticulaire et aux noyaux médians des fais-

ceaux de Burdach des deux côtés symétriquement. De ces noyaux

une partie des fibres se rendent au ruban de Reil, s'entrecoisent et

entrent dans les olives inférieures. A ce niveau, on note une dégé-

nérescence des fibres arciformes externes. Au point le plus éloigné

de l'axe des noyaux qui appartiennent aux faisceaux de Goll et de

Burdach, les fibres dégénérées se groupent dans toutes la substance

blanche restante des faisceaux de Goll ainsi que dans l'angle posiél'o-

médian des faisceaux de Burdach : il y en a autant des deux côtés.

- 5. En montant voici ce que l'on voit. Au niveau des portions les

plus près de l'axe du noyau réticulaire de la protubérance, les

fibres de l'auditif s'entrecroisent et se groupent en deux faisceaux

de forme arrondie presque régulière qui appartiennent à l'effectif

du ruban de Reil latéral ou inférieur, et sont eu dehors du ruban

de Reil principal. La dégénérescence est un peu plus accentuée du

côté correspondant à la lésion. Dans la zone des tubercules quadri-

jumeaux postérieurs la plus voisine de l'axe, au niveau du noyau

central supérieur de Bechterew, le nombre des fibres entrecroisées

décroît ; il en est qui passent dans le ruban de Reil principal, en

nombre à peu près égal pour les deux côtés, et forment graduelle-

ment le ruban de Reil latéral, aussi volumineux de chaque côté.

Les fibres de ce dernier montent jusqu'aux noyaux des tubercules

quadrijumeaux postérieurs et s'entrecroisent en partie au-dessus de

l'aqueduc de Sylvius. Un peu plus en dedans, au niveau des noyaux

des tubercules quadrijumeaux postérieurs, il se produit un nouvel

entrecroisement d'un petit nombre de fibres entremêlées aux fibres

du prédoncule cérébelleux antérieur : c'est le trousseau commis-

sural de Bechterew qui unit entre eux les noyaux vestibulaires.

A cette hauteur, le ruban de Reil principal semble tout à fait'

indemne de dégénérescence : les fibres dégénérées se limitent

au territoire du ruban de Reil latéral ou inférieur, ainsi qu'aux

noyaux des tubercules quadrijumeaux postérieurs, symétriquement

des deux côtés. 6. En dedans des parties supérieures du noyau

réticulaire de la protubérance, au niveau précisé tout à l'heure, on

trouve des fibres dégénérées dans le faisceau longitudinal posté-

rieur. On les suit dans le domaine des tubercules quadrijumeaux

antérieurs, dans le noyau accessoire de l'oculoinoteur commun de

Bechterew : elles sont notablement plus nombreuses du côté de la

lésion. Encore plus en dedans, les diverses parties des couches

optiques ne présentent pas de dégénérescence du tout. -7. Nulle

dégénérescence des fibres acoustiques de Monakow, ce qui signifie

332 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

que les fibres radiculaires de l'auditif ne passent pas directement

dans les fibres acoustiques de Monakow. - P. KERAVAL.

LI. De l'absence des réflexes patellaires en un cas de myélite

dorsale par compression avec dégénérescence des racines posté-

rieures dans la moelle lombaire; par M. MARTELS. (Neurolog.

Cen0'a ? XXI, 1902.)

Un foyer tuberculeux comprime la moelle au niveau du cinquième

segment dorsal depuis 4 mois au moins. Au début les réflexes

étaient exagérés. Ils disparurent complètement quand survint la

paralysie flasque et restèrent absents jusqu'à la mort. A ce niveau

la coupe transverse de l'organe n'est pas complètement altérée : il

existe encore quelques fibres indemnes et le faisceau pyramidal

n'est pas totalement dégénéré. D'ailleurs lorsqu'on piquait les

jambes du malade (il s'agissait d'un homme de trente ans), il

sentait encore.

En revanche, on constate dans la moelle lombaire la dégénéres-

cence de toutes les racines postérieures : elle est surtout accusée

dans les troisième et quatrième segments et principalement dans

leur portion intramédullaire. Quelle est la cause de cette dégéné-

rescence ? Ce n'est point l'intoxication générale de l'organisme : en

' effet, à l'époque où déjà les réflexes étaient absents il n'existait

pas de tuberculose étendue; on en constatait à peine des traces

dans les poumons. Et l'autopsie n'y révèle qu'une tuberculose peu

avancee. Par contre la dégénérescence radiculaire est plus pro-

noncée que dans les cas de ce genre. L'anémie, le marasme, les

accidents du décubitus ne se montrèrent que lorsque l'atteinte des

racines était déjà un fait ancien cliniquement. Peut-on accuser les

toxines produites dans le canal vertébral même par le foyer tuber-

culeux ? La dure-mère et la pie-mère sont indemnes à ce niveau.

Ce ne peut donc être l'effet que de la compression mécanique due

à la stase lymphatique et vasculaire; cette stase tenait à la com-

pression dorsale. Sans compter qu'il y a eu de ce fait (du fait du

foyer) une paralysie spéciale des vasomoteurs médullaires. On en

doit tirer une indication thérapeutique : quand une myélite par

compression récente, incomplète, s'accompagne cependant de la dispa-

rition des réflexes tendineux patellaires, faire une ponction lombaire.

. P. IEnAVAL.

LU. Contribution à l'étude du trajet des fibres du goût; parJ. hnor.

(Neurolog. Cenl1'(/[/¡I., XX, 1901).

Observation, sans autopsie, rapprochée des documents cliniques

et expérimentaux des auteurs. Il s'agit d'un foyer morbide ayant

d'abord atteint la branche motrice de la cinquième paire, puis les

autres branches des cinquième, sixième, quatrième et troisième

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 333

paires : le rameau sensitif du maxillaire inférieur a le moins souf-

fert. L'unilatéralité de la paralysie, notamment du trijumeau,

l'envahissement graduel d'un nerf à l'autre, le caractère de la

douleur, l'action favorable du traitement mercuriel font penser à

une lésion syphilitique et très probablement à une méningite de la

base.

Au moment de son admission le malade était atteint d'une

anesthésiedes branches ophthalmique et maxillaire supérieure du

trijumeau droit et d'une légère hypoesthésie de la branche maxil-

laire inférieure du même nerf. Il existait un faible trouble du

goût sur les deux tiers antérieurs de la langue à droite; l'acide

était perçu comme salé; il y avait un retard dans la perception de

l'amer moins vivement senti que de l'autre côté; l'excitation élec-

trique décelait aussi quelque différence entre les deux côtés. Sous

l'influence du traitement la sensibilité du maxillaire inférieur rede-

vient normale, et, aussitôt, parallèlement, disparaissent les plus

miuimes différences de la fonction gustative. Au moment de son dé-

part, persiste encore un trouble très marqué de la sensibilité dans

le territoire de l'ophthalmique et du maxillaire supérieur; celle

du maxillaire inférieur est presque absolument normale : le goût

est identique sur les deux moitiés de la langue. Cette constatation

a donc la valeur d'une expérience quant au trajet des fibres du

goût dans le maxillaire inférieur. De plus, la diminution du champ

gustatif n'a pas été la même pour les quatre espèces de saveur,

Vintschgau pense qu'il y a lieu d'admettre des fibres spéciales

propres à la perception de l'acide et du sucré, du salé et de l'amer.

Dans les cas nombreux de troubles dans le territoire de la cin-

quième paire, l'ageusie existante ne portait que sur la partie an-

térieure de la langue. La partie postérieure de cet organe serait

pourvue de fibres gustatives à l'aide de la neuvième paire (Vints-

chgau, Hoenigschmied, Ranvier et Drasch, Sandmeyer et Hosen-

berg, Lehmann, Ziehl et Pape). Hermann et Landois prétendent

que les libres du goût ne viennent que par la neuvième paire; elles

pourraient arriver, par celle-ci, jusqu'à la partie antérieure de la

langue, ainsi que le veut Carl. Du ganglion pétreux les fibres, par

le nerf tympanique ou de Jacobson, gagnent le plexus tympani-

que : de là, les unes, par le petit nerf pétreux superficiel, s'en vont

au ganglion otique et, par suite, au nerf lingual, tandis que les

autres, la plus petite partie, par le rameau communiquant du

plexus tympanique, arrivent au ganglion géniculé et, de là, par le

nerf de la septième paire, et la corde du tympan, au lingual droit.

C'est une hypothèse à laquelle Cassirer a essayé d'apporter la

première preuve clinique. Son observasion de parésie des neu-

vième, dixième, onzième et douzième paires du côté gauche n'a

qu'un défaut; c'est qu'il existe une hypoesthésie de la langue et

du palais. Discussion touffue. Variétés individuelles de Gowers,

334. REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

Frankl-Hochwart, Wallenberg. Ce dernier auteur croit avoir trouvé

que la pile de noyaux du faisceau solitaire reçoit par devant les

fibres du goût de la cinquième paire, qu'elle est, par conséquent,

la station terminale des libres gustatives issues de divers ganglions.

En ce cas il faudrait admettre que les fibres de la neuvième paire

peuvent, chez certains individus, prendre une part exagérée à la

formation du faisceau solitaire.

Au moment de son départ, le malade avait de la conjonctivite à

droite ainsi qu'un reste de blépharoptose du même côté. On lui

conseilla de porter un bandeau. Il l'enleva. Le lendemain, légère

érosion de la cornée qui bientôt aboutissait à une kératite neuro-

paralytique. La cornée de ces sujets, moins résistante, s'enflamme

au moindre sujet d'irritation (Hippel jeune, Senftleben, Eberth-

Balogh). La blépharoptose et le bandeau constituaient des agents

de protection : la première a guéri ; le malade a eu tort d'enlever

son bandeau. La kératite a guéri sous l'influence de l'atropine et

d'un nouveau monocle.

Enfin on a aussi constaté de la diminution de l'odorat et de la

sécrétion de la muqueuse nasale : on sait que la cinquième paire

communique avec les branches de l'olfactif (Magendie).

P. Keraval.

LUI. Un arrêt de développement du nez; nouveau signe de dégé-

nérescence ; par H. GUDDEN (Neurolog. Centralbl., XXII, 1903).

La narine forme en avant une fente canaliculée qui témoigne

d'un arrêt de développement foetal (figure à l'appui).

P. KERAVAL..

Lit. Influence de l'état mental des parents sur là formation du

sexe de leurs enfants ; par A. LlTKrNS (Obozrénié psichiat1'Ù,

VIII, 1903).

Quand les bactéries se trouvent aux prises avec des conditions

défavorables de sécheresse, de chaleur, de froid, de pénurie de

substances nutritives, elles se multiplient par un autre procédé,

celui des spores qui, plus résistantes, sont susceptibles de vivre

longtemps sans avoir besoin de milieu nutritif. Ces spores sont en

somme conçues au moment où le protoplasma de leurs parents se

trouvait en état d'effort, où il était stimulé par la pénurie des

moyens pour la lutte contre les conditions ambiantes. L'organisme

le plus simple peut donc changer la forme de sa postérité dans le

sens le plus avantageux pour assurer sa perpétuité, selon les con-

ditions qu'il rencontre. Or ce qui excite le protoplasma des orga-

nismes inférieurs à agir ainsi, l'insuffisance des matériaux nutri-

tifs, l'abaissement de la température, la sécheresse, déterminent

les mêmes effets chez les organismes supérieurs; mais ici intervient

la complexité du système nerveux et du développement mental.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 335

Les propriétaires de haras savent que, pour provoquer la multi-

plication des mâles, il faut nourrir les animaux modérément et

faire procéder à la fécondation. Ces conditions semblent pour le

cheval suffisantes pour provoquer dans le système nerveux un état

de tension et d'excitomotricité qui fait concevoir un individu

mille. 1 .

Chez l'homme il s'en faut de beaucoup que le caractère de la

nourriture et le degré de l'activité musculaire constituent des con-

ditions propres à donner au système nerveux la tonicité indispen-

sable à la procréation du mâle. Ce sont, ici, les influences psychi-

ques qui jouent le rôle principal ; elles peuvent être très différentes,

mais ont ceci de commun que, quelque soit le procédé, elles élèvent

l'auto-activité psychique interne. Et celle exagération de l'auto-

activité mentale est l'état du système nerveux qui constitue la con-

dition de la conception de l'individu du sexe masculin. M. Litkens

donne à l'appui l'observation de cinq familles témoignant de cette

proposition. Pour lui, l'influence consciente des générateurs sur

le sexe de leur postérité est indéniable.. Il s'agit maintenant de

déterminer auquel degré un couple donné peut être placé dans des

conditions propre à la suractivité neuropsychique nécessaiie. Ces

conditions varient énormément selon les différents individus, au

prorata des particularités de leur état mental et des conditions de

leur existence ordinaire. P. KERAVAL.

LV. De l'appareil inhibiteur du coeur chez les chiens nouveau-

nés ; par E.-E. GnaTÉ (Obozrénié psichiatrii, VIII, 1903).

Expériences propres à déterminer l'état du développement des

ramifications terminales des fibres inhibitrices du coeur, et celui

du centre inhibiteur du bulbe chez les chiens nouveau-nés.

L'auteur montre que le coeur de ces animaux contient dès la

naissance des éléments nerveux spéciaux dont l'excitation par le

courant d'induction ou par la muscarine provoque un ralentisse-

ment des contractions cardiaques ainsi que l'arrêt du coeur en

diastcle. Il y a donc lieu de croire que l'appareil inhibiteur du

coeur est, chez le jeune chien, déjà apte à fonctionner. Pourquoi,

quand cesse la respiration de l'animal, le coeur continue-t-il, long-

temps à battre sous l'influence de toute excitation nouvelle ? On

l'ignore; le microscope n'a pas trouvé d'explication à cela.

Les fibres inhibitrices du coeur dans le nerf vague sont égale-

ment stimulables chez le chien nouveau-né. Elles le sont moins

avant le quatrième jour de la vie qu'à partir de ce jour, parce

qu'il y a jusqu'alors beaucoup de fibres amyéliniques; mais dès le

quatrième jour le développement des fibres s'effectue.

Le centre inhibiteur bulbaire existe déjà chez le chien nouveau-

né, mais dans le cours des deux premières semaines de la vie il ne

jouit pas de l'excitabilité normale qu'il a ultérieurement. D'ailleurs

336 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

des centres inhibiteurs sont en général faiblement développés chez

les chiens nouveau-nés ; ils n'ont presque pas de centres inhibi-

teurs corticaux.

Ainsi s'expliquent les particularités du coeur extrêmement exci-

table de l'enfant nouveau-né. P. IiEnAVaL.

LVI. Contribution à la pathologie du sentiment de l'impression

consciente; par A. PicK (Neurolog. Centralblatt, XXII, 1903).

Volkelt prétend que toute perception à laquelle se rattache la

cognition s'accompagne de l'impression immédiate de cette con-

naissance et que cette impression jouerait un rôle important dans

le processus de commémoration. Ce n'est pas la clarté, la netteté

des images commémoratives qui constitue l'élément grâce auquel

on reconnaît les choses, c'est le sentiment qu'on a eu de la péné-

tration dans la conscience de leurs images, l'impression spéciale

qui accompagne le phénomène de perception consciente. La cons-

cience du souvenir n'est autre que l'expérience du passé qualifiée

de souvenir. -

Chez l'épileptique et assez souvent aussi chez l'hystérique, il se

produit un état mental particulier pendant lequel, tout en restant

maître de lui, le patient indique que tout lui parait étrange; ce

qui l'entoure n'est pas altéré, n'est pas modifié pour lui, mais il a

l'impression de quelque chose d'étrange ; il semble que ce qui

l'entoure ne lui soit- de rien, il éprouve une sensation bizarre

vague. Cet état est dû à la déchéance de ce sentiment de la péné-

tration dans la conscience des perceptions, à la déchéance de la

qualité du phénomène de la perception consciente (Bekanntheils-

gefuhl, Belwnntheitsqualitoet).

En certains cas de désorientation qui surviennent chez les

anxieux on retrouve cette perturbation en tant que phénomène

primitif; ils reconnaissent difficilement leur entourage, et ce

trouble tient à l'absence de la qualité du phénomène de la con-

naissance, du sentiment de la pénétration consciente. (le trouble

d'emblée produit parfois un état d'angoisse assez fort.

M. Pick a retrouvé cet accident en un cas de neurasthénie

sexuelle; le malade indique qu'il est parfois envahi d'un senti-

ment étrange ; il lui semble que, dans les rues qu'il connaît de-

puis longtemps, tout àcoup tout lui estnouveau. Il a la sensation,

malgré qu'il sache bien que la rue lui est familière depuis long-

temps, de quelque chose de bizarre sur laquelle se développe un

sentiment d'appréhension. P. KERaVAL.

LVII. De l'influence de la musique sur le travail musculaire; par

I. Spirtow (Obozrénié psichialrii, VIII, 1903).

Il faudrait consacrer plusieurs pages à mettre en relief l'extrême

variété des expériences, et leur dispositif. Le résumé bref des cou-

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 337

clusions générales de l'auteur exigerait lui-même beaucoup de

place. M. Spirtow a expérimenté sur : un fonctionnaire de

trente-six ans (15 expériences); un étudiant en médecine de

vingt-deux ans (9 expériences) ; ;- un étudiant en mathématiques

de vingt ans (6 expériences; un fonctionnaire de trente-trois

ans (il expériences); une jeune femme mariée de trente ans

(14 expériences) ; enfin une jeune fille de vingt-quatre ans

(8 expériences); en tout 63 expériences.

L'examen de la quantité et du débit du travail effectué sous

l'influence de la musique montre qu'elle n'agit pas toujours sur

l'appareil moteur volontaire comme le voudrais la formule d'après

laquelle une musique gaie augmenterait l'activité de cet appareil,

tandis qu'une musique triste la diminuerait. Il s'en faut de beau-

coup. Dans les cas mêmes où tout porte à croire que la musique

va exciter l'appareil moteur volontaire, dans la danse par exemple,

il ne faut pas du tout s'attendre il ce qu'il en soit ainsi. Pourquoi

en effet supposer que chez tout homme une musique excitante

gaie stimulera infailliblement,' d'un seul coup, avant tout la por-

tion de cet appareil qui doit être occupée au travail prescrit ?

Cela aura lieu chez quelques personnes; chez d'autres c'est moins

le thème musical que l'association harmonique des sons aux con-

ditions du travail qui imprimera à l'appareil musculaire une

extrême activité. Il y a même des cas dans lesquels c'est un mor-

ceau mélancolique qui a présidé à l'augmentation du travail.

Faut-il par suite penser que lorsqu'une musique gaie excite trop

d'éléments, l'appareil moteur volontaire en pâtit, tandis que quand

une musique triste affaiblit certains éléments, l'appareil moteur

volontaire est susceptible de fournir une plus grande somme d'é-

nergie ? Sait-on au reste exactement l'étendue de la dépression dont

une musique triste est capable sur les diverses parties de l'appa-

reil moteur volontaire ? En dehors même de la question des indi-

vidus plus ou moins accessibles à l'influence des thèmes mélanco-

liques ou guerriers, est-ce que vraiment la musique triste contient

en soi exclusivement des éléments d'influence déprimante ? Ne

possède-l-elle pas une association harmonique de sons agréable à

l'organisme qui, par elle-même, indépendamment des émotions et

des images éveillées plus ou moins, à un degré plus ou moins vif,

dans le même instant, peut, à l'instar d'autres sensations agréables,

agir jusqu'à un certain point par l'idée stimulante ? On peut faire

un raisonnement inverse pour lés cas où les conditions du travail

à accomplir étant comparativement faciles, la musique s'est tra-

duite par une diminution du travail, tandis qu'elle a fait accom-

plir une plus grande somme de travail en des conditions où ce der-

nier était pénible. P. KERA V AL.

Archives, 2« série, t. XVIII. 2

338 REVUE d'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

1.I1. Monocéhromatopsie et achromatopsie ; par W. ALTEa (Neurolog.

Cenl1'alblalt, XXII, 1903).

Chez un paralytique général qui est liés probablement hémi-

achromatopsique, se produisent plusieurs accès de monochroma-

topsie pour le vert. Trois de ces accès n'entraînent aucun incon-

vénient à leur suite. Pendant les deux autres, alors que la mono-

chromatopsie rétrocède progressivement il se produit de l'a-

chromatopsie. Nulle trace d'ailleurs d'érythropsie secondaire.

M. ALTER tente l'explication du mécanisme de ces phénomènes par

une théorie nouvelle d'une fonction bi-polaire attribuable au pro-

toplasma des articles externes des cônes. La théorie de la fonction

bi-polaire appartient à M. de Iiu.vowsr,r; elle sera développée dans

un autre travail; nous l'examinerons alors en même temps que

l'application qu'en a faite M. Altéra la dualité du protoplasma en

question. P. KERAYAL.

LX. Du trouble de la marche de flanc chez les hémiplégiques; par

A. SCIIÜLLER. (Neurolog. Cenlralbl. XXII, 1903.)

Pour marcher de flanc ou de côté en allant vers la droite, on

commence par pencher le corps à gauche, on se balance sur la

jambe gauche, on soulève la jambe droite que l'on porte plus loin

vers la droite, puis on redresse le tronc, on place le pied droit sur

le sol à une certaine distance de l'autre ; finalement on soulève la

jambe gauche pour la placer auprès de la jambe droite. On a fait

ainsi un pas à droite.

Chez l'hémiplégique la marche de flanc vers le côté paralysé ne

se distingue pas essentiellement de la marche de flanc normale,

tandis que la marche de côté vers le côté sain est défectueuse.

Supposons un état spasmodique de l'extrémité droite, l'hémiplé-

gique va normalement de côté vers la droite, tandis que pour

. aller vers la gauche il traîne le membre droit au moment où il

doit le rapprocher du membre gauche. Cela tient à ce que la

jambe spasmodique a subi un allongement dû à l'extension de

toutes les articulations du membre inlérieur (Mann). La jambe

droite étant plus longue que la gauche, elle traîne sur le sol au

moment où le patient doit l'attirer vers la jambe gauche; il n'en

est pas ainsi quand il s'agit de rapprocher la jambe gauche de la

jambe droite quand le malade marche de côté vers le côté droit

paralysé. P. KERAVaL.

LXI. Contribution à la psychophysiologie du négativisme; par Il.

Vocn (Cenlrulblult sur Ne1'venhei ? llnde, XXV, N. F. XIV, 1903.)

Le négativisme ou délire d'opposition, est comme tous les au-

tres symptômes catatoniques dû à l'exagération des impressions

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 339 '

corticales. Il est surtout dû à ce que les phénomènes de nutrition

intracorticale qui correspondent à l'exécution d'un mouvement

subsistent chez ces malades après l'exécution de ce mouvement et

empêchent que les phénomènes de nutrition corticale propres au

mouvement suivant ne se substituent à temps aux premiers.

Mais pourquoi cette persévérance du mécanisme psychomoteur

d'un mouvement donné produit-elle un mouvement antagoniste ? ' ?

Cela tient à ce que tout mouvement d'un groupe quelconque de

muscles s'accompagne normalement de l'innervation des muscles

antagonistes. Quand je fléchis l'avant bras sur le bras, mon biceps

se tend aussi bien que mon triceps; si j'accentue ce mouvement

de flexion, la contraction du biceps augmente tandis que celle du

triceps décroît, ce qui n'empêche que pendant tout ce temps ne

subsiste une certaine tension du triceps; s'il n'en était pas ainsi

je ne pourrais interrompre brusquement ce mouvement, ni le ré-

gulariser avec précision. Désignons la contraction du biceps para,

celle du triceps par b ; le processus psychomoteur du centre du

biceps par a', celui du centre du triceps par b'. Quand je dis au

catatonique de continuer à fléchir l'avant-bras, il faut que la con-

traction du biceps augmente (a + x), et que celle du triceps di-

minue (b - y) ; il doit alors se produire dans le centre cortical du

biceps et' + x, et dans le centre cortical du triceps bi - y. Or

l'écorce étant déjà occupée par d'autres phénomènes corticaux qui

ne sont pas encore effacés, le catatonique n'obtiendra pas d'em-

blée ni (il - x, ni bl - y; aussi le mouvement n'a-t-il pas lieu

instantanément. Puis quand a lieu finalement une autre flexion

de l'avant-bras, quand en somme la tension du triceps diminue

(bc y ! , la forte tension du triceps demeure néanmoins aux

aguets, de sorte que, pour un rien, elle reparaît et qu'alors c'est

b qui revient et qui s'oppose à la flexion de l'avant-bras commen-

cée ou en train.

Le catatonique ayant souvent éprouvé la difficulté mécanique

qu'il ressent à obtempérer aux ordres reçus, à cause de l'inter-

vention contre sa volonté de ses antagonistes, il se dit qu'il est

inutile d'essayer, qu'il ne réussisra pas et il en est inquiet, an-

xieux. De là le cachet souvent psychique du négativisme. Le malade

a l'air récalcitrant et de mauvaise humeur. Il peut être assiégé de

toutes sortes de pensées sur le motif, le sens, le but, de cette sujé-

tion motrice; il s'y peut ajouter des idées délirantes, des halluci-

nations sensorielles qu'on prend pour la cause et qui ne sont que

l'effet.

Est-ce que nos idées psychomotrices ne sont pas à nous-

mêmes arrêtées régulièrement et au besoin contrôlées par des idées

antagonistes ? En ce cas, il faudrait se représenter le négativisme

catatonique comme on se représente le mécanisme des instincts

et des phénomènes de la volonté supérieure. P. KERAYAL.

340 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

LXII. Contribution à la connaissance des lésions corticales cir-

conscrites de la région motrice chez l'homme ; par H. Li ? I.

(Newologisches Centralbl. XXII, 1903.)

Un homme de vingt-huit ans reçoit dans le pariétal droit un

coup de couteau à 1 centimètre de la suture sagittale, obhque-

ment dirigé en dehors et en avant sur une étendue de 2 centi-

mètres ; la plaie occupe le plan vertical des deux apophyses mas-

toïdes. La lame a pénétré dans le cerveau de 4 centimètres.

lien résulte des accidents immédiats et consécutifs qui permettent

de constituer la localisation des lésions (figure d'orientation cor-

respondante). M. Lévi procède à une étude critique des symptômes

qui d'ailleurs s'améliorent. Comparant ce cas particulier avec les

observations des auteurs et des expérimentateurs, il arrive aux

conclusions suivantes.

Les lésions corticales du centre de la jambe et les lésions sous-

corticales du centre du bras se traduisent par des troubles de la

motilité, des troubles de la sensibilité, de l'ataxie, de l'atrophie

musculaire.

1. Les troubles de la motilité sont : a, une paralysie complète du

membre supérieur lorsque le foyer se limite à la couronne rayon-

nante ; b, «ne parésie de la jambe lorsqu'il se produit une des-

truction modérément étendue de son centre cortical ; c, des acci-

dents irritatifs et des spasmes susceptibles de rétrocéder.

2. En fait de troubles de la sensibilité, on constate : a, avant tout

des perturbations du sens musculaire et du sens stéréognostique;

b. le malade ne peut localiser les sensations tactiles et thermiques;

il localise moins difficilement les impressions douloureuses. Les

troubles de la sensibilité sont en somme tout aussi graves quand

il y a lésion sous-corticale immédiate de la couronne rayonnante

que quand il s'agit d'une lésion directe de l'écorce.

3. 1,'ataxie tend moins à rétrograder que les autres symptômes.

Il se produit en l'espèce, ce qui a lieu chez l'enfant qui apprend à

marcher, à se saisir des objets, à parler. Il faut, avant que les

mouvements voulus se fassent convenablement, que se déposent

dans les parties du cerveau appelées à remplacer la substance

nerveuse détruite de nouvelles images commémoratives des mou-

vements.

4. Il se produit dans la jambe parétique une atrophie musculaire

précoce qui dépend du foyer cérébral. P. KERAVAL.

LXIII. L'imprégnation des cylindraxes à l'argent; par M' 13 ! tts-

chowsky. (Neurolog. Centralblatl, XXI, 1902). - L'imprégnation

à l'argent des neurofibrilles ; par le même. (Neurolog. Cuoral-

blatt, XXII, 1903).

M. Bieischowsky fait connaître deux procédés :

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 341

Premier procédé. Fixer préalablement les pièces dans une

solution de formol à 10 p. 100 ; effectuer des coupes sur le. micro-

tome à congélation. Ces coupes sont remises dans la solution de

formol à 10 p. 100. On les immerge alors dans une solution de

nitrate d'argent ammoniacale préparée par l'addition à un volume

quelconque de liqueur ammoniacale officinale de gouttes d'une

solution à 10 p. 100 d'AgAz03 suffisantes pour obtenir un préci-

pité blanchâtre que l'on fait disparaître par une nouvelle addition

d'Az H3 : l'odeur doit rester ammonicale. Les coupes sont ensuite

placées dans le formol à 10 p. 100 ; on ajoute de l'eau alcaline,

de façon à obtenir au bout d'un certain temps une coulenr jau-

nâtre. Des immersions successives dans le nitrate et le formol

servent à nuancer la teinte jusqu'à ce que la substance grise ait

un ton brun jaunâtre. On lave alternativement et définitivement

à l'eau distillée. A ce moment, tous les cylindraxes sont brun

foncé ou noir, les cellules jaunâtres ou brunes, le reste des

tissus forme un fond jaunâtre diffus d'un beau contraste. Il faut

alors fixer à l'or ou au platine. (Voir le mémoire).

Par ce procédé, les cellules nerveuses témoignent fréquemment

d'une structure nettement fibrillaire surtout dans les dendrites ;

les cylindraxes de calibre quelconque sont homogènes.

Deuxième procédé. Les coupes ne sont pas directement impré-

gnées de la solution argentique ammoniacale. On plonge les

coupes imbibées de nitrate d'argent dans des solutions ammonia-

cales faibles. (Technique très compliquée à lire dans l'original.)

Cette nouvelle méthode fait apparaître les fibrilles inlra-cellu-

lilires, les cylindraxes et les réseaux de Golgi (figures). Les fibrilles

intra-rellulaires ressemblent énormément à celles qu'a montrées

Bethe. On peut souvent suivre les fibrilles de la portion de cellule

vectrice du noyau à travers le cône originel jusque dans l'axone;

on constate cependant qu'il n'y en a qu'une petite partie qui par-

ticipe à la formation de l'axone. La structure péricellulaire appa-

raît sous forme de réseaux plus ou moins épais entourant le pro-

toplasme cellulaire et les dendrites; cette disposition est iden-

tique à celle des réseaux de Golgi. Ces réseaux en certains types

de petites cellules font le tour de la périphérie du corps de la

cellule et des dendrites à l'état de larges raies noires, dépourvues

de détails plus fins de structure : sont-elles constituées par de la

neurokératine, ou par de la névroglie ? Sont-ce les expansions

terminales péricellulaires directes d'axones venus de loin ? On ne

sait. Le procédé rend visible les cylindraxes des fibres nerveuses

myéliniques ou amyéliniques.

Outre ces éléments fondamentaux de l'écorce du cerveau et du

cervelet, il n'est pas rare de voir, surtout dans l'écorce cérébel-

leuse, des orties tout à fait semblables à celles qu'Apàthy a

décrites chez les invertébrés.

3t2 REVUE d'anatomie ET DE physiologie pathologiques.

En dépit de ces perfectionnements, la méthode a pour inconvé-

nients de colorer simultanément le tissu conjonctif fibrillaire intra

et péri-vasculaire ou méningé; les fibrilles de névroglie surtout

quaud la pièce a été plongée trop tôt dans la solution fixatrice de

formol ; la substance chromophile des cellules, notamment quand

on fait agir trop peu de temps l'ammoniaque sur les fibrilles.

Elle l'emporte sur la méthode de Golgi. Au point de vue de l'his-

thologie fine, elle lui est inférieure pour l'étude anatomique des

fibres des organes centraux. P. KERAVAL.

LXIV. Que sont les corpuscules de Nissl ? par C. Ciienzinski.

(Neurolog. Cenlmlbt., XXII, 1903).

L'examen de coupes longitudinales (antéropostérieures ou trans-

versales) des cellules des cornes antérieures de la moelle du boeuf

traité par la méthode de Nissl (bleu de méthylène, bleu de tolui-

dine ou thiolnine) montre l'absence complète des corpuscules de

Nissl. Le protoplasma tout entier est rempli de raies et non de

granulations, de mottes, d'amas sans ordre de substance colorée.

Partout des fibres formant une touffe autour du noyau; les unes

vont d'un prolongement à l'autre du même côté en dessinant un

arc sensiblement parallèle au bord de la cellule, dont la convexité

regarde le noyau ; les autres vont d'un pôle à l'autre en'entourant

le noyau qu'elles regardent par leur concavité. Ces raies sont

d'ailleurs ondulées et non planes (figures). Chez l'homme les raies

ont généralement l'aspect de chaînes; disposées comme chez le

boeuf, elles sont formées de courts bâtonnets ou fuseaux qui plé-

sentent des intervalles non colorés; il en est de même pour la

moelle du lapin.

Ces dessins n'ont rien de commun avec les fibrilles de Betle ou

d'Apàthy d'ailleurs obtenues par un traitement chimique bien

plus compliqué. Ils se rapprocheraient plutôt du feutrage des

cellules nerveuses de la rétine décrit par Uogiel. Les raies parais-

sent formées des conglomérats de granulations signalés par de

Quervain dans les corpuscules de Nissl. Et les mêmes cellules de

la moelle soumise à des coupes horizontales et transversales

révèlent bien les granulations et mottes de Nissl.

Les granides de Nissl sont donc la coupe optique horizontale des

raies longitudinales (transverses et obliques) qu'on pourrait designer

sous le nom de fibres et qui semblent être les intégrantes absolues

de la cellule nerveuse . P. Ki.raval.

LXV. Les formes pathologiques de la rougeur émotive ; par

IlAttTEMUKHG. (Revue de médecine. Août 1902.)

Trois observations. Dans deux de ces cas, la rougeur émotive,

devenue une obsession pour le sujet, avait engendré un état syn-

revue d'anatomie ET DE physiologie pathologiques. 343

dromique de phobie, avec angoisse, découragement, dégoût de la

vie et même tendance au suicide.

LXVI. De l'élément psychique dans l'hémianesthésie hystérique ;

par 13EwnEu. (Bévue de médecine. Août 1902.)

Dans un article paru antérieurement dans la Revue de médecine

(mars 1901), l'auteur a essayé d'établir que l'anesthésie hystérique

n'est pas une anesthésie vraie, qu'il y a en réalité sensation perçue,

mais qu'elle est aussitôt inhibée par suggestion et entre dans le

domaine de l'inconscient, c'est-à-dire qu'il y a eu en réalité une

amnésie.

Il rapporte dans un nouvel article deux observations d'hémia-

nestésie d'origine organique, mais présentant les caractères cli-

niques des anesthésies hystériques ou psychiques. Ce fait peut

s'expliquer par l'hypothèse qu'un élément psychique est venu se

greffer sur l'élément organique prémonitoire, le malade exagérant

son anesthésie par autosuggestion ; l'examen ultérieur vint confir-

mer cette hypothèse. M. H.

LXX. Du reflexe carpophalangien ; par W. de Bechterew. (06oré-

nié psichiatrii, VII, 1902.) - Du réflexe carpométacarpien, par

le même. (Neurolog. Centralblatl, XXII, 1903.)

Même article en russe et en allemand. Ce réflexe s'observe surtout

dans les cas d'hémiparésie, d'hémiplégie, et en général dans les

paralysies de l'extrémité supérieure d'origine centrale. Prend-on la

main du côté malade dans la sienne, le dos en haut et les troi-

sième et seconde phalanges digitales pendantes, et frappe-t-on

avec le marteau sur le carpe et les parties adjacentes du méta-

carpe, particulièrement sur le côté externe, il se produit des

mouvements de flexion de toutes les phalanges, sauf du pouce.

Quand l'hyperexcitabilité réflexe ést très exagérée, ce même mou-

vement de flexion des phalanges des doigts peut être provoqué

par l'excitation mécanique d'autres parties de la main, entre

autres, des tendons des fléchisseurs.

Ce réflexe carpométacarpien provient de la transmission de

l'excitation des tendons qui couvrent le dos de la main au niveau

- du carpe et de la racine du métacarpe aux fléchisseurs des pha-

langes digitales, entre autres aux interosseux. L'arc réflexe

correspondant occupe le niveau de la première racine thoracique

et des racines cervicales inférieures. Son apparition indique donc

une lésion du neurone moteur central au-dessus du renflement

cervical. On le trouve surtout dans les hémiparésies et hémiplé-

gies organiques d'origine basale, capsulaire ou corticale. La

percussion de la région du carpe et de la partie limitrophe du

métacarpe en fait un réflexe périostiqne et non cutané.

P. 1ERA\'dL.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

XXXI. Discussion de quelques nouveaux travaux sur la surdité ver-

bale ; par Il. Lirraianrr. De la localisation des diverses for-

mes de la surdité verbale; par E.-Brscaorr. (Centralbl. f. Nel'-

venheilk. XXIV. N. F. XII. 1901.)

Ce sont les travaux de Déjerine et Sérieux (Revue de psychiatrie,

1898), de Bischoff (Archiv (. psychwt1'ie, 1. XXXU, 1899),deVeraguth

. etKast (Deutsche Zeitschr. f. IYe·venlieillc, t. XVII et XVIII, 1900), de

Thomas (La parole, 1900), qui font les frais de cette étude criti-

que. M. Bischoff critique à son tour la critique de M. Liepmann :

il pense que l'existence de la surdité verbale pure dans le cas de

lésion bilatérale du lobe temporal n'est pas prouvée, qu'elle est

simplement possible. P. Keraval.

XXXII. Une observation de myélite apoplectique; par G. CLaT.o.

(Centralbl. f'. Ne¡'venheilk. XX 1 V. N. F. XII. 1901.)

Il s'agit d'un homme de trente-six ans qui, à la fin de 1899, se

plaignait de douleurs dans les jambes avec affaiblissement du

bras et de la jambe gauches. Il racontait qu'à l'âge de quatorzeà

seize ans, il s'était beaucoup servi d'eau-forte, qu'il avait été mai-

gre et délicat jusqu'à seize ans. Parents âgés de soixante et onze

et soixante-douze ans. Pas d'hérédité neiveuse ni d'antécédents

morbides. Il est marié et père de deux enfants dont l'aîné est bien

portant et le plus jeune a eu une fois une affection pulmonaire ( ? ).

Sa femme a avorté deux fois.

A l'âge de seize ans, il a été atteint d'un abcès dentaire au niveau

de la canine gauche : il souillait alors dans des tubes de laiton qui

étaient placés dans l'eau-forte. Il semble avoir eu, à la suite, un

empyème de l'antre d'Highmore. Vingt et un jours après l'incision,

il était guéri. Deux mois plus tard, un beau matin, sentiment

d'engourdissement de la jambe droite avec paralysie du bras etde

la jambe gauches ; pendant quatorze jours cathétérisme et lave-

ments nécessaires; épreintes vésicales durant quatorze jours en-

core. La jambe gauche se rétablit complètement en cinq mois; la

main gauche s'est simplement améliorée.

On constate actuellement de l'atrophie avec raccourcissement et

raideur de la jambe gauche : le réflexe patellaire y est très exa-

géré, il existe du clonus podalique. Signe de Babinsky à gauche,

point à droite. L'avant-bras gauche est fort maigre ; la sensibilité

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 345

thermique est diminuée, de même qu'à la main de ce côté. Les

rayons de Roentgen témoignent d'un amoindrissement du squelette

en ces deux organes. L'atrophie musculaire est des plus nette à la

face antérieure de l'avant-bras et surtout à l'éminence thénar,

dans les espaces interosseux. Les fléchisseurs du pouce et de l'in-

dex, qui ne fonctionnent pas, ont totalemeut perdu leur excitabi-

lité électrique : les autres muscles, qui ne sont qu'affaiblis, ne

l'ont pas complètement perdue. Myosis à gauche ; réaction des

pupilles à la lumière normale des deux côtés.

On a donc sous les yeux les traces d'une affection spinale aiguë.

L'atrophie de la jambe gauche, sans accidents paralytiques, tient

à ce que l'affection est survenue pendant la période de développe-

ment du sujet. L'atrophie avec paralysie musculaire et ? 011

dégénérative de l'extrémité supérieure gauche indique u]

des cellules des cornes antérieures. Le myosis gauche p<

croire qu'elle est descendue jusqu'à la huitième racine cervi

la première racine dorsale. La paralysie motrice à gauche

pagnée d'un émoussement de la sensibilité à droite, mon

faible que soit ce syndrome de Brown-Séquard, que l'af

dû au début être plutôt diffuse, qu'elle a, la vessie et le

ayant été pris, intéressé plus de la moitié de la coupe tra

Les phénomènes spasmodiques et le signe de Babinsky témoi-

gnent de la participation de la substance des cordons latéraux

des pyramides, et, par conséquent de l'atteinte de la substance

blanche. ,

En somme un foyer de la substance grise de la moelle cervicale,

de la corne antérieure, a occupé l'étendue comprise entre le

septième segment cervical et le premier segment dorsal, et il a

aussi dès l'origine affecté toute la substance blanche du côté

gauche. ,

Quelle en était la nature * ?

Il s'est manifesté une paralysie spinale aiguë portant sur l'appa-

reil moteur du côté gauche, déterminant des troubles de la sensi-

bilité de la jambe droite ainsi qu'une paralysie vésicale et rectale.

Tout s'est rapidement résolu; il n'est resté qu'une paralysie dégé-

nérative de la main gauche et des traces de troubles sensitifs. Cela

ressemble a une hématomyélie. Les phénomènes d'apoplexie spi-

nale ont partiellement rétrocédé dès les premiers temps de l'affec-

tion, dès que la compression due à l'extravasat a cessé, et comme

d'ordinaire, nous ne retrouvons que les résidus. Mais nous ne

retrouvons aucune des causes occasionnelles nécessaires à cette

hémorrhagies. Impossible de penser la poliomyélite : il n'y a pas

eu de stade prodromique fébrile; le processus s'est étendu au delà

du domaine de la substance grise. La rapidité de la marche exclut

une myélite aiguë ordinaire.

L'idée d'une myélite apoplectique se justifie par l'abcès dentaire

346 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

compliqué de suppuration de l'antre d'Highmore. Ce foyer a pu

infecter la molle et déterminer l'inflammation apoplectique, que

les bactéries-aient agi directement ou par leurs toxines. A l'appui

les observations de Mayer (Arbeit, ccus d. Neurolog. Institut cah.,

VII, 1900), et les expériences de Homen et Laitinen, de Widal et

Bezançon : l'inoculation de streptocoques a été suivie de paralysies

soudaines mortelles avec lésions de la moelle ressemblant à celles

de la myélite aiguë. , P. KERAVAL.

XXXIII. Des affections mentales et nerveuses à la période secon-

daire de la syphilis; par M. Scu.ISwvrTSCU. (06oxrézié psichiatrii,

VI, 1901.)

Etude parallèle de 3 observations, caractérisées par : de l'exci-

tation maniaque, de la confusion mentale avec stupeur et cata-

tonie, une paralysie faciale périphérique. Les deux premières

sont évidemment, dit l'auteur, des psychoses syphilitiques secon-

daires. Elles se distinguent cliniquement peu des psychoses toxi-

ques et autotoxiques. En attendant, les renseignements commé-

moratifs, la coexistence simultanée de tels et tels signes, et sur-

tout le succès du traitement spécifique constituent les éléments

les plus importants du diagnostic des troubles syphilitiques de la

sphère nerveuse et mentale. P. Keraval.

XXXIV. De l'ataxie cérébelleuse [aiguë ; par W.-M. 13ECIlTrItEW.

(Ubozrénaé psichiatrii, VI, 1901. - Neurologisch. Ccntmlbt., XXI,

1902.)

Schnitzer dans ses questions de médecine neuropsychique

(Voprossy Navno-psiehitseheslwi J11edilziny, 1901), publie un cas

d'ataxie cérébelleuse aiguë, qui rappelle les observations de l'au-

teur (Obo : ¡l'enié psiclciatrü, 1900), avec cette différence qu'il y a

dans ce cas non alcoolisme chronique, mais tare héréditaire et

syphilis. La cause occasionnelle fut, en l'espèce, une intoxication

par du poisson. Le facteur immédiat fût-il l'empoisonnement de

l'organisme par les produits de la fermentation putride, ou un

épanchement de sang dans le cervelet sous l'influence des efforts

de vomissements ? On ne sait.

En tout cas- le syndrome ataxie cérébelleuse aiguë se développe

non seulement chez les alcooliques, mais en d'autres conditions.

Il y a des raisons de penser que la cause anatomique est une

lésion du cervelet, très probablement d'origine vasculaire. Par

suite toutes les causes et circonstances qui contribuent à léser les

vaisseaux du cervelet, à produire des hémorrhagies, des throm-

boses, des embolies, etc., de cet organe, peuvent engendrer le

syndrome en question. P. KERAYAL.

, REVUE DE pathologie NERVEUSE. 347

XXXV. Observation remarquable d'hémicranie ; par G. FLATAU

(Cezzlrcelblatt f. Nervenheithunde, XXV. N. F. XIII, 1902).

Remarquable complication d'un accès de migraine; par L.

HOEFL1>LUR (Neurolog. Centralbl. , XXII, 1903).

L'observation de M. FLAT.au concerne un homme de quarante-

huit ans, ayant eu, il y a vingt et un ans, une encéphalite infec-

tieuse. Tares héréditaires. A l'âge de seize ans, sous l'influence du

surmenage, il a son premier accès de migraine ophlhalrnique;

celui-ci se complique parfois de paresthésie de la face et du membre

supérieur du côté opposé à la céphalalgie. Finalement il s'y ajoute

de ['aphasie ; impossibilité de trouver les sons qui correspondent

aux mots, d'assembler les images écrites, de les composer. Durée :

près de dix jours; disparition graduelle rapide. 11 y a lieu de

penser à une altération ancienne de certains centres dont dépen-

dent les phénomènes de contracture vasculaire; peut-être s'agit-il

d'altérations fugitives des vaisseaux.

Deux espèces de complications dans l'observation de M. Hall-

MAYR. Chez une femme de cinquante-sept ans, atteinte de migraine

opht1wlmiqlle, un beau jour, l'hénziscotovze Sll1'Vit à la disparition

de l'hémicranie et de tout symptôme cérébral, pendant vingt-six

jours; le champ visuel normal ne se rétablit que graduellement.

Pendant tout ce temps intégrité du sensorium; rien d'hysté-

rique ; aucune simulation. Il est à croire qu'il s'est agi d'une toxine

qui a lésé les cellules des couches nucléaires du nerf optique et

leur parenchyme; l'organisme se réparant, les substances de pré-

servation naturelle du sang reprirent leur empire, et les cellules

des noyaux du nerf se remirent à fonctionner normalement.

Chez la même malade, une autre fois, un violent accès de mi-

graine s'accompagne d'inconscience totale qui dure plus de dix

jours pendant lesquels la patiente vit d'une existence mécanique

(conservation des impressions et des reflexes), dépourvue de tout

phénomène d'association intra-cérébral; amnésie absolue consé-

cutive. Cette combinaison d'un accès de migraine avec un épuise-

ment neurasthénique du cerveau émanait d'énormes soucis,- d'émo-

tions, de surmenage. Cette fois l'agent nocif, trouvant un cerveau

remarquablement préparé, a déterminé sur l'écorce entière un

trouble fonctionnel excessif; nerfs sensoriels, sphère psychomo-

trice et sensorielle ont été affectés, et, quand l'accès de migraine

proprement dit eut cessé, il persista encore des symptômes d'exci-

tation cérébrale. P. Keraval.

XXXVI. Les états d'obnubilation psychique des hystériques et leur

paralogie ; par A. \1'ESTUnnL (Neurolog, CentralGlcclt., XXII.

1903).

A la lumière de quatre observations, l'auteur établit que

348 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

la paralogie constitue un symptôme qui n'est pas du tout uni-

taire puisqu'on le rencontre à un degré très marqué en des trou-

bles psychiques de diverses espèces, tels que : l'hystérie et la

démence précoce. On le note, encore comme prélude du stade

d'agitation de la folie circulaire et, alors, il est produit non pas

par une idéogénèse diminuée, défectueuse ou inexacte, mais par

une exagération de l'idéation. ' ,

Le mécanisme en est du reste différent. Dans les états d'ob1w-

bilation crépusculaire des hystériques, les malades se donnent évi-

demment la peine de réfléchir, ils ont l'air obtus, confus, à demi-con-

scients, se fatiguent à répondre à de longues questions, parlent

lentement comme s'ils sortaient d'un rêve. Ce symptôme est la

suite ou l'escorte de certaines pertubations mentales de l'état

hystérique dont la nature est pour nous tout aussi énigmatique

que l'hystérie même.

Il en est tout autrement chez le catatonique. Ici pas de trouble

de la conscience, pas de sommation, pas d'état crépusculaire; les

réponses absurdes sont extraordinairement rapides, elles partent

comme des balles de pistolets, souvent avant que la question ait

été complètement formulée. La réponse à côté s'accompagne très

fréquemment de verbigération, certaines idées sont doublées de

fusées rhytmiques de nombres ou de mots qui n'ont souvent qu'un

rapport très éloigné, ou n'ont pas de rapport du tout avec la ques-

tion. Les réponses absurdes ne tiennent pas à la perte «permanente

des connaissances et perceptions, elles ne dérivent pas directe-

ment du processus d'abêtissement ; le symptôme est la manifesta-

tion du délire d'opposition (négativisme) de la catatonie.

P. Keraval.

XXXVII. De la valeur diagnostique des irrégularités des bords des

pupilles dans les maladies nerveuses dites organiques ; par

J. Pilez (Neurolog. Cenlralblatt, XII, 1903).

Nous ne pouvons donner que les conclusions des observations

cliniques et des recherches expérimentales de ce mémoire qu'ac-

compagnent d'édifiantes figures.

I. Le bord des pupilles est susceptible de présenter les alté-

rations pathologiques suivantes. Ce sont : a. des irrégularités

temporaires ou variables produites par une mobilité inégale,

variable, de certains segments de l'iris; b. des changements de

positions de la pupille entière; c. des irrégularités constantes du

bord pupillaire. - Il. Toutes ces altérations constituent des phé-

nomènes très fréquents dans la paralysie générale, le tabès dorsal,

la syphilis cérébrospinale. - ici. Elles se montrent aussi dans le

cours d'autres maladies mentales et nerveuses; on ne les observe

qu'exceptionnellement chez l'individu sain. IV. On peut occa-

- REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 349

sionnellement voir survenir dans la catatonie la mobilité passa

gère, ou variable, inégale de certains segments de l'iris. V.

Les irrégularités du bord pupillaire ont une grosse valeur diagnos-

tique incontestable, parce que parfois elles précèdent l'apparition

du signe d'Argyll Robertson et peuvent constituer pour ainsi dire

le stade initial de ce signe. VI. Les altérations de forme de la

pupille que nous produisons expérimentalement étant très sem-

blables en somme aux irrégularités pathologiques du bord de la.

pupille, il y a lieu de supposer que ces dérnières sont simple-

ment l'expression d'un processus pathologique d'excitation, de

parésie ou de paralysie de certains segments de l'iris, produit par

des lésions pathologiques de certains filets des nerfs ciliaires

courts ou longs, ou de leurs noyaux. VU. L'inégale mobilité de

certains segments de l'iris dépend d'une parésie du filet corres-

pondant des nerfs ciliaires : parésie partielle de l'iris. VIII. Les

changements de position de la pupille entière sont l'expression

de la combinaison d'états d'excitation, de parésie ou de paralysie

des différents filets des nerfs ciliaires courts ou longs. IX. Les

irrégularités constantes du bord des pupilles sont l'expression

d'une paralysie définitive de certains segments de l'iris : irido-

plégie partielle. Elles sont, selon toutes probabilités, produites par

des lésions pathologiques des filets pupillaires correspondants ou

de leurs noyaux (atrophie des cellules nerveuses correspondantes).

X. Chez un enfant nouveau-né, j'ai vu la pupille présenter les

formes les plus différentes oe transformant les unes dans les

autres; ce changement continuel de forme de la pupille prouve

que chez le nouveau-né il n'existe parfois pas encore de synergie

dans la mobilité des divers segments de l'iris, que cette synergie

ne se développe que plus tard. P. Keiuval.

XXXVIII. L'attaque convulsive de toux hystérique; par ADaDIE ET

Grenier de CARDENAL (Bévue de médecine, Novembre 1902.)

Observations de trois jeunes filles chez qui la crainte d'une

affection pulmonaire détermina des crises nerveuses alternant

avec des crises de toux. L'absence de lésions pulmonaires, les

stigmates hystériques évidents, l'aura précédant l'apparition de la

toux permettent d'affirmer qu'il s'agit là d'une toux de nature

hystérique. On retrouve dans ces attaques de toux les trois pério-

des : préconvulsive, convulsive, post-convulsive de la grande atta-

que d'hystérie : la période préconvulsive comprenant des auras

sensitives (boule abdominale, gonflement thoracique, constriction

laryngée) ; la deuxième période comprenant une phase tonique

avec immobilisation du thorax, tétanisations des muscles inspi-

ratoires, efforts d'inspirations avec bruits laryngés, et une phase

clonique : convulsions thoraciques et abdominales avec expirations

330 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

longues et convulsives et toux explosive ; la troisième période

enfin correspondant à la période post-convulsive et se terminant

d'ordinaire brusquement. Sans hypnose ni délire, les malades

passent sans transitions de l'état convulsif à l'état normal. M. II.

\11V. Sur un cas de paramioclonus multiplex. Etat psychi-

que spécial; par l3rrTn.wu. (Bévue de médecine. Novembre 1902.)

- M. H.

XL. Hérédosyphylis cérébrale tardive; par L. HAUDnIx. (P&IiCli-

nique de Bruxelles. Novembre 1902.)

Un cas d'hérédosyphilis chez un enfant de dix ans. Des sym-

ptômes fébriles persistant avaient fait croire à une fièvre typhoïde

et ce n'est qu'un examen ultérieur qui permit d'attribuer les troubles

à une lésion syphilitique de la base du crâne.

XLI. Observation de catatonie en relation avec la première mens-

truation ; par H. itIUCna, (Neurolog. Centralbl. XXI. 1902.)

Il s'agit d'une fillette de quinze ans. Plusieurs jours d'agitation

motrice avec délire terrifiant sont suivis de stupeur avec attitudes

et mouvements stéréotypés, mutacisme, refus de nourriture, ,en-

sion des muscles du corps, accès spasmodiques catatoniques

interrompus par la rigidité habituelle. Verbigération quand la

malade parle. L'auteur croit devoir rattacher ces accidents à la

première menstruation, la jeune personne ne paraissant avoir ' à

aucune tare héréditaire, et, tout en étant modérément douée, sem-

blant jouir d'un état mental normal jusqu'alors. L'âge constitue

une rareté pour l'explosion de la catatonie. P. Keraval.

XLIL De la sensibilité de l'arcade zygomatique, comme signe d'af-

fection organique des parties essentielles du cerveau et des mé-

ninges ; par W.-M. llCHTElOEW. (06oj : re't : ! e psiehiutnü, VII,

1902.)

Ce signe aurait de la valeur dans les lésions syphilitiques à

forme de méningo-encéphalite et dans les affections d'origine

vasculaire. Parfois même les processus pathologiques anciens des

parties essentielles du cerveau se trahissent par une sensibilité

marquée de l'arcade zygomatique, très nette dans les cas plus

récents. L'auteur affirme avoir découvert un processus patholo-

gique en foyer par ce procédé, alors que les autres symptômes

étaient en faveur d'un désordre diffus ou même fonctionnel. Cette

sensibilité se peut expliquer par le trait d'union que forme l'ar- t

cade entre deux régions crâniennes : quand on la frappe, elle

ébranle une portion assez notable de la base des enveloppes du

crâne. P. Keraval.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

I. Manie transitoire alcoolique; par E.-N. Iwarrow. (Oborénié

psichiatrii, VI, 1901.)

Il s'agit d'un soldat de vingt-cinq ans ayant brusquement présenté

les symptômes de la manie avec fmeur, le 19 mars 1899 de 11 heures

du soir à 3 heures du matin; il s'endort ensuite d'un profond

sommeil et se réveille sans rien se rappeler de ce qui s'est passé.

A la fin de septembre de la même année, il se réveille à 11 heures

du soir brusquement en criant qu'on lui donne à manger des con-

combres, des melons d'eau, déchire sa chemise, houspille son

matelas; on est obligé de l'attacher et de le maintenir au lit; il se

calme rapidement et s'endort. Le lendemain il dit ne se souvenir

de rien. On le croit épileptique.

Une observation de trois mois démontre qu'il n'a jamais d'atta-

ques, qu'il ne présente aucune anomalie psychique. C'est un

buveur d'ancienne date, porteur de parésie du facial droit, de

tremblements de la langue, des lèvres et des doigts, d'une dévia-

tion en crochet de la langue à droite. Il a bien eu des accès de

manie furieuse instantanés et passagers avec obnubilation de la

conscience, mais sans hallucinations; ce n'était donc pas le délire

hallucinatoire aigu des buveurs. Il ne s'est pas manifesté d'ac-

cidents convulsifs; ce n'était pas de l'épilepsie alcoolique. Il

n'était pas ivre à ce moment; il ne l'avait été ni le jour des

accès, ni la veille. Il n'est pas épileptique. D'où le diagnostic.

P. Kerival.

II. Contribution à l'anatomie pathologique de la maladie de Ba-

sedow : par L. KEDZioR et J. ZANIETOWSKI. (Neurolog. Ccnlrulb.

XX. 1901.

Filehne, Dunlafe et Bienfait ont provoqué chez le lapin les symp-

tômes du goitre exophthalmique en sectionnant les corps restifor-

mes. Voici une observation qui, de concert avec celle de Mendel

(1895), montre une atrophie très accusée du corps restiforme

gauche dans la maladie de Basedow. Les coupes faites au micro-

tome à congélation ou à la main ont été plongées dans une solution'

d'acétate d'urane et d'azotate de potasse, puis colorées au carmin

ammoniacal (solution de Bloch modifiée par Kadyj). Nulle altéra-

tion du cerveau, du cervelet, de la moelle, sauf des foyers d'hé-

morrhagie récents et anciens. Notons qu'il s'agit d'une fillette de

352 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

dix-huit ans, non réglée, malade depuis quatre ans. Par contre,

les parties supérieures du bulbe témoignent a un faible grossisse-

ment de la coloration rouge des faisceaux pyramidaux et des

olives qui contraste avec la couleur jaunâtre des deux corps resti-

formes : le corps restiforme gauche a même une teinte cireuse. Ce

dernier forme un petit ovale d'une dimension près de deux l'ois

inférieure à celle du corps restiforme droit. A un fort grossisse-

ment, le raphé, les noyaux olivaires, les fibres arciformes se dessi-

nent nettement en rouge foncé sur fonds rouge clair; on voit très

bien les fibres du corps restiforme droit, tandis que celles du corps

restiforme gauche sont clairsemées, si rares que l'on croirait

qu'il s'agit de coupes pratiquées à la hauteur du calamus scripto-

rius, où les corps restiformes convergent en arrière, se rappro-

chent, où les fibres diminuent fortement. Le faisceau latéral du

cervelet du côté gauche et le noyau gauche de la dixième paire pa-

raissent aussi plus petits que du côté droit. Les portions moyennes

et inférieures du bulbe sont également asymétriques à gauche,

mais sans différences marquées dans le trajet des fibres.

P. KERAVAL.

III. Convulsions myocloniques dans la paralysie générale pro

gressive; par J.-S. Hermann. (Neurolog. Centralb. XX. 1901).

Il s'agit d'une observation de convulsions myocloniques qui

n'étaient associées ni avec des attaques congestives épiteptifonnes,

ni avec des attaques congestives apoplectiformes. Le diagnostic de

paralysie générale ressort et du tableau clinique, et des lésions

macroscopiques. Les convulsions portèrent plus fréquemment sur

des muscles isolés que sur des groupes de muscles : d'abord uni-

latérales, elles ne devinrent que tardivement bilatérales. Le facial

demeura indemne. A de certains moments les extrémités furent

animées de mouvements involontaires rappelant au plus haut

point les mouvemenls choréiques. La volonté et les émotions

agissaient sur les convulsions de la même manière que sur la

chorée. Ce n'étaient cependant point des mouvements choréiques;

en effet la chorée se manifeste par des mouvements irréguliers,

inopportuns, portant sur divers groupes musculaires en commun

et donnant aux actes un caractère physiologique, avec cette seule

différence qu'ils sont involontaires, irrésistibles. Les muscles

du visage prennent aussi part aux mouvements choréiques, en

déterminant les contorsions de^la physionomie. Chez ce malade,

au contraire, les convulsions occupaient surtout des muscles

isolés qui, par eux-mêmes, n'exercent pas de fonction physiolo-

gique déterminée, tels le sternocléidomastoïdien, certaines paities

des muscles de l'abdomen, des tendons à part. Les convulsions

étaient rapides comme des éclairs, tandis que les mouvements

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 353

choréiques sont beaucoup plus lents. Ce n'étaient pas non plus

des convulsions post-apoplectiques.

La soudaineté de ces convulsions, leur individualisation muscu-

laire, les rapprochent du type de Kemmler, mais elles n'étaient

pas rhythmiques et synchrones aux pulsations du pouls. Elles

n'avaient rien de l'athétose, de la sclérose en plaques : rien non

plus du tic généralisé, la face étant intacte.

Il existait une dégénérescence kystique du rein gaucho. Etaient-ce

des convulsions urémiques ? Elles n'étaient pas épilepliformes, ne

s'accompagnaient pas de perte de connaissance, n'étaient pas sui-

vies de coma; enfin, elles ont duré environ six semaines sans

qu'ily ait eu la moindre perte de connaissance. On n'a observé ni

vomissements, ni modifications du pouls et de la respiration. La

longue persistance des convulsions d'un côté exclusivement, leur

extension en rapport avec la localisation des centres des membres

dans l'écorce, l'absence de convulsions faciales, plaident contre un

trouble moteur toxique. On n'a pas examiné l'urine parla simple

raison que le malade n'a jamais eu d'oedème ni aucun phéno-

mène morbide pouvant faire supposer une affection des reins.

Est-ce de la myoclonie ? Cela y ressemble. L'atteinte de muscles

séparés, de certaines parties de muscles à part, de certains ten-

dons isolément est en sa faveur. On voyait des contractions se

produire sur le sternocléidomastoïdien, le droit de l'abdomen, tels

adducteurs, tels tendons de tels doigts et de tels orteils. C'étaient

des convulsions rapides, soudaines ; même quand le malade était

au repos, les faibles convulsions, qui survenaient alors, étaient, de

temps à autre, interrompues par des mouvements brusques en

éclair. Parfois on observait toute une série desecousses successives

d'un muscle déterminé. Les convulsions faibles ne produisaient

pas d'effet moteur; seules les convulsions fortes, s'étendant simul-

tanément à beaucoup de muscles ou à des groupes musculaires

entiers, faisaient mouvoir l'extrémité correspondante ou les mem-

bres ; les mouvements étaient en ce cas uniformes, liés, c'est-à-

dire que le même mouvement était exécuté plusieurs fois de suite.

Cette particularité nous ramène au tic généralisé, et nous éloigne

des convulsions choréiques. Les muscles de la face étant épargnés,

l'affection côtoie la myoclonie de Friedreich. Ce sujet a aussi pré-

senté des contractions spasmodiques en des muscles homonymes,

mais ni synchrones, ni symétriques s'il arrivait que des convul-

sions bilatérales portassent sur des muscles homonymes, il y avait

entre elles un certain retard. Des convulsions croisées et autres

combinaisons ont été observées également. La volonté n'interrom-

pait pas les phénomènes convulsifs, alors que les émotions les exa-

géraient. Ce qui est propre à la myoclonie, ce sont : les contrac-

tions en éclair, les convulsions de muscles isolés, de portions iso-

lées de muscles, de tendons isolés, l'absence de symétrie et de

Archives, 2' série, t. XV111. ' 23

351 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

simultanéité des contractions. L'absence des réflexes patellaires

tient à ce que la myoclonie est greffée sur la paralysie générale,

qui s'accompagne très souvent de disparition de ces réflexes.

Silvestrini a du reste décrit un cas de myoclonie pure où les

réflexes palellaires faisaient défaut.

Les convulsions myocloniques ont été signalées en qualité d'épi-

phénomènes dans l'hystérie et la neurasthénie (Strùmpell, 111oebius,

Lemoine, Unverricht), dans l'épilepsie (Unverritch, Homén,

Seppilli, Krewer). Myoclonie, chorée, athétose peuvent donc coin,

pliquer d'autres maladies.

Anatomie pathologique et pathogénie. - Friedreich et Unverriclit

imputent le paramyoclonus aux cellules nerveuses des cornes

antérieures de la- moelle. Unverritch attribue l'hémimyoclonus au

cerveau. Minkowski, Grawitz, Krewer font de la myoclonie une

affection cérébrale. Lorsqu'elle se produit dans l'épilepsie, elle

est l'indice de la pénétration en profondeur du processus patholo-

gique, de l'atteinte des grandes cellules nerveuses.

Chez ce malade la myoclonie fut très probablement d'origine

cérébrale. En effet, d'abord unilatérales, les convulsions n'ont

envahi l'autre côte que longtemps après; elles se sont effec-

tuées graduellement d'abord sur le membre inférieur droit, puis,

sur le membre supérieur droit, enfin, dans le môme ordre, plus

tard, à gauche, n'ayant atteint les autres muscles volontaires que

bien longtemps après et à un moindre degré : cette marche cor-

respond à la localisation des centres moteurs de l'écorce. Or, on a

trouvé des kystes sous-arachnoïdiens dans la zone motrice corti-

cale. Bechterew a déjà noté que les attaques congestives épilepti-

formes des paralytiques généraux coïncident fréquemment avec

la présence de kystes sous arachnoïdiens sur les ascendantes.

P. Keraval.

IV. Note sur la rétraction de l'aponévrose polinaire chez les

aliénés ; par Fiai : et Francillon. (Bévue de médecine. Juin 1902.)

La rétraction de l'aponévrose polinaire, déjà signalée dans quel-

ques cas, a été étudiée sur 226 malades d'un service d'aliénés. Il

en a été observé 14 cas, ce qui donne une proportion de 6,19 pour

100. Observée d'après les ' divers cas d'aliénation, c'est chez les

paralytiques généraux que cette anomalie s'est présentée le moins

souvent. Les délirants persécutés ont donné une proportion plus

forte; 14 p. 100; les épileptiques et les déments séniles ont

donné également une proportion assez forte, environ 10 p. 10U;

les imbéciles, 4 et demi p. 100.

11 a été difficile d'établir un rapport entre la maladie mentale et

le début de la rétraction de l'aponévrose. Toutefois la proportion

est moins forte chez les paralytiques que chez les autres aliénés, et.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 355

cette considération que la rétraction aponévrotique se montre chez

eux avant l'apparition des troubles trophiques qui leur sont

propices peut amener à penser que cette anomalie n'est chez tous

ces malades qu'une manifestation commune d'une tare congénitale.

11. H.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

III. Traitement par le trional, et addition au même mémoire : par

'VoLSF. (Centralbl. f. Nervenheilk, XXIV., N. F. XII, 1901.)

Dans un premier travail l'auteur annonce un résultat étonnant

du trional dans la confusion mentale aiguë primitive ou délire

général hallucinatoire. Il administre le premier soir 2 grammes

du médicament, le lendemain, matin et soir, encore 2 grammes,

puis chaque matin et chaque soir de chaque jour 1 gramme au

moins, de façon à rendre le malade somnolent ; on ne le tire de

cette somnolence que pour manger et faire ses besoins. Si des '

hallucinations et de l'agitation surviennent, on élève de nouveau

la dose à 2 grammes. Durée du traitement : douze jours environ.

Le réveil a lieu graduellement en un ou deux jours. Calme, luci-

dité, souvenir de l'état morbide antérieur.

Dans l'appendice, l'auteur communique que la femme qui

faisait l'objet de l'observation III est retombée malade : il est

vrai qu'elle était albuminurique. Deux nouveaux cas traités par le

même procédé comprennent une psychose à rechutes, simplement

calmée, et une manie suivie de catatonie guérie. P. Keraval.

IV. La photothérapie à Paris, Hambourg et Berlin; par L.-lI1.

POUSSEPE. (Obo ? l'énié psicleiatnü, VI, 1901 )

1.C'est surtout à l'étranger que c'est propagé le traitement parla

lumière et la chaleur conjointement. 2. Ce traitement doit être

nommé photothermothérapie, pour le distinguer de la photothé-

rapie. 3. La photothermothérapie est appliquée avec succès à

un nombre énorme d'affections constitutionnelles, de troubles de

la nutrition, de maladies nerveuses. 4. La photothérapie est à

l'étranger appliquée exclusivement par le professeur Finsen, en

Danemark : sa méthode s'est comparativement peu répandue

dans les autres pays. 5. Les hôpitaux russes de photothérapie

le cèdent aux hôpitaux étrangers en dimensions et en confort,

mais ils surpassent ces derniers au point de vue de l'élaboration

scrupuleuse des éléments scientifiques de la question.

' P. 11EFAVAL.

356 , REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. , '

V. Les principes de l'action thérapeutique de l'électricité statique

(franklinisation) ; par S.-1\I. Scnnrzbr. (Oboz1'cllié psichial1'ii, VI,

1901.)

1. L'accumulation d'électricité à la surface de l'organisme

n'exerce aucune influence sur sa vitalité physiologique ou patho-

logique. 2. La tension électrostatique des masses électriques

qui s'accumulent à la surface de l'organisme n'agit pas non plus sur

les fonctions delà peau. - 3. Toutes les méthodes de frankiinisation.

pratiquées en thérapeutique déterminent le passage des masses élec-

triques au sein de l'organisme, parce que celui-ci est le meilleur

conducteur, le plus court chemin par lequel elles arrivent aux

points où elles se neutralisent. 4. Le passage des masses élec-

triques 11 travers les tissus et liquides de l'organisme s'accompagne

fatalement de phénomènes électrolytiques et du développement

de chaleur. 5. Ces deux facteurs tiennent sous leur dépendance

l'augmentation et l'accélération des échanges de la nutrition

générale, et de ceux de la nutrition locale quand on se sert de

l'étincelle et du souffle électriques. Telle est la base de tous les

effets thérapeutiques de la fraulclinisation. P. KERAVAL.

VI. Le traitement à l'acide cacodylique; par II. Smidt. (Neurolog.

Ccnlr'alGlutL, XXI, 1902.)

Revue des travaux correspondants. L'auteur adopte le juge-

mens que lui a transmis par lettre de Vincenti de Milan. « L'em-

ploi hypodermique de ce médicament s'est propagé chez nous,

parce que c'est un procédé commode, aisé à employer, inoffensif,

à la condition qu'on prenne toutes les précautions aseptiques

voulues, dans les cas d'asthénie physique et psychique. C'est en

somme un traitement neuroionique. Il trouve son indication cli-

nique en tant qu'adjuvant d'autres médications toniques et

reconstituantes, pourvu, bien entendu, qu'on n'en attende pas des

miracles. L'injection hypodermique a l'avantage de ne pas mo-

lester l'estomac ni l'intestin. Mais ce n'est pas un spécifique de

quelque affection mentale : il faut pour que la substance agisse

que la psychopathie soit greffée sur un fonds d'asthénie ou d'ané-

mie. » P. 11ER : 1-AL.

VII. Cas d'infantilisme pancréatique ; résultats du traitement,

par Byrom BRAMWELI. (The Scottish Médical and SU1'gical Journal,

vol. XIV, n° 4, avril 1904, p. 321).

A la réunion de la Société médico-chirurgicale, il y a deux ans

(1902), je présentai un malade qui souffrait de ce que je croyais

être jusqu'ici une maladie non décrite, que j'ai dénommée infalll-

lisme pancréatique. A la réunion de mars de la Société, en 190h

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 357 7

je présentai de nouveau le même malade. Un changement remar-

quable dans son état est résulté de l'administration d'extrait pan-

créatique.

Etat avant le traitement (27 décembre 1901). Lorsqu'il fut t

présenté pour la première fois à la Société en février 1902, le

malade était âgé de dix-huit ans et neuf mois, mais il ne sem-

blait pas avoir plus de onze ans ; son développement corporel

avait été évidemment arrêté à l'âge de onze ans ; il avait des

formes parfaites et ne présentait aucun des changements physiques

suggestifs de crétinisme sporadique ; au point de vue mental il

était brillant et intelligent. Avant que le traitement pancréatique

fût commencé, le 27 décembre, sa taille était de 4 pieds 4 1/8

pouces, et son poids 4 « stones » 7 1/2 livres. Pendant neuf ans

avant qu'il n'attirât l'attention, il avait souffert de diarrhée chro-

nique ; le nombre moyen des selles avant le traitement était de

cinq ou six dans les vingt-quatre heures. L'abdomen était gonflé

et tympanique. L'urine ne contenait pas de sucre. La sécrétion

pancréatique fut montrée défectueuse ou complètement absente

par trois méthodes distinctes de recherches, à savoir :

1° Les selles contenaient une quantité considérable de graisse

non digérée; cette graisse non digérée devint beaucoup moindre

après l'administration d'extrait pancréatique.

2° Quand le malade était au régime lacté, le taux de l'acide

phosphorique dans l'urine était considérablement au-dessous de

la normale ; après l'administration d'extrait pancréatique, le taux

de l'acide phosphorique fut accru d'une façon marquée.

Le médecin de ma maison, le Dr David Young, conduisit cette

partie de l'enquête. Il dit que lorsqu'un malade est au régime

lacté, le caséinogène est la source du phosphore de l'urine. Ce

caséinogène est transformé dans l'estomac en paranucléine et une

substance protéique. La paranucléine, qui contient 4 p. 100 de

phosphore, est insoluble; mais quand la paranucléine -vient au

contact du suc pancréatique, elle est décomposée en acide paranu-

cléique et une albumose, qui est soluble. C'est là la source du phos-

phore (acide phosphorique) dans l'urine. Le Dr Young trouva que

le total de l'acide phosphorique dans l'urine dans le cas présent

lorsque le malade était au régime lacté, était extrêmement petit ;

mais que pendant l'administration de l'extrait pancréatique il

subissait un accroissement rapide et très marqué. z

3° Par l'épreuve du professeur Sahli. Cette épreuve consiste en

l'administration de capsules (inventées par le professeur Saldi de

Berne), capsules contenant de l'iodoforme entouré d'une substance

glutoïde, laquelle est insoluble dans la sécrétion gastrique et

intestinale, mais est soluble dans la sécrétion pancréatique. Si la

sécrétion pancréatique est active, la paroi glutoïde de la capsule

est dissoute et l'io ioforme est mis en liberté; l'iode, sous forme

358 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

d'iodites et d'iodates peut alors être mis en évidence dans la salive

en faisant l'épreuve du chloroforme et de l'acide nitrique; l'acide

nitrique met en liberté l'iode, qui donne au chloroforme une cou-

leur rosé* Cette épreuve est une belle manière de démontrer :

premièrement, la longueur du temps pendant lequel les aliments

(c'est-à-dire la capsule) restent dans l'estomac, et, secondement,

si la sécrétion pancréatique est active ou non. Si on n'obtient

aucune réaction iodée dans la salive après l'administration de la

capsule, on peut conclure, ou que la capsule n'a pas quitté l'esto-

mac, ou que la sécrétion pancréatique est ajournée.

Dans le cas présent, après l'administration d'une capsule

d'épreuve, l'iode ne put être découvert dans la salive. Que la cap-

sule eût quitté l'estomac, cela fut cependant prouvé par ce fait

qu'elle fut retrouvée non digérée dans les selles. L'expérience fut

répétée plus d'une fois, et l'activité des capsules fut éprouvée par

une expérience de contrôle. Ces capsules furent données à deux

malades qui n'avaient aucune maladie gastrique ou intestinale;

dans les deux cas, on trouva l'iode dans la salive une heure et

demie après qu'elles avaient été- ingérées. Quand, cependant, on

donna une capsule d'épreuve seule sans aliments, et une dose

(deux drachmes) d'extrait pancréatique deux heures après, on

trouva que la salive contenait de l'iode une heure après que l'ex-

trait pancréatique avait été administré.

Ces trois méthodes d'investigation montraient que la sécrétion

pancréatique était insuffisante ou entièrement absente. Il semblait

probable, par conséquent, que le métabolisme défectueux de la

partie supérieure du tractus gastro-intestinal, la diarrhée, et l'ar-

rêt de développement (l'infantilisme) fussent dus à une sécrétion

pancréatique défectueuse ou suspendue. Les résultats du traite-

ment, l'administration d'un extrait glycérine de pancréas,

ont confirmé cette vue.

Etat après le traitement (mars 1904). Le traitement pancréatique

fut commencé le 27 décembre 1901, et a été continué plus ou

moins régulièrement depuis cette date. Le résultat a été une amé-

lioration remarquable à la fois en ce qui concerne la diarrhée et

la croissance et le développement corporels. 1) Avant le traitement,

il y avait en moyenne cinq ou six évacuations diarrhéiques par

'jour ; actuellement, il y a en moyenne deux évacuations par jour,

dont l'une est moulée. 2) Avant le traitement, le malade dit qu'il

n'avait pas grandi du tout pendant huit ans : pendant les deux

ans qui se sont écoulés depuis que le traitement a été commencé,

il a grandi de 5 -g- pouces, et il a augmenté en poids de 1 a stoneu

8 livres. 3) Le développement sexuel qui, lorsque le malade attira

l'attention, était tout à fait infantile, progresse maintenant d'une

manière normale ; il y a eu une croissance de poils du pubis, et

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TABLEAU

indiquant l'âge, la taille, le poids, etc., dans le cas d'infantilisme pancréatique décrit dans le texte, (i différentes

dates, avant et après le traitement.

360 SOCIÉTÉS SAVANTES.

le pénis et les testicules se sont développés. 4) Le malade a l'air

beaucoup plus vieux, et sa voix, qui était d'une tonalité élevée et

aussi enfantine, est devenue rude et d'une tonalité basse.

On voit l'état du malade avant et après le traitement,'sur les

figures 1 et 2 de la planche XI, qui sont photographiées exacte-

ment sur la même échelle.

Rema q2ces. - Je suis d'avis que ce cas est un type distinct d'in-

fantilisme dû à la sécrétion pancréatique défectueuse ou abolie.

Cette opinion est, je crois, prouvée par les observations faites sur

la sécrétion pancréatique avant- que le traitement ne soit com-

mencé, et par l'amélioration extraordinaire qui a résulté de l'ad-

ministration d'un extrait glycériné de pancréas. Je crois que cet

état est une entité clinique distincte, une nouvelle maladie qui

n'a pas été jusqu'ici reconnue ; et, ce qui est même de plus d'im-

portance, les résultats du traitement semblent montrer la manière

par laquelle la maladie devrait être traitée et par laquelle elle

peut être guérie. Comme je l'ai déjà dit, cet état est tout à fait

distinct du crétinisme sporadique, avec lequel beaucoup de ces

cas ont été sans aucun doute confondus. Le malade ne présentait

aucun des caractères physiques ou mentaux du crétinisme spora-

dique la forme infantile du myxoedème. Des radiographies

furent prises lorsque le malade attira pour la première fois l'atten-

tion ; elles montrèrent que les lignes épiphysaires- qui devraient

le souder entre la seizième et la dix-huitième année (Gray)

étaient alors, à l'âge de dix-huit ans neuf mois, non soudées, par

conséquent que les os étaient' capables de s'accroître encore. Le

tableau suivant montre les résultats du traitement :

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance solennelle du 30 mai. Présidence de M. Brunet.

- rapport de la Commission du Prix Esquirol.

M. VJGOUROUX donne lecture du rapport de la commission du

Prix Esquirol.

Quatre mémoires ont été présentés :

1° Contribution à l'étude de l'évolution clinique et anatomo-

pathologique des traumatismes du crâne guéris chirurgicalement.

2° Des rapports du paludisme et de l'aliénation mentale.

BIBLIOGRAPHIE. 361

3° Contribution à l'étude des névroses et des délires paroxys-

tiques.

4° Les incendiaires.

Le prix est décerné à M. Gimbol, auteur du mémoire n° 4 ; une

mention honorable est accordée à M. Cornu, auteur du mémoire

n° 3.

M. le secrétaire général prononce l'éloge de M. Lunier, ancien

inspecteur général du service des aliénés et ancien président de la

Société médico-psychologique. U. B.

Séance du 27 juin. - Présidence de M. Bonnet.

Suicide et paralysie générale; par 11111. nIARIG et VIOLLET.

On peut dire que : le suicide rare chez les paralytiques généraux

confirmés, peut cependant s'observer à la phase initiale de la ma-

ladie daus les formes dites des hôpitaux ou sans délire de Requin.

Il peut, 'en effet, procéder tantôt d'un état dépressif délirant asso-

cié, tantôt d'une dépression légitime due à la compréhension de

la gravité du mal chez les plus cultivés. A l'Asile on peut encore

observer des réactions suicides à une période plus avancée, mais

elles perdent de plus en plus de leur gravité en tant qu'effet.

On peut cependant observer exceptionnellement le suicide par

conceptions mélancoliques ou de persécutions associées à la der-

nière et surtout le pseudo-suicide à une période avancée de la

maladie : le malade se tuant sans le vouloir, par mégalomanie ou

démence; c'est à ce pseudo-suicide qu'appartient la mort du

paralytique général sautant par la fenêtre avec la conviction qu'il

vole, ou se noyant persuadé qu'il surnagera ; ce dernier cas a été

observé à la colonie familiale de Gheel, où sont placés de nombreux

paralytiques, mais où les autres formes de suicide n'ont pas été

observées chez ces malades.

BIBLIOGRAPHIE.

La Neurasthénie (La Neurasthenia), par LVIGI Cappeletti (de For-

rare), avec préface du Prof. Bonfigli. Manuali Hocpli. Milan, 1904.

Un petit format commode, une division très claire, un texte

précis et d'une lecture agréable, suivi de mille cent trente et un

indications bibliographiques, voici de quoi justifier le succès de

cet élégant petit livre.

Tous les facteurs étiologiques de la neurasthénie sont passés en

362 VARIA.

revue à l'aide de nombreux matériaux et statistiques : civilisation,

race, profession, hérédité, traumatismes, intoxications, etc.

Quant à la symptomatologie, elle est soigneusement décrite,

appareil par appareil (troubles sensoriels, sensitifs, moteurs, cir-

culatoires, respiratoires, digestifs, génito-urinaires, trophiques,

sécrétoires, sématologiques, intellectuels). Après avoir rappelé

les stigmates, les asociations morbides, l'évolution, le pronostic et

le diagnostic de cette affection, l'auteur étudie les diverses théories

pathogéniques qui ont été proposées et les médications qui en

découlent (hygiène prophylactique et thérapeutique ; cure phy-

sique, chirurgicale et pharmaceutique). z

Toutes les théories pathogéniques sont rappelées par Cappeletti :

théories de l'entéroptose (Franz Glénard), de l'auto-intoxication

(Bouchard), - de la neurasthénie envisagée comme maladie des

échanges (Axenfeld et Huchard), théorie de l'épuisement de la

cellule nerveuse (Beard), théorie anatomique et vaso-motrice de

Kaan (neurasthénie héréditaire, neurasthénie acquise par surme-

nage ou par insuffisance des matériaux nutritifs), théorie

mécanique de Maurice de Fleury (neurasthéniques à hypo ou à

hyper-tension). D'autres auteurs ont encore voulu expliquer la

neurasthénie par une action réflexe d'origine castro-intestinale

(Leven), par les troubles vaso-moteurs (G. Dumas), par un

trouble intime dans la nutrition des éléments nerveux (Erb), etc.

En ce qui le concerne, l'auteur pense que, dans l'état actuel de

nos connaissances, c'est dans un trouble primordial des éléments

cellulaires nerveux qu'il faut chercher l'origine de la maladie.

Il insiste sur le régime psychique et somatique, sexuel, diété-

tique, etc., qui convient à tous les neurasthéniques; les différents

moyens physicothérapiques (hydrothérapie sous toutes ses formes,

électricité, bimérithérapie, etc.) sont étudiés avec précision, ainsi

que les différents agents médicamenteux. On voit donc que le

petit manuel justifie amplement l'éloge du préfacier Bonfigli, pro-

mettant qu'il sera utile et à celui qui sait, en tant que compen-

dium excellent de toutes les connaissances sur la matière, et à

celui qui ne sait pas, en tant que guide facile et clair pour l'étude

de la maladie la plus répandue de toutes les affections du système

nerveux. Pierre Roy.

VARIA.

Les aliénés en liberté.

Suicide d'un vieillard. M. Charles Duvry, âgé de soixante-

douze ans, cultivateur, en proie à des troubles cérébraux, s'est jeté

dans la mare située dans sa cour. (Semeur de l'Oise, 27 mai.)

VARIA. · 363

Suicide. Hier matin, vers onze heures, M. le commissaire du

deuxième arrondissement était prévenu-qu'un suicide venait de se

produire, rue de la Préfecture, 105. Ce magistrat se rendit au lieu

indiqué et constata que M. X..., âgé de soixante-sept ans, s'était

pendu. L'enquête a établi que cet homme, malade depuis très long-

temps, ne jouissait plus depuis plusieurs mois de ses facultés et avait

manifesté à plusieurs reprises l'intention de se donner la mort.

(Progrès de Lyon, 31 juillet 1904).

Suicide d'un officier. Le capitaine trésorier Creusat, du

40° régiment d'artillerie, s'est suicidé d'un coup de revolver à la

tempe droite. Il survécut deux heures à ses horribles blessures. Il

était, depuis quelques temps, atteint du délire ^de la persécution.

Cet officier jouissait de l'estime générale dans son régiment.

(L'Aurore, 7 septembre 1904.)

Un fou à la tête dure. Un cercle de badauds se formait hier,

vers midi, boulevard Richard-Lenoir, -devant la porte d'un petit

chalet de nécessité, écoutant'un homme qui s'exprimait ainsi : -.

Mesdames et messieurs, j'ai la tête très dure. Mon assertion

ne suffit certainementpas à vous convaincre, et la toucher ne vous

convaincrait pas davantage. Je ne vais pas casser des pierres avec

ma tête, tout le monde fait cela aujourd'hui. J'ai un truc : je vais

passer à travers la porte du chalet.

Un mouvement de curiosité se produisit parmi les curieux.

Après avoir déposé deux sous devant la tenancière, notre

homme s'enferma. Quelques secondes plus tard, un craquement se

fit entendre et, ainsi qu'il l'avait annoncé, l'homme à la « tête

dure » sortit par la brèche qu'il venait de faire dans le flanc du

chalet. La préposée ne trouva pas, comme bien on pense, cette

expérience de son goût, et elle appela les agents. Ceux-ci condui-

sirent l'homme au poste de police du quartier Saint-Ambroise.

Il fit remarquer que son crâne était intact après le choc qu'il

venait de supporter. - Je suis tombé une fois du premier étage

sur la tête, ajouta-t-il, et je n'ai absolument rien ressenti. D'ail-

leurs, tenez... et, avant qu'on ait pu prévoir son geste, notre

homme avait « traversé » la porte en bois qui donne dans le cou-

loir conduisant au commissariat. C'est pas plus malin que ça,

déclarat-il en se frottant l'occiput.

M. Bottolier-Lasquin, commissaire de police a envoyé le monsieur

à « la tête dure », François Duchemin, trente-deux ans, camelot,

demeurant passage Raoul, à l'infirmerie spéciale pour le faire exa-

miner au point de vue mentale. (Le Journal.)

Un fou mystique. - Depuis quelque temps, 1\1. Emile Bonafoy,

vingt-quatre ans, chaudronnier, 18, rue des Panoyaux, présentait

quelques signes d'aliénation mentale, prétendant à qui voulait

l'entendre, qu'il était amoureux fou d'une femme idéale qui était

364 VARIA.

venue le visiter en rêve. Naturellement les voisins du malheureux

aliéné se gardaient bien de le contredire, et, ce genre de folie ne

paraissant nullement dangereux, ilsy attachaient peu d'importance.

IIier matin, vers dix heures, la concierge de l'immeuble où

habitait le jeune homme, étonnée de ne pas l'avoir vue descendre

à l'heure accoutumée, ut enfoncer la porte de la chambre occupée

par Emile Bonafoy et recula d'horreur devant le spectacle qui se

présentait à ses yeux. Complètement nu, le ventre ouvert et per-

dant ses entrailles, le malheureux fou gisait râlant sur son lit

ensanglanté.

Immédiatement prévenu, M. Tirache, commissaire de police du

Père-Lachaise, se rendit rue des Panoyaux où on lui remit une

lettre laissée par le désespéré dans laquelle ce dernier déclarait au

magistrat qu'il avait été contraint de, s'ouvrir le ventre pour

obéir aux injonctions de sa mystique maîtresse. Emile Bonafoy

qui respirait encore, a été conduit en toute hâte à l'hôpital Tenon

où il fut admis d'urgence dans un état désespéré. (Le Journal).

Evadé d'un hospice. Un c011cic1'gc assommé. - La compassion

est évidemment un sentiment très digne, mais encore faut-il que le

sujet qui en bénéficie soit véritablement intéressant, sans quoi l'on

risque fort, tout en voulant faire du bien, d'aider à la perpétration

de quelque forfait, ainsi que le prouvent, d'ailleurs, 'dit le Journal,

les faits que nous allons raconter.

Il y a environ un an, M. Pierre Prat, âgé de quarante-cinq ans,

ouvrier passementier, habitant rue des Amandiers, à la suite de

scènes violentes auxquelles il se livrait vis-à-vis des siens, sous

l'empire de crises alcooliques, était interné à l'hospice de Villejuif,

sur la demande de sa femme.

Au mois de février dernier, Pierre Prat, trompant la surveillance

de ses gardiens, réussissait à s'évader de la maison de santé et

venait se réfugier chez un de ses cousins, Emile L..., rue de la

Mare, déclarant hautement à qui voulait l'entendre qu'il avait été

victime d'une séquestration arbitraire de la part de sa femms, qui

voulait profiter de son internement pour se débarrasser de l'enfant

que le passementier avait eu de son premier mariage.

Les dires de Pierre Prat, paraissaient assez exacts, puisque, du-

rant l'absence de son mari, Mme Prat avait fait admettre son beau-

fils à l'Assistance publique. Les voisins de M. Emile L... s'émurent

de la situation de l'évadé de Villejuif et adressèrent à qui de droit

une pétition attestant sa parfaite lucidité.

En présence de tant d'assertions, l'administration fit cesser les

recherches qu'elle avait ordonnées en vue de retrouver Pierre Prat,

et, il y a un mois, ce dernier, n'ayant désormais plus rien à craindre,

réintégra le domicile conjugal, rempli, apparemment, des meil-

leures dispositions. -

VARIA. 365

Pendant les quinze premiers jours que le passementier passa

dans sa famille, rien de grave ne se produisit, et Pierre Prat

paraissait définitivement guéri de sa fatale passion. lorsqu'il

rencontra quelques anciens amis, qui l'entraînèrent au cabaret.

Dès lors. tout changea : l'ouvrier passementier reprit ses habi-

tudes d'intempérance et, derechef, des scènes violentes eurent

lieu dans le ménage. Chaque jour, l'alcoolique, furieux, au cours

de ses accès, brutalisait sa malheureuse femme. -

Hier après-midi, les cris de Mme Prat, prirent une telle intensité

que la concierge de l'immeuble, Mme Baumain, quarante ans, aidée

de quelques voisins, enfonça la porte du logement, et arriva à

temps pour délivrer la pauvre femme, que son mari s'apprêtait à

étrangler. Voyant sa victime lui échapper, Pierre Prat, se saisit

d'un énorme gourdin qui se trouvait dans un coin de la pièce et

s'élançant sur Mme Baumain, lui en assénait plusieurs coup sur le

sommet du crâne.

Gravement blessée, la concierge s'affaissa, ensanglantée, pendant

que les témoins de cette scène, après une lutte terrible, réussis-

saient à s'emparer du forcené, qu'ils conduisirent au commissariat

de police du quartier du Père-Lachaise, d'où il a été dirigé sur le

Dépôt. Quant à Mme Baumain, dont l'état est grave, elle a été

transportée à l'hôpital Tenon.

Un assassin de huit ans. Le parquet du Havre vient d'ouvrir

une enquête sur la mort d'une fillette de six ans, Yvonne Garrivet,

qui avait disparu lundi dernier de chez ses parents et qu'on

retrouva le lendemain noyée, près de la digue Saint-Jean. On avait

cru d'abord que l'enfant s'était tuée accidentellement; mais des

propos échappés à un gamin de huit ans, nommé André Tré-

guilly, tirent supposer que celui-ci avait jeté la fillette à l'eau.

C'est sur l'aveu que, pressé de questions, il aurait fait à un parent

d'Yvonne Garrivet, que les magistrats ont ouvert leur enquête.

(Le Temps, 11 septembre.)

Hôpitaux POUR aliénés militaires

Notre confrère Granjux imprimait, il y a quelques jours dans

« le Caducée », le voeu de voir organiser des hôpitaux pour aliénés

dans les lignes d'arrière des armées en campagne. Le transport à

longue distance des militaires frappés d'accidents mentaux pré-

sente, en effet, de tristes inconvénients, surtout au point de vue du

traitement. Nous lisons à ce sujet dans les journaux politiques :

« Trois hôpitaux militaires pour les aliénés vont être organisés à

Irkoust, Kharbiu et Tchita pour faire face aux cas, toujours crois-

sants, de folie qui surgissent actuellement dans l'armée russe en

Extrême-Orient, par suite des conditions climatériques, des excès

de fatigues, des privations et autres causes. (Le Scalpel du 21 août

190.i.) .

366 VARIA.

INSTITUT DE médecine légale ET DE psychiatrie.

A la suite des épreuves subies en fin d'année par les élèves ayant

suivi les cours de l'Institut de médecine légale et de psychiatrie

créé l'année dernière sous la direction de MM. les professeurs

Brouardel et Jeoffroy, ont été diplômés : MM. Eachetta, Bounet,

Dabaux, Fulco, Lande, Laurent, Logez, Pierreson, Pergola,

Pachéco, Rochau, Hamaide, Schunda, Wassilian, Labrousse.

Fédération générale DES instituteurs BELGES

Congrès international de l'enseignement p ? ' : ma : )'e.La Fédération.

Générale des Instituteurs belges a décidé de porter à l'ordre du

jour du Congrès International de l'Enseignement, organisé sous

ses auspices à l'occasion de l'exposition de Liège en 1905, diverses

questions relatives à l'Education des enfants arriérés et anormaux.

Une section spéciale étudiera et discutera ces questions. D'autres

congrès vers la même époque s'occuperont des oeuvres sociales

relatives à l'enfance anormale, mais il appartient à notre Congrès,

essentiellement pédagogique, d'examiner particulièrement les

problèmes nombreux et complexes qui sont à résoudre pendant la

période de scolarité de ces petits déshérités.

Questions proposées : 1° Organisation d'enseignement spécial;

A) Pour arriérés pédagogiques. B)Pour arriérés médicaux; 2° Où et

quand doit se faire l'éducation professionnelle des enfants anor-

maux ? 3° Formation du personnel de l'enseignement spécial ; 4° Quel

est le rôle du médecin ? A) Dans les écoles pour arriérés pédago-

giques. B) Dans les écoles pour arriérés médicaux; 5° Dans quelle

mesure les expériences et les observations faites dans l'enseigne-

ment spécial peuvent-elles profiter au développement des sciences

pédagogiques ?

Adresser toute correspondance à M. Tobie Jockheere, premier

secrétaire adjoint de la Société Protectrice de l'Enfance anormale,

rue de la Senne 64, à Bruxelles (à partir du 1er octobre 1904, rue

de la Buanderie, 36 Bruxelles) ou à M. P. Cnudde, Secrétaire

général du Comité organisateur pour le Congrès International de

Liège, instituteur à Syngem (Belgique).

AUX AMATEURS D'ABSINTHE. - MÉTHODE HYGIÉNIQUE DE LA PRÉPARER

Versez avec lenteur l'absinthe dans le verre

Deux doigts, pas davantage; ensuite saisissez

Une carafe d'eau bien fraîche, et puis versez,

Versez tout doucement d'une façon légère. 1

Que petit à petit votre main accélère

La verte infusion; puis augmentez, pressez

Le volume de l'eau. Mais croyez-moi, cessez

Quand vous aurez jugé la liqueur assez claire

FAITS DIVERS. 367 Î

Laissez-là reposer une minute encor.

Couvez-là d'un regard comme on couve un trésor.

Respirez son' parfum qui donne le bien-être.

Enfin pour couronner tant de soins inouïs

Bien délicatement, prenez le verre, et puis.....

Lancez sans hésiter, le tout par la fenêtre.

FAITS DIVERS.,

Asile public d'aliénés D LESVELLEC (près Vannes).- Une place d'in-

terne titulaire en médecine et deux places d'interne provisoire sont

actuellement vacantes à l'Asile public d'Aliénés de Lesvellec. Les

candidats sont invités à produire à l'appui de leur demande :

1° un extrait de naissance; 2° un certificat d'inscriptions de Doc-

torat au nombre de douze au moins ; 3° un certificat des examens

subis et, s'il y a liéu, du stage qu'ils ont pu faire dans un Asile

(cette dernière condition n'est pas indispensable). Les internes

sont nommés par M. le Préfet du Morbihan, sur la présentation du

Directeur, pour une durée de trois ans. Ils auront, pendant la

durée de leur internat, toutes facilités pour se présenter aux exa-

mens du doctorat auxquels ils seront astreints. Les avantages

consistent en : nourriture (table de première classe du régime des

Asiles) logement, éclairage, chauffage, blanchissage et une indem-

nité annuelle de 700 francs. Les Docteurs en médecine peuvent

poser leur candidature à l'internat. Les internes, devenus docteurs,

continuent leurs fonctions s'ils le désirent. Les internes provi-

soires remplacent, en cas d'absence ou d'empêchement, les titu-

laires avec tous les avantages. Les demandes doivent être adressées

à M. le Directeur de l'Asile de Lesvellec (Morbihan.)

Asile d'aliénés de vILLEJUIF. M. Monteil (Gdgard), préfet de la

Haute-Vienne, est nommé directeur de l'asile public d'aliénés de

Villejuif, en remplacement de M. Lucipia, décédé. M. Monteil est

compris dans la classe exceptionnelle du cadre et recevra, en con-

séquence, à partir du jour de son installation, outre le logement,

le chauffage et l'éclairage dans l'établissement, le traitement de

8.000 francs déterminé parles décrets susvisés de G juin 1863 et

19 octobre 1893.

Asile U'ALL;NÇON. Une place d'interne sera vacante le le' octo-

bre 1904 à l'Asile public d'aliénés d'Alençon. Minimum de scola-

rité : 12 inscriptions de doctorat. Avantages : 800 francs, .loge-

368 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

ments, nourriture, chauffage, éclairage, blanchissage. Labora-

toire et bibliothèque. Adresser les demandes à M. le Dr Charuel,

directeur, médecin en chef.

Un meurtrier DE seize ANS alcoolique. Un meurtre a été

commis au château de Beaulieu, près Sainte-Foy-la-Gironde, dans

les circonstances suivantes. « Deux individus pris de boisson, et

faisant partie d'une troupe de vendangeurs, se sont pris de querelle

pour un motif futile et en sont venus aux mains. Le nommé

Lallivein, quarante-cinq ans, a reçu un coup de couteau dans la

région du coeur et est mort sur le coup. Son meurtrier, nommé

Brousse, seize ans, a pris la fuite. (L'Aurore, du 14 septembre 1904).

Ces jours derniers, une ménagère de Senlis, 111 ? Pasquier, s'est

pendue dans son grenier. Le Dr Pauthier, médecin légiste, a fait

les constatations d'usage. La mort remontait à plusieurs heures.

Cette malheureuse ne jouissait pas de la plénitude de ses facultés

mentales. (Semeur de l'Oise, 14 septembre 1904).

Pari mortel. Un buveur d'absinthe. Dans un débit de la

rue Marc-Seguin, Isidoré Miquel, quarante ans, charron, avait

parié de boire douze absinthes pendant les douze coups de midi.

Il est tombé mort à la septième. (Bonhomme Normand, 26 août,

1er septembre 1904.) .

Mutilation par un enfant. Une fillette de deux ans, demeu-

rant chez ses parents, à Kerlouan (Finistère), a, d'un coup de

couteau, coupé le nez à son petit frère, âgé de 4 mois. (Bonhomme

Normand, 20 août, 4°l'septembre 1904.)

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Annuaire de l'Internat en Médecine des asiles publics d'aliénés du

département de la Seine. 1 vol. in-16 de 104 pages. Librairie Vigot,

frères, 23, place de l'Ecole-de-Médecine. Prix : 2 francs.

Disposizioni sui 12a ? ziconiii e sugli alienali. In-8° de 8 pages. Ditta

Editrice, à lllilano, 1904.

JOLIVFL (Mmo A.). JJicêt1'e autrefois et aujourd'hui. In-16 de 52 pages.

lmp. Baudry. Vesoul, 1904.

UGOLOTTI (Ferdinando). Sulla forma del palallo negli alienati. In-8'

de 8 pages. Iliv. sperimentale de irenatria.

E. W EIL (Antonin-Clerc). La leucocytose en clinique, vol. in-8° de

182 pages avec 4 figures hors texte, librairie Joanin et Ci*, 24, rue de

Condé. 0

Le rédacteur-gérant : Bourneville. ,

Evreux, Ch. H2BIS ? imp. 9-i ! )0.

Vol. XVIII. Novembre 1904. N° 107.

ARCHIVES DE NEURO* " " '"

CLINIQUE NERVEUSE

Epilepsie, pathogénie et indications thérapeutiques.

Seconde Partie : Traitement DE L'EPILEPSIE.

PAR .

LE Dr ALEXANDRE PARIS

Médecin de l'Asile de Marévillp,

Chargé de Cours à la Faculté de Médecine de Nancy'.

Généralités. Le prédisposé à l'épilepsie naît avec un

système nerveux spécialement impressionnable; c'est donc

à diminuer cette impressionnabilité, à modérer l'excitabilité

méningo-encéphalique qu'il faudra tout d'abord s'attacher.

Cela pourra suffire quelquefois, mais il n'en sera pas ainsi

dans un trop grand nombre de cas; nous avons vu, en effet,

qu'il y a encore quelque chose au-dessus de cette impres-

sionnabilité spéciale, ce qui la met en jeu, et la preuve que

l'action sur le terrain méningo-encéphalique n'est pas tou-

jours suffisante pour prévenir l'attaque d'épilepsie nous est

fournie par l'action même du bromure de potassium, consi-

déré à juste titre comme le médicament le plus efficace

jusqu'à ces derniers temps : l'insuccès du bromure de potas-

sium dans beaucoup de cas (la majorité de nos épileptiques

des asiles d'aliénés ont été, sans résultat favorable, saturés

de bromure de potassium avant l'admission dans nos services

et même par nous), son succès relatif dans un certain

nombre de cas, son efficacité définitive dans un petit

nombre de cas, viennent complètement à l'appui de notre

' Voir 190f, n- 98, p. 97 ; n° 99, p. 206.

Archives, 2" série, t. XVIII. 24

370 ' CLINIQUE NERVEUSE.

interprétation. Ils prouvent que le bromure de potassium ne

combat qu'un seul des deux principaux facteurs étiologiques,

qu'il ne modifie que le terrain nerveux préparé ou par orga-

nisation congénitale ou par influence particulière sous l'ac-

tion du corps thyroïde. Son principal effet, diminution de

l'impressionnabilité de l'encéphale, notamment des régions

méningo-corticales du cerveau, et, consécutivement, de

l'irritabilité ou plutôt de l'irritation du bulbe, n'est mani-

feste qu'à la condition que la cause des excitences, qui

émane le plus généralement du corps thyroïde, n'agisse pas

elle-même de façon très intense. S'il en était autrement, le

bromure guérirait toujours; or nous savons que des doses

colossales, de même que des doses moyennes fort longtemps

continuées, ont été prescrites sans succès sérieux et que, au

contraire, une action favorable du bromure a été parfois

promptement obtenue chez des épileptiques affectés d'une

altération sérieuse du corps thyroïde et chez lesquels,

d'après ce que nous apprend la physiologie du corps thy-

roïde, l'impressionnabilité méningo-encéphalique est dimi-

nuée du fait même de la diminution de la fonction de la

glande thyroïde. C'est donc que le bromure ne peut pas

atteindre toutes les causes principales de l'épilepsie ; nous

le voyons remède curatif en quelque sorte dans l'épilepsie

légère, alors que le terrain nerveux épileptogène ne reçoit

pas de fortes excitences, mais seulement remède adjuvant,

certainement très précieux, dans le traitement de l'épilepsie

déterminée par des excitences méningo-encéphaliques

intenses. La place de ce médicament n'en reste pas moins

bien marquée dans tout traitement complet de l'épi-

lepsie.

Si nous ne pouvons pas encore agir avec une force suffi-

samment intense et soutenue sur l'organe d'où partent habi-

tuellement les excitences principales qui mettent en jeu

l'impressionnabilité méningo-encéphalique spéciale, nous

pouvons cependant assez fréquemment, nos observations

cliniques nous permettraient presque de dire toujours,

modérer l'activité fonctionnelle de cet organe, surtout lors-

que, par exemple, elle est stimulée par d'autres organes sur

lesquels une action est plus facile (glandes génitales), et

nous pouvons presque toujours prévenir ou diminuer l'accu-

mulation de secreta (agents d'excitences) dans le sang, soit

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 371

par un traitement qui aura pour but une sorte de lavage du

sang, soit par une régularisation de l'activité de tous les

organes d'excrétion, glandes sudoripares, reins, excrétions

intestinales, etc.

Quant aux causes secondaires d'excitences, que nous

avons vues, circonstances aggravantes, dans la pathogénie de

l'épilepsie, toxines d'origine alimentaires ou autres, elles

sont, en général, assez faciles à combattre. Nous pourrons

donc instituer désormais un traitement ralionnel de chacune

des causes de l'épilepsie ; il nous reste à discuter les moyens

thérapeutiques ou hygiéniques à choisir. Avant de parler du

traitement d'une maladie, il faut s'occuper d'abord de pré-

venir cette maladie ; nous commencerons donc par une

étude de la prophylaxie de l'épilepsie.

Prophylaxie. L'hérédité de l'épilepsie est aujourd'hui

affirmée par tous les auteurs ; un grand nombre des 60 épi-

leptiques de notre service sont filles ou petites-filles d'épi-

leptiques (j'ai connu ici, en vingt-cinq ans, de véritables

familles d'epileptiques), la plupart des autres descendent

d'ivrognes ou d'alcooliques, comme beaucoup d'aïeules des

premières, du reste. Cela connu, il semble que l'on devrait

accorder à l'enfant qui naît et même à l'enfant qui va naître

d'épileptique ou d'alcooliques, une attention et une sollici-

tude absolument spéciales afin qu'il ne soit que le moins

possible victime de la tare que lui a infligée au moins un

de ses ascendants. Eh bien, auteurs et praticiens négligent

à cet égard toute prophylaxie rationnelle.

Une prophylaxie efficace peut cependant être instituée

même avant la naissance de l'enfant ; je le montrerai en

prenant comme exemple le foetus dont le père ou la mère

sont épileptiques. Cet enfant est évidemment menacé des

convulsions qui éclatent peu après la naissance et qui font-

de nos jours encore tant de victimes, soit qu'elles tuent,

soit qu'elles laissent des altérations indélébiles qui font des

idiots ou des imbéciles ou des arriérés. Tout nous indique

que nous pouvons et que nous devons faire quelque chose

pour l'en préserver. « L'incubation de l'oeuf humain, pour

évoluer dans de, bonnes conditions, doit se faire dans le

calme et dans la quiétude Et s'il est bon pour tout

citoyen de posséder un casier judiciaire vide, il n'est pas

372 CLINIQUE NERVEUSE.

moins utile de posséder pour bien agir dans la vie un casier

utérin vierge de tout accident», nous dit M. le professeur

Pinard 1. Il est de la plus élémentaire prudence de donner

à la femme enceinte, épileptique ou non, dont le foetus est

menacé d'épilepsie en raison de son ascendance, un régime

spécial et toutes les mesures prophylactiques que nous

prescririons pour un adulte manifestement menacé d'épi-

lepsie et dont nous parlerons plus loin. Cette précaution, dont

l'utilité est incontestable, est cependant habituellement

négligée ; les ouvrages classiques n'en disent, du reste, pas

un mot ; on ne pense au traitement du foetus par traitement

de la mère que lorsqu'il y a crainte de sypllilis.

L'enfant nait d'un père ou d'une mère épileptique, on ne

se préoccupe généralement pas spécialement de la question

« nourrice »; on le laisse nourrir par la mère si elle a du

lait, on lui donne une nourrice si elle n'a pas de lait ou si

elle craint de se déformer et on ne s'attache pas plus au

choix de la nourrice que s'il s'agissait d'un nourrisson nor-

mal, né de parents absolument sains. Il est cependant

démontré, de façon absolument indiscutable, par M. le pro-

fesseur Budin2 notamment, que les moindres troubles ner-

veux chez les nourrices ont un retentissement immédiat sur

les nourrissons. On voit ainsi avec quelle facilité éclateront

les convulsions infantiles chez un sujet né avec une tare

épileptique et dont la nourrice peut être exposée ou sujette

elle-même à des troubles nerveux.

Si la mère est épileptique, il est donc évidemment indiqué

de l'empêcher de nourrir; en ne le faisant pas (on fait plus

généralement le contraire, dans les campagnes au moins),

on expose non seulement l'enfant aux convulsions infan-

tiles, à l'épilepsie précoce, mais la mère à une aggravation

de l'épilepsie' dont elle est atteinte ou à l'aliénation men-

tale qui se développe si facilement chez les nourrices pré-

disposées.

Si la nourrice n'est pas épileptique, il faut lui imposer

néanmoins un régime analogue à celui que nous donne-

rions à une prédisposée, afin de diminuer son impressionna-

bilité et d'éviter ainsi le plus possible toutes les causes

' Revue d'hygiène, janvier 1897.

= Société obstétricale de France, Séance du 11 .avril ]890.

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 373

d'excitances anormales du système nerveux de l'enfant.

Il importe de donner à cet enfant prédisposé, plus encore

qu'à tout autre, une nourrice saine, peu émotive, non irri-

table, déterminée à accepter un régime spécial duquel

seront exclus boissons alcooliques et, en général, tous ali-

ments excitants. A défaut de nourrice se prêtant à ces

conditions, mieux vaut, à mon avis, recourir au biberon.

J'insiste à dessein sur cette question du traitement pro-

phylactique de l'épilepsie à instituer, pour ainsi dire, dès

les premiers temps de la vie intra-utérine, car je suis per-

suadé, comme je le disais à propos de la pathogénie des

épilepsies dites secondaires, que les convulsions infantiles,

dont le nombre des victimes est colossal, n'éclatent le plus

souvent que parce que l'enfant a reçu de ses ascendants une

tare que l'on a négligée, que l'on a laissée exposée aux

excitances les plus variées en ne s'occupant pas du régime et

du traitement de la mère ou de la nourrice, ou en prenant

une nourrice au hasard.

Les convulsions de l'enfance ne sont pas autre chose que

de l'épilepsie vraie, dans la grande majorité des cas ; il suffit

pour s'en convaincre de faire une enquête sur les antécédents

de l'enfant au point de vue de l'hérédité et l'on trouvera le

plus souvent, dans son ascendance ou de l'épilepsie ou de

l'alcoolisme et l'on sait avec certitude 'que plus de moitié

des cas d'épilepsie se rencontrent chez des descendants

d'ivrognes ou d'alcooliques. ,

En instituant le traitement dès la vie intra-utérine, non

seulement on peut prévenir dans beaucoup de cas les con-

vulsions de l'enfance et tous les accidents qui en résultent,

mais on place le système nerveux de l'enfant dans de meil-

leures conditions pour supporter les excitances de plus en

plus nombreuses et variées auxquelles il sera de plus en plus

exposé à mesure qu'il avancera en âge ; c'est donc une

atténuation de longue durée que l'on apportera déjà à sa

tare.

Lorsque l'enfant a acquis un certain développement, qu'il

peut quitter le régime lacté complet, on doit maintenir

néanmoins un régime un peu spécial dans lequel le laitage

et les oeufs auront la plus grande place, car les excitances

du système nerveux se multiplient à mesure que le dévelop-

pement physique et intellectuel progresse.

374 CLINIQUE NERVEUSE.

C'est aussi pour prévenir le plus possible les causes secon-

daires d'accroissement de ces excitances que l'on assurera

par des soins de propreté minutieux les fonctions normales

de la peau, que l'on devra veiller à la régularité des évacua-

tions intestinales, rénales, etc., que l'on remédiera sans

retard aux troubles mêmes les plus légers qui éclateraient

du côté des voies digestives.

Les moindres crises d'irritabilité, les moindres variations

d'humeur non motivées, annonçant déjà quelque chose de la

mentalité spéciale qui. constitue chez l'adulte le caractère

épileptique, en quelque sorte première manifestation

bruyante de l'épilepsie (que l'on a tort, à notre avis, de

négliger dans les ouvrages classiques), seront l'indice de la

nécessité d'un traitement préventif plus attentif qu'il sera

prudent de compléter par quelques doses de bromure de

potassium (suivant âge), des laxatifs (manne), etc. Des ver-

mifuges seront évidemment prescrits si quelques symp-

tômes semblent accuser l'existence dans le tube digestif

d'oxyures, de lombrics, etc.

Le travail intellectuel, qui devra rester toujours modéré,

au moins jusqu'après la puberté, sera permis mais surveillé

de façon à ce qu'il ne soit augmenté que d'une manière len-

tement progressive, en raison des progrès de l'âge, et qu'il

soit interrompu à la plus légère apparition de signes de

fatigue cérébrale ou d'obtusion intellectuelle.

L'exercice physique, utile au développement et au jeu

régulier des organes, sera évidemment recommandé, mais à

la condition que l'on interdira tous les exercices qui conges-

tionnent spécialement les centres nerveux ou qui exposent

à des chutes sur la tête ou à des trépidations pouvant avoir

une action facheuse sur le système nerveux, trapèze, sauts,

équitation par exemple.

En raison de l'irritabilité spéciale du système nerveux de

l'enfant prédisposé à l'épilepsie, de l'impressionnabilité con-

génitale qui le porte à la poltronnerie, on éloignera autant

que possible toutes les causes de taquineries, de frayeurs;

c'est assez dire que l'on surveillera attentivement ses rela-

tions avec ses camarades, que l'on veillera même sur son

' C'est à ce titre que je proscrüais l'usage de la voiturette pour pro-

mener l'enfant prédisposé.

EPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 375

sommeil, de façon à ne pas le laisser, s'il rêve, trop long-

temps en proie à un cauchemar. Ses écarts de caractère ou

de conduite devront être réprimés, mais avec intelligence,

sans brusquerie ni physique ni surtout morale, la répéti-

tion de chocs moraux pouvant avoir des. conséquences aussi

fâcheuses, sinon plus, que la répétition de chocs physiques,

surtout sur un cerveau prédisposé et en voie de développe-

ment et qui reçoit déjà d'autres excitences dont on combat

l'exagération possible par maintes précautions.

Si le traitement prophylactique a été bien surveillé chez

l'enfant, la puberté se passera plus facilement sans accidents

graves.

La puberté, outre les mesures prophylactiques que nous

venons de citer, prescrit des obligations préventives plus

sérieuses en raison de l'éclosion d'une activité fonctionnelle

spéciale que nous avons vue susceptible d'exercer une in-

fluence très fâcheuse sur la prédisposition comme sur l'épi-

lepsie.

A l'approche de la puberté, et pendant quelque temps, il

sera prudent d'atténuer l'impressionnabilité par des doses

plus régulières et plus soutenues de bromure de potassium,

de détourner un peu de l'activité fonctionnelle des glandes

génitales et thyroïde par une stimulation des fonctions d'au-

tres glandes pouvant aussi assurer l'élimination plus rapide

de sécrétions excitantes, glandes sudoripares, rénales, intesti-

nales, etc c'est alors que l'on ajoutera utilement au

bromure les frictions cutanées, frictions sèches matin et soir,

les laxatifs, le régime lacté un peu plus sévère, surtout chez

la jeune fille et même un peu de benzoate de lithine dont

nous montrerons l'utilité plus loin.

11 importera de prévenir aussi toutes les causes d'irritations

ou d'excitation qui peuvent résulter pour les organes géni-

taux de la malpropreté, de fermentations, de parasites, de

la masturbation, etc....

Tant que cette époque particulièrement dangereuse n'est

pas nettement franchie, que le système nerveux ne semble

pas arrivé à une activite ferme et régulière, qu'il ne paraît

pas avoir une orientation fonctionnelle bien nette, il est pru-

dent de ne rien abandonner des mesures préventives. Le t1'a-

vaiL intellectuel sera modéré, autant pour prévenir un sur-

croît d'irritation méningo-cérébrale directe que pour éviter

376 CLINIQUE NERVEUSE. -

les conséquences de la vie sédentaire. Le camphre adminis-

tré, de tempsen temps, chez le garçon; chaque mois à l'appro-

che de l'époque présumée des règles, et pendant une huitaine

au moins, chez la jeune fille, contribuera heureusement à

diminuer l'éréthisme des organes génitaux et du corps thy-

roïde, surtout s'il est associé à un hypnotique selon la pra-

tique de Ricord. Les bains un peu prolongée, par leur action

dépressive, peuvent rendre quelques services, mais je pros-

crirais absolument la douche froide dont les effets ne sont

pas constants.

Peu à peu, lorsque l'adolescent prédisposé approchera de

l'âge adulte, qu'il ne sera plus exposé à se laisser aller à une

folle désespérance, ce dont on s'assurera préalablement au-

tant que possible, on commencera à l'éclairer sur la néces-

sité de continuer à observer une certaine réglementation

hygiénique, qui, du reste, lui pèsera d'autant moins qu'elle

aura été instituée plus tôt. Il est, en effet, extrêmement utile,

à tous égards, de faire pour le prédisposé à l'épilepsie, et

même pour l'épileptique, ce que M. le professeur Brouardel

conseille de faire à l'égard du tuberculeux non voué aune

mort certaine, c'est-à-dire de lui montrer la nécessité d'une

hygiène rigoureuse en lui exposant les conséquences possi-

bles de la négligence, du défaut de précautions, et pour lui-

même et pour son entourage et pour la société et pour sa

descendance ; on le déterminera facilement à suivre une thé-

rapeutique hygiénique en lui montrant les conditions du

succès assuré. -

En lui faisant connaître le caractère habituel de l'épilep-

tique en appelant son attention sur l'instabilité des manifes-

tations psychiques ou de sensibilité de l'épileptique, en lui

montrant ce qu'il présente lui-même de commun avec ce

caractère, en appelant son attention sur les accès d'irritabi-

lité qu'il déplore souvent lui-même, dont il reconnaît le peu

de logique, on l'amène à une hygiène qui le met en garde

contre bien des ennuis qui ne résultent généralement que

d'une irritabilité qu'il chercherait à atténuer, à laquelle il

céderait moins facilement, s'il en connaissait l'origine, s'il

se considérait comme un candidat' la maladie ou comme un

malade ordinaire.

' Caractère qu'il faut, par conséquent, décrire avec soin dans les ouvra-

ges classiques. '

/

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 377 Î

Mettre l'épileptique, ou le prédisposé, en état de se mieux

connaître d'apprécier lui-même son caractère, et c'est parce

qu'on ne le fait jamais que j'insiste, c'est évidemment le

déterminer à veiller davantage et sur lui-même et sur sa

descendance, à suivre plus attentivement le traitement qui

atténue l'épilepsie ou la tare épileptique, c'est lui permettre

de mieux protéger sa descendance, de donner ses enfants

tous les soins que nous venons de voir utiles, d'imprimer à

leur éducation une direction, un développement plus en

rapport avac leur constitution originelle. Cette connaissance

de soi-même donnera certainement d'excellents résultats au

point de vue individuel comme au point de vue familial ou

social. C'est ainsi que j'ai pu rendre quelques services en

dessillant les yeux à des malades ou à de simples prédisposés

qui ne s'expliquaient pas les violences et les emportements

auxquels ils se laissaient aller sans mesure pour des futilités

et qui rendaient malheureuses toutes.les personnes obligées

de vivre avec eux.

Quant au régime alimentaire du prédisposé adulte, il

peut être un peu moins rigoureusement ordonnancé, l'épi-

lepsie éclatant surtout dans l'enfance et l'adolescence, mais

les écarts de régime ne pourraient cependant avoir que des

conséquences nuisibles, ne serait-ce que par un effet secon-

daire et passager de renforcement des excitences habituelles,

se traduisant par une exaltation momentanée de la mentalité

caractéristique.

Il est évident que le régime devra être d'autant plus sévè-

rement établï que.la prédisposition s'accusera davantage et

qu'il sera utile de donner de temps en temps bromure de

potassium, trional', si des bizarreries de caractère, une

augmentation de l'irritabilité ou de la sensiblerie, accusant

ou une impressionnabilité plus grande du système nerveux

ou des excitences plus intenses exercées sur le système

nerveux, viennent indiquer que la prédisposition s'aggrave,

que l'épilepsie menace de se manifester par ses grands symp-

tômes classiques. "

Pour la femme, il sera extrêmement important d'assurer la

régularité du retour des époques menstruelles, car cette

1 Dont nous verrons plus loin l'action.

378 CLINIQUE NERVEUSE.

périodicité régulière permettra d'instituer avec plus de succès,

de mieux ordonnancer le traitement préventif de l'exaltation

momentanée de la tare épileptique qui crée un danger spécial

d'évolution de la prédisposition; cette exaltation est bien

accusée par la plus grande fréquence des attaques au moment

des règles chez les épileptiques, et l'on sait aussi que la

première attaque d'épilepsie éclate presque toujours à une

époque menstruelle, double raison pour mieux veiller aux

époques menstruelles sur les femmes seulement prédisposées.

C'est un point thérapeutique qui a toujours été négligé

jusqu'à ce jour et qui mériterait cependant une grande

attention. Ne serait il pas naturel de renforcer le traitement

préventif ou le traitement curatif à l'approche et pendant

toute la durée de la période menstruelle, c'est-à-dire pendant

huit à dix jours par mois, ce que l'on ne fait jamais. Au trai-

tement habituel de la prédisposition ou de l'épilepsie, il serait

utile, d'après la pathogénie que nous avons indiquée, d'ajou-

ter quelquefois des agents d'élimination ou de destruction

des toxines qui peuvent se produire dans le tube digestif

plus à ce moment qu'en temps ordinaire. Je dois dire cepen-

dant que l'on a beaucoup exagéré, dans cesderniers temps, le

rôle de ces toxines; n'est-on pas allé jusqu'à les considérer,

par exemple, comme une des plus grandes causes d'épilepsie

en se basant précisément sur ce que les troubles digestifs

sont assez fréquents chez la femme au moment de l'écoule-

ment des règles et sur la plus grande fréquence des attaques

au même moment ? Mais on oublie, en faisant cette déduc-

tion, que les troubles gastriques sont aussi très fréquents à

la ménopause, ce qui n'empêche pas l'épilepsie de s'atténuer,

parfois même d'une façon absolument surprenante, on oublie

que certaines maladies infectieuses, dans lesquelles prédo-

minent des troubles gastro-intestinaux, comme la fièvre

typhoïde, suspendent l'épilepsie pendant leurs phases d'as-

cension et d'état, on oublie que la castration ovarique, qui

supprime ces troublés gastro-intestinaux périodiques, n'at-

ténue pas toujours bien sensiblementl'épilepsie grave, ce qui

suffirait déjà à montrer la nécessité de' chercher d'autres

causes principales à l'épilepsie. Nous avons, du reste, parlé

déjà un peu de cette question, dans la première partie de

notre travail. Le traitement curatif général que nous insti-

tuons actuellement, et dont nous parlerons plus loin, répond

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 37&

suffisamment à toutes les indications secondaires auxquelles

nous venons de faire allusion.

Les relations sexuelles du prédisposé, comme de l'épi-

leptique, doivent être régulièrement modérées; toutes les

causes de stimulation anormale des organes génitaux sont

à éviter, mais il est utile de céder aux sollicitations natu-

. relies, spontanées, la continence imposée pouvant, comme

nous l'avons dit, avoir des conséquences plutôtfâcheuses, une

série d'incitations nuisibles sur l'encéphale ainsi que sem-

blent l'attester les rêves érotiques qui, chez le continent,

précèdent des pollutions nocturnes, qui, chez des épilep-

tiques continents, constituent un signe avant-coureur d'une

attaque d'épilepsie. ,

Les bains un peu prolongés, l'exercice physique, la marche

surtout, exerceront sur le système nerveux et sur les organes

génitaux une action dépressive utile. Faut-il dire après cela

qu'une profession sédentaire, le décubitus prolongé. le tabac,

les plaisirs de la table ne peuvent qu'être nuisibles au pré-

disposé comme à l'épileptique. Le mariage a quelquefois une

influence favorable sur l'épilepsie, et qui- confirme ce que

nous avons dit de la continence ou des excès génésiques,

mais il n'est pas à recommander cependant, en raison de

l'intérêt social.

Je me suis étendu un peu longuement sur le traitement

prophylactique applicable à la prédisposition, à l'épilepsie,

surtout pour faire ressortir l'importance de s'occuper davan-

tage d'un certain nombre de circonstances aggravantes que

l'on néglige habituellement et dont le traitement complète-

rait heureusement le traitement curatif de l'épilepsie qui,

jusqu'à ce jour, ne tendait guère qu'à la suppression de l'at-

taque convulsive. On oublie trop qu'il y a, à côté de l'attaque

convulsive, avant elle, des troubles de l'intelligence et de la

sensibilité, une irritabilité, une sensiblerie, un caractère

spécial qui méritent de retenir l'attention, car ils peuvent

avoir de graves conséquences non seulement pour le prédis-

posé ou le malade mais pour sa famille, pour les personnes

qui sont tenues de vivre avec lui et pour la société. Que l'on

se préoccupe donc, par exemple, autant de l'enfant menacé

d'épilepsie que l'on prend cure de' l'enfant pour lequel on

380 CLINIQUE NERVEUSE.

redoute des accidents de nature syphilitique et l'on rendra,

certes, au moins autant de services au point de vue indivi-

duel et au point de vue social, car 'l'épileptique ne mérite

pas seulement notre sollicitude comme tout malade, nous la

lui devons aussi dans l'intérêt même de la société à laquelle

il fait courir des dangers que les médecins aliénistes ont trop

souvent l'occasionde constater. J'arrive au traitementcnratif

de l'épilepsie : .

Traitement curatif. Tout ce que je viens de dire de la

prophylaxie doit nécessairement servir de base au traite-

ment curatif, qu'il s'agisse d'un enfant, d'un adolescent ou

d'un adulte épileptique, toutes les prescriptions prophylac-

tiques que nous venons d'étudier doivent être appliquées

rigoureusement suivantles indications que nous avons signa-

lées. Mieux elles seront suivips,plus certaine et plus prompte

sera l'efficacité du traitement curatif.

Ce traitement doit répondre pour l'adolescent et l'adulte

aux quatre indications principales : 1° Diminution de l'im-

pressionnabilité méningo-encéphalique; 2° Modération de

l'activité fonctionnelle du corps thyroïde et des glandes

génitales ; 3° élimination régulière de leurs sécrétions;

4° Ecart de toutes les causes complémentaires d'excitence

méningo-encéphalique, développement ou accumulations

accidentels de toxines, etc

Les indications sont moins étendues pour le traitement cu-

ratif de l'épilepsie chez l'enfant; chez lui, en effet, on ne peut

songer à modérer sérieusement l'activité fonctionnelle de la

glande tyroïde sans nuire à son développement physique

et intellectuel. Du reste les causes d'excitation méningo-cor-

ticale du cerveau sont relativement faibles lorsque l'on

impose le traitement prophylactique que nous avons indiqué

et l'on' obtiendra un résultat satisfaisant en complétant ce

traitement par un agent susceptible de diminuer seulement

l'impressionnabilité encéphalique; le bromure de potassium

répondra suffisamment à cette indication. S'il ne donnait

pas les résultats attendus, on pourrait évidemment étendre

un peu le traitement curatif en s'inspirant de ce que

nous allons dire du traitement complet de l'épilepsie chez

l'adulte.

Chez l'adolescent et chez l'adulte, l'impressionnabilité

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 381 L

méningo encéphalique est avantageusement combattue par

le bromure de potassium, comme nous l'avons vu et ainsi

que l'attestent les cas déjà assez nombreux où il a suffi

pour faire disparaître les grandes attaques d'épilepsie. Mais

il ne donne parfois que des résultats incomplets ou insigni-

fiants, ainsi que le prouve la présence dans les asiles d'a-

liénés de tant d'épileptiques qui ont été saturés cependant

de bromure de potassium avant d'arriver à l'aliénation

mentale. Chez de tels malades nous avons obtenu des résul-

tats encourageants, quelques-uns relativement bons, en

complétant l'action du bromure de potassium, donné à

chacun des trois principaux repas, par du trional à la dose

de un à deux grammes, suivant les indications individuelles

(excitation cérébrale, insomnie, instabilité simple, etc...),

dose administrée en deux fois à douze heures d'intervalle,

moitié à huit heures et demie ou neuf heures du soir, moitié

le matin à la même heure.

On peut, dans quelques cas, lorsque le bromure occasionne

des accidents cutanés, par exemple, substituer le trional au

bromure de potassium sans compromettre les résultats du

traitement, comme nous avons pu le constater quelquefois;

mais le trional sera toujours un synergique précieux en cas

d'insuffisance d'action de bromure de potassium; ainsi B...,

jeune épileptique, confiée à une gouvernante et une bonne,

rationnellement traitée depuis longtemps par le bromure de

potassium ou les bromures associés, n'en voit pas moins son

affection s'aggraver à tel point que, en janvier 900, un

ami de la famille m'écrit : « l'état de la malade a empiré,

« elle devient méchante, elle jette à la tête des gens ce qui

« se trouve sous sa main; et cela arrive surtout quand elle

« n'a pas de crise. De plus elle mouille son lit et ses vête-

« ments, passe. plusieurs jours sans vouloir se lever, et,

« enfin, elle en est arrivée à ne plus pouvoir prononcer que

«quelques mots »; la gouvernante et la bonne allaient

cesser leurs services. Je conseillai d'ajouter au traitement,

outre quelques laxatifs, trional un gramme à un gramme

cinquante centigrammes, trois à quatre heures après le

repas du soir pour compléter l'effet du bromure. Quelques

semaines après j'apprenais que la malade s'était trouvée très

bien de cette addition, que gouvernante et bonne conti-

nuaient volontiers leurs services. Ce moyen thérapeutique

382 CLINIQUE NERVEUSE.

complémentaire utilisé par elles chaque fois que de l'exci-

tation se produitla jugule immédiatement. '

Il m'a, du reste, permis, dans la même année 1900, de

rendre promptement à sa famille une jeune fille dont l'épi-

lepsie s'était aggravée malgré un long traitement par le

bromure de potassium. Aux symptômes classiques de l'épi-

lepsie s'ajoutaient depuis quelque temps de violents accès

d'agitation avec idées de suicide et même tentatives de sui-

cide. Je fis prendre du trional en plus du bromure de potas

sium, tantôt trois heures après le repas du soir, tantôt soir

et matin, de douze en douze heures, et, bientôt, non seule-

ment les grandes attaques d'épilepsie devenaient plus rares,

mais les troubles psychiques, les idées de suicide et l'excita-

tion se dissipaient totalement et la jeune fille rentrait dans

sa famille fin mai 1900. 11 est quelquefois utile de faire

alterner le bromure de potassium et le trional dans l'ordon-

nancement général du traitement curatif. Les bains un peu

prolongés sont quelquefois aussi des adjuvants utiles.

Quant à la seconde indication « modération de l'activité

fonctionnelle du corps thyroïde et des glandes génitales»,

elle paraît, au premier abord, assez difficile à remplir;

comment, en effet, modérer, en l'état actuel de nos connais-

sances, la fonction du corps thyroïde. Nous avons pensé

résoudre la question, autant que possible actuellement, en

usant de l'action que nous savons pouvoir excercer sur des

organes dont l'activité est en rapport intime avec celle de

la glande thyroïde, les glandes génitales, par exemple; en

modérant l'excitation des organes génitaux, l'activité des

glandes génitales, on doit évidemment modérer dans une cer-

taine mesure l'activité fonctionnelle du corps thyroïde, car

nous avons vu que les modifications physiologues des pre-

mières s'accompagnent de modifications analogues de la

seconde (hyperactivité ovarique et hyperactivité thyroïdienne

des époques menstruelles; - hypoactivité thyroïdienne et

hypoactivité génitale du myxoedémateux; corps thyroïde

rudimentaire et ovaires ou testicules rudimentaires du

crétin complet). Le camphre, le lupulin, les bains un peu

prolongés, les diurétiques et les laxatifs rempliraient en

partie l'indication à la condition que la prophylaxie que

nous avons recommandée soit rigoureusement suivie (et

ÉPILEPSIE : PATHOGÉNIE ET INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES. 383

surtout, par la femme, aux époques menstruelles). Je donne

la préférence au camphre associé à un hypnotique selon la

pratique de Ricord (pilules camphre et thridace âa dix à

quinze centigrammes pour une pilule). Pour bien remplir

l'indication, les pilules devront être données, chez la

femme, au moins quelques jours avant l'époque présumée

des règles. pendant la période menstruelle et quelques

jours après ; elles peuvent sans inconvénients être prescrites

chez l'homme, au moins une quinzaine de jours par mois.

Comme l'épileptique est bien souvent arthritique, que

son irritabilité, ses variations de sensibilité ressemblent

parfois un peu à celles de l'arthritique, je me suis basé sur

ce rapprochement pour rechercher une médication capable

de prévenir l'accumulation dans le sang de sécrétions glan-

dulaires, qui, trop abondantes, ont une action particulière-

ment nuisible sur le terrain épileptogène.

J'ai fixé mon choix sur le benzoate de lithine, afin d'unir

les effets, tous particulièrement à rechercher ici, de l'acide

benzoïque et de la lithine, l'acide benzoïque stimulant, diu-

rétique, diaphorétique, diminuant les sécrétions bronchiques

(et peut-être bien aussi, par relation de voisinage, les sécré-

tions thyroïdiennes), et la lithine ayant une action diuréti-

que puissante. Ce choix me semble assurer la régularité des

excrétions cutanées et rénales, et peut-être modère-t-il en

même temps les sécrétions thyroïdiennes ? Il paraît, du reste,

ratifié par les résultats cliniques que j'ai obtenus. Donné

dans une certaine quantité de liquide, eau, infusion de hou-

blon ou de queues de cerises, ce sel assure une sorte de lava-

ge du sang qui prévient l'accumulation dans le sang de pro-

duits de sécrétion de la glande thyroïde.

La régularité des fonctions de tous les appareils ou orga-

nes d'épuration ou d'excrétion étant indispensable, on

prescrira utilement l'usage de laxatifs.

Les antiseptiques du tube digestif seront utiles si le régi-

me alimentaire n'est pas rationnellement établi, comme nous

l'avons indiqué plus haut, si le régime convenable n'est pas

accepté par le malade pour un motif quelconque (goût ou

situation professionnelle, etc.). Du reste le camphre que l'on

fera prendre de temps en temps, joint à son action dépressive

sur les organes génitaux une certaine action antiseptique

. dont bénéficie un peu le tube digestif ? `

384 CLINIQUE NERVEUSE.

Les améliorations obtenues grâce au régime préconisé par

MM. Richet et Toulouse sont évidemment dues à la suppres-

sion des causes adjuvantes dont nous parlons, à l'atténuation

de circonstances aggravantes ; le traitement préconisé par

ces auteurs remplit ainsi une partie des indications plutôt

secondaires que nous révèle la pathogénie de l'épilepsie. Il

ne sera pas toujours facile de faire accepter un tel régime

dans la pratique courante.

Les injections de sérum, qui donnent à M. Maurice de

Fleury des résultats favorables, agissent aussi contre une

partie des causes de l'épilepsie, contre les causes secondai-

res surtout. Mais ces modes de traitement adjuvant, à recom-

mander dans un service hospitalier, ne peuvent guère rendre

de services dans la pratique ordinaire de la médecine. Le

traitement par injections de sérum ne serait pas toujours

accepté bien longtemps par les malades; il peut occasionner

des accidents, généralement peu graves, je le veux bien,

mais qui suffiront pour le faire rejeter par le malade (ainsi

qui j'ai pu le constater), et auxquels il est inutile d'exposer

un malade quand on peut faire autrement ; enfin c'est un

traitement qui ne peut pas être renouvelé indéfiniment et

qui est peu pratique pour le médecin dont la clientèle est un

peu étendue.

J'estime que nous sommes suffisamment documentés sur

la pathogénie de l'épilepsie pour la rayer du cadre des né-

vroses, et pour la combattre efficacement, surtout si nous

nous attachons enfin à soigner les adultes en les instruisant,

en leur faisant connaître toutes les phases que peut parcou-

rir leur affection et en les amenant non seulement à accepter

toutes les prescriptions mais à donner à leur descendance

dès l'âge le plus tendre, dès la vie inta-utérine même, les

soins dont nous connaissons l'efficacité réelle.

UN meurtrier DE quatorze ANS. Lectoure. Deux jeunes gar-

çons de quatorze ans, s'étant pris de querelle dans la soirée d'hier,

l'un d'eux, nommé Moga, s'arma d'un couteau et en porta un coup

violent à son adversaire, nommé Victor Pujos, qui fut grièvement

blessé au côté droit. Le jeune meurtrier a pris la 1'uite. (L' Aurore i»

29 septembre.)

PHYSIOLOGIE.

Contribution à l'étude des fonctions de la couche

optique.

Par LE D' BENAKY

Médecin de l'hôpital Saint-Charalambe, à Smyrne.

De récents travaux, se basant sur des faits immédiatement

observés et contrôlés par l'autopsie ou simplement déduits

de l'observation clinique et de l'expérimentation, ont établi

que les mouvements mimiques de la face sont sous la dépen-

dance de la couche optique. C'est à ce titre que nous publions

l'observation suivante de tumeur de l'encéphale. Bien que

cette tumeur eût envahi plusieurs organes de l'encéphale,

certains symptômes, néanmoins, ont présenté un tel carac-

tère qu'il serait impossible de ne pas les attribuer à une

lésion de la couche optique.

A... L..., âgée de cinquante-cinq ans, est entrée à l'hôpital,

salle Saint-Pantaléon n° 17, le 15 janvier 1903. Archives de l'hôpi-

tal, feuille d'admission n° 1733. Antécédents personnels ou héré-

ditaires inconnus. La malade garde le décubitus dorsal.

Torpeur intellectuelle très prononcée, dont elle sort avec peine.

Elle donne alors des réponses qui ne paraissent nullement claires.

Ptosis de la paupière droite avec parésie de tous les muscles innervés

par l'oculo-moleur commun et léger strabisme divergent. Le

membre supérieur droit est animé de mouvements spasmodiques-

beaucoup plus marqués dans la position assise de la malade.

Membres inférieurs paralysés. La malade peut avec beaucoup de

peine se tenir debout quand on la soutient ; si non elle a de la

tendance à tomber en arrière. Réflexes augmentés.

L'examen ophtalmoscopique montre de l'étranglement de la

papille avec oedème péripapillaire et plaques atrophiques sur la

papille. Congestion veineuse très accentuée. Petites hémorrhagies

le long des veines dans la partie avoisinant la papille. La malade

ne peut, vu son état intellectuel rien prendre de la main et l'on

est obligé de la nourrir à la cuiller. Le réflexe de la déglutition

Archives, 2» série, t. XVIII. 2

386 PHYSIOLOGIE.

est conservé. Elle ne se salit pas. A son agitation seulement on

comprend qu'elle se sent le besoin d'uriner. ,

Cet état a duré-pendant six jours, puis les symptômes se sont

aggravés. La torpeur intellectuelle s'accentuait de plus en plus. La

malade ne faisait que déchoir et finalement elle entra dans le

coma. Elle eut alors de l'incontinence des urines et des matièles

fécales. Le réflexe de la déglutition était cependant conservé et

l'on pouvait lui faire prendre du lait à la cuiller. La mort eut lieu

dans le coma le 11 février 1903.

Cette malade a présenté un symptôme très curieux. Elle

proférait constamment des menaces, soit quand on lui

prenait la main, soit quand on essayait de la faire marcher

ou pendant qu'on procédait à l'examen ophtalmoscopique.

Bien souvent même quand simplement on lui parlait. Elle

répétait alors à chaque moment : je vous frapperai;

menace qu'elle réaliserait si l'on ne prenait pas garde de lui

tenir les mains. Quand on la laissait libre, en effet, elle

levait la main comme pour frapper à la figure. Elle accom-

pagnait alors ce mouvement d'un sourire forcé et presque

moqueur, accentué de plus par le ptosis de la paupière et le

strabisme externe qui lui donnaient une physionomie toute

particulière. '

Autopsie. Glio-.<(t1'come ayant envahi tout le lobe pariétal droit

et arrivant jusqu'aux méninges sur lesquelles il adhère fortement.

La tumeur se prolonge dans l'intérieur du lobe frontal au-dessous

du ventricule latéral. Cette partie a la forme d'un fuseau qui s'ar-

1 être en avant à trois centimètres de l'extrémité antérieure du lobe

frontal et en arrière au niveau d'une ligne passant par les tuber-

cules quadrijumeaux postérieurs et a envahi le corps strié, la

partie postérieure de la couche optique, toute la capsule interne,

le noyau lenticulaire et une partie de la capsule externe.

Les dégâts causés par la tumeur nous rendent bien compte

des symptômes présentés par la malade tels que les divers

troubles de motilité. Mais il est un symptôme qui attire

spécialement noire attention dans l'histoire de cette malade :

c'est la menace perpétuelle de celle-ci de frapper, menace

qu'elle accompagnait du geste et de la parole pendant que

sa physionomie prenait une expression étrange en dessinant

ce sourire forcé et presque moqueur, phénomènes qui sont

tous du domaine de la mimique. Or, il résulte des travaux

ÉTUDE DES FONCTIONS DE LA COUCHE OPTIQUE. 387 -j

de plusieurs observateurs que les mouvements de la mimique

sont sous la dépendance de la couche optique.

Romberg cite une observation de Stromeyer, où pour

employer ses propres termes, il y avait « conservation des

mouvements des muscler innervés par le facial tandis que

ceux qui résultent des émotions étaient suspendus ». Mais

c'est Notbnagel qui, le premier, a attiré l'attention sur

cette question. Cet auteur a observé un cas avec paralysie

de la mimique du nerf facial gauche. L'homme en question

pouvait faire contracter volontairement les muscles de la

face mais il ne pouvait pas rire. Pendant ie rire, c'est-à-dire

les muscles de la face qui produisent cet acte de la mimique

ne se contractaient pas chez lui. L'autopsie avait montré

une tumeur de la couche optique droite avec destruction de

celle-ci'.

Il existe cependant dans la littérature médicale quelques

observations, où l'on a noté une tendance irrésistible au

rire (abstraction faite des autres états pathologiques de

1 encéphale qui peuvent présenter ce symptôme). La pre-

mière de ces observatiens est due à Oppenheim Les symp-

tômes présentés dans le cas décrit par cet auteur montraient

l'existence d'altérations dans la région de la couche optique.

Il y avait en même temps tendance irrésistible au rire.

Westphal ', qui a observé un cas semblable s'exprime

ainsi : « La gaieté et le bavardage du malade font l'impres-

sion d'un état pathologique. Cependant le rire continuel et

exagéré était le symptôme qui nous a le plus frappé».

Oppenheim et Eisenlohr3 expliquent ce phénomène comme

une conséquence d'irritation de la couche optique,

l3echterew6 a également publié un cas de rire forcé qu'il

avait observé chez une fille de quinze ans. Cet auteur analysant

' Cité par Nothnagel, in Traité clinique du diagnostic des maladies

de l'encéphale, traduit par Keraval. p. 226.

Ilaîzdbiich der Speciellen Pathologie und Thérapie, von Ilermann

\uttu.yel. IT. 1l,111d. die Geschwitlsle des Gehirue, von Oppenheim.

p. 111. J ,

1 Ibid. ,

, lbitl. ·

1 lbid.

Cité par Yimoucopoulo.

388 PHYSIOLOGIE.

les phénomènes présentés par la malade et prenant en con-

sidération le symptôme concomitant du rire forcé conclue

que la lésion devait siéger vers la partie postérieure de la

couche optique. A côté de ces observations où l'autopsie n'a

pu être faite, il y a deux observations où l'autopsie avait

démontré des altérations limitées dans la couche optique.

La première de ces observations est due à Gowers 1. Il s'agit

d'une femme de quarante et un ans ayant éprouvé, il y a six mois

une attaque apoplectique à la suite de laquelle la jambe et le bras

demeurèrent paralysés du côté droit pendant des mois. Au moment

de son admission il existe encore une légère paralysie du segment

inférieur de la face pour l'expression motrice des émotions, mais

non pour les mouvements volontaires. Voici ce que démontrait

l'autopsie : la couche optique gauche présente à sa surface en

avant du tubercule postérieur (pulvinar) une dépression à direction

transversale. La section transverse montre qu'il s'agit d'un foyer

gros comme la moitié d'une noix, plein d'un contenu jaune

ocreux ; il occupe presque le milieu de la couche optique s'éten-

dant en dedans et en arrière jusqu'au tubercule quadrijumeau

antérieur ; en dehors il ne va pas au delà des limites de la couche

optique.

La deuxième observation est due à Yimoucopoulo=, médecin

de la Section des aliénés à l'hôpital Saint-Charalambe. Le malade

en question, cultivateur, âgé de trente ans, avait présenté les

symptômes suivants : Nerf facial droit atteint de parésie en même

temps que de mouvements spasmodiques. Langue déviée à droite.

Membre supérieur droit paralysé, atrophié et atteint de mouve-

ments spasmodiques, principalement dans l'articulation du carpe.

Membre- inférieur droit parésié, oedématié. Phénomènes réflexes

augmentés. Clonus du pied. Signe de Romberg positif. Intelli-

gence obtuse. Le malade a présenté dans les six ou sept derniers

mois de sa vie un rire continuel. La mort survint accidentellement

à la suite d'une entérite aiguë. Diagnostic posé : Polio-encephalite

infantile.

Autopsie. Crâne de microcéphale. Méninges oedématiées. Hémis-

phère célébrai gauche atrophié. La plus grande partie du ceiitie

semi-lunaire détruite et occupé par un kyste rempli de liquide et

' Cité par Nothnagel in Traité clinique, etc., p. 201.

2 Communication faite au 2' Congiùs médical panhellénique (1903)

Ce tiavail a été publié dans la Revue psychiatrique et neurologique

d'Athènes (novembre '1903). On peut également lire un résumé de ce

travail dans la Grèce médicale, 1-15 oct. 1903.

ÉTUDE DES FONCTIONS DE LA COUCHE OPTIQUE. 389

communiquant avec le ventricule latéral droit. Dans la couche

optique gauche, tumeur de la grosseur d'une aveline située dans

l'angle formé par la surface supérieure et interne de la couche

optique. Cette tumeur faisait une légère saillie dans le troisièm e

ventricule.

Ces faits semblent en contradiction avec les cas précé-

demment décrits de Nothnagel et de Gowers qui ont observé

la paralysie des muscles mimiques de la face à la suite

d'altérations pathologiques de la couche optique. Cette

contradiction, cependant ne serait qu'apparente et due sim-

plement à la diversité des symptômes que présentent d'une

manière générale les tumeurs encéphaliques. Ceux-ci, en

effet, peuvent être ou bien des symptômes d'abolition des

fonctions de la partie encéphalique qui en est le siège ou bien

des symptômes d'irritation. « La tumeur de la couche

optique (dit Yimoucopoulo) décrite par Nothnagel a, par

son grand volume occasionné une paralysie des muscles de

la face, soit des phénomènes d'abolition. La tumeur par

contre que nous avons observée, a, par sa petitesse, occa-

sionné des phénomènes d'irritation, d'où contraction irré-

sistible des muscles de la mimique de la face. Il n'est

cependant pas douteux que si le malade restait encore en

vie, la tumeur se développant davantage, aurait occasionné

des symptômes de destruction de la couche optique. »

Il en fut de même de notre malade. La tumeur tout en

ayant envahi la couche optique n'en avait détruit que la

partie postérieure seulement. Les lésions qu'elle avait pro-

voquées dans ce ganglion central n'avaient ainsi produit que

des symptômes d'irritation, qui, en une période ultérieure,

auraient fait place à des symptômes d'abolition des fonc-

tions de la couche optique par l'envahissement total de

celle-ci parla tumeur.

Ces faits prouvent que des processus irritatifs de la couche

optique, quelle qu'en soit la nature, peuvent déterminer des

contractions des muscles mimiques de la face. A ce titre,

cette observation pourrait servir de contribution à l'étude

de la physiologie pathologique de la couche optique.

RECUEIL DE FAITS.

Deux cas de mérycisme;

PAR LES DOCTEURS

RAVIART, F T CAUDRON,

Médecin-Adjoint. Interne,

à l'asile d'Armentières.

Les cas de mérycisme sont-ils rares, les observateurs dé-

daignent-ils de les recueillir; toujours est-il que la littéra-

ture médicale de ces dernières années ne comprend qu'un

fort petit nombre d'études consacrées à ce phénomène. C'est

à peine si, depuis qu'il est étudié en France, on en a publié

plus de deux cents cas, dont les plus connus sont les auto-

observations de Percy, de Laurent, de Cambay, de Raphaél

Blanchard et ceux rapportés par Bourneville et Séglas dans

la si remarquable « Etude Critique », qu'ils ont en 1883-84

consacrée au mérycisme dans les Archives de Neurologie.

Rappelons également le cas observé par Duvivier, dans le

service de M. le professeur Combemale et publié dans l'Echo

Médical du Nord (1900, n° 8, p. 90).

Nos observations sont celles de deux mérycoles aliénés,

seuls malades de l'Asile d'Armentières qui, à notre connais-

sance, aient présenté ce trouble sur près d'un millier de

pensionnaires. Cette fréquence, on le voit, est loin d'attein-

dre celle constatée par Bouchaud en 1883 à l'asile de Lom-

melet, où, sur 571 malades, il comptait 14 mérycoles dont 11

étaient des idiots. Notre première observation est celle d'un

adulte; la seconde, celle d'une fillette de dix-neuf ans, seule

mérycole sur environ cent enfants idiots ou épileptiques.

Observation I. D. B... est né en 1801, de parents sur lesquels

nous n'avons que peu de renseignements, qui, en tout cas, ne sont

pas mérycoles. Il ne présente rien d'anormal du côté de ses facul-

tés intellectuelles jusqu'au moment où, étant au régiment, appa-

DEUX CAS DE MÉRYCISME. 391

raissent des idées délirantes de persécution, sous l'empire des-

quelles, il se livre à des voies de fait contre un supérieur ; conduit

alors au cachot, il met le feu à la paille, se livre à de nombreuses

excentricités; il est réformé peu après.

Sitôt admis à l'asile, ou pose chez lui le diagnostic de mélancolie

avec idées de persécution basées sur des hallucinations de l'ouïe. Son

état ne.s'améliore pas, toujjurs triste, taciturne, inaclif, aussi

incohérent dans ses propos que dans ses actes, répondant d'une

façon absurde aux questions qu'on lui pose, parfois troublé au

point de déchirer ses vêtements, malpropre, sans être cependant

gâteux, il finit par tomber dans l'état démentiel où il se trouve

actuellement.

En 1884, lors de son arrivée à l'asile, D. B... n'était pas méry-

cole, ses dents étaient en excellent état, les digestions paraissaient

s'accomplir normalement. Ce n'est qu'au bout de quelques années

que les troubles survinrent, et à en croire l'entourage, ils seraient

apparus à la suite d'excès commis par le malade; devenu glouton,

le repas terminé, il allait dérober des aliments qu'il avalait avec

voracité; des régurgitations s'en suivirent, le mérycisme apparut,

et, tel il se montra, tel il est depuis environ quinze ans.

La rumination s'est toujours accomplie de la même façon, quo-

tidiennement et après chaque repas. Toujours aussi glouton,

D. B... ne mâche pas ses aliments, les avale presque aussitôt por-

tés à la bouche, et c'est un spectacle curieux de le voir, en peu

d'instants dévorer le contenu de plusieurs assiettes dans lesquelles

pain, viande et légumes sont amoncelés.

Après un laps de temps variant de quelques minutes à deux ou

trois heures, très peu de temps après le repas le plus souvent, la

rumination commence : elle se produit sans effort, la paroi abdo-

minale ne semble pas intervenir, une inspiration assez forte mar-

que simplement le début du phénomène.

D. B... peut à volonté, quand les aliments sont remontés dans

le pharynx, les introduire dans la bouche ou les avaler de nou-

veau. Si c'est à la première alternative qu'il s'arrête, il manifeste,

dès que le bol arrive dans la bouche, les signes du contentement

le plus évident, il passe la langue entre ses lèvres comme s'il

dégustait et nous déclare ensuite : « Quand j'ai fini de manger, je

remange parce que'j'ai du plaisir. » Au moment où il parle, quel-

ques éructations se produisent, puis il continue tranquillement sa

rumination. Plus rarement et lorsqu'il ne se croit pas surveillé,

il va contre un mur, rejette ses aliments dans sa main, se met à

rire et les réingurgite.

D'autres fois, le phénomène ne se produit pas aussi facilement,

notre malade se tire alors la langue avec la main, tousse et fait,

comme il le dit, « repasser le manger. » Le nombre des régur-

gitations est variable, et nous avons remarqué qu'il est en rapport

392 RECUEIL DE FAITS.

avec la nature des aliments ingérés : c'est ainsi que les haricots,

par exemple, sont ruminés plus longuement que les pommes de

terre. -

Tous les aliments liquides ou solides ainsi ruminés, sont bons

au dire du malade. Leur goût n'est, pas modifié, et nous avons pu

nous assurer qu'aucune odeur désagréable ne s'en dégage et qu'ils

n'ont rien de commun avec les matières rejetées brusquement de

l'estomac après un commencement de digestion. D. B... rumine

toute la journée et ce n'est qu'aux approches du repas que le phé-

nomène se ralentit.

La mastication et l'insalivation sont accomplies imparfaitement

chez lui. On peut, du reste, constater l'insuffisance de son système

dentaire ; il n'existe plus de dents au maxillaire supérieur, et, à la

mâchoire inférieure, on ne compte plus que quatre incisives, une

canine et deux molaires. Il a fort peu de salive, les aliments n'en

sont guère imprégnés, et, après les repas, on peut constater la

sécheresse de la langue.

Les joues sont pendantes, et, au moment du repas, elles per-

mettent au malade d'y loger momentanément ce qu'il ne peut ava-

ler de suite. Le réflexe pharyngien est aboli. L'estomac fait une

légère saillie à l'épigastre, il est du reste dilaté et la percussion

montre qu'il s'étend jusqu'à l'ombilic ; il est le siège d'un bruit de

gargouillement qu'il est possible d'entendre à une certaine dis-

tance.

L'intestin parait fonctionner normalement et les selles du malade

sont du reste à peu près normales.

Ce n'est pas à dire cependant qu'il n'existe pas de troubles

digestifs chez lui. La quantité d'aliments qu'il ingère, est telle que

des phénomènes d'intolérance doivent se produire, aussi peut-on

le voir, tandis qu'il se promène dans la cour, rejeter parfois sur

le sol une quantité plus ou moins grande d'aliments incomplète-

ment digérés et dégageant une odeur désagréable, il est fréquent

aussi de retrouver. le matin, son vase de nuit rempli de matières

vomies, nauséabondes, dans lesquels se retrouvent souvent intacts

des aliments provenant de l'avant-dernier repas.

Très probablement des troubles du chimisme stomacal existent

chez ce malade dont l'estomac est dilaté, l'indocilité du sujet ne

nous a malheureusement pas permis de nous en assurer par des

recherches spéciales. Quoi qu'il en soit, l'état général est bon.

D. B... ne souffre pas de son mérycisme; ruminer est peut-être

même pour ce malheureux la seule satisfaction qu'il soit encore

capable d'éprouver.

Observation IL Elle concerne une petite malade entrée à

l'asile en 1893 et morte l'année dernière de tuberculose pulmo-

naire. C'était une fillette de dix-neuf ans, appartenaut à une

DEUX CAS DE MÉRYCISME. 393

famille fortement entachée d'hérédité névropathique, mais dans

laquelle on n'a jamais observé le mérycisme. Elle-même était

atteinte d'idiotie consécutive à des convulsions de l'enfance, elle

était, en outre, sujette à de nombreuses attaques d'épilepsie.

Ce n'est que cinq ou six ans après son entrée que le mérycisme

fut observé chez elle. Nous ne pouvons dire à la suite de quelles

circonstances le phénomène apparut, mais nous savons que A. D...

était devenue à cette époque beaucoup plus gloutonne qu'au

début : elle avalait les aliments sans les mâcher et elle entrait

dans de violentes colères lorsqu'on ne les lui présentait pas asez

vite. De plus, on devait la surveiller d'une façon toute particulière

pour l'empêcher de dérober aux autres malades la viande dont elle

était extrêmement friande. Elle buvait fort peu.

Le mérycisme apparaissait chez elle après chaque repas. Il dé-

butait sitôt après que les aliments étaient ingérés'et il durait pres-

que jusqu'au repas suivant. A toute heure de la journée, on voyait

la malade mâcher ses aliments et on pouvait lire sur son visage

tout le plaisir qu'elle y prenait. Elle allongeait le cou, pi ovoquait

une éructation et les aliments remontaient dans la bouche avec un

bruit de glou-glou. Tantôt A. D... se bornait à les faire revenir

dans la bouche, tantôt elle les rendait dans sa main ou sur le sol,

où elle les reprenait ensuite. Si on essayait alors de les lui retirer,

elle se fâchait.

Les aliments ainsi ruminés revenaient secs et avec leur appa-

rence première ; elle ruminait surtout la viande qu'elle préférait

du reste à toute autre chose. Elle ruminait peu la purée de pois

qu'elle n'aimait pas ou bien elle la rejetait au lieu de la soumettre

à la mastication.

Notons ici qu'à son retour dans la bouche, le bol alimentaire ne

dégageait aucune odeur désagréable. Les liquides étaient éga-

lement ruminés et alors que la malade était au régime lacté

absolu, le mérycisme se produisait. La paroi abdominale ne pré-

sentait pas de contraction appréciable lors du début du phéno-

mène. A. D... ruminait aussi bien debout et assise que couchée.

On n'a jamais remarqué qu'elle ruminât la nuit.

Comme nous le disions au début de cette observation, elle pré-

sentait certains jours de nombreuses attaques d'épilepsie; il nous

parait intéressant de dire ici quelques mots de l'influence de ces

attaques sur le mérycisme. Au moment même de l'attaque, tout

phénomène était naturellement suspendu, mais peu de temps

après sa fin, alors même que la malade étendue à terre était à

peine sortie de la période de torpeur consécutive à la crise, la

rumination recommençait.

Enfin, la tuberculose pulmonaire à laquelle elle succomba n'eut

aucune action sur le mérycisme que l'on put observer jusqu'à la

fin. La toux, si fréquente à ce moment, n'apportait aucun déran-

394 REVUE d'aNATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

gement dans la rumination et ne déterminait pas de vomissements.

Comme chez bon nombre de mérycoles, le système dentaire était

en mauvais état ; de nombreuses dents étaient gâtées, il manquait

quelques molaires. L'estomac était dilaté, fréquemment le siège

d'un bruit de clapotage que l'on entendait à distance et l'ingestion

des liquides était accompagnée d'un glou-glou caractéristique.

La digestion paraissait s'accomplir assez régulièrement, toute-

fois on retrouvait dans les salles des pois verts et des haricots non

modifiés par les sucs digestifs, nous avons déjà dit que notre ma-

lade n'aimait pas ces aliments.

En résumé : chez un aliéné sans antécédents héréditaires

connus et chez une idiote épileptique présentant des antécé-

dents héréditaires d'ordre névropathique,le mérycisme, non

observé chez les ascendants, apparaît chez le premier vers

vingt-huit ans, chez la seconde vers quinze ans, très vrai-

semblablement à la suite d'indigestions dues à leur voracité,

favorisées par le mauvais état de leur appareil dentaire. Le

phénomène se montra avec ses caractères ordinaires, se

produisant sans efforts, agréable aux malades. Il n'était, chez

notre petite malade, influencé ni par les crises d'épilepsie,

ni par l'évolution de la tuberculose pulmonaire ; la toux n')

apportait aucune modification.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

PATHOLOGIQUES.

LXVIII. Doigts en valgus; par PAULY. (Bévue de médecine. Dé-

. cembre 1902.) M. H.

LXIX. Un cas de langue double ; par Lrrz. (Médical Record.

1 Mars 190 ? .)

LXX. Difformité congénitale observée chez un enfant de cinq ans

LXXI. De l'influence de l'écorce du cerveau et des ganglions sons

corticaux sur la contraction de l'utérus de la lapine; par 1V.J.

PLOKl1lNSKY. (Obozrénié psichicclnü, VII, 1902.)

Après avoir introduit dans la matrice l'appareil nécessaire à

enregistrer les contractions de l'organe (voir le manuel opératoire

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 395

dans le texte), l'auteur excite le cerveau. Il s'agit de lapines mul-

tipares, à matrice développée, et même grosses. -

I. Il existe dans l'écorce une région utéromotrice située à la 1/2

postérieure de la zone motrice, en dedans, près du bord de l'hé-

misphère, de la scissure interhémisphérique, ou sur ce bord même,

quelquefois un peu en dehors.

L'excitation de cette région renforce les contractions utérines

indépendantes antérieures, en provoque et les rend rhythmiques,

surtout quand on répète l'excitation. Un faible courant électrique

peut rester inactif, mais il agit si on le renforce. De même, dans

les cas où il n'y a' pas de mouvements utérins spontanés, si l'on

excite l'écorce d'arrière en avant, on obtient, juste au moment où

les électrodes touchent larégion indiquée, des contractions rhyth-

miques alternatives. L'excitation réitérée peut entretenir l'inten-

sité des contractions utérines, augmenter la tonicité générale de

l'organe, etc. L'action du centre d'un hémisphère est indépendante

de celle de l'autre..

II. La couche optique est utéromotrice, mais il faut que les élec-

trodes pénètrent dans la profondeur, sur les confins de la portion

antérieure, ou un peu en arrière, entre les parties antérieure et

moyenne : alors l'utérus se contracte énergiquement, plus vive-

ment que lorsqu'on excite l'écorce.

Si l'on tient compte que l'excitation de la couche optique a tou-

jours lieu après celle de l'écorce, c'est-à-dire quand l'organe expé-

rimenté est un peu fatigué, et que néanmoins les contractions

obtenues sont plus énergiques, il s'ensuit que la couche optique

renferme un centre plus puissant que l'écorce. Quelques expériences

semblent démontrer dans la partie antérieure de la couche optique

l'existence d'un centre d'arrêt des contractions utérines.

III. L'excitation des tubercules quadrijumeaux postérieurs a

donné des contractions moins vives que celle de la couche optique.

Celle du noyau caudé et du cervelet est demeurée sans résultat.

Celle du sciatique a par action réflexe fait vivement contracter

l'utérus. Celle du bout central du nerf vague, sectionné au cou, a

aussi agi, mais point l'excitation du bout périphérique. Le plexus

hypogastrique agit également.

Les centres automatiques de l'utérus sont donc subordonnés aux

centres supérieurs cérébrospinaux qui peuvent en renforcer ou en

entraver les contractions, mais par l'intermédiaire des centres pro-

pres de cet organe. P. KERAVAL.

LXXII. Contribution à la localisation de l'hémianesthésie céré-

brale ; par K. Sciiaffer. (Neurolog. Centralbl., XXI, 1902.)

Un malade atteint d'hémiplégie typique avec hémianesthésie

très marquée, présente dans l'hémisphère droit un ramollissement

396 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

des lèvres de la scissure de Sylvius qui plonge et occupe la tête et

le corps du noyau caudé, le segment antérieur et le genou de la

capsule interne. Delà, altérations consécutives en deux directions :

atrophie marquée de la couche optique, dégénérescence descen-

dante des pyramides jusque dans la protubérance, le bulbe et le

côté opposé de la moelle. L'atrophie de la couche optique porte

principalement sur son noyau externe, ou postéro-externe ; elle

tient à l'interruption de la communication entre l'écorce et cet

organe. La couche optique n'est pas directement lésée, car le ra-

mollissement ne s'étend que jusqu'à la couche réticulée ou grilla-

gée d'Arnold. Comme il appert que la lésion n'atteignait guère, en

sus du segment antérieur et du genou de la capsule interne, que

la moitié antérieure de son segment postérieur, et qu'elle a res-

pecté la portion postérieure de ce segment postérieur, seule la

partie motrice de la capsule interne est anéantie; il faut donc

croire, le patient ayant été hémiplégique et hémianesthésique,

qu'aux fibres motrices sont mélangées des fibres sensitives. celles

de la sensibilité cutanée. (Déjerine, E. Long). Figures à l'appui.

P. KERAVAL.

LXXIII. Existe-t-il une régénération autogène des fibres nerveuses 1

Contribution à la théorie du neurone ; par E. Muenzer. (Neuro-

log. Ce ? ztt-alblait. XXI, 1902). Contribution à la question de la

régénération autogène des nerfs; par A. 13;l'IIE. Id. Réplique

à Bethe ; par E. ! \1UENZEI\. (Neurolog. Centralbl. XXII, 1903.)

Au T3° Congrès des Naturalistes et Médecins allemands, Ver-

worn a soutenu que le corps de la cellule avec son prolongement

nerveux et ses dendrites constitue une unité. Nissl a dit le con-

traire : la substance fibrillaire serait autonome, indépendante des

cellules nerveuses. M. Muenzer pense que toutes les fibres qui pro-

viennent d'une cellule nerveuse appartiennent à un neurone; le

neurone comprend toutes les fibres nerveuses sous la dépendance

trophique d'un protoplaste. Au 26e Congrès des Neurologistes et

Aliénistes allemands du Sud-Ouest, de juin 1901 (Bade), Betlie

combat la genèse des fibres nerveuses du neuroblaste, soutient la v

genèse multicellulaire du cylindraxe, et communique des expé-

riences d'après lesquelles le Lout périphérique du sciatique sec-

tionné et tout à fait séparé du bout central se serait régénéré et

aurait recouvré sa fonction. D'après les mêmes expériences de

Muenzer, les fibres nerveuses néoformées constatées dans le bout

périphérique en question tiennent au rétablissement de la conti-

nuité, par l'intermédiaire de la cicatrice, entre le bout périphérique

et les parties centrales, les cellules nerveuses. Il n'existe pas de

régénération autogène des fibres nerveuses. Du tout, répond Bethe,

ces anastomoses extérieures au nerf, je les évite; c'est bien dans le

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 397

bout périphérique même isolé du centre que je trouve des fibres

régénérées composées de manchons de myéline et de cylindraxes.

Ces fibres régénérées ne sont pas entrées du dehors dans le bout

du nerf; ce ne sont pas non plus des fibres venues du bout central

dans le bout périphérique. Je n'ai pas dit cela, termine Muenzer;

j'ai simplement constaté le rétablissemeni par la cicatrice de la

continuité avec les centres nerveux expliquant les fibres néofor-

mées, et sauvegardant la théorie du neurore. La question en est là.

Les détails de la polémique sont à lire dans le mémoire de Muen-

zer. (Fi. ); et les controverses aussi. P. Keraval.

LXXI V. De la genèse sous-corticale de spasmes musculaires isolés.

Contribution à la clinique des tumeurs des tubercules quadriju-

meaux, avec remarques sur le trajet du faisceau central de la

calotte; par J. SORCO. (Neurol. Centralbl, XXI, 1902, lr, 15, iG,

17.) ,)

Observation clinique accompagnée d'étude anatomique et histo-

logique très minutieusement analysée et discutée. Figures.

Cette observation, conclut l'auteur, permettrait d'attribuer aux

foyers sous-corticaux, c'est-à-dire aux centres sous-corticaux, la

faculté de provoquer des convulsions isolées de certains groupes

de muscles, et de croire que ces convulsions, parties de ces cen-

tres, se puissent propager de groupes en groupes musculaires,

voire de muscles en muscles, pour finalement se généraliser

suivant les lois de l'épilepsie Jacksonienne.

Nous possédons en outre assez de points de repère pour sup-

poser qu'il existe dans la région des tubercules quadrijumeaux,

non seulement des faisceaux moteurs, mais des centres moteurs

qui commandent aux muscles des membres, à l'intérieur desquels

(et cette opinion s'impose en présence de faits tels que celui-ci),

chaque muscle, chaque groupe de muscles est tout aussi distinc-

tement représenté que dans l'écorce.

Il est pour le moment impossible de dire si l'excitation de ces

centres donne directement naissance aux convulsions de groupes

musculaires isolés, ou si elle actionne, par mécanisme réflexe, les

centres corticaux. Mais nos connaissances physiologiques actuelles,

édifiées sur l'expérimentation et l'observation clinique relatives aux

formes convulsives en rapport avec les diverses parties du cerveau,

permettent d'exprimer l'opinion que voici.

On sait que l'excitation des centres de l'écorce engendre des

convulsions qui surviennent par accès et se généralisent selon des

lois déterminées, taudis que les convulsions permanentes, la chorée,

1 athétose, les différentes formes de tremblements, émanent non

de l'excitation des contingents corticaux du système moteur, mais

de celle de ses contingents subcorticaux. Les exceptions à cette

398 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

règle, très rares, s'expliquent'd'ailleurs d'une autre manière. De là

l'idée que, dans l 's foyers de la région des tubercules quadrijumeaux,

l'excitation directe des centres moteurs qui occupent celle région est

susceptible de déchaîner des convulsions de muscles et groupes muscu-

laires isolés à forme d'accès ou continues, et que ces convulsions se

peuvent généraliser sous l'action directe de ces centres sous-corticaux

ou par excitation réflexe des centres corticaux..

Il y a lieu de croire à l'intervention réflexe de l'écorce dans la

généralisation des convulsions quand les accès, procédant exacte-

ment d'après les lois de l'épilepsie Jacksonienne, co-intél'Cbsel1t le

facial et l'hypoglosse : si ces deux territoires sont épargnés, comme

dans le cas présent, l'excitation sous-corticale suffit à expliquer

la généralisation convulsive.

Les deux observations publiées par Eisenlohr (Jahrb. d. Hambur-

ger Staatskrankenanstaiten. 1900-1901) et par l'auteur permet-

traient, en l'absence de tout foyer cortical, d'appliquer l'apparition

de convulsions musculaires isolées au diagnostic d'un foyer sié-

geant dans la région des tubercules quadrijumeaux, ce qui ne

veut pas dire que le processus pathologique doive relever des

tubercules quadrijumeaux mêmes. L'essentiel est de savoir que le

foyer affecte la région sise en avant des tubercules quadrijumeaux,

ce que peut faire aussi une tumeur originaire de la couche opti-

que. ' P. KKHAYAL.

LXXV. Des relations du faisceau longitudinal inférieur avec le

ruban de Reil et d'un nouveau système moteur de couronne

rayonnante; par II. Schuetz. (Neurolog. Centrals, XXi, ID02.)

Un idiot privé de la presque totalité de son lobe temporal et de

son lobe occipital a cependant conservé son faisceau longitudinal

inférieur : il est facile de voir qu'il va du pôle occipital, non au

lobe temporal, comme le prétendent les auteurs qui en font un

faisceau d'association, mais au cervean moyen. Fleclisig d'ailleurs

le fait partir de la couche optique. De recherches par 1\1. Schülz

sur des foetus à partir du septième mois et sur l'enfant âgé de

six semaines, il résulterait ce qui suit.

Le faisceau longitudinal inférieur a son plus gros volume au

niveau à' peu près du corps genouillé externe ; il circonscrit la

corne postérieure du ventricule latéral en laissant entre lui et le

ventricule la place nécessaire à la radiation optique de Gratiolet

et au tapetum, se dirige, à la partie supérieure de l'arc qu'il

décrit, de dedans en dehors, à la partie externe du même arc,

d'avant en arrière, enfin, à sa partie inférieure, de dehors en

dedans vers la corne d'Ammon qu'il n'atteint pas; il s'en rappro-

che à mesure qu'il gagne la région occipitale, pour n'aboutir à

l'écorce que dans le gyrus lingual, Il envoie aussi des fibres au

revue d'anatomie ET DE PHYSIOLOGIE pathologiques. 399

coin. Les antres circonvolutions du lobe occipital ne sont munies

de fibres myéliques que lorsque la radiation optique de Gratiolet

est myélinisée.

Dans la région du corps genouillé externe, ce faisceau se com-

pose de deux espèces de fibres. 1° En dehols de cet organe, il reçoit

des fibres du nerf optique. 2° Il en reçoit du ruban de Reil. Ces

fibres-ci se séparent de la portion externe du ruban de Reil

médian, au niveau environ du corps genouillé externe, pour se

diriger en dehors; juste au niveau de celui-ci, et immédiatement

au-dessus, elles forment un éventail. Cet éventail affecte quatre

directions : a) celle du faisceau longitudinal inférieur avec lequel

il se confond ; b) celle du tiers antérieur de la première temporale;

c) celle des ascendantes ; d) celle du bord externe du noyau len-

ticulaire. Des détails de la description il résulte que la partie ex-

terne du ruban de Reil projette un faisceau rayonnant qui s'épa-

nouit dans le noyau amygdalien ou la corne d'Amlllon, dans les

parties les plus antérieures de la lèvre temporale, dans les ascen-

dantes, le gyrus lingual, le coin. 'Ce faisceau, identique aux fais-

ceaux protubérantiels de Schlesinger, ou au faisceau moteur du

Ruban de Reil de Hoche, émané des centres olfactifs, optiques,

auditifs, sensitifs du cerveau, est un faisceau primaire moteur

rayonnant. P. KEHAVAL.

Du poids de l'encéphale et de quelques-unes de ses parties

chez le nourrisson et les enfants plus âgés; par H. PIISTER.

(Nellrolog. Centralbl, XXII, 1903.)

Etude de 302 encéphales, 161 de garçons, 141 de filles, dont 228

ont été soumis à des pesées partielles (121 pour les garçons,

)0' ? pour les filles) les enfants sont morts aux âges de une semaine

à quatorze années. Voici les principales conclusions :

I. Le poids moyen de l'encéphale est, quelque soit l'âge, plus

élevé chez les garçons que chez les filles, cette différence, relati-

vement faible au début de la vie, s'accroît plus tard. Ce poids s'ac-

croit au cours du développement chez les deux sexes ; le premier

tiers de l'accroissement pondéral est atteint à la fin du huitième

mois de la vie, le second tiers, dans la première moitié de la troi-

sième année. Le poids total se chiffre chez les garçons par 1350 à

1400 grammes et plus à cinq ans; il est chez les filles de 1280

grammes et plus à trois ans et dépasse chez elles 1300 grammes

à sept ans. A tous les âges le poids total est infiniment variable

selon les individus.

II. Le cervelet, quel que soit l'âge, pèse moins chez la fille que

chez le garçon. Au cours du développement, il s'accroit davantage

cliez les garçons. Chez les enfants du même âge et du même sexe

on relève de remarquables variations dans le poids absolu et même

400 REVUE d'anatomie et DE PHYSIOLOGIE pathologiques.

relatif de cet organe. Chez les nouveau-nés normaux le* poids

moyen est de 20. grammes; chez , l'adulte il atteint environ

135 grammes pour la femme, presque 150 grammes pour l'homme;

son accroi·sement moyen est donc, au cours du développement,

de près de 120 à 130 grammes. Le cervelet croit donc proportion-

nellement plus vite que l'ensemble de l'encéphale et même que le

.cerveau ; il acquiert le premier et le deuxième tiers de son accrois-

sement total plus rapidement que l'encéphale et même que le cerveau.

Il septuple pendant la vie extra-utérine son poids initial ; il aug-

mente donc bien plus notablement de poids (et de volume) que les

autres parties de l'encéphale, voire que l'encéphale entier. Le cer-

velet étant chez le nouveau-né à peu près les 5,5 p. 100 (le tout

l'encéphale, il atteint chez l'adulte presque les Il p. 100 de ce

dernier; il double donc dans le cours delà vie son chiffre pondéral

relatif.

III. Le poids moyen du cerveau des garçons l'emporte en tout

temps sur celui des filles. Cette différence est chez les enfants âgés

(et chez les adultes) de 50 à 100 grammes et davantage ; d'abord

notablement moindre (elle n'est chez le nonvetu-né que de 6 à

10 grammes), elle atteint au second mois de la vie 20 à 30 gram-

mes. Son accroissement moyen total est de 910 grammes au plus

pour les garçons,'et de 840 grammes au maximum pour les filles.

Il atteint un peu plus lentement son premier tiers que ne le fait

l'encéphale entier. Par suite, la somme totale du poids des hémis-

phères cérébraux' n'est devenue pour les garçons supérieure a

303 grammes, pour les filles supérieure à 280 grammes, qu'à l'âge

de neuf à dix mois. A partir de la, l'accroissement ultérieur est

tel que le second tiers n'en est acquis, à peu près au milieu de la

troisième année, que peu de temps après l'augmentation corres-

pondante du poids total de l'encéphale. Le poids du cerveau est

aussi très variable suivant les individus de méme.1lge. et de même

sexe. 11 n'y a pas dans l'enfance de différence constante de gros-

seur en faveur, d'une moitié déterminée. Mais on trouve presque

toujours des différences de poids entre l'hémisphère droit et l'hé-

misphère gauche, ce dernier pesant le plus souvent cinq à si £

grammes de plus que l'autre. , s, .. !

IV. Le reste de l'encéphale (bulbe, protubérance, tubercules qua-

drijumeaux) qui est de 91 5 chez le nouveau-né, atteint à peu

près 27 à' 28 grammes. La moyenne en est plus forte chez les

garçons. La différence de poids entre les deux sexes parait pres-

que la même avant la puberté, à tous les âges. L'accroissement par

tiers s'effectue dans les deux sexes à peu près comme celui de

l'ensemble de l'encéphale. Tandis que le poids du cervelet qui, chez

le nouveau-né est à peu près 5, 5 p. 100 du poids total de l'encé-

phale, atteint presque Il p. 100 du poids de ce dernier chez l'adulte,

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 4OL L

tandis que le reste de l'encéphale qui n'était d'abord par rapport

à l'encéphale que de 1,6 p. 100 atteint 2 p. 100, le poids relatif du

cerveau proprement dit diminue; il représentait au début 93 p. 100

du poids encéphalique total; il n'en est plus finalement que les

87, p. 100. P. Keraval.

LXXVII. De l'action des rayons du radium sur l'excitabilité des

centres psychomoteurs; par M. N. JUUKOIVSKY. (Oboz ? ,énié psi-

chiatrii, VIII, 1903, novembre.)

Après avoir mis a nu l'une des circonvolutions sigmoïdes du

chien et déterminé l'écartement des bobines de l'appareil du Bois

Reymond qui correspond au courant minimum propre à faire

mouvoir le moins possible le membre antérieur ou le membre

postérieur, on expose avec toutes les précautions voulues la région

psychomotrice à l'action de 10 ou de 15 milligrammes de bromure

de radium. On soumet ensuite la région au courant inducteur et

l'on note quel est alors l'écartement des bobines qui correspond

au courant minimum propre à déterminer les mêmes mouvements.

Six expériences et une expérience-étalon sont minutieusement

décrites.

L'auteur conclut que les rayons du radium augmentent l'excita-

bilité électrique des centres psychomoteurs. Il faut, après l'action

du radium sur la région, un courant moindre pour obtenir les

mêmes mouvements qu'avant l'action du radium. L'intensité de

cette augmentation et sa durée dépendent de la quantité de

radium qu'on a fait agir, et, évidemment, de sa radio-activité.

Après avoir duré un temps plus ou moins long cette hyperexcita-

bilité tombe graduellement; elle tombe quelquefois au-dessous

du degré initial-de l'excitabilité antérieur au début de l'action du

radium, il arrive aussi que tout en tombant elle reste cependant

supérieure à l'affaiblissement de l'excitabilité de l'expérience-étalon

qui suit normalement l'électrisation répétée de l'écorce motrice

sans action à aucun moment du radium. P. Keraval.

LXXVIII. Quelques expériences sur l'action du calcium sur l'écorce

cérébrale; par le Dr Roncoroni (Riu. Sp.,cli fren. 1903, fasc. 1,

t. II). ' - J. S.

LXXIX. La psycholepsie de Janet et la théorie de Storch-Foers-

ter ; par le Dr DE Bues. (Journal de Neurologie, 1904, n° 9.)

On sait que certains psychopathes se plaignent assez souvent que

tout autour d'eux est mort, que rien n'existe plus, que tout est

voilé, obscur, que les objets n'ont plus de relief, qu'ils sont drôles,

étranges, etc. Janet qui a fait de ces états une étude particulière

prétend qu'ils sont dus à une seule et même cause la perte du sen-

ARCIIIVES. 2. série, t. XVIII. 26

402 revue d'anatomie et DE physiologie pathologiques.

liment du réel. Les malades, dit-il, ont la perception du monde exté-

rieur, mais ils ont perdu le sentiment de réalité qui est inséparable

de cette perception. Cet auteur regarde le sentiment du réel comme

une faculté psychique spéciale, mais sans expliquer sur quoi celle-ci

repose. Il mentionne en outre que ces malades ne sentent souvent

plus leur propre personne, se croient morts, etc. Le doute de l'exis-

tence personnelle provient simplement, d'après Janet, de la perte

de la faculté psychique susdite.

Foerster soutient au contraire que les troubles de la conscience

personnelle sont primaires et dérivent de l'utilisation insuffisante

des sensations d'organes et que vu le rôle important que ces sen-

sations jouent dans la perception réelle du monde extérieur, il se

produit aussi des troubles dans l'appréciation de ce dernier.

Stock interprète aussi ce manque de perception du monde exté-

rieur par la dissociation de la myopsyche et de la pathopsycbe,

c'est-à-dire par la dissociation du contenu sensoriel spécifique de

la perception et des sensations organiques correspondantes.

C'est à cette théorie de Foerster-Storch que se rallie l'auteur du

travail que nous analysons, tout en admettant qu'il y a également

une part de vérité dans celle de M. Janet. A côté en effet, ou plutôt

au-dessus de la conscience perceptive, il existerait une conscience

aperceptive, siège des facultés volontaires et morales, et c'est

celle-ci qui serait troublée dans les cas de psychasthénie ou de

psycholepsie visés par Janet.

Quant aux phénomènes d'ordre secondaire qui accompagnent

habituellement la perte du sentiment du réel, ils relèveraient

également les uns des troubles de la perception proprement dite

(obsession de se souvenir, névrose d'angoisse, névrose cérébro-

cardiaque), les autres de ceux de l'aperception (obsessions de doute,

de scrupule, etc.). G. D.

LXXX. Quelques déductions pratiques de la réfutation du neurone;

par le Dr DEBRAY. (Journal de Neurologie, 1904, n° 6.)

Après avoir rappelé que la théorie du neurone ne peut plus se

concilier avec les nouvelles données de l'histologie, de la physio-

logie et de la pathologie nerveuse, l'auteur tire de ces nouvelles

données quelques déductions pratiques intéressantes au point de

vue notamment de la suppléance plus facile des conducteurs ner-

veux détruits, de l'intégrité mieux assurée des centres, de la

régénération plus complète des nerfs sectionnés et de la restau-

ration fonctionnelle des cellules ou des extrémités nerveuses alté-

rées par une infection ou une intoxication, etc. G. D.

LXXXI. Dégénérescence et régénération des terminaisons motrices

des nerfs coupés ; par MM. ODIEn et HERZEN. (Rev. méd. de la

Suisse Romande, 1904, n° 7.)

REVUE d'anatomie-et DE PHYSIOLOGIE pathologiques. 403

On admet en général, malgré certains faits contradictoires, que

les filaments terminaux d'un nerf moteur séparé des centres dégé-

nèrent jusqu'à leur dernière terminaison. D'après l'examen de

nombreuses préparations provenant de divers cobayes auxquels ils

avaient pratiqué la section du nerf sciatique avec arrachement du

bout central, les auteurs estiment que chez les animaux adultes

la régénération et la néoformation de la presque totalité des

organes moteurs terminaux, après section du tronc nerveux, se

font avec le concours et la participation du tissu musculaire.

G. D.

LXXXII. Nouvelles recherches sur les localisations spinales, par

le Dr P.\nCnON et Mme Parchon. (Journal de Neurologie, 1904,

nos 12 et 13.)

Bien qu'on ne soit pas encore en droit d'affirmer qu'à chaque

muscle corresponde un centre spécial dans la moelle, les recher-

ches exposées dans ce travail viennent confirmer la théorie de

Sano d'après laquelle les localisations spinales sont musculaires.

Cette théorie, d'après les auteurs, se confondrait du reste avec

celle des localisations fonctionnelles. Si on trouve plusieurs mus-

cles pour telle ou telle fonction, c'est parce que celle-ci n'est que la

résultante de plusieurs actions élémentaires qui, elles, sont l'ex-

pression de la fonction d'un muscle isolé. Donc, toutes réserves

faites sur les résultats que peuvent donner de nouvelles recherches,

on peut d'ores et déjà admettre que c'est la fonction qui détermine

la disposition des cellules en groupements principaux et les sous-

divisions de ceux-ci en groupements secondaires, et par conséquent

que les localisations sont fonctionnelles.

Ainsi se trouve vérifiée une fois de plus cette loi fondamentale

de neurologie générale que la fonction fait l'organe. G. D.

LXXXIII. A propos de l'anatomie pathologique de la paralysie

générale; par le Dr l\l.\HAm (Journal de Neurologie, 1904, n° 24.)

Après s'être défendu d'avoir jamais prétendu que les lésions des

vaisseaux de l'écorce cérébrale étaient toujours primitives dans la

paralysie générale, l'auteur déclare que de ses recherches il résulte

seulement que ces lésions vasculaires sont celles qui s'observent le

plus constamment. Il ajoute que jusqu'ici on n'a pas encore publié

un seul cas de paralysie générale indiscutable avec intégrité des

vaisseaux de l'écorce, et d'autre part que si on rencontre parfois

cette lésion dans d'autres phychoses, c'est qu'il s'agit d'anciens

syphilitiques. G. D.

LXXXIV. L'anatomie pathologique de l'idiotie; par Alzheimer.

(Congrès des médecins aliénistes Bavarois, 24 mai 1904, Ansbach),

(Psych. ne1l1'. Wochensch. 9 juillet 1904).

404 revue d'anatomie ET DE PHYSIOLOGIE pathologiques.

- Il est démontré actuellement que, sous le nom d'idiolie, on réunit

des processus pathologiques très différents qui ont affecté le cer-

veau avant la naissance ou pendant les premières années. Mais on

est moins avancé touchant la différenciation des diverses maladies

qui déterminent les états d'idiotie.

On connaît bien, grâce à l'observation clinique, le crétinisme et

l'idiotie myxoedémateuse qui relèvent des maladies de la nutrition,

par suppression des fonctions du corps thyroïde. Il n'en est pas de

même au point de vue de la description clinique des autres états

d'idiotie. Au point de vue anatomo-pathologique, on ne peut se

baser, pour la séparation d'espèces nosologiques, sur les résultats

macroscopiques des autopsies : la macroencéphalie et la microencé-

phalie, la macrogyrie et la microgyrie, la porencéphalie et l'hydro-

céphalie ne sont pas des maladies spéciales, mais le résultat de di-

vers processus pathologiques, et ne peuvent donc servir à la déter-

mination d'espèces morbides naturelles. On peut présentement

distinguer :

1° La paralysie générale. Il n'est pas exceptionnel de rencontrer

dans les asiles d'idiots des cas de paralysie générale juvénile, et

surtout chez des sujets primitivement débiles. Doivent être rangés

dans cette catégorie, certains cas d'idiotie méningitique de Bourne-

ville en tant que leur début et leur terminaison ne s'opposent pas

à leur rattachement à la paralysie juvénile.

2° L'idiotie amaurotique. La cause semble en être des processus

dégénératifs (et non inflammatoires) portant plus particulière-

ment sur certains systèmes de faisceaux. Par l'époque de son appa-

rition, son aspect clinique général, sa marche foudroyante, son

caractère familial, l'idiotie amaurotique a des traits bien particu-

liers.

3° La sclérose hypertrophique tubéreuse.

4° L'idiotie consécutive aux lésions circonscrites du cerveau (par

encéphalite, hémorragies traumatiques, blessures du cerveau, en-

dartérites syphilitiques, embolies, tumeurs).

5° Les arrêts de développement. Plus rares qu'on ne l'a dit, ils

sont observés dans la microencéphalie (aspect embryonnaire des

circonvolutions, microgyrie), dans certains cerveaux rappelant

ceux des singes ou des carnivores. 1

6° Processus dégénératifs étendus de diverse nature, mal étu-

diés encore. Enfin certains cas peuvent, peut-être, être rattachées

à l'hébéphrénie (Kraepelin) 1. Paul Sérieux.

(') On trouvera dans le compte rendu du service des enfants de Bicêtre

(1880-1903), de nombreux documents avec figures et planches sur l'ana-

tomie pathologique des idiots. L'auteur aurait pu parler de l'idiotie mon-

golienne qui forme un groupe très distinct. (B.)

REVUE d'anatomie ET DE PHYSIOLOGIE pathologiques. 405

LXXXV. La rage expérimentale à virus fixe et ses lésions histologi-

ques ; par le Dr Lanme. (Journ. de Neurologie, 1904, u°8 4 et 5).

Des nombreuses expériences faites par l'auteur il ressort :

1° que la rage expérimentale à virus fixe ne produit pas de

lésions spéciales; 2° que le nodule rabique du ganglion est une

manifestation particulière de l'inflammation de cet organe ; 3° que

ni le siège, ni l'intensité des lésions de la rage des laboratoires ne

permettent de faire le diagnostic post mortem de la maladie;

4° que l'anatomie pathologique de la rage due au virus fixe est

l'ensemble de toutes les lésions des enveloppes et de la substance

nerveuse de tout le névraxe; 5° que le mode d'introduction du

virus fixe dans l'organisme n'a pas d'influence sur l'intensité et le

siège des lésions rabiques ; 6° que les légères lésions visibles de la

rage expérimentale doivent être attribuées au fait que l'animal

meurt sidéré avant que ces alternatives aient eu le temps d'évoluer.

C - , G. D.

LXXXVI. Sur le réflexe du fascia lata; par MM. DtûE et C¡OENAI5.

(Journ. de Neurologie, 1902, n° 14.)

De l'examen de l'état du réflexe du fascia lata dans 12 cas de

lésions du cerveau ou des méninges, les auteurs déclarent n'avoir

pu tirer des conclusions bien nettes. Les particularités dignes

d'être notées, c'est que le réflexe du fascia lata était aboli dans

deux cas de compression du cerveau sans altération de l'écorce,

et, dans un autre, où le faisceau sensitivo-moteur était complète-

ment détruit. Il semble donc que les lésions du faisceau moteur

seul n'exercent sur la-production de ce réflexe qu'une influence

assez restreinte se traduisent souvent par de la diminution; que

les lésions destructives du faisceau sensoriel peuvent anéantir ce

réflexe et enfin que la corticalité comprimée peut exercer un pou-

voir d'inhibition sur sa production. '

Par contre, dans la démence précoce, les auteurs ont constaté

une diminution ou une abolition du réflexe du fascia lata avec

conservation des réflexes cutanés, c'est-à-dire un syndrome

qui serait l'inverse du phénomène de Brissaud, et de l'ensemble

de leurs recherches, ils sont portés à croire que, dans les affec-

tions aussi bien corticales que cérébro-spinales, le réflexe du

fascia lata suit une marche tout à fait parallèle à celle de la sen-

sibilité douloureuse, alors que le phénomène des orteils semble

être absolument indépendant îles troubles sensitifs. G. D.

LX.TXVII. Hémimélie et dégénérescence mentale; par 1.. LAnUELLE.

(ltlcll. de la Soc. de rr.êd. mentale de Belgique, juin 1902.)

Il s'agit d'un homme de cinquante-sept ans, qui a fait à l'asile

406 REVUE d'anatomie ET DE PHYSIOLOGIE pathologiques.

d'aliénés de Volières un séjour d'un mois pour une affection

mentale aiguë et qui présentait depuis sa naissance une absence

complète du troisième segment du membre supérieur gauche, en

même temps qu'un certain nombre de stigmates de dégénéres-

cence physique. L'origine de la malformation du membre est

attribuée par le malade à ce que sa mère, étant enceinte, fut

appelée auprès d'une femme qu'on lui avait dit être simplement

malade et qui en réalité venait d'être amputée du bras. La

coexistence de désordres mentaux et de malformations physiques

attribuables à une impression maternelle pendant la grossesse,

a été confirmée récemment par Bourneville.

Cette théorie pathogénique est adoptée par l'auteur, qui n'hé-

site pas à rattacher à une dégénérescence acquise ab utero les

troubles mentaux et les anomalies physiques de son malade.

G. D.

LXXXVIII. Théorie physiologique de l'hystérie ; par le D1' SOLLIER.

(Journ. de Neurologie, 1904, n° 1.)

Dans une conférence faite à la Société belge de neurologie, le

D1" Sollier, après avoir critiqué les théories psychologiques de

l'hystérie, expose la conception physiologique qui porte son nom

et qui consiste, comme on le sait, à considérer cette névrose

comme le résultat d'un phénomène d'arrêt, d'inhibition ou de

sommeil des centres cérébraux. L'anesthésie est la marque, le

sigillum de cet arrêt des centres corticaux; elle disparaît lorsque

ces centres reprennent leur activité pour réapparaître dès que

ceux-ci cessent de fonctionner. Pour réveiller un hystérique c'est-

à-dire pour ramener ses centres cérébraux à l'activité, il faut agir

directement sur eux par injonction, avec ou sans hypnose, soit

indirectement par restauration de la sensibilité au moyen d'exci-

tations mécaniques périphériques. ' '

Au moment où le réveil se produit, le sujet passe brusquement

de l'état de personnalité où il était au moment où il s'est endormi

à celui où il aurait été s'il n'avait jamais été vigilambule.

En même temps se produit un autre phénomène caractéristique,

le retour au sommeil normal, lequel était disparu depuis que les

malades étaient plongés dans une sorte de sommeil patholo-

gique. -

L'auteur réfute ensuite les objections qui ont été faites à sa

théorie, notamment celles qui attribuent à la suggestion ou à l'au-

to-suggestion, les réactions présentées par les sujets qui se réveil-

lent et il termine en signalaut quelques-uns des faits nouveaux,

tant au point de vue physiologique que psychologique, que sa

théorie permet de mettre en évidence (existence d'une cénesthésie

cérébrale, détermination de centres viscéraux, etc.) G. DENY.

revue DE pathologie mentale. 407

LXXXIX. Les syndromes solaires expérimentaux; par M. L.llG;vrEL-

Lavasrme. (Jottnrn. de Neurologie, 1904, n° 8.)

Sous le nom de syndromes solaires, l'auteur désigne l'ensemble

des perturbations viscérales résultant de l'arrachement ou de

l'excitation du plexus solaire. Il distingue expérimentalement un

certain nombre de syndromes solaires de paralysie, d'excitation

ou d'irradiation, et montre que le premier est réalisé surtout en

clinique dans les périlonites, le second dans la colique de plomb et

le troisième, dans l'arrêt du coeur en diastole au cours des coli-

ques hépatiques ou néphrétiques. Il paraît donc légitime mainte-

nant, en clinique, en présence de certains syndromes, d'émettre

au moins l'hypothèse d'une localisation solaire. G. Deny.

XC. Régénération autogène chez l'homme et la théorie du neu-

rone ; par G. Durante (Journ. de Neu1'lllogie, 1904, n° 8.)

A l'autopsie d'une femme atteinte d'un neurone du poignet qui

avait subi cinq ans avant de mourir une résection du nerf médian

depuis la paume de la main jusqu'au tiers supérieur de l'avant-bras,

l'auteur a constaté que les deux bouts du nerf, distants de plus de

vingt centimètres se terminaient tous deux par un volumineux

névrome d'ampulation : ces deux bouts, absolument libres, n'étaient

réunis aux lissus voisins que par un lâche tissu cellulo-adipeux.-

L'examen histologique a montré en outre dans le bout périphé-

rique des tubes nerveux indiscutables dont le nombre augmentait

à mesure qu'on s'éloignait du névrome terminal. Cet exemple de

régénération autogène chez l'homme vient à l'appui de l'opinion

des auteurs qui ont combattu dans ces derniers temps la théorie

du neurone qui devient d'après eux un organisme pluri-cellulaire,

dont chaque élément conserve une indépendance relative, tant à

l'état normal qu'à l'état pathologique. G. DENY.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

IV. Les psychoses des vagabonds; par K. WILMANNS (Ceenlralbicclt

sur Nervenheilhund. XXV. N. F. XIII, 1902.

Etude du vagabond comme individu et des relations entre ses

lacunes congénitales ou acquises et sa conduite antisociale.

Cent vingt-sept sujets, la plupart du sexe masculin; douze

femmes seulement; vingt-deux n'avaient jusqu'ici subi aucune

408 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. z

condamnation correctionnelle. L'ivrognerie acquiert chez eux un

développement inouï.

La plupart d'entre eux sont des imbéciles éréthiques qui, moins

bêtes que'les imbéciles torpides, forment avec les criminels par

habitude une grande famille : c'est pendant les premières années

de leur vie nomade qu'ils manifestent des tendances criminelles;

à la longue ils arrivent à être des vagabonds proprement dits. Il

faut accuser la faiblesse de leur volonté exagérée par l'alcoolisme

chronique. La même pathogénie s'applique à certains hystériques

ayant maints points communs avec l'imbécile éréthique. Il existe,

par contre, des hystériques intelligents qui errent sans travail,

souvent sans ressources, sans compter ceux qui, atteints de syn-

dromes fréquents et graves, côtoient la correctionnelle à laquelle

ils n'échappent qu'à la faveur de leurs épisodes pathologiques ; à

peine sortis des hôpitaux ou des asiles, ils vivent de mendicité,

pour réintégrer à chaque instant les maisons hospitalières.

L'impulsion migratrice est fonction de toutes les agitations psy-

chomotrices; quand. les ressources viennent à manquer, ces ma-

lades deviennent des mendiants et des vagabonds. Cela se voit

dans la démence précoce, la paralysie générale, la folie circulaire

ou périodique. Exemples à l'appui : 4 maniaques, 4 paralytiques.

Soixante-six cas de démence précoce, parmi lesquels six pros-

tituées. Trois groupes : 10 personnalités saines et sédentaires à

l'origine, très ordonnées jusqu'au jour où, entre vingt et trente ans,

se produit une psychose aiguë grave suivie d'incomplète guérison,

et de vagabondage; -2° au début parfaite santé; puis soudain,

ou graduellement, sans cause appréciable, mobilité, instabilité,

irrégularité de la vie, vagabondage; - 3° tares pathologiques

originelles; dès la prime jeunesse, lacunes morales et intellec-

tuelles ; instruction incomplète; impossibilité d'apprendre un mé-

tier, d'où le vagabondage. Etude détaillée.

Rien qui prédispose plus au vagabondage que l'épilepsie, par

l'intermédiaire de la débilité mentale, des fréquents accès convul-

sifs ou syndromes psychiques ; dix-neuf cas.

L'ensemble des espèces précédentes constitue un total de 110.

Reste donc dix vagabonds. Chez cinq d'entre eux, il fut impos-

sible de trouver des éléments cliniques clairs. Les cinq autres se

décomposent en : une affection syphilitique des vaisseaux du cer-

veau ; une psychose de détention; un cas d'imbécile souteneur et

coupable d'effraclion; un cas de criminel-né non aliéné; un cas

de crétin très débile. l'. KIOEAVAL.

V. Contribution à la casuistique de la réaction biologique des

cheveux chez les aliénés; par W. Ueinicke (Ve : <)'c/oa'. Central-

blait, XXII, 1903).

Il s'agit d'une démente précoce de vingt et un ans chez qui

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 409

chaque épisode d'exaltation psychique ? élait, une ou deux [heures

auparavant, précédé de la canitie d'une mèche de cheveux dirigée

du haut du front vers le pariétal gauche. Elle devenait blanc d'ar-

gent. De sortequece phénomène permettait de prédire avec certitude

l'agitation imminente. La couleur blanche persistait pendant la

phase entière, atteignait son maximum à la période d'acmé de

cette dernière et disparaissait ensuite rapidement, parfois dans

les quelques heures qui suivaient la résolution de l'agitation.

Pendant l'agitation les pupilles étaient dilatées. Nulle autre ano-

malie du cheveu. Pas d'anomalies unguéales non plus.

Cette blancheur passagère du cheveu est due à un excès d'air

dans la gaine médullaire. Il y a lieu de croire que le poison fau-

teur à la démence précoce irrite les nerfs trophiques des cheveux,

car à ce moment le cuir chevelu de la région est hyperalgésié.

L'irritation des nerfs trophiques en modifiant la circulation san-

guine et lymphatique des cheveux, en chasse la lymphe; les cel-

lules s'y rétractent, principalement les cellules dentelées de la

gaine médullaire, et forment ainsi des fentes par lesquelles pénètre

une quantité plus considérable d'air atmosphérique. Dès que

cesse l'irritation, les cellules reprennent leur forme primitive, la

gaine médullaire se rétrécit, l'excès d'air est chassé, voire résorbé,

le cheveu reprend sa coloration normale. Pourquoi ce processus

s'est-il limité à une seule mèche ? On l'ignore. P. KERAVAL.

VI. De la pathogénie du délire spécifique du paralytique, contribu-

tion aux recherches de pathologie expérimentale sur la démence

paralytique; par A. WizEL (Neurolog. Cenlral6l, l\II, 4903).

Le délire du paralytique général est un monstre. Tandis que le

délirant systématique, indemne de lacunes intellectuelles, adapte

son délire à la provision d'idées et de notions enregistrées dans

son intelligence, l'accommode aux idées de temps et d'espace

intactes chez lui, le paralytique qui a perdu quantité d'idées

concrètes ou abstraites, spéciales ou générales, qui n'a plus la

notion du temps et de l'espace, émet les conceptions délirantes

les plus exagérées, les plus monstrueuses. D'ailleurs, le paraly-

tique est incapable de rien estimer à sa juste valeur, pas plus les

propriétés objectives de la matière que les choses de l'esprit.

Rien ne l'arrête. La monstruosité du délire de chaque paralytique

dépend des lacunes de son intelligence, de la perte de telles ou

telles idées ou notions'. P. IiswvaL.

VIII. De l'angoisse; par [,ONDE. (Revue de médecine. Août

et octobre 1902.)

Etude séméiologique faite dans le service de M. le professeur

Brissalld : L'angoisse, sauf dansl'angospection, jusqu'ici n'a guère

410 O REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

retenu que l'attention des psychiatres ; l'auteur a eu l'idée de

l'étudier dans les diverses maladies. L'angoisse s'observe : dans les

diverses affections du système nerveux ; dans les affections des

voies respiratoires; dans les maladies du coeur, les affection' !

abdominales, les intoxications et auto-intoxications.

Dans les maladies du système nerveux, l'angoisse a été observée :

dans les paralysies bulbaires, les lésions méningo-encéphaliques

basilaires, les affections médullaires, du cervelet, dans la paralysie

générale, dans les névroses, vertige mental, vertige de Ménière,

névrose d'angoisse, goitre exophtalmique, etc.

Pour les maladies de l'appareil i-espiratoit e, l'angoisse a été notée

dans les lésions des pneumogastriques, la coqueluche, l'asthme, la

névralgie phrénique ; l'angoisse est aussi un des éléments du syn-

drome de la respiration de Cheyne Stokes, l'angoisse laryngée,

l'angoisse d'origine pleurale sont des phénomènes Iréquents.

L'angoisse est un symptôme classique de l'angine de poitrine;

toutes les affections cardio-aortiques peuvent donner lieu à des

variétés d'angoisses assez diverses. Elle accompagne aussi certains

troubles abdominaux, la colique hépatique ou néphrétique, la

dyspepsie. La plupart des intoxications ou auto-intoxications

s'accompagnent d'angoisse, ainsi que les affections qui intéressent

le sympathique.

De cette étude générale l'auteur fait ressortir que l'angoisse peut

apparaître dans deux cas : 1° Quand les centres nerveux qui com-

mandent ce syndrome sont directement atteints : 2° Quand une

affection quelconque retentit par influence sur ces mêmes

centres.

Au point de vue du diagnostic, il est intéressant de rechercher le

point de départ de l'angoisse et principalement de savoir si elle

est d'origine somatique ou psychique ; elle peut souvent mettre

sur la voie d'un trouble somatique. L'angoisse peut revêtir diffé-

rentes formes, elle peut être complète, telle qu'on l'a classique-

ment définie; « Un sentiment de resserrement à la région épigas-

trique accompagné d'une grande difficulté de respirer et d'une

tristesse excessive, » ou bien elle peut apparaître à l'état fruste.

Etat de peur, irritabilité, indécision, insomnie, épigaslralgie,

oppression, lypothymie, etc., peuvent être des signes d'angoisse

fruste. Au point de vue physico-pathologique on peut dire que le

bulbe semble être la région qui produit le phénomène de l'angoisse,

au mpins objectivement. La sensation d'angoisse a sans doute son

point de départ dans l'écorce, mais le phénomène objectif semble

un phénomène bulbaire, et il y aurait lieu de rechercher si certaines

angoisses larvées dont le sujet n'a qu'une conscience vague, mais

qui se manifestent par des signes objectifs frustes de l'angoisse,

ne sont pas des angoisses réflexes où le bulbe seul est intéressé.

Les localisations subjectives de l'angoisse : respiratoire, car-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 411

diaque et pulmonaire, semblent indiquer qu'à ce point de vue c'est

le nerf pneumogastrique qui joue le rôle principal. En considérant

ses ramifications avec le sympathique, et l'expansion de ses pro-

longements peut-être le long des artères des membres et qui expli-

querait l'angoisse d'origine périphérique, ne pourrait-on pas émettre

cette hypothèse que l'angoisse est « l'expression de la souffrance

du neurone pneumo-gastrique sensitif» ? Quant au pronostic de

l'angoisse, il n'a qu'une valeur relative; toutefois on peut dire

qu'en général les maladies organiques mortelles qui donnent de

l'angoisse sont celles qui peuvent se terminer par la mort

subite.

Le traitement de l'angoisse est symptomatique de la lésion qui l'a

produite; dans l'angoisse des neurasthéniques, par exemple, il y

a lieu de traiter d'abord les lésions somatiques qui peuvent la

déterminer. M. H.

IX. L'image mentale morbide ; par VASCRIDE et Vorpas. (Revue de

médecine. Novembre et décembre 1002.)

Les auteurs font ressortir dans cet article l'influence de l'image

mentale dans l'éclosion du délire des malades classés comme dégé-

nérés. L'image mentale peut avoir une intensité telle qu'elle

s'impose à la conscience, arrêtant le libre jeu de toutes les autres

images et finissant par régner en maîtresse chez l'individu.

Le rôle de cette image avec son coefficient représentatif et

émotif a été longuement analysé dans les processus psychiques

des états dégénératifs. Il est étudié successivement chez les tiqueurs,

les obsédés, les invertis sexuels et aussi dans les délires propres

aux dégénérés.

Cette image mentale doit sa physionomie morbide à sa sponta-

néité d'apparition et à l'autonomie propre qu'elle revêt ensuite dans

le cours du délire. Quant à expliquer cette soudaineté d'apparition

aucune loi psychologique ne peut encore le faire. Elle peut s'im-

planter avec son allure spéciale au milieu d'une activité mentale,

qui peut rester par ailleurs très bien ordonnée. Ce sont les sujets

qu'on a appelé dégénérés supérieurs. en donnant le nom à ces

états émotifs de stigmates de dégénérescence. Mais c'est peut-être

trop d'exclusivisme de ranger, d'après ces troubles, des intelli-

gences de premier ordre avec de simples dégénérés. Pour le

moment on ne peut guère ranger ces états émotifs que parmi les

psychopathies qui ne relèvent encore d'aucune classification

spéciale. M. H.

X. Hystérie à forme de paralysie générale ; par Collet et Lepike.

(Revue de médecine. Décembre 1902.) M. H.

412 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XI. La craniométrie chez les aliénés; par 1.- W. PORTOÕCALOW. (0-

l'énié psichialrii, VII, 1902. ·

Revue fort complète dont nous résumons les conclusions. Les

progrès de l'anthropologie doivent se réfléchir sur la psychiatrie.

Les mensurations crâniennes peuvent dans l'avenir apporter à la

biologie et à la sociologie des éléments conclusifs d'ordre scienti-

fique. Mais il faut consolider les bases de la craniométrie. A l'étude

géométrique de la tête il convient d'associer la méthode morpho-

logique de Sergi. La céphalométrie de l'aliéné et ses mensurations

craniennes doivent acquérir un sens clinique, diagnostique et ana-

tomopathologique, voire pathogénétique. Il est indispensable de

distinguer exactement les mesures utiles à la céphalométrie, dp

celles qui conviennent à la craniométrie. L'expérience clinique

devra déterminer les diamètres et autres mesures favorables à la

céphalométrie psychopathologique et ceux qui ressortissent à

l'anthropologie spéciale. Il faut pour la craniométrie des aliénés

s'entendre au préalable sur le nombre des mensurations, les mé-

thodes, la technique d'examen, la manière de se servir des maté-

riaux céphaiométriques, les'conditions de fixation des index

mathématiques, etc. Aux dérivés immédiats des mensurations et

calculs, par la méthode linéaire, il serait désirable de compa-

rer les résultats des données d'autres méthodes. La craniométrie

des aliénés, notamment des dégénérés, épileptiques, imbéciles,

idiots, se trouverait bien de l'adjonction aux diamètres antéro.

postérieurs et transverses, des mesures obliques de Bechterew.

Il serait bon que dans les asiles on censurât systématiquement

le crâne des aliénés, et qu'on dressât la statistique céphalol11é-

trique par formes mentales, tailles, sexes, âges, poids, etc.

. P. Ki,nV.4L.

XII. Des phobies professionnelles. Phobie du Saint-Sacrement,

chez les prêtres; par W.-M. Bechterew. (Obozrénié psichialrii.

VII. 1902.) Centralblatl sur Neraenheillcunde. XXVI. N. F. XIV.

1903). '

11 s'agit d'un prêtre qui appréhende de ne pas porter le Sainl-

Sacrement avec la prudence voulue et de le heurter, ou de laisser

choir quelque objet du service sacré que, dans le rite grec, il est,

pendant la messe, obligé de prendre et de tenir en disant la prière

pour la famille impériale. Pendant tout ce temps, il est inquiet

ressent du tremblement dans les membres, éprouve l'idée fixe

d'une anomalie dans sa personne, et quelque démangeaison. Cela

dure 5 il minutes. Aucune autre cérémonie ne lui cause cettte

obsession, qu'il n'avait pas il y a dix ans. Il a dû cesser de dire la

messe bien que l'obsession ne vienne qu'à propos de cette pratique.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 413

11 ne s'est pas amélioré néanmoins, car l'idée seule qu'il doit effec-

tuer ce cérémonial le plonge dans une crainte irrésistible. Il a

actuellement soixante ans, et ne présente qu'une artériosclérose

légère. Aucune tare héréditaire.

Ce genre de phobie chez des prêtres ne semble pas rare. Le

remède consiste à faire cesser les pratiques rituelles qui causent

cette émotivité; on y joindra, au besoin, un repos professionnel pro i

longé, l'hydrothérapie, les agents médicamenteux qui calment

l'excitabilité nerveuse, la suggestion hypnotique, l'autosuggestion.

Mais cette affection semble assez résistante. P. Keraval.

XIII. La folie hallucinatoire qui se développe à l'occasion d'une

affection commune de l'ouïe ; par W.-M. Bechterew (Obozrénié

psiclaiutrü, VIII, 1903.)

Entre toutes affections des organes des sens, celles de l'ouïe

présentent un terrain particulièrement favorable au développemen t

de troubles mentaux. Ceux-ci, caractérises par des hallucinations

auditives abondantes, se compliquent ultérieurement d'halluci-

nations sensorielles en d'autres organes au moins à l'état épisodi-

que. Les malades de ce genre, le plus ordinairement prédisposés

plus ou moins, conservent souvent la faculté d'apprécier la nature

morbide de leurs hallucinations. Mais en certains cas, ils déli-

rent vraiment et attribuent à leurs hallucinations une origine

étrangère. Dans les quatre observations rapportées à l'appui de

l'excellente description nosographique, il s'agit d'otites moyennes;

M. Bechterew nous fait assister à l'évolution et au mécanisme des

conceptions délirantes; le téléphone, l'électricité, la transmission

télépathique des pensées et des sensations auditives ou autres

interprétations analogues y jouent un grand rôle. Si l'affection

de l'ouïe ne guérit pas, si les hallucinations qu'elle engendre ne

disparaissent pas, le délire se perpétue d'ordinaire pendant de

longues années ; le processus pathologique se complique-t-il, il

subit une autre phase de développement. La guérison dépend du

sort des lésions de l'oreille ; il s'en faut malheureusement de

beaucoup qu'elles se puissent améliorer ou guérir.

P. Keraval.

XIV. Troubles de la sensibilité dans les états neurasthéniques et r

mélancoliques; par M. DUBOIS (de Berne). (Journal de 1'eurolo-

gie, t 90 r, n° 9.)

On a attaché dans ces dernières années une grande importance

pour le diagnostic de la paralysie générale à la constatation de

certains troubles de la sensibilité, notamment d'une hyperesthésie

dans le domaine de la huitième racine cervicale et de la première

dorsale. L'auteur estime qu'il y a là une grosse erreur et à

414 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

l'appui de son opinion il rapporte trois cas de psycho-névrose

simple dans lesquels on a constaté une fois un effacement du

sillon nasolabial avec hypoesthésie des deux pieds, une autre fois

une anesthésie à la face interne du bras et de l'avant-bras avec

diminution du réflexe cutané plantaire, et dans le troisième une

hypoesthésie limitée à la face interne des deux bras et il une moi-

tié des doigts et des orteils. G. D.

XV. Un cas d'association dutabes à la paraysie générale;

par .111;\1..10FFROY et BADAUD.

Si les lésions médullaires postérieures de la paralysie générale

sont d'ordinaire différentes de celles du tabes classique, il n'est

pas impossible qu'à la paralysie générale frappant uniquement le

cerveau, vienne s'associer le tabes proprement dit. Cette associa-

tion pour peu fréquente qu'elle soit, existe parfois; les circons-

tances permettent aux auteurs d'en citer un cas démonstratif et

de conclure uue fois de plus que si le plus ordinairement les dégé-

nérescences postérieures de la moelle dans la paralysie générale

affectent un type spécial s'éloignant plus ou moins du tabes vul-

gaire, il est des cas, néanmoins, où concurremment à la paralysie

générale, évolue un tabes légitime. Dans le premier cas, c'est la

même maladie qui envahit l'ensemble de l'axe cérébro-spinal;

dans le second cas, la paralysie générale du cerveau est purement

et simplement associée au tabes classique de la moelle. (Revue neu-

rologique, novembre 1903.) E. B.

XVI. Constitution idéo-obsessive comme forme psycho-patholo-

gique autonome; par le Dr SOUHI1ANOF.

L'auteur décrit l'état mental des sujets obsédés. Il étudie les

rapports de cet état morbide avec les délires et avec le syndrome

neurasthénique. (Revue neurologique, juin 1903). E. B.

XVII. Délire hypocondriaque de zoopathie interne chez un débile

tabétique, hystérique et gastropathe ; par MM. E. DUPRÉ el

Léopold LÉm.

Intéressante observation d'un héréditaire présentant à la fois :

la débilité mentale, l'hystérie, la neurasthénie avec gastropathie et

des signes de tabes. L'apport à la conscience des incitations cénes-

thésiques les plus variées, détermine chez ce prédisposé l'appari-

tion d'un délire hypocondriaque avec idées de possession et que,

par analogie avec les démonopathies, on peut dénommer un délire

de zoopathie interne. (Revue neurologique, septembre 1903.)

E. B.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 415

XVIII. Tics des lèvres, cheilophagie et cheilophobie; par H. MEIGE.

(Journal de Neurologie, 1903, n° 20.)

En dehors des tics proprement dits qui se distinguent par leur

caractère convulsif, les lèvres sont comme l'occasion et le siège

d'habitudes motrices intempestives dont la plus fréquente est la

cheilophagie. Ces habitudes vicieuses peuvent avoir une origine

mentale ainsi que le prouve l'observation, rapportée dans ce tra-

vail, d'un jeune homme né de parents tiqueurs et tiqueur lui-

même, chez lequel la peur de maintenir les lèvres rapprochées

par suite d'une véritable cheilophobie et l'habitude de renverser

la lèvre inférieure, ont eu pour conséquences la détrication et

finalement l'apparition au niveau de la lèvre inférieure de petites

squames, lesquelles ne laissèrent pas que de lui causer pendant

de longues années les plus grandes inquiétudes. Il suffit de don-

ner au malade le conseil de rapprocher fréquemment ses lèvres

l'une de l'autre et même de les mouiller avec la pointe de la

langue pour le débarrasser de la légère infirmité eten même temps

de sa cheilophobie J. G. D.

XIX. oc Congrès des médecins aliénistes et neurologistes du

S -0. de l'Allemagne (28-29 mai 1904, Baden-Baden) Gerhardt

(Erlangen). La ponction lombaire au point de vue du diagnostic et

de la thérapeutique.

La ponction lombaire est avant tout utile pour résoudre le pro-

blème de l'existence d'une méningite et de sa nature (tuberculeuse,

épidémique, métastatique) ; elle rend des services au diagnostic et

au pronostic dans le typhus, la pneumonie, etc. accompagné de

symptômes cérébraux graves et dans les cas d'abcès cérébraux sus-

ceptibles d'une intervention chirurgicale. Elle est utile encore pour

distinguer la syphilis cérébrale des autres maladies du cerveau et

de la moelle (à l'exception du tabes), pour différencier la paraly-

sie générale des psychoses simples.

Au point de vue thérapeutique la ponction lombaire est employée

dans les cas aigus et subaigus de méningite séreuse, dans la cé-

phalée des syphilitique. ; les résultats sont moins favorables dans

l'hydrocéphalie, les méningites, les tumeurs du cerveau.

Les dangers de la ponction lombaire ne sont pas considérables

(bien qu'on ait publié 26 cas de mort), à condition de régler l'écou-

lement du liquide, de n'en extraire que quelques centimètres cubes

et de ne pas pratiquer la ponction dans les cas de tumeur céré-

brale.

' Voir l'observation que nous avons publiée dans le Compte rendu de

Bicêtre pour 1902, p. 206.

416 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

Discussion :

Erb signale l'importance de la ponction lombaire dans les cas

douteux au point de vue de l'étiologie syphilitique.

Schultze a constaté des résultats dans deux cas de méningite.

Hoche annonce la publication prochaine d'un mémoire sur la

question dû à la Clinique de Fribourg.

Nonne a vu une guérison dans un cas d'hydrocéphalie trauma-

tique après des ponctions répétées. Il met en garde (ainsi que

Schultze) contre le danger de la ponction dans le cas de tumeur

cérébrale.

Schünborn a ponctionné 100 malades à la clinique de Ileidelberg.

Chez 25 tabétiques il a trouvé de la lymphocytose dans tous les

cas ; de même dans 13 cas de méningite, et sur 5 cas de sclérose

multiple dans 3 cas. Résultats négatifs dans le tétanos, la carie des

vertébres, les tumeurs cérébrales, les névroses. 11 a fait dans 20 cas

la cryoscopie du liquide, sans résultats constants.

TABLER (lleidelberg). La ponction lombaire chez les en fct7lla. -

L'auteur a fait 120 ponctions. Il préfère, chez l'enfant comme chez

l'adulte, la position couchée. L'opération est bien supportée en gé-

néral, surtout chez les jeunes enfants. On a pu enlever 100 centi-

mètres cubes de liquide dans la méningite épidémique, 650 cen-

timètres cubes de liquide dans l'hydrocéphalie. Dans les cas où

l'on supposait qu'il n'existait pas une augmentation de la quantité

du liquide céphalo-rachidien on a été plus prudent; on observe en

effet, même après l'évacuation d'une petite quantité de liquide, des

symptômes de méningisme.

Au point de vue thérapeutique, on a eu de bons résultats dans

la compression cérébrale, dans l'idiotie post-méningitique.

Nonne (Hambourg). Cas de pseudo-tumeur cérébrale avec guérison.

L'auteur a observé 12 cas d'une affection caractérisée par l'en-

semble symptomatique dû aux tumeurs du cerveau, avec évolu-

tion subaiguë ou chronique, stase papillaire, dont 8 guérirent (deux

ans et demi et trois ans et demi) et 4 se terminèrent par la mort.

Il ne s'agissait ni d'hydrocéphalie, ni de tuberculose. Un des cas

à issue mortelle succomba rapidement après avoir été considéré

comme guéri durant 2 ans ; dans les 3 autres cas, l'autopsie a été

négative. A comparer avec l'hémiplégie sans lésion anatomique

de Jacobson.

ALZHEIMER (Munich). Sur le délire alcoolique fébrile ddlagnan.-

L'auteur en a observé 3 cas terminés par la mort. Autopsie néga-

tive au point de vue des organes autres que le cerveau, qui présen-

tait des lésions des cellules ganglionnaires de l'écorce, des hémor-

ragies punctiformes, de la dégénérescence des laisceaux.

KRAEt'EUN (Munich). Psychiatrie comparée. K. vient de faire des

études de psychiatrie comparée à Java. Au point de vue de l'étio-

logie le climat tropical n'a pas d'action sensible sur les Européens.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 4)7 7

L'action de l'alcool sur ces derniers ne présente rien de de parti-

culier ; les indigènes (qui sont musulmans) n'en boivent pas. En

revanche ils s'intoxiquent avec l'opium : on n'observe pas de psy-

chose due à l'opium; les manifestations dues à l'abus de l'opium

sont moins graves que le morphinisme; on n'observe pas de symp-

tômes dus à l'abstinence. Le bétel n'a point d'action sur le corps

ni sur le cerveau. '

Sur 370 indigènes aliénés, il n'a pas trouvé un paralytique ou un

cas de syphilis cérébrale, tandis que sur 50 aliénés européens il

en a constaté 8 cas. Les processus démentiels jouent le même rôle

qu'en Europe. La folie maniaque-dépressive est plus rare, l'épilep-

sie est fréquente. Dans la folie maniaque-dépressive les accès de

dépression sont plus rares, les idées de culpabilité font défaut; les

accès d'excitation sont plus violents. Dans la démence précoce on

n'observe pas de dépression au début, les idées délirantes sont

rares, les symptômes catatoniques peu accentués, la stupeur pro-

fonde est peu fréquente, de même que la démence complète. Une

maladie spéciale, le Laffa est caractérisée par des mouvements

automatiques imités avec coprolalie. L'Ano% n'est pas une espèce

clinique; il comprend des états d'excitation divers avec tendances

à des actes de violence. Il survient dans la catatonie, l'épilepsie, etc.

PaulS Éamox.

XX. De la réaction pupillaire prolongée aux toxiques comme signe

précoce de la paralysie générale; par 1\11\1. TOULOUSE et VUftPIS.

(Journ. de Neurologie, 19U4, n° 3.)

Il résulte des recherches des auteurs que la modification pupil-

laire consécutive à l'action de l'atropine ou de l'ésérine dure tou-

jours plus longtemps chez les paralytiques généraux que chez les

sujets normaux.

Cette lenteur de l'iris à revenir à son état normal constitue une

des premières manifestations de l'état morbide du système ner-

veux et permet le diagnostic précoce de la paralysie générale.

. G. DENY.

'L'il. Fréquence et évolution des lésions du fond de l'oeil dans la

paralysie générale; par MM. Ravurt et CAUDRON. (Journ. de

Neurologie, 1904, ne 3.)

Chez 38 paralytiques généraux sur 44, les auteurs ont constaté

des lésions du fond de rail (décoloration ou atrophie de la

papille] qui ont évolué parallèlement aux altérations cérébrales

et se sont traduites histologiquement par la prolifération des

éléments névrogliques et conjonctifs de la rétine, de la papille et

du nerf optique, ainsi que par celle des fibres radiées. G. D.

Archives, 2' série, t. XVIII. 27

418 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XXII. Aperçus et démonstrations sur la folie maniaque-dépressive;

par M. Tiiohsen (de Bonn). (Journ. de Neurologie, 1904, n° 2.)

D'après l'auteur il convient de ranger dans la folie maniaque-

dépressive tous les cas de psychose fonctionnelle où une dépres-

sion et une exaltation se réunissent dans une attaque d'une cer-

taine durée laquelle se répète plusieurs fois pendant la vie du

malade. M. Thomsen n'admet l'existence ni d'une manie simple,

ni de la manie périodique, mais il relate un cas de mélancolie

périodique pure et deux cas de folie à double forme non circu-

laire, à accès unique, c'est-à-dire n'appartenant pas à la folie

maniaque dépressive.

M. Thomsen signale encore deux cas de guérison ou d'amélio-

ration considérable de folie maniaque-dépressive, puis il aborde

la question du diagnostic de cette psychose avec la démence pré-

coce.

Ce diagnostic est difficile surtout dans les cas de stupeur : on

admet que dans la catatonie, celle-ci est la conséquence d'un

arrêt « sperrung » et dans la mélancolie d'un retard « hem-

mung » delà volonté; de là quelques différences dans les réac-

tions motrices de ces deux variétés de malades quand on veut

leur faire exécuter des mouvements actifs ou passifs.

Le diagnostic différentiel entre l'agitation maniaque et l'agita-

tion catatonique est plus facile : le catatonique ne se soucie pas

de ce qui l'entoure, le maniaque aperçoit tout et vivement. Le

premier est d'une humeur indifférente, niaise ou puérile; l'hu-

meur du second est gaie ou irascible. L'agitation du catatonique

est -sans but, elle se déroule dans un cadre étroit; celle du

maniaque veut un théâtre plus grand et se montre jusqu'à un

certain point désordonnée; mais ou le diagnostic devient parti-

culièrement difficile et même impossible n'est dans les cas où il

s'agit des formes mixtes de la folie maniaque-dépressive.

. G. D.

XXIII. Troubles dysarthriques permanents chez un enfant épilep-

tique ; par le 1)' DECROLY. (Journ. de Neurologie, 1904, u° 4.) .)

Il s'agit d'un enfant de quatre ans qui est devenu épileptique

au déclin d'une coqueluche. Bientôt après l'intelligence déclina,

le caractère devint sombre et la parole très difficile.

Un traitement iodo-bromuré associé il l'application d'emplâtres

mercuriels sur la nuque amena la diminution des accès épilepti-

ques mais resta sans effet sur la dysarthrie. La persistance de ce

trouble après l'atténuation des autres symptômes fait supposer a

l'auteur que l'irritation corticale, point de départ de l'état comi-

tial, prédomine au niveau du centre du langage.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 419

D'autre part le changement obtenu par l'association du bromure

avec la médication spécifique semble indiquer que cette épilepsie

relève de l'hérédo-syphilis. G. D.

XXIV. De la démence précoce chez les jeunes gens i par le Dr MEims

(Bull. de la Soc. de méd. mentale de Belgique, 1902, nos 104, 105

et 106.) .

Etude clinique basée sur 40 cas de démence précoce observés

sur des sujets de douze à vingt-cinq ans. Sur ces 40 malades,

G étaient atteints de formes plutôt légères de la maladie et n'of-

fraient aucun trouble de l'état émotionnel; l'auteur les considère

comme appartenant au type hébéphrénique de Kraepelin. Les

34 autres étaient atteints, au contraire, de formes graves avec

stupeur ou excitation et doivent être rangés dans la catatonie. La

conception de la démence précoce adoptée par le Dr Meeus

s'éloigne un peu de celle de Kroepelin, pour se rapprocher de

celle de Aschaffenburg, lequel soutient que les formes légères ou

graves ne sont que des degrés d'une même maladie.

Outre l'apparition rapide et constante d'un affaiblissement

intellectuel spécial, la démence précoce serait caractérisée, dans

l'immense majorité des cas, par un état de torpeur ou d'agita-

tion, des moments de lucidité, une singulière association des

idées, des bizarreries extraordinaires dans la vie ordinaire ; puis,

comme symptômes plus immédiats, plus sensibles, des phéno-

mènes moteurs et des anomalies graves dans le domaine de la

volonté. G. D.

XXV. Troubles intellectuels et catatonie; par le Dr PEETERS.

(Bulf. de la Soc. de méd. mentale de Belgique, juin 1902.)

L'observation qui fait l'objet de ce travail est celle d'un homme

de trente-six ans, chez lequel se sont montrés à un haut degré les

symptômes de la catatonie, c'est-à-dire l'immobilité, le mutisme,

la flexibilitas æ1'ea, l'état cataleptique, la suggestibilité; plus

tard, la raideur musculaire, la .verbigération peut-être, si l'on

peut donner ce nom à la répétition des mêmes prières ou de cer-

tains chants chez un malade qui a eu certainement du délire

religieux.

A propos du diagnostic, l'auteur fait remarquer que certains

symptômes catatoniques accompagnent souvent la mélancolie

stupide, en particulier l'immobilité, le mutisme, la raideur par-

ticulière avec flexion difficile des membres, l'état cataleptique, etc.

Mais la physionomie, le maintien du malade n'étaient nullement

en rapport avec un état mélancolique; ce n'était pas davantage

un hystérique, car il ne présentait ni les troubles moteurs, ni les

troubles sensitifs caractéristiques de cette affection.

420 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

Malgré ces considérations et bien que les troubles mentaux

offerts par le malade correspondent assez bien à ceux que Kal-

baum a-assignes à la catatonie, l'auteur hésite à admettre ce

diagnostic, l'existence de la folie catatonique ne lui paraissant

pas encore snffisamment établie. G. D.

XXVI. Considérations sur la catatonie ; par J. CRocQ. (Bull. de la

Soc. de méd. mentale de Belgique, juin 1902.)

Après un exposé historique et critique de la catatonie considérée

comme affection autonome, l'auteur relate les observations de trois

malades présentant entre eux de nombreuses analogies : chez tous

la maladie a débuté par un délire mystique avec agitation motrice

et psychique intense, attitudes pathétiques, hallucinations de la

vue et de l'ouïe; puis s'est déclarée, plus ou moins rapidement,

une période de mélancolie anxieuse entrecoupée de poussées

maniaques, ensuite se sont montrés le mutisme, la cyanose des

extrémités, les attitudes catatoniques; enfin chez les deux plus

anciens l'état démentiel est définitivement constitué. -

« Cette schématisation des trois cas de catatonie que je viens

de rapporter semblerait, a priori, dit l'auteur, prouver l'autonomie

même de la maladie et les défenseurs de cette théorie ne manque-

ront pas de me faire remarquer que je démontre sans le vouloir,

l'existence même de la catatonie.

« Il en serait ainsi si l'évolution symptomatologique que je viens

de décrire, ne répondait qu'aux cas dans lesquels la catatonie

survient... mais il existe un grand nombre d'observations de folie

hystérique ou d'hébéphrénie qui ont évolué comme la catatonie,

lesquels auraient dû conduire à la catatonie, si celle-ci constituait

réellement une entité morbide et qui se sont, au contraire, terminés

soit par la guérison, soit par la démence, sans que des patients

aient, à aucun moment, présenté de phénomènes catatoniques...

La catatonie ne peut donc, à mon avis, être considérée comme une

entité morbide spéciale... elle ne constitue qu'un symptôme pou-

vant se rencontrer dans les états morbides les plus variés ».

G. D.

XXVII. La prédisposition en étiologie mentale ; par le Dr Maras-

DON DE MONTYEL (Journ. de Neurologie, 1904, nos 13 et 14.)

L'auteur s'attache à démontrer dans ce travail que si une pré-

disposition, héréditaire ou acquise, est nécessaire pour le dévelop-

pement des psychoses, celle-ci est cependant incapable à elle seule,

sans le secours de causes occasionnelles, de donner naissance aux

vésanies.

Héréditaire ou acquise, la prédisposition peut être simple ou dé-

générative, mais la seconde, lorsqu'elle est héréditaire, se mani-

- REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 421

festerait toujours par une exaltation des facultés pouvant atteindre

au génie, et quand elle est acquise par un affaiblissement plus ou

moins marqué des mêmes facultés.

La dégénérescence d'origine héréditaire ne mettant pas à l'abri

des causes capables d'engendrer la prédisposition acquise, on pour-

rait observer des cas mixtes résultant de la combinaison des deux

dégénérescences et caractérisés par un mélange d'affaiblissement

et d'exaltation des faculté'.

M. Marandon de Montyel admet en outre que des psychoses dif-

férentes sont dévolues à la prédisposition simple suivant qu'elle est

acquise (manie, hypémanie, confusion mentale et leurs variétés)

ou héréditaire (folie intermittente, périodique, circulaire, à double

forme, délire systématisé progressif, etc.).

Quand à la prédisposition dégénérative, si elle est acquise, elle ne

pourrait donner naissance qu'aux mêmes formes psychopathiques

que la prédisposition simple de même origine; si elle est héréditaire,

aux formes signalées plus haut viendraient s'ajouter les obsessions,

les impulsions, la manie raisonnante et la folie morale. G. D.

XXVIII. Considérations sur l'ampliation des ventricules latéraux

dans les maladies mentales ; par le Dr Marchand (Journ. de Neu-

rologie, 1901. ni10).

En mesurant la quantité de liquide céphalo-rachidien contenu

dans lès ventricules latéraux de 125 cerveaux d'aliénés, l'auteur a

constaté que la capacité de ces cavités était augmentée dans toutes

les démences et surtout dans la démence paralytique. Associée à

une diminution de poids du cerveau, cette ampliation des ventri-

cules latéraux constitue un des meilleurs signes des démences.

Dans la paralysie générale, la pression du liquide céphalo-rachidien

étant accrue, deux causes se surajoutent pour augmenter la capa-

cité des ventricules latéraux : l'atrophie cérébrale, et la pression

exagérée du liquide céphalo-rachidien résultant de la suractivité

des plexus choroïdes enflammés. Dans les autres formes de

démence, la pression du liquide est normale et l'ampliation des

ventricules latéraux est la conséquence de l'atrophie cérébrale.

G. D.

Asile d'aliénés DES P1'RÉNÉES-OItIENT.1LES. Sur la proposition

de M. Maynou, le Conseil d'arrondissement s'associe au voeu émis

par M. le Dr Parés, au Conseil général, dans sa session extraordi-

naire d'octobre 1904 en vue de la construction rapide d'un asile

d'aliénés à Perpignan ou dans le département. (La République des z

Pyrénées-Orientales, il oct.). Tous les départements devraient

avoir leur asile d'aliénés, adultes et un Asile-Ecole pour les enfants

idiots, imbéciles, arriérés, épileptiques, amoraux.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

XLIII. Contribution à la psychologie de l'apraxie motrice; par

A. Pieu. (Neuroloy. Centralbl., XXI, 1902.)

Un homme de cinquante-neuf ans perd un beau jour soudain la

faculté de parler, ou il s'exprime tout de travers ; il ne peut lire, les

caractères se brouillant devant ses yeux, écrire car il est incapable

de trouver les traits nécessaires au tracé des lettres; il conserve sa

connaissance, l'ouïe, le mouvement. Trois jours plus tard il est

guéri. Depuis, tous les quinze jours il a les mêmes accès en éprou-

vant de la contracture dans la région massétérine. Un d'entre eux

se borne à des nuages ou à des anneaux de feu devant les yeux;

un autre se traduit par une angoisse subite avec impossibilité de

dire ce qu'il veut. Il y a trois années que cela dure. Un des der-

niers épisodes se manifesta sur la promenade par une sorte de

sommation kaléidoscopique, sans perte de connaissance. Une fois

pendant sa toilette, au moment où il se disposait à aller aux cabi-

nets, envahi brusquement d'un sentiment d'angoisse, d'inquiétude,

d'ambiance bizarre, au lieu de prendre son chapeau, il saisit son

pot de nuit et le porte machinalement aux water-closets où il le

dépose ; il croit à une impulsion consciente. Dans les mêmes con-

ditions, un autre jour, il souille de l'eau qu'il vient de verser dans

un verre, à l'aide de l'eau sale du lavabo, et il s'en aperçoit aus-

sitôt. t.

De l'examen matériel et mental du sujet, l'auteur conclut à

l'apraxie motrice par accès. Il analyse comparativement les faits

de Liepmann (Dus Krccnlcheitsbild dei- Apraxie und 71 ? otoi-iseller

Asymbolie, tirase à part 1900. Ne1l1'olog. Centralbl. 1902, p. 615.

Société de psychiatrie et maladies nerveuses de Berlin. 9 juin 1902).

A rapprocher de l'observation donnée par nous dans Vidée fixe.

(Archives de Neurologie, t. VIII, 1899, p. 30). P. Keraval.

XLIV. Cas insolite de spasme facial ; myokymie limitée au facial

gauche ; par M. BFni\unuur. (Ne1l1'olo[]. Centralbl. XXI, z

Observation de spasme facial tonique primitif avec palpita-

tions musculaires; par L. 1\'EV.IARII. (Neurolog. Centmlbl., XXII.

1903.)

L'observation de Bernhardt concerne une femme de vingt-sept

ans chez laquelle se sont développées à son insu des convulsions

fibrillaires des muscles du côté gauche de la face. Incessantes,

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 423

elles ne produisent pas de mouvements; ce sont des palpitations.

La fente palpébrale du même côté est rétrécie depuis quelques

semaines. Aucune autre anomalie sauf une sclérose de l'oreille

moyenne avec hypo-acousie qui ne gêne guère la conversation.

Guérison sous l'action de courants galvaniques faibles (anode

dans la fosse mastoïdienne) et de K. Bra à petites doses. L'auteur

après avoir examiné l'hypothèse d'une paralysie faciale antécé-

dente, d'une affection protubérantielle ou bulbaire absente, dia-

gnostique la myokymie de Fr. Schultze ou chorée fibrillaire de

Morvan (1890). Observations de G. Hoffmann (1895), C. Meyer,

Buber, (1897), Biancone et Karcher, Wiliamson (1901).

Dans l'observation de M. Newmark qui concerne un étudiant en

médecine de vingt-trois ans, la contracture est un peu plus pro-

noncée, et les palpitations s'étendent au peaucier du cou. Ce jeune

homme aurait eu, il y a sept ans, une affection faciale semblable.

Sa guérison s'effectue en deux temps. Mais deux années plus tard

le patient présente des accidents du côté de la moelle (sclérose

en plaques probable) auxquels il succombe en trois ans.

' P. hERW 'AL.

XLV. Observation de névrite périphérique de l'hypoglosse droit ;

par A. PANSKt. (Neurolog. Centrslbl . XXII. 1903.)

L'auteur l'attribue à une inflammation pharyngienne avec tumé-

faction ganglionnaire. Comparé aux observations de Hoffmann,

Montesano, Erb, Marina, ce cas en diffère par la marche rapide,

par l'absence dans la moitié de la langue atrophiée et dans le

nerf enflammé d'altérations qualitatives de l'excitabilité électri-

que (aucune trace notamment de réaction dégénérative), par

l'absence des convulsions brillaires dans les muscles de la langue

paralysés. Ces deux derniers caractères se retrouvent dans une

observation deIoebius, (Paralysie simultanée de plusieurs nerfs crâ-

niens. Archives de Neurologie, 1889, t. XVII, p. 292). Il s'agissait d'un

jeune garçon de neuf ans affecté de paralysie de plusieurs nerls

craniens d'origine basale, syphilitique ( ? ). Langue déviée à gauche;

la moitié gauche de l'organe plus étroite, plus mince, plus

molle que la moitié droite, n'est le siège d'aucune convulsion

librillaire ; -d'abord il'semble y avoir hyperexcitabilité électrique

du côté hémiatrophique, puis rien de semblable ne se manifeste

plus, bien que 1 hémiatrophie subsiste plusieurs mois encore.

Moebius s'en étonne sans y pouvoir trouver d'explication.

P. Keraval.

XLYI. L'hystérie; par WILLLUI B. YOUNG, de Bnn-Air (Tennessee).

. (Médical News, n° 1613, vol. 83, p. Ji 18.)

L'auteur n'a l'intention de traiter que l'étiologie, l'anatomie

pathologique et le traitement de cette névrose. En ce qui concerne

424 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

l'étiologie, il pense que l'hérédité ne joue qu'un rôle insignifiant,

mais l'imitation consciente ou inconsciente est le plus grand fac-

teur de l'hystérie. L'auteur n'en veut pour .preuve que les grandes

épidémies qui, au moyen âge, ont sévi sur les communautés reli-

gieuses, l'entraînement des croisades, etc. Les faits mêmes qui

semblent nettement causés par l'hérédité sont le plus souvent pro-

duits par l'imitation, par les enfants, des accidents névropathi-

ques de leurs parents. Les faits d'hystérie tardive ne sont pas plus

contradictoires à cette idée qu'à celle de l'hérédité : il est le réveil

de l'imitation mise en réserve dans l'enfance par l'intelligence

inconsciente (inconsciolls mind). Or, les filles vivent plus cons-

tamment en contact avec leurs mères et peuvent ainsi plus aisé-

ment mettre en action leur imitation inconsciente. Ce fait permet,

plus que la doctrine de l'hérédité, de fournir l'explication du plus

grand nombre d'hystériques femmes (20 femmes contre 1 homme).

Au point de vue anatomo-pathologique, l'auteur, pour qui

l'hystérie est une psychose, pense que l'on devrait « trouver les

lésions dans la glande pituitaire », à cause, dit-il, de la ressem-

blance des symptômes de l'acromégalie et de l'hystérie.

Quant au traitement, il doit être avant tout psychique et ten-

dre à divertir le malade et à l'entourer d'une atmosphère de

gaité. 11 serait désirable que la charité commune s'occupe d'éten-

dre les bienfaits de cette cure aux hystériques pauvre. De cette

façon, on verrait décroitre l'hystérie au lieu de la voir s'accroître.

Marcel VIOr.LET.

LVII. Tic convulsif avec coprolalie; par H. 111ORGL DE LITCIIUIELD

(Miunesota). (Médical News, n° 1612, vol. 83, décembre 1883,

p. 1082, 1 lig.)

Dans le tic convulsif ou maladie de Gilles de la Tourette, on

observe des impulsions verbales de diverses natures : onomalo-

pées, cris d'animaux, écholalie, coprolalie, etc. Par un effort de

volonté, le malade pent parfois résister à l'obsession devant le

monde, mais il lui donne libre cours lorsqu'il est seul. Le dia-

gnostic 'est facile à faire lorsque le syndrome est au complet, ce

qui se présente dans le cas rapporté par l'auteur.

Il concerne un jeune homme de dix-huit ans, sans antécédents

héréditaires ni personnels et qui n'a pas eu de convulsions dans

son enfance. Aucun signe physique de dégénérescence, état

général très bon. Début de l'affection à douze ans, par des tics

de la face; ces tics augmentent progressivement de force et

s'étendent à la nuque, puis aux épaules et aux bras qui sont

animés de mouvements violents et simultanés. Deux ans après.

les spasmes de la face sont accompagnés de bruits qui ressem-

blent à « hum » et à « Whoa ». Ces bruits involontaires et qu'il

revue DE pathologie NERVEUSE. 425

ne peut retenir en font la risée de tout le monde. Parfois, ces

bruits sont remplacés par des injures et des mots obscènes.

Traité successivement par les bains, l'électricité, le massage, etc.,

ces traitements n'ont eu aucun résultat. Traité par l'auteur, par

l'isolement et le nitrate d'argent à doses progressives, il fut guéri

de sa coprolalie en trois semaines, les bruits qu'il faisait enten-

dre avaient cessé au bout de deux mois. Tout le syndrome reprit

pendant une semaine à la suite d'un incendie, puis disparut pro-

gressivement pendant huit mois d'isolement pour reprendre gra-

duellement toutes les fois qu'il sort en public.

Marcel Viollet.

\

XLVIII. Un cas de tétanos céphalique avec paralysie faciale et

oculaire, guérison; par G. HALTENIIOLF. (Revue médicale de la

Suisse Romande, 1902, na 9.) , .

Il s'agit d'un enfant de trois ans qui en tombant sur le bout

d'un bâton avec lequel il creusait la terre se fit une plaie à la

partie inférieure de l'orbite droite. Bien qu'une injection de sérum

antitétanique ait été pratiquée deux jours et demie après l'acci-

dent, on vit survenir une paralysie du facial droit et du moteur

oculaire externe gauche accompagnée de raideur de l'orbiculaire

et de trismus. L'auteur attribue la guérison du petit malade à

l'injection préventive de sérum antétanique car bien qu'inférieure

à celle du tétanos traumatique en général, la mortalité du tétanos

céphalique est encore assez élevée (61 p. 100).

Notons eu outre que les cas de tétanos accompagnés de para-

lysies crâniennes sont plus graves que ceux qui évoluent sans cette

complication. Bien que l'examen histologique des nerfs atteints

de paralysie soit resté négatif dans les cas mortels on tend à

admettre que ces paralysies sont le résultat de l'action du poi-

son tétanique sur les centres de la moelle allongée et de la protu-

bérance. G. D.

XLIX. Paralysie faciale : rire et pleurer spasmodiques; localisation

cérébrale ; par M. Piéry. (Société des Sciences médicale, de Lyon, z

3 février 1904.

Observation d'hémiplégie gauche totale avec rire et pleurer spas-

modiques chez une femme de quarante-quatre ans, syphilitique.

A propos de cette observation M. Piéry pose le problème de la

localisation cérébrale du rire et pleurer spasmodiques et de celle

du syndrome : paralysie volontaire avec conservation de l'expres-

sion des émotions.

Il accepte l'hypothèse-de Brissaud qui localise le rire et le pleu-

rer spasmodiques dans le segment antérieur de la capsule interne,

426 REVUE DE pathologie NERVEUSE.

et non celle de Bechterew, pour qui le symptôme est réalisé par

une lésion de la couche optique.

Dans l'observation de l'auteur la localisation de Brissaud est la

seule en effet qui puisse expliquer à la fois les crises de rire et de

pleurer, et la paralysie faciale disparaissant à l'occasion des mou-

vements de la mimique faciale.

L'interprétation de ces deux syndromes juxtaposés exige même

l'intégrité de la couche optique dont la lésion détermine un

syndrome facial diamétralement opposé à celui en question.

G. C.

L. Un cas de voix eunucoïde datant de l'ictus dans l'hémiplégie;

par M. Grasset (Journ. de Neurologie, 1904, n° 8).

Il s'agit d'une femme de soixante-dix ans qui immédiatement

après un ictus apoplectique suivi d'une hémiplégie classique pré-

senta le phénomène connu sous le nom de voix eunucoïde (voix de

soprano avec impossibilité d'émettre des sons graves) que l'auteur

crut pouvoir attribuer à une paralysie d'origine cérébrale du crico-

thyroïdien.

Cette hypothèse fut confirmée à la fois par l'examen laryngo-

scopique et par l'examen électrique des muscles du larynx.

G. D.

LI. Un cas de tétanos céphalique avec diplégie faciale; par le

1 Dr BOUCH.1UD. (Journ. de Neurologie, 1904, n° 3.)

Il s'agit d'un homme de trente-six ans qui, à la suite d'un accès

d'épilepsie, se fit une plaie à la face dorsale du nez ; quelques

jours plus tard, il fut atteint de trismus avec diplégie faciale et

dysphagie, puis d'accès de dyspnée et finalement succomba dans

une crise de suffocation.

On sait que le tétanos céphalique est dû à l'introduction dans

les tissus du bacille de Nicolaier et de la toxine qu'il élabore.

C'est par une plaie qui siège habituellement dans la région orbito-

temporale mais qui peut être située dans un autre point de la

face et même sur la muqueuse buccale ou pharyngée que s'effectue

l'inoculation.

Il semble bien que, chez le malade en question dont la plaie

occupait la région médiane du nez, la toxine tétanique se soit

propagée par les fibres sensitives des deux nerfs de la cinquième

paire jusqu'aux centres mésocéphaliques et qu'elle ait ainsi pro-

voqué, avec le trismus, une paralysie faciale bilatérale. On n'a

encore donné de ce dernier accident aucune explication satisfai-

sante. G. D.

REVUE DE MÉDECINE LÉGALE. 427 I

LII. Un phénomène palpébral constant dans la paralysie faciale

périphérique; par MM. Duruv-DuTEMps et CESTAN. (Journ. de

Neurologie, 1904, nu 3.)

Ce phénomène peut être considéré comme constant puisqu'il

s'est montré dans 15 cas de paralysie faciale périphérique. Voici

en quoi il consiste : le malade, regardant en bas, on lui com-

mande de fermer énergiquement les yeux, on voit alors dans la

paupière supérieure du côté paralysé se relever brusquement

découvrant le globe oculaire qui est convulsé en haut.

Ce phénomène est dû à ce que dans les cas de paralysie faciale,

la paupière supérieure n'étant plus maintenue par l'orbiculaire,

est fortement entrainée en haut pendant les efforts d'occlusion des

yeux, par le globe oculaire qui s'élève à ce moment grâce à un

mouvement associé et inconscient.

Inversement, lorsque l'oeil se dirige en bas, il entraine avec lui

la paupière supérieure qui s'abaisse ainsi fortement, malgré

l'inertie complète de l'orbiculaire.

La même explication s'applique aux mouvements de la pau-

pière inférieure.

Le phénomène palpébral n'est donc, en réalité, que l'amplifica-

tion d'un mouvement normal très peu apparent à l'état physiolo-

gique ; il n'en constitue pas moins un signe spécial il la paralysie

de l'orbiculaire puisqu'il manque dans les lagophtalmies dues à

une autre cause : exopthalmies diverses, maladie de Basedow,

rétractions cicatricielles des paupières, etc. G. D.

LUI. Un cas particulier de paralysie faciale ; par le Dr Bienfait.

(Journ. de Neurologie, 1904, n°2.)

Observation d'un cas de paralysie faciale intéressant en raison

des phénomènes bulbaires qui l'accompagnaient et qui rappe-

laient la symptomatologie de la maladie de Menière. D'après

l'auteur la lésion qui avait déterminé cette paralysie siégeait dans

le conduit auditif interne et intéressait à la fois le nerf facial et le

nerf auditif. G. D.

REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.

I. Sur l'appréciation des dénonciations et témoignages des hys-

tériques dans la pratique médico légale : par le Dr BlONDI. (Rw.

Sp. difren. 1903. fasc. 1, t. II).

Deux observations, montrant que. dans la pratique, les dénon-

428 REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.

ciations et témoignages des hystériques peuvent avoir une valeur

tiès variable.

Il est certain que si la fausse dénonciation a un caractère fan-

tastique et romanesque, quand il ne manque ni la lettre anonyme,

ni un certain mystère, le soupçon de mensonge viendra facilement

même à l'esprit du magistrat. Et alors l'expert trouvera souvent

dans l'étude du sujet des troubles plus ou moins profonds de

l'intelligence, des faits d'hallucination, d'auto-suggestion. Il s'agira

dans la plupart de ces cas de forme hystériques graves avec épi-

sodes plus ou moins prolongés de troubles psychiques, parlois

avec des anomalies profondes du caractère, ou perversions

sexuelles.

On rencontrera plus de difficultés, si l'hystérique accusatrice

manque de troubles intellectuels évidents de forme ou de contenu, et

si l'anomalie psychique se limite à un dérèglement de l'imagination,

ou à l'insuffisance plus ou moins complets de sentiments moraux.

Alors la fausse dénonciation prendra plus facilement un caractère

de vraisemblance parce que même devenue inconsciente par un

travail d'auto-suggestiou, elle a toujours son origine dans un pro-

cessus inconscient. Même dans ces cas, il y aura dans la dénonciation

quelque circonstance qui révélera l'imprévoyance et le caractère

superficiel commun aux dégénérés; et d'autre part l'examen du

sujet révèlera des anomalies somatiques, l'obtusion et la perversion

du sens moral. le dérèglement d'imagination qui se traduit par le

mensonge plus ou moins habituel.

En tout cas, l'expert tiendra compte des preuves spécifiques, des

antécédents de l'accusé, des circonstances extrinsèques au fait, de

tout cet ensemble de preuves qui, parallèlement avec les résultats

de l'examen somatique et psychique du témoin ou de la plaignante,

pourront mettre en mesure d'établir un jugement sur chaque cas

particulier.

Si l'on est en face d'une hystérique, pour ainsi dire plus sensitivo-

motrice que psychique, quand on ne rencontre chez elle ni troubles

intellectuels, ni anomalies du caractère, ni dérèglement notable de

l'imagination, ni émotivité, quand son récit n'a rien de romanes-

que, et concorde avec ce qu'on peut voir autre part, que l'expert

ne craigne pas de déclarer que l'on peut faire quelques cas de ses

allégations et le magistrat par une instruction attentive, pourra

ainsi éviter une erreur judiciaire sans tomber d'autre part dans

l'excès de dénier toute créance aux déclarations des hystériques..

J. SECLas.

II. Phases médico-légales de la loi de Vermont en ce qui con-

cerne l'observation des criminels aliénés; par Walter de Berry

(The American Journal of 11lsanity, juillet 1902, p. 103, 115).

L'auteur, après avoir rappelé les erreurs judiciaires, insiste sur-

REVUE DE MÉDECINE LÉGALE. 429 9

tout sur la nécessité d'un examen prolongé des coupables qui plai-

dent la folie pendant une période d'observation suffisante à l'asile.

SIMON.

III. Syphilis et divorce ; par Prince A. Morroir. (Médical Neus,

n° 1613, vol. 83, p. 1110.)

Après un bref exposé des cas délicats où le médecin peut être

appelé à formuler un avis au sujet d'une syphilis transmise par

des rapports conjugaux, l'auteur expose qu'en aucun code la con-

tamination vénérienne n'est considérée comme un cas de divorce,

sauf au Kenbucky. Partout ailleurs l'appréciation est laissée au

jugement de la cour, qui fait l'état des circonstances dans les-

quelles la syphilis a été traumatisée, traitant différemment les

conjointes selon qu'il y a eu immoralité, rapports avant le ma-

riage adultère, dans la transmission de la syphilis, ou que la

syphilis contractée en dehors des contacts vénériens, a été igno-

rée du conjoint d'où est partie la transmission (contamination

professionnelle : chancre du sein chez les nourrices, etc.)

L'auteur fait ensuite une revue générale des façons dont la

question est tranchée par les codes des différents pays et ramène

son étude à trois points principaux : contraction du mariage, an-

nulation du mariage, divorce.

En ce qui concerne le premier point, l'existence de la syphilis

chez un des fiancés est suffisante pour empêcher le mariage et

faire rompre les promesses et les engagements.

En ce qui concerne l'annulation du mariage, l'auteur cite des

cas où la contagion syphilitique en a été la cause. Mais on em-

ploya des artilices de procédure ; dans un cas, il est parlé de mal-

formations rendant impossible les rapports sexuels normaux;

dans un autre cas de fraude, l'homme ayant nié la syphilis avant

son mariage.

En ce qui concerne le divorce, la question a été jugée différem-

ment par les médecins, les juristes et les juges qui ont précédé

l'auteur, qui fait porter son étude non seulement sur le code de

son pays mais encore sur celui des autres nations et en particulier

de la France. En France, dit-il, les tribunaux attachent une grande

importance à la question de contamination antérieure ou posté-

rieure au mariage, et font du second cas seul un cas de sépara-

tion.

La femme qui a contracté la syphilis de son mari et qui désire

en faire un sujet de divorce doit prouver : 1° qu'il a la syphilis ; 1°

qu'elle a la syphilis ; 3° que la syphilis de son mari est la cause

de la sienne.

Ces trois points semblent à l'auteur de grands obstacles pour

une demande en divorce, en raison du scandale qu'ils suscitent et

430 REVUE DE MÉDECINE LÉGALE.

de la honte qu'ils entraînent pour la femme elle-même. Il en con-

clut que les lois existantes ne sont pas suffisantes pour assurer

la protection à la femme aussi indignement trompée et atteinte

il la fois dans son honneur et dans sa santé. Marcel VIOLLET.

IV. Juges et experts; par A. HOCHE. Juges et experts; par P.

NOECKE. (Neurolog. Centralblatt. XXI. 1902.)

- ' 1

M. Naecke dit : « L'expert sachant indubitablement plus, dans

sa spécialité, que le juge le plus instruit, ce dernier n'a qu'à se

conformer sans réserve à sa décision ». On peut cependant enten-

dre plusieurs experts, et, « dans le cas de désaccord, c'est au col-

lège médical qu'il doit appartenir de trancher le différend. » Afin

que le juge ne soit pas réduit au rôle d'automate, il est à désirer

qu'il possède quelque instruction en matière de médecine meutale

et dans les sciences connexes. (Archiv f. Criminalanthropologie...

1900. III. p. 99.). Frank (Psyclticctn. Wochenschr. 1901, n° 37), in-

siste sur le rôle muet du juge, « puisque le rapport de l'expert met

en évidence l'irresponsabilité du prévenu ». 11 ajoute « qu'il faut

sans délai satisfaire aux conclusions en faveur de l'examen mental

d'un prévenu. »

M. Hoche pense que ces prétentions ne tendent à rien moins,

dans les cas où l'état mental est douteux, qu'à transformer le mé-

decin expert, qui n'est qu'un conseil technique, en un juge rendant

un verdict. Discussion...

M. Naecke répond... Qui niera que l'expert digne de confiance

en sache plus long qu'un profane ? Ce profane doit donc se sou-

mettre à l'appréciation de l'expert, fût-il juge. L'arrêt doit néan-

moins demeurer entre les mains dujuge; il est d'ailleurs bien rare

qu'il soit réduit à juger sans comprendre le rapport de l'expert.

S'il en est ainsi il suspend son jugement ou renvoie l'affaire. Voici,

par exemple, une interdiction demandée pour un paralytique en

rémission qui répond brillamment et ne présente que peu ou pas

de signes physiques. Le médecin affirme que c'est un paralytique.

Le juge doit interdire. C'est au surplus pourquoi les juges doivent

posséder une teinte de la spécialité, bien choisir les experts et en

nommer plusieurs. /L'appel au collège médical s'explique par ceci

que le membre aliéniste de ce collège est généralement un des

psychiatres les plus capables du pays. P. Keraval.

V. Vol avec escalade et effraction Simulation d'aliénation men-

tale. Rapports médico-légaux; par les Drs LEKTZ et de l3ce.

(Bull. de la Suc. de méd. mentale de Belgique, 1902. n° 106.)

VI. Organisation d'un service de médecine mentale dans les pri-

sons ; par le Dr E. 11ASOIN. (Journ. de Neurologie, 1904, n° 11.)

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. 431

Les établissements pénitentiaires de la Belgique sont répartis

en trois circonscriptions desservies chacune par un médecin alié-

niste. Lorsque la conduite d'un détenu donne lieu de suspecter

son état mental, le directeur de la prison en avertit le médecin

aliéniste de la circonscription, lequel, après examen du détenu,

adresse un rapport t't l'administration et rédige, s'il y a lieu, un

certificat de collocation dans un asile d'aliénés. Cette organisation,

d'après l'auteur est susceptible de plusieurs améliorations ; il

estime que le médecin ordinaire de la prison est placé dans de

meilleures conditions que le spécialiste, pour procéder à l'exper-

tise des détenus, à la condition, bien entendu, que l'administra-

tion centrale se décide à ne plus introduire dans les prisons que

des médecins possédant des connaissances spéciales en psychia-

trie.

En second lieu M. Masoin se déclare partisan de la création

pour les condamnés reconnus aliénés, de la création d'un asile-

frison, destiné à remplacer les quartiers spéciaux des asiles de

Mons et de Tournai, dans lesquels ces sujets sont actuellement

colloqués. Cet asile-prison serait situé au voisinagne du péniten-

cier central et pourvu d'un quartier spécial d'observation.

Enfin, M. Masoin s'élève contre la prérogative accordée aux

directeurs des prisons lesquels sont actuellement seuls juges de

l'opportunité de soumettre un détenu à une expertise ; il voudrait

que le médecin et le directeur de la prison soient investis tous

deux de ce droit et se missent d'accord sur chaque cas.

G. Deny.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

VIII. Comment faut-il traiter les neurasthéniques; par Glorieux.

(Policlinique 'de Bruxelles. Avril 1902).

L'auteur préconise un traitement familial pour les neuraslhé-

niques et combat le traitement dans un établisssement qui déprime

souvent les malades au lieu de les améliorer. M. H.

IX, De l'application des bains d'air chaud au traitement des aliénés

et des épileptiques ; par I.-S. Gerhainn. (06orénié psichiatrü,

VII, 1902. 6, 7, 8, 11, 12.)

Long mémoire très soigné dans lequel sont successivement

étudiés : 1° Les moyens physiques et médicamenteux employés

dans le traitement de^l'agitation et de l'insomnie chez les aliénés ;

432 " REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

2° L'application des bains d'air chaud au traitement des épilepti-

ques et des aliénés ; 3° L'action de ces bains sur l'insomnie, le

pouls, la respiration, les modifications de poids, l'excrétion

sudorale des aliénés. Nombreuses observations, minutieusement

prises. Nous relevons ce qui suit.

A. Un traitement sudorilique mesuré n'exerce aucune action sur

l'état morbide des épileptiques; une sudation plus intense se traduit

par la recrudescence des accès. Il faut supposer que lorsqu'on

pousse l'excrétion des substances toxiques celle-ci est ensuite

pleinement compensée par l'augmentation de leur production dans

l'organisme, et que, si l'on insiste trop pour les chasser, la

formation du toxique l'emportant sur son excrétion, la maladie

empire.

B. Chez les aliénés, les bains d'air chaud ont sur les bains d'eau

les avantages que voici : 1° Souvent ils agissent plus favorablement

sur l'agitation et l'insomnie que les bains d'eau; 2° Ils tonifient le

coeur, et son ralentissement se continue de quelques heures à

à quelques jours; 3° Le bain d'air coûtemeilleurmarché et n'exige

pas d'installations spéciales ; 4° Le chauffage du bain d'air chaud

à l'aide d'une grande lampe à pétrole s'effectue à peu près en un

quart d'heure ; La quantité des bains de ce genre est illimitée.

P. Keraval.

X. Communications sur le véronal ; par 0. M\TTHEY (Neurolog.

Cenlralbl. XXII, 1903.) Essais cliniques avec le véronal ; par

W. SPIELMlènR (Centralbl. f. Nervenheilk. XXVI. N. F. XIV 1903.)

Expériences avec le véronal dans les états d'agitation des

paralytiques généraux; par K. Abraham (Centrvlbl. f. Nerven-

hâle, XXVII. N. F. XV, 1004).

Administré dans du thé chaud, le véronal par doses de 0,50 à

1 gramme au maximum en une fois, ne doit pas dépasser

3 grammes par jour, sauf peut-être quand on a affaire à une agi-

tation extrême. C'est alors un soporifique et un sédatif excellent. Il

calme ou fait dormir généralement en une demi-heure d'un som-

meil calme, profond, réparateur, qui, même pour des petites doses

de 0, 50 dure six à sept heures. Réveil d'ordinaire agréable ; ce-

pendant pour des doses de 1 gramme il subsiste quelque somno-

lence. il agit plus prômptement que la plupart des autres médica-

ments de ce genre. En dehors de l'accoutumance, dont il est aisé de

triompher en suspendant le médicament il n'a pas, àpart quelques

vertiges et quelque ralentissement du pouls (à 4 grammes),

d'inconvénients (O. Matthey).

C'est, dit à son tour M. Spielmeyer, un bon sédatif et surtout un

hypnotique des plus recommandables. Pris dans du pain azyme,

il ne détermine ni tintouins, ni photopsies, vertiges ou nausées.

REVU ! ; DE THÉRAPEUTIQUE. 433

Même à hautes doses ou à doses longtemps prolongées, il n'agit

sur aucun viscère. Dans le cas d'accoutumance, il suffit de doses

lentement progressives pour venir à bout de l'insomnie; l'incerti-

tude de son action dans l'agitation de la démence précoce tient à

la nature du symptôme. Si, à la dose de 1 gramme il entretient

quelque assoupissement, il suffit de substituer au véronal deux

, lois par semaine de la paraldéhyde ou du trional. Ces inconvénients

sont dépourvus de danger ; le véronal est inoffensif.

Tel n'est pas l'avis de M. Abraham. Il a constaté que maints

paralytiques refusent le véronal ; que l'action de ce médicament

s'affaiblit au bout de plusieurs jours, qu'il peut déterminer des

troubles cardiaques et respiratoires inquiétants, que l'effet en est

inégal. Comme il est difficilement soluble, comme il possède un

goût désagréable, comme il ne'peut être employé en injections

hypodermiques, et qu'en outre il coûte cher, il ne saurait, pense

M. Abraham, être introduit dans la pratique. P. Keraval.

XI. Méningite cérébro-spinale. Traitement par production d'un

abcès de fixation. Guérison; par le Dr PnoBST. (Rev. méd. de la

Suisse romande, 1902, n3 20.) ,

Observation d'un homme de vingt-cinq ans, qui fut pris subite-

ment de céphalalgie, de fièvre, de vomissements avec raideur de

la nuque, convulsions localisées au bras et à la jambe droites, etc.

On posa le diagnostic de méningite cérébro-spinale et on pro-

voqua un abcès de fixation, en pratiquant une injection de téré-

benthine sous la peau de l'abdomen. Dès le lendemain, les

vomissements et les convulsions cessèrent et, un mois après, le

malade était complètement rétabli.

L'auteur, toutefois, ne croit pas pouvoir tirer de ce fait unique

des conclusions positives relativement à l'action curative des abcès

de fixation. G. D.

XII. Notice sur un nouvel appareil pour les fractures de la rotule

chez les convulsionnaires etles aliénés; par le Dr BEESAU. (Bull.

de la Soc. de méd. mentale de Belgique, juin 1902.)

Cet appareil se distingue des autres par deux organes essentiels :

tu une plaque de carton pleine qui s'applique sur la rotule dont

les fragments ont été préalablement rapportés au moyen d'une pla-

que de carton trouée; 2 une ceinture abdominale qui immobilise

toute la partie intérieure du tronc et empêche les soulèvements du

bassin. L'auteur relate trois cas de fracture de la rotule chez un

hystérique, un épileptique et une aliénée, où l'application de cet

appareil a été suivie d'une prompte consolidation. G. D.

Archives, 2° sétie, t. XVIII. 28

ASILES D'ALIENES.

I. De la protection de la fortune des malades dans les établis-

sements d'aliénés. Ce qu'elle est ; ce qu'elle doit être ; par le

Dr SAMUEL Garnier. 14

Il est assez fréquent, surtout dans les maisons de santé, de voir

un tuteur profiter des revenus d'un aliéné interné, se les approprier

et n'en consacrer qu'une petite portion à l'entretien du malade.

L'étude de M. S. Garnier, montre, avec faits à l'appui, la facilité

avec laquelle on peut spolier les aliénés internés, dans la législa-

tion actuelle et la nécessité de reviser la loi de 1838 dans le sens

d'une protection pratique et effective. (Annales nédico-psychologi-

ques, février 1903). E. B.

IL L'Assistance publique des épileptiques ; par le D'' V. Parent.

Dans cet article sont étudiés les progrès récents de l'Assistance

publique des épileptiques aux Etats-Unis d'Amérique et en France

ainsi que l'organisation des colonies fondées pour ces malades,

colonies composées de pavillons petits, se rapprochant du genre

des habitations ordinaires. Dans uue colonie complète, il faut, en

dehors des habitations des assistés : 1° un bâtiment central d'ad-

ministration, où les colons ne devront aucunement avoir affaire;

2° une infirmerie et même un petit hôpital, pour le traitement de

tous les cas de médecine ordinaire ou de chirurgie; 3° des ateliers

de toute sorte.

L'idéal serait qu'une colonie se suffise entièrement à elle-même.

(Annales médico-psychologiques, juin 1903). E. B.

111. Des sorties d'essai et des congés de distraction; par le

ut li0SP1TrIL.

La nécessité des sorties d'essai et des congés de distraction est

évidente et démontrée par l'expérience. Ces deux moyens doivent

désormais faire partie de la thérapeutique générale de la folie, de

par l'indication et sous la responsabilité du médecin traitant. Les

pouvoirs publics et le maire devront être prévenus des sorties

d'essai dépassant un jour. (Annales médico-psychologiques, août

1903). ' E. B.

ASILES D'ALIÉNÉS. 435

IV. Sur l'autonomie d'un Asile public d'aliénés; par le Dr Dumaz.

L'auteur retrace l'histoire de l'Asile de Bassets, près Chambéry.

Un accord va être signé, reconnaissant l'indépendance de l'Asile de

Bassens en matière financière vis-à-vis des deux départements de .

la Savoie et fixant que le prix de journée, poui les malades placés

u'oflice, sera réglé d'après les dépenses ordinaires. L'Asile pourra

accumuler ses bonis annuels jusqu'à 200.000 francs avant que les

départements puissent exiger une diminution proportionnelle de

ce prix. (Annales médico-psychologiques, ocl. 1903). E. B.

V. L'Asile de Galkhausen (près de Cologne) ; par le De de 1)1 ? RE.

(Bull, de la Soc. de méd. ment, de Belgique, 1903, n° 113).

Situé sur un plateau de 110 hectares de superficie (dont 45

boisés), l'asile de Galkhausen a été construit en 1902. Il se compose

de 22 pavillons à un étage avec véranda, pouvant recevoir chacun

/il) malades. Seul lelazaietou infirmerie n'a qu'un rez-de-chaussée.

Lespavillonsont un caractère ditlerentetsontdisposéssanssymétrie

de chaque côté de l'avenue principale. Les cellules sont remplacées

par des chambres d'isolement avec fenêtres aux carreaux épais,

mais sans barreaux. Il n'y a pas de mur de clôture, mais une

simple haie séparant l'asile des propriétés voisines.

La population est de t150 malades avec cinq médecins et 19 gar-

diens, soit un gardien eu moyenne pour 8 ou 9 malades.

Les pensionnaires sont classés d'après leur état d'agitation ; les

agités sont placés dans des pavillons aux portes et aux fenêtres

ICl1nées; les demi-agités sont placés dans des pavillons aux portes

fermées et aux fenêtres ouvertes ; les uns et les autres ne vont z

au jardin qu'accompagnés. Les pavillons des tranquilles ont leurs

portes et fenêtres ouvertes et les malades peuvent circuler libre-

ment dans le jardin.

Uanstes pavillons fermés (40 malades) la surveillance est confiée

il 7 gardiens, dans les pavillons demi fermés à 4 gardiens, et dans

les pavillons ouverts, environ à 2 gardiens.

Lorsqu'un malade s'agite ou délire trop bruyamment on le

traite par l'alitement d'abord, par la chambre d'isolement ensuite,

et enfin par un bain de trois heures renouvelé deux ibis par jour.

Inutile de dire que tous les moyens de contrainte sont supprimés.

G. D.

VI. Statistique clinique des alcooliques traités à l'asile de Bel-Air,

en 1901 et 1902, par le Dr Papadaki. (Rev. méd. de la Suisse-

Romande. 1903, n° 12.)

Sur les 508 malades entrés à l'asile de Bel-Air pendant les

années 1901 et 1902, il y en a 50 pour lesquels l'alcool est indiqué

436 asiles d'aliénés.

comme cause occasionnelle de la psychose et 85 pour lesquels

cette substance a été la cause déterminante et directe de la

maladie. -

Parmi les sujets du premier groupe, on trouve seulement des

épileptiques (34 p. 100) et des paralytiques généraux (20 p. 100).

Les affections du second groupe se répartissent comme suit :

1° Psychoses aiguës : delirium tremens 34, hallucinoses il, délires

atypiques G, délires atypiques avec maladies graves concomi-

tantes 12 ; 2 Etats démentiels : psychoses pol3·névritiques 4,

démences alcooliques avec ou sans épilepsie 18.

La prédominance des hallucinations auditives, la possibilité de

systématiser, la conservation de l'orientation, la fréquence des

symptômes de polynévrite constituent les phénomènes caractéris

tiques de l'hallucinose.

Certaines affections des organes des sens peuvent, peut-être, dans

certains cas, décider de l'éclosion du delirium tremens ou de

l'hallucinose.

Sous la dénomination de délires atypiques il faut entendre les

formes séparément décrites de l'ivresse pathologique et du délire

subaigu transitoire.

Pour toutes ces psychoses, l'internement dans un établissement

installé ad hoc est indiqué. L'expérience a démontré que l'absti-

nence totale et immédiate n'a jamais porté préjudice aux malades.

Les femmes paraissent être atteintes beaucoup plus souvent que

les hommes de la psychose de Korsakoff.

La durée de l'internement à l'asile de Bel-Air, trop brève pour

chaque cas particulier, donne néanmoins pour les années 1901 et

1902 un total de 3.083 journées de malades. Ce chiffre multiplié

par 3 francs (prix du revient d'une journée) représente pour ces

deux années la somme de 11.409 francs consacrée à un traitement

palliatif. G. D.

VII. Visite faite à un certain nombre d'établissements d'aliénés

en Allemagne, Bavière et Autriche; par le Dr de ÎIlAEIOE. (Bull.

de la Soc. de méd. ment, de Belgique, 1902, n" 106.)

Les établissements visités par l'auteur sont ceux d'.ludernacl,

sur le Itllin, de Francfort, de Darmstadt, d'lleppenheim, de

Heidelberg, de Munich, d'Obersendlin, de Trieste et de Zuricli.

Il fournit sur chacun d'eux un certaiu nombre de renseignements

intéressants et termine en disant : « Il est permis de certifier

que, si nous pouvons apprendre bien des choses instructives a

l'étranger et ainsi améliorer et perfectionner certains détails d'or-

ganisation dans les asiles, nous pouvons avec orgueil assurer que

l'étranger peut lui-même venir apprendre chez nous beaucoup

de choses utiles, dont il ignole même l'existence. » G. D.

varia. 437

VIII. Colonie wallonne d'aliénés de Lierneux. Rapport sur la

situation médico-administrative pendant l'année 1901; par le

De Deperon. (Bzzll. de la Soc. de méd. ment, de Belgique, juin 1902).- ""

« Le régime familial, ditl'auteur, évite aux malades trois choses

douloureuses inhérentes à la plupart des asiles : la séquestration,

l'inaction et le contact avec d'autres aliénés.

L'expérience montre que dans les colonies, l'état de la plupart

des malades se modifie avantageusement. Est-ce la société cons-

tante de personnes saines, la présence d'enfants, la visite d'étran-

gers, les relations de familles qui produisent ce résultat ? Toujours

est-il que l'aliéné se prend à s'intéresser, lui aussi à la maison où il

est. Jusque-là perdu dans les grandes salles d'un asile et y vivant

d'une vie artificielle, simple numéro d'un groupement, il n'avait, et

ne pouvait avoir aucune individualité. Dans le milieu familial où il

est seul de son genre et où il est quasi libre, tout change : son

caractère, son énergie, sa volonté s'éveillent. Alors que la seule

issue possible des hospices était la mort, il y a dans la vie de '

famille comme un espoir de guérison et celle-ci ne frit-elle pas

complète, les résultats en seraient encore louables, car faire d'un ,»

malheureux qu'il soit moins malheureux, c'est presque une guéri-

son. » Suivent un certain nombre de renseignements intéressants :

i;i3t aliénés de tous âges et des deux sexes ont été traités à la

colonie de Lierneux depuis sa fondation; 73 sont entrés en 1901.

La proportion des guérisons a été de 4 p. 100; celles des décès de

- 166 p. 100. Les évasions ont été au nombre de 7. Un seul accident

(suicide par submersion) s'esi. produit pendant L'année écoulée.

G. DENY.

VARIA.

Pour les enfants arriérés ou anormaux.

F

A la suite d'une mission confiée au De Gauraud, relative à la

situation des enfants arriérés ou anormaux à l'étranger, et dont

les résultats l'avaient vivement intéressé, M. Chaumier a chargé

M. Marne) Chariot, inspecteur général de l'instruction publique, de

lui fournir un rapport sur la situation au point de vue scolaire des

anormaux physiques, intellectuels ou moraux. Voici le rapport de

M. Marcel Chariot :

Paris, 30 septembre.

Monsieur le ministre,

La loi du 28 mars 1882 dit, dans son article 4, que « l'instruction

primaire est obligatoire pour les enfants des deux sexes âgés de six

438 varia.

ans révolus à treize ans révolus ». Mais il est une catégorie d'en-

fants à qui, jusqu'ici, la loi n'a pas été appliquée : ce sont les sujets

qui, soit au pointdevue physique, soit au point de vue intellectuel

ou moral, ne se trouvent pas dans des conditions normales pour

recevoir l'enseignement commun. -

L'instituteur public ne peut accepter ni encore moins garder

dans sa classe des enfants incapables de prendre part aux exercices

scolaires et dont la présence retarderait la marche des études et

serait une cause de désordre, parfois même de scandale. Ces éli-

minations s'imposent dans l'intérêt de l'immense populalion nor-

male des enfants de nos écoles.

Mais ce n'est pas envers celle-là seulement que l'Etat a des

devoirs à remplir. Ses obligations ne sont pas moins strictes, elles

ont même un caractère plus impérieux à l'égard des malheureux

êtres d'exception : anormaux physiques, anormaux intellectuels,

anormaux moraux. La société a sa part deresponsabililé dans des

tares qui sont, le plus souvent, le. résultat de l'hérédité ou du

milieu : elle doit donc prendre à sa charge la réparation ou l'atté-

nuation de ces misères. Et ce qui est son devoir est également son

intérêt. Laissés à l'état de nature, les anormaux ne cesseront, pen-

dant toute leur vie, d'être pour la collectivité une lourde dépense.

Au contraire, habilement et humainement traités par les nouvelles

méthodes scientifiques, ils ne seront plus condamnés à demeurer

irrémédiablement des non-valeurs sociales, des parasites onéreux

et nuisibles, mais ils prendront une part, plus ou moins impor-

tante, dans le travail commun, et un certain nombre d'entre eux

en viendront peut-être un jour à faire, pour la société, presque

autant qu'elle aura fait pour eux.

Le législateur de 1882 n'avait pas méconnu cette conséquence

de principe d'obligation, puisque l'article 4 de la loi du 28 mars

porte, in fine, qu'un « règlement d'administration déterminerales

moyens de donner l'instruction primaire aux sourds-muets et aux

aveugles ». Mais ce règlement, qui reste encore à faire, n'était

destiné, comme on le voit, qu'à deux catégories d'anormaux. Il

laissait de côté tous ces petits êtres, d'une intelligence lente ou

incomplète, qui ne peuvent sans doute s'accommoder de la disci-

pline et des programmes appliqués dans nos écoles ordinaires,

mais qui ne sauraient non plus être confondus avec les idiots elles

crétins, et traités comme des incurables.

Le silence de la loi scolaire à leur égard s'explique surtout par ce

fait qu'il y a Vingt-deux ans les études psycho-physiologiques

n'avaient pas été poussées aussi loin qu'aujourd'hui, et tenaient

moins décompte de la graduation dans le classement des anoma-

lies intellectuelles. Or, c'est précisément l'existence constatée de

toutes ces variétés dans les infirmités mentales, et la détermina-

tion de leur curabilité, qui a donné à l'Etat enseignant la cons-

VARIA. 439

cience de devoirs nouveaux, et qui rend indispensable aujourd'hui

l'élaboration du règlement attendu, dont les dispositions devront

s'étendre à toutes les catégories d'anormaux éducables. '

Même en ce qui concerne les sourds-muets et les aveugles, on est

resté sous l'influence de cette idée ancienne, que le soin de leur

- infirmité relève beaucoup plus de l'assistance que de l'éducation,

et que l'intérêt de la société à leur égard doit se manifester sur-

tout par les secours matériels ou l'hospitalisation. Quant au devoir

de les instruire, l"1tat s'en remettait et s'en remet encore aujour-

d'hui presque exclusivement à des institutions privées, dont la

plupart sont congréganistes. Le tableau ci-dessous donne la répar-

tition actuelle des aveugles et des sourds-muets des deux sexes

entre les diverses maisons d'éducation qui leur sont affectées.

440 VARIA.

Les arriérés intellectuels et moraux perfectibles, dont le nombre

est beaucoup plus considérable que celui des aveugles et des

sourds-muets (on ne l'évalue pas à moins de quarante mille), sont,

au point de vue éducatif, encore plus délaissés.

La situation s'aggrave chaque jour, et, chaque jour, dans les

congrès d'enseignement, d'assistance, de médecine, les voix les

plus autorisées pressent l'Etat de remplir ses obligations. Ce qu'on

lui demande, ce n'est pas de supprimer ou de supplanter l'initiative

privée, ni celle des départements et des communes, à laquelle on

doit déjà tant de fructueux efforts, mais de la-considérer simple-

ment comme une auxiliaire dans l'accomplissement d'une tâche

qu'il ne saurait décliner, et que lui seul d'ailleurs peut embrasser

dans son ensemble.

A quelles méthodes s'arrêtera-t-il ? Quelles classifications éta-

blira-t-il entre les anormaux éducables ? Quel type d'établissement

leur destinera-t-on Comment recrutera-t-il et formera-t-il le per-

sonnel enseignant' ? Comment, pour les élèves sortants, ménagera-

t-il la délicate et périlieuse transition entre l'école et la vie ? Mais

n'aura-t-il pas, au préalable, à faire le recensement, aussi rigou-

reux que possible, des enfants qui ont droit à une de ces éduca-

tions spéciales, et à étudier scrupuleusement les expériences ten-

tées et les résultats obtenus dans les établissements existants.

Quoi qu'il en soit, pour préparer une telle oeuvre, l'Etat a les

éléments nécessaires : les hommes de science, les éducateurs, les

praticiens auxquels il fera appel lui apporteront le concours d'un

savoir, d'une expérience, d'un dévouement auquel aura été rare-

ment fournie une plus belle occasian de servir l'humanité.

Veuillez agréer, etc.

\fncRCEL CHARLOT,

Inspecteur général de l'enseignement

primaire.

Conformément aux conclusions de ce rapport, M. Claumié a

décidé, d'accord avec le président du conseil, d'instituer une com-

mission chargée d'étudier la question. Sont nommés membres de

cette commission :

MM. Léon Bourgeois, député, ancien président du conseil, ancien

ministre de l'Instruction publique, président. Baguer, directeur

de l'Institut départemental des sourds-muets d'Asnières. Bédorez,

directeur de l'enseignement primaire de la Seine. -- Binet, direc-

teur du laboratoire d'études psychologiques à la Sorbonne.

Dr Bourneville, membre du conseil supérieur de l'Assistance

publique. - Bruman, conseiller d'Etat, directeur de l'administra-

tion départementale et communale au ministère de l'Intérieur. -

Marcel Chariot, inspecteur général de l'instruction publique.

VARIA. 441 1

Jacques Cohen, docteur en droit, chef adjoint du cabinet du

ministre de l'Intérieur et des Cultes.

Collignon, directeur de l'institution nationale des sourds-muets.

- Gasquet, directeur de l'enseignement primaire au ministère de

l'Instruction publique. - Jost, inspecteur généralhonoraire de l'ins-

truction publique. -Lacabe, inspecteur primaire il Paris. smala-

pert, professeur de philosophie au lycée Louis-le-Grand.

Mesureur, directeur de l'administration générale de l'Assistance

publique, à Paris. -Henri Monod, directeur de l'assistance et de

l'hygiène publiques au ministère de l'Intérieur. Pissard, inspec- .

leur général des services administratifs au ministère de l'Intérieur.

- Ilobin, directeur de l'institution nationale des jeunes aveugles, à

Paris. De Saint-Sauveur, chef du bureau des établissements de

bienfaisance au ministère de l'Intérieur. -Strauss, sénateur, mem-

bre du conseil supérieur de l'Assistance publique. -1111 Stupuy,

directrice d'école enfantine, il Paris. -dur Jean Gauraud, chargé de

mission, secrétaire.

Nous nous bornerons à noter, pour le moment, que depuis

vingt-cinq ans nous réclamons l'application complète de la

loi du 28 mars 1882, qui doit s'appliquer à tous les enfants,

dans la mesure du possible. Or, comme la très grande majo-

rité est améliorable, notre réclamation est justifiée. Afin

d'arriver à ce résultat, nous avons fait adopter en 1889 par la

commission parlementaire chargée de l'examen du projet de

loi portant revision de la loi du 30 juin 1838, sur les aliénés,

un article imposant aux départements la création d'asiles-

écoles pour les enfants anormaux au point de vue intellectuel

et moral (idiots, amoraux).

M. Chariot semble faire encore une exclusion, au détriment

des idiots et des crétins, ceux-ci de plus en plus rares, croyons-

nous, ceux-là, au contraire, nombreux et quoiqu'on dise

1res améliorables, même à un degré prononcé. Nous avons

réclamé pour tous les anormaux une statistique qui n'a ja-

mais été faite sérieusement.

Si, dans le monde pédagogique, on ne fait que commencer

à s'intéresser aux anormaux intellectuels et moraux, il y a

bien longtemps que les médecins s'en sont occupés, ont

réclamé pour eux des soins spéciaux, et tenté leur éducation.

On ne peut avant un essai prolongé du traitement médico-

pédagogique déclarer un enfant incurable.

442 " VARIA.

Certificats d'Aliénation; SECRET Professionnel

Nous avons exposé les circonstances d'une affaire de séquestra-

tion, dont était saisi le tribunal civil de Lille. Le tribunal vient de

rendre son jugement.

Après avoir rappelé les faits d'internement de M. Houtre, en-

fermé comme fou pendant cinq jours, en janvier dernier, à l'hôpital

Saint-Sauveur, à Lille, ainsi que la peine que l'on a eue, malgré

l'avis du médecin de cet établissement le déclarant sain d'esprit,

à le faire sortir le tribunal estime qu'il n'a existé aucune conni-

vence entre les trois défendeurs, 111 ? Houtre, le docteur Iluart et

M. Krebs, maire d'Ilellemmes, assignés en payement de dommages-

intérêts par M. Houtre.

En ce qui concerne Mue Houtre, le jugement admet sa bonne

foi; quelques jours avant, son mari s'était livré à des violences

extrêmes et avait même, en brisant la lampe -dans un accès de

colère, allumé un commencement d'incendie; elle avait en face

d'elle un alcoolique qui, pour coups à sa femme, avait même été

condamné à treize mois de prison.

Pour ce qui touche le maire, M. Krebs, le tribunal juge que sa

responsabilité n'est pas davantage engagée. Il a agi sur le vu

d'un certificat médical qui lui indiquait un danger imminent.

Mais les juges retiennent une faute à la charge du docteur Iluart,

qui a délivré le certificat sans revoir le malade. En conséquence,

Mme Houtre et M. Krebs, maire d'Hellemmes, sont mis hors de

cause. Quant au docteur Iluart, il est condamné à payer il

M. Houtre la somme de i 000 francs à titre de dommages-intérêts

Cette même affaire a eu, le lendemain, son épilogue devant le

tribunal correctionnel de Lille. Le docteur Masson, de Marq-en

Rareeul, avait adressé à son confrère, le docteur Huart, un certi-

ficat où il déclarait que jadis il avait soigné M. Houtre, et qu'il

avait constaté que, à son avis, c'était un alcoolique invétéré, can-

didat à l'aliénation mentale. Au cours des polémiques que la sé-

questration de M. Houtre provoqua, le docteur Iluart et M. Krebs

publièrent cette lettre. Le parquet a poursuivi le docteur Masson

pour divulgation de secret professionnel. -

Le tribunal, dans son jugement, a déclaré que la règle du

secret est formelle; qu'aucun tempérament ne peut y être

apporté et que, notamment, on ne peut tenir compte du

défaut d'intention de nuire ou du but poursuivi. Dans l'espèce, il

y a lieu de se montrer d'autant plus sévère que le docteur Masson

a ajouté dans sa lettre, comme par une sorte de préméditation :

« Je vous autorise à faire de cette pièce l'usage que vous vou-

drez. » Le tribunal condamne le docteur Masson, pour violation

d'un secret professionnel, à trois `jours de prison avec sursis el

100 francs d'amende. (Le Temps.) .

VARIA. 443

Ce fait montre la nécessité absolue de la part des médecins de

ne pas délivrer de certificats quand ils n'ont pas vu les malades

dans les dernières vingt-quatre heures et surtout quand il s'agit

d'alcooliques chez lesquels il peut se produire une amélioration

rapide.

LES aliénés EN liberté.

Terrible drame DE la folie. A coups de faux. Trois vic-

times. -D'après une dépêche adressée le 13 septembre, de Pal-

lanzana au Petit Parisien, du 14 septembre, un pauvre fou,

nommé Frédéric Zanaii, âgé de trente ans, qui habitait avec ses

parents à Falmenta, a tué son père, sa mère et sa soeur dans des

circonstance terrifiantes. -

Durant la nuit d'avant-hier, se trouvaient réunis dans la cabane

des Zanaii, qui sont pâtres, le père et la mère du fou, sa soeur,

son beau-frère et un oncle. Vers minuit, Frédéric qui était parti-

culièrement agité depuis quelques jours, se leva, alluma une

chandelle de suif et alla réveiller sa soeur, qui dormait.

Tout à coup, des cris terribles retentirent; le fou avait saisi la

jeune femme à la gorge et l'étranglait. Les parents sautèrent hors

du lit, mais Frédéric avait eu le temps de s'emparer d'une faux;

il frappa à la tête sa soeur, dont la cervelle jaillît sur les murs.

Epouvantés, les parents voulurent s'enfuir, mais le iou se plaça

devant l'unique porte de la chaumière et commença à frapper au

hasard autour de lui. Il atteignit sa mère à la poitrine, la mort

fut mtanstanée.

Le père, le corps labouré d'entailles profondes, se réfugia sous

un lit; les autres parents du fou qui assistaient à cette épouvan-

table tuerie le virent bientôt se diriger vers eux, il frappa à la

jambe son -beau-frère et son oncle.

Ce dernier enfin réussit à se jeter sur lui et à le terrasser, mais

après l'avoir frappé à coups de poing au visage pour l'assommer,

il prenait la fuite. Lorsque, le lendemain, les carabiniers de Pallanza

arrivèrent, ils trouvèrent Frédéric couché dans une mare de sang

auprès du corps de son père et de sa mère. On le crut mort, mais

à peine était-il sur le brancard qui devait le transporter qu'il

s'échappait. 11 avait dormi sur le sol auprès du cadavre de ses

parents. Les carabiniers l'ont conduit à l'asile d'aliénés de Novare.

Ainsi qu'on le voit, il n'y a pas malheureusement qu'en

France qu'on retarde l'hospitalisation des aliénés.

Assistance DES IDIOTS.

Assassinat par sa mère d'une idiote aveugle. Au hameau

du Petit-Mont, dit le Progrès de Lyon, du 31 juillet. habitait

une femme Pollet âgée de soixante-dix-huit ans. Cette femme

444 VARIA.

avait avec elle sa fille âgée de quarante ans. La Cille était idiote et ne

pouvait travailler et la mère devenait aveugle. Bien souvent la

pauvre femme se plaignait à ses voisins de sa triste situation : son

âge et son infirmité n'allaient bientôt plus lui permettre de subve-

nir aux besoins de sa fille et aux siens et elle était décidée à se

suicider. Ses voisines la réconfortaient de leur mieux, elles lui fai-

saient comprendre ce que deviendrait sa fille si elle mettait son

funeste projet à exécution. A cela elle répondait invariablement :

« Je la tuerai avec moi. » Hier la malheureuse décida d'en finir.

Les voisins trouvèrent dans l'après-midi les corps des deux femmes

dans une mare.

La gendarmerie prévenue aussitôt se rendit sur les lieux accom-

pagnée du juge de paix, du greffier et de M. le D1' Edouard. Des

premières constatations il résulte que la femme Pollet a noyé sa fille

en se noyant elle môme. Le drame a dû être terrible. L'idiote ne

voulait pas mourir et voulait s'échapper de l'étreinte de sa mère;

mais la malheureuse fut vaincue elles deux femmes roulèrent dans

la mare. Des traces de coups à la tête prouvent surabondamment

cette lutte. La femme Pollet était très estimée dans le pays, où ce

terrible drame a jeté la consternation.

Assistance A domicile : Séquestration et assassinat d'un dément.

D'après une dépêche de Coblentz, 31 juillet au Progrès de Lyon

(31 juillet), un crime effroyable vient d'être commis à Windesheim,

près de Kreuzenach, la célèbre ville d'eau de la Prusse rhénane.

Un incendie ayant éclaté chez le serrurier Stoffel, les pompiers

s'empressèrent d'accourir ; déjà toute la maison était en feu, et il

ne fallait pas songer au sauvetage. Mais des cris plaintifs s'étant

fait entendre dans le brasier, quelques hommes courageux réussi-

rent à pénétrer dans une chambre du rez-de-chaussée.

Au pied d'un lit gisait le cadavre d'un nommé Steyre, beau-

frère du serrurier Stoffel. Chose horrible, les bras et les jambes

du cadavre avaient été sectionnés. Sur le lit étaient fixées des

cordes à moitié calcinées, qui avaient servi à attacher Steyer. et

qui n'avaient lâché leur prisonnier qu'au moment où l'incendie

les atteignait. v

Mais ici se pose une question terrible. Les assassins, près avoir

dépecé leur victime, voulaient effacer les traces du forfait en met-

tant le leu à la maison. Ils durent prendre quelques précautions

préliminaires, c'est ce qui explique la rapidité avec laquelle l'in-

cendie s'est propagé. Steyer aurait donc été tué avant d'être

dépecé. Mais les premiers sauveteurs affirment avoir entendu des

cris et des gémissements. Donc, à ce moment, Steyer était encore

en vie et ses assassins l'auraient dépecé vivant ! .

Les auteurs probables ,du crime ont été arrêtés : le serrurier

Stoffel et son fils. Leur attitude pendant l'incendie fixa les soup-

VARIA. 445

çons. Stoffel est un homme violent, capable d'avoir combiné et

exécuté cet affreux drame. A la suite d'arrangements de famille,

Stoffel avait dû prendre à sa charge son beau-frère Steyer qui

était tombé en enfance. Déjà Stoffel avait été condamné pour avoir,

avec une hache, enfoncé les dents de son beau-frère. Il avait relé-

gué depuis longtemps le malheureux dans une soupente obscure de

sa maison. Stoffel aurait donc commis son crime pour se débar-

rasser de son beau-frère et se libérer en même temps des 'engage-

ments pris pour l'entretien du malheureux. -

, Les miracles.

Voici une pauvre femme. Toutes les maladies se sont abattues

sur elle. Les médecins la déclarent incurable. Or, conformément

au dogme, nous devons croire que les maladies dont elle a été ac-

cablée furent l'effet de la volonté céleste. Elle va à Lourdes et, su-

bitement, Dieu la guérit. S'il la voulait bien portante, pourquoi, pré-

cédemment, l'a-t-il rendue malade ? Pourquoi cette complication ? ` ?

Je sais... Les gens qui prétendent interpréter, de science certaine,

les volontés du Créateur, répondront : « Dieu veut ainsi montrer

sa toute-puissance et son infinie miséricorde. » Ainsi, le Dieu de

ces gens-là est un Dieu qui, pour fournir une semblable démons-

tration, ne trouve pas d'autre moyen que d'accabler en secret une

misérable créature et de lui rendre ensuite publiquement la santé.

Est-ce assez puéril ! Quelle conception grotesque de l'action de la

Divinité 1 (llarduin, Malin, 26 sept. 1904.)

L'alcoolisme en SC4NDI.1VIR.

Ou croit généralement que, en Suède et en Norvège, l'énorme

réduction des débits a enrayé l'alcoolisme. Or M. Legrain, dans les

noies de voyage qu'il a communiquées au Conseil d'administration

de la, Ligue nationale contre l'alcoolisme, a rapporté des impres-

sions toutes différentes.

Le schnaps coule à loisir dans les maisons du monopole, qui sont,

il vrai dire. très peu nombreuses; on ne peut pas y vendre moins

d'un lüre d'alcool à la fois. Mais, déjà, d'autres maisons conces-

sionnaires où l'on en vend au détail se sont établies, et l'on en sert,

il la condition formelle qu'ils mangent, aux consommateurs qui

souvent, font semblant de manger. Et, dans beaucoup d'établisse-

ments où il n'est pas permis de débiter de l'alcool au détail, il est

de règle de s'en laisser « voler » moyennant finances.

On vient dans ces maisons pour manger; mais, de temps en

temps, un consommateur se dirige vers l'armoire, l'ouvre, se sert

un verre d'un liquide dont on peut deviner la nature, l'absorbe en

entier, et revient s'asseoir, manger de nouveau et recommence

aussi souvent qu'il le veut son pèlerinage. Si un agent du fisc sur-

vient, ni vu ni connu. Le tenancier a de l'alcool dans l'armoire pour

446 FAITS DIVERS.

son usage personnel, et il n'en a jamais offert ni versé. On peut

toujours se laisser voler.

Il y a d'ailleurs manière de s'enivrer là où l'on ne peut acheter

qu'un litre au moins. L'alcoolisme se manifeste sous la forme

d'une ivresse massive et bestiale, qui est le résultat du monopole.

Il est vrai que dans les campagnes où l'on peut parfois parcourir

100 kilomètres sans trouver un débit, il est difficile de s'enivrer,

mais alors quand on vient à la ville on songe à se rattraper. Les

paysans et gens du peuple, qui viennent faire leur marché, leurs

provisions, achètent naturellement au moins un litre d'alcool.

Quand ils n'ont pas suffisamment d'argent en poche, ils se coti-

sent, achètent un ou plusieurs litres et retournent chez eux.

Dans ce cas il est rare que la bouteille revienne; elle circule de

mains eu mains, entre deux ou trois individus, jusqu'à ce qu'elle

soit complètement vide et dans les stations avoisinant les villes, les

trains ramènent des quantités considérables d'individus dans une

ivresse comateuse complète.

Le monopole russe a produit ces mêmes effets : on peut acheter

« la petite bouteille » et la consommer au dehors, s'enivrant sur

le trottoir. Eu'sorte que, dans les villes, l'alcoolisme s'étale sur la

\oie publique.

Et d'outre part, l'alcoolisme se développe constamment dans la

bourgeoisie par consommation du punch. Dans les buffets, on voit

de grands samovars remplis d'alcool; là des gens en redingote et

chapeau haut de forme mangent debout des hors-d'oeuvre et se ser-

vent' d'abondantes rasades en puisant dans le samovar. On boit

sans contrôle, et on paie ce qu'on déclare avoir bu.

En tout cas, il est intéressant de noter que les mesures prises en

Scandinavie, bien que très tyranniques, n'ont pas réussi à enrayer

l'alcoolisme. Ce qu'il faut, dit justement M. Toulouse, c'est réfor-

mer l'individu, et non l'opprimer, et ce n'est d'ailleurs pas lâche

facile. (Revue Scientifique, n° 16 du 1"> octobre 1904.)

FAITS DIVERS.

Asiles d'aliénés. Mouvement de septembre 1904. M. le Dr LÉ-

pinte, ICI' du concours de 1904, nommé médecin adjoint, à Pau;

M. le D1' Auury, médecin adjoint, à Cliilons-sur-Marne, nommé

médecin adjoint à Maréville (Meurthe-et-Moselle), poste créé; M. le

D1' Hoy, 2° du concours 1904, nommé médecin adjoint, à Chialons-

sur-Marne ; M. le D1' médecin adjoint à l'asile d'Auxerre

(Yonne), promu à la ire classe du cadre ; M. le D'" Pocuorr, médecin

FAITS DIVERS. 447

adjoint à l'asile d'aliénés de Saint-l'on (Seine-Inférieure) promu

à la classe exceptionnelle du cadre ; M. le Dr Brunet, médecin ad-

joint à l'asile d'aliénés Saint-Yon (Seine-Inférieure) promu à la

classe exceptionnelle du cadre; M. DUGARDiN (Eugène), chevalier de

la Légion d'honneur, a été nommé Directeur de l'asile d'aliénés de

Bailleul (Nord) par arrêté du 13 septembre 1904 (poste créé) ; M. le

D' CllocnEAux, Directeur-médecin à l'asile d'aliénés de la Charité

(Nièvre) a été nommé médecin en chef à l'asile d'aliénés de Bail-

leul (Nord) par arrêté du 19 septembre ! 904.

La tradition naguère, était de nommer des médecins directeurs,

chose naturelle puisqu'il s'agit d'établissements consacrés aux

malades. Dans ces dernières années on tend à déroger à cette

habitude, ce qui ne contribuera pas à faciliter le recrutement des

médecins.

Nécrologie. Nous avons le regret d'annoncer la mort du

Dr DUHAMEL, interne à l'asile d'aliénés de Montdevergues, décédé

le 9 septembre 1904 à l'âge de vingt-sept ans, à la suite d'une

longue et douloureuse maladie.

Noire jeune confrère qui se destinait à la carrière des asiles

avait le 8 novembre 1903 soutenu brillamment sa thèse de doctorat

devant la faculté de Montpellier sur La situation des aliénés dans le

comtat Venaissain et dans Vaucluse de 1680 à 1901. Cette étude très

consciencieuse et très intéressante est un document précieux pour

l'étude de l'histoire dcs asiles en général et plus particulièrement

des progrès accomplis daus cette région de la France au point de

vuc de l'hospitalisation et du traitement des aliénés.

Aux obsèques de notre regretté confrère qui ont eu lieu à Avi-

gnon assistaient les autorités du département, le personnel de

l'asile et un grand concours d'amis. -

Le 1)1' l'iclieuot, médecin en chef de l'établissement, a prononcé

un discours dans lequel il a fait l'éloge de son élève et lui a adressé

en termes émus un dernier témoignage d'estime et de regrets

affectueux au nom du Corps médical, des administrateurs, du per-

sonnel et des malades de l'asile.

- 111. Alphonse Raoul, directeur de l'asile départemental d'alié-

nés du Hhône, vient de mourir à l'âge de soixante-deux ans.

M. ltaoul fut successivement sous-préfet de Saint-Girons et de Brive,

puis secrétaire général des Côtes-du-Nord, maire de Mazères et

conseiller général des Hautes-Pyrénées. Il avait été en outre,

inspecteur de l'Assistance publique à Paris et directeur de l'asile

d'aliénés de.Montdevergue (Vaucluse).

Les aliénées enceintes. Nous avons annoncé, dans un précé-

dent numéro, qu'une jeune femme internée à l'asile d'aliénés de

Clermont, Mme Gaillard, de Honquerolles, avait nais au monde en

cadette un enfant que l'on trouva mort étouffé dans un linge. Cette

448 BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

mère infortunée a succombé elle-même ces jours derniers, probable-

ment aux suites de ses couches, et son enterrement a eu lieu aujour-

d'hui jeudi à Agnetz. (Le Semeur de l'Oise, 30 sept. 1904.)

Cetexemple qui s'ajoute à tant d'autres, montre la nécessité

d'une surveillance des aliénéesenceintes, plus rigoureuse en-

core que celle des autres aliénées et d'un examen fréquent

. de leur état puerpéral.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Clvrck (I'IERCE) ET IiIO\TCOIIEItS' (AL1\). - Suggestions and plans for

psychopalhic tards. pavillons and hospilals for american ciliés. In-8°

de 10 pages avec planches. (AlIlel'ican Journal ofliisaizily..)

D ONATII (JULIUS). - flie Be £ leulung des cholius der J,11)ilel)sie. ln-8» de

38 pages. Vogel à. Leipzig.

DONATII (JULIUS). Pupillenpritfitng und llîil)ille7ti-eaZ-Iioiioîz. ln-8^ de

30 pages. lIlonalsschl'if'l sur psychiatrie und Neurologie.

Dipe (31AURICE). /Jel'malo-l'syehies. ]n-8° du 38 pages. Iinp. Simon it

Bennes. .

l'II IXCOTTE (Xatier). - Considérations sur l'éliologie et la pathogénie

de la névrose l7ocumccliqzte. In-8° de 20 pages. llayez à brucelles,

Godlewski (.1.).- Les neurasthénies. 1 vol. in 16 de 3H pages. Librai-

rie Maloine, 25-27, rue de l'Ecole-de-Médecine. Prix : 4 fr.

IiruLrlni`u (F.). Expérimental sludies in mental cleficie7zcy. I ! r8^ de

JU pages. (Américain Journal of 11syclwlogy.)

L'index philosophique. Publication annuelle de la Revue de philosophie,

dirigée par 111. E. I'I;7LLAL13E. Premier volume iii-8- de 350 pages, prix :

10 francs, C. NAUD, 3, rue Racine, Paris. Contenant 4.623 titres biblio-

graphiques d'ouvrages et articles de revues, relatifs à la philosophie et

aux sciences annexes (biologie, neulologie, psychiatrie, sociologie, crime

et pénalité) parus en 1902 en Europe et en tlmérique, par nl. N. Vescmoa,

chef des travaux du laboratoire de Psychologie expérimentale de l'Asile

de Villejuif, et le C'' voit BoeclI.IK, de Stettin. Le deuxième volume, qui

eu en préparation, contiendra non seulement les titles des ouvrages et

articles de revues de l'année 1903, mais encore une brève analyse de tous

ceux qui intéressent plus particulièrement les philosophes. L'Index Phi-

losophique comble une lacune dans la littérature et la publicité [rail-

cuise. Il a sa place marquée dans la bibliothèque de tout vrai travailleur

11r ? UAIIT (Georges). - De la chorée de Ilunli7zglo7t. In-8° de 20 pages.

Yander llaegllen. Galld, -

Siccaiuu (1'IEIlo-DIEGo). - Co7zsicle7ocio7zi su la fisiopalolonia c su 1(t

leoria del lie. lit-8- de 32 pages. MarcheIi à Ancolla.

Le rédacteur-gérant : f3ounnevu.LE.

Evreux, CI,. Ilémsssr, imp. - 10-100fit

Vol. XVIII. Décembre 1904. N" 108.

ARCHIVES DE NEUROLOGIE

MÉDECINE LÉGALE.

Pyromanie et puberté. -Examen médico-légal d'une

jeune incendiaire;

Par LE D' Raoul LEROY,

Médecin-adjoint de l'Asile des aliénés d'Evreux.

« Toutes les fois qu'à la campagne, dans un village, dans

une commune, des incendies se répètent à des intervalles

rapprochés, c'est qu'il existe un garçon, une fille à dévelop-

pement intellectuel ou physique incomplet, idiot, imbécile

ou épileptique; c'est sur cet infirme que doivent porter les

soupçons. » Telle est la proposition que formule Motet dans

son article Pyromanie du Dictionnaire Jaccoud.

L'état mental des incendiaires est, en effet, tout spécial.

Les médecins légistes savent que, dans l'immense majorité

des cas, les prévenus arrêtés pour incendies sont de minus

habens. Les pays qui fournissent le plus d'aliénés sont ceux

où les incendiaires sont les plus nombreux et nous avons

attiré l'attention sur le grand nombre d'incendies criminels

se produisant en Normandie parallèlement à la dégénéres-

cence alcoolique de cette région 1.

Les débiles incendiaires mettent le plus souvent le feu

par vengeance ou pour s'amuser de la vue d'un spectacle

terrifiant; rares sont ceux qui agissent sous l'influence

d'une obsession les poussant irrésistiblement' à l'incendie.

Dans ces derniers, on voit ordinairement la pyromanie

' Raoul LEROY. Contribution' à l'étude de l'alcoolisme en 11'or-

mandie. Le bilan de l'alcoolisme dans l'Eure au XIX' siècle. (Recueil des

travaux de la Société libre de l'Eure, année 1901).

Archives, 2' série, t. XVIII. 29

450 MÉDECINE LÉGALE. ' ' "

éclater à l'occasion de la puberté. Telle est l'observation de

la malade dont nous publions l'examen médico-légal. Il

s'agit d'une jeune fille de quinze ans qui, en trois jours,

alluma trois incendies chez sa patronne. Cette personne,

tarée héréditairement, avait été poussée par une obsession

véritable avec tous ses caractères classiques, obsession sur-

venue brusquement lors de l'établissement des menstrues.

Je soussigné, etc.

Au commencement de mai 1904, trois incendies éclataient en

trois jours dans la maison de la veuve M..., épicière à Broglie

(Eure), incendies n'ayant occasionné, du reste, que des dégâts

peu importants. Le feu prenait toujours dans des circonstances

mystérieuses et les gendarmes ne savaient sur qui faire porter les

soupçons lorsque, en interrogeant la petite bonne de mis M..., ils

remarquèrent que celle-ci se troublait et semblait fortement

impressionnée. Engagée à dire la vérité entière, la jeune fille

avoua ce qui suit : .

« Le lundi 2 mai, à ma rentrée d'une inhumation où Mme M...

m'avait envoyée, j'ai pris une allumette dans la cuisine avec l'in-

tention de mettre le feu. Après m'être déshabillée, je suis entrée

dans la chambre à sucre où j'ai mis le feu aux brosses en chien-

dent déposées sur les sacs de sucre, puis je suis descendue net-

toyer le jupon de ma patronne. Environ une demi-heure après, en

remontant le vêtement, j'ai vu que les appartements étaient rem-

plis de fumée et en ai informé Mme M... Hier, 4 mai, vers neuf

heures du matin, j'ai pris une allumette qui était sur la table de

nuit dans la chambre de 1\11110- M..., je suis entrée dans la chambre

de son fils et ai mis le feu à un journal qui était sous la bibliothè-

que, j'ai ensuite fermé la porte et suis descendue nettoyer le ma-

gasin...

« Vers les cinq heures du soir, étant seule à travailler dans la

cour, j'ai pris une allumette dans une boite qui était sur la che-

minée dans la petite cuisine, suis montée au grenier où étaient les

balais, ai frotté l'allumette et ai mis le feu aux balais. Lorsque j'ai

vu qu'ils flambaient, j'ai fermenta porte et suis descendue conti-

nuer mon ouvrage. Environ une demi-heure après. j'ai aperçu, de

la cour, la fumée qui sortait de la toiture, c'est alors que j'ai dit

que le feu devait encore être dans le grenier. »

. Cette jeune bonne de quinze ans, fille de parents fort honora-

bles, n'avait aucun motif, ni aucun intérêt, à allumer ainsi des

incendies chez sa patronne où elle était placée depuis cinq jours

seulement. Les renseignements fournis sur elle étaient excellents

et on doit écarter toute idée de vengeance.

Quand elle fut invitée à compléter ses aveux et à faire connaître

PYROMANIE ET PUBERTÉ. EXAMEN D'UNE INCENDIAIRE. 451

le mobile de ses actes, l'inculpée répondit : « Quelque chose de

surnaturel me poussait à mettre le feu ».

Quoiqu'on fit pour la persuader, elle resta inébranlable et

répéta invariablement les mêmes paroles.

Cette absence bien constatée de tout sujet de haine et de ven-

geance, cet acharnement dans l'exécution de l'acte criminel, cette

obligation d'une force étrangère à laquelle elle était obligée de

céder émurent M. le juge d'instruction de Bernay, qui demanda

l'examen médico-légal de la prévenue. -

Les résultats auxquels nous sommes arrivés prouvent surabon-

damment le bien fondé des scrupules de l'honorable magistrat.

G... Emilienne, âgée de quinze ans, est née le 21 mars 1888 à

Bosc-Morel, canton de Broglie (Eure).

Les antécédents héréditaires sont les suivants :

Côté paternel. Grand-père paternel mort à soixante-six ans

de tuberculose pulmonaire, sobre, de caractère très violent, colères

excessives.

Grand'mère paternelle : soixante-huit ans, bonne santé.

Cousin germain paternel : bizarre, détraqué, ayant fait à quia-

torre ans des fugues non motivées. - ,

Père : intelligent, pondéré, bonne conduite, sans stigmates phy-

siques de dégénérescence.

Côté maternel Grand-père maternel mort à cinquante-huit ans

de maladie de vessie, sobre. Grand'mère maternelle : s'est suicidée

à soixante-deux ans.

Mère : atteinte de coxalgie ; très nerveuse, très émotive, sans vo-

lonté, se laissant facilement aller au découragement. Il n'existe

dans la famille ni idiots, ni épileptiques.

L'inculpée a donc une tare héréditaire très lourde, surtout du

côté maternel. Ce fait a une très grande importapce pour expli-

quer son état mental.'Elle a trois soeurs âgées de neuf'ans, six

ans et huit mois jouissant toutes d'une bonne santé, mais la

seconde a présenté des convulsions.

Emilienne naquit à terme lorsque son père avait vingt ans et sa

mère dix-huit ; elle commença à marcher à treize mois, à parler à

quinze mois et fut propre de bonne heure.

L'enfant contracta la rougeole à cinq ans et n'eut pas d'autres

maladies infantiles.

Sa santé physique n'a jamais rien laissé à désirer, sauf de grands

maux de tête survenant quelquefois après les repas et semblant

dus à une digestion difficile.

La jeune prévenue fréquenta l'école des Soeurs de Broglie de

cinq à douze ans, c'était une enfant peu intelligente ayant de la

difficulté à apprendre et n'ayant jamais pu écrire correctement.

Son caractère très vif, très violent, se faisait souvent remarquer par

une absence complète d'équilibre, par de violentes impulsions ; « il

4S3 MÉDECINE LÉGALE.

lui prenait, dit son père, des envies de rire ou des envies déjouer

qui n'avaient plus de fin, on aurait dit qu'elle riait ou qu'elle jouait

par agacement. »

A l'Age de treize ans, c'est-à-dire en 1902, la jeune fille présenta

à différentes reprises des accès de somnambulisme nocturne. Elle se

levait la nuit, se promenait dans toute la maison et retournait se

coucher sans conserver au réveil le moindre souvenir de cet acte

automatique.

De tout temps, du reste, son sommeil était agité, entrecoupé de

rêves; ses parents l'entendaient de leur chambre rire souvent aux

éclats.

Emilienne.se plaça à treize ans chez 'Mme L..., rentière à Broglie

et resta vingt mois dans cette place (mai 1902 à janvier 1904) à la

complète satisfaction de sa maîtresse. « Je n'ai jamais eu à me

plaindre d'Emilienne, elle travaillait bien, était très convenable

et avait bon caractère. » .

Tous les renseignements s'accordent, en effet, à considérer l'in-

culpée comme une jeune fille bonne, bien élevée, travailleuse,

d'une honnêteté et d'une moralité irréprochables. Rien ne faisait

prévoir qu'elle serait un jour en prison et la chose resterait inex-

plicable sans la lumière que la psychiatrie jette sur cette affale.

Vers la lin de février ! 901, une fonction physiologique apparut

chez Emilienne, la menstruation s'établit. Les premières règles

eurent lieu le 28 février et s'accompagnèrent de troubles nerveux

(énervement, céphalée, insomnie). Les secondes règles se passè-

rent sans incident (28 mars-3 avril) ; Les troisièmes règles commen-

cèrent le 23 avril et furent exceptionnellement longues, durant jus-

qu'au 2 mai, date du premier incendie. ' .

Le 29 avril, c'est-à-dire cinq jours après le début des menstrues,

la prévenue perdit tout à fait le sommeil ; « il lui semblait voir

constamment du feu autour de son lit ». Le 30, il lui vint soudai-

nement dans l'esprit l'idée de mettre le {eu; la jeune fille repousse

cette pensée comme abominable. Le lendemain, nouvelle obsession

plus nette et plus violente.

Le 2 mai, vers les dix heures du matin, en revenant d'un enter-

rement, Emilienne est reprise de la pensée, cette fois impérieuse et

inéluctable, d'allumer un incendie; elle lutte de toutes ses forces

contre celte volonté étrangère qui s'impose à son esprit, elle tremble

des pieds ci La tète, son cour se gonfle, ses oreilles bourdonnent.

L'idée obsédante envahit tout le champ de la conscience, chasse

toutes les autres préoccupations et détermine une telle angoisse

douloureuse qu'incapable de résister Emilienne s'avoue vaincue,

prend une allumette et après avoir changé de vêtement, va mettre

le feu à un paquet de brosses de chiendent. Elle ressent alors un

extrême soulagement et une détente agréable consécutive.

Telle est la façon dont les choses se sont passées, et les mêmes

PYROMANIE ET PUBERTÉ. - EXAMEN D'UNE INCENDIAIRE. 453

phénomènes d'obsession et de lutte angoissante se sont reproduits

exactement lors du deuxième et troisième incendies, sauf un sou-

lagement consécutif moins net.

Nous nous trouvons certainement ici en présence d'une crise de

pyromanie classique : obsession consciente avec impulsion irrésistible

donnant lieu à une résistance d'intensité variable.

C'est à la prison d'Evreux où la prévenue a été transférée que

nous avons eu l'occasion de l'examiner à plusieurs reprises. Emi-

lienne G... est une jeune fille de taille moyenne, à la physionomie

douce et sympathique. Elle présente quelques stigmates physiques

de dégénérescence peu accusés (grand lobule de l'oreille, léger

prognathisme du maxillaire supérieur, voûte palatine ogivale).

Aucun trouble de la sensibilité, aucun symptôme d'hystérie.

Au point de vue intellectuel, l'inculpée, sans être à proprement

parler une débile, a certainement un niveau inférieur à la

moyenne ; elle a peu de mémoire et ne possède que des notions

sommaires. , ,

La sensibilité affective est bien développée chez elle, elle n'a

jamais cherché à faire de la peine à qui que ce soit et ne se mon-

trait pas brutale envers les animaux ; elle manifeste d'excellents

sentiments à l'égard de ses parents et se montre, à la prison,

bonne, soumise et obéissante ; elle s'occupe très régulièrement.

Emilienne ne manifeste pas beaucoup d'émotion de se voir en

prison tout en éprouvant un profond regret des actes qui lui sont

reprochés. Elle a conscience, en effet, qu'elle est la victime d'une

force involontaire.

Lorsqu'on lui demande d'exprimer les sensations qu'elle éprou-

vait sous l'influence de l'obsession, elle emploie des termes très

expressifs et très vrais :

« J'ai mis le feu parce que je ne pouvais faire autrement. »

« Cette idée m'a prise subitement, j'allais, c'était impossible de

résister ».

« C'était plus fort que moi, je marchais malgré moi ».

Il est difficile d'admettre que l'inculpée ait été capable de com-

poser un pareil système et de s'appuyer justement sur des faits

scientifiques admirablement établis aujourd'hui mais dont la con-

naissance lui est formellement interdile. Elle aurait pu se borner

à invoquer un entraînement quelconque, mais il y a loin de cette

formule banale qu'adoptent certains individus à cette révélation de

faits exceptionnels qui s'enchaînent logiquement, scientifiquement

et qui, réunis, constituent la symptomatologie d'une affection

mentale.

Bien que soumise à une force qui opprimait sa volonté, la pré-

venue agissait avec prudence et déployait une certaine habileté

pour ne pas être prise en flagrant délit. Cette particularité se ren-

contre et il n'existe aucune incompatibilité entre l'obéissance du

434 MÉDECINE LÉGALE.

patient à l'obsession et l'instinct de conservation qui lonctionne pa-

rallèlement sans qu'il y ait absorption de l'un par l'autre.

Il faut remarquer qu'Emilienne ne prenait qu'une seule allu-

mette à la fois, juste ce qui lui était nécessaire pour un incendie.

Elle donne pour motif qu'elle cédait à la passion du moment sans

avoir l'idée qu'elle pourrait bientôt recommencer. Cette obligation,

bien que susceptible de différentes interprétations, confirme natu-

rellement la forme intermittente de ses obsessions. En effet, l'acte

consommé, elle retrouvait le 'calme et se croyait débarrassée ;

mais un nouvel accès se produisant, elle revenait à ses allures pri-

mitives.

Nous considérons Ja prévenue comme une dégénérée héréditaire

chez laquelle l'apparition de la puberté a déterminé. l'éclosion de

l'obsession pyromaniaque. Cette notion des rapports de la puberté

avec l'impulsion a été admise de tout temps. Il n'est pas jusqu'au

théâtre qui n'ait mentionné ces relations et Ibsen, dans un de ses

drames les plus connus le Canard sauvage, met en scène une jeune

fille de quatorze ans qui, poussée d'abord par son évolution pubé-

rale à l'incendie, finit ensuite par se suicider.

Dans ces conditions, nous considérons l'inculpée comme irres-

ponsable de l'acte qui lui est reproché.

Nos conclusions sont donc les suivantes :

4 Emilienne G... présente du fait de sa lourde hérédité mor-

bide un état de dégénérescence mentale caractérisé par des stig-

mates physiques, la faiblesse de l'intelligence, des impulsions cons-

cientes irrésistibles ;

2° La puberté a déterminé chez elle l'éclosion de l'obsession à

mettre le feu dite pyromanie, obsession dont elle présente tous les

symptômes classiques ; -

3° Emilienne G... est entièrement irresponsable.

Cette observation est intéressante à plus d'un titre

Notons la double hérédité morbide ancestrale, concentrant

ses tares sur la jeune malade, -alors que son père est

indemne et sa mère peu touchée.

L'absence de toutes défectuosités morales.

Le peu d'importance des stigmates physiques.

L'apparition brusque de l'obsession pyromaniaque, non

pas à l'apparition de la puberté, mais lors des troisièmes

règles.. »

Celles-ci furent longues et abondantes. La jeune fille per-

dait depuis cinq jours, lorsqu'elle éprouva l'obsession.

Il est permis de supposer que le facteur anémie est venu

jouer un rôle dans la rupture de l'équilibre mental de la

jeune prédisposée.

ASILES D'ALIÉNÉS.

Aliénés criminels et asiles spéciaux.

Par LE D' V. BOURDIN,

médecin en chef de l'asile d'aliénés du Mans (Sar6e).

L'accident arrivé à notre collègue, le Dr Vallon, le distingué

médecin de l'Asile clinique, ramène l'attention sur la ques-

tion du régime des aliénés dangereux et criminels. Il est

bon,' croyons-nous, lorsqu'un malheureux événement se

produit, d'en tirer tous les enseignements qu'il comporte.

La question des aliénés criminels a été longuement traitée,

comme on sait, en août dernier, au Congrès des aliénistes et

neurologistes, tenu à Pau. Deux doctrines partagent les spé-

cialistes : les uns voudraient que les aliénés de cette caté-

gorie fussent séparés des malades ordinaires et placés dans

des asiles spéciaux, qui n'existent point en France à l'heure

actuelle; les autres, qui croient voir des difficultés à ces

mesures d'exception, demandent le maintien du stalu quo,

ou tout au moins, avant la construction d'asiles spéciaux, la

mise à l'essai de l'établissement de Gaillon (Eure), dont un

quartier était déjà réservé aux criminels devenus aliénés en

cours de peine. La prison de Gaillon ayant été désaffectée

par un vote de la Chambré, rien ne s'oppose en effet à cette

transformation.

Sans essayer de mettre d'accord les partisans de l'un et

l'autre système, nous croyons qu'il convient de bien préciser

la question avant d'adopter une solution quelconque. Cer-

tains aliénés homicides sont parfaitement inoffensifs à

l'asile; nous avons, pour notre compte, pu rendre à la

liberté, sans inconvénient, un parricide interné depuis dix

ans, et complètement guéri. En raison de son crime, on

avait toujours reculé devant l'idée d'une sortie. D'autres,

456 asiles d'aliénés.

qui n'ont jamais commis au dehors le moindre délit, sont

manifestement dangereux à l'asile et deviendraient crimi-

nels s'ils en trouvaient l'occasion. Nous soignons en ce

moment un mégalomane qui, persuadé qu'il est Dieu, exige

sa sortie, promettant sa divine protection au médecin si sa

mise en liberté peut attirer des ennuis à celui-ci; ne voyant

rien venir, il nous déclara un matin qu'il nous avait con-

damné à mort et qu'il allait, de ses propres mains, exécuter

sa sentence souveraine. Des mesures de protection spéciales

doivent être prises depuis ce jour à son égard.

En réalité, nous croyons qu'il faut s'en tenir à la distinc-

tion clinique en aliénés présumés curables et incurables.

Aux premiers, l'asile avec ses moyens d'isolement peut suf-

fire, comme le soutenait M. Keraval au Congrès de Pau;

pour les autres, lorsqu'ils sont dangereux, qu'ils aient été.

ou non criminels, l'asile spécial s'impose, et nous nous en

déclarons partisan dans ces limites. Le Dr Vallon nous sem-

ble avoir émis une pensée analogue, lorsque au Congrès il

proposait que l'asile spécial fût réservé à ceux des aliénés

criminels qui troublent constamment la tranquillité des

asiles et nécessitent des mesures de répression en opposi-

tion avec la conception moderne de l'asile-hôpital.

Que l'on ne nous objecte pas qu'on ne peut savoir si ces

aliénés sont particulièrement dangereux, et que tous peu-

vent le devenir à un moment donné. Il est hors de conteste

que le médecin d'asile, après un certain temps de séjour

d'un malade, sait parlaitement si ce malade est à redouter;

c'est moins chez l'aliéné une affaire de troubles morbides

que de caractère, et l'observation quotidienne des infir-

miers, jointe à la sienne propre, suffira dans la plupart des

cas à fixer définitivement le médecin. Ce ne sera pas parce

que certains aliénés auront eu des périodes d'agitation

durant lesquelles ils se seront montrés plus ou moins vio-

lents, que ces malades seront étiquetés dangereux; beau-

coup de ceux-là, redevenus calmes, sont inoffensifs et peu-

vent être occupés sans danger; il suffit à leur égard de

prendre des précautions durant la phase d'excitation. On

devra plutôt tenir compte des actes commis au dehors, des

menaces faites et prouvées, des renseignements fournis par

la famille ou les voisins; au besoin, une enquête spéciale

devra pouvoir être ordonnée et faite, avec le concours du

ALIÉNÉS CRIMINELS ET ASILES SPÉCIAUX. 457

médecin, avant que tel aliéné soit classé dans les dangereux.

Surtout on devra attendre un certain minimum de temps

d'observation, minimum à fixer, avant de requérir l'admis-

sion à l'asile spécial.

Qui prononcera cette'admission ? A notre avis, ce ne peut

être que l'autorité judiciaire. On a dit que cette interven-

. tion de la justice était fâcheuse, que les magistrats n'auraient

point la compétence nécessaire, et que si un médecin civil

éprouve déjà de l'hésitation pour délivrer un certificat à fin

d'internement, à plus forte raison une décision analogue

.prise par un magistrat ne devrait offrir aucune garantie.

Toutes ces considérations ont leur valeur; mais, à notre

avis, l'arrêt de la justice ne devrait être rendu qu'après un

temps donné d'examen du malade à l'asile, et bien plus, son

intervention ne se produirait qu'à la demande même du

médecin traitant. C'est lorsque celui-ci jugerait que le ma-

lade n'offre que peu ou point de chances de guérison, qu'il

est dangereux, soit par les faits qui lui sont imputés alors

qu'il était en liberté, soit par les tendances qu'il a manifes-

tées à l'asile, ce n'est qu'alors que le médecin solliciterait

de la justice le transfert à l'asile spécial.

Mais il est indispensable que la responsabilité du médecin

soit dégagée dans une mesure de ce genre; et l'autorité

administrative, loin de couvrir le médecin, s'appuierait

nécessairement sur le certificat ou le rapport délivré par

celui-ci. Or, s'il nous est possible de prendre entière la res-

ponsabilité d'un traitement, il ne nous appartient pas de

décider quelle mesure il convient d'appliquer pour mettre la

société à l'abri des atteintes d'un criminel ou d'un individu

susceptible de le devenir. L'autoritéjudiciaire, au contraire,

a toute qualité pour trancher la question; le médecin n'in-

tervient que comme conseil, comme partie plaignante, si

l'on veut; le juge, avant de prononcer l'envoi à l'asile spécial

de l'aliéné qui lui est signalé comme dangereux, aurait

naturellement pour devoir de se renseigner aussi complète-

ment que possible . auprès des familles, des municipali-

tés, etc. Il pourrait même ordonner le maintien à l'asile-

hôpital si les faits ne lui paraissaient pas probants.

Envisageons maintenant, de façon sommaire, ce que

pourra être l'asile spécial. A vrai dire, la question de l'orga-

nisation détaillée de cet asile ne pourra être étudiée que

458 asiles D ALIENES.

lorsque le principe de sa création aura été admis. On peut

pourtant supposer qu'on y fera peu de traitement. Les ma-

lades dangereux sont par définition même peu faciles à trai-

ter et, de plus, en cas d'amélioration ou de guérison, on peut

toujours craindre une rechute, se traduisant chez l'aliéné

meurtrier par un nouvel homicide. Dans ces conditions, il

serait difficile de blâmer l'administration qui refuserait,

malgré l'avis du médecin, d'accorder la sortie. Pour le par-

ricide, dont nous avons parlé, nous n'avons obtenu la mise

en liberté qu'en proposant que cet homme restât soumis à

une certaine surveillance de la part du maire de son village,

et qu'il fût visité d'office, de temps à autre, par un médecin*

de la localité. %

Si l'on ne fait pas de traitement dans l'asile spécial, on

est en droit de redouter qu'il ne diffère guère d'une prison.

Et dès lors nous nous défierons de ces asiles nouveaux, s'ils

doivent ressembler à certains asiles dits de sûreté que l'on

trouve annexés à des asiles ordinaires. Nous avons eu l'oc-

casion de visiter récemment, à l'étranger, un de ces quartiers

de sûreté, et nous sommes resté glacé d'effroi devant ces

murailles d'une hauteur démesurée, ces portes munies

de solides barreaux de fer contre lesquels se pressaient de-

malheureux déments à la figure hâve, les poings serrés, se

répandant en imprécations et en menaces contre leur méde-

cin devenu leur geôlier, presque leur bourreau. Le confrère

qui nous accompagnait nous déclara qu'il ne pénétrait

jamais dans ce quartier, assuré qu'il n'en sortirait pas

vivant. La précaution nous parut sage en effet, mais nous

avons peine à croire que ce soit là l'idéal du traitement ( ? )

pour aliénés dangereux.

Le but de cet article est de soumettre à l'appréciation de

nos collègues une solution plus humaine, en même temps

que tout aussi efficace pour la sécurité générale. Cette me-

sure, c'est la relégation.

La relégation, c'est-à-dire le transfert à vie dans une terre

lointaine, est applicable, depuis la loi de 1885, aux récidi-

vistes ayant encouru des peines déterminées. Mais il existe

dans cette loi un article (art. 18, loi du 27 mai 1885) en

vertu duquel un condamné peut être dispensé provisoire-

ment ou définitivement de la relégation pour cause d'infir-

mités ou de maladies. L'aliénation est une de ces maladies;

aliénés criminels ET asiles spéciaux. 459

aussi le nombre des simulateurs a-t-il subi une singulière

recrudescence depuis la mise en vigueur de la loi, ainsi que

le signalait le Dr Garnier, il y a quelques années. Exempter

de la relégation un criminel parce qu'il est aliéné, nous parait

une erreur, explicable encore en 1885 lors de la promulga-

tion de la loi, mais qui n'a plus de raison d'être aujourd'hui.

Actuellement., en effet, l'on tend à placer les aliénés inof-

fensifs en colonies qui leur assurent une bien plus grande

somme de liberté. Ces colonies conviennent surtout aux

aliénés inoffensifs et regardés comme incurables, la colonie

n'étant pas à proprement parler un, instrument de traite-

ment.-Lorsque ces malades viennent à s'agiter, on les réin-

, tègre dans un asile ordinaire, dit fermé, et la menace seule

de cette réintégration a souvent suffi à les calmer.

Ne pourrait-on transformer de même en colons, dans

quelqu'une de nos lointaines possessions, les aliénés dange-

reux ? Loin de la métropole, l'idée de l'évasion cesserait vite

de les hanter; ils pourraient accomplir la, sous la surveil-

lance de gardiens spéciaux, un travail utile et rémunérateur

et ils jouiraient d'une liberté relative que ne leur donnera

jamais l'asile spécial créé dans la mère-patrie. Un bâtiment

central serait annexé à la colonie, et servirait à la fois d'in-

firmerie et de lieu de refuge temporaire pour les aliénés trop

turbulents -pendant leurs accès» d'agitation. La relégation

étant perpétuelle, la Société recevrait toutes les garanties

d'ordre et de sécurité qu'elle est en droit d'exiger.

Nous disons que la relégation de l'aliéné dangereux doit

être à vie : il est impossible, à notre avis, de l'admettre

autrement. Même si le malade venait à guérir ou du moins .

s'améliorer notablement, nous pensons qu'il devrait rester à

la colonie, où l'on pourrait le séparer de ses compagnons,

lui attribuer une concession de terre à cultiver, etc. ; mais

admettre la possibilité d'un retour, c'est s'exposer à des

revendications passionnées de la part des familles, à des

attaques de journaux, poursuites contre les médecins, etc.,

et surtout à de nouveaux crimes en cas de rechute. Et puis,

la justice ne peut prononcer la relégation que pour un temps

déterminé, soit un nombre donné d'années, soit la vie

entière; elle ne peut condamner un malade à l'asile spécial

jusqu'à sa guérison, ce terme n'ayant en définitive qu'une

valeur conventionnelle.

460 asiles d'aliénés.

C'est précisément en raison de toutes ces considérations

que la construction de l'asile spécial sur sol français est

grosse de périls. On n'a déjà que trop de tendance dans le

public à considérer les asiles actuels comme des bastilles

modernes, malgré tous les progrès réalisés dans l'hospitali-

sation des aliénés : que dira-t-on de l'asile spécial ? Réflé-

chissons-y bien : l'établissement dé maisons de ce genre

dans notre pays de franche liberté soulève de bien sérieuses

objections, et nous craignons que nos collègues qui font

cette proposition m'aient pas suffisamment envisagé les

dangers d'ordre moral qu'elle présente. '

Pour résumer nos idées, nous conclurons :

, I. Le maintien dans les asiles ordinaires des aliénés dan-

gereux est inadmissible. C'est un élément de trouble qui ·

apporte une réelle entrave au bon fonctionnement de ces

établissements et à la cure des malheureux qui doivent y

être traités. ,

II. L'asile spécial s'impose, à condition qu'on y place ceux

des aliénés criminels qui sont restés dangereux et ne parais-

sent point curables après un temps suffisant d'observation;

et aussi les aliénés non criminels, mais réellement vicieux

et intraitables, jugés dangereux par le médecin d'asile-

hôpital et susceptibles de devenir criminels, à coup sûr inso-

ciables. t

III. L'établissement de ces asiles spéciaux dans la métro-

pole est peu pratique et soulève une foule d'objections.

IV. La relégation à vie des aliénés dangereux est la solu-

tion la plus acceptable; elle sera prononcée par un tribunal

après enquête.

V. L'asile spécial n'a de raison d'être qu'à condition

d'être annexé à une colonie d'aliénés criminels; ces malades

en effet ont droit dans la mesure du possible à bénéficier des

'progrès réalisés dans le régime des aliénés incurables.

Les Archives de Neurologie sont ouvertes à toutes les opinions

scientifiques. Aussi n'avons-nous pas hésité à donner l'hospitalité

au très intéressant travail de M. le Dr Bourdin, tout en faisant des

réserves expresses sur la création d'asiles spéciaux pour les alié-

nés dits criminels et sur la rélégation. 13.

CLINIQUE NERVEUSE.

Imbécillité; hémiplégie gauche; épilepsie; état de

mal mort; atrophie considérable de l'hémisphère

cérébral droit. 1

Par BOURNEVILLE ET Reine MAUGERET

Sommuhe. Père et sa famille, rien de particulier. Petite cou-

sine, hémiplégie gauche congénitale. Mère, rien. Grand-père

paternel, mort de tuberculose ( ? ). Oncle et tante maternels, excès de

boisson. Attire tante, crises de nerfs. Autre tante, intelligence

médiocre, cataracte. - Cousine germaine, épileptique. Pas de

consanguinité- Egaille d'âge.

Conception, grossesse, accouchement, naissance, rien de particu-

lier .

Première dent à huit mois; dentition complète à deux ans et

demi. Début de la marche, de la parole, de la propreté ci dix

mois. Etat de mal convulsif à onze mois, pendant trois jours :

prédominance des convulsions à gauche : Hémiplégie gauche con-

sécutiue et arrêt de l'intelligence. Suppressio/i de la marche

qui ne l'evient qu'a cinq ans. Coqueluche à quatre ans. Début

de l'épilepsie à deux ans et demi; accès sériels.

Etat du malade à Ventrée : Hémiplégie gauche, atrophie et con-

fracture. - Marche des accès. Etal de mal, élévation progressive

de la température : mort. Température et poids après décès.

lrozsce. Asymétrie de la base du ci-dize : rétrécissement des

fosses à drode; épaississement notable du frontal et du pariétal

droits. - Atrophie considérable de l'hémisphère cérébral droit;

des nerfs et des artères de la base de l'encéphale; Dégénéra-

tions secondaires.

Persistance du thymus. Tubercules cicatrisés. Ilypertro-

phie du cceur. Ilydatides des testicules.

Ham... (Jean-Marie), né le 18 août 1886 à Milhac de Nontrou

(Dordogne), est entré à 131célre le-13 mars 1903, et y est décédé le

23 octobre 1903.

462 recueil DE faits.

Antécédents. (Renseignements fournis par son père et par sa tante

maternelle). Père, cinquante-deux ans, terrassier, exempté du ser-

vice militaire par un frère sous les drapeaux; il n'a eu ni convul-

sions, ni chorée, ni fièvre typhoïde, ni rhumatismes, ni derma-

toses, ni syphilis. Il a fait, avant son mariage, quelques excès de

boisson, mais est actuellement très sobre, ne fume pas, est de

caractère doux, n'a pas de migraines. Son père, potier, mort il

soixante-sept ans de pneumonie, était sobre. Sa mère, morte à

soixante-dix-sept ans de vieillesse, ni démente, ni paralytique,

était sobre. Grands-parents paternels sobres, morts, ni déments,

ni paralysés, le grand-père à quatre-vingt-dix-sept ans, la grand

mère à soixante-dix. Grand-pare7tls maternels, morts, le grand

père à soixante-dix ans, la grand'mère à soixante-huit; pas de

détails sur eux. Une tante paternelle, morte on ne sait de quoi,

aurait eu deux enfants bien portants. Deux oncles et une tante ma-

lernels, décédés/de maladie inconnue, n'auraient pas eu d'attaques.

Deux frères et une scc2cr, bien portants, sobres, n'ont pas eu de con-

vulsions ; leurs enfants, six garçons et deux filles, sont en bonne

santé et n'ont pas eu de convulsions. Une cousine au second degré,

du côté maternel, est venue au monde paralysée du côté gauche;

elle a beaucoup de peine à marcher, mais ne serait pas arriérée et

n'aurait pas d'accès. Dans le reste de la famille, rien autre à signa-

ler.

MÈRE, morte à quarante-cinq ans. il y,a un an, de « chlorose »,

elle toussait beaucoup, avait beaucoup maigri, était jaune pâle,

avait eu une perte un mois avant sa mort; elle n'avait eu ni con-

vulsions, ni fièvre typhoïde, ni rhumatismes, ni dermatoses, ni

syphilis; elle était très sobre, d'un caractère très doux, et n'avait

pas de migraines. Son père est mort à quarante-sept ans, de tuber-

culose suivant son gendre, d'un cancer « dans le côté gauche » suri-

vant sa fille; on ne croit pas qu'il fut buveur. Sa mère, âgée de

soixante-treize ans, est bien portante, sauf un affaiblissement de

la vue. Pas de renseignements sur les grands-parents paternels et

maternels. Pas d'oncles et tantes ni paternels ni maternels. Trois

frères, dont l'un fait de nombreux excès de boisson, les deux autres

sont mariés et comme leurs enfants sont bien portants. Quatre

sce7crs : l'une mariée, sans enfants, est morte usée par la bois-

son ; les trois autres sont bien portantes, sobres, et deux d'entre

elles ont des enfants également sains; de ces trois soeurs vivantes,

l'une aurait eu des crises de nerfs mal déterminées, dans lesquelles

elle ne perdait pas connaissance; une autre, celle qui donne une

partie de ces renseignements, est calme, d'une intelligence mé-

diocre, parait avoir une cataracte de la première enfance, a eu, de

dix à treize ans des fièvres intermittentes dans son pays (près de

Lannion), qu'elle a quitté à dix-neuf ans, elle a quatre enfants bien

imbécillité, hémiplégie gauche, épilepsie. MAL mort. 463

portants. Huit neveux et deux nièces en bonne santé; une nièce de

dix-sept ans, épileptique. Dans le reste de la famille, rien à signa-

ler d'anormal. Pas d'autre épileptique.

Pas de consanguinité. Père et mère, tous deux des Côtes-du-

Nord, mais de communes différentes. Égalité d'âge.

Quatre enfants : 1° garçon mort du croup à un an, pas de con-

vulsions ; 2° garçon, dix-huit ans. pas de convulsions, bien portant,

sert les maçons; 3° le malade; 4° fille, neuf ans, pas de convulsions.

Le malade. - Rien de particulier à la conception. Rien non plus

à signaler pendant la grossesse, ni traumatismes, ni ennuis, ni

troubles morbides d'aucune sorte, ni maladies infectieuses. Parez

miers mouvements du foetus à quatre mois et demi. Accouchement

à terme naturel, parle sommet; durée du travail, six heures; pas

de chloroforme; quantité des eaux de l'amnios normale. Pas d'as-

phyxie à la naissance, pas de circulaire autour du cou. L'enfant

semblait bien portant et pesait cinq livres et demie; ses premiers

cris ont été naturels. Allaitement au sein par la mère; sevrage à

deux ans. Première dent à huit mois. Dentition complète à deux

ans et demi. Début de la parole, de la marche et de la propreté à

dix mois. Pas de renseignements sur la date de la fermeture des

' fontanelles.

A onze mois, l'enfant, qui jusque-là était absolument normal, eut

des convulsions. Il resta trois jours sans connaissance, « il y avait

des moments où il était raide comme un bout de bois » ; pas de

détails sur les secousses cloniques, mais les convulsions Précloml-

nuient du côté gauche; les yeux n'auraient pas été tournés; il y eut

des évacuations involontaires. Après ces trois jours de convulsions,

l'enfant resta paralysé du côté gauche; c'est quatre à cinq jours

après ( ? ) que l'on constata la raideur du bras et de la jambe; le

pied n'aurait jamais été tourné.

Auparavant, IL.. était très fort, et le père affirme qu'il marchait

seul depuis une dizaine de jours : à partir de ce moment, il ce<sa

de marcher pour ne plus remarcher qu'à cinq ans. Avant les convul-

sions, le père répète que son enfant était intelligent, prononçait

quelques mots tels que papa, maman, riait, s'amusait, était cares-

sant ; après les convulsions, il perdit les quelques mots qu'il pronon-

çait, il ne jouait plus et paraissait triste. Son sommeil resta bon..

On ne sait à quelle cause attribuer ces convulsions. Il n'y en aurait,

d'ailleurs, jamais eu d'autres.

Vers deux ans et demi, apparurent des accès épileptiques. Ces

accès survenaient par séries, surtout au moment des changements

de température ; d'autres fois, trois mois s'écoulaient sans qu'il

s'en produisit. Le maximum des accès parait avoir été de six en

464 RECUEIL DE faits.

vingt-quatre heures. Mais le père peut mal préciser la marche de

la maladie. Il semble cependant qu'avec l'âge les accès soient deve-

nus moins fréquents. Ils étaient aussi bien nocturnes que diurnes.

Aucun renseignement sur les accès nocturnes. En ce qui concerne

les accès diurnes, pas d'aura, pas de cri; l'enfant ne tombait pas,

mais s'appuyait seulement sur ce qui se trouvait à sa portée. ou bien

s'asseyait. Le côté droit restait tout à fait indemne. Du côté gauche,

il y avait un tremblement très prononcé du membre inférieur; il

s'agit, d'après ce que montre le père, de trépidation avec frappe-

ment du talon sur le sol; le bras ne tremblait pas. A la fin de la

crise qui durait environ deux minutes, il y avait deux ou trois

secousses cloniques, à amplitude assez large, dans le bras gauche,

mais aucune dans la jambe gauche. Aucune modification du côté

droit. Aucune non plus à la face, pas de congestion, pas de dévia-

tion des yeux. Un peu de bave filante. Ni miction, ni défécation

involontaires. A la fin de l'accès, l'enfant parfois « rigolait », sou-

riait, d'autres fois avait quelques larmes ; mais aussitôt la crise

passée, il redevenait tel qu'auparavant.

Le caractère de l'enfant est très doux. Pas d'accès de colère. Pas

de mauvais instincts, vol, gourmandise, salacité, pyromanie, clas-

tomanie. Pas d'onanisme. Pas de turbulence. Les fonctions diges-

tives sont normales, mais l'enfant bave en mangeant; pas de cons-

tipation ni de diarrhée, ni rumination, ni gâtisme. Pas de vers

intestinaux. Pas de bronchite ni d'hémoptysie. La sensibilité géné-

rale est normale. Au point de vue sensoriel, l'enfant verrait moins

bien de l'oeil gauche; mais aucune différence en ce qui concerne

l'odorat ni l'ouïe. Jamais d'hallucinations ni de folie. Les senti-

ments affectifs sont développés : l'enfant est obligeant, et aime

bien son père et ses frères et soeurs. Il n'est- pas impressionnable.

Pas de renseignements sur des vertiges possibles. 11 ne se plaint

jamais de la tète. Ni grincements de dents, ni grimaces, ni tics.

Le sommeil est bon, sans rêves, ni cauchemars, ni accès de cris;

pas d'attaques de sommeil, pas de somnambulisme. Très peu de

mémoire, pas de raisonnement. L'enfant est allé à l'école de sept à

quatorze ans. il n'apprenait rien, mais on le gardait, parce que ses

crises n'attiraient pas l'attention : il n'y est plus allé et est resté

seul à la chambre depuis la mort de sa mère (il y a un an) « parce

qu'il est trop vieux »; il ne sait ni lire ni écrire.1 Aucune aptitude

particulière. Il ressemble à son père physiquement, et à sa mère

psychiquement. Pas de renseignements sur les traitements suivis;

sa mère le conduisait au dispensaire Furtado-Heine et lui donnait

les médicaments délivrés. Aucun traitement depuis trois ans. Une

seule maladie infectieuse, la coqueluche à quatre ans. Pas d'acci-

dents scrofuleux, ni de rachitisme. Aucun traumatisme céphalique

ou autre. -

IMBÉCILLITÉ, HÉMIPLÉGIE GAUCHE, ÉPILEPSIE. 4G5

Température ci l'entrée (t3-18 mars). '

466 RECUEIL DE FAITS.

lantes. Joues régulières, légèrement rosées. Bouche assez grande,

horizontale. Lèvres et langue peu épaisses. GoÛt normal. Voûte pa-

latine profonde, légèrement ogiyale. Luette et pharynx normaux ;

amygdales peu volumineuses; pas de végétations adénoïdes. Pro-

gnathisme du maxillaire-supérieur avec les dents très serrées et

quelques caries; au maxillaire inférieur, rien de particulier, quel-

ques caries. Mastication normale. Menton rond, sur le même plan

que le maxillaire supérieur. Oreilles normalement implantées, un

peu écartées du crâne ; hélix normal, assez bien ourlé, léger tuber-

cule de Darwin; anthélix, tragus et antitragus normaux; lobule

non adhérent. Ouïe bonne. ,

Cois : circonférence, 29 centimètres. Corps thyroïde normal.

Membres supérieurs. Le membre supérieur gauche est atrophié,

les masses musculaires ont presque disparu. Il est cyanose et froid,

surtout au niveau de l'extrémité. Un léger duvet le recouvre. Le

bras est collé au tronc; l'avant-bras fléchi sur le bras angle droit,

et en pronation ; la main légèrement fermée, le pouce en dedans.

Le membre entier présente une contracture presque invincible ; les

mouvements spontanés y sont trop insuffisants pour permettre à

l'enfant de s'en servir utilement. La sensibilité y est diminuée au

tact, à la température, à la douleur. Pas d'hémichorée, ni d'hémi-

athétose. Sur les mains, les mêmes taches que sur le visage. -

Le membre supérieur droit est normal.

Membres inférieurs . - Le membre inférieur gauche est atrophié

comme le supérieur, aussi bien dans sa longueur que dans son

volume. Un léger duvet le recouvre de même. La cuisse est en

extension sur le bassin, la jambe en extension sur la cuisse, le

pied en extension sur la jambe. Le membre entier est paralysé et

en état de contracture. La sensibilité y est diminuée au tact, à la

température, à la douleur.- Réflexe rotulien exagéré; trépidation

spinale. Réflexe de Babinski en extension. La marche se fait pres-

que en équinisme, le talon touchant à peine la terre. L'enfant couit

rarement, et le saut lui est difficile (Fig. 14).

Thorax régulier. Respiration costo-abdominale. Rien d'anormal

à la percussion et à l'auscultation des poumons ; de même qu'à

celles du coeur. Pouls plein et vibrant. Abdomen : rien d'anormal

à la palpation et à la percussion du foie, de la rate, des fosses

iliaques. Les deux côtés du tronc sont à peu près semblables.

Organes génitaux et puberté. La lèvre supérieure, la lèvre in-

férieure, les joues, le menton, sont glabres; dans les aisselles,

quelques poils roux : thorax sur les deux faces, ventre et fesses,

glabres ; sur le pénil, quelques poils roux frisés; verge, longueur

9 cm. 5, circonférence 8 cm. 5 ; bourses normales ; testicules, du

volume d'une noix, le gauche est plus petit ; périnée et anus, gla-

bres ; les membres supérieur et inférieur droits, glabres; les mem-

bres supérieur et inférieur gauches, recouuerts d'un léger duvet.

IMBÉCILLITÉ, HÉMIPLÉGIE GAUCHE, ÉPILEPSIE. 467

Au point de vue fonctionnel, peu de chose à signaler. Les fonc-

tions digestives s'accomplissent bien ; l'enfant a bon appétit, il pré-

fère le lait au vin, digère bien, a des selles régulières mais avec

tendance à la constipation ; ne gâte jamais. La respiration est

normale. La sensibilité générale est diminuée du côté gauche.

Intelligence très peu développée. Parole naturelle, mais l'enfant

ne fait que répondre aux questions qui lui' sont posées, et cela

toujours à voix basse.

Poids à l'entrée, 38 kilog. 600. Taille, 9"'48. Les urines ne

contiennent ni sucre, ni albumine.

^Traitement : hydrothérapie ; élixir polybromuré, de 1 à 3 cuille-

rées ; école.

Fig. 14. - Ham... en mars 1903.

468 RECUEIL DE FAITS.

Mars. Ni accès ni vertige. Avril : un vertige. Mai : ni

accès ni vertige.

Juin. - Un accès, un vertige. 12, juin, l'enfant est revacciné avec

succès. Le caractère de l'enfant est sombre, doux et timide; il se

borne à répondre quand on lui parle, mais jamais n'entame la

conversation de lui-même, et parle toujours à voix basse. Il n'est

pas du tout affectueux, ni avec les autres ni avec les infirmiers ;

il est même indifférent pour tout le monde. Il serait un peu sour-

nois. Il se laisse guider avec docilité et n'est pas grossier. Il s'est

habitué facilement dans le service, et on ne l'a jamais vu pleurer;

mais il ne rit ou sourit que rarement, rien ne parait le distraire.

Il procède lui-même à tous les soins de sa toilette, bien qu'avec un

peu de maladresse et de nonchalance. Il n'a ni tics ni manies.

Son sommeil est régulier, sans cauchemars ni hallucinations. Lors

de ses accès, il dit avoir un peu mal à la tête, mais seulement s'il

est interrogé, car il ne se plaint jamais. Lors de son entrée, il a

été placé dans la troisième classe. Eu ce qui concerne la lecture, il

a été mis à la deuxième partie du syllabaire Regimbeau, phrases

de lecture courante, bonne articulation. Ecriture mal assurée, un

peu tremblée. En calcul, il ne fait que l'addition, lit et écrit des

nombres comprenant des centaines. Aucune notion d'histoire ni

de géographie. Connaissances usuelles peu développées : il a quel-

ques notions sur les couleurs, sur les animaux les plus communs,

sur les métiers, sur les légumes et quelques céréales. Depuis son

entrée, il a fait quelques progrès; il est docile et attentif, fait

preuve de beaucoup de bonne volonté et s'applique de son mieux.

Sa tenue est bonne, son caractère bon et serviable, il ne taquine

jamais ses camarades :

Juillet.- Deux accès, deux vertiges. Août - Un accès, pas

de vertige. Septembre : Ni accès, ni vertige.

Octobre. Les accès reparaissent et deviennent, à partir du 18,

plus fréquents qu'ils n'ont jamais été ils se produisent surtout la

nuit. On en compte 27 du 14octobre au 23..

Le 23, l'enfant qui en a eu plusieurs dans son dortoir, est trans-

féré à l'infirmerie, à 7 heures et demie du matin. Sa température

à 8 heures du matin est de 37°,7. A 9 heures, un accès, qui dure

environ deux minutes. De 9 heures à 2 heures de l'après-midi, ni

accès ni vertige ; l'enfant dort, de 10 heures à midi, la tempéra-

ture à ce moment est de 38° ; aucun malaise apparent, mais l'en-

fant, interrogé, accuse un léger mal de tête. A plusieurs reprises,

lotions vinaigrées et sinapismes. Vers 2 heures de l'après-midi,

nouvel accès, qui est le début d'un état de mal : 7 accès se succè-

dent, à intervalle de dix minutes ou un quart d'heure. Lors du

premier, la température est de 37°,G au moment du ronflement,

de 37°,9, un quart d'heure après, de 37°8 deux heures après.

L'enfant sent venir les crises : « Cela va me reprendre, dit-il, les

IMBÉCILLITÉ, HÉMIPLÉGIE. ÉTAT DE MAL ÉPILEPTIQUE. 469

doigts me piquent », et aussitôt, il est pris d'un tremblement géné-

ral, les secousses sont plus fortes du côté gauche, la bouche est légè-

rement convulsée, sans déviation accusée ni à droite ni à gauche,

le nez est pincé, les paupières battent vivement, les yeux sont

demi-ouverts, non injectés, les pupilles sont fortement dilatées,

surtout la droite, la face est congestionnée. Presqu'aussitôt l'ac-

cès terminé, l'enfant pâlit. Pendant les accès, il conserve son

entière connaissance, interrogé à plusieurs reprises, il répond, bien

qu'avec difficulté à cause des secousses ; on lui demande s'il

souffre, il répond : « Oui, un peu, j'étouffe et j'ai mal à la tête. »

Lors de l'approche d'un accès. il dit encore : « Je voudrais bien

m'empêcher de trembler de la sorte, mais je ne peux pas me rete-

nir ». Les 7 accès successifs sont semblables, et se produisent à

environ dix minutes d'intervalle; ni bave, ni mousse, pas d'évacua-

tion involontaire d'urine ou de matière ni pendant ni après. Tempé-

rature prise lors d'un accès : au moment du ronflement, 37°,6 ;

cinq minutes après l'accès, 38°,2 ; un quart d'heure après l'accès,

38°,5. Traitement : lotions vinaigrées, sinapismes, bain sinapisé,

lavements purgatifs, une cuillerée d'élixir polybromuré, inhala-

tions de nitrite d'amyle. Un peu après 5 heures, huitième accès ;

subitement, l'enfant se congestionne, le cou et les oreilles sont

d'un rouge pourpre, la figure boursouflée, les yeux légèrement

injectés, les lèvres noirâtres; mêmes secousses des membres et

même battements des paupières que dans les accès précédents, sans

non plus de morsure de la langue, ni de bave, ni mousse ; mais

cette fois un fort bruit de déglutition, et une évacuation abondante

succédant à un' second lavement, le premier n'avait pas agi.

L'accès dure deux minutes environ. Le malade se plaint fortement

à trois ou quatre reprises, mais cette fois il avait perdu connais-

sance. Brusquement, le visage pâlit, les membres s'allongent, et

l'enfant rend le dernier soupir à 5 h. 20 du soir.

470 RECUEIL DE FAITS.

Tableau des accès et des vertiges.

ÉTAT DE MAL, MORT. 471 I

ques dizièmes de degré sous l'influence de l'accès (Voir pour com-

paraison le tableau de la T. à l'entrée, p. 465).

Autopsie, faite le 25 octobre 1903 à 10 heures du matin, soit qua-

rante-une heures après décès.

Cou. = Persistance du thymus (37 grammes). Corps thyroïde,

14 grammes.

Thorax. Poumons fortement congestionnés; le droit présente

des cicatrices de tubercules, il n'en existe pas à gauche.

C031l1' énorme (250 grammes), surchargé de graisse. Pas de per-

sistance du trou de Botal. Pas de lésions valvulaires. Dilatation

assez sensible de l'aorte.

Abdomen. - Rien de particulier à l'estomac, ni à l'intestin, ni à

l'appendice, lequel mesures 12 centimètres de longueur. Rien non

plus au pancréas ni à la rate. Foie volumineux et très congestionné;

la vésicule biliaire ne présente rien de spécial et ne contient pas

de calculs. Reins se décortiquant facilement et n'offrant pas de

lésions. Rien de particulier aux capsules surrénales ni aux organes

minaires. Le testicule gauche présente, sur l'épididyme, une hyda-

tide pédiculée, dont le pédicule mesure presque un centimètre, et

à son pôle antérieur, une hydatide sessile. Sur le testicule droit,

même disposition, mais le pédicule est moins long.

Tète. Cuir chevelu assez épais, un peu congestionné. Crâne :

dur, épais, très épais même dans sa moitié droite, correspondant

au foyer cérébral (le frontal droit mesure 9 millimètres, le pariétal

6 millimètres) ; la moitié gauche est notablement moins épaisse (le

frontal gauche mesure 3 millimètres, le pariétal 3 millimètres). La

moitié droite de l'occipital participe à cette hypertrophie osseuse

(1-"ig. 15).

Il n'y a pas de plaques transparentes sur la moitié droite, hyper-

trophiée du crâne, tandis qu'il en existe de nombreuses-sur la

moitié gauche. Le frontal, dans toute sa moitié droite et la partie

voisine du frontal gauche (légèrement hypertrophiée) ainsi que le

pariétal et l'occipital droits sont gras et d'un gris violacé, indice

d'nne congestion intense. La suture coronale et les deux ou trois

centimètres antérieurs de la suture interpariétale sont peu dente-

lées, le reste de cette suture et la suture pariéto-occipilale sont

très dentelées.

Extérieurement l'occipital fait une saillie notable sur le pariétal

à gauche, très légère à droite.

Une grande quantité de liquide s'écoule lors de l'enlèvement du

cerveau; une certaine quantité s'écoule encore à l'incision de la

dure-mère. La fosse orbitaire est rétrécie par suite de l'épaisseur

considérable du frontal. Apophyse crista-galli mince, triangulaire,

presque collée contre la fosse orbitaire droite. Apophyses clinoïdes

antérieures effacées, les postérieures au contraire très volumi-

472 RECUEIL DE FAITS.

neuses. Fosse occipitale droite un peu moins longue que la gauche.

Pie-mère légèrement vascularisée sur les deux hémisphères, et

d'une façon générale. Glande pituitaire, un peu grosse et un peu

dure. -

Cerveau. - A l'examen du cerveau, ce qui frappe immédiate-

ment, c'est l'atrophie très considérable de l'hémisphère droit. Nerf

olfactif droit, aplati et gris. Nerf optique droit, et surtout

la bandelette beaucoup plus petit que le gauche (PL. V).

Tubercule mamillaire droit, gris et aplati, trois fois au moins plus

petit que le gauche. Artère communicante droite beaucoup plus petite

que la gauche; il en est de même de la sylvienne, de la cérébrale

Fig. 15. - Crâne de Ham...

SCLÉROSE ATROPHIQUE DE L'HÉMISPHÈRE DROIT. 473

antérieure, de la cérébrale postérieure. Les faces internes des lobes

frontaux sont accolées l'une à l'autre.

Le bulbe et la protubérance sont bien moins larges et moins

bombés à droite qu'à gauche; la pyramide antérieure droite est

tout à fait effacée.

La coupe des pédoncules cérébraux montre que le droit est d'au

moins un quart plus petit que le gauche. L'atrophie porte sur la

largeur et davantage sur la hauteur.

Le cervelet et l'isthme pèsent 137 grammes. L'hémisphère céré-

bel/eux droit (73 gr.) est considérablement plus volumineux que le

gauche atrophié (43 gr.) (l. V, VI).

Voici d'ailleurs leurs dimensions : ... -

474 RECUEIL DE FAITS.

.

très diminuées sans être sclérosées. Tout le lobe temporal est

atteintde sclérose ve1'micellée. En résumé la lésion forme un demi-

cercle, comprenant : 10 le lobe frontal ; 2° le lobe temporel; 3° les

plis pariétaux inférieur et supérieur et le pli courbe, demi-cercle

qui encadre la frontale et la pariétale ascendantes. (PL. VIII et IX).

La Planche VI montre une longue bande noire répondant

à la scissure interhémisphérique : elle tient à l'ABSENCE Du

corps calleux, sur laquelle nous reviendrons.

sclérose atrophique CROISÉE : cerveau ET CERVELET. 475

a. L'affaiblissement de l'intelligence peut être rattaché ici

à l'imbécillité : physionomie peu expressive, air timide, ne

soutenant pas le regard ; peu de'spontanéité ; nonchalance ;

caractère doux, affectivité médiocre, indifférence pour tout le

monde. La volonté est faible, l'enfant se laisse guider avec

docilité. Il sait syllaber mais non lire couramment; il écrit

passablement, fait l'addition, s'habille, se lave, mange seul,

Tous ses actes sont lents partie à cause de son état mental,

partie à cause de sa paralysie. Les notions usuelles sont assez

limitées.

b. L'hémiplégie gauche (fig. 14) est nettement caracté-

risées, au membre supérieur les mouvements spontanés sont

à peu près nuls; la contracture très prononcée, dans la

flexion pour le coude et la main, s'oppose presqu'absolu-

ment aux mouvements provoqués. La température y est

diminuée. Il en est de même de la sensibilité dans ses

divers modes. Notons enfin l'atrophie ou mieux l'arrêt de

développement du système musculaire bien mis en évidence

par les mensurations et la fig. 15.

Le membre inférieur gauche offre les mêmes particula-

rités. La seule différence consiste en ce que la contracture

s'est faite dans l'extension.

Le pied a l'attitude du pied bot équin. Les mensuretions

montrent que tous le membre est atrophié, à un moindre

degré toutefois que le membre supérieur.

Notons encore la petitesse relative du testicule gauche et

la présenced'un duvet assez abondant sur les membres du

côté paralysé, alors que le côté sain estglabre, particularités

qui se rencontrent fréquemment, mais non toujours dans

l'hémiplégie cérébrale infantile.

c. L'épilepsie a débuté à deux ans et demi. Les accès

chez les hémiplégiques sont quelquefois isolés, le plus sou-

1876, p. 163) ; 7ëH ? )e ? e infantile suivie d'épilepsie partielle : étal de

mal épileptique, mort : foyer ancien intéressant les circonvolutions

frontale et pariétale ascendantes et le lobe pariétal (Soc. Anatomique,

1876, p. 558) , - Notes cliniques sur l'épilepsie partielle (Icono ! ! 1' pho-

loger. de la Salpêtrière, 1878, t. II; mémoire de 90 pages avee 10 plan-

ches et 2 figures) ; Dans sa thèse intitulée : De l'épilepsie dans l'hé-

miplégie spasmodique' infantile. 1882 (avec 2 pl. et 5 fig.), un de nos

internes, M. Vuillamier, a repris notre description, en l'accompagnant de

16 observations recueillies dans notre service et mises par nous à sa dis-

position : Epilepsie partielle, (Progrès médical. 1879. p. 299. etc.) ;

Voit la collection des Comptes rendus de Bicètre. de 1880 à 1903, passim.

476 RECUEIL DE FAITS.

Hémiplégie. - Mens ! l1'((tions.

ÉTAT DE MAL EPILEPTIQUE, TEMPÉRATURE. 477

mence épileptique, sauf encore si l'hémiplégie est d'origine

méningo-encéphalitique, auquel cas la démence peut se pro-

duire. Les épileptiques hémiplégiques, comme Ham..., sont

sujets à des états de mal épileptique, de même que les épi-

septiques ordinaires, et peuvent y succomber. C'est le cas

de l'enfant dont nous venons

de relater l'histoire. Mais,

fréquemment, quand ils

sont .parvenus à un certain

âge, vingt-cinq, trente ans,

s'ils ont survécu aux états de

mal, on voit les accès s'éloi-

gner et enfin disparaître :

le malade reste avec son

idiotie ou son imbécillité,

ou son arriération mentale

et son hémiplégie. Maintes

fois, tant à la Salpêtrière,

quand nous remplaçions

Deiasiauve qu'à Bicêtre,

lorsqu'il s'agissait de mala-

des de ce genre n'ayant

qu'une arriération intellec-

tuelle ou un faible degré

d'imbécillité, nous avons pu

les faire passer des sections

d'aliénés dans les divisions

de l'hospice comme infir-

mes incurables.

L'état de mal épileptique

n'a offert, ici, que la pre-

mière période ou période

convulsive, composée seulement de 8 accès, ces derniers com-

pliqués d'une cyanose très prononcée et s'est terminé par la

mort en quelques heures. La température n'a monté que jus-

quà39,9 (fg. 16). Souvent elle s'élève à un chiffre supérieur.

D'autres fois, après la période convulsive, après la cessation

des accès, la température s'abaisse jusqu'à la normale (fig. 16),

puis elle se relève plus ou moins vite, monte au delà de 40°

et le malade succombe '(période méningitique) . Enfin, dans

d'autres cas, les accidents méningitiques disparaissent,

Fig. 16. - Tracé de la température

- de l'état de mal de Il ...

478 . RECUEIL DE FAITS.

la température s'abaisse progressivement une seconde fois

et le malade guérit.

III. L'autopsie est du plus haut intérêt.

a. Le crâne, voûte et base, est asymétrique. Sa moitié

droite est moins longue et notablement plus étroite que la

gauche, l'hémisphère cérébral droit extrêmement atro-

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 49

phié ne l'ayant pas provoquée à se développer. Entre cet

hémisphère atrophié et la partie correspondante de la calotte

crânienne, il existait un espace considérable. Cet espace

était comblé, comme il arrive en pareille circonstance et

comme nous en avons rapporté maints exemples : 1° par une

hypertrophie des os dont l'épaisseur était le double des os

correspondants du côté gauche (fig. 15) ; elle prédominait au

niveau du frontal ; 2° par une accumulation considérable du

liquidecéphalo-1'Ctchidien. (Voir le numéro de juillet, p. 39,

fig. 8, et PL. 1 et II, un cas analogue : Hypertrophie compen-

satrice des os du crâne répondant à une atrophie considé-

rible des lobes frontaux). ,

Les détails que nous avons donnés dans la relation de

l'autopsie nous dispensent d'insister longuement sur le cer-

veau lui-même, Nous nous contenterons de dire qu'il s'agit

làd'un bel exemple de sclérose atrophiqtteintéressant l'resque

tout l'hémisphère cérébral droit, avec atrophie croisée du

cervelet et compliqué, lésion rare, d'une absence complète du

corps calleux '. '

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE

' PATHOLOGIQUES.

XCI. Gliome volumineux du lobe frontal gauche; destruction

presque complète de la troisième frontale, absence de phéno-

mènes moteurs et d'aphasie, oedème papillaire de l'oeil droit,

vision diminuée; amélioration par la ponction lombaire; par

MM. Charvet etl3..1NCEL. (Lyon médical, n° 15, 10 avril 1904.)

Observation intéressante dans laquelle l'évolution d'un gliome

volumineux du lobe frontal gauche a été presque complètement

latente, en dehors de troubles intellectuels vagues et de phéno-

mènes papillaires. Les auteurs insistent sur l'absence des phéno-

mènes moteurs et d'aphasie, malgré la destruction presque com-

plète de la troi- sième frontale gauche, et surtout sur l'améliora-

tion apportée aux phénomènes visuels par la ponction lombaire.

' Nous en donnons la description il l'explication des Planches.

480 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

Des faits qu'ils rapportent, il semble d-écouler que, dans les cas

où il existe des symptômes nets mais diffus de tumeur cérébrale,

la simple ponction lombaire peut améliorer certains symptômes

(céphalée, diminution de l'acuité visuelle, hébétude) et doit ètie

conseillée. G. C.

XCII. Signe de Kernig et signe de Lasègue. Pathogénie du signe

de Kernig; par M. Piéry. (Lyon médical, n° 17, p. 696.)

Pour M. Piéry, la pathogénie du signe de Kernig peut se fur-

muler ainsi : « Ce signe est dû. à la contracture de défense des

muscles fléchisseurs de la cuisse, qui réagissent à l'élongation

douloureuse des nerfs enflammés de la queue de cheval (branche

d'origine du grand nerf sciatique), élongation engendrée, par la

flexion forcée de la cuisse sur le bassin, la jambe étendue (posi-

tion de Kernig). Deux observations. G. C.

XCIII. Lésions de l'écorce cérébelleuse chez les paralytiques géné-

raux ; par MM. TATY et JEANTY. (Soc. des Se. méd. de Lyon, 8 juif.

1903.)

De l'étude des préparations portant sur huit sujets et compa-

rables entre elles, et de Jeur comparaison avec le cervelet d'un

décapité de vingt-cinq ans, MM. Taty et Jeanty ont constaté les

faits suivants :

L'altération et la raréfaction constante des cellules de Pmkinja,

altération allant de la chromatolyse ordinaire à la destruction totale.

La couche des grains est touchée, mais sa lésion est moins appa-

rente. La couche moléculaire est également atteinte. La méninge

est, en général, peu malade. Les altérations vasculaires sont

rares. On trouve rarement des leucocytes autour des vaisseaux.

.Autour des cellules de Purkinje atteintes et à la place des dis-

parues, on constate la présence des éléments, dont la forme, la

coloration et les dimensions se rapportent au type décrit par

MM. Lannois et Paviot dans leur étude sur l'atrophie du cervelet.

Ces éléments sont disséminés sur une certaine épaisseur. On en

reconnaît dans la couche des grains, dans la zone moléculaire. La

plupart de ces éléments ont le caractère des leucocytes, dans cer-

taines préparations, le processus neuronophagique apparait net-

tement. D'après MM. Taty et Jeanty, le cervelet participe au pro-

cessus morbide, fait déjà signalé par Roecke, mais la réaction

paraît moins intense que dans le cerveau et se montre surtout au

voisinage de la couche dp Purkinje. 11 leur a semblé que les formes

du type tabes moteur présentaient les lésions les plus considé-

rables et les plus caractéristiques. G. C.

REVUE D'ANATOMIE ET DE . PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 481

XCIV. Recherches bactériologiques sur le sang des épileptiques;

par MM. Lwnois et LESfKUR. (Société médicale des Hôpitaux de

Lyon, 3 novembre 1903.)

Des recherches auxquelles se sont livrés les auleurs et qui ont

porté sur 9 malades, ils arrivent aux mêmes conclusions que

Besta en Italie. « Dans le'sang des épileptiques en crise, on ne

trouve aucun élément microbien. » Il n'y.a donc pas lieu de

décrire, comme l'a fait M. Bra, un streptocoque de l'épilepsie.

. G. C. '

XCV. Idiotie microcéphalique ; épilepsie; asymétrie cérébrale ;

microgyrie; ulégyrie; cuir chevelu suggestif d'atavisme; par

J. 1VOLAN (Clinicnl and palholog. Notes, in Journal of Mental

Science, janv. 1904, p 69).

U.C..., âgé de quarante et un ans, admis à l'asile au sortir

d'une maison de refuge, le 4 août 1902, mort d'épilepsie le

22 décembre 1902. On n'a pu avoir aucun renseignement anté-

rieur.

Son apparence physique aurait réjoui le coeur d'un évolution-

niste, car au premier aspect il était un spécimen parfait du

type simien. Sa face arrêtée dans sa croissance était dirigée en

avant; sa figure grossière et ricanante semblait sortir d'entre ses

grandes oreilles difformes. Le crâne un peu en retrait était enve-

loppé dans un cuir chevelu mal ajusté, sur lequel les cheveux noirs

et raides poussaient en crêtes. Il progressait au moyen d'un mou-

vement de côté, conservant son équilibre en étendant ses avant-

bras allongés. Il laissait échapper des sons spasmodiques, sans

signification, semblables à des grognements. Dans ses habitudes

personnelles il était dépravé au plus haut point, montrant un

dédain absolu des besoins de la nature. Son appétit vorace était

manifestement satisfait par l'ingestion d'une matière quelconque.

Il n'y avait rien qui appelât un commentaire spécial dans la nature

de ses accès épileptiques, qui étaient fréquents et sévères. Il était

sourd et muet. Il ne donnait aucun indice de sens sexuel, autre

que de tâtonner gauchement dans le voisinage de ses organes

génitaux. L'examen relatif à ses facultés mentales avait aussi un

résultat presque négatif. On ne pouvait dire qu'il possédât aucune

des facultés intellectuelles sauf au degré le plus rudimentaire.

D'où, en décrivant son aspect on énonçait qu'il était au premier

abord du type simien, mais son intelligence était infiniment

au-dessous de celle possédée par les singes anthropoïdes ordi-

naires. Il prouvait manifestement la forcé de la thèse du Dr Ire-

land, que l'intelligence d'un singe est très différente de celle d'un

idiot, la jauge de l'intelligence simienne ne peut pas être atteinte

Archives, 2' série, t. XVIII. 31

,482 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

simplement en déduisant tant de l'intelligence humaine. H. C...,

était aussi loin au-dessous du niveau intellectuel du singe moyen,

que ce'dernier est inférieur au spécimen hautement développé,

qui fait en ce moment les délices et l'admiration d'un music-hall

de Londres, où dans un costume d'ordonnance, sans tache, il

déguste avec une évidente appréciation et avec distinction le menu

élaboré qui est placé devant lui. H. C..., s'il avait été placé

devant un tel repas, aurait apporté son appétit vorace pour

l'exercer, non sur les mets seuls, mais sur le linge de table, la

verrerie et la coutellerie, et de préférence aurait probablement

essayé ces derniers comme hors-d'oeuvre. Pendant le temps de

son séjour ici, il réclama l'attention entière des serviteurs pour

l'empêcher de manger des ordures et des tripailles, et de mettre

d'autre manière, sans le savoir, sa vie en danger, par des actions

dénuées de sens.

Autopsie. - L'état général des organes n'appelait aucune

remarque spéciale. Dans l'estomac, cependant, on trouva une

, boule de matière ingérée, consistant principalement en grossière

fibre à matelas. Cette masse, qui reproduisait la forme de l'esto-

mac, montrant nettement une grande et une petite courbures,

pesait 10 onces. Elle était complètement libre de toute attache

avec les parois du viscère, et sa présence daus son intérieur ne

semblait pas avoir donné naissance à aucun état inflammatoire,

bien qu'elle dût y avoir été de longs mois, car le malade n'avait

pas eu d'occasion de se procurer les fibres à l'asile (cette masse

a été présentée) (Egagropile).

Le cuir chevelu, comme il a été déjà indiqué, était anormal, assez

flottant sur le crâne ; les cheveux, arrangés en crêtes hérissées cou-

rant dans la direction sagittale, arrangement lui donnant l'aspect

observé dans quelques carnivores. Une partie du cuir chevelu est

montrée (voyez planche I, fig. 1), et aussi des préparations micros-

copiques de ce cuir chevelu; et l'examen de l'un et des autres tend

à confirmer la théorie qui considère cet état comme le résultat

possible d'un développement rétrograde, plutôt que d'un simple

« cuir chevelu hypertrophié », c'est-à-dire un cuir chevelu qui

avait été destiné à couvrir un crâne de grosseur normale. J'attire

une attention spéciale sur la coupe montrant la section, qui a

été préparée par mon dernier assistant, le Dr J.-II. Thompson,

lequel rencontra beaucoup de difficulté pour faire la préparation,

à cause de son extrême dureté. Son effort, cependant, a été entiè-

rement couronné de succès, et a le mérite de la nouveauté ; car le

' Consul, à l'Hippodrome.

; L'hypertrophie n'était pas de l'énorme variété signalée par les

1),- Me Dowall et Cowan. Dans leurs cas, le cuir chevelu était converti en

de grands plis rugueux.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 483

D° 13obertson déclare qu'il n'a été fait, autant qu'il le sache,

aucune section de cuirs chevelus anormaux.

Le crâne à première vue ne présentait pas d'autre anomalie

marquée que son petit volume et son asymétrie exagérée, le côté

gauche étant plus petit que le droit. La synostose était complète.

Un examen attentif révélait, en outre des caractères ordinaires

d'un crâne microcéphale (os frontal étroit et allant en pente,

fosses temporales profondes, fosses ethmoidades étroites, condyles

occipitaux saillants, sinus frontaux larges, os de la face progna-

thiques, arcade dentaire étroite), de petits espaces correspon-

dant aux éminences frontales, montrant de nombreuses dépres-

sions qui causaient un aspect poreux. A cet espace de chaque côté

la dure-mère était quelque peu adhérente; de la même manière

l'arachnoïde était adhérente à la dure-mère par un arrangement

cribriforme ; une production villeuse la couvrait, dans une étendue

correspondant à l'emplacement des aires osseuses poreuses.

Cerveau. Vu en place, l'asymétrie des hémisphères céré-

braux était tout de suite apparente. Une disproportion anormale

était aussi évidente entre le cerveau et le cervelet, le dernier étant

gros à l'excès par rapport au premier. Enlevé, l'organe pesait

seulement 20 onces.

Les circonvolutions de l'hémisphère gauche présentaient une

apparence vermiforme ; les sillons béants et éloignés ; les circon-

volutions semblaient être contournées en nombreux petits cercles,

chacune étant diminuée en volume, si bien qu'il y avait l'état

complexe de la microgyrie et de l'ulégyrie ; les érosions à la sur-

face et les indurations cicatricielles qui caractérisaient la der-

nière, étant bien marquées (voir planche I, fig. 2).

Scissures. Les scissures de Sylvius et de Rolando étaient

normales de direction et, relativement, dans leurs dimensions,

mais dans chaque hémisphère la scissure rolandique commençait

en un point postérieur au milieu de la ligne de la scissure longi-

tudinale, d'où le résultat que les lobes frontaux étaient anormale-

ment grands. Environ 3/8 seulement de la scissure pariéto-occi-

pitale, étaient visibles sur la surface externe.

Hémisphère gauche. Lobe frontal : circonvolution frontale

ascendante assez bien développée ; circonvolutions supérieure et

moyenne, normales de position mais mal formées ; circonvolution

inférieure très atrophiée, les sillons par conséquent baillanls et

très irréguliers. Lobe pariétal : la circonvolution ascendante,

comme la frontale ascendante, assez bien développée, mais à

l'extrémité supérieure montrant de la minceur. Le lobule pariétal

supérieur rétréci, atrophié, et irrégulier ; le premier sillon annexé,

bien marqué, comme l'étaient aussi les deux divisions du lobule

pariétal inférieur. Lobe occipital : circonvolutions petites et irrégu-

lières. A cause de l'atrophie et du retrait des circonvolutions dans

484 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

la partie antérieure du lobe il y avait une constriction marquée qui

rejetait en saillie la portion occipitale. Lobe temporo-sphénoïdal

gauche : circonvolution supérieure très réduite, avec béance résul-

tante des sillons ; circonvolutions inférieure et moyenne au-des-

sous du développement normal.

Hémisphère DROIT. Lobe frontal : circonvolution ascendante

bien marquée, tandis que le reste du lobe était à peu près nette-

ment différencié, (par les'sillons pré-rolandique, frontal supérieur

et frontal inférieur), en les 3 circonvolutions frontales, qui toutes

étaient bien développées. Lobe pariétal droit : circonvolutions

et sillons normaux dans leur position, et, en tant que comparés

avec la région correspondante du côté gauche, bien développés.

Lobe occipital droit : circonvolution moyenne particulièrement

bien développée.'Toutes.les divisions de ce lobe montraient leurs

rapports avec les lobes pariétal et temporo-sphénoïdal, très claire-

ment, par les différents sillons annexés.

Remarques. Ce cas d'idiotie congénitale est un excellent spéci-

men des conditions anormales qui donnent naissance à la vraie

microcéphalie, aussi bien qu'à ces changements pathologiques,

auxquels les erreurs du développement dans la structure rendent

particulièrement exposée la fine organisation du tissu cérébral' et

de la fonction cérébrale. Cliniquement, un cas d' « amentia »

primitive essentielle ne peut pas être particulièrement attrayant;

cependant l'examen pathologique de tels cas est fascinant pour

ceux qu'intéresse l'étude du cerveau comme organe de l'esprit. Il

"est satisfaisant de voir que récemment, à la fois chez nous et à

l'étranger, un nouvel intérêt a jeté beaucoup de lumière nouvelle

sur les erreurs fondamentales qui produisent celle-ci et les états

alliés, et si nous ne pouvons pas guérir l'idiodie, nous pouvons

du moins apprendre la leçon de ses maux. Il a été dit avec vérité,

quoique « pas » par un Irlandais, « que la grande majorité des

imbéciles et des idiots vivant actuellement devraient avoir été trai-

tées il y a trois générations ». Nous devons être d'accord sur la

vérité de cette observation, et ainsi par une étude plus minutieuse

de ces infortunées créatures qui trouvent leur voie dans nos

asiles,

« Leurs tètes quelquefois si petites, qu'il n'y a pas d'espace pour l'es-

[prit :

.Quelquefois si grandes, qu'il n'y a pas d'esprit pour un tel espace »,

puissions-nous poser les fondements scientifiques de telles mesures

'préventives qui puissent tendre à diminuer le nombre des idiots

et des imbéciles dans trois générations d'ici.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 485

XCVI. Sur un cas de torticolis congénital avec autopsie et examen

histologique du système nerveux; par MM. Gallavardin et Savy.

(Lyon médical. 22 Novembre 1903, p. 767).

Les auteurs relatent une observation : *

Cliniquement. Torticolis congénital très accentué avec hémiatro-

phie cranio-faciale.

Autopsie. Transformation tendineuse, raccourcissement et rétrac-

tion extrême du chef sternal du sterno-cléido-mastoïdien (8 centi-

mètres au lieu de 18 centimètres). Atrophie musculaire simple du

chef claviculaire. Pas d'apparence cicatricielle, pas trace d'héma-

tome ancien, ni d'adhérences inflammatoires périmusculaires.

Examen histologique du système nerveux : Aucune lésion dans

le système nerveux périphérique (filets du spinal, tronc du sympa-

thique cervical, ganglions cervicaux inférieur et supérieur).

Pas de lésion du noyau bulbaire du spinal. Atrophie très marquée

de la corne antérieure de la moelle cervicale supérieure. (Noyau u

cervical du spinal). "

MM. Gallavardin et Savy concluent de cette observation : 1° que

les lésions macroscopiques ou microscopiques qu'ils ont constatées

au niveau du muscle sterno-cléido-mastoïdien dans ce cas de tor-

ticolis congénital ne leur semblent pas en faveur de l'origine mus-

cataire locale (traumatique ou infectieuse), de cette affection;

2- que l'absence de lésions au niveau du système nerveux périphé-

rique (filets du spinal, tronc et ganglions du sympathique cervical)

ne permet pas non plus d'attribuer cette affection à une lésion

névritique; 3° qu'il existe une lésion médullaire « collatérale » du

torticolis congénital, l'atrophie de la corne antérieure de la moelle

cervicale supérieure c'est-à-dire du noyau d'origine du spinal cer-

vical ; 4° que la signification exacte de cette lésion reste encore à

préciser. ' ' ' '

Il est possible qu'il s'agisse d'une lésion médullaire primitive,

tenant sous sa dépendance les altérations musculaires et l'hémia-

trophie cranio-faciale; cette interprétation très vraisemblable,

qu'aucun argument ne permet de rejeter définitivement, ferait du

torticolis congénital l'analogue de la paralysie infantile. Mais il est

possible que cette lésion ait seulement la valeur d'une atrophie

rétrograde consécutive à une malformation ou à une Jésionprimi-

tive du muscle. G. C. -

XCV11. Hémiplégie immédiate consécutive à la ligature des caro-

tides ; par M. BUTTER. (Lyon Médical. 27 décembre 1903,

p. 996). 1 .

M. Beutter publie une observation recueillie dans le service de

M. le professeur Poncet d'un cas d'hémiplégie consécutive à la''

486 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

ligature de la carotide primitive, pendant l'extirpation d'une

tumeur maligne adhérente. Cette observation est intéressante à

deux titres : d'abord parce que l'hémiplégie fut constatée presque

immédiatement après la ligature, contrairement à ce qui eut lieu

dans tous les autres cas publiés ; puis, parce que cette hémiplégie

eut une prédominance marquée pour le membre supérieur.

' Le cas que l'auteur présente autorise à rejeter les théories qui

incriminent la thrombose ou la coagulation; l'hémiplégie s'étant

déclarée immédiatement après la ligature, un caillot n'aurait pas

eu le temps de se former. " -

Doit-on incriminer l'anémie mécanique ou la congestion par

paralysie des vaso-moteurs lésés dans la ligature de la carotide,

ou par la ligature des jugulaires interne et externe droites.

Sans trancher la question l'auteur pense que le début immédiat

et l'amélioration rapide sont eu faveur des deux hypothèses. On

peut admettre, que dans certains cas, le cercle de M'illis est irrégu-

lièrement développé, que les communicantes antérieure et posté-

rieure peuvent être insuffisamment perméables, et que ce n'est que

peu à peu qu'elles se laissent dilater pour suppléer à l'insuffisance

de la circulation dans un territoire donné de la masse encépha-

lique. Ceci expliquerait la guérison graduelle de l'hémiplégie dans

l'observation en-question.

Pour expliquer le second point intéressant, c'est-à-dire la pré-

dominance de la paralysie au membre supérieur, l'auteur pense

que le fait est dû à la sensibilité plus ou moins grande des cellules

nerveuses suivant qu'elles sont préparées à des fonctions plus déli-

cates. Il en serait ainsi pour les centres moteurs du membre supé-

rieur. ' G. C.

XCVIII. Lésions du cervelet dans quelques formes d'aliénation men-

tale ; par BRIDIER (Lyon Médical, 2 janvier 1904, n° 4).

S'appuyant sur de précédentes recherches anatomo-patholo-

giques faites sur les démences, lui permettant de différencier par

les seules lésions histologiques du cerveau, certains types anato-

miques différents rattachables à telle ou telle démence, M. Bridier

a cherché, dans ce nouveau travail à décrire des types anatomiques

différents de lésions cérébelleuses dans les démences paralytiques,

sénile, vésanique. Dans deux cas de démence sénile il a constaté

des proliférations névrogliques abondantes autour dès cellules de

Purkinjé; dans une démence rapide chez une syphilitique il a

trouvé des lésions cellulaires et l'existence d'éléments analogues

aux cellules de Purkinje, mais plus petits et doublant en dessous

la couche normale de ces cellules ; enfin dans une démence à

longue évolution, les altérations morphologiques étaient notables

et allaient jusqu'à la destruction cellulaire.

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 487

- Ces faits semblent de nature à légitimer la nécessité d'un examen

minutieux du cervelet des aliénés, mais sont en trop petit nombre

pour en tirer une conclusion. G. C.

XCIX. Sur la teneur en sucre du liquide Céphalo-rachidien ; par

MM. LANOts et BONDON (Bulletin soc. méd. des Hop. de Lyon. 31 mai

1904, p. 192). ,

De leurs recherches qui portent sur 17 examens de liquide

céphalo-rachidien les auteurs arrivent aux conclusions suivantes :

1° Le corps réducteur qui existe dans le liquide céphalo-rachi-

dien est bien du glycose, il donne avec la phénylliydrazine une

ozazone caractéristique du glycose.

2° La teneur en glycose du liquide céphalo-rachidien varie dans

des limides très étroites; elle est de 0,40 à 0,50 p. 1000.

3° La fixité de ce chiffre, qui est la moitié du taux du glycose du

sang normal, et le tiers de celui du sérum, est un argument en

faveur de l'opinion' qui voit dans le liquide céphalo-rachidien un

liquide de sécrétion et non de transsudation simple. Il est probable

que le sucre joue un rôle dans la nutrition des éléments nerveux

avec lesquels il est en contact.

4° Le taux du sucre peut s'élever dans certaines conditions

pathologiques; dans le diabète les auteurs ont trouvé 1 gr. 22 et

1 gr. 05, soit 2 et 3 fois plus de sucre que dans le liquide céphalo-

rachidien normal. G. Carrier.

C. Acromégalie : Splanchnomégalie ; gros coeur : mort par asys-

tolie (Sans lésion orificielle cardiaque ni néphrite) ; par MM. J.

Paviot et M. Beutter (Bull. Soc. 111éd. des Hôp. de Lyon, 31 mai

1904, p. 198).

L'intérêt de cette observation réside dans les deux points sui-

vants :

1° Gros coeur chez une acromégalique, l'ayant conduite à la mort

dans le syndrome asystolique.

2° Bruits cardio-pulmonaires déterminés par ce gros coeur dans

le parenchyme pulmonaire voisin.

Pour expliquer le premier point, on pourrait admettre dans ce

cas, qu'à un moment donné c'est la disproportion même de l'organe

central de la circulation qui fait apparaître l'asystolie, comme le

gros coeur, quelque soit sa cause, essouffle le porteur et crée une

asystolie transitoire et courte en présence de l'effort. Le coeur acro-

mégale, grandissant lentement mais indéfiniment, arriverait à

créer une asystolie définitive par un mécanisme analogue, mais

qui échappe dans son intensité.

Les auteurs font ce rapprochement sans donner au phénomène

une véritable explication. Ils attirent simplement l'attention sur

488 REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES.

ces deux points : 1° L'acromégalie avec splanchnomégalie peut

conduire à l'asystolie et à la mort, du seul fait d'un gros coeur.

2° Les bruits que ce gros coeur détermine dans le parenchyme

pulmonaire voisin par son volume et par l'augmentation de calibre

parallèle de l'aorte et de la pulmonaire, peuvent arriver à simuler

des bruits de lésions orificielles, mais n'existant point en réalité.

- G. C.

CI. Un cas d'anecéphalie avec amyélie; par BmssAUD'et BRUANUET.

(Nouv. Iconogr. de la Sulpétrière. iN" 3. 1903.)

Description anatomique d'un monstre humain mort-né de sept

mois et demi, présentant des malformations très accentuées des

cavités crânienne et rachidienne, et de plus une hernie ombiii-

cale renfermant une grande quantité des viscères abdominaux.

Capsules surrénales normalement développées. Pas d'adhérences

amniotiques. Les autres parties de l'organisme sont normales. Les

auteurs n'ont rien trouvé qui put éclairer la pathogénie des alté-

rations constatées. R. C.

Cil. Paraplégie cervicale incomplète par tumeur gliomateuse de

la moelle avec pachyméningite néoplasique, par Spillmann et

Hoche. (Nouv. leronogr. de la Salpétrière. N° 3.1903.)

Jeune fille de dix-neuf ans, sans hérédité pathologique. Dou-

leurs débutant à la racine du membre supérieur droit, irradiant

vers l'extrémité. Atrophie progressive des muscles. Complications

de broncho-pneumonie. Mort. A l'autopsie on découvre une tu-

meur volumineuse siégeant au niveau des VIII0 racine cervicale

et Ire dorsale et produisant comme une véritable section graduelle

et progressive de l'axe nerveux. Cette observation, dans laquelle

l'évolution néoplasique ne s'est manifestée que, par un tableau cli-

nique restreint, montre la grande difficulté dû diagnostic des tu-

meurs intramédullaires qui, surtout lorsqu'il survient un état phieg-

riratique intercurrent, peuvent en imposer par la polynévrite infec-

tieuse. R. C.

CIII. Sur une forme rare d'hémimélie radiale intercalaire ; par

KLIPPEL et BADAUD. (Nouv. Iconogr. de la Sulpétulèrc. IV° 4.

1903.)

11 s'agit d'un cas de malformation portant sur deux régions sy-

métriques des membres supérieurs avec atténuation du côté

droit atrophie des phalanges et des métacarpiens avec exten-

sion, aux régions .musculaires et aux vaisseaux correspondants. A

l'occasion de cette observation, les auteurs présentent quelques

remarques critiques tendant à démontrer l'insuffisance des expli-

cations pathogéniques mises en. avant jusqu'à ce jour (hérédité,

REVUE D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE PATHOLOGIQUES. 4890

traumatisme, etc.), et la nécessité de chercher une voie nouvelle

qui puisse conduire à des connaissances positives... mais comme

le reconnaissent les auteurs eux-mêmes cette conclusion n'est pas

une explication. R. C.

CIV. Une observation d'abcès du cerveau ; par IIermonC. Goiidinier

(Amez·icun Journzal o/' Izzsuzzily, I, 03, p. 441-446. 1 planche). S.

CV. Tumeur cérébrale chez une femme de soixante-dix-huit ans T

par J.-D. Madison (Tlie American Journal of Insanity, I, 03,

p. 447-455. 1 planche). S.

CVI. L'écorce motrice; par Clarence-B. FARRAR (The American

Journal of Insanüy, I, 03, p. 477-514). ,

L'article commence par un long historique où l'on peut rele-

ver cette remarque relativement à la délimitation de la zone

motrice que des ressemblances de configuration (sillons par ex.}

sont insuffisantes pour affirmer en anatomie comparée l'identité

fonctionnelle de deux régions. Chezl'homme, la zone motrice serait

avant tout prérolandique. L'étude histologique proprement dite,

comprend ensuite une vingtaine de pages. Simov.

CVII. Une observation de tumeurs adiénales métastatiques dans-

la deuxième frontale et la frontale ascendantes gauches; par

Walter CIIANNIiliG et. Wallace-R. KNOWLTO" (The Ame1"icanJoumat

of Insunily, I, 03, p. 515-525. 3 planches).

Après l'exposé clinique et anatomo-pathologique (la moelle ne

parait pas avoir été examinée) du fait, courte revue bibliogra-

phique. Noter comme signes de tumeur des lobes frontaux : la

raideur de la nuque, la stupeur, etc. SIUOiJ. ,

. 1 -

CVIII. Contribution à l'étude du sang dans la folie maniaque

dégressive; par Yessie-Weston Fisiier (Tlie American Journal or

Insmily, IV. 03, p. 559-381). ' ,

1° Résumé des recherches antérieures.

2" Analyse détaillée de 5 observations personnelles.

3° Conclusions : a) pas de modifications pathognomoniques du

sang dans les phases maniaques de la folie maniaque dépressive ? r

b) l'anémie n'est pas un facteur causal ni même n'accompagne pas

toujours cette psychose ; c) l'hémoglobine et les globules rouges

sont souvent, sinon toujours, accrues pendant un accès d'agita-

tion ; d) un certain degré de leucocytose accompagne presque

constamment l'activité psychomotrice et l'auteur a même tendance

à y voir un effet de celle-ci. D'autre part, un accroissement de

poids accompagne l'amélioration de l'état mental. ' Simon, ',

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

LIV. Sur les Hémispasmes de la face. Hémispasme facial vrai, lié-

mispasme hystérique ; par MM. Lannois et PoROT (Lyon médical

7 lévrier 1904, n° 6).

Dans ce travail, MM. Lannois et Porot ont cherché à différencier

d'iniquement certains spasmes unilatéraux de la face, les uns cio-

niques et intermittents. les autres toniques et permanents. Les

premiers, dont ils rapportent cinq observations sont pour eux de

véritables spasmes présentant les caractères cliniques et l'allure

évolutive d'une affection organique, ils leur donnent le nom dhé-

mispasme facial vrai; les seconds (deux observations), contractures

anciennes ou récentes de la face, étaient des manifestations sur-

venant chez des hystériques en mal de contracture, ils les appel-

lent hémispasme facial hystérique.

L'hémispasme facial vrai se caractérise par les symptômes prin-

cipaux suivants : a) Secousses toujours unilatérales.&) Les secous-

ses n'atteignent que les muscles innervés par le facial.-c) Les

secousses sont toujours cloniques, groupées en séries arrivant par-

fois à la production de véritables accès pouvant aller jusqu'à la

tétanisation du muscle. d) Les secousses échappent à l'influence

de la volonté et persistent souvent pendant le sommeil. -e) Inexpres-

sion de l'hémispasme; c'est-à-dire qu'il ne répond à aucune des

expressions courantes de la physionomie.

La mimique bizarre et complexe de l'hémispasme n'est pas en

rapport avec un geste, une idée ou un sentiment, mais est en rap-

port avec un territoire nerveux périphérique, celui de la VIle paire.

Ces différents symptômes différencient nettement l'hémispasme du

tic. A ces caractères de première importance, s'en ajoutent quel-

ques autres secondaires : Les manifestations auriculaires, 1 héliiis-

pasme coïncide fréquemment avec une diminution de l'ouïe du

même côté, des bourdonnements d'oreille. L'hémispasme facial

vrai ne s'accompagne jamais de douleurs au moment des accès. On

trouve quelquefois une diminution nette de la sensibilité à la piqûre

dans le territoire cutané du trijumeau.

Ces données cliniques permettent d'affirmer le caractère orga-

nique de l'hémispasme facial vrai; il traduit la réaction motrice

du nerf facial. Au point de vue pathogénique, les auteurs tendent

à admettre la théorie reflexe, le centre de réflexion est au niveau

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 491

du bulbe, la voie centrifuge motrice est représentée (par la Vil0

paire, c'est le trijumeau qui représente la voie centripète.

En général, on retrouve en effet dans l'étiologie des malades, de

violentes névralgies faciales ou dentaires, affection ou lésion ayant

intéressé quelques-unes des terminaisons de la V" paire.

Ces affections ont pu produire, à la longue, des lésions dégéné-

ratives du nerf sensitif, et par un processus de névrite ascendante

retentir dans le bulbe sur les noyaux d'origine de la Vile paire.

L'hémispasme facial vrai, non douloureux, ales caractères d'une

manifestation nerveuse organique systématisée. Il est essentielle-

ment différent des manifestations motrices psycho-mentales du tic

et de l'hystérie. Du fait de sa systématisation anatomique, de son

étiologie et de ses caractères cliniques, il touche en certains cas à

l'épilepsie jacksonienne, en d'autres à l'hémispasme douloureux.

Les hémispasmes hystériques sont en général d'un diagnostic fa-

cile ; leur début est assez caractéristique; ils surviennent à la suite

d'une émotion, quelquefois à la suite d'un traumatisme (hystéro-

traumatisme). La recherche des stygmates oriente complètement le

diagnostic. Le seul diagnostic' auquel on puisse songer est la

paralysie faciale suivie de contracture. G. Carrier.

LV. De la forme la plus habituelle des modifications de l'intelli-

gence et du caractère qui peuvent résulter des maladies du nez

et du cerveau; par M. Noyer (Société d'anthropologie de Lyon,

7 février 1903.)

Des troubles psychiques se présentent assez souvent au cours

des maladies du nez ; ils peuvent avoir des formes variées, mais

eu général se rapportent à un type caractérisé, par une légère ob-

nubilation intellectuelle et une incapacité marquée de diriger les

opérations mentalesdont les conséquences sont : L'impossibilité

de saisir rapidement la signification des excitations venues de

l'extérieur ou de l'intérieur. C'est un défaut d'attention, une asym-

bolie passagère; une très grande difficulté à réveiller rapidement

les images de mémoire. L'absence de frein à la cérébration auto-

matique qui déterminera une sorte d'état de rêve. Une sensation

de dépression physique et morale très accentuée. Enfin un état

d'angoisse constant qui, chez l'adulte à l'état de veille, détermine

de l'anxiété et de l'irritabilité, une tendance mélancolique pronon-

cée et, pendant le sommeil, des rêves pénibles et des cauchemars.

Chez l'enfant de l'agitation sans but et des phénomènes moteurs,

chorée, tics, etc., et aussi des peurs nocturnes. G. C.

LVI. La parésie spasmodique des vieillards athéromateux; par

MM. Pic et Bonnamour. (Société médicale des Hôpitaux, 10 fé-

vrier 1903.) .

492 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

MM. Pic et Bonnamour mettent en évidence un type clinique

rarement observé et qui est constitué par une parésie spasmo-

dique naissant insidieusement, progressant sans bruit et évoluant

constamment sans ictus, sans troubles de la sensibilité.

Les malades présentent, en outre presque toujours des signes

centraux ou périphériques d'athérome artériel. C'est pour cette

raison qu'ils désignent ce syndrome clinique sous le nom de

parésie spasmodique des vieillards atheromateux.

A la période d'état, la démarche parêto-spasmodique coïncide

avec le syndrome spasmodique habituel : hypertonie musculaire,

contracture, exagération des réflexes rotuliens, souvent trépida-

tion épileptoïde et clonus de la rotule. Les réflexes cutanés sont

souvent normaux; signe de Babinski inconstant. Pas de troubles

de la sensibilité. Le psychisme est rarement intact, on constate

généralement un affaiblissement intellectuel avec rire et pleurer

spasmodiques, dysarthne. On trouve, en outre constamment des

signes d'athérome. La terminaison a lieu quelquefois par

cachexie progressive, parfois par un ictus intercurrent, enfin,

plus souvent, par une complication intercurrente (pneumonie où

broncho-pneumonie).

A l'autopsie, on constate au cerveau l'existence de lacunes de

désintégration, siégeant, en général, dans les noyaux gris cet-

traux, de préférence dans les noyaux lenticulaires; parfois dans

les cas d'ictus, on trouve de petits foyers de ramollissement cap-

sulaire. Les lésions de la moelle ne sont jamais bien syetérna-

tisées ; elles sont plutôt un peu diffuses dans le cordon latéral et

même dans les faisceaux postérieurs. Ces lésions sont variables

d'étendue et de siège suivant les sujets et suivant la hauteur

d'une même moelle. Sans l'affirmer, les auteurs pensent que ces

lésions sont en connexion avec des altérations vasculaires. Il

s'agit en somme dans la majorité des cas d'une sclérose com-

binée postérô-latérale.

MM. Pic et Bonnamour admettent que leurs observations consti-

tuent en quelque sorte une synthèse de deux ordres de faits, les

uns mis en évidence par Demange en 1885, sous le nom de tabes

spasmodique sénile, où il étudie surtout les lésions médullaires;

les autres mis récemment en lumière par MM. Marie et Ferrand,

qui font jouer un rôle exclusif aux lésions lacunaires et centrales

du cerveau. Ils pensent que le syndrome parésie spasmodique est

fonction de la lésion médullaire et non de la lésion cérébrale.

Les lésions cérébrales, dans leurs observations, tiennent sous leur

dépendance, sinon les phénomènes parétiques, du moins les trou-

bles encéphaliques tels que les vertiges, les ictus, la démence,

les phénomènes pseudo-bulbaires, le rire et le pleurer spasmodi-

ques.

Interprétant ces différents faits, ils croient que chez des vieil-

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 493

lards athéromateux, on peut observer des phénomènes cérébraux z

qui sont directement fonction des troubles circulatoires et des

scléroses médullaires, sous la dépendance des mêmes causes qui

ont produit l'artério-sclérose. Ils comparent ces scléroses médul-

laires autochtones aux diverses scléroses viscérales si fréquentes à

un âge avancé.

Le diagnostic devra être fait avec toutes les paraplégies spas-

modiques d'origine encéphalique ou médullaire ; ces diverses

causes éliminées, on pourra penser, chez un vieillard athéroma-

teux, à cette variété de sclérose polyfasciculaire pseudo-systéma-

tique. ' G. Carrier,

LVII. Surdité verbale par lésion temporale droite; par M. MOL-

lard. (Société nationale de médecine de Lyon, 27 avril 1903.)

Il s'agit d'un malade atteint d'une hémiplégie 'droite présentant

en même temps une aphasie complète, motrice et sensorielle

(surdité verbale).

En présence de pareils symptômes, le diagnostic semblait être :

vaste ramollissement de l'hémisphère gauche intéressant à la fois

les centres moteurs et les centres du langage, particulièrement le

lobe temporal. A l'autopsie, on trouva, en effet, un ramollisse-

ment de l'hémisphère gauche qui expliquait l'hémiplégie droite,

mais dont la localisation ne pouvait donner l'aphasie totale

observée et la surdité verbale. Les lésions trouvées sur l'hémi-

sphère droit, qui consistaient en un ramollissement du lobe tem-

poral droit, des premières et deuxièmes frontales, ainsi que de la

face inférieure du lobe frontal, expliquaient au contraire les

troubles sensoriels. "

L'auteur fait remarquer que ces cas sont. rares, il rappelle

quatre observations publiées, une de Küssmaul, de Touche, de

Koster et une récente de M. Joffroy. Dans ces quatre observa-

tions, les malades étaient des gauchers vrais ou corrigés (obs. de

M. Joffroy). Sans affirmer que son malade soit un gaucher,

M. Mollard met en évidence cette association de lésions tout à

fait exceptionnelle et telle, qu'il est difficile au clinicien de la

soupçonner. G. C.

LVIII. Un cas d'acromégalie avec diabète. - Tumeur du corps

pituitaire; MM. J03SERAND et Bériel. (Société médicale des hôpi-

taux de Lyon. ter décembre 1903).

Il s'agit de l'observation d'une jeune femme de 30 ans, sans

aucun antécédent pathologique, ayant présenté une acrqmégalie

,fruste mais assez typique ne déterminant pas de véritables diffor-

mités et s'accompagnant de diabète évident. La mort est survenue

brusquement en 24 heures avec des accidents imprévus ne rappe-

494 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

lant pas le coma diabétique; (céphalée plus vive, en une nuit appa-

rition d'amblyopie avec paralysie totale des muscles extrinsèques

et intrinsèques des globes et des releveurs de la paupière, pas de

trouble de la respiration, coma terminal.

Al'autopsie la plupart des organes étaient sains; le thymus était

plus visible que normalement. Il y avait une tumeur du corps

pituitaire faisant une saillie hémisphérique au-dessus de la selle

turcique, la loge osseuse etait dilatée et les sinus caverneux refoulés

de chaque côté. La base de l'encéphale était comprimée et la

tumeur y avait déterminé la formation d'une cupule aplatissant

complètement le chiasma des nerfs optiques. La face antérieure de

la protubérance dans sa moitié gauche présentait une petite

dépression hémisphérique régulière due à un petit bourgeon qui

faisait saillie à la face postérieure de la selle turcique.

Les auteurs appellent l'attention sur la coexistence du diabète,

fait signalé par Marie dans un tiers ou même la moitié des cas. -

Ils rappellent les diverses hypothèses données pour expliquer

cette association sans prendre part dans le débat.

Intervention de lésions du pancréas (Dallemaque, Hauseman)

d'une part; trouble de la secrétion interne de l'hypophyse d'autre

part; enfin la théorie de Loeb qui fait jouer le plus grand rôle aux

compressions exercées par la tumeur sur les centres nerveux, en

particulier sur le tuber cinereum qui contiendrait des centres dont

la lésion donne lieu à la glycosurie. G. C.

LIX. Arthropathies et Ostéopathies tabétiques ; par M. DESTOT.

(Société nationale de médecine de Lyon. 14 décembre 1903)

D'après M. Destot on peut décrire deux formes de troubles tro-

phiques tabétiques. Les uns, tout à fait au début, caractérisés par

la régression du squelette primitif et l'ossification irritative des

tissus parostaux; les autres qui se montrent au décours du tabès

et où on ne voit que la résorption du squelette avec membres de

polichinelle. L'auteur insiste sur ce fait que la radiographie permet

de faire le diagnostic à début osseux. G. C.

LX.Deux cas de Chorée chronique : 1° Chorée congénitale molle.-

2° Chorée héréditaire de Huntington; par MM. AVDRY et POIIOT.

(Société médicale des hôpitaux de 1.110n. 15 décembre 1903).

La première observation est celle d'un enfant de 5 ans qui pré-

senta des mouvements choréiques dès les premiers actes physiolo-

giques volontaires un peu complexes (marcher, manger). Lesmou-

vements choréiques se voyaient aussi bien au repos que pendant

les différents mouvements. Il présentait en outre un état propulsif,

et un besoin incessant de mouvement. Il y avait absence de spasmes,

de contractures; l'état intellectuel était normal.

' REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 495-

Les auteurs rangent ce cas dans le groupe des chorées dites con-

génitales, et de l'athétose double, qui pour la plupart des auteurs

(Freud, Rosenthal, Lannois) est rattaché aux affections spasmo-

paralytiques de l'enfance, aux diplégies cérébrales infantiles.

M. Lannois dans saclassification des chorées arythmiques (1893) le

range dans les chorées symptomatiques.

Les auteurs, à l'exemple de M. Gilbert Ballet, étiquètentleurcas

chorée congénitale motte et le rangent dans le groupe des chorées

congénitales, qui, pour eux comme pour M. Ballet, peuvent exister

sans spasme. ' ,

Dans l'étiologie de cette variété de chorée congénitale on relève

généralement un accident de la grossesse ou surtout un accouche-

ment laborieux, ce qui existait dans le cas publié par les auteurs.

L'anatomie pathologique n'en est pas encore au point; mais dans

tous ces cas de chorée congénitale, qu'elle soit spasmodique ou

molle, le caractère chronique et congénital, la coexistence fré-

quente des troubles intellectuels font penser qu'il s'agit bien d'une

affection organique. -

Dans la seconde observation il s'agit d'un malade âgé de 40 ans

atteint de chorée chronique d'Huntington dont le caractère héré-

ditaire et familial est des plus net (le père du malade et un de ses

frères étaient atteints de manifestations choréiques). Il présentait

en outre une paralysie avec atrophie du membre inférieur droit,

vraisemblablement d'origine médullaire, et due à un foyer de po-

liomyélite. 1 G. C.

LXI. Trophoedème hystérique; par MM. LANNOis et Lançon (Journal

des médecins praticiens de Lyon, 31 décembre 1903).

Deux observations de trophoedème hystérique ; l'une chez une

jeune fille de quinze ans d'une durée relativement courte ; l'autre

chez une jeune fille de vingt et un ans qui a été de très longue

durée. G. C.

LXII. Trophoedème chronique chez une épileptique; par Lannois

(Soc. méd. des Hôpitaux de Lyon, 22 mars 1904).

Le cas de troplroedéme chronique rapporté par M. Lannois est

intéressant par la coïncidence de l'épilepsie. Il rappelle que l'épi-

lepsie parait, dans un certain nombre de cas, déterminer des

oedèmes plus ou moins transitoires, tel le cas de Teissier et Lecreux

et celui plus récent de Féré.

Dans son observation l'oedéme ne semble pas sous l'influence de

la névrose, mais ces trophoedèmes isolés ne s'en rattachent pas

moins à la famille névropathique.

Cette tare nerveuse, dit l'auteur, expliquerait la fragilité anor-

male, fragilité congénitale probablement, des centres trophiques-

496 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.

conjonctifs, cause première du trophoedéme. Il ajoute que si l'on

songe que dans les oedèmes névropathiques, il y a, d'une part, des

troubles vaso-moteurs marqués, que d'autre part, l'oedéme etl'adi-

pose sous-cutanée masquent souvent les lésions dans les amyotro-

phies d'origine médullaire, on peut tendre à admettre que ces

.centres hypothétiques de la trophicité conjonctive doivent siéger

près des centres trophiques des muscles et des centres vaso-

moteurs, vraisemblablement à la base et à la partie la plus externe

de la corne antérieure. G. Carriep.

.LXIII. Ostéomalacie sénile. Forme nerveuse; par MM. V. Chap-

. PET et G. MOURIQUAND (Soc. méd. des Hôpitaux de Lyon, 22 mars

1904). r

Une observation dont l'intérêt réside dans la forme nerveuse de

l'ostéomalacie présentée par le malade. Les symptômes nerveux

consistaient en une paraplégie (contracture douloureuse des adduc-

teurs) et de l'exagération des réflexes.

Les auteurs pensent que l'hypothèse la plus vraisemblable est

celle de l'inflammation du conduit vertébral ; il leur a été donné

d'observer dans plusieurs autopsies d'ostéomalaciques une con-

gestion marquée des méninges avoisinant les corps vertébraux.

Sans tirer aucune conclusion des recherches histologiques entre-

prises sur les moelles d'individus ayant présenté les signes cli-

niques de l'ostéomalacie nerveuse, ils ont trouvé dans trois cas

des lésions médullaires coustantes : une dégénérescence myélinique

disséminée dans les différents cordons. Ils pensent que cette alté-

ration évidente peut expliquer suffisamment et la paraplégie

incomplète présentée par les divers malades observés et l'exagé-

ration si marquée de leurs réflexes. G. C.

LXIV. Gigantisme et acromégalie ; par LANNOis et P. Roy.

(Nouv. Iconogr. de la Salpêtrière. 1\° 3. 1903.)

Géant de 2m,12 mort à trente-six ans acromégalique et diabéti-

que. L'examen anatomique et histologique montre, outre les dé-

formations squelettiques et l'existence d'une tumeur pituitaire

volumineuse, quelques particularités intéressantes : plaques os-

seuses méningées spinales, tuberculose pulmonaire, hypertrophie

.énorme du corps thyroïde, gigantisme viscéral, diabète.

IL Gunnov.

LXV. Gigantisme précoce avec développement précoce des organes

génitaux; par IIUDOVERNIG et PAPOVIK. (Nouv. Iconogr. de la Sal-

pêtrière. N° 3. 1903.)

Observation d'un garçon de six ans, mesurant lm,40 et présen-

tant du côté des organes génitaux le développement d'un adulte.

REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE. 491 -1

LXVI. Hypertrophie congénitale d'une main; par Arr.n'r. (Nouv.

Icoi2ogi,. de la Salpét/'ièl'e. N° 3. 1903.)

Hypertrophie portant à la fois sur les parties molles et sur le

squelette, mais,relativement beaucoup plus accentuée sur les par-

ties molles, ce qui permettrait de ranger ce cas dans une catégorie

intermédiaire entre l'éléphantiasis congénitale et l'hypertrophie

vraie. R. C.

LXVII. Spasmes et tremblements chez des psychasténiques ; par

Raymond et Janet. (\-ozcv. Iconogr. de la Salpétriêre. N° 4.

1903.)

A l'occasion de deux cas nouvellement observés, les professeurs

R... et J... continuent la discussion diagnostique tendant à établir

le tableau clinique de la névrose spéciale dite psychasthénique.

LXVIII. Tic tonique du membre supérieur droit; par IiUDLn.

zone. Iconogr. delà Salpétriêre. N° 4. J 913.)

Jeune homme a hérédité vésanique et névropathique, léger trau-

matisme à la main droite à l'âge de quatre ans, évolution régu-

lière, à l'âge de dix-huit ans est pris d'un tremblement de la main

droite qui le gêne pour écrire, à ce trouble s'ajoute de la gêne dans

les mouvements du bras, puis une altitude vicieuse du membre

qui reste en formation et peu à peu s'accuse de l'exagération du

creux sous-claviculaire et de l'effacement des pectoraux et quel-

qu'atrophie du biceps. Le malade'ne présente aucun trouble de la

conscience, aucune affection organique, il est seulement émotif et

violent, il s'efforce de corriger son infirmité, continue à exercer son

métier de mécanicien et fait six mois de service militaire sans se

plaindre. Le Dr R... l'améliore par un traitement rééducateur.

. R. C.

1,XiX. Infantilisme myxoedémateux et maladie de Recklinghausen ;

par Meige et FEINDEL. (Nouv. lcolluur de la Silpêlricre. M 4.

1903.)

L'observation chez un même sujet jeune fille de dix-huit ans

des symptômes cliniques de deux affections différentes, résul-

tant de l'insuffisance de deux glandes étroitement solidaires dans

leur évolution et leur activité physiologique est une intéressante

démonstration des synergies organiques, qui conduit les auteurs

à poser ce problème pathogénique : « La neurofibromatose peut-

elle être invoquée pour expliquer les insuffisances fonctionnelles

qui s'observent chez nombre d'infantiles et qui portent sur les

glandes thyroïde, pituitaire, surrénales, sexuelles; ou bien la ma-

ARCIIlVES, 21 série, t. XVIII. 32

498 REVUE DE PATHOLOGIE NERVEUSE.-

ladie de Recklinghausen n'est-elle qu'un mode de dystrophie du

tissu nerveux et cutané qui, dans certains cas, vient se surajouter

aux autres dystrophies (cutanées, osseuses, vasculaires, glandu-

laires) si souvent alliées à l'infantilisme et dont la cause commune

nous échappe encore. Li. C.

LXX. Langue cérébriforme chez un aliéné alcoolique ; par le i

Dr Levi BIANCHINI. (Nous. Icorangn. de IJ Salpétriêre. N° 4. 1903.)

Un homme ne présentant aucune tare héréditaire - s'était tou-

jours montré normal au point du physique et mental est pris

tout à coup de troubles qui proviennent de la confusion mentale.

Cet accès guérit, un deuxième se produit un an après, puis un

troisième accompagné de manifestations convulsives. Le sujet pré-

sente comme particularité intéressante, une conformation anor-

male de la surface supérieure de la langue, qui est creusée de sil-

lons longitudinaux et transverses profonds, donnant à l'aspect de

l'organe celui d'un cerveau en réduction : pas de lésions muscu-

laires. R. C.

LXXI. Nouvelles remarques sur l'akathisie ; par HASKOYEC (Noltv.

- Iconogr. de la Salpétriêre. N° 5. 1903.) »,

A la suite d'un premier travail de l'auteur, Raymond et Janet

publièrent deux observations d'akathisie qu'ils identifièrent àcelles

relatées par H... et qu'ils placèrent sous ladépendance de l'aboulie

professionnelle des psychasténiques. H... expose - en comparant

la symptomatologie des quatre.cas que s'il y a analogie au

point de vue clinique, il n'en est pas de même au point de vue pa-

thogénique : les cas observés par l'auteur appartiendraient à la

sphère des lésions motrices primaires, ceux de Raymond et Janet

à la sphère émotive dont les lésions affectives primaires sont sui-

vies par des lésions motrices secondaires. R. C.

LXXII. Le pseudo-oedème catatonique ; par Dite. (1'o2lU. Iconogr.

de la Sulpélniére. 1 ? 6. 1903.)

Résumé : Nous supposons, au point de vue pathogénique, qu'il

s'agit : -

1° Pour le myxoedème, d'une lésion thyroïdienne primitive

retentissant ensuite sur le cerveau et la trophicité générale.

2° Pour le trophoedème d'une dystrophie probablement complexe.

Ici le retentissement cérébral est inconstant. - 3° Pour l'adipose

douloureuse, d'une dystrophie atteignant probablement d'emblée

plusieurs glandes vasculaires sanguines etayant un retentissement

cérébral très fréquent. 4° Pour le pseudo-oedème catatonique,

d'un trouble cérébral probablement primitif et atteignant ultéiieui'e-

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. *- 499

ment d'abord d'une façon dynamique puis créant des lésions pro-

bablement durables dans le corps thyroïde et d'autres glandes vas-

culaires sanguines. H. C.

LXXIII. Tics et stéréotypies de léchage chez l'homme et chez le

cheval; par Hurdler et CUOM¡¡L (Noitu. Iconogr. de la S Ipé(niè : 'e,

n° 6, 1903).

Intéressante étude de clinique comparée dont voici les conclu-

sions :

De même qu'il existe chez les équidés, des tics véritables, com-

parables sinon identiques aux tics humains de même nature, il

existe chez eux une variété d'habitudes motrices vicieuses de

léchage, des stéréotypies parakinétiques de léchage, dontles mani-

festations objectives présentent les plus grandes analogies avec les

troubles de même genre observés chez l'homme.

Tics et stéréotypies se rencontrant également chez des animaux

présentant à la fois des troubles psychopatiques et des stigmates

physiques analogues aux tares physiques ou psychiques de dégé-

nérescenceconstatées chez les humains. L'habitude morbide de

léchage, ne revêtant pas l'apparence convulsive n'est pas un tic,

c'est une stéréotypie. Il existe d'ailleurs entre les stéréotypies et les

tics du cheval le même degré de parenté morbide qu'entre les

stéréotypies et les tics de l'homme.

Les stéréotypies de léchage du cheval reconnaissent le même

mécanisme pathogénique que les stéréotypies de l'homme ; un

acte volontaire, le léchage, déterminé par la gourmandise, devient

anormal par sa fréquence et sa répétition et semble- acquérir l'au-

tomatisme. De plus les lésions de la bouche, des troubles de la

dentition, peuvent se rencontrer à l'origine des stéréotypies, aussi

bien que des tics, chez le cheval aussi bien que chez l'homme.

il. C.

-REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

XIII. Section du sympathique cervical pour une maladie de

Basedow; par M. JAUOULAY. (Société natianltle de médecine de

Lyon, 6 avril 1903.)

M. Jaboulay présente une jeune fille de vingt ans, chez laquelle

il a pratiqué la section du sympathique cervicale en 1898, pour

une maladie de Basedow.

L'observation a été publiée en détails dans la chirurgie du

grand sympathique. Il existait une exophtalmie exceptionnelle,

500 REVUE DE THÉRAPEUTIQUE.

le signe de Groefe, la convergence était impossible. Tachycardie :

120; tremblement considérable; le cou mesurait 35 centimètres;

troubles digestifs, diarrhée, troubles menstruels.

La partie inférieure du ganglion cervical supérieur a été résé-

quée. L'amélioration a été immédiate. Actuellement, il n'y a plus

d'exophtalmie, la paupière supérieure suit le globe, la conver-

gence se fait facilement. 11 existe encore un peu de tachycardie :

100, et un souffle au premier temps à la pointe. Il n'y a plus de

tremblement. La diarrhée a disparu. Il n'existe aucun trouble

trophique. Pas de troubles vaso-moteurs. Le cou a diminué de

3 centimètres. G. C.

XIV. Sur un cas de neuromyélite optique aiguë; par MM. \VEILL

et G.4.LL.\YAnDiN. (Lyon médical, 9 août 1903.)

L'observation publiée par MM. Weill et Gallavardin est intéres-

'sante à un double titre : elle contribue à fixer le syndrome clini-

que de la double névrite optique évoluant au cours d'une myélite

aiguë; de plus, l'étude des lésions observées semble donner une

conception nouvelle de l'association de ces deux actes morbides.

Observation résumée : paraplégie ayant débuté insidieuse-

ment, sans cause étiologique connue, devenue totale en huit à

dix jours et réalisant le tableau d'une section médullaire com-

plète ; impotence absolue, anesthésie totale, tactile, douloureuse,

thermique, musculaire, remontant jusqu'à trois travers de doigt

au-dessus du sein; abolition des réflexes cutanés et tendineux,

incontinence des matières fécales et de l'urine (guérison de l'in-

continence par les cathétérismes systématiquement rapprochés).

Eschare fessière.

Amaurose bilatérale, ayant débuté un mois et demi après le

début de la myélite, devenue totale en quelques jours et ayant

présenté ultérieurement une légère amélioration. Broncho-pneu-

monie terminale.

A l'autopsie et à l'examen microscopique on trouve : une myé-

lite aiguë diffuse très intense de la moelle dorsale inférieure et du

renflement lombaire, une névrite optique double. Des lésions

légères de névrite périphérique (sciatique poplité externe). Enfin,

une encéphalite interstitielle diffuse.

Pour expliquer la nature des rapports qui unissent les deux

termes principaux de l'affection, myélite aiguë et névrite optique,

de nombreuses hypothèses ont été mises en avant.

Wharton Jones, le premier, émit une théorie vaso-motrice; il

prétend que les lésions du nerf optique sont consécutives à des

troubles circulatoires rétiniens et rétro-bulbaires, qui eux-mêmes

sont sous l'influence des lésions médullaires dorsales superieures

intéressant les origines du sympathique cervical.

REVUE DE THÉRAPEUTIQUE. SOI

Albutt invoque une méningite ascendante se basant sur les cas

semblant relever d'une origine traumatique. Katz tend à admettre

qu'il s'agit d'une inflammation localisée simultanément en deux

endroits différents. MM. Weill et Gallavardin pensent qu'il s'agit

d'un processus inflammatoire, d'origine indéterminée, mais plus ou

moins généralisé à tout le système nerveux. '

Ces neuromyéhtes optiques aiguës ne seraient qu'un syndrome

anatcmo-clinique, dû à la prédominance, en certains points

(moelle, nerfs optiques), d'altérations généralisées à tout le sys-

tème nerveux, tout comme d'autres syndromes, la psychose

polynévritique par exemple, peuvent être considérés comme

étant l'expression de la prédominance des lésions en d'autres

points (nerfs, encéphale). G. Carrier.

XV. Arthropathie nerveuse traitée par la résection; par PATEL et

CAVAILLON. (Nouu. Icozzogo. delà 8(ilpéti,ièi,e. c\o 4. 1903.)

Cas d'artropathie trophique avec ouverture de l'articulation

tibiotarsienne conduisant à uneinterventionchirurgicale. L'analyse

des symptômes cliniques conduit d'autre part à formuler le dia-

gnostic d'arthropatie nerveuse sur un fond de tabes frustes, elles

résultats de l'opération pratiquée sans anesthésie par M Jaboulay

sont en faveur de la chirurgie conservatrice. IL C.

XVI. Névrome adipeux diffus du médian. Résection, régénération

autogène; par Durante. (Nouv. Iconogr. de la S Upélrtere. 1903.)

Observation anatomique concernant un névrome diffus du mé-

dian avec infiltration adipeuse ayant nécessité une large résection

de ce nerf. L'autopsie pratiquée quatre ans après l'opération per-

met de constater les signes suivants : Ecartement de deux bouts

mesurant 'dix-sept centimètres. Bout périphérique persistant avec

névrome terminal et présence de fibres nerveuses présentant tous

les stades entre les tubes protoplasmiques embryonnaires et les

fibres nerveuses adultes. Fibres jeunes de néoformation. Cylin-

draxes nets mais moins nombreux et plus souvent interrompus

que dans le bout central. L'auteur fait remarquer que cette obser-

vation « est en opposition avec la loi de Waller et la doctrine du

neurone et confirme les travaux récents montrant que le nerf est,

non pas formé par un prolongement cellulaire central, mais cons-

titué par une chaîne de neuroblastes périphériques relativement

indépendants ».

XVII. Le traitement des aliénés; par Charles-G. Wagner (The Ame-

ricaza Journal v('Insanity, IV, 03, p. 621-627.)

Généralités : le désespoir, la démoralisation, les suicides, consé-

quences des anciens asiles, prisons ; -, -influence calmante du luxe ;

502 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

les clôtures entretiennent les idées d'évasion ; ce que coûte la

déchéance en chronicité; les dépenses pour les cas aigus repré-

sentent par suite autant d'économies pour-la société. Simon.

XVIII. Plan graduel et systématique d'exercice au dehors pour les

déments vésaniques ; par Chester-L. CARLISTE (The Amel ican

Journal of Insanity, IV, 03, p. 63 i-L1).

Amélioration des aliénés quand on s'en occupe, et notamment

des démences consécutives aux l'ormes mélancoliques, même de

la démence précoce. Smox.

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

XXIX. L'alcoolisme en Bretagne; par Ducrest DE VILLENEUVL.

(Nouv. Icone{]. de la Sclp2Lriérc. i\° 3. 1903.)

La légende et l'histoire s'accordent à montrer que les Bretons

ont toujours eu la passion des boissons alcooliques. Contre cette

tare ancestrale, il n'y aurait d'autre remède que la suppression des

débits d'alcool. il. C.

XXX. Rapport du tabes avec la paralysie générale ; par CURIONI.

(Nouv. Iconogr. de la Salpllriène. i'\° 5. 1903.)

Le tabes et la paralysie générale sont-ils une seule et même

maladie dominée par la syphilis, ou bien y a-t-il lieu de différen-

cier le tabes vrai des lésions tabetiformes de la paralysie progres-

sive La question est en débat et ce n'est point, comme le dit

l'auteur, une observation isolée qui pourra faire pencher la ba-

lance dans un sens ou dans l'autre ; mais la rareté même des cas

publiés sur les associations tal1eto-parü lytiques est une raison de

les recueillir avec intérêt.

Observation. Femme de cinquante-huit ans. A eu cinq enfants

dont trois sont morts : deux très jeunes et un idiot de vingt-un ans.

Pas d'antécédents spécifiques prouvés. Il y a trois ans, troubles de

la vue : signe de Romberg. Depuis lors, affaiblissement intellec-

tuel progressif Attaque apoplectiforme et embarras de la parole.

Mélange d'idées de satisfaction puérile et de persécution. A gau-

che, déviation de la face, dilatation pupillaire. A droite, ptosis et

strabisme divergent. Abolition des réflexes pupillaires, rotuliens et

plantaires. Troubles de la sensibilité et des fonctions vésicales.

Epanchement pleural. Arythmie. Mort. A l'autopsie, lésions mé-

REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 503

ningo-corticales de la paralysie générale. Du côté de la moelle,

lésions des méninges du canal épendymaire et des cordons posté-

rieurs qui peuvent être considérés comme intermédiaires entre

celles du tabes vrai et du pseudo-tabes Dans le cerveau comme

dans la moelle, abondance de prlasmazellen, disséminés entre des

leucocytes polynucléaires et des lymphocytes. R. C.

XXXI. Adipose sous-cutanée symétrique et segmentaire chez une

démente alcoolique et hérédo alcoolique ; par DENY et LcPnv.

(Nouu. leonogr. de la S dpétrière. N° 5. 1903.)

Observation qui tendrait à démontrer qu'à côté des infections

^scarlatine, variole, rougeole...) invoqués jusqu'ici pour expliquer

la pathogénie des dystrophies conjonctive-; acquises, il y a lieu

d'accorder un certain rôle aux intoxications et en particulier à

l'alcoolisme chronique.

XXXII. Délire alcoolique continu par SOU¡\11 \NorF et WËDEKSKY

(Nouv. /cuH07r. de Ia, Salpolrière, n° 6, 1903).

Les auteurs cherchent à établir la symplomalologie particulière

du délire alcoolique continu en vue de le différencier des autres

psychoses alcooliques. Les particularités de cette forme seraient :

Durée plus longue. Accès de delirium tremens antérieurs. Hallu-

cinations et illusions auditives, quelquefois hallucinations olfac-

tives, visuelles et tactiles. Pas de délire systématisé. Pas d'affai-

blissement intellectuel progressif. Contractions idio-musculaires et

lésions fréquentes de l'organe auditif. R. C.

,

XXXIII. Les fous au Brésil; par Rmnen (The American Journal of

Insanity, I, 03, p. z7-392).

1°Notions générales sur le Brésil : Nature riche; peuple oisif,

pauvre, abstinent. Mais abus de café; sensualité, tremblements,

sénilité précoce. Alcoolisme. Malaria.

2° Un aliéné pour 800 ou 15.000 habitants, selon les contrées,

ces différences de statistique étant des différences d'hospitalisa-

tion.

3° Description de l'hôpital de Rio-de-Janeiro : planchers admi-

rablement cirés, etc. ; puis de ceux de San Salvador et de San

Paulo. Sinon.

XXXIV. Contribution à la chimie de la dégénérescence nerveusé

dans la paralysie générale et autres maladies mentales; par

Isador Il. ComnL, Journal of Insanity, I, 03, p. 393-416).

Deux parties dans ce travail : 1° Un résumé des recherches anté-

rieures de même nature, de ce qu'on sait actuellement de la

804 REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE.

chimie des dégénérescences nerveuses, à la fois d'après l'étude du

métabolisme (sang et urine), du liquide cérébro-spinal, et du tissu

nerveux lui-même ;.2°les recherches personnelles de l'auteur, tech-

nique et conclusions, parmi lesquelles la plus nette parait celle-ci :

la présence de choline dans le liquide céphalo-rachidien permet

d'affirmer une affection organique.

Noter enfin 21 indications bibliographiques. Sinon.

XXXV. Des dermatoses chez les aliénés ; par James-Mac-Far-

lane WtNFiELD (The Americun Journal of Insanity. 1, 03, p. 417-

426). S.

XXXVI. Un cas de démence précoce avec autopsie ; par William-

Rush DUNTON (The -4rnei-icit Journal of ]nsanity, I, 03, p. 42ï-

439. 4 planches).

Altérations cellulaires distribuer à tout le cerveau, mais surtout

marquées au niveau de la première frontale. Oiromoiyse centrale,

légère pigmentation jaune pale, légère atrophie cellulaire ; atro-

phie, dislocation et gonflement du noyau, plissement de la mem-

brane nucléaire; endo-nucléole. Les couches profondes sont les

plus atteintes. Mêmes altérations des cellules motrices. Légère

augmentation des cellules de névroglie. Phagocytose bien marquée

et désintégration cellulaire considérable. Pas d'altérations des

fibres à myéline ni des vaisseaux. Smon.

XXXVII. Paralysie générale aiguë avec une observation, histoire

clinique et anatomie pathologique ; par'' Stewart PATON et

G.-Y. Husu (The American Journal of Insanity. p. 4JÎ-41J. 2 plan-

ches).

On trouve d'abord au début de l'article un court historique avec

la classification de Lissaner des cas anormaux de paralysie géné-

rale : 1° Paralysie générale avec localisation des lésions aux por-

tions postérieures des hémisphères ; 2° Paralysie générale avec

prédominance céribelleuse des lésions et des. symptômes ; 3° Para-

lysie générale à forme aiguë; 4° Paralysie générale compliquant un

tabes, avec délire hallucinatoire, etc. '

L'observation et la description des lésions paraissent pouvoir

prêter à discussion. Retenir toutefois la conclusion : à la forme

foudroyante, exceptionnelle de la paralysie' générale, correspon-

draient également des lésions spéciales. Simon.

XXXVIII. Les progrès de la psychiatrie en Grande-Bretagne en

1902; par ll.-H. Urguiiait (The American Jotl1'1lal of Insanily,

IV, 03, p. 593-599).

Les questions passées en revue sont les suivantes : Folie pella-

- REVUE DE PATHOLOGIE MENTALE. 505

greuse (Warpocke). La syphilis comme cause de folie (Mott :

pas de syphilis, pas de paralysie générale). - Tuberculose et dysen-

terie dans les asiles d'aliénés. - Infirmiers de nuit. Ecoles d'lIIf1r-

miers. Laboratoires (ilobertson : toute aliénation chez un sujet

normal est conséquence d'une intoxication préexistante). - Pre-

miers troubles mentaux (leur traitement dans les hôpitaux géné-

raux, etc.) Nourriture des aliénés. La question des statis-

tiques. etc., etc. - SI\10N.

XXXIX. Folie puerpérale ; par Robert Jones (The American Jour-

nal of Insanity, IV, 03, p. 601-620).

1° Etudes statistiques : pour 100 femmes internée de quinze à

quarante-cinq ans, 75 environ en état de grossesse, d'accouche-

ment, de puerpéralité ou de lactation. Proportion parmi elles des

naissances illégitimes. Rôle de la primiparité, etc.

2° Epoque de début des troubles mentaux, et forme de l'aliéna-

tion selon celle-ci. Pas de folie spéciale pour la grossesse ou la

lactation, dit l'auteur; mais il a tendance à rattacher à la partu-

rition, et à la période immédiatement voisine un délire avec agita-

tion, illusions, hallucinations et prédominance d'idées érotiques et

religieuses - qu'il considère comme une entité nosologique spé-

ciale- et dont on trouve au chapitre Symptomatologie, p. 60j et

suivantes, une description riche en détails intéressants. -

3° Idées de suicide, infanticides au cours des folies puerpérales.

Age. Fréquence des antécédents héréditaires (50 p. 100). Pro-

nostic. - Pathogénie. - Traitement et revue des principales ques-

tions qui peuvent se poser à l'aliéniste : faut-il provoquer l'avor-

tement ? etc. On trouve, sur tous ces points, dans l'article de Il.

Jones, outre l'opinion personnelle de l'auteur, et les données sta-

tistiques sur lesquelles elle repose, un résumé des conclusions

d'autrui sur le même sujet. ' Smox.

XL. Des facteurs héréditaires dans l'épilepsie; par R.-E. DoRAN

(The American Journal of Instlnitll, VU, 03, p. 61-i3).

Statistiques portant sur 1.300 cas. Conclusions : 1° Difficulté de

ces recherches. On trouve cependant des névroses variées ou de

l'alcoolisme dans 46,5 p. 100 des cas ; 2° Alcoolisme, épilepsie et

folie combinés paraissent responsables de 38,5 p. 100 des cas ; 3°

l'alcoolisme paternel existait dans 18 p.'100 des cas ; 4° les mala-

dies sans relation avec le système nerveux paraissent n'exercer

qu'une influence héréditaire faible; 5° conclusion la plus intéres-

sante, mais qu'on ne trouve nettement exposée qu'au cours de

l'article : plus la tare héréditaire est forte, plus l'épilepsie est pré-

coce. SIMON.

806 ' SOCIÉTÉS SAVANTES.

XLI. Nature et genèse de l'illusion vésanique; par J.-W. \VIIE ! lRY

- (The American Journal of Iiisaizily, VU, 03, p 89-96.)

L'auteur aboutit à la définition suivante de l'illusion vésanique :

une idée née dans la cérébration inconsciente ; projetée dans la

conscience par intervalles; crue aveuglément et vivement défendue

par son auteur, mais qui ne peut par aucun autre être acceptée

comme vraie. - Il est malheureusement impossible de résumer

les nombreuses remarques d'observation fine qu'on rencontre d'au-

tre part au cours de l'article.- S lu 0 ?

SOCIÉTÉS SAVANTES.

SOCIÉTÉ MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE

Séance du 31 octobre 1904. Présidence de M. CIIIIISTIAN.

. M. Christian. Vous avez tous appris, avec une profonde dou-

leur, l'attentat dont M. Vallon a été victime. J'ai le plaisir de vous

apprendre que l'état de notre collègue est devenu meilleur et je

vous propose de lui adresser les félicitations de notre Société.

(adopté).

Etiologie de la démence précoce.

MM Rodbinowitch et Piiulpin dans une étude spéciale sur l'état

de l'appareil circulatoire chez 31 sujets atteints de démence pré-

coce, ont noté chez la grande majorité de leurs malades, l'abaisse-

ment habituel de la tension artérielle qui oscillait entre 13 et 14

centimètres et demi, quelquefois même descendait à 12 centimètres

hypotension artérielle qu'ils attribuent en grande partie à la

déchéance organique vers laquelle évoluent plus ou moins rapide-

ment les sujets atteints de démence précoce.

Leur enquête leur a fait trouver parmi leurs 31 malades, 7 cas

de rétrécissement mitral pur, associé chez tous à une tuberculose

pulmonaire très légère, circonscrite et stationnaire, compliquée en

outre chez 4 sujets d'un arrêt de développement considérable de

l'organisme.

Ils admettent que, dans certains cas, il doit y avoir une relation

entre ces trois éléments : le rétrécissement mitral pur, la dystro-

phie tuberculeuse et la démence précoce qu'ils ont trouvés trop

SOCIÉTÉS SAVANTES. ' 507

particulièrement réunis dans leurs observations pour qu'il n'y ait

pas quelquefois plus qu'une simple coïncidence.

La démence vésanique. n'est pas une démence.

MM. ToULOUSE etDFMAYE, après avoir défini ce qu'ils entendaient

comme démence et dont ils donnent comme type la démence para-

lytique, admettent qu'à la fin des vésanies, il n'y a pas véritable-

ment démence, mais confusion, c'est-à-dire impossibilité de se

servir des connaissances antérieures qui, néanmoins, persistent.

Par une série de questions simples, on arrive à faire ressortir ces

connaissances antérieures. La démence précoce n'est, elle-même,

qu'une confusion car on ne l'observe jamais au début, et parfois,

transitoirement seulement.

M. Christian fait remarquer que personne ne défend plus guère

la folie vésanique.

M. AItNAUD. -Je viens chicaner M. Toulouse sur sa définition de

la démence. La démence de la paralysie générale ne peut prêter à

confusion avec la démence vésanique. M. Toulouse veut qu'il n'y

ait pas affaiblissement intellectuel chez les vésaniques chroniques,

je ne suis pas de son avis. La confusion mentale a été appelée au

début démence aiguë. Il est difficile d'établir, comme le veut M. Tou-

louse une ligne de démarcation entre la démence et l'affaiblisse-

ment intellectuel. '

M. DtNY. Je veux tâcher de concilier MM. Toulouse et Arnaud.

Dans l'état actuel de la science, la solution serait d'admettre en

France le mot de démence aiguë avec notion de curabilité.

M. TOULOUSE. Je ne voudrais pas avoir l'air d'enfoncer des

portes ouvertes, je réagis contre l'habitude d'employer : démence

vésanique, dans les certificats.

M. Duphé. Baillarger avait déjà établi la distinction que

M. Toulouse indique entre la démence et les pseudo-démences. Je

ne suis pas d'avis de prodiguer le mot de démence qui doit conser-

ver son cachet d'incurabilité. -

M. DOU'111 : BENTE. En ayant l'air de s'éloigner de Kroepelin et

s'élonner du chaos qu'il a construit, M. Toulouse, se rapproche

de Kroepelin et de M. Masselon. Son exemple du paralytique général

dément est, en outre, mal choisi, à cause des rémissions de la pa-

ralysie générale.

M. CHRISTIAN. Je suis de l'avis de M. Doutrebente. Jamais per-

sonne n'a nié que l'incurabilité ne fut la caractéristique de la

démence vraie.

M. DE1ÎY. - Je dirai à M. Toulouse que le symptôme confusion

n'a jamais uniquement servi pour faire le diagnostic de démence

précoce, mais surtout d'affaiblissement intellectuel.

M. TOUr.oUSE. - M. Dupré fait remarquer avec raison que Bail-

508 * SOCIÉTÉS SAVANTES.

larger avait déjà décria ces différences avant moi, d'autres l'ont fait

aussi. Quant à M. Doutrebente, je lui répondrai que le terme

démence paralytique est bien accepté par tout le monde comme le

type le plus complet, le plus noir des démences. Quant aux rémis-

sions, elles sont la plupart du temps des erreurs de diagnostics.

Je ne comprends pas le gâtisme comme un signe de démence. La

confusion mentale est souvent le seul symptôme invoqué pour

faire le diagnostic de démence vésanique.

Paralysie générale et pachyméningite gommeuse.

MM. DOUTItE\BE\TE et Marchand communiquent une nouvelle

observation dans laquelle on constate des lésions syphilitiques

cérébrales surajoutées à celles de la paralysie générale.

Il s'agit d'un homme de quarante ans, syphilitique depuis l'âge

de vingt et un ans, qui présente les signes classiques de laparaly-

sie générale. Le malade mourut après avoir présenté les symptômes

du délire aigu. A l'autopsie, on constata, en outre des lésions

habituelles de la méningo-encéphalite diffuse, une pachyméningite

localisée au niveau du sinus longitudinal supérieur. L'examen his-

tologique montra qu'il s'agissait d'une pachyméningite gommeuse

en pleine évolution.

M. Doutrbbente. Permettez-moi d'ajouter un mot : huit hom-

mes n'ont pas pu arrêter mon malade et j'ai été, je l'avoue obligé

d'employer la camisole de force.

M. CHRISTIAN. Sans étrangler le malade ?

M. DOUTREBENTE. - C'est vrai.

Puérilisme mental guéri par suggestion.

M. LEROY présente l'observation d'une malade hystérique, chez

qui les accès convulsifs sont remplacés par des crises de puéri-

lisme : zézaiement enfantin, onomatopées, jeux du premier âge,

larmes faciles, etc. Ces accès disparurent après l'établissement

tardif des règles.

M. Dupré. Il faut distinguer entre le puérilisme et l'infantilisme.

L'hystérie joue, en effet, un rôle important dans la genèse de ces

accès de puérilisme.

Singulières cachettes d'une aliénée.

M. Leroy présente l'observation d'une vieille délirante chronique

qui collectionnait les sujets les plus divers et les plus saugrenus,

dans son rectum et dans son vagin. Dans l'énumération de ces

objets on trouve pêle-mêle des couteaux, des clous, des cailloux,

des peignes, des boites de fer contenant des cheveux, des timbres

'des épingles, etc.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 509

Une surveillance attentive suffisait à peine pour empêcher la mise

en place de ces singulières collections, dans cette encore plus sin-

gulière cachette. MARCEL Briard.

SOCIÉTÉ DE NEUROLOGIE

Séance du 3 novembre 1904. Présidence DE M. DEJERINE.

M. LE Président prononce l'éloge funèbre de M. Gombault.

Sclérodermie.

M. Muet présente une malade dont la main gauche, les doigts,

une longue bande sur toute l'étendue du bras et de l'avant-bras et

le sein sont atteints de sclérodermie. L'électrisation par la haute

fréquence n'a amené qu'un résultat peu appréciable. 1,'électro-

lyse, au contraire, a produit une amélioration très notable.

Ilémol'l'hagie cérébro-méningée à symptômes l1u ! ningi/iques.

MM. Achard et RAMOnD. - Le diagnostic entre l'hémorrhagie

méningée et la méningite est parfois difficile, même après la ponc-

tion lombaire. Le liquide extrait peut, en effet, présenter à la fois

la coloration hémitique et la leucocytose, soit. que l'hémorrha-

gie ait secondairement déterminé une réaction leucocytaire, soit

que la méningite ait donné lieu à une diffusion sanguine. , 1

Chez une femme de 33 ans, frappée subitement d'une attaque

épileptiforme, nous avons observé une série de symptômes ménin-

giliques : attitude en chien de fusil, raideur de la nuque, signe de

Kernis, vomissements, fièvre (38° 6). Les attaques épileptiformes

se répétèrent avec une grande fréquence, laissant après elles une

hémiplégie droite. La mort survint dans le coeur, avec une tempé-

rature de 40° 9, six jours après le début des accidents. Une ponc-

tion lombaire avait donné un liquide jaune ambré, renfermant,

outre de nombreux globules rouges, quelques-uns polynucléaires,

de grands mononucléaires et sm tout des lymphocytes. On pou-

vait songer à la méningite tuberculeuse qui débute parfois chez

l'adulte par des attaques épileptiformes. Or l'autopsie montre un

foyer d'hémorrhagie du lobe frontal gauche, rompu sous les mé-

ninges qui étaient inondées de sang. ,

111 yocysmie.

M. Marie désigne par ce vocable le tremblement musculaire

ondulatoire vermiculaire, ressemblant à un grouillement de vers

10 SOCIÉTÉS SAVANTES.

et qui se produit sur le membre inférieur des deux cotés dans

l'hémiplégie organique récente du quinzième au vingt et unième

jour. Le fait que ce tremblement fibrillaire est bilatéral et se pro-

duit seulement ou surtout au niveau des membres inférieurs tient

à ce que ceux-ci reçoivent tous les deux beaucoup plus de fibres

venant d'un seul hémisphère que les membres supérieurs.

Maladie bleue et cyanose rétinienne.

M. Babinski présente un petit garçon atteint de maladie bleue

et montre des aquarelles reproduisant les veines dilatées et noi-

râtres du fond de l'oeil. Malgré cette cyanose locale, la vision ne

souffre aucun trouble chez ce jeune sujet.

L'hippas dans la chorée.

M. CRUCHFT (de Bordeaux) a noté la fréquence de l'hippus dans

le cas de méningite tuberculeuse, de tumeur du cervelet, d'ophtal-

moplégie ancienne, il l'a toujours rencontré dans la chorée, tandis

qu'il manquait dans la maladie des tics. Il croit, à l'encontre de

certains auteurs, à l'existence de ce phénomène et attire l'atten-

tion sur les causes d'erreur auxquelles 1'lippus peut donner lieu

dans la recherche du réflexe lumineux.

M. HASKOYEK (de Prague), dans une communication sur : le syn-

drorrze tlcalantique de Déjel'ine et ses formes bénignes, émet un avis

conforme à celui de MM. Déjerine et Thomas. Dans une seconde

communication, il note le cas de deux jumeaux atteints l'un d'épi-

lepsie, l'autre de migraine ophtalmique.

M. Oddv (de Marseille) communique un cas de lésion de l'épicone

dans une plaie de la moelle.

M. Lannois (de Lyon), à propos de la remarque de Crocq, a fait

pratiquer systématiquement dans son service le décubitus gauche

pendant toutes les crises d'épilepsie. L'attaque est toujours plus

courte dans cette attitude. F. ROISSIER. -

SOCIÉTÉ D'IlI'Pl\OLOGIE ET DE PSYCHOLOGIE

Séance du mardi 25 octobre 1904. Présidence DE M. JULES Voisin.

Le facteur efficace en Icypnotliérapie.

M. E. de GErEasLau (de Gothembourg Suède) rapporte divers

cas dans lesquels la suggestion expressément dirigée conlre cer-

tains troubles fonctionnels ayant échoué, l'amélioration, puis la

SOCIÉTÉS SAVANTES. 511

guérison survinrent à la suite de simples séances de sommeil.

Donc l'hypnotisme, indépendamment de toute suggestion, possède

par lui-même une indéniable puissance thérapeutique.

M. BERILLON. Chez la plupart de nos névropathes, il y a désé-

qnilibre fonctionnel entre le cerveau et la moelle épinière. Le

sommeil normal rétablit l'équilibre; l'hypnose fait de même.

L'action de cette dernière se manifeste même par des signes

objectifs, par exemple, augmentation de la tension sanguine et,

consécutivement, chaleur aux mains et aux pieds. L'hypnotisme

est curatif en soi, en dehors de toute suggestion; il suffit, à lui

seul, à guérir des symptômes qui n'ont pas été visés par les sug-

gestions exprimées.

M. Paul Magnin. Les mélancoliques anxieux sont, au début,

très peu accessibles aux suggestions. Des séances successives de

sommeil améliorent assez vite leur état, et alors, la suggestion les

impressionne. A ces malades on ordonne, d'ordinaire, de fortes

doses de préparations opiacées; dès lors, n'est-il pas rationnel de

les soumettre à une cure de sommeil ? J'ai soigné un peintre déco-

rateur atteint d'accès de confusion mentale; il sortait complète-

ment de son état de confusion après une demi-heure de sommeil

provoqué, en dehors de toute suggestion. De même, dans certaines

formes de l'hystérie, les malades sont peu accessibles à l'hétéro-

suggestion ; mais, par le fait qu'ils dorment, ils détruisent d'eux-

mêmes leurs autosuggestions.

Un cas de trac chez un musicien.

M. Paul FAREZ. - M. X..., élève du Conservatoire, a obtenu un

premier accessit au concours de 1902. A l'approche du concours

de 1903, il est pris de trac, toutes les fois qu'il joue en public;

alors, il ne pense plus qu'à ne pas faire de fausse note, il ne se

préoccupe que du mécanisme et le sentiment artistique manque

totalement; aussi, au concours de 1903, il n'a pas de nomination.

Comme il est travailleur et bien doué, il persévère en 1904. Chez

lui ou à la classe, il joue en artiste, de manière à mériter de grands

éloges; en présence d'un ou de plusieurs étrangers, non seulement

il se sent démonté et désorienté, mais il s'arrête court, incapable

de continuer à jouer. Dans ces conditions, il ne parait pas possible

qu'il affronte de nouveau le concours. Mais alors, il devra quitter

le Conservatoire; il aura la honte de rentrer dans sa ville natale

comme un « fruit sec », après avoir trompé les espérances de ses

concitoyens; sa carrière d'artiste est brisée, etc... Obsédé par ces

idées, il voit avec terreur s'approcher la date fatale; il devient

sombre et taciturne, ne dort plus, mange à peine et désespère sa

famille par ses lettres éplorées. Quatre jours avant le concours, il

annonce à son père sa détermination de se tuer. Le père accourt

512 2 SOCIÉTÉS SAVANTES.

à Paris, affolé, et me l'amène. Après une première séance d'hyp-

notisme, M. X... prend part à une répétition dans une salle de

concert. Asa grande stupéfaction, il joue facilement, avec entrain,

sans hésitation, trouble ou appréhension; en même temps, ses

idées noires l'ont quitté; il est tout à fait calme et confiant; il ne

redoute plus l'époque du concours. La veille de celui-ci, nous fai-

sons une nouvelle séance ; et, au jour dit, on lui décerne, à l'una-

nimité, le premier des seconds prix. Le voilà tout désigné pour

un brillant premier prix en 1905; il ne manquera pas de recourir

encore à l'hypnotisme pour être en possession de tous ses moyens.

M. Voisin. - J'ai soigné jadis une jeune fille qui préparait les

examens de l'hôtel de ville. Quoique travailleuse et intelligente,

elle avait été plusieurs fois refusée ; chaque fois qu'elle paraissait

devant les examinateurs, elle était prise de' trac et ne pouvait

faire aucune réponse. Je l'ai soignée par l'hypnotisme et elle a

passé très facilement ses deux brevets. Elle est devenue une excel-

lente institutrice et n'a souffert d'aucun trouble nerveux pendant

dix-huit ans. Ces jours-ci, à la suite de préoccupations, de clia-

grins et de surmenage, elle a de nouveau présenté un état névro-

palhique dont je l'ai débarrassée par la suggestion. Qu'il s'agisse

de trac chez les musiciens, chez les acteurs ou chez les écoliers,

c'est par l'hypnotisme qu'on le traite efficacement.

M. BERILLON. C'est surtout chez les musiciens qu'apparaît le

trac. A vrai dire, la musique fait appel à la névropathie, l'entre-

tient et la développe; je parle surtout des exécutants. Ceux-ci se

surmènent sans répit, du matin au soir, ils sont étrangers à tout

ce qui se passe autour d'eux; leur culture générale est souvent

médiocre, pourrie pas dire nulle; obsédés par tel air, tel passage,

ils sont comme monoidéisés par une idée fixe; et, ainsi, ils se

déséquilibrent. Chez eux les diverses formes de trac rentrent dans

ces phobies dont j'ai déjà, il y a longtemps, signalé le caractère

professionnel. On les guérit en simulant, pendant l'hypnose, avec

tous ses détails, la scène qui, d'ordinaire, provoque le trac.

M. Lionel DAURIAC. - Il est très très vrai que la musique, par

elle-même, porte au déséquilibre nerveux. La musique, en effet,

est excitatrice d'émotions : les natures musicales prennent plaisir

à reproduire cette émotion et ainsi ils surmènent leur émotivité.

Aussi, je recommande toujours aux musiciens : ne personnifiez

pas votre morceau, ne vous laissez pas prendre par votre émotion,

oubliez-vous vous-même, passez du subjectif à l'objectif, mette/ :

en valeur les grandes lignes de la composition musicale que vous

interprétez, etc. Les exécutants se créent un mode d'excitation

qui les isole du monde extérieur; la pratique même de leur art les

mène au nervosisme. Il n'en est pas de même des compositeurs,

car ceux ci s'objectivent, et la pratique correcte'de la composition

exige la pleine possession de soi-même.

VARIA. 513

La suggestion mentale et les rayons Blondlot, par M. NAOUM KOTIK

(d'Odessa). -

Un cas de claire audition, par M. PEWNI1ZKY (de Saint-Péters-

bourg).

Influence de la suggession hypnotique sur le sexe des nouveau-

nés, par M. FELDMANN (de Saint-Péterbourg).

(Ces trois manuscrits sont renvoyés à l'examen de MM. Aragon,

Binet Sanglé, Lionel Dauriac et Paul Farez).

VARIA.

L'affaire DE l'asile DEVANTES. -

Il y a deux semaines, tous les journaux ont raconté la mort d'un

aliéné de l'asile de Nantes en donnant à ce fait un titre sensation-

nel. D'après cela, on aurait pu croire que le malade avait été ou

étranglé par ses gardiens ou étouffé par suite de leur incurie ou de

leur imprudence. '

Nous avons demandé des renseignements dans le but de con-

naître l'exacte vérité et voici ce que nous avons appris :

Pendant plusieurs jours, le nommé E..., âgé de 40 ans, quittant

à chaque instant son domicile, avait fait du scandale dans la ville

de \antes et occasionné des attroupements par ses discours et ses

actes extravagants. Il s'était rendu chez deux armuriers, M. Bri-

chet, rue de la Fosse, et M. Aubron, rue Contrescarpe, leur récla-

mant violemment un fusil qu'il disait leur avoir remis. Les jour-

naux avaient parlé de lui dans leur chronique locale et la police

arrêta enfin E... alors qu'il vagabondait de nouveau dans les rues.

Au poste il se montra très surexcité, incohérent, se disant mar-

chand de vins en gros, acheteur de toute la récolte de la contrée

dont une partie fui avait déjà été livrée et dont le reste allait lui

être expédié sous peu, etc., etc.

Le docteur Bahuaud, appelé à constater son état, délivra un cer-

tificat et E... fut conduit à l'asile Saint-Jacques le 9 octobre, où il fut

reconnu atteint de manie, peut-être par alcoolisme, mais sans

signes de paralysie générale.

Comme au dehors, il se montra agité, violent, avec le même

délire, il fallut le maintenir le jour et la nuit par les moyens ordi-

naires de contention . On le laissait cependant parfois libre de tous

ses mouvements. Le lundi 17 octobre, vers cinq heures du soir, il

put ainsi se faufiler dans le dortoir d'un pavillon qui n'a qu'un

rez-de-chaussée, brisa le grillage d'une croisée et passa dans le

parc des hommes pensionnaires. Les gardiens le retrouvèrent là,

Archives. 2' série. t. XVIII. 33

Hi r

514 -il VARIA.

le ramenèrent dans sa section et au moment du coucher, après lui

avoir mis la camisole, le recouvrirent des pieds à l'abdomen avec

de nombreux balins servant de garniture aux lits de gâteux, et

assujettirent ces balins avec des bandes de toile remontant du bas

à la tête du lit. Ils avaient spontanément agi ainsi pour empêcher

le malade d'avoir froid et de de se découvrir durant la nuit.

Le 18, à huit heures et demie du matin, E... était encore main-

tenu au lit par les mêmes moyens; il eut soudain une syncope.

Le premier gardien de la section, qui venait de rentrer de permis-

sion, partit effaré à la recherche de l'interne de garde, criant par-

tout que E... venait d'être étouffé dans son lit. Quand le médecin

en chef arriva quelques minutes après, E... était mort et déjà

débarrassé de toutes les entraves.

Le docteur Biaute ordonna aux gardiens de remettre toutes

choses en l'état et fut convaincu alors que ses prescriptions habi-

tuelles n'avaient pas été suivies et qu'on n'avait tenu aucun

compte des recommandations qu'il adresse si fréquemment à son

personnel. '

Le corps de E... ne portait cependant aucune trace de violence.

Le malade avait été vu pendant la nuit par le veilleur qui n'avait

remarqué que son insomnie, ses paroles incohérentes et son agita-

tion ; un des gardiens lui avait vers sept heures présenté un mor-

ceau de pain dans lequel il avait grignoté quelques bouchées et sur

lequel l'empreinte de ses dents était apparente.

Le malaise était donc postérieur et avait été subit, comme le

gardien l'avait rapporté; la mort ne parut donc pas au docteur

Biaute pouvoir être sûrement attribuée à une suffocation par

compression des organes thoraciques.

Mais en raison du bruit propagé dans tout l'hospice par le pre-

mier gardien, le médecin en chef ordonna le transport de E... à

l'amphithéâtre avec les plus grandes précautions et remit à vingt-

quatre heures la signature du bulletin de décès.

Le 19, à huit heures et demie du matin, il constate qu'un écou-

lement très abondant de sang avait eu lieu par les narines et que

de l'emphysème soulevait les tissus du cou et de la partie supé-

rieure du thorax. En présence de ces phénomènes qui seuls n'au-

raient pas suffi pour démontrer la mort accidentelle par suffoca-

tion, mais qui en auraient été des signes certains pour le vulgaire,

la famille, les amis, les curieux qui auraient cherché à voir le

cadavre et le garçon d'amphithéâtre, le docteur Biaute dit dans

la déclaration de décès que la cause ne pouvait être déterminée que

par l'autopsie et, dans le rapport au préfet, qu'il avait constaté à

l'égard de E... une application de moyens de contention contraire

a ses prescriptions habituelles, qu'une syncope rapidement suivie

de mort était survenue et qu'il fallait demander au parquet l'au-

topsie nécessaire pour préciser la cause du décès.

VARIA. 515

L'autopsie fut pratiquée le 20, quarante-huit heures après le

décès par M. le docteur Ollive, professeur de clinique médicale de

l'Ecole de Nantes. Le médecin légiste ne constata extérieurement

aucune marque de violences, ne trouva d'autres lésions internes

que celles d'une aortite chronique et après s'être enquis de tout ce

qui s'était passé, n'attribua la mort de E... qu'aux effets de la grave

affection organique si visible sur les pièces anatomiques.

La justice n'avait donc plus à intervenir et, le corps de E... pou-

vait êlre inhumé, sans qu'on ait la crainte, à cause des bruits qui

auraient couru, de voir dans la suite surgir des dénonciations.

Mais si l'oeuvre de la justice était terminée, il restait à l'adminis-

tration des hospices, et c'est ainsi qu'ont pensé avec raison quelques

journaux ayant raconté la fin de cette triste histoire, le devoir de

punir disciplinairement ceux qui avaient gravement manqué aux

règles de patience, de mansuétude et de traitement que le docteur

Biaute, de l'aveu de tous, ne cesse d'inculquer aux agents de tout

ordre, depuis les simples infirmiers jusqu'aux surveillants en

chefs. -

C'est là, d'ailleurs, qu'en est actuellement l'affaire. L'administra-

tion des hospices a recherché les fautes commises et les responsa-

bilités encourues, elle y est poussée encore par les frères de E...

qui, s'en rapportant aux conclusions de l'autopsie, exigent seule-

ment une sanction disciplinaire exemplaire à l'égard de ceux qui,

par défaut de surveillance ou mauvaise application des moyens de

contention, ont méconnu toutes les prescriptions médicales dans

les soins qu'on doit aux aliénés.

PSYCHOLOGIE DES émeutes. -

A. Manzoni,' dans Ses Fiancés, a décrit avec un grand soin

l'état mental des foules durant les émeutes. Nous croyons

intéressant de reproduire cette description 1.

Dans les émeutes populaires, il y a toujours un certain nombre

d'hommes qui, soit un effet de la violence de leurs passions, soit

par une persuasion fanatique, un dessein criminel, un infernal

amour de destruction, font tout ce qu'ils peuvent pour pousser les

choses au pire. Ils proposent ou appuient les projets les plus bar-

bares ; ils attisent le feu chaque-fois qu'il semble se ralentir.

Rien n'est jamais trop violent pour eux ; ils voudraient que le

tumulte n'eut ni mesure ni fin. Mais, pour servir de contre-poids, il

y a toujours un certain nombre d'autres hommes qui, peut-être avec

la même ardeur et la même obstination, s'appliquent à obtenir

l'effet contraire, ceux-ci portés d'amitié ou de partialité pour les

personnes qu'on menace, ceux-là sans autre impulsion qu'une

' Manzoni, Les Fiancés, trad. Hev. Dusseuil. Bibliolh. Charpentier.

516 VARIA.

pieuse et soudaine horreur du sang et du crime. Que le ciel les

bénisse ! Dans chacun de ces partis opposés, encore bien qu'il n'y

ait jamais de mesures concertées d'abord, la conformité des

volontés fait naître un concours subit dans les opérations. Ce qui

compose ensuite la masse et même le matériel du tumulte, c'est un

vaste mélange d'hommes qui. par .des nuances et des gradations

infinies, tiennent à l'une et à l'autre de, ces extrémités ; un peu

échauffés, un peu coquins, penchant un peu vers une certaine jus-

tice comme ils l'entendent, un peu affamés de voir quelque bonne

scélératesse, prompts à la férocité et à la miséricorde, à l'adoration

et à l'exécration, selon que l'occasion se présente d'éprouver l'un

ou l'autre sentiment; avides à chaque instant de savoir, de croire

quelque chose d'étrange; éprouvantle besoin de crier, d'applaudir

o,u de hurler contre quelqu'un.

Qu'il vive ! et qu'il meure ! sont les mots qu'ils aiment à jeter.

Si l'un a réussi à leur persuader qu'un tel n'a pas mérité d'être

écartelé, on n'a pas besoin de dépenser plus de paroles pour les

convaincre qu'il est digne d'être porté en triomphe. Acteurs, spec-

tateurs, instruments, obstacles, tout va selon le vent : prompts

aussi à se taire quand personne ne leur donne le mot, à se désister

quand les instigateurs manquent ; à se débander quand plusieurs

voix d'accord et non contredites ont dit : « Allons nous-en », et à

s'en retourner chez eux en se demandant l'un à l'autre : a Qu'est-

ce donc ? » Toutefois, comme, en de telles occurences, cette masse

a la plus grande force, qu'elle est la force même, chacun des deux

partis actifs use de toute son habileté pour l'attirer à lui, pour

s'en rendre maître. Ce sont comme deux âmes ennemies qui com-

battent pour entrer dans ce vaste corps et le faire mouvoir. C'est

à qui saura le mieux répandre les bruits les plus propres à exciter

les passions, à diriger les mouvements en faveur de l'une ou de

l'autre intention ; c'est à qui saura le plus à propos trouver les

nouvelles qui excitent l'indignation ou la tempèrent, mettre enjeu

les espérances et les craintes ; c'est à qui saura trouver le cri qui,

répété de bouche en bouche, exprime, atteste et forme en même

temps le voeu du plus grand nombre, pour l'un ou pour l'autre

parti.

Nous avons fait tout ce longbavardage pouren venir à dire que,

dans la lutte entre les deux partis qui se disputaient le voeu du

peuple rassemblé en foule devant la maison du vicaire l'apparition

d'Antonio Ferrer donna presque en un instant un grand avantage

au parti des modérés, qui avaient visiblement le dessous. Si ce

secours avait encore un peu tardé d'arriver, il n'aurait plus eu ni

la force ni un but pour combattre. L'homme était agréable à la

multitude à cause de ce tarif de son invention si favorable aux

acheteurs, et à cause de son héroïque résistance contre tout rai-

sonnement contraire. Les esprits déjà portés en sa faveur étaient

VARIA. 517

maintenant encore plus touchés de la courageuse confiance d'un

vieillard qui, sans gardes, sans appareil, venait trouver et affron-

ter une multitude courroucée et tumultueuse. Cet avis qu'il venait

prendre le vicaire pour le conduire en prison, faisait ensuite un

admirable effet. La fureur contre ce malheureux se serait soulevée

plus terrible encore si l'on était venu la braver et si l'on n'y. avait

voulu faire aucune concession ; mais avec cette promesse de satis-

faction, ou, pour le dire à la milanaise, avec cet os danslabouche,

elle s'apaisait un peu et donnait place aux autres sentiments

opposés qui naissent dans une grande partie des esprits.

Les partisans de la paix, ayant repris haleine, secondaient Ferrer

de cent manières : ceux qui se trouvaient près de lui, en excitant

à chaque moment par leurs applaudissements, l'applaudissement

public, et cherchant en même temps à faire un peu reculer le

monde pour ouvrir un passage au carrosse; les autres en applau-

dissant, en répétant et en faisant courir ses paroles ou celles qui

paraissaient les meilleures qu'il pût dire, en imposant silence aux

furieux obstinés et en tournant contre eux la nouvelle passion de

la mobile assemblée : « Qui est celui qui ne veut pas qu'on dise vive

Ferrer ? Tu ne voudrais donc pas, hé ! que le pain soit à bon marché ?

Ce sont des coquins, ceux qui ne veulent pas d'une justice de chré-

tiens ; et il y en a parmi ceux qui crient plus fort que les autres

pour faire sauver le vicaire. En prison, le vicaire ? vive Ferrer ! place

à Ferrer ! » Le nombre de ceux qui parlaient ainsi allant toujours

en augmentant le nombre du parti contraire diminuait sans cesse.

Les premiers en vinrent même a donner sur les doigts à ceux

qui voulaient tout ruiner, à les maltraiter, à leur retirer les outils

des mains. Ceux-ci écumaient de rage, menaçaient même, cher-

chaient à se relever ; mais la cause du sang était perdue; le cri

qui dominait, c'était : « Prison, justice, Ferrer ! » Après unecourte

lutte, ceux-ci furent vaincus; les autres s'emparèrent de la porte,

et, pour la défendre contre de nouveaux assauts et pour préparer

l'entrée à Ferrer. L'un d'eux, en criant au travers (car les fentes

n'y manquaient pas), avertit les gens de la maison qu'il était venu

du secours, et que le vicaire eut à se tenir prêt « pour aller tout de

suite... en prison. Hein ! vous comprenez !

Est-ce ce Ferrer qui aide à faire les ordonnances ? demanda à un

de ses voisins notre Renzo, qui se souvint du aiclil Ferrer que le

docteur lui avait montré au bas de la fameuse ordonnance que l'on

sait, et qu'il lui avait fait sonner à l'oreille.

- Justement, le grand chancelier, lui répondit-on.

C'est un galant homme, n'est-il pas vrai ? -

C'est bien plus, vraiment, qu'un galant homme ! C'est lui qui

avait mis le pain à bon marché ; ils ne l'ont pas voulu, et mainte-

nant il vient chercher le vicaire pour le mener en prison, parce

qu'il n'a pas agi selon la justice. ».

518 VARIA.

Il est inutile de dire que Renzo fut aussitôt pour Ferrer. Il vou-

lait aller à sa rencontre. La chose n'était pas facile; mais avec ses

coups de pied, ses coups de coude de montagnard, il parvint à se

faire jour et à se porter au premier rang, juste à côté de la voi-

ture. La voiture avait déjà pénétré dans la foule ; dans ce moment

elle était arrêtée par un de ces écueils inévitables et fréquents dans

une telle promenade.

Le vieux Ferrer présentait tantôt à l'une, tantôt à l'autre des

portières, une figure tout humble, toute douce, tout aimable, une

figure qu'il avait toujours tenue en réserve pour le jour où il vien-

drait à se trouver en présence de don Philippe IV ; mais il fut con-

traint de la dépenser en cette occasion. Il parlait aussi, mais le

bruit et le bourdonnement de tant de voix, les vivat même qu'on

poussait pour lui ne laissaient entendre qu'à peine et bien peu de

ces discours. Il s'aidait aussi du geste : tantôt il portait le bout de

ses doigts unis sur ses lèvres pour y prendre un baiser que ses

mains en s'ouvrant aussitôt, distribuaient à gauche et il droite

comme pour rendre grâce de la bienveillance que lui témoignait le

public ; tantôt il les allongeait et les agitait lentement' hors de la

portière pour demander un peu de place; tantôt il les baissait

poliment pour demander un peu de silence. Quand il en avait uu

peu obtenu, les plus voisins entendaient et répétaient ses paroles :

« Pain, abondance. Je viens pour faire justice; un peu de place, de

grâce. » Etouffé ensuite et comme suffoqué du bourdonnement de

tant de voix, de la vue de tant de ligures enflammées, de tant de

regards fixés sur lui, il se tirait un moment en arrière, gonflait

ses joues, en chassait le vent à grand bruit, et se disait à part :

PO}'11 ! i vida, que de gentes ! (sur ma vie, que de monde ! )

« Vive Ferrer ! N'ayez pas peur. Vous êtes un brave homme. Du

pain ! du pain ! .

Oui du pain ! du pain ! répondit Ferrer.

Abondance ! je vous le promets, moi » ; et il mettait la main

sur son coeur. « Ouvrez-moi le passage, ajoutait-il ensuite en

criant de toutes ses forces, je viens pour le mener en prison, pour

lui infliger un juste châtiment. » Et il ajouta a voix bien basse :

Si est aculpable (s'il est coupable).

Se baissant ensuite vers son cocher, il lui disait, en hâte : Ade-

lante, Pedro, si puedes (en avant, Pedro, si tu peux).

Le cocher souriait aussi au peuple avec une politesse affectueuse

comme s'il avait été un grand personnage ; et avec une grâce inef-

fable ; il promenait lentement, le fouet à droite et à gauche, pour

demander aux voisins incommodes de se ranger et de se retirer

un peu sur les côtés. « De grâce, disait-il aussi, Messieurs, un peu

de place, un tant soit peu, à peine de quoi passer. »

En attendant, les officieux les plus actifs s'employaient pour

faire le passage demandé avec tant de grâce.

VARIA. 519

Quelques-uns, devant les chevaux, font retirer le monde avec

de bonnes paroles, en leur mettant les mains sur la poitrine, en

les poussant doucement : « la, la, un peu déplace, messieurs. »

Les autres faisaient le même manège aux deux côtés du carrosse

pour qu'il pût courir sans effleurer les pieds ni caresser les

visages; accident qui, outre le mal qui aurait pu en résulter,

aurait fait courir de .grands risques à la popularité d'Antonio

Ferrer.

Renzo, qui avait été quelques instants à regarder avec complai-

sance cette respectable vieillesse, un peu troublée par le chagrin,

tourmentée par la fatigue, mais animée par la sollicitude embellie,

pour ainsi dire, par l'espérance d'arracher un homme à des

angoisses mortelles ; Renzo, dis-je, laissa de côté toute idée de

retraite. Il résolut de prêter main-forte à Ferrer, et de ne pas

l'abandonner jusqu'à-ce qu'il fut venu à bout de ses desseins. Il se

mit aussitôt avec les autres à faire faire place, et il n'était, certes,

pas un des plus paresseux. Un passage s'ouvre. « Avancez, avan-

cez », disaient quelques-uns au cocher en se retirant ou en courant

en avant pour faire ranger le monde un peu plus loin. « Adelan/e

presto, coa juicio, (en avant, vite, avec précaution) » lui dit aussi

le patron ; et le carrosse se mit en mouvement.

Au milieu des saluts qu'il prodiguait à l'aventure au public.

Ferrer en adressait certains autres de remerciement, avec un sou-

rire d'intelligence, à ceux qu'il voyait s'employer pour lui : Plus d'un

de ces sourires fut adressé à Renzo, qui, en vérité, les méritait

bien, et servait en ce jour le grand chancelier mieux que ne l'aurait

pu faire le plus intrépide de ses secrétaires. Le jeune montagnard

extravaguait de joie de cette politesse; il lui semblait presque

qu'il s'était lié d'amitié avec Antonio Ferrer.

La voiture, une fois en mouvement, poursuivit sa route avec

plus ou moins de lenteur, et non sans s'arrêter de temps à autre.

Le trajet était très court; mais eu égard au temps qu'on y mettait,

il aurait semblé un petit voyage même à qui n'aurait pas eu la

sainte hâte de Ferrer. Le peuple se pressait, s'agitait en avant, en

arrière, à droite, à gauche du carrosse, comme des dauphins

autour d'un vaisseau qui s'avance, battu par la tempête. Le fracas

était plus perçant, plus discordant, plus étourdissant que celui de

la tempête. Ferrer, en regardant tantôt d'un côté, tantôt de l'autre,

en s'agitant et en gesticulant toujours, cherchait à -entendre

quelque chose pour régler là-dessus ses réponses. Il voulait, pour

mieux faire, entamer la conversation avec cette troupe d'amis;

mais la chose était difficile, la plus difficile peut-être qu'il eût

encore rencontrée dans ses longues années de service à la grande

chancellerie. De temps en temps pourtant, quelque mot, quelque

phrase même répétée par l'assemblée sur son passage, se faisait

entendre comme l'éclat d'une grosse fusée domine le bruit confus

520 VARIA.

d'un feu d'artifice. Lui, tantôt en se mettant en quatre pour

répondre d'une manière satisfaisante à ces cris, tantôt criant de

toute la force de ses poumons les mots qu'il savait devoir être les

mieux accueillis, ou que quelque nécessité subite semblait deman-

der, leur parla tout le long de la rue : « Oui, messieurs, pain,

abondance. Je le mènerai en prison; il sera châtié..., si esta cul-

pable (s'il est coupable). Oui, oui, je l'ordonnerai, moi; le pain à

bon marché. Asi es... Cela est ainsi, veux-je dire. Le roi notre

Seigneur ne veut pas que ses fidèles sujets souffrent la faim. Ox, ox,

guardaos. (Ho ! ho ! prenez garde.) Qu'on ne vous fqsse pas de mal,

messieurs. Pedro, adelante con juicio (Pedro, en avant, avec pré-

caution), abondance, abondance ! un peu de place par charité.

Pain ! Pain ! en prison ! en prison ! Qu'est-ce... ? » demandait-il

ensuite à un homme qui avaitjeté la moitié de son corps dans la

portière pour lui hurler un conseil, une demande, un applaudisse-

ment, n'importe quoi. Mais celui-ci sans vouloir entendre le

« Qu'est-ce ? » avait été tiré brusquement en arrière par un autre

qui le voyait sur le point d'être écrasé sous les roues. A travers les

acclamations réitérées, à travers aussi quelque frémissement

d'opposition qui se faisait entendre çà et là, mais qui était aussitôt

comprimé, voilà que Ferrer arriva enfin à la maison, grâce surtout

à ses bons auxiliaires.

Les autres qui, comme nous l'avons dit, étaient là avec les

mêmes bonnes intentions, avaient, en attendant, travaillé à faire

et à refaire un peu de vide. Prière, exhortation, menace, ils avaient

tout employé; ils poussent, ils pressent, ils foulent aux pieds deçà

et delà avec ce redoublement d'ardeur et de force que donne tou-

jours l'approche d'une issue désirée. Ils étaient parvenus a partager

la foule en deux, et ensuite à rejeter les deux files en arrière, si

bien qu'entre la porte et le carrosse, qui s'arrêta devant, il y avait

un petit espace libre. Renzo, qui, en faisant un peu le batteur

d'estrade et un peu le guide, était arrivé avec le carrosse, put

trouver place dans l'un de ces deux remparts d'officieux qui fai-

saient en même temps face au carrosse et servaient de digues aux

deux flots frémissants de peuple. En aidant à en soutenir une avec

ses puissantes épaules, il se trouva très bien placé pour voir.

Ferrer respira en voyant la place libre et la porte encore fermée,

ou, pour mieux dire, pas encore ouverte.

Du reste les gonds étaient plus qu'ébranlés dans leurs fonde-

ments ; les huisseries en éclats, brisées, enfoncées, fendues vers le

milieu, laissaient voir par une large brèche un bout de cadenas

tordu, forcé et presque arraché, qui, pour ainsi dire, les tenait

jointes ensemble. Un officieux s'était mis à ce pertuis à crier qu'on

ouvrit, un autre accourt pour ouvrir la portière du carrosse; le

vieillard met la tête dehors, se lève, et s'appuyant de la main sur

le bras de ce digne homme, il pose le pied sur le marchepied.

VARIA, 521

La foule se soulève de tous côtes pour voir; mille figures, mille

nez sont à l'air. La curiosité et l'attention générale font naitre un

moment de silence. Ferrer s'arrête en ce moment sur le marche-

pied ; il promène ses regards autour de lui, s'incline pour saluer

le peuple, met la main' sur le coeur et crie : « Pain et justice ! » »

Revêtu de sa toge, la tête haute, la démarche assurée, il descend à

travers les acclamations qui montent jusqu'au ciel.

Les gens de la maison avaient, en attendant, ouvert la porte, où,

pour mieux dire, avaient fini d'arracher le cadenas et les anneaux

déjà' chancelants. Ils firent une ouverture pour donner l'entrée à cet

hôte si désiré, en mettant toutefois un grand soin il borner l'ouver-

ture à l'espace que son corps pouvait occuper. « Vite, vite, disait

celui-ci, ouvrez-bien, que je puisse entrer; et vous, en braves gens

contenez le peuple, et ne le laissez pas venir derrière moi..., pour

l'amour du ciel... ! Préparez un peu de passage pour tantôt, à l'ins-

tant. Aïe, aïe ! messieurs, un moment, disait-il ensuite aux gens

de la maison ; doucement avec cette porte; laissez-moi passer. Hé,

mes côtes ! je vous recommande mes côtes. Fermez, maintenant.

Non, hé, hé ! ma robe ! ma robe ! Elle serait restée prise entre les

jointures si Ferrer n'en avait pas retiré avec précipitation la

queue. Elle parut comme la queue d'un serpent qui, poursuivi se

cache dans un trou.

Les portes, refermées du mieux que l'on pouvait, étaient, en

attendant, étayées par derrière avec des supports. Au dehors, ceux

qui s'étaient constitués gardes du corps de Ferrer travaillaient des

épaules, des bras et de la voix à maintenir la place vide, en priant

du fond du coeur leur seigneur Dieu qu'il eût bientôt fait.

« Vite, vite, disait encore celui-ci dans la maison, sous leportique,

aux serviteurs qui l'entouraient essoufflés et criant : soyez béni !

Ah ! Excellence ! Oh ! Excellence ! Juste ciel ! Excellence ! 1

Vite, vite, répétait Ferrer; où est ce cher homme ? »

Le vicaire descendait l'escalier, demi entraîné, demi porté par

les autres domestiques, pâle comme la mort.

Quand il vit son sauveur, il poussa un grand soupir ; il lui revint

un peu de pouls, il lui courut un peu de vie dans les jambes, un peu

de couleur sur les joues, et il se hâta d'arriver devant Ferrer en

disant : « Je suis dans les mains de Dieu et, de votre Excellence.

Mais comment sortir d'ici ? nous sommes entourés de toutes parts

de gens qui veulent ma mort.

Vengea con migo, llsted (venez avec moi) et prenez courage. Ma

voiture est là dehors : vite, vite. » Il le prend par la main et le con-

duit vers la porte en le rassurant durant tout le trajet, mais en

disant en son coeur : Aqui està et busilis ! Dios nos valga ! (Voici le

point difficile, que Dieu nous soit en aide). -

La porte s'ouvre; Ferrer sort le premier; l'autre le suit, tout

rapetissé, cramponné, collé à cette toge protectrice comme un

822 2 - VARIA. ,

petit enfant à la jupe de sa mère. Ceux qui avaient maintenu la

place libre lèvent aussitôt les mains, agitent leurs chapeaux, ils

font en quelque sorte un nuage pour soustraire le vicaire à la vue

dangereuse de la multitude. Celui-ci entre le premier dans le car-

rosse et se tapit dans un coin. Ferrer monte ensuite; la portière se

ferme. Le peuple entrevoit, sait, devine ce qui est arrivé, et il

envoie un bruit confus d'applaudissements et d'imprécations.

La partie du voyage qui restait à faire semblait la plus difficile

et la plus dangereuse. Mais le voeu public pour laisser aller le

vicaire en prison s'était suffisamment manifesté : et pendant que

la voiture s'était arrêtée plusieurs de ceux qui avaient favorisé

l'arrivée de Ferrer s'étaient encore plus appliqués à préparer et à

maintenir un chemin au milieu de la foule; le carrosse put au

retour, courir avec un peu plus de vitesse et sans intervalles. A

mesure qu'il s'avançait les deux foules rangées. sur les côtés se

confondaient ensemble et se réunissaient derrière.

Ferrer, à peine assis, s'était baissé pour avertir le vicaire qu'il

se tint bien caché dans le fond, et qu'il ne se laissât point voir,

pour l'amour du ciel ; mais l'avis était inutile.....

LE martyrologe DES asiles. L'attentat de l'Asile clinique.

La série rouge dont nos asiles s'ensanglantent se poursuit avec

une désolante persistance, depuis quelques mois; avec les moits

tragiques des infirmiers victimes des malheureux insensés qu'ils

soignaient à Paris, puis à Villejuif, nous avons eu à déplorer les

attentats contre les médecins aliénistes :

Celui de M. le Dr Devay, à Lyon, tout d'abord, pour ne pas

remonter plus loin ; ici, l'intervention du savant chirurgien

Jaboulay, parvint à sauver notre collègue, frappé dans des condi-

tions analogues.

Le DrVorster, frappé de même d'un poignard au ventre, périt,

il y a quelques mois, dans son asile, en Allemagne, de la.. main

d'un de ses malades ; et voici qu'à l'asile clinique, le Dr Vallon

tombe frappé d'une lame à la nuque, le mardi 4 octobre, à dix

heures du matin, au cours de sa visite médicale.

Hâtons-nous de dire que les conséquences de l'attentat n'ont

pas été aussi graves qu'on l'a craint tout d'abord et avec raison.

Tout danger pour la vie est écarté aujourd'hui. Notre ami et

dévoué collaborateur ne présente plus qu'un affaiblissement de la

motilité dans le côté droit du corps et une diminution de la sensi-

bilité dans le côté gauche, accidents en voie d'amélioration.

L'instrument de l'attentat est une lame effilée, longue de

8 centimètres, solidement emmanchée, dont l'origine n'est pas

encore établie : vient-elle du dehors ? fut-elle dérobée à l'éplu-

chérie ? l'enquête l'établira; toujours est-il que le malade la tint

VARIA. z3 3

cachée dans son béret tous ces jours derniers, préméditant son

acte 1.

Il avait été, par M. Vallon même, soustrait aux poursuites judi-

ciaires comme irresponsable.

M. Vallon, depuis vingt ans, s'est spécialement consacré à

l'étude des délicats problèmes de la médecine légale ; il tombe

victime, à la fois de son dévouement professionnel de médecin

d'asile et de son apostolat médico-légal. Le malade qui l'a frappé

avait été deux fois sauvé par lui des -condamnations que ses actes

dangereux entraînaient, mais dont son état psychique morbide le

fit déclarer indemne.

. LES établissements d'aliénés ET LE pari mutuel.

La commission extraparlementaire du pari mutuel a examiné la

question de principe suivante : les établissements d'aliénés doi-

vent-ils être considérés comme oeuvres de bienfaisance et appelés,

à ce titre, à bénéficier du prélèvement de 2 p. 100 opéré en faveur

de ces oeuvres sur les sommes engagées au pari mutuel ? La com-

mission, à l'unanimité, a déclaré que les charges résultant de la

construction et de l'entretien des établissements d'aliénés étaient

essentiellement départementales et qu'il était impossible d'assi-

miler ceux-ci aux oeuvres de bienfaisance pour lesquelles la loi de

1893 a stipulé un prélèvement sur le pari mutuel. (L'Aurore du 21

novembre 1904).

LES dangers DE l'hypnotisme.

Sous ce titre : Une affaire d'hypnotisme, le Progrès de Lyon du

3 novembre, raconte ce qui suit : Le tribunal correctionnel de Dôle,

avait à connaître en sa dernière audience d'une espèce comme

on dit au Palais assez particulière et que nos tribunaux n'ont

pas eu à juger souvent jusqu'ici. Voici sommairement exposée l'af-

faire dont il s'agit :

Un jeune boulanger de notre ville, le sieur Victor Latcha, âgé

de vingt-deux ans, originaire de Montbéliard (Doubs), se livrait,

en amateur, depuis trois années, aux pratiques mystérieuses de

l'hypnotisme et de la suggession mentale, pratiques dans lesquelles

il avait obtenu, il faut le reconnaître, certains succès. C'est ainsi

qu'à Dôle, où il travaillait depuis quelques mois, chez M. Natt,

boulanger, il avait expérimenté ses connaissances en hypnose sur

maints et maints jeunes gens de la ville.

Au mois de juillet dernier, le jeune Henri Bertaut, âgé de seize

ans, fils d'un honorable conseiller municipal de Dôle, se prêtait

bénévolement aux expériences successives de Latcha, mais bientôt

ce nouveau sujet tombait en des crises d'hystérie répétées, avec

' Voir les nos il et 43 du Progrès médical de 1904

S24 faits divers.

aggravation de catalepsie, anesthésie et troubles qui l'obligèrent à

garder le lit deux mois durant et desquels il parait à peine guéri

aujourd'hui.

Plainte fut donc portée par le père du jeune malade; une enquête

' laborieuse intervint et finalement, après qu'une expertise médico-

légale eût été ordonnée, laquelle fut confiée à M. le docteur Jour-

niac, médecin à l'asile de Saint-Ylie, l'hypnotiseur en question se

voyait poursuivi, à la reqnéte du Parquet, pour violences sur la

personne d'autrui, violences ayant entraîné pour la victime une

incapacité de travail de plus de vingt jours.

A l'audience, l'inculpé ne nie pas les pratiques auxquelles il se

livrait depuis quelques années, mais il essaie d'expliquer- que le

jeune Berthaux était plutôt prédisposé à l'hystérie. Il ajoute qu'au-

cun des sujets qu'il a endormi n'a éprouvé le moindre trouble.

L'interrogatoire terminé, M. Couchepin, procureur de la Républi-

que, dans un lumineux et très savant réquisitoire, qui a duré près

d'une heure, regrette tout d'abord que la loi soit désarmée en

France vis-à-vis de l'hypnotisme, tandis que certains pays étran-

gers, comme la Russie, l'Allemagne, le Danemark et l'Autriche

possèdent des lois et règlements restrictifs de la liberté desdites

pratiques.

M. le procureur lit ensuite de longs extraits du livre de Gilles

de la Tourette où des cas semblables à celui du jeune Berthaux

sont relevés, des personnes qui de santé excellente jadis ont vu

leur état général physiologique et mental pérécliteretlamort même'

les atteindre après avoir servi de champs d'expériences à des hyp-

- notiseurs, tels que Donato et autres exhibitionnistes. En consé-

quence le ministère public demande une condamnation sévère au

tribunal, duquel il attend un verdict qui fera, il l'espère, jurispru-

dence en la matière. L'affaire a été en délibéré mardi et le juge-

ment intervenu jeudi a condamné Latcha à 200 francs d'amende

et aux frais qui, vu l'expertise médicale et les enquêtes prélimi-

naires, seront assez élevées pour le condamné.

FAITS DIVERS.

Asiles d'aliénés. Mutations octobre 1901. M. le D1' JLWPATÉ,

docteur-médecin à Naugeat (Haute-Vienne), nommé en la même

qualité à La Charité (Nièvre). \I. le D' BROQUÈRE, directeur-méde-

cin à Laval (Mayenne), nommé en la même qualité à Naugeat

(Haute-Vienne). -111. le Dl' Pain, médecin-adjoint à Laval (Mayenne),

nommé directeur médecin du même établissement. - JI. le D' NOL1,

BULLETIN bibliographique. lui25

directeur-médecin à St-Illan (Lozère), nommé à la classe excep-

tionnelle du cadre à partir du le, octobre 1904. M. le Dr COLIN,

médecin en chef des asiles d'aliénés de la Seine, promu à la 2° classe

du cadre. - M. le De VIALLON, médecin en chef à l'asile d'aliénés-

de Brou (Rhône), promu à la 2° classe du cadre. - M le Du

Lépine, médecin-adjoint à l'asile d'aliénés de Pau, nommé en la

même qualité à Brou. M. le De JUQLELIER, 4° du concours de

1904, nommé médecin-adjoint de l'asile d'aliénés de Laval (Mayenne).

Asiles d'aliénés, - Nominations et promotions. Mouvement de nou.

M. le Dr Cornu, 4° du concours 1904 nommé médecin-adjoint à

Pau en remplacement de M. le Dr Lépine nommé à Bron. - M. le

Dr Vernet, médecin en chef à l'asile de Maréville, promu à la

classe exceptionnelle du cadre. M. le Dr LwoFr., médecin-direc-

teur de l'asile de Moisselles, nommé médecin en chef de l'asile de

Maison-Blanche (Seine), en remplacement de M.' le D1' Taguet

admis à faire valoir ses droits à la retraite et nommé médecin en

chef honoraire. M. le Dr TRE.,iEL, médecin en chef à Ainay-le-

Château, nommé directeur-médecin à l'asile de Moisselles. -111. le

D' Bonnet, médecin en chef à l'asile Saint-Robert, nommé méde-

cin en chef à la colonie familiale à Ainay-le-Chàteau. M. le

Dr Caperas, médecin-adjoint à l'asile de Dury (Somme), nommé

médecin-adjoint à la colonie familiale à Dun-sur-Auron. - 11. le' 1

D Dupain, médecin en chef de l'asile de Vaucluse, promu à la pre-

mière classe du cadre. M. le D' DEZIHRTE, médecin-adjoinl à

Bailleul, nommé médecin-adjoint à Laval en remplacement de

M. le De Pain nommé directeur-médecin.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

G.wneie. - Rapport médical pour l'année 1903 de l'asile dépa1'lemen-

tal d'aliénés de Dijon. 1 vol. de 102 pages. Jl11p. Sirodot-Carré, Dijon,

1904.

HL'GEOBLEK (J.) . Ecoles régionales pour les sourds-muets et les aveu- ! /les. In-8» de 22 pages. Imp. Starck à Lyon.

Marie (A.). Névrose et paralysie générale. In-S° de 24 nages. Imp.

Severeyns. Bruxelles, 1904.

T/te Seguin pltysiolo,qical School. In-So de 36 pages.

N'oBiNs (L. J.). Ansgervahlle 11'er/ce. Band V. Nietzsche, 1904. 111..

4.50. Librairie J.-A. Barths, à Leipzig.

EXPLICATION DES PLANCHES

Les Planches (p. 40), PL. II (p. 47), Pt., III (p. 48), Pt.. IY (p..1,9)

ont été intercalées dans le texte et décrites dans la relation de l'au-

topsie.

Planche Y. Base de l'encéphale de ¡¡am... (\'oir p. 473). - Elle

montre l'atrophie de l'hémisphère droit et de hémisphère cérébelleuse

gauche. 1 , -

Planche VI. Face convexe de l'encéphale : Mi,eux que la précédente,

cette planche montre très nettement le degré d'atrophie de l'hémisphère

cérébral droit. '

Planche VII. Hémisphère cérébral gauche : face interne. F', frontale

interne, avec un pli sinueux, F", faisant une saillie notable sur le plan

de F' LP, lobe paracentral. CCC, pli doublant la circonvolution

du corps calleux, cachée par le trigone Tg et le septum lucidum; il

aboutit en arrière au lobe paracentral. Tgp, pilier postérieur du tri-

gone ( ? ). - Scnx, partie du sillon calloso-marginal. CS, tète du corps

strié, dont l'autre partie est cachée par le trigone Tg. CO, couche

optique. NO, nerf optique. - PC, pédoncule cérébral. - il, incisure

temporale très marquée. -, CII, circonvolution de l'hippocampe, -

LQ, lobe carré. C, coin. - LO, lobe occipital. L, f, lobe fusiforme très

volumineux. T', troisième temporale.

Planche VIII. Hémisphère droit : face convexe. LF. lobe frontal;

toutes ses circonvolutions sont atteintes de sclérose atrophique à un

degré extrêmement prononcé. FA, PA, frontale et pariétale ascen-

dantes paraissant confondues (Voir PL. IX). - SS. Scissure de Sylvius

très distincté. En écartant ses lèvres on voit le lobule de l'insula très

atrophié. La digitation antérieure, très atrophiée, existe dans toute sa

longueur. La deuxième dotation est réduite à une courte crête. Les

autres digitations ont disparu, d'où une surface plane, d'aspect un peu

vitreux. LT, lobe temporal, dont les circonvolutions sont extrême-

ment atrophiées, P', lobule pariétal supérieur. - P'- lobule pariétal

inférieur. LO, lobe Qccipital.

Planche IX. Hémisphère cérébral droit : face convexe. - L'hémis-

phète est renversée en dehors afin de bien mettre en évidence la frontale

et la pariétale ascendantes confondues sur la Planche VIII, ainsi que le

sillon de Rolando, SR.

Planche X. Hémisphère droit : face interne. LF, lobe frontal. F'.

portion de la première frontale ou frontale interne. - LP, lobe para-

central. ' CCC, circonvolution du corps calleux. CC, corps calleux

très réduit. -, CS, corps strié. f0, couche optique. PC, pédoncule

cérébral.

Planche XI. Hémisphère droit : face inférieure. LO, lobe orbi-

taire. LT, lobe temporal composé de circonvolutions très atrophiées.

- LO, lobe occipital. ·

Le rédacteur-gérant : Bourneville.

!

ARCHIVES DE NEUROLOGIE, 1904, T. XVIII. 1 PL. V.

t

Archives DE NEUROLOGIE, 1904, T. XVIII. PL. VI.

Archives -de NEUROLOGIE, 1904, T. XVIII. PL. VII,

Archives de neurologie, 1904, T. XVIII. PL. VIIbis.

acenes DE NEUROLOGIE, 1904, T. XVIII. PL. VIII.

umes ue wuun.o,re, 1904, T. XVIII. Pr, lx.

Archives de neurologie. 1904, T. XVIII. PL. X.

1 HCIlI \'E" DE NEUROLOGIE, 1 ! )0-l, 'l'. XVIII. PL. XI.

1

TABLE DES MATIERES

Abasie. Un cas particulier d' guéii i

par la suggestion, par Stembo,881.

Abcès. Voir Cerveau.

Accidents bllbaiues. D'origine au-

l'lculalre, par Bonmer, 71.

ACC011110DArI0\. Voir Centres cor-

ticaux.

AcnlloMATOPsIE. Voir Jlonochrolna-

lopsie.

Acide CACODYLIQUE. Le traitement à

t ? par Smult. 356.

ACIIOCY.1-NOSE chronique hypeitro-

phiante, par Péhu, 55.

Acromégalie. Contribution à l'étude

des échanges nutritifs dans 1 ?

par Paillon, 91. : : Splanchno-

. mégalie; gros coeur; mort par

asvstohe, par Paviot et Beutter,

487. Un cas d'- avec diabète.

Tuineui du corps pituitaire, par

Josserand et Beriel, 493. - soir

Gigantisme.

Acropaiiesthésies. Remarques sur

la pathologie des -, par Plclc,

51.

Adipose. Un cas d'- douloureuse,

par Raymond et Guillain, 74. >

Affections céhlbrales. Contribution

à la pathologie des -- toxiques

par Alter, 151. Des - mentales

et nerveuses à la période secon-

daire de la syphilis, par Schai-

kewitsch, 33G.

Agiuphie. Voir Cécité verbale.

AKATIIISIE. Nouvelles remarquables

sur 1 ? pa. Haskovec, 498.

Alcoolisme. La cure actuelle de

l ? par Legrain, 177. L'- en

Scandinavie, 445. L'- en Breta-

gne, par Ducrest Je Villeneuve,

502. Drames de l ? 524.

Alcooliques. Voir Suggestibilité.

- traités avec succès. - traites

avec succès, contre son gré et il

son insu. par suggestion pondant t

le sommeil naturel, par Farez,

178..

Aliénés. Les - en liberté, 93. -

Voir Os. Des mesures à prendre à

l'égard - CI iminels, par Keraval.

252. Contribution à la casuistique

de la léaction biologique des

cheveux des -, par Heinicke,

408. - Voir Crazzionzélrie. - Voir

Bains. Visite faite à un certain,

nombre d'établissement zen

Allemagne, Bavière et Autriche,

par de Maèie, 436. Colonie wal-

lonne ci,- de Lierneux; par De-

peron, 437. Les - en liberté,

if3. Les - enceintes, pli. -

criminels et asiles spéciaux, par

Boudin, 454. Le traitement des

, par Wagner, 501. Les derma-

toses chez les -, par Vinfield.

504. Singulières cachettes d'une

- , par Leroy, 508. Evasion d'un

- assassin, 513. 1

Amadrose. Voir Rétine. Etude du

nerf optique dans 1' tabétique,

par P. Marie et Léri. 77.

.1w·cLIE. Voir Anencéphalie .

Anatomie pathologique. L'état ac-

tuel de l ? du système nerveux

central, par Nissl. 154.

A : 'EI\CEPII ,"LIE. Un cas d'- avec

amyélie, par Brissaud et Bruan-

det, 488.

Anesthésie. Action des excitations

mécaniques faibles et repétées

sur l'- hystérique, par .\laânin,

82. Des rapports de l'- avec les

rêves et les cauchemars chez une

hystérique, par Jourdan, 312.

Angoisse. De l ? par Londe, 409.

Année PSYCIIOLOGIQUE. L'- -, 284.

Appareil. Notice sur un nouvel

pour les fractures de la rotule

chez les convulsionnaires et les

aliénés, par Beesau, 433.

Aphasie. Contribution à l'étude de

l'- sensorielle optique, par Ho-

senfeld, 329.

Aphasiques. Voir Lésions corticales.

Aponévrose. Note sur la rétraction

de l'- palmaire chez les aliénés,

par Féré et Francilien, 351.

Apraxie motrice. Contribution à la

psychologie de l ? par Pick,

422.

ë28 table DES matières

Argent, Voir Cylindraxes. - Voir

Neuro fibrilles.

A RTIflt0l ,l III E«Voir Syringomyélie.

AnTEllIO-SCLÉIi05E. Voir Ophtalmo-

Pléyie.

Aktuopatuies et Ostéopathies tabé-

tiques, par Destot, 494. ner-

veuse traitée par la résection,

par Patel et Cavaillon, 501.

Asile ' de Bron : condamnation

d'un infirmier.- d'aliénés : noms

des médecins en chef, des méde-

cins adjoints et nombre des.in-

ternes, 182. Les habitués des -

par Marie, 276. d'aliénés :

mouvements de mai, juin et juil-

let 1904. 287. - public d'aliénés

de Lesvellec. 367. d'aliénés de

Villejuif, 367. - d'Alençon. 367.

- d'aliénés des PjTénées-OI ien-

tales, 421. De la protection de la

fortune des malades dans les -

d'aliénés, par S. Garnier. 434.

Des sorties d'essai et des congés

de distractions dans les d'alié-

nés, par Hospital, 434. Sur l'au-

tonomie d'un public d'aliénés,

par Dumas. 435. L'- 'de Galk-

hausen, par de Maëre, 435. Sta-

tistique clinique des alcooliques

traités à l'- de Bel-Air en 1901

et 1902, par Papadaki, 435. -

d'aliénés. Mouvement de septem-

bre 1904, 416. - d'aliénés. Muta-

tions d'octobre et novembre, 525.

L'affaire de l'- de Nantes : 514.

L'attentat de 1'- clinique, 523.

Assistance des idiots ; 4-i3. - à

domicile : Séquestration et assas-

siiiat d'un dément, 444.

Astasie-abasie labyrinthique, par

Bcnnier, 53.

Ataxie. De l'- cérébelleuse : aiguë,

par Bechterew, Ï46.

Atrophies, cérébrales unilatérales,

par Paul-Boncour. 28.

AUTOC\'TOTOXIIOE spécifique et anti

dans le coma des épileptiques :

par Ceni. 150.

Bains. De l'application des d'air

chaud au traitement des aliénés

et des épileptiques, par Ger-

main, 431.

Basedow. Contribution à l'anatomie

pathologique de la maladie de - -1

par Kedzior, 351. Section du

sympathique cervical pour une

maladie de -, par Jaboulay, 499.

Bielscuowsivy. Voir Diplopie

Bulbe. Voir Malformations Cra-

tiennes.

Buveurs. Voir Dispensaire.

Calcium. Quelques expériences sur

l'action du sur l'écorce céré-

brale, par Ronconon, 401.

Caractère. Note relative à la ques-

tion des modifications du - à la

suite des lésions du cerveau, par

Fiiedmann, 325.

Catalepsie symptomatique et rythme

de Cheyne-Stokes, par Bauer. 52.

Catatonie. Observation de en

relation avec la première mens-

truation, par Mucha, 350.

Voir Troubles intellectuels. Con-

sidérations sur la -, par Cracq,

420.

Cauchemars. Voir Anesthésie.

Cécité verbale avec agraphie : par

Thomas, 74. Voir' Surdité.

Voir Paralysie.

Centres nerveux. Voir Kyste. Des

corticaux de l'accommodation,

par Bielitzky. 156.

Certificats d'aliénation. Secretpro-

fessionnel, 442.

Cerveau. Voir Caractère. Une ob-

servation d'abcès du , par

Gordinier, 4S9. Voir Maladie.

CERVELET. Atrophie du et sclérose

en plaques, par Thomas, 62.

Voir Tumeurs. Noie sur un cas

de ramollissement du avec

étude des dégénérescences secon-

daires, par Négel, 65. Lésions

du dans quelques formes

d'aliénation mentale, pai Bri-

dier. 486.

Chéilophagie. Voir Tics.

CHCILOPHOBIE. Voir Tics.

CHEIIt01fI : G : ILIE. Voir Syringomyélie.

Cheval. Voir Dégénérescence.

Cheveux. Voir Aliénés.

CHEYNE-STOKES. Von Catalepsie.

CHOMEE. Contribution à l'étude de

l'anatomie pathologique et de la

pathogénie de la - par Kopc-

zynslii, ù4. Accidents pseudo-mé-

ningitiques à répétition au cours

de l'évolution d'une de Syden-

ham chez un hystérique, pai

Barjon, 58. Deux cas de chro-

nique, congénitale molle ,

héréditaire de Iliintiii.1toil; par

Audry et Porot, 494.

COEUR. De l'appareil inhibiteur du

TABLE DES MATIÈRES. 529 9

chez les chiens nouveau-nés

par Gartié, 335.

COIT. Voir Circulation.

Colonne vertébrale. Fracture de la

- -. Lésion spinale limitée à une

minime partie d'étage radiculaire,

par Brissaud et Brecy, 63.

Congrès. XIV°. des médecins

aliénistes et neurologistes de

France et des pavs de langue

française (Pau, 1 ? 7 août 1904),

96, 191, 209. XXIII» des méde-

cins aliénistes et neurologistes

du S.-O. de l'Allemagne, 415.

Conjonctive. Voir Sensibilité.

Constitution IDCO-OUSESSIVE comme

forme psycho-pathologique auto-

nome, par Soukhanoff, 414.

Contracture. Sur un cas remarqua-

ble de post-hémiplégique, par

Devic et Gallavardia, 52. Voir

Paralysie.

Convulsions. Des rythmiques et

des mouvements automatiques

chez les hystériques, par Bechte-

rew, 326. Voir Paralysie géné-

rale.

Coprolalie. Voir Tics.

Cornée. Voir Sensibilité.

Corps étranger. Voir Mydriase.

Couche optique. Contribution à

l'étude des fonctions de la ?

par Benaky, 385.

Circulation. La cérébrale pen-

dantle coït, par Poussèpe, '162.

Crâne. Du ostéomalacique, par

Paviot et Mauriquand, 69.

CRANIO : uÉTRIE. La- chez les aliénés,

par Portougalow, 412.

CYLINDRAXES. - L'imprégnation des

- à l'argent, par Bielschowsky,

340.

Cytodiagnostic - Voir Tabès.

Di'.cUBirus. Voir Paralysie générale.

Dégénérescences secondaires. Voir

Cervelet. Voir Noyau rouge.

Des stigmates anatomiques, phy-

siologiques et psychiques de la

chez l'animal, en particulier

chez le cheval, par Rudler et Cho-

mel. 265.

Délire. Voir Imitation. Etat obsé-

dant point de départ d'une défor-

mation de l'épaule et suivi du

des négations, par Privât de For-

tunié, 169. hystérique traité

par la suggestion hypnotique, par

fililo de Majewska, 181. Deux cas

Archives, 2° série, t XVIII.

de - aigu traités avec succès par

les bains frais, par Doutrebente

et Marchand, 541. Traumatisme

et alcoolique, par Mabille. 260.

- de possession par les reptiles,

- de grossesse et entéro-colite

muco-membraneuse. par Mirallié,

272. De la pathogénie du spé-

cifique du paralytique, contribu-

tion aux recherches de pathologie

expérimentale sui la démence pa-

ralytique, par Wizel, 409. -

hypocondriaque de zoopalhie in-

terne chez un débile tabétique,

hystérique et gastropathe, par

Dupré et Lévi, 414. alcoolique

continu, par Soukhanoff et Mle-

densky, 503.

Démences. Les - vésaniques, par

Deny, 211. De certains caractères

psychologiques de la - précoce

et des limites de cette affection,

par Masselon, 231. de la pu-

berté, par Marie, 232. Sur la -

organique secondaire à quelques

délires chroniques hallucinatoi-

res, par Marie, 232. Un cas de

précoce avec autopsie, par Leroy

et Laignel-Lavastine, 232. De la

précoce chez les jeunes gens,

par Mefus, 419. Un cas de pré-

coce, avec autopsie, par Dunton,

504. Etiologie de la - précoce,

par ltoubinomtch et Phulpin, 506.

La vésanique n'est pas une

démence, par Toulouse et Demaye,

507.

Déments vésaniques. Plan graduel

et systématique d'exercice au

dehors pour les ? par Carlisle.

Adipose sous-cutanée symétrique

et segmcntaire chez une alcoo-

lique et hérédo-alcoolique, par

Deny et Le Play, 503 :

Dermatoses. Voir Aliénés.

Diabète. Voir Pschastéaie. Voir

Acromégalie

DIÈTE. Voir Epilepsie.

Difformité congénitale observée

chez un enfant de cinq ans, 394.

DiPLÉGiE. Sur la faciale périphé-

rique, par Panegrossi, 55.

Diplopie. Remarques critiques rela-

tives au mémoire de Bielschowsky

intitulé : monoculaire sans cau-

ses physiques, et considérations

sur la vision des strabiques, par

Storch, 319.

Dispensaire. Le anti-alcoolique

34

530 TABLE DES MATIÈRES.

de Paris et le traitement des bu-

veurs d'habitude, par Bérillon,

261.

DOIGT en valgus, par Pauly, 39f.

COULEUR. - Voir Neurasthénie.

Ecorce cérébrale. Lésions de l ?

et cérébelleuse chez une idiote

aveugle-née, par Taty et Giraud,

242. De l'influence de l'- et

des ganglions sous-corticaux sur

la contraction de l'utérus de la

lapine, par Plokhinsky, 394. Lé-

sions de l'- cérébelleuse chez

les paralytiques généraux, par

Taty et Jeanty, 480. L'- motuce,

par Farrar, 489.

ECOLES régionales pour les sourds-

muets et les aveules, par Huen-

tobler, 525.

ECTOSCOPIE L'- et l'ectothérapie

cérébrales, par Biafchi, 181.

Education physique. L ? appli-

quée au traitement des maladies

mentales, par Tissié, 263.

Electricité statique Les principes

de l'action thérapeutique de l'-

- , par Schatzky, 356.

Emeutes Psychologie des -, 515.

Encéphale. Du poids de l'- et de

quelques-unes de bes parties chez

le nourrisson et les enfants plus

âgés, par Pfister, 399.

Entants Anormaux. Les au

point de vue mental; leur traite-

ment et leur éducation, par Shut-

tleworth; traduite, par Ley, 285.

Pour les ? 437.

Epaule. Voir Syringomyélie. -Voir

Délire.

Epilepsie. L'- ne peut pas être

causée par des états toxémiques,

par Holl, 50. Pathologie et traite-

ment de l ? par W. Thomson.

70 Les résultats de la chirurgie

cérébrale dans l'- et dans les

défectuosités mentales congéni-

tales, par W. Spratling, 73. Trai-

tement de l'- par la diète, par

Schnitzer, 92. Voir Excitabi-

lité. -, pathogénie et indications

thérapeutiques, par Paris, 369.

Des facteurs héréditaires dans

l ? par Doran, 505. ,

EPILEPTIQUES. Voir Sang. - Voir

Alltocytotoxine. - Voir Sang.

Voir Bains. L'assistance publique

des -, par Parent, 13 1.

Erysipèle. Voir Névrite.

ESQUIHOL. Rapport sur le prix -,

par Vigouroux, 360

Etats vertigineux. Contribution à

l'étude du diagnostic et du traite-

ment de quelques - -, par Hoyet,

281. Sur les associations psychi-

ques obsédantes de contraste dans

les mélancoliques, par Soukha-

noff, 305

Euphorie délirante. Voir Phtisi-

ques. 1

Excitabilité. De l'- de la région

corticale motrice du cerveau à la

suite de l'attaque d'épilepsie. par

Ossipow et Borischpolsky,-325

Face. Voir Paralysie.

Faisceau longitudinal. Voir Reil.

Fibres. De la quotité des à myé-

line d'un cerveau normal et d'un

cerveau paralytique, par Schaffer,

155 Contribution à l'étude du

trajet des du goût, par Kron,

332. Existe-t-il une régénération

autogène des - nerveuses ? Con-

tribution il la théorie du neurone,

pat Muenzer, 396.

Fièvre hystérique Voir Hystérie.

Folie. Un cas de à deux avec

infériorité relative de l'organe

actif, par Dromard et Levassort,

168. La hallucinatoire qui se

développe à l'occasion d'une affec-

tion commune de l'ouie, par Bech-

terew, 413. Aperçus et démons-

trations sur la maniaque dé-

pressive, par Thomsen, 418. - 1

Voir Sang. puerpérale, par

Jones, 505.

Fou. Un furieux, 286. Terrible

lutte avec un , 287. Un -à la

tête dure, 363. Un - mysti-

que, 363. Les - au Brésil/par

Ridder, 503.

Fractures. Voir Colonne verlé

broie.

Gigantisme et acromégalie, par Lan-

nois ei Roy, 496. précoce avec

développement précoce des or-

ganes génitaux, par lludovernig

et Papovlk, 496.

Glandes. Les parathyroïdes.

Etude anatomique et expérimen-

tale, par Jouty, 88.

Gliome. Voir Ponction lombaire.

Goût. Voir Fibres.

Habitude. Des phénomènes morbi-

des d ? par Crocq, 't7.

TABLE DES MATIÈRES. â31 1

Ht,11[ \ : -IESTHÉSIE. De l'élément psy-

chique dans l'- hystérique, par

Bernheim, 343. Contribution à la

localisation del'cérébiate, par

Scliaffer, 395.

Hlmiataxie post-hémiplégtque et

coordination sous-corticale, par

Clapaiède. 53.

HÉmATROPIIIE. Un cas d'- faciale

progressive, par Calmette et Pa-

gens, 55. Voir 7< : ra ? e.

Hémicranie. Observation remarqua-

ble d ? par Flatau, 347.

IIÉwnÉme. Voir Phocomélie. - et

dégénérescence mentale, par La-

melle, 405. Sur une forme lare

d' radiale intercalaire, par Klip-

pelet Rabaud, 488.

Hémiplégie immédiate consécutive à

la ligature des carotides, par

Beutter, 485.

Hémiplégiques. Du trouble de la

marche chez les -, par Schuller,

338.

IIÉ\IISP.1531ES Sur les de la face,

par Lannois et Porot, 490.

Hémobuhagie cérébro-méningée à

symptômes méningitiques, par

Achard et Ramond, 509

fiMOEDO&YpmLis cérébrale tardive,

par Haudrix, 350.

Hippus. L'- dans la chorée, par

Cruchet, 510.

Hôpitaux pour aliénés militaires,

365.

Hypnothéuapie. Le facteur efficace

en -. par Geijerslam, 510.

Hypnotisme. L'- et la sgugestion à

l'état de veille, par Magnin. Les

dangers de l ? 51 ! .

Hvpnose et sorcellerie, par Demon-

chy, 181.

HYPOGLOSSE. Contribution à l'étude

des localisations dans le noyau

de l ? par Parhon, 63.

Hystérie. Du cas d'- à grandes

manifestations. Fièvre hystérique,

par Lannois et Porot, 60. Un cas

grave d ? par Bérillon. z

Voir Phénomène plantaire. Théo-

rie physiologique de l ? par

Sollier, 406. - à forme de para-

lysie générale, par Collet et Le-

pine, 411. L' par Young, 423.

Hystérique Voir Chorée. - Voir

Anesthésie. Voir Convulsions.

Les états d'obnubilation psychi-

que des - et leur paralogie, par

WestphaJ, 347. Sur l'appréciation

des dénonciations et témoignages

des dans la pratique médico-

légale, par Biondi, 427.

Idiotie. L'anatomie pathologique

de l ? par Alzheimer, 403. -

microcéphahque, épilepsie, asy-

métrie cérebrale, microgyrie, ulé-

gyrie, cuir chevelu suggestif

d'atavisme, par Nolan, 481.

Illusion vésanique. Nature et ge-

nèse de 1 ? par Wlierrv. 506.

Image mentale morbide, par Vas-

chide et Vurpas, 411.

1.IBÉCILITÉ; hémiplégie gauche : épi-

lepsie; état de mal; mort; atro-

phie considérable de l'hémisphère

cérébral droit, par Bournemlle et

MIlo Maugeret, 461.

Imitation. Du rôle de l'- dans la

formation d'un délire, par Vurpas

et Duprat, 166.

Impression consciente. Contribution

à la pathologie du sentiment de

l ? par Pick, 336.

Infantilisme. Cas d'- pancréatique,

résultat du traitement, par Bram-

well, 356. myxoedémateux et

maladie de Recklinghausen, par

Meige et Feindel, 497. Infirmiers,

brutalités, 513.

Institut de médecine légale et de

psychiatrie, 366.

Instituteurs. Fédération générale

des - belges, 366.

Intoxication saturnine avec polyné-

vrite chez un électricien, par G.

Guillain et Lhermitte, 75.

JANET. La psycholepsie de et la

théorie de Storch-Foerster, par

de Buck. 401.

Juges ET experts, par Hoche, 430.

par Noecke, 430.

KERNIG. Signe de , pathogénie,

par Piéry, 480.

KoRSAKoFF. Contribution à l'étude

de la psychose de - par Sou-

khanoff et Boutenko, 84, 173. Un

cas de psychose de -, par Guil-

liarovsky, 172.

Kyste. Un cas de dermoide des

centres nerveux, par Raymond et

Courtellemont, 76,

Langue. Un cas de double, par

Leitz, 394. cérébriforme chez

532 TABLE DES MATIÈRES.

un aliéné alcoolique, par Bian-

chmi, 498.

LASÈGNE. Signe de -, par Iliéry,

480.

Léchage. Voir Tics :

Lèpre. Deux cas de - nerveuse,

par Raymond, 97.

Lésions corticales et sous-corticales

minimes avec - sous-épendy-

maire très prononcée chez deux

aphasiques, par P. llarie et Lén.

80. Contribution à la connais-

sance des corticales circon-

scrites de la région motrice chez

l'homme, par Lévi, 340. Voir

Cervelet. -

Léthargie. Un cas de -, 33.

LIÉBEACLT. Eloge de -, par Van

Renterchem, 176. Prix -, par

Farez, 176. et l'Ecole de

Nancy, par Beaunis, 176.

LIQUIDE céphalo-rachidien. Le

dans les processus méningés

subaigus d'origine rhumatismale,

par J. Lépine, 70. Le sur la te-

neur en sucre du -, par Lannois

et Boulud. 487.

Lobe. Voir Tumeurs. - Voir Sclé-

rose.

Localisations spinales. Nouvelles

recherches sur les -, par M. et

Mm. Parchon, 403.

1,IACRODACTYLIE. Un fait de -, par

Lejars, 56. , par Cayla, 56.

5lACM-ESTHÉsiE. Contribution à la

question de la-, par Iwanow, 60.

Main. Hypertrophie congénitale

d'une -, par Apert. 497

MAL de mer. Le et la suggestion,

par Bonnet, 82.

Maladie du demi-sommeil, par Le

Menant des Cliesnais, 181. -

Voir Raynaucl. - mentales. Voir

Education physique. - nerveu-

ses. Voir Pupilles. Voir Base-

dow. De la forme la plus habi-

tuelle des modifications de l'in-

telligence et du caractère qui

peuvent résulter des - du nez et

du cerveau, par Royet, 491.

Voir Recl,linghausen. - bleue et

cvanose rétinienne, par Babinski,

510.

Malformations crâniennes et syn-

drome bullaire. Enclavement du

bulbe, par Sicard et Oherthur, 271.1

Manie transitoire alcoolique, par

Iwanow, 351.

Martyrologe des asiles. L'attentat

contre 1\1. Wallon, 5 : 12.

;\IÉDIUII1E délirante, par Paul Sol-

lier et Boissier (F.), 1, 130.

Méningite. terminée par la mort,

dans laquelle le myosis et la sup-

]Jlessioll de la salive ont été les

seuls symptômes Autopsie. Etude

de diagnostic par exclusion, par

Altschul, 67. - cérébro-spinale

Traitement par production d'un

abcès de fixation. Guétison, par

Probst, 433.

Merycisme. Deux cas de -. -par

Raviait et Caudron, 390

Méthode hypno-pédagogique. Ses

applications au traitement des

habitudes vicieuses chez les en-

fants. par Berillon. 266. Courte

communication sur une nouvelle

de coloration du système

nerveux central, par Schroetter,

320.

Meurtrier. Un - de quatorze ans,

384.

Migraine ophtalmique avec hémia-

nopsie et aphasie transitoires.

Hémiface succulente. Photopho-

bie et tic de clignement, par

Meige, 275. Remarquable compli-

cation d'un accès de par Koefl-

mayr, 347.

Miracles. Les -. 445.

MoeBIus. Remarques critiques sur le

livie de P--J Moebllls, intitulé :

La Bosse des Mathématiques, par

Ahrens, 320.

Moelle. Voir Névrite. Les lésions

du système lymphatique posté-

rieur de la - sont l'origine du

piocessus anatomo-pathologique

du tabes, par Marie (P.) et Guil-

lain, 62. Les dégénérations du

cordon antérieur de la -, par

P. Marie et Guillain, 164. Un cas

de carcomatose de la - épinière,

par Préobragensky, 174. La locali-

sation des fonctions motrices de

la épinière, par Sano, 235.

Kote sur quelques centres sympa-

thiques de la - épinière, par

Laignel-Lavastine, 238. A propos

des modifications de la con-

sécutives aux amputations de

membres chez le tétard, par

Brissaud et Bauer, 244. Contri-

bution à l'étude des représenta-

tions motrices du membre infé-

rieur dans la de 1 homme, par

TABLE DES MATIÈRES. 533

Parhon et Goldstein, 280.

Voir Réflexes.

IOI'WCI ! RO[ \TOPS¡¡; et achromatop-

sie, par Alter, 338.

Moyen epilepto-frenateur héroïque,

par Crocq, 218.

Muscles. Rôle des - spinaux dans

la marche normale chez l'hom-

me, par Lamy, 1-178.

Musique. De l'influence de la -

sur le travail musculaire, par

Spirtow, 336

Mydriase unilatérale et corps étran-

ger du conduit auditif externe,

Sabrazès, 52.

Myéline. Voir Fibres.

Myélite. Note sur l'anatomie pa-

thologique de la aigu ëdifftisel

par Weill et Gallavardin, 65

- Voir Réflexes. Une observation

de apoplectique, parFlatau,344

par Marie, 509.

lloor,mnE. Voir Spasme.

Myokynif. Un cas de dans la po-

hoencéphalo-méningite aiguë, par

Delektorsky, 170.

MyopATHiE. Un cas de atrophi-

que progressive avec troubles de

la sensibilité, par Lamion et Po-

rot, 57. ,

Miosis. Voir Méningite.

Myotonie avec atrophie musculaire,

par Lannois, 273.

MYXOEDEMATEUX. Voir Sclérose.

Voir Infantilisme.

Narcose. De l'origine et de la na-

ture de la nerveuse, par We-

densky, 158.

NÉCROLOGIE Mordret, 287. Duha-

mel, 447. Raoul, 447.

Négativisme. Contribution iL la psy-

cho-physiologie du -, par Vogt,

338. '

Nerf auditif. Voir Tumeur. op-

tique. Voir Amaurose. Contribu-

tion à la question de la régéné-

ration autogène des -, par Be-

the. Réplique, par Muenzer, 396.

Dégénérescecne et' régénération

des terminaisons motrices des -

coupés, par Odier et Ilerzen, 402.

Nerveux. Voir Suggestibilité. Le

climat de Pau et les -, par

Clouzet, 251.

Neurasthénie Douleur épigastri.

que suralguc dans la , par

Page, 269.La-, parCappeletti,361.

Neurasthéniques. Les - dans l'ar-

mée, par Lux, 180. Comment

faut-il traiter les -9 par Glorieux,

431.

NEUROFIDRILLES. L'imprégnation à

l'argent des -, par Bielschowsky,

340.

NEUROFIBROS.1RCOMnTOSE. La , par

Cestan, 53.

NEUROMYELITE. Sur un cas de op-

tique aiguë, par Weill et Galla-

vaidin.

Neurone. A propos de la théorie du

- , par Durante, 79. Quelques dé-

ductions pratiques de la réputa-

tion du -, par Debray, 402. Ré-

génération autogène chez l'hom-

me et la théorie du -, par Du-

Faute, 407. '

Xevr algie. Deux cas de - guéris

par la suggestion hypnotique,

par Damoglou, 81.

Névrite radiculaire subaigue. Degé-

. nérescences consécutives dans la

moelle (racines postérieures) et

dans les nerfs périphériques (ra-

cines antérieures), par Nageotte,

61. et atrophie optique dans

l'érysipèle facial, par Cabannes,

268. Observation de - périphéri-

que de l'hypoglosse droit, par

Dan : ,kl, 423.

NEVROSE adipeux diffus du médian.

Résection, régénération autogène,

par Durante, 501.

Névrose. Pression intraartérielle

dans la traumatique, par Has-

kovec, 62. - et paralysie géné-

rale, par A Marie, 526.

NEZ. Un arrêt de développement du

- , nouveau signe de dégénéres-

cence, par Gudden, 334. - Voir

Cerveau.

u'ISSI. Que sont les corpuscules de

- ? par Chenzinskl, 342.

NITRITE DE SOUDE. Voir Tabès.

NOEVI. Note sur la fréquence et sur

la distribution des chez les

aliénés; parFéré etAmouroux, 193.

NOEVUS avec .varices et hypertro-

phie osseuse, par Guillain et

Courtellemont, 161.

Noyau rouge. Lésion ancienne du

. Dégénérations secondaires,

par P Marie et Guillaln. 67.

spécial. Voir Protubérance.

013NUI31L ? TION. Voir Hystérique.

Obsessions et vie sexuelle, par Ma-

randon de Montyel, 289.

634 TABLE DES MATIÈRES.

OEIL. Voir Paralysie générale.

OPHTAL110PLÉGIE et arténo-sclérose,

par Péchin et Rollin, 32.

ORTEILS. Etude sur le phénomène

des -, par l\1armesco. 63.

Os Trois cas de fragilité Iles -

chez des aliénés, par Marie et

Violet. 166.

OSTÉGIALACIE. Voir 1Vinofj1'(ldsky.

Ostéomalacie sénile Forme l1l 1'-

veuse, par Chappet et \lourl-

quand, 496.

Ostéopathies. Voir Arllaropallaies

OuiE. Voir Folie.

Paires crâniennes. Des terminai-

sons et connexions centrales des

septième et huitième -, par wu-

roubow, 329.

Parallélisme. Le moderne, par

Moskiewicz, 321.

Paralysie. De la contracture secon-

daire du releveur de la paupière

supérieure dans le cours de la

faciale, par Berger et Loewy, 54.

- radiculaire totale du plexus

brachial avec hémiatrophie et

parésie de la face, par Courmont,

57. hérédo-syphililique, par

Rose, 75. Lésions des neurolibril-

les dans la générale, par Bal-

let et Laignel-Lavastine, 162. Le

décubitus aigu dans la géué-

rale, par Vigouroux, 165. Quel-

ques réflexions sur l'étiologie de

la - générale dans le départe-

ment de l'Orne, par Coulonjou,

2-i2. Relations cliniques de la cé-

cité avec la générale et le ta-

bès, par Léri, 248. Contribution

à l'étude de l'état du fond de

l'oeil, dans la générale, par

Briche, Raviart et Caudron, 277.

Etude anatomo-pathologique d'un

cas de - infantile au point de

vue de la topographie des mus-

cles atrophiés et des localisations

médullaires, par Parhon et l'api-

nian, 279. Convulsions myocloni-

ques dans la générale progres-

sive, par Hermann, 352. Suicide

et - générale, par Marie et Viol-

let, 361. A propos de l'anatomie

pathologique de la générale.

par blahaini, 403. générale

Voir Réaction pupillaire. Fré-

quence et évolution des lésions du

fond de l'oeil dans la - générale,

par Raviart et Caudron, 417.

faciale : rire et pleurer spasmo-

ditlues localisation cérébrale,

par 425 - faciale. Voir

Phénomène palpébral. Un cas

particulier de - facial, par Bien-

fait. 427 Contribution à la chimie

de la dégénérescence nerveuse

dans la - génél ale et autres ma-

ladies mentales, par Corial, 503.

aiguë, par Rusk, 504. géné-

rale et pachyméningite gom-

meuse. par Doutrebente, 508.

Paralytique général. Voir .S7j)'1)i-

gomyélie. La prétendue bienveil-

lance du -, par Pactet. 163.

Voir Ecorce cérébelleuse.

P1RA1170CLO\US multiplex. Sur un

cas de -. Etat psychique spé-

cial, par Brtrand, 330.

Paraplégie cervicalemcomplète par

tumeur gliomateuse de la moelle

avec pachyméningite néoplasique,

par Spillmann et Hoche, 188.

Parésie. Voir Paralysie. La - spas-

modique des vieillards athéro-

mateux, par Pic et Bonnamour,

491.

Pari mutuel. Les établissements

d'aliénés et le -, 524.

PARld1\S01\. Des formes anormales

'de la maladie de , par Collet, t,

59.

PAU. Voir Nerveux

Phénomène plantaire combiné. Etude

de la réflectivité dans l'hystérie,

par Ci-ocq, 261. Un - palpébral

constant dans la paralysie faciale

périphérique, par Dupuy-Du-

temps et Cestan, 427.

Phobie. La du regard, par Har-

temberg, 202. Des profession-

nelles. - du Saint- Sacrement

chez les prêtres, par Bechterew,

412.

Phocomélie Un cas de et hémi-

mélie, parllalbron, 68.

Photophobie. Voir migraine.

PHOTOTIlI : R.\l'oe La à Paris, Ham-

bourg et Berlin, par Poussèpe,

3jj.

Phtisiques. Euphorie délirante des

. Etude anatomo-chnique, par

Dupré. 282. '

Pied. Voir liéflexe.-

Plexus choroïdes. Voir Vomisse-

ments

POLIE1\CtI'H \LITE supérieure aiguë

hémorrhagique, par Brissaud et

Brécy, 243.

1

TABLE DES MATIÈRES. 535 5

YOLI011SI.LITE. Contribution l'étude

dis la - aiguë (avec présentation

de préparations), par Préobra-

]en>ky, 87.

Polynévrite. Voir Intoxication. Un

cas de - éthylique ayant évolué

sous la forme'de paraljsie asceti-

dante, par Oberthuret Roger, 270.

Ponction lombaire La au point

de vue du diagnostic et de la

thérapeutique ; par Gerhardt, +la.

Gliome volumineux du lobe fron-

tal gauche ; amélioration par la

- , par Charvet et Bancel, 47U.

Prédisposition. La en étiologie

mentale, par Marandon de Mon-

tel, 420,

Prisons. Organisation d'un service

de médecine mentale dans les -,

par Masoin, 430

Processi s méningés. Voir Liquide

céphato1'Clchidien

Protubérance. Un noyau spécial de

la formation réticulée dans la

région supéneuie de la -, par

Bechterew, 155.

PsEUDO-OEDÈ\fE Le catatom-

que, par Dide, 198.

Pseudo-épilepsie. Voir Suggestion

hypnotique

PS1'Cfi\sTÉWE et diabète, par Ober-

thur et Chenal ? °il. 1.

Psyciiasténiques. Voir r l;ljas);2es.

Psychiatrie Les progrès de la -

en Giande-Btetagne en 190, par

Urqullart, 504.

Psychologie DES émeltes, pal' Man-

zoni, 516

Psychose Voir l : orsalo ? - Voir

Rétractions musculaires. Docu-

ments figurés représentant d'an-

ciennes pratiques chirurgicales

contre les -, par Meige, 267. De

quelques considérations sur les

- puerpérales, par Picqué. 273.

Puérilisme mental guéri par sug-

gestion, par Leroy, 509.

Pupilles. La réaction paradoxale

des -, avec observation person-

nelle de rétrécissement des

sous l'influence de l'ombre, par

Piltz. 101 De la valeur diagnos-

tique des irrégularités des bords

des - dans les maladies ner-

veuses dites organiques, par

Piltz, 348.

P\RO1 llE et puberté. Examen mé-

dico-légale d'une jeune incendiaire

par Leroy, f 19.

Radium. Le - en thérapeutique

nerveuse, par Foveau de Cour-

melles, 247. De l'action des rayons

du - sur l'excitabilité des'cen-

tres psychomoteurs, par Jou-

hon·sl : y, 401.

Rage La - expérimentale à virus

fixe et ses lésions histologiques,

par Ladame, 405.

Rapport médical pour l'année 1903

à l'asile départemental de Dijon,

par Garmer, 525 · ! R,\Y1'AD. Un cas de maladie de-

suivi de mort chez une jeune

fille hystérique et tuberculeuse,

par Coulotijou, 2.3

Réaction pLp[LHi3E De la pro-

longée aux toxiques comme si-

gne précoce de la paralysie géné-

rale, par Toulouse et Vurpas, 417.

RC1,Llr,L.IIAUSEN. Voir Maladie de -.

]\ÜLECTI\ 1111. Voir Phénomène plan-

laire.

Réflexe. Note sur un - adducteur

du pied, par Kirschberg, 3f,

Quelques nouvelles donnée sur la

physiologie des- tendineux, par

btchebàclc, 61 Nouveaux élé-

ments relatifs à la physiologie

des - profonds, par Schterbak,

156. Nouvelles contributions à la

physiologie des - tendmeux, par

Scliterbak, 156. Du - sous-épi-

lieux, - (le l'extrémité supérieure

de l'homme, inconnu jusqu'ici,

par Siettier. 159. Du - sous-épi-

neux. par Pickett, 159 - sous-

épmeux. Réplique à Pichett. par

Stemer, IJ9. lies - sous-scapu-

faire et pectoral, par Bechterew,

159. Ue l'absence des patellai-

res en un cas de myélite dorsale

par compression avec dégénéres-

cence des racines postérieures

dans la moelle lombaire, par

Bartels, p. 33 : : ? Du carpopha-

Idnglen. par Bechtet'ew, 3î3. Sur

le - du fascia lata, par Dide et

Chénals, 405.

Regard. Voir Phobie.

HEIL. Des relations du faisceau lon-

gmulmal mférieur avec le ruban

de - et d'un nouveau système

moteur de couronne rayonnante,

par Schuetz, 398. '

RCIIE'lORATlO, La périodique des

souvenirs musicaux, 1),ii,Swobo(la,

179.

Rétine. Etude de la dans l'amau-

536 TABLE DES MATIÈRES.

rose tabétique, par P. Marie et

Lei, 17.

Rétractions musculaires. Des - et

de l'amyotrophie consécutives 1

aux contractures et aux attitudes

stéréotypées dans les psychoses,

par Cullerre, 214.

Retraites. Caisse des -, par Du-

bonrdieu, 279.

RLvEs Voir Anesthésie

Rhumatisme. Accidents nerveux tar- 1

difs du - articulaire franc, par Il

Lhermitte, 163. !

Rougeur émotive. Les formes pa-

thologiques de la-, par liaiteni-

berg, 342.

SAMUEL. Le prophète -, par Binet-

Sanglé, 179.

Sang. Du païasite trouvé dans le -

des épilepiidues. Son agglutina-

tion par le sérum des animaux

infectés et par le sérum des épi-

leptiques, par Bra, 61. -, voir

Aulocytotoxine. Contribution à

la question de quelques proprié-

tés soit-disant toxiques et théra-

peutiques du Lérum du - des

épilepliques, par Sala et Rossi.

151. Recherches bactériologiques

sur le - des épilepliques, par

Lannois et Lesieur, 481. Contri-

bution il l'étude du - dans la

folie maniaque dégressive, par

Ficher, 489.

Sciatique d'origine spécifique, par

Gauchler et Roussy, 75

Sclérodermie, par Huet, 509.

Sclérose en plaques. Voir Cezaelet.

Un cas de - symétrique des lobes

occipitaux, par Marchand, 68.

en plaques chez un infantile m yxoe-

démateux, par Raymond et Guil-

lain, 163.

Schéma bulbaire, par Bonnier, 239.

Sens des attitudes. A propos du

soi-disant - , par Claparède,

67. Sur l'exploration clinique du

musculaire, par Claparède,

245.

Sensibilité. Voir Myopathie. Re-

cherches sur la - normale de la

cornée et de la conjonctive, par

Cabannes et Robineau, 249. De

la - de l'arcade zygomatique,

comme signe d'affection organi-

que des parties essentielles du

cerveau et des méninges, par

Bechterew, 350.

Sexe. Influence de l'état mental des

parents sur la formation du -

de leurs enfants, par Lltlsens,

334.

Sinus. Voir 1'/¿1'ombose.

Sorcellerie. Voir Hypnose.

Srlsne essentiel ou idbpathique,

- par F¡,ke, 51. Le - facial ; ses

caractères cliniques dlstictifs, par

Meige, 54. - professionnel, par

G. Ballet et Rose, 76. De la ge-

nèse sous-corticale de - muscu-

laires isolés. Contribution à la

clinique des tumeurs des tubei-

cules quadrijumeaux avec remar-

ques sur le trajet du faisceau

central de la calotte, par Sorgo,

397. Cas insolite de - facial,

myokymle limitée au facial gau-

che ; par Bernhardt, 422. Obsei-

vation de - fac : al tonique pri-

mitif avec palpitations muscu-

laires, par Newmatk, 122. et

tremblements chez les psychas-

tuniques, par Raymond et Janet.

497.

SP L -i IÇ CIIN 0,M É G, Li r. Voir AE)'07né-

galie.

SPOiI'D1'LOSE rkyzomélique et tuber-

culose, par Pic et Bombes de

Violiers, 70.

Sucre. Voir liquide céphalo-rachi-

dien.

Suggestibilité. La des alcooli-

ques. par Berillon, 176. Examen

de la - chez les nerveux, par

Schnyder, 246.

Suggestion hypnotique. Attaques de

pseudo-épilepsie guéries par la

, par Viazemsky, 80. -; voir

Abasie. - ; voir Névralgie ;

voir Mal de me1'. La impéra-

live, par Bérillon, 83. - voir

Alcoolique. à l'état de veille et

- hypnotique, par Bourdon, 178.

; voir Hypnotisme. voir

Délire.

Suicide d'un fou, 95. Tentative de

- d'un adolescent, 288. -. Voir

,Pw'al ! Jsie générale. - d'un vieil-

lard, gaz. , 363. - d'un officier,

363

Surdité et cécité verbales. aphasie

totale ; autopsie, 1)ai, Déjeriiie et

Thomas. Discussion de quelques

nouveaux travaux sur la ver-

bale, par Liepmann, 3... De la

localisation des diverses formes

de la - verbale; par Biscl1ofT,

TABLE DES MATIÈRES. 537

3». - verbale par lésion tempo-

laie droite, par Mollard, 493.

Sthénomètue. Présentation du -,

par Joü e, 179.

Storch-Foersier. Voir JA11ET.

Sydenium. Voir Chorée.

Syndromes solaires. Les - expéri-

mentaux, par Laignel-Lavastme,

407.

Syphilis. Un cas de - héréditaire

tardive à forme cérébro-spinale,

par Richon, 57. - Voir Affections

mentales. et divorce, par Mor-

rouir, 4'9.

Syringomyélie, arthropathie de l'é-

paule, par Brissaud et l3uandet,

56. Lésions de - trouvées à l'au-

topsie d'un paralytique général,

par Joffroy et Gombault, 64,

avec chéiromégahe, par Raymond

et Guillain, 163.

Système lymphatique. Voir Moelle

nerveux ; voir Anatomie pa-

thologique. nerveux ; voir Mé-

tlzocle.

Tabès. A propos du cytodiagnostic

du , par Widal, Sicard et Ra-

vaut, 53. -. Voir Moelle. -.

Voir Paralysie générale. Les

formes fébriles du -, par Faure.

` ? i7. Contribution à la thérapeu-

tique du-. Le nilrite de soude,

par ObeOhur et Bousquet, 278.

Un cas d'association du à la

paralysie générale, par Joffroy et

Rabaud, 414. Happort du - avec

la paralysie générale, par Cu-

rioui, 502.

'l'aDi : ryoe. Monstmeuse déforma-

tion du tibia droit en fourreau de

sabre chez un , par Sabrazès,

57. - -

'l'É1AOS. Un cas de céphalique

avec paralysie faciale et oculaire ;

guérison, par Haltenhoff, 425. Un

cas de céphalique avec diplégie

faciale, par Bouchaud, 426.

Thrombose. Observation de auto-

chtone des sinus, par Good. 322.

Tibia. Voir Tabétique.

Tics. Forme clinique des - unila-

téraux de la face, par Cruchet,

264. Remarques cliniques et thé-

rapeutiques sur quelques de

l'enfance, par Meige et Femdel,

274. - de clignement, voir Jli-

graine. des terres, chéilopha-

gle, chéilophobie, par Meige. 415.

- convulsif avec coprolalie, par

Morel de Litchfield, 4 ? 1 - to-

nique du membre supérieur

droit, par Rudler, 497. - et sté-

réotypies de léchage chez l'hom-

me et chez le cheval, par Rudler

et Chomel, 499

Toriicolis. Sur un cas de - con-

génital avec autopsie et examen

instologique du système nerveux,

par Gallavardin et Savy, 482.

Toux hystérique L'attaque convul-

sive de -, pat Abadie et Grenier

cie Gardenal. 349.

Trac. Un cas de -- chez un musi-

cien. par Farez, 511.

Traumatisme. Voir Délire.

Tremblements. Contribution à l'o-

rigine corticale des -, par Mas-

salongo, 62. -

Trional. Traitement par le -, et

addition au même mémoire, par

Wolff, 355

ÏROPHOEDKME chronique acquis et

progressif, par Sicard et Laigncl-

Lavastme, 55.

TROPIlOEDÈ\1E hystérique, par Lan-

nois et Lançon, 495, chronique

chez une épileptique, par Lan-

nois. 493.

Troubles. Voir Tumeurs. Aperçu

médico-légal sur les mentaux

post-traumatiques, par Marie et

Viollet, 167. Nouvelles commu-

nications sur les de percep-

tion des distances en profondeur,

par Pick, 328. de la sensibilité

dans les étals neurasthéniques et

mélancoliques, par Dubois, il ?

dysarthriques permanents chez

un enfant épileptique. par De-

croby, 418. - intellectuels et ca-

tatome, parPeeters, 419.

TUBERCULOSE Voir Spondytose.

Tumeurs. Les manifestations des

du cervelet, par Duret, 64. Sur

les manifestations des du lobe

occipital et du lobetemporo-spté-

noidal, par Duret, 66. - (des

plexus choroldes) du quatrième

ventricule avec vomissements

incoercibles et fécaloides. par

Paviot, 66. Deux cas de du

nerf auditif, par Lépine, 60.

Voir Vomissements. Troubles au-

ditifs dans les cérébrales, par

Souques, 161. cérébrale chez

une femme de soixante-dix-huit

ans, par Madison, 4S9. Une ob-

538 TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS.

servation, de - métastatiques

dans la deuxième frontale et la

frontale ascendante gauches, par

Channing et Kno\\'Hon, 489. -

du corps pituitaire. Voir Acromé-

galie.

Vagabonds. Les psychoses des -,

par Wilmanns, 407.

Ventricules L1'rÉRALX. Considéra-

tions sur l'ampllatiou des

dans les maladies mentales, par

Marchand, 421.

Vermont. Phases médico-légales de

la loi de - en ce qui concerne

l'observation des criminels alié-

nés, par de Berry, 428. '

Véronal. Communications sur le-,

parMatthey, 432. Essais cliniques

avec le -, par Spielmeyer, 432.

Expériences avec le dans les

états d'agitation des paralytiques

généraux, pal Abraham, 432.

VIE sexuelle. Voir Obsessions.

Vision corticale. Leçons de choses

sur la physiologie de la -, par

Hnzy, 38.

Vol avec escalade et effraction. Si.

mulation d'aliénation mentale.

itapp0[ts médico-légauv, par

Leutz et de lloeck, 430.

Vomissements incoercibles et féca-

loïdes au cours d'une tumeur des

plexus choroïdes du II" venturi-

. cule, par l'amut, 130.

Voix eunucoïde. Un cas de - de

l'ictus dans l'hémiplégie, par

Grasset, 426.

"\VILLIS. Les anomalies de formation

du cercle artériel de -. leur fré-

quence et leur signification chez

les aliénés, par Wyroubow, 323.

VlIVOGRADSRY. Recherche des mi-

crobes de dans un cas d'ostéo-

malacie sénile, par Lacomme, 68.

Yeux. Déviation conjugée des

avec rotation en sens opposé de

la tête, par Roussy et Gauckler,

163.

TABLE DES AUTEUllS ET DES COLLABORATEURS

Abadie, 349.

Abraham, 432.

Achard, 509.

Ahrens. 320.

Alter. 151, 338.

AItschul, 61.

Alzheimer, 403.

Amouroux, 193.

Appert, 497.

Au(f¡'y, 494.

Babll1sJ¡j.510

Ballet, 76. inti ? .

Dancel, i 79.

Barjon, 58.

Bartels, 332.

Bauer. 52. 244.

Beaunis, 176.

Becheterew, 15,Q, 160,

326, 343, 346, 350,

413.

Benaky. 385.

Berger', 54.

Bénel, 493.

Bernhardt, 422.

Bernheim, 343.

Berillon. 83, 176, 179,

26.. 266.

Bertrand, 350.

Berry (de), 428.

Baesau, 433.

Beutter, 18b, 489.

Biafchi, 181.

Biancliini, 498.

Biehtzky, 156.

Bielschowsky, 340.

Bienfait, 427.

Binet-Sanglé, 179.

BiondJ. 427.

Bischoff, 344.

Bloch, 182.

Boech, 430.

Boissier, 1, 130.

Bombes de Villiers, 70.

Bonnamour. 491.

Bonnet, 82.

Bonnier, 53, 74. 239.

Bouchaur1, 426.

Boudin, 455.

Boulud, 487.

Bourdon, 178.

Bournemlle, 161.

Bousquet, 278.

Boutenko, 84, 173.

Bra, 61.

Bramvwe)).3a6.

Brecy, 63, 243

Brioche, 217.

Bridier, 486.

Brissaud, 56, 63, 243,

214, 488.

Bruandrt. 56, 488.

Bruck (de), 101.

CabannNs, 2 19, 268.

Calmette, 55.

Cappeletti, 361.

Carliste, 502.

Caudron, 27;, 390, 417.

Cavaillon, 501.

Cayla, 56.

Ceni, 151.

Cestan. 53.

Chanl1lng, 489.

Chappet, 496.

TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS. 53G

Char\-et,479.

Chénais, 271, .10.ï.

Chenzinski, 3j

Chome], 26 ? 199

Cliristian, 166, 167, 506,

Claparède, 53, 67, 215.

Clarence, 51.

Collet, 57, 411.

Corial, 503.

Coulonjou, 2.2, 243.

Courmont, 57.

Courtellemont, 7, 10...

Ciocq, 247, 248, 201,

420

Crouzet, 251.

Cruchet, 264, 510.

Cullerre. 244.

Curioni, 502.

Damoglou, SI.

Debray, 402.

Decrofy, 418.

Déjerine. 74, J63.

Delektorsky, 170.

Demaye, 507.

Demuuchy, 181.

Deny, 503.

Deperon. 437.

Dest.t, 194.

Devic, 5 ? .

Dide, 405, 498.

Doran, 505.

Doutrebente, 241, 508.

Dubois, 413.

Dubourdieu, 279.

Ducrest de Villeneuve,

502.

Dumas, 435.

Dunton. 504.

Duprat, 166.

Dupré, 2S ? , 414..

Dupuy-Dutemps, 427.

Durante, 79, 407, 501.

Duret, G4, 6G.

Farez, S.-3, S8, liG, 17S,

511.

Farrar, 489.

Faure, 277. 1.

Feinrtel,°ï1, 497.

Féré, 193, 354.

Fisher, 489.

Flatau, 344, 317.

Foveau de Courmelles,

247.

Francillon, 354.

Freulmann, 323.

Gallavardin, 52, 65, .85,

500.

Garnier, 43L

Gartié, 335. '

Gauchier, 71, 163. i

Geljerslam, J10.

Gerhardt, 415.

Germain, 431.

Gnaud,2t2.

Glorieux, 431.

Goldstein, 280.

Gumbault, 61.

Good, 322.

Gordinier, 489.

Grasset, 420.

Grenier de Cardenal,

318.

Gulden, 334.

Guillain, 62, 67, 74, 75,

z163, 164.

Guiliaro\"sky, 172.

Halbran, 68.

Hall, 50. -

Haltenhoff, 425.

Hartemberg, 202, 342.

Haslcovec, 62, 498.

Haudnx, 350.

Heil1lcke, 408.

Hermann, 352.

Hirschberg, 54.

Ilitzig, 328.

Hoche, 430.

Hoeflmayr, 347.

Hospital, 131.

Hudovernich, 496.

Huet, 509.

IwanofT, 60.351.

Jaboulet, 499.

Janet, 197.

Jeanty, 480.

Joffroy, G H.i.

Joire, 179.

Jones, 505.

Josserand, 493. « '

Joukowsky, 401.

Jourdan, 312.

Jouty, 88.

Kedzior, 351.

Kéraval, 252.

Klippel, 488.

Knowlton, 489,

Kopczynsl<l, Õi.

Kron, 332.

Lacomme, 68.

Ladame, 405.

Laynel-Lavastine, 65.

162, 232, 238, 407.

Lamion, 57.

Lamy, 278.

Lançon, 495.

Lannois, 60, 73, 481,

487, 491,495,496.

Lamelle, 405.

Legrain, 117.

Leitz, 394.

Lhermitte, 75, lfi3.

Lejars, 56

Le .Menant des Ches-

nais, 181.

Le Play, 503.

Lentz, 430.

Lépine, 66, 70, 411.

Léri, 77, 80, 248.

Leroy. 232, 449, 508.

Lesieur, 481.

Lém. 3f0, 414.

Litchfield (de), 424.

Litkens, 335.

Loevy. 154.

Londe, 409.

Lux, 180.

Mabille, 260.

Madison, 489.

Maere (de) 435, 436.

Magnan, 82. 83,180.

dlahaim, 403.

Majewska (de), 181.

Maiandon de Montyel,

289, 420.

Marchand, 68, 241, 421,

508.

Marie (P.), 62. 67. 74,

77, 80, 164, 166, 167.

Marie, 232, 276, 361,

509.

Marinesco, 63.

111assalonno, 62.

Nlasselon, 231.

11latthey, S3 ? .

11laugeret, 461.

Mauriquand, 69, 496

Méeus, 419.

Meige, 54. 267,274,275,

415, 497.

Miralhé, 272.

Mollard, 493.

Morroir, 429.

Mosloewicz, 321.

Mucha, 350.

Jluenzer, 396.

Nageotte, 61

Negel, G5.

Newmark, 422.

1 riissJ, 154.

540 TABLE DES AUTEURS ET DES COLLABORATEURS.

Noecke, 430.

Nolan, 481.

Oberthur, 270, 271, 278.

Odier, 402.

Ossipow, 323.

Pactet, 165.

Panegrossi, 55

Page, 269.

Pagès, 55

Panski, 423.

Fapadaki, 435.

Papman, 279.

Papovik, 96

Parchon (\I. etbim), 403,

Parent, 434.

Parhon, 63,91,279,280.

Paris, 369.

Pâte),501.

Parton. 504.

Paul-Boncour, 28.

Pauly, 394.

Paviot, 66, 69, 151, 487.

Peeters, 419.

Péchin, 52.

Péhu, 55.

Pfister, 399

Phulpin, 506.

Pic, 70, 491

Ptclc, 1, 3 ? S, 336, 422.

Pickett, 160.

Picqué, 272.

Piéiy, 425. 480.

Piltz, 1, 61. 348.

Ploldllnsky, 339.

Porot, 57, 60, 490, 494.

Portougalow, 412.

Poussèpe, 162. 355.

Préobrajensky, 87, 174.

Privât de Fortunié, 169.

Probst. 433

Rabaud, 414, 488.

Ramond. 509

Havant, 53.

Raviart, 390. ? ï7, 417.

Raymond, 74, 76, 97,

163, 497.

Renterchem (van). 167

Bichon, 57.

Riddler, 503.

Robineau, 219 - ~

Roger, 270.

Rollin, 5 ?

Honcoroni. 401.

Rose, 75, 76

Rosenfeld. 329.

Rossi, 151.

ltoubinowitch, 506.

Rouss ? 74, 163.

Roy, 211, 496.

Iloyet, 281. 491.

Rudler, 265, 497. 499,

Rusk, 504 I

Sabrazès, 57.

Sala, 151.

Satio, 235.

Savy. 4S. -

Schaffer, 155, 39.

Schaihewitscli, 316.

Schatzky, 356

Schnyder, 246

Schroetter, 321.

Schuetz, 398.

Schuller, 338.

Shuttleworth, 285.

Sicard 53, 55, : ! 72

Smidt, 356..

Sollier, 1, 130, 406.

Sorgo, 397.

Soukhanoff. 81, 173.

305, 414

Souques, 164.

Spielmeyer, 43.

Shillrrann, 4SS.

SpirtoW , 33G

Spratling, î3

Stecherbach, 61, 156.

Steiner, 159.

Stembo, 81.

Storch. 319.

Swoboda, 179.

Taty. 2+, 450.

'fliéoliari, G5.

Thomas, 62, 74, 163.

1'homsen, U8.

Thomson, 70.

Tissié. 263.

Toulouse, 417,507.

Urquhart, 504

Vaschide, 411.

Viazemski, 80.

Viollet, 166, 16. 232,

361.

Vigouroux, 1G,3G0.

Vont. 338 '

Voisin, 81

Vurpas, 166, 411, 417.

Wagner, 501 '

Walter, 428.

Wedensky, 158, 503.

Weill, 65, 300

Wesphal, 347.

Wherry, 506.

Wiazemsky. 1 i i.

Widal. 53.

Wilmanns, 407.

Winfield, 504.

Wizel, 409.

Wolll' 355.

\\y'roubom, 323, 329.

Young\, 423.

Zal1leto\\'old,' 351.

Evreux, Cli H€mesev, imp.