On mêla les intérêts de l’honneur avec ceux de la fortune ; je méprisai tout. […] Enfin, j’eus en moi-même un combat que je ne puis vous exprimer, entre mon amour et mon honneur. […] Je ne savais pourtant point encore que j’avais l’honneur d’être sa nièce. […] Elle ne m’a jamais fait aucune proposition indigne d’une femme d’honneur. […] Je respectai son honneur dans le temps même qu’elle outrageait si cruellement le mien.
Contamine lui a offert toutes choses pour en triompher sans sacrement ; elle a tout refusé, et a mieux aimé risquer tout, que d’en avoir une partie par un bout qui ne lui fît point d’honneur. […] Un homme comme vous, croit faire honneur à une fille telle que je suis, quand il lui parle, et je vous assure que je n’ambitionne point cet honneur et que même il me chagrinerait. […] Elle croira sur ce pied-là, que vos visites seront d’un bon parent ; et j’espère que vous vivrez avec moi aussi sagement que si j’avais en effet l’honneur d’être votre cousine. […] Il est même de votre honneur qu’une fille que vous destinez à votre lit, soit d’une vertu qui ne soit point soupçonnée ; puisque c’est tout le bien qu’elle peut vous apporter. […] La princesse, reprit Mademoiselle de Vougy, va être extrêmement étonnée de la savoir si sensible sur le point d’honneur.
Où est donc l’honneur de la Chevalerie ? […] Mais toi, ami Sancho, où étais-tu que tu n’as pas eu ta part de l’honneur ? — Ma foi, Monsieur, répondit-il, j’étais à boire et à dormir. — Comment, interrompit Don Quichotte, je croyais que tu soutenais l’honneur de la comtesse. — C’était mon dessein, reprit Sancho, mais il est venu un diable d’enchanteur qui m’en a détourné. […] Je suis pourtant chevalier aussi bien que vous, et il me semble qu’on devrait bien faire à tous seigneurs tous honneurs. — Il est vrai, répondit Don Quichotte, que j’ai été surpris que tu n’aies point soupé avec nous ; mais, Sancho, tu dois en avoir de la joie, puisque c’est signe qu’on respecte ici la vertu, et qu’on regarde les gens par leurs actions, et non pas par leur qualité. […] Tu vois par là, Sancho, que les hommes ne s’arrêtent qu’à l’apparence qui les frappe ; ainsi il faut, mon pauvre enfant, te résoudre à bien faire, et tu seras bien traité ; mais avoue tout, il y a quelqu’autre chose qui te chagrine, tu n’es pas ordinairement si sensible aux honneurs de la table, et pourvu que ton ventre soit bien garni, je ne me suis pas encore aperçu que tu te misses en peine du reste. — Mardi, Monsieur, vous l’avez deviné, répondit Sancho, aussi n’ai-je pas sujet de me plaindre du traitement, puisqu’il n’a tenu qu’à moi de manger autant et plus que vous ; mais ce dont je me plains, est de ce qu’on m’a dit en soupant.
Y en a-t-il aucun qui ne se fasse honneur de ses amourettes quoiqu’elles ne soient qu’un désordre effectif ? […] Cela étant, est-ce un honneur pour un homme de poignarder ou d’empoisonner une femme, qui pour toute défense n’a que des larmes et des gémissements impuissants ? […] Nos Espagnols ne devraient-ils pas se faire aussi bien qu’eux un point d’honneur de leur fidélité et de leur constance ? Il n’y a qui que ce soit qui ne soit sujet à être tenté, cela est même assez ordinaire ; mais quoiqu’il soit difficile, il n’est pas impossible de résister à la tentation et aux appétits désordonnés que peuvent donner une belle fille ou une belle femme qui vient s’offrir ; il faut appeler à son secours toute sa raison et l’idée de la dame de son cœur, et sans doute on en sortira à son honneur. […] C’est donc une tyrannie aux hommes de vouloir obliger des esprits plus faibles que les leurs à avoir plus de fermeté qu’ils n’en ont eux-mêmes ; et c’est une cruauté et une barbarie de punir dans autrui des fautes qu’on commet soi-même, pendant qu’on ne les regarde dans soi que comme une galanterie dont on se fait honneur.
Les Françaises lui dirent la même chose, et ajoutèrent que la quête de ces malheureux était indigne de gens d’honneur et de qualité, que les personnes considérables en France ne s’y commettaient pas, et laissaient ce soin à des gens destinés à cet emploi ; et qu’on regarderait en France avec horreur un officier de qualité distinguée, qui aurait seulement livré un malfaiteur, bien loin de l’avoir poursuivi et arrêté lui-même. Le duc de Médoc, qui avait un très grand fond de probité et d’honneur, écouta tout ce qu’on lui dit avec une patience admirable, et sans répondre un seul mot ; mais après qu’on eut achevé de lui dire tout ce qui se pouvait dire sur cette matière, il prit la parole, et après avoir remercié toute la compagnie en général du soin que chacun en particulier avait témoigné pour sa personne, il ajouta que s’agissant de rendre service au comte de Valerio, et de sauver l’honneur d’une des meilleures maisons d’Espagne, il n’aurait pas eu l’esprit en repos si lui-même n’y avait été ; que de plus, chacun se faisait dans le monde un point d’honneur et de probité selon son humeur ; qu’il avouait que la recherche qu’on faisait de gens qu’on destinait au gibet, offrait à l’esprit quelque chose de bas et de rebutant, qu’ainsi il ne blâmait point les Français de ne s’y pas commettre, parce qu’ils croyaient que cela était indigne d’un grand cœur ; mais que pour lui il était d’un autre sentiment et qu’il ne croyait pas qu’il fût plus indigne d’un prince de faire la guerre à des voleurs et à des bandits qui désolaient toute une province et ses propres compatriotes, que de la faire à des étrangers ; qu’il croyait même que c’était plus utilement servir sa conscience et le public dans une guerre de cette nature, que dans une guerre réglée, parce que les ennemis qu’on combat dans celle-ci, ne sont pas des ennemis particuliers ni domestiques, puisqu’on peut s’en défaire par un traité de paix ; mais que les autres sont des ennemis d’autant plus cruels, qu’ils ne sont retenus par aucune digue ; de plus que la guerre avait ses lois inconnues aux scélérats, et que les ennemis qu’on combattait dans une guerre de prince à prince, étaient presque toujours des ennemis contraints par la volonté et par l’ambition de leur souverain, avec qui la vie était sauve, ou du moins ne courait pas tant de risque, qu’avec les autres, qui non seulement n’épargnaient personne, mais de qui même leurs propres amis et les gens de leur connaissance avaient plus à craindre que des étrangers ; qu’enfin dans une guerre ouverte on était en état d’attaquer et de se défendre, et que l’on n’était jamais surpris qu’on ne dût s’attendre à l’être ; mais que les voleurs de grands chemins étaient des gens qui mettaient leur sûreté dans les surprises qu’ils faisaient aux gens qui ne se défiaient nullement d’eux ; et qu’en un mot c’était des ennemis d’autant plus dangereux qu’ils empêchaient le commerce et la sûreté, et qu’il n’y avait avec eux ni paix ni trêve à espérer que par leur mort ; enfin des gens universellement regardés avec exécration ; ce qui était si vrai, qu’en France même, où les gens de distinction tenaient cette chasse si indigne d’eux, les bandits et les voleurs de grand chemin étaient punis du plus long et du plus rude des supplices, et privés même de la sépulture.
Le cardinal de Richelieu l’employa dans quelques autres négociations, dont il sortit à son honneur. […] à l’honneur de quel saint retenez-vous le bien de ces gens-là ? […] Il le fut, n’ayant pour témoins que les gens du logis auxquels cela ne pouvait faire aucun honneur. […] Aussi son proverbe ordinaire était : Moins d’honneur et plus de profit. […] Il fut mis plusieurs fois en prison et en sortit sinon à son honneur, du moins sans infamie.
Elle ne fit point les honneurs de sa voix, j’eus honte de chanter après ce que je venais d’entendre, qui était le redouble des Rochers du fameux LambertLambert Air des Rochers…. […] Ce ne fut point ici que je lui dis que j’avais l’honneur de vous connaître, laissez-moi poursuivre, vous saurez tout en son temps. […] Il est vrai que pour son honneur elle a dû soutenir son engagement ; mais il est vrai aussi qu’il est très rare que le sexe soit si sensible, surtout étant attaqué par autant de partis qu’il s’en est présenté pour elle. […] Jussy ne paraissait point, sa femme fit les honneurs du logis. […] Il vit bien que la violence n’était plus de saison, et qu’il n’en sortirait pas le plus fort, ni à son honneur.
Qu’il était de son intérêt et de son honneur de prévenir le tout par un prompt mariage. […] Telles et telles ont fait des enfants, et se sont perdues de réputation et d’honneur ; c’est qu’elles n’ont pas eu l’esprit de cacher leur secret comme telle et telle, dont on ne parle seulement pas. […] La curiosité porte à en goûter ; les réflexions émeuvent les sens ; un gaillard les surprend dans le moment de la tentation, elles résistent un peu pour faire honneur à leur défaite ; enfin elles succombent par faiblesse, et poursuivent par libertinage. […] Donnez-vous la main l’un à l’autre, j’espère qu’elle vous sera aussi chère après votre mariage, qu’elle vous l’a jamais été, parce que j’espère qu’elle sera toujours la même, et qu’elle ne vous fera jamais repentir de l’honneur que vous lui faites. […] Elle n’eut qu’à essuyer les formalités de justice comme mineure émancipée, et Dupuis comme son curateur ; toute la famille lui ayant déféré cet honneur sans charge.
Je changeai d’habillement, et ma figure imprimant du respect à cette populace, j’en sortis avec honneur. […] Au contraire, je me fis une nécessité d’honneur de soutenir ce que j’avais fait. […] Et il n’y a pas manqué, d’autant plus que son honneur y était intéressé. […] J’ai vécu, poursuivit cette veuve, comme doit vivre une femme d’honneur avec son époux. […] Je n’ai point eu l’honneur de la voir depuis son mariage, et je serai fort aise de la saluer.
En tout cas, quand elle ne le croirait pas, il sera de son honneur de le faire croire aux autres. […] Que tout le monde la prendrait en horreur, et qu’elle aurait autant d’ennemis, qu’il y aurait de gens d’honneur qui apprendraient son infamie. […] Il n’a point déclaré son mariage par plusieurs raisons, dont [la principale est] que le lieu où elle est morte ne lui fait point d’honneur. […] Que la défunte ne se serait point ressentie de cet honneur, mais seulement sa mère dont il avait juré la perte. […] Madame de Contamine fit les honneurs de chez elle.
Je crains de vous en dire trop pour mon honneur ; je crains de ne vous en pas dire assez pour exciter votre compassion. […] L’honneur vous l’ordonne, l’amour ne vous le défend-il pas ? […] Je la piquais de l’honneur de sauver une âme à Dieu en la retirant de la religion du pape ; en un mot, ma lettre était d’un véritable huguenot. […] J’avais l’honneur d’être son parent et d’en être fort considéré. […] Je suis d’une maison à vous faire honneur, elle se donne à moi sans s’arrêter à votre choix ; elle me fait plaisir, je ne me soucie pas qu’elle ne vous en fasse point.
Je suis une des filles d’honneur de l’infortunée Balerme qui songe à pleurer Durandus son amant dont elle porte le cœur à la main, pendant que lui couché comme un veau, dort comme une toupie sans remuer non plus qu’un rocher. […] La voûte parut illuminée d’une lumière vive et pure, et représenter un ciel couvert de nuages ; en même temps il entendit distinctement ces paroles proférées d’une voix forte : Arrête, invincible Chevalier des Lions, c’est contre l’enchanteur Freston que tu veux combattre, et tu dois te souvenir que je me suis réservé l’honneur de la victoire. […] Ils n’y virent rien qui méritât leur attention, mais au-dessus d’une porte qui leur parut de jaspe, ils virent un écriteau de marbre noir sur lequel ces paroles étaient écrites en lettres d’or : Qui que vous soyez qui venez affronter Merlin dans son palais et lui enlever les princesses qu’il y tient enchantées, préparez-vous à de rudes combats dans lesquels si vous demeurez victorieux, outre l’honneur que vous en remporterez, vous trouverez aussi des richesses qui vous appartiendront ; mais sachez qu’il faut être d’un cœur pur et net, n’avoir rien à autrui sur sa conscience et n’avoir jamais menti, ou vous attendre avant que d’en sortir à en faire une rude pénitence ; il ne sera plus temps de reculer quand vous aurez une fois franchi cette porte. […] L’illustre princesse Dulcinée du Toboso devrait être désenchantée ; cependant nous la venons de voir encore sous son infâme figure de laide et dégoûtante paysanne ; c’est de quoi l’invincible et le fidèle chevalier des Lions, Don Quichotte, l’honneur de la Manche, te demande justice par ma voix, comme il va te la demander lui-même.
Non, répondit Des Frans, je vous supplie de m’en dispenser ; et croyez qu’il faut que des affaires d’honneur et de conséquence m’appellent ailleurs, puisque je romps si promptement visière à la civilité, en ne vous tenant pas compagnie. […] Des Ronais fit les honneurs de chez lui, ils se mirent à table, et s’entretinrent de leurs anciennes connaissances, et se rendirent compte en gros de tout ce qui leur était arrivé depuis leur séparation, attendant qu’un plus long loisir leur permît d’entrer dans un plus ample détail. […] Elle a dû l’être pour son honneur, reprit Dupuis.
Madame votre mère, continua-t-elle, n’est pas plus exempte que ses sœurs de la satire de Sainville ; ses airs de dévotion ne sont, à ce qu’il dit, que des hypocrisies ; mais c’est vous, Mademoiselle, qu’il attaque le plus fortement ; il m’a dit que vous aviez fait auprès de lui les démarches les plus basses et les plus honteuses du monde, qu’il avait feint de vous aimer pour voir jusques où vous pourriez vous porter ; que sans doute vous iriez encore plus loin que vos tantes dans le pays des aventures, qu’il vous faisait croire que son but était le mariage, mais qu’il avait trop d’horreur pour votre famille pour s’y allier, et pour vous trop de mépris, pour vous confier son honneur. […] Ses soins à me faire expliquer la quantité de lettres qu’il m’avait écrites, et qu’on m’avait dit qu’il était de mon honneur de lui renvoyer toutes cachetées, et que je lui renvoyai en effet, me paraissaient des suites de ses trahisons, et son absence me parut la confirmation du mépris et de l’indifférence qu’on m’avait persuadée qu’il avait pour moi. […] Il n’en est pas de même de ceux qui comme Deshayes et moi ont franchi les bornes de l’honneur et de l’innocence ; un crime leur en fait faire un autre, et l’intérêt réciproque qu’ils ont à se ménager fait qu’ils épousent aveuglément leurs passions mutuelles, et que toutes leurs mauvaises actions leur deviennent communes. […] Ils revinrent à Paris pour faire de l’argent et mettre ordre à leurs affaires ; et la marquise, dont j’ai l’honneur d’être parente de fort proche, m’ayant fait connaître qu’elle souhaitait que je fusse de la partie, et y ayant consenti, nous montâmes en carrosse quatre de compagnie, c’est-à-dire la marquise, Sainville, une femme de chambre et moi, et nous partîmes quatre jours après le départ de Silvie. […] Elle vous les demande, Monsieur, et l’honneur de votre appui à la Cour en faveur de son époux que le vice-roi de Naples retient en prison avec beaucoup de dureté et fort peu de justice.
Un diable de si bonne mine attira l’attention de nos deux chevaliers, et Pluton lui ayant permis de parler, il commença par remontrer toutes les peines qu’il se donnait pour rendre les femmes belles et attirantes, qu’il inventait tous les jours quelque pommade et quelque essence pour conserver leur teint, ou bien pour en cacher les rides, qu’il avait depuis peu de temps travaillé à cela avec beaucoup de succès, puisqu’il y avait des femmes âgées de plus de soixante ans qui ne laissaient pas par son moyen de paraître avec des cheveux bruns, une peau unie et délicate, et enfin si jeunes qu’il faudrait avoir en main leur extrait baptistaire pour les croire plus vieilles que leurs enfants ; que cela faisait augmenter le nombre de leurs amants, et augmentait en même temps celui des sujets de l’enfer ; mais que malgré tous ses soins il courait risque de perdre son temps s’il y avait encore dans le monde deux hommes de l’humeur du chevalier Sancho, qui à tout moment disait pis que rage des femmes, et tâchait d’en dégoûter tout le monde ; que si cela était souffert, il n’avait qu’à laisser en enfer son panier plein de cornes, parce qu’il ne trouverait plus de femmes qui en pussent faire porter à leurs maris, n’y ayant plus aucun homme qui leur voulût aider à les attacher, qu’il avait employé un temps infini pour en faire qui fussent propres à tout le monde, qu’il y en avait de dorées pour les maris pauvres, et qui se changeaient sur leur tête en cornes d’abondance ; qu’il y en avait d’unies et simples pour ceux dont les femmes faisaient l’amour but à but ; qu’il y en avait de jaunes pour ceux qui épousaient des filles qui avaient déjà eu quelque intrigue ; de blanches pour ceux qui épousaient des veuves ; de noires pour ceux qui épousaient des fausses dévotes ; de diaphanes et transparentes pour ceux dont les femmes savaient cacher leur infidélité ; de vertes pour ceux qui épousaient des filles élevées dans un couvent ou dans une grande retenue ; et de rouges pour ceux dont les femmes payaient leurs amants, à qui d’ordinaire elles ne se contentaient pas de sacrifier la bourse et l’honneur, mais le sang même de leur époux ; que chaque couleur convenait parfaitement à la qualité d’un chacun ; qu’il y avait dans le monde assez de femmes de vertu qui rebutaient les hommes, sans que Sancho voulût mettre les hommes sur le pied de rebuter les femmes ; que c’était de quoi il demandait justice, et protestait en cas de déni de laisser toutes les femmes et les filles en garde à leur propre vertu, sans les tenter dorénavant par lui-même, et sans les faire tenter par d’autres, ni leur fournir les occasions d’être tentées. […] Il ne faut que savoir l’aventure qui lui est arrivée il n’y a pas si longtemps avec une fille nommée Altisidore. — Je la sais aussi bien que vous, repartit Molieros, c’était moi qui lui en avais inspiré la tentation, et je l’avais conduite jusques au point de réussir quand des esprits d’en haut gardiens de l’honneur de cette fille vinrent mal à propos les séparer tous deux et les châtièrent de leurs mauvais desseins sans leur avoir permis de l’accomplir. […] C’est d’avoir voulu violer les droits de l’hospitalité en voulant d’un lieu d’honneur où il était bien reçu en faire le théâtre de ses débauches, dont il mérite des reproches et des châtiments ; c’est d’avoir eu plus d’indulgence pour soi-même que pour autrui, c’est d’avoir été hypocrite, d’avoir voulu priver les autres des plaisirs infâmes où il tâchait de se souiller lui-même, d’avoir voulu sous les dehors d’une vie honnête et d’un mépris affecté des femmes cacher le penchant vicieux qu’il a pour elles ; c’est là vouloir imposer à Dieu et aux hommes, avoir deux mesures, l’une pour soi, l’autre pour autrui, c’est cela encore un coup dont on devait l’accuser ; il devait se souvenir de son proverbe ordinaire, Médecin guéris-toi toi-même.
Champi me faisait l’honneur de me considérer, et que j’avais celui de vous appartenir. […] Je suis bien aise, monsieur, ai-je dit à M. du Quesne, d’avoir encore l’honneur de vous assurer de mes respects avant notre départ de France : je vous avoue pourtant que j’aurais fort souhaité devoir cet honneur à un autre sujet que celui qui m’amène. […] et s’il a lu celui-là étant jeune, est-il de son honneur de faire connaître qu’il s’en souvient ? […] Ils m’ont promis d’y venir ; j’ai fait l’honneur à M. […] Fais les honneurs de ta chambre, a-t-il continué parlant à moi.
C’est le même Coinda qui a bâti cette pagode à l’honneur de Mado. […] Cela est faux : c’est un de ses généraux qui la commande, & qui n’y gagnera pas beaucoup d’honneur. […] Notre honneur dépend-il de ceux qui n’en ont point ? […] Ce sont là les secrets de la Providence, qui d’un même limon forme des vases d honneur & d’autres d’opprobre. […] La France y gagnera de l’honneur sans profit, & c’est tout.
. — Tu te trompes, ami Sancho, lui dit Don Quichotte, un chevalier et un sergent, ou un homme de justice, sont en tout différents ; l’un n’y va qu’attiré et poussé par la vue d’un gain sordide ; mais un chevalier errant n’y va qu’en vue de l’honneur, et pour délivrer les bons et les innocents des torts que ces bandits leur font. — Eh bon, bon, reprit Sancho, dis-moi qui tu hantes, et je te dirai qui tu es. Tenez, Monsieur, ajouta-t-il, faites-en telle différence qu’il vous plaira, dans le fond c’est toujours le même métier, et les mêmes membres de justice qui y gagnent autant d’honneur que les chevaliers, ont encore du profit que les autres n’ont pas.
Ils dirent qu’il était vrai qu’on ne voyait point de Français s’empoisonner, se poignarder, ou se pendre, pour avoir eu le malheur de n’avoir pas épousé une vestale, et que sauf le respect de tous les Espagnols en général, et des Portugais en particulier, ils regardaient comme des fous ceux qui étaient assez sots et assez malheureux pour en venir à ces extrémités ; que la manière de France sur un pareil sujet était sans doute plus raisonnable, puisque c’est être en effet extravagant, que de se punir des péchés d’autrui, et qu’à le bien prendre la mauvaise conduite d’une femme ne devait être imputée au mari qu’autant qu’il la souffrait sans y mettre ordre lorsqu’il le devait et autant qu’il le pouvait ; que du reste un homme n’en devait pas être regardé comme moins honnête, quoiqu’il eût une femme libertine, pourvu qu’il eût fait en homme d’honneur ce qu’il devait pour la ranger à la raison, pour sauver les apparences, et pour éviter l’éclat et le scandale, dont tout ce contrecoup et la honte retombait sur lui, lorsqu’il faisait le moindre faux pas. Pour montrer la différence qu’il y a entre ces divers procédés de gens qui ont des épouses infidèles, dit Sainville, et qu’il y en a qui sont plaints par le public, ou dont on ne parle seulement pas, et d’autres moqués et raillés avec juste raison, pour faire voir en même temps que ce point d’honneur qu’on y attache dépend beaucoup plus de la conduite du mari que de celle de la femme, quoique ce soit elle qui fasse le crime, pour montrer que ce ne sont pas ceux qui examinent la conduite de leurs épouses avec le plus de vigilance qui sont le plus à couvert de leur infidélité, et que c’est cette conduite qui les y pousse, je crois qu’il est à propos que chacun de nous raconte quelque aventure qu’il sache certainement être arrivée de notre temps en France même, afin de ne point mêler d’histoires étrangères dans nos entretiens ; et pour cet effet, je vais, poursuivit-il, en conter une qui montrera que les précautions d’un jaloux donnent déjà de lui un sujet de risée, qui est encore augmenté lorsqu’il a affaire à des gens qui ont l’esprit de les rendre inutiles, et de les tourner contre lui-même, et qui prouvera en même temps, que la jalousie est en effet un poison mortel pour ceux qui s’y abandonnent.
Les arts étaient en vogue et en honneur ; l’ouvrier s’occupait et vivait du travail de ses mains, et on n’était point obligé d’acheter à prix d’argent la liberté de gagner sa vie ; les meilleurs ouvriers travaillaient le plus, parce qu’ils étaient les plus recherchés ; mais les autres n’étaient point obligés de travailler en cachette, ou de mendier leur pain. […] Les femmes n’étaient servies que par des femmes ; le grand monde leur était inconnu ; leur domestique faisait toute leur occupation, et leur propre jardin bornait leur promenade ; assez parées de la seule nature, elles faisaient consister leur beauté dans leur vertu, et leur mérite dans leur attachement pour leurs époux, sans témoigner aucun empressement pour ces sortes de parures que la mode invente tous les jours ; leur honneur ne courait aucun risque ; armées de leur seule modestie et de leur pudeur, elles retenaient tout le monde dans le respect, et ôtaient la hardiesse de leur rien dire de malhonnête.
Ne voyez-vous pas bien que ce maudit Parafaragaramus jaloux de l’honneur que j’aurais gagné, et vous aussi, m’a lâché un démon qui m’a fait déjeuner par enchantement ; et de peur que je ne le battisse bien, pour sa récompense, il m’a emmené dans l’endroit où vous m’avez vu, où il m’a endormi et lié ; mais patience, tout vient à point à qui peut attendre. […] Valerio lui répondit qu’il lui avait fait plaisir, et qu’étant une fois prisonnier des Français il en avait reçu un traitement si généreux et si honnête, qu’il ne souhaitait rien plus ardemment que de pouvoir s’en ressentir avec honneur.
. — Oui, Seigneur, lui répondit-elle, et veuve d’un Français que j’aimais beaucoup, et dont la mémoire me sera toujours chère, parce que c’est à ses soins que je dois la conservation de mon honneur, que les bandits m’auraient ravi, si lui-même ne l’avait pas mis à couvert de leur violence. — C’est donc en vous défendant qu’il a été tué ? repartit Sotain. — Non, Seigneur, répondit-elle, il avait été tué avant que les bandits fussent victorieux. — Et comment donc, reprit Sotain, a-t-il pu mettre votre honneur à couvert de leur violence ? […] Le mari lui dit de le suivre, et l’Italienne l’ayant suivi, il la fit entrer chez lui ; et après l’avoir bien fait manger en sa présence même, il la mena dans son jardin tout au bout, afin de n’être entendu de personne, où lui ayant demandé si elle voulait rester chez lui, il lui répondit que son honneur y serait en sûreté, et qu’il lui procurerait un parti qui l’empêcherait de regretter la dame qu’elle allait chercher, et les parents de son mari. […] Elle lui dit en riant qu’elle savait bien que sa vertu était en sûreté, non seulement par l’innocence et la pureté de ses intentions, mais aussi par la précaution de son époux ; mais que cependant il n’était ni de son honneur ni de son devoir de rester dans un état de tentation continuelle, à laquelle quand bien même elle ne succomberait pas, elle se reprocherait toujours la présence d’un homme déguisé auprès d’elle, qui pouvait être reconnu par mille contretemps que toute la prudence humaine ne pouvait prévoir et laisser une tache à sa réputation.
Que pour le comte du Chirou, ils n’avaient pas toujours été si bons amis qu’ils étaient parce qu’ils avaient aimé la même maîtresse à Gironne, que pourtant malgré sa concurrence, du Chirou n’avait jamais voulu le faire arrêter comme il le pouvait lorsqu’il allait dans cette place dont les Français étaient maîtres, pour voir incognito leur commune maîtresse ; mais qu’enfin tous deux ayant reconnu que non contente de les sacrifier l’un à l’autre, elle les sacrifiait encore tous les deux à un troisième, ils s’étaient joints d’intérêt pour avérer sa perfidie, et la prendre sur le fait ; qu’ils y avaient réussi, et que cette conformité d’aventures les ayant rendus fort bons amis, qu’ils s’étaient promis amitié et secours partout où ils se trouveraient, sauf le service de leur souverain et l’intérêt de leur honneur ; que même sitôt que la paix avait été faite entre la France et l’Espagne, du Chirou l’était venu voir à Barcelone, où il s’était fait porter blessé, et lui avait offert sa bourse, et tout ce qui pouvait dépendre de lui, pour lui rendre tous les services qui auraient pu lui être nécessaires dans l’état où il se trouvait. […] La marquise ayant par là l’esprit en repos, les ducs et les deux épouses n’ayant eu aucun sujet de chagrin que par rapport à leurs amis, le comte Valerio et son épouse étant contents, Sainville et sa veuve étant dans la meilleure intelligence du monde, aussi bien que le comte du Chirou avec la belle Provençale, Valerio et Sainville reprenant peu à peu leurs forces, Don Quichotte se portant bien, et Sancho en parfaite santé, à quelques brûlures près ; en un mot tout le monde ayant l’esprit porté à la joie et au plaisir on se disposa en attendant le départ, qui n’était retardé que par Valerio, Sainville et du Chirou, à prendre de nos aventuriers tout le divertissement qu’on pouvait en prendre sans s’en railler ouvertement, surtout de notre héros, dont le comte du Chirou admirait la valeur, et à qui il devait la vie, aussi bien que la duchesse et Eugénie, qui outre cela lui devait encore celle de son époux, et peut-être son honneur.
Vraiment, Seigneur chevalier, lui dit la belle Provençale, le métier de chevalier errant n’est pas, à ce que je vois, fort dangereux ; nous croyions trouver déjà cinq ou six chevaliers vaincus, et vous dans le chemin de la gloire ; Monsieur le duc avait ordonné qu’on emmenât une charrette pour enlever les trophées et les dépouilles que vous aviez conquises, et il n’y en a pas un de nous qui n’eût juré que vos bras agissaient pour l’honneur de la beauté de la comtesse, et nous voyons avec étonnement qu’il n’y a que vos dents qui soient en mouvement pour le profit de votre ventre. — Mardi, Mademoiselle, lui répondit Sancho, vous parlez comme on dit que parlent les gens de votre pays, sans savoir ce qu’ils veulent dire ; si vous aviez été ici il y a un quart d’heure, vous auriez vu si je n’ai pas bien gagné le pain et l’eau que Monseigneur Parafaragaramus me fait donner. — Quoi ! […] Parafaragaramus pria Eugénie de faire les honneurs du modique déjeuner qu’il lui présentait.
Cette petite fille se vit croître, et en même temps les honneurs de son père et son bien qui était déjà fort ample. […] Je vous rends grâces, Monsieur, continua-t-il en s’adressant à son gendre, de la bonté que vous avez eue de l’épargner et de sauver l’honneur de toute ma famille, et le mien en particulier.
Cinq coups de canon pour un mandarin, c’est beaucoup, mais Monsieur Du Quesne leur fait autant d’honneur qu’il veut en recevoir d’eux, et outre cela, on croit ici que la présence du Père Tachard lui en a valu plus de deux. […] Ils m’ont fait l’honneur, l’un et l’autre, de boire à ma santé et moi j’ai salué la leur. […] Ce n’est point à moi à trouver à redire aux navires que la Compagnie envoie aux Indes mais il me semble qu’il eût été de son honneur et de son intérêt de n’y envoyer que des vaisseaux bons voiliers. […] Les princes de ce pays-ci obligent assez souvent les Européens de faire des dépenses excessives quoique ridicules et inutiles, mais dont on ne peut pas se dispenser quand ce ne serait que l’honneur de la nation qui y oblige. […] On dit que nous y trouverons des ennemis, et que comme c’est demain la Saint-Louis, nous tirerons du canon sous les auspices de ce saint protecteur de la France, et à l’honneur de notre grand Roi qui en est l’âme.
On a dit que le duc de Médoc était un fort honnête homme, aussi bien que le duc d’Albuquerque ; le comte Valerio et le comte du Chirou, et tous, comme on l’a vu, avaient obligation à Don Quichotte, tant par rapport à eux-mêmes, qu’à cause de leurs épouses, surtout le duc et la duchesse de Médoc, le comte de la Ribeyra, Eugénie son épouse et le comte du Chirou, qui tous lui devaient la vie, et les femmes leur honneur ; et comme la reconnaissance est le propre des bons cœurs, ils avaient résolu de faire paraître la leur dans toute son étendue, et de renvoyer notre héros chez lui dans un état à ne lui rien laisser à souhaiter pour la vie ; mais ils avaient résolu de lui faire recevoir leurs présents comme venant de la main d’un enchanteur, parce qu’ils étaient bien persuadés qu’il était trop généreux pour les accepter de main à main. […] Ne sais-tu pas bien qu’il y a des démons qui gardent tous les trésors, et devais-tu douter qu’il n’y en ait de commis à la garde de l’honneur d’Altisidore que tu voulais ravir ?
Ecoute-moi, brave Don Quichotte, vrai miroir de la Chevalerie errante, honneur de la Manche, modèle de tous les chevaliers passés, présents et futurs.
Le duc d’Albuquerque lui dit qu’il y avait pourvu ; que l’histoire que la Française leur avait racontée le soir, lui avait donné l’idée de ce qu’il avait à faire ; c’est-à-dire de mander au duc de Médoc qui était son parent, l’état de toutes choses, et le prier de venir lui-même sur les lieux mettre ordre à tout par son autorité ; ce qu’il pouvait facilement, étant gouverneur de la province ; qu’il ne doutait pas qu’il ne lui accordât sa demande, et que quand il y serait, on prendrait avec lui des mesures pour faire en même temps tout savoir à Valerio, et ne rendre public que ce qu’on voudrait bien qui fût su pour mettre l’honneur d’Octavio et de Don Pedre à couvert, et que jusqu’à son arrivée, on ne devait faire autre chose que tâcher de divertir le comte Valerio, et avoir soin des Français qui étaient dans le château.
Il leur avait à tous refusé cette complaisance en leur faisant comprendre que l’entière exécution du dessein et sa réussite dépendaient uniquement de la diligence ; parce que si on donnait le temps à quelqu’un de ces scélérats de s’échapper ou de s’éloigner, il serait après leur fuite impossible de sauver la réputation de Don Pedre et celle d’Octavio, et par conséquent celle de Valerio ; ce qui était vrai ; ainsi il leur avait si résolument dit qu’il voulait que l’affaire fût terminée dès le lendemain par lui-même, qu’on avait été obligé de le laisser faire comme il voulut, et d’une manière dont il est sorti à son honneur, avec l’aide de nos deux chevaliers.
L’hôte faisait un bruit de diable ; et très peu persuadé de la vertu des Françaises, et outre cela extrêmement jaloux, il s’égosillait en appelant sa femme, croyant peut-être qu’il y allait de son honneur.
Sitôt qu’il y fut, ils l’entendirent faire son défi de tous les quatre côtés du monde à tous les chevaliers errants, Maures, Arabes, Castillans et autres, et puis après se recommander à la bonne grâce de sa mauricaude et à celle de la comtesse Eugénie, qu’il suppliait de l’aider, puisqu’il ne s’exposait que pour son honneur.
Celle de Jussy fait voir, qu’une fille qui a eu de la faiblesse pour un amant, doit, pour son honneur, soutenir son engagement toute sa vie ; n’y ayant que sa constance qui puisse faire oublier sa fragilité.
— Voilà parler en honnête homme, lui répliqua Parafaragaramus ; eh bien, remets tout entre les mains du curé de ton village, sans en parler à ta femme ; il est homme d’honneur, et aura soin de marier ta fille, et de t’empêcher de jamais tomber en nécessité. — Pardi, reprit Sancho tout réjoui en se frappant de la main droite dans la gauche, tenez, nous aurions fait un pape, car nous sommes tous deux de même avis.
Eh bien, Madame, me voilà venue, dit-elle à la duchesse ; je vous aurais apporté un présent si le gland avait été mûr, mais la saison n’est pas assez avancée : car à tous seigneurs tous honneurs. — Je vous en rends grâces, répondit la duchesse en riant ; Monsieur le duc vous a envoyé chercher, poursuivit-elle, pour participer à la fortune du seigneur Sancho qui est à présent fort riche.