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2. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre quatrième) « Chapitre LIX. De ce qui se passa chez le duc de Médoc après le départ de Dulcinée, et comment Sancho reçut sa femme que la duchesse fit venir au château. »

De ce qui se passa chez le duc de Médoc après le départ de Dulcinée, et comment Sancho reçut sa femme que la duchesse fit venir au château. […] lui demanda la duchesse. — Pardi, Madame, ne le voyez-vous pas bien ? […] La duchesse lui promit, et chacun s’en alla en éclatant de rire. […] Eh bien, Madame, me voilà venue, dit-elle à la duchesse ; je vous aurais apporté un présent si le gland avait été mûr, mais la saison n’est pas assez avancée : car à tous seigneurs tous honneurs. — Je vous en rends grâces, répondit la duchesse en riant ; Monsieur le duc vous a envoyé chercher, poursuivit-elle, pour participer à la fortune du seigneur Sancho qui est à présent fort riche. […] Les Espagnols, la duchesse et les autres dames se mirent avec les Français aux fenêtres, pour se donner le plaisir de l’entrevue.

3. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLIII. De l’accident qui arriva au chevalier Sancho, en tirant une arme à feu. Remède pire que le mal. »

La duchesse ayant dit qu’il était vrai, il ne resta plus qu’à faire l’opération. […] Pendant cette belle opération le duc qui venait en effet au bruit qu’il avait entendu de la forêt, fut bientôt auprès de la duchesse, et le premier objet qu’il vit, ce fut les charitables chirurgiens en œuvre. Cela le fit rire de toute sa force, et n’aurait pas sitôt cessé si la duchesse ne lui avait pas fait signe. […] Après cela le duc monta en carrosse avec la duchesse. […] Don Quichotte fut toujours à la portière du carrosse, et eut lieu d’être content des louanges que le duc et son épouse donnèrent à l’envi l’un de l’autre à sa valeur.

4. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLI. Don Quichotte et Sancho s’arment pour aller combattre les brigands. Ces deux chevaliers font des actions de valeur inouïes. »

Quand le jour fut grand, le duc sous prétexte de visiter tout son monde, descendit dans la cour, où il fit semblant d’être surpris de voir nos deux chevaliers à pied et désarmés. […] demanda le duc avec beaucoup de douceur. —  Bouche close, interrompit Sancho, en parlant à son maître, et en se serrant les deux lèvres de ses deux doigts. —  Eh quoi ! […] Ils auraient plus longtemps parlé et mangé, car la station plaisait fort à Sancho, si le duc ne fût arrivé suivi de toute sa troupe au nombre de plus de cent hommes. […] Le duc les questionna sur leurs armes et leurs chevaux qui étaient en bon ordre, et leur dit qu’il soupçonnait là-dedans de la nécromancie. […] Patience, nous les reconnaîtrons ; laissez-nous seulement aller, et vous verrez beau jeu. —  Allez à la bonne heure, dit le duc qui avait divisé sa troupe en quatre, afin d’entrer de quatre côtés.

5. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre quatrième) « Chapitre LIV. Départ de la compagnie. Comment Sancho fit taire le curé. Aventures diverses arrivées à cet infortuné chevalier. »

Sitôt que tout fut résolu, le duc les fit partir pour son château, avec ordre de mettre tout en état de bien recevoir les aventuriers errants. […] Entre ceux qui lui rendirent ce pieux office, fut un petit Bohème de la compagnie de Bracamont, qui s’était vêtu d’un justaucorps des livrées du duc, et qui passait pour un des valets de pied de la duchesse. […] La compagnie, et surtout la duchesse, n’avaient jamais ri de si bon cœur. […] Mais, mon enfant, il faut prendre ton mal en patience, et ne faire semblant de rien, parce qu’on se moquerait de toi, et que Monsieur le duc et Madame la duchesse seraient choqués, s’ils savaient que tu eusses voulu souiller leur château par tes impuretés. […] Ils voulurent passer outre sans en demander la cause ; mais la duchesse les retint malgré eux.

6. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XXXIX. Du grand projet que forma le duc de Médoc, et dans lequel Don Quichotte entra avec plus de joie que Sancho. »

Quelque lecteur a sans doute déjà trouvé à redire qu’on n’ait point parlé des civilités que notre chevalier avait faites à ce duc, et s’imagine peut-être qu’il ne lui en fit point. […] Lorsqu’ils furent tous assemblés, c’est-à-dire les deux ducs, la duchesse Dorothée, la comtesse Eugénie, et Don Quichotte, Eugénie raconta au duc tout ce qu’elle avait dit au lieutenant et que le greffier avait écrit ; après cela Don Quichotte et le duc d’Albuquerque l’instruisirent de ce qu’ils avaient vu. […] Comme ce duc était un très hon-| nête homme, il voulut bien à la prière d’Eugénie se donner la peine et se charger de tout. […] On arrêta sa fougue, et le duc, après l’avoir assuré qu’on ne ferait rien sans lui, lui fit promettre qu’il ne sortirait point du château ; ce qu’il jura foi de loyal chevalier. […] Le duc ne manqua pas d’envoyer le lendemain chercher le lieutenant avec ordre d’amener main-forte ; il envoya encore quérir plusieurs gens de justice pour voir tout d’un coup la fin de l’aventure.

7. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre quatrième) « Chapitre LVIII. Des tristes et agréables choses que Parafaragaramus apprit au chevalier de la Manche. »

Il allait lui dire de quelle manière cela lui avait été donné lorsque le duc lui demanda s’il voulait troquer sa vaisselle contre son pesant d’argent monnayé et le dixième de plus pour la façon. […] Le troc fut fait dans le moment, et quelque instance que lui pût faire le duc, il ne voulut jamais être présent aux pesées, et s’en rapporta à la bonne foi de ceux qui voulurent s’en mêler. Il voulut de plus obliger les officiers du duc de recevoir de lui quelques présents ; mais comme ils avaient des ordres contraires ils le remercièrent, et pour l’empêcher de les en presser davantage, le duc fut obligé de lui dire, que le premier qui prendrait de lui la moindre chose ne resterait pas une heure à son service. […] Je l’ai conduite dans l’appartement de la duchesse mon épouse, où Madame d’Albuquerque et les autres dames lui tiennent compagnie et l’admirent. Don Quichotte qui avait l’idée remplie de sa Dulcinée ne douta pas un moment que ce ne fût elle, et suivit le duc et les autres qui l’emmenaient comme en triomphe, en publiant la beauté de cette dame inconnue.

8. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLVI. Pourquoi Sancho perdit ses armes enchantées, et du terrible combat qu’il eut à soutenir pour les recouvrer. »

Notre héros était armé, et Sancho désarmé voulait passer sans rien dire ; mais la duchesse l’arrêta et lui demanda où il allait si vite. […] On marchait toujours cependant, et enfin les ducs qui marchaient les premiers, s’arrêtèrent tout d’un coup en feignant une grande surprise d’être arrêtés sans voir par qui ni comment. […] Je ne vois rien, lui dit le duc. —  Ni nous non plus, dirent tous les autres presque en même temps. —  Quoi ! […] Il alla donc seul d’un pas précipité, sans s’apercevoir ni d’une ficelle qu’on avait mis en travers sur son chemin, ni d’un paquet qu’on lui avait attaché au derrière, pendant que la duchesse et les autres le questionnaient. […] lui dit le duc.

9. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLIV. Ce qui se passa dans le château après cette expédition. »

On se mit à table sitôt qu’on eut eu soin des blessés, et qu’on se fut assuré des prisonniers, et comme la journée avait été fatigante, on se coucha de bonne heure ; le lendemain on fit enterrer les morts fort honorablement, surtout le gentilhomme qui avait été assassiné dans le carrosse de la duchesse. […] Après cela le lieutenant partit, et emmena son gibier, ayant reçu de bons ordres sur la manière dont il devait tourner les informations, et sauver celui qui avait indiqué les retraites des autres, comme le duc le lui avait promis. Le lieutenant revint trois jours après, et fit voir au duc les informations et les interrogatoires des bandits ; le duc les trouva comme il l’avait souhaité, et les communiqua à Valerio, qui eut lieu d’en être satisfait. […] Don Quichotte qui n’avait garde de demeurer en si beau chemin, reprit la parole après le duc, et après avoir répété une partie de ce qu’il avait dit, il ajouta que l’emploi de délivrer son pays de malfaiteurs et de brigands, était non seulement honorable, mais encore digne d’un roi ; que c’était par là qu’Hercule, Thésée et plusieurs autres héros s’étaient rendus fameux ; que c’était le premier devoir de la Chevalerie errante, puisque c’était délivrer les faibles des torts et des violences que les méchants leur faisaient, et que quand il serait roi, il ne tiendrait point cette recherche au-dessous de lui. […] En effet cette bonne nouvelle pensa lui faire perdre le peu de raison qui lui restait ; mais la tranquillité et le repos dont il jouissait dans son lit, lui aidèrent à calmer ses transports ; et comme sa mâchoire se raccommoda, et qu’il buvait et mangeait tout son saoul, il se releva avec un embonpoint qui ne cédait en rien à celui où on l’avait vu auparavant ; il ne faut cependant pas le lui envier, car il en aura besoin pour soutenir les rudes assauts que les ducs, le comte, leurs épouses, les Français et les Françaises lui préparent.

10. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre quatrième) « Chapitre LX. De l’aventure qui arriva au malheureux Sancho peu de temps après qu’il fut hors de chez le duc de Médoc, et de plusieurs autres choses qui ne sont pas de grande importance. »

Sancho avait repris toutes ses forces lorsque les ducs de Médoc et d’Albuquerque, le comte de la Ribeyra, la marquise, la belle La Bastide, le comte du Chirou, Sainville et Silvie partirent pour Madrid. […] Il ne resta au château que les duchesses de Médoc et d’Albuquerque, la comtesse Eugénie et les deux chevaliers. […] Ces deux paysannes n’avaient jamais été si aises qu’elles l’étaient de se voir bien nourries et bien entretenues ; elles commençaient à se croire des gens de conséquence, et la duchesse ne trouvait pas un plus grand plaisir que celui de les faire jaser. […] La duchesse, après l’avoir assurée que le mari qu’on destinait à sa fille était tel qu’il le fallait, le lui fit voir, et elle en fut contente ; mais elle dit qu’il fallait que Sanchette le fût aussi, puisque c’était pour elle. […] Ecoute, Sanchette, lui dit sa mère en présence de toute la compagnie, Madame la duchesse veut te marier avec ce jeune homme-là ; si c’était moi, j’aurais bientôt dit oui, mais c’est pour toi, fais comme tu voudras, au moins si dans la suite il te frotte un peu l’échine, ne me viens pas étourdir les oreilles, car je ne te force pas ; si tu dis oui, à la bonne heure ; si tu dis non, tant pis pour toi, il a la mine de ne pas manquer de femmes.

11. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XXXV. Du tour ridicule et malin que fit Parafaragaramus au chevalier Sancho, et des événements tristes qui le suivirent. »

Le duc et la duchesse d’Albuquerque, qui savaient pour lors qui elle était, ne l’avaient point quittée, et la joie où elle était elle-même d’être échappée à son beau-frère et de se voir en sûreté, l’ayant tout à fait remise, elle allait monter dans le carrosse de Don Fernand avec Dorothée et Gabrielle pour retourner chez elle, lorsqu’en descendant de la chambre où on l’avait portée, et passant devant celle où était Sancho, elle entendit sa voix. […] Le duc la reçut fort civilement. […] Le duc lui dit que c’était des Français et des Françaises qui paraissaient gens de qualité, et que s’il avait été proche de chez lui, il lui eût évité toute l’incommodité qu’il en pouvait recevoir, en les conduisant dans quelque endroit qui lui appartient. […] Le duc et la comtesse pour ne rien dire qui donnât matière aux soupçons, parlèrent de Sancho Pança, et dirent enfin au comte ce qui lui était arrivé dans l’hôtellerie : il en rit autant que ses blessures le lui purent permettre. […] Le souper ne fut pourtant pas triste ; Eugénie se contraignit pour ne donner aucun soupçon à son époux ; le duc et la duchesse d’Albuquerque tâchèrent d’y inspirer la joie, ou du moins d’en bannir la mélancolie.

12. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre quatrième) « Chapitre LIII. Belle morale du seigneur Don Quichotte. »

Il prit la parole après le duc, et voici ce que Cid Ruy Gomez lui fait dire. […] Tout beau, Monsieur, dit-il à son maître en l’interrompant, n’allez pas parler de même devant ma mauricaude, vous augmenteriez encore la bonne opinion qu’elle a d’elle ; elle m’a dit mille fois que je ne suis qu’une bête, qu’un animal ; vraiment elle me dirait bien cette fois-là que Dieu m’a mis au monde avant AdaM. — Votre femme est donc méchante, Chevalier Sancho, lui demanda la duchesse, puisque vous vous en plaignez ? […] reprit la duchesse, croyez-vous qu’elles soient toutes méchantes ? […] lui demanda le duc. — Ma foi, Monseigneur, lui répondit Sancho, il en parlerait comme moi. — Dites-nous donc ce que vous en pensez, lui dit le comte Valerio. — J’en pense, répliqua Sancho, que… Je ne veux rien dire à cause de ces dames qui m’écoutent. — Au contraire, ami Sancho, lui dit la belle Dorothée, dites tout ce que vous pensez, nous ^ vous en prions toutes, et cela servira à nous faire connaître nos défauts pour nous en corriger. — Vous ne ressemblez donc pas à ma femme qui ne se corrige de rien, leur dit-il. — Mais enfin que pensez-vous de toutes les femmes ? […] Mais quand le oui est dit, et qu’elle voit bien qu’un mari ne peut plus s’en dédire, c’est pour lors qu’elle ne se contraint plus, et qu’elle met le diable à la maison. — Mais, Sancho, lui dit la duchesse, il semble que vous vouliez faire entendre que toutes les femmes fassent désespérer leurs maris. — Non pas toutes, Madame, répondit-il ; il y en a qui sont bien douces ; mais en récompense il y en a aussi qui ne le sont guère, et d’autres qui ne le sont point du tout.

13. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLV. Pourquoi la maîtresse d’une hôtellerie voisine du château venait souvent demander des nouvelles de Sainville et de Silvie. »

La duchesse de Médoc avait dit au duc son époux par un reproche fort obligeant pour la marquise, qu’il avait été sur ses brisées en écrivant au marquis de Pecaire, son frère à elle, en faveur du marquis, et avait ajouté qu’elle laissait à sa générosité et à son bon cœur le soin de lui procurer de l’appui au Conseil de Madrid ; mais qu’elle se chargeait de lui en procurer à Naples. […] Elles étaient si pleines d’honnêtetés pour lui, et d’assu- j rance de service pour le marquis qu’il protégeait, que la marquise, à qui il les communiqua, n’eut plus d’inquiétude de ce qui pouvait arriver à son époux, et ne craignit plus que les mauvais traitements que le vice-roi de Naples pouvait lui faire ; mais elle en fut délivrée par des lettres qu’elle reçut de lui, et d’autres que la duchesse reçut de son frère, qui leur apprit que le marquis était libre sur sa parole, et s’embarquerait à la première occasion commode pour se rendre à Madrid, où les ordres du Conseil l’appelaient, et où il achèverait de se justifier de ce dont on l’accusait. La marquise ayant par là l’esprit en repos, les ducs et les deux épouses n’ayant eu aucun sujet de chagrin que par rapport à leurs amis, le comte Valerio et son épouse étant contents, Sainville et sa veuve étant dans la meilleure intelligence du monde, aussi bien que le comte du Chirou avec la belle Provençale, Valerio et Sainville reprenant peu à peu leurs forces, Don Quichotte se portant bien, et Sancho en parfaite santé, à quelques brûlures près ; en un mot tout le monde ayant l’esprit porté à la joie et au plaisir on se disposa en attendant le départ, qui n’était retardé que par Valerio, Sainville et du Chirou, à prendre de nos aventuriers tout le divertissement qu’on pouvait en prendre sans s’en railler ouvertement, surtout de notre héros, dont le comte du Chirou admirait la valeur, et à qui il devait la vie, aussi bien que la duchesse et Eugénie, qui outre cela lui devait encore celle de son époux, et peut-être son honneur. […] On avait résolu de faire arriver chez le duc les aventures les plus surprenantes, et d’y faire désenchanter Dulcinée, et cependant on s’était diverti de Sancho, comme je vais dire dans le chapitre suivant.

14. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLIX. Repas magique. Apparition d’un nouvel enchanteur. Défi fait à Don Quichotte, et ce qui s’ensuivit. »

Les ducs, le comte et leurs épouses lui firent de loin de très grandes révérences ; ce que firent aussi les Français et les Françaises, qui tous firent semblant d’être étonnés de le voir. […] Le duc tira Sancho en particulier, et voulut lui faire naître du scrupule de cette table infernale, et de ce qui était dessus. […] C’est ce maudit magicien-là, poursuivit-il avec fureur, qui avait enchanté l’épée du chevalier Sancho ; mais je jure de ne me pas faire couper poil de barbe que je ne l’aie trouvé ; et afin qu’il ne puisse plus m’en donner à garder, je porterai aussi bien que lui mon épée nue. —  Désabusez-vous, Seigneur chevalier, lui dit le duc, je ne crois pas que ce soit lui qui ait fait cet enchantement, je crois plutôt que ç’a été Parafaragaramus, qui n’a pu souffrir que vous vous exposassiez avec des armes inégales contre un démon. Eugénie promit encore de lui en donner des nouvelles le lendemain, après avoir parlé à son bon ami Parafaragaramus. —  Je voudrais bien, dit notre héros en parlant au duc, que Monsieur le bachelier que j’ai vu chez vous, et les autres incrédules, fussent ici pour voir s’il y a des enchanteurs ou non. […] Sitôt que notre héros fut rentré dans le château, son premier soin fut d’aller visiter ses armes, qu’il trouva blanches et bien polies, avec une autre lance en bon état, et deux lions peints au naturel sur son écu ; aussi n’était-ce pas le même écu qu’il avait porté dans la forêt, la peinture n’en aurait pas été sèche ; c’en était un autre que le duc avait fait peindre depuis quelque temps, et qu’il fit mettre à la place du premier, pour toujours faire trouver à notre héros du merveilleux dans tout ce qui lui arrivait.

15. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XXXVII. Des offres obligeantes que fit le duc d’Albuquerque aux dames françaises ; de la reconnaissance de Valerio et de Sainville, et de la conversation particulière que Don Quichotte eut avec Sancho. »

Ensuite il voulut s’étendre sur ses louanges en particulier, et surtout sur la bonne grâce qu’elle avait à raconter quelque chose ; mais Don Quichotte prit la parole, et dit qu’il laissait le soin à Monsieur le duc des affaires de la marquise et de Silvie auprès du roi d’Espagne, mais qu’il se chargeait de les garantir des bandits, et qu’il irait les accompagner jusqu’à Madrid. Il n’est pas encore temps de songer à leur départ, Seigneur chevalier, lui dit le duc ; nous ferons tous le voyage ensemble : nous vous prions de ne vous point impatienter jusques à ce temps-là ; vous savez que vous êtes nécessaire ici. —  Comment donc, ajouta Eugénie en riant et en s’adressant à notre héros, vous m’avez promis de ne nous point abandonner que je ne vous donnasse congé, et vous êtes tout prêt à partir ! […] Chacun se retira donc : la marquise coucha avec sa parente qui avait raconté l’histoire de Silvie, et que nous nommerons désormais Mademoiselle de la Bastide, Silvie coucha avec sa tante, le duc et la duchesse d’Albuquerque eurent le plus bel appartement ; et comme le château de Valerio était vaste et parfaitement bien meublé, tout le monde fut logé commodément et sans embarrasser le maître ni la maîtresse. […] lui demanda notre héros, voyant qu’il n’achevait pas. —  Laissez-moi, Monsieur, lui dit Sancho avec chagrin. —  Dis-moi ce que tu as, mon pauvre Sancho, je t’en prie, lui dit Don Quichotte. —  Eh bien, Monsieur, voyez-vous, lui répondit-il, je suis fâché qu’on ne dira plus de nous que nous sommes saint Antoine et son cochon, puisque nous ne mangeons pas à la même écuelle, et que vous êtes avec des ducs et des comtes pendant que je suis avec des valets.

16. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XXXVIII. De l’arrivée du duc de Médoc, et de la mort touchante de Deshayes. »

Le lendemain matin Eugénie envoya prier le duc et la duchesse d’Albuquerque et Don Quichotte de passer dans le jardin du château où elle les attendait. […] La duchesse et Eugénie emmenèrent la marquise et Silvie dîner avec le reste de la compagnie auprès du lit de Valerio. […] Dorothée, Valerio et Eugénie se joignirent à lui, et le duc qui avait l’âme toute généreuse, et qui se faisait un plaisir de rendre service aux gens de qualité, fit non seulement ce que le duc avait promis qu’il ferait en écrivant à son beau-frère, mais il écrivit encore aux premiers du Conseil de Madrid.

17. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre quatrième) « Chapitre LXI. Comment Don Quichotte et Sancho sortirent du château pour s’en retourner chez eux ; de ce qui leur arriva sur la route. Mort de Don Quichotte ; et ce qui s’ensuivit. »

Je sais bien que Madame la duchesse n’épargne rien pour m’en rendre le séjour agréable ; mais dans la situation où se trouve mon cœur et mon esprit, il me semble que le Toboso me convient mieux que tous les autres lieux du monde. […] Nous faisons ici bonne chère et beau feu ; on a autant de considération pour vous que si vous en valiez la peine ; car toutes les chimères de Chevaleries à part vous n’êtes qu’un simple gentilhomme, et vous mangez avec des ducs et des duchesses, vous riez tous ensemble et êtes camarades comme cochons. […] Le héros de la Manche et son écuyer après avoir pris congé des dames, et avoir remercié la duchesse, prirent le chemin du Toboso, et couchèrent le premier jour dans une hôtellerie que Don Quichotte prit alors pour ce qu’elle était, et il ne leur arriva rien de particulier ; mais le lendemain s’étant remis en marche, et se trouvant sur le midi fatigués de la chaleur et du chemin qu’ils avaient fait, ils gagnèrent un bois fort épais qui pouvait être à trois cents pas du grand chemin.

18. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLVIII. Du combat de Don Quichotte contre Sancho, et quelle en fut la fin. »

Les ducs et les autres, Français et Espagnols, qui avaient voulu en avoir le plaisir, étaient déjà allés se cacher dans des endroits qu’ils avaient fait préparer, et qui tous avaient vue sur une pelouse que Sancho avait choisie pour le théâtre de sa gloire. […] Lorsque la lassitude allait séparer les combattants, et que les spectateurs en eurent pris tout le plaisir qu’ils en pouvaient prendre, le duc fit partir son maître d’hôtel. Celui-ci qui était avec quatre valets de pied déguisés en satyres, auprès de l’arbre où le duc était monté, partit au premier signal, et marcha à nos aventuriers, qui à sa vue interrompirent leur ridicule combat. […] Don Quichotte ne se le fit pas répéter, et obéit avec une soumission profonde, et passa directement sous les arbres où les ducs et les autres étaient cachés, et sa confusion leur donna un nouveau sujet de rire.

19. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XL. Des armes enchantées que les deux chevaliers reçurent de Parafaragaramus, avec des chevaux infatigables. »

Le lecteur est déjà dans l’impatience de savoir quelle était cette voix, il faut l’en retirer, et lui dire que le duc de Médoc avait questionné l’officier sur tout ce qui était arrivé à Don Quichotte et à Sancho ; celui-ci lui avait dit tout ce qu’il en savait, et là-dessus le duc avait imaginé, et en même temps résolu d’exécuter deux choses ; l’une, au sujet du désenchantement de Dulcinée, que nous verrons dans la suite ; et l’autre, au sujet du combat du lendemain. Il connaissait assez la bravoure et l’intrépidité de notre héros, pour savoir jusques où son courage le porterait dans la forêt ; il prévoyait bien aussi que Sancho ne le quitterait pas d’un pas ; il aurait bien voulu ne les point exposer contre des bandits ; mais dans le fond, outre que Don Quichotte n’aurait pas trouvé bon que l’affaire se fût passée sans lui, le duc voyait bien qu’il lui serait d’un grand secours, et qu’après tout c’était la mort la plus glorieuse qui pût arriver à deux fous, que de perdre la vie en servant le public ; d’un autre côté il voyait bien que l’occasion serait chaude et de fatigue, et que les chevaux de nos aventuriers n’étaient point assez forts pour la supporter, ni leurs armes assez bonnes pour résister au mousquet et au pistolet ; ainsi il avait jugé à propos de les armer par cette voie étant bien persuadé que l’estime qu’ils feraient de leurs armes et de leurs chevaux, qu’ils croiraient tenir de la main d’un enchanteur, leur ami, les animerait davantage, et relèverait le courage, surtout de Sancho, qui lui paraissait abattu par la conversation qu’il avait eue avec Don Quichotte, et que lui et Parafaragaramus avaient écoutée. Ainsi quand nos aventuriers cessèrent de parler, le duc se retira à son appartement.

20. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLVII. Suites agréables de la victoire remportée par le chevalier Sancho, et du projet que forma Don Quichotte pour le faire repentir de son indiscrétion. »

Les ducs et le reste de la compagnie crièrent tous en même temps, que le charme avait cessé, qu’ils voyaient le cheval et les armes, et crièrent victoire au brave chevalier Sancho, qu’ils joignirent tout épouvanté d’avoir vu l’enfer ouvert, et bien persuadé qu’il s’était battu contre un démon. […] Et les contorsions qu’il faisait pour se tenir droit, faisaient mourir de rire les ducs et les autres qui le suivaient à pied. […] Sancho fut mis entre les deux duchesses, quoiqu’il s’en défendît beaucoup ; mais ses fesses lui faisaient trop de mal pour demeurer assis sur son gazon. […] Sancho passa encore toute la journée dans son lit où il but et mangea à son ordinaire, c’est-à-dire qu’il pensa se crever, en faisant raison le verre à la main à tous les gens du duc et du comte qui étaient venus le voir pendant la journée, si bien qu’il avait terriblement les dents mêlées le soir que toute la société vint le voir pour apprendre des nouvelles de sa santé.

21. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XXXIV. De l’arrivée de plusieurs personnes dans l’hôtellerie. Qui étaient ces personnes. Nouvel exploit de Don Quichotte. Sanglants combats. »

Le duc qui le vit dans le plus grand embarras où il eût été de sa vie, lui remontra qu’il n’était point en état de s’exposer. Notre hardi chevalier n’en voulut point démordre, il prit le cheval de celui qui emportait Eugénie, qui était libre, et se saisissant de l’épée de ce scélérat, il se mit après les ravisseurs malgré le duc et Dorothée qui le firent suivre par quatre cavaliers de crainte d’accident ; mais comme il ne suivait que sa tête et ses visions, ceux-ci qui le perdirent bientôt de vue, revinrent sans autre fruit que d’être bien fatigués. […] Le duc vit bien que le seul parti qu’il y avait à prendre était celui de les porter toutes deux dans son carrosse jusqu’au lieu le plus proche.

22. (1721) Mémoires

Je rapporterai là-dessus dans la suite quelque chose de particulier lorsque j’introduirai Monsieur le duc de La Rochefoucauld. […] Elle eut encore un autre enfant qui a été Philippe duc d’Orléans, père de Philippe aussi duc d’Orléans aujourd’hui régent de France sous la minorité de Louis XV. […] Ce ne fut point à moi qu’il le disait, c’était à Monsieur le duc d’Arpajon dont nous avons vu la veuve première dame d’honneur de madame la dauphine Victoire de Bavière. […] Monseigneur, Mons[ieur] et Madame d’Orléans, monsieur] le duc de Vendôme, et d’autres de leurs affidés, tinrent conseil ensemble pour lui faire avoir l’exclusion, et suivant ce qu’ils avaient résolu de concert, Monsieur le duc de Beauvilliers, qui était du secret, fut chargé de parler au Roi seul à seul. […] Ce furent Messieurs les ducs de Bourgogne, d’Anjou, aujourd’hui roi d’Espagne sous le nom de Philippe V, et de Berry, tous trois petits-fils de Louis.

23. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre L. Dissertation sur la différente manière d’aimer des Espagnols et des Français. »

Il n’en était pas de même de Sancho, qui ne quittait ce gîte qu’avec peine, parce qu’il y trouvait de quoi se rassasier et de quoi contenter son humeur gloutonne, et qu’outre cela c’était pour aller chez le duc, où il lui était arrivé des aventures qui ne lui plaisaient pas.

24. (1713) Les illustres Françaises « Histoire de Monsieur de Terny, et de Mademoiselle de Bernay. »

Au sortir du couvent je remontai à cheval et j’allai à toutes jambes chez Monsieur le duc de Lutry à cinq grandes lieues de là. […] Monsieur le duc de Lutry qui m’avait tenu parole et qui y était dans une place distinguée, qui n’était séparée de Clémence que par un espace vuide, me fit l’honneur de m’embrasser comme s’il y avait eu longtemps qu’il ne m’eût vu et me fit mettre à côté de lui vers ma maîtresse.

25. (1713) Les illustres Françaises « Histoire de Monsieur Des Frans et de Silvie. »

On m’y disait que je croyais aimer une vestale et une fille de bonne famille, que l’engagement où je me précipitais faisait horreur à des gens qui prenaient intérêt dans moi : que mon attachement était honteux de toutes manières : qu’on avait pitié de me voir la dupe d’une fille qui le méritait si peu : qu’elle n’avait jamais connu ni père ni mère : qu’elle devait son éducation à la même maison où nous avions tenu un enfant ensemble : qu’elle avait été abandonnée de ses parents dès le moment de sa naissance, et exposée sur une porte, et de là portée aux Enfants-Trouvés, où elle était restée jusqu’à l’âge de huit ans : qu’on ne pouvait pas disconvenir qu’elle ne fût belle, que c’était cette raison qui avait obligé feu Madame la duchesse de Cranves, qui n’avait jamais eu d’enfants, de la demander à cet hôpital : qu’elle avait été élevée chez elle jusqu’à l’âge de dix-huit ans : qu’elle s’y était tout à fait formée, et y avait appris tout ce qu’une fille pouvait savoir : que quoiqu’elle n’eût vu là que des exemples de vertu, sa conduite avait été soupçonnée ; mais qu’on n’osait pas assurer qu’elle fût criminelle ; que pourtant Madame de Cranves avait paru n’en être pas fort contente ; puisqu’au lieu de lui faire par son testament autant de bien qu’elle avait promis de lui en faire, elle ne lui avait laissé que peu d’argent comptant, quelques meubles, et une rente viagère ; que le bruit courait que Silvie de concert avec la Morin, ci-devant l’une des femmes de chambre de Madame de Cranves, et celle à qui elle se confiait le plus, avec qui Silvie demeurait pour lors, et qu’elle faisait passer pour sa tante, avait fait sa main : qu’elle avait pris bien des pierreries et beaucoup d’argent comptant que cette dame avait peu devant sa mort, et qu’on n’avait pas trouvé dans ses coffres : qu’on disait qu’elle avait fait ce coup-là par le conseil d’un jeune homme nommé Garreau, qui était secrétaire et intendant de cette dame, et qui faisait ses affaires, qui leur avait indiqué l’endroit où était cet argent : que ce jeune homme lui avait promis de l’épouser : que c’était le même avec qui on prétendait qu’elle avait eu quelque amour criminel ; mais que tout cela était demeuré un simple soupçon, parce que Garreau était mort en prison, où les héritiers de cette dame l’avaient fait mettre sur de très grands indices du vol. […] Il me dit qu’il avait été autrefois de la connaissance de Madame la duchesse de Cranves, morte depuis environ deux ans ; et qu’il la regrettait, parce qu’elle lui aurait rendu service, et tout au moins aurait pris sa fille auprès d’elle, qui en valait bien une autre que cette dame avait retirée d’un hôpital. […] Madame la duchesse de Cranves était sœur de Monsieur le marquis de Buringe mort en Candie avec Monsieur de Beaufort ; c’est lui qui était mon père. […] Il parla de sa famille, et nomma Madame la duchesse de Cranves ; c’était où je l’attendais.

26. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XXXVI. Suite de l’histoire de Silvie et de Sainville. »

Pour nous, nous faisions le plus de diligence qu’il nous était possible afin de pouvoir aller réclamer l’autorité de Monsieur le duc de Médoc, gouverneur de cette province, contre les entreprises de Deshayes.

27. (1690) Journal d’un voyage fait aux Indes Orientales (tome 1)

Capistron et Palaprat qui soient bien dans leurs affaires ; mais ils le doivent à leur patrimoine et à la libéralité des princes de Vendôme, duc et Grand Prieur. […] Qu’on lise l’histoire de Hollande, on verra que Philippe duc de Bourgogne, dit le Bon, auquel ces pays appartenaient, fournissait de ses deniers sans intérêts aux marchands qui se jetaient dans le commerce de mer, pour leur faciliter les moyens de faire des entreprises plus fortes. […] Ce sage duc ne se mêla jamais du commerce que pour y maintenir la paix et l’union, et surtout la bonne foi.

28. (1691) Journal du voyage des Indes orientales (à monsieur Raymond)

Pour moi, je me serais conformé à l’exemple que nous en ont laissé Messieurs Crusius et Brugman, ambassadeurs de Monsieur le duc de Holstein en Perse, qui suivant la relation du Sr Olearius, secrétaire de cette ambassade, ne firent aucune difficulté de se déchausser et désarmer pour entrer dans le tombeau de Sich Sephy, roi de Perse, que les gens du pays regardent comme un saint, et pour contenter ma curiosité, j’aurais ôté non seulement mes souliers mais ma chemise aussi, et j’y aurais entré très volontiers en état de pure nature Justement comme on peint nos deux premiers parents et je ne croirais point par celte démarche avoir fait aucun tort à ma religion. […] On dit ici qu’il était fils naturel d’un prince français qu’on m’a nommé, mais je n’y vois point d’apparence, car il faudrait qu’il l’eût eu dès le berceau, étant à peu près de même âge ; pour son frère naturel, cela se peut, car défunt Monsieur le duc de Nemours a été un des plus galants hommes de son temps, et si on en croit la chronique scandaleuse, il a eu plusieurs bonnes fortunes et amourettes dont celui-ci pourrait bien avoir été une échappée.

29. (1691) Journal d’un voyage fait aux Indes Orientales (tome 2)

Crusius & Brugman, ambassadeurs de M. le duc de Holstein en Perse, qui ne firent nulle difficulté de se déchausser pour entrer dans le tombeau de Schah Séphi, que la nation persane regarde comme un saint. […] Monicault prit son parti : il fit en peu de mots, mais expressifs, un narré de l’affaire ; &, pendant qu’un clerc le mettait au net, il mena Rupli chez M. le duc de Lédiguières, en faveur duquel il avait, il n’y avait que trois mois, gagné un procès contre MM. de Créqui, l’un maréchal de France, & l’autre gouverneur de Paris. […] Que cette idée avait cela de commun avec la République de Platon, que c’était un très beau projet dans la spéculation, mais absolument impossible de réduire en pratique : non seulement parce qu’une union si grande des souverains était impossible ; mais aussi parce que ce qui se passe dans les Indes est trop éloigné d’eux pour les frapper aussi vivement que les objets présents, & parce que l’argent des Hollandais leur fera toujours trouver des souverains dans l’Europe, auxquels leurs établissements dans les Indes étaient tout à lait indifférents, par rapport à leurs États ; tels que sont l’empereur, les ducs de Savoie, de Brandebourg, de Lorraine & d’autres, toujours prêts à se vendre, & qui, tirant des Hollandais les sommes immenses que celte République seule était en état de leur fournir, seraient toujours prêts, moyennant cet argent, de faire en sa faveur des diversions en Europe, comme ils l’avaient déjà tait non seulement pour empêcher sa ruine en Europe, mais pour empêcher aussi que ses établissements & son commerce dans les Indes soient troublés, bien loin de contribuer à leur anéantissement : & qu’ainsi les Hollandais n’avaient rien à craindre, parce qu’à cet égard, ils seraient toujours en état de dire, Saepe premente Deo, fert Deus alter opem.

30. (1713) Les illustres Françaises « Histoire de Monsieur Dupuis, et de Madame de Londé. »

L’écuyer de Monsieur le duc de Ledune était de ses intimes amis, aussi bien que de mon oncle.

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