Quelques éclairs ayant éclaté, un coup de tonnerre se fit entendre, et ces nuages s’ouvrirent et firent voir le sage enchanteur Parafaragaramus sur un char doré tiré par deux cygnes. […] Toutes ces visions avaient achevé d’étonner Sancho ; mais la présence du sage Parafaragaramus le rassura peu à peu, et une fiole de rossolis qu’il lui fit avaler, en lui disant que c’était de l’ambroisie, acheva de lui rendre ses esprits ; il en fit prendre aussi au héros de la Manche, qui lui fit bien du bien, parce qu’outre qu’il était à jeun, il puait dans cette caverne d’une terrible force le salpêtre et le soufre qu’on y avait brûlé. […] Je t’ai promis, dit Parafaragaramus à Don Quichotte, de t’ouvrir le chemin au désenchantement de la princesse Dulcinée, et je vais te tenir parole, et t’aider à en tenter l’aventure, si tu te sens assez de force et de courage pour cela ; en ce cas tu n’as qu’à me suivre et ton écuyer aussi, pour retrouver son argent, car l’un et l’autre sont en la puissance du sage Merlin qui doit commencer aujourd’hui à goûter un vrai repos en ne se mêlant plus des affaires du monde, pourvu que tu mettes à fin les aventures qui t’attendent, sinon il gardera les trésors dont il est en possession, jusqu’à ce qu’il se rencontre quelque chevalier plus heureux que toi. […] Plus amoureux qu’Orphée il te demande son Eurydice ; le sage Merlin lui a cédé la victoire, parce qu’il a connu dans les destinées qu’il la lui aurait vainement disputée. […] Le sage Merlin qui a vu le mauvais usage que ce méchant faisait de mon argent le lui a ôté, et vient de me le rendre, et je vous le donne.
Elle est sage, du moins il y a beaucoup d’apparence que si elle ne l’avait pas été, elle ne serait jamais parvenue où elle est. […] Vous conviendrez avec moi qu’il ne suffit pas à une fille d’être sage et vertueuse ; c’est en effet l’essentiel, mais il faut aussi qu’elle paraisse telle. […] Je me trompais cependant ; car il est certain qu’elle est trop sage. […] Je vous la certifie sage et vertueuse, et si elle ne l’était pas, je n’aurais pas le front de m’intéresser pour elle. […] Sauvez-lui sa réputation, elle mérite d’être conservée, et ce qu’elle demande de la princesse et de vous, doit par avance vous assurer que sa conduite est sage.
Il y alla, et les surprit tous deux tête à tête ; mais ne voyant aucun vestige de ce qui se passait entre eux, et cet époux sage et prudent voulant bien lui-même ne pas s’apercevoir du tour, il leur fut facile de justifier leur surprise sur l’étonnement où sa présence les mettait. […] Justin en fit ses plaintes à Cléon, qui bien loin de donner dans le sens de son gendre, lui dit que sa fille était sage, qu’il la certifiait telle, qu’elle avait été trop bien élevée pour rien faire d’indigne de sa naissance, et qu’il ne la croirait jamais criminelle qu’il ne le vît de ses propres yeux. […] Justin était trop persuadé de la vérité de cette morale pour ne s’y pas rendre, et outre cela il souhaitait trop que sa femme fût sage, ou du moins qu’elle parût telle, pour contredire son beau-père. […] Justin fut plus sage que vous n’auriez été, et s’il ne s’en mit pas en fait, ce ne fut pas faute de courage ; car ses actions ont témoigné en d’autres occasions, que le fer et le feu ne l’épouvantaient pas ; mais ce fut uniquement par prudence, que sans paraître, ni faire aucun bruit, il vit tout ce qu’un homme trahi peut voir de plus injurieux et de plus accablant ; il les entendit se donner un rendez-vous à deux jours de là pour aller se promener ensemble à une maison de plaisance qui était à deux lieues. […] La maxime des Français me paraît bien plus sage que la nôtre ; elle pardonne le meurtre dans le moment en faveur des premiers mouvements de colère ; mais elle punit le poison et le poignard comme un assassinat, puisque c’en est un en effet.
La vérité est qu’elle était fort jolie, fort sage, et avait beaucoup d’esprit. […] Il réclamait à haute voix le bon et le sage Parafaragaramus, et il criait avec plus de désolation qu’une mère qui aurait vu poignarder son enfant entre ses bras. […] Quoique la nuit approchât, Sancho ne se rebutait pas, et aurait passé toute sa vie dans cette recherche s’il n’avait pas été retiré de son embarras par la voix du sage Parafaragaramus, qui vint de l’autre côté du ruisseau lui faire une belle remontrance sur le peu d’attache qu’un honnête homme doit avoir pour les biens de ce monde, et surtout un chevalier errant. […] Celui-ci lui rendit enfin sa joie en lui disant que la rivière où il avait perdu sa bourse, répondait aussi bien que le ruisseau où il était, à la caverne de Montésinos ; que c’était Freston qui la lui avait volée, et qu’il l’avait portée à Merlin, pour se payer de tout ce que la princesse Dulcinée lui devait ; que ce sage enchanteur n’avait point voulu se satisfaire de l’argent d’autrui, et qu’il avait promis de la rendre lorsque cette princesse serait désenchantée. […] — Madame, répondit Don Quichotte avec un air froid à glacer, et d’un ton tout magistral, si Altisidore avait été bien sage dans son cœur, les enchanteurs qui l’ont maltraitée auraient été ses défenseurs, et non pas ses bourreaux ; elle n’a que ce qu’elle mérite, et elle a tort de me demander vengeance d’eux, puisque j’aurais fait moi-même ce qu’ils ont fait ; Dieu bénit les bonnes intentions et punit toujours les mauvaises ; permettez-moi de ne vous en pas dire davantage ; elle peut s’expliquer elle-même.
Qu’il croyait pourtant qu’elle était sage et trop bien élevée pour faire une sottise ; mais que si elle en faisait, elle en pâtirait toute seule. […] Ma femme était sage, à ce qu’on disait, je le croyais ainsi, et on attachait mon salut éternel à sa main. […] Je ne vous ai jamais rien dit là-dessus, je crois que vous avez toujours été sage, j’espère que vous la serez toujours. […] Croyez-vous que par une règle particulière je me gouverne bien, vous qui ne croyez pas qu’il y ait une fille qui soit sage ? […] Il ne m’a rien paru dans lui que d’un homme fort sage, reprit Des Frans.
En disant cela elle alla à lui, et lui, en gambadant et sautant vint à elle, et la pria tout haut de la part du sage enchanteur, de vouloir bien déjeuner dans la forêt, elle et ceux qui l’accompagnaient. […] Il fut prié de dire où il avait fait connaissance avec le sage enchanteur Parafaragaramus, et d’où il connaissait le satyre Rebarbaran, et surtout de ne rien déguiser, parce que l’un et l’autre écoutaient. […] Il n’osa pourtant pas assurer que ce fût Parafaragaramus lui-même avec qui il avait été dans l’hôtellerie, parce que ce sage enchanteur lui paraissait trop discret et trop honnête pour l’y avoir laissé dans une posture si indécente, et concluait par croire que c’était quelque autre qui avait usurpé son nom.
Une conduite si sage et si retirée aurait remis l’esprit de tout autre que d’un jaloux ; mais la jalousie est la maladie de l’esprit la plus cruelle et la moins curable. […] Elle l’avait nourrie et élevée dans une douceur achevée et dans un trop grand respect pour son père pour la croire capable d’en avoir agi de cette sorte par son propre mouvement ; ainsi sur ce sage fondement elle remarqua les acteurs, et aperçut de la contrainte et quelque chose de forcé dans sa fille, et une maligne joie dans les yeux de son gendre, avec un sens froid hors d’œuvre dans une pareille occasion. […] Sa femme lui répondit que sa mère était trop vertueuse pour lui donner de semblables conseils, et trop sage pour avoir la moindre pensée criminelle. […] Ce fut ainsi que la jalousie de Sotain mit dans sa maison celui qui aurait dû lui faire trouver ce qu’il craignait, si sa femme eût été moins sage. […] Elle en avait ri au commencement, mais la suite l’importuna, et quoique Sotain fût enfin revenu chez lui, Julia qui avait promis à Célénie de changer de conduite, n’en devint pas plus sage, au contraire il devenait plus hardi et plus entreprenant de jour en jour, de sorte que cette femme craignant qu’il ne manquât enfin de respect pour elle, et que la trouvant seule, comme il en avait à tout moment le privilège, il ne se portât aux dernières violences, elle voulut le prévenir et lui dit plusieurs fois qu’elle se plaindrait à Sotain de sa conduite.
Nous sommes ici, mon fils, dans la forêt des Ardennes, et la fontaine que tu vois est l’ouvrage du sage Merlin ; cet enchanteur l’a faite exprès pour guérir un chevalier de ses amis de la passion qu’il avait pour une princesse ; car il faut que tu saches que cette eau a la vertu de changer en haine le plus violent amour. — Quoi, Monsieur ! […] Sancho, qui de son côté n’était guère plus sage que son maître, s’imagina aussi qu’il en haïssait davantage sa Thérèse.
Et qu’il y avait très assurément des femmes en Espagne, aussi bien qu’en France, qui seraient toute leur vie restées sages et fidèles, si leurs maris ne leur avaient pas eux-mêmes inspiré l’envie de justifier leurs ombrages et leurs jalousies, et que très assurément le meilleur parti qu’un homme marié pouvait prendre, était de ne témoigner à sa femme aucun soupçon ; et pour soutenir leur paradoxe, ils citèrent les vers de l’Arioste que je ne rapporterai pas, mais bien la traduction ou la paraphrase faite par Monsieur de La Fontaine. […] Et moi, ajouta la marquise, je raconterai celle d’un fort honnête homme, qui, par sa prudence ayant en même temps sauvé sa réputation et celle de sa femme, s’est fait plaindre et louer par tous ceux qui ont appris son aventure, laquelle s’est enfin terminée à faire de son épouse une des femmes de France des plus sages et des plus retirées.
Il n’y a que celui qui gagne de l’argent qui sache ce qu’il en coûte à gagner et qui l’épargne, et le sage enchanteur m’a conseillé de ne le pas donner à ma femme qui est une boute-tout-cuire ; vraiment si elle l’avait, elle en ferait passer la moitié par la vallée d’entonne, mais moi je prétends m’en servir à marier ma fille et à vivre paix et aise, et à ne rien faire, comme le seigneur de notre village. […] Il était entré chez nous sans que nous le sussions, et dans le fond, bonne conscience se moque de la médisance, s’il n’y a de la rime il y a de la raison. — Je le crois, dit la duchesse, vous me paraissez trop sage pour faire entrer votre amant dans votre chambre, mais vous ne sauriez empêcher le monde de parler. — Tenez, Madame, lui dit Sanchia, Nicolas est un animal qui y va tout à la bonne foi comme un âne qui pète ; il est maigre comme un pic et court comme un daiM. […] Les ducs, les comtes et les dames arrivèrent en ce moment, et la duchesse d’Albuquerque remontrant à Sancho qu’il était indigne d’un chevalier de battre sa femme, que cela était infâme à un honnête homme, et qu’à peine le pardonnait-on à un crocheteur, et que Monsieur le duc était en droit de s’en offenser, cela s’étant passé dans son château et à ses yeux, celui-ci lui répondit qu’il n’avait fait que ce qui lui avait été commandé par les juges d’enfer, et par le sage Parafaragaramus, et de plus, qu’entre le bois et l’écorce il n’y faut pas mettre le doigt.
Tous se levèrent à l’aspect de ce sage enchanteur, qui était toujours vêtu de blanc, et tenait pour lors à la main un autre livre que celui qu’il avait coutume de porter. […] Ce traître prenait si juste le temps de l’absence du sage Parafaragaramus pour me déchirer, qu’il m’a cent fois traînée parmi les ronces et les épines ; mon faible corps succombait sous ses coups, et n’attendant ma liberté que de Dieu, j’ai fait vœu pour sortir de ma captivité et de l’enchantement qui me retenait, de me faire religieuse sitôt que je serais retournée au monde.
Je conviens, dit Plutus, que l’argent appartient au chevalier Sancho, puisque le sage Parafaragaramus dit que Cardénio le lui a donné. […] Sancho voulait les suivre, mais le sage enchanteur lui ordonna de rester avec les autres, l’assurant qu’il n’avait plus rien du tout à craindre.
Nous ne fûmes pas si sages dans cette entrevue-ci que le jour précédent. […] Je lui en dis ma pensée ; il me répondit que j’étais méchant physionomiste, et que Mademoiselle Récard était la fille de Paris la plus sage et la plus retenue. […] Je passais un jour devant sa porte ; j’étais seul, je vis sortir de chez elle la sage Récard. […] Je veux être sage, parce que je veux lui faire passer avec plaisir du moins la première nuit de nos noces ; après cela, je pourrai voir la demoiselle en question. […] La mort d’une femme si belle, si sage et si vertueuse, fut regardée avec la dernière compassion.
Les uns consentirent à la proposition et furent les plus sages, et d’autres la refusèrent tout plat, si bien que pour que ce contrat fût exécuté, il fallait qu’il fût rendu commun avec tous les créanciers tant consentants que refusants. […] Le conseil du Roi n’avait pas jugé à propos de décider entre les deux frères, dont l’un avait la force de l’autorité de son côté, et l’autre le bon droit, et sur ce sage fondement, avait renvoyé connaissance de la cause au parlement de Bretagne. […] Il avait épousé une demoiselle de Normandie d’une beauté parfaite, et aussi sage que belle. […] Monsieur de Tourville, homme sage, brave, prudent, expérimenté et bon pilote, qui les commandait, attendait fort impatiemment l’arrivée du comte de Cœuvres pour entrer dans la Manche comme il en avait reçu l’ordre de la cour. […] En effet il n’y avait rien de si juste que ce qui avait été arrêté dans le conseil, et rien de si sage que ce que M. de Tourville avait écrit, mais la pétulance de M. de Pontchartrain perdit tout.
Si je n’avais pas craint les suites, peut-être n’aurais-je pas été si sage. […] Allons, au nom de Dieu & de saint Louis, a-t-il poursuivi : mon sentiment me paraissait le plus sage ; mais, le vôtre est le plus brave : suivons-le. […] Je connais pourtant des filles & des femmes très sages, dont les mères ne l’étaient guère ; mais, Rara avis in terris. […] Mercier suivit son exemple, & s’empara d’une brune très aimable ; & moi je restai sage, malgré les tentations. […] Dès le lendemain, mon cocu & moi retournâmes chez ce banian, où nous fûmes fort bien reçus, & où nous ne fûmes pas si sages que la veille.
Je crois même que cela vous rendra sage pour l’avenir. […] Si cette affaire-ci ne vous rend pas sage, vous ne le deviendrez jamais. […] J’avais espéré que ma bonté vous aurait rendu sage, et vous vous déchaînez de plus en plus. […] Cela le rendit sage, il n’osa plus parler de moi ni de Garreau, qui ne s’en tint pas aux paroles, et qui lui donna des coups de canne en plein hôtel, et par là s’en fit un ennemi irréconciliable. […] Si elle n’avait pas été effectivement sage, elle n’y serait pas restée longtemps : Madame de Cranves ne l’aurait pas admise dans sa confidence, et ne lui aurait pas confié ma jeunesse.
Celle de Contamine fait voir qu’une fille sage et vertueuse peut prétendre à toutes sortes d’établissements, malgré la bassesse de sa fortune.
Le bien vous met cent piques au-dessus de moi, et je suis trop sage pour vous rien accorder qui puisse me perdre auprès de vous. […] Je ne doute pas, lui dit-il, Mademoiselle, que vous et les vôtres, ne soyez aussi sages dans le particulier, que dans le public. […] L’amour que Monsieur a pour vous, l’engage à vous épouser ; comptez que cet amour n’est rien, qu’il sera bientôt évanoui, à moins qu’il ne soit soutenu par une conduite de votre part toute soumise, toute sage, et toute vertueuse, et par un entier dévouement. […] Une femme véritablement sage et vertueuse, est l’objet de mon admiration ; mais il s’en trouve si peu de ce caractère, que vous ne devez pas trouver mauvais que je m’en prenne au plus grand nombre pour regarder le général, les autres en petit nombre passant dans mon esprit pour miracles que la nature ne produit que rarement.
On lui demanda à quel dessein, et il répondit avec plus d’esprit qu’on ne pensait, qu’il y avait quelque temps que son maître étant en conversation avec le curé de son village et son neveu, ils avaient trouvé à redire aux choses inutiles qu’on mettait dans les livres, et que peut-être le sage enchanteur qui écrivait leur histoire, et qui n’en oubliait pas une circonstance, serait embarrassé d’entendre des choses qu’il n’entendait pas lui-même ; qu’on ne parlait que pour se faire entendre, et que cela étant, on n’avait que faire de se servir de termes obscurs ; par exemple, ajouta-t-il, au lieu de dire que les saphirs… — Il faut zéphirs, lui dit la duchesse en l’interrompant. — Eh bien, reprit-il, au lieu de dire que les zéphirs, puisque zéphirs y a, se jouaient dans les cheveux de la dame dont Monseigneur et Maître parlait, et les faisaient voltiger, je ne sais comme il a dit, ne valait-il pas mieux dire tout d’un coup que le vent les soufflait ; cela aurait été plus court, et je l’aurais mieux entendu.
Ce que vous dites là n’est pas sage, reprit Madame d’Ornex, en rougissant de colère. […] Je levai ma canne, et assurément je me serais fait des affaires dont je me repentirais encore, si mon valet de chambre plus sage que moi, ne m’eût arrêté.
Je le crois d’autant plus que ce que je lui ai vu faire au Port-Louis, en ma présence, dans une occasion que le hasard seul avait fait naître, m’indique un homme également sage et vigoureux. […] M.du Quesne et le Conseil en décideront ; et ils sont trop sages pour laisser l’Écueil à la discrétion d’un fou. […] M. de La Chassée est vengé, et nous ne voyons plus ce qu’il faudra faire pour retenir Bouchetière, si ceci ne le rend pas sage. […] Les autres officiers, sages imitateurs d’une si judicieuse conduite, furent tout pris comme lui, les portes du fort étant ouvertes. […] Ce sage duc ne se mêla jamais du commerce que pour y maintenir la paix et l’union, et surtout la bonne foi.
Vous savez ce que vous dîtes ensemble ; car pour ce qui est de ce que vous fîtes, Deshayes m’a dit qu’il n’y pouvait rien avoir de plus sage entre des gens qui s’aiment, et que vous ne sortîtes point des bornes de la modestie.
Mais le Hollandais sage et prudent et qui craignait d’être blâmé de ses maîtres si son plaisir leur coûtait si cher, se contenta de donner l’argent, et comme le pucelage en question était à lui, l’ayant payé tout ce qu’il pouvait valoir, et qu’il était en droit d’en disposer, il mit la fille entre les mains d’un commis qu’il avait avec lui qui ne fut point si scrupuleux que lui. […] Il n’y avait rien de si sage et de si prudent que cet avis, et s’il avait été suivi il est constant que ces navires étaient perdus pour les ennemis. […] Allons Monsieur, a-t-il poursuivi, mon sentiment était selon moi le plus sage, mais le vôtre est le plus brave, suivons-le, et allons au nom de Dieu. […] Mais Remraja n’étant pas en état de hasarder une bataille décisive dans son pays, il a fait en capitaine sage la même chose qu’a fait le Grand Scanderberg lorsque le Sultan Amurat assiégeait Croye, capitale d’Epire : il ne s’est point renfermé dedans sachant qu’elle était commandée par un gouverneur fidèle, il est resté aux écoutes dehors et a toujours tenu avec trente mille chevaux l’armée de son ennemi en suspens de ses desseins et l’a perpétuellement fatiguée et harassée par des attaques imprévues, et afin que cette armée se ruinât d’elle-même tant sur sa marche que dans le siège, il a fait faire un dégât général de plus de trente lieues le long de la côte et de plus de quatre-vingts lieues dans les terres, a fait tuer les bestiaux, coupé et brûlé le riz, et enfin tout ce qui pouvait servir à la nourriture afin que son ennemi fût obligé de quitter le pays faute d’y pouvoir subsister. […] J’ai aussi appris que Monsieur Godeau dit vrai dans son troisième siècle de l’Histoire de l’Eglise, quand il dit au sujet du différend qui était entre saint Cyprien et le pape saint Etienne, que les saints qui sont encore sur la terre sont hommes et que le zèle fait souvent faillir les plus sages.
Pour une dame aussi sage que vous, la médisance est bien mordicante !