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2. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XLIV. Ce qui se passa dans le château après cette expédition. »

Le duc de Médoc, qui avait un très grand fond de probité et d’honneur, écouta tout ce qu’on lui dit avec une patience admirable, et sans répondre un seul mot ; mais après qu’on eut achevé de lui dire tout ce qui se pouvait dire sur cette matière, il prit la parole, et après avoir remercié toute la compagnie en général du soin que chacun en particulier avait témoigné pour sa personne, il ajouta que s’agissant de rendre service au comte de Valerio, et de sauver l’honneur d’une des meilleures maisons d’Espagne, il n’aurait pas eu l’esprit en repos si lui-même n’y avait été ; que de plus, chacun se faisait dans le monde un point d’honneur et de probité selon son humeur ; qu’il avouait que la recherche qu’on faisait de gens qu’on destinait au gibet, offrait à l’esprit quelque chose de bas et de rebutant, qu’ainsi il ne blâmait point les Français de ne s’y pas commettre, parce qu’ils croyaient que cela était indigne d’un grand cœur ; mais que pour lui il était d’un autre sentiment et qu’il ne croyait pas qu’il fût plus indigne d’un prince de faire la guerre à des voleurs et à des bandits qui désolaient toute une province et ses propres compatriotes, que de la faire à des étrangers ; qu’il croyait même que c’était plus utilement servir sa conscience et le public dans une guerre de cette nature, que dans une guerre réglée, parce que les ennemis qu’on combat dans celle-ci, ne sont pas des ennemis particuliers ni domestiques, puisqu’on peut s’en défaire par un traité de paix ; mais que les autres sont des ennemis d’autant plus cruels, qu’ils ne sont retenus par aucune digue ; de plus que la guerre avait ses lois inconnues aux scélérats, et que les ennemis qu’on combattait dans une guerre de prince à prince, étaient presque toujours des ennemis contraints par la volonté et par l’ambition de leur souverain, avec qui la vie était sauve, ou du moins ne courait pas tant de risque, qu’avec les autres, qui non seulement n’épargnaient personne, mais de qui même leurs propres amis et les gens de leur connaissance avaient plus à craindre que des étrangers ; qu’enfin dans une guerre ouverte on était en état d’attaquer et de se défendre, et que l’on n’était jamais surpris qu’on ne dût s’attendre à l’être ; mais que les voleurs de grands chemins étaient des gens qui mettaient leur sûreté dans les surprises qu’ils faisaient aux gens qui ne se défiaient nullement d’eux ; et qu’en un mot c’était des ennemis d’autant plus dangereux qu’ils empêchaient le commerce et la sûreté, et qu’il n’y avait avec eux ni paix ni trêve à espérer que par leur mort ; enfin des gens universellement regardés avec exécration ; ce qui était si vrai, qu’en France même, où les gens de distinction tenaient cette chasse si indigne d’eux, les bandits et les voleurs de grand chemin étaient punis du plus long et du plus rude des supplices, et privés même de la sépulture.

3. (1691) Journal d’un voyage fait aux Indes Orientales (tome 2)

On va dire, sans doute, que l’esprit m’a tourné, de mettre en parallèle la faible puissance d’une compagnie particulière avec la richesse du plus puissant prince du monde. […] Je parlerai de ces princes, & de la guerre qui est entre eux. […] La volonté du prince y est absolue. […] Ces princes en ont fait des souverains & n’en ont fait que des ingrats, & des ennemis d’autant plus nécessaires qu’ils connaissent parfaitement leurs véritables intérêts. […] Que de princes chrétiens, que de papes même ont été de ce sentiment ! 

4. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre quatrième) « Chapitre LVII. Du repas magnifique où se trouva Don Quichotte, et du beau et long discours qu’il y tint. »

Chacun mesurait son ambition à son état, et non pas son état à son ambition ; on ne voyait pas comme on voit aujourd’hui de malheureux publicains, dont l’opulence n’a tiré sa source que de l’usure et de la mauvaise foi, dans la levée des deniers du prince, faire réformer, et rendre plus vastes et plus magnifiques pour leur usage particulier, les mêmes palais dont peu de temps auparavant les princes s’étaient contentés.

5. (1715) Continuation de l’histoire de l’admirable Don Quichotte de La Manche (livre troisième) « Chapitre XXXIII. Comment on a découvert ces nouvelles aventures qu’on donne au public. »

Un des Français qui avait suivi ce prince, se trouva dans un festin avec des Espagnols ; on y parla des héros des deux nations.

6. (1691) Journal du voyage des Indes orientales (à monsieur Raymond)

Et si cela avait été autrement, la postérité serait privée de ce jugement si équitable et qu’on appelle encore aujourd’hui le jugement de Salomon, qui est le même prince sous le règne duquel Monsieur l’abbé de Choisy prétend que ces naufrages ont été faits. […] Les princes de ce pays-ci obligent assez souvent les Européens de faire des dépenses excessives quoique ridicules et inutiles, mais dont on ne peut pas se dispenser quand ce ne serait que l’honneur de la nation qui y oblige. […] Qu’à l’issue du repas entre la poire et le fromage ce prince avait piqué d’honneur ces deux capitaines sur les prérogatives de l’une et l’autre nation et les richesses de leurs maîtres, et leur avait dit enfin qu’il en jugerait par un achat qu’il voulait leur faire faire, et voir celui qui y mettrait le plus d’argent. […] Après sa mort son fils aîné, nommé Sombagy, est monté sur le trône, prince faible et jeune. […] J’ai aussi appris par des officiers qui sont revenus de Siam à Pondichéry que ni la femme ni les enfants de Monsieur Constance ne sont point morts, mais sont seulement esclaves du roi régnant, étant la coutume de ce pays que les parents d’un criminel d’Etat sont faits esclaves du prince après que leur parent a payé de sa vie, si ce n’est qu’ils soient impliqués dans son crime, auquel cas ils perdent aussi la vie.

7. (1690) Journal d’un voyage fait aux Indes Orientales (tome 1)

Le pape pouvait fixer pour le bien de la paix entre les princes chrétiens le premier méridien où bon lui semblait : chaque point de la terre a le sien, suivant le cours journalier du soleil. […] Aristote, que l’École reconnaît pour le prince des philosophes, n’est-il pas mort dans ces sentiments ? […] Si de nos jours Innocent XI, moralement parlant très honnête homme, avait été infaillible, aurait-il donné au prince d’Orange l’argent dont il s’est servi pour détrôner Jacques II, son beau-père, prince catholique s’il en fut jamais ? […] Capistron et Palaprat qui soient bien dans leurs affaires ; mais ils le doivent à leur patrimoine et à la libéralité des princes de Vendôme, duc et Grand Prieur. […] Ce prince prévoyait que ce commerce de mer ferait un jour la richesse de ses États, et leur apporterait incomparablement plus de lustre et de commodités que celui de terre ne pourrait faire.

8. (1713) Les illustres Françaises « Histoire de Monsieur Des Frans et de Silvie. »

Il me semblait qu’il m’était honteux, fils d’un homme brave, mort au service de son prince, de passer ma vie dans un fond de province, relégué dans la crasse d’un bureau, pendant que les jeunes gens de ma naissance étaient ou dans les mousquetaires, ou dans d’autres postes à acquérir de l’honneur par la voie des armes, qui était toute mon inclination. […] C’était, comme je vous ai dit, un gentilhomme manceau, appelé Rouvière, extrêmement pauvre, parce qu’il avait toujours été attaché à la fortune d’un prince qui avait sacrifié à la sienne, celle de quantité de noblesse, qui avait suivi son parti pendant les troubles.

9. (1713) Les illustres Françaises « Histoire de Monsieur Des Ronais, et de Mademoiselle Dupuis. »

Il fut marié dans son lit ; et lorsqu’il se porta bien, on fit courir le bruit qu’il avait été marié incognito il y avait plus d’un an, et qu’il n’avait pas voulu découvrir son mariage, crainte que cela ne lui fît quelque affaire avec Monsieur le prince de Lonne, de la main de qui il avait refusé un bon parti.

10. (1713) Les illustres Françaises « Histoire de Monsieur Des Prez, et de Mademoiselle de l’Épine. »

Nous restâmes encore seuls Mademoiselle de l’Épine et moi : elle me dit que cet ecclésiastique lui paraissait de bon sens et honnête homme, et qu’elle croyait que sa mère n’aurait rien à dire contre ce que nous faisions : en effet, excepté que les lois du prince n’étaient pas suivies pour la publication des bans, ni l’enregistrement du mariage sur le livre de paroisse, le reste était conforme à la pratique ordinaire, et l’on ne pouvait pas dire que notre mariage ne fût bon.

11. (1713) Les illustres Françaises « Histoire de Monsieur Dupuis, et de Madame de Londé. »

Je vous avoue que je n’approuve pas qu’un homme capable et en état de servir son prince, sa patrie, le public et ses amis, aille s’ensevelir pour toute sa vie, ni qu’il renferme avec lui tous les talents que Dieu lui a donnés, ni qu’il prive le monde des services utiles qu’on est en droit d’en attendre.

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