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2. (1912) Les Colchiques « Les Colchiques »

Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mères, Filles de leurs filles, et sont comme tes paupières Qui battent, comme les fleurs battent au vent dément.

3. (1905) Salomé « Salomé »

Mon cœur battait, battait très fort à sa parole, Quand je dansais dans le fenouil, en écoutant Et je brodais des lys sur une banderole Destinée à flotter au bout de son bâton, Pourquoi voulez-vous maintenant que je la brode ?

4. (2019) Salomé « Salomé »

Mon cœur battait, battait très fort à sa parole, Quand je dansais dans le fenouil, en écoutant.

5. (1911) Salomé « Salomé »

Mon cœur battait, battait très fort à sa parole, Quand je dansais dans le fenouil, en écoutant.

6. (1918) Océan de terre « Océan de terre »

Océan de terre A G. de Chirico J’ai bâti une maison au milieu de l’océan Ses fenêtres sont les fleuves qui s’écoulent de mes yeux Des poulpes grouillent partout où se tiennent les murailles Entendez battre leur triple cœur et leur bec cogner aux vitres                         Maison humide                         Maison ardente                         Saison rapide                         Saison qui chante                 Les avions pondent des œufs                 Attention on va jeter l’ancre Attention à l’encre que l’on jette Il serait bon que vous vinssiez du ciel Le chèvrefeuille du ciel grimpe Les poulpes terrestres palpitent Et puis nous sommes tant et tant à être nos propres fossoyeurs Pâles poulpes des vagues crayeuses O poulpes aux becs pâles Autour de la maison il y a cet océan que tu connais        Et qui ne se repose jamais Décembre 1915 GUILLAUME APOLLINAIRE

7. (1905) L’Émigrant de Landor Road « L’Émigrant de Landor Road »

Les boursiers ont vendu tous mes crachats d’or fin ; Mais, habillé de neuf, je veux dormir enfin Sous des arbres pleins d’oiseaux muets et de singes. » Les mannequins, pour lui, s’étant déshabillés, Battirent leurs habits, puis les lui essayèrent. […] Intercalées dans l’an, c’étaient les journées veuves, Les vendredis sanglants et lents d’enterrements, Des blancs et de tout noirs, vaincus des cieux qui pleuvent, Quand la femme du diable a battu son amant.

8. (1912) L’Émigrant de Landor Road « L’Émigrant de Landor Road »

Les boursiers ont vendu tous mes crachats d’or fin ; Mais, habillé de neuf, je veux dormir enfin Sous des arbres pleins d’oiseaux muets et de singes. » Les mannequins, pour lui, s’étant déshabillés, Battirent leurs habits, puis les lui essayèrent. […] Des blancs et de tout noirs, vaincus des cieux qui pleuvent Quand la femme du diable a battu son amant.

9. (1917) Le Dépôt « Le Dépôt »

Le Dépôt Je me suis engagé sous le plus beau des cieux Dans Nice la Marine au nom victorieux Perdu parmi 900 conducteurs anonymes Je suis un charretier du neuf charroi de Nîmes L’Amour dit Reste ici mais là-bas les obus Epousent ardemment et sans cesse les buts J’attends que le printemps commande que s’en aille Vers le nord glorieux l’intrépide bleusaille Les 3 servants assis dodelinent leurs fronts Où brillent leurs yeux clairs comme mes éperons Un bel après-midi de garde à l’écurie J’entends sonner les trompettes d’artillerie J’admire la gaîté de ce détachement Qui va rejoindre au front notre beau régiment Le territorial se mange une salade A l’anchois en parlant de sa femme malade 4 pointeurs fixaient les bulles des niveaux Qui remuaient ainsi que les yeux des chevaux Le bon chanteur Girault nous chante après 9 heures Un grand air d’opéra toi l’écoutant tu pleures Je flatte de la main le petit canon gris Gris comme l’eau de Seine et je songe à Paris Mais ce pâle blessé m’a dit à la cantine Des obus dans la nuit la splendeur argentine Je mâche lentement ma portion de bœuf Je me promène seul le soir de 5 à 9 Je selle mon cheval nous battons la campagne Je te salue au loin belle rose ô tour Magne Décembre 1914

10. (1907) Lul de Faltenin « Lul de Faltenin »

Sirènes, j’ai campé vers vos Grottes, tiriez aux mers la langue En dansant devant leurs chevaux, Puis, battiez de vos ailes d’anges, Et, j’écoutai ces cœurs rivaux.

11. (1907) Fragment « Fragment »

Fragment par Guillaume Apollinaire Sirènes, j’ai rampé vers vos Grottes, tiriez aux mers la langue En dansant devant leurs chevaux ; Puis, battiez de vos ailes d’anges, Et j’écoutai ces chœurs rivaux.

12. (1915) Le Servant des Dakar [Le Servant de Dakar] « Le Servant des Dakar [Le Servant de Dakar] »

Le Servant des Dakar [Le Servant de Dakar]       C’est dans la cagnat en rondins voilés d’osier Auprès des canons gris voilés tournés vers le nord Que je songe au village africain   Où l’on dansait où l’on chantait       Où l’on faisait l’amour           Et de longs discours              Nobles et joyeux Je revois mon père qui se battit  Contre les Achantis au service des Anglais    Caresser les seins durs comme des obus        De ma sœur au rire en folie             Et je revois    Ma mère la sorcière qui seule du village         Méprisait le sel    Piler le millet dans un mortier    En regardant mon frère bercer         Sa superbe virilité    Qui semblait un petit enfant Je me souviens du si délicat si inquiétant    Fétiche dans l’arbre Et du double fétiche de la fécondité    Plus tard une tête coupée    Au bord d’un marécage    O pâleur de mon ennemi    C’était une tête d’argent      Et dans le marais    C’était la lune qui luisait    C’était donc une tête d’argent    Là-haut c’était la lune qui dansait      C’était donc une tête d’argent    Et moi dans l’ombre j’étais invisible      C’était donc une tête de nègre dans la nuit profonde    Similitudes pâleurs Et ma sœur plus tard    Suivit un tirailleur         Mort à Arras    Si je voulais savoir mon âge Il faudrait le demander à l’évêque    Si doux si doux avec ma mère    De beurre de beurre avec ma sœur      C’était dans une petite cabane          Moins sauvage que notre Cagnat de Canonniers servants          J’ai connu l’affût au bord des marécages          Où la girafe boit les jambes écartées             J’ai connu l’horreur de l’ennemi qui dévaste             Le Village                     Viole les femmes                              Emmène les filles Et les garçons dont la croupe dure sursaute        J’ai porté l’administrateur des semaines      De village en village                      En chantonnant Et je fus domestique à Paris    Je ne sais pas mon âge       Mais au recrutement       On m’a donné vingt ans    Je suis soldat français on m’a blanchi du coup Secteur 59 je ne peux pas dire où   Pourquoi donc être blanc est-ce mieux qu’être noir     Pourquoi ne pas danser et discourir         Manger et puis dormir Et nous tirons sur les ravitaillements boches Ou sur les fils de fer devant les bobosses     Sous la tempête de feux métalliques           Je me souviens d’un lac affreux               Une nuit folle           Une nuit de sorcellerie Et de couples enchaînés par un atroce amour

13. (1915) Le Servant des Dakar [Le Servant de Dakar] « Le Servant des Dakar [Le Servant de Dakar] »

Le Servant des Dakar [Le Servant de Dakar]       C’est dans la cagnat en rondins voilés d’osier Auprès des canons gris voilés tournés vers le nord Que je songe au village africain   Où l’on dansait où l’on chantait       Où l’on faisait l’amour           Et de longs discours              Nobles et joyeux Je revois mon père qui se battit  Contre les Achantis au service des Anglais    Caresser les seins durs comme des obus        De ma sœur au rire en folie             Et je revois    Ma mère la sorcière qui seule du village         Méprisait le sel    Piler le millet dans un mortier    En regardant mon frère bercer         Sa superbe virilité    Qui semblait un petit enfant Je me souviens du si délicat si inquiétant    Fétiche dans l’arbre Et du double fétiche de la fécondité    Plus tard une tête coupée    Au bord d’un marécage    O pâleur de mon ennemi    C’était une tête d’argent      Et dans le marais    C’était la lune qui luisait    C’était donc une tête d’argent    Là-haut c’était la lune qui dansait      C’était donc une tête d’argent    Et moi dans l’ombre j’étais invisible      C’était donc une tête de nègre dans la nuit profonde    Similitudes pâleurs Et ma sœur plus tard    Suivit un tirailleur         Mort à Arras    Si je voulais savoir mon âge Il faudrait le demander à l’évêque    Si doux si doux avec ma mère    De beurre de beurre avec ma sœur      C’était dans une petite cabane          Moins sauvage que notre Cagnat de Canonniers servants          J’ai connu l’affût au bord des marécages          Où la girafe boit les jambes écartées             J’ai connu l’horreur de l’ennemi qui dévaste             Le Village                     Viole les femmes                              Emmène les filles Et les garçons dont la croupe dure sursaute        J’ai porté l’administrateur des semaines      De village en village                      En chantonnant Et je fus domestique à Paris    Je ne sais pas mon âge       Mais au recrutement       On m’a donné vingt ans    Je suis soldat français on m’a blanchi du coup Secteur 59 je ne peux pas dire où   Pourquoi donc être blanc est-ce mieux qu’être noir     Pourquoi ne pas danser et discourir         Manger et puis dormir Et nous tirons sur les ravitaillements boches Ou sur les fils de fer devant les bobosses     Sous la tempête de feux métalliques           Je me souviens d’un lac affreux               Une nuit folle           Une nuit de sorcellerie Et de couples enchaînés par un atroce amour

14. (1911) Cortège « Cortège »

Et cette mer avec les clartés de ses profondeurs Coulait, sang de mes veines et fait battre mon cœur.

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