Les Sapins
Les sapins en bonnets pointus
De longues robes revêtus
Comme des astrologues
Saluent leurs frères abattus,
Les bateaux qui sur le Rhin voguent.
Dans les sept arts endoctrinés
Par les vieux sapins, leurs aînés
Qui sont de grands poètes,
Ils se savent prédestinés
A briller plus que des planètes
A briller doucement, changés
En étoiles et enneigés.
Aux Noëls bienheureuses
Fêtes des sapins ensongés
Aux longues branches langoureuses.
Les sapins, beaux musiciens,
Chantent des noëls anciens
Au vent des soirs d’automne
Ou bien graves magiciens
Incantent le ciel, quand il tonne.
Des rangées de blancs chérubins
Remplacent l’hiver, les sapins
Et balancent leurs ailes.
L’été, ce sont de grands-rabbins
Ou bien de vieilles demoiselles.
Sapins, médecins divagants,
Ils vont, offrant leurs bons onguents.
Quand la montagne accouche.
De temps en temps sous l’ouragan
Un vieux sapin geint et se couche.
Neu Gluck
, 1901.