Les Colchiques
Le pré est vénéneux mais joli en automne.
Les vaches y paissant lentement s’empoisonnent.
Le colchique couleur de cerne et de lilas
Y fleurit. Tes yeux sont comme cette fleur-là,
Violâtres comme leur cerne et comme cet automne,
Et ma vie pour tes yeux lentement s’empoisonne.
Les enfants de l’école viennent avec fracas,
Vêtus de hoquetons, jouant de l’harmonica.
Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mères,
Filles de leurs filles, et sont comme tes paupières
Qui battent, comme les fleurs battent au vent dément.
Le gardien du troupeau chantonne en allemand,
Tandis que lentes et meuglant, les vaches abandonnent
Pour toujours ce grand pré mal fleuri par l’automne.
Neu Glück, Septembre 1901.