Arbre
Poème inédit par GUILLAUME APPOLLINAIRE PARIS
Tu chantes avec les autres tandis que les phonographes galopent
Où sont les aveugles où s’en sont-ils allés
La seule feuille que j’aie cueillie s’est changée en plusieurs mirages
Ne m’abandonnez pas parmi cette foule de▶ femmes au marché
Autrefois
Du camarade qui se promène avec toi en Europe tout en restant
En Amérique
Un enfant
Un veau dépouillé pendu à l’étal
Un enfant
Engoulevent Grondin Blaireau
Et la taupe Ariane
Nous avons loué deux coupés dans le Transsibérien
Tour à tour nous dormions le voyageur en bijouterie et moi
Mais celui qui veillait ne cachait point un réwolver
armé
Tu t’es promené à Leipzig avec une femme mince déguisée en homme
Intélligence car voilà ce qui est qu’une femme intelligente
Et il ne faudrait pas oublier les légendes
Je voyais une chasse tandis que je montais
Et l’ascenseur s’arretait à chaque
étage
Entre les pierres
Entre deux vaisseaux norvégiens amarrés à Rouen
Il y a ton image
Le beau nègre en acier
La plus grande tristesse
C’est quand tu reçue une carte postale ◀de la
Corogne
Le vent vient du couchant
Le métal des caronhers
Tout est plus triste qu’autrefois
Tous les dieux terrestres vieillissent
L’Univers se plaint part ta
voix
Et des êtres nouveaux surgissent
Trois par trois
GUILLAUME APPOLLINAIRE. (Paris.)