Les Estampes d’Albert Durer donnerent envie à Raphael de faire graver, et porta Marc Anthoine Boulognois à se fortifier dans le dessein, pour se rendre plus capable de bien suivre ceux qui lui vouloit faire graver, à quoi il reüssit assez heureusement. […] Ces œuvres furent suivis d’un autre : La Chambre de la Tour Borgia où il peignit plusieurs Histoires ; l’une desquelles represente l’incendie de Borgo Vechio, que le Pape Leon IV. eteignit de sa benediction qui est merveilleusement belle, l’autre est du mesme Saint, qui ayant faict construire le port d’Ostie fust attaqué d’une armée navalle de Turcs pensant le surprendre et le faire prisonnier, où il y eust grand combat ; puis encore une autre Histoire où le Pape Leon X. sacre Francois premier Roy de France ; il estoit accompagné de plusieurs Cardinaux, Ambassadeurs et autres personnes et Officiers, necessaires à cette celebre ceremonie, desquels le Pape est suivy quand il tient Chapelle. […] Il avoit dans sa jeunesse estudié la maniere de Pierre Perugin, laquelle il fortifia de coloris, de dessein, et d’invention, mais quand il eust atteint plus d’age et de cognoissance, il s’aperceut bien qu’il n’avoit encore rien fait et qu’il estoit bien esloigné du vray, particulierement quand il vit les œuvres de Leonnard da Vinci, qui donnoit la grace et le mouvement aux airs des Testes, et aux Figures, qui n’eust en cette partie là jamais de semblable, il en demeura tout surpris, et d’autant qu’il y prenoit un grand goust: il se mit à l’estudier, s’efforcant d'oublier cette maniere du Perugin son Maistre, ce fut lors qu’il fit des efforts d’esprit extraordinaires pour suivre Leonnard de prés, mais quoy qu’il fit, il ne l'a jamais surpassé, bien que plusieurs ont dit qu’il l’avoit passé en douceur, et une facilité qui luy estoit naturelle, toutefois il ne le surmonta jamais de conceptions terribles ny dans cette force d’art dans lequel Leonnard a eu peu d’egaux ; Raphaël ayant esté l’unique qui en est aproché de plus pres. […] Il fut enterré honorablement suivy d’un grand nombre de peuple et de tous ceux de l’Art, le Bembo luy erigea l’Epitaphe Latine qui suit.