En effet, dés qu'il eût considéré la maniére de ces deux Grans Hommes, il prît la résolution de changer celle qu'il avoit contractée chez son Maître ; il retourna à Pérouse, où il trouva beaucoup d'occasions d'éxercer son Pinceau : mais le ressouvenir des Ouvrages de Leonard de Vinci luy fit faire une seconde fois le voyage de Florence, et aprés y avoir travaillé quelque tems à fortifier sa maniére, il alla à Rome, où Bramante son parent, qui avoit préparé l'Esprit du Pape sur le mérite de Raphaël, luy procura l'Ouvrage de Peinture qu'on devoit faire au Vatican. […] Les soins qu'il y prit sont incroyables ; aussi ne furent-ils pas infructueux, car la réputation de ces Ouvrages porta le nom de Raphaël par tout le Monde. […] Il se donnoit tous les soins possibles pour les réduire dans un état qu'il n'eut rien à se reprocher ; et c'est pour cela qu'on voit de luy un crayon de petites parties : comme des mains, des pieds, des morceaux de draperies, qu'il dessinoit trois ou quatre fois pour un même sujet, afin de prendre ce qui luy en sembleroit de meilleur 2 Quoy qu'il ait été fort laborieux, on voit fort peu de Tableaux faits de sa propre main ; il s'occupoit plus ordinairement à dessiner, pour ne point laisser inutiles le grand nombre d'Eléves qui ont éxécuté ses Desseins en plusieurs endroits, principalement dans les Loges et dans les Appartemens du Vatican ; dans l'Eglise de Nôtre-Dame de la Paix, et dans le Palais Ghigi, à la résérve de la Galatée et d'un seul Angle, où sont les trois Déesses qu'il a peint luy-même.