Il luy donna encore sa Chappelle à peindre à sainte Marie de la paix : Ce fut là où il desgorgea tout de bon le suc qu’il avoit tiré des œuvres de Michel l’Ange, où entre autres choses certaines Sybilles et Prophetes, quel ques femmes et enfans qu’il y peignit ravissent les yeux, et estonnent l’esprit des plus sçavans en ce bel art ; et ce qui luy acquit plus d’esclat fut qu’ayant veu, comme nous avons dit, la Chappelle de Michel l’Ange secrettement, ce dernier ouvrage de Raphael vit le jour avant mesme que la Chappelle de Michel l’Ange fut descouverte, outre que cet œuvre est estimé le plus beau que fit jamais Raphael. […] Il disposa dans la voute le Conseil des Dieux avec les Noces de Psiché, Et dans les angles des arcades, diverses Figures representans des Dieux et Déesses, qui sont Mercure vollant, Jupiter qui baise Ganimede, le Char de Venus, et les graces qui avec Mercure eslevent Psiché dans le Ciel, outre plusieurs autres Histoires Poetiques dans les autres Angles ; puis dans les coings de ladite voute il peignit quantité d’amours et petits enfans, portant chacun les armes des Dieux qu’ils representoient, la foudre pour Jupiter, un autre l’espée de Mars, puis une peau de Lion pour Hercules, et ainsi des autres, tous lesquels estoient accompagnés des animaux qui leurs sont familliers. […] S’il se fust tenu à ce juste millieu il auroit entierement possedé la vertu du sage sçavant ; mais voulant passer plus outre, et monstrer qu’il entendoit aussi bien les nuds que Michel l'Ange, il s’escarta un peu ; comme on le voit à l’incendie de la Chambre de la Tour Borgia, et aux voûtes du Palais d’Augustin Chigi, où ses ouvrages ne se trouverent pas avoir ceste grace, ny ceste douceur.