Vic-sur-Aisne, 13 novembre 1760
Je vous remercie, mon cher confrère, d'avoir songé à m'envoyer l'histoire du czar Pierre.
Je l'attendais de Paris, mais j'aime mieux la devoir à votre amitié; cet ouvrage va m'occuper agréablement le reste de l'automne. J'espère que vous n'oublierez pas de m'envoyer le second volume quand il paraîtra. Sérieux ou non, je ne puis lire depuis longtemps que ce que vous écrivez, et quoiqu'il ne me soit pas permis, comme à vous, de dire tout, je trouve que vous êtes le seul Français qui ait conservé l'art et le ton de la bonne plaisanterie; ce talent était moins rare autrefois; il me paraît ajouter beaucoup au mérite d'être le premier écrivain de son siècle. Je suis digne, autant que l'humanité peut le permettre, de l'honneur que vous me faites de me croire content de ma situation. [His health is not too good and he would like to be nearer his birthplace.] Je lirai Tancrède quand il sera imprimé. Continuez à rire puisque cela vous est bon et très agréable aux autres; à l'égard de ma bénédiction, je crois que je ne suis guère digne de vous la donner, ni vous de la recevoir; aimez moi toujours et soyez persuadé, mon cher confrère, que j'aurais toute ma vie, pour le vieux Suisse autant d'amitié que d'admiration….