1745-05-17, de Voltaire [François Marie Arouet] à Philippe Néricault Destouches.

Il se présente, mon cher ami, une occasion d'exercer la première des vertus et de remplir le premier des devoirs.
Il s'agit, non pas de secourir simplement, mais de tirer de l'abîme le plus épouvantable de la misère, et d'arracher au désespoir et à la honte une famille entière, dont les malheurs devraient faire verser des larmes à ceux qui la persécutent. Il n'y a pas un jour à perdre; il faut vingt louis, je n'en ai que dix, mettez vous de moitié avec moi. Vous me remercierez de vous avoir indiqué le moyen de placer aussi avantageusement votre argent. Ces dix louis passeront pour ce que vous me devez. Mon cher Terence, ne balancez pas un moment, je vous en conjure: envoyez moi un billet de dix louis à Paris payable à vue sur un homme solvable, et mettez cette action au rang de vos œuvres les plus estimables.

On va jouer le Glorieux à Etiole; je le verrai, et de là j'irai voire l'auteur que j'embrasse avec tendresse, et que je mets au dessus de son siècle. Mes humbles services to yr ladi. Farevell my honour friend.

Voltaire